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Titre : Bulletin de la Société de géographie de Lille

Auteur : Société de géographie (Lille). Auteur du texte

Éditeur : Société de géographie (Lille)

Date d'édition : 1923-01-01

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327240723

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb327240723/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 13893

Description : 01 janvier 1923

Description : 1923/01/01 (A44,T65)-1923/03/31.

Description : Collection numérique : Fonds régional : Nord-Pas-de-Calais

Description : Collection numérique : Ministères des Affaires étrangères

Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k57209507

Source : Bibliothèque nationale de France, département Collections numérisées, 2009-15461

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 17/01/2011

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1923. JANVIER FEVRIER-MARS N° 1.

BULLETIN

DE LA

SOCIÉTÉ DE GÉOGRAPHIE

DE LILLE

(LILLE, ROUBAIX, TOURCOING)

Reconnue d'utilité publique par décret du 21 Décembre 1895. MÉDAILLE D'OR A L'EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1900.

PUBLICATION TRIMESTRIELLE

QUARANTE-QUATRIÈME ANNEE

TOME SOIXANTE-CINQUIÈME

SOMMAIRE :

Pages.

1. Procès-verbaux des Assemblées générales :

Assemblée générale du 28 Décembre 1922 ......................., 5

II. Séance solennelle du dimanche 28 Janvier 1923..... .. 10

III. Comptes rendus de Conférences :

A. DUFOUR. — La Syrie...... . ..................... ............... 32

Pierre DEFFONTAINES-— La Lorraine .......... .......... ...... 34

IV. Excursions de la Société en 1923.............................................. .... ..... .38

V. Chronique géographique....... ... ... 38

SIEGE DE LA SOCIÉTÉ! : 116, rue de l'Hôpital-Militaire, LILLE.

Abonnement au Bulletin : 20 francs. —- Prix du Numéro : 5 francs.

(1.6 Bulletin est envoyé gratuitement aux Sociétaires).


SOCIÉTÉ DE GÉOGRAPHIE DE LILLE

(Lille-Roubaix-Tourcoing)

FONDÉE LE 14 JUIN 188O

Reconnue d'utilité publique par décret du 25 Décembre 1895

MEMBRES DU BUREAU POUR 1923

MM.

Président. ... Auguste, CREPY, :*, *A., *, Négociant,

Vice-Consul du Portugal, à Lille.

Vice-Présidents Oscar GODLN, * A., C. *, Membre correspondant des Sociétés de Géographie de Madrid, de Lisbonne et de la Suisse Orientale, à Lille.

Edmond MASTJREL - PROTJVOST,

" Industriel, à Tourcoing.

Jules SCRIVE-LOYER, Propriétaire, à • Lille.

A. BUFQUIN, * A., Dir. de la. Banque de France, à Roubaix.

Secrétaire-Général— Maximilien SORRE,*,*,0.*,Maître de

Confér. à la Fac. des Lettres de l'Université. » » adjoint Paul THOMAS, Professeur au Lycée.

Secrétaire du Comité. Auguste SCHOTSMANS, 0.*, Propriét.

à Lille.

Trésorier Pierre DECROIX, *, I. *, *, à Lille.

« adjoint— .. Maurice TRTEFFRY, Négociant, à Lille.

Bibliothécaire .'7 René GIARD, Libraire, à Lille.

Archiviste .'. — Félix FIÉVET, Propriét., à La Madeleine.

AVIS

La BIBLIOTHÈQUE et le SECRÉTARIAT de lu Société sont ouverts chaque jour non férié de 10 à 12 heures et de 15 à 18 heures. •

La Société n'est pas responsable des opinions émisés par les Auteurs dont les travaux sont insérés au Bulletin.


BULLETIN

DE LA

SOCIÉTÉ DE GÉOGRAPHIE

DE LILLE

(LILLE, ROUBAIX. TOURCOING)



BULLETIN

DE LA

SOCIÉTÉ DE GÉOGRAPHIE

DE LILLE

(LILLE, ROUBAIX, TOURCOING)

Reconnue d'utilité publique par décret du. 21 Décembre 1895

JANVIER-FÉVRIER-MARS 1923

Quarante-Quatrième année. —- Tome Soixante-Cinquième.

SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ :

116, Rue de l'Hôpital Militaire, 116

LILLE



PROCÈS-VERBAUX DES ASSEMBLÉES GÉNÉRALES

Assemblée générale du 28 Décembre 1922

Présidence, de M. AUGUSTE CREPY. Président

La séance est ouverte à 20 h. 30 sous la présidence, de M. Auguste Crepy, Président. Prennent place au bureau : MM. A. Crepy, Bufquin, Petit, Fiével, Lirondellc.

M. A. Crepy prononce l'allocution suivante :

Depuis notre, dernière Assemblée générale nous avons eu le plaisir d'inscrire 214 nouveaux sociétaires parmi lesquels trois Membres fondateurs.

Nous avons nommé Membres d'honneur pour services rendus à la Société et en raison de leur haute situation dans le monde géographique, MM. de Martonne et Demangeon.

Congrès. — Le Congrès annuel des Sociétés Savantes aura lieu eu Avril 1923 ; le programme détaillé est à votre disposition au Secrétariat.

Le, 5e Congrès international des Sciences historiques aura lieu à Bruxelles, du 8 au 15 Avril 1923. Le programme se trouve également au Secrétariat.

La Société Sultaniêh île Géographie du Caire, pour fèter son cinquantenaire, assume la tâche, de préparer pour 1925 le.XIe Congrès international de. Géographie. Je vous engage à prendre dès maintenant vos dispositions pour y assister nombreux. Ce sera le premier Congrès international depuis celui de Rome, qui a eu lieu en 1913 et auquel j'ai eu l'honneur de vous représenter.

MM. Scrive-Loyer et Julien Petit ont bien voulu nous représenter à plusieurs des Congrès qui ont eu lieu à Marseille, au cours île la remarquable exposition coloniale qui s'y est tenue cette année.

Centenaire de Pasteur. — La Société a été représentée aux Fêtes du Centenaire par M. .1. Scrive-Loyer.

Excursions. — Sur 20 excursions inscrites au programme, huit n'ont pas eu lieu faute d'un nombre suffisant d'adhésions. Nous serions très désireux qu'elles retrouvent leurs succès d'autrefois ; nous serions reconnaissants aux personnes qui voudraient suggérer au Secrétariat des buts nouveaux et intéressants.


— 6 —

Séance solennelle. — Noire Séance solennelle est fixée au 28 Janvier. La Conférence d'usage y sera faite par Mgr Baudrillart, Recteur de l'Institut Catholique de Paris, et Membre de l'Académie française.

Colisaliims. — Comme vous le savez, par la circulaire que vous avez reçue, nous avons été contraints d'élever momentanément le taux des cotisations. Nous espérons néanmoins qu'en raison des efforts que nous faisons pour vous donner des conférences aussi variées et intéressantes que possible, vous resterez tous fidèles à votre chère Société de Géographie. Nous avons déjà hier, inscrit deux nouveaux Membres fondateurs et un autre sociétaire est venu payer sa cotisation de 1923 au nouveau tarif. Il a fait plus ; comme il compte venir aux Conférences avec trois autres personnes de sa famille, il a payé' deux cotisations. Nous souhaitons que cet exemple soit imité.

Elections. — Nous avons à procéder à la réélection de dix membres dont les pouvoirs expirent le 31 Décembre : MM. Auguste Crepy, Louis Decramer, Albert Degouy, Marcel Delanne, Général Lacapelle, Dr Le Fort, Mgr Lesne, Louis Nicolle, Julien Petit et Raymond Rajal.

Nous avons en outre à compléter par deux nouveaux membres pour l'année 1923 la série A.

Nous proposons à vos suffrages à titre d'indication, les noms de M. Sorre, nouvellement chargé à la Faculté des Lettres de renseignement de la Géographie, et M. l'Abbé Baeckeroot. Professeur de Géographie économique à l'Ecole des Hautes Etudes commerciales annexée aux Facultés Catholiques. Nous vous prions de vouloir bien déposer voire bulletin dans l'urne qui vous sera présentée à la sortie.

M. Auguste Crepy présente ensuite M. Lirondelle, membre du Comité d'Etudes, qui veut bien l'aire revivre pour l'assistance, ses souvenirs de la Russie de naguère. M. Lirondelle évoque avec émotion les paysages et les aspects des foules, qui se déroulaient aux veux charmés du voyageur lorsqu'il descendait le grand fleuve russe la Volga.

Puis M. A. Crepy remercie M. Lirondelle de celle conférence — intitulée causerie par pure modestie. Il lui exprime les sentiments que tous oui éprouvés, en écoulant son évocation toute pleine de poésie , si pénétrante, où ressuscitait tout le charme étrange de la vieille Russie.

Le relevé; des bulletins de vote a donné les résultais suivants :

Membres du Comité pour les années 1923-1924-1925 : MM. Auguste Crepy, Louis Decramer, Albert Degouy, Marcel Delanne, Général Lacapelle. Dr Le Fort, Mgr Lesne. Louis Nicolle, Julien Petit et Raymond Rajal.

Membres du Comité pour l'année 1923 : MM. Sorre, l'Abbé Baeckeroot.


MEMBRES NOUVEAUX ADMIS PAR LE COMITÉ D'ÉTUDES LILLE

Nos d'ins- MM cription.

6235. WACHÉ. Joseph, 11, rue de Fleurus.

6236. LEPOT, Jean, 23, rue de la tiare, Ascq.

6237. MEURISSE Henri, 75, rue Nationale.

6238. BRFIVART, Alfred, industriel, 130, rue Royale.

6239. DESPRETZ-CU VELIER, 233, rue de Lille, Marquette.

6240. QUDIN Pierre, *, 54. rue Sadi Carnot, Haubourdin.

6241. MICHUTTE (Abbé), professeur à l'université cath. de Louvain

6243. CLARO, Albert, 52, rue Blanche.

6244. ROSSIGNOL, Étienne (Mme), 25, rue Mercier

6245. DUPREZ (Mme), 14, rue Gauthier-de-Châtillon.

6246. DARAGON, Félicien, percepteur, i5, rue Jean-Bart.

6247. COLLINS, Guy, clerc de notaire, Baisieux.

6248. CHENAL, Léon, industriel, 178, rue d'Artois. (3252. LANGUEREAU Gaston, ingénieur, Mens-en-Barocul 6253. GUERRIN, docteur en médecine, 17, rue Patou.

6254. HOURDEAU, ingénieur, 3, rue de Jemmapes

6255. DESAILLY (Mlle), 63, rue de Lens.

6256. PONCELET, Victor, négociant.- 3, square Dutilleul. 6258. MONTASSIER (Mlle), 4, rue Dumont d'Urville. 5259. RIQUET (Mlle), 82. rue Nationale.

6260. HENNION, Marie-Louise, 54, boulevard Victor-Hugo.

6261. ROGIER, Pierre, Agent administratif, 13, boulevard Victor-Hugo. 6202. LECLERCO, Léon, Commissaire priseur, 78, rue de Turenne. 6263. LECOCO, Henri, 12, rue de la Chapelle, La Madeleine.

626L. DAGBERT, Louis, 2, rue, d'Inkermann.

6265. FALALA, vérificateur principal des douanes, 83, rue Barlhélemy-Dclespaul.

6266. DROLART, — — — 27, r. de la Concorde, La Madeleine.

6207. RINCHEVAL, Marie, 55. rue Gantois.

6208. DERLS, Albert,32, rue Esquennoise.

6269. FASCIAUX, Alexandre, 2, rue Arnould-de-Vuez.

6270. LEVIS, Edouard, pharmacien, 27, rue de Roubaix.

6271. DELEHELLE, Henri, notaire, Haubourdin.

6272. DUMEZ (Abbé), Institut. St-Jacques, Hazebrouck.

6273. GRAS. Pierre, ingénieur, 96, rue du Maréchal Foch. La Madeleine.

6274. DOINEL, Maurice, 17, rue du Sabot.

6275. DEBROMELLE, Maurice, tailleur, 8, place de Strasbourg.

6276. LEBRUN, négociant, 51, rue Basse. 6277. DERRY (Mme), professeur, 53, rue Basse.

6278. MOREL, Adolphe, 17, rue de la Vieille-Comédie.

6279. DUROT, Raymond, 30, rue St-André.

6282. PLOUVIET, Léon, commis P. T. T., 19, rue Gustave Joncquet


— 8 — LILLE (suite)

N°s d'ins- MM

cription.

6283. HALNAUT (Mme), 93, rue, des Meuniers.

6284. VERSTRAETE. André, industriel, 20, rue Henri-Kolb.

6285. VERSTRAETE, Jules, colonel de gendarmerie.

0280. VILLETTE, Jeanne, 70, rue de Canteleu.

6287. LOQUET-DELRIVE, ingénieur, avenue Verdi, La Madeleine.

6288. I.ASCOUR (Mme). 14 bis. rue, Nicolas-Leblanc.

6289. LERÉVÉREND, Louis, négociant, 87, rue Nationale.

6290. THOMAS, Raymond, ingénieur, 21, rue Nicolas-Leblanc. 6291 . MATTEX (Abbé), 55, rue des Meuniers.

6202. ALLÈGRE, Robert, directeur du Nord financier, 12, rue de, la Chambre des

Comptes.

6293. LABBE, Armand, entrepreneur, 15. rue Boucher-de-Perthes.

0291. WAUQUIER, Edouard, constructeur, 67 bis, rue de Wazemmes.

6296. LotsTlllois, Pierre (Mme), 15, boulevard de la Liberté.

6297. MULLER, Pierre, fondé de pouvoir B.C.N., 42, rue Royale. 6218. DEUPORTE, Paul, receveur municipal, 2, rue du Lombard. 6210. QUENIART Charles, banquier, 14, boulevard Carnot.

