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Full notice

Title : Comptes-rendus de la Société scientifique & littéraire d'Alais

Author : Société scientifique et littéraire (Alés, Gard). Auteur du texte

Publisher : [s.n.] (Alais)

Publication date : 1872

Relationship : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327464038

Relationship : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb327464038/date

Type : text

Type : printed serial

Language : french

Format : Nombre total de vues : 2032

Description : 1872

Description : 1872 (T4).

Description : Collection numérique : Fonds régional : Languedoc-Roussillon

Description : Collection numérique : Collections de Montpellier Méditerranée Métropole

Rights : Consultable en ligne

Rights : Public domain

Identifier : ark:/12148/bpt6k5730017s

Source : Bibliothèque nationale de France, département Collections numérisées, 2009-38901

Provenance : Bibliothèque nationale de France

Online date : 19/01/2011

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COMPTES-RENDUS

DE LA

SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE

ET LITTÉRAIRE D'ALAIS



COMPTES-RENDUS

DE LA

SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE

& Littéraire D'ALAIS

ANNEE 1872

TOME IV

ALAIS

TYPOGRAPHIE J. MARTIN Rue Bridaine, 4, et rue Dumas, 5

1872



SOCIETE

SCIENTIFIQUE ET LITTÉRAIRE

D'ALAIS

RÈGLEMENT DE LA SOCIÉTÉ

I

BUT DE LA SOCIÉTÉ

ARTICLE Ier

La Société scientifique et littéraire d'Alais a pour objet de favoriser l'expansion des connaissances utiles, par tous les moyens qui sont en son pouvoir.

Dans ce but, elle recevra et discutera — à l'exclusion des questions politiques et religieuses — toutes les communications qui lui seront faites, publiera un Bulletin de ses travaux, et pourra avoir des séances publiques.

En outre, elle formera des collections scientifiques, littéraires, industrielles, agricoles et artistiques intéressant principalement la localité, créera une bibliothèque et fera reproduire, au moyen de fac-similé, dessins ou copies, les objets ou manuscrits rares qu'elle ne pourra se procurer.

II

COMPOSITION DE LA SOCIÉTÉ

ARTICLE II

La Société se compose de Membres résidants limités à quarante;


— 6 —

De Membres non résidants ; De Membres honoraires.

ARTICLE III

Sont Membres de la Société, les Fondateurs et les personnes qui ont rempli les conditions indiquées dans les articles suivants :

ARTICLE IV

Pour être élu Membre de la Société, il faut avoir été présenté par deux des Membres résidants, qui devront, huit jours avant la présentation, communiquer au Bureau le nom du candidat.

Après convocation spéciale, il est procédé au scrutin, si plus de la moitié des résidants assistent à la séance.

Dans le cas contraire, une deuxième convocation est nécessaire, et l'on peut alors procéder au vote, quel que soit le nombre des membres présents.

Toutefois, le candidat, pour être admis, devra toujours obtenir les deux tiers des suffrages.

ARTICLE V

Le vote est spécialement réservé aux résidants pour ce qui concerne l'élection des Membres de la Société, la nomination du Bureau et les modifications à apporter au règlement.

Dans tous les autres cas, les non résidants sont admis à voter.

ARTICLE VI

Chaque Membre résidant s'engage à verser, entre les mains du Trésorier, une cotisation annuelle de vingt francs, qui sera toujours acquittée dans le courant de janvier de chaque année.

Les Membres non résidants sont tenus de payer tous les ans, à la même époque, une somme de dix francs.

L'année dans laquelle on est admis devra être payée en entier.

Les Membres honoraires ne sont soumis à aucune cotisation.


— 7 —

III

DU BUREAU ET DE SES ATTRIBUTIONS

ARTICLE VII

La Société est administrée par un Bureau composé de : Un Président ; Un Vice-Président ; Un Secrétaire-Général; Un Archiviste ; Un Trésorier ; Un Secrétaire des séances ; Un Secrétaire-Adjoint.

ARTICLE VIII

La durée des fonctions du Président est fixée à une année ; il dirige les débats, veille à l'exécution des règlements et ordonnance les dépenses.

ARTICLE IX

Le Vice-Président remplace le Président en cas d'absence ou d'empêchement. — Nommé pour un an, il passe de droit Président l'année suivante. — Après l'expiration de ses fonctions, il n'est pas immédiatement rééligible.

ARTICLE X

Le Secrétaire général est nommé pour cinq ans; il est chargé de la correspondance générale, des comptes-rendus de fin d'année et surveille l'impression et la distribution du Bulletin.

ARTICLE XI

Le Secrétaire des séances et le Secrétaire-Adjoint sont nommés pour un an. Ils sont chargés de la rédaction des procès-verbaux.

ARTICLE XII

Le Trésorier a la gestion des fonds de la Société et en rend un compte annuel. — Il est nommé pour un an.


— 8 —

ARTICLE XIII

L'Archiviste est nommé pour cinq ans. Il est chargé de la conservation de la bibliothèque et des collections. Ses fonctions ne sont pas incompatibles avec celles de Trésorier.

ARTICLE XIV

Toutes les années, à la première séance du mois de janvier, après convocation spéciale, la Société procède, au scrutin secret et à la majorité des suffrages, au remplacement des Membres du Bureau dont les pouvoirs sont expirés, si le nombre des votants excède la moitié des Membres résidants. Dans le cas contraire, à la suite d'une seconde convocation, le vote aura lieu dans la séance suivante, quel que soit leur nombre.

IV

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

ARTICLE XV

Les séances ordinaires de la Société ont lieu une fois par

semaine, du 1er octobre au 1er mai ; au moins une fois par

mois le reste de l'année, dans un local spécial choisi par le Bureau.

ARTICLE XVI

En cas de dissolution de la Société, les collections et la bibliothèque reviendront de droit à la Ville ou au Collége d'Alais.

ARTICLE XVII

Aucune modification ne pourra être apportée au présent Règlement, si elle n'est proposée par cinq Membres de la Société et prise en considération par les deux tiers des Membres présents.

Après ce premier vote, la discussion sera ajournée à un


— 9 —

intervalle d'un mois au moins, et sera annoncée par convocation spéciale.

Les modifications proposées ne seront adoptées que si elles ont été acceptées par plus de la moitié des Membres résidants de la Société, sur vote au scrutin secret.

ARTICLE XVIII Dans le courant du mois où aura lieu son installation, le nouveau Bureau arrêtera la liste générale des Membres de la Société. Il pourra, selon les circonstances, considérer comme démissionnaire tout Membre résidant ou non résidant qui n'aura pas payé sa cotisation.

Le Secrétaire-Général, Le Présidetn,

V. AUPHAN. MAXIMIN D'HOMBRES.


LISTE DES MEMBRES

DE LA

SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE & LITTÉRAIRE

D'ALAIS

BUREAU POUR 1872

Président MM. MAXIMIN D'HOMBRES.

Vice-Président CHARVET.

Secrétaire-Général . . AUPHAN #.

Archiviste-Trésorier. . BARRE ife.

Secrétaire des séances. CANONVILLE.

Secrétaire-Adjoint. . . VILLARD.

MEMBRES RÉSIDANTS

MM. AUPHAN (VICTOR) &, docteur en médecine, inspecteur des eaux thermales d'Ax.

CASTANIER (LEOPOLD), licencié en droit, avoué.

CHEVALIER (JULES), docteur en médecine.

DADRE (ADRIEN), docteur en droit, avocat, ancien bâtonnier.

DESTREMX (LÉONCE), membre du Conseil général de l'Ardèche, député à l'Assemblée Nationale.


—11 —

MM. FRAISSINET (EDOUARD), ingénieur civil.

GAUJOUX (EUGÈNE), professeur de littérature au Collége spécial d'Alais.

GROS (AMÉDÉE), architecte.

LARGUIER (FRÉDÉRIC), docteur en médecine, inspecteur des eaux minérales d'Auzon (Fumades).

LEDOUX (CHARLES), ingénieur au Corps des Mines, directeur de l'Ecole des Mines d'Alais.

MERLE (HENRY) &, directeur-gérant de la Compagnie de produits chimiques d'Alais.

PLANTIER (ALFRED), docteur en droit, docteur en médecine, ancien chirurgien-major des mobilisés du Gard.

MAGNON (ANSELME), ingénieur civil, professeur à l'Ecole des Mines, élu le 11 juillet 1868.

VEILLON (Gustave), ingénieur civil, membre du Conseil général du Gard, élu le 11 juillet 1868.

PIN (PAUL), docteur en médecine, élu le 8 août 1868.

BARRE (Louis) #, ingénieur civil, élu le 2 janvier 1869.

ITSCHNER (HENRI) 0, principal du Collége spécial d'Alais, élu le 2 janvier 1869.

GARREAU DE DOMBASLE, ingénieur civil, professeur à l'Ecole des Mines d'Alais, élu le 15 janvier 1869.

DE TUBEUF (ALEXANDRE), docteur en médecine, maire d'Alais, élu le 13 février 1869.

DE ROUX-LARCY (ERNEST), élu le 20 février 1869.

DUPIN (FÉLIX), directeur-gérant des Mines de Carnoulès, député à l'Assemblée Nationale, élu le 6 mars 1869.

CHARVET (GRATIEN), agent-voyer de l'arrondissement d'Alais, élu le 10 avril 1869.

LUCY (ARMAND) fâ tgi, receveur particulier des finances, élu le 10 avril 1869.

D'HOMBRES (MAXIMIN), avocat, élu le 5 mars 1870.


— 12 —

MM. DE LAVIT (EMILIEN) ®, architecte, ancien capitaine des mobilisés du Gard, élu le 5 mars 1870.

MAURIN (JOSEPH), avocat, élu le 5 mars 1870.

WOLFF (JACQUES) 0, professeur de mathématiques au Collége spécial d'Alais, élu le 5 mars 1870.

BOURGOGNE (EMILE),pharmacien, élu le 19 mars 1870.

CANONVILLE (THOMY), ingénieur civil, professeur au Collége spécial d'Alais, élu le 19 mars 1870.

FRANCEZON (FRÉDÉRIC), filateur, élu le 19 mars 1870.

DE LACHADENEDE (PAUL) *, président du Comice agricole, élu le 19 mars 1870.

PIN (EMILE), avocat, élu le 19 mars 1870.

FABRE (CÉSAR), juge de paix, élu le 2 avril 1870.

LEYRIS (ANDRÉ), commis-greffier au tribunal civil d'Alais, élu le 30 avril 1870.

CHAMBOREDON ( Louis ), ancien magistrat, élu le 19 novembre 1870.

CHABAUD (LÉOPOLD), avoué, élu le 3 décembre 1870.

LACHARME (CLAUDE), professeur au Collége d'Alais, élu le 3 décembre 1870.

VILLARD (EMILE), ingénieur, élu le 4 juin 1871.

CASTANIÉ, directeur des houillères de Rochebelle, à Alais, élu le 18 novembre 1871.

DUCLAUX-MONTEIL *, ancien maire d'Alais, élu le 16 décembre 1871.

MEMBRES HONORAIRES

MM. DUMAS (J.-B.)G. C. *#, membre de l'Institut, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, etc., élu le 4 juillet 1868.


— 13 —

MM. ROUX (FERDINAND) 0. #, directeur de l'Ecole normale supérieure de Cluny, élu le 4 juillet 1868.

DELARCY (baron ROGER), député àl' Assemblée Nationale, ministre des travaux publics, élu le 12 décembre 1868.

GUIZOT (FRANÇOIS) G. C. * #, de l'Académie française, de celle des inscriptions et belles-lettres, etc., élu le 5 juin 1869.

BALARD C. *, de l'Institut, élu le 6 novembre 1869.

DE LESSEPS (FERDINAND) G. C. *, élu le 6 novembre 1869.

SCHMIDT (WALDEMAR), à Copenhague, élu le 6 novembre 1869.

D'HOMBRES (baron CHARLES) &, membre du Conseil général du Gard, élu le 5 mars 1870.

DE CLAUSONNE (G.) *, président honoraire à la Cour de Nimes, secrétaire perpétuel de l'Académie du Gard, élu le 19 mars 1870.

GERMER-DURAND (EUGÈNE) #, bibliothécaire de la ville de Nimes, secrétaire-archiviste de l'Académie du Gard, etc., élu le 2 avril 1870.

DE ROZIÈRE (EUGÈNE) #, inspecteur général des archives, élu le 3 juillet 1870.

MISTRAL (FRÉDÉRIC), poète provençal, élu le 18 février 1871.

PASTEUR (Louis) 0. #, membre de l'Institut, élu le 18 mars 1871.

GERMAIN (A.) 0. #, doyen de la Faculté des lettres de Montpellier, élu le 4 novembre 1871.

DONNÉ C. *, recteur de l'Académie de Montpellier, élu le 18 novembre 1871.

DE ROUVILLE, professeur de géologie à la Faculté des sciences de Montpellier, élu le 9 mars 1872.


— 14 —

MEMBRES NON RÉSIDANTS

MM. BONDURAND(EDOUARD), àSénéchas,élule21 mars 1868.

O. DE MARICHARD, correspondant de la Société d'anthropologie de Paris, à Vallon (Ardèche), élu le 21 mars 1868.

PARRAN (ALPHONSE) f$>, ingénieur au Corps des Mines, directeur de la Compagnie de Mokta-el-Hadid, élu le 21 mars 1868.

GAUSSORGUES (LÉONCE), licencié en droit, à Anduze, élu le 6 juin 1868.

NOUTON (EMILE) #, ingénieur au Corps des Pontset-Chaussées, à Paris, élu le 8 août 1868.

IM-THURN (EMILE), membre de l'Académie du Gard, élu le 12 décembre 1868.

DE RAMEL (GABRIEL), officier d'infanterie, élu le 12 décembre 1868.

DE RAMEL (FERNAND) &, docteur en droit, à Paris, élu le 2 janvier 1869.

BENTKOWSKI #, docteur en médecine, à Saint-Jeandu-Gard, élu le 2 janvier 1869.

CAZALIS DE FONDOUCE (PAUL), ingénieur civil, à Montpellier, élu le 20 mars 1869.

D'ADHÉMAR (comte GASTON), maire de Bagard, à Anduze, élu le 5 juin 1869.

DE LA BRUGUIÈRE (ALBERT RODIER) ancien élève de l'Ecole polytechnique, à Anduze, élu le 5 juin 1869.

CALAS (JULES), directeur des mines de Trélys, maire de Robiac, à Rochesadoule, élu le 5 juin 1869.

DE COEHORN (baron GUILLAUME), à Saint-Jean-du-Gard, élu le 5 juin 1869.

DOZE (MELCHIOR), peintre d'histoire, professeur au lycée de Nimes, élu le 5 juin 1869.


— 15 —

MM. DUFOIX (LOUIS), licencié en droit, à Anduze, élu le 5 juin 1869.

DUMAS (ERNEST) #, ancien député au Corps législatif, à Paris, élu le 5 juin 1869.

JAUBERT (JACQUES-MARIE), ingénieur, élu le 5 juin 1869.

JOUGUET (FÉLIX), directeur des Forges de Bességes, élu le 5 juin 1869.

PELLET (SCIPION), agent-voyer inspecteur du département du Gard, à Nimes, élu le 5 juin 1869.

DE PELET (PAULIN), au château de la Bouvière, canton de Sauve, élu le 5 juin 1869.

ROUSSELLIER (J.-G.), ingénieur, à Aimargues, élu le 5 juin 1869.

DE LA ROUZIÊRE (CHARLES), sous-directeur de la Compagnie houillère de Bességes, élu le 5 juin 1869.

VIDAL (EMMANUEL) #, docteur en médecine, élu le

5 juin 1869.

BOISSIER (ALFRED), docteur en médecine, à Montpellier, inspecteur des eaux de Lamalou-le-Haut, élu le

6 novembre 1869.

DE CAZENOVE (RAOUL), membre de la Société littéraire de Lyon, à Lyon, élu le 6 novembre 1869.

ECHALLIÉ (CHARLES), banquier, à Dijon, élu le 6 novembre 1869.

JEANJEAN (ADRIEN), à Saint-Hippolyte-du-Fort, élu le 6 novembre 1869.

LIQUIER (Louis), à Anduze, élu le 6 novembre 1869.

MARSAUT (J.-B.), ingénieur, à Bességes, élu le 6 novembre 1869.

MÉNARD (LÉONCE), docteur en médecine, à Nimes, élu le 6 novembre 1869.

ROUX (EMILE), ingénieur à Bességes, élu le 6 novembre 1869.


— 16 —

MM. DE SEYNES (JULES), professeur agrégé à la Faculté de médecine de Paris, élu le 6 novembre 1869.

SOULIER (HIPPOLYTE), ancien juge de paix, à Anduze, élu le 6 novembre 1869.

MAZADE (FLORIMOND), docteur en médecine, à Anduze, élu le 22 janvier 1870.

POMARET DE ROUSSET *, ingénieur des Ponts-elChaussées, à Florac (Lozère), élu le 22 janvier 1870.

VALCROZE (POLYDORE), à Saint-Martin-de-Boubeaux, élu le 22 janvier 1870.

DE LACHADENEDE (RENÉ), ingénieur à Rochesadoule, élu le 19 février 1870.

VILLARET (JEAN), à Comiac (canton de Sauve), élu le 19 février 1870.

DE THÉZILLAT (CHARLES) # # 0, ancien préfet de la Lozère (ancien membre résidant).

MURGUE, ingénieur à Rochesadoule, élu le 5 mars 1870.

BARDON (GUSTAVE), ingénieur à Rochesadoule, élu le 19 mars 1870.

MEUSNIER (CHARLES), ingénieur à Lyon, élu le 19 mars 1870.

BERNARD (ALBERT), ancien sous-préfet, élu le 30 avril 1870.

ROCHETIN (LOUIS), juge suppléant au tribunal civil d'Orange, élu le 30 avril 1870.

CASTELBON, pharmacien, à Portes, élu le 7 mai 1870.

MORRIS, ingénieur aux Forges et Fonderies d'Alais, à Tamaris, élu le 7 mai 1870.

MALINOWSKI (JACQUES), licencié ès-sciences, professeur au lycée de Cahors (ancien membre résidant).

LISBONNE (JOSEPH), à Clavières, près Alais (ancien membre résidant).

CHAPTAL, professeur au Lycée de Nimes, élu le 3 juillet 1870.


— 17 —

MM. ALÊGRE (LÉON), bibliothécaire de la ville de Bagnols, élu le 19 novembre 1870.

BERTELOT, docteur en médecine, à Chamborigaud, élu le 19 décembre 1870.

GARNIER (HIPPOLYTE), directeur des mines du Vialas, par Villefort (Lozère), élu le 19 décembre 1870.

MIRK, directeur des mines de Cessous et Trébiau, élu le 19 décembre 1870.

VASCHALDE (JOSEPH), propriétaire à Joyeuse (Ardèche), élu le 14 janvier 1871.

CASAUBON, docteur en médecine, à Saint-Jean-deMarvéjols, élu le 28 janvier 1871.

DE MARVEILLE DE CALVIAC (JULES), propriétaire, à Lassalle, élu le 28 janvier 1871.

CHALMETON (FERDINAND), directeur des mines de Bességes, élu le 22 avril 1871.

ROMANT (ALBÉRIC), médecin vétérinaire, à Remoulins, élu le 4 juin 1871.

GILLY (ALBERT), propriétaire à Remoulins, élu le 2 septembre 1871.

GLORIEUX (FLORENT), ingénieur des mines, à Tamaris, près Alais, élu le 2 septembre 1871.

MAZEL, propriétaire-horticulteur, près d'Anduze, élu le 2 septembre 1871.

COULONDRES (ALFRED), juge de paix du canton de Villeneuve-lez-Avignon, élu le 11 novembre 1871.

DUBOIS (ANTONY), avocat à Montpellier (ancien membre résidant).

DES HOURS (LOUIS), conseiller de préfecture de la Haute-Garonne, à Toulouse (ancien membre résidant).

DUBOIS, juge de paix, à Vallon (Ardèche), élu le 30 décembre 1871.

FRANCEZON (PAUL), négociant, élu le 30 décembre 1871.

2


-18.-

MM. JUDÉE, docteur en médecine, médecin-*major à Rennes, élu le 30 décembre 1871.

BRIVET, directeur de l'usine de produits chimiques, à Salindres (Gard), élu le 27 janvier 1872,

DE CHAPEL (ALFRED), propriétaire à Cardet, élu le 27 janvier 1872.

BIVER, directeur des charbonnages des Bouches-duRhône, à Marseille, élu le 9 mars 1872.

FABRE, docteur-médecin, directeur de l'établissement hydrothérapique de Lafoux, près Remoulins (Gard), élu le 9 mars 1872.

GIDE (AUGUSTE) , licencié en droit, à Nimes, élu le 9 mars 1872.

DE LORME (AUGUSTE), propriétaire à Rochefort (Gard), élu le 9 mars 1872.

PRADEL (ALPHONSE), docteur en médecine, médecin des mines, à Molières (Gard), élu le 9 mars 1872.

SILHOL (ALFRED), propriétaire à Nimes, élu le 9 mars 1872.

THÉROND (GASTON), ingénieur des mines de Lalle, à Bességes, élu le 9 mars 1872.

BALARD (POLYDORE), ingénieur chimiste, à Salindres, élu le 16 mars 1872.

BARON (VICTOR), ingénieur civil à Camont, commune de Saint-Martin-de-Valgalgues, élu le 16 mars 1872.

DE LAJUDIE (FÉLIX), ingénieur de la Cie des Forges, à Bességes, élu le 16 mars 1872.

BABILOT, directeur des mines de Portes, élu le 4 mai 1872.

GUINET, docteur en médecine, membre du Conseil général du Gard, à Barjac, élu le 11 mai 1872.


EXTRAIT DU REGISTRE

DES

PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES

de la

SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE & LITTÉRAIRE

D'ALAIS

Séance du 6 janvier 1873

PRÉSIDENCE DE M. DADRE, PRÉSIDENT

Présents : 21 membres résidants et un membre non résidant. Lecture et approbation du procès-verbal de la dernière séance.

L'ordre du jour appelle la discussion sur des modifications à nos règlements, proposées par le Bureau le 24 avril et le 21 octobre 1871, et prises en considération par l'Assemblée.

Après une discussion à laquelle ont pris part un grand nombre de sociétaires, les articles VII, X et XIII sont modifiés comme suit :

ARTICLE VII. — La Société est administrée par un Bureau composé de :

Un Président ; Un Vice-Président ; Un Secrétaire Général ; Un Archiviste ; Un Trésorier ; Un Secrétaire des séances ; Un Secrétaire Adjoint. ARTICLE X. — Le Secrétaire général est nommé pour cinq ans; il est chargé de la correspondance générale, des comptesrendus de fin d'année et surveille l'impression et la distribution du Bulletin.


— 20 —

ARTICLE XIII. — L'Archiviste est nommé pour cinq ans. Il est chargé de la conservation de la bibliothèque et des collections. Ses fonctions ne sont pas incompatibles avec celles de Trésorier.

Un article nouveau est en outre ajouté au règlement. Il est rédigé dans les termes suivants :

ARTICLE XVIII. — Dans le courant du mois où aura lieu son installation, le nouveau Bureau arrêtera la liste générale des Membres de la Société. Il pourra, selon les circonstances, considérer comme démissionnaire tout Membre résidant ou non résidant qui n'aura pas payé sa cotisation.

D'après l'article XIV du règlement, la Société procède au renouvellement de son Bureau. Sont élus :

Vice-Président : M. CHARVET. Secrétaire Général : M. AUPHAN. Archiviste-Trésorier : M. BARRE. Secrétaire des séances : M. CANONVILLE. Secrétaire Adjoint : M. VILLARD.

M. Ledoux fait ensuite une communication très-intéressante et très-écoutée, relative aux mines du Laurium, en Grèce, que l'auteur avait visitées quelque temps auparavant. Cette communication a été reproduite in-extenso dans la Revue des Deux-Mondes.

Séance du 13 janvier 1872

PRÉSIDENCE DE M. DADRE, PRÉSIDENT

Compte-rendu des travaux de la Société, par M. Gaujoux, secrétaire général. — Ce travail sera inséré in-extenso dans le Bulletin.

M. Barre, trésorier, présente l'état des recettes et des dépenses pendant l'année sociale de 1871. Il accuse un reliquat de compte de fr. 705 40.

Les comptes du trésorier sont approuvés par la Société qui lui vote des remerciements pour sa bonne gestion des fonds sociaux.


— 21 —

M. Dadre, président sortant, procède à l'installation du nouveau Bureau et s'exprime en ces termes :

« MESSIEURS ET CHERS COLLÈGUES ,

» Lorsque je m'associais, il y a quelques années à peine, à l'oeuvre de fondation de notre Société, je ne croyais pas y avoir jamais d'autre place que celle de l'ouvrier qui apporte à son heure sa pierre à l'édifice. Vos suffrages m'y ont fait une situation plus périlleuse en m'appelant à un poste d'honneur, dont l'occupation eût été une haute témérité de ma part si je l'avais sollicitée, un écueil inévitable, si je n'avais été soutenu par votre constante bienveillance.

» Arrivé au terme de ma carrière présidentielle, je puis donc, sans aucun orgueil, envisager le chemin que nous avons parcouru ensemble et constater les progrès accomplis par notre Société, car l'honneur en revient à vous seuls. Ces progrès sont dus surtout au mérite des oeuvres littéraires et à l'importance des travaux scientifiques qui nous ont été communiqués. M. Gaujoux, votre secrétaire général, vous en présentera l'analyse, et comme assurément il le fera dans la forme élégante et correcte qui lui est familière, je n'ai garde de toucher à son oeuvre, dans la crainte de l'affaiblir.

» Vous y verrez, Messieurs, que cette année encore, malgré les graves et sombres préoccupations qui assiégeaient nos esprits, notre Société a continué de marcher avec résolution et succès vers le but qu'elle s'est marqué : l'expansion de connaissances utiles, l'étude des questions qui intéressent notre région d'une manière plus spéciale ; sous ce dernier rapport, le travail si remarquable de notre collègue, M. Parran, complément précieux de l'oeuvre capitale d'un savant distingué qui fut aussi notre collègue, M. Emilien Dumas, suffirait à lui seul pour attester que notre jeune Société a déjà conquis son droit de cité dans le monde des lettres et des sciences.

» Aussi bien, Messieurs, une ancienne et docte Académie, à laquelle des liens étroits rattachent plusieurs d'entre vous, l'Académie du Gard, nous souhaitait-elle dernièrement la bien-venue de la façon la plus courtoise et la plus aimable, plaçant ainsi, en quelque sorte, notre entrée dans la patrie des lettres sous un patronage du meilleur augure pour notre avenir.


— 22 -

» Et comme si rien ne devait manquer à notre consécration, nous avons eu la rare et bonne fortune de recevoir nos lettres de naturalisation dûment octroyées par un haut dignitaire, qui est en même temps un homme de lettres et un savant de la plus haute distinction, un des esprits les plus fiers et les plus délicats de notre époque, M. le recteur Donné. Son autorisation nous était nécessaire pour occuper le local actuel de nos séances ; je la lui ai demandée en votre nom, et vous n'avez pas oublié avec quelle grâce charmante il nous l'a aocordée dans une lettre que nos archives conserveront comme un précieux témoignage de sympathie, comme un véritable titre de noblesse et de naturalisation pour notre Société.

" Je ne doute pas, Messieurs, que l'avenir ne réponde à ces promesses de vos débuts ; le choix que vous avez fait du collègue appelé à me remplacer m'en est un gage certain. On l'a dit avec raison : Il y a dans toute société savante deux portes d'inégale hauteur; la grande porte, qui s'ouvre d'elle-même à ceux qui suivent la voie droite et qui arrivent précédés de leurs oeuvres; la petite, à laquelle aboutit le chemin détourné qu'il vous plaît quelquefois de laisser libre à ceux qui, sans bagage littéraire, ne vous paraissent pas néanmoins étrangers et indifférents aux choses de l'esprit. J'ai suivi le chemin détourné ; mon successeur, M. Maximin d'Hombres, entre par la grande porte.

» Il est mal aisé de parler d'un ami qui vous écoute, même pour dire le bien qu'on en pense. Je ne saurais toutefois, malgré cette gène, me taire sur un point. Ce qui me frappe dans les oeuvres de notre nouveau président, à côté, je dirai presque au-dessus, de leur mérite littéraire, c'est le sentiment qui les a inspirées et qui les vivifie. M. M. d'Hombres aime les lettres et, en les cultivant, il n'a pas semé sur un sol ingrat ; mais ce qu'il aime avant tout, on le voit, d'un amour intime, profond, presque passionné, c'est son pays. Soli totus amor, belle devise qui honore celui qui l'a prise et qui la justifie si bien aux regards de tous ceux qui savent ses longues et patientes recherches, ses investigations laborieuses, son ardeur, que rien n'a arrêté pour découvrir au milieu de nos vieilles archives, un parchemin, une charte, un acte quelconque attestant, à l'honneur de nos pères et de notre cité, que le respect du droit et la soumission à Dieu étaient unis, dans notre vieil Alais, à l'amour du peuple et de la liberté.

Deu arjradal e al pobol util.


— 23 —

» Ce sentiment nous a valu la communication de ces études si remarquées, dont notre Bulletin s'est enrichi, sur Alais, ses origines, sa langue, ses chartes, sa commune et son consulat, et c'est à ce même sentiment de l'amour du pays que nous devons encore ce dictionnaire, que l'un de nos plus grands et plus charmants poètes en langue d'Oc, notre compatriote M. de La Fare, appelait de tous ses voeux, afin de conserver, disait-il, à la langue de nos pères, toute sa dignité de langue morte.

» L'amour du pays, Messieurs, C'est aussi l'amour des institutions qui peuvent, en quelque mesure, favoriser son développement intellectuel et provoquer des travaux utiles. Votre nouveau président donnera à notre Société ce qu'il a toujours donné sans réserve à son pays : son esprit et son coeur ; et nos travaux, soyez-en sûrs, en recevront une impulsion nouvelle et féconde.

» Je ne voudrais pas, Messieurs, abuser de votre attention ; mais avant de quitter cette place, je tiens à adresser une dernière parole à mes collaborateurs. Sans leur précieux concours, il m'eut été impossible dé remplir la tâche qui m'était imposée. Grâce à leur dévouement, la marche de notre Société n'a pas été arrêtée ; je les en remercie de tout coeur en mon nom et au vôtre.

» Mes chers collègues, le président qui vous fait ses adieux a obtenu votre bienveillance; mais les morts n'ont droit qu'à la justice, et, en étant pesé dans la balance, je crains bien d'être trouvé trop léger. La rigueur de votre arrêt sera néanmoins très-adoucie pour moi, si, redevenu simple ouvrier, en reprenant ma place au milieu de vous, j'y retrouve votre amitié. »

Après ces paroles chaleureusement applaudies, les nouveaux élus prennent place au bureau, et M. Maximin d'Hombres prend à son tour la parole :

« MESSIEURS,

" II y a un an, quand après avoir bien voulu m'accueillir parmi vous, vous m'appeliez encore à faire partie du Bureau de Votre Société, je ne songeai qu'à me féliciter de ce témoignage flatteur de vos sympathies ; et si j'étais fier de prendre rang après un ami qu'à tant de titres il me plaisait de reconnaître


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pour un maître ; ma pensée écartait dans le lointain le moment où notre loi statutaire m'imposerait le devoir de lui succéder à la présidence. Aussi, cet honneur qui m'arrive aujourd'hui, semble-t-il me prendre au dépourvu : avec lui je ne comptais plus, et mon apprentissage d'une année a été en vérité trop court.

» J'aurais presque le droit d'en accuser votre amitié trop confiante. Elle savait pourtant ce que j'étais et ce que je pouvais lui apporter. La part de ma vie que j'avais donnée au public s'était circonscrite dans l'étude du droit et au barreau ; celle que je m'étais réservée pour la dépenser à ma guise, ne sortait pas du cercle restreint de quelques patientes recherches consacrées à nos annales locales ou à notre vieille langue vulgaire. Plus curieux de l'origine des choses qu'épris de leurs brillants effets, mon esprit n'était pas de ceux qui pouvaient faire rejaillir un certain éclat sur une Société comme la vôtre. A supposer donc que ma place fût dans vos rangs, elle n'était pas assurément à votre tète ; et, malgré votre excès de bienveillance, vous n'éprouverez ni étonnement ni déception en constatant aujourd'hui que votre nouveau président ne peut mettre à votre disposition que son zèle, son assiduité et sa bonne volonté à s'inspirer des leçons et des exemples de ses devanciers. Vous lui pardonnerez en même temps, mes amis, la sincérité de ses aveux et la simplicité de ses paroles.

» Que serait-il ici besoin d'ailleurs de discours et de rhétorique, là où une poignée de main suffit et vaut mieux? N'oublions pas, en effet, que si notre association a pour premier but de mettre en commun les fruits de notre modeste science, elle en atteint plus sûrement encore un autre, inappréciable entre tous, celui de nous rapprocher et de nous confondre dans la grande famille des lettres et de la science. N'oublions pas qu'à côté de cet adage du vieux maître : sçavoir c'est vivre, l'expérience du coeur a écrit celui-ci : vivre librement ensemble, c'est s'estimer.

» Vivons donc ensemble par l'intelligence, Messieurs; et puisque nous avons été assez sages pour fermer la porte aux bruits des passions extérieures, recueillons-nous plus que jamais dans notre chère et pacifique retraite.

» Notre pauvre France est là comme ailleurs, là plus qu'ailleurs peut-être. Et croyez-le bien, la Société alaisienne scientifique et littéraire fera ainsi oeuvre de patriotisme et méritera mieux les honorables adhésions qui se groupent autour d'elle, les encouragements et l'accueil qui ont salué et grandi son essor;


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quand, le travail et l'union de ses membres, qui représentent les forces vives et intellectuelles de la cité, s'inspirant à la recherche du vrai, s'aimantant dans leur mutuel amour du beau, elle aura prouvé qu'il lui est également facile d'arriver au bien. » Ce n'est pas, Messieurs, un programme nouveau que je viens de tracer : je n'ai fait que prendre dans nos traditions, et vous en êtes mes témoins, avec tous les collaborateurs quevous me donnez pour composer notre Bureau. Ce sont eux qui me rassurent, et sur leur concours que je me repose; et c'est pour cela, Messieurs, qu'à part le sentiment naturel d'hésitation et de crainte en abordant ces hautes fonctions, sous le coup d'une émotion trop vive pour ce que je viens d'entendre et qu'il me reste à mériter, je ne trouve plus en moi qu'un profond sentiment de reconnaissance pour avoir été autorisé à vous dire et toute ma pensée et tout mon coeur.

» Mon cher prédécesseur, vous que je suis heureux d'appeler deux fois mon confrère, vous avec qui j'ai eu, depuis bien des années déjà, les plus solides et les plus affectueux rapports, en même temps que les plus charmantes relations, permettez-moi de vous appliquer plus particulièrement l'idée que j'ai exprimée pour tous ; permettez-moi de me féliciter de ce que ma vie a été assez mêlée à la vôtre, ici et ailleurs, pour qu'il m'ait été donné de vous apprécier dignement. Puisque vous le voulez, je prendrai le fauteuil que vous venez de m'offrir avec une grâce si amicale; mais sachez bien que j'entends vous laisser ici votre véritable place, celle que votre nature d'élite vous y a conquise. Le droit de présider à cette réunion me devient plus cher et plus précieux par le devoir si doux qu'il m'impose, au nom de tous et comme leur interprête, de vous porter nos remerciements pour l'habile direction que vous avez eue de nos travaux et de nos études, et pour avoir ainsi affirmé et consolidé la prospérité et l'avenir de notre Société scientifique et littéraire. »

M. Charvet, vice - président, communique une note de M. Germer-Durand, membre honoraire, relative à une inscription trouvée sur la porte de l'ancienne léproserie d'Alais , située au quartier de Bouzac, sur la rive droite du Grabieu.

A l'aide d'un estampage en plâtre qui lui avait été remis par


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M. Charvet, le savant archéologue de Nimes est parvenu à déterminer exactement le sens de cette inscription ainsi conçue :

2lnn0 : îmi : milleairttfl : tti : dcrtttttf *. e atti t : ht abrtal b u interne QOÏ,

+ mtstxt : t : ht petra be la : + ; t Bon uatlet : an frreau : fie : an basti t : aquet : astal : ant en :

M. Germer-Durand l'interprète et la complète ainsi qu'il suit :

Anno D(omi)ni millesimo III (c) cicanta e sint de abrial lo vinteme gor. Mestre J(an) de Pèyrabela, e son vailet Andreau fle an bastit aquet ostal. Amen.

« L'an du Seigneur mil trois cent cinquante-cinq, d'avril le vingtième jour, Maître Jean de Peyrabelle et son valet, André Aufle (?) ont bâti cette maison. Amen. »

Séances du 30 janvier 1872

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES i PRÉSIDENT

Après la lecture et l'approbation du procès-verbal de la dernière séance, M. Gaujoux, secrétaire général,, lit le compterendu des travaux de l'année, qui sera reproduit dans le Bulletin.

M. Charvet, vice-président, rend compte, au nom de la commission désignée le 7 août 1869, des fouilles et des recherches exécutées aux frais de la Société aux sources des Furnades et dans les environs.

Vu la longueur de cette lecture, la fin en est renvoyée à la prochaine séance.

M. Francezon lit une pièce de poésie intitulée : les Alpes,


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où l'on retrouve au plus haut degré toutes les qualités de l'auteur.

M. Chabaud dit ensuite une pièce de vers qu'il nomme modestement : Souvenir de jeunesse, et que l'on pourrait intituler : La Création et le Créateur. Le style y est à la hauteur du sujet.

M. Francezon expose les inconvénients qu'aurait l'impôt sur les matières premières pour l'industrie de la soie. D'après l'honorable membre, ce serait la ruine de l'industrie séricicole dans nos pays.

Séance du 27 janvier 1872

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

Après la lecture du procès-verbal, M. le secrétaire général donne communication d'un article de M. Malinowski, membre non résidant, publié dans le Journal du Lot et relatif à la découverte, dans les environs de Cahors, de gisements trèsimportants de phosphate de chaux.

M. le Dr Auphan lit une analyse critique dé l'article Mariage, du Dr Bertillon (Dictionnaire des sciences médicales).

Ce travail est purement statistique. La grande quantité de chiffres et de calculs qu'il contient en rendent l'analyse trèsdifficile; aussi M. le Dr Auphan n'a-t-il donné que les résultats généraux.

Les documents fournis par le Dr Bertillon sont de deux sortes : les uns purement statistiques doivent être admis sans contestation et feront faire un nouveau progrès à cette science toute récente connue sous le nom de démographie; les autres, s'appliquant aux choses de la médecine et dépendant de causes diverses connues ou inconnues, ont donné lieu à des déductions plus ou moins logiques que le Dr Auphan n'accepte pas pour la plupart.

En comparant le nombre de mariages annuels à la population mariable, on trouve que la France est un des pays où l'on se marie le moins. — L'âge d'élection pour les mariages est, en France, de 25 à 35 ans pour les hommes, et de 20 à 30 ans


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pour les femmes. C'est en Angleterre que les jeunes gens sont le plus pressés de se marier, et en Italie où ils se marient le plus tard. — Les troubles politiques, les guerres, les épidémies, influent sur le nombre de mariages. En Angleterre, le nombre de mariages tend à s'accroître d'une année à l'autre. Il existe, au contraire, en Suède une régression rapide et significative. En France, la tendance au mariage n'a pas sensiblement varié depuis le commencement du siècle. L'âge moyen des époux, le jour de la célébration du mariage, est, en France, de 28 ans et demi pour les garçons, et de près de 25 ans pour les filles. — Les femmes sont relativement d'autant plus jeunes que leur mari est plus âgé, et, réciproquement, l'âge des époux croît d'autant plus lentement que s'élève plus rapidement celui des épousées. — Nous retenons au passage un renseignement très-intéressant qui concerne le degré d'instruction chez différentes nations. Sur 1,000 époux, ne savent pas signer : en Italie, 600 ; en France, 252 ; en Angleterre, 226. — Sur 1,000 épouses, ne savent pas signer : en Italie, 790 ; en France, 400 ; en Angleterre, 330. Nous regrettons à cet égard l'absence de documents concernant l'Allemagne.

En Angleterre, chaque couple a une fécondité représentée par 4 enfants vivants; en France, nous ne dépassons pas, par mariage légitime, 3 enfants vivants qui, à 20 ans, se réduisent à moins de 2. La population adulte ne se maintient donc que par l'appoint des naissances illégitimes. On compte par 100 femmes mariées, en France, 12 naissances ; en Angleterre, 20, et en Belgique 21.

La durée moyenne du mariage est comprise, pour l'Angleterre, entre 20 et 29 ans, et se rapproche très-vraisemblablement de 25 ans; en France, elle est comprise entre 25 et 27 ans.

En France, l'âge moyen des époux décédés est d'environ 58 ans, et celui des épouses est de 52 ans et demi.

Tels sont les principaux renseignements qui, d'après le Dr Auphan, doivent être admis sans contestation. Mais, pour les questions qu'il nous reste à examiner, notre collègue ne partage plus les opinions de l'auteur dont il affirme du reste l'entière bonne foi, mais dont il ne saurait regarder les conclusions comme parfaitement déduites des documents statistiques invoqués, parce que ces documents sont expliqués, complétés,


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modifiés, par des données scientifiques qui ne paraissent avoir préoccupé en rien M. le Dr Bertillon.

Sur 1,000 mariages, on compte 13 mariages consanguins. L'auteur parait regretter les prohibitions de la loi ; il soutient que la consanguinité n'amène pas fatalement la dégénérescence des descendants. Sous l'influence d'unions consanguines même très-rapprochées, certaines espèces animales sont régénérées, perfectionnées; d'autres, au contraire, s'éteignent et disparaissent. On doit remarquer les mêmes faits pour l'homme. Si, dans certains cas de consanguinité, la descendance s'étiole, dégénère et meurt, dans d'autres, il se produit une véritable régénération successive qui porte à son apogée les qualités spéciales d'un beau sang. Le Dr Auphan reconnaît qu'il devrait en être ainsi, qu'il n'existe aucune loi physiologique qui s'y oppose ; mais , dit-il, peut-on trouver beaucoup de familles indemnes d'affections héréditaires ? Par les mariages consanguins, vous donnez une nouvelle vigueur au germe morbide qui, trouvant un terrain plus propice pour se développer, a bientôt frappé toute la descendance jusqu'à extinction de la lignée.

D'après la statistique judiciaire, la tendance au crime dans l'état de célibat est bien plus accusée que dans l'état de mariage. Représentée par 100 chez les mariés des deux sexes, elle s'élève à 206 chez les célibataires. — D'où le Dr Bertillon conclut que c'est l'influence moralisatrice du mariage qui abaisse ainsi le chiffre de la criminalité chez les mariés ; mais la plupart des célibataires de cette triste catégorie ne se marient pas parce qu'ils sont pervertis et criminels, et parce que aussi peut-être auraient-ils quelque peine à trouver des conjoints disposés à s'unir à eux.

Comme on trouve un plus grand nombre d'aliénés chez les célibataires que chez les mariés, l'auteur en déduit que le mariage exerce sur l'aliénation mentale une influence préservatrice considérable. Non, répond le Dr Auphan ; votre statistique est évidemment faussée, parce que vous mettez à l'appoint du célibat tous les cas d'hérédité, tous les épileptiques , tous ceux dont la folie s'est annoncée par quelque trouble intellectuel passager, mais qui a suffi pour faire craindre l'apparition de cette redoutable maladie. Non, le mariage n'est pas un préservatif efficace contre l'aliénation mentale.

Enfin, si l'on consulte les tables de mortalité, on observe que la mortalité des célibataires au-dessus de 30 ans est


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constamment supérieure à celle des mariés, la mortalité des veufs et surtout des jeunes veufs est encore plus élevée que celle des célibataires. — L'influence désastreuse du veuvage est significative pour l'auteur; elle ne l'est pas moins pour le Dr Auphan. Mais notre collègue n'admet pas qu'il en soit de même pour le célibat. D'abord, dit-il, les données statistiques fournies par le Dr Bertillon lui-même ne sont pas tellement probantes pour la Belgique et la Hollande, puisque la mortalité des célibataires dans ces deux pays dépasse à peine et n'atteint pas toujours la mortalité des mariés.

Le célibat peut être examiné à deux points de vue différents : le célibat chaste, le célibat continent, le célibat dans le sens absolu du mot, et le célibat incontinent, le célibat des débauchés.

D'après l'auteur, la continence absolue entraînerait avec elle une foule de maladies (satyriasis, hystérie, nymphomanie). — Le Dr Auphan, regardant la fonction de reproduction comme une sorte de fonction sociale destinée à la conservation de l'espèce et non de l'individu, ne croit pas que de son défaut complet d'exercice, il puisse résulter aucun danger. Les cas de continence exagérée ayant déterminé des accidents seraient pour lui des cas de fausse continence, de chasteté de contrebande , cachant derrière elle le pire des vices, l'onanisme. Du reste, la statistique par profession accorde au prêtre catholique, prototype du célibataire, la vie moyenne la plus longue.

Le célibataire incontinent et débauché ne se marie pas parce qu'il ne veut pas changer de conduite, et l'influence moralisatrice du mariage n'a que faire sur un pareil homme.

En résumé, dit le Dr Auphan, instruire et moraliser les masses, c'est le moyen d'augmenter le nombre de mariages, — Le mariage n'est point pour un peuple un moyen de moralisation ; c'est, au contraire, le signe de la moralité d'un pays.

Si l'on doit admirer et honorer les intelligences d'élite qui, comme Kant, Pascal, Newton, ont fait alliance avec la science et le travail et ont payé leurs dettes à l'humanité par des découvertes utiles ; si l'on doit honorer et respecter ces hommes de bien ; Vincent de Paule, de Lépée et tant d'autres qui ont fait alliance avec la charité et le dévouement et sont devenus les pères adoptifs des pauvres, des déshérités et des orphelins; si l'on doit plaindre et remercier les malades et les infirmes qui ont fait alliance avec la souffrance et n'ont point voulu transmettre ce triste héritage à leurs descendants; on doit,


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au contraire, vouer au mépris public le débauché qui a contracté union intime avec la luxure, la prostitution et l'adultère, et qui trouvera dans une mort prématurée la juste punition de ses débordements et de ses vices immondes.

Les formalités exigées par le règlement ayant été remplies, M. Brivet, directeur de l'usine de Salindres, et M. Alfred de Chapel, propriétaire à Cardet, sont élus membres non résidants.

M. Charvet termine la lecture de son rapport sur les fouilles archéologiques faites aux Fumades et dans les environs par les soins de la Société.

Vu son importance locale, ce travail sera inséré en entier dans le Bulletin.

Séance du 3 février 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

Lecture et adoption du procès-verbal.

La Société a reçu des lettres de remerciements de MM. de Chapel et Brivet, récemment nommés membres non résidants.

M. Judée, membre non résidant, expose, sur l'école de tirailleurs, une théorie nouvelle dont il est l'auteur. — Il insiste surtout sur les avantages que présente son système dans le cas d'un mouvement de retraite ou dans le cas d'une marche de flanc. - Cette question, quoique peut-être un peu trop technique, n'en a pas moins intéressé l'auditoire.

Lecture est ensuite donnée, par M. Lucy, membre résidant, d'une pièce de vers inédite, intitulée : Aux Allemands, dont l'auteur, M. Lucy père, a su atteindre les hauteurs de la plus belle poésie.

Séance du 10 février 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. Plantier présente à la Société une curieuse boîte en cui-


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vre jaune qui paraît remonter à la fin du XVIe siècle ou au commencement du dix-septième. — Cette boîte, de forme oblongue et arrondie à ses deux extrémités, a 0m,16 de long sur 0m,045 de large et 0m,03 de hauteur. Sa face latérale est ornée de feuillages assez grossièrement gravés. La face supérieure du couvercle est divisée en cinq compartiments, dans chacun desquels sont gravés des dessins allégoriques se rapportant au texte des versets 2 et 3 du chap. I des prophéties d'Isaïe. Ce texte, indiqué par un titre initial, se trouve gravé en vieux hollandais autour des dessins précités et sert à les expliquer. En voici la traduction :

f 2. — « J'ai nourri des enfants et je les ai élevés; mais ils se sont rebellés contre moi.

L'unique dessin qui se rapporte à ce premier verset représente deux jeunes hommes menaçant et repoussant leur père.

Les trois dessins suivants ont trait au 3e verset d'Isaïe ainsi concu :

f 3. — « Le boeuf connaît son possesseur et l'âne la crèche de son maître ; mais Israël n'a point de connaissance. »

Les trois dessins explicatifs qui l'accompagnent représentent : 1° Un boeuf au milieu des pâturages;— 2° un âne devant une crèche ; 3° trois homme égarés sur un chemin désert.

L'auteur de la communication pense que ce petit meuble servait à contenir le tabac en carotte et la râpe à tabac dont les priseurs firent usage jusqu'au XVIIIe siècle.

Il pense que cette boîte fut apportée de Hollande dans nos pays par quelque militaire qui avait pris part, sous le règne de Louis XIV, aux guerres de la succession d'Espagne dont les Pays-Bas furent le théâtre.

M. Leyris lit une pièce de poésie languedocienne intitulée : Espiraciou. Sauf une ou deux expressions peut-être un peu trop françaises, cette pièce de vers est remarquablement écrite.

M. Plantier fait hommage à la Société de diverses empreintes de pierres antiques gravées, provenant de la collection de notre regretté membre honoraire, feu M. Jules Canonge.


Séance du 17 février 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

Le Secrétaire général dépouille la correspondance.

La Société a reçu une étude de M. Tomasi sur un nouveau dissolvant de l'acide plombique, qui n'est autre que l'acétate de soude additionné de quelques gouttes d'acide acétique.

La Société d'Apt communique le programme des questions qu'elle met au concours et pour lesquelles divers prix seront décernés. M. Auphan donne lecture de ce programme et le met à la disposition des membres qui voudraient prendre part à ce concours.

M. Germain, doyen de la Faculté des lettres de Montpellier, membre honoraire, adresse deux brochures, dont M. Charvet donnera l'analyse dans une prochaine séance.

M. Ollier de Marichard présente à la Société la carte archéologique du Vivarais et fait part de ses dernières recherches. Il a découvert, sous la coulée basaltique de la chaîne du Coiron, un crâne humain ou plutôt la partie postérieure d'un crâne présentant certaines particularités de conformation. Le trou occipital serait rejeté de beaucoup en arrière; de plus, en reconstituant avec le compas crânien la partie antérieure, on reconnaît que l'angle facial serait notablement moins ouvert que chez les individus des temps préhistoriques découverts jusqu'à ce jour.

Séance du 34 février 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

M. le Président communique une lettre de M. de Clausonne, annonçant la mort d'un de nos membres honoraires les plus distingués : M. Félix de La Farelle, correspondant de l'Institut, membre de l'Académie du Gard, ancien député de l'arrondissement d'Alais (1842-1848). Notre éminent compatriote, qui vier

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— 34 - de s'éteindre à l'âge de soixante-douze ans, laisse, sur l'économie sociale, plusieurs ouvrages très-remarquables, dont l'un : Du progrès social au profit des classes ouvrières, a obtenu le prix Montyon, en 1840. Il a enrichi les annales de l'Académie du Gard d'études historiques très-intéressantes. M. d'Hombres insiste surtout sur les qualités de l'homme privé; l'écrivain, l'économiste, ayant reçu les hommages mérités et publics des corps savants auxquels il appartenait. Personne ne sut se concilier autant de sympathies; il n'eut jamais que des amis, et sa mort est un deuil public pour le département qu'il a servi comme député, comme conseiller général, comme publiciste, et surtout comme homme de coeur.

Le Secrétaire général dépose sur le bureau :

1° Le programme d'un concours ouvert par l'Académie du Gard. Cette Société savante propose pour sujet de prix à décerner en mai 1873 :

Étude comparée de la production industrielle et agricole du département du Gard en 1830 et en 1810.

Les travaux des concurrents doivent être adressés à Nimes, à M. le Secrétaire perpétuel, dans les formes académiques ordinaires, avant le 1er février 1873. Le prix consistera en une médaille d'or de la valeur de 300 fr.;

2° Une circulaire de la Société des sciences industrielles de Lyon, offrant son concours dévoué et une généreuse hospitalité aux membres délégués des Sociétés scientifiques et industrielles qui se rendront à Lyon pour l'Exposition internationale et pour le congrès scientifique organisé à cette occasion ;

3° Le deuxième cahier du tome VIII de la Société des sciences physiques et naturelles de Bordeaux;

4° Une brochure intitulée le Laurium et les mines d'argent en Grèce, par M. Ledoux, membre résidant. Cette brochure, offerte par l'auteur, est extraite de la Revue des Deux-Mondes, livraison du 1er février 1872.

M. Ledoux expose l'organisation en Prusse de l'enseignement. Il constate que cette organisation toute communale dans les campagnes, diffère essentiellement du système adopté en France. La gratuité n'existe que pour les indigents. Les ministres des divers cultes ont la haute main sur cet enseignement, qui n'a pu devenir obligatoire que grâce au concours actif des membres des divers clergés. Pour l'auteur, l'enseignement gratuit, laïque et obligatoire, tel qu'on le conçoit en France, est irréalisable.


— 35 — Séance du 3 mars 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

M. le Secrétaire général remet, au nom de M. le Dr Judée, les ouvrages suivants :

1° Essai sur une nouvelle organisation de l'armée ;

2° Réorganisation de l'armée (lettre à M. le général Faidherbe);

3° De la tenue d'infanterie en campagne (lettre au ministre de la guerre);

4° Nouvelles recherches sur la circulation cardiaque ;

5° Un modèle de couvre-nuque, proposé par M. Judée au ministre de la guerre, pour garantir les soldats en campagne de l'ardeur du soleil et pour remplacer le mouchoir qu'ils mettent encore aujourd'hui sous le képi. Ce nouveau couvre-nuque présente comme principaux avantages, d'être assez adhérent pour ne pas être emporté au moindre coup de vent, d'absorber la transpiration, entretenir sur la tête, par le fait de l'évaporation, une fraîcheur relative, et de garantir parfaitement la nuque.

Séance du 9 mars 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

Les formalités voulues par le règlement ayant été remplies, l'ordre du jour appelle l'élection d'un membre honoraire et de sept membres non résidants. Sont nommés. Membre honoraire : M. de Rouville, professeur de géologie à la Faculté des sciences de Montpellier. Membres non résidants : MM. Biver, directeur des charbonnages des Bouches-duRhône; Fabre, docteur en médecine, directeur de l'établissement hydrothérapique de Lafoux ;


— 36 —

MM. Gide (Auguste), licencié en droit à Nimes ;

De Lorme (Auguste), propriétaire à Rochefort; Pradel (Alphonse), docteur en médecine à Molières; Silhol (Alfred), propriétaire à Nimes ; Thérond (Gaston), ingénieur des mines de Lalle, à Bességes.

Le Secrétaire général dépose sur le bureau une aquarelle, dont l'auteur, M. le Dr Judée, fait hommage à la Société. — Des remerciements sont votés au donateur.

La Société a reçu le sixième bulletin de la Société d'agriculture du Gard, qui contient entre autres travaux intéressants, une étude comparée de l'agriculture en France et en Prusse.

Le congrès des Sociétés savantes devant s'ouvrir à Paris vers la fin du mois, la Société délègue, pour y assister, MM. Canonville et Itschner, membres résidants.

M. de Lavit donne la description d'un appareil de son invention, qu'il nomme Manographe métallique, et destiné à enregistrer les pressions successives qui se produisent dans une chaudière, de sorte qu'il suffit de consulter une fois l'appareil enregistrant pour savoir toutes les variations de pression qui ont eu lieu dans l'espace de plusieurs heures. Un croquis et une note explicative seront annexés au procès-verbal.

M. Chabaud dit une fable charmante dont il est l'auteur. Copie de cette pièce sera soumise à la Commission du Bulletin.

Séance du 16 mars 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

Lettres de remerciements :

1° De M. de Rouville, nommé membre honoraire dans la dernière séance;

2° De MM. Gide (Auguste), Pradel et Silhol, nommés membres non résidants.

Les formalités réglementaires ayant été remplies, sont nommés membres non résidants :


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MM. Baron (Victor), ingénieur civil à Camont;

Balard (Polydore), ingénieur chimiste à Salindres ; De Lajudie (Félix), ingénieur à Bességes.

M. Ledoux communique d'intéressants détails sur les mines de soufre de Sicile, sur les procédés d'extraction et sur les moeurs des mineurs indigènes. Il y a lieu de regretter que l'auteur n'ait pu rédiger un résumé de cette attrayante communication.

Séance du 33 mars 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES , PRÉSIDENT

M. le Secrétaire général dépose le tome II (3me sér., 4me liv.) de la Revue des langues romanes. Il signale dans ce volume un article appréciant à sa juste valeur le travail de M. M. d'Hombres, sur la charte d'Alais en 1200. Il regrette avec l'auteur de l'article que le texte de la charte octroyée en 1215 n'ait point été publié avec les commentaires qu'y aurait certainement ajoutés le savant commentateur de notre histoire locale.

M. M. d'Hombres, sur l'invitation de quelques membres, développe les motifs de son silence sur ce document, relatif au vieil Alais, et en prend l'occasion pour donner des indications précieuses au sujet de vestiges aujourd'hui presque disparus, de l'emplacement de nos anciens remparts, des agrandissements successifs de la cité, de nos vieilles églises, et en particulier de l'église Saint-Jean, étudiée avec autant de soin que de compétence par M. Gros, architecte, membre résidant, qui veut bien nous donner aussi à cet égard quelques détails très-intéressants.

M. Charvet communique une lettre de M. Malinowski, membre non résidant, sur l'archéologie du département du Lot. On aurait découvert, à Cahors, des fûts de colonne, des chapiteaux, des tuiles romaines, etc., et un sanglier en bronze de 30 centimètres de longueur, remarquable par son degré de conservation et par la bizarrerie de sa forme.


— 38 — Séance du 6 avril 1873

PRÉSIDENCE DE M. CHARVET, VICE-PRÉSIDENT

La correspondance comprend :

1° Une brochure de M. Léon Clos, de Toulouse: Recherches sur le curateur de la République;

2° Une nouvelle brochure de M. Tomasi Donato, sur l'iodure plombique.

M. le Dr Plantier communique verbalement une étude littéraire, philosophique et morale sur le dernier roman d'Octave Feuillet, publié par la Revue des Deux-Mondes.

Séance du 13 avril 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

M. le Secrétaire général dépose sur le bureau :

1° Le Bulletin de la Société littéraire, historique et archéologique de Lyon; (Années 1870 et 1871.)

2° Une brochure intitulée : Essais sur l'ancienne constitution municipale de Perpignan, par M. Léon Clos, ancien magistrat; (Extrait des mémoires de l'Académie des sciences de Toulouse.)

3° Les Bulletins de la Société départementale d'archéologie et de statistique de la Drôme ; (Années 1871 et 1872, 21me livraison.)

4° Les Bulletins de la Société des sciences naturelles et historiques de l'Ardèche. (Années 1862, 1863,1864,1865, 1866, 1867,1868.)

Le reste de la séance est consacré à la discussion de diverses propositions, relatives à l'organisation de la bibliothèque, à l'acquisition d'instruments nécessaires pour faire quelques observations météorologiques, observations dont se chargerait volontiers M. Lacharme.

M. Edouard Fraissinet propose d'établir, sur les bords du


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Gardon, à un point convenable, une échelle métrique pour mesurer approximativement le débit de la rivière lors des fortes crues.

Séance du 30 avril 1873

PRÉSIDENCE DE M. CHARVET, VICE-PRÉSIDENT

M. Plantier annonce que M. Edouard Fraissinet a été chargé, par M. le maire d'Alais, d'étudier les dispositions à prendre pour mesurer le débit du Gardon, durant les crues de la rivière. M. E. Fraissinet propose d'installer l'échelle qui doit servir à cette mesure, vis-à-vis le Moulin, sur l'extrémité de la digue qui protége la rive droite. — Quelques membres pensent que le Pont du marché serait préférable.

M. Leyris donne lecture d'une poésie patoise dont il est l'auteur, intitulée : Lou mantel de mounpèro. M. le Président félicite l'auteur et le remercie de cette communication.

M. Malinowski envoie le prospectus d'un ouvrage publié par lui, sur les phosphates de chaux. La Société décide qu'elle souscrira pour un exemplaire.

M. Charvet donne lecture de la première partie d'un travail relatif aux origines généalogiques de la maison Des Hours de Calviac et de Mandajors. La lecture de la deuxième partie de ce travail important et plein de faits historiques intéressants, est remise à une prochaine séance.

Séance du 37 avril 1872

PRÉSIDENCE DE M. LE Dr AUPHAN, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL

M. le Dr Auphan, président, donne communication de l'envoi d'une brochure de M. Tomasi, sur une combinaison de bioxyde de chrome et de dichromate potassique, dichromate kalichromique, et du programme de l'Exposition universelle et internationale d'économie domestique, en 1872, à Paris.


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M. Duclaux-Monteil communique un rapport fait à l'Académie du Gard par M. Teulon, ancien premier président de la Cour d'appel de Nimes, sur deux opuscules de M. Edouard Bondurand : La statue de Bastiat et l'Amour dans Homère.

Ces deux opuscules ont été lus pour la première fois à la Société scientifique et littéraire d'Alais, qui les a insérés dans ses Bulletins. Ce suffrage de notre Société est consacré par l'éminent rapporteur de l'Académie du Gard.

M. Teulon, collègue de Frédéric Bastiat à l'Assemblée constituante de 1848, trouve les appréciations de M. Bondurand, sur le caractère et les écrits du célèbre économiste, parfaitement justes. « Les opinions républicaines de Bastiat, » dit M. Teulon, trouvaient sans doute de nombreux con» tradicteurs ; mais dès qu'ils l'avaient connu, ces contradic» teurs se changeaient bientôt en amis. » Après de longues disputes, ses idées ont enfin prévalu, et il est sorti vainqueur de sa double lutte contre le socialisme et contre le protectionisme. C'est le jugement porté par M. Bondurand, dont M. Teulon loue les qualités de langage comme économiste. « Son style, » dit-il, n'est pas seulement pur, correct, élégant; il est vif, » net, coloré, transparent, et laisse voir ses pensées dans toute » sa lumière. Il est, de plus, pénétrant, et au besoin il sait être » émouvant. »

Passant au second opuscule de M. Bondurand, l'Amour dans Homère, M. Teulon fait remarquer que lorsqu'on aborde un pareil sujet, il faut commencer par répudier toutes les idées modernes et se retremper aux sources mêmes de l'antiquité. « Rien de commun, dit-il, entre les héroïnes de Shakspeare et » celles d'Homère. Et cependant que d'études attrayantes n'y » a-t-il pas à faire sur ces dernières ! Quelle grâce ! quelle » vérité! on pourrait même dire quelle pudeur ! bien que si » différente de la pudeur d'aujourd'hui. » — M. Bondurand passe successivement en revue, ajoute M. Teulon, les diverses femmes des poèmes homériques : Hélène d'abord; la reine des dieux elle-même : la puissante Junon, puis Nausicaa, Pénélope, enfin la grande figure d'Andromaque... Que de regrets touchants dans Hélène ! quelle émotion virginale dans Nausicaa à l'aspect d'Ulysse ! quelle sainte fidélité dans Pénélope ! quelle grandeur morale dans Andromaque.

En terminant, M. Teulon signale chez notre jeune confrère


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une aptitude marquée à la critique dans les choses d'art, de haute littérature et de philosophie sociale. « L'art surtout, dit » M. Teulon, il en possède la langue riche et nombreuse; il en » a tous les instincts délicats et profonds. Qu'il poursuive » donc cette voie avec persévérance; il y trouvera, avec le » succès, l'accomplissement de sa vocation. »

La Société apprend avec plaisir que l'Académie du Gard, à la suite de ce rapport, a nommé M. Edouard Bondurand associé correspondant.

Séance du 4 mai 1873

PRÉSIDENCE DE M. CHARVET, VICE-PRÉSIDENT

Lecture et adoption du procès-verbal de la séance précédente.

Correspondance : 1° Les deux derniers Bulletins de la Société d'agriculture du Gard ; 2° programme des questions mises au concours par la Société industrielle de Lyon.

Les formalités réglementaires ayant été remplies, M. Babilot, directeur des mines de Portes, est élu membre non résidant.

M. Plantier offre deux ouvrages de M. Bonnefon, pasteur à Alais : l°un Catéchisme ; 2° une Histoire des grands chrétiens. M. Canonville communique le compte-rendu de la dernière session du Congrès des Sociétés savantes, auquel il avait pris part avec M. Itschner comme délégué de la Société. Il donne l'analyse sommaire des mémoires présentés et ajoute quelques détails sur les travaux qui lui ont paru le plus intéressants.

En voici l'énumération :

Recherches de paléontologie et de stratigraphie dans l'Hérault, le Gard, l'Aveyron et le Lot, par M. Bleicher (Colmar).

Etudes sur les formations géologiques des Pyrénées, par M. Leimerye (Toulouse).

Résolution d'équations du 3e et 4e dégré, par M. Lucas (Amiens).

Description de l'Iconarithme, instrument destiné à faciliter l'étude des images fournies par les lentilles, par M. Monoyer (Strasbourg).


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Travail de géologie et de géographie physique du Sahara, par M. Pomel (Alger).

Description d'un appareil destiné à constater l'existence, la force et la direction des courants sous-marins, par M. Léchaut (Havre).

Recherches sur le genre Lemanea, par M. Sirodot (Rennes).

De l'eau de mer au point de vue médical, par M. Sicard (Marseille).

De la houle, des roulis, des grains, par M. Bertin (Cherbourg).

Recherches sur la betterave, par M. Corenwinder (Lille).

Description d'un nouvel hygromètre, par M. Georges Sire (Besançon).

De l'ozone obtenu en assez grande quantité, par M. Houzeau (Rouen).

De l'insalubrité des rivières et de l'assainissement des eaux industrielles, par M. Girardin (Bourges).

Description d'un appareil destiné à rendre sensibles les lois de la réflexion des ondes, par M. Chautard (Nancy).

Découverte à Menton d'un squelette humain presque entier, dans la position accroupie, par M. Rivière.

Exposition des particularités que présentent les feuilles des juncus, par M. Duval-Jouve (Montpellier).

Recherches archéo-paléontologiques du terrain quaternaire parisien, par M. Reboux (Paris).

Détails sur les gisements de phosphate de chaux du Quercy, par M. Malinowski (Cahors).

Observations pluviométriques faites à Athènes, et essai de carte pluviométrique du midi de la France, par M. Raulin (Bordeaux).

Etat actuel de la question des aurores boréales, par M. Fron.

