Rappel de votre demande:


Format de téléchargement: : Texte

Vues 1 à 8 sur 8

Nombre de pages: 8

Notice complète:

Titre : Le Ménestrel : journal de musique

Éditeur : Heugel (Paris)

Date d'édition : 1893-03-12

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb344939836

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb344939836/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 44462

Description : 12 mars 1893

Description : 1893/03/12 (A59,N11)-1893/03/18.

Description : Collection numérique : Arts de la marionnette

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5615029r

Source : Bibliothèque nationale de France, TOL Non conservé au département des périodiques

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 01/12/2010

Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 97%.


3233 - 59me ANNÉE - II. PARAIT T0US LES DIMANCHES Dimanche 12 Mars 1893.

(Les Bureaux, 2 bis, rue Vivienne) (Les manuscrits doivent être adressés franco au journal, et, publiés ou non, ils ne sont pas rendus aux auteurs.)

SOMMAIRE- TEXTE

I. L'impôt sur les pianos, J. T. — II. Semaine théâtrale : premières représentations de Sapho et de la Paix du ménage, à la Comédie-Française, PAUL-EMILE CHEVALIER. — IU. La vérité sur le rôle de "Wagner pendant la révolution de 1849 (2° et dernier article), EDOUARD NEUKOMM. — IV. Revue des grands concerts. — V. Nouvelles diverses, concerts et nécrologie.

MUSIQUE DE PIANO Nos abonnés à la musique de PIANO recevront, avec le numéro de ce jour:

MAZURKA

extraite de Kassya, opéra de LÉO DELIBES. — Suivra immédiatement : fa Neige, entr'acte-prélude extrajt du même opéra;

CHANT

Nous publierons dimanche prochain, pour nos abonnés à la musique de CHANT : Chanson slave, extraite de Kassya, opéra de LÉO DELIBES, poème (I'HENRI MEILHAC et PHILIPPE G-ILLE. — Suivra immédiatement : Récit de Cyrille, extrait du même opéra.

L'IMPOT SUR LES PIANOS

Ce n'est pas d'aujourd'hui que l'idée de mettre un impôt sur les pianos est discutée au Parlement, mais c'est la première fois que cette discussion a été traitée avec tant de rapidité, quelque peu voisine, semble-t-il de la légèreté. C'est par un simple amendement, produit de quelques fantaisies individuelles, sans que la question ait été aucunement étudiée au préalable, après un débat d'un quart d'heure dont le ton semble n'avoir pas été des plus sérieux, si l'on en juge par les On rit... Nouveaux rires... qui émaillent le compte rendu de Y Officiel, que la Chambre a pris une détermination qui, pour un intérêt budgétaire vraisemblablement assez médiocre, pourrait peut-être porter quelque préjudice à la pratique et au progrès de l'art musical. Tel fut le principal résultat des plaisanteries neuves et exquises qui ont cours.

Il en avait été différemment dans les précédentes Assemblées où la même question fut soulevée, toujours résolue négativement. En ce temps-là on avait encore l'habitude d étudier les choses et de les prendre au sérieux. Tel fut le cas en 1874 et 1877, époques où l'Assemblée nationale, puis la Chambre des députés, furent saisies de propositions analogues, présentées la première fois par M. de Belcastel, la seconde par M. Ch. Mention. A l'occasion de cette dernière, une commission fut nommée, et un rapport présenté par M- E. Tiersot, député de l'Ain. Ce rapport, adopté à l'unanimité moins une voix (celle de l'auteur de la proposition, qui se trouvait être seul de son avis dans la Commission) concluait

concluait rejet. Comme les considérations qui y sont énoncée sont encore valables aujourd'hui et qu'aucune n'a été reproduite dans la récente discussion; comme d'autre part, le Sénat n'a pas encore statué et que par conséquent il peut encore ne pas être inutile de faireentendre la voix de la raison, nous résumerons les parties essentielles de ce rapport, annexé au procès-verbal de la séance du 1er mars 1877, et redevenu ainsi d'actualité.

En commençant, le rapporteur rappelle ce qui s'était produit en 1874, lorsque la proposition fut faite pour la première fois. C'était peu après la guerre, à une époque où l'on avait à faire face à des charges extraordinaires; dès sa première année, l'Assemblée nationale avait eu à voter près de 600 millions d'impôts. En une semblable situation, il était naturel que toute proposition raisonnable tendant à accroître les ressources du budget fût prise en considération ; et cependant, après mûr examen, la proposition parut tellement inacceptable que l'Assemblée, après l'avoir ajournée une première fois, la repoussa définitivement après une nouvelle étude de la Commission du budget et une dernière et longue discussion publique.

« Dans cette situation, continue le rapport de 1877, lorsque notre honorable collègue, M. Mention, est venu nous proposer un impôt qu'il était allé choisir parmi ceux que l'Assemblée nationale avait trouvés des plus mauvais parmi les mauvais, votre Commission a été à peu près unanime à repousser celte proposition. »

Et le rapporteur expose les principaux motifs qui ont déterminé le rejet :

« M. Mention n'ignore pas que le prix des pianos et des harmoniums est très variable, et que, par conséquent, l'impôt qu'il propose ne serait pas toujours proportionnel à l'objet imposé. »

Puis il passe à des considérations budgétaires qui peut-être seraient encore applicables à la situation présente, mais que nous négligeons pourtant, ne voulant retenir que ce qui touche directement à la musique :

« Les pianos, dit le rapport, ne sont pas seulement des meubles pour les appartements, ce sont encore des instruments qui concourent à la pratique d'un art fort intéressant, et qui tend chaque jour à se populariser davantage, s

» Oui, sans doute, la musique est un luxe. Elle est un luxe au même titre que la science, la poésie, les beaux-arts, que tout, en un mot, ce qui orne et élève l'esprit. Et le piano est un des moyens les plus puissants pour la divulgation de cet art civilisateur.

» C'est lui qui retient nos enfants au foyer de là famille et qui le leur fait aimer ; c'est lui qui, dans nos petites villes le plus habituellement privées d'orchestre, permet seul d'or-


82

LE MENESTREL

ganiser des concerts et des fêtes musicales, d'apporter ainsi un élément de vie à leur monotonie habituelle, et de procurer des recettes dont le produit sert le plus souvent à la création d'oeuvres utiles, au soulagement de bien des souffrances et à l'atténuation de bien des désastres, ainsi que nous le voyons aujourd'hui. C'est lui "encore qui permet à nos instituteurs de campagne de réunir autour d'eux les enfants confiés à leurs soins, de les initier péniblement au secret d'un art qui leur est resté trop longtemps étranger, et de constituer ces orphéons et ces sociétés musicales que nous voyons se développer de jour en jour, qui préparent à cette chère jeunesse des joies et des plaisirs nouveaux, et qui donnent à nos fêtes un élément d'intérêt qui leur a manqué trop longtemps.

» M. Mention affirme que l'impôt qu'il propose ne diminuera pas le nombre des pianos. Lorsque, dit-il, une personne peut acheter un instrument dont le prix moyen varie de 500 à 1.000 francs, ce n'est pas une dépense de 15 francs par an qui peut la retenir.

» Notre honorable collègue se trompe. Certes, la théorie de la moyenne est très commode pour le comptable, mais cette théorie, en vertu de laquelle celui qui possède moins établit l'équilibre en payant pour celui qui possède davantage, n'est sûrement pas le type de la moralité et de la justice..Or, jamais cette théorie n'aurait été appliquée dans une aussi large proportion que dans l'exécution de cette loi.

» Ce n'est pas, en effet, dans une moyenne de 50O à 1.000 francs que se meut la valeur des pianos. Le prix de ces instruments descend jusqu'à 300 ou 400 francs, ce sont ceux dont la vente est le plus nombreuse, et il s'élève aisément à 2.400 à 3,000, à 4.000 francs et au-dessus, pour les grands instruments des facteurs en renom. A l'Exposition de 1867, la maison Erard avait exposé un piano de 33.000 francs, plusieurs autres facteurs en avaient de 48.000 francs. Nous admettons que ce sont là des exceptions, mais le fait n'en existe pas moins. Nous sommes autorisés à établir la moyenne du prix des pianos entre 300 et 3.000 francs. C'est-à-dire tandis que les moins riches paieraient 5 0/0 de la valeur de leur instrument, ceux qui le seraient ie plus paieraient seulement cinq pour mille.

« Sans doute une personne qui peut mettre 1.000 francs et plus à l'acquisition d'un instrument de musique ne serait pas arrêtée par la crainte de payer 15 francs (1) chaque année ; mais il n'en serait pas de même pour ceux qui ne pourraient consacrer que 300 francs à cette dépense... Il est permis de dire que ces derniers reculeraient devant une charge aussi lourde, et ceux-là ne sont ni les moins nombreux ni les moins intéressants.

« Après ce qui précède, nous ne nous arrêterons pas à discuter la statistique quelque peu fantaisiste sur laquelle l'auteur de la proposition s'est appuyé pour établir le nombre des instruments à clavier qui existent en France ; nous ne nous appesantirons pas davantage sur les difficultés que rencontrerait la perception de ce nouvel impôt ni sur les vexations qu'elle pourrait occasionner aux contribuables.

» Nous croyons avoir démontré que cet impôt n'est pas nécessaire, que son produit serait tout à fait aléatoire, qu'il est des plus antiproportionnels, et enfin qu'il porterait à la popularisation de l'enseignement musical une entrave des plus regrettables».

