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Titre : Comptes rendus de l'Académie des sciences. Série 2, Mécanique, physique, chimie, sciences de l'univers, sciences de la terre

Auteur : Académie des sciences (France). Auteur du texte

Éditeur : Centrale des revues (Montrouge)

Date d'édition : 1989-03-09

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb343942015

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb343942015/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 58253

Description : 09 mars 1989

Description : 1989/03/09 (SER2,T308,N10).

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k56629922

Source : Bibliothèque nationale de France, département Collections numérisées, 2009-3813

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 01/12/2010

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1989 - PREMIER SEMESTRE

CRAMED ISSN 0249-6305

COMPTES RENDUS

DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES

TOME 308 SERIE II N° 10 - 9 MARS 1989

Série II MÉCANIQUE PHYSIQUE CHIMIE SCIENCES DE L'UNIVERS SCIENCES DE LA TERRE


COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES

23, quai de Conti. 75006 Paris. Tél. (1) 43.26.66.21 ; Télex 206 521 F; Télécopie(1) 43.54.63.99.

INSTRUCTIONS AUX AUTEURS

Une Note aux Comptes rendus est la première relation publiée d'une découverte importante ou d'un résultat nouveau significatif. Elle bénéficie d'une publication rapide. Elle est obligatoirement présentée par un Membre, un Associé étranger ou un Correspondant.

Langue et présentation

Le français est la langue normalement utilisée dans les Comptes rendus. La rédaction doit être claire, accessible au plus grand nombre de spécialistes et bien mettre en évidence l'originalité du résultat (*).

La Note rédigée en français doit tenir dans quatre pages imprimées (figures et tableaux compris).

Toutefois les Notes bilingues contenant une version abrégée en anglais d'une page imprimée au moins, de deux pages au plus, et faisant appel aux figures, tableaux et références bibliographiques, peuvent atteindre une longueur maximale de 6 pages (figures et tableaux compris).

Les auteurs étrangers peuvent présenter une Note rédigée en anglais (ou éventuellement et sur demande spéciale dans une langue usant de caractères latins), à condition de l'accompagner d'une version abrégée en français d'une page imprimée au moins et faisant appel aux figures, tableaux et références bibliographiques. Les Notes répondant à cette règle peuvent atteindre une longueur totale de 6 pages (figures et tableaux compris).

En cas de nécessité, et avec l'autorisation d'un des Secrétaires perpétuels, une ou deux pages de figures hors texte peuvent être ajoutées à la Note. Ces planches sont à la charge des auteurs, qui doivent soumettre une mise en page prête à l'impression.

Comité de Lecture

Les Secrétaires perpétuels sont responsables de la publication des Comptes rendus. Ils sont assistés d'un Comité de lecture qui peut suggérer de recueillir l'avis de spécialistes. Ils peuvent ainsi être conduits à demander aux auteurs d'apporter certaines modifications à leur texte initial. Ils décident en dernier ressort de l'acceptation des Notes. La date de remise du manuscrit, et celle de son acceptation définitive ne varietur, sont indiquées à la fin du texte imprimé.

Composition d'une Note

Une Note aux Comptes rendus comprend normalement et dans l'ordre :

1. la rubrique sous laquelle elle est publiée (**), en français et en anglais (éventuellement une deuxième rubrique peut être ajoutée);

2. le titre en français;

3. les noms des auteurs précédés de leur prénom;

4. un court résumé en français;

5. le titre et un court résumé en anglais;

6. éventuellement une « version abrégée » en anglais;

7. le texte de la Note;

8. les légendes des tableaux et des figures en français et en anglais;

9. la liste des références numérotées dans l'ordre où elles sont citées dans le texte, chacune donnant auteur(s) (initiales des prénoms, et nom), titre de la revue, tome, année, première et dernière page de référence (et, pour les Notes de la série I, titre complet de l'article);

10. l'adresse postale et le numéro de téléphone des auteurs ou des Laboratoires;

11. le nom, l'adresse, les numéros de téléphone, télex et télécopie de la personne qui doit corriger les épreuves.

Les auteurs étrangers écrivant le texte de la Note (cf. 7) en anglais ou dans leur langue, joignent une version abrégée en français (cf. 6) et des légendes pour tableaux et figures rédigées en français (cf. 8).

Caractéristiques techniques

Les Notes sont obligatoirement dactylographiées en double interligne (texte, résumés, légendes, etc.) et adressées en deux exemplaires.

Une page imprimée des Comptes rendus compte 47 lignes de 85 caractères, signes ou espaces. Les résumés sont imprimés en petits caractères (95 caractères ou espaces par ligne). Les titres, résumés, tableaux, figures et bibliographie doivent tenir dans le nombre de pages indiqué.

— Fournir les originaux des figures avec des lettres ou des chiffres de dimension suffisante pour permettre la réduction. Ne pas donner de documents dépassant le format 21 x 30 cm.

— Utiliser les unités internationales (**).

— Présenter clairement les équations mathématiques (dactylographiées si possible) en particulier exposants et indices.

— Indiquer dans la marge ou dans une liste les symboles non usuels et si nécessaire consigner les directives et explications pour l'Imprimeur sur un feuillet séparé, attaché au manuscrit.

— Ne pas commencer une phrase par une formule mathématique.

— Les Notes de « bas de page » sont à éviter dans la mesure du possible; elles seront numérotées séparément des références et figureront à la fin du texte avant la bibliographie.

Correction des Épreuves

Les corrections sur épreuves ne peuvent être que d'ordre typographique. Les épreuves corrigées doivent être retournées par retour du courrier avec le manuscrit à l'Académie des Sciences (Service des Comptes rendus, 23, quai de Conti, 75006 Paris).

Tirages à part

Chaque Note donne lieu à 25 exemplaires de tirages à part gratuits pour les auteurs. Ceux-ci pourront en acquérir un plus grand nombre, à leurs frais, à condition d'envoyer la commande en même temps que le renvoi des épreuves corrigées.

(*) Il n'est parfois pas possible, en raison de la concision exigée, de donner les démonstrations ou les preuves complètes du résultat énoncé, spécialement dans la série I ; il est alors recommandé de joindre à l'appui de la Note un texte, si possible dactylographié, explicitant les compléments nécessaires à une bonne compréhension qui facilite l'examen de la Note par le présentateur et qui sera conservé cinq ans dans les Archives de l'Académie pour pouvoir être communiqué à tout lecteur des Comptes rendus qui en fait la demande. Il est alors fait mention au bas de la Note de l'existence de ce document par la formule suivante : « Résumé d'un texte qui sera conservé cinq ans dans les Archives de l'Académie et dont copie peut être obtenue. »

(**) La liste des rubriques ainsi que des tableaux d'unités internationales sont donnés dans le premier numéro de chaque tome.

COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES

Série I : Mathématiques ; Série II : Mécanique, Physique, Chimie, Sciences de l'Univers, Sciences de la Terre ; Série III : Sciences de la Vie.

Tarif d'abonnements. France 1989 Vol. 308 + 309-40 numéros

Une série 2440 F Pour l'Étranger les tarifs postaux par voie normale sont inclus. Sur demande, l'enDeux

l'enDeux 4 370 F voi par avion sera facturé en sus. En 1989, Le service de la Série générale « La Vie

Trois séries (I, II, III) 5490 F des Sciences » est assuré gracieusement à tous les abonnés.

La Vie des Sciences : Institution 458 F/Particulier 275 F

Adresser les commandes à : C.D.R., Centrale des Revues, 11, rue Gossin, 92543 Montrouge Cedex, France.

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Série II : MECANIQUE-PHYSIQUE

CHIMIE SCIENCES DE L'UNIVERS SCIENCES DE LA TERRE

TOME 308 — SÉRIE II — N° 10 — 9 MARS 1989


« Reproduction in whole or in part without the permission of the author or his representative is prohibited (law of March 11, 1957, Article 40, Une 1). Such reproduction by whatever means, constitutes an infringement forbidden by Article 425 and those following it, of the Penal Code. The law of March 11, 1957, Unes 2 and 3 of Article 41, authorizes only those copies or reproductions made for the exclusive use of the copyist, and not intended for collective use, and such analyses and short quotations as are made for the purposes of an example or illustration. »

« Toute représentation ou reproduction, intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l'auteur, ou de ses ayants-droits ou ayants-cause, est illicite (loi du 11 mars 1957, alinéa ler de l'article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal. La loi du 11 mars 1957 n'autorise, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article 41, que les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective d'une part et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'utilisation. »

The appearance of the code at the bottom of the first page of an article in this journal indicates the copyright owner's consent that copies of the article may be made for personal or internai use, or for the personal or internai use of specifie clients. This consent is given on the condition, however, that the copier pay the stated per-copy fee through the Copyright Clearance Center, Inc., 21 Congress St., Salem, Mass, 01970 (U.S.A.) for copying beyond that permitted by Sections 107 or 108 of the U.S. Copyright Law. This consent does not extend to other kinds of copying, such as copying for general distribution, for advertising or promotional purposes, for creating new collective works, or for resale.

© Académie des Sciences, Paris, 1989

Les Comptes Rendus de l'Académie des Sciences sont une publication imprimée et diffusée par GAUTHIER-VILLARS, 1, boulevard Ney, 75018 Paris, Société anonyme, constituée pour 99 ans, au capital de 3089600 F. Siège social : 17, rue Rémy-Dumoncel, Paris. P.D.G. : J.-M. BOURGOIS. Actionnaire : BORDAS S.A. (99,8% des parts).

Directeurs de la publication et responsables de la rédaction : MM. les Secrétaires Perpétuels de l'Académie des Sciences, P. GERMAIN et A. JOST.


CONTENTS

1989 — VOLUME 308 — SECTION Il — N° 10

Mechanics of Solids

Bifurcation conditions inside and at the boundary for a class of non-standard materials, Ahmed BENALLAL,

René BILLARDON and Giuseppe GEYMONAT. 893

This paper presents some properties of the rate boundary value problem arising for a large class of materials. Some conditions for the existence and uniqueness are given and the associated linear problem is investigated in detail; necessary and sufficient conditions for its well-posedness (with a meaning to be given below) are derived and interpreted.

Mechanics of Solids

(see Tome 308, Series I, 1989, p. 293)

Damage, Fatigue, Fracture

Branch crack propagation under uniaxial loading experiments, Michel BARQUINS, Khereddine GHALAYINI and Jean-Pierre PETIT. 899

In order to understand the branching process from defects in geologicdl conditions, a set of branch fractures, formed under uniaxial loading at the tip of a preexisting oblique open slot, was studied in PMMA (polymethylmethacrylate) plates. It was found (i) that the branching was always initiated perpendicularly to the local plane tangent to the slot edgeat the braneh crack root, (ii) that the branch crack root-crack tip distance increased with the slot-loading axis angle. The study of the stress field linked to an elliptical slot under pure shear conditions confirms our experimental observations.

Surface and Interphase Physics

Needle-crystal growth in an axial flow: scaling laws, Martine BEN AMAR and Yves POMEAU. 907

At large or finite Prandtl number, we find several regimes of growth for a needle-crystal. The growth velocity and tip radius are derived, depending on the fluid velocity and undercooling.

Chemical Physics

Statistical characteristics of the temperature in a reactive boundary layer, Mohieddine BOUTOUILI, Michel CHAMPION, Pascal BRUEL and Jean-Claude BELLET. 915

Modelling of turbulent combustion at large Damkholer and turbulent Reynolds numbers leads to an expression for the mean chemical rate which introduces an integral time scale which is a characteristic of the combustion progress variable c. In the case of a boundary layer with injection of reactant, such an integral scale TT based on the température field is measured and comparable to Tc based on a progress variable c(t). Both TT and Tc are found to vary strongly accross the boundary layer which indicates the need of an equation describing the évolution ofsuch a quantity.



Organic Synthesis

Activation of the anomeric carbon of sugars by the carbonate group and applications in osidic synthesis, Marc BOURSIER and Gérard DESCOTES 919

The synthesis of anomeric carbonates is described and their use in osidic synthesis is compared with previously described methodologies.

Crystal Chemistry

Chemical preparation and crystallographic features of a new diphosphate of ethylene diammonium, Slaheddine KAMOUN, Amor JOUINI and Abdelaziz DAOUD 923

Chemical preparation and main crystallographic features are given for a new diphosphate. The tris(ethylene diammonium)bis(monohydrogendiphosphate) dihydrate sait is monoclinic P21/n with unit cell dimensions: a=11.860(2)Â, b = 6.463(1)Â, c = 14.997(3)Â, p = 112.36(1)°, Z = 2 Dm=1.716Mxgm- 3, Dx=1.788Mxgm- 3.

Mineralogy

Silver and thallium in sulfosalts of the sartorite series (Lengenbach, Binn valley, Switzerland), Assia LAROUSSI,

Yves MOËLO, Daniel OHNENSTETTER and Daria GINDEROW. 927

Electron microprobe analyses of minerais of the sartorite series (Lengenbach deposit, Switzerland) allowed specifying the Tl and Ag distribution between them. Liveingite and baumhauerite contain up to 1% Ag and 77. Their compositions agree with ideal formulae Pb20As24S56 and Pb12As16S36. Rathite shows 3.5 to 4% Ag, and 0.9 to 2.4% Tl, having the ideal formula [Pb6AgAs]AssS20. Baumhauerite forms intergrowths with an Agrich derivative, close to [Pb10AgAs]As16S36. A new compound, "mineral A", containing 0.6 to 4.7%77, might be derived from chabourneite through Pb and As substitution; its formula is Pb5_2xTlxAs8+:cS17 (0.06 <x< 0.5).

Marine Geology

Age of an Atlantic shelf mud patch supplied by an estuary: the west Gironde example (France) was deposited in historic rimes, Patrick LESUEUR, Olivier WEBER, Laurence MARAMBAT, Jean-Pierre TASTET, Jean-Marie JOUANNEAU and Jean-Louis TURON. 935

the mud patch located at the western part of the Gironde estuary System represents the bulkiest, fine-grained sédiment deposit on the Aquitain inner shelf. Its morphology and lithology are precisely defined. Radiochronological and palynological data show that muds have been deposited since 2,000 years B.P., probably during the sixth century. This resuit infers a constant and considerable sedimentation rate ranging from 30 to 40 cm per century.

Geology

Fluctuations of the accumulation rate of the sediments deposited in the South Atlantic Ocean during the last

120 M.a, Michel STEINBERG 941

Estimates of average accumulation rates of sediments were computed from data on cores recovered by the Deep Sea Drilling Program in the South Atlantic Ocean for the past 120 M.a. Periods of high accumulation rates are separated by low accumulation rate periods. Some fluctuations seem to be related to important geodynamic events such as the establishment ofdeep water connections between the North and the South Atlantic Ocean. For the past 60 M.a. some observed fluctuations may be correlated to analogous events occuring in other oceans and thus could have a global cause.

Incursions of Alpine microfaunas in the Triassic of the Balearic Islands and the Spanish Pyrenees, Daniel VACHARD, Jean-Paul COLIN, Joan ROSELL and Peter HOCHVLI. 947

The Triassic of northeastern S pain, considered as Germanie, has yielded two foraminiferal assemblages characteristic ofthe Alpine Realm, in the Ladinian. s. l. ofMinorca (Balearic Islands) and the Rhaetian s. 1. of the Spanish eastern Pyrenees. Thèse assemblages, respectively dominated by Lamelliconus procerus and Aulotortus friedli and Gandinella falsofriedli, allow solving some problems concerning the systematics, biostratigraphy, paleoenvironments and paleogeography.

The Albian tectonics in the bauxitic deposits from Ariège (Central Pyrénées, France) in connection with the dynamic évolution of the European stable margin, Pierre-Jean COMBES and Bernard PEYBERNES. 953

In the Central Pyrenean realm (Ariège), synsedimentary normal faults induced the polyphase deposition of bauxites, separated by well-dated reef intercalations (Urgonian limestones). Along some of these faults, compression motions may have later followed previous extension ones; they are assigned in time to Early and Mid-Albian and to the Mid-/Late Albian boundary. The palinspastic reconstruction of the European stable margin during this time allows Connecting this tectonic instability to the activity of strike-slip faults announcing the general Late Albian transpression regime.

II



Tectonics

Compression, strike-slip faulting and extension at the periphery of the north western Mediterranean Basin,

Alain MAUFFRET and Maurice GENNESSEAUX. 961

A new study of seismic profiles shows that the Gulf of Lion may have undergone Eocene compression tectonics. After this event strike-slip faulting was active from Languedoc to the Catalan Range. The opening of the pull-apart basins precedes the sea-floor spreading in the north western Mediterranean Basin. This sequence oftectonic events could be correlated with a clock-wise rotation ofthe stress field which reacted to the convergence between Africa and Europe.

Hydrogeology

Transition between the two asymptotic behaviours in a porous media phenomenon with convection and exchange, Claude THIRRIOT. 969

During thermal or chemical transport phenomena in porous media, the apparent velocity of transport or convection—taken as that ofthe displacement ofthe maximum—can change following the value of the exchange coefficient.

After showing the extrême cases, the simplified problem is solved in analytical form by using asymptotic solutions.

With the use of dimensionless parameters and variables, a unique graph is obtained to describe the displacement ofthe maximum value when the entrance boundary condition is an impulsion.

Paleontology

lemanja palma n. g., n. sp., a new Gyrodontidae (Pisces, Actinopterygii) in the Lower Cretaceous of the Chapada do Araripe (N-E Brazil), Sylvie WENZ. 975

A new genus, new species, Iemanja palma, is described on the basis of a new material from the Chapada do Araripe, and found in nodules of the lower part of the Romualdo Member, Santana Formation (AptianAlbian). This new taxon confirms the endemicity of the fauna from the Chapada do Araripe and increases the number of Pycnodontiforms which may have colonized waters of continental origin.

Micropaleontology

(see Tome 308, Series II, 1989, p. 947)

III



C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 893-898, 1989 893

Mécanique des solides/Mechanics of Solids

Conditions de bifurcation à l'intérieur et aux frontières pour une classe de matériaux non-standards

Ahmed BENALLAL, René BILLARDON et Giuseppe GEYMONAT

Résumé — On donne quelques propriétés du problème en vitesses pour une large classe de matériaux non-standards. Une condition suffisante d'existence et d'unicité est proposée et l'étude du problème linéaire associé est entreprise; des conditions nécessaires et suffisantes pour que celuici soit bien posé (dans une sens défini ci-dessous) sont fournies et interprétées mécaniquement.

Bifurcation conditions inside and at the boundary for a class of non-standard

materials

Abstract — This paper presents some properties of the rate boundary value problem arising for a large class of materials. Some conditions for the existence and uniqueness are given and the associated linear problem is investigated in detail ; necessary and sufficient conditions for its well-posedness (with a meaning to be given below) are derived and interpreted.

Abridged English Version — The mechanical behaviour under isothermal and small strain conditions of the rate-independent materials considered herein is modelled by the rate constitutive équations (7) where a and s denote the stress and strain tensors, and A the set of the thermodynamical forces associated to the internai variables a. [These constitutive equations are derived from the specifie free energy W (e, a), the state laws (1 a, b), the elastic domain defined byf (A; oc)gO, the plastic potential F (A; a), the normality rule (2) and the usual conditions (3).] The tangent modulus L takes the forms (8).

The rate problem considered in this paper is the problem !P given in section 2.1: for given fields of the rates of the volumetric forces fd, surfacic forces Fd on 3t Q and displacements vd on d2 fi, find the field of the displacement rates v in fi (and subsequently, through relations (7), (2) and (4), the field of the rates of the stresses and internai variables). Because of relations (8), the problem 0* is non-linear.

The solutions v to problem 0P satisfies problem 2 given in section 2.2 where se is the opérator defined by relation (10).

It is recalled in section 2.3 that the operator se is monotone if condition (11) is satisfied, and strictly monotone and coercive if condition (12) is satisfied. In the latter case, a solution to the problem 2, exists and is unique. Similar conditions for the uniqueness (without the proof of the existence) are given in [4] and [8]. The condition (12) is also equivalent to the strict positiveness of the symmetric linear operator Hs.

In section 2.4, it is recalled that necessary conditions for the existence of a solution to the problem 2 can be derived from the gênerai results given in [1] and [3] when the condition (11) is satisfied whereas the condition (12) is not.

In section 3 the linear problem associated to the problem P is considered, viz. the rate boundary value problem where the piecewise linear tangent modulus L is replaced by the linear tangent modulus H. This problem is said to be well-posed if it possesses a finite number of linearly independent solutions which are continuously dependent on the data, these data requiring a finite number of linearly independent compatibility conditions. The

Note présentée par Huy Duong Bui. 0249-6305/89/03080893 S 2.00 © Académie des Sciences

C. R., 1989, 1er Semestre (T. 308) Série II - 60


894 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 893-898, 1989

necessary and sufficient local conditions for this well-posedness are:

(a) the operator G : w -* G (w)= — Div[H :e(w)] is elliptic for any xeÙ.

(b) the boundary conditions satisfy the complementing condition for any x e ôfi.

The condition {a) can be written under the form of relation (13) as introduced in [9] for large déformation elasto-plasticity. It is linked to the possible existence of stationary acceleration waves within the body.

The condition (b) is linked to the possible existence of surface waves ([10], [5]). When the ellipticity condition (a) is satisfied, the complementing condition is satisfied at x belonging to the boundary dfi if the Unes of the matrix C(t + xn) are linearly independent modulo L+ (x, T, t) as polynomials in T. The definitions of C(t + xn) and L+ (x, T, t) are given by the relations (15) and (14) where x is a complex variable and H*(x, t + tn) the transpose of the matrix ofthe cofactors of [(t+tn). H. (t + tn)]. It must be noticed that the satisfaction of the complementing condition implies ellipticity, and that it generally fails before the ellipticity condition.

1. RELATIONS DE COMPORTEMENT. — On considère une classe générale de matériaux à laquelle appartiennent beaucoup de solides utilisés dans la pratique (élastiques, élastoplastiques, endommageables, etc.). On se place dans l'hypothese des petites perturbations en conditions isothermes. Nous admettrons que le comportement réversible de tels matériaux est déterminé par la connaissance de l'énergie libre spécifique W (e, a), fonction de la déformation £ et d'un certain nombre de variables internes a (*). La contrainte CT et les forces thermodynamiques A associées aux variables internes a sont obtenues par les lois d'état :

où p désigne la masse volumique. Le comportement irréversible est caractérisé par la donnée dans l'espace des forces d'un domaine de réversibilité C d'équationf(A; a)g0 à l'intérieur duquel aucune irréversibilité n'est possible. L'évolution des variables internes est déterminée par un potentiel plastique F (A; a), les relations de normalité et les conditions usuelles

Lorsque %>0, son calcul se fait par la relation de consistence f=0, d'où l'on déduit tous calculs faits que ( 2)


C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série H, p. 893-898, 1989 895

Dans la suite, on supposera h>0. Une interprétation mécanique de cette condition est donnée dans [2].

La dérivation de la relation (1 a) par rapport au temps permet d'exprimer la vitesse de contrainte en fonction de la vitesse de déformation :

où L désigne le module tangent et prend les formes

où on a posé

2. LES PROBLÈMES EN VITESSES. —2.1. Formulation. — Soit une structure occupant l'ouvert fi de R 3; connaissant son état à un instant donné, le problème en vitesses consiste à trouver à cet instant les champs des vitesses des déplacements v, des contraintes a et des variables internes à, lorsque la structure est soumise aux vitesses de forces volumiques fd, de forces surfaciques Fd sur la partie ôl fi de la frontière et de déplacements imposés V1 sur la partie complémentaire ô2 fi. Connaissant le champ des vitesses des déplacements v, ceux des contraintes et des paramètres internes sont immédiatement obtenus par les relations (7), (2) et (4). Nous ne considérerons dans toute la suite que le problème en vitesse des déplacements suivant :

Il est à noter que le problème (&) est non linéaire à cause des relations (8). Nous supposerons dans la suite que la frontière de fi et les coefficients de L sont suffisamment réguliers et que E est uniformément défini positif dans fi.

2.2. Formulation variationnelle. — Soient V = [H1(fi)] 3, Vad= {weV/w=vd sur 32fi}, Vo = {weV/w=0 sur ô2fi}, et l'opérateur se : V -► V (V désignant le dual de V), borné, hémicontinu, défini par

Le principe des puissances virtuelles montre que les solutions v du problème (P) vérifient le problème (2) suivant :


896 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 893-898, 1989

Remarque. — Si a —pb avec peR, et si on pose fip= {xefi//=0}, les solutions de (&>) sont les points stationnaires de la fonctionnelle J définie sur Vai par

2.3. Une condition suffisante d'existence et d'unicité. — (a) L'opérateur se est monotone de V dans V sous la condition

(b) L'opérateur se est strictement monotone et coercif, et le problème (2) a donc une solution unique [6], s'il existe a>0 tel que

La condition de stricte monotonie (12) traduit la relation d'exclusion de Hill [4] impliquant l'unicité et est équivalente à la condition proposée par Raniecki et Bruhns [8] dans le cas des problèmes homogènes, mais dans les deux cas l'existence n'était pas prouvée. Cette condition est aussi équivalente à la stricte positivité de l'opérateur linéaire défini sur l'espace des tenseurs symétriques par :

2.4. Une condition nécessaire d'existence. — Si seule la condition (11) est satisfaite, on peut perdre l'existence et/ou l'unicité de la solution du problème (3P). Dans ce cas, on peut appliquer les résultats de [1] et [3] pour trouver des conditions nécessaires pour l'existence d'au moins une solution. Par exemple si a = pb, on introduit la fonctionnelle de récession Joe(w)( 3) et alors la condition J°°(w)^0 pour tout weVad est nécessaire pour l'existence d'au moins une solution; dans notre cas,

D'un point de vue mécanique, la condition J°°(w)^0 s'interprète en disant que le travail des forces extérieures doit être négatif ou nul dans tout déplacement virtuel tel que l'énergie de déformation correspondante est nulle. Des conditions analogues (éventuellement plus compliquées) peuvent être données dans le cas général.

3. ANALYSE DU PROBLÈME LINÉAIRE ASSOCIÉ A H, - Ce problème consiste à étudier les solutions du problème aux limites (P) en remplaçant l'opérateur L par H. Il nous paraît intéressant d'appliquer à ce problème les résultats connus pour les problèmes aux limites linéaires elliptiques. Dans ce cadre le problème en question est bien posé ( 4) (aux sens qu'il est à indice dans les espaces de Sobolev convenables [7]) si et seulement si deux conditions de caractère local sont satisfaites :

(a) l'opérateur G : w -> G (w) = — Div [H : e(w)] est elliptique pour tout xefi.

(b) les conditions aux limites vérifient la condition complémentaire pour tout xeôfi (5).


C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 893-898, 1989 897

Dans le cas présent, la condition (a) se traduit pour tout xefi par

La condition (b) qui n'a pas encore été exploitée à notre connaissance, s'exprime comme suit. Soit xeôQ. fixé et supposons (13) satisfaite. Soit n le vecteur unitaire normal en x à la frontière ÔQ, et t un vecteur unitaire tangent à cette dernière. Définissons le polynôme L (x, x, t) de la variable complexe T et à coefficients réels par

Notons IHr(x, t + xn) la matrice transposée de la matrice des cotacteurs de [(t+x n). H. (t + x n)] et définissons la matrice C (t + x n) par

Les éléments de C(t+xn) sont des polynômes en x de degré 4 pour xe32fi et de degré 5 pour xedi fi. La condition complémentaire stipule que les lignes de la matrice C(t + xn) doivent être linéairement indépendantes (en tant que polynômes en x) modulo L+ (x, x, t).

La perte de la condition d'ellipticité (a) est la condition de localisation introduite par Rice [9] en plasticité en transformations finies et est liée à l'existence d'ondes d'accélération stationnaires. En effet, depuis Hadamard, il est bien connu que quand l'opérateur G est elliptique, le système dynamique p ôz u/dt 2 = G (u) n'admet pas de solutions de la forme u(x, t)=Aexp(j(k.x—et)) avec c=0.

