ÉDITION DE PARIS
Pour compléter
L'ÂSSURÂNCHNVALIDITÉ
Voici que l'assurance-invalidité vient de se placer au premier plan de l'actualité avec le dépôt du projet élaboré par M. Renoult, ancien ministre du Tra1 vail.
Que l'établissement de pensions d'invalidité doive, et le plus tôt possible, compléter le régime des pensions de vieillesse, c'est ce que nul ne saurait contester. D'une part, les statistiques montrent qu'en certaines professions les travailleurs n'ont que d'assez minces chances d'aboutir à 60 ans avec la plénitude de leur capacité de travail, et il est juste, puisqu'ils ont versé les cotisations obligatoires, qu'ils aient le bénéfice, sous une forme ou sous une 1 autre, des sacrifices consentis. Il est même avéré, par l'expérience de l'Allemagne, que les invalides sont beaucoup ulus nombreux que les ouvriers arrivés à l'âge de la retraite sans avoir subi aucune dépréciation de leurs facultés productives. En second lieu, le jour où fonctionneront les pensions d'invalidité, l«s salariés biea plus qne maintenant, il s'affilier aux caisses de retraite, car ils seront à peu près sûrs de profiter du régime légal et de trouver la compensation des versements qu'ils se seront imposés. Déjà l'abaissement de l'àge-limite de la retraite-vieillesse de 65 à 60 ans a engendré des résultats très appréciables à cet égard. Des centaines de milliers de travailleurs, qui se manifestaient hostiles iou indifférents, ont modifié du tout au tout leur attitude.
A la vérité, la loi des retraites de 1910 'prévoyait déjà l'invalidité, mais elle entendait sous ce nom une incapacité absotlue de travail, en sorte que l'ouvrier qui aurait perdu les trois quarts de sa force de labeur, et qui n'aurait touché que lun franc par jour chez son patron, devait ¡être exclu de toute allocation. Ceux qui ont écrit que l'invalidité n'était guère insérée que pour mémoire dans la loi iniI tiale des retraites ne se sont point trompés. Actuellement, le travailleur qua- idragénaire ou quinquagénaire qui se trouve être victime d'un sinistre profes- sionnel, d'un accident proprement dit, a un recours 4an,s la loi -de s'il est étreint par'une de ces maladies, 'professionnelles ou non, qui brisent la ^vigueur et qui font d'un homme encore mûr un vieillard, s'il est lentement entraîné vers la tombe par la tuberculose, il risque la pire des misères. Qu'il gagne quotidiennement quelques centimes, il n'aura aucun droit aux pensions prescrites en 1910 seule l'Assistance publique pourra lui venir en aide, en sorte que ses droits ne seront pas, net- tement établis.
La loi d'invalidité, qui est à l'étude et qu'il faudra bien mettre sur pied, et sans trop de délai, quel qu'en soit le .coût, parce qu'elle est réclamée par 'l'humanité et par la solidarité sociale, nous a été d'ailleurs promise l'an dernier par M. Léon Bourgeois. Mais le ministre du Travail d'hier voulait faire ,une large place à la mutualité. Il esti:mait que les sociétés mutualistes seules (pouvaient lutter Pfficacement contre les fraudes, contre les simulations, contre Iles abus qui tenteraient, hélas! de s'in\troduire en ce domaine comme en tant ¥:l'autres.
Les exemples étrangers ne nous feront d'ailleurs point défaut, et nous devrons utiliser les expériences, les écoles » de nos voisins plus entrepretnants ou plus expéditifs que nous. Nul n'ignore que l'Allemagne, pen:dant longtemps, a eu le système le plus '-complet qui fût d'assurances sociales. '•Bismarck, qui s'efforçait par tous les frnoyens d'attacher la classe ouvrière à l'Empire, et de vaincre ses résistances '\Jour le régime politique qui lm était nnposé, avait institué î'assurunce-maladie, l'assurance-accidents et l'assu* ncevieillesse et invalidité. Celle-ci, la plus difficile à aménager, était venue la dernière, en 1889; mais depuis lors, à la lumière des constatations pratiques qui avaient été effectuées. elle a été par deux fois remaniée, en 1899 et en 1911. La loi de 1911 est même, pour 1 étendue et pour le détail des classifications, un véritable code où seuls des juristes et les secrétariats ouvriers organisés par les syndicats d'outre-Rhin peuvent se retrouver. Ici, c'est la retraite-invalidité qui est le but essentiel, la retraitevieiilesse n'intervenant que comme un complément et pour ceux qui ont eu la chance d'arriver à 70 ans sans infirmité. Une même cotisation, qui varie de 9 à 23 francs par an, selon la valeur du salaire, et qui est doublée d'un égal versement patronal, procure indifféremment l'allocation d'invalidité et l'allocation de vieillesse. La pension d'invalidité, dans laquelle la part de l'Etat entre, quel qu'en soit le taux, pour 62 fr. 50, oscille entre 145 et 562 fr. 50. Est proclamé invalidft tout assuré qui perd plus des deux nefs de sa capacité de travail.