La discussion vint en séance publique à la fin de ce même mois de mars. Deux points y furent traités spécialement. D'abord le nombre présumé des instruments susceptibles d'être frappés par l'impôt. M. Ch. Mention déclara à la tribune que ce nombre s'élevait à six cent mille : mais le rapporteur put le mettre facilement en contradiction avec lui-même, et lui prouver qu'il n'en savait rien, en lui rappelant que peu auparavant, devant la commission, il avait évalué ce

(1) Il s'agissait, à ce moment, de 15 francs et non de 10. Gela d'ailleurs ne fait rien à l'affaire.

nombre à trois cent mille. « Dans ces conditions, ajoutait-il, il est difficile de fixer une prévision de perception suffisamment assurée. Le produit de l'impôt est donc absolument incertain. » — Aujourd'hui, même chose se reproduit : l'on vient nous dire qu'il y a en France un million de pianos ! Or, voici comment, dans la récente discussion, le rapporteur général du budget s'exprime :

« La commission fait toutes ses réserves sur les évaluations qui ont été apportées à la tribune, et qui, mes collègues me permettront de le dire, sont un peu fantaisistes. On ignore s'il y a actuellement cinq cent mille ou un million de pianos en France; aucune statistique n'a été faite sur cet objet. Le chiffre d'un million représenterait un piano par trente-six habitants ; je crois cette proportion, vraiment exagérée. »

Le second point est de ceux qui sont le mieux faits pour nous toucher aujourd'hui encore. Citons in extenso :

« M. TIERSOT, rapporteur. — M. Mention vous a dit que l'application de cet impôt était très aisée et nullement vexatoire. Il suffit de lire sa proposition pour réfuter l'argument qu'il a présenté.

y "Voici ce que dit l'article 3 :

« En cas de déménagement du contribuable hors du ressort de h perception, la taxe ou portion de taxe restant à acquitter est immédiatement exigible.

» Vous voyez, Messieurs, quelle est la conséquence de cet article : au moment où nous allons faire un déménagement, alors que nous avons déjà des embarras bien suffisants, il nous faudra abandonner, pour un temps, cette opération assez désagréable pour aller faire un voyage auprès du percepteur et lui porter notre déclaration. » D'autre part, l'article 7 est ainsi conçu : » La taxe établie par Varticle premier de la présente loi sera doublée pour les contribuables qui auront fait des décla?'atio?is inexactes ou qui riauront pas fait de déclarations dans le délai fixé par la loi.

» Je demande comment M. Mention entend que l'inexactitude de ces déclarations sera établie. Elle ne pourra l'être que d'une seule manière : par l'inspection de nos domiciles à laquelle se livreront les employés des contributions directes ou indirectes. Je ne sache pas que cette visite serait fort agréable à ceux qui auraient à la subir. »

Dans la dernière partie de la réponse, le rapporteur développe ce qui a été lu dans le rapport relativement au caractère antidémocratique de cet impôt : « Il n'est pas douteux que les personnes qui se trouvent dans cette situation (ceux qui ne peuvent acheter qu'un instrument à bas prix) y regarderont à deux fois avant de s'imposer une charge aussi lourde, et je crois, en conséquence, que l'enseignement populaire de la musique aura à en souffrir. »

La Chambre, consultée, décida à mains levées qu'il ne serait pas passé à la discussion des articles.

Le résultat eût peut-être encore été le même aujourd'hui si la question eût été étudiée avec le même sérieux et la même compétence. Sans compter que bien ■ d'autres raisons pouvaient être ajoutées à celles qui, en 1877, avaient entraîné la conviction de l'Assemblée. Mais nous ne voulons pas traiter la question à nouveau : il nous sufât d'avoir rappelé la façon dont elle avait été précédemment résolue. Deux mots seulement sur la discussion du mois dernier.

D'abord, les interruptions spirituelles : « Imposez aussi les violons (On rit). Et les trombones, les cors de chasse (Nouveaux rires)».

Cela est très plaisant, en effet. Seulement, cela nous paraît être d^'une logique absolument rigoureuse. Nous ne voyons pas" très bien quelle raison sérieuse on pourrait donner — les blagues boulevardières étant mises de côté — pour traiter le piano différemment des autres instruments. La distinction est tellement subtile qu'elle nous échappe. Et comme personne n'a jamais songé à faire payer les possesseurs de violons, flûtes, harpes, orgues, etc., il nous semble


LE MÉNESTREL

83

nue l'impôt frappant les seuls pianos serait aussi injuste qu'injustifié.

Passons au principal argument de l'auteur de la proposition, M. J. Rabier; il est répété deux fois, dans un discours de vingt-cinq lignes :

« Le droit est juste, équitable ; il atteindra les classes aisées et, en somme, frappera le luxe.»

Le rapport et la discussion de 1877 ont démontré jusqu'à l'évidence l'inanité de cette affirmation. Et comme depuis quinze ans la pratique de la musique s'est considérablement étendue dans les classes populaires, il s'ensuit que ce projet d'impôt devient de plus en plus antidémocratique, par conséquent opposé à l'esprit du Parlement.

Enfin, nous cueillons à la fin de la discussion la déclaration suivante :

M. FERNAND RABIER. ■— Il est bien entendu que les professeurs de piano seraient exemptés du paiement de la taxe.

Plusieurs membres. — C'est évident.

Voilà qui est d'une excellente intention, — encore que ce terne de « professeur de piano » soit loin de comprendre ■tous ceux pour lesquels le piano est l'instrument professionnel, l'outil de travail, et que les compositeurs, les virtuoses, voire les professeurs de chant, d'harmonie, etc., aient droit à bénéficier de la même exception. Mais n'insistons pas, et considérons cette réserve comme acquise. — Maintenant, nous serons curieux de savoir comment les collecteurs d'impôts vont s'y prendre pour distinguer les professeurs de piano de ceux qui ne le sont pas. Il y a encore de beaux jours pour les plaisanteries aimables et fines, et nous n'avons pas fini de rire. C'est toujours cela.

J. T.

SEMAINE THEATRALE

'COMÉDIE-FRANÇAISE : Sapho, drame lyrique en un acte, en vers, de M. Armand .Silvestre; la Paix du ménage, comédie en deux actes, en prose, de M. Guy ■ de Maupassant.

La Comédie-Française se déride! M'est avis même que lundi dernier, au moins en une partie du spectacle auquel elle nous avait conviés, elle a fait mine de se gaillardement déboutonner. La Paix du ménage est, en effet, d'une légèreté de paroles et d'un cynisme d'action qui, tout d'abord, ont semblé effaroucher quelque peu les austères habitués de la Maison. Cependant, bien vite, ces gens graves et superlativement corrects ont été désarmés par l'esprit, la verve et l'originalité semés à foison dans ees deux actes par le pauvre Guy •de Maupassant; et, dès ce premier soir, le succès a été complet et l'hommage rendu à l'auteur, mort hélas! pour le théâtre, éclatant.

Trois personnages seulement : M. de Saluées, Mme de Saluées et M. de Randol; lisez : Monsieur, Madame et... l'autre. Monsieur court et délaisse madame, qui trouve en Jacques de Randol ce qui lui manque chez elle. Tout irait pour le mieux dans ce modèle des ménages à trois, si, un beau soir, monsieur, contrarié dans ses amours du dehors, ne s'avisait de vouloir revenir temporairement à madame. Or, si Madeleine de Saluées eonsent à tromper, son honnêteté relative s'offusque à l'idée d'un partage infamant, et comme le dégoût profond et irrémédiable de son mari lui est venu à la suite d'une scène oh celui-ci, pris en un piège habilement tendu, se dispose à la traiter comme Tune quelconque de ses passagères et luxueuses liaisons, elle demande à Randol de l'enlever sur-le-champ. Ce Jacques de Randol, quoique très sérieusement épris, est avant tout de son temps; en garçon pratique, il hésite, discute, soupèse le pour et le contre et va finalement céder, lorsque Saluées rentre l'oeil allumé, lair heureux de vivre. La chanteuse qu'il courtisait en vain s'est humanisée; madame ne lui est plus d'aucune utilité. Et la douce Paix du ménage de reprendre comme auparavant.

J'ai parlé tout à l'heure d'originalité et, ainsi qu'on peut s'en rendre aisément compte, ce n'est point dans la donnée même de la pièce, non plus que dans l'amertume avec laquelle elle esttraitée, amertume à laquelle nous commençons à être suffisamment habitues, qu'il faut l'aller chercher, mais bien dans un dialogue vif, naturel et sans fausses pudeurs, avec d'étonnantes et fort amusantes théories.

La Paix du ménage est tout ce qu'il y a de plus excellemment joué

par MIlc Bartet, d'une grâce et d'une finesse adorables et aussi d'une adresse remarquable dans les passages assez scabreux de son rô\e, par M. Worms, d'un dandysme et d'un égoïsme parachevés, et par M. Lebargy, d'une allure mondaine très moderne avec, en plus, une nuance de sentiment très juste.

C'est évidemment comme palliatif à la Paix du ménage et pour se faire pardonner une audace aussi grande par les esprits timorés, que le même soir la Comédie nous a donné la Sapho de M. Armand Silvestre. La fable de ce drame lyrique est connue : Sapho se précipitant dans la mer, du haut du promontoire de Leucade, pour ne pas survivre à l'abandon du volage Phaon qu'elle aime. Jamais, croyonsnous, M. Armand Silvestre ne fut mieux et plus noblement inspiré, et telles pages de cette oeuvre, comme la plainte de Sapho et les stances à la lyre, demeureront d'impérissables modèles du genre.

Fort malheureusement, à part M. Silvain, qui a dit avec sa belle diction et son style large si propre à la déclamation des beaux vers, l'interprétation a été plutôt faible, et j'en veux énormément à MUe Dudlay et à M. Dehelly de nous avoir abîmé ainsi toute la captivante musique que j'ai été heureux de retrouver dès le lendemain en lisant la brochure.

PAUL-ÉMILE CHEVALIER.

LA. VERITE SOR LE ROLE DE WAGNER

PENDANT LA RÉVOLUTION DE 1849

D'APEÈS IDE ETOUVEAUX DOOUMEITTS

(Suite)

III

Wagner en serait cependant resté très probablement à son rêve de république royale, s'il n'avait, dans le même temps, fait la connaissance du célèbre Bakounine, venu à Dresde pour y prêcher la flamboyante théorie du tout pour tous.

Il le rencontra chez Roeckel, directeur de la musique privée du roi, qui, depuis l'effervescenee déchaînée sur le royaume de Saxe, s'était montré l'un des plus fervents adeptes des bouleversements projetés. — Frédéric-Auguste, on en conviendra, n'avait pas de chance avec ses musiciens.