La condition complémentaire (b) s'interprète aussi en termes d'ondes de surfaces [10] et la perte de cette condition est liée aux instabilités de surface [5]. Pour simplifier, considérons le demi-espace D défini par x3>0. Alors les opérateurs (G, B) satisfont la condition complémentaire si pour tout k=(ku k2, 0) ^0, u = 0 est la seule solution de la forme u=z(x3)exp(i(k.x)) avec z borné, du problème à coefficients constants

Il faut remarquer que la vérification de la condition complémentaire entraîne l'ellipticité. Un exemple très simple de perte de la condition complémentaire dans le domaine elliptique est rencontré dans le cas élastique endommageable. Par exemple, si

Si on considère un échantillon initialement dans un état homogène de la forme s = 61 et si A est le tenseur d'élasticité isotrope avec coefficients de Lamé A et G, alors la condition complémentaire pour les conditions de traction est violée quand 52/M=(A+G)(l-D)/(3A + 2G) 2 tandis que la perte d'ellipticité a lieu pour 52/M=(A + 2G)(l-D)/(3A+2G) 2 et la perte de définie-positivité de l'opérateur H5 pour Ô2/M = ( 1 - D)/(3 (3 A + 2 G)).

(1) Ces variables peuvent être scalaires, vectorielles ou tensorielles.

( 2) Les notations « • », « : » et ® désignent respectivement le produit contracté sur le nombre adéquat d'indices selon la nature des variables a, le produit contracté sur deux indices et le produit tensoriel. D'autre part <x> =(1/2)(x+|x|).


898 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 893-898, 1989

( 3) Si J:V->R est convexe, propre, faiblement semi continue inférieurement, alors pour tout ueV Jco(o)= lim (1/X.) J(«0H-Xv), où i>0edom J, la limite ne dépendant pas de va.

Si -* +oe>

(*) Un problème aux limites linéaires est dit bien posé s'il admet un nombre fini de solutions linéairement indépendantes avec nécessité :

— pour les données, de satisfaire au plus un nombre fini de conditions de compatibilités linéairement indépendantes,

— pour les solutions, de dépendre continûment des données.

( 5) Cette condition peut être adaptée aux interfaces pour les problèmes de type transmission.

Note remise le 9 janvier 1989, acceptée le 1er février 1989.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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Laboratoire de Mécanique et Technologie, E.N.S. de Cachan/C.N.R.S./Université Paris-VI,

61, avenue du Président-Wilson, 94230 Cachan.


C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 899-905, 1989 899

Endommagement, fatigue, rupture/Damage, Fatigue, Fracture

Branchement des fissures sous compression uniaxiale

Michel BARQUTNS, Khereddine GHALAYTNI et Jean-Pierre PETIT

Résumé — Pour mieux comprendre les phénomènes de branchement qui interviennent sur des défauts de la croûte terrestre supérieure, on étudie dans un lot d'éprouvettes d'un matériau analogue cassant, le PMMA (polyméthacrylate de méthyle), soumis à une compression uniaxile, la géométrie des branchements des fissures qui sont initiées aux extrémités d'une préentaille centrale traversante, inclinée par rapport à la direction du chargement. On montre, d'une part, que le branchement s'effectue toujours perpendiculairement au plan tangent à la surface du défaut préexistant et passant par le point de branchement, et d'autre part, que la distance entre le point de branchement et le front d'entaille croît avec l'inclinaison de cette entaille par rapport au chargement imposé. L'étude du champ de contraintes autour d'un défaut de forme elliptique soumis à un cisaillement pur confirme l'ensemble des observations.

Branch crack propagation under uniaxial loading experiments

Abstract — In order to understand the branching process from defects in geological conditions, a set of branch fractures, formed under uniaxial loading at the tip of a preexisting oblique open slot, was studied in PMMA (polymethylmethacrylate) plates. It was found (i) that the branching was always initiated perpendicularly to the local plane tangent to the slot edge at the branch crack root, (ii) that the branch crack root-crack tip distance increased with the slot-loading axis angle. The study of the stress field linked to an elliptical slot under pure shear conditions confirms our experimental observations.

Abridged English Version — Various brittle geological structures tend to form at the tip of preexisting joints submitted to shearing movements (elementary faults). In order to understand the physical origin of these structures we tested PMMA (polymethylmethacrylate) plates (50 x 32 x 5 mm), each with a 0.3 mm wide and 10 mm long slot oriented in directions ranging from 15 to 75° to the loading axis. Under moderate load (uniaxial constant loading conditions), Mode I propagation of the branch crack well known in various brittle or semibrittle materials, ([2] to [9]) was observed in the material (Fig. 1), followed at higher stress levels by the formation of a shear band more or less in the extension of the defect [1]. We concentrate here on the branch crack problem where the path (initiation and propagation) is not understood in spite of extensive experimental data. Statistical observations on the root of the branch crack showed that for a load axis-slot direction angle P>40° the branching angle 6 was at 90 + 5° to the slot: axis (Fig. 2) whereas the distance from the branch crack to the slot tip tended to be greater than half the slot width (Fig. 3) and increase with p (Fig. 5).

For p<40o, themean branching angle 0 appeared less (Figs. 4 and 5) ; this seemed related to the tendency of the branch crack to initiate at or near the irregularity shaped slot tip, but a closer examination showed that the tangent to the branch crack root was still more or less perpendicular to the slot edge at this root, ». e., perpendicular to the local free surface. Whatever the slot orientation, at some distance from the slot, the branch crack path tended to escape from the local slot edge influence and follow an apparently hyperbolic trajectory asymptotic to the loading axis.

Thèse experimental branching angle results do not agree with Erdogan and Sih's calculadons [10] widely used for experiment interpretations ([6], [7], [11], [12]); these predicted a 70.5° branching angle (cp on Fig. 6) given a maximum tensile stress of G^ [Eq. (1)]. In fact, as shown by our observations, the branching crack is initiated along the slot, in the

Note présentée par Jean SALENÇON. 0249-6305/89/03080899 S 2.00 © Académie des Sciences


900 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 899-905, 1989

vicinity of its extremity, so that the problem is the determination of the crack initiation direction at a point localized along the slot, assuming that the branching crack opens perpendicularly to the highest normal stress. The analysis of the asymptotic stresses field shows that the maximum is reached on a plane perpendicular to the slot surface.

Moreover, new calculations for an elliptical open crack (Fig. 7), using Kolosov-Muskhelishvili's formalism [13], predict that the distance (x in Fig. 8) from the slot centre to branch root (deduced from the maximum value of the tensile stress am at the edge of the elliptical crack [Eq. (2)]) increases with the slot angle (thus confirming our test observations) and with the radius of curvature of the crack tip (Fig. 8). In our experiments, the local variations of this radius (due to the hand-sawn slot) account for the wide distribution of the crack root location (8 in Fig. 3).

INTRODUCTION. — Dans le but de comprendre la genèse de structures cassantes de géométries variées aux extrémités de joints planaires préexistants dans les roches, deux d'entre nous [1] ont étudié l'évolution d'un défaut plan traversant, oblique à une compression uniaxiale, dans des plaquettes en analogue cassant (PMMA, polyméthacrylate de méthyle). On a observé notamment la propagation en Mode I des deux fissures branchées, symétriques par rapport au centre du défaut, qui rejoignent la direction de la contrainte appliquée (fig. 1).

Bien que ces branchements de défaut sous contrainte dans les matériaux fragiles ne constituent pas un phénomène nouveau, puisqu'ils ont été observés dans le verre ([2] à [5]), les matières plastiques ([6], [7]), le plâtre [8] et dans différents minéraux du granité [9], le problème de la localisation du branchement et de sa dépendance à l'inclinaison du défaut, par rapport à la direction du chargement imposé, n'a pas été examiné; de même, l'influence de l'inclinaison du défaut sur l'amplitude de l'angle de branchement est mal comprise.

Le but de cette Note est de montrer que l'étude du champ de contraintes autour d'un défaut de forme elliptique soumis à un cisaillement pur permet de rendre compte de l'observation suivante : la fissure branchée est toujours initiée perpendiculairement à la surface libre du défaut préexistant, à une distance du front qui croît avec l'inclinaison de ce défaut par rapport à la contrainte de compression imposée. L'influence du rayon de courbure du front d'entaille est également prise en considération.

PROTOCOLE EXPÉRIMENTAL. — Dans des plaquettes de 50 x 32 x 5 mm en PMMA, un défaut central traversant (fissure ouverte de 0,3 mm d'épaisseur et de 10 mm de longueur) est réalisé par sciage suivant des inclinaisons variables entre 15 et 75° par rapport à la direction du chargement. L'éprouvette, maintenue par deux raidisseurs latéraux afin d'éviter le flambage, est soumise à un palier de pression uniaxiale, parallèlement à sa plus grande dimension, à l'aide d'un système hydraulique à servo-commande. La déformation et la rupture sont effectuées sous chargement global constant.

RÉSULTATS EXPÉRIMENTAUX. — Dès qu'une pression suffisante est appliquée, une fissure branchée apparaît au voisinage d'une extrémité de l'entaille, initiée à partir d'une des nombreuses microfractures induites par le sciage. Simultanément, ou après un temps qui peut atteindre plusieurs secondes, comme l'observe avec justesse Cottrell [4] dès 1972, une deuxième fissure branchée se développe vers l'autre extrémité du défaut. Les deux fissures cheminent ensuite suivant des trajectoires qui s'incurvent plus ou moins selon


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901

l'inclinaison du défaut initial, mais qui restent parfaitement symétriques par rapport au centre de l'entaille (fig. 1).

Un lot de 50 plaquettes fissurées, présentant différentes inclinaisons P de défaut, a été examiné. La mesure de l'angle 0 de branchement, défini communément par l'angle que fait la direction de l'entaille initiale avec la tangente à la racine de la fissure branchée, permet, en première analyse, de distribuer les échantillons en deux catégories liées à l'inclinaison du défaut préexistant. Pour les inclinaisons au moins égales à Pcritique ~ 40°, l'angle de branchement est trouvé égal à 90 + 5° (fig. 2), et les fissures sont initiées le plus fréquemment à une distance 8 du front d'entaille au moins égale à la demi-épaisseur de cette entaille, c'est-à-dire 82:0,15 mm (fig. 3). Pour les inclinaisons inférieures à Pcritique, l'angle 0 de branchement est trouvé inférieur à 90° et décroît avec l'inclinaison (fig. 4), tandis que l'initiation tend à se produire au voisinage immédiat du front (8rg0,15 mm). La figure 5 montre trois branchements représentatifs des observations, ainsi que les trois trajectoires schématiques correspondantes, lesquelles, à quelque distance du point d'initiation, tendent hyperboliquement vers la direction du chargement imposé.

La partition des échantillons en deux catégories n'est en fait qu'un artefact lié à la définition même de l'angle de branchement. En effet, si pour p < Pcritique, la direction de la tangente à la racine de la fissure est repérée non pas comme précédemment par rapport à l'axe de l'entaille, mais par rapport au plan tangent local de la surface de la lèvre du défaut, on constate que le raccordement se fait perpendiculairement. Ce que confirme un examen attentif des photographies publiées, mais interprétées différemment, par Brace et Bombolakis [2], Sketty et coll. [5], Nemat-Nasser et Horii [6] et Ashby et Hallam [7]. De même, l'analyse locale des branchements observés pour p > Pcritique d'une part, ramène la distribution de la figure 2 à la valeur unique 0* = 9O° et d'autre part, aligne tous les points de la figure 4 sur l'horizontale 0=90°. Ainsi, quelle que soit l'inclinaison p de

C. R., 1989, 1er Semestre (T. 308)

Série II - 61

Fig. 1. — Schéma de la rupture fragile sous forme de fissures branchées

à partir d'un défaut imposé ouvert faisant un angle p avec l'axe de chargement.

Fig. 1. — Sketch of the formation of branch cracks

from an open slot making an angle p with the loading axis.

Fig. 2. — Angles de branchement 9 mesurés pour les inclinaisons de défaut P = 45, 60 et 75°. Fig. 2. — Branching angles 9 measured for p=45, 60 and 75°.


902 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 899-905, 1989

l'entaille, et indépendamment de la position du point d'initiation part rapport au front d'entaille, la fissure branchée est initiée en Mode I perpendiculairement à la surface libre de cette entaille.

DISCUSSION. — Le problème de la rupture en mode mixte des matériaux fragiles présentant des défauts plans inclinés a été étudié en premier lieu par Erdogan et Sih [10] en 1963. Sous compression uniaxiale, le déplacement relatif des lèvres de l'entaille initiale correspond au Mode II du cisaillement plan. Les contraintes appliquées sur un petit élément de volume situé à la distance r du front d'entaille sont, en coordonnées cylindriques (fig. 6) :

Partant de l'hypothèse que la fissure est initiée à l'extrémité du défaut et qu'elle s'étend radialement dans la direction perpendiculaire à la plus grande tension, supposée être uw, Erdogan et Sih en déduisent un angle de branchement égal à 70,5°, valeur reprise dans un certain nombre de travaux récents ([6], [7], [11], [12]). En fait, l'expérience montre que la fissure branchée est initiée le long du défaut et au voisinage plus ou moins proche de son extrémité. Il convient donc de rechercher, en un point localisé le long du défaut, la direction d'initiation telle que l'ouverture s'effectue suivant la direction de facette soumise à la plus grande contrainte normale. L'analyse du champ de contraintes asymptotiques montre que le maximum est atteint sur la facette perpendiculaire à la surface du défaut.

Chaque éprouvette de PMMA préentaillée, dont l'axe du défaut initial fait un angle P avec la direction de la contrainte de compression uniaxiale cr imposée, peut être assimilée à une plaque infinie présentant un évidement elliptique de grand axe 2 a égal à la longueur de l'entaille et de petit axe 2 b égal à son épaisseur. En utilisant le système de coordonnées curvilignes défini par deux familles d'ellipses (S;) et d'hyperboles (ri) homofocales, ayant mêmes foyers que l'ellipse Ç0 représentative de l'entaille (fig. 7), le formalisme de KolosovMuskhelishvili [13] permet d'écrire les contraintes supportées par un petit élément de

Fig. 3. — Distance 5 du front d'entaille à la racine du branchement pour p=45°.

Fig. 3. — Distance 8 from the slop tip to the branch crack root, measured parallel to the slot axis, for p=45°.

Fig. 4. — Angle de branchement moyen 8 pour différentes inclinaisons p de l'entaille.

Fig. 4. — Mean branching angle 8 for different orientations p of the slot.


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Fig. 6. — Contraintes subies par un petit élément de volume situé à la distance r du front de fissure. Fig. 6. — State of stress on a smallpart situated at a distance r from the slot tip.

Fig. 7. — Contraintes supportées par un petit élément de volume proche d'une extrémité d'un défaut elliptique,

dans un système de coordonnées curvilignes. Fig. 1. — State of stress near an elliptical crack tip in curvilinear coordinates.

Fig. 8. — Valeurs calculées de la distance x de la racine de la fissure branchée au centre d'un défaut elliptique,

en fonction de l'inclinaison p de l'entaille, pour différents rayons de courbure du front d'entaille.

Fig. 8. — Variations of the slot centre-branch root distance x with the slot angle,

for different values ofthe radius ofcurvature ofthe elliptical crack tip.


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Au bord de l'évidement elliptique, Ç = ^0> CJ^ = °'ç71=0 et la contrainte um prend la forme simplifiée suivante : (2) am(^ = ^0) = a{e2^ cos 2p + M(l-e2Ç° cos 2 p)sh 2^-e2^ sin 2p sin 2r|]}.

La fissure branchée s'initie au point où la contrainte de traction o"nn(^ = ^0) prend sa

valeur maximale, laquelle dépend de l'inclinaison p de l'entaille. La figure 8 montre, en

fonction de p, la distance x du point d'initiation repérée par rapport au centre du défaut,

pour différents rayons de courbure R = b2/a de front d'entaille. Il est clair que la fissure

branchée s'ouvre d'autant plus loin de l'extrémité de l'entaille que l'inclinaison est plus

grande, comme le vérifie l'expérience (fig. 5). De plus, pour une même inclinaison, la

position du branchement est très largement dépendante du rayon R, et s'éloigne du front

à R croissant. Compte tenu du mode de façonnage des entailles par sciage, qui produit

d'une éprouvette à l'autre des fronts de rayons de courbure très variables, on comprend

ainsi parfaitement la large distribution expérimentale des distances 8 de branchement

présentée dans la figure 3.

Les auteurs remercient l'A.T.P. « Dynamique Bilan de la Terre » pour son soutien financier (contribution n° 59 DBT).

Note remise le 3 février 1989, acceptée le 8 février 1989.

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L.C.P.C., 58, boulevard Lefebvre, 75732 Paris Cedex 15;

J.-P. P. : Laboratoire de Tectonique, U.R.A. n° 266,

U.S.T.L., place Eugène-Bataillon, 34060 Montpellier Cedex.

EXPLICATIONS DE LA PLANCHE

Fig. 5. — Types de branchement correspondant aux inclinaisons p= 15, 45 et 75°. Fig. 5. — Types of branching for P=15, 45 and 75°.


PLANCHE I/PLATE I

MICHEL BARQUINS



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Physique des surfaces et des interfaces/Surface and Interphase Physics

Croissance de cristaux en aiguille avec écoulement axial :

lois d'échelle

Martine BEN AMAR et Yves POMEAU

Résumé — Pour un nombre de Prendtl grand ou d'ordre 1, nous trouvons plusieurs régimes de croissance d'un cristal en aiguille caractérisés par différentes lois d'échelle dépendant de la vitesse du fluide et du sous-refroidissement à l'infini.

Needle-crystal growth in an axial flow: scaling laws

Abstract — At large or finite Prandtl number, we find several regimes of growth for a needlecrystal. The growth velocity and tip radius are derived, depending on the fluid velocity and undercooling.

Abridged English Version — We examine the growth of a needle-crystal in an imposed flow, at low undercooling A. According to the fluid velocity at infinity uoe, three regimes can occur depending on the relative strengths of three typical lengths of the problem: the tip radius of the needle-crystal p, the thermal and hydrodynamic boundary layer thicknesses eth and ehy. In any case, etb<zehy since in ordinary fluids, the Prandlt number v/D is always greater than 1 (v is the kinematic viscosity and D the heat diffusion coefficient in the liquid phase). The thermal field near the tip, obeys the convection-diffusion equation: (1) uhyVT = DAT.

Which defines the thermal length as soon as one can estimate the fluid velocity uhy near the tip of the needle-crystal. Scaling laws for the growth rates and the tip radius are derived from Stefan (St) and Gibbs-Thomson (G-T) laws. The validity of the different régimes is characterized by a dimensionless quantity N = A(D 2 v)1/3/aoer, in either 2 or 3D.

Let us consider first the case of a very low imposed velocity. Then, the hydrodynamic boundary layer thickness given by v/«oe is so large that the fluid velocity in the thermal boundary layer is of order uoe(eth/eby) 112, which gives for eth the following estimate (D 2 v)1/3/«oe. We assume that the tip radius is very small compared with eth, so that équation (1) reduces to the Laplace equation at the tip and the temperature behaves like r 112 in 2 D or Log(r) in 3D (Laplace singularity around a needle). From St and G-T laws, we derive in 2D:

Where T is the capillary length. First, we recover the well-known relationship of solidification p2«c independent of the undercooling A. Eliminating e& from Equation (2), we evaluate the growth rate in term of A and ux. This case of low velocity implies that N must be restricted to [1, 1/A] in 3D.

If p is greater than the thermal length (second and third cases), we can always estimate uc and p from St and G-T laws, as soon as the thermal length is known at the tip of the needle-crystal:

th

Note présentée par Yves POMEAU. 0249-6305/89/03080907 $ 2.00 © Académie des Sciences


908 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 907-914, 1989

In the second case, where eth<p<ehy, the fluid velocity is given by ux(etJ(pehy)1/2), in the thermal boundary layer, so from (1) we get eth = Dil 2 p1/4ej^4/uL/2- This case corresponds to an imposed flow such that (D/v)2/3<N< 1. Finally, when the fluid velocity increases, so that N becomes less than (D/v)2/ 3, p becomes greater than any characteristic thickness, and the tip feels a hydrodynamic stagnation point with ehy = (p 2 v/woe)1/ 3 so Equation (1) reads elh = (Dehy/u00)1/ 3. In the two last régimes, the relationship p2ac = Dr is no longer satisfied.

Ivantso [1] va trouver une remarquable solution des équations de Stéfan-Lamé et de diffusion. Cette solution décrit la croissance d'un cristal en aiguille parabolique lorsque la chaleur (ou les impuretés) dégagée par cette croissance est évacuée par la seule diffusion moléculaire dans le liquide sous-refroidi. Par la formule de Gibbs-Thomson, les effets capillaires déterminent finalement ([2], [3]) tous les paramètres de cette solution, mais d'une façon assez subtile. Dans cette note, nous étudions la même question avec un écoulement axial dans le fluide. Ceci a déjà été examiné ([4], [5]), en particulier une remarquable solution parabolique exacte a été trouvée pour un écoulement de fluide parfait. Nous nous proposons ici de considérer le cas d'un écoulement axial et stationnaire de fluide visqueux qui forme une couche limite de Blasius le long du cristal. Nous retrouverons d'abord les lois d'échelle connues ([2], [3]) pour la vitesse de croissance et le rayon de courbure à la pointe comme fonctions du sous refroidissement seul que nous étendons ensuite au cas avec écoulement lorsque celui-ci constitue une grande perturbation en un sens à définir. Les calculs sont présentés pour le cas bidimensionnel ; les résultats pour le cas à trois dimensions sont indiqués au fur et à mesure sans démonstration, lorsqu'ils diffèrent du cas à deux dimensions. Le but de cette Note étant d'établir des lois d'échelle, les égalités ne doivent pas être comprises au sens strict, mais au sens des ordres de grandeur.

1. LOIS D'ÉCHELLE DE LA CROISSANCE SANS ÉCOULEMENT. — Déterminons d'abord les lois d'échelle pour la couche limite thermique sur les branches asymptotiques d'un cristal en aiguille en croissance. La loi de diffusion du champ (température ou concentration) s'écrit, dans le repère propre d'une forme stationnaire de croissance :

où uc est la vitesse de croissance du cristal, D le coefficient de diffusion (thermique ou impuretés), x(/y) la direction perpendiculaire (/ parallèle) à l'axe du cristal. Pour de faibles sous-refroidissements (voir plus loin la définition précise de cette limite), la largeur transverse du cristal est négligeable devant l'épaisseur de la couche limite thermique. Alors, sur les branches asymptotiques du cristal on peut remplacer les conditions aux limites de (1) par des conditions aux limites sur la demi-droite x = 0, y<0. Cette couche limite correspond à une solution de similitude de (1) telle que 0 est fonction de la combinaison sans dimension Dy/ucx 2. Pour ses petits arguments, c'est-à-dire loin du cristal, cette fonction tend vers A, le sous refroissement adimensionné donné par (T—Teq)cL/L, où Teq est la température d'équilibre entre les deux phases, cL la chaleur spécifique du liquide et L la chaleur latente de transformation.

L'épaisseur de la couche limite thermique est donc eth(y) = (Dy/uc) 112, alors que la largeur du cristal à la distance y de sa pointe est trouvée en intégrant la vitesse de


C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 907-914, 1989 909

croissance déduite de la loi de Stéfan-Lamé pendant le temps y/uc, pour un gradient local suivant x d'ordre de grandeur A/e^fj), soit

Pour un faible A, l'épaisseur du cristal est faible comparée à la couche limite thermique. Près de la pointe, les échelles de longueur en x et y deviennent du même ordre de grandeur. La taille de la couche limite de diffusion est fixée par eth(y)=y=etb, soit

Le rayon de courbure de la pointe et la vitesse de croissance uc sont fixés d'une part par la condition de Stéfan-Lamé, d'autre part par la relation de Gibbs-Thomson [3]. On trouve une première condition en remarquant que près de la pointe, le terme de convection devient relativement négligeable dans l'équation de diffusion, étant donné que l'échelle de longueur caractéristique est le rayon de courbure à la pointe, supposé faible devant eib. En conséquence, localement le champ de température satisfait à l'équation de Laplace avec condition de Dirichlet sur le cristal. Pour une demi-droite, ce champ a une singularité en racine carrée près de la pointe, et se comporte localement comme

où r est approximativement la distance à cette pointe et où le dénominateur etb permet le raccordement avec la couche limite thermique extérieure. Le gradient près de la pointe est donc approximativement A(l/peth)1/ 2 [3D: A./p Ln (elh/p)]. Combinant ce dernier résultat avec la loi de Stéfan-Lamé, on trouve la loi d'échelle pour la vitesse de croissance uc:

équivalent à la relation d'Ivantsov entre le nombre de Péclet (P=wcp/D) et A :

La condition de Gibbs-Thomson donne la seconde relation, nécessaire pour fixer uc et p indépendemment :

0=I7p, où T est proportionnel à la constante capillaire et a dans nos choix de dimensions (c'est-à-dire avec 0 sans dimension physique) — la dimension d'une longueur. D'où:

qui combiné avec (4) donne, dans les deux cas, la relation classique :

Cette relation, qui élimine le sous-refroidissement, toujours difficilement mesurable expérimentalement, ne fait pas intervenir non plus etb à la pointe. Pour l'établir, nous n'avons utilisé que l'hypothèse de faible A et d'une pointe localement parabolique. Donc, elle n'exige pas que le cristal ait des branches asymptotiques paraboliques. Ceci explique, peut-être pourquoi, elle est vérifiée dans les expériences, alors que les flancs du cristal présentent des branchements secondaires.


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Dans ce qui suit, nous allons utiliser les mêmes méthodes pour retrouver les lois d'échelle dans le cas d'un écoulement axial et stationnaire d'un fluide de viscosité finie. Comme le calcul va le montrer, il faut distinguer plusieurs limites différentes, qui dépendent de l'ordre mutuel de p, rayon de courbure du cristal à la pointe, de eth et de ehy : épaisseurs des couches limites thermique et hydrodynamique au voisinage de la pointe. Toutefois, certaines formules, décrivant les branches asymptotiques, sont communes aux différents cas et seront déduites à la fin. D'autre part, dans chacun des paragraphes, on emploiera les mêmes notations pour les mêmes grandeurs physiques, étant entendu que l'expression algébrique de ces grandeurs diffère en général suivant l'approximation considérée.

2. LOIS D'ÉCHELLE POUR LA CROISSANCE AVEC ÉCOULEMENT DANS L'HYPOTHÈSE p<eth<ehy. — Nous ne considérons pas le cas où l'écoulement n'est qu'une faible perturbation : alors, évidemment les résultats du paragraphe précédent continuent à s'appliquer en première approximation. Ce paragraphe est consacré au cas où l'écoulement constitue déjà une perturbation importante en un sens qui sera précisé.

L'équation de diffusion-convection (1) est à remplacer maintenant par :

où uft est le champ de vitesse hydrodynamique au voisinage du cristal en aiguille, mesuré dans son repère propre. Contrairement à des travaux récents [4], nous allons nous placer dans le cas — a priori réaliste si la valeur de uh à l'infini est assez grande — où le premier terme de gauche de (7) est négligeable devant le second et où la couche limite de Blasius est beaucoup plus épaisse que la couche limite thermique. Cette dernière condition, précisée plus loin signifie physiquement que la vorticité diffuse plus vite que la « chaleur » (c'est-à-dire le champ scalaire 0). Elle implique donc que le nombre de Prandtl (ou de Schmidt, s'il s'agit d'impuretés) est grand. La première condition dépend du rapport sans dimension : uju^ où «oe est la vitesse de l'écoulement loin du solide.

Calculant l'épaisseur de la couche limite visqueuse comme on l'a fait pour la couche limite thermique, on obtient :

où u est la viscosité cinématique du fluide. Cette estimation est consistente avec l'approximation de Stokes, mais aussi avec celle de Blasius où le nombre de Reynolds de la couche limite est arbitraire. Le calcul qui suit, basé sur cette hypothèse deviendrait inconsistent si, près de la pointe, la couche limite hydrodynamique, d'épaisseur ehy = u/Moe était plus mince que le rayon de cette pointe. On reviendra sur cette condition : v/u^ f> p. Au voisinage des branches asymptotiques du cristal, la composante axiale de la vitesse hydrodynamique vaut donc uy = uoex/eby(y), pourvu que x<eby(y). Substituant cette estimation dans l'équation de convection diffusion parabolisée :

où uy et ux sont les composantes cartésiennes du champ de vitesse hydrodynamique, et remarquant qu'en raison de l'incompressibilité les deux termes de gauche de (9) sont du


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même ordre de grandeur, nous obtenons l'estimation

pour l'épaisseur de la couche limite thermique suivant x. Cette estimation est consistante si eth(y)«ehy(y% soit si u/DM comme annoncé. On peut négliger le premier terme dans (7), comme nous l'avons fait si

Étudions maintenant le voisinage de la pointe du cristal. La taille de la couche limite thermique vaut donc eth telle que eth(etb) — etb où l'on utilise la forme de la fonction elh(y) donnée en (10). Ce qui donne :

eth=(D2u)1/3/u0O qui définit pour le problème examiné la longueur d'écran analogue à la longueur elb introduite précédemment pour le cas sans écoulement. La suite des calculs pour les estimations du voisinage de la pointe suit la même ligne que dans le cas sans écoulement et conduit d'une part à la relation (6) entre rayon de courbure à la pointe et vitesse de croissance et d'autre part à la vitesse de croissance elle-même :

La condition (11) et l'hypothèse de départ (p<eth) peuvent s'exprimer en fonction des paramètres de contrôle : le sous-refroidissement et la vitesse hydrodynamique : 1<N<1/A 3 à 2D ou 1<N<1/A à 3D, avec N donné par

3. LOIS D'ÉCHELLE POUR LA CROISSANCE AVEC ÉCOULEMENT DANS L'HYPOTHÈSE eth < p < ehy. — Lorsque la vitesse uoe est telle que les trois longueurs typiques du problème, soit p, etb, ehy sont dans l'ordre etb<p<eby, alors que nous supposions jusqu'à présent qu'elles étaient dans l'ordre p<etb<eby, il faut modifier les estimations qui viennent d'être présentées. L'inégalité eth<p signifie que la couche limite thermique est beaucoup plus fine que la taille caractéristique du cristal (mesurée par exemple par le rayon de courbure p à la pointe). Le calcul de etb ne peut plus se faire comme dans le cas précédent où l'on avait considéré le cristal en aiguille comme une simple demi-droite pour calculer le champ thermique dans son voisinage.

