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Titre : Historique du 2e régiment de tirailleurs sénégalais : 1892-1933

Éditeur : L. Fournier (Paris)

Date d'édition : 1934

Sujet : Guerre mondiale (1914-1918) -- Histoire des unités

Sujet : Sénégal

Sujet : France. Armée. Tirailleurs sénégalais

Sujet : Tirailleurs Sénégal

Sujet : Histoire

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34076968x

Type : monographie imprimée

Langue : français

Format : 1 vol. (208 p.) : cartes ; in-8

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Description : Collection numérique : Documents consacrés à la Première Guerre mondiale

Description : Collection numérique : Bibliothèque Francophone Numérique

Description : Collection numérique : Zone géographique : Afrique de l'Ouest

Description : Collection numérique : Thème : L'histoire partagée

Description : Collection numérique : La Grande Collecte

Description : Collection numérique : L'Afrique et la France aux XIXe et XXe siècles

Description : Collection numérique : Histoire et géographie

Description : Contient une table des matières

Description : Avec mode texte

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k63178642

Source : Service historique de la Défense, 2011-321570

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 11/10/2012

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Historique du

2e Régiment de

Tirailleurs Sénégalais 1892 = 1933

PARIS

IMPRIMERIE-LIBRAIRIE MILITAIRE UNIVERSELLE L. FOU n NIE n 264, Boulevard Saint-Germain, 284 1934





Historique du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais 1892-1933



Historique du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais 1892 = 1933

PARIS

IMPRIMERIE-LIBRAIRIE MILITAIRE UNIVERSELLE L. FOURNIER 264, Boulevard Saint-Germain, 284 1934



LISTE DES OFFICIERS AYANT COMMANDE LE 216 REGIMENT DE TIRAILLEURS SENEGALAIS DEPUIS SA CREATION

DATE DE LA PRISE DE COMMANDEMENT

RÉGIMENT DE TIRAILLEURS SOUDANAIS

Lefèvre, Jules-Charles. Lieutenant-colonel 29 juillet 1892.

Combes, Antoine-Vincent id. 30 septembre 1892.

Panier des Touches. Chef de bataillon. 26 août 1893.

Comte. Lieutenant-colonel 19 février 1894.

Ebener. id. 17 avril 1895.

Moroni. Chef de bataillon. lGr avril 1896.

Lamary. Lieutenant-colonel 31 juillet 1896.

Valet. Chef de bataillon. 21 juin 1897.

Ebener. Lieutenant-colonel 20 janvier 1898.

Vimard Colonel 1er août 1899.

2e RÉGIMENT DE TIRAILLEURS SÉNÉGALAIS

Bertin. Colonel. 7 février 1901.

Ebener. id. 6 septembre 1902.

Dumoulin. Chef de bataillon. 14- avril 1904.

Caudrelier. 'Colonel 15 mai 1904.

Simoneau, Edmond-Marie.. id. 12 avril 1905.

Noël, François-Marie. id. 1907.

Simonin, Ernest-Jules. id. 27 septembre 1908Gallois, Achi1le. id. 1910.

de Ranglaudre, Louis-Marie Chef de bataillon. 1912.

Mourin, Charles-Henri. id. avril 1913.

Fouquet, Jules-Edouard. id. mai 1913.

Venel, Paul-Célestin. Lieutenant-colonel juin 1913.

Simonin Chef de bataillon. 13 février 1914.

Vimont, Henri-Alexandre Colonel 23 octobre 1914.

Molard, Jules. id. 1915.

Bourgeron, Charles. jd. 1916.

de Fajolle, Antoine-Marie.. Lieutenant-colonel 27 février 1919.

Cluzeau, Jean-Pierre. Colonel février 1921.

Braive, Louis. id. mars 1923.

Malafosse, Joseph-Louis. id. avril 1925.

Berger, Pierre-Henri. id. avril 1927.

Lion, Louis-Auguste jd. mai 1929.

Perraud, Henri. id. juin 1930.

de Martonne, Edouard id. juillet 1932.



PREMIÈRE PARTIE

LE RÉGIMENT DE

TIRAILLEURS SOUDANAIS DU 1 er JUILLET 1892 AU 7 MAI 1900



PREMIÈRE PARTIE

LE REGIMENT DE TIRAILLEURS SOUDANAIS

du 1er j!uillet 1892 au 7 mai 1900

Le Régiment de Tirailleurs Soudanais, glorieux prédécesseur du 2e Sénégalais actuel, a été essentiellement l'agent de la conquête de cet immense territoire qui forme les cinq colonies actuelles du Soudan Français, de la Guinée Française, de la Côte d'Ivoire, de la Haute-Volta et du Niger.

Les officiers qui l'ont successivement commandé (voir en tête du présent historique) furent moins des chefs de corps que des conquérants. Aussi faire l'historique du Régiment de Tirailleurs Soudanais est-ce faire l'histoire militaire presque complète d'un chapitre particulièrement important de la conquête africaine, qui, en moins de huit années, devait conduire nos anciens de l'Infanterie de marine, de Kayes sur le Haut-Sénégal, à Tombouctou et au Tchad.

§1. — Création du Régiment de Tirailleurs Soudanais.

Le Régiment de Tirailleurs Soudanais, qui devait donner naissance en 1900 au 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, a été créé par décret du 23 avril 1892 ; une loi du 11 avril de la même année avait accordé les crédits nécessaires à cette création.


Le régiment devait être formé à la date du 1er juillet 1892, et compter huit compagnies.

Le rapport du Ministre de la marine et des colonies, M. Cavaignac, au Président de la République, indiquait que le nouveau régiment serait composé avec les six compagnies de tirailleurs sénégalais présentes à ce moment au Soudan et deux compagnies d auxiliaires indigènes formées dans le pays.

A la date du 27 juin, le lieutenant-colonel Lefèvre, du Régiment de Tirailleurs Sénégalais, désigné pour commander le nouveau Régiment de Tirailleurs Soudanais, fit paraître un ordre, dont il convient de citer le passage suivant :

« Au moment de vous séparer les uns des autres, et quels que » soient les sentiments de regret que vous en éprouvez, n'ayez, (( futurs Soudanais, qu'une pensée, celle de l'honneur d'avoir été « appelés à faire souche d'un nouveau corps, dans lequel se « perpétueront les belles traditions dont vous serez les vigilants « gardiens ».

Le régiment à sa création avait la composition suivante :

ETAT-MAJOR

MM. Lefèvre, lieutenant-colonel, commandant le régiment.

Bourgey, chef de bataillon.

Oswald, chef de bataillon.

Divers, capitaine major.

Martin, lieutenant-trésorier et officier d'habillement.

Bouras, médecin aide-major.

Mamadou Racine, capitaine indigène détaché à l'Etat-Major du commandant supérieur.


1

L'encadrement des compagnies comprenait quatre officiers (dont un officier indigène).

lrd compagnie (ancienne lre auxiliaire) : capitaine Colonna d'Istria, lieutenant Cailleau, souslieutenant Lecerf;

2e compagnie (ancienne 3e compagnie de tirailleurs sénégalais) : capitaine Réjou, lieutenant Bunas;

- 5e compagnie (ancienne 9e compagnie de tirailleurs sénégalais) : capitaine Lombard, lieutenant Tiffon, sous-lieutenant Quintard, lieutenant indigène Birom Faye;

4e compagnie (ancienne 2e auxiliaire) : capitaine Patriarche, lieutenant Castarède, sous-lieutenant Mazoyer;

"5'3 compagnie (ancienne 15e compagnie de tirailleurs sénégalais) : capitaine Loyer, lieutenant Babonneau, sous-lieutenant Trioreau, lieutenant indigène Yoro Boubakar;

6e compagnie (ancienne 6° compagnie de tirailleurs sénégalais) : capitaine Arlabosse, lieutenant Freyss, sous-lieutenant Chrétien, lieutenant indigène Sadio Ka;

78 compagnie (ancienne 7e compagnie de tirailleurs sénégalais) : capitaine de Bouvié, lieutenant Morin, sous-lieutenant Maillac, lieutenant indigène Samba Diéri;

8e compagnie (ancienne 8e compagnie de tirailleurs sénégalais) : capitaine Menou, lieutenant Scal, sous-lieutenant Privey, lieutenant indigène Koli Guiro.


EFFECTIF DES UNITES ; Européens : un adjudant, 1 sergênt-majo1?, 1 s'ergen-Moumcr,.

G sergents, 1 caporal-fourrier, 2 clairons. Total : 12.

Indigènes : '4 sergents, 16 caporaux, 2 clairons, 3? tirailleurs.

de lre classe, 100 tirailleurs de 2e classe. Total : 154.

Total général (officiers camprts) : 170.

Le territoire sur lequel le régiment était stationné comprenait une faible partie du Soudan actuel, et toute la haute vallée du Niger et de s.on affluent le Milo qui ont formé dans la suite la Haute-Guinée.

L'es emplacements des. compagnies étaient les suivantesEtat-Major, Section hors-rang et

suite. ',' ',' Médine 1 re Compagnie. Sanankoro 2e - ',' Kérouané 3,e - Bissandougou 4e Kouroussa 5e Médine Ge — Bamako 7e — Siguiri 8° -- Kankan

§ 2. — Situation du Soudan en 1892.

Le commandant supérieur des troupes était le colonel de Badens.

Au moment où le Régiment Soudanais était formé, la campagne de 1891-1892 du lieutenant-colonel. Humbert venait de finir.. ElLe avait eu pour conséquence d'assurer notre autorité dans la vallée du Milo, par la constitution de postes solicles à Bissandougou et à Kérouané, d'augmenter la colonie du Guénié-Kalary, du Minia.I;lk?" et de tous les pays situés au nord de Sansanding jusqu'à Nampala ; le Bendougou offrai-L son alliance. Cette campagne avait été très pénible ; la colonne avait perdu au feu 4 officiers et


47 hommes ; 12 officiers et 140 hommes avaient été blessés ; de plus 56 officiers et 114 hommes de troupe étaient revenus malades.

Aussi dès les premiers mois de l'existence du nouveau régiment, plusieurs décès avaient éprouvé le corps des officiers.

Malgré le succès de la colonne du lieutenant-colonel Humbert, il restait encore beaucoup à faire ; la garnison de Kérouané était cernée, les communications entre Bissandougou et Kankan étaient coupées et Bilali, agitateur qui occupait les territoires entre le Fouta-Djallon et le SierraLeone, continuait à inquiéter les provinces de la rive gauche du Haut-Niger. En outre Samory, bien que retiré au Nafana, continuait la lutte avec énergie, encouragé moralement par Tié et Ahmadou. Il était urgent de purger les vallées du Haut-Niger et du Milo des bandes sofas qui les ravageaient et de forcer Samory à quitter le pays en supprimant ses relations avec le Fouta-Djallon et le Sierra-Leone, d'où il tirait des subsides et un appui moral.

Les premiers mois d'existence du régiment sont consacrés à son organisation. L'hivernage d'ailleurs empèche toute opération importante. Pendant ces quelques mois, des reconnaissances sont cependant faites autour des postes pour assurer leur sécurité ; des escortes circulent également pour protéger les mouvements de personnel et de matériel.

Le 1er septembre 1892, Je centre du régiment est transféré de Médine à Rayes.

COMMANDEMENT SUPÉRIEUR DU COLONEL ARCHINARD, CAMPAGNE 1892-1893

§ 3. — Programme du commandant supérieur.

En novembre 1892, le colonel Archinard revient au Soudan, pour y reprendre les fonctions de commandant


supérieur des troupes qu'il. avait déjà remplies, mais cette fois avec des attributions très étendues. Le commandant supérieur a désormais la direction générale des opérations militaires, sans pouvoir toutefois se mettre lui-même à la tête des troupes. Les instructions reçues lui enjoignent de consolider les résultats obtenus et de substituer, dans toutela mesure du possible, à la politique d'action militaire celle de pénétration pacifique. Mais avant de donner à la colonie une organisation ferme, il est nécessaire de chasser Samory et ses bandes du Haut-Niger et du Haut-Milo, de calmer le Kaarta et le Ségou, ensuite intervenir au Macina et réprimer les menées d'Ahmadou.

Ne pouvant lui-même conduire l'expédition, le colonel Archinard confie ce soin au lieutenant-colonel Combes, qui a remplacé le lieutenant-colonel Lefèvre dans le commandement du Régiment de tirailleurs soudanais. Il se réserve de rétablir l'ordre dans le nord du Soudan et d'agir, si besoin est, contre Ahmadou. La campagne de 1892-1893 embrasse donc deux séries d'opérations distinctes ; celles du lieutenant-colonel Combes contre Samory dans les territoires qui forment la Haute-Guinée actuelle ; celles du colonel Archinard pour pacifier le Kaarta et le Minianka et sa lutte contre Ahmadou, lutte qui aboutit à la conquête du Macina.

A. - OPERATIONS DU LIEUTENANT-COLONEL COMBES CONTRE SAMORY (1) (Décembre 1892, Mars 1893) S 4. - Organisation des colonnes.

Le 11 novembre 1892, le lieutenant-colonel Combes, commandant le Régiment de Tirailleurs Soudanais, quitte

(1) Voir croquis N° 1.



Kayes avec son Etat-Major, une compagnie de légion qui vient d'être -' envoyée au Soudan, l'artillerie et divers services, pour se diriger sur' Siguiri, où doit se faire la concentration de la colonne.

Cette colonne comprend- : l Eseadron de spahis soudanais, capitaine de Carné; l Escadron de spahis auxiliaires, capitaine Prost; 1 Batterie de 80 de montagne, capitaine Richard; 1 Compagnie de légion, capitaine Destenave; Q Compagnies de tirailleurs soudanais, savoir :

lre 09 : capitaine Montéra, lieutenants Vinay et Dupuy; 2e - : capitaine Colonna d'Istria, lieutenants Bunas et Mazoyer; 3e - : capitaine Robert, lieutenants Maritz et Moreau; 4e - : capitaine de Bouvié, lieutenants Castarède et Trioreau; 5° - : capitaine Loyer, lieutenants Morin et Lecerf; 6e - : capitaine Scal, lieutenants Privey et Plat.

3 Compagnies d'auxiliaires, savoir : lre Cie : lieutenant Delaforge, lieut. Millot, Bourgeois et Incar; 2e — : capitaine Valentin, lieut. Andlauer, Voulet et Maritz; 3e — : lieutenant Salvat, lieut. Aymar et Quintard.

1 Détachement d'ouvriers, capitaine Reichemberg; Convoi : capitaine Parizot; Service de Santé : médecin de lre classe Boissier; Service de l'arrière commandant de Gasquet.

2 vétérineircs, MM. Fraimbault et Pécus.

Les compagnies de tirailleurs soudanais ont un effectif moyen de 100 hommes ; les compagnies de tirailleurs auxiliaires 130 hommes, la compagnie de légion comprend 80 hommes montés à mulets.

Le 21 décembre 1892, la concentration est achevée.

L'ennemi est réparti en deux groupes : Samory dans la vallée du Haut-Milo et Bilali dans le Haut-Niger. Le lieutenant-colonel Combes forme deux colonnes :


— une légère comprenant deux compagnies,. de réguliers et 1™ d'auxiliaires, un peloton de spahis et une pièce de canon et commandée par le capitaine Briquelot ; — l'autre avec laquelle il remontera le Milo contre Samory.

§ 5. — Colonne volante du capitaine Briquelot.

Le capitaine Briquelot quitte Kuuroussa au commencement de janvier 189-3 et s'avance rapidement vers le Sud.

Le 9 janvier, il surprend le village de Douako dans le Sankaran, s'en empare, bouscule l'ennemi une deuxième fois à Salinkoro et trois jours après arrive à Moria, où il trouve de nombreux approvisionnements. La colonne traverse le iNian-dan sur un pont de- 40 mètres qu'elle construit avec des bambous et des lianes et se trouve alors dans le Kouranko, où Bilali est signalé.

Dialakoro est pris, puis Sofadougou, campement central de l'adversaire. lequel s'enfuit vers l'Ouest avec quelques partisans à notre approche. La colonne le serre de près : en chemin le capitaine Briquelot rase les villages de Farandola, Bambaya, Xiafarando, et en février atteint Faranah, puis Hérémakono, où il s'arrête quelques jours pour y établir des postes malgré la protestation du sergent anglais commandant les postes de Falaba et Calière. Mais, les bandes de Bilali reparaissant, le capitaine Briquelot reprend la poursuite sans plus s'occuper de cette question de frontière (15 février).

Il livre à Bilali plusieurs combats d'arrière-garde à Kalaya, Somakala, Kiremba, Samaclougou, et le 7 mars 1893 arrive à Tembicounda aux sources du Niger. Continuant vers le Sud, il -rejette Bilali abandonné de presque tous ses partisans dans le Sierra-Leone. Le Kouranko est définitivement délivré des sofas. Revenu à Fa.ranah, le capitaine Briquelot y place la 4e compagnie qui occupe en même temps Hérémakono et Kouroussa. Avec le reste de sa troupe, il marche


sur Benty où il entre le 9 mai 1893 après avoir fondé le poste de Ouossou dans le Tamisso.

§ 6. — Colonne principale.

De son côté, le lieutenant-colonel Combes a franchi le Niger en amont de Siguiri à la fin de décembre 1892 et s'est rendu à Kankan ; il n'a rencontré que des villages déserts ou en ruines.

Le lieutenant Morisson (de l'Etat-Major de la colonne), -chargé de sonder le Milo, assure que la rivière est navigable jusqu'à Kérouané. La rivière est utilisée comme ligne de ravitaillement et le commandant de Gasquet organise un service de pirogues entre Bamako, Siguiri et Kérouané.

Le 6 janvier 1893, la colonne quitte Kankan et remonte le Milo jusqu'à Onomi, où le lieutenant-colonel Combes apprend que des rassemblements de sofas ont lieu dans le Sankaran. Samory a profité de l'hivernage pour s'y établir solidement : il songe alors à se rapprocher du Sierra-Leone pour donner la main à Bilali ; il retourne donc sur la rive gauche du Milo et, poussant au Sud-Ouest, essaie de s'emparer du pays des Tomas. Mais la résistance des habitants, qui réclament notre concours, le fait échouer ; en outre, la rapidité de la marche du capitaine Briquelot empêche sa jonction avec Bilali. Samory se borne alors à -concentrer ses troupes à Kouafadié, capitale du Sankaran.

Laissant le commandant Oswald avec un peloton de -spahis, une section d'artillerie et deux compagnies de tirailleurs (une de réguliers et la 3e d'auxiliaires), pour garder les gués du Milo entre Kankan et Kérouané? le lieutenantcolonel Combes s'avance sur Kouafadié, où après une marche pénible il arrive le 19 janvier 1893 sans avoir aperçu l'adversaire.

En apprenant que la colonne est commandée par le lieutenant-colonel Combes, qui depuis son succès de 1885 inspire une grande terreur aux Sofas qui l'appellent « Coumbo »,


Samory a, en effet, rétrogradé dans le Sud-Ouest, cherchant à nous entraîner loin du Guéléba et du Nafana où il a mis en sûreté ses femmes et ses biens. Serré de près par le capitaine Dargelos, il se dérobe et par un long détour au sud du Milo regagne le Nafana. Le commandant Oswald s'efforce de le devancer au passage du Kouraï, mais il n'a avec lui qu'un léger engagement près de Diéradougou (23 janvier).

Le jour même, le commandant Oswald meurt d'une insolation.

Pendant ce temps, le lieutenant-colonel Combes revient sur le Milo et campe au gué de Balila, point de croisement des routes de l'Est et du Sud. En février, le lieutenantcolonel Combes, averti de la retraite de Samory au Nafana, se résout à le relancer jusque-là. Pour assurer sa liaison avec le capitaine Briquelot, il détache au Kissi et au Kouranko le capitaine Dargelos avec deux compagnies de tirailleurs et un peloton de Légion ; en outre, il place deux postes, chacun d'un peloton de tirailleurs et d'un de spahis, aux gués de Balila et de Nanafara et le renforce par la batterie de 80 m/m de montagne. Ne connaissant pas les contrées qu'il va parcourir, le lieutenant-colonel s'allège de tous ses impédimenta et ne prend avec lui que quatre compagnies de tirailleurs, un peloton de légion, un escadron et demi de spahis et 800 porteurs chargés de trente jours de vivres européens et six de vivres indigènes.

Le 4 février, la colonne se met en route vers l'Est. Tous les Européens, au nombre de 113, sont montés.

Le 6 février, les éclaireurs signalent l'ennemi au delà de Faranna ; le lendemain sur le Dion, la colonne surprend et disperse quelques bandes installées sur la rive gauche de la rivière.

Les Sofas se reforment en arrière du Kouraï, d'où ils sont repoussés après un vif combat. Tout en nous harcelant nuit et jour, Samory recule, brûlant les villages, détruisant les approvisionnements et chassant devant lui les naturels


du pays,, comme il en a l'habitude-. Le lieutenant-colonel Combes accélère la p-oursuite et culbute la majeure.- partie des bandes adverses à Guéléba, centre important sur - la rivière Gouala (2), affluent, du Sankarani, où l'al -m. an-.y a réuni une grande quantité ae vivres qui nous permettent de nous ravitailler. Après, un jour de- repos, la colonne ae dirige sur Odienné (3.), dont le chef passe pour hostil&am Sofas. Mais Odienné cède à Samory et quand nous arrivons le 13 février 1893, le village est désert et en flammes. Avec ses seules ressources, le lieutenant-colonel Combes s'engage sur les traces des. Sofas dans le Nafana. et gagne Konglléni, capitale du pays. Les vivres deviennent rares, les attaques plus fréquentes dans ce pays sauvage parsemé- d'épais fourrés où l'adversaire se croyant invincible. redouble d'audace ; les populations effrayées par les cruautés, de Samory ne nous sont d'aucun secours. Le. lieutenantcolonel Combes juge prudent de ne pas- s'aventurer davantage. vers l'Est. Il lance simplement de fortes reconnaissances autour de Konguéni, pour se procurer des vivres et se créer des. alliés.

L.e 22 février, le lieutenant-colonel, obliquant au Sudr traverse le Nafana dans toute sa longueur, rejoint l'e-nnem, i sur les rives du Sien-ba. L'avant-garde., formée de la lre compagnie, a un engagement assez vif avec L'ennemi (23. février), mais parvient à le refouler ; puis la colonne enlève Roma et le lieutenant-colonel, franchissant le Borntou, se porle sur KoroT où il pénètre assez à temps pour préserver le village de l'incendie (24 février). Samory est expulsé des riches provinces du Kaladougou et du Nafana, où il se croyait imprenable. Mais comme il refuse toujours je combat, que l'hivernage approche et que les malades sont nombreux, le lieutenant-colonel ne pousse pas plus

(2) Cette rivière forme actuellement la limite entre la Guinée et la Côte d'Ivoire.

(3) Cette ville appartient actuellement a la haute Côte cPTvorre.


loin et s'achemine sur Kérouané par Guérésouba, Foukala, Diéradougou et Tiéoua. Assailli plusieurs fois par les Sofas, il les maintient à distance et. rentre à Kérouané le 10 mars 1893. L'effet produit par la colonne est considérable dans cette région, dont les habitants nous sont dès lors acquis.

§ 7. — Colonne du capitaine Dargelos.

Pendant ce temps, le capitaine Dargelos a quitté Balila le 26 janvier 1893 pour se rendre au Kissi. Avisé que le fils de .Bilali occupe en force Firaoua, capitale du Kissi, il s'y porte et, le 5 février, s'en empare après un brillant assaut.

Sillonnant ensuite le Kissi en tous sens, il harcèle les bandes qui infestent le pays.

Battues et rejetées dans le Sud, ces bandes cherchent à rallier Samory dans l'Est. Elles se heurtent à Balila, au détachement du lieutenant Aymar, qui aidé par les spahis les détruit facilement. Le Kissi est débarrassé et le capitaine Dargelos ramène de son expédition 11.000 captifs que les Sofas avaient rassemblés.

§ 8. — Reconnaissances autour de Kérouané. Organisation de la région Sud.

Pour consolider les résultats de cette campagne, le lieutenant-colonel Combes crée une série de postes à la limite des contrées nouvellement conquises pour balayer les groupes qui tenteraient de se reconstituer. Le capitaine Dargelos, à peine revenu du Kissi, y est renvoyé ; le capitaine Valentin avec la 2e compagnie auxiliaire part pour Kissidougou, où il doit fonder un poste ; l'escadron Prost est dirigé sur Niansanadougou et le capitaine Montéra, avec la lre compagnie de réguliers, sur Guéléba. Parvenu sur les bords du Dion, ce dernier est attaqué par plusieurs bandes ; bien que très inférieur en nombre, il résiste éner-


giquement et permet au capitaine Prost, averti, de le secourir avec ses spahis. L'ennemi est repoussé avec pertes.

Le capitaine Prost descend ensuite au Sud-Est jusqu'àMoussadougou, d'où il chasse Karamoko.

Le lieutenant-colonel Combes organise le pays. Samory, privé des dernières provinces de son ancien royaume, ne songe pour l'instant qu'à cacher sa retraite.

Le Sierra-Leone est séparé de la vallée du Niger par une série de postes (Ouassou, Hérémakono, Faranah, Kissidougou et. Kérouané), qui assurent notre occupation dans la région Sud du Soudan.

B. — CONQUETE DU MOYEN-NIGER ET DU BANI PAR LE COLONEL ARCHINARD (4)

(février-mai 1893)

§ 9. — Conquête du Macina (février 1893).

Tandis que le lieutenant-colonel Combes opère contre Samory dans le Sud, le colonel Archinard se rend au Kaarta et au Bélédougou pour y rétablir le calme. Avec une faible escorte, il se rend à Nioro, où il séjourne du 8 au 16 février 1893 pour régler les affaires de la contrée. Le 17 le colonel Archinard quitte Nioro avec la 5e compagnie de tirailleurs soudanais, trois sections de tirailleurs régionaux, une section de 95 m/m, un groupe de spahis et trois convois: un de chameaux, un d'ânes et un de porteurs. Dix jours après, il entre à Goumbou et inflige à ce village une forte amende, pour le punir de sa rébellion.

Il pénètre ensuite dans le Bélédougou où il fait accepter l'impôt, puis il atteint le Niger et le Ili mars 1893 arrive à

(4) Voir croquis N° 2.



Ségou. Là il apprend qu'à la. suite des intrigues d'Ahmadou, une insurrection est à la veille d'éclater dans le Minianka; Il se décide à parcourir le Minianka pour apaiser le mouve-v ment et marcher ensuite, si besoin est, contre Ahmadoù ; al mobilise les garnisons de Sansanding et de Bamako et avec:celle de'Ségou forme une colonne ainsi composée :

1 Peloton de spahis réguliers : capitaine BaureB; 100 spahis auxiliaires capitaine Blachère; 1 Section d'artillerie de 95 : capitaine Huvenoit; 1 Section d'artillerie de 80 : capitaine Livrelli; 2 Compagnies de tirailleurs soudanais : 5e Cie : lieutenant Chrétien, lieutenant Babonnêau, 6e - : capitaine Maillot, lieutenants Cailleau et Maillac.

iA Compagnies d'auxiliaires :

Auxiliaires de Nioro : lieutenant Frère jean, sous-lieutenant Segond;

Auxiliaires de Sansanding : capitaine Cogniard (du 2e zouaves); lieutenants Bénédetti et Dugast; lre Cie auxiliaires de Ségou : lieutenant Freyss, sous-lieutenants Bocher et Pécon de Laforest; 2e Cie auxiliaires de Ségou : capitaine Lespiau, lieutenants Bouverot et Demars.

§ 10. — Pacification du Minianka (mars 1893).

A la fin de mars 1893, la colonne franchit le Bani à Garo et se porte sur le gros village rebelle de Kentiéri qu'elle attaque par l'artillerie, pendant que le capitaine Maillot, avec une section de tirailleurs, refoule des bandes ennemies dissimulées dans un pli de terrain. Le bombardement est continué pendant la nuit sur le tata et l'on évite ainsi un assaut meurtrier. Terrifié par cet exemple, Mpésoba, point central du Minianka, se rend immédiatement et les soumissions affluent de toutes parts. Les chefs Peuls qui avaient.

'fomenté la rébellion sont fusillés.

La colonne gagne ensuite Dougouélo (où le 6 décembre


1892, le lieutenant Cailleau, envoyé momentanément en garnison dans ce village, avait eu affaire aux révoltés et avait accompli des prodiges de valeur), puis le Bandougou qui nous est allié. Le colonel fait remplacer par des pièces de quatre celles de 95 m/m retournées à Ségou. Il s'avance ensuite sur San où il est reçu avec empressement. Là il apprend que Djenné a reçu les Toucouleurs, qui y ont construit une citadelle. Il marche sur Djenné et le 11 avril il campe devant la ville.

§ 11. — Prise de Djenné.

Djenné est bâti sur une légère éminence au milieu des marais, dont la crête est couronnée d'un mur en terre crénelé et percé de nombreuses portes. Le marigot de Karayogo (5), de 10 à 40 mètres de large, entoure la hauteur.

Les Djennéens refusent l'accès de la ville ; les pièces sont aussitôt mises en batterie et commencent le feu. La moitié des spahis et une compagnie de tirailleurs reconnaissent la place sur tout son pourtour. Toute la journée et la nuit suivante, les canons tirent lentement sans interruption ; le 12 avril au matin, une brèche a été pratiquée à la porte principale ; deux autres sont créées à droite et à gauche. La section Babonneau, envoyée pour sonder les dispositions de l'ennemi, est accueillie à coups de fusil.

A 10 heures, le colonel Archinard donne les ordres suivants : l'assaut sera exécuté par trois compagnies, les compagnies Lespiau, Cogniard et Freyss. La première entrée dans l'enceinte poussera droit devant elle pour séparer la ville en deux, car à droite se trouve la population marchande, et à gauche les Toucouleurs avec leur chef Alfa Moussa ; c'est de ce côté qu'il importe de porter l'effort décisif. La compagnie suivante se tiendra sur la gauche et

(5) Marigot temporaire qui réunit le Niger au Bani.


reliera la première à la dernière ; celle-ci tournera franchement à gauche pour s'emparer de l'enceinte extérieure.

La batterie est alors rapprochée et fait un feu rapide, puis les colonnes d'attaque s'ébranlent et escaladent la colline, soutenues par l'artillerie.

La compagnie Freyss est en tête et le lieutenant Bocher atteint le premier la brèche avec quelques tirailleurs ; le reste de la compagnie le rejoint et arrive à une petite place d'où elle chasse les défenseurs qui l'occupaient fortement.

Le lieutenant Freyss est blessé de quatre balles, le sergent Dethir, qui veut le garantir, de deux.

Pendant ce temps, le capitaine Lespiau s'est établi à grand'peine à gauche ; chargé furieusement par les Toucouleurs, il résiste et renforcé par la section Bénédetti, oblige l'ennemi à reculer et le poursuit jusqu'à l'extrémité de la ville. Mais, en route il est tué raide d'une balle au front.

A l'extrême gauche, la compagnie Cogniard prend pied dans la ville, non sans difficultés ; le lieutenant Dugast est tué. La compagnie continue à progresser et après une lutte dans les cours des maisons parvient à la face Ouest de Djenné.

Dès lors Djenné est à nous : Alfa Moussa blessé se sauve dans la direction de Bandiagara, les notables font leur soumission, la ville paie une forte indemnité de guerre.

Mais nous avions perdu 2 officiers et 11 tirailleurs tués, 6 Européens et 51 indigènes blessés. L'ennemi avait perdu 510 hommes. Une compagnie (Maillot 6e) est laissée en garnison à Djenné.

§ 12. — Occupation de Mopti.

Après ce succès, le colonel Archinard croit utile de pousser jusqu'à Mopti, pour intimider Ahmadou.

Il envoie l'ordre au lieutenant de vaisseau Boiteux de le rallier à Mopti avec les canonnières, et le 14 avril 1893 il semet en marche.


Après avoir repoussé à Djéna une reconnaissance de 200 cavaliers lancée par le fils d'Ahmadou, la colonne arrive le 17 à Mopti où elle est reçue avec joie par les.Peuls indépendants. Des reconnaissances parcourent les villages voisins ; un retour offensif des Toucouleurs est repoussé par la compagnie Frèrejean et la section Babonneau.

Le commandant supérieur n'avait pas l'intention, cette année-là, de dépasser Mopti. Mais bientôt il apprend qu'Ahmadou s'est avancé jusqu'à Kori-Kori où il réunit une armée nombreuse pour nous barrer le chemin de Bandia-' gara. Dans ces conditions, le colonel estime qu'il est préférable d'enlever Bandiagara tout de suite et d'en finir avec Ahmadou. Il envoie le lieutenant de vaisseau Boiteux à Ségou pour en ramener les pièces de 95. Dès l'arrivée decette artillerie, il se dirige sur Bandiagara (26 avril 1893).' § 13. — Prise de Bandiagara.

Le 27 avril 1893, la colonne arrive au pied de la colline de Kori-Kori et la trouve fortement défendue. Elle campeen carré de crainte des surprises. Une centaine d'hommes, en effet, attaquent le bivouac pendant la nuit et sont refoulés après des pertes sérieuses. Le lendemain, les troupes gravissent la hauteur, la fusillade s'engage, la batterie aborde enfin le sommet du mamelon. Les Toucouleurs tentent de nous tourner sur la droite, ils sont repoussés par la compagnie d'auxiliaires du lieutenant Frèrejean ; ils se rabattent à gauche où ils trouvent la compagnie d'auxiliaires du lieutenant Bouverot et abandonnent alors la position, .L'ennemi s'est battu mollement et a une quarantaine d'hommes hors de combat ; de notre côté nous n'avons que quelques tirailleurs blessés. Ne voyant plus rien devant lui, le colonel Archinard gagne Kori-Kori, où il apprend qu'Ahmadou a rassemblé son armée à Kouni-Kouni ; mais ne trouvant aucune trace des Toucouleurs, la colonne continue sa route sur Bandiagara, que le 'sultan a déjà


quitté. Les- Français s'établissent dans la ville et des reconnaissances de cavalerie s'assurent qu'il n'y a pas de rassemblements ennemis dans 1-es environs. Beaucoup de chefs se soumettent, la région est pacifiée.

914. — Annexion du Macina.

Laissant à Bandiagara Aguibou, ancien sultan de Dinguiraye, qu'il avait amené avec lui, avec une garnison composée de spahis auxiliaires et de la 5e compagnie du régiment soudanais (lieutenant Bouverot) sous les ordres du capitaine Blachère, commandant les spahis auxiliaires de la colonne, le colonel Archinard rétrograde avec la colonne sur Mopti et Djenné et le 20 mai rentre à Ségou où la colonne est disloquée.

Pendant le retour à Ségou, le colonel Archinard apprenant qu'Ahmadou cherche à recruter des indigènes pour reprendre l'offensive, envoie à Bandiagara la 6e compagnie de tirailleurs soudanais (capitaine Maillot) pour permettre au capitaine Blachère d'éloigner le sultan. Cet officier rejoint les Toucouleurs le 19 mai 1893 à Douentza, et leur tue 103 hommes ; de son côté quelques hommes et le lieutenant Arago (des spahis auxiliaires) sont blessés. Ahmadou se retire à Dallah, à 55 kilomètres plus à l'Est en direction de Hombori. Le capitaine s'y porte, mais le sultan a le temps de s'échapper. Le capitaine Blachère poursuit encore quelque temps les Toucouleurs, puis rentre à Bandiagara avec un nombreux butin et la famille d'Ahmadou qu'il a capturée.

La 5e compagnie tient garnison à Bandiagara et la 6" rentre à Djenné.

§ 15. — Organisation de la conquête.

Le colonel Archinard avant de quitter Ségou organise les territoires conquis.


Le Macina est laissé à Aguibou, sous le contrôle d'un résident. Les cercles de Sokolo et de Djenné sont formés.

Un poste est créé à Mopti.

La colonie- du Soudan est partagée en trois grandes régions, comprenant chacune plusieurs cercles : Région Nord, chef-lieu Nioro.

Région-Est, chef-lieu Ségou.

Région Sud, chef-lieu Siguiri.

Au Soudan proprement dit, les expéditions semblent terminées. Mais le colonel Archinard, d'accord avec le général Borgnis-Desbordes, a conçu le projet de pousser jusqu'à Tombouctou, estimant la possession de cette ville nécessaire à la sécurité du Soudan, à sa prospérité et à son avenir.

Avant son départ pour la France, et comptant bien revenir l'année suivante, le colonel Archinard laisse au lieutenantcolonel Combes et au lieutenant de vaisseau Boiteux, des instructions sur la conduite à tenir pendant son absence. Le premier mobilisera des tirailleurs en vue de la prochaine campagne ; un décret du 9 août 1893 porte à douze le nombre des compagnies du régiment de tirailleurs soudanais, et un autre du 29 août crée un 2e escadron de spahis.

Le lieutenant de vaisseau Boiteux activera la construction des chalands ; il sera libre d'escorter les convois entre Djenné et Tombouctou, à condition de ne pas sortir de son rôle de protecteur et de ne pas communiquer avec les habitants de Tombouctou.

Mais tout n'était pas dit avec Samory : celui-ci reparaît dans la boucle du Niger, ce qui allait décider le successeur d'Archinard à entreprendre contre lui de nouvelles opérations. De plus, une marche téméraire et prématurée du commandant Boiteux sur Tombouctou allait exiger notre intervention immédiate.


COMMANDEMENT INTERIMAIRE DU LIEUTENANT-COLONEL BONNIER

(1893-1894)

A. - REPRISE DE LA LUTTE CONTRE SAMORY

§ 16. — Formation d'une colonne expéditionnaire à Bamako.

A la fin de novembre 1893, le lieutenant-colonel Bonnier, chargé, par intérim, du commandement supérieur du Soudan, apprenant que Samory recommence les hostilités et qu'il est sous les murs de Ténétou et de Bougouni qu'il assiège, quitte Kaves et se rend en hâte à Bamako. Là il ordonne à une partie des garnisons voisines de se rendre au Sud, dans la vallée du Milo, pour renforcer au besoin les postes de Kérouané et de Kissidougou.

Répondant à l'appel de Mademba qui a succédé à Tiéba, il constitue une colonne composée de la manière suivante :

1 Escadron de spahis : capitaine Prost; 1 Batterie de 6 pièces : capitaine Aurenche; 4 Compagnies du régiment de tirailleurs soudanais :

8* Compagnie : capitaine Scal; 9® — : capitaine Paussier; 11" — : capitaine Philippe, lieutenant Frantz, souslieutenant Sarda; 12e — : capitaine Puyperoux, lieutenant Maillac, sous-lieutenant Bluzet.

Le plan du commandant supérieur intérimaire consiste à J'avancer directement sur Ténétou et rejeter Samory au


Sud, pendant qu'une deuxième colonne coupera la retraite aux Sofas et purgera le pays à l'Est du Milo, des bandes ennemies ,qui y sont encore. Cette deuxième colonne, commandée par le commandant Richard, de l'artillerie, devait comprendre les garnisons de Kankan et Kérouané et un escadron de spahis (capitaine Goujet).

§ 17. — Marche sur Ténétou (6) (décembre 1893).

Le 30 novembre 1893, le lieutenant-colonel Bonnier .traverse le Niger et s'achemine vers Ténétou. Apprenant que Ténétou et Bougouni viennent de se rendre, il accourt à Faragaré, surprend l'ennemi, le bouscule (5 décembre 1893) et sauve ainsi le village des flammes. Dans la nuit, le lieutenant-colonel organise une colonne volante : 11e et 126 compagnies, spahis, 2 pièces de canon, et avec deux jours de vivres se lance à la poursuite des Sofas.

Arrivé à Kaloni, il tombe à l'improviste sur l'adversaire et le disperse ; après une vive et courte fusillade, l'almany réussit à s'échapper. L'ennemi a perdu plus de 200 hommes et a dû abandonner les captifs et le butin qu'il avait fait à Ténétou et à Bougouni.

Le lendemain 7 décembre, le lieutenant-colonel retourne à Faragaré, et, après un jour de repos, repart pour Ténétou, précédé par les 8e et 9e compagnies. La route est jonchée de cadavres, victimes de Samory ; à Ténétou, le tata est saccagé et les corps mutilés de 300 malheureux gisent au milieu des ruines.

Pendant deux jours, le lieutenant-colonel harcèle les bandes de Sofas qui fuient vers le Sud ; il laisse alors la

(6) Voir croquis N° 1.


■8e -compagnie à Ténétou et un poste de miliciens à Faragaré* puis regagne Bamako (18 décembre 1893).

Samory privé de ressources et de munitions, rétrograde vers le pays de Kong.

§ 18. — Derniers engagements dans la région Sud du Soudan ou Haute - Guinée actuelle (décembre 1893mars 1894), De son côté, le commandant Richard a envoyé le lieutenant G. Maritz en reconnaissance au Kissi, pour en expulser les bandes qui le ravagent ; lui-même parcourt le Toukouro et le Sankouma, refoulant devant lui les Sofas qui fuient 1 vers le Sud. Il fonde un poste à Beyla et y place en garnison la 7e compagnie (capitaine Loyer et lieutenant Lecerf) : puis s'enfonce au Sud-Est sur les traces de l'ennemi qui cherche à rejoindre Samory vers le Bandama.

Rappelé sur le Milo par ordre de M. Albert Grodet, récemment nommé gouverneur civil du Soudan, il rentre à Kérouané où il disloque sa colonne. Pendant ce temps, le lieutenant Maritz s'est porté à l'Ouest jusqu'à Warina, où il se heurte de nuit le 23 décembre à une troupe anglaise.

Le lieutenant Maritz n'a que 20 tirailleurs et 120 auxiliaires, les Anglais sont 300. Après une lutte acharnée., les Anglais se retirent avec 3 officiers et 50 hommes hors de combat ; les Français en ont 30, parmi lesquels le lieutenant Maritz tué dès le début.

A Beyla, le capitaine Loyer déploie une grande activité et peu à peu calme le pays. Pendant une sortie aux alentours du poste, le lieutenant Lecerf s'aventure à Nzapa, à six jours de marche dans le Sud-Ouest (7) et est tué sous les murs du village dans une escarmouche avec les Sofas (15 mars 1894).

(7) Localité située au Sud-Est de Fassang-ouni, dans le haut bassin de la rivière Diani ou St-Paul, qui se jette dans la mer à Monrovia.


Quant à Samory, il change de tactique et au mois de janvier envoie des émissaires à Kayes pour demaBdej? la paix. En réalité, il ne renonce pas à ses prétentions, mais sentant que le Soudan lui est fermé désormais, il songe à se tailler un empire dans le pays de Kong et l'hinterland de la Côte d'Ivoire. Croyant à sa bonne foi, M. Grodet prescrit au commandant Richard d'entrer en pourparlers avec lui ; mais l'attitude louche de Samory nous éclaire et ses délégués sont reconduits à la frontière. Samory jette le masque et se déclare à nouveau notre ennemi ; il envahit le Nord de la Côte d'Ivoire. Le Gouvernement envoie le colonel Monleil pour enrayer les progrès des Sofas et en même temps oroonne la formation d'une colonne à l'aide des postes de la région Sud du Soudan, afin de protéger éventuellement les états de Mademba. Le commandant Dargelos, successeur du commandant Richard, reçoit l'ordre de concentrer trois compagnies de tirailleurs à Bougouni, alors point ,extrême de notre pénétration dans l'Est, et d'y rassembler trois mois de vivres ;. il devra s'abstenir de toute diversion du côté de Kong à cause des difficultés du ravitaillement.

Le commandant Dargelos séjourne plusieurs mois à Bougouni.

A partir de 1891, les Sofas ont été éliminés du Soudan proprement dit.