Ce Roeckel, originaire de G-ratz, était le neveu de Hummel, qui en avait fait un pianiste de talent. Mais, dès sa jeunesse, il s'était senti mordu du fatal démon de la politique; et, son séjour aidant, à Paris, où il avait fréquenté beaucoup plus assidûment Lafayette, Armand Marrast et Laffltte queZimmermann, Ealkbrenneret Dcehler, il était promptement devenu l'un des apôtres les plus illuminés de la rénovation soeiale. A Dresde, où il arriva en 1843, il fut tout d'abord engagé comme chef des choeurs à l'Opéra; mais aussitôt que l'aurore d'une ère nouvelle eut vaguement percé les brouillards de l'Elbe, il se lança dans le journalisme militant et donna le jour à une feuille de combat intitulée les Cahiers du peuple, auxquels "Wagner, en bon ami et coreligionnaire, s'empressa de collaborer. Mme Wagner, première du nom, se jeta, dft-on, aux genoux de son mari, pour le supplier de renoncer à la fréquentation de Roeckel; mais ses prières furent vaines. Wagner continua donc ses visites chez Roeckel, et Bakounine devint son prophète.

Tel était l'aseendant de ce farouche Moscovite sur tous ceux qui l'approchaient, que chaeun lui obéissait aveuglément. Wagner luimême, refrénant son orgueil, se contenta d'un rôle effacé dans l'état-major révolutionnaire. Bien plus, il accepta de servir sous les ordres de Roeckel, que Bakounine, obligé de s'éloigner momentanément, avait choisi pour lieutenant :

« Mes frères, mes chers amis, écrivait l'apôtre du soulèvement germanique, je vous conjure de regarder comme votre chef suprême, en Saxe, un de mes meilleurs compagnons, un homme ardent et solide que vous connaissez tous : j'ai nommé Roeckel. Il s'entendra avec vous et s'efforcera, par ses attaches, à faire coïncider l'insurrection tchèque avec le mouvement révolutionnaire aile mand, dont l'explosion ne saurait tarder; car nous n'avons plus de temps à perdre. Si ce mouvement n'éclatait pas, les Russes viendraient; car, je le sais, la Russie couve un plan réactionnaire; et il ne peut en être autrement, car la Russie est le pays de toutes les réactions. Ici, nous sommes en relations avec un Hongrois et deux Polonais qui viennent de Paris. Nous allons probablement recevoir de cette ville de l'argent, et je vous en enverrai aussitôt.

« Bon courage, et à bientôt

» Votre ; » BAKOUNINE. »


8'Î.

LE MENESTREL

Comme l'avait dit le signataire de cette lettre, le moment de l'action était proche. En Saxe, ce fut, nous le savons, la dissolution de la Cnambre qui précipita le mouvement. Le 3 mai 1849, le peuple, en apprenant cette mesure, courut aux armes, et la bataille s'engagea.

La ville de Dresde, si calme d'ordinaire., a pris l'aspectad'un champ de carnage; les rues, lus places se hérissent de barricades; la fusillade crépite sur tous les points à la fois. A l'Hôtel de Ville, le gouvernement insurrectionnel siège en permanence. Bakounine, accouru à la première alerte, est là, donnant des ordres..., et quels ordres! Il fait parvenir aux chefs de barricades l'avis d'avoir à mettre le feu à toutes les maisons dans lesquelles se seraient réfugiés des soldats. A l'arsenal, dont le peuple s'est emparé, et où l'on a trouvé de grandes quantités de poudre et de munitions, il fait fondre de la pois, pour en fabriquer des torches et des brûlots. La terreur, en ville, est à son comble ; les bourgeois, affolés, se cachent dans leurs caves; l'insurrection est maîtresse du terrain; les troupes royales, débandées, défaites, s'éloignent en toute hâte ou pactisent avec l'émeute. Et pendant ce temps, comme dans tous les soulèvements populaires, des malfaiteurs de toutes sortes, la lie de la population, se répandent dans les maisons, où ils se livrent à un pillage effréné.

Tant que dura la bataille, les chefs demeurèrent à leur poste : Bakounine, Tchirner et quelques autres à l'Hôtel de Ville, Roeckel sur les barricades, où il jouait de son fusil comme de son bâton de chef d'orchestre, précipitant les mouvements d'ensemble, modérant le zèle de quelques solistes trop pressés, et conduisant la symphonie des balles avec une maestria qui lui eût valu certainement, en d'autres circonstances, l'admiration du monde militaire et la confiance absolue des sociétés musicales.

Des membres du gouvernement, un seul demeurait invisible : Wagner. C'est qu'il avait choisi la situation la plus élevée parmi ses collègues... : il s'était enfermé dans la tour de l'église de la Croix, au sommet de laquelle il s'exerçait au maniement du Glocken-Spiel, dont il devait, dans la suite, tirer un si excellent parti dans la scène du feu de la Walkyrie. En d'autres termes, Wagner s'élait préposé à la direction du tocsin, qu'il réglait, en véritable et grand artiste qu'il était, suivant les péripéties du drame qui se déroulait à ses pieds.

Quelle symphonie ce dut être que ce carillon qui, six jours durant, du 3 au 9 mai, tint les combattants en haleine, leur insufflant la haine, la bravoure et la vengeance ; qui signala, de ses coups précipités, les incendies qui rougissaient le ciel; qui, à toute volée, et tour à tour, célébra la victoire populaire, et jeta le cri d'alarme lorsque l'armée saxonne reparut avec des régiments nouveaux, prussiens, et du canon.

Wagner descendit alors de sa tour ; et, comme la plupart de ses collègues avaient déjà pris la fuite, il fit comme eux. Seul, Roeckel, qui était bien l'homme « solide » révélé par Bakounine, continuait à se battre comme un enragé. Il fut pris sur une barricade, le fusil fumant à la main, et condamné à plusieurs années de travaux forcés, qu'il fit au bagne, tandis que Wagner, condamné à mort, par contumace, jouissait à Zurich d'une quiétude bien gagnée.

IV

Quelques gouttes d'absinthe vinrent cependant se mêler au doux breuvage de la villégiature helvétique que Wagner s'était offerte après les vives émotions du clocher de Dresde. Aux éclatantes fanfares dont ses amis célébraient son héroïque conduite sur les barricades, en le montrant, à l'heure éphémère de la victoire, trônant, comme dictateur, à l'hôtel de ville de la capitale saxonne, s'opposaient les notes discordantes des journaux opposés à sa gloire, dont les appréciations étaient loin de flatter son amour-propre :

« Voilà, s'écriait la Nouvelle Gazette de musique, M. le maître de chapelle Wagner qui s'est enfui pour avoir trop joué des eloches de notre ville dans la tour de l'église de la Croix, où sa précieuse personne était moins en dariger que sur les barricades. »

Un autre journal, hostile à la réputation musicale de l'auteur de Pàenzi, profitait de l'occasion pour le confondre, avec Roeckel, dans un même sac d'anathème artistique :

« Il nous a été donné, disait le Petit Journal de musique, de voir parmi les pires ennemis de la société deux individus protégés par Sa Majesté et qui se faisaient passer pour artistes, sans l'être. Il s'agit du directeur de la musique du roi, Roeckel, et d'un favori de la cour, le maître de chapelle Wagner. Le premier avait été nommé à son poste éminent par pure charité, bien qu'il fût incapable de produire quoi que ce fût, et que sa façon de diriger l'orchestre laissât à désirer à tous les points de vue. Quant au second, e'est un compositeur

compositeur grand talent; car, on dira ce qu'on voudra, sa musique ne renferme pas de mélodies claires, coulantes et belles. Qu'il ait de la poésie, de la bonne volonté et des connaissances musicales très réelles, nous n'en voulons pas disconvenir; mais ce qui lui manque, encore une fois, c'est le talent ; et, sans talent, on n'arrive à rien. Nous le déclarons bien nettement : Wagner a d'autant plus nui à l'art musical, qu'il était libéralement doué pour le bien représenter. Par sa musique baroque et bruyante, il a détruit chez ceux dont le goût n'est pas encore formé tout sens pour le beau, pour le vrai, pour le simple, qui sont l'apanage du grand art. Ceci, pour peu de temps, espérons-le bien. »

D'autres gazettes allaient plus loin et s'attaquaient à l'homme, dans sa vie privée. Nous ne suivrons pas celles-là, notre but n'étant que d'éclairer un coin particulier, demeuré jusqu'ici dans l'ombre, d'une existence qui appartient d'autant plus au public que Wagner n'a rien négligé pour établir autour de lui tout un système d'informations qui ont rendu leur besogne facile à ses biographes.

Une légende s'était établie autour du Rienzi de 1849. Nous l'avons réduite à ses justes proportions. Wagner, accusé par les uns d'avoir fait couler le sang de ses compatriotes, exalté par les autres pour le rang suprême qu'ils lui attribuent, n'a été ni le meurtrier des premiers, ni le potentat des seconds. 11 n'est pas non plus le couard de quelques-uns. Il fut le sonneur de la république passagère du

royaume de Saxe; et rien autre chose.

EDMOND NEUKOMM.

REVUE DES GRANDS CONCERTS

Concerts du Châtelet. — Le Désert, depuis son apparition au Conservatoire, le 8 décembre 1844, a tenu une place telle dans l'oeuvre de Félicien David que tous ses autres ouvrages ont plus ou moins pâli devant l'éclat de ce premier né. Aujourd'hui, le Désert exerce encore la même attraction puissante qu'aux premiers temps de sa carrière glorieuse, et ceux qui ont entendu l'ouvrage ne l'oublient plus. C'est donc qu'il répondait à un besoin légitime de notre sens esthétique, qu'il remplissait un vide, et en effet, on peut le considérer comme uns conception-type, la plus remarquable sans doute de celles qui ont décrit l'Orient et noté la mélancolie rêveuse et douce de ses cantilènes. « 0 nuit, û belle nuit ! » reste le modèle idéal d'une mélodie réalisant l'équation complète de la représentation artistique avec la chose représentée. Félicien David avait voyagé en Orient ; aussi, sa partition, vécue, pour ainsi dire, restera, même quand on l'exécutera plus rarement, une oeuvre de bibliothèque dont les airs principaux seront chantés séparément et dont l'ensemble marquera une date dans l'histoire de la musique descriptive. — La Fantaisie pour violon et orchestre de M. Georges Hue a été bien rendue par M. Pennequin. Elle est intéressante, surtout dans sa deuxième partie. Voici quelle a été l'impression produite par les extraits des Scènes d'enfantsde Schumann, orchestrées par M. Benjamin Godard.La Rêverie a été acclamée frénétiquement et bissée; le reste n'a produit aucun effet. Les Scènes d'enfants se composent d'une douzaine de pièces pourpiano dont la facture est exquise et la mélodie pleine d'attrait, surtout à causede la concordance parfaite de la forme musicale avec le procédé d'exécution pianistique. Cela est trop fin,trop subtil pour l'orchestre; aussi, malgré le talent déployé par M. B. Godard et les charmantes coquetteries de son instrumentation, l'effet a-t-ii été inférieur à ce que l'on pouvait espérer.