Notre point de départ continuera d'être l'approximation de couche limite pour le champ de vitesse hydrodynamique, qui conserve une dépendance en x et y de la forme :

u=u0OF[xu^o/2/(vj)1/2], où la fonction F est solution de l'équation de similitude classique.

Les conditions aux limites imposent à cette fonction de tendre vers 1 pour ses grands arguments et de valoir 0 quand son argument s'annule. Près de zéro elle admet un développement de Taylor qui commence avec un terme linéaire. Dans le cas précédent c'est ce qui avait conduit à l'estimation de l'épaisseur de la couche limite thermique, puisqu'on avait supposé que celle-ci se trouvait au voisinage de la parabole d'équation.

x = (etby) 1' 2. Substituant cette estimation dans l'expression de u donnée ci-dessus, on obtenait donc que cette parabole correspondait au domaine des petits arguments de F,


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d'où l'estimation :

estimation, qui une fois introduite dans l'équation de diffusion convection conduit finalement au résultat présenté plus haut pour la couche limite thermique. Dans le cas que nous considérons actuellement, la couche limite thermique est a priori beaucoup plus mince que le rayon de courbure du cristal à la pointe. Il faut donc considérer comme ordre de grandeur du champ de vitesse celui qui est encore défini par l'approximation de couche limite, mais maintenant sur la parabole représentée physiquement par le cristal, soit d'équation : x = (py) 112, d'où la nouvelle estimation de l'ordre de grandeur du champ de vitesse;

A l'intérieur de la couche limite thermique, que l'on cherche à déterminer au voisinage de la pointe, on a besoin plutôt d'une estimation du gradient du champ de vitesse au voisinage de cette pointe, puisque la vitesse hydrodynamique elle-même doit s'annuler sur le cristal. Donc le long de cette surface, et au voisinage de la pointe, ce gradient, tel qu'il est donné par l'approximation de couche limite considérée plus haut, vaut :

gradu = uoe/(pehy)1/ 2, ce qui conduit à un champ de vitesse dans la couche limite thermique (d'épaisseur eth indéterminée pour l'instant) d'ordre de grandeur (uj(peby)ll2)elh.

Substituant cette estimation dans l'équation de convection diffusion, on aboutit à :

Restent maintenant à déterminer les paramètres de la dendrite, à partir des relations de Stefan-Lamé et de Gibbs-Thomson et à définir les limites de validité du cas considéré :

qui est écrite pour faire apparaître autant que possible les grandeurs sans dimensions. Ce deuxième cas s'applique si :

(D/v)2/3<N<l, les formules restent les mêmes à 3D si x représente la distance (positive) à l'axe.

4. Lois D'ÉCHELLE POUR LA CROISSANCE AVEC ÉCOULEMENT DANS L'HYPOTHÈSE eth < eby < p. — Considérons maintenant le dernier cas, c'est-à-dire celui où la vitesse hydrodynamique est suffisamment grande pour que l'épaisseur des couches limites hydrodynamique et thermique soient toutes les deux plus faibles que le rayon de courbure à la pointe, tel qu'il est donné par la formule de Gibbs-Thomson, soit :

L'épaisseur de la couche limite à la pointe ne suit plus l'approximation de Stokes, puisque le nombre de Reynolds calculé avec le rayon de la pointe vaut Re = p/ehy qui est


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très supérieur à 1 par hypothèse. On se trouve donc dans la situation classique d'une couche limite visqueuse supposée non décollée, ce qui est certainement vrai dans la région du point de stagnation avant. L'écoulement externe, c'est-à-dire calculé à l'échelle p est l'écoulement d'Euler stationnaire autour de la pointe, la condition de non glissement étant assurée par la couche limite. Les calculs classiques de couche limite hydrodynamique donne pour le voisinage du point de stagnation avant une épaisseur de couche limite hydrodynamique d'ordre :

Si le nombre de Prandtl — ou de Schmidt — qui décrit la diffusion du scalaire 0 est petit, on peut négliger eby devant l'épaisseur « thermique » et il faut appliquer la méthode de la référence [4] pour résoudre ce problème, en ajoutant toutefois la condition de Gibbs-Thomson. Mais nous nous sommes placés dès le départ dans l'autre limite, celle où la diffusion de 0 est beaucoup plus lente que celle de la vorticité. Alors la couche limite thermique est à l'intérieur de la couche hydrodynamique et l'on peut approcher la vitesse hydrodynamique (tangentielle) qui y règne par ux (etb/eby) 2, où le carré provient de ce que le début du développement de Taylor du champ de vitesse près d'un point de stagnation commence par des termes du second ordre. En insérant cette approximation dans l'équation de convection-diffusion on obtient :

ce qui, avec la relation uc=AD/eth, conduit à l'estimation de la vitesse de croissance :

Connaissant la vitesse de croissance, on peut s'assurer que ce traitement s'applique aux grandes vitesses hydrodynamiques telles que :

5. Lois D'ÉCHELLE POUR LES BRANCHES ASYMPTOTIQUES. — Comme le laisse penser la géométrie même du problème, les branches asymptotiques ont peu de chances de dépendre de façon détaillée du mécanisme qui fixe la courbure du cristal en aiguille à la pointe. Comme nous allons le voir, ces branches dépendent de paramètres locaux en quelque sorte et aussi de la vitesse de croissance uc, que l'on ne précisera pas dans les développements qui suivent, et pour lesquels il suffit de substituer les expressions trouvées plus haut. Le résultat essentiel de cette section va donc être le fait que ces branches asymptotiques sont toujours paraboliques, et d'équation cartésienne :

où Ec définit une échelle de longueur. Si le cristal en aiguille était défini par une seule échelle de longueur, Ec devrait être du même ordre de grandeur que le rayon de courbure à la pointe, c'est d'ailleurs ce qui se passe dans les deux premiers cas considérés plus haut, à deux dimensions : pas d'écoulement et limite p<etll<ehy. Par contre dans les autres cas, Ec n'a plus le même ordre de grandeur que la courbure p : si le problème interne a une asymptote pour x x p, on s'attend à ce que le raccordement se fasse, le


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long de cette asymptote, pour y x p2/Ec, ce qui est consistent quels que soient p et Ec. A la distance y de la pointe, l'épaisseur de la couche limite visqueuse vaut :

ehy(y) = (yv/uK,)ll2> d'où l'on déduit par l'argument déjà présenté que l'épaisseur de la couche limite thermique vaut :

Le calcul de l'épaisseur du cristal à la distance y de la pointe se fait en remarquant que la vitesse de croissance suivant x est donnée par la loi de Stéfan-Lamé, avec un gradient de température d'ordre A/elb(y), soit :

uc(y) = DA/eth(y). La largeur du cristal à la distance y, soit ec(y) est obtenue en intégrant cette vitesse sur le temps de croissance à cette cote y, soit y/uc. Ce qui donne :

qui est la forme la plus générale pour cette échelle de longueur et s'applique donc aussi au cas sans écoulement, à 2D. A 3D, à cause des effets de courbure, elle n'est valable que si Ec>Eth. A 2D et dans le cas avec écoulement, on peut retenir l'approximation cidessous pour Ec :

Note remise le 2 janvier 1989, acceptée le 1er février 1989.

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Laboratoire de Physique statistique, Ecole normale supérieure, 24, rue Lhomond, 75231 Paris Cedex 05.


C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 915-918, 1989 915

Physico-chimie/Chemical Physics

Caractéristiques statistiques de la température dans une

couche limite réactive

Mohieddine BOUTOUILI, Michel CHAMPION, Pascal BRUEL et Jean-Claude BELLET

Résumé — Dans la modélisation de la combustion turbulente à grands nombres de Damkholer et Reynolds turbulent, on fait intervenir pour le calcul du taux de production chimique une échelle intégrale de temps Tc d'une variable c représentative de l'avancement des réactions, et qui peut aussi en première approximation être celle TT de la température. Pour la modélisation des écoulements cisaillés, on a mesuré^ les fluctuations de température dans une couche limite réactive : les résultats montrent que Tc et TT sont tout à fait comparables (sauf au voisinage de la paroi), mais varient fortement à la traversée de la zone de combustion.

Statistical characteristics of the temperature in a reactive boundary layer

Abstract — Modelling of turbulent combustion at large Damkholer and turbulent Reynolds numbers leads to an expression for the mean chemical rate which introduces an integral time scale which is a characteristic of the combustion progress variable c. In the case of a boundary layer with injection of reactant, such an integral scale TT based on the temperature field is measured and comparable to Tc based on a progress variable c (t). Both TT and Tc are found to vary strongly accross the boundary layer which indicates the need of an equation describing the évolution ofsuch a quantity.

1. Une description maintenant classique [1] des écoulements turbulents réactifs prémélangés distingue un certain nombre de régimes de combustion suivant les caractéristiques respectives du champ turbulent et des flammes qui s'y propagent. Un régime qui semble représenter une bonne approximation dans de nombreux cas pratiques est celui où la vitesse locale de propagation de la flamme uL est petite devant les fluctuations de vitesse et où l'épaisseur 8L de la flamme est petite devant l'échelle caractéristique de la turbulence. Ce cas particulier correspond à une combustion dite « en paquets » où les flammes restent de structure laminaire et sont localisées dans des interfaces très minces devant l'échelle des structures turbulentes, chaque interface séparant une région de réactifs d'une région de produits de combustion. Plus précisément, ce régime est caractérisé [2] par la double inégalité R»DA»1 où R=fc1/ 2 Z/v est le nombre de Reynolds turbulent et DA = Zu£/fc1/ 2 v le nombre de Damkholer ; k est ici l'énergie cinétique de la turbulence et Z son échelle intégrale. Appelant c une variable caractérisant l'avancement des réactions chimiques, on obtient c=0 dans les réactifs, c = 1 dans les produits et 0<c< 1 dans l'état intermédiaire, qui est spécifique des interfaces (flammelettes).

2. Tenant compte de la structure de l'écoulement défini au paragraphe précédent, on peut en faire une description statistique en supposant que la fonction densité de probabilité de c, en un point quelconque de l'écoulement, est quasi bi-modale soit :

où ô est la distribution de Dirac et a, p des fonctions de poids dépendant de la position. c(t) en un point donné peut donc être considérée comme une variable aléatoire bi-valuée c=0 ou 1 et sa variation décrite comme celle d'un signal télégraphique où les temps de passage des créneaux c = 0 (mélange réactif) et des créneaux c = 1 (produits de combustion) sont tr et tp respectivement. Dans ces conditions, Bray et Libby [3] ont montré que le

Note présentée par Marcel BARRÈRE. 0249-6305/89/03080915 $2.00 © Académie des Sciences


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taux de production moyen de gaz brûlés w s'écrit :

où N est la fréquence moyenne de passage des interfaces réactives alors que wF est le taux de production moyen par interface. Si la distribution des temps de passage est connue, on peut déterminer N : ceci a été fait ([3], [4]) dans deux cas de distributions exponentielles décroissantes pour les longs temps de passage. Le résultat général est :

où g est un facteur numérique d'ordre unité dépendant de la forme exacte de la distribution et c est la valeur moyenne de c. Tc est un temps caractéristique des paquets de gaz brûlés et défini par :

où Pu est la fonction d'autocorrélation temporelle :

3. Un certain nombre de travaux expérimentaux ([3], [5], [6], [7]) ont montré qu'en première approximation Tc peut être considérée comme constant à la traversée d'une flamme turbulente plane. Par ailleurs, les mesures qui ont été effectuées sur ces flammes ont montré un bon accord avec les prédictions du modèle statistique résumé au paragraphe précédent, en ce qui concerne les distributions des temps de passage tp et tr et la fréquence moyenne N.

Avec les mêmes objectifs, nous nous sommes intéressés à des flammes turbulentes dont la structure moyenne n'est plus plane et qui correspondent à des nombres de Reynolds plus élevés. C'est le cas d'une couche limite turbulente réactive obtenue par injection du prémélange réactif à travers une plaque poreuse dans un écoulement de gaz brûlés parallèle à la plaque [9] (fig. 1). Cette expérience a été réalisée dans un canal de section carrée 10 x 10 cm 2 et de longueur 40 cm pour une vitesse extérieure à la couche limite ue = 12m.s- 1. L'écoulement principal est constitué de gaz brûlés à 1 300 K et le taux de soufflage F = pr vrjpe ue des gaz réactifs (faiblement dilués par de l'azote pour que la zone

Fig. 1. — Schéma d'une couche limite turbulente avec injection pariétale d'un mélange réactif.

Fig. 1. — Turbulent boundary layer with wall injection ofthe reactant mixture.

Fig. 2. — Exemple de signal de la variable d'avancement c(x = 36 cm, F = 0.04).

Fig. 2. — Sample of c (t) signal at a given location within the flow field.


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de combustion soit bien décollée de la paroi poreuse) peut varier entre 0 et 7 %. Les mesures sont effectuées sur le champ de température au moyen de thermocouples chromelalumel de 25 um dont l'inertie thermique est compensée numériquement ([10], [11]). La fréquence d'échantillonnage est de 20 kHz. L'analyse spectrale des signaux de température permet de déterminer en chaque point de mesure la plus petite échelle temporelle mesurable, compte tenu de la diminution du rapport signal/bruit quand la fréquence croît, et, connaissant aussi la vitesse locale, la plus petite échelle spatiale mesurable. Dans tous les résultats présentés ici, les échelles mesurées sont toutes supérieures aux limites inférieures respectives. Il faut noter que l'analyse du champ T(t) en un point de l'écoulement n'est qu'une approximation de celle du champ c (t) décrit plus haut dans la mesure où l'écoulement de couche limite que nous utilisons n'est pas isenthalpique, la température des gaz brûlés de l'écoulement principal étant plus basse que la température adiabatique correspondant au mélange frais injecté (à richesse 0,8). La figure 2 donne un exemple de signal c (t) obtenu dans la zone de combustion en attribuant à c (t) la valeur 0 quand la température mesurée est inférieure à 1000 K, et la valeur 1 quand la température mesurée est supérieure à 1000 K (on a vérifié que le signal ainsi obtenu est peu sensible au seuil de température, pourvu qu'il soit choisi dans des limites réalistes). En accord avec l'expression (4), on définit alors :

Les variations de Tc et TT à travers la couche limite ont été mesurées, à la distance x = 36 cm à compter du bord d'attaque de la plaque poreuse et pour trois valeurs du taux de soufflage : F=0,02, 0,04, 0,07. Les évolutions des échelles intégrales de temps TT et Tc à travers la couche limite réactive sont données sur la figure 3 pour F=0,04.

C. R., 1989, 1er Semestre (T. 308)

Série II - 62

Fig. 3. — Comparaison des échelles intégrales de temps TT et Tc pour F = 0,04. Fig. 3. — Integral time scales TT and Tc for F=0.04.

Fig. 4. — Influence du taux de soufflage F sur la distribution

de l'échelle intégrale T/T à travers la couche limite.

Fig. 4. — Integral time scale TT profiles for various values ofthe injection rate F.


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Deux conclusions s'imposent : d'une part TT et Tc restent tout à fait comparables excepté peut être dans la région de l'écoulement très proche de la paroi et d'autre part, contrairement au cas des flammes étudiées précédemment ([3], [5], [6], [7]), l'échelle intégrale de temps varie fortement à la traversée de la zone réactive. Ce dernier point, important pour la modélisation, est confirmé par l'étude de l'évolution de TT en fonction du taux d'injection, comme le montre la figure 4.

Dans le cas général d'un écoulement cisaillé, la modélisation du taux de production chimique w par l'équation (2) nécessite donc la résolution d'une équation de bilan pour T. L'étude d'une telle équation est actuellement en cours [12]. Note remise le 26 janvier 1989, acceptée le 2 février 1989.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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[12] K. N. C. BRAY, M. CHAMPION et P. A. LIBBY, Comb. Sci. and Tech, (à paraître).

Laboratoire d'Énergétique et de Détonique, E.N.S.M.A., 86034 Poitiers Cedex.


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Synthèse organique/Organic Synthesis

Activation du carbone anomère des sucres par le groupe carbonate et application en synthèse osidique

Marc BOURSIER et Gérard DESCOTES

Résumé — La synthèse de carbonates anomères et leur utilisation en synthèse osidique sont décrites et comparées avec des méthodologies voisines.

Activation of the anomeric carbon of sugars by the carbonate group and applications

in osidic synthesis

Abstract — The synthesis of anomeric carbonates is described and their use in osidic synthesis is compared with previously described methodologies.

L'emploi des carbonates en chimie des sucres est principalement signalé en tant que groupe protecteur ([1], [5]) sous forme de carbonate linéaire ou cyclique et comme groupe participant pour des réactions de glycosylation si cet enchaînement est localisé sur la position 2 [6]. Par contre, l'utilisation de ce groupe en position anomère comme groupe activant pour des synthèses osidiques ne semble pas avoir été signalé alors que des groupements de structure voisine tels que le groupe imidate ([7], [9]), tosylate [10] et dithiocarbonate [11] sont largement utilisés pour des donneurs glucidiques.

La réaction du tétra-O-benzyl-2,3,4,6-D-glucopyrannose commercial 1 avec le chloroformiate d'éthyle ou le cyanoformiate d'éthyle permet de préparer le composé recherché 2 en milieu alcalin (schéma et tableau I).

Les rendements obtenus mais non optimisés sont voisins de 50 % avec un fort pourcentage de carbonate P (a/P = 12/88). L'emploi d'une autre base comme la pyridine permet d'inverser la stéréosélectivité (a/p = 76/24).

Le mélange de carbonates anomères formé 2 est stable en milieu alcalin (NaHC03, K2C03, NaOH N) et acide (HC1 N, TsOH en excès) à température ordinaire. Par contre, par chauffage à reflux dans le dichlorométhane en présence d'acide paratoluène sulfonique (TsOH), le carbonate 2 se décarboxyle en 4 h pour former avec 75 % de rendement, l'éthyl tétra-O-benzyl-2,3,4,6 glucopyrannoside 3b (R = Et, a/p: 2/1). Les méthodes de glycosylation intermoléculaires avec 2 comme donneur peuvent donc entrer en compétition avec ce processus de décarboxylation.

TABLEAU I

EtO-C-X

O | Base |/| Réactif | Durée (h) Rdt (%) 2 (a/p)

X=CN KOH : 0,5 3,5 47 (a) (12/88)

X=C1 KOH : 0,5 5 56 (°) (12/88)

X=C1 Pyridine : 2,2 4 79 (76/24)

X = C1 KOH : 0,5 4 76 (18/82)

(a) Après recristallisation. Solvant : dichlorométhane.

Note présentée par Marc JULIA. 0249-6305/89/03080919 $ 2.00 © Académie des Sciences


920 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 919-921,1989

Le tableau II résume les principaux essais effectués pour de telles glycosylations en utilisant le carbonate 2 comme donneur tout en les comparant avec ceux de la méthode de Fischer testée dans les mêmes conditions en utilisant directement 1.

L'examen du tableau II permet de préciser que la réaction de glycosylation est plus efficace que la décarboxylation dans la plupart des cas présentés. En outre, les rendements et stéréosélectivités observés sont plus élevés que par la méthode de Fischer. L'utilisation d'un alcool employé comme solvant augmente sensiblement les rendements et les stéréosélectivités en faveur du glycoside. Par contre, l'emploi d'un acide de Lewis tel que BF3 diminue le rendement sans modifier particulièrement la stéréosélectivité de la réaction.

TABLEAU II

Catalyseur Rdt (%)

Donneur ROH Solvant (1 éq.) T (°C)/durée (h) (b) a/p

1 MeOH MeOH TsOH 65/4 3 a 73 40/60

2 MeOH MeOH TsOH 65/4 3 a 87 82/18

1 MeOH MeOH TsOH 65/18 3 a 63 56/44

2 MeOH MeOH TsOH 65/18 3 a 82 84/16

2 MeOH(°) Toluène TsOH 65/4 3 a 70 61/39

1 i-PrOH i-PrOH TsOH 82/6 3 c 90 47/53

2 i-PrOH i-PrOH TsOH 82/6 3 c 81 75/25

2 i-PrOHO CH2C12 TsOH 40/6 3 c 81 57/43

2 i-PrOHC) CH2C12 BF3 40/6 3 c 53 44/56

2 i-PrOH CH2C12 TsOH 25/5 j 3 c 65 64/36

2 BnOH BnOH TsOH 85/5 3 d 55 77/23

(a) 5,2 équivalents.

(b) Pourcentages estimés par RMN.


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Les résultats obtenus sont ainsi voisins de ceux précédemment décrits avec les imidates par R. R. Schmidt et coll. [8] mais ils ne permettent pas d'envisager l'utilisation des carbonates pour des synthèses osidiques complexes. En effet, un essai de glycosylation avec 2 comme donneur et le di-O-isopropylidène-1,2,5,6 glucofurannose comme accepteur de faible nucléophilie, selon les conditions précédentes, ne conduit qu'à la formation de 3 b (R = Et), résultant de la décarboxylation compétitive de 2.

En conclusion, la recherche d'autres substituants activants du groupe carbonate au niveau du carbone anomère devrait permettre une extension de cette méthode d'ocglycosylation qui demeure, pour l'instant, limitée aux accepteurs de forte nucléophilie et utilisés en large excès. Note remise le 16 janvier 1989, acceptée le 2 février 1989.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

[I] L. HOUGH, J. E. PRIDDLE et R. S. THEOABLAD, Adv. Carb. Chem., 15, 1960, p. 91.

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Chimie organique II, Université Lyon-I, E.S.C.I.L., 43, boulevard du U-Novembre-l918, 69622 Villeurbanne.



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Cristallochimie/Crystal Chemistry

Préparation chimique et données cristallographiques sur un nouveau diphosphate de l'éthylène diamine

Slaheddine KAMOUN, Amor JOUINI et Abdelaziz DAOUD

Résumé — La préparation chimique et les caractéristiques cristallographiques d'un nouveau diphosphate de l'éthylène diamine [NH3(CH2)2NH3]3[HP207]22H20 sont signalées. Le tris(éthylène diammonium)bis(monohydrogénodiphosphate)dihydrate cristallise dans le système monoclinique P2!/n avec les paramètres suivants: a=ll,860(2)Â, è = 6,463(l)Â, c=14,997(3)Â, p=112,36(l)°, Z=2D„=l,716M.gm- 3, 0^=1,788 M.gm- 3.

Chemical preparation and crystallographic features of a new diphosphate of

ethylene diammonium

Abstract — Chemical preparation and main crystallographic features are given for a new diphosphate. The tris(ethylene diammonium)bis(monohydrogendiphosphate) dihydrate sait is monoclinic P2/n with unit cell dimensions: a = 11.860(2)A, 6 = 6.463(1)Â, c=14.997(3)À, p = 112.36(l)°, Z = 2 D„= 1.716M x gm- 3, D^ 1.788 M x gm- 3.

INTRODUCTION. — L'étude de [NH3(CH2)2NH3]3fHP207]2 2H20 s'inscrit dans le cadre d'une étude systématique de l'interaction de l'acide diphosphorique [H4P207] avec des molécules organiques porteuses de doublets libres. L'éthylène diamine se prête bien à cette étude. Peu de travaux, sont signalés dans la littérature, on ne peut guère citer pour les amines aliphatiques que [C(NH3)3]3HP207 [1] et [C(NH3)3]4P207H20 [2].

Dans le présent travail, nous décrivons la préparation chimique du tris(éthylène diammonium) bis(monohydrogénodiphosphate) dihydrate, conduisant à un produit cristallisé, et nous présentons ses caractéristiques cristallographiques.

PRÉPARATION CHIMIQUE. — Le tris(éthylène diammonium)bis(monohydrogénodiphosphate) dihydrate est obtenu à l'aide de la méthode de Boullé [3]. L'introduction progressive d'une solution de dichloro éthylène diammonium et d'acide chlorhydrique en quantité stoechiométrique, dans une suspension de Ag4P207 dans l'eau, provoque la précipitation du chlorure d'argent et la libération des ions monohydrogénodiphosphate [HP2073 ~] dans la solution suivant la réaction de métathèse :

Le pH final de la solution est voisin de 5.

Après filtration, la solution limpide obtenue est abandonnée quelques jours à la température ambiante et donne naissance à des monocristaux incolores, de formes prismatiques et de taille suffisante pour une étude structurale. Notons que l'ajout d'alcool éthylique (vol./vol.) favorise la cinétique de croissance des cristaux. L'analyse chimique du phosphore contenu dans ce sel a été réalisée par absorptiométrie à la longueur d'onde de 430 nm; celle des protons de l'éthylène diammonium et du monohydrogénodiphosphate par protométrie volumétrique [4]. L'analyse thermogravimétrique effectuée sur ce sel montre qu'il cristallise avec deux molécules d'eau. Les monocristaux du tris(éthylène diammonium)bis(monohydrogénodiphosphate)dihydrate sont stables à l'air dans les conditions ambiantes.

Note présentée par Erwin-Félix BERTAUT. 0249-6305/89/03080923 $ 2.00 © Académie des Sciences


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TABLEAU

Diagramme indexé de [NH3(CH2)2NH3]3[HP207]2 2H20. Les mesures ont été effectuées à la longueur d'onde du cobalt KLa^ à l'aide d'un diffractomètre automatique à deux cercles « STOE/CSS » avec une largeur de pas de 0,04° en 20 et un temps de comptage de 30 s. sur chaque pas. Les intensités reportées dans ce tableau sont les hauteurs relatives des pics au dessus du fond continu. L'affinement par moindres carrés des données angulaires de ce diffractogramme a conduit aux paramètres de maille donnés dans ce mémoire.

Indexed powder diagram for [NH3(CH2)2NH3\3[HP201]22H20.. Data have been recorded with a two circle diffractometer "STOE/CSS" using cobalt Ku^ radiation, with a step width 0.04° (28) and scan time of 30 sec. on every step. Intensifies reported in this table are relative peak heights above the background. Unit cell dimensions reported in this work have been refined by a least squares method using the angular data of this diffractogram.

h k l dobs dcal I h k l dobs dcal I

1 0 1 7,35 7,35 19 222 2,776 0 0 2 6,94 6,93 65 3 0 5 2,776

0 1 1 5,86 5,86 5 2 2 3 2,619 2,619 9

T 1 1 5,55 5,55 45 0 15 2,549 2,549 8

2 0 2 5,42 5,42 70 3 2 2 2,489 2,489 36 T 0 3 4,99 4,99 22 2 2 2 2,427 2,427 15 111 4,85 4,85 28 224| 2,410)

0 1 2 4,73 4,73 3 3 2 3 2,409

2 1 1 4,37 4,37 6 0 2 4 2,363 2,364 16

2 10 4,18 4,18 17 4 11 2,343 2,343 7

2 1 2 4,15 4,15 10 4 15 1 2,313

1 1 2 3,982 3,982 44 0 0 6 2,311 2,312 8 T 1 3 3,952 3,952 20 115 2,311

0 1 3 3,761 3,760 91 3 13 2,291 2,291 17

211 3,718 3,717 32 40 2) 2,272

9 979 11

2 1 3 3,677 3 2 4 S 2,272

2 0 2 3,675 J 5 12 2,221 2,222 13

3 0 3 3,611 3,614 73 4 2 1 2,163 2,163 6 3 1 2 3,343 3,342 44 0 3 1 2,129 )

3 0 1 3,244 3,244 6 3 2 2 2,125

301 3,237 5 10) 2,077 |

020) 3' 23? 3,232 30 4 24 2'° 77 2,076 18

3 1 0 3,183 3,182 100 2 0 8 1,870

2 14 3,157 6 14 1,869

3 1 3 3,154 5 2 4 1,869 1,868 6 12 0 3,099 T 3 4 1,867

T 2 1 3,097 5 0 7 1,865

0 1 4 3,055 3,055 3 5 12] 1,818

12M 2958 2'958[ 54 515 1, 816

12 2) 2,951 520 1,816 1,815 3

0 2 2 2,929 2,929 17 3 15 1,815

2 2 1 2,837 2,837 9 2 16 1,813

Étude cristallographique. — Les spectres d'oscillations et de Weissemberg obtenus avec le rayonnement Cu(Kal a2) montrent une maille monoclinique. Les extinctions observées sur les cristaux [NH3 (CH2)2NH3]3 [HP207]2 2H20 :

OkO n'existe qu'avec k=2n hOl n'existe qu'avec h + l=2n

conduisent au groupe spatial P21/n.

