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DIPLOMATIQUES
1912
CHALONS-SUR-MARNE. — IMPRIMERIE A. ROBAÏ
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RECUEIL MENSUEL
DE DIPLOMATIE, D'HISTOIRE
ET DE DROIT INTERNATIONAL
FONDÉ EN 1861
LIT ANNÉE - TROISIÈME SÉRIE
TOME CENT VINGT-DEUX
PARIS LIBRAIRIE ANCIENNE H. CHAMPION
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52e ANNÉE NOS 5-6-7 MAI-JUILLET 1912
PREMIÈRE PARTIE
TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
FRANCE — ALLEMAGNE
Accord au sujet de la nationalité des personnes se trouvant dans les territoires échangés le 4 novembre Î9H
Les indigènes originaires des territoires qui ont donné lieu à des échanges et résidant au jour de l'annexion définitive dans les territoires cédés par la France à l'Allemagne, perdront la qualité de sujets français pour entrer dans la sujétion coloniale allemande.
Réciproquement, les indigènes originaires des territoires qui ont donné lieu à des échanges et résidant au jour de l'annexion dans les territoires cédés par l'Allemagne à la France sortiront de la sujétion coloniale allemande pour acquérir la qualité de sujets français.
Toutefois, dans le délai d'un an à dater de l'annexion définitive, les indigènes seront libres de quitter le territoire annexé par l'une des parties contractantes pour s'établir sur le territoire de l'autre en emportant leurs récoltes. Dans ce cas, ils recouvreront leur sujétion primitive.
L'annexion ne modifiera en rien la nationalité des citoyens français, européens ou autres, et des sujets français non originaires des territoires qui ont donné lieu à des échanges, alors même qu'ils continue-
6 TRAITES, CONVENTIONS, PROTOCOLES
raient à résider sur les territoires cédés par la France à l'Allemagne, et ils ne seront pas tenus d'émigrer dans un délai déterminé.
Réciproquement, l'annexion ne modifiera en rien la nationalité, ni des ressortissante allemands, européens ou autres, ni des personnes soumises à la sujétion coloniale allemande et non originaires des territoires qui ont donné lieu à des échanges, alors même qu'ils continueraient à résider sur les territoires cédés par l'Allemagne à la France, et ils ne seront pas tenus d'émigrer dans un délai déterminé.
Les dispositions des alinéas 4 et 5 ne touchent pas le droit de chacune des parties contractantes d'expulser, pour des raisons générales . de police, les personnes visées dans lesdits alinéas.
Fait à Berlin, le 2 février 1912, en double exemplaire.
(L. S.) Signé : JULES CAMBON. (L. S.) Signé : ZIMMERMANN.
FRANCE — RUSSIE
Convention pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques.
' 2<? novembre ipn
Le Président de la République française et Sa Majesté l'Empereur de toutes les Russies, également animés du désir de protéger les sciences, les lettres et les arts, ont résolu d'adopter d'un commun accord les mesures les plus propres 1 à assurer réciproquement, dans les deux pays, aux auteurs; la protection de leurs droits sur leurs oeuvres littéraires ou artistiques et ont, z. cet effet, désigné pour leurs plénipotentiaires :
Le Président de la République française : Son Excellence M. de Selv&s, sénateur, Ministre des Affaires étrangères,
et Sa Majesté l'EmpereurM toutes les Russies : Son Excellence M. Iswolsky, son AX mbassadeur extraordinaire et plénipotentiaire près le Président de la Rc "publique française, Lesquels, dûment autorisés, ont arrçtê, ît/s dispositions suivantes :
OEUVRES LITTÉRAIRES ET ARTISTIQUES 7
ARTICLE ier
Les ressortissants de chacune des deux Hautes Parties contractantes jouissent, dans chacun des deux pays, pour leurs oeuvres littéraires ou artistiques, qu'il s'agisse d'oeuvres publiées dans l'un de ces deux pays ou dans un autre pays, ou qu'il s'agisse d'oeuvres non publiées, des droits que les lois respectives accordent actuellement ou accorderont par la suite aux nationaux, ainsi que des avantages spécialement stipulés dans la présente convention.
Les stipulations de cette convention s'appliquent également à toute oeuvre littéraire ou artistique publiée pour la première fois dans l'un des deux pays contractants et dont l'auteur n'appartient pas à la nationalité de l'un' de ces pays.
ART. 2.
L'expression « oeuvres littéraires et artistiques » comprend toute production du domaine littéraire, scientifique ou artistique, quels qu'en soient le mode et la forme de reproduction et quels que soient le mérite et la destination de l'oeuvre, telle que : les livres, brochures, et autres écrits, les discours, leçons, conférences et sermons ; les oeuvres dramatiques ou, dramatico-musicales, les oeuvres chorégraphiques et les pantomimes, dont la mise en scène est fixée par écrit ou autrement, ainsi que les productions cinématographiques ayant un caractère personnel et original ; les compositions musicales avec ou sans paroles ; les oeuvres de dessin, de peinture, d'architecture et de sculpture ; les médailles et plaquettes ; les oeuvres de gravure et de lithographie; les illustrations, les cartes géographiques ; les plans, croquis et ouvrages plastiques, relatifs à la géographie, à la topographie, à l'architecture, aux sciences ou à la mise en scène d'une oeuvre dramatique ou dramatico-musicale, etc.. ; les photographies et autres oeuvres obtenues par un procédé analogue à la photographie.
ART. 3.
Les auteurs de chacun des deux pays jouissent, dans l'autre pays, du droit exclusif de faire ou d'autoriser la traduction de leurs ouvrages, jusqu'à l'expiration de dix années à partir de la publication de l'oeuvre originale, à la condition de s'être réservé ce droit sur la page du titre ou dans la préface.
Le droit exclusif de traduction cesse d'exister lorsque l'auteur n'en a pas fait usage dans un délai de cinq ans à partir de la publication de l'oeuvre originale, en publiant ou en faisant publier une traduction de son ouvrage.
Il est toutefois entendu que le délai susmentionné de cinq ans sera
8 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
réduit à trois ans pour l'usage du droit de traduction des oeuvres scientifiques, techniques et destinées à l'enseignement.
Pour les ouvrages composés de plusieurs volumes publiés par intervalles ainsi que pour les cahiers ou numéros de recueils périodiques, les délais susmentionnés comptent à dater de la publication de chaque volume, cahier ou numéro, et, pour les ouvrages publiés par livraisons, à dater de la publication de la dernière livraison de l'oeuvre originale, si les intervalles entre la publication des livraisons ne dépassent pas deux ans et, dans le cas contraire, à dater de la publication de chaque livraison.
Dans les cas prévus au présent article, est admis comme date de publication, pour le calcul des délais de protection, le premier janvier de l'année dans laquelle l'ouvrage a été publié.
ART. 4.
Le traducteur, sans préjudice des droits de l'auteur de l'oeuvre originale, jouit des droits d'auteur sur sa traduction.
ART. 5.
Sont spécialement comprises parmi les reproductions illicites auxquelles s'applique la présente convention les appropriations indirectes non autorisées d'un ouvrage littéraire ou artistique, telles que : adaptations, arrangements de musique, transformations d'un roman, d'une nouvelle ou d'une poésie en pièce de théâtre et réciproquement, lorsqu'elles ne sont que la reproduction de cet ouvrage dans la même forme ou sous une autre forme, avec des changements, additions ou retranchements non essentiels, sans présenter le caractère d'une nouvelle oeuvre originale.
ART. 6.
A l'exception des romans-feuilletons et des nouvelles, les articles de journaux ou de recueils périodiques, publiés dans l'un des deux pays, peuvent être reproduits, en original ou en traduction, dans l'autre pays, à moins que la reproduction n'en ait été expressément interdite.
La protection de la présente convention ne s'applique pas aux nouvelles du jour ou aux faits divers qui ont le caractère de simples informations de presse.
ART. 7. , En ce qui concerne la faculté de faire licitement des emprunts à
OEUVRES LITTERAIRES ET ARTISTIQUES 9
des oeuvres littéraires et artistiques pour des publications destinées à l'enseignement ou ayant un caractère scientifique, ou pour des chrestomathies, est réservé .l'effet de la législation du pays dans lequel ladite publication est faite.
ART. 8.
Dans tous les cas où la présente convention autorise des emprunts à des oeuvres littéraires et artistiques, la source doit être indiquée ; la sanction de cette obligation est déterminée par la législation du pays où la protection est réclamée.
ART. 9.
Les auteurs d'oeuvres dramatiques et dramatico-musicales, que ces oeuvres soient publiées ou non, sont protégés contre la représentation publique de celles-ci en original, pendant la durée de leur droit d'auteur sur l'original et le sont contre la représentation publique en traduction pendant la durée de leur droit de traduction.
ART. 10.
Les auteurs d'oeuvres musicales sont protégés contre l'exécution publique de celles-ci, lorsqu'ils ont indiqué sur chaque exemplaire imprimé de l'ouvrage qu'ils l'interdisent.
Les exceptions à cette disposition seront réglées par la législation intérieure de chacun des deux pays contractants.
ART. 11.
La reproduction et l'exécution publique des oeuvres musicales par des instruments mécaniques ne peuvent être faites sans le consentement de l'auteur, sauf l'application des réserves et conditions, déterminées à cet égard par la loi intérieure du pays où la protection est réclamée.
ART. 12.
Les oeuvres obtenues par la photographie ou par un procédé analogue à la photographie ne sont protégées que si chaque exemplaire de l'oeuvre porte l'indication de la raison sociale ou des nom, prénoms et domicile de l'auteur ou de l'éditeur de l'oeuvre, ainsi que l'année de la publication.
Celles de ces oeuvres qui sont insérées dans un ouvrage publié sont,
10 TRAITES, CONVENTIONS, PROTOCOLES
jusqu'à preuve du contraire, réputées avoir paru pour la première fois avec cet ouvrage et les mentions de nom et de date . portées sur ledit ouvrage suffisent à leur égard.
ART. 13.
La reproduction des oeuvres littéraires et artistiques par la cinématographie ou par tout autre procédé analogue ne peut être faite sans le consentement de l'auteur.
Sans préjudice des droits de l'auteur de l'oeuvre originale, la reproduction, par la cinématographie ou par tout autre procédé analogue, d'une oeuvre littéraire ou artistique est protégée comme une oeuvre originale.
ART. 14.
Sous la réserve des dispositions de l'article 3 (alinéa Ier), de l'article 10 et de l'article 12 (alinéa Ier), ci-dessus, la jouissance des droits stipulés par la présente Convention n'est subordonnée à l'accomplissement d'aucune condition ou formalité.
Pour que les auteurs des ouvrages protégés par la présente Convention soient, jusqu'à preuve du contraire, considérés comme tels et admis, en conséquence, devant les tribunaux des deux Hautes Parties contractantes, à exercer des poursuites contre les contrefacteurs, il suffit que leur nom soit indiqué sur l'ouvrage en la manière usitée.
Pour les oeuvres ano^^mes ou pseudonymes, l'éditeur dont le nom est indiqué sur l'ouvrage est tonde à sauvegarder les droits appartenant à l'auteur. Il est, sans autre preuve, réputé ayant cause de l'auteur anonyme ou pseudonyme.
ART. 15.
La durée de protection accordée par la présente Convention aux oeuvres littéraires et artistiques publiées en original ou en traduction, ou non publiées, aux oeuvres photographiques ou obtenues par un procédé analogue à la photographie, aux oeuvres posthumes, aux oeuvres anonymes ou pseudonymes, est réglée par les lois du pays où la protection est réclamée.
Mais il est entendu que, dans celui des deux pays où la protection est réclamée, l'oeuvre ne pourra bénéficier d'une durée plus longue que celle accordée par la loi du pays contractant dont l'auteur est ressortissant ou dans lequel l'oeuvre a été publiée pour la première fois.
OEUVRES LITTERAIRES ET ARTISTIQUES II
ART. ié.
Les dispositions de la présente Convention ne peuvent porter préjudice, en quoi que ce soit, au droit qui appartient au Gouvernement de chacun des deux pays contractants de permettre, de surveiller, d'interdire, par des mesures de législation ou de police intérieure, la circulation, la représentation, l'exposition de tout ouvrage ou production à l'égard desquels l'autorité compétente aurait à exercer ce droit.
ART. 17.
' La présente Convention s'applique à toutes les oeuvres qui, au moment de son entrée en vigueur, ne sont pas,encore tombées dans le domaine public de leurs pays d'origine.
Il est toutefois entendu que les oeuvres licitement publiées avant l'entrée en vigueur de la Convention ne pourront être l'objet de poursuites basées sur ses dispositions.
Dans l'année qui suivra la mise en vigueur de la Convention, pourront être publiés les volumes et livraisons nécessaires pour l'achèvement des ouvrages licitement en cours de publication, dont une partie aurait déjà paru avant son entrée en vigueur.
ART. 18.
La présente Convention est applicable sur tout le territoire de chacune des Hautes Parties contractantes y compris leurs colonies et possessions.
ART. 19.
Les Hautes Parties contractantes conviennent que tout avantage ou privilège plus étendu qui serait ultérieurement accordé par l'une d'elles à une tierce puissance, en ce qui concerne la protection des oeuvres littéraires et artistiques, sera, sous condition de réciprocité, acquis de plein droit aux auteurs de l'autre pays ; sont toutefois exceptés les avantages ou privilèges, concédés en vertu de conventions d'union internationale auxquelles d'une des Hautes Parties contractantes pourrait adhérer.
ART. 20.
La présente Convention entrera en vigueur six mois après l'échange des ratifications.
12 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
Sa durée sera de trois années à partir de cette date.
Elle continuera ses effets jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an,_ à compter du jour où elle aura été dénoncée par l'une des Hautes Parties contractantes.
ART. 21.
La présente Convention sera ratifiée et les ratifications en seront échangées à Paris le plus tôt possible (i).
En foi de quoi, les plénipotentiaires respectifs ont signé la présente Convention et l'ont revêtue de leurs cachets.
Fait à Paris, en double exemplaire, le 29 novembre 1911.
(L. S.) Signé : J. DE SELVES. (L. S.) Signé : ISWOLSKY.
FRANCE — DANEMARK Convention d'arbitrage (9 août 19H).
Le Président de la République française et S. M. le roi de Dane-, mark, signataires de la convention pour le règlement pacifique des conflits internationaux conclue à la Haye, le 18 octobre 1907.
Considérant que, par l'article 40 de cette convention, les Hautes ; Parties contractantes se sont réservé de conclure des accords « en vue d'étendre l'arbitrage obligatoire à tous les cas qu'elles jugeront possible de lui soumettre » ;
Considérant que la deuxième conférence de la paix a été unanime à reconnaître, dans l'acte final, le principe de l'arbitrage obligatoire et à déclarer que certains différends sont susceptibles d'être soumis à l'arbitrage obligatoire sans aucune restriction :
Ont résolu de conclure une convention consacrant ces principes et ont nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir :
1) Cette convention a été promulgée ea France, le 33 avril 1912 et en Russie le 7 juin 1912. Les ratifications ont été échangées à Paris le i3 mai 1912.
'3 CONVENTION D'ARBITRAGE
Le Président de la République française :
M. Charles-Prosper-Maurice Horric de Beaucaire, Envoyé Extraorinaire et Ministre Plénipotentiaire de la République française à openhague ;
S. M. le Roi de Danemark :
S. Exe. M. le comte Cari William Ahlefeldt Laurvig, Son Ministre es Affaires Etrangères,
Lesquels, dûment autorisés, sont convenus des dispositions suiantes :
ART. Ier
Les différends d'ordre juridique et, en premier lieu, ceux relatifs à 'interprétation des traités existant entre les deux Parties contractantes, ui viendraient désormais à se produire entre elles et qui n'auraient pu tre réglés par la voie diplomatique, seront soumis à l'arbitrage, dans es termes de la convention pour le règlement pacifique des conflits nternationaux signés à la Haye le 18 octobre 1907, à la condition outefois qu'ils ne mettent en cause ni les intérêts vitaux, ni l'indéendance ou l'honneur de l'un ou de l'autre des Etats contractants et u'ils ne touchent pas aux intérêts de tierces puissances.
ART. 2.
Les différends relatifs aux questions suivantes seront soumis à l'aritrage sans que les réserves mentionnées à l'article Ier puissent être nvoquées :
L — Réclamations pécuniaires du chef de dommages lorsque le rincipe de l'indemnité est reconnu par les parties.
IL — Dettes contractuelles réclamées au gouvernement de l'une des arties par le gouvernement de l'autre comme dues à ses natioaux.
III. — Interprétation et application des stipulations conventionelles relatives au commerce et à la navigation.
IV. — Interprétation et application des stipulations conventionnelles relatives aux matières ci-après désignées :
Propriété industrielle.
Propriété littéraire et artistique.
Droit international privé réglé par les conventions de la Haye.
Protection ouvrière internationale.
14 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
Postes et télégraphes. #
Poids et mesures.
Questions sanitaires.
Câbles sous-marins.
Pêche.
Jaugeage des navires.
Traite des blanches.
Dans les différends relatifs aux matières visées au n° IV du présent article et sur lesquels, d'après la loi territoriale, l'autorité judiciaire serait compétente, les Parties contractantes ont le droit de ne soumettre le litige à l'arbitrage qu'après que la juridiction nationale aura statué définitivement.
Les sentences arbitrales rendues dans les cas visés à l'alinéa précédent seront sans effet sur les décisions judiciaires antérieures.
Les Parties contractantes s'engagent à prendre, ou, éventuellement, à proposer au pouvoir législatif, les mesures nécessaires pour que l'interprétation donnée par la sentence arbitrale dans les cas susvisés s'impose par la suite à leurs tribunaux.
ART. 3.
Dans chaque cas particulier, les hautes parties contractantes signeront un compromis spécial déterminant nettement l'objet du litige, l'étendue du pouvoir des arbitres, la procédure et les délais à observer en ce qui concerne le fonctionnement du tribunal arbitral.
Les Parties contractantes conviennent de conférer au tribunal arbitral prévu dans la présente convention le pouvoir de décider, en cas de désaccord entre elles, si un différend qui s'est élevé entre elles appartient à la catégorie des différends à soumettre .à un arbitrage obligatoire conformément aux articles 1 et 2 de la présente convention.
ART. 4.
Si, dans l'année qui suit la notification par la partie la plus diligente d'un projet de compromis, les hautes parties contractantes ne réussissent pas à se mettre d'accord sur les dispositions à prendre, là cour permanente sera compétente pour l'établissement du compromis.
Elle pourra être saisie par la requête d'une seule des parties.
Le compromis sera arrêté conformément aux dispositions des articles 54 et 55 de la convention, de la Haye, pour le règlement pacifique des conflits internationaux du 18 octobre 1907.
RAPATRIEMENT DES ALIENES 1 $'
ART. <;.
La présente convention est conclue pour une durée de cinq années, avec faculté de tacite reconduction de cinq en cinq ans, à partir de l'échange des ratifications.
ART. 6.
La présente convention sera ratifiée dans le plus bref délai possible et les ratifications seront échangées à Copenhague (i).
Fait à Copenhague, en double exemplaire, le 9 août 1911.
(L. S.) Signé : HORRIC DE BEAUCAIRE. < (L. S.) Signé : C. W. AHLEFELD LAURVIG.
FRANCE — PAYS-BAS
Décret portant promulgation de la convention signée à Paris le 11 février 1911 entre la France et les Pays-Bas pour le rapatriement des aliénés indigents de ces deux pays et le texte de ladite convention.
Le Président de la République française,
Sur la proposition du président du conseil, ministre des affaires étrangères, et du ministre de l'intérieur.
Décrète :
ARTICLE ier
Une convention ayant été signée à Paris, le 11 février 19n, entre la France et les Pays-Bas, pour le rapatriement des aliénés indigents des deux pays et les ratifications de cet acte ayant été échangées à Paris, le 10 mai 1912, ladite convention dont la teneur suit recevra sa pleine et entière exécution.
(1) Les ratifications furent échangées à Copenhague le 11 décembre 1911 ; la convention fut approuvée en France par décret du 27 décembre 1911.
î6 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
CONVENTION
Le Président de la République française et Sa Majesté la Reine des Pays-Bas, désirant régler d'un commun accord le rapatriement des ressortissants des Etats contractants, atteints d'aliénation mentale, qui sont tombés à la charge de l'assistance publique sur le territoire de l'autre Etat contractant, ont nommé à cet effet pour leurs plénipotentiaires savoir :
Le Président de la République française :
M. S. Pichon, sénateur, Ministre des Affaires Etrangères de la République française.
Sa Majesté la Reine des Pays-Bas :
Son chambellan, M. le chevalier de Stuers, son Envoyé Extraordinaire et Ministre plénipotentiaire près le Président de la République française ;
Lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, sont convenus de ce qui suit :
ARTICLE Ier.
Les Etats contractants s'engagent à recevoir leurs ressortissants atteints d'aliénation mentale et tombés à la charge de l'assistance publique sur le territoire de l'autre Etat contractant.
Ce rapatriement sera subordonné dans chaque cas au consentement préalable de l'Etat dont relève le malade.
Ledit consentement sera demandé et la réponse donnée par la voie diplomatique.
La demande de rapatriement sera accompagnée de tous renseignements que l'Etat requérant pourra fournir en vue d'établir l'identité de l'indigent visé et d'un certificat médical contenant des renseignements précis sur l'état mental du malade.
ART. 2.
Le fait que l'aliéné a perdu sa nationalité ne pourra être opposé à l'Etat requérant si le malade n'a pas, entre temps, acquis la nationalité de cet Etat ou d'un Etat tiers.
ART. 3. Le gouvernement qui a obtenu le rapatriement fera connaître au
RAPATRIEMENT DES ALIÈNES 17
gouvernement qui y a consenti les lieu, date et heure de la remise de l'aliéné, ainsi que le nombre des gardiens nécessaires pour l'accompagner.
Les frais résultant du transport de l'indigent à l'une des stations frontières de remise, et d'hospitalisation jusqu'au rapatriement,, resteront, à la charge de l'Etat qui remet l'aliéné, toutes les fois qu'il ne pourra se faire rembourser sur les biens du rapatrié ou sur ceux de ses parents qui sont tenus de cette obligation.
ART. 4.
Le présent traité n'est pas applicable aux colonies ou possessions des deux états contractants.
ART. 5.
Le présent traité sera ratifié et les ratifications en seront échangées à Paris aussitôt que faire se pourra.
Il entrera en vigueur trois mois après la date de l'échange des ratifications.
En foi de quoi, les plénipotentiaires respectifs ont signé le présent traité en double expédition et y ont apposé leurs cachets.
Fait à Paris, le 11 février 1911.
(L. S.) Signé : S. PICHON. (L. S.) Signé : A. DE STUERS.
ART. 2.
Le président du conseil, ministre des affaires étrangères et le ministre de l'intérieur sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret.
Fait à Paris,Te 22 mai 1912.
A. FALLIÈRES.
Par le Président de la République :
Le président du conseil, ministre des affaires étrangères,
R. POINCARÉ.
Le ministre de l'intérieur, T. STEÈG.
ARCHIVES DIPLOM., t. 122, n" 5-6~7, mai-juillet 1912. 2
TRAITES, CONVENTIONS, PROTOCOLES
FRANCE — BELGIQUE
Décret portant promulgation de la convention relative à la délimitation de la frontière entre Gespunsart et Pussemange signée à Paris le 12 mars 1912 entre la France et la Belgique, et texte de ladite convention.
Le Président de la République française,
Sur la proposition du président du conseil, ministre des affaires étrangères et du ministre de l'intérieur,
Décrète :
ARTICLE Ier.
Une convention relative à la délimitation de la frontière entre Gespunsart et Pussemange ayant été signée à Paris, le 12 mars 1912, et les ratifications de cet acte ayant été échangées à Paris, le 11 mai 1912, ladite convention dont la teneur suit recevra sa pleine et entière exécution.
CONVENTION
Le Gouvernement de la République française et le gouvernement de S. M. le roi des Belges, en vue de la délimitation de la frontière entre Gespunsart et Pussemange, sont convenus des dispositions suivantes :
ARTICLE ier.
Est approuvé le procès-verbal, du 20 juillet 1910, des opérations de la commission mixte de vérification de la frontière entre Gespunsart et Pussemange, ainsi que le plan annexé audit procès-verbal.
ART. 2.
Les paragraphes 2, 3 et 4 de l'article 2 du procès-verbal descriptif, 6e section, annexé au traité de limites de Courtrai du 28 mars 1820, sont remplacés par les nouveaux textes ci-après ;
§ 2. —-De cette borne, la limite se dirige au sud, en ligne droite, sur une croix de bois dite « la croix rouge », placée dans L'angle sud-
DELIMITATION DE FRONTIERE 19
ouest d'une remise dépendant de l'aubette des douanes, appartenant à l'Etat belge : celle-ci étant construite au midi de la route de Gespunsart à Pussemange, dans l'angle nord-est d'un jardin appartenant au sieur Balteaux-Rogissart. Ainsi dirigée, la limite traverse un pré au sieur Martinet, le ruisseau, une pâture clôturée et un pré appartenant au sieur Balteaux-Rogissart, un pré de Barbier-Cochinard, un autre au susdit Balteaux, la route de Gespunsart à Pussemange et un petit coin du jardin dudit Balteaux.
§ 3. — De la croix rouge, la limite continue à se diriger vers le sud sur une distance de 24 m. 50, traversant le jardin de BalteauxRogissart et le chemin de Gelmésart à Pussemange jusqu'à l'entrée du chemin dit de la Piécelotte. Elle prend ensuite la direction sud-sudouest en suivant l'axe du chemin reconnu mitoyen, jusqu'à l'angle nord-ouest de la terre appartenant à la fabrique de l'église de Pussemange, laissant sur la France le verger de Balteaux-Rogissard et sur la Belgique les maisons et jardins des sieurs Balteaux-Rogissart, Louvet et Simon. La limite reprend ensuite la direction du sud en se confondant avec les limites séparatives des terres entièrement situées sur la Belgique et des vergers et terres entièrement situés sur la France jusqu'à sa rencontre avec une borne qui se trouve dans l'alignement des vestiges de haie formant la limite d'un pré situé sur la Belgique et d'un autre situé sur la France, appartenant tous deux au sieur Baudier-Toupet.
Trois bornes intermédiaires seront placées pour marquer la frontière entre la croix rouge et cette dernière borne.
§ 4. — De cette borne, la limite frontière quittant les prés du sieur Baudier-Toupet sur la France et sur la Belgique continue à se diriger vers le Sud et rencontre après un parcours de 5 mètres l'angle formé par deux haies vives séparant le bois dit ce Petit Bois » de la commune de Pussemange, d'une part, et le pré, sur la Belgique, ainsi que l'étang, sur la France, appartenant au susdit Baudier-Toupet, d'autre part.
Ensuite, sans changer de direction, elle suit presque en ligne droite la séparation entre l'étang susdit, le bois dit des « Poules », tous deux sur la France et le petit bois de Pussemange, sur la Belgique, jusqu'à la fin de ce dernier où se trouve un vieux chêne dit des « Poules ».
ART. 3.
Il sera procédé à l'abornement de la frontière conformément aux indications du procès-verbal de la commission mixte de vérification du 30 juillet 1910 et, à cet effet, il y aura lieu :
i° De remplacer la borne G mentionnée au paragraphe 3 de l'article 2 du procès-verbal descriptif, 6e section, annexé au traité des limites de Courtrai, du 28 mars 1820, qui est brisé ;
20 TRAITES, CONVENTIONS, PROTOCOLES
2° De placer trois bornes intermédiaires aux points F, E, D, du plan annexé au procès-verbal susvisé du 20 juillet 1910.
ART. 4.
La présente convention sera ratifiée et les ratifications seront échangées à Paris aussitôt que faire se pourra.
En foi de quoi, les soussignés : M. Raymond Poincaré, sénateur, président du conseil, ministre des affaires étrangères de la République française, et M. le baron Guillaume, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de Sa Majesté le roi des Belges près le Président de la République française, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente convention et y ont apposé leurs cachets.
Fait à Paris, en double exemplaire, le 12 mars 1912.
(L. S.) Signé : R. POINCARÉ. (L. S.~) Signé : GUILLAUME.
ART. 2.
Le président du conseil, ministre des affaires étrangères, et le ministre de l'intérieur sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret.
Fait à Paris, le 22 mai 1912.
A. FALLIÈRES., Par le Président de la République : Le président du conseil, ministre des affaires étrangères, R. POINCARÉ.
Le Ministre de l'intérieur,
T. STEEG.
FRANCE-BELGIQUE 21
FRANCE — BELGIQUE
Décret portant promulgation des trois actes signés entre la France et la Belgique le 23 décembre 1908, pour le règle ment des questions pendantes entre les deux nations au sujet du Congo et texte de ces actes.
Le Président de la République française,
Sur la proposition du président du conseil, ministre des affaires étrangères et du ministre des colonies,
Décrète :
ARTICLE. Ier.
Le Sénat et la Chambre des députés ayant approuvé : •
' i° L'arrangement portant règlement du droit de préférence de la France sur les territoires de l'Etat du Congo, signé à Paris, le 23 décembre 1908 ;
20 La déclaration signée à Bruxelles le 23 décembre 1908, en vue de compléter l'article 3 de la convention du 5 février 1885 par l'addition d'une disposition nouvelle ;
30 La déclaration signée à la même date en vue de fixer la limite des possessions franco-congolaises dans le Stanley-Pool ;
Et les ratifications de cet arrangement et de ces déclarations ayant été échangées à Bruxelles le 4 avril 1912, lesdits actes dont la teneur suit recevront leur pleine et entière exécution.
ARRANGEMENT
PORTANT RÈGLEMENT DU DROIT DE PRÉFÉRENCE DE LA FRANCE SUR LES TERRITOIRES DE L'ÉTAT DU CONGO.
Considérant qu'en vertu des lettres échangées les 23, 24 avril 1884, entre M. Strauch, président de l'association internationale du Congo, et M. J. Ferry, président du conseil, ministre des affaires étrangères de la République française, un droit de préférence a été assuré à la France pour le cas où l'association serait amenée un jour à réaliser ses possessions ; que ce droit de préférence a été maintenu lorsque l'Etat indépendant du Congo a remplacé l'association internationale :
22 TRAITES, CONVENTIONS, PROTOCOLES
Considérant qu'à la suite du transfert à la Belgique des possessions de l'Etat indépendant du Congo, en vertu du traité de cession du 28 novembre 1907 et de l'acte additionnel à ce traité en date du 5 mars 1908, le gouvernement belge se trouve substitué à l'obligation contractée sous ce rapport par le gouvernement dudit Etat.
Les soussignés sont convenus des dispositions suivantes qui régleront désormais le droit de préférence de la France à l'égard de la colonie belge du Congo.
ART. Ier.
Le gouvernement belge reconnaît à la France un droit de préférence sur ses possessions congolaises, en cas d'aliénation de celles-ci à titre onéreux, en tout ou en partie.
Donneront également ouverture au droit de préférence de la France, et feront, par suite, l'objet d'une négociation préalable entre le Gouvernement de la République française et le gouvernement belge, tout échange des territoires congolais avejc une puissance étrangère ; toute concession, toute location desdits territoires en tout ou en partie, aux mains d'un état étranger ou d'une compagnie étrangère investie de droits de souveraineté/
ART. 2.
Le gouvernement belge déclare qu'il ne sera jamais fait de cession, à titre gratuit, de tout ou partie de ces mêmes possessions.
ART. 3.
Les dispositions prévues aux articles ci-dessus, s'appliquent à la totalité des territoires du Congo belge.
En foi de quoi, les soussignés ont dressé le présent arrangement qu'ils ont revêtu de leurs cachets.
Fait en double exemplaire, à Paris, le 23 décembre 1908.
(L. S.) Signé : S. PICHON. (L, S.) — A. LÉCHAIT.
DECLARATION
Le gouvernement de la République française et le gouvernement belge conviennent d'adopter pour limites de leurs possessions respectives dans le Stanley-Pool :
FRANCE-BELGIQUE 23
La ligne médiane du Stanley-Pool jusqu'au point de contact de cette ligne avec l'île de Bamu, la rive méridionale de cette île jusqu'à son extrémité orientale, ensuite la ligne médiane du Stanley-Pool.
L'île de Bamu, les eaux et les îlots compris entre l'île de Bamu et la rive septentrionale du Stanley-Pool seront à la France, les eaux et les îles comprises entre l'île de Bamu et la rive méridionale du StanleyPool seront à la Belgique.
Le territoire de l'île de Bamu est placé sous le régime d'une neutralité perpétuelle. Aucun établissement militaire ne pourra y être créé et il est entendu que le territoire ainsi neutralisé sera, au surplus, soumis au régime prévu par la disposition finale de l'article 2 de l'acte général de Berlin.
En foi de quoi les soussignés ont dressé la présente déclaration qu'ils ont revêtue de leurs cachets.
Fait en double exemplaire à Bruxelles le 23 décembre 1908.
(L. S.) Signé : BEAU. (L. S.) — E. GENTIL. (L. S.) — J. DAVIGNON.
DÉCLARATION
Le gouvernement de la République française et le gouvernement belge,
Désirant'achever sans délai la délimitation entre Manyanga et l'Océan, de la frontière de leurs possessions en Afrique, définie par la convention du 5 février 1885, conclue entre le gouvernement de la République française et l'association internationale du Congo ;
Ayant constaté, à la suite des reconnaissances effectuées par la commission de délimitation franco-congolaise, que l'existence d'un accident de terrain non prévu par la convention précitée avait pour conséquence de laisser dans l'indétermination une partie de frontière comprise entre la source la plus septentrionale du Shiloango (pic Kiama) et l'origine de la crête de partage des eaux du Niadi-Quillou et du Congo (pic Bembo).
Conviennent de prendre pour base d'un règlement définitif, d'une part, le texte intégral de la convention de 1885, d'autre part, les procès-verbaux de la commission mixte, et de compléter l'article 3 de ladite convention par l'addition d'une disposition nouvelle.
En conséquence, les deux gouvernements, d'accord pour reconnaître comme document définitif la carte de l'ensemble de la frontière telle qu'elle a été établie par la commission mixte, adoptent la ligne de faîte comprise entre le pic Kiama et le pic Bembo comme limite de
24 TRAITES, CONVENTIONS, PROTOCOLES
leurs possessions entre la source la plus septentrionale du Shiloango et la crête de partage des eaux du Niadi-Quillou et du Congo.
En foi de quoi les soussignés ont dressé la présente déclaration et l'ont revêtue de leurs cachets.
Fait en double exemplaire à Bruxelles le 23 décembre 1908.
(L. S.) Signé : BEAU. (L. S.) — E. GENTIL. (L. S.) ■— J. DAVIGNON.
ART. 2.
Le président du conseil, ministre des affaires étrangères, et le ministre des colonies sont chargés, chacun en ce qui le concerne de l'exécution du présent décret.
Fait à Rambouillet, le 22 avril 1912,
A. FALLIÈRES.
Par le Président de la République
Le Président du Conseil, Ministre des Affaires Etrangères, R. POINCARÉ.
Le Ministre des Colonies, A. LEBRUN.
FRANCE — GRANDE-BRETAGNE
Décret approuvant l'arrangement conclu le 29 décembre 1911 entre la Grande-Bretagne et la France au sujet des taxes postales sur les lettres échangées entre les établissements français de POcéanie et le dominion de la Nouvelle-Zélande et texte dudit arrangement.
Le Président de la République française,
Sur la proposition du ministre des affaires étrangères et du ministre des colonies,
Décrète :
TAXES POSTALES 25
ARTICLE Ier.
Un arrangement portant réglementation des taxes postales sur les lettres échangées entre les établissements français de l'Océanie et la Nouvelle-Zélande ayant été signé à Paris le 29 décembre 1911 entre la France et la Grande-Bretagne, ledit arrangement dont la teneur suit est appiouvé.
ARRANGEMENT
PORTANT RÉGLEMENTATION DES TAXES POSTALES SUR LES LETTRES ÉCHANGÉES ENTRE LES ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS DE L'OCÉANIE ET LA NOUVELLE-ZÉLANDE.
Le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Sa Majesté Britannique se sont mis d'accord sur les articles suivants, en vue de réglementer les taxes postales sur les lettres échangées entre les établissements français de l'Océanie et le dominion de la Nouvelle-Zélande :
ARTICLE I".
Conformément aux dispositions de l'article 21 de l'union postale universelle conclue à Rome le 26 mai 1906, il.est convenu de modifier les taxes postales sur les lettres envoyées des établissements français de l'Océanie à des localités situées dans le dominion de la Nouvelle-Zélande, et sur les lettres envoyées de la Nouvelle-Zélande à des localités situées dans les établissements français de l'Océanie.
ART. 2.
Les modifications mentionnées dans l'article qui précède sont les suivantes :
Toute lettre venant des établissements français de l'Océanie à destination de la Nouvelle-Zélande sera soumise à la taxe de 10 centimes par 20 grammes ou fraction de ce poids au lieu de 25 centimes pour les 20 premiers grammes ou fraction de ce poids et 15 centimes pour chaque unité supplémentaire de 20 grammes ou fraction de ce poids en sus.
Toute lettre venant de la Nouvelle Zélande à destination des établissements français de l'Océanie sera soumise à la taxe de 1 penny (10 centimes de franc) par once (28 gr. 349) ou fraction de ce poids au lieu de 2 pence et demi (25 centimes de franc) pour la première once
2 6 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
ou fraction de ce poids, et i penny et demi (15 centimes de franc) pour chaque once supplémentaire ou fraction de ce poids en sus.
ART. 3.
Les bureaux de postes des établissements français de l'Océanie et de la Nouvelle-Zélande délivreront les lettres mentionnées dans l'article qui précède, sans frais pour les destinataires, pourvu que ces lettres ne soient pas insuffisamment affranchies, auquel cas, il sera fait application de la disposition contenue dans l'article 11, paragraphe 2, des règlements de détail pour l'application de la susdite convention postale universelle de Rome.
ART. 4.
La présente convention entrera en vigueur à une date qui sera fixée par les administrations des postes intéressées et demeurera appliquée encore pendant six mois après que l'une des parties contractantes aurait notifié à l'autre son intention d'y mettre fin.
En foi de quoi les soussignés ont signé la présente convention et y ont apposé leur sceau.
Fait à Paris, en double exemplaire, le 29 décembre 1911.-
(L. S.) Signé : J. DE SELVES. (L. S.) — FRANÇOIS BERTIE.
ART. 2.
Le ministre des affaires étrangères et le ministre des colonies sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret.
Fait à Paris, le 30 décembre 1911.
Par le Président de la République :
Le ministre des affaires étrangères, J. DE SELVES.
A. FALLIÈRES.
Le ministre des colonies, A. LEBRUN.
CONVENTION D ARBITRAGE 27
ESPAGNE — ITALIE
Convention d'arbitrage
(2 septembre 1916)
TEXTE ORIGINAL DE LA CONVENTION EN LANGUE ESPAGNOLE (i)
Su Majestad el Rey de Espana y Su Majestad el Rey de Italia, deseosos de arreglar, en lo posible, por la via de arbritraje, lasdiferencias que pudieran surgir entre sus paises, han decidido celebrar un Convenio para este efecto, y han nombrado por Plenipotenciarios suyos, â saber :
S. M. el Rey de Espana, al Ëxcelentisimo Sr. D. Manuel Garcia Prieto, Su Ministro de Estado, Diputado â Cortes, Présidente de la Real Academia de Jurisprudencia y Legislaciôn, Caballero Gran Cruz de la Orden civil de Alfbnso XII, etc., etc.
S. M. el Rey de Italia, al Ëxcelentisimo Sr. Julio Silvestrelli, Su Embajador en Madrid, Caballero Gran Cruz de Su Orden de la Corona de Italia, Gran Oficial de Su Orden de San Mauricio y San Lazaro, etc., etc.
Los cuales, después de haberse comunicado sus plenos poderes respectivos y de haberlos encontrado en buena y debida forma, han acordado lo siguiente :
ARTICULO i.°
Las Altas Partes contratantes se comprometen â someter al Tribunal permanente de arbitraje, establecido en el Haya por el Convenio de 29 de Julio de 1899, las diferencias que pudieren surgir entre ellas, siempre que taies diferencias no afecten al honor, â la independencia ni â la soberania de los paises contratantes y que no se \\2cyz podido obtener una soluciôn amistosa por medio de negociaciones diplomaticas directas 6 por cualquier otra via de conciliaciôn.
!.i) On trouvera page 29 la traduction française de cette convention ; afin de donner aux Archives Diplomatiques tout le caractère d'authenticité désirable, dorénavant, nous publierons toujours, avec la traduction française, le texte des traités dans l'une des langues étrangères employées pour la rédaction de l'original.
N. D. L. R.
2-8 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
ARTICULO 2.°
Correspondes â cada una de las Altas Partes contratantes el apreciar si la diferencia surgida afecta â su honor, â su independencia ô â su soberania, y es, por consiguiente, de las que por su naturaleza estân comprendidas entre las que, conforme al articulo anterior, estân exceptuadas del arbitraje obligatorio.
ARTICULO 3. 0
En cada caso particular las Altas Partes contratantes firmaran un compromiso especial determinando claramente el objeto del litigio, la extension de los poderes del arbitra 6 del Tribunal arbitral, el procedimiento para la designaciôn de este, su residencia, el idioma de que haja de valerse y aquellos cuyo empleo esté autorizado ante él, el importe de la cantidad que cada una de las Altas Partes contratantes tendra que depositar en calidad de anticipo para los gastos asi como las reglas que deberân observarse en lo que concierne â las formalidades y â los plazos del procedimiento, y, en gênerai, todas las condiciones que las Altas Partes hayan accordado entre si.
ARTICULO 4. 0
Ninguno de los arbitras podrâ ser subdito de los Estados firmantes del présente Convenio, ni estai- domiciliado en sus territorios, ni hallarse interesado en las cuestiones que sean objeto del arbitraje.
ARTICULO 5. 0
En las cuestiones que sean compétentes las Autoridades judiciales nacionales, conforme â las Leyes territoriales, las Partes contratantes tendrân el derecho de no someter la diferencia al fallo arbitral en tanto que la jurisdicciôn nacional compétente no se haya pronunciado con caracter definitivo, salvo en el caso de dénégation de justicia.
ARTICULO 6.°
Salvo las disposiciones del articulo 3.°, el procedimiento arbitral se regularâ por las disposiciones establecidas por el Convenio del Haya para la soluciôn pacifica de los conflictos internacionales de 29 de Julio de 1899, y por las del Convenio de 18 de Octubre de 1907, tan pronto como este haya comenzado â régir entre las Altas Partes contratantes.
CONVENTION D ARBITRAGE 29
ARTICULO 7. 0
El présente Convenio se ratificarâ en el plazo mas brève posible y las ratificaciones se canjearân en Madrid. El Convenio régira durante diez anos, â partir del canje de las ratificaciones. Si no se lo denuncia seis meses antes del vencimiento de dicho plazo, se lo considerarâ como renovado por un periodo de diez anos, y asi sucesivamente.
En fé de lo cual, los Plenipotenciarios han firmado el présente Convenio y han puesto en él sus sellos respectivos.
Hecho por duplicado en San Sébastian, el 2 de Septiembre de 1910. ■— (L. S.) — firmado : M. Garcia Prieto. — (L. S.) — firmado : J. Silvestrelli.
TRADUCTION FRANÇAISE DE LA SUSDITE CONVENTION
Sa Majesté le Roi d'Espagne et sa Majesté le Roi d'Italie, désireux de régler, dans la mesure du possible, par voie d'arbitrage, les différends qui pourraient surgir entre leurs pays, ont résolu de signer une convention à cet effet, et ils ont nommé pour leurs plénipotentiaires,' savoir :
S. M. le Roi d'Espagne, Son Excellence Monsieur Manuel Garcia Prieto, Son Ministre d'Etat, député aux Cortès, Président de l'Académie Royale de Jurisprudence et de Législation, Chevalier Grand'Croix de l'Ordre Civil d'Alphonse XII, etc., etc.
S. M. le Roi d'Italie, Son Excellence M. Julio Silvestrelli Son Ambassadeur à Madrid, Chevalier Grand'Croix de Son Ordre de la Couronne d'Italie, Grand-Officier de Son ordre de Saint-Maurice et Saint-Lazare, etc., etc.
Lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs respectifs et les avoir trouvés en bonne et due forme ont convenu ce .qui suit :
ARTICLE Ier.
Les .Hautes Parties contractantes s'engagent à soumettre au Tribunal permanent d'arbitrage établi à La Haye, par la Convention du 29 juillet 1899, les différends qui pourraient surgir entre elles, toutes les fois que ces différends n'intéresseront ni l'honneur, ni l'indépendance, ni la souveraineté des pays contractants et qu'une solution amicale par voie de négociations diplomatiques directes ou par quelque autre m oyen de conciliation n'aura pu être obtenue.
30 TRAITES, CONVENTIONS, PROTOCOLES
ART. 2.
Chacune des parties contractantes restera libre d'apprécier si le différend intéresse son honneur, son indépendance ou sa' souveraineté et, est, conséquemment, de ceux qui par leur nature et conformément au précédent article, sont exceptés de l'arbitrage obligatoire.
ART. 3
Dans chaque cas particulier, les hautes parties contractantes signeront un compromis spécial qui déterminera clairement l'objet du litige, l'étendue des pouvoirs de l'Arbitre ou du Tribunal arbitral, le mode de désignation de ce dernier, sa résidence, la langue dont il devra être fait usage et celles dont l'emploi sera autorisé devant ledit tribunal, le montant de la somme que chacune des parties contractantes devra déposer d'avance pour les frais ainsi que les règles qui devront être observées en tout ce qui concerne les formalités et les délais de procédure, et, en général, toutes les conditions qui seront convenues entre elles.
ART. 4.
Aucun des arbitres ne pourra être sujet des Etats signataires de la présente convention, ni être domicilié sur leurs territoires ni être intéressé dans les questions soumises à l'arbitrage.
ART. 5.
Dans les questions qui seront de la compétence des Autorités judiciaires nationales, conformément aux lois territoriales, les parties ' contractantes auront le droit de ne pas soumettre le litige au jugement du tribunal arbitral, avant que la juridiction nationale compétente ait prononcé son jugement définitif, exception est faite pour le cas de déni de justice. . •
ART. 6.
A part les dépositions de l'article 3, la procédure arbitrale sera réglée d'après les dispositions établies par la Convention de La Haye pour la solution pacifique des conflits internationaux du 29 juillet 1899 et celles de la Convention du 18 octobre 1907, aussitôt que celle-ci aura été mise en vigueur entre les hautes parties contractantes.
ASSISTANCE JUDICIAIRE 31
ART. 7.
La présente Convention sera ratifiée dans le plus bref délai possible (1) et les ratifications seront échangées à Madrid. La Convention aura plein effet pendant dix ans, à dater du jour de l'échange des ratifications, si elle n'est pas dénoncée six mois avant l'échéance de ce délai, la convention sera considérée comme renouvelée pour une période de dix années et ainsi successivement.
En foi de quoi, les Plénipotentiaires ont signé la présente convention et y ont apposé leurs sceaux respectifs.
Fait en double à Saint-Sébastien, le 2 septembre 1910.
(L. S.) Signé : GARCIA PRIETO. (L. S.) Signé : J. SILVESTRELLI.
NORVEGE — LUXEMBOURG
Déclaration en vue de faciliter l'assistance judiciaire réciproque
(ier juin 1910.)
En addition à la Convention de la Haye relative à la procédure civile du 17 juillet 1905, le Gouvernement Royal de Norvège et le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg sont convenus de ce qui suit, en vue de rendre plus facile l'assistance judiciaire réciproque : ■
ARTICLE I".
Conformément à l'article 1, dernier alinéa, de la Convention de la Haye relative à la procédure civile, du 17 juillet 1905, les autorités judiciaires norvégiennes et luxembourgeoises pourront correspondre directement entre elles dans les affaires concernant la signification d'actes en matière civile et commerciale.
(1) Les ratifications ont été échangées à Madrid, le 17 février 1912.
32 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
. ART. 2.
En ce qui concerne la Norvège, tout tribunal aura le droit de s'adresser aux autorités luxembourgeoises avec des demandes d'exécution de significations, et tout tribunal de première instance aura le' droit de recevoir, delà part d'autorités luxembourgeoises, des demandes d'exécution de significations en Norvège.
En ce qui concerne le Luxembourg, le procureur général près la cour supérieure de justice et les procureurs d'Etat près les tribunaux d'arrondissement auront charge d'adresser aux tribunaux de première instance de la Norvège les demandes d'exécutions de significations comme aussi de recevoir de la part des tribunaux norvégiens les demandes de cette espèce auxquelles il y aura lieu de satisfaire dans le Grand-Duché.
Si l'autorité recevant la demande n'est pas. compétente sur les lieux, elle devra transmettre la demande à l'autorité compétente et en aviser aussitôt l'autorité requérante.
ART. 3.
Cette déclaration sera exécutoire à partir du 15 juin 1910 et restera en vigueur jusqu'à l'expiration de six mois après sa dénonciation par l'une des parties.
La déclaration sera échangée contre une déclaration analogue du Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg.
Kristiania, le Ier juin 1910.
Le Ministre des Affaires Etrangères de Norvège :
(L. S.) Signé : J. IRGENS.
ATTRIBUTIONS DES CONSULS 33
BOLIVIE — COLOMBIE EQUATEUR — PEROU — VENEZUELA
Accord relatif aux attributions des Consuls respectifs dans chacune des républiques contractantes.
(iS juillet 1911)
TEXTE ORIGINAL DE L ACCORD EN. LANGUE ESPAGNOLE
Los infrascritos Plenipotenciarios de las Repûblicas del Ecuador, Bolivia, Perû, Colombia y Venezuela, previo el canje de sus respectivos plenos poderes, convienen en el siguiente.
ACUERDO SOBRE CÔNSULES :
ARTICULO I°.
Cada una de las Repûblicas contratantes podrâ mantener Cônsules en las ciudades y plazas comerciales de las otras y en los puertos abiertos en ellas al comercio extranjero. Ese servicio consular se harâ por Cônsules Générales, Cônsules y Vicecônsules 6 Agentes Cônsulares. Cada Repûblica podrâ exceptuar aquellas ciudades, plazas 6 puertos en donde no estime conveniente la residencia de dichos empleados ; pero esta exception sera comûn â todas las naciones y previamente comunicada â estas.
ARTICULO 2°.
Para el ejercicio de sus funciones los Cônsules obtendrân el exequâtur del respectivo Gobierno del pais â que han sido destinados, y lo presentaran â la autoridad para que les haga guardar las exenciones y prerrogativas â que por este pacto tienen derecho.
ARTICULO 30.
Los Estados contratantes no reconocen en los Cônsules caracter diplomâtico, ni permitiran que ejerzan funciones diplomâlicas conjuntamente con las cônsulares ; esto respecto de los paises cuya législation asi lo détermine, pero le otorgan las siguientes prerrogativas :
ARCHIVES DIPLOM., t. 122, n" 5-6-7, mai-juillet 1912. 3
34 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
ia Los archivos, escudo y bandera de los Consulados serân inviolables. El escudo y bandera no hacen inviolables el domicilio del Consul cuando la autoridad se viere en el caso de allanarlo conforme â la ley.
2a Los Cônsules, en todo lo que sea relativo al ejercicio de sus funciones, serân completamente independientes del Estado en cuyo territorio residan.
3a Los Cônsules estarân exentos de todo servicio personal 6 contribution extraordinaria que se imponga en el pais de su residencia. Esta exenciôn no comprende â los Cônsules que sean nationales del pais en que ejercen.
ARTICULO 4°.
Los Cônsules estarân sometidos â las leyes y autoridades del pais en todo aquello en que no tengan una especial exenciôn por este Acuerdo ô por Tratados Publicos.
ARTICULO 5°.
Los Cônsules podran ejercer las atribuciones siguientes :
ia Dirigirse â las autoridades del Distrito de su residencia, y ocurrir, en caso necesario, al Gobierno General por medio del Agente Diplomâtico de su naciôn, si lo hubiere, y directamente, en caso necesario, reclamando contra cualquiera infraction de los Tratados de Comercio que se cometa por las autoridades del pais, con perjuicio del comercio de la naciôn â que el Consul sirve ; lo mismo que contra cualquier abuso que se cometa por autoridades 6 empleados contra individuos de la naciôn cuyos intereses gestiona, y promoverân lo conveniente para que no se les niegue ni retarde la administration de justicia, ni sean juzgados y penados sino por los Jueces compétentes, conforme â las leyes del pais.
2a Presentarse por sus compatriotas, cuando éstos asi lo solicitaren, ante las autoridades del pais, en los negocios ô asuntos que aquelios indiquen.
3a Acompanar â los Capitanes, Contramaestres y Patrones de los buques de su naciôn en lo que necesiten hacer para el despacho de sus mercancias y buques, y ante los Tribunales ô autoridades en las declaraciones que los mismos ô alguno de là tripulaciôn tengan que hacer.
4a Recibir las declaraciones, protestas y relaciones de los Capitanes, Contramaestres y Patrones de los buques de su naciôn, por razôn de averias causadas en alta mar y las protestas que cualesquiera individuos de su naciôn tengan â bien hacer sobre asuntos mercantiles. Estos documentes en copia auténtica, expedida por el Consul, serân
ATTRIBUTIONS DES CONSULS 35
admitidos en los Tribunales, y tendran el mismo valor que si hubieren sido otorgados en los mismos.
5a Arreglar todo lo relativo â las averias que hayan sufrido en alta mar los efectos y mercancias embarcados en buques de la naciôn â que sirve el Consul, que lleguen al punto en que réside, siempre que no haya éstipulaciôn contraria entre los armadores, los cargadores y aseguradores. Pero si se hallaren interesados en taies averias habitantes del pais en donde el Consul resida, que no sean de la naciôn â que este sirva, toca â las autoridades locales el conocer y resolver sobre dichas averias.
6a Componer amigable y extrajudicialmente las diferencias que se susciten entre sus compacriotas sobre asuntos mercantiles, siempre que ellos, voluntariamente y por escrito se sometan â su arbitraje, en cuyo caso el documente en que conste la décision del Consul tendra toda la fuerza de un documento pûblico otorgado con todos los requisitos necesarios para ser obligatorio â las partes interesadas.
7a Hacer que se guarde el debido orden â bordo de los buques mercantes de su naciôn, y decidir en las diferencias que sobrevengan entre el Capitan, los Oficiales y los individuos de la tripulaciôn, excepte cuando los desordenes que sobrevengan â bordo puedan turbar la tranquilidad pûblica, ô cuando en las diferencias estén mezclados individuos que no sean de la naciôn â que pertenece el buque, pues en este casos deberân intervenir les autoridades locales.
8a Dirigir todas las operaciones relativas al salvamento de los buques de la naciôn que sirve, cuando naufraguen en costas de su jurisdicciôn. En tal caso, las autoridades locales solo intervendrân para man-. tener el orden, dar seguridad â los intereses salvados y hacer que se cumplan las disposiciones que deben observarse para hacerla efectiva. En ausencia y hasta la llegada del Consul, deberân tambien dichas autoridades tomar todas las medidas necesarias para la conservation de los intereses naufragados.
9a Tomar posesiôn, formar inventario, nombrar peritos para hacer los avalûos, y procéder â la venta de los bienes muebles de los individuos que hayan muerto abintestato y sin herederos forzosos en el pais de la residencia del Consul. En taies diligencias procédera el Consul, asociado â dos comerciantes nombrados por él mismo : y para la prâctica de las mismas diligencias y la entrega de los bienes y su producto observai! las leyes respectivas y las instrucciones que tenga de su Gobierno. Cuando el Consul no se hallare en el lugar en que haya occurrido la muerte del individuo, las autoridades locales tomarân las providencias de su resorte para dar seguridad à los bienes de este.
ioa Pedir â las autoridades locales el arresto de los marineras que deserten de los buques de su naciôn, exhibiendo, si fuere necesario, el registre del buque, el roi de la tripulaciôn û otro documento oficial que justifique su demanda. Dichas antoridades dictarân las pro-
3 6 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES ]
videncias de su competencia para la persécution, aprehensiôn y arresto : de aquellos desertores, y los pondrân â la disposition del Consul ; pero si el buque â que pertenece hubiere salido y no se presentare ocasiôn para hacerlo partir, semantendrâ en arresto â expensas del Consul hasta por très meses, y si cumplido este plazo no se hubiere remitido, seran puestos en libertad por las respectivas autoridades, y no podrân ser nuevamente arrestados por la misma causa.
ARTICULO 6°.
Los Cônsules de cualquiera de las Repûblicas contratantes, résidentes en otra de las mismas, podran hacer uso de sus atribuciones en favor de los individuos de las otras Repûblicas contratantes que no tuvieren Consul en el mismo luga'r.
En fe de lo cual firman cinco ejemplares de un ténor, en Caracas, â 18 de Julio de 1911.
Los Plenipotenciarôs del Ecuador, J. PERALTA — JULIO ANDRADE — N. CLÉMENTE PONCE.
Los Plenipotenciarios de Bolivia, A. GUTIERREZ — R. SORIA GALVARRO
GALVARRO ISMAEL VASQJJEZ.
El Plenipotenciario del Perû, V. M. MAURTÙA.
El Plenipotenciaro de Colombia, JOSÉ C. BORDA.
Los Plenipotenciarios de Venezuela, J. A. VELUTINI. L. DUARTE LEVEL — F. TOSTA GARCIA — J. L. ANDARA. — A. SMITH.
TRADUCTION FRANÇAISE DU PRECEDENT TRAITE
Les Plénipotentiaires soussignés des République de l'Equateur, de Bolivie, de Colombie et du Venezuela après s'être communiqué respectivement leurs pleins pouvoirs sont convenus du suivant accord sur les Consuls.
. / ARTICLE ier.
Chacune des Républiques contractantes pourra entretenir des consuls dans les villes et places commerciales des autres et dans les ports qui y sont ouverts au commerce étranger. Ce service consulaire sera assuré par des consuls généraux, des consuls, des vice-consuls ou des agents consulaires. Chaque République pourra excepter les villes, places et ports où elle ne jugera pas nécessaire la résidence de ces fonctionnaires, mais cette exception sera commune à toutes les nations qui en seront au préalablement prévenues.
ATTRIBUTIONS DES CONSULS
ART. 2.
Pour l'exercice de leurs fonctions les Consuls obtiendront l'exequatur du gouvernement du pays où ils résideront et le présenteront aux autorités afin qu'elles leur assurent les exemptions et prérogatives auxquelles de ce fait ils auront droit.
ART. 3.
Les Etats contractants ne reconnaissent aux consuls aucun caractète diplomatique ni ne permettent que ces fonctionnaires exercent des fonctions diplomatiques conjointement avec leurs fonctions consulaires, et ce, pour des pays dont la législation le permet, mais ils leur octroient les prérogatives suivantes :
i° Les archives, armoiries et drapeaux des Consulats seront inviolables. Les armoiries et le drapeau ne rendent pas inviolable le domicile du consul quand l'autorité se verra, conformément à la loi, dans l'obligation de l'abattre.
20 Les consuls, en tout ce qui concerne l'exercice de leurs fonctions seront complètement indépendants de l'Etat sur le territoire duquel ils résideront.
30 Les consuls seront exempts de tout service personnel ou de contribution extraordinaire dans le pays où ils résideront. Cette exemption ne sera pas étendue aux consuls nationaux du pays où ils exerceront leurs fonctions.
ART. 4.
Les consuls seront soumis aux lois et autorités du pays sur tous les points pour lesquels ce présent accord ou les traités antérieurement publiés n'auront pas stipulé d'exemptions spéciales.
Les consuls pourront avoir les droits suivants :
i" S'adresser aux autorités du district de leur résidence et, le cas échéant, avoir recours au Gouvernement Général, par l'intermédiaire de l'agent diplomatique de leur nation, s'il en existe un, ou directement, dans le cas où cela sera nécessaire, pour réclamer contre les infractions que commettent les autorités du pays aux traités de commerce, au préjudice de la nation dont ils sont consuls. Ils procéderont de même pour tout abus commis par les autorités contre les individus des pays dont ils gardent les intérêts ; ils agiront de façon à ce que justice leur soit rendue sans retard, à ce qu'ils soient jugés et condamnés par les tribunaux compétents, conformément aux lois du pays.
38 TRAITES, CONVENTIONS, PROTOCOLES
20 Se présenter au lieu et place de leurs compatriotes quand _ ceuxci le leur demanderont devant les autorités du pays dans les affaires et questions qui leur seront indiquées.
3° Accompagner les capitaines, contremaîtres et patrons des' navires de leur nation dans les démarches que ces derniers auront à faire pour l'enregistrement de leurs marchandises et de leurs navires, et devant les tribunaux et autorités pour y faire les déclarations qu'eux-mêmes ou quelqu'un de leur équipage aura à faire.
4° Recevoir les déclarations, protestations et rapports des capitaines, contremaîtres et patrons des navires de leur nation en raison des avaries causées en pleine mer et les protestations que leurs nationaux peuvent avoir à formuler aux sujets de questions commerciales. Ces documents, sous forme de copie -authentiquée expédiée par le consul, seront admis devant les tribunaux et auront la même valeur que s'ils avaient été délivrés par le greffe de ces tribunaux.
5° Régler tout ce qui est relatif aux avaries qu'auront souffertes en pleine mer les effets et marchandises de commerce embarquées dans les navires de leur nation, qui arriveront au port où ils résident, toutefois qu'il n'y aura pas de stipulation à ce contraire entre les armateurs, les chargeurs et les assureurs. Mais si dans cette question d'avaries sont intéressés des habitants du pays où résident le consul et qui ne soient pas de la même nation, la connaissance des faits revient aux autorités locales qui décideront sur ces avaries.
6° Régler à l'amiable et sans concours judiciaire les différends qui surgissent entre leurs compatriotes au sujet de questions commerciales, toutefois que les parties se soumettront volontairement et par écrit à son arbitrage et dans ce cas, le document renfermant la décision du consul aura la force d'un document public délivré avec toutes les garanties nécessaires pour que l'exécution en soit rendue obligatoire aux parties intéressées.
7° Faire en sorte que l'ordre dû soit observé à bord des bateaux marchands de pays, et décider dans les différends qui peuvent surgir entre le capitaine, les officiers et les hommes d'équipage, excepté quand les désordres qui surviennent à bord peuvent troubler la tranquillité publique ou quand à ces différends, se trouveront mêlés des individus qui ne seront pas de la nation du navire ; dans ce cas les autorités locales devront intervenir.
8° Diriger toutes les opérations relatives au sauvetage des navires de leur pays, quand ils feront naufrage sur les côtes du pays où ils résident. Dans ce cas. les autorités locales interviendront seulement pour maintenir l'ordre, donner la sécurité aux intérêts sauvés et faire en sorte que les dispositions soient prises pour rendre effective cette sécurité. En absence du consul et jusqu'à son arrivée, les autorités devront également prendre toutes les mesures nécessaires pour la conservation des intérêts naufragés.
' ATTRIBUTIONS DES CONSULS 39
9° Prendre possession, dresser inventaire, nommer des experts pour faire les évaluations et procéder à la vente des biens meubles des individus décédés ab intestat et sans héritiers — dans le pays de leur résidence. Le consul procédera à ces formalités, assisté de deux commerçants désignés par lui et pour l'exécution de ces formalités et la remise des biens et du produit qui en sera tiré, il observera les lois correspondantes et les instructions qu'il aura reçues de son Gouvernement. Quand le consul ne se trouvera pas dans le lieu où sera décédé l'individu, les autorités locales prendront les mesures de leur ressort pour mettre en sûreté les biens de ce dernier.
io° Demander aux autorités locales l'arrestation des marins qui déserteront les navires de leur nation ; ils présenteront, s'il le faut, le livre de bord, le rôle de l'équipage ou un autre document officiel qui justifie leur demande. Les autorités dicteront les mesures de leur compétence pour la poursuite, appréhension et arrestation de ces déserteurs et les mettront à la disposition du consul, mais si le navire auquel il appartient est parti et qu'il ne se présente pas d'occasion de le faire partir, le déserteur sera détenu pendant trois mois aux frais du consul. Une fois ce délai passé, les déserteurs non livrés seront mis en liberté par les autorités compétentes et ne pourront plus être arrêtés pour les mêmes motifs.
ART. 6.
Les consuls de chaque république contractante, résidant dans l'une d'elles, pourront faire usage de leurs attributions en faveur des individus des autres républiques contractantes qui n'auront pas de consul dans l'endroit.
En foi de quoi signent cinq exemplaires d'une seule teneur, à Caracas, le 18 juillet 1911,
Les Plénipotentiaires de l'Equateur : J. PERALTA — JULIO ANDRADE. N. CLÉMENTE PONCE.
Les Plénipotentiaires de Bolivie : A. GUTIÉRREZ — R. SORIA GALVARRO
GALVARRO ISMAEL VASQUEZ.
Le Plénipotentiaire du Pérou : V. M. MAURTUA.
Le Plénipotentiaire de Colombie : JOSÉ C. BORDA.
Les Plénipotentiaires du Venezuela : I. A. VELUTINI. — L. DUARTE LEVEL. — F. TOSTA GARCIA. — J. L. ANDARA. — A. SMITH.
40 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
BELGIQUE
Protocole concernant la Prorogation de l'Union internationale constituée par la Convention des Sucres du 5 mars 1912 (1).
Les Gouvernements de l'Allemagne, de l'Autriche-Hongrie, de la Belgique, de la France, du Luxembourg, des Pays-Bas, du Pérou, de la Russie, de la Suède et de la Suisse, ayant décidé de maintenir en vigueur après la date du 31 août 19.13, l'Union internationale constituée par la Convention des Sucres du 5 mars 1902, les, soussignés, à ce dûment autorisés, sont convenus de ce qui suit :
ARTICLE Ier.
Les Etats contractants s'engagent à prolonger pour un nouveau terme de cinq ans, qui prendra cours le Ier septembre 1913, la Convention relative au Régime des Sucres du 5 mars 1902, telle qu'elle a été amendée et complétée par le protocole du 26 juin 1906, relatif à l'accession de la Suisse, par l'Acte additionnel à ladite convention du 28 août 1907, et par le protocole du 19 décembre 1907, relatif à l'adhésion de la Russie, sous réserve de l'attribution à la Suisse du droit de vote que le protocole du 26 juin 1906 ne lui avait pas accordé et sous réserve également des dispositions faisant l'objet de l'article 2 ci-après.
Lesdits Etats contractants renoncent, en conséquence, à user de la faculté que leur concédait l'article 10 de la convention du 5 mars, 1902, quanta la dénonciation de cet acte diplomatique.
ART. 2.
Le contingent d'exportation de 200.000 tonnes accordé à la Russie par l'article 3 du protocole du 19 décembre 1907, pour chacun des quatre exercices compris entre le Ier septembre 1909, et le 31 août 1913, est maintenu pour chacun des cinq exercices compris entie le Ier septembre 1913, et le 31 août 1918.
Prenant en considération le fait que, par suite de circonstances
(1) Ce protocole a été promulgué en France par décret présidentiel du 12 avril 1912.
CONVENTION DES SUCRES 41
exceptionnelles, il s'est produit, en 1911-12, simultanément, une pénurie de sucre et une élévation considérable du prix sur le marché mondial, les Etats contractants consentent à ce que la Russie bénéficie d'un contingent extraordinaire, qui sera réparti comme suit :
Tonnes.
Exercice 1911-12 150,000
Exercice 1912-13 50,000
Exercice 1913-14 50,000
ART. 3.
Le présent protocole sera ratifié et les ratifications en seront déposée^ à Bruxelles, au Ministère des Affaires Etrangères, le plus tôt possible et, en tout cas, avant le Ier avril 1912.
Il deviendra obligatoire de plein droit à cette date, s'il a été ratifié au moins par les Etats européens exportateurs de sucre spécifiés ciaprès : Allemagne, Autriche-Hongrie, Belgique, France, Pays-Bas, Russie.
Cette éventualité se trouvant réalisée, les autres Etats signataires du présent protocole qui ne l'auraient pas ratifié à la date précitée pourront néanmoins, en le ratifiant avant le Ier septembre de la même année, continuer à faire partie de l'Union internationale aux conditions qui leur sont faites actuellement et pour toute la durée du présent protocole, pourvu que, avant le Ier avril 1912, ils aient donné leur assentiment définitif à l'attribution à la Russie du contingent extraordinaire prévu à l'article 2 du présent protocole. Ils ne pourront, en aucun cas, se prévaloir de la clause de tacite réconduction visée à l'article 10 de la convention du 5 mars 1902, pour continuer, d'année en année, leur participation à l'Union.
ART. 4.
Dans la session qui précédera le Ier septembre 1917, la Commission permanente statuera par un vote d'unanimité sur le régime qui serait celui de la Russie au cas où elle serait disposée à continuer sa participation à la convention au delà du terme du Ier septembre 1918.
Dans le cas où la commission ne pourrait se mettre d'accord, la Russie serait considérée comme ayant dénoncé la convention pour cesser effet à compter du Ier septembre 1918.
ART. 5.
Il sera loisible à chacun des Etats contractants de se . retirer de l'Union à partir du Ier septembre 1918, moyennant préavis d'un an ;
42 TRAITES, CONVENTIONS, PROTOCOLES
dès lors, les dispositions de l'article 10 de la convention du 5 mars, 1902, concernant la dénonciation et la tacite réconduction redeviendront applicables.
En foi de quoi les soussignés, plénipotentiaires des États respectifs, ont signé le présent protocole.
Fait à Bruxelles, le 17 mars 1912, en un seul exemplaire original, dont une copie conforme.sera délivrée à chacun des Gouvernements signataires.
Pour l'Allemagne : VON FLOTOW, HERMANN MEHLHORN, KEMPFF.
Pour l'Autriche-Hongrie : COMTE CLARY ET ALDRINGEN.
Pour l'Autriche : LEOPOLD JOAS.
Pour la Hongrie : TELESZKY JANOS.
Pour la Belgique : CAPELLË.
Pour la France : A. KLOBUKOWSKY, A. DELATOUR.
Pour le Luxembourg : LE COMTE D'ANSEMBOURG.
Pour les Pays-Bas : O. D. VAN DER STAAL DE PIERSHIL.
Pour le Pérou : TELEMACO ORIHUELA.
Pour la Russie : KOUDACHEF.
Pour la Suède : F. DE KLERCKER.
Pour la Suisse JULES BOREL.
Déclarations relatives à l'Attribution à la Russie du Contingent extraordinaire prévu à l'article 2 du Protocole signé à Bruxelles, le 17 mars 1912, concernant la Prorogation de l'Union internationale des Sucres.
Première Déclaration
Les soussignés, au moment de procéder à la signature du protocole concernant la prorogation de l'Union internationale des Sucres, déclarent ce qui suit :
La répartition des deux contingents supplémentaires de 50,000 tonnes attribués à la Russie pour les exercices 1912-13 et 1913-14 se fera de telle manière que la quotité du contingent extraordinaire pour chacun des quatre semestres compris entre le iCr septembre 1912, et le 31 août 1914, ne dépasse pas 25,000 tonnes.
CONVENTION DES SUCRES 43
Pour l'Allemagne : VON FLOTOW, HERMANN MEHLHORN, KEMPFF.
Pour l'Autriche-Hongrie : COMTE CLARY ET ALDRINGEN.
Pour l'Autriche : LEOPOLD JOAS.
Pour la Hongrie : TELESZKY JANOS.
Pour la Belgique : CAPELLE.
Pour la France : A KLOBUKOWSKY, A. DELATOUR.
Pour le Luxembourg : LE COMTE D'ANSEMBOURG.
Pour les Pays-Bas : O. D. VAN DER STAAL DE PIERSHIL.
Pour le Pérou : TELEMACO ORIHUELA.
Pour la Russie : KOUDACHEF.
Pour la Suède : F. DE KLERCKER.
Pour la Suisse : JULES BOREL.
Deuxième Déclaration.
Les soussignés, au moment de procéder à la signature du protocole concernant la prorogation de l'Union internationale des Sucres, sont autorisés à déclarer ce qui suit :
Les Gouvernements qu'ils représentent s'engagent, pour le cas où ils ne pourraient ratifier le protocole précité avant le Ier avril 1912, à donner, tout au moins à cette date, leur assentiment définitif à l'attribution à la Russie du contingent extraordinaire prévu à l'article 2 dudit protocole.
En foi de quoi ils ont signé la présente déclaration.
Fait à Bruxelles, le 17 mars 1912, en un seul exemplaire original, dont une copie conforme sera délivrée à chacun des Gouvernements signataires.
Pour le Luxembourg : LE COMTE D'ANSEMBOURG. Pour le Pérou : TELEMACO ORIHUELA. Pour la Suède : F. DE KLERCKER. Pour la Suisse : JULES BOREL.
Troisième Déclaration.
Le soussigné est autorisé à déclarer que le Gouvernement de Sa Majesté le Roi d'Italie donne son assentiment à l'attribution à la Russie du contingent extraordinaire pour les exercices 1911-12 et 1912-13.
COSTA.
Bruxelles, le 17 mars 1912.
44 TRAITES, CONVENTIONS, PROTOCOLES
Traduction de la note adressée par M. le Ministre de la Grande-Bretagne à Bruxelles à M. Je Ministre des Affaires Etrangères de Belgique,
Bruxelles, le 17 mars 1912.
M. le Ministre,
Sous la date du 18 décembre 1907, mon prédécesseur, Sir. A. Hardinge, a adressé une note à votre Excellence annonçant qu'il était autorisé à signer le protocole relatif à l'adhésion de la Russie à la Convention des Sucres sous la réservé que l'assentiment du Gouvernement de Sa Majesté britannique se bornait aux dispositions permettant à la Russie d'adhérer à la convention et n'impliquait pas un assentiment à la stipulation visant l'exportation du sucre russe.
En présence de cette réserve, le Gouvernement de Sa Majesté britannique considère que son assentiment n'est pas nécessaire pour l'augmentation de l'exportation russe prévue par le protocole qui a fait l'objet des récentes discussions de la Commission internationale des Sucres, vu que cet assentiment n'a jamais été donné à la restriction de celle-ci, et en conséquence, il ne se propose pas de m'autoriser à signer ce protocole, qui prévoit une augmentation de l'exportation du sucre russe en même temps que le renouvellement de la convention pour une période de cinq années a partir du ier septembre 1913. Néanmoins, pour éviter toute possibilité de malentendu à ce sujet, je suis chargé par le Principal Secrétaire d'Etat pour les. Affaires Etrangères de Sa Majesté britannique de déclarer formellement que le Gouvernement de Sa Majesté britannique ne voit aucune objection à l'augmentation de l'exportation russe pour la présente année et pour les années ultérieures " de la continuation de la convention, et je dois prier votre Excellence de vouloir bien communiquer le contenu de cette note aux autres membres de l'Union sucrière, en les priant d'en prendre acte.
Je saisis, etc.
F. H. VILLIERS.
TRAITES 'DE COMMERCE 4$
ITALIE
(omenelature des Traités de Commerce en vigueur à la date du 1er Janvier 1912, entre l'Italie et les autres puissances.
A la date du $ mars 1912, la direction générale des Affaires ommerciales du Ministère des Affaires Etrangères a dressé la nomenclature officielle des traités de commerce en vigueur à la date u Ier Janvier 1912 (1); nous en publions ci-après la traduction brégée :
(1) Cf. Bolletino del Ministero degli Affari Esteri, n" 424. (Mafs 3912).
4<J TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLE
j
DATE DATE DAT!