AMÉDÉE BOUTAKEL

— ConcertLamoureux. — L'Ouverture de Fêle, de J. Brahms, écrite pour une solennité académique, est, malgré son titre, une oeuvre d'un caractère assez sombre et qui n'éveille en rien l'idée d'une fête. Le style en est sobre, l'orchestration excellente, très pleine, très nourrie, sans les exagérations et les débauches instrumentales qui sont de mode aujourd'hui. C'est une oeuvre très forte et que l'on entend avec plaisir. Wagner était représenté par Siegfried-Idylle, et notre compositeur français Saint-Saëns par son poème symphonique le Rouet d'Omphale, si souvent entendu et toujours applaudi. Nous nous plaisions à faire, en nous-même, la comparaison des deux styles et des deux pensées : ici, la pâtée allemande, sans forme et sans saveur, filant comme un éternel macaroni, mets indigeste et lourd à l'estomac de l'auditeur assoupi ; — là, une nourriture substantielle et légère à la fois, artistement combinée par un cuisinier habile, d'une digestion agréable ; d'un côté, l'absence de forme, ls vague, l'indécision, de l'autre, la clarté, l'harmonieuse disposition, la précision en toutes choses. Il est vrai que Saint-Saëns a conservé l'esprit français, les qualités françaises, qu'il n'a pas, comme nos jeunes fin de siècle, cédé aux charmes de la Circé allemande, experte en métamorphoses, et qu'il est resté un compositeur national par excellence. On donnait également, de lui, la Marche militaire tirée de sa Suite algérienne, que l'on eût désiré entendre tout entière. Les honneurs individuels du concert ont été partagés entre M. Houfflack et Mm° Sophie Menter. Le premier a dit, avec un style parfait, un sentiment excellent et une grande virtuosité, le concerto de violon 1 en sol mineur de Max Bruch. Le concerto, qui est plutôt une fantaisie e» trois parties, est une très belle composition, quoique le finale ne soit pas-


LE MÉNESTREL

85

. ja hauteur des deux premières parties. Il produit toujours un grand effet, nitout quand il est interprété par un artiste delà valeur de M. Houfflack. TC concerto en sol, de Rubinstein, est également une très belle chose. Il n'est pas écrit, non plus, suivant les vieilles données classiques de Mozart, He Hummel, ni même celles, plus modernes, de Mendelssohn et de Schumann. L'orchestre y tient une place prédominante et parfois exagérée, au noint que le piano est souvent étouffé par son puissant rival. Mmo Menter s'est tirée vaillamment de cette lutte inégale, et a recueilli des applaudissements réitérés et mérités. Elle a, sans orchestre, exécuté avec une maestria incomparable, une Rapsodie hongroise, en mi, de Liszt. Nous serait-il permis de dire que le morceau où nous avons le plus apprécié son admirable talent a été une romance de Schumann, pièce bien simple, qu'elle a dite de la façon la plus merveilleuse ? H. BARBEDETTE.

— Programmes des concerts d'aujourd'hui dimanche : Conservatoire : Relâche.

Châlelet, concert Colonne : Ouverture des Francs Juges (Berlioz); Concerto pour trois pianos (Bach), par MM. Diémer, Risler et P(erret; prélude de la Reine Berthe IJoncières);.Scherzo pour deux pianos (Saint-Saëns). par MM. Diémer et Risler; fregnents de la troisième suite (Tschaïkow*ky) ; le Désert (Félicien David), avec le concours de M. Warmbrodt et de M" 0 du Minil.

Cirque des Champs-Elysées, concert Lamoureux : Ouverture du Freischûtz (Weber); faDtaisie de coDcert pour piano' (Tschaïkowsky), par Mme Sophie Menter; fragments de Tristan et Yseult (R. Wagner), avec le concoure de M™ Materna; fragments de Peer Gynt (Grieg); Canzonelta et Tarenletla di brc.mura (Liszt), par 1 Sophie Menter; scène finale du Crépuscule des dieux (Wagner), Brunehilde, M>° Materna; Danses hoagroises (Brahms).

— Concerts et musique de chambre : Mlle Petit-Gérard, une des meilleures parmi nos jeunes pianistes, vient de donner, chez Erard, une audition fort brillante d'oeuvres modernes, avec le concours de M. Delsart. Elle a mis en lumière, avec un style très personnel et une belle virtuosité, toute une série de courtes compositions de M. Edmond Laurens, de M. Alph. Duvernoy une charmante suite de Variations (op. 31), de M. Emile Bernard, deux Impromptus fort intéressants (op. 32), de M. I. Philipp, un élégant Caprice, la deuxième Valse-Caprice d'après Strauss, une transcription de la Danse des prêtresses de Dagon de M. Saint-Saëns, de M. Périlhou la jolie Paraphrase sur Werther, de M. Pierné une brillante Étude et Fantasmagorie. Elle a joué auparavant la sonate enwi mineur de M. Saint-Saëns, avec M. Delsart, qui s'est fait applaudir, seul, dans diverses pièces de MM. Widor, Lalo et Popper. — MM. Rémy, Parent, Van Waeffelghem et Delsart ont fait entendre, dans leur quatrième concert, le 14e quatuor de Beethoven et le septuor avec trompette, de Saint-Saëns, avec le concours de MM. Teste, le merveilleux trompette de la Société des concerts, et Risler, le parfait élève de M. Diémer. — MM. I. Philipp, Berthelier, J. Loëb et Balbreck avaient inscrit, dans leur septième programme, un Morceau romantique fort intéressant, pour piano et cordes, de M. Delaborde, la belle sonate pour piano et violoncelle de M. Saint-Saëns, longuement applaudie, et le quintette pour clarinette et cordes, de Brahms, admirablement interprété avec lj concours de MM. Turban et Carembat. L'émouvant andante, particulièrement, a été dit par M. Turban avec un son noble et charmant et le style le plus pur. — A signaler aussi une audition du 2e quatuor, de la sonale et de diverses mélodies de M. Gabriel Fauré, à une séance de MM. Parent, Bailly et Ronchini.

Très intéressantes, les séances nouvelles de musique de chambre, fondées à la galerie Vivienne par MM. Pennequin, Lespine, Bailly et Abbiate. La première a eu lieu le 24 février, avec le concours de Mme de Berny et de M. César Galeotti. On y a entendu le quatuor de Beethoven, le quintette de Schubert, une sonate de Grieg pour violoncelle et piano et l'air de la Vestale de Spontini, remarquablement interprété par Mme de Berny. La deuxième séance a eu lieu vendredi dernier, avec le concours de M. Ch.-M. Widor et de M. Clément. M. Pennequin est, comme on sait, l'excellent violon-solo de l'Opéra-Comique et des concerts Colonne. Jeu fin et des plus distingués. La troisième séance est annoncée pour le vendredi 24 mars, avec le concours de Mmes Edouard Colonne et Pennequin.

NOUVELLES DIVERSES

ÉTRANGER

De notre correspondant de Belgique (10 mars). — A la Monnaie, on est tout aux dernières répétitions d'Orphée, qui passera la semaine prochaine; aux Galeries, les splendeurs du Pays de l'or ont succédé au Brillant Achille, qui avait été renforcé, les derniers soirs, des Six Demoiselles à maria-, une des plus spirituelles bouffonneries du regretté Léo Delibes; PAlcazar a donné une nouvelle hospitalité aux chansonniers du Chat noir avec la Marche à l'Etoile et le Rêve de Joël. Voilà les seules nouvelles de nos théâttres, en ces derniers jours. Mais la musique ne chôme pas pour cela. Au dernier Concert populaire, nous avons eu le Chasseur maudit de Franck et la pittoresque, quoiqu'un peu longue Noce villageoise de Goldmark, encadrant un pianiste, M. Van Tyn, professeur au Conservatoire de Liège, — malheureusement indisposé, ou mal disposé, ce jour-là. Les XX nous ont oftert une seconde séance de musique française, avec des oeuvres instrumentales de MM. Vincent d'Indy, de Castillon et Fauré, fort intéressantes, et une autre séance consacrée à de très jeunes compositeurs belges, qui donnent des promesses, simplement. Enfin, au Cercle artistique, M.Julien Tiersot

a donné, mardi, la conférence sur la chanson populaire française que nous avions annoncée et qui a obtenu le plus vif succès. Après avoir, expliqué les origines de ces jolies mélodies populaires à la recherche desquelles il se consacre depuis plusieurs années avec tant de persévérance et de talent, il nous en a fait entendre quelques-unes, parmi les plus caractéristiques de celles qu'il a harmonisées et publiées dans le si intéressant recueil que l'on sait. Il en a chanté lui-même une partie, de sa voix nette, aux inflexions douces, et le reste a été dit par Mme Paulin-Archainbaud, de la Monnaie, avec beaucoup de goût, de charme et d'esprit. Le public était extraordinairement nombreux, et il a fait fête aux deux interprètes avec une chaleur et une expansion qui ne lui sont pas habituelles. L. S.