Etude sur l'île de Madagascar, par M. A. Grandidier.

Travaux d'optique, de M. Boussinesq (Gap).

Travaux d'électricité, de MM. Crova (Montpellier), Raoult (Grenoble).

Etude sur les moyens d'améliorer la culture en Sologne, par M. Masure (Orléans).


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Carte du département de l'Ariége, par M. Mussy (Foix). De la greffe cutanée, par M. Ollier (Lyon). De l'éclipsé de soleil en décembre 1810, par M. Janssen (Paris).

Travail de M. Tardieu (Bordeaux) sur les Moyens d'assurer la sécurité des voyageurs en chemin de fer. — On y trouve une critique du service de la voie, des chaînes d'attelage qui relient les wagons entre eux ; au cas de rencontre, l'énoncé d'un moyen pour séparer les deux locomotives du reste du train, laissant celles-ci venir se heurter et diminuant par là le choc que reçoivent les wagons ; enfin la description d'appareils électriques propres à relier entre elles toutes les parties du train.

Travail de M. Lagout (Troyes) sur l'Esthétique nombrée. — M. Lagout développe le principe suivant : « Dans tous les arts, les rapports les plus simples produisent les sensations les plus agréables. » Il cherche à le prouver en étudiant les divers monuments consacrés par le temps et en montrant que toutes les parties qui flattent notre vue sont entre elles dans des rapports musicaux.

Exposé d'un nouveau système monétaire, par M. Poncet (Romorantin). — Après avoir montré les inconvénients de la multiplicité des systèmes monétaires, et les imperfections du nôtre, l'auteur ajoute que, pour faire adopter le sien universellement, il en a emprunté la base au système décimal. Cette base est l'as qui vaut 10 grammes ; les divisions sont le décias, le centias, le millias. II n'admet plus que dix types de monnaie, avec des formes particulières pour le bronze, l'argent et l'or :

Bronze, disque avec vide triangulaire ;

Argent, disque cannelé avec vide quadrangulaire;

Or, disque dentelé avec vide circulaire.

Il termine en montrant que les monnaies étrangères sont presque toutes des divisions entières de l'as.

M. le Dr Auphan présente l'analyse et la critique d'un recueil de fables dont l'auteur, M. Louis de Combettes, est connu personnellement de notre collègue.

M. Louis de Combettes est un homme de coeur, profond observateur, connaissant les hommes et les choses, et ayant voulu faire profiter sa famille, ses amis, des connaissances qu'il


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avait acquises. Il a pensé que la fable était certainement la forme la plus pittoresque pour donner un corps à ses impressions, une sanction morale à ses préceptes et à ses conseils. Il n'a cherché à imiter personne, ni l'inimitable Lafontaine, ni le doux et pastoral Florian : il s'est contenté d'être moraliste. Ses fables sont toutes frappées au coin du bon goût, de la simplicité et de la véritable philosophie. Aussi, ne sont-elles point écrites pour des enfants dont la jeune intelligence comprendrait trop difficilement la haute portée morale du récit.

Dans beaucoup de ses apologues, l'auteur laisse parler son coeur, et, s'il ne sait pas toujours être bref, s'il se complaît peut-être un peu trop à reproduire une idée sous diverses formes, il ne cesse jamais d'être vrai, sentimental, moraliste. M. Auphan en donne pour preuves ses charmants récits intitulés : la Rose et l'Oranger, le Rossignol et le Poète, la Colombe et la Pie grièche, l'Hymen et l'Amour, etc., etc., remplis de grâce, de douceur et de sentiment, et où le fond fait toujours heureusement oublier les légères imperfections de la forme.

La Bergère et le Ruisseau, le Chêne et le Passant, le Loup, l'Epervier et l'Hirondelle, le Bucheron et le Chêne, etc., se rapprochent beaucoup plus du genre classique par la nature et la brièveté de la narration.

L'originalité de l'auteur se dégage d'une manière complète dans le Souhait, la Bru et la Belle-Mère, les Emigrants, le Loup philosophe, le Torrent et le Ruisseau, le Frêlon, le Lion endormi, le Tyran, la Ménagerie, etc. Quelques-unes de ces fables sont de véritables petits poèmes épiques où l'on trouve souvent des allusions politiques très-heureuses, et toujours une rectitude morale peu commune.

En terminant cette courte analyse, le Dr Auphan s'excuse de son inexpérience en matière de littérature, ce qui l'a forcé à laisser dans l'ombre de véritables beautés littéraires ou morales. Mais il espère avoir donné le désir de lire l'oeuvre si utile, si moralisatrice, de M. de Combettes.

Après cette communication, quelques membres demandent le dépôt dans la bibliothèque du volume de M. de Combettes, pour qu'il puisse être mis à la disposition des sociétaires. Le Dr Auphan, ne voulant point se dessaisir de l'exemplaire qui lui a été envoyé par l'auteur, se charge d'en réclamer un au nom de la Société.


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PRÉSIDENCE DE M. CHARVET , VICE-PRÉSIDENT

Correspondance : 1° Tome IX des mémoires de la Société archéologique du midi de la France ;

2° Recueil de l'Académie des jeux floraux de Toulouse;

3° Quatre pièces de vers adressées par M. Auguste Gide, membre non-résidant.

M. Plantier, chargé par l'auteur d'en donner lecture, prie M. le Secrétaire général de vouloir bien le remplacer.

Des remerciements sont unanimement votés à notre collègue de Nimes, et les pièces adressées par lui à la Société sont remises au Comité de publication.

M. Charvet remet au nom de M. Girod une belle vue photographique d'Alais. Il est chargé, par la Société, de remercier l'habile photographe.

Les formalités voulues par le règlement ayant été remplies, M. le Dr Guynei, de Barjac, est élu membre non résidant.

M. le Dr Auphan lit, sur les eaux d'Euzet, un travail dans lequel il examine quelques-unes des propriétés les plus remarquables de ces sources. A cause de son intérêt local, ce travail sera inséré dans le Bulletin.


COMPTE-RENDU

DES

TRAVAUX DE LA SOCIETE

Pendant l'année 1871

PAR

M. EUGÈNE GAUJOUX

Secrétaire général LU DANS LA SEANCE GÉNÉRALE DU 13 JANVIER 1872

MESSIEURS ,

Je dois, avant toute chose, vous épargner une déception en prévenant une attente à laquelle j'ai vainement essayé de répondre. J'aurais voulu signaler, avec l'étendue d'appréciations qu'elles méritent, les études intéressantes et variées qui ont occupé, cette année, nos réunions. Mais pareille tâche, légère et facile à d'autres, a brusquement effrayé un esprit comme le mien, qui ne s'est jamais arrêté que sur quelques points du domaine des lettres et qui, tout entier au plaisir et au devoir d'écouter et d'apprendre partout, avait à craindre de ne savoir pas même louer avec à-propos. Si le cadre où se renferme aujourd'hui votre rapporteur vous paraît justement amoindri, vous en connaîtrez du moins tout de suite la cause.

Parmi les communications, si intéressantes à divers titres, dont nous avons eu le privilége, je choisis tout d'abord celles qui, pour des motifs différents, après avoir revêtu la forme d'une causerie intime et pleine de charme, n'ont pu décider leurs auteurs à les livrer à l'impression. Nous n'aurons donc point, Messieurs, la satisfaction de les trouver reproduites dans notre Bulletin, et alors même que le souvenir en demeure vivant chez tous, il ne saurait me dispenser de vous en dire quelques mots; il m'invite peut-être à leur consacrer ma première page.

Le service des eaux de Paris pendant le siége (de septembre 1870 à février 1871), tel est le sujet de l'entretien si lumineux


-47et

-47et plein d'actualité, dont M. Nouton, ingénieur au corps des ponts-et-chaussées, s'est acquitté avec tant de bonne grâce. Il nous a fait connaître d'abord les moyens qu'on avait dû employer, à Paris, pour surmonter les difficultés multiples et spéciales qui s'opposaient à l'alimentation régulière des eaux destinées aux besoins domestiques ou aux usages publics. Il nous a ensuite montré par quels prodiges de prévoyance et d'activité, cette immense population, qui consomme, en temps ordinaire, pendant la saison d'été, un peu plus de deux cent cinquante mille mètres cubes d'eau par vingt-quatre heures, avait été soustraite aux terribles conséquences d'une interruption, même passagère, dans l'ensemble de son service hydraulique. Or, l'importance de ce service est telle, qu'elle doit suffire à la moitié environ de la quantité d'eau consommée. Cent trente-deux mille mètres cubes sont, en effet, amenés par les canaux de l'Ourcq, l'aqueduc de la Dhuis, etc., etc., et cent vingt mille par les appareils hydrauliques. Vous avez compris et loué avant moi, Messieurs, la haute intelligence, l'anxieuse sollicitude et le dévouement qu'une pareille mission suppose chez ceux qui l'avaient acceptée et remplie, et M. Nouton, n'oubliant que lui-même, nous a laissé oublier qu'il est de ceux qui ont présidé à toutes les opérations et les ont conduites, quand ils ne les ont pas inspirées. Eu égard à leur importance, mais avec la pensée de revenir à propos sur mes pas, je m'attache tout de suite aux deux communications que M. Ledoux, le savant directeur de notre Ecole des mines d'Alais, nous a faites, à quelques mois d'intervalle, et toujours sous forme de causerie. — Dans la première, il nous a rendu compte de quelques expériences qui se poursuivent sur un corps, peu connu en France jusqu'à présent, la dynamite, substance explosible et qui semble appelée, en dépit de bien de préventions, à devenir un agent précieux, en se prêtant docilement aux applications nombreuses que la science ne manquera pas de lui demander. Dans l'état actuel, la dynamite a, pour les travaux extérieurs, un pouvoir coupant, et, pour les travaux intérieurs, son effet utile est incontestable pour abattre avec économie les roches fissurées et celles que l'eau mouille constamment. M. Ledoux, qui ne parle et ne juge qu'après avoir vu par lui-même, nous a décrit minutieusement l'usine que M. Barde a établie à Port-Vendres, pour fabriquer en grand et livrer à l'industrie, la dynamite dont il nous a en dernier lieu fait connaître les transformations successives. — Dans sa dernière communication, M. Ledoux, qui venait de remplir, en


Grèce, une mission importante aux mines de Laurium, nous a fait l'historique de ces mines argentifères, activement exploitées dans les temps anciens, et abandonnées plus tard pendant des siècles, pour être reprises il y a quelques années à peine, par une société Franco-Italienne. C'est dans l'étude comparative du mode d'exploitation des deux époques, et incidemment dans une foule de détails se rattachant à la Grèce, que M. Ledoux a montré un remarquable talent d'exposition. Il n'est pas aisé d'analyser une communication de cette importance, qui est restée jusqu'au bout une véritable causerie, avec ses détours, ses caprices, ses surprises, ses rencontres heureuses. Espérons, Messieurs, que sous une forme ou sous une autre, ici ou ailleurs, cette attachante étude n'est pas condamnée à rester pour nous un simple souvenir (1).

A leur tour, MM. Garreau, Lacharme, Plantier, Maurin, le Dr Judée, Castanier et le Dr Auphan ont su, par des communications pleines d'à-propos, relever l'attrait de nos séances hebdomadaires et en bannir une monotone uniformité.

M. Garreau nous a initiés à la richesse minéralogique des mines de Mercoirol, et notre curiosité a été particulièrement excitée par les remarquables échantillons de quartz, limpide ou enfumé, et dont la majeure partie contient ce que les minéralogistes appellent la goutte d'eau.

M. Lacharme, notre studieux collègue, nous a entretenus des essais au chalumeau, à l'aide du borax, et a complété sa lumineuse exposition par quelques expériences, dont le succès a été complet. Nous avons eu sous les yeux des perles diversement colorées, suivant les métaux qui en formaient la base.

Avec un esprit d'initiative peu ordinaire, M. Plantier a touché, comme toujours, àbien de points intéressants. Il nous serait à coup sûr fort difficile de l'y suivre ; mais, tous nous lui savons gré de l'empressement avec lequel il nous communique, suivant les circonstances, et avec l'aimable abandon d'un homme qui pense tout haut : un jour, le résultat de ses observations, un autre jour, le fruit de ses lectures. Tout dévoué à la prospérité de l'oeuvre que nous poursuivons en commun, il la suit partout du coeur et des yeux.

M. Maurin, qui a su de bonne heure partager son temp

(1) Cette étude a été publiée depuis dans la Revue des Deux-Mondes, livraison du 1er février 1872.


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entre le culte de l'art et celui de l'esprit, nous a initiés aux progrès chaque fois plus merveilleux de la photographie, et nous a présenté ensuite, en y mettant l'empreinte de ses convictions et de sa parole, les idées de M. Simiot à l'endroit de notre organisation militaire.

Sur le même sujet, mais en se plaçant sur un terrain à la fois plus général et plus pratique, M. le Dr Judée s'est trouvé tout-à-fait d'accord avec M. Maurin. Pour lui aussi, le service obligatoire est la base de la réorganisation de l'armée, et il s'est offorcé de montrer par quel fonctionnement régulier, après cinq ans de service effectif, dont deux ou trois se passeraient rigoureusement sous les drapeaux, notre pays pouvait se promettre une puissante armée, toujours prête à entrer en campagne et en mesure de ressaisir dans le monde, le glorieux prestige qui peut-être ne s'est voilé un jour que pour briller ensuite d'un éclat plus vif.

Je traduis vos impressions, Messieurs, en louant, chez M. Léopold Castanier, la sûreté de jugement, la modération de langage, l'aménité de caractère. Et tout cela, vous le retrouvez toujours dans les questions où il intervient. En l'entendant il y a quelques jours à peine vous développer quelques considérations d'économie politique sur les bons de monnaie, vous avez regretté qu'un surcroît d'occupations le tint parfois si longtemps éloigné de nos séances.

A une foule de qualités heureuses dont j'aurais à le louer s'il n'était pas là, M. le Dr Auphan ajoute le mérite d'une assiduité rarement en défaut, et d'une participation très-active à toutes les questions nées du moment.

J'aborde enfin, Messieurs, les travaux dont la place a été marquée par vous dans notre Bulletin, et qui me dispensent ainsi d'une analyse spéciale, devant laquelle j'aurais trèssagement reconnu mon insuffisance.

A en juger par l'accueil que vous lui avez fait, le dernier travail de M. Parran a une importance capitale, surtout pour notre contrée. Une coupe stratigraphique générale du département du Gard est sans doute un travail tout spécial que peuvent seuls apprécier les hommes pompétents. Laissez-moi donc traduire votre pensée, en répétant après vous que c'est là une oeuvre substantielle, méditée et écrite avec scrupule, et qui résume des recherches minutieuses, une vaste et profonde érudition. Cette coupe écrite, utile à la fois aux théoriciens et aux praticiens, est le complément naturel de la carte géologique


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d'Emilien Dumas. Elle comble une lacune, puisque le texte n'a pas paru, du vivant de l'illustre géologue, et que rien n'en indique la prochaine publication.

Les considérations théoriques et pratiques sur la maladie de la vigne, que nous devons à la plume de M. Romant, de Remoulins (Gard), s'adressent, dans un autre ordre d'idées, à des juges qui pourront seuls leur assigner le rang et la valeur qu'elles méritent. Mais, ce travail n'eût-il d'autre résultat que de répondre aux préoccupations du grand nombre, dans nos contrées méridionales, justifie par cela même l'impression et la publicité que vous leur accordez.

A côté de ce travail, vous retrouverez, Messieurs, une consciencieuse Etude, de M. Louis Chamboredon, sur les établissements métallurgiques des Phéniciens, et particulièrement sur quelques villes ou bourgades de la Gaule, auxquelles ces établissements ont donné naissance. A Dieu ne plaise, Messieurs, que je veuille intervenir dans le débat et préjuger ce qu'en penseront les érudits ! Mais pourquoi ne dirais-je pas qu'elle me semble jeter un jour nouveau et plus clair sur la dénomination d'Alais, trouvée un peu subtilement peut-être dans le mot latin Ala ! Notre ville, à tout prendre, ne perdrait rien à remplacer son aile blanche par les attributs de l'industrie. C'est l'industrie qui lui a donné sa rapide importance et c'est elle qui longtemps assurera sa prospérité.

Une notice sur l' Ecole de droit d'Alais au XIIIe siècle, due à la gracieuse prévenance de M. de Rozières, inspecteur général des archives, avait à divers titres éveillé la curiosité de M. Dadre, qui, avec une délicatesse de touche dont il a le secret, a tracé l'historique de cette école et en a fait une des pages les plus intéressantes de notre Bulletin.

Sous ce titre piquant, l'Amour dans Homère, M. Bondurand nous a donné à son tour une étude charmante, où se retrouvent toutes les qualités de son esprit. Le style y est abondant, pittoresque, ingénieux en ressources, habile à tout dire, tout plein de coquetteries mélodieuses. En l'écoutant, nous avons involontairement répété avec André Chénier :

Trois mille ans ont passé sur la cendre d'Homère, Et, depuis trois mille ans, Homère respecté Est jeune encor de gloire et d'immortalité.

Ce poétique souvenir, Messieurs, m'invite à mentionner tout


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de suite la place que la poésie a su prendre au milieu de nous. M. Frédéric Francezon et M. Lisbonne nous ont montré cette année que la veine de l'inspiration lyrique est loin d'être épuisée chez eux. Une élégie sur le style ancien, imitée de Tibulle, puis une Nuit de décembre, ont valu à M. Lisbonne de sincères félicitations, et vous avez applaudi avec non moins de chaleur aux accents toujours vrais de la muse de M. F. Francezon : la Liberté et le Coin du feu. Cette dernière pièce, dédiée par le poète à son ami M. Maximin d'Hombres, a trahi, chez notre sympathique président, et le charme de son esprit et l'éternelle jeunesse de son coeur.

M. Leyris, dans cette langue métallique et sonore du Languedoc qu'il parle si bien, nous a lu, cette année, un petit chef-d'oeuvre de sentiment et de grâce : Margarida, où il nous semble avoir mis toute son âme. Le sujet d'ailleurs en est admirable : une jeune fille, éperdue d'amour, trahie dans ses espérances, devient folle de désespoir et cherche l'oubli et la mort au fond d'un gouffre. Dès le début de sa pièce, M. Leyris vous saisit par des détails charmants. Autour de Margarida tout est amour, tout est lumière, tout est joie; mais à mesure que l'action marche, l'ombre se fait, et la tristesse vous gagne le coeur. Nous ne pouvons trop encourager, Messieurs, cette poésie, profonde à la fois par le sentiment, et pure par la forme dont M. Leyris possède tous les secrets.

Cette revue de nos travaux, Messieurs, n'a laissé, si je ne m'abuse, qu'un oubli, mais il est volontaire. J'ai retardé à dessein et le plus possible, le moment où j'éveillerais, chez vous, le souvenir d'Emilien Dumas ; sa mémoire et son oeuvre ne voulaient point être mêlées à l'agitation qu'il n'a point connue pendant sa vie. Notre collègue, M. Magnon, vous a raconté naguère cette vie, si noblement et si utilement dépensée. Grâce à lui, Messieurs, il vivra dans nos annales : il n'est pas mort dans nos coeurs. Ce qu'il y a d'absent en lui peut-il en effet se comparer à ce qui nous reste de lui? Non, tout ce qu'il y avait là de mortel n'est plus, l'être matériel a péri, Emilien Dumas vit encore !

Tel est, Messieurs, le résumé bien aride de vos travaux. Laissez-moi, en finissant, vous remercier de l'attention que vous avez prêtée à une lecture dont la sécheresse contraste avec les deux remarquables discours que vous avez entendus, et les sujets intéressants qui vont suivre.


RAPPORT

lu à la

SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE & LITTÉRAIRE D'ALAIS

(SÉANCE DU 20 JANVIER 1872)

Par M. G. CHARVET

Vice-Président

et rapporteur au nom de la commission chargée de faire exécuter des fouilles archéologiques aux environs de L'ÉTABLISSEMENT THERMAL DES FUMADES (1)

MESSIEURS ,

Les premiers travaux auxquels s'est livrée notre Société, dans le domaine archéologique, ont été naturellement dirigés vers les fouilles intéressantes de la Grotte des Morts de Durfort, dont les gisements importants vous avaient été signalés dès nos premières réunions et avant même que la Société d'Alais fût définitivement constituée.

Ces fouilles, accomplies sous la direction de MM. Cazalis de Fondouce et Ollier de Marichard, furent, vous le savez, Messieurs, l'objet de curieuses communications dont vous avez gardé le souvenir ; et le rapport dressé à ce sujet par nos doctes confrères reçut un accueil bienveillant parmi les Sociétés savantes les plus accréditées.

Tout en conservant aux études préhistoriques le rang qu'elles se sont acquis auprès de vous et qui leur appartient légitimement, vous n'avez cependant pas cru devoir, Messieurs, limiter à ces recherches les travaux de vos co-associés. Votre attention s'est portée sur les vestiges répandus à la surface de notre sol, et se rattachant à des époques moins lointaines que peut éclai(1)

éclai(1) Commission, nommée dans la séance du 7 août 1869, se compose de MM. Louis des Hours, Frédéric Larguier et G. Charvet.


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rer l'histoire ; votre sollicitude s'est éveillée en faveur de ces traces si nombreuses parmi nous de la période gallo-romaine ; et c'est à cette intention que, dans votre séance du 7 août 1869, vous avez nommé une Commission chargée de faire opérer des fouilles dans le voisinage des sources sulfureuses des Fumades, où des découvertes archéologiques venaient récemment d'avoir lieu.

Déjà, notre excellent confrère, M. le Dr Larguier, médecininspecteur de la station des Fumades, y avait recueilli quelques débris, et, grâce à sa connaissance approfondie de la localité, la Commission dont il fait partie a pu, sans trop de tâtonnements, opérer, au mois de juillet 1870, des recherches qui, sans être très fructueuses, ne sont cependant pas dépourvues d'intérêt.

Toutefois, Messieurs, persuadée que des explorations entreprises sur un seul point ne pouvaient amener que des découvertes relativement bornées, la Commission n'a pas cru se détourner du but que vous lui aviez assigné en élargissant, sur des régions circonvoisines également intéressantes, le cercle de ses investigations.

C'est au nom des collègues auxquels vous avez bien voulu m'associer que je viens, Messieurs, vous rendre compte aujourd'hui du résultat des recherches opérées, soit individuellement, soit collectivement, par les membres de la Commission que vous avez instituée.

Sur la limite orientale de l'arrondissement d'Alais, entre le défilé de Tharaux et celui des Angoustrines, se dresse, dans la direction du nord au sud, une chaîne imposante, coupée à pic à l'aspect du levant, et formant l'une des ramifications les plus importantes de la ligne de faîte qui sépare la vallée du Gardon de celle de la Cèze.

De la crète de cette chaîne se détachent, en forme de lobes, six dentelures principales, remarquables par leur conformation singulièrement uniforme et désignées dans le pays sous les noms de Ranc-de-Fons (489m), Serre-d'Allègre ou de SaintSaturnin, Ranc-de-Gàuto-Fracho (356m), Mont-Lansac (319m), Serre-de-Suzon ou Ranc-de-Sant-Pèile (300m) et Serre-de-Bouquat (631m).


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Cette chaîne est limitée au nord par l'Auzonnet, qui descend de Portes et se jette dans la Cèze en face de Rivières-de-Theyrargues ; au midi et au couchant, par l'Alauzène (1), qui prend sa source à Seynes et se réunit à l'Auzonnet près du hameau d'Auzon ; au levant par les confins de l'arrondissement d'Uzès.

Au sud du col de Angoustrines, non loin du village de SaintJust, s'ouvre la vallée de la Droude, rivière torrentueuse séparée de l'Alauzène par une chaîne de collines peu élevées, et dont les eaux bourbeuses coulent du levant au couchant d'abord, puis du nord au midi à partir de Méjeannes-lez-Alais, et se jettent dans le Gardon un peu en aval de Brignon.

C'est sur la surface de la région occupée par les bassins de ces trois cours d'eau et présentant dans son plus grand développement, c'est-à-dire du nord au midi, un parcours d'environ 30 kilomètres, que l'archéologue découvre à chaque pas des traces irrécusables de l'occupation celtique et de la domination romaine qui lui succéda (2).

Nous n'avons pas compté, sur cette portion de l'arrondissement d'Alais, moins de treize points différents sur lesquels il est permis de constater des traces d'une agglomération galloromaine plus ou moins importante. Nous citerons particulièrement les Fumades, Arlinde, Auzon et Boisson dans la commune d'Allègre ; Cals, dans celle de Navacelle ; Suzon qui dépend de Bouquet ; Brouzet, Seynes ; Vié-Cioutat, sur les limites de Mons et Monteils ; Euzet ; Carias près de SaintEtienne-de-l'Olm, et enfin le hameau de Lascours près de Cruviers et le Serre de Brienne à proximité de Brignon.

A l'époque gallo-romaine, ces divers centres de population communiquaient entre eux par des voies secondaires qui les reliaient aux villes les plus importantes de la contrée :

1° La voie de Nemausus à Albenate (de Nimes à Aubenas) qui franchissait le Gardon au-dessus du pont Saint-Nicolas, se bifurquait à Sainte-Anastasie (Marbacumj, se dirigeait d'un côté vers Uzès, Valérargues, Lussan et Barjac ; de l'autre, suivait parallèlement la rive gauche du Gardon, par Saint-Chaptes, Moussac, Brignon ou Brienne, Cruviers, Lascours, et se reliait à Ners avec la route de Nimes à Gabalum.

(1) Ou la Lauzène, que l'on appelle vulgairement la Lauso dans le pays.

(2) Voyez la carte ci-après, planche n° 1.


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2° La voie d'Uzès à Alais, passant près de Barron, Euzet, Monteils, Vié-Cioutat et Méjeannes-lez-Alais.

3° La voie d'Uzès à Saint-Ambroix, par Seynes, les Angoustrines, Brouzet, Navacelle et Auzon.

Parmi ces localités diverses, quelques-unes exigent une mention particulière ; ce sont celles de Suzon, Seynes, ViéCioutat et Brienne.

Dans un remarquable mémoire publié en 1851 par l'Acadédémie du Gard (1) le capitaine Colson, s'inspirant des études de notre savant confrère M. E. Germer-Durand, et discutant les opinons émises par Ménard en 1748, par M. Walkenaer en 1839 et M. L. Renier en 1849, sur le texte d'une inscription lapidaire découverte à Nimes en 1747, et conservée au Musée de cette ville ; le capitaine Colson, disons-nous, croit pouvoir identifier les localités qui précèdent avec celles qui sont désignées dans l'inscription sous les noms de SEGUSTON, STATUMAE, VATRUTE, et BRIGINN (2).

Vous n'ignorez pas, Messieurs, que cette opinion a été vaillamment combattue par notre excellent confrère, M. Chamboredon, dans un mémoire imprimé dont il a fait hommage à la Société : il ne nous appartient donc pas de nous prononcer sur un point aussi délicat (3)

(1) Mèm. de l'Acad. du Gard. (Année 1851, p. 75-135.)

(2) Cette inscription est ainsi conçue :

ANDVSIA BRVGETIA TEDVSIA VATRVTE

VGERNI

SEXTANT BRIGINN STATVMAE VIRINN VCETIAE SEGVSTON

(3) M. Chamboredon fait ingénieusement remarquer que les doux noms de localités UGERNI et UCETIAE, inscrits en grosses lettres et placés un peu en dehors des autres noms de lieu mentionnés sur l'inscription en plus petits caractères, ont la forme du génitif, tandis que les seconds ont celle du nominatif. Il conclut de cette double observation que les noms de forme génitive étaient les chefs-lieux des groupes de noms inscrits au-dessous d'eux, et qu'il manquerait ainsi à l'inscription le nom du chef-lieu duquel dépendait le premier groupe qui comprend Anduze.

Pour quiconque a vu l'inscription au Musée de Nimes, il ne peut cependant y


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La commune d'Allègre, qui fait partie du canton de SaintAmbroix, se compose de la réunion de six localités différentes : 1° le hameau d'Allègre proprement dit, situé sur le serre du

avoir lieu de supposer qu'il existait au-dessus d'Anduze un nom de chef-lieu : la partie supérieure de l'inscription étant complète. Cette inscription est en effet gravée sur la face antérieure d'un prisme rectangulaire de marbre gris veiné de blanc que couronne une frise circulaire évidemment destinée à supporter la statuette de quelque divinité.

On ne peut donc admettre que les deux groupes de noms qui subsistent en entier à la partie supérieure de l'inscription indiquent une division administrative ou civile ; car, fait judicieusement observer M. Léon Rénier, « la situation de " celles de ces localités dont lès noms modernes sont connus ne se prête point à " cette conclusion. » Comment croire, en effet, que dans ce petit pays des Volsques Arécomiques, UGEBNUM ou Beaucalre fût le chef-lieu d'un district comprenant Anduze ? Comment admettre que Sextantio, situé près de Montpellier, fit partie de l'arrondissement d'Uzès ? (*)

« En général, dit le capitaine Colson, toutes les fois que, dans une vallée, le » cours d'eau porte un nom reproduit avec différentes modifications dans les » appellations de localités, on peut croire à une dénomination plus ancienne, » commune à tout le canton. »

C'est en se fondant sur cette observation que le savant archéologue a été conduit à reconnaître le SEGUSTON de l'inscription nimoise dans l'oppidum antique, dont le pied est baigné par le Séguisson et sur le versant duquel s'élève le hameau de Suzon. Le même raisonnement lui a donné lieu de considérer l' oppidum de Vié-Cioutat, situé sur le territoire de Mons et contourné par la Droude, comme étant le VATRUTE, de l'inscription précitée.

Il nous est toutefois impossible d'admettre, avec le capitaine Colson, que ViéCioutat ou Vatrute et Brethmas sont des lieux identiques : la colline de Brethmas (**) contre laquelle est adossé le village de Saint-Hilaire et où l'on retrouve des vestiges gallo-romains, étant éloignée de Vié-Cioutat d'au moins six kilomètres.

(*) M. Chamboredon fait remarquer que Pomponius Méla place les Sextani dans la portion du territoire d'Arles qui s'étendait jadis sur la rive droite du Rhône, ce qui viendrait à l'appui de son opinion.

(Voir la notice de M. Chamboredon sur l'inscription de Nimes, page 4.) ;

(**) M. Maximin d'Hombres pense que le nom de Brethmas pourrait dériver du gaulois brett, bois, planche, éclisse, servant à la fabrication des bretos ou hottes montagnardes, et il y aurait quelque raison de supposer que cette fabrication était une industrie du pays.

On trouve à proximité de Remoulins, sur la limite du territoire de Castilhondu-Gard, des vestiges d'un ancien hameau gallo-romain désigné sous le nom de Breton ou Mas-de-Breton, et dont le nom a peut-être la même origine que celui de Brethmas. Ce lieu, situé sur le parcours de la voie romaine de Nimes à Alba-Helviorum, près du ruisseau de la Valliguière, sur un point de


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même nom; 2° le hameau d'Auzon, situé sur la rive gauche de l'Auzonnet ; 3° celui de Boisson ; 4° celui d'Arlinde, sur la rive droite du ruisseau formé par les sources auxquelles il doit son nom (1) ; 5° la Bégude, traversé par un chemin vicinal de grande communication; 6° enfin le hameau des Fumades, qui domine les sources minérales du même nom.

Notre savant confrère, M. Chamboredon, à qui nous avons fait part des observations qui précèdent, a bien voulu nous transmettre les suivantes que nous nous empressons de reproduire, dans l'espérance qu'elles pourront jeter un nouveau jour sur la discussion :

« La forme de la pierre sur laquelle est gravée l'inscription ne permet pas d'admettre sans doute que le premier groupe y était précédé du nom d'un cheflieu ; mais, de l'absence de celui-ci, on ne peut cas induire que les quatre localités qui y sont désignées n'en avaient pas. Cette absence paraît exprimer seulement que ce chef-lieu n'avait pas participé au fait qui donna lieu à cette inscription, et c'est ce qui explique pourquoi son nom n'y figure pas.

» Nous ferons observer d'ailleurs qu'il n'est pas probable que les noms de cette inscription y aient été placés au hasard, sans ordre, et que ce soit sans motif que ceux d'Uyemum et d'Ucetia y aient été mis au génitif et gravés en plus gros caractères.

" La forme de ces deux noms dénote évidemment la supériorité des localités qu'ils désignent sur celles dont les noms sont inscrits au-dessous ; ces dernières devaient donc dépendre administrativement les unes d'Ugerni et l'autre d'Uceti.

» Si on se range à cette opinion qui nous paraît vraie, incontestable, et ressortir de la simple inspection de l'inscription, il est impossible d'admettre alors :

» Que Sextant soit le Sextantio, Sextatio ou Substantio, placé dans le voisinage de Montpellier, à 20 lieues environ d'Ugerni ;

« Que Briginn, que l'on prononçait Briguin, réponde à Brignon, qui portait le nom de Brinum ou Brinium, dans le moyen âge ;

» Qu'enfin Statumoe puisse être assimilé à Seynes, et Virinn à Vézénobres ou Vernon (dans l'Ardèche).

« Il fallait nécessairement que ces quatre localités fussent placées dans le voisinage d'Ugerni, puisqu'elles en dépendaient. C'est ce qui nous a engagé à leur assigner ces positions plus en rapport avec le sens de l'inscription et à

la vallée où l'eau du ruisseau demeurait autrefois stagnante sur une assez vaste étendue couverte d'oseraies, a pu être jadis un centre de fabrication habité par une petite colonie de vanniers.

M. Maxim in d'Hombres considère aussi comme probable que le nom de Brethmas (le Berthomates ou Bretomansus des vieilles chartes) pourrait indiquer, soit que le Mansus primitif était construit en planches, soit qu'il était établi dans un pays couvert de bois. — Maximin d'HOMBRES, Dictionnaire languedocien-français, au mot Brethmas, tom. I, p. 140.)

(1) Ar, Arre, Var, Gard (source, cours d'eau) ; linde (clair, limpide).


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Le hameau d'Allègre, la moins importante des six localités précitées, a donné pourtant son nom à l'ensemble de la commune. Il est à peine habité aujourd'hui par une douzaine de familles ; mais il se trouve adossé aux ruines de l'ancien castrum qui, au moyen âge, commandait la contrée et réunissait derrière ses remparts, aux temps de guerre et d'invasion, les

déterminer cette situation en nous basant sur l'étymologie des noms qu'elles portent, comme pouvant seule nous la signaler.

" Nous pouvons nous tromper, mais il nous semble que nous sommes plus dans le vrai que Ménard, par exemple, qui n'a cherché à découvrir la position de ces localités qu'en consultant la ressemblance plus ou moins imparfaite qui existe entre les noms anciens et ceux que portent certaines localités actuelles, Ce qui fait supposer que l'historien de Nimes pensait qu'aucune idée de classification n'avait présidé à la rédaction de cette inscription.

" Quant à Seguston, il devait être peu éloigné d'Uceti, puisqu'il en dépendait.

» Mais la position de Suzon où on l'a placé dans ces derniers temps, ne nous parait pas plus lui convenir que celle de Soustelle où Ménard le plaçait, quoique Suzon ne soit pas à une trop grande distance d'Uzès.

» Suzon est, en effet, une pauvre localité, un tout petit hameau caché au milieu de rochers stériles et où quelques habitants peuvent trouver à peine de quoi subsister.

» Il n'est donc pas admissible que cette localité fût le siége d'une de ces bourgades volsques, généralement populeuses, entourées de terres fertiles et autrement situées que celle-ci.

" II est plus probable que, dans les premiers temps du christianisme, Suzon servit de refuge, d'asile, à des âmes pieuses, à des cénobites, qui vinrent y abriter leur foi contre les persécutions.

» On y construisit vraisemblablement alors une chapelle, une petite église dans le style du temps, et c'est ce qui explique la découverte des débris galloromains (tuiles, briques, amphores, etc.) que l'on y a faite depuis peu.

» Comme cet asile, cet abri, était situé dans un lieu élevé, placé au-dessus des villages ou hameaux qui se trouvaient dans son voisinage, il est probable qu'il fut désigné, par les habitants de ces dernières localités, sous le nom de locus susum, domus susum, perfugium susum, le lieu, l'habitation, l'asile situé au-dessus, en haut, expressions qui furent probablement réduites au simple nom de susum, lequel a été vraisemblablement modifié par l'écriture en celui de Suzon, que porte cette localité.

» Nous mentionnerons d'ailleurs que le mot de susum n'est qu'une variante de sursum, employé de préférence à ce dernier mot par plusieurs auteurs, entre autres par le savant Varron.

» Revenant à Seguston, nous ajouterons que, dans l'incertitude où nous laissait le manque de données sur sa situation, nous avons cherché à la déterminer au moyen de l'étymologie de son nom ; mais nous nous hâtons de dire que nous n'avons pas la prétention de donner le nom de Chusclan comme répondant d'une manière pleinement satisfaisante à celui de Seguston.

" Il peut se faire, en effet, que Seguston fût situé beaucoup plus près d'Uzès, et que son nom ait été remplacé et effacé par le nom de quelque saint impose par le christianisme à cette localité, tel que celui de Saint-Quentin ou celui de Saint-Maximin, etc. "


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populations environnantes. Le pourtour de l'enceinte présente 400 mètres de développement environ ; on y retrouve les vestiges d'un ancien château seigneurial et de diverses habitations importantes, les restes d'une chapelle et d'un autre édifice religieux qui parait remonter à l'époque carlovingienne. Nous n'avons retrouvé, parmi les débris épars sur le plateau, aucune trace de l'occupation celtique ou gallo-romaine.

Allègre faisait autrefois partie de l'ancien diocèse d'Uzès, et le prieuré de Saint-Félix-d'Allègre dépendait du doyenné de Navacelle.

Il n'existe que de très-rares documents historiques sur cette localité. Il en est fait mention seulement dans Ménard en l'année 1310, à l'occasion du procès des Templiers.

Il semble résulter de la déposition de Pierre de Peyremale, frère servant de la milice du Temple, — déposition consignée dans l'interrogatoire des Templiers détenus à Alais — qu'il existait à cette époque, au château d'Allègre, une Commanderie des chevaliers du Temple (1). Ce fait pourrait aussi être déduit du vocable de l'église d'Auzon, dédiée à saint Privat qui était, comme chacun sait, un des patrons des Templiers.

Les domaines qui dépendaient de cette commanderie furent, après la suppression de l'Ordre, attribués, comme la plupart des autres possessions des Templiers, aux chevaliers de SaintJean-de-Jérusalem, et les chevaliers de Malte qui succédèrent à ces derniers, conservèrent ces domaines jusqu'à la Révolution française. La métairie et le moulin de Peyrolle, situés au pied du serre d'Allègre, sont encore désignés dans le pays sous le nom de moulin et grange des Commandeurs.

' Nous devons à l'obligeance de M. G. Delbosc-d'Auzon, la communication de quelques actes desquels il résulte que le château et une portion du territoire d'Allègre furent tenus aux XIVe et XVe siècles par plusieurs co-seigneurs, sous la suzeraineté du seigneur de Portes (2).

(1) Item dixit et confessus fuit requisitus se fuisse oriundum de Castro de Alegrio, dyocesis Uticensis. Item dixit et confessus fuit requisitus quod XL, anni sunt elapsi quod fuit ipse qui loquitur receptus in fratrem servientem dicti ordinis templariorum apud Yallesium.

(MÉNARD. T. 1, preuves, p. 193, col, 1.)

(2,) Le 9 des calendes d'août (22 juillet) 1313, Gaussin de Naves; Pierre Jourdan, chevalier; Pierre Guilhem Bérard; Raymond Guilfred, Guérin d'Allègre,


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Les seigneurs d'Uzès devaient aussi posséder quelques droits sur le pays, car nous avons retrouvé, dans l'embrasure d'une fenêtre de la maison Loubier, une pierre sur laquelle sont sculptées les armes d'Antoine de Crussol, premier duc d'Uzès, et de sa femme, Louise de Clermont-Tonnerre (1).

Les sources sulfureuses des Fumades sont situées à 3 kilomètres au couchant des ruines d'Allègre, à 300 mètres environ de la rive gauche de l'Alauzène et au pied de la colline qui domine le confluent de ce ruisseau avec l'Auzonnet. Les anciens livres terriers désignent ce lieu sous le nom de las Fonts (les fontaines), qui est la seule dénomination usitée dans le pays. Parmi les diverses sources qui émergent sur ce point, et dont

Raymond de Cadoine, Bernard del Puech au nom d'Arnaude sa femme, et Raymond d'Allègre font hommage et reconnaissance à Guillaume de Randon, chevalier, seigneur de Luc et do Portes, pour tout le tènement d'Allègre qui s'étend des limites du château de Bouquet à partir du puech de Colobret ou Colobrine jusques à l'eau du Séguisson ; descend par ladite eau jusqu'au mas Dumas, de là jusqu'à Puech-Chastre, descend ensuite au ruisseau d'Algresol ou Argensol jusqu'à la fontaine de Darnaga (ou du Tarnagas) ; suit la vallée jusqu'à la dent du ranc de Gauto-Fracho et suit la crète jusqu'à la Fournache (le Fournas) et de là jusqu'au champ de Garde-Loup (Trape-Loup) ; parvient au gas de Valèse (gué de l'Alauzène), monte par Combe-Auberte, jusqu'à l'AigueVerse, puis au Chemin-Blanc, prend le mas Chabert en suivant les limites de Rousson jusqu'au terme de Jogue-Ventour ou Roque-Voltour, descend par le mas de la Teulière jusqu'à l'Auzon (Auzonnet) ; se sépare de la seigneurie de Saint-Julien de Cassagnas en suivant le valat de Vabremale ; monte par le serre de Fenestrette et descend du serre par le valat jusqu'à l'eau de Cèze; de ladite eau descend jusqu'au gué de la Lauze (Alauzène) suit le chemin qui conduit au moulin de Barbai et (aujourd'hui Gibol) et du moulin au vieux gas d'Aguilonne jusqu'au gas d'Auzon, s'étend de là jusqu'aux combes de Rivières, descend à Massalian, à Sarrasine jusqu'au terme de Malon, qui sépare la seigneurie de Lussan de celle d'Allègre et s'arrête aux limites de Rivières.

En 1404, Charles VI octroya des lettres de noblesse à Paul Tuffand, en y ajoutant le titre de co-seigneur d'Allègre et l'investiture du territoire des Fontaines (las Fonts — Sources des Fumades), de Rivières et d'Auzon.

Au mois d'avril de la même année, Paul Tuffand et Pierre de Alte-Villaret, seigneur de Rousson, font hommage à André des Bedousses, procureur du seigneur de Portes, pour tout ce qu'ils tiennent de ce dernier dans la co-seigneurie de Rivières.

En 1770, Louis-Antoine Delbosc-d'Auzon, avocat au Parlement de Toulouse, se qualifiait seigneur d'Auzon, Paunac (métairie près du mas Chabert) et Calz, et co-seigneur d'Allègre.

(1) De gueule à la bande de trois pièces d'or, qui est d'Uzès ; parti de gueule à deux clés d'argent posées en sautoir, qui est de Clermont-Tonnerre.


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la plupart ont reçu des appellations modernes, la plus anciennement connue est celle que l'on désignait sous le nom de FontPudènto (fontaine puante), et qui se trouve située sur la propriété Roustan.

Notre savant collègue honoraire, M. Germer-Durand, a publié, sur les sources minérales en général et sur celles des Fumades en particulier, une étude historique précieuse à consulter, et à la suite de laquelle nous nous bornerons à mentionner le résultat des recherches opérées par les soins de la Commission.

Des fouilles, exécutées en 1865 par l'avant-dernier propriétaire de l'établissement, amenèrent la découverte d'une piscine antique, dont le déblaiement a pu être opéré presque en entier au moyen des fonds alloués par notre Société.

La partie supérieure de cette construction repose à 1m,50 en contrebas de la surface du sol actuel. La piscine est entièrement établie dans un massif de maçonnerie ordinaire, en moellons simplement ébauchés sur les faces, employés par assises à peu près régulières et formant un carré de 5m,50 de côté, évidé sur ses angles par une échancrure rectangulaire de 0m,70 à 1 mètre de pénétration (1).

La forme de la piscine est circulaire et, sur le développement de son pourtour, règne un gradin également circulaire de 0m,38 de giron sur 0m,21 de hauteur au-dessus du fond de la cuvette. Par suite de cette disposition, l'intérieur de l'ouvrage présente en plan deux cercles concentriques, et le diamètre du cercle supérieur est de 4m,14, tandis que celui du cercle inférieur n'est que de 3m,38. La profondeur dans oeuvre de la piscine étant, en totalité, de 0m,46, il s'ensuit que la maçonnerie générale dépasse de 0m,25 la face horizontale du gradin et se développe en forme de margelle irrégulière sur le pourtour de l'ouvrage.

Le massif dans lequel est creusée la piscine repose en entier sur un fond de terre végétale. Comme première fondation, règne un blocage en pierres brutes d'environ 0m,40 d'épaisseur, formant libage et supportant une couche de béton ou de maçonnerie en ballast de 0m,25. Sur cette dernière assise, repose le radier de la cuvette formé d'une couche de signinum opus

(1) Voyez la planche n° 2.


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de 0m,22 d'épaisseur, composé de chaux vive et de fragments de briques concassées, de 0m,02 de diamètre.

Les parements intérieurs verticaux de la cuvette et le giron du gradin sont, nous l'avons déjà dit, ébauchés en moellons ordinaires et en outre revêtus d'un enduit de signinum de 0m,06 d'épaisseur, dans la composition duquel on a employé de la brique grossièrement pulvérisée.

J'ai l'honneur, Messieurs, de mettre sous vos yeux des échantillons de ces divers éléments que l'on retrouve, à quelques modifications près, dans toutes les constructions romaines destinées à la conduite des eaux. Voici d'abord un fragment de signinum détaché du canal du Pont-du-Gard et auquel sont encore adhérentes des traces de la couche de peinture à l'ocre rouge qui recouvrait la surface du revêtement, et la moitié environ de la couche de concrétions calcaires que les eaux de la fontaine d'Eure ont déposées jadis sur les parois intérieures de l'aqueduc (1). Voici, en second lieu, un fragment de la cuvette d'un bassin découvert à Carias, et enfin un débris d'une composition de même nature trouvé à Vié-Cioutat. En rapprochant ces divers échantillons de ceux qui proviennent de la piscine des Fumades et que je mets également sous vos yeux, vous y retrouverez, Messieurs, des éléments constitutifs à peu près identiques.

En examinant le pourtour de la construction des Fumades, il est facile de constater, au nord, une solution de continuité dans l'ensemble des maçonneries : c'est par cette coupure de 0m,70 environ de largeur que les eaux pénétraient dans la piscine. On trouve sur ce point une sorte de récipient secondaire qui paraît avoir été autrefois recouvert en dalles et où prenaient naissance deux embranchements, dont l'un semble se diriger vers le couchant à rencontre de la colline, tandis que le second, dont les amorces annoncent un canal à voûte circulaire de 0m,45 de diamètre, paraît se prolonger dans la direction du nord, vers la source de Font-Pudènto. Quant au canal de fuite destiné à l'écoulement des eaux, il nous a semblé le re(1)

re(1) largeur du canal du Pont-du-Gard étant dès le principe de 1m,22 et se trouvant aujourd'hui réduite à 0m,62, il s'ensuit que les couches latérales de concrétions calcaires sont chacune de 0m,30 d'épaisseur. Or, le fonctionnement de l'aqueduc ayant, selon les plus grandes probabilités, duré environ 400 ans, on peut évaluer le dépôt calcaire annuel à trois quarts de millimètre.


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trouver près de l'angle du bassin qui sert de trait d'union entre la piscine et le canal d'arrivée.

De la forme et des dimensions de la piscine antique, il est aisé de déduire comment elle était utilisée. Le plus grand diamètre de la cuvette est, avons-nous dit, de 4m,14, c'est-àdire un peu plus du double de la taille humaine la plus élevée. Les baigneurs, réunis en groupe et simultanément plongés dans l'eau sulfureuse qui remplissait aux trois quarts la profondeur du bassin, pouvaient, selon le cas, s'asseoir sur le gradin ou bien s'étendre sur le fond de la cuvette, en réunissant leurs pieds vers le centre, et se déployer en éventail, rayonnant tout autour, le coude appuyé sur le giron du gradin qui leur procurait un exhaussement suffisant pour tenir la tète constamment élevée au-dessus de la surface de l'eau.

L'usage antique de jeter des pièces de monnaie en offrande dans les sources et les lacs était commune aux Gaulois et aux peuples de l'Italie. « Nous n'en voudrions pour preuve, dit » M. Germer-Durand, que les précieuses découvertes faites en » janvier 1852 aux bains de Vicarello, les Aquoe Apollinares » des itinéraires romains.

» On sait que c'est en curant le bassin de cette source ther» male qu'on a trouvé les quatre vases itinéraires en argent, » connus aujourd'hui sous le nom de Vases Apollinaires, qui » ont déjà rendu et rendront encore tant de services à la science » de la géographie antique, pour ce qui concerne l'Espagne, la » Gaule méridionale et l'Italie ; mais ce qu'on sait moins peut» être, c'est qu'on en a retiré plus de 500 kilog. d'oes rude, " plus de 100 kilog. d'oes grave signatum, et plusieurs cen» taines de kilogrammes de monnaie frappée qui, partant de » l'origine de l'art, descend presque jusqu'à l'extinction du » paganisme. »

« Les mêmes faits, dit encore M. Germer-Durand, ont été » plus ou moins observés dans tous nos établissements d'eaux

» minérales, célèbres ou non Les vertus bienfaisantes de

» ces eaux avaient été, de la part des Gaulois d'abord, puis de » leurs descendants plus civilisés, les Gallo-Romains, l'objet » d'un même culte ; et la forme ordinaire des offrandes faites » par eux à la divinité qui présidait à ces eaux salutaires, à » Bélinus-Apollon, était aussi la même : une pièce de monnaie » jetée dans la source. »

Le même usage a été évidemment pratiqué aux sources des Fumades ; les baigneurs y ont aussi jeté des pièces de monnaie,


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et des fouilles profondes, faites sur l'emplacement des plus anciennes sources de cette localité, amèneraient sans doute la découverte d'un grand nombre de ces offrandes. « Les pièces » qui se sont rencontrées dans la piscine, ajoute très-judicieu» sement M. Germer-Durand, ont dû y être entraînées par le » cours des eaux plutôt que jetées originairement dans la pis» cine elle-même. »

M. Germer-Durand a décrit les trois pièces de monnaie découvertes lors des premières fouilles en 1865 : la première est une coloniale impériale de Nimes du premier type; sa présence indique que les eaux des Fumades étaient déjà exploitées 30 ans avant J.-C. La seconde date du règne da Néron (54-68 ans après J.-C). La troisième enfin est de la première année du règne de l'usurpateur Magnus Clemens Maximus, proclamé empereur dans les Gaules en 383 et décapité le 28 juillet 388.

A cette nomenclature, nous nous contenterons d'ajouter celle des monnaies dont la découverte a eu lieu par les soins de la Commission en 1869 et 1870.

Deux de ces monnaies vous ont été remises par M. Larguier, dans la séance du 3 septembre 1870 ; elles sont en argent et d'une belle conservation : la première est de Trajan (98-117 de J.-C.) (1).

La seconde est de Caracalla (204-209 de J.-C.) (2).

La troisième est une monnaie coloniale d'argent d'Emporioe (Ampurias) dans la Tarragonaise (3).

La quatrième enfin est une coloniale impériale de Nimes, en bronze, du troisième type, assez bien conservée. Cette pièce présente un caractère qui, jusqu'à présent, n'avait été observé que sur les monnaies gréco-égyptiennes de la dynastie des Ptolémées : le bord supérieur du flan est aminci par un chanfrein en forme de biseau.

(1) IMP. CAES. NERVA. TRAIAN. AVG. GERM. — Tête laurée de Trajan à droite R). — P. M. TR. P. COS. IIII. P. P. — Victoire ailée marchant à gauche et tenant une couronne et une palme.

(2) IMP. ANTONINVS. PIVS. AVG.— Buste lauré de Caracalla à droite avec le paludamentum et la cuirasse.

R). LIBERTAS. AVG. — La liberté debout à gauche tenant un bonnet et un sceptre.

(3) Tête de Cérès à droite. — Légende EMP.

R). — Légionnaire armé à gauche, tenant l'enseigne romaine de la main droite, et le bouclier et la haste de la main gauche.


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A cette liste de monnaies, nous ajouterons une pièce en bronze de l'empereur Claude, trouvée à Auzon (1).

Nous mentionnerons encore pour mémoire un sarcophage monolithe, découvert dans cette dernière localité sur une propriété de M. Delbosc-d'Auzon.

Dans le hameau de la Bégude, nous avons retrouvé une pierre tumulaire qui sert de margelle au puits communal et porte l'inscription suivant»? relevée avant nous par M. Germer-Durand :

D. M.

VINDIAE. Q. FIL.

QVARTINAE

D[is] il/[a>ubws] Vindioe, Q[uinti] fil\iaf\, Quartinoe. « Aux dieux mânes de Vindia Quartina, fille de Quintus. »

Les fouilles opérées par la Commission dans le voisinage de l'église d'Arlinde n'ont pas produit les résultats qu'elle en espérait. Nous n'y avons trouvé que des sépultures chrétiennes peu intéressantes.

Dans le mur d'enceinte du cimetière attenant à l'église Notre-Dame-d'Arlinde, on a récemment encastré une pierre tumulaire dont l'inscription a été, comme la précédente, mentionnée avant nous par M. Germer-Durand :

D. M.

T. CORNELI

CORNELIANI

D[is] M[anibus~\ T\itï\ Cornéli Corneliani. « Aux dieux mânes de Titus Cornélius Cornelianus. »

(1) T. CLAVDIVS. CAESAR. AVG. IMP. GERM. — Tête de Claude à droite, R). — Fruste. On distingue seulement sur le champ les deux lettres S. C. (an de J.-C. 41-54).

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Nos recherches ont été plus fructueuses sur le territoire du hameau de Cals, dépendant de la commune de Navacelle. On nous avait signalé la découverte de divers ustensiles en bronze, sur la propriété de M. Agniel, située à peu près au milieu de l'intervalle qui sépare le hameau de Cals de l'établissement des Fumades, et qui parait avoir servi de champ de sépulture sous les Gallo-Romains.

Nos fouilles ont mis à découvert une foule de débris d'objets en verre blanc ou bleu et en poterie n'ayant, pour la plupart, conservé aucune forme appréciable. Nous avons pourtant été assez heureux pour trouver intacts : deux patères en verre d'un modèle élégant, dont l'une est ornée de fines cannelures (1); une patère en imitation de poterie samienne ; une fiole lacrymatoire, dont le goulot a été cassé depuis par accident; un fragment de couvercle et une anse de vase également en verre ; quelques fragments de poterie fine recouverts d'élégants dessins ; une spatule en bronze fortement oxydée, et enfin une série de pastilles en verre ou osselets noirs et blancs, au nombre de onze, servant à l'amusement des enfants.

La patère antique était, vous le savez, Messieurs, une sorte de soucoupe servant à boire, mais plus particulièrement à faire des libations, soit sur la tête des victimes, soit sur l'autel des sacrifices.

Les osselets (oscellatoe) étaient de deux sortes : les uns, marqués de points, comme nos dés modernes, servaient de jeu de hasard pour les grandes personnes ; les seconds, dont les spécimens sont sous vos yeux, servaient de jeu d'adresse pour les enfants. Ce dernier jeu se pratiquait avec huit osselets sans marques. On en étalait une partie sur une table : on en jetait en l'air un ou deux que l'on avait eu soin de conserver dans la main, et l'on se hâtait d'en ramasser le plus possible des autres, en s'efforçant de rattraper dans la même main ceux qui venaient d'être lancés et qu'il fallait éviter de laisser retomber sur la table. Ce jeu est encore pratiqué de nos jours par les

(Il V. pl. III, fig. 2 etc.


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enfants des campagnes, et les osselets que nous avons retrouvés proviennent, à coup sûr, de la sépulture d'un enfant (1).

Maintenant, Messieurs, la Commission vous proposera de quitter les environs des Fumades que nous venons d'explorer, pour la suivre vers le centre des montagnes qui s'étendent entre Allègre et Bouquet, et dominent toute la contrée.

A partir du hameau de la Bégude, s'ouvre une vallée étroite et profonde, de 4 kilomètres environ d'étendue, et qui, sur cette région, est le seul passage naturel praticable pour franchir la chaîne et gagner le versant opposé. C'est la vallée d'Argensol (2), parcourue dans toute sa longueur par le ruisseau torrentiel du même nom qui prend son origine dans le voisinage du hameau de Suzon et vient se réunir, près de la Bégude, au ruisseau d'Arlinde.

Quand on remonte la vallée d'Argensol, on ne tarde pas à voir se dessiner, dans la direction du midi, un pic d'une forme singulière, identique à celle de l'oppidum de Laudun, connu sous le nom de Camp-de-César, et dont le profil rappelle, avec plus de régularité peut-être, mais infiniment moins d'élégance, celui de l'Acropole athénien (3). C'est le pic de SantPèile ou de Suzon dont nous avons déjà parlé, et au sommet duquel s'élevait, suivant M. Germer-Durand et le capitaine Colson, l' oppidum des Segustones.

La colline présente, au nord et au levant, l'aspect d'un cône tronqué à base elliptique, dominé par un plateau horizontal de

(1) Il n'est pas rare de rencontrer dans les sépultures chrétiennes des premiers siècles des perles d'onyx, qui ont quelque analogie avec les osselets antiques. Les sépultures où ces objets se rencontrent sont, en général, des tombeaux d'enfants ou de jeunes filles. Dans la symbolique chrétienne, l'onyx est, en effet, considéré comme l'emblème de l'innocence et de la candeur.

(2) Dans les actes anciens, cette vallée est quelquefois désignée sous le nom d'Algresol et la presque totalité de son parcours est située sur le territoire d'Allègre, ce qui semble venir à l'appui de l'observation du capitaine Colson sur la similitude qui existe entre l'appellation de certaines localités anciennes et celle du cours d'eau le plus rapproché.

(3) Voyez planche III.


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300 mètres de diamètre, dont les escarpements verticaux se développent comme une enceinte fortifiée et atteignent de 20 à 26 mètres d'élévation.

Du côté du couchant, qui est le seul accessible, le flanc de la montagne s'infléchit suivant une pente d'environ 45°, aboutissant au lit du Séguisson dont les eaux suivent une faille étroite au milieu de rochers abruptes, et se perdent dans les gouffres profonds connus sous le nom des Aiguières, qui séparent le pic de Suzon du mont Lansac.

C'est sur le flanc occidental du pic de Suzon que s'élève le hameau du même nom, composé d'une quinzaine d'habitations rurales.

Sur la partie la plus élevée du plateau qui couronne le pic, on retrouve encore les amorces d'un mur d'enceinte et les restes d'une citerne voûtée ; et de fréquentes trouvailles faites sur ce point et sur les flancs de la colline viennent journellement ajouter preuve sur preuve à l'opinion admise que ce lieu fut jadis le centre d'une agglomération gallo-romaine.

La partie la plus élevée du plateau ne contient guère que des débris de poteries celtiques. Une pièce d'argent a pourtant été trouvée dans la propriété Domergue qui couronne le plateau. Elle est de l'empereur Trajan (1).

Cette pièce est perforée vers le bord, particularité que nous avons constatée sur diverses monnaies impériales, et qui semble prouver que les Romains portaient quelquefois ces pièces suspendues à leur cou comme une amulette, ou les conservaient enfilées sur un cordon, comme les Chinois font pour leurs sapèques.

Mais si le sommet du plateau et l'intérieur de l'enceinte gauloise contiennent peu de vestiges gallo-romains, en revanche, la pente de la colline, à partir du hameau de Suzon jusqu'au lit du Séguisson, en est littéralement jonchée. Le sol est couvert de fragments de briques, d'amphores, de poteries samiennes vraies ou imitées. Aux abords du ruisseau, s'ouvre, dans le flanc du rocher, un boyau incliné où se trouve pratiqué un escalier taillé dans le roc vif, donnant accès au premier

(1) IMP. TRAIANO. AVG. GER. DAC. P. M. TR. P. COS. VIII.— Tête laurée de Trajan à droite.

R). — OPTIMO PRINCIPI. — Victoire casquée debout, à gauche, tenant de la main droite une couronne de laurier et s'appuyant sur une haste de la main gauche.


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gouffre des Aiguières, et permettant aux défenseurs de la place investie de s'approvisionner d'eau à l'insu de l'ennemi.

Parmi les objets que nous avons recueillis à Suzon, nous citerons encore : 1° une patère en verre à peu près pareille à celle de Cals; 2° un volant ou peson de fuseau en plomb artistement ciselé (1) ; 3° une coloniale impériale de Nimes en bronze ; 4° une monnaie d'argent de Domitien (2).

Au moyen âge, Suzon fut le siége d'un prieuré régulier, désigné sous le vocable de Saint-Jean et uni, comme le prieuré voisin de Notre-Dame-d'Arlinde, à la sacristie du monastère de Goudargues (3). Ce prieuré possédait une chapelle aujourd'hui détruite, mais dont l'emplacement et les traces du pavé subsistent encore à côté de la citerne publique. Des fûts de colonnes en calcaire dur provenant de cette église sont encore encastrés dans le mur latéral d'une maison voisine. Nous en avons retrouvé un tronçon qui soutient un manteau de cheminée dans la maison Gayet. Ce dernier nous a cédé un chapiteau roman qui surmontait la colonne et dont le caractère architectural nous paraît remonter au XIIe siècle. Un autre tronçon de colonne cannelée d'un plus grand diamètre, attenant à la citerne publique, a été creusé en forme d'auge pour abreuver les chevaux.

La chapelle de Saint-Jean-de-Suzon, fut sans doute, au moyen âge, l'objet d'une dévotion particulière : c'est ce qui paraît résulter de l'appellation vulgaire de la colline elle-même, désignée sous le nom de Sant-Pèile, correspondant à celui de Saint-Pilon ou montagne sainte.

Que le pic de Suzon ait ou non été l'ancien refuge des Segustones, on ne peut s'empêcher d'y reconnaître tous les signes caractéristiques d'une de ces anciennes places fortes gauloises, désignées par les auteurs latins sous le nom d'oppidum.

Dans plusieurs passages de ses Commentaires, César parle

(1) Ce petit appareil est désigné en languedocien sous le nom de vertél, du latin verticillus qui, à son tour, vient de vertere, tourner.

(2) IMP. CAES, DOMITIANVS. AVG. P. M. — Tête laurée barbue de Domitien à droite.

R°. — TR. POT. COS. VIIII. P. P.— Ancre autour de laquelle est enlacé un dauphin (835 de Rome, 82 de J.-C).

(3) E. GERMER-DURAND. Dict. top. du Gard.


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de ces camps retranchés, situés sur des mamelons escarpés et tirant de leur position même leurs principaux moyens de défense. C'est là qu'aux jours du danger les Gaulois, toujours en guerre avec leurs voisins, mettaient en sûreté la partie de la population inhabile à porter les armes, et défendaient euxmêmes leurs remparts improvisés.

Il est facile de s'expliquer les causes qui, à la suite de l'occupation romaine, amenèrent l'abandon intégral ou partiel des oppida celtiques. Il suffit, pour cela, de remarquer que l'emplacement des villes et des villages gallo-romains était choisi par la population conquérante, comme nous pourrions le faire aujourd'hui, au milieu de notre civilisation et dans les conditions de sécurité politique où se trouvent les peuples modernes de l'Europe occidentale.

Les grands propriétaires habitaient soit dans les villes, soit dans des maisons de campagne agréablement situées, dans de beaux sites, de riches plaines, sur le bord des cours d'eau. Les campagnes proprement dites étaient parsemées de villoe, sorte de métairies destinées à l'exploitation des terres et à la demeure des colons ou des esclaves employés à la culture des champs. Ces métairies et leurs annexes formaient des agglomérations plus ou moins importantes que l'on peut comparer à nos hameaux actuels. Brouzet, Arlinde , Auzon et une foule d'autres points habités par les Gallo-Romains, sur les bords du Gardon, à partir de son confluent avec le Rhône jusqu'au pied des Cévennes, témoignent de la vérité de ce que nous avançons.

Les villoe différaient peu, à l'extérieur, de nos manoirs du moyen âge et s'appelaient déjà des châteaux (castra-castella) ; mais elles s'en distinguaient à l'intérieur par une entente délicate des douceurs de la vie. Le château contenait souvent deux logis pour le maître, un d'hiver et un d'été, placés chacun à une exposition différente. Chaque logis avait ses portiques à colonnades, que nous appellerions aujourd'hui verandahs, et où l'on se promenait en tout temps à couvert ; ses toits dorés, ses belvédères, ses bains froids et ses thermes ou bains chauds.

La maison d'hiver était chauffée au moyen de tuyaux en terre cuite, qui faisaient circuler la vapeur d'eau jusqu'au sommet. La bibliothèque était le salon favori du maître ; on s'y réunissait pour la conversation. Celle d'un des amis de Sidoine Apollinaire, Tonance Ferréol, de Nimes , dont la villa se trouvait, à ce que l'on croit, située dans le voisinage d'Alais,


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au quartier de Brésis, était divisée en trois parties : l'une, composée de livres chrétiens et destinée aux femmes ; l'autre, de livres purement profanes, pour les hommes; la troisième, d'ouvrages mélangés, à l'usage des deux sexes.

Sidoine nous apprend ailleurs comment on passait la journée dans la villa d'un autre de ses amis, nommé Consentius. On allait d'abord à l'église ; on faisait ensuite des visites dans les châteaux environnants et l'on était rentré vers la quatrième heure, c'est-à-dire vers dix heures du matin ; ce qui montre qu'on était fort matinal. On se livrait ensuite aux jeux de la campagne : c'étaient la paume, les dés, une sorte de toupie ou d'autres passe-temps à la mode. On allait ensuite aux bains et, au retour des bains, on dînait mollement étendus sur des divans placés au pied des statues des Muses.

Telles étaient, Messieurs, les conditions d'existence dans lesquelles vécurent nos ancêtres, les Gallo-Romains, jusque vers le milieu du Ve siècle.

Malgré les perturbations et les pertes énormes que durent éprouver les familles puissantes de la Gaule à la suite des premières dévastations qui signalèrent cette époque, un grand nombre d'entre elles avaient néanmoins conservé d'immenses fortunes.

C'est ainsi que Sidoine Apollinaire, décrivant un repas donné à l'empereur Majorien par un simple citoyen d'Arles dont la richesse n'est cependant pas signalée d'une manière exceptionnelle , représente des esclaves vigoureux fléchissant sous le poids des vases d'argent ciselés dont ils encombrent les tables du festin. Il décrit les lits des convives recouverts de draperies de pourpre et les murailles de la salle ornées de tapisseries assyriennes richement peintes ou brodées (1).