Les paramètres de maille affinés par une méthode de moindres carrés à partir des données angulaires de 46 réflexions, relevées sur le diagramme de diffraction de ce


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composé et rapportées dans le tableau, sont :

a = 11,860(2) Â t= 6,463(1) Â c = 14,997(3) Â p = 112,36(1)°.

La mesure de la densité de ce sel a été effectuée à la température ambiante par pycnométrie, le liquide étant le bromobenzène.

La valeur moyenne mesurée Dm=1,716Mg.rn- 3 est en bon accord avec celle calculée Dx=l,788Mg.m- 3. La maille élémentaire renferme deux unités formulaires de [NH3(CH2)2NH3]3[HP207]2 2H20.

Le tableau fournit le diagramme de diffraction indexé du tris (éthylène diammonium)- bis(monohydrogénodiphosphate)dihydrate [échantillon tournant. Montage en réflexion]. Note remise le 16 janvier 1989, acceptée le 24 janvier 1989.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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S. K. et A. J. : Laboratoire de l'État solide,

Département de Chimie, Faculté des Sciences, 5000, Monastir, Tunisie;

A. D. : Laboratoire de l'État solide, École nationale d'Ingénieurs de Sfax, 3038, Sfax, Tunisie.



C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 927-933, 1989 927

Minéralogie/Mineralogy

Argent et thallium dans les sulfosels de la série de la sartorite (Gisement de Lengenbach, vallée de Binn, Suisse)

Assia LAROUSSI, Yves MOËLO, Daniel OHNENSTETTER et Daria GINDEROW

Résumé — L'analyse à la microsonde électronique de minéraux de la série de la sartorite (gisement de Lengenbach, Suisse) a permis de préciser la distribution de Tl et Ag dans les différentes espèces rencontrées. Liveingite et baumhauerite contiennent au plus l% Ag et Tl, et vérifient les formules idéales Pb20As24S56 et Pb12As16S36. La rathite contient de 3,5 à 4%Ag, et 0,9 à 2,4%T1, avec comme formule idéale [Pb6AgAs] As8S20. Un dérivé structural argentifère de la baumhauerite, en intercroissance avec cette espèce, est proche de [Pb10AgAs] As16S36. Un composé nouveau, dénommé « minéral A », contient de 0,6 à 4,7 %T1, et pourrait être l'équivalent plombo-arsénifère de la chabournéite, avec pour formule Pb5_2a.TLAs8+:<.S17 (0,06 <x< 0,5).

Silver and thallium in sulfosalts of the sartorite series (Lengenbach, Binn valley,

Switzerland)

Abstract — Electron microprobe analyses of minerais of the sartorite series (Lengenbach deposit, Switzerland) allowed specifying the Tl and Ag distribution between them. Liveingite and baumhauerite contain up to V/0Ag and Tl. Their compositions agree with ideal formulae Pb20As2AS56 and Pb12As16S36. Rathite shows 3.5 to 4%Ag, and 0.9 to 2.4% 77, having the ideal formula [Pb6AgAs]AssS20. Baumhauerite forms intergrowths with an Ag-rich derivative, close to [PblaAgAs]Asl6S36. A new compound, "mineraiA", containing 0.6 to 4.7%Tl, might be derived from chabourneite through Pb and As substitution; its formula is Pfc5-2;eTZjr4ss+JS17 (0.06<x<0.5).

Abridged English Version — Lead arsenic sulfosalts belonging to the sartorite series, and occurring in the Lengenbach quarry[1], correspond to an homologous series [2], with the general formula, taking in account minor Tl and Ag contents ([3], [4], [5]) : P^N-S-ZXC1"!, Ag)+x (As, Sb)8+xS4N+4.

Numerous samples from Lengenbach hâve been studied in reflected light and using scanning electron microscope and automated Camebax probe. SEM photographs show complex microtextures (Fig. 1), similar to those described by Giusca [6], of composite crystals. 280 microprobe analyses, performed on 150 distinct points, gave good valency balance, unliked published formulae derived from crystal structures [7] or microprobe studies([4], [8]).

Table gives selected probe analyses results of the five minerai species studied: rathite, liveingite, baumhauerite, "Ag-rich baumhauerite", and a new compound, called "minerai A". Figure 2 shows the projection of the analyses onto the Pb2S2-(Tl, Ag)2S-As2S3 plane.

Rathite. — Several compounds have been called "rathite" ([7] to [10]), but it is better to consider rathite as a Tl- and Ag-rich derivative of dufrenoysite. The rathite studied shows 3.5 to 4%Ag, 0.85 to 2.4% Tl, and 0.15 to 0.75% Sb; the empirical formula (No. 75/1) is pb5.68(Ago.94Tlo.i8)i.i2(As9.65Sbo,07)9.62S20. very close to the ideal formula [Pb6AgAs]As8S20.

Liveingite shows 0.2 to 0.6% Ag, and 0.4 to 1.3% Tl. Its composition agrees with the idéal formula Pb20As24S56.

Baumhauerite contains up to 0.8% Ag, and 0.9% Tl, without corrélation; Sb is below 0.5%. The analyses confirm ideal formula Pb12As16S36. "Ag-rich baumhauerite" is a specifie compound, in lamellar intergrowth with baumhauerite. Ag content varies from 1.4

Note présentée par Claude GUILLEMIN. 0249-6305/89/03080927 $ 2.00 © Académie des Sciences


928 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 927-933, 1989

to 2.1%, Tl content from 0 to 0.8%. Analysis No. 56/3 corresponds to: pb10.54(Ago.65T10.10)0.75Asi6.68S36, close to the idéal formula [Pb10AgAs] As16S36.

Baumhauerite studied by Engel and Nowacki[4], containing 1.4% Ag, with a proposed structural formula of Pblx 6Ag0 6As15_7S36, appears to be "Ag-rich baumhauerite".

"Minerai A" is a new compound, which contains Tl (0.6 to 4.7%), some Sb (0.8%), but no Ag. Solid solution indicated by the variation of Tl content is compatible with the extent of chabournéite solid solution ([2], [11]). Analyses No. 84/1 and 35/1 gave respectively : Pb4.84Tl0 08(As8 03Sb0 14)8 17S17 and Pb4.67Tl0 26(As821Sb015)8 36S17, in accordance with the idéal formula of solid solution Pb5-2xTl;cAs8+;cS17 (0.06 <x< 0.50) extrapolated from [2].

Preliminary X-ray data on a crystal fragment No. 84/1 gave the parameters of sartorite [12], which indicates an intergrowth of this minerai species with "minerai A".

CONCLUSION. — The distribution of Tl and Ag between associated sulfosalts of the sartorite séries indicates distinct crystallochemical rôles of these two elements. On the basis of structure determination of rathite I [8] and Ag-rich baumhauerite [4], the presence of Ag within rathite and "Ag-rich baumhauerite" is due to the existence of a specifie structural site, as explained by the équation:

The presence of Tl in "minerai A", devoid of Ag, and the structural relationship between

sartorite and chabourneite [2] could explain the origin of epitaxial intergrowths between

"minerai A" and sartorite, and (pseudo-)superstructures observed in some sartorite crystals[12].

I. INTRODUCTION. — Les sulfosels de plomb et arsenic de la série de la sartorite ont tous été définis dans le gisement de Lengenbach (Valais, Suisse [1]). Ces espèces forment une série d'homologues [2] répondant à la formule générale :

Pb2+4N_8_2x(Tl, Ag)x (As, Sb)8+JCS4N+4,

avec N = 3 (sartorite), 4 (dufrenoysite et rathite), ou des valeurs intermédiaires (3,5 pour la baumhauerite, et 3,67 pour la liveingite).

La présence occasionnelle de thallium ou d'argent, en teneur pouvant atteindre plusieurs pour-cent, a été notée à différentes reprises ([3], [4], [5]), sans cependant faire l'objet d'une recherche systématique, compte tenu des difficultés d'analyse à la microsonde électronique au début des années soixantes. L'emploi d'une microsoride automatisée Camebax a permis l'analyse en série d'une cinquantaine d'échantillons (Service de Conservation des Espèces Minérales du B.R.G.M. et G.I.S. C.N.R.S.-B.R.G.M., Orléans). L'incorporation de l'argent et du thallium dans la baumhauerite, la liveingite et la rathite a pu être précisée, et deux nouvelles phases ont été mises en évidence, dénommées provisoirement "minéral A" et "baumhauerite argentifère".

II. MODE D'ÉTUDE. — Après examen à la loupe binoculaire, des fragments millimétriques ont été prélevés et montés en section polie par lots de 16 grains. L'examen au microscope métallographique et au microscope électronique à balayage montre que ces grains correspondent le plus souvent à l'association de 2, 3, voire 4 sulfosels distincts. On retrouve les textures complexes décrites par Giusca [6], correspondant à différentes relations topotactiques entre espèces de la série. La figure 1 est un exemple de texture


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lamellaire associant baumhauerite et « baumhauerite argentifère », texture qui semble résulter de la démixtion d'une solution solide préexistante.

Pour optimiser les analyses à la microsonde électronique, et réduire les erreurs dues aux effets de matrice, la lorandite, TlAsS2, a été prise comme étalon pour les éléments Tl et As, et un grain de baumhauerite pure, dépourvue d'élément mineur (Tl, As ou Sb) a été utilisé comme étalon interne, en lui assignant la formule idéale Pb6As8S18. L'antimoine a également été dosé dans une partie des échantillons. Les 280 analyses ainsi obtenues sur environ 150 plages différentes montrent toujours un bon total des teneurs, ainsi qu'un bon équilibre des valences, contrairement à certaines formules établies par l'étude des structures cristallines [7], parfois complétées par des analyses sommaires à la microsonde ([4], [8]).

Le tableau donne une sélection d'analyses des cinq phases communément rencontrées. La sartorite n'a pas été observée, et la dufrenoysite a donné des compositions variables, dues à une intercroissance très fine avec de la liveingite. La figure 2 représente la projection de ces analyses dans le diagramme Pb2S2-As2S3-(Tl, Ag)2S, le plus apte à visualiser la substitution 2 Pb -> 1 As +1 (Tl, Ag) [2].

III. RÉSULTATS. — 1. Rathite. — Plusieurs composés ont reçu la dénomination de rathite ([7] à [10]). En restreignant l'usage de ce terme aux seuls homologues correspondant à N=4, et riches en argent ou thallium, la rathite de cette étude est riche en argent (de 3,5 à 4%), un peu moins en thallium (de 0,85 à 2,4%). La rathite I de Marumo et Nowacki[8] montrait à l'inverse 3,6 %T1, avec une teneur en argent très imprécise (4,7% selon l'analyse structurale?[2]). L'antimoine est également présent, en teneur inférieure au pour-cent. Sur la base de 20 atomes de soufre, on obtient ici comme formule structurale (anal. n° 75/1) : Pb5j68(Ag094.Tl0 lg)x 12(As9j55Sb0i07)9?62S20, proche de la formule idéale [Pb6AgAs] As8S20.

2. Liveingite. — Rencontrée uniquement en association avec la baumhauerite, la liveingite montre une faible teneur en Ag et Tl (Ag de 0,2 à 0,6%; Tl de 0,4 à 1,3%), avec un rapport atomique voisin de 1. Sur la base de 56 at. S, le remplacement maximal du plomb par [As+(Ag, Tl)] conduit à la formule (moyenne anal. n° 49/2 et 58/2): Pb18i44Ag024Tl0j21As2419S56, en accord avec la formule idéale Pb20As24S56 (N = 3,67).

3. Baumhauerite. — Ce sulfosel montre parfois la présence d'argent (jusqu'à 0,8 %) ou de thallium (jusqu'à 0,9 %), sans corrélation, et toujours en faible teneur, inférieure à celle de la liveingite, lorsqu'ils coexistent. La teneur en Sb est inférieure à 0,5%. Sur la base de 36 at. S, la formule d'un échantillon thallifère est (anal. n° 54/1) : Pbllj85Tl0>03(As16j01Sb0il3)16il4S36, très proche de la formule idéale

4. « Baumhauerite argentifère ». — C'est un dérivé structural de la baumhauerite, mais sans solution solide continue (fig. 1). Il devrait donc s'agir d'une espèce à part entière, au même titre que la rathite relativement à la dufrenoysite (fig. 2). La teneur en Ag va de 1,4 à 2,1%, celle en Tl de 0 à 0,8%. Ainsi, comme dans la rathite qui lui est souvent associée, Ag prédomine sur Tl, dans le même rapport atomique, mais avec des teneurs environ deux fois moindres. Sur la base de 36 at. S, sa formule structurale est (anal. n° 56/3) : Pb10,54(Ag0 65T10 10)0 75As16,68S36, composition qui se rapproche de la formule idéale [Pb10AgAs] As16S36.


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TABLEAU

Sélection d'analyses à la microsonde électronique des différents sulfosels de la série de la sartorite rencontrés.

(Ev = erreur relative sur l'équilibre des valences).

Selected probe analyses of different encountered sulfosalts of the sartorite series.

% cationique

N échant.

Espèce (nb. anal.) Pb Tl Ag As Sb S S Ev Pb (Tl, Ag) As

Rathite 8/1(4) 43,9 2,10 3,50 26,3 0,15 23,7 99,7 +2,7 34,9 7,0 58,1

75/1(3) 44,8 1,35 3,90 25,9 0,35 24,4 100,6 -0,4 35,7 7,0 57,3

38/1(2) 45,4 0,90 3,85 25,3 0,75 23,7 100,0 +1,8 36,3 6,7 57,0

Liveingite .... 49/2(1) 50,7 0,50 0,45 24,3 n.d. 23,8 99,8 -1,4 42,6 1,2 56,2

58/2(1) 51,1 0,65 0,25 24,1 n.d. 24,0 100,1 -2,2 43,0 1,0 56,0

Baumhauerite. . 88/1(2) 52,3 - - 24,9 0,15 23,4 100,7 +3,0 43,1 - 56,9

54/1(3) 50,9 0,10 - 24,9 0,30 23,9 100,1 -0,2 42,3 0,1 57,6

89/1(2) 51,0 0,30 - 24,9 0,35 23,4 99,9 +2,2 42,3 0,2 57,5

« Baumhauerite

argentifère». 56/3(4) 46,4 0,45 1,50 26,6 n.d. 24,5 99,5 -0,1 37,7 2,7 59,6

95/3(1) 46,6 0,50 1,45 26,5 n.d. 23,9 100,1 +2,3 37,8 2,7 59,5

11/4(1) 46,0 0,65 1,45 27,0 n.d. 24,2 99,3 +2,0 37,1 2,8 60,1

«Minéral A». 84/1(3) 46,1 0,65 - 27,7 0,80 25,0 100,3 +0,4 37,0 0,6 62,4

35/1(3) 44,3 2,35 - 28,2 0,85 24,9 100,6 +2,0 35,1 2,0 62,9

La baumhauerite étudiée par Engel et Nowacki[4] montre une teneur semblable en Ag (1,4%), avec comme formule structurale Pb11 6Ag06As15>7S36. Il s'agit donc très probablement de cette même « baumhauerite argentifère ».

5. « Minéral A ». — C'est la phase la plus riche en arsenic rencontrée; on la trouve associée aussi bien à la rathite qu'à la baumhauerite ou son dérivé argentifère. Elle est dépourvue d'argent, et montre une teneur variable en thallium (de 0,6 à 4,7%); sa teneur en antimoine est proche du pour-cent. Les analyses s'étalent le long d'une ligne de substitution correspondant à une valeur de N proche de 3,3.

Aucune espèce connue de la série de la sartorite ne correspond à une telle valeur de N. Par contre la distribution de ces analyses s'accorde très fidèlement avec la droite de substitution correspondant à la série de la chabournéite, de formule générale simplifiée Pb2ïTl2 5_x(Sb, As)105_xS17 ([2], [13]). Sur la base de 17 atomes de soufre, les analyses 84/1 et 35/1 du tableau donnent respectivement les formules Pb4,84.Tl0>08(As8i03Sb0>14)8il7S17 et Pb4,67Tl0i26(As8i21Sb0,15)8,36S17, très proches du pôle idéal Pb5As8S17 obtenu en soustrayant Tl et Sb de la formule générale ci-dessus, avec x = 2,5.

Un fragment du cristal correspondant à l'analyse 84/1 du tableau a fait l'objet d'une étude aux rayons X. Ce fragment apparaît orthorhombique, de groupe spatial Pcn2i ou Pcnm, avec comme paramètres élémentaires a=19,7, f> = 7,9 et c=4,2Â, en très bon accord avec les paramètres donnés pour la sartorite [12], ce qui semble indiquer que le cristal automorphe examiné était un cristal composite, associant le « minéral A » à la sartorite.

IV. INTERPRÉTATION CRISTALLOCHIMIQUE. — L'association étroite du « minéral A », thallifère, avec la rathite et la « baumhauerite argentifère », à prédominance de Ag sur Tl, révèle un comportement cristallochimique distinct de ces deux métaux. L'enrichissement en Ag et Tl de la rathite relativement à la « baumhauerite argentifère », avec cependant conservation du rapport Ag/Tl, indique que c'est le motif (ou sous-motif)


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structural de type N=4 qui fixe spécifiquement ces métaux, et non le motif de type N=3. Ce qui confirme les études des structures cristallines de la rathite I [8] et de la baumhauerite (en fait la « baumhauerite argentifère » [4]), qui assignent la fixation de Ag par un site spécifique du motif de type N = 4. L'occupation complète de ce site par Ag conduit pour la rathite à la formule idéale [Pb6AgAs] As8S20, déjà citée, ce qui conduit pour la « baumhauerite argentifère » à la formule [Pb10AgAs] As16S36, égale à la somme [Pb6AgAs]As8S20 + Pb4As8S16. La formule idéale proposée en III. 4 est donc justifiée.

Les données acquises sur la liveingite sont encore trop fragmentaires. L'existence d'une « liveingite argentifère », intermédiaire entre la rathite et la « baumhauerite argentifère », est envisageable d'un point de vue cristallocliimique, mais un tel composé n'a pas été rencontré jusqu'à présent.

Les données relatives au « minéral A » appellent deux remarques :

— Une analyse à la microsonde de sartorite par Nowacki et Bahezre [3] donne une teneur en thallium de 2,6%, et se situe sur la droite de substitution de la chabournéite ; pour 13 atomes métalliques, la formule est : Pb4i42Tl028As830S18 4, soit Pb4j98As8j02S184 sans Tl;

— Makovicky [2] a montré la parenté structurale entre la sartorite et la chabournéite, dans laquelle, en considérant le pôle hypothétique sans Tl ni Sb, alternent un feuillet de type sartorite Pb2As4S8 et un feuillet de composition Pb3As4S9. Les deux feuillets ainsi différenciés ont des épaisseurs très voisines, et de ce fait les mailles élémentaires de ces deux espèces présentent également une grande parenté. Il est donc possible que les caractéristiques cristallographiques de la série de la chabournéite convergent vers celles de la sartorite lorsqu'on se rapproche du pôle purement plombo-arsénifère de cette série, permettant des intercroissances en parallèle conduisant à des cristaux composites.

V. CONCLUSION. — L'étude comparative à la microsonde électronique de différents homologues de la sartorite prouve le rôle spécifique joué, en teneur supérieure au pourcent, par l'argent et le thallium pour la formation de véritables espèces. Ag joue ce rôle pour la rathite, idéalement [Pb6AgAs] As8S20, et la « baumhauerite argentifère », idéalement [Pb10AgAs] As16S36. Tl joue ce rôle pour le « minéral A », qui admet une solution solide prononcée selon la formule supposée : Pb5_2;cTLAs8+:;cS17 (0,06<x<0,5). Le rôle cristallochimique de Tl dans la rathite et la « baumhauerite argentifère » reste à préciser : simple substitution avec Ag, ou insertion dans un site spécifique.

Dans tous les cas, comme le montre la comparaison des volumes des mailles élémentaires de la rathite [8] et de la dufrenoysite [12], le remplacement de 2Pb par lAs + 1 (Ag, Tl) se traduit par une contraction du réseau cristallin, qui devrait permettre de différencier la « baumhauerite argentifère » de la baumhauerite, et peut-être de repérer d'autres composés potentiels, tels que le dérivé argentifère de la liveingite, qui aurait alors pour formule idéale [Pb8AgAs]As12S28.

Le « minéral A » apparaît chimiquement comme un dérivé de la chabournéite, mais probablement proche cristallographiquement de la sartorite, qui en est un homologue. Cette homologie entre la série isomorphe de la chabournéite et la sartorite pourrait expliquer certains aspects soulevés par d'autres auteurs :

— cette homologie pourrait conduire à des intercroissances lamellaires à très petite échelle entre ces deux structures. Ainsi, des lamelles du type chabournéite en faible quantité dans une matrice de sartorite pourraient induire des effets de diffraction analogues à des surstructures [12];


932 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 927-933, 1989

— le « minéral A » pourrait, au moins pro parte, entrer dans la constitution de la « sartorite-oc » de Smith et Solly [14], considérée initialement comme triclinique (symétrie de la chabournéite).

La cristallochimie de la série de la sartorite demande donc à faire l'objet d'un réexamen général, couplant étroitement les approches microscopique, cristallographique, et chimique à la microsonde, si possible sur les échantillons-types ayant servi à la définition des différentes espèces. Note remise le 18 janvier 1989, acceptée le 3 février 1989.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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A. L., Y. M. et D. O. : C.R.S.C.M. (G.I.S. C.N.R.S.-B.R.G.M.),

1 A, rue de la Férollerie, 45071, Orléans Cedex 2;

D. G. : Laboratoire de Minéralogie et de Cristallographie,

Université Pierre-et-Marie-Curie, 4, place Jussieu, 75252 Paris Cedex 05.

EXPLICATIONS DE LA PLANCHE

Fig. 1. — Intercroissance lamellaire de baumhauerite (gris clair) et de « baumhauerite argentifère » (gris

sombre). Microscope électronique à balayage; image en électrons rétro-diffusés. Fig. 1. — Lamellar intergrowth between baumhauerite (light grey) and "Ag-rich baumhauerite" (dark

grey). S.E.M. photo; back-scattered electrons.

Fig. 2. — Projection dans le système Pb2S2-As2S3-(Tl, Ag)2S des analyses du tableau : 1, droite de substitution

2Pb -» As+(T1, Ag) (N constant); 2, enveloppe de l'ensemble des analyses effectuées; 3, analyses du tableau.

Les doubles flèches indiquent les associations observées. Fig. 2. — Projection in the Pb2S2-As2S3-(Tl, Ag)2S plane of the analyses from Table: 1, substitution line

2Pb-* As+(Tl, Ag) (N constant); 2, envelope of whole performed analyses; 3, analyses from Table. Double

arrows indicate observed associations.


PLANCHE I/PLATE I

ASSIA LAROUSSI

C. R., 1989, 1er Semestre (T. 308)

Série II-63



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Géologie marine/Marine Geology

Datation d'une vasière de plate-forme atlantique au

débouché d'un estuaire : la vasière à l'Ouest de la Gironde

(France) est d'âge historique (vr siècle à nos jours)

Patrick LESUEUR, Olivier WEBER, Laurence MARAMBAT, Jean-Pierre TASTET, Jean-Marie JOUANNEAU et Jean-Louis TURON

Résumé — La vasière située à l'Ouest de la Gironde représente la plus vaste zone de sédiments fins de la plate-forme interne de l'Aquitaine. Sa morphologie et sa lithologie sont présentées. Les données radiochronologiques et palynologiques montrent que les vases se déposent depuis moins de 2000 ans B.P., probablement depuis le vie siècle. Ce résultat laisse supposer un taux de sédimentation important et constant estimé à 30 à 40 cm par siècle et montre que la vasière constitue un piège récent et efficace pour les matériaux fins expulsés par l'estuaire.

Age of an Atlantic shelf mud patch supplied by an estuary: the west Gironde

example (France) was deposited in historic times

Abstract— The mud patch located at the western part of the Gironde estuary System represents the bulkiest, fine-grained sediment deposit on the Aquitain inner shelf. Its morphology and lithology are precisely defined. Radiochronological and palynological data show that muds have been deposited since 2,000 years B.P., probably during the sixth century. This resuit infers a constant and considerable sedimentation rate ranging from 30 to 40 cm per century.

Abridged English Version — Fine-grained sédimentation on mid-latitude shelves can usually form mid-shelf mud belts ([1] to [3]). Another kind of mud deposit is smaller mud-patches which can be found in the coastal part of the shelf close to the estuary inlet [4]. One of them is the west Gironde mud-patch example [5] for which the beginning of deposition was previously estimated at 10,000 or 7,000 years B.P. ([6], [7]). With a view to determining the magnitude of the Holocene sedimentary fluxes, we hâve considered a more detailed stratigraphy of this sedimentary body.

RESULTS. — The west Gironde mud-patch is a lenticular sedimentary body 420 km 2 in area, oriented NE-SW and located at a depth of between 30 and 75 m. Its thickness does not exceed 3.7 m; it fills a light depression with in a substrate compound of three units : 1. shelly pebbles and cobbles with coarse sand; 2. medium sand with shelly debris; 3. fine sand. Thèse different units are sometimes superimposed to form sedimentary sequences of shelf sand patches ([9] to [11]). In the mud-patch itself the sediments are silty-clayey, organized in several centimetric to decimetric fining-up sequences [12], more silty at the base of the mud-patch (Fig. 2). Radiochronological ages (Fig. 1, Table) obtained from shelly material ofthe substrate vary between 4,950 + 750 and, 1,940+150 years B.P. They are always younger than previous studies implied. In the lower part of the mud deposit, the shells observed in a living-position, are very young in age and vary from 620 + 70 to 500 + 70 years B.P. One may therefore assume that more than the half of the fine-grained sediments were deposited in the last thousand years.

The abundance of pollen (10 to 20%) from ruderal plants and cerealia (Fig. 2) and the présence of walnut-tree (2 to 3%) mark significant human activity ([13], [14]) which can be attributed to the Roman colonization dating back to 2,000 years B.P. The oak-tree pollen frequency (less than 30%) shows that the muddy sedimentation starts from 1,500 years

Note présentée par Georges MILLOT. 0249-6305/89/03080935 $ 2.00 © Académie des Sciences


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B.P. [15]. Then, the significant increase in pine rate (Pinus maritima/Pinus sylvestris) in the upper part of the mud deposit indicates the replanting of the Landes during the 19th century [16].

INTERPRETATION. — 1. The sandy-pebbled substrate of the west Gironde mud-patch attains a maximum age of 2,000 years B.P. The upperlying clayey deposit started after Roman colonization, probably between the 6th and the 14th centuries and still continues today (H, [12]).

2. Several assumptions can explain this chronology: (a) arriving at a mature stage after its filling during the Holocene, the estuary discharged larger amounts of solid material into the sea; (b) the cyclical migration at the estuary inlet modified the direction and dispersion of estuarine plume; (c) the influence of man's activities on soil erosion connected the wide agricultural clearing during the médiéval epoch. Probably, thèse three events occurred simultaneously.

3. Contrary to previous studies ([6], [9]), the sedimentary body of the mud-patch cannot be associated with the Holocene transgression. Its settlement takes place from 2,000 years B.P. and the sedimentation rate is on the order of 30 to 40 cm. century- 1. These results lead to considering that the west Gironde mud-patch entrapped about 50% of the suspended matter delivered by the estuary. Thus, it is an efficient deposition site for the fine-grained sédiments of Gironde estuary.