B. — CONQUETE DE TOMBOUCTOU (8) (1894-1896) § 19. — Nécessité de la marche sur Tombouctou.

Au milieu de décembre, le lieutenant-colonel Bonnier, rentrant de son expédition contre Samory, est avisé qu'en dépit des instructions reçues, le commandant Boiteux s'est avancé sur Tombouctou. Prévoyant que cet officier sera

.(8) Voir croquis N° 3.


bientôt dans une situation critique, il précipite son retour à Bamako.

Là, il donne l'ordre de rassembler toutes les pirogues à Toulimandio et le 21 décembre 1893 s'embarque avec son infanterie pour Ségou. Les autres éléments de la colonnesous les ordres du commandant Joffre, du Génie, rejoindront par terre en suivant la rive gauche du Niger, ainsi que la 10e compagnie. A Ségou, le commandant Hugueny annonce au lieutenant-colonel la nomination de M. Grodet comme gouverneur du Soudan et lui remet une lettre le.

rappelant à Kayes. Mais il répond à M. Grodet qu'en raison du danger couru par le commandant Boiteux, Bonnier jugeopportun de différer l'exécution de cet ordre et, afin d'éviter une catastrophe, de continuer sa route vers le Nord.

En chemin, il apprend l'occupation de Tombouctou, la mort de l'enseigne Aube (28 décembre) et la situation périlleuse du commandant Boiteux.

Deux colonnes sont formées : la colonne du lieutenantcolonel Bonnier ou colonne n° 1, et celle du commandant Joffre ou colonne n° 2.

§ 20. — Colonne du lieutenant-colonel Bonnier.

La colonne n° 1, commandée par le lieutenant-colonel Bonnier, comprend :

2 pièces de 80 de campagne j 2. pièces de 80 de montagne i (capitaine Aurenche) 2 pièces de 4 de montagne

1 Bataillon du régiment de tirailleurs soudanais à 3 Compagnies (commandant Hugueny), savoir : 5e Cie (9) : capitaine Tassard, lieutenant Bouverot; 11e — : capitaine Philippe, lieutenant Frantz, sous-lieutenant Sarda; ge — : capitaine Paussier.

(9) Cette Compagnie venait de Bandiagara, où elle était restée en garnison depuis l'occupation de cette ville.



Cette colonne descendra le fleuve par eau directement sur Tombouctou.

Le 1er janvier 1894, les troupes du lieutenant-colonel, réparties sur 300 pirogues, sont mises en mouvement et, après 9 jours, arrivent en vue de Kabara où elles rallient la flottille.

Aussitôt débarquées, elles gagnent Tombouctou, sauf la r9e compagnie qui reste à Kabara pour protéger le convoi et 4'artillerie qui y sont laissés.

Le commandant Boiteux, délivré, retourne à Kabara ; une section de la 11e compagnie occupe le fortin que Boiteux a fait construire au Nord de la ville ; le reste du détachement bivouaque au Sud-Ouest de la place.

Obéissant aux ordres de M. Grodet, le lieutenant-colonel se dispose à retourner à Kayes, comptant disperser en route des bandes de Touareg qui lui sont signalées du côté de Goundam. Le 12 janvier il repart, laissant à Tombouctou la 9e compagnie, un peloton de la 11e compagnie (lieutenant Frantz), l'artillerie et le convoi sous les ordres du capitaine Philippe. Le 13, la petite colonne rencontre des campements Touareg et capture plus de 3.000 moutons ; le 14 elle en capture encore 600 à Manakoré, une section de la 5e compagnie échange des coups de fusils avec une trentaine d'hommes armés et fait quelques prisonniers. Ceux-ci informent que de nombreux Touareg (Tin Guérérif et Kel Antassar) sont massés à Djidjin, non loin de Dongoï. Le lieutenant-colonel oblique de ce côté, mais à cause de l'heure avancée, laisse à Manakoré les animaux et les tirailleurs fatigués sous la garde d'une section de la 5e et d'une de la 11e avec le sous-lieutenant Sarda.

La colonne, réduite à trois sections, campe le soir à Tacoubao que les Touareg viennent de quitter. La section Bouverot fouille le terrain à gauche, les deux autres avec le capitaine Tassard fouillent à droite. Ces reconnaissances reviennent : la première avec 800 moutons, la deuxième avec une centaine de bœufs.


On campe en carré : la section Bouverot au Sud, les sections Tassard au Nord, l'Etat-Major au centre, le bétail parqué sur les deux autres faces. Les feux sont allumés, six sentinelles veillent à petite distance en avant des faces.

Le 15 janvier, à 5 h. 30, deux coups de feu suivis du cri de : « Aux armes » retentissent ; en un clin d'œil tout le monde est debout, mais .trop tard : 250 fantassins et 150 cavaliers Touareg se sont glissés jusqu'aux abords du bivouac et surgissant de toutes parts, renversent les faisceaux, chassent les bœufs et les tirailleurs affolés devant eux. L'attaque est si rapide, le désordre est tel que toute résistance est impossible; un quart d'heure après, le détachement presque en entier est exterminé. Le capitaine Nigotte, le sergent-major Béretti, le sergent Labire et 8 tirailleurs, réussissent à se faufiler de buissons en buissons et aboutissent à un marigot qu'ils franchissent avec beaucoup de difficulté. Deux heures et demie après, il rejoignent le sous-lieutenant Sarda.

Onze officiers : lieutenant-colonel Bonnier, capitaines Livrelli (artillerie), Regad (guerre), commandant Ilugueny, capitaines Tassard et Sansaric, lieutenants Garnier et Bouverot (infanterie de marine), le docteur Grall, le vétérinaire Lenoir ; l'interprète Aklouck ; 2 sous-officiers, les sergents Gabrie et Etesse ; 69 tirailleurs, sont tombés dans cette surprise.

Le capitaine Nigotte prend le commandement des survivants et le 17, rentre à Tombouctou après quelques alertes insignifiantes.

Le capitaine Philippe, avec le plus grand sang-froid, prend les dispositions nécessaires pour parer au danger de la situation. De légères reconnaissances parcourent les environs, cherchant à recueillir les isolés qui auraient pu échapper au massacre, mais sans s'éloigner, car les Touareg sont en force à proximité de la ville.

Tombouctou est organisé solidement de manière à repousser tout assaut ; les 300 hommes de la garnison


exercent une surveillance active. La 56 compagnie, avec le lieutenant Frantz, est reconstituée au moyen de. miliciens pris sur place. Les vivres sont abondants ; le capitaine 'Philippe attend sans inquiétude. Il prescrit au lieutenant de vaisseau Boiteux de ne pas quitter Kabara avant l'arrivée de la colonne Joffre et envoie au commandant un émissaire pour le renseigner et le mettre en garde contre les Touareg.

Le capitaine Philippe termine son rapport sur le massacre de Dongoï en disant « qu'il répond de tout ».

§ 21. — Colonne du commandant Joffre.

La colonne du commandant Joffre (colonne n° 2) comprend:

Le 2e Escadron de spahis soudanais : capitaine Prost; 1 Peloton de 30 spahis auxiliaires : capitaine Pouydebat; 2 pièces de 80 de montagne : capitaine Fourgeot; 2 Compagnies du régiment de tirailleurs soudanais : 10e Cie : capitaine Cristofari, lieutenant Frèrejean, sous-lieutenant Sadioka; 12e — : capitaine Puypéroux, lieutenant Maillac, sous-lieutenant Bluzet.

Le 27 décembre 1893, la colonne se met en marche ; elle descend la rive gauche du Niger jusqu'à Sansanding. Là elle quitte le fleuve dont les rives sont trop marécageuses à cette époque et se dirige par Monimpé et Kono sur Télé où elle arrive le 3 janvier 1894. De là, le commandant Joffre oblique par Daoura sur Oudiabé, le point d'eau le plus rapproché.

Le sentier est à peine tracé, le pays inculte et les troupes ont fort à souffrir de la soif pendant les quatre jours de route. Elles se reposent trois jours à Oudiabé, puis M colonne continue par Dialafa, Manguirna et Diartou, vers Soumpi où elle arrive le 16, peu après que les Kel Antassar l'ont évacué.


Lé commandant Joffre apprend que les Touareg se rassemblent en grand nombre du côté de Goundam. Dès ce moment, épié par l'ennemi sans cesser à l'affût, il redouble de précautions. Apprenant par la pointe de spahis que le chef du canton de Niafounké, Niankou, refuse l'entrée de ses terres aux Français, le commandant se porte sur le village avec l'escadron Prost et la 10e compagnie (capitaine Cristofari). Le village est entouré par plusieurs marigots profonds, dérivations de l'Issa-Ber (10), qu'il faut traverser.

Quatre cents guerriers en disputent l'entrée. Après le premier feu de salve, croyant les tirailleurs désarmés, ils s'élancent brusquement et sont reçus par un tir rapide presque à bout portant. En un quart d'heure, ils ont une centaine d'hommes tués et se dispersent (20 janvier 1894).

Cinq jours après, la colonne campe à Atta, sur les rives du lac Fati. Le village est désert, les habitants ont emmené leurs pirogues, mais ont laissé d'abondantes provisions.

Le capitaine Pouydebat part alors la nuit avec quinze spahis et le peloton Maillac (12e compagnie) pour occuper le marigot de Goundam, déversoir du lac Faguibine, et y réunir les embarcations nécessaires au passage. A son arrivée à Goundam au petit jour, il n'y trouve aucun bateau; sur la rive opposée une forte bande de Touareg se masse dans le village. Le capitaine s'établit en face et est rejoint le soir par la colonne.

Le cours d'eau a 300 mètres et un courant très rapide. Le commandant Joffre envoie un courrier à Kabara pour prévenir le lieutenant de vaisseau Boiteux de sa situation et détache au Sud vers Tendirma l'escadron Prost et un peloton de la 12e compagnie pour se procurer des vivres et des pirogues. Le capitaine Prost arrive le 28 au matin à Tendirma, dont les habitants se sont réfugiés dans une île voisine avec leurs grains et leurs troupeaux ; il trouve

(10) Lui-même est un des bras du Niger.


quatre pirogues dont il se sert pour traverser avec vingt hommes. Après un échange de coups de fusils avec les indigènes, il aborde dans nie et s'empare des denrées et du bétail qui y sont accumulés. Le 31, il rallie la colonne avec son butin.

Les Touareg, en voyant les barques, se groupent avec inquiétude le long du rivage ; ils sont décimés par l'artillerie et se retirent. Le lendemain, FElat-Major, un peloton de spahis et la 10e compagnie sont transportés sur la rive gauche et s'y retranchent fortement. Ce jour-là, le commandant Joffre apprend par lettre la catastrophe de Tacoubao, l'arrivée prochaine de la flottille et celle du capitaine Philippe avec six sections de tirailleurs et deux pièces de 80.

Ces renforts arrivent le 3 février 1894 à Goundam.

Désireux de venger au plus tôt la mort de ses compagnons, le commandant veut profiter de l'appoint fourni par le capitaine Philippe et constitue une colonne légère avec l'escadron Prost, 2 compagnies et demie de tirailleurs, 2 sections de 80 (capitaine Aurenche). Laissant le reste de ses troupes à Goundam, il s'avance le 4 sur Farasch où les Touareg sont signalés.

Mais à notre approche l'adversaire se retire et le commandant Joffre, désespérant d'atteindre un ennemi aussi mobile dans cette région aride et accidentée, avec des porteurs fatigués et peu de vivres, rétrograde vers Goundam.

Le 7, il s'achemine vers Tombouctou par terre, tandis que le convoi chargé sur des pirogues descend le marigot de Goundam sous l'escorte de la flottille et d'un peloton de tirailleurs.

A Tacoubao, la colonne recueille, parmi les ossements épars sur le sable, les squelettes des 13 Européens massacrés (11). Elle arrive le 12 février 1894 à Tombouctou après un parcours de 812 kilomètres.

(11) Ces restes furent transportés à Tombouctou, puis en 1896 transférés à Marseille.


22. — Lutte contre les Touareg de l'Ouest (1894-1896).

Après le massacre de Tacoubao, on ne pouvait évacuer Tc>moouctûu sans provoquer un soulèvement dans toute la colonie. Il fallait donc s'y implanter et forcer les Touareg a se soumettre.

Le Gouvernement, après avis du Ministre des colonies, en décide ainsi, et pour pourvoir à ces nouvelles exigences, un 4° bataillon de tirailleurs est créé (Décret du 7 mars 4894). Les cadres nécessaires sont dirigés aussitôt sur le Soudan.

Tout d'abord le lieutenant-colonel Joffre améliore la défense de la ville. Les deux fortins qu'avait construit le lieutenant de vaisseau Boiteux sont remplacés par deux forts, l'un le « fort Bonnier « au Sud, l'autre le « fort Hugueny » ;au Xord.

A Kabara, où s'établissent la 10e compagnie et les spahis, et où stationne une flottille de pirogues, le capitaine Gristofari bâtit une redoute qu'il relie à Tombouctou par deux petits blockhaus. En prévision de la baisse des eaux, qui obligerait les chalands à s'arrêter à Kordoumé, un poste retranché est organisé dans ce village.

Dans l'intervalle, des bandes de Touareg apparaissent vers le Kissou. La. compagnie Paussier (9e), visite Tassakant, Dongoï cet Galaya. Le capitaine Gauthenotn détruit un peu plus tard un campement Important d'Irréganaten à Takayégourou sur la rive droite du Niger.

Pour achever l'occupation, le lieutenant-colonel détache en mars sur Goundam, trois pelotons de l'escadron Prost, la 11e compagnie, capitaine Philippe, un peloton de la 10' et une section de 80.

Cette colonne surprend les Touareg près de Goundam et les bouscule ; un fort est élevé aussitôt dans le village et les spahis se portent jusqu'à Mékoré.

La sécurité assurée, le lieutenant-colonel Joffre se tourne contre les Touareg eit en premier lieu s'attaque aux Tin-


Guérérif, auteurs de la surprise de Tacoubao. A la tête de la 5e compagnie (capitaine Puypéroux, sous-lieutenant Bluzet) et d'un peloton de la 10e compagnie (lieutenant Frèrejean, sous-lieutenant Sadioka), il gagné Goundam où il rallie le peloton Frantz de la -11e compagnie et l'escadron Prost. Pénétrant dans le Billi, il rejoint les Tin-Guérérif et du 20 au 28 mars, leur livre une série d'engagements à Daouré, Goro, Sansan, dans lesquels il 1 leur inflige des pertes sérieuses. Cernés une nuit à Kili par les spahis et les tirailleurs du lieutenant Frantz, les Touareg s'enfuient vers le lac Fati, après avoir perdu 120 des leurs dont plusieurs chefs.

L'écrasement des Tin-Guérérif a une portée considérable; les tribus non guerrières se placent sous notre protection, le Billi est à nous. Ce résultat est affermi par la création de deux postes fortifiés, à El-Oualadji et Saraféré, par le capitaine Philippe avec un .peloton de la 11e compagnie.

Aussitôt rentré à Tombouctou, le lieutenant-colonel Joffre repart contre les IrréganaLen qui ont pillé le village de Danga, sur la rive droite du Niger. A son approche, les Touareg se retirent et sont dispersés après une légère escarmouche. Plus à l'Ouest le lieutenant Frantz s'élance sur les traces des Kel-Antassar, soutenu par un peloton de spahis ; les atteint dans le défilé de Karao-Kamba et saisit les troupeaux qu'ils venaient d'enlever dans le Billi.

Sur ces entrefaites, la 9e compagnie du Régiment de Tirailleurs Soudanais, jugée inutile à Tombouctou, est renvoyée à Ségou.

Le capitaine Gérard remplace à la 10e compagnie le capitaine Cristofari.

En mai, des reconnaissances continuent à rayonner autour de Tombouctou, surtout à l'Ouest où se trouvent les Iguellad, qui excités par Ngouna, chef des Kel-Antassar, ont envahi le Billi et saccagé Ougoukoré. Ngouna est tombé à l'improviste sur Dongoï, qu'il a razzié et dont il a massacré 14 habitants ; après quoi, il s'est éloigné sur Farasch.


Le capitaine Laperrine, qui a succédé au capitaine Prost à l'escadron, se jette à sa poursuite et fait 120 prisonniers ; -en même temps, le capitaine Gérard (10e compagnie) s'embarque au Nord du Fati, sur la ligne de retraite des Iguellad ; dès qu'ils sont en vue, il se précipite sur eux et les met en déroute, après leur avoir tué 45 hommes..Terrifiés par cet échec, les nomades se soumettent, mais Ngouna refuse de se rendre ; il essaye d'entraîner les chefs des Irréganaten et des Igouadaren, ne réussit pas et se réfugie alors avec les débris des Kel-Antassar dans le Nord à Ouna et Djérane.

Les Iguellad, vivant dans un pays pauvre, sont attirés vers le Billi et le Kissou. Pour tranquilliser les indigènes il faudra réduire cette tribu et la chasser des bords du Faguiibine. Mais la saison est trop avancée et cette expédition est remise au mois d'octobre suivant, après l'hivernage.

Jusque-là, des postes provisoires sont installés contre Tombouctou et Goundam, à Tassakant, El-Mansaraf, Douékéré et Djidjin. Restent les Kel-Témoulaï, qui à plusieurs reprises ont volé les Maures Bérabiches, nos partisans intéressés. Le capitaine Puypéroux (5e compagnie) se dirige contre eux, les rencontre à Aguélal, les oblige à évacuer leurs campements et fait de nombreux prisonniers.

A la fin de 1894, la 5e compagnie de tirailleurs soudanais occupe. Goundam avec deux pelotons de spahis et une section de 80, la 10e est à Tombouctou avec le gros de l'artillerie et l'autre demi-escadron de spahis. Une compagnie de tirailleurs sénégalais vient augmenter cet effectif.

Un détachement de trois armes occupe Kabara.

Au mois de juillet, le lieutenant-colonel Joffre a comme successeur dans la région Nord le commandant Ebener.

Délivré des Touareg, Tombouctou recommence ses transactions avec Djenné d'une part, et le Sahara de l'autre.

La population sédentaire est soumise; parmi les nomades, les Bérabiches, les Kountas et les Igouadaren acceptent notre autorité. La tribu des Tin-Guérérif est terrassée ; les


Jrréganak'ii onLdulllauùé l'aman, les Kel-Témoulaï font de même puu après ; les iguettad, depuis leur défaite de Fatir sont calmes. Seul, Ngonna est en lutte ouverte contre nous.

Le gouverneur du Soudan M. (irodel veut alors appliquer aux Touareg une politique nouvelle. Craignant de les irriter par une attitude hostile, il croit pi^Térable de suspendre toutes opérations militaires contre eux et prescrit au commandant Ebener de limiter à un rayon de 10 kilomètres les sorties des garnisons de Tombouelou et de Uoundam et d'assurer la sécurité de la route qui unit ces deux points (ordre confirmé par le commandant supérieur des troupes).

Les conséquences de celle passivité se font bientôt sentir; les Touareg s'agitent et enhardis par notre inertie, après.

avoir pillé le Billi et le Kissou, razzie ni les convois entre Kabara et Tombouctou. Dans une de ces actions le souslieutenant de spahis Potin est grièvement blessé.

Profilant du voyage de, M. (irodel à Tombouctou, le commandant Ebener proteste contre l'impuissance où il est réduit. Mais il est remplacé par le commandant Bouvier.

Olui-ci tombe malade et remet le commandement au capitaine Bougel.

Les Touareg, plus tranquilles que jamais, pillent de nouveau le Billi. Le lieutenant .Jacobi, chef du poste de (iouiidam, poursuil les pillards el leur enlève leur butin.

En juillet 18').), le commandant Kéjou est appelé au commandement de la région Nord par le colonel de Trentinian. Dès son arrivée, il se rend compte de la situation.

Les tirailleurs, travaillés sourdement par les marabouts, ne sont plus sûrs. Les Touareg pillent el assassinent sous les.

murs de Tombouctou.

Le commandant de région lance, sous sa responsabilité, des reconnaissances incessantes, de façon à ramener les.

nomades au respect de nos armes.

D'ailleius, le colonel de Trentinian. qui à ce moment, succède à M. (irodel. comme gouverneur du Soudan,


approuve hautement le commandant Réjou ; celui-ci enjoint alors aux. chefs de postes de courir sus aux Touareg.

Le 1er août 1895, le capitaine Florentin, de Goundam, est averti que Ngouna a ravagé Douékoré. Il se porte sur ce village avec sa compagnie (lie), atteint l'ennemi près de Farasch et le disperse (4 août) ; la tribu s'enfuit vers le Nord. Laissant un petit poste à Farasch, le capitaine aborde de nouveau les fuyards et leur inflige un échec sur les bords du lac Faguibine. Le 6, au point du jour, il est attaqué par un millier de Touareg qui lui donnent un assaut furieux. Grâce aux précautions prises, leur élan se brise sur la double haïe d'épines (zériba) dont nous couvrons nos bivouacs depuis la cruelle expérience de Dongoï. Décimé par les feux de salve, l'ennemi se retire en désordre, poursuivi par les tirailleurs qui lui tuent beaucoup de monde.

Le capitaine Florentin rentre le soir même à Goundam, ayant perdu le tiers de son effectif.

La ruine des Kel-Antassar est achevée par le capitaine Imbert, qui avec ses spahis et deux pelotons de tirailleurs (lieutenants Claudel et Burgnière) les harcèle sans cesse en août et en septembre. Enfin, en octobre, le capitaine Rouget, avec un peloton de spahis et les pelotons de tirailleurs Claudel et Méchet, refoule les dernières bandes des KelAntassar.

La sécurité rétablie autour de Tombouctou, le commandant Réjou veut se relier au Nord du Soudan par une ligne de postes et décide la création d'un poste à Soumpi, sur la route de Goundam à Sokolo. Dans ce but, le commandant Réjou constitue une colonne avec l'escadron de spahis, la 6e compagnie (capitaine Faudet, lieutenants Sagols et Jacobi) et une pièce de 80. Le lieutenant Claudel sert d'adjudantmajor.

Le 7 novembre 1895, la petite colonne quitte Tombouctou et marche sur Soumpi par l'itinéraire inverse de celui de la colonne Joffre. Elle s'augmente en chemin de la 5e compagnie (capitaine Jobard, lieutenant Mangin) et le 18, pénètre




dans le village sans avoir été inquiétée par les Touareg. La compagnie Jobard demeure en garnison à Soumpi où elle construit un fort. Le commandant Réjou regagne Goundam à la fin de novembre sans incidents.

Pendant ce temps, le capitaine Florentin a bousculé vers Ras-el-Mâ plusieurs bandes de Kel-Antassar.

Au commencement de décembre, une bande de Touareg ayant razzié un village ami près de Tombouctou, le lieutenant Bérard, des spahis, se jette sur eux avec ses spahis, mais il est tué dans la charge. Pour en finir, le commandant Réjou exécute avec sa colonne le tour du lac Faguibine, explore le Daouna et en chasse les Touareg ; au cours d'un engagement comme il y en a chaque jour, le lieutenant Mourouzi est blessé d'un coup de lance.

Fatigués de ces luttes continuelles, les Kel-Antassar font leur soumission malgré leur chef. Les Igouadaren font également leur soumission.

Du côté de Soumpi, des reconnaissances rayonnent journellement autour du poste. Une d'elles, conduite par le lieutenant Mangin, atteint El-Hadj-Bougouni au puits de Zidéïda et le met en fuite après lui avoir infligé des pertes.

Désormais la région peut être considérée comme pacifiée.

L'activité du commandant Réjou, jointe à la mobilité des colonnes qui, durant des semaines, ont accompli chaque jour 40 et 50 kilomètres, a eu raison des Touareg.

§ 23. — Première révolte du Macina. Affaire de Bossé (12).

Au Macina, Aguibou que nous avions placé comme fama, après la fuite d'Ahmadou, n'avait pas su assurer son autorité sur ses sujets. A plusieurs reprises, ils s'étaient soulevés contre lui, entre autres Ali-Kari, almany de Bossé, qui terrorise la contrée par ses pillages et ses cruautés. En vain, au mois de mai 1894, le fama a-t-il voulu l'attaquer à Bossé :

(12) Voir croquis N° 4.


il a subi un échec et le capitaine Nigotte, alors résident à.

Bandiagara, venu au secours cl'Aguibou avec une quarantaine de tirailleurs et dix spahis, in'a pas réussi aprèsvingt jours d'opérations à terrasser Ali-Kari. Après une tentative malheureuse sur Bossé, il s'est borné à bloquer la. place, mais sans résultat; puis il s'est retiré à Bandiagara, après avoir enlevé cependant le village voisin de Lo.

Enhardi par ce succès, Ali-Kari cherche à soulever le pays contre notas et contre Aguibou.

En apprenant ces événements, le commandant Quiquandon, chef de la région comprenant les cercles de Sokolo, Ségou, Djenné et Bandiagara, organise à Djenné une colonnesous le commandement du capitaine BonacoorsI.

§ 24. — Colonne Bonaccorsi.

Cette colonne, sous le commandement du capitaine Bonaccorsi (artillerie de marine), avec le lieutenant Mangin pour adjoint, est concentrée le 22 juin iRai; elle comprend :

15 spahis; , 2 pièces de 80 de montagne (capitaine Clerc); 2 Compagnies de marche, formées de .tirailleurs auxiliaires encadrés par des légionnaires, savoir : lre Compagnie, capitaine Maillot et lieutenant deTavernier; 2e Compagnie, lieutenants Betbéder ^et Albot (guerre); 1 Peloton de tirailleurs réguliers (10° Compagnie, lieutenant Péiou); Les médecins Manin et Emily.

Le 1er juillet 1894, la. colonne arrive devant Bossé. L'artillerie se met en batterie au Sud-Ouest du village et pratique une brèche dans la muraille. La ire compagnie garde la face Nord, les spahis les faces Est et Sud, la 2e compagnie chargée de l'attaque se tient près des pièces ; le peloton Pétou est en réserve.


A 9 heures 1a, 2e compagnie s'avance à l'assaut et ne triomphe de la résistance acharnée des défenseurs qu'après 7 heures de combat et grâce à l'appui des pelotons Pétou et de Tavernier. Maître du village, le capitaine Bonaccorsi attaque le tata de l'almany situé à l'Ouest du village. Après une lutte désespérée, Ali-Kari succombe les armes à la main et les Français s'emparent du réduit, mais au prix de pertes considérables : 9 hommes tués et 149 blessés dont 6 officiers : le capitaine Maillot, les lieutenants de Tavernier, Pétou, Mangin, Betbéder et Albot.

Le 3 juillet, la colonne repart pour Djenné, où elle arrive le 12, après avoir châtié en route le village de Kombori, partisan de l'almany Ali-Kari.

CONQUETE DE LA BOUCLE DU NIGER (13) (1895-1899)

A. — GOUVERNEMENT DU COLONEL DE TRENTINIAN (14)

§ 25. — Programme du lieutenant-gouverneur.

Le colonel de Trentinian avait pris, comme lieutenantgouverneur, la direction des affaires du Soudan au mois de juillet 1895, en remplacement de M. Albert Grodet, rappelé en France ; il avait pleins pouvoirs du gouverneur général, M. Chaudié, pour agir à sa guise.

(13) Comme on le verra par la suite, l'expression géographique ici employée englobe en réalité la Haute-Volta et la Côte d'Ivoire actuelles.

(14) Voir croquis N° 4.


Frappé des conséquences funestes de la politique d'inertie de M. Grodet, le nouveau lieutenant-gouverneur se propose de remettre en vigueur le projet d'extension vers l'Est du colonel Archinard, en vue d'acquérir la boucle du Niger entre Bandiagara et San et de relier le Soudan à la Côte .d'Ivoire et au Dahomey.

Il est, en effet, urgent d'intervenir dans la boucle, car l'influence et les intérêts de la France y sont menacés par Samory d'abord, par les Anglais de la Gold-Coast et les Allemands du Togo ensuite.

§ 26. — Mission Destenave au Mossi (avril-décembre 1895).

Le Gouvernement envoie en avril 1895, au Mossi, le capitaine Destenave (guerre), alors résident de Bandiagara, pour renouveler avec les chefs des principales villes les marchés antérieurs qu'avait conclus le commandant Monteil.

Parti de Bandiagara avec une compagnie du Régiment de Tirailleurs Soudanais (lieutenants Voulet, Margoine et Gaden), le capitaine Destenave se porte sur Ouahigouya, capitale du Yatenga, province vassale du Mossi, dont. le souverain Bakaré accepte définitivement notre protectorat.

De là il se rend à Yako, autre ville tributaire du Mossi, où il est mal accueilli par les habitants avec lesquels il échange des coups de fusil. Désespérant, avec le peu de monde dont il dispose, d'entrer à Ouagadougou, le capitaine continue sa route vers l'Est et atteint Dori dans le Liptako. En ce point il maintient les traités conclus par le commandant Monteil, puis retourne à Bandiagara en décembre 1895.

§ 27. — Exploration du Niger par le lieutenant de vaisseau Hourst (janvier-octobre 1896).

En janvier 1896, le lieutenant de vaisseau Hourst avec l'enseigne Baudry et le lieutenant Bluzet, du Régiment de Tirailleurs Soudanais, s'engage dans le chenal du Niger en aval de Kabara sur la canonnière « Le Davoust » qui


remorque deux chalands. Le long du lleuve il négocie avec les chefs des pays qu'il traverse, séjourne cinq mois et demi près de Say dans l'île de Talibia, malgré l'hostilité des habitants, et aboutit à la fin d'octobre à Wari, après avoir descendu tout le cours du Niger.

Cette exploration prouve qu'entre Bamako et Ansongo, c'est-à-dire sur un parcours de 1.700 kilomètres, le fleuve est navigable aux hautes eaux, et peut constituer une voie de pénétration vers le Tchad.

§ 28. — Seconde révolte du Macina (avril 1896).

Au mois d'avril 1896 une nouvelle révolte éclate dans le Macina. A l'instigation du marabout Hamidou-Kolado, ami d'Ahmadou, les habitants du Dakol prennent les armes et se disposent à marcher sur Bandiaga-ra. Le capitaine Menvielle (gllerre), successeur du capitaine Destenave à Bandiagara, réunit les troupes qu'il a sous la main : un détachement de tirailleurs réguliers de la ge et de la 16e (lieutenant Pinchon), une compagnie d'auxiliaires (lieutenant Youlet), un peloton de spahis (lieutenant Chanoine). Le capitaine Menvielle dirige les opérations et le capitaine Bouché commande les troupes. La colonne se porte contre les insurgés qu'elle rencontre à Sangha. Elle les écrase après un violent combat, capture le marabout et le fait fusillerLes auxiliaires du lieutenant Voulet et les spahis parcourent, alors la région pour disperser les dernières bandes.

§ 29. — Directives du Ministre des colonies.

Le Ministre des colonies, M. Delcassé, après une tentative de négociations diplomatiques avec l'Angleterre d'un côté et l'Allemagne de l'autre, avait engagé le gouverneur général à marcher résolument de l'avant. Il fallait, en effet, ne pas perdre les bénéfices acquis dans la boucle et nous en assurer la possession en arrêtant les progrès des Anglais et des Allemands vers le Nord et en achevant l'occupation.


M. Chaudié, gouverneur généraill, adresse des instructions dans ce sens aux gouverneurs du Dahomey et de la Côte d'Ivoire, ainsi qu'au lieutenaiitr^ouveme'Hr du Soudain qui adopte le plan, suivant.

Dès la fin de l'hivernage de 1896, une colonne aux ordres du commandant Destenave, pénétrera dans la boucle et s'y implantera solidement, ; en attendant, une mission, commandée par le lieutenant Voulet, se portera au Mossi et au Gourounsi pour préparer les voies à la conquête et prévenir les Anglais en plaçant ces deux provinces sous notre protectorat.

De plus le commandant Valet organisera une deuxième colonne qui, manœuvrant au Sud-Ouest de la précédente, s'établira dans la boucle de la Volta Noire : on peut ainsi espérer fermer Ù, Samory toute issue vers le Nord, et, par la création de postes au Lobi, amorcer la jonction du Soudan à. la Côte d'Ivoire.

Enfin une mission confiée au Lieutenant Blondiaux cherchera à gagner la Côte d'Ivoire par l'Ouest en partant de l'extrême Sud du Soudan.

§ 30. — Mission Voulet au Mossi et au Gourounsi (juillet i896, mars 1897).

Le lieutenant Voulet, du Régiment de Tirailleurs Soudanais, doit en plein hivernage pousser jusqu'à Ouagadougou dans un pays manifestement hostile à la France et où il sera en contact avec les Anglais.

La mission. comprend : le lieutenant Chanoine (spahis), les sergents Loury et Jariel (tirailleurs soudanais), 23 tirailleurs et 10 spahis réguliers. 180 tirailleurs et 40 spahis auxiliaires, 250 porteurs chargés de trois mois de vivres.

Le 30 juillet 1896 la mission quitte Bandiagara et se dirige sur Ouahigouya pour soutenir notre allié récent Bakaré, chassé depuis plusieurs mois de sa résidence par le chef de Yako. Malgré le mauvais état des chemins, le


lieutenant Voulet accourt, bouscule l'ennemi à Sim, Soulou, Pagoro, Prambi et ramène Bakaré à Ouahigouya (17 août) ; quelques jours après il l'investit solennellement à Goursi.

Marchant ensuite sur Yako,. capitale du Kipirsi, le lieutenant s'empare de la ville par force et se dirige sur Ouagadougou. Deux partis se partagent Ouagadougou : l'un favorable, l'autre, le plus nombreux, hostile aux Français.

Voulet envoie à Bokary, naba (15) du Mossi, une lettre et un drapeau ; Bokary déchire le drapeau et renvoie le parlementaire frappé de verges ; il se lance au devant de la colonne qu'il rencontre le 1er septembre à peu de distance de Ouagadougou. Après deux heures d'un combat très vif, les Mossi sont dispersés et rejetés vers le Sud; Ouagadougou est occupé. Huit jours après, Bokary revient avec toute son armée ; il est repoussé de nouveau, poursuivi pendant trois jours et finalement abandonné par la plupart de ses guerriers. Ouagadougou est incendié ; les habitants déposent les armes et nomment comme chef Kouka-Koutou, un des frères de Bokary, qui traite avec nous et place le Mossi sous notre suzeraineté.

Laissant un poste à Ouagadougou, la mission continue vers le Sud, franchit la rivière Kassirmi, affluent de la Volta, et s'engage dans le Gourounsi. Là, deux compétiteurs se disputent le pouvoir ; l'un Babato pactisant avec Samory; l'autre Hamariah, sympathique aux Français. Le lieutenant appuie la cause cl'Hamariah, le fait proclamer roi à Sati (19 seplembre) et échange avec lui une convention qui place le Gourounsi sous notre protection. Mais Hamariah est inquiet, car Saranké-Mory, fils de Samory, opère dans le Sud du Gourounsi avec un millier de cavaliers. Babato aura vraisemblablement recours à son aide après le départ des Français. Payant d'audace, Voulet-s'enfonce dans le Sud et

(15) Désignation locale du Sultan.


.somme Samory d'évacuer le Gourounsi. L'almany intimidé rappelle à lui ses bandes et Saranké-Mory se retire en direction de Boussa (16), entraînant avec lui Babato et ses partisans.

Voulet rentre alors à Ouagadougou ; puis traversant le Kipirsi, le Boussouma, le Yatenga, revient sur Ouahigouya (1er novembre) pour se réapprovisionner. Là le docteur Henric, qui lui a amené des renforts, lui apprend qu'à l'instigation des marabouts de Lanfiéra, les Samo (ou Samoro) se sont révoltés contre leur chef Ouidi-Diabo, qui est assiégé à Bouron avec un convoi de munitions destiné à la mission.

Le lieutenant attaque les Samo à Gassan et à Ouellé et leur inflige de sanglantes défaites. Dans ces combats la mission a 6 hommes tués et 60 blessés, dont deux sousofficiers européens. Le sergent-major Lourv, quoique grièvement blessé à l'assaut du tata d'Ouellé (12 novembre 1896), n'en reste pas moins à la tête de sa section.

Le marabout de Lanfiéra est exécuté et Ouidi-Diabo réinstallé à Barani.

Dans l'intervalle Voulet avait reçu l'ordre d'occuper définitivement Ouagadougou ; il y retourne et atteint cette ville le 23 décembre. Bokary tient encore la campagne et réussit à fomenter une insurrection contre nous. Du 27 décembre 1896 au 11 janvier 1897, la colonne le harcèle sans cesse, parcourant tout le Sud du Mossi de Koupéla à Kounda. Peu à peu les diverses provinces du Mossi se soumettent : Bokary est déchu de ses droits et son frère Kouba est couronné solennellement à Ouagadougou le 20 janvier 1897.

Le lieutenant Voulet est alors avisé qu'une expédition anglaisé s'est avancée de Coumassie sur Tenkodogo (ou Tingourkou), village Mossi sur la, frontière du Gourma. Il notifie par lettre au capitaine Donald Stewart, chef de la

(16) Dans la Gold-Coast actuelle.


mission, la prise de possession du Mossi et du Gourounsi par la France et se dirige à sa rencontre par Koupéla à marches forcées (180 kilomètres en 7 jours).

Le 7 février 1897 les représentants des deux nations ont une entrevue à Tenkodogo et, après quelques pourparlers le capitaine Stewart, s'inclinant devant le fait accompli,.

recule sur Gambaga, capitale du Mampoursi.

Le canton de Tenkodogo reste en dehors de l'action commune de la France et de l'Angleterre. Quelques jours après, le pays reconnaît notre souveraineté.

Averti qu'une troupe d'Européens rayonne dans le Gourma et pensant que c'est une mission allemande du Togo, Voulet marche au devant d'elle ; mais c'est le capitaine Baud, qui se rend au Gourma, venant du Dahomey pour annexer le pays. Il le rencontre le 14 février 1897 à Tigla. Unissant leurs efforts, ils assaillent Bilanga, le seul village de la contrée qui résiste encore, et s'en emparent. Le Soudan est désormais réuni au Dahomey. Le 24 février 1897, Voulet se remet en marche vers Ouagadougou, où il trouve la colonne du commandant Destenave.

Laissant le lieutenant Chanoine et ses spahis au commandant Destenave, Voulet regagne Bandiagara où il arrive en avril avec le reste de ses hommes. Durant cette campagne de huit mois il avait eu 113 hommes hors de combat. Une portion considérable de la boucle du Niger était tout au moins préparée en vue de l'occupation définitive et les progrès vers le Nord des Allemands et des Anglais pouvaient sembler arrêtés..

§ 31. — Mission Destenave dans l'Est du Macina (janvier 1897, avril 1898).

Le commandant Destenave reçoit la mission suivante : occupation et organisation du Yatenga et du Mossi ; prise de possession des pays de l'Est (Liptako, Dargol.) depuis Aribinda jusqu'à Say, avec le Macina pour base d'opérations.


Le c®$onne qu'il1 commande ne comprend que des auxiliaires eneadrés- par des gradés indigènes- et, parmï les dis officiers qu'iL a avec lui, un seul, le lieutenant Pelletier, appartient au- Régiment1 de Tirailleurs Soudanais. La •dtesçrip'tÈon détàtHé'e de ses opérations ne rentre donc pas -dans le cadre du présent opuscule.

De janvier 1897 à avril 1898-, le commandant Destena-ve remplit le programme qui lui a été fixé. Tout le- pays compris dans la boucle du Niger nous appartient ; l'Est du Macina, qui vient d'être occupé par la colonne, est pacifié -et son organisation est à peu près complète ; deux routes ont été ouvertes, l'une allant de Saraféré sur le Niger jusqu'à la. frontière du' Dahomey et de la Gold-Coasl., l'autre de Mopti à Say.

§ 32. - Création de la région Niger-Volta. (février 1897, avril 1898).

Le colonel de Trentinian, prévoyant qu'il sera impossible -d'enrayer partout l'agitation qui règne au Yatenga, au Mossi, au Gourounsi et chez les Samo (ou Samoro), décide "dès la fin de 1896 la création d'une nouvelle région, •comprenant le cercle de Ségou, les pays Samo, Bobo et le Gourounsi (17). Cette région portera le nom de Niger-Voîta "et sera dirigée par le commandant Valet. A la tête d'une ,,colonne, cet officier soumettra les Samo, occupera la boucle de la Volta Noire et installera sur cette rivière un service de 'pirogues pour le ravitaillement du pays Gourounsi., Avant -de s'engager dans ce pays, il est urgent de savoir quelles ;sont à notre égard les dispositions de Babemba.

Depuis le départ du commandant Quiquandon, le fama .sub.it la pression de Samory, sa fidélité semble de plus en plus douteuse.. La capitale, Sikasso, est maintenant entourée

f17) Soit une notable portion de la colonie actuelle de la HauteVolta.


de murailles de cinq mètres d'épaisseur. Dès lors il ne nous craint plus et laisse ses troupes piller des villages sousnotre dépendance. Le capitaine Braulot, du Régiment.

Soudanais, est chargé de se rendre à Sikasso, pour y succéder au commandant Quiquandon en qualité de résident.

et faire de justes remontrances à Babemba.

Inquiet des préparatifs faits à Ségou, Babemba présented'humbles excuses au capitaine et proteste de son dévouement à nôtre cause.

§ 33. — Soumission des Samo. Colonne contre les Bobo.

La colonne qui se forme à Ségou est composée de .la.

manière suivante ■.

1 Groupe de 16 spahis (lieutenant Courtois); 2 pièces de 80 et une de 95 (lieutenant Dutheil de la Rochère); 8e Cie de tirailleurs soudanais (capitaine Boulaud, lieut. Favart); 9e Cio de tirailleurs soudanais (capitaine Mayer, lieut. Pascal); 3 Pelotons de tirailleurs : 1re Compagnie lieutenant Spies; 46 Compagnie : lieutenant Malot; Hors-cadres : lieutenant Bunas; 1 Compagnie de tirailleurs auxiliaires (lieutenant Maillaud):

Le 27 février 1897, le commandant Valet quitte Ségou et,.

après avoir passé le Bani à San, se porte, sur Lanfiéra, où il rallie le peloton Bunas et les spahis du lieutenant Courtois.

Il s'avance alors contre les Samo au Nord de la boucle de la Volta Noire et les bat successivement à Sono, Diédou, Yéguéré et Niancoré. Débarrassé des Samo, il s'établit à Sono et fait rayonner des reconnaissances aux environs.

Mais il tombe malade et rentre à Ségou, laissant le comman-

dement au capitaine Hugot (10 avril). Celui-ci multiplie les postes dans la région ; nos troupes sont assez bien accueillies par les populations.


Le capitaine Cazemajou (du Génie) parti avec le peloton Malot pour explorer la rive droite de la Volta Noire à l'intérieur de la boucle, arrive à Diébougou où il se croise avec le lieutenant Chanoine.

La campagne paraît terminée, quand le capitaine Hugot est avisé qu'une troupe de Bobo, pillards endurcis qui ne veulent pas de la proximité des Blancs, a razzié un village qui a donné l'hospitalité à la colonne.

Le capitaine accourt sur Mansara où ils sont rassemblés et le 23 avril 1897 après un court bombardement ordonne l'assaut du tata. L'ennemi bien abrité inflige aux tirailleurs des pertes cruelles et les repousse par deux fois. Le capitaine fait cesser le feu, fait reformer les sections et fait recommencer la canonnade ; les tirailleurs s'élancent de nouveau, pénètrent dans l'enceinte et après une lutte des plus vives restent maîtres du village. La colonne compte quatre tirailleurs dont un sergent tués, et 65 blessés parmi lesquels les lieutenants Malot et Favart, les adjudants Marchai et Corvaissier.