NATIONS de
de la stipulation rentrée en vi?ueur de la décl
Traité du 6 décembre 1891 1 février 1892.
All6magne Traité additionnel du 3 U ^"^
( décembre 1904 1 mars 1906.
'
Argentine Convention du 1er juin
1894 et protocole additionnel du 31 janvier 1895 28 février 1896. —
Autriche - Hongrie Traité du 11 février 1906. 1er mars 1906. 31 décemb
1 avec facul dénoncer janvier 19
Belgique Traité du 11 décembre 1882 1er janvier 1883. —
Bolivie Traité du 18 octobre 1890. 7 janvier 1901. —
Brésil Echange de notes du S juin
1900 28 juillet 1900. 31 décembi
Traité du 13 janvier 1906 (31 décembre 1905).... 14 janvier 1906. —
Bulgarie J
/Echange de notes (10 mars
( -21 juillet 1910) — —
Canada Accord provisoire du 6
juin 1910 10 juin 1910. '—
Chili Traité du 12 juillet 1898. 3 juillet 1911. —
Chine Traité du 26 octobre 1866. 30 juin 1868. Indétermi
\ TRAITES DE COMMERCE 47
'< CLAUSE de
■ laTaU°n OBSERVATIONS
1 plus
favorisée
Oui
Oui Oui
Oui
L Non L'arliole 3 du traité consacre l'égalité avec les nationaux en matière de
commerce et de navigation, pour les sujets d'une des deuxnations dans l'autre Etat ; une déclaration annexée au traité engage les deux Gouvernements à négocier un accord commercial dans les deux années à dater du traité.
Quj Le tarif spécial concerne la réduction des droits sur le café à son entrée en Italie ; ce traité a été prorogé après échange de notes du 4 mai au 4 juin 1910.
Oui Le tarif spécial ne concerne que les droits d'entrée en Bulgarie; il y eut échange de notes du 4 mai au 6 juin 1911 ; on attend encore l'approbation du Sobranjé ; le traité a été prorogé au 31 décembre 1917.
L'échange de notes conclut à la réciprocité de la franchise pour les
meubles des sujets d'une des deux nations qui s'établissent sur le territoire de l'autre.
0. Cf. ObsMT. L'accord conclut à l'application du tarif conventionnel italien à un certain nombre de marchandises canadiennes et du tarif intermédiaire canadien à un certain nombre de denrées de provenance italienne.
n Oui Pour ce qui concerne la nation la plus favorisée, il est fait exception à
la clause pour les réductions spéciales douanières que le Chili concède aux autres Etats du Sud ou du Centre-Amérique.
i Oui Les tarifs spéciaux stipulés au traité et qui concernaient l'importation
des denrées italiennes en Chine furent modifiées par l'accord du 28 mars 1903 ; la clause de la nation la plus favorisée est accordée au seul bénéfice de l'Italie mais cette dernière, par tradition bienveillante et par réciprocité de traitement l'accorde également aux marchandise» chinoises importées en Italie.
48 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES j
I j.
DATE DATE DA1
NATIONS de
de la stipulation l'entrée en vigueur de la déc
Chine Accord du 28 mars 1903. 27 avril 1903. Indéten
Colombie ...... Traité'du 27 octobre 1892. 10 novemb. 1894 —
Congo belge... Convention du 19 décem- 14 juin 1885. Indéten:
bre 1884.
i Cuba Traité du 29 décembre 1903 2 décembre 1904. 2 décembr
Danemark Traité du 1er mai 1864. 24 novembre 1864 — j
Egypte Convention du 14 juillet 16 février 1909. 16 février
, 1906. • avec faci
révision 1 vrier 191' 16 févriei
/Traité du 12 août 1900. 28 juin 1906. —
^Convention additionnelle — —
' du 26 février 1911.
Etats-Unis Traité du 26 février 1871. 17 novembre 1871 —
Ethiopie Traité du 21 juillet 1906. 11 juin 1907. —
France Echange de notes, 21 no- 12 février 1899. Indéterm
vembre 1898.
TRAITÉS DE COMMERCE
,! CLAUSE
-V de
lanfaUOn OBSERVATIONS
al plus
favorisée
i — L'accord par lequel furent stipulés les tarifs spéciaux à l'entrée en
Chine fui conclu en exécution de l'article VI, et du protocole final de paix du 7 septembre 1901 entre la Chine et les Puissances alliées.
H Oui <^u traité font suite deux échanges de notes de môme date entre le
ministre d'Italie à Bogota et le Ministre des Relations Extérieures de Colombie au sujet de la propriété scientifique, littéraire et artistique des citoyens des deux Etats et aux indemnités dues pour dommages provenant de l'Etat de révolution ou de révolte des tribus sauvages aux Italiens résidant en Colombie.
i Oui
i Oui
1 Oui Le traité est applicable aux colonies des deux pays.
Le 17 septembre 1903, un article additionnel est intervenu par lequel le traitement de la nation la plus favorisée est assuré également pour ce qui regarde l'exercice des professions et des industries.
i Oui
La convention additionnelle dont les ratifications n'ont pas encore été
échangées, réduit de moitié les droits en vigueur pour le Champagne et les vins mousseux italiens.
t Oui L'article 24 du Traité déclare que le traitement de la nation la plus
favorisée sera libéralement concédée par l'une des parties contractantes à l'autre, si la concession en a été faite libéralement par elle à une troisième puissance. La clause de la nation la plus favorisée est applicable a Porto-Rico, aux îles Philippines et Havai.
i Oui
Vf. Cf, observ. Le modus vivcndi stipulé le 21 novembre 1898 conclut à l'application du tarif minimum aux marchandises italiennes à l'exception des soieries, du tarif conventionnel ultérieurement réduit aux denrées françaises, à l'exception des soieries. Le traitement de la nation la plus favorisée est étendu aux marchandises et aux territoires des deux pays, exception faite des marchandises françaises en Erythrée et des marchandises provenant, de l'Erythrée et importées en France ou dans les colonies françaises.
ARCHIVES DIPLOM., t, i22, n<" 6-6-7, mai-juillet 1912. 4
50 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
DATE DATE DATE
NATIONS de
de la stipulation . Uentrée en yigueur de la déché
Royaume-Uni Traité du 15 juin 1883. 1<* juillet 1883. —
de GrandeBretagne et d'Irlande
Grèce Protocole du 18 décembre 1er janvier 1900 —
1899.
Honduras Traité du31 décembre 1868 14 juillet 1874. —
Japon Accord provisoire 12 juil- 17 juillet 1911. —
let 1911.
Libéria Traité du 23 octobre 1862. 6 mai 1863. —
Maroc Traité du 30 juin 1825. 6 octobre 1825. Indéterm
Mexique Traité du 16 avril 1890. 23 juillet 1891. —
/Accord des 21 et 9-22 dé- 1^ janvier 1904. I cembre 1903.
on enegro Echange de notes 10 juin 1«' juillet 1904.
/ (28 mai) -11 juin (29 !
[ mai) 1904.
Nicaragua .. Traité du 25 janvier 1906. 28seplemb. 1906 28 septeml:
Norvège Traité du 14 juin 1862. 13 septemb. 1906 —
Accord des 30 novembre19 décembre 1905.
Traité du 24 novemb. 1863.
Pays-Bas 12 novembre 1864 —
[Déclaration du 12 novem»
/ bre 1S64. J
TRAITES DE COMMERCE
CLAUSE de
IF IaTati0n OBSERVATIONS
■al plus
favorisée
n Oui Toutes les colonies anglaises ont adhéré à ce traité sauf l'Australie, le
Canada, le Cap et l'Inde. Après échange de notes, le 13 janvier 1905, il a été conclu que le traitement de la nation la plus favorisée serait étendu aux sujets britanniques dans les ports de la côte italienne de Somalis.
i Oui
n Oui II a été signé une déclaration interprétative de la clause de la nation la
plus favorisée, lors de l'échange des ratifications le 13 juillet 1875.
n Oui Par déclaration officielle du 25 août 1910, le gouvernement japonais a
notifié l'annexion de la Corée à son Empire et a indiqué le 29 août de la même année les règles relatives à l'importation dans ce pays des marchandises étrangères.
n Oui
n Oui L'Italie a adhéré au traité d'amitié et de commerce signé le 1" juin
1890 entre l'Empire allemand et le Maroc. Ce traité contient un tarif conventionnel des droits ds douane d'exportation du Maroc ; le gouvernement italien a donné pleine et entière exécution à ce traité dans le royaume par la loi du 26 avril 1891.
n Oui
n Oui Renouvelable tacitement de six en six mois.
n Oui n Oui
in Oui La déclaration est interprétative de l'article 2 du traité et maintient en
vigueur les dispositions du paragraphe 3 de l'article 2 du traité du 24 juin 1851.
52 TRAITES, CONVENTIONS, PROTOCOLES
DATE DATE DATI
NATIONS de
de la stipulation renlrée en vigueur de la déch,
Panama Traité du 27 octobre 1892. — —
Paraguay .. Traité du 22 août 1893. 20 novembre 1894 —
Pérou. Traité du 23 décemb, 1874 7 novembre 1878 —
Perse Traité du 29 septemb. 1862 15 décembre 1862 —
Portugal Accord provisoire du ■ 9 28 mai 1911. —
mai 1911.
Roumanie Traité du 5 décembre (22 14 avril 1907. 31 décemhi
novembre) 1906.
Russie Traité des 15-28 juin 1907. 17 janvier 1908. 21 décembr
Salvador Traité du 27 octobre 1860. 9 mai 1861. —
Traité du 14 avril 1906 sur le modèle de celui conclu avec le Nicaragua, pas encore sanctionné par les Parlements des deux nations.
( Traité du 18 octobre 1886.\ St-Domingue... )Acte arjditiomiel du 5 jan-f 15 juillet 1903. Indéterm ( vierl889. )
/Convention d'amitié et de 31 juillet 1897. \
I' bon voisinage du 28 juin
.1847. . • J
Déclaration du 9 janvier 1er juillet 1901. I
1901. 1 29 juillet 1
Convention additionnelle 18 juillet 1906. I
du 16 février 1906. \
Convention additionnelle 29 juillet 1907.
du 15 juin 1907. /
TRAITES DE COMMERCE 53
: CLAUSE
? , de
, ,Ianfati 011 OBSERVATIONS
l plus
favorisée
Oui Traité conclu avec la Colombie auquel adhéra la République de Panama le 10 novembre 1903.
Oui
Oui Oui
Oui Sont exclus du traitement de la nation la plus favorisée les vins de Porto et de Madère à l'entrée en Italie et ceux de Marsala et de vermouth en Portugal. De même, les stipulations de l'accord re sont pas applicables : 1* aux faveurs concédées par le Portugal à l'Espagne et au Brésil ; 2° aux importations portugaises dans les colonies italiennes et aux importations italiennes dans les colonies portugaises ; aux importations entre colonies italiennes et portugaises.
Oui
Oui
Oui Le 22 juillet 1909 la République du Salvador a reconnu applicable aux denrées italiennes le traitement de la nation la plus favorisée.
Oui
54 TRAITÉS, CONVENTIONS, PROTOCOLES
DATE DATE DATE'
NATIONS de
de la stipulation Pentrée ea vigtieur de la déché
Serbie Traité du 14-1 janvier 1907 1er avril 1907. 31 décembre
avec facul dénonciati 1er janvier
Siam- Traité du 3 octobre 1868. 1er janvier 1871. Sans date fi
déchéance,
sujet à.ré\
^ avec pré-a\
douze mois
Suède Traité du 14 juin 1862. 13 septemb. 1862 -—
( 1« juillet 1905.
- Suisse Traité du 13 juillet 1904. ) 31 décembre
( 1er janvier 1906.
Tunisie Traité du 28 septemb. 1896 25 janvier 1897. —
Turquie Traité du 25 octobre 1823. — —
Protocole du 25 avril 1907.
Venezuela Traité du 19 juin 1861. 20 septemb. 1862 —
Zanzibar Traité du 28 mai 1885. 30 décembre 1886 Indétermii
Article additionnel du 10 tobre 1885.
. TRAITES DE COMMERCE 55
CLAUSE
ri? de
L1 la nation _
la OBSERVATIONS
f1 plus
{ favorisée
i Oui
i Oui La révision en a été proposée par le gouvrnenient siamois le 7 février
1906. Ce traité fixe à 3 •/„ ad valorem les droits d'importation sur les marchandises italiennes importées au Siam.
u Oui
i Oui
îIT. Oui H est stipulé que les droits d'entrée en Tunisie (exception faite des droits sur les fruits, huiles et graines oléagineuses) ne pourront pas être supérieures aux droits correspondants minima de la douane française.
— Actuellement, les traités ci-contre ne sont plus en vigueur et les règles
douanières entre les deux pays sont les suivantes : 1° Pour l'importation des marchandises italiennes en Turquie : taxe
de 100 „/" ad valorem (iradé impérial du 12 octobre 1912). 2° Pour l'importation des marchandises turques en Italie : taxe établie par le tarif général italien, exception faite pour les marchandises énumérées dans le décret royal du 26 novembre 1911.
Oui
IQ Oui Après échange de notes avec la Grande-Bretagne, le gouvernement
roval italien a accordé le traitement de la nation la plus favorisée aux sujets du Sultan de Zanzibar dans les ports de la côte italienne des Somalis le 13 janvier 1905.
DEUXIEME PARTIE
CORRESPONDANCES, DÉPÊCHES, NOTES
GRANDE-BRETAGNE — HONDURAS
Echange de notes entre le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande et la République de Honduras tendant à proroger jusqu'au 6 avril 1913 l'effet du traité de commerce et de navigation signé entre ces deux pays le 21 janvier 1887.
(3-8 avril 1912)
N° 1
Le Ministre de Sa Majesté Britannique au Ministre des Affaires Etrangères de Honduras
Guatemala, 3 avril 1912.
Monsieur le Ministre,
En confirmation de mon télégramme en date de ce jour, j'ai reçu de mon Gouvernement l'instruction d'avoir à vous exprimer l'espoir que, comme il a été jusqu'à ce jour impossible par suite de circonstances imprévues d'obtenir l'approbation par le Congrès du traité de commerce conclu entre la Grande-Bretagne et le Honduras, le gouvernement de Votre Excellence voudra bien ne pas faire, d'objection à ce que l'effet du traité de 1887 soit prorogé pour une nouvelle période d'une année qui se terminera le 6 avril 1913.
Veuillez, etc.
LIONEL CARDEN.
DELIMITATION DE FRONTIERES 57
N° 2
Le Ministre des Affaires Etrangères de la République de Honduras à M. le Ministre de S. M. Britannique.
Tegucigalpa, 8 avril 1912.
Monsieur le Ministre,
J'ai l'honneur de remettre à Votre Excellence.une copie du décret N° 114 expédié le 6 de ce mois par le Congrès National, approuvant la décision qu'avait prise le Pouvoir Exécutif de cette République de proroger d'une nouvelle année les effets du Traité de commerce de 1887 entre les Honduras et la Grande-Bretagne. En conséquence, ledit traité restera en vigueur jusqu'au 6 avril 1913.
J'ai été très heureux de pouvoir en cette occasion satisfaire le désir que m'avait exprimé Votre Excellence.
Veuillez, etc.
MARIANO VASQJJEZ.
GRANDE-BRETAGNE — PORTUGAL
Échange de notes entre le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande et la République Portugaise au sujet de la délimitation de la frontière entre les possessions britanniques et portugaises dans les fleuves Ruo et Chire dans l'Afrique Orientale.
(3-30 novembre 1911)
N° 1
Note adressée par le ministre de S. M. Britannique à Lisbonne au Ministre portugais des Affaires Etrangères (1).
Légation de S. M. Britannique, Lisbonne, ie 6 novembre 1911.
Excellence, Comme suite à la correspondance échangée en juin et septembre
(1) L'original de cette note est en anglais.
58 CORRESPONDANCES, DÉPÊCHES, NOTES
dernier entre S. Exe. Monsieur Azevedo et mon prédécesseur Sir Francis Villiers, au sujet du règlement de la frontière entre les possessions respectives de nos deux gouvernements sur les fleuves Ruo et Chire, j'ai l'honneur de proposer à Votre Excellence le règlement de cette question dans les termes suivants :
Le Gouvernement de Sa Majesté Britannique et le Gouvernement de la République Portugaise ayant résolu de délimiter leurs territoires de l'Afrique Orientale sur les neuves Ruo et Chire entre les points de ces fleuves mentionnés dans le Traité du n juin 1891 (1), il a été décidé de commun accord par les gouvernements intéressés d'accepter comme frontière la ligne des thalwegs de ces fleuves, en convenant que les îles qui sont entre la rive gauche de ces fleuves et leurs thalwegs, appartiendront au Portugal et que celles qui sont entre la rive droite des dits fleuves Ruo et Chire et ces thalwegs appartiendront à l'Angleterre, cette détermination de frontières se rapportant par ailleurs à l'état des deux fleuves en 1908. La frontière est donc ainsi fixée :
Au Portugal appartiennent les îles de Sancoulani et petites îles adjacentes, Mase Codoso, en aval du village de Mlolo, celles de l'embouchure de Ruo, Ngoma, Msamboux n° 1, Dumba, Chicao, Nhamoula, Calumbi, Calicouvani et de Chisouca, ainsi qu'il est indiqué dans la carte ci-annexée des fleuves Ruo et Chire.
A l'Angleterre appartiennent les îles de Malô. Nhamdamboua, Nhapember, Nhafouzi. Msamboua n° 2, Tengani, Panga, Tembo et les deux îles de Koutamo, ainsi qu'il est indiqué dans la carte ci-annexée des fleuves Ruo et Chire.
Le Gouvernement de Grande-Bretagne et de Portugal prennent l'engagement de respecter la ligne limitrophe qui est stipulée par cet accord et de reconnaître comme territoires portugais et britanniques les îles' ci-dessus indiquées, conformément aux stipulations du traité du 11 juin 1891.
Si votre Excellence veut bien, avec l'agrément du Gouvernement de Portugal, préparer l'acceptation de l'accord dans les termes ci-dessus, je lui serais très obligé de vouloir bien m'adresser une note à cet effet. Les notes ainsi échangées seront considérées comme constituant l'accord.
Je saisis, etc.
ARTHUR H. HARDINGE.
Son Excellence Mr. Augusto de Vasconcellos, Ministre des Affaires Etrangères.
(1> Entre Sancoulani et Port Herald.
DELIMITATION DE FRONTIÈRES 59
N° 2
Réponse du Ministre des Affaires Etrangères de Portugal au Ministre de Sa Majesté Britannique à Lisbonne, lui notifiant l'agrément du gouvernement portugais à la modification de frontière proposée dans sa note du 6 novembre 1912) (1).
Ministerio dos Negocios Estrangeiros, Lisbôa, 3o de Nôvembro de 1911.
Senhor Ministre,
TENHO a honra de accusar a recepçâo da nota que vossa Excellencia se serviu dirigir-me em 6 do corrente, em continuaçâo da correspondencia anteriormente trocada entre este Ministerio e a Legaçâo a digno cargo de vossa Excellencia com respeito a linha de fronteira luso-britannica nos rios Rua e Chire.
Propôe vossa Excellencia que o accordo a que chegaram os Governos Portuguez e Britannico sobre esta questào fique definido nos termos seguintes :
Havendo o Governo da Republica Portugueza e o Governo de Sua Magestade Britannica resolvido fazer a demarcaçâo dos seus territorios na Africa Oriental, ao longo dos rios Ruo et Chire, entre os pontos d'estes rios estipulados no Tratado de 11 de Junho de 1891 ; foi decidido pelos dois Governos interressados, de commun occordo, acceitar a linha dos thalwegs d'aquelles rios como fronteira, ficando pertencentes a Portugal as ilhas que se encontram entre a margem esquerda dos mesmos rios e seus thalwegs, e â Inglaterrâ as que estâo entre esses thalwegs e a margem direita dos alludidos rios Ruo et Chire, sendo estes limites referidos ao estado dos dois rios em 1908. Por esta maneira ficam pertencendo :
A Portugal as ilhas de Sanculani e ilhotas adjacentes, de Masecodoso a jusante da povoaçâo de Mlolo, da foz do Ruo, de Ngnoma, de Msambua No r, de Dumba, de Chicau, de Nhamula, de Calumbi, de Calicuvani, e de Chisuka, como esta indicado no mappa annexo dos rios Rua e Chire.
E â Inglaterrâ as ilhas de Malô, de Nhamdambua, de Nhapember, de Nhafuzi, de Msambua No. 2, de Tengani, de Panga, de Tembo e as duas ilhas du Cutàmo, esta indicado no mappa annexo dos rios Ruo o Chire.
(1) Nous donnons le texte original portugais de cette note qui ne fait que reproduire, à part les formules de politesse et d'acceptation, les termes mêmes de la note du Ministre anglais imprimée ci-contre.
6o DÉPÊCHES, CORRESPONDANCES, NOTES
Tanto o Governo de Portugal como o da Gran-Bretanha se obrigam a respeita a linha limitrophe que fica estipulada por este accordo e a reconhecer como territorios portuguezes e inglezes as ilhas que acima, respectivamente, ficam indicadas, de conformidade com o que. résulta do Tratado de n de Junho de 1891.
Tenho a satisfaçào de notificar a vossa Excellencia o assentimento do Governo da Républica a este accordo que assim fica définitivamente consignado na présente nota e n'aquella de vossa Excellencia a que respondo.
Aproveito, &c.
AtJGUSTOS DE VASCONCELLOS.
Sir Arthur, H. Hardinge, &c, &c, &c.
AUTRICHE-HONGRIE — NORVÈGE
Echange de notes entre le ministre des Affaires Etrangères du royaume de Norvège et le Ministre d'Autriche-Hongrie à Kristiania au sujet de règles à établir pour la correspondance entre les autorités judiciaires norvégiennes et autrichiennes.
(18-27 mars T912) N° 1.
Kristiania, le 18 mars 1912.
Le soussigné Ministre d'Autriche-Hongrie à Kristiania a l'honneur d'informer Son Excellence Monsieur J. Irgens, Ministre des Affaires Etrangères, que le Gouvernement Impérial et Roj'al d'Autriche, s'inspirant des dispositions de la Convention de la Haye du 17 juillet 1905 sur la procédure civile, est disposé, sous garantie de réciprocité, mutuelle, à régler la correspondance entre les autorités judiciaires norvégiennes et autrichiennes d'après les principes suivants :
Dans les cas prévus par les articles 3, 10 et 19 de la Convention susmentionnée, les autorités judiciaires autrichiennes seront tenues de faire accompagner tout acte destiné à la Norvège d'une traduction en norvégien, de même que les autorités judiciaires norvégiennes devront joindre aux actes destinés à l'Autriche une traduction en langue allemande.
L'arrangement précité entrera en vigueur.un mois.après l'échange-
ÉCHANGE DE NOTES 6l
des notes y relatives et restera exécutoire trois mois après dénonciation par l'une des parties.
En attendant une note analogue à la présente de la part de Votre Excellence, le soussigné saisit cette occasion pour Lui présenter les assurances de sa haute considération.
(L. S). COMTE DENIS SZÉCHÊNYI. Chambellan de S. M. Impériale et Royale Apostolique, Envoyé Extraordinaire el Ministre Plénipotentiaire d'Autriche-Hongrie en Norvège.
N° 2.
Kristiania, le 27 mars 1912.
Le soussigné Ministre des Affaires Etrangères a l'honneur d'accuser réception à Monsieur le Comte de Széchênyi, Ministre d'AutricheHongrie, de la note N° 150 en date du 18 de ce mois, et de déclarer pour sa part au nom du Gouvernement Royal norvégien que celui-ci s'inspirant des dispositions de la Convention de la Haye du 17 juillet 1905 sur la procédure civile, est disposé, sous garantie de réciprocité mutuelle, à régler la correspondance entre les autorités judiciaires norvégiennes et autrichiennes d'après les principes suivants :
Dans les cas prévus par les articles 3, 10 et 19 de la Convention susmentionnée, les.autorités judiciaires norvégiennes seront tenues à faire accompagner tout acte destiné à l'Autriche d'une traduction en allemand, de même que les autorités judiciaires autrichiennes devront joindre aux actes destinés à la Norvège une traduction en langue norvégienne.
L'arrangement précité entrera en vigueur un mois après l'échange des notes y relatives et restera exécutoire trois mois après dénonciation par l'une des parties.
Le soussigné saisit cette occasion pour présenter à Son Excellence Monsieur le Ministre d'Autriche-Hongrie les assurances de sa haute considération.
(L. S). J. IRGENS, Ministre des Affaires Etrangères de Norvège.
62 CORRESPONDANCES, DÉPÈCHES, NOTES
FRANCE — ESPAGNE
Modifications à l'article 2 de la Convention de Bayonne du 13 juin 1903.
M. Raymond Poincaré, président du Conseil des Ministres, et M. Perez Caballero, ambassadeur d'Espagne à Paris ont échangé le 27 avril 1912 des notes constatant l'entente intervenue entre le gouvernement de la République et le gouvernement dé S. M. le Roi d'Espagne pour apporter à l'article 2 de la convention signée à Bayonne le 13 juin 1903 entre la France et l'Espagne, une modification portant que la durée de la validité de l'acquit-à-caution pour les entrepreneurs de transports et les loueurs de voitures sera de quatre-vingt dix jours au lieu de quarante.
Déclarations constatant l'accord intervenu entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de S. M. le Roi d'Espagne relatif aux certificats de jauge délivrés aux navires espagnols et français.
M. Raymond Poincaré, président du conseil, ministre des affaires étrangères de la République française, et M. Perez Caballero, ambassadeur d'Espagne à Paris, ont signé, le Ier mai 1912, des déclarations constatant l'accord ' intervenu entre le Gouvernement de la République et le gouvernement de S. M. le roi d'Espagne, et qui contient les dispositions suivantes :
Les certificats de jauge délivrés aux navires espagnols et français par les autorités de leur pays seront acceptés réciproquement dans les ports français et espagnols pour la perception des droits de navigation, sous réserve, dans les deux cas, des dispositions ciaprès :
a) Lorsqu'un navire français abordera dans un port espagnol, les autorités espagnoles se réservent le droit de vérifier son certificat national de jauge, en vue de déterminer si la.déduction effectuée sur le tonnage brut pour l'espace occupé par l'appareil moteur excède 5 5 D/° du tonnage restant après défalcation des espaces mentionnés à l'article
CERTIFICATS DE JAUGE 63
27 du règlement espagnol, et, si la déduction dont il s'agit dépasse la proportion susvisée, l'excédent correspondant sera ajouté au tonnage net porté au certificat de jauge, en vue de déterminer le tonnage imposable ;
F) Dans, les ports français, les navires espagnols dont la déduction pour l'appareil moteur est établie dans la limite indiquée au paragraphe précédent, auront droit, pour la détermination du tonnage imposable, et après requête adressée à cet effet par les capitaines aux autorités desdits ports, à une déduction complémentaire égale à la différence entre la déduction portée à leur certificat national de jauge et celle qui est allouée d'après le règlement français ;
c) Dans tous les cas; les autorités de chaque pays se réservent le droit de vérifier les certificats de jauge des navires de l'autre nation, et, si des différences importantes étaient constatées, elles pourraient rectifier le. tonnage porté auxdits certificats pour la perception des droits.
Il est bien entendu que ces rectifications n'auraient d'effet que poulie voyage au cours duquel la vérification du certificat aura été reconnue nécessaire ;
d) Le nouveau règlement espagnol sur le jaugeage des navires n'ayant pas d'effet rétroactif, le bénéfice des dispositions qui précèdent ne sera applicable qu'aux navires espagnols dont les certificats de jauge auront été établis à une date postérieure au Ier avril 1910, et spécifieront que les calculs de jauge et les déductions qui y sont inscrites ont été effectuées conformément aux règles édictées par le Board of Trade.
Par mesure de réciprocité, les dispositions susvisées ne seront également applicables qu'aux navires français dont les certificats de jauge auront été établis postérieurement à la même date ;
é) Si le gouvernement espagnol vient à donner un effet rétroactit au nouveau règlement sur le jaugeage des navires en Espagne, il en avisera le gouvernement français en lui faisant connaître la date à laquelle tous les bâtiments espagnols seront rejaugés conformément audit règlement. A partir de cette date, la clause d sera considérée comme étant sans effet et les autres dispositions de l'accord comme applicables à tous les navires des deux pays.
Le présent accord entrera en vigueur le Ier juin 1912.
64 CORRESPONDANCES, DÉPÊCHES, NOTES
FRANCE — MAROC
Dépêches échangées entre S. M. le Sultan du Maroc et le Général Lyautey, commissaire résident général de la République française. - -
{28-30 avril Ï912)
TÉLÉGRAMME DU GÉNÉRAL LYAUTEY ' ' Paris;. £8 avril 1912.
A Sa Majesté Moulay-Hafid, Fèz.
Appelé par la confiance du gouvernement français aux fonctions de commissaire résident général au Maroc, je m'empresse d'en informer Votre Majesté.
Je la prie de croire que j'appliquerai tout mon zèle à mériter sa confiance par mon respect pour sa personne souveraine et par mon dévouement aux,intérêts de son Empire.
En attendant que je puisse très prochainement lui présenter mes hommages à Fez, j'invoque sa haute bienveillance.
GÉNÉRAL LYAUTEY. . RÉPONSE DE S. M. LE SULTAN DU MAROC
Fez, 30 avril 1912. .
Sa Majesté Moulay-Hafid, Sultan du Maroc, à M. le général Lyautey, résident général de la France au Maroc, au ministère des affaires étrangères, Paris.
Je suis sensible à votre assurance et les sentiments d'assistance et de mutuel respect que vous exprimez serviront les intérêts désormais communs de mon Empire et de votre pays.
Je vous adresse mes félicitations, à l'occasion de la haute-mission dont vous avez accepté la charge' et pour laquelle vous désignait votre expérience, en vous assurant que vous trouverez en moi la bienveillance que vous invoquez.
MOULAY-HAFID.
PROGRAMME MILITAIRE ET POLITIQUE AU MAROC 65
FRANCE — MAROC
Télégramme adressé de Fez, le 14 juin 1912, par le Général Lyautey, commissaire résident général de la République à M. Poincaré, Ministre des Affaires Etrangères, pour lui exposer son programme militaire et politique au Maroc.
Voici, dans ses grandes lignes, le programme que je me propose de suivre, tel que j'ai pu l'arrêter jusqu'à présent :
i° Limiter strictement notre action aux régions occupées, mais en assurant d'une façon absolue leur sécurité ainsi que leur organisation politique, sociale et économique. Notre action s'étendra ainsi à une région comprenant la Chaouïa et ses abords et à la zone Rabat-Fez, limitée au nord par la frontière espagnole et au sud par le pays Zayani.
2° Il en résulte nécessairement que dans toute la mesure possible, la région située en dehors de cette zone devra être « neutralisée ». Je vais essayer d'obtenir ce résultat en m'appuyant sur les grands caïds, Glaoui à Merrâkech, Anflous à Mogador, Aïssa ben Omar à Saffi (avec qui je me suis mis en relations) et en leur donnant satisfaction sur tous les faits acceptables. J'assurerai ainsi leur autorité et leur solidarité d'intérêts avec nous. Je suis aidé par nos consuls, M. Maigret et M. Marc, qui font de l'excellente besogne. D'autre part, je réserve au centre la question du Zaïan en m'abstenant de toute mesure militaire qui puisse le provoquer ou l'approcher de trop près, tout en recherchant les moyens indirects de peser sur lui.
3° En ce qui concerne les régions occupées, j'estime qu'il n'y a rien à modifier à la Chaouïa où tout va bien. C'est sur la zone Rabat-Fez que doit se porter d'abord tout l'effort, tant pour dégager entièrement et définitivement les abords de Fez et y asseoir l'autorité régulière que pour dégager les abords sud de la ligne d'étapes et assurer la reconstitution du pays en arrière. Mais c'est à Fez qu'est pour le moment la clef de la question.
4° En conséquence, ne pouvant laisser Fez sous la menace journalière des rassemblements établis sur la rive droite du Sebou, qui coule à 4 kilomètres de la ville, je constitue une zone de couverture sur la périphérie est et sud de Fez, c'est-à-dire sur la rive droite du Sebou et au sud de Sefrou, dont je donne la direction militaire et politique au général Gouraud. Cet officier général aura pour mission de chercher les principaux rassemblements rebelles, de les disloquer, puis de ramener les éléments disposés à rentrer dans l'ordre et de rejeter les
ARCHIVES DIPLOM., t. 122, n" 5-6-y, mai-juillet 1912. 5
66 CORRESPONDANCES, DÉPÊCHES, NOTES
éléments irréductibles à une distance telle qu'ils cessent d'être menaçants pour Fez et ses abords.
Les circonstances seules détermineront la durée et le lieu de ces différents stationnements pendant chacun desquels il fera toute besogne nécessaire pour obtenir un résultat définitif. Il sera pourvu d'un service politique comprenant des officiers du service des renseignements et des personnages indigènes maintenant le principe de coopération avec le Maghzen, ainsi que le service-médical organisé pour les indigènes. Il cherchera autant que possible à se ravitailler sur place pour créer une solidarité d'intérêts et essayera d'amener les tribus restées fidèles à marcher avec lui. Cette action se poursuivra le temps qu'il faudra, plusieurs semaines ou davantage.
5° Une action analogue sera entreprise au sud de 'Mékinès pour ramener dans l'ordre les Béni M'Tir et les Zemmour et couvrir les abords sud de notre ligne d'étapes, mais sans pénétrer dans le pays Zayan. Cette action sera assurée avec les forces mobiles rendues disponibles par les renforts annoncés et par la suppression du poste Tafoudeit, la réduction des effectifs d'Agourai et de El-Hadjeb, qui deviendront de simples points d'appui et des magasins de ravitaillement solidement retranchés pour petits effectifs munis de l'artillerie que je vous ai demandée.
6° Le général Moinier assurera l'exécution de ce programme.
7° Derrière ces couvertures, l'autorité locale et celle du Maghzen seront reconstituées dans toute la mesure du possible.
8° J'estime que rien d'efficace ne peut être fait au point de vue administratif et économique, tant que cette condition première de la sécurité ne sera pas réglée. D'autre part, c'est à Fez même qu'est le noeud de la question. ]'y resterai donc avec M. Gaillard tant qu'il sera nécessaire pour assurer la mise en train de ce programme, laissant au général Moinier toute latitude pour se porter au point où sa présence est le plus utile. Je m'entendrai avec M. de Saint-Aulaire sur tous les points, dès son arrivée, et je me déchargerai provisoirement sur lui de toutes les questions diplomatiques et économiques prédominantes dans la région côtière, ainsi que de l'action personnelle sur le sultan.
Je procéderai de même pour les directions des finances et des travaux publics. Je pourrai, du reste, probablement pousser une pointe rapide sur Rabat.
9° Je serai reconnaissant à Votre Excellence de m'adresser toutes les observations que lui suggérerait ce programme. Je suis prêt à le modifier d'après les indications que vous voudrez bien me donner.
io° Au surplus, il reste bien entendu que des circonstances imprévues peuvent m'amener à le modifier.
LYAUTEY,
NOTIFICATIONS 6j
Notifications faites au Gouvernement de la République Française par les Ambassadeurs et Ministres de diverses Puissances.
(inai-juin ip 12)
— Le gouvernement italien a notifié au gouvernement de la République, que conformément aux dispositions du procès-verbal de dépôt des ratifications sur l'arrangement international signé à Rome, le 9 décembre 1907, portant création à Paris d'un office international d'hygiène publique, le gouvernement de S. M. la reine des Pays-Bas a effectué le dépôt de ses ratifications sur ledit arrangement.
— Conformément aux dispositions de l'article 26 de la convention relative à la procédure civile signée à la Haye, le 17 juillet 1905, le ministre des Pays-Bas à Paris a notifié au gouvernement de la République que le gouvernement danois adhérait audit acte international en ce qui concerne ses possessions des Antilles sous les réserves suivantes :
i° Les commissions rogatoires et les actes judiciaires destinés à être exécutés, remis ou signifiés sur les territoires de ces colonies devront être transmis par la voie diplomatique.
20 Les agents diplomatiques et consulaires des Etats étrangers ne pourront, dans ces contrées, ni exécuter des commissions rogatoires ni effectuer des remises directes d'actes judiciaires, sauf dans ce dernier cas, si le destinataire est ressortissant de l'Etat requérant.
— Conformément aux dispositions de l'article 6 de l'arrangement relatif à la répression de la circulation des publications obscènes, signé à Paris le 4 mai 1910, l'ambassadeur d'Autriche-Hongrie à Paris a effectué, le 24 avril 1912, au ministère des affaires étrangires, le dépôt de l'instrument des ratifications de S. M. l'Empereur d'Autriche, roi de Bohême, etc., et roi apostolique de Hongrie, sur cet acte international.
— En exécution de l'article 18 de la convention télégraphique internationale de Saint-Pétersbourg du 22 juillet 1875, revisée à Lisbonne le 11 juin 1908, le ministre de la République portugaise à Paris a notifié au gouvernement français l'accession de l'Union sudafricaine aux clauses de ladite Convention.
— L'ambassadeur d'Allemagne à Paris a fait connaître au gouvernement de la République française qu'à la date du 20 janvier 1912, le gouvernement égyptien a accédé à la convention radio-télégraphique internationale et à l'engagement additionnel signés à Berlin le 3 novembre 1906.
68 CORRESPONDANCES, DÉPÊCHES, NOTES
— L'ambassadeur d'Allemagne à Paris a fait savoir au gouvernement de la République française que Son Excellence le Président de la République des Etats-Unis d'Amérique a ratifié la convention internationale radio-télégraphique signée à Berlin le 3 novembre 1906.
Le gouvernement impérial allemand a également notifié que l'Espagne a accédé à la dite convention pour ses territoires du golfe de Guinée.
— Conformément aux dispositions de l'article 7 de l'arrangement relatif à la répression de la circulation des publications obcènes signé à Paris, le 4 mai 1910, le gouvernement britannique a notifié au gouvernement de la République française l'accession de la confédération australienne audit arrangement international à partir du 12 avril 1912.
— Le 8 juin 1912, le ministre des Pays-Bas à Paris a effectué au ministère des affaires étrangères le dépôt de l'instrument des ratifications de S. M. la reine des Pays-Bas sur l'arrangement international du 4 mai 1910 relatif a la répression de la circulation des publications obscènes. '
— L'ambassadeur d'Allemagne à Paris a fait savoir au gouvernement de la République française :
i° Que le Siam a accédé à la convention radio-telégraphique internationale conclue à Berlin, le 3 novembre 1906, ainsi qu'à l'engagement additionnel au protocole final et au règlement d'administration publique, signés le même jour ;
20 Que l'Italie a ratifié ladite convention et le règlement d'administration publique du même jour ;
30 Que la république de Saint-Marin a accédé à ladite convention, ainsi qu'au protocole final et au règlement d'administration publique du même jour.
— Le gouvernement allemand a également fait savoir à la France, au mois de juin 1912, que Son Excellence le Président de la République Orientale de l'Uruguay, avait ratifié la convention internationale radio-télégraphique signée à Berlin le 3 novembre 1906, ainsi que le règlement d'administration publique et l'engagement additionnel y annexés.
— Conformément aux dispositions de l'article 24 de la convention postale universelle signée à Rome, le 26 mai 1906, , visé par l'article 15 de l'arrangement relatif à l'échange des lettres et des boîtes avec valeur déclarée portant la même date, le conseil fédéral suisse a notifié au gouvernement de la République française l'adhésion de l'empire d'Ethiopie audit arrangement.
TROISIÈME PARTIE
LI, DECRETS, ARRfflS, DOCUMENTS DIVERS
. FRANCE
Loi portant ouverture au ministre des affaires étrangères sur l'exercice 1912, d'un crédit extraordinaire à l'occasion des funérailles de S. M. le roi de Danemark,
Le Sénat et la Chambre des députés ont adopté.
Le Président de la République promulgue la loi dont la. teneur suit :
ARTICLE UNIQUE
Il est ouvert au ministre des affaires étrangères, sur l'exercice 1912, en addition aux crédits alloués par la loi de finances du 27 février 1912 et par des lois spéciales, un crédit extraordinaire de neuf mille francs (9,000 fr,) imputable sur le chapitre 29 : « Frais de réception de personnages étrangers et missions extraordinaires à l'étranger ».
Il sera pourvu au crédit ci-dessus au moyen des ressources générales du budget de l'exercice 1912.
La présente loi, délibérée et adoptée par le Sénat et par la Chambre des députés, sera exécutée comme loi de l'Etat.
Fait à Paris, le 30 mai 1912.
Par le Président de la République :
Le Président du Conseil, ministre des affaires étrangères, R. POINCARÉ.
A. FALLIÈRES.
Le ministre des finances, L.-L. KLOTZ.
70 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS .
Loi portant ouverture au ministre des affaires étrangères sur l'exercice 1912 d'un crédit extraordinaire à l'occasion du voyage à Paris de S. M. la reine des Pays-Bas.
Le Sénat et la Chambre des Députés ont adopté.
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
ARTICLE UNIQUE
Il est ouvert au ministre des affaires étrangères, sur fexercice 1912 les additions aux crédits accordés par la loi de finances du 27 février 1912 et par des lois spéciales, un crédit extrordinaire de deux cent mille francs, qui sera inscrit à un chapitre spécial portant le N° 29 bis et intitulé « Frais de réception de S. M. la reine des Pays-Bas en France ».
Il sera pourvu à ce crédit au moyen des ressources générales du budget de l'exercice 1912.
La présente loi, délibérée et adoptée par le Sénat et par la Chambre des Députés sera exécutée comme loi de l'Etat. -
Fait à Paris, le 30 mai 1912.
A, FALLIÈRES.
Par le Président de la République : >
. Le Président du Conseil, Ministre des Affaires Etrangères,
R. POINCARÉ.
Le Ministre des Finances,
L.-L. KLOTZ.
Décret modifiant la composition du comité consultatif du contentieux au Ministre des Affaires Etrangères.
{18 avril 1912)
Le Président de la République française.
Sur la proposition du président du Conseil, ministre des Affaires étrangères,
FRANCHISE POSTALE Jl
Vu les décrets des ier février 1877, 26 avril 1880, 17 juillet 1882 et le décret du 17 juin 1890, arrêtant la composition et les attributions du comité consultatif du contentieux.
Décrète :
ARTICLE Ier
La composition du Comité consultatif du contentieux est modifiée ainsi qu'il suit :
Feront partie du comité, outre les membres désignés ' par l'article premier du décret du 17 juin 1890 :
i° Deux anciens conseillers d'Etat ;
20 Deux anciens conseillers à la Cour de Cassation ;
30 Les avocats du Ministère des affaires étrangères à la Cour d'Appel et à la Cour de Cassation.
ART. 2
Le président du Conseil, ministre des Affaires'Etrangères est chargé de l'exécution du présent décret.
Fait à Rambouillet le 18 avril 1912.
A. FALLIÉRES.
Par le Président de la République :
Le Président du Conseil, Ministre des Affaires Etrangères, R. POINCARÉ.
Décret admettant à circuler en franchise par la poste les correspondances de service entre les agents diplomatiques et consulaires de France à l'étranger et les procureurs de la République aux Colonies.
(14 septembre ipn)
Le Président de la République Française,
Vu la loi du 25 frimaire an VIII (art. 13") ;
Vu l'ordonnance du 17 novembre 1844 concernant les franchises postales ;
72 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Sur le rapport du Ministre des Travaux publics, des Postes et des Télégraphes,
Décrète :
ARTICLE Ier
Est admise à circuler en franchise par la poste, sous pli fermé, la correspondance de service échangée entre les agents consulaires et diplomatiques de France à l'étranger et les procureurs de la République aux Colonies.
ART. 2
Les plis expédiés en franchise, en vertu de l'article précédent,- par les procureurs de. la République aux agents consulaires et diplomatiques de France à l'étranger devront être déposés aux bureaux de poste, inscrits sur un bordereau spécial pour être affranchis gratuitement en timbres-poste, ainsi que le prescrit le règlement du 10 décembre 1875, concernant les dépêches officielles, à destination de l'étranger.
ART. 3
Le Ministre des travaux publics, des postes et des télégraphes est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera inséré, au Bulletin des lois. . •
Fait à Rambouillet, le 14 septembre 1911.
Signé : A. FALLIÈRES.
Par le Président de la République :
Le Ministre des Travaux publics, des Postes et des Télégraphes, Signé : VICTOR AUGAGNEUR.
Décret autorisant l'exécution en France de libéralités en faveur d'oeuvres de bienfaisance.
(2 mai 1912)
Le Président de la République française,
Sur le rapport du ministre des affaires étrangères,
Vu - le testament olographe de M. Alphonse Haas en date du
OEUVRES DE BIENFAISANCE 73
15 novembre 1907, déposé au rang des minutes de Me Belzeaux, notaire à Elbeuf ;
Vu l'acte de décès du testateur en date du 28 décembre 1909 ;
Vu les pièces constatant l'accomplissement des formalités de publications et d'affichage prescrites par le décret du Ier février 1896 ;
Vu l'article 910 du code civil ;
Vu l'avis du conseil d'Etat du 12 janvier 1854 ;
Vu l'article 19 de la loi du 25 février 1901 ;
La section de législation, de la justice et des affaires étrangères du conseil d'Etat entendue,
Décrète :
ARTICLE Ier
Est autorisée l'exécution en France des libéralités consenties par M. Alphonse Haas, par testament du 15 novembre 1907, en faveur : i° des hôpitaux israëlites de Mulhouse et de Strasbourg ; 20 des pauvres israëlites de Pfastatt, de Sulz et de Jungholts ; 30 des communautés israëlites de Pfastatt et de Sulz ; 40 de la commune de Bischwiller.
ART. 2
Il est déclaré que ces libéralités ont le caractère de bienfaisance prévu par l'article 19, paragraphe 2, de la loi du 25 février 1901.
ART. 3
Le ministre des affaires étrangères est chargé de l'exécution du présent décret.
Fait à Rambouillet, le 2 mai 1912.
A. FALLIÈRES.
Par le Président de la République : Le Ministre des Affaires Etrangères, R. POINCARÉ.
74 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Décret relatif aux pouvoirs exercés par le haut commissaire des confins marocains.
Le Président de la République française,
Sur la proposition du président du conseil, ministre des affaires étrangères,
Décrète :
ARTICLE Ier
Le haut commissaire des confins algéro-marocains exerce les pouvoirs dévolus aux consuls : en matière de juridiction civile, pénale et de haute police, par l'édit de 1778 et par la loi du 28 mai 1836 ; en matière d'état civil, par l'ordonnance du 23 octobre 1833 ; en matière de certificats dévie, par les ordonnances des 30 juin 1814 et 20 mai 1818 et le décret du 26 juin 1882 ; en ce qui concerne la conservation des archives, par l'ordonnance du 18 août 1833 ; en matière de dépôts, par l'ordonnance du 24 octobre 1833 ; en matière de passeports, légalisations et transmissions d'actes judiciaires, par l'ordonnance du 25 octobre 1833 ; en matière de successions, par l'ordonnance de 1681 ; en matière d'actes notariés, par les instructions du 30 novembre 1833 ; en ce qui concerne le service militaire, par la loi du 21 mars 1905 ; en ce qui concerne l'immatriculation, par le décret du 16 septembre 1910 ; en ce qui concerne la comptabilité et la perception des taxes de chancellerie, par le décret du 20 décembre 1910 et la loi du 8 avril 1910, ainsi que par les lois et décrets qui modifieront les textes précités.
ART. 2'
En cas d'absence ou d'empêchement, le haut commissaire pourra se faire suppléer, soit par le chef du bureau civil, qui lui est adjoint en vertu de ses instructions de service, soit par un fonctionnaire de ses bureaux.
ART. 3
Il nommera, dans les conditions prévues par l'articla 20 de l'ordonnance du 20 août 1833,, la personne qu'il jugera le plus capable pour remplir les fonctions de chancelier.
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ART. 4
Le tribunal institué près du haut commissaire de France à Oudjda fonctionnera dans les conditions prévues aux articles Ier, 2 et 3 jusqu'au jour, où, conformément aux dispositions du paragraphe 2 de l'article 9 de la convention franco-allemande du 4 novembre 1911, aura été institué un régime judiciaire destiné à remplacer les tribunaux consulaires.
Fait à Paris, le 30 mai 1912.
Par le Président de la République :
Le Président du Conseil,
Ministre des Affaires Etrangères,
R. POINCARÉ.
A. FALLIÈRES.
Rapport du Ministre des Affaires Etrangères au Président de la République sur l'organisation du Protectorat français au Maroc.
(27 avril 1912)
Monsieur le Président de la République,
Le 18 janvier dernier, au lendemain même du jour où le cabinet que j'ai l'honneur de présider est entré en fonctions, il a chargé une commission composée de représentants des ministères des affaires étrangères, de la guerre et des finances, de lui fournir d'urgence les renseignements indispensables à l'établissement de notre protectorat au Maroc.
Cette commission s'est livrée à un travail complet, quoique très rapide, qui a permis au Gouvernement de préparer un projet de traité, ainsi que les éléments d'une organisation administrative et financière. Muni de ces documents, notre ministre de France au Maroc a rejoint son poste, avant même ' que fut ratifié le traité franco-allemand du 4 novembre 1911. Cette ratification qui devait forcément précéder la signature d'un traité de protectorat, a eu lieu le 12 mars 1912. Aussitôt M. Regnault a reçu l'ordre de partir de Tanger pour Fez. Bien qu'à cause de la saison les routes fussent encore difficilement praticables, il est parti le 16 mars, sans même attendre le vote définitif du crédit destiné à la mission, crédit qui avait été demandé, le 22 février,
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avant la ratification du traité franco-allemand et qui avait été l'objet d'une loi du 22 mars.
Dès son arrivée à Fez, M. Regnault est entré en relations avec le sultan ; son autorité personnelle a triomphé en deux jours des difficultés qu'il a rencontrées ; le traité de protectorat a été signé le 30 mars.
M. Regnault aurait désiré que l'établissement du protectorat ne fût pas publié avant plusieurs jours pour que le sultan pût, comme il l'offrait, faire connaître lui-même la nouvelle aux populations marocaines et leur expliquer la véritable signification du régime auquel elles allaient être soumises. Mais il a été impossible de tenir secret, même pendant vingt-quatre heures, un événement que la presse européenne avait immédiatement connu par ses correspondants et que l'opinion française attendait, du reste, avec impatience. M. Regnault a par suite, été invité, dès le ier avril, à commencer la mise • en application du protectorat et avec l'aide des collaborateurs expérimentés qui l'avaient accompagné à Fez, il a tout de suite étudié un certain nombre de réformes administratives et financières.
Il poursuivait ces études d'accord avec le général Moinier et aucun indice qui eût été porté à la connaissance du Gouvernement ne leur faisait prévoir, à l'un ou à l'autre, la possibilité d'un trouble quelconque, lorsqu'à éclaté à Fez l'émeute dont les conséquences ont été si meurtrières, et qui est malheureusement suivie d'autres rébellions.
Tant que l'ordre n'a pas été rétabli dans la capitale, on ne pouvait évidemment songer à modifier un état de choses que la haute compétence de M. Regnault et la valeur du général Moinier avaient rendu possible, qui avait même trouvé, pour quelques semaines, une raison d'être particulière dans la nécessité de prolonger la présence de M. Regnault auprès du sultan, mais qui, malgré tout, n'était que provisoire.
Il convient aujourd'hui d'assurer définitivement au Maroc l'unité de notre action.
L'oeuvre à entreprendre est toute de civilisation et de progrès. Mais aucune mesure administrative, durable et féconde, ne peut être prise que dans des régions déjà pacifiées. Pour préparer et étendre méthodiquement cette pacification nécessaire, il est indispensable qu'un homme investi de la confiance du Gouvernement de la République concentre dans ses mains, sous la souveraineté du sultan, les pouvoirs civils et militaires.
La tâche qu'il aura à remplir est difficile et complexe.
Il faut qu'il mette notre protectorat en valeur, en observant nos engagements vis-à-vis des puissances et en faisant notamment respecter l'égalité économique, que la France a promise.
Il faut qu'il demeure fidèle à la conception même du protectorat,
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qui est seule conforme aux traités internationaux et qui est exclusive du Gouvernement direct.
Mais il faut aussi que, par une convenable disposition de nos forces, par un emploi efficace de nos bureaux indigènes, par l'exécution rationnelle d'un programme tout à la fois politique, économique et stratégique, il sache préparer et maintenir l'acceptation de notre protectorat par les tribus marocaines.
J'ai l'honneur de soumettre à votre approbation un décret qui confie cette importante mission à l'expérience et au patriotisme du général Lyautey.
Veuillez agréer, monsieur le Président, l'assurance de mon respectueux dévouement.
Le Président du Conseil,
Ministre des Affaires Etrangères,
R. POINCARÉ.
Rapport fait à la Chambre des députés au nom de la commission des affaires exétrieures des protectorats et des colonies chargée d'examiner le projet de loi portant approbation du traité conclu entre la France et le Maroc, le 30 mars 1912, pour l'organisation du protectorat français dans l'empire chérifien, par M. Maurice Long, Député de la Drôme.
Messieurs,
Le traité conclu le 30 mars 1912 entre le Gouvernement de la République et le Gouvernement de Sa Majesté le sultan du Maroc pour l'instauration du protectorat français dans l'empire chérifien a été renvoyé à l'examen de votre Commission des Affaires extérieures.
Les droits que la France exerce au Maroc, elle ne les tient pas seulement des arrangements internationaux, mais encore des inoubliables sacrifices que lui a déjà imposés la haute mission de civilisation et de progrès dont elle prend la charge.
Le projet de loi qui soumet ce traité à votre approbation n'est donc plus que la consécration -formelle d'une situation de droit et de fait.
Votre Commission n'a pas pensé cependant que son examen dût être limité strictement au traité en lui-même : elle ne saurait, sans excéder son mandat, procéder à une enquête sur les causes des événements qui ont, depuis la signature du traité du 30 mars, troublé
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l'état général du Maroc : mais elle a cru devoir, pour vous permettre d'exercer utilement votre contrôle, vous fournir :
i° Un exposé purement objectif des faits et des actes qui ont marqué notre action au Maroc et nos rapports avec le sultan, depuis que l'occupation de Fez a orienté notre .politique vers l'établissement du protectorat ;
2° Un examen sommaire des importants problèmes financiers, économiques et administratifs que soulève la nouvelle constitution de ce pays.
Nous n'avions pas à apporter, ni même à suggérer précisément, des solutions dont il appartiendra au Gouvernement, après étude sur place, de prendre l'initiative, mais il ne nous était pas permis de laisser passer, sans la saisir, l'occasion de placer sous le regard attentif du pays les éléments qui peuvent lui permettre de se faire une idée aussi exacte que possible de l'effort à accomplir et des résultats à espérer.
1° EXPOSÉ DE L'ACTION FRANÇAISE AU MAROC (19II-I9I2)
I
Depuis l'accord du 16 mars 1911 jusqu'au 17 octobre ipn
Avant les négociations des mois d'octobre-novembre 1911 et de la fin de mars 1912 qui ont abouti au traité de Fez, il y avait eu une série de pourparlers et même d'accords préliminaires, entre le Gouvernement français et le sultan Moulay-Hafid depuis 1909. Nous ne reviendrons pas sur la collaboration du Maghzen et de la France pendant les années 1909, 1910 et le début de l'année 19 n, alors qu'au lendemain du premier accord franco-allemand du 8 février 1909, on avait pu croire, et l'on avait cru, qu'on allait pouvoir développer l'influence politique française au Maroc, sans rencontrer de nouvelles difficultés. Cette période, qui est aujourd'hui du domaine purement historique a déjà fait l'objet de nombreux et complets débats parlementaires.
Rappelons seulement l'accord financier du 16 mars 1911 qui n'était pas encore le protectorat, qui ne pouvait pas l'être, mais qui en était la préface.
Il avait pour objet tout à la fois de fournir au Maghzen les ressources qui lui faisaient défaut et de lui imposer les mesures d'intérêt
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général les plus utiles en matière de réforme administrative et de travaux publics.
En même temps, des lettres échangées avec l'ambassadeur chérifien, stipulaient : de la part du gouvernement français, une assistance générale et une protection politique promise au sultan ; de la part du Maghzen, l'obligation de se conformer aux conseils et aux vues de la France dans la réforme de l'Etat marocain.
En réalité, le Maghzen, contraint par cette détresse financière qu'il avait toujours connue, par sa détresse militaire et politique, était venu à nous peu à peu au cours des années 1909 et 1910. Au commencement de 1911, il paraissait donc préparé à suivre nos directions. Il était peut-être moins prêt à faire cesser les abus que nous avions l'intention de faire disparaître ; il n'avait pas encore modifié ses procédés traditionnels d'administration, mais en nous invitant à prendre le contrôle de cette administration il nous permettait d'organiser un nouvel état de choses.
La révolte des tribus empêcha l'exécution des accords de mars 1911. Cependant, l'expédition de Fez aurait dû, semble-t-il, précipiter les solutions que nous cherchions. Des difficultés diverses s'y opposèrent. La plus grave fut la nécessité de faire oeuvre essentiellement militaire. L'autorité militaire, ayant à assurer notre sécurité à Fez, ne pouvait guère tout de suite envisager la situation sous son aspect politique et administratif ; elle se borna, comme elle le devait, à prendre des mesures de défense et de pacification.
Nos troupes étaient arrivées le 21 mai sous les murs de Fez, sans avoir rencontré de résistance sérieuse, mais après de rudes épreuves phj'siques, et malgré le plein succès de la marche forcée de la colonne du général Moinier, les tribus se ressaisissent aussitôt après son passage. Le colonel (aujourd'hui général) Gouraud, qui amenait les convois de ravitaillement, eut à résister à de violentes attaques. Pour assurer la ligne de communication, les troupes, laissant une faible garnison devant Fez, reprennent le 29 mai la route de l'ouest et, en divers petits engagements, repoussent les assaillants en tous points.
Du 6 au 15 juin, la route de Meknès est à son tour dégagée, le prétendant Moulay-Zin est fait prisonnier et une garnison est installée à Meknès.
La sécurité devenait complète aux environs immédiats de Fez ; seuls les Beni-Mtir — au sud de Meknès — continuaient la rébellion. Il était nécessaire d'agir contre ces fractions et de placer chez elles des garnisons susceptibles de tenir le pays-. Ce résultat fut atteint à la suite de marches et de petits engagements du 18 au 28 juin.
Un poste était établi à la kasba El-Hadjeb (garnison chérifienne), à Rabat par le Zemmour en livrant quelques combats aux Zemmours et en fondant des postes à Souk-el-Arba, Tiflet, Si-Allal-Bahraoui,
So LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Le 8 juillet, le général Moinier organise le territoire occupé en deux zones :
i" Zone de Meknès, sous les ordres du général Dalbiez.
2" Zone de Rabat-Mehedia, sous les ordres du général Ditte.
En rendant un hommage éclatant aux qualités au-dessus de tout éloge dont ont fait preuve nos troupes pendant cette première période si difficile de l'occupation, il convient de ne pas oublier les travaux qui, en arrière de l'oeuvre plus brillante de l'avant, s'exécutaient utilement pour l'organisation des services de santé et de ravitaillement, l'aménagement des postes, l'établissement des lignes télégraphiques, etc., etc.
Pendant que se poursuivait cette indispensable action militaire, notre politique marocaine avait continué à s'exercer suivant sa direction générale antérieure. Les instructions remises au général Moinier lui prescrivaient de secourir Fez, de réorganiser une force militaire chérifienne et de préparer le retour des troupes françaises dans la Chaouïa.
Un télégramme du 20 juin l'invite encore, pour montrer que notre occupation dé Fez ne sera pas prolongée au delà du délai strictement nécessaire à la pacification, à étudier le transfert de son camp à Ras-elMa, en ne laissant à Fez que des troupes Maghzen et les forces nécessaires pour assurer la garde de la ville.
A partir du iQr juillet, les complications diplomatiques survenues à la suite de l'incident d'Agadir maintenaient pour ainsi dire en Europe et à Paris le centre de gravité, le foyer de la question marocaine. C'est donc ici que, l'année dernière, à partir de cette date, toutes les questions furent concentrées. Le Ministre de France au Maroc était retenu à Paris par le Gouvernement pour les besoins de la négociation. Les agents du Ministère des affaires étrangères à Tanger et à Fez n'étaient pas en mesure, par leurs attributions officielles, de prendre la direction effective de la politique française au Maroc et de la représenter avec une autorité suffisante auprès du sultan.
Il faut dire aussi qu'une action exercée par de simples conseils et dirigée dans le sens d'une restauration du pouvoir du sultan ne correspondait plus à la réalité, dans un pays occupé, alors que les auto. rites militaires répugnaient à collaborer avec un personnel maghzénien qu'elles estimaient décrié et que leur but, hautement proclamé, était d'affranchir les tribus de cette domination.
Moulay-Hafid se trouvait donc dépourvu, sinon de conseils, du moins de direction. Tout en la réclamant, il gardait quelque inquiétude sur la façon dont elle lui serait donnée et il cherchait à prendre des garanties personnelles pour l'avenir par les moyens habituels, vente de caïdats, contributions extraordinaires et notamment par les ventes de biens domaniaux. Les fonctionnaires chérifiens agissaient de même dans l'incertitude du lendemain.
PROTECTORAT FRANÇAIS AU MAROC Si
Les choses traînèrent ainsi pendant les mois d'août et de septembre 19il, sans qu'il y ait précisément lieu d'incriminer à ce moment personne : ce sont, en réalité, les circonstances elles-mêmes qui ont commandé ces lenteurs et ont rendu inévitables ces difficultés.
A partir du 10 juillet, les opérations militaires entreprises s'étaient bornées le plus souvent à des actions locales, iinposées par la nécessité d'assurer la sécurité des postes et de la ligne d'étapes.
On doit mentionner particulièrement la colonne contre les Zaers (6 juillet-6 août) chargée de châtier les auteurs de l'agression du 14 janvier 1911 (lieutenant Marchand) et qui livra des combats à Dar-Djilalli (10 juillet), Ez-Zitonna (n juillet), Aïn-Sebbat (12 juillet). Un poste fut installé à Zebboudja, au coeur du pays Zaër et reçut le nom de « Camp Marchand ».
Quelques jours plus tard, le 18 août, les colonnes Brulard et Taupin, sous les ordres du général Ditte, après avoir dispersé quelques groupements Zemmours dissidents, se portèrent à Guelta'Nfita, dans la direction du camp Marchand et, après un combat assez violent, établirent la' liaison entre la ligne d'étapes Rabat-Meknès et le poste des Zaërs.
Les mois suivants furent consacrés surtout à l'installation des postes et à l'amélioration des pistes. Il était d'ailleurs indispensable de donner à la majeure partie des troupes un repos qu'elles avaient largement gagné.
n
DU 17 OCTOBRE I9II AU 30 MARS I912
Les négociations de Berlin ayant abouti, le 14 octobre, à un accord sur la question marocaine, le Ministre des Affaires étrangères envoya le 17 à l'ambassadeur chérifien, El-Mokri, une lettre qu'il adressait au sultan pour lui communiquer officieusement cet accord, lui en expliquer la portée et prévenir toute fausse interprétation de ses dispositions. M. de Selves rappelait les principes dont s'était toujours inspirée la politique de la France au Maroc : il assurait Moulay-Hafid que le Gouvernement de la République s'attacherait dans le même esprit à respecter la religion musulmane et les institutions qui en découlent. Il lui promettait pour lui et pour .son héritier la protection de la France, désormais appelée à conseiller et diriger le Maghzen dans la réorganisation du Moroc.
Il convient de rappeler, à propos de cette expression « pour lui, et son héritier » que dans les lettres échangées les 13 et 16 mars 1911, un article avait été inséré par lequel le Gouvernement français donnait l'assurance au sultan que l'assistance promise serait continuée dans les mêmes circonstances à l'héritier du trône désigné par lui conformément à la tradition maghzénienne.
ARCHIVES DIPLOM., t. 122, n" 5-6-7, mai-juillet 1912. 6
8 2 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Il est en effet dans les traditions du Maroc, que ce soit le sultan en fonctions qui désigne lui-même son successeur, soit qu'il abdique, soit qu'il reste en fonctions jusqu'à sa mort. Il n'y a pas d'héritier de droit ; la désignation de l'héritier est faite par le sultan lui-même.
Dans cette lettre du 17 octobre, M. de Selves demandait en outre que le sultan prît, dès lors, l'engagement de confier aux agents français à l'étranger la représentation des intérêts marocains et admit le représentant de la France au Maroc comme intermédiaire auprès des agents étrangers, par application de l'article 3 de l'accord de Berlin, qui devait porter la date du 4 novembre.
En somme, M. de Selves prenait utilement les précautions nécessaires, même avant la signature définitive du traité franco-allemand, pour qu'un traité de protectorat pût être ultérieurement signé par lui, il s'assurait par avance de l'assentiment de Moulay-Hafid, à un moment où le sultan, paraît-il, était très préoccupé des conséquences du protectorat que nous voulions établir.
Le même jour, 17 octobre, par une coïncidence remarquable, ElMokri remettait au Ministre des Affaires étrangères une note dans laquelle Moulay-Hafid, en prévision du résultat des négociations francoallemandes, dont il se déclarait vivement impressionné, avait formulé un certain nombre de demandes relatives, soit au futur régime prévu pour le Maroc, soit à sa situation personnelle.
Ce document comprenait vingt-sept articles. Moulay-Hafid rappelait tout d'abord que le Gouvernement français avait promis de protéger éventuellement son héritier, stipulant de nouvelles garanties à cet égard, pour le cas où par faiblesse ou lassitude, il céderait le pouvoir à cet héritier ; il se réservait, en outre, en prévision d'une abdication éventuelle, la liberté soit de rester au Maroc, soit de fixer son séjour en France ou à l'étranger. Il demandait qu'on lui reconnût la propriété personnelle d'immeubles dont il donnait la liste. Il désirait conserver le droit de nommer et de révoquer les ministres et les gouverneurs, tout en admettant que ces fonctionnaires fussent soumis à un contrôle français, à l'exception de l'administration des habous. D'autres propositions concernaient la liste civile, l'armée, le développement éventuel de l'occupation militaire française, le droit de grâce, le maintien des coutumes, etc..
Dès le 18 octobre, M. de Selves fit une première réponse générale à cette note. Il se référait aux déclarations de sa lettre de la veille et à l'accord paraphé à Berlin le 14 octobre. Il donnait au sultan les assurances compatibles avec l'institution d'un nouvel état de choses et les engagements internationaux.
Cette réponse de M. de Selves, aussitôt transmise à Fez, parut évasive et trop peu explicite au sultan. Il exprima aux agents français de très vives inquiétudes ; il leur manifesta même l'intention formelle d'abdiquer si on ne lui donnait pas tout au moins les satisfactions d'ordre dynastique et d'ordre personnel qu'il avait demandées.
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Notre chargé d'affaires au Maroc, M. de Billy, télégraphiait le 2 novembre, dans les termes les plus pressants, à M. de Selves, qu'en résumé le sultan était prêt à adhérer à l'accord franco-allemand, notamment à l'article 3, aussitôt qu'il aurait reçu une réponse lui donnant satisfaction sur tous les points de sa note du 17 octobre présentant un caractère personnel.
De son côté, M. Regnault insistait pour qu'on donnât à MoulayHafid les satisfactions qu'il réclamait, sous menace d'abdication immédiate.
Tout en se déclarant disposé quelques jours après à adhérer au traité franco-allemand, Moulay-Hafid, maintenait encore une réserve sur l'article 3.
Par un télégramme du 7 novembre, le Ministre des Affaires étrangères adressa à Fez une nouvelle réponse plus précise et de nature à calmer les inquiétudes du sultan. Le gouvernement français admettait les demandes relatives à la protection à donner à l'héritier de MoulayHafid, celles qui concernaient l'abdication éventuelle du sultan, ses voyages, ses résidences : on lui reconnaissait expressément la propriété des biens qu'il avait mentionnés, sauf réserve des droits du contrôle de la dette. On maintenait, quant à la liste civile, les dispositions de l'accord financier signé au mois de mars. On promettait de faciliter au sultan la conclusion d'un emprunt qui permît de lui rembourser les dépenses d'ordre militaire imputées, au cours de l'insurrection, sur sa fortune personnelle. On lui ferait avancer, à valoir sur cette opération, une somme de cinq cent mille francs pour le payement de ces dettes privées. Le Ministre des Affaires étrangères insistait pour que le sultan ne procédât à toute nomination ou destitution de hauts fonctionnaires que d'accord avec le représentant de la France.
Une note reproduisant ces engagements et ces déclarations fat remise le 9 au sultan, qui aussitôt déclara adhérer sans réserve à l'accord franco-allemand du 4 novembre.
M. Ben-Ghabrit, qui avait conduit cette négociation, repartit quelques jours après pour Paris, avec des lettres chérifiennes formulant l'adhésion officielle de Moulay-Hafid à la convention de Berlin. Le sultan annonçait en même temps son intention de se rendre en France, en mai 1912, pour manifester l'union des deux gouvernements.
A partir de ce moment, l'occupation à laquelle il ne pouvait plus être question de mettre fin nous faisait définitivement assurer la charge morale de ce pays. Mais le Gouvernement avait d'abord à se préoccuper d'obtenir le vote du Parlement sur la convention francoallemande du 4 novembre ; il décidait notamment de ne procéder, jusqu'à la ratification, à aucun nouvel acte d'occupation au Maroc.
Aussi, pendant la période hivernale, l'activité des troupes fut-elle très réduite. D'ailleurs, il y avait lieu de les refaire à la suite des opérations fatigantes de la campagne de 1911.
84 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS"
Il fut cependant jugé nécessaire, pour la sécurité de la ligne d'étapes Rabat-Fez, d'envoyer une colonne dans [la région montagneuse « Tafoudéit-Agouraï » à l'abri de laquelle les Zaïan et les Zemmour préparaient leurs coups de main. Le général Dalbiez installa, en décembre, un poste à Agouraï, en plein paj^s berbère.
Les 27,000 hommes dont disposait alors le général Moinier lui étaient indispensables pour la pacification et la garde des territoires déjà occupés, dans la région Fez-Meknès-Rabat-Casablanca.
Mais en outre des troupes débarquées, nous disposions au Maroc d'une armée chérifienne d'environ 6.000 hommes devant être, progressivement portée à 15.000, au cours des années 1911 et 1912. Le noyau de cette armée avait été constitué par les anciens tabors chérifiens et les instructeurs de la mission militaire.
L'attention avait d'abord été appelée sur les troupes indigènes à la suite de la part brillante que les goums de la Chaouïa avaient prise aux opérations de la marche sur Fez et sur Meknès. Les, tabors eux-mêmes ont été très utilement employés à El-Hadjeb et surtout à Sefrou. Après avoir organisé l'armée chérifienne à une époque où les difficultés diplomatiques nous conduisaient à occuper le Maroc seulement au nom du sultan, les services rendus par les levées locales, la capacité militaire reconnue des Marocains, le souci d'économiser nos hommes et notre argent, avaient peu à peu fait prévaloir cette conception d'une armée chérifienne à laquelle serait dévolue la tâche-d'occuper progressivement le Maroc, de la conquérir même, tandis que les troupes françaises, dont le contingent serait en même temps réduit, demeureraient l'arme au pied dans les régions pacifiées, ou en sentinelle le long des lignes d'étapes, comme une réserve, une sorte d'appareil de grand secours en cas de danger.
Cette armée marocaine constitue un organisme absolument indépendant de notre corps d'occupation ; son autonomie est complète ; elle a son état-major, ses armes spéciales, ses services propres, et son commandant en chef, au service nominal du sultan, n'a de directions à recevoir que de nos agents du Ministère des Affaires étrangères. Son encadrement européen est des plus réduits et elle est maintenue groupée dans des camps spéciaux (El-Hadjeb, Sefrou, Arboua, Fez) tandis que les unités françaises sont à Dar-el-Dabigah, Meknès, Souk-elArba, Tiflet, Agouraï ; pas plus qu'elle ne campe avec l'armée française, elle ne- va au combat côte à côte avec elle. Les deux organismes qui doivent concourir à un but commun restent soigneusement distincts et séparés, et cette situation anormale se prolonge jusqu'au 4 avril, date à laquelle l'armée chérifienne est placée sous le commandement du général commandant en chef les troupes françaises débarquées.
Pour compléter cet exposé de notre action militaire, .avant de revenir à la négociation du protectorat, résumons brièvement les opé-
PROTECTORAT FRANÇAIS AU MAROC 85
rations poursuivies jusqu'au moment où éclatèrent les troubles de Fez (17 avril).
A la suite d'un coup de main des Zemmour (17 février 1912) contre un convoi près de Souk-el-Arba, deux colonnes furent formées le 28 février sous la direction du général Ditte :
Colonne' Brulard partant de Souk-el-Arba ;
Colonne Taupin partant d'Agouraï.
Celle-ci dut livrer un violent combat le 29 février pour faire sa jonction le même jour à Tachtout (Tafoudeït) avec la colonne Brulard.,
Ces opérations assurèrent momentanément la sécurité de la région. Mais, vers le 27 mars, les Zaïan se joignant aux Zemmours montrèrent de nombreux contingents hostiles dans la région « OulmèsTafoudeït » ; ils attaquèrent les Aït-Mimoun soumis,
Le général Ditte, pour mettre fin à cette agitation, quitta Souk-elArba le 4 avril avec 13 compagnies, 2 batteries, 1 escadron, soit environ 2.300 hommes.
Se portant le 5 sur Oldjet Soltane, il fut attaqué par de nombreux contingents Zemmour et Zaïan (11 tués, 47 blessés) resta maître du terrain, mais rentra à Souk-el-Arba pour ramener ses morts et ses blessés, marche en retraite qui provoqua un nouveau combat.
Le général Moinier, désirant confirmer les résultats obtenus le 5 avril, prescrivit au général Ditte de réoccuper la région évacuée.
Ce mouvement s'effectua le 13 avec les forces suivantes ; 19 compagnies, 1 batterie 1/2, 1 escadron, soit environ 3.200 hommes. Ces opérations se poursuivaient sans incident lorsque éclatèrent les troubles de Fez (17 avril 1912). Pour renforcer la garnison de la capitale, la colonne Ditte dut être rapprochée et disloquée.
Pendant ce temps, des groupements hostiles venus de l'Est menaçaient (depuis la fin de mars) la garnison de Sefrou. Un détachement de 1.400 hommes de l'armée chérifienne (capitaine Hergault) part de Fez le 29 mars pour dégager Sefrou.
Le 30 mars, la colonne Hergault se heurte à 3.000 berbères qui sont rejetés sur la rive droite, du Sebou après un violent combat (5 tués, 15 blessés).
Le général Moinier envoie à cette colonne un renfort de 500 chérifiens.
Le 31 mars, le lieutenant d'Ivry qui s'est porté de Sefrou sur le Sebou, pour ravitailler la colonne Hergault, est attaqué au retour (15 blessés).
En présence de l'attitude hostile que présentent les tribus augmentées des contingents Beni-Ouaraïn, le général renforce la colonne Hergault d'un détachement de troupes régulières sous le commandement du commandant Fellert.
86 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Le 9 avril, la colonne Fellert franchit le Sebou et disperse les BeniOuaraïn. Elle a 3 tués et 4 blessés. Après avoir obtenu la soumission des Beni-Saaden, elle rentre à Fez et prend part à la répression de l'émeute du 17 avril.