I. INTRODUCTION. — La sédimentation fine des plates-formes marines des moyennes latitudes se développe généralement dans la partie médiane du plateau continental ([1], [2]). Ce type de sédimentation se retrouve dans la partie nord du Golfe de Gascogne pour constituer la « Grande Vasière » qui s'étend de part et d'autre des fonds de 100 m [3]. Par ailleurs, d'autres vasières en position plus interne sont liées à la proximité d'une source continentale [4]. La vasière, située à 30 km au large du débouché de la Gironde dans le Golfe de Gascogne, appartient à ce type. Si l'alimentation actuelle de cette vasière à partir de l'estuaire a pu être démontrée [5], le début de son fonctionnement était estimé jusque là soit à 10000 ans B.P, soit à 7000 ans B.P. ([6], [7]).

Dans le cadre du programme ECOMARGE, dont un des objectifs vise à déterminer les variations des flux sédimentaires apportés à l'océan durant l'Holocène, le projet DEPOVASE envisage l'étude détaillée du corps vaseux et l'établissement d'une stratigraphie précise à partir de données lithologiques, faciologiques, palynologiques et des datations absolues (14C) [8].

II. DONNÉES MORPHOSÉDIMENTAIRES. — Centrée sur 45°42' de latitude nord et 1°38' de longitude ouest, la vasière s'étale sur près de 420 km 2. Elle constitue un corps sédimentaire silto-argileux orienté NE-SW sur environ 30 km et localisé entre 30 et 75 m de profondeur

(fig. 1).

Cette lentille vaseuse dont l'épaisseur maximale avoisine 3,70 m, remplit une légère dépression marquée d'un substrat de sables et graviers. Trois faciès constituent ce substrat, ils peuvent être reconnus à l'entour de la vasière : 1. des graviers et galets coquilhers parfois envasés et associés à des sables grossiers; 2. des sables moyens roux à débris coquilliers; 3. des sables fins gris micacés. Ces trois termes peuvent être superposés pour former des placages sableux que l'on rencontre au Sud de la vasière et, plus généralement, sur le plateau continental du nord de l'Aquitaine ([9] à [11]).


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Les faciès des sédiments de la vasière elle-même sont silto-argileux; ils s'organisent en séquences granoclassées décimétriques voire centimétriques [12] plus silteuses dans les deux premiers mètres du corps sédimentaire que dans là partie supérieure où l'argile augmente fortement (fig. 2).

III. DONNÉES RADIOCHRONOLOGIQUES. — Elles ont été obtenues par la mesure du 14C sur des coquilles prélevées dans différents faciès de 7 carottes [8] (fig. 1, tableau).

Les éléments coquilliers des sédiments non cohésifs constituant le substrat de la vasière ont des âges compris entre 4950+750(KC87P3) et 1940 + 150 ans B.P. (KC8716). Les plus anciens correspondent aux faciès à graviers et galets, les sables moyens ont un âge de 3 090 +110 ans B. P. (KC 8708) et enfin les sables fins gris sont datés de 1940 +150 ans B.P. (KC8716) sur un groupe de Turitella communis observé en position de vie. Il apparaît donc que les âges de substrat sont dans tous les cas beaucoup plus jeunes que ne le laissaient supposer les données antérieures.

Dans le corps vaseux sensu stricto, les datations de coquilles de lamellibranches ou de gastéropodes dont les espèces analysées sont associées exclusivement à des faciès vaseux, donnent des âges très récents de 620 + 70 et 500 + 70 ans B.P. (KC8712(1); KC8708)

Fig. 1. — Aire de répartition de la vasière et des faciès sédimentaires périphériques.

Localisation des prélèvements et isopaques de la couverture vaseuse.

Fig. 1. — Shelf mud patch area and its proximal sedimentary facies.

Location of samples and isopachs mud deposit.


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dans des niveaux situés à la base du corps vaseux sous les niveaux les plus silteux. Ceci implique que plus de la moitié de la sédimentation vaseuse s'est effectuée au cours du dernier millénaire.

III. LES DONNÉES PALYNOLOGIQUES. — L'étude palynologique a été effectuée sur les vases de trois carottes (KC8716, KC87P3, KC8014), prélevées respectivement à 65, 50 et 42 m de profondeur (fig. 1), et associée pour deux d'entre elles à des datations au 14C (tableau).

Dans les sédiments de la vasière, une quarantaine de taxons ont été déterminés; seuls ont été retenus ceux dont la présence ou la variation a une valeur chronologique (fig. 2). Les fréquences relatives sont calculées par rapport au total (200 à 400 palynomorphes) des pollens d'herbes, d'arbres et des spores de ptéridophytes. L'abondance (10 à 20 %) de pollen de plantes de recolonisation de défrichement et de céréales, la présence significative du noyer (2-3 %) traduisent une activité humaine importante (déboisement, mise en culture...) ([13], [14]). Le dépôt de ces vases remonte donc au plus tôt à la colonisation romaine (2000 ans B.P.). Mais comme la fréquence du chêne (s. 1.) baisse au-dessous de 30 %, on pourrait envisager de ramener le commencement de ces dépôts à 1 500 B.P., âge obtenu pour ce même phénomène dans une baie du littoral aquitain [15]. Enfin, l'augmentation significative du rapport Pin maritime/Pin sylvestre vers le quart de l'épaisseur des vases permet d'y reconnaître le reboisement des Landes au milieu du XLXE siècle (100 ans B.P., fig. 2) [16].

IV. CONCLUSIONS. — 1. Le substratum sablo-graveleux de la vasière située à l'Ouest de la Gironde apparaît âgé au maximum de 2000 ans B.P. Au-dessus, la vasière commence à se développer à des périodes variables selon les sites, mais toujours postérieurement à la

Fig. 2. — Résultats lithologiques, radiochronologiques et palynologiques (données de KC 87P3)

reportés sur une coupe synthétique de la séquence sédimentaire de la vasière et de son substratum.

Fig. 2. — Lithological, radiochronological and palynological results (data from KC 87P3)

ofthe synthetic sedimentary sequence of substrate and shelf mud patch.


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TABLEAU

Résultats radiochronologiques récents obtenus dans la vasière et dans son substratum. Les dates marquées par des astériques (*) ont été reportées sur la coupe synthétique de la figure 2 en fonction de la lithostratigraphie et donc à un niveau qui ne correspond forcément pas à celui de leur prélèvement.

Récent radiochronological results from substrate and shelf mud patch.

Faciès Matériel daté Age B.P. Identification Carottes profondeur Niveau en cm

ans en m dans la carotte

Vase Echinoderme Moderne LY 4443 KC 8721 77 m 15 cm

Vase Lamellibranche 500±7o Gif 7800 KC8708 42 m 185 cm

Gastéropode

'

Vase Lamellibranche 62o±70* Gif 7798 KC8712(1) 50 m 175 cm

Gastéropode

Sablefin Turitella, chione 1940±150* LY 4444 KC8716 65 m 290 cm

Sable moyen Meretrix 3090 + 110* LY 4445 KC8708 42 m 244 cm

Gravier Lamellibranche 3920 + 70 Gif 7801 KC8705 33 m 205 cm

Gravier Débris coquilliers 4360 + 70 Gif 7799 KC8712(2) 50 m 200 cm

Gravier Glycymerisg. 4360 + 110 LY 4441 KC87P3 50 m 305 cm

Gravier Glycymerisg. 4950 + 750 LY 4442 KC 87 P3 50 m 305 cm

(*) The ages have been replaced on the synthetic sedimentary sequence on figure 2 according to the lithostratigraphy and then do not correspond necessarily with the sample depth in core.

colonisation romaine, probablement après 1 500 ans B.P. A 40 cm au-dessus de la base des vases, la datation radiochronologique obtenue dans le sondage KC 8712(1), montre que la sédimentation fine aurait commencé un peu avant 620 ans B.P. Au total, dans notre chronologie historique, le dépôt de la vasière ouest de la Gironde aurait commencé entre l'an 500 et l'an 1 300 après J.C.; il se poursuit actuellement ([7], [12]).

2. Plusieurs hypothèses peuvent être invoquées pour expliquer ce phénomène : (a) l'arrivée à maturité de l'estuaire qui, après son comblement durant l'Holocène, expulse en mer une plus grande partie de sa charge solide; (b) la migration cyclique des passes de la Gironde [17] modifiant l'orientation et la dispersion du panache turbide; (c) enfin l'action anthropique liée aux grands défrichements de l'époque médiévale concourant à une forte accentuation de l'érosion des sols déboisés du bassin versant. Ces trois explications peuvent avoir joué de façon concomitante.

3. Le corps sédimentaire de la vasière n'est donc pas hé, contrairement aux hypothèses antérieures ([6], [9]), à la transgression holocène. Sa mise en place est postérieure à 2000 ans B.P. et le taux de sédimentation y est de l'ordre de 30 à 40 cm par siècle. Ces résultats laissent penser que la vasière piège environ 50 % des suspensions expulsées par la Gironde; elle constitue donc une trappe naturelle très efficace pour les matériaux fins et estuariens.

Note remise le 23 janvier 1989, acceptée le 3 février 1989.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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P. L., O. W., J.-P. T., J.-M. J., J.-L. T. : Laboratoire de Géologie et Océanographie, U.A.-C.N.R.S. n" 197,

avenue des Facultés, 33405 Talence Cedex; L. M. : Laboratoire de Préhistoire, Institut du Quaternaire, U.A.-C.N.R.S. n° 133,

avenue des Facultés, 33405 Talence Cedex.


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Géologie/Geology

Fluctuations des taux d'accumulation des sédiments de l'Atlantique Sud au cours des 120 derniers millions d'années

Michel STEINBERG

Résumé — L'examen des variations du taux d'accumulation moyen des sédiments déposés depuis 120 M.a. dans l'Océan Atlantique Sud montre l'alternance de périodes à fort et à faible taux d'accumulation. Certaines discontinuités semblent liées à des phénomènes géodynamiques importants comme l'établissement des communications entre l'Atlantique Sud et l'Atlantique Nord. Pour les derniers 60 M.a., d'autres discontinuités coïncident avec celles mises en évidence dans d'autres océans; leurs causes seraient alors globales.

Fluctuations of the accumulation rate of the sediments deposited in the South

Atlantic Ocean during the last 120 M.a

Abstract — Estimates of average accumulation rates of sediments were computedfrom data on cores recovered by the Deep Sea Drilling Program in the South Atlantic Ocean for the past 120 M.a. Periods of high accumulation rates are separated by low accumulation rate periods. Some fluctuations seem to be related to important geodynamic events such as the establishment of deep water connections between the North and the South Atlantic Ocean. For the past 60 M.a. some observed fluctuations may be correlated to analogous events occwing in other oceans and thus could have a global cause.

Abridged English Version - Legs 3, 4, 36, 39, 40, 41, 71, 73, 74 and 75 of the Deep Sea Drilling Program were devoted partially or completely to the study of the South Atlantic Océan. Several general studies ([1] to [10]) concerning the sedimentology, the mineralogy or the chemical composition of sediments in this area ([6] to [9]) have been published. However, with several notable exceptions ([1], [11] to [13]), most remain qualitative, mainly because only relative variations of the diverse components and not accumulation rates were considered.

We have selected approximately 1 500 samples scattered, in most of the realized wells for which mineralogical and chemical data have been published ([8], [10], [14] to [16]). For each sample it is usually possible to determine their âge, their sedimentation rate, their porosity and density from the Initial Reports of D.S.D.P. However, due to the evolution of biostratigraphic scales during the past twentv years, precise ages and, thus, sedimentation rates are rather délicate to determine. We hâve tried to overcome this difficulty by always using the same stratigraphie scales ([17] to [19]). From these parameters, using the formula proposed by Van Andel [20], it is possible to determine the total accumulation rate of sédiments. If the percentages of the different components are known it is also possible to compute partial accumulation rates. Thus, for example, from chemical data it was possible to determine carbonate accumulation rate. Moreover we determined an accumulation rate of silica "in excess". For this purpose it was admitted that, when the Si02/Al203 ratio is greater than 3, the excess of silica corresponds to quartz and/or biogenic silica. This value was choosen because, in most clay minerais, the Si/Al ratio is between 2 and 3 [21]. Finally, the accumulation rate of clays was determined by subtracting carbonate and silica accumulation rates from the total accumulation rate. Then, average accumulation rates were estimated for each million year period between 1 and 120 M.a. In so doing we took into account stratigraphie hiatus, thus including in the calculation of the mean value as many 0 values as the number of boreholes in which the considered age period was absent.

Note présentée par Georges MILLOT. 0249-6305/89/03080941 $ 2.00 © Académie des Sciences


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The average accumulation rates of the three main sedimentary components (silica, carbonate and clays) are plotted on the figure. The total accumulation rate varies from 1 to 4x103 g.cm-2xl0~6y. While some geological periods are characterised by high accumulation rates (1, 23-25, 47-49, 71-73, 85-87, 97-99, 111-113 M.a.) others (16-18, 31-33, 5761, 77-79, 105-107 M.a.) are relatively low. It is not easy to compare our results with data already published ([1], [11] to [13]) because the latter concern only Legs prior the 41st and average accumulation rates are generally computed for 5 or more M.a. periods. However, for the last 60 M.a., which is the only period for which comparisons can be made, maxima at 15 and 49 M.a., and minima at 10,18 and 60 M.a. coincide with those demonstrated by Davies et al. [13]. As noted by the same authors, some of these maxima and minima seem to occur at the same time in other Oceans and therefore may be due to global, although unknown, phenomena.

If these periods of high and low accumulation rates are considered as periodic, their frequency, which is in the order of 21-25 M.a. during the last 70 M.a. decreases to 1215 M.a. for older periods. We are not aware of any geodynamic phenomena with such periodicity. However, it may be noted that the change occuring during the Late Cretaceous coincide with the establishment of deep water (more than 3 km) connections between the North and the South Atlantic Ocean [1].

Fluctuations of the total accumulation rate may be related to the variation of one or more component. Thus, between 1 and 40 M.a. the accumulation rate for clays remains almost constant while for carbonate it varies considerably. On the contrary, clays are mainly responsible of the abrupt maximum occuring between 42 and 53 M.a. or beyond 108 M.a.

As a gênerai rule, the proportion of clay has decreased since 120 M.a. but has increased slightly since 15 M.a. The diminution may be related to the progressive expansion of the South Adantic Ocean and thus to the increasing of oceanic areas remote from the sources of continental detritus. The slight increase since 15 M.a. is much smaller than that known in the North Atlantic Ocean [22]. The origin of the latter is attributed to the renewal of erosion due to the Alpine orogeny. If this interpretation is correct, one would naturally expect that the consequences of such geodynamic movements be much attenuated South of Equator. However, as already mentionned, the general decreasing trend of the accumulation rate of clays is suddenly interrupted about 45-52 M.a. It may be noted that this event follows, or coincides, with the establishment of deep circulations comparable to those prevailing today ([1], [23]). Such massive transfers of sediments related to the establisment of communications between oceanic basins are known in other regions. Thus, in the North Adantic Océan, the subsidence of the Greenland Scotiand Ridge enabled massive transfers of Neogene sediments as far south as the Biscay abyssal plain [24].

The volume of sediment deposited in oceanic basins is small when compared to the volume of sédiments deposited on platforms and at the foot of continental slopes. However, fluctuations of their accumulation rates may be related to important geodynamic events such as the establishment of communications between the North and the South Atlantic Ocean and, in some cases, they may be related to global events.

I. INTRODUCTION. — En dehors des continents qui le bordent, l'Océan Atlantique Sud est délimité au Nord par la zone de fracture décrochante de la Romanche et au Sud par la zone de fracture des Falkland. Les campagnes 3, 4, 36, 39, 40, 41, 71, 73, 74 et 75 du Glommar Chalenger ont été totalement ou partiellement consacrées à l'exploration de cet


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océan. Plusieurs études synthétiques ([1] à [10]) ont été publiées sur la sédimentation de cette région. Certaines portent sur la répartition des principaux faciès sédimentaires à diverses époques géologiques ([1] à [4]). D'autres ont permis de reconstituer les variations de la profondeur de compensation des carbonates ([l]-[5]) ou celles des principaux courants [10]. L'évolution des assemblages de minéraux argileux ([6] à [8]) et celle de la composition chimique des sédiments ont également été étudiées ([8], [9]). Toutefois, à quelques exceptions près ([1], [11], [12], [13]), la plupart de ces résultats demeurent qualitatifs, car seules sont prises en compte des variations relatives de teneurs minéralogiques ou chimiques et non les taux d'accumulation. Or, d'un point de vue sédimentologique très général, cette grandeur est la seule permettant d'estimer les quantités de matière déposées dans les océans.

Les résultats publiés nous ont permis, pour environ 1 500 échantillons répartis à tous les niveaux stratigraphiques et dans presque tous les forages réalisés dans l'Atlantique Sud, de calculer leurs taux d'accumulation. Des valeurs moyennes de ces taux ont ensuite été établies par tranche de 1 M.a. puis, ces résultats ont été filtrés par calcul de moyennes glissantes à un pas de 5. Outre la description de la méthode employée, nous présentons les variations du taux d'accumulation des sédiments et de leurs principaux constituants : carbonates, argiles et silice, au cours des 120 derniers millions d'années.

II. MÉTHODE UTILISÉE. — Le choix des échantillons pris en compte dans cette étude est relativement arbitraire. Il est fondé sur l'existence de données minéralogiques et chimiques déjà publiées. La plupart d'entre elles ([8]-[10]) ont été obtenues dans seulement deux laboratoires, ce qui constitue une bonne garantie de leur homogénéité analytique. Afin de compléter ces données nous avons également utilisé des résultats publiés par Zemmels et coll. [14], par Emelyanov et coll. [15] et par Jacquin [16].

Pour chaque échantillon, il est très généralement possible de déterminer, en consultant les rapports de campagnes, le taux de sédimentation, l'âge, la porosité et la densité. L'estimation du taux de sédimentation repose sur une détermination aussi précise que possible de l'âge des sédiments. L'évolution des connaissances sur les fossiles caractéristiques et sur l'âge des limites d'étage rend parfois délicate la comparaison de résultats de campagnes anciennes avec ceux de campagnes plus récentes. Sans être à même de réaliser un travail de spécialiste, nous avons partiellement remédié à cette difficulté en utilisant toujours les mêmes échelles stratigraphiques ([17] à [19]). L'attribution d'un âge à chaque échantillon a été effectuée en tenant compte de sa profondeur par rapport aux limites datées des formations sédimentaires où il se trouve. Le taux d'accumulation est ensuite calculé en utilisant une formule proposée par Van Andel [20] :

R=(D-0,01025. P) (0,1. S)

où R est le taux d'accumulation exprimé en g. cm- 2 x 10- 3 ans. D la densité du sédiment humide exprimée en g. cm" 3, P la porosité exprimée en pourcents et S le taux de sédiment exprimé en mètres par million d'années. Précisons que ce mode de calcul implique que seule la compaction est responsable de la modification, des propriétés physiques du sédiment. Les éventuels phénomènes de cimentation ne sont donc pas pris en compte.

Lorsque les pourcentages des constituants minéraux ou chimiques du sédiment sont connus, il est possible de calculer des taux d'accumulation partiels. Dans notre cas, seule la minéralogie des argiles avait été déterminée mais, nous disposions pour presque tous les échantillons des résultats de l'analyse des éléments majeurs. Le taux d'accumulation des carbonates a donc été calculé en considérant que tout le calcium est impliqué dans


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des minéraux carbonates. Nous avons également estimé le taux d'accumulation de la silice « en excès » de la façon suivante. Lorsqu'on examine la composition de la plupart des minéraux argileux, on constate que le rapport Si02/Al203 est compris entre 2 et 3 [21]. Dès lors nous avons considéré que toute quantité de silice supérieure à trois fois la teneur en alumine du sédiment était de la silice non combinée dans des alumino-silicates. Ce calcul présente l'inconvénient de ne pas permettre la distinction du quartz et de la silice biogénique.

Pour chaque tranche de 1 M.a. nous avons ensuite calculé des taux d'accumulation moyens. Ce calcul tient compte de l'existence de hiatus, en incluant dans la moyenne autant de valeurs égales à 0 qu'il existe de forage où la tranche d'âge considérée est absente. Ces taux d'accumulation ne doivent être confondus, ni avec des flux de particules primitivement sédimentés, ni avec les masses de sédiments déposés dans l'Atlantique Sud. Les particules primitivement déposées ont en effet pu être érodées, partiellement ou totalement dissoutes et les masses sont, quant à elles, plus ou moins proportionnelles à la surface des fonds océaniques qui, par suite de l'élargissement progressif de l'Atlantique Sud, a été multipliée environ par 12 depuis 120 M.a.

III. RÉSULTATS ET DISCUSSION. — Sur la figure, les taux d'accumulation de la silice « en excès », des carbonates et des argiles sont portés en abscisses et les temps géologiques en ordonnées. Par construction, la courbe qui limite l'ensemble du graphique correspond au taux d'accumulation total du sédiment. L'examen de la figure permet de constater les faits suivants.

Variations du taux d'accumulation moyen de la silice en excès, des carbonates

et des argiles dans l'Océan Atlantique Sud, au cours des derniers 120 M.a.

Fluctuations of the mean accumulation rate of silica, calcite

and clays in the South Atlantic Ocean during the past 120 M.a.


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Des périodes géologiques à fort taux d'accumulation alternent avec d'autres où le taux d'accumulation est faible. Ces fluctuations sont importantes puisque les taux d'accumulation moyens peuvent être multipliés (ou divisés) par 2. Ainsi note-t-on l'existence de maximums à 1, 23-25, 47-49, 71-73, 85-87, 97-99 et 111-113 M.a. et de minimums à 1618, 31-33, 57-61, 77-79, 92-94 et 105-107 M.a. Il n'est pas aisé de comparer nos résultats à ceux déjà publiés ([1], [11] à [13]) car, pour l'Atlantique Sud, ces derniers sont fondés sur un nombre plus limité de campagnes océanographiques (legs antérieurs au 41); ils prennent en compte un nombre relativement restreint d'échantillons et le pas de temps choisi n'est qu'exceptionnellement inférieur à 5 M.a. Cependant pour les derniers 60 M.a., seule période envisagée par les auteurs cités, nous retrouvons certains minimums (10,18 et 60 M.a.) et maximums (15 et 49 M.a.) notés par Davies et coll. [13] dans l'Atlantique Sud. Comme l'avaient remarqué ces auteurs, certains de ces épisodes se retrouvent aux mêmes époques ou à des époques voisines dans tous les océans, ce qui donne à penser qu'il s'agit de phénomènes globaux dont les causes sont, toutefois, largement hypothétiques.

On peut également noter qu'en assimilant ces alternances à des phénomènes périodiques, leur fréquence qui est de l'ordre de 21-25 M.a. durant les derniers 70 M.a., est seulement de 12-15 M.a. pour les périodes plus anciennes. Nous ne connaissons aucun phénomène géodynamique présentant des fréquences de cet ordre. Tout au plus, pouvons nous noter que le changement qui se produit à partir du Crétacé supérieur coïncide avec le début de la mise en place de communications des eaux profondes entre l'Atlantique Nord et Sud [1].

L'accroissement du taux d'accumulation total peut être dû à celui d'un ou de plusieurs constituants des sédiments. Ainsi, entre 1 et 40 M. a., les proportions d'argiles demeurent relativement constantes mais les taux d'accumulation des carbonates varient amplement. Par contre, c'est l'accroissement du taux d'accumulation des argiles qui est à l'origine de l'important maximal situé entre 42 et 53 M.a. ou de celui situé au-de là de 108 M.a. A certaines périodes, enfin, les variations du taux d'accumulation des carbonates et des argiles semblent concomitantes.

D'une façon générale, les proportions d'argiles diminuent depuis 120 M.a. mais croissent à nouveau légèrement depuis 15 M.a. environ. La décroissance des argiles peut être, en première approximation, attribuée à l'élargissement progressif de l'Atlantique Sud et donc à l'augmentation de la surface océanique éloignée des sources d'apport continentaux. L'augmentation du taux d'accumulation des argiles depuis 15 M.a. environ est beaucoup moins importante que celle qui existe à la même époque dans l'Atlantique Nord [22]. Dans cet océan, on considère que ce fait est lié à une reprise de l'érosion, elle-même due aux mouvements alpins. Si cette interprétation est exacte, il est normal que l'écho de ces importants phénomènes géodynamiques soit considérablement amorti dans des régions situées au Sud de l'Equateur.

Toutefois la décroissance générale des argiles depuis 120 M.a. est brutalement interrompue vers 45-52 M.a. On peut remarquer que ce phénomène succède ou coïncide avec l'établissement de circulation profondes, voisines des circulations actuelles, entre les deux parties de l'Océan Atlantique qui, selon diverses estimations ([1] et [23]), se situerait entre 60 et 50 M.a. De tels transferts massifs de matière, liés à l'établissement de communications entre bassins océaniques, sont connus dans d'autres régions. Ainsi, dans l'Atlantique Nord, la subsidence de la Greenland-Scotland Ridge a provoqué au Néogène l'arrivée de grande quantités de sédiments qui se sont répandus jusque dans la baie de Biscaye [24].


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CONCLUSIONS. — Dans l'Atlantique Sud, le taux d'accumulation moyen des sédiments varie de 1 à 4.103 g.cm-2.10~ 6 ans environ. Les fluctuations du taux d'accumulation se produisent à une fréquence comprise entre 12 et 25 M.a. Elles peuvent être due aux variations d'un ou de plusieurs des constituants essentiels des sédiments.

Les sédiments se déposant dans les fonds océaniques ne représentent qu'une fraction très minime des dépôts marins qui s'accumulent surtout sur les plateaux continentaux et au pied des pentes continentales. Toutefois, les fluctuations de leur taux d'accumulation n'en reflète pas moins des phénomènes géodynamiques de grande ampleur. Ainsi, dans l'Atlantique Sud, certaines de ces fluctuations semblent liées à l'établissement des communications entre cet océan et l'Atlantique Nord; d'autres semblent synchrones de discontinuités analogues signalées dans d'autres océans. Leur origine encore inconnue serait alors, d'ordre global. Note remise le 9 janvier 1989, acceptée le 31 janvier 1989.

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C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 947-952, 1989 947

Géologie/Geology (Micropaléontologie/Micropafeontology)

Incursions de microfaunes alpines dans le Trias des Iles Baléares et des Pyrénées espagnoles

Daniel VACHARD, Jean-Paul COLIN, Joan ROSELL et Peter HOCHULI

Résumé — Le Trias du Nord-Est de l'Espagne, réputé germanique, a livré deux associations de Foraminifères caractéristiques du domaine alpin, l'une dans le Ladinien s. L de Minorque (Iles Baléares), l'autre dans le Rhétien s. L des Pyrénées orientales espagnoles. Les associations dominées respectivement par Lamelliconus procerus et par Aulotortus friedli et Gandinella falsofriedli permettent d'aborder divers problèmes d'ordre systématique, biostratigraphique, paléoenvironnemental et paléogéographique.

Incursions of Alpine microfaunas in the Triassic of the Balearic Islands and the

Spanish Pyrenees

Abstract — The Triassic ofnortheastern Spain, considered as Germanie, hasyielded two foraminiferal assemblages characteristic of the Alpine Realm, in the Ladinian. s. 1. of Minorca (Balearic Islands) and the Rhaetian s. 1. of the Spanish eastern Pyrenees. These assemblages, respectively dominated by Lamelliconus procerus and Aulotortus friedli and Gandinella falsofriedli, allow solving some problems concerning the systematics, biostratigraphy, paleoenvironments and paleogeography.

Abridged English Version — Field researches undertaken in Minorca (Balearic Islands) and in Bac Grillera (eastern Spanish Pyrenees) led to the discovery of several levels with foraminifera, and especially Involutinids, in sections previously dated as Muschelkalk or even, in the second site, Late Cretaceous (Fig. 1). The first resuit of this study was to date these levels with a certain accuracy, as Ladinian (probably Late Ladinian) in Minorca, and Early Rhaetian s. I. (probably Sevatian) in Bac Grillera. These two assemblages, rich in Involutinids, yield précise data in other fields of analysis.

I. THE LADINIAN OF MINORCA. — It contains four species of Involutinids: Lamelliconus procerus, Aulotortus praegaschei, Triadodiscus eomesozoicus (Fig. 2 :1-3) and Lamelliconus biconvexus. The most interesting species for its abundance is Lamelliconus procerus. Examination of numerous specimens allowed us to: (a) assign this "Trocholina" to the genus Lamelliconus Piller [3], (b) put in synonymy the subspecies L. procerus procerus and L. procerus multispiroides and (c) suggest a probably circalittoral paleoenvironment for this species.