Les Bobo déclarent accepter notre souveraineté. Dans l'intervalle le commandant Caudrelier, placé à la tête de la région Niger-Volta, rejoint la colonne avec le capitaine Braulot qu'il a fait venir de Sikasso.La route étant libre, il pousse jusqu'à Ouahabou, fonde un Doste à Boromo et essaye de créer une petite flottille sur la Volta-Noire. Il constitue alors, conformément aux instructions du lieutenant-gouverneur, deux colonnes secondaires : — l'une sous le capitaine Hugot, nommé résident du Gourounsi, pour relever le capitaine Scal, dont la présence est nécessaire au Mossi ; — l'autre sous le capitaine Braulot, pour installer des postes au Lobi, observer les mouvements de Samory et si possible se relier avec une mission qui, venue de la Côte d'Ivoire, s'achemine sur Boudoukou et Bouna. Le commandant Caudrelier maintient à Boromo la 8e compagnie (capitaine Bouland) et se replie avec le reste de ses troupes sur


-ûto&Pkoye et Sono, où il compte passer riiiTermg^ ; les spahis rejoignent» Kati.

§ 34. — Occupation du Gourounsi (mars-juwtet 11897).

Le capitaine Hugot emmène avec lui le lieutenant. MilLot qui lui servira d'adjoint, un peloton (2* compagnie), plus la -compagnie d'auxiliaires Maillaud. Dans le courant de mai il se met en route par Diéfessi sur Léo, où le 22 il rencontre le capitaine Scal, avec lequel il règle certaines affaires ,encore pendantes dans la province. Puis tournant au Sud,, il gagne Founsi par Dossouma et Ouasombalé (31 mai 1897).

Là il apprend que Babato, malgré la convention de Yarba (i8), a envahi de nouveau le Gourounsi avec les Zabermabés ; ceux-ci ont massacré les habitants de BéléléAsseydou, pillé et brûlé le village et sont pour l'instant à Doucé.

Le capitaine Hugot écrit immédiatement au résident de Coumassie pour se plaindre de l'inexécution de la clause, du traité de Yarba relative à Babato et lui demande une entrevue. En même temps il se dirige sur Sagnecé, qu'il atteint le 6 juin après une étape des plus pénibles.

Se sachant à proximité des Zabermabés, il se couvre du côté de Doucé par une patrouille de 12 hommes (lieutenant Maillaud). Celle-ci s'engage dans un long défilé qui conduit à Doucé et signale les éclaireurs ennemis. Voyant le faible .effectif de notre détachement, une soixantaine de cavaliers se lancent à l'attaque ; le lieutenant Maillaud augmente leur confiance en simulant une retraite précipitée, puis il se retourne et les accueille par des feux de salve qui provoquent leur fuite.

'Peu après arrive le capitaine Hugot ; il fractionne sa

(18) Convention par laquelle le capitaine Stewart s'engage à maintenir Babato, qui a obtenu asile et sauvegarde de l'Angleterre, à deux étapes de la frontière provisoire de la Gold-Coast et du Soudan et assume la responsabilité de toute agression future de Babato sur nos terres.


troupe en trois groupes aux ordres des lieutenants Millot, Mailla.ud et du sergent Sancenot et se porte sur Doucé qu'il enlève de vive force, grâce au lieutenant Maillaud qui déborde par la droite (15 juin 1897, jour de la Pentecôte).

Les Zabermabès tentent vainement un retour offensif ; décimés par la fusillade, ils se retirent en désordre vers le Sud après avoir perdu 4 chefs et laissent des approvisionnements considérables dont profite la colonne.

Après un jour de repos, le capitaine Hugot s'avance jusqu'à Oua, où il est bien reçu par le chef. de village. Il renouvelle le pacte signé en 1895 par le capitaine Baud et établit un poste à Boussa. Tout le Sud du Gourounsi est à nous (19)..

Le capitaine se rend alors à Bolé, où il rencontre le capitaine anglais Montgomery-Gampbell; celui-ci permet d'incarcérer Babato, en attendant qu'on le juge à Coumassie.

Brisé par les fatigues, le capitaine Hugot tombe malade et succombe le 27 juillet 1897, abandonnant le commandement du Gourounsi au lieutenant Millot. Celui-ci livre encore combat le 13 janvier 1898 à des rebelles pillards qui se sont rassemblés à Kassi, et les disperse ; au cours de la lutte, le sergent Sancenot est blessé grièvement d'une flèche empoisonnée.

§ 35. — Tentatives de pénétration au Lobi et massacre de la mission Braulot (juin-août 1897).

Pendant ce temps, le capitaine Braulot, quittant Boromo avec le lieutenant Bunas et 97 hommes, tous du Régiment de Tirailleurs Soudanais, s'est enfoncé dans le Sud jusqu'à Diébougou, où, dès le 26 mai 1897, il a établi un poste. Il lance alors des reconnaissances légères du côté du Lobi pour observer l'attitude des Sofas. A cette date Samory est

{19) Toute cette région, située au Sud du 11° degré de latitude, devait quelques années plus tard être attribuée à l'Angleterre et rattachée à la Goid-Coast.


-à Sounankoro, sur la rive droite du Comoé ; Saranké-Mory et Bilali sont à Bouna.

Au début .de juin, l'almany s'empare de Kong qu'il ravage, franchit le Comoé et pousse jusqu'à Noumoukiédougou, où il est rejoint par Saranké-Mory et Bilali, qui viennent de Bouna par Lokhosso qu'ils ont razzié au passage.

Il continue ensuite jusqu'à Sidardougou, couvert à l'Ouest par Karamoko, à l'Est par Saranké-Mory et Bilali et menace Bobo-Dioulasso, dont les habitants effrayés demandent le secours du commandant Caudrelier.

Le commandant Caudrelier, qui a pour instruction d'éviter tout conflit, ne bouge pas et Samory saccage BoboDioulasso. A cette nouvelle, le capitaine Braulot renvoie sur Sono le lieutenant Bunas avec 50 hommes pour prendre les ordres du commandant Caudrelier ; en outre, il doit châtier les Bobo-Oulés, tribu hostile qui a coupé les communications entre Sono et Boromo. Assailli par les Bobo-Oulés à la sortie de Bougouri, le lieutenant Bunas réussit à les maîtriser après un court engagement où 2 tirailleurs sont tués et 9 blessés.

Cependant Samory, inquiet de l'approche des Anglais sur sa droite, adresse des émissaires au commandant Caudrelier, lui proposant d'abandonner le Sud du Lobi et de se cantonner, désormais, sur la rive droite du Comoé.

Le Ministre des colonies, consulté, télégraphie d'accepter ces ouvertures, mais avec réserve en raison de la duplicité habituelle de l'almany.

Le commandant Caudrelier enjoint alors au capitaine Boulard d'aller avec sa compagnie (8e) créer un poste à Lokhosso et au capitaine Braulot de descendre vers le Sud jusqu'à Bouna, que les Sofas consentent à nous restituer.

De là Braulot cherchera à entrer en relations avec la mission Bonhoure détachée de la Côte d'Ivoire.

Prévenu de ce projet, Samory dépêche au commandant Caudrelier un courrier pour lui dire qu'il approuve l'installation à Bouna du capitaine Braulot. La compagnie Boulard


{8e) gagne donc Diébougou puis, accompagnée du capitaine Braulot et de ses tirailleurs, gagne Lokhosso où elle parvient le 8 août 1897.

Poursuivant sa route vers le Sud avec sa petite troupe {lieutenant Bunas, sergent Miskiewitch, 97 tirailleurs), le -capitaine Braulot débouche le 16 août en vue de Bouna, qu'à son grand étonnement il trouve occupé par le chef sofa Suleyman ; pendant deux jours il parlemente avec lui et, sur son refus formel d'évacuer la place, il retourne au Lobi dans l'intention de se ravitailler.

Près de Boguié, le capitaine croise une bande de 7 à 8.000 Sofas commandés par Saranké-Mory et demande aussitôt à ce dernier des explications sur le malentendu de Bouna. Saranké-Mory affirme qu'il apporte lui-même à Suleyman l'ordre d'évacuer la place et convie les Français à rentrer avec lui à Bouna. Les deux troupes reviennent côte à côte et le 20 août arrivent de nouveau près de la yille.

Soudain à un signal de trompe, les Sofas se jettent sur les gradés et les tuent, cernent les tirailleurs surpris et les désarment. Cinquante de ceux-ci pourtant se dégagent et réussissent après avoir erré cinq ou six jours à gagner Lokhosso. Tous les autres sont massacrés sauf trois que les .Sofas gardent comme instructeurs. Le capitaine Braulot et le lieutenant Bunas ne reparaissent plus ; plus de 60 fusils, 2.000 cartouches et 100 caisses de vivres tombent entre les .mains des Sofas.

Dès le 24 août le capitaine Boulard, n'ayant aucune nouvelle de la colonne Bra.ulot, a lancé du côté de Bouna le lieutenant Favart et 40 hommes qui rencontrent peu après les débris de la colonne.

$36. — Reprise des opérations contre Samory. Colonne Caudrelier (novembre 1897, janvier 1898).

A la suite du guet-apens de Bouna (20 août 1807) et de


l'échec de la mission Bonhoure (20), le Ministre des colonies M. Lebon avait décidé de recommencer la lutte contre: Samory (voir plus loin § 39).

Durant l'hivernage, le commandant Caudrelier était resté à Sono, se bornant à des petites reconnaissances dans la.

vallée de la Haute-Volta. Il avait eu ainsi plusieurs engagements avec les rebelles, entre autre le 27 août 1897 à Kouorola, où s'était distingué le fourrier Hornac (gecompagnie)

Le 25 septembre avait eu lieu la prise de Bobo-Dioulasso, où la colonne d'assaut était composée de la 8e compagnie (capitaine Bouland) et de la 9e compagnie (lieutenant Sagols), celle-ci en réserve, et où s'étaient distingués le lieutenant Sagols et l'adjudant Corvaissier.

Au reçu des ordres du lieutenant-gouverneur (novembre.

1897) le commandant Caudrelier rassemble à la hâte les-

forces qu'il a sous la main et s'avance aussitôt vers le Sud, en vue de couper Samory de ses communications avec la Gold-Coast et d'enrayer les progrès des Anglais.

La colonne du commandant Caudrelier avait la composition suivante :

3 Compagnies du régiment de tirailleurs soudanais, savoir : 2e Cie : lieutenants Demars et Méchet; 8e - : lieutenant Cottes, sous-lieutenant Braive; 9° - : capitaine Marchaisse, lieutenants Jacobi et Guignard~ 2 pièces de 80 : lieutenant Dutheil de la Rochère.

Arrivé à Lokhosso, le commandant laisse au lieutenant Dutheil de la Rochère, de l'artillerie de marine, le soin d'affermir notre autorité sur le Sud du pays Lobi, jusqu'aux: environs de Bouna où les Anglais se trouvent depuis peu

(20) M. Bonhoure forcé de rentrer pour prendre l'intérim du Gouvernement à Grand-Bassam, c'est son compagnon, M. Nébout,.

qui prend la direction de la colonne.

i


-de temps. Il se porte avec le gros de la colonne sur le haut .comoé, où il fonde les postes de Kobio et de Kémoko-DianiTikoro, qu'il place sous la garde de la 2e compagnie.

Averti à ce moment que des troubles ont éclaté sur la Haute-Volta Noire, le commandant retourne sur ses pas, •et le 17 janvier 1898 s'empare du village de Limpoli. Le lendemain, il disperse les insurgés à Bagassi, après un -sanglant combat où le lieutenant Gouraud (de la guerre), son adjoint, le lieutenant Jacobi et le sergent-major Lorcery, de là 8" compagnie, sont blessés par des flèches empoisonnées.

Tranquille de ce côté, mais inquiet des menées anglaises au Gourounsi, le commandant Caudrelier pousse jusqu'à Boussa, où les Britanniques ont un poste, et s'installe à proximité le 11 février 1898 ; les troupes des deux nations campent dans le voisinage l'une de l'autre, attendant l'arrêt d'une commission mixte réunie à Paris pour départager les -zones d'influence.

Le commandant Caudrelier laisse au Gourounsi le capitaine Gouraud, avec mission d'élablir dans la. zone contestée le plus grand nombre de postes possible. Il gagne ensuite Léo, d'où il revient à Diébougou le 16 février. C'est alors qu'il apprend la situation critique du lieutenant Demars, qui depuis cinq jours est cerné à Kong par les Sofas.

§ 37. — Siège de Kong.

Sur le Comoé, le lieutenant Demars avait pour rôle de surveiller les mouvements de Samory et prévenir la marche .des Anglais vers l'Ouest. Avisé que les Sofas, après avoir détruit Kong, se retirent dans le Sud et que les Anglais se préparent à s'emparer de cette ville, il se dirige hardiment sur Kong le 21 janvier 1898 avec deux sous-officiers et 116 tirailleurs, afin de l'occuper. Il y arrive le 25, après une vive, escarmouche avec les bandes de Moussa et de Karamoko. Pensant avec raison que Talmany cherchera à


reconquérir Kong, pour conserver le contact des Anglais ses pourvoyeurs, le lieutenant Demars se retranche dans un petit réduit au Sud-Est de la ville et appelle à lui le lieutenant Méchet resté sur le Comoé ; celui-ci arrive le 12 février avec 2 sous-officiers et 19 tirailleurs.

Dès la veille un petit groupe de Sofas s'était approché du poste. L'ennemi augmentant chaque jour et commençant à encercler le poste, Demars envoie un courrier à Diébougou pour demander secours au commandant Caudrelier. Le 14 l'investissement est complet ; 3.000 Sofas, sous les ordres de Saranké-Mory et de Moctar, entourent la ville.

Une diversion est nécessaire pour permettre l'accès à un nouveau renfort de 2 sous-officiers et 29 tirailleurs. Le lieutenant Demars dispose alors d'un officier, le lieutenant Méchet, 6 sous-officiers : adjudants Corvaissier (8e) et Roucher (2e), sergent-major Foucher, sergents CorbisierT Wenzel et Lardin (2e), avec 164 tirailleurs.

Du 14 au 27 février l'ennemi tente en vain plusieurs assauts et subit des pertes sensibles. Bientôt l'eau manque au poste ; pour s'en procurer il faut aller à un petit ruisseau à 800 mètres et chaque fois c'est un nouveau combat. Dès le 16, cha.cun est rationné et ne touche que 25 centilitres par jour. Les Sofas répandent de fausses nouvelles pour essayer de démoraliser les tirailleurs, et promettent des récompenses à ceux qui trahiront. Les souffrances et les privations augmentent chaque jour ; le 23 on mange les animaux de selle et on renvoie une cinquantaine de femmes comme bouches inutiles. Pourtant la résistance touche à sa fin et les assiégés sont à bout de forces. Enfin, le 27 février, le commandant Caudrelier apparaît en vue de la ville, après une marche forcée remarquable.

En recevant le courrier du lieutenant Demars lui annonçant l'occupation de Kong et les dangers qu'il courait, le commandant Caudrelier avait réuni les contingents les plus rapprochés (8e et 9e compagnies), un détachement de la compagnie auxiliaire du Gourounsi (sergent Sancenot)..


deux pièces de 80, en tout 200 fusils, et s'était dirigé aussitôt sur Kong par Lokhosso et Kémoko-Dianirikoro. Arrêté sur la rive droite du Comoé par les Sofas, il les avait bousculés le 25 février à Nasian, le lendemain à Tasélémou et, les dispersant définitivement sous les murs de Kong, avait dégagé le lieutenant Demars et ses compagnons.

Comme le siège de Nafadié (21), soutenu en 1885 par les capitaines Louvel et Dargelos, le siège de Kong est un exemple de l'esprit de discipline des tirailleurs soudanais.

Pendant les 13 jours de siège, ils ont eu 5 hommes tués; 24 blessés dont le sergent-major Foucher grièvement et 26 auxiliaires morts de soif.

L'établissement des postes sur le Comoé et à Kong supprime tout rapport entre les Anglais et les Sofas, et interdit à l'influence britannique l'accès du pays à l'Ouest du Comoé.

§ 38. - Exploration du lieutenant Blondiaux sur le HautCavally (janvier 1897, février 1898) (22).

Les territoires compris entre le Soudan proprement diL, la République de Libéria et la Côte d'Ivoire, étant à l'abri des convoitises étrangères, semblaient par leur position fatalement destinés à devenir français. Mais avant d'y engager une colonne et d'en prendre possession, il était nécessaire d'en faire la reconnaissance. Dans ce but, au mois d'octobre 1896, sur la demande du lieutenant-gouverneur du Soudan et après avis du gouverneur général M. Chaudié, le Ministre des colonies, M. Lebon, chargea le lieutenant Blondiaux de parcourir les hautes vallées du Càvally et de la Sassandra, avec mission de rechercher un

(21) On en trouvera le récit dans 1' « Histoire militaire de l'A. O.F. » (Paris, Imprimerie Nationale 1931), pages 310 et suivantes.

(22) Voir croquis N° 5.


tracé pour la frontière franco-libérienne et d'examiner la possibilité d'une communication entre le Soudan méridional et la Côte d'Ivoire. Pendant ce temps, MM. Esseyric et Torové, partant de la Côte d'Ivoire, taisaient route vers l'Ouest pour relever le cours inférieur du Bandama rouge et du Cavally.

Dans la, région Sud du Soudan (Haute Guinée actuelle), notre poste le plus avancé était Beyla, d'où les patrouilles avaient poussé dans l'Est jusqu'à Koro, village déjà visité en 1893 par la colonne Combes.

Le lieutenant Blondiaux arrive à Beyla en décembre 1896 et organise sa mission. Accompagné de l'adjudant Not (15e compagnie du Régiment Soudanais), du sergent indigène Kantara Kamara (interprète), de 10 tirailleurs, 10 auxiliaires et 50 porteurs, il se met en route le 6 février 1897.

Se dirigeant vers le pays Manon, pour vérifier le cours du Férédougou-ba, il constate que les rivières venant du Nord (Sien-ba, Tien-ba, etc.) qui se réunissent à Dabala au Férédougou-ba, donnent naissance au fleuve Sassandra et non comme on le croyait précédemment, au Cavally. De Dabala, il se rend à Kani, dans le Nigbi, puis à Sakala (ou Sarhala) dans le Ouorodougou. Trouvant Sakala entre les mains des Sofas, le lieutenant évite le village, entre le 7 mars à Kouassidougou, se heurte près de Tenendiéri à une bande de 500 Sofas environ et apprend que toute la ligne du Bandama est fortement occupée par les troupes de l'almany.

La jonction du Soudan à la Côte d'Ivoire est réalisée par l'Ouest géographiquement.

Jugeant inutile et dangereux d'aller plus loin, Blondiaux revient sur ses pas par Boron, Bafélétou, Guibourosso et Sokoro, suivi par une cinquantaine de cavaliers sofas qui se contentent de l'observer et de détruire les villages où on lui offre l'hospitalité.

Après s'être heurté successivement aux Lo, aux Ouobé et aux Nguéré, peuplades réputées anthropophages qui lui refusent le passage sur leur territoire, Blondiaux voyant.


l'hivernage s'approcher, rentre à Touba le 9 juin 1897, après avoir reconnu la ligne de partage des eaux des bassins de la rivière Diani ou SaintcPaul et du Férédougou-ba. Il séjourne à Touba jusqu'à la fin de l'hivernage. Dans l'intervalle, il envoie l'adjudant Not à Beyla pour obtenir un renfort de 30 hommes, commence les fondations d'un poste et amorce une route vers Beyla. Il reconnaît, en outre, les chemins de l'Est et du Nord et se met en relations avec Odienné, où le capitaine Ristori vient de créer un poste.

Le 15 décembre Blondiaux poursuit son voyage vers le Sud, dans l'intention de fixer les limites respectives des bassins du Cavally et de la Sassandra et de se rabattre ensuite vers l'Ouest pour suivre le cours du Cavally jusqu'à son embouchure. De Touba, il marche sur Man, à la limite de la grande forêt, où il est accueilli avec hostilité (26 décembre). Obligé de se défendre contre les Dioulas, qui appellent les Ouobé à leur aide, il résiste plusieurs jours aux assauts de plus de 2.000 guerriers et, comprenant l'impossibilité de s'enfoncer plus avant vers le Sud, se décide tt ba ttre en retraite, serré de près par l'ennemi. Après deux heures de lutte, Blondiaux réussit à se dégager et rétrograde sur Toungaradougou, où il -aboutit le 5 janvier 1898. Ce combat lui avait coûté 4 tués et 16 blessés. Il se disposait à suivre vers le Sud le cours du Djougou ou Cavally, après avoir évacué ses blessés sur Beyla, lorsqu'il est rappelé au Soudan par le lieutenant-gouverneur.

Revenu à Beyla le 25 février 1898, le lieutenant Blondiaux se dirige le 25 février sur Bamako avec ses hommes, pour participer à la colonne de Sikasso.

Bien qu'inachevée, l'exploration du lieutenant Blondiaux avait donné des résultats géographiques importants ; en outre, l'attitude des habitants avait montré que la conquête de cette région serait longue et laborieuse.


B. — GOUVERNEMENT INTERIMAIRE DU LIEUTENANT-COLONEL AUDEOUD (1897-1898)

5 39. — Programme des opérations.

A la fin de mai 1897, le colonel de Trenlinian, dont la santé était ébranlée, ayant demandé son rappel momentané en France, fut remplacé à la tête des affaires du Soudan par le lieutenant-colonel Lamary, commandant le Régiment Soudanais.

A la fin de l'hivernage, le colonel de Trentinian n'étant pas encore remis de ses fatigues, le Ministre des colonies désigna le lieutenant-colonel Audéoud pour exercer l'intérim du gouvernement pendant l'année 1897-1898, et en octobre s'embarquait avec lui pour le Sénégal. Arrivé à Saint-Louis, il discuta avec les différents gouverneurs des colonies de l'Afrique Occidentale, accourus pour le saluer, la conduite à suivre contre Samory ; la conclusion fut qu'il fallait se débarrasser à jamais de l'almany. En conséquence le lieutenant-colonel Audéoud recevait l'ordre d'encercler le chef noir dans un cercle de postes de plus en plus restreint, de façon à préparer les voies à l'expédition définitive qui serait dirigée contre lui l'année suivante pour le capturer.

Le lieutenant-colonel donne des instructions en ce sens aux commandants de la région Niger-Volta et de la région Sud ; mais peu après, la duplicité de Babemba allait le forcer à intervenir et à s'emparer de Sikasso. C'est alors que, se tournant contre Samory, le gouverneur intérimaire allait lancer une colonne pour relier les postes du Comoé à ceux de la région Sud et refouler les Sofas vers le SudOuest.

La campagne 1897-1898 peut donc se diviser en deux parties : 1° Les opérations du Kénédougou, qui amènent la prise de Sikasso et la mort de Babemba ;


2° La. lutte contre Samory dans la vallée de la Sassandra.

lutte qui se termine par la dissolution de l'armée sofa el la capture de l'almany..

§ 40. — Prise de Sikasso.

A peine le capitaine Braulot s'était éloigné de Sikasso que Babemba change d'attitude avec nous ; il laisse ses guerriers razzier les villages du cercle de Bougouni ou attaquer les officiers en tournée topographique, et adresse des lettres insolentes au commandant de Ségou et au lieutenantgouverneur.

Celui-ci voulant, comme ses prédécesseurs, maintenir autant que possible les bonnes relations avec le fama, charge le capitaine Morisson d'aller au Kénédougou, pour exiger de Babemba une explication de sa conduite, délimiter ses états et le menacer de représailles s'il continue ses agressions. En outre, le capitaine devra pousser Babemba à garder la neutralité pendant le mouvement que nous projetons contre Samory.

Escorté de 30 tirailleurs et de 2 interprètes, le capitaine Morisson quitte Bougouni le 18 janvier 1898 et 9 jours après atteint Sikasso.

Les entrevues avec Babemba sont d'abord assez cordiales; mais brusquement le fama, influencé par son entourage qui lui montre notre faiblesse et nos hésitations à l'égard de Samory, somme le capitaine de disparaître le jour même sous peine de mort.

Le capitaine Morisson se retire ; assailli le 2 février par 1.200 guerriers qui le dépouillent de ses bagages, de ses armes et de ses munitions, il réussit à échapper el grâce à une marche rapide de 90 kilomètres évite d'être massacré.

Désireux de venger notre insulte, le lieutenant-gouverneur réclame du gouvernement l'autorisation de marcher contre Babemba.

Aidé du commandant Pineau, son chef d'Elal-Major, le


lieutenant-colonel Audéoud déploie une activité remarquable pour former sa colonne. Faute d'officiers et de troupes disponibles, il emprunte des éléments un peu partout, rappelle les rapatriables en route pour la France, dégarnit les cercles, vide les arsenaux, recrute des auxiliaires : toutes les ressources du Soudan sont concentrées en vue de l'expédition projetée.

La colonne a la composition suivante :

1 Escadron de spahis (capitaine Imbert); 2 pièces de 80 de montagne, ) 2 pièces de 95, V (capitaine Pilliwuyt); 4 pièces de 80, J 2 Compagnies du régiment de tirailleurs soudanais, savoir : 6° Cie : capitaine Marteliy, lieutenant Coquet; 15e — : capitaine. Coiffé, lieut. Boeck, sous-lieutenant Mangin; 4 Compagnies d'auxiliaires, savoir : .5e — : capitaine Morisson, lieutenants Loury et Blondiaux; 6e - : capitaine de Montguers, lieut. Houet et Frochen; 7e - : capitaine Truptil, lieutenants Gérard et Mejanel; 8e - : capitaine Benoit, lieutenants Bordeaux et Gallet.

En tout 37 officiers, 58 sous-officiers ou soldats européens, 1.260 indigènes et 250 conducteurs.

Le lieutenant-colonel emporte en outre 300.000 cartouches, un mois de vivres pour les Européens et 15 jours pour les indigènes et les animaux répartis entre 1,200 porteurs et 100 voitures.

Le 30 mars 1898) le lieutenant-colonel Audéoud prend, à Kati, le commandement du gros de la colonne, qui achève de se grouper sur les bords du Bagoé ; pour détourner l'attention de l'ennemi, des démonstrations sont faites en amont et aval dans le Minianka, vers Bougouni et Tombougou.

Le 9 avril, la colonne, réunie au complet à Séguéné,


traverse le gué de Ouo et le lendemain se dirige sur Kinian et Sikasso.

En apprenant l'approche des Français, Babemba masse son armée vers Komankou pour leur barrer le passage, mais averti que Kinian a été surpris et enlevé, il retourne à Sikasso pour défendre sa capitale.

Les villages de Sansanna et de Doumana se soumettent et le 15 avril la colonne arrive sur les bords du Baninko, à 3 kilomètres de Sikasso. Pendant que les tirailleurs rétablissent le pont qui a été détruit, une bande ennemie surgit et tue 5 ou 6 hommes ; quelques salves les mettent en fuite.

Couverte par l'infanterie, la batterie légère se range sur le plateau qui domine la ville à un kilomètre au Nord. Le bivouac y est installé et le lieutenant-colonel Audéoud procède à la reconnaissance de Sikasso. Peuplée de 30.000 habitants et gardée par 12.000 guerriers dont 2.000 cavaliers, Sikasso est une véritable forteresse, fermée par deux murs d'enceinte concentriques de 5 mètres de haut sur 7 d'épaisseur à la base. A l'intérieur se dresse sur un mamelon abrupt un fortin appelé « le donjon », haut de 30 mètres. Enfin, un réduit central, constitué par un double mur de 6 mètres, renferme le tata de Babemba, réputé imprenable.

En présence de pareilles défenses et de forces aussi considérables, le lieutenant-colonel Audéoud se décide à faire le siège de la ville avant de l'assaillir.

Le 17 avril le capitaine Pilliwuyt, protégé par la compagnie Martelly, déploie sa batterie de siège (2 pièces de 95 et 2 pièces de 80) en éperon un peu en avant du bivouac et commence le bombardement. L'adversaire prononce une contre-attaque très bien menée, mais il est repoussé par les tirailleurs après une lutte sérieuse où le lieutenant Coquet est légèrement blessé.

Le lendemain, reprise du bombardement et nouvelle tentative de l'ennemi, qui échoue contre la résistance du capitaine Coiffé et du lieutenant Coquet ; à midi la face Est


du donjon s'écroule. Après un. examen attentif du terrain, le lieutenant-colonel se décide à entamer les travaux de sape par le Nord, pour faciliter l'accès des brèches qui seront créées dans ce secteur.

Ces travaux durent du 18 au 30 avril et donnent lieu à quatorze combats préliminaires de jour et de nuit, soit pour refouler les sorties de l'assiégé, soit pour conquérir les positions nécessaires en vue de la bataille finale.

Le 19 les compagnies Morisson et Coiffé, soutenues par le tir des canons, débroussaillent les abords de la ville, pendant que les spahis enveloppent un fort parti adverse et lui tuent une centaine d'hommes.

Le 20, le lieutenant-colonel prescrit la construction d'une redoute sur une petite éminence, nommée « le tertre rouge », à 400 mètres d'une des portes de la ville. L'escadron sonde les alentours et disperse les cavaliers ennemis,' nermellant ainsi à la compagnie Coiffé de bntir l'ouvrage malgré le feu incessant de la place ; pendant ce temps, la compagnie Morisson maintient par trois fois l'adversaire à distance. Le 23, l'escadron et la compagnie Truptil se dirigent du côté de l'Ouest: à 5 kilomètres de la route de Bougouni, ils se heurtent à un corps de 80 cavaliers et 1.500 fantassins qu'ils chargent et bousculent.

Dans les derniers jours d'avril, des convois de ravitaillement circulent constamment entre le Bagoé et le camp ; de plus les tirailleurs s'emparent d'un point d'eau à 500 mètres au nord du bivouac.

Le 25, pendant que le lieutenant Guillermin emmène les blessés sur le Bagoé, le lieutenant-colonel donne l'ordre de s'emparer du petit village de Sankourani, à 750 mètres au Sud-Est du Tertre rouge et qui, occupé par de nombreux guerriers, pourrait inquiéter les derrières des colonnes pendant leurs mouvements sur Sikasso. Les 6e et 8e compagnies d'auxiliaires surprennent le village au petit jour ; mais les gens de Sikasso accourent en foule et exécutent un feu meurtrier ; la section Bordeaux qui est à la droite est


fort éprouvée ; néanmoins le village est. détruit et le capitaine de Montguers ordonne la retraite. L'ennemi devient pressant ; le lieutenant Bordeaux, secondé activement par le sergent Hertz, couvre les blessés pendant que le capitaine Benoit et le lieutenant Gallet se retirent par échelons en -contenant l'adversaire. Le lieutenant Gallet tombe presque aussitôt, mortellement frappé d'une balle au front. A 10 heures le détachement rentre au camp avec 8 hommes tués et 26 blessés.

Du 26 au 29, Babemba reste immobile. Le 29 avril, le lieutenant-colonel Audéoud, jugeant les trois brèches ouvertes par l'artillerie suffisamment larges, annonce l'assaut général pour le surlendemain. Trois colonnes seront formées d'une compagnie chacune : la 5e compagnie (capitaine Morisson) abordera la brèche n° 1 ; la 76 compagnie {capitaine Truptil) la brèche n° 2 ; la 15e compagnie (capitaine Coiffé) la. brèche n° 3. Une fois dans l'enceinte, ces trois compagnies se déploieront prêtes à parer aux retours offensifs et, gagnant du terrain en avant, auront pour -objectif le donjon qu'elles attaqueront de concert. Un peloton de la 86 compagnie (lieutenant Guillermin remplaçant le lieutenant Gallet) se tiendra à Sankourani et la compagnie Martelly (6e réguliers) à la redoute du Tertre rouge ; tous deux appuieront au besoin la colonne de gauche. La compagnie de Montguers - {6" auxiliaires), l'autre peloton de la 8° compagnie (capitaine Benoit) et deux pièces de 80 de montagne seront en réserve pour assurer la garde du camp ; les deux autres pièces de 80 de montagne se joindront à la batterie de siège ; enfin les spahis surveilleront les flancs et les derrières et se porteront aux contre-attaques.

Le 30 avril 1898 au soir, l'artillerie entame une violente canonnade contre les brèches pour éviter qu'elles ne soient réparées par l'ennemi. Le lendemain, un peu avant l'aube, les compagnies de tête s'approchent à 150 mètres des "emparts et au signal du lieutenant-colonel s'avancent avec entrain.


Au centre, la compagnie Truptil s'élance avec une telleimpétuosité que les défenseurs s'enfuient presque sanscombattre et les tirailleurs arrivent au donjon, où le lieutenant Méjanel plante le premier drapeau. Derrière apparaît.

la compagnie Morisson qui a réussi à garnir la brèche n° 1.

A gauche la compagnie Coiffé éprouve une vive résistancequ'elle réussit à briser ; la section Mangin, serrée de flanc et de front par des forces supérieures qu'elle a voulu tourner, réussit à se dégager et la compagnie atteint à son tour le fortin. Dans l'intervalle le peloton Guillermin a rejeté une bande ennemie au Sud de Sankourani, et la.

réserve, aidée par les spahis, a mis en déroute un groupe d'environ 2.000 hommes qui tentait de cerner le camp.

Maîlrcs du donjon, les tirailleurs conduits par le commandant Pineau se répandent dans la ville. Alors commence une guerre de rues meurtrière ; dans chaque quartier, les habitants luttent avec acharnement particulièrement autour de la maison de Eo-Taraoré, neveu du Fama et dans le tala de Babemba, d'où part une fusillade nourrie qui nous cause beaucoup de mal. Pour éteindre ce feu, le lieutenant Peltier (artillerie) amène ses deux pièces de 80 de montagne sur le donj on. Pendant ce temps, la compagnie Morisson et lepeloton TTéWeL traversant la portion Ouest de la ville, chassent les défenseurs de ce quartier au delà des, murs ; mais, ce sucres coûte la vie au lieutenant Loury et une blessuregrave au lieutenant Hauet.

Do leur côté, les compagnies Coiffé et Martellv pénètrent dnns le ^prieur Est, le peloton Girard envahit la maison de' Pô. Dans la plaine, les spahis talonnent sans cesse les cava¡;"T'S ennemis.

-H heures, le feu cesse, seul le Iain dr Babemba résisteencore, rléfpndu par les meilleurs soldats.

Apr0s un repos de 3 heures, pendant lequel on organise le rlnTli"n el nn approche les pièces de 80, l'action s'engage ;■ "i1' En une demi-heure, les obus de mélinite font r.. ',,,l,,, rinns le tala; franchissant le mur extérieur, le-


commandant Pineau se précipite avec tout son monde dans le tata, soutenu par les deux compagnies de réserve.

Le sergent indigène Moussa Sidibé et trois de ses hommes parviennent à entrer dans la demeure où Babemba, entouré -de sa garde, se défend désespérément et attirant sur leurs pas les autres tirailleurs, engagent une lutte corps à corps où le Fama et ses fidèles succombent courageusement. Dès lors le tata est entre nos mains. L'armée de Babemba aux trois quarts écrasée s'échappe vers le Sud.

En quinze jours la colonne a eu 2 officiers tués, 3 autres -et 5 sous-officiers blessés, 60 tirailleurs tués et 150 blessés.

La prise de Sikasso, glorieux fait d'armes où le Régiment de Tirailleurs Soudanais avait eu une part prépondérante, produit un grand effet dans la boucle du Niger ; les soumissions nous arrivent et dès le 3 mai le Kénédougou en entier est définitivement annexé au Soudan.

Le cercle de Sikasso est rattaché à la région Niger-Volta confiée au commandant Pineau.

§ 41. — Dernières opérations contre Samory (23).

La lutte décisive entreprise contre Samory dans la vallée -du Bandama et de la Sassandra (août 1897, octobre 1898) comprend trois séries d'opérations : 1° Celles du commandant Bertin dans la région Sud, pour fermer à l'almany les routes du Nord-Ouest ; 2° Celles du' commandant Pineau dans la région NigerVolta, pour ravitailler Kong et interdire aux sofas toute fuite vers le Nord-Est et l'Est ; 3° Enfin celles du commandant de Lartigue dans la région .sud, pour empêcher la retraite de Samory dans le Libéria -et achever la destruction de ses bandes.

(23) Voir croquis N° 5.


§ 42. — Opérations du commandant Bertin dans la région Sud du Soudan ou Haute Côte d'Ivoire actuelle (août 1897.

juin 1898).

Au mois d'août 1897, le commandant Bertin, chef de la.

région Sud du Soudan (Haute Côte d'Ivoire actuelle) avait fait occuper Odienné par un peloton de la 7e compagnie(capitaine Ristori, lieutenant Buck) ; de là, le lieutenant.

Buck exécutant une reconnaissance vers Borotou et Koro, s'était avancé jusqu'à Kani et au retour s'était croisé à.

Farandougou avec le lieutenant Blondiaux.

En octobre, le commandant Bertin reçoit l'ordre d'occuper la frontière Sud-Est de la région Sud, qui confine aux états de Samory, de ne franchir sous aucun prétexte le Bagoé, mais de se maintenir dans une position d'expectative et de ne fairé usage de la force que si cela est nécessaire en deçà de la frontière.

Il concentre la 7e compagnie du Régiment de Tirailleurs.

Soudanais à Odienné, et sur son ordre, celle-ci détache une fraction à Tombougou pour y créer un poste. Peu après la.

1M compagnie (capitaine Arnould et lieutenant Woelfel), relève les garnisons d'Odienné et de Tombougou ; la 713 compagnie rendue ainsi disponible va en novembre construire un poste à Touba; de plus la 3e compagnie d'auxiliaires (capitaine Gaden, lieutenant Feist) en installe un autre à Dabala.

Le capitaine Conrard est nommé résident d'Odienné eL commandant tout ce pays.

A ce moment les Sofas sont encore beaucoup plus à l'Est: l'extrême gauche de l'armée de l'almany, sous le chef Bilali, est signalée à Nganaoni et Féguéré, dont elle saccage les environs.

Pour éviter ces exactions, les habitants se réfugient sous la protection de nos postes et en particulier autour de Tombougou. Bilali se venge en brûlant tous les villages de la rive droite du Bagoé ; encouragé par notre inaction sur



la rive droite de ce fleuve, il le traverse, vient incendier Tombougou et même attaque le poste ; mais il est refoulé (2 février 1898).

Le capitaine Conrard prescrit de multiplier les patrouilles afin de rassurer les populations.

Le 10 mars le lieutenant Woelfel se porte avec 50 hommes de Tombougou vers le Sud, pour se mettre en relations avec la compagnie Gaden à Dabala. Assailli en route par 300 Sofas de Bilali, il réussit à les disperser après plusieurs heures d'un combat où il a 3 tirailleurs tués et 2 blessés.

En avril le capitaine Gaden, laissant quelques hommes à Dabala, pousse jusqu'à Toté et Bafélétou, puis continuant à progresser, réunit à la fin du mois toute sa compagnie à Bafélétou. Il est remplacé à Dabala et Toté par des groupes de la 7e compagnie. A la même époque, le lieutenant Woelfel est envoyé avec 50 tirailleurs dans le Niené, pour défendre le pays menacé par les guerriers de Babemba et les Sofas de Bilali, qui s'efforcent de se rejoindre.

Profitant de l'éloignement du lieutenant Woelfel, les Sofas pillent le village de Niamenso à l'Ouest de Tombougou ; un parti de 15 tirailleurs (sergent Poulhazan de la lre compagnie) -est aussitôt envoyé d'Odienné pour secourir les habitants. Les 21 et 22 avril, la petite troupe est entourée par un ennemi nombreux et bien armé, qui tente à deux reprises différentes l'assaut de Niamenso et cherche à incendier le village ; mais le sergent déjoue toutes les entreprises et, grâce à cette énergique résistance, permet au capitaine Chaptal, de la garnison d'Odienné, de le délivrer après une marche forcée de 69 kilomètres.

A la suite de la chute cle Sil\asso, le lieutenant-gouverneur imprimant une impulsion vigoureuse aux colonnes dirigées contre Samory, envoie au lieutenant-colonel Bertin (promu à re grade le 8 avril J898) l'ordre de franchir enfin le Bagoé, de rejeter au Sud la bande de Bilali et de fonder un poste sur le Bandama, à mi-chemin entre Tombougou et Kong, de manière à appuyer sur la droite le mouvement que


le. commandant Pineau doit accomplir de Sikasso sur 1\.9Jlg (24).

Le lieutenant-colonel Berlin adopte alors les mesures suivantes : A Tombougou rallieront immédiatement 100 tirailleurs de la lre compagnie (lieutenant AYoelfel), la 3e compagnie d'auxiliaires (capitaine Gaden), une section mobile de 80 m/m sous le lieutenant Jacquin. Les communications sont gardées avec la région Sud : à Odienné, par le capitaine Conrard et le capitaine Arnould avec une centaine d'hommes. Enfin, le détachement sera couvert sur son flanc droit par la lre compagnie ainsi répartie : 50 hommes sous le sergent Bratières à Toté ; 20 hommes à Dabala et 90 hommes à Touba avec le capitaine Ristori. En cas d'alerte vers Kani, Ristori accourra au point dangereux avec le gros de son monde.

Retardé par la perte d'un courrier et par des lenteurs dans la transmission des ordres, le lieutenant-colonel Berlin ne peut quitter Tombougou que le 9 juin et trouve évacués les divers points occupés auparavant par les Sofas de Samory.

Le commandant Pineau, l'ayant devancé à Tiémou. avait commencé l'établissement d'un poste au gué du Bandama, puis avait continué sa route vers le Sud à In poursuite de Samory.

Le lieutenant-colonel Berlin s'occupe alors de compléter le ravitaillement de Kong (commandant Pineau). Dans ce but, maintenant la section de 80 et le capitaine Gaden à Tiémou avec un peloton de la 3e compagnie, il dirige sur Kong le peloton Feist avec plusieurs centaines de charges et fait rétrograder les tirailleurs du lieutenant Wcelfel sur Tombougou, pour y rassembler d'autres convois.

Jugeant son rôle terminé, le lieu tenant-colon e] retourne

(24) Cet ordre envoyé dans une fausse direction arriva avec un retard de 15 jours. -


-à Odienné, où le 1er juillet, il cède le commandement de la région Sud au commandant de Lartigue.

Un premier résultat est désormais acquis, une ligne serrée -de postes s'étend du Milo au Comoé, fermant ainsi aux Sofas toute issue vers le Nord.

§ 43. — Opérations du commandant Pineau sur le HautBandama (mai-juin 1898).

Coupé de ses communications avec la Gold-Coast depuis -que le commandant Gaudrelier a fondé des postes sur le Comoé, Samory songe à s'installer à demeure sur les territoires qu'il a conquis dans ces dernières années, entre les Etats de Kong, le Soudan Français, la République de Libéria et la Grande forêt, c'est-à-dire dans les hautes vallées du Bandama et de la Sassandra.

Dans cette intenLion il construit sur le Bandama blanc, à quelques kilomètres au Sud de Ténendiéri, un formidable tata qu'il nomme « Bori-Bana », indiquant par ce mol, qui en langue bambara signifie « fini de courir », qu'il ne veut pas aller plus loin..

Son armée, forte de 12.000 Sofas dont 4.000 armés de fusils à tir rapide, comprend cinq groupes principaux : L'almany avec sa garde personnelle (1.500 hommes environ) est à Dabakala ; il est couvert en direction du Nord: — à droite par les troupes de Saranké Mory et de Moctar, ses fils, dites les « Bandes de Kong ». Moctar avec 2.000 hommes et un canon pris aux Anglais à Bouna assiège Kong ; Saranké Mory parcourt et pille les alentours de la ville au Nord et à l'Ouest.