Mais, quand les grandes invasions se succédant à des intervalles de plus en plus rapprochés vinrent enlever aux campagnes cette sécurité dont la forte organisation romaine les avait dotées, un pareil état de choses ne put continuer à subsister. Les populations abandonnèrent de nouveau les plaines pour se réfugier, comme les anciens Gaulois, sur des points escarpés, protégés par une ceinture de remparts ; la plupart des antiques oppida furent réoccupés par les populations me(1)

me(1) APOLL. Epist. IX, 13.


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nacées, et cette situation se prolongea pendant toute la durée de la période féodale.

A trois kilomètres au midi de Suzon, sur le point le plus élevé de la chaîne de Bouquet et à 631 mètres d'altitude audessus du niveau de la mer, se dresse le pic ou Serre-deBouquet, que surmonte le Signal ou Guidon-de-Cassini.

Des fouilles exécutées au pied du Guidon, en 1869, pour y préparer l'emplacement d'une chapelle, ont amené la découverte de douze monnaies de bronze d'origine romaine, parmi lesquelles on remarque une coloniale impériale de Nimes d'une belle conservation; un Titus (1) non moins bien conservé ; un Claude (2); un Commode (3) ; une Faustine, femme d'Antonin, et un Vespasien (4) un peu fruste mais cependant très-reconnaissable.

Ces découvertes nous font supposer que le sommet du pic de Bouquet a pu, comme la plupart des points élevés de la Septimanie, être occupé par une de ces tours d'observation appelées speculoe que construisaient les Romains pour se transmettre des signaux et surveiller les invasions ennemies.

S'il fallait en croire une tradition répandue dans le pays, il y aurait lieu d'admettre l'existence d'une ancienne ville du nom de Lamparre, située au quartier de la Fontaine, à proximité du village de Brouzet, où notre confrère M. Chamboredon fixe, non sans raison peut-être et contrairement à l'opinion du

(1) T. CAESAR IMP. COS. VIII. - Tête radiée de Titus à droite. Monnaie fondue, R). — FELICITAS PVBLICA. — La Félicité debout à gauche tenant une corne

d'abondance de la main gauche et un caducée de la main droite. — Dans le champ : S. C. — (An 79-81 de J.-C.)

(2) IMP. Tl. CLAUDIVS. CAESAR AVG. P. M. TR. P. - Tête nue de Claude à gauche. R). - S. C. dans le champ.

(3) M[arcus) COMMODUS ANTONINUS PIVS BRIT. — Tête radiée de Commode à droite.

R).— P. M. TR. P. IMP. VII. COS. IV. — Dans le champ : S. C. Rome casquée, assise à gauche sur un bouclier, tenant de la main droite une Victoire et la gauche appuyée sur une haste.

(4) IMP. CAES. VESPASIAN. AVG. — Tête laurée de Vespasien à droite.

R). — Femme debout tenant une corne d'abondance. Dans le champ : S. C.


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capitaine Colson, l'emplacement de l'antique Brugetia de l'inscription nimoise.

Quoi qu'il en soit, il est incontestable que l'on découvre, au couchant de cette localité , une prodigieuse quantité de débris d'aqueducs, de poteries, de marbres, etc., qui démontrent de la manière la plus évidente l'existence sur ce point d'une vaste réunion d'habitations ; et la portion de forêt communale qui s'étend au midi du village a conservé le nom de Lamparre.

A quatre kilomètres au midi de Brouzet, s'ouvre le défilé des Angoustrines, qui occupe le point le plus resserré de la vallée de l'Alauzène, entre la montagne de Bouquet et les collines de Saint-Just. Ce défilé qui, sous la domination romaine, dut être un point stratégique fort important, est désigné dans le pays sous le nom des Angoustrines ou Angoustines (1).

Au sortir du défilé, la vallée s'évase au midi du côté de Seynes, et au couchant dans la direction de Saint-Just. Deux routes vicinales s'embranchent sur ce point en face de la mai(1)

mai(1) couvent improprement nommé des Augustines est situé non pas, comme on l'a dit bien souvent, sur le territoire de Seynes, mais sur celui de SaintJust-et-Vacquières. C'est à ce titre que les religieuses de ce monastère, après leur réunion aux Bénédictines de Saint-Félix-de-Montseau (Hérault) continuèrent à percevoir une redevance sur la commune de Saint-Just.

(Voyez E. GERMER-DURAND. Dict. top. du Gard.)

L'existence d'un couvent de religieux Augustins à proximité de celui des Augustines, sur l'emplacement de la campagne de M. de Lavemède, est un fait inexact. Dans tous les cas, ce monastère aurait été situé sur le territoire de Brouzet, et non sur celui de Seynes.

Nous inclinons à croire que le nom des Augustines donné au point où s'élevait le monastère des Cisterciennes n'est qu'une corruption de celui des Angoustrines ou des Angoustines, par lequel on l'a désigné vulgairement de tout temps dans le pays. Cette dénomination est, en effet, antérieure à l'établissement du couvent, puisque l'acte de donation de 1188 désigne le lieu où il fut construit sous la même appellation. Les religieuses de l'ordre de Citeaux ne suivaient pas d'ailleurs la règle de Saint-Augustin. Nous pensons donc que le nom des Angoustrines ou Angoustines, donné à cette portion de territoire, dérive d'Angustioe, expression fréquemment employée par les auteurs latins pour désigner des vallées étroites, des passages resserrés entre deux montagnes, des défilés enfin, dénomination qui ne saurait être mieux appliquée qu'au défilé des Angoustrines.


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son de campagne de M. de Lavernède, qui confine aux limites des territoires de Saint-Just et de Brouzet.

Par un acte daté de l'année 1188 , Raymond II d'Uzès ou de Posquières, évêque d'Uzès, donna à l'abbesse Ermessinde le lieu des Angostrines pour y fonder un monastère de Cisterciennes.

Le mur d'enceinte de ce bâtiment existe encore sur la rive gauche de l'Alauzène, à 100 mètres environ du sommet de l'angle formé par là bifurcation des deux routes précitées. Ce mur, qui n'a plus aujourd'hui que 2 mètres d'élévation sur 1 mètre d'épaisseur environ, sert actuellement de clôture à un jardin potager et présente un carré de 25 mètres de côté.

C'est sur le bord de la route vicinale qui se dirige vers SaintJust et à proximité de cette localité qu'a été découverte une monnaie de Nimes d'une patine et d'un type admirables et d'une merveilleuse conservation. Cette pièce que j'ai l'honneur, Messieurs, de mettre sous vos yeux, est une coloniale impériale du troisième type (1), comme celle trouvée au Guidon-de-Cassini. De l'avis de tous les connaisseurs, c'est une des plus belles qui existent et, jointe à un denier consulaire en argent de la famille Cossutia (2), frappé à Corinthe, trouvé près d'Alais, et gracieusement offert à la Société par M. Fleury, Secrétaire de la Mairie, elle formera certainement un des plus précieux échantillons de notre collection numismatique.

A quatre kilomètres au couchant de Saint-Just, se trouve le

(1) IMP. DIV. F. — Têtes adossées d'Octave et d'Agrippa, l'une laurée, la seconde avec la couronne rostrale. Dans le champ, P. P.

R). — COL. NEM. — Crocodile à droite enchaîné à un palmier auquel sont suspendues une couronne de laurier et des bandelettes.

(2) Au droit : SABVLA agnomen ou surnom de la famille Cossutia, de l'ordre équestre. — Tête de Méduse ailée entourée de serpents qui montrent leur tête sous son manteau.

R). — L. COSSVTI. C. F.— Lucius Cossutius Caii filius. — Bellérophon monté sur Pégase tenant de la main droite un dard, emblème de Corinthe. Au bord de la médaille, le chiffre XXXXI.

Le consul Cossutius ayant été chargé de conduire une colonie à Corinthe, on frappa à cette occasion une grande quantité de deniers. On pense que ces deniers portent le numéro de l'émission.


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village de Mons, dont le territoire est traversé du levant au couchant par la Droude. Au sommet d'une colline située sur la limite méridionale de cette commune s'élève l'oppidum de Vié-Cioutat dont nous avons déjà parlé.

Nous aurions voulu consacrer quelques pages à la description de ce curieux reste de forteresse gauloise, en mentionnant les découvertes qui y ont été faites à diverses époques ; mais ces détails nous entraîneraient trop loin et nous paraissent devoir faire l'objet d'un mémoire spécial.

A la suite de trois visites successives faites en compagnie de MM. Aurès et Flouest, membres de l'Académie du Gard, et de nos confrère.; d'Alais MM. Cazalis de Fondouce, Parran, Barre, Gros et Bondurand, nous en avons rapporté divers tronçons de colonnes; la partie supérieure d'un chapiteau d'ordre dorique grec ; un seuil de porte gallo-romain ; un fragment de moulin à bras en pierre volcanique d'Agde ; un débris de meule plate en conglomérats d'une grande finesse; une brique sur laquelle on distingue des empreintes de chaussure gallo-romaine ; divers morceaux de poteries grossières, d'amphores, de poteries en terre de Samos, le plus souvent imitées et ornées de dessins artistiques ; une portion de cymaise à laquelle est fixé un bout de crampon en fer servant à la sceller (1) ; un fragment de mosaïque fort curieux dont chacun des éléments, en forme de parallélipipède rectangle, a ses arêtes supérieures taillées en pan coupé (2) ; une grande vasque en calcaire dur ayant à peu près la forme d'un creuset et recueillie par M. Frédéric Francezon (3) ; une magnifique urne cinéraire et une fiole lacrymatoire en verre conservées par M. Maximin d'Hombres (4). A cette énumération, nous ajouterons une lampe funéraire en bronze et deux styles en fer dont la spatule est un peu détériorée par la rouille, et que notre confrère M. le Dr Plantier a bien voulu donner à la Société.

(1) Cet échantillon a été offert à la Société par M. l'abbé Florisoone.

(2) Ce fragment de mosaïque a été donné à la Société par M. Edouard Fraissinet.

(3) Cette vasque a 0m,70 de hauteur — 0m,89 de diamètre supérieur — 0m,67 de diamètre inférieur et 0m,05 d'épaisseur.

(4 Voyez planche III, fig. 4 et 5.


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Puisque j'ai nommé notre confrère M. Plantier, dont vous connaissez tous, Messieurs, le talent de collectionneur et à qui la Société doit la possession de deux poteries gallo-romaines et d'un fragment de mosaïque trouvés par M. le pasteur Gaillard à l'ermitage de Saint-Julien, nous croyons devoir profiter de cette circonstance pour mettre sous vos yeux une pièce extrêmement curieuse qu'il a bien voulu nous confier : c'est un vase antique en verre blanc d'une forme très-pure, trouvé dans un puits romain à la Liquière, près de la maison de campagne de notre regretté collègue M. le Dr Serre (1).

La Commission pense que des fouilles sérieuses exécutées, soit dans l'intérieur de l'enceinte de Vié-Cioutat, soit sur les pentes de la colline, pourraient amener des découvertes importantes. Elle croit devoir, en conséquence, émettre le voeu que la Société veuille bien consacrer quelques fonds à cet usage, dès que ses ressources lui permettront de disposer d'une somme suffisante pour être utilement appliquée à cette destination.

Quand on suit la route départementale n° 2 d'Uzès à Alais, on rencontre, à 6 kilomètres de cette dernière ville et. à gauche du chemin, Méjeannes-lez-Alais. Franchissant ensuite la Droude, on passe entre Monteils à droite et Vié-Cioutat à gauche et l'on arrive en vue de Saint-Hippolyte-de-Caton. Cette localité tire son surnom du voisinage d'une butte conique de calcaire marneux dont les strates superficielles se sont effeuillées au contact de l'air, et donnent à la petite colline l'aspect d'un tumulus formé d'un monceau de pierrailles (2).

(1) Voyez planche III, fig. 1.

(2) Des hypothèses plus ou moins invraisemblables ont été mises en avant pour déterminer l'étymologie du nom du Serre-de-Caton. L'explication nous en paraît cependant fort naturelle : dans le langage vulgaire de Nimes et de ses environs, on appelle catouno un caillou, une pierre roulante, de petite dimension, et il n'est pas rare d'entendre dans les rues de Nimes des enfants du peuple menacer un camarade en lui disant : " Te f.... un cop de catouno ! — Je te fiche un coup de pierre ! » — En nous fondant sur cette observation, nous pensons que le Serre-de-Caton n'a d'autre signification que celle de serre ou colline pierreuse. — Dans le dénombrement de la Sénéchaussée de Beaucaire de l'année 1384, la commune de Saint-Victor-de-Malcap est désignée sous le nom de Sanctus-


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Le Serre-de-Caton est situé vers le milieu de l'intervalle qui sépare Saint-Hippolyte de Saint-Etienne-de-l'0lm.

A 500 mètres au nord de cette dernière localité, sur un mamelon rocheux appelé Carias, on a trouvé d'importants vestiges de fondations de bâtiments, de poteries, d'aqueducs et des fragments d'inscriptions lapidaires d'origine gallo-romaine.

Des fouilles exécutées il y a peu d'années sur une propriété qui occupe le flanc oriental du mamelon, amenèrent la découverte d'un caveau souterrain maçonné et voûté, dont l'entrée était murée et où se trouvaient encore empilées contre les parois et dans un parfait état de conservation , un certain nombre de ces amphores gallo-romaines de forme allongée et à culot mucroné, qui paraissent avoir été destinées à conserver des matières liquides.

Fidèles à leur déplorable habitude, les paysans qui avaient fait cette précieuse découverte n'eurent rien de plus pressé que de mettre en pièces toutes les poteries qui la composaient, et nous n'avons pu sauver de la destruction qu'un seul goulot d'amphore.

Sur un autre point du mamelon de Carias, on a également trouvé des poteries d'une date moins ancienne qui ont eu le même sort que les précédentes. Elles contenaient quelques pièces d'argent que M. le baron d'Hombres a recueillies et qu'il a bien voulu nous confier pour les communiquer à la Société.

Ces pièces sont au nombre de sept. L'une d'entre elles est un denier raymondin : c'est la monnaie des comtes de Toulouse, et les échantillons n'en sont pas rares. Elle porte d'un côté, dans le champ, la croix de Toulouse et en exergue : R[aimundus] COMES PALATII.

Victor-de-Malo-Catone, que l'on devrait traduire par Malcat, mauvais rocher, mauvaise pierre. Le nom de Peyremale (Petra-Mala) a la même origine.

Au siége de Lavaur en avril 1211, et à celui de Beaucaire en 1216, lors de la guerre des Albigeois, les croisés employèrent, pour lancer des pierres contre les assiégés une machine qu'on appelait cate — catus — (*) ou guate.

« Et adonc que touta la gent es estada presta, lodit conte de Montfort a faict » preparar la CUATA, laqualla era ung engin per tirar peyras et abatre las " muralhas. »

(V. Hist. de Languedoc. — T. III. p. 208 et preuves, col. 35 et 71.)

(*) Pierre de Vaux-Cernay.


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La face opposée présente dans le champ un croissant surmonté d'une étoile et en exergue : DVX MARCHIO PROVINCIAE.

Les six autres pièces sont des deniers melgoriens (1), mentionnés si fréquemment par les historiens du Languedoc et frappés par les évêques de Maguelone.

Ces monnaies au type odonique, comme celles des anciens vicomtes de Narbonne, sont faciles à reconnaître par la forme bizarre de la croix à huit pointes du revers qui se retrouve identiquement sur les sceaux épiscopaux des évêques de Maguelone.

Quelques numismates ont cru voir dans les légendes de ces monnaies des caractères arabes, se fondant sur les censures que l'évêque Bérenger de Frédol s'attira en 1266 de la part du pape Clément IV, pour avoir fait fabriquer des monnaies portant des caractères arabes et le nom de Mahomet (2). Ces reproches, adressés par le pape à l'évêque, sont, en effet, basés sur ce que ce dernier avait voulu augmenter ses bénéfices en faisant frapper des marabotins, monnaie arabe fort usitée alors en Languedoc et en Espagne, mais qui n'a rien de commun avec le denier melgorien que nous avons sous les yeux.

En examinant attentivement ces légendes, on peut lire en lettres onciales grossières, autour de la croix à huit pointes, le mot RAMVNO, synonyme de Raymond en langue romane; et sur la face opposée dont le champ porte quatre anneaux disposés en carré, on distingue le mot NARBONA.

Quelques-uns ont pensé que le nom de RAMVNO désignait Guillaume-Raymond, premier évêque-comte de Melgueil en 1197, et que l'on conserva depuis son nom sur la monnaie melgorienne ; mais M. Barthélémy croit que ce prélat et ses successeurs ne firent que copier servilement les monnaies des vicomtes de Narbonne.

(1) Au XIVe siècle, la livre melgorienne valait intrinsèquement 17 fr. 80 d'aujourd'hui. Mais il faut à cette valeur intrinsèque ajouter quatre ou cinq fois autant pour représenter le pouvoir commercial de l'argent à cette époque. — Le sol melgorien valait alors intrinsèquement environ 0 fr. 89 d'aujourd'hui, soit 4 fr. 45 pour l'époque.

(2) Clément IV, après avoir réprimandé l'évêque au sujet de divers abus dont ce dernier s'était rendu coupable, dénonce le scandale public occasionné par les contrefaçons de monnaies au type mahométan, qui se fabriquaient dans le diocèse de Maguelone : « Quis enim catholicus, lui écrit-il le 16 septembre 1266, » monetam debet cudere cum titulo Mahometi ? "

(A. GERMAIN. Maguelone, p. 64.)


— 79 —

Deux fragments d'inscriptions lapidaires ont été découverts à Carias. Le moins incomplet des deux nous a été donné par M. François Soleyrol, de Saint-Etienne-de-l'Olm. Le cippe qui porte cette inscription funéraire a souffert dans sa partie gauche et dans sa partie inférieure, et quelques caractères manquent au commencement des lignes et au bas de l'inscription.

Notre savant collègue honoraire M. Germer-Durand, à qui doivent être soumis tous les documents épigraphiques découverts dans nos contrées et dont l'autorité est souveraine en pareille matière, a bien voulu opérer la restitution du texte que nous transcrivons avec sa traduction :

D. M.

DO] MITIAE'L'F.

RV] STICILLAE'Q.

DOM] ITIVS'ONES

TVS. VX] SORI'OPTIMAE

La pierre étant cassée dans le bas, il y a lieu de penser que la portion disparue devait porter, en dernière ligne, la formule :

ET SIBI VIVVS FECIT

« Aux Mânes de Domitia Rusticilla, fille de Lucius (Damitius). — Quintus Domitius, qui lui survit, a élevé ce tombeau pour son excellente épouse et pour lui-même. »

Il résulte de l'interprétation du texte que Q. Domitius Onestus avait épousé sa cousine.

Ce monument épigraphique vient ajouter trois noms de plus à la liste des personnages de la gens Domitia, qui a laissé de nombreux monuments dans nos contrées.

Le second fragment offert à la Société par M. Casimir Trinquier, de Saint-Etienne, ne contient pas un seul mot complet, et il a été jusqu'à présent impossible de l'interpréter.

Chemin faisant, nous mentionnerons la partie supérieure d'un cippe, découverte près de Lascours et recueillie par


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M. Eugène Ducamp qui a bien voulu l'offrir à la Société. Ce fragment ne contient que la première ligne de l'inscription du monument. Elle est formée par ce seul mot :

ICOTIIS

Nous signalerons aussi dans le village de Cruviers quelques inscriptions tumulaires complétement dégradées par les enfants et absolument indéchiffrables.

Au confluent du Gardon et de la Droude, s'élève une colline de terre végétale dont le plateau supérieur, en pleine culture, fourmille, en quelque sorte, de vestiges celtiques et gallo-romains. C'est le serre de Brienne, sur lequel M. Germer-Durand et le capitaine Colson fixent l'emplacement de l'antique Briginn.

Le capitaine Colson a commis un erreur topographique en plaçant le village actuel de Brignon sur le serre de Brienne : Brignon est, en réalité, assis sur un mamelon beaucoup moins élevé, formant le prolongement méridional du serre de Brienne, mais qui en est tout-à-fait distinct, puisqu'une route les sépare.

Le compois terrier de Brignon de l'année 1462, rédigé en langue vulgaire, désigne l'emplacement de l'ancien oppidum sous le nom du quartier de Briena (1).

Le village moderne contient une grande quantité de débris gallo-romains découverts à Brienne.

On lit à la base du chapiteau d'un pilastre toscan, à l'angle nord-ouest de la maison Vallat, sur la place publique, l'inscription suivante, relevée jadis par M. le baron d'HombresFirmas :

(1) Item. — En Briena una terra confronta a soley levant an lo cami cet (le chemin sec) ; an Mons. de Brinhon a ben marj (vent marin) ; — conten une sesteyrade de bona valor.

(Arch. municipales de Brignon. —Compois de 1462, cote de G. Gasanhas.)


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SOLIMARVS (1) LEITVRRONIS

A côté de la porte d'entrée de la maison Reboul, on lit aussi le nom de SERVILIA suivi d'autres mots complétement effacés.

Nous citerons encore : 3° une inscription funéraire qui orne la façade de la maison de Jacques Foucard, du Carlat, à gauche de la porte d'entrée :

D. M.

T. VESMERI

TERTI

D[is) M[anibus] T[iti] Vesmeri Terti[i]. « Aux dieux mânes de Titus Vesmerus Tertius. »

4° Une quatrième inscription lapidaire en très-beaux caractères parfaitement conservés, encastrée à 6 mètres de hauteur environ, contre la face interne de l'ancienne porte méridionale des remparts de Brignon et citée par MM. Baumes et Vincens (2).

Elle porte :

G. L. N. C. VALERIVS

GERMANVS

AMICVS

G[enio] L[ucii] N[ostri] C[aïus] Valerius Germanus amicus.

« Au Génie de notre bien-aimé Lucius, son ami Caïus Valerius Germanus. »

(1) Ce nom celtique latinisé s'est retrouvé plusieurs fois. Il rappelle la déesse Solima ou Solimara, dont le culte était en honneur chez certains peuples des Gaules et principalement chez les Leuci, anciens habitants de la Lorraine. Le radical sol doit avoir le même sens que le sol, sel, sul, des langues celtiques ou dérivées du celtique, il signifie soleil. Dans toutes ces langues aussi, mar, rnarch, mark, signifie cheval. Solimarus aurait donc la signification de Cheval du Soleil.

(Mém. de l'Acad. du Gard : année 1851, p. 49.)

(2) Topographie de Nimes.

6


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Nous mentionnerons en outre un chapiteau composite de dimension colossale, recueilli par M. Foucard, et qui surmonte un pilier de la porte d'entrée de sa basse-cour.

A cette énumération, il nous reste à ajouter celle de nos découvertes personnelles dans le voisinage de Brienne :

1° Une monnaie coloniale impériale de Nimes, en bronze;

2° Un culot de vase en poterie grise celtique ;

3° Enfin un autel votif en pierre de taille des carrières de Brouzet (1).

Ce petit monument, Messieurs, est certainement un des spécimens les plus curieux du genre. Il présente à peu près la forme d'un piédestal de 0m,20 de hauteur sur 0m,12 d'épaisseur en moyenne, orné d'une frise et d'un socle dont l'exécution dénote une main d'artiste peu exercée. Une des cornes de l'autel est cassée.

Le monument offre comme particularité fort curieuse une perforation oblique qui, partant du milieu de sa base, vient se terminer sur la face gauche latérale, à peu près au tiers de sa hauteur. Cette perforation est le signe distinctif des autels destinés aux sacrifices.

Les autels païens étaient ou circulaires ou carrés, avec une cavité au sommet où l'on allumait le feu et qui correspondait à un orifice latéral ou inférieur par lequel s'échappaient les libations de vin ou le suc des offrandes consumées.

« Ces parties, dit Anthony Rich, sont essentielles à tous les autels sur lesquels on brûlait des victimes, où l'on versait des libations ; partout où elles manquent, bien que la pierre ressemble en général à un autel, ce n'est qu'un cippus et non pas un ara. Les archéologues, ajoute le même auteur, oublient trop souvent cette différence (2). »

Tout en présentant les signes caractéristiques qui distinguent l'autel proprement dit du cippe, le monument que vous avez sous les yeux offre, Messieurs, une autre singularité non moins curieuse et dont l'exemple est peut-être unique : c'est que la perforation oblique signalée, au lieu d'avoir son origine à la face supérieure de l'autel et d'aboutir sur un point latéral inférieur, se trouve disposée en sens inverse.

(1) Voyez planche III, fig. 7.

(2) Anthony RICH. — Dict. des antiquités romaines et grecques, au mot ARA.


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Nous pensons que cette dérogation aux règles habituellement suivies tient à ce que la face supérieure de l'autel présentait une surface trop exiguë pour servir aux sacrifices et que l'on retournait le monument de bas en haut pour accomplir les rites sur la face inférieure dont la superficie présente un plus grand développement.

La face antérieure de l'autel porte une inscription votive grossièrement ciselée. On y lit :

CASVNA W - L - M -

M A I

Il serait difficile, Messieurs, de déterminer, par la forme des caractères, l'époque à laquelle remonte la confection du petit monument que vous avez sous les yeux. Ces autels votifs sont, en général, d'un travail grossier, et celui-ci, en particulier, révèle chez son constructeur une grande inexpérience des règles de l'art.

Les caractères de l'inscription paraissent gravés avec la pointe d'un couteau : le nom de la femme qui a dédié l'autel est seul écrit en entier. Les quatre sigles qui entrent dans la deuxième et la troisième ligne composent une formule que l'on trouve reproduite avec de légères variantes sur tous les monuments de ce genre.

Le premier sigle figuré par un w barré représente la double abréviation V. S. comme le caractère typographique moderne employé pour exprimer le mot verso (f). Les deux abréviations suivantes sont simplement initiales. Quant au troisième sigle, il est quadruple et se trouve figuré par une sorte de chiffre entrelacé dans lequel on distingue les lettres M.A.T.I.

M. Germer-Durand complète et interprète cette inscription de la manière suivante : CASVNA V[otum] S[olvit] L[ibera] M[ente] MAT[r] I [s].

« Casuna accomplit librement son voeu aux Mères. »

Il existait, Messieurs, dans la mythologie païenne un certain nombre de divinités secondaires sur lesquelles nous n'avons que des données fort incertaines et dont les attributions sont encore


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mal définies par les savants modernes : les Matroe ou déessesmères doivent être comprises dans cette catégorie.

Il n'existe qu'un très-petit nombre de bas-reliefs antiques où ces déesses sont représentées, toujours au nombre de trois, comme les Parques, avec lesquelles certains archéologues les ont confondues.

A Metz, elles sont figurées debout sur le frontispice d'un ancien temple. Deux d'entre elles tiennent des pommes de pin à la main ; la troisième semble les tenir dans les plis de sa robe.

Un autre bas-relief du Musée lapidaire de Lyon provenant de l'église d'Aisnay les représente assises : celle du milieu tient des fruits sur ses genoux et une corne d'abondance de la main gauche ; les deux autres paraissent tenir des fruits dans un plateau posé sur leurs genoux.

Dans un mémoire publié en 1730 par l'Académie des inscriptions et belles-lettres (1), l'abbé Banier émet l'avis que les déesses-mères sont des divinités champêtres et qu'elles président à la campagne et aux fruits de la terre.

Le capitaine Colson les identifie avec les Proxumi, divinités dont le culte paraît avoir été circonscrit dans le midi de la Gaule (2).

Dans son Traité des dieux inconnus, Spon admet, sur l'avis d'un savant antiquaire vénitien, que les Proxumi et les Matroe étaient les Pénates.

M. de Blégier, qui a fait de consciencieuses recherches sur Avignon et le Comtat-Venaissin, voit dans ces divinités les Mânes des ancêtres vertueux dont la présence sanctifiait la maison et qui veillaient sur leurs descendants.

« Les Mânes divinisés, ajoute M. de Blégier, n'étaient autres que les lares et les pénates. De la sorte, le mot proxumi ou proximi, qui signifie parents, conserverait son acception naturelle. En cela, je me trouve plus particulièrement d'accord avec Millin, qui a rendu proxumi par proches, sans même y joindre le mot dieux; ce qui ne peut s'entendre que des pâ(1)

pâ(1) VIII, année 1730.

(2) Mém. de l'Académie du, Gard. Année 1851, p. 64.


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rents, ou, pour mieux dire, des mânes divinisés des ancêtres (1). »

Enfin, notre savant collègue de l'Académie du Gard, M. Aurès, ancien Ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussées, auteur d'un mémoire très-complet et encore inédit qui vient d'obtenir le prix des Sociétés savantes pour la circonscription académique de Montpellier, conclut que le culte des Proxumes, localisé au pays Arécomique, était rendu aux mânes des aïeules, considérées comme les génies particuliers de la famille et de la maison (2).

L'opinion de MM. Aurès et de Blégier nous paraît reposer sur des bases sérieuses, et nous n'hésitons pas à admettre que les pénates, les lares, les mânes, les proxumes et les déessesmères sont, dans chaque famille et sous des appellations différentes, la personnification des ancêtres.

A l'appui de cette opinion et pour clore la discussion, veuillez me permettre, Messieurs, de citer textuellement une page d'un de nos savants compatriotes, pour qui les moeurs romaines ont gardé bien peu de secrets et qui nous a révélé tant de choses curieuses sur l'antiquité :

« Il y avait, chez les anciens peuples de l'Italie, dit M. Gaston Boissier, une croyance profondément enracinée qui devait les familiariser avec l'idée qu'un homme peut devenir un

dieu Ils admettaient qu'il doit y avoir autre chose que le

corps dans l'homme, qu'il contient nécessairement un élément qui persiste à côté de l'élément qui s'éteint, et ils étaient amenés à conclure que cette partie invisible et immortelle vaut mieux que l'autre, puisqu'elle lui survit. Ces idées, qui semblent communes à toutes les nations aryennes, n'ont peut-être pris nulle part une forme si précise et si arrêtée qu'en Italie, d'où elles se sont répandues sur l'empire romain. Là, les morts, quand ils sont débarrassés de ce corps qui se corrompt et réduits à une substance impérissable, sont appelés les purs et les bons, mânes, et, comme les dieux passent pour des esprits dégagés de toute matière corruptible, les morts, qui jouissent du même avantage, deviennent semblables aux dieux, ou plutôt

(1) Mém. de l'Académie du Gard. Année 1851, p. 58.

(2) Voir le Rapport de M. Flouest dans les Mémoires de l'Académie du Gard, 186U-1870, pages 105-122.


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sont des dieux véritables, dii Manes. Cicéron fait de cette croyance un article de foi. « Chacun, dit-il, doit regarder » comme des dieux les parents qu'il a perdus. » C'est ce que signifient nettement les cérémonies des funérailles quand on en cherche le sens. Le tombeau est un autel et on lui en donne souvent le nom ; sur cet autel, on fait des sacrifices véritables, des libations et des festins. Pendant le sacrifice, la flûte résonne, les lampes sont allumées comme dans les temples ; le fils qui rend les derniers devoirs à son père a la tète voilée, et il reproduit tous les mouvements du prêtre qui prie. C'est qu'en vérité son père est un dieu, et il doit se le rendre favorable. Etait-il possible que le chef de famille qui avait passé sa vie à veiller sur les siens, les abandonnât après sa mort ? Ne devait-il pas, au contraire, d'autant plus les protéger que sa protection devenait plus efficace ? C'est ainsi qu'on fut conduit à regarder le nouveau dieu comme le protecteur et le patron de la maison. Selon l'opinion commune, les lares sont les âmes des aïeux divinisés, et on les honore chez soi, dit Servius, parce que primitivement on enterrait les morts dans son domicile (1). »

MESSIEURS ,

Notre excursion archéologique est terminée. En lui donnant une extension plus large, la Commission eut craint d'outrepasser les attributions que vous lui aviez conférées. Elle s'estimera heureuse, Messieurs, si vous jugez qu'elle a suffisamment correspondu au voeu de la Société et employé convenablement la portion des fonds sociaux que nous devons à la munificence de l'Académie des Sciences et que vous avez mise à notre disposition pour être consacrée à des recherches archéologiques locales.

A la suite de cette première tentative, vous resterez comme nous persuadés, Messieurs, que, si cette illustre assemblée daignait nous continuer ses encouragements, de nouvelles recherches, opérées sur divers points inexplorés du sol de

(1) Gaston BOISSIER. — L'Apothéose impériale. — Revue des Deux-Mondes du 1er mai 1871, p. 64-65.


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notre arrondissement, pourraient nous révéler encore de nombreux vestiges celtiques et gallo-romains.

Les récentes découvertes de M. Cazalis de Fondouce dans les grottes du Pont-du-Gard, dont il a rendu compte au dernier congrès scientifique de Bologne et à l'Académie de Nimes, nous donnent aussi lieu d'espérer que l'étude des périodes préhistoriques du midi de la France entre dans une nouvelle phase, et que les grandes cavités souterraines de la vallée du Gardon, à peine consultées, n'ont point encore dit leur dernier mot.

Toutes ces explorations continuées avec une infatigable persévérance pourraient, nous n'en doutons pas, amener des découvertes inattendues dont l'ensemble ne serait peut-être pas sans utilité pour l'histoire et la géographie ancienne de notre pays.

G. CHARVET.


SOURCES D'EUZET-LES-BAINS

REMARQUES ET OBSERVATIONS

sur quelques-uns de LEURS PROPRIÉTÉS PHYSIOLOGIQUES ET THÉRAPEUTIQUES

PAR

Le Dr AUPHAN, Secrétaire général

MESSIEURS ,

De récentes recherches chimiques (1), exécutées par M. le professeur Béchamp, de Montpellier, sur la source Lavalette, d'Euzet, et sur deux nouvelles sources découvertes dans cette station, m'engagent à vous entretenir de quelques-unes des propriétés physiologiques et thérapeuthiques de ces eaux minérales, nos voisines, propriétés qui se trouvent aujourd'hui rationnellement expliquées par les substances dont M. Béchamp a constaté la présence et que les analyses antérieures n'avaient fait qu'indiquer ou n'avaient point encore signalées.

La plupart d'entre vous connaissent la topographie de l'établissement d'Euzet. On sait aussi que les sources naissent dans le terrain lacustre bitumineux, à la partie méridionale d'une vaste plaine s'étendant de la petite ville de Barjac jusqu'aux villages de Saint-Hippolyte-de-Caton et de Saint-Jean-deCeyrargues. Les montagnes environnantes appartiennent au terrain néocomien, et c'est sur une couche de terrain crétacé inférieur que repose le schiste marneux formant la plaine lacustre dont il est ici question.

(1) Voir le Montpellier médical, n° d'avril 1872.


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Mais pour compléter ces renseignements géologiques, je crois devoir citer ici l'opinion de notre regretté collègue, M. Émilien Dumas, sur le régime des sources d'Euzet. Certainement personne ne mettra en doute la compétence de ce savant observateur. — Pour lui, ces sources ne sont pas toutes solidaires ; certaines d'entre elles n'ont aucune relation avec leurs voisines, et il doit évidemment exister plusieurs nappes aquifères séparées par des couches plus ou moins épaisses de calcaire feuilleté bitumineux.

Cette indépendance de quelques sources expliquerait les différences chimiques importantes observées par M. le professeur Béchamp. Quoi qu'il en soit, ces différences existent et elles sont à la fois confirmées par l'analyse chimique, et par les propriétés physiques, physiologiques et thérapeutiques des eaux qui sont loin d'être identiques, suivant qu'on puise à tel ou tel griffon.

§ I.

Il résulte des derniers travaux de l'éminent professeur de Montpellier que les sources d'Euzet dont il vient de publier l'analyse doivent être classées parmi les eaux salines, sulfatées calciques sodo-magnésiennes. L'analyse la plus récente datait de 1854; elle était due à M. O. Henry, alors chef des travaux chimiques à l'Académie de médecine. Cette analyse est de beaucoup plus complète que celle qui fut faite en 1827 par Limouzin-Larnothe ; mais comme elle n'a pas été exécutée sur place, elle est loin d'offrir les mêmes garanties d'exactitude que celle que M. le professeur Béchamp vient de faire à la source même et à laquelle il a apporté le soin le plus scrupuleux.

Vous me permettrez de mettre en regard les résultats obtenus par ces deux expérimentateurs sur l'eau de la source Lavalette, et de vous faire observer combien sont grandes les différences que l'on constate dans ces résultats, non-seulement au point de vue de la quantité des principes minéralisateurs, mais encore et surtout au point de vue de leur nature.


— 90 — ANALYSE DE LA SOURCE LAVALETTE

Henry Ossian. Béchamp.

Acide sulfhydrique libre . . . Sulfate de potasse hydraté . .

» de soude hydraté. . .

» de magnésie hydraté . Sulfate de chaux hydraté. . .

Hyposulfite de soude

Bicarbonate de magnésie. . .

» de chaux ....

Acétate et Butyrate de soude.

Chlorure de sodium

» de magnésienne . .

Silicate de magnésie

Silice

Alumine

Protoxyde de fer

Phosphate

Matière organique

Bitume

Oxide de manganèse

» de cuivre

0,0047 0,00022

— 0,02171

0,491 0, 37019

0, 491 0,39604

1,660 2,59075

— 0,05269

0,733 0, 22368

— 0,00308 0,080 0, 02060

— 0,08597

0,00218

0,166 0,00316

Traces 0,02512

— Traces

— Traces

3,130 3,79559

De l'examen comparatif de ces deux analyses, il ressort les différences suivantes :

1° L'acide sulfhydrique est seul signalé par M. O. Henry, tandis que M. le professeur Béchamp constate, en outre, l'existence d'une quantité notable d'hyposulfite de soude. D'après le premier, la dose du principe sulfureux ne serait que de 0,0047 par litre, et elle atteindrait, d'après le second, le chiffre de 0,0523.

2° Les sels purgatifs, figurant pour 0,571 par litre dans l'analyse exécutée à Paris, doivent être portés à la dose de près d'un gramme (0,900) d'après M. le professeur Béchamp. Ecart : 0,400 entre les deux résultats.

3° La quantité de bicarbonate constatée par le chimiste parisien s'élève à 0,733, tandis qu'on n'en trouve que 0,223 dans la nouvelle analyse. Cette différence de plus de 50 centigram-


— 91 —

mes par litre est due à ce que le premier observateur ayant procédé loin des sources , une certaine quantité de l'acide carbonique de l'air est venue se combiner avec les bases contenues dans l'eau et fausser certainement les résultats, en faisant croire à l'existence primitive de doses beaucoup plus élevées de bicarbonates terreux.

On devrait toujours se souvenir que l'eau minérale est éminemment altérable et ne jamais l'examiner qu'à son lieu d'origine. Ce défaut de fixité dans la composition des sources sanitaires explique en partie leur énergie considérable non loin de leur point d'émergence et leur activité infiniment moindre après le transport. C'est qu'au lieu d'avoir l'eau minérale vivante, animée, que l'on trouve à la station, on n'en a plus, pour ainsi dire, que le cadavre.

4° D'après M. O. Henry, il y aurait des traces d'acide phosphorique. M. Béchamp n'en signale point; mais, en revanche, il note la présence de l'acide acétique, de l'acide butyrique et d'un oxyde métallique, le cuivre, dont l'activité, même à dose infinitésimale, ne saurait être mise en doute.

Pour en finir avec ces considérations chimiques, je dois vous dire que la lithine figure parmi les substances trouvées par le savant chimiste de Montpellier dans les deux nouvelles sources non sulfureuses analysées par lui. Cette substance ne serait pas contenue dans l'eau de Lavalette.

§ II.

Je vous le disais en commençant, l'analyse de M. Béchamp explique mieux qu'aucune autre les effets physiologiques et thérapeutiques des eaux d'Euzet.

J'ai, pendant huit ans, dirigé cette intéressante station et j'ai consigné dès 1858 les observations suivantes dans mon travail intitulé : Considérations médicales sur les eaux d'Euzet-lesBains.

Il s'en faut que les sources sulfurées calcaires aient une ction analogue à celle des sourees d'Euzet. Fortement chargées de sels calcaires et de principes sulfureux, ces eaux, rises à doses convenables, occasionnent souvent la constipaion ; et, si certains malades en font un usage immodéré, ils


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ne sont purgés que par indigestion. Après quelques jours, les fonctions de l'estomac deviennent plus pénibles, et cet organe, sursaturé de principes sulfureux, éprouve pour les eaux minérales dont nous parlons une répugnance invincible. Ces eaux paraissent localiser leur action sur les organes pulmonaires et sur l'appareil cutané.

Rien de pareil pour les eaux d'Euzet. Les malades s'habituent promptement à leur goût légèrement hépatique et bitumineux et finissent même par les boire avec plaisir. Elles produisent au début des évacuations, tantôt alvines, tantôt bilieuses, qui se continuent plus ou moins longtemps. Puis, après les premiers jours, reflet physiologique des eaux ne se traduit plus que par des selles semi-liquides, par une plus grande abondance des urines et de la sueur et par une facilité très-grande dans les digestions. Ces eaux sont limpides, d'une fraîcheur remarquable et peuvent être bues à la dose énorme de 150 verres par jour sans occasionner le moindre effet nuisible. Elles agissent en augmentant l'activité vitale de tout le système et, en particulier, des reins et des organes digestifs.

Vous le voyez, messieurs, ce ne sont point là les propriétés des eaux sulfurées calciques dont les sources d'Auzon sont un des types les plus complets.

§ III.

Pour ne pas abuser trop longtemps de votre bienveillante attention, j'arrive immédiatement aux effets thérapeutiques spécialement attribués aux sources d'Euzet et auxquels ne sauraient prétendre les sources sulfurées calciques proprement dites. Je n'ai donc point l'intention de faire ici une monographie complète ; je ne veux marquer, si c'est possible, que les différences qui peuvent exister entre Euzet et d'autres stations sulfureuses soi-disant analogues.

Les eaux d'Euzet ont de tout temps été reconnues trèsefficaces contre les maladies de l'appareil pulmonaire. Il suffit pour s'en convaincre de consulter les oeuvres de Sauvages, du professeur Ridens, de Montpellier, de Lieutaud et du Dr Pau-


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let, d'Anduze. — Cette efficacité ressort du reste des nombreuses expériences cliniques qu'il m'a été donné de faire durant mes huit années d'inspection.

Elles peuvent, dans certains cas, remplacer les eaux sulfurées calciques, comme les Fumades, ou sodo-calciques, comme les Eaux-Bonnes; mais leur mode d'action n'est point le même : les eaux franchement sulfureuses , fortement excitantes, produisent une sorte d'exaltation de tout le système, irritent et congestionnent l'appareil respiratoire vers lequel elles paraissent plus spécialement concentrer leur action, et disposent par cela même à des accidents fort redoutables (congestions pulmonaires, hémoptysies, etc.); au contraire, les eaux d'Euzet donnent lieu seulement à quelques phénomènes peu marqués de subirritation du côté de l'arrière-bouche et des bronches ; elles excitent légèrement le tube intestinal et procurent par ce moyen une révulsion salutaire sur les organes digestifs. Prises à petites doses, elles semblent modérer la toux dès les premiers jours, tandis que les sources franchement sulfureuses produisent en général au début une aggravation de ce symptôme.

Cette spécialité d'action de l'eau d'Euzet s'explique d'abord par la nature particulière du composé sulfureux (hyposulfite de soude signalé par M. Béchamp), par la présence du bitume, et aussi par la composition saline de l'eau imprimant une activité salutaire aux organes digestifs et aux autres grandes fonctions de l'économie.

Quelques conséquences pratiques se déduisent de ce qui précède. A cause de son action sédative, la source Lavalette administrée en boisson, à faible dose, peut convenir aux tuberculeux, même dans les cas où des raptus, des mouvements congestifs, des hémoptysies, seraient à redouter. — Les phénomènes de cette nature que l'on y a observés sont la conséquence de traitements mal dirigés, de pratiques thermales exagérées, d'inhalations trop chaudes ou trop prolongées.

Il est toute une classe de tuberculeux que j'ai eu souvent l'occasion de traiter à Euzet, et je puis dire que dans le plus grand nombre des cas , j'ai obtenu des résultats vraiment remarquables. Je veux parler de la phthisie granuleuse se développant d'abord lentement, ne présentant guère au début d'autres symptômes qu'un amaigrissement progressif et une subirritation de toutes les muqueuses de l'économie. Rien encore ne s'observe du côté du poumon, si ce n'est un peu d'obscurité


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du bruit respiratoire avec expiration prolongée. Cet état dure quelquefois deux ou trois ans avec quelques alternatives d'aggravation et d'amélioration. Puis surviennent presque suhiment des accidents tuberculeux formidables, des phénomènes de colliquation, et les malades succombent en un ou deux mois avec tous les symptômes de la phthisie tuberculeuse aiguë. Si, pendant cette période prémonitrice, on entreprend à Euzet une cure convenablement dirigée, on s'aperçoit d'une reconstitution rapide de l'organisme, d'un arrêt dans la série des phénomènes morbides qui se succédaient jusque là avec une implacable ténacité; et, quoiqu'on ne puisse pas dire que le malade est absolument guéri, il n'en est pas moins vrai que la maladie est enrayée pour un temps quelquefois considérable. Je pourrais citer à l'appui huit ou dix personnes d'Alais ou des environs qui depuis dix, douze ou quinze ans qu'elles ont suivi une cure thermale à Euzet, n'ont jamais cessé de jouir d'une santé relativement bonne. Mais, on le comprend, ce sont des cas où il faut se hâter, la cure thermale ne pouvant pas évidemment réussir quand la période aiguë a déjà commencé et que l'on peut constater, presque jour par jour, la marche envahissante des granulations pulmonaires qui détruisent si rapidement le parenchyme de l'organe.

Du reste, toutes les formes de la tuberculose peuvent être amendées ou guéries par la cure thermale d'Euzet où les salles d'inhalation ont pris depuis longtemps un grand développement.

Nous devons en excepter toutefois la période ultime de la maladie, lorsqu'il y a déjà diarrhée colliquative, fièvre hectique, et que tout fait craindre une terminaison prochaine; car la fièvre loin de se modérer acquerrait un développement plus considérable et la maladie prendrait inévitablement une marche plus rapide.

Permettez-moi de vous signaler en passant le succès des inhalations de bitume dans les cas d'asthme essentiel. On peut en quelques minutes arrêter un accès à son début en faisant respirer au malade les vapeurs bitumineuses de la salle d'inhalation.

Mais je m'arrête et passe sous silence les résultats remarquables obtenus dans les autres maladies de l'appareil pulmo-


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naire ; car, pour ne pas dépasser le but que je me suis posé, je ne veux appeler votre attention que sur les états pathologiques qui réclament d'une manière plus spéciale la cure thermominérale d'Euzet.

Les dyspepsies essentielles, les dyspepsies diathésiques et symptomatiques et les inflammations chroniques de l'estomac et des intestins, constituent les principales maladies des organes digestifs que l'on observe à Euzet-les-Bains.

La dyspepsie est caractérisée par des troubles dans les fonctions digestives sans lésion organique. Cette forme morbide est le plus souvent liée à un état diathésique particulier (rhumatisme, goutte, herpétisme). D'autres fois, elle n'est que le symptôme d'une lésion organique grave ; telles sont par exemple : l'hypertrophie du coeur, les anévrismes de l'aorte, les affections organiques de certaines glandes abdominales (foie, pancréas, etc.).

La dyspepsie, liée à une affection organique grave, ne peut être utilement modifiée par aucune espèce de cure thermale.

La dyspepsie, liée à un état général concomittant (herpétisme, rhumatisme, goutte), trouve souvent sa guérison aux sources thermales qui combattent avantageusement les états diathésiques dont nous parlons. Les eaux sulfurées calciques par exemple réussissent souvent contre les troubles gastriques d'origine herpétique, strumeuse et même rhumatismale. Aussi la spécialité d'action des eaux d'Euzet, dans ces sortes de dyspepsies, ne serait point à invoquer comme preuve d'une différence, au point de vue thérapeutique, entre elles et les eaux sulfurées calciques. Toutefois nous devons retenir qu'à Euzet le succès est la règle, et qu'aux autres stations réputées similaires, le succès est l'exception. Mais dans la dyspepsie goutteuse l'action des eaux sulfureuses simples est en général nulle ; les quelques cas de cette espèce que j'ai pu suivre à Euzet ont tous été améliorés ou guéris par la cure minérale interne instituée à cette station.

Quant aux dyspepsies essentielles, le nombre considérable de malades qui vont, chaque année, chercher leur guérison à l'établissement d'Euzet, les succès qu'ils obtiennent et que les médecins des environs ont tous pu constater, me dispensent de tout commentaire. — Et cependant personne n'ignore que les eaux sulfurées calciques proprement dites n'ont aucune action


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sur ces maladies essentielles (névroses ou autres) des organes digestifs. Il devient donc évident que la source Lavalette, d'Euzet, doit être chimiquement et cliniquement séparée des sources auxquelles on avait cru devoir l'assimiler jusqu'ici.

Je continue cet examen comparatif. La gastrite et la gastroentérite chroniques, l'obstruction abdominale, l'engorgement chronique du foie, les hémorrhoïdes et la constipation sont le plus souvent guéries ou soulagées par la cure complexe d'Euzet, dont l'eau de la source Lavalette, prise à l'intérieur et à doses variées, suivant les cas, forme le principal élément. Ces divers états morbides ne se rencontrent guère près des eaux sulfureuses proprement dites qui, loin de les modifier, les aggravent le plus souvent.

Je crois devoir ajouter à titre de renseignement que, dans les maladies du tube digestif s'accompagnant d'éréthisme ou de subinflammation, les eaux d'Euzet doivent être fréquemment préférées aux eaux bicarbonatées sodiques, acidules, dont on peut craindre quelquefois les effets trop excitants.

La seule affection scrofuleuse où l'influence du traitement interne d'Euzet soit parfaitement démontrée, c'est le carreau. L'effet direct et marqué qu'ont les eaux minérales qui nous occupent sur les organes de la cavité abdominale, explique leur influence sur l'engorgement indolent des ganglions mésentériques. Le succès est d'autant plus assuré que la diathèse scrofuleuse a fait moins de ravages dans l'économie et qu'elle n'en est, pour ainsi dire, qu'à son début. Quant aux manifestations plus graves de la scrofule, elles n'éprouvent en général que des modifications à peine sensibles, dues plutôt à l'influence des milieux qu'à l'action particulière des eaux; et cependant les eaux franchement sulfureuses revendiquent dans les cas graves une efficacité non douteuse.

Passons rapidement sur les affections de la peau ; car les eaux d'Euzet partagent, avec la plupart des eaux sulfureuses, une spécialité d'action dans ce groupe de maladies. Remarquons toutefois qu'elles agissent plus efficacement sur les dartres sèches qui, d'après les travaux des darmatologistes modernes


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et notamment de Bazin, ne seraient souvent que des manifestations de la diathèse arthritique goutteuse.

Le rhumatisme et ses nombreuses métamorphoses doivent être passés sous silence ; car on ne trouve à Euzet, pour les combattre, que les moyens balnéothérapiques ordinaires et non pas une eau à cemposition spéciale.

Lorsque, en 1858, je publiai mon travail sur les sources d'Euzet, je n'avais pas encore pu constater suffisamment leur mode d'action sur la gravelle et les autres affections des voies urinaires. Mais durant les six années qui ont suivi cette publication, il m'a été donné d'observer un certain nombre de cas de gravelle urique avec accès plus ou moins violents de colique néphritique , quelques catarrhes vésicaux avec surexcitation (cystite) et deux catarrhes atoniques de la vessie chez des vieillards.

Je n'ai pas à vous développer ici les causes, la symptomatologie de la gravelle ou diathèse urique qui, comme on le sait, a une si grande affinité avec la goutte. Qu'il me suffise de vous dire que la gravelle est constituée par des concrétions qui se forment dans les reins et la vessie, grâce à un excès d'acide urique ou d'urate de soude. Tant que ces concrétions restent ténues, elles se déposent sous forme de poussière ou de sable au fond du vase, après l'émission des urines. Si, au contraire, elles s'agglomèrent, elles constituent ainsi un noyau qui va sans cesse s'augmentant par l'adjonction de nouvelles molécules. Dans le cas où ces concrétions se sont primitivement formées dans le rein, elles ont besoin, pour être rejetées au dehors, de traverser un conduit long et étroit faisant communiquer le rein avec la vessie. C'est la douleur déterminée par ce passage à travers l'uretère que l'on désigne sous le nom de colique néphrétique. La forme des graviers, l'élasticité et l'ampleur des conduits, la susceptibilité plus ou moins grande du malade, diminuent ou augmentent l'horreur de cette torture.

Dans les cas relativement peu nombreux où il m'a été permis d'expérimenter l'action des eaux d'Euzet, elles ont paru agir

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très-efficacement, non-seulement comme stimulant de l'appareil urinaire, mais encore, comme agent chimique.

L'action stimulante sur les reins ressort des considérations physiologiques insérées au début de ce travail.

L'action chimiqne m'a été révélée par la forme plus arrondie, moins anguleuse, des graviers rendus qui paraissaient, pour ainsi dire, usés à la surface.

Parmi les malades qu'il m'a été donné d'observer et qui tous se sont bien trouvés de la cure d'Euzet, je citerai seulement une dame d'Alais qui, à la suite de deux saisons faites en 1861 et en 1862, s'est trouvée complétement débarrassée de ses épouvantables crises de coliques néphrétiques. Une seule fois, il,y a six ans, cette dame a eu une manifestation légère de la, maladie, que l'eau d'Euzet prise en boisson à domicile, a suffi pour faire disparaître complètement.

Les modifications heureuses obtenues à Euzet dans les cas de ce genre, font pressentir tout le parti que l'on pourra tirer de cette eau minérale dans la cure de certaines formes de, la diathèse goutteuse dont la parenté, avec la gravelle est incontestable.

Notre honorable collègue, M. le docteur Léonce Ménard, a pu constater comme moi les heureux effets du traitement interne d'Euzet dans les cas de catarrhe de vessie.

Aux observations déjà citées dans l'intéressant mémoire du savant chimiste de Montpellier, vous me permettrez de joindre celle d'un vieillard de soixante-cinq ans, ancien négociant à Nimes, venu à Euzet en 1859 pour se guérir d'une affection dyspeptique déjà ancienne. Les digestions laborieuses et difficiles avaient déterminé un amaigrissement prononcé; à ces accidents se joignaient une constipation opiniâtre et une incontinence d'urine que rien n'avait pu vaincre. Quand, par hasard, il lui arrivait de pouvoir en recueillir quelques gouttes, ses urines étaient bourbeuses et répandaient une forte odeur ammoniacale.

Quinze jours de traitement ont suffi pour rétablir les digestions, régulariser les selles, et faire cesser l'incontinence, qui faisait son désespoir. Cette observation est très-remarquable.

Je pourrais citer encore quelques exemples ; mais je ne veux point abuser de votre patience.

Du resté, Messieurs, je crois avoir accompli ma tâche, je


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crois avoir démontré que par leur action physiologique, comme aussi par leurs effets thérapeutiques, les eaux d'Euzet diffèrent essentiellement des eaux sulfurées calciques proprement dites.

En effet, elles sont légères et faciles à digérer et peuvent être bues à des doses considérables sans occasionner d'accident. Elles paraissent porter plus spécialement leur action sur les organes digestifs et sur les organes urinaires ; car elles sont laxatives et diurétiques. Au contraire, les eaux sulfurées calciques agissent surtout sur l'appareil pulmonaire et sur la peau, dont elles augmentent et régularisent les fonctions.

Si les eaux d'Euzet sont efficaces dans les maladies de la poitrine, ce n'est point par leur mode excitant comme les eaux sulfureuses; c'est par une sorte d'action locale béchique et sédative tout à la fois, et aussi par une action spéciale reconstitutive.

Les maladies des organes digestifs, celles des voies urinaires, sont rapidement améliorées ou même guéries par l'emploi rationnel de la cure d'Euzet. — Ces maladies ne sont traitées avec succès par les eaux sulfurées calciques que très-exceptionnellement, quand elles sont tenues sous la dépendance d'une diathèse spéciale à laquelle s'applique la médication thermale sulfureuse.

Les nouvelles sources analysées dans ces derniers temps par M. le professeur Béchamp augmenteront certainement les applications médicales des eaux d'Euzet.

La source A, ferrugineuse, moins minéralisée que les autres sources du groupe d'Euzet, mais éminemment digestible et reconstituante, mérite une étude attentive de la part du médecin qui doit avant tout rechercher quels en sont les effets physiologiques, quel est, par exemple, celui des trois appareils d'excrétion de l'économie, sur lequel elle paraît plus spécialement porter son action.

La source B, dépourvue des principes volatils de Lavalette, permettra de mieux distinguer l'action des éléments fixes qu'elle contient. Analogue par sa composition aux eaux si justement célèbres de Contrexéville et de Vittel, elle convient probable-


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ment dans les mêmes cas. C'est ce que démontrent les observations déjà recueillies par M. le Dr Léonce Ménard. Du reste, le savant chimiste de Montpellier, qui en a fait l'analyse, ne craint pas de la désigner d'avance sous le nom de Contrexéville méridional

Pour moi, Messieurs, je ne puis que m'associer à l'heureuse idée de son intelligente marraine qui, pour consacrer le souvenir des services rendus au pays et aux malades, a voulu la désigner désormais sous le nom de Source Béchamp.


LA VIE-CIOUTAT

APERÇU ET OBSERVATIONS

sur SON ORIGINE, SON NOM ET L'ÉPOQUE PRÉSUMÉE DE SA DESTRUCTION

PAR

M. L. CHAMBOREDON

Membre résidant

Au sud-est d'Alais, à sept ou huit kilomètres de cette ville, se trouve un plateau sec, pierreux et presque stérile, qui domine le village de Méjane et que l'on signale comme ayant été le siége d'un opidum ou opidulum. Ce plateau, placé à proximité de la route d'Uzès, est désigné par les habitants des localités voisines sous le nom de Vié-Cioutat, — la vieille cité, la vieille bourgade — nom d'origine romaine qui dérive selon toute apparence de Vetus Civitas ou de Vetus Civitatula (1).

On y remarque encore les restes de ses anciennes murailles démolies presque jusqu'aux fondements, et qui, par l'espace qu'elles embrassent, permettent d'apprécier l'étendue que cet opidulum devait occuper (2).

Dans l'enceinte de ses anciens murs, où croissent des arbustes et quelques chênes verts, on voit, semés ça et là, des débris de poteries, de tuiles romaines, de briques, etc.

(1) La Vié-Cioutat est placée presque au milieu du triangle formé par les villages de Mons, de Méjane et de Monteils. Quoiqu'elle soit comprise dans le territoire de la commune de Mons, elle est cependant plus près et plus à portée de Méjane qu'elle domine ; la plus grande partie du terrain qu'elle occupait appartient même à des propriétaires de cette dernière localité.

(2) On estime à plus de cinq hectares l'espace qu'embrassaient ses murailles.


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On a trouvé, il y a quelques années, enfouies sous ces ruines, des armes anciennes toutes rouillées, des cella, des médailles, et entre autres choses une coupe antique d'origine étrusque d'un travail remarquable.

Ces découvertes et celles que l'on y a faites depuis, engagèrent dernièrement la Société scientifique et littéraire d'Alais à y faire exécuter quelques fouilles qui, bien que pratiquées dans un très-petit espace, n'ont pas été cependant sans importance.

On a extrait, en effet, de ces ruines des fragments d'amphores, d'urnes, de vases, et notamment deux bases de colonnes d'ordre toscan avec une portion du fût de l'une d'elles qui semblent attester, par leurs débris, que les Romains avaient créé un établissement dans ce lieu (1).

Cet heureux résultat, tout en faisant regretter que ces fouilles n'aient pas été poussées plus avant, ont attiré l'attention sur les ruines de la Vié-Cioutat et éveillé la curiosité à son sujet.

On s'est demandé quelle pouvait être l'origine de cet opidulum, quel était son nom, ce qui avait pu motiver sa création sur ce plateau isolé et presque stérile ; enfin à quelle époque et par qui il avait été ruiné et détruit.

Nous allons essayer de répondre à ces diverses questions, non pas avec la prétention de les résoudre d'une manière pleinement satisfaisante, mais bien avec la pensée que cet essai pourra donner lieu à des recherches qui seront peut-être plus heureuses que les nôtres et qui, en jetant quelques lumières sur le passé de la Vié-Cioutat, permettront de baser sur elles une monographie de ce lieu.

1) On n'a trouvé jusqu'à présent dans les ruines de la Vié-Cioutat aucun ustensile, aucun objet qui date de l'époque celtique. On peut objecter, il est vrai, que les murs de son enceinte étaient en pierres sèches; mais c'est un fait qui ne détruit pas l'opinion que l'on peut avoir sur son origine.

Nous observerons en effet que, pour la défense d'un petit poste fortifié, d'un castra, comme la Vié-Cioutat parait l'avoir été dans le principe, on ne s'attachait pas à construire des murs d'enceinte avec des pierres régulièrement taillées et à les lier avec du ciment, ainsi que cela se pratiquait dans les villes où les Romains établissaient des colonies, comme Nimes, Orange, etc.

On se bornait seulement à creuser des fossés sur les bords desquels on élevait des murs en pierres sèches ou des parapets en terre. C'est ce qui explique pourquoi les murs d'enceinte de la Vié-Cioutat étaient en pierres sèches, ainsi que leurs débris semblent l'indiquer.

Il peut se faire encore que ces murs aient été construits plus tard, comme moyen de défense, à l'époque des invasions sarrazines ou autres, ou bien dans quelque guerre intestine; c'est une opinion qui n'a rien d'improbable.


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DE L'ORIGINE DE LA VIÉ-CIOUTAT

On est jusqu'à présent privé de données certaines sur la Vié-Cioutat ; les historiens de nos provinces et de nos cités méridionales n'en font point mention, et parmi les nombreux documents que le passé nous a transmis, il n'y a pas un acte, pas le moindre écrit, dans lequel il en soit question. Nous ne pouvons donc soulever le voile mystérieux qui couvre le passé de ces ruines qu'en nous appuyant sur des probabilités qui, bien qu'assez fortes pour être admises, n'ont point cependant tous les caractères de la certitude.

La Vié-Cioutat fut, selon toute apparence, une agglomération de peu d'importance, vu la faible étendue de son périmètre et l'oubli complet qui a pesé sur elle.

Quoique placée au milieu de la population des Volks Arecomiks, nous ne pensons pas néanmoins qu'elle ait fait partie de leur confédération et ait été comptée au nombre de leurs bourgades ; nous ne partageons donc pas l'opinion de ceux qui pensent que c'était l'ancienne Vatrute de l'inscription du Musée de Nimes, laquelle était placée, selon nous, sur les bords du Gardon, ainsi que l'étymologie de son nom semble l'indiquer (1).

Nous sommes plus portés à croire que la Vié-Cioutat prit naissance à l'époque de la conquête de la Gaule méridionale par les Romains, peut-être au temps de Pompée, sous l'odieux proconsulat de Fonteius, et que ce fut dans le principe un castra, un poste fortifié, un de ces petits camps permanents que le Romains établissaient dans les provinces conquises pour surveiller les populations et les tenir en respect.

Au sujet de ces postes fortifiés, de ces castra, nous ferons quelques observations qui, nous le pensons, ne seront pas Sârïs

(1) Le nom de Vatrute, de cette ancienne bourgade volsque, ne paraît être que l'expression celtique vardu-te, qui signifie habitation, village, bourgade placée sur les bords du Gardon, et que par métathèse la prononciation et le langage ont transformée en celle de Vadrute, Vatrute. C'est à él'tymologie probable de ce nom qui nous a déterminé à placer Vatrute à Saint-Jean-du-Gard. Nous n'avons pas pensé que le nom du ruisseau qui coule au pied du plateau de la ViéCioutat (le Doudre, ou Droude, ou la Droude) fut un motif suffisant pour faire considérer les ruines de la Vié-Cioutat comme étant celles de l'ancienne Vatrute-


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objet, et ne pourront que contribuer à faire apprécier notre opinion.

Ces castra étaient établis quelquefois dans des bourgades ou auprès d'elles ; ainsi il y en avait peut-être à Ucetia (Uzès), à Ugernum (Beaucaire), etc. ; mais assez souvent ces postes fortifiés, ces petits camps permanents, étaient établis dans des lieux isolés, stériles même, tels que le plateau de la ViéCioutat. On avait soin de les choisir autant que possible élevés, dominant des bas-fonds et à proximité d'une route ou d'un chemin de service, afin qu'ils pussent correspondre sans difficulté entre eux ainsi qu'avec le chef-lieu de la province, et se prêter au besoin un mutuel secours.

Dans ces conditions, ces postes, d'une facile défense, étaient mis promptement en mesure de résister à un soulèvement et de repousser une surprise.

Quelques-uns de ces derniers castra ont été le germe de villes importantes et populeuses ; d'autres, au contraire, qui se trouvaient placés dans des positions stériles ou insalubres, y ont à peine laissé la trace et le souvenir de leur nom.

Ce qui contribua surtout à donner de l'importance à queluns d'entre eux et à attirer une population plus ou moins nombreuse dans l'enceinte de leurs murailles, c'est que les Romains en firent des centres administratifs et en quelque sorte des chefs-lieux des circonscriptions administratives ou territoriales dans lesquelles ils se trouvaient placés.

Ces circonscriptions, qui n'étaient pas d'une grande étendue, recevaient quelquefois le nom de civitas, et le poste fortifié, le castra, dans lequel se centralisait l'administration, était désigné, à ce que l'on croit, sous le nom de castra mediana ou de civitatula mediana, la bourgade placée au milieu, la bourgade centrale, ou simplement de mediana, que l'on prononçait medjan, la centrale, lorsque ce poste n'avait pas un nom particulier (1).

(1) Chez les Latins, le j n'était pas connu; c'est une lettre de création moderne. A son défaut, l'i se prononçait dans un grand nombre de cas comme le j, lorsqu'il était suivi d'une voyelle. Ainsi on disait Janus, Jovis, Julius, et non Ianus, Iovis, Iulius; Medjo, et non Medio, etc. ; et c'est ce qui explique pourquoi on (prononçait Medjana et non Mediana.

Au sujet de ce dernier mot (Mediana), nous observerons qu'il était employé par Vitruve, qui vivait au temps de la bonne latinité, pour désigner un objet central. Ainsi les expressions locus medianus, positio mediana, signifiaient un lieu central, une position centrale.