Après la signature du traité du 4 novembre, notre action politique au Maroc subit encore un temps d'arrêt en attendant le vote du Parlement. On se préoccupe cependant d'arrêter les pratiques fâcheuses que nous avons déjà signalées, notamment en matière de ventes de biens domaniaux. Dès le 7 novembre 1911, nous demandions à Moulay-Hafid et Moulay-Hafid promettait d'arrêter ces abus. S'ils ont encore été signalés par la suite, du moins des réserves de droit ont été faites et renouvelées le 9 janvier 1912, qui permettront une revision des opérations irrégulières.
L'accord franco-allemand, approuvé par le Sénat le 10 février, fut ratifié à Berlin le 12 mars.
Le Gouvernement français avait déjà, par anticipation, demandé au Parlement les crédits nécessaires à l'envoi d'une mission à Fez ; notre ministre de France au Maroc. M. Regnault, avait été invité à rejoindre son poste à Tanger. Aussitôt après la ratification, et sans attendre même le vote des crédits afin d'éviter toute perte de temps, le Gouvernement donna l'ordre à M. Regnault de se rendre immédiatement à Fez et d'y demander l'adhésion de S. M. Moulay-Hafid aux propositions établies pour fixer les principes du nouveau régime.
En même temps devaient être examinées avec le sultan les questions générales d'ordre politique, financier et juridique qu'allait soulever l'organisation nouvelle du Gouvernement chérifien. On avait assuré à M. Regnault le concours des collaborateurs nécessaires en lui adjoignant MM. Boulogne, directeur des travaux publics de l'Algérie, Emmanuel Bertrand, ancien consul général à La Canée, très versé dans les questions musulmanes et Choublier, consul de première classe, ancien professeur de droit au Caire.
La mission de M. Regnault, complétée par une partie du personnel de la légation, quittait Tanger le 16 mars et arrivait à Fez le 24 du même mois.
Avant l'arrivée de M. Regnault à Fez, laquelle était connue ainsi que l'objet de sa mission, le sultan manifestait depuis quelques semaines beaucoup de mauvaise humeur ; il était repris des mêmes velléités d'abdication qu'en octobre 1911 et en parlait fréquemment dans ses conversations avec ses intimes. Il évita d'ailleurs d'exposer ses plaintes à notre consul.
Celui-ci nous rapporta cependant à la date du 12 mars le jour même de la ratification de l'accord du 4 novembre, que le sultan faisait réunir les objets précieux qu'il possède au palais de Betha ; qu'il déclarait se proposer de renvoyer quelques-unes de ses femmes dans leurs familles, etc., afin de se mettre à même d'abdiquer. Au même
PROTECTORAT FRANÇAIS AU MAROC 87
moment, il engageait des pourparlers avec une maison de Tanger dans le but d'acheter une propriété où il pût se retirer.
Sa résolution était devenue publique et beaucoup de personnes le connaissant déclaraient qu'il abdiquerait sans même signer le traité de Protectorat.
Notre consul mis au courant par des tiers se rendit chez lé sultan pour le rassurer sur nos intentions.
C'est dans cet état d'esprit que M. Regnault trouva le sultan à son arrivée à Fez, le 24 mars.
Le 26 mars, la mission était reçue solennellement par le sultan. Des discours -étaient échangés par lesquels le chef de la mission et Moulay-Hafid affirmaient et reconnaissaient la nécessité d'introduire les réformes propres au rétablissement et au maintien de l'ordre dans l'empire chérifien.
Dès le lendemain, M. Regnault entrait en relations avec le sultan au sujet des garanties relatives à sa situation personnelle, qui avaient fait l'objet des accords préliminaires des mois d'octobre et novembre 1911. Les engagements antérieurs étaient précisés et renouvelés dans deux lettres échangées à la date du 30 mars, en même temps que le traité du Protectorat était signé.
S. M. Moulay-Hafid renouvelait alors à M. Regnault son intention déjà indiquée en novembre de se rendre prochainement à Paris pour manifester l'union des deux gouvernements. Il était d'abord convenu que le sultan quitterait Fez le 17 avril, en même temps que la mission pour se rendre à Rabat, en attendant de prendre une décision définitive au sujet de son voyage en France.
M. Regnault aurait désiré que l'établissement du Protectorat ne fût pas publié avant plusieurs jours pour que le sultan pût, comme il l'offrait, faire connaître lui-même la nouvelle aux populations marocaines et leur expliquer la véritable signification du régime auquel elles allaient être soumises. Mais il a été impossible de tenir secret, même pendant vingt-quatre heures, un événement que la presse européenne avait immédiatement connu par ses correspondants, et que l'objet même de la mission permettait d'ailleurs de prévoir. M. Regnault a, par suite été invité, dès le 1e 1' avril, à commencer la mise en application du protectorat et avec l'aide des collaborateurs expérimentés qui l'avaient accompagné à Fez, il a tout de suite étudié un certain nombre de réformes administratives et financières.
Ces réformes devaient tendre notamment à la réorganisation des services du maghzen où les méthodes de travail actuelles et la confusion des attributions sont peu compatibles avec l'exercice d'un pouvoir régulier et à l'établissement d'autorités régionales capables de faire sentir dans tout le pays l'action du Gouvernement. La création d'un service de travaux publics, la refonte des services financiers, la révision du régime foncier et des institutions judiciaires apparaissaient égale-
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ment comme devant s'imposer immédiatement au Gouvernement du Protectorat.
M. Regnault poursuivait ces études, d'accord avec le général Moinier et aucun indice qui eût été porté à la connaissance du Gouvernement ne leur faisait prévoir, à l'un ou à l'autre, la possibilité d'un trouble quelconque, lorsqu'à éclaté à Fez l'émeute dont les conséquences ont été si meurtrières, et qui allait être malheureusement suivie d'autres rebellions.
III
APRÈS LA SIGNATURE DU TRAITÉ DE PROTECTORAT
Les tragiques événements du 17 avril dernier, à Fez, vous sont malheureusement trop connus. C'est un nouveau sacrifice, et de tous ceux que nous coûte déjà le Maroc, celui qui a été le plus profondément ressenti par tout coeur français. Votre Commission rend hommage à la mémoire de tous ces martyrs, victimes d'une attaque tragique et de traitements odieux.
Il n'était pas dans le mandat de votre Commission de rechercher les causes de la mutinerie des soldats chérifiens et de l'émeute de la population de Fez qui l'a accompagnée. M. le Président du Conseil a d'ailleurs très nettement déclaré à la Commission que les renseignements qu'il possède ne lui permettent pas de se former un jugement définitif et de dégager des responsabilités.
L'émeute de Fez fut contenue grâce aux courageux efforts des troupes françaises qui purent immédiatement accourir du camp de DarDâbigah, et les renforts arrivés de Meknès, après deux jours, permirent de rétablir l'ordre dans la capitale.
Mais des faits, tels que le massacre d'officiers français, la mise à sac du mellah, ne pouvaient manquer d'avoir une répercussion immédiate en surexcitant la xénophobie et les instincts de pillage des tribus environnantes, au moment même où le traité de Protectorat rendu public devait faire apparaître aux yeux des marocains que nous mettions en tutelle le Maghzen, pouvoir discuté sans doute, mais qui demeure néanmoins la personnification traditionnelle du Maroc, alors surtout que le chef suprême de la foi religieuse devenait, comme on disait, « prisonnier des Français ».
L'insurrection des tribus gagnait rapidement de proche en proche et il pouvait sembler un moment qu'après la douleur des massacres nous risquions de connaître des périls plus graves.
Cette gravité de la situation, que les circonstances venaient de faire éclater à tous les yeux, tenait à ce que, depuis un an, nous n'avions au Maroc qu'une action militaire éparpillée et non coordonnée à une action politique dans la main d'un chef unique concentrant cette double action. Il importait avant tout d'assurer cette unité.
PROTECTORAT FRANÇAIS AU -MAROC 89
A fin avril dernier, nous étions, comme on l'a fortement et très justement dit, « campés en pays ennemi ». Pour assurer l'oeuvre indispensable de pacification militaire, pour l'étendre méthodiquement, en même temps que pour préparer et poursuivre l'oeuvre également nécessaire de civilisation et de progrès, le Gouvernement a investi de sa confiance un homme qui concentrera dans ses mains, sous la souveraineté du sultan, les pouvoirs civils et militaires.
Par décret du 28 avril 1912, le général Lyautey a été nommé commissaire résident général ' de la République française au Maroc, et un décret du 11 juin 1912 a fixé ses attributions en le faisant dépositaire de tous les pouvoirs de la République française dans l'empire chérifien.
La tâche qu'il aura à remplir est difficile et complexe.
Il aura à mettre notre Protectorat en valeur, en observant nos engagements vis-à-vis des Puissances et en demeurant fidèle à la conception même du Protectorat, exclusive.du gouvernement direct.
Il faut aussi que, par une convenable disposition de nos forces, par un emploi efficace de nos bureaux indigènes, par l'exécution rationnelle d'un programme tout à la fois politique, économique et stratégique, il sache préparer et maintenir l'acceptation de notre protectorat par les tribus marocaines.
M. le Président du Conseil a très loyalement déclaré à votre Commission quJen nommant un résident général au Maroc pour y instaurer le régime du Protectorat avant le vote et la ratification du traité, il considérait qu'il avait ainsi engagé sa responsabilité.
Votre Commission a estimé que les circonstances commandaient impérieusement cette décision, elle vous propose de régulariser cette situation par votre vote.
Il aurait été imprudent de prétendre arrêter à l'avance d'une façon définitive les lignes directrices de la mission confiée à l'expérience et au patriotisme du général Lyautey, avant qu'il ait pu prendre des mesures sur place et procéder à une instruction préalable. Le Gouvernement lui fait confiance et décide de lui laisser la plus grande latitude possible ; c'est aussi le sentiment de la- Commission, conforme aux conseils que donnait M. Ribot, le 9 février dernier, aux applaudissements du Sénat : « Ce qu'il vous faut, c'est mettre à. la tête du Maroc un homme qui ait de l'autorité, de la décision, des vues larges, et que vous lui laissiez une liberté aussi grande que possible. » On connaît au surplus la méthode du général Lyautey. Ce qu'il a fait dans les Confins est la préface de ce qu'il fera à Fez.
Son l'apport d'ensemble du 7 décembre 1908 définit cette méthode essentiellement politique et civilisatrice où l'affirmation de la force n'est que le moyen mis au service de la paix.
La conquête dans le pays africain doit être — c'est une de ses expressions — une organisation qui marche. Le soldat précède. L'ad-
90 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
ministration civile suit immédiatement avec tous ses avantages économiques.
Dès son arrivée à Fez, le général Lyautey s'est trouvé aux prises avec des difficultés dont il ne faut pas exagérer l'importance, mais qui étaient assurément sérieuses. La situation paraît déjà grandement améliorée. La brillante opération menée par la colonne Gouraud a dispersé les tribus qui assiégeaient Fez. Le passage de la Moulouïa par le général Girardot, prépare la dissociation des méhallas qui venaient encore récemment l'attaquer jusque sur la rive droite.
En même temps, le général Lyautey marque à Fez sa préoccupation de restaurer l'autorité indigène en cherchant à se concilier dès l'abord ces chorfas, ces ulémas, les détenteurs traditionnels d'une influence religieuse qui peut neutraliser, sinon concilier, le fanatisme musulman. Il vient de remettre l'amende de guerre infligée aux habitants de Fez. Enfin, le sultan reçoit la satisfaction à laquelle il attachait un si grand prix, en quittant Fez pour se rendre à Rabat, environné de ce prestige que nous devons assurer à sa dignité souveraine.
Bref, il faut envisager la situation marocaine avec sang-froid. En attendant avec confiance le moment où, après une première phase de pacification prudente et progressive, nous aurons à agencer définitivement les rouages de notre administration, nous devons déjà nous préoccuper des divers problèmes les plus urgents que pose la constitution de notre Protectorat.
2° ORGANISATION DU PROTECTORAT
La situation financière
Le régime financier du Maroc est complexe.
Il comporte d'une part un régime fiscal indigène basé sur les institutions coraniques et la tradition locale et dont le produit ne peut être déterminé avec une apparence de précision, exception faite des impôts coraniques qui, en Chaouïa, ont été réformés et sont perçus par l'autorité militaire française. D'autre part, il comporte un régime fiscal indirect dont les éléments essentiels, douanes, monopoles, octrois et marchés, etc., existaient avant la conférence d'Algésiras, mais qui postérieurement a été complété ou réformé, soit en conformité • de l'acte d'Algésiras (taxe spéciale de l'article 66, taxe urbaine) soit en vue d'une liquidation du passif de l'Etat marocain (douanes, mostafadet, sakkat et autres revenus concédés, gérés par l'Administration du contrôle de la Dette).
Impôts marocains non affectés Malgré sa richesse naturelle et sa population, le Maroc est financiè-
PROTECTORAT FRANÇAIS AU MAROC 91
rement l'Etat le plus faible qu'on puisse concevoir. Le fait de payer l'impôt caractérise le pays maghzen, par opposition au pays Siba qui ne fournit aucune contribution. Un certain nombre de tribus demeurent dans une situation intermédiaire et indécise, et retiennent ou apportent leur soumission et leur argent, selon les circonstances et la force momentanée du maghzen.
Dans les limites où il peut être levé sur les tribus par l'intermédiaire des caïds, l'impôt revêt un caractère religieux et féodal.
Le pays soumis paye les impôts coraniques (zekkat et achour) qui résultent d'un devoir religieux. Le zekkat est un impôt sur les bestiaux : comme les troupeaux constituent la principale ressource des Arabes, la loi musulmane a défini rigoureusement la quotité des prélèvements qui doivent être réalisés en nature quand les contribuables ont peu ou point de numéraire.
L'achour n'est qu'une sorte de dîme seigneuriale qui atteint tous les produits de la terre dans une proportion égale au dixième du rendement.
Les tribus admettent aussi la légitimité de dons traditionnellement offerts au trésor chérifien à l'occasion de fêtes religieuses comme un hommage féodal apporté par les vassaux au seigneur suzerain ; enfin, elles supportent plus ou moins aisément certaines contributions extraordinaires que le maghzen sollicite pour une expédition du Sultan, ou qu'il impose en punition de quelque inéfait.
Quant aux contributions indirectes (mostafadet ou droits d'octroi, de marchés, monopoles du tabac, du kif, du soufre, etc.) ce sont des institutions modernes basées sur le procédé du fermage, et qui, dans les régions où elles ne sont pas soumises à un contrôle, sont loin de rendre ce qu'on serait en droit d'en attendre. Le maghzen, qui n'établit pas comme nous une relation étroite entre ses recettes et ses dépenses, ne se préoccupe pas de faire rendre à ces fermages, pas plus qu'à son domaine, tout le produit dont ils sont susceptibles. Les exemples ne sont pas rares de fermages d'octrois adjugés au moins offrant, - et de loyers domaniaux abandonnés à titre de traitement forfaitaire à certains fonctionnaires du maghzen.
Toujours est-il qu'il existe, dans les grandes villes de l'intérieur, un régime d'impôts indirects (octrois, droits de marchés, etc.) dont la perception est effectuée par voie de fermage, et sur le produit desquels, il est vrai, on ne possède que des renseignements sans précision suffisante : ces impôts n'en sont pas moins des impôts acceptés et dont nous pourrons sans difficulté sérieuse améliorer le rendement.
Il est évident, d'autre part, que le domaine de l'Etat n'existe pas seulement dans le périmètre myriamétrique des ports ouverts où il constitue l'un des gages des emprunts, et qu'après avoir effectué toutes opérations nécessaires de reconnaissance, de bornage, etc., le Protectorat devra trouver un supplément de recettes dans les terres domaniales de l'intérieur.
92 L0ÏS ET DOCUMENTS DIVERS ' '
En dehors de ces diverses sources de revenus, il ne faudrait pas imaginer qu'il est loisible au Maghzen de créer à son gré de nouvelles taxes, même si elles peuvent apparaître comme mieux réparties, plus équitables, et d'une application plus facile. C'est l'oubli de ce principe qui provoqua en grande partie la désaffection dont fut l'objet le sultan Moulay Abd-el-Aziz, lorsque, après une période de prodigalités et d'innovations coûteuses, il voulut instituer le nouveau régime fiscal du « tertib ». Cette réforme fiscale faisait table rase du passé, supprimait les impôts de l'achour et du zekkat et les remplaçait par une taxe fixe applicable à tous, basée sur le capital en terres arables, arbres fruitiers et bétail. Nulle part le Maghzen ne put obtenir la mise en vigueur du Tertib, qui soulevait particulièrement les résistances de nombreux contribuables jusqu'alors exempts d'impôts en vertu de privilèges religieux et militaires, ou à raison de la protection étrangère. Et la masse ignorante faisant cause commune avec ces privilégiés pour demeurer sous le régime arbitraire des vieux impôts coraniques.
C'est, d'ailleurs, depuis cette époque qu'on ne trouve plus au Maroc de perceptions normales d'un impôt quelconque. En fait, depuis une dizaine d'années, le Maghzen a vécu d'expédients et de contributions irrégulières dont le produit dépendait uniquement de son autorité effective sur les caïds et de l'autorité des caïds sur les tribus.
On comprend, dès lors, que le produit des impôts non affectés ne peut faire l'objet d'aucune évaluation. Ils ne sont perçus régulièrement que dans les régions occupées militairement des confins algéro-marocains (dont nous examinerons plus loin le régime financier) et dans la Chaouïa. Il est intéressant de constater que, contrôlés par notre Corps de débarquement, les vieux impôts coraniques, achour et zekkat, ont produit pour la seule Chaouïa un revenu important de :
1.595.865 P. H. en 1909. 1.297.740 P. H. en 1910. 2.780.000 P. H. en 1911.
Malgré le fléchissement du rendement de l'exercice 1910 dû notamment à la médiocrité de la récolte, la progression est rapide et l'aurait été plus encore si le nombre des protégés et censaux échappant à l'impôt ne s'était sensiblement accru. Encore faut-il tenir compte que pendant ces mêmes années et en dehors des impôts dont nous venons d'indiquer le rendement, une importante indemnité de guerre, perçue en plusieurs annuités, a été levée sur les tribus Chaouïa pour leur participation, en 1907,. aux massacres et au pillage de Casablanca.
Contrôle de la Dette
Passif du Maghzen. — La Dette publique marocaine a été inaugurée par une série de petits emprunts s'élevant au total de 22 millions
PROTECTORAT FRANÇAIS AU MAROC 93
500.000 francs contractés- par le sultan Abd-el-Aziz, auprès de divers banquiers français, anglais et espagnols, qui furent remboursés en 1904 au moyen d'un emprunt de 62.500.000 francs, consenti par un consortium français. La dette s'est augmentée, en 1910, de l'emprunt de 101 millions et demi de francs à la Banque d'Etat, destiné notamment pour partie au remboursement d'un prêt allemand de 10 millions de marks. Il y avait là, sous l'influence de la France, une levée succes-- sive d'hypothèques étrangères. Il reste, d'autre part, un passif liquide au 30 juin 1909 à 14 millions, qui nécessitera un prochain règlement, un compte d'avances à la Banque d'Etat s'élevant à 6.022.000 francs (mai 1912), et sans doute d'autres dettes non liquidées depuis le 30 juin 1909.
Enfin, l'Etat marocain s'est reconnu débiteur vis-à-vis de la France, suivant accord du 21 mars 1910, d'une indemnité de 70 millions remboursable en 75 annuités de 2.740.000 francs représentant les dépenses militaires de la France jusqu'au 31 décembre 1909 ; il s'est également reconnu débiteur, vis-à-vis de l'Espagne, suivant accord du 17 novembre 1910, d'une indemnité de 65 millions de pesetas espagnols remboursables en 75 annuités de 2.545.000 pesetas, représentant les dépenses militaires de l'Espagne jusqu'au 31 octobre 1910.
Il est à penser que les Gouvernements français et espagnol admettront que la charge de ces indemnités doit en principe être restreinte à chacune de leurs zones respectives, et que même, pour ne pas alourdir sans profit réel la situation financière des pa}^ dont ils assument la protection, tout au moins ajourneront-ils le règlement de leur créance.
En somme, si l'on ne tient compte que pour mémoire des indemnités militaires française et espagnole, la dette publique marocaine s'établirait, en capital, aux environs de 200 millions comportant une charge annuelle d'environ 10 à 11 millions.
Cette dette à concurrence de 16^ millions étant couverte par des emprunts gagés, nous devons examiner ce qu'est le gage, par quels produits il est constitué et si ces produits, après satisfaction donnée aux emprunts, laissent un excédent libre applicable au budget du Protectorat.
Revenus concédés
Les revenus concédés sont :
i° Les douanes maritimes dans les 8 ports ouverts au commerce international, savoir : Tétouan, Tanger, Larache, Rabat, Casablanca, Mazagan, Safi, Mogador, dont le produit, en 1911 a été de 20.725.759 P. H,
94 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Report 20.725.759 P. H.
20 Les Mostafadet (droits d'octroi et de marchés dans les ports) et sakkat (divers monopoles, soufre, etc.) dont le produit a été en 1911 de. . 1.707.151 P. H.
30 Les revenus des domaines dans la zone de 10 kilomètres autour de chaque port, dont le produit a été en 1911 de 339.654 »
40 La moitié de la taxe urbaine dans chacun des 8 ports dont le produit a été en 1911 de 263.058- »
50 Le monopole du tabac et du kif affermé actuellement pour la somme de 1.070.000 P. H. et pour 1.605.000 P. H. à partir de 1915, avec une participation éventuelle aux bénéfices. Le produit a été, en 1911 (ire année de 352 jours) de 1.034.333 ' »
Total. . . . 24.069.955 P. FI.
On y pourrait ajouter 117.445 P- H. de produits divers et, bien qu'ils ne soient pas effectivement compris dans le gage, les droits de magasinage, ancrage, aconage, qui se sont élevés en 1911 à 569.490 P. H. ; mais ces recettes sont absorbées, et au-delà, par les dépenses des services auxquelles elles sont affectées.
De ce produit brut d'environ 24 millions de pesetas hassani il faut défalquer les frais de régie et les charges de certains services (aconage, surveillance de la contrebande) qui ne sont pas des services de perception.
Ce chiffre est vraisemblablement appelé à augmenter assez rapidement et dans de notables proportions. En effet, les droits de douane dont le produit était stabilisé vers 19 millions de pesetas en 1904, 1905, 1906 et 1907,- ont doublé en quatre ans. En outre, si l'on compare le rendement des douanes maritimes en 1911 avec celui déjà connu d'une partie de l'année 1912, on constate que, tandis que le rendement dp Ier janvier au 30 avril 1911 était de 4.870.000 P. H., celui de la période correspondante de 1912 s'élève à 9.109.000 P. H., soit une plus-value d'environ 1 million par mois.
Il n'est pas inutile de remarquer que les approvisionnements importés par l'Intendance à l'usage des troupes débarquées au Maroc, n'étant pas assujettis aux droits, nos opérations militaires n'ont pas de répercussion directe sur la progression du rendement des douanes, non plus que sur les statistiques du commerce.
Dans cette même période, le rendement des revenus concédés ÇMostafadet, domaine, taxe urbaine, tabacs, aconage) est passé. de
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r.194.ooo P. H. à 1.679.000 P. H. (1), soit une plus-value de près de 500.000 P. H. sur une période de quatre mois.
Revenus à affectations spéciales.
Taxe spéciale. — L'Acte d'Algésiras (art. 66) a institué une surtaxe douanière de 2 1/2 % ad valorem, sur les produits importés au Maroc par voie maritime.. Les recettes de la taxe spéciale sont affectées aux améliorations des ports.
La taxe spéciale est perçue sans frais par l'Administration du contrôle de la Dette : son rendement a été en 1911 de 2.556.000 pesetas hassani.
Le compte de la taxe spéciale est tenu à la Banque d'Etat. Il s'élevait, au 31 décembre 1911, en y comprenant les exercices antérieurs et à la suite des conversions demandées par les gestionnaires du budget de la taxe, à 4.736.269 fr. 58 (rapport à l'assemblée générale des actionnaires de la Banque d'Etat du 18 mai 1912).
Taxe urbaine. — La taxe urbaine, instituée par l'Acte d'Algésiras (art. 61), n'est appliquée que dans les huit ports ouverts. Elle est perçue par un service spécial fonctionnant sous l'autorité d'un fonctionnaire marocain en résidence à Tanger. Le produit de la taxe urbaine est divisé en deux parts égales : l'une affectée aux emprunts, ainsi qu'il a été dit au chapitre précédent, l'autre affectée à des dépenses de caractère municipal.
La part versée en 1911 à l'Administration du contrôle de la Dette, au titre des emprunts, a été de 263.058 pesetas hassani.
On doit penser qu'une somme égale a été réservée aux travaux municipaux.
Régime des confins algéro-marocains.
Les confins algéro-marocains ont bénéficié jusqu'à présent d'une autonomie administrative et financière dont la conséquence, au point de vue fiscal, était que toutes les ressources perçues à un titre quelconque (droits de douane ou de marchés, droits de portes, achour et zekkat) étaient attribuées à l'Administration et à la mise en valeur des confins.
Il est à penser que le Gouvernement du Protectorat sera amené à réformer ce régime financier des confins. Quant à présent, et nous plaçant au point de vue des éléments du futur budget marocain,
1,1) La taxe urbaine, qui est perçue par un service spécial, avait tourni en igu, pour la période envisagée, 77.000 P. H. Elle n'avait encore rien fourni, au 3o avril, sur l'exercice 1912.
96 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
nous devons prendre provisoirement, pour néant la rubrique des confins.
Nous nous bornerons à rappeler ici que les perceptions douanières dans la région des confins fournissent un produit d'environ un demi-million de francs par an et qu'elles ont pour base un régime douanier très différent de celui des ports. Il a été établi par des arrangements spéciaux entre la France et le Maghzen (accords des 20 avril et 7 mai 1902), auxquels fait allusion l'article 103 de l'Acte d'Algésiras qui déclare que l'application du règlement des douanes restera dans la région frontière de l'Algérie, l'affaire exclusive de la France et du Maroc. Le tarif des droits est spécifique pour un certain nombre de marchandises énumérées, presque toutes taxées au poids à des taux modérés ; il est de 5 % ad valorem pour les autres marchandises.
Le problème douanier qui se pose dans les confins algéro-marocains est d'ailleurs très complexe. Sans préjuger les solutions qu'il recevra, il convient de signaler quels sont les divers intérêts en présence :
Intérêts franco-algériens. —■ La loi du 17 juillet 1867 prescrit (art. 6) que les produits naturels et fabriqués, originaires des pays limitrophes, entrent en franchise en Algérie lorsqu'ils sont importés par la voie de terre. Il en résulte qu'aucune douane algérienne ne frappe les produits marocains.
Ce régime ne présente guère que des avantages à l'heure actuelle, en tant qu'il s'applique aux produits naturels. L'Algérie, en effet, a besoin de bestiaux et de blés marocains, et d'autre part les éleveurs ou les cultivateurs établis au Maroc dans le voisinage de l'Algérie verraient leurs affaires péricliter si la douane frappait leurs exportations vers la province d'Oran. Mais en ce qui concerne les produits fabriqués, la franchise accordée aux provenances du Maroc peut prêter à de nombreuses fraudes. Des marchandises européennes vendues à Oudjda, Aïoun-Sidi-Mellouk, Debdou, etc., rentreront en Algérie sans payer, comme si elles étaient originaires du Maroc. La fraude sera d'autant plus lucrative si le transit à travers l'Algérie est accordé aux marchandises étrangères destinées au Maroc, et si les droits d'entrée chérifiens sont plus faibles à la frontière algérienne que dans les ports de mer.
Pour prévenir ces inconvénients, on a envisagé plusieurs remèdes. L'un consiste à retirer aux produits fabriqués le bénéfice de la loi de 1867. Un autre consiste à inscrire, dans le tableau D annexé à cette loi, une énumération limitative des produits marocains admis en franchise, ce qui permettrait de taxer éventuellement les vins marocains. Un troisième consiste à fixer, comme pour la Tunisie, le « contingent » de chaque marchandise qui peut être introduit en franchise pendant l'année. Enfin, on a proposé aussi de relever les droits de douane chérifiens sur la frontière algérienne au niveau
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qu'ils atteignent dans les ports, et de refuser le transit à travers l'Algérie aux produits non français. Ces deux dernières propositions touchent directement aux intérêts étrangers qu'il nous faut examiner maintenant.
Intérêts étrangers. — La Grande-Bretagne, on le sait, possède, -d'après l'article 4 de la déclaration du 8 avril 1904, le droit de demander, pour ses marchandises destinées au Maroc, les mêmes facilités de transit à travers les possessions françaises d'Afrique qu'elle accorde à travers ses possessions, africaines à nos marchandises destinées à l'Egypte.
Cette stipulation, valable jusqu'en 1934, peut faire l'objet de réclamations formulées par d'autres puissances, qui solliciteront le transit pour leurs propres marchandises en vertu du traitement de la nation la plus favorisée. Il conviendrait alors d'examiner si le transit à travers l'Algérie rentre bien dans la catégorie des avantages douaniers qui constituent le traitement de la nation la plus favorisée. Il conviendrait aussi de savoir si une interprétation aussi large du régime de la nation la plus favorisée doit être adoptée vis-à-vis des puissances qui appliquent le régime d'une façon très restrictive vis-à-vis de nous, et si nous devons concéder le transit en Afrique à des pays qui nous le refuseraient ailleurs.
Enfin, il faudrait aussi rechercher si la Grande-Bretagne, qui ne tirera en somme qu'un profit très hypothétique de son droit de transit algérien, n'y renoncerait pas comme nous pourrions renoncer à notre droit de transit à travers l'Ouganda pour nos marchandises destinées à l'Egypte. On se rappelle d'ailleurs qu'une autre question douanière va se poser dans l'Afrique du Nord entre la France et l'Angleterre ; nous pourrons dénoncer à partir du Ier juillet prochain l'article 2 de l'arrangement du 18 septembre 1897 1ui limite à 5 % ad valorem les droits perçus en Tunisie sur les cotonnades britanniques.
Quant à la péréquation des droits de douane chérifiens, qui relèverait les droits payés à la frontière algérienne jusqu'au niveau des ^droits payés dans les ports, c'est une mesure qui ne pourra être désirée par nos concurrents étrangers, semble-t-il, que si le transit à travers l'Algérie n'existe pas pour eux. Lorsque la question se posera, il conviendra sans doute de la traiter sous ses différents aspects : en ce qui concerne les marchandises qui pourront être acheminées vers l'intérieur du Maroc, lorsque la sécurité des transports et l'aménagement des voies de communication le permettra, le Gouvernement aura pour devoir d'examiner si l'existence d'un régime douanier préférentiel sur la frontière algérienne est compatible avec l'interdiction d'aucune inégalité dans l'établissement des droits de douane, stipulée dans l'accord franco-allemand du 4 novembre 1911. Mais, en ce qui concerne les produits qui doivent rester chez les populations de la région propre ment dite des confins, il est clair que l'application d'un régime douaARCHIVES
douaARCHIVES t. 122, n°s 5-6-7, mai-juillet 1912. 7
98 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
nier risquerait de troubler les marchés locaux, et de provoquer, en même temps qu'un fâcheux mécontentement, des fraudes aussi étendues qu'impossible à réprimer. L'Administration algérienne et l'Administration du Protectorat devront donc, conformément aux accords de 1902 et à l'article 103 de l'Acte d'Algésiras, adapter leurs relations douanières aux circonstances locales.
Conclusions
En résumé, la situation financière du. Gouvernement du Protectorat se traduit par les éléments suivants :
Une' dette qui, avec la liquidation complémentaire du passir du Maghzen, atteindra 200 millions et exige une annuité de 10 à 11 millions de francs,
Des recettes qui, sur la base des produits' de 1911, se ■ décomposeraient ainsi :
I. — Achour, sekkat et droits de
marchés dans la Chaouïa 3.267.525 P. H. soit 2.700.000 fr.
IL ■—■ Mêmes impôts dans
le reste du Maroc Mémoire
III. — Revenus concédés.... 24.756.890 P. H. soit 20.000.000 »
IV. — Mostafadet et sekkat
dans les villes de l'intérieur Mémoire.
V. — Part dans les bénéfices du monopole des tabacs Mémoire.
VI. — Taxe spéciale 2.556.827 P. H. soit 2.130.000 »
VIL — Taxe urbaine (moitié non affectée aux emprunts) 263.000 P. H. soit 220.000 »
VIII. •— Produits des confins.. Mémoire.
IX. — Produits divers :
Redevances minières.. Mémoire.
Produits du domaine en dehors du périmètre des ports Mémoire.
Soit un total de recettes, sauf mémoire de 30.844.242 P. H. soit 25.700.000 fr.
et, par conséquent, un excédent d'environ 14 à 15 millions de francs applicable aux dépenses à imputer sur le seul budget du Protectorat.
PROTECTORAT FRANÇAIS AU MAROC 99
Il convient toutefois de remarquer que la négociation espagnole en cours peut avoir pour effet d'attribuer à la zone d'influence espagnole les excédents libres des revenus concédés dans les ports de Larache et de Tetouan ; mais, parallèlement, les charges du Gouvernement du Protectorat se trouveront territorialement réduites. Cette double observation s'appliquerait aux produits de la taxe spéciale et de la taxe urbaine intéressant ces deux ports.
On peut, à ce qu'il semble, au point de vue des produits financiers, envisager l'avenir avec quelque confiance. Nous avons dit plus haut ce qu'a été la progression des impôts perçus par l'autorité militaire, celle des revenus concédés gérés par l'Administration du Contrôle de la Dette. Cette progression des rendements est particulièrement intéressante à suivre pour Casablanca et la Chaouïa, qui ont subi plus directement notre action. Le mouvement du port de Casablanca a presque doublé en 5 ans (101.000.000 P. H. en 1907. — 194.000.000 P. H. en 1911) ; et l'on aura quelque idée de la puissance économique de cette région par le montant des contributions (9 millions de francs) qu'elle a, sous des titres divers, fournis en 1912.
Le Gouvernement du Protectorat marocain aura, cela va sans dire, le droit souverain d'établir les impôts et taxes de toute nature, sous réserve de respecter les stipulations des traités existants antérieurement entre le Maroc et les puissances, ainsi que les clauses de l'accord franco-allemand du 4 novembre 1911.
En somme, sa liberté d'action ne sera limitée, en droit, que spécialement en ce qui concernera l'établissement de taxes douanières, et d'une façon générale par le principe de l'égalité économique entre les nations.
Mais cette liberté théorique est surtout limitée en fait par l'état actuel du Maroc. Il est clair que l'impôt peut être perçu seulement dans les régions pacifiées. Nous estimons, en outre, que, même dans ces régions, et, au fur et à mesure que s'étendront leurs limites, il sera prudent de ne créer aucun impôt ayant les apparences d'une nouveauté et de se borner à remettre en vigueur les anciennes institutions marocaines en ayant soin, bien entendu, d'en faire une application exempte des abus dont l'administration des caïds et du Maghzen était coutumière. L'impôt soulèvera d'autant moins de protestations qu'il se présentera sous la forme traditionnelle, précisée et prévue par la loi coranique. Les tribus admettront avec d'autant moins de difficultés d'être soumises à cet impôt qu'il ne sera ni trop lourd, ni arbitraire, qu'elles apprécieront le contrôle de nos agents dont elles apprendront à connaître l'intégrité, et que surtout nous affecterons une notable partie de leurs contributions à des oeuvres d'utilité générale (voies de communication, infirmeries, dispensaires, écoles, travaux d'eau, marchés, etc.). Notre nouveau résident général au Maroc, M. le général Lyautey, disait excellemment dans un de ses rapports
Î00 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
comme haut commissaire des confins algéro-marocains : « Il faut que les indigènes payant pour la première fois l'impôt touchent du doigt son utilité pour la collectivité.
D'après ces principes, le Gouvernement du Protectorat pourra percevoir, dans les régions où son action, s'étendra progressivement, les impôts agricoles de l'achour et du zekkat, le revenu des biens domaniaux autres que ceux des ports, les droits de mostafadet, de marchés dans les villes de l'intérieur. Il serait téméraire, pour ne pas dire impossible, d'évaluer, même approximativement, le rendement de ces revenus.
Ils naîtront et progresseront en raison directe de l'organisation du Protectorat. L'impôt se percevra à l'abrir. de l'ordre public en même temps que grâce à la sécurité garantie sjjj développera la richesse générale. |j
On voit, en tout cas, par ces premiers! résultats, qui n'ont actuellement d'autres bases que le commerce international ou l'agriculture en Chaouïa, que le Maroc a dès maintenant;:, une valeur économique indéniable. I;
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Il ne faut pas nous dissimuler toutefois que les ressources du futur budget marocain, pendant longtemps encore sans doute, ne feront que diminuer dans une faible proportion les sacrifices financiers que devra s'imposer la France sur son propre budget pour remplir au Maroc la mission dont elle prend la charge.
En effet, les dépenses militaires, tant que nous serons dans la période où l'action militaire est indispensable, devront être supportées par le budget métropolitain.
Ces dépenses, pendant l'année 1911, se sont élevées à 60.249.166 francs. Il serait, téméraire de faire état de prévisions quelconques pour les dépenses qui incomberont de ce chef au budget français dans l'avenir ; une politique impatiente qui se laisserait entraîner à l'ambition d'investir trop rapidement tout le pays, nous ferait assumer de redoutables responsabilités financières. Ce seul aspect du problème, sans parler d'autres considérations que nous signalerons plus loin, nous commande de nous avancer lentement et prudemment au Maroc.
LA QUESTION MONÉTAIRE
Le développement de la richesse générale au Maroc est gravement influencé par la question monétaire.
On sait que le Maroc n'a pas de monnaie d'or et que la monnaie d'argent marocaine, dite hassani, subit par rapport au franc une dépiéciation assez forte.
PROTECTORAT FRANÇAIS AU MAROC 101
« L'activité des opérations d'importation et d'exportation (i), plus encore, peut-être, les achats de terrains et d'immeubles par les étrangers, et les dépenses militaires, ont provoqué des besoins de monnaie hassani qui ont profondément troublé le cours de cette monnaie. Par suite de la demande constante, son prix s'est élevé de 152 pesetas hassani pour 100 francs, le 31 décembre 1910, à 125 pesetas environ pour 100 francs,- le 31 décembre 1911. Dans l'intervalle, on avait atteint le cours de 115 pesetas pour 100 francs ; nous ne nous arrêterons pas à celui de 110 3/4 que l'on croit avoir été coté, car nous n'avons pas eu connaissance d'affaires sérieuses au-dessous de 115; encore le prix de 120 a-t-il été rapidement regagné.
« Ces mouvements importants n'auraient dû surprendre personne, puisque la situation financière se modifiait profondément ; le pays s'enrichissait de la grande exportation, des fonds apportés du dehors pour achats et dépenses diverses, etc., tout cela devait infailliblement provoquer la hausse du hassani, et il serait puéril de penser que cette hausse pouvait être évitée. Nous nous sommes efforcés d'atténuer les trop brusques variations de cours par une frappe constante de monnaie hafidienne. L'encaisse de la Banque 'd'Etat a pu satisfaire à toutes les demandes ; la nouvelle monnaie frappée se répand dans le pays où elle reste dissimulée jusqu'à ce que des besoins la fassent sortir et la remettent en circulation. »
Ces frappes de monnaie (2), très vivement réclamées par les commerçants établis au Maroc et nécessitées pour partie aussi par les besoins de notre Corps d'occupation, ne sont pas sans danger. Il n'est pas certain qu'elles soient réellement absorbées par les transactions et nous courrons le risque, par une année de récolte médiocre et d'opérations commerciales réduites, d'avoir une surabondance de monnaie qui amènerait sa dépréciation.
La crainte de telles variations apporte un trouble constant dans les opérations commerciales aussi bien que dans la gestion des finances publiques.
L'assainissement de la monnaie, en d'autres termes la stabilisation du cours de change, est donc un des premiers problèmes que le Gouvernement du Protectorat devra mettre à l'étude : une prompte solution intéresse â la fois le commerce général du Maroc et notre gestion budgétaire. Sans doute, ce problème est délicat et la variété des solutions que lui ont données les différents pays du monde témoi(1)
témoi(1) d'Etat du Maroc — Rapport à l'Assemblée générale du 18 mai 1912.
{2) Les frappes produisent un bénéfice dont il est fait deux parts. L'une est affectée à un fonds de réserve destiné à faciliter l'assainissement du régime monétaire marocain. L'autre appartient au Maghzen, c'est-à-dire aujourd'hui au budget du Protectorat : c'est sur cette part que seront remboursées certaines avances faites au Sultan ; les 66.000 kilogs frappés en 1912 produiront un bénéfice d'environ 6.800.000' P. H.
102 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
gne de la complexité de ses éléments ; mais pour difficile qu'il soit, le problème doit être résolu sans retard.
RÉGIME DES MINES
A l'époque où les affaires du Maroc étaient soumises au régime de l'Acte d'Algésiras, une conférence internationale a été instituée à Paris à l'effet d'établir un règlement minier applicable dans ce pays. Cette conférence a élaboré un projet qu'elle a annexé à un protocole du 7 juin 1910.
Mais ce projet de règlement n'ayant pas reçu l'adhésion de toutes - les puissances signataires de l'Acte d'Algésiras, n'a dès lors pas été promulgué par le sultan, et il peut actuellement être considéré comme inexistant, sauf cependant en ce qui concerne spécialement les redevances des mines de fer dont l'assiette devra être établie conformément aux dispositions des articles 35 et 49 de ce projet, dispositions auxquelles se réfère l'article 5 de l'accord franco-allemand du 4 novembre 1911.
En définitive, à l'heure actuelle, le Gouvernement du Protectorat aura à déterminer, en respectant les stipulations spéciales de cet accord, les conditions de concession et d'exploitation des mines, minières et carrières, et, à raison des difficultés que laisse déjà prévoir la concurrence des intérêts en cette matière, il conviendra de hâter autant que possible la promulgation d'un règlement minier.
Quels pourraient être les principes généraux du régime minier marocain ? A cet égard, il n'appartient pas à votre Commission de formuler une opinion, mais certaines indications d'ordre général ne paraîtront peut-être pas inutiles.
En premier lieu, il ne • conviendrait assurément pas de procéder comme il a éfé fait pour l'Algérie par la loi du 16 juin 1851, laquelle a purement et simplement étendu à ce pays la législation générale française. Notre loi de 1810 a vieilli ; elle exige une revision qui est depuis longtemps l'objet de projets et propositions de loi, et son application trop littérale a, malheureusement, privé le Trésor de ressources considérables auxquelles il pouvait légitimement prétendre. Dans un pays comme le Maroc, où tout est à créer, il importe essentiellement que les mines fournissent au budget, s'il est possible, une contribution raisonnable, et il convient pour cela que la législation à laquelle elles seront soumises possède la souplesse et les moyens d'action nécessaires.
On pourra s'inspirer, pour l'étude de cette législation, des nombreux décrets qui ont fixé le régime des mines dans la plupart des • colonies françaises : Annam, Tonkin, Madagascar, Guyane française, etc. Il sera intéressant de se rendre compte des procédés que l'on y a adoptés, dans le double but d'assurer aux colonies des recettes minières convenables, sans décourager les prospecteurs, ni les exploitants.
PROTECTORAT FRANÇAIS AU MAROC IO3
Mais ce n'est évidemment pas dans ces législations que l'on trouvera une solution complète du problème. Le Maroc ne ressemble pas, en effet, aux pays auxquels elles se rapportent. Jusqu'à présent, malgré que l'ensemble des nombreuses prospections effectuées fasse apparaître le sous-sol marocain comme remarquable par ses formations métallifères, leur valeur industrielle ne semble pas considérable. On trouve sur beaucoup de points, dans le Sous notamment, comme dans le Riff, des indices encourageants, mais aucun gisement important n'a encore été reconnu, et le minerai de fer, dont on se préoccupe tant, ne s'est pas révélé sous forme de masses de gros tonnages, et d'une exploitation sûrement rémunératrice. A la vérité, le champ des découvertes est loin d'avoir été complètement exploré et peut réserver d'agréables surprises ; en ce cas, des industries minières pourraient acquérir au Maroc une grande prospérité, car le pays est riche, la maind'oeuvre y serait abondante, le ravitaillement des mines et l'écoulement de leurs produits se feraient aisément.
Ce ne sont là, sans doute, que des espérances, mais encore convient-il que, si elles se réalisent, le Trésor marocain y trouve un contingent de ressources appréciables, les intérêts des exploitants restant, bien entendu, suffisamment sauvegardés par la législation.
Il est à remarquer que cette source de revenus, encore inexistante au Maroc, a néanmoins déjà reçu une affectation. Aux termes du traité hispano-marocain du 17 novembre 1910, le Gouvernement chérifien a fait abandon au Gouvernement espagnol, pour le remboursement de ses dépenses militaires dans le Riff, de 5 5 0/° de la part de ces redevances non antérieurement affectée à des services spéciaux, soit 55 0/° des redevances totales. Cette stipulation s'applique aux redevances auxquelles pourrait donner lieu l'exploitation des mines situées dans une partie quelconque du territoire marocain. Cette question est donc de celles qui font actuellement l'objet d'un échange de vues avec l'Espagne.
LES TRAVAUX PUBLICS
L'exécution de travaux d'utilité publique au Maroc ne date que de quelques années, et les premières ressources destinées à les payer ont été fournies soit par la surtaxe douanière de 21/2 % établie à Algésiras en faveur de la caisse spéciale, soit par l'emprunt de 1910.
Jusqu'à présent, un môle, un quai et un égoût ont été construits à Tanger, un wharf a été établi à Safi et deux ports ont été commencés, l'un à Casablanca, l'autre à Larache. En outre un petit programme de travaux a été arrêté et sera réalisé en six ans (1909-1915) sur les fonds de la caisse spéciale. Il comprend diverses améliorations (éclairage des côtes, aménagement des ports et routes d'accès) et doit entraîner une dépense totale de 4.905.000 francs.
Quant au port de Casablanca, dont les progrès ont été d'une regret-
104 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
table lenteur, ses travaux viennent de recevoir une impulsion un peu plus vive. L'abri à barcasse a fait l'objet de deux adjudications dont l'une a eu lieu le 9 avril et dont l'autre aura lieu le 25 juin ; la grande jetée sera prolongée, grâce à un prélèvement de 750.000 francs sur les revenus de la caisse spéciale ; enfin l'on espère passer, avant l'achèvement des lots qui vont être adjugés, c'est-à-dire l'été de 1913 les marchés relatifs à la continuation du port.
Mais il est bien clair qu'à • partir du moment où la France, puissance protectrice, entreprend d'outiller le Maroc et de le mettre en valeur, les travaux publics ne peuvent plus progresser suivant les méthodes fragmentaires et parcimonieuses qui ont prévalu jusqu'ici.
Il faut s'élever à une vue d'ensemble et résoudre les deux grands problèmes qui se posent :
i° Donner au Maroc, pays orienté vers l'Atlantique, un grand port situé sur l'Océan et des ports régionaux ;
20 Tracer des voies ferrées suivant les principales artères traditionnelles de ce pays, et leur apporter du trafic par l'amélioration de-s routes ou, lorsqu'on le peut, des voies navigables.
Tarder à équiper un grand port, ce serait en effet engorger le trafic d'exportation en proportion même des facilités qu'on donnerait au trafic intérieur. Et créer des chemins de fer dont le tracé ou la construction ne correspondraient pas à des besoins que tous les maîtres successifs du Maroc ont reconnus, ce serait fausser le développement du pays ou bien se condamner à de nouveaux sacrifices.
Il appartiendra au Gouvernement du Protectorat, dûment éclairé par les techniciens qui étudient ces problèmes (1), de déterminer l'étendue et la durée des travaux à exécuter dans les différents ports, la direction et la largeur des voies qu'il faut assigner aux grandes lignes de chemins de fer, etc. Les principaux traits de ce qu'on pourrait appeler le système circulatoire du Maroc apparaissent d'ailleurs
(1) Trois séries d'études sont effectuées en ce moment pour préparer ou faciliter des travaux publics au Maroc.
i" Commission d'étude des ports. — Elle se réunit à Tanger le ,i5 juin et commence ses travaux sur le Du-Chayla. Elle comprend : MM. Guérard,' inspecteur général des ponts et chaussées, président.
Constolle, inspecteur général des ponts et chaussées, directeur des travaux
hydrauliques de la Marine. Ribière, inspecteur général des ponts et chaussées, directeur du service des
phares et balises. Renaud, ingénieur en chef hydrographe de la Marine, de Marliave, capitaine de vaisseau, commandant le croiseur Du-Chayla et
la division navale du Maroc. Vergnes, capitaine au long cours, commandant le paquebot Iméréthie, de la compagnie Paquet. 2° Mission des chemins de fer. — M. Nouailhac-Pioch, ingénieur en chef des -ponts et chaussées, a été mis à la disposition du Ministère des Affaires étrangères
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dès maintenant. C'est ainsi qu'on ne peut négliger ni les admirables résultats obtenus par nos officiers et nos colons à Casablanca et dans son voisinage, ni les avantages du Sebou qui est navigable jusqu'auprès du point où traverse la route de Tanger à Fez par Meknès, ni la stipulation d'après laquelle l'adjudication de la ligne Tanger-Fez ne doit être primée par aucune autre, ni la nécessité urgente de relier Fez à l'Atlantique par Meknès, et à l'Algérie par la région de Taza. Enfin, sans parler de questions qui, le moment venu, se régleront d'une manière facile à prévoir, comme celle des communications entre Marrakech et la Chaouïa, et celle du développement de Mogador, des problèmes en quelque sorte excentriques ne doivent pas être oubliés : celui du Haut-Guir, qui exigera le prolongement du chemin de fer au-delà de Colomb-Béchar, et celui du Sous, qui exigera tôt ou tard l'ouverture du port d'Agadir et l'établissement d'une voie ferrée vers Taroudant.
Toutefois notre préoccupation constante doit être bien moins d'entreprendre un grand nombre de travaux que de mener à bien, avec la rapidité qui a tant manqué jusqu'à ce jour, ceux qui diminueront les dépenses du Protectorat en renforçant sa position militaire et ceux qui augmenteront ses ressources en donnant leur débouché normal'à des régions riches mais actuellement presque inaccessibles.
LE PROBLÈME FONCIER
Le régime de la propriété immobilière constitue peut-être le plus délicat des problèmes qui se posent au Maroc. Il a déjà fait l'objet de nombreuses études et de multiples projets dont l'expérience acquise en Algérie et en Tunisie nous prépare à apprécier les mérites. Il est examiné en ce moment même par certains membres de la mission qui avait accompagné M. Regnault à Fez ; et le Gouvernement du Protectorat tirera sans doute aussi d'utiles enseignements du travail qu'il a confié sur la sociologie musulmane à M. Doutté, professeur à l'Université d'Alger, ainsi que des recherches effectuées, sous la direction si compétente de M. Michaux-Bellaire, par la mission scientifique de Tanger. Nous ne saurions préjuger les conclusions de ces différentes enquêtes et nous devons nous borner à indiquer les nécessités en face desquelles se trouve le protectorat français.
pour remplir une mission de reconnaissance générale des tracés de chemins de fer à exécuter au Maroc. Un ingénieur et deux conducteurs du service des travaux publics du Maroc lui sont adjoints. M. Nouailhac-Pioch a constitué sa mission et doit se trouver à Fez à l'heure actuelle.
3° Mission géologique. — Une mission d'études géologiques a été confiée à M. Louis Gentil, professeur adjoint à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris, dont on connaît les beaux travaux d'ordre scientifique et pratique, dans la région frontière et dans la région de Marrakech.
106 ' LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Deux questions bien différentes se présentent, l'une d'ordre gouvernemental, l'autre d'ordre juridique.
La question gouvernementale consiste à faire en quelque sorte l'inventaire des biens domaniaux, à séparer le domaine de l'Etat chérifien du domaine qui appartient personnellement au sultan, à préserver enfin le domaine de l'Etat contre des empiétements et contre des aliénations peu productives.
Cette question est presque entièrement une question d'administration et de fait. Peut-être cependant conviendrait-il d'appliquer aux aliénations du domaine des règles analogues à celles que l'Allemagne a instituées, dès 1898, dans sa colonie chinoise de Kiao-Tchéou : revision périodique de l'évaluation des immeubles et taxes sur les plus-values provenant des travaux exécutés par l'Etat ou du développement en quelque sorte spontané du pays. On éviterait ainsi des spéculations démoralisantes, au grand profit des acquéreurs qui accroîtront par leur effort personnel la prospérité du Maroc.
La question juridique apparaît, de son côté, sous deux aspects principaux : il y a, d'une part, les problèmes qui concernent la régularisation de la propriété, et, d'autre part, ceux qui concernent son transfert.
Les procédés de régularisation varient évidemment selon que le propriétaire est un franc tenancier (terre melk) ou un détenteur précaire de biens qui appartiennent à la collectivité (terre arch). Tout en reconnaissant le principe, proclamé en Algérie, par le senatus-consulte du 22 avril 1863, d'après lequel les tribus sont collectivement propriétaires des terres dont elles ont « la jouissance permanente et traditionnelle », il ne faut pas oublier que ces terres doivent être délimitées pour empêcher des luttes entre tribus voisines, et que d'ailleurs la propriété privée est souvent un système plus conforme à la mentalité des populations berbères ainsi qu'aux intérêts économiques du Maroc et de ses habitants. Mais il serait déplorable de retomber, sous le prétexte de favoriser la constitution de la propriété privée, dans les abus qu'a engendrés en Algérie la loi du 26 juillet 1873. Un régime qui offrirait aux indigènes des garanties au moins égales à celles de la loi du 12 février 1897 et qui faciliterait en même temps les transactions par l'existence d'un registre foncier apparaît comme l'une des solutions qu'on peut envisager.
Quand une solution de ce genre aura été appliquée, le transfert de la propriété deviendra facile à réglementer. Mais des mutations de plus en plus nombreuses ont lieu aujourd'hui, et le Gouvernement du Protectorat peut d'autant moins s'en désintéresser que l'insécurité actuelle des ventes d'immeubles risque de causer les plus vives contestations, non seulement entre indigènes mais encore entre indigènes et européens.
Peut-être serait-il donc nécessaire de perfectionner dès maintenant, fût-ce à titre transitoire, la procédure des mutations immobilières, en
PROTECTORAT FRANÇAIS AU MAROC IO7
se servant des agents qui la pratiquent à l'heure actuelle, c'est-à-dire des adoul, du cadi, des témoins indigènes, etc. Ces perfectionnements devraient répondre aux deux ordres de préoccupations suivantes : ne pas froisser la mentalité musulmane et préparer, au fur et à mesure des mutations, les éléments d'un registre foncier.
Le principe fondamental de notre action, dans ces problèmes si importants du régime foncier, doit être, en effet, de donner au Maroc les avantages pratiques qui résultent de nos institutions, sans détruire aucun des avantages que les institutions d'origine berbère ou musulmane confèrent aux Marocains eux-mêmes.
L ORGANISATION JUDICIAIRE. — LA PROTECTION ETRANGERE
Deux ordres de problèmes se présentent en cette matière : l'un relatif aux tribunaux destinés à remplacer la juridiction consulaire, l'autre qui concerne la justice indigène.
La juridiction consulaire est appelée à disparaître comme incompatible avec le nouveau régime du Maroc dans un délai dont il dépendra de nos efforts de rapprocher plus ou moins l'échéance. Il est clair en effet que le Gouvernement français aura à engager avec les puissances intéressées des pourparlers pour obtenir leur renonciation expresse aux tribunaux consulaires, et qu'il ne pourra utilement le faire que le jour où nous aurons nous-mêmes institué au Maroc des tribunaux appelés à juger les litiges civils et commerciaux et les poursuites pénales intéressant' nos nationaux et les étrangers, suivant une législation et une procédure qui, aux termes de nos accords internationaux, devront placer les ressortissants étrangers exactement dans les mêmes conditions que les ressortissants français.
Votre Commission renouvelle le voeu, déjà émis par elle lors de l'examen de la convention du 4 novembre 1911, que le Gouvernement se hâte de préparer cette conséquence naturelle et nécessaire de la nouvelle situation de la France dans l'empire chérifien. Cette question de l'organisation d'un régime judiciaire, destiné à remplacer la juridiction consulaire, se lie à celle de la protection étrangère de certains indigènes, actuellement réglée par la convention de Madrid de 1880. Régulièrement, il ne devrait y avoir au Maroc que deux catégories, 'limitativement prévues, d'indigènes protégés. D'abord les protégés consuétudinaires, visés par l'article 16 de la convention de Madrid, dont le nombre est limité à 12 par puissance. L'exercice du droit consuétudinaire de protection est, en vertu de l'article précité, réservé aux seuls cas où il s'agirait de récompenser des services signalés rendus par un marocain à une puissance étrangère •— ou pour d'autres motifs tout à fait exceptionnels. Ils ne peuvent être fonctionnaires du Maghzen. En second lieu, les marocains au service des légations ou consulats et les censaux des maisons de commerce, au nombre de deux par maison. En fait, la faculté de protéger des indi-
Ï08 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
gènes marocains a donné lieu à de nombreux abus. Il conviendra d'abord de procéder, aussitôt que possible, à une revision sérieuse des listes de protection, et cette première mesure suffira déjà à réduire considérablement les inconvénients du maintien actuel de la protection. Ensuite, et lorsque nous aurons introduit au Maroc un ordre de choses régulier, nous aurons à envisager la suppression même du régime de la protection.
En ce qui concerne la justice indigène proprement dite, une tâche non moins importante s'impose a l'attention du Gouvernement protecteur : c'est celle de la composition et du fonctionnement des juridictions appelées à juger les poursuites pénales contre les indigènes et les conflits civils entre indigènes.
En cette matière comme en tant d'autres, par suite de l'anarchie persistante de ces dernières années, tout sera à reprendre par la base, notamment au point de vue du personnel. Nous estimons que pour assurer un recrutement qui présente de réelles garanties de savoir et d'intégrité, il conviendra de s'inspirer de ce qui a été fait en Egypte et en Tunisie dans le même ordre d'idées, surtout en Egypte où, il faut le reconnaître, le fonctionnement des tribunaux indigènes — dont la plupart des juges sont à l'heure actuelle licenciés en droit — est absolument remarquable.
OEUVRES SCOLAIRES ET OEUVRES D ASSISTANCE
L'article premier du traité qui est soumis à vos délibérations inscrit les réformes scolaires parmi celles que le sultan s'engage à introduire, d'accord avec la France, sur le territoire marocain. C'est une heureuse innovation, particulièrement digne du génie français, que d'avoir ainsi exprimé, dans l'acte même qui constate les droits de la France sur le Maroc, l'importance que nous attachons à notre mission d'éducateurs.
Jusqu'à présent, la création d'écoles françaises au Maroc, ainsi que l'installation des dispensaires et d'hôpitaux, qui s'y relie naturellement, n'a pu être entreprise qu'avec des ressources excessivement limitées et dans des conditions de sécurité souvent douteuses. Les résultats encore si incomplets dont nous allons donner un aperçu ne doivent donc pas être jugés d'après l'oeuvre qu'il est nécessaire d'accomplir, mais d'après les difficultés de l'oeuvre accomplie ; et, à ce point de vue, l'on peut affirmer qu'ils font honneur aux vaillants Français qui les ont obtenus, et à la légation de France qui, sous la direction de M. Regnault, consacrait une notable partie de son activité et de ses ressources aux établissements d'enseignement.
A l'heure actuelle, il existe au Maroc, en dehors des écoles étrangères ou des rudimentaires « écoles coraniques » :
PROTECTORAT FRANÇAIS AU MAROC Ï09
i ° Un enseignement secondaire français représenté par le grand collège de Tanger (150 élèves) ;
2° Un enseignement primaire français représenté par huit écoles de garçons ou de filles groupant un peu moins de mille élèves ;
30 Un enseignement franco-arabe, représenté par onze écoles qui réunissent environ onze cents enfants ;
40 Les 22 écoles de l'Alliance israélite universelle, dont l'enseignemend rend de précieux services à l'oeuvre française, et dont les élèves sont près de cinq mille.
Ces statistiques démontrent qu'aujourd'hui il n'y a pas au Maroc deux mille ni peut-être même pas mille enfants musulmans qui apprennent le français ou qui reçoivent en français l'instruction la plus modeste. *
Cette constatation n'a rien d'imprévu, si l'on songe aux faibles moyens dont nous avons disposé jusqu'ici et si l'on réfléchit qu'en Algérie, où la population indigène des écoles primaires né dépasse guère 30.000 enfants, l'effort énorme qu'exige la loi de 1908 n'amènera encore dans nos écoles qu'un quart de jeunes indigènes en âge de recevoir l'instruction. Mais il n'en est pas moins nécessaire d'accomplir au Maroc, dans le domaine scolaire, ce que les habitants peuvent légitimement attendre de nous.
A cet égard, deux des expériences qui ont été faites en Algérie méritent spécialement d'être retenues.
D'abord, il faut faire accepter notre enseignement français par les population indigènes en montrant qu'il n'est pas une entreprise dirigée contre la religion musulmane. Que nos instituteurs respectent scrupuleusement les traditions, les usages, les moeurs des tribus au milieu desquelles ils vivent et, très rapidement, disparaîtront les préventions contre notre école. Que nos maîtres donnent à leurs élèves des notions pratiquement et immédiatement utilisables, bien appropriées aux besoins locaux et ils attireront une clientèle intéressée.
L'enseignement au Maroc doit être très simple, utilitaire et pratique. Il importe que le profit matériel d'aller à l'école apparaisse le plus tôt possible. « Le chemin du coeur du Berbère — disait l'un d'eux — passe par son ventre ». La langue française usuelle qui permettra aux indigènes d'entrer facilement en relations avec nous, le calcul, les notions d'hygiène, d'horticulture et d'agriculture •— tout à fait adaptées au milieu — l'usage de nos principaux outils, voilà notre programme de début. Son application aura pour résultat d'améliorer immédiatement la condition matérielle des indigènes, soit en détruisant des préjugés malfaisants ou des coutumes détestables, soit en substituant à des pratiques surannées des usages plus rationnels, soit surtout en innovant heureusement dans les procédés des cultures et des industries locales.
IIÔ LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
L'école française au Maroc est faite pour la vie. Elle doit être, comme en Algérie, un « foyer de civilisation élémentaire ». Son action se-traduit dans les faits et devra se mesurer au progrès économique et moral réalisé par les populations indigènes.
D'autre part, il est impossible d'inculquer à la fois aux enfants deux langues écrites, surtout lorsqu'elles sont aussi étrangères, l'une à l'autre que le français et l'arabe littéral. Nos préférences doivent donc aller à l'enseignement du français, d'autant plus que, dans la plus grande partie du Maroc, c'est par des idiomes berbères, et non arabes, que les indigènes communiquent entre eux.
Il importe de remarquer en outre que la langue berbère, n'étant pas écrite, le français pourra aisément devenir la langue écrite de la race kabyle, phénomène qui se produit déjà sur certains points de l'Algérie.
Faut-il répéter à ce propos que, loin de nous attacher à « arabiser » les Berbères, comme nous l'avons tenté dans certaines .parties de l'Algérie, nous devons nous efforcer de conserver aux populations marocaines la langue traditionnelle qu'elles ont défendue successivement contre tant d'envahisseurs ? La création récente d'un cours de berbère par la mission scientifique de Tanger est à ce sujet un symptôme excellent. "
Aux institutions scolaires s'ajoutent logiquement les institutions médicales et charitables. Dans ce domaine, le dévouement de nos médecins a déjà réalisé une oeuvre considérable et parfois héroïque. C'est en 1904 que pour favoriser le développement de l'influence française au Maroc, le Gouvernement français a décidé d'y créer des dispensaires gratuits.
Ces dispensaires existent actuellement à Tanger, Larache, Rabat, Casablanca, Mazagan, Safi, Mogador, Oudjda, Fez et Marrakech. A Mazagan, le dispensaire comporte également un petit hôpital.
A côté des dispensaires, il existe des hôpitaux à Tanger, Casablanca et Fez. L'hôpital de Tanger comprend deux sections : l'une pour les européens, l'autre pour les indigènes.-On a commencé, à Tanger, la construction d'un institut Pasteur, qui réunira tous les services bactériologiques et hygiéniques.
L'hôpital de Casablanca, dû à une générosité privée, ne correspond plus aux besoins actuels de la population. La construction d'un hôpital civil est projetée et s'impose de toute nécessité.
A Fez, le docteur Murât, médecin du dispensaire, a ouvert un hôpital d'une vingtaine de lits.
A Marrakech, un hôpital doit être construit aux frais du Gouvernement marocain, pour perpétuer la mémoire du docteur Mauchamp dont il portera le nom.
PROTECTORAT FRANÇAIS AU MAROC III
Des infirmeries indigènes ont été créées par les médecins de notre corps d'occupation tant dans la Chaouïa que dans la région d'Oudjda.
Ces premiers résultats, obtenus en quelque sorte sous le feu des combats ou des révoltes, sont le gage des immenses bienfaits que la France apportera aux populations marocaines à mesure que l'ordre sera rétabli et que la prospérité renaîtra. Le médecin est le plus puissant des pionniers auxquels une nation civilisée peut confier son drapeau, parce qu'il est le plus bienfaisant. On imagine difficilement à quel pitoyable état sanitaire sont quelquefois réduites des populations décimées par les fièvres et les épidémies, à la merci des rebouteurs et des sorciers. Le médecin européen, l'homme qui réellement guérit, est, à leurs yeux, un personnage surhumain, une façon d'envoyé de Dieu. On entreprend de longs voyages pour le consulter, on emporte son remède comme un talisman. Dans l'impossibilité où elle est d'envoyer là-bas des médecins français en nombre suffisant, la métropole se doit_ de créer, au Maroc, un corps de médecins indigènes formés soigneusement à nos méthodes dans nos écoles de médecine, et qui, connaissant à fond la langue, habitués au pays, reçus partout, iront porter dans les milieux indigènes, avec leurs soins, l'idée sensible d'une France compatissante et généreuse.
Soutenue par les oeuvres scolaires et par les oeuvres d'assistance, ennoblie par une politique de générosité envers les indigènes, l'influence française qu'ont fait triompher au Maroc la valeur de nos officiers et l'abnégation de nos soldats remportera des victoires nouvelles et deviendra indestructible.
3° LE TRAITÉ DU 30 MARS I912
La situation internationale du Maroc, telle qu'elle avait été réglée par l'acte d'Algésiras, avait conduit la France à rechercher d'abord le consentement des puissances aux modifications nécessaires pour l'établissement du protectorat.
Mais ce consentement constaté par l'accord franco-allemand du 4 novembre 1911 et par l'acceptation d'un certain nombre des autres puissances ne pouvait se suffire à lui-même : il ne faisait que rendre possible la seule convention qui pût, d'après les principes élémentaires du droit international, et aussi d'après le bons sens, constituer le protectorat, à savoir la convention entre l'Etat protecteur et l'Etat protégé.
L'acte du 30 mars 1911 réalise formellement cette convention de protectorat entre les deux Etats intéressés, la France et le Maroc.
Le traité de Fez énonce les principes directeurs de notre future action marocaine en formules simples et sobres en tenant compte des obligations que nous imposent nos accords internationaux comme des droits qu'ils nous reconnaissent solennellement.
112 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Il se rapproche autant que possible des traités du Bardo et de la Marsa en 1881 et 1883, dont les dispositions principales constituent le type défini et incontesté d'un régime de protectorat consacré par une pratique de trente ans de Tunisie.
L'article premier donne à la France tous les droits au point de vue politique. Il assure au nouveau régime la souplesse qui lui permettra de s'adapter aux circonstances et de réaliser progressivement les réformes dont l'utilité se fera sentir dans les questions d'ordre administratif, judiciaire, financier, économique ou militaire. Le premier paragraphe n'est d'ailleurs que le texte même de l'accord du 4 novembre 1911, mais il représente cependant un progrès positif sur la situation de droit que nous constituait cet accord. Alors que l'accord du 4 novembre imposait à la France l'obligation de se mettre d'accord avec le sultan pour chaque mesure politique ou militaire qu'elle croyait devoir prendre au Maroc, le nouveau traité formule l'adhésion globale et définitive à toutes les propositions et occupations qui paraîtront utiles au Gouvernement français. Nous avons déjà fait remarquer dans un chapitre précédent que le négociateur français a intentionnellement introduit le mot « scolaire » dans l'énumération des réformes que le Sultan s'engage à accomplir avec le concours de la France, et la Chambre s'associera certainement aux félicitations que la Commission a déjà adressées au Gouvernement pour avoir tenu à marquer ainsi tout l'intérêt qui s'attache à notre oeuvre éducatrice dans l'Afrique du nord.
Le second paragraphe de l'article premier formule les assurances, demandées dès le début par Moulay-Hafid dans sa note du 17 octobre 1911, et que l'esprit même de notre politique musulmane commandait de lui donner, en ce qui concerne l'exercice de la religion islamique et le respect des institutions religieuses, notamment de celles des habous. Le nouveau régime « sauvegardera » également la situation religieuse, le respect et le prestige traditionnel du sultan. Ces formules répondent à une méthode de gouvernement désireuse de ne pas porter atteinte aux sentiments qu'évoque dans un Maroc, même troublé, l'origine chérifienne de la djmastie actuelle et de préserver, pour i'utiliser, ce qui reste de forces morales dont ce gouvernement, quels que fussent ses abus, disposait encore sur l'opinion.
Le second paragraphe prévoit également l'existence d'un « maghzen chérifien réformé ». Cette réorganisation, exclusive de l'administration directe, est l'essence même du protectorat. Elle implique qu'il subsistera non pas seulement un sultan, chef religieux des croyants, mais qu'à côté des agents français munis des moyens suffisants de contrôle, d'initiative et de direction, nous emploierons dans la plus large mesure possible, les autorités indigènes pour agir sur cette population avec les formes et les ressorts apparents auxquels elle est déjà habituée.
Le troisième paragraphe vise les droits de l'Espagne, en vertu de
PROTECTORAT FRANÇAIS Ati MAROC 11^
l'arrangement du 3 octobre 1904 et le § 4, le caractère spécial reconnu à la ville de Tanger par l'article 9 de ce même arrangement ; ces questions font l'objet des négociations qui se continuent actuellement, dans un esprit amical, avec le Gouvernement de Madrid et restent en conséquence en dehors du développement 'de ce rapport.
L'article 2 ne fait que préciser conformément aux principes ci-dessus relatés les droits de la France en matière d'occupations militaires et de police sur terre et sur mer. L'avis préalable remplace l'accord préalable.
L'article 3 garantit au sultan l'appui de la France « contre tout danger qui menacerait sa personne ou son trône ou qui compromettrait la tranquillité de ses Etats » ; le même engagement est pris en faveur de l'héritier du trône et de ses successeurs. Rappelons à cet égard que, si la désignation de ce successeur revient traditionnellement au sultan en fonctions, les lettres échangées le 30 mars 1912 entre Moulay-Hafid et M. Regnault précisent que cette désignation n'interviendra pas sans l'agrément de la politique française.
L'article 4 attribue au Sultan le pouvoir de sanctionner par firman ou décréter les mesures réglementaires et administratives prises sur nos propositions. Mais il prévoit en même temps, pour faciliter la procédure administrative, que ce pouvoir pourra être délégué à ses fonctionnaires.
L'article 5 définit les pouvoirs du représentant de la République auprès de S. M. chérifienne. Il est inspiré de l'article 5 du traité du Bardo et de l'article 3 du traité franco-allemand. Mais le traité du Bardo avait insuffisamment déterminé les attributions du Ministrerésident de la République à Tunis : après avoir éprouvé les difficultés que cette indécision avait amenées dans les rapports du résident et du commandant des troupes, on dut prendre un décret du 23 juin 1885 qui créait la fonction du résident général, dépositaire de tous les pouvoirs de la République en Tunisie. Le texte proposé reproduit cette formule. D'autre part, le pouvoir de promulguer au nom du Gouvernement français les décrets beylicaux ne fut attribué au résident que par un décret présidentiel du 10 novembre 1884, contre lequel le Bey ne souleva d'ailleurs aucune objection. Le dernier paragraphe de l'article 5 aura l'avantage de préciser cette attribution par un engagement bi-latéral.
L'ensemble de l'article 5 assure l'unité de notre action politique et administrative au Maroc.
L'article 6 attribue à la France, suivant une formule du traité du Bardo, la représentation et la protection des sujets et des intérêts marocains à l'étranger. Le même texte du traité de 1881, maintenu ici dans son intégralité, interdit au sultan de conclure aucun acte ayant un caractère international sans l'assentiment préalable de la France. .
ARCHIVES DiPLOM,, t. 122, n" 5-6-y, mai-juillet 1912. S
Ï-I4 'LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Uartick 7, également inspiré du traité du Bardo, réserve aux deux Gouvernements, la faculté de fixer d'un commun accord les bases d'une réorganisation financière sans porter atteinte aux droits des créanciers de l'Etat marocain. C'est la promesse d'une réforme financière générale que nous accomplirons à notre heure.
Uartick 8 s'oppose à ce que le sultan ou lé maghzen contracte aucun emprunt et accorde aucune concession en dehors de nous. Il n'était pas inutile de bien spécifier cette règle après les pratiques suivies au cours de ces dernières années.
En outre de ces stipulations du traité du 30 mars 1912, les deux lettres échangées à la même date rappellent et précisent les engagements antérieurs pris envers le sultan, relativement à sa situation personnelle, à celle de sa famille et à celle de ses héritiers. Ces lettres prédsent les engagements antérieurs que nous avons analysés plus haut, et les améliorent en ce sens que la transmission du pouvoir devra être concertée avec la France.
Le Gouvernement n'a pas pensé, et avec raison, que les règlements d'affaires personnelles dussent être insérés dans le traité lui-même, d'abord parce que ce sont des conventions privées dont il n'y a pas lieu de faire des engagements diplomatiques, qu'elles n'ont pas à être communiquées aux puissances comme devra l'être le traité de protectorat lui-même, et enfin parce que les crédits prévus dans ces conditions ne devront pas être imputés sur le budget français, mais prélevés sur les revenus du Trésor marocain.
En somme, il a paru à votre Commission que le texte du traité que le Gouvernement présente à votre approbation a tout à la fois la précision et la souplesse nécessaires pour nous donner les moyens de développer avec logique et avec prudence notre action directrice au Maroc.
(à suivre).
CONVENTION FRANCO-RUSSE IÎ5
Rapport présenté à la Chambre des Députés, par M. Théodore Reinach, député de la Savoie, sur le projet de loi portant approbation de la convention signée à Paris, le 29 novembre 19H, entre la France et la Russie, pour la protection des oeuvres artistiques et littéraires,
(Janvier 1912)
Messieurs,
Le respect des droits d'autrui s'affermit et s'affine d'autant mieux qu'on a soi-même plus de droits à faire respecter. Ce fait d'observation, qui se constate dans les rapports entre citoyens d'un même pays, ne se vérifie pas moins dans les rapports internationaux. Nulle part il ne s'y manifeste d'une manière plus frappante qu'en matière de productions intellectuelles, c'est-à-dire dans un domaine où la reconnaissance du droit d'auteur — qu'on y voie un droit sui generis ou une simple variété du droit de propriété — par le caractère idéal de l'objet auquel il s'applique, suppose chez ceux qui le conçoivent un degré de culture et de conscience assez avancé.
Aussi ne faut-il pas s'étonner si ce droit, d'abord ignoré ou méconnu à peu près partout, ensuite progressivement introduit dans la législation intérieure des divers Etats, à commencer par les nations les plus civilisées, n'a réussi que tardivement et timidement à s'imposer dans les relations internationales.