— La musique française vient d'obtenir un très grand succès en Belgique avec la Judith de M. Charles Lefebvre. Comme nous l'avons annoncé, l'excellente Société de musique de Tournai vient d'exécuter ce beau drame biblique, sous la direction de M. Henri de Loose, avec Mlle Baldo, MM. Heuschling et Pieltain pour interprètes. L'assistance, très nombreuse et très brillante, a vivement applaudi l'oeuvre et son exécution, et a fêté le compositeur, qu'elle a rappelé deux fois au milieu de bravos chaleureux.

—• Un commerçant avisé autant qu'ingénieux vient de mettre en vente, à Venise, le «dernier chapeau porté par Richard Wagner », certifié authentique par le consul d'Allemagne. Mais pourquoi diable a-t-il attendu si longtemps pour offrira l'avidité du public une relique aussi précieuse?

— Pour la saison de carême, l'Italie ne compte que vingt-huit théâtres ouverts avec une troupe d'opéra, savoir: quatre à Milan, deux à Venise, deux à Naples, deux à Gênes, deux à Savone, et un dans chacune des villes suivantes: Bergame, Casalmontferrat, Ferrare, Livourne, Lecce, Modène, Messine, Palerme, Padoue, Pavie,Rome, Turin, Trapani,Trévise, Udine et Verceil.

— La réclame théâtrale prend de singulières allures, et l'on se demande où elle s'arrêtera. Nous empruntons ce qui suit au Trovatore : « Il y a quelques jours, on lisait dans les journaux de Milan une nouvelle qui avait tout l'air d'un communiqué de la direction de la Scala, car la forme et les mots mêmes étaient identiques. Le voici : « L'impresa fait savoir » qu'elle a engagé pour les premiers jours de mars et pour trois représen■» tions, la célèbre Melba, connue, en dehors de ses mérites artistiques, pour ses « aventures avec le duc d'Orléans. » Le fait est que celle-là est originale, et que voilà une façon neuve et insolite d'annoncer ses artistes.

— On a inauguré ces jours derniers, au Conservatoire de Parme, une salle destinée aux concerts et aux exercices des élèves et à laquelle, en raison du récent succès de Falstaff, on a donné le nom de salle Verdi. Le programme du concert donné à cette occasion, à part une cantate écrite' par le jeune élève Terenziano Marusi sur des paroles de M. Michèle Caputo, ne comprenait que le seul nom de Verdi : ouvertures de Luisa Muller et i'Aroldo ; paraphrase de concert pour piano, de Gottschalk, sur le Trovatore ; air de soprano d'un Ballo in maschera ; andantino et prestissimo du quatuor pour instruments à cordes; paraphrase de concert pour piano, de Liszt, sur Rigoletto ; enfin, boléro des Vêpres siciliennes.

— Une question a été mise en discussion depuis quelques jours, dit le Mondo artistico de Milan, celle de la suppression des musiques militaires. Plusieurs journaux s'en sont occupés pour et contre. Nous ne voulons pas entrer dans les appréciations, ajoute notre confrère; mais il nous parait étrange qu'une proposition de ce genre soit faite justement en Italie, le pays de la musique par excellence.

— C'est à un sentiment touchant qu'on doit la première représentation, au théâtre Pagliano de Florence, d'un opéra posthume du compositeur P. Meucci, Annalena, écrit sur un livret de M. Marrucci. C'est le frère de cet artiste, l'avocatE. Meucci, qui, sans regarder aux frais, amis cet ouvrage à la scène, accomplissant ainsi un voeu fait il y a neuf ans sur la tombe du défunt. L'opéra nouveau a pour sujet un épisode du siècle célèbre de Florence, qui a déjà donné naissance à tant d'oeuvres du même genre. Ce livret n'est pas bon, paraît-il, et la musique ne paraît pas s'élever beaucoup au-dessus d'une honnête médiocrité. Mais le public a écouté l'ouvrage avec respect et sympathie, en faveur des circonstances auxquelles il devait son apparition.

— Tapage, sifflets et scandale épouvantable au théâtre Verdi, de Padoue, à la première représentation d'un opéra, A Canareggio, dont la musique est due à un riche dilettante, le comte Carlo Sernagiotlo. Les cris et les hurlements commencèrent dès le premier acte, en dépit des protestations des spectateurs des loges, sans doute amis de l'auteur. Mais au second le bruit devint infernal, et tel que le chef d'orchestre, M. Podesti, crut devoir quitter son siège et faire baisser le rideau.

— Un ex-acteur de la Compagnie piêmontaise, M. Carlo Marchisio, s'est avisé d'écrire une revue-zarzuela de circonstance, Crak-Chèque, qu'un compositeur nommé Mariotti a mise en musique. Cet aimable ouvrage a été tellement bousculé, à sa première représentation, qu'on en est encore à attendre la seconde.

— A Adria, première représentation d'un « ccherzo comique » intitulé un Matto per forza, du maestro F. Paresini. — A Arezzo, apparition d'une « idylle » en un acte, l'Alba, musique très inexpérimentée d'un jeune com-, positeur du nom de. Pavan.


86

LE MÉNESTREL

■— Les deux théâtres les plus importants deLivourne vont être baptisés à nouveau. Le fameux théâtre des Avvalorati s'appelera désormais théâtre Giuseppe Verdi, et le Politeama Livournais prendra le nom de l'illustre écrivain Guerrazzi.

— Le 19 février a eu lieu à Lisbonne, au théâtre de la Trinité, la première représentation d'un opéra dû à deux auteurs portugais, M. Eça Leal pour les paroles, M. Augusto Machado pour la musique. Leilora da Infanta, tel est le titre de cet ouvrage, dont malheureusement le poème est sans action, sans chaleur et sans intérêt. Par contre, on dit grand bien de la musique, dans laquelle le compositeur a déployé de nouveau les qualités qu'il avait fait apprécier déjà dans ses deux oeuvres antérieures, Lauriana et i Doria.

— La collection royale d'anciens instruments de musique qui s'est inaugurée à Berlin, le 15 février, sera ouverte désormais au public tous les mardis et vendredis, de midi à deux heures. Commencée en 1888, cette collection s'augmente et s'enrichit chaque jour, soit par dons, soit par acquisitions. On y voit, entre autres, le clavecin de voyage de Frédéric le Grand, le clavecin à double clavier de J.-S. Bach, le piano à marteaux de Charles-Marie de Weber, celui qu'Erard construisit à Londres pour Mendelssohn, le piano à table de Meyerbeer, et enfin le quatuor d'instruments à archet avec lequel Beethoven, qui tenait la partie de violoncelle, faisait de la musique chez lui en compagnie de ses amis.

— Un luthier peu scrupuleux est en train de réfléchir, entre quatre murailles, sur les conséquences que peut avoir une trop grande habileté commerciale. Cet excellent industriel, nommé Giovanni Rizzato, s'était rendu d'Adria, où il était établi, à Lublin, et avait vendu à un artiste de cette ville, M. Hans Gernster, au prix de 400 florins, en le lui donnant pour un stradivarius, un violon dont la valeur ne dépassait pas une cinquantaine de francs. Celui-ci, un peu naïf sans doute, finit pourtant p ar s'apercevoir qu'il avait été trompé, et se plaignit aux autorités de Lublin. On se mit alors à la recherche de notre homme, qu'on trouva tranquillement installé dans une chambre de l'hôtel du Bon Pasteur, à Trieste, en compagnie d'un petit bagage comprenant quatorze violons de médiocre qualité et une quantité d'étiquettes de luthiers célèbres, à l'aide desquelles il espérait sans doute faire passer ceux-ci pour des chefs-d'oeuvre. Parmi ces étiquettes se trouvaient celles d'Amati, 1712; Guadagnini, 1717 ; Jacques Gofriler, 1728; Roger delPer, Milan, 1714; Antonio Ciochi,Venise, 1790; Joseph Guarneri, Crémone, 1717; Andréa Guarneri, 168i, etc. Le trop habile luthier a été mis à l'ombre, en attendant qu'il ait à répondre ' de ses méfaits devant dame Justice.

— La Société des concerts du Musée, à Francfort, vient d'organiser une brillante matinée musicale en l'honneur de Rubinstein, qui a réservé aux assistants la surprise de se mettre lui-même au piano. Le programme, consacré exclusivement aux oeuvres du maître russe, comprenait le quatuor en si (op. 44), la sonate pour piano et alto, un air du Paradis perdu, plusieurs mélodies, et la célèbre suite du Bal costumé à quatre mains, dont le succès a été particulièrement vif. Quelques jours auparavant, Rubinstein avait dirigé, à une soirée musicale de cette même société, sa symphonie en sol mineur, son concerto pour piano en sol majeur, exécuté par Mlle de Jakimowsky, et son ballet de Feramors.

— Un nouveau Wagner. Le compositeur allemand Auguste Bungert entreprend actuellement de transformer en tétralogie musicale l'Odyssée d'Homère. Cet ouvrage, qui est, paraît-il, aux trois quarts achevé, comprendra quatre parties qui défraieront chacune une soirée et seront représentées dans l'ordre suivant : 1° Circé ; 2° Nausicaa ; 3° le Retour d'Ulysse; 4° la Mort d'Ulysse.

— De Magdebourg on nous signale le très grand succès obtenu, au der.nier concert symphonique donné dans la salle du Casino, par le concerto

pour violoncelle de M. Saint-Saëns et par la Fantaisie hongroise de Louis Lacombe, très bien dirigés par le chef d'orchestre, M. Fritz Kaufmann.

— Un gentilhomme autrichien, le comte Pezzini, qui vient de mourir à l'âge de quatre-vingt-douze ans a laissé un testament où il lègue sa loge au théâtre... au couvent des capucins de la ville d'Ala. Cette loge devra être occupée à chaque représentation d'opéra par trois moines du couvent, qui auront pour mission de veiller à ce que le spectacle ne porte pas atteinte aux bonnes moeurs. C'est une tâche bien difficile et même dangereuse que le vénérable moraliste a léguée là aux bons pères.