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Par cela même que ces castra ou civitatula mediana étaient des centres administratifs, ils devenaient la résidence obligée de tous les fonctionnaires romains attachés à la circonscription ou à la cité (civitas), tels que les officiers chargés de juger les différends qui pouvaient s'élever entre les citoyens romains et les indigènes. C'est là qu'habitaient aussi les fermiers et les personnes préposées à la perception des impôts ou des tributs qui devaient être fournis, tant en nature qu'en argent, par les habitants de la circonscription

Le séjour de tous ces fonctionnaires et de leur suite devait naturellement attirer dans ces postes fortifiés, dans ces castra, une population plus eu moins nombreuse de marchands de comestibles et autres, suivant l'étendue de la circonscription. Leur enceinte devait donc s'élargir selon les besoins et former peu à peu des civitatula et même des opidum d'une certaine importance.

C'est vraisemblablement ainsi que l'agglomération ou la civitatula dont les ruines ont conservé le nom de Vié-Gioutat fut créée sous la protection du poste ou du petit camp permanent qui y était établi, et que son titre de centre administratif dut faire désigner par les habitants de la circonscription sous le nom de civitatula mediana ou de mediana (medjana) — la centrale (1). C'est ce qui donne la raison de l'étendue de son périmètre, quoique sa position sur un plateau rocailleux et presque stérile fût peu favorable à son accroissement.

Les chefs ou commandants de ces castra, de ces postes, les embellissaient quelquefois par des monuments ; ils y faisaient construire des temples et des habitations somptueuses où ils se donnaient tout le luxe et tout le confort de leur temps, comme pour faire contraste avec la solitude et la stérilité' du lieu où ils étaient placés. C'est ce qui explique encore la découverte de ces débris de colonnes et autres objets que l'on a faite à la Vié-Cioutat.

(1) Plusieurs Mediana sont signalées par les géographes anciens. Il y en avait en Illyrie, en Italie, en Espagne, en Afrique, etc.


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DE L'EPOQUE RÉSUMÉE DE LA DESTRUCTION DE LA VIÉ-CIOUTAT

On ne peut fixer d'une manière précise l'époque à laquelle fut détruite la Vié-Cioutat.

Est-ce aux peuplades du Nord ou aux Sarrazins qu'il faut attribuer sa ruine ? ou bien faut-il la considérer comme le fait de quelque guerre intestine du moyen âge et dont la VieilleCité aurait été victime ? C'est ce que l'on ne saurait dire, faute de documents historiques qui puissent nous éclairer à ce sujet.

Dans l'incertitude où nous laisse ce défaut de données, on est presque obligé de se rattacher à une espèce de tradition locale ou plutôt à une opinion assez généralement accréditée, qui fait remonter la destruction de la civitatula mediana à l'époque de la domination des Sarrazins dans la Septimanie, et signale ces derniers comme en étant les véritables auteurs.

Cette opinion n'a rien d'improbable sans doute ; nous observerons toutefois que quand on songe à tous les ravages que commirent dans nos contrées les bandes armées de CharlesMartel, lorsque ce vaillant chef des Francs vint tenter la conquête de la Septimanie, on est porté à attribuer à celles-ci autant qu'aux Arabes d'Espagne la ruine de la Vieille-Cité. Ce qu'il y a de certain, c'est que les chroniqueurs du temps parlent moins des dévastations des Sarrazins dans la première moitié du VIIIe siècle que des ravages et des ruines qu'accumulèrent sur leur passage, dans nos contrées, les troupes de Charles-Martel.

Quoi qu'il en soit de l'opinion que l'on adopte, oh peut toujours fixer à l'époque sarrazine (de 720 à 750) le fait de la destruction de la Vié-Cioutat.

Il est probable que beaucoup d'habitants de la civitatula mediana qui avaient échappé à sa destruction s'en rapprochèrent lorsque l'orage qui avait éclaté sur elle leur parut calmé ; mais, peu tentés sans doute d'aller en relever les ruines, ils préférèrent vraisemblablement aller s'établir les uns à Mons


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et à Monteils (1), qui prirent peut-être naissance à cette époque, et d'autres, en plus grand nombre, sur les bords du ruisseau qui coule au pied de la Vié-Cioutat, auprès des terres qu'ils cultivaient, position bien préférable à celle du plateau sec et pierreux où elle était assise.

On est induit à admettre qu'il se forma ainsi, dans ce dernier lieu, une agglomération à laquelle ces débris de la

(1) Monteils dont il est ici question reçut, au moyen âge, le nom de CastramMontilis, — château du mont inférieur, du petit mont, du monticule, à cause du château qui y fut sans doute bâti. Il peut se faire qu'à l'époque de la féodalité ce château et celui de Mons aient servi d'asile à bien des gens qui vinrent se placer sous leur protection, ce qui dut vraisemblablement contribuer à l'accroissement de la population de ces deux villages, tandis que Méjano vit peut-être alors la sienne diminuer. C'est un fait que l'on peut admettre, mais que l'on ne saurait établir, en s'appuyant sur le dénombrement des feux qui eut lieu en 1384, au commencement du règne de Charles VI.

Ce serait une erreur en effet que de se baser sur le dénombrement des feux d'alors pour évaluer la population qu'une localité pouvait avoir, parce qu'à cette époque le nom de feu avait une signification toute autre que celle qu'il reçut plus tard.

En 1384 et avant, on donnait le nom de feu à une certaine étendue de terre, à des moulins, à des usines, à des industries, ayant une valeur ou un revenu capable de supporter la quotité de contributions fixée à un chiffre pris pour unité et qui servait de base à l'assiette de l'impôt. (Cette quotité pouvait être représentée par exemple par un marc d'argent valant 10 livres parisis ou par toute autre matière supérieure ou inférieure à celle ci.)

Si les biens, immeubles et autres d'une communauté ou paroisse avaient une valeur d'une moitié, d'un tiers ou d'un quart en sus d'un feu, ils étaient imposés aussi pour cet excédant. De là vient que certaines localités, comme Méjane, sont appréciées dans ce dénombrement à un feu et demi, que d'autres le sont à un feu et tiers, etc.

En 1536, un feu était taxé en Provence et probablement aussi en Languedoc à 11 livres 6 sous 8 deniers ; mais il est à présumer qu'en 1384 cet impôt était moindre.

De ces faits on peut en induire que le nombre des feux pouvait augmenter dans une localité quoique la population restât la même, et réciproquement.

Il pouvait se faire encore qu'une localité beaucoup plus peuplée qu'une autre comptât moins de feux que celle-ci. Ainsi quoique le village de Méjane ne fût taxé en 1381 qu'à un feu et demi, il pouvait se trouver beaucoup plus peuplé que celui de Monteils qui le fut à trois, et que celui de Mons qui le fut à sept, par la raison que son territoire pouvait être moins étendu que celui des deux autres et que des annexes considérables pouvaient avoir augmenté le nombre des feux de ces derniers.

Ce qui nous a engagé en partie à faire ces observations, c'est que nous avons remarqué que dans certains ouvrages et notamment dans la Topographie du Gard, ouvrage précieux d'ailleurs sous bien des rapports, on prend le mot feu comme ayant en 1381 la même signification qu'en 1789.


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population de la Vié-Cioutat durent donner le nom de NovaCivitatula-Mediana, ou simplement de Mediana, Medjana, Méjane (1), en souvenir de leur cité détruite, dont les ruines reçurent peut-être alors celui de Vié-Cioutat qui leur est resté.

En nous résumant, nous dirons que nous sommes porté à croire que c'est à un castra, à un poste fortifié, qu'il faut attribuer l'origine de l'opidulum ou de la civitatula dont les ruines se montrent sur le plateau qui domine Méjane ;

Que cette origine remonte à la conquête du pays occupé par les Volks-Arecomiks ;

Que placé vraisemblablement au milieu de la circonscription territoriale dont il faisait partie, ce castra , ce petit camp , devint le centre administratif de cette circonscription;

Qu'à titre de centre administratif, il attira de nombreux habitants dans son enceinte, où il se forma une agglomération que l'on dut probablement désigner sous le nom de CivitatulaMediana, le bourg central, ou plus simplement sous celui de Mediana, Medjana, la centrale;

Que cette Civitatula-Mediana ayant été détruite à l'époque de la domination sarrazine dans la Septimanie, les habitants qui avaient échappé à sa destruction s'établirent en grande partie sur les bords du ruisseau qui coule au pied des ruines de la Vié-Cioutat (on peut du moins le présumer), et donnèrent à l'agglomération qu'ils y formèrent le nom de Nova-Civitatula-Mediana,, en souvenir de leur patrie détruite, ou simplement de Mediana, Medjana, que le nom de Méjane a conservé. Quant aux ruines de la vieille cité (vetus civitatula),

(1) Il y a plusieurs Méjane dans le Gard et autres départements. Nous citerons entre autres une Méjane située aux environs de Carcassonne dont il est fait mention dans un acte du XIIe siècle, relatif à la fondation de l'abbaye de Villelongue et cité dans les actes servant de preuves à l'Histoire du Languedoc. Dans cet acte en latin, Méjane est désigné sous le nom de Meiana, qui semble n'être que celui de Mediana dont on a supprimé le d.

Un acte du commencement du XIIIe siècle cité par Ménard fait mention de Méjane sous le nom de Meianoe (Mejanoe).


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elles ne furent désignées sans doute, à partir de ce moment, que sous le nom de Vié-Cioutat, la vieille cité, la vieille bourgade.

Nous sommes bien aise de rappeler, avant de finir, que nous ne considérons pas l'opinion que nous venons d'émettre sur le nom, l'origine et le passé de la Vié-Cioutat comme incontestable ; loin de là, nous la donnons seulement comme n'ayant rien d'improbable et très-admissible par conséquent, en attendant que des documents plus certains puissent mieux nous éclairer sur le nom et le passé de cet ancien opidulum.


LA LIBERTE

par

M. Frédéric FRANCEZON

MEMBRE, RÉSIDANT

Revenez, souvenirs de mes jeunes années,

Me consoler du temps présent. L'heure est sombre ; et j'entends, au plus bas des nuées,

Gronder l'orage menaçant.

Bien des ans sont passés depuis que, de la France,

J'ai vu la Liberté s'enfuir. Son retour aujourd'hui nous dirait : Confiance !

En illuminant l'avenir.

Car cette Liberté, du lait de ses mamelles,

Désaltérait tous ses enfants. Son front resplendissait, couronné d'immortelles ;

Et partout ses pas triomphants

Promenaient le flambeau dont la vive lumière Enflamme et remplit tous les coeurs ;

Ses bienfaits, prodigués à la nation entière, Rayonnaient sur ses détracteurs.

Comme le laboureur qui déchire la terre

Pour lui confier ses trésors ; Comme le moissonneur entassant dans son aire

Le fruit de ses constants efforts ;


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J'ai vu la Liberté, dans les champs de l'Idée,

Tracer de lumineux sillons ; Puis, les germes éclos, de l'humaine pensée,

Agrandir tous les horizons ;

Et dans ces champs féconds, tous ceux que le génie

Marquait au front du sceau divin Firent une auréole à la grande Patrie

Moins périssable que l'airain.

Voilà la Liberté, France républicaine,

Que j'appelle dp tous mes voeux. L'écueil est près du port, et la route incertaine :

Prends ce pilote courageux.

L'Aigle a jeté sur nous les hordes étrangères;

Les ruines, ont jonche le sol ; Et si l'oiseau de proie, en entr'ouvrant ses serres,

Tentait de reprendre son vol,

Qu'il nous trouve abrités sous la Liberté sainte,

Défiant tous les oppresseurs. Empereur ou Faubourgs, nous braverions sans crainte

Vos sinistres adorateurs.


L'IMMORTALITE DE L'AME

SONNET Par M. Auguste GIDE. Memore non résidant

Non v'accorgete voi che noi siam vermi Nati a formar l'angelica farfalla. (DANTE, le Purgatoire.)

Quand l'humble ver, au fond de sa prison légère, S'enferme et s'engourdit en un pesant sommeil, Sous la funèbre couche, aux regards du vulgaire, Il semble enseveli sans espoir de réveil.

Mais bientôt rejetant sa dépouille grossière, Papillon diapré qui se joue au soleil, Il s'envole brillant d'azur et de lumière, Et va de fleur en fleur boire leur suc vermeil.

Ainsi, des vers rongeurs devenu la pâture, L'homme quittant un jour son enveloppe impure, De gloire couronné volera vers les cieux ;

Et là, près de son Dieu, papillon angélique, Respirant les parfums de la Rose mystique, Des merveilles d'Eden rassasîra ses yeux.


A UNE JEUNE FILLE

Par le Même

Jeune fille aux yeux bleus, dont la pudeur naïve Colore le front pur d'une rougeur craintive ; Toi dont l'âme inquiète écoute avec frayeur Un premier mot d'amour qui, d'une voix plaintive Doucement soupiré, fait tressaillir ton coeur ;

Pourquoi, triste et cachant le trouble qui t'oppresse, Crains-tu de te livrer au besoin de tendresse Dont le charme en secret, comme un rêve enchanteur, Sans cesse offre à tes yeux celui dont la jeunesse De ton premier amour a ravi la faveur ?

As-tu vu quelquefois cette branche pliante Qu'un arbuste abandonne à l'onde turbulente ? Le rapide courant l'attire avec amour; Mais bientôt, surmontant la pente séduisante, Sa tige vers le bord la ramène à son tour.

Cependant le ruisseau qu'a fait grandir l'orage Hors de son lit étroit se déborde avec rage ; Alors le frêle arbuste à la terre arraché, Loin des fleurs dont l'haleine embaume le rivage Disparaît tristement sous l'abîme caché.

C'est ainsi que d'amour suivant la douce pente, Ton coeur hésite encore et frémit d'épouvante ; Mais crois-moi, c'est en vain que tu fuis ton destin. Fleur qu'attend d'un amant la main impatiente, Tu dois éclore un jour aux rayons du matin.

Oh ! tandis qu'à seize ans, sur ton front dispersées, Tombent tes tresses d'or du zéphir caressées; Pendant que ton printemps n'est qu'un long jour serein, Livre gaiment ta vie au ruisseau des années, En effeuillant la rose avant son court déclin.


MARGARIDO

par M. André LEYRIS, Membre résidant

Un souèr ère délon d'Avéno Soul âou pè d'un sâouze latiè ; Touto roujo, la luno pléno Dâou mitan das bosses sourtiè ; Din lou vala sé miraïavo Entré lous vijes à mous pès ; Un rajoulé d'or cascaïavo Coum' un éfanté din soun brès.

Un gour qu'èro plé dé jounquino Din l'âoubraje dourmiè pu bas. E pér déssus l'éscurésino, Un raï das pivous dâou ribas Fasiè trélusi la cimèrlo ; Sémblavo qu'âou ciel i-aviè fio ; Ero éstéla coum' uno pèrlo, Fasiè pa 'n pouce d'èr en io.

La choto avivado miâoulavo, E coum' un négre parpaïoù A l'éntour das âoubres voulavo, Lou gréïés cantavou pértoù ; Din touto la piano tranquinlo, Dé tén-z-én tén on énténdiè Un chi japa, drinda 'n'ésquinlo Ou bada quâouque mésadiè.


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Gnuè qu'émbaïmavo, gnuè supèrbo, D'un avan-gOus dâou paradis, Moun cur se drouvissiè din l'èrbo Coum'uno flou que s'éspandis; Dé pâou à pâou, dé tan bien qu'ère, E, coumo se m'avièou bréssa, Pluguère, è pièï m'éndourmiguère Douçomén, san m'en avisa.

E pantaïsère uno bérjèïro Qu'èro poulido coum' un jour, Que dâou sère din la vijèïro Davalavo dévèr lou gour : Anavo è végnè sus la draïo ; Aou miè dé soun troupèl Manqué, Embé soun capélé dé païo, Réquinquïa sus soun suqué.

S'assétè din l'èrbo finéto En pàousan soun picho bértoul, Soun méntouné din sa manéto, Soun couïde dessus soun jinoul ; E coumo quâouquus que s'anuïo E que languis dinc un désèr, Pénsavo aqui sus l'aïgo bluïo, En éspinchan véni lou souèr.

Coum 'un éfan se pénjoulavo Aou fin bor pér se véïre aval ; E quan s'afintavo, sémblavo, Dessus aquél fatal mirai, Un âoussél qu'uno sèr l'atiro E que mostro soun pitre blan, Ba dé las alos, viro, viro Dé branco en branco, en davalan.


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Pièï coupavo uno margarido, E 'n l'êsfloutant din soun fandàou : « Disou que Pièré se marido , — Sou i-fasiè—parlo mé 'n pàou ! « Es vrai aquô, digo, flouréto ? « Digo mé-z-où ; m'aïmo papus ! « Anén^ parlo, souï ta suréto, « Souï Margarido coumo tus. »

D'aquél moutmén, dessus k gravo, Embé dous biôous coumo d'oiïstâôus, Un chrari drm-drin travéssavo, Bassaqua dé pér lous câïâous; E Pière rèftibé soran aguïado, Sus lou chari sé tégnè dré ; Cantavo 'il vélién d'en journadô. Elo sounè : " Pièré ! Ptèré 1 »

Mais Pièré vire pa là tèfeto ; Pièré passé lièj èrb sour ! Elo cridavo : « Aresto! arèsto! » Maïs lou chari filè toujour. Alor, faguè 'n sioule, la pâouro, En séntén soun cur i pougni ; Sa voués sé pèrdéguè din l'âouro San lou poure faire véni.

Embé lou rire d'uno morto

Fisse lou toumple qu'aviè fan :

« La toumbo nous drouvis sa porto,

— Soufagué — vène, moun éfan ;

« Dé qué fariès dessus la tère ?

« Naïsseriès pa qué pér soufri :

« Quan-t-on po pa dire : Moun pero?

« Fôou pa naïsse, vôou maï mouri. »


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Anavo sâouta ; sous dous brasses S'abungavou dîn l'éscabour; Sous agnèlés bialavou lasses, Escampïas à soun éntour; Lou valoun èro soulitari, Lou chari s'énténdié papus ; La campano dé Sént-Alari, Aval sounavo l'Anjélus.

Tout émb' un co 'n oumbro mé passo, Un cris mé drévéïo éspaïma ! Din l'éscurésino l'àïgasso Vése aïlaval révouluma. Coum' un loubas qué sé lipavo, En sa proïo qu'éngoulissiè, Souto un roussignôou qué cantavo Lou gour négre tréfoulissiè.

E, coum' uno rèïno poulido, La luno tégnè tout lou cièl, Touto la campagno éndourmido Din lous plis dé soun blan mantèl. Coum un éfanté sus sa mèro, Din la plano lou rajoulé, A trés pas dé soun soumbre fréro Toujour cascaïavo soulé.

6 janvier 1872.


LA MÉÏNADO

Par le même

Ma méïnado famièïro Touto éncaro sus iéou l'aï, E sièï coumo la poumièïro Que pénjo souto soun faï.

Mais, dinc uno bono tèro, M'a planta, Diou, à l'abri ; Mai que siègue un picho pèro, Moun frui se faï, es nourï.

L'aïme bien touto ma colo, I-a pa dingus dé créntoùs ; A mous bêles fôou l'éscolo, A mous pichôs dé poutoùs.

L'un tèn l'âoutre din la bando, Tout aquô 's frès é gaïar, Tout aquô bado, démando, S'aparo è faï fa sa par.

Mé fan joui quan s'amusou ; Dé touto lus amo i van ; Tènou 'n tout, en tout adusou, Rés lus passo pa davan.

Quan tout aquô s'atroupèlo, Lou souèr que vèn fa rampar; Brounzino, voultéjo âou pouèlo, Coum' un abél âou cagnar.

Fôou mous castèls en Espagno, Pensé ce que n'en faraï ; Plagne lou que faï la cagno As éfants qu' i soun un faï.


LE CHAT & L'ENFANT

FABLE Par M. L. CHABAUD, membre résidant

Un jeune chat, angora de naissance,

Passait la plus douce existence

Que jamais chat ait pu passer.

Le choyer et le caresser

C'était, pour Madame et sa bonne, Et pour Lili surtout, enfant blonde et mignonne, Un vrai besoin du coeur :

On l'aimait trop pour son malheur !

— Au pied du lit de la fillette Etait un vieux manchon : il servait de couchette

Au petit chat qui, jour et nuit, Dormait fort, mangeait mieux, ou bien bâillait d'ennui : On le voulait ainsi. De janvier en décembre

Il ne pouvait quitter la chambre.

Le laisser vaguer sur les toits !

Mais les jours d'hiver sont trop froids, Disait-on ; puis la brume Parfois enrhume. Les jours d'été ! Mais non, il fait trop chaud l'été :

Privons-le de sa liberté

Et conservons sa chère vie. Alors on résistait à sa pressante envie D'aller et de venir au gré de son humeur ; Et le pauvret passa son existence entière Sans avoir pu courir sur la moindre gouttière. On fait si bien qu'un beau jour le chat meurt;

Car la Faucheuse impitoyable Moissonne également les jours d'un pauvre diable Et d'un chat trop heureux. On le pleura beaucoup,

Les yeux bleus de Lili surtout !

Aujourd'hui que le temps a vu tarir tes larmes, Blonde enfant, retiens bien ceci : la Liberté,

Au prix de légères alarmes,

Donne tout.... même la santé.


CASSIS

SONNET

Par M. L. ROCHETIN

Membre non résidant

Ai vist Cassis, vileto blanco Assetado au bord de la mar Que, bluio e lindo coumo un clar, Vèn poutouneja sa calanco ;

Ai vist, alargant i flot clar, Si pescadou, la man sus l'anco : Pople revoi que noun assanco Lou remoulin di toumple amar.

Oh ! subretout, tesant la velo, Un juvenome fier et bèu.... Soun front un pauquet palinèu

Avié lou trelus d'uno estello

M'an di soun noum : — Ero, o Mistrau,

Toun fiéu valent, toun Calendau.




PISCINE ROMAINE DES FUMADES



COUTUMES

DE

S A I N T - G I L L E S

PUBLIÉES

par M. A. de LAMOTHE

Membre honoraire

INTRODUCTION

Le registre d'où sont tirées les Coutumes que nous publions appartient aux archives municipales de la ville de Saint-Gilles.

C'est un petit in-folio de 153 feuillets, dont 18 eu blanc, et qui contient :

1° Une rubrique ou table des matières en trois feuillets non numérotés ;

2° Les Coutumes et lois municipales : folio I à XXXIX ;

3° Une addition à ces coutumes, faite à la suite d'un procès qui aboutit à une sentence arbitrale rendue par Bernard d'Adorno (1), Guillaume de Codols (2) et Guido Fulcodi (3), entre l'abbé Guillaume (4) de Sieure et les syndics de SaintGilles (1257) : f° XXXIX à LXII ;

4° Une seconde addition, suite d'une nouvelle transaction

(1) Bernard d'Adorno, archidiacre de Béziers. (2) Guillaume de Codols, jurisconsulte (saige en dretz).

(3) Guido Fulcodi, autrement appelé Fulconi, Foulques ou Fouquet, né à Saint-Gilles, jurisconsulte distingué, marié et père de famille, fut successivement secrétaire du roi Louis IX, puis prêtre, archidiacre du Puy en Velay, 1237), archevêque de Narbonne (1259), cardinal du titre de Sainte-Sabine, et enfin pape en 1265, sous le nom de Clément IV ; il mourut en 1268.

(4) Guillaume de Sieure, que Ménard, dans son Histoire de Nimes, nomme simplement Guillaume 1er, fut abbé de Saint-Gilles de 1252 à 1265, donna sa démission en 1265 et mourut en 1275.

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passée ( de tempore Hugonis (1) abbatis, 1305) : f° LXII à LXXX;

5° La sentence arbitrale de 1257 ; 6° Une autre sentence de 1488.

Ces deux dernières pièces sont écrites en latin, et nous n'avons pas à nous en occuper.

La rubrique n° 1 est en latin, ainsi que les titres de chaque article des coutumes ; des trois autres documents, nos 2, 3 et 4, le premier affecte seul la forme d'un code.

La réunion de ces trois parties forme le corps de la Coutume, et se divise en trois lois intitulées : première ley ; secunda ley ; dernière ley. Toutefois cette division est purement arbitraire.

C'est ainsi qu'à la première loi sont cousus trois fragments de lois devenues coutumes : le premier sous Pons de Marguerittes (2), en 1246; le second, en 1233; le troisième, sous l'abbé Raymond (3), en 1287.

La seconde loi a également reçu une addition de coutumes datant de 1231, et se termine par une bulle de Clément IV ( Guido Fulcodi ), véritable hors-d'oeuvre, portant la date de 1267.

La troisième et dernière, plus récente, ne remonte qu'à 1305.

La Coutume se compose donc, non pas de trois lois, mais d'articles pris dans cinq ou six transactions successives, et forme une sorte de compendium ou code, non encore définitivement arrêté , puisque l'abbé et les syndics se réservent le droit d'y ajouter ou d'en retrancher à l'avenir certains articles, suivant l'occurrence, et pour l'utilité et profit de la communauté.

Ces réserves faites, nous suivrons, dans le reste de l'analyse du manuscrit, la division indiquée, si défectueuse qu'elle puisse paraître.

La première ley, ainsi qu'il est facile de s'en convaincre par

(1) Hugo, Hugues II de Folaquier, abbé de Saint-Gilles, de 1302 à 1319.

(2) Pons de Marguerittes, cité par Ménard sous le nom de Pons II, abbé de Saint-Gilles de 1245 à 1252.

(3) Raymond II, Régis, abbé de Saint-Gilles de 1286 à 1301.


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la lecture de la table, ne traite que de sujets généraux, et, dans le texte, la ley scripta est souvent comparée à la costuma. Le nombre des articles qu'elle renferme est de quarante-huit.

La secundo, ley n'est, à proprement parler, que la solution donnée, article par article, aux divers points en litige entre l'abbé de Saint-Gilles et le syndic de la ville, au sujet de leurs droits respectifs, tels que la juridiction de Sieure, d'Estagel et de Camarignan ; la création des clavaires et des banniers ; les droits de pêche, etc., et a, comme on le voit, une importance beaucoup plus grande que la précédente, au point de vue de l'histoire locale. Elle contient quarante articles.

La dernière ley, qui complète les deux lois dont nous venons de parler, traite, à peu de chose près, les mêmes sujets. Comme la seconde, elle n'est pas présentée en forme de code, et chacun des douze articles qui la composent n'est qu'une exposition du jugement rendu par les arbitres, précédée de la petitio syndicorum, opposée aux prétentions de l'abbé.

Originairement, ces trois lois ont été écrites en latin. La Coutume dont nous donnons la copie n'est donc qu'une traduction du texte primitif, faite en langue vulgaire par un jurisconsulte ou, tout au moins, par une personne très versée dans la science du droit.

Il eût été toutefois curieux de comparer les deux textes ; malheureusement le plus ancien a disparu, probablement pendant les guerres civiles qui, par trois fois, ruinèrent la ville, presque de fond en comble, à l'époque des troubles religieux.

Etait-ce une raison pour négliger le précieux registre que possèdent encore les archives, et sur lequel M. de Rozière avait déjà appelé l'attention du Comité des sociétés savantes ? — Assurément non.

Le texte roman, vénérable lui aussi par son antiquité, présente en effet un double intérêt.

Au point de vue de l'histoire civile, il nous initie aux détails de la vie politique et à l'organisation municipale d'une cité aujourd'hui bien déchue , mais qui eut ses jours de splendeur et une importance considérable, soit par le nombre de ses habitants, soit parla célébrité de ses pèlerinages et le commerce


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considérable qu'elle entretenait avec le levant, et en particulier avec la Pologne, la Bohème et la Hongrie.

Au point de vue du droit, il présente un riche sujet d'étude en lui-même, et un terme de comparaison de grande valeur avec les autres fragments de droit coutumier dans les autres villes du midi, tels par exemple que la charte romane conservée dans les archives d'Uzès.

Enfin (et en cela le texte original n'aurait pu suppléer à la perte de cette traduction), il offre un spécimen des plus curieux de la langue romane à cette époque, et ouvre un champ d'études nouveau à ceux qui s'occupent de rechercher les lois de formation de notre belle langue d'Oc, soeur jumelle de la langue d'Oil, et qui, si elle n'a pas eu l'honneur de former le français actuel, a du moins celui de continuer à être dans le Midi l'idiome populaire.

Les limites étroites imposées à cette brève introduction ne nous permettent pas d'aborder des considérations qui nous entraîneraient trop loin ; nous nous bornerons donc à signaler, dans le texte roman, l'excessive variabilité de l'orthographe.

Et, par exemple, s'y écrit he, e ou et; on, hon ou on; l'h s'y emploie avec ou sans aspiration : he ou et, hou pour ou; le z y remplace souvent l's ; la désinence latine ius ou ium s'y change en i, par retranchement de la dernière syllabe : notari pour notarius ; testimoni pour testimonium ; negoci pour negocium; le d y prend la place de la dentale t : dissipador pour dissipator; l'y se met pour l'i : mays ou mais, si ou sy ; quelquefois l'e pour l'ai ; on écrit indifféremment, fere, faire ou fayre.

Beaucoup de mots sont encore absolument latins, impugnare, pecunia, solempnitas, executor, creditor ; plus encore sont espagnols ou catalans, et cette ressemblance des deux langues est si intime, qu'elle frappe non-seulement dans les mots, mais encore dans la tournure des phrases, comme par exemple dans cette forme impérative : gardan se aquellos que prendran las causas que ceux qui prendront les choses se gardent

Il y aurait à faire beaucoup d'autres remarques sur l'acception particulière dans laquelle sont pris certains mots, et sur des locutions ou des termes qui ne se rencontrent, il est vrai,


— 125 —

que rarement; tels que : ne faire pour en faire ; consec pour obtient; torquir pour torturer; ho entendon pour entendent cela. Nous nous sommes contenté de signaler en note quelquesunes de ces singularités, dans lesquelles un grammairien pourra reconnaître les métamorphoses successives d'un mot latin, se faisant roman ou français; de même qu'en étudiant les Coutumes de Saint-Gilles en elles-mêmes, un jurisconsulte découvrira, dans la législation de cette époque, des transformations analogues.

Nimes, le 21 décembre 1872.

A. DE LAMOTHE,

Archiviste du Gard, Correspondant du ministère de l'instruction publique pour les travaux historiques et philologiques, Membre honoraire de la Société scientifique et littéraire d'Alais, etc.


COSTUMAS ET LEYS MUNICIPALES

DE SAINCT-GILY

Sensegon las costumas et leys municipales de Sainct-Gily. Et premierement la rubrica :

Rubrique du présent libvre intitulé :

Sensegon las costumes et leys municipales

de Sanct-Gily

traduictes de latin en francoys

ET PREMIEREMENT :

1. De sacrosanctis ecclesiis F° I

2. De debito ecclesiastico id.

3. De officio decani et vicarii III

4. De cancellario IIII

5. De vicario carceris V

6. De creacione notariorum id.

7. De sacramento cancellarii VII

8. De quibusdam legibus id.

9. De compromissis VIII

10. De libello conventionali id.

11. De competenti foro IX

12. De servitute parietum X

13. De testibus XI

14. De usuris XII

15. De captalariis id.

16. De venditionibus XIII

17. De jure emphiteotico XVI

18. De furto seu banno XVIII


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19. De testamentis publicandis XIX

20. De pecunia pupillari id.

21. De cessione bonorum id.

22. Contra constitutiones XX

23. De distractione pignorum XXI

24. De fide jussoribus XXII

25. De accusationibus et inscriptionibus id.

26. De corrigendis moribus XXIII

27. De jure fisci id.

28. De filia dotata . . . . XXV

29. De fide instrumentorum XXVI

30. De testibus cogendis XXVII

31. De redditibus minorum distrahendis id.

32. De recognitione canonis XXVIII

33. De pena ludencium et jurantium id.

34. De notis scribendis in cartulario id.

35. Ne tabelliones sint advocati XXIX

36. De acquitationibus minorum id..

37. De dilatione ultramarina id.

38. De restituenda pocessione spoliata XXX

39. De debitoribus id.

40. Ne advocati dent consilium id.

41. De transcriptis testatorum XXXI

42. De cartulariis notariorum defunctorum. ... id.

43. Diffinitio controversiarum domini abbatis et

consulum ejusdem ville Sancti-Egidii . . . XXXII

44. Quantum accipere debeant notarii XXXVI

45. Quod nemo audeat ponere vinum id.

46. Quod nemo audeat emere vinum XXXVII

47. De tempore et prescriptione id.

48. De prestantibus impedimentum nubentibus . XXXVIII

49. Quod nemo audeat amovere de grege vel armento

armento id.

Seconde Ley

1. De discordia sopita que fuit inter dominum abbatem

abbatem syndicos Sancti-Egidii XXXIX

2. De laudimiis XL

3. De bannis et creatione clavarii et baneriorum. XLI


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4. De piscationibus fossatorum hominum ville

Sancti-Egidii XLIIII

5. De restitutione dissaysitorum et spoliatorum. XLIII

6. Quod vicarius et judex sint annales id.

7. De emenda facienda de talis . id.

8. De piscationibus fossatorum XLIIII

9. De paludibus Corrigie superioris et inferioris. id. 10. De murribus (sic), turribus et fossatis ville

S.-E XLV

1.1. De abeurato del Versador XLVI

12. De vetis cuniculorum et columbarum .... id.

13. Quod non prohiberint (sic) notariis facere notas XLVII

14. De incendio vel ruyna domorum id.

15. De leudis et pedagiis id.

16. De piscatione stagni Escamandri XLVIII

17. De lectis mortuorum id.

18. De mortuis sepeliendis XLIX

19. De matrimoniis contrahendis id.

20. De solutione decimarum vinearum id.

21. De decima litis danda id.

22. De cartulariis notariorum L

23. De decima agnorum id.

24. De pecunia non exigenda a nautis id.

25. De pascuis de Loa, Espeyrano, Camarinhano,

Stagello et Syeura LI

26. De pascuis tenementi Espeyrani LII

27. De pascuis tenementi Carmanhani id.

28. De tenemento Stagelli . . LIII

29. De tenemento Syeure LIIII

30. Quod nemo audeat venari in tenemento domini

domini LV

31. Quod hommes S.-E. [non] audeant corpus,

collegium vel conventiculam contra monasterium

monasterium LV

32. De sexteyralagio LVII

33. De laudimiis LVIII

34. De decima porcellorum id.

35. De pravis consuetudinibus id.

36. De emphyteotis et feaudatariis id.

37. De pignorationibus LIX


— 129 —

38. De firmanciis id.

39. De restitutione pignorum id.

40. De divisione parrochiarum LX

41. Gratia domini Clementis LXI

42. De reprehencione et correctione id.

Bernieve Ceg

1. De tempore domini Hugonis abbatis LXII

2. De decimis et decimatione racemorum . . . LXV

3. De decimis hortorum id.

4. De incantu ville S.-E LXVII

5. De leuda panis id.

6. De captione hominum ville S.-E id.

7. Quod vicarius, judex aut notarius nichil recipiant

recipiant dandis et tutellis juris id.

8. Quod nullus exerceat officium curie secularis

quod non possit puniri per eamdem.... LXIX

9. Quod licitum sit abbati per curiam temporalem

compellere rebelles ad solvendam decimam. id.

10. Quod vicarius et judex sint annales et curiam

fréquentent LXX

11. De pascuis Corregie inferioris et superioris, et

quibus et quomodo liceat pascere in eis. . id.

12. De justicia domini abbatis LXXVI

13. Quod clavarius non se intromittat de jure pertinenti

pertinenti dominum abbatem, alias quod

contineatur in compositione antiqua. ... id.

14. Approbantur antiqua slatuta LXXVII


PREMIERE LEY

De sacrosanctis ecclesiis et de rebus ad eas pertinentibus

(Cas dans lesquels les églises ou monastères peuvent hériter.)

En ladicte rubrica, laqualle fay mention de las gleises et delz bens daquelas, son contengus los cazes que sensegon :

Et premierement, que, si aulcune personne intra en monestier ; si, apres que y sera intrada, moris aulcung de sos parens, ou fraires, ou sorres, filz ou filhes, ou aultres alz qualz, sy non foguessa intrat en monestier, aguera sucedit, non pot ny aussy lo monestier sucedit (1) a dengun delz desusdictz ; ny non poyra inpugnar (2) ny rompre lo testament que aura estat fach per aulcung delz dessusdictz; mais sy aulcung delz dessusdictz ly donna per donation dentre vieux (3), per testament ou autra derniere volontat, aura lodict monestier so que ly aura estat donat, legat ou layssat, et non aultre cause. Dis en oltra que, sy alcuns bens ou hereditatz eron provengut a el ques intrat in monestier, devant que intressa aldit monestier, non poyra demandar losd. bens ou hereditat, si non que, davant quel intressa aldict monestier, aguessa dit et declarat quel volia que sos bens et hereditat fuguesson deldit monestier. Dis aussy en oltra que, so ques estat dessusdict de aquelses que intron en monestier sy deu observar et ha luoc en totz aquelses que renoncion al monde, et intron en luoc en lo quai vivon en habit de religion, et desobz regla et regularement.

De debito ecclesiastico

( Prêts faits aux églises. — Le prêteur est dispensé de faire la preuve que l'argent prêté ait été employé au bénéfice desdites églises. )

Si alcung presta pecunia a la gleysa ou autre luoc venerable ou religios, poyra levar et exigir so que aura prestat, sans que

(1) Faute de copiste; il faudrait sucedir. — (2) D'impugnare, attaquer. — (3) Entre-vifs.


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ly sya necessari probar que so quel a prestat sya estat convertit en la utilitat delz luocz dessusd.; provegut (1) que lo dit prest sya estat fach he baylat an aquel que ha lo govert desd. luocz. Et provegut aussy, que aquel lo quai ha lod. govert, non sya point jogador, ni discipador de bens, he que non sya point suspet ny deffamat de mal regir he governar losd. luocz, et de discipar los bens daquelses luocz. Dis en oultre que, sy aquel que aura lo govert d'un chascung delsd. luocs, dis et asseris (2) que el non pot pagar so que, coma dit es, anara manlevat de bens mobles, luy sera he es permes de arrendar he engagar loz fruicts he esmolumens delsd. bens immobles; he sy non trobe que los vuelha pendre en gaige, ny per arrendament, poyra vendre, delz bens immobles jusques a la somme del deute, per pagar los creancies. ITEM, que lo governador de lasdictes gleyses, luocz venerables ho religios, pot donar a fieu ho a novel accapte bens immobles, aya el necessitat hou non necessitat de pagar deutes, non observadas las solempnitas deldretz; losquals bens immobles on (3) acoustumat destre donats en fiou ho a novel (4) accapte, en deminissent hou acreyssent la cansa (5) antigua, ainsy en tant que aura estat accordat entre lod. governador, ho aquel que pendra a fieu ho a novel accapte; provegut que los bens immobles que auront estatz bayllatz a fiou hou a nouvel accapte, en la forme dessusd., non sya pas de las melhors, ny porten (6) los grans emolumens; mays (7) sya de las mielz loyemas, entre las autras, he aven petitz emolumenz ; provegut aussy que la persona a la quala seran baylatz losd. bens immobles, a fiou ho novel accapte, sya facile a convenir et a compellir a pagar he a faire son dever ; et non es point necessary, en los cazes dessusd., de jurar que las causas dessusd. non syan pas fachas per deception he lesion de lasd. gleyses, luocs venerables he religieuses ; et que las penas entreductas per lo dret comun, contre aquelses que, infra dos ans, non pagon la cense; ny aussy las penas entroduictas per lod. dret comun, tant contre aquelses que font losd. contracts, que contre los juges et notaris, que auctrison he prenon alienations, non on point de luoc en la ville, territori e juridiction de Sainct-Gily.

(1) Pourvu que, du latin proviso quod. — ,2) Du latin asserit, affirme. — (3) Pour ont. — (4) Du latin novum accapitum, nouvel achat ; terme de droit féodal. — (5) Pour censa; cense, rente payée annuellement. — (6) Inversion pour : ni qu'ellos porten, forme espagnole. — (7) Pour mais ; dérivé de magis.


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De offirio decani et vicarii

(Juridiction du doyen et du viguier. — Fixation des frais de justice. — Quand y a-t-il lieu de les payer ?)

En los negocis de la cort, appres lo senhor, lo deyen he lo viguier tenon lo premier luoc; alz qualz sy expecta (1) he apparten una (2) en lo juge jurat a elses accistent, loqual sappelle cancelli (3), et ausit toutas causas tant civillas que criminellas, per se ho per autre ; et toutas causas, requirens cognoyssenca de causa, appres que lodit juge aura pronunciat, decernit (4) ho ordenat; que y ya de fayre de lor auctoritat confirmar ho faire executar per los executors de justicia ; et non devon ren aver ny prendre per las publications des testamens, ny des testamens, ny per qualcunque autre occasion, de las partidas, per dengune art (5) ny magination (6) ; mays tout deu procedir de lor bon grat he sans despens, jusquas a tant que la causa, per transaction hou per sentencia, aya fin; he sy, per lad. transaction ho sentencia, una partida non consec (7) ny ganha ren de lautra, ladita cort non levara ny exigira ren. Et sy una chascuna de lasd. partidas consec, hou una tant solament de lautra, adonc la cort poyra pendre la terca part de so que per lung ou lautre aura estat donat, rendut ho restituit ; la qualle terca part ho portion Ion appella vulgarament justicia (8). Totas de vegadas (9), sy la sola possession es ajugada, non sy levara ren per la dicta justicia. Et semblablement, sy lou deutor fa convenir son creancier que ly retorne so que ly a ypothecat hou engaiat, he lou deutor es condempnat a pagar so que deu, he lo creancier a rendre la causa ypothecada hou engajada; non deu ren estre levat per la justicia, sinon que lo creancier non aguessa volguda prendre sa pecunia, a el deguda he presentada a luoc he temps degut ; car, aldit cas, non sera quite de justicia. Et semblablement, sy lo creditor, loqual a gaige per so que ly es degut, demanda al deutor so que ly deu, he lo juge condampna lo debitor ha pagar, he lo creditor a retornar lo gaige, sinon hy avia agut autre pacte entre las par(1)

par(1) quos spectat, les regarde.— (2) Du latin una cum, ensemble avec.— (3) De cancellarius, chancelier. — (4) Décrété, de decernere. — (5) Pour per denguna art, par aucun art.— (6) Pour machination.—(7) Obtient, de consequitur. — (8) Frais de justice. — (9) Du latin totas vices quod, ou mieux toties.


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tidas, sur la exaction de so que era degut cessa la exaction de justicia. Sy aulcuna causa mobla es demandada en jugament, ho devant que foguesse demandada en jugament, aquel que la dévia ha offert he presentat, ha (1) temps et luoc, de la baylar, he lo creditor non laya volgude pendre, non obstant que non laya point depausada ny consignada, non es deguda aulcuna justicia, ny non ly sont subjects lod. debitor he creditor. Et que lodict dogan (2) et viguier non devon pendre, en deguna causa pecuniera, per la justicia, autrement que a estat dessusd. Lo viguier pot, sans juge ny saige en dretz, expedir, cognoysce he terminar toutas las causas, lasquallas non requirisson point cognoissenca de causa. Et lasd. causas dessusdictas ont luoc en los seignors, he en toutes autres personas messas he deputadas per losd. segnors, deyens et viguiers, sur lo fach de la cort.

Be cancellario

(Juridiction du chancelier. — Il lui appartient d'enquérir au sujet des notaires ; de connaître des crimes privés ou publics; de prononcer des sentences.)

Lou cancellier ou juge deu estre sage en dretz ; car per se et non per autre, toutas causas requirens cognoiscensa de causa deu cognoisce et expedir, presens, totas de vegadas, aquelz que aministron los negocis de la cort. Et que al juge sapparten faire diligente inquisition sur la institution delz notaris, he la nomination daquelses, apres que los aura ben enquiris (3) ; la qualla nomina on fara davant lod. degan he vicari; los qualz notaris, per lod. juge enquiritz et nominatz, seron, per losd. degan et viguier, confirmatz. Aussy, ledit cancellier he juge es tengut de cognoisce de tos crimes, tant privatz que publics, et los innoscens absolve, hou ordonnar de qualqua pena devon estre pugnitz los colpables. Et, sy labbat concedis bulla, lou juge la deu gardar, et so que sen acquiris (4) ; et que non deu ladita bulla roborar aulcung instrument que non sya script per la man de notari public et acomplit.

(1) Ha pour à. — (2) De decanus, doyen. — (3) Examiner, de inquirert, d'où inquisition et enquête. — (4) Ce qui s'en suit.


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De vicario carceris

(Le geôlier a droit de faire les criées au prix habituel ; c'est à lui de garder les prisonniers, de les interroger, de les torturer ; il doit aussi les nourrir, leur fournir des lits. — Fixation de ce qu'il peut leur retenir.)

Lou viguier de la carce (1) deu fayre, del mandament delz magistrats de la cort, totz los bajamentz que seront necessaris de fayre per diversas causas; he aldict viguier de la carce sappertan (2) destre crida (3) publica, provegut que, per la crida publica que fara, non leve plus ques accoustumat de faire per las causas acostumadas de cridar publicament. Et deu et est tengut de gardar los incarceratz que auront estat preses per lad. court, enfermatz ho autrement, ainsy que sera per la cort ordenat ; et deu aussy, per lo commandament de la court, torquir (4) he mettre a la torture losd. incarceratz, affin de atrobar la veritat ; et aussy los interrogar de lors compagnons ou complices. Et aussy deu advisar que losd. prisonniers non perisson de fan, et totz los jors lor donne de pan et d'ayga, tant que lor sera necessari, per la substentation de lor vida; et loz provesisca de lict vil et de pauc de valor, jusques a tant que seront condampnatz ho absolz; et appres que seront condampnatz, retendront la despolha, fors los vestimentz, losqualz usavon totz los jors, quant fogueron preses. Et sy losd. prisoniers son absolz per misericordia, per gracia ho per sentencia, non retendran ren de lor despoilha, sinon que foguesson dellivras moyant(5) pecunia; car, aldit cas, auria lad. despoilha ho la justa extimation daquela.

de creatione notariorum in villa Sancti-Egidii

(Conditions de moralité exigées pour être notaire. — Devoirs des notaires. — Inamovibilité de ces officiers.)

Los notaris, que seront instituis et ordonatz en la villa de Sainct-Gilly, devron estre de parfaict estat : so es que non

(1) Du latin earcer, prison. — (2) Du latin pertinet, appartient. —(3) Criées à son de trompe qui se faisaient dans les carrefours. — (4) Tourmenter, du latin

torquere. — (5) Pour « moyennant ».


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ayon mens de xxv ans. Et losd. notaris ne devon point estre de nation ni de pays diffamât (1) ; ny de manieras, ny de conditions malvaysa et reprobada; ny devon esse autrement de sy villa vida et conversation, que versemblable que, per proffit et gazanh , faguessan alcuna causa mal fâcha. Aussy non devon estre hebryayes; ny aussy trop avaricioses ; ny aussy prodigues ; ny enfames (2) ; ny aussy trop dedicatz et inclins a jocz et luxuria; et las causas dessusd. sont ordenadas a causa de la grant fe et crezence que Ion deu donar alz actes delsd. notaris. ITEM que, appres que per lo cancellier ou juge aura esta facha diligente inquisition, presens los degan et viguier et plusors autres honestes personages aldict acte appellatz, syan nomatz et ordenatz estre creatz notaris, si, apres que ladita inquisition aura estada facha, sont trobatz suffizens et dignes. Et puys appres syan confirmatz perlosd. degan et viguier. Et apres seront tenguts de jurar sur los sainctz Evangelis, corporalement toquatz, quelses non poyront ne faront testament ne autre instrument, sy non tant solament de et sur so que auront vist et ausit ; et los faront en publica forma ; et non scrieuront scientement autrament, en lors papiers ou quartas (3), synon que ainsy que ho entendon aquelses que los requirisson de fayre los instrumentz; et que non faront dengune falcetat, ny en trop, ny en pauc scriure (4) ; ny non farront ny consentiront que sya autrement faictz que ho entendon las partidas; aussy juraront que non revelaront denguna causa honesta que lor aya estada dicha hou comessa en secret.

ITEM que, en contractz de prest, de association ho affrayrement, non baylaront a ung chascung desd. contrazens, synon tant solament ung instrument; et semblablement de tot aultres contracts que non son perpetualz; car de contracts perpetuais podon baylar als contrasens tant que ne voldront.

Dis aussy que, sy lo juge, en presencia de plusors testimonis, per aquo appellatz et per causa coneguda, ordena que sian fachs plusors instrumentz, aussi en contractz non perpetualz

(1) De mauvaise réputation, comme par exemple les Juifs a cette époque. — (2) De mauvais renom. — (3) Quarta, charta; charte, papier. — (4) Ni en ajoutant, ni en retranchant au dire des parties.


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mais temporalz, lo notari, en aquel cas, en poyra, a chascung delsdicts contrasens, fayre plusors.

Dis aussy que, quant los notaris penront (1), en ladicte ville de Sainct-Gily, aulcungz inventaris de pupilz minors ou de autres personages, quelses devront retenir, devers se, los originalz; affin que, sy aulcune de las partidas, quant vendra a la redetion delz comptes, avian occultatz los inventaris, la veritat se puescha trobar devers lod. notari.

Aussy es contengut et entendut aldit sacrament que preston losd. notaris, que elses non differiront ny prolongueront, per pecunia, per amor, ny malvolencia, de fayre baylar et expedir losd. instrumens.

Dis aussy que lod. office de notari es perpetual ; et, per so, aquelses que una vegada auront agut etconsegut lod. office, non poyront estre dostatz, synon per causa legitima et segon las leys conogudas.

De sacramento cancellarii seu judicis

(Serment d'équité et d'impartialité exigé du chancelier ou juge.)

Los chanceliers ho juges, incontinens que seron estatz instituis ho ordonatz, devon et sont tengutz de jurar quellos faran tout so que sy apparten destre fach en lor office, justament, legitimament, et segon las leys et costumas de la cort de SainctGily, et segon la sciencia et industria a ellos per Dieu donada; et que per pecunia, ny amor, favor, ody, ho malvolencia non dependian ny sy inclinaran plus dungna part que dautra.

De quibusdam legibus desuetudine sublatis

(Lois coutumières qui n'ont jamais été observées à Saint-Gilles ou y sont tombées en désuétude.)

Dis que las leys que parlan et comandan jurar los advocatz, non sont point de costuma ny observance en la cort de SainctGily; ny aussy la ley que dis que deu estre facha eygala distribution a una chascuna partida davocatz ; ny aussi so que per las leys es ordenat, que los conselhers ou accessors delz juges assistiront tant soulament en lor provencia, et que non puescon,

(1) Pour « prendront ».


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plusors vegadas, aver ung mesma office; et assy lo temps per las leys ordenat, et la pena entroduita contra aquelos que non observon lasdictas leys. Et semblablement non sont point de costuma ny sont point observadas en ladicte cort de Sainct-Gily las leys que prohibisson alz magistratz hou juges perpetualz hou temporalz, comprar ho autrement contrazir, en los luocs ho provencias en losqualz sont magistras ho juges, durant lor office, non pueschon agir ho demandar so que a ellos sapparten ho lor es degut; et aussy que autre non lor puesca ren demandar hou los fayre convenir, aussy non est point de coustume ny observance en lad. court.

De compromissis

( Conditions auxquelles peuvent être réclamés les gages. — Exception faite par la coutume à la loi de droit commun.)

Segon la costuma de Sainct-Gily, sy aulcung compromes es passat entre aulcung, et per major fermetat hy meton pena hou gaiges, non poyra, ny luna ny lautra de las partidas, demandar las penas ho los gaiges, synon que losd. compromeses sian passatz et confirmatz per sacrament hou non, et estatz baylatz et depausas gaiges devers los compromissaris hou autra, et los gages tojort demoraran en depposit (1), en nom de precari (2), baylatz a ung ho autres de las partidas, alz qualz casses pot lung ho laultre demandar losdicts gaiges hou pena. Semblablement, si lung ho lautre non hotempera (3) a la sentencia diffinitiva de larbitre ho arbitres, lo atemperant poyra demandar los gaiges ho la pena, non obstant que non hy sia entrevengut (4) jurament ny depositat gaiges, ny hy sia entrevengut constitution et precari; car a ladicte costuma non es point contraria la disposition del dret comun, appres la sentencia diffinitiva delz arbitres.

Dis, en oultre, que lad. costuma relassa et remet la necessitat introduicte per lo drech comun, de donar las sentencias en escript, tant alz juges que alz arbitres.

(1) En dépôt, de in deposito. — (2) A titre précaire. — (3) De obtemperare, obtempérer. — (4) Intervenu.

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De libello conventionali

(Cas dans lequel le libellé est obligatoire. — Sursis de 20 jours, ordinairement abrégé, à moins que le défendeur n'invoque la nécessité de faire venir ses preuves d'outre-mer.)

Segon la costuma de ladicta villa, non es necessary de donar libel, ny a dengung actor (1) ho demandor donar cautio, synon que lod. actor sya reconvengut per lo deffensor, per tant riche que sia, per qualcumque actio ; et, a son nom propri ho daltruy, el sia convengut he tirat en jugament, es necessari que done bonas et soufizentas cautions; et si non pot point trobar, deu jurar sur la generale obligance de ypotheca de tous sos bens; et que alz cazes dessusd. so es quant aulcun dona bonas et soufizentas firmances, ho quant non pot trobar, dona caution juratoria, las dictas cautions emporton que, aquel que dona las dictas cautions es tengut de sy presentar en jugement et de pagar causa jujada. Et appres que lasd. cautions son donadas, et lo actor a facha sa demanda, a tant es que lo juge dona la dilation de XX jours ; mays, causa rasonabla, subsistenta et conoguda, las pot et ha acoustumat las abreviar, exceptat que sy ha a probar ho autra causa a fayre de la la mar (2) ; car adonc na point acostumat estre abreviada.

De competenti foro

(Compétence de la cour de Saint-Gilles pour juger même les étrangers. — Exceptions faites en faveur des pèlerins et des marchands.)

En deguna causa criminela ny aussy pecuniaria, que non tocha ny aparten a lacusation daulcung delicte ho crisme public, ny a demandar causa ho bens immobles, non pot aquel que es convengut en lad. cort de Sainct-Gily, demandar estre remes devant autre juge, ont que demore (3) hou sya nascut aquel que es, coma dit es, convengut, et de qualque juridiction que sya. Sinon que foguesson marchantz, negociators ho portadors de merchandises en lors bestias, las qualas logon (4)

(1) Celui qui actionne. — (2) Pour : delà la mer, outre-mer. — (3) En quelque lieu qu'il habite. — (4) Louent pour porter.


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a portar lasd. marchandisas ; ho pelegrinis (1), hou romieux (2), los quais per so que lors bens son long (3) deldict Sanct-Gily, non poyront point trobar de firmansas (4) ; et son las causas dessusdictes ordenadas per obviar a la malicia de plusors, que, affin de fayre rasonar et reserve ? vexation (5), facilament voran mectre en plaidejaria losd. marchans, negociators et portadors, en lors bestias proprias, de marchandisas dautruy, losquals amarion may sy rasona(O) he reserve vexation que de pleidejar aldit Sanct-Gily, et hy fayre grandes despensas. Et procedisson las causas dessusd., synon que apara et sia remostrada la evidenta et caloniosa malicia delsd. merchans, negociators ho portadors, ho lor juge requis de fayre justicia foguessa manifestament negligent de fayre justicia. Toutas de vegadas (7), sy losd. merchans ho negociators desplegon lor merchandisa per la vendre, et losd. portadors demoron per trobar cargas a portar, alsdicts cases sont tengus de respondre (8), en lad. ville de Sainct-Gily, an aquelos que los demandaran ; et seran tengutz de fayre so que lor sera ordenat per lo juge. Et que, des bens immobles deu cognoysse lou juge, dins la juridiction del cal sont assis et signatz losd. bens immobles, sinon que sia del commun consentiment.

He sernitute parietum

(Traité des servitudes, telles que murs mitoyens, droit d'appui, égoûts, conduites d'eau, etc.)

Tautas quantas ves (9) aulcung ha tengut ho apialat (10), per long temps, en la paret (11) dung autre, un chabrion (12) de fuste ho autra causa, poyra , aquel que dis a el appartenir lad. servitut, metre, et tenir, et appielar plusors cabrions de fusta ho dautra causa, per touta la paret quero bastida del temps que a tengut, tant solament ung cabrion ho fusta, ho autra causa, tantas (13) que ny voudra metre ho autrement

(1) De pelegrinus, pèlerins. — 2) Romieux, pèlerins de Rome, puis pèlerins en général, et enfin étrangers. Beaucoup de pèlerins passaient par Saint-Gilles, pour aller à Rome ou en revenir. — (3) De longe, loin. — (4) Du latin firmare, assurances, caution. — (5) Réserve vexation (?), susciter un dernier embarras au poursuivant en justice. — (6) Préféreraient composer ou traiter. — (7) Toutefois. — (8) Répondre (en justice). — (9) Toutefois et quantes. — (10) Appuyé. — (11) Du latin paries, muraille.— (12) Chevrons.— (13) Autant qu'il voudra en mettre.


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appropriar, sans toutas de vegadas prejudice de la causa que deu ladicta servitut. Et sy appres que lodit premier cabrion ho fusta mes, tengut et appielat a ladite pares, aquel de qui es lad. paret, la paret la leva plus aut, so que fayre non pot aquel a qui es deguda lad. servitut, sans son congiet, non poyra, aquel a qui es deguda ladita servitut, plus aut mettre, ny tenir, ny appodiar, ho sy appielar, que non montan la paret antique, sinon que paye ho tome (1) la mitat de la despensa facha en montant plus aut ladita paret; et que aquel a qui es deguda ladita servitut, non poyra compellir ny forsar aquel de qui es ladita paret de la reparar. Et aussy non lo poyra compellir (2) a paguar sa part de so que aura despendut en reparant ladita paret. Toutas de vegadas, sy lad. paret a bezoing de repparar, et aquel de qui es lad. paret non vol ho differies, et prolonge trop la reparar, espermes et licite a aquel a qui es deguda lad. servitut reparar ladita paret. Et sy aquel de qui es la paret vol cargar, ho metre qualque causa en ladita paret, el sera tengut de pagar la mitat de la despensa que sera facha en reparant ladicta paret. Dis en oltra que tant solament es permes en aquel de qui es la terra ho plassa en la qualla es la paret, laquala, coma dit es, deu lad. servitut, faire cloacas, grun (3) ou eyguiros (4), per recebre et conduyre las aygas que hy coron, ho naysson de per se, ho lasquallas Ion ho geta. Mays sy deu servitut de pendre et recebre los stanzins (5) et egotz de son vezin; car en aquel cas el es detengut de pendre lodit egot sobre se. Et aquel a qui es deguda ladita servitut non ly pot mettre autras aygas que aquelas que venon desd. egotz ho estalzis. Ny non pot fayre denguna causa, en lad. paret, sinon tant solament so que pot faire, segon la forme de la servitut, ainsy que a estat dessusd., en paret communa, lung et lautre pot, enquoras que lautre non vuelha, cargar et sy appodiar ho appielar et repparar et bastir et plus aut montar; mais non pot point faire, en ladita paret, comme fenestras, cloacas, aysidas, ny ayguieras, sans la volontat de son companhon. Dis en oltra que lo es permes gitar et extendre lo cobert de sa maison, sobre lo cobert de la maison de son vezin, sy es plus bassa ; et aussy de dessus l'ort, terra ho plassa de sond. vezin, provegut que

(1) Rende. — (2) De compellere, forcer. — (3) Grun; égoût, synonyme de tou ou touat. — (4) Évier, de aqueria. — (5) De stagnum, eaux dormantes, mare, cloaque.


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lo egot ho estalzis (1) non tombon de sobre lodit hostal bas, ort, ho plassa. Et, si aquel de qui es lodit hostal bas, ho aquel de qui es lodit ort, ho plassa, vol bastir et alsar (2) sa maison, ho pot faire, et hostar so que pendra, et se extendra devers se et ho retenir, jusques a tant que ly sia satisfach de sa pena que aura messa, et ho desfar.

He testibus

(Nul ne peut être appelé en témoignage, s'il n'a été régulièrement cité et s'il n'est reconnu digne de déposer en justice.)

Segon la coustume deldict Sainct-Gily , dengung testimony non pot estre compellit de depausar et portar testimoniage en causes pecuniarias, que descendon ho dependon de crimes ho delictes publiez; sinon que coste (3) quellos ayon estatz presens et pregatz; et en ho sur lo negoci ho causa que non lo vol produire ho aurion promes de testificar; et que, en las causas que son tant solament pecuniarias, que non descendon ny deppendon de crimes ho delictes publiez ho privatz; es amessa (4) et souffis la depposition dung solet testimoni, jusques a la soma de dos marez de bon, purgat et approbat argent ; et aquo, si lodit testimoni es honeste ; et non luy pot estre appousada denguna causa, per que non deia et puesca portar testimoniage et estre admes por testimoni.

He usuris

(Difficultés opposées par la coutume aux réclamations des prêteurs à intérêts.

Tallament son detestablas et abominablas las usuras, que sian degudas ho promessas en jurament ho sans jurament, non deu estre ausit ny admes qui las demande envers lo juge; et las fermances per las ditas usuras pagar donadas, non deu estre convengut; et gaiges per aquellas donat non pot estre demandât, sinon a laventura, sy agiguessa en materia ho Judici possessori. Totes de vegadas, sy al creancier es estat baylat et

(1) De estalagium. — (2) Elever. — (3) S'il ne conste, du latin constat. — (4) Admise.


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expedit gaige, lo pot retenir, sy las usuras son talas que non sian prohibidas, mais ben degudas de dretz civil.

He captalariis

(Le maître a la primauté de droits sur tous les créanciers, les courtiers, agents ou surveillants qu'il emploie pour la vente de ses marchandises.— Exceptions à ce privilége.)

En los bens delz institors (1), factors (2) ho captaliers (3), de qualque estat ho condition que sian, lor mestre es preferit, jusques a la soma del principal (4) per el aldictz institors, factors ho captaliers baylada, ho baylat a tous autres creanciers, avens ou non avens ypothecas, tacitas ho expressas, et aussy generalles ho speciales, es prefferit lodit maistre en los bens inquiritz, appres quel ha baylada ladita soma, ho principal aion estatz fachz los contractz an los creanciers, avant ho appres. Et aussy es preferit alz creanciers precedens, en quores que sian privilegias como la fama per sa dot, synon ha que obligances generales, sian ellas tacitas ho expressas ; mais si lo creancier que aura premierament contraictzho prestat que lodit mestre, sy era prevengut, ho avia hypotheca speciale la quale possedis, deu estre profferit en lo gaige ho yppotheca, loqual el ten jusquas et a tant que mont sa sort (5) principala. Et que, en totz los cazes dessusd., son exeptatz los mestres desqualz sont las naux en lasquallas sont portadas las dictas marchandisas ho capital, et aussy aquellos en las maisons desquals domoron et tenon logadas losd. institors ho factors ; car lod. mestre de la nau per lo noly, et lo senhor de la maison per lo pres del loguis, son preferitz. Item, exeptat que los creditors que avion contractz et negociat an de losd. institors ho factors, avant quellos foguesson fachs, instituitz, ho ordinatz institors ho factors, et sy avian fach obligar et yppothecar los bens que avian per advant, losd. institors ho factors non obstant que las causas, en la fayson que dict es, fog obligadas et ypothecadas foguesson enquoras devers losd. fators, institors ho autres; car aldit cas, non obstant ladita coustuma,

(1) Surveillants. Sic apetlatus ex eo quod negolio gerendo insistat. (ROBERT ETIENNE.) — (2) Agent. Qui rem alicujus privatam administrat. (R. E.) — (3) Captalarii, marchands serviteurs d'autres marchands. (DUCANGE.) — (4) Non compris les intérêts de cette somme. — (5) Sort, lot, du latin sortiri.


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cal recorir a la disposition del dretz par laquala seron prescritz. Et sy los créanciers que hont contratat, marchandat, vendut ho prestat alzditz factors, trobon los bens, causas ho marchandisas, lasquallas avian vendidas, prestadas ou autrament alienadas, devon estre institors ho factors. Dis en oltra que, affin que dores en avant Ion non dobte que sont las personas que sont nomadas et entendudas et que devon gausir de lasd. costumas, dis que son aquellous institors ho ordenatz et depputas a qualqua marchandissa ho aministration que sia, sans aver donat a lor mestre fermances bonas, soufisentas et salvables, ho autre soufisente caution sur et per lou principal hou capital. Et que tout lo gazang deu estre delz mestres delsd. factors, ho al myns de xn pars la nou. Et aussy tout lo dampnage que avendra en lad. marchandisa ho administration devra sosportar lod. mestre, suion que lod. dampnage fossa vengut per la colpa et deffaut deld. institor hou factor.

De Venditionibus

(Conditions de la vente : — Pour qu'elle soit conclue, il faut que l'acheteur ait payé une partie du prix. — Exception en faveur des pèlerins, etc.)

Devant que, segon la costuma de Sainct-Gily, una causa sya dita estre venduda hou comprada, es besoing que lo comprador aye pagat lo pres ho una partida deld. pres, per petita que sya; ho que aquel que a vendut aya bailat al comprador la causa que ly a venduda. Et non soutira point aver estat dacordy deldit pres ; et que despuis que lo pres hou partida daquel es pagat, non es licite ny permes a lune ny a lautra de las partidas, sans consentiment de l'autra, sy desparti de ladita venda ho compra; ny aussy quant, coma dit es, la causa venduda es estada baylada al comprador ; et sy lo dit pres ho partida daquel non es pagat, ho la causa venduda non es stada baylada aldit comprador, non es obligat, ny lo comprador, ny lo vendedor, dacomplir la compra ho la venda. Et lo pres es dit estre pagat, sia el reaiment contat et pagat, ho lo comprador naya respondut a qualque creancier deldit venditor. Et davant que marchandisas compradas syen ditas bayladas, juxta ladita costuma, qualque sian messes ho portadas, per vertu de lad. vendition, de foras la botiqua en la quala eron devant lad. vendition. Et non souffira point quellas foguesson contadas ho pesadas dins la boteca en la quala eron davant que foguesson vendudas. Toutas de vegadas


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sy une causa es venduda a lenquant, non ou luoc lasditas costumas ; — Mais es en tot et par tot escrit : sy qualcung ha comprat publicament et manifestament qualques bens mobles de persona non suspectiosa ho deffmada, losqualz bens mobles sian estatz raubatz ho ostatz et prezes per forsa, ignorant, lodit que compra, losd. bens estre raubatz ho per forsa ostatz, los compre a bona fe, ho los acquiris per aultre titre de alienation, non es tengut de los retornar an aquel de qui avian estatz raubatz houd obstas per forca, synon que lo pres que nauria donat ho la valor de ce que nauria donat luy sia retornat. Totas devegadas sy lad. causa raubada ho per força hostada ly avia estat donada, ho autrement que non ly agues ren costat, es tengut de la retornar. Et so que a estat dessusd. es vray, quant non appar ho non costa point qui ha raubada hou obstada ladita causa; ho sy appar non ha de que pagar. Car sy appar que ha de que pagar, aquel que a compra de ladita causa hou lousd. bens, es tengut de retornar losd. bens raubatz ho per forsa obstatz, reservada a el laction contre aquel que los ha raubas; — laqualla causa ho costuma ha luoc, per toutas quantas devegadas losd. bens de ung a aultre aion estatz vendus. Et so que dit es es vray, si aquel qui a comprat ten et possedis so que ha crompat ho autrement, coma dit es ho apres. Et sy non ten ny possedis, cessa ladita costuma, et a luoc la disposition del dretz commun. Et es assaber que la quantitat del pres donat per la crompa delz bens raubas hou doubstatz; hou l'estimation sy la causa raubada a estat donada; ho la bona fe de aquel que a crompat ; ho aqui a estat donat he lo luoc del contraictz fach. Si justicia, hou pot justificar per lo sacrament daquel qui es convengut contra aquel que demanda, et dis losd. bens ly aver estatz raubatz, ho autre que sy diran aver dretz on lasd. causas. Sy aucun crompa qualqua causa mobla hou se mouyen (1) de per se, sy en ladita crompa eron plusors presens, ung chascung daquellous que sont presentz aldict contractz es par ainsy que seria sy el expressament avia crompat, et ha atant de drefz corne sil mesmas avia crompat. Et ung chascung delses pagara sa part del pres et, por la rata (2) de quarta part del pres pagat, aura sa part de la causa, ainsy que dit es, comprada. Et se pot partir et divisir, la diviseront; et, sy non se pot bonement divisir, sera baylada a el delles que plus ne do(1)

do(1) par contraction, de mulier. — (2) Au prorata.


