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Titre : Mutilation des organes génitaux par un éclat d'obus compliquée de deux autres blessures et d'une fistule vésico-rectale : présenté à la Société de chirurgie de Paris (séance du 23 janvier 1856), par M. Larrey
Auteur : Larrey, Hippolyte (1808-1895). Auteur du texte
Éditeur : impr. de H. Plon (Paris)
Sujet : Organes génitaux mâles -- Maladies
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb30743877x
Type : monographie imprimée
Langue : français
Langue : Français
Format : In-8° , 5 p.
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Description : Avec mode texte
Droits : Consultable en ligne
Droits : Public domain
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5661010s
Source : Bibliothèque nationale de France, département Sciences et techniques, 8-TD121-30
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 02/11/2009
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MUTILATION
DES
ORGANES GÉNITAUX PAR UN ÉCLAT D'OBUS
COMPLIQUÉE DE DEUX AUTRES BLESSURES
ET
D'UNE FISTULE VÉSICO-RECTALE,
PRÉSENTÉ A LA SOCIÉTÉ DE CHIRURGIE DE PARIS
s (SÉANCE DU 23 JANVIER 1856)
^A.R M. LARREY,
J'ai eu l'honneur de présenter à la Société, dans Favant-dernière séance, un blessé de Crimée qui a perdu la totalité du pénis et l'un des testicules par un coup de feu, et chez lequel une fistule vésico-rectale est survenue secondairement.
L'intérêt que ce cas compliqué me semblait offrir m'a décidé à en rédiger moi-même l'observation d'une manière plus complète que je n'ai pu le faire dans un simple exposé verbal, afin d'en donner lecture à la Société (1).
Le nommé C..., gendarme de la garde impériale, atteint déjà d'un coup rie feu à la cuisse droite et d'un coup de baïonnette à la fesse du même côté, ramenait un prisonnier russe vers la tranchée, lorsqu'en se retournant pour s'assurer de lui, il se sent frappé aux parties génitales par un éclat d'obus. La douleur instantanée, agissant comme une commotion vive, lui fait perdre connaissance. Il revient à lui, et, à côté de ses vêlements déchirés, ensanglantés, il voit que son pénis a été entiè(1)
entiè(1) observation , extraite des Bulletins de la Société de chirurgie, a éié recueillie en raè.nc temps par un stagiaire du V'al-de-Gràce, M. Thémoin, pour sa thèse sur les plaies de la région scrotalc.
— 2 — rement détaché ; il essaye en vain de se relever, et ne se traîne qu'avec peine jusqu'à la tranchée, où il s'évanouit encore en perdant beaucoup de sang. Les premiers secours de la chirurgie ne peuvent lui être donnés que plusieurs heures après sa blessure, et lorsque l'hémorrhagie s'est arrêtée.
On constate alors vers le côté gauche des bourses une large plaie étendue à la face interne et supérieure de la cuisse jusqu'à la région inguinale correspondante, et empiétant même par en haut sur le pubis droit, tandis que par en bas elle intéresse le périnée jusqu'au-devant de l'anus, en se rapprochant d'une seconde plaie étroite-et profonde produite par un coup de baïonnette. Une troisième blessure résulte d'un coup de feu par une balle qui a entamé la cuisse .sans pénétration au tiers moyen de sa face interne.
Quant à l'éclat d'obus, il a emporté la totalité de la verge à sa racine , ainsi que le testicule gauche, dont le cordon s'est rétracté dans l'aine.
Le testicule droit subsiste, mais tout à fait dénudé , faisant hernie dans la plaie à travers la cloison déchirée du dartos, et maintenu seulement par le cordon intact. On conserve cet organe après quelque hésitation à le sacrifier. Il n'y a point de fracture au bassin.