— Nouvelle à la main des Signale, de Leipzig. Précaution utile. — « Pourquoi avez-vous donné aux différentes parties de votre immeuble des dimensions si étroites : par exemple, aux fenêtres, à la porte cochère, à l'escalier? — Dame ! un piano est si vite arrivé! »

— Un savant musicologue, le docteur Hammerich, a fait récemment, à Copenhague, une conférence fort intéressante sur les anciens instruments à vent appelés lurer, les plus anciens que l'on connaisse, car ils remontent à l'âge de bronze, c'est-à-dire à un millier d'années avant notre ère. Vingttrois de ces instruments avaient été découverts, il y a cent ans environ, dans une touibière près de Fréderiksbourg, à quelques milles de Copenhague. Ils étaient très bien conservés. Dix-sept se trouvent encore au Musée ethnographique de Copenhague ; les autres ont été envoyés en Suède. Ces instruments, longs de deux pieds, sont construits avec un art véritable, et ne se trouvent que dans les contrées septentrionales. Ils servaient par

ticulièrement dans les combats et dans les cérémonies religieuses. Leur travail délicat et minutieux suffit, dit-on, à prouver que dès l'âge de bronze les règles de la musique étaient déjà jusqu'à un certain point connues.

— La Romania musicala, de Bucharest, annonce que dans le courant du présent mois de mars, la troupe allemande de Prague ira représenter en cette ville cinq opéras de Wagner. La direction amènera tout son per. sonnel non seulement de chanteurs, mais de choristes (70), de musiciens d'orchestre (48) et de danseurs, ainsi que tout son^matériel scénique. Les ouvrages représentés seront le Vaisseau fantôme, les Maîtres chanteurs, Tannhduser, Lohengrin et la Valkyrie. C'est une fantaisie qui coûtera cher aux spectateurs, car les prix d'abonnement aux cinq représentations sont fixés: pour les fauteuils, à 100 francs, et pour les loges, de 240 à 750 francs.

— Le nouveau grand théâtre de Zurich, dont l'inauguration récente s'était faite avec tant d'éclat, traverse, paraît-il, une crise redoutable, et le déficit est tel qu'on craint de le voir obligé de fermer ses portes au premier jour. Un journal local, le Tageblatt, a publié ces jours derniers une longue déclaration de l'administration du théâtre, dans laquelle il est fait appel au patriotisme des citoyens zurichois pour obtenir d'eux une aide matérielle qui permette d'éviter la clôture de l'établissement. On ne sait si cet appel sera entendu, et s'il sera possible de terminer au moins la saison.

— Les fameux nègres au jus de réglisse de MM. Moore et Burgess à Londres, mieux connus sous le nom de Christie Minstrels, se constituent en société au capital d'un million 875.000 francs. Cette respectable institution, une des plus anciennes et des mieux établies de Londres, prendra désormais le titre de Moore and Burgess, Limited. Dans le prospectus lancé par la société pour recueillir des souscriptions, il est dit qu'on s'est assuré le concours de M. Augustus Harris et dys compositeurs Isidore de Lara et Daniel Godfrey. Il y aura encore de beaux jours pour la négromanie et la banjomanie.

— On ne doit pas s'ennuyer à Newcastle, en ce qui concerne la musique, L'un des journaux de cette ville annonce qu'on y va exécuter prochainement un morceau intitulé l'Orage de la mer et qui sera joué par cinq pianos et un orgue à la fois; comme il y aura deux exécutants à chaque instrument, voilà un morceau qui sera joué par vingt-quatre mains. Pour peu qu'elles ne s'accordent pas complètement entre elles, ce sera de la musique véritablement orageuse.

— La ville de Sidney s'enorgueillit de posséder dans sa Town Hall (Hôtel de Ville) le plus grand orgue du monde. Il ne contient pas moins de cent vingt-huit registres. Voici, d'après une brochure australienne, la désignation de dix-neuf autres orgues, célèbres par leurs dimensions: cathédrale de Riga (124 registres) ; église Saint-Sulpice, de Paris (118) ; Albert Hall, de Londres (114) ; Notre-Dame, de Paris (110) ; Auditorium, de Chicago (109); église Saint-Georges, de Liverpool(lOO); église paroissiale de Doncaster (94); Hôtel de Ville de Leeds (93) ; cathédrale d'Anvers (90) ; Alexandre palace, de Londres (88); Armley, près Leeds (70); Crystal palace, de Londres (68); Hôtel de Ville de Birminghm (68) ; cathédrale de Fribourg (68); palais du Trocadéro, à Paris (66) ; Brooklyn, près New-York (66) ; Hôtel de Ville de Melbourne (66) ; Albert Hall, de Sheffîeld (64) ; église Sainte-Marie, de Bradford (60).

— L'inspectorat du théâtre Santa Izabal, à Pernambuco, s'occupe en ce moment de créer une bibliothèque théâtrale et musicale, et il a déjà commencé à former, dans le foyer de ce théâtre, une galerie de portraits de compositeurs dramatiques. Ces portraits sont l'oeuvre d'un peintre brésilien, M. Libanio do Amaral, et l'on trouve déjà, dans la galerie, ceux de Verdi, Meyerbeer, Rossini, Donizetti, Bellini, Georges Bizet, Massenel, Ponchielli et Carlos Gomes.

— L'ex-reine d'Hawaï, en véritable souveraine fin de siècle, cultivait la musique et l'art de la composition. Au concert donné dans l'église Kaumakapili, d'Honolulu, à l'occasion de l'anniversaire de l'indépendance de Hawaï, l'orchestre Hawaï-Ponoï a exécuté une oeuvre musicale de Sa Majesté portant ce titre suave : He Mêle Lahdi Hawaï. Au programme figuraient également une Marche triomphale de l'organiste Best, un concerto pour piano de Hauptmann, un sextuor de Jules Cohen et la romance de Mignon d'Ambroise Thomas.

PARIS ET DEPARTEMENTS

Nous avons publié récemment la liste des cinq noms de compositeurs anciens prix de Rome, que la section de musique de l'Académie des beaux-arts est chargée de dresser périodiquement et de présenter au ministre. C'est sur cette liste, on le sait, que celui-ci choisit et désigne le compositeur chargé, selon les clauses du cahier des charges de l'Opéra, d'écrire pour ce théâtre l'ouvrage en un ou deux actes, ballet ou opéra, qui doit y être représenté tous les deux ans. On considère comme probable que c'est sur^M. Charles Lefebvre, dont le nom figure en tète de la liste récente, que se portera cette fois le choix du ministre. M. Charles Lefebvre, artiste extrêmement distingué, qui obtint le prix de Rome en 1870, avec M. Henri Maréchal, est connu par plusieurs oeuvres remarquables : Judith, grand drame biblique en trois parties; Zaïre, opéra en cinq actes représenté avec succès à Lille; le Trésor, opéra-comique joué à Bruxelles et à Angers; une symphonie, des quatuors pour instruments à cordes, etc., etc.


LE MENESTREL

87

__ Un de nos confrères publie, sans plus de détails, la nouvelle suivante nue nous reproduisons textuellement d'après lui: «Dans sa dernière séance, l'Académie des Beaux-Arts a proposé pour le prix Bordin, à décerner en ■ong le sujet suivant : De la musique symphonique et de la musique dite de rhcfflibre en France depuis les dernières trente années du dix-huitième siècle jusqu'à nos jours. »

__ En outre d'une symphonie, d'une scène dramatique et d'un quatuor, la Société des compositeurs de musique met au concours le sujet suivant : j)e la notation proportionnelle aux XVe et XVIe siècles, avec exemples. Prix unique de 200 francs offert par la Société. Les étrangers sont admis à concourir pour cette dissertation, qui, toutefois, devra être écrite en français. On est prié d'adresser tous les manuscrits des concours à M. J.-B. Wecierlin, bibliothécaire-archiviste de la Société des compositeurs, 22, rue Rocbechouart (maison Pleyel-AVolff).

_- Par suite d'une indisposition de MmG de Nuovina la répétition générale de Kassya à l'Opéra-Comique se trouve encore remise à la semaine prochaine.

_- Le petit opéra bouffe de M. Saint-Saëns Phryné, qui avait été écrit pour la Renaissance, direction Détroyat, passe à l'Opéra-Comique et sera représenté prochainement. M. Garvaiho s'est également engagé à représenter avant le 1er novembre prochain le Flibustier, de M. Richepin, mis en musique par M. César Cui, le maître compositeur russe si apprécié des musiciens. Détail curieux, M. César Cui, général lui-même et des plus distingués dans l'armée russe, est le fils d'un général français du premier empire qui se fixa et se maria en Russie après la fameuse campagne de Napoléon Ier. M. César Cui est donc, pour le moins, à moitié français; on peut même dire qu'il l'est tout à fait depuis la manifestation de Cronstadt.

— Une erreur d'impression nous a fait annoncer la réception, à l'OpéraComique, d'un ouvrage en un acte de M. Antoine Banès, intitulée Mademoiselle Rose ou le Dîner de Pierrot. Il y a ici une confusion. Ce n'est pas un, mais deux ouvrages en un acte, que M. Garvaiho a reçus récemment. L'un a pour titre effectivement Mademoiselle Rose et pour auteur musical M. Antoine Banès ; mais le Dîner de Pierrot est le titre du second, dont les auteurs sont MM. Bertrand Millanvoyé pour les paroles et Ch. Hess pour la musique. Les deux rôles principaux de ce dernier seront créés par M. Fugère et Mme Molé-Truffier.

— On nous prie de rectifier une erreur commise par notre correspondant de Bruxelles dans l'intéressante notice nécrologique qu'il a consacrée au regretté Henry Warnots. Warnots n'était pas né à Saint Trond et n'avait pas soixante-quatre ans ; il était, comme le dit d'ailleurs notre collaborateur Arthur Pougin dans son supplément à la Biographie universelle des musiciens, de Fétis, né à Bruxelles le 11 juillet 1832, et n'était âgé par conséquent que de soixante ans.

