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Titre : Travaux de l'Académie nationale de Reims

Auteur : Académie nationale de Reims. Auteur du texte

Éditeur : P. Giret (Reims)

Date d'édition : 1903

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34368590s

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34368590s/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

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Description : 1903

Description : 1903 (VOL116,T2)-1904.

Description : Collection numérique : Fonds régional : Champagne-Ardenne

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5614988d

Source : Académie nationale de Reims

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 18/01/2011

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TRAVAUX

DE

L'ACADÉMIE NATIONALE DE REIMS



TRAVAUX

DE

L'ACADEMIE NATIONALE DE REIMS

CENT-SEIZIÈME VOLUME

ANNÉE 1903-1904. — TOME II

DEUX VOLUMES SEMESTRIELS CHAQUE ANNEE

PAR ABONNEMENT : 12 FRANCS

PRIX DE CE VOLUME : 7 FRANCS

REIMS

CHEZ L. M1CHAUD, LIBRAIRE DE L'ACADÉMIE 19, rue du Cadran-Saint-Pierre, 19 <<,/ M D CCCC V I


NOTA

Toute reproduction est interdite sans l'agrément de l'Académie et des auteurs.

La responsabilité des opinions et assertions émises dans les ouvrages publiés par l'Académie appartient tout entière à leurs auteurs.


Fragment réduit d'un plan de Robert Lajoye, arpenteur royal, 1677 (Archives de Reimt, fs. du chapitre, pians, n» 4)

« INDICE » : K. C'est la troisiesme et dernière porte de la Porte a Vesle. — L. C'est la maison apelée la Barbe aux Quannes. — M. C'est la chaussée au devant de S' Lazare appelée la chaussée S» Lazare. - N. C'est S'Lazare. — O. C'est l'église S' Éloy. — P. C'est une pointe de pré de deux arpens. — Q. C'est le grand chemin qui conduit du aux bourg S< Éloi a la chapelle Sainte Anne, laquelle chapelle est au bout du faux bourg de Fleschambault.



LA LÉPROSERIE DE REIMS

du XII' an XVII" siècle

PAR

M. PAUL HILDENFINGER

Sous-Bibliothécaire à la Bibliothèque Nationale Lauréat de l'Académie



INTRODUCTION

Les archives de la léproserie : Historique et Répartition actuelle.

Les archives des léproseries Saint-Ladre auxjhommes et Saint-Ladre aux femmes de Reims, et particulièrement les titres domaniaux dont quelques-uns remontent au xne siècle, ont été d'une façon générale très bien conservés. Comme il est trop fréquent, les papiers relatifs à la vie intime des malades ont été souvent supprimés, et il faut noter, en particulier, la perte d'un précieux registre intitulé « le livre de la direction des lépreux » (1). Mais ce sont là des

(i) Ce registre, signalé dans des inventaires de productions est ainsi décrit (Archives de l'Hôpital Général, A. 2, 3, n" 41, f° 15 v°) : « Un livre en veslin de lettres fort anciennes intitulé au premier feuillet d'icellui : C'est le livre de la direction des lépreux, contenant les cérémonies qui se font a la réception des lépreux, les prières qui se font pour leurs guérison, leurs habits, leurs manière de vivre, ce qu'ils sont tenus d'observer, le tout sous la direction et administration des eschevins... sous les peines y portées, contenant vingt-neuf feuillets ». Il a disparu non pas dans les « feux, bruslements et incendies » dont "parle un mémoire du xvne siècle (Archives de l'Hôpital Général, A. 2, 4, n° 55, f° 5), mais très tard dans un procès de 1663 : il figure en effet parmi les documents d'une note peu postérieure intitulée « Mémoire des litres et pièces qui manquent au sacque que j'ay envoyé à M. Frison [représentant du Conseil de ville auprès du Grand Conseil de Paris]. » (Ibid., A. 2, 3,'n° 42).


exceptions ; l'administration des léproseries appartenait à l'Echevinage rémois et l'on comprend le soin avec lequel ce corps, en butte à d'incessantes attaques, a gardé un chartrier qui était « le rempart de ses droits. ».

Les archives furent, sans doute, d'abord réunies à la léproserie même, mais durant les guerres anglaises, les échevins jugèrent peut-être plus sûr de les ramener en ville (1). En tout cas, en 1349, elles sont placées dans la loge de l'Echevinage, en un coffre solidement fermé (2). C'est là que sont dès lors portés les comptes de chaque année. On peut trouver quelque exagération dans une déclaration des échevins de 1481 proposant à un commissaire royal de lui montrer les comptes depuis deux ou trois cents ans (3) ; cependant Varin signale un fragment de compte du XIII 0 siècle (4) et nous avons d'assez nombreux comptes du xive siècle.

Ces archives étaient entretenues par les clercs de l'Echevinage. En 1411-1412, deux de ces clercs, Jean Maubrouet et Person de Saint-Vincent, furent chargés de classer et d'inventorier les titres concernant

(1) Archives de l'HôpitalGënéral, E. 15, 8, f° 8 :«Item xn. deniers pour unescrinpris a S Ladre etmenés en la logenos maistrespour mettre nos chartes et nos privilèges.»

(2) Ibid. « Item xim. s. pour n. cerres de fer qui sont mises en l'escrin

(3) Pièces justificatives, xn.

(4) VARJ.V. Archives administratives de Reims, II, 2" part., 743, note.


ni

la léproserie Saint-Ladre et de « mettre en papier en briefla moule et la substance desd. lettres». Ils firent, cette année, le tiers de l'inventaire et reçurent une somme de 40 s. p. (1). En 1428, le coffre qui renfermait les chartes de Saint-Ladre fut transporté avec le reste des papiers du Buffet de l'Echevinage dans un cellier de la maison de l'Echevinage et scellé dans le mur (2).

Un grand remaniement fut fait dans ces archives au milieu du xve siècle. Sans doute, la place manquait dans la loge des échevins ; on résolut de transporter les « chartres, tiltres et enseignemens de S. Ladre » à l'église Saint-Pierre-le-Vieil (3). Dès 1475 un local fut préparé « entre deux vossures pour estre hors de périls des feuz au-dessus de la chapelle Notre Dame, au-devant de celle des fons de lad. église » (4). Mais il convenait auparavant de classer les titres. Les greffiers de l'Echevinage et les gouverneurs de Saint-Ladre furent chargés de ce soin et l'on invita les échevins à venir les aider (5). Le travail fut long. Les échevins ne mettaient pas grand empressement à répondre à l'invitation qui leur avait

(1) Archives de l'Hôpital Général, E. 16, 2, f° 7.

(2) Ibid., E. 16, 10, f° 4, v°.

(3) Archives communales de Reims, Conclusions du Buffet de l'Echevinage, 2, f° 27 v°. — Cf. VARIN, Archives administratives, I, 1" partie, p. XCXIV.

(4) Ibid., Hôpitaux Saint-Ladre, liasse 34, n° 2, f° 1.

(5) Archives communales, Conclusions de l'Echevinage, 2, f" 27 v°.


IV

été faite : pour activer leur zèle on dut décider (1) que « selonqu'ilzy besoigneront, en seront payés ». Enfin en 1478, trois échevins, M* Pierre Blancpignon, Robert Choilly et Jean Charpentier, assistés de JeanFoulquart, procureur de l'Echevinage, achevaient le travail. Les titres avaient été classés par liasses de A à Z, AA à ZZ, etc., et chaque liasse enfermée dans une layette de chêne ou de bois blanc o signée sur la couverte à cel signe » A+, B+, etc. (2). Un « cartulaire » de 43 folios in-4° avait été dressé pour rester à l'Echevinage (3). Il semble que les archives demeurèrent en cet état jusqu'au xvn 8 siècle (4) : une mention du compte des léproseries de 1593-1594 permet de constater un transport d'archives dans la « chambre haute de l'Echevinage » (5) Quand, à la suite de la fusion du Conseil de ville et de l'Echevinage (1638), furent inventoriés les titres des deux corps administratifs (1648), le troisième

(1) Ibid., 2, f° 161 v° (21 février 1477 n. st.).

(2) Ibid., Hôpitaux Saint-Ladre, liasse 34, n° 2, f° 11 V.

(3) Il est encore aujourd'hui aux Archives communales, Hôpitaux de Saint-Ladre, liasse 34, n° 2. — P. VABIN [Archives administratives, I, in partie, p. XCXIII) n'a connu de l'inventaire de 1478 qu'une copie du xvn' siècle (Bibliothèque nationale, ms. fr. 8335).

/4) Cependant, une partie des papiers appartenant à l'Echevinage a peut-être été portée au xvie siècle à l'abbaye de Saint-Denis. Voy. Archives communales, Comptes des léproseries, 7, f° 80, v° (1520-1521): « Pour avoir levé les serrures du chartrier estant à S. Denis... »

($)Archives communales, comptes des léproseries, 21, f° 507.


chapitre fut consacré aux foires de la Couture et le quatrième aux hôpitaux, c'est-à-dire aux léproseries (1). Vers la même époque, les léproseries ayant été réunies à l'Hôpital Général, les archives étaient transmises au bureau de l'hôpital par les administrateurs (5 janvier 1652). Un inventaire (2) avait été préalablement rédigé en deux cahiers, l'un correspondant aux 25 premiers sacs déposés à l'Hôpital Général, l'autre aux sacs 25 à 41 inclus. Depuis, les titres de Saint-Ladre ont été trois fois inventoriés, en même temps que les autres papiers de l'Hôpital Général. Le premier de ces inventaires, rédigé par Charles Nolin, chanoine de Reims, administrateur de l'Hôpital Général de 1687 à 1704, est divisé en deux volumes (3), l'un concernant les propriétés de l'hôpital à Reims, l'autre le domaine rural. Cette division indique suffisamment quelle a été la principale préoccupation du rédacteur. La même préoccupation se retrouve, d'ailleurs, dans l'inventaire général de 1750, en 2 volumes, oeuvre de M. Rogier, président au présidial de Reims, ancien administrateur de l'Hôpital Général (4). Enfin, au xixe siècle, le classement de la circulaire de 1854 a été appliqué aux archives de l'hôpital, et un inventaire

(1) VARIN. Archives administratives, I, lr« partie, p. C.

(2) Archives de l'Hôpital Général, D. 2.

(3) Archives de l'Hôpital Général, D. 3 et D. 4.

(4) Ibid, D. 5 et D. 6.


VI

rédigé de 1859-1861, dont un exemplaire est déposé aux Archives nationales, sous la cote P. 89033.

Le fonds des léproseries se trouve aujourd'hui mêlé au fonds propre de l'Hôpital Général et réparti suivant le classement de 1854. Dans chacune des séries, un certain nombre de cartons est réservé aux archives correspondantes de la léproserie. Mais, pour les domaines, on a confondu l'administration des gouverneurs de la léproserie et l'administration du Bureau de l'Hôpital qui l'a continuée. Les legs ou donations faits à Saint-Ladre ont été distribués dans les différents dossiers qui comprennent ainsi toute l'administration d'une ferme, par exemple, depuis le xme siècle jusqu'au xvnie, et ces dossiers sont intercalés ça et là, entre d'autres dossiers concernant des biens venus par ailleurs à l'Hôpital Général et qui n'ont aucun rapport avec l'ancien domaine de la léproserie. D'autre part, une distinction a été faite entre les propriétés vendues et les propriétés conservées.

Les archives de la léproserie déposées à l'Hôpital Général sont donc réparties dans les liasses ou cartons suivants :

Série A : 2, 5.

Série B: 9, 25, 27, 28, 29, 37, 38, 40, 41, 49, 50, 57, 58.

Série D : 1 à 6.

Série E : 15, comptes de 1313-1376 (série non


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continue) ; 16, comptes de 1382-1612 (série non continue) ; 17 (1615-1616) ; 18 (1629-1631).

Série F : 1 et 2.

Mais une autre partie des titres de Saint-Ladre est aujourd'hui aux Archives communales de Reims.

En 1652, au moment du transport des archives à l'Hôpital Général, une grande partie des comptes et quelques titres isolés étaient restés à l'hôtel de ville. Ces titres, classés lors de l'inventaire de François Copillon (1691) dans la cellule n° 30 de la première armoire (1), furent trouvés au nombre de treize, par Le Moine, au moment où il travaillait au classement des Archives municipales, et après avoir pris l'avis du Conseil de ville pour savoir s'il fallait rendre ces pièces à l'Hôpital Général (2), il les inventoria et en forma la liasse 34 (3). Cette liasse s'est enrichie depuis. En 1835, plusieurs dossiers furent reportés de l'Hôpital Général à l'hôtel de ville, où ils sont encore. Ces dossiers, qui correspondent à l'Inventaire de 1750, sont accompagnés de petits bordereaux sur feuilles volantes et renferment les bulles des papes, les sauvegardes royales et les titres

(1) VARIN. Archives administratives, I, 1™ partie, p. CIII.

(2) Archives communales, Hôpitaux Saint-Ladre, liasse 34, Renseignements, note manuscrite de Le Moine.

(3) Bibliothèque nationale, ms fr. 8336 : Inventaire des chartes de l'hôtel de ville de Reims, fait par Pierre-Camille LE MOINE, de Paris, avocat en Parlement, archiviste de plusieurs églises et abbayes du Royaume (1787), p. 597. — Cfr. VARIN, Archives administratives, I, lrB partie, p. CXI.


VIII

concernant la juridiction de la léproserie et les meubles des lépreux. Tous ces documents, ainsi que ceux restés à l'hôtel de ville en 1652, avec une liasse de pétitions et une de pièces administratives, sont aujourd'hui rangés et cités (1) sous la cote générale : Hôpitaux Saint-Ladre, liasse 34.

Outre cette liasse, les archives communales possèdent 29 gros volumes reliés des comptes de la léproserie. Ces comptes s'étendent de 1336 à 1633, avec 6 comptes pour le xiv* siècle, et complètent la série du dépôt de l'Hôpital Général. Ils sont tantôt sur papier, tantôt sur parchemin : quelquefois la minute en papier et la grosse en parchemin ont été gardées également. Deux de ces comptes (exercices 1613-1614 et 1614-1615) sont compris aujourd'hui, avec un mémoire du xv" siècle en faveur de l'archevêque contre les échevins, dans le fonds de l'archevêché (2).

Ces comptes sont doublés, pour le xvi" et xvn" siè(1)

siè(1) avons cependant essayé, autant que possible, démettre un peu plus de précision dans nos renvois. Lorsque le document cité fait partie d'un des dossiers de 1835, nous donnons le titre du dossier et le n° du document dans ce dossier. Quand le document fait partie de ceux inventoriés par Le Moine, nous donnons simplement le numéro : ainsi l'inventaire de 1478 figure sous la cote : liasse 34, n° 2. Mais ces renvois n'ont rien de définitif. —D'autre part, lorsque le document est emprunté aux archives de l'Hôpital Général, nous croyons pouvoir donner simplement la cote, sans répéter chaque fois l'indication du fonds.

(2) Liasses G. 185-186. Cf. L. Demaison, Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790. Marne. Archives ecclésiastiques. Série G., Clergé séculier. I, pp. 107-108.


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clés par une série de « pièces à l'appui des comptes et pièces relatives à l'administration » soigneusement enliassées, année par année, et s'étendant de 1515 à 1636 (avec lacunes). Sauf quelques exceptions, la lecture de ces pièces ne fait guère qu'apprendre ce que l'on peut déjà savoir par les comptes mêmes.

En dehors des archives de la léproserie même, la collection des Conclusions du Buffet de l'Echevinage, c'est-à-dire des délibérations du corps échevinal, nous a donné, malgré l'absence de tables et de rubriques, les renseignements les plus intéressants. Cette collection de 14 volumes in-folio ne commence malheureusement en fait qu'à 1473 (1). D'autre part, nous avons pu consulter aux Archives Nationales les registres du Parlement et, pour la dernière période de l'histoire de la léproserie, les cartons ou registres V7.126-151, ainsi que les autres documents concernant la réformation des hôpitaux au xvi" et au xvn" siècles et l'ordre de Saint-Lazare, répartis dans les séries M, MM, S et Zln.

(1) VARIN, Archives administratives de Reims, I, p. LXII1.



LA LÉPROSERIE DE REIMS

du XIIe au XVIIe siècle

CHAPITRE I"

La léproserie du xil» au XIVe siècle.

L'origine des léproseries Saint-Ladre aux hommes et Saint-Ladre aux femmes de Reims, comme celle de presque toutes les léproseries, est des plus obscures. Si l'on a de très bonne heure des renseignements sur les hôpitaux rémois, il n'en est pas de même pour les léproseries. L'acte le plus ancien que nous ayons pu rencontrer est une donation faite aux lépreux par uncroisé partant pour Jérusalem, en 1146(1 ). Cette donation permet de constater à cette date l'existence d'une communauté de lépreux, mais nous n'avons trouvé nulle mention de la date de fondation. Même au moyen âge les administrateurs n'avaient sur ce point aucun renseignement précis. Une déclaration des biens de la maladrerie présentée par les gouverneurs aux commissaires des francs fiefs, en juillet 1464 (2), commence ainsi : « Et premiers l'ostel et hospital (3)

(1) Archives communales, liasse 34, renseignements.

(2) E, 5, 1, dossier 1, n° 1, f° 5.

(3) A strictement parler la léproserie n'est pas un hôpital. Mais même dans la langue du moyen âge, cette distinction n"est


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Saint Ladre aux hommes assis près de la porte à

Vesle de Reims ou il y a de lies long et ancien temps, et passés sont mil ans que fut la fondacion et constitution d'icellui... » Cette allégation ne repose sur rien. Le titre de fondation n'était pas à cette date aux mains des gouverneurs de la maladrerie. Au xvf 3, au xvne siècle, ces administrateurs sont obligés de constater cette absence. Assignés en 1572, à présenter les titres de fondation devant les vicaires du Grand Aumônier de France, ils reconnaissent qu'ils ne les ont jamais eus (1), et il en est de même en 1663 dans un procès contre l'ordre de Saint-Lazare (2). Nous avons vainement, essayé de retrouver une indication dans les testaments source si précieuse de renseignements sur les établissements de charité. Il faut jusqu'ici nous en tenir à cette date de 1146.

En l'absence des litres, peut-être pourrait-on risquer une hypothèse sinon sur la date de fondation, du moins sur l'origine de la léproserie. Si l'on suppose qu'elle a été établie sur un terrain commun de la ville, il n'y a plus besoin de chercher une donation spéciale el sur ce point l'absence de titre s'explique D'ailleurs on. pourrait peut-être supposer que la léproserie n'a pas été créée en une fois d'une seule pièce, mais qu'elle s'est formée peu à peu. Un habitant devient lépreux, on lui construit une maisonnette en dehors de la ville; puis d'autres sont installés près de lui, ou ailleurs : ainsi s'expliquerait la multiplicité des emplapas

emplapas observée. Sous celle réserve, ces deux mots seront pour plus de facilité employés comme synonymes au cours de ce travail.

(1) Archives communales, conclusions du buffet, 7, f° 96 v°.

(2) A. 2, 3, dossier 11, n° 49.


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céments où se trouvent d'abord les lépreux rémois. En 1285 encore le testament de Hugues Le Large mentionne non seulement les deux léproseries qui ont subsisté jusqu'au xvii° siècle, Saint-Ladre aux hommes et SaintLadre aux femmes, mais les léproseries de Sainl-Médard et de Dieu-Lumière (1). Ainsi ce ne serait que dans une seconde période que les malades auraient été groupés dans un même lieu et sous une même administration. Quoiqu'il en soit de celte hypothèse, les échevins de Reims, dont on peut en effet constater au xin" siècle l'intervention dans la maladrerie, ont souvent revendique l'honneur de l'avoir fondée : « Il est certain, disentils dans un texte de 1652, que tout aussy tost que la maladie contagieuse de la lèpre commença d'affliger nostre ville de Reims, les eschevins, qui avoient la police d'icelle, mirent l'ordre pour les séquestrer et les faire vivre hors de la société des autres hommes, fournissant aux despens de la ville a ceux qui n'avoient pas moyen de subsister de leurs biens ou de leur travail tout ce qui esloit nécessaire tant pour le spirituel que temporel, ce qui les a fait reconnoislre de lous temps pour patrons, fondateurs et administrateurs perpetuelz... (2) » Il reste uniquement de cette assertion qu'ils sont patrons de la chapelle, mais lout patron n'est pas nécessairement fondateur. Il reste encore que l'absence de tilre s'expliquerait par une fondation communale : mais ce n'est qu'une hypothèse. Enlin le rôle que les bourgeois ont effectivement joué dans l'administration de l'hôpital s'expliquerait de même : mais d'autres explications sont possibles. Ce n'est donc qu'avec certaines réserves que

(1) VARIN, Archives administratives de Reims, I, 2° part., p. 101)0.

(2) Archives communales, liasse 34, H, f° 27 v°.


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l'on peut considérer les léproseries Saint-Ladre comme ayant été fondées en commun par les bourgeois de Reims. Les droits de ceux-ci ne sont historiquement établis qu'à partir de 1231.

Jusque là on doit admettre que les puissants archevêques de Reims ont étendu leur autorité sur les léproseries comme sur toute la cité. Sur les hôpitaux ils ont exercé cette influence non seulement comme chefs politiques, mais comme chefs religieux. En droit commun, en effet, les maisons-Dieu et maladreries du diocèse relèvent de l'ordinaire. En 1148, Sanson, archevêque de Reims, intervient à Saint-Quentin pour remettre la léproserie à l'abbé de Saint-Quentin-en-1'Isle, en spécifiant les droits du chapelain de l'église des lépreux (1). Nous n'avons pas pour la léproserie de Reims de preuve aussi précise de l'intervention administrative des archevêques : il y a même des textes (2) où ils semblent non pas affirmer leur autorité, mais, si nous ne nous trompons, traiter de pair avec la communauté. C'est surtout en vertu de leur pouvoir judiciaire qu'ils interviennent soit par eux-mêmes (3), soil par leurs archidiacres (4).

(1) Ch. GOMART. Éludes Sainl-Quenlinoiscs, t. V, 287.

(2) A 5, 1, n° 1 (1182) : Guillaume aux blanches mains donne aux lépreux une rente en échange d'une foire qu'il leur avait primitivement concédée : « Easdem nundinas non pro nostra tantum, sed rnagis pro veslra utilitate a vobis requisimus et easdem de donatione vestra, communi vestrum nssensu, recepimus. » En 1251, Thomas de Beaumets fait un contrat avec eux en termes analogues : « Inter nos et dictas magislrum et patres convenimus quod nos tenemur..., etc. » (A 5, 1, n° 1).

(3) A 5, 1, n° 9 (1196) : sentence de l'archevêque Guillaume condamnant les lépreux à payer sa vie durant à Philippe de Saint-Symphorien un droit de dîme pour Beaufuy.

(4) B. 14, 1, n° 1 (décembre 1215) : sentence de l'official de l'archidiacre dans un procès entre Saint-Ladre et Roger Quicot. —


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Une preuve de leur autorité se trouverait peut-être encore dans l'intérêt qu'ils ont d'abord porté à la maison de Saint-Lazare et les nombreuses faveurs qu'ils lui ont accordées. En somme,il n'ya pas déraison pour nepas admettre que l'archevêque ait exercé, ici comme ailleurs, un haut contrôle sur l'administration de la communauté. Mais au milieu du xuic siècle ce contrôle, devenu plus étroit, appartient aux échevins. Comment se justifie cette intervention? Sont-ils vraiment fondateurs? Sontils intervenus positivement à la fondation? Est-ce une concession du pouvoir épiscopal? Dans les derniers siècles les théoriciens prétendent rattacher l'administration des léproseries aux droits de police de l'Echevinage. Bidet distingue dans les pouvoirs de l'Echevinage deux juridictions : la justice de la Pierre au Change, tribunal judiciaire, et la justice du Buffet, qui serait plutôt d'ordre administratif, où les échevins décident des questions de voierie et de police, et à laquelle se rattacherait la surveillance des lépreux (1). Dans un factum de 1634 les échevins font en effet remarquer que l'administration de la maladrerio leur a été « commise... comme estans juges de la police de ladite ville, estant l'un des principaulx poincts de la police d'empescher que le mal ne se glisse parmis le peuple(2). «Cette théorie, très logique, semble construite après coup. Il n'y a rien de cette distinction des droits de police et de justice dans la charte de 1182 (3) qui organise ou réorganise l'EcheB.

l'EcheB. n° 2 : sentence de l'oflicial de l'archidiacre dans un procès entre Saint-Ladre et Milet de Monclin pour les dîmes de Lucquy (juin 1236).

(1) BIDET, Histoire de l'échevinage, part. I et II, p. 110 et 114, dans VARIN, Archives administratives de Reims, I, 2a part. p. 488.

(2) A 2. 4, n° 13, f° 7.

(3) VARIN, ibid, I, p. 392.


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vinage à Reims. Parmi les droits restitués par Guillaume aux blanches mains faudrait-il ranger ces droits de police et la surveillance des lépreux ? L'ont-ils reçue par une délégation spéciale, alors que d'ordinaire c'est aux chapitres et aux archidiacres que sont délégués les droits des évêques sur les hôpitaux ? D'abord simples représentants de l'archevêque, n'est-ce que peu à peu qu'ils ont acquis sur Saint-Ladre une autorité sans réserve et sans contrôle ? L'onl-ils purement usurpée à la faveur des agitations du xni" siècle pendant lesquelles ils organisent leurs pouvoirs contre l'archevêque? Nous ne saurions répondre, et l'histoire des débuts de l'Echevinage est encore trop obscure pour que l'on puisse voir quel rôle il avait, et s'il en avait un, dans l'administration des léproseries avant le second tiers du xine siècle. Mais en 1231 est fondée la chapelle de Saint-Ladre aux femmes, et dans l'acte de fondation interviennent deux proviseurs laïques, bourgeois de Reims (1). En 1240, l'archevêque reconnaissait officiellement ces privilèges. Dès lors, la léproserie sera sous le contrôle, puis sous l'administration directe de l'Echevinage.

Aux xue et xine siècles, les papes et les archevêques accordèrent naturellement à la léproserie de Reims la protection qu'ils accordaient à toutes les oeuvres de la charité chrétienne. Moins favorisée que les hôpitaux parisiens, la maison de Saint-Lazare, dépendant d'une des grandes villes de France, devait cependant solliciter l'attention de la papauté. Les lépreux, leur église, leurs biens furent l'objet d'un certain nombre de mesures

(1) Voy. ci dessous, p. "27.


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spéciales. Une bulle d'Innocent IV (I) rappelle ces faveurs; et, quelques-unes ayant pu être négligées, le pontife maintient la léproserie dans ses privilèges et les déclare imprescriptibles.