L'Angleterre avait déjà institué des pensions de vieillesse de 6 fr. 25 par semaine à l'âge de 65 ans pour les salariés qui n'avaient pas un certain revenu, et elle avait mis toute la dépense à la charge du budget. La loi de 1911 a établi une assurance de maladie et d'invalidité. Le salarié acquitte en principe 0 fr. 40 ou 0 fr. 30 par semaine, selon qu'il appartient au sexe fort ou à
l'autre l'employeur verse 0 fr. 30 et l'Etat 0 fr. 20. Si le salaire est inférieur à 3 fr. 15 par jour, la contribution de l'employeur est accrue. Dans tous les cas, l'affiliation est obligatoire. En échango de cette affiliation et de sa cotisaiion, l'assuré a droit d'abi,rd à une allocation de maladie durant 26 semaia:rl est frappé d'invalidité, au sens de la loi allemande, d'une indemnité à vie de 6 fr. 25 par semaine.
Voilà deux exemples significatifs pris entre plusieurs autres, mais qui ont d'autant plus de portée qu'ils sont empruntés à deux grands Etats voisins, et dont l'industrie concurrence directement la nôtre.
«IAN FROLLO
LE PRÉFET DE LA SEINE RESTE EN FONCTIONS Le président du Conseil a reçu, hier ma. tin, le préfet de la Seine et le président du conseil municipal de Paris. Peu après, la note suivante était communiquée à la presse
a Le bruit a couru, depuis quelques jours, du déplacement de plusieurs hauts fonctionnaires. On a dit, notamment, que M. Delanney, préfet de la Seine, allait quitter ses fonctions.
Ces bruits sont de tous points inexacts et nous sommes autorisés à les démentir. Le baron Schilling est arrivé à Paris Il remettra aujourd hui, à M. Poincaré, les insignes de l'ordre de Saint-André Le baron Schilling, directeur de la chancellerie au ministère des Aifaires étrangères de Russie, est arrivé, hier, à deux heures de l'après-midi, à la gare du Nord, où il a été salué par Vl. Sévastopoulos, conseiller d'ambassade, qui attendait sa venue.
Aujourd'hui, à trois heures, le baron Schilling sera reçu en audience par le Président de la République, auquel il remettra un lettre autographe du tsar, et, ainsi que nous lavons annoncé, les insignes de l'ordte de Saint-André.
A cette cérémonie assisteront M. Isvolsky, ambassadeur de Russie, et tous les membres de l'ambassade en grande tenue M. Aristide Bnan<l, président du Conseil M. Jonnarl, ministre des Affaires étrangères. L'ordre de Saint-André est la distinction la plus haute de l'empire russe. Elie fut instituée en 1698 par Pierre le Grand et complétée plus tard par Paul I" et Nicolas ler. Les membres de cet ordre ne forment qu'une classe unique de chevaliers. Ils sont de droit chevaliers des ordres de SaintAlexandre et de l'Aigle Blanc, de SainteAnne et de Saint-Stanislas.
La décoration- consiste en une croix de Suint-André {'maillée de bleu foncé avec bor-
dure d'or représentant A chaque extrémité se trouvent les initialea S. A. P. R, qui sihnifient Sanctus Andrea.s Patronus Russix.
La croix est anglée d'une aigle bicéphale éployée aux têtes couronnées, en émail noir, becs et .griffes dorés.
La décoration, surmontée de la couronne
impériale, se porte avec un large cordon bien clair passé en écharpe de droite à gauche. De plus, les chevaliers portent sur le côté gauche de la poitrine une plaque à huit rayons d'argent cannelés, ornée d'un médaillon reproduisant la devise.