— au centre par la « Bande de Sikasso », sous Konnady Kéléba qui se tient dans le Nafana à l'Ouest de Kong.

— à gauche par Bilali à Ningoni.

Le 30 avril, Moctar tenLe sur Kong un assaut furieux ; il est repoussé deux fois par le capitaine Teissonnière, qui


-commande la 9e compagnie, après un rude combat où ie lieutenant Guignard est légèrement blessé.

Quelques jours après, le capitaine Marchaisse (18e compagnie), secondét par le sous-lieutenant Pruneau (9e compa.gnie), conduit du Comoé sur Kong un fort convoi ,de vivres.

vifcaqué le 16 mai à Manokolo par un fort convoi de Sofas, il les refoule et amène à Kong son convoi intact ; mais il a -8 hommes tués et 12 blessés, dont le sergent Bujol (8° compa.gnie) grièvement.

'Profitant de l'effet produit dans la boucle du Niger par la prise de Sikasso, le lieutenant-colonel Audéoud, malgré l'approche de l'hivernage, confie au commandant Pineau le soin de chasser du Haut-Bandama et des environs de Kong toutes les bandes qui y sont signalées, et de ravitailler Kong, l'avertissant qu'il sera soutenu à l'Ouest par le lieutenant-colonel Bertin. Le commandant Pineau organise aussitôt sa colonne qui comprend :

1 Détachement de spahis : lieutenants de Barazia et Cabarrus; 4 Compagnies de tirailleurs auxiliaires à 200 hommes chacune, ■savoir : 5e Cie : capitaine Morisson; 6e - : capitaine de Montguers, lieutenant Frochen; 8e - : capitaine Benoit; Une de nouvelle création : capitaine Marandet.

Le capitaine Chaptal, les lieutenants Méjanel, Dubois et Cotten sont mis à la disposition du commandement.

Celui-ci forme deux groupes : — le premier, comprenant quelques spahis, la 8e compagnie et un convoi de vivres considérable, sous les ordres du capitaine Benoit, se dirigera sur Kong par la route de Soubakaniédiougou et les postes du Comoé qu'il ravitaillera comme Kong ; — le deuxième, comprenant le restant de la colonne sous les ordres du commandant Pineau, descendra sur Tiémou


par le chemin direct jusqu'au Comoé. Le capitaine Benoit devra se relier avec le deuxième groupe ; après avoir ravitaillé Kong, il se portera sur Tiémou où il rejoindra le-, commandant vers le 5 juin.

Le 12 mai, le capitaine Benoit commence son mouvement,.

surveillé sur son flanc droit par Konnady Kéléba. Quatrejours après il est attaqué brusquement à Nasian par un fort parti de Sofas. L'adjudant Piétri (18e compagnie), qui commande l'arrière-garde, parvient à éviter le désordre et oblige l'ennemi à s'éloigner. Démoralisés par leurs échecs successifs, Saranké Mory et Moctar disparaissent dans le.

Sud.

Le 20 mai, le commandant Pineau quitte Sikasso et s'avance vers Tiémou à travers le Folona. A cette nouvelleSamory détruit ses campements de Dabakala et gagne BoriBana, protégé vers Tiémou par 2.000 hommes environ sous; Moréfinadian.

Le 23 mai, Fô Taraoré arrive à Tiémou avec 500 cavaliers,.

350 fantassins et 600 habitants échappés de Sikasso.

Fô se jette rapidement à Bori-Bana el, engage Samory à fuir. l'assurant de la supériorité des Français. Cédant aux sollicitations de son entourage, qui cherche à le ramener dans le pays Toma dont la plupart des chefs sofas sont ■originaires, Samory envoie l'ordre à ses bandes de seconcentrer à Séguéla. Le 2 juin, l'almany abandonne son tata avec, ses femmes et. sa garde. De son côté le commandant Pineau s'achemine vers le Sud, très bien renseigné par les émissaires qu'il lance en avant, et recueille la soumission de tous les villages que les Sofas n'ont pas détruits.

Le 31. mai, il entre à Tiorhomarandougou après une légère escarmouche.

Averti que Moréfinadian s'est, aventuré de Tiémou jusqu'à Gambilidougou pour s'unir à Konnady Kéléba, le commandant abandonne son convoi à la garde de la compagnie


Marandet et accourant de nuit à Gbombélédougou, bouscule J'adversaire qu'il rejette sur Komokhodougou (1er juin).

Revenant ensuite à Tiarhomarandougou pour attaquer Bilali, il apprend que celui-ci s'est retiré sur Tiémou. Le -commandant part aussitôt sur les traces des Sofas.

Arrêté un instant à Monokhodougou par leur arrière.garde, il la disperse, et le 2 juin pénètre à Tiémou au moment ou Bilali sort du village après l'avoir incendié.

Accélérant la poursuite, le commandant Pineau, après -deux heures de repos et malgré une violente tornade, pousse jusqu'à un petit marigot qu'il franchit. Sentant que Bilali ,est proche, ce que démontrent les femmes, les enfants, les captifs, les chevaux ou les vivres qui jalonnent la route, il .forme une colonne légère avec les spahis, une pièce de canon, 200 tirailleurs des compagnies Marandet et Morisson, et à minuit tombe sur le camp ennemi établi dans les ruines de 'Ténindiéri.

- Surpris en plein sommeil, les Sofas affolés s'enfuient sans même décharger leurs armes. A Ténindiéri la colonne se trouve à proximité du tata de Bori-Bana ; après quelques hésitations, le commandant Pineau réfléchissant qu'il a donné rendez-vous au capitaine Benoit à Tiémou et gêné par la brousse très épaisse en cet endroit, renonce à se risquer jusque-là et revient sur ses pas.

Le 3 au soir, il est à Tiémou, ayant parcouru 116 kilomètres en 37 heures, et le lendemain va camper sur les "bords du Bandama, où bientôt il est rallié par le capitaine •Benoit.Celui-ci, après avoir ravitaillé Kong sans la moindre difficulté grâce au départ de Saranké Mory et de Moctar, s'est jeté vers l'Ouest (90 kilomètres en 34 heures) et le 2 juin a semé la déroute à Kémokhodougou parmi les bandes de Konnady Kéléba et de Moréfinadian, dont les débris se sont enfuis le long de la rive gauche du Bandama.

Bilali ne se voyant plus inquiété, continue lentement sa


marche sur Séguéla, pillant tout sur son passage et couvrant les derrières de l'armée de Samory.

Le commandant Pineau installe alors un poste (lieutenant Cotten) sur la rive gauche du Bandama, à 18 kilomètres de Tiémou sur la route de Tombougou à Kong et détache quelques tirailleurs à Bori-Bana ; puis il se porte vers Kong, où il arrive le 8 juin.

Là, il relève la garnison, confie le commandement de la place au capitaine Chaptal avec le lieutenant Pruneau comme adjoint et rejoint ensuite Bobo-Dioulasso (Voir § 60).

La colonne du commandant Pineau au Sud de Sikasso' avait affermi notre autorité sur les populations du Kénédougou et provoqué l'évacuation par les Sofas du pays compris entre le Comoé et le Bandama. Les postes du Bandama interdisaient à Samory les routes de l'Est ; il n'avait plus pour s'échapper que l'étroit couloir du Manon, entre la Grande forêt et les postes de la région Sud.

Pendant cette campagne, le commandant Pineau avait eu 2 officiers et 2 sous-officiers blessés, 8 indigènes tués et 12 blessés.

§ 44. — Opérations du commandant de Lartigue sur la Haute Sassandra (juin-octobre 1898).

Averti de la retraite de Samory, le lieutenant-colonel Audéoud envoie à Odienné le chef de bataillon de Lartigue (guerre), en remplacement du lieutenant-colonel Bertin rapatriable. Il lui donne pour instructions de barrer lechemin de l'Ouest à l'almany, de lui disputer la rive droite de la Sassandra, celles du Cavally, et de le harceler sans interruption, sans se laisser arrêter ni par la mauvaisA- saison. ni par les difficultés du terrain ou du ravitaillement.

Le 15 juin 1898, le commandant de Lartigue arrive à Odienné. En attendant le retour du lien tenant-colonel Bertin, alors en route vers Tiémou, il prescrit provisoirement les mesures propres à enrayer les progrès de Samory


dans l'Ouest. Celui-ci est arrivé à Séguéla le 14 juin, ayant à sa suite une foule de femmes, d'enfants et de captifs évaluée à 12.000 personnes, dont 800 au moins possèdent des fusils à pierre, et des troupeaux comprenant 20 à 25.000 têtes de bétail, dont 6.000 bœufs.

L'almany ordonne de franchir la Sassandra, opération qui n'est terminée que le 25 au soir. L'armée s'avance ensuite sur Doué. Malgré la promesse de Samory qu'il se présente en ami, les habitants de Doué et du Manon se sauvent à son approche et viennent demander secours au poste de Touba. Les Ouobés et les Dioulas, inquiets également, sollicitent leur pardon de l'attaque de la mission Blondiaux et invoquent notre appui.

Le commandant de Lartigue leur fait distribuer des armes et des munitions ; pendant ce temps le capitaine Ristori (7e compagnie) équipe les volontaires incljgènes du Manon et réunit à Guentéguéla 70 tirailleurs tirés des postes de Touba, Dabala et Toté.

A cause de son faible effectif, le capitaine Ristori se contente de garder le gué de Guibasso, lance des patrouilles le long de la rive droite de la Sassandra jusqu'à Doutou au confluent du Gouan ou Bafmg, détache le sergent Bratières à Toté avec 60 tirailleurs ; puis le 29 juin, apprenant que les Sofas sont sur la rive droite, il rentre à Touba.

En raison de la dissémination des forces de la région Sud, le commandant de Lartigue n'a pu s'opposer aux mouvements des Sofas vers l'Ouest.

Le 1er juillet 1898, le lieutenant-colonel Bertin lui ayant remis le commandement, il ordonne le ralliement général à Touba. La 3e compagnie d'auxiliaires (capitaine Gaden) et les deux pièces de 80 (lieutenant Jacquin) se porteront de 'Tiémou sur Kani. Le capitaine Gaden installera en ce point un de ses pelotons et les canons et, avec l'autre peloton et le lieutenant Jacquin, poussera jusqu'à Touba. Le capitaine Arnould, alors à Séguéré avec un peloton de la lre compagnie, ira relever à Tombougou le lieutenant Woelfel ;


celui-ci, avec l'autre peloton de cette compagnie et ledocteur Boyé, se dirigera sur Touba. Le sergent Bratières rejoindra Toté avec son groupe. Enfin le commandant de.

Lartigue gagne Touba avec une trentaine de tirailleurs.

prélevés sur la garnison d'Odienné, où il laisse le capitaineConrard et 20 tirailleurs.

Pendant ce temps, le capitaine Ristori rassemble à Touba-.

les porteurs et les approvisionnements nécessaires à la, colonne. Celle-ci, organisée le 15 et le 16 juillet 1898comprend :

1 Peloton de la lre Cie (93 hommes) : lieutenant Woelfel; 3 sections de la 7e Cie (155 hommes) : capitaine Ristori; Docteur Boyé, sergent Ariste.

Soit au total 24B fusils.

Pendant son séjour à Touba, le commandant de Lartiguecherche à se renseigner sur la situation exacte de Samory.

Recevant des renseignements contradictoires, il lance sur la rive droite du Gouan ou Bafing une reconnaissance qui lui apprend le 17, que l'adversaire est campé depuis quatre jours autour de Doué ; il décide de se rendre à Douépar le gué de Bama ; mais, par suite d'une erreur vouluedu guide, il atteint le Bafing en amont du gué de Doué.La colonne traverse le 19 juillet et s'arrête à 3 kilomètres de Doué, couverte par l'avant-garde du capitaine Ristori.

après avoir échangé quelques coups de fusil avec les avantpostes sofas.

Le commandant de Lartigue remet l'assaut au lendemain..

espérant que le capitaine Gaden et le sergent Bratières arriveront à Doué où il leur a donné rendez-vous.

Samory, décidé à passer l'hivernage à Doué et se croyant à l'abri de nos coups pendant cette saison, a établi soncamp sur les hauteurs qui entourent Doué à 4 kilomètres à l'Ouest et au Sud. Les bandes de Saranké Mory et de Moctar assiègent Kaba Kouna, village Dioula plus à l'Est.


Le 20 juillet au matin, la colonne s'avance sur Doué, précédée par le peloton Woelfel qui, après plusieurs feux de salve, s'élance dans Doué et en chasse les Sofas. Ceux-ci se replient sur les mamelons à l'Ouest et au Sud du village.

Aidé par une section de la 7e compagnie, le peloton Woelfel s'élance à la baïonnette sur le mamelon Ouest et en garnit bientôt.les crêtes. En même temps la section Ariste s'empare du mamelon Sud, malgré une violente fusillade et une diversion de 300 à 400 cavaliers qui essaient vainement de déborder les tirailleurs par la gauche. La 3e section de la 7e compagnie est en réserve.

Maître des collines voisines, le commandant, ramène ses troupes à Doué, ne laissant sur chacun des mamelons qu'une section : à l'Ouest section Kantara-Kamara (lre compagnie), au Sud section Ariste.

Le front occupé mesure 2 kilomètres ; les deux mamelons sont séparés par un ravin assez profond où se trouve la route ; en arrière se trouvent les campements des Sofas.

Samory a rappelé en toute hâte Saranké Mory et Moctar ; dès qu'ils arrivent, il se retire en les chargeant de nous bousculer. Saranké Mory tourne alors ses efforts contre la section du sergent Kantara-Kamara. Bien que grièvement blessé à la jambe, celui-ci reste à la tête de ses hommes -et est dégagé d'abord par le lieutenant Woelfel qui accourt avec la section du sergent Diouké-Konaté, puis par le capitaine Ristori et le docteur Boyé avec deux sections de la 7e compagnie.

De son côté, la section Ariste ayant abandonné sa position pour secourir la section Kantara-Kamara, est remplacée aussitôt sur la colline par les Sofas qui menacent ses 'derrières. Devant ce danger, le commandant de Lartigue prend le commandement des tirailleurs et dans une vigoureuse offensive disperse de nouveau l'assaillant.

A ce moment arrive le sergent Bratières avec ses <30 hommes ; ceux-ci sont répartis moitié à gauche, moitié à droite et, grâce à ce renfort, l'ennemi est définitivement


repoussé avec des pertes sérieuses : 300 à 400 hommes dont plusieurs chefs sont hors de combat. Dans l'affaire de Doué, les Français ont eu 13 hommes tués et 28 blessés.

Le commandant de Lartigue pensait être ravitaillé par lecapitaine Gaden, qui devait arriver le surlendemain. Malheureusement, ce dernier n'avait touché à Touba aucun approvisionnement. La colonne est sans cartouches, ses vivresont été mouillés pendant la traversée du Bafing. Dans ces conditions, on ne peut poursuivre les Sofas et achever leurdéroute. La rencontre de Doué a cependant pour résultat de.

forcer Samory à s'enfoncer dans une contrée difficile, où la.

démoralisation ne tardera pas à envahir son armée.

Le commandant décide de revenir sur Touba et de s'y approvisionner pour être en mesure, à la première occasion, d'attaquer de nouveau l'almanv. Pendant ce temps, SarankéMory fait un retour offensif sur Doué ; mais n'y trouvant plus les Français, il se lance sur leurs traces et le 22 juillet les rencontre au village de Nzo, où il est accueilli par un feu nourri. Un tirailleur est tué, 4 sont blessés, l'ennemi est repoussé.

La colonne gagne Touba sans être inquiétée, surveilléede loin par les Sofas qui s'arrêtent à Diogo à 5 kilomètres du poste. Le 23, le lieutenant Jacquin (artillerie) s'avancesur ce point avec deux sections de la 7e compagnie, surprend Saranké-Mory, et s'empare de quelques troupeaux.

Samory s'est retiré à Gourouno, à proximité de Didiou, laissant 4 à 500 fusils près de Doué, pour assurer ses communications avec deux de ses lieutenants qui opèrent dans le Manon. Les habitants de Kabakauna. tombant brusquement sur les Sofas qui occupent Doué, en massacrent un grand, nombre dont le chef. L'almany rappelle à lui SarankéMory et Moctar et nos tirailleurs réoccupent le gué du Baflng.

Le commandant de Lartigue, manquant totalement de vivres, veut d'abord pourvoir en grains les postes de Beyla.

Touba et Kérouané ; puis il empêchera Samory de se retirer


dans le Libéria et tâchera par tous les moyens de l'affaiblir et de désagréger ses troupes.

Le commandant ordonne de fortifier Touba ; il y fait rentrer les 2 pièces qui sont à Kani et y installe la 7e compagnie (capitaine Ristori et sergent Ariste), qui comprend 200 hommes dont 60 sont détachés à Kani ; puis avec lepeloton Woelfel (lre compagnie) et la compagnie Gaden (auxiliaires), il recule le 28 juillet sur Beyla, dont le poste sera augmenté et porté, ainsi que Kérouané, à l'effectif de60 auxiliaires.

Une fois à Beyla (3 août 1898), le commandant de Lartiguemultiplie ses émissaires vers Lola, Nzo et Toungaradougou, pour exciter les habitants à la résistance et obtenir des, renseignements sur la contrée. Il adresse aussi des émissaires à Nzapa et Nzolou, pour montrer aux Tomas à quels dangers ils s'exposent s'ils reçoivent les troupes.de l'almany.

En même temps, il achève de ravitailler les postes.

Dans l'intervalle la colonne est renforcée par 25 tirailleurs auxiliaires de Kani et 30 réguliers venus de la portion centrale du Régiment Soudanais à Kayes, avec 2 sous-officiers européens ; de plus une compagnie de la région NigerVolta, la 15e avec le capitaine Gouraud (25), le lieutenant Mangin, 2 sous-officiers et 100 hommes, est envoyée deSikasso à Beyla.

Le lieutenant-colonel Audéoud ordonne alors au commandant d'en finir avec Samory avant qu'il entre dans leLibéria. De son côté celui-ci, au commencement d'août, envoie un messager à Touba pour avoir la paix et l'autorisation de se fixer à Sanankoro. Le commandant de Lartigue- lui répond qu'avant tout pourparler l'almany devra livrer ses fils Saranké Mory et Moctar comme otages, ainsi que ses armes et ses munitions.

(25) La lEe compagnie était commandée par le capitaine Coiffé; mais ce fut le capitaine Gouraud (Guerre) qui prit le commandement du détachement de la 15e devant servir de renfort dans les opérations du commandant de Lartigue contre Samory.


En réalité Samory ne cherche qu'à détourner notre attention pour rentrer tranquillemént au Libéria. Mais depuis l'affaire de Doué, la discorde règne parmi les Sofas : un -certain nombre de chefâr, dont Konnady-Kéléba, en ont assez, les vivres diminuént ; aussi les désertions sont-elles nombreuses. Dans la première quinzaine d'août, 1.000 Sofas se réfugient sous Touba ; dans la deuxième quinzaine 1.500 se présentent à Touba et un millier à Beyla.

Néanmoins, Samory continue à progresser vers l'Ouest : il entre à Toufigaradougou, mais devant l'attitude hostile des anthropophages de la forêt, il décide de descendre plus au Sud pour traverser le Cavally et prescrit de marcher sur Déniféso. Assaillis en ce point par les Dioulas, les Sofas sont refoulés avec des pertes sérieuses. Konnady-Kéléba accourt et s'empare du village après deux jours de lutte.

§ 45. — Première reconnaissance du lieutenant Woelfel sur le Diougou ou Haut-Cavally (août-septembre 1898).

Averti de ces événements, le commandant de Lartigue veut cerner l'almany dans le quadrilatère où il se trouve : quadrilatère formé sur trois faces par le Gouan ou Bafing, la Sassandra et le Cavally et au Sud, sur la quatrième, par la contrée difficile où vivent les populations réputées anthropophages.

Pour arrêter Samory sur le Cavally, le commandant dirige sur Toungaradougou le lieutenant Woelfel avec 100 hommes de la lre compagnie (sergents Panier et Bratières). Cet officier trouvera en route une fraction de la 7e compagnie (70 hommes avec le sergent Ariste) venue de Touba, mettra Samory en demeure d'exécuter ses promesses et, s'il essaie de passer, l'attaquera hardiment.

Woelfel quitte Beyla le 18 août 1898 et parvient à Toungaradougou le 26, ayant rallié en route la section Ariste. Il écrit à l'almany exigeant de lui ses deux fils, ses armes et ses munitions. Samory ayant refusé, le lieutenant se retire à Fanha et avise le commandant de Lartigue.


Avant de se lancer sur la rive droite du Cavally où il prévoit un engagement avec les Sofas, le commandant tient à assurer la subsistance de ses colonnes ; d'ailleurs la 15e compagnie n'a pas encore rejoint. En attendant il envoie le sergent- Buot (7e compagnie) avec 25 tirailleurs et des vivres sur Fanha, pour boucher la trouée entre le Diougou (26) et le Bafing et augmenter ainsi la liberté d'action du lieutenant Woelfel. Celui-ci sera soutenu par lecapitaine Gaden, qui avec 150 tirailleurs, le lieutenant Mangin et les sergents Berthet et Lafon (Pe compagnie), se porte sur Nzo. Opérant de concert avec le lieutenant Woelfel, le capitaine Gaden barrera le gué du Cavally aux Sofas et les rejettera au Sud. Au cas où les Sofas auraient déjà franchi le fleuve, les deux officiers se replieraient derrière, la rivière Diani ou Saint-Paul et en disputeraient les abords ; enfin dans le cas d'un recul de Samory vers l'Est, ils le poursuivraient de façon à l'atteindre au delà dela Sassandra.Informé de ces dispositions, Woelfel se rend de Fanha à Nzo. Il ramène à lui les habitants de la forêt, d'abord hostiles ; ceux-ci lui fournissent des guides et des vivres.

Le 4 septembre le lieutenant connaît les emplacementsdes bandes de Samory ; Moctar est à Déniféso ; SarankéMory est à Guéhoubié ; Samory à Gouro ; Bilali et Konnady- Kéléba à Oua.

La veille, Bilali s'est approché du gué de Kabaguéra et en a été chassé par les Nguérés ; ceux-ci facilitent la voie à Woelfel en débroussaillant la route de Nzo à Tiaféso sur la rive droite du Cavally. Le 7 septembre le lieutenant arrive à Guéniafeso après des marches pénibles.

Le, 8 septembre 1898, Woelfel apprend que Bilali et Konnady-Kélébfl ont traversé le Diougou et se sont installés à Tiaféso.

"Espérant les surprendre et les séparer du gros, il se met

(26y Haut cours du Cavally.


-en route le lendemain au jour pour Tiaféso, précédé des sections Panier et Ariste ; deux heures après, celles-ci se heurtent aux avant-postes sofas, qui surpris par l'apparition des tirailleurs se sauvent dans les bois. Accélérant son allure, la colonne envahit le campement ennemi, rempli <Tune cohue de femmes et d'enfants et, grâce à cette manœuvre audacieuse, sépare Bilali et Konnady-Kéléba du reste de l'armée.

Pendant ce temps, les bandes de Saranké-Mory et Fourouba-Moussa ont gagné la rive droite du Diougou et se sont établies sur un mamelon dominant Tiaféso à l'Est et au Sud.

Le lieutenant Woelfel se trouve donc entouré de tous côtés par les Sofas. Profitant du désarroi causé par sa présence, il oppose la section Bratières à Bilali et KonnadyKéléba et donne l'ordre aux sections Panier et Ariste de -déloger respectivement Saranké-Mory et Fourouba-Moussa -de leurs positions ; lui-même se tient, en réserve au centre, prêt à secourir ses subordonnés. La section Panier s'élance à la baïonnette et bouscule Saranké-Mory jusqu'au Diougou -où beaucoup de Sofas se noient. La section Ariste obtient la soumission de Fourouba-Moussa ; après quelques feux ,de salve, durant lesquels Bilali est tué, les bandes de 'l'Ouest et du Nord-Ouest, déposent également les armes. Le lieutenant Woelfel a ainsi provoqué la réddition de 1.800 Sofas, 11 à 12.000 fusils dont 5.000 à tir rapide et les autres à pierre, 3 caisses d'obus et 60 de cartouches. Autour -de lui se groupent 39.000 personnes et de nombreux chefs parmi lesquels Bilali le jeune, Fourouba-Moussa, KonnadyKéléba, Sabou-ba, Fô et Ahmadou.

Samory s'est enfui à la hâte sur Gouro, pour de là rallier Moctar toujours à Déniféso et avec lui revenir vers les montagnes de Gourouno.

D'autre part le capitaine Gaden est arrivé sans encombre à Guéniaféso ; le 11 septembre il fait sa jonction avec "Woelfel.


Le capitaine ne peut songer à poursuivre Samory, car le Diougou monte sans cesse et tous les marigots sont débordés. De plus les convois ne sont pas arrivés. Enfin il faut évacuer les prisonniers et les réfugiés qui n'ont plus de vivres et les protéger contre les Guérés. En conséquence, il décide de rentrer à Nzo pour se ravitailler, renvoyer les captifs sur Beyla et recueillir des renseignements précis sur la situation de Samory.

§ 46. — Formation de la colonne de Lartigue à Nzo.

Durant ces événements, le commandant de Lartigue a reçu de Sikasso le renfort attendu (15e compagnie avec le capitaine Gouraud). Il organise aussitôt sa colonne qui comprend le lieutenant Jacquin (artillerie) comme adjoint; le docteur Boyé et l'interprète militaire Watin ; 25 tirailleurs de la 3e compagnie d'auxiliaires et la 15e compagnie.

Le Il septembre il se dirige de Beyla sur Nzo. Au delà de Fanha, la colonne rencontre une file ininterrompue de gens affamés et des monceaux de cadavres ; le 20 septembre elle rejoint à Nzo le capitaine Gaden. Le commandant apprend alors que Samory, après avoir réuni les débris de son armée à Dénifeso, s'est enfoncé vers le Sud. Ces indications laissent supposer que Samory a l'intention d'hiverner dans ces parages, ou bien de se rendre chez les Tomas, ou encore qu'il abandonne toute idée de retraite vers le Libéria et pense à retourner au Konadougou et dans le Djimini.

Le commandant adopte les mesures suivantes : Le capitaine Ristori s'avancera de Touba avec 90 tirailleurs, jusqu'au gué du Bafing pour en chasser les Sofas qui s'y risqueraient ; il se joindra, au besoin, à un quelconque des détachements en action et s'occupera de leur ravitaillement. Le capitaine Conrard, résident d'Odienné, se portera avec 30 hommes sur Kani et, assisté de 60 tirailleurs de ce poste, poussera jusqu'à Séguéla où il se retranchera. Il surveillera par des patrouilles les gués de la


Sassandra et en défendra l'approche à l'ennemi. Un peloton de 50 tirailleurs, demandés à la région Niger-Volta, .doit l'appuyer bientôt. Ce détachement sous le lieutenant Foucher est envoyé en effet de Sikasso ; mais en route il apprend la capture de Samory et fait demi-tour.

En même temps une colonne volante, sous les ordres du capitaine Gouraud, s'engagera vers Déniféso sur la piste de Samory et, se rabattant au Sud, cherchera à refouler l'adversaire vers le Diougou, dont la rive droite sera gardée par le commandant de Lartigue et 200 tirailleurs. De plus, un poste de 25 hommes est placé à Fanha et un autre de 25 à Fabédougou, pour faciliter le mouvement des convois sur la route de Beyla à Nzo. Enfin un parti de 15 tirailleurs (sergent indigène Diouké Konaté) parcourt la forêt de Fanha à Séné, pour préserver les réfugiés contre les anthropophages.

§ 47. — Capture de Samory.

Le capitaine Gouraud dispose de la 15e compagnie (lieutenant Mangin, adjudant Brail, sergent Maire) ; de la 3e compagnie d'auxiliaires (capitaine Gaden, lieutenant Jacquin, sergents Bratières et Lal'on) et du docteur Boyé ; en tout 220 hommes. A cause de la difficulté du terrain, les Européens n'ont pas de chevaux. Chaque tirailleur est muni de 15 jours de vivres et de 150 cartouches.

Le capitaine Gouraud quitte Nzo le 24 septembre et, franchissant le Diougou, pénètre 2 jours -après à Déniféso. Le pays est dévasté, les villages sont en ruines et encombrés de cadavres décomposés. Un déserteur sofa ramené par une patrouille annonce que la « diassa » de Samory se trouve à trois étapes dans le Sud-Est ; le lendemain la colonne marche dans cette direction et atteint Guanhoulé.

Au delà la marche devient de plus en plus pénible. Le 28, de nombreux fugitifs s'accordent à dire que l'almany a levé son bivouac 2 ou 3 jours auparavant. Le capitaine Gouraud


y arrive en effet vers 11 h. 30 et n'y trouve qu'un canon et le harnachement de Samory.

Des éclopés annoncent que Samory remonte depuis trois jours vers le Nord dans le but de se réfugier au Manon ; Moctar et Saranké-Mory sont en avant ; sur ses derrières il se couvre très mal.

Le capitaine tourne aussitôt au Nord et, peu après, parvient à un campement où les Sofas ont séjourné jusqu'au 25 ; les traînards affirment que Samory est à quelques kilomètres à peine au delà de Guélémou ; une légère arrière-garde sous Massi-Amara occupe le village ; en arrière se trouvent les huttes des femmes et plus loin le camp de l'almany. Gouraud s'avance alors avec de grandes précautions pour ne pas être éventé et à la nuit s'arrête dans une clairière au milieu de la forêt.

Pendant ce temps, le commandant de Larligue a détaché à Gourouno le sous-lieutenant Yam-Ly avec GO tirailleurs pour fermer la trouée Haffng-niougou, et a envoyé deux convois sur les traces du capitaine Gouraud. Le commandant se prépare à aller avec tout son monde dès les premières nouvelles, du côté de Gourouno, de façon à prendre l'ennemi entre deux feux.

Prévenu que Samory songe réellement à se retirer au Djimini, Gouraud décide d'attaquer le lendemain à l'improviste et de s'avancer, si possible, jusqu'au centre du camp pour s'emparer de l'almany, comptant entraîner ainsi la reddition de tous les Sofas.

Le lieutenant Jacquin commandera l'avant-gaMe avec le sergent Bratières et enverra le jour une patrouille pour déborder la position tenue par Massi-Amara ; le lieutenant Jacquin envahira ensuite brusquement le village des femmes et gagnera la route de l'Est, seule issue favorable à la fuite de l'almany.

Le capitaine Gaden et la 2° section do sa compagnie se dirigeront droit sur la case de Samory et l'occuperont ; le lieutenant Mangin à la tête d'un peloton formé par une


section de la 3e compagnie et une de la 15e compagnie, sera en réserve ; l'autre section de la 15e sera en convoi. Il est recommandé de ne tirer qu'en cas d'absolue nécessité et sur l'ordre des gradés seulement.

Le 29 septembre 1898 au point du jour, le mouvement commence. Le caporal Fodé Sangaré se porte avec son escouade sur les derrières de Massi-Amara, l'isolant ainsi du gros de l'armée. Découragés les Sofas se rendent sans résistance. Vers 8 heures, la colonne débouche dans une vaste clairière fermée à 2 ou 3 kilomètres de là par une colline au revers de laquelle se dressent les huttes des Sofas et traverse deux marigots où femmes et enfants sont en train de se laver.

Sans s'inquiéter de leur effroi, la section Bratières part au pas gymnastique, traverse le village des femmes en leur ordonnant de se taire et apparaît soudain au cœur du campement ennemi sans avoir été signalée. L'irruption des tirailleurs sur le marché, produit une rumeur qui avertit Samory. Celui-ci se sauve en courant sans prendre le temps de s'armer.

Reconnu à sa haute taille et à sa chéchia rouge ornée d'un turban bleu, il est poursuivi à outrance par les tirailleurs du sergent Bratières et bientôt, épuisé, s'assied en disant : « Tuez-moi ». Le sergent Bratières le saisit et le remet au lieutenant Jacquin accouru avec sa section.

Sur un geste de leur chef, les Sofas qui s'agitaient de toutes parts restent tranquilles. Pendant ce temps, le capitaine Gaden a occupé la hutte de Samory ; l'adjudant Brai], avec le peloton de réserve, a cerné le village des femmes ; le capitaine Gouraud et le lieutenant Mangin ont suivi l'avant-garde à distance et peu après rejoignent le lieutenant Jacquin et son prisonnier.

Les chefs des Sofas déposent leurs armes. Moctar et Saranké-Mory qui sont à 12 kilomètres plus loin, sont avisés de ces événements et Gouraud les somme de se rendre, sous peine de voir égorger leurs père et mère. A une heure de

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l'après-midi, ils se présentent au camp et remettent leurs armes à condition d'avoir la vie sauve.

Dans la soirée des patrouilles circulent aux environs, rassemblent les armes et les troupeaux et découvrent le trésor de l'almany contenant 250.000 francs environ.

Le lendemain on détruit tout ce qui ne peut être emporté et on s'apprête au départ.

Le 1er octobre 1898 la reconnaissance reprend le chemin de Gourouno ; au centre marche Samory, Saranké-Mory, Moctar et les porteurs du trésor. Derrière l'arrière-garde viennent les griots et les marabouts; les femmes, les enfants et esclaves (50.000 personnes environ) sont acheminés sur Touba sous la protection de la 3e compagnie d'auxiliaires.

Le 2, le détachement arrive à Gourouno, où il trouve le sous-lieutenant Yan-Ly et des vivres pour les captifs ; puis par Toungaradougou il revient sur Guéasso, où il rallie le commandant de Lartigue.

Sur le point de répondre à de nouvelles propositions de paix de l'almany, celui-ci avait appris la veille le succès de Gouraud et s'était "avancé jusqu'à Guéasso à la rencontre de ce dernier. Les deux colonnes reviennent alors sur Beyla où elles entrent le 17 octobre. Après quelques jours de repos, Samory, ses principaux fils, son conseiller MorifingDian, une quinzaine de ses femmes et 50 Sofas sont dirigés sur la portion centrale du régiment, à Kayes, sous la garde de 50 tirailleurs commandés par le lieutenant Jacquin et le sergent Bratières. Ils y arrivent le 13 décembre.

Ce voyage impressionne vivement les populations indigènes forcées de constater qu'en six mois les deux grands chefs soudanais, Babemba et Samory, ont été réduits par les Français.

Grâce à la promesse qui lui a été faite par le capitaine Gouraud, Samory et ses fils ont la vie sauve. Samory, Saranké-Mory et Morifing-Dian, sont déportés au Congo.

Moctar et les autres chefs sont dispersés dans les postes du Sahel et du Nord. 2.500 Sofas sont envoyés aux travaux du


chemin de fer de Ivayes au Niger ; les autres, au nombre de près de 40.000, sont autorisés à retourner chez eux et vont repeupler le Ouassoulou. Quant à Bilali-Amara, le griot de confiance de Samory, inculpé d'être l'instigateur du guet-apens de Bouna (voir § 35), il est condamné à mort par un conseil de guerre réuni à Beyla.

Ainsi finit Samory qui pendant plus de quinze ans avait été notre plus redoutable adversaire et avait semé la mort dans les plus riches contrées du Soudan.

§ 48. — Résultats de la campagne 1898 ; vues d'avenir.

Le 14 juin 1898, une convention signée entre la France et l'Angleterre avait réglé les questions en litige à la limite du Gourounsi, du Mampoursi et du Bouzanlsé ; la frontière du Soudan et de la Gold-Coast était désormais fixée.

Le gouvernement du lieutenant-colonel Audéoud avait été, selon le mot du commandant Pineau, « l'un des plus féconds en résultats parmi ceux qui s'étaient succédés au Soudan ».

Il restait maintenant à s'établir dans le Nord de façon à arrêter les incursions des Touareg et à assurer la navigation du Niger jusqu'à Say ; achever la soumission du centre de la boucle du Niger et organiser les territoires conquis ; enfin, au Sud, compléter l'exploration du lieutenant Blondiaux de manière à prendre pied chez les anthropophages de la forêt et amorcer une ligne de pénétration vers la Côte d'Ivoire.

Les différentes opérations entreprises dans ce but constituent la campagne de 1898-1890, dont nous allons étudier les phases successives dans chacune des régions. Au Nord la lutte contre les Maures et les Touareg et l'occupation des rives du Niger jusqu'à Ansongo par le lieutenant-colonel iftobb ; dans l'Est-Macina, l'expédition du commandant Crave sur les pays Touareg entre Dori et le Niger ; dans la région Niger-Volta, les mesures prises par le commandant


Pineau pour ramener' le calme clans les régions nouvellement conquises ; dans le Sud, te. voyage du lieutenant "Woelfel pour relier par le Cavally le Soudan à la Côte d'Ivoire ; dans l'Est, entre le Niger et le Tchad, les missions Cazemajou et Voulet .pour relier nos possessions du Soudan à celles du Congo et du Haut-Oubangui ; toutes ces opérations, auxquelles le Régiment de Tirailleurs Soudanais continue à prendre la plus grande part, se feront avec l'approbation et sous la direction du général de Trentinian qui, promu à ce grade le 27 octobre 1898, arrive à Kayes le 5 décembre et reprend à cette date le gouvernement du Soudan.

C. — GOUVERNEMENT DU GENERAL DE TRENTINIAN

§ 49. — Marche générale des opérations dans les régions du Sahel et du Nord de 1895 à 1899.

Après la prise et l'occupation de Tombouctou (voir §§ 20 et 21), les postes militaires du Nord du Soudan sont en contact avec deux peuples bien distincts, à l'Ouest les Maures, à l'Est les Touareg. Ces deux peuples sont euxmêmes fractionnés en un certain nombre de tribus, dont certaines nous étaient soumises et les autres hostiles.

Dès son entrée en fonctions, le général de Trentinian avait cherché à agir par persuasion auprès des Maures et des Touareg, pour leur imposer pacifiquement notre domination. C'est ainsi qu'en 1890 il avait parcouru à cheval avec son Etat-Major la série des postes Sokolo, Nampala, Soumpi, Goundam et Tombouctou. Cette randonnée, où le lieutenant-gouverneur fit jusqu'à 100 kilomètres par jour, avait produit une vive impression.

Il tourne d'abord son activité contre les Maures, de façon à les tenir en respect, se réservant de nouer plus tard des relations avec les Touareg riverains du Niger en aval de Tombouctou.


§ 50. — Soumission des Maures du Sahel. �

A la fin de septembre 1895, le lieutenant-gouverneur décide : la création d'un cercle à Soumpi. :

A la suite de difficultés survenues au sujet des Maures entre le commandant de la région de Tombouctou et celui du cercle de Sokolo, le colonel de Trentinian, désireux d'assurer l'uniformité de la politique vis-à-vis des Maures, décide le 1.5 décembre 1895 la création de la région du Sahel, qui sera placée sous les ordres d'un officier supérieur. Le commandant de Lartigue (guerre) en reçoit la direction jusqu'à l'arrivée du commandant Klobb (artillerie).

En octobre 1895 le capitaine Disdier, commandant le cercle de Sokolo, a établi un poste à Nampala (une section de la 14e compagnie de tirailleurs soudanais) et en novembre la 6e compagnie a pénétré à Soumpi et s'y est établie. Lors de son voyage à Tombouctou, le colonel de Trentinian prescrit d'installer deux postes à Boundoubadi et à Léré, centres des territoires des Ouled-Allouch ; de plus le cercle de Soumpi va en fonder un à Ras-el-Ma, pour barrer aux nomades l'accès de la vallée du Niger. Léré est occupé par 40 tirailleurs de la 14e compagnie avec le lieutenant Colcanap ; Boundoubadi par le lieutenant Roussot de la

même compagnie. Un peloton du poste de Soumpi est dirigé

sur Ras-el-Ma avec un peloton de la 6e compagnie de Goundam.-Un peloton de la 5e compagnie va se fixer à 1 Tarsa, enfin, d'octobre à janvier 1897 un groupe de tirailleurs ; est maintenu à Talakinn. Malgré ces dispositions, les Ouled-Allouch s'emparent en 1896 des troupeaux et des récoltes de plusieurs tribus séden- ; taires qui se mettent sous la protection des postes de Ras- j el-Ma et de Tarsa. Les garnisons de Ras-el-Ma et de Léré 1 reçoivent l'ordre d'exécuter des reconnaissances mensuelles, de concert avec les spahis de Sokolo (décembre 1896). Le

chef des Oulled-Allouch, Cheikh-ould-Sidi, harcelé et inquiet est sur le point de signer un traité lorsqu'il apprend l'irruption du lieutenant Wirth à Bassikounou.


f- Le lieutenant Wirth ayant saisi aux Maures 14 chameaux au cours d'une randonnée autour de Ras-el-Ma, se voyait désormais en mesure de franchir les espaces privés d'eau et songeait à surprendre Bassikounou, base d'opérations des Ouled-Allouch. Le 21 janvier .1897 il quitte Ras-el-Ma avec le sergent Martinet (6e compagnie), 45 tirailleurs et ses 14 chameaux ; trois jours après il arrive en vue de Bassikounou, où il est accueilli à coups de fusil.

i Il fait alors garder toutes les issues et s'empare d'un puits voisin qui alimente les habitants. Plusieurs escarmouches ont lieu de ce côté, au cours desquelles un tirailleur est tué et deux autres blessés. Pendant ce temps, le lieutenant envoie un chamelier réclamer des secours au lieutenant Guillermin, chef du poste de Léré distant-de 0 kilomètres.

: Le lendemain une partie des habitants ayant réussi à s'échapper, le lieutenant ordonne l'assaut et obtient le soir ême la reddition de la place. Se lançant aussitôt sur les aces des Maures qui se retirent vers le Nord, il atteint eurs campements aux puits de Lam-Lam et de Nioti et mpare de la plus grande partie de leurs troupeaux. Intilidés, 60 Ouled-Allouch déposent leurs armes. Laissant quelques tirailleurs à Bassikounou, le lieutenant Wirth regagne Ras-el-Ma. Le commandant de Lartigue, qui devait iriger peu après contre ce village une opération avec une olonne importante, reprocha au lieutenant Wirth d'avoir ontrarié sa politique. Cette téméraire équipée, couronnée e succès, avait néanmoins provoqué la disparition d'un efuge de bandits et rendu la sécurité à la route de Sokolo Ras-el-Ma.

Démoralisé par l'énergique poursuite dont il a été l'objet.

heikh-ould-Sidi sent l'inutilité de la résistance et sollicite 'aman. Sur notre promesse d'évacuer Bassikounou,, il ngent à payer un tribut annuel de 3.000 francs et s'engage respecter nos protégés.

Au mois d'avril,, les troupes restées à Bassikounou retour-


nent à Ras-el-Ma et à Tarsa, mais une section de la 2e compa- a gnie s'installe en mai au puits de Guendouch. J En août 1898 un raid du capitaine Imbert et du lieutenant J Picart avec 30 spah'is contre les 0. Mendouh amène la soumission de cette tribu. î

Les Maures du Sahel sont en grande partie soumis. Pour assurer ces résultats, le général de Trentinian crée un ; peloton de méharistes à Tombouctou, une compagnie de' gardes-frontières et un escadron de gardes à cheval qui sont répartis à Goumbou, Nioro et Sokolo,

§ 51. — Lutte contre les Touareg de l'Est.

Le commandant Brunet a succédé au commandant Réjou; dans le commandement de la région Nord. Grâce à son prédécesseur il n'a, en 1896, aucun engagement avec les nomades.

A la fin de l'hivernage de 1890, il passe le commandement de la région au commandant Golclschoen.