La bienveillance du Saint-Siège est assurée aux lépreux. AlexandreIII(2), Célestin III(3), HonoriusIII (4) les prennent successivement sous leur protection. Au xme siècle, Innocent IV (5) assure l'indépendance aux administrateurs en leur laissant entière liberté pour l'admission des frères, des malades ou le choix du chapelain ; c'était là un privilège qu'ils devaient garder précieusement et défendre non seulement contre l'autorité dont il émanait, mais jusqu'au x\i° siècle contre l'archevêque et contre le roi. Les mêmes bulles plaçaient sous la protection pontificale les biens de la léproserie. Alexandre III (6), par une mesure qui quelques années plus tard va devenir générale (7), exempte les lépreux de dîmes de leurs jardins, des fruits de leurs arbres, « du nourrissement de leurs bestes et des terres qu'ils labourent (8) ». Honorius III renouvelle ce privilège et Célestin 111 leur accorde une exemption semblable pour leurs vignes.

(1) Archives communales, liasse 34, bulles, n° o (Lyon, 12 octobre 1246).

(2) JAFFÉ, Regestu, II, n- 12316 (21 juillet 1174).

(3) Archives communales, liasse 34, bulles, n° 1 (23 janvier 1193).

(4) Ibid., n° 3 (10 mai 1217). Une autre bulle perdue est connue par une bulle du 9 novembre 1246 (K. Herger, Registres d'Innocent IV, 2213).

(5) Ibid., n" 6 (27 septembre 1246).

(6) JAFFÉ, Regesta, II, n° 12316.

(7) LABBE et COSSAKT, Concil., X, 1320, 3e concile du Latran, can.23 (1170).

(8) Archives communales, liasse 34 n° 2, 1'° 3.


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En même temps, le Saint-Siège les aide à sauvegarder leurs intérêts. En 1196, les frères de Saint-Ladre adressent une longue plainte à Célestin III. L'abbaye de Saint-Remi et celle de Saint-Pierre, qui depuis plus de quarante ans fournissent régulièrement des prébendes, refusent brusquement de s'acquitter. Renaud de Donchery a mis le feu à leur maison de Beaufuy ; le fermier des Loges les a volés. D'autres encore leur ont fait tort. Le pape mande (1) au doyen et à deux chanoines de Reims de s'entremettre pour leur faire obtenir satisfaction. Innocent IV, après avoir mis les lépreux et leurs biens sous la protection du Saint-Siège (15 octobre 1246) (2). prend des mesures plus générales. Pour éviter sans doute des abus, une bulle (3) du 2 novembre 1246 accorde aux frères de Saint-Ladre que nul ne pourra les obliger, sans leur consentement, à vendre ou aliéner leurs héritages : toute tentative de ce genre sera sans effet. Quelques jours auparavant (.fi octobre 1246) (4), ils avaient obtenu le privilège de ne pouvoir être cités en justice hors du diocèse, évitant ainsi des déplacements et des frais qui souvent étaient si onéreux qu'ils préféraient faire défaut ou accepter des compromis désavantageux. Une bulle de Sixte IV, conçue dans le même esprit, fait monition à tous ceux qui, profitant sans doute des guerres anglaises, avaient détourné quelque bien de l'hôpital, de restituer de suite sous peine d'excommunication (I" juin 1473) (5).

(1) Archives communales, liasse 34, bulles, n° 2 (Latran, 22 janvier 1196).

(2) E. BERGEN, Registres d'Innocent IV, 2161.

(3) Archives communales, liasse 34, bulles, n° 8.

(4) Ibid., n° 9. ^5) Ibid., n° 14.


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Enfin ces privilèges s'étendent à l'église de la léproserie, sous l'invocation de saint Ladre et de saint Eloi. Innocent IV accorde des indulgences à tous ceux qui visiteront l'église Saint-Eloi le jour de la fête de ce saint (1). De même, un acte émané de trois archevêques et de trois évêques et daté du Latran, 13 octobre 1300, donne quarante jours d'indulgence aux bienfaiteurs ou visiteurs de la chapelle (2). Enfin, en 1246, une bulle d'Innocent IV permet au maître et aux frères de SaintLadre, malgré l'interdiction générale dont avait été frappé le pays, de faire dire dans leur chapelle des messes basses, « interdiclis exclusis, non pulsatis campanis » (6 octobre 1246) (3).

Avec les privilèges du pouvoir spirituel, Saint-Ladre recevait les faveurs des seigneurs temporels. Il ne semble pas cependant que les rois aient fait autant pour la maladrerie qu'on pourrait l'imaginer en se rappelant que Reims fut la ville du sacre. Saint-Louis intervient un moment (4) dans la lutte de l'archevêque et des échevins administrateurs de Saint-Ladre, mais avec un but purement politique. Philippe-Auguste ratifie certaines donations faites à la léproserie. Mais nous ne voyons pas le roi faire lui-même de donations : à part une aumône de 16 s. au sacre de Philippe VI (S), nous n'avons rencontré qu'une mention de celte nature dans un curieux projet dressé par le Grand

(1) Archives communales, liasse 34, bulles, n° 7 (5 novembre 1246).

(2) Bibliothèque Nationale, collection de Champagne, 28, page 110.

(3) Archives communales, liasse 34, bulles, n° 4.

(4) VAHIN, Archives administratives, I, 2° partie, 777 (25 mars 1258).

(5) E. 15, 25, f° 7.


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Aumônier des « sommes et deniers ordonnés estre payées et aumosnées » aux établissements religieux et charitables de Reims après le sacre de Louis XIII (1) : encore l'article concernant Saint-Ladre se trouve-t-il rayé.

A peu près les seuls actes de l'autorité royale, qui soient gardés au chartrier, en dehors des pièces judiciaires, sont des lettres de sauvegarde : lettres de Jean II (Paris, 21 mai 1353) (2), lettres de Charles V (7 mars 1372-1373) (3), lettres de Louis XI (19 juillet 1481) (4), lettres de Charles VIII (10 mars 1485-1486) (4), lettres de Louis XII (14 août 1498) (5). En même temps pour ses domaines ruraux dépendant d'autres seigneurs, Saint Ladre obtenait des privilèges semblables : ainsi le comte de Flandre prenait la ferme de Beaufuy sous sa sauvegarde (6).

C'est naturellement aux archevêques que la léproserie doit d'abord le plus de faveurs. Ceux qui devaient plus tard soutenir contre la maison de Saint-Ladre de longs et ruineux procès commencèrent par lui donner des marques nombreuses de leur bienveillance. Eu 1201, Guillaume de Champagne, ayant accordé un droit sem(1)

sem(1) nationales, V 7. 127, liasse de 1610 : « Plus pour payer la valeur du cheval du roy appartenant aux pauvres de Saint Lazare a cause du privilège, cent escus. »

(2) Archives communales, liasse 34, renseignements : signilication de ces lettres par le bailli de Vcrmatidois(13 avril 1355).

(3) Ibid., et Comptes des léproseries, 1, 97 v°.

(4) Ibid., inventaire de 1652, l'° 6 : les lettres de Louis XI sont données comme de 1491.

(5) Ibid., id., fu 6 v.

(6) E. 13, 3, f" 8 v° (1350) : Item iui s. pour les despens de 1. Vallet qui apporta unes lettres clauses a nos maistres les eschevins que la maison de Bofouy estoit mise en la sauvegarde le comte de Flandres.


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blable à l'Hôtel-Dieu de Reims (1), fit don aux lépreux de deux charretées de bois (2) à prendre chaque semaine dans les bois de Chaumuzy. Par une convention du 22 juin 1251 (3), Thomas de Beaumets suspendit ce droit pour trois ans, en leur faisant par compensation une rente annuelle de 10 1. de Provins ; le délai passé, la léproserie dut en effet rentrer en possession de son droit (4). Ce genre de donation est un des modes de libéralité dont les seigneurs usaient le plus fréquemment en faveur des léproseries (5). Souvent aussi ils marquaient leur bienveillance aux établissements hospitaliers en leur octroyant des foires (6). C'est ainsi que fut instituée lafoire de Reims en faveur de la léproserie (7). Par l'acte de fondation (1170),

(!) VARIN, Archives administratives de Reims, I, 2e partie, 629.

(2) Ibid., 447. Confirmé par Philippe-Auguste, Paris, octobre. 1201 ( L. Delisle, Catalogue des actes de Philippe-Auguste, n° 678).

(3) A 5, foires, 1, n° 1 (copie de 1370).

(4) En 1343, Jean de Guéron, receveur de l'archevêque de Reims fait commandement à J. Milart, fermier de Chaumuzy, de laisser prendre aux gouverneurs le bois qui leur est dû. (A 5, foires, 7, 24 septembre 1343.)

(5) L. LF. GRAND. Les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris, pages 70 et 136.

(6) Lafoire de Saint-Lazare de Paris est bien connue (L. Delisle, Catalogue des actes de Philippe-Auguste, n° 27). Quelques maladreries tirent môme de ces foires d'autres avantages que les profits purement pécuniaires : la léproserie de Blois a une foire de trois jours avec la justice civile et criminelle dans le bailliage durant ces trois jours et le droit, pendant ce temps, d'autoriser le duel judiciaire ou de prescrire un accord entre les deux parties (Archives nationales, MM. 223, f° 228 v° : confirmation par Louis, comte de Blois et de Clermont, dés privilèges de la léproserie, analysée dans un tactum pour l'ordre de Saint-Lazare;. La léproserie de Falaise possède de même les droits de justice durant la foire. (Boutaric, Actes du Parlement de Paris, 1, n°1826.)

(7) Recueil des histor. de France, XVI, 189.


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l'archevêque Henri de France décidait qu'elle se tiendrait chaque année du jour de Pâques au soir de Quasimodo, près de la maladreric. Tout autre marché qui pouvait avoir lieu à cette époque était suspendu. La maison de Saint-Ladre toucherait tous les droits et profits. Mais l'archevêque se réservait les droits de justice et quelques autres soigneusement, énumérés ; de plus, la communauté devait lui payer une prime fixe de cent sous sur les tonlieux et rouages et de dix sous sur les droits de change qu'elle percevait durant la foire. Cette libéralité fut confirmée par le pape Alexandre III, en un acte du 21 juillet 1174 (1) où il prenait sous sa protection les marchands et les visiteurs se rendant à la foire ou en revenant (2). En 1176, Guillaume de Champagne accentua encore la libéralité de son prédécesseur en accordant de précieuses indulgences à ceux qui visiteraient la foire (3).

Mais cette fondation ne donna sans doute pas ce qu'on en espérait. C'est au moins le prétexte qu'invoqua Guillaume de Champagne pour demander aux lépreux dé renoncer à leur privilège. En effet dès T182 les frères de Saint-Ladre rendent à l'archevêque les droits de foire et reçoivent en compensation une rente annuelle de 10 1. 8. s. p. à prendre chaque semaine sur les changes de Reims ; ils acquièrent en outre le droit de faire moudre leur blé gratuitement aux moulins de l'arche(1)

l'arche(1) Regesta, II, n° 12310. (2) Archives commun ah s, liasse 34, n° 2, f° 3.

(3) VARIN, Archives administratives, I, lre partie, 359, d'après une transcription de Rogier (Bibl. de Reims, ms. de Rogier, I, f> 32 v°).—Archives communales, liasse34,n° 2, f°2vl>. Remise leur est faite d'un an de pénitence sur sept, d'une quarantaine sur trois, et des offenses envers ses père et mère, excepté les violences.


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vêque d'Entre-Deux-Ponls, avec le privilège de faire passer les premiers leur blé à la meule, avant tous autres, sauf celui de l'archevêque (1). Cette convention fut successivement ratifiée par le chapitre de Reims (2), par Philippe-Auguste (3), neveu de Guillaume de Champagne, et par le pape Célestin III (4).

La foire cependant continuait à se tenir devant la léproserie. En octobre 1201, Guillaume décida de la transporter à la Couture (5). En même temps la rente d'abord constituée aux lépreux sur les changes fut convertie en une rente de 100 setiers de froment sur les moulins d'Entre-Deux-Ponts, ils gardaient le droit de moulage gratuit. Cette nouvelle donation fut confirmée en octobre 1201 par Philippe-Auguste (6), et le 9 mars 1203 par Innocent 111(7). La rente fut payée d'abord régulièrement. Mais elle devait faire au xive siècle l'objet d'un long procès qui compliqua encore les rapports déjà difficiles de l'archevêque et de l'Echevinage.

En dehors des bienfaits qu'ils doivent ainsi aux archevêques, les lépreux rémois trouvèrent une autre source de richesse dans la charité des particuliers. Sans insister sur toutes ces donations plus ou moins importantes, il faut cependant en signaler quelques-unes :

(1) F. DUCHESNE, Histoire de tous les cardinaux françois, II, 135. — Archives communales, liasse 34, n° 2, f° 2 v° : « Cum... consideraremus quam parum émoluments et minus quam speraretur conferrent... nundine »

(2) A5. foires, 2 (1189) (copie de 1261).

(3) Ibid. 1, n° 1 : Senlis, 1189 (copie de 1370).

(4) Ibid., 2 : Latran, 25 janvier 1196 (copie de 1261).

(5) F. DUCHESNE, Histoire de tous les cardinaux françois, II, 138.

(6) L. DELISLE, Catalogue des actes de Philippe-Augusle, n° 678. (7)A 5, foires, 1, n°2.


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l'histoire de Saint-Ladre aux xu° et xme siècles ne peut plus guère être que celle de ces libéralités : elles permettent au moins de constater la place que la léproserie tenait parmi les élablissements hospitaliers de la ville (.1).

L'acte le plus ancien, nous l'avons dit, du fonds de Saint-Ladre est une donation faite en 1146 aux pauvres lépreux habitant près du Pont de Vesle, par Ebal Rigaud, au moment de son départ pour la croisade (2) : du consentement de son frère Guy du Châlel, il abandonne à la maladreric la dîme de l'église de Rouvroy. Six ans plus tard, Roger de Ba/.oches (3) fait don d'une place à Flancourt pour y construire des moulins (1152). Puis Guy d'Aultry donne aux « povres ladres » la terre de Beaufuy, avec usage de ses pâturages et droit de coupe dans ses bois (1153) (4). Hermengarde de Gornay leur octroie un droit d'usage dans les prés et bois dépendant de la ferme de Quatrc-Champs, en même temps qu'une rente de 4 s. (monnaie de Reims)sur cette ferme(1166) (5). Etienne Cocu, en H 83. leur constitue pour son fils un trécens de 5 s. sur une maison du bourg de la Porte Chacre, en les autorisant à occuper la maison au cas où le trécens ne serait plus payé (6).

(1) Il faut noter que les Rémois ne s'intéressèrent pas seuls à la léproserie et que des dons lui furent, faits dans tout le diocèse, et notamment dans les 1 Ardennes.

(2) Archives communales, liasse 34, renseignements.

(3) B. 9, 1, n" 1

(4) Archives communales, liasse 34, n° 2, f°69. Les titres originaux signalés encore à l'invenlaire de 1730 n'existent plus aux archives de l'Hôpital général : ils ont sans doute été remis lors de la vente à l'acquéreur de Beaufuy (1837).

(5)B. 14-, l,n022(Vidimusdel'Échevinage de Reims, juillet 1386). (6)B. 50, 5, n" 1.


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Sans parler des donations faites au moment de l'admission d'un parent lépreux (1) ou en échange de services rendus au donateur par les frères et soeurs de SaintLadre (2), ces actes de générosité s'expliquent par les motifs les plus variés. Très souvent ils sont inspirés par la pure charité, et l'on peut deviner par quelle délicatesse d'intention on vient de voir ce père associer son fils à sa bonne action. Ou bien ce sont des legs, dernier souvenir d'un mourant aux pauvres lépreux (3). Quelquefois, le bienfaiteur stipule la célébration d'un service religieux (4) ou spécifie une destination précise à celte libéralité (5).

Mais parfois ces bonnes actions ne sont que simplement apparentes. Il arrive que la donation n'est au fond

(1) Cochonnet, fils de Thierri Fripier, donne à l'hôpital un surcens de 13 s. rémois sur une maison près de la Poterne « ad Posternam... pro Maria matre sua leprosa dicte domus » (B. 50, 3, n° 11) ; Mathilde, veuve de Gerberl, un surcens de 10 s. rémois sur le tiers d'une maison sise « in vico Faveroso... pro portion? Martini filii sut', leprosi S. Lasiiri. » (Ibid., n" 12, novembre 1232). Mais ces donations ont déjà un autre caractère, et il y aura lieu d'y revenir.

(2) B. 37, 2, dossier 1, n" 4 (1343) : donation par Margaronne de Reims d'une petite maison, rue du Carrougc, près de la Poterne.

(3) B. 28, 2, dossier, 4, n° 1 (mai 1223) : Herbert du Jard laisse deux maisons à partager entre Saint-Ladre, l'Hôtel-Dieu, l'hôpital Dieu-Lumière et les chapelains de l'Eglise de Reims.

(4) B. 27, Muire, n° 7 : donation, sous réserve d'usufruit, d'une terre sise à « Moyre» par Henri Béranger, chanoine,à charge d'un anniversaire perpétuel à Saint-Ladre (février 1243-1244).

(3) B. 50, 5, n°29: Thibaut Lcclerc, du bourg deVesle, l'ait don de la somme nécessaire pour acheter un surcens de 7 s. sur une maison du parvis Xotre-Dame, sous condition que ce revenu sera distribué en pitances aux frères de la maison, le jour de son anniversaire (octobre 1252).


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qu'une affaire ou même une restitution plus ou moins déguisée : telle la concession faite par Hermengarde de Cornay (1), veuve d'Eudes, en compensation des forfaits de son mari, ou celle d'Alain de Coudé en 1187 (2) : il s'était approprié certaines terres et vignes que possédait la léproserie près de Sainle-Genevièvc; pris de scrupule, il se confesse à l'archevêque Guillaume, lui remet les terres pour en disposer suivant, sa conscience et part en pèlerinage.L'archevêque rend les terres à Saint-Lazare. Revenu à Reims et ayant sans doute liquidé ses remords, Alain revendique ces biens (injustice. Mais sur le conseil de Guillaume et comprenant peut-être qu'il perdrait son procès, il abandonne l'instance et reconnaît aux lépreux la propriété de leurs immeubles.

Mais ce ne sont que des exceptions, et les enrichissements de saint Ladre viennent presque toujours d'une inspiration véritablement charitable, ("est ainsi que se constitue peu à peu le domaine de la maladrerie. Elle acquiert par donation, à Reims, les maisons (3); hors de Reims, dos terres (i). des jardins '.'>), des vignes (61; le

(1) On verra plus loin la donation de Roger de Bazoehes à Flancourt.

(2) B. 27, Muire, n°l.

(3) B. 37, note: maison rue du Barbàfre (juillet 1243). — Archives communales, liasse 34, n" 2, f" 32: maison rue Perdue (mai 1221). — B. 38, 2, doss. 1, n° 16 : donation de meubles et de maisons, l'une près delà Poterne, l'autre au Marché (30 novembre 1221).

(4) A*, 1, doss. 9 : une pièce à Muire au lieudit La Fontaine Rocquerelle (décembre 123K>. — R. 40, 1, n° 1 : une pièce de 4 jours aux Loges (août 1308).

(5j B. 29, 2, n° 4 : donation par Arnoul Boutri de la moitié d'un jardin sis au lieudit « En Baingnouer » (juin 1230).

(6) B. 27, Cuampfleury, 1 : donation d'une vigne à Champfleury par Flandrine, veuve d'Aubri Le Crevé, sous réserve d'un usufruit viager de la moitié de la récolte (25 novembre 1221).


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domaine vignoble se complète par l'acquisition de pressoirs : Alain Heurday (1), écuyer, seigneur d'Ormes, abandonne à la léproserie ses pressoirs d'Ormes ; Lucyanne de Cumières en ajoute un autre, avec les privilèges de banalité (2). La léproserie doit encore à la générosité d'un de ses grands bienfaiteurs, le chapelain Mainier, la possession d'étaux à la bortcherie de Reims (3). D'autres libéralités lui apportent des rentes et des surcens (4), des dons (5) ou des redevances (6) en nature, dont l'exemple le plus intéressant est celui des pains prébendes par certains établissements religieux (7).

Des achats complètent ces donations et y suppléent au besoin. La maladrerie est assez riche pour acheter des terres à Muizon (1187) (8) ou une maison à Reims (1220-1221) (9). Elle achète également des dimes : à

(1) B. 29, dos. 17, n» 1, f° 1 (note).

(2) A"'. 1, dos. 9 (novembre 1232). Cf. Inventaire de U78, f° 79.

(3) B. 28. Elaux, n° 1.

(4) A 5, 1, dossier 9 : rente de 5 s. sur une maison de Reims (mai 1220). —B. 30, 5, n° 10 : surcens de 14 s. (monnaie de Reims) sur une maison du Marché au blé et, un autre de 7 s. 1/2 sur une maison « in vico qui dicitur vicus Chailiviele » (mars 1231-1232). — As. 1, dossier 9 : surcens annuel de 60 s. p. sur la maison de Guillaume Laborde aux faubourgs de la ville (novembre 1247). Etc.

(5) B. 27, Chuffilly, 1 : donation d'une mine de blé à prendre à Chuffilly, aumonée par Raoul de Chuffilly, chevalier (1249).

f-B. 27, Courtagnon, 3 : legs fait par Gile de Courtagnon de sept harretées de bois « pro ardere suo (des lépreux) et u&itatione sua ». ; (6) On a déjà signalé les droits de coupe dans les forêts.

(7) Archives communales, liasse 34, bulles, n° 2.

(8) B. 28, Muizon, 1 : achat de 17 jours de terre à Muizon an prix de 40 1.

(9) B. 50, liasses, n° 0 : achat d'une partie de maison « in vico monetariorum juxta Corlillum ».


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Warnier, chevalier, un douzième des grosses dîmes de Thelines et une part des menues dîmes (février 12411212 ou 1246-1247) (1) ; à Milet de Monclin, chevalier, sa part des dîmes des paroisses d'Auboncourl ctde'Lucquy (avril 1234) (2), et à son fils la part de ces dîmes qu'il tenait de son père (avril 1234) (3).

Klle acquiert surtout des surcens : le Charlrier comprend une volumineuse liasse de ces surcens, et l'inventaire de 1478 en signale de nombreux exemples du xuie siècle (4). D'aulres opérations lui permettent de se libérer des charges qui peuvent grever ses possessions (5).

En même temps que le domaine rural et la fortune immobilière de lalépioserie, sedéveloppe l'enclos même de l'établissement. Des dons (6) ou des achats (7) amènent la réunion d'enclaves ou de Ierres contiguës à celles de lamaladrerie.

Telle est, rapidement esquissée, l'histoire de la for(1)

for(1) acte n'est connu que par deux inventaires (Inventaire de 1478, f° 73 v° et A:l. 1, n" 9) qui ne donnent pas la même date. (2)B. 27, 1.

(3) A. 5, 1, n° 9. — lî. 27, 4 : amortissement par Thibaut de Champagne (17 mars 1270).

(4) Fol. 18, 19, etc.

(5) A. 5, 1, n° 9 : les administrateurs rachètent à Jacques d'Hauteville une redevance annuelle de un niuid de grain qu'il percevait sur une des propriétés de lamaladrerie (mai 1223).

(6) B. 29, 2, n° 3 : donation par Oudard de VVignicourt, chevalier, d'une pièce do terre enclavée dans les terres qui entourent la léproserie, devant la Terre suudée (juillet 1217).—B. 27, Muire. n" 2 : donation parObin, fils de Gérard d'une autre pièce contiguO au domaine de Saint-Ladre, vers Muire (août 1238).

(7) B. 29, 2, n° 4: achat d'un jardina la Flèche, près du jardin de Saint-Ladre (juillet 1228); d'une terre attenante au cimetière de la léproserie et à la Terre saudée (mai 1229) ; d'une masure près du jardin (février 1238-1239).


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tune mobilière et immobilière de la léproserie de Reims. C'eslauxnGet au xin" siècle un enrichissement progressif. Des lettres d'amortissement d'août 1276(1), données par l'archevêque Pierre Rarbetaux frères de Saint-Ladre pour les biens acquis par eux depuis trente ans. montrent comment se forme peu à peu leur patrimoine. Cet amortissement porte sur un total d'environ 7 I. p. 1/2 de surcens. Cet enrichissement, qui, on le voit, n'a rien d'exagéré, n'a cependant pas été sans rencontrer certains obstacles. C'est ainsi que l'accroissement du domaine foncier de l'hôpital attira l'attention peu bienveillante de l'abbaye Saint-Remi.

Les acquisitions faites par les frères de Saint-Ladre dans les limites du ban de l'abbaye lui parurent dangereuses ou au moins gênantes. Elle voulut les obliger à vendre leurs propriétés sises dans les limites de la seigneurie abbatiale. Ils protestèrent. En mars 13351236, un accord intervint par devant les officiaux de Reims. La maladrerie conservait ses propriétés ; mais, pour les acquisitions futures au ban Saint-Remi, elle ne pourrait les garder plus d'un au sans l'assentiment de l'abbaye (2). C'est sans doute à la suite de nouvelles difficultés que les frères de Saint-Ladre obtinrent d'Innocent IV la bulle qui a déjà été signalée et qui leur accorde que nul ne pourra les obliger à vendre ou aliéner leurs biens malgré eux (3).

(1) Inventaire de 1478, f° 103 v».

(2) Pièces justificatives, 111.

(3) Archiva communales, liasse 34, bulles, n" 8 (2 novembre 1246).


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CHAPITRE II.

Le Régime intérieur de la léproserie du XIIe au XIVe siècle.

Au xin' siècle Saint-Ladre aux hommes, situé en dehors et à l'Ouest de la ville à environ 200 mètres de la Porte de Vesle, apparaît comme une grande ferme entourée d'un vaste enclos. C'est en effet une ferme entourée de terres, de prés et de bois, où les membres de la communauté font des travaux de cullure et élèvent des animaux (1). La léproserie possède uneélable (2) à bestiaux, un « ran » à porcs (3), une bergerie (4), une grange, des celliers (5). Elle a son four (6). Au milieu, une cour (7). Çà et là, des fosses à fiens (8). Dans une serre est rangé tout un matériel de brouettes (9), de vans (10), de^ boisseaux (10), d'échelles, de scies'et de haches (11), etc.

La communauté comprend deux groupes de frères :

(1) Voy. ci-dessus, p. 7.

(2) E. 15, 24, f» 27 (1313).

(3) VARIN, Archives administratives, tome II, 2e partie, 743 (1336-1337).

(4) E. 16, 1, f°12 v« (1381-1382).

(5) B. 29, 2, n° 7.

(6) Ibid.

(7) Ibid.

(8) B. 49, 4, n" 35.

(9) E. 13, 24, f- 2 v».

(10) Pièces justificative?, I.

(11) L. DEMAISON. Inventaire des meubles de Saint-Ladre en 13i9. dans Travaux île l'Académie de Reims, 72, p. 124.