LA JOURNÉE DË~ffi. POiNCARÉ
Le Président de la République a.reçu hier matin M" Labori, bâtonnier de l'ordre des avocats, et les membres du conseil de l'ordre, qui sont venus l'inviter officiellement au dtner du 5 mars, donné par le barreau en son honneur.
Au cours de cette entrevue, M" Labori a prononcé une allpcutioo; dont voici le principal passage
Dans quelques jours, la foule assemblée de nos confrères vous exprimera, mieux que je ne le saurais faire ici. l'enthousiaste fierté du 1.arreau. Laissez-moi aujourd'hui, à l'occasion de cette visite presque familière à laquelle vous vous êtes gracieusement prête, me réjouir surtout de ce que vous voulez bien rester l'un des nôtres. Nous nous sentons tout heureux d'apporter notre hommage non pas à un avocat d'hier qui nous quitterait pour monter au rang suprême, mais un confrère éminent, qui ne permet pas que sa grandeur nouvelle le sépare de nous et dont le nom sera ainsi désormais, pour notre tableau, une incomparable parure
M. Raymond Poincaré a accepté l'invitation, et a répondu par quelques paroles émues
La réunion dont vous parliez, man cher Làtonnier, et que vous avez organisée pour célébrer mon élection, ne sera pas un dîner d'adieu (:11e sera, grâce à vous tous, une consécration nouvelle de notre indissoluble confraternité. Lotre profession est une de celles dont on se glorifie. alors même que momentanément on ne peut plus l'exercer. Je la conserverai, tout à la fois, comme in honneur et comme un soutien morfal je la conserverai, pour reprendre volre mot, liommfi une parure et comme une défense je la conserverai comme un souvenir et comme une espérance.
Peu après, le Président de la République a reçu M. Liard, vice-recteur de 1 Académie de Pans, puis le bureau de la chambre de commerce.
M. Raymond Poincaré a reçu ensuite M. Loubet, qui venait lui rendre la visite que le Président lui avait faite samedi dernier; enfin, le général Brugère, ancien président du conseil supérieur de la guerre, le président et les membres du comité du cercle de l'Union artistique.
LE CRIME DE BERNE Berne, 24 février.
L'affaire Delacour parait avoir pris une tournure légèrement plus lavorable pour Mme Cerisier. Aujourd'hui, on a des doutes sur sa complicité, et l'on croit également que V. Cerisier n'a pas joué le rôle d'ami complaisant qu'on lui avait attribué.
Par contre, la preuve matérielle de culpabilité que l'on cherchait contre Delacour serait à la veille d'être trouvée. On pense avoir de sérieuses raisons de croire que le pistolet jeté par l'assassin sur le lieu du crime est bien le sien. L'enquête, toutefois, n'aurait encore rien révélé de positif sur une tentative d'empoisonnement dont Cerisier aurait également été victime.
r
LA RÉVOLUTION MEXICAINE
Apres la mort [de M. Madeirc> Londres, février.
On ne counaHca vraisemblablement, jamais ]es circonstances dans lesquelles Ic président Madeiro et le vkv-pré.siuent Suarès ont trouvé la mort. Je vous ai transmis, hier, la version officielle telle qu'elfe fut
lie général Huerta
jommuniquée par le président Huerta et té- légraphiée au gouvernement américain. Les journalistes étrangers fixés à Mexico ont essayé d'obtenir des soldats et des officiers qui escortaient les deux hommes d'Etat à la prison centrale quelques détails complémentaires. Or, ces détails, officiels également, puisque aucun civ'l n'a assisté à la scène, sont en contradiction formelle avec ceux qu'on connait déjà.
D'après eux, MM. Madeiro et Suarès n'avaient pas été placés dans la même auto, mais chacun dans une auto différente. Lorsque l'attaque se produisit, les officiers de 1 escorte ne les prièrent nullement d'en descendre et ne les confièrent point, comme on l'a dit, à la garde de trente hommes, pendant que les soixante-dix autres soldats repoussaient les assaillants. Ce furent MM. Madeiro et Suarès qui, d;eux-mêmes, soupçonnant que les coups de feu étaient tirés par leurs partisans, sautèrent u bas des autoe et essayèrent de profiter de l'obscurité et du désarroi provoqué par cette attaque imprévue pour s'enfuir. Ce serait pour les en empêcher que l'escorte, conformément à la loi, aurait tiré sur eux et les aurait tués. à cette version qu'à la précédente.