— l'Année musicale de notre excellent confrère Camille Bellaigue est devenue, cette fois, l'Année musicale et dramatique, M. Bellaigue étant tout à la fois maintenant, à la Revue des Deux Mondes, critique dramatique et critique musical. Le lecteur de ce joli recueil annuel y gagnera d'être informé non seulement do ce qui concerne nos scènes lyriques, mais de ce qui se produit sur nos scènes littéraires, et ce sera double plaisir pour lui. Nous n'avons pas, d'ailleurs, à faire l'éloge de ce nouveau volume, qui reproduit les qualités qu'on avait justement remarquées dans les précédents, C'est toujours la même langue claire, précise, élégante, mise au service d'un jugement sain et délicat, avec, par-ci par-là, un gentil grain de fantaisie qui ne messied pas même dans les oeuvres sérieuses. La critique s'y montre toujours courtoise, et s'il lui arrive parfois d'être sévère, c'est du moins sans cette rudesse et cette âpreté qu'on peut regretter de rencontrer chez certains écrivains dont le mérite ne perdrait rien à se présenter sous des formes moins amères. L'Année musicale et dramatique n'est pas seulement un recueil intéressant et utile, c'est aussi un livre aimable et d'une lecture pleine d'agrément. A. P.

— Aux Après-midi littéraires et artistiques de la salle des Capucines, demain lundi 13 mars, à cinq heures, deuxième conférence de notre collaborateur Arthur Pougin: Verdi et ses oeuvres.

V

— Nous apprenons que MIW Gabrielle Ferrari a été invitée à exposer ses compositions à Chicago, comme M"1™ Holmes, de Grand val, Chaminade, Carissan, etc., dans ce superbe Palais des Femmes construit par des architectes et maçons du beau sexe.

— Dans les dernières années de sa vie, Stephen Heller disait souvent pe le seul plaisir artistique qu'il éprouvait encore était celui d'entendre de jeunes enfants intelligents et bien doués jouer la musique des maîtres. Ils sont incapables, sans doute, d'en saisir les pensées profondes; mais, disait-il, à la place de l'expression vraie, ils mettent toujours une expression naïve qui leur est propre et pleine d'attraits. Heller eût été heureux d'entendre, à la salle Pleyel, es tout jeunes élèves de Mmû Marie' Jaëll, diriges suivant la méthode « le Toucher ». Nous n'avons pas à entrer dans i examen technique de cette méthode (1). Mais il faudrait être aveugle ou de parti pris pour ne pas reconnaître que les jeunes virtuoses de sept à

(1) Le Toucher, nouveaux principes élémentaires pour l'enseignement du piano, Par Marie Jaëll, au Ménestrel.

douze ans que nous avons entendus sont surprenants d'agilité, de netteté et, parfois, de véritable sentiment artistique. Notez que la musique qu'ils interprétaient était celle de Chopin, de Bach, de Schumann, de Schubert et de Liszt. Le jeune Frifri Ponselle ouvrait la marche par un prélude de Chopin. Venaient ensuite MUes Rochefort et Cailliolte, dont la première s'est signalée dans une gigue de Bach, la seconde dans une romance de Schumann et une fugue de Bach. Grand succès pour la fille de mon excellent confrère Boutarel; M 110 Éva Boutarel a les plus rares dispositions : elle a dit d'une façon tout à fait magistrale le premier Caprice de Paganini et sera, un jour, une artiste de grande valeur. H. BAUBEDETTE.

Mme Roger-Miclos a fait entendre le 2 mars, salle Pleyel, un ensemble d'oeuvres de Beethoven, Schumann, Liszt, Mendelssohn, qui a permis d'apprécier sous ses aspects divers et variés un talent remarquable. Souplesse, légèreté, vigueur et bravoure, telles sont les qualités que chacun a pu apprécier dans le jeu; mais, si l'on se place à un point de vue plus essentiellement musical, il faudra louer sans réserve la grâce de certaines interprétations, principalement dans les Pièces romantiques de Schumann. MUe Pregi a partagé le succès de ce beau concert et fait applaudir, entre autres choses, la charmante mélodie de Léo Delibes, Myrto. En somme, pianiste et cantatrice ont obtenu un succès enthousiaste. An. B.

— Nous ne saurions nous dispenser de signaler, au moins en quelques mots, le très beau concert donné cette semaine par MUe Marie Panthès, avec le concours de l'orchestre Lamoureux. M1Ie Panthès s'est fait vivement et justement applaudir dans le concerto en ré mineur de Rubinstein et la Fantaisie hongroise de Liszt, qu'elle a joués avec une verve, un éclat et un style remarquables. Elle a fait grand plaisir aussi dans diverses pièces détachées, telles que le scherzo à la russe de M. Tschaïkowsky, la Toccata de M. Massenet et la Fileuse de Mendelssohn.

— M. Dufour, directeur du grand théâtre de Marseille, a profité de la présence de M. Reyer dans cette ville pour donner trois représentations de Sigurd pour lesquelles M. Gresse, le créateur du rôle d'Hagen a été spécialement engagé. La première de ces trois représentations a eu lieu hier mercredi, avec Mmes Issaura, Pacary, Passama, MM. Paulin, Noté, Gresse et Hermann Devriès. L'exécution, sous l'intelligente direction de M. Mirane, a été excellente. Mais le succès de la soirée a été pour Mlle Pacary, une belle et très remarquable Hilda, la seule qui, après Mme Bosman, ait donné à ce rôle sa véritable ampleur et l'accent dramatique voulu par le compositeur. Immédiatement après la représentation,

.M. Reyer a offert le rôle de Salammbô à Mlle Pacary, qui l'a accepté et sera prête à le chanter dans une quinzaine de jours. L'engagement de Mlle Pacary à l'Opéra est tout indiqué. Ses débuts dans les rôles d'Hilda, d'Ortrude et de Valentine y feront sensation. Encore une élève de notre Conservatoire qui va faire son chemin.

— L'Association des artistes musiciens, fondée parle baron Taylor, a fait célébrer jeudi 23 février, à Rouen, en l'église Saint-Godard, un superbe salut en musique au bénéfice de sa caisse de secours, avec le gracieux concours de Mme Berthe de Montalant, de MM. Warmbrodt et Auguez pour la partie vocale, Mlle Spencer-Owen et MM. Cretivy et Latouche pour la partie instrumentale. Cette solennité, qui a été très réussie au point de vue artistique, avait attiré une foule considérable et a été des plus fructueuses pour l'Association.

— A la seconde soirée musicale donnée par M. et Mm 0 Diémer, en leur hôtel de la rue d'Amsterdam, on a applaudi, outre le maître de la maison, Mme Connëau, Mme Leroux-Ribeyre, qui a chanté de façon ravissante Menuet, de Louis Diémer, et Ouvre tes yeux bleu*, de J. Massenet; M. Marsick, M. Stojowski, très applaudi dans Troisième orientale, de Louis Diémer, et Enroule, de Benjamin Godard; M. Loëb et M. Diaz de Soria, à qui on a fait redire la Sérénade espagnole de Louis Diémer.

— Au Grand-Théâtre de Lille, très belle reprise de Manon, avec Mlle Horwitz, MM. Delaquerrière et Cobalet. Les trois anciens pensionnaires de l'Opéra-Comique ont été, la soirée entière, bissés et rappelés. M. Oscar Petit, le directeur du théâtre, a l'intention de donner, avant sa fermeture, une série de l'oeuvre exquise de M. Massenet, interprétée par ces trois excellents artistes.

— A Nice, réussite complète pour le concert donné par Mlle Marie de Labordette, à la salle Rumpelmayer. Le grand air de Sigurd et l'Aubade, de C. de Champmoynat, ont bien mis en valeur le talent de la jeune cantatrice.

— L'Harmonie municipale de Beauvais a donné dernièrement, sous la direction de M. Delannoy, un fort beau concert au cours duquel on a très applaudi Mme Michard-Cour, MM. Bartet, Bertaine et Granier.

— CONCERTS ET SOIRÉES. — Le lundi 20 février, dans les salons de l'Institut Rudy, quatrième séance donnée par Mme Sdliard-Dietz. M»" M. Lavigne très applaudie dans l'Esclave, de Lalo, le Crépuscule, de J. Massenet, M 11" Ch. Vormèse, qui a délicieusement accompagDé sur son violon l'adaptation de B. Godard sur la Lucie, d'Alfred de Musset, très bien dite par M. Ch. Léger. Saillard-Dietz et M»' de Faye-Zozin dans la Sérénade tunisienne, de G. PfeiSer, et M 11" Duhamel, Montrose MM. Loob et Rey ont recueilli de nombreux applaudissements au cours de cette intéressante séance. - A la salle Erard, également lundi, intéressant concert donné par M"" Berthe Duranton. Grand succès pour la brillante pianiste et pour les artistes qai lui prêtaient leur concours. On a particulièrement applaudi M>« Adeline Rebrey.de l'Opéra-Comique: après le grand air i'ïïérodiade, elle a chante te Charité, de Faure, puis le duo de Sigurd avec M. Mazalbert. Une belle personne,


88

LE MÉNESTREL

une belle voix et le style d'une ancienne élève de M» 1" Carvalho, voilà M 1" Adeline

Rebrey. — M. Mazalbert a chanté seul deux exquises compositions, tes Toutes Petites

de Paul Vida), et Sur la montagne, de Charles Levadé, qui lui ont valu d'unanimes

applaudissements. — Très agréable concert mardi dernier au théâtre de la galerie

Vivienne, par la Société d'auditions Emile Pichoz. Succès pour la jeune harpiste

Mllc Skotf, pour le baryton BeleD, dans Pensée d'automne, de Massenet, et surtout

pour M" 6 Raphaële d'Agenvile, dont la délicieuse voix de conlralto a donné du

relief aux charmantes compositions de M. Léon Sch'lesiDger, Si tu voulais et Valse

printanière. Une amusante comédie de M. Georges Villain, A l'anneaud'or,terminait

le concert. — Intéressant concert samedi dernier à la Société nationale. On a

applaudi un trio de M. Lazzari, oeuvre sérieuse, pleine de qualités; des variations

en quatuor, tort bien ëcriies, de M. Stojqwski, et un nocturne de Fauré ainsi que

la ballade de Grieg. Ces deux dernières oeuvres étaient interprétées par M. Faïk

Bey délia Sud la, jeune élève de Liszt, qui a fait preuve, surtout dans la ballade,

d'un très réel et très sérieux talent. A signaler aussi les mélodies de MM. Bordes,