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les frères ladres, les malades ; et les frères sains, qui servent et soignent les pauvres lépreux. Une maison spéciale est réservée aux malades, un autre bâtiment aux frères sains. Le « manoir » des ladres comprend uue cuisine (1) et une salle appelée « refectoir » (2), mais qui doit aussi servir de dortoir; elle est ornée d'une cheminée et renferme 8 lits (2). Un préau permet aux malades de se promener lorsqu'il pleut (3) ; ils ont un jardin spécial (i).

A côté du bâtiment des malades, mais séparées par un mur, se trouvent la maison des chapelains et la maison des convers (5). L'une renferme au xni° siècle 5 its, l'autre 7(6). Le refectoir des « haitiéz » est meublé d['une grande table, de bancs, de différents coffres ; des plateaux de fer fixés au mur et des candélabres sont destinés à supporter le luminaire. D'ailleurs, le détail complet des menus meubles, ustensiles de cuisine, etc., est donné tout au long dans l'inventaire de la maison des haitiéz publié par M. Demaison (7) et accessoirement par l'inventaire général des biens de l'hôpital

(1) Archives communales, comptes des léproseries, 1, f° 23.

(2) Pièces justificatives, I. On remarquera en effet que les lits sont indiqués comme faisant partie du mobilier des réfectoirs.

(3) B. 29, 2, n° 7.

(4) E. 13, 15, f» 18.

(5) B. 29, 2, n° 7 (1331-1332) : « .. .aliqua edifieia, quam plurima,

plurima, grangiam, stabulas, domum Guidonis Gramaire

fossas ad finum et alia edifieia, prout se extendunt a muro qui est inter domilorium leprosorum dicte domus et domum preibiteri ejusd^m domus ac domum conversorum ejusdem domus et quoddam pratellum... » ( 1er bail des dépendances de la léproserie).

(6) Pièces justificatives, I.

(7) Trois inventaires de. meubles, dans Travaux de l'Académie de Reims, 72, p. 115


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dressé au xme siècle par Raoul d'HautvilIers (1). Il est intéressant d'y noter des candélabres de fer qu'aux repas du soir on posait sans doule sur la table à la place du curé, et de la converse, et trois bassins « à laver mains... dont li uns est a barbiers » (2). Une salle spéciale avec cheminée élait réservée à l'infirmerie : l'inventaire do Raoul d'HautvilIers n'y signale qu'une grande table pour tout mobilier : on portait sans doute en cas de besoin le lit du malade dans cette salle.

La maladrerie possédait un cimetière particulier et une chapelle (3) «joingnant au mouslier» (4), ornée d'un clocher (5) et devant laquelle élait disposé un tronc pour recueillir les aumônes (fi). L'enclos renfermait encore, au début du xiv° siècle, au moins deux bâtiments particuliers, élevés sans doute par des lépreux riches pour y habiter durant leur vie et qui à leur mort étaient demeurés à l'hôpital. C'est ainsi, semble-lil, que s'expliquerait l'existence de la « maison Gui Grantmaire » (7), et de la maison de Davoudet appelée

(1) B. 49, i,n° 35..Ce nom est donné par une mention finale. Ce personnage, d'ailleurs inconnu, dut être le maître de la maison : à la suite d'un article de cet inventaire indiquantun contrat entre la maison et Aubert, lils de Sebille, se trouve celte note : « Ce lu lait par Raoul d'Auviler». On peut dater ce document du xine siècle, et par l'écriture et par la mention, parmi les débiteurs de l'hôpital (f° 3) d'un nommé Bauduin Cauehon, cité en 1235 dans les jugements de l'Echevinage (VAHIN, Archives administratives de Reims, tome I, 2'' partie, 767).

(2) DKMAISON, loe. citai., p. 123 et p. 122. — Pièces justificat., I.

(3) Pièces justificat., I. (4)E. 16. 1, f" 68.

(5) E. 15, 7, f» 8.

(6) E. 16, 1, f" 27.

(7) VARIN, Archives administratives de Reims, tome 11, 2e partie, 747.


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au milieu du xiv* siècle la « Davbuderie » (1). Enfin tout un domaine de bois, de jardins, d'aulnaie, etc., s'étendait autour des bâtiments (2) : dans l'un des jardins, était le lavoir des lépreux (2). Des bâtiments spéciaux avec manoir, chapelle et cimetière, étaient réservés aux lépreuses, du même côté de la ville, mais à un kilomètre et demi environ au Sud de la léproserie des hommes.

La communauté, nous l'avons dit, comprend des « haitiéz » et des malades. Le personnel sain de la maison devait êlre aux xne et xiu" siècles relativement important. En 1313, le nombre des haitiéz s'élève encore à 9 personnes (3) : les comptes en donnent une liste, mais sans indiquer le rôle de chacune d'elles. On peut cependant reconnaître dans le personnel : les proviseurs, le maître, les chapelains, les frères et soeurs, les servantes et les portiers.

En principe, l'administration appartient au maître de la maison. Chargé sans doute de l'ordre et de la discipline intérieure, les actes conservés le montrent surtout comme le représentant de la maladrerie dans la gestion des biens: c'est lui qui est mis en saisine des nouvelles acquisitions(4), qui représente la léproserie en justice (5), qui est le trésorier et le comptable de l'hôpital (6).

Les frères doivent avoir aussi une certaine part dans

(t) E. 15, H, 1° 9.

(2) B. 29, 2, n" 7.

(3) E. 15, 24, f» 1 v".

(4) B. 30, 5, n» 15.

(5) B. 27, n" 2.

(6) B. 50, 5, n» 27.


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l'administration des bieils : dans les contrats, ils sont toujours cités à la suite du maître. Les frères malades eux-mêmes interviennent : sans doute, il n'en est pas à Reims comme dans certaines maladreries, à Touruay, par exemple (1), où c'est le plus ancien des malades qui administre, mais le maître doit cependant tenir compte de leur avis: ainsi ils ratifient la vente d'une maison sise rue des Monnoyers(2) ; ainsi en I 182, quand Guillaume de Champagne reprend aux lépreux les droits de foire pour leur donner une renie sur les changes, le contrat n'est fait que par l'assentiment commun de tous « commuai vestrum as sensu » (3). Ils ont même, comme dans beaucoup de maladreries (4), une part dans la réception des nouveaux malades ; en 1292, par exemple, des difficultés s'étant élevées avec l'archevêque pour la réception d'un lépreux, l'archevêque fait commandement au maître et aux malades « ut recipiant r.um ipsis in consortio suo » (5).

Quelquefois, le maître délègue ses pouvoirs au chapelain : ainsi en 1234, Saint-Ladre ayant acquis une part des dîmes de Lurquy et d'Auboncourt, c'est le chapelain qui est « investi » (6). Même au xivJ siècle, il arrive assez fréquemment qu'il ait un certain rôle administratif: il négocie la vente eu gros des fruits du jar(1)

jar(1) Notice historique des ilivers hospices de la ville de Tournai, pp. 82-99.

(2) Inventaire d: 4'i7S, f" 17 (mars 1220).

(3) Voy. ei-dessu«, p. 12.

(4) A. LACHOIX, Inventaire, sommaire des archives hospitalières de la ville de Romans, p. iti-, 2" colon. : réception d'Antoine Diehou, par les consuls de Romans, du consentement des lépreux (1488).

(5) VAKIN, Archives administrative*, Lomé I, 2° partie, p. 1077. (.0) B. 27, 1.


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din (1). il est chargé de visiter à la campagne les dépendances de l'hôpital (2).

Mais, si le maître, assisté dans une certaine mesure du chapelain et des frères, administre la maladrerie, ce n'est au xiu* siècle, que sous le contrôle d'autres officiers laïques, les proviseurs. Dès 1231, au moins, un contrat est fait « de consemii et voluntate provisorum dicte domus » (3).

On ne saurait d'ailleurs confondre le maître et les proviseurs : un acte de 1255 établit bien la différence : « magistroet fratribus domus leprosorum... et etiamprovisoribus» (4). D'autre part, un acte de juillet 1231 après avoir indiqué le maître signale deux bourgeois de Reims comme « prouvoyeurs » (5). On a même les noms de quelques-uns de ces proviseurs qui figurent toujours à deux : Voisin Cauchon et Jacques Le Rouché (6) en 1231 ; Jacques Helluin et Jean Lesco en 1251 (7); Henri Le Coqut et Robelet Maslelot en 1257 (8).

(1)E. 15, 5, f° 13 v°.

(2) Ibid. 15 v. Cette administration n'allait d'ailleurs pas sans quelques secousses : ainsi en 1275, le maître refuse de payer certains cens auxquels prétend Gaucher de Neuville, chanoine, seigneur de Muire : d'où saisies et protestations quelque peu véhémentes, si l'on en croit le chanoine qui se plaint que « liditfrere et malade... eussent par pluseurs foyes enfraintes lesd. saisines » et fait à sa « gent pluseurs rescousses ». L'affaire se termina par un compromis. (B. 27, Muire, 5 octobre 1275.)

(3) B. 30, 5, n' 10.

(4) B. 41, 2, n° 1.

(3) Inventaire de 1478, f° 6t. — VAIUX, Archives administratives de Reims, lome I, 2° partie, 546.

(6) Ibid. Dans le texte latin publié par VAIUX et dont Y Inventaire de H78 donne une traduction presque intégrale, on trouve, au lieu de ce nom, celui de Jean Slrabo.

(7) B. 27, Prouvais, n" 4.

(8) B. 28, Et aux, dossier 1, u° 1.


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Quelles sont au juste leurs fonctions? Il est difficile de le déterminer, d'aulaut que dans certains cas on les désigne manifestement sous le nom de « maîtres » ( 1). D'une manière générale ils apparaissent comme les délégués de l'Echevinage. chargés d'assurer le contrôle des bourgeois sur l'administration du maître : ils surveillent et donnent leur assemus aux actes de disposition. Mais il faut noter qu'ils n'interviennent pas à tous les contrais, ou du moins certains actes : un acte de 1239, un autre de 1240, d'autres encore (2). ne font pas mention des « prouvoyeurs ».

Mais leur autorité n'a pas tardé à se développer, à mesure que s'accentuait l'inlervenlion de l'Echevinage dans les affaires de la léproserie. Le maître devenant un rouage inutile a été supprimé. A la fin du xnie siècle les proviseurs sont devenus « maîtres ». Une bulle de Boniface VIII, du 16 avril 1293, mentionne simplement deux proviseurs laïques : « laici provisores » (3). Un accord de 1299 (4) passé au Buffet deséchevins constate ([lie « li pourveur... en nom des frères et sereurs de celé maison se sont accordeit a ce par devant nous (les échevins) denostre volenleil, et de, nostre assentemeiit. . . » ; il n'est pas question du niailre. Il n'en est pas question d'avanlaijc dans les comnles du début du xtv'' siècle l'.'ii.

(1) B. 50, 5, ii" 29 : acle de vente d'un surceus en 1232,, dressé au nom des maîtres et frères, magistris et fralribiis. On doit donc supposer que cette dénomination au pluriel s'applique aux proviseurs.

(2) B. 50, 3, nus 20, 21, 23, 12k

(3) Pièces justificatives, Y.

(4) B. 50, 3, n" 34.

(3) Archives communales, comptes des léproseries,!.


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et les proviseurs sont appelés désormais « mar/istri. et provisores domorum S. Lazari » (1).

Le chapelain tient une place importante dans la maladrerie. On a vu qu'il intervient parfois dans l'administration de la maison. Ses fondions religieuses lui assurent une grande autorité morale : ainsi en 1236 une contestation entre les frères de Saint-Ladre et Milet de Monclin est soumise d'un commun accord à l'arbitrage de maître Hue, ancien chapelain (2). Il jouit d'avantages particuliers : la table, le logement, le feu lui sont complètement assurés. D'autre part en 1219, un prêtre, maîlre Wiard Chaudiaus, partant en pèlerinage, avait fondé une chapellenie d'une valeur de 50 s., monnaie de Reims, en se réservant le droit de desservir la chapelle à son retour (3). Au xive siècle, le chapelain reçoit une pension de 30 s. p. par mois.

Un seul chapelain avait d'abord suffi au service divinr En 1231, une donation de M0 Mainier (4), un des plus généreux bienfaiteurs de la léproserie, permit l'institution d'un chapelain des femmes. La fondation était assurée par le don du quatorzième des dîmes de Saint-Souplet ; la léproserie s'engageait d'autre part à fournir la table et le logement, moins les draps, au nouveau chapelain : il devait, le cas échéant, suppléer son collègue ; il n'avait pas charge d'âmes. La présentation du nouveau chapelain, comme celle de l'ancien, appartenait à la communauté ; mais une clause spéciale exigeait qu'il ne

(1) B. 49, 16, n" I.

(2) B. 27, n° 2.

(3) B. 30, 5, n° 4.

(4) VARIA', Archives administratives de Reims, tome I, 2e partie, p. 546. Traduit dans Y Invent, de 4478, f° 44 v°.


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fut institué que du conseil et assentiment du grand archidiacre de Reims.

Les premiers chapelains furent choisis parmi des prêtres séculiers, étrangers à la maison ; mais il semble qu'ils négligèrent quelque peu leur office : le revenu de la chapellcnie était d'ailleurs de peu de valeur. Toujours est-il que les frères pensèrent qu'un des leurs montreraitplus de dévouement, pourrait célébrer déplus nombreux offices et administrer plus facilement les sacrements aux lépreuses. Sur leur requête, l'archidiacre Gomelius, par lettres du 9 novembre 1246 (1), leur accorda qu'à l'avenir le chapelain serait choisi parmi les membres de la communauté qui seraient prêtres : le, revenu do la chapelle devait être appliqué à l'entretien des lépreux. Mais au xiv° siècle, ce système avait disparu ; à celle époque, le chapelain recevait une pension de 48 s. p. par mois (2).

Dans un des chapitres de son Historia occidentalisa), Jacques de Vitry trace un tableau célèbre de l'organisation des hôpitaux du xme siècle. Les grandes maisonsDieu et maladreries sont desservies par une communauté de frères et de soeurs généralement soumis à la règle de Saint-Augustin, qui portent l'habit régulier et prononcent les trois voeux. Mais en d'autres établissements, au lieu de ces congrégations strictement reli» gieuses, se rencontrent des sortes de confréries pieuses, dont les membres, donnant leurs biens à la maison, en gardent cependant l'usufruit, peuvent être mariés et ne mènent pas à proprement parler la vie religieuse (4i.

(1) Piècesjustificat., IV.

(2) Archives communales, comptes des léproseries, 1. 13) Ch. XXlX.Edit.de Douai, 1597, p. 337.

(4) L. LR GRAND, Les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris, pp. CIII-CVI.


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De ces deux systèmes, lequel existe à Saint-Ladre ? L'absence de documents ne permet pas de répondre de façon entièrement satisfaisante.

Au début du xiv'' siècle la communauté comprend des frères convers et des soeurs converses. La définition du « frère » cl celle du « convers » sont peut-être distinctes en théorie, maisen fait, le litre de « convers » s'applique fréquemment au frère. A Reims, un bail de 1331-1332 semble bien distinguer les frères et les convers : mais ce n'est sans doute qu'une formule (1). Dans un accord de 1258, la maison ayant une revendication à faire, saint Louis en charge soit le maître, soit l'un des convers : « quod magisler domus vel itniis ex convcrsis ejusdem petet reslitulionem » (2), et au xiv" siècle, on trouve couramment « frère Pierre convers » ou « suer Ysabel converse » (3).

Celte confusion ne permet pas toujours de savoir, même pour des léproseries dont on a gardé le règlement, si l'on a affaire à de véritables religieux, prononçant les trois voeux : à plus forte raison ici où nous n'avons pas de texte de ce genre. Un curieux débat de 1231 peut fournir quelques renseignements sur ce point (4). Un clerc, du nom d'Evrard, qui s'était donné avec ses biens à la léproserie, après y avoir vécu quelque temps, se relire pour prendre l'habit au prieuré de Saint-Maurice de Reims. A sa mort, la léproserie fait réclamer sa succession. Mais le prieur de Saint-Maurice refuse, et il allègue qu'il était permis à Evrard de quitler la mala(1)

mala(1) 29, 2, n<> 7.

(2) MARLOT, Histoire de Reims, III, 804.

(3) E. 15, 2, 10 V.

(4) Pièces justificatives; II.


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drerie pour se soumettre à une règle plus étroite « presser tim cum inler leprosos sit nulla vel modica religionis régula constituta », et le juge, sur ce point, donne raison au prieur.

Mais qu'était-ce au juste que cette règle? On ne peut donner ici que quelques faits. Dans son arrêt final, le juge de 1231 reconnaît le bien-fondé de la revendication de Saint-Ladre et oblige le prieur de Saint-Maurice à restituer. Les biens des convers demeurent donc la propriété de lamaladrerie. En 1217, « Le Fussicians » lègue à Sorine, converse àSaint-Ladro, un pré dont elle jouira sa vie durant et qui, à sa mort, reviendra à l'hôpital (1). Il ne semble donc pas que ce soit là une clause exceptionnelle. Quantaux meubles, ils restent à l'hôpital, demême que ceux du chapelain (2). Nous ne saurions dire si les voeux de chasteté ou d'obéissance devaient être prononcés : nous n'avons cependant pas rencontré de frères mariés.

La discipline paraît avoir été assez sévère. En 1313, frère Huel est conduit en prison (3) ; en 1284, Jaque), fils de Bertrand Lefèvre, est expulsé « pour les faillies qu'il faisoit en l'bospital et la deshonneste vie qu'il y menoit » (4). Mais c'était un « donné » ; il avait acheté « sa vie et son gouvernement » dans l'hôpital: pouvait-il en être exclu? La maison dut lui verser une indemnité, mais il ne rentra pas à Saint-Ladre. Il semble bien, en outre, que les membres de la communauté portent l'habit régulier (5); l'acte de fondation de la chapelle des

II) B. 50, 5, n" 2.

(2) E. 13. 3, f" 2 V. i'3) E. 15,24, f" 5.

(4) Inventaire de 1478, i'° 88.

(3) Le costume des soeurs est de « cammelin » (E. 13, 24, fol. 4 v).


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femmes (1) mentionne comme une exception que le chapelain ne sera pas tenu de prendre habit de religion. Enfin dans leur requête à l'archidiacre Gometius (2), les frères, proposant de désigner l'un d'entre eux comme chapelain, font valoir combien il est dangereux que la chapelle soit desservie par un prêtre non-religieux, « capellanam secularem ». Tels sont les seuls éclaircissements fournis par les textes sur la règle de Saint-Ladre à cette époque.

Les frères du xive siècle paient un droit d'entrée à leur réception (3). Ils reçoivent une pension mensuelle, les frères de 20 s.., les soeurs de 18 s. (4). Ils ont droit, comme le chapelain, à une part des droits de « vivailles » et de « mortailles » des malades (5).

Leur devoir est avant tout la prière et le service des malades. Ils leur donnent des soins physiques, le grand remède devant consister en bains (6). Ils leur donnent des consolations morales. Ils doivent s'efforcer de faire de cette maison de souffrance une « officine de santé », d'être, suivant les paroles enthousiastes de Jaques de Vitry (7), la douceur et l'apaisement des malades, « suavitas et mitigatio infirmorum ». Mais ils ont ,en même temps une part dans les travaux de la ferme : il faut s'occuper des pressoirs que l'hôpital

(1) VAHIN, Archives administratives de Reims, tome I, 2" partie, p. 546.

(2) Pièces justificatives, IV.

(3) E. 13, 3, f° 2 v° : « Premiers xl. s. que suer Vsabel donna pourestre au moustier. ».

- (4),E. 15, 24, i° 1 v°(1313). ' ."

- (S) E. 15, 1, f° 5 v° (1337-1338).

(6) E. 15, 3, f° 5 « Item pour II bainnouirs, I pour le convers, et l'autre pour la malade ».

(7) Chap. XXIX, édit. de Douai, 1597, p. 341.


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possède à Ormes (1), de la pêche du vivier (2), des treilles du jardin (3), « ou l'on doit mettre perches(4) », il faut aider ou faire aider dans leurs travaux les lépreuses, moins fortes et moins expérimentées (5). D'autres sont délégués dans les dépendances de Saint Ladre. En 1301, lors d'une contestation avec l'archevêque (6), les échevinsse déclarent maîtres de recevoir les convers et de les « tresmuer de maison en autre ». Un convers est en effet mis à la tête de la léproserie des femmes (7), d'autres sont placés dans les domaines ruraux.

Un acte d'association, daté de 1152, entre Roger de Bazoches et la maison de Saint-Ladre, fournit à ce sujet de curieux renseignements (8). Roger donne un terrain pour asseoir un moulin à Flancourt près de Faverolles. Saint-Ladre élèvera le moulin à ses frais. Les revenus seront ensuite partagés entre Roger et la communauté, déduction faite des frais. Autant que possible, le moulin sera administré par l'un des frères (9), qui devra

(1)| VARIN, Archives administratives de Reims, tome II, 2e partie, p. 743, note.

(2) Archives communales, comptes des léproseries, 1, 35 v°.

(3) E. 15, 6, f° 8 V.

(4) E. 16, 2, f° 9.

(5) E. 16, 1, f° 60 v° : « Item pour IX. journées de l'ouvrier qui pona faulx et planta plansons a Saint Ladre aux femmes », 12 s.

(6) VARIN, Archives administratives, tome II, lro partie, p. 13.

(7) Archives communales, comptes des léproseries, 1, 35 v°.

(8) B. 9. 1, n° 1. Cet acte, vainement cherché par Lacourt (MARLOT annoté, I, f° 60 v° ; dans VARIN, Archives administratives, tome I, 1" partie, p. 358) est en effet coté à tort : « C'est la lettre que Rogerius dona le lieu de Flancourt au frères de Saint-Ladre pour faire les molins qu'on dit maintenant l'arcevesque devers S. Ladre. »

(9) B. 9, 1, n° 1 « .. .homus lumen molendinarium de fratribw ejusdem domus molendiiiis providebit recipietque illius mercedem. Si


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fidélité à Roger. S'il ne se trouve pas de frère capable de ces fonctions, il choisira un étranger qui prêtera serment aux deux parties. Un charpentier désigné par Saint-Ladre sera également attaché aux moulins.

La communauté exploite donc elle-même le domaine que lui a valu la charité générale. Au xn° siècle il semble qu'il y ait une colonie dans la ferme deMarcelot (1), et au xive siècle il s'y trouve encore un convers (2). 11 y a au moins deux frères, en 1337, à la ferme de Beaufuy (3). Pendant l'hiver de 1348, la peste enlève coup sur coup frère Nicolas, convers de Beaufuy, et Jehan Kahier, convers de Marcelot (4). En 1353, frère Jehan Amaury administre le domaine de Beaufuy (5).

Ces domaines sont d'ailleurs considérables. En 1338, Marcelot rapporte 427 setiers de grain et 8 queues de vin (6). En 1353, 22 « pierres » de laine sont vendues des laines de Marcelot et de Beaufuy (7). On se représentera bien l'importance de ces fermes en sachant qu'en 1338 la « mainie » de Marcelot comprend 2 charretiers, 1 berger, 1 vacher, 1 porcher, 1 autre berger pour la

autem idoneus ad hoc agendum de domo non fucrit, domus alium jtrocurabit. Quod si molendinarim de fratribus domus fuerit, per obedientiam a magislro domus ei precipietur ut fidelis domui sit et Rogero ; si vero alienus fidelitalem faciet utrisque. »

(1)B. 14, 1, n° 22 : Hermengarde de Cornay donne un droit d'usage et de pâture dans son domaine de Quatre-Champs aux frères de Saint-Ladre habitant à Marcelot « eorum fratribus Marcelau commorantibus ».

(2)E. 15, 1, f°12.

(3) Ibid., f° 13 : « C. s. pour la robe les frères... V. s. pour H paires de chauses acheté pour les frères ».

(4) E. 15, 2,1° 7 V.

(5) Archives communales, comptes des léproseries, 1, f° 41.

(6) E. 15, 1 f° 4.

(7) Archives communales, comptes des léproseries, 1, f° 35 v°.


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garde des agneaux, 2 servantes, et qu'il faut encore engager des ouvriers au moment de la moisson (1). Toutes ces dépendances restent en relation constante avec la maison principale : les convers entretenus par la maison de Reims (2) demeurent sous la surveillance des maîtres ; les maîtres vont visiter les fermes ; les convers viennent à Reims faire leurs achats ou prendre l'argent dont ils ont besoin (3). Les maîtres dressent un inventaire (4), sans doute à l'installation de chaque nouveau convers. Les frères administrateurs doivent rendre leurs comptes (5).

Nous en aurons fini avec le personnel sain de la maladrerie, quand nous aurons indiqué les servantes et le portier. Trois « baiselles » sont attachées au service des frères sains (G) et du chapelain (7), des lépreux et enfin des lépreuses. Elles sont payées : la première 9 s. par terme, la seconde 12 s. (\ à., et la troisième 12 s. (8), outre démenties gratifications (9). Le portier est chargé de surveiller la porto et de sonner les offices (10).

(1) E. 15, 1, f 8.

(2) E. 15, 1, f 08 12-13 : Frère Jean Kahier reçoit de la toile, une robe pour son année et 32 s. pour sa chaussure pour deux ans ; frère Jehan de Noirval, convers de Beaufuy, reçoit 100 s. pour la « robe» des frères, 14 s. pour la façon et 5 s. pour 2 paires de chausses (1338).

(3)E. 15,24, i° 3 : « Item XVI d. pour despens pour frère Baudier quant il vint querre de l'argent pour leur mainie ».

(4) E. 15, 2, f"7 v°.-

(5) E. 15, 24, f° 5. (G) E. 15, 24. f«3. (7) E. 15, 1, 1° 8.

(8)E. 15, 24, f° 3(1313).

('.»_) E. 16, 7, f" 22.

(10) E. 15, 9,1° 4. Il se faisait parfois remplacer. (E. 15,3, f°4.)


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Auprès de sa loge (1) devait se trouver la niche du chien.

Au début du xive siècle, le régime des malades présente encore deux caractères qui s'effaceront par la suite : ils mènent la vie commune, et celte vie est très religieuse.

Les nombreuses fondations de messes et anniversaires que nous avons signalées en indiquant la formation du patrimoine de l'hôpital, montrent assez que la léproserie est une communauté religieuse. Des prières sont récitées pour la guéfison des malades (2). Les Heures sont dites chaque jour, et chaque nuit la cloche sonne pour Complies (3).

Dans la journée, quand son mal le lui permet, le lépreux, qui ne peut quitter la léproserie, travaille au jardin. Chacun doit avoir au moins un coin à lui (4), ou même un jardinet clos (5).

A l'heure des repas, une clochette appelait les malades à table (6). On a vu que malades et haitiéz mangeaien

(1) E. 15, M" 4.

(2) Aa. 3, n° 41, f° 15 v°.