Le blessé a uriné sans effort avant même de recevoir les premiers secours , mais toutes les tentatives pour introduire une sonde dans la vessie échouent complètement; l'orifice de l'urètre , rétracté sous le pubis, ne peut même être retrouvé au milieu des lambeaux altrits et tuméfiés de la plaie. On se contente de la régulariser autant que possible; le testicule est remis à peu près en place et soutenu par l'appareil du pansement, qui ménage une sorte d'hiatus pour l'écoulement d'ailleurs volontaire de l'urine.
La réaction est peu prononcée, si ce n'est pendant un seul jour, avec fièvre et délire, suivi d'une exaltation morale assez vive; mais aussitôt après le calme survient; le blessé souffre peu, et il est évacué sur Constantinople, où on essaye encore de le sonder à diverses reprises sans y réussir.
La plaie, en voie de suppuration, est envahie par la pourriture d'hôpital, qui détruit une nouvelle portion des tissus, résiste à divers traitements et cède à l'application du cautère actuel.
La cicatrisation s'établit enfin au bout de cinq mois , et, lorsqu'elle est à peu près complète, le pauvre mutilé arrive en France. Après s'être arrêté à Marseille, sans pouvoir encore être sondé , il entre au Val-de-Grâce provisoirement en octobre et définitivement en décembre
4 855, dans notre division de clinique , où nous l'examinons plusieurs l'ois. Voici l'état des parties mises à découvert par I'écartement des cuisses :
La bourse droite existe seule ; elle est close , assez développée , se portant à gauche, et contenant un testicule sain , assez ferme et non atrophié. Nul vestige de la verge, même à sa racine sous le pubis; point d'orifice urétral extérieur ou appréciable , ni trace du raphé, qui a été détruit avec le reste du scrotum et le testicule gauche. Mais la portion conservée des bourses, étant renversée à droite , fait voir en dedans et sur la ligne médiane une sorte de cul-de-sac i'nfundibuliforme, allongé verticalement, bordé d'un côté par l'enveloppe tégumentaire, de l'autre par un repli de la cicatrice, recouvert dans le milieu par une pseudo-membrane muqueuse , d'un aspect rougeâtre, humide à sa surface, et aboutissant sous le pubis à une anfractuosité irrégulière, d'où s'écoule l'urine par un pertuis tellement étroit, sinueux et serré, que les bougies les plus fines n'y pénètrent qu'à demi et en provoquant de la douleur. L'ensemble de ces parties représente assez bien dans la position indiquée une apparence d'hermaphrodisme (1).
Voilà pour l'état physique du blessé , dont les conditions physiologiques offrent aussi de l'intérêt. Indiquons-les sommairement.
11 n'a jamais eu de rétention d'urine , malgré l'étroitesse extrême de l'orifice vésical de l'urètre et malgré l'impossibilité absolue du cathétérisme, mais sans doute à cause des adhérences qui empêchent l'oblitération complète de cet orifice. Il urine cependant à volonté , si ce n'est sous l'inûuence du froid, qui semble agir sur le col de la vessie et déterminer une incontinence momentanée. L'urine coule par suintement et non par jet.
Mais une complication secondaire bien fâcheuse est survenue. C'est une fistule vésico-rectale, paraissant dépendre d'une érosion consécutive plutôt que d'une perforation primitive de la vessie, et qui, étant d'ailleurs assez étroite, ne semble pas remonter à une grande hauteur.
Quant au seul testicule restant, loin de s'atrophier, il offre un volume et une consistance notables, en provoquant des désirs , des excitations pénibles, et parfois même des pollutions nocturnes trop reconnaissables pour le malheureux mutilé, qui a femme et enfant.
Ajoutons que cet homme, précédemment plein de courage et d'éner(1)
d'éner(1) dessin fort bien fait par M. le docteur Sarazin , aide-major du Valde-Grâcc, est présenté en même temps que le malade à la Société.
gie, est devenu depuis sa blessure craintif et timide ; son caractère était décidé , il est irrésolu ; il avait l'esprit calme; il est agité; il éprouve de fréquentes insomnies, et alors de la tristesse, de la douleur, ou bien il montre une excitabilité nerveuse et une loquacité incessantes. Sa constitution physique semble elle-même se transformer et offrir déjà quelques-uns des attributs de la femme assignés aux castrats.