Je vous ai signalé que les familles -des deux victimes réclamaient leurs corps. Mme Madeiro et les sceurs de 1" ex-président,; qui se sont réfugiées à la légation du Japon, se sont rendues, hier, à la prison centrale et ont fait une demande dans ce sens. On leur répondit par un refus. Aujourd'hui, cependant, satisfaction leur a été donnée, ainsi qu'à la famille de M. Suarès.
Le corps de M. Madeiro ne porte qu'une seule blessure. Le président a été atteint par derrière à la base du crâne par un projectile qui a traversé la tête et est ressorti par le front. Il avait perdu beaucoup de sang par la bouche..
M. Suarès a été atteint par plusieurs balles qui, toutes, l'ont frappé en face, Une scène extrêmement pénible s'est déroulée à la prison. L'une des sœurs de M. Madeiro, Mlle Mercedes Madeiro, traita les officiers de lâches et d'assassins.
C'est vous, leur dit-elle, qui avez assassiné cet homme sans défense. Vous et vos supérieurs n'êtes que des traîtres. A Washington, on déclare que le meurtre de MM. Madeiro et Suarès va retarder la reconnaissance par le gouvernement américain du général Huerta comme nouveau président. Cette reconnaissance n'aura lieu que lorsque la mort des deux hommes d'Etat aura été expliquée d'une façon satisfaisante. Toutefois, un télégramme de ce soir de M. 1 Wilson, ambassadeur des Etats-Unis à Mexico, ne parait pas devoir éclaircir les choses. En effet, il annonce que des funérailles militaires sont préparées par le gouvernement mexicain aux deux victimes. Ces funérailles auraient lieu avec la plus grande pompe et le plus grand apparat. Comment alors concilier cela avec la version de la tentative de fuite donnée par les officiers de l'escorte ?
D'après les dernières dépêches, la. tranquillité régnerait maintenant à Mexico, où l'on considère les assassinats comme la conséquence inévitable de ta révolution. En province, le calme renaîtrait également les projets de révolte contre M. Huerta seraient abandonnés daiis tous les? Etats, sauf dans ceux de Coahuila et de Yucatan. Le New-York American publie un télégramme reçu de Mexico annonçant que le général Félix Diaz aurait été tué toutefois, cette nouvelle n'est pas confirmée. OPERATIONS MILITAIRES AU MAROC Rabat, 2-i février.
Dans la région de Rabat, une colonne, composée de détachements partis respectivement de Moaziz, Teddors et Merzaga, et réunis sous le commandement du coloner Blondelat, a surpris un groupe important de dissidents Zaers, qu'elle a dispersés et dont elle a razzié les troupeaux.
Après la disjonction de la colonne, le détachement de Merzaga a été attaqué' par d'autres groupes rebelles qu'il a repoussés. Nos pertes sont de deux tués et huit blessés.
Dans la région de la Chaouia, le poste d'Uucdjan a été attaqué par des Tadla. La ligne télégraphique a été détruite entre Ouedzeni et Dar-Chafaï. Les rebelles ont été repoussés avec des pertes importantes. Nous avons eu deux blessés.
Garde-chasse assassiné Limoges, x'i février.
M. Blanzat, garde-chasse, a cté trouvé mort sur la route de Saint-Priest, près de Le malheureux avait le visage labouré à coups de crosse de -fusil. S^s vêtements étaient demi consumés. Le.s gendarmes unt organisé une battue, pour retrouver l'auteur de cet assassinat.
Nâpie-Nii à Londres1 pour la paix Dalksnipe ? 'j&a JtuX$f*rio accepte définitivement la médiation européenne
D'après des informations qui circulent outre-Manche et qui offrent quelque consistance, les pourparlers de la paix balkanique, rompus le mois dernier, auraient repris en sous-main. La venue d'Hakki pacha à Londres aurait eu pour effet de renouer les négociations au point où elles auraient été brisées il y a sept semaines. C'est-à-dire que la Turquie accepterait maintenant conformément à la note de Kiamil pacha, mais contrairement à la première réponse du cabinet Mahmoud Ghefket la cession d'Andrinople. Nos lecteurs eQnçoivent qu'il demeure très malaisé, pour l'instant, de se procurer des indications certaines, des données de source officielle, sur les conversations qui ont lieu entre Hakki pacha et les ambassadeurs, et peut-être entre la Porte et les Balkaniques.