Il s'y implante cependant, il y développe peu à peu toutes ses conséquences, à mesure que la civilisation se répand et se nivelle, que la production artistique et littéraire se crée de nouveaux foyers et cherche de nouveaux débouchés, et que, par un progrès parallèle de la conscience morale et du calcul économique, le souci de ne pas léser l'intérêt du voisin se double, dans chaque nation, d'un intérêt personnel à n'être pas lésé soi-même.
I
La Russie, violemment tirée de la barbarie par un barbare de génie, a fait depuis le xvnie siècle des progrès rapides dans la voie de la culture intellectuelle, si rapides chez l'élite que le gros de la nation a eu plus de peine qu'ailleurs à la suivre, même à distance respectueuse. De là un conflit de deux tendances en apparence contradictoires : un groupe assez restreint d'artistes et d'écrivains demande à être protégé contre le pillage et, réciproquement, proclame le droit des auteurs
Il6 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
étrangers à être mis à l'abri de la contrefaçon nationale ; d'autre part, la quantité de lumière produite par cette élite étant notoirement insuffisante pour les besoins de 1' « intelligence », on cherche à y suppléer en utilisant le plus largement possible l'éclairage venu de dehors — sans le rémunérer.
Ainsi, la Russie a eu d'assez bonne heure des lois, à la vérité fragmentaires et passablement incohérentes, sur la propriété intellectuelle : en 1827, loi instituant une redevance au profit des auteurs dramatiques joués sur les théâtres impériaux ; en 1828, règlement sur le droit d'auteur pour les oeuvres littéraires ; en 1845, loi sur la propriété musicale ; en 1847, loi sur la propriété artistique. Cette législation, d'abord confondue avec les lois de police, rattachée depuis 1886 à l'article 420 du Code civil, si elle multipliait quelque peu les formalités et les exceptions, consacrait, somme toute, l'essentiel, à savoir le droit exclusif de l'auteur sur son oeuvre pendant toute sa vie et celui de ses ayants cause pendant cinquante ans après sa mort.
En revanche, le droit des étrangers était totalement ignoré, excepté s'ils résidaient .et publiaient, leurs oeuvres sur le territoire russe. « Les auteurs du dehors, écrit M. Poinsard, sont incessamment pillés (et, ajoutons-le, souvent travestis), surtout par les éditeurs de périodiques, au grand détriment des auteurs russes. Les auteurs dramatiques ou lyriques n'obtiennent de rémunération que quand ils sont joués sur les théâtres impériaux de Saint-Pétersbourg ou de Moscou. »
Des efforts avaient été tentés à diverses reprises pour modifier cette situation. On en trouve la première trace dans les traités de commerce signés par la Russie en 1857 avec la Belgique, et en 1861 avec li France. Malheureusement, la convention franco-russe du 6 avril 1871, qui d'ailleurs passait sous silence la question essentielle, celle des traductions illicites, fut dénoncée par le gouvernement russe en 1886. Depuis lors1", le mal n'a fait que s'aggraver, et de plus en plus l'étranger n'a pas été seul à en souffrir. Les nombreux écrivains russes dont la gloire a franchi les frontières de leur patrie, les Tourguénief, les Tolstoï, les Dostoïevsky, pour ne citer que les morts, ont été traduits en diverses langues avec une désinvolture aussi préjudiciable à leur réputation qu'à l'intérêt de leurs éditeurs ; pour se mettre à l'abri de rapines semblables, un groupe de jeunes auteurs russes fondait à Berlin, il y a quelques années, une maison d'édition pour la publication du premier tirage de leurs oeuvres, afin de pouvoir invoquer, dans les pays de l'Union internationale de Berne, la protection stipulée pour ce cas par l'article 6 (actuel) de l'Acte de Berlin.
Le pillage des opéras français à Pétersbourg justifiait par représailles celui des opéras russes à Paris, et M. Arman de Caillavet s'en expliquait très nettement encore en 1909 au Congrès de l'Association internationale à Copenhague, non sans soulever les applaudissements de ses confrères.
CONVENTION FRANCO-RUSSE II7
Cet état de choses, en ce qui concerne- la France, semblait d'autant plus paradoxal que les deux pays apprenaient chaque année davantage à se comprendre et à s'apprécier. Le rapprochement intellectuel activé, sinon inauguré, par le Roman Russe, d'Eugène-Melchior de Vogue, jalonné par une série de succès retentissants depuis la Guerre et la Paix jusqu'au Spectre de la Rose, se doublait d'un rapprochement politique, scellé à Cronstadt, consacré à Cherbourg et à Châlons. Il devenait impossible que deux nations, liées par tant de sympathies et d'intérêts, continuassent, pour l'échange de leurs productions littéraires et artistiques, à vivre sous un régime international voisin de la barbarie.
Le souffle de rénovation et de libéralisme relatif, qui a passé sur la Russie depuis la crise nationale de 1904, est venu enfin apporter à ce mal un commencement de remède. Un projet de codification des lois sur la propriété intellectuelle, élaboré par le Gouvernement entre 1895 et 1900, et soumis par lui à l'examen de l'Association internationale littéraire et artistique, était resté en souffrance. L'étude en fut reprise. Après des discussions prolongées où, plusieurs fois, il a failli sombrer, il fut voté par la Douma en avril 1909, remanié de nouveau par le Conseil de l'Empire, et finit par recevoir la sanction impériale, qui en fit la loi du 20 mars 1911. Ce texte, très complet, en 75 articles, renferme plusieurs stipulations en faveur des auteurs étrangers quels qu'ils soient. L'article 32 interdit la réimpression en Russie d'une oeuvre littéraire étrangère tant que la durée de la protection dans le pays d'origine n'excède pas celle que la loi russe accorde aux ouvrages' nationaux. L'article 44 applique la même règle aux oeuvres musicales édictées à l'étranger. Enfin, l'article 35, sur l'histoire duquel noui reviendrons tout à l'heure, tout en maintenant le principe de la « hberté de traduction », prévoit que l'obligation d'obtenir l'autorisation de l'auteur étranger pourra être stipulée dans les conventions relatives à la protection de la propriété littéraire conclues par la Russie avec les puissances étrangères.
La conclusion d'un arrangement de ce genre avait été envisagée par le gouvernement russe et même annoncée à bref délai dans le traité de commerce signé le 15 juillet 1904 avec l'Allemagne. Elle le fut également dans l'accord signé le 29 septembre 1905 avec la France (art. 7 des « articles séparés »). Cependant les pourparlers furent suspendus pendant de longues années par le retard apporté à l'élaboration de la loi russe sur le droit d'auteur. Un instant on put croire que la Russie abandonnerait la voie des accords particuliers pour se rattacher purement et simplement à l'Union internationale de Berne, qui groupe déjà en un faisceau solide la moitié des Etats européens. En 1908, des délégués russes parurent comme invités à la conférence réunie à Berlin pour reviser la Convention de Berne. Cependant, si vivement intéressés et influencés qu'ils aient pu être par les intéressants débats auxquels ils assistèrent, ils ne crurent pas devoir engager leur gouvernement à souscrire à l'oeuvre éminemment libérale qui
Ii8 Lois ET DOCUMENTS DIVERS
couronna les travaux de cette conférence. On comprend sans peine, comme le dit l'exposé des motifs de notre projet de loi, que la Russie, dans l'état actuel de son opinion publique et de sa législation intérieure, n'ait pas osé brûler les étapes que l'Union internationale a mis vingt-deux ans à franchir. Elle aurait pu cependant, pour ménager les transitions, accéder à l'acte d'union avec des réserves, en s'en tenant pour certains points aux stipulations primitives de 1886 ou de 1896. Quoi qu'il en soit, du moment que la Russie a préféré persister dans le système des arrangements séparés avec les pays dont la production intellectuelle offre le plus d'affinité avec la sienne et invite à une pénétration réciproque, il faut se féliciter que ce soit avec son alliée, la France, qu'elle s'est décidée à traiter la première.
Sitôt la loi nationale définitivement votée et promulguée, les pourparlers si longtemps interrompus furent, en effet, repris. Au printemps dernier une Commission mixte fut instituée qui se composait, pour la France, des délégués suivants : M. Louis Renault, membre de l'Institut, Président ; MM. Alexandre Bérard, sénateur (en remplacement de M. Couyba) ; Théodore Reinach, député ; Grunebaum Ballin, président du conseil de la Préfecture de la Seine ; Hennequin, directeur honoraire au Ministère de l'Intérieur ; Sauvel, secrétaire général du syndicat pour la protection de la propriété intellectuelle ; Verwaest, chef de bureau au Ministère de l'Instruction publique ; d'Estournelles de Constant, chef de bureau au Sous-Secrétariat d'Etat des Beaux-Arts ; Lucien Layus, président du cercle de la librairie ; et, pour la Russie, de MM. Werevkine, conseiller privé, adjoint du Ministre de la Justice ; Walter, conseiller d'Etat ; Beltkowski, directeur au Ministère des Affaires étrangères ; Bellegarde, chef de la direction générale de la Presse ; Westmann, directeur du département du service général, et Reinbot, avocat, jurisconsulte au Ministère de l'Instruction publique.
Les deux demi-commissions nationales travaillèrent d'abord séparément sur les bases de la loi du 20 mars 1911. La Commission française rédigea un avant-projet qui fut communiqué au gouvernement russe ; celui-ci, sur l'avis de sa Commission, y répondit par un contre-projet. Lorsque les points de vue respectifs parurent suffisamment rapprochés pour faire entrevoir une entente possible, trois des commissaires russes, MM. Werevkine, Walker et Beltkowski, se rendirent à Paris, et la Commission plénière commença ses travaux le 9 octobre 1911, sous la présidence d'abord de M. Fernand Gavarry, représentant le Ministre des Affaires étrangères, ensuite de M. Louis Renault. Sous l'habile direction de ce juriconsulte éminent, dont le nom est inséparable de tous les progrès réalisés depuis un quart de siècle dans le droit international, les délibérations se sont poursuivies jusqu'au 17 octobre, jour où fut signé lé protocole de clôture. Les deux Gouvernements, après avoir pris connaissance des travaux de la Commission, ont entièrement approuvé son oeuvre, et la Convention,
CONVENTION FRA.NO>RUSSE 119
dont vous avez le texte sous les yeux, a été sigûée à, Paris le 29 novembre 1911 par MM. de Selves et Iswolsk)', sous réserve, en ce qui concerne la France, de l'adhésion du Parlement.
C'est cette adhésion nécessaire que le Gouvernement vient vous demander aujourd'hui. Il fait observer avec raison qu'aux termes de l'article 20, sans doute pour faciliter' un régime de transition et de liquidation du passé, la Convention n'entrera en vigueur que six mois après l'échange des ratifications. Il y a donc intérêt, pour satisfaire la légitime impatience de nos nationaux trop longtemps lésés, â hâter le plus possible le moment de cet échange. Cette considération suffirait à elle seule à justifier le caractère succinct des observations qu'on va lire, alors même que l'exposé des motifs, très clair et très complet du projet ministériel, ne nous dispenserait pas d'entrer dans de plus longs détails.
II
La nouvelle convention pose en principe, dans son article premier, que les auteurs russes et, bien entendu, leurs ayants droit, jouiront désormais en France de la protection accordée aux auteurs français par nos lois nationales et que réciproquement, les auteurs français obtiendront en Russie (la Finlande et la Sibérie comprises, nous futil assuré), la protection accordée aux auteurs russe par la loi russe. Aux oeuvres des auteurs français ou russes ou' assimilés, sous le rap* port de la protection, les oeuvres d'auteurs étrangers, mais publiées pour la première fois en France et en Russie. Ainsi, double protection : 1° En raison de la nationalité, indépendamment du lieu de publication ; 20 En raison du lieu de publication, indépendamment de la nationalité. A cet égard, on le voit, notre convention est plus large que l'Union de Berlin, qui subordonne exclusivement la pro tection au lieu de la publication, sans tenir compte de la nationalité de Fauteur.
Pour mesurer la valeur exacte de la protection ainsi accordée aux auteurs français ou publiant en France, pour apprécier son étendue, ses modalités, ses conditions, il importe de connaître les dispositions de la loi russe de 1911 que les tribunaux russes auront en général à leur appliquer. Comme le texte de cette loi n'est pas très facilement accessible, nous croyons rendre service à nos nationaux en le reproduisant en appendice (1) à la suite du présent rapport.
Les dispositions particulières, que nous allons maintenant analyser, tantôt reproduisent, en substance, celle de la loi russe, tantôt au contraire en constituent une modification, parfois avantageuses quelquefois malheureusement défavorable à l'égard des auteurs français.
(1) Cf. Archives Diplomatiques, n» 8 (août 1912).
120 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
En ce qui concerne d'abord l'étendue de la protection octwyée, c'està-dire la réponse aux deux questions : « Quelles oeuvres sont protégées ? », « Contre quel genre de reproductions le sont-elles ? », on s'est généralement contenté de calquer les dispositions de l'acte international de Berlin, et nous renvoyons par conséquent aux explications que nous avons fournies à ce,sujet dans notre rapport sur cette convention, présenté à la précédente législature (Impression, n° 3226, 17 mars 1910). Nous nous bornons à souligner par le tableau ci-après le parallélisme des deux documents :
Convention franco-russe. Convention de Berlin.
Art 2 (Nomenclature générale Art. 2 (§ 1 et art. 3.
des oeuvres protégées).
Art. 4 (Traduction protégée Art. 2, (§ 2).
comme oeuvre originale).
Art. 5 (Interdiction des appro- Art. 12.
priations indirectes).
Art. 6 (Articles de journaux Art 9 (§ 2 et 3).
protégés ou non).
Art. 7 (Chrestomathies). Art. 10.
Art. 8 (Indication obligatoire Art. 9 (§ 2).
des sources).
Art. n (Reproduction par des Art. 13.
instruments dé musique mécaniques).
Art. 13 (Cinématographes et Art. 14.
protection des films j.
C'est aussi à la Convention de Berlin que sont empruntés :
Convention franco-russe. Convention de Berlin.
Art. 16 (Réserve du droit de Art. 17.
police).
Art. 17 (Mesures transitoires). Art. 18.
Cette nomenclature, en somme fort étendue, n'appelle que peu d'observations. Dans deux cas seulement le texte renvoie expressément aux dispositions de la loi intérieure de chaque pays : c'est à propos des Chrestomathies (art. 7) et des instruments de musique mécaniques (art. 11). Pour les Chrestomathies et, en général, pour la reproduction d'extraits d'auteurs contemporains dans des « publications littéraires », nous devons prévenir nos nationaux que les dispositions de l'article 39 de la loi russe ne sont pas complètement rassurantes. Sans doute il n'est question que de « courts extraits » et d'oeuvres
CONVENTION FRANCO-RUSSE 121
« d'étendue peu importante ». On exige, en outre, que l'ouvrage où ces morceaux sont reproduits « forme un tout original » ou « poursuive un but pédagogique, scientifique ou technique ». Mais l'étendue réelle du dommage qui pourra être causé à nos éditeurs par ces emprunts licites dépendra essentiellement de l'esprit dans lequel les tribunaux russes interpréteront ces termes un peu élastiques.
D'autre part, en ce qui concerne les instruments de musique mécaniques, il importe de remarquer que l'article 42 de la loi russe, auquel renvoie l'article 11 de la convention, a consacré le système de la licence obligatoire, déjà introduit dans les récentes lois d'Allemagne et des Etats-Unis : en d'autres termes, la reproduction d'une oeuvre musicale sur un instrument mécanique exige bien, en principe, le consentement du compositeur, mais, lorsque celui-ci a accordé l'autorisation à un seul fabricant, tout fabricant du même genre établi en Russie a le droit de réclamer pour lui le même avantage, moyennant une indemnité fixée à l'amiable ou, à défaut, par le tribunal. Ces dispositions de la loi russe paraissent viser aussi bien les compositions musicales accompagnées de paroles que les airs de musique pure, à la différence de la convention de Berlin, qui, on le sait, n'admet de « réserves et de conditions » qu'en ce qui concerne ces derniers.
Notons, pour en finir avec ce chapitre de l'étendue de la protecr tion, que l'art industriel, qui n'est pas protégé par la loi russe du 20 mars 1911, ne figure pas davantage dans les stipulations de notre accord. Il serait imprudent, en effet, d'espérer tirer le principe d'une protection des termes de l'article 2 visant « toute production du domaine artistique, quel qu'en soit le mode et la forme de reproduction, et quels que soient le mérite et la destination de l'oeuvre. » A la vérité, ces derniers mots ont été exclus de la convention de Berlin, précisément afin d'écarter la protection absolue réclamée pour l'art industriel. Mais qu'elle qu'ait été, en les insérant dans le nouveau texte, la pensée de nos négociateurs, elle ne saurait prévaloir contre le principe général posé dans l'article premier : la convention ne protège dans chaque pays les ressortissants étrangers que dans les cas et dans la mesure où la loi protège ses propres nationaux. Or, nous l'avons dit et l'exposé des motifs (page 4) le confirme : « l'art industriel n'est pas protégé en Russie ». Il y a là une lacune infiniment regrettable pour notre industrie d'art qui continuera d'être librement et impunément mise au pillage sur les bords de la Neva. Espérons que les progrès mêmes de l'arc industriel de nos alliés leur suggéreront un jour prochain l'idée de le protéger, et, par contre-coup, de protéger le nôtre contre le parasitisme des contrefacteurs (1).
(1) Ce que nous disons de l'art industriel s'applique aussi à la protection de la propriété industrielle en général : cette protection, pour les étrangers, est, on le sait, tout à fait défectueuse en Russie. Nous nous contentons de cette brève indication et d'un souhait discret, la question ne rentrant pas dans la compétence de la Commission de l'enseignement.
Ï22 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
La protection, dans les limites que nous venons d'indiquer, est acquise à l'oeuvre d'art ou de littérature par le seul fait de son existence. La convention consacre dans son article 14 le principe posé par la convention de Berlin (art. 4) : que la jouissance des droits stipulés n'est subordonnée à l'accomplissement d'aucune formalité. Toutefois, trois exceptions sont apportées à cette règle, pour cadrer avec les dispositions de la loi intérieure russe (art. 33, 48, 60). La première concerne les oeuvres photographiques : celles-ci, pour être protégées, doivent porter une date et l'indication de la raison sociale, à moins qu'elles ne soient insérées dans un ouvrage publié (art. 12^. Les deux autres exceptions se rapportent aux traductions et à l'exécution des oeuvres musicales ; nous les retrouverons dans un instant.
Arrivons à la durée de la protection. Si la loi russe a, d'une manière générale, non sans des contestations vives et prolongées, fini par maintenir le délai de la loi française (50 ans après la mort de l'auteur ou du dernier des collaborateurs), elle comporte cependant d'assez nombreuses exceptions restrictives. La France aurait conclu un marché de dupe en consentant, dans tous les cas, aux auteurs russes, la protection quinquagénaire, alors que les auteurs français, pour des oeuvres similaires, n'obtiennent en Russie qu'une protection de moindre durée. Ici donc, comme dans la convention de Berlin (art. 7), on a admis la règle (art. 15) que si, en principe, la durée de la protection est déterminée par la loi du pays où on la réclame, elle ne pourra cependant être plus longue que celle qui est accordée dans le pays d'origine : en d'autres termes, la durée de la protection est toujours réglée par la loi la moins favorable.
Voici quelles seront, pour les auteurs français en Russie, les conséquences de cette règle, en laissant de côté pour l'instant ce qui concerne les traductions et les représentations dramatiques. La durée de la protection sera de :•
50 ans à partir de la publication pour les recueils de chansons, mélodies, proverbes, contes, etc. (loi russe, art. 13) ;
2 5 ans à partir de la publication pour les journaux, dictionnaires, almanachs, recueils variorum, considérés comme tels, sans préjudice du droit de 50 ans pour chaque auteur sur son oeuvre particulière (loi russe, art. 14) ;
25 ans à partir de la publication sur les recueils d'oeuvres photographiques présentant un intérêt artistique, historique ou scientifique (loi russe, art. 61) ;
TO ans à partir du tirage pour les oeuvres photographiques ordinaires (même art.).
La date de la publication est fixée conventionnellement au Ier janvier de l'année où l'ouvrage a été publié (art. 3, §). Cette règle, formulée à l'occasion des traductions doit, croyons-nous, s'appliquer à-
CONVENTION FRANCO-RUSSE Ï2J
tous les cas où le délai de protection part de la publication. Mais s'agit-il du Ier janvier ancien style ou nouveau style ? Les tribunaux français appliqueront-ils celui-ci et les tribunaux russes celui-là ? Nous posons la question sans la résoudre : sur ce point, une déclaration interprétative ne serait pas de trop.
III
Si intéressantes et si satisfaisantes que soient la plupart des dispositions que nous venons d'analyser, il faut bien avouer qu'elles ne présentent qu'une importance relative : le point essentiel, le point douloureux pour nos auteurs reste celui de la traduction. La langue russe est peu répandue en France ; la langue française, comme d'ailleurs la langue allemande, l'est beaucoup moins en Russie qu'il y a cinquante ou cent ans. La réimpression pure et simple d'une oeuvre russe en France, d'une oeuvre française en Russie, est donc peu à redouter. Le mode normal de propagation des oeuvres littéraires d'un des deux pays dans l'autre c'est, pour les ouvrages destinés â la lecture, la publication d'une traduction ; pour les oeuvres destinées à la scène, la représentation d'une traduction. Tant que nos auteurs et les auteurs russes -—■ car ce que nous disons de Sardou ou d'Anatole France s'applique tout aussi bien à Tchékhov ou à Gorkhi — ne seront pas protégés contre ce mode de contrefaçon, tant qu'on ne leur aura pas assuré non seulement une rémunération convenable, mais, ce qui leur importe peutêtre davantage, le moyen de surveiller l'intégrité et la valeur littéraire de la traduction de leurs oeuvres, rien de-sérieux n'aura été fait pour la défense des plus légitimes intérêts.
Traduire, est-ce reproduire ? Oui, répond le bon sens, et avec lui les jurisconsultes français ; non, ont soutenu longtemps les représentants des pays moins avancés ou moins féconds, que préoccupait surtout le souci de fournir à leurs compatriotes des instruments d'étude ou de culture littéraire. L'exposé des motifs du projet ministériel fait remarquer que, même dans les accords avec des Etats beaucoup mieux outillés au point de vue intellectuel que la Russie (Allemagne, 1883 ; Italie, 1884 ; Portugal, 1866), la durée de protection du droit de traduction a d'abord été resserrée en d'étroites limites. Il en fut de même dans la convention internationale de Berne en 1886, et c'est seulement lors de la revision de 1908 que l'assimilation complète de la traduction à la reproduction est venue assurer aux auteurs une protection efficace. Encore a-t-il fallu permettre aux Etats contractants de faire sur ce point des réserves et de s'en tenir aux stipulations de 1886 et de 1896.
La question du droit de traduction a été la pierre d'achoppement de toutes les négociations précédemment tentées entre le gouvernement russe et les puissances étrangères. Elle a failli devenir la pierre d'achoppement de celle-ci. Le résultat final, péniblement obtenu, ne doit être
124 L0IS ET DOCUMENTS DIVERS
considéré que comme une première étape, comme l'amorce de progrès futurs.
L'article 33 de la loi russe de 1911 accorde aux auteurs russes un droit exclusif de traduction sur leurs oeuvres pendant dix ans,.à partir de la publication, sous deux conditions : i° qu'ils se soient réservé ce droit sur le titre ou dans la préface de l'ouvrage original ; 2° qu'ils l'aient exercé effectivement, en faisant traduire l'ouvrage, dans les cinq ans de la publication. Quand on arriva à l'article qui-porte aujourd'hui le numéro 35, le texte du projet du gouvernement russe, examiné et amendé par la Commission de la Douma, était ainsi conçu : « Les oeuvres publiées à l'étranger peuvent être traduites en Russie, soit en russe, soit en d'autres langues, à moins que le contraire ne soit stipulé dans les traités conclus par la Russie avec les puissances étrangères. » Le 3 juin 1909, la Douma, à une faible majorité, supprima la partie de la phrase, en italique, proclamant ainsi le principe de la liberté absolue de traduction des oeuvres étrangères et écartant la possibilité de l'atténuer par des conventions internationales. De vives protestations furent élevées contre ce vote étroitement nationaliste, non seulement par notre Société des gens de lettres et par les Congrès internationaux de Copenhague (1909) et de Luxembourg (1910), mais par des écrivains russes eux-mêmes, au premier rang desquels il faut nommer l'éminent historien du droit, Kowalevsky, et l'infatigable champion de la propriété littéraire, Séménoff. Cependant la question avait été soumise au Conseil de l'empire, chargé d'examiner le projet voté par la Douma. Après de remarquables discours de MM. Kowalevsky, Grimm et Kon, le Conseil décida de modifier la rédaction de l'article 35 et d'y inscrire à nouveau la faculté pour le Gouvernement de conclure des traités avec des puissances étrangères accordant une protection réciproque aux auteurs contre le droit de traduction à condition que « "dans les conventions de cette nature, on ne puisse reconnaître aux ressortissants étrangers des droits plus étendus que ceux dont jouissent les Russes par application de l'article 33 de la présente loi. » Ce compromis^ imaginé en décembre 1910, ratifié par la Commission mixte de la Douma et du Conseil de l'empire, fut enfin accepté par la Douma elle-même ; il a fourni le texte définitif de l'article 3 5 de la loi.
L'article 3 de la Convention franco-russe fait application, en faveur des auteurs des deux pays, de la protection facultative et limitée prévue par l'article 35 de la loi russe. En combinant ses dispositions avec celles de l'article 33 de la même loi, on voit donc que l'auteur français sera protégé contre la traduction illicite de son oeuvre en Russie (et, bien entendu, réciproquement l'auteur russe en France) pendant dix ans à compter de la publication à condition : i° de réserver son droit sur la page du titre ou dans la publication. C'est assurément un sérieux progrès sur le régime actuel de piraterie,, mais un progrès encore bien insuffisant. Et malheureusement cette protection, déjà si étriquée, subit une restriction encore plus forte dès qu'il s'agit d'un ouvrage
CONVENTION FRANCO-RUSSE 125
scientifique, technique ou pédagogique, c'est-à-dire, au fond, de toute publication originale n'ayant pas le caractère d'une oeuvre d'imagination. Pour cette importante catégorie d'ouvrages (1), que l'Académie des sciences de Pétersbourg voulait exempter purement et simplement de toute protection dans l'intérêt de. la diffusion de la science en Russie, la durée de protection reste bien fixée à dix ans, mais c'est dans un délai de trois ans que l'auteur devra exercer son droit pour le conserver. Il sera bien rare que la réputation d'un ouvrage scientifique s'impose assez vite pour que dans les trois ans de sa publication il soit assuré de trouver un traducteur.
Comme la traduction, la représentation ou exécution publique d'une oeuvre n'est, au fond, qu'une "variété de reproduction. Les restrictions apportées à la défense contre les traductions illicites ont naturellement exercé un contre-coup fâcheux sur les représentations des oeuvres dramatiques ou dramatico-musicales. Le droit de traduction n'étant protégé que pendant un délai beaucoup plus court que le droit d'auteur sur l'original, l'article 9 de la Convention dispose que les auteurs ne seront protégés contre la représentation publique de la traduction d'une oeuvre dramatique ou d'un opéra que pendant la durée de ieur droit de traduction (dix ans) et à condition de l'avoir exercé dans les cinq ans. C'est la même règle que consacrait le texte primitif de la Convention de l'Union internationale de Berne (1886). Le résultat est médiocre ; il constitue néanmoins un progrès. Espérons que nos amis russes, en y réfléchissant davantage, arriveront à comprendre que ce progrès en appelle un second ; ils n'auront pour cela qu'à se pénétrer des belles paroles prononcées à la conférence de Berlin par M. Paul Hervieu, président de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques : « Le droit que les auteurs et les artistes ont ici à faire valoir, disait notre compatriote, est de l'essence la plus noble et la plus délicate : c'est le droit d'exercer une surveillance même lointaine et le contrôle artistique sur leur oeuvre d'art ; c'est le droit que leur'rêve et leur pensée ne soient pas présentés au public malgré eux, contre leur sentiment et leur conscience, dans des conditions qui "peuvent être inadmissibles ; c'est le droit que leur réputation, leurs titres à la renommée, ne risquent pas d'être dénaturés par la fantaisie, la négligence, la parcimonie, l'incapacité (2). »
Les observations de M. Hervieu s'appliquent avec autant de force à l'exécution publique des oeuvres purement musicales qu'à celle des oeuvres dramatiques. La nouvelle Convention, dans son article 10,
(1) Sans doute M. Kowale'sky a montré que sur le total des traductions publiées en Russie, le nombre des ouvrages proprement scientifiques n'excède pas 3 1/2 „/° ; mais il faut remarquer que ce sont les ouvrages de ce genre qui coûtent le plus de peine et rapportent le rrioins de profit aux auteurs comme aux éditeurs.
(2) Actes de a Conférence réunie à Berlin, page 175. (Séance du i5 octobre 1908.)
Î2è LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
s'est montrée en apparence plus généreuse pour celles-là que pour celles-ci. La protection accordée aux musiciens atteint la durée normale de cinquante ans,- mais à la condition que l'auteur ait indiqué « sur chaque exemplaire imprimé de l'ouvrage » qu'il en interdit l'exécution publique sans son assentiment. On se demande comment cette restriction jouera lorsqu'il s'agira d'une partition orchestrale, dont les exemplaires, comme il arrive si souvent, sont manuscrits et non pas imprimés ou gravés (i). D'autre part, venenum in cauda, le deuxième alinéa de l'article 10 est ainsi conçu : « Les exceptions à cette disposition seront réglées par la législation intérieure de chacun des deux pays contractants ». Or, en se reportant à l'article 50 de la loi russe, on apprend que « l'exécution publique d'une oeuvre musicale peut avoir lieu sans le consentement de l'auteur : i° si cette exécution n'est pas donnée dans le but de réaliser un profit direct ou indirect : 2° si elle a lieu au cours des fêtes populaires ; 30 si la recette est exclusivement destinée à un but de bienfaisance et que les exécutants ne reçoivent aucune rémunération ». L'intention qui a dicté ces exceptions est sans doute excellente, mais on conçoit qu'une interprétation trop large, surtout du deuxième cas, puisse engendrer de regrettables abus.
Telles sont, Messieurs, dans leur ensemble les stipulations du nouvel accord. Conclu pour une durée de trois ans seulement, à partir de sa mise en vigueur, mais susceptible de reconduction tacite d'année en année, il comporte, nous l'espérons fermement, de larges et prochaines améliorations. Ces améliorations pourront résulter de nouveaux arrangements conventionnels entre la France et la Russie ; elles pourront aussi se produire automatiquement : 1° par la revision de la loi russe intérieure, puisque l'article premier de la Convention stipule que les ressortissants des deux pays jouiront des droits que les lois respectives accordent ou accorderont par la suite, aux nationaux ; 2° du fait d'accords conclus ultérieurement par la Russie avec d'autres puissances et qui pourraient contenir des dispositions plus favorables aux auteurs que celui-ci : l'article 19 renferme, en effet, la clause de la nation la plus favorisée, à charge, bien entendu, de réciprocité.
On excepte, il est vrai, de cette dernière disposition les avantages qui seraient concédés en vertu de conventions d'union internationale. Mais il n'est pas défendu d'espérer que cette clause même, les heureux
(1) Il semble que, sur ce point, une erreur de langage ait été commise dans la rédaction du traité, car l'article correspondant de la loi russe (art. 48) parle simplement d'une mention sur chaque exemplaire, sans spécifier s'il s'agit d'exemplaires imprimés ou manuscrits.
CONVENTION FRANCÔ-RUSSË 127
effets du nouveau régime contractuel, les progrès de la réflexion juridique et économique, le développement de la production artistique et littéraire de la Russie inclineront de plus en plus l'opinion publique de ce grand pays vers la solution la plus large et la plus simple, l'adhésion à l'Union internationale de Berne que déjà, au Congrès de Berlin, son délégué officieux, M. Boulatzell, envisageait comme éventuelle (1).
Depuis longtemps, dans le cénacle des pays qui ont apporté la contribution la .plus large à la formation de l'âme moderne, une place d'honneur est marquée à la patrie de Tourguénief et de Tolstoï, de Moussorgrski et de Rubinstein, de Vereschaguine et'd'Antokolski. En attendant qu'elle se décide à s'y asseoir, nous la félicitions et nous nous félicitons du pas décisif qu'elle vient d'accomplir dans la voie du respect international du droit d'auteur. Sans dissimuler notre regret que nos négociateurs n'aient pas pu, du premier coup, obtenir davantage pour nos romanciers et nos dramaturges et n'aient rien obtenu pour notre art industriel, nous saluons dans ce traité — le premier, répétons-le, que la Russie ait conclu sous le régime de sa nouvelle législation nationale — à la fois un nouveau témoignage et un nouveau facteur de la profonde sympathie qui unit les deux nations alliées et de l'étroite solidarité de leurs intérêts. La Chambre n'hésitera pas à ratifier un accord précieux par les résultats dès à présent acquis, plus précieux encore par les perspectives qu'il ouvre et les hautes espérances qu'il justifie.
En conséquence, nous avons l'honneur de proposer à l'adoption de la Chambre le texte de loi ci-après :
PROJET DE LOI
ARTICLE UNIQUE
Le Président de la République est autorisé à ratifier et, s'il y a lieu, 1 faire exécuter la convention signée à Paris, le 29 novembre 1911, entre la France et la Russie, pour la protection des oeuvres artistiques et littéraires.
Une copie authentique de ce document demeurera annexée à la présente loi.
(i) Actes de la Conférence réunie à Berlin, page 149. D'après Le droit d'auteur du j5 décembre 1911, le nombre total des ouvrages publiés en Russie pendant l'année 1910 s'élevait à 29.057 dont 22,321. en .russe. Il y avait, en outre, 2.3gi journaux et r.817 revues, dont environ les trois quarts en langue russe. Il faut dire que, en ce qui concerne les « ouvrages », cette statistique n'est pas exactement comparable à celle des pays occidentaux, parce que l'on y fait figurer une quantité d'imprimés {catalogues, programmes, statuts de sociétés, livraisons séparées d'un même ouvrage, etc.), qui ailleurs n'entrent pas en compte. Voici pour l'année 19io les Chiffres des autres grands pays : France, 12.615 ouvrages ; Grande-Bretagne, 10.864.; Etats-Unis, 13.470;'pays de langue allemande, 3i.281 ; Italie, 6.788.
128 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Extraits du Rapport fait à la Chambre des Députés par M. Paul Desehanel, député d'Eure-et-Loir sur lé projet de budget du Ministère des Affaires Étrangères pour l'exercice 1913.
Messieurs,
Enfin, la réforme des traitements est accomplie. Les traitements de poste vont être transformés en traitements de grade, avec indemnités de cherté de vie. Les traitements insuffisants vont être relevés. Cela, sans qu'il en coûte un centime aux contribuables, au moyen dés ressources nouvelles (près de 2 millions) procurées au Trésor par.la réforme des tarifs de chancellerie.
Nous remercions les membres éminents de la Commission des tarifs qui, depuis plusieurs années, nous ont prêté leur précieuse collaboration. Nous remercions aussi M. Raymond Poincaré, Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères, et M. Klotz, Ministre des Finances, d'avoir répondu au voeu de la Commission du budget en utilisant ces ressources nouvelles pour améliorer les traitements de nos agents.
Nous espérons que les crédits affectés aux loyers des chancelleries seront relevés, dans l'exercice prochain, par le même moyen.
* * * •
La Commission du budget, désirant mettre la Chambre en mesure de discuter le budget dans le plus bref délai possible,' a demandé aux rapporteurs de se borner à l'examen des chapitres.
Nous nous sommes conformé au désir de la Commission.
CHAPITRE PREMIER
Traitement du Ministre et Personnel de l'Administration centrale
i Crédit demandé pour 1913. . . ." . . . . 853.700 fr.
Crédit voté en 1912 . . . 838.200 »
Crédit proposé par la Commission 915.652 »
Dans ses propositions budgétaires pour l'exercice 1913, le Gouvernement avait sollicité un relèvement de. .... 15.500 fr. ainsi réparti :
PROJET DE BUDGET 129
i° Augmentation du traitement du contrôleur (de 5.000 fr. à 8.500 fr.) 3.500 fr.
20 Création d'un emploi de commis pour le service du contrôle 3.000 fr.
4° Transfert du traitement de l'inspecteur du matériel de l'ambassade ottomane, du chapitre 19 au chapitre premier. Assimilation à un emploi de commis comptable (de 2.000 fr. à 4.000 fr.) 3.000 fr.
3° Transfert du traitement du rédacteur chargé de la préparation des travaux relatifs à la Cour de La Haye, du chapitre 30 au chapitre premier, assimilation à un emploi de rédacteur (de 5.000 fr. à 7.000 fr.). ............. 6.000 fr.
La Commission du budget a admis le principe du relèvement du traitement du contrôleur des dépenses engagées pour le porter au chiffre de 8.500 francs, inscrit dans les budgets des autres Ministères :
Augmentation 3.500 fr.
Elle a également reconnu l'utilité du transfert des chapitres 19 et 30 au chapitre premier d'une somme de 9.000 »
12.500 fr.
Par contre, elle a rejeté les crédits destinés à la création d'un emploi de commis de contrôle : diminution 3.000 fr.
Au cours de l'examen du présent chapitre, les deux points suivants ont spécialement attiré notre attention :
i° Nous nous sommes préoccupé de l'emploi d'une somme de 6.600 fr.
inscrite au budget de 1912 sous la rubrique divers salaires.
La Commission du budget a été amenée à reconnaître que ce crédit était très inférieur aux dépenses qu'il était destiné à régler (traitements d'auxiliaires, part contributive de l'Etat pour la constitution de certaines retraites) et que, par conséquent, le Département devait imputer l'excédent des dépenses compris sous cette rubrique, sur les reliquats du chapitre provenant de la . différence entre les traitements réels et le chiffre des traitements moyens inscrits au budget.
La Commission estime que ces procédés de compensation ne doivent pas être admis. La loi de finances de 1912 a déjà posé en principe que les reliquats sur les chapitres des traitements ne pouvaient être affectés ni à la rémunération de travaux extraordinaires, ni au payement de gratifications.
ARCHIVES DIPLOH., t. 122, n°! 3-6-7, mai-juillet 1912. 9
I30 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
L'application de cette règle doit être étendue et généralisée.
On ne saurait donc imputer sur les disponibilités du chapitre premier des traitements d'auxiliaires ou toutes autres dépenses accessoires sur lesquelles le Parlement n'aurait pas été amené à se prononcer. Nous avons donc pensé qu'il convenait d'inscrire, au chapitre premier les crédits suffisants pour faire face à toutes les dépenses du chapitre, sauf à laisser tomber en annulation en fin d'année les crédits non utilisés.
Les dépenses actuellement imputées sur les disponibilités du chapitre premier, ainsi que sur le crédit de 6.600 francs, se répartissent comme suit :
4 commis auxiliaires permanents à la comptabilité 6.200 fr.
4 auxiliaires temporaires (commis ou dames dactylographes) 6.200 »
Contribution de l'Etat pour versement à la Caisse nationale des retraites sur le traitement des dames dactylographes (5 o/° sur 33.600 francs). .... 1.680 »
Contribution de l'État pour application de la loi sur les retraites ouvrières (8 auxiliaires à 9 francs).... 72 »
Total 14.152 fr.
Le chapitre premier ne disposant pour ces emplois que du crédit inscrit au budget de.. 6.600 fr.
et de l'économie déjà réalisée sur le traitement d'un chet de division remplacé par un sous-directeur. . . . 1.000 »
Soit 7.600 fr. 7.600 »
La réforme proposée devait amener une inscription supplémentaire au budget de 6.552 fr.
La Commission l'a adoptée, pour consacrer un principe à l'application duquel elle attache une particulière importance.
20 Le Parlement s'est, à différentes reprises, élevé contre le maintien à l'administration centrale des Affaires étrangères d'agents non payés. Or, le classement des dossiers et la recherche des pièces sont confiés actuellement à de jeunes-élèves vice-consuls non rétribués et remplacés dès qu'ils sont pourvus d'un poste à l'étranger.
Cette organisation présente des inconvénients sur lesquels il est inutile d'insister. Il est indispensable que le service essentiel du classe^ ment soit assuré par des fonctionnaires permanents choisis dans les cadres en raison de leurs aptitudes.
PROJET DE BUDGET 131
Cette réforme était à l'étude depuis longtemps, la Commission a pensé qu'elle devait l'incorporer dans le budget de 1913.
Sa réalisation nécessite un crédit de 58.400 francs qui se décompose comme suit :
4 secrétaires archivistes de 4.000 à 7.000 (5.5000 22.000 fr.
7 attachés classeurs de 3.000 à 5.000 (4.000) 28.000 »
2 commis expéditionnaires de 2.000 à 4.000 (3.000) 6.000 »
Une dame dactylographe, de 1.800 à 3.000(2.400) 2.400 »
Total 58.400 fr.
En résumé, la situation du chapitre premier se présente ainsi :
i° Crédits votés en 1912. . . . 838.200 fr.
2° Augmentations acceptées par la Commission :
Relèvement du traitement du contrôleur 3-5oo fr.
Transferts des chapitres 19 et 30 pour régularisation 9.000 »
Augmentation pour parfaire la rétribution des auxiliaires 6.552 »
Crédit nécessaire pour l'organisation du service du classement 58.400 »
Soit 774S 2 »
Crédits proposés par la Commission 915.652 fr.
CHAPITRE 2
Indemnités et gratifications au personnel de f administration centrale
Crédit demandé pour 1913 21.200 tr.
Crédit voté pour 1912 21.200»
Crédit proposé par la Commission 21.200 »
I32 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
CHAPITRE 3
Personnel de service
Crédit demandé pour 1913. . . ... . . 160.000 fr.
Crédit voté pour 1912 160.000 »
Crédit proposé par. la Commission 160.000 »
Le chapitre 3 est exclusivement réservé aux traitements et salaires du personnel de service.
La dernière annuité de 6.000 francs du crédit de 30.000 francs sollicité pour améliorer la situation du personnel de service, a été incorporée au budget de 1912. Il n'est donc demandé aucune augmentation de crédit pour l'exercice 1913.
Le décret prévu pour régler la situation du personnel de service, qui est en ce moment à l'étude, consacrera les augmentations accordées par le Parlement.
-*£>*
CHAPITRE 4
Indemnités et gratifications au personnel de service
Crédit demandé pour 1913. : . . . . . . 25.800 tr.
Crédit voté pour 1912 25.000 »
Crédit proposé parla Commission. . . . . . 25.800 »
L'augmentation de crédit de 800 francs qui est sollicitée est la conséquence d'une entente intervenue entre le Sous-Secrétariat des Postes et Télégraphes et le Département des Affaires étrangères.
Elle permettra de substituer, pour le service du standard téléphonique du Ministère, un facteur adulte à un jeune facteur téléphoniste. On aura ainsi un agent toujours au courant du fonctionnement des appareils, capable de dresser les jeunes facteurs dont le cadre est si instable et d'assurer d'une façon convenable les communications téléphoniques.
La Commission a reconnu que cette augmentation était nécessaire au bon fonctionnement du service et l'a accordée.
CHAPITRE. 5 Matériel et impressions
Crédit demandé pour 1913 272.000 fr.
Crédit voté en 1912. . . ....'. .' 272.000 »
Crédit proposé'par la* Commission. ...... 272.000 »
PROJET DE BUDGET 13 3
CHAPITRE 6
Archives. — Bibliothèque. — Publication de documents diplomatiques
Crédit demandé pour 1913 43.000 fr.
Crédit voté en 1912. 43.000 »
Crédit proposé par la Commission. . . . ... . 43.000 »
CHAPITRE 7
Dépenses secrètes .
Crédit demandé pour 1913 1.000.000 fr.
Crédit voté en 1912 1.000.000 »
Crédit proposé par la Commission 1.000.000 »
[CHAPITRE 8
Personnel des services extérieurs
Crédit demandé pour 1913 8.738.700 fr.
Crédit voté en 1912 8.134.700 »
Crédit proposé par la Commission 8.738.700 »
L'augmentation de 604.000 francs prévue pour ce chapitre se décompose comme suit :
' i° Crédits nouveaux 580.000 fr.
20 Transfert du chapitre 9 24.000 »
Le Président du Conseil, Ministre des Affaires Etrangères, sollicite du Parlement une augmentation de 580.000 francs sur le chapitre VIII, afin de substituer le traitement de grade au traitement de poste pour les agents des postes ou emplois des services extérieurs, comme la Commission du budget et son rapporteur le demandent depuis plusieurs années.
Cette substitution est liée : i° à la revision de la liste actuelle des postes ou emplois, dont une partie sera, au fur et à mesure des possibilités, supprimée ou transformée ; 2° à la réduction des cadres di-
134 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
plomatiques et consulaires, réduction qui s'impose par suite de la diminution du nombre des emplois.
La revision ainsi faite permettra de disposer des crédits nécessaires pour augmenter le traitement afférent aux emplois des services extérieurs, pour la plupart insuffisamment rétribués, comme nous l'avons exposé à maintes reprises dans nos rapports et comme le Parlement l'a reconnu.
Les émoluments alloués aux agents des services extérieurs se composeraient de trois parties : ,
i° Un traitement de grade, que l'agent conserverait intégralement, soit lorsqu'il se trouverait à son poste, soit lorsqu'il serait en congé ;
2° Un traitement de poste ou d'emploi qui serait attribué au chef de poste, lorsqu'il serait présent, et, lorsqu'il serait absent, à l'intérimaire ;
3° Une indemnité de cherté de vie, variant selon une échelle fixée par catégories de postes et par grade. Les catégories seraient au nombre de huit, la huitième comprenant les postes où la cherté de vie est la plus grande.
Les traitements de grade et d'emploi, l'échelle de cherté de vie figurent dans les tableaux de développement du budget de 1913, avec la liste revisée des postes et emplois.
On constate ainsi que cette réforme exigerait, en définitive, l'augmentation demandée de 580.000 francs.
Il est toutefois indispensable de faire remarquer que la réforme nécessiterait, pour être accomplie, un délai de quelques années. Le point important est que le Ministre des Affaires étrangères prenne les mesures nécessaires pour qu'elle s'accomplisse maintenant de façon absolument certaine. Ces mesures seraient les suivantes :
i° La liste des postes ou emplois étant fixée par un décret, tout poste ou emploi qui ne figurerait pas dans cette liste serait supprimé, aussitôt que la vacance s'en produirait. Il y a là une amélioration de la situation antérieure, où l'on n'avait pas prévu de délai pour la suppression des emplois.
2° La quotité des cadres étant fixée par un second décret, les cadres actuels seraient progressivement diminués, chaque fois qu'une vacance aurait lieu, d'après une proportion à déterminer par des mesures transitoires. Il est absolument impossible, en effet,' de prévoir la réalisation immédiate de pareilles mesures, puisqu'il faut également envisager les droits acquis des agents en cause.
30 La réglementation établissant le traitement de grade serait immédiatement mise en vigueur, sans qu'on puisse toutefois, bien entendu, porter dès ce moment aux chiffres prévus le total des émoluments de tous les postes ou emplois. Il faudrait :
PROJET DE BUDGET 135
a) Appliquer dès la promulgation du budget, l'augmentation prévue de 580.000 francs, en réalisant une première partie du programme de réforme ; on fixerait par exemple aux chiffres qu'ils doivent atteindre les traitements des postes ou emplois de certaines régions à déterminer, en commençant par les emplois inférieurs ;
h) Utiliser ensuite trimestriellement les disponibilités produites par les suppressions ou transformations de postes ou d'emplois pour continuer jusqu'à exécution complète le programme de transformation des traitements.
La Commission a accordé d'une part le crédit nouveau de 580.000 francs, et a autorisé le transfert, du chapitre 9 au chapitre 8, de la somme de 24.000 francs.
CHAPITRE 9
Indemnités et gratifications au personnel des services extérieurs
Crédit demandé pour 1913 183.300 fr.
Crédit voté en 1912 207.300 »
Crédit proposé par la Commission 183.300 »
Le transfert d'une somme de 24 francs, du chapitre 8 au chapitre 9, est motivé par le fait qu'en appliquant à tous les agents le traitement de grade, on les placera tous sous le même régime. A l'heure actuelle, les consuls suppléants reçoivent un traitement fixe de 5.000 francs, et une indemnité fixe de 2.000 francs, quel que soit le poste auquel ils sont affectés. Pour eux, moins encore que pour les autres agents- du corps consulaire, on a tenu compte jusqu'ici des conditions de cherté de vie qui diffèrent tant selon les pays.
Les consuls suppléants devant, d'après le projet de réforme des traitements, recevoir désormais un traitement de grade et une indemnité de cherté de vie comme tous les autres agents, il n'y a pas de raison de faire à l'avenir une exception pour eux, et il y a lieu d'imputer l'ensemble de leurs émoluments sur le même chapitre que ceux de tous les agents de l'extérieur.
CHAPITRE 10
Personnel à la disposition du Ministre et en disponibilité
Crédit demandé pour 1913. . 120.000 fr.
Crédit voté en 1912 120.000 »
Crédit proposé par la Commission 120.000 »
136 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
La situation de « mise à' la disposition du Ministre » est réglée par les décrets des 31 décembre 1901 et 8 septembre 1907 ; la disponibilité est réglée par les décrets des 26 avril 1880 et Ier avril 1882.
La disposition ne peut durer plus d'une année.
La- disponibilité peut se prolonger un laps de temps égal à la durée des services de l'agent sans dépasser dix ans. Toutefois, la disponibilité avec traitement ne peut se prolonger que pendant trois ans ; ce délai est porté à cinq ans en cas de suppression d'emploi.
CHAPITRE 11
Frais de représentation
Crédit demandé pour 1913 1.580.000 fr.
Crédit voté en 1912 1.550.000 »
Crédit proposé par la Commission 1.580.000 »
La Commission de revision des dépenses des postes à l'étranger, instituée dansje courant de 1911,'a constaté l'insuffisance de la dotation de ce chapitre.' Les'exercices i9ioeti9ii n'ont pu sey solder que par des crédits'supplémentaires. Pour 1912, l'Administration a pris les mesures nécessaires pour maintenir les dépenses dans la limite des crédits votés. Mais plusieurs chefs de mission ont fait valoir des observations dont il est équitable de tenir compte.
Il y a lieu de remarquer.qu'aux termes.d'engagements précédents, le crédit réservé aux dépenses de service (chap. 17) devait être, en 1913, augmenté de 100.000 francs. Le Département a pensé qu'il pouvait surseoir à cette demande et qu'il affecterait plus utilement une partie de ce crédit aux frais de maison des missions diplomatiques.
Depuis le Ier janvier 1912, le Département est revenu, pour.le payement de l'ensemble des frais de représentation, au régime forfaitaire qui avait été partiellement abandonné, notamment pour les dépenses de chauffage et d'éclairage, réglées sur états depuis 1910. Des agents s'étant plaints de l'insuffisance des nouveaux forfaits, l'augmentation de 30.000 francs demandée parle Gouvernement pourra servir à réparer certaines erreurs. La Commission a accordé l'augmentation demandée par le Gouvernement. " -.''-■ .........
CHAPITRE 12
Missions
Crédit demandé pour 1913. >.'.*. 40.000 fr.
Crédit voté en 1912 40.000 »
Crédit proposé parla> Commission 35.000 »
PROJET DE BUDGET 137
Au cours de ces dernières années, la dotation du présent chapitre a présenté d'importantes variations :
De 1875 à 1903 100.000 fr.
De 1904 à 1907 90.000 »
De 1908 à 1910 94.000 »
En 1911 79.000 »
En 1912 40.000 w
Pour l'exercice prochain, le Département demande l'ouverture du même* crédit de 40.000 francs.
Voici l'emploi de cette somme en 1912 :
i° Un ministre plénipotentiaire chargé d'étudier les mesures propres à développer les relations entre nos postes et les groupements, commerciaux, financiers et industriels français. . . . 12.000 fr.
20 Un consul chargé de mission commerciale en Espagne et Portugal
30 Un vice-consul chargé de mission en Italie. . 8.000 »
40 Un sous-chef chargé de visiter les postes consulaires d'Europe pour vérifier les mesures qui ont été prises et rechercher les améliorations à apporter pour la conservation de certains documents dont ils sont détenteurs 10.000 »
Total. 40.000 fr.
Malgré la diminution de 39.000 francs imposée au budget de 1912 au chapitre des Missions, la Commission du budget a reconnu qu'il était possible d'opérer sur le présent chapitre une nouvelle réduction de 5.000 francs.
CHAPITRE 13
Secours
Crédit demandé pour l'exercice 1913 200.000 fr.
Crédit voté en 1912 200.000 »
Crédit proposé par la Commission 200.000 »
I38 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS '
Répartition des secours fixés accordés en 1912 sur les fonds du Ministère des Affaires Etrangères.
Ambassadeur. 1 veuve.
Ministres plénipotentiaires. ... 4 veuves.
5 fils ou filles. Secrétaires d'ambassade 2 anciens secrétaires.
1 veuve.
Consuls généraux 2 anciens consuls généraux.
17 veuves. 15 fils ou filles.
2 nièces. Consuls 2 anciens consuls.
23 veuves.
40 fils ou filles.
2 petites-filles.
1 mère.
3 soeurs.
Vice-consuls 11 veuves.
Chanceliers et élèves chanceliers . 2 anciens chanceliers.
20 veuves.
2 fils ou filles. Drogmans et interprètes .... 4 drogmans.
■ ■ 8 veuves.
1 interprète.
1 mère d'interprète.
Commis de chancellerie 4 anciens commis.
8 veuves. 1 belle-mère.
1 soeur. Agents consulaires 2 veuves.
4 fils ou filles.
Personnel subalterne des ambassades et consulats 20 cawas, portiers, gardiens, concierges, etc.
38 veuves.
2 filles.
PROJET DE BUDGET I39
Administration centrale 8 anciens employés.
9 veuves.
1 belle-fille.
1 ancien architecte du départetement.
1 ancien inspecteur de l'Ambassade
l'Ambassade
9 gardiens de bureau, concierges, huissiers, etc. 25 veuves. 4 courriers-facteurs.
2 veuves.
3 folioteuses. 1 lingère.
CHAPITRE 14
Indemnités de loyer
Crédit demandé pour 1913 575.000 fr.
Crédit voté en 1912 574.000 »
Crédit proposé par la Commission . . . . . . . 575.000 »
Des critiques nombreuses et justifiées ayant été adressées au Département des Affaires Etrangères contre l'installation de certains postes diplomatiques et des bureaux consulaires à l'étranger, cette Administration décida de prendre des mesures pour que les missions et consulats français fussent désormais logés dans des locaux plus grands, mieux situés, sans luxe dispendieux, mais de façon à faire honneur à notre pavillon.
A cet effet, une augmentation de crédit de 180.000 francs fut sollicitée. Le Parlement voulut bien accueillir cette demande, mais décida que la réforme serait effectuée en trois ans.
Le budget de 1911 comporta une majoration de 60.000 francs. Celui de 1912 fut également augmenté de 60.000 francs. Pour 1913, le Département demande l'inscription au budget de la dernière annuité, 60.000 francs.
D'autre part, il propose sur le présent chapitre une annulation de 59.000 francs.
Aux termes de la loi du 15 décembre 1911, l'Etat français a été autorisé à faire l'acquisition du Palais Farnèse, pour l'installation définitive des services de l'ambassade de la République à Rome.
■ 140 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Cette acquisition rend disponible le crédit inscrit au budget des Affaires étrangères pour frais de loyer'de l'immeuble,
soit 59.000 fr.
Les modifications apportées au chapitre 14 pour 1913 se résument comme suit :
Augmentatioii 60.000 fr.
Annulation \ . 59.000 »
Différence en plus. . 1.000 fr.
Parmi les postes qui, en 1912, ont bénéficié de l'augmentation de 60.000 francs, nous citerons ceux dont l'indemité de loyer a été relevée de plus de 1.000 francs.
Bogota 2.000 fr. d'augmentation.
Mexico 2.000 » —
Montevideo 7.000 » ■—
Santiago-du-Chili .• 2.200 » ■—
Sofia 4.000 » —
Calcutta 1.500 » —
Johannesburg 1.000 » — .
Quito. 1.800 » —
Santo-Domingo. 1.800 » —■
Bombay. ........... 1-350 » —
Buenos-Aires 4.000 » —
Cordoba 1.800 » —
Harrar. . . i.oôo » —
Mexico 4.500 » .•—
Nouvelle-Orléans 1.000 » —
Saint-Paul 2.500 »
Kobé, 1.200 » —
CHAPITRE 15 ,
Frais d'établissement
Crédit demandé pour 1913 500.000 fr.
Crédit voté en 1912 500.000 »
Crédit proposé par. la Commission. ...... 500.000 »
PROJET DE BUDGET I4I
Ce chapitre comporte les crédits servant à allouer aux agents diplomatiques et consulaires des frais d'établissement et des frais d'installation. Les premiers concernent la personne de l'agent (uniforme, garde-robe coloniale, etc.) et les secondes s'appliquent à l'installation matérielle proprement dite (mobilier, aménagement, etc.) Ces deux sortes de frais ont été séparées pour la première fois en 1876, les textes postérieurs à cette date ont maintenu la distinction.
Le règlement actuellement en vigueur est le décret du 6 octobre 1906.
Les frais d'établissement varient suivant l'importance du poste auquel sont appelés les agents. De 10.000 francs pour les ambassadeurs, ils ne sont que de 600 francs pour les élèves-consuls, les élèves vice-consuls, les élèves interprêtes et les commis de chancellerie.
Les frais d'installation sont déterminés d'après l'importance du poste et la zone géographique dans laquelle il se trouve. Ils s'acquièrent au bout de 8 ans dans la première zone (Europe, sauf la Russie, Méditerranée, sauf la Tripolitaine et l'Egypte, Iles Canaries), de 5 ans dans la deuxième zone (Russie, Chine septentrionale, postes hors d'Europe jouissant d'un climat tempéré) et de 3 ans dans la troisième zone (autres postes). Ces zones sont donc établies en considération de deux facteurs : la distance et le climat.
Pour les chefs de famille ayant emmené leurs enfants mineurs, les frais d'installation sont majorés d'un dixième par tête, avec maximum de trois dixièmes ; il en est de même si l'agent recueille sous un toit des ascendants, frères mineurs ou soeurs dont il est l'unique soutien. Il y a par contre réduction d'un cinquième si l'agent est veuf ou célibataire, du quart ou de moitié s'il habite un immeuble appartenant à l'Etat, partiellement ou complètement meublé.
Tout agent qui, dans un même poste, a prolongé son séjour pendant 2, 4 ou 6 ans, suivant la zone a enfin droit à des seconds frais d'installation égaux à la moitié de ceux qui ont été antérieurement alloués.
Ajoutons que le règlement de 1906 a accordé aux agents subalternes (chanceliers, interprètes, élèves et commis) des frais d'installation qu'ils ne recevaient pas auparavant.
CHAPITRE 16
Frais de voyages et de courriers
Crédits demandés pour 1913 ......... 794.000 fr.
Crédits accordés pour 1912 794.000 »
Crédit proposé par la Commission 794.000 »
142 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Les dépenses qui incombent à ce chapitre budgétaire sont évaluées comme suit ;
Frais de voyages 614.000 fr.
Frais de courriers 160.000 »
Frais de funérailles des agents décédés à l'étranger. 20.000 »
Total .... 794.000 fr.
Mais l'Administration doit faire observer que ces évaluations sont toujours dépassées dans la réalité et que le présent chapitre fait l'objet, presque chaque année, de demandes de crédits supplémentaires.
Les frais de voyages des agents ainsi que les frais de transport de leur mobilier sont réglementés par le décret du 6 octobre 1906. L'Etat prend à sa charge les frais de déplacement calculés d'après les tarifs de la voie la plus directe et la plus économique : les Compagnies de navigation françaises subventionnées par le Gouvernement doivent accorder sur les frais de passage une réduction de 30 0/°.
Quant au transport des objets mobiliers, le remboursement leur en est effectué, sur pièces justificatives, dans la limite d'un maximum fixé pour chaque grade.
En ce qui concerne les frais de courriers et transport de valises, nous rappellerons que ces dépenses sont indispensables pour garantir le secret à la correspondance d'Etat.
Enfin, une somme de 20.000 francs est prévue pour assurer les frais de funérailles à l'étranger des agents décédés à leur poste.
CHAPITRE 17.
Dépenses des résidences
Crédit demandé pour 1913 ... 1.279.400 fr.
Crédit voté pour 1912 1.280.000 »
Crédit proposé par la Commission 1.280.400 »
Les crédits inscrits à ce chapitre sont destinés à assurer les dépenses des résidences extérieures, gages de la domesticité, habillement et loge-, ment des gardes et cawas, abonnements aux journaux et publications, frais de statistique,- frais de bureaux, donatives, aumônes, secours de route, chauffage, éclairage des bureaux, etc..
Jusqu'en 1890; ces dépenses étaient remboursables sur pièces. Le
PROJET DE BUDGET I43
Département a dû renoncer à cette méthode qui présentait plusieurs inconvénients : impossibilité de se maintenir dans la stricte limite des crédits budgétaires, retard apporté dans le remboursement des avances faites par les agents, réclamations incessantes des agents, divergences de vues entre l'Administration centrale et les agents sur la nécessité ou l'opportunité de certaines dépenses.
En 1891, une Commission proposa au Ministre de fixer aux chefs de poste un crédit forfaitaire pour toutes les dépenses de leur résidence. Cette mesure fut adoptée. Mais, par suite du renchérissement de la vie à l'étranger, de l'augmentation de la main-d'oeuvre, de la hausse du change local dans certains pays, le fonds d'abonnement qui, vingt ans auparavant, était suffisant, ne permit plus, pour beaucoup de postes, de satisfaire aux charges qui leur incombaient.
Le Département sollicita alors le relèvement des crédits du présent chapitre. Prenant en considération les raisons qui lui étaient exposées, le Parlement décida qu'une augmentation de 200 francs serait allouée sur ce chapitre à répartir en deux annuités.
Une première majoration de 100.000 francs fut votée en 1912.
Le Ministre décida qu'une Commission spéciale serait chargée de répartir cette somme après un examen détaillé de toutes les dépenses du poste.
Une revision sévère fut opérée par cette Commission au cours de l'année 1911.
Le tableau ci-après donne la répartition du crédit ouvert au budget de 1912.
Le Département ne sollicite pas pour 1913 la seconde annuité de 100.000 francs sur laquelle il était en droit de compter. Les travaux de la Commission ont permis de constater que les crédits mieux répartis devaient donner à la plupart des postes des ressources suffisantes pour assurer le fonctionnement du service.
D'autre part, le Département escompte les disponibilités que procurera l'application d'un nouveau régime entraînant d'importantes suppressions de postes.
Le régime forfaitaire ne devait pas priver le Département de tout contrôle sur l'emploi des fonds d'abonnement. La Commission a décidé que les postes devraient tenir un registre de leurs dépenses et conserver toutes leurs pièces justificatives pendant trois ans.. Ils devront, en fin d'année, produire au Département un relevé, par catégories, de toutes les dépenses effectuées dans l'intérêt du service.
La différence en moins de 600 francs inscrite au budget de 1913 a été expliquée dans l'exposé des motifs du projet de loi. Elle résulte d'un transfert d'ordre de 2.600 francs au chapitre 27 et d'une augmentation de 2.000 francs sollicitée en raison des charges complémentaires de gardiennage et de domesticité que nous impose la propriété du Palais Farnèse.
144 L0IS ET DOCUMENTS DIVERS
CHAPITRE 18
Frais de correspondance.
Crédit demandé pour 1913 450.000 fr.
Crédit voté pour 1912 "" 450^000 »
Crédit proposé par la Commission....... 450.000 »
Les crédits nécessaires pour assurer le service de la sorrespondance télégraphique et téléphonique du Ministère des Affairés Etrangères et des postes diplomatiques et consulaires diffèrent beaucoup d'une année à l'autre et le crédit de 450.000 francs, suffisant si aucun événement grave ne, complique la situation internationale, ne peut satisfaire aux charges du chapitre en cas de complications extérieures.
Pour l'exercice 1911, ces frais se sont élevés à 596.000 francs dont voici la répartition :
Dépenses faites à Paris 186.551 52
Créance de L'Easter Telegraph Company .... 1.5 61 03
Télégrammes transmis par les Beaux-Arts. ... ' 30 50
Dépenses des postes à l'étranger ■'. . . 386.433 40
Abonnements téléphoniques 4.355 29
Imprévu 17.068 71
Ce chiffre, si élevé, est la résultante des difficultés franco-allemandes, de la guerre turco-italienne, de la révolution en Chine, etc....
Le Département ne sollicite toutefois du Parlement, pour l'exercice 1913, qu'un crédit de 450.000 francs, représentant les dépenses moyennes du chapitre.
Il y a lieu d'ajouter que l'Administration, par des circulaires fréquentes, ne cesse de recommander à ses agents de ne faire emploi de la correspondance télégraphique, très coûteuse, que dans les circonstances indispensables.
CHAPITRE 19
Frais de résidence de l'ambassade ottomane.
Crédit demandé pour 1913 63.000 fr.
Crédit voté en 1912 66.000 »
Crédit proposé par la Commission. ...... 63 tooo »
PROJET DE BUDGET 145
L'article 245 du décret du Ier octobre 1867 a prévu un emploi d'inspecteur du matériel de l'hôtel affecté à la résidence de l'ambassade ottomane, dont la fonction consiste à certifier la réception des fournitures, l'exécution des travaux et la prise en charge des objets susceptibles d'être inventoriés.
Cet emploi existe toujours, il est rémunéré sur les fonds du chapitre 19. Mais, en réalité, son titulaire doit être considéré comme un agent de l'administration centrale, puisqu'il travaille dans les bureaux du Ministère aux écritures de la comptabilité.
Pour satisfaire aux dispositions de la loi du 22 avril 1905, qui interdit l'imputation sur des chapitres autres que ceux affectés aux dépenses du personnel des administrations centrales, de tout traitement alloué au personnel employé dans les administrations centrales des Ministères, nous proposons le transfert de cet emploi sur le chapitre premier avec un traitement moyen de 3.000 francs.
Cette opération entraîne sur le présent chapitre une annulation de 3.000 francs (traitement moyen d'un commis 2.000 à 4.000).
CHAPITRE 20
Entretien des immeubles à l'étranger. ■— Achat et entretien de mobilier et de fournitures à l'étranger.
Crédit demandé pour 1913 . . . , 358.000 fr.
Crédit voté en 191,2 338.000 »
Crédit proposé par la Commission. ....... 358.000 »
L'augmentation de 20.000 francs sollicitée pour l'exercice 1913 est motivée par les raisons suivantes :
Par la loi du 15 décembre 19 n, le Parlement a autorisé le Ministère des Affaires Etrangères à négocier l'achat de l'immeuble du Palais Farnèse. Cette acquisition, conclue à la date du 27 décembre, fait réaliser à l'Etat français une économie annuelle de 75.000 francs, correspondant au montant du loyer payé autrefois à l'Administration farnésienne jusqu'à concurrence de 59.000 francs par le Ministère des Affaires Etrangères, et pour le surplus, par le Sous-Secrétariat des Beaux-Arts, l'école française d'archéologie étant installée au 2me étage du Palais.
Par contre, cette acquisition met à la charge de l'Etat français des dépenses nouvelles. En dehors des travaux de consolidation et d'appropriation dont l'exécution sera assurée par l'administration des Beaux-Arts, le Département des Affaires étrangères devra pourvoir à l'entretien courant de l'immeuble. On ne peut se dissimuler que ce ne soit pour son budget une lourde charge en raison de l'importance
ARCHIVES DIPLOM., t. i2s, n" 5-6-7, mai-juillet 1912. - 10
I46 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
des constructions et dépendances machinerie, cours, jardins et de l'ancienneté des bâtiments.
Il est d'autant plus nécessaire d'assurer à cet édifice un entretien digne de notre représentation nationale que l'immeuble du Palais Farnèse étant un des monuments historiques de la ville de Rome, est soumis à la surveillance et à l'inspection de l'administration italienne. De l'étude effectuée par les soins de l'ambassade de France à Rome et du rapport de l'architecte en chef du département, il résulte que la dépense annuelle d'entretien de l'immeuble et du mobilier du Palais Farnèse ne peut être évaluée à moins de 20.000 fr.
Le Département des Affaires étrangères sollicite en conséquence l'incorporation de ce crédit au chapitre 20 de son budget, dont il a déjà signalé la dotation à peine suffisante par rapport à la valeur du domaine de la France à l'étranger. La Commission a accordé le crédit demandé, conformément aux propositions du Gouvernement.
CHAPITRE 21
OEuvres françaises en Europe.
Crédit demandé pour 1913 138.000 fr.
Crédit voté en 1912 97.000 »
Crédit proposé par la Commission 138.000 »
Le Département des Affaires Etrangères demande que les crédits du chapitre 21, consacrés aux oeuvres françaises d'Europe, soient augmentés pour l'exercice 1913 d'une somme de 41.000 francs, ce qui aurait pour conséquence de porter de 97.000 à 138.000 francs le chiffre total inscrit à ce chapitre. Sur les 41.000 francs de crédits nouveaux demandés, 36.000 francs seraient consacrés aux Instituts français de Saint-Pétersbourg et de Madrid, et 5.000 francs seraient réparties entre les différentes oeuvres françaises d'Europe, notamment entre nos écoles d'Espagne.
Institut français de Saint-Pétersbourg.
Les cours réguliers organisés par l'Institut français de SaintPétersbourg, ont eu un succès qui a dépassé les prévisions les plus optimistes.
200 auditeurs réglementairement inscrits les ont fréquentés assidûment et, dès à présent, les locaux qui avaient été choisis sont devenus insuffisants : un agrandissement est à l'étude qui permettra de recevoir dès octobre prochain une clientèle qui s'annonce déjà plus nombreuse. De même, pour donner satisfaction aux besoins qui se sont .manifestés, une extension du programme des cours est actuellement à l'étude.
PROJET DE BUDGET 147
. Enfin l'Institut de Saint-Pétersbourg prépare à Moscou la création d'une sorte de filiale, en y organisant des conférences qui permettront de grouper à l'avance les sympathies nécessaires à l'oeuvre.
L'action scientifique de l'Institut est en pleine prospérité ; elle n'a été négligée dans aucune de ses manifestations possibles.
i° De jeunes savants missionnaires ont 'été envoyés en Russie : six ont déjà été chargés de missions d'études pour lesquelles chacun d'eux a reçu une somme de 2.000 francs ;
2° Des conférences ont été faites à Saint-Pétersbourg par des personnalités éminentes de la science française, par MM. d'Arsonval, Charcot, Bénédit, Delbet ;
30 Une bibliothèque de publications spéciales, nécessaire aux travaux de l'Institut, a été organisée.
Le fonctionnement de l'Institut a été assuré pour la première année par des subventions privées qui ont atteint 85.000 francs, mais la continuité de l'action à exercer exige' des ressources permanentes que l'initiative privée ne peut garantir. Cette année encore il a fallu, pour vivre, faire un pressant appel aux générosités particulières, mais les ressources réunies par ce moyen sont inférieures aux besoins réels de l'Institut. Une somme de 5.000 francs est réservée à l'Institut pour
1912 sur les fonds mis par le Parlement à la disposition du Ministre des Affaires étrangères, il est absolument nécessaire de_'porter dès
1913 cette subvention annuelle à 30.000 francs.
Le loyer de l'Institut s'élève à . 10.000 fr.
Le directeur reçoit un traitement de 12.000 »
3 ^professeurs ont chacun un traitement de 6.000
francs, soit. 18.000 »
Ces chiffres, étant donné le prix de la ' vie à Saint-Pétersbourg, sont déjà très suffisants.
Les frais de conférence et de voyage s'élèvent à. . 10.000 »
Les frais de publications s'élèvent à 5.000 »
Les frais de matériel s'élèvent à 8.000 »
Les gages du personnel subalterne s'élèvent à. . . 5.000 »
Selon ses ressources, l'Institut pourra plus ou moins alimenter ceux des chapitres de son budget qui peuvent être variables, mais il y a un minimum de dépenses obligatoires ; pour y faire face, une subvention de 30.000.francs est absolument nécessaire pour 1913.
Institut français de Madrid.
Les ressources mises jusqu'ici à la disposition de cette fondation française qui intéresse nos grandes universités du Sud-Ouest ont permis d'amorcer l'oeuvre à entreprendre et de constater ses chances de grand
I48 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
développement. L'Institut prépare actuellement son établissement définitif et l'organisation permanente de son oeuvre d'enseignement.
Un immeuble est actuellement en construction à Madrid par les soins de la société française de bienfaisance ; cette construction a été rendue possible par l'attribution à l'Institut de Madrid d'une subvention de 150.000 francs accordée par la Commission de répartition du fond des jeux. Les oeuvres dépendant des Universités de Bordeaux et de Toulouse s'installeront dans ce nouvel immeuble dès 1913.
L'utilisation et l'entretien de cet immeuble et les dépenses nécessaires d'enseignement exigent impérieusement la création de ressources nouvelles et permanentes ; et c'est ce qui justifie l'augmentation de crédits destinés à porter à 15.000 francs pour 1913 la subvention du Département des Affaires étrangères qui ne peut être que de 4.000 francs en 1912. Cette subvention de 4.000 francs est tout à fait insuffisante pour assurer l'organisation définitive de l'Institut et son fonctionnement normal dans le bâtiment actuellement en construction.
L'augmentation de 5.000 francs demandée par le Département des Affaires étrangères en faveur des différentes oeuvres françaises d'Europe, et notamment en faveur de nos écoles d'Espagne, représente le minimum indispensable pour faire face aux demandes les plus urgentes qui lui sont adressées. La Commission a accordé le crédit demandé.
CHAPITRE 22
OEuvres françaises en Orient.
Crédit.demandé pour 1913 1.120.000 fr.
Crédit voté pour 1912 1.100.000 »
Crédit proposé par la Commission 1.120.000 »
Cette augmentation de 20.000 francs est destinée à l'école française de droit du Caire.
Fondée en 1890, cette école, dont les débuts furent modestes, n'a pas tardé à prendre un développement que ses fondateurs eux-mêmes étaient loin d'espérer. De 15, le nombre de ses étudiants s'est élevé progressivement jusqu'à 400. Actuellement même il dépasse ce chiffre. L'accueil empressé que cette institution a reçu de la part de la jeunesse égyptienne est le meilleur témoignage que l'on puisse fournir en faveur de l'excellence de son enseignement. Mais cette prospérité même de l'école du Caire ce n'est pas sans entraîner de sérieux inconvénients. En particulier, le personnel enseignant, en raison du nombre toujours croissant des étudiants qui viennent fréquenter les cours, ne peut plus, malgré son zèle et son dévouement, suffire à la tâche écrasante qui lui incombe. Il est impossible, en effet, aux quatre
PROJET DE BUDGET 149
professeurs qui constituent actellement le personnel de l'école de droit du Caire, d'enseigner d'une manière satisfaisante l'ensemble des matières contenues dans le programme de licence. Il est indispensable d'adjoindre à ces quatre professeurs deux nouveaux collaborateurs. Ce renforcement du corps professoral de l'école française de droit du Caire a été demandé avec la plus vive insistance par M. Berthélemy, professeur à la faculté de droit de Paris, dans le rapport qu'il a adressé à M. le Ministre de l'Instruction publique, en sa qualité de président de la Commission envoyée au mois de novembre dernier au Caire pour faire passer les examens des deux premières années de licence aux élèves de l'école française de droit. De l'avis de M. Berthélemy, la valeur scientifique de l'enseignement de l'école ne peut être maintenue que si deux chaires nouvelles étaient créées dans le plus bref délai.