Au cours de l'occupation de l'Est-Macina par le comman.. 1 dant Destenave (voir §31), le lieutenant-gouverneur pense 1 à utiliser le Niger pour le ravitaillement des nouveaux. I postes. Le voyage du lieutenant de vaisseau Hourst avait; vérifié la navigabilité du Niger, il reste à s'assurer le droit I de circulation auprès des Touareg. Le général de Trentinian fl donne l'ordre au commandant Goldschoen de lancer de légers détachements vers l'Est, pour, entrer en relations 9 avec les tribus riveraines du Niger. 8 En mai 1897, le commandant Goldschoen envoie le lieu- S tenant de Chevigné (des spahis) auprès de Mabibou, 1 aménokal des bords du Niger en aval de Tombouctou, pour a i!

s'assurer que ses dispositions à notre égard n'ont pas changé M depuis la visite du lieutenant Hourst. Le chef targui signe S avec notre représentant un traité de commerce et d'amitié. 9 ; Le lieutenant rentre à Tombouctou le 20 mai, rapportant, m en outre, un permis de navigation du chef des Iguadaren. 9


Il avait constaté que le niveau du Niger aux basses eaux est insuffisant pour assurer la navigation.

à 52. — Echec de Rhergo (19 juin 1807).

A ce moment plusieurs tribus rebelles des Touareg de TEst riverains du Niger, préparent un mouvement d'ensemble contre les Français. L'époque est bien choisie, car le commandant Goldschoen est alors dans le Sud avec une grosse fraction de la garnison de Tombouctou. Averti que des groupes de Touareg, au nombre de 3.000 environ, se concentrent à Rhergo, le capitaine Paussier, commandant par intérim, envoie de ce côté le capitaine Audié avec 95 tirailleurs de la 4e compagnie de soudanais et 41 spahis sous le lieutenant de Chevigné et le sous-lieutenant de Latour de Saint-Ygest, pour observer l'adversaire.

La colonne arrive le 18 juin 1897 à Rhergo ; le lendemain, le capitaine Audié trouvant ses tirailleurs fatigués s'arrête pour camper, laissant aux spahis le soin de sonder le terrain vers l'Est.

Au bout de 3 heures de marche, une patrouille signale les Touareg à Séréri, à l'Ouest de Rhergo. Le lieutenant de Chevigné envoie des feux de salve à 800 mètres et oblige l'ennemi à se retirer vers le Niger ; mais d'autres bandes surgissent à ce moment d'un bois situé sur la gauche des spahis et ceux-ci sont entourés par environ 300 cavaliers et 200 fantassins. La plupart des spahis sont tués ainsi que le lieutenant de Latour ; seul, le maréchal des logis de Libran et 10 cavaliers peuvent rejoindre l'infanterie, grâce au dévouement du lieutenant de Chevigné, lequel, blessé et tombé de cheval, se brûle la cervelle pour ne pas retarder la retraite.

Se sentant trop faible pour agir contre les Touareg qui semblent fort nombreux, le capitaine Audié se replie sur Tombouctou et prévient le commandant Goldschoen qui se hâte de regagner Tombouctou.


§ 53. — Combat de Gourzgaï (septembre 1897).

Enhardis par ce succès, les Touareg menacent Tombouctou. Le commandant Goldschoen reprend résolument l'offensive. Le 10 juillet à la tête de 250 hommes (4e et 11e compagnies) avec un peloton de spahis, il marche sur Rhergo par la rive gauche du Niger. A son approche, l'ennemi recule vers l'Est. Le commandant recueille les corps des braves tombés 20 jours auparavant et les ramène à Tombouctou. En apprenant les derniers événements, le général de Trentinian dirige sur Tombouctou le commandant Klobb (artillerie), commandant de la région du Sahel, avec des renforts.

Dans l'intervalle, le commandant Goldschoen multiplie les reconnaissances autour de Tombouctou et organise une floltille de chalands armés pour la police du Niger.

Au commencement de septembre 1897, les renforts du Sahel ayant rallié, on organise 2 colonnes : Pendant que le commandant Klobb longera la rive gauche du Niger, avec 400 fusils environ, Goldschoen descendra le fleuve pour coopérer à l'action de Klobb.

La colonne Klobb comprend :

3 Compagnies du régiment de tirailleurs soudanais; la 4e Compagnie : capitaine Audié, sous-lieutenant Meynier; la 12e Compagnie : capitaine Millet, sous-lieutenant Pujo; 1 Fraction de la IIe : lieutenant Guillermin; 1 Détachement des 15° et 16e Compagnies : lieutenant Sigoney; 1 pièce de 80 de montagne; 18 spahis : lieutenant Delassus.

Le commandant, Goldschoen s'embarque sur les chalands avec la 11e compagnie (lieutenants Delestre et de Fajolle) et se fait appuyer par une canonnière. Quelques jours après son départ, l'expédition apparaît en vue de Bamba. Avisé par les spahis que les campements touareg sont à 3 kilomètres de là, à Gourzgaï, la colonne se porte sur ce village.


Sous la protection de l'avant-garde, la 11e compagnie débarque et s'unit à la colonne Klobb qui, formée en carré et flanquée de patrouilles, s'avance au-devant de l'adversaire. Les Touareg s'élancent à l'attaque. Le sergent indigène Mamadou Diaye, qui commande une des flancs-gardes, reçoit le premier choc et reflue sur le gros en luttant pied à pied. Malgré la violence des feux de salve, les Touareg entraînés par leur course, ne s'arrêtent qu'à quelques mètres des tirailleurs : l'un de ceux-ci est même traversé totalement par une lance.

Refoulé en désordre, l'ennemi s'enfuit avec de grosses pertes, poursuivi par les spahis qui lui infligent un peu plus loin une nouvelle défaite. Le 22 septembre, la colonne, rentre à Tombouctou avec un butin considérable.

Pourtant les Touareg continuent à nous être hostiles, surtout les Iguadaren fanatisés par Ngouna. En octobre et novembre 1897, les commandants Goldschoen et Klobb ont encore avec eux plusieurs engagements, entre autres à Gourzgaï (18 novembre) où les nomades se retirent avec 18 tués et de nombreux blessés.

Pendant ce temps le lieutenant Delestre, nommé chef de la flottille des chalands, parcourt activement la vallée. Averti à la fin de décembre que Abiddin est retourné à Bamba -avec 300 ou 400 hommes, le lieutenant accourt et, grâce aux canons des vapeurs le « Mage » et le « Niger » et aux feux -de salve des tirailleurs, disperse le rassemblement. Abiddin, jugeant que la saison des hautes eaux ne lui est pas favorable, s'éloigne vers l'Est.

3 54. — Opérations du commandant Klobb contre les Touareg du Sud (mai-juillet 1898).

Au commencement de janvier 1898, le commandant Klobb remplace le commandant Goldschoen à Tombouctou.

Au mois de mai, informé que Abiddin se montre de nouveau sur les bords du Niger, il se porte contre lui avec


un demi-escadron de spahis, une section d'artillerie, 2 compagnies de tirailleurs (lie et 12e) et la flottille du lieutenant Delestre. Le 22 mai il atteint les Kounta aux environs de Bamba et les bouscule.

Se tournant alors contre Sakaoni et Ngouna, le commandant Klobb passe sur la rive droite du Niger et du 25 au 31 mai harcèle les Touareg sans relâche. Serrant de près les Jg-uadaren, il les accule au Niger près de Iloa, à 30 kilomètres en aval de Bousouna. les canonne jusque sur la rive gauche et les contraint de se réfugier vers Gao sur les territoires de Mabibou. Puis prenant comme objectif les KelAnlassar demeurés en arrière, il les écrase fi Bousouna '5 juin).

Le commandant, laissant à Bamba le lieutenant Delestre avec Ja fî.JMj]Jf- et la lj* compagnie, regagne Tombouctou.

A peine a-t-il disparu que les Kel-Antassar et les Jg-uadaren, sollicités par Abiddin, se réunissent et viennent le 2't juin assaillir le lieutenant Delestre ; pendant 3 heures il leur tient tête avec ses 40 hommes et réussit à se dégager.

Les Touareg se séparent d'Abiddin qui cependant le i ï juillet livre un nouvel assaut au lieutenant Delestre ; mais aux premiers coups de canon, ses hommes se débandent de toutes parts. Ahiddin s'enfonce alors au Sud, puis à 1 Lst, et se dirige sur le Niger pour rentrer sur la rive gauche.

Apprenant ce mouvement des Kounta, le lieutenant Delestre redouble de surveillance. Le 21 juillet il tombe sur Abiddin à Dongoï, au moment où celui-ci passe le fleuve, lui enlève son butin et disperse la colonne.

Ab.-idin fe replie vers l'Est et pendant tout l'hivernage on n entend plus parler de lui. Quant aux Jguadarcn. ils offrent leur soumission et sont désormais tranquilles.

Voyant qu'il est inutile d'insister auprès d'eux, Nyouna s achemine par le d' -ert. sur les bords du lac Faguibine pour semer la révolte parmi les Kel-Autassar de l'Ouest ; ceux-ci invoquent la protection du commandant Klobb qui

i


envoie à leur aide le lieutenant Grossard: (iO compagnie) avec un peloton monté à chameaux.

Au cours de sa reconnaissance, le lieutenant se heurte vers Immamella (novembre) aux derniers partisans du chef targui et entame avec eux un combat durant lequel Ngouna est tué. Cette mort met fin aux entreprises des Touareg autour de Tombouctou.

Le 28 novembre le lieutenant Mevnier crée définitivement un poste à Bamba, le premier à l'Est de Tombouctou, et organise un peloton méhariste analogue à celui qui fonctionne déjà à Tombouctou.

§ 55. — Conquête des rives du Niger de Bamba à Ansongo (décembre 1898, février 1899).

Le capitaine Voulet, ayant été chargé par le Ministre des colonies d'une mission vers le Tchad, désirait utiliser la voie du Niger pour se rendre à Say. Le lieutenant-colonel Audéoud, pour lui faciliter le trajet, décide de prendre effectivement possession des terrains de la rive droite jusqu'à Say.

Il ordonne en conséquence au lieutenant-colonel Rlobb, commandant de la région de Tombouctou et au commandant Crave, chef de la région Est-Macina, de former chacun une colonne pour garantir le capitaine Voulet jusqu'au point où il s'éloignera du Niger. En particulier Klobb escortera la mission le long du fleuve jusque vers Sinder ; au retour il installera des postes sur le Niger, de façon à imposer notre influence aux tribus riveraines.

A la fin de novembre 1898, le lieutenant-colonel 100bh quitte Tombouctou avec deux compagnies du Régiment de Tirailleurs Soudanais : la 11e compagnie (lieutenants Delestre, de Fajolle et Gressard), la 4e compagnie (capitaine Cristofari, lieutenants Desclaux et Hutin) et une section d'artillerie. Il longe la rive gauche en marchant parallèlement au capitaine Voulet, lequel descend le fleuve sur les chalands de la flottille dont deux sont armés en guerre.

«


A l'approche de la colonne, les Aouélémidden. se retirent dans le Nord-Est ; seuls les Tademk-Kel-Bouroum s'unissent.

aux Kel-es-Souk dans la région des mares de la rive droite.

Le lieutenant-colonel se porte contre eux et du 8 au 12 octobre châtie un groupe des Kel-es-Souk ; les autres se-, sauvent sans résister. Laissant le capitaine Cristofari à Gao, le lieutenant-colonel Klobb continue à descendre leNiger.

Avisé que les Touareg du Sud se sont rassemblés à la.

mare d'Ansena à l'Ouest d'Ansongo, il s'avance contre eux.

Bientôt les Touareg reculent vers les mares de Gossi et demandent la paix.

Le 25 décembre, la colonne opère sa jonction avec celle du commandant Crave à Ansongo. Le lieutenant-colonel Klobb confie alors la mission Voulet à la garde du commandant Crave, et libre de ses mouvements, établit un poste à Ansongo (lieutenant Gressard), un autre à Taoussa et revient sur Gao, où dit-on, les Aouélémidden ont l'intention d'attaquer les Français (13 janvier 1899).

Le lieutenant-colonel construit à Gao, en un emplacement dominant, un poste solide et attend vainement l'assaut des Touareg. Convaincu que ceux-ci n'osent pas se présenter, il lance dès le 10 janvier des reconnaissances aux environs.

Le lieutenant Desclaux remonte le Niger jusqu'aux monts Tondibi et razzie les Imédédren, tribu vassale des Aouélémidden ; le capitaine Cristofari se dirige vers l'Est contre les Tin-Guéréguedesch et les chasse des puits de Téguiroualt et d'Argabech ; le lieutenant de Fajolle pousse dans le Sud, visite les puits de Diourou, Zakaouan, Tissakan et s'arrête à peu de distance du puits desséché de Samit.

Enfin le lieutenant Ilutin s'assure que les Tin-Guéréguéclesch ne sont pas revenus à Argabech et constate leur disparition vers l'Adrar des Iforhas.

Dans l'intervalle le lieutenant Delestre termine le poste ;.

de nombreux vassaux des Aouélémidden ou des Kel-es-Souk se soumettent, ainsi que les Tadenrk-kel-Bouroum.


De son côté le lieutenant Meynier exécute un raid contre les Kel-Tabankort, vers le puits de Marzafal situé en plein désert à 110 kilomètres au Nord de Bamba.

-Le 2 février 1899, le lieutenant-colonel Klobb quitte Gao, y laissant le lieutenant Delestre et revient à Tombouctou.

Là, il remet le commandement de la région Nord au commandant Delval et gagne Kayes pour être rapatrié.

§-56. — Premières formations méharistes et reconnaissances au Nord de Tombouctou.

Les premières formations méharistes dans les confins Nord du Soudan sont dues au commandant Klobb. En 1897 il crée un corps de chameliers, destiné en principe à la conduite des convois, mais qui peut également être utilisé pour éclairer les colonnes et reconnaissances. Malheureusement les chameaux rassemblés à Tombouctou et Rasel-Ma périssent avant d'avoir été utilisés.

En 1898, le lieutenant de Gail organise un groupe méhariste de 32 hommes, avec lequel il effectue de nombreuses tournées autour de Tombouctou.

Installé à Bamba, le peloton méhariste participe en novembre 1899 aux opérations contre les Bérabiches dissidents. Ces derniers ayant tenté de razzier le village de Ernessé, 28 kilomètres Est de Tombouctou, et de soulever les autres tribus touareg, deux reconnaissances marchent contre eux : .— l'une partant de Tombouctou, commandée par le capitaine Grémillet (6e compagnie du Régiment Soudanais et peloton de cavaliers du Sahel) ; — l'autre partant de Bamba, sous les ordres du capitaine Quérette (50 tirailleurs de la 4e compagnie, peloton méhariste de Gail et 15 spahis).

Le campement du chef des dissidents, Ould Mehemet, est surpris au puits de Iouahouaten. Le 28 novembre, les deux détachements font leur jonction au puits de In Alay.


En septembre-octobre 1900, le lieutenant Fiction e&ëciit-e, avec 18 spahis et 50-auxiliaires-, une- rftCO-ItmaJ'ss;anc-e. dë1 Tombouctou à Araouam par Bôu^Djehiba» <qul peut' être'COïM^dérée comme le point de départ de la^pénétratl'oïl dans les confins sahariens.

§57. — Opérations dans la région -Est-Diacinia (mai 1808, janvier 1900). — Reconnaissances au Mossi et au Liptako (mai 1898).

Au mois d'avril 1898, le commandant Crave succède à Bandiagara au commandant Destenave comme commandant de la région Est-Macina ; un grand nombre des officiers > dela mission Destenave sont remplacés à la même époque.

Pour assurer la frontière Sud du Mossi, le capitaine Scal,..

qui commande à Ouagadougou, envoie en mai le lieutenant Dussault fonder un poste à Kamoéga, village de Kassang-o.

Renforcé en route par 15 cavaliers du naba de Bittou, notre allié, le lieutenant s'avance avec ses 30 tirailleurs auxiliaires sur Kamoéga où il est bien accueilli. Mais bientôt il est entouré par une bande de plus de 600 guerriers du voisinage, qui lancent sur sa troupe des feux de salve. Voyant ses munitions diminuer et le nombre de ses adversaires augmenter, il se retire sur Zebilla où se trouve une garnison.

Formant ses hommes en carré, il s'ouvre un" passage à travers les ennemis et réussit à se dégager avec 2 hommes blessés seulement. Les Kassango ont plus de 40 tués et un grand nombre de blessés.

A la même époque, au Liptako, le capitaine de Coma (cavalerie), résident à Dori, averti que les Logomaten campés jusqu'alors vers Sinder sur le Niger se sont avancés menaçants sur la mare d'Ossolo à 50 kilomètres de Dori, se porte sur ce point avec les tirailleurs du capitaine Muller (16e compagnie). Après 9 jours de marche rapide, il atteint les Touareg et les force à s'éloigner. Ce succès produit uncertain effet. Pourtant l'agitation:continne à régner à l'Ouest


de Sinder, soigneusement entretenue par le marabout Modibt-Ditgourou et par Bokar-Ouandiédou, chef desL«g*maten.

S 58. - Expédition du commandant Grave contre les Logomaten (octobre-novembre 1898).

Le lieutenant-colonel Audéoud avait prescrit au comman- dant Crave de refouler les Touareg du Gorouol, les chasser sur la rive gauche du Niger, convoyer la mission Voulet à son arrivée à Sinder jusqu'à Say et créer des postes sur le fleuve en amont de Say, de façon à permettre la libre navigation de Tombouctou à Say.

Au moyen d'éléments pris dans les divers postes de la région, le commandant Crave concentre à Dori la colonne suivante :

1 Peloton de spahis : lieutenant Dckmnay; 2 pièces de 80 : lieutenant Charpentier; 3 Compagnies de tirailleurs soudanais; 3e Compagnie : capitaine Mutlr-r, adjudant Noirtin; 16e Compagnie : capitaine Mongrand, adjudant Daste; 1 Compagnie de tirailleurs auxiliaires : lieutenant Hugo.

Le commandant Grave avait comme adjoints le capitaine de Coma (cavalerie) et le lieutenant Delbor; le docteur Roquemaure accompagnait la colonne.

Le 21 octobre '1898, le commandant Crave se met en marche sur Diagourou. Le surlendemain, après un parcours de 100 kilomètres, il surprend l'adversaire et le met en fuile après un léger combat. De nombreuses patrouilles circulent les jours suivants aux environs, s'emparent de 5 villages et provoquent de nombreuses soumissions.

Le 26, la colonne s'engage vers le Nord sur les traces de l'ennemi et gagne Téra. Apprenant que les Logomaten cherchent à se dérober, le commandant Crave laisse en


arrière le convoi avec le lieutenant Hugo et part le soir même à la poursuite de Bokar qui est à 30 kilomètres de là.

Dans la journée du lendemain, la colonne rejoint les Touareg à Garakoïré, sur les bords du Niger à 35 kilomètres en amont de Sinder, et leur inflige une sévère leçon.

Quelques jours après, le lieutenant Hugo ayant rejoint le convoi, le commandant Crave marche sur Sinder, où se sont réfugiés les Logomaten ; le 2 novembre les Français arrivent devant l'agglomération qui porte le nom de Sinder.

Elle se compose de cinq îles très riches, où les habitants ont accumulé du grain. Le Niger est en cet endroit bordé par des dunes de 25 à 30 mètres de haut et a une largeur de plus de 6 kilomètres ; entre le fleuve et les dunes se trouve une zone marécageuse, de 400 à 500 mètres de large, cultivée en rizières. Ne pouvant déployer ses troupes, le commandant s'établit sur une dune dominant l'agglomération et ouvre le feu sur les îles.

Les défenseurs évacuent la première île distante de 300 mètres de la rive, et s'abritent dans les autres du côté Est qui n'est pas exposé à l'artillerie. Pour les attaquer les pirogues nous font défaut. Pour y remédier, sur la proposition de l'adjudant Noirtin, on construit pendant la nuit deux radeaux en paille. Au matin le passage commence, et à midi, la première île tombe entre nos mains. Un poste y est immédiatement élevé.

Le 5 novembre une pirogue ayant été découverte, la compagnie Mongrand occupe la deuxième île qui est déserte. A cause de la profondeur et de la rapidité du courant, le commandant renonce à occuper les autres îles.

Laissant l'adjudant Daste avec 50 tirailleurs et les blessés dans le nouveau poste, il retourne à Garakoïré, où dans l'intervalle le lieutenant Hugo a harcelé à différentes reprises les Touareg des environs.

Le 13 novembre 1898, le commandant ayant enfin trouvé des barques, remonte le Niger vers Kentadji où se sont


groupés les fuyards de Sinder, les contraint à déposer leurs armes et pousse jusqu'à Ayorou et Dounzou dont il s'empare.

: Après une reconnaissance sur Labézenga le commandant Crave, apprenant que le lieutenant-colonel Klobb ne sera pas à Ansongo avant le 15 décembre, profite de ce répit pour marcher contre Ndiougui, qui a rassemblé les tribus touareg des Oudalan et du guerrier Amadou-Atour dans le Gorouol.

Confiant au capitaine Mongrand (16e compagnie avec une pièce de 80) le soin de bâtir un poste à Dounzou, le commandant s'avance le 26 novembre sur Yatakala. Là apprenant que l'ennemi s'est réfugié vers les mares du Nord, il dirige les auxiliaires du lieutenant Delbor (27) sur Dori pour en ramener des vivres et des munitions ; puis il se porte hardiment contre les Touareg avec les spahis, le capitaine Muller et une pièce de 80.

Le ler décembre 1898, au sortir de la mare de Dakol, les spahis signalent la présence de Ndiougui un peu en avant de la mare Falikine. L'épaisseur de la brousse empêche la colonne de se former en carré ; en un instant elle est assaillie par 300 cavaliers qui bousculent tout ce qui se trouve devant eux, les spahis sont rejetés dans l'infanterie.

Le lieutenant Charpentier et le docteur sont roulés à terre avec leur monture et foulés aux pieds ; la section de tête (Noirtin) est complètement cernée. 'Pourtant les tirailleurs reprennent leur sang-froid, le lieutenant Charpentier court à sa pièce et fait tirer à mitraille ; le capitaine Muller réussit à faire former le carré et ouvrir le feu à volonté, l'ennemi disparaît.

Après cette alerte la colonne continue son mouvement.

Trois kilomètres plus loin elle est attaquée par le gros des Touareg (500 fantassins et 300 cavaliers) qui échouent totalement. Décimés par les feux de salve, les Touareg sont

(27) Le Lieutenant Hugo, atteint d'une attaque de paralysie, a remis le commandement au Lieutenant Delbor.


bientôt en pleine déroute ; deux des fils de Ndiougui sorat tués ainsi qu'Ahmadou-Atour, chef'des Saïbabay. La colonne n'avait perdu que 2 tués et 8 blessés.

Le commandant Grave revient alors à Yatakalsa, où le 5 décembre 1898 il est rejoint par le lieutenant Delbor et fe surlendemain il arrive à Dounzou.

Le 10 il repart et longe le Niger jusqu'à Ansongo pour y attendre la mission Voulet. Le 20 décembre elle arrive avec ses chalands et continue la descente du Niger vers Say, protégée par un détachement de tirailleurs fourni par le commandant Crave.

Cinq jours plus tard la colonne rencontre la colonne Klobb, puis rentre à Dounzou après avoir installé un po-ste à Labézenga.

Le commandant séjourne à Dounzou jusqu'au 16 janvier, réprimant des rébellions à Firkou, Ayorou et pacifiant les environs. Renforcé à ce moment par le lieutenant Beaudu (16e compagnie), les sous-lieutenants Coiscaud (16s compagnie), Guerrier (3e compagnie) et un groupe de tirailleurs, il laisse à Dounzou le lieutenant Coiscaud et retourne sur Sinder.

En chemin, il a une légère escarmouche avec les Logomaten qui sont dispersés par le sous-lieutenant Guerrier.

Dans l'intervalle, l'adjudant Daste a battu les Logomaten en plusieurs rencontres et obtenu la soumission de la population noire des îles et de plusieurs tribus touareg. Le capitaine Mongrand reçoit le commandement du poste de Sinder occupé par la 16e compagnie, une pièce de 80, quelques spahis et le docteur Roquemaure. *

Le commandant Grave rentre à Dori (16 février 1899) et peu après remet à Bandiagara le commandement de la région de l'Est-Macina au commandant Simonin.

§ 59. — Reconnaissances dans le Kipirsi, le Yatenga et le Hombori (février-avril 1899).Certaines tribus de pillards parcourent les provinces du


Kipirsi et du Yatenga ; de plus, du côté de Hombori, les Kel-Gossi sont toujours hostiles. Pour faire cesser ces mouvements, les postes de Ouagadougou, Ouahigouya et Bandiagara vont être obligés d'intervenir en février, mars et avril 1899.

Aussitôt arrivé à Ouagadougou, le capitaine Amman (artillerie de marine), successeur du capitaine Scal, fait une tournée dans le Kipirsi pour y ramener le calme. Avant de l'entrer à Ouagadougou, il veut punir les habitants de Goursi, qui plusieurs fois ont pillé les marchands de passage. Avec 60 tirailleurs et 20 spahis, il se porte sur Goursi, dont le chef refuse de délivrer des vivres ; le lieutenant Grivart, des spahis, envoyé en avant avec s-es cavaliers, est: attaqué.

Le capitaine Amman accourt avec les tirailleurs pour disperser le rassemblement, fouille les cases et en déloge les indigènes. Le lieutenant Grivart est atteint d'une flèche empoisonnée et succombe quelques instants après. Le village de Goursi est sévèrement châtié (14 février 1899).

Néanmoins l'agitation continue dans la contrée ; pour en finir le capitaine Boutig (artillerie de marine), chef du poste de Ouagadougou, circule du 21 avril au 23 mai dans le Yatenga et y affermit notre autorité.

D'autre part, au commencement de mars, les Kel-Gossi ayant poussé leurs incursions jusque dans le IIombori, les habitants du pays demandent au commandant de Bandiagara un poste pour les protéger. Le lieutenant Richard d'Ivry (guerre) marche contre les Touareg avec un peloton d'auxiliaires. Un géologue M. Legeal, qui marche avec la petite colonne, est entraîné par son cheval au milieu des Touareg qui le massacrent. Le lieutenant Richard d'Ivry se met à la poursuite des Touareg, les rejoint dans le Hombori, et, par de sévères exemples, venge la mort de M. Legeal.


§ 60. — Dernières opérations contre les Touareg du Sud (avril 1899, janvier 1900).

Les postes établis entre Ansongo et Say sur le Niger.

étaient insuffisants pour une aussi vaste étendue. Aussi les, Touareg avaient-ils toute latitude pour traverser le fleuve et organiser des razzias. Les chefs de poste reçoivent des instructions fermes pour s'opposer à ces passages.

Au milieu d'avril, le lieutenant Coiscaud (16e compagnie), commandant le poste de Dounzou, averti que des bandes touareg franchissent le Niger près de Kentadji, s'avance contre elles et capture une partie de leurs troupeaux.

Au retour (24 avril), il se rend à Ayorou et Kentadji pour acheter des roniers nécessaires aux constructions, mais les habitants montrent une mauvaise volonté évidente. Irrités d'être taxés d'une amende, ils attaquent l'officier au moment où il embarque en pirogue et le blessent de plusieurs coups de lance.

Le commandant Simonin prescrit au capitaine Mongrand de réprimer cet altentat. Le 5 mai, celui-ci quitte Sinder avec les 130 hommes de la garnison (tirailleurs, spahis et canonniers) et 6 jours après arrive en vue de l'île de Kentadji. Il aborde l'île de front avec la plus grande partie de ses forces, tandis que le lieutenant Beaudu la prend à revers. Pendant 3 jours les défenseurs résistent énergiquement. Le M mai l'assaut est donné de trois côtés à la fois et après un brillant combat où le sous-lieutenant Guerrier et le sergent Delansornc (3e compagnie) se signalent particulièrement, l'adversaire évacue ses positions.

Désormais la vallée est paisible. Mais les Touareg du Sud ne sont nullement bridés.

Exploitant le meurtre de M. Legeal, Ndiougui excite contre nous les Ivcl-Gossi et les tribus voisines. En juin, il cherche à s'unir aux Aouélémidden de la rive gauche pour une razzia dans la direction de Fada. Les lieu tenants Delestrc et Gressard entravent ce mouvement et le 11 juil-


let 1899, infligent près de Bouro des pertes sérieuses à Ndiougui.

Pour achever la pacification des Touareg, le colonel Septans est nommé commandant supérieur des régions Nord et Est-Macina, avec mission d'user de la persuasion et de n'employer la force que contre Ndiougui. Le colonel Septans constitue une colonne à l'aide des troupes levées dans les deux régions. En septembre et octobre, il harcèle les dissidents dans la région des mares et réussit à refouler Ndiougui au delà du Niger. Les Kel-Gossi et les Aouélémidden offrent la paix.

A la suite de ces succès, tout le secteur du Niger entre Labézenga et Sansané-haoussa forme un nouveau cercle, celui de Dounzou, sous le commandement du capitaine Moll, de l'Etat-Major hors cadres. Celui-ci déploie une grande activité pour interdire l'accès du Niger aux Touareg rebelles et à la fin de l'hivernage empêche Ndiougui de revenir sur la rive droite. Découragé, le chef targui se soumet sans conditions.

Le capitaine Moll se tourne alors vers les Logomalen, et détache contre eux une forte colonne commandée par le lieutenant Figeac. Celui-ci surprend le campement des nomades, saisit une centaine d'entre eux et s'empare de nombreux troupeaux (janvier 1900). Réduits à l'impuissance, les Logomaten ne bougent plus. Les Ouara-Ouara, les Kelguérif déposent les armes et Mabilou lui-même se soumet.

§61. - Pacification de la région Niger-Volta (juin 1898, mars 1899).

Après avoir rejeté les Sofas de la haute vallée du Bandama (voir § 43), le commandant Pineau s'était porté sur Kong (8 juin 1898). Il crée le cercle du Haut-Bandama avec le lieutenant Cotten (19e compagnie) et celui de Kong, avec le capitaine Chaptal (17e compagnie). Le lieutenant


Cotten, malgré l'hivernage, parcourt son cercle d'un bout à l'autre et en exécute la topographie. Le capitaine Chaptal envoie des reconnaissances au Djimini et au Diamala. L'une d'elles, conduite par le lieutenant Pruneau (9e 'compagnie) son adjoint,, pousse jusqu'au pays Mango et se met en liaison avec les postes de Boudoukou et Kouadiokoffi de la Côte d'Ivoire.

Pendant ce temps, le commandant Pineau met en route sur Bobo-Dioulasso les quatre compagnies avec lesquelles il venait d'opérer sur le Haut Bandama avec les spahis, ién les acheminant par quatre voies différentes. Tous ces éléments arrivent à Bobo-Dioulasso le 15 juillet 1898 munis d'itinéraires complets.

A son retour, la compagnie Benoit (8e auxiliaires) est chargée d'installer un poste à Bouaké. Enfin 50 tirailleurs avec le lieutenant Benard (18e compagnie) occupent Bouna, que la convention du 14 juin 1898 force les Anglais à nous abandonner. De Bouna, le lieutenant Benard se porte sur Bondoukou où il arrive le 25 juillet.

La liaison entre le Soudan et la Côte d'Ivoire est réalisée.

Le pays du Sud du Lobi formera le cercle de Bouna, avec le capitaine Morisson pour chef. Des officiers sillonnent la région en tous sens : le lieutenant Hameau remonte le Baninko, le lieutenant Froechen (19R compagnie) longe le Comoé jusqu'à sa source. Le lieutenant Dubois descend la Volta-Noire jusqu'à hauteur de Bouna. Leurs relevés topographiques sont centralisés à Bobo-Dioulasso par le lieutenant Méjanel (3e compagnie). Beste à affermir l'ordre dans les provinces et à imposer notre domination aux tribus encore insoumises.

C'est ainsi que, au Tierla, vivent des peuplades sauvages, les Mboin et les Karaboro, qui refusent obéissance au commandant du cercle de Bobo-Dioulasso. Cette attitude hostile étant dangereuse pour les postes du Bandama menacés d'être coupés, le commandant Pineau détache au Tierla la 9e compagnie (capitaine Teissonnière, lieutenants-


Feist et Froechen, sous-lieutenant Schwartz) pour réduire Les rebelles.

D'U 14 août au 4 novembre 1808, le capitaine Teissormière avec ses 130 ho-mmes parcourt un terrain difficile et :livreles combats de Zabola (4' septembre), Bamfora, Bohéri (9 septembre)., Maningara, Boukari (31 octobre), pendant lesquels il a 3 hommes tués et 12 blessés. Les populations du Tierla demandent provisoirement l'aman ; mais elles n'ont pas fini de faire parler d'elles.

A la même époque le lieutenant Modest, chef du poste de Diébougou, lance plusieurs patrouilles dant le Lobi où sont signalés des groupes en armes. Le sergent Bergeron (18B compagnie), en réquisition vers Palani, est assailli par ÎSO noirs environ ; atteint de 4 flèches il rallie son monde, riposte par des feux de salve et se retire vers Lomprelé. En chemin, le caporal Birama Diallo succombe aux blessures qu'il a reçues.

Plus au Sud, le capitaine Benoit, renforcé à Kong, par une fraction de la garnison (lieutenant Pruneau, sergent Sallat), a'.avance sur Bouaké, pénètre dans la ville et y construit mn poste avec deux annexes à Kombara et Andromie. Unissant leurs efforts contre nous, Baoulés et Ngans attaquent le 23 décembre et cernent la redoute de Kombara. Pendant 5 jours, du 26 au 31. décembre, le lieutenant Pruneau lutte contre les assiégeants et après 4 engagements, réussit à débloquer Kombara. Les Ngans s'enfuient sur la rive gauche du Comoé.

De son côté le commandant Pineau, désireux de prendre contact avec le Niénégué et le Minianka, forme une colonne ainsi composée :

50 spahis : lieutenant Cabnrrus; 2' Compagnies de tirailleurs ; 9e Compagnie : capitaine Teissnnnière, lieutenant Feist: 1 cVauxiliaires r capitaine Simonin, lieutenant Modest; 1 section de 80 : lieutenant Sasportes.


Le 2 décembre il quitte Bobo-Dioulasso et s'achemine sur Béréba, capitale du Niénégué. Intimidés, les habitants n'osent résister et acceptent notre suzeraineté. Des reconnaissances circulent aux environs et ouvrent une route directe de Bobo-Dioulasso à Boromo.

Le commandant se porte ensuite à Pâ (13 décembre 1898), où près de 1.000 guerriers se sont concentrés pour marcher contre lui. Mais ils déposent les armes sans se défendre. De Pâ, la colonne se rend à Boromo et Sono. Le siège de ce dernier cercle est transféré à Koury, sur la Volta.

Le 15 janvier 1899, le commandant Pineau se porte en direction de Djenné. Avisé que les gens de Pérakuy ont des intentions belliqueuses, il pousse en avant le capitaine Teissonnière ; le 21 janvier 1899, cet officier enlève le village d'assaut et le surlendemain la colonne arrive à Sienso, où elle séjourne jusqu'à la fin du mois.

Dans l'intervalle, le commandant procède à l'inspection du cercle de San et porte le chef-lieu de San à Koutiala.

Le 1er février 1899, la colonne s'avance dans le Minianka sur un front de 100 kilomètres, partagée en autant de groupes qu'il y a d'officiers. Elle obtient successivement la soumission des villages de Dougouéla, Mpesoba, Konséguéla, Tembéla, Tiéré, Moribila et Zébala.

Le 6 mars, le commandant Pineau rentre à Bobo-Dioulasso. Pendant ce temps, une ligne télégraphique, devant relier le Soudan à la Côte d'Ivoire, a été établie de Lanfiéra à Bobo-Dioulasso par Sono et se poursuit vers Kong. Les travaux sont interrompus par la mauvaise volonté des indigènes de la Léraba (affluent du Comoé). Le capitaine Marchaisse les châtie vigoureusement.

A peine revenu, il est envoyé au Niénégué où l'agitation règne de nouveau ; il punit sévèrement les villages de Sara, Nioukhéna, puis ceux de Somona et Nempéna. Malgré tout, ce pays est loin d'être définitivement pacifié.


§ 62. — Seconde exploration du lieutenant Woelfel sur le Haut-Cavally (mai-septembre 1899).

Les tentatives faites en 1897 par le lieutenant Blondiaux, par MM. Eysseric et Toroyé, pour se relier à travers la grande forèt de la Côte d'Ivoire (voir § 38) avaient échoué devant l'hostilité des habitants. Après la chute de Samory, le Gouvernement général profite du prestige acquis sur les indigènes pour reprendre le projet.

Deux missions sont organisées. L'une partant de la Côte d'Ivoire remontera le Cavally ; l'administrateur Hostains et le lieutenant d'Ollone en sont chargés'. L'autre partant du Soudan, descendra le Diougou ou Cavally pour s'unir à la précédente ; cette mission est confiée au lieutenant Woelfel, qui avait déjà, l'année précédente, accompli une première reconnaissance de la région (voir § 45).

Accompagné de 130 tirailleurs du Régiment Soudanais (lieutenant Mangin, docteur Lemasle, sergent Ariste), le lieutenant Woelfel se met en route le 19 mars et de Beyla se dirige sur Lola où il entre 8 jours après. Un poste y est créé et laissé à la garde du sergent Ariste avec 30 tirailleurs.

Ce poste se tiendra en relation constante avec le détachement, de façon à lui expédier courriers et vivres.

Dans une reconnaissance aux environs du poste pour Uter le terrain, le lieutenant Mangin est attaqué et retourne à Lola avec deux hommes blessés. En présence de cette attitude, le lieutenant Woelfel envoie Mangin à Man, village qui s'est rallié à nous, pour y recruter des auxiliaires. Le lieutenant Mangin rejoindra ensuite le gros de la colonne.

Bien accueilli à Man, le lieutenant Mangin reçoit des renforts et repart pour le Sud. Le 30 avril 1899 à Ninéné, il se heurte à une sérieuse résistance et est obligé d'enlever le village d'assaut. Harcelé par les Gbololo, le lieutenant arrive le 3 mai à Gouatongui avec un homme tué et 3 blessés et y rejoint son chef venu de Nzo.

La mission se porte alors sur Guékangoui. Averti que-


les gens de Danané veulent lui barrer la route, le lieutenant Woelfel partage sa troupe en deux fractions pour abaMer le village par deux chemins différents et évite ainsi un désastre.

En effet, les Gbololo coupant par des abatis la route habituelle de Danané, ont aménagé une belle route bifurquant sur une clairière semée de bas-fonds, dont les crêtes sont garnies de tireurs ; ils espèrent que les Français tomberont dans ce piège. Mais le lieutenant Woelfel s'arrête à la bifurcation, pour attendre que le lieutenant Mangin soit. parvenu sur les derrières du. village. Se lançant alors en avant, il entre à Danané et en chasse les habitants.

La colonne ne tarde pas à être assiégée dans le village.

Huit jours de lutte triomphent des Gbololo qui se soumettent.

Nous avions 2 tués et 6 blessés, dont le lieutenant Mangin.

La colonne reste à Danané jusqu'au 15 juin. A cette date le lieutenant Mangin marche sur- Logoualé ou les Yaro se s'ont rassemblés en armes et s'en empare après un vif combat, qui lui coûte 5 tués et 8 blessés.

De son côté le lieutenant Woelfel pousse une pointe dans le Sud. 11 fonde un poste à Nouantoglouin et décide d'y passer l'hivernage, remettant à la bonne saison pour se relier à la mission Hostains qu'il sait parvenue à 70 kilomètres de là.

Pendant l'installation du poste, de fréquentes patrouilles circulent pour éloigner les Yaro toujours rebelles. Ceux-ci essaient plusieurs fois, mais sans succès, d'assaillir le' poste'.

A la fin d'août, le lieutenant Mangin les disperse à Logoualé, où il est encore blessé.

A ce moment le poste est achevé et le lieutenant AYoelïel se dispose à rejoindre AI. Hostains ; mais il est arrêté par des ordres du Ministre des colonies et, peu après, rappelé.

On peut, néanmoins, considérer la jonction du Soudan et de la Côte d'Ivoire, par l'Ouest, comme réalisée. Et, en effet, en décembre 1899 la mission Hostains-d'Ollone était signalée à Nzo.


DU NIGER AU TCHAD (1898-1900)

S G3. — Mission Cazemajou (1898).

La mission du capitaine Cazemajou (du Génie) (28) était composée de l'interprète Olive, de l'interprète indigène Badié Diara, du sergent Samba Taraoré, du caporal Kouby .Keïta, de 16 tirailleurs de la 18° compagnie et de 16 domestiques ou palefreniers civils. Elle devait marcher vers l'Est jusqu'au Tchad, pour tenter de relier nos possessions du Soudan à celles du Chari.

Le massacre de cette mission a fourni l'occasion, à un groupe de gradés indigènes et de tirailleurs du Régiment Soudanais, d'accomplir à Zinder un fait d'armes qui s'apparente aux pages militaires les plus héroïques de tous les temps et de tous les pays.

La mission quitte Karimama (sur le Niger) le 10 décembre 1897 et arrive le 11 avril a Zinder, sans autre incident que la désertion d'un domestique. Reçue avec de grandes démonstrations d'amitié, la mission guidée par le chérif (ou envoyé du sultan) s'installe à 1.200 mètres du village dans une soukala fortifiée, où on lui envoie des vivres.

Au bout de 20 jours, le 2 mai 1898, la mission se dispose à repartir et le capitaine fait demander au Serky (29) une entrevue. Deux jours après le chérif vient chercher le capitaine et l'interprète Olive et les conduit au Serky dont l'accueil est très bienveillant. Le capitaine lui remet quelques présents, puis se rend avec l'interprète chez un indi-

(28) Cet officier avait exploré en avril 1897 la boucle de la Volta Noire (Voir § 33).

(29) Nom local du sultan.


gène qui doit lui livrer des chameaux, 3 de leurs domestiques restant à la porte. Au bout d'un quart d'heure, une bande de 40 hommes armés survient, le capitaine et Olive sont traînés et assommés à coups de bâton. Les domestiques sont emprisonnés ; le sergent indigène Samba Taraoré et un tirailleur qui étaient allés au marché subissent le même sort.

Aussitôt après le meurtre des deux Européens, un cavalier se dirige vers le camp de la mission et appelle l'interprète Badié Diarra. Celui-ci s'avance et est aussitôt saisi ainsi que le gardien du troupeau, ils vont rejoindre les autres prisonniers dans le tata du Serky. Le sultan fait alors interroger Badié Diarra et après s'être assuré qu'il est musulman, hii offre de rester à son service ; il déclare qu'il a fait tuer les deux Européens parce que c'étaient des infidèles et qu'ils allaient porter des munitions et des armes à Rabah, son ennemi. Badié Diarra refuse. Pendant ce temps, le caporal Kouby Keïta, resté au campement avec 12 tirailleurs, est attaqué par trois groupes comptant plusieurs centaines d'hommes, armés de fusils à tir-rapide, d'arcs et de flèches. Il organise la défense avec ses tirailleurs et les domestiques présents et accueille l'ennemi par une fusillade bout portant. A 15 heures un nouvel assaut est encore repoussé ; l'ennemi a une centaine de morts, les tirailleurs ont 3 tués et 4 blessés. Profitant de ce succès, Kouby Keïta fait dire au Serky que, si les prisonniers ne lui sont imméDiatement rendus, il prendra et brûlera Zinder. Il faut savoir que cette ville, entourée d'un tata, compte 9 ou 10.000 habitants et qu'il reste à Kouby Keïta 8 tirailleurs valides.

Le Serky lui envoie un marabout qui raconte le massacre et offre la paix moyennant 1.500 thalers. Le caporal accepte, mais à la condition qu'on lui rende les corps des chefs de la mission. Pour affirmer sa volonté, il incendie pendant la nuit quelques cases voisines de la ville, sans que l'ennemi ose bouger.