(3) E. 15, 8, f° 7. Cf. le tableau des offices dans le règlement de la maladrerie du Grand Beaulieu (R. MERLET, communication dans Bulletin historique et philologique du Comité des Travaux historiques, 1895, p. 564.) Une donation de Louis VJI à la léproserie de Saint-Lazare de Pontoise «domuiS. Lazari et misellis inibi Deo servicntibùs» précise bien ce caractère religieux des maladreries (L. LE GRAND, Les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris, p. 224).

(4) VARIN, Archives administratives de Reims, tome II, 2e partie, p. 766.

(5)E. 15,7, f° 9.

(6) VAUIN. loc. cit., tome II, 2e partie, p. 746 et 747.


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à part. La cuisine est commune (1). La nourriture est naturellement très simple : des légumes récoltés à Reims ou dans les fermes, des pois (2), des fèves (-3), les poissons des viviers. La basse-cour contribue quelquefois au menu. Les malades peuvent avoir du vin (4). Le pain est fait dans la maison qui possède un four (5) et un pétrin (6).

Des âmes charitables prennent d'ailleurs soin d'améliorer l'ordinaire. En 1193, Garin fait une donation, sous condition que chaque année iO s. seront employés « pour la réfection et pitance des lépreux et aultrcs dix solz pour convertir en viandes pour les lespreux, desirans nouvelles viandes par leur grande maladie (7) ». Mainier, le fondateur de la chapelle de Saint-Ladre aux femmes, abandonne aussi « auxpovres de Saint Ladre » ses droits sur un surcens a condition que « chacune semaine ou xvue la porcion dud. trecensqui escherrapar lad. xvne sera exposé en vivres communs, c'est assavoir en la despenso de la cuisine commune dud. S. Ladre (8) ». Enfin, aux anniversaires des pieux fondateurs de messes, des pitances sont, selon leur intention, distribuées aux malades (9).

(1) Inventaire de t i78, f" 14 v°. (2)E. 15, l,f» 4.

(3) Pièces justificatives, I.

(4) E. 15, 6, f° 8 : « Item, donné a la malade de S. Ladre as fammes et dou commandement des eschevins demy muy de vin, des vins des persuelz d'Ourmes... »

(5) B. 29, 2, n° 7.

(6) L. DEMAISON, loc. cit., Travaux de l'Académie de Reims, 72, p. 123.

(7) Inventaire de U78, 1° 31 v°.

(8) Ibid., f° 14 v° (sans date).

(9) B. 50, 5, n° 29 (1252). — VARIN, Archives administratives de Reims, tome I, 2e partie, p. 811 (1362).


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Les lépreuses, on l'a vu, occupent un bâtiment spécial. Déjà,au début du xm 6 siècle, une bulle d'Innocent III (1) distingue : « domus in quo sunt viri leprosi et domus [in guo] sunt mulieres leprose. » On Comprend les raisons de discipline et de bon ordre qui expliquent cette séparation, et des scandales comme ceux de Melun et de Corbeil, en 1201, justifient une telle mesure (2). Ces raisons permettraient même de supposer que cette séparation a toujours pu exister à Reims. Mais Saint-Ladre aux femmes était une dépendance de Saint-Ladre aux hommes : de la maison des femmes on ne pouvait communiquer avec la ville que par la maison des hommes ; aucun pont ne reliait les deux rives de la Vesle en face de Saint-Ladre aux femmes; en 1359, quelques habitants de la rive gauche se cotisèrent pour acheter un b ateau et le maître paya 2 s. pour la part de la malade (3). Le personnel de la léproserie des femmes comprenait, com_ me il a été dit, un chapelain, un convers, une servante. 11 se complétait par un portier (4). Un chien gardait la maison (5).

Au xiv° siècle se produisit dans le régime intérieur de la maladrerie une transformation, difficile à suivre en détail, mais très nette. Les cas de lèpre, en effet, deviennent de moins en moins fréquents. En 1336, l'hôpital renferme 2 lépreuses et 1 lépreux. En 13371338, les deux lépreuses sont mortes et le malade reste

(1) A 5, foires, 1, n° 2.

(2) GUÉRAR», Cartulaire de Notre-Dame de Taris, I, 86. (3)E. 15, 8, f°5.

(4)E. 15, 9, f°4. (5) E. 15, 8, f° 11.


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seul : on autorise sa femme à habiter avec lui (1). En 1359, il n'y aura qu'une lépreuse. Le régime organisé à l'hôpital n'avait plus de raison d'être : il devenait plus simple et plus économique de fournir au malade une pension avec laquelle il s'entretiendrait à sa guise. Le lépreux de 1338 reçoit 40 s. par an(l). En 1370, Poperel, le malade, touche de même une pension « pour faire ses despens par led. an (2) », et en 1388 (3), à une nouvelle lépreuse on fournit un mobilier avec toute une batterie de cuisine (4).

Dès lors, tout ce personnel sain devenait inutile. D'ailleurs, les lépreux étantde plus en plus rares, l'élan de charité qui avait poussé les frères et les soeurs dans les léproseries allait se porter ailleurs. En 1336, le personnel religieux de la maison est réduit à deux personnes : le chapelain et une soeur (5). Cependant les convers se maintinrent plus longtemps aussi bien dans les domaines ruraux qu'à Reims, où il y a encore une « converse » en 1408 (6), et où il existe un convers jusqu'au xvi* siècle.

Une partie des bâtiments était donc inoccupée. Les gouverneurs n'avaient plus qu'à les donner à bail. En 1353, le « jardin des haitiéz » est loué (7). En 13311332(8), les maîtres afferment pour 6 ans, moyennant

(l)E. 15, 1, ■f°6. (2)E. 13, 15, f°32 v".

(3) Pièces justificatives, VIL

(4) La démolition de l'hôpital pendant les guerres du xiv° siècle a du contribuer à cette transformation, et, en le relevant, les écbevins tinrent sans doute compte du nouvel état de choses;

(3) VARIN, Archives administratives, tome II, 2e partie, p. 745. (6)E. 16,6, f°4.

(7) Archives communales, Comptes des léproseries, 1, 35 v°.

(8) B. 29, 2, n°7. . ■ -


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62 1. p. par an, une portion des dépendances de SaintLadre que les membres de la communauté n'étaient plus assez nombreux pour faire valoir : bois, aunaie, jardins, four, celliers, granges avec les droits d'usage. la.« faulx Saint-Ladre », c'est-à-dire de faucherlesmarais, la pêche des viviers « prout fratres facere et uti consueve ■ tant », et avec la maison Guiot Grantmaire, sous cette réserve cependant qu'ils pourraient la reprendre, le cas échéant, pour y loger un malade (1).

Ainsi, la communauté des frères s'égrenant, la léproserie perd le caractère .religieux qu'elle avait jusqu'ici. Un arrêt du Parlement de Paris peut bien encore, en 1385, parler des « religiosorum magistri, fratntm et sororum domus et leprosarie S. Lazari (2) », il n'est pas sûr qu'à Reims, les maîtres laïques et les malades méritent cette épithète.

Enfin, au début du xv° siècle, dernière transformation dans l'administration de la léproserie. Les maîtres jusqu'ici n'ont été que les délégués des échevins (3), et le ton même avec lequel ils s'adressent l'Échevinage le prouverait (4). Maisles échevins gardaient la surveillance de l'administration. Certaines mesures (5) ne sont prises que « dou commandement les esche vins ». Le bail de 1332, dressé au nom des frères et soeurs, n'est consenti que « de volantate et assensu provisorum suorum et scabinorumremensium ». D'autre part, les maîtres rendent

(1) Dans ce cas, dit le bail « omnes fenestre dicte domus erunt obscurate et fiet hostium in domo ad opus leprosi ».

(2) Archives nationales, X 1», 33, f° 193 v°.

(3) Pièces justificatives, V : les 12 échevins y sont d'abord cités, puis les deux maîtres laïques.

(4)E. 16, 4, fi.

(5) E. 15, 24, f° 41. - E. 13, 6, f° 8.


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compte chaque année. Au xv 8 siècle, ce contrôle ne parut plus suffisant aux échevins: ils jugèrent plus sûr et plus pratique, pour des raisons que l'on devine, de confier à. deux d'entre eux l'administration de la léproserie. Les comptes de 1412-1413 sont encore rendus par un bourgeois (1) ; en 1420-1421, deux échevins sont commis au gouvernement de Saint-Ladre (2).

En résumé, au début du xv° siècle, la vie commune a cessé, la léproserie est une institution laïque, dirigée par deux échevins au nom du corps échevinal. Elle va garder ce régime durant tout le xv" siècle et une partie du xvi", jusqu'au jour où elle prendra un nouveau caractère par l'intervention du pouvoir central.

(1)E. 16, 7.

(2) E. 16, 9. Les comptes manquent entre ces dates.


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CHAPITRE III. Histoire de la léproserie du XIVe au XVIe siècle.

D'une façon générale, la vie administrative, la vie intime d'un hôpital ne saurait être profondément modifiée par les secousses politiques qui font l'histoire de la ville ou de la province. Seules les guerres semblent avoir atteint la léproserie de Reims : elles l'atteignaient naturellement dans ses revenus. La guerre de Cent ans l'atteignit plus sérieusement encore.

Dès le début, elle se ressent des exactions des hommes d'armes. Les soldats du comte de Flandre réquisitionnent des boeufs et des charretiers à Beaufuy (1). En 1353, les maîtres de la maison n'osent plus sortir de la ville pour aller jusqu'à Saint-Ladre et délèguent leurs pouvoirs au chapelain (2)< Le siège de Reims de 1359 porta à la maladrerie un coup terrible. On sait qu'Edouard III, débarqué à Calais le 30 octobre 1359, vint en novembre mettre le siège devant Reims (3) : il espérait que la captivité du roi Jean et les troubles populaires lui permettraient de se faire sacrer. Dans, la ville, à la suite de désordres intérieurs, le capitaine

(1) E. 15, 3, f° 8 v° : « Item ni. s. pour les despens de i vallet qui aporta les nouvelles que la gent le comte de Flandres avoient pris m. bues et xm. chartrons en la maison de Marcelot et de Bofouy. »

(2) E. 15, 5 : « Donné à Mons. Jehan Richar, cureit de S. Ladre, dou commandement les eschevins pour ce que li maistres n'y osoient alerpour les guerres, LXIV s. p. »

(3) H. MORANVILLÉ. Le siège de Reims de 4359-1360, dans Bibliothèque de VÉcole des Chartes, 1895, p. 98.


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Gaucher de Chatillon est chargé de la défense à la fois par le régent, l'archevêque et les habitants : dès le 5 novembre, il organise la résistance (1) : les remparts sont consolidés, les maisons situées dans la zone militaire sont rasées, pour ce qu'elles tournent « a grant empeschement de faire les forteresses de lad. ville et d'aler legierement autour d'y celle pour faire le guet ». La léproserie, avec la maladrerie des femmes, se trouvait parmi les maisons condamnées. Elle subit le sort que durent subir plus d'une fois les établissements hospitaliers ou religieux situés à la périphérie des villes quand on eut besoin d'assurer la défense (2).

La démolition (3) commença ausssitôt (4). De nombreux ouvriers y travaillent : ce sont surtout des fem mes, les hommes occupés sans doute à la défense même. La besogne se fait méthodiquement : les matériaux doivent pouvoir être utilisés à nouveau. On prend soin de sauver autant que possible les portes, les fenêtres, les tuiles. Les cloches sont soigneusement détachées et descendues (5), un sergent surveille les

(1) Archives Communales. Livre blanc de l'Echevinage, f° 230 v«.

(2) A Reims, en 1339, le couvent des religieuses de Clairmarais. .l'hôpital de Dieu-Lumière, etc. F.-V. PERGANT. (Le Siège de Reims par les Anglais, p. 41); de même la maison des Filles-Dieu de Paris (L. LE GRAND, Les Maisons-Dieu du Diocèse de Paris, p. 237); oelles des Dominicains d'Arles, des Mineurs de Beaucaire (H. DÉMÊLÉ, Arnaud de Cervole, dans Mélanges de littérature et d'histoire l'eligîeuse publiés à l'occasion du jubilé épiscopal de Mgt de Cabrière, t. I, p. 475) ; etc.

(3) E. 15, 9, f° 9 v° « Autrf s mises faites par led. Joffroy dou commandement Monsieur le Capitain et les Esleus pour abatre le moustier S. Ladre aux hommes et pour toute la maison. »

(4) Ibid : « Et fu la semaine Saint-Martin d'iver » (H novembre).

(5) Ibid. f° 5 : « Item paie a Thiebaut Lenay, charpentier,


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chantiers et empêche que les ouvriers ou d'autres ne dérobent rien (1). Une part des matériaux est employée aux fortifications (2). Les autres sont conduits en ville par eau (3). Une remise avait été louée à Thiébaut d'Aubilli aux environs de la Porte de Vesle (4). On y porta et on y rangea tous ces matériaux (5). Les dépendances subissaient le même sort. Saint-Ladre aux femmes était démoli en même temps ; les bois qui l'entouraient étaient abattus (6) ; de même, les. maisons qui environnaient Saint-Ladre aux hommes (7). Les maisonnettes qui formaient une annexe de la léproserie près de Saint-Marc à Cachot disparurent sans

pour la louier de ses mouffles de quoi on avala les cloches S. Ladre, pour ce m. s. p. »

(1) Ibid. f» 9 : « Item paie à Robin de Vendeux, sergent dou prevost de Reims, qui garda et defendi qu'on n'emportast mair, rien ne tieule de S. Ladre, pour son salaire, XLII. S. p.

(2) Ibid. f° 3 : « ...De Pierre de Besennes et Guillaume de Vaus commis a paier les frais de la fermeté de Reims pour pluseurs pièces de mairrien prises a S. Ladre as hommes et a S. Ladre as femmes, lesquelles ont esté mises a la fermeté... »

(3) B, 15, 9, f° 11 : « 1t. a Colart Le Teste pour amener a nef dou gros marrien de S. Ladre juquez a la Porte a Veesle...» Ibid. f° H, v° : « It. aud. Colart pour son salaire de nagier par Veele juques à la Porte les gros sommiers de S. Ladre... »

(4) E. 15, 10, f° 21 v°: « It. paiet à la suer Thiébaut d'Aubilli pour le louier de la maison en laquelle le marrien de la maison S. Ladre a esté hebergié et en a eut. viu. escut. »

(5) E. 15, 9, f' 11 : « It. a Oudinet de Besennes qui entassa les huis, les portes et les fenestres... It. a m. vallés qui entassèrent le mairrien chies Thiébaut d'Aubilli. »

(6) Ibid. f° 4, v° « Autres mises pour coper les bois

S. Ladre as femmes pour double des annemis. »

(7) Ibid : « A Thierri La Poulinée pour le louier d'une maison qu'il loua a Reims en deffaut de celle qu'il tenoit a Saint Ladre qui fu abatue pour le doubte des Engles », 6 1. 15 s. p.


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doute avec celte église (1). Enfin dans la campagne livrée aux Anglais, les biens de Saint-Ladre n'étaient pas plus respectés (2). — Dès le début, les meubles de la maladrerie avaient été ramenés en ville (3) : une partie fut conduite chez l'un des maîtres (4).

Par bonheur, il n'y avait à ce moment à l'hôpital qu'une seule malade. Son frère consentit à louer aux t maîtres une chambre rue de la Madeleine où elle resta durant tout le siège (5). On y amena son mobilier et on compléta son ménage par différents achats (6). La vie était plus chère en ville, surtout en de telles circonstances : de plus, la pauvre malade se trouvait privée des ressources de son jardin : on augmenta sa pension (7).

Cependant les Anglais après avoir brûlé Cernay et enlevé Cormicy (6 janvier 1360) n'étaient pas plus avancés. Edouard III redoutant une intervention du dauphin leva le siège le 11 janvier (8). Mais les

(1) VARIN, Archives administratives, III, 161 : lettres de Gaucher de Châtillon (23 avril 1360).

(2) E. 15. 11, f° 6, v° : 1 Item pour pluseurs choses refaire en la maison des Loges que li annemis avoient deffait... »

(3) E. 15, 9, f" 9, v°.

(4) E. 15, 9, f" 4.

(3) Ibid : « It. a Thierri de la rue de la Magdaleine pour le louier d'une chambre ou li malade a deinouré par l'espasse de xx semaines pour doubte des Englois, pour ce Ix. s. p. Item, pour amener les mueblez de la malade en la rue de la Magdaleine en la maison son frère... »

(6) Ibid : « lt. pour une volette achetée pour mettre les froumages la malade... » De môme, une bouteille d'étain, etc.

(7) E. 15, 12 f" 5, v". — E. 13, 9, f» 4, v°.

(8) H. MORANVILLÉ. Le siège de Reims de 1359-1360, dans Bibliothèque de l'École des Chartes, 1893, 98.


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Rémois, soupçonnant sans doute un piège, restèrent sur la défensive : les travaux de défense continuèrent jusque vers la fin de février (1).

Quand on fut sûr que la retraite des Anglais était définitive, les maîtres de l'hôpital commencèrent à réparer ce désastre. Au mois de juillet, les travaux étaient en train. Déjà les portes étaient reconstruites, le terrain dégagé (2). Dans les derniers jours du mois, on ramenait les « chauses » de la maison où elles avaient été remisées. De nouveaux matériaux étaient achetés au châtelain de Courlancy (22 juillet) (3). La maison du censier (4), celle du prouvendier (5) sont reconstruites. Au mois de septembre, on travaillait encore (6). En 1369 seulement, la cloche, remisée à Porte à Vesle, était rependue dans le clocher (7). Naturellement, la maladrerie devait se ressentir d'un tel choc encore après 1360. La léproserie des femmes, par exemple, ne fut pas aussitôt relevée. La malade resta plusieurs mois encore chez son frère, puis elle fut transportée dans une « borde » spécialement construite pour elle près de la maison des hommes (8). Les 165 livres que touchèrent les maîtres pour prix des

(i) E. 15, 9, f°12, v°.

(2) E. 15, 10, f° 21 v° : « It, à Thierri La Poulenée qui distourna les pierres et l'ordure qui estoit es portes de S. Ladre, xiv. s. »

(3) E. 15, 10, f 8.

(4) E. 15, 10, f° 9, V Çi)lbid. f°21.

(6) Ibid. f 24.

(7)E. 15, 15. f°13.

(8) E. 15, 9, f° 5 : « Item, paie a Jeh. Jolivet pour faire une maison de tous points à S. Ladre as hommes pour demourer la malade puis que les Ainglois en furent aie, xii. 1. p. »


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matériaux fournis à la «fermeté » (1) et la location des écuries que, plus tard, ils aménagèrent pour recevoir les bêtes que les paysans venaient mettre en sûreté près de la ville (2) ne furent que des compensations insuffisantes aux pertes dont ils avaient souffert.

Au xve siècle, Saint-Ladre resta à l'abri de telles épreuves. Les troubles qu'apportèrent les guerres dans les finances de la léproserie semblent de peu d'importance auprès des événements de 1359. Quand, en 1475, Raulin Cochinart, mettant de nouveau Reims en état de défense, déblaya les environs de la ville, SaintLadre échappa au désastre : seules, les maisonnettes que la maladrerie pouvait avoir près de Saint-Marc a Cachot durent disparaître avec cette église (3). Mais ce sont de mauvaises récoltes, des rentrées difficiles, des exactions de gens d'armes. La situation de la maladrerie était particulièrement dangereuse en temps do guerre. Le chapelain de Saint-Ladre aux femmes n'ose y porter le calice d'argent et en achète un d'étain (4). Le censier de Saint-Ladre ne veut pas se risquer à habiter sa maison hors de ville (5). Les administrait) E. 15, 10. f°2 v". : 163 I. 12 s. Id.

(2) E. 15, 16, f° 12 (1370-1371) : « Dou boucher de Fimes pour le haubergage de pluseurs bestes qu'il amena à S. Ladre pour le doubte des ennemis environ la Notre Dame en mi aoust, pour ce v. s. vi. d. p.... It. d'un homme de Villedommenge pour la hauberge de bestes qu'il amena à S. Ladre pour doubte, xu. d. p. »

(3) BRISSART-BINET, Histoire de la ville de Reims, 24.

(4) Archives communales, Comptes des léproseries, 2, f° 80 V (1430).

(5) Ibid., id. 2, 1° 101 vu : « A Deniset Croisie, nagueres censier de S. Ladre aux hommes, lequel pour occasion des guerres n'a


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teurs (1), le censier, prennent à différentes reprises des mesures pour faire rentrer les moissons « pour cause des guerres dont on se doubtoit lors ». Le domaine rural surtout a été atteint. Si on est heureux de ne pas rencontrer le nom de Saint-Ladre dans cette longue liste de douloureuses requêtes qu'a publiée le P. Denifle (2), on doit cependant constater qu'à la fin de la guerre de Cent ans, les fermes de Marcelot, de Beaufuy, des Loges sont en ruines (3) ; mais le temps, une bonne administration et l'absence de malades ont ramené quelque prospérité : c'est à cette époque qu'est reconstruite l'église de la maladrerie (4).

Enfin, les guerres de la Ligue qui entraînèrent tant de troubles en Champagne (5) furent de nouveau funestes à la léproserie. Les gens d'armes se livrent à leurs exactions ordinaires (6). Les réservoirs à poissons appartenant à Saint-Ladre, qui gênaient la défense, sont démolis sur l'ordre du Conseil de Ville (7). En

osé demourer en la maison de lad. censé et si n'a osé y mettre les moissons, mais lui a convenu faire admener a grans frais en ceste cité et louer grange pour les mettre ; et en recompensation de ce Messieurs les eschevins ont ordonné le quitter, via. I. p. » (1432-1433). (1)E. 15, 15. f- 29.

(2) P. H. DENIFLE, La désolation des églises, monastères et hôpitaux en France vers le milieu du XV siècle.

(3)15, 1, n° 2 (1471).

(4) Archives communales, Compt. des lépros., 2, f" 151 et sqq.

(3) Cf. E. HENRY, La Réforme et la Ligue en Champagne et à Reims, p. 218.

(6) Archives communales, Pièces comptabl., liasse de 1568 : mémoire des réparations des maisons et bâtiments hospitaliers « que les gens d'armes ont rompus et brûlé. »

(7) Ibid., Conclusions du buffet, 8, f° 285 v° (1580).


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1591, les soldats espagnols s'installent dans les faubourgs (1) : les jardins dépendant de Saint-Ladre sont dévastés (2). Le maréchal de Saint-Paul « pour empescher les dessins de l'ennemy » fait raser les maisons des faubourgs. Les démolitions exécutées soit par des équipes municipales, soit par les habitants réquisitionnés en corvées (3) durent au moins du mois d'août 1591 à fin février 1592 (4). Plusieurs habitations appartenant à l'hôpital sont renversées (5); les chapelles n'échappent pas au désastre : Jean et Nicolas Pussot abattent d'abord les combles de Saint-Eloi et de Sainte-Anne (6) ; puis Nicolas Barbet (7) et Jehan Thiébault (8), maçons, démolissent les constructions mêmes, et un sergent royal a mission de surveiller ce lravail(9).On sauve ce que l'on peut(10). Une partie des

(1) PÏÏSSOT, Journalier, p. 31.

(2) Archives communales, Compt. des lépros., 21, f° 85.

(3) Ibid., Conclusions du Conseil de ville, 16, p. 344.

(4) Ibid., Comptes des deniers patrimoniaux, 20, f 01 132 et 133 v° : les travaux furent conduits par Gérard Delacroix aine (pour le quartier Cérès) et Thomas Cachette, l'un des douze capitaines des bourgeois. (Cf. Archives communales, Conclusions du Conseil de Ville, 13, f" 202 v°) ; défense était faite aux maçons de travailler ailleurs .qu'aux démolitions et aux casemates (Ibid.. f° 209).

(3) Archives communales, Conclusions du Conseil deVille,16,f-189.

(6) Ibid., Comptes des lépros., 21, f° 313 (3 septembre 1591).

(7) Archives communales, comptes des deniers patrimoniaux, 20, f° 105 : mandements du Conseil de ville du 1er et 18 octobre 1391 (pour Sainte-Anne).

(5) Ibid., f° 107. —Le 6 octobre, Thiébault touche 6 écus 2/3, sur 13 écus 2/3, prix de la démolition entreprise à Saint-Eloi (Archives communales, Conclusions du Conseil de Villa, 16, f° 225).

(9) Ibid., (■ 109.

(10) Les cloches de Saint-Eloi, par exemple, remisées chez M. Marlot, puis chez le procureur de l'Eclievinage (Archives communales, Comptes des lépros., 21, f° 508).


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matériaux est portée chez Gérard Lelarge, teinturier (1), une autre au prieuré de Saint-Bernard de Reims (2). Les arbres saccagés par les soldats et une certaine quantité de matériaux peuvent être vendus (3). Il est difficile de préciser jusqu'à quel point furent poussées les démolitions et ce qui put rester debout des léproseries.

Mais en juillet 1592, la crise paraissait finie ; on s'occupait de réparer le désastre (4), et dès le mois d'août on travaillait à Sainte-Anne (5) ; les cloches ne semblent cependant pas avoir été replacées dans la chapelle avant 1604-1605 (6). En 1612, on « bâtissait et couvrait » la nef et le petit clocher de Saint-Eloi (7).

(1) Archives communales, Comptes des lépros., 21, f° 151.

(2) Ibid , id., 21, f° 320. — Le Conseil de Ville décide (4 novembre 1591) que la Porte de Fléchambault sera murée dès que les matériaux de Sainte-Anne auront été ramenés en ville (Conclusions du Conseil de Ville, 16, l'° 247) ; le 19 novembre, la porte est encore ouverte (Ibid., f° 262 v°).

(3) Ibid., foa 90, 282 et 279. Les recettes de ces ventes sont portées pour 658 1. 5. s. 6 d. t. aux comptes de 1591 ; 330 1.1., en 1592 ; 24 1.1. en 1593. Une partie de ces matériaux fut achetée par les Minimes (Ibid., f 461 v°).

(4) Ibid., Comptes des lépros., 21, f° 305.

(5) Ibid., 21, f° 319, v° : une verrière est commandée pour être placée derrière l'autel, par contrat du 27 août 1592. - Ibid., f° 311 : « Audit Barbelet, masson, a esté payé... la somme de dix-sept livres... pour son sallaire d'avoir reffait et remassoné de noeuf !e devant du pignon de la chapelle de Sainte Anne avec les arrestes et une huisserie de pierre de taille et reffait plusieurs bresches quiy estoient rompues. » — « Audit... pour les ouvrages de massonnerie par lui faittes es six maisons des lespreuses estants proches de lad. chappelle. » (Ibid., f° 312).

(6) Ibid., 23, non folioté.

(7) Pussor, Journalier, p. 157.


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CHAPITRE IV.

La léproserie au XV» et au XVIe siècles (1).

La fortune de la maladrerie ;

description des enclos.