La version qui court à Londres est la plus optimiste l'arrangement final serait, sinon en'.vue, du moins en préparation.
La version qui prévaut à, Berlin est plus prudente la Turquie aurait prié les puissances d'élaborpr la formule d'une convention de paix, mais on ne 4it p»K -:i Le cabinet de Constantinopte par les alliés.
A Constantinople, le gouvernement se borne à annoncer qu'il a envoyé des instructions complémentaires à Hakki pacha. Les journaux du comité Union et Progrès continuent à affirmer qu'Andrinople ne sera pas livrée aux Bulgares.
A Paris enfin, les milieux officiels gardent une discrétion absolue. On a pourtant l'impression que des entretiens importantes se succèdent dans la capitale britannique, et qu'ils contribuent, tout autant que les chutes de neige en Thrace, à retarder les opérations des belligérants.
Le conflit bulgaro-roumain a perdu une grande part de son acuité. Dans l'après-midi de dimanche, les ministres des six grandes puissances avaient offort au cabinet de Sofia les bons offices de l'Europe, déjà agréés par la Roumanie la Bulgarie a donné hier une réponse favorable. Les chancelleries auront donc à.chercher une base de transaction crui puisse être soumise aux deux Etats.
qui ai profané les cimetières* Grasse. 24 février.
Pierre Chiapale a subi ce matin son premier interrogatoire, en présence de son défenseur.
Le jeune bandit est toujours loquace, maia il semble déjà quelque peu déprimé. Chiapale a reconnu avoir profané les nécropolea de la Roquette et de Mouans-Sartoux. Il a donné comme raison de ces actes de vandalisme celle qu'il avait donnée déjà, c'est-à-dire qu'il y avait été poussé par « Alouette Cette fois, Chiapale a apporté une rectification à ses premières déclarations, en ce qui concerne la participation de Sauvaire. Il avait tout d'abord déclaré que, le 21 décembre dernier, lorsqu'il était allé, pour la deuxième fois, saccager le cimetière de la Roquette, son camarade Sauvaire l'avait accompagné et que, tandis que lui- même enlevait les ornements funéraires qui garnissaient les tombea, son complice in- cendiait la maison Hugues.
Aujourd'hui, Chiapale a déclaré au juge d'instruction que c'était lui qui avait mis le feu à la maison Hugues et non Sauvaire. Il a ajouté que jamais celui-ci ne l'avait accompagné quand il s'était rendu dans les cimetières. Il l'innocente donc sur ce point. Pour pénétrer dans le champ de repos, Chiapale a dit qu'il escaladait le mur d'enceinte. Il a affirmé qu'il était toujours seul, mais M. Peillon reste sceptique à cet égard, car il semble impossible qu'un homme seul ait pu enlever les berceaux en fer ou les pierres tombales qui recouvraient les sépultures
Un cambrioleur opérait
avec son enfant sur les bras Louis Allainguillaume, un grand et vigoureux gaillard de vingt-huit ans, mais paresseux comme il n'est point permis de l'être, avait trouvé ce moyen à la fois simple et ingénieux df, cambrioler sans trop de danger pour sa personne.
Quand sa profession de mécanicien lui laissait des loisirs cela arrivait fort souvent il travaillait cela arrivait plus fréquemment encore de son métier de cambrioleur.
Et ces jours-là, pour opérer avec une relative tac:lité, il emmenait avec lui son enfant, un bébé de deux ans.
A voir ce grand gaillard qui, son petit enfant dans les bras, entrait délibérément dans une maison, passait la tête haute de- vant la loge du concierge, et grimpait tran- iSfurvlxMi était très occupé à dévaliser, "rne d'Avron, le logement d'un receveur de la Compagnie des omnibus, M. Aimé Blangy, fût surpris par l'arrivée inopinée du loC?la fut très fâcheux pour Allainguillaume, qui déjà avait empli ces poches de bijouv. -te bagues, de montres, de bracelets, de couverts en argent et de trois billets de banque de cent francs.
II voulut fuir, M. Blangy ne lui en laissa pas le temps," et d'ailleurs Allainguillaume ne pouvait point abandonner là son bébé qui; avait couché sur le lit, pour travailler plus à l'aise. Il se laissa arrêter sans résistance
Le cambrioleur, tout penaud, fut conduit devant M. Lardanehet, commissaire de police de Charonne, qui l'a envoyé au dépôt. Quelques instants après, informée de l'arrestation de son mari, Mmes Allainguillau- me, qui est souffrante elle est accouchée depuiti trois jours faisait réclamer et ramener chez elle son enfant, rue de la Folie- Regnault.