Aussi le Ministère des Affaires Etrangères, d'accord avec celui de l'Instruction publique, n'a-t-il pas hésité à demander au Parlement, pour le budget de 1913, un relèvement de 20.000 francs, pour l'école française de droit du Caire.
Il importe d'ailleurs de remarquer que l'école du Caire, grâce aux droits d'inscription, d'examens et de bibliothèque versés par ses étudiants, rapporte chaque année à l'Etat plus de 160.000 francs, alors que la subvention qui lui est accordée sur les crédits du Ministère des Affaires Etrangères ne dépasse pas 47.000 francs.
Il semble donc de stricte justice d'utiliser à son profit une partie des ressources qu'elle procure à l'Etat, en relevant de 20.000 francs le chiffre de sa subvention qui serait ainsi portée de 47.000 à 67.000 francs
La Commission a accepté le relèvement de 20.000 francs au présent chapitre.
CHAPITRE 23
OEuvres françaises en Extrême-Orient.
Crédit demandé pour 1913 175.000 fr.
Crédit voté en 1912 175.000 »
Crédit proposé par la Commission 175.000 »
CHAPITRE 24 OEuvres françaises au Maroc.
Crédit demandé pour 1913 300.000 fr.
Crédit voté • en 1912 1.091.300 »
Crédit proposé par la Commission 300.000 »
150 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
L'établissement du protectorat français au Maroc aura pour conséquence de rattacher au budget du Protectorat la plupart des dépenses qui étaient précédemment à la charge du budget métropolitain (renseignements, service de la sûreté., subventions, secours, surveillance maritime, etc..)
Le budget de l'Etat continuera néanmoins à supporter un certain nombre de dépenses pour le fonctionnement d'institutions françaises, soit à Tanger, soit dans la zone d'influence espagnole.
Il ne saurait être question de donner de ces dépenses une nomenclature précise avant le règlement du régime financier du Maroc. Mais, d'après la répartition du crédit de 1.091.300 francs affecté aux oeuvres françaises du Maroc, pour l'exercice 1912, on peut, dès maintenant, considérer comme imputables sur le budget des Affaires Etrangères de 1913 les dépenses suivantes :
i° Service sanitaire :
Tanger. ■— Traitement des médecins 8.000 fr.
Frais de dispensaire. . . 6.000 »
Subvention à l'hôpital . 22.000 »
Allocation au vétérinaire
français 4.300 »
Fonctionnement de l'institut Pasteur ... ; 30.000 »
Larache. ■— Traitement du médecin 8.000 » Frais de dispensaire . . 4.000 »
82.300 fr. 82.300 fr.
20 Enseignement :
Tanger. — Collège et écoles. . . . 71.720 fr. Subvention à l'Alliance
française 10.000 »
Subvention à l'école du
Tabor 600 »
Larache. —• Ecole mixte 2.400 »
94.720 fr. 94-720 »
30 Service de la sûreté :
Tanger 17.560 »
40 Garde indigène à Tanger. 3.000 »
50 Secours et divers :
Chériffa d'Ouezzan ........ 15.000 fr.
Chérif d'Ouezzan 2.580 »
PROJET DE BUDGET I 5 I
Subvention à divers ' établissements de Tanger . 1.000 »
Gardien du cimetière français à Casablanca 225 »
18.805 fr. 18.805 »
6° Construction du collège français : De Tanger 30.000 »
Total 248.385 fr.
Le développement de notre influence à Tanger, la construction commencée d'un nouveau collège dans cette ville occasionneront certainement en 1913 des dépenses supérieures à celles qui sont prévues au budget de l'exercice 1912.
Pour ce motif, le Département n'a pas cru devoir limiter ses propositions à cette somme de 248.385 francs et sollicite l'inscription d'un crédit de 300.000 francs que la Commission a accordé.
CHAPITRE 25
OEuvres françaises en Amérique.
Crédit demandé pour 1913 46.000 fr.
Crédit voté en 1912 13.000 »
Crédit proposé par la Commission 46.000 »
Jusqu'en 1909, les crédits affectés aux oeuvres d'Amérique se trouvaient confondus avec ceux des écoles d'Europe dans un seul et même chapitre qui était intitulé : « OEuvres françaises d'Occident. »
Ce crédit a été fixé à titre d'indication, en 1910, à 17.000 francs. Ce chiffre était manifestement insuffisant. Aussi fut-il porté successivement à 21.000 francs en 1911 et à 31.000 francs en 1912. Tel qu'il est actellement fixé, ce crédit est encore loin de répondre aux très nombreux besoins qu'il est en principe destiné à satisfaire. Si l'on considère l'importance des subventions que reçoivent de leurs gouvernements les écoles allemandes, anglaises, italiennes, si florissantes aux Etats-Unis, au Brésil, en Argentine, on ne peut s'empêcher de reconnaître combien modeste est le concours financier que nous prêtons aux écoles françaises installées dans ces régions. Nos représentants sont cependant unanimes à signaler les très grands services que nous rendent ces établissements en contribuant à maintenir vivace le sentiment national chez les Français immigrés ou fils d'immigrés. Mais beaucoup de demandes n'ont pu jusqu'à présent être accueillies, faute de crédits suffisants. C'est ainsi qu'aucune subvention n'a pu encore être accordée
152 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
à la « Fédération de l'Alliance française aux Etats-Unis et au Canada » qui étend ses ramifications sur toutes les régions de l'Amérique du Nord, et dont les efforts pour répandre notre langue, nos idées, notre littérature mériteraient d'être largement encouragés. De même, il serait nécessaire de pouvoir attribuer une subvention à l'école maternelle de New-York, institution philanthropique et patriotique qui assume la charge de garder et d'instruire les enfants de la population pauvre de langue française de New-York. Quand on sait combien les enfants de Français élevés dans les écoles publiques américaines ont tendance à oublier la langue de leur pays d'origine, l'oeuvre de l'école maternelle de New-York apparaît comme très digne d'être encouragée.
En Louisiane, plusieurs oeuvres intéressantes se recommandent également à notre attention : entre autres l'école de l'Union française, l'école de la Société du 14 juillet, l'Alliance franco-louisianaise. Cette dernière institution s'est donnée pour but de ramener l'attention du public sur l'intérêt que présente l'étude et l'enseignement de la langue française. Grâce aux efforts de son Comité, elle a réussi à organiser des classes de français dans un grand nombre d'écoles publiques de la Nouvelle-Orléans. Actuellement, elle dispose d'un personnel enseignant de 40 professeurs qui apprennent le français .à près de r.8oo élèves des deux sexes dans 17 écoles publiques. Le ministère des Affaires Etrangères accorde à l'alliance franco-louisianaise une subvention annuelle de 12.000 francs. Il serait très désirable que cette allocation pût être portée à 16.000 francs, afin de donner à cette institution les moyens d'étendre encore son rayon d'action.
En Amérique du Sud, nous trouvons également un grand nombre d'oeuvres scolaires françaises qui, faute d'un concours plus efficace de la part de la métropole, luttent difficilement contre la concurrence des écoles étrangères. C'est ainsi que l'Alliance française de BuénosAyres n'a pu recevoir, l'an dernier, qu'une subvention de 2.000 francs sur 5.000 francs que demandait pour elle notre Ministre en Argentine. Le rôle de cette association, dans une ville où nos compatriotes sont particulièrement nombreux, est pourtant des plus utiles ; par des conférences, des cours du soir, des allocations de prix, des subventions accordées à des professeurs de français, elle a déjà acquis d'importants résultats qui seraient encore plus considérables si les ressources ne lui faisaient défaut. De même, le « collège Victor-Hugo » de BuenosAyres, important établissement d'enseignement secondaire dans lequel une large place est réservée à la langue française, mériterait de voir sensiblement relevée la modeste subvention qu'il reçoit depuis plusieurs années. A Santa-Fé, nous avons également depuis 1900 une école française dont l'entretien impose de lourdes charges à la colonie française presque uniquement composée des ouvriers de la compagnie de chemins de fer. Il serait à souhaiter que la très modeste subvention qui lui est accordée put être sensiblement augmentée.
D'autres écoles françaises intéressantes existent encore en Argentine ;
PROJET DE BUDGET 153
à Mendoza, à Tucuman, à Cordoba, etc. Il n'a pas été possible, jusqu'à présent, faute de crédits, de les faire bénéficier de subventions.
La même remarque s'impose à l'égard du collège franco-brésilien de Saint-Paul (Brésil) pour lequel notre consul demande l'attribution d'une subvention.
En Uruguay, le collège Carnot de Montevideo reçoit, depuis plusieurs années, une subvention de 500 francs. Cette allocation est bien modeste et ne correspond guère à l'importance de cet établissement qui compte aujourd'hui plus de 200 élèves.
Il en est de même des écoles françaises de Santiago du Chili, de la Trinité et de Saint-Thomas, qui toutes mériteraient un relèvement de subvention.
En résumé, c'est une augmentation de 15.000 francs au minimum qu'il serait désirable de voir attribuer, dès 1913, aux oeuvres françaises d'Amérique pour encourager ces oeuvres qui contribuent utilement à faire connaître autour d'elles notre langue et notre .pays.
La Commission a accordé le relèvement de crédit demandé.
CHAPITRE 26
Relations entre la Côte des Somalis et l'Ethiopie.
Crédit demandé pour 1913 50.000 fr.
Crédit voté en 1912 50.000 »
Crédit proposé par la Commission 50.000 »
Ce chapitre a pour objet de rémunérer diverses missions françaises en Ethiopie et d'allouer des subventions aux institutions françaises de ce pays.
Les missions dont il s'agit sont : la mission vétérinaire d'AddisAbbeba et la.mission médicale de Harrar.
La mission vétérinaire se compose de deux vétérinaires militaires
qui reçoivent un traitement respectif de 10.000 fr.
et de 5.000 »
La mission médicale (hôpital Makonnen de Harrar-Ville) comprend un médecin militaire, Directeur de l'hôpital qui reçoit 12.000 »
et un sergent infirmier qui touche. ....... 3.000 »
L'hôpital bénéficie, en outre, pour fonctionnement de l'établissement actuel (achat de médicaments, d'instruments de chirurgie et matériel), pour gages du personnel indigène, chauffage, éclairage, blanchissage, achat et nourriture des mulets, etc., d'une allocation de 10.000 »
Total 40.000 tr.
154 L0IS ET DOCUMENTS DIVERS
Les 10.000 francs disponibles servent à subventionner les écoles françaises d'Addis-Abbeba et deDirré-Daoua,àpayer les frais de voyage de congé d'Ethiopie en France ou de France en Ethiopie des membres des deux missions et de leur famille, à leur accorder des indemnités extraordinaires (déplacements pour intérim, etc.).
CHAPITRE 27
Subventions aux Sociétés françaises de bienfaisance, à l'étranger.
Crédit demandé pour 1913 62.600 fr.
Crédit voté en 1912 60.000 »
Crédit proposé par la Commission 62.600 »
L'augmentation de 2.600 francs demandée pour 1913 est la conséquence d'une mesure d'ordre. Certains postes imputaient sur leur fonds d'abonnement des subventions à des associations de bienfaisance :
Genève 1.0.00 fr.
New-York - 800 »
Chicago. 500 »
Rio de Janeiro 300 »
2.600 fr.
Le Département demande le transfert de cette somme au présent chapitre. Cette opération a pour contre-partie une diminution proposée sur le chapitre 17.
La Commission a accordé l'augmentation demandée.
CHAPITRE 28
Présents diplomatiques.
Crédits demandés pour 1913 35.000 fr.
Crédits votés en 1912 ^ 35.000 »
Crédits proposés par la Commission„ ..... 35.000 »
Ce crédit de 35.000 francs permet au Ministère des Affaires Etrangères de satisfaire aux dépenses traditionnelles dans les Chancelleries ; il a été employé comme suit en 1911 :
PROJET DE BUDGET ' 155
Administration nationale des Monnaies et médailles 275 43
Achat de croix et décorations 26.806 25
Fourniture d'écrins 2.459 50
Emballage 256 60
Frais de transport 663 92
Présents divers I-951 »
Couronnes mortuaires !-S55 »
Disponible • 1.032 30
Total 35.000 fr.
CHAPITRE 29
Frais de réception de personnages étrangers et missions extraordinaires à l'Etranger.
Crédit demandé pour 1913 30.000 fr.
Crédit voté en 1912 15.000 »
Crédit proposé par la Commission 15 :ooo »
Le Gouvernement avait proposé de relever de 15:000 francs la proposition inscrite à cette ligne budgétaire pour faire face aux dépenses urgentes et imprévues occasionnées "notamment par l'envoi de missions extraordinaires à l'Etranger.
Votre Commission a estimé que la provision de 15.000 francs
était suffisante et qu'il appartenait au gouvernement de saisir les
Chambres de demandes de crédits spéciaux lorsque cette provision serait épuisée.
CHAPITRE 30
Participation de la France aux dépenses de la Cour d'arbitrage de La Haye. — Frais de justice et d'arbitrage international.
Crédit demandé pour 1913 40.000 fr.
Crédit voté en 1912 20.000 »
Crédit proposé par la Commission 24.000 »
i° Sur le crédit de 20.000 francs, précédemment inscrit au chapitre 30, la Commission a admis, par application de la loi du 22 avril 1905, le transfert au chapitre premier du traitement du secrétaire chargé de la préparation des travaux relatifs à la Cour de La Haye, soit 6.000 francs.
l$6 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Le crédit primitif affecté aux dépenses de la Cour d'arbitrage de La Haye, est donc ramené de 20.000 francs à. . ■ 14.000 fr.
20 Le Gouvernement avait demandé une provision de 26.000 francs pour satisfaite aux premières dépenses qu'il est nécessaire d'engager au début de ' la procédure d'arbitrage.
La Commission a reconnu le bien-fondé de cette' dernière demande, mais elle a pensé qu'elle pouvait réduire la proposition du Gouvernement à. . . . 10.000 fr.
Le crédit proposé par la Commission s'élève à. 24.000 fr.
CHAPITRE 31
Participation de la France à des dépenses internationales.
Crédit demandé en 1913 43-625 fr.
Crédit voté en 1912 43-625 »
Crédit proposé par la Commission. ...... 43-625 »
Ce chapitre comprend celles des dépenses internationales qui incombent au Ministère des Affaires Etrangères et dont voici la liste :
Surveillance des boutriers mascatais 3.000 fr.
Entretien du phare du cap Spartel. ..... 2.000 »
Administration et voirie du quartier diplomatique de Pékin 8.000 »
Entretien du cimetière franco-anglais de Phalère. 500 »
Entretien des cimetières européens de Djeddah et Damas (Turquie d'Asie), de Making (Pescadores) et de Kalung (Formose) 500 »
Bureaux internationaux de Zanzibar et de Bruxelles, pour la répression de la traite des noirs. . . . 9.000 »
Office international de l'hygiène publique de Paris ÏS-^2S s
Bureau de l'Union interparlementaire de l'arbitrage de Bruxelles 7.000 »
Dépenses imprévues et diverses 1.200 »
Total. 43-625 fr.
Ces évaluations sont forcément théoriques ; la dépense réelle varie d'après le cours du change, les charges annuelles des bureaux internationaux et les frais imprévus.
Surveillance des boutriers mascatais. — Le Tribunal de la Haye a rendu en août 1905 une sentence arbitrale aux termes de laquelle le Gouvernement français est tenu de surveiller les boutriers mascatais
PROJET DE BUDGET 157
autorisés à arborer notre pavillon. L'autorité consulaire est tenue d'aller chaque année à Sour (Imanat d'Oman) pour s'assurer que les boutres naviguant dans ces parages ne contreviennent pas à l'acte de Bruxelles de 1890 relatif à la répression de la traite des noirs.
Entretien du phare du cap Spartel. — Le Gouvernement marocain étant dépourvu de toute marine, une convention de mai 1865 met à la charge des puissances contractantes les dépenses nécessaires pour l'administration et l'entretien du Cap Spartel. Chacune de ces nations paye une cotisation égale.
Si l'organisation administrative du Maroc réformé met cette dépense à la charge du Protectorat, le Département en proposera d'office l'annulation. Elle est maintenue pour 1913 au présent chapitre.
Administration et voirie du quartier diplomatique à Pékin. — Le Gouvernement chinois a admis en 1911 que les Chinois n'auraient pas le droit de résider dans le quartier des Légations et que cette partie de la ville serait mise en état de défense. Les dépenses d'administration et de voirie incombent par contre aux nations représentées.
Entretien du cimetière franco-anglais de Phalère. — Ce cimetière contient les restes d'officiers et de soldats anglais et français morts du choléra au Pirée pendant la guerre de Crimée. Un gardien est chargé de la protection du cimetière. Les frais sont fixés à 420 francs pour l'Angleterre et à 500 francs pour la France.
Entretien des cimetières de Djeddah, Damas, Making et Kalung. ■— Le cimetière chrétien de Damas n'est régi par aucune convention : cette dépense a un caractère purement traditionnel. Celui de Djeddah fut construit en 1865 par la France et l'Angleterre. Ceux de Making et de Kalung sont réglementés par des conventions passées en 1897 et 1902 avec le Gouvernement japonais.
Bureaux internationaux de Zanzibar et de Bruxelles. — Ces Bureaux résultent de l'Acte de Bruxelles de 1890 auquel nous avons fait allusion plus haut. L'Angleterre est chargée d'assurer le service des avances en qualité d'Etat protecteur du Sultanat de Zanzibar.
Office international d'hygiène publique. — Cet office a été créé à Paris en vertu d'une convention internationale signée à Rome (Loi du 21 mars 1908). Le chiffre de 15.625 francs a été obtenu en divisant les dépenses annuelles par le nombre des puissances contractantes qui ont ratifié la convention.
Union interparlementaire de l'arbitrage. — Cette institution, due à l'initiative de M. Cremer, membre de la Chambre des Communes, et de M. Frédéric Pass}', se propose de réunir les membres des divers Parlements en vue de coopérer à l'oeuvre de la paix internationale. Les pays affiliés versent des subventions dont le montant ne peut différer.
158 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
CHAPITRE 32
Allocations à la famille d'Abd-El-Kader
Crédit demandé pour 1913. . 70.000 fr.
Crédit voté en 1912. 55.000 »
Crédit proposé par la Commission 70.000 »
Etablie primitivement à 80.000 francs, la pension servie aux descendants du grand émir a été, par suite d'extinctions ou de suppressions ramenée au chiffre de 55.000 francs.
Elle est répartie entre les 24 membres de la famille Abd-el-Kader et leur domesticité. Ainsi que l'ont constaté nos consuls à Damas, elle est devenue aujourd'hui manifestement insuffisante ; elle met de ce fait les descendants du grand émir dans une situation des plus pénibles, incompatible avec le haut rang qu'ils occupent dans le monde musulman ; la prolongation de cet état de choses ne serait pas sans inconvénients pour notre prestige et le développement de notre influence en Orient.
Les émirs sont environnés en Syrie et dans tout l'Islam d'une grande considération. Ils n'ont jamais failli à leurs obligations envers nous et nous ont constamment prêté leur concours le plus dévoué ; ils nous ont donné une nouvelle preuve de leurs sentiments en sauvant, à notre demande, la population chrétienne de Kerak menacée, à la fin de 1910, d'un massacre général.
Ces indications suffisent à marquer l'intérêt de premier ordre que nous avons à conserver ces fidèles soutiens de notre influence et à ne' pas les laisser tomber dans la misère.
Le Département a-prescrit en 1911 au Consul de France à Damas de lui adresser toutes les indications utiles concernant cette question. Les informations transmises par notre agent ne laissent aucun doute ' sur la nécessité absolue de mettre un terme à une situation devenue intolérable. Depuis trente ans, les prix des loyers et des divers objets de consommation ont, à Damas, augmenté de 2 à 4, 5, et 6 fois leur valeur primitive.
Si le relèvement de crédits de 15,000 francs n'a pas été compris dans les propositions budgétaires de 1912, c'est que le Ministère des Affaires Etrangères n'a été saisi de cette question que postérieurement au dépôt du projet de loi, comme nous l'avons indiqué dans notre rapport sur le budget de 1912.
La Commission a accordé l'augmentation demandée.
PROJET DE BUDGET 159
CHAPITRE 33 (nouveau)
Services français en Andorre
Crédit demandé pour 1913 6.000 fr.
Crédit voté en 1912 »
Crédit" proposé par la Commission 6.000 fr.
Aux termes du décret organique du 27 mars 1806, modifié le 3 juin 1882, la suzeraineté de la France en Andorre est exercée par le Ministre de l'Intérieur, représenté en délégation permanente par le Préfet d'un département voisin, avec le concours d'un viguier choisi parmi les habitants de ce département.
L'idée qui a présidé à l'économie de cet acte consiste à considérer les vallées andorranes, non comme un pays étranger, mais comme un territoire relevant de la souveraineté de la France. Les fonctionnaires désignés par ce décret sont nommés par le Ministère de l'Intérieur.
Mais comme la suzeraineté des vallées est partagée avec un co-prince étranger, les fonctionnaires sont admis à correspondre directement avec le Ministère des Affaires Etrangères pour le règlement des questions internationales auxquelles la situation spéciale de l'Andorre peut donner naissance.
Organisation administrative. — Les fonctionnaires français investis de fonctions publiques en Andorre sont :
i° Le préfet des Pyrénées-Orientales, délégué permanent de France (décrets des 3 juin 1882 et 27 février 1884) :
20 Le viguier français, nommé à vie (décrets des 27 mars 1806 et 3 juin 1882) ;
30 Le président du tribunal civil de Perpignan, le président et le vice-président du conseil de préfecture des Pyrénées-Orientales, membres du tribunal supérieur (décrets des 13 juillet 1888 et. 19 janvier 1898) ;
40 Le juge des appellations, nommé à vie ;
5° Le bayle (bailli) français, nommé pour 3 ans par le préfet des Pyrénées-Orientales (décrets des 27 mars 1806 et 3 juin 1882) ;
6° Le chef du service de l'Andorre à la. préfecture, nommé par le préfet ;
70 Un traducteur, nommé également par le préfet.
Traitement des fonctionnaires. — Le délégué permanent est, aux termes du décret au 3 juin 1882, chargé de représenter l'Etat français,
l6o LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
d'une part, dans l'exercice de ses droits de souveraineté vis-à-vis des autorités andorranes, d'autre part, dans ses relations avec l'évêque d'Urgel, co-prince en Andorre.
II. se trouve ainsi investi de la double qualité d'agent du Ministère de l'Intérieur, puisque l'Andorre relève sous certaines réserves de la souveraineté française, et d'agent diplomatique relevant des Affaires étrangères.
En fait, le délégué permanent n'a jamais exercé, que sous le contrôle exclusif des Affaires étrangères ses doubles fonctions, entre lesquelles il n'est guère possible d'établir une démarcation bien nette en raison du statut particulier de l'Andorre, et dans l'impossibilité de régler nombre de questions sans accord avec l'évêque d'Urgel.
En raison de cet ensemble de circonstances, la qualité diplomatique se trouve primer chez le délégué permanent celle de représentant de la souveraineté française qu'un autre fonctionnaire, le . viguier, exerce également et plus effectivement comme il sera indiqué plus loin.
Le Ministère de l'Intérieur s'est refusé, dès l'institution de cette fonction, c'est-à-dire en 1884, à payer quoi que ce fût du traitement du délégué permanent, lequel a été toujours assuré par le Ministre des Affaires étrangères. Ce traitement était fixé au chiffre brut de 8.000 francs, mais celui-ci se réduisait en fait à 5.800 francs net.
La différence tenait à ce que le Préfet prélevait sur son indemnité :
i° 1.000 francs pour le bayle et ses secrétaires ; 2° 800 francs pour le chef du service de l'Andorre à la préfecture des Pyrénées-Orientales ;
30 400 francs pour le traducteur.
Le juge des appellations, conseiller de préfecture de la HauteGaronne, recevait 3.000 francs sur le budget du Ministère de la Justice (chapitre 16, exercice 1911).
Le bayle, dont les fonctions sont exclusivement judiciaires, reçoit. 2.000 francs payés de la façon suivante : 1.000 francs sur le budget du Ministère de la Justice et 1.000 francs sur l'indemnité ci-dessus de 8.000 francs attribuée au délégué permanent. '•
Le viguier, nommé aux termes du décret du 27 mars 1806 par le Ministère de l'Intérieur, est le vicaire, le représentant du co-prince français en Andorre où il exerce les attributions administratives que lui confèrent les coutumes andorranes. La question de l'imputation budgétaire de son traitement a été maintes fois agitée sans jamais avoir été régulièrement résolue par une loi de finances.
Jusqu'en 1882, la fonction de viguier était demeurée gratuite. A
PROJET DE BUDGET l6l
cette époque, un nouveau titulaire sollicita du Gouvernement l'attribution d'un traitement fixe « pour frais de déplacement et toutes autres dépenses résultant de l'exercice de ses fonctions », traitement qui lui fut accordé et dont le chiffre fut fixé à 6.000 francs par arrêté du 20 avril 1882. M. Goblet, Ministre de l'Intérieur, prit à sa charge la moitié de ce traitement, soit 3.000 francs, et l'imputa au chapitre « Fonds secrets », tandis que l'autre moitié devait être payée par le Ministère des Affaires étrangères. Cette décision fut appliquée jusqu'en 1904. A cette époque, les fonds secrets du Ministère de l'Intérieur ayant été réduits de moitié, M. Emile Combes fit valoir la nécessité où il se trouvait de supprimer toute dépense autre que celle de Sûreté générale antérieurement imputée sur les fonds secrets, et demanda, en conséquence, au Ministère des Affaires Etrangères, d'assurer, à l'aide du seul budget de son Département, le payement de la totalité du traitement alloué au viguier trançais.
M. Rouvier, alors Ministre des Affaires Etrangères, adhéra à ces propositions et l'indemnité de 6.000 francs fut intégralement payée au viguier français par les soins de son Département en 1905 et 1906.
En 1907, de nouvelles difficultés se produisirent.
M. Pichon excipant du caractère provisoire de la décision prise par M. Rouvier, émit l'avis que la dépense afférente au fonctionnement de la délégation elle-même et au payement de ses fonctionnaires ne devait être couverte qu'à l'aide de crédits mis à la disposition du Ministère de l'Intérieur. Ce Département, pour les motifs exposés plus haut, persista dans ses conclusions antérieures. En l'absence de tout accord, le Ministère des Affaires Etrangères supprima l'indemnité de 2.800 francs qui jusqu'alors avait été payée en totalité au délégué permanent.
Toutefois, lors du dépôt des propositions budgétaires de l'exercice 1908, les Affaires étrangères proposèrent l'inscription de la dépense au chapitre 30 « Participation de la France à des dépenses internationales. » La Commission du budget ne crut pas devoir accepter cette combinaison. (V. notre rapport n° 230, p. 200).
Mais, dans la deuxième séance du 26 novembre 1908, lors de l'examen par la Chambre du budget des Affaires étrangères, une question fut posée à ce sujet au Gouvernement. Reconnaissant les inconvénients de la situation actuelle, le Ministre répondit à une question de M. Brousse, qu'il ferait étudier la possibilité de déposer un projet de loi pour régler la question (1).
Pendant deux années consécutives, aucun fonds ne fut versé tant
(1) Journal Officiel, novembre 1908, p. 2681. ARCHIVES DIPLOM., t. 122,^" 5-6-7, mai-juillet 1912.
162 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
pour l'administration de l'Andorre que pour les divers fonctionnaires qui en avaient la charge.
A la suite de nombreuses réclamations des intéressés et des plaintes répétées de particuliers las de voir les affaires administratives' et judiciaires en souffrance, un accord intervint en 1910 entre les Ministères de la Justice, des Affaires Etrangères et de l'Intérieur : la dépense se répartissant comme suit :
AFFAIRES JUSTICE _ INTERIEUR
ÉTRANGÈRES
francs francs francs
Préfet ; » » 5.800
Secrétaite » 800 »
Traducteur ' » 400 . »
Viguier..... » 6.000 »
Bayle , 1.000 1.000 »
Juge des appellations 3.000 » »
4.000 8.200 5.8oo
18.000
Mais cette convention de janvier 1910 n'a pas donné à la question une solution définitive. Le Ministère de l'Intérieur estime qu'elle ne revêt pas le caractère d'une. dette à la charge de son Département. Un Ministre ne saurait, en effet, prendre d'engagement sur les fonds secrets que pour lui-même, et, en aucune manière, il ne peut engager ses successeurs sur ce chapitre.
D'ailleurs, en présence de l'insuffisance actuelle et absolue des fonds secrets du Ministère de l'Intérieur et de l'impossibilité de prélever sur un autre chapitre l'indemnité du délégué permanent, le préfet des Pyrénées-Orientales n'a jamais pu recevoir partie même de cette indemnité depuis que ladite convention est intervenue.
Bien que jusqu'à l'heure actuelle le Ministère des Affaires- Etrangères ait assuré le payement de la part qui lui incombe dans cette dépense, il n'en demeure pas moins que les observations présentées par le Ministre de l'Intérieur au sujet de l'affectation de ses fonds secrets ont une égale valeur pour les crédits spéciaux du Ministre des Affaires Etrangères.
Nécessité d'inscrire la dépense au budget. — Il est donc indispensable que par l'instauration d'une situation nette et régulière, une réglementation définitive intervienne pour mettre fin à des difficultés
PROJET DE BUDGET l6j
qui durent depuis plusieurs années et se renouvellent périodiquement.
Les dépenses de l'administration de l'Andorre' sont des dépenses d'Etat : comme telles, elles doivent être inscrites régulièrement au budget et réglementées conformément aux principes de comptabilité qui exigent l'affectation légale à toutes dépenses publiques de crédits spécialement déterminés.
Il ressort de ce qui précède que la régularisation de la situation actuelle, en ce qui concerne les traitements des fonctionnaires français en Andorre, ne doit pas être réalisée par l'inscription de l'ensemble de ces émoluments à un chapitre spécial du budget des Affaires étrangères ou de l'Intérieur.
Ces traitements doivent être répartis entre les différents départements : Affaires Etrangères, Intérieur et Justice, auxquels ces fonctionnaires se rattachent par la nature même de leurs services.
C'est la seule solution conforme à la logique en même temps qu'à notre conception de la situation des Vallées à l'égard de la France.
Le Ministère de la Justice n'est pas le seul qui soit déjà entré dans cette voie d'une façon complète pour le Juge des appellations, et d'une façon partielle pour le bayle. Le Ministère de l'Instruction publique, le Sous-Secrétariat des Postes et Télégraphes subviennent depuis de longues années aux frais qu'occasionne le fonctionnement des écoles et du service postal et télégraphique qu'ils ont organisés en Andorre.
Dans ces conditions, nous proposons l'inscription :
i° Au budget des Affaires étrangères :
a) Du traitement du délégué permanent ; cette indemnité serait toutefois réduite à 4.800 francs se décomposant ainsi : 4.000 francs de traitement, 800 francs d'abonnement forfaitaire pour frais de bureau et dépenses diverses 4.800 fr.
h) Des traitements des collaborateurs du délégué permanent :
Le chef du service de l'Andorre 800 »
Le traducteur 400 »
Total 6.000 fr.
2° Au budget du Ministère de l'Intérieur :
Du traitement du viguier. 6.000 fr.
3° Au budget du Ministère de la Justice : a) Du traitement du juge des appel-
164 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
lations. . . . , 3.000 » •
b) Du traitement du bayle 2.000 »
5.000 fr. 5.000 »
Total général. . . 17.000 fr.
Si le Parlement veut bien accepter le principe de cette répartition, chacune de ces dépenses fera l'objet, conformément à l'article 59 du décret du 31 mai 1862, portant règlement sur la comptabilité publique, d'un chapitre particulier inscrit à chacun des budgets de la Justice, des Affaires Etrangères et de l'Intérieur.
Le Département des Affaires étrangères sollicite l'inscription du crédit de 6.000 francs, représentant sa 'part contributive, à un chapitre nouveau de son budget.
La Commission a accordé le crédit demandé.
CHAPITRE 34
Emploi de fonds provenant de legs ou de donations
■ Crédit demandé pour 1913 Mémoire.
Crédit voté pour 1912 Mémoire.
Crédit proposé par la Commission Mémoire.
Actuellement le Ministère des Affaires étrangères a la gestion de six fondations qui sont, par ordre d'importance :
Le legs Auchois ;
Le legs Stamati-Bulgari ;
La fondation Maunois-Kcechlin ;
Le legs Lesieur ;
Le legs Langlet-Bercourt ;
Le legs d'Entraigue.
Legs Auchois. — Les arrérages de cette libéralité s'élèvent actuellement à 77.500 francs ; ils permettent, d'allouer une subvention trimestrielle de 19.000 francs à l'hôpital français de Londres et à la maison de convalescence de Brighton. Le solde disponible, au. 31 décembre 1911, s'élevait à plus de 2.000 francs.
Legs Stamati-Bulgari. — Les arrérages de 2.750 francs permettent au Consul de France à Corfou de remettre aux indigents français de cette ville, chaque semestre, une somme de 1.250 francs. Le surplus a pour objet de constituer une réserve grâce à laquelle il. sera possible
PROJET DE BUDGET 165
d'accorder des secours extraordinaires en cas de C3rclones, de tremblements de terre, etc..
Le compte de la Caisse des dépôts et consignations fait ressortir, au 31 décembre 19.11, un reliquat disponible de plus de 1.700 francs,
Fondation Maunois-Koechlin. — Les intérêts actuels (1.250 fr.) sont intégralement répartis entre diverses sociétés philanthropiques françaises de Genève.. En un an (du troisième trimestre 1911 au deuxième trimestre 1912 y compris), ces arrérages ont été répartis de la façon suivante :
Société philanthropique française 650 fr.
Société de l'enfance française abandonnée. .... 287 50
OEuvre des colonies de vacances françaises .... 212 50
Asile des vieillards et incurables français 100 »
Total. .... 1.250 fr.
Legs Lesieur. — Les arrérages, de 1.150 francs, permettent de servir, depuis 1911, une subvention annuelle de 1.100 francs à la société françaises de bienfaisance de la Havane. Le reliquat disponible était supérieur à 1.000 francs à la fin de l'année 1911.
Legs Langlet-Bercourt. — Les intérêts des rentes déposées à la Caisse des dépôts et consignations ont été portés de7i7à75o francs en 1910 par suite d'un achat de 3 3 francs de rentes 3 0/°. L'allocation annuelle à la société française de bienfaisance de Moscou est restée fixée à 717 francs. Le solde créditeur atteignait presque 500 francs à la fin de 1911.
Legs d'Entraigue. — L'hôpital Saint-Louis des Français reçoit chaque année le montant total des arrérages, soit 198 francs. Le compte de la Caisse des dépôts et consignations fait ressortir un reliquat de 200 francs qui permettra de verser à l'établissement bénéficiaire la subvention afférente à 1911, qu'il n'a pas encore touchée.
CHAPITRE 35
Dépenses des exercices périmés non frappées de déchéance
Crédit demandé pour 1913 Mémoire.
Crédit voté en 1912 Mémoire.
Crédit proposé par la Commission Mémoire.
CHAPITRE 36
Dépenses des exercices clos Crédit demandé pour l'exercice 1913 Mémoire.
l66 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Crédit voté en 1912 Mémoire.
Crédit proposé par la Commission Mémoire.
CHAPITRE 37
Remises sur recettes de chancelleries
Crédits demandés pour 1913 578.000 fr.
Crédit voté pour 1912 425.000 »
Crédits proposés par la Commission 548.000 »
A la suite de calculs plus précis, le Gouvernement a reconnu que le crédit nouveau de 153.000 francs demandé, au titre du chapitre 37, pouvait être diminué d'une somme de 30.000 francs.
Cette proposition est appuyée des indications suivantes :
Recettes des Chancelleries
Les recettes des droits de chancellerie pour l'année 1911 peuvent, d'après les documents déjà parvenus au Ministère, être ainsi évaluées :
Perception dans les chancelleries 2.032.190 16
Perception dans les agences consulaires (évaluations) 319.000 »
Recettes d'overtime 216.426 75
Total des recettes de 1911 2.567.616 91 2.567.616.91
Avec l'application du nouveau tarif incorporé dans le projet de budget de 1913, les prévisions de recettes pour l'exercice prochain peuvent être ainsi calculées :
Perception dans les chancelleries 2.878.616 91 Perception dans les agences consulaires 429.000 »
Recettes d'overtime (tarif réduit) 70.000 »
Total des prévisions pour 1913. 3.377.616 91 3.377.616 91
Soit en plus. . . . 810.000 fr. 810.000 fr.
Remises sur recettes des chancelleries
Sur les recettes de 1911, les remises accordées aux agents entraîneront les dépenses ci-après :
PROJET DE BUDGET 167
Remises de 5 0/° sur les perceptions des chancelleries 101.609 5°
Remises de 5 0/° sur les perceptions des agences consulaires (évaluation) 15.950 »
Remises sur les recettes d'overtime 72.142 25
Remises aux agents consulaires (évaluation). . . 240.000 »
Total des dépenses pour 1911 429.701 75
Les crédits inscrits au budget de 1911 pour ces sortes de dépenses
s'élèvent à 425.000 fr.
L'accroissement des recettes de chancelleries entraînera forcément une augmentation des remises.
On peut donc prévoir pour 1913 et, à ce titre, la dépense suivante :
Remises de 5 0/° Sur les perceptions des chancelleries 143.930 80
Remises de 5 0/° sur les perceptions des agences consulaires. 21.450 »
Remises sur les recettes d'overtime (abandon de la recette totale). 70.000 »
Remises aux agences consulaires. 310.000 »
Total 545.380 80
Soit sur les prévisions inscrites au budget de 1911 425.000 » 425.000 »
une augmentation de 120.38080 120.380 80
Le Ministre des Affaires Etrangères avait demandé l'inscription au budget de 1913 d'un nouveau crédit de. . . . . 153.000 fr.
D'après les précédentes évaluatiens, une augmentation de 123.000 fr.
devra satisfaire à toutes les charges nouvelles du chapitre.
La Commission a accepté l'annulation de la différence proposée par
le Gouvernement, soit 30.000 fr.
Cette opération, comparativement au crédit de 425.000 francs voté en 1912, accuse, pour l'exercice de 1913, une augmentation de crédit de 123.000 francs accordée par la Commission.
l68 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Rapport fait à la Chambre des Députés au nom de la Commission du budget chargée d'examiner : 1° le projet de loi portant ouverture au Ministre des Affaires étrangères, sur l'exercice 1912, d'un crédit extraordinaire pour frais d'arbitrage des affaires du « Carthage », du « Manouba » et du « Tavignano », du traité de commerce franco-suisse de 1906 et de l'arbitrage relatif à l'île Clipperton ; 2° portant ouverture, sur l'exercice 1912 : 1° au Ministre de l'Intérieur, d'un crédit extraordinaire destiné à faciliter la participation dès sociétés sportives françaises aux jeux olYmpiques de Stockholm ', 2° au Ministre des Affaires étrangères, d'un crédit supplémentaire pour frais de représentation du Ministre' de France à Stockholm, par M. HenrY Chéron, Député.
Messieurs,
En dehors du cahier collectif de crédits supplémentaires qu'il a déposé le 6 juin 1912, le Gouvernement vous a saisis de deux demandes de crédits applicables l'une à des frais d'arbitrage, l'autre à la participation des sociétés sportives françaises aux jeux olympiques de Stockholm.
Frais d'arbitrage
Les arbitrages dont il est question ici sont au nombre de trois.
D'abord, on sait que le Gouvernement français et le Gouvernement italien ont convenu de confier à un tribunal extraordinaire siégeant à la Haye les difficultés survenues entre eux au sujet de la saisie du « Carthage », du Manouba « et du « Tavignano ».
De leur côté, les Gouvernements helvétique et français ont résolu de soumettre à un tribunal arbitral une difficulté d'interprétation du traité de commerce franco-suisse de 1906.
Enfin, par une convention du 2 mars 1909, le Gouvernement français et le Gouvernement mexicain se sont engagés à soumettre à l'arbitrage du roi d'Italie', qui a bien voulu accepter, un litige pendant entre eux au sujet de la souveraineté d'une île du Pacifique connue sous le nom d'île Clipperton. Suivant l'autorisation qui en avait été donnée par une loi du 8 février 1911, le Gouvernement français a procédé le 9 mai suivant, à Mexico, à l'échange des ratifications sur ladite convention qui a été promulguée par décret du 22 juin 1911.
CRÉDITS EXTRAORDINAIRES ' 169
La procédure fixée par le haut arbitre, en vertu des pouvoirs que lui confère l'article 56 de la Convention de- la Haye du 18 octobre 1907 pour le règlement pacifique des conflits, comporte la remise par les parties de divers documents, mémoires et répliques.
L'impression de ces documents, : l'exécution de travaux cartographiques, les frais de déplacement et les honoraires d'un conseiller technique nécessitent une dépense relativement élevée.
C'est pour le règlement de ces trois litiges internationaux que le Gouvernement demandait un crédit total de 168.000 francs qu'il a pu réduire à 154.000 francs.
Nous allons vous donner ci-dessous tous les détails nécessaires sur les demandes qui vous sont présentées. Disons dès maintenant que nous vous proposons de voter le projet du Couvernement, en approuvant hautement le généreux idéal de paix qui conduit de plus en plus les peuples à résoudre par la justice les conflits qui s'élèvent entre eux. Certes, de tels progrès dans la voie de la sagesse et de l'humanité ne doivent pas nous faire oublier les nécessités immédiates d'une organisation militaire solide et puissante. La force . n'est pas inconciliable avec le droit, puisqu'elle en constitue au contraire la meilleure sanction. Mais il faut sincèrement se réjouir de la part toujours plus grande qu'au milieu de difficultés sans nombre, les nations font à la solution pacifique de leurs litiges. Il y a là un mouvement des idées et des faits qu'il serait injuste de ne pas souligner.
Voici maintenant, Messieurs, le détail par chapitre des crédits sollicités.
MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES CHAPITRE 30 bi-S
Frais de justice et d'arbitrage international. . . 154.000 fr.
Le projet de loi portant ouverture d'un crédit de 168.000 francs pour frais de divers arbitrages internationaux.
Les prévisions primitives du Département des Affaires étrangères avaient été établies comme suit :
Arbitrage franco-italien 142.000 fr.
Arbitrage franco-suisse 10.000 »
Arbitrage franco-mexicain .... 16.000 »
Soit. . . . 168.000 fr. 168.000 fr.
17° LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Depuis le dépôt de la présente demande, des indications plus précises ont permis à l'Administration d'apporter plus d'exactitude dans ses évaluations. La situation actuelle peut s'établir comme suit :
Arbitrage franco-italien 124.000 fr.
Arbitrage franco-suisse * 10.000 »
Arbitrage franco-mexicain. . . . 20.000 »
Soit. . . . 154.000 fr. 154.000 fr.
soit, sur l'ensemble du chapitre, une économie de 14.000 fr.
proposée par le Ministère des Affaires étrangères.
i° Arbitrage franco-italien
«
Un tribunal extrordinaire d'arbitrage, réuni à la 1 Haye, doit prochainement régler les difficultés survenues avec l'Italie au sujet de la saisie du « Carthage », du « Manouba » et du « Tavigno ».
Ces affaires donneront lieu à trois instances successives et distinctes.
Dans ses premières évaluations, le Gouvernement avait estimé qu'un crédit de 142.000 francs était nécessaire pour subvenir aux frais de ce triple arbitrage.
Pour établir ce chiffre, il avait été tenu compte des deux litiges portés précédemment devant le tribunal de la Haye au sujet des déserteurs de Casablanca et de l'extradition de l'hindou Savarkar.
Les crédits demandés au Parlement avaient été respectivement de 80.000 francs et de 73.107 fr. 63.- Mais la première affaire avait duré 24 jours, la seconde 12 jours ; les débats relatifs aux difficultés francoitaliennes auront une durée plus longue : le Gouvernement a cru prudent de prévoir 60 jours.
Dans la somme de 142.000 francs avaient été prévus les frais de voyages, les honoraires et les indemnités de trois jurisconsultes qui devaient être envoyés à la Haye. Ce nombre a pu être réduit à deux : un agent du Gouvernement de la République et un conseil technique.
Le Conseil technique, l'honorable M. André Hesse, en sa qualité de député, a fait connaître son désir de n'accepter aucun honoraire. Nous ne pouvons que l'en remercier et l'en féliciter.
A la nomenclature des prévisions pour frais du tribunal arbitral indiquant
3 jurisconsultes ou délégués ;
CRÉDITS EXTRAORDINAIRES 17I
Honoraires 9.000 fr.
Indemnité de séjour: 100 fr. pendant 60 jours 18.000 »
1 Secrétaire :
Indemnité de 40 fr. pendant 60 jours 2.400 »
Frais de voyage : 101.40 x 4 = . 405 60
Soit. . . . 29.805 60 29.805 60
il convient donc de substituer les prévisions suivantes:
1 jurisconsulte, agent du Gouvernement :
Honoraires 2.000 fr.
Indemnités de séjour : 100 fr. pendant 60 jours 6.000 »
1 jurisconsulte, conseiller technique Néant
1 secrétaire : indemnités journalières 40 fr. pendant 60 jours. . . . 2.400 »
Frais de voyage : 2 personnes. . . 202 80
Soit. . . . 11.602 80 11.602 80
Différence en moins. . . 18.202 80
D'autre part, une Commission d'enquête doit se rendre sur les côtes tunisiennes pour vérifier le point marin où a été saisi le « Tavignano ». Aucun précédent ne permet d'évaluer la dépense de cette enquête. Les frais sont subordonnés à l'importance et aux difficultés de l'expertise et à la procédure qui sera admise par les deux puissances.
L'affrètement éventuel d'un bâtiment, les frais de déplacement des pêcheurs de la côte tunisienne dont la Commission réclamera le témoignage, les frais de copie, traductions, ont été prévus pour une somme de 30.000 francs.
La somme dei42.i55 fr. 60 prévue par le Département peut donc être ramenée à 123.952 fr. 80.
Dans la demande incorporée dans le projet de loi, le chiffre de 142.155 fr. 60 avait été arrondi à 141.000 francs. L'Administration propose de fixer le crédit à ouvrir pour les arbitrages franco-italiens à 124.000 francs ; cette mesure comporte par conséquent une réduction de 18.000 francs sur le crédit primitivement demandé.
I72 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Nous produisons, d'ailleurs, l'état de prévisions établi par le Ministère des Affaires étrangères.
Arbitrage franco-italien
i° Tribunal de La Haye :
^ 4 arbhref 6 I honorail'es à 25' 000 fr- =! 125.000 fr. dont la moitié à la charge du Gouvernement français. 62.500 fr.
Remboursement des frais d'hôtel et de voyages des arbitres, liquidés par le Bureau international de La Haye (évaluation pour 60 jours). ...... 12.000 »
b) 1 jurisconsulte, agent du Gouvernement :
honoraires. . 3.000 »
Indemnité de séjour : 100 x 6Q jours 6.000 »
1 jurisconsulte, conseiller technique Néant
c) 1 secrétaire :
Indemnité journalière : 40 fr. x 60 jours. . . . 2.400 »
d) Frais de voyage (101 fr. 40 X 2) 202 80
e) Impressions, copies, traductions, mémoires, etc. ' 10.000 »
f) Provision au Bureau de La Haye (1,000 fl.). . 2.100 »
98.202 80 2° Commission d'enquête :
a) Honoraires :
1 président. . 5.000 fr.
2 commissaires 6.000 »
3 secrétaires. . »
11.000 fr., dont 1/2 5.500 »
b) Indemnité de séjour :
3 présidents et commissaires, ioof . pour 20 jours. . . 6.000 fr.
2 secrétaires, 5of pour 20 jours. . . 2.000 »
c) Voyages, déplacement: 5 X 500 fr. 2.500 »
10.500 fr., dont 1/2 5.250 »
A reporter 10.750 » 98.202 80
CREDITS EXTRAORDINAIRES 173
Report 10.750 » 98.202 80
d) Frais d'expertise enquête, témoins, affrètement d'un navire 30.000 fr., dont 1/2 15.000 »
25.750 » 25.750 »
Total 123.952 80
2° Arbitrage franco-suisse
C'est pour résoudre une difficulté d'interprétation du traité de commerce franco-suisse de 1906 que les gouvernements helvétique et français ont résolu de, soumettre ce différend à un tribunal d'arbitrage.
Mais il a été convenu que, pour réduire au minimum les frais de cet arbitrage, il serait fait emploi de « la procédure sommaire », qui réduit de 5 à 3 le nombre des arbitres.
Pour le même motif, le siège du Tribunal a été fixé à Paris.
Le crédit de 10.000 francs sollicité, par le Gouvernement pour subvenir aux frais de cette instance se décompose comme suit :
Honoraires du surarbitre. ..'.... 6.250 (250 L) Honoraires de l'arbitre français 3.000
Frais divers, impressions, voitures. . . . 750
Total. . . . . 10.000
3° Arbitrage franco-mexicain
Pour résoudre le litige pendant entre eux au sujet de la souveraineté de l'île Clipperton, le Gouvernement mexicain et le Gouvernement français se sont engagés à soumettre la question à S. M. le Roi d'Italie.
La loi du 8 février 1911 a autorisé le Gouvernement français à ratifier et, s'il y a lieu, à faire exécuter la convention conclue à Mexico le 2 mars 1909 entre la France et le Mexique {Journal officiel n° 49, page 1.306).
La procédure fixée par le haut arbitre, en vertu des pouvoirs que lui contère l'article 56 de la convention de la Haye du 18 octobre 1907 pour le règlement pacifique des conflits internationaux, comporte la remise par les parties :
i° D'un mémoire défensif dans les douze mois des ratifications (ce délai est venu à expiration le 9 mai dernier) ;
174 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
2° D'un mémoire de réplique dans les six mois suivants (9 novembre 1912) ;
30 D'un mémoire récapitulatif dans les quatre mois suivants (9 mars 1913).
Les frais d'établissement de ces mémoires, dont l'impression est confiée à l'Imprimerie nationale, avaient primitivement été évalués à. ' 5.800 fr.
L'exécution de divers documents cartographiques est prévue pour 200 »
Enfin, il y a lieu de prévoir des dépenses complémentaires spéciales suivant état ci-après :
Déplacements. . . 3.000 »
Frais de traduction, copies, recherches de documents, divers 2.000 »
Rémunération d'un conseiller technique 5.000 »
Total 16.000 fr.
C'est ce chiffre qui est incorporé dans le projet de loi n° 1920, portant ouverture du crédit extraordinaire de 168.000 francs pour le règlement des arbitrages en 1912. Diverses circonstances imprévues ont majoré très sensiblement le prix de revient du premier mémoire qui vient d'être remis au Roi d'Italie. Postérieurement à l'évaluation faite par le Département des Affaires étrangères, des documents complémentaires sont parvenus ; en outre, certaines indications ont été reçues dont il a fallu tenir compte et qui ont amené des modifications au dernier moment. Le Département a dû, pour arriver dans les délais faire accélérer le travail des ateliers de l'Imprimerie nationale en ayant recours à la procédure coûteuse des réquisitions. Pour ces motils, les ' frais d'impression du mémoire susdit se sont élevés à 4.600 francs ; le reliquat du crédit de prévision, soit 1.200 francs, est insuffisant pour les deux mémoires ' qui restent à imprimer aux mois d'août et de décembre de cette année.
Un supplément de crédit de 4.000 francs devient nécessaire ; le Gouvernement estime que le crédit total destiné au règlement de l'affaire de l'île Clipperton doit être porté de 16.000 à 20.000 francs.
Ainsi que nous l'avons dit plus haut, nous vous proposons d'adopter ces divers crédits.
Participation aux feux olympiques de Stockholm.
Le Comité olympique international organise pour le mois de juillet, prochain, à Stockholm, des jeux olympiques analogues à ceux organisés précédemment à Londres, à Paris et à Athènes.
CRÉDITS EXTRAORDINAIRES I75
La participation française à cette importante manifestation sportive est préparée et assurée, en ce qui concerne la France, par les soins du Comité olympique français qui réunit les grandes fédérations de sociétés sportives françaises groupant environ 600.000 adhérents.
Pour permettre d'envoyer à Stockholm des équipes suffisamment nombreuses, en même temps que des bateaux et agrès de toute nature, et en vue d'assurer le succès des représentants de la France, le Comité aura à supporter des charges très importantes ; le Ministre de l'Intérieur vous demande d'y participer, ainsi que cela s'est fait d'ailleurs, en 1908, en faveur des jeux olympiques de Londres, pour lesquels un crédit extraordinaire de 50.000 francs a été voté.
Les dépenses de transport de France en Suède devant être considérablement plus élevées que de France à Londres, la participation de l'Etat français serait portée à 100.000 francs pour les jeux olympiques de Stockholm.
D'autre part, la présence, dans la capitale suédoise, de nombreuses sociétés sportives, les fêtes locales qui seront données imposeront au ministre de la République, à Stockholm, des dépenses imprévues de représentation pour lesquelles le Ministre des Affaires Etrangères demande un crédit de 5.000 francs.
Cette proposition se justifie par les dépenses que le Ministre de France à Stockholm aura à engager pour recevoir les nombreuses sociétés qui participeront à ce concours international et s'associer aux fêtes qui seront données à Stockholm.
Le Parlement a déjà reconnu qu'il était équitable de tenir compte aux agents chargés de représenter la France à l'étranger des dépenses extraordinaires qu'ils ont à supporter lorsqu'une manifestation internationale importante a lieu dans la ville de leur résidence ; c'est ainsi qu'à l'occasion des expositions de Londres, Rome, Turin, Bruxelles, Buenos-Ayres, des crédits spéciaux ont été inscrits au budget du Ministère des Affaires Etrangères.
La Commission du budget estime toutefois que des crédits de cette nature doivent donner lieu à toutes les justifications de droit.
En ce qui concerne les 100.000 francs des jeux olympiques, leGou-, vernement propose que les subventions ne soient pas allouées directement aux sociétés sportives ; les dépenses seraient supportées dans l'ensemble par le Comité olympique et remboursés globalement, dans la limite de 100.000 francs, à ce Comité. Sans manquer aucunement de confiance dans le Comité olympique, la Commission du budget, en vertu de sa jurisprudence habituelle, qui tend à n'admettre que des dépenses justifiées sur états, ne peut souscrire à ce mode d'emploi du crédit. Nous vous proposons donc de voter les 100.000 francs, mais à charge des justifications de droit.
C'est sous ces réserves, Messieurs, que nous vous demandons de
17^ LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
voter à la fois le crédit de 100.000 francs et le crédit de 5.000 francs demandés par le Gouvernement à l'occasion des fêtes Olympiques de Stockholm.
La Commission du budget vous proposé, en conséquence de tout ce qui précède, de réunir les deux projets-de loi n° 1920 et 1924 en un seul projet, qui sera ainsi conçu :
PROJET DE LOI (l)
ARTICLE Ior
Il est ouvert au Ministre des Affaires Etrangères, sur l'exercice 1912, en addition aux crédits alloués par la loi de finances du 27 février 1912 et par des lois spéciales, un crédit extraordinaire" de cent cinquante-quatre mille francs (154.000 fr.) qui sera inscrit sous le n° 30 bis à un chapitre spécial du budget du Ministère des Affaires Etrangères, sous la rubrique : « Frais de justice et d'arbitrage international ».
ART. 2.
Il est ouvert au Ministre des Affaires' Etrangères, sur l'exercice 1912, en addition aux crédits accordés par la loi de finances du 27 février 1912 et par des lois spéciales, un crédit supplémentaire de cinq mille francs (5.000 fr.) applicable au chapitre 11 : « Frais de représentation ».
ART. 3.
Il est ouvert au Ministre de l'Intérieur, sur l'exercice 1912, en addition aux crédits accordés par la loi de finances du 27 février 1912 et par des lois spéciales, un crédit extraordinaire de cent mille francs (100.000 fr.) applicable au chapitre 20 bis : « Subvention aux fédérations sportives à l'occasion des jeux olympiques de Stockholm. ».
ART. 4.
Il sera pourvu à ces crédits au moyen des ressources générales du budget de l'exercice 1912.
(1) La loi a été promulguée, dans les termes mêmes du projet, le 3 juillet 1912.
COMMISSIONS ROGATOIRÉS I77
Circulaire du Ministre des Affaires Etrangères relative à la transmission directe des commissions rogatoires entre tribunaux consulaires français.
Le Ministre des Affaires Etrangères à Messieurs les Agents diplomatiques, Consuls généraux et Consuls de France au Maroc, en Turquie, en Ethiopie, à Mascate, en Perse, au Siam et en Chine.
Paris, le 27 octobre igir.
J'ai l'honneur de vous faire savoir que mon Département, le Ministère de la Justice et celui des Colonies se sont mis d'accord pour décider que les commissions rogatoires en toutes matières (pénales, civiles ou commerciales), seraient transmises directement par les tribunaux consulaires français à ceux de la métropole ou des Colonies, et réciproquement.
Vous devrez donc désormais adresser les mandats judiciaires aux procureurs de la République compétents, sans recourir à mon intermédiaire.
De 'même il vous appartiendra d'envoyer directement à l'autorité française requérante les pièces d'exécution des mesures qui vous auront été demandées.
J'ajoute que, par décrets des 29 mai et 14 septembre derniers, la correspondance de service que vous échangerez avec les parquets de France et des Colonies a été admise à circuler en franchise sous pli fermé.
Pour le Ministre et par autorisation :
Le Ministre plénipotentiaire, directeur~3 Signé : GAVARRY.
AUTRICHE
Loi portant prorogation de l'effet de ïa loi du SÔ Août 1891 sur l'exercice de la juridiction consulaire.
27 décembre ipn.
Après avis des deux Chambres du Conseil de l'Empire, j'ordonne ce qui suit :
i° L'effet des articles ibis, 18, 22 et 23 de la loi du 30 août 1911
ARCHIVES DIPLOM., t. 122, n°s 5-6-7, mai-juillet 1912. 12
I78 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
(Reichsgesetzplait, n° 136) contenant les dispositions relatives à l'exercice de la juridiction consulaire, est prorogé jusqu'au 31 décembre 1913Pour
1913Pour qui est de la limitation de la juridiction consulaire en Egypte et à sa suppression en Tunisie (Art. 19 de la loi sur la juridiction consulaire) les dispositions existantes demeurent en vigueur;
2° Pour la durée de l'effet de la loi sur la juridiction consulaire, la loi du 22 janvier 1902 (Reichsgesetxblatt, n° 40) concernant le tarif des droits consulaires demeure en vigueur (Art. 9 de la dernière loi) ;
30 Les dispositions de l'article 1, paragraphe 1 de la loi du 30 août 1891 (Reichsgesetxblatt, n° 146) ne pourront être abrogées ou modifiées qu'à partir du 31 décembre 1913, quand la loi concernant le même objet dans les autres domaines de l'Empire sera de même abrogée ou modifiée de semblable manière ;
40 Cette loi, que Mon Ministre de la Justice est chargé de faire exécuter, entrera en vigueur à dater du Ier janvier 1912.
Vienne, le 27 décembre 1911.
FRANÇOIS-JOSEPH, m. p. STÙRGKH, m. p. HOCHENBURGER, m. p.
*
* * '
Ordonnance du Ministre de la Justice concernant la protection du droit d'auteur dans les rapports avec l'Espagne.
13 avril i<)!2.
1. En vertu de l'article 50 de la loi espagnole concernant la propriété intellectuelle du 10 janvier 1879, les ressortissants d'Etats dont la législation reconnaît aux Espagnols le droit de propriété intellectuelle dans les termes établis par ladite loi, jouissent en Espagne des droits que cette loi confère, sans qu'il y ait besoin ni de traité ni d'intervention diplomatique.
Conformément à cette disposition, l'Espagne édictera un décret royal qui entrera en vigueur le 16 avril 1912 et en vertu duquel les auteurs autrichiens bénéficieront en Espagne des droits garantis par la loi précitée, à la condition que leurs oeuvres soient protégées en Autriche et n'aient pas perdu cette protection par l'expiration du délai légal de protection ; sous ces réserves, la protection profitera également aux oeuvres publiées avant que le décret royal ait commencé à déployer ses effets.
IL La réciprocité étant ainsi assurée, nous décrétons, conformément à l'article Ier de la loi du 26 février 1907 (Reichsgesetxblatt, n° 58), ce qui suit :
DROITS D'AUTEURS 179
Les dispositions de la loi du 26 décembre 1895 (Reichsgesetxblatt n° 197) concernant le droit d'auteur sur les oeuvres de littérature, d'art et de photographie s'appliquent aux oeuvres de sujets espagnols, protégées en Espagne et qui ne sont pas publiées en Autriche, avec cette restriction que la durée de la protection, en Autriche, de ces oeuvres ne dépasse pas la durée prescrite par la loi espagnole.
III. La présente ordonnance entrera en vigueur le 16 avril 1912.
Elle est également applicable aux oeuvres parues avant cette date. Les dispositions des articles 66 et 67 de la loi du 27 décembre 1895 (Reichsgesetxblatt n° 197), ainsi que les articles 9 et 15 de l'ordonnance du Ministère de la Justice du 29 décembre 1895 (Reichsgesetxblatt, n° 190) s'appliquent à ces mêmes oeuvres, avec la modification que les reproductions simplement commencées et dont la fabrication n'était pas interdite jusqu'alors pourront être terminée et répandues comme celles déjà fabriquées licitement. Les passages des prescriptions précitées où il est question de l'entrée en vigueur de la loi du 26 décembre 1895 ou des délais à compter depuis cette époque, devront être interprétés en ce sens que, au lieu de cette date, c'est celle de l'entrée en vigueur de la présente ordonnance qui fera règle.
HOCHENBURGER, m. p.
ESPAGNE
Décret royal déclarant applicable aux sujets autrichiens la loi du 10 Janvier 1879.
(ieT avril 1912.) Exposé des motifs du Ministère d'Etat
La loi autrichienne du 26 février 1907 modifiant celle du 26 décembre 1895 relative au droit d'auteur sur les oeuvres de littérature, d'art et de photographie prévoit que, par une ordonnance du Ministère de la Justice à promulguer dans la Feuille impériale des lois, les dispositions de la loi de 1895 pourront être rendues applicables, en tout ou en partie, aux oeuvres dues à des auteurs de nations ne possédant aucun traité avec l'Empire, à la condition que la réciprocité existe quant à la reconnaissance des droits des auteurs. D'autre part, l'article 50 de notre loi du 10 janvier 1879 concernant la propriété intellectuelle prescrit que les ressortissants d'Etat dont la législation reconnaît aux Espagnols le droit de propriété intellectuelle dans les termes établis par ladite loi, jouiront en Espagne des avantages et bénéfices que cette loi confère, sans qu'il y ait besoin de traité.
i8o LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
En conséquence, à la suite des négociations appropriées avec le Gouvernement autrichien, le Ministre soussigné, d'accord avec celui de l'Instruction publique et des Beaux-Arts, a l'honneur de soumettre à l'approbation de Votre Majesté le projet de décret suivant.
Madrid, le Ier avril 1912.
Sire, aux pieds royaux de V. M.
MANUEL GARCIA PRIETO.
DÉCRET ROYAL
Le Ministère impérial et royal autrichien de la Justice ayant déclaré qu'à partir de la date de la mise en vigueur du présent décret, la réciprocité en matière de propriété intellectuelle est- établie à l'égard à la Monarchie espagnole, Je décrète ce qui suit :
ARTICLE PREMIER
La réciprocité prévue par l'article 50 de la loi du 10 janvier 1879 ayant été garantie dans les deux pays, les ressortissants autrichiens jouiront en Espagne des bénéfices accordés par ladite loi, pour autant que leurs oeuvres sont protégées et conservent leur protection en Autriche; toutefois, ils ne pourront réclamer cette protection en Espagne à l'égard des oeuvres qui ne jouissent pas du droit de propriété dans ledit Empire parce que le délai légal fixé pour qu'elles entrent dans le domaine public est expiré, quand bien même la loi espagnole accorderait un délai plus long que celui garanti par les lois en vigueur en Autriche.
De même il est entendu qu'après promulgation du présent décret, les formalités et conditions requises par la législation des deux pays pour étendre aux nationaux respectifs la protection concédée par les lois intérieures sont considérées comme étant remplies.
ART. 2
Le présent décret est applicable aux oeuvres protégées dans les deux pays au moment où les dispositions y contenues commencent à déployer leurs effets, ainsi qu'aux oeuvres qui dorénavant obtiendront la protection dans l'un des deux pays, mais en aucun cas aux oeuvres qui auraient perdu ce droit.
ANNEXION DE LA TRIPOLITAINE 181
ART. 3
Les dispositions contenues dans le présent décret commenceront à régir à partir du 16 avril.
Donné au Palais, le Ier avril 1912.
ALFONSO. Le Ministre d'Etat,
■ MANUEL GARCIA PRIETO.
ITALIE
Décret de S. M. le Roi d'Italie signé à Rome le 5 novembre 1911 et annexant la Tripolitaine et la Cyrénaïque au Royaume d'Italie.
VICTOR EMMANUEL III, par la grâce de Dieu et la volonté de la Nation, Roi d'Italie,
Sur la proposition du Président du Conseil des Ministres et du Ministre des Affaires étrangères,.
Après avis du Conseil des Ministres,
Vu l'article 5 du Statut fondamental du Royaume; Nous avons décrété et décrétons :
La Tripolitaine et la Cyrénaïque sont placées sous la souveraineté pleine et entière du Royaume d'Italie.
Une loi déterminera les règles définitives de l'administration de ces pays. Tant que cette loi ne sera pas promulguée, il y sera pourvu par décrets royaux.
Le présent décret sera présenté au Parlement pour être converti en loi.
Nous ordonnons que le présent décret, muni du sceau de l'Etat, soit inséré dans la collection officielle des Lois et Décrets du Royaume d'Italie, mandant à tous de l'observer et de le faire observer.
Donné à Rome, le 5 novembre 1911.
VICTOR EMMANUEL,
GIOLITTI — Di SAN GIULIANO — FINOCCHIAROAPPILE — FACTA — TEDESCO •— SPINGARDI — LEONARDI-CATTOLICA — CREDARO •— SACCHI — NITTI — CALISSANO.
Vu, par ordre de Sa Majesté :
Le Président du Conseil des Ministres :
GIOLITTI.
ï82 LOIS ET DOCUMENTS DIVERS
Loi du 25 février 1912 convertissant en loi le Décret royal du 5 novembre 1911, plaçant la Tripolitaine et la Cyrénaïque sous la souveraineté pleine et entière du Royaume d'Italie.
VICTOR EMMANUEL III, par la grâce de Dieu et par la volonté de la Nation, roi d'Italie,
Le Sénat et la Chambre des Députés ont approuvé,
Nous avons sanctionné et promulguons ce qui suit :
ARTICLE UNIQUE
Lé Décret Royal du 5 novembre 1911, n° 1247, par lequel la Tripolitaine et la Cyrénaïque furent placés sous la souveraineté pleine et entière du Royaume d'Italie est converti en loi.
Nous ordonnons que la présente munie du sceau de l'Etat soit insérée dans la collection officielle des Lois et Décrets du Royaume d'Italie et mandons à tous de l'observer et de la faire observer comme loi de l'Etat.
Donné à Rome, le 25 février 1912.
GIOLITTI — Di SAN GIULANO — FINOCCHIAROAPRILE — FACTA •— TEDÈSCO ■— SPINGARDI — LEONARDI — CATTOLICA ■— CREDARO — SACCHI — NITTI — CALISSANO.
Vu, le Garde des Sceaux :
FINOCCHIARO-APRILE.
QUATRIÈME PARTIE
CHRONIQUE
Réceptions diplomatiques
— En remettant ses lettres de créances à M. le Président de la République, le 30 janvier 1912, M. Joao Chagas, Envoyé Extraordinaire et Ministre Plénipotentiaire de Portugal à Paris, a prononcé l'allocution suivante :
« Monsieur le Président,
« J'ai l'honneur de remettre à Votre Excellence les lettres qui m'accréditent en qualité d'Envoyé Extraordinaire et de Ministre Plénipotentiaire de la République Portugaise près le Gouvernement de la République Française, et je suis chargé, à cette occasion, de vous faire connaître, Monsieur le Président, les sentiments d'amitié bien sincère de Monsieur le Président de la République Portugaise envers Votre Excellence, ainsi que les voeux qu'il forme pour le bonheur et la prospérité de la France.
« Permettez-moi, Monsieur le Président, de joindre à ces expressions cordiales mes hommages et mes voeux personnels.
« Je suis particulièrement heureux d'avoir à accomplir mes fonctions auprès du Gouvernement d'une grande nation à laquelle j'ai toujours été profondément attaché, qui m'a jadis accordé une généreuse hospitalité et pour le génie de laquelle, pendant toute mon ancienne carrière d'homme de lettres, j'ai professé la plus vive admiration.
« Les sentiments que j'ai l'honneur de vous exprimer, Monsieur le Président, ne sont pas uniquement personnels ; ils sont aussi le reflet de ceux de mon pa3>-s où l'influence intellectuelle et morale de la civilisation française se traduit par d'unanimes sympathies que je suis
184 -CHRONIQUE
surtout heureux de vous témoigner maintenant qu'un nouveau lien s'est établi entre le Portugal et la France.
« Aux affinités de la race, de la langue et de la culture qui existent entre nos deux pays, est venu s'ajouter l'identité de l'idéal de progrès dans l'ordre politique et sociale. Ce nouveau rapprochement nous fait pour ainsi dire des frontières communes.
« J'ai à coeur de devenir, auprès du Gouvernement de la République Française, l'interprète fidèle et dévoué de ces sentiments de solidarité et d'amitié sincère et j'ose espérer que, grâce à l'appui de votre haute bienveillance, Monsieur le Président, et au concours amical du Gouvernement de la République Française, je pourrai m'acquitter d'une façon heureuse de la mission dont le Gouvernement de la République Portugaise a bien voulu m'honorer. »
— Le Président de la République a reçu, le 29 avril 1912, en audience officielle S. Exe. M. Myron Th. Herrick, qui lui a remis les lettres par lesquelles S. Exe. M. le président des Etats-Unis d'Amérique l'accrédite en qualité d'ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire.
En remettant ses lettres de créance, l'ambassadeur a prononcé l'allocution suivante :
« Monsieur le Président,
* Le président des Etats-Unis d'Amérique m'ayant fait l'honneur de me nommer ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire près le Gouvernement de la République française, je viens remplir un devoir doublement agréable pour moi en présentant à Votre Excellence les lettres qui m'accréditent en cette qualité.
« C'est une distinction dont je ne saurais être trop fier que d'être ainsi appelé à la longue suite d'hommes éminents qui, depuis la constitution de notre gouvernement, sont venus successivement travailler à développer les bons rapports qui, dès l'origine, se sont établis et se sont si heureusement maintenus entre la France et les Etats-Unis. En consacrant, à mon tour, tous mes efforts à la poursuite de ce noble but, j'ai non seulement la confiance de remplir fidèlement la mission toute d'amitié dont notre président m'a chargé, mais encore de mériter que le gouvernement de Votre Excellence reporte sur moi la bienveillance et le concours cordial dont il a honoré mes prédécesseurs. Je pourrai ainsi manifester d'une façon adéquate la chaude sympathie que mes compatriotes professent pour le peuple français et répondre au sincère désir qu'a mon gouvernement de fortifier, par tous les moyens possibles, les liens historiques qui unissent les deux pays et leur permettent de marcher fraternellement d'accord dans" les voies du progrès et de la paix.
RÉCEPTIONS DIPLOMATIQUES 185
« De plus, ce n'est point la partie la moins agréable de ma tâche, je suis charge de vous transmettre les voeux que forme personnellement notre président pour le bonheur de Votre Excellence, et en même temps de vous donner l'assurance que le peuple des Etats-Unis, de son côté, fait des voeux ardents pour qu'une prospérité sans mélange soit l'apanage constant du peuple français. »
Le Président de la République a répondu en ces termes :
« Monsieur l'Ambassadeur,
« Je suis heureux de recevoir de vos mains les lettres qui vous accréditent en qualité d'ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire des Etats-Unis d'Amérique. Je constate avec satisfaction que votre gouvernement, par le choix qu'il a fait de votre personne, tient à maintenir la tradition de ne désigner pour les hautes fonctions que vous remplissez, que des hommes éminents, préparés par leurs qualités personnelles à continuer l'oeuvre de rapprochement entre les deux pays à. laquelle se sont constamment appliqués vos prédécesseurs.
« Votre mission sera d'ailleurs grandement facilitée par la sympathie traditionnelle qui unit nos deux républiques et leur perjmet dé travailler, dans la paix et la concorde, au développement réciproque de leurs relations commerciales et à l'affermissement de leurs bons rapports politiques.
« Cette sympathie prend toute occasion de s'exprimer, qu'il s'agisse, soit de s'associer aux deuils occasionnés par de terribles catastrophes, soit d'honorer, dans un mutuel hommage, la mémoire de ceux des Français qui autrefois combattirent- sur le sol américain pour la cause de la civilisation et de la liberté.
« Aussi pouvez-vous être assuré de trouver auprès du Président de la République française et de son gouvernement le concours le plus entier et le désir permanent de vous rendre aussi agréable que possible votre séjour parmi nous.
« Très sensible aux souhaits personnels de M. le Président de la république des Etats-Unis et à ceux de votre natiori dont vous vous êtes fait l'interprète, je vous prie de transmettre à M. Taft l'expression sincère des voeux que je forme à mon tour pour son bonheur ainsi que pour la prospérité du noble peuple américain. »
— Le 4 mai 1912, M. le Président de la République a reçu en audience publique M. J.-Gustave Guerrero, qui lui a remis les lettres l'accréditant en qualité d'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la République de Salvador.
i86 CHRONIQUE
-— Le samedi 5 mai 1912, M. Rafaël de Miero a remis au Président de la République les lettres de créance l'accréditant en qualité d'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la République de l'Uruguay auprès du gouvernement français.
Le ministre uruguayen s'est exprimé ainsi :
« Monsieur le Président,
« C'est un honneur dont j'apprécie tout le prix que celui qui vient de m'échoir d'être accrédité en qualité d'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de l'Uruguay auprès du gouvernement de la République française.
« Ami de la France, par l'esprit autant que par le coeur, il me sera facile de remplir la mission dont je suis investi par mon gouvernement, de maintenir et de resserrer les relations si cordiales qui existent entre la France et l'Uruguay depuis près d'un siècle.
« Cette longue tradition d'inaltérable amitié répondant aux sentiments autant qu'aux intérêts des deux pays m'autorise à espérer qu'elle ne cessera de subsister, si, consacrant tous -mes efforts à la poursuite de ce noble but, j'arrive à mériter de Votre Excellence et du gouvernement de la France la bienveillance et le concours si cordial dont ils ont honoré mes prédécesseurs.