6302. MORIN, Pierre, compt., 9, rue Gustave Testelin.

6303. TISSIER, Victor, employé de commerce, 191, rue Gamhella.

6305. DUPONT-OFENER, 176, rue Colbert.

6306. CATOIRE, Gaslon. 103, rue Royale.

6307. VERLINDE, Maurice, industriel, 9, rue Malus.

6308. FOURNIER, 27, boulevard Carnot.

6300. GAYET, Marcel, avocat. 15, rue de Thionville.

6310. OLIVIER (Mme), 53. rue Nicolas-Leblanc.

6311. CARPENTIER (Abbé), professeur, 13, rue de Toul.

6312. GUERBER. Octave, arch., 27, rue Gustave Joncquet.

6313. DEJOULX, André, ingénieur, 4, rue Thiers. 6311. PREUDHOMME, 19, avenue de l'Hippodrome. 6315. GALDIN, Léon, étudiant, 4. place Catinat. 6316. COURCOT, Simone, 6, rue Lafayelte.

6317. COIILIOT, Jean-Baptiste, 8, rue Camille Desmoulins.

6318. DE WILDE, Charles, négociant, 79, rue Colbert.

6319. VAX AERDE, dentiste, 16, square Dutilleul.

6320. DELBECO, Bernadette, 19bis, rue Masurel.

6321. PRÉVOST (Mme), infirmière à l'Hôpital-Militaire. 6322. TELLIER, Germaine. 10, rue à Fiens.

6323. DANNA. Albert, ingénieur électricien, 92, avenue Si-Maur.

6321. DEGRAVE, Maurice, 31, rue Grande-Chaussée.

6325. ROUSSEL (Mme), 152. rue de Solférino.

6326. SORRE, Maximilien, maitre de conférences à la Faculté des Lettres.

6327. SARAZIN, A., négociant, 5, place aux Bleuets. .

6328. COPPIN, Michel, 9, rue de Thionville.

6329. DUELIN (Mlle), 148, rue d'Esquermes.

6330. MARSILLE, Berthe, 16, rue de Fleuras.

0331. BREUNIN (Mme), 32, rue Neuve.


LILLE (suite)

N° d'ins- MM:

cription.

6332. CHAMPION, Edouard, 5, quai Malaquais, Paris.

6333. WALKER, II. B., 25, rue Henri Kolb.

6334. DECIMULE, Jules, 22, rue de Bruxelles.

6335. VANDEVOODE, Maurice, 2, rue Ste-Anne. 6336. DUFLOT-HUE, Charles, 20, rue d'Arras, Seclin.

6337. MAILLOT, Jules, 372, avenue de Dunkerque.

6338. VERGNE, Joseph (Abbé), 92, rue de Solférino. 6339. LAPRISE, Jean, étudiant, maison Si-Michel.

6340. COOREVITS, Achille, 19, rue Grande-Chaussée.

6341. RAZEMOX, docteur en médecine, 36, rue des Fossés 6312. DONZE, H., 25, rue de Lens.

6343. DASSONVILLE, Charles, 71, rue Lamblin, Ronchin.

6344. VANSEVEREN, Michel, 14, rue Lazare Carreau.

6345; HERLIN, Auguste, notaire, 83, rue de l'Hôpital-Militaire

6346. HUGONNET, architecte, 28, rue Grande-Chaussée.

6317. MINET, Gaston, négociant, 12, rue de. Paris.

ROUBAIX

N°s d'ins- MM cription. MM.

6242. CHEVALLIER, contrôlent à la Banque de France.

6249. CARLIER, chef d'escompte, à la Banque de France.

6250. JACOZ (Mmc), 170, rue du Collège.

6251. DUPONT, Eugène, 66, rue du Grand Chemin.

6280. MOTTE, Alfred (Mme), 31, rue Neuve.

6281. LEMAIRE, Henri, industriel, 126, boulevard d'Armentières. 6295. LEFEBVRE, Napoléon, professeur, 92, rue de Lille,

6300. DESROUSSEAUX, docteur en médecine, 133, rue de l'Epeule.

6301. DESTOMBES, Paul, architecte, 01, rue de Lille.

6304. TORRIS, Marcel, étudiant, 111, boulevard d'Armentières.

6348. VAX NIEUWENHUYSE, docteur en médecine, 5, rue Pauvrée.

6349. DESRUMAUX, Jules, industriel, 87, rue de l'Industrie.

6350. VALENTIN-DECOSTER, industriel, 4, avenue des Lilas.

6351. AUTEFAGE, docteur en médecine, 96, rue du Grand Chemin.

6352. DIFFRE, docteur en médecine, 38, rue des Fabricants.

TOURCOING

N° d' inscription. M.

6257. LEMAN-VAN DE KERCKHOVE. 76, rue de Roabaix


- 10

SEANCE SOLENNELLE

du Dimanche 28 Janvier 1923

LaSéance solennelle de la Société, a eu lieu le Dimanche 28 Janvier, à 15 heures dans la Salle des Fêtes de la Société Industrielle.

Aux cotés de M. Auguste Crepy, Président, avaient pris place. Mgr Baudrillart, de l'Académie française. Recteur de l'institut Catholique de Paris, qui avait accepté de donner la conférence d'usage, M. le Général Lacapelle, M. le Recteur Georges Laon, Mgr Lesne, M. Chavin représentant le Préfet, les Membres du Bureau et du Comité d'Etudes de la Société.

Après avoir salué les autorités préseules et notamment les Recteurs, M. G. Lyon et Mgr Lesne, remercié M. le Préfet de s'ètre fait représenter, M. Auguste Crepy prononce les discours suivant :

Discours de M. Auguste Crepy

Président.

MONSEIGNEUR. MESDAMES, MESSIEURS.

La Société de Géographie de Lille est entrée le 14 Juin dernier, dans la quarante-troisième année de son existence. Forte à la fois des traditions qui demeurent vivaces et d'une heureuse collaboration d'éléments anciens et d'éléments jeunes au sein île son Comité d'Etudes et de ses différentes Commissions, elle a réussi, en ces années difficiles d'après-guerre, à poursuivre à peu près régulièrement le cours de ses travaux. C'est à vous tous qui m'entourez, mes chers Collègues, que notre chère association le doit : j'ai l'agréable devoir de vous en remercier.

Pendant l'année qui vient de s'écouler, des distinctions flatteuses ont été décernées à un certain nombre des nôtres : permettez-moi de les en féliciter en votre nom. Au premier rang de ceux dont le Gouvernement a tenu à reconnaître les services par un témoignage public de haute estime, j'ai le plaisir de citer l'un des Membres les plus anciens, les plus dévoués — et en même temps les plus modestes — de notre Comité d'Etudes, M. Auguste Schotsmans, promu il y a quelques mois au grade d'Officier de la Légion d'Honneur.

En outre, M. Georges Six, Membre correspondant et M. Félix Coquelle, Membre fondateur de notre Société, ont été nommés Chevaliers du même


— Il —

Ordre et notre sympathique Trésorier, M. Pierre Decroix, a été promu Officier de l'Instruction Publique.

Mesdames, Messieurs, l'activité de notre Société revêt des formes multiples : toutes font également l'objet de notre attention et nous sont également chères. Mais au moment où la révision des programmes scolaires est, comme vous le savez à l'ordre du jour du Parlement, et où la place de la Géographie est à la veille - nous affirme-t-on — d'être mise en discussion dans les nouveaux programmes,- il me paraît particulièrement intéressant de préciser le point de vue qui, jusqu'ici, a été celui de notre Société dans le domaine de l'enseignement géographique. Je vous demande donc la permission de vous entretenir aujourd'hui de ce sujet qui touche à la fois à la conception et à . l'organisation de nos concours et à nos rapports avec le personnel géographique enseignant.

A la vérité, toutes les manifestations de la vie de notre Association touchent de plus ou moins près à l'enseignement géographique : l'organisation de conférences, la formation et l'entretien d'une bibliothèque, l'institution d'excursions visent à répandre par les moyens les plus attrayants la connaissance géographique et.sont autant d'aspects d'une oeuvre d'enseignement à l'usage de tous les nôtres. Toutefois notre Société a des points de contact plus immédiats et plus spéciaux avec l'enseignement géographique: je. veux parler des concours que nous organisons chaque année dans nos trois villes de Lille, Roubaix et Tourcoing, et des rapports que nous entretenons avec les géographes de profession — tant pour assurer le fonctionnement de ces concours que pour maintenir à nos publications et à nos travaux une orientation conforme aux progrès de la science géographique.

L'idée qui a présidé à l'établissement et à la classification de nos concours est simple : par le jeu d'une féconde émulation nous nous efforçons de développer parmi nos jeunes concitoyens le goût de l'étude de la géographie, afin d'initier leurs esprits aux choses du dehors et aux questions générales en leur apprenant à situer les unes et les autres dans leur cadre naturel et ■humain, à la surface du globe. Nous sommes persuadés qu'ils seront appelés à bénéficier de semblables notions, quelle que soit la profession, libérale ou commerciale, vers laquelle ils s'orientent ou qu'ils exercent dans l'avenir. Aussi -— et c'est là une originalité de nos concours, si on les compare à ceux qu'ont institués ailleurs des sociétés similaires, —• n'hésitons-nous pas à réserver une très large part aux sections primaire et secondaire,' c'est-à-dire, aux catégories-qui s'adressent à l'enfant et à l'adolescent, garçon ou fille, de 9 à 19 ans, qu'il suive ou non les cours d'un établissement d'enseignement, et quel que soit au surplus cet établissement. Ce que nous cherchons surtout à obtenir, c'est la participation à nos multiples séries du plus grand nombre possible de candidats et de candidates.

Je me fais un plaisir de vous indiquer ici que, pour nos concours de 1922, 18 établissements, dont un de Douai et même un de Valenciennes, nous ont


— 12 -

envoyé 190 candidats, jeunes gens ou jeunes filles, dont 3l ont obtenu des prix et 28 des accessits, consistant en livres et en médailles, accompagnés de diplômes.

Nous sommes heureux de ces résultats, mais nous désirerions qu'un plus grand nombre d'écoles primaires nous envoient des candidats.

])'un ordre différent, mais non moins intéressants, sont nos concours supérieurs, c'est-à-dire ceux qui s'adressent aux étudiants de nos Universités ou aux travailleurs libres ayant atteint l'âge de la maturité.

Ces concours n'ont été institués que postérieurement aux précédents. En effet, rétablissement dans notre ville des facultés officielles transférées de Douai et celui des facultés libres, ne remonte qu'à une époque sensiblement postérieure à la fondation, voire au plein essor de notre association. Mais, aussitôt l'enseignement supérieur installé à Lille, nous avons créé des concours d'un niveau plus élevé et qui n'ont pas tardé à être attentivement suivis. Ces concours supérieurs sont, les uns, d'un caractère surtout utilitaire et pratique, les autres d'un caractère surtout scientifique. Parmi les premiers figurent nos concours déjà anciens de Géographie commerciale et notre concours nouvellement fondé de Géographie coloniale.

Nous avons eu le plaisir d'enregistrer cette année pour la première fois, la participation de jeunes filles à notre 2e série de Géographie commerciale : cela est dû à la création à Lille de l'Ecole supérieure de Commerce des jeunes filles. Mais il nous faut exprimer le regret que, la 1re série, réservée aux employés du Commerce et de l'industrie des deux sexes et, le concours de Géographie coloniale ce dernier doté cependant d'une médaille d'argent et d'un prix de 258 francs), n'aient pas davantage attiré l'attention des intéresés.

Nous émettons le voeu qu'ils soient plus suivis celle année.

D'autres concours supérieurs revêtent un caractère scientifique. C'est le cas du concours pour le Prix Paul Crepy, dont le but est d'éveiller chez les étudiants la vocation de la recherche géographique.

C'est le cas aussi du concours de Géographie historique du Nord et du Pas-de-Calais et Au concours de Monographies communales et Etudes géographiques des mêmes départements: ces deux derniers ne peuvent, par leur nature même, attirer qu'un nombre, très restreint de candidals, mais ils. donnent lieu au dépôt de mémoires originaux, souvent importants et qui contribuent à la fois à mieux faire connaître notre région et à maintenir le bon renom de notre Sociélé.

Comme vous le voyez. Mesdames, Messieurs, nous avons tenté des efforts persévérants, des efforts variés pour stimuler l'étude de la Géographie à ses divers degrés. Par une conséquence logique, notre Société, depuis sa fondation, n'a cessé d'entretenir des rapports permanents avec les maîtres de l'enseignement géographique. Plusieurs d'entre eux, qui comptent parmi les plus éminents de notre pays et qui nous honorent d'une fidèle amitié, figurent sur la liste de nos Membres d'Honneur. Et dans notre Comité


- 13 —

d'Etudes, comme dans les jurys de notre Commission des Concours nous bénéficions depuis de longues années d'une unanime et cordiale collaboration des géographes professionnels de notre ville, quel que soit l'établissement d'enseignement, officiel ou libre, auquel ils appartiennent.

A cet égard, qu'il me soit permis de saluer aujourd'hui, la récente entrée au Comité d'Études de deux des plus distingués d'entre eux: MM. l'Abbé Baeckeroot, et Maximilien Sorre : ce dernier a bien voulu assumer les fonctions de Secrétaire général, laissées vacantes par son dévoué prédécesseur, M, Julien Petit, obligé de les résigner, à notre vif regret, faute de pouvoir résider à Lille foule l'année. Vous aurez tout à l'heure le plaisir d'entendre pour la première fois M. Sorre, dans la lecture du rapport sur nos travaux de l'année.