Le lendemain 6 mai, les prisonniers sont rendus. Le Serky fait proposer aux tirailleurs de rester à son service ; mais ils répondent qu'il faut d'abord restituer les corps des blancs, qu'on verra ensuite.

Le 7 mai, le Serky fait demander les 1.500 thalers promis.

Les tirailleurs, pressés par le manque de vivres, se décident à envoyer 200' thalers. C'est Kouby Keïta qui les porte lui-même au Serky et obtient des vivres et de nouvelles promesses. Dans l'après-midi du 8, le Serky change de ton -et annonce une attaque pour le lendemain. Le sergent Samba fait dire au Serky que, puisqu'il se moque des tirailleurs, ceux-ci vont recommencer la guerre. La nuit venue, le caporal Kouby Keïta et 6 hommes partent « faire patrouille », ils brûlent encore plusieurs cases près du tata et tuent quelques isolés.

Le 9 mai, dès le jour, le caporal sort de nouveau pour « faire patrouille » ; il aperçoit une forte colonne sortant du tata ; il commence aussitôt le combat en se repliant. Le .combat dure jusqu'à midi, l'ennemi est obligé de se retirer.

L'escorte a eu comme blessés, un tirailleur et deux domestiques ; d'après des renseignements donnés par un captif, l'ennemi aurait eu 8 chefs tués et un grand nombre de guerriers tués ou blessés.

Le 10 mai, le sergent Samba Taraoré fait occuper les puits voisins et en interdit l'approche aux habitants. Les tirailleurs les gardent les journées des 11, 12 et 13, mais le 14 au matin ils sont assaillis par une nuée de guerriers et obligés de se retirer sur le campement. Kouby Keïta meurt en y arrivant, blessé d'une flèche empoisonnée. Après une lutte acharnée, l'ennemi abandonne encore une fois la partie.

Mais, outre le caporal, 2 tirailleurs sont tués, 3 hommes sont blessés dont un domestique. Les munitions s'épuisent et la situation devient critique.

Les survivants décident de profiter de la nuit pour reprendre le chemin de l'Ouest. Les thalers restants sont partagés entre eux. L'interprète Badié Diarra réunit tous les


papiers du capitaine et la petite trou.pe, ayant' placé' ses blessés les plus gravement alteints sur les chevaux qu'elle■ a encore, se met en route sans: bruit vers lil- heures du-soirMais le départ est vile connu. Des. le premier jour) des' bandes de cavaliers les poursuivent. Harcelés nuit' et jour, ces braves gens se battent.sans' arrêts. Mourant de f&im et de soif, ils abattent deux de leurs chevaux pour boire leur sang: eL manger leur chair crue. Enfin. ils arrivent à la: limite diu sultanat de Zinder et la poursuite cesse, 'Pendant cesderniers jours, un homme avait été tué et 3 blessés. A partir' de ce moment, la petite Lroupe peut continuer tranquilles ment sa route et est bien reçue partout. Le 8-juillet 1898-ils?

arrivent à llo d'où ils sont dirigés sur Say.

Sur 33 indigènes appartenant à la mission, il y a.7 tues cl 11 blessés. Sur ces chiffres les tiraillburs-comptent 0'tuéset 9 blessés. Trois seulement sont revenus indemnes ; l'un d'eux a 9 blessures, un autre 7, le troisième 31

S () j. — Mission Voulet-Chanoifte, puis Joalland;'Meynier' (1899-1900) (30).

A la suile du massacre de la mission Cazemajou, le Gouvernement décide d'envoyer une autre mission, chargée de traverser les régions situées entre le Niger et le lac Tchad, d'entrer en relations avec les divers chefs, d'étudier et préciser les limites de la zone d'influence française théoriquement fixée par l'a.ccord franco-anglais du M juin 1898, enfin de faire sa jonction sur les bords du Tchad, avec la mission Foureau-Lamy venant d'Algérie et la mission Gentil venant du Congo.

Gel le mission, connue sous le nom de « Mission Afrique Centrale » ou « Mission VouleL-Chanoine », est confiée au capitaine Voulet, de l'infanterie de marine, ayant comme adjoint Je capitaine Chanoine, des spahis sénégalais. Elle

(30) Voir croquis N'° 7.


comprend en outre : les lieutenants Pallier et Péleau, de l'infanterie de marine, Joalland, de l'artillerie de marine et le docteur Henric ; 3 sous-officiers européens, sergent-major Laury, sergent Bouthel, maréchal des logis Ton rot. L'effectif de l'escorte est de 600 tirailleurs réguliers (du Régiment Soudanais) ou auxiliaires. 100 spahis, 1 pièce de 80 de montagne, 2.000 porteurs ou femmes de tirailleurs.

Concentrée le 2 janvier 1899 a Sansané-houassa, la mission quitte le Niger le 12 se dirigeant vers HamdllJlaye, mais est obligée par le manque d'eau de revenir au fleuve. A la suite de dissentiments, le lieutenant Péteau est renvoyé à Say. La mission se reforme à Gava, d'où elle repart le d8 février.

Par Dogondoutchi, Matankari, Birni-nkonni elle arrive près de Tessaoua où se passe le drame de Dankori (14 juillet).

Le lieutenant-colonel Klobb, venu de Tombouctou avec le lieutenant Meynier pour relever de leur commandement les capitaines Voulet et Chanoine, est assassiné par ces deux officiers, qui, deux jours après, sont eux-mêmes massacrés par leurs propres tirailleurs.

Pendant six semaines, la mission, passée au commandement du lieutenant Pallier, continue vers l'Est, recevant la soumission du sultan de Tessaoua, chassant de sa capitale le Serky ou sultan de Zinder qui est tué le 13 septembre, -au combat de Rumj-i, par le sergent Suley Taraoré, du Régiment Soudanais, à la tète d'un détachement de poursuite comprenant 50 tirailleurs du même régiment.

Le 4 septembre, le lieutenant Pallier, avec le docteur Henric et les sous-officiers Laury et Tourot, quittent Zincler, Tentrant au fleuve avec une partie des tirailleurs et le personnel non indispensable ; ils arrivent à Say le 14 novembre.

De ce fait, la mission réduite à 165 fusils avec le canon de :80, passe sous le commandement du capitaine .loalland (promu à ce grade le 2 juin 1899) et du lieutenant Meynier.

La « Mission Joalland-Meynier » quitte Zinder le 3 octobre, continuant sa progression vers l'Est. Elle atteint Nguigmi


sur les bords du Tchad le 24 octobre, et fait sa jonction avec la mission Gentil le 10 janvier 1900.

Les trois missions réunies livrent le 22 avril 1900 la bal aille de Koussouri à l'armée du sultan Rabah, qui est tué. Du côté français, 2 officiers et 20 tirailleurs sont tués, 4 officiers blessés dont le lieutenant Meynier.

Après la prise de Dikoa, capitale de Rabah, les trois missions victorieuses se séparent. Le capitaine Joalland reprend, avec ce qui lui reste de tirailleurs, la route du Soudan et arrive le 10 juillet 1900 à Zinder.

En attendant sa relève par le capitaine Moll et des troupes nouvelles, Joalland inflige au village de Tana-Mari une sévère leçon aux Touareg insoumis qui cherchaient à l'attaquer. L'adjudant Bouthel et le sergent indigène Moussa Kéïta se distinguent au cours de cette opération par leur énergie et leur bravoure.

Le 30 octobre, le capitaine Moll succède à Joalland.

Sur le point de changer de nom par application des mesures consécutives à la réorganisation des troupes coloniales, le Régiment Soudanais aura apporté sa dernière collaboration à une des pages les plus brillantes de l'histoire coloniale, à savoir la conquête du Tchad, méritant ainsi de voir inscrire le mot « Tchad » parmi le nom des batailles inscrites au drapeau de son successeur, le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais.

§65. — Installation du Régiment à Kati (1899).

En janvier 1899, la portion centrale du Régiment de Tirailleurs Soudanais et l'Etat-Major du régiment, installés à.

Kayes depuis sept ans, furent transférés sur le plateau de Kati, situé à une douzaine de kilomètres au Nord de Bamako, ville qui devait elle-même devenir la capitale du Soudan Français. L'occupation du camp de Kati date donc de cette époque.

Le Régiment commandé par le colonel Vimard compre-


nait alors l'effectif considérable de 22 compagnies, effectif justifié par le nombre- d'opérations importantes, dont le Régiment Soudanais avait été l'agent principal, et qui avaient amené (voir ci-après § 67) la conquête et l'occupation d'un territoire ayant déjà une superficie double de celle de la métropole.



DEUXIÈME PARTIE

LE 2ème SENEGALAIS DU 7 MAI 1900 A 1933



DEUXIÈME PARTIE

LE 2e SENEGALAIS DU 7 MAI 1900 A 1933

A. — AVANT LA GUERRE (1900-1914)

§66. - Création du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais.

Par décret du 7 mai 1900, le Régiment de Tirailleurs Soudanais, dont la portion centrale et l'Etat-Major sont stationnés au camp de Kati, devient le 26 Régiment de Tirailleurs Sénégalais.

Ce nouveau nom peut sembler moins bien adapté que le précédent à son stationnement et à ses destinées.

En effet, le régiment stationné à Kati est essentiellement la force militaire du Soudan ; il recrute, dégrossit et transforme en tirailleurs toutes les races de cette immense colonie, constituant ainsi depuis plus de trente ans le gigantesque creuset où viennent se connaître, se fondre et en partie s'uniformiser toutes les races du Haut-Sénégal et de la boucle du Niger. De même que son glorieux prédécesseur avait été essentiellement l'agent de la conquête soudanaise, le nouveau corps allait se voir confier non une simple tâche passive d'occupation, mais une tâche active d'extension et de pacification dans laquelle plusieurs de ses Unités ont eu à se distinguer. Il allait aussi, au moment où toutes les énergies nationales étaient nécessaires pour lutter contre l'envahisseur, être appelé à fournir une collaboration


intense, quoique indirecte, à la défense nationale, en recrutant et en instruisant des milliers de tirailleurs qui furent ensuite dirigés sur les champs de bataille du front français ou du front d'Orient.

§ 67. — Situation du Soudan en 1900.

La fin du xixe siècle, le remplacement de la vieille infanterie de marine par la coloniale, coïncident exactement avec la fin de la période de grande conquête au Soudan. A cette période va succéder, à partir de l'année 1900, celle de la pacification et de l'organisation.

Dès 1899, le Soudan avait atteint ses limites extrêmes et formait un bloc d'un seul tenant, déjà grand comme deux fois la France. Il était alors divisé en 4 régions et 4 cercles indépendants : Région Ouest, chef-lieu Bamako, comprenant les cercles de Bamako, Kita, Ségou, Djenné ; Région du Sahel, chef-lieu Nioro, comprenant les cercles de Nioro, Goumbou, Sokolo ; Région Nord et Nord-Est, chef-lieu Dori, comprenant les cercles de Koutiala, Sikasso, Bobo-Dioulasso, Kouri, Diébougou, Kong, Bouna et les résidences du Mossi et du Gourounsi ; Région Sud, chef-lieu Siguiri, comprenant les cercles de Siguiri, Dinguiraye, Kouroussa, Bouguuni, Kissidougou, Kankan, Beyla, Touba.

Cercles indépendants : Kayes, Médine, Bafoulabé, Satadougou.

A la tête de cet ensemble se trouvait un lieutenantgouverneur, qui avait été jusqu'en :1800, le général de Trentinian.

Mais le décret du 17 octobre 1899 substitue au régime



militaire le régime civil et ampute le Soudan d'un certain nombre de cercles au bénéfice des colonies voisines, Guinée - et Côte d'Ivoire. Désormais la colonie (1) ne comporte plus que deux territoires militaires, commandés par des officiers supérieurs et dépendant directement du gouverneur général: 1er territoire militaire, chef-lieu Tombouctou.

2e territoire militaire, chef-lieu Bobo-Dioulasso.

La sécurité, la pacification et l'extension progressive de l'occupation continuent à être assurées par le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais. Comme précédemment, un commandant supérieur des troupes assure la direction de l'ensemble au point de vue militaire.

§ 68. — Répartition et activité des Unités du 2° Régiment de Tirailleurs Sénégalais à sa création (2).

En mai 1900, le régiment dont le nom vient d'être changé en celui de 2e Sénégalais occupe non seulement la colonie du Soudan telle qu'elle vient d'être réorganisée, mais déborde par ses unités les plus actives sur la Guinée, la Côte d'Ivoire et le futur territoire de Zinder.

Voici, en effet, un tableau, aussi complet que possible, du champ d'action de ses diverses unités : La lre compagnie, précédemment à Bafoulabé, et venue vers la fin de janvier à Kati, n'a pas tardé à quitter ce poste (5 mars 1900) sous les ordres du lieutenant Beaudu pour se j rendre en Côte d'Ivoire, après être passée par Bougouni, j Sikasso et le poste du Bandama, est arrivée le 10 avril à Bouaké. Là le capitaine Lemagnen en a pris le commande-

(1) La colonie du Soudan français prendra successivement les j noms suivants : « Sénégambie et Niger » (octobre 1902), « Haut- 1 Sénégal et Niger » (octobre 1904), avant de reprendre en 1920 celui , du « Soudan ». j

(2) Voir croquis N° 6.


ment et dès le 15 mai a emmené 3 sections en opérations dans la région du Baoulé, laissant une seule section, avec l'adjudant Rinn, à Bouaké. Un poste d'une section (lieute-

nant Beaudu) est créé à Kouadiokoffi et un autre, ayant même composition (lieutenant Gérard) ;i Lomo.

La 2° compagnie (capitaine Letendre) occupe les deux postes de Koutiala (lieutenant Facon avec 3 sections) et San (sous-lieutenant Monin avec une section).

La 3e compagnie, de Dori, vidée au mois de février de 60 hommes passés à la 5e avec le lieutenant Guerrier et 70 hommes passés à la 6e avec le lieutenant Albin, et restée provisoirement à l'effectif de 40 indigènes sous le commandement du lieutenant Brochot, a été mise avec le sergent Fardet à la disposition du capitaine résident à Ouahigouya pour prendre part à des opérations de police dans le Yatenga. Au cours de ces opérations, elle vient d'avoir, à la prise de la grotte de Dio (21 février), 1 tirailleur tué et 3 blessés et est rentrée à Dori depuis le 28 mars.

La 4e compagnie est scindée en trois détachements occupant des postes de la rive gauche du Niger : Bamba, avec le -capitaine Méc.het (lequel vient de succéder au capitaine Quérette) et 64 tirailleurs ; Tosaye, avec le lieutenant Martel et 28 tirailleurs ; Gao avec le sous-lieutenant de Lavigerie et 30 tirailleurs.

La 50 compagnie, précédemment a Dori, est depuis le 18 avril également sur la rive gauche du Niger : Say avec le capitaine Lambert et 94 hommes ; Dosso avec- le lieutenant Michel et 79 hommes ; Selba avec l'adjudant Jégou et '24 hommes (poste supprimé le 14 juillet suivant). Le capitaine Moll, qui va prendre le commandement au mois de juillet 1900, se dispose à partir dans la direction de Zinder.

La 6e compagnie, commandée par le capitaine Gremillet, -est en station depuis la fin de l'année précédente à Tombouctou (129 hommes), avec un petit poste de


27 hommes à Kabara. Du 5 au 13 mai, un détachement de 80 tirailleurs, commandé par le lieutenant Âlbini récemment venu de la 3P compagnie, est; mis sous les ordres du capitaine Henrys de l'Etat-Major pour une tournée de police aux environs de Tombouctou,. aiai cours de laquelle des campements insoumis sont enlevés à Tineguel et Kokochi, ce qui représente 300 prisonniers,. 100 chevaux, 3.000 bœufs, 5.000 moutons.

La T compagnie, stationnée à lvouroussa jusqu'en juillet de l'année précédente, a quitté ce poste sous le commandement du capitaine Dauvilliers pour fonder ceux. de Kissidougou et de Sampouyara, après une série de dures randonnées en pays Toma, dans la vallée de la rivière Toffa ou Doffé. Parmi les principaux combats livrés au cours de ces luttes incessantes, on peut citer ceux de Kongola et de Legouan livrés par les lieutenants Raymond et. Leseurre (10 et 10 septembre 1809), qui nous ont coûté chacun plusieurs blessés. En février-mars, la 7e compagnie a pris part, à la colonne du Kissi-Sucl, commandée par le chef de bataillon Conrart. avec comme adjoint le capitaine d'artillerie coloniale Charnet. Plus récemment (1er mai) le combat de Tankollo a encore coûté des perles à l'unité. Le poste de Sampouyara se trouve à ce moment commandé par le lieutenant Dasque.

La 8° compagnie, commandée par le capitaine Tiffon puis, à partir du mois de juin, par le capitaine Ruby, occupe les deux postes de Diébougmi (70 hommes) et Lokhosso (40 hommes) et vient d'évacuer le petit poste provisoire de Pintouri. Les deux officiers de la compagnie, lieutenant Haillol (remplacé par le lieutenant Schwarlz), et lieutenant Ouilichini, sont sans arrêt en reconnaissance dans'le Sud du Lobi et jusqu'à Houna. La compagnie a dans le même moment un détachement de 30 hommes comme escorte de la Commission franco-anglaise de délimitation (mission Delafosse).


La 9e compagnie, à Bobo, commandée par le capitaine Bachot, vient de voir rentrer le 11 avril le détachement de 61 tirailleurs, en reconnaissance dans le Tierla sous les ordres du lieutenant Desportes depuis le mois de février et se dispose à envoyer au début de juin une autre reconnaissance de 50 tirailleurs, sous les ordres du lieutenant Oyaux, dans le Niénégué.

La 10e compagnie, commandée par le capitaine Berger à Koury (85 hommes) a un poste de 20 hommes à Boromo sous les ordres du sergent-major Wagner.

La 11e compagnie occupe les postes de Gao et d'Ansongo sur le Niger, respectivement avec 2 sections et demie sous les ordres du lieutenant Théveniaut et I section et demie aux ordres du lieutenant Bergeron.

La 12e compagnie a sa portion centrale à Soumpi (46 hommes) d'où le capitaine Disdier vient d'être évacué pour maladie ; il a été remplacé dans le commandement de l'unité par le lieutenant Quarez. Deux postes à Goundam et Ras-el-Ma, 25 et 50 hommes respectivement avec les lieutenants Jérusalémy (puis Desplagnes)* et HarclelIet.

La 13e compagnie, précédemment à Kayes, est depuis le mois de mars- à Kati, avec le capitaine Malafayde qui se trouve rapatriable en juin ; un petit, poste à Toukoto sur le chemin de fer, 20 hommes avec le sergent Guillaumet ; enfin depuis le mois de février, un petit détachement provisoire de 25 hommes, commandé par le lieutenant Lucas, à Boussoura en pays Coniagui dans le Nord du cercle de KadéTouba (Guinée).

La 14e compagnie a été disloquée au mois de mars, par le départ du capitaine Letendre passé à la 2°, du lieutenant Coiscaud rapatrié et du lieutenant Leblond passé à la 9e.

Compagnie-squelette représentée depuis lors à Bobo par un sergcnt-major ; sera transférée en écritures, le mois suivant (juillet), à Kati, où elle recrute sous la direction du lieu te-


nant Curault ; puis dès qu'elle aura atteint l'effectif de 150 hommes, sera envoyée à Dounzou et Sinder sous le commandement des lieutenants Thorin et Renault.

Là 15e compagnie à Sikasso (capitaine Crété) a fourni en février, mars et avril un détachement de 50 hommes, sous les ordres du lieutenant Citerne, qui a fait colonne dans le Tierla (cercle de Bobo-Dioulasso) en liaison avec le lieutenant Desportes de la 9e compagnie.

La 16e compagnie a 2 sections à Dounzou sous les ordres du capitaine Moll, une à Sinder avec le lieutenant Bachellez et une à Yatakala avec le lieutenant Figeac. Le poste de Dounzou fait preuve d'une activité incessante : le 25 janvier une sortie prononcée contre les Touareg a fait 550 prisonniers (dont GO blancs) et ramené 6.000 moutons. Une autre tournée également fructueuse est en cours, du 14 avril au 15 mai. En juillet le capitaine Moll va passer à la 5e compagnie et le commandement passera au lieutenant Figeac.

La 17e compagnie, portion centrale à Kati (lieutenant Bontems) avait depuis le mois de février les 3 sections des lieutenants Massé, Fébure et Dumas à la colonne du KissiSud (Haute-Guinée) avec la 7e compagnie : ces 3 sections sont rentrées à Kati le 15 avril, mais pas pour longtemps car le 15 juillet toute la compagnie, à l'effectif de 150 indigènes, va partir pour Koury sous le commandement du lieutenant Fébure.

La 18e compagnie, commandée par le capitaine Sagols,.

précédemment à Bobo-Dioulasso, a été envoyée au mois de février 1900 en Côte d'Ivoire. Maintenue 15 jours à Dabakala, autant à Bouaké, puis à Kouadiokoffi, Toumodi, Ouossou,.

elle est occupée à améliorer la sécurité et les routes autour de cc poste, et pousse d'incessantes reconnaissances sur Lomo, sur Ivokombo, Dida, etc. tantôt sous les ordres du lieutenant Buck, tantôt sous ceux du commandant de compagnie en personne. Au mois d'août, cette unité


s'installera à Kouadiokoffi (119 hommes) et Toumodi (35 hommes).

Enfin les numéros 19 et 20 seront donnés le 1er août à 2 compagnies de nouvelle formation, créées à Kati et .chargées de recruter sous la direction du lieutenant Curault. En septembre 1900 la 19e compagnie, forte de 150 hommes, sera dirigée sur Dori sous le commandement du lieutenant Larroque. La 20e compagnie ne tardera pas à prendre une part brillante aux opérations sur la rive gauche du Niger qui amènent la formation du 3e Territoire militaire ou Territoire de Zinder.

§ 69. — Conquête du pays Baoulé en Côte d'Ivoire (1900-1901).

Parmi les foyers de dissidence, que la réorganisation de 1899 faisait désormais extérieurs au Soudan, et où le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais avait détaché ses compagnies les plus actives, les deux principaux sont la HauteGuinée et la Côte d'Ivoire.

En Guinée, la 7e compagnie est maintenue à Kissidougou jusqu'à la fin de l'année 1901. Successivement commandée par les capiLaines Angot, Boulard, Méchet, CauteneL et Bénédetti, elle continue à prendre une part active à la pacification du pays Toma, puis rentre à Kayes, où la vie de garnison sera pour elle interrompue toutes les fois que la Guinée, privée d'une organisation militaire suffisante, aura a réduire des incidents locaux (voir § § 82 et 84).

La Côte d'Ivoire, qui dispose également de forces militaires insuffisantes pour la lourde tâche de la pacification, conserve durant plusieurs années des unités du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais.

La lre compagnie, de Kouadiokoffi, mène jusqu'à la fin de l'année 1900 une série ininterrompue de patrouilles et de reconnaissances, au cours desquelles les lieutenants Beaudu et Gérard, le sergent-major Baulier, etc. font du recensement, visitent et soumettent les villages Nzipouin, ont


maille à partir avec les Fari et les Faafoué impatients de toute autorité. En 1901 cette unité remonte à -Xoury -au 1. sommet de la, boucle de la Volta Noire, pour travailler en pays Lobi, et est remplacée à Kouadiokoffi et Toumodi ,par la 18e compagnie.

Du 8-avril au 27 juin 1901, un détachement de la 10e compagnie de Sikasso (50 tirailleurs commandés par l'adjudant Nanti) est mis à la disposition du capitaine Moreau, commandant la subdivision de Séguéla, pour opérer des tournées de police dans les environs de ce .poste.

Mais c'est surtout dans le cercle de Bouaké, commandé par le chef de bataillon Aymerich, que la 17e compagnie du 26 Régiment de Tirailleurs Sénégalais (capitaine Sponville, lieutenants Stephan et Gérard) a à travailler, en liaison avec la lle compagnie du let Sénégalais (lieutenant Mailles), pour faire progresser la pacification du pays Baoulé. Les principales étapes sont marquées par la création des postes-de Tiéplé (février 1901), d'Afouékro, Sensénou (mars), Soungba, Yabnuékro sur le Nzi (avril), etc., jusqu'au moment où la 17e compagnie est supprimée et où la colonie de la Côte d'Ivoire cesse d'avoir recours au 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais.

§ 70. — Colonne des Samo (janvier-mars 1901).

Certains événements survenus au cours de l'année 19Û0 avaient montré que l'intérieur de la boucle du Niger, comprenant le Gourma, le Hombori, le cercle de Dori, le Macina-Est (Bandiagara), et surtout le pays Samo (ou Samoro) au Sud de Bandiagara, avait besoin d'être parcouru par une force mobile, destinée à ramener — si-possible sans violence — ces populations au respect de l'autorité. Les seuls postes militaires alors occupés à la périphérie de cette zone étaient au Nord Tombouctou et Bamba, au Sud Bandiagara (peloton de spahis), Dori et Djibo, où la 3e compagnie, de Dori, détache en février 1901 un poste de i sousofficier européen et 25 tirailleurs.


Cette mission fut confiée à la compagnie du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais à Tombouctou, qui fournit à cet effet, en janvier 1904, sous le commandement du capitaine de Rostang (qui avait succédé dans le commandement de l'unité au capitaine Grémillet en octobre 1900) un détachement fort de :

1 pièce de canon.

60 tirailleurs, avec 2 sous-officiers européens et le docteur Lasselves, médecin de lre classe de la marine.

Ce détachement avait pour mission d'opérer une tournée de police dans l'Est-Macina, avec plus spécialement comme objectif le pays Samo en direction de Louta et Tougan.

La concentration a lieu à Hancliap-ara, où le détachement est renforcé par :

1 jicl; fn de spahis.

s• <■ îii;11 de gardes-frontières à pied.

La colonne est placée sous le commandement du capitaine de Batz (cavalerie hors cadres) adjoint au commandant du 1er Territoire militaire.

Elle quitte Bandiagara le 20 janvier, et y rentre le 13 février après avoir suivi, sans incident notable, l'itinéraire suivant : Kani-Kombolé, Louta, Dagalé, Donkou, retour à Louta, Baï sur la rivière Sourou ou Bagué, Dimbal, rentrée à Bandiagara et dislocation.

Le peloton de la 6e compagnie est de retour à Tombouctou le 13 mars 1901.

§ 71. — Occupation du Lobi (3V.

A l'intérieur de la colonie du Soudan, un important foyer

(3) Voir croquis N° 4.


de dissidence subsistait dans la région de Gaoua et de Diébougou' (boucle de la Volta Noire), habitée par des populations de races Lobi, Oulé, Birifor, Dagari, Bougouri, etc.

de caractère farouchement indépendant et belliqueux.

A part l'occupation des postes de Diébougou et de Lokhosso, l'action militaire s'était bornée à des reconnaissances et tournées à fa.ible portée et sans résultat durable.

Parmi celles-ci on peut citer : — affaire de Kombou, 16 janvier 1809, où les lieutenants Modest et Schwartz, de la 8e compagnie de Diébougou (capitaine Tiffon commandant la compagnie) se heurtent à une' défense sérieuse du village, qui nous coûte 2 tués (dont le sergent Thouron), 1 disparu et 12 blessés ; — du 23 au 26 avril, le capitaine Tiffon. commandant la 8e compagnie organise, avec un canon et 3 pelotons (lieutenant Schwartz de la 8e, lieutenants Desportes et Renard des 9e et 18e de Bobo-Dioulasso), une colonne pour châtier le village de Kombou ; — en mai, la 18e compagnie de Bobo (capitaine Marchaise avec le sous-lieutenant Goguelu) fait une expédition punitive contre les villages de Simona, Nampéla, Toro près de Koury qui nous coûte 1 tirailleur tué ; — à partir du mois de juin, le capitaine Ruby, qui prend le commandement de la 8e compagnie, organise avec les lieutenants Haillot et Quilichini d'incessantes tournées de recensement, de paiement d'impôts. L'une d'elles, dirigée contre le village de Naflringué (16 au 21 décembre 1900), nous coûte un blessé, mais inflige une sévère leçon aux Oulé, qui ont une vingtaine de tués et une trentaine de blessés.

En même temps la 9e compagnie, de Bobo, dont le capitaine Baudelaire vient de prendre le commandement en remplacement de Bachot, mène avec les lieutenants Oyaux et Leblond (remplaçant Desporles) une seconde reconnaissance dans le Niénégué (décembre 1900), qui ne sera du reste pas la dernière dans ce coin difficile.


A partir de 1901, les Lobi et les Birifor sont en état de rebellion permanente ; chaque tournée de route, de recensement ou d'impôt devient une expédition militaire.

En janvier-février 1901, le capitaine Ruby, commandant la 8e compagnie à Diébougou, organise une reconnaissance importante dans le Sud du Lobi proprement dit, comprenant :

92 tirailleurs de la 8e, avec le lieutenant Quilichini et l'adjud. Roth; 1 pièce de 80 de montagne; 14 conducteurs et 20 cavaliers auxiliaires..

La concentration a lieu à Lokhosso. Au cours de sept engagements avec les rebelles, la colonne a 6 blessés dont 4 tirailleurs ; elle inflige à l'ennemi des pertes s'élevant à 16 tués et 30 blessés environ.

En mars, on ne note pas moins de 3 expéditions punitives contre les villages lobi de Nako, Intoyéri, Nakoni. Il en est de même tous les mois suivants.

Le 27 novembre 1901, au cours de l'assaut du village de Diboulou par le capitaine Ruby et le lieutenant Piard, nous avons 1 tué et 5 blessés, tous auxiliaires, contre 35 tués du côté adverse.

Le 9 décembre, 2 tirailleurs blessés à l'attaque du village de Boumi ; 1 tirailleur noyé au passage de la rivière Bougouri-ba.

En décembre 1901 et janvier 1902, une colonne importante opère dans la boucle de la VoIla sous le commandement du commandant de Béchevel, commandant le 2e Bataillon à Bobo-Dioulasso. Elle comprend 2 pièces de 80 de montagne et 3 détachements fournis par les lre et 9e compagnies, respectivement sous les ordres du capitaine Courjon (avec les lieutenants Mongin et Diam-diaye), des capitaines Boussot et Cautenet. L £ concentration a lieu à Ouarkoye le 30 décembre 1901 et le lieutenant-colonel Millard, commandant le 2e Territoire militaire, assiste au début des opérations.


L'itinéraire suivi est le suivant ; Sanaba,. Ouaraikuy (5 cavaliers auxiliaires blessés de notre côté, 23î hiés et ■iS» prisonniers chez les rebelles), Daboura, Solens-ot, Béma, Molé, Konka, Fini, Kondougou (dislocation le 15 janvier 1002). Le détachement de la Lm compagnie rentre à Koury le 30 janvier et celui de la fie compagnie à Bobo quelques jours plus tard.

Tous ces efforts n'amènent que des résultats strictement locaux et sans lendemain.

La création du poste de Gaoua, au centre du pays Lobi proprement dit, et le transfert dans ce poste du centre de la 8° compagnie (1er avril 19021 permettent une surveillance plus directe, mais d'autre part exaspèrent les populations par les prestations et, travaux de routes qui leur sont.

imposés.

Puis une épidémie s'abat sur la Fo compagnie de Koury.

A la suite d'une visite du médecin-major Ruelle, envoyé spécialement de Kati par le chef de corps, la compagnie est disséminée : le capitaine Angéli, lieutenant Le Jariel, lieutenant indigène Diam-diaye avec 50 tirailleurs dans le Nord du cercle ; lieutenant Pierre avec 5 sous-officiers européens et 33 tirailleurs à Dangoumana. Le poste de Roromo reste occupé par une douzaine d'hommes, sous le commandement de l'adjudant Vaucherel, puis bientôt du lieutenant de Montalembert (novembre-décembre 1902).

En 1903, conformément aux instructions reçues, le capitaine Pelletier inaugure une « politique d'apprivoisement », dont les effets sont longs à se faire sentir.

Ainsi en novembre lmH, un tirailleur occupé au débroussaillemenl de la route de Gaoua à Diébougou est assassiné par les habitants du village de Tumbis. Le capitaine Dominé, commandant la 8e compagnie, se rend sur les lieux avec un détachement de 60 hommes et casse le village.

En 1905, on ne peut dénombrer les incessantes tournées du capitaine Dominé autour de Ga<fua, puis de ses successeurs les capitaines Angéli, Galcau, celles du lieutenant Greigert, du lieutenant Ouégnaux autour de Diébougou


ainsi que dans le pays des Dagari, des Oidé et dans .le Bougouri (ou Pougouli).

C'est seulement à partir de 1906 qu'une amélioration se produit dans les rapports entre l'autorité et les ressortissants de ce pays difficile. Le 1^' avril 1907, la 5e compagnie du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, stationnée à BoboDioulasso et Koury, la 7e compagnie (à Bobo) et la 8e compagnie (Gaoua et Diébougou) sont transformées en brigades de garde indigène. Néanmoins le pays Lobi reste un point névralgique en Afrique Occidentale Française et, longtemps après qu'il a été détaché du Soudan et rattaché à la IlautcVolta, des opérations y furent encore nécessaires (notamment en 1930).

§ 72. — Affaires de Sargadjé et Loga (août 1899, février et novembre 1900).

Pendant que la mission VoulcL-Cllanoinc, puis JoallandMeynier (voir § 64) avance vers le Tchad, nous étendons progressivement notre occupation sur la rive gauche du Niger.

C'est ainsi que le 27 août 1899, le lieutenant Angéli, de l'Etat-Major, parti avec 20 hommes de la 5e compagnie en tournée de police dans la région de Dosso, est surpris au village de Sargadjé (ou Serkadié, 60 kilomètres Nord de Dosso, dans la vallée du Dallol Maourey) par 200 archers djermabés (ou du Djerma) : 16 tirailleurs sont tués, 3 blessés, le lieutenant également blessé, peut s'échapper avec 4 hommes et rejoint péniblement le poste de Dosso.

Au :mois de février 1900, le lieutenant Baudelaire de la 5e compagnie commandant le poste de Dosso, apprend que, par mesure de représailles, le maréchal des logis de Marlel se propose d'enlever avec 6 hommes le chef de Sargadjé.

En dépit des instructions reçues, l'officier estime ne pouvoir laisser agir seule une force aussi réduite ; il part aussitôt avec 1 sous-officier européen (sergent Walhin), 50 tirailleurs


et 20 auxiliaires. Egaré par le guide, il n'arrive qu'à la nuit en vue de Sargadjé, et est violemment attaqué pendant l'installation au bivouac. Les auxiliaires s'enfuient. Le lieutenant Baudelaire se dégage à la baïonnette et rentre à Dosso le 24 février au soir, ayant eu 19 blessés. De Martel rejoint un peu plus Lard avec ses cavaliers.

Le 0 novembre 1900, une colonne quitte le poste de Say, sous les ordres du capitaine Berger commandant la 106 compagnie, en vue d'infliger une punition au village de Sargadjé pour le guet-apens contre le capitaine Angéli et l'attaque du lieutenant Baudelaire. Cette colonne avait la composition suivante :

M" Compagnie du 2" U.T.S. (venue de Dori) : lieutenants Brochot et Wirth; 10" Compagnie du 2" M.T.S. fvenue de Koury) : lieutenants Guerrier et Cnumont, officier indigène Sadio-Ka; 1 Peloton de h. IfÎ'\ pincé provisoirement sous les ordres du lieutenant Albin de la 3° Compagnie; 2 pièces d'artillerie : nmréclml des logis Devaux; .'J0 cavaliers dépendant du chef Aouta de Dosso, soif au total 240 fusils.

Arrivé il Sargadjé, le 1(5, elle trouve le village évacué. Elle bouche le puits i't l'aide de bûches et de troncs d'arbres et met le feu aux cases ; durant toute la nuit on entend crépiter les cartouches provenant du guet-apens du lieutenant Angeli l'année précédente.

Lu .tH, la colonne procède à la destruclion du gros village de Lnga, fortifié par un fossé avec des palanques, situé à (i kilomètres Est de Sardadjé. Dans cette opération nous avons (i blessés dont ln sergent-major Boiron de la 3° compagnie, grièvement blessé d'un coup de lance au coté droit.

Le 20 novembre 1900 ]a colonne Berger est dissoute et scindée en deux détachements qui rentrenl respectivement à Say et Dosso.


§ 73. — Création du territoire de Zinder.

Les mesures de réorganisation administrative nécessitées par l'extension de notre occupation sur la rive gauche du Niger, amènent la création d'un 3e Territoire militaire, ou Territoire de Zinder (23 juillet 1900), commandé par le lieutenant-colonel Péroz ayant comme adjoint le chef de bataillon Gouraud. Le chef-lieu est installé provisoirement à Sorbohaoussa sur le fleuve Niger.

Ce territoire créé sur le papier, il va falloir l'organiser et l'occuper. Création de postes, ravitaillement de ces postes, construction de routes, aménagement des lignes d'étapes, le tout au milieu d'incessants combats, dans un pays de parcours difficile à peine connu, tout cela va être la tâche des 19", 20e, 21e et 22e compagnies du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, magnifiques unités de guerre coloniale auxquelles Gouraud, qui s'y connaît, a plus d'une fois rendu hommage et qui formeront le noyau du futur « Bataillon de Zinder ».

§74. - Première occupation de Tahoua et Zinder par le capitaine Moll (juillet-novembre 1900).

La 5e compagnie du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, destinée à tenir garnison à Zinder sous le nom de we compagnie, quitte Say les 26 juillet et 19 août 1900 en deux détachements à destination de son nouveau poste.

Le premier détachement, sous les ordres du capitaine Moll commandant l'unité, à l'effectif de 150 hommes et une pièce de 80 de montagne approvisionnée à 200 coups,

emporte 200 jours de vivres européens ; il comprend le docteur Chapeyron, médecin de 2e classe dey:ec;lonies, le sous-lieutenant indigène Bandiougou et 3 sous-offlciers européens, les sergents Poncet, Walhin et Fardet.

A partir de Matankari (9 août), le détachement traverse un

pays franchement hostile dont les- habitants s'enfuient à.i


noire approche. Les vivres commencera i\ manquer. Le21 août la colonne arrive à Tahoua, où elle séjourne ciiiq1 jours et où; le sous-lieutenant, Bflndiou&ou avec 40 hoirniMS- réussit, à s'emparer de quelques bestiaux. Lu- 30 « près- dû Labba, le convoii est; attaqué1 dans; un passage difficile: à travers des rocailles ferrugineuses par des pistons- arrruis3 dîares; las assaiiïanLs sont. repoussés,, un caporal blessé d'une: flèche.

Le Il septembre le docteur Ghapeyron s'emparo do quelque bestiaux. Le S la colonne arrive 1\.: Katiotio- où, elle reste dix jours. Après une-première tentative infruotucuse contrele village do Dan-Gaild, au cours de laquelle le sergent Toumane Taraoré est. blessé d'une llèche,' le sorgpnl" FRrdot, enlève la localité de vivo force aven sa section (16 septembre)*.

Le 21 le délachement se remet en route, entre iVTeseaoua le 2(5 et Ù. Zinder le 3 octobre.

Le seeoiul détaehement k l'effectif de. 100-hommes,, aouff les ordres du lieutenant .Tigaudon, quitte 9ay. le IR, aoûL et, suit l'itinéraire du détachement précédent avec les nHlInas, difficultés. Il arrive à Zinder le (> novembre, ayant, eu en cours de route 2 tirailleurs blessés dans deux engagements avec, les Touareg aux environs de Tamaské et de Bouzouch.

« Gel,le marche très pénible, écrit tic Guidambado le chef do bataillon Gouraud; commandant le V bataillon, fait le plus grand honneur aux qualHés- (in discipline (M, d'endurance1 d-e la 20" compagnie, l'énergie cl, au sang-froid du. capir laine Moll. »

S 'Ir!. - Occupation progressive du Djerma.

En novembre JOBO. afin de préparer une ligue d'étapesvers Zindcr et le lao TchilCL lin. détachement de IR 22'4 compagnie, sous les ordres du lieutenant Ivigoac, (fuiatto Sorbo" baoussa et atteint Tahoua. le. bii décembre. Là:, au coursd'une vingtaine de' jouirs d'escarmouches- et lFenga:!.r.Gtu.ents, ir refoule vers le Nord de-forts parfis touareg.


Du 23 décembre 1900 au 20 janvier 1901. 'plusieurs clélachements empruntés aux 3e, 19°, £ -compagnies du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais (capitaine Berger, lieutenants Wirth et Albinl, comprenant au total plus de 300 fusils, -esoortent le commandant Gouraud, parcourant le Djerma et obtenant au prix de petites notions locales énergiques et répétées, la soumission du pays Sonrhaï, du Tondigandia et du Kourfeï.

Le 5 janvier 1901, à la limite Nord du territoire .nouvellement occupé, est créé le poste de Filingué, placé d'abcxrd sous les ordres du lieutenant Albin, puis 'bientôt ;a.près du capitaine Comu commandant la 19e compagnie. La reconnaissance de la route de Filingué .à Tahoua test l'objet en mars et avril de reconnaissances très dures, au cours desquelles plusieurs tirailleurs, perdus ou imamemifcaiïér-Bent isolés, meurent de soif.

Le 17 janvier, les lre et 2e sections de la .20e compagnie .(capitailile Moll commandant) s'emparent de Tiétessmuraa, village fortifié par une quadruple ligne de défenses et défendu par les nombreux guerriers de 21 villages réunis du pays Ngourou.: ce succès nous coûte 1 tirailleur tué et 17 blessés.

§ 76. — Lutte de Gouraud contre les Touareg Kel-Gress (avril-juillet 1901).

La ligne d'étapes reliant au Niger les principaux ceritres ,.du nouveau territoire militaire de Zinder était l'objet d'attaques incessantes de la part des Touareg, qui surgissent -du désert et y disparaissent une 'fois leur coup 'fait. Parmi -ceux-ci, un des partis les plus mordants était celui des 'Kel(Gress (ou Kel-Rhéris) : 'le chef de toalaillon Gouraud mène contre eux une série de brillants combats qui ne devait pas tarder à amener leur soumission.

De gros rassemblements touareg ayant été signalés près -des puits de Zanguebé, une reconnaissance ;sous les ordres


de Gouraud quitte le poste de Guidambado le 12 avril 1901 à 21 heures. Le détachement comprend :

Lieutenant Chèdeville (zouaves hors-cadres); 50 tirailleurs de la 22e Compagnie du 2e R. T. S., lieutenant Bachellez, sergent Braun; 7 tirailleurs de la 19e Compagnie.

Le 13 à 8 heures, après une marche dè nuit de 11 heures, la reconnaissance atteint les campements touareg, comprenant environ 2.000 individus. Le feu est ouvert aussitôt et l'action, très vive., se poursuit jusque vers 10 h. 30. Les KelGress se défendent avec bravoure, chargeant à plusieurs reprises le carré d'infanterie et venant chaque fois se faire tuer à cinquante mètres de la ligne de feu.

A 10 h. 30 nous restons maîtres du terrain. Le succès est payé' de 4 tués et 2 blessés de la 22e compagnie. Les pertes ennemies s'élèvent à environ 50 morts, dont une quinzaine de blancs.