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nara; laquala soma sera entre ellos divisada, et aquel a qui sera demorada et ne aura plus donat, retendra deldit pres tant que ne baylera a ung delz autres, sinon que aguessa estada entre ellos autrament extimada et enquentada. Dis que : si aulcung romieu crompa aldit Sanct-Gily qualqua causa, sy appres que lad. causa ly aura estat baylada et el aura pagat lo pres el se repentis et vol recobrar son pres ho argent, ho pot fayre en retornant la causa que avian comprada. Et sy aquel que la ly ha vendida ha trenquada ho despartida ladita causa de una autra, dis que en ha sosportat ho encourregut dampnage, a cause de que vol retenir deldit pres, non ho pot faire. Et semblablement sy deu fayre et observar quant lod. romieus vendon alcuna lor causa, mais aquellos que contratron ambe elles, non sy podon repentir ny desistir del contratz, sans lo consentiment delsd. romieus. Et losd. romieus poyron usar et excibcir deld. previlegi, so pendent quelles seran en lad. villa de Sainct-Gily, ho dos jors appres que sen seran anatz de ladicta villa. Totas leys prohibissens portar aur, argent, vin, lanas et totas autras marchandisas a la Barbarnia(l) sont corregidas por la costuma de Sanct-Gily, per laqualla es permes a ung chascung portar totas marchandisas en totas regions, et a qui excercir tota negociation. So que a estat dit dessus daquellos que son presens, quant ung autre crompe, et que hy ont tant coma aquel que crompe, sy entend quant aquellous que son presens dison et proteston incontinent quellos y vollon aver lor part. Et aussy, si aquel que compre per son usage, ho detz siens, ho per la necessitat ho utilitat de son mainage, non point per marchandejar, ny por gazanhar; car alditz cazes cessa ladita costuma. Laqualla costuma a tant soulament luoc en la villa de SanctGily et tant soulament als habitans, en aquela dont que sian los contrazens. Et lad. coustuma non lega point los Romieus sy crompon qualqua causa en ladita villa de Sanct-Gily, so que a estat dessusdict que aquel que crompa, publicament he a bona fe, causa raubada, ho per forsa obstada, non es tengut de rendre lad. causa, sinon que ly sia retornat lo pres que jurara naver donat, ha luoc et se deu entendre en aquel que auria pres en gaige, publicament et ha bona fe, bens mobles ou somovens (2), raubatz ho per força obstatz ; et deu lou estar al

(1) Etats barbaresques, Turquie et Levant, avec lesquels Saint-Gilles entretenait un commerce considérable. (2) Pour se moventes, pouvant se transporter.


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jurament daquel que los ha prezes en gaige : so es de la soma que navia baylada, del luoc en qui los aura crompas, et sy los a pres a bona fe et sans fraud et barat.

De jure emphiteotico

(Droits du seigneur sur la vente faite à un tiers par un emphytéote.— Obligation de dénoncer la vente au seigneur, sous peine de payer doubles droits. — Pouvoir donné au seigneur d'expulser un créancier insolvable, etc.)

Per la costuma de Sanct-Gily, sy aulcung ten causa que fassa censa et directe, non obstant que de long temps non aya pagada censa, ho que aya venduda ladita causa qui fay censa, sans requirir lo consentiment del seignor del quai sy ten, non tomba point en comis, mais que non laya venduda a persona de dretz prohibida. Ny non pot, lodit seignor direct, reppellir ny mettre de foras lo novel comprador ho autrement novel possessor, sinon que lodict seignor retorne aldit crompador lo pres que naura costat, ho sinon a bailat pres en argent lextimation de la causa, laqualla lodit novel comprador auria baylada per la dicta causa censual, sy aquel que ha crompada qualqua causa censuala non ho denuncia al seignor del quai sy ten infra ung an comptant del temps que laura crompada, et la possession daquella luy aura estada baylada pagara double lausime (1); autrament es tengut lod. seignor de recebre lodit novel emphiteote ho comprador. Et non poyra lod. seignor levar per lodit lausime, sinon de vingt ung, he sy es per pignoration ho gage non levara sinon de XXXXta ung, loqual lausime de vingt ou de quarante non pot estre levat, sinon que aquel qui ha crompat ho autrement aquezit, ho lo creancier que ha pres en gaige, ayon comensat de possedir he poyron comensar de possedir sans lo consentiment deldict seignor et la voluntat daquel que ha vendut ho autrament allivrat. Et sy la causa emphiteotica, ho que fa cense, es baylada ho transferida per legat ho donation ho autre titre lucretif, soit que non coste ren, non es degut dengung lausime ny extimation, ny non pot lod. seignor repellir ny expellir ledit novel emphiteote, possessor ho tenencier. Et so que dict es ha aussy luoc quand qualqua causa censuala es donada, extimada ho non extimada en dot

(1) Droit de vente à payer au seigneur direct, en cas de mutation.


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per qualqua persona que sya donada. Et semblablement sy es baylada al marit en gaige per la dot. Et las causas dessusditas ont aussi luoc quant, per sentencia hou transaction, enquaras que ly entrevengue pecunia, es facha translation ho aliénation duna causa censuala de ung a autre, provegut que non sya fach fraud, barat ny deception deldict seignor. Sy alcuna causa es divisida hou partida entre plusors coheretiers hou companhons comuns en bens, per licitation, so es que demorara am aquel qui plus ne donara ho per transaction, ho per extima, ho extimation, es degut lausime al seignor directe de ladita causa divisida. Mais lod. seignor non poyra retenir par prelation ladite causa ainsi que dit es, divisida, ho partida, ho baylada ha ung delsd. coheretiers hou companhons ; mais si entre losd. coheretiers hou companhons a estat partida alcuna causa entre ellos comuna, autrement que per la faysson dessusd. non es degut dengung lausime, ny dengune extimation ; ny lod. seignor non pot contradire que la causa partida non demore en aquel que a estat assignada et baylada per los autres coheretiers hou companhons. Sy aquel que deu censa non la paga, lod. seignor directe ne pot portar las portas he lou degitar; et mais tota sa familha de las maisons que font censa et aussy de las terres les fachiers ou mercenaris, et tota la familia, he pot empachar totalament lo laborage, jusques a tant que sya pagat de lad. censa; et poyra lod. seignor prendre ho retenir tos los arayres et autres causas depputadas a laborage, et tos los fruictz que trobara amassatz, retenir en gaige, jusques a tant que tous lous arrayraiges luy sian pagatz. Sy aulcung cessa de pagar per ung an la pension que deu, sy per lo senhor ly es denunciat, et cessa aussy per lo second an lad. pension, deu estre doublada ; car sy lou premier an nou devia que XII deniers, syan pagas dos solz (1); lo second an, quatre solz; lo tiers an, VIII; lo quartz, XVI solz; lo Ve, XXXII solz. Et, sy en lod. Vme an, lo emphiteote ho tenancier non a pagat tous losd. acroysamens, sera licite et permes ald. senhor, en la fin deld. Vme an, de la auctoritat de la cort, intrar et pendre la possession de la causa emphiteoticaria, et fayre los fruictz syens, jusques a autres v ans; losquals fruictz aura lod. seignor lad.

(1) Sou tournois. — D'après les calculs généralement admis, le sou valait alors 2 francs 60 centimes ; mais il serait difficile d'évaluer ce que représenterait aujourd'hui cette même somme.


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causa en plen dretz, an et per cornes lod. emphiteote sera exclus de tot. Et sy lod. emphiteote ho tenancier vol recobrar lad. causa, infra losd. derniers v ans, non poyra, sy non que pague lasd. pensions croyssemens. Et que los fruictz que lod. seignor aura prezes, so que dici es pendre, non sera tengut de los rendre aldit emphiteote ho tenencier, si entre lo senhor he lo emphiteote ho tenencier ha question ho debat de la denonciation de la crompa facha, ho de la censa non pagada, Ion deu ester et croyre, al sagrament del emphiteote ho tenancier, sy es persona honesta et de cogneguda veritat. Et so que dit es de la cansa que es tenguda del senhor directe en causa, ha luoc en los feaudataris, per plus forte raison sy lod. feaudatari cessa en so que es tengut de fayre. Et que delz fiouz non usa hon pointa Sanct-Gily, segon la disposition del dretz script; mais hon ne juge segon la costuma.

He furto seu baru»

(Du vol commis par nécessité ou légèreté et du vol fait en vue de se procurer un lucre. — Dans le premier cas, le voleur ne doit pas être puni comme larron, mais est tenu à rembourser le dommage.)

Sy aulcung, de jour et non point de nuict, per joyeusetet, ho per manjar, ho per portar en sas mans, aura prezes fruictz delz arbres d'un autre ; ou cassayre, per paysar son aucel (1) de cassa, avia preza la gallina ho causa semblabla dung aultre, occultement, non sera convengut per action de fait, non sera punit comme layron ; mais gardon se aquellos que prendran las causas dessusdictas que non encorisson las penas ordenadas contre los layrons ; car sy prendon las causas dessus dictas per gazanhar, ny en granda quantitat per vendre, ho a laventura per gardar et en manjar et usar chascung ho plusors jors ensequens. Aussy se gardon que presens aquellos de qui son las causas dessus dictas hou de lors mercenaris, el et elses prohibisens et contredisens, non prengon ren per forsa. Et sy ho font, seront punitz segon las penas de las ley de dretz script. Et non obstant que en los cazes dessusdictz, la costuma deld. Sanct-Gily aya

(1) Du latin avis et avicellus. — Oiseau employé pour la chasse. Ces oiseaux se partageaient en deux classes : les nobles et les ignobles. Les plus recherchés étaient : le faucon, l'émérillon et le tiercelet ; les éperviers et les autres oiseaux de proie ne jouissaient pas de la même estime auprès des fauconniers.


obstat las penas hou action de fait, toutas devegadas non ha point obstedas las penas que sont introduites de dretz contra aquellos qui devon ho font dampnage et interestz, hou autrament font contra las leys.

de testamentis publicandis

(Les testaments seront publiés en présence du chancelier ou juge et, à leur défaut, devant un homme de loi.)

Les testamens devon estre publicatz davant aquellos que presidissont en la cort, present lo cancellier ho juge que deu examinar los testimonis ; et sy lod. cancellier ho juge non podon anar, a causa de sa malautia, hou de son abscencia, ho per autra occupation, poyran, las causas dessusdictas, estre fachas et explicadas en la presencia et assistencia de qualcung sage en dretz, la quala causa dis aver vist estre observada per long temps, en totz los negocis que requirisson cognoissenca de causa.

De pecunia pupillari

(Devoirs des tuteurs modifiés par la coutume. — Cas auxquels on peut refuser la charge de tuteur. — Emploi de l'argent des pupilles.)

La ley que compellis los tutors a crompar terras hou possessions de la pecunia delz pupilz, es corregida per la costuma, maiorment quant losd. pupilz non sont mascles mais femellas, que non sy poyran sy honestament maridar en las terras, comme faran en largent, sy lo testedor dona per tutor a ses enfants aquel que sap ben luy estre obligat, ho sapt ben quel es obligat aldit tutor ; sy lou deute es clar et sans contraversya, lod. tutor poyra segurament administrar ladita tutella sans encorir denguna pena he sans perdre son dretz. Et sy non vou estre tutor, sy pot excusar. Toutas de vegadas, sy la soma quel deu ho luy es deguda es petita, enquoras que lo deute non sya clar, sy se vol excusar non sera point ausit. Item, cessa lauctentica unde vir et uxor, a la succession de lung et de lautre sont appeladas premierement las famas.


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De cessione bonorum

(Cession de biens par le débiteur. — Cas auxquels le créancier a le droit de saisir son débiteur par corps. — Ses devoirs envers son prisonnier.)

Non obstant que beneficii de cession de bens approffiecha que los condempnatz non syan detenguts en las carces, toutas de vegadas la ley municipalle ho costuma dispensa que aquel qui es convengut et connivent ho a confessat en jugement ; et a estat ordenat ho luy a estât commandat que paguessa, deu estre baylat al creancier que lo detenga, liat he estacat, jusques a tant que aya pagat ; sinon que coste manifestement que, per fuoc ho per tombament de maison, per naufragy ou aultre cas de defortuna, ho per so que avia estat fermance per aultruy, sya devengut a pouriera et a non poder pagar. Et que en los cazas dessusdictz, dengung non sera privat deldict benefficii de cession de bens, loqual ha tant soulament luoc en los cazes dessusdictz, segon ladita costuma. Et que quant qualcung sera, coma dit es, baylat a estre detengut, liat et estacat, jusques a tant que aya pagat, deu aver de pan et daigue souffizent, autra causa non, synon que sya per la gracia et misericordia de aquel que lo deten. Quant totz los bens de qualconque persone sont vendutz per la cort, ho per los creanciers, ho per lo curador donat alz bens, los creanciers non podon levar ny allogar las usuras (1), mays tant soulament la sort principala, et las usuras que ont levadas per lou deute principal que demandon, devon conter et allogar en diminution de ladita sort principala ; et en lo subre plus de lad. sort principala seron allogatz he ameses coma los autres creanciers; et sy per lasd. usuras avian estatz donatz gaiges ho fermanses, losditz gaiges ny aussy las dictas fermanses non sont point tengutz ny obligatz per las dictes usuras.

Contra constitutiones

(La loi impériale : Si quis, etc., abrogée par la coutume.)

Las penas statuidas ho ordenadas contre aquellos que, per forsa, invazisson las possessions d'autruy, ou daquellos que

(1) Intérêt, soit légal, soit usuraire.


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sont absens sans sentencie judiciala, per tres constitutions de lemperador, so es per la costitution : Si quis in tantam (1) ho non ab re L conquirebat, non hont point de luoc, segon la costume dud. Sanct-Gily ; mais souffis retournar la possession a aquel que navia estat degitat.

De distractione pignorum

(Cas auxquels le créancier peut vendre le gage reçu. — Formalités à remplir. — Cas d'exception.)

Per la costuma, es introduit que lo debitor que bayla gaige non pot estre compellit de resevre lo gaige, sinon que naya fach pacte expres de lo recevre et recoubrar, toutas de vegadas sy bens mobles hont estatz baylatz en gaige, sans que aya estat fach pacte ny convention sus lo pagament del deute ho la vendition del gaige, appres ung an he ung jort ; he appres que lo creancier aura somat et requis, de sept en sept jours, per tres vegadas, lo debitor deu resevre lodit gaige, poyra lo creditor, sans crainte de encorir dengunas penas, vendre lodit gaige sans fraudet sans barat, he lo pres que naura print, retenir per lacort ho soma principala et per las usuras ; he sy ren y sobra, ho tornara al debitor. Et sy la pecunia per la quala a estat baylat aulcung gaige non es pagada al jour assignat ho promes, facha, ainsi que dit es, ladita trina denonciation aldit debitor de resevre lod. gaige, pot lo creditor non sperar que lan sia passat, vendre lodit gaige ; he non poyra, per aquello soulo raison, lodit debitor retracter ladicta vendition; mais la hont han estatz bailatz en gaige bens immobles, en la vendition daquelz deu estre gardada la disposition del dretz, sy non que aya autrament entrepres entre las partidas ; car sy y a pacte ho convention, deu estre gardada tant en las terras que autre bens immobles, et aussy en bens de per se se movens coma bestiatz. Et es a noter que, si ung chival hou una jumente, portant he soufertan: brida, ho autra semblabla bestia, a estat baylada ho obligada en gaige et lodit creditor, per necessitat ho per sa volontat, ambe armas ho sans armas, la chivaucha, ho per nafra (2) hou per autre cas, la partida, lodit creditor pert son deute, he lo debitor pert sa bestia. Ny lung non a ac(1)

ac(1) de la loi citée. — (2) Blessure.


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tion contra lautre, sinon que autrament aya estat convengut entre ellos. Et aussy a luoc, so que dict es, lo filh ou autre de la familha ho qualque estrangier que sya de la voluntat deldit creditor ho ha fach semblablement, coma dit es, deldit creditor. Et sy lou deute es de usuras; sy la bestia peris ho mor, autrament que per la maniera dessusd., cardengung non. lo trebailha a laventura a lestable ho al camin, sans colpa, del creditor deu estre observada so que dessus a estat dict, en las autras causas, jusquas la soma de la cort principala es derrogant al dretz escriptz per la costuma. Mais, sy lo deute non es usurari, la mort ou perdition del gaige avenen, sans colpas del creditor, non perjudica point aldit creditor.

De fide jussoribus

(Cas auxquels le créancier peut, sans s'occuper du principal débiteur, poursuivre celui qui s'est porté caution.)

Ainsy que era introduit per lo dretz antic, aussy es introduit per la costuma : que lo creditor pot laissar lo debitor principal, he convenir la firmansa, sinon que autrament aya estat de pacte entre las partidas. Toutas devegadas, sy lodit creditor a offert convenir premierement lo debitor principal presen et que ha ben de que pagar, et loqual sy perforsa de frustar he repellir lintencion deldit creditor actor, deu lod. creditor, layssar la firmansa, jusques que la causa, entre lodit creditor he debitor principal, aya aguda deguda fin.

De accusationibus et inscriptionibus

(Précautions prises contre les gens qui accusent. — Personnes dont les accusations ne sont pas reçues.)

Non obstant que segon la costuma de Sanct-Gily, la necessitat de sy inscribir ou obligar a semblabla pena, sya remessa a la censator, toutas devegadas incontinent que qualcung accusa ung autre de alcung crime hou delicte, devon estre preses et fachas actes, davant lo juge, del non de lacusator et de lacusat, et de la qualitat del crime, et de la forma de lacusation, et del temps ; et de tout deu estre baylat acte a luna et a lautra de las partidas, tant aquellous que sont prohibis a accusar segon las leys, et aussy aquellos qui ont juridiction, sur aquel


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qui es acusat sont repellis ; et non devon estre admesses a accusar. Ny aussi gens comesses et depputas per aquellos que ont la juridiction, ny los sergens, ny exequtors, sinon que lo crime sya notory; car, quant lo crime es notori, cessa ladita costuma; et ainssy sans accusator, pot estre lod. crime notori examinat et, segon las leys, diffinit et punit.

De corrigendis moribus

(Droit donné aux personnes de plus haute condition de corriger leurs inférieurs.)

Ainsy que, par las leys, es donada licencia et poyssance alz plus vielz de corregir los plus joynes, que son de lor propinquitat ho linage ; aussy, per la coustuma deldict Sanct-Gily, es licite et permes alz maiors de estat, qualitat hou condition, de corregir aquellos que sont de mendre et plus bas estat, qualitat ho condition, de paraulas, de menassas et encores batre; mais que los batton moderadamen. Et per so, sy aulcung de bas estat, qualitat ho condition, a batut ho dichas paraulas folas, ho auria fach alcuna causa deshonesta, ho autre inconvenient contra alcung de major estat, qualitat ho condition, et sya estat corregit, ainsy que dessus a estat dict, per alcung de major estat, qualitat, condition, lo que ainsy es corregit, non pot aver action de injurias contra aquel que ainsy laura corregit.

He jure fisci

(Droits de justice. — A combien ils se montent. — Cas auxquels ils sont dus.— Exceptions. — Si un étranger meurt sans faire de testament et sans parents connus, ses biens seront, au bout de l'année, partagés entre les moines du monastère et les pauvres.)

Lestat del monde de tot temps a estat variable et incert, et jamais non a estat ferme, mais a estat et anat a undas entre fortuna et deffortuna, prosperitat et adversitat, talament que plusors vegadas a mudatz los estatz delz reaimes, los ungs augmentent et los autres diminissent. Et plusors delz bens des delinquens, losqualz, segon las leys, devion estre a fisc ho confiscation del emperador, ont estatz, per las costumas delz luocz particulars, aplicatz et confiscas als ducz, contes, marquis, ho autres senhors desd. luocs. Et nonobstant que, per lad. usur11

usur11


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pation, ellos ayon et consegon las dictas confiscations, totas devegadas non consegon point lo privilegi de l'emperador ; et quant aussy al profit de lasdictas confiscations, las costumas ly ont alcunas adjustat et autre diminuit de so que lo dretz navie ordonat. Et segon las costumas de Sanct-Gily, en las causas pecuniarias, por qualque occasion que syan entre los privatz particuliers demandadas, los degans (1), ny los viguiers, ny autres officiers a elsos superiors hou inferiors, non podon levar ny exigir, per lo emolument, loqual lon appella voluntieyrament et vulgarement justicia, sy non la terca partida de la quanti - tas de pecunia que es demandada, et aquo appres la sentencia donada, laqualla terca part dona et paga aquel que es condampnat ; talement que aquel que a sentencia per se non pert ny sy dimynuis ren de so que ly es degut et jujat del principal. Ben es vray que lod. dretz de justicia non sy deu point levar indistintament en toutas causas ; car en las causas possessorias non sy leva ny se pren ren, synon que sya en lo interdit : Unde vi (2), loqual a luoc maiorement quant alcung a estat degitat par forsa de violenca de sa possession. Et aussy se paga lod. dretz de justicia en las actions que sy donon hou sont entendidas en luoc deldit interdit de Unde vi, ho a sa semblansa ho supplicament, como sy eron petitorias. Dis en oltre que, sy lo debitor offre et presente pagar so que deu a son creditor, et lo creditor non ho vol pendre mais lo fay convenir per justicia, non es ren degut per lod. dretz de justicia, enquaras que lodit debitor non aya depausat ny consignat so que deu. Sy lo creditor ten et possedis la causa que ly es obligada et per pacte expres, lo debitor es tengut de resevre lad. causa obligada. Et sy lodit creditor fay convenir son debitor sur so que dit es, et lo debitor es condempnat a resevre lod. gaige, non es ren degut per ladita justicia; mais sy lo debitor agis contra lo creditor, per so que lo creditor non vol pendre so que ly es degut et rendre lo gaige, sy lo creditor es condempnat, non sera tengut de ren pagar per lo dretz de justicia, sinon que la pecunia que era deguda per lodit debitor aguessa estada depositada et consignada segon lo dretz ; car, en aquel cas, seria tengut lod. creditor de pagar los dretz de justicia. Sy alcung a comis crime public o privat, del que appres sya convaincut et condempnat, de tous sous bens ho partida daquellos ho pecu(1)

pecu(1) ; de decanus, doyen. — (2) Premier mot du texte de la loi.


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niarament sera punit ; et so en los cazes que non son prohibitz et contreditz per lo dretz. Sy alcung delz habitans de SanctGily mors sans fayre testament, sinon a dengung parent qui ly succedissa, la molher aura sos bens tant solament a sa vida, et sera tenguda de los pendre per inventari. Sy alcung estrangier mor sans fayre testament en lad. villa de Sanct-Gily, sos bens devon estre mezes et baylatz a qualque bon prodhome ho messes en maison sagrada. Et sy, de infra ung an, non ven ny apper dengung de son linage que remostre losd. bens a aquel appartenir, losd. bens seran devisys per labbat, loqual ne baylara la mitat alz morges he lautra alz paures.

De filia dotata

(Biens dotaux des filles. — Priviléges dont ils jouissent.)

La filha, dotada per lo payre vivent ho morta, sa mayre es exclusa, una ambe aquellos que dessendon de lad. filha dotada, de tous los bens et succession paternala et maternala, vivent et surestant ung ho plusors frayres dung mesmes payre nascutz, ho sorres que non syan point estadas dotadas, ho aussy survivens los enfans ho successors legitimes delsd. frayres ho sorres non dotadas, et a quo sya estada dot costituda, granda ho petite. Ny non poyra agir ny demandar suppliment de legitima. Et so que dict es a aussy luoc, enquoras que lo payre non laya dotada. Sy lo payre estent furios ho pres per los inimicz et detengut, ho es anat en qualque luoc que non sen scabon novellas, ho es prodigue, ho autrement costituit en estat et qualitat que las leys civillas ordenon ly estre donat ho provesit de curator alz bens, lo curator, ho la mayre, an lo conselh delz plus prochans, hou lous plus prochans sy la mayre es morta, ladita filha es estada dotada. Et aussy a luoc so que dit es, sy la filha a estada dotada per la mayre, ho per autre, delz bens de la mayre, tant que toqua los bens de la mayre. Et so que a estat dessus dit ha luoc, quant lo payre ho la mayre son mortz sans fayre testament ; car sy ont fach testament, poyra ladita filha dotada demandar so que ly aura estat layssat et ordenat per lo testament.


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SEGON SEN LAS CONSTITUTIONS, ESTATZ ET LEYS MUNICIPALAS FACHAS TANT SOLAMENT SUR L'ESTAT DE LA VILLE QUE DE LAS CORTZ DE SANCT-GILY , PER MONS. PONS DE MARGARIDAS (1) , ABBAT DE SANCT-GILY , AN LOU CONSEILH ET CONSENTIMENT DELZ RELIGIOSOS ET HABITANS DE LAD. VILLE DE SANCT-GILY, L'AN MIL CC XLVI, AU MES DE NOVEMBRE.

De fide instrumentorum

(Mesures prises pour assurer l'authenticité des actes. — Liste des notaires de Saint-Gilles. — Précautions prises pour la conservation des actes. — Production de titres en justice, etc.)

Affin que l'on scachan dores en avant, apres que alcun instrument aura estat fach produict en la cort de Sanct-Gily, sy lod. instrument aura estat escript per lous notaris, mortz ou vious (2), de Sanct-Gily, seront mezes quatre instrumens, dung chascung notari de Sanct-Gily, en una archa publica, de la quala mons. l'abbat tendra una clau et lo viguier l'autra, et sera messa lad. archa en la maison de la cort; et quand sera produit en jugament alcung instrument desd. notaris, sy la partida contra laquai sera produit vol dire que l'instrument non es script per aquel notari, sera facha comparation en los instrumentz messes dans lad. archa, per veser sy sera tot duna man ; mays so non obstant, enquores que sya tout duna man, poyra aquel contra loqual sera l'instrument produit dire et redarguir l'instrument de falsitat; et que ladita comparation non servira, sinon que de remostrar que sya script per aquel notari, sy ladita comparation ho remostra, laqualla remostration deppend de la cognoissensa de la cort. Et, affin que al temps advenir, Ion non puescha dobtar qui sont ho ont estatz notaris de Sanct-Gily, los noms et surnoms sont escripts sy desoubz. Et que los noms delz notaris que seront per lou temps advenir en la villa seront escripts en lo cartel public de la cort,

(1) Pons de Marguerittes, que Ménard, dans son Histoire de Nimes, nomme simplement Pons II (1245-1252). — (2) Vivants.


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loqual sera gardat en ladicta archa publica. Et sy alcung vol denegar que alcung de aquellos delz quais los nom et surnom sont escripts coma dict es, non aya estat notari public en ladite villa de Sanct-Gily, non sera point ausit. Et affin que losd. instrumentz, messes comme dict es dins lad. archa publica per fayre lasd. publications, non sy pueschon mudar ny corrompre, seront losd. instrumentz soubz escriptz et signatz dedins ou de foras per los notaris que sont de present ho seront per lo temps advenir en lad. villa de Sanct-Gily. Et so que a estat dit quant Ion playdeya en ladita cort, ha ausy luoc quant Ion playdeya davant certains arbitres ; et que playdeya Ion en lad. cort ho davant losd. arbitres, ladita cort sera tenguda de baylar la coppie delz instrumenz. Et que losd. quatre instrumenz, ainsy et coma dit es, messes en lad. archa, non pueschon estre negatz ny per dobtozos reputatz. Et so que a estat dit et ordenat delz noms et surnoms delz viguiers et juges, losqualz aussy sont escripts en lo present libre, que chascun les pot usar.

De testibus cogendis

Les témoins peuvent être obligés à se présenter. — Exemption en faveur des parents de l'accusé, jusqu'au troisième degré inclusivement. — Cas où cette exception n'est pas admise.)

Dis que, non obstant disposition de la ley municipala ou costuma antiqua, laquala lodit abbat, per conselh et consentiment delz dessusditz, corregis per la comuna utillitat, a la requisition del actor ho del reu (1), los testimonis devon estre compellis a portar testimoin de veritat en la causa pendente en la cort, et per devant arbitres, sinon que per lo dretz script syon excusatz de portar testimoni de veritat. Et que dengung non deu estre compellit de portar testimoniage en causa criminala, agiscasi civilament ou criminalament contra alcung de sa consanguinitat ho affinitat, sinon que passe lo ters grau (2), sinon que la cort de son office, sans requisition daltruy, procedissa en lad. causa criminala; car, aldit cas, ung chascun pot estre compellit a portar testimoniage, sinon que par las leys

(1) Reu ; du latin reus, coupable. — (2) Grau ; de gradus, degré.


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scriptes sy puescha excusar, hou alegaria crainte et dobte de incorrir irregularitat. Dis en oultre que, sy alcung es appellat porter testimoni en causa criminala, sya clergue hou laic, tel que dobte encorrir irregularitat, et que vuelha estre clerc, si jura que tant soulament sy excusa de portar testimoniage, per dobte dencorrir irregularitat, aldit cas deu estre excusat de portar testimoniage, cornent que en ladite causa criminala Ion procedissa, so es ordinairement, ho la cort de son office et propriment.

De redditibus minorum distrahendis

(Vente aux enchères des biens des mineurs. — Cette vente doit se faire par devant notaire. — Le tuteur ou curateur ne peut se rendre adjudicataire. — Convocation du conseil de famille.)

Los tutors et curators delz minors de etat (1), et dautras semblables personas a lasqualas, segon la disposition del dretz escript, es donat curator, si vendon las rendas hou revengudas daquellos dasqualz son tutors ou curators, los devon vendre a lenquant public, et delivrar alz plus offrent, de laqualla vendition prendra tant soulament instrument lou notari de ladita villa de Sanct-Gily, loqual notari, per lo deves de son office, sera tengut baylar et faire instrument de ladita venda a aquel que era dessobz la tutella ho cura daquel que fasie lad. vendition; quant ne sera requis, et que lasdites rendas ho revengudas devon estre enquantatz per VI jors de festas, et non pot lod. tutor, ny per autra entrepausada persona, retenir a se lasdictas revengudas ny aver daquel a qui auront estedas delivradas, sinon que lo foguessa son heritie hou las ly leguessa. Dis en oltre que, sy aldit tutor ho curator sembla que las dictas revengudas non dejon estre messas a lenquant public, quel hou deu dire et manifester à la cort, laqualla, appellatz los parens et amicz daquellas que son desoubs tutella hou cura, ordenaria syse devon metre a lenquant public ou non. Et que los tutors et curators devon estre compellitz a gardar et observar las causas dessusditas.

(1) Etat, pour edad, âge.


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De recognitione canonis

(Quiconque aura payé pendant trois ans la rente ou loyer, soit d'une maison, soit d'une terre, sera tenu de continuer à payer, à moins qu'il ne fournisse la preuve qu'il a payé indûment.)

Qui per tres ans aura pagada censa ho pension per alcuna terra, maison ho autra possession, sera compellit de la pagar mais appres lo temps advenir, et aussy de la recognoisce en scrite publica, si non pot remostrar aver pagada endegudament lad. censa ho pension. Et aquo, ayon estadas fachas lasd. tres pagas per el ho per son predecessor, ho per lung ou per lautre; car, coma dict es, sera tengut de pagar, si non remostra, coma dit es, indejugament aya pagat.

De pena ludenrium et jurancium

(Amendes dont sont punis ceux qui blasphèment en jouant, ou jurent par la tète, le sang, ou lo foie de Dieu. — Le dénonciateur sera cru sur parole et recevra la moitié de l'amende.)

Sy alcung, a qualque joc quel jogue, dis blasphemis, ho contumelie, ho perjura, per lo cap, lo sang, lo fegge, ho autre membre de Dieu, de la virgen Maria, ho de sanct Gily, per una chascuna vegada sera tengut de pagar tres solz, et delz autres sanctz dos solz, delz qualz la mitat sera de la cort et lautra daquel que ho aura revelat. Et Ion creyra lo revelan per sa simpla paraula ho a son sagrament, segon la qualitat deldit revellant ; et sy aquel que anssy aura blasphemat ho injuriat non ha de que paga, sera punit a larbitre de la cort. Et so que dit es sentend tant daquellos que jogon que daquellos que font jogar. Et que la cort deu tenir secret lo revellant.

De notis scribendis in cartulario

(Obligation pour les notaires d'inscrire leurs actes dans un cartulaire. — Le notaire qui négligera cette formalité sera puni.)

Tos los notaris presens et advenir que seront appelatz en la villa de Sanct-Gily a faire instrument, sont tengus scriure la nota en lo cartulari et de lo legir a las partidas. Et sy en lo contract ou negoci es facha alcuna causa contra la forma accostumada, lodict notari ho mectra en sa nota ordenadament. Et lo notari que fara lo contrari sera punit per la court.


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De tabelliones sint advocati

(Défense faite aux notaires de servir d'avocats à leurs clients. — Exception en faveur de leurs pupilles ou de leurs parents au troisième degré.)

Lous notaris non devon point exercir loffice davocat, ny de procuror, sinon en lor causas, et aquo sans fraud. Et synon per los pupilz et autres minors de etat, desqualz losd. notaris sont tutors hou curators. Et sinon aussy per aquellos que son de lor consanguinitat hou affinitat jusquas al ters grau, segon lo dretz canon. Et losd. notaris non devon estre donatz de lor bon grat, ny aussy compellis per força destre curators à las pleydeyarias.

De acquitationibus minorum

(Le tuteur ne peut se faire donner quittance par ses pupilles qu'en présence de leur curateur, de la cour ou d'un conseil de famille composé des trois plus proches parents.)

Aquellos qui ont estatz tutors dalcung, non devon ny podon consegre absolution ny quictance daquellos dasqualz ont estatz tutors, sinon que lor curator, sy point en hont, hy sya present : hou sy non curator aya estat fach, en presencia de la cort, ou almens, en la presencia de tres plus prochans parens daquel que a estat tutella. Et sy altrament avian fach absolution hou quictance, la poyront faire revocar et cancellar. Et lo sagrament, sy ont jurat, fayre relaxar.

De dilatione ultramarina

(Délai accordé à celui qui demande à produire des témoins demeurant outremer. — Conditions auxquelles ce délai est accordé.)

Qui, en playdeian, demandara dilation per probar de la la mar (1), sera tengut nommar los testimonis segretament al juge, affin que lod. juge arbitre sy demande la dillation caloniosant. Et sy puis appres appar et costa que calumpniosant aya deman(1)

deman(1) rendue nécessaire par l'étendue du commerce maritime de SaintGilles avec le Levant.


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dada lad. dilation, et sera probada lad. calumpnia, sy non produis point de testimonis de la la mar, sera condampnat en los despens, losqualz seron probatz per lo sagrament daquel que playdeiara ambel precedant, toutas devegadas la taxation dal juge jusques a quanta soma preste jurar et non point appellar. Et que lad. dillation a probar de la la mar non sera point donada, sy premierament aquel que la demanda renuncie a lautre production de testimonis, et que ladicte dilation non sera donada que una vegada en una causa ; ny enquores une vegada, si non sy agis dung marc dargent ho de plus.

He restituenba possessione spoliatis

(Toute personne dépouillée par une autre aura droit à être remise en possession, même à main armée. — Nul ne sera admis à prouver que la chose dont il se sera emparé lui appartient, avant qu'elle n'ait été rendue à son précédent possesseur.)

Sy alcung es estat degitat et expoliat per forca de sa possession, la cort pot et es tenguda, à la simple denonciation daquel que a estat privat, degitat ou expoliat de sa possession, sans libel et sans contestation de plaids, inquirir et sy informar de. lad. expoliation et la ly fayre retornar, an man armada sy besoin es. Et sy aquel que aura expoliat autre vol dire et remostrar que la causa de laquala ha lautre expoliat sya siena ho que aya en aquela dretz, non sera ausit, jusques a tant que lad. possession sya retornada en aquel que aura estat despolhat. Et appres que aura restituida lad. possession et que sera de possessor demandador, sera ausit per la cort et persegue son dretz.

De debitoribus crebitori reddendis, et qui

(La loi qui autorise que le débiteur soit livré à son créancier défend qu'un chrétien soit livré à un juif, un homme à une femme, une femme à un homme, un habitant de Saint-Gilles à un étranger.)

La ley hou coustuma antiqua de Sanct-Gily, que lo debitor paure deu estre baylat al creditor, reservadas certanas exations (1) contengudas en aquela ley. si entend que ung crestian

(1) Sic, pour exceptions.


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debitor, per paure que sya, non deu estre baylat a ung juzieu (1) son creditor, ny ung home a una fama, ny una fama a ung home, ny ung paure debitor de Sanct-Gily a ung sien creditor extrangier de Sanct-Gily.

de abvocati dent concilium post sacramentum calumpnie

(Défense aux avocats de souffler à l'oreille d'un client la réponse qu'il doit faire à une question qui lui aura été posée devant la cour.)

En una chascuna causa, appres que sera estat jurat que Ion non procedis point per calumpnia en lad. causa, mays per so que sy pensa aver bon dretz, si lactor ou autre fay alcuna position, et permes a ladvocat de deduire et disputer devant lo juge ou autre que ten la cort, si ladite position es dobla, aven diversas significations, que la partida responda a ladite position, lo advocat non deu point instruire hou ensenhar à la partida que deu respondre sur lo fach. Ny non y deu respondre davant que ladita partida, ny non hy deu parlar a laurelha, ny lo tirar a part, jusquas a tant que aura respondut, sinon que ho fassa del consentiment del juge. Et lavocat que fara lo contrari sera punit, per una chascuna vegada, en v sols lornesses, et sy la cort los luy remet, seront applicats a la partida adversa.

De transcriptis testamentorum

(Copies des testaments. — Conditions qu'elles doivent remplir pour être authentiques. — L'héritier sera appelé pour en entendre lecture.)

Los dobles extractz hou copias factz et preses delz testamentz hou autras dernieras voluntas, per mandament et auctoritat de la cort, present lo heritier, ou sy es minor de XXV ans, son tutor hou curratour hou appellat et non volon venir, hou sy non sy troba appres que aura estat appellat hou denunciat a sa maison, sera adjustada alditz dobles copias ou extractz tenta

(1) Le nombre des Juifs établis à Saint-Gilles pour y faire le commerce était alors très considérable. Suivant Benjamin de Tudèle, il n'y avait pas, dans cette ville, en 1170, moins de cent Juifs savants.


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fe coma sy eron originalz ; toutas devegadas devant que los sobscriptz hou signatz per lo notari devon estre legitz en los originalz davant la cort. Et sy bezoing, seron corregitz, appellatz, toutas devegadas, lod. héritier, hou son tutor hou curator, ainsi que dit es. Et so que es dessus dit et ordenat delz testamens et autras derieyras voluntas, deu estre gardat et observat en los autres instrumens faictz sur el por contractz perpetualz, appellatz aquelz que la cort cognoiscera et dira estre appelatz. Et sy es atrobat, per man publica script en losd. dobles ou extraicts ou copias, que las causas dessusd. sian estadas observadas, sera presumit que, totas las causas hou solempnitas dessusd. ayan esladas legitimament faschas, los extraicts hou coppiaz delz testamens, hou dautres derrieyras voluntas, que per avant, auriont estatz fachas per autoritat de la cort, que sy probara per la sola subscription fachas de man publica, saranagutz, tengutz et reputatz per publiez.

de cartulariis notariorum defunctorum

(Après la mort d'un notaire, ses notes et registres seront portés à l'abbé, qui les remettra à une commission, en réservant les droits de l'héritier. — Ces notes seront transcrites dans le cartulaire public, et signées par les membres de la commission.)

Affin que las nottes delz notaris mortz non venon entre las mans de personas que non syan juradas, a estat ordenat que, encontinens appres la mort del notari, mons l'abbat prenga lasditas notes et las cometa a ung delz notaris, loqual el causira, gardat totas devegadas lo dretz del heritier del notari mort. Et que de lad. commission sia faitz instrument public. Et aussy sera scripta lad. comission al caltulari public de lad. cort. Et faitz et observat so que dit es, non sera permes a dengung de allegar, negar, ny doblar que lasd. notas non ayan estadas comessas ald. notari, ny negar lod. cartulari de lad. cort estre public. Et que alz instrumentz preses et expedis de lasditas notas per lod. notari, cornes ansy que dict es en lasd. notas, sera ajusteda plena et entieyra crezensa, ainsy que aguera estat al notari que aura prezas lasdictas notas. Et que lod. cartulari public de lad. cort, en loqual seront scriptz los noms delz notaris, delz viguiers, juges et accessors, sera subscript per tos los notaris.


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Diffinitio controversiarum domini abbatis SanctiEgibii et consulum cjusdem ville

Plaintes portées par l'abbé de Saint-Gilles devant les commissaires et les arbitres désignés, contre les usurpations de pouvoir commises à son détriment par les consuls. — Sentence rendue par les arbitres.)

Entre las autres causes que mons. l'abbat et son conven prepausavon devant lous comesses et depputatz, per terminar, diffinir et jugar lasd. controversias contra losd. consolz et habitans deld. Sanct-Gily, desia lod. abbat que losd. consoulz usurpavon la juridiction et seignoria del monestier deld. SanctGily, per so que losd. consoulz, coma juges ordenaris, condempnavon aquellos que pleydeiavon devant ellos, hou lous absolvition et levavon los dretz de la justicia. Et que aquellos que delinquyon metion en obsteige (1) et taxavon lo temps que devion demorar en obstage. Et prenion argent que appellavon vulgarament assizas, en defraud (2) de las justicias delsd. monestier ; et que gitavon de la villa en luoc de exil aquellos que volion, et que, quant aucun avia cornes crime que requerio confiscation, ellos destruision las maisons que devion estre confiscadas a la cort. Et que prenion conoysensa sy las mesuras et los pezes eron justes ho injustes, et metian penas et prohibition al degan que non faguessa point lad. inquisition. Item, que, contra la volontat deld. abbat, fazian cridar et proclamar so que sy volion ; et fazian sagramens et stetutz a lor arbitre, en ladita villa; et que s'applicavon las plassas pertenens aldit abbat. Et compellion los injurias de jurar que non se rancuresso (3) point en lad. cort. Et sy efforsavon de fayre conjurations en las villas circumvicinas. Et car las causas dessus dictas, et plusors autras, se fazion et cometion per lajutori et conselh dalcun complices, et adjuratz requeris que lord, sagrament fosson romputz. Item, quellosavion emougut (4) lo poble a armas. Et contra sa prohibition avion despoulhas et deraubadas plusors maisons de alcungs prudhomes de totz lors bens, si conclusia en action de injurias demanda los

(1) Dans le sens de contrainte par corps. — (2) Du latin in defraudatione, au préjudice. — (3) Se rancurar, s'abriter. — (4) Emougut, de emovere, ému à, appelé aux.


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dampnages et despens per el souffertatz et faictz, asserissen et disen que toute la plenaria et entiera juridiction de tota la villa de Sanct-Gily luy pertenia et expectava, afferment que lo consolat devie estre destituit. Et losd. consulz dision a lencontrari que, encoras que lad. juridition sappartenguessa ald. abbat, per so non devia point estre destituit lod. consolat; car lod. consolat avia estat donat per son predecessor, jusquas a XXIX ans, et per el confermat, et aussy lo sagrament de los consors, se excusans, anssy que podian, de las autras causas per lod. abbat perpausadas, lasquallas controversias et debatz fogron deceditz et appointas per levesque de Nismes et lo vicari de larchevesque d'Arles, ainsi que sensec :

Et premierement que losd. consols et habitans de SanctGily renunciarion a lor consolat, et revocarion tous sagramens faictz, exceptat lo sagrament faictz et prestat de pax et fidelitat a la gleyse, et exceptat lo sagrament que aura estat faictz entre alcungz de la villa, per certain acordi entre ellos fait. Et que lo monestier de Sanct-Gily auria la entieyra et plenaria seignoria et juridiction, sans denguna retention, et toutas las justicias de la villa de Sanct-Gily et de sas partenencias, et tot quant parten a las regalias. Et que toutz los habitans de lad. villa, despuys que auront quatorze ans, seront tengutz de jurar que seran fizels et obediens ald. abbat, et sos successors, et sos adjutors de tot lor poder; de gardar et retenir perpetuellement touta la seignoria et juridiction, et totas justicias de la villa de Sanct-Gily, a sa cognoissensa renuncians a totz dretz et defension lor competen, et que Ion poyra compelir per lo temps advenir. Et que, en chascuna mutation d'abbat, lod. sagrament fidelitar sera renovelat. Et en la cort deldit Sanct-Gily sera mes et constituit un viguier que sya saige, discret et prodhome, loqual, tant soulament per ung an, ausira, terminara et diffinira totas causas, tant civilas que criminalas, tout a luy acistent un saige en dreetz, segon las leys scriptes (1) et costumas approbadas, que sont scriptes en ung autre public instrument, et aussy demandara las sentencias a execution. Et que tant lo viguier que aussy lo juge, devant que prengon la demostration de ladita justicia, et delz ditz lors officiers, juraran davant tot lo

(1) On voit par cet exemple que la loi écrite et la coutume s'employaient concurremment au lieu de s'exclure réciproquement.


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poble, en las mans deld. abbat, ainsy que juges et administradors de justice, segon la ley del emperador : Instituit.

ITEM, que lo viguier exercera tota juridition, tant volontaria que contenciosa, del conseilh del juge a el acistent. Et que per denguna de lasditas juridictions, si es voluntaria hou contenciosa, lod. viguier, ny aussy lod. juge, non prenga ny exigisca ren per fayre exercir ladita juridition, ny per entrepausar son autoritat, per se ny per autre entrepausada persona, sinon que so que la cort ha accostumat de prendre per lo nom de la justicia, so es la tersa part de la soma en la quala alcung aura estât condanpnat, hou la tersa part de l'extimation sy alcuna causa ven en condempnation, que vulgarament sappella justicia. En las causas criminalas, sian conlens de las penas hou punitions ordenadas de dretz scriptz.

ITEM, poyra lod. viguier, hou aquel a qui labbat aura baylat lod. office, cognoisce et aregardar las mesuras et los pezes. Et si, inquire de son office et sans requisition hou dénonciation dalcung, troba alcuna mesura ho pes injuste, aquel qui aura derlinquit ho devers loqual sera trobat ladite faite, hou injuste mesura, hou pes, sera punit en vingt soulz ; et sy y retorna plus derlinquir en lasditas mesuras hou pes, sera punit en dobla pena ; et si tercament es trobat derlinquent, sera punit coma falsari. Et sy alcung es convaincut, per accusation legitimament facha, del falz pes ho falsa mesura, sera punit segon las leys scriptes. Et que totz los dictz crimes syan punit sans misericordia, sinon que aytant (1) que misericordia se poyra estendre lou juge hou aquel que executera la sentencia.

Semblablament mons., en lou conselh del convent, per bona fe, prometia per se et sos successors, que per el, per son viguier, ny per alcung son officier, ny per aultra persona, non sera facha alcuna violencia injuste, ny oppression, ny dengung tribut, ny injuste exation, aux privatz (2) de la ville hou aux extrangiers.

ITEM, que peregrins et extrangiers que, per se affanar hou negociar, venon a la dicta villa de Sanct-Gily, una en tous los bens, syan en salva garda et protection deld. mons. labbat et de la cort, en venen, demoran et sen retournant, sinon que ayon injuriat publicament los inimicz del monestier, hou sinon que aion talament injuriat alcung de la villa per que rasona(1)

rasona(1) autant. — (2) Particuliers, de privati.


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blement et meritoriament, dejont estre repellitz de la securitat del dict mons. labbat; car, aldict cas, lod. abbat, ny son viguier, ny autre, non lou deu lougar en la villa sans lo conseilh daquel que aura estat injuriat, ho aura dampnage souffertat, et que la securitat facha entre la villa de Sanct-Gily, d'Avignon et de Marcelha, en lo conseilh deld. abbat sya observada jusques al temps que es estat convengut.

ITEM, que totas las claux, tant del bourg que de suburbis, sian tengudas et gardadas perpetualment per lod. abbat, hou a sa volontat las fassa gardar. Et tot quant apparten a seignoris hou juridition, deu estre fach et applicat per lo viguier; toutas devegadas, quant y aura necessitat, lo degan deu donar conselh et adjutori al viguier et al juge.

ITEM, que losd. consoulz et tota la universitat de la ville de Sanct-Gily syan perpetualament quictes de toutes las actions et demandas, lasquallas contra ellas lod. abbat auria fachas, retengut so que dict es ald. abbat. Et aqui incontinent lod. abbat remes ald. consolz et a tota ladita villa, del consentiment del covent, et tant per se que per sos successors, totas devegadas rancuras, querimonias et injurias jusquas an aquel jort ald. abbat et ald. covent fachas, reservada la honor, auctoritat et reverencia de la gleysa romana et del rey de Franca. Et aussy los consolz et autres eyssi nommatz promettront et jureront fayre et observar las causas dessus dictas, et non contravenir per se ny per autra persona. Et lod. evesque de Nismes et lo degan ho vicari d'Arles, per l'autoritat de laqualla ellos procedisson en lad. part et negoci, lauseron et approbaron las causas dessusdictas. Et hy sont escriptz ung grand tas de testimonis et notari que ho recebia, et na pres instrument.

Quanturn acripere bebeant notarii be instrumentis et notis

(Honoraires que doivent recevoir les notaires pour la rédaction de leurs actes.)

La présent ley a estat facha l'an mil. CC. XXX. III, regnant lo rey Loys (1), et dis entre autres causes que los notaris devon estre de bona fe et de bona diligencia, et aver las autras condictions

(1) Louis IX, et plus ordinairement S. Louis, 1225-1270.


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requisas a ung chascung notari, ainsy que es ordenat per las leys deld. Sanct-Gily.

€luob nemo aubeat ponere oinum infra territormm Sancti-Egidii natum seu factum extra decimariam et juribictionem Sancti-Egidii.

(Défense de faire entrer dans la ville du vin ou des raisins provenant d'ailleurs que de la dimerie de Saint-Gilles.)

Aqueta ley a estat facha l'an mil. CC. LXXXVII et lo dimenche davant la festa de sainct Mathieu (1) apostol, regnant lo rey Philipes (2), et fos facha per mons. Raymond(3), abbat, del conseilh de sos frayres dessoubz escriptz, et del consentiment des habitants, tant clercs que laicz, de la dite villa, et de lor comun consentiment et sans contradiction de dengung, et ont volgut et ordenat que las leys que sensegon syan messas et adjustadas an las autras et que syan totz temps observadas.

Et premierament, que dengung, de qual estat ny condition que sya, de la villa ny extrangier, per marchandeiar ny per qualcunqua autra causa que sya, vin, razins hou vinaygre, non meta, ny porte, ny fassa mettre ny apportar dins la villa de Sanct-Gyly, ny dins los faux borgs , ny en lo territory de Sanct-Gily, sinon que sya nascut dins la decimaria (4), juridition et territori de Sanct-Gily.

Quod nemo audeat emere vinum nisi ab habitantibus Sancti-Egidii

(Défense d'acheter raisins, vin ou vinaigre à tous autres qu'aux habitants de Saint-Gilles. — Exception en faveur des étrangers. — Dispenses accordées par l'abbé en temps de disette.

Que dengung, clerc ny laic, non auze crompar vin, razins, ny vinaygre, dins la villa, teretori et juridition de Sanct-Gily, sinon que delz habitans de la dicta villa, sur la pena de perdre lo vin, los razins et vinaigre, et x solz torneses et de la vais(1)

vais(1) septembre. — (2) Philippe IV dit le Bel, 1285-1303. — (3) Raymond II Régis, abbé de Saint-Gilles, 1286-1301. (4) Étendue du territoire sur lequel se prélevait la dîme.


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sella (1), laqualla pena sera applicada a la cort deld. SantGily; sy alcung estrangier a crompat vin, razins hou vinaygre, dins la villa' hou territori de Sanct-Gily, luy sera permes lo vendre dins ladite villa hou territori de Sant-Gily, hou lo gitar de foras se vol. Totas devegadas, lod. abbat hou sa cort, an lo conseilh jurat de ladita villa, et an son consentiment, poyra dispensar contra ladita ordenanca, per certain temps, et a quo quant ly aura fauta de vin et de vinaygre, et per aytant de temps que deja (2) lod. conseilh jurat de la villa. Et lod. conseilh, an la auctoritat deld. mons. l'abbat, poyra elegir dos homes per cognoysce sy en ladita villa aura neccessitat de vin. Et si fara et adjustara lod. conseilh a la requisition et istancia delz merchans et autres homes deld. Sant-Gily.

De tempore et prescriptione preceptorum curie Sancti-Egidii

(Prescription de droit des ordonnances des viguiers ou de leurs lieutenants, après trois années révolues. )

Los commandemens hou mandamens del viguier ou juge de Sant-Gily, hou lors luoctenens, non duron, synon tres ans apres lo terme ordenat a pagar hou otemperar alz dictz commandemens, sinon que coste per scripturas aver estat innovatz hou renovelatz; mais passatz losd. tres ans, non poyra lactor agir ny demandar, ny lo reu exipir, ny sen defendre, mais seront prescriptz de dretz et de faitz.

De prestantibus impedimentum nubentibus in ecclesia vel domibus contrahenrium

(Défense de s'opposer par violence à la célébration des mariages canoniques, sous peine d'amende. — Prime de deux sous accordée à ceux qui dénonceront les contrevenants.)

Que dengung non done, ny fassa empachament a aquelses que spouson, segon los dretz canon, a la gleysa, de lenga, de cop de baston, de soufletz, ny autrement, ny prenga de lors

(1) Vaisseaux vinaires, tels que : banastes, banastons, cornues, etc.

(2) Dejar, laisser, permettre. — Ce verbe a continué à s'employer en espagnol avec la même signification.

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maisons raubas, draps, ny autres bens mobles, ny los compelissa a donar alcuna causa per forsa, sur la pena de x solz tornesses, a applicar, la mitat a la caritas ou almorna comuna delz habitans de ladita villa, he lo denuneiant aura dos solz t. de lad. pena, et sera tengut segret. Non intendron toutas devegadas per denguna juridiction, sya, per so que dit es, acquirida a ladita caritat, ny aussy a lad. villa.

Quod nemo audeat amovere de grege vel armento bestiam sine licencia domini

(Défense, sous peine de cent sous d'amende, de prendre dans un troupeau, en l'absence du propriétaire, un ou plusieurs animaux, quand bien même on les aurait achetés.)

Denguna garda de bestiari, sya gros hou menut, ny dengung crompador auze prendre dalcung tropel alcuna bestia, enquoras que sya syena, sans licencia et presencia daquel de qui es lo tropel, sur la pena de cent (1) solz t. a applicar a lad. cort de Sanct-Gily. Et sy non pot pagar ladita pena, que la pague en lo cora (2), segon larbitre daquel qui en jugera.

Losdictz Statutz hou Leys municipales fouron legitz et recitatz lan dessusd. et a la XIIII. k. d'octobre, per lo notari, enterrogant en alla vos lod. abbat et losd. habitans sy vollion que losd. Statutz fosson gardatz perpetualment en la dita villa, et totz responderont que hoc, et tot fos fach del conseilh et consentiment delz morges, lesqualz hy sont noumatz en grand nombre.

(1) Cette amende, comparée aux autres, parait exorbitante, surtout si elle s'applique à un troupeau de chèvres ou de moutons.

(2) Cora, pour : en lo que aura.


SECONDE LEY

De disrorbia sopita que fuit inter dominum abbatem et scindicos Sancti-Egidii

De las discordias, debatz et controversias que eron entre G. (1), abbat de Sanct-Gily, et los scindiez de la dicta villa, fos compromes en mestre Bernard d'Adorna (2), archidiacre de Beziers, et messire Guilhen de Codolis (3), saige en dreitz, et a quo l'an mil ce. L. VII. et al mes de julhet, commet en arbitres arbitradors et amiables compositors, losqualz decidiyron et termineron losd. debatz et questions, ansy que sensec per ordre; et losqualz arbitres prengron per ters mestre Guido Fulcodi (4).

ARTICLE I

(Juridiction de Sieure (5), d'Estagel (6) et de Saint-André-de-Camarignan (7).

La premiera question era que desian losd. sindiez, quant alcung delz habitans de Sant-Gily derelinquission en los territoris de Syeura, d'Estaigel, de Carmaignan, de SanctAndrieu-d'Espeyran (8), et autres, que non devion point estre punitz per losd. priors, mains en la villa, et per los officiers de Sant-Gily.

Losqualz ordenron que los priors de Syeura et d'Estagelz, que ont propris territoris, en los qualz ont lors juriditions,

(1) Guillaume de Sieure, abbé de Saint-Gilles de 1252 à 1265. - (2) Bernard d'Adorno. — (3) Guillaume de Codols, jurisconsulte.— (4) Guido Fulcodi, autre jurisconsulte qui, plus tard, devint pape sous le nom de Clément IV.

(5) Domaine et prieuré de Saint-Saturnin-de-Sieure, dépendant de l'abbaye de Saint-Gilles qui, en 1549, en inféoda la plus grande partie au sieur de Brueys.

(6) Domaine et prieuré de Sainte-Cécile-d'Estagel, dépendant de l'abbaye de Saint-Gilles, dont le conrassier en avait la haute et basse juridiction.

(7) Domaine et prieuré de Saint-André-de-Camarignan, uni à l'infirmerie de l'abbaye de Saint-Gilles.

(8) Terre et bois d'Espeiran occupant une partie de l'ancienne forêt Flavienne, et encore fort considérable à la fin du XVIIme siècle. C'est par erreur que le rédacteur de l'acte a mis Saint-André-d'Espeyran ; le prieuré rural était sous le vocable de Saint-Félix.


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fasson justicia, tant en causas civilas que criminales, las qualas criminalas, segon la costuma deldit Sanct-Gily, non importon point pena de mort, ny perdement de membre, ny estre foetet. Mays sy losd. crimes importon pena de mort, hou tiercament de membre, hou estre fouetat, ellos, ny autres per ellos, non podon cognoysce ny los punir, synon que sya de los pendre et menar al viguier de Sanct-Gily, loqual viguier pot et deu cognoyce delsd. derlinquens que ly auront amenatz, hou el mesmas aura prezes.

Mays lo prior de Sanct-André ha tant solament cognoiscenca de causas hou demandas realas hou mixtas ; las autras, tant civilas que criminalas, sappartenon ald. viguier de Sanct-Gily.

Mays losd. priors d'Estagel et de Syeura, per lasd. questions civiles et criminalas, de las qualas, segon la forma dessus dite, lor apparten la cognoissensa, ny aultres per ellos, non prengon ny dethenon dengung habitant de Sant-Gily, ny dengung de lors familiars, sy podon et volon donar fermansas compétentes en losd. tenemens, en la villa de Sanct-Gily hou en son territori, lasquallas fermansas syan souffizentas a satisfaire a quo de que es question. Et losd. tres priors non prendront per lo dretz appellat justicia, oltra la decima part de la plaideiaria, ansy que sy observa en la cort del rey he deld. abbat.

Au regart del fach d'Espeyran (1), per so que es unit a la causa del abbat et sy toca en lo tenement de Sant-Gily, es totalament deld. abbat, lo viguier de Sant-Gily cognoiscera, examinera et diffinira toutas causas, tant civilas que criminales, et sy besonh es, punira, que sy avendront en lod. Speyran. Toutas devegadas, las actions realas seron tratadas per lod. abbat, ou autre per el, en lo tenement d'Espeyran.

Sy dengung rauba lenhas (2), conilhs (3), hou autras causas, hou autrament derlinquis en lo bosc d'Espeyran, loqual lod. abbat de tot temps ha acostumat per fayre gardar per ung forestier, la cognoissensa et punition sy apparten ald. abbat, et en poyra, lod. abbat hou autre, a qui cometre ho voudra, cognoisse en lod. Speyran, si bon luy semble. Et so que es dessus dict delz raubatoris hou delictes faitz et comesses aldict

(1) La propriété du bois d'Espoiran donna lieu à un très long procès entre l'abbé et les moines de Saint-Gilles. Ces derniers finirent pourtant par le gagner.

(2) Bois de chauffage. — (3) Conils, lapins. Le mot a persisté en Catalan sous la forme conejo.


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bosc d'Esperan, ha luoc contra aquellos que raubon ou defraudon lo peage de Mirapeys, hou en ça. Toutas devagadas, non pendra ny detendra lod. abbat dengun habitant de la villa de Sanct-Gily, ny lors familiars, sy volon et podon donar cautions souffizentas, ho sy possedisson bens immobles en Syeura, SanctGily, hou en lors tenemens, souffizans a satisfaire la cause que sy agis.

He laubimiis

(Droits de lods ou mutation dus à l'abbé de Saint-Gilles.)

De las causas que vendon, et de lasqualas sy deu lausime, non deu lod. abbat levar lo vinteme, et des gages lo quaranteme, en laquala vintema hou quarantema part, sera tengut de lausar la causa alienada ; sinon que lod. abbat, ou autre senhor directe, la vuelha retenir prelation (1), et pagar lo près que lautre ne donava, et aquo dins lo terme de dretz; laquala costuma deu estre gardada, non tant soulament per lod. abbat, mais aussy per totz autres clercs hou non clercs de Sanct-Gily.

De bannis et creatione clavarii ( 2) et baneriorum ( 3)

(Nomination de banniers. — Serment qu'ils prêteront entre les mains du viguier. — Vérification des comptes des clavaires ou trésoriers.)

La quarte demanda delz scindiez, sur lo fach delz bans, losqualz dizion appartenir a la villa, et lo scindic del monestier disia que ren.

Fos dict et ordenat que, totz los ans, quant los baniers deuront estre estetuitz et ordenatz, lou viguier de mons. l'abbat appellera devant [luy] vingt prodhomes de las plates tablas et draparia, et delz aultres mesties, que eligiront los baniers, et los presenteront ald. viguier, loqual sera tengut de los admetre et instituir, et de' recebre lor sagrament, que ben et fizellament excerciront loffice de banier. Loqual viguier commandara alditz baniers, sur lo sagrament per ellos prestat, que los gaiges que ellos pendront, le jour mesmes que los pendran, ou al plus long

(1) Prelation, droit réservé au seigneur, dans l'acte de concession, de reprendre, moyennant remboursement, un fief distrait du domaine principal.

(2) Trésoriers ou comptables. — (3) Sorte de sergents.


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lendeman, apporteran fiablament ald. viguier et clavari de la villa, loqual clavari sera aussy elegit desdits vingt hommes, per tota la universitat de la villa, aussy totz los ans, per pendre et levar las obventions (1), proffitz et emolumens de ladite villa ; loqual clavari sera tengut de tenir una archa communa, per fayre et furnir a la despensa de ladita villa. Et lod. clavari, ainsy que dit es eligit, jurara, en las mans deld. viguier, que ben et fizelament sy portera en sond. office de clavari; et que rendra bon et loyal compte a son successor de so quel aura près, levât, recebut et despendut, present lod. viguier hou lod. abbat, sy hy vol estre present, auquel compte aussy syan presens vingt prodhomes, que seront appellas delsdictz luocz, loqual office de clavari non durara oultre ung an. Et so que restera desd. bans, appres que lo banier sera pagat, sy partira per mitat entre lod. abbat et lod. clavari, per lad. villa. Et so que a estat dessusd. et ordenat deld. ban, si entend del ban de la villa et territori de Sant-Gily et aussy de Loa (2), et que la compulsion de fayre pagar lod. ban sy fara per lod. viguier; lo ban d'Espeyran sera totalament deld. abbat. Et totalament de Syeura, d'Estagel et de Carmanhan, sera lo ban delz priors, sans que l'abbat ny la villa hy ayan ren. Et ainsy terminada la cinquiesme demanda deldit sindic. Et que non sy levara plus grand ban que era accostumat. Ny aussy Espeyran, Carmanhan, Estegel et Syeura non sy levara plus grand ban que en la villa et territori de Sant-Gily.

de piscatoribus fossatorum et pontium de namerna

(Conditions auxquelles est soumise la pêche, tant dans les fossés que près des ponts de la grande robine. — Défense de gêner le cours de l'eau, en plaçant les filets à moins de 20 cannes de l'ouverture des ponts. — Dîme due par les pêcheurs au monastère.)

La VIe demanda delz scindiez, a esta dict et ordenat : que la pesca delz pons, devers la part et cartier de la palus, sera faitz et observat so que sy fa et observa en la pesca de las paluns de la Correga superiora, et ainsy corne sera ordenat de las paluns, de la dicta Corrigia (3) superiora. Et au regard de la pesca

(1) Du mot latin obventio, gain, profit.

(2) Ancien nom de la terre de Loubes, près Saint-Gilles.

(3) Terres en grande partie marécageuses dans le territoire de Saint-Gilles, et dont l'une s'appelait la Corrége supérieure, et la seconde la Corrége inférieure.


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delsdicts pons, devers la robina, sera faictz et observât, ainsy que dessoubz appres sera ordenat de la pesca de la robina. Et quant las portas delzdicts pons esteran hobertas, per conduire layga de la paluns a la robina, lod. monestier, ny pescans per loud. monestier, ny autres quelconques, non poyran metre ny tenir lous ingins, ny artilhans, per pendre peyssons, tant pres delz dictz pons, per que lo cors de layga, que ven de las dictas palus a ladita robina, sya enpedit ou deteriorat. Mays poyra ben ung chascung pescayre metre sos artz et ingins de ça et de la losditz pons, provegut que a tout lou myns syan long delsd. pons de vingt canes, et pescar segon la forma dessus dicta.