Dès le XIII° siècle, l'inventaire général dressé par Raoul d'Haulvillers (2), que nous avons déjà signalé, permet de se rendre un compte exact de la situation financière de l'hôpital. Cet inventaire est divisé en deux parties : 1° les cens, 2" les autres revenus appartenant à Saint Ladre (3).

La première partie (4) comprend, énumérés sans ordre, les cens établis sur des maisons, des étaux, des granges et des jardins et se rapporte uniquement à Reims même. Elle mentionne 71 surcens établis sur des maisons et valant de 5 deniers à 40 s. La somme de ces surcens est de 30 1. 1 s. 2 d. Leur multiplicité marque la multiplicité des libéralités faites à l'établissemenl. Une sorte de cadastre dressé en 1328 et relevant les « sourcens que les ecclises tiennent sur les héritages... de l'arcevesque en la ville et cité de Reims » indique en face du nom de Saiiit-Ladre 30 surcens d'un total de

(1) La plupart des documents utilisés par les ch. IV-VII sont du xve siècle; nous ne nous interdisons pas cependant d'en rapprocher des faits soit antérieurs soit postérieurs.

(2) B. 49, 4, n° 35.

(3) A la suite se trouve un inventaire des meubles (Pièces justilicativ., I).

(4) « Ce sont li cens que on doit h S. Ladre de Rains ».


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15 l. 23 s. 8 d. (1). Les autres sont répartis sur tous les points de la ville et leur énumération constitue une source intéressante pour l'histoire de la topographie rémoise. Un autre cahier du xive siècle où les surcens sont groupés par termes donne un total de 21 1. 2 s. 8 d. (2).

Les étaux loués ou tenus à cens rapportent chaque année, si l'on additionne les sommes fournies par l'inventaire, 12 1. 6 s. Ils sont situés au marché central ou au marché Saint-Remi et tenus par des bouchers ; l'un est loué à un marchand de cuir. 11 faut ajouter le droit de place perçu par l'hôpital sur les tables installées pendant le marché l'une « ammi le change... ou on vent les dras », l'autre «au chief dou change ou on vent les froumages et les oes et Toile » : ce droit donne un total de 57 s.

Enfin cette première partie de l'inventaire comprend encore 2 cens dûs par des jardins, l'un de 10s., l'autre de 16, et 2 légers cens dûs par des granges, soit au. total 5 s.

L'ensemble forme une somme de 45 1. 20 s. 2 tl. Puis « commencent les revenues qui appartiennent à S. Ladre (3) ».

Ce sont d'abord : d'une part, des loyers de trois maisons que Thôpital possède à Reims, et dont le total se monte à 8 1. 7 s. ; d'autre part, « la revenue » d'un terrain situé aux environs de l'hôpital et utilisé à la fabrication des briques, la terre Saudée : ce terrain est loué ici 8 1.

(1) VARIN, Archives administratives de Reims, tome II, lr" part., p. 494.

(2) B. 49, 4, dossier 36, n° 5.

(3) B. 49, 4, n° 35, f 12 v°.


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On a déjà vu qu'en dehors de Reims, Saint-Ladre possède un certain nombre de fermes à Beaufuy, à Marcelot, àMuizon, aux Loges. Il possède aussi des pressoirs dans deux villages du vignoble rémois, Ormes et Prouilly, dont le droit de pressurage constitue un revenu des plus réguliers.

La fortune de la maladrerie comprend en outre un certain nombre de dîmes. Au xiir" siècle elle possède les dîmes de Rouvroy, inscrites dans le registre de Raoul d'Hautvillers pour 80 setiers ; de Lucquy, pour 32 setiers, de Biaise, pour 36, de Bezannes, pour 12 s. Le registre signale ensuite les rentes de Taissy, 23 d., et les rentes plus importantes de Prouvais qui valent en argent environ 19 s. 6 d., et en blé 60 setiers 3 quarlels 5 quartes. Des redevances en grains d'une valeur de 3 setiers 12 quartes sont fournies par les villages de Thillois, de Cauroy, de Villers-Franqueux, de Loivre. L'Hôtel-Dieu paie 6 setiers, et on se rappelle que par , les lettres de 1201 les moulins de l'archevêque doivent une rente de 100 setiers (1). Outre le vin fourni par le droit de pressurage, l'hôpital reçoit chaque année 4 muids et 4 setiers dûs par des pièces de vignes situées à Coulommes et à Sacy. Chaque semaine, quelques établissements religieux distribuaient un certain nombre de pains aux malades : l'abbaye Saint-Remi, 21 ; l'HôtelDieu et Saint-Pierre-les-Dames, 7; Saint-Nicaise, 4. Enfin le registre que nous analysons signale 104 charretées de bois aumonées par Guillaume aux Blanches Mains, 11 charretées de « raimes » à prendre à Courtagnon, et des redevances spéciales, comme les

(1) F. DUCHESNE, Histoire de tous les cardinaux françois, II, 138.


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40 anguilles dues à Mezières par « cil qui peschent les eaues le conte (1) » et les 3 livres de poivre payées par les « gius » de Reims.

Le total des sommes en argent inscrites dans cette seconde partie est de 73 1. 15 s. 5 d. Une note indiquant que le blé se vend en moyenne 4 d. le setier, permet d'évaluer approximativement les 302 setiers 3 quartes relevés à 4 1. 8 d. En additionnant ces deux sommes et celles des surcens, sans tenir compte ni des revenus non évalués ni des valeurs non signalées, comme différents droits que nous retrouverons plus tard, comme la valeur propre de l'enclos, des bâtiments, des chapelles, on arrive à un total de 123 1. 11 s. 3 d.

Au xve siècle la situation de Saint-Ladre nous est connue non seulement par les comptes mêmes, mais par des sortes de « mémentos » donnant l'état des biens, placés en tête de certains comptes par des gouverneurs soigneux. On peut aussi trouver certaines indications dans les déclarations faites devant les commissaires de francs fiefs et nouveaux acquêts (2).

La fortune immobilière est assise à la fois à Reims et dans les domaines ruraux. A Reims, outre les enclos de Saint-Ladre aux hommes et de Saint-Ladre aux femmes avec leurs dépendances et attenances, le patrimoine de l'hôpital comprend :

1° Deux maisons, l'une rue du Croc en fer, l'autre plus importante, appelée la « maison de la Forge (3) »,

(1) Cf. E. 15, 1 f° 15 : « Deffaus de l'année... It. XX s. pour les anguilles de Maisières ».

(2) A 5. 1, dossier i, nos 1 et 2; As. 1, dossiers 2, 3, etc.

(3) Archives communales, Comptes des léproseries, 3, f° 17 v° (1471). — Une maison de la Forge appartient au xvie siècle au


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sise au marché au blé, au coin de la rue des « Trovs roiaulx »; la première est louée, en 1464 (1), 12 s. par an et la seconde 4 1. p.

2° Quelques jardins, prés et terres. Au xvne siècle, Saint-Ladre possédera ainsi un pré à Clairmarais, au lieudit « le bois Hubault (2) » ; un autre au lieudit « la Flèche », derrière la Barbacane ; le jardin de la « Scntelette ».

3° Cinq étaux « à vendre chairs », dont un à SaintRemi et les autres à la Grande Boucherie; en outre, une « place a vendre solers ». En 1516, l'hôpital possède de plus un étal à boucher et deux à cordonniers. En 1634 les étaux à bouchers rapportent ensemble 259 1. par an.

4° Les huches ou sauvoirs à poissons, réservoirs installés « Entre deux ponts » à côté des moulins du Chapitre. Au xvie siècle ils sont donnés à surcens perpétuel moyennant 101. t. par an.

De plus, au xvie siècle, un certain nombre de maisons seront construites dans l'ancien enclos de Saint-Ladre : il y en a 4 en 1516, d'un revenu de 39 1. t. par an ; 5 en 1543, l'une avec jardin et pré, l'autre avec vendangeoir, rapportant annuellement 84 l. 10 s. I.

En dehors de Reims, la maladrerie possède :

1° Des terres : 3 jours à Cernay, aux lieuxdits En Didry et à la Bonde Saint Ladre ; à Muire, un jardin roye du Chapitre.

2° Le pressoir de Prouilly et les 3 pressoirs d'Ormes placés dans un grand bâtiment (3).

chapitre de Saint-Symphorien (DUCHÉNOV. Les enseignes de Reims, du XiV'-xvn- siècle, 114, p. 131.) (i) A 5. 1, doss. 1, n° 1, article 30.

(2) Archivet municipales, Comptes des léproseries, 29 (non coté).

(3) B. 29, 7, n° 11.


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3* Les fermes. — Laplus voisine de Reims est celle de Muizon, entre la Vesle et la grand'route; la maison et les domestiques sont exempts de la juridiction du seigneur de Muizon. Différentes redevances y sont rattachées qui en 1464 valent 25 s. p. par an. Au xvie siècle le domaine est loué 150 1. t. — Près de Chàlons, aux Loges, la maladrerie possède une belle et grande ferme, avec pourpris, jardins, etc., ruinée durant les guerres du xv" siècle. En 1549, ce domaine était affermé 35 1. 10 s. t. — Dans le département actuel des Ardennes, se trouve la maison de La Mure, près de la Neuville-enTourne-a-Fuy, entourée de 94 jours de terre et louée en 1549, 241. t. par an: — Dans la même région, deux fermes distantes de quelques lieues dépendent encore de SaintLadre : celle de Beaufuy à laquelle se rattache un bois important encore connu au xvin" siècle sous le nom de « Bois des Ladres (1) », et celle de Marcelot ou de la Vagnerie, près de Terron. Ce domaine de Marcelot comprend non seulement une ferme et ses dépendances, mais un vivier qui reste exploité par les gouverneurs de l'hôpital. Cet étang, placé au bord d'une chaussée, fermé d'un côté par des travaux d'endiguement, communique de l'autre avec un ruisseau (2). Non loin de l'étang s'élèvent une chapelle et un petit logis. Cette chapelle, dédiée à la Vierge, est en 1345 dotée par Colars de Day, chevalier, d'une rente d'un selier de blé, à condition qu'un cierge serait allumé pour le repos de son âme à chaque service (3). Brûlée pendant les guerres

(1) Plans du xvme siècle, dans B 25, 2° liasse, n"s 3, 26, etc.

(2) Plan de 1530, dans B. 14, 1, n° 7.

(3) B. 14, 1, n° 18. — Pièces Comptabl., lias, de 1614 : Reçu de Jean Thomas pour y avoir « repainct l'image Nostre Dame. »


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anglaises, elle est relevée au milieu du xv° siècle : en 1450 (n. st.) (1), les échevins obtiennent de Jean Juvénal des Ursins l'autorisation de quêter pour la reconstruction avec des lettres d'indulgences à ceux qui concourront à cette restauration. Elle fut démolie en 1688 et la paroisse réunie à celle des Alleux (2). Il faut encore noter au xv" siècle l'institution à Marcelot et à Beaufuy d'un maire rendant la justice au nom de SaintLadre et dont les sentences entraînent des amendes applicables à l'hôpital (3).

En dehors de ces propriétés, la fortune de la maladrerie consiste surtout en surcens et en dîmes. Les cens sont établis à Reims sur 16 maisons : trois de ces maisons sont sises au Marché au blé (4), l'une « à l'enseigne du Vironicle(5) », l'autre nommée la maison de l'Image. Au Marché aux étamines (6), rue des Trois Rois, la maison de la Cloche doit annuellement 7 s. p. Au bourg de Vesle 3 maisons paient au xv° siècle 17 s. de surcens : l'une a pour enseigne la Couronne, l'autre est assise près du puits Harduin entre l'Hôtel-Dieu et les Chapelains de l'ancienne congrégation, la troisième roye le prieuré de Clairmarais et l'Hôtel-Dieu. Un des chapelains de Saint-Etienne de Reims doit un cens de 12 s. et le curé de Saint-Hilaire 30 s. p. pour le presbytère. Les autres maisons sont rue de la Perrière ; rue

(1) B. 14, \, n° 25.

(2) B. 14, 1, 53.

(3) Archives communales, Conclus, du Buffet, 4, f° i>9 v°.

(4) Sur l'emplacement actuel de la Place des marchés.

(o) Archives communales, Comptes des lepros., 2, f° 137. Sur cette enseigne et les suivantes, cf. DUCHÉNOY, Les enseignes de Reims.

(6) Aujourd'hui rue de l'Arbalète.


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des « Chastellains » ; à la Porte aux ferons au coin de la ruelle des Meules ; rue Porte Chacre, au coin de la rue qui va au marché à la laine; en la Poissonnerie, près de la halle aux harengs. Une rente de 12 s* par an est due à Noël par les cordeliers de Reims sur leur pourpris.

Quant aux dîmes, Saint-Ladre a acquis le droit de les percevoir en tout "ou en partie à Bezannes, à SaintSouplet, à Lucquy, Auboncourt,Vauzelles et Monclin, à Vouziers, Biaise et Thelines. Il perçoit le quatorzième des dîmes à Saint-Souplet, le douzième à Vouziers, Biaise et Thelines, où l'abbaye de Saint-Thierry et le chapitre de Reims ont également une part (1).

Il faut rappeler en outre les prébendes de pains déjà signalées et qui sont payées jusqu'au xvnc siècle, et les redevances en grains réduites à une rente de 5 setiers 3 quartels de froment payée par l'Hôtel-Dieu.

L'état du patrimoine n'a donc guère changé depuis le xiv 8 siècle. En 1633, au moment de la disparition de la léproserie, la recette était de 3459 1. 9 s. 3 d. t. Au ^vm" siècle, d'après Bidet (2), la censé Saint-Éloi et toutes les terres qui formaient l'ancien enclos étaient louées 500 1. et les 7 autres maisons élevées autour de la maladrerie 700 I.

Tels étaient les revenus ordinaires de la léproserie. Les recettes extraordinaires n'ont pas grande importance. C'est la vente des vieux objets, ferraille, etc.; c'est de temps à autre la vente de l'herbe des prés ou des fagots faits dans les bois de Saint-Ladre (3). Ce

(1) A». \. doss. 9(1455).

(2) Mémoires, II, ch. 3, p. 20, dans VARIN, Archives administratives, t. I, lr° part., p. 12 (note).

(3) Archives communales, Compt. des léproser., 4, f" 249 v*.


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sont surtout les offrandes et les dons, dons en argent ou dons en nature (I). Mais le grand élan qui a enrichi la léproserie au xm° siècle (2) a cessé avec les causes mêmes qui l'avaient fait naître. Les legs sont rares. Dans le cours du xv° siècle (3), nous n'en avons relevé que cinq (4). Cependant une grande partie du luminaire de l'église est offerte par la charité des fidèles (5) ; et il faut tenir compte des offrandes déposées aux jours de fêtes ou durant les octaves, au moment de l'exposition des reliques, ainsi que des aumônes jetées dans tes troncs. En 1393, le total de ces offrandes se monte à 23 1. 6 d. (6); en 1409, à 20 1. 16 s. p. (7); en 1468,

(1) Archives communales, Compt. des léproser., 2, f° 72 : Jaquemin deVilliers donne un cheval à Saint-Ladre (1424). — Ibid., 2, 1'° 163 v°: deux carriers vendant à l'hôpital 240 pieds de pierre en donnent 9 « de gratuité » (1463). — E. 16, 14, f° 6, v°:Jehanne de Voisine, dite de Paris, fait don d'une nappe de lin de 0 à 7 aunes (1468).

(2) Cf. VABI.N, Archives administratives, t. 1, 2e partie, pp. 1000 et 1007.

(3) Au xive siècle, notons les legs suivants : legs d'Estève Bauduynet Pierre Honoré, ancien curé de Saint-Ladre (1300) « pour mettre en la réparation des joyaulx ■> après le siège (E. 16, 9, f° 10); legs par Baudon Erarl (1369) de la moitié d'une maison devant la Croix de la Madeleine (Inventaire de 1478, f° 29 v") ; legs par Jean Ellebaut (1379) d'une terre à Muire (B. 29, 2, n° 9).

(4) Legs d'un trécens de 5 s. légué en 1403 par Etienne Le Cuisinier, religieux de Sainl-Symphorien (Inventaire de I478,ï" 12); legs de 24 I., en 1468 (E. 16, 14, I" 6 v"); de 16 s. en 1475 (A)- chives commun/des, Comptes des lépros., 3, f" 74 v"); legs de 8 s. (1485) par l'un des membres de la famille Cauchon, Nicolas (Ibid., 4, f" 118), et de 12 jours 1/2 de terre (1490) par Antoine Waladé, lépreux (A 5. 1, 6, n° 1).

(5) Au point qu'en 1382 les maîtres peuvent en revendre « en chandeilles et tortis » 40 s. p. (E. 16, 1, f" 5) ; en 1468, 17 s. 4 d. (E. 16, 14, f" 6 v").

(6)E. 16, 2, f" 3. (7) E. 16, 6, f" 3 v".


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à 32 1. 4 d. (1); en 1576, à 7 1. 4 s. 8 d. t. (2); en |612 (3), à 111 s. 7 d. t. L'argent des troncs dut d'abord revenir directement aux malades; plus tard, il fut gardé par les gouverneurs et confondu dans la caisse commune. En certaines circonstances, les gouverneurs firent sans doute un appel particulier à la charité publique : c'est ainsi qu'en 1453-1454, au moment des travaux de reconstruction de l'église Saint-Eloi, le nombre des « deniers a Dieu » augmente (4) et qu'en 1463-1464 il s'élève à 29 1. 11 d. p. (5). Il est touchant de noter l'aumône « d'un homme de Reims qui ne se vuelt pas nommer (6) » et celle de deux « compaignons massons » qui travaillaient sans doute sur les chantiers de l'église et abandonnent un double sur leur salaire (7). La partie la plus intéressante du patrimoine de SaintLadre était constituée parles deux hôpitaux des hommes et des femmes, leurs enclos, leurs attenances et dépendances. Les deux léproseries comme toutes les maladreries se trouvaient à l'écart de la ville. On comprend les avantages que présentait une telle situation pour un hôpital de ce genre. Mais cet isolement pouvait devenir dangereux ; malgré les précautions prises par les administrateurs , les guerres étaient fréquemment funestes aux léproseries. Mais même en temps de paix cette situation écartée avait ses inconvénients. Elle encourageait par exemple les voleurs que tentaient les pauvres

(1) E. 16, 14, f° 6 v». (2)E. 18, lo, f°60 v". (3)E. 16, 17, f° il.

(4) Archives communales, Comptes des léproser., 2, fos 149 et sqq.

(5) Ibid., id., M 62 v°.

(6) Ibid., id.

(7.) Ibid., id., 2, f° 149.


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richesses de la chapelle. Des larrons sans vergogne pèchent à la glu dans les troncs (1) ; d'autres brisent les fenêtres pour pénétrer dans l'église (2). Il en était de même à Saint-Ladre aux femmes. En 1544, on y fracture le tronc (3) ; en 1612, on y « robbe » une aube et d'autres vêtements : aussi l'Echevinage décide-t-il que les objets précieux seront mis en garde, contre rémunération , chez un habitant du faubourg, près de la maladrerie (4). On pense bien que la crainte qu'inspirait la lèpre avait été de bonne heure insuffisante à écarter les malfaiteurs, et les chiens, qu'on entretenait à la léproserie des hommes et surtout à la léproserie des femmes, n'étaient pas des animaux inutiles. A la fin du xvie siècle des rôdeurs entraient la nuit par une brèche à Saint-Ladre aux femmes et allaient se coucher dans les chambres vides (5). D'ailleurs, les lépreux et lépreuses pouvaient avoir à faire à d'autres ennemis. Au début du xvne siècle, Jean Denisme, louvetier des baillages de Vermandois et de Vitry, demande aux échevins l'autorisation de pénétrer librement à la léproserie des femmes pour y chasser les loups qui y fréquentent (6).

(1) Archives communales, Compte des léproser., 2, f° 176. — E. 115, 8, f» 4.

(2) Ibid., 6, f° 33 v°.

(3) Ibid., Conclus, du Buffet, 5, f° 135.

(4) Ibid., id., 11, f° 113 v°.

(5) Ibid., id., 9. f° 188,

(6) Archives communales, liasse des pétitions, non classée (sans date) : Pétition de Jean Denisme : «... Est-il que a l'hospital de la maladerie S. Anne et es environs d'icelle y fréquentent plusieurs loups, comme il est bien adverly ; pour lesquelz avoir et en exterminer le païs, il desireroit luy estre commis vacquer a la chasse et prise, et, pour ce faire et avoir moien d'estre au couvert pour y parvenir, avoir une petite chambre non occupé présentement par aucune maladde, ains par ung jardinier, duquel


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La description exacte et complète des deux enclos présenterait, on le comprend, le plus grand intérêt. Mais, sauf un débris de la chapelle des lépreux, il ne reste aujourd'hui de la maladrerie que le nom du Chemin des Bons-Malades et le nom du faubourg SainteAnne. Les plans intérieurs font défaut : malgré les nombreux procès soutenus par l'hôpital, aucune « vue » n'en a été dressée. Les plans de Reims, dont le plus ancien, celui de Cellier (1), est d'ailleurs du début du xvii 0 siècle (2), n'indiquent guère ce qui est situé hors du rempart ; quant aux vues de la ville faites au xvi\° ou au xvm* siècle, elles sont prises de l'Ouest, à peu près de l'emplacement même de Saint-Ladre aux hommes, et par suite, ne donnent presque aucun renseignement sur l'hôpital. On peut cependant utiliser un plan du xvne ou du début du xvme siècle, conservé aux Archives communales (3), et un plan dressé en 1677 par Robert Lajoye, arpenteur, lors d'un procès entre le Chapitre et plusieurs jardiniers (4). Sauf les rares indications qu'on y peut trouver, on en est réduit aux brèves mentions fournies par les comptes. II serait téméraire d'essayer d'après ces textes une complète restitution des léproseries ; il est permis du moins de s'en aider dans une description très générale des enclos.

ilz ont pouvoir d'y aller pour y vacquer a lad. chasse : ce que touteffois ilz ne veulleut et entendent faire sans votre permission. .. ». En 1598, 3 loups sont tués près de Saint-Éloi (PUSSOT, Journalier, p. 75).

(1) Bibl. Nat., Départ, des estampes, V". 105.

(2) H. JADART, La Chalcographie de la ville de Reims (1618-1892), p. 7. Cf. H. MENU, Le premier plan de Reims.

(3) Plans, n° 15, fonds du Chapitre.

(4) Archives communales, plans, n° 4.


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La maladrerie des hommes était située sur l'emplacement actuel do l'avenue de Paris, du chemin des Bons-Malades (rue Bienfait) (1) et du faubourg d'Epernay, et ses dépendances s'étendaient vers l'Est jusqu'à la rue Passe-Demoiselles et la rue du Moulin-Brûlé. En sortant de Reims, vers l'Ouest, on franchissait deux fois la Vesle qui formait l'île d'Ëntre-Deux-Ponts, dépendant du Chapitre(2) et on dépassait la Barbacane. Aussitôt, à droite et à gauche de la chaussée, se voyaient des terrains dépendant de l'hôpital. Au sud du chemin se trouvaient un pré et un jardin enclos de murailles, un autre jardin et le bois de GlorieLte, le tout s'étendant jusqu'à la Bouverie (3), et d'autre part, au Nord, deux bois et une oseraie situés entre la rivière Brûlée vers la Barbacane, et l'enclos de l'hôpital (4). Enfin, on atteignait sur la droite l'enclos même de SaintLadre aux hommes. Un plan de 1773 (5) cantonne « les maisons S. Eloy » entre la route d'Epernay et la route de Paris. Mais le domaine de la maladrerie au xive ou au xve siècle débordait au-delà, ou plutôt les chemins présentaient une autre disposition. La chaussée royale, au lieu de se couder comme la rue de Vesle actuelle, se

(1) Par décision du Conseil municipal du 29 décembre 1903, cette voie a pris en effet le nom de rue Bienfait. M. C. SCHWINGROUBER (Reims, rues et places publiques, p. 146), pense à tort que son ancien nom venait du voisinage de l'hôpital Saint-Louis où les malades finissaient de se rétablir.

(2i) VARIN, Archives administratives, II, p. 404.

(3-4) As. l,dos. 1. n" 1, f" 2 : déclaration aux commissaires des francs fiefs (1464). Cf. Archives nationales, S. 4883. La Bouverie est figurée sur le plan n° l.'i en face de l'église Saint-Eloi à l'angle de la route de Paris et du chemin conduisant à la chapelle SainteAnne.

(5) B. 29, 2, n0 61.


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continuait directement vers l'ouest, de façon qu'elle couperait aujourd'hui le faubourg d'Epernay, vers l'angle do la rue de Courlancy (1).

Le pourpris faisait front sur le chemin et s'étendait vers le Nord jusqu'aux bords marécageux de la Vesle, où l'hôpital possédait la « faulx Saint-Ladre » (2). 11 était fermé de murs, de fossés et quelquefois même d'un fossé doublé d'un mur. Ces murs étaient soigneusement garnis de bornes « pour garder que les harnois n'y feissent dommaige a charrier contre lesd. murailles » (3). Les fossés, bien enlretenus, fréquemment curés et relevés, sont en communication avec la Vesle (4). Différentes portes s'ouvrent dans la muraille : l'une pour aller de la cour des ladres chez le censier et le convers (5) ; une autre, fermée d'une chaîne, conduit aux prés situés derrière l'enclos (6) ; un fossé passe entre l'enclos et les prés, où un pont assez large permet aux chariots d'entrer (7). Sur le chemin, la cour est fermée par un mur

(1) Archives communales, plans n° 15. Dom CHASTKLAIN (Journal, publié par H. JADART, p. 57), signale en 1722 un changement de tracé de la route de Paris. Dans un plan des environs de Reims, par DAUDET (Bibl. Nat., Dép. des estamp., V». 105), celle route passe entre Muire et Sainte-Geneviève d'un côté et le faubourg Saint-Eloi de l'autre : un bâtiment plus considérable, au bord de la route, est peut-être l'église ?

(2) A 5. 1, doss. 1, n° 1, l'° 2. C'est-à-dire le privilège de faucher les marais.

(3) Archives communales, Compt. des léproser., 5, 1° 140 v° (1507-1508).

(4) Ibid., id., 3, f° 41 v".

(5) Ibid., id., 3, f°s 184 v° et 185. (G) Ibid., id., 10, fu217.

(7) Ibid., 12, f° 16 v° (1546-1547) : « Aussi a faire le pont 1 par ou on mené les charriotz aux prez desd. malades, led. pont con tenant douze piedz de long et six piedz de large. »


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qui part de l'église (1) située à l'Ouest par rapport aux bâtiments de l'hôpital, et dans ce mur est percée une autre porte, sans doute la grand'porte de la léproserie. Enfin, probablement plus à l'Est, une porte ferme un double pont (2) qui aboutit « vers la Porte a Vesle » sur le grand chemin : cette porte doit être réservée aux ladres; à côté de la porte un banc est maçonné dans la muraille (3) : c'est là que les malades viennent s'asseoir pour implorer sans doute la charité des passants.