Monseigneur, Mesdames, Messieurs, j'en ai assez dit pour démontrer une fois de plus le profond intérêt que notre Société n'a cessé de témoigner à l'enseignement géographique. Peut-être avons-nous le droit de dire que dans notre modeste périmètre d'action, nos efforts n'ont pas été stériles. En tout cas, je ne crois pas trahir votre opinion, mes chers collègues, en déclarant que la connaissance de la géographie esf l'une de celles dont l'acquisition nous apparaît, par nos fils, plus particulièrement précieuse : nous la jugeons plus que jamais nécessaire pour nous, Français, au lendemain des bouleversements politiques et économiques qui viennent d'affecter notre continent. Or, comme je vous le disais en commençant, la révision des programmes scolaires qui est actuellement à l'étude paraît menacer — menace même d'une façon très précise — la géographie d'une réduction du nombre d'heures déjà si restreint que le programme de 1902 lui avaient réservé. L'Association des Géographes français s'en est émue et a poussé un cri d'alarme, en émettant le voeu que, dans l'allégement désiré des programmes, la part de la géographie soit sauvegardée.

S'il est permis à votre président de donner sur cette question son sentiment, je m'associerai à ce voeu et j'exprimerai l'espoir que la révision des programmes ne porte pas atteinte à l'enseignement de cet ensemble de notions si attrayantes et si suggestives auquel on donne le nom de Géographie et dont la diffusion à travers le Pays, contribue si grandement à répandre, ou du moins a maintenir, une juste et saine conception des intérêts territoriaux et économiques de notre Nation dans le domaine colonial et dans le domaine extérieur.

M. le Président donne alors la parole à M. Sorre, Secrétaire général, pour la lecture du rapport annuel.

Rapport de M. le Secrétaire général.

MESDAMES, MESSIEURS, MES CHERS COLLÈGUES,

Quand notre Collègue, M. Giard, lisait l'an dernier à cette place le rapport de M. Julien Petit, personnene pensait que votre Secrétaire général dût


abandonner si tôt sa charge. La manière même dont il l'exerçait, vous était un gage qu'il maintiendrait longtemps une tradition rappelée au début de son rapport. On ne l'ail si bien que ce qu'on aime. Vous avez dù vous incliner devant sa décision et lui désigner un successeur. Mais l'héritage qu'il laisse est bien lourd. Si la confiance que vous lui aviez témoignée vous conférait des droits sur lui. et l'autorité et le dévouement et l'urbanité qu'il apportait dans l'exercice de son mandai lui avaient déjà donné des droits sur vous. Je ne me sens à cette heure que des devoirs. Cependant. Messieurs. M. Julien Pelit. Secrétaire général honoraire, continue de participera nos travaux. Sa présence et ses conseils amicaux, seront précieux à son successeur. Vous étonnerai-je en vous disant que dans ce rapport vous trouverez souvent un échu île sa pensée ?

Mes chers Collègues, au moment où vous donniez au nouveau venu que je suis un tel témoignage de confiance, il m'a semblé que le meilleur moyen d'y répondre, était de me pénétrer d'abord de vos traditions. Votre Bulletin en est le dépositaire: il donne la plus fidèle image de votre activité. Noire Président. M. Auguste Crepy. marquait l'an dernier en termes excellents sa fonction dans la vie de la Société. « Celle publication, disait-il. demeure indispensable, non seulement pour tenir nos sociétaires au courant du mouvement géographique, mais encore pour encourager les patientes recherches des techniciens dont nous pouvons publier les travaux, assurer à notre Bibliothèque par voie d'échanges le service des publications des Sociétés correspondantes de France, des Colonies et de l'Etranger, et faire connaître au loin le nom de la Société de Géographie de Lille. »

Une définition si substantielle, se passe de commentaire assurément. Permettez-moi. cependant, d'y arrêter quelques instants votre attention.

Le Bulletin est véritablement la condition même de la vie de la Société. Il réveille et entretient l'intérêt que lui portent tous ses membres. Des conditions de santé, d'âge, de résidence, d'occupation peuvent s'opposer à la fréquentation de nos conférences, de nos excursions. Assez nombreux sont . ceux qui ne peuvent s'associer à ces manifestations collectives. Mais voilà que quelques feuilles imprimées leur en apportent périodiquement, soit le compte rendu détaillé, soit au moins l'écho. Ils ont alors l'impression d'appartenir à un groupement agissant, de participer à son activité. Impression singulièrement efficace, pour secouer les indifférences et prévenir les désertions. On sait, à n'en pas douter, avec quelle impatience notre Bulletin est attendu, avec quel intérêt il est lu. Il constitue, le lien le plus fort entre tous nos membres. Et nous sommes avertis de ce qui se passerait si ce lien se relâchait. Beaucoup d'associations provinciales traversent dans la France entière une crise grave et prolongée. Le recrutement devient difficile, les défections se multiplient. Ce n'est pourtant pas que nulle part, les conférences manquent, disons-le sans ironie. Mais on voit partout un rapport étroit entre Ia décadence des Sociétés et l'irrégularité ou l'insuffisance de leur Bulletin. Les difficultés


matérielles'croissantes qui ont amené, dans beaucoup de cas, des Sociétés à supprimer la publication de leurs actes, ont eu les conséquences les plus' redoutables pour la vitalité des centres scientifiques provinciaux.

Et pourtant, ce n'est pas aux lecteurs de notre Bulletin que j'apprendrai quel rôle capital les Revues locales ont joué dans la diffusion de l'esprit géographique. Il y a aujourd'hui une école géographique française qui a sa marque distinctive, qui peut prétendre marcher de pair avec. l'Ecole allemande, l'Ecole anglaise ou l'Ecole américaine. Elle se réclame de la grande mémoire de Vidal de la Blache. Ce qui est peut-être plus remarquable, ses productions ont trouvé des lecteurs dans notre pays. Il existe désormais eu France un public qui achète et lit des ouvrages d'un abord souvent austère. Or ce public, c'est en grande partie aux Sociétés de Géographie que revient l'honneur de l'avoir formé' par leurs Bulletins. Parallèlement, l'intérêt pour les choses coloniales s'est éveillé depuis cinquante ans d'un bout à l'autre de notre territoire. On s'intéresse à tous les progrès de la France d'Outre-Mer. Les noms des grands pionniers de notre entreprise d'expansion qui furent en même temps de magnifiques ouvriers de la science, sont familiers à tous. Dans la vulgarisation de leur oeuvre, dans la transformation de l'esprit national, dans l'élargissement de notre horizon et de nos légitimes ambitions, des Bulletins comme le nôtre ont eu leur belle part. A l'heure où la connaissance du monde extérieur est plus que jamais indispensable à cause de la solidarité croissante de toutes les régions du globe, où nos colonies sont notre plus grand espoir, ce sont là des raisons bien puissantes pour souhaiter que les seuls organes où le grand public peut trouver des renseignements contrôlés et précis sous une forme abordable à tous, ne périclitent pas, faute de subsides.

Le Bulletin d'une Société de Géographie a encore une autre fonction. Il a sa place marquée au premier rang dans ce mouvement d'idées et de recherches sans lequel il ne peut pas y avoir de renaissance régionale dans notre pays. Bien plus que les Revues d'histoire ou d'archéologie — ceci soit dit sans esprit de concurrence — il peut aider à la formation de la conscience régionale. La nécessité de cette renaissance, c'est encore un des enseignements de Vidal de la Blache ! Elle n'est possible que si elle s'appuie sur une exacte connaissance des choses. Les aspects caractéristiques du sol, du ciel et des eaux dans une région, leurs liens avec les formes spéciales de l'activité humaine qui s'y enracinent, la participation à une vie de relations plus générale, et les intérêts et les besoins et toutes les manifestations changeantes de la vie dans notre coin de terre, voilà de grands objets pour notre curiosité. Leur intérêt, scientifique se double d'un intérêt pratique. Or les grandes revues géographiques ne peuvent faire à ces préoccupations qu'une place mesurée. Elles répondent à d'autres nécessités. C'est aux revues locales de rassembler tous ces renseignements et de constituer comme un immense répertoire géographique de la France. Elles y gagnent d'avoir chacune sa physionomie propre. La Revue de Lille no ressemble pas à celle de Bordeaux,


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ni à celle de Montpellier, ni à celle de Marseille, ni à celle de Lyon, Et quelle sécurité morale pour le travailleur attaché à sa région — vous savez d'expérience qu'il s'en trouve dans le Nord — s'il sait pouvoir compter sur une publication qui accueillera son oeuvre. Vous dirai-je, Messieurs, qu'en me laissant entraîner à tracer ce tableau idéal d'un Bulletin de Société de Géographie, j'ai le sentiment de caractériser le vôtre.

Enfin, mieux un Bulletin remplira ces conditions, plus le rayonnement de la Société s'accroîtra, plus se trouvera facilité le service d'échanges avec des Sociétés correspondantes. Point de vue qui a sou prix. Vous connaissez les inconvénients entraînés dans l'ordre intellectuel par notre excessive centralisation. Certains vont jusqu'à prétendre qu'on ne peut pas travailler en province faute de renseignements. Il y a là. avec quelque exagération, un fond de vérité. Toutes les personnes qui ont besoin d'une documentation exacte sur des pays étrangère — ce ne sont pas seulement les travailleurs de la plume — se trouvent gênées par la difficulté de se procurer des revues, presque toujours absentes des bibliothèques publiques. Grâce à leurs services d'échanges, les Sociétés de Géographie peuvent constituer de riches collections d'une inestimable utilité.

Vous m'excurez de vous avoir un peu longuement parlé du Bulletin. Il représente, vous le savez, un des gros soucis des deux Secrétaires qui le revêtent leur signature. Nous sommes engagés d'honneur à ce qu'il soit digne de vous. C'est avec une moindre préoccupation des responsabilités morales que je vais vous parler des conférences, selon l'usage.

La série des Conférences de cette année ne l'a cédé ni en variété, ni en valeur éducative aux précédentes. Une fois de plus, nous devons remercier Monsieur le Président, de son effort si heureux pour grouper à chaque campagne les orateurs les plus distingués. Je me persuade que le rappel des sujets traités ne sera pas trop fastidieux puisqu'il évoquera pour beaucoup d'entre vous des heures agréables.

Les événements politiques de cette année — et les plus récents — ne vous ont pas permis d'oublier les vues si perspicaces et d'une si grande portée que M. Georges BLONDEL VOUS exposait en Séance solennelle, sur la situation actuelle de l'Allemagne. Certains sujets ont, hélas, le privilège d'une triste actualité.

Le 28 Janvier. M. Auguste CHEVALIER, VOUS entretenait de ses voyages en Afrique et en Asie, qui ont été si féconds pour la connaissance phylogéographique du monde tropical. Le 2 Février, M. le Chanoine LELEU, VOUS conduisait à travers les Pyrénées, de l'Océan à la Maladetta et vous faisait admirer les sites encore trop peu fréquentés d'une chaîne riche en contrastes. C'est un grand sujet que traitait devant vous. M. de RAULIN, le 9 Février, et qui intéresse la prospérité de la France : le représentant de la Ligue Maritime et Coloniale, a puisé dans sa forte conviction. les accents les plus persuasifs pour vous parler de la marine marchande, et de son rôle dans la vie d'une nation.


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11 a suffi, le 16 Février à M. l'Abbé HENRY, d'écouter la voix de son coeur pour commenter les aspects de la Cathédrale de Reims avant, pendant et après la guerre : était-il une ville en France où il fut assuré d'être mieux entendu ?

Le 26 Février, le R. P. AIZIER, S. J., évoquait le plus piquant contraste, celui qui oppose Vieille Chine et Jeunes Chinois. Monde obscur où seul un observateur aussi délié peut porter quelque lumière. Vous vous êtes retrouvés sur un terrain plus connu, le 2 Mars, lorsque M. WIBAUX, vous a conduits en auto à travers le Maroc. : contrée où nous ne sommes que d'hier, aussi familière pourtant à quelques uns de nos touristes que notre Algérie. Notre politique assurément y trouve plus aisément sa voie que dans ce trompeur Orient où se déchaînent les convoitises.

Le 9 Février, M. Michel LHÉRITIER, vous a dit ce qu'il avait vu dans la Grèce d'aujourd'hui et ce qu'on pouvait préjuger de son rôle politique et économique.

Le 26 Mars, c'est de l'Egypte que M. Albert MILLET, vous entretenait : son séjour dans cette contrée l'avait préparé à vous exposer des problèmes dont les données mêmes échappent parfois à nos consciences occidentales.

Entre temps, le 30 Mars, M. le Chanoine DELSAUX, VOUS guidait aux défilés de ce Rhin héroïque que l'imagination germanique environne des plus troubles prestiges. Où qu'on vous ait conduits, au milieu des plus grands spectacles, c'était encore aux hommes, à leurs passions et à leurs rêves qu'on vous ramenait presque toujours. Avec M. Jean BOSLER, le 30 Mars, vous avez échappé à l'humanité : on eût trouvé difficilement un conférencier plus qualifié pour vous parler du système solaire, des planètes et de leurs satellites. Enfin le 2 Avril, la campagne a été close sur une note française, disons régionaliste, par une Conférence de M. ROUX-PARASSAC, la Vallée du Rhône.

La campagne 1922-1923 s'est ouverte sur une note analogue avec la conférence de M. René MATHIEU, Terres et gens de la Normandie. Le 10 Octobre, le 15. M. Léon BERTHAUT, vous parlait avec, son lyrisme accoutumé de la mer, grande route des nations. Le 26, notre Trésorier, M. Pierre DECROIX, VOUS traçait dans une causerie accompagnée de projections cinématographiques un séduisant tableau des sports d'hiver : est-il un maître à qui nous consentions à nous abandonner avec plus de confiance ? Une Société comme la nôtre ne pouvait pas ne pas ne pas accorder à la mémoire du Prince Albert de Monaco, l'hommage qui lui est dû. M. THOULET, qui fut son collaborateur, est venu rappeler ici, le 9 novembre, ses campagnes océanographiques. Les longs services que M. Thoulet a rendus à la science, conféraient •à son témoignage une particulière autorité. Ce devoir accompli comme il convenait, nous nous sommes de nouveau tournés vers les pays du soleil: sous notre ciel voilé, l'imagination ne résiste pas à leur attrait. Et le 12 Novembre M. MEYS, nous montre Brousse, Scutari et les îles Prinkipo ; le 23,


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M. l'Abbé OLIVIER, nous raconte un pèlerinage récent en Terre Sainte et peint la situation actuelle de la Palestine, et le 30 Novembre, avec le R. P. DERVILLE, S. J., nous accomplissons une visite à Tazza la mystérieuse; moeurs, coutumes, famille, religion, il a vu toutes ces choses naguère, alors qu'il portait un autre habit, bien honorable aussi.