Chausson et Fauré, fort bien chantées par M. Lazzari. — Le lundi, 20 février,

à l'Ecole classique de la rue Charras, charmante soirée musicale dans laquelle se

sont fait particulièrement applaudir : pour le chant, M"c Sorval, élève de M. Marcel,

, M""' Eyreams, élève de M. Benhemet, M. Haloucherie, élève de M. Genevois;

pour le piano, M" 0 Laloue, élève de M" 0 Balutet, Petibon, élève de M. Chavagnat,

Chavagnat, AUiod, élève du cours d'accompagnement de M. Berges ; pour la

' mandoline, Mlle Péchenet et son professeur M. Talamo; enfin M" 0 Fournier,

MM. Brette, Mornac et Blancard, élèves du cours d'opéra-comique de M. Barnolt

—A l'a salle d'horticulture. Le quatuor vocal Muller de la Source a consacré presque

entièrement sa séance du 22 février à une seconde sélection du Winkelried de

Louis Lacombe, dont on admire chaque jour davantage la belle et vigoureuse

partition. — A Bourges, beau concert donné par la tournée Baret. M 1' 0 Levallois,

violoniste, l'étoile de cette trjupe, a obtenu un grand succès. M"" Balanqué

a bien dit la Vierge à la crèche de M. Pénavaire, M. Martapoura, Pensée d'automne,

de Massenet. Le pianiste-compositeur G. Lamotne et M. Baret, l'excellent comique, '

ont fait plaisir. — M™° Zina de Nari, du Théâtre-Lyrique, vient de remporter un

beau succès à la soirée de la comtesse d'Arzy en chantant les airs de son pays ; de

plus, nous apprenons que cette artiste va donner quelques représentations du

Trouvère et de Faust au théâtre municipal de Pau. — Lundi 27, brillante soirée

chez M"" Ferrari. La maîtresse de la maison s'est fait applaudir très justement

et comme compositeur et comme virtuose. A côté d'elle Mms Marcy dans le Matin

et le Baiser, de Théodore Dubois, M. Brun dans VHyrnne nuptial pour violon,

M. Kerrion dans la Cavatine pour violoncelle, et ces deux artistes dans le

Duetlino d'amore, du même compositeur, M" 0 Kireevsky et M. C ., de

l'Opéra-Comique, ont été l'objet de flatteuses ovations. — Musique également chez M" 0 la baronne Boissy-d'Anglas. Programme exclusivement composé d'oeuvres de MM. Henri Maréchal et Ed. Diet. Du premier, on a bissé les Vivants et les Morts et la Chanson béarnaise, fort bien dite par M. Viterbo. — Mercredi dernier, très brillant concert donné à la salle Erard par M 11" Marguerite Baudé, une des plus, brillantes élèves de M. J. Delsart. La charmante violoncelliste a joué, avec son maître, la Sérénade de Widoret a été couverte d'applaudissements. M™ VanArnhem qui a dit en perfection l'air d'Bamlet et M"' Petit-Gérard ont fait infiniment de plaisir. — La deuxième séance du violoniste Ed. badaud, consacrée aux maîtres anciens, avait attiré un nombreux public chez Pleyel. Le programme a été exécuté avec la perfection que l'on peut attendre d'artistes tels que MM. Diémer et Tafianel, secondés de MM. Cros-Saint-Ange, Laforge et Gibier. Signalons particulièrement le quatuor pour cordes de Schumann, dans lequel M. Nadaud a fait preuve d'une grande virtuosité. — L'audition d'élèves de M 11" Henriette Thuillier a eu lieu le 26 février, sous la présidence de M. Benjamin Godard, dont on a exécuté un grand nombre de compositions. Parmi les élèves avancées, nous avons distingué M"" Madeleine F., qui a exécuté Jonglerie, de Godard, M"" Andrée L., (les Fuseaux) et Mlle Hélène G., (danse du Tasse). Le jeune violoncelliste Hasselmans a interprété avec succès deux pièces de M. Godard. — M 11" Camille Gharmois, premier prix du Conservatoire, a donné le 25 février, à la salle Erard, une très brillante séance de piano où son remarquable talent a obtenu les suffrages unanimes d'un public nombreux et appréciateur. — Soirée des plus agréables la semaine'dernière chez M» 0 Moreau-Sainti. Brillant succès pour M"" Naudin dans le Poète et le Fantôme, de Massenet, M"e Chaminade, dans ses séduisantes compositions, le violoncelliste Liégois, M™ Lherbay, de TOdéon, dans la scène musicale déclamée de MM. Auguste Dorchain et Léon Schlesinger, Sans lendemain, accompagnée par le violoniste Parent et M. Schlesinger. Pour finir, une charmante comédie de M. Moreau-Sainti, Mamz'elle Gervaise, interprétée par Mmo Lherbay et MM. Vilmont et Duluard.— La Société d'art vient de faire entendre, dans sa sixième séance, une intéressante sonate pour piano et violon de M. Parent, des mélodies élégantes de M. H. Eymieu, fort bien dites par M"e Pregi, et des morceaux de

piano de MM. Périlhou (paraphrase sur Werther) et Philipp (Arabesque) remarqua, blement joués par M" 0 Wassermann. — Les deux dernières réceptions musicales de Mme Péan ont été remarquablement intéressantes. Au programme une sélection de Sigurd d'E. Reyer et du Songe d'une nuit d'été de notre maître vénéré Ambroist Thomas. Les interprètes, M 11" Bréval et Marcy de l'Opéra, M™" Marie Rmff, MM. Alvarez, de l'Opéra et Belhomme, de l'Opéra-Comique, ont été acclamés. A côté de ces artistes, une jeune élève de M" 0 Ruefi,M"c Delerme,'a pleinement réussi dans l'air d'CJtah de Sigurd. — Très grand succès obtenu par M"' 0 Marcus de Beaumont, à l'audition des élèves de M'"™ Migneret et Drouard,- dans les variations du Carnaval de Venise et l'air de l'abeille de la Reine Topaze. Dans, cette même séance, vifs applaudissements pour Crépuscule, de Massenet, et le délicieux Passepied de Léo Delibes.

— CONCERTS ANNONCÉS : le 13 mars, à quatre heures et demie, à l'Institut Ruày cinquième séance de piano et de musique d'ensemble donnée par Mm° SaillardDietz. Au programme les noms de M™" Lebey, Daubrive, Frings, Duhamel, de Garetti, de Faye-Jozin et de MM. Magnus, Verdalle, Mac-Master, Christ Gallia Dutilloy, Charles Léger et L. de Vaux. — Le 15, salle Pleyel, concert donné par M"e Louise Riquier, avec le concours de M" 0 L. Lammers. — A la même date

15 mars, à neuf heures et demie, salle Erard, concert de M. Léon Delafosse. - Mardi soir, 21 mars, salle Erard, M. Louis Diémer donnera un concert de bienf aisance au profit de la famille du peintre S., avec le concours de Mm° M. Bataille, de MM. Marsick, Loëb et J, Thibaud. — Jeudi 16 mars, à onze heures et demie, salle Pleyel, audition des élèves de Mm 0 Louise Gomettant.

NÉCROLOGIE

Un tragique événement a jeté sur la radieuse journée de la mi-carême un voile de tristesse et de deuil. L'humoriste Gibert venait de déjeuner à l'entresol du café Riche, avec quelques camarades, appartenant pour la plupart au monde des théâtres, MM. Bouvet et Taskin, de l'Opéra-Comique, Villain, de la Comédie-Française, etc. Il avait été, selon son habitude, d'un bout à l'autre du repas, étourdissant de verve et de gaîté. Tout à coup une fanfare éclate sur le boulevard: c'est la cavalcade qui passe, Gibert,impatient d'entamer la bataille des confetti, se précipite au balcon, l'enjarcbeet met imprudemment le pied sur la marquise. La marquise, qu'il croyaiten zinc, et qui était en verre, cède sous le poids ; le malheureux passe au travers et se fracasse le crâne sur le trottoir. On le transporte chez un pharmacien de la rue Le Peletier, mais à peine arrivé, il expire. — Gibert, par . sa verve humoristique, toujours de bon aloi, toujours fine, d'une ironie très spirituelle, était, depuis de longues années déjà, le favori des salons parisiens. On l'y accueillait non comme un gagiste, mais comme un ami qui se prête de bonne grâce à divertir ses pairs. Et il s'était créé dans le ; monde artistique des amitiés aussi nombreuses que fidèles. Il fut le créa- i teur d'un genre où beaucoup, depuis, l'ont imité sans l'égaler jamais. Que de soirées exquises passées à entendre cet incomparable diseur! Est-il besoin de rappeler aux habitués de nos five o'clock les heures charmantes : qu'ils lui doivent? Le pauvre garçon n'avait pas encore quarante ans.

(Figaro.)

— Nous avons le regret d'apprendre la mort de M. Charles-Joseph Lebouc, violoncelliste fort distingué, qui s'était fait connaître comme virt uose et comme professeur. Ancien élève de Norblin, de Colet et d'Halévy au Conservatoire, il avait obtenu en 1842 un accessit d'harmonie, en 1843 les deux seconds prix de violoncelle et d'harmonie, et en 1844 le premier ; prix d'harmonie et un premier accessit de fugue. M. Lebouc, qui avait épousé l'une des filles du grand chanteur Adolphe Nourrit, se livra

à l'enseignement dès qu'il eut terminé ses études, et ouvrit avec sa femme des cours généraux de musique théorique, vocale et instrumentale, qui comprenaient toutes les branches de l'art, et il donnait chaque année douze séances de musique fort intéressantes. On doit à cet artiste excellent une Méthode complète et pratique de violoncelle. Il a publié aussi quelques fantaisies et morceaux de genre pour violoncelle avec accompagnement de piano. M. Lebouc, qui n'a jamais été professeur au Conservatoire, comme on l'a dit à tort, est mort à Hyères, où il possédait la villa de l'Hermitage. A. P.

HENRI HEUGEL, directeur-gérant.