Les fossés sont reliés entre eux par des canaux qui traversent la maladrerie et que soutiennent des travaux de maçonnerie (4). L'hôpital est ainsi abondamment pourvu d'eau. D'ailleurs, plusieurs viviers se trouvent à l'intérieur de l'enclos et communiquent avec les fossés. Sur l'un de ces canaux est installé le lavoir des lépreux (5), couvert et fermé (6). Les aisements devaienl sans doute aussi, comme à Saint-Ladre aux femmes, être reliés à un de ces canaux. On comprend les avantages hygiéniques que présentait une telle disposition. Mais le voisinage de la Vesle pouvait avoir ses inconvénients : ainsi pendant l'hiver de 1539, les crues delà rivière se firent sentir dans l'hôpital même où plusieurs rnurs furent « fondus (7). »

(1) Archives communales, Compt. des léproser., 5, f° 35 v (1503-1504) : « Pour trois piedz de nod de bois mis de travers du mur de la court des lespreux pour le garder de pourriture a cause de l'eaue du grand toict de l'église qui tombe dessus, xn d. p. »

(2) Ibid., 3, f° 184 v".

(3) Ibid., 3, f° 135, et 9, f° 252 v*.

(4) Ibid., 3, f» 185 v°, et 7, f» 12 v".

(5) Ibid., Conclus, du Buffet, 0, f° 119.

(6) Ibid., Pièces comptables, liasse de 1564.

(7) Ibid., Conclusions du Buffet, 4, 1° 224 v° (21 février 1539).


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La déclaration des biens faite on 1464 aux commissaires des francs fiefs et nouveaux acquêts décrit ainsi la maladrerie (1) : « Et premiers l'oslel et hospital Saint Ladre aux hommes, eslans assis au devant et près de la Porte a Vesle... église, cymetiere, maison, grant manoir et logis tant pour les povres malades comme pour les convers, frères et soeurs dud. hospital, et pour leur curé ou chappelain ; pareillement y a granges, estables, cours, jardins, préz, boschet, fosses ou saulvoirs a poisson, et grant pourpris... » Comment étaient disposés dans l'enclos ces divers bâtiments et jardins? On a vu qu'il n'est possible de répondre à celte question qu'avec de grandes réserves.

Cependant on peut admettre que le grand « manoir », c'est-à-dire le bâtiment principal, était placé vers l'Est de l'enclos, entre la cour des ladres et les jardins. D'après le plan de 1677, il faut, en venant de Reims, passer d'abord devant Saint-Lazare, c'esl-à-dire l'hôpital, "pour arriver à l'église. Les chambres de ce bâtiment sont signalées comme « répondant » soit sur le jardin, soit sur la cour, soit au Levant (2) : ce qui indiquerait que la cour et le jardin n'étaient pas à l'Est du manoir. On devait y pénétrer par une porte d'une certaine apparence , puisqu'elle était ornée d'une statue de SaintEloi (3) ; c'est sans 1 doute là que se voyait l'enseigne, peinte des images de saint Eloi et de saint Ladre (4), qui devait rappeler aux passants qu'ils pouvaient faire aumône en ce lieu. Des fenêtres, garanties (au xvie siè(1)

siè(1) 1, dossier 1, n" 1, f° 2.

(2) F. 2, 6 et f. 2, 199.

(3) Archives communales, Comptes des lépros., 4, f° 302 v°(1497).

(4) E. 16, 14, f 10.


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de) par des panneaux d'osier (1) laissaient entrer la lumière : l'une de ce» fenêtres était ronde. Ce bâtiment était sans doute surmonté d'un étage où l'on montait par un escalier (2), cl qui peut-être servait de grenier où l'on hissait les réserves par une poulie (3). En cas de danger, les gouverneurs faisaient sortir les panonceaux royaux. En même temps, on dressait sur le toit de l'hôpital des bannières (4). pour avertir les gens d'armes qu'il y avait là un asile de pauvres malades à épargner (5).

Le bâtiment principal était accolé de hangars, de cellicrs(6), d'une avanl-loge(7), d'une recommandise(iS). Au xvie siècle, l'un des celliers fut aménagé en prison (9), la porte solidement fermée (10) et les fenêtres garnies de barreaux de fer (11).

Dans la cour, devant le manoir, se trouvait un grand

(1) Archives communales, Compt. des !<'■ [>r., 7, f" 153 v" (15211522) : » A Bertrand... pennelier pour deux taillis des blanches oizieres mis l'un au devant de l'os de l'hospital S. Ladre aux hommes et l'autre a la voirrière de l'autre pignon... »•

(2) Ibid., id., 2, P 165. (3)Id., f" 153.

(4) E. 16, 3, f» 9.

(5) Ce devait être une habitude générale, et au xvi 9 siècle encore, pendant les guerres, les bons bourgeois essayaient ainsi de faire passer leurs maisons pour des hôpitaux, de sorte, dit Bouchet, que « ce n'eussent esté en tout le pays de Poiclou que ladreries el lepreseries. >■ (fi. BOUCHET, Si'ri'-es, sérée 36", Ed. Lemerre, V, p. 91.)

(6) Archives communales, Pièces comptabl., liasse 1552.

(7) Ibid., Comptes des lépros., 3, 1° 8.

(8) Ibid., 2, f" 163 v".

(9) Ibid., Conclus, du Buffet, 3, f" 174 (2i janv. 1520 n. st.).

(10) F. 2, 178.

(11) Archives communales, Conclus, du Buffet, 7, 1" 133 v°.


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vivier maçonné, de 40 pieds de long et de 20 delarge(l). Dans la cour encore, on voyait le, puits principal, un autre étant dans le jardin (2). Le puits de la cour était couvert d'un toit à double rampant(3) orné d'écaillés (4), reposant sur qualre tiges de for : dessous, la poulie où s'enroulait la corde soutenant deux seaux de cuir munis de chaînettes (5).

Non loin de là s'élève le colombier, couvert de tuU les (6); il se termine par une tourelle dont la porte s'ouvre d'en bas par une corde et une poulie (7), et au haut de laquelle sont placés deux pigeons de plomb (8).

Enfin la cour des lépreux est décorée d'une sorte de préau où se tiennent les malades, par exemple lorsqu'il pleut (9). Cette galerie qui s'adosse au mur de clôture est garnie d'un plancher (10). L'une des extrémités tient, semble-t-il, au bâtiment de l'hôpital (11). Ce préau a environ 10 pieds de large. Le devant de la « gallerie » est orné d'une croix de bois (12).

Près de la cour de la censé se trouve au xv" siècle la « chambre de Messieurs les eschevins (13)», où ils se

(1) Archives communales, Comptes des léproser., 12, f° 16 v°.

(2) Ibid., id., 4, 1°279.

(3) Ibid., id., 4, f" 41 v".

(4) Ibid., id., 4, f° 41.

(5) Ibid., 4, 44 v".

(6) Ibid., 3, f° 40 v".

(I) Ibid., 3, i"4I.

(8) Ibid., 3, f" 40 v".

(9) F. 2, 180 «... Faut rechausser... le mur de la clausure de la court des lespreux soubz la gallerye ».

(10) F 2? 79.

(II) Ibid.

(12) Archives communales, Comptes des léproser., 5, 1" 14.

(13) E. 16, 14, fil.


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tiennent lorsqu'ils viennent à Saint-Ladre, notamment les jours de fêtes. Devant celte chambre s'étend un petit jardin (1).

L'enclos renferme encore la maison du curé et celle du convers (2) avec leurs jardins. Elles sont placées en bordure sur le chemin et on peut supposer qu'elles sont à l'Ouest de l'église. De ce côté aussi doit se trouver la censé. Le plan de 1677 ligure en effet les maisons de Saint-Eloy au-delà de la chapelle par rapport à l'hôpital.

En dehors du « manoir », les lépreux peuvent être logés dans des maisonnettes ou « bordes » dispersées çà et là dans l'enclos (3). Deux de ces bordes sont près du cimetière; une autre « respond sur la rue du coslé de la ville » (4), une autre est près de l'église (5). Ces bordes qui existaient déjà au xvu siècle devinrent surtout fréquentes au xvic et au xvn'' siècles.

Au xvi 6 siècle aussi, des maisons sont bâties dans le pourpris pour être louées à des non-malades. Ces maisons et leurs dépendances sont séparées par un mur de la partie de l'enclos réservée aux ladres. En 1531, les gouverneurs font même murer une porte de communication entre les ladres et un locataire (6). L'une de ces maisons est placée à l'Est de l'église, entre le chevet et la porte de la cour (7) ; la maison

(1) E. 16, 13, f" 5 v".

(2) As. 1, dossier 1, n" 1, f 2.

(3) Archives communales, Pièces comptables, liasse de 1620.

(4) Ibid., liasse de 1501.

(5) Ibid., liasse de 1552.

ifi) Archives communales, Comptes des léproseries, 3, f" 12. (7) F*. 163.


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attenant à la chapelle a pour enseigne l'image SaintEloi(l).

Au xve siècle l'église près de laquelle se trouvait le cimetière, était située sur l'emplacement actuel du numéro 10 du faubourg d'Epernay (2). Dès le xn° siècle la maladrerie possédait une chapelle. Le concile de Latran de 1179(3) permettait aux léproseries d'avoir une église spécialement réservée à leur usage, et dès 1195, Célestin III prenait sous la protection du Saint-Siège l'église de Saint-Ladre de Reims (4). C'est encore sous ce titre (basilica Sancti Lazari) que la chapelle est désignée dans une donation de 1202 (5).

Mais de bonne heure l'église de Saint-Ladre fut aussi placée sous l'invocation de saint Eloi, dont saint Oucn rapporte en effet que, parmi d'autres miracles, il avait rendu la santé à un lépreux (6). En 1246, Innocent IV accorde des indulgences à ceux qui visiteront « l'église de l'hôpital construite en l'honneur de saint Eloi », le jour de la fête de ce saint (7). Au xve siècle les deux saints sont associés, et l'on dit « l'église Saint-Eloy et Saint-Ladre » (8).

(1) Archives communales, Comptes des léproseries, 28, f° 151 v°.

(2) Ch. GIVELET, H. JADART et L. DKMAISON, Répertoire archéologique de l'arrondissement de Reims, 2e fascicule, pp. 229 et 230.

(3) LABBEet COSSART, Concilia, X, 1520.

(4) Archives communales, liasse 34, bulles, n" 1.

(5) B. 27. Donchery, n° 2.

(6) Viti heati Elegii, H, 62, dans MIG.NK, Patrologie la,tine, 87, 583.

(7) Archives communales, liasse 34, bulles, n° 7 (5 novembre 1246).

(8) Archives municipales, Compt. des lépros., 5, f° 35 v° : « Audit Piètre Cardinal pour avoir par luy recouvert le loict de lad. église S. Eloy et S. Ladre » (1503-1504). De même f° 36.


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La chapelle, sans doute peu importante, disparut-elle durant le siège de 1359 avec le reste de la léproserie? En tout cas, au xve siècle, on devine la reconstruction d'une église de plus d'importance. Des quêtes sont faites, et les comptes de 1453-1454 et de 1403-1464 (1) mentionnent une très grande quantité de fournitures : pierres, chaux, pièces de bois, etc., sans d'ailleurs donner de renseignements plus explicites. Il ne faudrait donc pas admettre, comme semble le supposer Marlot(2), que l'église détruite durant les guerres anglaises ne se fût jamais relevée. La vérité est que l'édifice reconstruit au xv° siècle dût (pour tant que nous sommes renseignés sur cette question assez obscure) être démoli à nouveau, moins un portail, vers la fin du xvi" siècle et fut, comme on l'a vu (3), reconstruit au début du xvn" siècle, très légèrement (4). C'est ce qui expliquerait que Marlot n'ait vu au xvn 6 siècle qu'un débris de l'ancien monument. Ce portail subsistait encore en 1759, au dire de Bidet (5), qui le juge « d'un ouvrage fort gothique », et ne disparut, selon Tarbé (6), qu'à la Révolution.

Si l'historique de cette chapelle est peu connu, cequel'on peut savoir de la disposition qu'elle présentait est aussi peu précis. V Almanach historique de la ville de Reims pour tannée M DCC LV, qui donne une liste des anciennes églises rémoises subsistantes ou disparues, ne mentionne

(1) Ibid., id.. 2, f"s 151 et sqq. cl f"s 163 et sqq.

(2) Histoire de Reims, II, 274.

(3) Voy. ci-dessus, p. 49.

(4) Le choeur ne fui pavé qu'en 1628 (F. 202).

(5) Mémoires, IV, p. 240, dans VAUIN, Archives législatives de R'ims, 2e part., Statuts, 2, p. 13.

(6) Reims, essais liistoriijucs sur ses rues et sur ses monuments, p. 23.


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Saint-EIoini dans l'une ni dans l'autre de ces catégories. Les deux ou trois vues que l'on en a ne concordent pas. Une des vues de Reims par C. Chastillon (1) montre à l'emplacement de Saint-Eloi une petite église gothique simple, sans arcs-boutants, à transept saillant; le chevet est plat, la nef éclairée par 4 fenêtres; un clocher surmonte la croisée du transept. Mais si l'on en juge par la représentation des églises conservées, cette image de Saint-Eloi ne doit pas être d'une scrupuleuse exactitude; il suffit, d'ailleurs, de remarquer qu'elle semble présenter le chevet vers le Sud. Son aspect est tput différent dans une vue de 1722 intitulée « Voyage eL route du roy à Reims pour son sacre (2) » : mais le faubourg y est représenté par deux maisonnettes isolées dans la campagne ; il n'y a pas lieu de supposer la représentation de l'église plus fidèle que celle du reste du faubourg. Povillon-Picrrard donne aussi une vue de la léproserie qu'il semble avoir imaginée de toutes pièces : le texte dont il l'accompagne reste muet sur la chapelle et ne donne même aucune description de la maladrerie (3). Enfin le plan de 1677 représente la chapelle de 1612 et non celle du xv° siècle. Quant au monument lui-même, il n'en reste aujourd'hui que deux faisceaux de colonnettes encastrées dans des murs modernes et qui faisaient partie sans doute des pieds-droits d'une porte. Ils ont été signalés dans les quelques lignes que le Répertoire archéologique de l'arrondissement de Reims (4)

(1) Bibl. Nal. Départ, des estampes. V». 105 : vue intitulée « La grande, puissante et renommée ville de Reims ».

(2) Ibid.

(3) Description étymologique et lopographique de Reims(1822), n, f" 80 (ms. de la bibliothèque de Reims).

(i) CIVELET, JADART et DEMAISOX, Répertoire archéologique, 2e fascicule, pp. 230.


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consacre à Saint-Eloi. Il convient donc de rappeler ici ce qui a été dit au début de cette description et de tenir compte de ce qu'il y a de conjectural dans une restitution même vague d'un monument qui n'est en somme connu que par les mentions peu précises des comptes.

Cette église devait être de dimensions assez importantes. Tout au moins lors des reconstructions de 1612 y utilise-t-on une « grande forme de voire contenant trente piedz »(1) et d'autres plus petites de quinze pieds. D'ailleurs, l'écartement des deux groupes de colonneLtes qui subsistent, c'est-à-dire l'écartement des pieds-droits est d'environ cinq pas.

On pénètre dans l'église par plusieurs portes. Il est naturel et les comptes l'indiquent d'ailleurs, que le portail principal soit dirigé vers la rue. Or nous pouvons remarquer que la porte dont il reste un débris a son ébrasement dirigé de telle sorte que la partie la plus étroite soit sur l'a rue actuelle, c'est-à-dire qu'on devait entrer par cette porte de l'Ouest à l'Est. Si donc cette porte était la porte principale sur la rue, il faudrait admettre que la chaussée passait entre l'église et les maisons de Saint-Eloi. Il semble donc que l'on doive distinguer la porte dont il reste un débris et qui se trouvait à. l'Oucsl de l'église et une seconde porte latérale sur la rue (2).

Cette porte de l'Ouest était ornée à droite et à gauche

(1) Archives communales, pièces comptables, liasse de 1610.

(2) D'autre part, au xvnc siècle, mention est faite d'une porte ouvrant sur le cimetière. Il semble qu'elle soit distincte de la porte Ouest si l'on lient compte d'un mémoire de maçonnerie où la pierre destinée à faire le seuil de la porte est indiquée comme ayant 3 pieds de longueur et si l'on se souvient que la porte Ouest a au moins 5 pas do large.


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de colonnettes dont les bases sont aujourd'hui détruite^ et dont les chapiteaux étaient décorés de palmeltes à 3 feuilles d'unegrandé simplicité. Ce que nous savons de l'historique de cette chapelle nous obligerait à les dater du xv, 0 siècle ; mais elles sembleraient plutôt du xivc. C'est au portail principal que se trouvait la statue de saint Eloi signalée, par Marlol, et après lui par Tarbé et Povillon-Pierrard (1). La statue qui ornait le trumeau se détachait en blanc (2) sur le reste du portail peint eu rouge. Sur le linteau des sculptures rappelaient la légende du saint. Au-dessus de cette porte se trouvait la rose (3) formée de colonnettes de pierre (4) ; elle était garnie de losanges de verre, dont sûrement quelquesuns étaient ornés de peinture (5). Sur le toit à double rampant (6) se détachait le clocher qui renfermait plusieurs cloches (7). Au sommet, une croix fleurdelisée était soutenue par Un épi (8), et tout en haut se voyait un coq doré (9). Au sommet du pignon de façade se trouvait une autre croix (10), et, probablement à l'autre

fl) MARLOT, Metropolis remensishistoria, 1656,1, p.270.—TARBÉ, Reim», p. 22. — POVILLON-PIERRARD, Description étymologique et topographique de Reims, II, f° 80.

(2) Archives communales, Comptes des léproseries, 5, f° 36 v° (1503-1504) : « A Tourtelet paintre pour avoir par lui paint de rouge peinclure le portail de S. Eloy sur la rue et reblanchy. l'image dud. S. Eloy... x s. p. »

(3) Ibid., id., 2, f° 153 v° (1452-1453) : « A Jesson Fumée peintre pour avoir fait le patron pour faire la verrière du ront de l'église S. Eloy, xvi. s. p. »

(4.) Ibid., 2, f» 157.

'.">) Ibid., pièces comptables, liasse 1576.

(6) Ibid., Comptes des léproseries, 3, fu 201 v".

^7) Ibid., 4, f" 324. .

(8) Ibid., pièces comptables, liasse 1610.

19) Ibid., comptes, 9, f° 251 v°.

(10) Ibid., pièces comptables, liasse 1610.


u -

extrémité une tige de fer, au haut de laquelle se balançait une « bannerole » peinte (1).

A l'intérieur, une nef sans doute unique. C. Chastillon l'a représentée à 4 travées, bien que la chapelle du xvn" siècle semble n'en avoir eu que deux (2). Les feaêtres losangées (3) étaient doublées d'un treillis d'osier (4). Sur une des arcades blanchies étaient écrits « en grosse lettre les pardons de S. Ladre (5). » La nef était garnie de bancs, munis au xvn 0 siècle d'un dossier surmonté d'une petite corniche (6). Ces sièges étaient ferrés et maçonnés dans le sol (7) : quelques-uns formaient coffre. Deux bancs étaient réservés aux échevins et aux chantres qui assistaient au service les jours de fêtes (8). Dans un coin une porte de chêne (9) fermait l'escalier en vis qui montait au clocher (10).

L'église comprenait un certain nombre de chapelles, dont les autels très simples pouvaient être ornés de chandeliers de bois(11) et de devants d'autel en tapisserie (12). Mais il est difficile de déterminer le nombre de ces chapelles, d'autant que l'édifice tout entier est tantôt appelé « l'église » et tantôt « la chapelle ». Peut-être faut-il compter la chapelle Sainte-Catherine(13) ; la cha(1)

cha(1) communales, comptes, 3, f" 202.

(2) Ibid., pièces comptables, liasse 1010.

(3) Ibid., comptes, 10, f" 216 v".

(4) Ibid., pièces comptables, liasse 1611.

(5) Ibid., comptes des léproseries, 2, f° 175 v.

(6) Ibid., pièces comptables, liasse de 1610.

(7) Ibid., comptes, 5, f°s 36 et 121 v".

(8) Ibid., 3, f" 7. (V)Ibid., 5, f" 121.

(10) Ibid., 5, f" 139 v.

(11) Ibid., 4, f° 354 v".

(12) Ibid., 13, f" 503 v».

(13) E. 15, 12, f"7v".


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pelle des maréchaux, signalée en 1468 (1) ; la chapelle des orfèvres (2), « ou ils ont acoustumé eulx trouver (3) » à la Saint-Eloi ; une chapelle est manifestement dédiée à saint Eloi avec la statue de ce saint, tenant en main une crosse dorée (4) et devant laquelle pend un chandelier (5). Peut-être ces deux chapelles n'en sont-elles qu'une seule. Une autre chapelle est « dite » des malades (6): c'est sans doute cette chapelle qui, au xvic siècle, fut ouverte sur un côté et agrandie d'une sorte d'arrière-chapelle où se tenaient les lépreux. On monte par deux marches dans le choeur fermé d'une « closure » dont le fronton, sans doute, porte un crucifix (7). L'autel est, élevé sur une crypte (8). Le devant d'autel est de bois (9) peint à l'huile (10), et au xvn" siècle cette peinture représente quatre « ystoir de saint Esloy (11) ». Le retable, également de bois peint, représente une Nativité, un Crucifiment et une Résurrection (12). Entre deux chandeliers de cuivre (13) ou de fer (14) est la croix, dont les croisons dorés sont ornés d'une image des quatre évangélistes (15).

(1) E. 16, 14, f» 10 v".

(2) Archives communales, Comptes des léproseries, 3, f° 132.

(3) Ibid., 5, f 139 v".

(4) Ibid., pièces comptables, liasse 1010.

(5) Ibid., comptes, 4, f°233.

(6) Ibid., 5, f> 121 V. (7)E. 16,14, f° 11.

(8) Archives communales, Comptes des léproseries, 5, f° 36.

(9) Ibid., 2, f° 131 v".

(10) Ibid., 3, f° 122.

(11) Ibid., pièces comptables, liasse de 1610.

(12) E. 16, 14, fil.

(13) Archives communales, comptes, 12, f° 18. . (14) E. 16, 10, f"4.

(15) Archives communales, comptes, 5, f° 37.


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L'inventaire publié par M. Demaison(l) et celui qu'on trouvera aux pièces justificatives (2) fournissent des renseignements complets sur le trésor de Saint-Eloi. L'église possède des reliques de saint Maur, de saint Ladre et de saint Eloi, mais surtout la «crois 01ivier(3) » « ou il a de la vraie crois » et de la couronne d'épine. On peut encore citer une « fiertre d'argent plainne de saintuaires (4) », un reliquaire à pied, plus modeste, en laiton, qui renferme plusieurs « beaux reliques (5) », un encensoir de Limoges, une croix de cuivre dorée (fi). Tous ces objets précieux sont enfermés dans des coffres ferrés (7) et au xvne siècle dans une belle caisse couverte de cuir noir (8). Le vestiaire était des plus complets : il fut renouvelé en 1485 par une série d'achats faits à un brodeur de Troyes (9). L'inventaire de 1349 signale en outre une vingtaine de livres parmi lesquels on peut citer une vie de saint Eloi, une de saint Ladre et un « livre a viseler malades ». En 1429, Messire Robert de Chartres est chargé d'écrire un livre neuf qui renferme la vie et « le service de S. Eloy (10) ». Quelques-uns de ces livres, reliés de cuir blanc (II), sont ornés de lettrines (12).

(1) Travaux de l'Académie de Reims, 72, p. 119.

(2) Voy. pièces justificatives, I.

(3) Du nom du donateur.

(4) DEMAISON, dans Travaux Académie de Reims, 72, p. 121.

(3) E. 16,7, f° 12. — Archives communales, Comptes des léproseries, 2, f" 39 v°.

(6) E. 16, 10, f" 4 v".

(7) Voy. pièces justificatives, I.

(8) Archives communales, comptes, 28, f° 467.

(9) Ibid., 14, fos 97 v» et sqq.

(10) E. 16, 10, i'° 4 v".

(11) Archives cpmmunales, Comptes des léproseries, 2, f° 39 v°.

(12) Ibid., 6, P 93 v°.


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Ce trésor est enrichi soit par des acquisitions, soit par des dons : on a signalé la magnifique croix qui garde le nom d'Olivier ; en 1420, l'un des gouverneurs fait don de « certains beaux reliques (1) », en 1513, la veuve d'un lépreux offre deux missels en papier(2).—Il est d'ailleurs soigneusement entretenu. Les gouverneurs vendent les calices ou les objets hors d'usage (3). Ils font repeindre les reliquaires (4), y font remplacer des verres (5), relier des livres (6). Des toiles sont achetées pour garantir les objets précieux de la poussière. Une lingère est chargée de réparer les vêtements, de tailler de nouvelles aubes ou de nouveaux surplis, de fabriquer des« sacques a calices (7) ». Les gouverneurs veillent avec le curé au blanchissage du linge de l'église (8) et à l'entretien du luminaire, faisant fondre par un cirier la cire provenant d'aumônes ou de redevances (9), ou achetant directement les cierges (10).

Ça et là, une tapisserie, une statue décorent la chapelle. Ici, le « drap du mauvais riche (11) » ; là, l'image de saint Ladre (12) portant le vêtement gris des lépreux, les cliquettes en main. Cette statue d'abord placée au bout de l'église fut ensuite dressée sur une voûte de

(1) Archives communales, Comptes des lépros., 2,f°39 v°.

(2) Ibid., 6, f° 93 v».

(3) E. 16, 3, f° 7 v".

(4) Archives communales, comptes, 3, f°122.

(5) Ibid., 2, f 39 v".

(6) Ibid., 6, f° 164.

(7) Ibid., Comptes des léproseries, 10, f" 162.

(8) Ibid., Conclusions du Buffet, 6, f° 189 V.

(9) Ibid., Comptes, 9, f° 13 v".

(10) Fa. 146.

(11) Archives communales, Comptes, 2, f° 122 v°.

(12) E. 10, 10, f° 4.


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7 pieds de haut (1) avec celle de saint Eloi, debout près de l'enclume, la mîlre en tête et la crosse à la main. Le mémoire d'un peintre en 1554 (2) permet encore de se représenter, entre autres images, la statue de la Vierge, couronnée et portant l'Enfant, et celle de saint Augustin vêtu d'un manteau noir.

Le mobilier de l'église est complété par un lutrin, économiquement acheté aux contres de l'église SaintJacques (3) ; des bénitiers portatifs attachés (4) an mur par une anse (5) ; un tronc de pierre solidement fixé au sol près de l'entrée et fermé d'une forte serrure (6).