Le 10 Décembre, M. Georges FROMENT-GUIEYSSE. nous emmène sous des cieux plus ardents. Ces petites Frances du Pacifique que le Comité de l'Océanie française nous apprend à connaître et à aimer, de quels soins ne devons-nous pas les entourer ? Elles assurent de l'autre côté du monde le rayonnement de notre influence. Si nous en avons le ferme propos elles seront les étapes d'une grande route française tout autour du globe .Mais, voici les étapes d'une route moins lointaine. Le 19 Décembre, M. Alfred FICHELLE, nous faisait visiter Prague, ville historique, il est superllu de dire avec quelle double compétence d'historien et de, géographe; le 24. M. Marcel EMERIT, nous apportait ses impressions de voyage de Munich à Vienne, aux pays allemands du Danube, dans des contrées où s'entretient la plus implacable haine contre le nom français. Et le 28 Décembre, en Assemblée générale. M. André LIRONDELLE, Professeur, à la Faculté des Lettres, évoquait avec un charme inégalable ses souvenirs des jours d'autrefois, sur la Volga. Pendant que nous l'écoutions, si éloignés des préoccupations présentes, toutela poésie de la vieille Russie nous enveloppait. Nos marches de l'Est, aussi ont eu leur plaee. Le 14 Décembre, M. l'Abbé Auguste COUPÉ, avait décrit la cité pittoresque et artistique de Colmar. Le 18 Janvier, M. Pierre DEFFONTAINES. nous a tracé à propos de la Lorraine, de toute la Lorraine, un tableau de géographie humaine et économique. IL nous a fait de ses richesses et de son activité le plus limpide exposé et nous avons écouté avec intérêt ses suggestions touchant les relations du Nord et celles des pays lorrains.

Il m'a fallu violenter quelque peu pour les besoins de la cause l'ordre chronologique. Vous me reprocheriez cependant de ne pas vous rappeler la conférence de M. J. Alphonse DUFOUR, sur la Syrie, sa situation actuelle, ses ressources, son avenir, le 21 Décembre ; plus près de nous, la si émouvante et si belle causerie de M. l'Abbé G.DECROO, une .Mission catholique en Perse durant la guerre, du 11 Janvier. Enfin, M. L. Frédéric ROUQUETTE, le 25 Janvier a fermé la série en nous contant sa traversée de l'Islande et sa randonnée au Groenland de la façon la plus pittoresque.

Grâce à l'activité de votre Président, les conférences représentent la manifestation de votre activité qui souffre le moins de la dureté des temps : on trouve facilement, il est vrai, des gens qui parlent, il est moins aisé de distinguer ceux qui ont vraiment quelque chose à dire. On pourrait souhaiter que toutes les manifestations de notre vie collective, spécialement les excursions en fussent au même point. Il faut embrasser toutes les tâches : elles ne sont pas telles qu'elles ne se puissent accomplir.


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La lecture de ce rapport terminée, M. le Président présente ainsi Mgr Baudrillart :

« Monseigneur Baudrillart, de l'Académie française, Recteur de l'Institut Catholique de Paris, Évêque titulaire d'Himéria, est bien connu à Lille, où il a donné jadis ses conférences sur l'histoire du Concordat et, au lendemain de l'armistice, une conférence sur son oeuvre de propagande française à l'étranger pendant la guerre.

Cette oeuvre, il la poursuit encore eu dirigeant le Comité Catholique des amitiés françaises à l'étranger.

Il y a quelques mois, d'accord avec le, Gouvernement, Mgr Baudrillart, a entrepris un nouveau grand voyage de propagande à l'étrange/, analogue à ceux qu'il a faits, pendant la guerre, en Espagne et aux États-Unis.

Il s'est dirigé cette fois vers l'Argentine, l'Uruguay et le Chili. II y a été le représentant officieux du Gouvernement français et s'est appliqué à y réchauffer les amitiés françaises.

Il connaît parfaitement la langue espagnole et les civilisations néo-latines. Son grand ouvrage sur Philippe V et la Cour de France, qui a fait sa réputation d'historien, lui a donné autrefois l'occasion de devenir un spécialiste de, tout ce qui regarde l'Espagne et ses anciennes colonies.

Sa réputation personnelle, l'autorité qui s'attache à sa qualité de Recteur d'un grand Institut, le prestige de l'Académie française lui assuraient un accueil particulièrement sympathique.

Il va nous dire que) fut cet accueil et nous faire part des impressions qu'il rapporte d'un voyage qui a contribué à faire connaître et aimer la France, à dissiper les soupçons et à réfuter les mensonges que propage dans l'Amérique du Sud l'influence allemande. "

Nous donnons ci-dessous un compte-rendu détaillé, avec des extraits étendus de la conférence de Mgr Baudrillart.

Compte rendu détaillé de la Conférence de Mgr Baudrillart

de l'Académie française.

IMPRESSIONS D'AMÉRIQUE

ARGENTINE — URUGUAY — CHILI

« Il n'en est pas de l'Amérique du Sud comme de l'Amérique du Nord et il ne faut pas s'attendre quand on parle de l'Amérique du Sud, à moins qu'on ne décrive certaines régions particulièrement pittoresques, à entendre citer des traits de moeurs aussi originaux que ceux que l'on peut rencontrer dans la grande République du Nord.


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« Les Etats-Unis, eux aussi, doivent presque tout à l'Europe, mais ils la regardent un peu comme une aïeule affaiblie et arriérée.

« Au contraire, la grande préoccupation de l'Amérique du Sud est d'être tenue pour vraie et bonne européenne.

« Et en vérité, elle y a droit. Quand un Européen débarque à BuenosAires, il a l'impression d'être chez lui. Le général Caviglia, le vainqueur des Autrichiens, disait à notre Ministre, M. Clausse : «je me sens ici en Italie », et il ajoutait : « d'ailleurs, les trois-quarts des gens sont de mon pays. » Sauf, cette proportion, les Espagnols et les Français peuvent en dire antant. ».

Ils le peuvent à cause de l'extrême courtoisie de l'accueil, de la politesse raffinée. Mais surtout. l'Argentine, l'Uruguay, et bien qu'à un moindre degré le Chili, c'est vraiment notre Europe Occidentale et Méridionale et cela pour quatre raisons : 1° communauté de race ; 2° communauté de culture ; 3° communauté de religion ; 4° enfin, influence actuelle de notre pays.

I. Communauté de race.

Les races qui ont constitué l'Argentine et l'Uruguay sont européennes : espagnole, italienne, basque, française. (L'Uruguay ne diffère à peu près pas de l'Argentine ; les Argentins n'ont jamais pris leur parti de sa séparation. L'Uruguay lui-même se désigne sous le nom de République Orientale, c'est-à-dire province orientale l'Argentine ; néanmoins, l'Uruguay tient extrêmement à son indépendance).

« On a envoyé en Argentine, écrit Martinez, de 1854 à 1912 : Italiens : 2.133.738 colons; Espagnols: 1.297.892; Français: 206.912; Anglais: 51.660; Austro-Hongrois: 80.736; Allemands: 55.068; Suisses: 31.624; Belges : 22.186 ; autres nationalités ; 368.529 ».

La race espagnole conserve la suprématie ; les Italiens se transforment facilement en Espagnols, au moins jusqu'à présent; ils adoptent la langue espagnole, modifient leur nom. Peut-être dans l'avenir n'en sera-t-il plus ainsi en raison de l'éducation très italienne donnée par les Salésiennes et les religieuses de Marie Auxiliatrice aux enfants du peuple de sang italien.

Excellence des éléments basques, basques français et basques espagnols, d'où sont descendues plusieurs des principales familles.

Enfin, les éléments français proprement dits sont supérieurs à ce que l'on croit en général.

De ce mélange, s'est formé un type assez homogène et généralement beau.

Sans doute, dans les campagnes éloignées de la province de Buenos-Aires et dans les villes, surtout celles qui sont proches des frontières du Brésil, de. la Bolivie et du Chili, il y a une population créole assez dense descendant des Espagnols et des Indiens. « Le crime des Espagnols des' premiers temps,


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dit-on volontiers dans ce pays, est d'être venus sans femmes. » Ils ont épousé des indigènes ; de là la population créole. Parmi ces familles, il en est cependant qui se sont élevées et qui tiennent aujourd'hui leur place dans la Société. C'est malgré tout l'exception : la plupart des grandes familles sont du sang uniquement blanc.

Quant aux purs Indiens, il n'en reste que fort peu, dans les régions de l'extrême frontière. Nous n'en avons guère vu que dans la province de Tucuman employés comme ouvriers agricoles, ou malades dans les hôpitaux.

La situation est la même dans VUruguay.

Au Chili, il en est un peu différemment.

La haute classe est presque exclusivement composée d'espagnols se rattachant souvent à des familles venues à l'époque coloniale. Il y a eu cependant un assez grand nombre de mariages entre espagnols, basques, italiens et français, mais à un degré bien moindre qu'en Argentine.

La classe inférieure, beaucoup plus nombreuse proportionnellement que dans ces deux derniers pays, est composée de métis espagnols et d'indiens et, parmi les indiens, surtout d'Araucaniens qui, aujourd'hui encore, habitent en grand nombre les provinces du Sud.

Ces Araucauieus sont une race extrêmement vigoureuse et leur mélange avec les espagnols a donné une race à la fois forte et agile. C'est parmi ces hommes que se recrutent principalement l'armée chilienne. « Le jour de la fête nationale du Chili, j'assistais à la revue. Je fus extrêmement frappé de la précision des mouvements et de l'allure martiale de ces hommes. Le Président de la République me dit : « Ce sont des soldats qui n'ont que quatre mois de formation. » J'étais justement émerveillé. Parmi ces soldats, il en est qui font carrière dans l'armée et il n'est pas rare de rencontrer parmi les officiers des types appartenant à cette race créole ».

Donc, dans l'ensemble, on peut affirmer la communauté de race entre les Argentins, les Urugayens et les Chiliens de la classe supérieure d'une part, et l'Europe Occidentale et Méridionale de l'autre.

Une telle communauté entraîne naturellement des affinités de caractère et une sympathie profonde. Mais certaines différences naissent évidemment des conditions nouvelles où se développent ces races d'origine européenne : l'influence du climat, du sol, le fait d'appartenir à des pays où presque tout est à créer donnent des allures assez particulières, surtout aux hommes. C'est par là que, peut-être, ils se rapprocheraient un peu des Américains du Nord, bien qu'ils en demeurent, somme toute, très éloignés.

IL

Communauté de culture.

De tous ces peuples, on dit qu'ils sont latins, non pas seulement par le sang, mais par la civilisation et par l'éducation qu'ils reçoivent.

« Pendant longtemps, les classes supérieures ont puisé directement à la


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source de la civilisation latine. Cependant, par le fait de la vie coloniale et ensuite des occupations qui incombaient à ces hommes obligés de mettre en culture des terres qu'il fallait défricher, ou de créer de toute pièce l'industrie, la culture classique n'a jamais pu tenir la place considérable qu'elle occupe dans nos vieux pays. S'ils sont réellement latins, c'est par l'intermédiaire de l'Espagne, de l'Italie et de la France, c'est-à-dire des trois nations qui possèdent l'a quintessence de la culture latine passée dans les littératures nationales. Aujourd'hui, c'est exclusivement par l'entremise des littératures de ces trois nations que s'exerce l'influence, latine et aussi par les oeuvres originales des écrivains nationaux.

« Depuis une vingtaine d'années, l'enseignement du latin a été aboli dans les collèges. Il en résulte que la haute société elle-même ne tardera pas à l'ignorer complètement.

« L'enseignement est partagé en trois branches comme en France : primaire, secondaire et supérieur.

« L'enfant, de 6 à 14 ans, doit poursuivre obligatoirement ses études primaires. A 14 ans. il est libre d'entrer au collège national ou dans quelque établissement d'enseignement secondaire libre. Les examens de passage, peu difficile, élimineront au cours de leurs études un petit nombre de jeunes gens ; la grande majorité les poursuivra jusqu'à 18 ans. Mais dans ces études secondaires, il n'y a pas de sections différentes comme chez nous. Tous les élèves suivent le même programme, et ce programme est exclusivement technique et scientifique. On n'enseigne que l'histoire du pays, quelques éléments de philosophie morale et l'on donne une idée sommaire des littératures étrangères. Il n'existe pas d'examen d'ensemble analogue à notre baccalauréat.

« Quant aux maîtres, il est, fort peu de professeurs de carrière. Depuis 1905 seulement, il existe une Ecole normale de professeurs et un Institut secondaire de professeurs. Les cours dans les collèges, sont faits par des avocats, des médecins, des ingénieurs. Il est facile d'en conclure que la culture littéraire et classique ne tient désormais dans ces études qu'une place tout à fait insuffisante. Il en résulte que le français n'est plus guère enseigné aux générations présentes que comme une largue commerciale et encore assez parcimonieusement. Si la culture française proprement dite venait à disparaître, les conséquences seraient pour nous très graves.