« Ce n'est pas la partie la moins agréable de ma mission d'être chargé de vous transmettre les voeux personnels de mon président pour le bonheur de Votre Excellence, en même temps que de vous donner l'assurance des vives sympathies du peuple de l'Uruguay pour la grande République dont nous nous efforçons de suivre les enseignements qui marquent, aujourd'hui comme hier, les routes les plus nobles de l'humanité. »
Le Président a répondu en ces termes :
« Monsieur le Ministre,
« Les sentiments que vous venez d'exprimer en termes si heureux en me remettant les lettres par lesquelles Son Excellence le président de la République de l'Uruguay vous accrédite en qualité d'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire me touchent vivement et je vous en remercie sincèrement.
« Je me félicite du choix que le gouvernement de la République orientale a fait de votre personne pour travailler avec nous à maintenir et à resserrer les relations de traditionnelle amitié qui unissent nos .deux pays, et vous pouvez compter, dans l'accomplissement de votre mission, sur l'entier concours du président et du gouvernement de la République.
RÉCEPTIONS DIPLOMATIQUES 187
« Veuillez bien faire savoir à S. Exe. le président Batlle Ordonez combien je suis sensible aux voeux dont il vous a chargé d'être auprès de moi l'interprète, et lui transmettre mes souhaits les meilleurs pour son bonheur et la prospérité de la République orientale. »
■— Le Président de la République a reçu, le jeudi 30.mai 1912, en audience solennelle, au Palais de l'Elysée, M. Miguel Diaz Lombardo, Envoyé extraordinaire et Ministre plénipotentiaire du Mexique.
Introduit auprès du Président de la République, M. Miguel Diaz Lombardo a prononcé le discours suivant :
« Monsieur le Président,
« J'ai l'honneur de remettre entre les mains de Votre Excellence les lettres m'accréditant comme Envoyé extraordinaire et Ministre plénipotentiaire du Mexique auprès du gouvernement de la République française, et aussi les lettres de rappel de mon prédécesseur, M. Sébastian de Mier.
« La mission dont M. le Président de la République mexicaine a bien voulu m'honorer est très flatteuse pour moi, et m'est agréable au plus haut point, car je suis chargé d'exprimer à Votre Excellence les voeux que le peuple mexicain et M. le président Francisco Madero forment pour la prospérité de la nation française et le bonheur de son premier magistrat.
« Certainement, ma tâche sera facile à remplir si Votre Excellence veut bien me continuer la bienveillance accordée à mon prédécesseur, bienveillance qui lui a permis de s'acquitter avec éclat de sa mission.
« J'entretiens le ferme espoir qu'à l'avenir les liens de sincère amitié existant si heureusement entre la France et le Mexique se resserreront de plus en plus, et que les rapports intellectuels et économiques de nos deux pays se développeront encore davantage, à leur mutuel profit.
« Votre Excellence me permettra d'ajouter que la France, qui a eu la gloire de propager partout, et particulièrement dans le Nouveau Monde, les lumières et les bienfaits de la civilisation latine, s'est fait aimer au Mexique, et que la colonie française y résidant, qui, par son labeur et sa probité, a contribué à accroître la richesse du pays, a su également gagner l'estime de tous mes compatriotes. Et ce sont là des précédents que je suis très heureux de constater.
« Enfin, j'ose espérer que Votre Excellence daignera accepter mes voeux respectueux pour la prospérité de la France et le bonheur de son Président. »
l88 CHRONIQUE
Le Président de la République a répondu en ces termes : •
« Monsieur le Ministre,
« En recevant de vos mains, avec les lettres de rappel de M. Sébastian de Mier, celles qui vous accréditent en qualité d'Envoyé extraordinaire et de Ministre plénipotentiaire du Mexique, j'ai plaisir à vous souhaiter une heureuse bienvenue. J'y ajoute l'assurance que vous pouvez compter sur tout mon concours pour vous faciliter l'accomplissement de la haute mission qui vous a été confiée par votre gouvernement.
« Les bonnes dispositions que n'a cessé de rencontrer auprès de nous, au cours de sa longue mission, votre éminent prédécesseur, dont vous avez si. justement rappelé le souvenir, ne sont-elles pas pour vous montrer que la France est désireuse de maintenir avec le Mexique les plus cordiales relations ?
« En évoquant les sentiments dont le peuple mexicain est animé à l'égard de la colonie française, et en insistant sur sa participation au développement de votre richesse nationale, ainsi, que sur l'estime dont elle jouit auprès de vos compatriotes, vous lui avez rendu un hommage dont nous sommes particulièrement touchés. Il ne peut que contribuer à resserrer les liens de sincère amitié qui existent entre nos deux Républiques.
« Par là nous aurons, des deux côtés de l'Océan, la haute satisfaction de voir nos rapports intellectuels et nos relations économiques se développer chaque jour davantage, au commun profit de nos deux pays.
« Je vous prie, Monsieur le Ministre, de transmettre à S. Exe. M. le Président Madero, les voeux que je forme pour son bonheur, ainsi que pour la prospérité du Mexique. »
— Le 4 juillet, M. le Président de la République a reçu en audience particulière l'ambassade extraordinaire danoise chargée de lui notifier officiellement l'avènement au trône de S. M. Christian X. Cette ambassade, qui se composait de S. Exe. M. O. de Oxholm, chambellan, ancien maréchal de la Cour, et de M. O. de Vind, veneur de la Cour, venait de Londres où elle s'était acquittée d'une mission semblable auprès de S. M. le Roi de Grande Bretagne et d'Irlande. Le Président a offert un dîner en l'honneur des ambassadeurs.
— Le Président de la République a reçu le 11 juillet, en audience officielle, S. Exe. M. le baron Ishii qui lui a remis les lettres par
RÉCEPTIONS DIPLOMATIQUES 189
lesquelles S. M. l'Empereur du Japon l'accrédite en qualité d'Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire.
L'Ambassadeur a prononcé l'allocution suivante en remettant ses lettres de créance :
« Monsieur le Président,
« J'ai l'honneur de remettre entre vos mains les lettres par lesquelles S. M. l'Empereur, mon auguste maître, daigne bien m'accréditer auprès du Gouvernement de la République française en qualité de son Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire.
ce Vous.. n'ignorez certes pas, Monsieur le Président, quel rôle considérable fut joué par les Français pour le développement de mon pays, et que l'affinité du caractère essentiellement chevaleresque et humanitaire des deux peuples aidant nos rapports mutuels n'ont jamais cessé d'être des plus excellents à tous les points de vue. Je n'ai pas besoin d'ajouter combien S. M. l'Empereur, mon Gouvernement et le peuple japonais tout entier sont ardemment désireux de resserrer davantages les relations si étroites basées sur des causes aussi naturelles que permanentes.
« Dans ces conditions, je suis très heureux de constater que ma tâche doit être singulièrement facilitée, d'autant plus que, sans aucun doute, vous voudrez bien, Monsieur le Président, de même que le Gouvernement de la République, me prêter le concours des plus bienveillants et des plus efficaces comme à mes éminents prédécesseurs dans l'accomplissement de ma haute mission en France, où j'ai passé, au début de ma carrière, de longues années aussi agréables qu'instructives, dont j'évoque toujours le souvenir avec une douce et indicible émotion.
« Enfin, Monsieur le Président, je me permets de vous remettre à la même occasion les lettres de rappel de mon prédécesseur le vicomte Kurino. »
Le Président de la République a répondu en ces termes : « Monsieur l'Ambassadeur,
« Les gracieuses paroles que vous venez de prononcer, en me remettant les lettres par lesquelles S. M. l'Empereur du Japon vous accrédite, en qualité d'Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire, auprès du Président de la République française, me touchent tout particulièrement.
« Je tiens à vous dire que je me félicite que le choix de votre Souverain ait porté sur votre distinguée personne pour succéder au
I90 ' CHRONIQUE
diplomate éminent dont le souvenir se rattache aux efforts qui ont eu pour heureux effet de rendre plus étroits les liens d'amitié qui unissent nos deux pajrs.
« Je vous suis reconnaissant des sentiments que vous venez d'exprimer à l'égard de la France. Elle a suivi avec une vive sympathie l'admirable développement du Japon, qui n'a cessé de grandir depuis plus d'un demi-siècle. Elle est fière du modeste mais très dévoué concours que quelques-uns de ses enfants ont été appelés à lui prêter.
« Il vous a plu de le rappeler, je vous en remercie, comme il m'est agréable d'apprendre que vous n'avez pas oublié les années que vous avez passées à Paris, au début de votre brillante carrière. Vous nous revenez aujourd'hui avec l'autorité qui s'attache à votre haute fonction.
« Quelle favorable condition pour mener à bien la mission qui vous est confiée !
« Vous pouvez être assuré de trouver chez tous, et particulièrement, auprès du Président de la Republique, le concours le plus amical pour l'accomplissement de votre mission. Par là, j'en suis assuré, se resserreront encore les relations toujours plus confiantes qui unissent si heureusement le Japon et la France.
« C'est dans cette conviction que je suis heureux, Monsieur l'Ambassadeur, de vous souhaiter la bienvenue parmi nous. »
Voyage de S. M.' la reine des Pays-Bas et de S. A. R. le Prince des Pays-Bas en France (1er, 2 et 3 juin 1912) ; discours et toasts officiels.
Toast porté par M. le Président de la République à l'issue du dîner offert à S. M. la Reine et à S. A. R. le Prince au palais de l'Elysée le samedi Ier juin 1912 :
« Madame,
« C'est avec un particulier plaisir que je salue, ce soir, Votre Majesté au nom de la France et du gouvernement de la République.
« Au mois de juillet dernier, Votre Majesté a bien voulu considérer ma présence dans sa capitale comme un gage des excellents rapports qui unissent si heureusement nos deux pays. Je suis persuadé que votre séjour parmi nous fortifiera encore ces cordiales relations.
« Par l'accueil qui lui a été fait, Votre Majesté a pu se rendre compte de la nature des sentiments dont elle est l'objet de la part du-
VOYAGE DE LA REINE DES PAYS-BAS I9I
peuple français ; à sa déférence empressée pour Féminente souveraine qui nous honore aujourd'hui de sa visite royale se joignent les manifestations éclatantes d'une respectueuse sympathie pour son auguste personne et d'une haute estime pour son beau et noble pays.
« Paris, qui n'oublie pas les hôtes éclairés qui, durant leurs séjours dans ses murs, ont témoigné de quelque goût pour lui, est heureux, Madame, de vous marquer sa reconnaissance pour les visites que vous lui avez faites avant votre couronnement, et la France se plaît à saluer dans la terre de Hollande, si justement jalouse de son indépendance et du magnifique essor de sa puissance économique, une des grandes patries des choses de la Pensée, de la Science et de l'Art.
« Puisse Votre Majesté conserver des heures, trop courtes à notre gré, qu'elle va passer en France, un agréable et durable souvenir.
« Je bois à la santé de Votre Majesté, de S. M. la reine-mère, de son A. R. le prince des Pays-Bas et de S. A. R. la princesse Juliana.
« Je bois à la gloire et à la prospérité de la Hollande. »
Réponse de S. M. la Reine des Pays-Bas :
« Je vous remercie bien sincèrement, Monsieur le Président, des gracieuses paroles, de bienvenue que vous venez de m'adresser.
« Je suis fort heureuse de pouvoir vous rendre l'aimable visite que vous nous avez faite l'an dernier aux Pays-Bas et dont moi et mes compatriotes nous avons conservé, je puis vous l'affirmer, un souvenir particulièrement agréable.
« Les excellents rapports qui unissent si heureusement nos deux pays, l'affinité de goûts et d'intérêts me sont un gage qu'aussi dans l'avenir ces liens d'amitié pourront être de plus en plus consolidés.
« Ces relations, d'ailleurs, datent de loin. Déjà, au moyen âge la culture française avait trouvé un champ propice aux Pays-Bas ; votre ■littérature et vos arts y avaient trouvé et y trouvent toujours de fervents adeptes. Nous éprouvons une profonde admiration pour le génie, pour l'ardeur au travail, la vaillance de votre noble nation.
« Pour moi personnellement, revenir en votre beau pays et en ce splendide Paris m'est particulièrement agréable. Je suis fière du sang français qui coule dans mes veines et que le nom de ma race se rattache à la France.
« Je tiens donc à vous exprimer, Monsieur le Président, tout le plaisir que nous éprouvons, le prince et moi, à être aujourd'hui les hôtes du premier magistrat de la République, et je suis on ne peut plus touchée par l'accueil que les Français m'ont préparé.
« Je bois à votre santé, Monsieur le Président, et à celle de Mme Fallières, et à la gloire et à la prospérité de la France. »
192 CHRONIQUE
Discours prononce par M. César Caire, premier vice-président du Conseil Municipal de Paris, lors de la réception de S. M. la Reine des Pays-Bas à rHôtel-de-Ville, le dimanche 2 juin 1912 :
« Madame,
« Au nom de la ville de Paris, j'ai l'honneur de déposer aux pieds de Votre Majesté nos hommages les plus respectueux. Je la remercie d'avoir daigné venir, avec Monsieur le Président de la République, visiter notre palais municipal, berceau de nos premières franchises et de nos antiques libertés.
« Votre Majesté voudra bien me permettre d'offrir à Son Altesse Royale le prince des Pays-Bas, dont la présence ici nous touche très vivement, les sentiments de déférence empressée de la population parisienne.
« Madame,
« En nous donnant la joie de recevoir aujourd'hui Votre Majesté, vous comblez les désirs du peuple de Paris qui vous connaît et qui vous aime.
« Il a suivi de loin, et il a vu grandir avec intérêt et sympathie Votre Majesté, sous la protection d'une mère incomparable qui a façonné votre âme à toutes les délicatesses du devoir et à l'art difficile de gouverner, et que nous saluons de toute notre admiration et de tous nos respects.
« Sur cette terre de France, patrie de la chevalerie, où la femme a gardé sa royauté séculaire si bienfaisante et si douce, et [où maintes fois même elle s'est illustrée par l'héroïsme, nul chef d'Etat ne pouvait être accueilli avec plus d'enthousiasme que Votre Majesté..Toutes nos traditions se lèvent du sol national pour la' fêter et pour lui faire cortège, car jamais couronne royale n'a été portée avec plus de grâce charmante et de souriante bonté.
« Nous savons que Votre Majesté recueille, dans l'exercice du pouvoir, l'affection, unanime d'un peuple heureux de la prospérité de son pays comme il est fier de son histoire et jaloux de son invincible indépendance. Il vit en paix, sous votre sceptre aimé, dans cette Néerlande, terre hospitalière aux idées et aux hommes, terre de liberté, aujourd'hui autant qu'autrefois, posée comme une émeraude sur la frontière .d'une mer aux reflets d'opale, fraîche, coquette et pimpante, au milieu de ses canaux, de ses digues, de ses prés verts et de ses fleurs, luttant sans cesse avec une énergie victorieuse contre le flot envahisseur et gardant, comme un trésor, dans ses villes, les plus merveilleux chefs-d'oeuvre de Fart. ;
VOYAGE DE LA REINE DES PAYS-BAS 193.
« Ce peuple a les sympathies de la France.
« Si les deux nations se sont mesurées parfois sur les champs de bataille, elles y ont gagné une estime réciproque. Jamais adversaires ne furent moins ennemis.
« Néerlandais et Français sont faits pour se comprendre.
« Aussi nous réjouissons-nous d'avoir, à cette heure, à nos côtés, sous les yeux de Votre Majesté, les représentants de votre nation, MM. les Bourgmestres et MM. les Délégués des municipalités d'Amsterdam et de la Haye vos grandes et florissantes cités.
« Madame,
« Nous garderons profondément gravé dans nos coeurs le souvenir de la visite de Votre Majesté. Elle est un gage de relations de plus en plus cordiale entre les Pa}rs-Bas et la France. ■
« Et si la souveraine, adorée de tout un peuple, veut bien nous autoriser à ne pas oublier la mère, nous nous permettrons d'exprimer, pour la princesse ro3rale, nos voeux les plus ardents d'avenir et de bonheur et de les faire monter vers ce berceau où reposent les espérances de votre pays. »
Discours de M. Delanney, préfet de la Seine.
« Madame,
« L'administration de la ville de Paris est heureuse de s'associer aux représentants de la cité pour souhaiter à Votre Majesté et à son Altesse Royale la plus respectueuse bienvenue.'
« C'est un honneur précieux qui m'échoit de saluer en Votre Majesté la descendante d une maison qui, dès le moyen âge, fixait les regards de l'Europe et savait mériter l'estime des hommes épris d'indépendance et de justice.
« Une tradition plusieurs fois séculaire unit les destinées de votre illustre dynastie à celle de la nation ; Votre Majesté a recueilli cet héritage pour en faire sa plus belle parure. Après avoir été, comme les princesses lointaines, la filleule des provinces néerlandaises, elle en est à son tour l'auguste marraine, et la tutrice bien-aimée.
« Avec Votre Majesté, nous saluons le peuple fidèle qui a su faire sienne la fière devise de ses souverains, et qui, non content de maintenir intact un patrimoine chèrement acquis, a vu dans le développement de ses richesses naturelles et de sa puissance commerciale, le moyen d'acquitter une dette sacrée envers les artisans de sa fortune et de sa gloire. ARCHIVES DIPLOM., t. !22, n" 5-G~7, mai-juillet 1913. l3
194 CHRONIQUE
« Nous aimons la loyauté, la patience, l'énergie hollandaise, et jusqu'à cette réserve digne et profonde que le Grand Taciturne incarne si superbement. Ces vertus traditionnelles ont pour emblème un étendard dont les trois couleurs semblent se confondre avec celles de notre drapeau national. Que Votre Majesté daigne voir dans ce symbole commun l'image de l'union qui règne entre les deux peuples, et le gage des voeux ardents que nous nous permettons ,de former pour elle, pour S. M. la reine mère, pour LL. A A. RR. le prince Henri et la princesse Juliana, ainsi que pour le royaume des Pays-Bas. »
Réponse de S., M. la Reine des Pays-Bas aux deux précédents discours :
« Monsieur le président du conseil municipal, « Monsieur le préfet,
« En vous remerciant sincèrement des aimables paroles qui nous ont été adressées et auxquelles mon peuple sera très sensible, je tiens à vous exprimer mon vif plaisir d'être reçue ici par vous en cet Hôtel de Ville, où bat le coeur de Paris.
« Paris ! .nom magique, qui par le monde évoque tant de souvenirs sous tous les rapports ! Evénements historiques depuis l'ancienne Lutèce ; théâtre aussi de luttes pacifiques dans le domaine des arts et des sciences, où concourir c'était vaincre.
« La population si laborieuse de votre splendide cité trouve dans ce superbe édifice, digne siège de son administration, le symbole des franchises municipales auxquelles elle a toujours aspiré.
« Je suis particulièrement sensible au chaleureux accueil de la part de la population parisienne. Avec joie j'y vois la sympathie du peuple français pour mes compatriotes ; sympathie, d'ailleurs, vous ne l'ignorez pas, bien réciproque.
« Je vous prie, messieurs, de vouloir bien, être mes interprètes, auprès des Français'que vous représentez, de ma vive gratitude pour ces sentiments, qui me touchent profondément et d'être assurés de tous nos meilleurs souhaits du prince et de moi, pour le bonheur et la prospérité de Paris. »
Toast porté par Sa Majesté la Reine des Pays-Bas, au déjeûner qui lui fut offert le lundi j juin 1912, dans la salle des Batailles du Château de Versailles, à l'issue de la revue de Satory.
« Monsieur le Président,
« Avant de quitter la France, je tiens à vous remercier chaleureuse-
CHRONIQUE I95
ment pour ces journées inoubliables. L'accueil qui m'a été fait dépasse tout ce que je pouvais m'imaginer. Ces preuves de sympathie dont je suis très touchée seront hautement appréciées par mes compatriotes.
« Mais avant tout je désire vous exprimer ma haute admiration pour le magnifique spectacle qui m'a été offert aujourd'hui. Je suis particulièrement charmée d'avoir pu en personne me rendre compte de la superbe tenue des troupes, de leur prestance, de l'ordre et de la discipline dont elles ont fait preuve dans leurs mouvements. C'est là une armée dont la France doit être fière. Elle doit voir en elle le plus sûr gardien de sa gloire et de son honneur.
« Pour terminer je sens le besoin, Monsieur le Président, de boire à votre santé et à la gloire de la vaillante armée française. »
Réponse du Président de la République :
« Madame,
« Votre noble adieu à la France est pour toucher une nation, qui comptera au nombre de ses meilleures journées celles où il lui aura été donné d'acclamer Votre Majesté et de faire fête à la gracieuse souveraine qui, par une rare délicatesse, a voulu se rappeler en répondant à nos compliments de bienvenue que du sang français coulait dans ses veines.
« Vos chaleureuses paroles iront, en même temps, au coeur de nos soldats. Notre armée sera fière de la haute appréciation d'une reine, digne héritière des vertus de sa race, qui sait ce qu'un peuple peut attendre de la valeur de ses soldats et de leur attachement au drapeau.
« Permettez-moi, Madame, de boire une fois encore à la santé de Votre Majesté, et de lever mon verre aux libres destinées de votre glorieux pays. »
Télégramme adressé de la gare-frontière de Feignies par S. M. la Reine des Pays-Bas, au Président de la République, le lundi 3 juin 1912.
« Au moment de quitter le sol de France, je désire encore une fois, Monsieur le Président, vous réitérer mes chaleureux remerciements pour les inoubliables journées passées dans votre pays et pour l'accueil si sympathique qui m'a été offert par vous et par le peuple français.
196 CHRONIQUE
« J'exprime ma reconnaissance à tous ceux qui m'ont donné . des témoignages de leur sympathie et je forme les meilleurs voeux pour la prospérité de la France.
« WlLHELMINE. »
Réponse du Président de la République :
« L'aimable télégramme que Votre Majesté a eu la gracieuse pensée de m'adresser en quittant la France m'a bien vivement touché. Je suis sûr d'être l'interprète des sentiments du peuple français en exprimant de nouveau à Votre Majesté la joie qu'il a eue de pouvoir lui témoigner sa respectueuse sympathie pour Elle et sa cordiale estime pour la belle et noble nation néerlandaise.
« Je puis assurer Votre Majesté que nous garderons un précieux souvenir de son séjour à Paris et de celui de Son Altesse Royale le prince des Pays-Bas et je prie Votre Majesté d'agréer les voeux très sincères que je forme pour son bonheur et celui de la famille royale ainsi que pour la prospérité des Pays-Bas.
« A. FALLIÈRES. »
Nominations dans le personnel militaire français désigné pour l'encadrement des troupes chérifiennes.
— Par décision ministérielle du 24 avril 1912, ont été mis hors cadres, en mission, pour l'encadrement de l'armée chérifienne.
MM.
Goubeau, capitaine breveté du 65e régiment d'infanterie, détaché à l'état-major particulier du ministre de la "guerre, en remplacement du capitaine de Lesparda, tué à l'ennemi.
Auroux, capitaine hors cadres à l'état-major du territoire militaire d'Aïn-Sefra (emploi de nouvelle création).
Astraud, lieutenant au 24e bataillon de chasseurs à pied.
Chevrier, lieutenant au 4e régiment de zouaves.
Faugière, lieutenant au Ier régiment de tirailleurs algériens.
Marty, lieutenant au 2e régiment de tirailleurs algériens.
Messal, lieutenant au 3e régiment de tirailleurs algériens.
Blanche, lieutenant au 3e régiment de tirailleurs algériens.
NOMINATIONS 197
Serre, lieutenant au 3e régiment de tirailleurs algériens.
Coadic, lieutenant au 4e régiment de tirailleurs algériens.
Vidalin, capitaine au 2e régiment de spahis.
De Terves, capitaine au 3 e régiment de spahis.
Balet, lieutenant au 6e régiment de chasseurs d'Afrique.
Comte, vétérinaire en 2e au Ier régiment de spahis.
Schaeffler, aide-vétérinaire au 39e régiment d'artillerie.
Crussard, médecin-major de ire classe aux hôpitaux de la division de Tunisie.
Vendeuvre, médecin aide-major de ire classe aux hôpitaux de la division d'Oran.
— Par décision ministérielle du 24 avril 1912, M. le capitaine de cavalerie Bouret, hors cadres, en mission pour l'encadrement de l'armée chérifienne, a été remis à la disposition de son arme.
— Par décision'du Ministre de la Guerre en date du 9 mai 1912, ont été mis hors cadres, en mission, pour l'encadrement de l'armée chérifienne :
MM.
Fumey, capitaine au 30e bataillon de chasseurs à pied.
De Sartiges, lieutenant au 4e régiment de tirailleurs algériens.
Maz Tahar oud Djelloul, sous-lieutenant indigène au 2e régiment de tirailleurs algériens.
Deschamps, capitaine au 2e régiment de dragons.
Blanchin de Chalain, capitaine au 6e chasseurs d'Afrique.
Fages, lieutenant au Ier régiment de spahis.
Biffaud, capitaine au 2e groupe d'artillerie de campagne d'Afrique.
Bastide, capitaine au 3e d'artillerie.
Delgrange, lieutenant au 52e régiment d'artillerie.
Arnaud, sous-intendant militaire de 3e classe à Avignon.
Mounier, officier d'administration de 2e classe des bureaux de l'intendance, à Alger.
— Par décision du ministre de la Guerre en date du 24 mai 1912
I98 CHRONIQUE
ont été mis hors cadres, en mission pour l'encadrement de l'armée chérifienne :
MM.
De Lesquen, lieutenant au 2e régiment étranger. Pisani, sous-lieutenant d'artillerie.
Nominations et mutations dans le personnel diplomatique et
consulaire.
(mars-juin 1912)
— Par arrêté du 27 mars 1912, M. Doulcet (Marie-Augustin-Jean), secrétaire d'Ambassade de ire classe à Lisbonne, a été chargé des fonctions de conseiller à Saint-Pétersbourg.
— Par décision présidentielle du 28 mars 1912, M. de Matharel (C.-L.), chef de bataillon breveté au 19e régiment d'infanterie de ligne, a été désigné pour occuper le poste d'attaché militaire à la légation de la République française en Bulgarie, en remplacement de M. le chef de bataillon Tabouis, relevé de ses fonctions.
— Par décret en date du 2 avril 1912, M. Chausson (FerdinandJoseph-François), consul de 2e classe à La Vera-Cruz, a été nommé au consulat de France à Valparaiso, en remplacement de M. Neton (ElieAlberic), nommé à Porto.
— Par décret en date du 3 avril 1912, M. Leriche (Louis-EdouardVictor-Joseph), consul de 2e classe, chargé du vice-consulat de Rabat, a été chargé du vice-consulat de Mersina et de Tarsous, en remplacement de M. Barré de Lancy (Gabriel-Georges), consul de 2e classe, nommé consul à Rabat, le vice-consulat de cette ville ayant été transformé en consulat, par décret de même date.
PERSONNEL 199
— Par arrêté en date du 22 avril 1912, M. Lacombe de la Tour (Ernest-Jules-HenriJ, secrétaire d'ambassade de première classe à Munich, a été chargé des fonctions de son grade à Lisbonne, et M. de Manneville (Gustave-Henri-Benoist), secrétaire d'ambassade de première classe à Bruxelles, a été chargé des fonctions de conseiller à Berlin, en remplacement de M. de Berckheim, placé, sur sa demande, dans le cadre de la disponibilité.
— Par arrêté du 24 avril 1912, M. Trumet de Fontarce (FrançoisRené), ancien secrétaire de première classe à Saint-Pétersbourg, chef de bureau à la direction des affaires politiques et commerciales au Ministère des Affaires Etrangères, a été chargé des fonctions de conseiller à Bruxelles, et M. Qinchant (Louis-Georges-Raoul), également chef de bureau à la direction des affaires politiques et commerciales, a été chargé des fonctions de secrétaire d'ambassade de deuxième
. classe à Munich.
— Par arrêté en date du 24 avril ^1912, M. Dard (Emile-LaurentJoseph), secrétaire d'ambassade de première classe à Vienne, a été chargé des fonctions de son grade à Sofia, en remplacement de M. de Cherisey (Jean-René), nommé rédacteur au Ministère des Affaires Etrangères, et M. Jaunez (Victor-Léon), secrétaire d'ambassade de deuxième classe, sous-chef de bureau à la direction des affaires politiques et commerciales du Ministère des Affaires Etrangères, a été chargé des fonctions de son grade à Vienne.
— Par décret en date du 20 avril 1912, M. de Berkheim (Théodore-Sigismond), secrétaire d'ambassade de ire classe à Berlin, a été nommé ministre plénipotentiaire de 2e classe et placé, sur sa demande, dans le cadre de la disponibilité.
— Par décret du 23 avril 1912, M. Piat (Emile-Victorien), consul général, a été placé dans le cadre de la disponibilité, sur sa demande.
— Par décret du 26 avril 1912, M. Châtain (Marcel-Jean-BaptisteRomain-Eugène), ministre plénipotentiaire de 2e classe en disponibilité, a été admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite.
— Par arrêté du 24 avril 1912, M. Corbin (André-Charles), secré-
200 . CHRONIQUE
taire d'Ambassade de 3 e classe à Rome, a été nommé attaché au cabinet du Ministre des Affaires Etrangères.
— Par arrêté en date du 26 avril 1912, M. Malzac (André-MirandaGérard), interprète de 2e classe à Constantinople, a été nommé interprète au consulat de France à Casablanca (emploi créé).
— Par décret du 28 avril 1912, M. Lyautey (Louis-Hubert-Gonzalve), grand-officier de la Légion d'honneur, général de division commandant le 10e Corps d'Armée, a été nommé commissaire résident général de la République française au Maroc.
—-Par décret du 28 avril 1912, M. Gaillard (François-Henri), consul de ire classe à Fez, a été chargé des fonctions de secrétaire général près le commissaire résident général de la République française au Maroc.
— Par décret du 28 avril 1912, M. Doulcet (Marie-Augustin-Jean), secrétaire d'ambassade de 2e classe à Saint-Pétersbourg a été nommé ministre plénipotentiaire de 2e classe, en remplacement de M. Frandin, admis à la retraite.
— Par décret du 28 avril 1912, M. Martin (Richard-William), secrétaire d'ambassade de 2e classe à Madrid, est nommé ministre plénipotentiaire de 2e classe en remplacement de M. Loynes, admis à la retraite.
— Par décret en date du 30 avril 1912, M. Malpertuy (Jean-ClaudeLazare), consul de ire classe à Carthagène, a été nommé au consulat de France à Valence.
M. Tinayre (Jean-Gaston-André), consul de 2e classe, chargé du vice-consulat de Venise a été nommé consul de France à Carthagène. •
M. Lambot de Fougères (Emile -Fernand- Léon -Marie -René), • consul de 2e classe, chargé du vice-consulat de Bourgas, a été chargé du vice-consulat de Venise.
M. du Fajret de la Tour (Louis-Miriam-Joseph), vice-consul de 2e classe, chargé de la chancellerie de Gênes, a été nommé vice-consul de France à Bourgas.
PERSONNEL 201
M. Roux (Marius), vice-consul de 2e classe, chargé de la chancellerie à Adis-Abbaba, est nommé au vice-consulat de France à Hodeïdah (poste créé).
— Par décision du Ministre de la Guerre en date du 9 mai 1912, M. le lieutenant Canonge, du 3 e régiment d'infanterie, détaché au service des affaires indigènes d'Algérie a été mis à la disposition du commissaire résident général au Maroc pour être employé au service des renseignements des troupes débarquées au Maroc.
— Par décret en'date du 10 mai 1912, M. Chassin de Marcilly (Marie-Ernest-Henri-Aimé, consul général, chef du bureau du Maroc, a été nommé au consulat général de France à Varsovie, en remplacement de M. de Fages de Chaulnes, décédé.
— Par décret en date du 10 mai 1912, le vice-consulat de France à Roustchouk a été supprimé.
— Par arrêté en date du 10 mai 1912, M. Cruchon-Dupeyrat (Jean-Baptiste-Adolphe-François-Joseph), consul général, attaché commercial en Russie, a été nommé chef du bureau du Maroc à la direction des affaires politiques et commerciales.
— Par décret de M. le Président de la République en date du 18 mai 1912, M. Chilhaud-Dumaine (Alfred), ministre plénipotentiaire de ire classe, président de la délégation française à la Commission des Pyrénées a été nommé ambassadeur de la République française près S. M. l'Empereur d'Autriche, Roi de Hongrie, en remplacement de M. Crozier (Thilippe-Marius), admis à faire valoir ses droits à la retraite.
— Par arrêtés en date du 15 mai 1912, ont été nommés attachés d'ambassade : MM. Rouillé, Cosme, Barois, de Dampierre, Delens et Renom de la Baume ; élèves consuls : MM. Guillouet et Barde.
— Par arrêté en date du 18 mai 1912, M. Delarue Caron de Beaumarchais (Maurice-Jean-Paul), secrétaire d'ambassade de 2e classe à Tanger, a été nommé sous-chef du bureau du Maroc.
202 CHRONIQUE
— Par décret en date du 21 mai 1912, M. Brouzet (André-AugusteBernard), vice-consul de ire classe, a été nommé au vice-consulat de France à Vera-Cruz (poste transformé).
— Par décrets en date du 22 mai 1912 :
M. Boudet (Léonce-Jëan-Albert), consul de ire classe à Rio de Janeiro, a été nommé au consul de France à Las Palmas, en remplacement de M. Wiet, décédé.
M. Dupas (Janies-Alexandre), consul de ire classe à Saint-Paul, a été nommé au consulat de France à Rio de Janeiro.
M. Parson (Jacques-Emile-Léon), vice-consul de France à Andrinople, a été placé, sur sa demande, dans le cadre de la disponibilité.
— Par arrêté du Ministre des Affaires Etrangères en date du 21 mai 1912 :
M. Gaillard-Lacombe (Urbain-Jean-Maurice), secrétaire d'ambassade de 2e classe à Rio de Janeiro, a été nommé attaché à la direction des affaires politiques et commerciales.
M. de Salignac-Fénelon (Alfred-Marie-Bertrand), secrétaire d'ambassade de 2e classe, attaché à la direction des affaires politiques et commerciales, a été chargé des fonctions de son grade à la légation de la République à Rio de Janeiro.
— Par décision du Ministre de la Guerre, en date du 24 mai 1912, M. Paris, chef d'escadron au 7e régiment de hussards, attaché militaire à l'ambassade de la République française en Espagne, a été affecté avec le même grade au 10e régiment de dragons.
— Par décret en date du 25 mai 1912 :
M. Ganderax (Pierre-Emile-Marie), ministre plénipotentiaire de 2e classe à Cettigné, a été nommé envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la. République au Luxembourg, en remplacement de M. de Sercey, décédé.
M. Blanchard de Farges (Maurice-Henri), ministre plénipotentiaire de 2e classe chargé de mission, a été nommé président de la délégation française à la commission des Pyrénées, en remplacement de
PERSONNEL 203
AL Chilhaud-Dumaine (Alfred), nommé ambassadeur de France à Vienne.
M. Birlé (Ernest-Charles), consul de 2e classe chargé du vice-consulat de Palma, a été nommé au consulat de France à Saint-Paul.
— Par décret en date du 28 mai 1912, M. Aynard (JosephRaymond), ministre plénipotentiaire de 2e classe, sous-directeur des affaires de chancellerie et du contentieux administratif, a été nommé envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la République à Cettigné.
— Par décret en date du 31 mai 1912 :
M. Jacquin de Margerie (Bruno-François-Marie-Pierre), ministre plénipotentiaire de ire classe à Pékin, a été nommé adjoint au Directeur des affaires politiques et commerciales et chargé de la sous-direction d'Europe, d'Afrique et d'Orient au Ministère des Affaires Etrange.es.
M. Conty (Alexandre-Robert), ministre plénipotentiaire de 2e classe, adjoint au Directeur des affaires politiques et commerciales, a été nommé envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la République française à Pékin.
M. 'Legrand (Albert-Louis-Hubert), ministre plénipotentiaire de 2e classe, chargé des fonctions de premier secrétaire à l'ambassade de la République française à Rome, a été placé dans le cadre de la disposition.
— Par décret en date du 2 juin 1912, ont été promus à la ire classe de leur grade, MM. de Chérisey (Jean-René) et de Carbonnel (François), secrétaires d'ambassade de 2e classe, rédacteurs à la direction des affaires politiques et commerciales.
■— Par décret, en date du 6 juin 1912, M. Martin (René-William), ministre plénipotentiaire de 2e classe, chargé de premier secrétaire à l'ambassade de la République à Madrid, a été nommé sous-directeur des affaires de chancellerie et du contentieux administratif au Ministère des Affaires étrangères,
— Par décrets en date du 8 juin 1912 :
M. Bonfort (Joseph-Antoine-Albert-Louis), consul de irc classe, a été nommé au consulat de France à Madrid (emploi créé).
204 CHRONIQUE
M. Maugras (François-Emile-Roger), consul suppléant, a été nommé secrétaire d'ambassade de 3e classe, pour prendre rang du 28 mars 1911.
— Par décret en date du n juin 1912, ont été nommés secrétaires d'ambassade de 3 e classe :
M. de Percih (Maurice-Romuald), attaché d'ambassade faisant fonctions de troisième secrétaire à Constantinople.
M. du Perron de Revel (Guy-Paul-Marie-Bruno), attaché d'ambassade à Fez.
M. Thierry (Adrien-Joseph-Marie-Hilaire), attaché d'ambassade à Londres.
M. Tripier, attaché autorisé à Madrid.
M. Fournes (Marie-Joseph-Octave-Paul), attaché d'ambassade, attaché au cabinet du ministre.
M. de Sartigê (Anne-Marie-Louis), attaché d'ambassade à SaintPétersbourg.
M. Barbier-Lalobe de Felcourt, attaché autorisé à Londres.
— Par arrêté en date du n juin 1912 :
M. Ribot (André-Paul-Adrien), secrétaire d'ambassade de i^e classe au Caire, a été chargé des fonctions de son grade à l'ambassade de la ■ République à Vienne.
M. Vieugué (Paul-Antoine-Charles), secrétaire d'ambassade de ire classe à Saint-Pétersbourg, a été chargé des fonctions de son grade à l'ambassade de France à Madrid.
— Par décret en date du 12 juin 1912, M. Leriche (Louis-EdouardVictor-Joseph), consul de 2e classe chargé du vice-consulat de France à Mersina et à Tarsous (non installé), a été placé dans le cadre de la disponibilité.
— Par décret en date du 13 juin 1912 :
M. Souhart (Fernand-Arthur), ministre plénipotentiaire de ire classe à Lima (non installé), a été admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite.
M. Maurouard (Lucien), ministre plénipotentiaire de ir« classe à
PERSONNEL 20 5
Port-de-Prince, a été nommé envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire à Lima.
M. Carteron (Edouard-Maurice-Jacques-Chaiies-Ludovic), élève consul, faisant fonction de consul suppléant au Caire, est nommé consul suppléant.
— Par décision du Ministre de la Guerre en date du 14 juin 1912. M. le capitaine du génie breveté, hors cadres, Braconnier, stagiaire à l'état-major du gouvernement militaire de Paris, a été placé en mission hors cadres et mis à la disposition du Commissaire général de France au Maroc (service).
Mutations et nominations dans le personnel des contrôleurs
civils.
(mai-juin 1912)
— Par arrêté du Résident Général de la République Française à Tunis, en date du 4 mai 1912 :
M. Bertholle, contrôleur suppléant de 3e classe à Bizerte, et M. Lafond, contrôleur principal de 3e classe à Gabès, ont été élevés à la deuxième classe de leur grade.
Par arrêté du Résident Général de la République à Tunis en date du 31 mai 1912, M. Weyland, contrôleur suppléant de ire classe, chef de bureau du contrôle civil à la Résidence générale a été chargé des fonctions de contrôleur civil et de vice-consul de France à Mactar ; M. Baruet contrôleur suppléant à Tunis a été chargé des fonctions de Contrôleur civil et de vice-consul à Thala en remplacement de M. Balut, admis à faire valoir ses droits à la retraite ; M. Briquez, contrôleur civil à Gafsa a été chargé, sur sa demande, des fonctions de contrôleur suppléant à Tunis ; M. Mactar, contrôleur civil à Mactar a été désigné pour le poste de Gafsa ; M. Penet, contrôleur suppléant de 1 re classe à Tozeur a été nommé chef de bureau du Contrôleur civil à la Résidence générale ; M. Digoy, contrôleur suppléant de 2e classe à Sousse a été nommé chef de l'annexe de Tozeur.
M. Gaudiani, contrôleur suppléant de 2e classe à Kairouan, a été nommé à l'annexe de Zaghouan, poste rétabli.
206 ' CHRONIQUE
— Par arrêté du Résident Général de la République Française à • Tunis, en date du 7 juin 1912 :
M. Rostaing, secrétaire de ire classe au contrôle civil de Gafsa, a été chargé des fonctions de contrôleur suppléant et maintenu au même poste.
M. Léon Renoux, secrétaire de ire classe au contrôle civil de Sousse, a été chargé des fonctions de contrôleur suppléant et maintenu au même poste.
M. Brejean, contrôleur suppléant de 3 e classe au Kef, a été désigné pour le poste de Sousse ; M. Mauroy, contrôleur suppléant de 3eclasse à Béjà, a été nommé au Kef, et M. Hedde, contrôleur civil stagiaire à Sfax, a été désigné pour le poste de Béja.
— Par arrêtés du Résident général de la République française à Tunis, en date du 30 juin 1912, M. Gaudiani, contrôleur suppléant de 2e classe, chef de l'annexe de Zaghouan a été élevé à la ire classe de son grade.
Si Aïssa el Miliani, breveté d'arabe, a été nommé seciétaire-interprète à l'annexe de Zaghouan.
M. Rémy, contrôleur suppléant de 3 e classe à Souk-el-Arba, a été élevé à la 2e classe de son grade. •
Si Mohammed Safi, breveté d'arabe, a été nommé secrétaire-interprète au contrôle civil de Sousse.
— Par décret du 2 juin 1912, M. Balut (Georges-Louis-Gabriel), contrôleur civil en Tunisie, a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à la date du Ier juin 1912.
— Par arrêté en date du Ier mai 1912 un concours sera ouvert le 24 juillet pour la nomination.à un emploi de contrôleur civil .stagiaire en Tunisie. Les inscriptions pour ce concours seront reçues au bureau du personnel du Ministère des Affaires Etrangères jusqu'au 2 juillet 1912 inclusivement.
PERSONNEL 207
Nominations dans le Personnel de la Résidence Générale
à Tunis.
— Par arrêté du Résident Général de la République Française à Tunis en date du 23 mai 1912, M. Manceron, préfet honoraire, a été nommé délégué du Résident général au service du contrôle des dépenses engagées.
— Par arrêté du Résident Général de la République Française en date du 23 mai 1912, M. Bernard, chef de division à la Direction générale des Finances a été nommé chef du service du contrôle des dépenses engagées créé à ladite Direction.
Comités et commissions
-— Par décret en date du 15 mai 1912 rendu sur la proposition du ministre de la guerre, M. Babire, chef de bureau à la direction de la comptabilité du ministère des affaires étrangères, a été nommé membre de la commission de classement des candidats aux emplois réservés aux soldats engagés et rengagés par la loi du 21 mars 1905.
— Par arrêté du Ministre de l'Intérieur du 25 mai 1912, M. Maurice Herbette, ministre plénipotentiaire de 2e classe, sous-directeur au Ministère des Affaires Etrangères a été nommé membre de la commission, instituée par décret du 13 janvier 1912 en vue de l'examen des dossiers des propositions pour médailles d'honneur des épidémies et pour les médailles d'honneur de Fl^rgiène.
— Par décret en date du 13 juin 1912, M. Louis Berthelot, ministre plénipotentiaire de 2e classe, sous-directeur d'Asie à la direction des affaires politiques et administratives, a été nommé commissaire du Gouvernement pour assister le Président du Conseil, Ministre des Affaires Etrangères, dans la discussion devant la Chambre des Députés du budget des Affaires Etrangères pour l'exercice 1913.
2o8 CHRONIQUE ,
—^ Le 4 juillet, le Sénat a procédé à la nomination d'une commission de dix-huit membres qui sera chargée de l'examen du projet de loi portant approbation du traité conclu entre la France et le Maroc, le 30 mars 1912, pour l'organisation du protectorat français dans l'empire chérifien.
Cette commission est ainsi composée :
Ier bureau : MM. Flandin et Louis Martin.
2e bureau : MM". Lozé et Ribot.
3e bureau : MM. Paul Leroux et Blanc.
4e bureau : MM. Millies-Lacroix et d'Estournelles de Constant.
5e bureau : MM. Pichon et Gervais.
6e bureau : MM. de Selves et Lucien Hubert.
7e bureau : MM. Chautemps et d'Aunay.
8e bureau : MM. Pauliat et Decrais.
9e bureau : MM. Pierre Baudin et Paul Strauss.
La commission a constitué son bureau de la façon suivante : Président, M. Ribot ; vice-président, M. Decrais ;■ secrétaires, MM. Gervais et Lucien Hubert ; rapporteur, M. Pierre Baudin.
Distinctions honorifiques
— Par décret du Président de la République en date du 23 avril 1912, M. Gaillard (François-Henri), consul de ire classe à Fez a été promu au grade d'officier dans l'ordre national de la Légion d'honneur pour s'être particulièrement distingué par son courage et son dévouement lors de la révolte des troupes chérifiennes à Fez (17-19 avril 1912).
— Par décret du Président de la République en date du 23 avril 1912, M. Biarnay, directeur des télégraphes chérifiens a été nommé chevalier de la Légion d'honneur, pour s'être également distingué par son courage au cours des troubles de Fez.
— Par décret du Président de la République en date du 28 mai 1912, ont été nommés chevaliers de la Légion d'honneur : M. Char-
DISTINCTIONS HONORIFIQUES 209
donnet (Gabriel-Jean-Amable), lieutenant au 4e régiment de tirailleurs, et M. Keiser (Paul-Lucien-Louis), lieutenant au même régiment, tous deux grièvement blessés au combat de Fez, le 26 mai 1912.
— Par décret du Président de la République en date du 2 juin 1912, M. Bourdu, adjudant au 4e régiment de tirailleurs algériens, a été nommé chevalier de la Légion d'honneur, pour s'être particulièrement distingué au combat de Fez le 26 mai 1912.
— Par décret du Président de la République en date du 10 juin 1912, ont été nommés chevaliers de la Légion d'honneur :
MM.
Asscher (Joseph), sujet néerlandais, négociant à Paris.
Dor (Henri), citoyen suisse, docteur en médecine.
Leenart (Philippus-Johannes), sujet néerlandais, directeur de la compagnie française de l'Ouhamé-Nana, de la compagnie commerciale de la colonisation du Congo français et de la société « la Brazzaville ».
Sanson (Louis), sujet néerlandais, président de la chambre de commerce néerlandaise de Paris.
Schroder (Bernard-Jean-Joseph), sujet néerlandais, exportateur.
— Par décret du Président de la République en date du 12 juin 1912, ont été nommés chevaliers de la Légion d'honneur pour faits de guerre au Maroc :
MM. Guéiïn, lieutenant au 2e régiment étranger, et Chevrier, lieutenant au Ier régiment de spahis.
— Par "décret du Président de la République en date du 19 juin 1912, ont été nommés chevaliers de la. Légion d'honneur pour leur vaillante et loyale conduite lors des troubles de Fez (17-20 avril 1912) :
MM.
Ali ou Belaïd Ba Hamrani, caïd reha, au 5e bataillon d'infanterie de l'armée chérifienne.
ARCHIVES DIPLOM., t. i22, nos 5-6-7, mai-juillet 1912. 14
210 CHRONIQUE
Bou Djemaà ben Bareck, caïd reha au 6e bataillon d'infanterie de l'armée chérifienne.
Si Ahmed ben Bachir er Rehammi, caïd reha au 3 e bataillon d'infanterie.
— Par arrêté du Ministre de l'Instruction publique et des BeauxArts en date du 27 avril 1912, M. Bastin (Charles), consul général de Belgique à Yokohama, a été nommé officier de l'instruction publique.
— Par arrêté de même date, le Ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts a nommé officiers d'académie :
MM. Chambille (Louis-Joseph), secrétaire des commandements de S. A. R. le duc de Cumberland et Sentous (Louis), agent consulaire de France à Los Angeles (Californie).
•— Par arrêté du Ministre de l'Instruction publique et des BeauxArts, M. Machi (Antoine), agent consulaire d'Italie à Lille, a été nommé officier de l'instruction publique, MM. Banquells (Francisco), premier adjoint au maire de Valence (Espagne) et Boviaud (Eugène), secrétaire archiviste du Cousulat de France à Valence (Espagne), ont été nommés officiers d'académie.
Exequaturs (avril-juillet 1912)
L'exéquatur a été accordé à MM. : ■
A. Isenberg, consul de Belgique à Cette, avec juridiction sur les départements de- l'Ariège, de l'Aude, de FAveyron,. de l'Hérault et des Pyrénées-Orientales.
Armando Navarro, consul général de Portugal à Paris.
E. Desmazures, consul de Belgique à Pontoise, avec juridiction sur les arrondissements de Pontoise et de Mantes.
Antenor Gérez, consul de la République Argentine à Toulouse.
GuiUermo Forteza, consul de l'Uruguay à Montpellier.
EXEQUATUR 211
Léopold de Mélier de Labarthe, consul du Chili à Toulouse.
Amadée Gelé, vice-consul de la République Dominicaine à Brest.
Ipollito Muzio-Olivi, agent consulaire d'Italie à File-Rousse.
Alfred de Vial, consul général de la république d'Haïti à Bordeaux.
Ernest Hahn, consul de Suisse à Nancy, avec juridiction sur les départements de la Haute-Marne, Meurthe-et-Moselle, Meuse et Vosges.
Francisco Burgos Rubio, consul de Colombie au Havre.
Jules-Emile Bonduelle, vice-consul de Norwège à Concarneau, avec juridiction sur l'arrondissement de Quimperlé et les cantons de Concarneau, de Fouesnant, de Quimper, de Briec et de Rosporden de l'arrondissement de Quimper.
Jules-Henri-Georges Robinet, vice-consul de Suède à Reims.
Luis N. Munoz (R.), consul du Chili à Pau.
Juan Carlos Godoy, consul de la République'Argentine à Lyon.
Henry Clobery Wallis, vice- consul de S. M. Britannique à Dieppe.
Tomas Comamala, vice-consul de l'Uruguay à Roubaix.
Guilherme Quillinan da Silva Machado, consul de Portugal à Marseille.
Ernest Congé, vice-consul du Brésil à Cette.
J. Max Olano, consul général de Salvador à Paris, avec juridiction sur la France.
M. Charles Pineau, vice-consul du Pérou à Pauillac. Carlos Calamet, consul de l'Uruguay à Bordeaux. Raymond Richou, vice-consul de S. M. Britannique à Angers. Julio Valdes, consul de Panama à Saint-Nazaire.
212 CHRONIQUE
CHAMBRE DES DEPUTES
Discussion du Budget des Affaires Etrangères pour l'exercice 1913 à la Chambre ; discours et interpellations.
(U juin 1912)
M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. Paul Bluysen dans la discussion générale du budget du ministère des affaires étrangères.
Je rappelle à la Chambre qu'elle siège actuellement en séance publique ordinaire.
M. PAUL BLUYSEN, député de l'Inde. Messieurs, l'heure n'est certainement pas propice aux grands discours et aux grands aperçus diplomatiques.
Aussi, je n'ai que quelques courtes observations à présenter et sur des points très spéciaux relatifs à notre situation dans certains pays, tels que l'Amérique du Sud ou la Perse.
Cette situation aurait fait l'objet de quelques questions que j'aurais voulu poser au cours de l'année à M. le Ministre des Affaires Etrangères.
Mais, sans incriminer la bonne volonté des hommes politiques qui se succèdent à la tête du département, il résulte de notre règlement qu'ils jouissent d'une tranquillité presque absolue, en ce qui concerne la direction de nos affaires au dehors. Ils sont presque entièrement à l'abri même d'une simple question, qui ne trouverait pas sa place dans nos ordres du jour si chargés.
Et ainsi se trouve coupée, en quelque sorte, toute communication entre le Parlement, et le ministère des affaires étrangères, au sujet duquel on n'a guère d'informations que lorsqu'éclatent quelque gros scandale comme l'incident de Rome, qui n'est pas réglé, ou encore quelque bruit de presse comme l'incident de Saint-Pétersbourg, au sujet duquel la lumière n'est pas faite. . • '.
Il serait désirable, cependant, pour le Parlement, qu'il fût renseigné souvent et complètement sur ce qui se passe dans différents Etats qui semblent considérés comme sans importance, comme « secondaires ». Et c'est une grave erreur. Toute notre politique extérieure ne tient pas dans les entretiens diplomatiques entre Pétersbourg, Londres,
DISCUSSION DU BUDGET DEI913 213
Rome, Berlin. Il y a maints autres pays où nous avons eu et où nous avons encore des intérêts importants engagés. (Très bien ! très bien \)
On ne s'en préoccupe que très insuffisamment dans un département ministériel où tant de fois nous avons vu, ces temps derniers, se produire les fautes de direction, les exemples d'irresponsabilités les plus regrettables.
Les assemblées étrangères, à cet égard, sont mieux partagées. En Angleterre, il n'y a pas de question où l'amour-propre, où l'intérêt national sont en jeu, qui ne soit aussitôt portée à la tribune et qui ne soit éclaircie par une l'éponse'du Gouvernement.
Il me serait facile de multiplier aujourd'hui les exemples de l'ignorance qui est ainsi la nôtre et aussi d'une certaine négligence avec laquelle, selon moi, seraient traités nos nationaux par une représentation trop souvent impuissante ou absente de son poste. Mais l'heure, je vous l'ai dit, n'est pas favorable à des développements de ce genre, et je dois me borner à indiquer quelques pays sur lesquels je voudrais attirer l'attention du Gouvernement.
C'est dans les pays de l'Amérique du Sud notamment qu'à mon avis il serait désirable que notre département des affaires étrangères exerçât, par l'intermédiaire de ses agents, la plus active surveillance.
Ce sont des pays où, en ce moment, les -capitaux français, comme on le sait, répondent trop facilement peut-être aux sollicitations qui leur sont adressées.
Personne parmi nous n'a perdu le souvenir récent de l'emprunt du Paraguay dont, d'ailleurs, au point de vue judiciaire, nous n'avons plus de nouvelles. La situation de l'Uruguay n'est pas plus rassurante.
Au Pérou, agité par tant de révolutions et qui fait encore un emprunt en ce moment, nous n'avons que depuis très peu de jours un ministre, M. Souhart, auquel, d'ailleurs, on n'a pas encore enjoint ou permis de gagner sa résidence.
Avec le Venezuela, les relations diplomatiques sont toujours interrompues. Notre collègue M. Brousse disait récemment que, malgré cela, pendant quatre ans nous avons payé le traitement d'un agent.
Il n'y a pas de représentant du Venezuela à Paris, depuis l'expulsion, trop rapide, de celui qui avait été accrédité par M. Castro.
Certainement, pourtant en dehors même des grandes entreprises, des grandes sociétés qui ont engagé des capitaux dans ce pays et y ont soulevé des litiges, les petits commerçants français devraient être protégés, défendus par nous-mêmes et non par les agents d'autres puissances, sous la sauvegarde desquels ils ont été obligés de se placer. (Très bien ! Très bien I)
Cet état de choses s'aggrave de ce fait que nous avons, dans ce
214 CHRONIQUE
pays, autant de sympathies que de relations d'affaires proprement dites.
Ces jours derniers, à la Sorbonne, un écrivain érudit, qui a excellemment représenté son pays parmi nous, M. Carlos Villanueva, rappelait, en une conférence, la part que la France napoléonienne a prise aux premiers pas du Venezuela dans la voie de l'indépendance et il affirmait chaleureusement que là-bàs tous sentiments de reconnaissance ne sont pas éteints.
Il suffirait de les connaître, de les faire revivre et de nous faire reprendre là, comme ailleurs, un rang, une prépondérance que nous avons perdue faute d'une direction avisée, vigilante, que je souhaite vivement voir rendue à notre action dans le monde entier. (Trèsbien ! très bien ! )
Messieurs, je me garderai, comme je l'ai dit en commençant, de prolonger ces observations, espérant sur ces points une réponse satisfaisante de M. le président dû conseil, et je ne pousserai pas plus loin cette revue des questions que nous ne posons pas parce que le temps et les moyens nous en manquent. (Parlex ! parlex \)
Je me hâte d'en développer rapidement une, que je n'ai jamais pu amener jusqu'à cette tribune ; il s'agit de notre situation en Perse, qui est bien la route de l'Inde. Quelque petit que soit le coin de terre que nous possédons là, maintenant, et que je représente, on voudra bien comprendre que je m'y intéresse particulièrement à bon droit. (Très bien ! très bien !)
Il y a dix ans à peine, les liens de la Perse et de la France paraissaient cordiaux et solides ; ils avaient un caractère en quelque sorte sentimental et pratique.
Ils procédaient de tout un passé de glorieuses ambassades échangées, de sympathies historiques, littéraires, artistiques même.
D'autre part, ils nous assuraient une légitime influence dans l'équilibre d'intérêts qui peuvent résulter de la situation de ce pays, chemin des invasions et des grands trafics internationaux.
Notre influence s'exerça à Téhéran sous l'énergique direction de notre ministre d'alors, M. de Lamartinière, de la façon la plus efficace ; elle se traduisit par l'appel qui nous fut fait pour les finances, la justice, l'instruction publique ; elle favorisa l'installation d'une colonie commerçante, qui comprenait plus d'une centaine de personnes.
Notre ministre exerçait, dans ce sens, l'action la plus heureuse ; il tenait à l'écart, sans heurt, la prédominance allemande, qui cherchait tous motifs de nous supplanter.
Brusquement, vers 1908, cette politique traditionnelle et opportune fut abandonnée ; un changement de ministre se produisit et, avec lui, s'effondra l'édifice de notre fortune grandissante.
DISCUSSION DU BUDGET DE I913 215
Au conseiller financier français, M. Bizot, fut substitué un commissaire américain.
Notre médecin officiel auprès du scliah reçut congé ; de même en partie, nos professeurs.
Nos commerçants se découragèrent et quittèrent presque tous la Perse.
Enfin, en 19 n — c'est sur ce point que j'essaj^ai à cette époque d'attirer l'attention des Chambres, et c'est la raison pour laquelle, à un an de distance, je m'excuse d'être à cette heure si matinale à la tribune — en 1911, sur le terrain diplomatique, l'Allemagne remportait sa première victoire, par le traité de Postdam et obtenait enfin de peser de tout son poids sur les destinées du pays.
L'Angleterre et la Russie négociaient entre elles, sans qu'il apparût que la France comptât, encore, pour quelque chose dans ces accords passés ou préparés.
Ne pourrions-nous donc reprendre pied ? (Très bien ! très bien !) Ce. serait, semble-t-il, possible.
En Perse, les regards d'une partie de la population instruite n'ont cessé de se tourner vers nous.
Le ministre persan à Paris comprend qu'une certaine association des intérêts des deux nations leur serait profitable autant qu'à l'harmonie européenne ; il agit autant qu'il peut en notre faveur, afin de ramener à Téhéran et dans d'autres grandes villes des éléments pondérateurs et civilisateurs français. (Très bien ! très bien /)
Il se heurte à des difficultés que des correspondances particulières me font connaître et dont quelques-unes sont étrangement significatives.
La prudence, ou, pour mieux dire, la pusillanimité de notre action diplomatique est, à cet égard, au moins surprenante. Alors que nous pourrions, comme précédemment, poursuivre notre oeuvre de coopération à l'ordre et à la prospérité en Perse, nous demeurons indifférents, en apparence, ou même nous cédons à des craintes chimériques. J'en ai cité, il 3'' a quelque temps, dans la Petite République, un exemple que je tiens à replacer ici.
L'an dernier, le gouverneur persan avait fait entrevoir que l'expérience des services du commissaire et d'autres agents américains lui ayant suffi, il serait satisfait de recourir de nouveau aux services des Français.
On ouvrit des pourparlers. Notre département des Affaires Etrangères consentit d'abord à choisir des conseillers qui travailleraient à la reconstitution de l'enseignement supérieur, du droit, de l'administration, etc.
Ils furent désignés ; mais au moment où ils gagnaient leur poste, ils furent avisés d'une modification de leur titre effectuée au quai d'Or-
2l6 CHRONIQUE
say ; ils n'étaient plus, officiellement, des conseillers ; ils devenaient des professeurs consultants !
Cette nuance subtile, un peu enfantine, révélaient les craintes qui s'étaient fait jour.
On ne voulait pas mécontenter nos rivaux allemands, qui, eux, avaient créé librement une école de leur nationalité, où ils étaient obligés d'enseigner le français, mais- qui portait l'étiquette germanique.
Nous n'étions admis, à Téhéran, qu'à titre consultatif ; les autres avaient leur plein droit.
Ce n'est qu'un petit fait. On en citerait aisément d'autres. Voici que s'offre, demain, un renouveau de notre énergie, peut-être ; il est question de créer, à Téhéran, une grande université qui, selon, le voeu de la majeure partie dés Persans éclairés, aurait un statut français.
Un crédit de 20,000 fr. a été voté ; le terrain est acheté ; on peut construire l'édifice de toutes manières.... Que sera-t-il ? Cela dépendra de nous, du plus ou moins d'attention qu'enfin nous donnerons à ces choses, de la bonne volonté par laquelle nous répondrons à ces invitations, qui nous indiquent clairement notre intérêt, notre devoir.
Avant de terminer — je n'en ai plus que pour quelques instants (Parlex ! parlex 0 — Ie voudrais vous montrer que, pendant ce temp's, dans d'autres capitales, on travaille, alors que nous, nous restons inactifs. Je sais bien que de très grands problèmes s'offrent à nous et je comprends que, dans cette grande agitation mondiale, M. le 'Ministre des Affaires Etrangères, comme ses prédécesseurs peut-être, ait son attention tournée d'une façon continue vers d'autres côtés, vers d'autres incidents que ceux, d'apparence minuscule, que je vous signale. Mais pendant ce temps, les chancelleries étrangères sont supérieurement actives. Nous n'avons pas le temps de le démontrer, au Parlement ; nous parlons de politique étrangère à peine une fois par an, à l'occasion du budget, en dehors des grands débats sur des questions absolument précises, telles que les traités que nous concluons. A l'étranger, il n'en est pas de même. Les chancelleries et les Parlements suivent avec une extrême attention Faction extérieure du pays. Ce sont perpétuellement et des ' questions posées à ,1a tribune des communes et des interventions spéciales dans la presse et des demandes de toute nature. Il y a là tout-un ensemble, je ne dirai pas d'agitation, mais de préoccupations, qui fait précisément la grandeur de cette politique et notamment de la politique anglaise. (Très bien ! Très bien f)
Pendant ce temps, dis-je, dans d'autres capitales, on travaille. On prépare, notamment, la création du chemin de fer Londres-Pétersbourg-Téhéran-Bombay. Et c'est là-dessus encore que je veux attirer votre attention. -
Ce sera une entreprise colossale, la. plus formidable de ce siècle nais-
DISCUSSION DU BUDGET DE I913 2Ir]
sant, dont elle modifiera complètement le régime économique. Elle a droit à toutes les sympathies françaises, mais elle appelle aussi l'exercice du droit de regard de notre Parlement, de notre Gouvernement. (Très bien ! très bien 1)
Je l'ai connue par hasard, par des correspondances de Bombay où des négociants avisés me disaient : « La France vient de supprimer (dans son traité avec les messageries maritimes) l'escale commerciale de Bombay et elle se met ainsi vis-à-vis de nous en infériorité. Est-ce qu'elle ne fera rien ? Les Anglais vont venir jusqu'à nous par le rail, à travers la Perse ».
Après avoir publié un court article, encore dubitatif, sur ce sujet, dans la Presse coloniale, je posai une question écrite.
M. le Ministre des Affaires étrangères — c'était M. Poincaré — me répondit en confirmant mes renseignements généraux. Il savait, en effet, qu'une société d'études s'était créée, pour ce raiîway LondresPétersbourg-Téhéran-Bombay — et cela pourrait être Londres-ParisPétersbourg-Téhéran-Bombay — entre des financiers russes, anglais, français, mais sa documentation, pour moi du moins, n'allait pas au delà.
Il fallait s'en contenter : dix lignes au fournal Officiel. Et encore étais-je heureux de les avoir obtenues et en remerciais-je — et je récidive — le ministre, averti et bienvenant.
Or, à Londres, le 19 mars, aux Communes, une question sur le même sujet a été posée à sir Edward -Grey, et le ministre a fourni les éclaircissements les plus complets :
« Effectivement, dit-il en résumé, le 19 mars — depuis ce temps nous n'en avons eu aucune notion — des établissements financiers anglais, français et russes ont constitué une société d'études pour l'établissement d'une voie ferrée entre Kurashi et la frontière russo-persane. L'Angleterre ne s'oppose pas à une étude préliminaire ; mais, si la construction de la ligne est décidée, l'Angleterre se réserve une complète liberté d'action au sujet de l'itinéraire adopté, la composition du conseil d'administration, la représentation des intérêts britanniques, la construction, le contrôle, les tarifs des vo3>ageurs et des marchandises, etc. ». Sir Edward Grey ignore qui représentera définitivement l'Angleterre dans ce syndicat. Il ajoutait :
« La société d'études n'a pas encore demandé le consentement de l'Angleterre pour exécuter des relevés topographiques dans les régions mentionnées. »
Quand j'analyse cette réponse —' je la trouve admirable, je vous demande pardon d'employer un adjectif aussi gros — quand on analyse cette réponse, on voit qu'elle donne toute satisfaction au sentiment national anglais.
D'abord, le jeu des institutions parlementaires, là-bas, est si large et
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si souple qu'on ne se contenterait pas d'une question écrite et d'une simple réponse au Journal Officiel.
C'est au.grand jour, à Londres, devant les honorables et le public, que ces affaires se débattent avec une pleine limpidité.
Et le Ministre dit tout ce qu'il faut dire : il montre que tout est prévu, qu'on a pensé au tracé du chemin de fer, à son administration, à son contrôle, aux tarifs, à la part, enfin, de l'empire britannique.
Ici, nous ne savons rien. J'ai lu, cependant, quelques notes dans les journaux ; une d'elles m'a fait voir que la société d'études a été formée à Londres et qu'elle comprend un consortium de nos- grandes banques, pour la France ; elle aurait pour président M. Raindre, ancien ambassadeur.
Un peu plus tard, j'ai vu que sir Edward Grey, continuant à se préoccuper de cette affaire, désirant y maintenir tout au moins l'égalité dans la participation des trois nations, ferait aux Russes des observations dans ce sens.
Je viens donc aujourd'hui demander à M. le Ministre des Affaires Etrangères —- m'excusant d'avoir insisté plus que je n'aurais voulu, mais on peut se laisser entraîner par son sujet lorsqu'on le considère comme très intéressant (Parlex ! parlex 0 — Je viens demander à M. le Ministre des Affaires étrangères si son département entier — je ne 'parle pas seulement de notre éminent représentant à Londres, M. Paul Cambon, qui, je lésais, a porté à ce sujet toute l'attention désirable — suit cette affaire avec toute l'attention 5 qu'elle mérite. Je lui demande de la suivre personnellement, comme elle l'a été à Londres. (Très bien ! très bien /)
J'ai montré que, du côté anglais, toutes précautions sont prises, même en ce qui concerne déjà les futurs tarifs des vo37ageurs et des marchandises.
On s'occupe aussi des tracés, qui auraient pour nous beaucoup d'importance.
A l'heure actuelle, la voie russe atteint Djoulfa, dernière localité frontière sur le fleuve Araxe, à peu de distance au nord de la grande ville persane de Tamis.
On pense que le tracé du transiranien sera la suite de cette voie qui, passant par Tauris, atteindra Téhéran, passera à Ispahan, Yezd ou les abords de Vezd, Kirman et ensuite atteindra le golfe Persique à Benders-Abbas. Mais ce tracé subirait des modifications plus ou moins considérables.
C'est ainsi que, dans les abords de la mer Caspienne, au Nord, tout un groupe de Russes préconisent une ligne qui suivrait le littoral de la mer Caspienne depuis Bakou jusqu'à Recht et ensuite empruterait, pour gagner Téhéran, l'infrastructure d'une route carrossable.
Enfin au Sud, rien n'est fixé. L'état-major anglais élève de profondes
DISCUSSION DU BUDGET DEI913 219
objections contre tout tracé qui ne permettrait pas à la flotte britannique du golfe Persique de dominer entièrement de ses canons le tracé de la ligne.
Quand au chemin de fer de Bagdad, il se relierait au réseau anglorusse de la Perse par une amorce qui, partant de Bagdad, franchirait la frontière persane à Khanikin et passerait par Kermanschan.
A tous les points de vue, enfin, ce chemin de fer paraît avoir pour les trois grandes puissances du Nord, la nôtre comprise, la plus haute importance.
Quoiqu'en apparence la France ait là de moindres intérêts, je ne crois pas que nous devions laisser une telle entreprise se traiter sans que la certitude nous soit donnée d'une pareille attention vis-à-vis de nos constructeurs, vis-à-vis des capitaux que notre épargne sera quelque jour prochain sollicitée d'y engager.
Nos financiers, qui ont besoin de l'appui de notre Gouvernement pour cette affaire, lui doivent des comptes et nous, Parlement, nous" devons être informés. Il ne faut pas, comme il arrive en pareil cas, que nous soyons « les pa3^ants », sans être, sans avoir été les dirigeants. (Très bien ! très bien \)
Messieurs, j'ai terminé et je m'excuse encore, en raison de l'origine de mon mandat — puisque je suis député de l'Inde — de vous avoir entraîné en Perse que je considère comme devant être un jour le cher min de mon pa3rs ; je m'excuse, dis-je, d'avoir retenu si longtemps votre bienveillance...
J'espère avoir atteint mon but, qui est d'obtenir que le Ministre des Affaires Etrangères, d'accord avec M. le Ministre des Finances, veuille bien donner à la Chambre sur ce point, les mêmes assurances que sir Edward Grey a prodiguées aux Communes et que, pour ma modeste part, jusqu'au bout, jusqu'à l'achèvement complet de l'affaire, je ne cesserai de solliciter à chaque discussion générale de ce budget, puisque nous ne pouvons intervenir autrement dans le courant de l'année.
M. le Ministre des Affaires Etrangères ne peut pas ne pas voir, en effet, comme toute la Chambre, que la diplomatie moderne, médiocre dans ses tractations selon des formules antiques que brisent le télégraphe et le téléphone, doit se rénover en coopérant aux efforts du. commerce et de l'industrie, en rendant partout, même dans les plus petites et les plus lointaines contrées, à notre pa3rs, la place honorée et profitable qu'il n'aurait pas dû perdre ou du moins qu'il aurait dû entièrement garder ou accroître. (Applaudissements.)
M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. Paul-Meunier.
M. PAUL-MEUNIER, député de l'Aube. Messieurs, au moment où la commission du budget et le Gouvernement nous invitent à voter
220 CHRONIQUE
les crédits qui sont destinés à assurer la continuité des relations officielles de la France avec les autres nations, je vous demande la permission de prier à mon tour le Gouvernement de nous indiquer comment avec l'aide de ces crédits et avec l'autorité morale de la France, il entend travailler au maintien de la paix de l'Europe.
Je suis de ceux qui pensent que le budget des Affaires Etrangères est avant toute autre chose un budget de la paix et c'est dans cet esprit que je veux le voter.
J'entends bien que, tout récemment encore, on a dit et on écrit.que la cause de la paix était devenue une cause difficile à plaider ; et, au lendemain d'un conflit armé qui a éclaté non loin de nous, on a crié très haut à la faillite du pacifisme.
Ce serait beaucoup, messieurs, que de nous demander d'abolir la guerre tout d'un coup et par le seul effort de notre propagande. Nous n'avons jamais dit ni pensé que la guerre pût être abolie au cours de cette génération : nous ne savons même pas dans quelle génération elle pourra l'être.
Mais ce que nous constatons, ce que tout le monde constate avec nous à la lumière éclatante de récents événements, c'est qu'il n'est pas conflits internationaux qui ne puissent être réglés à l'amiable, soit par un effort sincère de la diplomatie, soit par la puissance de . l'arbitrage pratiquement organisé.
En ce qui nous console par-dessus tout, c'est cette force grandissante de l'opinion publique qui se prononce ouvertement contre le recours à la violence et en faveur du respect du droit. (Très bien ! très bien !)
En 1908, messieurs, à la séance d'ouverture de la conférence interparlementaire qui s'est tenue au palais de Reichstag, devant huit cents députés qui appartenaient aux divers parlements du monde, le chancelier impérial, alors le prince de Bûlow, après avoir salué la présence à Berlin du premier délégué du groupe français, l'illustre Frédéric Passy, qui vient de terminer hier sa longue et glorieuse carrière, le prince de Bûlow, s'adressant aux députés présents dans la salle du Reichstag, disait :
« Je sais que, mandataires.du peuple, vous exprimez les sentiments de vos concitoyens. Quoi qu'on en dise, leurs voeux sont en majorité favorables à la concorde, au progrès et à la paix, c'est-à-dire qu'ils sont en harmonie avec vos aspirations. Quant aux gouvernements, vous voudrez bien leur rendre cette justice qu'ils sont allés au-devant de vos désirs en concluant des traités internationaux ; ils ont tenu compte de vos inspirations en se livrant à l'étude de toutes les questions qui leur paraissent mûres. Si les gouvernements sont résolus à suivre cette voie à l'avenir, comme dans le passé, c'est en partie votre mérite, messieurs. Les gouvernements sont d'accord.entre eux et d'accord avec vous quant au but à atteindre ; les divergences portent sur les mo3?ens
DISCUSSION DU BUDGET DE 1913 221
à employer pour atteindre ce but le mieux possible et le plus sûrement possible. »
Il est pourtant, messieurs, un point essentiel, fondamental, sur lequel aucune divergence n'est possible entre les mandataires du peuple et les gouvernements, c'est que, pour arriver au but vers lequel nous marchons d'accord les uns et les autres, il n'est qu'un seul moyen : c'est de hâter, dans la mesure possible, la réunion de la troisième conférence de la Haye.
Mais qui prendra l'initiative de cette conférence ? Mais quelles seront les questions qui lui seront posées ? Comment seront-elles posées ? Et comment la solution de ces questions sera-t-elle préparée ?
C'est sur ces quelques points seulement que je voudrais attirer en quelques minutes la bienveillante attention de la Chambre et celle du chef de notre Gouvernement.
La première conférence de la Haye, tout le monde le sait, a été convoquée en 1899 sur l'initiative du gouvernement russe. La seconde a été proposée par le Président de la République des Etats-Unis d'Amérique, puis, sur- l'initiative du gouvernement russe, elle a été convoquée par la reine des Pays-Bas.
Quant à la troisième conférence, la future conférence, elle a déjà donné lieu dans cette Chambre à un certain débat.
Au mois de décembre 1909, notamment, j'ai eu l'honneur, ici même, d'exprimer le voeu que le Gouvernement de la République prît l'initiative, qui serait si honorable pour la France, de provoquer la réunion de la troisième conférence de la Haye.
Le Ministre des Affaires Etrangères d'alors, l'honorable M. Pichon, répondit à la tribune où je suis :
« Le Gouvernement de la République souscrit entièrement à ce désir et, s'il était nécessaire, à un moment donné, que l'initiative fût prise par la France, je suis convaincu que le Gouvernement qui exercera le pouvoir à cette époque -— et ce ne sera certainement pas celui qui est en ce moment sur ces bancs — en prendra l'initiative. »
Messieurs, puisque la prophétie de M. Pichon s'est réalisée, puisqu'il n'est plus sur ces bancs, je me permets de m'adresser à son éminent successeur et de lui demander s'il lui est possible de nous dire qu'il souscrit à la promesse de son prédécesseur et qu'il est prêt à tenir les engagements du cabinet de 1909. Voilà, messieurs, la première question sur laquelle je voulais appeler votre attention et celle de M. le Ministre des Affaires Etrangères.