Minorcan Involutinids are also at the heart of the problem of the massive apparition of this group during the Late Ladinian or an earlier émergence during the Early Ladinian. The same problem exists in Israël [7]. Contradictory identifications of ammonites by various specialists do not allow solving this problem. The palynological association, however, tends to confirm a Late Ladinian age.

II. THE RHAETIAN OF BAC GRILLERA. — Included in structurally complex series, mostly of Late Cretaceous age [13], shales and limestone samples provided most interesting associations

Note présentée par Michel DURAND-DELGA. 0249-6305/89/03080947 $2.00 © Académie des Sciences


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of foraminifera and palynomorphs. The foraminifera are essentially represented by Gandinella falsofriedli and Aulotortus friedli (Fig. 2:4-5) in an ooidic grainstone with various particles (true oolites, superficial oolites, cortoids, pelletoids, intraclasts etc.) with early diagenetic sparitic cernent, indicating deposition in a high energy environment.

The synonymy of Pilamminella falsofriedli with Gandinella appenninica and Glomospirella friedli with Angulodiscus (?) gaschei is admitted, as well as the existence of a Gandinella falsofriedli Zone, dated as Sevatian, e. g. uppermost Norian s.l. or basai Rhaetian s.l. This newly introduced biozone precedes the Triasina hantkeni Zone of the Rhaetian s. s. [14]. Observed in Bac Grillera, the Gandinella Zone was, until now, only known from the Apennines to the Carpathians, therefore in a limited area of northwestern Tethys. On the contrary, Triasina hantkeni has a much wider geographical distribution, from the French Pyrenees to Morocco, the Philippines and Indonesia, indicating different paleogeographical conditions [20]. The palynological study confirms a Norian/Rhaetian, probably Sevatian âge.

III. CONCLUSIONS. — Faunas discovered in the Triassic of northeastern Spain contribute to a compared stratigraphie analysis of different groups of fossils: foraminifera, ammonites, palynomorphs and ostracodes. They mainly yield précision on incursions of the Triassic Tethys in the Balearic Islands and the Spanish Pyrénées. They follow a seaway which extended as far as the French Pyrenees (Ariège and Corbières), but seemed to be relatively independent from the seaway which reached Sardinia.

INTRODUCTION. — La plus grande partie de l'Espagne, en dehors de la zone Bétique, appartient au domaine du Trias germanique, tout particulièrement les Iles Baléares et les Pyrénées. En fait, les incursions marines d'origine mésogéenne, donc de Trias dit alpin, ne sont pas rares. Peybernès et Lucas en ont récemment donné des exemples dans les Pyrénées françaises [1]. Des recherches de terrain ont permis la découverte d'intéressants Foraminifères dans des calcaires triasiques de Minorque (Iles Baléares) et de Bac Grillera (Province de Gérone, Pyrénées orientales espagnoles) (fig. 1). Ces Foraminifères permettent des datations et des corrélations paléogéographiques, et ils conduisent à ouvrir des discussions portant sur : (1) la stratigraphie comparée de différents groupes : Foraminifères, Ammonoïdés, palynomorphes et Ostracodes; (2) les reconstitutions généralement admises du profil des fonds marins triasiques; (3) le détail des indentations de la Mésogée aux Iles Baléares et dans les Pyrénées espagnoles. Nous analyserons les données nouvelles de ces deux régions, avant de nous livrer à une discussion d'ensemble.

I. LES FORAMINIFÈRES DU LADINIEN S. /. DE MINORQUE. — Le « Muschelkalk » de Minorque a été divisé en trois ensembles lithostratigraphiques par Llompart et coll. [2]. Quelques bancs situés au sommet de l'ensemble inférieur et à la base de l'ensemble moyen ont livré quatre espèces dTnvolutinoïdes (Colin, Hochuli, Rieber, Rosell et Vachard, en préparation) : Lamelliconus procerus (Liebus, 1942) communs, Aulotortus praegaschei (Zaninetti, 1969) rares, Triadodiscus eomesozoicus (Oberhauser, 1957) très rares (fig. 2 : 1-3). Ces populations peuvent apporter un certain nombre de solutions aux problèmes actuellement posés par les Involutinoïdes. Elles sont d'un moindre secours dans la discussion sur le type de paroi de ces organismes ([3], [4]) car la sparitisation qui affecte leur test est générale. Il semble cependant qu'en se fondant sur le développement de la spire, on puisse suivre Salaj et coll. [5], et rattacher Trocholina procera au genre Lamelliconus Piller, 1978 [3]. Par contre, les populations de cette espèce sont suffisamment riches


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pour que l'on observe tous les passages entre la sous-espèce L. procerus procerus et la sous-espèce L. procerus multispiroides Durdonovic, 1968 [6], qui n'est donc pas fondée, contrairement à l'avis de Benjamini [7].

Les niveaux à L. procerus, étant compris entre, au-dessous, des calcaires à Radiolaires et à « filaments » de Daonella supposés épibathyaux et, au-dessus, des calcaires à microfaunes et stromatolithes qui peuvent être infralittoraux ou interditaux, doivent s'être formés sur des plates-formes peu étendues ou très en pente, et correspondre à une zone circalittorale très réduite.

Sur un plan plus général, les populations de Foraminifères baléares contribuent à un débat biostratigraphique actuellement en cours : celui de l'explosion (« première apparition » des auteurs) des Foraminifères Involutinoïdes. Selon Zaninetti [8], celle-ci a lieu au Ladinien supérieur, alors que Benjamini [7] la situe au Ladinien inférieur. Grâce aux Ammonoïdés, Llompart et coll. [2] paraissent apporter, à Minorque, des arguments à l'option de Benjamini, mais il convient de noter : (a) que ces auteurs se sont basés sur les travaux de Parnes et coll. [9] qui ont servi à établir le cadre stratigraphique dans lequel Benjamini a travaillé; (b) que Rieber (in Colin, Hochuli, Rieber, Rosell et Vachard, en préparation) a découvert, dans les niveaux contenant les Foraminifères et les Ammonites jugées du Ladinien inférieur, des Ammonites du genre Protrachyceras qui datent le Ladinien supérieur. Le problème reste donc entier. Simplement, on notera la remarquable similarité des faunes et microfaunes de Minorque, notamment l'abondance quasi exclusive de L. procerus, avec celles de l'Ariège [1] et d'Israël [8]. Ceci donne un certain crédit à la notion de « province sépharade » [10], pourvu que les organismes soient bien contemporains d'un bout à l'autre de l'actuelle Méditerranée. Les associations de Foraminifères d'autres régions ayant, en totalité, le plus d'espèces en commun avec celles de Minorque, semblent être celles du Carnien supérieur des Alpes Calcaires Septentrionales [8] et celles du Carnien inférieur de Lybie [11].

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Fig. 1. — Carte de situation des affleurements étudiés.

1 = Minorque; 2 = Bac Grillera.

Fig. 1. — Location map ofthe studied outcrops.

1= Minorca; 2 = Bac Grillera.


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L'étude palynologique de ces niveaux de Minorque a révélé que les associations sont dominées par les pollens bisaccates Triadispora et par les Ovalipollis; le groupe des Circumpolles est également fréquent avec Camerosporites, Duplicisporites et Paracirculina. Ces spores et pollens sont connus à la fois dans les domaines alpin et germanique et indiquent également le Ladinien supérieur ou le Carnien inférieur.

II. LE RHÉTIEN S. l. DES PYRÉNÉES ESPAGNOLES ORIENTALES. — Le gisement de Bac Grillera (Rosell, inédit) se situe dans un ensemble structural complexe [12]. En effet, au milieu d'une série d'âge crétacé supérieur [13], nous avons pu déterminer grâce aux Foraminifères et aux palynomorphes l'âge rhétien d'un élément faisant partie de ces écailles (Colin, Hochuli, Rosell et Vachard, en préparation).

Il s'agit d'un grainstone ooïdique à oolites vraies, à oolites superficielles, à cortoïdes, à pellétoïdes, avec des agrégats de boue, des intraclastes de pelsparite et quelques bioclastes non oolitisés : Algues, Foraminifères, Ostracodes... La population est dominée par deux genres morphologiquement assez proches mais bien différenciés par leur type de paroi : Gandinella et Aulotortus, avec les espèces G. falsofriedli et A. friedli (fig. 2:4-5).

Nous approuvons les conclusions systématiques de Salaj et coll. 1988 [14], qui font de Gandinella un genre monospécifique et mettent les espèces Gandinella falsofriedli (Salaj, Borza et Samuel, 1983), qui a priorité, et Gandinella appenninica Ciarapica et Zaninetti 1985 a [15] en synonymie; et celles de Ciarapica et Zaninetti 1985 b [16] qui mettent en synonymie Glomospirella friedli et Angulodiscus (?) gaschei. Notre abondant matériel contient toutes les formes de passage permettant de conclure à ce sujet.

D'autre part, l'absence de Triasina hantkeni Majzon 1954, dans notre matériel, et les données de la palynologie confirment que Salaj et coll. 1988 [14] ont eu raison d'établir

Fig. 2. — Foraminifères ladiniens et rhétiens. 1-2, Lamelliconus procerus (Liebus 1942). Minorque (Gx70). 1, Lame C 254-3; 2, Lame C 254-2. 3, Triadodiscus eomesozoicus (Oberhauser 1957). Minorque. Lame C 254-2 (G x 70). 4, Gandinella falsofriedli (Salaj, Borza et Samuel 1983) en haut et Aulotortus friedli (KristanTollmann 1962) en bas, et aspect du microfaciès. Bac Grillera. Lame E 24074-2 (Gx30). 5, Gandinella falsofriedli (Salaj, Borza et Samuel 1983). Lame E 24074-1 (G x 70).

Fig. 2. — Ladinian and Rhaetian Foraminifera. 1-2, Lamelliconus procerus (Liebus 1942). Minorca (M x 70). 1, Slide C 254-3; 2, Slide C 254-2. 3, Triadodiscus eomesozoicus (Oberhauser 1957). Minorca. Slide C 254-2 (M x 70). 4, Gandinella falsofriedli (Salaj, Borza and Samuel 1983) above and Aulotortus friedli (KristanTollmann 1962) below, and the microfacies. Bac Grillera. Slide E 24074-2 (M x 30). 5, Gandinella falsofriedli (Salaj, Borza and Samuel 1983). Slide E 24074-1 (M x 70).


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une zone à Gandinella falsofriedli, et que celle-ci est l'équivalent de la partie terminale de l'Alaunien et du Sévatien, à l'exclusion de la partie supérieure de celui-ci. Cette zone correspond donc à la partie supérieure du Norien s. l., ou à la partie inférieure du Rhétien s. l., mais ne s'identifie ni avec le Norien s. s., ni avec le Rhétien s. s. La palynologie confirme cette attribution d'âge, car les échantillons livrent une association dominée par Corollina meyeriana, accompagnée de Rhaetipollis germanicus, Granuloperculatipollis rudis, et de kystes de Dinoflagellés Rhaetogonyaulax rhaetica et Dapcodinium priscum. Une association voisine avait déjà été rencontrée dans le Nord-Ouest des Pyrénées catalanes, province de Barcelone [17].

Gandinella falsofriedli (=appenninica) est connue pour l'instant de Bac Grillera jusqu'aux Carpathes (Slovaquie, Hongrie, Roumanie), avec des relais dans les Alpes françaises, l'Apennin septentrional et peut-être les Alpes Calcaires Septentrionales, donc dans une région limitée du Nord-Ouest de la Téthys. Par ailleurs, on sait que le Foraminifère caractérisant la dernière zone du Trias, donc le Rhétien s. s., Triasina hantkeni, possède une vaste répartition géographique, du Maroc aux Philipines et à l'Indonésie, dans un domaine que des découvertes successives ont permis de baliser ([8], [18], [19], [20]).

CONCLUSION. — Les incursions de la mer alpine en Espagne, que l'on avait longtemps cru limitées aux Cordillères Bétiques, se manifestent aussi en certains points des Iles Baléares et des Pyrénées orientales espagnoles.

Les comparaisons paléogéographiques actuellement possibles sont encore mal définies. On peut cependant évoquer des communications téthysiennes se faisant facilement par le Sud (province sépharade) au Ladinien s. l., et par le Nord au Rhétien s. l. Mais ces interprétations sont peut-être des apparences dues à des contrôles écologiques locaux, liés aux incursions plus ou moins prononcées de la mer « alpine » au coeur des domaines immergés paraliques « germaniques ». Note remise le 17 janvier 1989, acceptée le 3 février 1989.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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D. V. : Université des Sciences et Techniques de Lille-Flandres-Artois,

Laboratoire de Paléobotanique et Biostratigraphie du Paléozoïque,

GRECO n° 7 du C.N.R.S., U.F.R. des Sciences de la Terre, 59655 Villeneuve-d'Ascq Cedex;

J.-P. C et P. H. : Esso Rep, 213, Cours Victor-Hugo, B.P. n° 150, 33321 Bègles;

J. R. : Departamento de Estratigrafia,

Facultad de Ciencias, Universidad Autonoma de Barcelona,

Bellaterra, Barcelona, Espagne.


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Géologie/Geology

Tectonique albienne dans les gisements de bauxites des

Pyrénées ariégeoises (France) en relation avec l'évolution

géodynamique de la marge passive européenne

Pierre-Jean COMBES et Bernard PEYBERNES

Résumé — Mise en évidence de failles normales synsédimentaires déterminant, dans les Pyrénées ariégeoises, la mise en place polyphasée de bauxites et d'intercalations pararécifales fossilifères. Certaines de ces failles ont pu rejouer ultérieurement en compression à l'Albien inférieur-moyen et à la limite Albien moyen-Albien supérieur. La reconstitution palinspastique de la marge européenne à cette époque permet de lier cette instabilité tectonique au fonctionnement de failles coulissantes, inaugurant le régime en transpression de l'Albien supérieur.

The Albian tectonics in the bauxitic deposits from Ariège (Central Pyrénées, France)

in connection with the dynamic evolution of the European stable margin

Abstract — In the Central Pyrenean realm (Ariège), synsedimentary normal faults induced the polyphase deposition of bauxites, separated by well-dated reef intercalations (Urgonian limestones). Along some of these faults, compression motions may have later followed previous extension ones; they are assigned in time to Early and Mid-Albian and to the Mid-/Late Albian boundary. The palinspastic reconstruction of the European stable margin during this time allows connecting this tectonic instability to the activity of strike-slip faults announcing the general Late Albian transpression regime.

Abridged English Version — Settled during the Early Cretaceous over the European stable margin of the Pyrenean realm, the Ariège bauxites belong to a succession of steps which are bound by growth faults in connection with motions of blocks, more or less tilted during the rifting phase ([1], [2]). A comparable model has been proposed for the Béarn and Pays Basque bauxites [3] underlining the North-Iberian margin of the Pyrénées. However, analysis of several Ariège polyphase bauxite deposits shows that some tectonic features could be assigned to local compressions having occurred since the Early-Mid-Albian.

1. THE OBSERVATION DATA. — 1. Combe-de-Lé (NW of Durban). — Its bottom corresponds (Pl, Fig. 1) to a karstic paleosurface truncating the Early Kimmeridgian limestones and broken to the south by E.W. nearvertical faults. These faults are sometimes underlined by red karstic breccias which are well-developed along a paleorelief escarpement (10 m) covered by a complex bauxitic series of four terms [2]: lower bauxites (1); lower Simplorbitolina limestones (a) (Early-Mid-Albian), crowned by an erosion surface; mid-bauxites (2); upper Simplorbitolina limestone (b, same age as a); upper bauxites (3) preceding gullying polygenic Marillac breccias (basis of the Black Flysch) [1]. To the south of this site, mid-bauxites lie on (1) and (a) with an angular discordance. This feature is consistent with a possible lightly reverse reactivation, Early-Mid-Albian in age, of the faults inducing this paleorelief and linked to a northward compression.

2. Bacqué (NE of La Bastide-de-Sérou) (PL, Fig. 2). — In the NW dolomitic bottom (Early Kimmeridgian), normal faults controlling its karstic evolution and the formation of collapse breccias cemented by red argilites are observed. Above, the series is composed of: (1) lower bauxites capped by a ferrugineous discontinuity ; (2) upper bauxites including lignite remains; (3) Gasteropod-bearing maris; (4) limestones (I) followed by limestones (II), both

Note présentée par Jean DERCOURT. 0249-6305/89/03080953 $2.00 © Académie des Sciences


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containing a Foraminifera assemblage pointing to Early-Mid-Albian [4]. On the NW side of the layer, several faults (N 110-130; one of them is reverse to the north) are sealed under the clear discordance of limestones (II). These faults and the folding of bauxites could corne from the Early-Mid-Albian compression of previous normal faults comparable with the NW side ones.

3. Couchet (Pradières syncline, NE of Foix) (Pl, Fig. 3). — It shows nearvertical beds. Between the faulted, brecciated and karstic dolomitic bottom and the unconformable Black Flysch breccias (Upper Albian) ([5], [6]), we can separate four main bauxites (I, II, III, IV) and three intercalations of limestones (a, b, c), Early-Mid-Albian in age, sometimes bound by erosion and/or dissolution surfaces (E1 to E4), To the top, bauxites I, II and III contain large and rounded Kimmeridgian blocks and bauxite IV contains smaller Albian ones. To the east of the layer, a bit of dolomitic wall overthrusts the vertical bauxitic formation showing southward drag-folds. These features are the consequence of tectonic motions explaining: (1) during Early and Mid-Albian, the genesis of small olistolites induced by the normal faults of the bottom ; (2) at the end of this time, and just before Late Albian, thrusting of the allochthonous bit over previously erected beds, in connection with a reactivation, in compression, of these normal faults.

II. SITUATION ON THE PALINSPASTIC RECONSTRUCTION OF THE EUROPEAN MARGIN DURING EARLY-MID-ALBIAN AND GEODYNAMIC MEANING. — In the places studied, the occurrence of synsedimentary tectonic motions seems to be proved. They consist of possible compressions during the Early-Mid-Albian coming from the reactivation of extension faults cutting the European margin. The latter can be reconstructed for this period (Fig.); it shows two distinct areas; (1) to the west, the transcurrent Mauleon basin [7] filled with Black Flysch, from the end of the Early Albian [8] ; (2) to the east, the remains of the previous hemipelagic axial basin [7], bound on its two sides by successive diachronous Urgo-Albian shelves covering alterite belts. Within this paleogeographic framework, early compression to the east of the flysch basin may have been generated by local motions of SW-NE strike-slip faults during the extension phase (rifting); they precede the larger strike-slip longitudinal motions ([7], [9], [10]) characterizing Upper Albian times to the south of the bauxite northern belt.

INTRODUCTION. — Au Crétacé inférieur, sur la marge passive européenne du domaine pyrénéen, les bauxites de l'Ariège appartiennent à une série de gradins limités par des failles dont le jeu synsédimentaire en distension est lié au mouvement de panneaux et de blocs plus ou moins basculés durant la phase de « rifting » ([1], [2]). Une représentation comparable et symétrique a été proposée pour les bauxites de la marge nord-ibérique dans les Pyrénées basco-béarnaises [3]. Les observations effectuées dans les gisements de bauxites ariégeois, à mise en place polyphasée, permettent de préciser ces mouvements tectoniques et de montrer que certains d'entre eux sont attribuables à des compressions dès l'Albien inférieur-moyen. La reconstitution de la marge européenne à cette époque nous permettra de situer ces gisements et de les interpréter du point de vue géodynamique.

I. LES GISEMENTS ÉTUDIÉS ET LEURS ENSEIGNEMENTS SUR LA TECTONIQUE SYNSÉDIMENTAIRE. — 1. Le gisement de la Combe-de-Lé (NW de Durban-sur-Arize) (pl., fig. 1). — Le mur est une paléosurface karstifiée, à irrégularités métriques, dans un « mudstone » du Kimméridgien inférieur qui, au sud du gisement, est affectée par des failles E-W subverticales ou fortement inclinées vers le sud (80-85°). La fracturation connexe contrôle la


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dissolution karstique en favorisant l'apparition d'une brèche, à éléments subarrondis décimétriques cimentés par des argilites rouges, bien développée le long d'un paléorelief d'une dizaine de mètres recouvert par une série bauxitique complexe [2] où on distingue, schématiquement de bas en haut : une formation bauxitique inférieure (1); des calcaires à Simplorbitolines inférieurs (a), avec Simplorbitolina manasi Ciry et Rat seule (Albien inférieur) ; une formation bauxitique moyenne (2) venant sur les termes précédents par l'intermédiaire d'une surface d'érosion; des calcaires à Simplorbitolines supérieurs (b) avec S. manasi et S. conulus Schr. (Albien inférieur-moyen) ; une bauxite supérieure (3) et des brèches (c) (« Brèches de Marillac ») hétérométriques, à éléments anguleux (diamètre 1-10 cm) polygéniques (calcaires kimméridgiens, calcaires albiens à Simplorbitolines, à Floridées) reposant, avec une surface d'érosion basale, sur les niveaux sous-jacents. Ces brèches passent latéralement vers l'ouest au « Complexe flyschoïde à Floridées » de l'Albien supérieur (Flysch noir).

Au sud du gisement, (1) et (a) se redressent fortement (60° vers le nord) près du paléorelief au mur et les calcaires à Simplorbitolines inférieurs (a) se chargent en éléments calcaires et bauxitiques subanguleux. La formation bauxitique moyenne (2) se trouve en discordance angulaire nette sur (1) et (a). Cette disposition et le dépôt d'éléments détritiques locaux pourraient être interprétés par la réactivation légèrement inverse des failles contrôlant le paléorelief du substratum, indiquant une compression avec vergence nord que l'âge des calcaires à Simplorbitolines permettrait de situer durant l'Albien inférieur-moyen. Ces mouvements ont pu réapparaître à la limite Albien moyen/supérieur expliquant le large étalement, en discordance, des brèches (c) sur une importante paléosurface d'érosion.

2. Le gisement de Bacqué (NE de La Bastide-de-Sérou) (pl., fig. 2). — Le mur Kimméridgien inférieur est une dolomie fine à poches karstiques anastomosées plurimétriques dont le développement est contrôlé par des failles normales, bien visibles au NW où la fracturation a déterminé la formation d'une brèche d'effrondrement-dissolution à ciment d'argilites rouges, analogue à celle décrite à la Combe-de-Lé. Au-dessus s'observent : (1) une bauxite inférieure limitée vers le haut par une discontinuité encroûtée de fer; (2) une bauxite supérieure ligniteuse; (3) des marnes riches en Gastéropodes; (4) un premier niveau calcaire (I) où dominent les petits Foraminifères et les Floridées; (5) un deuxième niveau calcaire (II) à Orbitolinidés, en particulier S. manasi.

Dans le gradin NW du gisement, plusieurs failles (N 110 à 130°E), dont une nettement inverse à vergence nord, affectent tous les termes sauf le calcaire (II) nettement discordant. Ces accidents et le plissement de la bauxite pourraient être dus à la compression d'anciennes failles normales analogues à celles de la bordure NW. Les calcaires (I) et (II) contenant une microfaune de l'Albien inférieur-moyen [4], la compression serait apparue durant cette période. La faille inverse limitant les deux gradins (N 80°E-75°S), à rejet vertical (10 m environ) et latéral senestre, a joué (ou rejoué) postérieurement lors de la compression pyrénéenne.

3. Le gisement de Couchet (synclinal de Pradières, NE de Foix) (pl., fig. 3). — Situé sur le flanc nord du synclinal de Pradières [5], le gisement est à peu près E-W, avec un pendage vertical à 80° S. Les dolomies kimméridgiennes du mur présentent un paléorelief karstique avec brèches d'effondrement-dissolution, à éléments subarrondis décimétriques et ciment argilo-carbonaté, masquant partiellement une ou deux failles faiblement inclinées au Nord. L'ensemble est recouvert par la série bauxitique qui débute avec une brèche argileuse de base, pyriteuse, emballant des blocs subarrondis décimétriques du mur. Le


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reste de la série, d'une vingtaine de mètres d'épaisseur, est constitué, schématiquement, par quatre niveaux principaux de bauxite (I, II, III, IV) et trois intercalations de calcaires para-récifaux (a, b, c) à petits Rudistes, Polypiers isolés, Gastéropodes et nombreux microfossiles, dont S. manasi, correspondant à l'Albien inférieur-moyen. Des surfaces d'érosion et/ou dissolution (E1 à E4) affectent les intercalations calcaires ou certains niveaux bauxitiques (II et III). Latéralement, vers le haut du gisement, les niveaux bauxitiques I, II et III se chargent en blocs subarrondis kimméridgiens atteignant 50 cm de diamètre dans la partie la plus haute, probablement la plus proximale. Seule la bauxite IV montre, à sa base, des éléments (1 à 10 cm) de calcaires d'âge Albien inférieur-moyen.

Dans la partie est du gisement, un lambeau de mur et de brèche argileuse de base repose, par l'intermédiaire d'un contact anormal, sur la formation bauxitique verticale à nombreux microplis d'entraînement déversés vers le sud. Dans le gisement et, cartographiquement, à proximité, les différents termes sont recouverts en discordance (30° environ) par les brèches de l'Albien supérieur constituant la base du flysch noir du synclinal de Pradières ([5], [6]) qui représente le véritable toit de la série bauxitique.

Le dépôt des différentes bauxites, des intercalations calcaires para-récifales et la mise en place des surfaces d'érosion-dissolution, indiquent des conditions oscillantes littorales,

Esquisse palinspastique du domaine pyrénéen à la fin de l'Albien inférieur et à l'Albien moyen. Légende : 1 : Calcaires urgo-albiens moyens ; 2 : Pélites noires ; 3 : Grès verts ; 4 : Flysch noir argilo-gréseux ; 5 : Brèches de talus; 6 : Bauxites albiennes intra-urgoniennes (a : Combe-de-Lé; b : Bacqué; c : Couchet-Pradières et Baychet) ; 7 : Lacunes (érosions et/ou non dépôt) ; 8 : Limites d'érosions postérieures (se superposent parfois à des paléofailles) ; 9 : Directions d'extension du domaine pyrénéen ; 10 : Cisaillements senestres contemporains (ou immédiatement postérieurs à l'est du domaine).

Palinspastic sketch-map of the Pyrenean realm at the end of Early Albian and during Mid-Albian. Legend: 1: Mid-Urgo-Albian limestones; 2: Black maris; 3: Green sandstones; 4: Black flysch; 5: Slope breccias; 6: Albian intra-urgonian bauxites (a: Combe-de-Lé; b: Bacqué; c: Couchet-Pradières et Baychet); 7: Gaps (érosions and/or absence of deposition) ; 8: Limits of later erosions (sometimes superposed to paleofaults) ; 9: Extension directions of the Pyrenean realm ; 10: Synchronous senestral strike slip faults (or immediatly later to the east of the realm).


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avec des émersions multiples, en grande partie contrôlées par des variations eustatiques (cet aspect sera abordé dans une autre publication). Toutefois, l'intervention des mouvements tectoniques est nette : (1) durant l'Albien inférieur-moyen par l'apport septentrional, proximal, de blocs de Kimméridgien probablement dû au fonctionnement des failles visibles au mur; (2) à la fin de cette période et avant l'Albien supérieur, par la mise en place du lambeau allochtone sur des termes déjà sensiblement inclinés vers le sud, qui pourrait être attribuée à une reprise en compression, avec vergence sud, de failles normales antérieures. La phase pyrénéenne a ensuite accentué le redressement du gisement.

II. INTERPRÉTATION DANS LE CADRE GÉODYNAMIQUE DE LA MARGE EUROPÉENNE RECONSTITUÉE A L'ALBIEN INFÉRIEUR-MOYEN. — Les gisements étudiés démontrent l'existence d'une tectonique synsédimentaire active, avec apparition possible de compressions locales à l'Albien inférieur-moyen et à la limite Albien moyen/supérieur. Ces mouvements, à vergence nord ou sud, semblent réutiliser, dans les cas considérés, des failles antérieures qui peuvent être interprétées comme satellites d'accidents majeurs constituant la marge européenne. La reconstitution de cette dernière à l'Albien inférieur-moyen (fig.) montre en effet la permanence d'un réseau losangique de failles synsédimentaires N40_60/N120_140, contrôlant la sédimentation depuis l'Albien inférieur au moins [7]. Elle borde deux domaines distincts : (a) à l'ouest, le « Bassin de Mauléon », graben en décrochement sur croûte amincie [8] empli, dès la fin de l'Albien inférieur (zone à Rauliananus), par le flysch noir pélito-gréseux et siège de cisaillements synsédimentaires longitudinaux; de puissantes accumulations conglomératiques (Poudingues de Mendibelza) soulignent ses escarpements bordiers; (b) à l'est, les vestiges d'un bassin hémipélagique en extension, non turbiditique, issu du vaste bassin axial aptien [7], dont quelques lambeaux s'étirent le long des segments de la faille nord-pyrénéenne [1]. Sur ses deux marges se développent les ultimes plates-formes urgoniennes dont les prismes de haut niveau marin successifs, centrifuges, fossilisent des ceintures d'altérites diachrones. Ponctuellement, dans les Corbières, des décharges terrigènes deltaïques (grès verts) en perturbent la sédimentation carbonatée.