Pour rendre le moins incomplet possible cet essai de description, il faut ajouter quelques mots sur les « bordes » ou « budes » des malades. Le lépreux habile soit une borde, goil une chambre du « manoir ». Généralement, la borde est réservée à un seul ladre, quelquefois à deux (7). On peut imaginer ce que sont ces bordes en constatant que dans un procès du xvi 8 siècle (8) une de ces maisonnettes, construite par un lépreux, est évaluée à 51 1.12 s. t. et que l'on fournit en 1609(9) pour la bude <rfe Jean Laurent un sommier de 17 pieds de long. La borde, crépie (10) à l'extérieur, est éclairée de plusieurs

(1) Archives communales, liasse 34, renseignements.

(2) Pièces justificatives, XVII.

(3) Archives communales, Comptes des léproseries, 2, f° 124' v".

(4) Ibid., pièces comptables, liasse de 1610. (3) Ibid., Comptes, 2, f° 123.

(6) Ibid.

(7) F. 1,5.

(8) Archives communales, pièces comptables (1554).

(9) F. 2, 79.

(10) Archives communales, Comptes des léproseries, 8, f° 280.


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fenêtres (1) vitrées (2) et grillées (3). On y pénètre par une ou même deux portes(4). Le rez-de-chaussée est occupé par la chambra du malade, celle de la servante (5) et la cuisine. La cuisine est pavée (6). Le reste est couvert d'un plancher de bois léger (7). Quelquefois même, sans doute pour des raisons d'hygiène, le plancher est placé non à même sur le sol, mais sur une couche de braise (8). La borde renferme une cheminée (9), quelquefois un four (10). Des armoires fixes (11), des arches (12), un garde-manger (13) sont ménagés dans la muraille.

Dans la chambre, un mobilier naturellement très simple. Après le siège de 1359, les meubles ayant sans doute été sacrifiés, en parlie au moins, pendant la démolition et le régime commun cessant, les gouverneurs fournissent à chaque nouvel arrivant non seulement la vaisselle, mais les ustensiles de cuisine et le mobilier qui lui sont nécessaires. Poperel, en 1369 (14), Ysabin Renier en 1388 (15) reçoivent ainsi un ménage complet. Ce mobilier, à la mort du malade, reste à la lépro(l)Fa.

lépro(l)Fa.

(2) F 2. 122.

(3) Archives communales, Comptes, 12, f° 94.

(4) Ibid., pièces comptables (1606).

(5) F». 208.

(6) Archives communales, comptes, 8, fu 9 v°.

(7) Ibid., Conclusions du Buffet, 7, f 133.

(8) Ibid., Comptes, 9, f° 104 v".

(9) Ibid., 12. f° 94.

(10) J6î"<i, 5, fM41.

(11) Ibid., 12, f 94.

(12) Archives communales, Comptes des léproseries, 12, f° 92.

(13) F*. 173.

(14) E. 15, 15, f° 15 v°.

(15) Pièces justificatives, VII.


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série. Les chambres sont alors toutes garnies. Il n'y a plus qu'à subvenir à l'entretien (1). Au xve siècle, il n'est plus question dans les comptes de fournitures faites à l'entrée des malades : les gouverneurs mettent à leur disposition une chambre garnie d'un mobilier qu'il leur est loisible de compléter en apportant des meubles et du linge. Cette organisation permet de se rendre compte de la manière dont était meublée une borde ou une chambre à la fin du xive siècle et au début du xve, et il est peu probable que l'aspect intérieur des chambres se soit beaucoup transformé par la suite.

Des armoires, une table, un lit, un escabeau (2), voilà le principal du mobilier. Le lit (3) est un châlit de bois couvert d'un matelas, de draps, d'un oreiller, d'une couverture de serge (4). Deux fois par an, le censier fournit de la paille pour renouveler le matelas (5). Dans les armoires est rangé le linge; la batterie de cuisine : pots de cuivre, d'étain, de lerre, chaudrons, mortier, salière(6); le couvert du ladre : couteau, cuiller de bois(7), écuelle d'étain ou de bois (8), les ciseaux. Sur la table, un candélabre de fer (9) ; dans la cheminée, les chenets et la crémaillère; auprès, le soufflet. Dans un coin, le panier, les balais (10), le van (11), les seaux, qui servent

(1) E. 16, 7, f°9 v°.

(2) Archives communales, pièces comptables, liasse 1600.

(3) Pièces justificatives, VII.

(4) E. 16, 16, f° 4.

(5) F=. 86.

(6) E. 15, 16, f" 14.

(7) E. 15, 15, f° 15 v".

(8) E. 16, 3, f° 9.

(9) E. 15, 15, f°15 v°.

(10) E. 15, 8, f°4.

(11) Archives communales, pièces comptables (1606).


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de sièges quand le ladre reçoit la visite de ses voisins (1). Enfin un certain nombre de cuveaux servent à faire la lessive, et des baignoires (2) sont à la disposition des malades.

La borde comprend quelquefois un étage : il est occupé par un grenier fermé par une trappe (3), où le lépreux met son bois en réserve. La maisonnette est couverte de tuiles, parfois simplement de branchages et de feuilles (4). Enfin le ladre a une cave (5) et une petite étable (6).

Saint-Ladre aux femmes n'est pas mieux connu que Saint-Ladre aux hommes. Il ne reste rien du « manoir » situé à 1.500 mètres environ au sud de la léproserie des hommes, en face des moulins de Fléchambault, sur l'emplacement actuel d'une partie du faubourg SainteAnne. Cette partie de la ville dépendait de la juridiction du Chapitre. Des démêlés devaient donc s'élever entre les chanoines et les gouverneurs de l'hôpital. C'est ainsi que doivent du moins s'expliquer les procès que nous constatons en 1376(7) et de 1469 à 1471 (8) et sur lesquels la disparition des registres capitulaires nous prive de plus amples renseignements.

Saint-Ladre aux femmes était également voisin de Saint-Remi. L'abbaye possédait là un étang qui communiquait avec les fossés pénétrant dans les jardins de

(1) E. 15, 15, t" 27.

(2) Archives communales, Comptes des léproseries, 11, (° 199v°.

(3) F 3. 33.

(4) Archives communales, Comptes, 8, f° 227.

(5) lbid., 3, 1» 22.

(6) lbid., 5, f° 36.

(7) E. 15, 25, f° 13 v".

(8) Archives communales, Comptes des léproseries, 3, f°s 10 et 45.


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la léproserie : les poissons pouvaient ainsi quitter l'étang de Saint-Remi pour entrer dans les fossés de SaintLadre. De là, dès 1230, un débat que termina un accord (1 ) : une sorte de barrage serait placée à l'entrée du fossé, laissant passer l'eau, non les poissons ; les frères de Saint-Ladre étaient autorisés à le faire nettoyer, quand besoin serait, après avoir prévenu les religieux ; l'abbaye devait pourvoir au remplacement du barrage. Les frères de Saint-Ladre pourraient avoir deux bateaux, l'un sur l'étang, l'autre dans leurs fossés pour ramener l'herbe qu'ils avaient droit de faucher.

L'hôpital consistait en un long bâtiment situé en bordure sur le chemin. Ce devait n'être, d'après le plan de Reims par Cellier, qu'un rez-de-chaussée surmonté d'un grenier (2). Au xvn" siècle, les chambres ouvraient sur la rue (3). L'enclos comprenait en outre, du moins à la fin du xvie siècle, un certain nombre de maisons isolées (4). Devant l'hôpital, sur la chaussée, était plantée une grande croix de bois (5). La maladrerie possédait un puits et un four(6). Il y avait une grande cour pavée, bordée d'une rigole de grès pour l'écoulement des eaux (7). Une loge permettait aux lépreuses de se mettre à l'abri (8).

(1) Pièces justificat., III.

(2) Archives communales, Compl. des léproser., 8, f° 248 v.

(3) F 2. 7.

(4) Archives communales, Compt. des léproser., 21 (1592-1593), f° 312 : « Aud. Barbeiet... pour les ouvrages de massonnerie par lui faittes es six maisons des lespreuses estants proches de lad. chappelle. >>

(5) lbid.. Comptes, 5, f" 140 v°.

(6) VK 7.

(7) Archives communales, Comptes, 10, f" 9.

(8) lbid., 6, f" 176.


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Comme Saint-Ladre aux hommes, la léproserie des femmes est abondamment fournie d'eau. Un conduit, en partie souterrain (1), amène l'eau de la Vesle à une fontaine où « elles prengnent les eaues et lavent les buéz ». L'eau de là s'écoule dans les fossés, et les gouverneurs veillent à l'entretien de ces fossés pour que l'eau sale ne vienne pas refluer vers la fontaine (2). Une autre canalisation passe sous les chambres aisiées où existent des travaux de maçonnerie (3).

Au Sud de la maladrerie, dans la direction de Cormontreuil(4), s'étendent les jardins le long de la Vesle. Là aussi est le petit bois de Gloriette. Les jardins sont entourés partie de haies (5), partie de murs, et l'on y pénètre par plusieurs portes (6). Dans les jardins se trouve le vivier dont la pêche, généralement vendue (7), est quelquefois distribuée aux malades (8).

Près du cimetière des femmes (9) est la chapelle. Fondée en 1231, la chapelle fut réparée vers 1382 (10). Au xvie siècle elle était placée sous l'invocation de sainte Anne : mais ce titre ne doit dater que du xve siècle, car ce n'est qu'à cette époque que les missels rémois indi(1)

indi(1) 15, 2, f° 5 v°.

(2) Archives communales, Conclusions du Buffet, 5, f" 93.

(3) E. 15, 2, f" 5 v°.

(4) B. 19, 2, n° 12.

(5) VARIN, Archives administratives de Reims, II, Ie part., 746.

(6) Archives communales, Comptes des léproseries, 9, i'° 101 v°.

(7) lbid., 1, 1" 35 v°.

(8) E. 16, 6, f° 4.

(9) B. 49, 4, n° 35, f° 12.

(10) E. 16. 1, f° 17 (1381-1382) : « Au curé de S. Sixte qui chaque semaine dit une messe a S. Ladre aux femmes pour l'ame de la bienfaitrice qui fit reparer la chapele... »


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quent la fête de cette sainte au calendrier (1). La chapelle fut démolie en mai 1758 (2).

Elle était d'ailleurs de peu d'importance. Les plans du xvne siècle (3) la représentent comme une construction peu élevée placée à l'Est du « manoir ». Dans le « pourtraict de la ville » par E. Moreau (1622) et la « description de Reims » par C. Chastillon, le bâtiment qu'on peut supposer être cette église a une façade ornée d'un petit clocher. Les comptes de 1522-1523 signalent pour les combles de l'église la fourniture de 2 sablières de 40 pieds de long (4). Le toit est couvert de tuiles (5). La façade est percée d'un petit oculus. Le fond de la chapelle est voûté en cul de four (6). La nef devait être éclairée par trois fenêtres de chaque côté (7), garnies de vitraux de couleur (8).

L'autel était orné d'un retable de bois, peint d'une crucifixion. La chapelle possédait une statue de NotreDame (9). En 1620, les gouverneurs achetèrent pour Sainte-Anne « un tableau en détrempe ou est représenté un crucifix, une nativité et une annonciation » (10).

(1) Biblioth. de Reims, mss. 227, 228, etc.

(2) Journal anonyme du xvme siècle, publié à la suite du Journal de Dom Pierre Chastelain, par H. JADART, p. 221. — BIDET, Mémoires, II, ch. III, p. 20; dans VARI^, Archives administratives, I, lre part., p. 13 (note).

(3) Bibl. Nation., Département des estampes. Va. 105 : plan de Cellier et de Colin. Voy. aussi Toonecl der vermanrste Koopsteden, 2e part., vue de Reims. Voy. aussi le dessin de POVILLOIN-PIEHRAIID, Description étymologique et lopographique de Rlieims, IV (1822), f° 134 (ms. 1877 [n° provisoire] de la Bibliothèque de Reims).

(4) Archives communales, Compt. des léproser., 7, f° 122 v".

(5) lbid., pièces comptables (1592).

(6) lbid., fi, f° 176 v".

(7) lbid., Comptes des léproseries, 2, f" 177.

(8) lbid., pièces comptables (1610).

(9) lbid., Comptes, 2, f" 164.

(10) lbid., pièces comptables, liasse de 1610.


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CHAPITRE V.

La léproserie aux XVe et XVP siècles : les gouverneurs, l'administration.

L'administration de la léproserie est confiée à deux échevins. Les administrateurs ne sont donc pas, comme dans telle ou telle maladrerie, comme à Reims même au xme siècle, des administrateurs permanents. Chaque année, le premier jour de carême, des élections, tenues dans une salle de la commanderie du Temple, renouvellent l'Echevinage (1), et aussitôt les douze nouveaux élus se répartissent les différents services (2); deux d'entre eux sont commis à la police, deux à la voierie, etc. ; deux enfin à l'administration des hôpitaux Saint-Ladre. Un banquet termine l'élection, qui a son contre-coup dans un droit de bienvenue distribué aux lépreux (3).

Les nouveaux administrateurs reçoivent une << institution » de leur office sous le scel de l'Echevinage (4). Par ces lettres de procuration, leurs collègues confient aux deux « procureurs, proviseurs, maistres, gouverneurs et administrateurs » le gouvernement de la maladrerie, le maniement des deniers, l'administration du domaine, la conservation des privilèges de l'hôpital, la défense des droits des malades (5). Ces lettres autorisent

(1) Aa. 3, dossier 11, n° 35.

(2) A 2. 4, n° 13.

(3) Les maîtres du xiv siècle, offraient de même aux ladres une légère « courtisie » (E. lo. 24. f° 2, 1313).

(4) E. 16, 7, f° 12 v°.

(5) Pièces justificatives, IX.


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donc les maîtres à faire tout ce que les échevins « feraient ou faire pourraient » : et il semblerait en effet, à voir les comptes, qu'ils jouissent d'une indépendance toute personnelle. En réalité, en parcourant les registres des conclusions du Buffet, on s'aperçoit de l'étroit contrôle qu'exerce l'Echevinage sur ses deux délégués : presque toutes les démarches des gouverneurs sont soumises à une décision préalable, à une « conclusion » du Buffet, et seule l'administration courante est aux mains des gouverneurs. Il faut une conclusion pour qu'ils puissent faire réparer les reliquaires de l'église (1), ils ne peuvent recevoir un malade que par « lissence expresse » des échevins (2) ; au xvic siècle ils ne peuvent sans commandement solder une somme supérieure à 100 s. t. (3). Ainsi s'explique la mention qui se retrouve en tête des comptes du xv° siècle : « Et pour lad. année esloient eschevins : Jehan Noël l'aisné,etc. (4) » : c'est rappeler que la responsabilité du corps entier est engagée dans la gestion des deux léproseries (5).

Les échevins de Reims étant essentiellement juges ordinaires pour tous les habitants duban de l'archevêque, ces rapports étroits des gouverneurs et du Buffet pouvaient éveiller les inquiétudes de ceux qui avaient à sou(1)

sou(1) du Buffet, 4, f" 145 (1534).

(2) A 2. 3, n° 49, f° 12 v°.

(3),Archives communales, conclusions du Buffet, 7, f" 156 v" (1574).

(4) lbid., comptes des léproseries, 2, f" 137.

(5) Dans les cas particulièrement grave?, les échevins consultaient même un conseiller-pensionnaire, juriste spécialement attaché au Buffet (Compte des léproseries 3, fn 10 \") et dont la pension était payée soit en entier, soit pour partie (Conclusions, 2, f° 5 v") sur les fonds de l'hôpital.


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tenir un procès contre l'hôpital (1). Au début du xve siècle un plaideur, nommé Etienne Jacquemin, posa en effet la question: il récusait la juridiction de l'Echevinage, les échevins étant, disait-il, à la fois juges et parties ; d'autant, disait-il encore, qu'ils ne sont responsables devant personne. Le procureur de l'Echevinage ne put répliquer que par des distinctions entre l'administration et la juridiction, entre les gouverneurs de Saint-Ladre et le corps échevinal : d'ailleurs, ajoutait-il, le Buffet qui juge les affaires des échevins eux-mêmes peut bien juger celles des lépreux.

C'est en effet une théorie souvent rappelée que gouverneurs et échevins ne sont que les représentants des lépreux. C'est aux lépreux qu'appartiennent les biens de Saint-Ladre ; ils donnent fréquemment procuration aux échevins (2). Si les administrateurs ne semblent pas toujours s'être souvenu de ces principes, les ladres les leur ont plus d'une fois rappelés dans leurs revendications.

Dans ce même procès de 1414, on voit curieusement discutée la question de la co-responsabilité des deux (3) gouverneurs. Jaquemin refuse de plaider, un seul des gouverneurs étant présent : l'un ne peut représenter

(1) Liasse 34. Registre isolé, f 05 13 v", — 16 v° (1414).

(2) Archives communales, 2, f" 59 v° : « Pour despens faits... quand ils firent passer la procuration des malades"et convers ». De même, ibid., 7, f° 16 v".

(3) Par exception il s'en trouve 3 en 1477 : l'unjdes gouverneurs, Jacques Cauchon, fut en effet « contraint d'aler à l'armée du roy la ou il a demeuré long temps ». On lui donna Nicolas Grossaine comme suppléant et l'on décida qu'ils gouverneraient à trois, sans d'ailleurs plus déterminer leurs pouvoirs réciproques (Conclusions du Buffet, 2, f° 55 : 16 août 1477).


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l'autre. Sans doute, quand un mineur a deux tuteurs ou ou deux curateurs, l'un peut agir pour tous les deux : mais outre qu'ils sont permanents, et non renouvelables chaque année, ils sont responsables chacun pour le tout : ce qui n'est pas le cas ici. Si un seul des maîtres pouvait « démener» le procès, au moment où il sentirait la cause mauvaise, il se ferait « bouter hors dud. gouvernement » : contre qui le défendeur aurait-il recours ? Chacun des deux gouverneurs, considéré isolément, reste révocable et sans autorité. Il ne peut engager ses biens de la maladrerie que pour le temps de son gouvernement.

C'est peut-être à la suite de cette affaire que les échevins introduisirent dans leurs lettres de procuration une clause par laquelle ils donnaient pouvoir aux gouverneurs et à chacun d'eux pour le tout, et une autre où ils les autorisaient à bailler à ferme ou à louage les maisons et terres de la maladrerie « a tant d'années et termes comme bon leur semblera (1) ».

En tous cas. il ne semble pas que les pouvoirs particuliers de chacun des maîtres aient jamais été nettement délimités. Au xiv 6 siècle même, il arrive qu'ils rendent chacun un compte particulier (2). sans que l'on voie bien en quoi consiste ce partage des attributions. Au xvi" siècle l'un d'eux seul, le « receveur », lient les comptes et l'autre, d'après une conclusion du 7 février 1542 (n. st.) signe les « mandemens et ordonnances des ouvraiges et autres choses. . . lesquelles mises ne seront allouées au comptable sans led. mandement (3) ».

Les lettres de procuration accordaient aux deux gou(1)

gou(1) Pièces justificatives, IX.

(2)E. 15, 6.

(3) Conclusions du Buffet, 5, f" 36.


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verneurs une pension de 12 1. p. « pour eulx deux ». Cette pension, dont ils laissèrent plusieurs fois une partie pour les pauvres malades (1), ne varia qu'accidentellement pendant tout le. xiv 8 siècle (2). En 1518 elle était de 6 1. pour chaque gouverneur, quand une conclusion du 12 février (3) décida que désormais « celui qui ferait la recepte et mise » toucherait 8 1. et l'autre seulement 4. Au début du xviie siècle, les pensions étaient de 15 1. et de 12 1. 10 s. Elles furent supprimées par un règlement du 3 février 1618 (4).

Etudier les fonctions des gouverneurs, c'est tracer un tableau de l'administration générale de la maladrerie. Depuis les relations de Saint-Ladre avec le pouvoir central jusqu'au soin de faire mesurer le blé des réserves (5), tout leur incombe. C'est la discipline intérieure, l'entretien des archives(6), la surveillance des services: rappeler à l'ordre le cbapelain de Sainte-Anne qui néglige son office (7), rabattre au curé « pour chacune messe faillie H. s. vin. d. » pour en faire « dire messe (8) », envoyer un valet percevoir les cens en retard (9). Mais leur grande préoccupation est — avecle maintien despri(1)

despri(1) par ex. Archives communales, Comptes des léproseries, 2, f° 41 v".

(2) lbid., 2, f" 125 v".

(3) Conclusions du Buffet, 3, f" 150.

(4) Archives nationales, V 7. 130, liasse de 1618, n" 360.

(5) E. 16, 14, f° 12 v" : « Pour avoir fait mesurer le bief et aveinne qui l'an passé estoit en grenier de l'Echevinage appartenant aud. hospital par Nicolas Le Nyeullier... affinde savoir au vray ce qu'il y avoit » 12 d. p.

(6) Voy. ci-dessus, introduction.

(7) Archives communales, Conclusions du Buffet, 2, f° 31 (1475).

(8) lbid., id. 2, f° 199 v° (1495).

(9) E. 16, 1, f° 12.


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privilèges — l'administration de la fortune mobilière et immobilière, qu'il s'agit avant tout de bien régir et de sauvegarder au milieu de nombreux procès (1).

Il est un de ces privilèges dont les administrateurs du xve et du xvie siècle se montrèrent particulièrement jaloux. En 1453, les gouverneurs faisaient poursuivre le prévôt de Reims « pour ung homme qu'ung de ses sergens avoit arresté dedens la court S. Eloy qui est terre sainte (2) ». Ce droit d'asile peut se rattacher aux droits de seigneurie de l'hôpital. Les administrateurs ont le droit de punir les lépreux, avec, au xv" siècle, appel aux tribunaux royaux (3). Ils réclament non seulement ce droit de correction, mais tous les cas civils et criminels (4). A côté de cette juridiction sur les lépreux mêmes, ils développent leur autorité sur tous ceux qui peuvent se rattacher à l'hôpital : servantes, convers, censiers. Peu à peu les maisons deviendront plus nombreuses autour de la maladrerie, un quartier nouveau, le faubourg Saint-Eloi se créera, et les gouverneurs garderont la juridiction de ce quartier. Ils y organisent une justice seigneuriale, dépendant de la maladrerie, et dont ils sont les représentants. Au milieu du xv" siècle ils poursuivent un nommé Godeffrin, serviteur de Jean Chauvillet, pour « certaine offençe par lui faite et com(1)

com(1) ne rangerons pas parmi les fonctions principales des gouverneurs de Saint-Ladre celle que leur donne une conclusion du 16'février 1527 (n. st.) : « Et si a esté conclud que l'un des gouverneurs de S. Ladre, ung des chaussées, le procureur et greffier visiteront le « Barbeau » ot Y « Escut de France » et ou ils trouveront le meilleur vin ilz y facent abiller le disner pour le jour de Karesme » (Conclus. 4, f° 56).

(2) Archives communales, Comptes des léproseries, 2, f". 154.

(3) A 2. 3, 49. f° 12 v".

(4) A 2, 4, n" 13, f" 17.


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mise au jardin, pourpris et seigneurie » de Sainl-Ladre(l). En 1518, un officier du capitaine seigneur de Muire ayant saisi des chevaux sur une terre dépendant de l'hôpital, le procureur de l'Echevinage demande au capitaine de mettre cette saisie à néant (2). En 1513 (3), il fait reconnaître au pannetier de Reims (4) qu'il n'a nul droit sur les boulangers établis dans les maisons tenant à Saint-Ladre et qu'il ne peut « y prendre aulcuns pains, eschaudéz ou autre pâtisserie qui se y venderont ou sur les fenestres d'icelles pour le droict prétendu par led. » pannetier. En 1550, nous voyons les échevins préoccupés de rassembler les titres qui peuvent établir leur justice haute, basse et moyenne sur les locataires des maisons dépendant de la léproserie (5). En 1585, ils instituent même un maire pour exercer celte justice (6), comme déjà en 1528, ils en avaient « ordonné » un pour le domaine rural de Beaufuy (7). Celui de Reims prend le titre de « majeur en la justice de S. Esloy et de S. Anne (8) ». Cet officier tranche les questions concernant lépreux et à la fois exerce la juridiction seigneuriale. Deux couvreurs en 1592 sont poursuivis devant la « justice des hospitaux » pour vol de tuiles et l'amende

(1) E. 16, 14, f» 6 (1467-1468).

(2) Archives communales, Conclusions du Buffet, 3, f° 160 v° (14 mai 1518).

(3) lbid., liasse 34, juridiction, 22 (3 mai 1513).

(4) MARLOT, Histoire de Reims, III, 685.

(5) Archives communales, Conclusions du Buffet, 5, f°241 v°.

(6) lbid., 9, f° 72 (20 juillet 1585). il) lbid., 4, f° 59 v°.

(8) F. 2, 137 : ces fonctions, confiées d'abord à Guillaume Augier, procureur au Présidial de Reims, furent ensuite remplies par Renaud Jacopin, à partir de Noël 1620. (Comptes des léproseries, 27, f 407).


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qui leur est infligée, appliquée à Saint-Eloi et à SainteAnne (1). Une sentence du 23 mai 1597 bannit Méline Corneille des terres de Saint-Eloi (2). Les échevins réclamèrent même la juridiction criminelle. Dès 1534, Jean de Mouchy soupçonné d'avoir participé à l'assassinat d'un prêtre et arrêté dans une maison du faubourg, est jugé et acquitté (3) par le « juge des lépreux (4) ».

En même temps l'hôpital, exerce d'autres droits seigneuriaux (5). Dos institutions de tuteurs se font devant le maire (6). De même la léproserie a un droit de succession sur les biens « vaccans par décès ». C'est ainsi qu'ellerecueillc,enl606, les immeubles de Jaques Friqué, lépreux, trouvé pendu (7) ; en 1459, les meubles de Jean Doynet, curé de Saint-Ladre (8).

La gestion financière de Saint-Ladre est assurée au xve siècle par une comptabilité des plus sérieuses. Au fur et à mesure de leurs opérations, les gouverneurs les notent sur un cahier (9) ; les baux sont

(1) Archives communales, pièces comptables, 1592.

(2) lbid., liasse 34, renseignements (non coté).

(3) lbid., Conclus, du Buffet, 4, f° 143.

(4) Voyez ci-dessous pp. 205-207.

(5) 11 avait naturellement à supporter des charges correspondantes : « A Claude Cartier, maître cirurgien demourant à Reims a esté payé... la somme de quatre 1. t. pour son sallaire d'avoir pansé et medicamenté par sept ou huict jours led. Nie. Chariot, prisonnier es prison de S. Eloy... pour raison de plusieurs larcins et autres cas... d'une playe qu'il avoit a la main... » (Archives communales, Comptes, 22 [1600-1601], f° 629).

(6) Archives communales, pièces comptables, 1598.

(7) lbid., 1600.

(8) M. DEMAISON a publié l'inventaire de ce mobilier dans les Travaux de l'Académie de Reims, 75, p. 312.