Une jeune fille écrasée par un taxi-auto sous les yeux de sa mère matin, vers huit heures, boulevard Saint- Germain, à l'angle de la rue de Solférino. La marquise de Taffaiwl de la Jonquière, qui habite, rue de Villerseael, conduisait sa fille, Jeanne, âgée de dix-huit ans, à un cours de dessin. Les deux femmes venaient de quitter le trottoir du boulevard, elles s'engageaient sur la chaussée, Mme de la Jon- quière précédait sa fille de quelques pas. Soudain, un auto-taxi arriva, venant du côté de la Concorde. Mme de la Jonquière crut qu'elle pouvait traverser le boulevard devant l'auto. Elle précipita ses pas, sure 1 que sa fille la suivait.
Mais, plus prudente. Mlle de la Jonquiére eut un moment d'hésitation elle resta im- mobile. Le chauffeur, qui avait vu la jeune ülle s'arrêter, devina le danger il bloqua ses freins. Mais il était trop tard, Mile de la Jonquière fut projetée sur le sol où elle resta in animée;
Aux cris que poussèrent des passants, témoine de l'accident, lime de la Jonquière «h retourna. Elle aperçut sa fille gisant, la tête ensanglantée. La malheureuse mère se précipita sur tc corps de sa iillo. Un gardien de la paix arriva. Il aida Mme de la Jonquiëre à relever la blessée et â la transporfer dans une pharmacie. Mais la blessure, une fracture du crâne, était trop grave. Le pharmacien conseilla de conduire de la Jonquière à l'hôpital.
l./n autre auto-taxi fut requis. On y dépofca la jeune fille «f. on la conduisit à la Charité., Maix, avant même qu'elle y fût ar- rivée, Mil p. de la Jonquière ri" ̃̃̃̃ der- .nier soupir. Le corps iut alor • rue de ViHersexel.
La victime de ce grave accident était la fille du marquis de la Jonquière, décédé il y a quelques années. Elle avait trois sœurs I et un frère plus jeunes qu'elle.
L'auteur de l'accident, le chauffeur Victor Brosselard, pilotant l'auto 568 U-9. fut conduit devant M. le commissaire Rebnndin. Il ewliqua au magistrat qu'il avait fait tous ses efforts pour éviter l'accident, mais que ses freins s'étaient brisés.
Le magistrat a laissé le chauffeur en liberté, mais il lui a notifié qu'il le poursui- vrait pour homicide par imprudence. La lettre écrite à l'amant est reivoyée au mari IL BLESSE GRIEVEMENT SA FERME M. Philogone Hauyoux, quarante-deux ̃ ans, forgeron, demeurant 71, rue Sébastien- Mercier, à Paris, était jusqu'ici un mari heü- 1 l'eux'; il aimait sa femme, se croyait aimé | d'elle et consacrait tous ses gaine à 1a prosi périt* de son ménage, à entretien et à l'éducation de leurs quatre enfants. i Mais-i-eç Iwatieur trouI blé. M. Hauyoux recevait par la poste une lettre de Belgique qui l'intrigua beaucoup. L'ayant lue, il fut soudainement frappé d un grand coup au coeur sa femme le trompait La lettre qu'il venait de lire était d'elle. EJ;> l'avait adressée un nommé Ferdinand, à j Martial-le-Pont (Belgique), et elle disait acet homme qu'elle allait bientôt le rejoindre. Au lieu d'être remise à Ferdinand, la lettre fut expédiée au mari.
On juge de sa colère.
Cet après-midi, Philogone Hauyoux, qui travaille dans une usine de Pantin, te ren- dit chez les époux Frederick, où sh Il! 1 avait promis de lui apporter à manger. Mme Hauyoux était exacte au rendez- vous. Son mari, en l'aperoevanl, lui .nt u singulier propos J'ai bu quatre pernods, j'ai la colique. Allons donc, lui dit sa femme, en riant tu ne bois jamais Qu'est-ce que tu me con- tes Ne là? pouvant se maîtriser plus longtemps, Hauyoux demanda à sa femme si elle avait écrit en Belgique
Je ne aais pas ce que tu veux dire. Et la lettre à Ferdinand ?