Dans un tel dispositif, l'apparition de compressions à l'est du bassin flysch pourrait être rapportée à des contraintes locales liées au fonctionnement des failles coulissantes SW-NE dans le système distensif du rift pyrénéen. Toutefois, au stade suivant, l'Albien supérieur correspondant au jeu coulissant, d'ampleur limitée, de grands accidents E-W senestres dans la chaîne de bassins flysch formant le bassin axial pyrénéen ainsi reconstitué [7], le long de la faille nord-pyrénéenne ([7], [9]) ou s'intégrant dans une zone de décrochement [10], les compressions observées pourraient également être en relation avec une ébauche de ce coulissement déterminant des contraintes locales ou l'établissement plus général d'un régime en transpression.

CONCLUSION. — Les gisements de bauxites étudiés montrent que le dépôt du minerai a été contrôlé, dans le domaine littoral, par des failles normales synsédimentaires appartenant au réseau d'accidents qui limitaient les gradins de la marge passive européenne. Ces failles ont partiellement rejoué en compression à l'Albien inférieur-moyen et à la limite Albien moyen-supérieur comme on peut le préciser grâce à la présence d'intercalations para-récifales fossilifères. En considérant la reconstitution palinspastique de la marge à cette époque, on peut attribuer ces compressions à des coulissements le long des failles qui la délimitaient. Ces mouvements pourraient annoncer le régime en transpression


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généralisé de l'Albien supérieur entre les marges européenne et ibérique du domaine Pyrénéen.

Note remise le 28 novembre 1988, acceptée le 3 février 1989.

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P.-J. C. : Université des Sciences et Techniques du Languedoc, Géologie des Gîtes minéraux,

place Eugène-Bataillon, 34060 Montpellier Cedex ; B. P. : Université Paul-Sabatier, Laboratoire de Géologie sédimentaire et Paléontologie,

39, allées Jules-Guesde, 31062 Toulouse Cedex.

EXPLICATIONS DE LA PLANCHE

Coupes dans les gisements de bauxite de l'Ariège. Cross-sections in bauxitic loyers from Ariège.

Fig. 1. — Gisement de la Combe-de-Lé, coupe à travers la zone centrale complétée avec la partie occidentale

(en pointillés à l'arrière-plan). Fig. 1. — The Combe-de-Lé deposit, cross-section through the central part completed with the western one (dotted

Une in the back ground).

Fig. 2. — Gisement de Bacqué, coupe dans le gradin NW.

Fig. 2. — The Bacqué deposit, cross-section in the north-western step.

Fig. 3. — Gisement de Couchet, coupe synthétique. Les tirets fins indiquent le profil est, la tranchée d'accès (1) et la galerie de reconnaissance (2).

Fig. 3. — The Couchet deposit, synthetic cross-section. The thin pecked-line shows the eastern section, the access ditch (1) and the exploration drift (2).


PLANCHE I/PLATE I PIERRE-JEAN COMBES



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Tectonique/Tectonics

Compression, décrochements et distension sur le pourtour méditerranéen nord-occidental

Alain MAUFFRET et Maurice GENNESSEAUX

Résumé — Un nouvel examen de profils sismiques montre que le Golfe du Lion a été affecté par une tectonique compressive éocéne. A ce régime compressif aurait succédé une tectonique en décrochement depuis le Languedoc jusqu'à la Catalogne. L'élargissement des bassins rhomboedriques a précédé l'ouverture du bassin méditerranéen. Cette succession d'événements tectoniques est expliquée par une rotation horaire de la contrainte résultant de la convergence entre l'Afrique et l'Europe.

Compression, strike-slip faulting and extension at the periphery of the north western

Mediterranean Basin

Abstract — A new study of seismic profiles shows that the Gulf of Lion may have undergone Eocene compression tectonics. After this event strike-slip faulting was active from Languedoc to the Catalan Range. The opening of the pull-apart basins precedes the sea-floor spreading in the north western Mediterranean Basin. This sequence of tectonic events could be correlated with a clock-wise rotation of the stress field which reacted to the convergence between Africa and Europe.

Abridged English Version — INTRODUCTION. — The Gulf of Lion ( Fig.) lies between the Pyrenean Ranges and the Maures Massif (Provence). The Eocene compression is bounded on the north by the Cevennes fault ([1], [2], [3]). Towards the east, the Cap Sicié overthrust shows that the Provençal domain also underwent an upper Eocene deformation [4]. In the Gulf of Lion extension tectonics are evident ([5], [6]), but the previous Eocene compression events are poorly known. A new study of multichannel lines highlights the multi-stage tectonics which also affect this submerged area.

FOLDS AND THRUSTS. — On land (Pyrenees, Provence and Catalogne) the nappes have been set up in a N-S to NW-SE stress domain ([7], [8]). Off-shore a reflection seismic profile (Pl. A) crossing the Tramontane structure where Palaeozoic rocks have been sampled [6], shows a deep reflection which dips towards the south west. This dipping reflector below the Palaeozoic structure could be the trace of an intra-crustal Eocene thrust.

STRIKE-SLIP FAULTS. — A left lateral offset along the Cevennes Fault which trends N 50 is clear evidence of upper Eocene transpression motion ([7], [8], [9]). This fault has been active since the Mesozoic epoch ([10], [11]). Later, transtension is recorded along the Cevennes Fault which bounds the Alès Trough where the first evaporitic filling is latest Eocene in age [12]. An extensional event of the same age is also documented in Provence ([13], [14]). The others troughs, such as Vistrenque are also bounded by faults which strike N 50, e. g. the Nimes Fault. The regional tectonic pattern seems to be associated to a strike-slip regime with a succession of pull-apart basins and push-up [15]. The Vistrenque trough is relayed by the Central Graben, then the Ampurdan Basin. Strike-slip faulting is also documented ([16], [17], [18]) in the Catalonian Range, but the transpression was still active in this area during the Oligocene, whereas the northern domain was already affected by transtension tectonics.

EXTENSION FAULTS. — After the transtension event, the grabens of the northern region were formed and filled by Oligocene and Aquitanian syn-rift sediments (Pl. B). A later (lower Miocene) extension phase occurred in the southern region.

Note présentée par Jean AUBOUIN. 0249-6305/89/03080961 $ 2.00 © Académie des Sciences


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DISCUSSION. — Different kinematic evolutions ([19], [20], [21], [22]) of the north western Mediterranean Basin have been proposed. According to [19] and [21], a global N-S (N20, Table) relative motion between the European and Africa Plates has been recorded since the upper Cretaceous epoch. However it is also necessary to take into account the relative motion between the Iberia and European Plates which converged until their upper Eocene collision in the Pyrenean Range ([20], [21]). During the Burdigalian, a drastic change occurred in the relative motion between the European and Africa Plates and the trend changed from N20 to N 140 ([19], [21]), (Table). This plate tectonic framework may explain the geologie evolution of the area. The N 165 compression stress prevails until the upper Eocene collision in the Pyrenean Range. Then the influence of the N20 relative motion became predominant. The faults trending N 50 underwent a strike-slip motion. During the Oligocene the stress field rotated to N35 allowing an extension in the northern region, whereas the N70 Catalan structures were still in a transpression regime. During the Burdigalian, the formation of a marginal basin behind the Sardinia-Corsica micro-plate is linked to the N 140 relative motion.

CONCLUSIONS. — The tectonic evolution of the area studied suggests a rotation of the stress regime which may be correlated with the collision in the Betic Chain ([15], [16], [23]). The preexisting faults reacted to the stress field first in transpression then in transtension, before an opening of the western Mediterranean Basin.

INTRODUCTION. — Le Golfe du Lion est une marge continentale qui sépare les Pyrénées du massif des Maures (Provence, fig.). La zone axiale pyrénéenne s'ennoie sous la mer dans la région du Cap de Creus. Vers le nord, la compression éocène s'observe dans les Corbières et est perceptible dans le socle hercynien ([1], [2], [3]) au-delà de la faille de Cévennes. A l'est du Golfe, la nappe du Cap Sicié est le témoin le plus important de la phase compressive d'âge éocène supérieur (phase provençale, 4).

Par contre, la structuration du Golfe du Lion résulte essentiellement de mouvements distensifs oligo-miocènes ([5], [6]), et les compressions qui les ont précédées n'ont pas encore été clairement démontrées sauf dans quelques forages pétroliers proches du littoral. L'examen de profils sismiques multitraces ( Pl.), apporte cependant de nouvelles informations sur les compressions éocènes dans le Golfe du Lion ainsi que sur la tectonique polyphasée qui a affecté toute cette région.

PLIS ET NAPPES. — A terre, dans le Roussillon, de même qu'en Provence, la phase de compression principale est d'âge lutétien-bartonien. La direction de contrainte était, à cette époque, sensiblement N-S ([7], [8]). Ainsi, au cap Sicié [4], et près du littoral de Camargue ([2], [3]) se sont mises en place des nappes de socle. En mer, dans le centre du Golfe du Lion, le socle, reconnu par forage (Sirocco, Autan, Mistral), comprend des schistes paléozoïques ou du granite, sans indications sur la tectonique pyrénéenne [6]. Par contre, un profil de sismique réflexion recoupant la structure du forage Tramontane (pl, A), sans exagération verticale au niveau du socle, montre clairement un fort réflecteur à pendage apparent proche de 20° vers le SSW. Ce réflecteur peut s'interpréter comme une surface de chevauchement vers le N. d'âge pyrénéen. A cet endroit, le Paléozoïque foré au toit du socle (Tramontane) est donc impliqué dans ce chevauchement. Les séries mésozoïques n'ayant jamais été prélevées dans les forages de la partie méridionale du Golfe du Lion (Autan, Sirocco, Mistral), on peut ainsi en conclure que les deux unités


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séparées par un réflecteur penté appartiennent au substratum paléozoïque et qu'il s'agit bien ici d'un chevauchement socle sur socle. Plus au sud, en domaine intraplaque ibérique, se mettent en place les nappes de la chaîne catalane.

TECTONIQUE EN DÉCROCHEMENT. — Elle se traduit par un jeu sénestre de direction N 50 mis en évidence le long de la faille des Cévennes [9]. Cet accident majeur, jouant déjà en faille normale au Mesozoïque ([10], [11]), sépare un domaine méridional tectonisé du môle des Cévennes beaucoup moins déformé. Les études microtectoniques ([7], [8]) ont démontré que le jeu coulissant sénestre majeur le long de ces failles N50 était d'âge éocène supérieur, donc contemporain de la mise en place des nappes. Le mouvement transpressif devient transtensif dès l'Éocène terminal. En effet, des séries évaporitiques ludiennes [12] se déposent dans le fossé d'Alès, contrôlé par la faille des Cévennes. Par contre le mouvement est purement distensif en Provence [grabens N-S ([13], [14])]. En Languedoc d'autres bassins, comme ceux de la Vistrenque, sont bordés par des failles parallèles à la faille des Cévennes (faille de Nîmes). La disposition générale de ces bassins et des failles qui les limitent évoque fortement un jeu en décrochement avec formation de bassins losangiques et de relais compressifs [15]. Toutes ces unités structurales à caractère décrochant s'organisent suivant un dispositif continu par relais de failles qui peut se suivre du NE au SW de la région étudiée. En effet, le fossé de Vistrenque est relayé par le graben central du golfe du Lion puis par le relais compressif du Cap de Creus, le bassin de l'Ampurdan, la ride de Gavarres et enfin les bassins catalans. Ces derniers sont bordés par les grands accidents décrochants qui affectent la chaîne catalane prélittorale ([16], [17], [18]). De même, le Golfe de Valence pourrait appartenir, à l'origine, à ce système de bassins losangiques. Notons toutefois qu'en Catalogne la tectonique transpressive se poursuit jusqu'à l'Oligocène supérieur ([16], [17], [18]). Ce réseau continu fait partie d'un grand ensemble de fractures décrochantes qui affecte l'Europe méridionale depuis l'Espagne jusqu'au Rhône.

TECTONIQUE EN DISTENSION. — En Languedoc, après les jeux décrochants des failles à l'Éocène supérieur et Oligocène inférieur, les grabens s'élargissent suivant une direction d'extension a 3, NW-SE ([7], [8]). Cette phase correspond à la période de rifting qui précède l'ouverture du bassin occidental méditerranéen. Ces grabens sont remplis par des séries oligocènes et aquitaniennes [6]. Une coupe sismique (pl., B), montre la disposition en demi-graben du bassin central du Golfe du Lion et la discordance intra-aquitanienne qui scèle les séries synrift. En Catalogne et dans le Golfe de Valence la tectonique distensive apparaît plus tardivement, au Miocène inférieur ([16], [17], [18]).

DISCUSSION. — Les reconstitutions cinématiques proposées pour la période considérée, dans le bassin méditerranéen occidental, ([19] à [22]) varient sensiblement suivant les auteurs. Nous utiliserons ici celle d'Archambault [19] reprise par Olivet [21] qui s'accorde mieux avec nos observations. Dans ce modèle, le déplacement relatif Europe-Afrique, serait globalement N-S depuis le Crétacé supérieur jusqu'au Burdigalien, (N 20, tableau). Un changement se produit au Burdigalien (anomalie 6, 20 M.a.), résultant du mouvement anti-horaire de l'Afrique par rapport à l'Europe (N140, tableau). Cependant, jusqu'à l'Éocène moyen-supérieur, période où s'achève la suture pyrénéenne, la tectonique régionale est déterminée par le mouvement Ibérie-Europe, (N 165) [20]. Ce cadre cinématique permet d'expliquer l'évolution tectonique du bassin méditerranéen nord-occidental.


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En effet :

1. La direction des contraintes a1, N170 observées sur la bordure cévenole persiste jusqu'à l'Éocène moyen-supérieur, c'est-à-dire la période de la suture pyrénéenne. En Catalogne, la direction des contraintes, durant l'Éocène inférieur et moyen, différerait

Cadre structural du bassin méditerranéen nord-occidental. 1 : faille de décrochement à l'Éocène (en distension à partir de l'Oligocène sauf en Catalogne). 2 : plis, nappes et chevauchements. 3 : faille normale à l'Oligocène, décrochante à l'Éocène. 4 : bassin oligo-miocène. 5 : chaîne axiale des Pyrénées. 6 : étoile pour les forages Tramontane (T), Mistral (M), Sirocco (S) et Autan (A); trait épais pour les profils sismiques (A et B) présentés en planche I. Abréviations. FC : Faille des Cévennes; FA : Fossé d'Alès; FN : Faille de Nîmes; CO: Corbières; FV : Fossé de la Vistrenque; GC : graben central; BA : Bassin de l'Ampurdan; G: Gavarres et CC : Chaînes catalanes.

Structural framework of the north western Mediterranean Basin. 1: Eocene strike-slip fault (normal during the Oligocene epoch except in Catalonia). 2: folds and thrusts. 3: Oligocene normal fault (strike-slip fault during the Eocene epoch). 4: Oligocene-Miocene basin. 5: Pyrenean axial Range. 6: star for the exploratory wells Tramontane (T), Mistral (M), Sirocco (S) and Autan (A). Solid line for the location of the seismic profiles shown in Plate 1. Abbreviations. FC: Cevennes Fault; FA: Alès Trough; FN: Nîmes Fault; CO: Corbières; FV: Vistrenque Trough; GC: Central graben ; BA: Ampurdan Basin; G: Gavarres et CC: Catalan Range.


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965

TABLEAU

Déplacements relatifs Afrique-Europe et Ibérie-Europe d'après [19] et [21].

Direction des contraintes : Bordure cévenole d'après [7] et [8]; Catalogne d'après [17] et [18].

Relative motions between Africa and European plates and betwwen Iberia and European plates

after [19] and [21]. Stress field: Cevenole area after [7] and [8]; Catalan Range after [17] and [18].

Direction des Etage An. Depl. relatif Depl. relatif Evénement contraintes

Etage Age Afrique.Europe Iberie-Europe Evénements Bordure

Cevenole

75 33 N20 N165 Rapprochement Europe-Afrique

(Campanien) Rotation antihoraire de l'Iberie.

Pateocene 61 27 . Phase pyrénéenne

Eocene inf et Phase pyrénéenne

moyen. Compression chaînes catalanes

Phase pyrénéenne Eocene moy et Suture Iberie-Europe N170 sup Failles de décrochement senestre transpressives Compression chaînes catalanes

Formation des fossés languedociens ( Direction N 50)

Eocene term Failles de décrochement senestre transtensives (Languedoc) N10

Oligocene inf 37 15 Failles de décrochement senestre transpressives i

(Direction N 70, Catalogne).

Ouverture des grabens du Golfe du Lion.

Oligocene moy 32 10 . (Direction N 40). N35 N10

sup Failles de décrochement senestre transpressives

( Direction N 70, Catalogne).

Oligocene 25 7 » N 35

term

Elargissement des grabens du Golfe du Lion Aquitanien 23 6B . Formation des grabens catalans N 50

(Direction N 65)

Burdigalien 20 6 N 140 Ouverture du bassin méditerranéen

(Direction N 120-140)

quelque peu: N 135 d'après [17], [18]. A partir de l'Eocène terminal, l'influence du mouvement relatif N 20 Afrique-Europe devient perceptible dans toute la bordure nord occidentale étudiée. En Catalogne, les valeurs mesurées s'établissent autour de N10. Dans les Cevennes la valeur est probablement plus élevée et permet d'expliquer le passage du régime transpressif au régime transtensif à partir du Ludien pour les failles en décrochement de direction N 50 et la formation des bassins losangiques languedociens.

2. A l'Oligocène moyen supérieur, on constate, dans le Languedoc ([7], [8]), une permutation des contraintes : a 1 devient vertical, alors que a 2 prend une direction N 35. A cette époque, l'axe d'allongement des grabens du Golfe du Lion et de son pourtour a une direction très voisine (N40). Cependant, en Catalogne, la contrainte de direction N 35 reste compressive, car l'axe de la chaîne est orienté N 70. A l'Aquitano-Burdigalien, les grabens catalans s'ouvrent également ([17], [18]), la direction des contraintes étant devenue N 50, comme en Languedoc ([7], [8]).

3. Au Burdigalien enfin, s'opère un changement radical de la cinématique. Le déplacement relatif Europe-Afrique N140 aurait conduit, par un processus de subduction, à

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Série II - 65


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l'ouverture du bassin arrière-arc de Méditerranée occidentale. La dérive du bloc corsosarde s'effectue en effet suivant une direction N 120-140.

CONCLUSION. — La succession des événements tectoniques décrite dans cette Note suggère une rotation horaire, depuis N135 jusqu'à N50, de la direction du champ de contrainte. Dans un premier temps la tectonique était contrôlée par la rotation de la plaque ibérique. Dans une seconde étape, après la suturation au niveau des Pyrénées, la collision au niveau des chaînes bétiques prend le relais, induisant des déformations intraplaques jusqu'en Catalogne ([17], [18], [23]). Suivant leur orientation par rapport au champ de contrainte, les accidents préexistants ont fonctionné en transpression puis en transtension, enfin en failles normales. On suggère ainsi que les fossés du Golfe du Lion se seraient d'abord formés dans un régime coulissant transtensif avant d'évoluer en grabens dans un champ de contrainte distensif.

Les profils sismiques multitraces ont été aimablement communiqués par la CF.P. que nous remercions. Contribution n° 486 de l'U.A. 718 (G.E.M.C.O., C.N.R.S., Université Pierre-et-Marie-Curie).

Note remise le 3 octobre 1988, acceptée après révision le 3 février 1989.

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[19] M. F. ARCHAMBAULT, Thèse de 3e cycle, Brest, 1984, 211 p.

[20] J. L. OLIVET, P. BEUZART, J. M. AUZENDE et J. BONNIN, Rap. Sci. et Tech. CNEXO, 54, 1984, 107 p.

[21] J. L. OLIVET, in Profil ECORS : Rap. d'implantation, Equipe Profil ECORS, 1987, p. 9-49.

[22] L. A. SAVOSTIN, J. C. SIBUET, L. P. ZONENSHAIN, X. LE PICHON et M. J. ROULET, Tectonophysics, 123, 1986, p. 1-35.

[23] P. TAPPONNIER, Bull. Soc. Géol. France, 19, 1977, p. 437-460.

Département de Géologie dynamique et U.A. n° 718, Université Pierre-et-Marie-Curie, 4, place Jussieu, 75252 Paris Cedex 05.


PLANCHE I/PLATE I

ALAIN MAUFFRET

A. Profil sismique recoupant la structure Tramontane où un forage a atteint le Paléozoïque sous les séries aquitaniennes. Un réflecteur penté (flèche) peut figurer la trace d'un chevauchement intra-socle d'âge pyrénéen. L'exagération verticale est faible en surface (environ 3) mais devient nulle dans les zones profondes ou les vitesses sont élevées. La coupe est localisée sur la figure 1. B. Profil sismique recoupant le graben central du Golfe du Lion. On distingue très clairement un demi-graben rempli par des séries syn-rift aquitaniennes. La discordance intra-aquitanienne qui scelle les mouvements de distension est marquée par un fort réflecteur. Les horizons (flèches) que l'on distingue vers 4 secondes temps double, sous la faille listrique (à gauche) et sous le horst (à droite), peuvent correspondre à des plans de chevauchements d'âge éocène. Le profil est localisé sur la figure.

A. Seismic profile crossing the Tramontane structure where the Palaeozoic basement, overlain by Aquitanian sediments, has been drilled. A dipping reflector (arrow) may indicate the presence of a Pyrenean intra-basement thrust. The vertical exaggeration is small (about 3) below the sea bed but the scale is close to 1/1 deeper in the seismic section where the velocities are high. The seismic profile is located in Figure 1. B. Seismic profile crossing the central graben of the Gulf of Lion. This profile shows a half-graben filled in by Aquitanian synrift sediments. A prominent reflector is correlated to the intra-Aquitanian break-up unconformity. The conspicuous deep reflections (arrows) at about 4 seconds two-way travel time, below the listric fault (left side) and below the horst (right side), could be linked to Eocene thrusting. The profile is located in Figure.



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Hydrogéologie/Hydrogeology

Convection et échange en milieu poreux : d'une solution asymptotique à l'autre

Claude THIRRIOT

Résumé — En négligeant les phénomènes de diffusion ou de dispersion, on met en évidence l'influence de la vitesse de convection et du coefficient d'échange entre fluide et solide sur l'évolution d'une perturbation de température ou de concentration tout au long de son déplacement dans un milieu poreux. A partir de développements asymptotiques est calculée une célérité du maximum de l'onde due à une impulsion à l'entrée du milieu poreux.

Transition between the two asymptotic behaviours in a porous media phenomenon

with convection and exchange

Abstract — During thermal or chemical transport phenomena in porous media, the apparent velocity of transport or convection — taken as that of the displacement of the maximum — can change following the value of the exchange coefficient.

After showing the extreme cases, the simplified problem is solved in analytical form by using asymptotic solutions.

With the use of dimensionless parameters and variables, a unique graph is obtained to describe the displacement of the maximum value when the entrance boundary condition is an impulsion.

Abridged English Version — This study aims at showing the effect of exchange between a moving fluid and a porous solid material. The variable examined may be either the temperature or a chemical concentration ([2] to [5]). The diffusion on hydrodynamical dispersion is neglected in order to grasp easily the specifie aspects of this phenomenon.

For instance, for a thermal phenomenon the notations used are as follows: x, abscissa; t, time; P, porosity ratio; C and C, thermal capacities respectively for fluid and solid matrix; T and T', temperatures of fluid and solid; p and p', densities; H, exchange coefficient between fluid and solid matrix; u, mean real fluid velocity assumed constant.

From the physical equations (1) and (2), we obtain equations (7) and (8) valid also for chemical transport phenomena with exchange.

The objective is to examine the evolution of the solution to transit from the asymptotic solution without exchange to the other asymptotic solution with an infinite exchange coefficient (Fig.).

In the first case, a steep thermal or chemical front runs without deformation at the fluid speed.

Note présentée par Lucien MALAVARD. 0249-6305/89/03080969 $ 2.00 © Académie des Sciences


970 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 969-9774, 1989

In the second case, the same steep front runs again without deformation but at a reduced speed u/(1 +<X).

With an exchange coefficient of finite value, a deformation of the front appears. The propagation velocity may be shown by the velocity of the inflexion point of the (T, t) curve, moving along x.

The velocity is the same as the velocity of the maximum value provided by an impulse at the porous media entrance. The analytical computation is presented in the impulse case (but the steep front response would be directly obtained by simple integration).

The solution depends on Bessel functions (1) but it can be expanded in series for short enough times [equation (18)] or for very long times [equation (20)]. Both these two analytical expansions meet very well.

For instance, for a steep front at the porous media entrance, the solution is:

The analytical resuit allows us to compute the velocity of the maximum for impulse response (or of the inflexion point for steep front response). This velocity varies from u/(1+3oc/2) to u/(1+OC).

1. DÉFINITION DE L'OBJECTIF. — L'objet de l'étude est la mise en évidence de l'effet de l'échange entre un fluide en mouvement et une matrice solide. La grandeur considérée peut être la température ou une concentration ([2] à [5]). Pour cerner plus aisément les aspects spécifiques, on supposera négligeables la dispersion hydrodynamique ou la diffusion.

2. ÉQUATIONS. — Avec les notations suivantes : x, abscisse (éventuellement curviligne); t, temps; P, porosité; C et C, capacités calorifiques du fluide et de la matrice solide; T et T', températures du fluide et du solide; p et p', masses volumiques du fluide et du solide; H, coefficient d'échange entre fluide et matrice solide; u, vitesse moyenne réelle du fluide supposée constante, et l'hypothèse de dispersion négligeable et de cinétique linéaire d'échange, on obtient le modèle mathématique classique


C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 969-974, 1989 971

Un modèle identique serait obtenu pour la concentration [3].

3. SOLUTION IMAGE DONNÉE PAR LA TRANSFORMÉE DE LAPLACE. — Soient T et T' les images telles que

Les équations images sont, en supposant T et T' nuls pour t<0

En supposant que l'image à la frontière soit T0, la solution est :

4. EXAMEN DES CAS ASYMPTOTIQUES. — (a) h -* 0, pas d'échange avec la matrice poreuse

C'est la situation classique du problème hyperbolique du premier ordre ou de l'onde cinématique simple. (b) h -* oo, l'échange est infiniment rapide

On retrouve le modèle de l'onde cinématique mais avec une vitesse de déplacement u/(1 + a)

La question spécifique examinée dans cette Note est celle du raccordement entre ces deux comportements asymptotiques.

5. COMPORTEMENT POUR t PETIT. — Dorénavant, nous supposerons que la perturbation à l'entrée du milieu poreux est une fonction impulsion. Compte tenu de la linéarité de l'opérateur par produit de convolution, on pourrait construire toute réponse à partir de la réponse impulsionnelle.

L'image impulsionnelle est

Séparons e x/u) p qui correspond à la translation à vitesse u. Introduisons des grandeurs réduites


972 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 969-974, 1989

La partie perturbée de l'image est

Soit i? 1 l'opérateur de retour à l'original

Or, d'après Angot [1]

En clair, si x' t' reste petit, on peut envisager d'utiliser le développement limité

Il faut bien remarquer que dans la formule d'inversion de Mellin Fourier il intervient l'élément différentiel d p' = axdp donc l'expression de l'original en grandeurs réelles sera

(T0 échelle de la perturbation à l'entrée)

Pour obtenir la solution réelle, il reste donc à multiplier par h/a la partie finie de y (car pour l'impulsion il y a aussi multiplication du laps de temps par a/h ce qui maintient la valeur unité).

6. COMPORTEMENT POUR t GRAND. — A partir de l'expression générale de la fonction de Bessel (Angot [1]) il vient pour x't'> 1

d'où le développement asymptotique

Après vérification numérique, il s'avère qu'il y a un excellent recouvrement des deux développements asyptotiques obtenus pour t petit et t grand.