« Je me suis permis de signaler ce danger au nouveau Président, M. de Alvear. »

Sans doute, il y a les Universités. Mais, d'abord, les études secondaires sonT telles qu'un léger examen d'entrée est nécessaire pour permettre à ceux qui sortent des collèges de suivre avec quelque profit les cours Universitaires. En outre, étant donnée la formation antérieure, l'enseignement des universités se borne à peu près à celui du droit, de la médecine et aux applications des sciences. De plus les Universités argentines (Buenos-Aires, La Plata, Cordoba,


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Université du Littoral) sont présentement en pleine crise (grèves d'étudiants, conseils mixtes des professeurs et d'étudiants ; pas de vraie liberté d'enseignement ; rigueur des programmes imposés à tous ; absence d'émulation entre les Universités ; influence néfaste du dernier Ministre de l'Instruction Publique. Salinas).

M. de Alvear réagit, Mgr Baudrillart est intervenu auprès d'une congrégation religieuse française pour qu'elle instaure dans un collège de BuenosAires une section d'enseignement supérieur classique.

« Y a-t-il des chances de succès pour une telle tentative? Peut-être.

« Il y a. en effet, dans chacun de ces pays, des hommes éminents dont l'esprit très cultivé représente toutes nos vieilles traditions (Larreta en Argentine, Zorilla de San Martin en Uruguay ; Mgr Errazuriz au Chili). Et même parmi ceux qui ne sont pas du tout les représentants du passé, on dirait qu'il y a une certaine nostalgie de la culture classique.

« L'extraordinaire succès des conférences de M. Fougères, professeur à la Sorbonne, traitant uniquement l'archéologie grecque, est une preuve de cette sympathie latente qui demeure dans le peuple argentin pour l'antiquité classique. »

Il faut faire mention de l'Académie de Santiago du Chili, de l'Université catholique et de son Recteur, Mgr Casanueva.

« Si par malheur il y avait rupture complète avec l'éducation classique, les conséquences seraient graves, même dans l'ordre politique. »

III.

Communauté de religion.

« A la grande différence des Etats-Unis de l'Amérique du Nord si profondément marqués au coin du protestantisme, les Etats de l'Amérique du Sud ont avec ceux de l'Europe occidentale et méridionale le lien commun du catholicisme et chacun sait combien la religion, même quand elle est imparfaitement respectée, marque de son empreinte les moeurs et la vie d'un peuple.

« Dans l'ensemble, le cadre de la vie est encore un cadre catholique, sauf en Uruguay où il y a séparation de l'Eglise et de l'État. La religion catholique est encore considérée comme religion dominante ou même comme religion d'État ; bien que tous les cultes soient tolérés et qu'il y ait en fait une absolue liberté de conscience et de culte, il subsiste un grand respect extérieur de la religion.

« Mais quel est l'état véritable de ces pays au point de vue religieux?

« Il faut distinguer entre les trois pays dont nous nous occupons.


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1° EN ARGENTINE. — « Des hommes d'opinions très différentes qui ont écrit sur l'Argentine à leur retour en Europe, comme M. Clémenceau, M. Huret, le R. P. Burnichon de la Société de Jésus, se sont accordés à dire qu'au moins chez les hommes la religion en Argentine est fort superficielle et qu'en réalité la plupart des hommes sont des libres-penseurs avérés. Il est certain [qu'il y en a beaucoup. ]De nombreux directeurs de collèges, même de collèges religieux, avouent que la plus grande partie des enfants confiés à leurs soins perdent la foi avant la fin de leurs études.

« La cause principale en est la légèreté des moeurs. Ces hommes ne deviennent points des ennemis de la religion, mais secouent un joug qui les gêne. D'autre part aussi, il n'y à point dans la plupart des têtes de principes assez solides et assez cohérents. Des idées contradictoires cohabitent facilement dans le même cerveau et cela remonte à l'origine même de ces républiques.

« On ne doit pas oublier en effet qu'elles se sont constituées sous l'influence des idées révolutionnaires qui ont entraîné la France et l'Europe occidentale à la fin du XVIIIe siècle, el aussi des idées qui ont provoqué l'indépendance, des États-Unis. Ces idées coexistaient elles-mêmes avec tout le cadre extérieur du catholicisme maintenu par la domination espagnole, mais ce catholicisme était fort imprégné des idées joséphistes ou régalistes, de telle sorte que des hommes très religieux, beaucoup de prêtres et même de moines accordaient à l'État des droits presque illimités. Ce sont ces hommes laïques ou ecclésiastiques qui ont fait la révolution de l'indépendance entre 1810 et J1823. Ils croyaient très possible d'associer l'essentiel de leur foi et les idées d'extrême liberté dans tous les sens qu'ils invoquaient pour secouer le joug antérieur. « Aujourd'hui encore, vous entendrez dire constamment : nous devons tout ce que nous sommes à la France de Montesquieu, de Voltaire, de Rousseau, et même de Diderot. Et les mêmes hommes font [profession de catholicisme.

« Ce n'est pas à dire cependant qu'il n'y ait pas en Argentine, parmi les hommes d'excellents catholiques, et je crois qu'à ce point de vue il y a progrès marqué sur le temps où le Père Burnichon et M. Clemenceau ont visité ce pays. J'ai vu d'admirables catholiques membres du Tiers-Ordre (comme MM. Pereira el Cullen) qui ont une vie d'oeuvres, d'austérité, de piété et qui sont en toutes choses l'exemple de leurs concitoyens.

« Les femmes sont sérieusement catholiques et de plus en plus préoccupées de l'être avec science, autant qu'avec foi et piété. M. Huret et quelques autres ont dépeint les femmes argentines comme causant uniquement entre elles de petites dévotions, de leurs madones et de leurs saintes préférées, des congrégations ou associations pieuses auxquelles elles appartiennent, et tout cela avec petitesse et mesquinerie.

« Quant à moi, j'ai fréquenté plusieurs dames d'une haute intelligence en même temps que d'une haute piété, et j'ai visité des centres d'études


religieuses récemment fondés. Ces centres étaient fréquentés par de nombreusse jeunes filles, par des jeunes femmes et même par des femmes mûres qui suivaient les cours avec la plus profonde attention, cours vraiment supérieurs de philosophie, d'histoire ecclésiastique, de dogme, de littérature. Or les femmes ont une très grande influence sur la société.

« Il ne faut pas d'ailleurs juger de la religion en Argentine uniquement par Buenos-Aires. De même qu'en France, les villes de provinces ont des éléments extrêmement sérieux restés fidèlement attachés à toutes les traditions (Santa-Fé, Cordoba, Tucuman). »

Le clergé : insuffisance de son recrutement ; mode de nominations des évoques ; droits excessifs accordés à l'Etat ; désir de séparation de l'Église et de l'Etat se manifestant chez les meilleurs ; tentatives importantes faites par l'Union (Populaire catholique argentine. Si cette union parvient à réaliser ses projets, il est certain que le catholicisme en recevra un très grand accroissement.

2° Au CHILI. — La situation parait meilleure qu'en Argentine au point de vue religieux dans la classe supérieure. Celle-ci donne relativement beaucoup de prêtres; c'est uniquement dans ses rangs que se recrute le clergé. Les évoques : Mgr Errazuriz, archevêque de Santiago, Mgr Edwards, son auxiliaire ; Mgr Castro, évèque d'Ancud ; Mgr Fuenzalida, évoque de Conception.

De la religion dans le peuple, mais trop souvent superstitieuse et grossière et s'associant à un trop mince souci des lois de la morale.

3° DANS L'URUGUAY. —• Séparation de l'Église et de l'État. Gouvernement violemment anticlérical depuis vingt ans. Le rôle de M. Battle, le Combes de Montevideo. Attentat contre l'archevêque. On a remplacé des fêtes religieuses par celles de « l'enfant, de la famille, de l'humanité,des plages » etc. Par prudence, on les a fait coïncider avec les fêtes religieuses : Noël, Epiphanie. Ainsi, on ne change pas les habitudes du peuple et on change son esprit. Il y a quelques années, un prêtre ne pouvant pas sortir dans la rue en costume ecclésiastique sans être insulté ou frappé. On a poussé tout beaucoup plus loin qu'en France : plus de croix dans les cimetières, même sur les tombes, laïcisation des noms de villes, pas de processions, pas d'eau bénite dans les églises ; et dans l'ordre moral, divorce à volonté ; les enfants naturels sur le même pied que les enfants légitimes. Cependant, la séparation de l'Église et de l'Etat s'est faite dans des conditions honnêtes.

Les catholiques se sont ressaisis. Il y a un parti catholique proprement ilit appelé l' Union civique et des catholiques dans tous les partis. Ces catholiques ont des chefs éminents ; M. Zorilla de San Martin et les frères Gallima ; M. de Yeregui ; ils ont un journal actif : Le Bien Public, une grande association de jeunesse catholique et des associations ouvrières. Les catholiques


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espèrent un succès considérable aux prochaines élections. Il y a des conversions éclatantes comme celle du Dr Morelli. Plus de 400 étudiants catholiques à l'Université. L'exemple de la France sera décisif.

La religion réagit-elle sur la politique? Oui et non.

Non. s'il s'agit d'une action directe ; oui. par l'intermédiaire des femmes, notamment dans la politique argentine. Les femmes ont réussi par deux fois à faire repousser la loi du divorce (message du Président Irigoyen, 19 Septembre 1.922). Seulement, il est à craindre que cette influence ne dure pas.

« LU changement profond s'introduit dans tous ces Etats? Tous les hommes jusqu'à présent ont vécu de politique en même temps que d'affaires ; mais c'étaient des hommes appartenant à la société proprement dite; sur ceux-là. l'influence des femmes est grande. Ils sont courtois et même timides vis-à-vis des femmes, et peut-être d'autant qu'ils sentent qu'ils ont à se faire pardonner leurs infidélités.

« Or maintenant, il y a tendance, de la part des politiciens, à chercher leur appui directement dans la masse populaire. Il se forme une plèbe urbaine à Buenos-Aires. Beaucoup d'émigrants ne veulent pas aller cultiver la campagne, attirés qu'ils sont par les plaisirs des villes, exactement comme chez nous. »

Même au Chili, tendance à s'appuyer sur les métis. Exemple donné par M. Irigoyen à Buenos-Aires. et par M. Alessandri au Chili.

« Il va sans dire que ces classes populaires sont à peu près complètement inaccessibles aux influences de société. Ainsi les 14 députés socialistes qui se trouvent aujourd'hui à la Chambre de Buenos-Aires. Cet état de choses entraînerait des conséquences de toutes sortes et pourrait évidemment compromettre l'influence française. »

Influence actuelle de notre pays.

1° Dans l'ordre économique. — Initiatives françaises.

2° Mais cette influence est surtout intellectuelle. Le droit : la médecine ; les lettres. Témoignagne des écrivains : Leopoldo Lugones et Enrique Larrela, correspondant de l'Institut, ancien Ministre d'Argentine à Paris. Ce dernier a dit maintes fois avec éloquence ce que l'Amérique du Sud doit aux idées françaises « ces idées de France dont la terre est semée tout entière, graines ailées, graines voyageuses entre toutes, comme celles qui doivent à leur aigrette de légèreté et de, grâce la puissance de s'élever dans les airs et de parcourir le monde. »

Devenu à la fin de 1910 le représentant de son pays, il répète que la civilisation argentine s'est appuyée, au temps de ses premiers pas, sur le


génie civilisateur de la France. « Votre lumière a éclairé et animé notre matin... Pour nous, vous êtes les vrais héritiers de la Grèce dans le monde moderne... Aucun peuple ne fut jamais plus apte aux jeux subtils de la raison, anx compréhensions les plus diverses de la science, de l'art, de la vie tout entière dans ses austérités et ses jouissances... Oui, la belle harmonie, symbolisée par les attributs d'Athéna pacifique et guerrière, vous avez su la maintenir ici dans toute la sagesse et la noble mesure des forces dominatrices. »

Son admirable attitude pendant la guerre. Propagande: « Ce, qui ressort surtout de l'actuel conflit européen, c'est la magnifique verdeur physique et morale de la race latine. »

C'est le d'Annunzio de l'Espagne transatlantique ; il ne put entraîner son pays, mais il n'a pas cessé de chanter la France : « Terre de l'harmonie souveraine, pays de Montaigne et de Pascal, de la grâce dans la sagesse et de la logique dans le vertige ; pays de l'idéalisme hasardeux et de la prévoyance ménagère ! Aussitôt la guerre terminée, elle n'a donné que des preuves de sagesse. »

EN URUGUAY. — M. Buero. Ministre des Affaires Etrangères parlant au général Mangin en 1921 : « Vous (les, Français) êtes artistes, poètes, libérateurs. Votre droit unifie sans à coup la rigidité justieière de la conquête romaine grâce au bon sens des coutumes originaires. Vous êtes dociles et agiles, dans les arts délicats de la paix ; fermes et sages dans les rudes arts de la guerre. Vous avez réédité en plein âge contemporain le lointain miracle de Sophocle, le divin adolescent qui. après avoir vaincu à la palestre avec la gloire juvénile de son corps marmoréen, se présentait devant le tribunal sacré pour recevoir la palme d'or de ses immortelles tragédies. »

Au CHILI. — Le Président du Conseil. M. Huneus, élève des religieux français: « Vous pouvez dire aux hommes illustres qui régissent la France que chez nous l'on vous admire et l'on vous aime... et que nous sommes redevables d'une gratitude profonde aux citoyens français et aux congrégations françaises qui se sont voués à l'enseignement et au progrès de notre patrie. »

Tous ces éléments étrangers n'empêchent pas qu'il y ait un esprit national. Son intensité. L'un des faits les plus caractéristiques de l'Argentine actuelle, c'est le développement de cet esprit national.

On pourrait croire que dans un pays si composite et d'un passé aussi récent, il est très difficile de constituer un véritable esprit national. Et cependant, c'est le contraire qui est vrai.