Telle est la situation de ce malheureux. Que faut-il faire ou tenter pour la modifier, sinon l'améliorer ?
Convient-il d'inciser, de débrider le pertuis urétral, inaccessible jusqu'ici aux plus petites bougies, pour parvenir dans la vessie et y fixer une sonde, non-seulement afin d'élargir l'orifice urinaire,' mais encore afin de faciliter la cicatrisation de la fistule vésico-rectale ? Mais n'estil pas à craindre que cette opération, assez difficile d'exécution, ne soit incertaine dans son but, soit en détruisant des adhérences qui seules peut-être ont facilité la filtration de l'urine, soit en provoquant une inflammation oblitérante du conduit urétral ?
Y aurait-il une opération d'autoplastie à essayer, avec une portion de la peau restante du scrotum ? Moins encore sans douté, puisqu'il ne subsiste pas de moignon du pénis pour point d'appui, ni même vestige de cet organe.
Ne semble-t-il pas plus rationnel de recourir seulement à un moyen palliatif de cette triste infirmité , si surtout l'incontinence d'urine devient plus fréquente, ou si la fistule vésico-rectale persiste en même temps ? Ce moyen ne serait autre qu'un appareil conducteur ou tube à réservoir adapté à la région sous-pubienne et caché sous les vêtements ? M. Charrière s'occupe d'en confectionner un tout exprès.
Une indication plus rationnelle , sinon plus applicable , serait de parvenir à oblitérer la fistule vésico-rectale, soit par la cautérisation , comme nous l'a conseillé M. Cloquet, soit par l'anaplastie ; mais le résultat de cette opération ne serait-il pas compromis par les difficultés mêmes de rétablir le cours urétral de l'urine à l'aide d'une sonde ?
Une complication d'ailleurs existe à l'orifice anal. Un rétrécissement fibreux à peu près annulaire est survenu par la cicatrisation de la plaie de la fesse, dont la direction se portait même vers la cloison rectovésicalè , et le tissu inodulaire peu extensible est devenu si douloureux qu'il ne se prête pas à l'introduction du spéculum ani ordinaire. .
Pour suppléer à cet instrument, à celui même de M. Barthélémy (sorte de cône échancré sur sa paroi), je me sers d'une pince à polypes, dont les branches écartées distendent le rétrécissement et permettent
d'apprécier l'état des parties situées au-dessus (1). Nous reconnaissons ainsi sur la ligne médiane de la paroi recto-vésicale , à peu de distance du sphincter (2 centimètres environ), un orifice étroit, mamelonné , d'où l'urine suinte seulement par gouttelettes ou s'écoule un peu plus abondamment, selon que la miction n'a pas lieu ou se reproduit.
Une dernière question se présente : Faut-il conserver le testicule, qui non-seulement est devenu inutile, mais encore provoque parfois de pénibles excitations erotiques chez ce malheureux mutilé, plus à plaindre peut-être que s'il avait subi une castration complète? Je n'hésiterais pas à lui proposer le sacrifice du seul organe sexuel qui lui reste , s'il ne devait s'habituer peu à peu à sa triste situation, comme nous sommes à même de le constater déjà, et si à la longue l'atrophie testiculaire ne devait en être la conséquence.
Je rendrai compte ultérieurement à la Société du résultat définitif de cette observation.
(1) C'est le même moyen que j'emploie, on une rimple pince à anneaux, pour^i6joierFKI*»aTités étroites , telles que le conduit auditif ou les fosses
Paris. — Typographie de Henri Pion , imprimeur de l'Empereur, rue Uaraneière, S.