7. ÉTUDE DES MAXIMUMS. — Un premier maximum caractérisé par e~x' 8(t') est séquelle de la convection pure (h = 0). Il disparaît quand x' est grand.


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L'étude graphique et le développement limité montrent qu'il ne peut y avoir un second maximum que pour x'>2 à la date approximative (si x'—2«1)

Cas x' très grand. — Une première approximation de la localisation du second maximum correspond à x' — t'. Alors

En meilleure approximation, on peut considérer

soit avec les grandeurs réelles

On vérifie aisément que

t* échelle de temps.

Si on considère une perturbation échelon à l'entrée du milieux poreux, la réponse indicielle intégrale de la réponse impulsionnelle fait donc apparaître une variation très rapide de 0 à 1 de la fonction T/T0 à l'abscisse x au temps t correspondant à t'~x' c'est-à-dire

ce qui est l'indice de la convection apparente avec la vitesse réduite u/(l + a).

8. CÉLÉRITÉ DE DÉPLACEMENT DU SECOND MAXIMUM. — A partir de la fabulation de la série et de l'expression asymptotique pour x' grand, nous avons construit le graphe x's (f) et nous proposons l'expression approchée suivante qui respecte les tendances asymptotiques pour t' petit et t' grand avec privilège de la simplicité des coefficients sur la précision (qui reste tout de même très convenable)

d'où la célérité de déplacement c du maximum qui évolue de 2/3 à 1. En grandeurs physiques, la célérité du second maximum est :

La célérité du second maximum plus faible que celle du premier maximum, augmente au cours de sa propagation de la valeur u/(1 +3 a/2) à u/(1 + a).

9. ÉVOLUTION DE LA PERTURBATION ET AMPLITUDE DU SECOND MAXIMUM. — Tandis que l'impulsion frontale s'amenuise, la deuxième bosse tend assez vite (dès x' > 10) vers la courbe en cloche de Gauss dont l'échelle égale à l'écart-type, est /2x'.


974 C R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 969-974, 1989

La prise en compte des tendances asymptotiques conduit à l'approximation de la valeur maximale :

10. EXPLOITATION PHYSIQUE. — Entre les deux cas asymptotiques h=0 (convection pure à vitesse u) et h -> oo (convection apparente à vitesse réduite u/(\ -\-a) après l'atténuation du premier maximum (qui se déplace à la vitesse u) le phénomène sera marqué en une abscisse x par le passage d'une onde relativement étalée qui donnera l'illusion de la diffusion bien que celle-ci ne soit pas inscrite dans le modèle mathématique. Le fait que l'écart-type varie comme la racine carrée de la distance x' renforce encore l'analogie avec la dispersion particulaire par exemple. On voit donc la difficulté pour ne pas dire l'ambiguïté de la distinction dans l'estimation des paramètres u, H et D (diffusivité) à partir de l'enregistrement dans le temps en quelques rares sections du milieu poreux cylindrique.

11. CONCLUSIONS. — Ainsi, dans un phénomène de transport avec échange idéal (sans diffusion ni dispersion), une perturbation temporaire à l'entrée du milieu poreux provoque d'abord la propagation d'un premier maximum qui s'étiole peu à peu, alors qu'un deuxième maximum apparaît et s'accélère jusqu'à la vitesse limite u/(1 +a).

Note remise le 24 octobre 1988, acceptée après révision le 31 janvier 1989.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

[1] A. ANGOT Compléments de mathématiques à l'usage des ingénieurs de l' électrotechnique et des télécommunications, Masson, Paris, 1972, p. 390-393.

[2] K. FUJINAWA, Asymptotic solutions to the convection-dispersion équation and Pawell's optimization methods for evaluating ground-water velocity and dispersion coefficients from observed data of single dilution tests, Journal of Hydrology, 62, 1983, p. 333-353.

[3] K. FUJINAWA, Mathematical model for contaminant transport subject to chemical reaction in flowing groundwater. Actes du Ve Colloque International sur les Eaux Souterraines, Taormina, 17-21 novembre 1985, C.E.M.P.E., Catane, Italie.

[4] R. GUENNELON et A. M. de COKCBORNE, Transferts de solutés dans un milieu poreux, Étude de pores cylindriques, Étude expérimentale, Science du sol, I, 1982, p. 71-87.

[5] M. M. PELLERIN-MAUBOURGUET, Contribution à l'étude de la simulation numérique des transferts de chaleur conjugués, Thèse de 3e cycle, Institut national Polytechnique de Toulouse, 1977.

Institut de Mécanique des Fluides, Laboratoire 005, associé au C.N.R.S., 2, rue Camichel, 31071 Toulouse Cedex.


C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 975-980, 1989 975

Paléontologie/Paleontology

Iemanja palma n. g., n. sp., Gyrodontidae nouveau

(Pisces, Actinopterygii) du Crétacé inférieur

de la Chapada do Araripe (N-E du Brésil)

Sylvie WENZ

Résumé — Un nouveau genre et une nouvelle espèce, lemanja palma, sont décrits d'après un matériel inédit provenant de la Chapada do Araripe et trouvé dans les nodules de la partie inférieure du membre Romualdo, Formation Santana (Aptien-Albien). Ce taxon confirme le caractère endémique de la faune de la Chapada do Araripe et augmente le nombre de Pycnodontiformes ayant pu coloniser des eaux d'origine continentale.

Iemanja palma n. g., n. sp., a new Gyrodontidae (Pisces, Actinopterygii) in the Lower

Cretaceous of the Chapada do Araripe (N-E Brazil)

Abstract — A new genus, new species, Iemanja palma, is described on the basis of a new material from the Chapada do Araripe, and found in nodules of the lower part of the Romualdo Member, Santana Formation (Aptian-Albian). This new taxon confirms the endemicity of the fauna from the Chapada do Araripe and increases the number of Pycnodontiforms which may have colonized waters of continental origin.

Abridged English Version — The fossil localities of the Chapada do Araripe in northeast Brazil have been famous since early in the XIXth century for their well preserved fauna. The Chapada do Araripe is a plateau of about 150 km from east to west and 30 to 50 km from north to south, situated on the boundary between the states of Ceara and Pernambuco and reaching the state of Piaui in the west. The Santana Formation, which has yielded the fossil-bearing concretions, is divided into three members : Crato (lower), Ipubi (middle) and Romualdo (upper). The nodules corne from a marly layer at the base of the Romualdo member. The age of the nodules is considered, according to various authors, as Aptian ([1], [2]) or Albian [3]), on paleontological grounds. Recent syntheses ([4], [5]) suggest an undifferentiated Aptian-Albian complex.

The nodules have yielded an abundant vertebrate fauna, fishes and reptiles, associated with plants and non-marine ostracods [6]. Until now, just one species of pycnodonts, Proscinetes ( = Microdon) penalvai, has been recorded from the Chapada do Araripe [7].

The new form, Iemanja palma, is represented by a complete acid-prepared skeleton and two extra specimens. It has been identified as a gyrodontid on the basis of a complete dermal cover of the skull, without fenestra (character of gyrodontids if Coelodus is excluded) and the lack of cephalic spine.

As in derived pycnodontiforms, gyrodontids are distinguished from the brembodontids by the loss of fringing fulcra and by few incisiform teeth (except for Mesturus).

I. palma is essentially distinguished from the other genera in the family by the body shape, the vertebral and fin formula and the following combination of characteristics:

— posterior parietal process present (known with certainty in Proscinetes, Macromesodon and pycnodontids);

— reduced infraorbitals (unknown in Mesturus);

— separate lateral ethmoid and mesethmoid;

— single preopercular (two in Eomesodon and some species of Macromesodon);

Note présentée par Jean PIVETEAU. 0249-6305/89/03080975 $2.00 © Académie des Sciences


976 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 975-980, 1989

— antero-posteriorly elongated vomer and mandibula; numerous, subcircular, smooth teeth which are arranged irregularly except in the posterior region of the vomer where teeth are elongated and arranged regularly in three longitudinal series;

— neural and haemal arches partially extending along the notochord (different from gyrodontids);

— neural arches or haemal arches linked together through anterior and posterior claviform processes;

— squamation restricted to the antero-ventral region of the body (different from Mesturus, Gyrodus and, to a lesser extent, from Eomesodon).

Most of the characteristics of I. palma recall the gyrodontids but neural and haemal arches extending along the notochord occur in pycnodontids. Among the gyrodontids, I. palma must be compared to the group including Proscinetes and Macromesodon. The characteristics of dentition and the type of articulation between adjacent neural or haemal arches justify the creation of a new genus. In the present state of our knowledge, gyrodontids, which include more than twelve genera, are defined on the basis of primitive characteristics. No derived characteristics common to all gyrodontids being known, the family seems to be heterogeneous. I. palma confirms the endemicity of the Chapada do Araripe fauna. It is one of the relatively rare pycnodonts which may have colonized, regularly or from time to time, waters of continental origin.

INTRODUCTION. — La Chapada do Araripe, plateau de 150 km de long sur 30 à 50 de large, est située dans le Nord-Est du Brésil à la limite des états de Ceara, Pernambuco et Piaui. La Formation Santana, qui a livré les nodules fossilifères, est divisée en 3 membres : Crato (inférieur), Ipubi (moyen) et Romualdo (supérieur). Situées au-dessus du gypse (membre Ipubi), les argiles qui contiennent les nodules correspondent à la base du membre Romualdo. Elles sont, suivant les auteurs, considérées comme d'âge Aptien ([1], [2]) ou Albien [3] pour des raisons d'ordre essentiellement paléontologique ou, selon les synthèses récentes ([4], [5]), comme appartenant à un ensemble Aptien-Albien indifférencié.

Les nodules ont livré de nombreux Vertébrés, Poissons et Reptiles, associés à des Plantes et à des Ostracodes non marins [6]. Jusqu'à présent, une seule espèce de Pycnodontes, Proscinetes ( = Microdon) penalvai Silva Santos [7], avait été signalée à la Chapada do Araripe.

Actinopterygii

Gyrodontidae

Iemanja n. g. Espèce-type : Iemanja palma. Diagnose : genre monospécifique, cf. diagnose de l'espèce.

Iemanja palma n. sp.

Holotype : Museum national d'Histoire naturelle, Paris, MNHN BCE 166 a et b.

Locus typicus : Chapada do Araripe, N-E Brésil.

Stratum typicum : base du membre Romualdo, Formation Santana, Aptien-Albien.

Derivatio nominis : lemanja, divinité du culte afro-brésilien dont le nom signifie mère des Poissons et palma, cactus local en forme de raquette.


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Matériel : 3 individus.

Diagnose : Gyrodontidae subdiscoïde de moyennes dimensions; longueur standard atteignant 28 cm (holotype); longueur de la tête et hauteur maximale du corps représentant respectivement plus du 1/3 et environ les 4/5 de la longueur standard; fente buccale horizontale, toute entière située sous la région préorbitaire; mâchoires prognathes; profil frontal concave; os infraorbitaux régressés; ethmoïde latéral et mésethmoïde indépendants; préopercule unique, quadrangulaire, vertical, aussi large que haut; grande lacune d'ossification entre le bord dorsal du préopercule et le bord latéral du toit crânien; opercule étroit en forme de croissant effilé à son extrémité ventrale; allongement antéro-postérieur du vomer et des mandibules; vomer long, étroit, à bord oral fortement convexe; dents à surface orale lisse; mandibules, deux tiers antérieurs et faces postérolatérales du vomer pourvues de dents petites, nombreuses, subcirculaires et disposées irrégulièrement; tiers postéro-médian du vomer muni de dents disposées régulièrement selon 3 rangées principales (1 médiane et 2 latérales) de 7/8 dents chacune et flanquées de 2 rangées latéroexternes accessoires réduites (4/5 dents), seules quelques dents de la rangée médiane élargies en pavés; nombre total d'éléments vertébraux s'élevant à 36/38 paires dorsoventrales plus ou moins complètes : 4/5 épines neurales rattachées au crâne, 12 paires d'éléments abdominaux, 12/13 paires d'éléments postabdominaux, 6 éléments épichordaux et 9 hypochordaux participant au soutien de l'exosquelette caudal; base indentée des arcs neuraux et hémaux entourant partiellement la notochorde dans les régions abdominale et postabdominale et l'entourant complètement dans la région caudale; chaque épine neurale ou hémale doublée par des expansions lamellaires, antérieure et postérieure, très développées; arcs neuraux unis entre eux par l'intermédiaire de processus uniques, antérieur et postérieur, en forme de massues dans les régions antérieure et moyenne du tronc, chaque tête de côte articulée avec celle qui la précède et qui la suit; endosquelette caudal formé de 6 épines neurales complètes et 9 épines hémales + hypuraux, les 3 derniers hypuraux élargis, en forme de plaques triangulaires, 2 urodermaux; forte hypurostégie des lépidotriches de la nageoire caudale; exosquelette caudal formé de 5 rayons marginaux dorsaux et 6 ventraux, 21 rayons principaux dont 19 dichotomes; nageoires impaires reportées sur la deuxième moitié du tronc en arrière de la hauteur maximale du corps; dorsale : 42 axonostes; anale : 40/42 axonostes; revêtement écailleux localisé à la région antérieure du corps en avant des nageoires impaires; 12/13 rangées d'écailles complètes, restreintes à la région antéroventrale du corps; écailles du champ antérodorsal réduites aux côtes d'articulation.

Les Pycnodontiformes comprennent 4 familles : Brembodontidae, Gyrodontidae, Pycnodontidae et Coccodontidae. Seule la dernière, très spécialisée, semble former un groupe naturel. De même que Pycnodontidae et Coccodontidae, les Gyrodontidae se distinguent des Brembodontidae par la perte des fulcres frangeants des nageoires impaires et, exception faite de Mesturus, la diminution du nombre des dents incisiformes. Les Gyrodontidae sont définis par le degré d'ossification du squelette axial, l'absence de fenêtre dans la couverture dermique du crâne — si on considère Coelodus comme un Pycnodontidae et non comme un Gyrodontidae [8] — et l'absence d'aiguillon occipital. Telle qu'elle est définie actuellement, la famille des Gyrodontidae est fondée sur des caractères primitifs. Les caractères qui semblent dérivés (présence d'une apophyse pariétale, régression des infraorbitaux, allègement du revêtement écailleux) ne sont connus que chez certains Gyrodontidae (ensemble formé par les espèces de Proscinetes, Macromesodon et espèces affines). Dans l'état actuel de nos connaissances, les Gyrodontidae apparaissent ainsi comme un groupe particulièrement artificiel.


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Iemanja palma. — 1 : détail de la région postérieure de la mandibule gauche, 2 : tête en vue latérale, MNHN BCE 166a, 3 : vue générale, Departamento national da Produçao Mineral, DGM-DNPM 1160P. LEth, ethmoïde latéral; Md, mandibule; MEth, mésethmoïde; Op, opercule; Pop, préopercule; Vo, vomer.

lemanja palma. — 1: detail of the posterior region of the left mandibula, 2: skull in lateral view, MNHN BCE 166 a, 3: general view, DGM-DNPM 1160P. LEth, lateral ethmoid; Md, mandibula; MEth, mesethmoid; Op, opercular; Pop, preopercular; Vo, vomer.


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lemanja palma rappelle les Gyrodontidae, Proscinetes penalvai l'autre Pycnodontiforme de la Chapada inclus, par les caractères suivants :

1. présence d'une couverture dermique du toit crânien complète (caractère propre aux Gyrodontidae si on en exclut Coelodus); 2. présence d'un processus pariétal postérieur (connue avec certitude chez Proscinetes, Macromesodon et les Pycnodontidae); 3. régression des infraorbitaux (différent de Mesturus); 4. nombre (36/38) d'éléments vertébraux (comparable chez la plupart des Gyrodontidae et certains Pycnodontidae, inférieur chez les Brembodontidae); 5. nombre relativement peu élevé d'axonostes (D : 42; An : 40/42) et de lépidotriches aux nageoires impaires (différent des Brembodontidae — axonostes et lépidotriches moins nombreux — et des Pycnodontidae — axonostes et lépidotriches plus nombreux); 6. extension du revêtement écailleux (différent de Gyrodus, Mesturus et à un moindre degré Eomesodon); 7. absence d'épines céphaliques (différent des Coccodontidae).

Iemanja palma se distingue des Gyrodontidae tels qu'ils sont actuellement définis par le degré d'ossification du squelette axial : la base des arcs neuraux et hémaux entoure presque complètement la notochorde dans les régions abdominale et postabdominale (caractère partagé par P. penalvai) et complètement dans la région caudale (disposition rappelant partiellement celle des Pycnodontidae).

Iemanja se distingue de tous les autres Pycnodontiformes par la coexistence des caractères suivants dont certains lui sont propres :

1. réduction des os de la joue, notamment celle des infraorbitaux (connue également chez d'autres Gyrodontidae) et réduction du préopercule (connue à des degrés divers chez les Gyrodontidae mais spécialement avancée chez Iemanja); 2. présence de 2 unités distinctes dans la région ethmoïdienne, ethmoïde latéral et mésethmoïde; 3. allongement antéro-postérieur du vomer et des mandibules; 4. denture caractérisée par la multiplication du nombre des dents, la quasi-absence de dents en forme de pavés et la disposition irrégulière des dents (seuls les dents postérieures de la rangée médiane du vomer sont disposées selon des rangées régulières); 4. le système d'articulation entre 2 éléments vertébraux consécutifs, chaque arc étant caractérisé par la présence de processus, en forme de massue, l'un antérieur, l'autre postérieur.

L'ensemble des caractères de Iemanja rappelle les Gyrodontidae mais le degré d'ossification du squelette axial s'apparente partiellement à celui des Pycnodontidae. Parmi les Gyrodontidae, I. palma doit être comparé à l'ensemble formé par les nombreuses espèces des genres Proscinetes et Macromesodon, la denture et le système d'articulation entre arcs neuraux et hémaux adjacents justifiant une coupure générique nouvelle.

CONCLUSION. — L'ichthyofaune du Crétacé inférieur de la Chapada do Araripe s'est enrichie d'un taxon nouveau, Iemanja palma, rapporté à la famille des Gyrodontidae et qui confirme le caractère endémique de cette faune.

Typiquement marins au début de leur histoire géologique (Paléozoïque supérieur, Trias supérieur), et souvent considérés comme exclusivement marins, voire plus ou moins inféodés à la vie récifale, les Pycnodontiformes ont peuplé avec succès les mers du Jurassique supérieur et du Crétacé inférieur, les derniers représentants du genre datant de l'Éocène. Iemanja est un exemple de plus de ces formes, relativement rares, qui ont colonisé, régulièrement ou temporairement, des eaux d'origine continentale.

Note remise le 24 octobre 1988, acceptée après révision le 7 février 1989.


980 C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, p. 975-980, 1989

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

[1] K. BEURLEN, An. Acad. bras. Cienc, 38, (314), 1966, p. 455-464. [2] R. DA S. SANTOS et J. G. VALENÇA, An. Acad. bras. Cienc, 40, (3), 1968, p. 339-360. [3] M. R. LIMA, An. Acad. bras. Cienc, 51, (3), 1979, p. 545-556. [4] H. E. ASMUS et D. DE A. CAMPOS, Zitteliana, 10, 1983, p. 265-276.

[5] C. SCHOBBENHAUS et D. DE A. CAMPOS, In C. SCHOBBENHAUS et coll. éd., Geologia do Brasil, Brasilia, D.N.P.M., 1984, 501 p. [6] R. H. BATE, Palaeontology, 15, 1972, p. 379-393. [7] R. DA S. SANTOS, An. Acad. bras. Ciene, 42, (3), 1970, p. 445-452. [8] J. BLOT, Studi e Ricerche sui giacimenti Terziari di Bolca, 5, 1987, 209 p.

Institut de Paléontologie, U.A. n° 12, C.N.R.S., Muséum national d'Histoire naturelle, 8, rue Buffon, 75005 Paris.


COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES

23, quai de Conti. 750D6 Paris (France). Tel. (33.1)43.26.66.21 ; Télex 206 521 F; Telefax (33.1) 43.54.63.99.

INSTRUCTIONS TO AUTHORS

A Note in the Comptes rendus is the first report of an important discovery or a significant new result. It is rapidly published. It must be submitted by a Member, a Foreign Associate or a Corresponding Member of the Academy.

Languages used and presentation

Notes for the Comptes rendus are usually published in French. They must be clear, within the comprehension of the majority of specialists and distintly highlight the originality of the results (*).

The French text must not exceed 4 pages in length, including tables and figures.

However, a "Note" may be bilingual and include an "Abridged English Version" of at least one but not more than two printed pages, which refers to the figures, tables and bibliographical entries. In this case, the total length including, figures and tables etc. may extend to 6 pages.

Foreign authors may submit a "Note" written in English (other languages using latin characters may be accepted upon request), on condition that they include an Abridged French Version of at least one page, which refers to the figures, tables and bibliographical entries. In this case, the total length of the Note (including title, figures, tables, etc.) may extend to 6 printed pages.

If necessary, and with the authorization of one of the Permanent Secretaries of the Academy, one or two additional pages of figures may be added to the "Note". These additional plates must be submitted with a final layout and are published at the authors' expense.

Advisory Board

The Permanent Secretaries are responsible for the publication of the Comptes rendus. They are assisted by an Advisory Board which may suggest to refer to specialists in the field and may also request that the author(s) amend their initial text. They make the final decision regarding acceptance of the "Note". The date on which the manuscript is submitted and the date of its final acceptance ne varietur are indicated at the end of the printed text.

Contents of the "Note"

As a rule each "Note" should include the following items:

1. the heading denoting, in French and English, the scientific field under which it is to be published (**) (where applicable, a second heading for cross-reference in the tables of contents may be given);

2. the title in French;

3. the first names, followed by the surname, of the author(s);

4. a short Abstract in French (called "Résumé");

5. the title and a short Abstract in English;

6. if desired, an Abridged English Version;

7. the text of the "Note";

8. the captions for the tables and Figures in both French and English;

9. a numbered list of references in the order cited in the text. Each reference is to show the author(s)' first initial and surname, title of the review, volume, year, first and last pages of the article (for "Notes" in Series I, the complete title of the article should also be given);

10. the mailing address and phone number, of the author(s) or Laboratories;

11. the name, address, phone, telex and telefax number of the person to whom the texts are to be sent for proof-reading.

Foreign authors who Write their "Note" in English (or in another language) (§ 7 above), must include an Abridged Version in French (substituted for § 6 above) and captions for tables and figures in French, as indicated in § 8 above.

Technical Requirements

A "Note" must be typed, doubîe-spaced and submitted in two copies.

A printed page for the Comptes rendus consists of 47 lines of 85 letters, symbols or spaces. The Abstract and Résumé are printed in small letters (95 letters or spaces per line). Titles, abstracts, tables, figures captions and bibliographie entries must be included in the total number of pages allowed.

— The originals of the figures must be submitted with letters and numbers large enough to allow for réduction. No document should exceed 21 X 30 cm.

— Internationally accepted units should be used (**).

— Mathematical equations must be clearly written (typed if possible), especially sub- and superscripts.

— The meaning of uncommon symbols should be specified in the margin or on a separate list. Special instructions and explanations for the printer are to be noted on a separate sheet attached to the manuscript.

— No sentence may begin with a mathematical formula.

— Footnotes are to be avoided. However, if they must be used, they should be numbered differently from the references and will appear at the end of the text, before the bibliography.

Proof-reading

Only typographie corrections may be made on the proofs. Corrected proofs should be sent to the Academy of Sciences by return mail, along with the manuscript (Service of the Comptes rendus, 23, quai de Conti, 75006 Paris).

Reprints

Twenty-five reprints will be sent to the author(s) free of charge. Additional copies may be obtained, at the author's expense, provided an order is included when the corrected proofs are returned to the printer.

(*) Due to the brevity required, it may not always be possible to include all the conclusive experiments or the complete proof of the results obtained, especially in Series I. Therefore, we recommend that a text, typed if possible, be enclosed in support of the "Note", providing the supplementary information needed for a thorough understanding, in order that the submitting Member might easily examine the "Note". This document will be kept at the Academy for five years so that, on request, any Comptes rendus reader may have access to it. In this case, a footnote will appear at the end of the "Note" stating "this the succinct version of a text on file for five years in the Academy Archives. Copy available upon request."

(**) The list of Headings and tables of international units appear in the first issue of each Volume.

COMPTES RENDUS DE L'ACADEMIE DES SCIENCES

Series I: Mathematics ; Series II : Mechanics, Physics, Chemistry, Earth Sciences, Space Sciences ; Series III : Life Sciences.

Subscription Rates. Foreign Countries 1989 Vol. 308 + 309-40 numéros

One series 3 450 F For foreign countries, subscription rates include surface mail charges. For faster

Two seres 6210 F delivery, please mark your order "Air Mail charges invoiced in addition". For

Three series (I, II, III) 7770 F 1989, all subscribers receive a free service of Serie générale "La Vie des Sciences".

La Vie des Sciences : Institution 490 FF/Individual 294 FF

Subscriptions should be sent to : C.D.R., Centrale des Revues, 11, rue Gossin, 92543 Montrouge Cedex, France

Spécimen copy on request

Version française p. 2 de couverture


COMPTES RENDUS

DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES

MECANIQUE-PHYSIQUE-CHIMIE SCIENCES DE L'UNIVERS-SCIENCES DE LA TERRE,

Contents with English abstracts I, III

1989 — Tome 308 — Série II — n° 10

Mécanique des solides

Conditions de bifurcation à l'intérieur et aux frontières pour une classe de matériaux non-standards. Ahmed BENALLAL, René BILLARDON et Giuseppe GEYMONAT 893

Mécanique des solides

(voir tome 308, série I, 1989, p. 293)

Endommagement, fatigue, rupture

Branchement des fissures sous compression uniaxiale. Michel BARQUINS, Khereddine GHALAYINI et JeanPierre PETIT 899

Physique des surfaces et des interfaces

Croissance de cristaux en aiguille avec écoulement axial : lois d'échelle. Martine BEN AMAR et Yves POMEAU 907

Physico-chimie

Caractéristiques statistiques de la température dans une couche limite réactive. Mohieddine BOUTOUILI, Michel CHAMPION, Pascal BRUEL et Jean-Claude BELLET 915

Synthèse organique

Activation du carbone anomère des sucres par le groupe carbonate et application en synthèse osidique. Marc BOURSIER et Gérard DESCOTES 919

Cristallochimie

Préparation chimique et données cristallographiques sur un nouveau diphosphate de l'éthylène diamine. Slaheddine KAMOUN, Amor JOUINI et Abdelaziz DAOUD 923

Minéralogie

Argent et thallium dans les sulfosels de la série de la sartorite (Gisement de Lengenbach, vallée de Binn, Suisse). Assia LAROUSSI, Yves MOËLO, Daniel OHNENSTETTER et Daria GINDEROW 927

Géologie marine

Datation d'une vasière de plate-forme atlantique au débouché d'un estuaire : la vasière à l'Ouest de la Gironde (France) est d'âge historique (VIe siècle à nos jours). Patrick LESUEUR, Olivier WEBER, Laurence MARAMBAT, Jean-Pierre TASTET, Jean-Marie JOUANNEAU et Jean-Louis TURON 935

Géologie

Fluctuations des taux d'accumulation des sédiments de l'Atlantique Sud au cours des 120 derniers millions d'années. Michel STEINBERG 941

Incursions de microfaunes alpines dans le Trias des Iles Baléares et des Pyrénées espagnoles. Daniel VACHARD, Jean-Paul COLIN, Joan ROSELL et Peter HOCHULI 947

Tectonique albienne dans les gisements de bauxites des Pyrénées ariégeoises (France) en relation avec l'évolution géodynamique de la marge passive européenne. Pierre-Jean COMBES et Bernard PEYBERNES 953

Tectonique

Compression, décrochements et distension sur le pourtour méditerranéen nord-occidental. Alain MAUFFRET et Maurice GENNESSEAUX 961

Hydrogéologie

Convection et échange en milieu poreux : d'une solution

asymptotique à l'autre. Claude THIRRIOT. ....... 969

Paléontologie

Iemanja palma n. g., n. sp., Gyrodontidae nouveau (Pisces, Actinopterygii) du Crétacé inférieur de la Chapada do Araripe (N-E du Brésil). Sylvie WENZ. 975

Micropaléontologie

(voir tome 308, série II, 1989, p. 947)

Les « Comptes Rendus de l'Académie des Sciences » figurent dans « Current Contents » et « Pascal »

3899-89 Dépôt légal mars 1989 : Imprimeur 3300 — CPPP 60384 — Imprimé en France