Tout à l'heure, quand je rappelais le très éloquent discours prononcé en 1908 au palais du Parlement allemand par le prince de Bûlow, je me souvenais aussi qu'il avait dit que, pour dissiper les malentendus, il n'y avait rien de tel que de se rencontrer, de se con-
222 CHRONIQUE
naître et de nouer des relations personnelles. Ce qui était vrai pour les députés auxquels il s'adressait, ce qui est vrai pour les individus, est vrai également, je crois, pour les Etats et c'est précisément à l'époque où, par suite de l'intensité, de la complexité de la vie moderne, les difficultés internationales et je dirai même les menaces' de conflits sont si fréquentes, c'est aussi au moment où la charge des armements qui pèsent sur nous a dépassé tout ce que nous pouvions imaginer. (Très bien ! très bien ! à l'extrême gauche), c'est à ce moment, je crois, qu'il est plus urgent que jamais, pour les Etats, de se rencontrer, de se connaître, de causer et de s'entendre.
L'objet de. cette réunion future, de cette conversation, de cette entente, a été fixé, si je puis employer ce terme, par la ^dernière conférence de 1907, a, en quelque sorte, réglé l'ordre du jour de la prochaine séance. Cet ordre du jour, nous le trouvons à l'acte final de la conférence qui porte la signature de nos plénipotentiaires comme celle de tous les plénipotentiaires des nations du monde représentées à la Haye. Il y est écrit :
« La conférence, se conformant à l'esprit d'entente et de concessions réciproques qui est l'esprit même de ses délibérations, a arrêté la déclaration suivante qui, tout en réservant à chacune des puissances représentées le bénéfice de ses votes, leur permet à toutes d'affirmer les principes qu'elles considèrent comme unanimement reconnus :
« Elle est unanime,
i° A reconnaître le principe de l'arbitrage obligatoire ;
2° A déclarer que certains différends, et notamment ceux relatifs à l'interprétation et à l'application des stipulations conventionnelles internationales, sont susceptibles d'être soumis à l'arbitrage obligatoire sans aucune restriction;
« Elle est unanime enfin à proclamer que, s'il n'a pas été donné de conclure dès maintenant une convention en ce sens, les divergences d'opinion qui se sont manifestées n'ont pas dépassé les limites d'une controverse juridique, et qu'en travaillant ici ensemble pendant quatre mois, toutes les puissances du monde, non seulement ont appris à se comprendre et à se rapprocher davantage, mais, ont su dégager, au cours de cette longue collaboration, un sentiment très élevé du bien commun de l'humanité. »
En outre, la conférence a adopté à l'unanimité la résolution suivante :
« La deuxième conférence de la paix confirme la résolution adoptée par la conférence de 1899 à l'égard de la limitation des charges militaires ; et, vu que les charges militaires se sont considérablement accrues dans presque tous les pays depuis ladite année, la conférence déclare qu'il est hautement désirable de voir les gouvernements reprendre l'étude sérieuse de cette question, »
DISCUSSION DU BUDGET DEI913 223
Enfin, dernier paragraphe :
« La conférence recommande aux puissances la réunion d'une troisième conférence de la paix qui pourrait avoir lieu dans une période analogue à celle qui s'est écoulée depuis la précédente conférence, à une date à fixer d'un commun accord entre les puissances, et elle appelle leur attention sur la nécessité de préparer les travaux de cette troisième conférence assez longtemps à l'avance pour que ses délibérations se'poursuivent avec l'autorité et la rapidité indispensables.
« Pour atteindre à ce but, la conférence estime qu'il serait désirable qu'environ deux mois avant l'époque probable de la réunion, un comité préparatoire fût chargé par les gouvernements de recueillir les diverses propositions à soumettre à la conférence, de rechercher lés matières susceptibles d'un prochain règlement international et de préparer un programme que les gouvernements arrêteraient assez tôt pour qu'il pût être sérieusement étudié dans chaque pays. Ce comité serait en outre chargé de proposer un mode d'organisation et de procédure pour la conférence elle-même.
a Fait à La Ha3re, le 18 octobre 1907. »
Suivent les signatures de tous les plénipotentiaires.
Ainsi la conférence de 1907 avait esquissé dans ses grandes lignes le programme de la future conférence. Elle y avait inscrit d'abord l'arbitrage obligatoire. Elle y avait inscrit en second lieu la limitation des armements, et elle avait dit qu'il serait nécessaire de préparer le travail de la future conférence au moyen de la constitution d'un comité international, qui serait constitué avec le consentement et avec le concours de toutes les puissances intéressées.
C'est sur ces trois idées très simples et très précises que je ferai porter les trois brèves explications qui vont suivre.
La question de l'arbitrage obligatoire, sans restriction ni limitation, a été posée dans toute son étendue, la Chambre le sait à la conférence de 1907 par les plénipotentiaires de la République Dominicaine ; elle a donné lieu à de très longs débats. C'est elle qui a retenu le plus longtemps les délibérations de la conférence. On n'a pas abouti à un résultat complet, on a abouti, comme je l'ai indiqué, à la reconnaissance du principe de l'obligation de l'arbitrage, mais, depuis 1907, dans l'esprit même des résolutions que je viens de lire, dans l'acte final, un certain nombre de grandes puissances ont déjà travaillé à préparer la solution que nous désirons : la reconnaissance complète et définitive de l'obligation de l'arbitrage.
Je n'ai pas besoin de rappeler l'initiative si belle et si courageuse prise à cet égard par la République des Etats-Unis d'Amérique : je voudrais seulement rappeler l'accueil que cette initiative a rencontré auprès du gouvernement britannique.
Au mois de mars 1911, à la Chambre des Communes où une
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question lui avait été posée sur les propositions américaines en ce qui touche l'arbitrage obligatoire, sans aucune restriction ni réserve, sir Edward Gre3r, rappelant les paroles du Président Taft parlant d'une convention « avec une grande nation qui s'en tiendrait au jugement de la Cour internationale d'arbitrage pour tous les points qui ne peuvent être réglés par des négociations, qu'il s'agisse de questions d'honneur national, de questions de territoires ou de questions d'argent », sir Edward Grey disait :
« J'approuve ces paroles avec enthousiasme. Aucune ouverture en ce sens n'a encore été reçue jusqu'à présent par le Gouvernement Britannique, mais une telle ouverture recevrait une réponse sjmipathique. »
Et vers la même époque, au Parlement allemand, le chancelier impérial questionné sur le même sujet a répondu en termes mesurés, sans doute, mais d'une clarté parfaite « que le gouvernement de Berlin ne ferait aucune opposition de principe à l'établissement d'une convention de cette nature ».
Si importante pourtant que soit la question de l'obligation de l'arbitrage appliqué à tous les différends internationaux, sans distinction, il est certain que la seconde question visée par l'acte final de la conférence de la Ha3>"e de 1907 constitue le plus grave, le plus important et le plus angoissant problème de notre époque. Cette question de la limitation des armements, c'était la seule, vous vous en souvenez, qui fut inscrite à l'ordre du jour de la première conférence, celle de 1899, par le gouvernement impérial russe. Le comte Mourawieff, dans cette mémorable circulaire du 24 octobre 1898 qu'il faut relire sans cesse, disait :
« Le Gouvernement Impérial croit que le moment actuel serait très favorable à la recherche, dans la voie d'une discussion internationale, des mo3rens les plus efficaces d'assurer à tous les peuples les bienfaits d'un paix réelle et durable et de mettre avant tout un terme au développement progressif des armements actuels. »
Et il ajoutait :
« Les charges financières suivant une marche ascendante atteignent la prospérité publique dans sa source ; les forces intellectuelles et physiques des peuples, le travail et le. capital sont en majeure partie détournés de leur application naturelle et consumés improductivement. Des centaines de millions sont employés à acquérir des engins de destruction effroyables qui, considérés aujourd'hui comme le dernier mot de la science, sont destinés demain à perdre toute valeur à la suite de quelque nouvelle découverte dans ce domaine. La culture nationale, le progrès économique, la production des richesses se trouvent parafysés ou faussés dans leur développement.
« Aussi à mesure que s'accroissent les armements de chaque puissance, répondent-ils de moins en moins au but que les Gouverne-
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ments s'étaient posé. Les crises économiques, dues en grande partie au régime des armements à outrance, et le danger continuel qui gît dans cet amoncellement du matériel de guerre, transforment la paix armée de nos jours en un fardeau écrasant que les peuples ont déplus en plus de peine à porter.
« Mettre un terme à ces armements incessants et rechercher les moyens de prévenir les calamités qui menacent le monde entier, tel est le devoir suprême qui s'impose aujourd'hui à tous les Etats.
« Pénétrée de ce sentiment, S. M. l'Empereur a daigné m'ordonner de proposer à tous les gouvernements dont les représentants sont accrédités près la Cour impériale, la réunion d'une conférence qui aurait à s'occuper de ce grave problème. »
La Chambre se rappelle que la conférence de 1899, saisie de cet unique ordre du jour, la limitation des armements, n'a pas pu, du premier effort, aboutir et qu'à la dernière minute, pour éviter un avortement qui eût été désastreux, on a été obligé d'improviser un ordre du jour nouveau.
Depuis 1899, depuis l'époque où le comte Mouravief, au nom du gouvernement impérial russe poussait ce cri d'alarme, la progression des-armements en Europe n'a pas cessé de s'accentuer.
En 1906, à la conférence interparlementaire qui s'est tenue à Londres, le chef du cabinet anglais s'exprimait à peu près dans les mêmes termes, avec autant de force, autant d'énergie que le comte Mouravief pour protester, au nom de son pays, contre la manie criminelle des armements.
Et en 1907, la deuxième conférence de La Haye a voté elle-même la résolution que j'ai eu l'honneur de lire à la Chambre. Depuis cette conférence, où les plénipotentiaires des puissances, constatant la recrudescence de ces armements formidables qui ruinent le monde, exprimaient le voeu que cette question fut enfin mise à l'ordre du jour, étudiée par les Etats et résolue par la conférence internationale, tous les gouvernements d'Europe ont entendu depuis 1907 jusqu'à hier les doléances des Parlements, et les plaintes des peuples. C'est aux EtatsUnis d'Amérique, en 1910, que les premières protestations se sont élevées. Le 20 juin 1910, la Chambre des représentants et, le 24 juin 1910, le Sénat delà République des Etats-Unis d'Amérique ont voté une résolution jointe ainsi conçue :
« Résolu par le Sénat et la Chambre des représentants des EtatsUnis d'Amérique, assemblés en congrès, qu'une commission de cinq membres sera nommée par le Président des Etats-Unis pour examiner l'opportunité d'utiliser les organismes internationaux existants dans le but de limiter les armements des nations du monde par un accord international, de constituer avec les flottes réunies du monde une force internationale pour la préservation de la paix universelle, ainsi que
ARCHIVES DlPLoai,, t. 122, n" 5-6-y, mai-juillet 1912. s5
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d'examiner tous les autres moyens de réduire les dépenses du gouvernement dans des buts militaires et de diminuer les chances de guerre et de faire un rapport sur cet objet. »
A la suite de cette décision, le Président Taft a invité les gouvernements des différents pays à lui manifester leur intention de former également des commissions identiques. Le Président des Etats-Unis d'Amérique se contentait en somme de répéter aux Etats du monde les invitations qui leur avaient été faites par l'acte final de la conférence de 1907.
Mais ces protestations, ces réclamations, ces invitations aux puissances ne sont pas le privilège et le monopole du Parlement et du Gouvernement américain. La même année, le 10 novembre 1910, à la délégation du Reichsrath autrichien, à la suite d'une question posée par M. Seltz, député du parti socialiste, M. Schwegel a répondu, au nom du gouvernement impérial :
« Un accord de ce genre... » —pour la limitation des armements « ...ne peut se faire que par une initiative générale de tous les Etats. Il suffit que le rapporteur exprime, en séance plénière, sa conviction que le gouvernement autrichien sera prêt à entrer en pourparlers, si l'occasion s'en présente, et accueillera avec une réelle sympathie tout ce qui se fera en vue de diminuer le lourd fardeau qui pèse sur la monarchie. »
Et la même année, au mois de décembre 1910, au Parlement fédéral de l'empire allemand, répondant à une question de M. le député national libéral Bassermann, au sujet de la réduction des dépenses maritimes et d'une entente possible, à cet égard avec le gouvernement britannique, le chancelier, M. de Bethmann-Holweg, s'est exprimé en ces termes :
« En ce qui concerne nos rapports avec l'Angleterre et de prétendues négociations relatives à une limitation conventionnelle des armements sur mer, je dois tout d'abord insister sur ce point qui est de notoriété publique que le gouvernement britannique a exprimé à plusieurs reprises l'idée qu'une fixation conventionnelle des forces maritimes des différentes puissances contribuerait puissamment à améliorer les relations internationales. On sait que l'Angleterre a déjà exprimé cette idée à la conférence de La Haye. Depuis, l'Angleterre l'a mise en avant à plusieurs reprises sans toutefois faire de propositions qui puissent nous donner lieu de répondre par une acceptation formelle ou un refus positif.
« Nous nous rencontrons d'ailleurs avec l'Angleterre dans le désir d'éviter les rivalités en ce qui concerne les armements. »
Un peu plus tard, le 10 mars 1911, pendant la discussion du budget du Ministère des Affaires Etrangères au Parlement allemand, la social-démocratie, le groupe socialiste du parlement, avait déposé sur le bureau du Reichstag une résolution ainsi conçue :
DISCUSSION DU BUDGET DE I913 227
« Le Reichstag prie le chancelier de faire immédiatement une démarche en vue d'amener la conclusion d'une entente internationale pour la limitation des ■ armements. »
A cette motion du groupe socialiste allemand, le chancelier, M. de Bethmann-Hollweg, a répondu :
« Je ne veux pas assurément refuser toute valeur au travail des amis de la paix et du désarmement. Le temps est passé en Europe des guerres de cabinet. Les dispositions d'où peuvent naître les guerres aujourd'hui ont leurs racines dans le sentiment populaire. Ce sentiment seulement se laisse enflammer facilement. On a souvent parlé des excitations d'une presse irresponsable. Il est certain que ces influences ou d'autres doivent être contrebalancées d'une manière quelconque et je serai le premier à m'en réjouir si le tribunal international nous procure un tel contrepoids ; mais ces assurances de paix générale ne suffisent pas quand il s'agit de proposer à une grande puissance de désarmer. »
En présence de cette réponse du chancelier, le groupe du centre du Parlement a déposé l'amendement suivant à la motion que j'ai lue il y a un instant :
A Le Reichstag prie le chancelier impérial d'entrer en négociations avec les grandes puissances aussitôt que l'une d'elles fera des propositions tendant à limiter simultanément et également les dépenses militaires et navales. »
M. LUCIEN MILLEVOYE, député de la Seine. Pourquoi ne le fait-il pas lui-même ?
M. PAUL-MEUNIER. Il ne le fait pas lui-même, mon cher collègue, parce que les termes de la motion votée par le Reichstag ne le lui enjoignaient pas.
M. LUCIEN MILLEVOYE. Il attend des propositions, mais il n'en fait pas.
M. PAUL-MEUNIER. C'est exact. Le Reichstag s'était trouvé en présence de deux motions : l'une, conçue dans l'esprit que vous indiquez, celle du groupe socialiste qui préconisait l'initiative ; l'autre, celle du centre, qui demandait de répondre avec sympathie à toute initiative venant d'une autre puissance. C'est la motion du centre qui a été votée.
Cette même année, le 13 mars, à la chambre des communes, M. le député King, du parti libéral, a déposé la motion suivante :
« La Chambre regrette la nécessité du maintien des armements à outrance et accueillerait avec empressement une entente internationale pour la réduction des armements, » -
228 CHRONIQUE
Sur . cette motion sir Edward Grey a fait l'a déclaration suivante :
« La Chambre », a-t-il dit, « aurait raison de dire que c'est un étrange paradoxe que de voir s'accroître aussi rapidement les armements, alors . que les relations entre les puissances sont ce qu'elles sont. Oui, c'est un paradoxe ; mais il y a un paradoxe plus grand encore, c'est que le fardeau sans cesse croissant des dépenses navales et militaires coïncide non seulement avec l'amitié qui règne entre les puissances, mais encore avec le progrès et la civilisation mondiale. C'est parmi les nations de l'Europe, c'est-à-dire parmi les plus civilisées, que les dépenses sont les plus fortes. Nous aurions cru, au contraire, que le progrès et la civilisation conduiraient à une réduction des dépenses militaires et navales. L'humanité devra un jour sentir, comprendre le danger que cette rivalité des dépenses d'armements fait courir à.la civilisation. Le fardeau, sans cesse croissant, deviendra écrasant, intolérable... » — le Ministre des Affaires Etrangères de la Grande-Bretagne est plus à même que les autres de résister à ces dépenses, car les impôts y pèsent moins lourdement que dans d'autres pays sur le contribuable peu fortuné. Chez d'autres nations, un jour viendra où l'impôt signifiera famine pour certaines parties de la population, et alors il faudra bien s'arrêter dans la voie des armements et des dépenses. Encore quelques années, et ces nations en arriveront là. Ce n'est pas nous qui avons forcé le pas, ce n'est pas nous qui avons provoqué, ce n'est pas nous qui sommes cause si l'Allemagne et les autres pays accroissent leurs dépenses d'armement. N'avions nous pas naguère réduit notre budget naval ? N'avions-nous pas donné l'exem• pie ; mais qui Fa suivi ? »
M. BOUVERI, député de Saône-et-Loire. Très bien !
M. PAUL-MEUNIER. Et c'est là l'expression même de la vérité. La Grande-Bretagne, en effet, avait donné l'exemple. En 1910, elle avait réduit son budget maritime et, cette année, si l'on compare le chiffre total des dépenses du budget de la marine de l'Angleterre pour l'exercice 1912-1913 avec le chiffre de l'exercice 1911-1912, on constate une faible diminution, mais enfin une diminution.
L'exercice dernier s'élevait au chiffre, pour les dépenses maritimes, de 1 milliard 109 millions et l'exercice actuel s'élève seulement au chiffre de 1 milliard 102 millions. Il 5^ a donc une diminution de 7 millions de francs.
Mais le 4 mars 1912, à la Chambre des communes, M. Churchill a déclaré que le crédit total demandé pour la marine, pour l'exercice 1912-1913, et qui marque une diminution sur celui de l'exercice précédent, pourrait être augmenté, par voie de crédits supplémentaires, dans le cas où les puissances étrangères viendraient à renforcer le programme de leurs constructions.
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M. BOUVERI. C'est ce qu'a fait la France.
M. PAUL-MEUNIER. Tandis que l'Angleterre donnait et donne encore cet exemple pour son budget maritime, nous sommes obligés de constater qu'inversement dans les autres Etats, aussi bien les dépenses de l'armée de mer que celles de l'armée de terre suivent une marche ascendante.
En Italie, en 1911, le budget de la guerre s'élevait à 364 millions de lires. Il est passé en 1912 de 364 à 405 millions, et, pour l'exercice actuel, à 431 millions. En ce qui concerne le budget de la marine, la loi votée le 2 juillet 1911 comporte des excédents de dépenses qui vont s'échelonner de 1913 à 1918 et qui varient de 85 à 95 millions.
En Russie, le budget de la guerre de 1911 était de 1.200 millions ; en 1912,11 a atteint 1.300 millions et le budget de la marine, qui était de 287 millions en 1911, est passé à 436 millions en 1912, c'est-à-dire qu'il a presque doublé.
Il en est de même, en Espagne, où ce budget a subi, depuis la campagne marocaine, une marche ascendante ; de même dans^ les petits Etats comme la Belgique, où le budget de l'armée, qui était de 59 millions en 1911, est de 65 millions en 1912.
En Suisse également, ce budget qui était de 42 millions en 1910, est passé à 45 millions et, à l'heure actuelle, les Chambres fédérales discutent un projet concernant les dépenses militaires extraordinaires qui doivent s'élever à 31 millions, ce qui va doubler presque exactement le budget de l'armée pour l'année prochaine.
Enfin, en Allemagne, la progression a été la suivante : en 1901, le budget de la guerre était de 676 millions; en 1906 il passe à 880 millions ; en 1911, à 921 millions ; en 1912, à 963 millions.
En dix ans, de 1901 à 1912, il a augmenté de plus de 300 millions et, de plus, les 1 o et 21 mai de cette année, le Reichstag a adopté deux projets de loi concernant l'augmentation de la flotte et de l'armée, qui auront pour résultat d'augmenter, pendant les exercices 1912 à 1917, de 650 millions de marks, les dépenses de guerre, 440 millions de marks pour l'armée et 210 millions de marks pour;', la marine.
Enfin, en ce qui concerne la France, nos dépenses de guerre pour le Ministère de la guerre étaient de 743 millions en 1901, et elles s'élèvent cette année, dans le budget qui va nous être présenté après le budget des Affaires Etrangères, de 743 millions à 957 millions. Quant aux dépenses de la marine, qui étaient, il y a dix ans, de 328 millions, elles vont monter cette année à 461 millions.
Messieurs, voilà pour l'impôt d'argent, pour les dépenses d'argent. Mais à côté de l'impôt d'argent, il y a l'impôt du sang et vous allez
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voir que pour cet impôt, qui n'est pas moins pénible que l'autre, la progression a été la même.
Voilà un document inédit qui a été communiqué tout récemment par le Gouvernement britannique à la Chambre des. communes et qui donne la statistique du nombre d'hommes — 3' compris les réserves — que les nations d'Europe peuvent mettre sur pied actuellement par comparaison aux périodes précédentes. C'est un document qu'a bien voulu me communiquer le bureau spécial de la Chambre que M. Eugène Pierre a si heureusement constitué pour la publication des documents parlementaires étrangers.
Ce document porte qu'en 1870 l'armée anglaise comportait un effectif, réserves comprises, de 615,000 hommes. Il est aujourd'hui de 993,000 hommes.
L'armée française était en 1870 de 567,000 hommes. Elle est aujourd'hui de 3,360,000 hommes.
L'Autriche avait 800.000 hommes en 1870. Elle a, 2,200,000 hommes cette année.
La Russie, 1,400,000 en 1870 et 3,200,000 cette année. L'Allemagne, 955,000 en 1870 et 4,010,000 cette année.
Messieurs, j'ai hâté de dire que cette situation si particulièrement grave a ému déjà notre Parlement aussi bien que les parlements étrangers et qu'elle a ému aussi profondément nos plénipotentiaires, les représentants de la France à la conférence de" La Haye.
A la séance du 23 février 1911, c'est-à-dire à une époque contemporaine des débats des Chambres étrangères auxquelles j'ai fait allusion, et au cours de la discussion du projet de loi tendant à l'augmentation des dépenses maritimes pour la construction de nouveaux cuirassés, notre collègue du groupe socialiste M. Marcel Sembat a déposé ici une résolution demandant à la Chambre de surseoir aU passage à la discussion des articles jusqu'à ce qu'une convention internationale ait été engagée avec les grandes puissances maritimes pour arriver à la limitation des armements.
Le Ministre des Affaires Etrangères a -répondu à M. Sembat : Que nous nous livrions sur ce sujet — la limitation des armements — à de sérieuses études nationales, le Gouvernement n'3r contredit pas, et il est prêt à 3^ procéder avec vous. Nous resterons ainsi dans les limites de la décision, rappelée ce matin à la tribune par l'honorable M. Sembat, qui a été 'prise par le congrès radical de Nantes et aux termes de laquelle il 3r aurait le plus grand intérêt à organiser la propagande dans notre pays pour l'arbitrage international et la limitation des armements. Contentons-nous de cela pour le moment et n'allons pas plus loin.
A la suite de cette déclaration de M. le Ministre des Affaires Etrangères, la motion de M. Sembat fut écartée et la Chambre vota à une majorité de 447 voix contre 56, c'est-à-dire à une majorité considé--
DISCUSSION DU BUDGET DE 1913 231
rable, une motion en quelque sorte transactionnelle, qui était ainsi conçue :
« La Chambre invite le Gouvernement à faire tous ses efforts pour faire mettre, d'accord avec les puissances amies et alliées, à l'ordre du jour de la prochaine conférence de La Haye, la limitation simultanée des armements, et décide de passer à la discussion des articles. »
Cette motion fut votée, je le répète, par 447 voix, le 23 février 1911.
Il s'agit de savoir quelle suite sera donnée à la motion votée par la Chambre à une majorité, qui marque d'une façon aussi solennelle la volonté des représentants de la nation. Cette motion, votée par la Chambre et les déclarations du Gouvernement, qui s'y était rallié, qui l'avait acceptée, ce vote et ces déclarations concordent, je m'empresse de le reconnaître et de le constater, avec les termes mêmes des conclusions du rapport qu'au nom de nos plénipotentiaires, M. Léon Bourgeois avait remis au Gouvernement au lendemain de la conférence de 1907.
Je demande à mes honorables collègues la permission de rappeler quels, étaient les termes de ce rapport. M. Léon Bourgeois et ses collègues s'exprimaient ainsi :
« Nous avons cité le paragraphe de l'acte final du 18 octobre par lequel la conférence « recommande aux puissances la réunion d'une troisième conférence de la paix ». Elle indique, sinon la date précise de cette troisième conférence, qu'il appartient aux gouvernements de fixer, du moins le délai dans iequel elle devrait se réunir, c'est-à-dire dans une période de huit ans, analogue à celle qui s'est écoulée depuis la conférence de 1899.
« En votant à l'unanimité cette « recommandation », après d'assez longues négociations qui ont complètement mis les motifs en lumière, les représentants des puissances ont voulu affirmer qu'ils considéraient leurs travaux comme formant une faible partie d'une oeuvre beaucoup plus vaste et qui devait se compléter dans l'avenir. C'était le second anneau d'une chaîne dont le premier avait été forgé parles conventions de 1899 et dont les anneaux suivants seraient successivement forgés par le labeur continu de l'humanité. Sans manquer en rien à la reconnaissance due au souverain initiateur de l'oeuvre de La Haye, en proclamant au contraire très hautement ce que le monde devait au Tsar, de même qu'au Président des Etats-Unis d'Amérique, la conférence a affirmé que désormais les réunions des conférences ne dépendraient plus du désir manifesté par tel ou tel chef d'Etat, mais de la volonté commune de tous les Etats, résolus à poursuivre régulièrement et périodiquement dans l'avenir l'organisation juridique de la vie internationale. La conférence de 1907 peut dorénavant prendre son nom véritable : elle a été la seconde session des assises périodiques du monde civilisé.
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« Et les gouvernements, ajoutait M, Léon Bourgeois, reçoivent de cette décision mémorable un mandat que nul d'entre eux ne songerait à décliner.
« Dans l'intervalle des deux conférences, ils auront le devoir d'assurer l'exécution des votes de la conférence passée et celui de préparer le travail de la conférence à venir.
« L'acte final a demandé, en effet, que deux ans avant l'époque probable de la troisième conférence, un comité préparatoire fût chargé par les gouvernements de recueillir les diverses propositions à soumettre à la conférence, de rechercher les matières susceptibles d'un prochain règlement international que les gouvernements arrêteraient assez tôt pour qu'il pût être sérieusement étudié dans chaque pays... »
Les plénipotentiaires ajoutaient :
« Peut-être la délégation de la République ne dépassera-t-elle pas les limites du mandat dont elle rend compte ici, en exprimant à son tour, un voeu, au sujet de la préparation de la troisième conférence.
« Nous souhaitons vivement que, lorsque deux ans avant la réunion de cette troisième conférence, l'heure viendra d'organiser le comité préparatoire international prévu par l'acte final de 1907, la France soit prête sur toutes les matières susceptibles d'un règlement international à présenter ses conclusions et à les défendre. Un travail continu dans les quatre ou cinq années qui s'écouleront d'ici là ne sera pas de trop pour soutenir alors ce noble rôle.
« La législation internationale, créée en 1899 et 1907, impose^ en effet, à chaque Etat des tâches complexes.
« Chacun d'eux doit veiller à ce qu'une suite soit donnée, dans la mesure possible, aux voeux, résolutions et recommandations par lesquels la conférence, là où elle ne pouvait conclure elle-même, a marqué nettement son désir de voir les Gouvernements achever son oeuvre.
« En résumé, l'oeuvre de la Ha3'e est désormais une oeuvre permanente. Ce n'est pas seulement pendant les sessions des conférences qu'on devra la reprendre et la promouvoir. C'est pour chacun des Gouvernements un devoir continuel de la suivre, d'en préparer les développements et d'en hâter les fruits.
« Nous sommes certains, d'être approuvés par Vous, Monsieur le Ministre, en disant qu'il y a dans cette noble tâche un exemple à donner par le Gouvernement de la République française. »
Je me permets de demander maintenant au chef du Gouvernement s'il est résolu à donner cet exemple, conformément aux conclusions de M. Léon Bourgeois et des autres plénipotentiaires, qui représentaient la France en 1907 à La Haj'e, conformément à la résolution que la
DISCUSSION DU BUDGET DEI913 235
Chambre a prise au mois de février de l'an dernier à 440 voix de majorité.
D'après les résolutions votées à la Haye, la troisième conférence devrait avoir lieu en 1915. Le comité préparatoire international qui doit en préparer et en faciliter les travaux devrait se réunir en 1913.
Mais le comité national chargé de préparer lui-même la participation de la France à la conférence de la Ha5^e, l'heure n'est-elle pas venue de le constituer, et pour répondre au désir de nos plénipotentiaires, et pour donner suite au vote de la Chambre ? C'est la question précise que je me permets de poser au Gouvernement. (Très bien ! très bien ! à l'extrême gauche et sur divers bancs.")
En ces tout derniers temps, il y a quelques jours, l'union interparlementaire, cette grande société amicale qui groupe les membres de la plupart des parlements du monde, sur l'initiative du second délégué de la France à la conférence de la Haye, M. d'Estournelles de Constant, a voté une résolution invitant tous ses membres à ne manquer aucune occasion, notamment lors de la discussion du budget, pour soulever la question et pour inviter le gouvernement à entreprendre sans plus de retard les études nécessaires pour aboutir, soit séparément, soit par des accords internationaux à la réalisation du voeu émis à deux reprises par les conférences de la Ha3'e.
Cette résolution de la commission interparlementaire est signée, non seulement par notre collègue d'Estournelles de Constant, mais encore par M. Conrad Haussmann, membre du Reichstag, par M. Milioukow, membre de la Douma russe, et par lord Weardale, membre de la Chambre des Lords. C'est donc à la fois pour répondre au voeu de l'union interparlementaire, au voeu de la conférence diplomatique de 1907, pour suivre les conseils de nos plénipotentiaires à cette conférence, que je me permets, avant de voter les crédits du ministère des affaires étrangères, de demander à M. le Président du Conseil, d'abord s'il est résolu à provoquer, comme son prédécesseur en avait pris l'engagement, la réunion d'une troisième conférence à la Haye, ensuite s'il est disposé à préparer dès maintenant, comme la Chambre y avait invité le Gouvernement l'année dernière, à préparer la participation de la France à cette conférence.
Qu'il me soit permis d'attendre la 'réponse de M. le Président du Conseil avec confiance, je dirai avec d'autant plus de confiance qu'il me revient en ce moment à la pensée ces paroles rassurantes que prononçait à l'Académie française, au cours d'une séance solennelle de réception, le ro décembre 1909, notre éminent maître, M. Ernest Lavisse :
« Tout individualiste que vous soyez, au fond, disait M. Lavisse à M. Poincaré, vous n'hésitez pas à requérir, pour les oeuvres démo- _ cratiques d'assistance et de prévo3rance, l'aide de la commune, du département et de l'Etat ; vous proclamez légitimes les idées d'assis-
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tance et de solidarité humaine. Voilà, Monsieur, des mots qui mènent loin, très loin, et vous le savez. Même, vous prévoyez qu'un jour il faudra, dans tous les Etats du monde, choisir entre les dépenses militaires et les dépenses sociales. » ( Très bien ! très bien ! à l'extrême gauche et sur divers bancs.) « Ce jour viendra; il approche. Il mettra en présence deux mondes, deux conceptions différentes de l'humanité. Et ce sera le grand jour, dies magna. »
Je me garderai bien d'ajouter quoi que ce soit à un si beau langage. Mais, pour résumer toute ma pensée, que je m'excuse d'avoir développée si longuement (Très bien ! — Parlex -0 et à laquelle je m'excuse surtout d'avoir ajouté tant de lectures qui étaient peut-être superflues, je me permettrai de dire ce dernier mot.
Je rappelerai très simplement et très respectueusement à la Chambre et au Gouvernement ce que d'autres avant moi ont dit avec plus d'autorité à d'autres "Chambres et à d'autres Gouvernements : Il est temps de mettre un terme à ce fléau plus meurtrier que la fièvre de la bataille : la folie des armements (Très bien ! très bien ! à l'extrême gauche) et il est temps de sauver le monde d'un mal plus mortel que la guerre elle même : la paix armée. (Applaudissements à l'extrême gauche et sur divers bancs.)
M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. Millevoye.
M. LUCIEN MILLEVOYE. Très respectueux des décisions de la Chambre, je ne voudrais pas dépasser le délai d'un quart d'heure qui m'est imparti. Je prends l'engagement, si j'étais entraîné trop loin, de ne dépasser que de très peu ce délai.
Je voudrais me borner à de courtes reflexions, heureux si je peux obtenir que ces reflexions amènent M. le Président du Conseil à nous donner quelques réponses.
La Chambre, absorbée par les débats sur la législation électorale et par les incidents de sa politique intérieure, n'a peut-être prêté, depuis quelque temps, qu'une oreille un peu distraite aux grands bruits venus du dehors.
Cependant ces bruits méritent toute son attention. Ils justifient ses préoccupations, car quelques-uns sont d'une gravité exceptionnelle.
Trois grands événements dominent actuellement notre situation internationale, et il n'est pas possible de déterminer aujourd'hui encore avec précision quelles en seront les conséquences et la portée historique.
Je veux parler de la guerre italo-turque, du réveil de l'Islam et des armements de l'Allemagne.
La guerre italo-turque n'est, pas près de finir, et il serait encore téméraire de conclure qu'elle pourra être limitée, soit dans sa durée, soit dans son champ d'action, soit dans l'épuisement des forces qu'elle
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met en .présence. Si l'Italie dispose de puissants moyens d'action offensifs dans la Méditerranée, la Turquie a dans son patriotisme rajeuni, dans le concours des races qui contribuent à sa défense, et enfin dans l'héroïsme de ses auxiliaires arabes, des éléments incontestables et précieux de résistance.
Dans tous les cas, de part et d'autre, les concessions sont écartées comme des atteintes trop directes à l'honneur national ; et nous savons, par les enseignements de l'histoire, ce que cela signifie : cela veut dire qu'une question ainsi présentée ne peut être tranchée que par les armes.
Si nous avons recours, suivant le conseil que nous donnait très éloquemment notre ami M. Paul Meunier, soit à l'arbitrage européen, soit à l'intervention européenne, nous trouvons, 1 de ce côté encore, des perspectives assez menaçantes. Car, l'intervention européenne, comment se produirait-elle, surtout dans la question d'Orient ? Si nous interrogeons encore l'histoire, nous voyons que les intérêts de la France, de l'Autriche, de l'Allemagne, de l'Angleterre, de la Russie en Orient ont toujours été à peu près inconciliables. Les grandes conventions diplomatiques comme le traité de Paris après la guerre de Crimée, comme le traité de Berlin après la guerre russo-turque, n'étaient, on peut le dire, que des transactions éphémères.
L'Europe pourra-t-elle trouver, dans les circonstances présentes, l'occasion, le prétexte, les chances, la base d'une transaction de ce genre ? C'est tout ce que nous pouvons espérer. Notre espérance ne va pas au delà.
Nous pouvons le dire très haut, ce qui nous préoccupe avant tout, c'est de trouver le terme même de cette transaction, c'est d'en trouver l'occasion, c'est de trouver l'occasion où le Gouvernement français pourrait intervenir, où la diplomatie française pourrait jouer un rôle.
A cet égard, nous nous tournons très loyalement vers vous, Monsieur le Président du Conseil, nous vous faisons confiance et nous vous demandons, en présence de ce problème obscur, en présence de cette situation troublée, de conserver au Gouvernement de votre pays, à votre pays lui-même, dans cette question orientale, toute sa liberté, toute son impartialité et toute son indépendance. (Très bien ! très bien !)
Les circonstances sont peut-être favorables pour permettre à la diplomatie française de rentrer, vis-à-vis de l'empire ottoman, dans les voies traditionnelles, dans les voies un peu trop négligées depuis quelque temps d'une politique plusieurs fois séculaire.
Le débarquement des Italiens en Tripolitaine et en Cyrénaïque, la proclamation de notre protectorat au Maroc ont évidemment ranimé, dans l'Afrique du Nord, le feu des passions musulmanes. Mais la voix du Commandeur des crevants garde toujours et gardera longtemps
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encore, dans tous les pa3<"s où le Coran est la loi, une influence prépondérante.
La France doit s'appliquer à traiter le sultan de Constantinople en ami ; elle doit s'attacher à lui offrir des gages d'une sympathie, d'une amitié qui ne sera pas de pure forme. J'entends par là que notre diplomatie à Constantinople, tout en restant active, doit s'appliquer à devenir très amicalement, très loyalement bienveillante.
La France, ne l'oublions pas, est toujours en Orient la plus grande puissance morale de l'univers. Si cette situation nous crée des droits, elle nous impose aussi des devoirs. J'ai prononcé le mot de puissance morale ; ce n'est pas à la légère ; il ne faut pas en méconnaître la valeur et la portée. Même en matière diplomatiqne, la grande puissance morale, en dehors même de toutes les forces matérielles qui la secondent et qui l'appuyent, peut jouer un rôle prépondérant ; c'est celui que notre pa3^s peut jouer dans le règlement de la crise orientale. Oui la plus grande puissance morale de l'univers doit appuyer la plus grande puissance morale de l'Islam. C'est sur ce point que j'appelle l'attention de mes honorables collègues et du représentant du Gouvernement.
En Afrique, allons-nous gouverrïbr notre Afrique musulmane avec ou contre l'Islam ? Voilà la question nettement posée ; elle est extrêmement importante. Allons-nous gouverner l'Algérie, la Tunisie, le Maroc, la Mauritanie, l'Afrique centrale, un empire immense, allonsnous le gouverner avec ou contre l'Islam ?
Contre l'Islam, ce serait une aventure singulièrement téméraire qui pourrait même aller jusqu'aux plus grands périls ; avec l'Islam — oh ! j'entends bien les manifestations de scepticisme, mais le moment n'est pas venu d'ouvrir et surtout d'engager à fond ce grand débat — avec l'Islam, c'est possible si on lui donne quelque chose de nouveau, qui peut paraître bien simple et que, cependant, il accueillerait comme une grande chose : la justice. (Très bien ! Très bien !)
Qu'à l'heure actuelle, ceux qui se lèvent en armes soient frappés par les armes, c'est entendu. Que la police française s'exerce dans les pays musulmans comme elle s'exerce ailleurs, avec une certaine rigueur, nous n'y contredisons pas. Mais croit-on que la France pourra régner, de siècle en siècle, sur 20 millions de musulmans irréconciliables ? (Applaudissements.) Je ne le pense pas. Je crois, et je ne suis pas le seul à le croire, que le moment est venu d'apporter à cette Chambre une large charte africaine, un statut qui sera un grand statut de loj'auté, d'équité, quelque chose de large, de libéral en même temps que constitutionnel.
Je crois, je sais même que M. le- Président du Conseil est tout disposé à s'y associer. Nous l'en remercions et l'en félicitons. Je ne crois pas qu'à l'heure actuelle il 3' ait, pour un homme d'Etat repu-
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blicain, une tâche plus haute et j'ajoute que, pour un patriote français, il n'y en a pas de plus urgente.
Je ne fais qu'effleurer la question en passant, parce qu'elle sera traitée prochainement au cours d'une interpellation que j'ai déposée et dont la date sera fixée à la fin de sa séance, et que la question de l'indigénat musulman sera présentée par notre collègue M. Albin Rozet. (Très bien ! très bien !)
Si nous portons maintenant nos regards vers l'Europe, nous 3^ voyons à la fois un motif de crainte et un motif d'espérance.
Le motif de crainte, c'est celui qu'a indiqué notre honorable collègue M. Paul Meunier ; c'est la progression continue, incessante, méthodique des armements européens et, pour la cinquième ou la sixième fois, c'est l'Allemagne encore, c'est l'empire allemand, c'est, hélas! le Reichstag allemand qui en a donné le signal.
L'armée allemande va être augmentée de 200.000 hommes. C'est un fait brutal devant lequel tombe tout commentaire.
Un diplomate a dit un jour — et c'est peut-être la réponse que l'on pourrait faire aux observations de l'honorable M. Paul Meunier — un diplomate a dit : « On peut tout faire avec des baïonnettes, excepté s'asseoir dessus. » (On rit.)
Et l'Allemagne prétend aujourd'hui qu'elle pourra asseoir la paix du monde sur des millions et des millions de baïonnettes. Il est vrai que, dans la thèse et l'hypothèse allemandes, c'est la paix ; mais, dans les préoccupations des chancelleries, et surtout 'dans l'anxiété des nations, cela peut être tout autre chose. Dans tous les cas, nous sommes autorisés à dire que cette interprétation est repoussée par la conscience universelle et que la conscience universelle, que la conscience des chancelleries aussi bien que celle des peuples ne considère pas que l'on puisse interpréter un pareil déploiement de force comme une garantie exceptionnelle de paix, ni même comme une précaution absolument défensive.
C'est ce sentiment qui vient d'être traduit en Angleterre, avec une très grande autorité par l'homme même qu'on avait pu considérer un instant comme l'interprète du rapprochement anglo-allemand. Il faut citer ces paroles de lord Haldane ; il faut qu'elles soient inscrites au Journal officiel de la République française.
« La nation doit travailler, a dit lord Haldane, fermement et conformément aux idées modernes de défense, pour que l'empire britannique ne soit plus seulement la grande puissance maritime, mais encore la plus grande nation militaire que le monde ait jamais vue. »
Et il ajoutait ces paroles plus significatives encore : « La politique étrangère pourrait faire que le système actuel ne fut pas le meilleur pour l'avenir ; il faudrait alors que la nation consentît à tous les changements qui deviendraient nécessaires, »
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C'est le retour à la grande politique traditionnelle des Chatam, des Castlereagh, des Palmerston, des Disraeli, de Gladstone lui-même et sans aucune exagération, le Times a pu en publier ce commentaire :
« La grande majorité du peuple anglais est bien préparée à voir l'entente transformée, en cas de besoin, en une alliance active sur terre et sur mer ; ceci parce que la puissance de la France est indispensable à l'équilibre européen et que l'équilibre européen est indispensable à l'Angleterre. »
L'équilibre européen, c'est bien là la politique traditionnelle, la politique immuable de la Grande-Bretagne.
Mais si la préoccupation, le souci de cet équilibre europée crée une contradiction évidente entre les cabinets de Londres et de Berlin, au contraire, il rapproche et il rapprochera tous les jours davantage les cabinets de Londres et de Paris.
Voilà bien, après le motif de craindre, le motif d'espérer dont je parlais tout à l'heure. (Applaudissements.)
Quel sera le caractère de cette entente, qui repose sur des gages si précieux ? Cordialité ? ou alliance ? C'est le secret de l'avenir, d'un avenir prochain, qu'il ne m'appartient pas de pénétrer. Je me bornerai à dire aujourd'hui : laissons faire trois choses ; laissons faire notre diplomatie d'abord — et j'ai confiance dans celle qui est représentée ici — l'opinion ensuite, et surtout la raison. (Très bien! très bienl)
Mais ce qu'il faut proclamer bien haut à cette tribune •— et je voudrais que, sur ce point, M. le Minstre des Affaires étrangères voulût bien app^^er ma parole — ce qu'il faut proclamer bien haut, c'est que la triple entente est immuable dans ses garanties de paix internationale, dans ses garanties d'équilibre international, que les deux plus grandes puissances de l'Occident restent parfaitement d'accord avec la Russie pour ne point compliquer, pour ne point aggraver, à l'heure présente, le problème oriental, et que les pactes anciens et les pactes nouveaux, pacte d'amitié, pacte d'alliance, conservent toute leur force pacificatrice, toute leur vertu bienfaisante. (Applaudissements.)
Qu'il 3' ait eu, pour la Russie, une tentation et une occasion de régler, dans un sens plus favorable à sa situation maritime, la question, l'éternelle question des Dardanelles, je n'y contredis point ; et il îvy a là rien qui puisse nous inquiéter, ni nous émouvoir.
La tentation est légitime ; la question, si l'occasion la fait surgir, sera tranchée par les cabinets intéressés, après avoir été mûrement méditée et pesée. Je suis de ceux qui pensent que cette question des Dardanelles pourrait être aplanie actuellement dans le sens le plus favorable et le plus pacifique, sans porter ombrage ni aux susceptibilités, et aux défiances de l'Europe, ni aux droits et aux exigences de l'empire ottoman. Mais dans tous les cas, il n'est pas vrai d'affirmer, comme on Fa fait, que la Russie Fa soulevée sans précaution, il n'est pas vrai d'affirmer qu'elle ait cherché à y entraîner témérairement ses
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amis et ses alliés. Soutenir le contraire, ce serait méconnaître étrangement et avec une sorte d'ingratitude les services que la Russie a rendu depuis un demi-siècle à la paix du monde et ses interventions si heureuses pour l'équilibre et pour la garantie de l'Europe.
On n'a pas le droit, même à cette tribune, au cours des événements qui passent et se succèdent, d'oublier certaines dates historiques. Il faut y revenir parce qu'elles marquent dans nos souvenirs, dans nos coeurs, des précisions qui deviennent la base même de notre politique étrangère. Quand on accuse la Russie de vouloir engager témérairement toute la question d'Orient, on oublie qu'à une heure décisive, elle aurait pu l'engager d'une façon irréparable, et qu'elle ne Fa pas voulu, qu'elle ne l'a pas fait. La paix dont nous jouissons, avant et après Cronstadt, on a pu la définir la paix d'un grand empereur, de l'empereur Alexandre III, et c'est vrai.
Il 3' a une heure où l'Allemagne a voulu faire payer à la Russie le concours qu'elle nous avait apporté dans un moment critique, eîi 1875. Il fallait à Bismarck une revanche contre la Russie. Il la prépara savamment pendant deux ans, de 1875 à 1877. Il lui laissa croire que la route de Constantinople était libre. La Russie s'y jeta. Puis, au moment où elle allait toucher le prix de sa victoire et de sa conquête, brusquement Bismark ameuta contre elle toute l'Europe. Le traité de Berlin ne servit qu'à donner deux provinces turques à l'Autriche. Chypre à l'Angleterre, et à créer à côté de la Russie cette principauté bulgare qui, a'ors, sous la direction de Stambouloff, était véritablement dressée à la haine contre son bienfaiteur. (Très bien! très bien!)
C'est à ce moment que se dessine toute la politique qui a marqué et le destin de l'Europe et le destin de la Russie et le destin même de la France. Pendant dix ans, l'Allemagne avait présenté à l'Autriche les provinces slaves du Danube comme le champ illimité des compensations, comme la terre promise des convoitises. Et tout à coup retentissait à la tribune du Reichstag cette parole célèbre : « La Bulgarie nous est indifférente. Il nous est indifférent qu'elle soit gouvernée par l'un ou par l'autre. La question d'Orient n'étant pas pour nous un casus belli ne pourra jamais, dans aucun cas, nous mettre aux prises avec la Russie. » Ainsi parlait Bismarck à la. tribune même du Reichstag.
Qu'est-ce que cela signifiait ? Cela signifiait qu'il abaissait lui-même la barrière qu'il avait dressée au Congrès de Berlin devant les pas de la Russie, mais qu'appuyé sur l'Autriche et FAngleterte il en dressait une nouvelle contre laquelle la Russie pouvait se briser encore une fois.
Il y eut dans le monde entier un moment d'anxiété inexprimable — M. le Président du Conseil doit s'en souvenir. — La Russie allait-elle accepter cette proposition bien tentante ? Elle ne l'a pas acceptée. Elle pouvait condamner l'Europe à la guerre ; elle a préféré condamner la chancellerie allemande à la paix.
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L'histoire offre peu d'exemples d'une telle modération dans la force. Bravé en Bulgarie par Stambouloff et par un cabinet d'infimes politiciens, le tsar Alexandre III n'avait que deux pas à faire, la main • à tendre pour écraser ce nid de conspirations et d'intrigues. Mais allumer la guerre en Orient c'était nous laisser seuls en face de la Triple-Alliance qui allait se constituer. Il nous a fait ce sacrifice ; il pouvait satisfaire son ambition, il l'a contenue ; il pouvait venger son injure, il l'a dédaignée. (Applaudissements.)
Voilà les grands services que la Russie a rendus à la paix du monde et que nous n'avons pas le droit d'oublier. Rien ne nous permet de penser qu'à l'heure actuelle et dans la situation présente, la politique de la Russie ait changé et de manière et d'attitude et d'aspirations. Dans tous les cas, j'affirme, sans crainte d'être démenti officiellement, qu'aujourd'hui plus que jamais la triple entente, l'alliance franco-russe reste la base essentielle non seulement de l'équilibre européen, mais de toutes les espérances qui peuvent se rattacher à la paix du monde.
Je n'ai plus qu'un mot à ajouter. Puisque nous sommes assurés de conserver cette entente et cette alliance, fortifions notre système de défense extérieure par une politique qui sera la suprême garantie pour nos consciences et pour nos espérances françaises. C'est très bien de faire l'alliance entre la France et l'Islam, c'est très bien de conserver l'alliance entre la France et la Russie, ce sera très bien de compléter l'entente franco-anglaise par une alliance franco-anglaise, si c'est possible. Mais, Monsieur le Président du Conseil, si vous le pouvez, dans l'intérêt même de la France et de la République, essayez de faire l'alliance franco-française; essayez de l'établir sur des bases telles qu'elle ne puisse être ébranlée.
Vous cherchez ici, à travers bien des difficultés et à propos bien des incidents, à constituer l'équilibre d'une majorité républicaine. Je ne veux pas vous chercher chicane sur ce point ; la définition même d'une telle majorité est obscure, incertaine et très délicate ; mais, si vous pouviez faire la majorité française autour de votre Gouvernement, autour de votre politique, autour des garanties que vous ressentez si nécessaires à la sécurité, à la stabilité et à l'avenir de notre pays, si vous pouviez, dans une circonstance propice, venir déclarer à la tribune, comme l'a fait un jour Gambetta, dans un moment bien délicat, dans une phase terrible de détresse nationale, si vous pouviez déclarer .: . « Je ne connais entre les Français aucune différence, ils peuvent tous concourir à asseoir le gouvernement de la République ! » Cette thèse, si vous aviez le courage de la soutenir, recevrait la consécration de l'avenir.
M. RAYMOND POINCARÉ, Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères. J'ai toujours dit qu'au point de vue de la défense extérieure et de la politique extérieure, d'une façon générale, je ne connaissais que des Français. (1 rès bien ! très bien !) Je n'ai pas attendu, votre invitation, mon cher Collègue, pour le déclarer à la tribune même.
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M. LUCIEN MILLEVOYE. VOUS l'avez dit, mais croyez-vous qu'il soit facile. Monsieur le Président du Conseil, d'étabir une distinction, à cet égard, entre la politique intérieure et la politique extérieure ?
Cro3rez-vous qu'il soit possible de dire un jour à cette tribune : Il y a une majorité républicaine avec laquelle je gouvernerai et une minorité que je ne connais pas, puis, le lendemain, dans un jour de crise, dans une période comme celle que nous avons traversée tout récemment, de dire à cette même minorité : « Vous allez venir à nous et vous nous donnerez l'appoint de vos coeurs ? »
M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL, MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES. Vous démontrez vous-même que c'est très facile, puisque vous appuyez notre politique extérieure et que vous combattez notre politique intérieure. (Très bien ! très bien ! — On rit.)
M. LUCIEN MILLEVOYE. Il ne faut pas qu'il y ait d'équivoque.
Nous appuyons votre politique extérieure, Monsieur le Président du Conseil, parce que nous la jugeons essentiellement française ; et nous appuyons votre politique intérieure — je ne veux pas dire comme Corneille :
Je t'en avais comblé, je t'en veux accabler.
(Sourires) — chaque fois qu'elle se rapproche du sentiment français. Et voici le conseil que je vous donne en terminant : Evidemment, il vous est difficile de l'accepter au point de vue de la majorité, mais vous pourriez l'accepter au point de vue français ; élargissez, au point de vue républicain, les cadres de votre majorité jusqu'aux limites où l'on aime, où l'on respecte et où l'on sert la patrie française. (Vifs applaudissements à droite et au centre.)
M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. Damour.
M. MAURICE DAMOUR, député des Landes. Jusqu'en ces derniers temps ; l'activité parlementaire s'était portée de préférence sur les questions de politique intérieure. Sans perdre de vue les intérêts du pays au dehors, la représentation nationale restreignait au minimum le contrôle qu'elle est en droit d'exercer en cette matière.
De récents incidents ont montré combien il était nécessaire que le Parlement accordât une attention plus constante aux affaires étrangères. Ces incidents n'ont pas amené, toutefois, les réformes qu'ils appelaient, ni provoqué la réorganisation, qui s'impose, des services de cette administration.
Je ne reviendrai pas aujourd'hui sur les questions que j'ai eu l'honneur de développer à cette tribune, lors de la discussion des budgets de 1911 et 1912 et qui avaient trait à l'urgente nécessité
ARCHIVES DiPLOM., t. 122, n" 5-6-7, mai-juillet 1912. [G
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d'apporter dans les services du ministère et, en particulier, dans les institutions qui régissent le personnel, des modifications profondes. Aucune de ces questions n'a été résolue, et l'on peut toujours faire allusion aujourd'hui à ce que l'on a appelé avec trop de raison « la stabilité parfaite des traditions négatives de l'administration ».
Cette stabilité subsiste toujours, et nous voyons encore des fonctionnaires privilégiés de l'administration centrale, poursuivre avec succès leur carrière à Paris, sans craindre lès obstacles que dresserait devant eux un tableau d'avancement que l'on n'a pas cru encore nécessaire de créer.
Je demande à M. le Ministre des Affaires étrangères s'il ne pense pas qu'il soit utile de donner aux agents de son administration qui n'ont pas recours à l'intrigue pour conquérir leur grade, à ■ ceux qui poursuivent silencieusement, mais courageusement leur mission au dehors, souvent séparés de leur famille, sous des climats meurtriers, les garanties qu'un tableau d'avancement peut seul leur assurer. Si M. le Président du Conseil répondait favorablement à cette demande, ainsi que j'en ai l'espoir, il comblerait certainement les voeux de la grande majorité de nos agents à l'extérieur.
On a déjà souligné trop souvent pour que j'y revienne les conditions regrettables dans lesquelles s'effectuent les nominations et les mutations ; il me suffira de rappeler que c'est d'elles que dépendent la bonne marche de nos affaires et le succès de l'action de nos représentants à l'étranger.
Combien d'erreurs, de retards, de fausses nouvelles eussent été évités, combien de résultats obtenus si chacun de nos agents avait accepté un poste en rapport avec ses aptitudes, son expérience [et la connaissance du milieu dans lequel il était appelé à agir . (Très bien ! très bien !)
On n'en finirait pas s'il fallait énumérer toutes les questions intéressantes qui restent en suspens depuis des années parce que les agents chargés de les résoudre n'ont pas été choisis comme il convenait et n'ont pas reçu, à leur départ, les instructions qu'on aurait dû leur donner.
M. EMMANUEL BROUSSE, député des Pyrénées-Orientales. Très bien!
M. MAURICE DAMOUR. L'Espagne, je l'ai également signalée, nous doit, depuis l'année 1881, une somme de près de 100 millions pour dommages causés à nos nationaux. Nous avons, en outre, avec elle, de nombreux litiges du même ordre dont certains datent du commencement du siècle dernier.
Au Venezuela, nos compatriotes sont dépouillés, molestés, privés de leur liberté, eux et leurs familles, détenus pendant de longs mois dans des prisons infectes avec des prisonniers de droit commun sans
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qu'aucune réparation puisse être obtenue. Et cela, Messieurs, date de la présidence du général Castro.
Je pourrais citer de nombreux exemples de même nature, mais leur énumération serait trop longue, hélas ! Or, il est indiscutable que toutes ces questions auraient reçu depuis longtemps une solution si l'administration des affaires étrangères avait donné à ses agents des instructions nettes et précises, si elle n'avait pas, dans certains cas, entravé ou immobilisé leur action et, enfin, si, après avoir choisi les agents les plus qualifiés, elle les avait soutenu énergiquement tout en exerçant sur eux un contrôle constant et avisé.
Cela m'amène tout naturellement à rappeler un voeu que notre honorable président M. Paul Deschanel formulait dans son rapport si documenté de 1908 :
« L'inspection des consulats, écrivait-il, est une nécessité pour se renseigner autrement que par la déclaration des intéressés, sur la situation exacte des agents en même temps que sur l'utilité de leurs services. On stimule l'activité par la surveillance et l'on maintient les agents dans le devoir. » (Très bien ! très bien !)
L'inspecteur favoriserait les bons agents qui ne risqueraient plus de rester ignorés, victimes de leur discrétion et de leur réserve ; ils ne peuvent que gagner au contrôle.
L'inspection des consulats ferait connaître d'une manière précise et dans des conditions d'impartialité indispensables : i° la situation du consul et ses rapports avec nos nationaux, les autorités locales, les sociétés indigènes, les associations économiques, etc. ; 2° les moyens d'action et d'investigation dont dispose chaque agent ; 30 la tenue matérielle des postes, l'installation du bureau-état des archives, correspondance directe avec l'office du commerce et les particuliers, tenue des registres, etc. ; 40 la correction et la comptabilité des chancelleries et de tout ce qui engage la responsabilité des agents.
Il n'échappera pas au Gouvernement et à la Chambre combien il serait utile d'organiser un service d'inspection qui, à mon avis, devrait être confié à des agents supérieurs, expérimentés, a3^ant vécu à l'étranger, pouvant apprécier les travaux des agents et les aider de leurs conseils. Les multiples préoccupations des ambassadeurs et des ministres, le peu de moyens dont disposent les consuls généraux, ne leur permettent pas de se déplacer et d'exercer ce contrôle.
En terminant, je me permettrai de signaler à M. le Ministre des Affaires étrangères, à la commission du budget et à son rapporteur spécial l'intérêt qu'il y aurait à ce que la Chambre pût exercer, elle aussi, un contrôle efficace sur la façon dont les intérêts de nos compatriotes sont défendus au dehors. Il suffirait pour cela que l'administration des affaires étrangères fournit, chaque année, au rapporteur du budget de son département, un exposé des affaires en cours, de leur marche pendant l'année et des résultats obtenus. Nous serions ainsi en
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mesure de connaître les travaux réalisés par l'administration des affaires étrangères et de juger l'utilité de ses efforts ; j'espère que nous n'aurions alors qu'à la féliciter de son zèle, à rendre hommage à son activité et à apprécier les services qu'elle aurait rendus au pays. (Applaudissements.)
M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. le Président du Conseil, ministre des affaires étrangères.
M. RAYMOND POINCARÉ, président du Conseil, ministre des affaires étrangères. La Chambre me saura gré, je pense, de répondre le plus brièvement possible aux observations qui ont été présentées à cette tribune par les divers orateurs qui s'y sont succédé.
L'honorable M. Bl^^sen s'est plaint qu'il n'y eût pas de communication suffisante — c'est l'expression dont il s'est tout à l'heure servi — entre le ministère des affaires étrangères et le Parlement. Cette communication est, au contraire, établie dans des conditions aussi satisfaisantes que possible, et je remercie l'honorable M. Marin de vouloir bien d'un signe acquiescer à ma déclaration. M. Bluysen, luimême, sait mieux que personne qu'indépendamment des questions orales et des interpellations, le règlement de la Chambre permet des questions écrites auxquelles, je n'ai pas besoin de le dire, le ministre est toujours disposé à répondre.
Hier même, j'ai eu le plaisir de passer plus de deux heures consécutives à la commission des affaires extérieures, et je me suis très vivement félicité de pouvoir fournir à cette commission toutes les explications qu'elle a bien voulu nie demander.
M. Bhtysen n'a touché, si ma mémoire est fidèle, qu'à, un point particulier. Il a reproché à notre diplomatie de faire preuve, en Perse, d'incertitude et de pusillanimité. Je le prie de croire que le Gouvernement que j'ai l'honneur de présider ne néglige rien de ce qui peut développer en Perse notre influence morale et intellectuelle.
M. Paul Bluysen a parlé notamment du grand projet de chemin de fer, qu'on a baptisé dans d'autres nations le Calais-Bombay, et au sujet duquel il m'a déjà posé lui-même, il y a quelques semaines, une question écrite, tant il connaît effectivement toutes les ressources du règlement. (Sourires.)
Comme je l'ai, à cette occasion, écrit à l'honorable M. Bh^sen, un comité d'études travaille actuellement à la préparation du tracé. Le comité se compose de groupes financiers français, russes et anglais qui ont souscrits par égales parts une somme de trois millions pour les frais d'études. A la tête du groupe français a été placé, comme le rappelait du reste M. Bluysen lui-même, M. Raindre, ambassadeur de France, dont la présence nous est une garantie sérieuse que cette entreprise restera dirigée dans des voies conformes à la politique des puissances de la triple entente ; et j'indique à la Chambre que, déjà, un
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différend qui avait surgi entre les groupes russes et anglais quant à la répartition des actions entre les deux pa3<"s, a pu très aisément être aplani.
Le maintient d'une politique d'intérêts entre Anglais et Russes sur le domaine qui a été, au moins jusqu'en 1907 et parfois encore, depuis lors, le champ clos de leurs rivalités politiques et économiques, constitue un avantage tout à fait appréciable, que nous pourrons retirer du projet de chemin de fer de Calais à Bombay, car, il faut bien que je le dise, nous n'avons pas grand chose à gagner directement à l'ouverture d'une voie nouvelle qui n'empruntera vraisemblablement notre territoire que de Calais à Jeumont et dont l'effet le plus sûr, l'effet presque inévitable sera d'infléchir encore plus vers l'Est les grandes voies de communication du monde.
Mais je donne à l'honorable M. Bluysen l'assurance que le Gouvernement français usera de toute son influence pour que nos intérêts soient sauvegardés dans la réalisation de ce vaste projet et qu'il en suivra l'exécution avec l'attention la plus vigilante. (Très bien ! très bien !)
M. Damour a entretenu la Chambre de ce qu'il a appelé tout à l'heure « les traditions négatives de l'administration ». Qu'il me permette de lui dire que je le trouve bien sévère.
Son appréciation, d'ailleurs, est démentie par les propositions mêmes qui sont contenues dans le budget actuel et qu'expose si lumineusement le rapport de M. Paul Deschanel. C'est une véritable réorganisation administrative qui est aujourd'hui soumise à votre approbation. Je suis heureux de rendre à la commission du budget ce témoignage qu'elle a elle-même préparé, en collaboration avec le Gouvernement, cette importante réforme.
Je tiendrai, je n'ai pas besoin de l'ajouter, le plus large compte, pour les poursuivre et pour les compléter, des indications données à cette tribune par l'honorable M. Damour. (Très bien ! très bien !)
Sur les questions d'ordre général qu'ont abordées tout à l'heure l'honorable M. Paul Meunier et l'honorable M. Millevoye, je puis, je crois, me borner à des observations sommaires.
J'ai eu, il y a quelques semaines, l'occasion de fournir à la Chambre des explications complètes sur les relations de la France avec les diverses puissances. Je ne puis guère aujourd'hui que m'en référer aux renseignements que j'ai donné alors. Malgré le malaise qui continue à peser sur l'Europe du fait de la guerre italo-turque, malgré l'incertitude qui subsiste encore sur le retour de la paix, il ne semble pas qu'il y ait lieu de redouter aucune complication européenne.
L'attitude de la France vis-à-vis des deux nations belligérantes demeure ce qu'elle a toujours été, nous restons fidèles à la neutralité la plus scrupuleuse. {Très bien ! très bien !)
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Nous avons avec la Turquie des rapports traditionnels. Nous sommes nous-mêmes, comme le rappelait tout à l'heure M. Millevoye, une grande puissance musulmane et nous ne pouvons ni ne voulons rien faire qui affaiblisse notre influence en Afrique. (Très tien ! très bien !)
D'autre part, nous sommes attachés à l'Italie par des liens étroits que des liens récents n'ont.heureusement pas relâchés. Les affaires du Carthage, du Manouba et du Tavignano, qui avaient vivement ému l'opinion française, sont aujourd'hui soumis à l'arbitrage. Aucun de nos navires, vous le savez, n'a été exposé à des visites du genre de celles qui avaient motivé nos protestations. Ce malentendu passager n'a pas altéré les sentiments des deux peuples, unis par tant de souvenirs et tant d'affinités. (Très bien ! Très bien !)
Nos négociations avec FEgpagne se poursuivent au milieu de difficultés inévitables qui tiennent tantôt à la nature.des choses, tantôt à la contradiction même des intérêts, tantôt à une différence d'interprétation des conventions antérieures, mais qu'une bonne volonté réciproque a déjà en grande partie aplanies et qui ne peuvent tarder à disparaître.
Tout en défendant nos revendications avec fermeté, nous n'oublions pas que l'Espagne est notre voisine et notre amie et nous sommes convaincus que, de ces longues et laborieuses négociations, cette amitié sortira intacte. (Très bien ! très bien !)
Nos relations avec l'Allemagne sont k^ales et courtoises.
Nous avons constamment, dans l'application du traité du 4 novembre 1911, à traiter des questions où diffèrent nos points de vue. Nous nous efforçons d'apporter dans le règlement de ces affaires une précision et une clarté égales à notre bonne foi. S'il arrivait d'ailleurs, par impossible, que sur un point quelconque l'accord. ne s'établît pas entre les deux gouvernements, nous trouverions dans le traité même du 4 novembre la faculté de recourir à l'arbitrage, conformément aux intéressantes suggestions de l'honorable M. Paul Meunier.
Sur l'extension de l'arbitrage, telle que la conçoit M. Paul Meunier, je ne puis d'ailleurs que m'en référer aux déclarations de mon honorable prédécesseur, M. Stéphen Pichon, déclarations qu'a tout à l'heure rappelées l'honorable député. (Très bien ! très bien !)
Nos rapports avec la Russie et avec l'Angleterre n'ont jamais été meilleurs. Les trois gouvernements sont en contact permanent et échangent en pleine confiance leurs vues sur toutes les grandes questions de la politique internationale.
Notre alliance avec la Russie, consacrée non seulement par des accords positifs, mais par l'épreuve du temps, trouve son application sur tous les points du globe au bénéfice des deux nations. Elle n'a de pointe dirigée contre aucune puissance, mais elle permet aux deux gouvernements alliés de combiner leur action diplomatique pour la
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sauvegarde de leurs intérêts respectifs et de collaborer ainsi au maintien de la paix. (Très bien ! très bien !)
Il en est de même de notre entente avec l'Angleterre. La presse anglaise, comme le rappelait M. Millevoye, a récemment débattu la question de savoir s'il était désirable de transformer cette entente en alliance proprement dite.
Les avis se sont partagés sur ce point de l'autre côté du détroit ; mais les deux gouvernements amis ne se sont pas mêlés à cette discussion. L'entente cordiale a pour elle, à défaut de parchemin, la garantie d'une opinion en immense majorité favorable dans chacun des deux pa3^s. (Vifs applaudissements.)
Elle laisse entière la liberté d'action des deux gouvernements ; mais elle leur facilite le règlement quotidien de beaucoup d'affaires communes et la recherche de solutions concordantes dans les problèmes de politique générale.
C'est ainsi que la triple entente contribue à maintenir l'équilibre européen sans que personne puisse prendre ombrage d'aucun de ses acte, ni d'aucune de ses intentions-; c'est ainsi également que, sans rien aliéner de notre indépendance — je le dis pour répondre à la péroraison de l'honorable M. Millevoye — nous trouvons dans cette entente pour notre diplomatie, comme les deux nations amies et alliées y trouvent, elles aussi, de précieux éléments de succès. Mais il n'échappe pas à la Chambre que c'est en nous-mêmes que réside notre force essentielle. (Très bien ! très bien !) Notre amitié, Messieurs, n'est recherchée qu'en proportion de notre valeur dans le monde (Applaudissements), et cette valeur dépend de nous, de notre puissance militaire et de la concorde à laquelle tout à l'heure l'honorable M. Millevo3^e faisait appel. (Vifs applaudissements répétés.)
M. LE PRÉSIDENT. — Personne ne,demande plus la parole dans la discussion générale ?
La discussion générale est close.
Nous arrivons aux chapitres du budget du ministère des affaires étrangères.
En conséquence, et conformément à la résolution du 15 novembre 1911, la Chambre siège en séance publique de commission générale.
3" partie. — Services généraux des ministères.
« Chap. Ier. — Traitement du ministre et personnel de l'administration centrale, 915.652 fr. »
Personne ne demande la parole sur le chapitre Ier ?...
248 , CHRONIQUE
Je le mets aux voix, au chiffre de 915.652 fr.
(Le chapitre Ier, mis aux voix, est adopté.)
« Chap. 2. — Indemnités et gratifications au personnel de l'administration centrale, 21.200 fr. » (Adopté.)
« Chap. 3. — Personnel de service, 160.000 francs. » — (Adopté,)
« Chap. 4. — Indemntiés et gratifications au personnel de service, 25,800 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 5. — Matériel et impressions, 272,000 fr. » (Adopté).
« Chap. 6. — Archives. — Bibliothèque. — Publication de documents diplomatiques, 43,000 fr. » •— Adopté.)
<( Chap. 7. — Dépenses secrètes, r million de francs. » —• (Adopté.)
M. LE PRÉSIDENT. « Chap. 8. — Personnel des services extérieurs, 6,738,700 fr. »
La parole est à M. le rapporteur sur ce chapitre.
M. J. 'THIERRY, rapporteur. Messieurs, ainsi que vous avez pu vous en convaincre par la lecture du rapport de notre ■ honorable président, M. Paul De'schanel, divers chapitres du budget ne comportent aucune innovation appréciable, sauf le chapitre 8, où nous sommes en pré■ sence d'une majoration de 604,000 fr. Elle a été prévue pour la réforme des traitements par la transformation des traitements de poste en traitement de grade.
Ces traitements se comporteront à l'avenir de la manière, suivante : i° un traitement de grade que l'agent conservera intégralement, soit qu'il se trouve à son poste, soit qui soit en congé.; 2° un traitement de poste ou d'emploi attribué au chef de poste lorsqu'il sera présent, ou en son absence à son intérimaire ; 30 une indemnité pour cherté de vie, variant suivant une échelle fixée par catégories de postes et de grades, les catégories étant au nombre de huit, la huitième comprenant les postes où l'indemnité pour la cherté de vie -est la plus grande.
Cette réforme, poursuivie avec une clairvoyante ténacité depuis de nombreuses années par M. Paul Deschanel, auquel, après son élection à la présidence, j'ai eu le très grand honneur de succéder comme un très modeste rapporteur suppléant, alors que son rapport était déjà déposé, mérite d'être signalée. Elle ne doit pas passer inaperçue, parce qu'elle constituera une très grande amélioration dans la situation de notre personnel diplomatique.- et consulaire à tous les degrés. .
Comment cette réforme s'est-elle opérée ? Je m'empresse de constater que les ressources correspondantes ont été trouvées sans recourir à des impôts nouveaux. C'est par la refonte des tarifs de chancellerie
DISCUSSION DU BUDGET DE.I913 249
qu'a été instituée la recette nécessaire pour faire face dans l'avenir aux charges nouvelles exigées par la nouvelle échelle des traitements dont les tableaux figurent au rapport vous m'excuserez de vous en épargner le détail. En vous y reportant, vous verrez que l'effort démocratique et le recrutement des valeurs y ont été combinées avec tout ce que commande le sentiment de la dignité du pa3rs au dehors.
Cette réforme des tarifs de chancellerie a porté principalement sur les actes divers, tels que passeports, testaments, certificats, légalisations, visas, etc., et sur les immatriculations et les droits de navigation et enfin sur les droits d'ouverture.
Les immatriculations étaient beaucoup moins précises qu'elles ne le sont maintenant d'après le projet nouveau de la commission, présenté par l'honorable M. Paul Deschanel. Nous avons tous intérêt, cela ne fait pas de doute, aussi bien les étrangers que les Français, à ce que nos concit03>"ens soient tous régulièrement immatriculés dans les diverses résidences où ils habitent et dans les diverses colonies qu'ils composent.
En effet, pour nos affaires économiques notamment, sans parler des considérations politiques et de police, cette mesure présente un très grand intérêt. Elle permet à nos consuls d'être constamment au courant des activités françaises qui les environnent. Ils peuvent ainsi se tenir mieux en contact avec le commerce et l'industrie de la France, lorsqu'il leur est demandé non seulement des renseignements commerciaux mais encore des noms et des personnalités en vue de représentations et d'organisations d'expansion économique quelconques. Rien ne doit être négligé pour permettre à nos consuls d'établir, en parfaite connaissance de cause, des communications entre la métropole et nos nationaux établis à l'étranger.
Si le consul le plus diligent ignore ses compatriotes, si ceux-ci négligent de garder le contact avec lui, son bon vouloir est désarmé ; " il ne rend pas aux affaires métropolitaines les services qu'elles attendent de lui.
Des études comparatives ont été faites sur les organisations similaires des nations étrangères, dont le détail a été exposé dans un rapport très documenté de M. Lahure. Sur ce point comme sur beaucoup d'autres, je serais à même, si la question était posée par nos collègues, de rendre compte de l'élaboration quelquefois longue et controversée de ces diverses mesures.
Ces immatriculations deviennent maintenant plus fréquentes ; au lieu d'un caractère facultatif et temporaire elle prennent au contraire le caractère d'une formalité obligatoire, pa3?ante et renouvelable tous les cinq ans. Elles ne comportent pas de sanctions autres que le jeu de détaxes et de surtaxes, suivant que le sujet français est ou n'est pas immatriculé à sa résidence.
Les immatriculations étaient accompagnées, dans la réglementation
250 CHRONIQUE
des tarifs de chancellerie, d'un travail sur les droits de navigation et sur les redevances diverses que peuvent être appelés à payer les navires français et les navires étrangers qui, malgré certaines objections, ont été assujettis à leur tour.
Le premier tarif, institué en 1875, a été réformé et renforcé par le tarif de 1910 ; celui-ci a été revisé récemment par une commission instituée en 19 n et qu'a présidée M. Deschanel lui-même. Diverses réclamations, légitimes parfois, que ces droits de navigation avaient pu susciter, ont été étudiées à la lumière d'une enquête pratiquée par nos agents extérieurs. On peut dire que le dernier esprit de la réforme des droits de chancellerie a été dicté pour la navigation par le désir d'apporter des retouches aux droits qui ont été non pas ramenés à l'échelle de 1910, mais rapprochés, à l'échelle de 1875, tout en tenant compte de l'augmentation de la moyenne des tonnages, sans exagérer ni continuer jusqu'au sommet la proportion de la taxe au tonnage.