De la piscaria de la robina, a estat dict et ordenat que aquellos que pescaran en ladita robina, donaran aldict monestier tala et tante part, et de la qualitat de peyssons, coma sy avian pescat en lou Roze, et ainsy que ont accostumat de donar los pescayres delz peyssons prezes al Roze. Et la pescaria de ladite robina publica et coma (1) tant aldit monestier que alz habitans de la villa.

De restitutione dissagsitorum et spoliatorum

(Défense faite à l'abbé et à ses officiers de saisir les biens, meubles ou immeubles, de qui que ce soit, sinon après que les formalités du droit auront été remplies. — La personne dépouillée, si elle l'a été sans ces formalités, sera remise, sans délai, en possession de ses biens. — Si le droit de spoliation paraît douteux, l'abbé sera tenu de donner au plaignant des juges non suspects.)

La VIIa demanda dels ditz scindiez : A estat dit et ordenat : que dores en avant lod. abbat, ny aussy lod. monestier, non gitaran ny dissayserant dengung de sa possession et saysina, sinon que premierament sya appellat et ausit en sas rasons, et que sya observat lordre del dretz. Et sy alcung a estat dissaysit et expoliat autrament, sy es clar et manifest, lod. abbat sera tengut de lo restituir en sa possession et sans delay. Et, sy es causa dobtoza, lod. abbat baylara juge ou cort non suspecte, que cognoiscera sommariament et diffinira. Et sy cognoys que deya estre facha restitution, sera facha sans dengung dilay. Et sy lod. juge hou cort cognoys et dis que restitution non hy aya

(1) Pour : es comuna.


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point de luoc, sera procedit en la materia principala, en observant l'ordre del dret a lung et a lautre delz quonquerens (1) ; et so que dit es sy observara en los priors d'Estagel, de Syeura, de Carmanhan, et en los tenemens.

Quob vicarius et juder sint anales

(Les juges et les viguiers doivent être annuels. — Cependant l'abbé peut instituer comme juge celui qui aura été viguier l'année précédente, et réciproquement. — Mais cela ne pourra avoir lieu qu'une seule fois.)

La octava demanda delz scindiez, sur laquala a estat dit et ordenat que lod. abbat poyra, sy bon luy semble, fayre que, aqual que sera ung an juge, sya ung autre an viguier. Et aussy aurya estat ung an viguier, sya ung autre an juge. Toutes devegadas, non poyra fayre ladita mutation hou alternation oltra una vegada ; altrament, fara fraud a la costuma que vol que syan annalz.

De emenda facienda de talis et dampnis datis per familliam monasterii Sancti-Egidii

(L'abbé ne paiera pas de ban pour son bétail, mais il est responsable des dommages commis par ses bergers.)

La noviena demanda, sur laquala a estat dict et ordenat que lod. abbat non pagara point de ban per son bestailh; mays ben fara satisfaire la tala donada; los pastres, per se et per lor bestial, pagaran ban et tala, faictz per elses et per lor bestial.

De piscationibus fossatorum ville Sancti-Egidii

(Droit de pêche dans les fossés. — Ce droit appartient tantôt à l'abbé, tantôt aux propriétaires des fossés, selon que l'eau court ou est stagnante. — Droits dus à l'abbé.)

La Xe demanda,' sur laquala a estai, ordenat que, tant que layga envuidara los fossas, losqualz ung chascung privat de Sant-Gily ha en las palus de la Corregia inferiora, durant ladite envuidation, hy|poyra faire pescar lod. abbat tant sola(1)

sola(1) du latin conquerens.


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ment. Et quant layga sera toutalament dyminuda que la terra sy apparesca, a la capa ou a las extremitas delsditz fossas, et sy cessa lo cors de layga de las palus dintrar dins losd. fossatz, poyron aquellos de qui sont lesd. fossatz pescar libera - lament et sans dengune contradiction en losd. fossatz. Et sy layga de lasdictas palus intra dins losd. fossatz, poyran aussy aquellos de qui son losd. fossatz hy pescar; retenguda la levada dung jour al monestier, sy la pesca dura per una sepmana. Et sy dura meyngz duna sepmana, sera quite en donant lo treseme. Et so que dit es ha luoc, sinon hi a autres pactes hou conventions entre lod. monestier et losd. homes de SanctGily.

He palubibus Corrigie superioris et inferioris

(Droit qu'a le monastère de pêcher dans les marais de la Corrége inférieure. — Dans la Corrége supérieure, il pourra exercer un jour par semaine, le lundi excepté, un droit de levée sur les pêcheurs.)

La XIe demanda, sur laquala a estat dit et ordenat : que lod. monestier aura la pescarie de las palus de la Correga inferiora, et daquella poyra dispausar a sa voluntat; sauf et retenguda las convenensas, sy point en hya entre lod. monestier et aulcungz autres; sauf aussy et retengut so que a estat dict dessus, a la decission de la desema demanda. Et sy alcung intra lasd. palus he hy pren aucelz hou huous (1), los en poyra portar, provegut que [per] loud. monestier non hy sya estat prohibit de la intrar; car appres la prohibition, non poyra ren prendre ny apporter. Et que en las palus de la Correga superiora, lasquallas sont entre lo pont de Forchon et lo pont de Vierna et Brossan, hou en los viages, despueys lasditas palus, tirans vers lousd. pons, dengung ne pescara sans la voluntat deld. monestier. Mais en las paluns que sont despuys pres de sobres lasdictas palus de sobres, so es despuys las palus de Gily Vezian et Bernard Motet, jusquas la Martelliera, poyran pescar, losd. homes de Sant-Gily, sans contradiction deldit monestier. Toutas devegadas, lod. monestier hy aura sa levada, ung jort la sepmana, loquald. jour may amara lod. monestier, mays que non sya lo diluns. Et delz aucelz et huous daucel, ha estat

(1) OEufs.


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dict et determinat, coma a estat dict et determinat sus, en las palus de la Correga inferiora.

De muribus (sic) turribus et fossatis ville Sancti-Egidii

(Mesures à prendre pour assurer la sécurité de la ville. - Ordre à ceux qui ont des poternes ouvertes dans les murs, de les munir de portes garnies de serrures. — Les maisons et clôtures des jardins, devant le portail Mazel, seront conservées, etc.)

La XIIe demanda, sur la quala a esta dict et ordenat : que las posterlas bayladas et concedidas per lod. abbat, en las murailhas, demorarian en lor estat. Toutas devegadas, en temps de guerra hou de garda, que alcung voguessa fayre contra ladita villa, serian muralhadas las dictas posterlas, del mandament deldit abbat hou de sa cort, ou a la requisition de ladita villa ; et appres que la guerra hou temps de garda serian finis, serian obertas. Et que aquelses qui ont lasdictas posterlas, las devon tenir garnidas et provesidas de portas, de claux et serralhas, tallament que puescon estre sarradas per lou mandat de lad. cort, totas quantas vegadas clauront los portalz de ladita villa ; et que los empachamens messes a las corsieyras seron obstatz. Et que las maisons bastidas en la torre, foras lo portai del Mazel (1), et en la robina davant la mayson de Vayso, coyratier, et davant la maison de Perissa, demoron en lor estat ; et la clausura de lort. de laquala ha lod. Perussa, a qui mesmes. Et las causas, lasqualas lod. abbat avia retengut en lasdictas posterlas hou maisons, hou ort dessusd., seront perpetualment de la Caritat (2) de ladite villa de Sant-Gily. Mays, sy se vendion, los lausimes seron deld. monestier; etsy alcung de lasd. maisons, de la voluntat delz possessors hou autrament, per cas de fortuna tombon et sont destruydas, non seront point rehedificadas hou tornadas.

Del abeurato del Versador

(L'abbé sera tenu de rétablir l'abreuvoir du Versadou, là où il était primitivement, afin que les habitants de Saint-Gilles puissent faire boire leurs troupeaux.)

La XIIIme demanda deldictz scindiez, sur laqualla dision : que lod. abbat avya claux et fermat ung luoc que sapclla lo Ver(1)

Ver(1) ou de la Boucherie ; macellus. — (2) Hôpital de la charité.


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sador, que es en lou Roze et pres del Roze, en loqual losd. homes de Sant-Gily abeuravon lor bestial, et que lod. abbat non premetia point que hy abeurasson lor bestiary; et demandavon losd. scindiez que lod. abbat retornessalod. luoc al premier estât. Et fotz ditz et ordenat que lod. abbat restituira et faria labeurador, al cap superior de sa condamina (1) del Versador, coma era signat al temps que sos predecessors en lod. luoc, segon la mesura de la quala enquoras hy sont los signos, et sy apparon en lo segonal (2) devers lo Roze. Et que done via per anar aldit abeurador, laquala via salhira, per lo cap de ladita condamina, a la via per laquala Ion va a la fossa ; laquala via es entre ladita condamina deld. abbat et la terre de Peyre Bispi (3); et lod. abbat et sos successors gardaran et observaran las causas dessus, perpetualament.

De vetis (4) cuniculorum et columborum

(Permission donnée aux habitants de Saint-Gilles d'établir sur leurs terres des clapiers pour les lapins, et des colombiers, sans être tenus à payer des droits.)

La XIIIIe demanda, sur so que desian losd. scindiez que lod. abbat et alcungz morges prohibission et defendion alz homes de Sant-Gily, que non faguesson point, en lors proprias possessions, devezes de conilz ny de colombz (5), et que delz cognoyscens non sya point levat de ban. Et nonobstant que lod. abbat aguessa negat aver fachas lasd. prohibitions, totas devegadas, a cautella et de sur abondant, ordenaron losd. arbitres que, per lod. abbat ny per losd. morgues, non serion, dehores en avant, fachas lasd. prohibitions; mays que sya licite et permes a ung chascung de faire, en sas possessions, deves (6) de conilz et de colombz. Et aquelses que raubaran delsd. devezes conilz ou columbz, seran punitz pena deguda.

(1) Condamine, ferme, domaine; du latin campus domini, d'où condominium.

(2) Segonal (secundum aquarn). — Terrain d'alluvion rattaché à la rive et formant cuvette.

(3) Bispi pour Obispi, Pierre Lévêque.

(4) Endroits défendus ou gardés ; du latin veto.

(5) Pigeons.

(6) Pour devezes ; devois, endroits gardes.


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Quob non prohiberint notaris facere notas vel instrumenta ex parte domini abbatis pro universitate ville quando requiritur

(L'abbé et les moines ne pourront défendre aux notaires d'instrumenter en faveur des habitants, si ceux-ci ont un procès avec le monastère.)

La XVe demanda es, persoque lod. abbat hou los morgues, quant ont alcuna question ou debat ambe alcung de lad. villa, hou alcung de lad. villa en lod. abbat hou sousd. mourges, prohibisson alz notaris que non ayon point faire hou recebre instrumens hou nottes, a la requisition desd. habitans, ho a lor utilitat hou cautela. Sur que a esta dit et ordenat et prohibit : que sy las causas dessusd. ont estat fachas, que non sy fasson plus per lo temps advenir.

De incendio vel ruina domorum

(Celui dont la maison aura été détruite par un incendie pourra garder les matériaux et les employer pour la reconstruire; mais s'il les vend, il devra en payer le lods fixé au vingtième du prix de vente.)

La XVIema sur laquala a estat dit et ordenat : que sy aulcune maison es destruda per fuoc ou per ruyna, sera licite et permes an aquel de qui era estada lad. maison, pendre et ne portar tota la materia que ly restara, a causa de tornar metre en lod. edifice quant la voira repparar ; mais que done caution ou fermansa de ho retornar en la reparation deldit edifice. Et si vol vendre la materia que es sobrada deld. edifice, donara, per lo lausime, la XXma part, comme sy lod. ediffice agues estat vendut tout entier et san, sinon que donessa caution et fermansa de repparar lod. ediffice; cal, ald. cas, poyra vendre lad. materia sans pagar dengung lausyme. Et so que dit es sera observat aussy de las maisons que sy tenon delz morgues hou autres habitans de Sanct-Giles, coma a estat dict delz maisons que sy tenon deld. abbat.

De leubis et pebagiis

(Les droits de leude et de péage, augmentés par l'abbé, seront remis sur l'ancien pied.)

Decima septima demanda, sur la quala a estat dit : que sy lod. abbat avia ren fach ou empausat de novel sur losd. peages


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et portanages, que tot seria et es revocat et reduit al premier et degut estat.

De piscatione stagni Esramandri

(Droit de pêche des habitants sur l'étang de Scamandre. — Filets prohibés. — Droit de levée ou trézain.)

La XVIIIma demanda es per so que dision losd. scindiez : que, de tota antiquitat, los homes de Sant-Gily avian accostumat de pescar a lestang d'Escamandre, pregans (1) tous los ans n solz vi deniers, que appellavon palma et conrrassya, et que lo prior d'Estagel demandava plus grand pres ; a estat dit et ordenat : que los pescayres que avion alcungs pactes ou conventions an lo monestier, hy pescarion segon losd. pactes et convenensas ; et aquelles que non aurion alcungz pactes ny convenensas en lod. monestier, aussy pourrion pescar aldit estang sans bolietz (2), et sans brugina et sans clavelz ; salva et reservada, ald. monestier, una levada dung jort de la sepmana, excepta lo diluns, ho en pagan lou trezen (3) del peyssons, sy lod. monestier lama mais que lad. levada, sinon hia autres pactes ou conventions ; et dengung non poyra pescar en lod. estang an los bolietz hou burgina, sans la voluntat deld. abbat hou del conrresari.

De lectis mortuorum et de campanis pulsandis

(Le lit sur lequel le mort sera exposé appartiendra au couvent. — Pour les pauvres, il sera fait un lit commun, qui appartiendra à l'hôpital. — Droits à payer pour les cloches.)

La XIXma demanda, sur laquala a estat dit et ordenat : que lo lietz et la leytiera (4), portatz en lo mort, seron del monestier; et que sy autrament sy fazia, seria causa deshonesta et contra la generala costuma quasi de totas las gleysas ; et que. los homes de Sant-Gily poyront faire un lietz per portar los paures, loqual sera signat de foras dung chascung cartier de una granda croux blanca ; et la coberta deld. lietz sera negra ou environ de semblabla color ; et que haya lod. drap hou cuberta una

(1) Pregans, pour pagans, payant,

(2) Bouiller, sorte de tramait. — (3) Trézain, treizième partie du poisson. (4) Literie, c'est-à-dire paillasse, matelas, etc.


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granda cros blanca, del plus hault jusquas al plus bas ; sur loqual drap non sera messa autra cuberta; loqual lietz sera tengut al hospital delz paures, et en ny per lod. lietz lod. monestier non aura ny poyra ren demandar, ny non poyra retenir lod. lietz ny denguna causa daquel. Et, per lo tocar de las campanas, non sera ren demandat avant que lo corps sya sebelit; mays, puys appres, les heritiers hou executors de larma donaron segon que es acostumat.

De mortuis sepeliendis

(Droits dus pour les enterrements et les mariages. — Exceptions en cas d'interdit ou d'excommunication.)

La XXma demanda, sur la quala a estat dit : que los signes que dona hou a acoustumat de donar lo monestier, per sebellir los morts hou fayre nossas, demoraront en lor estat ; et devon estre donatz per lod. monestier, losd. signes hou signacles, liberalament, sans denguna fermansa et sans difficultat, per losd. mortz sebellitz ; sinon que lo mort foguessa de tala qualitat que sepultura ecclesiastica ly deguessa estre denegada per lo dretz canon, hou per lod. dretz, seria ordenat que lors successors de talz mortz foguesson tengutz de donar fermansa ; et so que dit es deu estre gardat et observat en los mariages, sinon que fosson excomergas (1) hou entreditz aquelzes que contrazon losd. mariages; mais, per autras questions, causas hou demandas, lasqualas lod. monestier hou autre qualcunqua aya hou sy deja aver contra los morts, hou lors heritiers, hou contra aquelses que volon solempnisar et fayre los mariages en la gleysa, losd. signes hou signacles non devon estre denegatz, mais agreablament, liberalament, sans denguna caution hou fermansa, et sans denguna retardation, devon estre donatz an aquellos que los demandon.

De matrimoniis contrahendis

(Les mariages ne pourront être célébrés que dans l'église de Saint-Martin.)

La XXIma demanda, sur laquala a estat dit et ordenat : que los mariages non sy poyront solempnizar en denguna gleysa de la villa de Sant-Gily, sinon a la gleysa de Sanct-Martin.

(1) Excommuniés.


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De solutione decimarum vinearum et feni

(La dîme du vin et des foins sera payée sans retenue aucune.)

La XXIIma demanda, sur laquala a estat dit : que los habitans de Sanct-Gily non levaran, ny pendran, ny retendran ren sur la decima del vin ny del fen, per lo amassar ny portar de ladita decima, ny per las despensas fachas en lamassar et portar.

De decima litis danda

(Frais de justice. — Ils ne seront réclamés qu'après procès jugé.)

La XXIIIma demanda, sur laquala a estat dit : que lod. abbat, ny autre per el deputat, de las causas secularas que sy pleydejaront devant elses, en cas d'appel, non poyra levar dengunas despensas ny esportulas, davant que la causa sya diffinida et terminada per sentencia hou amiable accordi ; mais segon los statutz et ordenances realas, finida la causa d'appel, syan contens de una sola décima de playdeiaria, tant per la premiera et principala causa hou instanta, que per las causas de las appellations. Et sy en la causa principala hou premiera instanca, per ladite decima avian estatz prezes alcungz gaiges, non seront plus prezes dautres en la causa d'appel ; mays sy en la premiera causa non hont estatz prezes alcungz gaiges, poyront estre prezes en la causa d'appel hou caution juratoria, segon las dictas ordenencas realas.

De cartulariis notariorum defunctorum

(Les notes et registres d'un notaire décédé seront remis à un autre notaire choisi par les héritiers du défunt.)

La XXIIIIma demanda, sur la quala a estat dit et ordenat : que los cartularis delz notaris mortz, appres que seront mortz, seront gardas a bona et fidela garda, ainsy que dispausara lod. abbat; et seront baylatz, infra dos mezes, a altres notaris, per faire et extraire, ainsy que de razon, los instrumentz delsd. cartularis; et los instrumens que eron faictz, devan que moriguesson, seran baylatz a ung notari de la villa de Sanct-Gily, causit et eligit per los heritiers et successors del notari mort ; loqual notari bailhara et expedira losd. instrumens an aquelses


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de qui sont, en pagan lo just pres de so que volon ; loqual pres baillara et rendra alz heritiers hou successors deld. notari mort.

De decima agnorura et ebulorum

(Il ne sera dû à l'abbé que la moitié de la dîme des agneaux ou chevreaux nourris dans une autre paroisse.)

La XXVma demanda es de la décima delz agnelz et cabritz provengus del bestial delz habitans de Sant-Gily deppaissens en autra parochia. A estat dict et ordenat : que lod. abbat, ho son rendier, non auria que la mita de ladite décima.

He pemnia non extgenba a nautis transeuntibus ultra mare pro passagio

(Dorénavant il ne sera rien dû à l'abbé par les marins étrangers, pour droit de voile ou de tablier à Saint-Gilles.)

La XXVIma demanda, sur laquala a estât dit et ordenat : que dehoras en avant séria permes, a ung chascung marinier extrangier, fayre et planter vêla et tenir tablier en la villa et terra de Sanct-Gily, sans que lod. abbat, ny autre per el, puescha ny deya levar ny pendre ren delsd. extrangiers, per lasd. vêlas hou tabliers; mais de so que lod. abbat auria extorquit et levat, a estat remes a sa consciencia.

De pascuis de Loa, Espeirano, et Camarinhano, Stagelo et Syeura

(Droits de dépaissance dus par les troupeaux mis dans les herbages de Loubes, Espeiran, Camarignan, Estagel et Syeure.)

Sur la question des pasturgaiges que demandavon losd. scindiez, en los tenementz de Sanct-Gily, de Loa, d'Espeyran, de Carmanhan, d'Estagel et de Syeura, a estat dict et ordenat : que en la Correga superiora, et en tot lo tenement adjacent a ladita Correga superiora, jusquas al gres, sya licite et permes aldit monestier las proprias terras, pratz, vinhas, restobles, palus et bosses, deffendre ; tallament que no es licite ny permes a dengung delz habitans de Sant-Gily hy fayre paysce son bestial, contra la voluntat deld. abbat et de sa familha; re-


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servat que lou bestiary de labor laBorans en lad. Correga superiora, poyran depaysce an las palus de lad. Correga superiora. Mais, sy aquelses de qui sont lasd. bestias aratorias ont alcunas palus en lad. Correga, lasqualas deffendon et emparon alz autres, non las poyran amparar ny deffendre que lou bestial aralori deldit monestier laborant en ladita Correga non pasturgue en los proprias paluns. Toutas devegadas, la herba que sera en las levadas del Roze sera publica, et ung chascung sen poyra ajudar et usar, telament que lod. abbat ny aussy dengung autre, per razon et occasion de sas terras propias, que sy confronton en ladita levada, non las sy poyra appropiar, non obstant que los albres, que son en lad. levada, son et seran daquelses que si confrontaran an la part de lad. levada en laquala seran losd. albres nascutz ho plantatz. Et so que a estat dit et ordenat de las terras, pratz, vinhas, paluns et bosses deld. monestier, en lad. Correga superiora, a aussy estat dit et ordenat de las terras, pratz, vinhas, paluns et bosses deldit monestier, en la Correga inferiora : so es que las puescha deffendre en la forma et maniera dessusdicta ; salvat et reservat so que a estat ditz deldit bestial aratori, et salvat aussy et reservat so que es estat dit de las levadas que ont dit ordonat que sia observat en lad. Correga inferiora.

Aussy a estat dit et ordenat : que es et sera licite et permes alz homes de la villa de Sant-Gily de metre et fayre paisce tot et chascung lor bestial, en et per tot lautre territori et tenement de lad. villa de Sanct-Gily, loqual es de foras lasd. doas Corregas, et de foras los territoris et tenemens a las Corregas se tenens et adjacens jusquas al gres, et aussy de foras lo tenement d'Espeyran ; et aquo perpetualament et sans contradition deld. monestier ny daltra persona, sans totas de vegadas donar tela ny dampnage en loz blatz, vinhas et albres, et delz pratz; laquala tela, sy point nen fan, seran tengutz de emendar ; et aussy lo ban acostumat, ald. arbitrage et ordenansa daquel que seran comis et deputatz per lad. cort de Sanct-Gily, losqualz en cognoisceran somariament et de plain, sans gardar ordre judicari. Et ont dit et declarat : quelses entendron a comprendre et comprendron, en lod. territori et tenement de SanctGily, lo territori et tenement de Loa, en loqual ont volgut et declarat : que las causas dessus prochanament dites, syan gardadas et observadas, he en las Corregas, montanhas, et en lo plan, fors que en las paluns, en lasqualas ont volgut et ordenat

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que sya gardat et observat so que dessus a estat dit et ordenat de las autras paluns.

De pascuis tenementi (Espeprani

(Fixation de la partie du tènement d'Espeiran, où les habitants de Saint-Gilles ont le droit de faire paître leurs troupeaux.)

Del tenement et territori d'Espeyran a estat dit et ordenat : que despuis la frontieyra del bosc d'Espeyran, vers la villa de Sanct-Gily, et en tota la part deld. tenement d'Espeyran ques entre la via que va de la villa en elra (1), et jusques al tenement de lenfermier (2), sera licite et permes, alz habitants de Sant-Gily, tenir et paiscer lor bestial et de lors pastres, sans contradition deldit abbat et monestier, liberallament et pacifficament, sans donar ny fayre tela, coma dessus a estat dit ; laquala tela, et aussy lo ban, emenderon en la forma et maniera dessus dite. Toutas devegadas, In bosc et tenement de ung appellat Guilhen Fulconis, de Posquieyras (3), nes exeptat ; car aquel sera apparat et deffendut ainsy que al temps passat aura estat defendut.

De pascuis tenementi Carmanhani

(Limites assignées à la dépaissance dans le tenement de Camarignan.)

Del tenement de Carmanhan, a estat dit et ordenat : que en la partide deld. tenement, laquala es entre la via publica per la quala Ion va de la, villa de Sant-Gily vers Posquieyras, alias Valvert, et la via que vay de lad. villa de Sanct-Gily vers Sancta-Columba (4), poyran losd. homes de Sant-Gily tener et fayre paisce lor bestial, et aussy aquel de lors pastres, sans donar tala, per tot lo plan que es entre lasd, doas vias, et jusquas a la via transversala que vay de Francas-Valz (5) a Aygas(1)

Aygas(1) ultra, en outre ; dans le sens de « au-delà ».

(2) Sainte-Colombe.

(3) Vauvert,

(4) Ancien prieuré annexé à la fin du XVIe siècle à celui de Saint-André-deCamarignan, et uni à l'office claustral d'infirmier de Saint-Gilles.

(5) Franquevaux, abbaye fondée avant 1143 sur les bords de l'étang de Scamandre.


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Vivas (1), laquala via vulgarament Ion appella la via de la Carreta. Mais de lad. via transversala et de foras las dites doas vias, ny en lo resydu hou demeurans et restans del plan del tenement deld. infirmier, dengung non paiscera ny mettra son bestial sans la voluntat deld. infirmier hou de sa familhe. Et aquelses que laboraran, de la voluntat deld. infermier, en lod. tenement, poyran fayre paisce lor bestial aratori per tot lod. plan de Carmanhan. Et que lo bestiari, tant deld. infermier, de sos pastres que aussy daquelses que arrendaran sas herbas, poyran paisce en lad. partida dessus assignada alz habitans de Sanct-Gily an lo bestiari delsditz habitans.

De tenemento Stagelli

(Personnes auxquelles il est permis de faire paître leurs troupeaux dans le tènement d'Estagel. — Partie du tènement dont le prieur dudit lieu a le droit d'interdire la dépaissance.)

Del tenement d'Estagel a estat dit et ordenat : que los homes de Sanct-Gily et los pastres poyran faire paisce lor bestial, sans totas devegadas donar tala, en tota la partida deldit tenement d'Estagel, laquala Ion laisa a la man drecha anant de ladita villa de Sant-Gily vers lo vent. Et sy confronta ladita partida en la quala, coma dit es, losd. habitans de Sant-Gily et los pastres podon fayre paisce lor bestial, dune part en lo tenement de lad. villa de Sanct-Gily, de lautra part en lo tenement de Loa, et de l'autre part en lo tenement de Syeura. En laquala partida aussy lo prior d'Estagel et aussy aquelses que compraran las herbas deld. prior poyran fayre pascer lor bestial coma losd. habitans de Sanct-Gily; et aussy aquelses que laboraran terras en lo tenement d'Estagel, poyran fayre paysce lor bestial aratori en la dicta partida deld. Stagel dessus confrontada; mays lod. prior d'Estagel poyra deffendre la partida deldit Stagel que Ion laisa a la man drecha venent de Nismes à Sanct-Gily, en passant per lo grand camin public ; et a quo jusquas al vallat hou vallon que es dessos lo bosc de Brasca et descend per l'Agal (2), per loqual layga decore, alcung temps de lan, vers lo tenement d'Aigasvivas, talament que dengung habitant de

(1) Aiguesvives, ferme sur les communes de Saint-Gilles et de Générac.

(2) L'Agau, ruisseau qui prend sa source au S. du Serre-Brugal, et va se perdre dans le marais de Scamandre.


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Sanct-Gily non poyra, coma habitant de Sanct-Gily, sans la voluntat deld. prior, aqui fayre paysce son bestial ; mais aquelses que laboraran en lod. tenement d'Estagel poyran fayre paysce lor bestial de labor en los luocz deffendutz et non deffendutz deld. Stagel ; mais non ha ren estat dit ny ordenat sy los habitans d'Estagel hy podon hou non podon metre altras bestias ; mais a estat dict et declarat que, per so que dessus a estat dictz et ordenat, non entendon point a prejudicar alditz habitans d'Estagel, mays en tot lo residu ho remanen deld. Stagel, loqual residu hou remanen que despuys et entre lod. valat hou vallon et lo tenement de lad. villa de Sanct-Gily, es permes et licite, alzdictz habitans de Sanct-Gily, de fayre paysce liberalament et sans denguna contradiction, sans totas devegadas donar ny fayre tela, coma a estat dit. Et que lodit prior et sos pastres hy poyran aussy mettre et paysce lor bestial ; mays non poyra point metre bestial estrangier. Et aussy a estat adjugat aldictz hommes de Sanct-Gily, los dretz et facultat de paisce en lo tenement de Sanct-Gily, reservat que lod. abbat hy poyra fayre paysce son bestial et de sos pastres, mays non hy poyra point metre bestial estrangier.

De tenemento Syeure

(Division et partage du tenement de Sieure. — Droits de dépaissance et de lignerage. — Conditions auxquelles ces droits sont soumis. — Faculté de défricher partie des bois.)

Del tenement de Syeura a estat dit et ordenat : que en la partida deld. tenement, laquala anant de Sanct-Gily a Nymes passant per lestrada (1) publica Ion layssa a la man drecha, poyran los habitans de Sanct-Gily paisse lor bestial et de lors pastres jusquas al camin de lestrada, et de sa, tirant et regardant vers Sant-Gily, per loqual camin de lestrada (2) Ion va de Lunel vers Nostra-Dama de Laval et Beucaire, exceptat lo bosc de Burgailh (3) en sas partenensas, que es et demora an devez

(1) Pour la estrada, route; terme resté en italien sous sa vraie forme : strada.

(2) C'est l'ancienne voie romaine, dite Voie Domitienne, qui va en effet de Lunel à Beaucaire, et tout près de laquelle se trouvait Notre-Dame-de-Laval, aujourd'hui simplement Laval, ferme de la commune de Nimes, à la limite de la commune de Marguerittes.

(3) Le Serre-Brugal, plateau autrefois boisé, au S. du bois de Broussan.


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ald. prior de Syeura. Et so que a estat dit dessus de sos pastres sy entend delz pastres que mangon et bevon lo pan et lo vin daquelses delz qualz gardon lo bestial. Et aussy a estat dict et ordenat que en losd. tenemens en losqualz a estat alsd. homes adjugat lod. dretz de paisce, auront aussy losd. habitans de Sanct-Gily dretz et facultat de prendre lenhas (1), exeptatz et reservatz arbres portans fruictz, en et per losqualz arbres portantz fruictz non sont point entendus ny compresos arbres portans aglans.

Et a estat dict et declarat, per aquelses que ont fachas las dites ordenansas et declarations, quelses non entendion point que la terra hou sol delsditz tenementz en losqualz avia estat concedide et adjugada alditz habitans de la villa de Sanct-Gily facultat de paisce et lenhayrar (2) non sera point publica, mays demoraria ben privada et particulieyra ald. abbat et priors, a chascung en son dretz, et aussy a tous autres particuliers si, per avant, elses avian dengunas terras proprias ald. tenement; et poyran, losd. abbat, priors hou autres, coma dit es, terras particularas et proprias en losd. tenementz, nonobstant losd. dretz et facultat de lad. villa de Sanct-Gily, losd. luocz hou tenemens reduyre per se hou autra entrepausada persona a agricultara et laboraige hou en pratz ; et appres que los auran reduitz, los poyran deffendre coma lors propriis, toutas devegadas, en tela fasson et manyera que aquelses que auran fachz bladz en losd. tenemens, losqualz sont de sobres las Corregas superiora et inferiora, et en lo grès, losqualz, coma dict es, ont estatz bailatz et assignatz alsd. habitans de Sanct-Gily, per depaisce et lenhayrar, non sera licite ny permes a dengung, après que naurat levât et gitat lo blat, deffendre hou seguar (3) los restobles; mays hy poyran ben depaisce losd. de Sanct-Gily en la forma dessus dite; mais en chascuna de las dites Corregas superiora et inferiora, sera licite et permes a ung chascung de défendre et amparar sos restobles, sos pratz et sos boses, et los appropiar a sos uzaiges hou los vendre et concedir a ung autre; toutas devegadas, las vinhas, sian en lasd. Corregas hou al grès, demoraran en defensa tot lo temps que vodra aquel de qui seran hou possedira lasdictas vinhas.

(1) Lenhas, en espagnol également Una, bois à brûler ; du latin lignum.

(2) En vieux français : lignerer, faire du bois.

(3) Seguar, du latin secare, couper.


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(Quob nemo audeat venari, in tenementis domini abbatis et dirtorum priorum, cuniculos vel facere carbonem

(L'abbé de Saint-Gilles et les prieurs des tènements de Sieure, Estagel, etc., ont le droit de chasser et de faire du charbon sur leurs terres, à condition de respecter les droits de dépaissance et de lignerage reconnus aux habitants.)

A labbat et alsd. priors es licite a chescung, en sos tenemens, de cassar et fayre carbon, ainsin que avian per advant accostumat et uzar delsd. tenemens a lor profict et utilitet : salvatz et reservatz alditz homes, losd. uzaiges de paisce et lenheyrar, segon la forme dessus dicta.

Quob homines Sancti-Egidii

[non] audeant corpus, collegium vel conventiculam

Sancti-Egidii contra monasterium

(Droit des habitants de Saint-Gilles de créer jusqu'à trois syndics et un clavaire. — Serment que prêteront les syndics entre les mains de l'abbé. — Durée de leur pouvoir. — Défense aux habitants de se coaliser contre l'abbé et le monastère.)

La premiera question hou demanda de mons. labbat et del monestier es sur aquo quil disia que los homes de Sant-Gily non devon point aver de unniversitat, de college, comunitet, hou congrégation; non podon faire scindiez ny clavaris; ny non devon usurpar la juridiction; car al temps passat avian renonciat al consolat, et avian consentit que tota juridiction, tant volontarie que contentiosa, foguessa deldit abbat, ainsy que costava per linstrument produit. Sur laquala question hou demanda a esta dict et determinat per los dessusditz mess. Bernard Dorna (1), archidiaque de Beziers, et Guilhen de Codolis, sage en dretz, an lo conseil et consentiment de mons. Guido Fulcodi, que la villa et universitat de Sant-Gily, quant séria bezoing et lous negossis hou (2) requeriront, poyran fayre et crear sindiez : ung, dous, hou al plus tres tant soulament ; losqualz scindiez, appres que seran per losdietz homes elegitz, seran presentatz aldict mons. labbat hou a son luoctenent, devant loqual losd. scindiez elegitz juraront quelses excerciront lod. office de sindicat

(1) D'Adorno.

(2) Pour hoc.


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ben et fidelament, tant en demandant que en deffendent, et que faran so que sy expeta et apparten a loflice de sindic, et non point so que non sy expeta; ny non prendran ny se apropiran denguna juridiction, constraincta, ny compulcion, au préjudice deld. monestier, sur umbra deld. office de scindic. Et duraran losd. sindicz en lor office tant que durant la cause per laquala auront estas faitz et ordenas sindicz ; et per so aura ladita universitat una archa comuna a ung clavari, loqual clavari sera elegit et aura office, ainsy que a estat ditz en la decesion de la quarte question delsd. sindicz, la ont sy agissia delz bans. Et ont prohibit que losd. homes de Sant-Gily jamais non fasson entre elses conjuration, confederacion, convention ny promission, per fe ny per jurament, ny autra conjuration suspecta, que justamment puescha estre dicta suspecta, ny non fasson point de compes (1), sinon expressa voluntat deld. abbat [et] monestier de Sanct-Gily hou de son luoctenent ; et sy point ny avio de fachas, las ont cassadas et revocadas, et aussy aquelas que seran fachas appres. Toutes devegades, sy losd. hommes de Sanct-Gily vesion aulcuna causa que poyra portar domage hou utilitat a la dite villa, que non sya contra lod. abbat ny contra sa cort, ho devron tratar, et convenir, et disceptar, davant lod. abbat ho son luoctenent. Mais sy la causa sur la quala volion aver tractament et comutation, et per so que entendon a deduyre rancura hou querimonia deld. abbat hou de sa cort, poyran sy adjustar, commuhicar et convenir en la absencia deldit abbat hou de son luoctenent, sans que ly mesclon autres tractamens ; et incontinent que auront tractedas las rancuras hou querimonias que ont contra lod. abbat hou sad. court, et devant que elegiscon dengung scindic per las conduire et persegre, las deuront dire et manifester aldit abbat hou a sond. luoctenent, alqual abbat requeriscan que ly plassa satisfaire et emendar la causa la quala sy rancuran del, hou de sadita court. Et sy lod. abbat non ho vol fayre, poyran losd. homes fayre et ordenar sindic hou sindicz, segon la forma dessus dicta; mais per tracter mariages et fayre tracter autres contractz privatz, licites et honestes, sy podon adjustar sans fraud et sans barat(2), et sy podon obligar par promissions et juramens, nonobstant las prohibitions dessusditas.

(1) Pour Compromeses.

(2) Fraude, tromperie ; s'est conservé dans le mot « baraterie ».


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De seytaralagio (1)

(Défense faite à l'abbé d'exiger des habitants de Saint-Gilles aucun droit de sestéralage, et aux habitants de vendre, comme leur appartenant, des blés étrangers.)

A estât dit et ordenat que lod. abbat non levaria ny exigeria dengung sexteyrelage delz habitans de Sanct-Gily; et aussy a esta dict et ordenat que losd. homes non fasson dengung fraud ny déception aldit abbat en venden los blatz delz estrangiers coma lors propriis; ny aussy en baylant lors mesuras alsd. extrangiers, per vendre hou mesurar lors blatz; ny aussy fayre denguna autra causa per fraudar et baratar hou decebre (2) lo dretz deldict monestier, en lod. sextayralage.

De laubimiis

(Pour le droit de lods, on s'en tiendra à ce qui a été réglé auparavant.)

A estat dit que la coustuma hou ley municipala touchant los lauzimes sya gardada et observada, segon sa forma et tenor ; laquala ley ou costuma sacomensa : Et emphiteota qui canonem longo tempore, etc.

De decimis porcellorum et aliorum animalium

(La dîme pour les animaux sera portée, suivant la coutume, au monastère, sauf pourtant celles qui sont dues par certaines terres de la Corrége supérieure, lesquelles seront payées sur place.)

A esta dit que sur las decimas non mutavon ny innovavon ren ; mais que las decimas syan portadas alsd. priors et al monestier de Sant-Gily, de tota sa decimaria, exceptat dalcunas terras, vinhas, pratz et bosses de la Correga superiora, delz qualz la decima na point acostumat destre portada; mais a coustumat estre donada et pagada ald. monestier, en losd. luocz; et que décima sya pagada de las causas que ont acoustumat de estre decimadas ; et tot sya fach et observat, ainsy que sy fazia

(1) Sestéralage. Droit qui se prélevait sur chaque sétier de blé vendu.

(2) De decipere, frauder, tromper.


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et observava davant lad. question et discordia. Et au regard de las premicias demandadas per lod. abbat et monestier, non ont ren dit ny mudat ; car non lor a point cosfat que jamais ayon estadas pagadas ny demandadas.

De pravis consuetubinibus et abusivis

(Aucun abus n'ayant été signalé, il n'y a pas lieu à s'occuper de cette question.)

Ont dict que, per so que non ly es costat ny apparegut, non hy ordenarien ren.

De emphiteotis et feudatariis

(Défense à tout feudataire de l'abbé de rien changer à sa censé en l'aliénant )

A estat dict, deffendut et prohibit que dengung, en alienant la cause que sy ten delsd. abbat, monestier ou privatz, non empause meta ny retenha dengung cas hou usaiges, sans la voluntat et concentiment daquel de qui se ten, sur la dicta causa emphiteoticaria ou feudalia.

De pignorationibus

(Cas auxquels il est permis d'exiger des gages. — Obligation de prévenir la Cour le jour même où on les aura reçus.)

A estat dit et ordenat que los homes de Sant-Gily, per deutes non gajaront ny pignoraront dengung, synon ainsy que a estat acoustumat, per causa non pagada, ainsy que vol et ordena la costuma hou ley municipala de ladita villa, hou per pacte légitime, hou per mala facha, hou per tala, en la quala tala aquel que gaige aura trobat aquelses que devon la tela hou lor bestial; et sera tengut aquel que en alcung delz cazes dessusd. aura gaigat hou dire et significar, aquel jort memas hou lendeman, a la cort.

De firmancis

(Les cautions pour les cas entre particuliers seront présentées au viguier ; mais, s'il s'agit d'une affaire entre un particulier et l'abbé, ce dernier recevra la caution.)

A estat dit et ordenat que, en las causas secularas, civilas hou criminalas, sy a contraversia entre alcuns, la fermansa sera


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donada davant lo viguier, et aussy inquisition, sy ung privat es offendut dung autre privat; mays si monseig., de sa persona hou de sa familia hou delz morgues, es offendut, per reverensa deld. abbat et monestier, sera donada firmansa de ester et obeir a dretz en la man deld. abbat, hou caution juratoria, sy non pot donar fermansas; synon que la enormitat del crime requiriguessa preza et détention de persona ; mais lo viguier inquirira de ladita offensa, sy ly pot procedir de son propri office et emovement, sans requesition d'autre. Sy es question ordenaria, sera trateda per drectz ordenari; et sera al plaser et cauzit deld. abbat, sy la causa sera tractada davant lod. viguier, hou de donar autra cort non suspecta.

de restitutione pignorum

(Les gages saisis à certaines personnes nommées dans l'acte, leur seront rendus dans le délai de deux mois.)

A estat dit et ordenat que los gaiges preses per los habitans de Sant-Gily dalcungz personages noumatz ayssi, syan retornatz infra dos mezes, si exten (1), hou lor extimation.

Las autras questions et demandas fachas et prepausadas, tant per lod. abbat et monestier que aussy per losd. scindiez et habitans de Sanct-Gily, sy son aretengudas a decezir et determinar quant lor playra; et en las causas et questions dessus decididas et determinadas si son retengutz la declaration et entrepretation et en aquo ont consentit losd. abbat et priors, exceptat lo prior de Syeura, que era absent, et losd. scindiez aussy hy ont consentit ; et tpt quant dessus a estat dit, appointat et ordenat, a estat approbat et ratificat per totas las partidas; et losd. arbitres aussy appointeron sur los despens faictz a causa de lasd. questions mais, car non servis de ren per lo temps advenir ho layssa.

(1) Si exstant, s'ils existent encore.


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De divisione parrochiarum monasterii Sancti-Egidii

(Nécessité de revenir sur la division primitive. — Obligation aux fidèles de recevoir les sacrements ou d'entendre la messe dans leurs églises paroissiales. — Privilége de l'église dédiée à Saint-Gilles. — Exceptions à ce privilége. — Tous les pèlerins ou étrangers appartiennent à ladite église de Saint-Gilles.)

L'an mil CC XXXI et al mes de febvrier, monsgr. Pons (1), per adonc abbat, divizit las parrochias tant dedins que de foras Sanct-Gily ; et car la plus grand partida es divisida per noms et surnoms delz habitans que eron en aquel temps, et ainsy de lors maisons delz non y a maintenant memoria ; et aussy en tant que seria necessaria, los curatz alsqualz sapparten de saber lasd. divisions, et losqualz entendon ou devon entendre latin, hou poyran legir et entendre, et per ainsy hon laisse de mettre en romans; mais per so que hy a alcunas causas, lasqualas es bon et licite que sacha ung chascung delditz habitans, hou mete. So es que ung chascung, sya home ou fama, es tengut de sy confessar et comergar et baptizar et aussir messas en sa propria gleysa parrochiala, sinon que anesson a la gleysa de Sant-Gily ; car ung chascung pot anar en aquela, sans alcuna contradiction de las proprias parrochias. Toutes devegadas en las grandes festas, coma : lo premier Dimenche de l'Advent, los tres jors de Nadal (2), la Epifania (3), la Purification de Nostra-Dama, Rampans (4), los tres jors de Paschas, l'Assencion de Nostre-Senhor, los tres jors de Pendecostes, l'Assumption de Nostra-Dama et lo jort de tous los Santz et en las festas d'armes (5), ung chascung es tengut auzir al mens una messa a sa gleyssa parroquiala; ny non es point excusat per anar a lad. gleysa de Sant-Gily; et ung chascung jort podon ausir messas et horas, tant de nuech coma de jort, en ladite gleysa de SantGily, de qualqua parroquia que sya; et aussy, en chascuna parroquia, le jort que sera la festa del cap daltar de la parroquia. Aussy tous aquelses que font compania en aquelses quespouson, hou a las famas quant levon denfant (6), hou alz mortz, podon ausir messa en autra parroquiala et maïorment a la gleysa de Sant-Gily. Totz estrangiers et Romyous, en qualque

(1) Pons Ier, abbé de 1208 à 1245.

(2) Noël. — (3) L'Epiphanie. — (4) Le Dimanche des Rameaux.

(5) Armes, pour " aimes ou âmes » Commémoraison des morts.

(6) Font leurs relevailles.


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parroquia que sian, son de la gleysa de Sant-Gily et aqui devon pendre los sagramens ecclesiasticz, tallament que denguna de las dictas parroquias non ont dengung dretz, ny sy devon entremettre en denguna fasson delsd. extrangiers. Mais per so que dict es, non entend point a prejudicar a la gleysa de SantMartin, ny alz dretz que ha en aquelses que sy exposon, ny en la sepultura des mortz ; mais los ly reserva expressament, exeptat so que dit a estat des extrangiers et pelegrins.

Graria domini Clementis pape quarti facta hominibus Sancti-Egidii

(Mention du privilége, accordé par le pape Clément IV aux habitants de SaintGilles, de ne pouvoir être cités en justice hors du diocèse de Nimes.)

Papa Clément, que per nation es nascut de Sanct-Gily, donet gracia et privilegi alz habitans de Sanct-Gily que, per dengunas letras appostolicas, ny aussy dalcung legat apostolic, non poguessan estre tractz foras la dioceze de Nymes, ny aussy dins aquela oltra una jornada comptant del luoc de SanctGily, et fos donat lod. previlege a Paris, lan segond de son papat (1).

De reprehentione et correctione a D. papa facta super homines .

(Exhortation, faite par Clément IV aux habitants de Saint-Gilles, de revenir à la paix et à la concorde, par respect pour leur saint patron.)

Appres que lan et lo jort dessusd. et a lad. villa de Paris, lod. papa a fâcha mention que lo corps de sant Gily es ald. SantGily (2), et que aussy es digne de très grand honor et reverensa et de granda comemoration, et majorment envers los habitants de Sant-Gily et defenit los grands bens que venon de pax et concordia et delz grans malz que prevenon de debatz et discordias, manda alsd. habitans de Sant-Gily que fermement porten

(1) En 1266.

(2) A l'époque des guerres de religion (1562), il fut transporté à Toulouse, où ses reliques sont encore conservées dans l'église de Saint-Sernin.


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honour et reverence ald. sant Gily, et que lor recomanda labbat, lo monestier et autras personas aqui servent a Dieu, en lor fazen et portan honorificencia deguda, et retornon a bona pax, delaysada tota discordia, et que ayon entre se bona aimor et bona union, affin que puescon meritar la gracia et entercession deldict sant Gily, et lamor et benivolencia del, et siege appostolic.


DERNIERE LEY

(1305)

De tempore domini hugonts abbatis in nomine ont nri Jesu £jji. Amen

(Transaction passée entre l'abbé Hugues de Folaquier et les habitants de SaintGilles au sujet de la dîme des raisins. — Quantité de vendange due pour la dîme. — Déclaration à faire à l'entrée de la ville aux agents de l'abbé. — Précautions prises contre la fraude, etc.)

L'an mil très cens et cinq, et del mes de julhet, fos fach lappointemant et transaction de et sur las causas que seran dictas appres, et aquo de et sobre las demandas, debatz, questions et plaidejarias que avion longament durat entre los sindicz de Sanct-Gily, al nom de la villa et universitat deld. SanctGily dune part, et mons. Hugo, abbat, per se et son monestier, d'autra. Losqualz abbat et scindic, alz noms dessusd., tracteron, fogron (1), transigiron et pacifiqueron lasd. questions et debatz en la forma et manieyra que sen sec : Et premièrement losd. sindicz bayleron et expauseron en escript las causas que demendavon et de que se rancuravon.

Et premièrement dision que lod. abbat et monestier grevavon fort los habitans de Sanct-Gily sur la decima delz razins, per so que alcunas vegadas perdian (2) la tersa, hou quarte, hou quinte, hou sexta, hou septima saumada, hou altra que la dezema, et la fazian portar ald. monestier, non obstant que non deguesson ny poguesson pendre ny fayre portar aldit monestier sinon la dezema saumada ; et la quala losd. habitans deuron donar et bailar, et lod. abbat et monestier non la devon point pendre de lors propria volontat hou auctoritat, ainsy que desion plus amplement estre contengut en una composition facha al temps passat, entre lo monestier et la villa.

Al contrari disia mons. labbat, quel ny sond. monestier non avian en ren grevatz losd. habitans ; car elses eron, tant per se

(1) Fogron, pour fagueron.

(2) Perdian, pour prendian ou prenian.


que per sos predecessors, despuys XL ans et de tot temps que non hy avia raemoria dhome, al contrari en possession et saysina de pendre, per la decima, la saumada que bon lor semblava de lasdictas saumadas ; mais volen venir en bona pax et concordia an losd. habitans, lod. abbat al nom dessusdit et losd. sindicz aussy alz noms dessusd., solempnament convengueron, transigiron et accorderon ansy que sensée : So es que lod. abbat et monestier , de horas en avant, elses ny autres per elses, non prendrai, per lo decime delz razins, sinon la decima part des fruictz et la dezema saumada per ladicta decima part ; et aquo quant vendimian, laquala decima part sera tengut ung chascung delsd. habitans portar al mandatent deld. abbat et son monestier hou de lors gens, portar ald. monestier sans denguna contradiction, car ainsy avya estat al temps passat ordenat que la devion portar coma dision, costar, per las antiquas compositions fachas entre lod. monestier et scindiez, per mons. Guido Fulcodi, per aquel temps abbat (1). Et sy alcung des habitans portava sa vendimia en plusors et diversas bestias (car las unas podon mays hou myns porter que las. autras), a estat dict, appointat, transigit et accordat que lod. abbat et mpnestier auront de chescuna sadita dezema part, sans que denguna de las partidas hy deyon hou puescon. hy fayre hou cometre fraud, déception hou barat; et sy hia dobt, quala, bestia porta mays hou myns, Ion estera al sagrament daquel que fara las saumadas hou banastons, qualque sya, so es sya lou inestre hou senhor de la vinha vendemia, hou son mercenari, ou, quelque autre que sya depputet et comis a fayre lasd. saumadas hou banastons.

Et aussy a estât dict et appointat que, en vendemian hou portan vendemia an las bestias, quant sera al portai per loqual passa sa vendimia, dira et denunçiara, alz gens deld. abbat hou monestier, que la saumada quel, porta es la deryeira et que non ha plus de vendemya devers aquel portai ; et aquo affin que sya licite et permes a las gens deldit abbat hou monestier pendre lo dretz de la decima que ly apparten, non obstant la convention dessus facha, laquala dis que non poyra lod. abbat hou monestier pendre sinon la dezema saumada. Et poyra lod. abbat fayre punir per sa cort aquelses que vendran a lencontra,

(1) Guy Fulcodi n'a jamais été abbé de Saint-Gilles. C'est une erreur, du copiste : il s'agit sans doute de Guilhen (Guillaume Ier), abbé de 1252 à 1265,


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et levar et exigir las penas degudas et encorregudas. Et, affin que en fazen lad. dezema saumada, deguda coma dict es per la décima, non sy fassa dengung fraud ny barat, a estat accordât et convengut que lod. abbat, hou son monestier hou sas gens, poyran fayre jurar aquelses que devon faire los banastons hou somadas, quelque las deya fayre, so es sya lou mestre de la vendimia hou sos mercenaris hou los gaudiers (2) que fizalament et egalament, et sans barat et fraud delz fruictz comuns et non point delz plus malvaizes, faran las saumadas per ladita décima degudas, et que las faran egallas a las autres saumadas que aura tachas per lo mestre de lad. vindemia, et delz razins que venion appres la saumada preza per lod. mestre sans alcuna détérioration et a bon arbitre, a bona fe et a bona consencia; loqual sagrament seran tengutz de faire a la voluntat et réquisition deld. abbat ou de sas gens, totas exceptions et excusations cessans, davant que anesson a las vinhas per fayre banastons hou soumadas. Es vray ques estat appointat et accordât que, encontinent appres que lou rectori de laudas, de matinas, deld. monestier, aura tocat, devra aver genz alz portalz per recebre lod. sagrament, ainsy que dict es; et sy non y a dengung per lod. abbat hou monestier per recebre lod. sagrament, aquelses que seran deputatz et auran carga de fayre los banastons hou saumadas poyran anar fayre losd. banastons ou saumadas sans prestar lod. sagrament; mays, toutas devegadas, seran tengutz de fayre lasd. saumadas ainsy que dessus a estat dict, aussy ben que sy aguesson jurât. A estat aussi appointat que dengung que deya fayre losd. banastons et saumadas, sya lo mestre ou autre, non sailha (1) de la ville, sinon per los portalz et luocs acostumatz. Et sy a estat requerit de jurar, coma dict es, non deu sortir jusquas que aya jurat, et aussy non devon salhir, jusquas que lod. rectori de laudas aya sonat, ny devant lhora dud. rectori. Vougueron aussy et consentigueron las dictas partidas que las causas dessusdictas fosson gardadas et observadas per lo temps advenir per elses et per lors successors, [sy non] al trament foguessa appointat et ordenat.

Aussy a estat dict, convengut et transigit : que lod. abbat poyra tous los ans, una hou plusors vegadas, fayre cridar et

(1) « Ceux qui ont la jouissance ». De Gaudere, jouir.

(2) Sorte.


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proclamar per sa cort que ung chascung que devra fayre hou sera députât a fayre losd. banastons et saumadas, sya lou mestre de la vendimia hou autre, las fassa egallas et sans mesclar hy ren per fraud ny per barat, ainsy que a estat dessus dit et convengut, ny ho fasson fayre per autras entrepausadas personas, et aquo sur la pena laqualla hy sera messa et ordenada per lod. abbat hou sad. cort, laquala sera levada et exigida contra totz aquelz que venront contra lad. convention, appointement et transaction, et aussy contra ladicte proclamation, nonobstant toutas frivolas hou soustratorias exeptions, appellations, hou raisons que alcung pourra deduire a lencontra, et en la forma et maniera dessus dicta, a estat diffinida lad. premiera demanda hou supplication delsd. scindiez.

De decima et becimatione racemorum

(Précautions prises pour assurer que la dîlme sera prélevée exactement et non plus selon le caprice des gens de l'abbé.)

La seconda demanda del scindic es que, sy alcung deu ung banaston de razins per ladita décima, lod. abbat hou son monestier hou sas gens font portar tota la saumada al monestier, et aqui ne prenon ambe una granda banasta que tenen al tinal tant que volon, en prejudice daquel que deu ladita decima, loqual la deu baylar et mesurar en la mesura que a mesuratz lous siens en la vinha. Sur la quala demanda hou question lod. abbat ha volgut et ordenat que, quant alcung de ladita villa dévia ung hou plusiors banastons de razins per la decima, lod. banaston hou banastons seront mezuratz an lo banaston que ont estatz mesuratz los razins daquel de qui es los razins et la vinha, et lo rocebra lod. abbat, sond. monestier ho sas gens, en lo portai per loqual passara la vendemia ; et lo mesurara aquel que deu lod. banaston ho sas gens, et puys sera portat, del mandament daquelses que seront ald. portai per lod. abbat, aldict monestier. Et losd. scindics fogueron contens de lad. resposte fâcha, coma dict es, per lod. abbat; et luna et lautra de las partidas vougueron et concentigueron que, ainsy que dict es, sy fegues al temps advenir.

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De becimis ortorum

(Dîme des jardins due au monastère. — Elle devra y être portée. — Exception faite en faveur des jardins de la Corrége supérieure.)

La tersa demanda delsd. scindiez es : que Ion vol compellir los habitants de Sanct-Gily, losqualz ont ortz, a portar la décima delsd. ortz, so que non avian acostumat ny non eron de dretz tengutz. Sur la quala ont appointat et transigit lasdictas partidas, alz noms que dessus, que per so que, en la composition fâcha en lo temps passat entre lod. monestier et lad. universitet de Sanct-Gily, que los homes de Sanct-Gily serian tengutz de portar, de tota lor decimaria, la decima ald. monestier, exceptada alcunas terras de la Corregia superiora, et los ortz [que] sont deforas lad. Correga superiora, nonobstant que sian dins la decimaria delsd. monestier; seront tengutz losd. homes portar la decima delsd. ortz, quant hy aura gran de blat al dict monestier, alqual la decima delz ortz Dieu en pot appartenir, en ensegen la forma de lad. composition au temps passat facha. Et que los ortolans ny autres que tengon losd. ortz non seron tengutz de porter la decima de las herbas ny des laguns delsd. ortz ald. monestier, ny a autre; mais soulament seront tengutz de pagar la decima de lasd. herbas et leguns sans fraud et barat en losd. ortz et entieyrament. Et ont volgut losd. abbat et scindiez transigens que so que dict es sy entenda et deu entendre delz ortz que sy azagon (1), en pozan layga del pous hou pouzes, ou per autra endustria daquelses de qui sont hou qui tenon losd. ortz. Mais, los autres ortz qui non ont point de pozes hou non sy azagon coma dict es, sont coma las autras terras, de lasqualas si deu donar et pagar la decima, segon la forma et manieyra contenguda en lad. antiqua composition.

De incantu ovlle Sancti-Egidii

(Le droit de vendre aux enchères appartient à l'abbé. — Les droits de vente sont fixés à 1 maille pour tout objet adjugé à moins de 20 sous tournois, et à 4 deniers quand le prix de l'objet s'élève plus haut que 20 sous.)

La quarta question hou demanda delsd. scindiez es : car dision que, segon luzage et costuma antiqua, era licite et permes

(1) Azagar, arroser, du latin adaquare.


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a ung chascung de lad. villa, mays que foguessa home soufizent, enquanter, et que so nonobstant lod. abbat sy efforsava appropiar a se lod. inquant. Sur laquala lasd. partidas appointeron et accorderon que, per so que lod. incant es de las partenensas de la juridiction, laquala es deld. abbat et de sos successors, que aussy lod. inquant sya imperpetuum deld. abbat et de sos successors, et a lors voluntas. Ben es vray que lod. abbat a volgut et consentit, que lo incantayre de las causas quel vendra non prenga de XII deniers sinon que una mealha, et aquo jusques a la somma de XX s. t.; mays, de las causas vendudas et valens XX soulz, recebra et aura un d. t.; et ainsy ont volgut lasd. partidas que sya [tengut] et observat perpetualament.

De leuda panis inter homines Massilie, Bellegarde et Sti-Egidii

(Réclamation des habitants de Saint-Gilles contre la leude du pain qu'on les obligeait de payer, tandis qu'en ladite ville les habitants de Bellegarde et de Marseille en étaient exempts. — Rejet de cette demande.)

La vma demanda delz scindiez de Sainct-Gily contenia que coma el foussa (1), ainsy que los homes de Marsalhe et de Bellegarde (2) et de alcungs autres luocz sont franez de la leda (3) del pan en ladita villa 4e Sanct-Gily, lod. abbat et monestier leva leda de pan des habitans de lad. villa, en lor grand prejudice, per so que non es rezonable quelses syan de pira condition que los autres, desqualz denguna leda non es levada. Sur laquala demanda ont convengut losd. scindiez, que lod. abbat hou son monestier et lors successors levon leda deldictz habitans ; car ainsy a estat acostumat per advant, nonobstant que delz habitants de Masseilha et de Bellegarde non sen leve point.

(1) El foussa, Saint-Gilles avait été.

(2) Commune du canton de Beaucaire.

(3) Leude, impôt perçu sur les denrées exposées dans les foires ou marchés.


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De coptione hominum nille Sancti-Egidii

(Abus d'autorité commis par les officiers de l'abbé dans l'arrestation et l'incarcération des hommes de SaintrGilles. — Promesse de l'abbé de remédier à cet abus.)

La VIma demanda delz scindiez es : car dision losd. scindiez que los officiers et curialz de Sanct-Gily, tant temporalz que spiritualz, per injurias et delictos indiferement, prenon al corps los habitans de Sanct-Gily, et puys contradison los relaxar jusquas a so que, per transaction hou composicion aion accordat ambelses (1) ; lor denegans et obstans las dilations legalas. Sur laquala lod. abbat a respondut, quel volia et condana a totz los officiers que avia per adonc, et comandaria alz autres que vendrion appres, par vertu del sagrament que ly farion, que sur las causas dessusdictas fasson bone et breva justicia : de la quala responsa losd. scindiez, al nom que dessus, sy tengueron per contons.

Quod nicarius, jubex ant notarius nichil recipiant de banbis juriis (sic) et tutellis

(Défense faite aux viguiers, juges ou notaires, de rien recevoir pour le devoir de leur charge. — Les expéditions demandées aux notaires leur seront toutefois payées par les parties. — Taxe établie pour les citations, prises de gages, etc.)

La VIIa demanda delsd. scindiez es que, nonobstant que los jugamens deguesson estre fachs et tractetz en la cort de SanctGily, sans frays et despensas, so nonobstant lo viguier et juge, notari, bedelz(2) et sergens de lad. cort, delz decretz et autres processes menatz et agitetz en lad. cort, extorquesson pecunia delzdictz habitans de Sanct-Gily, indegudament et injuste, et majorment lo notari de cancellar las inquisitions que sont escriptas, nen vol aver alcunas vegadas V. s. ; et alcunas vegadas et a tout lo myns XII d.; et losd. servens de chascung gaiament (3) ou citation, II d. Sur la qualla a respondit lod. abbat, volen et comandan a sas gens de cort, que son de present et

(1) Pour ambe elses, avec eux.

(2) Bedeau ou appariteur. —(3) Du latin vadiamentam.


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seran per lo temps advenir, que sur lad. demanda sya gardada la ley municipala de lad. villa; et en la declarant, a volgut, comandat et ordenat que lo viguier, ny lo juge, ny lo notari, ny lors luoctenens, per los decretz, tutellas, ho curas (1), donas en la cort, non prengon ny demandon ren a las partidas, volens et requerentz los decretz en los contratz que son ben et degudament fachs, et aquo a aussy volgut de las tutellas et curas, lasqualas seran per lad. cort donadas maiorment ; car la ley municipala de lad. villa sy a ordenat en qualla fasson losd. curialz sy devon governar en las causas dessusd., ha aussy volgut et ordenat que los notaris de sa cort, per ung chascung mandament, non ayon que quatre deniers de la moneda adonc corrent. Et sy avenia que correguessa la bona moneda de sanct Loys (2), non ayon que dos deniers torneses ; et que de las inquisitions que cancellarion, non prengan ren de las partidas contra la voluntat daquel contra loqual aura estat inquirit; car lasd. inquisitions procedisson plustost de la partida de la cort que daquel loqual aura estat inquirit. Et delz processes que sy font, en los cartularis non sera ren pres; car tot quant sy fa en jugament sy deu fayre sans despensa, exceptada la decima de la playdeiaria, ainsy que es contengut en la ley municipala; sauf et réservât que, sy en jugament a estat produict qualque instrument, loqual a estat demandat estre incorporat, de la incorporation deu estre satisfactz al notari. Et que los sergens ayon tant soulament, duna citation, ung denier per lor trabailh; et delz gayamens dos denies ; et, per los dos deniers que auront recebutz per gajar, seron tengutz retornar pueis appres los gages an aquelses que auran estatz gajatz. Et semblablament auran tant soulament, losd. sergens, dos denies per claure hou sagelar (3) estatz; aussy, per fayre arrestz, non auron que dos deniers, synon que per citar, gajar et arrestar, claure et sagellar, anesson deforas villa; car adonc, lor deu estre crescut lo trabailh a la cognoiscensa delz curialz regens la cort. Et sur so que es degut alsd. sergens hou messages, per aquelses que prenon hou arreston en lad. cort, ha volgut lod. abbat la ténor et forma de la ley municipala de lad. villa estre observada et gardada per losd. messages ou sergens, et aussy per

(1) Curatelles.

(2) Cette monnaie, étant d'un titre plus pur, avait aussi plus de valeur que les monnaies altérées par quelques-uns de ses successeurs.

(3) Sigillare, sceller.


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losd. curialz; de laquala responsa, declaration hou entrepretation, et de toi quant a estat dessus dict et es dessus contengut, losd. scindiez, al noms que dessus, sy sont tengutz et reputas per contens.

Quod nullus exercent officium curie secularis oui non possit puniri per eambem

(A l'avenir, aucun clerc ne pourra remplir la fonction de jugé ou de notaire à la cour séculière de l'abbé.)

La octava demanda delsdictz scindicz es que elses dison que, puys que per la cort del rey es ordenat que dengung clerc non sya notari de cort seculara, que aussy lodict abbat non deu tenir en sa cort seculara dengung clerc ; et totas devegadas nen tenia ung notari clerc, loqual non tant soulament uze de office de notari, mays dalcunas vegadas doffice de juge hou viguier, et continuablement, quant lod. juge hou viguier sont absens. Sur la quala a respondut lod. jabbat quel vol et. entend que, en las causas dessusdictas, sya gardat et observat totalament lestil (1) de la cort del rey; de laquala responsa losd. scindiez, alz noms que dessus, sy son tengutz per ben contens.

Quod licitum sit abbati per curiam

temporalem compellere rebelles ad soloendam decimam,

si voluerit, sive per censuram erclesiasticam

( Permission donnée à l'abbé d'user à son gré du pouvoir temporel ou des censures ecclésiastiques, pour forcer les récalcitrants à payer la dlme due audit monastère.)

La noviema demanda es que lod. abbat, al grand dampnage et préjudice de toute la universitat de Sanct-Gily, hou sos officialz et morgues, per las decimas a el non degudas de fach, font gaiar los habitans de lad. villa, la ont deurian compellir a pagar lasd. decimas, per censuras ecclesiastioas. Sur la qualla acorderon que sya licite ald. abbat, a sas gens et a sos successors, et alz autres del monestier que ont dretz et facultat de

(1) Stylus " style », formules de chancellerie.


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levar decimas, en subcidde et adjutori de dretz, compellir los habitans de Sant-Gily, losqualz seran rebelles a pagar la decima, per pignorations ho gaiemens, hou, sy mais amon, per censuras ecclesiasticas.

Quob vicarius et jubex sint annales et curiam frequentent

(Le viguier et le juge seront désormais annuels et devront remplir leur devoir avec la régularité qu'exige la bonne administration des affaires.)