Les Argentins se créent pour ainsi dire un passé, légendaire. Tout ce qui se rattache à la période de leurs origines es minutieusement recueilli et conté dans les écoles. Le général San Martin, héros de l'indépendance, est pour eux comme une sorte de Clovis et l'on raconte l'acte du général San Martin remettant à la Vierge son bâton de commandement avec la même componction que nos pères pouvaient raconter l'histoire du vase de Soissons.


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Cet esprit national est entretenu dans les écoles qui sont soumises, à ce point de vue, à un régime véritablement intensif.

Les différences d'origine des écoles ne gêne en rien cette culture générale de l'esprit national. Il y a des collèges nationaux, des collèges tenus par des religieux de toutes nationalités: partout l'enseignement est le même et donne les mêmes résultats au point de vue de cet esprit national.

« Ces pays, particulièrement l'Argentine, désirent être comptés pour quelque chose dans la politique mondiale, jouer un rôle politique et non pas seulement économique.

» Aidons-les à se faire dans le monde la place à laquelle ils ont droit. »

M. A. Crepy, remercie en ces termes Mgr Baudrillart :

Vouloir remercier l'éminent orateur d'une façon adéquate à l'ampleur el à l'intérêt de son sujet et aux jouissances littéraires qu'il nous a procurées sérait une entreprise téméraire de ma part.

Les applaudissements que vous venez d'entendre, Monseigneur, vous l'ont dit d'une façon éloquente.

Aussi me bornerai-je, si vous le voulez bien, à vous remercier d'un simple mot, du fond du coeur pour la peine que vous avez prise de venir jusqu'à Lille et à vous assurer de la part de tout ce brillant auditoire que longtemps restera gravé dans nos mémoires le souvenir de cette agréable après-midi du 28 Janvier 1923.

On passe à la lecture du palmarès faite par M. René Giard, Bibliothécaire de la Société.

PALMARES DES CONCOURS DE GEOGRAPHIE

DU 23 MAI ET DU 7 JUIN 1922

JEUNES GENS

PRIX PAIIL CREPY

BOURSE DE VOYAGE D'UNE VALEUR DE 700 FRANCS Sujet : les Vosges. M. Charles Lecompt, Étudiant à la Faculté des Lettres.

Monographies communales et Études géographiques concernant la Région du Word.

PRIX DE 500 FRANCS.

M. Emile Beaujot, Étudiant à la Faculté des Lettres.


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PRIX ERNEST NICOLLE

BOURSE DE VOYAGE EN ANGLETERRE D'UNE VALEUR DE 760 FRANCS

réservée aux Elèves de l'Ecole supérieure pratique de Commerce et de l'Industrie.

M. Marcel Brune.

Géographie commerciale.

2e SÉRIE. — Sujet : Le coton, pays producteurs, pays manufacturiers.

PRIX CONSISTANT EN OUVRAGES GÉOGRAPHIQUES D'UNE VALEUR DE 100 FRANCS

ET UNE MÉDAILLE D'ARGENT

offerte par M. le Ministre du Commerce et de l'Industrie.

Mlle Yvonne Ribeaucourl, élève de l'Ecole Supérieure de Commerce pourJeunes filles.

Enseignement secondaire.

1re SÉRIE. — Sujet: L'Inde anglaise. 1er Prix : MÉDAILLE DE VERMEIL offerte par M. Godin. M. André Souilliez, Lvcée de Tourcoing.

2e Prix ex oequo

MM. Jean-Marie Gantois, Ecole Jeanne-d'Arc.. Jean Macarez, Lycée Faidherbe.

1er Accessit. MM. René Fray, Lycée de Tourcoing. 2e — Georges Charlet, Petit Séminaire d'Haubourdin.

3e — Julien Ghesquière, Id.

' 4e — Pierre Picquet, Institution Notre-Dame des Victoires, Roubaix.

2e SÉRIE. — Sujet : Le Jura. . 1er Prix: MM. Jean Dieudonné, Lycée Faidherbe. 2e — Paul Boulanger, Lycée de Tourcoing.

1er Accessit. Albert Strée, Institution du Sacré-Coeur, Tourcoing 2e — Maurice Delnatle, id.

3e — Marcel Lefèvre, Lycée de Douai.

3e SÉRIE. — Sujet : Les principaux types de Plateaux. 1er Prix : MM. René Delcourt, Institution Notre-Dame de Valenciennes. 2e — Jules Callens, Petit Séminaire d'Haubourdin.

1er Accessit. André Delcourt, Institution Notre-Dame de Valenciennes. 2e — Michel Poulet, Lycée de Douai.

3e — Alexandre Renard, École Jeanne-d'Arc.

4e — Michel Landrieu, Institution Notre-Dame de Valenciennes.

4e SÉRIE. — Sujet: Les Pyrénées (avec croquis). 1er Prix : MM. Jean Magot, Lycée de Tourcoing. 2e — Yves Brochen, id,

1er Accessit. René Kahn, id.


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Enseignement primaire supérieur.

1er SÉRIE. — Sujet: L'Australie (avec croquis).

PRIX LÉONARD DANEL

(Voyage à la mer).

l<" Prix : MM. André Flament, École profess. de Fournes. 2e — Marins Fardoux, École prim. sup. Haubourdin

3e — Pierre Lecul, Ecole profess. de Fournes.

1er Access. ex oequo.

Georges Duhem, id.

Pierre Thibaut, Ecole prim. sup., Haubourdin.

2e SÉRIE. — Sujet : Les Iles Britanniques (avec croquis).

PRIX LÉONARD DANEL

{Voyage, à la mer).

1e Prix : MM. Gérard Desiméon, Ecole profess. de Fournes. 2e — Lucien Helle, id.

3e — Albert Herts, id.

1er Access. ex oequo.

Myrtil Dumoulin, Ecole prim. sup., Haubourdin. Jean Meurisse, Pensionnat St-Louis, Roubaix. André Thibaut, École professionnelle de Fournes.

3e SÉRIE. — Sujet: Géographie physique de l'Amérique du Sud (avec croquis).

PRIX LÉONARD DANEL Voy. à la mer).

1er Prix : MM. Paul Honoré, Pensionnat St-Louis, Roubaix. 2e — Robert Vansieleghem, id.

1er Accessit : ex oequo

Albert Gouble, id.

Pierre Neyrinck. id.

Pierre Subayrolle. id.

Enseignement primaire élémentaire.

1er SÉRIE. — Sujet : Suède et Norvège.

Ier Prix : MM. Kléber Hoeiman, École primaire supérieure d'Haubourdin. 2e — Jean Piéton, id.

1er Accessit. • . Hubert Anouilh. id.

2"e SÉRIE. — Sujet : Les grands fleuves de la France et les villes qu'ils traversent.

1er Prix : MM. Michel Dion, Ecole primaire supérieure d'Haubourdin.

2e — Marcel Dahiez, id.

1er Accessit. Emile Mesehaert. Pensionnai St-Louis. Roubaix.

2e — ex oequo.

Louis Bossut, id.

Lucien Sévéno, id.


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JEUNES FILLES

Enseignement secondaire.

1er SÉRIE. — Sujet : Les industries hydroélectriques de France et leurs applications, les centres principaux, les diverses formes, les projets.

1er Accessit. MMlles Irène Neyrinck, Collège de Jeunes filles, Roubaix. 2e — Claire Mérelle, id.

2e SÉRIE. — Sujet : Quelles sont les causes géographiques qui déterminent une forte densité de la population dans certaines régions du globe.

1er Prix : Médaille Parnot.

MMlles Marthe Holschuh, Collège de Jeunes filles, Roubaix. 2e — Suzanne Betz, id.

3e SÉRIE. — Sujet : L'Indo-Chine française.

1er Prix : Médaille Parnot.

MMlles Reine Walkens, Collège de Jeunes filles, Roubaix. 2e — Alicie Duhem, id.

3e — Lucienne Yaudenbulke, id.

1er Accessit. Marguerite Walkens, id.

4e SÉRIE. — Sujet : La Pologne.

1er Prix : Médaille Parnot.

t MMlles Thérèse Quilliet, Collège de jeunes filles, Roubaix.

2e — Agnès Béghin, id.

1er Accessit. Marie-Louise Lecry, id.

2e — Jènny Fairon, ' id.

Enseignement primaire élémentaire.

2e SÉRIE. — Sujet : Les grands fleuves de la France et les villes qu'ils traversent.

1er Prix : MM1Ies Louise Gottrand, École de la rue d'Isly. 1er Accessit. Marthe Lahaine, id.


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COMPTES RENDUS DE CONFÉRENCES

LA SYRIE

Par M. A. DU FOUR, Ingénieur

M. le Président Auguste Crepy donne lecture d'une lettre du Général Gouraud qui regrette de n'avoir pu répondre à son invitation. Il donne ensuite la parole à M. Dufour pour la conférence dont le résumé suit :

L'orateur entre dans le sujet en relevant qu'en Syrie les habitants sont divisés par groupements religieux au nombre de vingt-neuf. Chaque religion est. dénommée par ses ressortissants « nation ». Un peuple ainsi divisé forme un échiquier réparti en cases, chacune avec sa couleur, sa tradition. Il n'y a que le langage et des habitudes d'existence qui créent un lien entre ces nations. Le but du Général Gouraud a été de les fédérer en quelque sorte, pour le plus grand bien du pays et de ses habitants. L'idée d'une pairie syrienne grande et puissante est bien une idée française.

M. Dufour, après avoir énuméré les travaux du Haut Commissariat, conclut ainsi :

« Dans l'ensemble, le Mandat a été appliqué avec sagesse, avec pondé» ration et avec le souci constant de donner aux populations syriennes " l'impression que nous sommes venus en amis, en frères aînés.

C'est là tout un programme; les hommes pourront changer, la méthode initiale du premier Mandataire devra rester. La Syrie sera alors une Puissance intimement liée à la France.

Après ces observations sur l'Administration politique de la Syrie, M. Dufour aborde la question des ressources du pays. Sa vrai richesse? que vaut-elle? Quels efforts faut-il faire pour la recueillir et qui doit en être le bénéficiaire?


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M. Dufour a vu, et a étudié sur place ; ses conclusions méritent d'être tenues pour exactes. « La Syrie, est un pays éminemment agricole, son » sol, son climat, ses eaux, tout s'accorde pour faire de ce pays un » incomparable grenier de céréales. Mieux encore, on peut y cultiver » la betterave, la dessécher et l'exporter sous forme de « cossettes ».

Le conférencier montre la composition du sol, il examine ce qu'on produit avec les procédés primitifs actuellement en usage et déduit ce qu'on pourrait obtenir avec des moyens plus scientifiques. Il répond d'avance aux objections qu'on peut faire. Il s'étonne que tant de terres soient laissées en friche : sur 4 millions d'hectares prêts à être mis en culture, 700.000 seulement sont exploités.

La culture ne se limite pas aux céréales, elle s'étendra au coton, à la vigne, aux arbres fruitiers.

M. Dufour conclut ainsi :

Pour me résumer, j'ai, comme je vous le disais en commençant, la conviction que l'avenir de la Syrie est intimement lié au développement de son agriculture. Culture de céréales, partout où faire se peut. Développement de la culture de la vigne, notamment dans le Liban. Développement de la culture arbustive en utilisant les excellentes essences de la région de Damas. Culture alternée de la betterave et des céréales ; utilisation de la betterave pour la nourriture du bétail, pour la distillerie, pour produire un carburant devant suppléer au manque de combustible du pays et pour produire des betteraves sucrières qu'on pourra utiliser sur place pour la fabrication du sucre et qu'on pourra exporter sous forme de cossettes desséchées, dont nos sucriers feront un large usage. Culture du coton et sélection sévère des graines pour arriver à produire un coton syrien qui devra concurrencer les marques étrangères. Développement de la sériciculture trop abandonnée depuis la guerre. Enfin, développement de l'élevage et création des industries qui s'y rattachent telles que l'industrie de la laine d'un rendement si rémunérateur. Puis utilisation des cours d'eau, tant au point de vue de l'irrigation qu'au point de vue de la production de la force motrice par laquelle on suppléera au manque de combustible.

« Voilà un programme digne, d'intéresser tous ceux qui veulent voir la France conserver en Syrie le rôle prépondérant qu'elle doit y avoir et auquel les sacrifices énormes qu'elle y a consentis lui donnent droit ».

Les beaux clichés qui illustraient la conférence de M. Dufour étaient dus à l'obligeance du Haut Commissariat français.


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LA LORRAINE

Par M. Pierre DEFFONTAINES,

Agrégé d'Histoire et de Géographie. Membre de, la Fondation Thiers.

La Flandre et la Lorraine ont été si souvent unies au cours de l'histoire, elles sont appelées aujourd'hui à se donner une entr'aide si étroite et si utile au point de vue économique et même politique, qu'il est indispensable que les gens du Nord aient une connaissance approfondie de cette Lorraine aujourd'hui reconstituée.

Ce qu'il faut connaître, c'est moins sa physionomie physique que sa caractéristique humaine, son visage économique et social.

La Lorraine est par excellence une région humaine, le nom même est un nom d'homme, Lotharingie pays de Lothaire. Il a longtemps flotté, comme beaucoup de noms géographiques entre la mer du Nord et le Rhin et la Meuse, il a fini par se fixer sur une région étroitement définie.

Enchâssée entre de grands massifs forestiers, la Lorraine apparaît comme une immense clairière. Les grandes forêts de FArgonne, des Ardennes, de Creutzwald, des Basses-Vosges et des Vosges gréseuses lui tracent une large frontière d'arbres.