« Le détachement de la 22e compagnie qui a pris part à la reconnaissance et au combat de Zanguebé, écrit le commandant Gouraud, a inscrit une belle page à l'actif de la compagnie. Sur 39 heures, ce détachement a marché 31 heures et s'est battu 2 heures, contre un ennemi incomparablement supérieur et luttant avec une bravoure héroïque. Les Touareg n'ont jamais été plus braves qu'ils se sont montrés à Zanguebé. »

Malgré cette sévère leçon, deux mois ne se sont pas écoulés qu'une nouvelle sortie est nécessaire pour donner de l'air au poste de Guidambado. Elle comprend sous les ordres de Gouraud des éléments des 20e, 21e et 22e compagnies, en tout 176 hommes (lieutenants Bachellez et Cotten, sous-lieutenant indigène Bandiougou, sergents Mouhel et Laguerre).

Ayant quitté le poste le 17 juin 1901, en direction de l'Ouest, la colonne aborde le lendemain les campements de


Gàlma. Formée en carré, elle repousse les contre-attaquesde 500 cavaliers et 300 fantassins. Un caporal est sabré à l'angle du carré ; plusieurs chevaux et cavaliers criblés de balles, viennent rouler dans les jambes des tirailleurs. Les Kel-Gress se retirent, laissant sur le terrain 61 tués, parmi lesquels 7 chefs dont un de nos plus acharnés ennemis Yéliguini. Nos pertes sont : 1 caporal de la 22e compagnie tué, 2 tirailleurs de la 20e compagnie blessés par flèches.

A la suite de cette action, les Kel-Gress se dispersent, poursuivis par la colonne qui, le 20 juin, réussit à surprendre le campement d'un de nos principaux chefs, Molloul; cettesurprise rapporte la capture de 200 chameaux.

Au cours du mois de juillet, la 22e compagnie stationnée à Tahoua assure la tâche dure et ingrate de garantir les villages de la ligne Tahoua-Guidambado contre les rezzou venant du Nord.

En août, une section de 25 tirailleurs méharistes est formée et instruite à Guidambado pour contrebattrc les rezzou, que l'infanterie a peine à atteindre.

§ 77. — Installation du commandement à Zinder.

Dès que la situation militaire le permet, le lieutenantcolonel Péroz commandant le 3e Territoire militaire se hâte de quitter son poste provisoire sur le fleuve pour installer son poste de commandement définitif au cœur du Damagarim.

A cet effet la 21e compagnie du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, commandée par le lieutenant Wirth, quitte le 14 février 1901 Sorbo-haoussa, se dirigeant vers l'Est pour escorter Péroz sur Tahoua et Zinder. Après avoir passé quelques jours à Tahoua, elle continue à progresser vers l'Est, prenant part jusqu'à Guidambado (31 mars) à lareconnaissance dirigée par le commandant Gouraud, dont il a été question plus haut (§ 73).

Pendant ce temps (mars 1901) la région se garnit de


postes militaires, créés et occupés par la-22e compagnie sous les ordres du capitaine Joly : Tamaské (adjudant Breseon), Guidambado (lieutenant Bachellez). Péroz fait réaliser par le capitaine Cornu (19e compagnie) et le lieutenant Figeac (22e compagnie) la liaison entre Tahoua et Filingué. Le 15 avril Péroz arrive à Tessaoua et le 20 à Zinder. Il s'y installe avec comme adjoint le capitaine Gadeaa.

Le 3e Territoire militaire est désormais divisé en deux régions : la région Ouest, cheMieu Sorbo-haoussa, comprenant les cercles du Djerma, de Tahoua et de Filingué ; et la région Est, comprenant les résidences de Tessaoua et de Zinder.

§ 78. — Campagne de 1901 autour de Zinder.

Le 29 avril 1901 le lieutenant Mangin, avec 60 hommes .de la 21e compagnie, fonde le poste de El-Hassan au Nord de Tessaoua. Au cours de la construction de ce poste, une corvée chargée de rapporter des bois de construction, et comprenant le sergent indigène Tiécoura Kourouma, ï tirailleurs, 1 spahi auxiliaire interprète et 2 cavaliers du sultan de Tessaoua, a. une altercation avec les habitants du village -de Guidam-Maï, au cours de laquelle un tirailleur est tué et un grièvement blessé d'un coup de lance à la tête (16 mars 1901).

En mai, le 2e peloton de la ,20e compagnie, comprenant.

120 tirailleurs sous les ordres du lieutenant Jigaudon, quitte Zinder pour opérer une tournée dans le Damargou sous la direction du capitaine Gaden. Il crée un poste à Guidjigaoua (4 jours au Nord de Zinder), lequel poste -sera occupé par le lieutenant Jigaudon, le sergent Poncet et 00 hommes ; pui-s, en septembre abandonné et remplacé par Djadjidouna.

En même temps la 2e section de la. 20" compagnie, 50 tirailleurs commandés par le lieutenant Cotten, opère dans le Mounio, à 5 jours à l'Est de Zinder jusque vers Gouré. Au début de juin ce détachement se rend dans l'Ouest en



passant par El-Hassan, pour porter l'appoint de ses forces au commandant Gouraud opérant contre les Kel-Gress, et prend part a,u combat de Galma (17 juin) à une journée à l'Ouest de Guidambado (voir § 76 ci-dessus).

Au mois de juin également, le lieutenant Blanchard de la 19e compagnie crée le poste de Sandiré.

En juillet, le capitaine Moll étant passé hors cadres, le capitaine Cauvin prend le commandement de la. 20e compagnie. Les lre et 2e sections de cette unité, avec le capitaine Cauvin et le lieutenant Jacques ainsi qu'un peloton de la 21e compagnie, avec les lieutenants Marquis et Mangin, prennent part sous les ordres de Moll à une reconnaissance contre les Touareg dissidents du Damergou.

Le centre de la 21e compagnie, précédemment à Zinder, est transféré successivement en septembre à El-Hassan, sous le commandement du capitaine Brantonne, puis en novembre à Tessaoua sous les ordres du lieutenant Marquis.

Les derniers mois de cette année particulièrement active sont marqués par les événements suivants : - 19e compagnie : Le lieutenant Blanchard quitte Filingué pour redescendre à Sorbo-haoussa, centre de la nouvelle ira compagnie du bataillon de Zinder ; — 20e compagnie : Le lieutenant Jacques avec 50 tirailleurs fait une reconnaissance sur la route du Nord, vers Agadés, jusqu'à 75 kilomètres de Djadjidouna ; — 21e compagnie : Le détachement du lieutenant Cotten, -de Tamaské, rentre à Zinder, où il arrive en janvier 1902 ; — 22e compagnie : Sous le commandement du capitaine Joly à Tahoua, qui est également le siège du 2e bataillon du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais commandé par le commandant Gouraud ; crée et occupe en septembre les postes provisoires de Zanguebé et Labba, dressés contre les Kel-Gress. Labba sera évacué en octobre 1901 et Zanguebé ■occupé par un détachement de tirailleurs de la 20e compagnie et de miliciens, sous les ordres du capitaine Arnaud (infanterie hors cadres).


"Enfin en 1902 ces compagnies, qui étaient des unités de marche non organiques au 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, passent au Bataillon de Zinder.

� 79. — Défense des Confins sahariens (1904-1906).

Les 4e, 5q et lie compagnies du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais ont été appelées à participer à la pénétration 4ans les confins sahariens et à la défense de ces territoires contre les rezzou venus du Nord. C'est donc dans ces unités qu'il faut rechercher l'origine de ces belles formations méharistes qui depuis trente ans se consacrent à la tâche ingrate de mon 1er la garde au désert pour protéger la partie peuplée du Soudan.

En 1904, une section méhariste est créée à Ras-el-Ma et placée sous le commandement du lieutenantjérusalemy. Elle escorte dans l'Adrar des Iforhas la mission du capitaine Théveniaut, et effectue à Timiaouine la liaison avec un détachement algérien amené du Nord par le chef d'escadrons Laperrine : c'est la première jonction Soudan-Algérie (16 août 1904).

A ce moment, un rezzou de 400 Ouled-Djérir, venant du Tafilalet, est signalé ayant déjà dépassé le puits d'In-Alay et .se dirigeant, pour les razzier, sur les campements bérabiches soumis, installés au Nord-Est de Tombouctou. Le capitaine Aguttes se porte à sa rencontre avec un détachement comprenant 117 tirailleurs des 4e et 11e compagnies du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais (capitaine Prokos, lieutenant Vallier, et sous-lieutenant Curny) et 50 spahis (lieutenant Solar).. Il. rejoint et attaque le rezzou le 2 décembre 1904 près de la dune de Bayoukrou, et le rejette vers le Nord après un combat de. cinq heures qui nous coûte 9 tués et 19 blessés, parmi lesquels le lieutenant Solar.

En 1905, le capitaine Cauvin, commandant la 48 compagnie à Ras-el-Ma, réorganise cette unité en « compagnie méhariste ». Au début de l'année suivante, il est en mesure


d'entreprendre une tournée de police dans l'Azaouad (4).

Arrivé à Araouan, à 250 kilomètres au Nord de Tombouctou,, il reçoit ordre de pousser jusqu'à Taodenni pour effectuer la liaison avec le détachement, algérien du commandant Laperrine. Mais ce dernier n'était pas au rendez-vous et la seconde jonction Algérie-Soudan est réalisée par le lieutenant Cortier à El-Guettara le 20 mai 1905.

Le détachement de Cortier endure, sur la route du retour, de terribles souffrances : beaucoup de chameaux meurent d'épuisement après avoir rejoint le poste de Bamba sur le Niger, nouveau centre de la 4e compagnie, malgré la présence en ce point de nombreux pâturages.

Au mois de mai 1906, les compagnies du 2e Régiment dé Tirailleurs Sénégalais stationnées dans la région de Tombouctou (4e, 5e et 1.1e stationnées à Bamba, Gao et Tombouctou), sont détachées du régiment et servent à former le nouveau Bataillon de Tombouctou. 1

! fI.

§ 80. — Transformations successives du 23 Sénégalais jusqu'à la guerre.

Jusqu'en 1906, le régiment ne subit aucune transformation. Sa composition au début de 1906 est la suivante : Section hors-rang à Kati.

lor Bataillon.

10° Compagnie — à Kati.

14° Compagnie — à Kati, avec postes à Bamako et Koulikord. 15e Compagnie — à Bandiagara, avec poste à Mopti.

(4) Nom donné à la région semi-désertique située entre Tombouctou et Araouan,


6e Compagnie — Stationnée à Kati. — Envoyée en opérations dans la région de Tombouctou le 17 janvier 1906.

Rejoindra Kati le 9 février 1907 et deviendra la 1re Compagnie.

2e Bataillon.

lre Compagnie — à Bobo-Dioulasso, avec postes à Koury et Sikasso (le poste de Sikasso est supprimé le 1er juillet 1906).

&e Compagnie — à Gaoua, avec poste à Diébougou.

9e Compagnie — à Bobo-Dipulasso.

16e Compagnie — à Ouagadougou.

3e Bataillon.

3e Compagnie — à Dori (avec poste à Niamey à partir du 8 janvier 1906).

46 Compagnie — à Ras-el-ma, puis Bamba (Compagnie méhariste).

56 Compagnie - à Gao.

pagnie - à 11e Compagnie — à Tombouctou.

4J Bataillon.

2e Compagnie — Stationnée à Kayes. — Dirigée sur Zinder le 12 mai 1906.

7e Compagnie — à Kayes, avec poste à Bakel (poste supprimé le 1er juin 1906).

12e Compagnie — à Kayes.

13e Compagnie — à Nioro (formée le 15 juin 1904 avec des éléments de la gardefrontière).

Par décret du 29 mai 1906, le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais est formé à 3 bataillons, 12 compagnies.

Le Bataillon de Tirailleurs Sénégalais de Tombouctou est formé, comme on vient de le voir au paragraphe précédent, avec le 3e bataillon qui est dissous. La 2e compagnie du


4e bataillon (capitaine Lecrivain, lieutenants Aubrion et Petîtperrin) passe la 3 juillet 1906 au nouveau bataillon de Zinder.

Le régiment a alors la composition suivante :

1er Bataillon.

lre Compagnie — à Kati (cette Compagnie ne sera formée que le 9 février 1907 par la 6e Compagnie dissoute à son retour de Tombouctou).

2e Compagnie — à Kati (ancienne 14e).

3e Compagnie — à Dori.

4e Compagnie — a. Bandiagara.

2e Bataillon.

5e Compagnie — à Bobo-Dioulasso (ancienne lrej.

6e Compagnie — à Ouagadougou (ancienne 16e).

Partie pour tenir garnison à Niamey et. Dosso le 20 octobre 1907, passera au bataillon de Zinder en 1908.

-

7e Compagnie — à Bobo- Dioulasso (ancienne 9e).

8e Compagnie — à Gaoua.

3e Bataillon.

ge Compagnie — à Kayes (ancienne 7e). Cette Compagnie occupera Nioro. en janvier 1907.

10e Compagnie — à Goumbou. Poste occupé en mars 1907 par la 10e Compagnie venue de Kati.

12e Compagnie — à Kayes.

13e Compagnie — à Nioro. Cette Compagnie occupera Kiffa (Mauritanie) en novembre 1906, puis prendra le no 11 en février 1907.

Le l4* janvier 1908 la 3e compagnie stationnée à Dori et la.

6e compagnie stationnée à Niamey (avec poste à Dosso) sont,


passées au bataillon de Zinder. Le régiment est alors réduit à 10, compagnies.

Le leV' avril 1908 le' 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais est réduit à 2 bataillons (soit 8 compagnies), par suppression du 2e bataillon dont les compagnies (5e et 7e à Bobo-Dioulasso et Koury' et 8e à Gaoua et Diébougou) deviennent brigades de garde indigène et par création d'une nouvelle compagnie à Kayes.

Le 25 juin 1908 une nouvelle compagnie est créée à Ségou.

Le régiment est alors constitué à 3 bataillons et 9 compagnies réparties comme suit :

1er Bataillon.

lre Compagnie — Kati, (Postes à"Bnmako et. Koulikoro), effectif 240 hommes.

2e Compagnie

2° Bataillon.

3* Compagnie — à Ségou (nouvelle unité), effectif 120 hommes.

4® Compagnie — à Bandiagara (poste à Mopti), effectif 140 hommes.

5e Compagnie — à Goumbou (ancienne 10e), avec poste à Sokolo, effectif 120+50 hommes.

3e Bataillon.

6e Compagnie — à Kiffa (ancienne 11®, avec un peloton méhariste), effectif 170 hommes.

7e Compagnie — à Kayes (ancienne 12e), effectif 120 hommes.

8e Compagnie — à Kayes (nouvelle unit6), effectif 120 hommes.

9e Compagnie — à Nioro, effectif 140 hommes.

Jusqu'en 1914 le régiment ne subira plus d'autre transformation que certains changements dans des numéros d'unités.


La 5e compagnie, de Goumbou, envoie en janvier 1912 le lieutenant Rotier, avec 75 tirailleurs dont 10 lnéharistes, occuper provisoirement pour quelques mois le poste de Kassakoré. L'année suivante cette même compagnie abandonne Goumbou pour occuper Yélimané. En octobre 1914, la 5e compagnie viendra à KaLi et ne laissera qu'un détachement à Yélimané.

Le Ie*' décembre 1913, deux nouvelles compagnies sont créées :

10e Compagnie — à Kati.

Il c Compagnie — à Kayes.

§81. — Pacification de la Mauritanie, région Sud-Est (1906-1912).

Le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, bien que stationné en presque totalité au Soudan, a collaboré de façon active à la pacification de la partie Sud-Est de la Mauritanie, par l'intermédiaire de sa compagnie installée à Kiffa.

C'est le 26 novembre 1906 que la 13e compagnie, de Nioro, quitte ce poste pour aller occuper celui de Kiffa. Cette unité, alors commandée par le capitaine Saludo, avec les lieutenants Pinet et Clément, est à l'effectif de 6 sous-officiers européens et 150 tirailleurs, gradés compris. Elle voisiné à Kiffa avec le goum commandé par le capitaine Payn, et ces deux unités commencent de conserve dès le mois de décembre la série de reconnaissances et d'expéditions qui va être sans interruption, pendant sept années, la vie journalière des postes de l'avant.

En février 1907, l'ancienne 13e compagnie, devenue 11e compagnie, reconnaît, organise et occupe à Kiffa un nouveau poste mieux situé que le premier.

En juillet 1907, une section méhariste est organisée auprès de la 11e compagnie ; commandée par le lieutenant Paquette, elle se signale par une activité remarquable et son utilité


est consacrée l'année suivante par sa transformation en peloton méhariste à l'effectif de 2 sous-officiers européens, 117 indigènes et 120 chameaux. Au même moment (juillet 1908) la compagnie de Kiffa, qui est Revenue la 6e compagnie du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, est portée à l'effectif de 200 hommes.

Les années qui suivent sont occupées par le travail incessant de tournées, de contre-rezzou, d'expéditions punitivesT nécessaire à soumettre les tribus de cette partie de la Mauritanie et donner de l'air au poste de Kiffa. Il n'y a pour ainsi dire pas de mois où ne soient livrés des combats qui font, peu- à peu des unités d'élite de la 6e compagnie sous les ordres du capitaine Mangeot et du peloton méhariste commandé par le lieutenant Paquette. Parmi les principaux combats on peut citer les suivants : — Combat du 17 novembre 1908 contre les 0. Lacklal qui laissent 101 cadavres sur Je terrain ; mais de notre côté nous avons 4 tirailleurs tués et 4 blessés.

— Affaire de Zafiet (14 février 1909) conduite par le lieutenant Arnaud contre les Hammonat, où nous avons 3 tirailleurs méharistes blessés.

- Affaire de El-Beyed (4 mars 1909), où après une marche rapide de 235 kilomètres en 4 jours, le capitaine Mangeot à la tête d'un détachement de 50 tirailleurs avec 1 section de mitrailleuses, ayant fait sa jonction avec le peloton méhariste du lieutenant Arnaud renforcé d'une centaine de partisans maures, inflige une sévère leçon aux 0. Lacklal désormais définitivement soumis. A ce moment la 9e compagnie dé Nioro envoie en renfort à Kiffa un peloton de 50 tirailleurs, commandé par le lieutenant Klobb, lequel va collaborer activement pendant cinq mois aux diverses opérations menées dans le cercle.

— Contre-rezzou du lieutenant Labonne (Oummoul-Kebar, 17 août 1909).

— Reconnaissances du lieutenant Leborgne dans le massif


de l'Affollé, en octobre 1909, mai et juillet 1910 avec le combat de Bédeïzzou (1 caporal et 1 goumier blessés).

— Raid du lieutenant Demassez, terminé le 12 mai 1911 par l'affaire de Moulenhar qui, sur un effectif total de 30 hommes, nous coûte 10 tués dont le lieutenant commandant le peloton, 2 disparus et 6 blessés dont le sergent Cheval. Ce dernier et les quelques survivants ne peuvent se dégager qu'en laissant les morts sur le terrain. Tous les chameaux sont perdus.

Le lieutenant Demassez est remplacé à la tête du peloton méharis te par le lieutenant Tonnot, qui dirige en 1912 avec succès plusieurs contre-rezzou et expéditions punitives.

Enfin Je i' juillet î9.12, !a 66 compagnie de Kiffa est envoyée dans la - région de Tombouctou et devient la 5e compagnie du Bataillon de tirailleurs sénégalais n° 2.

£ 82. — Opérations de police en Haute-Gambie (septembreoctobre 1908).

Le 20 septembre 1908 la 7e compagnie, stationnée à Kayes, part en colonne de police dans le pays de Damantan (5) (Haute-Gambie) où un agitateur nommé Bayaga provoque des troubles. La colonne, accompagnée de M. Nicolas, administrateur des colonies, est à l'effectif suivant : 4 officiers : capitaine Viard et 3 lieutenants.

fi sons-officiers européens.

151 indigènes gradés compris.

Transportée par monoroues jusqu'à Sénoudébou, en empruntant le fleuve Sénégal et son affluent la Falémé, la colonne arrive le 9 octobre à Damantan. Le 14 elle enlève d'assaut le village de Tabadian, après un violent combat qui

(5) Canton appartenant actuellement au cercle de Tambaicounda (Sénégal) et compris entre le fleuve Gambie et son affluent de gauche le Koulountou.


dure 5 heures sans une minute de répit. Bayaga et ses complices périssent par nos armes. Nos pertes sont : 0 tirailleurs tués et blessés dont le sergent-major Michaud, de la 7e compagnie.

L'ordre étant revenu, les opérations de police prennent fin après, cette affaire et la compagnie rentre à Kayes le 5 décembre.

§ 83. — Colonne des Habbé (décembre 1909, février 1910).

En 1909, des troubles se produisent au Tombola, région située au Nord-Est de Bandiagara, où les Habbé sont restés dans un état d'insoumission latent et refusent le paiement de l'impôt. L'administrateur' commandant le cercle, M. d'Arboussier, est attaqué dans les gorges de Pélinga et un administrateur adjoint est tué.

Une colonne de répression est formée à Bandiagara en novembre 1909 sous les ordres du chef de bataillon Cazeaux, ayant comme adjoint le capitaine Bonnet ; docteur, le médecin-major Tardif. Elle comprenait :

1 Peloton de cavaliers auxiliaires sous les ordres du lieutenant Maronne, inspecteur des goums du Haut-Sénégalet-Niger (6).

3 Compagnies du 2° régiment de tirailleurs sénégalais : lre Compagnie (de Kati) : capitaine Vix, lieutenants Leduc et Escande, 6 sous-officiers européens, 119 indigènes.

Ie Compagnie (de Bandiagara) : capitaine Oyaux.

8e Compagnie (de Kayes) : capitaine Laffitte, lieutenants Millot et Person, 7 sous-officiers européens, 119 indigènes.

1 section de la 5e, de Sokolo, 25 indigènes sous les ordres du lieutenant Jouve.

1 Brigade indigène (venue de Koury).

1 Section d'artillerie.

(6\ La cavalerie 71e put être utilisée par suite des difficultés du terrain, et le lieutenant Maronne fut affecté à la 4° Compagnie.


La colonne quitte Bandiagara le 3 décembre. Les opérations sont dirigées successivement sur les massifs de Karza et Bargué, du Kikara et d'Ibissa.

La prise du centre de résistance de Pélinga (13 décembre), occupant dans les rochers une position extrêmement forte où les insoumis perdirent 85 tués, plus un nombre de blessés importants, puis celle du village de Yandagou (15 décembre), amènent la soumission du massif de Karza. et Bargué.

Les opérations dans le Kikara donnent lieu au combat .de Kinian qui nous coûte 2 tués et 6 blessés, dont le commandant Cazeaux (2 janvier 1910). Celui-ci passe le commandement de la colonne au capitaine Laffitte.

Enfin la prise d'Ibissa (14 janvier), qui nous coûte 2 tués et 4 blessés indigènes, semble régler la question du dernier massif dissident. La dislocation de la colonne est prononcée à Bandiagara le 12 février 1910. Le pays habbé se tiendra tranquille jusqu'en 1918, où à la suite des opérations de recrutement, les habitants de la montagne de Tabi, située à 45 kilomètres au Sud-Ouest de Hombori, entrent en rébellion et doivent être réduits par une colonne venue de Tombouctou sous le commandement du lieutenant-colonel Mangeot (octobre-novembre 1918).

§84. - Opérations de police du Fouta-Djallon (févriermars 1911).

Au mois de février 1911, la 7e compagnie stationnée à Kayes, reçoit l'ordre de se rendre à Dinguiraye dans le Pouta-Djallon (Guinée), pour y être mise à la disposition du lieutenant-gouverneur, M. Camille Guy, qui y dirige en personne des opérations de police.

La compagnie, commandée par le capitaine Talav, avec les lieutenants Amberger et Bornand et le médecin aide-major Goubil, à l'effectif de 6 sous-officiers européens, 116 sousofficiers et tirailleurs indigènes, arrive à Kita le 20 février et gagne le Dinguiraye par étapes ; elle y arrive le 6 mars.

Le capitaine Talay reçoit du gouverneur l'ordre de se rendre


à Labé, puis de procéder à l'arrestation d'un agitateur politique à Goumbo ; pour exécuter cette opération, la demibrigade indigène de Conakry est mise à sa disposition avec le capitaine Laussu et le lieutenant Bernard. Le lieutenant Amberger, avec la moitié de la 7e compagnie, doit, de son côté, effectuer une arrestation analogue à Touba dans le cercle de Kadé.

Le 30 mars le capitaine Talay suivi du lieutenant Bornand, avec 70 tirailleurs, pénètre dans la missidi de Goumbo, repaire de l'agitateur Tiermo Aliou. Conformément aux instructions reçues, pour montrer ses intentions pacifiques il ne fait pas mettre ba.ïonnette au canon et maintient les fusils de ses hommes culasse ouverte. Arrivé sur la place de la mosquée, il demande à parlementer avec le Ouali ou chef religieux qu'il avait mission d'arrêter.Au cours de l'échauffourée qui s'ensuit, les deux officiers sont tués avec 12 tirailleurs ; 2 sous-officiers européens (sergent-major Desmé et sergent Hureaux) et 20 tirailleurs blessés ; 20 fusils et 12 baïonnettes sont perdus. Le détachement du capitaine Laussu arrive quelques heures plus tard, brûle le village et ramène la compagnie décimée à Fofota sur la voie ferrée de Conakry au Niger.

Ces événements se passaient en présence du gouverneur Guy, de l'administrateur en chef Sassias commandant le cercle de Kindia et du commandant Bouin, chef du bureau militaire du gouverneur de la Guinée. Les corps des tirailleurs tués sont inhumés à Kindia, ceux des officiers ci Conakry. La 7e compagnie rentre à Kayes, où elle est réorganisée sous les ordres du capitaine Pinchon.

Le ouali de Goumbo, passé en territoire anglais, devait (Hre extradé sur la demande du gouverneur français au mois de juillet 1911. Ce fut le 2e peloton de la 7e compagnie (2 sous-officiers européens et 57 tirailleurs) sous les ordres du sous-lieutenant Daumain, renforcé par la demi-brigade de garde indigène de Conakry (lieutenant Bernard), qui reçut mission d'aller en prendre livraison à la frontière.


B. — PENDANT ET APRES LA GUERRE (1914-1933)

§ 85. — Le 2e Sénégalais pendant la guerre.

Pendant la Grande Guerre, le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais a été successivement commandé par le chef de bataillon Simonin, les colonels Vimont, Molard et Bourgeron.

Sous ces divers chefs, le régiment ne devait pas avoir l'honneur de combattre, comme corps constitué, sur les champs de bataille d'Europe. Mais il fut appelé, dès le début des hostilités, à fournir des unités constituées qui furent envoyées directement au front. C'est ainsi que, en août et septembre 1914, les lre, 2e et 12e compagnies de Kati, les 7e, 8e et 10e compagnies de Kayes furent dirigées sur Dnkar, puis embarquées pour la France.

Dans la suite, le régiment devait prendre une part très active au recrutement intensif qui permit de lever, dans les cercles du Soudan, des milliers de tirailleurs, lesquels, une fois dégrossis dans la portion centrale à Kati ou dans les postes détachés, furent acheminés sur le front de France ou d'Orient, ou encore sur le Maroc, où ils firent brillamment leur devoir.

Les transformations subies pendant la guerre dans l'organisation du régiment sont peu nombreuses : Le 12 octobre 1914, à la suite du départ en Europe de plusieurs unités, le régiment est reformé de la façon suivante :

à Kati lre, 2e, 5e, 6e, 11e, 12e Compagnies.

à Kayes : 7e et 10e Compagnies.

à Ségou 3e et 8e Compagnies.

à Bandiagara : 4e Compagnie; à Nioro : 9e Compagnie.


Le 1^ janvier 1915 sont créées la 13e compagnie à Gaoua - -et la 14e compagnie à Ouagadougou.

En 1916 la 6e compagnie de Kati va occuper Houndé, puis Bobo-Dioulasso. La T compagnie de Kayes va. occuper le poste de San et prend le n° 15 le 1er août 1917. Le 1er avril 1920 cette compagnie est dissoute, le poste de San -est occupé par un détachement de Ségou.

En 1917 la 11e compagnie de Kati va occuper Dédougou et la 12e Banfora, puis Houndé.

Le 1er août 1917 la 4e compagnie du Bataillon de Tirailleurs Sénégalais n° 2 stationnée à Oualata devient 7e compagnie du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais à Néma.

Pour reconnaître la part prise par le régiment à la formation des bataillons sénégalais qui se sont illustrés sur les divers fronts, la garde des fanions de plusieurs de ces glorieuses unités a été confiée au 2e Régiment de Tirailleurs .Sénégalais lors de leur dissolution. Notamment (ordre ,-général n° 13 du 14 mai 1920) : — fanion du 35e Bataillon de Tirailleurs Sénégalais, décoré de la croix de guerre ; — fanion du 103e Bataillon de Tirailleurs Sénégalais ; — fanions des lre et 2e compagnies du 103e Bataillon de Tirailleurs Sénégalais, dont le premier avec croix de guerre.

Ces fanions sont déposés dans la salle d'honneur du régiment qui a été inaugurée à Kati, le 28 janvier 1933, par le général Freydenberg, commandant supérieur des troupes du Groupe de l'Afrique Occidentale Française.

§ 80. — Colonnes de police du cercle de Bamako et du cercle de Goumbou-Nara (février-avril 1915) (7).

Au cours de la guerre. 1914-1918, les forcer d'occupation en Afrique Occidentale Française étant réduites au minimum,

(7) Voir croquis N° 8.


les opérations de recrutement entreprises de façon intensive en raison des besoins de la défense nationale amenèrent plusieurs populations mécontentes à se dresser contre l'autorité militaire ou administrative. Ces réactions, qui eurent au début un caractère purement local, menacèrent en 1916d0 se généraliser à tout le Soudan (8). Le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais eut à fournir plusieurs colonnes de répression, formées d'éléments disparates prélevés sur les maigres effectifs maintenus dans la colonie, lesquelles eurent facilement raison des désordres locaux.

Les troubles consécutifs à la réaction contre le recrutement ont affecté principalement, au Soudan, les cercles.

de Bamako, Goumbou-Nara, Dédougou, Bobo-Dioulasso,.

San, Koutiala, Bandiagara, Dori et Ouagadougou.

Cercle de Bamako. — Le 25 février 1915, sur réquisition du gouverneur du Haut-Sénégal et Niger, le colonel Molard, commandant le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais et en môme temps commandant militaire de la colonie, ordonne ¡\

un détachement du 2e Sénégalais d'accompagner en tournée de police M. Dolisie, administrateur en chef commandant ln cercle de Bamako, dans le Bélédougou (9) où l'on signale l'agitation de certains villages, agitation qui gagne même.

le Sud du cercle de Goumbou-Nara.

(8) La colonie portait alors, administraitivement parlant, la dénomination de « Haut-Sénégal-et-Niger ».

(9) Il peut paraître surprenant que l'insurrection ait débuté si près de la capitale de la colonie. C'est que la province du Bélédougou n'a jamais été conquise à main armée. En effet lors de la.

prise de Ségou par le Commandant Archinard, cette province vint spontanément se placer sous notre protection ; plusieurs notables paimi lesquels N diossé Taraoré, nous prêtèrent leur concours à la tête d'auxiliaires levés par leurs soins. En 1898. Ndiossé, mécontent pour diverses raisons, prit 'part avec le Bélédougou à l'agitation qui secoua la région de Bamako au moment du départ de la colonneAudéoud pour Sikasso (Voir � 40). Une tournée de police assura la pacification de cette province, dont les villages, condamnés à des peines diverses, durent raser leurs tatas; mais le tout se passa sans combat, de sorte que les Bambaras de cette partie du cercle deBamako pouvaient ignorer la Duissance de nos armes.



Cette petite colonne, désignée sous le nom de « colonne du Hélédougou », commandée par le capitaine Leblond, avec lelieutenant indigène Bandiougou, était forte de 1 sous-offlcier européen et 75 indigènes gradés compris (dont 3 gardescercle)

Le détachement séjourne à Yélikébougou (33 kilomètresNord do Kati) où il est, rejoint successivement par un premier renfort de 25 hommes amené par l'adjudant Fadiala Kéita, puis un second de 220 hommes avec 3 ofnciers eL un docteur. Dès lors la colonne, placée sous les ordres du chef de bataillon Caillel, a la composition suivante :

l1'" <:<mipagnie du 2" M.T.S., capitaine Minnrv avec :3 sous-officiers européens; 2" Compagnie du 2e H.T.S., capitaine Lfhtnnd HVPI1 il «ous-officiers européens; l'ue pièce de NO M., lieutenant Pnllnt; Médeein-niaj(11• de 2,' (Masse .Tousset.

soit un effectif total de 308, dont ri officiers, 7 qoii s-o l'il(' i ou gradés européens, 280 indigènes dont 278 [i l'ailleurS' cadre,s compris, 2no portnlll's. Ln cavalerie fajf défaut.

Par iMossombougou, la colonne arrive à Zambougou où a lieu le (i mars un combat contre 1.500 relie,Iles environ, qui nous coûte (i blessés ; les dissidents prennent la fuite en incendiant sur leur parcours le village de Molébougou.

Au cours de ce combat, l'adjudant Padiala Kéita se signale par les feux parfaiteme.nl, ajustés de la ['l'ne,lion qu'il commande. Pour tenir en mains ses tirailleurs, tous jeunes recrues ou réservistes, et leur montrer (pie l'ennemi n'est pas dangereux, il a revêtu sa tenue blanche cl, bien que de haute taille, sort de l'action sans blessure.

La colonne, accompagne la fournée administrative du commandant de cercle, par Ouolndo, Non ko, Sabougou : elle se présente le, 18 mars dovant Ngoumi, village Tortillé défendu par 300 à 'i00 guerriers commandés par le vieux chel


Ndiossé Taraoré. Le village est battu en brèche par le canon à 10 heures, attaqué à It h. 30 et définitivement occupé à la nuit tombante, après que le chef Ndiossé s'est-fait sauter dans son tata avec ses femmes et quelques défenseurs. Les pertes françaises dans cette affaire sont de 7 tués et.

47 blessés dont 2 Européens.

La chute de Ngoumi marque la fin des opérations actives.

Une section de la lro compagnie est envoyée pendant quelques jours à Mercoya, pour prêter main-forte, à M. Rocaché, administrateur du cercle de Goumbou, et au sous-lieutenant Bourrouillou en tournée de police sur les confins de cercle de Bamako. Les villages se soumettent et les chefs amènent leurs recrues.

La colonne prend le chemin du retour par Banamba et Koulikoro et arrive à Kati le 10 avril 1915.

Cercle de Goumbou-Nara. — Une petite opération conjuguée avait eu lieu en même temps dans le cercle de GoumbouNara voisin de celui de Bamako.

Le 15 mars 1915, l'administrateur commandant ce cercle, M. Rocaché, en tournée de recrutement, est mal accueilli et blessé au village de Médina-Souko. Le sous-lieutenant Bourrouillou, de la 9e compagnie du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais à Nioro, est envoyé à la rescousse avec un déta.chement improvisé et très disparate comprenant 1 sousofficier européen, 12 tirailleurs venus de Nioro et de Oualata, 18 gardes de cercle, 24 goumiers sous le commandement de M. Lozet, adjoint des affaires indigènes, enfin 116 partisans sous M. Rocaché.

Le 20 mars, ce détachement attaque et incendie le village de Diéméné occupé par plusieurs centaines de rebelles : cel.te action nous coûte 8 blessés légers ; M cadavres bambaras sont comptés sur le terrain. La tournée se continue par Djigué, Niantiala, Douabougou, Diéménékoura, Doubala, Tiémabougou ; tous ces cantons font leur soumission. remettent les fusils et les chevaux, présentent les


recrues. Le 16 avril, le détachement du sous-lieutenant Bourrouillou rentre à Goumbou et le 29 il est de retour à Nioro, ramenant le chiffre de 100 recrues qui lui avait été fixé.

§ 87. — Opérations dans la boucle de la Volta. — Colonne Simonin (novembre-décembre 1915) (10).

Dans les derniers mois de 1915, la boucle de la Volta Noire, qui avait toujours été un des points névralgiques du Soudan (voir § 71), fut agitée par des mouvements où l'on a cru reconnaître l'action d'agents étrangers. Cette agitation était marquée surtout dans le cercle de Dédougou par le refus de payer l'impôt, la résistance aux ordres du recrutement et la destruction des lignes télégraphiques.

Au milieu de novembre, des mouvements graves sont signalés au Sud de Dédougou. M. Magnet, administrateur commandant ce cercle, estime dès ce moment à 15.000 le nombre des révoltés. Deux combats ont lieu les 19 et 21 novembre à Bouna, village du canton de Datomo, où le détachement du lieutenant Taxil, en tournée de recrutement avec 15 tirailleurs et 37 gardes, a 2 tués et 23 blessés dont 4 Européens (lieutenant Taxil, docteur Cremer, sergent Dougnrd, M. Lowitz commis des affaires indigènes).

On appelle à la rescousse M. Labouret, administrateur du cercle de Gaoua mobilisé comme capitaine, qui, amène 1() lira illeurs de la 13e compagnie du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, et M. Maubert, administrateur cr-m mandant le cercle de Bobo-Dioulasso, qui marche sur Rondoukuy avec tous les gardes de cercle disponibles. Le capitaine Ferron, en tournée de recrutement dans le corde de Bandiagara, est dirigé avec 50 tirailleurs sur Dédougou pour y prendre le commandement des opérations. Le bataillon de Ségou envoie également à Dédougou 82 lirailleurs et 2 sousofficiers européens des 3e et 8e compagnies, Ouagadougou

(10) Voir croquis N° 9.



fournit une pièce de 80 M. avec 20 hommes. Un détachement de 50 tirailleurs est envoyé de Kati à Bobo.

Ces mesures n'ayant pas paru suffisantes, la. portion centrale du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais à Kati reçoit du général Pinaud, commandant supérieur, l'ordre de fournir les éléments nécessaires à la formation d'une colonne de répression. Les gaTnisons de Kati, Kayes, Nioro sont vidées de leurs meilleurs éléments, Tombouctou envoie également un peloton. Seul Ségou doit conserver une garnison de sécurité, en vue d'éviter l'extension de la rébellion et l'arrêt total du recrutement.

Le 18 décembre, la colonne, désignée sous le nom de Colonne du Bani-Volta (ou colonne de Dédougou) est concentrée à Dédougou. 'Placée sous le commandement du chef de bataillon Simonin, avec comme adjoint le capitaine Modest, elle a la composition suivante : lre Compagnie de marche, sous-lieutenant Breton, du bataillon de Tombouctou, 3 sous-officiers européens, 200 indigènes; 2e Compagnie de marche, sous-lieutenant Cartier du même bataillon, 5 sous-officiera européens, 181 indigènes; (Ces 2 compagnies forment un demi-bataillon placé sous le commandement du capitaine Fcrron).

3e Compagnie, capitaine de réserve Labouret, 3 sous-officiers européens, 200 indigènes;

40 gardes de cercle, M. Lowilz; 1 Batterie d'artillerie à 2 sections de 2 pièces, lieutenant Taxil, VA européens, 14 indigènes; 1 Goum de 100 cavaliers auxiliaires, M. Haillot; Service de santé : médecin major de 2° classe Jousset.

L'approvisionnement en munitions osl rie "00 cartouches par homme et 100 coups par pièce.

Le 21 décembre, par Karo et Noumou, la colonne, accompagnée par le gouverneur intérimaire du TTallt-Sénégal-et-


Niger, se porte à l'attaque du village fortifié de Yankasso, i)itué à 40 kilomètres au Sud-Est de Dédougou et défendu par les Marka ou Sarakollé. L'assaut est donné le 23, après une reconnaissance menée par le goum, mais sans prépa� ration d'artillerie. La compagnie Labouret pénètre difficilement dans le secteur du village qui lui est assigné, mais la lre compagnie de marche, composée d'éléments disparates -et jeunes, dont la plupart voient le feu pour la première f fois, ne peut dépasser les lisières du village. Son chef, le î -sous-lieutenant Breton, tombe frappé de deux balles. La p plupart des gradés européens et indigènes sont blessés ; la r .ire compagnie reflue. A 9 heures le rapitainp Ferron tente s de la rallier.

Pendant ce temps des groupes de dissidents cherchent à tourner l'artillerie et le convoi. Un second assaut mené par le sous-lieutenant Cartier échoue. Au cours de l'action l'artillerie a tiré 162 obus sur 200 emportés; mais les obus ordinaires ne peuvent rien contre les soukalas (11) ; une des pièces est rapidement devenue inutilisable. Craignant d'être .encerclé par de nouveaux contingents des villages voisins arrivant au secours des rebelles et qui se présentent avec un certain. ordre en rase campagne, le chef de bataillon Simonin décide de rompre le combat par échelons. Le lieui tenant-gouverneur et sa suite donnent leurs chevaux pour emporter les blessés. Le 24 décembre, veille de Noël, la colonne rentre à Dédougou.

Cet échec qui nous avait coûté 10 tués et 113 blessés, avait -de funestes répercussions sur le moral de nos jeunes tirai]leurs et augmentait d'autant la confiance des révoltés. Aussi l'insurrection s'étend vers le Sud et l'Ouest, aux cercles de Bobo, de San, etc.

, Le commandant Simonin est relevé. Le lieutenant-gouverneur intérimaire rentre à Bamako (2 janvier). Jusqu'au début 1

F (11) Habitations locales en « banco » ou terre battue.


do février Inln, la colonne séjourne 11 Uridougou sous lecommandement du capitaine Modost (12), se conlenlanl, pour se donner de l'air, do prononcer quelques reconnaissances, notamment vers le Sud jusqu'il Dallna cl, Zeoulà, vers le Nord jusqu'à Don roula et les passages dn la VoIla" De plus, pour aasurer la srieurilri axtririeure, cor ta in», villages voisins sont occupas, Kari par le capitnino Ferron avoe la 11' compagnie, mudi par sous-lioulenant Cartier ivoe la compagnie, Koury cl, lA hac do la Voila pnr un.

rilrimo.nl, (h4 In compagnie Labouret, ni l'on étudie le plan do drifonse de Dridougou, que IPS rebelles ont, driolarô vouloir attaquer. La destruction successive des lignes trilrigrapbiquos do Hobo-Dioulasso, Yako, ensuite colins dn San ni Djennri, menacent d'isoler complètement le poste du reste do la colonie.

La situation osl. jugée flurilaammo.nl. grave pour que raul.oril.ri civile daman do. au commandement militaire de mobiliser tout oo qui reste do foroos disponibles, non plus seulement nu KOlldllll, mais dans toute l'Afrique OccidentaleFrilnçni:-lr, pour rriprimer l'insurrection.

v SM, - Suite des opérations de la Volta. Colonne Molard (levrier-juillet 101 H).

Lf colonel Molard, commandant le 2" Rrigimont de Tirailleurs Srinrigalnis et eommnndnnt mililnire. du Tfaut-Srinrigal* et-Niger, avait i'e.(;u l'ordre do prendre le commandement de la colonne, do Dridougou et d'assurer en personne la diroc* lion des opérations. Colles-ci dovaionl comporter la dostrurlion svstriina.ti(pie, dans le cercle do Dridougou et une partie do celui do, Hobo-Dioulasso, de tous les villages Mark a et.

Hobo rrivoltris ; une liste comportant prris de 50 de ces villages fi u casser » est fournie par l'autorilri civile, sous

(1î?) F.vnru^ malade le î?.1 janvier cl remplacé à cette natf" dans leet miuatulenient provisoire d".s iroupps par 1., Capitaine CarpenUer.


: forme de réquisition, au commandement militaire chargé de l'exécution.

L'Etat-Major de Dakar ramasse, dans toutes les colonies -du. groupe, toutes les troupes disponibles, et réussit à mettre sur pied de nouveaux renforts.