La xma demanda delsd. scindiez es que la cort de Sanct-Gily deu estre annalla, et que lo juge et viguier devon continuar lad. cort, so que non font point. Sur la quala lod. abbat a volgut et accordat que lo juge et viguier de sad. cort syan temporalz per lo temps advenir, ainsy que devon; et que tengon et regiscon lad. cort, ainsy que la qualitat de la causa et los merites delz negocis hou requiriront; de la qualla responsa losd. scindiez sy sont tengutz per contens.

De pascuis Corrigie (1) inferioris et superioris, et quibus et quomodo liceat pascere in eis

(Des pâturages des deux Corréges. — Droits de dépaissance attribués, soit au monastère, soit à la communauté de Saint-Gilles.)

La XIa demanda delsd. scindiez es que los homes de SantGily syan deffendutz et mantegutz en lor possession, en laqualla sy devon (2) esse et aver estat al temps antic et passat, de mettre et fayre paisce quietement et pacificament tot lor bestial, de qualque estat ou condition que sya, en los territoris hou tenemens de las Corregas superiora et inferiora; et de lenheyrar, cassar et pendre aucelz, et autrament sy explechar (3) en la Correga inferiora et en Escamandre. Sur laqualla lasd. partidas convengueron, transigeron et accorderon : que sya licite et permes a perpetuitat, alz homes hou habitans de Sanct-Gily,

(1) Les Corréges supérieure et inférieure étaient deux tenements marécageux situés entre Saint-Gilles et Psalmodi, et dépendant de ces deux abbayes, ainsi que de la communauté de Saint-Gilles.

(2) Faute de copiste, pour dison.

(3) Avoir droit d'exploiter.


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sans denguna contradiction de mons. labbat, de sos successors, de sas gens et de son monestier, tenir et fayre paiscer tot lor bestial, de qualqua condiction hou qualitat que sya, quietament et pacificament, sans totas devegadas fayre ni donar dampnage ny tala alz blatz, vinhas, arbres et pratz ; loqual dampnage hou tela emendaron a la cognoiscensa delz juratz, et pagaran lo ban en la forma et manieyra que es contengut a la composition antiquament facha entre lod. monestier et lad. villa, en tout lou tenement de la Correga inferiora et en las paluns deld. tenement, ainsy que lod. tenement de lad. Correga inferiora sy move et confronta an et per la levada, laqualla es entre los pratz del almornier hou almornaria (1) et la honor de Raymond Carbonel, appellada vulgairament Pointa, et tira recta linha per lad. levada jusquas al gabin, et jusquas a la porquaria de lhospital de Sanct-Jehan-de-Hierusalem, la quala levada divisis et divisera; et ont volgut que lad. levada divisisca et desparta lou territori hou tenement del castel d'Espeyran et lo territori hou tenement de ladita Correga inferiora hou de las paluns de lad. Correga inferiora; laqualla levada fera terme et terminera losd. tenemens, et sera comuna entre lasd. partidas. Aussy sera licite et permes, alsd. homes et habitans de Sant-Gily, de paiscer lod. bestial en los tenementz de la Correga superiora tant quant dura et sy extend, lad. Correga, de la martelliera, appellada hou nommada vulgarament Radulphorum, hou des Radulphos, jusques al tenement de dona Regordana, molher de Guilhen Manen, de Sanct-Gily. Et aussy a estat appointat, transigit et accordat, entre lasd. partidas, que los homes et habitans de Sanct - Gily auront aussy, en losd. luocz et tenemens de lasd. Correga superiora et inferiora, en lasqualz lor a estat assignat dretz et facultat de paiscer lod. bestial, dretz, libertat et facultat de pendre, culhir et emporter fornilhe et linheyrar, pendre aucelz et cassar, et autrament sy explechar, sans contradiction deld. abbat ny de son monestier, ainsy que plus amplament es contengut en las compositions fachas , al temps passat, entre lod. monestier et homes de Sanct-Gily, per los discretz homes messires Bernard Dorna et Guilhen de Codolz, saiges en dretz, en lo conseil de mons. Guido Fulcodi; laquala composition lasd. partidas ont volguda estre gardada et observada sans den(1)

den(1) ou l'aumônerie de Saint-Gilles.


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guna inflation. A estat aussy appointat, transigit et accordat : que lo residu hou remanen de lad. Correga superiora, loqual residu hou remanen dura de las palluns de lad. Correga jusquas al tenement des heretiers de Raymond Gros, sera perpetuallament deld. abbat, de sos successors et deld. monestier, et en plen dretz; so es tant en proprietat que en possession, sans retenir denguna servitut ny explecha alsd. homes ny a autre; et ne poyra disposar lod. abbat, sos successors et deld. monestier, a toutes sas voluntas; talament que non sera licite ny permes a dengung desd. habitans de Sanct-Gily, de qualque estat hou condition que sya, en lad. partida, laquala, coma dict es, sera deld. abbat perpetualment, mettre bestiari, ny autrament sy explechar, sans la expressa voluntat dud. abbat et de sos successors; mais, des huy en la, poyra lod. abbat et luy sera licite, et aussy a sos successors et ald. monestier, défendre lad. partida comme siena propria et a son proffict et utilitat; et sy confronta ladita partida en la palu hou tenement de ladicte Regordana, molher de Guillen Manen ; et en lo camyn que va a Beaucaire; et en la honour de noble Pons Cambon; et en la honor del heritier de Raymond Gros ; et en la honor de Cebilhia, molher de Guilhaumes Salvanh ; et en la honor de Jehan de Rria; et en lo pons de Forchons, per loqual Ion va vers Barjac hou castel de Forchos(1). Et per recompensa delsd. pasturgaiges et explechas de lasd. Corregas superiora et inferiora, maintenant baylat et concedit alditz homes de SantGily, per lod. abbat et son convent, per so que per avant losd. homes non avian dengung dretz de paiscer ny sy explechar en lasd. Corregas hou tenemens, sans la voluntat deld. abbat hou de son monestier, sinon que en lo bestial aratori tant soulament; ainsy que es contengut plus amplament an la composition fâcha al temps passat entre-lod. monestier et losd. scindicz de ladita villa de Sant-Gily; losd. scindicz, al nom que dessus, convengueron et prometteron, per maniera de pacte expres et solempnalement fach entre losd. scindiez et abbat, ald. mons. Hugon, abbat present, stipulant, recebent et acceptant per se, per sond. monestier et sos successors, que losd. scindiez, al nom que dessus, serian tengutz crompar la mitat de las palluns et pratz hou de tot lod. tenement de lad. Regordana, loqual lad. Regordana ha en lad. Correga superiora; et baylaran lad.

(1) Ferme de la commune de Saint-Gilles.


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mitat ald. abbat, et la ly faran aver et tenir et sos successors; et que non sera licite ny permes alsd. homes et habitans de Sanct-Gily de fayre paiscer lor bestial, ny autrament sy explechar, en lad. mitat, contra la voluntat deld. abbat, de sos successors et de sond. monestier. Et si non podion profitablament aver, de lad. Regordana, lad. mitat, promettont losd. scindiez, per maniere de pacte expres, actorderon que del pres que vol lad. mitat, al regard de prodhomes que serian elegitz del consentiment de lasd. partidas, serian fachas autras inquisitions, al nom deld. monestier, al luoc de lad. mitat deld. tenement de Regordana, a la voluntat deld. abbat, de sos successors et de son monestier, hou baylar lod. pres ald. abbat, sy lo ama mays. Semblablement ont donat et remes losd. scindiez, al nom de ladicta universitat, ald. abbat, sos successors et ald. monestier, per major recompensa delsd. pasturgaiges et etpleches a elses, coma dit es, maintenant bailatz et conceditz, tous los dretz quelses avian et podian aver et que lad. universitat avia accostumat daver en paiscent lor bestial, de qualque estat hou condiction que foguessa, et lenheyrar hou autrament sy explechar en una partida del tenement d'Espeyran , loqual toca lo tenament de Sant-Gily ; so es asaber : al tenement ques entre la via per laquala Ion va a Eura et lod. tenement de lad. villa de Sanct-Gily et de Cambon, et sy confronta al cap del bosc deldit Speyran, loqual es devers ladita villa de Sanct-Gily ; en la qual cap a estat accordai de metre et sera mes ung terme, loqual regardera recta linea al terme cobert; so es assaber : lo terme plantat al cap del bosc de Cambon (1); et appres, seguen de terme en terme, los termes divisens los tenemens del Cambon et de Sanct-Gily ; et puys appres, delsd. termes jusquas a las pallus hou tenemens de Carmanhan (2) et de Eurra (3), loqual tenement poyra, dehoras en avant, deffendre et apparar, lod. abbat, sos successors et sond. monestier, alzd. homes et habitans de Sant-Gily, losqualz non poyron paysce, linheyrar ny autrament sy explechar en lod. tenement, mantenent, coma dict es, baylat et assignat per lad. recompensa ald. abbat, sos successors et monestier, exeptat et reservat que, sy dengung laborava ald.

(1) Ferme de la commune de Saint-Gilles.

(2) Prieuré de Saint-André-de-Camarignan, proche Saint-Gilles.

(3) Probablement Auriasse, ferme de la commune de Saint-Gilles, au bord du petit Rhône.


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tenement, poyra faire paisce lo bestial del labour en lod. tenement, sans fraud ny sans donar tala ; et sy font tala, la emenderont et pagaran lo ban, ainsy que a estat dessus declarat ; et lautre bestial non hy poyra point intrar. Et fos en oultre convengut et retengut, entre lasd. partidas , et expecialament concedit per lod. abbat, que lo bestial aratori et aultre gros bestial, payssen en lo gres hou hy laboran, poyran passar per anar abeurar hou heure al trencat, per una via que es entre lo bosc d'Espeyran et certanas vinhas de certans homes de SantGily; et sen poyran retornar, quant auran begut, per lad. via sans donar ny fayre tala al bosc, ny alz albres daquel la quala tela sy point en font, emendaront ald. abbat et a sos successors hou monestier, et pagaran lo ban. Et aussy a estat convengut entre lasd. partidas que, en totz losd. tenemens de las Correga superiora et inferiora, en losqualz a estat maintenant concedit dretz et facultat de paisce, linheyrar et cassar, alsd. habitans de Sanct-Gily, la proprietat del sol non sya point publica hou comuna; mais demora en plen dretz ald. abbat, sos successors et monestier. Et sya licite et permes ald. abbat et sos successors, per se hou per autre hou autres, losd. luocz redigir et metre en agriculture, hou laborage, hou en pratz ; et appres que los hy aura reduictz, los poyra deffendre et amparnr coma siens propris, aussy coma per vertut de la composition antiquament facha podia, sy volia. Laquala composition et lo contengut en aquella lasd. partidas, en tot et per tot, hont volgut que fouguessa gardada et observada; et poyran aussy lod. abbat, sos successors et monestier, et aussy los pastres, tenir et fayre paisce tôt lor bestial en lasd. paluns et pasturgaiges, ainsy que los autres homes et habitans de Sant-Gily, non obstant losd. dretz de paisce maintenant concedit alditz homes, airîfcy que avia per avant estât accostumat, et per lod. abbat et sos predecessors uzat. Et que sy alcung avia pres a laborage alcuna partida delsd. tenemens de lasd. Corregas superiora hou inferiora, appres que ne aura gitat, labbat non poyra point emparar ny deffendre losd. luocz reduictz a agriculture hou en labour. Et aussy convengueron et appointeron que, sy aulcung prenia, en losd. tenemens, alcungs luocz per fayre pratz, hy sera licite et permes de deffendre losd. pratz, despuys Carementran (1) jusques a la fiera de Sanct-Gily,

(1) Carementran, « Carême-entrant ou Carême-prenant », se dit des trois jours gras qui précèdent le mercredi des Cendres.


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en septembre; provegut que, dinfra aquel temps, el aya pressa et emportada lherba delsd. pratz sy vol ; autrament, passada ladicta fiera, nonobstant que non aya point amassada lherba deld. prat, sera licite et permes ald. abbat et a sos successors, et aussy alz homes et a ung chascung delsd. homes, paysce et fayre paisce lherba delsd. pratz, en totz lors bestialz, et autrament sy explechar coma en las pallus hou explechas comunas de la villa ; ny non sera licite a dengung que tenga losd. pratz los deffendre et amparar ald. abbat, a sos successors, ny alsd. homes, que non puescon aquy paiscer, segon la forma dessus dicta. Et ont aussy volgut que, sy alcung tenent losd. pratz, bote dins losd. pratz, infra lod. temps, per depaysce hou autrament, sy serian explechat, sera licite incontinent ald. abbat, a sos successors et a ung chascung desd. habitans de SanctGily , metre son bestial , et fayre paysce, et autrament sy explechar en losd. pratz, coma poyra, en las palus et explechas comunas; ny non sera licite ny permes an aquel que ten losd. pratz, despuys quel aura comensat los paisce hou autrament explechar, los deffendre, senhar ny amparar jusquas a Caramantran ensegen ; et aussy non sera licite ny permes a dengung, deffendre ny amparar sos restobles, sy point en fay, en lasd. Corregas superiora hou inferiora, hou en las palus de lasd. Corregas, maintenant baylatz per depaysce, et autrament se explechar alsd. habitants de Sanct-Gily; mais, lo blat gitat, seront explechas ald. abbat, sos successors et habitans de lad. villa de Sanct-Gily, coma a estat dessus dict.

De justicia domini abbatis

(En cas de contestation entre l'abbé et la communauté, ledit abbé devra fournir un juge non suspect pour juger le différend.)

Fos aussy convengut et appointat, sur aulcunas demandas que mons. labbat fazia alz scindiez de lad. villa, so es que : sil avenia que losd. scindiez hou homes de Sanct-Gily, al temps advenir, aguesson alcuna question, debat, hou alcuna descention an lod. abbat, sos successors hou son monestier; que lod. abbat lor deu donar cort hou juge non suspect, et davant loqual syan tengutz de respondre coma davant lo juge donat per lod. abbat hou sos successors; car lod. abbat a poyssanca de donar lad. cort hou juge, ainsy que costa et appar par las compositions, al temps passat, per los dessusd. et nomatz, fachas entre


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losd. sindicz et monestier, ainsy que dis lod. abbat et plus amplament contengut. Convengron et transigiron, losd. sindicz, al nom que dessus, et fagueron pacte expres que Ion estessa, sur las causas dessusdictas, a la ley municipala, composition hou compositions entre lod. monestier et lad. villa fâchas al temps passat per los senhors dessusd. ; la forma laquala hou de las qualas ont volgut sya gardada et observada en las causas dessus dites.

Quob claoarius non se intromitat

de jure pertinenti ad dominum abbatem, alias quod

contineatur in compositione antiqua

(Défense au clavaire de s'immiscer dans les affaires qui ne regardent que l'abbé.)

Aussy convengron, accorderon et transigiron lasd. partidas, que lo clavari dels homes et universitat de Sant-Gily, que es de présent hou sera per lo temps advenir, uze de son office et non sy entremeta point del dretz pertenen et expectan ald. abbat hou son monestier, en sa clavaria ; car non sy deu meylar altrament deld. office de clavaria, synon que ansy que es contengut en la decision de la quarte question facha al temps passat entre los homes et habitans de Sanct-Gily, duna part, et lod. monestier, dautra, es plus amplament contengut; laquala decision ont volgut lasd. partidas esse perpetualament gardada et observada sur lod. office de clavari, sans dengung fraud ny barat.

Approbantur antiqua statuta quathenus premissis non adversantur et firmantur predicta de tempore domini hugonis, per scindicos et per eum, sub pena centum marcharum argenti soloenda per tnobedientem obebienti et per juramrntum dictorum scindicorum, sub aliis obligationibus

(Approbation des statuts antiques en tant qu'ils ne sont pas opposés aux statuts précités. — Les parties s'engagent à observer les uns et les autres, sous peine d'une amende de 100 marcs d'argent.)

Aussy ont convengut, accordat et transigit lasd. partidas, que las compositions fachas, al temps passat, entre los homes de lad.


villa et lod. monestier, et las leys municipalas, ainsy que sont escriptz en publicz documens, et lo contengut en aquellas demoron en lor robor, efficaca et fermetat, et que syan gardadas per lasd, partidas, sans dengunament venir a, lencontra, nonobstant la presenta convention, composition hou transaction, non sya anuladas lasd. antiquas compositions et leys municipalas ny alcuna causa contenguda en aquelas, synon tant solament quant al contengut en aqueste predicta composition, convention hou transaction, laquala ont volgut expressament demorar en sa robor, forsa et valor ; talament que, per lasd. antiquas compositions hou leys municipalas, non sya alcunament derrogat a la presenta composition, convention hou transaction. Et que lasd. antiquas compositions hou leys municipalas syan gardadas sans dengunament venir a lencontra, en tant que non son contrarias a la presenta ny a las causas contengudas en aquesta; laqualla convention, composition ou transaction, et tot quant en ella es contengut, losd. scindiez, per se et al nom de scindiez, duna part; et lod. mons. Hugo, abbat, per se, sos successors, et a son nom et deld. monestier, dautre part; prometton et convenon, per manieyra de pacte, entre lasd. partidas solemnament fach, et de expressa convention, per se et lors successors, prometton servar et tenir, complir et non contravenir ny fayre contra, per dolosetat ny machination denguna ; ny fayre venir per alcung titre, razo, causa hou occasion, sur la pena de cent marcz dargent bon et fin, stipulada et promessa dung cartier et d'autre, a donar et pagar a la partida obedienta et gardant la presenta convention, composition hou transaction, per la partida que non regardara ny observara, en totz los articles et chapitres dessusd.; et aquo tantes quantas vegadas luna ou lautra de lasd. partidas vendra, dira hou excogitara alcuna causa contra las causas dessusd. et una chascuna daquelas. Et non obstant que alcuna de lasd. partidas aya comessa et pagada lad. pena, so nonobstant ladita presenta composition et lo contengut en aquela demorent perpetualament en lor efficassa et fermetat, per qualqua pena pagar ; et per totas las causas dessus dictas et una chascuna daquelas gardar, tenir, fayre et entendre et accomplir per losd. scindiez, ainsy que dessus es contengut, losd. scindiez ont obligat, se, ses bens, et ponm scindics, totz los bens dung chascung delsd. habitans et de la universitat, presens et avendors ; et lod. abbat, los bens del monestier en tota renonciation de dretz et cautela. Et per major fermetat de las causas


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dessusdictas, losd. scindiez, al nom que dessus , jureront sur los sanetz evangelis, corporalament tocatz entre las mans deld. abbat, en lors armas et dung chascung de la universitat; et lod. abbat, sur la vertu de religion et de sa dignitat, prometton tous ensemble tenir et observar totas las causas dessus dictas et las emologar et confirmar al venerable convent dessusd. de Sanct-Gily, et al conseilh de la universitat delz homes de lad. villa. Renunciant lasd. partidas, et una chascuna daquellas alz noms que dessus, per manieyra de pacte exprès, et solemnament fach, al beneffice destre restitutz al premier et entier estat, et a totas exceptions et a totz dretz, action et defensa, moyenan losqualz las dictas partidas, et una chascuna delas, poyra venir a lencontra de so que dict es, convengut et transigit es dessus ; convenens et partisans entre se lasd. partidas, que lo présent public instrument puescha, a la réquisition de lasd. partidas hou alcuna delas, estre dict, ordenat, faictz et reffaietz una vegada, dos vegadas, et tres et plusors vegadas, arabe addictions et clausulas de dretz, la veritat del faitz non mudada, al dit dung hou plusors saiges, jusquas a so que aya robor de perpetual fermetat.

AMEN. DEO GRATIAS.


NOUVELLES CONSIDÉRATIONS

SUR

LE PHYLLOXERA

VOIES DE TRANSMISSION — MOYENS PRÉSERVATIFS

Par M. E. ROMANT

lemtoe non résidant

MESSIEURS ,

L'accueil bienveillant que vous avez fait, l'année dernière, à un premier mémoire que j'ai eu l'honneur de vous présenter (1) sur la maladie de la vigne, m'encourage à venir de nouveau vous soumettre quelques considérations sur le même sujet. Après avoir répondu à quelques objections qui m'ont été adressées sur l'origine du puceron, nous aborderons l'importante question de la transmission de la maladie, et nous rechercherons les moyens rationnels de la combattre et surtout de la prévenir.

CHAPITRE 1er

SOMMAIRE. — Le phylloxera n'a pas été Importé d'Amérique. — A-t-il causé autrefois, dans nos vignobles, des ravages analogues à ceux d'aujourd'hui ? — Ses moyens de transmission autour des foyers primitifs : voie souterraine, voie aérienne. — Effets pernicieux du déohaussement des racines. — Caractère zoologique du puoeron, ses moeurs, insecte ailé.

L'apparition du phylloxera dans nos vignobles n'est pas le fait d'une récente importation, et ce ne sont point des plants

(1) Voir 2me Bulletin, année 1871.


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infectés venus d'Amérique, comme on semble le croire, qui ont été le point de départ de la généralisation de l'insecte. D'ailleurs, par quelle voie seraient venus ces plants? Portaientils des racines ou des feuilles, et, pendant une aussi longue traversée, le puceron aurait-il conservé assez de vitalité à son arrivée pour se reproduire et multiplier? Le puceron, on le sait, a fait son apparition simultanément dans Vaucluse et dans la Gironde ; il faudrait donc supposer qu'il a été importé à la fois sur ces deux régions opposées. Rien jusqu'ici n'est venu justifier ce fait, et probablement rien ne viendra le confirmer. Si l'insecte désorganisateur avait pour origine des plants accidentellement introduits dans nos vignobles, on retrouverait encore ces pieds vivants dans les premières vignes infectées, soit ici, soit à Bordeaux , puisque ces cépages, quoique phylloxérés, d'après le témoignage des savants américains, résistent au parasite. De plus, si le premier foyer a été constitué par un lot de vignes ainsi importées, pourquoi le puceron ne s'est-il généralisé que dans les vignobles compris entre le département de la Drôme et celui de l'Hérault, et a-t-il épargné d'abord ceux qui sont situés au nord de ce département ? Il nous semble que l'insecte, déposé accidentellement sur ces terrains, aurait en même temps, et tout aussi facilement, remonté vers le Nord. Il n'en est point ainsi cependant, et les départements de Vaucluse, des Bouches-du-Rhône et du Gard sont presque seuls jusqu'ici envahis et ravagés par le puceron. Ces faits ne paraissent-ils point démontrer que cette région, aujourd'hui désolée par le fléau, est le berceau primitif de l'insecte ; qu'il s'est acclimaté dans ces lieux, et que probablement de tout temps il a existé sur certains de nos cépages, notamment le grenache, formant dans nos contrées des foyers primitifs, disséminés çà et là sur quelques quartiers privilégiés, et que, de ces sources alors latentes, et par l'influence des causes générales longuement étudiées dans notre premier travail, il s'est ensuite généralisé et multiplié à l'infini ?

On nous dit : mais si le phylloxera existait de temps immémorial sur les racines de quelques-uns de nos cépages, serait-il resté inoffensif jusqu'à ce jour et n'aurait-il pas quelquefois signalé sa présence par des désordres analogues à ceux qui nous affligent actuellement ? — Le puceron pouvait fort bien exister jadis et passer inaperçu. Les anciens n'avaient pas nos moyens d'investigation; nos vignobles, dans la région dévastée, étaient considérablement réduits, occupant ordinairement les

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plus mauvais terrains ; — les grenaches, spécialement affectés à la conservation des types de l'espèce, étaient peu nombreux, et conséquemment les foyers du puceron très limités. Ce n'est, en effet, que lorsque nos vignes ont été composées en majeure partie de ces cépages que les foyers de l'insecte se sont multipliés et les familles prodigieusement agrandies. On n'a pas le souvenir, il est vrai, de pareils désastres; mais il ne pouvait en être ainsi, nos vignobles étant alors fort restreints et souvent isolés et séparés les uns des autres par des distances considérables. Il n'est pas moins vrai cependant qu'on voyait, autrefois comme aujourd'hui, de loin en loin, des vignes périr subitement, mais le fait passait inaperçu; on ne remontait jamais à la cause du mal qui, peut-être, ne différait point de celle d'aujourd'hui. Il est probable que si nos vignes s'étaient trouvées nombreuses comme maintenant, et que si le même concours inouï de circonstances climatériques avait alors Sévi, les mêmes désastres se seraient infailliblement manifestés.

Si, comme nous le pensons, l'existence du phylloxéra dans nos vignobles n'est point due à l'importation de plants américains infectés, il faut donc admettre que le puceron vivait et doit vivre encore, sur les racines de certains de nos cépages, à l'état de foyers latents, en colonies restreintes ou familles dont le nombre d'individus se trouvait limité à la conservation de l'espèce ; mais qui sont devenues plus tard les points de départ de l'infection.

La création de ces foyers primitifs et latents, sources actives de la transmission, et dont la formation remonte à des époques, fort lointaines, n'est point, comme on pourrait le croire, une simple hypothèse. Il serait fort difficile de s'expliquer la marche aussi rapide du fléau sans leur concours, et la généralisation de la maladie n'a point pour origine une seule colonie de pucerons, mais des centaines de foyers existant primitivement dans nos vignobles. C'est une grande erreur de croire que le

Shylloxera, qui ravage aujourd'hui trois ou quatre de nos départements, a pour commune origine et pour berceau unique quelques vignes situées aux confins des départements de Vaucluse et dé la Drôme. Si d'autres foyers semblables n'avaient point existé en même temps dans les pays limitrophes, la géné-


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ralisation du puceron n'aurait jamais atteint la foudroyante rapidité que nous lui connaissons. Le phylloxera apparaît souvent à de telles distances de ses sources premières qu'il n'est pas possible d'attribuer la formation de ces nouveaux foyers à la contagion directe. Du reste, en parcourant les vignobles des départements envahis, on peut s'assurer que presque partout la maladie en est arrivée aux mêmes périodes. Ici, comme ailleurs, on trouve des vignes mortes, des vignes en moyenne végétation, et, dans quelques quartiers, des vignes paraissant encore saines. Cette similitude, remarquable dans les progrès du mal, indique certainement la simultanéité de l'action. Les départements qui souffrent actuellement du phylloxera cultivaient les mêmes cépages : le grenache ; il est tout naturel que, soumis aux mêmes influences climatériques, ils aient été frappés simultanément d'une commune affection. Comment aussi, sans le concours de ces foyers, expliquer l'apparition du puceron à Bordeaux pendant la même période, et maintenant en Autriche et au centre de l'Espagne ? Si donc, à d'aussi grandes distances, on a pu constater des foyers primitifs indépendants, pourquoi, dans notre pays, ces foyers ne se formeraient-ils pas de la même manière ?

L'extension du fléau, autour de ces foyers et au-delà, peut se faire selon divers modes, dont tous ne sont point encore connus ; mais il nous a paru que l'insecte se généralisait en suivant deux voies à peu près invariables : l'une souterraine, l'autre aérienne.

Un ou plusieurs de ces foyers primitifs font donc leur apparition simultanément sur divers points d'un vignoble, souvent au centre ; et, à mesure que de nouvelles colonies se forment, le mal s'irradie de proche en proche jusqu'à la circonférence. C'est par les racines, qui s'entrecroisent de mille façons à l'intérieur du sol, que s'effectue avec tant de facilité et une aussi grande rapidité le passage de l'insecte d'une souche à l'autre. Il faut cependant un certain temps, souvent une année entière, pour que la totalité d'un vignoble soit infectée, et parfois les ceps, agents primitifs de la transmission, sont tout à fait étiolés ou étiques, tandis que le reste de la plantation offre encore les apparences d'une bonne végétation.

Si des vignobles sont contigus à celui-ci et s'il n'existe entre eux aucun obstacle qui s'oppose au passage des racines d'une vigne à l'autre, la transmission s'effectuera par le même mode, et les organes souterrains sont alors de sûrs agents de propa-


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gation. En examinant ces terrains contigus quand la maladie a fait quelques progrès, on trouve que les premiers ceps étiolés sont précisément situés sur les bords immédiatement en contact avec des vignobles infectés, et la contagion, sans nul doute, est venue de leur côté. Sur les jeunes plantiers de deux à trois ans, la contagion souterraine est plus lente, parce que les racines ne se croisent point encore; et ce n'est que la troisième ou la quatrième année, alors que la communication devient facile par l'extension des racines, que la maladie progresse rapidement.

Mais quand les vignobles se trouvent séparés par des obstacles infranchissables aux racines, comme une route par exemple; un fossé large et profond; une rivière; etc., si le puceron fait son apparition au-delà, on ne peut évidemment l'attribuer à ce même mode de transmission. De nouvelles observations nous ont positivement démontré que le phylloxéra pouvait être transporté par le vent à des distances assez considérables, et que, dans les cas que nous examinons, presque toujours la transmission de la maladie s'était effectuée par cette singulière voie, et voici comment : Chacun sait qu'après la taille de la vigne, en février, mars et avril, les vignerons ont l'habitude d'enlever la terre au pied des ceps, afin de les déchausser, de manière à pratiquer autour de la souche un entonnoir, dont la terre relevée forme les bords et la tige le centre. Cette opération, qui est fort utile pour détruire autour du végétal les mauvaises herbes, les bourgeons cachés, les racines trop superficielles et déposer les engrais, devient dangereuse dans les temps actuels. La tige, ainsi décolletée jusqu'aux racines superficielles, reste à nu pendant plusieurs mois, et ce n'est souvent qu'en mai, après les derniers labours, que la terre vient de nouveau recouvrir la base de la souche. Or, nous avons observé en janvier et février, — et à plus forte raison doit-il en être ainsi en mars, avril et mai — que des pucerons existent par milliers, non-seulement sur les radicelles superficielles, mais encore sur la tige, entre les fissures de l'écorce, dans la partie maintenant découverte. Le phylloxéra, quoique engourdi l'hiver, dès qu'il est mis à nu ou accidentellement détaché de la tige, pendant l'opération du déchaussement, et lorsqu'un rayon de soleil le frappe, se met en marche, s'agite vivement pour pénétrer plus avant dans l'écorce ou descendre plus profondément dans le sol, et c'est précisément pendant qu'il exécute ces divers mouvements que


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le vent peut l'enlever et le transporter à diverses distances. Ce fait ne doit point nous surprendre ; car le vent, qui porte au loin les grains de sable et qui joue un rôle si considérable dans la dissémination des plantes, peut bien soulever et transporter le puceron, infiniment plus léger que le grain de sable ou l'akene du pissenlit. Du reste, les expériences que nous avons faites justifient pleinement ces faits : Des racines couvertes de pucerons et de leurs oeufs, exposées au soleil du printemps qui mettait les insectes en mouvement, étaient facilement dégarnies d'un grand nombre de pucerons quand on les soumettait à un vent violent. La transmission est d'autant plus assurée qu'à cet instant toutes les vignes ont subi l'opération du déchaussement; et l'insecte, à la faveur du vent qui, on le sait, dans cette saison (mars et avril), souffle de longs jours avec intensité, peut aisément passer d'une vigne infectée à celle qui est saine. L'extension rapide du fléau du Nord au Midi ; la lenteur de sa marche dans les autres directions, semblent justifier notre manière de voir.

Un autre fait qui parait l'appuyer également, c'est que les bordures des vignobles, les pieds qui se trouvent sur les berges, à la base des talus ou près des haies, dont la souche et les racines sont rarement découvertes, sont les derniers envahis, et parfois résistent énergiquement au phylloxéra. On observe aussi que certaines vignes, dont la culture est fort négligée et le terrain incomplètement défoncé, sont plus lentement infectées du puceron. Ce fait singulier trouve-t-il son explication dans les considérations précédentes, et peut-on dire que le tassement du sol autour du cep, en soustrayant les racines au contact immédiat de l'air, constitue une barrière infranchissable à l'insecte et préserve les racines ainsi isolées de la contagion aérienne ?

Enfin, l'examen attentif des racines de beaucoup de souches atteintes récemment ou prêtes à succomber aux ravages du mal, semble démontrer que le fléau est venu de l'extérieur et a progressé du dehors au dedans. On trouve, en effet, souvent les racines les plus superficielles entièrement désorganisées, tandis que les plus profondes sont encore pleines de vitalité. En découvrant, dès la première année de l'invasion, les racines les plus rapprochées de la surface, on s'aperçoit que les plus ténues sont mortes et desséchées, et que l'écorce, sur les plus grosses, est friable et se détache avec facilité. Le bois de la racine est noirâtre, comme nécrosé, et depuis longtemps la


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sève ne pénètre qu'imparfaitement son tissu. Sur tout le pourtour de la souche, on trouve les racines ainsi frappées de mort, et l'on comprend que la plante, ne subsistant plus maintenant que par ses racines profondes, pousse alors des sarments rabougris, et s'étiole ensuite quand celles-ci, à leur tour, sont épuisées par les colonies de l'insecte. Dans ces divers cas, il n'y a donc pas le moindre doute à émettre à ce que la contagion ne soit venue de l'extérieur, la maladie ayant progressé du dehors au dedans.

§ III

En signalant cette nouvelle voie de transmission, nous n'admettons pas mieux ici, et pour les raisons exposées dans notre premier travail, l'existence de l' insecte ailé : les pucerons transportés par le vent sont absolument aptères. Il y a plusieurs années que nous étudions le phylloxéra, et jamais nous n'avons pu rencontrer des insectes ailés. Le phylloxera de la vigne, en raison de ses habitudes exclusivement souterraines, diffère essentiellement des pucerons des autres végétaux par ses formes et ses moeurs, et il ne sera pas hors de propos d'ouvrir ici une courte parenthèse, afin de faire connaître les particularités qui le distinguent.

Ses principaux caractères zoologiques sont les suivants : corps allongé, aplati et sillonné transversalement, principalement vers les parties postérieures ; soies sur les parties latérales de l'abdomen et de la poitrine, mais absence des deux soies postérieures aiguës ou obtuses qui caractérisent beaucoup de pucerons. Tête arrondie, portant deux longues antennes bordées de soies fines et de grosseur presque uniforme ; deux yeux latéraux paraissant comme deux petites taches rougeàtres; trompe repliée sous la poitrine. Six pattes avec soies terminées par deux crochets aigus et deux ou trois soies arrondies en forme de boule ; couleur de l'insecte verdâtre ou jaune clair après l'éclosion, mais devenant plus foncée à mesure que l'animal avance en âge. Mâle fort difficile à distinguer, s'il existe toutefois; femelle de couleur jaunâtre, devenant arrondie comme un petit disque au moment de la ponte, et portant sur le dos de fines excroissances verruqueuses.

Les phylloxéras vivent en troupe, agglomérés et serrés les uns près des autres, à la surface de l'épiderme des racines,


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entre les fissures de l'écorce. Immobiles sur les radicelles, la trompe plongée dans l'épiderme, ils passent leur vie entière à sucer la sève de la plante. A la place qu'ils occupent, les fibrilles de la racine se couvrent de nodosités, quelquefois de plaies à bords découpés et à fond jaunâtre. La femelle pond de dix à vingt oeufs chaque fois; la ponts dure souvent plusieurs jours. Les oeufs sont de couleur jaune et tellement gros relativement au volume de l'insecte, qu'au premier abord on les prendrait pour des larves vivantes ; cependant ils sont lisses, elliptiques, n'ont ni pattes ni antennes ; ils adhèrent aux racines et sont souvent agglutinés en un seul tas. L'éclosion a lieu au bout de quelques jours, et l'insecte qui en sort, alors fort agile, suce bientôt la racine et pond après huit ou dix jours d'alimentation.

A l'inverse des autres pucerons, les femelles ne mettent jamais bas des petits vivants; seulement, comme eux, les femelles pour pondre et les oeufs pour éclore n'ont pas besoin d'être fécondés. Le rôle du mâle, s'il existe, est donc fort limité, la nature ayant considérablement simplifié la procréation de ces êtres. La ponte a lieu presque toute l'année, sauf peut-être pendant les grands froids de l'hiver qui engourdissent l'insecte. Nous avons trouvé des oeufs sur les racines au mois de janvier; seulement, d'avril à septembre, la ponte est régulière et continue. Le puceron, une fois éclos, n'éprouve aucune métamorphose ; il grossit sans se dépouiller jamais de sa peau ; toutefois le corps, d'allongé qu'il était, devient plus arrondi, et comme verruqueux sur le dos dès que la ponte s'approche; une femelle fait plusieurs pontes avant de mourir.

L'insecte ailé n'existe donc point sur les racines, et depuis deux ans que nous étudions à la loupe et au microscope le phylloxéra, nous ne l'avons pas encore rencontré. De septembre 1871 à septembre 1872, nous avons conservé, dans des vases, des racines de vigne couvertes de phylloxéras, en les faisant plonger dans l'eau par une extrémité, pour les maintenir en sève. Deux ou trois fois par jour, nous regardions, avec une forte loupe, ces colonies de pucerons, et jamais nous n'avons pu découvrir le moindre phylloxéra ailé. Si l'insecte ailé existait, il ne nous aurait point échappé, et, sans aucun doute, nous l'aurions trouvé confondu avec les insectes aptères, comme cela existe pour les pucerons aériens des autres plantes. Nous suivons ces expériences depuis plus d'un an, ayant soin de renouveler tous les mois nos racines qui finissent par se des-


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sécher; nous avons vu pondre ainsi les femelles et éclore les oeufs; nous avons vu grossir les insectes, et nous nous sommes assuré qu'ils peuvent vivre ainsi en plein air, étant placés sur des racines fraîches, dans un lieu humide et à l'abri d'une trop vive lumière ; mais ils sont restés constamment aptères.

Il est donc pour nous acquis jusqu'à ce jour que la transmission du phylloxera ne se fait point par l'intermédiaire d'un insecte allé, déposant ses oeufs sur les feuilles ou les jeunes rameaux et donnant naissance à des colonies qui descendent sur les racines. La vigne peut bien nourrir sur ses feuilles ou ses nouvelles pousses, comme beaucoup de végétaux, un puceron qui ne fera point exception à la règle générale et aura ses insectes ailés ; mais ce puceron sera toujours distinct de celui des racines, et il n'est pas possible qu'il s'identifie avec lui. Le puceron des racines peut bien vivre longtemps à l'air, comme nous l'avons observé ; mais si des racines on le dépose sur les feuilles ou sur les jeunes rameaux, il ne tarde point à mourir. Il n'y a donc identité d'aucune sorte entre le puceron des feuilles et celui des racines. Nous reviendrons du reste sur ce point important, et au printemps prochain nous nous promettons de renouveler nos expériences.

CHAPITRE II

SOMMAIRE. — Indications à remplir dans le traitement de la maladie de la vigne. — Irrigation et submersion des vignobles. — De l'eau comme moyen destructeur du phylloxéra. — Moyens certains de s'opposer à la contagion immédiate. — Précautions indispensables contre la transmission aérienne. — Eviter le déchaussement, l'arrachage et le BRULIS de la plante. — Précautions rigoureuses à suivre pour réussir les nouvelles plantations. — Traitement ouratif.

Nous avons attribué la généralisation du puceron et sa rapide propagation à des influences climatériques générales qui, en privant la plante de ses éléments indispensables (les sels alcalins), en ont diminué la force de résistance, modifié la constitution, et, par cet affaiblissement, l'ont préparée à recevoir le puceron. C'est sous l'influence de ces causes pernicieuses,


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notamment la sécheresse, que les anciens foyers latents se sont progressivement développés et puis ensuite étendus à l'infini. Donc, combattre les causes de cette généralisation et ramener, s'il est possible, l'espèce à son type primordial, à ses colonies et à ses anciens foyers latents primitifs, tel est le problème qu'il faut actuellement résoudre.

Détruire les innombrables familles de pucerons qui pullulent sur les racines de nos vignes est, nous l'avons reconnu, une tâche au-dessus des efforts de l'homme, puisque nous ne pouvons rien contre les influences climatériques qui perpétuent la maladie. Nous accordons une grande confiance à l'irrigation ou à la submersion des terres, soit pendant l'hiver, soit au printemps, comme l'ont pratiquée quelques agriculteurs. L'eau, en effet, constitue à elle seule un excellent moyen destructeur du phylloxéra. Ce qui nous le prouve, c'est que, après les pluies de février 1872, en examinant les racines de certaines vignes que nous suivions plus spécialement nous avons trouvé sur l'épiderme un grand nombre de pucerons morts et desséchés. Avant l'arrivée de ces pluies, les racines de ces mêmes vignes portaient des colonies forts robustes et bien vivantes. De même, sur les racines que nous conservons pour suivre les phases de l'insecte, si nous élevons le niveau de l'eau dans nos vases, de telle sorte que les pucerons ou leurs oeufs soient un instant submergés, cela suffit toujours pour entraîner la mort de l'insecte au bout de quelques jours et empêcher les oeufs d"éclore. Aussi, cette année, avions-nous l'espoir de voir arriver en abondance les pluies du printemps et nous comptions sur leurs effets bienfaisants pour améliorer l'état de nos vignobles. Malheureusement, la sécheresse a persisté et nous avons obtenu juste l'humidité nécessaire à l'épiation de nos blés. D'une manière générale, les pluies abondantes détruisent les oeufs et les larves des pucerons aériens, et, en diminuant le nombre des familles, ralentissent les progrès de l'espèce ou les limitent à des proportions moins destructives pour les plantes. Depuis plusieurs années et surtout ces deux dernières, sous l'influence de ces conditions atmosphériques favorables, nous avons vu persister tout l'été des familles nombreuses de pucerons qui ordinairement, ne persistaient que quelques mois et s'évanouissaient aux premières pluies abondantes. Nous avons vu au mois de juillet un fait inouï : Des nuées de papillons se sont abattus dans les rues de notre village, et pendant quelques jours on aurait pu en prendre avec un filet des milliers. Cela nous


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promet certainement une belle récolte de chenilles. Si donc les circonstances climatériques actuelles sont favorables à la multiplication des divers insectes, pourquoi ne le seraient-elles point aux pucerons de la vigne.

L'arrosage limité au pied du cep avec divers agents insecticides ne peut rien sur les vignobles complétement phylloxérés ; et ce n'est réellement qu'au début du mal et employé dans certaines conditions, qu'il peut rendre quelques services. La multiplicité des vignobles frappés, l'étendue et la profondeur des racines du végétal, sont autant d'obstacles insurmontables à franchir. Mais s'il faut abandonner aux seuls soins de la nature les vignes depuis longtemps atteintes et renoncer à l'espoir de les voir se régénérer par d'autres conditions que l'éloignement des influences climatériques qui nous affligent depuis 5 à 6 ans (la cessation de la sécheresse), il nous reste cependant quelque espérance pour préserver du puceron celles qui n'en sont point encore envahies, et peut-être pourrait-on sauver les plantiers à la première période de l'invasion.

Si les moyens de propagation de l'insecte, c'est-à-dire les modes selon lesquels il passe d'un vignoble à l'autre, étaient parfaitement connus — et c'est là, il ne faut point se le dissimuler, le point capital de la question — il est évident qu'on aurait trouvé les bases certaines d'une bonne méthode préservatrice. Aussi, est-ce vers ce but que doivent tendre les efforts de ceux qui se livreront à l'étude du fléau, si l'on veut arriver à la solution du problème. Le traitement préservatif que nous allons exposer est le corollaire des moyens de transmission que nous avons signalés plus haut, et s'il n'a pas toute l'efficacité que nous désirerions, nous pensons que son expérimentation sérieuse pourra peut-être nous mettre sur la voie tant désirée.

Lorsqu'on aura reconnu après un examen sévère, soit par l'inspection des racines et sur plusieurs points opposés d'un vignoble, soit par l'examen des sarments, qu'il n'existe aucune trace de phylloxera, que la vigne soit nouvelle ou ancienne, le premier moyen à mettre en pratique sera de creuser sur chacune des faces contiguës à d'autres vignobles, un large et profond fossé, afin d'empêcher toute communication d'un terrain à l'autre par l'intermédiaire des racines. Le jeune plantier ou la vigne à préserver sont ainsi complètement isolés des voisins,


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et nul doute qu'on ne s'oppose, par ce moyen, à la contagion immédiate de racine à racine, toujours la plus dangereuse et la plus sûre dans ses effets.

Pour s'opposer aux effets de la transmission aérienne et par la voie des vents, les précautions les plus minutieuses devront être rigoureusement prescrites. Le plus grand danger existant lorsque les ceps sont décolletés et les racines superficielles mises à nu par l'opération du déchaussement, il devient urgent d'en surveiller l'application, d'en modifier les règles, afin de ne point laisser à l'insecte une voie toute ouverte qu'il lui sera facile de suivre, pour arriver ensuite progressivement vers les régions plus profondes.

Aussi, dès qu'il est reconnu qu'une vigne est infectée de pucerons, doit-on rigoureusement proscrire sur ce terrain l'opération du déchaussement des ceps et se contenter de simples labours, afin de ne point ouvrir au puceron une voie de sortie, et au vent une occasion d'enlever les insectes mis à découvert et de les déposer un peu partout sur les vignes voisines.

Si la vigne est déjà morte ou n'offre plus aucun espoir de guérison, la majorité des pieds étant étiolés ou étiques, il faut bien se garder de l'arracher avant que les racines ne soient entièrement désorganisées et la souche absolument desséchée et surtout, comme le font la plupart des vignerons, laisser les souches arrachées entassées sur le sol pendant de longs jours. Dans tous les cas, on ouvre à l'air de vastes foyers d'infection qui deviennent bientôt la source d'une active contagion. Il vaut mieux attendre une aimée encore le complet desséchement de la souche et la disparition du puceron et perdre une récolte, que de s'exposer, par ces imprudences, à voir la maladie se propager. Au reste, il est facile d'utiliser le terrain, en semant entre les rangées de souches, du millet à balais, des pommes de terre, des betteraves etc., comme on le pratique déjà dans quelques localités.

Pour toutes ces raisons, nous condamnons d'une manière absolue, l'opération conseillée par quelques agriculteurs (l'arrachage et le brûlis des souches), faite dans le but de détruire sur place les premiers germes de l'infection. Ce procédé, outre qu'il est fort dangereux, parce qu'il ouvre une voie à l'insecte, ne remplit jamais le but qu'il se propose. Ordinairement, lorsqu'on aperçoit dans quelques parties d'un vignoble des souches étiolées, non-seulement tout le vignoble est envahi par le puceron, mais les plus voisins le sont également, et l'ins-


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pection des racines à diverses distances du point attaqué ne laisse aucun doute à cet égard.

Quant aux vignes encore saines qu'il s'agira de préserver, au lieu de les déchausser, on se contentera, après les premiers labours, de les travailler au pied, de purger le pourtour du cep des mauvaises herbes, d'en arracher le chiendent ; mais, dans aucun cas, on ne doit jamais mettre à nu la tige trop profondément, surtout la laisser décolletée aussi longtemps qu'on en a l'habitude, sous peine des plus grands dangers. Pour les travaux de fumure, il vaudrait mieux les faire entre les rangs, mais si le fumier est déposé au pied du cep, on doit le recouvrir immédiatement; éviter les grands vents, et, dans tous les cas, toujours tasser la terre autour de la plante, afin de fermer toute voie à l'insecte.

Il n'est pas prudent de se servir des mêmes instruments aratoires pour les vignes saines et les malades, au moins faut-il, si l'on n'a point de charrues de rechange, laver ou soigneusement détacher la terre encore adhérente aux instruments habituellement employés.

En présence du fléau actuel, doit-on continuer à faire des plantations? Nous répondrons affirmativement; seulement on devra se montrer très rigoureux sur l'observation des principes précédents si l'on veut les préserver de l'invasion. C'est par de nouvelles plantations que nous parviendrons peut-être à régénérer nos vignobles; car, si, abandonnant nos vieilles vignes au fléau, nous étions assurés de les remplacer sûrement dans un temps rapproché, le résultat obtenu serait encore immense.

Quand on désirera faire une plantation, outre les conditions précédentes d'isolement et de culture, il faudra tenir compte encore des plants, des cépages et de la nature du terrain.

On ne doit point choisir les plants sur les quartiers envahis par le puceron ; car, outre leur peu de vigueur, on s'expose, en les déposant sur le terrain infecté, à transporter l'insecte ou ses oeufs, lesquels, fixés sur le sarment, dès qu'ils seront enfouis dans le sol formeront le noyau d'une première colonie. Il faut aussi se garder pour les mêmes raisons d'enfouir les plants dans un sol infecté ou à proximité de celui qui l'est ; jamais sous le vent ; avoir la précaution, si l'on veut surtout obtenir des plants chevelus, de les soustraire à la contagion, en les abritant au


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pied d'un mur élevé ou à la base d'un talus qui les protége des vents violents. Nous avons trouvé des plants chevelus d'un an portant déjà quelques colonies fort robustes de pucerons ; ils s'étaient infectés par l'oubli de ces simples précautions.

Comme nous l'avons dit dans notre première communication, on doit aussi tenir grand compte de la nature du cépage et ne se décider qu'à planter les plus robustes ; éliminer sévèrement les grenaches et choisir ceux que l'expérience et l'observation auront reconnus les plus résistants au fléau actuel.

Nous devons repousser de nos plantations les grenaches, si nous voulons sérieusement régénérer nos vignobles. Nous insistons vivement sur cette condition, parce que nous avons la ferme conviction, basée du reste sur des faits incontestables, que nous devons à cette espèce, très sensible au puceron, la généralisation de la maladie. Les quelques vignobles qui nous restent encore appartiennent à des espèces différentes; et si des plantiers de deux à trois ans conservent jusqu'ici une bonne végétation, c'est que les grenaches en ont été exclus. Aussi, recommandons-nous très instamment l'élimination de ce cépage dangereux quand il s'agira de créer de nouvelles plantations. Nous avons dans nos pays des espèces acclimatées, robustes et résistantes qu'il ne faudrait point négliger, comme on l'a fait malheureusement, pour cultiver exclusivement les grenaches, ce sont : le terret et ses variétés, l'espar, la clairette, ensuite l'aramon, le mourâstel etc., qui, lorsqu'ils sont atteints, ne le sont jamais primitivement, mais toujours par contagion, étant à proximité des grenaches infectés et, malgré cela, résistant plus longtemps aux ravages de l'insecte.

Pour obtenir cette force de résistance qui manque à certains de nos cépages, devrions-nous aller jusqu'à leur régénération par voie de semis, qu'il ne faudrait point reculer devant cette pénible tâche. Nous pourrions ainsi nous procurer des plants à racines robustes qui, greffés ensuite, seraient peut-être épargnés par le phylloxéra. Que chacun de nous sacrifie un coin de terre, comme nous allons le faire cette année, à créer ces plants par des semis et, dans quelques années, nous serons, je le pense, en mesure de lutter contre l'insecte destructeur. C'est là, il est vrai, une voie bien lente de régénération; mais elle est peut-être indispensable pour créer des espèces rustiques, à sève moins sucrée, et capables de repousser le puceron. Le temps presse, mettons-nous à l'oeuvre !

Enfin, si nous avions assez d'autorité pour hasarder un


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conseil aux viticulteurs des pays encore non envahis, nous leur dirions : Gardez-vous d'abandonner, comme nous l'avons fait imprudemment, les cépages identifiés, pour ainsi dire, à votre sol et à votre climat et de les remplacer surtout par les grenaches. si vous voulez prévenir le fléau. Interdisez même chez vous les plantations de ce cépage; surveillez soigneusement celles qui peuvent exister déjà et, comme mesure préventive, isolez vos vignobles de ces dangereuses plantations. Soyez persuadé que le jour où le grenache occupera une partie de votre terrain, le puceron le suivra de près et anéantira en quelques années vos superbes vignobles.

Le choix du terrain est aussi d'une importance considérable pour la nouvelle plantation. Tous les terrains indistinctement ne conviennent pas à la vigne, et nous croyons qu'il est temps de briser avec les procédés de routine que nous suivons sans raison, ni logique. Les sols, comme nous l'avons reconnu, résistent à la maladie en raison de leur nature et de leur richesse en potasse. Nous devons donc renoncer à planter ceux à base argileuse et à sous-sol de même nature, rejeter également surtout ceux qui sont habituellement bas et humides parce qu'ils deviennent trop compactes avec la sécheresse et nuisent au développement des racines. Choisir en général, des sols légers, calcaires, caillouteux, ou sablonneux, dans lesquels les racines s'enfoncent profondément et vont au loin chercher leur nourriture.

Toutes ces conditions paraissent minutieuses, mais l'on ne saurait trop prendre de précautions contre un insecte qui se glisse partout, et qui, une fois fixé, se multiplie avec une aussi effrayante rapidité.

Enfin, si malgré les soins les mieux ordonnés et les plus sages précautions, le phylloxera fait son apparition dans les plantiers de un à trois ans, — ce qu'il est aisé de reconnaître à la pâleur des feuilles, au rabougrissement des sarments et mieux encore par l'exploration des racines, — il reste comme dernière ressource le traitement curatif. C'est dans ce cas qu'on peut avoir recours aux liquides ou aux poudres insecticides avec quelque chance de succès. Le cep de un à trois ans se trouve dans de meilleures conditions que la vigne vieille pour être soumis aux agents destructeurs du phylloxéra; les racines sont peu profondes encore, elles ne s'éloignent que fort peu de la tige, elles sont isolées, ne s'entrecroisent point avec celles des rangées voisines, et elles peuvent par conséquent être faci-


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lement atteintes par les liquidés insecticides. On peut essayer l'acide phénique, l'huile de cade, le sulfure de potasse, etc., dissous dans l'eau et versés au pied du cep après déchaussement préalable.

Le choix de l'agent insecticide est, selon nous, fort indifférent; des centaines de remèdes peuvent tuer l'insecte; là principale difficulté, c'est de l'atteindre. Dans tous lès cas, l'entonnoir pratiqué par le déchaussement devra descendre le plus profondément possible de manière à découvrir la superficie des principales racines.

CONCLUSIONS

De nos études sur la maladie de la vigne, nous croyons pouvoir déduire les conclusions suivantes :

1° Le phylloxera ou puceron des racines a toujours existé dans nos vignobles, et quelques-uns de nos cépages, les grenaches notamment, le conservaient à l'état de foyers latents. La sécheresse, en privant la plante d'eau et de sels alcalins, a modifié la nature de la sève, affaibli le végétal et l'a préparé à recevoir le puceron. Les nombreuses plantations de grenaches ont considérablement accéléré la généralisation de la maladie ;

2° Le phylloxera se transmet d'un vignoble à l'autre par deux voies; l'une souterraine, de racine à racine quand les terrains sont contigus; l'autre aérienne, par l'intermédiaire des vents qui transportent l'insecte au loin quand les racines sont mises à nu accidentellement ;

3° L'eau est un excellent moyen destructeur du phylloxera. La submersion des terres l'hiver ou l'arrosage au printemps ont des effets à la fois préservatifs et curatifs;

4° On s'oppose à la transmission immédiate, de racine à racine, en creusant, entre les terrains contigus, un large et


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profond fossé, afin de détruire les racines infectées et isoler les plantations.

Pour combattre la transmission aérienne ou en diminuer considérablement les effets, on doit rigoureusement interdire l'arrachage et le colportage des racines phylloxérées, et surtout s'opposer à ce que, fraîchement arrachées, on les laisse en tas sur le terrain pendant les grands vents du Nord. Laisser la souche se dessécher avant de l'arracher, et utiliser en attendant le terrain en semant, entre les rangs, du millet à balais, des pommes de terre ou autres plantes. Proscrire absolument l'opération du déchaussement, fumer entre les rangs, travailler la plante au pied, mais tasser ensuite la terre.

Ne point se servir des mêmes instruments aratoires, pour les vignes saines et les vignes malades ; ou du moins soigneusement enlever la terre qui recouvre ces instruments avant de les utiliser.

5° Faire les nouvelles plantations d'après les principes suivants :

Choisir un terrain léger, calcaire, caillouteux ou sablonneux et riche en sels potassiques ; éviter les sols trop compactes, à base argileuse, qui sont ordinairement bas et humides et souffrent plus fortement de la sécheresse persistante ;

6° Chercher ses plants dans les vignobles non infectés et surtout ne point les enfouir à proximité des racines phylloxérées. Eliminer des divers épages dont on fera choix, les grenaches dont les plantations devraient être absolument interdites. Choisir les espèces les plus robustes et les plus résistantes au puceron : le terret, l'espar, la clairette, ensuite l'aramon, le mourastel, etc.

Essayer des semis pour se procurer des plants plus rustiques, qui, ensuite greffés, seraient sûrement moins sensibles au puceron.

7° Donner aux vignes une bonne culture et une fumure en harmonie avec les produits absorbés par plante. Seront d'excellents moyens adjuvants : les cendres, la suie, les débris de vieux murs, les feuilles des arbres, les débris ligneux de beaucoup de végétaux, substances forts riches en potasse, et capables de donner au végétal une grande activité de végétation qui en doublera la force de résistance ;

8° Renoncer enfin aux remèdes ou liquides insecticides pour


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les vignes déjà anciennes, parce qu'ils ne peuvent atteindre l'insecte à cause de la profondeur et de l'étendue des racines; mais ne point négliger ces moyens pour les plantiers de un à trois ans dont les racines, encore peu étendues, pourront être atteintes par les liquides déposés au pied de la souche. C'est ainsi que peuvent être utilisés : l'huile de cade, l'acide phénique, le sulfure de potasse dissous dans une certaine quantité d'eau.

E. ROMANT. Remoulins, 8 septembre 1872.

16


DE

L'ALESIA

dont il est fait mention

DANS LA VIE DE SAINT GERMAIN D'AUXERRE

Écrite par le prêtre CONSTANCE

Quelques années après la mort de cet Evêque (1)

Par M. L. CHAMBOREDON, Membre résidant

Dans la vie de saint Germain d'Auxerre, par le prêtre Constance, il est dit : que cet évêque en se rendant à Arles, auprès de saint Hilaire, s'arrêta à Alesia où il guérit la femme d'un sénateur.

L'auteur ne s'explique pas sur la position de cette Alesia, et l'on est à se demander si c'est du Pagus-Alisiensis, d'Alise, aujourd'hui Sainte-Reine, dont il entend parler, ou bien de l'Aleta des Cévennes, d'Alais, que les Grecs ioniens de Marseille et d'Arles désignaient vraisemblablement du nom d'Alesia.

Toutefois, lorsqu'on examine avec attention les raisons qui miiltent en faveur de cette dernière, on est amené à penser que c'est, selon toute apparence, d'elle que l'auteur a entendu parler.

(1) Saint Germain d'Auxerre vivait dans la première moitié du ve siècle, et son biographe dans la seconde. Ils étaient ainsi presque contemporains.

C'est à la prière de saint Patient, évêque de Lyon, que Constance écrivit la vie de saint Germain.

Le prêtre Constance était un homme d'une piété exemplaire, animé d'une foi ardente et tout dévoué aux intérêts du Christianisme.

Lié d'une étroite amitié avec Sidoine Apollinaire, natif comme lui de Lyon, il se retira auprès de lui à Clermont, et finit, à ce que l'on croit, ses jours dans cette ville.

Outre la vie de saint Germain d'Auxerre, on attribue encore au prêtre Constance la vie de saint Just.


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Il est certain qu'il ne peut être ici question de la fameuse Alesia des Commentaires; cette ville avait été, en effet, entièrement détruite par César, selon Florus, et il n'en restait plus alors que le souvenir. Quant au village qui fut bâti au pied du plateau où elle était assise, et qui reçut le nom de PagusAlisiensis, village d'Alise, il n'eut jamais aucune importance. C'était une localité sans vie, sans attrait, qui devait être généralement peu connue, mais qui pouvait l'être cependant du prêtre Constance, sous le nom qu'elle portait. Il est donc probable que si cet écrivain avait entendu parler d'elle, il l'aurait désignée sous le nom de Pagus-Alisiensis.

Mais ce qui nous porte à croire, surtout, que ce n'est pas à Alise que saint Germain s'arrêta, c'est qu'il n'est pas admissible que, dans l'état où se trouvait la Gaule à cette époque, il y eut des sénateurs dans cette localité, ainsi que l'a observé, avec juste raison, L. de Mandajors. En effet, presque toute la Bourgogne, jusque dans le voisinage d'Auxerre, était alors au pouvoir des Burgondes qui l'avaient ravagée et pillée, et d'où les familles opulentes et patriciennes devaient avoir disparu depuis longtemps, si elles n'avaient péri; tandis que, sans nul doute, des sénateurs pouvaient se trouver à Alais, placée dans le voisinage d'Arles, considérée alors comme la métropole de la Gaule, et aux environs de laquelle devaient se répandre des familles riches, occupant un rang distingué, dont les chefs pouvaient être membres du Sénat romain (1) ou avoir fait partie de celui qui avait été créé quelques années avant, dans cette métropole, sous le règne éphémère de ce Constantin, auquel les historiens donnent le nom de tyran ou d'usurpateur (2).

(1) Nous sommes bien aise de rappeler ici que les membres du Sénat, natifs de la Narbonnaise, ou qui y possédaient des terres, étaient exemptés de la loi commune, qui défendait aux personnes qui faisaient partie de ce corps, d'habiter dans les provinces sans une permission expresse.

(2) Sous Honorius, vers 408, au moment où l'Empire tombait en dissolution, ce Constantin, homme hardi, influent et vraisemblablement Gaulois de nation, entreprit, d'accord avec ses partisans, de fonder à son profit un Empire des Gaules. C'est un fait que M. Amédée Thierry s'est attaché à mettre en lumière dans un récit plein d'intérêt.

Constantin établit à Arles le siége de son Empire, à l'exemple de Constantin le Grand, et y créa un Sénat à l'instar de celui de Rome.

A la chute de cet Empire gaulois qui ne dura qu'un moment, Honorius, après avoir recouvré les provinces de la Gaule qui restaient sous la domination romaine, conserva pour Arles la même affection que ses prédécesseurs avaient eue pour elle. Il y établit un préfet du prétoire pour les Gaules, qui représentait l'empereur pendant son absence.


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Nous ajouterons qu'il pouvait aussi se trouver à Alais, des membres de cette assemblée de notables qu'un édit d'Honorius institua, en 418. Ces notables, qui étaient choisis parmi ce qu'il y avait de plus distingué, formaient une classe privilégiée et pouvaient être désignés vulgairement sous le nom de sénateurs.

Ainsi, s'il est difficile d'admettre qu'il y eut des sénateurs à Alise, à l'époque du voyage de saint Germain à Arles, tout concourt au contraire à établir qu'il pouvait y en avoir à Alais.

Il n'est pas probable, d'ailleurs, que pour se rendre à Arles, saint Germain ait été passer par Alise et Dijon. Nous ferons remarquer, en effet, que pour aller d'Auxerre aux Bouchesdu-Rhône, on prenait alors la route d'Autun (l'ancienne Bibracte), ou bien celle qui conduisait directement à Arles par Nevers et la vallée de l'Allier, en passant par Alais (l'Aleta, l'Alesia des Cévennes).

Aujourd'hui même, lorsqu'on veut aller d'Auxerre à Lyon, on prend encore la voie d'Autun ; à plus forte raison devait-on

Il voulut ensuite relever de l'oubli les anciens conventus des Gaulois; et, par son édit de 418, il chargea le préfet du prétoire de réunir tous les ans, à Arles, du 15 août au 15 septembre, une assemblée composée des hommes les plus considérables, choisis dans les sept provinces de la Gaule qui restaient encore à l'Empire (c'est-à-dire de la première Viennoise, des deux Narbonnaises, des deux Aquitaines, de la Novempopulanie et des Alpes maritimes). Cette assemblée devait s'occuper des affaires de ces provinces et des moyens de pourvoir à leurs besoins les plus pressants.

Les membres de cette assemblée, que l'édit désigne sous les noms de honorati, possessores, judices, et qui étaient nommés par l'empereur, formaient une classe privilégiée, pareille à celle des patriciens ; il n'est donc pas improbable que le vulgaire les ait considérés comme des sénateurs et les ait qualifiés de ce nom.

Ce que nous venons de dire doit suffire, ce nous semble, à établir que des familles de sénateurs ou des personnes désignées sous ce nom pouvaient très bien se trouver à Alais à l'époque du voyage de saint Germain dans le Midi.

Nous ne voulons point terminer ces observations sans ajouter que certains écrivains regardent l'assemblée des notables, instituée par l'édit d'Honorius, comme étant l'origine des anciens états de Languedoc et de Provence; d'autres, au contraire, tels que les auteurs de l'histoire du Languedoc, et M. de Larcy dans ses remarquables études sur les Vicissitudes politiques de la France, font remonter cette origine aux anciens conventus des Gaulois. Ainsi, d'après ces derniers, l'institution de ces conventus, qui n'aurait été que réorganisée par Honorius d'une manière légale, se serait maintenue à travers les âges, depuis des temps fort reculés (et tout au moins depuis le Ve siècle) jusqu'à la révolution de 89, et malgré les interruptions que lui auraient fait subir les invasions des peuples du nord et celles des Sarrasins, elle aurait conservé cet esprit de vie dont elle fut animée dès le principe.


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la prendre au Vme siècle, époque à laquelle Dijon, alors à l'état de germe sous le nom de Dibio, était privée des belles routes qui y aboutissent et n'offrait aucun attrait pour les voyageurs.

Il est d'autant moins probable que saint Germain ait pris le chemin d'Alise, qu'au moment même où il se rendait à Arles, les routes de la Bourgogne étaient infestées de bandes de barbares qui la parcouraient dans tous les sens, et n'offraient aucune sécurité. Et comme cette même cause, qui devait l'empêcher de prendre la voie d'Alise, lui interdisait aussi celle d'Autun, il dut, selon toute apparence, se diriger vers le Midi par Nevers et la vallée de l'Allier, route que prenaient alors beaucoup de voyageurs qui se rendaient du Centre et du Nord vers le littoral de la Méditerranée, et réciproquement; route qui était pour lui plus sûre et plus courte, et lui offrait, en outre, l'avantage de voyager presque immédiatement dans les provinces qui restaient encore à l'Empire.

Nous ajouterons que dans la première moitié du vme siècle, époque à laquelle vivait saint Germain, la langue grecque était généralement parlée à Marseille, et qu'à Arles, peuplée de Grecs, cette langue y était peut-être en usage plus que le latin (1); que de ce fait on peut induire qu'Alais (Aleta, Alessa, Aledsa, Alesta, Alest) devait être alors vraisemblablement connue et désignée, dans le dialecte ionien de ces deux villes, sous le nom d'Alesia. Quant à la dénomination d'Alestum que les Romains lui donnaient, elle n'était guère employée encore que dans les actes administratifs.

(1) Saint Césaire d'Arles, qui vivait au VIe siècle, recommande, dans une lettre pastorale, aux fidèles laïques qui assistent aux offices divins, de chanter à hauts voix à l'exemple des clercs, les psaumes, les hymnes et les cantiques, los uns en grec et les autres en latin, suivant la langue qu'ils parlent. Cette pratique fut observée non-seulement à Arles, mais encore dans toutes les églises voisines de cette métropole. Ce qui prouve que l'usage de la langue grecque était encore fort commun non-seulement à Arles et à Marseille, mais encore dans une partie du littoral.