Les portes qui la mettent en communication avec l'extérieur sont essentiellement des trouées dans la forêt, tel les passages de l'Argonne, tel le passage du pays gaumet au pied de l'Ardenne, tel surtout le col de Saveme qui n'est pas un col au sens physique du mot, puisque l'ancienne route, celle de Phalsbourg passait sur le plateau, mais qui est un col foreslier placé à l'endroit ou le manteau d'arbres qui sépare la Lorraine de l'Alsace est le plus étroit et le plus facile à traverser.

Géologiquement, la Lorraine appartient au bassin parisien, mais les rivières lui ont donné une individualité propre ; au lieu de s'écouler vers la Seine et la Manche elles s'en vont, après s'être livré de terribles batailles, droit vers le Nord pour déboucher dans la mer du Nord. La Meuse a été la grande vaincue dans ces batailles de rivières, elle


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a perdu tous ses affluents et elle promène dans sa large vallée des méandres indigents.

La caractéristique du paysage, provient de la disposition Nord-Sud de tous les accidents : rivières, côtes régulières de collines, disposition générale des couches géologiques. Il s'ensuit que les « pays » se succèdent d'Est en Ouest comme en une vaste tapisserie régulière et rythmique.

Tout d'abord à l'Est, sur la frontière d'Alsace, le pays des forêts, des bûcherons et des charbonniers, puis le plateau lorrain « sans grâce et sans sourire » (Vidal de la Blache) avec, ses grands étangs qu'on assèche périodiquement pour les transformer en cultures, assolement très spécial qu'on appelle « Passec. »

Les côtes de Moselle coupent la monotonie du plateau lorrain ; à leur abri s'est, installé un mode de vie heureux, plantureux même, sur les flancs de coteaux ou dans la douce vallée mosellane: des vignes, des arbres fruitiers, mirabelles et quetschers, des villages au nom joyeux, Rosérieulles, Chazelles, Lorry, des maisons à aspect, méditerranéen avec leurs toits plats, des gens gais et bien gaulois ; pays fertile, pays de circulation, véritable axe de la Lorraine où se sont, fixées les deux capitales: Metz, la ville des changeurs et des militaires, véritable ville de frontières, sentinelle vigilante et trafiquante, Nancy, résidence princière, le Versailles de l'Est, mais un Versailles créateur d'initiatives, bâtisseur d'usines et constructeur de mines.

Derrière cette zone active, c'est, à nouveau, le plateau lorrain, morne et vide, dominé par les rôles de Meuse, raides, sombres et pleines encore de souvenirs angoissants. C'est le cadre lugubre et grandiose à la fois de tous les cimetières de nos batailles successives.

Mais voici la Meuse en sa vallée, calme et riante, avec sa parure de prairies vertes, courte vision, car la grande frise des paysages lorrains finit vers l'Ouest comme elle avait commencé vers l'Est par un épais massif forestier, celui de l'Argonne.

Dans toutes ces variétés de « pays », c'est-à-dire de paysages, s'est développé un type uniforme de maisons et de villages.

De part et d'autre d'une large rue s'allonge le village lorrain composé de deux files rectilignes et régulières de façades toutes semblables, et si étroitement assemblées qu'il semblerait que toute l'agglomération n'est composée que de deux longues maisons se faisant vis-à-vis. Une partie de la rue sert de cour, chaque maison y a sa dépendance au « parge » où s'entasse le fumier et où se remisent les chariots.

3*


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La maison étroite et profonde, abrite sous son toit gràce à une parcimonieuse disposition, hommes, animaux et récoltes. La grand porte en plein cintre traduit toute l'importance des récoltes de céréales (1).

Dans ces villages s'est maintenu l'ancienne vie lorraine, mais, à côté, une industrie active construit de nouveaux modes de vie et des agglomérations bien différentes.

La Lorraine est le premier pays du fer de l'Europe. L'exploitation de son minerai, la « minette », atteint le chiffre formidable de 62.000.000 t., le reste de la France ne produit que 1.800.000 t. On reconnaît deux aspects bien distincts dans cette exploitation du fer, le long de la côte de Moselle, et spécialement dans Les festons que dessinent les petites vallées qui l'indentent, des mines ont été creusées en terrasses ; l'exploitation s'y fait tantôt à ciel ouvert, comme le long du ruisseau de la Côte-Rouge le bien nommé, tantôt par des galeries horizontales. La mine ici est toujours accompagnée de l'usine métallurgique. On les voit groupées au pied de la côte et dans les étroites vallées, Longwy, sur la Chiers,Villerupt, Micheville, la vallée de la Fensch et Hayange, la vallée de l'Orne avec Joeuf, Moyeuvre et Rombas, le centre de Nancy et ses annexes, Frouard, Pompey, Pont Saint-Vincent. Rien de saisissant que ces paysages d'usines enserrés dans les vallées creuses où se pressent les batteries de hauts-fourneaux, les trains de laminoirs, les chemins de fer et les trolleys aériens, les maisons ouvrières qui grimpent à l'assaut des pentes. La nuit, la descente de la vallée de la Fensch évoque un paysage féerique où se succèdent les feux d'artifice des creusets des blocs rougis se promènent suspendus à des ponts-roulants, des halos gigantesques balafrent le ciel et un bruit d'activité fébrile emplit l'air.

Sur le plateau de Briey, le paysage minier est tout autre, l'usine ne s'y eslt pas installée, il n'y a que la mine, avec son cortège de cités ouvrières jaillissant brusquement du plateau nu et morne, comme un village de jouets. Le plus souvent l'exploitation est toute récente et il a fallu faire appel à la main-d'oeuvre étrangère : italienne et polonaise. La. population du canton de Briey a plus que doublé en dix ans.

La Lorraine est arrivée à occuper le second rang dans le monde pour

la production du minerai après les États-Unis ; elle produit 1_ de la

1 10

fonte et —— de l'acier du monde. 10

(1) P. DEFEONTAINES et A. CHOVEAUX. — Lp. Région du Nord-Est. Paris, Hatier, 1921.


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Le fer n'est pas la seule richesse minière de cette région. A l'Est de Nancy d'autres mines exploitent le sel, soit par des galeries, soit au moyen de chasses d'eau qu'on envoie se saturer de sel dans la mine, puisqu'on retire et fait évaporer. Autour de la mine, les industries chimiques Solvay ou Kulhmann extraient la soude et autres produits dérivés.

Les Vosges ont elles aussi leur industrie spéciale, industrie nouvelle, émigrée d'Alsace au moment de l'annexion. Le long de leurs vallées, s'alignent des files d'usines textiles, véritables rues d'usines el certaines de ces régions montagneuses dépassent 270 habitants au kil 2. Epinal est la capitale de ce jeune centre industriel.

Il faut noter aussi les faïenceries de Sarreguemines, les verreries de Baccaral, les draps de Sedan.

Il se dégage de cette Lorraine, par nature peu fertile et assez deshéritée, une impression de travail, d'énergie, d'esprit d'initiative, impression que l'on retrouve sur cet autre coin de frontière qui sont les Flandres.

Il faut davantage lier ces deux centres de travail identiques par la mentalité de labeur et d'effort : unir le charbon du Nord et le fer de Lorraine, organiser la liaison des deux industries textiles de Roubaix et d'Epinal.

Depuis bien longtemps on parle d'un canal du Nord-Est de Metz à Dunkerque (1), mais rien n'est encore entrepris ; bien plus, c'est vers Paris (port de Gennevilliers) qu'on cherche à expédier les fers lorrains.

Il est temps que le Nord réclame sa part de liaison avec l'Est ; tout le long de la frontière, des centres industriels tracent comme des jalons entre Lens-Lille et Metz-Nancy : Maubeuge, Mézières, Sedan, Longuyon. Il importe de regrouper tous ces noyaux d'activité et de constituer et solidifier le front industriel de France contre toutes les puissances rivales de l'Est.

(1) Voir le projet si bien étudié par M. Scrive-Loyer.


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EXCURSIONS DE LA SOCIETE en 1923

La Commission des 'Excursions, réunie le 16 Avril sous la présidence de M. l'abbé Léman, a arrêté le principe d'un certain nombre d'excursions pour la saison d'été de 1923. Comme de coutume ces excursions feront l'objet d'un placard spécial comportant des précisions sur le programme et l'horaire ainsi que les noms des organisateurs. Dès maintenant nous pouvons annoncer que pour le mois de Mai sont prévues une visite au Musée Commercial (lundi 7), une excursion à St-Amand. En Juin on organisera un voyage aAnvers, et une promenade aux verreries d'Hirson. Pour Juillet on prévoit une visite aux mines de Bruay et des visites dans divers établissements industriels. A des dates non encore arrêtées dans le courant de Juillet et d'Août se placeront une semaine en Suisse et un voyage en Slovénie.

CHRONIQUE GÉOGRAPHIQUE

Notes régionales. — La personne et les travaux de M. Briquet sont familiers à tous ceux qui, dans notre région, s'intéressent à la géographie physique. Bien que ses fonctions présentes l'amènent à s'occuper de la France de l'Est (1), il ne cesse pas d'apporter de notables contributions à la connaissance des pays du Nord. Laissant de côté un travail plus considérable, de grande importance pour l'histoire du sol de la Belgique et des Pays-Bas (2),

(1) A. BRIQUET. — Alluvious anciennes et mouvements du sol dans la plaine d'Alsace. C, R. Séances. S. Géol. de France, 1923, p. 17-18.

( 2) A. BRIQUET. — Le Néogène du Nord de la Belgique et des Pays-Bas et ses relations stratigraphiques. B. S. belge de Géol., de Paléout et d'Hydrol,, XXXII, 1922, p. 69-91.


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on s'occupera seulement ici de deux communications sur la mer qui baigne notre littoral et les lignes de rivage de cette mer. La plus ancienne concerne l'origine du Pas-de-Calais (1). Elle retrace une histoire complexe dont voici les grandes lignes d'après M. Briquet. La pénéplaine préquaternaire qui s'étendait sur le sud de l'Angleterre et le nord de la France s'affaisse par degrés sur l'emplacement de la Manche et de la mer du Nord. Les preuves abondent de l'existence ancienne de ces deux bassins maritimes. Cependant ils restent distincts, séparés par, un isthme : sur l'emplacement du Pas-deCalais, la pénéplaine conserve son altitude de 200 m. C'est par cet isthme que s'effectuent les échanges qui assurent l'unité faunistique du sud de l'Angleterre et du Nord de la France. Il est d'ailleurs soumis à une érotion subaérienne qui le dissèque. Les rivières qui descendent sur un glacis faiblement incliné vers la mer du Nord ouvrent une dépression dans la crête. C'est alors que se produit une transgression marine dont la date est indiquée par la présence de l'industrie chélléenne dans les alluvions lluviales de la ferrasse de Menchecourt. Cette transgression marine a pour effet d'amener le rivage à un niveau supérieur de 5 m. au niveau moyen actuel. Et c'est, alors que la mer du Nord, envahissant une des vallées dont il vient d'être question, rejoint la Manche et, élargit par abrasion marine le passage. Les traces de l'élévation du niveau sont nombreuses. Dans l'Est de la mer de la Manche, c'est à Menchecourt près d'Abheville une couche d'origine marine intercalée, entre 7 et 12 m. d'altitude, dans les alluvions anciennes de la Somme. Ce sont encore une plate-forme littorale à Conchil-le-Temple et les levées de galets anciennes des Bas Champs de Picardie entre Somme et Authie. Ces témoignages établissent la pénétration de la Manche assez profondément dans les vallées préexistantes. Dans le voisinage immédiat du Pas-de-Calais, c'est une falaise témoignant de l'action de l'abrasion marine entre, Sangatte et Coquelles, les levées anciennes de galets de la Petite Rouge Cambre, de Coulogne et des Attaques, peut-être aussi une couche épaisse d'alluvions avec éléments d'origine marine au débouché du Ruisseau de Petit Phare à Wissant. L'ouverture du détroit paraît avoir été suivie par un nouvel abaissement du niveau de la mer qui découvrit une autre fois l'isthme : au cours de cet assèchement temporaire, qui explique les relations faunistiques entre le Sud de l'Angleterre et le Nord de la France au Quaternaire récent ainsi que la présence d'une l'aune à mammouth sur les fonds-marins, l'érosion subaérienne dut s'exercer. Elle put mettre en évidence des faits tectoniques comme l'accident monoclinal médian du Pas-de-Calais « dont la crête est représentée par les Ridens, le Colbart et la Varie et la partie basse par le Creux de Lobourg ». Enfin un dernier relèvement du niveau de la mer la ramena dans ses limites actuelles, l'action érosive des courants marins

( 1) A. BRIQUET. — Sur l'origine du Pas-de-Calais. , S. Géol. du Nord, XLVI, 1921, p, 141-157, I carte.


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approfondissant jusqu'à 60 m. le creux de Lobourg. L'histoire récente du Pas-de-Calais est, on le voit, d'une importance capitale, puisque, en accord avec, la structure profonde du sol et ce qu'on peut savoir de ses changements, elle doit nous fournir une clé pour l'interprétation des formes littorales qui se rencontrent à différents niveaux, pour l'explication des formes présentées par les fonds sous-marins, el nous aider a l'intelligence des formes topographiques du Sud de l'Angleterre et du Nord de la France — sans parler du monde vivant. Elle a été l'objet de longues controverses. On s'est borné à reproduire ici, aussi fidèlement que possible, l'image que nous en offre M. Briquet.