Il faut espérer que l'armement français s'accommodera de ces tarifs et que l'armement étranger les acceptera sous la persuasion de notre diplomatie; sur bien des points d'ailleurs, sinon parmi les nations les plus maritimes, le principe de la réciprocité peut être très 'légitimement invoqué.
Il y a donc un ensemble de ressources qui légitime très heureusement la parfaite correction financière de la réforme. Elles se chiffrent dans le second semestre de 1910 par une somme de 1,117,475 fr. ; la ressource totale pour l'année ne sera donc pas inférieure à 2 millions. Or les droits de chancellerie n'avaient produit en 1890 que 1,205,290 fr. et, en 1891, ils n'avaient rapporté que 1,232, 860 fr.
Les ressources nouvelles sont empruntées aux versements faits par nos nationaux sur qui elles ne pèsent pas entièrement, car les étrangers en supportent leur juste part. J'ai déjà eu l'honneur de vous signaler ce fait à propos des tarifs de navigation, mais il en est de même pour des quantités d'actes prévus ou non prévus au sujet desquels les étrangers relèvent de nos consuls : visas, certificats d'origine, etc. Pour toutes ces tarifications, il a été procédé à une étude approfondie laquelle, s'agissant d'actes internationaux, prend sa source dans la documentation empruntée non seulement à nos précédents mais encore à la moyenne des pratiques en usage dans les autres pa3?s. A cette occasion de nombreuses revisions, perquisitions et retouches de proportions ont été introduites dans les tarifs. (Très bien ! très bien !)
Voilà donc une réforme qui, par l'ingéniosité de son organisation, s'équilibrera en recettes et dépenses, de manière à permettre non seulement d'améliorer dès maintenant les traitements dans leurs chiffres aussi bien que dans, leurs principes,-mais encore de nous attaquer, l'année prochaine, à un autre problème solidaire du précédent et non moins important pour la dignité et le prestige de la représentation de la France à l'étranger. Je veux parler du problème de l'habitation. (Très bien ! très bien !)
DISCUSSION DU BUDGET DEI913 2$î
Vous savez tous combien sont fréquentes et nombreuses les plaintes non seulement de nos agents, mais encore des Français qui,, voyageant à l'étranger, regrettent souvent d'avoir à faire, au détriment et à la confusion de notre pays, des comparaisons humiliantes entre les installations des agents étrangers et celles des agents français. (Applaudisse- . ments.~)
M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL, Ministre des Affaires Etrangères. Très bien !
M. LE RAPPORTEUR. Il est permis, messieurs, d'espérer que, grâce aux disponibilités sur lesquelles, nous avons le droit de compter, nous pourrons, l'année prochaine, mettre en mouvement cette seconde réforme dans les mêmes conditions que la première et la mener à bonne fin.
La réforme des traitements n'est pas achevée, elle s'opérera progressivement par la voie d'extinction, permettant des suppressions de postes reconnus inutiles pour améliorer les autres. Mais aujourd'hui déjà son régime est arrêté comme il est exposé au rapport. 11 est issu d'une heureuse collaboration entre la commission du budget et le Gouvernement, elle s'accomplira suivant une charte que M. Paul Deschanel a résumée dans un exposé et des tableaux dont la lecture vous fera apprécier la valeur et le haut intérêt politique de l'oeuvre convenue.
Ce précédent vous permet d'affirmer que dans le budget de 1914 vous trouverez, par un nouvel et non moins heureux accord de la commission du budget et du Gouvernemeut, les bases, méthodiques et rationnelles, de la réforme si importante de l'habitation de nos agents. Nous n'avons pas la prétention de spécialiser les ressources créées par les études et la prévoyance de notre président, de les soustraire au budget général de nos recettes. Mais il nous est permis de compter sur la sollicitude du Parlement et du Gouvernement pour faire profiter nos agents de l'extérieur de recettes ingénieusement et laborieusement organisées dans un si noble souci de la dignité de la France et de ses bons serviteurs à l'étranger. (Applaudissements.)
^ M. LE PRÉSIDENT. M. Paul Bh^sen a déposé une proposition de résolution ainsi conçue .
« La Chambre invite le Gouvernement à prévoir, dans le budget du futur exercice, une augmentation de crédit du chapitre 8, en vue des dépenses de personnel de l'agence qu'il y aura lieu de créer à Calcutta, lors du transfert de notre consulat général à Delhi.
Conformément à l'article 51 bis du règlement, cette résolution ne pourra être votée qu'après avoir été rapportée par la commission du budget.
252 CHRONIQUE
M. PAUL BLUYSEN. Je ne. m'oppose pas au renvoi à la commission, mais la Chambre me permettra sans doute d'expliquer en quelques mots ce dont il s'agit.
M. LE PRÉSIDENT, VOUS avez la parole.
M. PAUL BLUYSEN..,Ma proposition' de résolution a pour but de demander à. M. le Ministre des Affaires Etrangères de vouloir bien préciser, ici, une dé ses réponses écrites que je le remercie d'avoir bien voulu rappeler tout à l'heure. Il s'agit de l'organisation de notre représentation consulaire dans l'Inde anglaise.
Le gouvernement anglais a résolu de transférer à Delhi la capitale du gouvernement impérial indo-britannique. Actuellement nous avons un consul général à Calcutta. J'estime que, si le transfert du gouvernement anglais se fait à Delhi, notre agence générale devrait suivre et 's'y installer également ; on laisserait alors un simple agent à Calcutta, de façon que notre représentation fût conforme à la nouvelle résolution prise par le gouvernement anglais.
M. JAURÈS. Delhi devient la capitale administrative, mais Calcutta reste une grande capitale industrielle.
M. PAUL BLUYSEN'. Je suis de votre avis, monsieur Jaurès ; mais, si le siège du gouvernement est transféré à Delhi, il faudrait que notre agence à Delhi fût renforcée. Il n'y aurait aucun inconvénient à faire ce transfert et, personnellement, je vois un avantage à ce renforcement de notre corps consulaire.
Je peux vous citer un fait qui s'est produit tout récemment dans l'Inde anglaise et qui doit attirer, à d'autres égards, l'attention de M. le Ministre des Affaires Etrangères et lui faire donner des instructions nouvelles pour que, dans toutes circonstances, nos nationaux reçoivent de nos consuls une aide morale et matérielle qui leur est trop souvent mesurée.
Au mois de décembre dernier, deux jeunes Hindous, natifs de Pondichéiy, et, à ce titre, français, se rendaient en territoire anglais. Nous étions, à ce moment-là, à l'époque des fêtes du couronnement, et la police prenait des précautions très sévères. Toujours est-il que nos deux concitoyens, deux jeunes étudiants en lettres, de seize et dix-sept ans, ont été arrêtés, à peine avaient-ils mis le pied sur le territoire anglais, et conduits au juge.
Un conseiller général de Chandernagor, qui les accompagnait,jugea nécessaire de faire appel d'abord au gouverneur de l'Inde française. Ce fonctionnaire, a fait tout son devoir, mais n'a pas réussi à tirer les deux jeunes gens de la prison où ils étaient détenus. On a alors fait appel à notre consul général à Calcutta, qui a déclaré que, du moment que le gouverneur de l'Inde française n'avait rien pu, il ne pourrait
DISCUSSION DU BUDGET DE 1913 253
rien non plus. Or, le consul pouvait davantage que le gouverneur, qui ne correspond pas directement avec les autorités anglaises de Calcutta, mais avec celles du district voisin. En réalité, il s'est déchargé, sous un prétexte, d'une affaire délicate.
Nos jeunes concitoyens sont donc restés vingt-trois jours au secret; ils n'ont été relâchés que le 19 janvier.
J'estime que, quelles que soient les circonstances et les excuses qu'on a invoquées — on m'a dit, par exemple, dans une lettre officielle, que le consulat général était absent et qu'il n'y avait qu'un gérant au consulat — des citoyens français, et à plus forte raison s'ils sont Hindous français, doivent bénéficier de la protection la plus complète de nos agents consulaires.
M. le Ministre des Affaires Etrangères a bien voulu me répondre à ce sujet, il y a quelque temps. J'ai estimé que sa réponse est insuffisante et j'ai déposé mon projet de résolution pour le prier, je ne dirai pas de prendre un engagement, mais de me donner l'assurance qu'à l'avenir — et des faits analogues pourraient être cités autre part — les instructions les plus précises seront données pour que tous nos nationaux, où qu'ils soient et quels qu'ils soient, reçoivent de nos agents consulaires la protection la plus grande, la plus prompte et la plus complète (Très bien ! très bien !)
M: LE PRÉSIDENT. La parole est à M. le Ministre des Affaires Etrangères.
M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL, Ministre des Affaires Etrangères. Je ne puis que confirmer ce que j'ai eu l'honneur d'écrire à M. Bunsen. Les instructions qu'il sollicite n'ont pas besoin d'être données. L'objet en rentre tout naturellement dans les attributions de nos agents à l'étranger.
En ce qui concerne la création d'un consulat à Delhi, je ne puis également que m'en référer à la déclaration écrite que j'ai eu l'honneur d'adresser à notre collègue. La question est à l'étude, mais elle exige une entente préalable avec le gouvernement britannique. (Très bien ! très bien !)
M. PAUL BLUYSEN. Je vous remercie, Monsieur le Ministre.
M. LE PRÉSIDENT. VOUS ne maintenez pas votre proposition de résolution, Monsieur Bluysen ?
M. PAUL BLUYSEN. Non, monsieur le Président.
M. LE PRÉSIDENT. La proposition de résolution est retirée. La parole est à M. Pradet-Balade sur le chapitre.
254 CHRONIQUE
M. PRADET-BALADE, député des Basses-Pyrénées, Messieurs, je n'ai qu'une simple et très brève question à adresser à M. le Ministre des Affaires Etrangères ; je le prie de vouloir bien y répondre avec sa ' netteté et sa franchise habituelles.
M. le Ministre des Affaires Etrangères croit-il à la nécessité où à l'utilité du maintien de la commission des Pyrénées ? Cette commission figure au chapitre 8 pour une somme de 12,000 fr. Je n'ai pas l'intention de demander la suppression de cette indemnité, mais je signale à la vigilance de M. le Ministre qu'elle pourrait être supprimée l'année prochaine.
Je ne- méconnais pas les services qu'a pu rendre la commission internationale des Pyrénées après le traité de 1856, lorsqu'il s'est agi de régler les clauses de ce traité et de solutionner les difficultés que pouvait demander son application. Mais à quoi sert-elle aujourd'hui ? Que fait-elle ? Elle se réunit tous les trois ou quatre ans, et encore faut-il toute l'énergie du président de la section française pour secouer de son sommeil léthargique, la commission espagnole, qui, elle ne veut jamais se réunir, pour prouver sans doute qu'il n'y a plus de Pyrénées (Sourires'), et lorsqu'on se réunit, à Bayonne généralement, les séances durent-elles deux ou trois heures à peine et on tient généralement deux séances, souvent même une seule ! Ce long espace de temps sans réunions, la brièveté de ces séances indiquent, je crois, suffisamment l'importance des questions qui peuvent être traitées, par la commission internationale des Pyrénées !
Voulez-vous me permettre, monsieur le Ministre des Affaires Etrangères, de citer un fait personnel ?
La commission, après trois ans d'absence et de silence, s'est réunie le 11 décembre dernier. J'avais demandé à M. le Ministre des Affaires Etrangères, alors l'honorable M. de Selves, et à M. Dumaine, devenu depuis ambassadeur à Vienne et alors président de la section française des Pyrénées, d'exposer et de défendre devant la commission, à Bayonne, les réclamations et les griefs formulés par les habitants de la vallée de Saint-Etienne-de-Baïgorry, dans l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter à la Chambre.
Ces griefs étaient parfaitement fondés et des plus importants.
Je fus admis à m'expliquer devant la commission ; je fus écouté avec beaucoup de déférence, de courtoisie, et, lorsque j'eus fini, le diplomate espagnol, qui présidait la section espagnole, me dit : « Je vous ai écouté avec beaucoup de plaisir, mais j'ai reçu, hier au soir, une dépêche de mon gouvernement m'interdisant de m'occuper des questions de frontière dont vous parlez. » Or il s'agissait de questions de pacage sur les hauts plateaux des Pyrénées.
Je dis alors au président de la section française : Mais à quoi sert donc la commission des Pyrénées, puisqu'on ne peut pas y traiter les questions et les difficultés qui concernent les Pyrénées ? Le président
DISCUSSION DU BUDGET DEI913 255
de la commission fit, comme le héros de Fogazzaro, il mit un doigt sur sa bouche et il murmura ce mot : Silentium ! (On rit.)
Permettez-moi, Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères, de vous répéter la question que j'adressais au diplomate espagnol dont il s'agit et de vous demander à quoi sert la commission internationale des Pyrénées, puisqu'elle ne peut même pas solutionner les difficultés qui existent au sujet de certains droits de pacage sur les sommets de nos belles montagnes euskariennes.
Je crois, quant à moi, qu'elle pourrait disparaître. Vous réaliserez ainsi une économie — oh ! pas énorme, 12,000 fr. ; mais enfin, il n'est pas de petits profits qui ne soient appréciables, même au Ministère des Affaires Etrangères.
Pour moi, Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères, j'3' verrais en outre un avantage. Lorsque nous avons des difficultés avec les Espagnols — et, malheureusement, vous savez que nous en avons — si nous nous adressons au Ministère des Affaires Etrangères, on nous dit : « Ceci est du ressort de la commission internationale, on nous dit, comme le diplomate espagnol : « Ceci n'est pas de notre compétence et regarde le Ministère des Affaires Etrangères ». (Sourires.) Nous sommes ballotés de la commission au ministère et du ministère à la commission et nous n'obtenons jamais satisfaction. Il se passe des semaines, des mois, des années, et jamais nous ne voyons aboutir la solution désirée !
Telle est la question que je pose. Je conclus en demandant, non pas immédiatement, mais pour l'année prochaine, la disparition de la commission internationale des Pyrénées. Je crois que ce serait un bien pour tout le.monde.
Puisque j'ai pris la parole sur ce chapitre, voulez-vous me permettre, Monsieur le Président du Conseil — et je m'en excuse, j'aurais dû le. faire dans la discussion générale du budget de votre département, mais je n'avais pas l'intention d'y intervenir — voulez-vous me permettre de vous adresser encore une prière ? Vous savez parfaitement quelles difficultés se produisent dans l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter, au sujet de la jouissance des pacages dans les Pyrénées et notamment dans le Pays Quint septentrional. Vous savez que de véritables crimes ont été commis par les fonctionnaires espagnols contre les frontaliers français de la vallée de Saint-Etiennede-Baïgorry.
Vous savez qu'ils sont, chaque jour, l'objet de vexations, d'abus d'autorité, d'injustices de toutes sortes de la part du gouvernement espagnol. Vous savez qu'il y a eu, je le répète, de véritables crimes, des confiscations de propriétés privées. Je vous ai saisi de toutes ces questions, il y a déjà quatre ou cinq mois. Je ne veux pas m'étendre davantage en ce moment sur ce sujet. Il fera, au besoin, l'objet d'une interpellation de ma part.
25é CHRONIQUE
Mais je vous demande instamment — car les habitants de la région que je représente souffrent cruellement de cet état de choses — je vous demande, Monsieur le Président du Conseil, de vouloir bien insister auprès du Gouvernement Espagnol pour obtenir enfin les justes réparations qui nous sont dues.
Notre honorable collègue, M. Damour, signalait avec beaucoup d'autorité et malheureusement beaucoup de vérité, l'apathie .qu'oppose toujours le gouvernement espagnol aux réclamations les plus justifiées qui lui sont faites. L'apathie, je le sais, est une force ; mais contre la force, il y a aussi la force. Il est certain que si le Gouvernement sait prendre et imposer les mesures nécessaires pour avoir une solution, le gouvernement espagnol sera bien obligé de céder, de rendre justice à nos frontaliers et de reconnaître des droits qu'il méconnaît et qu'il viole journellement.
Je demande à M. le Président du Conseil qu'il Tasse respecter les droits de nos 'nationaux, qu'il fasse respecter les traités et ;notamment les clauses de celui de 1856. De cette façon nous pourrons vivre très facilement, et nous ne demandons pas mieux, en bonne amitié avec l'Espagne. (Applaudissements).
M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. le Président du Conseil.
M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL, Ministre des Affaires Etrangères. Messieurs, il y a deux parties dans les observations de notre honorable collègue. La dernière a trait à un certain nombre de réclamations que ses électeurs ont, en effet, eu l'occasion de formuler depuis quelque temps, à l'occasion du droit de pacage et de certains .droits de jouissance.
Notre honorable collègue sait à merveille qu'il y a deux jours, à la suite de l'intervention personnelle qu'il avait faite auprès de moi, j'ai eu l'occasion de régler une des difficultés qu'il m'avait signalées.
Quant aux réclamations qui restent en souffrance et que j'ai bien l'intention d'appuyer de notre action diplomatique, notre honorable collègue dit qu'il m'en a saisi il y a plusieurs mois. Il y a plusieurs mois, il m'en avait, en effet, saisi pour la première fois et je lui ai fait remarquer qu'il manquait aux dossiers un certain nombre de documents essentiels et notamment des titres des propriétaires réclamants. Ces titres, notre collègue me les a apportés la semaine dernière.
M. PRADET-BALADE. VOUS m'avez, en effet, demandé ces titres, Monsieur le Président du Conseil, mais j'ai pris la liberté de vous faire observer qu'ils étaient inutiles, puisqu'on reconnaissait le droit de propriété des habitants dont je parlais, par la possession immémoriale qu'ils en ont et par l'immatriculation de leurs pièces de terre sur le cadastre espagnol.
DISCUSSION DU BUDGET DE I9I3 257
M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL, Ministre des Affaires Etrangères. On ne le reconnaissait pas ; on le contestait. C'était précisément pour répondre à cette contestation que je vous avais demandé ces documents que, du reste, vous avez bien voulu me fournir. Les ayant entre les mains, j'exercerai, avec toute la fermeté.nécessaire les revendications dont vous m'avez saisi.
Quant à la commission des Pyrénées, elle a été établie par des accords diplomatiques, comme la Chambre le sait, et je ne puis prendre aucun engagement en ce qui concerne sa suppression. (Très bien ! très bien !)
M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. Brousse.
M. EMMANUEL BROUSSE. Ne serait-il pas possible, puisque nous n'avons pas pu réussir pour la commission des Pyrénées, de remplacer à la commission du Danube par le premier secrétaire de la légation de Bucarest et à la commission des finances helléniques par le premier secrétaire de la légation d'Athènes, les divers fonctionnaires qu'à gros deniers vous envoyez représenter la France dans ces commissions ? Une nation nous a montré comment il fallait opérer, c'est l'Angleterre, qui a chargé le premier secrétaire de la légation britannique à Athènes de la représenter à la commission des finances helléniques. Il y aurait de ce chef une économie de 20,000 fr. à réaliser. (Très bien ! très bien !)
M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL. Le jour où nous suivrons l'exemple de l'Angleterre en ce qui concerne la rétribution des agents à l'étranger, notre budget, je crois, n'y trouvera aucune économie. (Rires et applaudissements.)
M. LE PRÉSIDENT. Personne ne demande plus la parole sur le chapitre 8 ?...
Je le mets aux voix, au chiffre de 8,738,700 francs.
(Le chapitre 8, mis aux voix, est adopté.)
« Chap. 9. — Indemnités et gratifications au personnel des services extérieurs, 183,300 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 10. — Personnel à la disposition du ministre et en disponibilité, 120,000 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 11. — Frais de représentation, 1,580,000 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 12. — Missions, 35,000 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 13. — Secours, 200,000 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 14. — Indemnités de loyer 575,000 francs. » — (Adopté.)
ARCHIVES DIPLOM., t. 122, n" 5-6-y, mai-juillet 1912. i7
158 CHRONIQUE
« Chap. 15. — Frais d'établissement, 500,000 fr. » —^-(Adopté.)
« Chap. 16. — Frais de voyages et de courriers, 794,000 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 17. — Dépenses des résidences, 1,279,400 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 18. — Frais de correspondance, 450,000 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 19. — Frais de résidence de l'ambassade ottomane, 63,000 francs. » — (Adopté.)
M.'LE PRÉSIDENT. — Chap. 20. — Entretien des immeubles à l'étranger. — Achat et entretien de mobilier et de fournitures à l'étranger, 358,000 fr. »
La parole est à M. Henry Cochin sur ce chapitre.
M. HENRY COCHIN, député du Nord. Messieurs, je demande la permission de poser une question à M. le Ministre des Affaires Etrangères et de le prier de préciser ses intentions, sur lesquelles d'ailleurs je n'ai aucun doute, mais qu'il me paraît utile d'affirmer, au sujet de l'entretien du palais Farnèse.
Le palais Farnèse est acquis à la France, il lui appartient. C'est une grande joie pour tous. C'est la suite d'une négociation très heureuse dont il faut féliciter notre diplomatie et dont les résultats font beaucoup d'honneur à notre pays. Il s'agit d'entretenir l'admirable monument qui est devenu propriété de la France. Le budget voit disparaître la somme que comportait sa location et il porte un crédit nouveau destiné à son entretien. Je voudrais qu'il fut bien entendu qu'il s'agit d'entretien et qu'il ne s'agit pas de restauration, cela est très important. Le palais Farnèse est une oeuvre d'art merveilleuse, non seulement par sa construction, ses lignes, son équilibre, par la noblesse des dessins des maîtres qui l'ont conçu et qui l'on bâti ; c'est une oeuvre d'art par son âme, par le temps qui a passé sur lui, qui lui a donné un caractère, une beauté et, en quelque sorte, une personnalité. (Très bien ! très bien !). C'est une oeuvre d'art aussi, • par sa couleur, par la patine admirable que le ciel romain imprime à ses pierres.
Il s'agit, maintenant que nous l'avons, de ne pas l'abîmer ; il faudrait y toucher le moins possible, le mettre tout simplement en état de conservation, tel qu'il est. Il a couru à ce sujet des bruits assez fâcheux, dans le temps même où la négociation se poursuivait pour l'acquisition du palais. Ces bruits avaient-ils quelque vérité ? Je n'en sais rien. Mais il faut avouer que toutes ces craintes étaient justifiées par des exemples déplorables trop nombreux qu'on a pu récemment constater en France ainsi que dans beaucoup d'autres pays encore ; vous savez à quelles fâcheuses pratiques je fais allusion : on a fait. subir aux monuments une sorte de remise à neuf souvent pire pour eux
DISCUSSION DU BUDGET DEI9Î3 259
que la mort, car elle détruit toute la vérité de leur aspect. (Très bien ! très bien \)
Le palais Farnèse, Monsieur le Président du Conseil, vous le connaissez comme moi, votre oeil d'artiste le revoit encore à l'heure où je parle. Vous n'avez pas seulement contemplé les belles et admirables lignes générales de sa silhouette élégante du dehors, puis sa gracieuse cour, puis au premier étage, ses salles et ses galeries vêtues de fresques fameuses. Vous êtes monté évidemment jusqu'à l'étage supérieur. Vous avez sans doute rendu visite à votre illustre confrère de l'Académie, qui, là, dans sa cité des livres, dirige les travaux des jeunes savants de notre école française.
Vous avez vu par les fenêtres ces délicieuses larges corniches, admirables restes de l'art de l'école de Michel-Ange, dont le délabrement même, la couleur rouge dorée de leur pierre fait la singulière beauté; de loin en loin naturellement, ces corniches ont des lacunes, des crevasses dans lesquelles le doux air de Rome a fait pousser des fleurs, des grosses touffes de giroflées, toutes choses qui ne sont pas très administratives, ni conformes au modèle général, conçu pour les monuments. Au milieu cependant de ces corniches et de ces fleurs se découpe un beau pan de ciel d'Italie, qui est toujours là, qui n'est pas non plus.administratif, mais qui est quant à lui, immuable et indestructible. Et cet ensemble est d'une ' magnificence superbe, d'une beauté toute romaine.
Je voudrais qu'à cette beauté, il fût touché e moins possible.
Le monument est vieux. Il a besoin d'entretien, cela s'entend. Il a besoin parfois de crochets de fer pour retenir ses pierres descellées. Dans les grandes salles du premier étage, il existe des fissures qui nécessitent une très grande attention, de travaux habiles et discrets de consolidation. Mais que ces travaux soient discrets, avant tout. A l'aspect, à la ligne, à la couleur, je voudrais que rien ne fût changé.
Je note ceci en particulier. Il y a un principe détestable et trop souvent pratiqué dans la restauration des monuments, c'est d'enlever les pierres qui ne sont plus entières, que le temps a un peu rongées, et de les remplacer par des pierres neuves. Elles sont belles telles qu'elles sont. Elles ont eu leur beauté de jeunesse et de nouveauté et elles ont maintenant la beauté du temps. (Applaudissements.)
Au commencement du dix-neuvième siècle, quand les grands défenseurs de la beauté française, Victor Hugo, Mérimée, Montalembert, protestaient contre la destruction de nos monuments du passé, ils avaient des formules que nons ne devons pas oublier ; ils disaient : « Il y a le vandalisme de destruction ; il y a aussi le vandalisme de restauration ! » ( Très bien ! très bien \) C'est contre ce vandalisme de restauration que je voudrais garder le palais Farnèse.
Je le répète, des bruits fâcheux ont circulé. On a dit que l'on allait
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refaire à neuf les corniches. Je demande qu'on les laisse en paix, même avec les giroflées. On a dit aussi qu'on allait supprimer ces petits bancs de pierre qui font le tour du palais et en flanquent la base. C'est sur ces bancs, au temps des Farnèse, condottierri, que s'asseyaient les lansquenets ; c'est sur ces bancs aussi qu'aujourd'hui s'avachit, un peu trop souvent peut-être, mais en groupes encore pittoresques, la paresse du peuple roi. (Applaudissements).
N'importe ! Les corniches sont là, les bancs sont là ; qu'on les y laisse, qu'on n'y touche pas. Voilà ce que je me permets de vous demander, Monsieur le Ministre.
Cette manière discrète d'entendre l'entretien et la conservation de l'édifice est conforme à l'économie du budget. C'est un avantage. Elle est conforme aussi à l'art. Que le palais Farnèse ne voie pas changer une seule de ses pierres ! Ce sera chose bien remarquable dans la Rome moderne, car s'il y a un lieu au monde où le « vandalisme de restauration » règne et sévit, c'est bien là.
Eh bien, voilà ce que je voudrais. Si dans cette Rome bientôt défigurée, il subsiste intact un des chefs-d'oeuvre de l'art romain, que ce chef-d'oeuvre reste le plus respecté, le plus conforme à la beauté romaine, et que justement, ce coin privilégié, ce coin unique de Rome soit le coin français, cela sera grandement à l'honneur de notre pays et ce sera à l'honneur aussi du ministre artiste qui aura donné le point de départ à dès instructions sévères pour la conservation parfaite du chef-d'oeuvre que nous sommes fiers de posséder. (Vifs applaudissements sur un grand nombre de bancs.)
M. LE PRÉSIDENT.' La parole' est à M. le Président du Conseil.
M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL, Ministre des Affaires Etrangères. Messieurs, je suis entièrement d'accord avec le lettré et l'artiste qu'est notre collègue M. Henry Cochin ; il peut, être assuré que je veillerai à ce que le Palais Farnèse soit entretenu, mais à ce qu'il ne devienne pas la victime du « vandalisme de restauration ». (Applaudissements.)
M. LE PRÉSIDENT. Personne ne demande plus la parole sur le chapitre 20 !...
Je le mets aux voix, au chiffre de 358,000 francs.
(Le chapitre 20, mis aux voix, est adopté.)
M. LE PRÉSIDENT. « Chap, 21. — OEuvres françaises en Europe, 138,000 fr. »
La parole est à M. Brousse sur ce chapitre.
M. EMMANUEL BROUSSE. L'année dernière, M. le Ministre des Affaires Etrangères avait promis d'augmenter assez sensiblement le crédit affecté aux écoles françaises en Espagne. Je vois que la commission du
DISCUSSION DU BUDGET DE I913 261
budget nous accorde une maigre augmentation de 5,000 fr. ; ce n'est pas suffisant.
Tout à l'heure je signalais à M. le Ministre une économie de 20,000 fr. à réaliser et j'avais l'arrière-pensée de l'affecter précisément aux écoles françaises en Espagne ; . je crois que M. le Ministre des Affaires Etrangères en a déjà fait emploi pour.l'augmentation du traitement des diplomates, je n'y contredis pas, mais je lui demande très instamment de faire tous ses efforts pour que, dans le prochain budget qui nous sera soumis, une somme plus considérable soit affectée à cette oeuvre patriotique au premier chef. (Très bien ! très bien !)
M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. de Monzie.
M. DE MONZIE, député du Lot. Je demande à M. le Président du Conseil de bien vouloir se souvenir que nous avons une école française à Lisbonne.
Depuis des années, on réclame des subventions importantes pour les écoles françaises d'Espagne, pour l'institut français de Madrid, pour Pécole française de Barcelone tandis que nous voyons attribuer simplement une somme de 2,260 francs à l'école française de Lisbonne.
Cette école compte environ 150 élèves. Elle reçoit une subvention qui, je le répète, se monte au total à 2.260 fr. tandis que l'école allemande qui compte, je crois, 50 ou 60 élèves, reçoit une subvention de 8,125 francs.
Je n'ai pas besoin d'insister sur la situation de la France au Portugal, et à Lisbonne en particulier. Nous avons là des amitiés très chères, mais qu'il est nécessaire d'entretenir. Nous avons beaucoup d'amis portugais qui parlent notre langue et qui voudraient la voir enseigner à leurs enfants.
Il y a là, pour l'influence française, un centre où il faut développer l'enseignement de notre langue et de nos idées.
Je ne demande pas à M. le Ministre de proposer, dans le prochain budget, des crédits plus élevés. Je lui demande de faire ce qui a été fait pour Barcelonne et en tout cas pour Madrid.
M. EMMANUEL BROUSSE. Pas assez pour Barcelone.
M. DE MONZIE. Nous avons obtenu, pour l'école de Barcelone et pour celle de Madrid, des subventions sur les fonds des jeux. Il est indispensable que l'école française de Lisbonne ait un siège, un immeuble, qu'elle soit installée de façon définitive.
A l'heure actuelle, par une sorte d'ironie, elle est, si je ne me trompe, installée dans l'immeuble qui appartenait au dictateur fameux Joao Franco. Elle est là à titre provisoire, elle voudrait avoir une installation définitive. Ce sera une oeuvre vraiment nationale parce qu'elle
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favorisera singulièrement le développement à Lisbonne et en Portugal de grandes entreprises françaises et parce que, aussi, elle conservera à la France des enfants chez qui le souvenir de la terre d'origine pourrait, à la longue, s'effacer.
C'est non seulement le voeu de nombreux Français dont notre ministre à Lisbonne voudrait, j'imagine, pouvoir mieux soutenir les intérêts, mais c'est le voeu des Portugais qui ont, avec ces Français,. avec les organisateurs de cette école des liens de sympathie et d'amitié durables.
Je vous demande, Monsieur le Ministre, en dehors des crédits de votre budget, par une subvention qui serait prélevée sur les fonds provenant des jeux ou du pari mutuel, de donner à cette école une vitalité, une importance qui lui sont nécessaires. (Applaudissements.)
M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. le Président du Conseil.
M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL, Ministre des Affaires Etrangères. M. de Monzie se trompe certainement lorsqu'il dit que M. de Saint René-Taillandier ne soutient pas suffisamment les intérêts de nos compatriotes à Lisbonne.
Sur le fond de l'a question, je suis entièrement d'accord avec lui. Je ferai tout ce qui dépendra de moi auprès de mon collègue de l'Intérieur pour que la plus large part possible soit accordée sur les fonds du pari mutuel à nos oeuvres françaises à l'étranger. Ce ne sont pas seulement les oeuvres d'Espagne et du Portugal qui sont trop faiblement subventionnées. A vrai dire, par rapport aux sacrifices que font un très grand nombre de puissances étrangères pour leurs écoles à l'étranger, nos efforts sont insuffisants. Je ferai, je le répète, tout le possible, pour les multiplier et pour les développer. (Applaudissements.)
M. LE PRÉSIDENT. Personne ne demande plus la parole sur le chapitre 21 ?...
Je le mets aux voix, au chiffre de 138,000 francs.
(Le chapitre 21, mis aux voix, est adopté.) ■
« Chap. 22. — OEuvres françaises en Orient, 1,120,000 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 23. — OEuvres françaises en Extrême-Orient, 175,000 fr. » (Adopté.) ' —' .
« Chap. 24. — OEuvres françaises au Maroc, 300,000 fr. » .— (Adopté.)
« Chap. 25. — OEuvres françaises en Amérique 46,000 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 26. — Relations entre la côlt des Somalis et l'Ethiopie, 50,000 fr. — (Adopté.)
DISCUSSION DU BUDGET DE 1913 263
« Chap. 27. — Subventions aux sociétés françaises de bienfaisance à l'étranger, 62,600 francs. » — (Adopté.)
« Chap. 28. — Présents diplomatiques, 35,000 fr. (Adopté).
« Chap. 29. — Frais de réception de personnages étrangers, missions extraordinaires à l'étranger et conférences internationales, 15,000 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 30. — Participation de la France aux dépenses de la cour d'arbitrage de la Haye. — Frais de justice et d'arbitrage international, 24,000 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 31. — Participation de la France'à des dépenses internationales, 43,625 fr. » — (Adopté.)
« Chap. 32. — Allocations à la famille d'Abd el Kader, 70,000fr. » (Adopté.)
M. LE PRÉSIDENT. « Chap. 33. — Service français en Andorre, 6,000 fr.
La parole est à M. Emmanuel Brousse sur ce chapitre.
M. EMMANUEL BROUSSE. Voici un chapitre nouveau qui est introduit dans le budget du Ministère des Affaires Etrangères, vous me permettrez, messieurs, de le saluer au passage. J'ai mis six ans à obtenir l'inscription de ce chapitre au budget. Vous vous rappelez que, dans la précédente législature, j'avais présenté des réclamations très vives et réitérées à la tribune de la Chambre parce que deux des plus hauts fonctionnaires qui représentent la France dans les Vallées d'Andorre n'étaient pas payés ou l'étaient fort irrégulièrement.
Leur traitement était imputé tantôt sur les fonds secrets du Ministère des Affaires Etrangères, tantôt sur ceux du Ministère de l'Intérieur et, quand il ne restait plus de fonds secrets à distribuer, ces malheureux fonctionnaires n'étaient pas payés.
On s'est décidé, enfin, à inscrire leurs traitements régulièrement au budget, mais, comme tout est bizarre dans les affaires d'Andorre, je crains bien que M. le Ministre des Affaires Etrangères et la Commission du Budget n'aient été victimes de l'ambiance, car ils ont pris une décision qui me paraît aussi très bizarre.
C'est ainsi que je vois le traitement de 6,000 fr. affecté au fonctionnaire qui relève du Ministère de l'Intérieur. M. le Préfet des PyrénéesOrientales, porté sur le budget des Affaires Etrangères, tandis que le crédit affecté au traitement de notre viguier, c'est-à-dire de notre agent diplomatique auprès de l'évêque d'Urgel et des Andorrans figure au budget de l'Intérieur. (On rit.)
C'est l'inverse qui devrait être fait. Le délégué permanent de la France en Andorre qui est, en l'espèce, le préfet des Pyrénées-Orientales, devrait voir son traitement porté sur le budget du ministère de
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l'Intérieur, tandis que le viguier, qui est le véritable représentant diplomatique, qui s'occupe plus spécialement de toutes les questions diplomatiques, qui est accrédité auprès de l'évêque d'Urgel et auprès du syndic général des Vallées, devrait voir son traitement porté au chapitre 33 du budget du Ministère des Affaires Etrangères.
Je tenais à présenter cette courte observation. J'espère que la Commission du budget et le Ministre des Affaires Etrangères ne verront aucun inconvénient à lui donner une suite favorable. (Très bien ! très bien !)
M. LE RAPPORTEUR. Il y a une répartition qui a été faite .entre les trois départements. Intérieur, Justice et Affaires Etrangères, suivant les attributions des différents fonctionnaires. S'il y a une transposition, elle ne peut résulter que d'une erreur matérielle. Rien ne sera plus facile, si elle est démontrée, que de la corriger dans le prochain budget. Mais ce qui est fait est déjà une organisation et un progrès.
M. EMMANUEL BROUSSE. D'après les explications que j'ai trouvées dans le rapport de M. Deschanel, il n'y a pas d'erreur matérielle. C'est de propos délibéré que le traitement du délégué permanent est porté sur le budget des Affaires Etrangères tandis que celui du viguier figurera au budget du Ministère de l'Intérieur. Je crois qu'il serait plus rationnel d'imputer le crédit du traitement du viguier au Ministère des Affaires Etrangères, et l'autre traitement au Ministère de l'Intérieur.
M. GEORGES COCHERY, Président de la Commission du Budget. Nous le ferons, s'il y a lieu, dans le prochain budget.
M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL, Ministre des Affaires Etrangères, La vérité est que nous avons laissé au budget du Ministère des Affaires Etrangères la dépense qui lui était imputée jusqu'ici. Nous pourrons étudier pour le prochain budget la nouvelle répartition que suggère l'honorable M. Brousse. (Très bien ! très bien !)
M. LE PRÉSIDENT. Personne ne demande plus la parole sur le chapitre 33 ?...
Je le mets aux voix, au chiffre de 6,000 francs.
(Le chapitre 33, mis aux voix, est adopté.)
, « Chap. 34. — Emploi de fonds provenant de legs ou de donations. » — (Mémoire.)
« Chap. 35. — Dépenses des exercices périmés non frappées de déchéance. » — (Mémoire.)
« Chap. 36. — Dépenses des exercices clos. » — (Mémoire.)
RÉCEPTIONS DIPLOMATIQUES 265
4e partie. — Frais de régie, de perception et d'exploitation des impôts et revenus publics.
« Chap. 37. — Remises sur recettes des chancelleries, 548,000 fr. » — (Adopté.)
M. LE PRÉSIDENT. NOUS avons terminé le budget des Affaires Etrangères.
ETRANGER
Réceptions Diplomatiques
— Le Président de la République de Bolivie a reçu, le 20 décembre 1911, en audience officielle, M. Francisco-José Urrutia, qui lui a remis les lettres par lesquelles le Président de la République de Colombie l'accrédite en qualité d'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire.
M. Francisco-José Urrutia a prononcé le discours suivant :
« Excellence,
« Quand je foulai la terre bolivienne, le jour anniversaire de cette journée mémorable où les vainqueurs de Boyaca, de Pichincha et d'Aroma offrirent, au pied du Cundurcunca, leur sang confondu en un holocauste final pour la liberté du monde américain, je sentis mon âme émue par les grands souvenirs de notre émancipation, en même temps que j'éprouvai comme la douce impression d'arriver aux rivages mêmes de ma patrie. Ces sentiments sont naturels de la part d'un envoyé Colombien quand il touche le sol consacré par l'auguste nom du libérateur,, par son souffle le. plus pur et par ses aspirations les plus généreuses.
« Jamais les robustes liens, qui unirent la Colombie et la Bolivie depuis l'aube de leur vie républicaine ne se sont affaiblis tant soit peu ;
266 CHRONIQUE
ces liens prennent leur racine même au fond de l'âme nationale dés deux peuples frères. Ces deux peuples sont nés unis dans la communion indissoluble de la gloire, ils ont grandi unis, ils vivent unis par le culte reconnaissant de leurs héros, par leur amour des institutions démocratiques si chèrement conquises, par leur foi réciproque dans les destinés prospères que leur réserve l'avenir, par leurs intérêts et leurs besoins communs, par leur désir enfin de voir se réaliser cet idéal de justice internationale et de confraternité américaine, basée sur le respect scrupuleux des droits de chaque nation, que proclamait ici même le fondateur de la Colombie et le créateur de la Bolivie. L'adhésion à cet idéal sera toujours un précieux lien entre les deux nations soeurs, entre la Colombie, fille aînée de Bolivar, née au milieu de la poudre des batailles vengeresses, infatigable au combat pour la justice et la liberté, et la Bolivie, fille chérie, créée au milieu de la splendeur des victoires, au pied des âmes inviolables de l'Illimani, comme évocatrice éternelle des sentiments, des idées et des vertus civiques qui produisirent de si héroïques sacrifices et qui furent si merveilleusement personnifiées dans votre premier mandataire, l'irréprochable maréchal de Ayacucho.
« Votre gouvernement et celui de mon pays ont sans doute bien compris qu'à ces liens qui ne peuvent s'apprécier qu'en temps que réminiscences d'une glorieuse histoire devaient venir s'ajouter des relations diplomatiques plus fréquentes, un commerce moral et matériel plus actif, une meilleure appréciation des affinités mutuelles et réelles des deux pays, à une époque surtout où la vie internationale se fait partout si intense et si vaste, et cela pour le bien de l'évolution harmonique et progressive des nations. Je crois ne pas me tromper en estimant que votre gouvernement s'est inspiré de ces pensées en désignant M. le docteur Alberto Gutiérrez comme envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de Bolivie en Colombie et je puis vous assurer que mon gouvernement s'est également inspiré de sentiments analogues en me confiant la charge importante d'envoyé extraordinaire et de ministre plénipotentiaire de Colombie en Bolivie ; je suis accrédité dans ces fonctions par la lettre que j'ai l'honneur de remettre entre vos mains.
« J'espère pouvoir compter, pour mener à bien ma tâche, sur votre illustre coopération et sur les sympathies du peuple bolivien. Au nom du Gouvernement et du peuple colombien, je souhaite que la paix demeure inaltérable entre nous et je fais des voeux sincères pour la prospérité et le développement florissant dé la Bolivie et aussi pour le bonheur du Gouvernement que Votre Excellence préside à de si justes titres. »
Le Président de la République Bolivienne a répondu :
RÉCEPTIONS DIPLOMATIQUES 267
« Monsieur le Ministre,
« Il m'est particulièrement agréable de recevoir la lettre autographe par laquelle S. Exe. M. le Président de la République de Colombie vous accrédite auprès de mon Gouvernement comme envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire.
« Les impérissables liens de traditionnelle amitié qui unissent nos deux pays acquerront plus de force et plus d'efficacité par l'échange des représentations diplomatiques entre les deux républiques, échange qui nous procure l'agréable occasion de vous accueillir au sein • de la communauté bolivienne.
« Je comprends votre émotion, Monsieur le Ministre, en foulant le sol bolivien, où campèrent victorieux, en des temps qui ne sont pas encore bien lointains, les soldats de Colombie, après avoir dispersé les troupes royalistes en une marche triomphale, à laquelle se rattachent les légendaires succès de Pichincha, de Junin et d'Ayacucho.
« Cette homérique expédition à travers presque tout un continent, 1 des rives de la Madeleine aux monts de Potosi, entreprise dans le but de détruire la puissance des diverses vice-royautés et de créer une constellation de républiques, est peut-être sans précédent dans l'histoire de l'humanité et le penseur et le patriote qui, comme vous, parcourt aujourd'hui cette voie sacrée, sera naturellement ému devant le ciel qui évoque ici le sacrifice de Ricaurte, là l'apothéose de Bolivar.
« Et ce n'est pas seulement la communauté de sacrifices, le sang versé en commun pendant une lutte de trois lustres et les exploits des mêmes héros qui nous émeuvent, c'est encore la similitude de l'évolution qui, paraissant obéir aux lois immuables de la formation des Etats, nous conduit d'une enfance mouvementée, comme des peuples nouveaux, à une jeunesse pleine de promesses, au cours de laquelle nous espérons marcher unis, comme vous l'avez si bien dit, par des institutions et des intérêts communs et par cet idéal de justice internationale et de conformité américaine, basée sur le respect scrupuleux des droits de chaque Etat.
» Ce respect sera encore augmenté par la solidarité entre les républiques du continent et par le règne d'une paix intérieure et extérieure inaltérable, qui fera de nous, aux yeux du monde, une collectivité de citoyens énergiques, amants du travail et de l'ordre.
« Dans cet ordre d'idées il est à désirer que les relations qui unissent « la fille aînée de Bolivar » et « la fille chérie du Libérateur » comme vous avez si joliement appelé nos de.ux Républiques çe fassent moralement, intellectuellement et commercialement plus intimes et aient des résultats plus positifs. Je suis convaincu que la mission confiée à votre savoir et à votre talent y contribuera d'une manière efficace.
268 CHRONIQUE
« Soyez convaincu, Monsieur le Ministre, que vous pourrez compter sur la coopération déterminée de mon Gouvernement pour la réalisation complète du noble but que vous poursuivez et que les sj'mpathies spontanées et sincères de la société et du peuple boliviens vous sont acquises pour rendre plus intimés les liens de traditionnelle affection qui nous unissent.
« Daignez exprimer au premier magistrat de la Colombie les voeux que je forme pour son bonheur personnel, pour la félicité et la prospérité du noble peuple colombien.
« Vous êtes reconnu dans votre haute qualité d'Envoyé Extraordinaire et de Ministre Plénipotentiaire de Colombie en Bolivie. »
— Le Président de la République de Colombie a reçu le jeudi 7 mars 1912, à Bogota, en audience solennelle M. PercyWyndham, qui lui a remis les lettres par lesquelles S. M. le Roi de Grande-Bretagne et d'Irlande l'accrédite en qualité d'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire.
M. Percy Wyndham a prononcé le discours suivant : '
. . I
« Monsieur le Président,
« J'ai été chargé par mon Auguste Maître, Sa Majesté le Roi de Grande-Bretagne et d'Irlande et de toutes les possessions britanniques au-delà des Mers et Empereur de l'Inde, de remettre aux mains de Votre Excellence les lettres de rappel de M. Francis-William Stronge, dernier ministre britannique dans cette république et,. de lui présenter les lettres de créance par lesquelles Sa Majesté a bien voulu me nommer son successeur.
« Désirant donner à Votre Excellence une nouvelle preuve de l'ardent désir qu'Elle a d'entretenir et de développer les relations d'amitié qui existent si heureusement entre la Grande-Bretagne et la Colombie,. Sa Majesté a résolu d'élever son agent diplomatique en Colombie au rang d'Envoyé Extraordinaire et de Ministre Plénipotentiaire.
« Il m'est personnellement agréable, Monsieur le Président, d'avoir été choisi pour être auprès de Votre Excellence le premier Ministre britannique revêtu de ce caractère.
« Votre Excellence - peut être convaincue que mon zèle constant s'emploiera à faire tout ce qui dépendra de moi pour maintenir et reserrer les liens d'amitié qui existent déjà entre nos deux pays.
« Les vifs efforts qu'a faits le Gouvernement de Votre Excellence pour consolider la paix dans cette vaste République ont été considérés par mon pays avec un intérêt croissant. Ces efforts, sagement dirigés par
RÉCEPTIONS DIPLOMATIQUES 269
Votre Excellence, auront pour résultat —■ ainsi je l'espère — de produire une constante affluence de capitaux anglais, et ainsi se trouveront resserrés les liens de l'échange commercial en même temps que s'augmentera le mutuel estime des deux peuples.
« Je suis sûr que je puis compter sur l'aide de Votre Excellence et sur celle du Gouvernement pour me faciliter l'accomplissement des devoirs de ma tâche et je saisis cette occasion pour exprimer à Votre Excellence mes voeux sincères pour la prospérité de la Colombie, ainsi que pour la longue vie et le bien-être personnel de Votre Excellence. » '
Le Président Restrepo a répondu :
« Monsieur le Ministre,
« Je reçois avec une vive satisfaction les lettres qui vous accréditent auprès du Gouvernement Colombien en qualité d'Envoyé Extraordinaire et de Ministre Plénipotentiaire de S. M. le Roi de GrandeBretagne et d'Irlande, Empereur de l'Inde, que vous venez de me remettre, conjointement avec les lettres de rappel de votre honorable prédécesseur, M. Stronge.
« J'estime, comme il convient, la nouvelle preuve de considération qu'a bien voulu donner à la Colombie votre Auguste Souverain en élevant le rang de sa représentation diplomatique en ce pays. Je me félicite que le choix de Sa Majesté en nommant un Ministre Plénipotentiaire pour la première fois se soit porté sur votre personne '; vos antécédents laissent augurer un heureux succès à votre importante mission.
« La République de Colombie, au cours de son histoire, a toujours été unie par des liens de traditionnelle sympathie avec la grande nation que vous venez représenter ici. Le peuple colombien a suivi avec admiration non seulement la marche progressive de l'Empire britannique, mais encore le développement de la vie juridique dans l'organisme de cette nation ; il voit avec satisfaction s'annoncer entre les deux pays une ère d'échanges commerciales, plus intenses qui produiront un profit mutuel et mettront une intelligence plus cordiale dans les relations entre la Colombie et la Grande-Bretagne.
« Je vous souhaite la bienvenue, Monsieur. Je réponds avec plaisir à vos sonhaits ; je vous présente très cordialement ceux que je fais pour votre santé et votre bonheur et pour que votre séjour en Colombie soit prospère. »
— Le 25 mai, S. M. l'Empereur Guillaume II a reçu à Berlin, le Ministre des Affaires Etrangères d'Autriche, Comte Berchtold. Le comte
270 CHRONICLÛE
a eu un entretien avec MM. de Bethmann-Hollveg et dé KiderlenWaechter.
— Le 25 mai, S. M. Moula3'--Hafid, Empereur du Maroc a reçu officiellement, à Fez, M. le Général Lyautey, commissaire résident général de la République française. Le général a prononcé l'allocution suivante :
v< Appelé par le gouvernement de la République à le représenter auprès de Votre Majesté, je suis profondément sensible à cet honneur. La collaboration avec votre gouvernement, que j'ai inaugurée et pratiquée pendant sept ans sur les confins algéro-marocains, doit désormais s'étendre sur un champ plus vaste, puisque Votre Majesté, soucieuse du bien de son peuple, a bien voulu demander le concours de la France, pour l'aider à établir au Maroc un régime d'ordre,- de justice et y introduire les réformes nécessaires à sa prospérité.
« Les hautes qualités de clairvoj^ance politique et d'énergie qui distinguent Votre Majesté sont la garantie du succès de cette grande oeuvre qui perpétuera le souvenir de son règne. Les événements si graves et douloureux que Votre Majesté déplore avec nous doivent resserrer encore les liens d'amitié noués par les deux gouvernements, sous les auspices de M. Regnault, auprès duquel je tiens à me faire l'interprète de la haute estime de ses concitoyens. J'espère que Votre Majesté voudra bien me continuer la confiance qu'EUe avait eu en lui et que méritaient à un si haut point sa droiture et sa loyauté. Les événements que je viens de rappeler ne sauraient en aucune façon constituer un obstacle à l'oeuvre de progrès entreprise par les deux gouvernements.
« Respectueux des prérogatives traditionnelles du pouvoir chérifien, Votre Majesté peut être assurée des sentiments personnels qui m'inspirent à cet égard. Respectueux également de la religion et des moeurs des sujets de Sa Majesté, la France est résolue à lui donner le concours le plus effectif pour l'introduction d'un régime d'ordre, de civilisation et de progrès. »
S. M. l'Empereur du Maroc a répondu en ces termes :
« Monsieur le commissaire résident général, il m'est agréable tout d'abord de vous féliciter de la haute confiance que le gouvernement de la République vous témoigne, en vous attribuant les fonctions de commissaire résident général dans l'empire chérifien. Vous aurez à accomplir ici une oeuvre importante et difficile, mais vos éminentes qualités et la haute compétence que vous possédez des choses de ce pays ne me laissent aucun doute sur le succès final de,votre tâche ;
RECEPTIONS DIPLOMATIQUES 271
votre oeuvre sur la frontière algéro-marocaine en est le sûr garant. Votre personne n'est pas inconnue du Maghzen, monsieur le commissaire résident général ; nous connaissons vos sentiments à l'égard de cet empire et le respect que vous professez pour la religion musulmane, les usages et les coutumes de nos sujets.
« Personne n'ignore la grande estime que nous avons pour votre prédécesseur, M. Resnault, qui a été pour nous aussi bien dans la paix que dans les dures épreuves que nous avons traversées récemment, et que nous déplorons tous, un loyal collaborateur et un conseiller sincère. La confiance que nous lui avons toujours témoignée vous est acquise dès maintenant, Monsieur le commissaire résident général.
« Vous pouvez donc compter sur notre amitié et la sincérité de nos sentiments.
« En terminant, nous vous renouvelons ici nos remercîments pour les marques de sympathie que vous nous avez persônnellemem témoignées dans vos télégrammes de Paris, de Casablanca, de Mékinès. Soyez, Monsieur le commissaire résident général, le bienvenu parmi nous, vous et les personnes qui vous accompagnent. ;;
— Le 12 mai 1912, M. Marmol, nouvellement nommé envoyé extraordinaire et ministre potentiaire de la République Argentine à Stockholm, a été reçu en audience particulière par S. M. le Roi de Suède.
— Le 13 mai 1912, S. M. le roi d'Espagne a reçu en audience particulière M. José Gustavo Guerrero qui lui a remis les lettres l'accréditant en qualité d'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la République de Salvador à Madrid.
— Le 29 mai, S. M. le roi d'Italie a reçu en audience particulière M. Goulkevitch, secrétaire de l'ambassade de Russie à Rome, nommé secrétaire de l'ambassade de Russie à Constantinople, et lui a remis le grand-cordon de l'ordre des saints Maurice et Lazare.
— M. Alfred Dumaine, ambassadeur de France, a été reçu le lundi 3 juin, au palais de Schoenbrunn, par S. M. l'Empereur d'Autriche, roi de Hongrie, auquel il a présenté ses lettres de créance. Aucune allocution officielle n'a été prononcée.
272 CHRONIQUE
' ■—Le 20 juin, S. M. le Roi d'Italie a reçu en audience solennelle le nouvel ambassadeur de Russie à Rome, M. Krupensky. Conformément à l'usage de la Cour italienne aucune allocution officielle n'a été prononcée.
Voyage de S. M. le Roi des Bulgares à Vienne et à Berlin.
Toasts échangés àl'issue du dîner de gala offert par S. M. l'Empereur d'Autriche à LL. MM. le Roi. et la Reine des Bulgares, le dimanche 2 juin 1912 au château de Schoenbrunn.
Toast de S. M. l'Empereur François-Joseph :
« J'éprouve un vif plaisir à souhaiter la bienvenue à Vos Majestés et à leurs Altesses Royales, le prince héritier et le prince Cyrille.
« Dans quelques semaines, Sire, vingt-cinq années se seront écoulées depuis le jour où la Providence a confié à Votre Majesté le sort de la Bulgarie. Suivant, dès son avènement, une politique de sagesse et de modération, Votre Majesté a assuré à son peuple les bienfaits de la paix et a contribué puissamment à la prospérité sans cesse grandissante de son. pays. Mes voeux les plus chaleureux accompagnent le développement de la pacifique Bulgarie, qui, grâce à la haute sagesse de Votre Majesté, forme dans les Balkans un élément d'ordre et de tranquillité.
« Je suis heureux de pouvoir considérer la présence parmi nous de Vos Majestés et de Leurs Altesses royales comme un nouveau gage de nos excellentes relations avec la famille royale. »
Réponse de S. M. le Roi Ferdinand :
« Sire, les gracieux souhaits de bienvenue que Votre Majesté impériale et royale apostolique vient de nous adresser me touchent de la manière la plus vive, et je lui en exprime, en mon nom et en celui de la reine et de mes fils., ma sincère reconnaissance.
« L'intérêt sympathique que Votre Majesté n'a cessé de porter à l'oeuvre que la Providence m'a confiée et au développement de mon pays, intérêt dont ses paroles me donnent un nouveau et précieux
VOYAGES PRINCIERS 273
témoignage, me faisait un agréable devoir de lui apporter, comme souverain et au seuil de mes vingt-cinq ans de règne, mes remerciements et ma gratitude. C'est avec une satisfaction particulière que j'accomplis aujourd'hui ce devoir. J'y vois en même temps l'occasion de marquer les sentiments qui m'animent envers l'auguste personne de Votre Majesté, à laquelle un long règne historique a acquis les droits les plus élevés à l'admiration et au respect de l'Europe entière. Je serais heureux, Sire, que vous considériez ces instants mémorables comme un gage de plus des excellentes relations qui existent entre nos deux Etats. Je lève mon verre en l'honneur de Votre Majesté et de toute la famille impériale ».
Toasts prononcés à l'issue du dîner de gala offert par S. M. l'Empereur allemand à S. M. le Roi des Bulgares, le 7 juin 1912, au nouveau palais de Potsdam.
Toast de S. M. l'Empereur Guillaume II :
« Que Vos Majestés veuillent bien me permettre d'exprimer la joie vive que nous cause, à l'impératrice et à moi, la visite à la cour de Vos Majestés Royales et de LL. AA. le prince royal et le prince 'Cyrille. Nous vous souhaitons de tout coeur la bienvenue parmi nous.
« C'est la première fois que Votre Majesté vient comme tsar chez nous. Je puis dire que je considère cette visite de Votre Majesté comme un nouveau gage des relations amicales qui ont existé déjà entre nos maisons et nos Etats.
« Votre Majesté n'est point un étranger en Allemagne. Pour resserrer les liens qui unissent Votre Majesté à sa patrie d'origine ce me fut une joie particulière de placer Votre Majesté à la tête de mon régiment de Thuringe.
« En Allemagne, on observe avec une vive et sincère sympathie l'oeuvre bienfaisante à laquelle Votre Majesté, depuis bientôt vingtcinq ans, consacre ses meilleures forces et grâce à laquelle le peuple bulgare est devenu un important facteur de la paix et de la civilisation.
« Qu'il soit donné à Votre Majesté de rendre des services longtemps encore à son pays et à la paix du monde. Tel est mon voeu le plus cher. Tel est mon voeu sincère. Je l'exprime en levant mon verre à la santé de Vos Majestés et de la famille royale de Bulgarie. »
ARCHIVES DIPLOM., t. 122, ri" 5-6-7, mai-juillet 1912. 18
274 CHRONIQUE
Réponse de S. M. le Roi des Bulgares :
« La réception tout aussi brillante que cordiale dont nous avons été l'objet et le salut de bienvenue sincère de Votre Majesté Impériale et Royale m'ont vivement touché. Je considère tout d'abord de mon devoir de vous exprimer en mon nom, au nom de la reine et au nom de mes fils, notre remerciement très sincère. Je suis heureux d'entendre que ma première visite comme monarque indépendant est un nouveau gage des relations amicales qui existaient déjà entre nos maisons et nos Etats.
« Je puis assurer à Votre Majesté que mon désir le plus sincère est d'entretenir ces bonnes relations.
« L'incomparable armée de Votre Majesté fut ' toujours un modèle pour la mienne. Ma nomination à la tête du régiment de Thuringe de Votre Majesté me remplit d'un plaisir et d'un orgueil particuliers.
« Je prie Votre Majesté de vouloir bien accepter l'expression de ma profonde reconnaissance pour cette haute distinction aussi flatteuse pour moi que pour mon armée. Votre Majesté a eu la bonté de réassurer de la sympathie sincère avec laquelle l'Allemagne observe la tâche à laquelle j'ai consacré toute ma force et les progrès que la Bulgarie a faits pendant les vingt-cinq années de mon gouvernement.
« Moi et mon peuple, nous apprécions hautement ces témoignages de sympathique bienvenue d'un pays auquel une grande partie de notre jeunesse doit cette culture qui fut si bienfaisante à l'essor de la Bulgarie.
« En remerciant Votre Majesté du souhait si bienveillant pour moi qu'elle vient d'exprimer en faisant des voeux pour que .je puisse longtemps encore servir mon pays et la cause de la paix, je vide mon verre à la santé de Votre Majeeté et de la famille impériale- »
Voyage de S. M. le roi de Monténégro à la Cour d'Autriche.
Toasts prononcés au cours du dîner de gala qui fut offert le 8 juin 1912, au château de Schoenbrunn, en l'honneur de S. M. le roi de Monténégro par S. M. l'Empereur François-Joseph.
Toast prononcé en français par S. M. l'Empereur d'Autriche :
« Il m'est tout particulièrement agréable d'exprimer à Votre
VOYAGES PRINCIERS 275
Majesté la vive satisfaction que j'éprouve à lui souhaiter la bienvenue.
« La visite de Votre Majesté me fournit l'occasion de lui renouveler aujourd'hui l'expression des sentiments bien sincères que j'avais eu le plaisir de lui témoigner le jour où, après un règne d'un demi-siècle, elle érigea en royaume le Monténégro.
« J'aime à espérer que la présence de Votre Majesté à Vienne contribuera à resserrer encore les rapports de bon voisinage et d'amitié qui existent entre nos Etats.
« En formant les meilleurs voeux pour le bonheur du vaillant peuple monténégrin, je tiens à vous assurer que vos efforts, qui visent à la prospérité de votre pays et au maintien de la paix, peuvent toujours compter sur mon appui sympathique. Je lève mon verre en l'honneur de Votre Majesté et je bois à la santé de toute la famille roj^ale. »
Le roi Nicolas a répondu également en français :
« Les paroles bienveillantes que Votre Majesté impériale, royale et apostolique vient de m'adresser me touchent vivement et je la, prie de vouloir bien agréer l'expression de ma [sincère reconnaissance. En tournant les yeux vers le passé je vois mon règne de cinquante années constamment marqué de la précieuse sympathie que Votre Majesté m'a gracieusement témoignée. Tout dernièrement encore, aux fêtes du renouvellement de la royauté de Monténégro, elle a daigné m'y montrer son intérêt particulier. Vos bontés, sire, sont de celles qui ne s'oublient pas. Je m'en souviendrai toujours, comme je me rappellerai aussi avec bonheur l'accueil cordial et flatteur dont Votre Majesté daigne m'honorer.
Le Monténégro se trouvant à côté de la grande monarchie des Habsbourgs profite largement de son voisinage. Il en ressent les bienfaits économiques et lui est redevable de bien des progrès dans sa culture et dans sa civilisation.
« Aussi suis-je heureux d'assurer à Votre Majesté que tous mes efforts sont dirigés à resserrer davantage les liens de bon voisinage et d'amitié qui existent entre son empire et mon pays.
« La prospérité de mon peuple et le maintien de la paix étant le but suprême de mes préoccupations, je remercie très cordialement Votre Majesté de l'appui sympathique qu'elle veut bien m'accorder pour rendre cette tâche plus facile. Je trouverai dans ces espérances un stimulant des plus puissants, puisqu'elles me viennent de l'auguste souverain qui jouit, à juste titre, des sentiments d'estime et de vénération générale, sentiments qui sont le plus profondément gravés dans mon coeur.
« Votre Majesté impériale et royale a voulu mettre le comble à sa
276 CHRONIQUE
bonté en touchant les fibres les plus sensibles d'un vieux soldat. Il lui a plu de me conférer la propriété d'un régiment de sa vaillante armée. Permettez-moi de vous en exprimer ma plus profonde gratitude.
« Je lève mon verre, à la précieuse santé de .Votre Majesté impériale, royale et apostolique et à celle de son illustre maison et je bois à la prospérité de ses peuples. »
Entrevue de Port-Baltique
— S. M. l'Empereur allemand et S. M. l'Empereur de Russie se sont rencontrés à Port-Baltique les 4 et 5 juillet dernier.
S. M. Nicolas II était accompagné de M. Kokovtzof, président du Conseil et de M. Sasonoff, Ministre des Affaires Etrangères. A la suite de cette entrevue le communiqué officieux suivant a été publié par les journaux de Saint-Pétersbourg, à la date du 7 juillet :
« L'entrevue de Sa Majesté l'Empereur et Roi et de Sa Majesté l'Empereur de Russie, a eu un caractère tout à fait cordial et' fournit une preuve nouvelle des relations amicales qui lient depuis des années les deux souverains.
« De l'échange de vues qui a eu lieu à ce sujet entre les hommes d'Etat qui accompagnent Leurs Majestés, a résulté à nouveau la ferme résolution de conserver les traditions vénérables existant déjà entre les deux pays. Les entretiens politiques, qui se sont étendus à toutes les questions actuelles, ont raffermi la conviction réciproque qu'il est de toute importance pour lés intérêts des deux Etats voisins et pour la paix générale de conserver une prise de contact réciproque et reposant sur une mutuelle confiance,
« Il ne pouvait s'agir ni de convention nouvelle, ni même de pratiquer quelque changement que ce soit dans le groupement des puissances européennes, groupement dont la valeur a déjà été éprouvée pour le maintien de l'équilibre européen et de la paix.
« C'est donc partout que l'entrevue de Port-Baltique peut être saluée avec une pleine satisfaction ; tandis que, d'une part, elle témoigne d'une ferme et durable amitié entre l'Allemagne et la Russie, d'autre part, elle exprime les grandes lignes pacifiques qui déterminent la politique des deux empires. »
A l'occasion de l'entrevue de Port-Baltique, S. M. l'Empereur allemand a conféré à M. Kokovtsof, Président du Conseil- des Minis-
MOUVEMENT DIPLOMATIQUE 277
très de Russie les insignes de l'ordre de l'Aigle-Noir et à M. Sasonoff, Ministre des Affaires Etrangères, les insignes de l'ordre du Mérite de la Couronne de Prusse. Le général Soukhomlinoff, Ministre de la Guerre, et l'amiral Grigorovitch, Ministre de la Marine, ont reçu l'Aigle-Rouge.
Mouvement diplomatique et consulaire
— Par décret de S. M. le Roi d'Italie en date du 28 janvier 1912, M. Francesco Crocè a été nommé consul d'Italie à Cette.
— Un décret royal du 18 janvier 1912 a institué un consulat italien à Mexico avec juridiction sur tous les Etats-Unis du Mexique, sauf ceux de Tamaulipas, Veracruz, Tabasco et Campêche.
— Par décret présidentiel du 31 janvier 1912, M. le docteur Victor Julio Cote a été nommé Consul de Colombie à Bordeaux.
— Un décret du Ministre des Affaires Etrangères du Royaume d'Italie en date du 7 février 1912, a créé une agence consulaire à Port-Arthur et l'a placé sous la dépendance du Consulat de la Nouvelle-Orléans.
— Par décret ministériel du 12 février 1912, M. Publio Landucci, consul d'Italie à Alexandrie (Egypte), a été nommé au même emploi à Tunis.
—• Par décret présidentiel du 9 mars 1912, M. Gerardo Manassevitz a été reconnu comme consul général du Pérou à Bogota ; M. Percy Charles Hugh Wyndham a été reconnu comme consul général de S. M. Britannique en Colombie, en résidence à Bogota.
— Le 12 mars, M. Tchanykoff, ambassadeur de Russie à Constantinople, a été relevé de ses fonctions et remplacé par M. de Giers.
— Par décret rc^al du 18 mars 19.12, M. Juliân Maria del Arroyo y Moret, Envoyé Extraordinaire et ministre plénipotentiaire de S. M. le Roi d'Espagne à Lima, Sucre et Quito, a été nommé chef de section au Ministère d'Etat.
278 CHRONIQUE
— Par décret du 25 mars 1912, M. Julio Betancourt a été nommé Envoyé Extraordinaire et Ministre plénipotentiaire de Colombie aux Etats-Unis, en remplacement du Général Pedro Nel Ospina, démissionnaire.
— Par décret royal du 31 mars 1912, le Comte Giovanni Gallina, Envoyé Extraordinaire et Ministre plénipotentiaire de ire classe, a été nommé commissaire général de l'Emigration au Ministère italien des Affaires Etrangères, en remplacement du Commandeur Pasquale di Fratta.
— Par décret royal du 4 avril 1912, le Commandeur Vittore Cobianchi, Envoyé Extraordinaire et ministre plénipotentiaire d'Italie à Montevideo, a été mis dans le cadre de la disposition et M. Carlo Aliotti, conseiller de légation de iro classe, a été nommé Envoyé Extraordinaire et Ministre plénipotentiaire à Mexico.
— Le 3 avril 1912, M. Bronevski, conseiller de l'ambassade de Russie à Tokio, a été nommé au même emploi à Berlin, M. Sevastopulo, secrétaire d'ambassade russe à Londres, a été nommé conseiller à Washington.
— Par décret royal du 4 avril 1912, le poste de 2e secrétaire de la légation italienne à Munich a été supprimé et un poste de 3e secrétaire à l'ambassade d'Italie à Vienne a été créé.
— Le 4 avril 1912, S. M. l'Empereur d'Autriche a nommé ambassadEUuiLàjibkwa.le
ambassadEUuiLàjibkwa.le Muller, premier chef de section au Ministère
dèsIrA'ftknTes'JEtrangères. Le baron Maichio, chef de section, a été
nommé premier chef de section et le comte Markus Wickenburg,
secrétaire d'Etat hongrois, en disponibilité, a été nommé chef de
section au Ministère des Affaires Etrangères, avec le titre de conseiller
intime. ,, ,, , '.,.v , . , > ■ ,
■,0']'/l .1/; ; jaojjpu J; IJUT/I nlj linofrj" Irjanoj orrirrir,.
•JIJ l/rr;n'j",lr;<!rioj o/fiftioij miudyss ùi'j ,j; J^ndbay-V/U. n-.., „, ,
— Par décretXQYâAi du 8 avril 1912, -M. Bernando Osorio-v, Elola,
agent diplomatique'espagnol au Caire a ete nomme envoyé extraordinaire et Ministre plénipotentiaire de S. M. le foi d'Espagne à Lima, Siâleï,dfët;:Qûitfe',i!«N'W ^kMisbMai^kndelli&lxoyd^y: Mfoçeuaoéié ndmmé Envo^ïP'&ftWMn&lîeWtiqMMstrff.^ ^Mqoxûdij
d'Espagne à La Havane et M. Cristôbal Fernandez Vallin y Alfonso,
4msP£gnl? êttjM'é'foqmôIq o-rjwfiirn VJ ■j-ii.';nibioj;:]y;f -j/ovrii! (3cnoM Y -j'j,: oL i'jrlj ôrnrnofi àîù r. <OJIIJO yj 'SVMV.. ,nmi.î /; -jii}ims.li'l> io/i -jl
— Le 15 avril 1912, M. le général Roca, a^eipri WMWiïê o4,e nfefr
MOUVEMENT DIPLOMATIQUE 279
République Argentine, a été nommé Envoyé Extraordinaire et ministre plénipotentiaire de cette puissance à Rio-de-Janeiro ; il a pris possession de son poste le 4 juillet.
— Le 18 avril 1912, M. Olyntho Magalhaes a été nommé ministre des Etats-Unis du Brésil à Paris.
— A la date du 19 avril 1912, le Ministre des Affaires Etrangères de la République Argentine a arrêté les nominations diplomatiques suivantes :
Ministres plénipotentiaires : En Suède, M. Lagos Marmol ; au Danemark, M. Carlos Ocantos, au Mexique et pour Cuba et la Colombie, M. Baldomero Fonseca.
Secrétaires de la légation : En Bolivie, M. Alfredo de Arteaga ; en Angleterre, M. Louis Dominguez, en Russie, M. Baldomero Gayan, au Pérou, M. Julian Portela ; au Paraguay, M. Pedro Guehalaga ; au Chili, M. Renato Correa.
— Le mouvement diplomatique belge suivant a été publié à Bruxelles, le 4 mai: M. Garnier-Heldewier, ministre au Maroc, a été nommé ministre en Bulgarie ; M. van Ypersele de Strihou, conseiller de légation à Paris a été nommé ministre en Roumanie; M. May, conseiller de légation à Londres a été nommé ministre à Washington ; M. de Prelle de la Nieppe, conseiller de légation, est passé de Constantinople à Londres; M. René van der Elst, secrétaire de la légation à Paris, a été nommé conseiller de la même légation; le comte van der Straten Ponthez, adjoint à la mission de Belgique à Buenos-Aires, a été' nommé secrétaire de la légation à Paris.
— Par décret du 13 mai 1912, M. Pedro Canavilles y Peôn, consul d'Espagne à La Havane a été nommé consul à San Juan de Puerto Rico, par permutation avec M. Félix de Siloniz y Colarta.
— En mai 1912, S. M. le Roi d'Italie a concédé l'exequatur aux consuls suivants :
MM.
Alfred Lemon, consul d'Angleterre à Florence. Carmichael Montgomery, consul d'Angleterre à Florence. Antonio Vallejo, consul du Mexique à Milan.
28o CHRONIQUE
— Le 5 mai 1912, le Journal Officiel du Brésil a publié le mouvement diplomatique suivant :
MM.
Edouard Lisboa, ministre à La Haye, nommé à Lisbonne. Cardoso Oliveira, ministre à La Paz, nommé à Mexico. Fontoura Xavier, ministre à Mexico, nommé à Madrid. Raoul de Rio Branco, nommé ministre à Berne. Graça Aranha, nommé ministre à La Haye.
— Le 9 mai 1912, le baron Marschall de Bieberstein, ambassadeur de l'Empire allemand à Constantinople, a été nommé ambassadeur à Londres, en remplacement du comte Wolff-Metternich, démissionnaire.
— Le 22 mai 1912, le prince Dolgorouki, ambassadeur de Russie à Rome, a été nommé membre du Conseil de l'Empire ; son successeur est M. Alexandre Krupenski, ministre de Russie à Kristiana, qui occupa pendant six ans les fonctions de conseiller d'ambassade à Rome, où il a laissé le souvenir à la fois d'un ami de l'Itlaie et aussi de la France.
Dans une récente interview avec un rédacteur du Messagero, M. Krupenski s'exprimait dans les termes suivants :
« La nécessité s'impose à l'Italie et à la Russie, surtout dans les circonstances présentes, de maintenir les très cordiales relations qui se sont nouées entre elles depuis l'entrevue de Racconigi.
« Une entente amicale entre la Russie et l'Italie est d'autant plus logique et naturelle qu'il n'existe dans leurs programmes respectifs aucune question qui puisse donner lieu à des malentendus et à des divergences, et je suis couvaincu qu'au point de vue de l'équilibre européen un très grand rapprochement entre la France et l'Italie ne serait pas moins utile.
« Quant à la guerre italo-turque, il est absolument faux qu'entre Saint-Pétersbourg et Rome on ait signé des conventions spéciales ou même qu'on ait échangé des vues pour une participation directe de la Russie au présent conflit. »
— Le 12 juin a eu lieu le mouvement diplomatique allemand suivant :
M. Rosen, ministre d'Allemagne à Bucarest, a été désigné pour le poste de ministre plénipotentiaire à Lisbonne ; le comte de Brockdorff, consul général à Budapest, a été nommé ministre plénipotentiaire à
MOUVEMENT DIPLOMATIQUE 281
Copenhague ; le baron de Romberg, conseiller rapporteur à l'office des Affaires Etrangères, a été nommé ministre à Berne ; M. de Waldthausen, ministre plénipotentiaire à Copenhague, a été nommé à Bucarest.
— M. Nelidow, directeur de la section d'Orient au Ministère des Affaires Etrangères, a été nommé ministre plénipotentiaire de Russie au Vatican le 18 juin ; son successeur est le prince Troubetzkoï.
CINQUIÈME PARTIE
BIBLIOGRAPHIE
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Further Correspondence respesting the Affairs of Persia, presented to both Houses of Parliament by Command of His Majesty. —- London, His Majesty's Stationery Office, 1911-1912, 5 vol. in-40.
Reports by His Majesty's agent and Consul-general on the finances, administration and condition of Egypt and the Soudan in 1911, • presented to both Houses of Parliament by command of His Majesty, (may 1912). —London, H. M. Stationery Office, 1912, in-40.
ITALIE
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CHALONS-SUR-MARNE. — IMPRIMERIE A. ROBAT