Ferdinand ? Je ne connais pas! Et cette lettre, la connais-tu ?
Mmes Frederick, voyant que la conversation prenait un ton très grave, s'interposa Allone, allons, monsieur Hauyoux. N'écoutez pas cette lettre. Vous voyez bien que c'est une personne qui se venge bassement. Ce n'est pas votre fernme qui a écrit cette ler.re. jetez cc'a au feu et n'y pensez plus.
Et croyant apaiser M. Hauyoux, Mme Fre- derick lVntraina. ainsi que sa femme, pour leur faire prendre le café.
Pendant qu'ils étaient toua dans la cuisi- ne, trois coups de revolver retentirent et Mme Hauyoux s'affaissa grièvement blessée une balle l'avait atteinte au-dessus du sein gauche, une autre à un bras, et la troi- sième dans le dos. Son mari aida Mme Fre- derick à la âéshabiller, puis il partit. A huit heures du soir, 'inspecteur Hérard l'arrêtait à son domicile.
Jaloux et neurasthénique un mercier se suicide Au numéro 8 de la rue de la Charbonnière, M. Aubertin exploitait un commerce de mercerie. C'était un jeune homme de vingt-cinq ans, qui s'était marié en 191f avec une fort jolie personne, enfant unique de petits commerçants. Le mari était simple, la femme coquette. Bientôt, les langues allèrent leur tram et le drame qui se déroula hier est le résultat des calomnies et des potins qui ne devaient pas manquer de se produire. Des lettres anonymes furent adressées à M. Aubertin. Elles accusaient la jeune feinme de lui être infidèle.
Tout d'abord le mercier dédaigna ces dé- nonciations puis, peu à peu, il se laissa gagner par le soupçon. Son caractère a'ai- grit, changea, et bien qu'il n'eût aucune raison de suspecter sa femme, il devint jaloux puis neurasthénique. Hier après-midi, Mine Aubertin reçut la visite d'un représentant de commerce, qu'elle ne tard' pas à congédier. A ce moment, le mercier descendit de sa chambre, située au-dessus de la boutique. Va-t'en, lui dit-il, les yeux hagards, va-t'en, je souffre trop, va-t'en, je sens que je vais faire en malheur
M. Aubertin tenait dans sa main un revolver. La jeune femme s'enfuit et alla pré- j venir des agents Lorsque ceux-ci arrivèrent, its trouvèrent le magasin fermé. Au même instant deux détonations retentirent. Sur )<̃ ht. NI, Aubertin gisait inanimé. Il s'était logé doux balles dans la Iftie. On le transporta l'hôpital Laribcisièrc.
LE PROCÈS DES BANDITS Le plaidoyer pour Soudy Monier dit S.vmenloff », le U.'nnine en réclcirnan' l'acquittement dt sou client. M" DOUBLET
M* Doublet. qui avait présenté ta défense, à une prénéaentn audience, de Poyer, lui succède 11 parle, cette fois, au nom de Soudy.
Dès le début, il fait cette déclaration au jury
Si. messieurs, j'avais la conviction que Soudy est bien rtioiiiine à la carabine, le vous dirais Je plaide coupable, mais je viens faire apfjçt il. toute votre indulgence. ù toute votre pitii. A votre indulgence, car Soudy n'a tué et n'a voulu tuer personne. S'il avait voulu tuer. i! eut couché il terre dc nombreuses victimes il avait itiitie les mains ,une arme redoutable. votre "pitié, parce que Soudy, atteint dun ma! incurable, ron"é par la tuberculose, n'a plus qu'un .v>uTfie de vie, et que. je le sais, vous ne voudriez pas, vous V'rahraif-, envoyer il l'échataud un malheureux si près déjà de la mort. » Mais bien différente s-era ̃ mon attitude. Ctwt un acquittement que je viens. en effet, .solliciter. de votre équité, de votre justice, et pourquoi ? Parce que, en étudiant eu volumineux dossier, en rapprochant )es diverses dépositions qui se sont mtiiiiff-^lèef. soit a l'instruction, soit aux prértliertfës nuuiunces, j'y ai tiouve de telles contradiede tû'îss iîivrftià-aublauçes qu'art doute peignant s'est emparë de moi, doute que je vais ûïfiforter 'le faire passr" d^Rs. «a» El Me Double* va, comme t'avaient fait tous ses prédécesseurs à la barre; s'efforcer d'atténuer le mauvais effet produit par les reconnaissances si formelles, faites à ces débats, de son client. I] va insister sur les hésitations de ces mêmes témoiris à l'instruction. pour dire que, ails se montrereut pluts catcgori-Tpnes à la barre, ce, n'est pas qu'ils fussent plus convaincus, mais bien parce qu'ils étaient impressiünnés par l'opinion publique.