Si le niveau de la mer paraît, dans nos régions, stable depuis plusieurs milliers d'années, les lignes de rivage ne cessent pas d'évoluer sous l'action des courants, guidée et accélérée dans certains cas par l'intervention de l'homme. On n'a pas oublié les pages de M. Demangeon sur les Bas Champs de Picardie. L'estuaire de la Somme qui remontait jusqu'à Abbeville a disparu, l'estuaire de l'Aa s'est comblé, celui de l'Arche, petit ruisseau qui aboutissait à Berck a disparu. Ces phénomènes se sont accomplis en moins de deux siècles. L'estuaire de l'Authie dont M. Briquet vient de s'occuper (1) manifeste la même tendance au colmatage naturel : il s'est raccourci d'au moins 4 km. Mais l'envasement est ralenti par la présence même de l'Authie qui entretient son chenal. D'autre part, les courants de Sud-Ouest jettent les vagues de Ilot à l'assaut de la pointe du Haut-Banc qui ferme l'estuaire au Nord et repoussent au jusant le chenal de l'Authie contre cette même pointe. La démolition des dunes menace gravement le phare, l'hôpital et compromet l'existence de la station. Sur une côte régularisée, avec un estuaire complètement, envasé, le péril disparaîtrait. C'est pourquoi M. Briquet pense qu'il faudrait, supprimer le chenal de l'Authie et ouvrir à travers les Bas Champs un chemin à la rivière vers la baie de Somme : en la faisant déverser à Rue dans le lit, artificiel de la Maye on la conduirait au Crotoy. L'amélioration du chenal du Nord de la baie de Somme serait obtenue du même coup.

Géographie humaine. La vie pastorale dans les Alpes. —

Les genres de vie fondés sur l'élevage, s'ils n'ont, pas marqué comme on l'a cru longtemps un stade du développement de l'humanité, comptent parmi les plus anciens, les plus répandus et les plus persistants. Avec, les progrès de la technique ils ont revêtu des caractères nouveaux. Ils se sont associés d'une manière très intime aux genres de vie fondés sur l'agriculture, qu'ils n'ont sans doute d'ailleurs jamais complètement exclu. Cependant il y a deux cas où les caractères du milieu géographique ont favorisé leur conservation avec une pureté relative et leur prédominance. C'est d'abord dans les vastes régions arides où domine un climat de caractère continental qui ne

(1) A, BRIQUET. — L'envahissement, de la mer sur la côte de Berck et les enseignements de la géologie récense. C. R. A. Sc, I. 176, 1923, p. 315.


permet qu'une culture sporadique. Et c'est encore dans les pays montagneux où l'espace à la fois et la sécurité manquent aux plantes de culture et où les hautes pelouses ne sont utilisables que par l'élevage du bétail. Steppes climatiques, steppes d'altitude sont les domaines naturels de l'élevage.

De pénétrantes études nous ont fait connaître le nomadisme pastoral de l'ancien monde, caractérisé par le déplacement de groupes humains entiers à la suite de leurs troupeaux. D'autres travaux ont révélé l'originalité du semi-nomadisme et de la transhumance dans les massifs montagneux. Il devient possible d'écrire aujourd'hui un des chapitres capitaux de la Géographie humaine. Le beau livre de M. Arbos « La vie pastorale dans les Alpes françaises. Etude de GéograpTiie humaine (1) » représente la plus récente et la plus importante contribution à cet ordre de recherches. Sans prétendre apporter ici une analyse complète d'un ouvrage dont le sujet est prodigieusement complexe, on voudrait du moins en donner quelque idée.

Dans le cadre général des genres de vie fondés sur l'élevage, la vie pastorale de montagne liée fondamentalement à des contrastes d'altitude entre des régions voisines, tient une place à part à côté du nomadisme pur et de la véritable transhumance. «... Tantôt, comme dans le nomadisme, le groupe humain se déplace avec le groupe animal : tantôt comme dans la transhumance, il laisse les bestiaux évoluer en dehors de lui. Mais toujours, à la différence des nomades, les montagnards ont des demeures attachées au sol et leurs bestiaux à la différence des transhumants vivent une partie de l'année entièrement à l'étable, en consommant des foins fauchés. Enfin, contrairement à ce qui a lieu en général clans le nomadisme et la transhumance les migrations de montagne ne s'effectuent que dans un petit rayon ». Il y a là une distinction qui s'impose désormais, à condition d'ailleurs de ne pas prétendre en tirer une classification trop formelle. La vie pastorale se déroule dans les Alpes jusqu'à plus de 2.800 m. (Grisons). Pour tous ceux qui ont, parcouru les Alpes françaises les déplacements des troupeaux, les spectacles offerts par les populations occupées aux soins du bétail sont des images inséparables du « souvenir des grands espaces boisés, gazonnés ou rocailleux dont elles varient la solitude ». La toponymie même garde partout les marques des préoccupations familières au paysan.

De vallée à vallée, de région à région, cette vie est infiniment diverse dans ses manifestations. La nature y est bien pour quelque chose : les différences du relief, les contrastes climatiques entre les Alpes du Nord et les Alpes du Sud créent des conditions de vie bien variées. Partout, cependant, le fait essentiel est la prépondérance des pâturages entre la forêt, pleine et les glaciers. Leur limite inférieure, telle que nous pouvons l'observer aujourd'hui,

(1) Pli. ARBOS. — La vie pastorale dans les Alpes françaises, Etude de Géographie humaine. Paris, Colin 1922. ln-8°, 720 p., 53 fig., cartes ou diagr., XIV pl. photo, hors texte. 28 fr. Ce livre peut être consulté à la Bibliothèque de la Société.


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résulte bien moins de l'action des agents naturels que de celle de l'homme qui a, suivant les temps, favorisé les empiétements des prés sur les bois ou protégé la forêt comme c'est le cas à notre époque, des pâturages, richesse unique de la montagne, âprement convoités, sont souvent propriété collective, objet d'une jouissance soigneusement réglementée. Ils constituent bien la principale source de vie. car si la fauchaison des prés et de maigres cultures autour d'habitations permanentes se pratiquent encore dans les zones hautes, ces formes d'activité sont étroitement limitées par le, climat, par la distance et la difficulté des communications ; d'où leur décadence. L'agriculture s'est surtout confinée aux fonds de vallées où dans le passé la difficulté des transports, a longtemps forcé le montagnard à produire ce qui était nécessaire à sa vie. dette combinaison de ressources traduit le rapprochement des étages climatiques. Elle nécessite des déplacements saisonniers entre les zones extrêmes, avec, des stations dans la zone intermédiaire où culture et élevage se partagent les soins des hommes, des migrations dont le rythme est variable, soumis à une infinité de circonstances locales, caractérisent le genre de vie de la montagne.

Ayant ainsi retracé les conditions générales de la vie pastorale, M. Arbos en étudie la fonction essentielle, l'exploitation du bétail. Nous avons lieu de supposer que dès les temps antiques elle jouait un rôle prépondérant. « Au moyen âge l'élevage el la vente des bestiaux fournissaient à l'habitant des campagnes le surplus de ressources qui lui était nécessaire, une fois qu'avec ses récoltes il avait assuré l'essentiel de son alimentation ». Mais au XVIIIe siècle encore malgré des indices d'amélioration qu'on ne peut passer sous silence, des causes nombreuses, au premier rang desquelles se place le défaut de ressources fourragères, entravent ses progrès. Elles persistent dans la première moitié du XIXe siècle, aggravées par l'accroissement de la population : vers 1850 les Alpes étaient surchargées d'hommes et de bétail bien au-delà- de leurs possibilités. Et l'on a dit que la forêt en avait souffert. Le dépeuplement de la montagme dans la seconde moitié du XIXe siècle et les progrès de la vie de relations amenèrent une révolution qui rétablit l'équilibre entre l'agriculture, la forêt et l'élevage. Le gros bétail en profita surtout, grâce au développement des réserves fourragères. Les races furent sélectionnées en même temps que l'industrie laitière prenait un développement considérable dans toutes les Alpes. Le mouton ne disparut pas pour cela de la chaîne car lui seul pouvait utiliser les landes des Préalpes méridionales et les pacages de forte altitude. «Ainsi, conclut M. Arbos, à la fois par le fait des conditions naturelles et des transformations économiques, les modes d'exploitation du bétail sont très variés. Comme ils imposent certaines formes à l'activité humaine, ils contribuent beaucoup à la variété des genres de vie ».

On aimerait à suivre l'auteur avec quelque détail d'un bout à l'autre de ce livre III, le plus étendu de son ouvrage. C'est celui-là que liront sans doute avec le plus de plaisir à cause de son caractère descriptif tous ceux qui


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aiment la montagne. Ils y trouveront classés les genres de vie dont les pages précédentes nous ont préparé à saisir le mécanisme ; genres de vie savoyards caractérisés par la prédominance de l'industrie laitière avec migrations développées mais de caractère pastoral, genres de vie des Préalpes méridionales fréquentées par le petit bétail sans habitat temporaire de montagne, genres de vie des Alpes provençales, domaine du mouton et des bovins sans lait où les déplacements humains gardent un caractère agricole marqué. Ils verront enfin comment la transhumance continue à ramener chaque été dans les hautes régions les moutons qui passent l'hiver dans les plaines du BasRhîne. Une sèche analyse rendrait mal compte de cette prodigieuse diversité — où le choix de l'homme a sa part à côté du jeu des influences naturelles. Le mieux sans doute est de citer la page où M. Arbos décrit le genre de vie de la Tarentaise. Il se déroule à travers quatre étages superposés, le village, la remue, la montagnette, la montagne (entre 1.140 et 1.258 m.) (p. 482).

« Il devient difficile de déterminer pour chaque propriétaire ce qui est son habitation principale ; c'est celle où il séjourne le plus longtemps ; et il séjourne le plus longtemps dans celle au voisinage de laquelle il possède le ' plus de terre. Comme certains paysans ont jusqu'à quatre maisons situées en des endroits différents dans les zones des villages et des remues, l'incertitude en est encore accrue. Pourtant, le rythme général des migrations est le même dans toutes les communes. La vie se partage à peu près également entre le village et la remue. La fin de l'automne et le gros hiver se passent, de la Saint-Martin (11 novembre) au début de mars, dans les remues, au-dessus du fond brumeux de la vallée. Le bétail, après y avoir pâturé les regains, y accomplit la plus grande partie de la stabulation. Quand mars commence, on descend aux villages : les animaux consomment le fourrage rentré l'été précédent, les hommes procèdent aux travaux de printemps dont les plus importants étaient naguère ceux de la vigne. Ces travaux de printemps exigent ensuite le retour dans les remues pour un mois ou un mois et demi, du 15-30 avril au 20-23 mai. Arrive ensuite la préparation à l'inalpage, pendant laquelle la famille se dédouble : les uns à la montagnette avec le bétail, les autres suivant les circonstances aux villages ou aux remues. Tout le monde se trouve réuni quand commence, vers le 25 juin, la saison des récoltes, qui provoquent par leur succession rapide et leur entre-croisement aux différents étages les évolutions les plus pressées et les plus compliquées. Du 25 juin au 10-20 juillet les foins et les blés retiennent aux villages, du 10-20 juillet au 30 juillet-10 août, aux remues ; la fenaison conduit ensuite aux montagnettes jusqu'au 15-20 août. De la mi-août au 25 septembre, il n'y a plus de règle : selon les besoins chaque famille se fixe tantôt aux remues, tantôt aux villages et ses membres font fréquemment le trajet des uns aux autres. Au 25 septembre, le retour du bétail à la montagnette y ramène femmes et enfants. Le 15 octobre réunit le groupe humain et le groupe animal dans les remues pour quinze jours, puis dans les villages jusqu'au 11 novembre où le cycle recommence ».


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On a choisi un des cas les plus compliqués, mais bien d'autres plus simples ne lui cèdent guère en intérêt.

Les nécessités d'une existence sans cesse en mouvement, la spécialisation des différents étages d'exploitation, impriment aux diverses formes de l'habitat des caractères particuliers. L'habitation permanente quel que soit 'son type a longtemps conservé une remarquable simplicité, abritant à la fois les hommes et le bétail. Au-dessus d'elle s'étagent les formes variées de l'habitation temporaire tantôt groupées, tantôt isolées : les chalets d'été, les caves, les halles, les granges, les fenils, les haberts. Quel voyageur surpris par l'orage ne leur a demandé abri et ne garde le souvenir de leur installation rudimentaire ?

Si localisée par la topographie même, cette vie pastorale n'est plus isolée comme dans le passé. Les formes modernes de l'élevage n'ont été rendues possibles que par les progrès de la vie de relations, des progrès ont favorisé les transactions à l'intérieur de la chaîne et permis l'écoulement des produits sur les marchés extérieurs. On est ainsi ramené à chaque instant à noter la répercussion des phénomènes économiques généraux sur la vie locale. Ils jouent un rôle déterminant à côté des influences géographiques locales qu'ils ne suppriment d'ailleurs pas.

Malgré son originalité profonde, sa vigueur due aux racines qu'elle a poussés dans le milieu géographique, cette vie pastorale est en décadence sur quelques points. Est-elle vraiment menacée dans l'ensemble, telle est la question que se pose M. Arbos en finissant. Et voici sa réponse :

« En tout état de cause il paraît difficile d'imaginer que les hommes, s'ils ne veulent pas laisser improductives les richesses de la zone pastorale, en tirent parti autrement que par la dépaissance estivale du bétail. Cette exploitation pourra prendre d'autres formes que celles qu'elle a affectées jusqu'ici ; mais elle ne cessera pas d'être temporaire et extensive. L'élevage reste donc le grand principe de la vie humaine dans les Alpes françaises ; parce qu'elle se subordonne à lui, elle gardera longtemps en ses manifestations une originalité à laquelle ne fera point défaut une nuance d'archaïsme ».

Cette originalité qui, aux yeux du touriste, est une des séductions de la vie alpestre, sans doute la sentira-t-on mieux après avoir lu l'ouvrage de M. Arbos. Nous nous réservons de revenir prochainement avec plus de détails sur quelques aspects des problèmes qu'il a traités et d'en mettre l'importance mieux en lumière.

MAX. SORRE.

LE SECRÉTAIRE-GÉNÉRAL, Gérant MAXIMILIEN SORRE.

LE SECRÉTAIRE-GÉNÉRAL ADJOINT

PAUL THOMAS.

LIlle, Imp. L Danel