Le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais fournit une 4e compagnie de marche, 185 hommes avec 3 sous-officiers -européens (capitaine Carpentier), qui quitte Kati le 2 janvier 1916 et arrive le 20 à Dédougou, avec un important -convoi de munitions d'artillerie et d'infanterie.

Le 4e Régiment de Tirailleurs Sénégalais envoie sa 3e compagnie, 12 Européens et 350 indigènes sous le -commandement du capitaine Lucas, avec une section de mitrailleuses ; cette unité arrive à Kati le 11 janvier, en même temps que le chef de bataillon Ozil qui prend les fonctions d'adjoint au commandant de la colonne.

Le bataillon de Tombouctou envoie 80 hommes. Mais par suite de l'arrivée à Ouagadougou de la 14e compagnie du '2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, venant de SansanéMango (Togo ex-allemand), ces 80 hommes sont arrêtés à Dori ; réunis à la commission de recrutement, qui devait opérer dans ce cercle, ces 80 hommes forment la petite colonne du capitaine Fourcade (voir plus loin §90).

Le bataillon de Guinée fournit une compagnie, 2 officiers, -6 sous-officiers européens., 200 indigènes sous les ordres du capitaine Amalric, concentrée à Kindia le 11 janvier, arrivée à Bobo le 18 février. Après avoir laissé 40 tirailleurs à Bobo.

ci la disposition du commandant de cercle, cette compagnie arrive à Dédougou au début de mars.

Le colonel Molard quitte Kati le 19 janvier avec 8 officiers, 19 sous-officiers ou soldats européens, 345 indigènes (compagnie Lucas), 26 tonnes de matériel et munitions ; ces -dernières comprennent 500 obus explosifs et 400.000 cartouches d'infanterie, le tout réparti en caisses de 25 kilos.

La colonne de Dédougou, concentrée dans ce poste le


10 février 1916 sous le commandement du colonel Molard, comprend :

5 Compagnies d'infanterie (Breton, Carpentier, Ferron, Labouret, Lucas) provenant de 3 corps différents; 1 Section de mitrailleuses (solls-lieutenant Poder); 1 Goum de 150 cavaliers, (M. Haillot); 1 Batterie de 80 de montagne à 4 pièces (sous-lieutenant, Monteil); Service de santé : docteurs Jousset, Stefani et Cremer, snit au total 17 officiers, 34 européens, 1.095 indigènes dont 168 auxiliaires.

L'administrateur commandant le cercle de Dédougou, M. Magnet. accompagnera la colonne comme chargé du service de renseignements ; le R. P. Dubernet, des Pères blancs, remplira comme volontaire les fonctions d'officier d'approvisionnement. A Dédougou, après le départ de la colonne, le docteur Macé assurera le service médical du < dispensaire et le sergent-major Trimardeau, le commandement du gîte d'étapes et les fonctions de vaguemestre.

La colonne tout entière quitte Dédougou le 13 février. Les villages de Pondou, Ouarkoye, Sokongo, La, Bouna, Bara, Banou, sont successivement enlevés aux rebelles, après autant de combats qui nous coûtent 11 tués, dont 1 s'ergent européen (sergent Paillé) et 4 auxiliaires, et 90 blessés, dont l, Européens-parmi lesquels le commandant Ozil, 64 tirailleurs et 22 auxiliaires. Yankasso est enlevé d'assaut le 2 mars (5 tués et 21 blessés) ; après quoi le retour s'effectue par Soldien el Tiékuy (28 blessés dont 2 Européens, et rentrée à Dédougou le 9. La troupe indigène, remise en i-onfiance, aura désormais une conduite irréprochable.

La compagnie Amalric, récemment arrivée de Guinée, entre dans la composition de la colonne.

Du 11 mars au 9 avril, les compagnies Carpentier et Breton opèrent dans le cercle de San (voir § suivant).

Les Unités restantes exécutent plusieurs expéditions puni-


tives à court rayon, sur Passakongo (12 mars); Ouroukuy, Koana, Pi6 (où nous avons 1 tué et 10 blessés dont 1 Européen), Koré, Pérékuy, du 18 au 25. Des postes provisoires sont installés et occupés à Siou, 16 kilomètres Sud de Yankasso, par le sous-lieutenant Cartier ; à Békuy, 5 kilomètres Nord-Est de Ouarkoye, par le sous-lieutenant Molières ; cette dernière opération nous coûte 18 tués et 57 blessés dont 7 Européens.

Fin mars la compagnie Labouret est renvoyée à Gaoua.

Le 1er avril est constituée une nouvelle compagnie de marche, commandée par le capitaine Cadence du 2e Sénégalais.

Le détachement Carpentier rentre de San le 9 avril, renforcé par la Compagnie Stéfanini du 1er Régiment de Tirailleurs Sénégalais, comprenant 2 officiers (sous-lieutenants Santini et Tognet), 5 sous-officiers européens et 250 indigènes plus la section de mitrailleuses de l'adjudant Rault. Les troupes placées sous le commandement du colonel Molard comprennent dès lors 7 compagnies d'infanterie, 2 sections de mitrailleuses et 1 batterie d'artillerie.

Pour. faciliter la marche, elles seront désormais scindées en deux fractions : — la première comprenant 5 compagnies, les 2 sections de mitrailleuses avec chacune ses six caisses de munitions, la batterie avec un petit approvisionnement de 30 coups par pièce, et.le 1er échelon du train de combat ; — la deuxième fraction, comprenant le 2e échelon du train de combat et 2 compagnies lui servant d'escorte.

C'est dans cette formation que la colonne de Dédougou se remet en marche le 13 avril et, durant trois mois et demi, parcourt sans arrêt la région en effervescence, pour faire rentrer dans l'ordre les villages révoltés. L'itinéraire est le suivant : Tiga 14 avril, Tchériba le 19, Da 22, Pompoye 27, Bagassi 2 mai, Bondoukuy- 23, Sara 27, Dohoun 4 juin, Houndé 12, Boromo 16, retour à Dédougou 23 juin.

Au cours de cette campagne, la pénurie de cadres euro-


péens donne un rôle de premier plan aux gradés indigènes.

C'est ainsi que, à l'assaut du gros village de Tchériba, renfermant environ 4.000 habitants de race Marka-Nourouma- et constitué par plusieurs soukalas entourées de murs crénelés, le rôle principal revient, durant presque toute la.

matinée, à une section de la compagnie Lucas commandée par le caporal Moussa Taraoré. Cette section, ayant réussi à prendre pied dans le village, est obligée, conformément à la tactique fréquemment employée dans ces affaires, derassembler des bottes de paille autour de l'îlot de résistance, et les enflammer, le tout sous le feu de l'adversaire.

Au cours de celle opération, exécutée avec le plus grand sang-froid, le caporal Mamadou Diallo est blessé d'une balle au ventre. Décidé à faire agir le canon, le colonel envoie le caporal Baba Coulibaly prévenir Moussa Taraoré de se terrer et d'attendre pour reprendre l'attaque, un signal convenu. En portant cet ordre, Baba Coulibaly est traversé de part en part par une balle ; il accomplit néanmoins sa mission, et ce n'est qu'au retour que, trahi par ses forces, il s'écroule pour ne plus se relever.

Le surlendemain, à l'attaque de Dâ, un des principaux villages Marka, une section de la compagnie - Lucas; commandée par le sergent Mamadou Coulibaly reçoit l'ordre d'attaquer la face Est, en procédant par vagues d'escouades.

Il part lui-même avec la première, mais les autres escouades, ayant mal compris les ordres, le suivent, et la section entière arrive à la brèche. Ne pouvant pénétrer qu'un par un, les tirailleurs se pelotonnent au pied du mur, cherchant.

un angle mort. Les rebelles accourent aux crénaux, font pleuvoir une grêle de balles et de flèches ; en un instant 2 tués, 5 blessés. A ce moment, donnant lui-même l'exemple, Mamadou Coulibaly escalade le mur d'enceinte, en se faisant faire la courte échelle par les tirailleurs, ses hommes l'imitent, pénètrent dans une cour, enlèvent une case devant eux, et bientôt la section tout entière est dans le village. Le 16 mai, la colonne repasse au village de La, qu'elle


avait conquis au mois de février. Elle le trouve réoccupé, et fortifié à nouveau ; la tombe du sergent Paillé a été violée et le cadavre mutilé. Le village est rasé.

Pendant ces opérations avaient eu lieu divers changements dans le personnel : les 26 avril et 20 mai, le commandant Ozil, puis le capitaine Ferron sont évacués malades ; le capitaine Lucas prend le commandement du bataillon ; le capitaine Vallet et le sous-lieutenant Chorhy remplacent dans leurs commandements Lucas et Perron. Le 1er mai, le -capitaine Amalric, désigné comme commandant militaire du Togo, quitte la colonne pour rejoindre son poste. Le '5 juin le capitaine Carpentier et le sous-lieutenant Chorhy quittent la. colonne et sont remplacés par le lieutenant Tognet et le capitaine Branche.

Après trois jours de repos à Dédougou, la colonne Molard repart le 27 juin pour achever de rétablir l'ordre dans le pays Bobo-Fing. Elle ne comprend plus à ce moment que : '2 Compagnies (Branche et Valet); 1 Section de mitrailleuses; 1 Section d'artillerie (Comte).

Elle est accompagnée par l'administrateur en chef Vidal, -comme délégué du gouverneur.

Après avoir franchi la Volta à Nokuy (en partie de nuit à cause de la tsé-tsé), elle passe par Bagala, Balaoué, Dankouma et Missakongo, et rentre à Dédougou le 24 juillet.

La situation politique étant fortement améliorée, vu d'autre part la fatigue des troupes, en marche depuis six mois, et l'approche de la saison des pluies qui rend les déplacements excessivement difficiles, la dissolution est prononcée à cette date.

La compagnie Stéfanini (3e compagnie du 1er Régiment de Tirailleurs Sénégalais) est envoyée dans le pays Niénégué, cercle de Bobo, pour construire et occuper le poste de Houndé, jusqu'à fin septembre 1916 où elle passe au Dahomey.


La seconde période active du 15 avril au 25 juillet nous !

avait coûté 40 tués, dont 30 tirailleurs, et 152 blessés, dont 3 Européens et 119 tirailleurs. �

Les pertes françaises pour l'ensemble des opérations defévrier à juillet 1916, menées contre les Bobo et les Marka révoltés, dans la boucle de la Volta et cercles voisins (13), s'élèvent à 56 tués dont 1 Européen et 42 tirailleurs et 284 blessés dont 11 Européens et 22'1 tirailleurs ; 39 villages avaient été enlevés de vive force, et la consommation des munitions avait été : 135.000 cartouches dont 130.000 pour fusil 86 et 5.000 pour le 74 ; 1.905 obus, dont 1.592 à mélinite et 313 à mitraille.

§ 89. — Insurrection du cercle de San.

Les compagnies Carpentier et Breton, de la colonneMolard, sous le commandement du capitaine Carpentier,.

sont mises en route le 11 mars 1916 de Dédougou sur San pour en ramener un important convoi de munitions destinées à la continuation des opérations dans la boucle de la Volta. La durée normale du trajet aller et retour étant de 16 jours, on pouvait escompter le retour au plus tard pour la fin du mois, même en supposant que ce détachement eût.

à s'ouvrir la route de vive force.

Mais la situation dans le cercle de San était loin d'être facile. Des milliers de rebelles, chassés du cercle de Dédougou par nos opérations, s'étaient rassemblés à l'Ouest rie la Volta en deux groupes principaux, dont l'un avait pour objectif le cercle de San, le second le cercle deKoutiala. De gré ou de force, les populations locales s'étaient ralliées à la révolte.

Dès le 23 février, les cantons de Tiontiou et de Mandjakuf s'étaient soulevés. 5.000 rebelles, en marche sur San, avaient.

détruit les villages fidèles de Bénénfl, I-Ianékuy; arrivés le-

(13) Non compris le détachement Carpentier, voir § 89.


4 mars devant Tominian, village évacué par ses habitants, mais défendu par des gardes de cercle et des partisans sous le commandement d'un commis européen, ils avaient enlevé ce point, nous tuant 7 gardes, 1 interprète et 1 chef de canton, dont les corps et les armes étaient restés entre leursmains.

Le 5 mars, sur réquisition du gouverneur, deux détachements avaient été dirigés sur San : 66 tirailleurs de Kati (s;""us-lieutenant Prestat) et 40 de Ségou (adjudant Cudelou).

Le 10 mars, avait eu lieu l'affaire malheureuse de Sienso, 5 kilomètres Sud de San, qui nous avait coûté, rien que parrrii les réguliers, la perte de l'adjudant Cudeloll, 2 gardestués, 1 caporal de tirailleurs disparu, plus une douzaine de blessés.

Les rebelles s'acharnent sur les lignes télégraphiques, en particulier-sur celle de San à Dédougou, de première importance pour les communications de la colonne Molard : les détachements chargés de la garde de ces lignes sont l'objet d'agressions constantes ; les réparations sont détruites aussitôt faites et le matériel transporté à de grandesdistances.

Arrivé à San le 17 mars, le détachement Carpentier est réquisitionné pour prêter main-forte pour le rétablissement de l'ordre. Renforcé de 40 tirailleurs avec le sous-lieutenant Prestat, il a le 23, à Tiédana, 26 kilomètres Sud-Ouest de San, une dure affaire qui nous coûte 7 tirailleurs tués, 2 officiers et 31 tirailleurs blessés.

L'arrivée à San le 28 mars, de la compagnie Stéfanini du 1er Régiment de Tirailleurs Sénégalais et le 31 de la compagnie Mégnou du 4e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, rend la liberté au capitaine Carpentier, qui reprend le 1er avril la route de Dédougou avec son détachement renforcé de la compagnie Stéfanini. Il met juste neuf jours pour rentrer à Dédougou, traversant un pays en révolte ouverte, obligé d'enlever d'assaut successivement tous les villages tout en .assurant la bonne marche et la garde de son convoi. Cette


marche nous coûte 7 tirailleurs tués et une trentaine de blessés.

Au début d'avril 1916, les troupes présentes dans la région de San sont placées, sur le papier, sous la direction d'ensemble du chef de bataillon Simonin, alors chargé de l'expédition des affaires du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais à Kati. On envisage en haut lieu la. formation d'un nouveau groupement, qui serait chargé, si les événement l'exigent, d'opérer dans les cercles de San, Koutiala, Djenné et Bandiagara, un nettoyage méthodique analogue à celui qui a été confié par voie de réquisition civile, à la colonne Molard dans le Cercle de Dédougou. Le groupement Simonin comprend : Compagnie Mégnou, provenant du 4e Régiment de Tirailleurs Soui égalai s, à San; Compagnie ThiébnuU;, du 2CJ Régiment de Tirailleurs Sénégalais, cri nuira de formation à Kati; Une section d'artillerie.

De plus 2 nouvelles compagnies, commandées par les lieutenants Uuillermin et Figaire, provenant respectivement du lor et du 4e Sénégalais, devaient entrer dans ce groupement.

Arrivés respectivement à San les 22 avril et 21 juin, elles sont mises, dans la pratique, directement à la disposition du colonel Molard, avec la mission spéciale d'assurer la liberté de la ligne de communication San-Dédougou. La compagnie Guillcrmin assure, du 22 mai au 4 juillet, l'escorte d'un important convoi de San à Dédougou et retour. La compagnie Figaire, ainsi que les autres unités théoriquement rattachées au groupement Simonin, n'ont à exécuter dans le cercle qu'un travail courant de protection et de patrouilles ne comportant pas d'action militaire proprement dite.

£ !JO. Cercles de Koutiala, Bandiagara, Dori, Ouagadougou.

Cercle de Koutiala. - Dès le commencement de février


1916, divers villages passent à la révolte. Les postes de partisans installés par l'administrateur subissent de rudes assauts. C'est ainsi que à Sanhouan, les gardes de cercle et.

partisans, aux prises avec les rebelles de 11 villages différents, sont dégagés grâce à l'énergique intervention de 1 caporal et 10 tirailleurs du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais spontanément accourus à la rescousse. Ces tirailleurs appartenaient à l'escorte du sous-lieutenant Grégoire, en tournée de recrutement dans le cercle. L'incident nouscoûte 1 garde et 3 partisans tués, 1 garde et de nombreux partisans blessés.

Un renfort de 30 tirailleurs est envoyé de Ka.ti à M. Grégoire, qui dispose alors de 53 hommes.

Au début de mars, le village de Toma, dépendant de Dédpugou, et proche de la frontière de Koutiala, est enlevé par les rebelles. Le 5, ceux-ci détruisent Maréna et ont avec les gardes et les partisans dans les ruines du village, un engagement qui nous coûte 3 tués et 18 blessés. Les contingents' dé 60 villages révoltés sont concentrés à Kiélé (cercle dé" D'édbugoû), mênaçarit les cantons de Bagadina et Ménamba. Le 15 mars, la ligne télégraphique de San à Koutiala est coupée. Néanmoins l'administrateur de Koutiala.

devait réussir, grâce à une judicieuse utilisation de sesgardes et de ses partisans, à maintenir dans l'ordre la majeure partie de son cercle sans avoir recours à l'intervention de forces régulières.

Cercle de Bandiagara. — C'est seulement vers le 20 mars 1916 que ce cercle commence à être ostensiblement travaillé par la propagande de rébellion venue de San. Le commandant de cercle, M. Fawtier, se porte vers la frontière Sud avec un détachement comprenant 30 tirailleurs (adjudant-chef Puget), 19 gardes de cercle et 64 goumiers. Après un engagement heureux à Kissédougou (1er avril), le détachement casse les villages rebelles de Ngoïna, Promani et Kondougou et installe des postes provisoires à Baraman-


dougou, Tonara et Koniniou, afin de se mettre en liaison avec le groupement Simonin qui doit venir nettoyer les confins du cercle de San.

Cercle de Dori. — Dans le pays de l'Oudalan, au NordOuest de Dori, les Touareg révoltés se groupent autour de leur chef Mamadou Otam, et grossis par des Kel-Gossû Logomaten et Tin-Guéréguédesch, razzient les Peuls et les Mossi sédentaires.

Le capitaine Fourcade, en tournée de recrutement dans le' cercle, s'efforce avec son escorte de rétablir l'ordre.

Le 22 février 1916, une reconnaissance dirigée sur le village ,de Saonga, à W k'Mrrrw très Nord de Dori, où sont signalés les cavaliers Touareg, tue 30 bellahs (ou vassaux) de Mamadou Otam et ramène un troupeau important.

Une autre reconnaissance (10-16 mars) donne lieu au combat de Tin-Abalak; au cours duquel les Touareg subis-sent des pertes sévères et aboutit è, l'occupation des campements de Bosseye.

Après une tournée dans le pays Sonrhaï, le capitaine Fourcade rentre à Dori. En mai ayant reçu un renfort de 80 hommes, provenant du bataillon n° 2 à Tombouctou et précédemment destinés à la colonne Molard, il marche sur Oursi, important point d'eau, situé à 90 kilomètres. NordOuest de Dori, qui sert de rassemblement aux rebelles de Gourma ; après un engagement à Youmboli, Fourcade détruit les campements d'Oursi (2 juin). La poursuite, entamée sans retard, amène la soumission des principaux chefs révoltés, et en particulier de Fellane, qui avait remplacé à la tête des Touareg de l'Oudalan, Mamadou Otam abandonné par ses partisans.

Le cercle de Dori se tient désormais tranquille.

Cercle de Ouagadougou. — Dès le 14 janvier 1916, l'administraleur en chef commandant le cercle du Mossi, signalait que les Gourounsi habitant l'Ouest de la subdivision de Koudougou. avaient partie liée avec les rebelles de.


Dédougou. De même dans le Kipirsi, où les habitants montraient une réelle mauvaise volonté devant les exigences de notre administration, les Marka propagandistes de la.

révolte allaient trouver un terrain tout préparé.

C'est d'abord la 14e compagnie du 2U Régiment de Tirailleurs Sénégalais (lieutenant Marotel) venant de SansanéMango (Togo ex-allemand) qui fut chargée du maintien de l'ordre dans cette région. Le 1er peloton .de cette unité commence en février les opérations de dégagement de Koudougou, lesquelles comprennent, uutre une série de patrouilles et de reconnaissances, l'occupation de postes provisoires à Sabou et Godé, pour isoler le pays soumis de la région occupée par les révoltés. En, mars, le 2e peloton se livre à une action analogue aux environs du poste de Léo.

Le 11 avril la compagnie Cadence, venant de Dédougou par Boromo, arrive à Koudougou et le capitaine Cadence prend la direction des opérations, Kn juin elle est renforcée par la compagnie Breton, provenant de la colonne Molard, et la pièce de canon de Ouagadougou.

Une série de patrouilles incessantes, ne constituant pas ù proprement parler des opérations militaires, réussirent avant ,la saison des pluies, à éclaircir la situation dans le Mossi, le Gourounsi et le Kipirsi. Le Yatenga s'était tenu à peu près calme.

§ 91. — Le 2e Sénégalais après la guerre. — La relève extérieure.

De même que, avant la Grande Guerre, le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais avait fourni les unités qui formèrent successivement le Bataillon n° 2 à Tombouctou, puis le Bataillon de Zinder, de même en 1920, au moment où la colonie autonome de la Haute-Volta fut détachée du Soudan, les unités du régiment stationnées sur cette nouvelle colonie furent détachées du corps pour former le Bataillon Séné-


galais n° 6,. avec portion centrale à Qwagadoifigoir et pastes à Bobo-Dioulasso, Dédougou, Gaoua. M'Oii'û'dé;. BaMfora.

Le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais est alors réorganisé à 9 compagnies, groupées en 2' bataillons (t4).

Etat-major et Compagnie hors-rang : Kati.

i l1'6 Compagnie : Kati (avec poste à Bamako); 1er B t .11 2e Compagnie : Kati (avec poste à Koulikoro,); le" Bataillon, r: C KT t.

fK t') 5e Compagnie Kati; (Kati) 6e Compagnie (ancienne 10e) : Kayes; 9e Compagnie Nioro (avec poste à Yélimané); !3° Compagnie Ségou; 2e p..„ Ie Compagnie Bandiagara (avec poste à Mopti); a al on. C ( t, N t (Sé ou) < 7e Compagnie Néma (avec postes à Nara et Oualata); 8e Compagnie : Ségou (avec poste à San).

Depuis cette époque (1920), le 2* Régiment de Tirailleurs Sénégalais n'a subi aucune transformation, en dehors de la suppression des postes détachés de Yélimané et San (1er janvier 1924) et de Nara (1er janvier 1930).

Le Régiment a été commandé successivement par l'es colonels de Fajolle (1919-1921), Cluzeau (1921-1923),- Louis Braive (1923-1925), Malafosse (1925-1927), Berger (1927-1929), Lion (1929-1930), Perraud (1930-1932) et de Martonne (1932).

Le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais continue à recruter et instruire, chaque année, un chiffre variable d'indigènes du Soudan appelés ou engagés volontaires, el d'autre part à fournir la relève extérieure conformément aux « Plans de relève » successifs qui lui sont notifiés chaque année par le Commandant supérieur. Les chiffres des militaires indigènes envoyés par le régiment en Afrique du Nord, à Madagascar el sur les théâtres d'opérations extfr-

(14) Voir croquis N° 10.



rieurs sont fonction des besoins des troupes en opérations et des corps d'occupation. Sans entrer dans les détails, il pourra être intéressant de savoir que, pendant les 15 années d'après-guerre, allant de 1919 à 1933 inclus, le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais a envoyé à l'extérieur 21.260 gradés et tirailleurs dont 6.600 en France, 4.800 en Algérie-Tunisie, 8.820 au Maroc, 830 au Levant et 150 à Madagascar, ce qui représente une moyenne de 1.420 par année.

§ 92. — Groupe nomade du Hodh.

La seule unité constituée du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais qui ait eu, au cours de ces quinze dernières années, l'occasion de prendre part à des opérations de guerre, est le Groupe nomade du Hodh, rattaché administrativement à la 7e compagnie de Néma. Ce groupe comprend 3 officiers, dont 1 stagiaire, 5 sous-officiers européens, et 94 tirailleurs méharistes gradés compris. Composé exclusivement de volontaires, c'est — comme son nom l'indique — une force essentiellement mobile, qui « nomadise » dans la région subdésertique dont le centre est approximativement marqué par le poste de Oualata, se tenant en liaison par T. S. F. tant avec Néma, son point d'attache, qu'avec les groupes nomades voisins : celui de Tichitt en Mauritanie et celui d'Araouan dans la région de Tombouctou. Il a la garde du front saharien dans un secteur de près de 500 kilomètres d'étendue.

Le 6 avril 1932, le groupe nomade du Hodh, installé au carré à Tiguiguilt (40 kilomètres Sud-Ouest de Oualata) et comprenant (y compris les gardes-méharis tes) 130 fusils, 6 fusils-mitrailleurs et 2 mitrailleuses, est attaqué à 3 heures par un razzi de 130 Régueibat, descendu du Hank par Aïoun-Abd-el-Malek. L'attaque est repoussée ; 7 pillards dont le chef de bande, restent sur le terrain. De notre côté nous avons 6 tués et 4 blessés. Le général Rérecki, commandant la 2e Brigade à Kati, se rend sur place en avion et organise la poursuite.


Le razzi se divise en trois fractions. L'ùne d'elles prend la fuite dans la direction du Nord-Ouest ; elle est devancée à la passe de Frékiké, entre Oualata. et Tichitt, par le lieutenant Guennebaud, commandant le groupe nomade, qui avec l'aide de l'aviation de Bamako (capitaine Démery) l'anéantit complètement, tuant 29 hommes, capturant les 9 autres (13 avril).

La seconde fraction se dirige vers le Nord-Est. A El-Ksaïb elle est surprise et détruite par le groupe nomade d'Araouan (capitaine Poggi), qui avait été alerté par la radio ; du 17 au 21 avril, 27 pillards, qui se présentent épuisés par une marche de plusieurs centaines de kilomètres à travers le désert du Djouf, sont tués ou faits prisonniers par le capitaine 'Poggi.

Seule la troisième fraction, comprenant une quarantaine d'hommes, réussit à regagner ses campements.

L'attribution de la médaille coloniale, 2 médailles militaires, 2 citations à l'ordre de l'Armée, 2 à l'ordre du Corps d'armée, li à l'ordre de la division, 10 à l'ordre de la brigade, 14 à l'ordre du régiment, comportant l'attribution de la Croix de guerre des T. 0. E., ont récompensé cette action de guerre.

§93. — Le 2e Sénégalais d'aujourd'hui (15).

Au 10r janvier 1933, la composition du régiment est la suivante : f ETAT-MAJOR

l MM.

t de Martonne, r Soreau, r Brocard, t

colonel, lieutenant, chef de bataillon,

commandant le régiment; adjoint an chef de corps; commandant major;

(15) Voir croquis N° 10.


Antonini,

Germain,

Boyer, Rhodes, Capéran,

capitaine, capitaine,

capitaine, capitaine, médecin-commandant,

trésorier; Service de la mobilisation et des effectifs;

commandant la Compagnie hors-rang; Service du matériel; médecin-chef.

L'encadrement des compagnies comprend, en principe, i capitaine et 2 lieutenants :

1er Bataillon : chef de Bataillon Weissenburger, commandant, lieutenant indigène Kantara Sako, adjoint; 1re Compagnie : capitaine TJiiriet, lieutenant Desbois; 26 --- : capitaine Viénot, lieutenants Ntchoréré et Forgeron; 5e — : capitaine Manfrino, lieutenants Dexemple et Sarrot, sous-lieutenant Robert; 6e - : capitaine Derrien, lieutenant Grué; ge - : capitaine Laforest, sous-lieutenant indigène Amadou Diallo;

1 Section de mitrailleuses (portée à ânes); 1 Groupe d'engins d'accompagnement;

2° Bataillon : chef de Bataillon Bemoin, commandant, sous-lieuten. indigène Soumana Touré, adjoinL, médecin-capitaine Courmes, méd. du bataillon; 3° Compagnie capitaine Boussand, lieutenant Farsac; ].J — capitaine Quinchard, sous-lieutenant Richard; 7e - : capitaine d'Adeler, lieutenants Coula ux et Farret, sous-lieutenant Bruge; Groupe nomade: capitaine Dessert, lieutenants Guennebaud et Bouillon; S- Compagnie : capitaine Pujol, lieutenant Darnault;

1 Seclion de mitrailleuses (à ânes).

Au régiment sont rattachés plus ou moins directement les organismes suivants :


Section de recrutement indigène : capitaine Chatenay; Ecole de perfectionnement des officiers de réserve : commandant Weissenburger; Ecole des enfants de troupe : lieutenant Ntchoréré; Centre régional d'instr. physique : lieutenant Dexemple; Société coopérative militaire de Kati-Bamako : capitaine Jullien.

A la même date du 1er janvier 1933, l'etïeclif réel des unités (non compris 526 indigènes appelés des classes 1930 et 1931 envoyés par anticipation en congé libérable) est le suivant :

Etat-major et Compagnie hors-rang (Kati) : 8 officiers, 32 sousofficiers, 28 caporaux et soldats européens, 106 indigènes gradés compris;

lre Compagnie (Kati) : 3 offic., 20 sous-offic., 367 indigènes; 2e Compagnie (Kati) : 2 offic., 8 sous-offic., 191 indigènes; 3e Compagnie (Ségou) : 2 offic., 6 sous-offic., 189 indigènes; ¡ 4e Compagnie (Bandiagara) 2 offic., 5 sous-offic., 133 indigènes; r 56 Compagnie (Kati) : 4 offic., 8 sous-offic., 193 indigènes; ! 6e Compagnie (Kayes) : 2 offic., 6 sous-ofnc., 1 gradé européen, 223 indigènes; u 7e Compagnie (Néma) : 1 offic., 6 sous-offic., 171 indigènes; Groupe nomade : 3 offic., 5 sous-offic., 94 indigènes; 8e Compagnie (Ségou) : 2 oîYic., 6 sous-offic., 130 indigènes; 9'1 Compagnie (Nioro) : 2 offic., 6 sous-offic., 161 indigènes;

1 soit un effectif total de 2.136 présents dont 175 européens et 1.961 indigènes.

Enfin pour former un tableau véritablement complet de la force que représente le 2e Sénégalais d'aujourd'hui, il faut tenir compte des réservistes qui lui sont rattachés dès le temps de paix, et qui comprennent :


45 officiers de réserve; 94 sous-officiers et 270 hommes de tr-oupe européens;

106.000 indigènes (16) dont 33.000 de la lre portion et 73.000 (17) de la 2e portion du contingent.

Une expérience récente. l'appel des réservistes indigènes des classes jeunes (classes 1924 à 1928) dans les cercles de Bamako, Bafoulabé, Bougouni, Kita, Ségou. qui a été réalisée au mois d'octobre-novembre 1932 par la portion centrale du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais à Kati, a montré que l'on pouvait compter sur tous les anciens tirailleurs répandus au fond des plus petits villages du Soudan, et que ceux-ci une fois rentrés dans leurs foyers n'ont perdu ni la confiance dans leurs chefs ni les qualités militaires qui en font une des plus belles troupes qu'un officier ou sous-officier français puisse être appelé à commander.

§ 94. — Les batailles inscrites au drapeau.

Le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais a reçu, comme les autres régiments sénégalais, un drapeau, qui a été remplacé en 1933 par suite de l'usure du premier, très endommagé par le climat el les insectes. Le drapeau du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, qui est déposé à la Salle d'honneur tout récemment créée au camp de Kati, porte par décision du Ministre les batailles suivantes : Soudan, Dahomey, Côte d'Ivoire, Madagascar, Congo, Tchad, Maroc.

Les pages qui précèdent suffisenl à monLrer que ces glorieuses inscriptions sont justifiées par le rôle tenu par le corps dans la conquête des colonies françaises.

(16) Y compris 10.500 provenant des cercles de l'ancienne colonie de la Haute-Volta rattachés au Soudan depuis 1933.

(17) Dont 17.300 des classes 1930, 1931 et 1932 effectivement employés sur les chantiers des grands travaux locaux.


La conquête du Soudan, commencée en 1890 à la suite de celle du Haut-Sénégal, est entièrement et uniquement l'œuvre du régiment qui s'appela successivement « Régiment de Tirailleurs Soudanais » puis a 2e Régiment Sénégalais ». Elle a donné lieu à des guerres poursuivies durant des années (comme la lutte entreprise pour libérer les populations sédentaires de la tyrannie sanglante de Samory) et à des épisodes héroïques (comme la prise de Sikasso), où la science et la ténacité des cadres européens ont été égalées par la valeur guerrière et l'attachement des tirailleurs.

Si la conquête du Dahomey en 1892, celle de Madagascar en 1895, ne sont pas l'œuvre de compagnies constituées du régiment, les unités de marche qui y participèrenl étaient formées en grande partie de tirailleurs soudanais.

La Côte d'Ivoire voyait dès J893 les randonnées épiques de Combes, plus tard celles de Gouraud aux trousses de Samory, en 1896 des fais d'armes comme le siège de Kong ou la conquête du Mossi, enfin dans les premières années du xxe siècle la soumission du pays Baoulé, qui sont toutes le fait d'officiers et de détachements constitués venus de Kayes, puis de Kati.

La soumission du Congo, la marche concentrique des grandes missions qui se réunirent au Tchad en 1900, réalisant ainsi l'unité du bloc africain français, sont aussi l'œuvre du régiment : ces événements, devenus historiques, illustrent à la fois l'héroïque volonté des chefs et le dévouement des plus humbles exécutants, comme celui des survivants de la mission Cazemajou à Zinder, qui peut s'égaler aux plus hauts faits de l'histoire militaire de tous les temps et de tous les pays.

Enfin la bataille du Maroc, ouverte en 1908 et qui se continue pendant et après la Grande Guerre, et jusque de nos jours, avec des péripéties angoissantes comme l'insurrection rifaine de 1926, n'aurait pu se poursuivre sans l'appoint des Troupes noires. Le 2e Sénégalais l'a alimentée par plusieurs milliers des siens. Les tirailleurs sénégalais


d'après-guerre, dignes héritiers de leurs aînés, ont signé de leur sang des pages de bravoure héroïque (comme la défense du poste de Beni-Derkoul) qui justifient pleinement l'inscription du mot Maroc sur le drapeau du régiment.

Ces fastes de l'histoire militaire du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais ont été évoqués et célébrés lors de la fête du corps, qui fut célébrée pour la première fois à Kati le 7 mai 1933, 33e jour anniversaire du décret créant le régiment, en présence des autorités civiles et militaires de Ramako et de Kati.


TABLE DES MATIÈRES



TABLE DES CROQUIS

Pages 1. — Opérations du lieutenant-colonel Combes contre Samory (décembre 1892 - mars 1893) 13 2. - Conquête du Moyen-Niger et du Bani, par le colonel Archinard (1893) 21 3. - Conquête de Tombouctou (1894-1896) 33 4. — Conquête de la boucle du Niger (1895-1899) 47 5. — Opérations dans la haute Côte d'Ivoire (1897-1898).. 77 6. — Stationnement du 26 Régiment de Tirailleurs Sénégalais à sa création (mai 1900) 135 7. — Conquête et occupation du territoire de Zinder (1900-1902) 155 8. — Colonne du Bélédougou (février-avril 1915) 171 9. — Opérations dans la boucle de la Volta Noire (novembre 1915 - juillet 1916) 175 10. — Stationnement du 2c Régiment de Tirailleurs Sénégalais en 1933 .,. 191



TABLE DES MATIERES

Pages Liste des Officiers ayant commandé le 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais depuis sa création 3

PREMIERE PARTIE

LE REGIMENT DE TIRAILLEURS SOUDANAIS DU 1er JUILLET 1892 AU 7 MAI 1900

§ 1. — Création du Régiment de Tirailleurs Soudanais.. 7 § 2. — Situation du Soudan en 1892 10

COMMANDEMENT SUPERIEUR DU COLONEL ARCHINARD (CAMPAGNE 1892-1893) § 3. ■— Programme du commandant supérieur 11

A) Opérations du lieutenant-colonel Combes contre Samory (décembre 1892, mars 1893) § 4. - Organisation des colonnes 12 § 5. — Colonne volante du capitaine Briquelot 1'5 § 6. - .Colonne principale 16 § 7. - Colonne du capitaine Dargelos 19 § 8. - Reconnaissances autour de Kérouané. Organisation de la région Sud .,. 19


B) Conquête du Moyen-Niger et du Bani par le colonel Archinard (février-mai 1893)

Pages §9. - Conquête du Macina (février 11893) 20 § 10. — Pacification du Minianka (mars 1893) 22 § 11. — Prise de Djenné 23 § 12. - Occupation de Mopti 24 § 13. — Prise de Bandiagara.,., 25 § 14. — Annexion du Macina 26 § 15. — Organisation de la conquête 26

COMMANDEMENT INTERIMAIRE DU LIEUTENANT-COLONEL BONNIER (1893-1894) A) Reprise de la lutte contre Samory § 16. — Formation d'une colonne expéditionnaire à Bamako 28 1.7. Marche sur Ténétou 29 § 18. — Derniers engagements dans la région Sud du Soudan ou haute Guinée actuelle (décembre 1893mars 1894) 30

B) Conquête de Tombouctou (1894-1896)

§ 19. — Nécessité de la marche sur Tombouctou 31 § 20. — Colonne du lieutenant-colonel Bonnier 32 § 21. — Colonne du commandant Joffre. 36 § 22. - Lutte contre les Touareg de l'Ouest (1894-1896).. 39 § 23. -- Première révolte du Macina, affaire de Bossé. 44 § 24. -- Colonne Bonaccorsi 45

CONQUETE DE LA BOUCLE DU NIGER (1895-1899) A) Gouvernement du colonel de Trentinian

§ 25. — Programme du lieutenant-gouverneur 48 S 26. — Mission Destenavc au Mossi (avril-décembre 1895) 49


Pages §27. - Exploration du Niger par le lieutenant de vaisseau Hourst (janvier-octobre 1896) 49 § 2.8. - Seconde révolte du Macina (avril 1896) 50 § 29. — Directives du Ministre des colonies 50 § 30. - Mission Voulet au Mossi et au Gourounsi (juillet 1896 - mars 1897) 51 § 31. - Mission Destenave dans l'Est du Macina (janvier 1897 - avril 1898) 54 § 32. - Création de la région Niger-Volta (février 1897avril 1898) 55 § 33. — Soumission des Samo, colonne contre les Bobo.. 56 § 34. — Occupation du Gourounsi (mars-juillet 1697). 58 § 35. - Tentatives de pénétration au Lobi et massacre de la mission Braulot (juin-août 1897) 59 § 36. — Reprise des opérations contre Samory. Colonne Caudrelier 61 § 37. — Siège de Kong 63 § 38. - Exploration du lieutenant Blondiaux sur le haut Cavally (janvier 1897 - février 1898) 65

B) Gouvernement intérimaire du lieutenant-colonel Audéoud campagne 1897-1898 § 39. — Programme des opérations 68 § 40. — Prise de Sikasso 69 § 41. — Dernières opérations contre Samory 75 § 42. -- Opérations du commandant Bertin dans la région Sud du Soudan ou haute Côte d'Ivoire actuelle (août 1897 - juin 11898) 76 .§ 43. — Opérations du commandant Pineau sur le haut .Bandama (mai-juin 1898) 80 § 44. — Opérations du commandant de Lartigues sur la haute Sassandra (juin-octobre 1898) 84 § 45. — Première reconnaissance du lieutenant Wœlfel sur le Diougou ou haut Cavally ",. 90 S 46. — Formation de la colonne de Lartigues à Nzo. 93 § 47. — 'Capture de Samory 94 § 48. — Résultats de la campagne 1898. Vues d'avenir. 98

C) Gouvernement du général de Trentinian § 49. — Marche générale des opérations dans les régions du Sahel et du Nord de 1895 à 1899 99


Pages § 50. - Soumission des Maures du Sahel 100 § 51. — Lutte contre les Touareg de l'Est. 102 § 52. — Echeè de Rliergo (19 juin 1897) 103 § 53. - Combat de Gourzaï (septembre 1897) 104 § 54. — Opérations du commandant Klobb contre les Touareg du Sud (mai-juillet 1898) 105 § 55. — Conquête des rives du Niger de Bamba à Ansongo (décembre 1898 - février 1899) 107 § 56. — Premières formations méharistes et reconnaissances au Nord de Tombouctou 109 § '57. — Opérations dans la région Est-Macina (mai 1898janvier 1900). Reconnaissances au Mossi et au Liptako (mai 1898) 110 § 58. — Expédition du commandant Crave contre les Logomaten (octobre-novembre 1898) 111 § 59. — Reconnaissances dans le Kipirsi, le Yatenga et le Hombori (février-avril 1899) 114 § 60. — Dernières opérations contre les Touareg du Sud (avril 1899 - janvier 1900) 116 § 61. - Pacification de la région Niger-Volta (juin 1898mars 1899) 117 § 62. - Seconde exploration du lieutenant Wœlfel sur le haut Cavally (mai-septembre 1899) 121

DU NIGER AU TCHAD (1898-1900)

§ 63. - Mission Cazemajou (1898) 123 § 64. — Mission Voulet-Chanoine, puis Joalland-Meynier (1899-1900) - -126 § '65. - Installation du régiment à Kati (1899) 128


DEUXIEME PARTIE

LE. 2e SENEGALAIS DU 7 MAI 1900 à 1933

A) Avant la guerre (1900-1914)

Pages § 66. - Création du 2° Régiment de Tirailleurs Sénégalais 133 § 67. —- Situation du Soudan en 1900 134 § 68. - - Répartition et activité des unités du 2e Régiment de Tirailleurs Sénégalais à sa création.:. 136 § 69. - Conquête du pavs Baoulé en Côte d'Ivoire (19001901) 141 § 70. — Colonne des Samo (janvier-mars 1901) 142 § 71. - Occupation du Lobi 143 § 72. — Affaires de Sargadjé et Loga (août 1899, février et novembre 1900) 147 § 73. — Création du. territoire de Zinder 149 ,§ 74. — Première occupation de Tahoua et Zinder par le capitaine Moll (juillet-novembre 1900) 149 § 75. — Occupation progressive du Djerma 150 § 76. — Lutte de Gouraud contre les Touareg Kel-Gress (avril-juillet 1901) 151 § 77. — Installation du commandement à Zinder 153 § 78. - Campagne de 1901 autour de. Zinder 154 § 79. — Défense des confins sahariens (1904-1906) 157 § 80. - Transformations successives du 2e Sénégalais jusqu'à la guerre 158 S 81. - Pacification de la Mauritanie, région Sud-Est (1906-1912) 162 § 82. — Opérations de police en Haute-Gambie (septembreoctobre 1908) 164 § 83. — Colonne des Habbc (décembre 1909 - février 1910). 165 § 84. — Opérations de police du Fouta-Djallon (févriermars 1911) 166

B) Pendant et après la guerre (1914-1933) § 85. — Le 2e Sénégalais pendant la guerre 168 § 86. — Colonnes de police du cercle de Bamako et du cercle de Goumbou-Nara (février-avril 1915) ..i.- 169


Pages § 87. — Opérations dans la boucle de la Volta. Colonne Simonin (novembre-décembre 1915) 174 § 88. — Suite des opérations de la Volta. Colonne Molard (février-juillet 1916) 178 § 89. — Insurrection du cercle de San 184 § 90. — Cercles de Koutiala, Bandiagara, Dori, Ouagadougou 186 § 91. — Le 2' Sénégalais après la guerre. La relève extérieure 189 § 92. — Groupe nomade du Hodh ,. 192 § 93. — Le 2e Sénégalais d'aujourd'hui. 193 § 94. — Les batailles inscrites au drapeau 196

Table des croquis 201


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