Les uns, observe-t-ii, avaient crut voir l'homme à la carabine avec des moustaches, d'autres sans moustaches certains le disaient brun et rasé, d autres le prétendaient fort et trapu. Est-ce avec de pare:ls témoignages que tU-6 horamec sensés, loyaux, peuvent envoyer un holnnle à la guillotine Non c'est impossible.
A certain moment, M' Doublet s'exclame A qui fera-ton croire que c'est à ce jeune homme épuisé qui, la veille encore, avait 9u aes vomissements de sahg, que des gens intelligenis conime Bpnnot, comme Garnier, comme Valet auraient confié la tache la pius périlleuse de toutes, celle qui consistait il maintenir la fouie indignée, exaspérée, en respect?
Cet argument a une grande valeur, et j'espère, messieurs les jurés, que vous vous en çouviea drc7 lorsque vous serez dans la salle de vos délibérations.
Le sur son client', insiste sur ce point c'est qu'elles ne provenaient ni de l'armurerie l'oury ni ne l'armurerie américaine.
.\le Doublet rappelle aux jurés qu'ils sont à la cour d'assises pour juger et non pour venger la société.
Le défenseur s'étend longuement enfin sur l'alibi invoqué par son client.
Puis. terminant
Au moment de céder la parole à un autre de mes confrères, je me sens envahi par une douloureuse émotion. Depuis onze mois que je \u les kieares d'espoir et de désespérance de ir.eu client, j'ai appris à pénétrer les pensées e, !o coeur de ce malheureux et, je dois le dire. Soudy a su s'attirer, dans une certaine mesure, la sympathie de son déienseur. J'ai senti passer '.n moi le frisson de. l'erreur judiciaire. Certes, Soudy q cté anarchiste, la vit sétait présent*'? si lamentable pour lui qu'il a quelque excuse a cela. Assassin, non, il ne l'a jamais été. Il vous demande, par ma bouche, de le déclarer innocent.
Me ZEVAES
M* Zevaès, ancien député de l'Isère, pro.nonce maintenant la défense de Carouy. En nvi levant, dit-il, je n ignore pas combien ma tâchfc et ma responsabilité sont lourdes. J al en effet a défendre Carouy, non seulement contre le réquisitoire il la fois si remarquable et si implacable de M. le procureur général,' mais aussi contre l'opinion publique, qui a été induite en erreur.
Quand, autrefois, on parlait des redoutables membres de l'association, on disait la hande it Bonnet. la bande à Garnier. Ceux-ci sont mort;1. Ils ont été tués aaru> les circonstances dramatiques que vous savez, et le regrette que la iutice ne les ait pas amenés ie:. car il eut été facile de faire le partage des responsabilités, comme aussi le partage des châtiments.
Bonnot. Garnie;- et Valet l'opinion puqui he connait pas le dossier, a supp!à
M* Zevaès
aux noms de ces bandits par ceiut de Carouy et la bande est devenue la bande de Carouy. Suprême injustice, puisque mon client n'a pris part ni au crime de Chantilly, ni a cului ue Montgerou. ni a coiui de la rue du lla\re. Il y a là une légende grossière, une erreur- manifeste, et j'espère que nies explications suffiront à vous pruuver qu ncht paa l'homme, te bandit, que M. ie procureur général s'est plu u vous dépeindre. Je vais vous dire ce qu'est Carouy et restituer à celui-ci sa veritable physionomie.
Gt M* Zevaès nous dit que son client n'est ni un chef ni un philosophe à la manière do Callemin. mais un simple, un modeste, sous l'écorce duquel se cache une nature profondément sentimentale.
:Adolescent, il était tout pénétré de po-j.sic et de religiosité il voulait se faire préln*. les hasards de la vie l'ont fait anarehii-te. il est vrai, mais anarchiste de la txone éeoïo. Garouy est un humanitaire, nous déclare