Si cette langue était ainsi assez généralement parlée à Arles et à Marseille pendant le VIe siècle, à plus forte raison devait-elle l'être pendant le Ve.

On croit, du reste, que la langue grecque ne s'éteignit à Marseille et à Arles que vers le Xe siècle et peut-être même plus tard.

Les langues, celles qui sont formées surtout, comme l'était la langue grecque, se maintiennent et se conservent même au contact des idiomes qui les dominent et qui sont imposés aux habitants comme langues nationales. Ainsi, dans certaines parties du royaume de Naples, on rencontre des localités où la langue grecque est encore parlée. En France, on voit la langue romane (notre languedocien) se maintenir depuis plusieurs siècles au contact du français, tout en se modifiant, mais en conservant néanmoins sa forme primitive.


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On est donc porté à penser que si le prêtre Constance fut prendre à Arles, ou y fit demander des renseignements sur le voyage de saint Germain et sur le séjour que cet évêque fit dans cette ville, on dut lui apprendre que saint Germain, en se rendant auprès de saint Hilaire, s'était arrêté à Alesia, où son nom était resté en vénération, sans s'expliquer probablement sur la situation de cette localité; mais il est à présumer que cette dénomination d'Alesia, dans l'esprit des personnes auxquelles il dut s'adresser, se rapportait évidemment à l'Aleta, à l'Alesia des Cévennes, qui leur était connu sous ce dernier nom, et non au Pagus-Alisiensis dont ils ignoraient peut-être l'existence.

Ce que nous venons de dire doit faire facilement comprendre pourquoi l'auteur de la vie de saint Germain, a employé la dénomination d'Alesia pour désigner l'Aleta des Cévennes, plutôt que celle d'Alestum que les Romains lui donnaient.

L'emploi du nom Alesia, par le prêtre Constance, ne peut donc être un motif pour faire penser que cet auteur a entendu désigner par ce nom toute autre localité que celle-ci.

Les raisons que nous venons d'exposer nous semblent établir suffisamment que l'Alesia dont il est fait mention dans l'écrit en question, était bien Alais (l'Aleta, l'Alesia des Cévennes), et justifier ainsi l'opinion que nous avons déjà émise à ce sujet.

Une chose, au surplus, qui nous paraît la corroborer et la confirmer en quelque sorte, c'est le nom de saint Germain que porte le Mont-aigu (mons-acutus), au pied duquel Alais est située, nom que cette montagne doit vraisemblablement à un oratoire ou à une petite chapelle, qu'une pieuse reconnaissance édifia à son sommet et dédia à saint Germain, en souvenir des actes de bienfaisance et de charité, par lesquels cet évêque avait signalé son passage dans nos contrées (1).

(1) Notre honorable confrère (M. C. Fabre), dans son élégante monographie de l'abbaye de Saint-Germain, signale une version locale qui s'est propagée depuis plusieurs générations à Alais et dans son voisinage, laquelle attribue la fondation de l'abbaye de Saint-Germain, à l'accomplissement d'un voeu pieux fait par la femme d'un sénateur, en reconnaissance de sa guérison opérée par saint Germain d'Auxerre.

Cette version , qui a vraisemblablement pour base l'opinion émise dans le temps sur Saint-Germain, par Louis de Mandajors et par son fils, nous parait donner à la fondation de ce monastère, une date un peu trop reculée, en la faisant remonter au Ve siècle ; nous ne pouvons donc l'adopter.

Nous pensons, néanmoins, que l'origine de cette abbaye peut très-bien se


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De ce qui précède, il nous paraît résulter que la vie de saint Germain d'Auxerre, par le prêtre Constance, doit être considérée comme un document historique d'une certaine importance pour cette localité.

Ce document pourrait attester à lui seul l'ancienneté de cette ville, si d'ailleurs, des monnaies du temps des Mérovingiens, des médailles et les débris d'antiquité exhumés dans divers quartiers ne concouraient aussi à en fournir la preuve ; et si, d'autre part, des faits, basés sur des données incontestables et sur des interprétations admises aujourd'hui comme des vérités historiques, ne tendaient à établir ses droits à une haute antiquité et à lui donner une origine pareille à celle de Nimes (Nemausus) et d'autres cités fondées par les Tyriens, dans les XIIe et XIIIe siècles avant notre ère.

rattacher à celle d'un oratoire ou d'une chapelle, qu'une pieuse reconnaissance aurait édifiée en l'honneur de saint Germain, au sommet de Montaigu.

Nous ajouterons que la renommée que cette chapelle put acquérir, à une époque de bouleversements et de désolation, et l'affluence des malheureux qui s'y rendaient pour demander à Dieu quelque soulagement à leurs maux, engagèrent, peut-être, l'ordre de Saint-Augustin à envoyer sur cette hauteur, (vers le IXe siècle) une colonie de ses membres, pour y fonder, auprès de cette chapelle, le vaste monastère, dont il ne reste aujourd'hui que les ruines.

A l'appui de l'opinion que nous venons d'émettre, nous rappellerons que d'après une tradition locale qui s'est perpétuée d'âge en âge dans notre localité, la chapelle de Saint-Germain était, chaque année et depuis un temps immémorial, l'objet d'un solennel pèlerinage, auquel s'empressaient d'assister un grand nombre de fidèles. Ce jour-là, le clergé d'Alais s'y rendait en procession pour aller visiter l'église de pieuse fondation.

Cette ascension religieuse qui se faisait dans la semaine de Pâques, se rattachait probablement aux premiers pèlerinages auxquels la renommée de la chapelle dédiée à saint Germain, avait donné lieu, et son institution remontait, peutêtre, à l'époque de sa fondation, au Ve siècle.


DE NUIT TOUS LES CHATS SONT GRIS

CONTE EN VERS Par M. J, LISBONNE, membre non résidant

Suivre la fumée odorante De son cigare dans les airs ; Suivre la pensée inconstante Qui se formule dans un vers.

Suivre le rêve qui séduit ; Suivre dans le ciel une étoile ;

Le nuage changeant qui fuit ; Dans la déserte rue, un voile.

SYLVESTRE.

C'était un soir d'hiver. Les étoiles brillaient Comme des diamants au ciel ; il pouvait être Dix heures et le quart. A plus d'une fenêtre, Les lumières passaient, pâlissaient, s'éteignaient.

On bâillait aux salons. Chacun, dans la famille Des bons bourgeois d'Alais, songe à gagner le lit. C'est l'heure charmante où la chaste jeune fille Pose, pour prier Dieu, le roman qu'elle lit,

A genoux, elle est là ! — Vous semble-t-il possible, Qu'un souffle impur jamais ternisse ce miroir ! Sir Robert, en entrant dans la chambre paisible, Arrêterait ses pas un instant pour la voir !

A genoux, elle est là ! — Ce que c'est que la vie ! Elle pense à son frère, à sa robe...; elle prie. Tout est confus en elle. — Et, la main sur les yeux, Un soir la Chasteté montera vers les cieux !

C'était, pour les amants, une nuit opportune. De distinguer un boeuf, on vous eût défié. La rue était un four : on avait oublié, De rallumer le gaz ; il devait faire lune :


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La flâneuse dormait. C'était le huit décembre... Peut-être le neuf. Si vous ne me croyez pas, Pour vous en assurer, au coin de votre chambre, Avant de vous coucher, lisez vos almanachs.

Vous y verrez, dans tous : samedi, lune pleine. Comme je vous l'ai dit, le maire avait raison; Et je ne comprends pas, vrai! que le bon Dieu prenne Avec l'autorité, ces airs de sans-façon.

Si le maire, l'adjoint, un sergent, un édile Quelconque m'assurait que mon chemin est bon ; Je lui dirais, avec ma voix la plus docile : « Cela me paraît fort! mais vous avez raison. »

Du reste, je suis vieux, et j'ai vu bien des choses, Des hontes et du mal. J'ai vu Musset mourir ; Avant la fin de mai, se faner bien des roses ! Je n'ai lu nulle part qu'un maire pût faillir.

Les gens, emmantelés jusqu'aux yeux, passaient vite. On aurait dit des daims poursuivis par un loup. Étaient-ils donc pressés de regagner leur gîte, Asile de bonheur? — J'allais, je ne sais où !

Je suis très bon enfant ; la franche indifférence Est ma déesse, à moi ; je lui dresse un autel. Je ne cancane pas sur la folle existence De madame une telle ou de monsieur un tel !

Je n'épluche, non plus, ni voisin ni voisine, Comme une cuisinière un panier de cressons. Les vertus, m'est avis, pour douteuse origine Ont bien souvent le vice, et j'en ai mes raisons.

J'aime la liberté et je la laisse aux autres ;

Et les intolérants sont de drôles de corps :

Chantez une romance ou bien des patenôtres !

Mais, ne me marchez pas sur les pieds j'ai des cors


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Et vous êtes très lourd. — Il vous est arrivé, Si bourgeois, si marchand, si dénué d'envie, Pour tant que vous soyez au positif rivé, Enchaîné, chevillé, de rêver dans la vie :

Par exemple, une fois, que votre oncle en mourant,

Vous laissait un mazet ou tout autre héritage.

Ça vous crève le coeur d'y penser seulement !

Un pauvre oncle si bon ! — Mais on meurt à tout âge !

Il pouvait espérer de vivre plus longtemps ! Et que ne gardait-il pour jouir, sa richesse?

Impitoyable mort ! trop farouche déesse !

Moi, j'en ai vu mourir, qui n'avaient pas vingt ans !

Vous aussi? Ils avaient l'oeil ouvert, haute mine; Aux lèvres un sourire; un coeur dans la poitrine. On les portait sans phrase au chemin de Bagnol ! Il est vrai d'ajouter qu'ils n'avaient pas le sol.

Lorsqu'au gouffre commun une puissance tombe, Des hommes, vivement affectés, c'est certain, Versent, en habit noir, des larmes sur sa tombe, Et des flots d'éloquence à remplir un bassin.

De toutes les vertus ils en font le modèle! Ils citent ses talents et ses traits de bonté ! Lorsque le pauvre choit, la mort, du bout de l'aile Le pousse dans le trou. Lugubre, en vérité !

Pour reprendre le fil perdu de mon histoire : Il vous plaît d'endosser un bel habit tout neuf. Moi, j'aime le bon vin; au Bac, j'aime les neuf; Un front de marbre aussi, sous une tresse noire.

Toutes les passions étant dans la nature, Des goûts et des couleurs, je ne discute pas. Vous raffolez des vers, j'aime mieux la peinture; Turenne aimait les chiens et Richelieu les chats.


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Je vous fais, en passant, ma confidence intime : Quand je marche, je vais au-devant de mes pas. Lorsque j'écris, je vais au courant de la rime. Ce serait drôle, si je ne m'égarais pas!

Vous me pardonnerez mes erreurs, je l'espère. Vous m'en tiendrez rigueur, que cela m'est égal ! Vous direz que je suis un grand original ; Je n'en changerai pas ma manière de faire !

L'aiglon ouvre son aile et s'envole aux sommets. Je me garde le droit d'être un peu fantastique. En revanche, épiciers, je permets et j'admets, Que vous ayez l'amour sacré de la boutique.

Un épicier, mon Dieu, qui vend de bon café,

Est un homme, à mon sens, digne de grande estime :

Ce métier me paraît honnête et légitime ;

Et je ne donne pas dans ces auto-da-fé !

Ne voudriez-vous pas, monseigneur le critique, Pour vous faire plaisir, qu'il fermât sa boutique ; Et quand vous voudriez du Moka, pour deux sous, Le diable m'emporte! où vous adresseriez-vous?

Qu'est-ce que je contais? — A dix heures du soir, Samedi, neuf décembre, il faisait un ciel noir. On n'y voyait pas plus, je me plais à le dire, Que vous n'y voyez dans ce que je viens d'écrire.

Dehors, s'il faisait sombre, il brillait dans mon âme Un splendide soleil, et des étoiles d'or. La vie et son flambleau m'inondaient de leur flamme !.. — N'avez-vous pas rêvé que votre oncle était mort?

Ne puis-je pas rêver, donc, que celte lumière, Qui se glisse furtive à travers les volets, De ses baisers craintifs, caresse la paupière D'une fille aux yeux noirs pleins d'amoureux reflets?


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Et lorsque, par hasard, les lueurs incertaines Des mobiles rayons se brisent sur le sol, S'il me plaît de penser que les tresses d'ébène En s'échappant du peigne inondent son beau col,

Et son sein de marbre, et J'allais donc par les rues

Rêvant je ne sais quoi de souriant, de bleu !

Des horizons dorés, des choses saugrenues

Et, madame, rêvant que vous m'aimiez un peu,

Beaucoup, si vous voulez. — Cet aveu vous chagrine! — Quand tout à coup, je vis, au détour du chemin,

— Juste, comme Raoul rencontrant Valentine — Une fée, un démon, un objet surhumain.

Je ne lui chantai pas la divine romance, Par la simple raison que je n'ai pas de voix; Mais je la poursuivis, pas à pas, à distance, Comme le chien d'arrêt une biche aux abois.

Songes, illusions, délirante magie, Qui nous trompez toujours, à qui l'on croit longtemps ; Fantômes bien-aimés du matin de la vie, Enivrantes erreurs des âmes de vingt ans !

On n'eût pas aperçu la Tour-Magne, et, — c'est drôle ! — J'étais sûr qu'elle avait un vrai pied d'Espagnole ; Un nez plein de finesse et des cheveux châtains, Et dans ses yeux voilés des regards assassins.

Elle marchait toujours, je marchais après elle. Une porte s'ouvrit et se forma soudain

— Bonsoir! Un coup de vent a soufflé ma chandelle!... Mon coucou va sonner une heure du matin !


UN MENAGE

Par M. Frédéric PRANCEZON, Membre résidant

Ils sont riches tous deux de santé, de jeunesse : Jean est un ciseleur, d'un mérite éprouvé, Et Lise, sa compagne, unit à la tendresse, Tous les charmes de la beauté.

Heureux, ils savouraient l'époque fortunée, Où tout chantait, riait, prospérait autour d'eux ; Où le mari, le soir d'une lourde journée, Dans son logis rentrait joyeux :

Il aimait ardemment; et quand sa jeune femme Accueillait son retour par un embrassement ; Qu'ils causaient tous les deux près de la vive flamme. Ou qu'ils se penchaient doucement

Sur le berceau chéri qui remplissait leur vie, Et semait sous leurs pas la joie et le bonheur, Ils étaient pénétrés de l'ivresse infinie

Que l'amour verse dans le coeur.

Lise pourtant un soir attendit inquiète

Jean ne vint que fort tard Il avait rencontré

Quelques anciens amis, voulant lui faire fête, Qui l'avaient vivement pressé

De venir avec eux passer une soirée ; Mais quand ils furent seuls : Frère, lui dirent-ils, Nous te cherchions, renonce à ta vie isolée ; Demain, parleront ces fusils.

Le comité t'attend au Club ; viens dans la lice Où tous nos compagnons s'apprêtent aux combats ; Lié par ton serment, deviens traître ou complice ; L'oeuvre a besoin de tous les bras.


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Jean était consterné ; pensant à son ménage, A son tout jeune enfant, il se sentit pâlir. Vains remords ; il leur dit : Je me dois sans partage, Je suis prêt à vous obéir. —

Non loin était le Club où la foule entassée, Ivre de passion, frémissante, attendait : Un immense hourra salua leur entrée ;

Et Jean, que le peuple acclamait,

Se sentit entraîné par une ardeur soudaine. En orateur de club, l'ouvrier se transforma ; Et quand là, devant lui, toute la foule pleine De tapage, se déchaîna ;

Qu'un souffle de colère, en embrasant les tètes, Annonça que l'orage était près d'éclater ; Son ardente parole excite des tempêtes Prêtes à tout bouleverser.

Tout était consommé pour Jean ; et, dans la rue, Quand seul, l'esprit plus calme, il se prit à sonder L'abîme au fond duquel sa chute était prévue, Il ne pouvait plus reculer.

Lise le vit rentrer si défait et si pâle, Qu'elle l'interrogea, pressentant un malheur ; Et quand elle eut appris cette scène fatale, Qui menaçait tout son bonheur ;

— Je te disputerai, dit-elle, à ta folie, On dirait le bonheur difficile à porter, Qu'il te pèse déjà, préférant une vie

Pleine de trouble et de danger :

Tu peux m'abandonner, dédaignant ma tendresse, Et me faire pleurer sur mon amour déçu, Me laisser pour ma part, amertume et tristesse ; Mais notre enfant serait perdu,


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Si tu n'étais plus là pour guider sa jeunesse.

— Au danger, lui dit Jean, si je suis exposé, N'accuse pas mon coeur, accuse ma faiblesse ;

J'ai subi la fatalité.

— Le lendemain, la ville était fort agitée, Et, dès le soir, l'émeute éclata dans Paris, Terrible; dans le sang elle fut étouffée,

Et Jean, captif, fut compromis.

Durant tous ces malheurs, Lise eut tous les courages; Elle avait chancelé d'abord sous ce ciel noir ; Mais bientôt ferme et calme, au milieu des orages, Elle vainquit le désespoir ;

Elle dut travailler, et travailler sans cesse, Passant presque ses nuits pour se donner du pain : Elle restait vaillante, en proie à la détresse, Et luttait contre le destin.

Ce travail sans repos l'eut bien vite affaiblie ; Lise n'en tint nul compte, et voulut résister, Jusqu'au moment fatal où, sous la maladie, Elle se sentit succomber.

— Oh ! dit-elle, je sens les sources de la vie

Se tarir ; tout s'écroule et sombre autour de moi ; A la coupe des maux, j'ai bu jusqu'à la lie ; Mon Dieu, je me confie à toi !

Dans ton séjour, bientôt, je vais être appelée

— Jean est tout au bonheur; il vient d'être acquitté ; Il est libre ; il accourt à cette chambre aimée ;

Mais il s'arrête épouvanté

Devant Lise mourante ; et prosterné près d'elle Il murmure : — Pardon ; je t'ai fait bien souffrir.

— O Jean, mon bien-aimé, je t'attendais, dit-elle,

Et maintenant je peux mourir!

Novembre, 1872.


EXTRAIT DU REGISTRE

DES

PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES

de la

SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE & LITTÉRAIRE

D'ALAIS

Séance du 1er juin 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

M. Auphan dépose sur le bureau : 1° Un numéro du Journal du Lot, où se trouve, sous forme de lettre, à M. Dumas, secrétaire perpétuel de l'Académie, le dixième article de M. Malinowski, sur les Phosphates de chaux du Quercy ;

2° Un volume de M. Louis de Combettes-Labourelie, intitulé : Cent Fables ;

3° Bulletin de la Société d'histoire naturelle de Toulouse (1re, 2me, 3me, 4me années) ;

4° Une lettre de M. Valcroze, membre non-résidant, par laquelle ce dernier offre à la Société : 1° Copie d'actes émanés de l'évêché d'Alais ; 2° une carte de ce même diocèse, dressée par les soins de monseigneur d'Avéjan, mais simplement pour en prendre copie ; — M. André, archiviste à Mende, qui est le prêteur, n'ayant pas cru pouvoir en disposer autrement. —

En conséquence de cette lettre, il est déposé sur le bureau : 1° La copie d'actes officiels pour l'établissement d'un prêtre dans la paroisse du Vigan ;

2° La carte en question qui porte la note suivante : « Cette carte a été réduite sur la carte manuscrite qui est à l'évêché d'Alais, et a été levée géométriquement par Mgr d'Avéjan, deuxième évêque. »

La Société charge MM. Charvet et Gros de s'entendre pour en obtenir la reproduction au meilleur compte possible, et remercie M. Valcroze pour son intéressante communication.


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M. le Dr Plantier fait don à la Société : 1e De six fers de lance de modèles divers ; 2° du compte-rendu de l'installation de la Maison de santé d'Alais, tiré sur papier vergé.

M. Béchamp, professeur de chimie à la Faculté de Montpellier, est nommé membre honoraire.

M. Léonce Gide (de Nimes) est nommé membre non résidant.

M. Bondurand, membre non résidant, met sur le bureau un dessin du disque solaire, qu'il a observé au commencement de mai. Il en a dessiné les taches, qui sont au nombre de neuf sans tenir compte des petites. L'observation a été faite au Péras, près Génolhac (Gard). Une discussion s'engage sur l'explication des phénomènes de ces taches entre MM. Wolf et Bondurand.

M. le Président propose à la Société de voter une médaille en argent, pour l'élève qui s'est le plus distingué au Collége, dans l'année 1871-1872; l'école des Ouvriers-Mineurs, ayant joui en dernier lieu de cet encouragement que la Société a décidé d'offrir alternativement aux élèves de l'École des ouvriers-mineurs et à ceux du Collége. La proposition est votée d'acclamation.

Séance du 6 juillet 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

M. Charvet dépose sur le bureau la copie de la carte du diocèse d'Alais, prêtée par M. Valcroze.

M. Canonville lit une lettre de M. Itschner, principal du Collége, membre résidant, dans laquelle ce dernier désigne à la Société l'élève Elysée Bernard, comme ayant mérité la médaille votée dans la dernière séance. M. Charvet est chargé de veiller à ce qu'elle soit gravée pour les premiers jours d'août.

M. Maximin d'Hombres fait circuler deux superbes photophies du troglodyte, découvert naguère à Menton, par M. Rivière. Les photographies sont un don de M. de Roux-Larcy, que le Président remercie au nom de la Société.

M. Charvet lit ensuite une lettre de M. Louis de CombettesLabourelie, par laquelle ce dernier exprime sa reconnaissance

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— 250 —

pour l'accueil fait à ses fables, dans une de nos dernières séances, et annonce l'envoi des volumes suivants qu'il nous offre :

1 ° Légendes de nos jours ;

2° Itinéraire par voie ferrée de Toulouse à Albi, et de Tessonnières à Lexas ;

3° Souvenir d'un Étudiant (1830 );

4° Légendes albigeoises, avec des lettres de M. de Lapérouse.

M. le Président donne lecture d'une circulaire du Congrès international d'anthropologie et d'archéologie préhistoriques pour 1872, demandant des adhésions au Congrès, donnant le programme des questions destinées à' être spécialement étudiées, le règlement général de l'association et la liste des membres déjà inscrits, parmi lesquels se trouvent MM. Cazalis de Fondouce et O. de Marichard, membres non résidants.

La Société reçoit, en outre, les ouvrages suivants :

1° Mémoires archéologiques du Midi de la France (Tome X.);

2° Annales de la Société des sciences industrielles de Lyon (Derniers fascicules.);

3° Carte allemande de la Moravie, de 1809, donnée par M. Bondurand. — On y remarque, dit le donateur, une grande netteté et la preuve que les Allemands possédaient dès cette époque des graveurs remarquables. — Le Président remercie M. Bondurand;

4° Annales de la Société d'agriculture, etc., du département de la Loire (Tome XV.);

5° Un extrait du Bulletin de la Société géologique de France (Tome XXIX.), sur la carte géologique de l'arrondissement d'Uzès, par M. Émilien Dumas. La petite brochure est remplie, en grande partie, par une lettre de M. de Rouville à M. Parran. M. Charvet en donne lecture. La carte est sur le point d'être gravée et sera supérieure, dit-on, en perfection de dessin, en périmètres géologiques et en détails topographiques, à celles des autres arrondissements.

M. le Président lit : 1° Une lettre par laquelle M. Béchamp remercie la Société de sa nomination ;

2° Une lettre de M. Malinowski indiquant diverses étymologies qu'il a trouvées dernièrement. La lettre est remise à M. Chamboredou, qui est chargé de donner son avis.


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M. Charvet prend ensuite la parole :

MESSIEURS,

Depuis notre dernière réunion du mois de juin, la collection archéologique de la Société s'est augmentée de quelques échantillons que je prends la liberté de vous communiquer, en vous faisant connaître leur provenance.

En première lieu, nous avons reçu de M. Vidal, maire de Rivières, et par l'intermédiaire de M. J. Martin, garde-général à Alais, deux monnaies en bronze trouvées près de Rivières.

La premier est une coloniale impériale de Nimes du troisième type, dont la Société possède déjà des échantillons remarquables.

La seconde est une obole de Marseille, d'une parfaite conservation.

Suivant M. Barthélemy, les monnaies massaliètes se rapportent à huit périodes distinctes, et celle que je mets sous vos yeux correspondrait à la cinquième époque, comprise entre la fin du siècle d'Alexandre et le premier siècle avant l'ère chrétienne. Elle porte à l'avers la tète de Diane, à droite, ornée d'un diadème; au revers du taureau cornupète, symbole d'Apollon, accompagné de la légende grecque MASSAAIHTQN.

Il est utile de remarquer que la colonie phocéenne de Marseille n'eut jamais de monnaie d'or; que depuis sa fondation (600 ans avant J.-C), et jusqu'à sa cinquième période, elle ne frappa que des monnaies d'argent, et qu'à partir de cette époque seulement, elle commença à émettre des monnaies de bronze. La pièce que je mets sous vos yeux serait donc un des premiers échantillons de la monnaie de bronze massaliète.

J'ai l'honneur de vous proposer, Messieurs, de voter des remerciements à M. Vidal pour le gracieux don qu'il a bien voulu faire à la Société.

Nous avons aussi reçu trois pièces arabes, en bronze, offertes par une personne d'Alais, dont le nom m'a échappé.

En troisième lieu, j'ai cru devoir faire l'acquisition pour la Société de deux pièces trouvées près de Saint-Jean-de-Ceyrargues, et qui manquaient à notre collection.


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La première est une monnaie d'argent de l'empereur Hadrien (An de J.-C. 118) :

IMP. CAESAR TRAIANVS HADRIANVS. — Buste lauré d'Hadrien à droite.

R). — P. M. TR. P. COS. III. — Exergue : SAL. AVG. — La Santé assise à gauche et donnant à manger, dans une patère, à un serpent enroulé autour d'un autel.

La seconde est un moyen bronze, assez rare, d'Annia Lucilla, femme de Lucius Verus :

LVCILLAE AVG. ANTONINI. AVG. F. — Buste de Lucilla à droite.

R). — HILARITAS — S. C.

L'Allégresse debout, à gauche, tenant une longue palme et une corne d'abondance.

M. le Président remercie l'honorable membre.

Le Bureau annonce qu'il a reçu avis de l'envoi de nouveaux livres du ministère des travaux publics : 1° Collection des Annales des mines et des Annales des ponts-et-chaussées ; 2° Carte géologique de la France, d'Élie de Beaumont, et deux volumes de texte. La Société remercie M. le ministre.

M. Charvet a fait déposer sur le bureau une série de livres donnés par Mme Martin. On y remarque spécialement le Dictionnaire des découvertes, en dix-sept volumes. La Société remercie Mme Martin pour son offre gracieuse.

En vertu de la décision prise dans la séance du 24 février 1872, de déléguer officiellement à l'exposition de Lyon, tous les membres qui en témoigneraient le désir, pour répondre à l'appel qui noas a été fait, M. Lacharme, professeur de physique au Collège, est, sur sa demande, délégué à Lyon.

La séance est levée.

Séance du 3 août 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

M. Auguste Gide offre à la Société un volume autographe de ses oeuvres musicales, comprenant diverses compositions reli-


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gieuses, telles que messes, morceaux pour orgue et quelques morceaux de musique de salon. M. le Président remercie le savant compositeur, dont les oeuvres seront précieusement conservées dans les archives de la Société.

M. le Président présente à la Société la médaille destinée à l'élève le plus méritant du collége d'Alais, le jeune Bernard, Elisée, de Durfort.

Ouvrages offerts : 1° 33e livraison du Bulletin de la Société archéologique de Montpellier ; 2° Mémoires de l'Académie du Gard, 1869-1870; 3° Bulletin de la Société d'archéologie de la Drôme, 22e livraison, 1871-1872; 4° Bulletin numéro 16 de l'Académie de La Rochelle; 5° Annales de la Société des sciences naturelles de Lyon, 1872, 2e livraison.

M. Charvet dépose sur le bureau un vase en poterie celtique, trouvé dans les fondations du chevet de l'église de St-Martinde-Valgalgues, et offert par M. Gros, architecte, membre résidant.

M. Gide, membre non résidant, lit une pièce de poésie inédite, intitulée : A ma Soeur, et datée de 1829. Il lit aussi une ode intitulée : Hymne au Soleil, datée de 1828.

M. Chamboredon, membre résidant, présente une note concernant les industries de luxe des Phéniciens, dans laquelle il paraît vouloir établir certains points de ressemblance avec les objets de luxe actuel.

Séance du 3 octobre 1872

PRÉSIDENCE DE M. CHARVET , VICE-PRÉSIDENT

M. Charvet, vice-président, présente trois pièces de monnaie d'argent, deux deniers et une obole des seigneurs d'Anduze et de Sauve, offertes à la Société par M. Ricard, secrétaire de la Société archéologique de Montpellier, et donne quelques détails sur ces monnaies qui intéressent particulièrement la Société, puisque la maison de Sauve et d'Anduze possédait en même temps la seigneurie d'Alais.

Les monnaies d'Anduze offrent deux types différents. Celles offertes par M. Ricard sont du premier type.

Premier type : + ANDVSIENSIS. — Dans le champ : un B accompagné de


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quatre points. — à\. + SALVIENSIS. — Croix ancrée ou nèlée aux quatre branches.

L'obole est au même type.

Deuxième type :

+ DE ANDVSIA. — Dans le champ : un grand B. — R. + DE SALVE. — Croix cerclée ou nèlée.

M. Barthélemy, dans son Manuel de numismatique, p. 181, donne le texte d'une charte de 1265, d'où il résulte que l'atelier monétaire des seigneurs d'Anduze était établi à Sommière. Ce monnayage finit en 1236, lorsque Bernard Pelet. II fit sa soumission au roi de France. Une officine royale fut alors établie à Sommière.

Le type de la monnaie d'Anduze est une croix ancrée ou nêlée d'un côté, et de l'autre un B placé dans le champ. Il est probable que cette lettre est l'initiale des noms de Bernard ou Bermond, qui se reproduisent constamment dans la famille Pelet. Lelewel pense qu'elle doit être expliquée par le mot Benedictio. Cette empreinte a évidemment été immobilisée, et c'est en vain que l'on chercherait à classer par ordre de date les monnaies des divers seigneurs des noms de Bernard ou Bermond. Cette tentative aurait d'autant moins de succès que la fabrique de ces pièces, quoique toute particulière, a été identique depuis le commencement du monnavage jusqu'à la fin (1).

M. le Vice-Président communique ensuite à la Société un curieux plan d'Alais très-détaillé, et se rapportant à l'époque du siège de la ville, sous Louis XIII. Cette gravure a été confiée à M. Charvet, par M. Ricard, pour être communiquée à la Société qui pourra aviser aux moyens d'en faire prendre copie, si elle le juge convenable.

A la suite du don et de la communication qui précèdent, M. le Président propose à la Société, sauf l'approbation du Bureau, la nomination de M. Adolphe Ricard comme membre honoraire de la Société.

Il annonce qu'à la suite d'une demande adressée au Conseil municipal d'Alais par M. Maximin d'Hombres, président, cette assemblée a bien voulu autoriser la Société à introduire dans sa collection archéologique, mais à titre de dépôt seulement,

(1) Voir Faustin POEY-D'AVANT. — Monnaies féodales de France. — T. II, p. 298-297.


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la collection de poteries et de monnaies offerte à la ville par M. de Mandajors et déposée à la bibliothèque d'Alais.

La Société vote des remerciements à M. Ricard et à la municipalité d'Alais.

M. de Lavit, membre résidant, offre quelques pièces de monnaie étrangère, et M. Charvet une pierre sculptée provenant du château d'Allègre, portant les armoiries de la famille d'Uzès et la date de 1597. Cette pierre, mentionnée dans le rapport de la commission chargée de faire des fouilles archéologiques dans les environs des Fumades, est offerte à la Société par M. Loubier, d'Allègre.

M. Charvet annonce à la Société que, sur la demande de M. le baron de Larcy, ancien ministre et membre honoraire, le Ministre de l'instruction publique a accordé à la Société d'Alais un exemplaire de la carte de Peutinger, publiée par M. Desjardins.

Il annonce aussi qu'il a reçu un nouveau mémoire de M. Romant, membre non résidant, sur la maladie de la vigne, et prie la Société de vouloir bien en entendre la lecture dans une prochaine séance.

M. Bourgogne lit le compte-rendu d'une conférence faite à Paris, par M. Jeannel, sur un nouvel engrais chimique.

M. Charvet lit une note de M. Chamboredon, en réponse aux étymologies données par M. Malinowski à diverses dénominations géographiques. M Chamboredon n'admet pas complètement les conclusions de M. Malinowski, notamment en ce qui concerne le nom de Saint-Malo, que ce dernier fait dériver de Moloch. M. Chamboredon pense, avec beaucoup plus d'apparence de raison, que le nom de cette ville lui vient du premier évêque d'Aleth, saint Maclou ou Mac-lo, dont le siége fut transféré, au XIIe siècle, sur l'île où s'élève aujourd'hui Saint-Malo, et dans laquelle existait une chapelle dédiée à cet évêque.

Séance du 26 octobre 1873

PRÉSIDENCE DE M. CHARVET, VICE-PRÉSIDENT

Lecture et approbation du procès-verbal de la séance du 5 octobre.

La Société vote la reproduction photographique du plan,


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dont il a été question dans la dernière séance, et représentant la ville et les environs d'Alais à l'époque de son investissement par Louis XIII.

Ouvrages offerts : 1° Deux années du Bulletin de la Société d'agriculture de l'Ardèche ;

2° Deux numéros de la Société industrielle de Lyon ;

3° Un numéro de la Société archéologique de Toulouse.

M. le Président communique à la Société la double démission, comme secrétaire des séances et comme membre résidant, de M. le professeur Canonville, nommé au lycée d'Angoulème. M. Canonville continuera à faire partie de la Société comme membre non résidant. Tout en exprimant sa satisfaction pour l'avancement mérité qu'a obtenu notre distingué collègue, M. le Président se rend l'interprète des sentiments de tous en exprimant les regrets unanimes que cause le départ de cet aimable et actif collaborateur, qui avait su se créer parmi nous de vives et nombreuses sympathies.

Sur le désir qu'en a manifesté par lettre M. Canonville luimême, la Société nomme à l'unanimité M. le professeur Lacharme, pour remplir provisoirement les fonctions de secrétaire des séances.

M. le Dr Plantier, au nom de M. Léonce Destremx, dépose sur le bureau :

1° Plusieurs branches de saule pleureur, les unes parfaitement saines, les autres atteintes d'une maladie spéciale portant son action à la fois sur des groupes de feuilles et sur l'écorce des jeunes pousses.

Les feuilles malades se montrent par groupes volumineux, beaucoup plus étroites qu'à l'état physiologique. Elles sont contournées sur elles-mêmes, et quoique la couleur n'en soit nullement altérée, les nervures en sont moins apparentes et la contexture plus délicate. M. Destremx n'a pu constater la présence d'aucun parasite qui explique ce phénomène de pathologie végétale.

Sur certains autres points , l'écorce des jeunes pousses s'enlève avec la plus grande facilité et laisse à nu la partie ligneuse. On n'aperçoit aucune tendance à la réparation, à la cicatrisation de la solution de continuité ainsi produite sur le végétal. Là, encore, il a été impossible de s'assurer de l'existence des parasites végétaux ou animaux.

2° L'extrémité supérieure d'un pin d'Alep, à végétation capricieuse et bizarre, a été aussi adressée par M. Destremx.


— 257 — Séance du 3 novembre 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

Après lecture faite, le procès-verbal de la dernière séance est adopté.

M. le Secrétaire général dépose les ouvrages suivants :

1° Les Amendements et les Engrais minéraux appliqués au sol des Cévennes, par M. Adrien Jeanjean ;

2° Essai d'une Bibliothèque albigeoise, par M. de Combettes-Labourelie ;

3° Deux numéros de la Revue scientifique de la France et de l'étranger.

Le premier de ces ouvrages est confié à M. Bourgogne pour en faire un compte-rendu à la Société, dans une prochaine séance.

M. Francezon débite une pièce de vers ayant pour titre : Un Ménage. M. le Président, au nom de la Société, remercie vivement l'auteur de ce travail plein d'émotions et d'à-propos, en le priant de vouloir bien lui en céder copie.

Séance du 9 novembre 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

Le procès-verbal de la dernière séance est adopté après lecture.

M. le Président fait part à la Société d'un don fait par M. le Maire d'Alais dans une séance précédente, consistant en une série d'anciens poids étalons de la ville d'Alais. — M. le Président remercie au nom de la Société M. de Tubeuf, donateur.

Ouvrages reçus :

1° Deux volumes de la Revue des Langues romanes, t. III ;

2° Le Bulletin de la Société archéologique du midi de la France,

3° Le Bulletin de la Société d'agriculture du Gard ;

4° Une carte d'état-major, donnée par M. Larguier. M. le Président remercie M. Larguier du don qu'il a bien voulu faire à la Société.


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Il est ensuite donné lecture d'une lettre adressée à M. Magnon, membre résidant de la Société, pour obtenir les dessins de la Grotte de Durfort, dans le but de les faire paraître dans le journal l'Illustration. La Société décide qu'on enverra à M. Dhombres, auteur de la lettre, le Bulletin où le travail sur la Grotte de Durfort se trouve inséré, en lui indiquant le moyen de se procurer les photographies faites à ce sujet.

Conformément au règlement, on procède aux élections de : M. Ricard, comme membre honoraire; M. P. Francezon, couvre membre résidant; MM. Sarrau, Gras et Girbon, comme membres non résidants.

M. le Dr Plantier fait don à la Société : 1° D'une tige de glycine ou bois de grenadille, pour être ajoutée, après préparation, à la collection des bois que possède déjà la Société; 2° d'une partie d'une tige de chanvre mâle (cannabis indica), venue spontanément, et mesurant, après croissance complète, une longueur de 4m,80. M. Plantier fait remarquer qu'avec des soins particuliers, c'est-à-dire des engrais et de l'eau en abondance, on pourrait obtenir un surcroît de végétation analogue pour toute espèce de plantes, et que l'on cultiverait ainsi facilement des plantes d'agrément que l'on a souvent beaucoup de peines à se procurer.

M. le Dr Auphan propose d'ajouter au catalogue des ouvrages qui forment la bibliothèque de la Société, et qui doit paraître dans le prochain Bulletin, celui des diverses collections. — Cette proposition est adoptée.

Séance du 16 novembre 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

M. Auphan, Secrétaire général, lit une lettre de remerciement de M. Ricard, nommé membre honoraire ; une autre lettre de M. Echallié, banquier à Dijon, dans laquelle l'auteur donne sa démission de membre non résidant. La démission de M. Echallié est acceptée à l'unanimité.

M. le Secrétaire général présente une brochure intitulée : Xano d'Oymé, ou la Chanson des Moissonneurs, par Léon Valéry, de Lalbenque.


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M. Charvet offre, au nom de l'auteur, les ouvrages suivants envoyés par M. Germain :

1° De la Médecine et des Sciences occultes à Montpellier, dans leurs rapports arec l'astrologie et la magie;

2° Mémoires de la Société archéologique de Montpellier, t. V.

Le premier de ces ouvrages est confié à M. Auphan, pour en faire le compte-rendu dans une prochaine séance.

M. Plantier demande ensuite la parole, pour exposer la méthode Chervin dans le traitement du bégaiement.

Le nombre des bègues existant en France est beaucoup plus considérable qu'on ne le pense généralement; il résulte de là statistique faite par M. Chervin, que le nombre de bègues est, en moyenne, de 3 sur 1,000, c'est-à-dire 100,000 bègues. La guérison des bègues est. donc une chose importante, et d'autant plus qu'aujourd'hui tout, le monde étant appelé à être soldat, c'est un cas de réforme.

On a fait une longue liste des vices de conformation qui peuvent amener le bégaiement, mais la vérité est que tous les défauts organiques qui peuvent contribuer au vice de l'articulation ou l'augmenter, n'en sont pas la cause déterminante. Il faut, pour trouver cette cause, remonter jusqu'au système nerveux, point de départ de l'influence qui détermine la mobilité musculaire. Le trouble de la fonction nerveuse rompt la succession harmonique entre la cause et l'effet. Aussi, la méthode de M. Chervin s'applique moins à corriger un vice de conformation, qui, le plus souvent, n'existe pas, qu'à rétablir l'harmonie entre les fonctions en désaccord.

Celte méthode ne comporte ni remède, ni opération, ni l'emploi d'aucun instrument dans la bouche; elle est basée sur les règles ordinaires de la prononciation. Par une imitation attentive, l'élève s'approprie la diction du professeur; l'exercice le fortifie dans cette nouvelle manière de parler, qui devient pour lui facile et naturelle.

Le cours est de vingt jours, et comprend trois périodes :

Pendant la première, l'élève est soumis au silence complet, ce temps est employé à rompre avec la mauvaise habitude ; pendant la deuxième, l'élève parle, mais lentement, posément, méthodiquement; ce temps est. employé à contracter un langage facile et naturel; pendant la troisième, l'élève parle couramment , non aussi vite que ceux qui coupent, mangent leurs mots ou bredouillent, mais comme les personnes qui ont fait


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un apprentissage de la parole, c'est-à-dire, qui parlent bien. Cette période est employée à fortifier la nouvelle manière de parler et à la rendre durable, ce qui arrive toujours, si l'élève continue chez lui les exercices du langage qui l'ont débarrassé de son bégaiement.

Séance du 33 novembre 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

M. le Secrétaire général dépose sur le bureau :

1° Le Bulletin de la Société d'agriculture, industrie et arts du département de la Lozère ;

2° Le Bulletin de la Société archéologique, scientifique et littéraire de Béziers ;

3° La Revue scientifique de la France et de l'étranger, envoyée par M. Cazalis de Fondouce.

M. Plantier offre à la Société les rapports et travaux divers, faits tant en France qu'à l'étranger, sur la méthode Chervin pour le traitement des bègues, ainsi qu'une petite carte géographique représentant le nombre des bègues par département.

M. Charvet donne lecture d'un second mémoire de M. Romant, sur le phylloxéra. Ce travail, qui est inséré dans le bulletin, a vivement intéressé la Société.

M. Auphan, Secrétaire général, donne l'analyse d'une brochure de M. Germain, de Montpellier, ayant pour titre : De la Médecine et des Sciences occultes à Montpellier, dans leurs rapports avec l'astrologie et la magie :

« Le merveilleux, dit-il, est une croyance de toutes les régions et de tous les pays, qui a sa source dans la nature même de l'homme. — De cette tendance naturelle sont nées la magie, l'astrologie et les autres sciences occultes. — Montpellier, cette ville si remarquable par ses institutions scientifiques, n'avait point échappé à la contagion de l'époque ; et tous ses docteurs, depuis Arnaud de Villeneuve jusqu'à Laurent Joubert, ont ajouté foi aux arcanes consignés dans ces pseudo-sciences.

Arnaud de Villeneuve, Bernard de Gordon ont consacré de nombreux écrits à étudier l'influence du mouvement des planètes sur l'homme et sur ses maladies; d'après eux, le


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médecin doit connaître à fond la marche des astres, l'époque

de leurs diverses conjonctions, etc — Certaines amulettes,

certains cachets en or pur jouissaient de vertus toutes différentes, suivant les devises qui y avaient été inscrites, suivant aussi les cérémonies cabalistiques effectuées aux divers moments de leurs préparations.

Gui de Chauliac, l'illustre père de la chirurgie moderne, croyait aussi aux talismans et aux influences astronomiques. Son génie n'avait point suffi à le garantir des incroyables préjugés de son époque. C'est ainsi qu'il attribue la cause primordiale de la peste de 1348 à la conjonction de Saturne, de Jupiter et de Mars, observée le 24 mars 1345.

Raymond Chalin professait aussi les mômes idées.

Le célèbre dialecticien Raymond Lutte aurait, dit-on, possédé le secret de la pierre philosophale. Ce secret, il avait cru l'avoir trouvé dans la propagation des lumières. Il fut un ardent apôtre du progrès; et, quoique partageant certains préjugés de son époque, il ne cessa de lutter contre l'ignorance et fit de nombreux efforts pour corriger la propension invétérée aux croyances astrologiques. Mais il ne put y parvenir, ainsi que le démontre évidemment ce qui vient d'être dit sur Gui de Chauliac et Raymond Chalin, ses successeurs immédiats. La preuve en est aussi dans les ouvrages de Guillaume Grisant, de Montpellier.

Dans cette nomenclature on ne doit point oublier le célèbre Dr Michel Nostradamus dont les obscures prédictions exercent encore de nos jours la perspicacité populaire; Martin Rulland qui a osé mettre l'alchimie au-dessus de la théologie ellemême ; le Dr Jean Fabre, qui fut plus tard médecin ordinaire de Louis XIV, et qui croyait, au moyen de cette science (l'alchimie), avoir expliqué, jusqu'à l'évidence, les mystères de la Sainte Trinité, de la Résurrection des morts et de la Béatitude éternelle.

Laurent Joubert qui vivait à la fin du XVIe siècle, et qui déplorait la persistance de toutes ces superstitions, de toutes ces croyances au merveilleux, n'en a pas été lui-même exempt. Ses nombreux écrits en font foi, et on pourrait citer de lui une foule de formules et de recettes plus ou moins extraordinaires qui démontrent qu'il croyait encore aux amulettes, aux influences astrologiques et aux maléfices.

M. le professeur Germain continue cette étude historique par la reproduction in extenso d'un acte de magie qui s'est


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produit à Saint-Jean-de-Védas, et de l'authenticité duquel se portent garants les professeurs de l'école de Montpellier. Cet acte montre jusqu'à quel point pouvait aller la crédulité des savants de cette époque. — L'auteur reproduit aussi un acte de démonomanie qui, quoique d'un genre différent, n'en est pas moins caractéristique.

Les diverses relations de l'éclipsé de soleil observée à Montpellier le 12 août 1654, permettent de se rendre compte de l'incroyable terreur qu'occasionna ce phénomène astronomique.

Telle est, en peu de mots, l'analyse de ce travail historique, qui contient de longues et nombreuses citations. Les préjugés de nos pères ont, grâce à Dieu, disparu depuis longtemps. Mais soyons indulgents pour ces naïves croyances, de peur d'être traités, à notre tour, avec rigueur par nos descendants; car si l'astrologie, la magie, la kabale, etc., ne comptent plus aujourd'hui que quelques rares adeptes, de nouvelles erreurs sont venues les remplacer; témoins les magnétiseurs, les somnambules lucides, les spirites, les tables tournantes, etc.

L'ouvrage de notre savant collègue est, pour ainsi dire, la continuation d'une étude remarquable d'histoire locale à laquelle il s'est livré, et qui a pour titre : Histoire de la Commune de Montpellier.

L'éminent professeur, dans l'oeuvre qui vient d'être l'objet de ce rapide examen, comme dans ses autres travaux, a fait preuve d'une grande bonne foi et d'un sérieux esprit philosophique. Tous les faits avancés par lui peuvent être contrôlés au moyen des nombreuses citations textuelles qui remplissent son livre ; et les déductions qu'il tire de ces faits sont éminemment logiques et démontrent une connaissance profonde de la nature humaine. »

M. le Dr Plantier rend compte d'une opération de cataracte par extraction, qu'il a faite il y a trois ou quatre jours; il s'agissait d'une femme de 55 à 56 ans. M. le Dr Plantier opère habituellement l'oeil gauche suivant la méthode de Liébreich, par la kératotomie inférieure. Dans le cas dont il s'agit, et pour des raisons spéciales, il a opéré l'oeil gauche au moyen d'un procédé particulier que l'on pourrait appeler kératotomie supérieure-externe, parce qu'il a fait l'incision en arc de cercle dans la partie supérieure en tenant le couteau de Graëffe de la main droite, pénétrant dans la chambre antérieure au point correspondant à la racine du nez et faisant sortir la pointe de


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l'instrument au point de la cornée qui correspond à l'angle externe de l'oeil. L'opération a parfaitement réussi, et tout fait présager un succès complet, d'autant plus complet que la section de l'iris, au lieu d'être faite vers le milieu de l'incision, a été opérée à l'angle interne de la plaie, et que la difformité pupillaire se trouvera ainsi cachée par la paupière supérieure. Ce procédé n'est applicable que dans quelques cas exceptionnellement favorables. On comprend, en effet, que si le globe oculaire est très enfoncé dans l'orbite, ou bien si la racine du nez est très proéminente, on ne puisse pas opérer l'oeil gauche de la main droite, en pratiquant la kératotomie supérieure. Il faudrait alors forcément avoir recours à l'opération de Liébreich, ou bien opérer avec la main gauche.

Séance du 30 novembre 1873

PRÉSIDENCE DE M. CHARVET, VICE-PRÉSIDENT

M. le Dr Plantier, dont le travail, l'activité et la finesse d'esprit sont bien connus de nous tous, fait l'analyse d'une conférence donnée au Hâvre le 10 septembre 1872, par M. Jules Siegfried, conférence pleine d'intérêt et d'à-propos, ayant pour sujet : l'Initiative individuelle.

En France , notre système de centralisation a le grand inconvénient de supprimer toute initiative personnelle, et de concentrer entre les mains d'un seul ou de quelques-uns toute la responsabilité. Avec un homme de génie à la tète des affaires, la centralisation est un puissant moyen d'action ; mais même alors cette force se trouve annulée au bout d'un certain temps, car le manque d'occasion, empêchant les hommes de se former, finit par affaiblir et énerver la nation tout entière. — Avec un chef incapable, il est facile de comprendre qu'une nation puisse se laisser conduire à la ruine en se croyant encore forte et puissante.

En théorie, cette centralisation savante est une excellente chose ; mais en y réfléchissant un peu, l'illusion n'est plus possible. En effet, la centralisation n'est autre chose qu'une grande machine dont les nombreux rouages transmettent, en l'affaiblissant, la force première. Chaque roue n'a aucune


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initiative ; elle ne fait que transmettre purement et simplement l'impulsion qu'elle a reçue sur un autre rouage. Le nombre des roues étant considérable, les engrenages étant souvent mal graissés, la machine fonctionne lentement et le pouvoir central, surchargé d'affaires insignifiantes, ne peut pas consacrer le temps nécessaire aux affaires réellement importantes.

Dans notre siècle de chemins de fer et de télégraphes, il faut lutter contre cet esprit de centralisation exagérée, en développant l'esprit opposé, celui de l'initiative individuelle : aujourd'hui, après nos récents malheurs, c'est plus nécessaire que jamais. — Le peuple, ne se composant que d'individus, ne vaut que ce que valent les individus dont il est formé ; la masse n'est forte que si elle est formée d'unités fortes. L'auteur cite un pays, petit par l'étendue, mais grand par sa fière indépendance et son amour des libertés, où l'on peut lire sur ses bannières la devise suivante : Tous pour un et un pour tous.

Comme exemple de la dernière partie de cette devise, il cite le jeune d'Assas, capitaine au régiment d'Auvergne qui, saisi dans la nuit par les ennemis, et menacé de mort s'il poussait un cri qui pût les trahir, s'écria avec toute l'énergie d'un noble courage : « A moi, Auvergne, l'ennemi est là ! » et mourut ainsi seul pour tous. L'égoïsme, ce dissolvant par excellence, est la ruine des peuples ; le dévouement est, au contraire, leur plus solide fondement. Le devoir de chacun est de s'occuper activement de la chose publique, dans le cercle où la Providence l'a placé.

Le principal prétexte que l'on fait valoir pour demeurer inactif est celui-ci : « Que puis-je faire ? Je ne suis rien ! » ou du moins : « J'ai si peu d'influence, que ce que je ferais resterait sans résultat. » Erreur profonde ! car notre action, si petite, si faible qu'elle soit, a cependant une valeur propre, et, avec de la persévérance, on arrive toujours à des résultats sérieux. La grande affaire n'est pas tant de commencer un travail que de le poursuivre avec courage.

Pour montrer la puissance de l'initiative individuelle, l'auteur cite les exemples suivants :

Au Havre, M. Mazeline, simple ouvrier, fils d'un obscur serrurier, est arrivé, par son intelligence, son travail, sa persévérance, son énergie, à fonder un atelier de construction des plus vastes et des mieux organisés du monde.

Un autre exemple très remarquable est celui de M. Jean Dollfus, de Mulhouse, qui, par son intelligence, son goût, son


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activité, son énergie, travaillant de six heures du matin à sept heures du soir, a fini par ajouter à l'établissement de son père des filatures, des tissages, une blanchisserie, si bien que cet établissement, qui n'occupait d'abord que quelques centaines d'ouvriers, en occupe plus de 5,000 aujourd'hui; et la ville de Mulhouse, qui ne comptait que 6 ou 7,000 habitants, en comptait plus de 60,000 à la veille de notre malheureuse guerre.

Comprenant que l'initiative, belle dans le domaine matériel, a bien plus d'importance encore dans le domaine moral, et que la fortune, cette grande force, ne. doit jamais être le but de la vie, mais bien un moyen d'être utile aux autres, il prit la résolution d'améliorer le sort de ses ouvriers. Avec quelques amis dévoués, il se mit lui-même à l'oeuvre, et fonda ces belles cités ouvrières de Mulhouse, qui ont fait sa gloire et qui ont été imitées partout.

Tout dernièrement, dans une fête qui réunissait auprès de lui 80 enfants et petits-enfants, pour célébrer le cinquantième anniversaire de son mariage, il distribuait une somme de 200,000 francs à ses ouvriers, montrant une fois de plus sa grande générosité et sa philanthropie pleine de coeur.

L'orateur, après avoir cité plusieurs autres exemples analogues, termine en montrant ce que peuvent la jeunesse et les mères de famille avec l'initiative individuelle, et en citant les paroles suivantes : « Un de nos plus illustres hommes d'Etat qui a rendu d'immenses services à son pays, M. Guizot, disait : « Je ne sais pas ce que c'est que le découragement. »

Nous, non plus, ne sachons pas ce que c'est que le découragement; redressons-nous ; à l'oeuvre tous, petits et grands, à l'oeuvre chacun dans sa sphère, reprenons une nouvelle énergie et disons : Je veux, donc je peux !

Séance du 7 décembre 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES, PRÉSIDENT

M. le Président annonce l'envoi très prochain des ouvrages donnés par le ministère des travaux publics, avec quelques cartes géographiques données par le ministère de l'instruction

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publique. M. Parran a bien voulu se charger d'en faire l'expédition à la Société.

M. le Secrétaire général dit qu'il a reçu le numéro 1 du Bulletin du mouvement social.

La Société décide que désormais on ajoutera à certaines séances, aux travaux des sociétaires, des causeries sur un sujet indiqué huit jours d'avance.

Séance du 14 décembre 1872

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES , PRÉSIDENT

M. le Président donne lecture d'une lettre de remerciement de M. Gras, nommé membre non résidant.

M. le Président annonce à la Société que le Bureau, dans sa dernière réunion, a pris les décisions suivantes :

1° Quatre membres de la Société seront adjoints à M. Barre, trésorier-archiviste, pour faire le catalogue de tous les livres et objets divers possédés par la Société. MM. Chamboredon, Plantier, Charvet et Maximin d'Hombres sont désignés pour ce travail.

2° Le Bureau adopte en principe l'illimitation des membres, d'après la proposition d'une modification à l'article 11 du règlement, à la séance du 2 novembre ; mais il propose à la Société qu'on donne au Bureau certaines attributions qui seront discutées plus tard, au sujet de la présentation des membres résidants ; de plus, un travail devra être présenté dans l'espace de deux ans après la nomination, par chaque membre résidant entrant désormais dans la Société; ceux-ci seront considérés comme démissionnaires si un travail quelconque n'était pas présenté pendant ce laps de temps.

M. Charvet lit ensuite un travail de M. Chamboredon sur les Phéniciens. La première partie de ce mémoire a pour sujet des considérations générales sur la nation phénicienne, les causes de son extension et de sa puissance dans le monde méditerranéen, et sur celles de sa chute et de sa ruine. La deuxième partie a pour titre : Observations sur l'origine des Phéniciens, leurs industries diverses, leur commerce, leurs inventions, leur langue, leurs institutions politiques et leur


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religion, pour servir d'appendice ou de complément aux considérations qui précèdent.

M. le Président remercie, au nom de la Société, M. Chamboredon de son intéressante communication.

M. Plantier propose à la Société, pour sujet de causerie à la prochaine séance, les idées développées dans les deux romans suivants : Don Juan de Kolomea et Frinko-Balaban, par M. Sucher-Masoch, parus dans la Revue des Deux-Mondes du 1er octobre et du 15 novembre 1872.

Séance du 31 décembre 1873

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES , PRÉSIDENT

M. le Secrétaire général dépouille la correspondance, et lit une lettre de remerciement de M. Sarran, nommé membre non résidant.

M. Bourgogne fait l'analyse d'un ouvrage de M. Adrien Jeanjean, adressé par l'auteur à la Société dout il est membre non résidant. M. Bourgogne dit que ce livre est le fruit d'études sérieuses, de nombreuses recherches et d'une observation judicieuse. M. Jeanjean s'était déjà fait connaître comme un sériciculteur habile, un géologue de mérite; son dernier travail le montre agronome distingué. Cet ouvrage est divisé en trois parties. Dans la première, l'auteur fait connaître la géologie des Cévennes, la nature minéralogique des divers terrains qui composent nos montagnes et les cultures principales qui s'y pratiquent. Dans la deuxième partie, il est traité longuement des amendements, c'est-à-dire de toutes les opérations qui ont pour but d'améliorer le sol. Chacune de ces opérations y est décrite avec soin, et cette description est appuyée sur l'expérience des agronomes distingués qui se sont occupés de ces sujets. La troisième partie est consacrée à l'étude des engrais minéraux ou engrais chimiques, peu employés de nos jours parce qu'ils sont peu connus.

Le livre de M. Jeanjean, dit M. Bourgogne, devrait se trouver dans toutes les bibliothèques; l'éducateur, le viticulteur et surtout l'agriculteur y trouveraient des renseignements utiles et de rares conseils sur la plus ou moins value de telle ou telle


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pratique agricole. M. Jeanjean n'est point exclusif, et s'il conseille la pratique des amendements et des fumures ordinaires, il veut aussi montrer à ceux qui désireraient mettre en pratique les idées que lui suggère son expérience, que l'emploi des engrais chimiques ne date pas d'aujourd'hui; il prouve, au contraire, que ces engrais sont employés depuis longtemps et avec succès.

M. Bourgogne félicite M. Jeanjean d'avoir eu la pensée de citer dans son ouvrage le nom de ceux de nos collègues (docteur Serre, Destremx (André), auxquels il emprunte quelques pratiques agricoles ; il exprime en même temps le regret que M. Jeanjean, qui signale à ses lecteurs les fabriques et provenances des engrais chimiques, ait oublié, dans sa nomenclature, ceux qui sont fournis par l'usine de Salindres, que dirige avec tant d'habilité notre excellent confrère, M. Merle; c'eût été un vrai service à rendre aux agriculteurs de nos Cévennes, pour lesquels l'approvisionnement serait plus facile.

M. Plantier a ensuite la parole sur le sujet de causerie proposé par lui dans la dernière séance. Avant de faire l'analyse des deux romans de Sucher-Masoch, le spirituel causeur fait à la Société une conférence très intéressante sur le boudhisme, dont quelques principes se trouvent développés dans les deux romans cités. Après quelques notions historiques sur Boudha, M. Plantier parle des principes de sa religion.

Les quatre vérités fondamentales de cette religion sont : 1° L'existence de la douleur dont l'homme est atteint, sous une forme ou sous une autre, quelle que soit sa condition icibas;— 2° l'attribution de cette douleur aux passions, au désir, à la faute ; — 3° cessation de la douleur par le Nirvana, but suprême et récompense de tous les efforts de l'homme ; — 4° voie qui conduit au Nirvana, c'est-à-dire à la cessation de la douleur.

Les conditions que l'homme doit remplir pour assurer sa délivrance éternelle sont : 1° La vue droite ; — 2° le jugement droit ; — 3° le langage droit ; — 4° se proposer, dans tout ce qu'on fait, une fin pure et droite, qui règle la conduite et rend honnête ; — 5° ne demander sa subsistance qu'à une profession droite, non entachée de péchés ; — 6° l'application droite de l'esprit à tous les préceptes de la loi ; — 7° la mémoire droite ; — 8° la méditation droite qui conduit dès ici-bas l'intelligence à une quiétude voisine du Nirvâna. Puis viennent les préceptes moraux dont les cinq premiers sont : Ne point


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tuer ; — ne point voler ; — ne point commettre d'adultères ; — ne point mentir ; — ne point s'enivrer ; — et cinq autres moins importants : s'abstenir de repos pris hors de saison; — s'abstenir de la vue des danses et des représentations théâtrales ; — s'abstenir de porter aucune parure et de se parfumer ; — s'abstenir d'avoir un grand lit ; — enfin s'abstenir de recevoir de l'or ou de l'argent.

Le résumé de l'enseignement de Boudha est celui-ci : abstention de tout péché ; — pratique courante de toutes les vertus ; — domination absolue de son propre coeur.

Le philosophe allemand Schopenhauer, disciple de Boudha, conclut, dans ses ouvrages, à l'anéantissement de la volonté par elle-même, comme dans le but suprême vers lequel l'homme doit arriver. Le monde est pour l'individu un lieu de souffrances et de misères ; le monde est donc un mal ; pour l'empêcher à jamais de renaître, il faut anéantir en soi la volonté de vivre. — Vouloir vivre, selon Schopenhauer, est une erreur autant qu'une imperfection de notre nature. — Cette volonté égoïste, il faut donc la combattre ; il faut la dompter et la réduire au silence. Poursuivre sincèrement ce renoncement représente la vertu; l'atteindre est la félicité suprême; la réaliser est la souveraine perfection. La perfection consiste donc à nier ce monde, le repos à l'anéantir, le bonheur à se perdre soi-même dans son anéantissement.

M. le Dr Plantier expose ensuite quelques critiques philosophiques sur le Christianisme, le Boudhisme et le système de Schopenhauer, et fait connaître en quelques mots son système à lui, basé sur les connaissances actuelles de la matière et des forces, système qu'il se propose de développer plus tard. Il termine en donnant le nombre d'individus composant les différentes religions :

Boudhisme, 315.977.000.

Christianisme avec toutes ses branches, 252.000.000.

Mahométisme, 120.105.000.

Brahmanisme, 111.357.000.

Autres religions, 138.420.000

La causerie sur les romans susnommés est renvoyée à la prochaine séance.


— 270 — Séance du 28 décembre 1872

PRÉSIDENCE DE M. MAXIMIN D'HOMBRES , PRÉSIDENT

M. le Président donne lecture des lettres de remerciement de MM. Sielfried et Crespon, reçus membres non résidants.

Il annonce ensuite l'arrivée des ouvrages suivants, donnés par le ministère des travaux publics.

1° Annales de l'Ecole des Mines, moins la première série;

2° Annales des Ponts-et-Chaussées ;

3° Carte géologique de France , par Dufresnoy et Elie de Beaumont, avec le texte;

4° Carte des voies romaines, de Peutinger, avec le texte.

M. le Secrétaire général présente deux volumes de l'Ecole des Mines, faisant suite à la collection donnée par le ministère des travaux publics, et le Bulletin bibliographique de la langue d'Oc, pendant 1869, par S. Léotard.

M. A. de Lamothe , archiviste du département du Gard, présenté comme membre honoraire par MM. Maximin d'Hombres et Charvet, est admis à l'unanimité.

M. Charvet a la parole pour la lecture de l'Introduction d'un travail de M. de Lamothe, ayant pour titre : Coutumes de Saint-Gilles, et qui sera inséré au Bulletin de la Société.

M. Plantier, continuant l'étude de la philosophie allemande, dit quelques mots sur la Théorie de l'inconscient, d'Edouard de Hartmann, et lit quelques passades d'une étude de M. Léon Dumont, parue dans la Revue scientifique du 7 septembre 1872, sur cette théorie.

Il fait ensuite l'analyse des deux romans de Sucher-Masoch, en faisant surtout remarquer les principes philosophiques de Boudha et de Schopenhauer qui s'y trouvent développés, principes qui semblent se répandre beaucoup dans l'Europe occidentale et en particulier dans l'Allemagne.


TABLE DES MATIÈRES

DU QUATRIÈME VOLUME

pages

Règlement de la Société 5

Liste des Membres de la Société 10

Extrait du registre des procès-verbaux des séances (du 6

janvier au 11 mai 1872) 19

Compte-rendu des travaux de la Société pendant l'année

1871, par M. Eugène Gaujoux, secrétaire général ... 46 Rapport de la Commission chargée de faire exécuter des fouilles archéologiques aux environs de l'établissement thermal des Fumades, par M. G. Charvet, vice-président. 52 Sources d'Euzet-les-Bains, par M. le Dr Auphan, secrétaire

général 88

La Vié-Cioutat, par M. L. Chamboredon, membre résidant. 101 La Liberté, poésie par M. F. Francezon, membre résidant. 110 L'Immortalité de l'âme, sonnet par M. Auguste Gide, membre non résidant 112

A une jeune fille, par le même 113

Margarido, poésie par M. André Leyris, membre résidant. 114

Ma Méïnado, poésie par le même 118

Le Chat et l'Enfant, fable par M. L. Chabaud, membre résidant 119

Cassis, sonnet par M. L. Rochetin, membre non résidant . 120 Coutumes de Saint-Gilles, publiées par M. A. de Lamothe,

membre honoraire 121

Nouvelles considérations sur le phylloxéra, par M. E. Romant,

Romant, non résidant 216

De l'Alesia dont il est fait mention dans la vie de Saint-Germain d'Auxerre, par M. L. Chamboredon, membre résidant 234

De nuit tous les chats sont gris, conte en vers par M. J.

Lisbonne, membre non résidant 240

Un Ménage, poésie par M. F. Francezon, membre résidant. 245 Extrait du registre des procès-verbaux des séances (du 1er

juin au 28 décembre 1872) 248


ERRATA

Page 132, lignes 8, 9 et 10, modifier la ponctuation comme il suit :

... criminellas, per se ho per autre, et toutas causas, requirens cognoyssenca de cause; appres que lodit juge aura pronunciat, decernit (4) ho ordenal que y ya de faire de lor auctoritat, etc.

Page 139, lignes 5 et 8, au lieu de : reserve ? vexation, lisez : reseme vexation; et modifiez comme il suit la note (5) relative à ce passage :

(5) Fayre rasonar (pour ransonar) et reseme vexation; obliger le commerçant à se racheter d'un droit injustement imposé.

Page 144, lignes 31 et 32, au lieu de : se mouyen de per se, lisez : se mouven de per se; et reportez-vous à la note (2) de la page 145.

Page 244, ligne 26, au lieu de : et se forma soudain, lisez : et se ferma soudain.