(9) Comptes des léproseries, 3, f° 123 v° (1476-1477) : « Pour papier pour escripre au long de l'an et minuer ce présent compte... »


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transcrits dans un registre spécial, au moins aux xvie et xvu" siècles (1). Les fonds sont déposés dans la loge aux échevins et placés dans un coffre, dont les clefs sont remises au prévôt, au procureur de l'Echevinage et aux gouverneurs des hôpitaux et des chaussées (2).

Les comptes sont rendus chaque année par les gouverneurs devant au moins deux de leurs collègues de l'Echevinage (3). Ces comptes, qui, au xvie siècle, vont du 1" juin au 30 avril, commencent, au xve siècle en carême, à l'époque du renouvellement de l'Echevinage. Calculés jusqu'au xvie siècle en monnaie parisis, ils sont établis en tournois à partir du 16 février 1507 (n. st.) (4). Chaque compte comprend 3 parties : 1° la « recepte », où sont inscrits : d'abord le reliquat du compte précédent, puis l'énumération des divers revenus en argent et en nature, les loyers, rentes, cens, oblations, enfin les recettes extraordinaires ; 2° les mises : pensions des chapelains et des malades, travaux et réparations, procès et mises extraordinaires, dépenses communes ; 3° les « réquirendes » : elles avaient compris longtemps toute une série de dettes anciennes qui revenaient chaque année impayées : après 1471 (5), ces dettes ne sont plus inscrites aux comptes. Le total est fait article par article, les totaux réunis en une somme générale ; le compte se termine par une balance, les réquirendes étant inscrites au chapitre des dépenses.

La vérification de chaque article est faite très soigneusement : chaque dépense doit être justifiée, et des notes

(1) Comptes des lépros., 28, f° 240 v». — lbid., 20, f° 409.

(2) Archives communales, Conclusions du Buffet, 6, f° 76.

(3) E. 16,2.

(4) Archives communales, Conclusions du Buffet, 3, f° 45,

(5) lbid., Comptes des léproseries, 3, f° 61 v°.


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marginales, inscrites sur ces comptes au moment de la reddition, renvoient ainsi aux comptes précédents (1), à l'acte d'obligation du débiteur (2), aux quittances données aux gouverneurs et qu'ils sont tenus de représenter (3). Au xvi" siècle, la vérification terminée, le greffier en remettait un double au comptable pour lui servir de décharge (4). L'opération finissait naturellement par un banquet: cet usage fut supprimé en 1510 (5).

Sans s'arrêter à la perception des revenus et à la poursuite des detles, faite soit par les gouverneurs, soit par un officier de l'Echevinage (6), on peut, semble-t-il, insister sur quelques-uns des chapitres de dépenses qui figurent aux comptes.

En tête des mises se trouvent régulièrement les cens dûs et payés par Saint-Ladre. Ils sont d'ailleurs de peu de valeur. Au x'v° siècle ils ne s'élèvent qu'à une somme de 39 s. 2 d. p. (7) payés en différentes redevances au seigneur de Muire, au maire du chapitre d'Entre-DeuxPonts pour le bois Hubault, au maire du chapitre d'Ausson pour les maisons de Saint-Ladre aux femmes, au « reffroiturier de l'église » de Reims, au maire d'Ormes, au pitancier de Saint-Nicaise. Il est intéressant de noter au xvi" siècle un cens de 2 s. 6 d. au gouverneur de la maison de Clairmarais pour une échoppe de cordonnier (8) et une rente de 7 s. 6 d. t. au receveur de la

(1) Archives communales, Comptes des léproseries, 6, f°53.

(2) lbid., Comptes des léproseries, f° 54 v°.

(3) lbid., Comptes des léproseries, f° 67.

(4) lbid., Conclusions du Buffet, 5, f» 109.

(5) lbid., Conclusions du Buffet, 3, f° 71 v° (5 février 1510 n. st.).

(6) lbid., Conclusions du Buffet, 4, f° 211 v°.

(7) lbid., Comptes des léproseries, 3, f° 6 v° (1469-1470). (8)Fa56.


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commanderie du Temple pour la maison de la rue du Croc-en-Fer (1). Ces cens peuvent être mis à la charge du censier de Saint-Ladre (2).

Les privilèges pontificaux accordaient l'exemption de dîmes aux maisons-Dieu et maladreries (3). De son côté le pouvoir civil leur avait fait fréquemment des faveurs analogues(4). Mais ces faveurs se rattachent au caractère religieux des maisons-Dieu (5), et ainsi sans doute s'explique que le domaine de Saint-Ladre n'ait profité qu'incomplètement de cette exemption d'ailleurs temporaire. Nous le voyons en effet au xive siècle soumis a des droits commerciaux (6) ; le censier des Loges doit

(1) F' 55.

(2) Comptes des léproseries, 3, f° 38 v° (1478).

(3) Voy. ci-dessus, p. 7.

(4) En 1315, Louis X dispense de tailles et contribution la maison-Dieu Saint-Gervais (L. LE GRAND, les Maisons-Dieu du diocèse de Paris, 161.) Jean II exempte de même les Quinze-Vingts en 1361 (L. LE GRAND, Les Quinze-Vingts, dans Mémoires de la Société d'hist. de Paris, XIII, 143.) Un mandement de Philippe VI à la chambre des comptes (21 octobre 1344) généralisant cette faveur fait défense de lever « nulle finance » sur les hôpitaux. (FONTANON, Les Edicts et ordonnances des rois de France (16H), II, 431.) Des lettres particulières du même roi exemptent d'amortissement les nouveaux acquêts des chartreries de Reims, en rappelant que cette exemption a été accordée à tous les hôpitaux de France (VARIN, Archives administratives, II" part., 747).

(5) C'est au moins ce que déclarent, dans un curieux procès de 1339, les habitants de Mitry (Seine-et-Marne) réclamant contre l'évêque de Meaux la libre disposition de la léproserie : la maison, disent-ils, est purement laïque, car ses biens, non amortis, sont soumis aux cens et redevances ordinaires. (Archives nationales, X,a, 8, f° 70; 31 juillet 1339).

(6) Archives communales, Comptes des léproseries, 1, f° 43 (1353): « Pour l'imposicion de la vendue des lainnes... » — E. 15,12, f° 5 (1363) : « Paietau vicomte de setrelaige pour l'année de l'an LX...» 36 s. 3. d.


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payer des rançons (1) et la maison de Muizon acquitte les droits prélevés pour la chevalerie du futur Jean II (2). Mais surtout la léproserie doit recevoir la visite des commissaires des francs-fiefs et nouveaux acquêts. La première visite est de 1344 (3). Les maîtres établirent sans doute pour la masse de leurs biens une possession de plus d'un siècle ; ils furent d'abord renvoyés « sans finance » (4). Mais le 19 mars 1490 (n. st.) les échevins acquittent un droit de 20 s. p. pour l'amortissement des biens légués à l'hôpital par Waladé, lépreux (5). En 1550 ils paient pour les propriétés du baillage de Vitry une somme de 61 l. 10 s. t., y compris les épices des commisaires (6). Plusieurs fois même cette perception entraîne des difficultés. En 1572, le gouverneur ayant tardé à fournir la déclaration du temporel, saisie est faite des biens de Saint-Ladre (7). En 1577, le gouverneur Nicolas Godinot reçoit commandement de payer 105 1.1. au receveur des nouveaux acquêts (8): il remontre que l'hôpital n'a acquis depuis 1521 qu'une pièce de terre à Trigny, qui peut rapporter 6 1. t. par an, et que la taxe imposée est exagérée (9). Le 28 juin, il obtient, contre paiement d'un droit de 6 1. t., mainlevée de la saisie qui avait suivi la sommation (10). Il y a plus : la léproserie municipale, n'est même pas

(1) Archives communales. Comptes des lépros., 1, f° 87

(2) VARIN, Archives administratives, II, 2e partie, 747.

(3) Signalé dans A 3. 8 (1521).

(4) A*. 3 (1471).

(5) A 5. 1, dossier 6, n" 1.

(6) A 3. 1, dossier 11, n° 3.

(7) A5 1, dossier 11, n" 2.

(8) Conclusions du Buffet, 8, f" 110 (24 avril 1577).

(9) A 5. 1, dossier 12, n" 3.

(10) A*. 1, dossier 12, n" 1.


.— 97 —

exempte de toutes les impositions municipales. Les propriétés sont « subjetz au sacre » (1), c'est-à-dire soumises à la contribution levée à Reims à l'occasion du«sainct sacre et couronnement desroysde France» (2). Ainsi les gouverneurs paient 19 1. 19 s. 6 d. pour le sacre de Henri II (3).

Au xve siècle, l'exemption des dîmes ne profite pas beaucoup plus à Saint-Ladre. A Reims, la situation particulière de l'hôpital faisait qu'il n'avait pas de dîme à payer. Pour le domaine rural, les maîtres purent sans doute, au début, faire valoir leur privilège : c'est ainsi qu'en 1181 l'archevêque Guillaume remet à Saint-Ladre les 4 setiers de froment et le setier de fèves que l'hôpital payait chaque année au curé de Saint-Martin de Voncq pour la dîme de Beaufuy. Mais un curieux accord du xiv° siècle nous montre quelle dût être par la suite la condition de l'hôpital à ce point de vue (4). Le curé de Bouy (5) prétend percevoir la dîme sur le domaine des Loges. Les échevins répondent qu'en effet les domaines affermés doivent la dîme ; mais lorsqu'ils sont occupés par les frères de Saint-Ladre, qui y travaillent propriis manibus seu sumptibiis, ils se trouvent dans les termes des exemptions pontificales. Ils semblent d'ailleurs n'avoir pas été très sûrs de leur théorie, car, par l'accord intervenu devant l'official, de l'assentiment de l'abbaye Saint-Denis de Reims, curé primitif de Bouy, ils consen(1)

consen(1) communales, Conclusions du Buffet, 2, f° 125 (1483).

(2) B. 40. 2, n° 3.

(3) Archives communales, Comptes des léproseries, 12, f° 18 v°.

(4) Inventaire de 1478, f° 69 v°. Cependant la dîme continuera à être payée sa vie durant à Messire Philippe de Saint-Symphorien, curé actuel.

(5) B. 40. 1, n» 16 (sans date).


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tenta payer une dîme de 9 setiers de grains. En tous cas cette théorie très intéressante explique bien comment le caractère de l'exploitation domaniale ayant changé, les échevins durent renoncer à maintenir les privilèges de la maison.

L'Echevinage intervenant sans cesse dans les affaires de la léproserie, il devait fatalement arriver que, à Reims, comme ailleurs (1), les finances de la maladrerie seraient à un certain moment plus ou moins confondues avec les finances des autres services qu'il administrait. Parfois ce sont des « prêts » que les gouverneurs font au corps échevinal, prêts relativement importants : 181 1. 12 s. p. en 1420(2); 22 1. 13 s. p. en 1430(3), 75 1. t. en 1516 (4). Ces sommes sont ensuite portées aux réquirendes, c'est-à-dire qu'elles ne sont pas restituées. Parfois les échevins, sans recourir à ce moyen, font simplement une sorte de virement aux dépens de la maladrerie. Ces avances sont d'ailleurs de peu de valeur: 8 s. p. pour « copper le may a Saint Ladre et l'admeneret pour xxvm. faissiaux d'erbe pour parer entour la loge aux eschevins le jour de la feste Dieu » (5) ; 24 s. p. pour une part ^es frais du banquet.

(1) Cf. L. LE GRAND, les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris, 154.

(2) Archives communales, comptes, 2, T° 41 v° (monnaie nouvelle).

(3) lbid., Comptes des léproseries, 2, f° 84.

(4) 76i'rf., Conclusions du Buffet, 3, f° 134 v° « Messieurs ont ordonné a M" M. Chuffet, eschevins et gouverneur de S. Ladre de bailler en prest au receveur des deniers communs de la ville... la somme de soixante quinze I. t. pour fournir au paiement des xvc 1. t. qui restent a paier des inMl. t. accordés en don par les habitans dud. Reims au roy notre sire. . . » (14 juillet 1516).

(5) E. 16, 6, f" 6 v° (1407).


, — 99 —

le jour du renouvellement de l'Echevinage (1). Quelquefois cependant elles sont plus sérieuses : c'est sur les deniers de Saint-Ladre que sont payés, en 1556, M6 Philippe Frémyn, licencié en lois, échevin, et Pierre Tropmignot, procureur de l'Echevinage, pour avoir assisté à la rédaction des Coutumes (2); en 1595, Adam de Lorraine, maître cuisinier, pour avoir « durant, Fan de ce compte visité le poisson qui se vend aud. Reims pour savoir s'il estoit sain et digne d'entrer au corps humain » (3). Un certain nombre de ces avances sont faites soit pour le loyer (4), soit pour l'entretien (5), soit pour la décoration de la maison de l'Echevinage (6). Il faut remarquer en revanche les avantages que procurait à l'hôpital une telle situation, les années où le budget était en déficit.

La comptabilité de la maladrerie, qui nous a permis d'examiner ainsi quelques points de la gestion financière, nous permet encore de nous renseigner sur l'administration du domaine. On a vu comment du système d|exploitation directe les administrateurs ont passé durant le xiv° siècle au système de l'affermage, d'abord pour le domaine attenant à l'hôpital, puis pour le domaine rural. Au xve siècle les gouverneurs ont pouvoir de louer ou accenser les maisons et autres héritages « a tant d'années et termes comme bon semblera ausd. gouver(1)E.

gouver(1)E. 1, f° 12 v°(1382).

(2) Archives communales, Comptes des léproseries, 13, f° 545 v°.

(3) lbid., 21,f°693 v°. (i)lbid., 5, f- 164 v". (5)E. 16, 16, f° 12.

(6) Archives communales, pièces comptables, liasse de 1592 : reçu du peintre rémois Nicolas Monneuze pour travaux faits en la chambre de délibération de l'Echevinage : tableau de Romulus et Rémus, verrières, etc.


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neurs » (1). Certaines parties du domaine sont ainsi données à bail à l'amiable, d'autres au dernier enchérisseur; ce procédé devient ensuite la règle (2).

Cependant l'exploitation directe n'a pas complètement disparu. D'abord, en certains cas exceptionnels, les gouverneurs sont obligés d'y recourir. En 1370, le censier de Saint-Ladre s'enfuit et les maîtres ne trouvant pas d'autre censier, font labourer etrécoltent eux-mêmes (3). En 1420, ils font la moisson dans la censé de Muire, le censier étant mort subitement sans hoirs (4). D'autre part ils se réservent certaines portions du patrimoine d'exploitation plus facile. C'est ainsi qu'au xve siècle, dans le domaine de Marcelot, ils conservent l'administration des viviers et de la chapelle (5). Tantôt ces viviers sont loués à court délai (6), tantôt les gouverneurs font pêcher eux-mêmes le poisson qu'ils revendent ensuite (7), tantôt ils vendent à l'avance la pêche d'une année. La chapelle est occupée par un ermite, à l'entretien duquel subvient la léproserie. On lui fournit son vêtement, des outils (8), parfois des provisions (9),

(1) Pièces justificatives, IX.

(2) Le marché, comme toutes les affaires, va se conclure à l'hôtellerie (E. 16, 1, f° 32). Cf. Archives communales, Comptes des léproseries, 2, f° 59 v°.

(3) E. 15, 15, f° 28 v°.

(4) Archives communales, Comptes, 2, f° 34.

(5) Voy. ci-dessus p. 55.

(6) B. 14,-1, n° 25 (9 décembre 1399): bail de 2 ans des étangs de Marcelot à Gérard Lejay, regislreur et promoteur de la cour de Reims, à charge d'en partager la pêche avec Saint-Ladre.

(7) Comptes des léproseries, 3, f° 103.

(8) Conclusions du Buffet, 2, f° 97 v° (4 juillet 1471): « Pour ayder a revestir frère Jehan hermite de Marcelaut et a avoir une hache, une besche et une serpe les gouverneurs de S. Ladre lui donront xxu. s. p. Et a déclaré et juré... que... jamais il n'en départira (de Marcelot), tant qu'il vivra. . . »

(9) Comptes des léproseries, 3, f° 82.


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on lui laisse quelquefois les oblations (1). Il prêle serment de ne jamais quitter la chapelle sa vie durant (2) et est chargé à la fois de l'entretien du culte et la garde des étangs. Les échevins doivent d'ailleurs parfois intervenir pour faire la paix entre l'ermite et les censiers (3). Quand l'ermite meurt, en attendant qu'il s'en présente un autre, les échevins envoient des sergents de l'Echevinage pour surveiller la chapelle (4) et font dire la messe par un prêtre du voisinage (5). Au début du xvi° siècle, un prêtre, Nicole Leroy, profite ainsi de ce que la chapelle est vide pour s'y installer, de sa propre autorité, comme ermite (6). Auxvie siècle ce sanctuaire devait être assez important pour qu'un prêtre consentit à payer le loyer du logis et pourpris qui en dépendaient, à charge de garder les « aornements » et de rendre les oblations aux échevins (7). On comprend dès lors les efforts que fit, en 1542, le curé des Alleux, village voisin, pour empêcher le chapelain de célébrer la messe (8).

(l)lbid., 3, f" 37 v° (1470-1471) : « Des oblations faites en argent a lad. chappelle... rien n'a esté receu... pour ce que Messieurs ont delaissié... lesd. oblations au prouffit de l'ermitte qui y est a la charge d'entretenir la chappelle d'illecq... »

(2) Conclusions du Buffet, 2, f° 97 v° (4 juillet 1471) : « Pour ayder a revestir frère Jehan hermite de Marcelaut et a avoir une hache, une besche et une serpe, les gouverneurs de S. Ladre lui donront xxu. s. p. Et a déclaré et juré... que... jamais il n'en départira (de Marcelot), tant qu'il vivra... »

(3; Archives communales, Conclusions du Buffet, 4, f° 195.

(4) lbid., Comptes des léproseries, 3, f° 57.

(5) lbid., Conclusions du Buffet, 3, f° 53.

(6) Un long procès s'ensuit : condamné, Leroy appelle au Parlement en 1504, mais il trouve moyen défaire plusieurs fois défaut: enfin son appel est mis à néant. (Archives nationales, X1"., 1509, f° 12o v° et X,a 140,f°44 [3 mai 15041).

(7) B. 14, 1, n° 3 (14 décembre 1514).

(8j Archives communales, Comptes des léproseries, H, f° 10.


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On a vu qu'il ne réussit à réunir la chapelle qu'au xvii" siècle (1).

Parmi les héritages de la léproserie, a déjà été signalée la « Terre saudée ». Située devant Saint-Ladre, près du chemin de Champfieury (2), elle fournit de la terre à briques et à fours. Au xve siècle ce terrain fut d'abord directement exploité par les gouverneurs. Ils paient un « quarrelier » qui vient fabriquer les carreaux (3) ; un puits est construit tout auprès pour fournir l'eau nécessaire (4). Les carreaux sont ensuite emmagasinés dans un hangar spécial, à Saint-Ladre (5), et vendus aux particuliers (6). A la fin du xve siècle, la Terre saudée est concédée au convers, à la condition que les échevins pourront prendre gratuitement les carreaux dont ils auront besoin (7) : en 1483, le convers demande à en être déchargé. Plus tard, une partie de la Terre saudée est louée à un étranger (8) : les habitants viennent lui acheter les briques au prix accoutumé, et Saint-Ladre se réserve le droit de faire des carreaux pour son usage (9).

(1) Voy. ci-dessus p. 56. Notons une conclusion du 10 novembre 1570, par laquelle on poursuivra un « quidam lépreulx » qui se pourvu de la chapelle, cette chapelle n'étant pas une maladrerie (Conclusions, 7, f° 54).

(2) Conclusions, 3, f° 159 v".

(3) Comptes des léproseries, 2, f" 164 v° (1462-1463) : « A Gérard Lorcignol quarrelier pour avoir l'ait xim milles de quarriaux sur la terre S. Ladre » 4 1. p.

(4) lbid., 8, f» 119.

(5) lbid., 4, f° 301 v° : « ... pour refaire la loge a mettre quarreaulx ».

(6) lbid., 2, f" 173 v"; 4, l'"s 119 v" et 144, etc.

(7) Conclusions du Buffet, 2, f° 97 (1481J. — lbid., 2, f° 109 (1483).

(8) lbid., 3, f° 159 v" (19 mars 1518 n. st.)

(9) Comptes, 8, f° 297.


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En dehors de ces cas spéciaux l'exploitation directe a généralement cessé au xv° siècle. Les dîmes sont affermées (1), comme les héritages qui entourent SaintLadre. Nous avons vu, dès 1332, baillées à ferme les dépendances de Saint-Ladre, sauf certaines réserves pour le cas où il viendrait de nouveaux malades (2). En 1388 (3), en 1413, etc., les maisons et jardins de Saint-Ladre aux femmes sont loués de même, sous condition que « se ainsi estoit qu'il venist une femme ladre pour mettre aud. lieu, elle averoit la chambre a cheminée par devers le chemin, et du jardin, depuis l'uys de lad. chambre allant tout droit a la pierre chevée... » et que réduction serait faite au locataire sur le prix du loyer (4). Quand il y a des femmes malades, les gouverneurs se contentent de louer une partie des jardins (5), et en 1459, une seule lépreuse habitant Ta maladrerie, et jouissant d'une part du jardin, les échevins louent le reste à son mari, moyennant une retenue sur la pension de la femme (6).

De même est affermé le revenu des pressoirs d'Ormes et de Prouilly. Pour les pressoirs de Prouilly, dès

(1) B. 27, 6 (15 novembre 1442): affermage à Guillaume Délabre de Lucquy des dîmes de Lucquy. — F 2. 71 : mise en adjudication du bail du quatorzième des dîmes de Saint-Souplet (1608).

(2) Voy. ci-dessus, pp. 38-39.

(3) E. 16, 2, f» 3 v°.

(4) B. 29, 2, n° 45 (1412).

(5) Archives communales, Comptes des léproseries, 2, f° 78 v° (1429-1430) : « De Poncinet Jaquet et Jehannette sa femme qui tiennent a louer... la moittié du jardin de gloriette, assis devant S. Ladre aux femmes... ». De même en 1512, les échevins baillent à surcens viager à Mathieu Lenayn, megissier, « une place on jardin des lépreuses » à charge d'y élever une maison (Conclusions du Buffet, 3, f° 89).

(6) B. 29, 2, n° 15 (26 octobre 1459).


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1345 (1), on trouve un bail aux habitants du village, moyennant 4 1, 10 s. par an (2). Au milieu du xvie siècle des difficultés surgirent entre les jurés de Prouilly et les gouverneurs qui obtinrent gain de cause (3). — Les pressoirs d'Ormes sont donnés à bail dès 1337 (4). Les premiers baux sont faits à l'amiable ; au xve siècle la « vendue de la revenue » est « délivrée au plus offrant et dernier enchérisseur » : 16 1. 16 s. p. en 1420 (5), 22 1. en 1424 (6). Le droit perçu par le fermier pour le pressurage est d'un pot sur 12, d'après un arrêt des Grands Jours de Troyes (7), qui maintient un usage ancien. Les pressoirs sont banaux : en 1444, les échevins s'adressent au Chapitre de Reims, seigneur d'Ormes, pourfaire respecter la banalité(8); au xvie siècle leur droit ayant été de nouveau contesté (9), cet arrêt des Grands Jours de Troyes maintient le droit de pressurage perçu par le fermier et fait défense aux habitants de pressurer leur vin ailleurs ou de bâtir de nouveaux pressoirs. Quelques années plus tard (1573) un long procès, com(1)

com(1) 1, n°9 (3 juillet 1345).

(2) Les réparations sont à la charge de l'hôpital (Archives communales, liasse 34, pétitions).

(3) Archives communales, comptes des léproseries, 12, f° 353 v° (1549-1550) : « Pour une lettres royaulx obtenues pour faire commandement aux marguilliers et gouverneurs de Prouilly de asseoir et imposer sur les habitans dud. lieu le fort portant le foible les despens obtenus à l'encontre d'eulx... »

(4) B. 29, 3, n° 3.

(5) Comptes des léproseries, 2, f° 10 v°.

(6) lbid., f°69.

(7) B. 29, 18, n" 1 (8 octobre 1531).

(8) B. 29, 4, n" 1 (19 septembre 1444). Une affaire du même genre peut être signalée pour les pressoirs de Prouilly en 13371338 (E. 15, 1, f° 13 v").

(9) Conclusions du Buffet, 4, f" 152 (23 octobre 1534).


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mencé en 1554(1) contre les héritiers de Husson Lacorde, fermier des pressoirs, se termine par un arrêt du Parlement (2), confirmatif d'une sentence du Présidial de Reims (3), qui condamnait les héritiers aux réparations et rendait la seigneurie utile avec la directe à l'Echevinage. Les pressoirs d'Ormes reconstruits en 1687 (4) subsistèrent jusqu'à la fin de l'ancien régime (5).

Le domaine rural, la censé Saint-Eloi, les pressoirs une fois affermés, il restait aux gouverneurs à assurer le revenu des maisons de Reims, à louer les étaux aux enchères (6), à s'occuper des acquisitions utiles (7), à pourvoir à toutes les petites difficultés, à toutes les conventions qui surgissent dans l'administration d'un domaine (8).

(1) B. 29, 7.

(2) B. 29, 9, n° 23.

(3) B. 29, 9, n° 1.

(4) B. 29, 16, n° 1.

(5) B. 29, 19.

(6) F 3. 15b".

(7) B. 28, Muizon, n° 7 (15 décembre 1556) : acquisition de 4 arpents de marais à Trigny sur les bords de la Vesle. De même F 2. 31, nos 14 et 15.

(8) Convention de dommages-intérêts avec Pierre Draveny, pour ce qu'une nouvelle construction, faite par lui et appuyée sur le mur de la bergerie de la grande censé, s'est écroulée, le mur étant « fondu » (Archives communales, pièces comptables de 1545; 1er mars 1545 n. st.).— Transport sur une maison du Marché au blé appartenant aux Cordelières de Reims d'une rente annuelle de 12 s. p., due précédemment sur un jardin sis rue Neuve, qu'elles tenaient de Saint-Ladre : « Disans lesdites parties comme de long temps lesd. religieuses, abbesse et couvent eussent pris a tiltre de bail et seurcens annuel des eschevins dud. Reims ungjardin assiz aud. Reims en Neufverue, tenant... etc., et pour ce queled. jardin


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Les administrateurs avaient encore à veiller à la conservation des biens. Rappelons d'abord le soin avec lequel ils « empêtrent » les sauvegardes royales et les font publier par les « quars fours », au Change, par toute la ville (1). Ils sollicitent de même le Saint-Siège (2), et les bulles de Jean XXII, chargeant le prieur de SaintMaurice de Reims et le doyen de Saint-Pierre de Soissons de faire restituer les biens de Saint-Ladre aux femmes (3), ou de Sixte IV (4) contre les détenteurs illicites des héritages, cens, terres, biens meublés et immeubles de la léproserie, sont partout publiées, criées, affichées « aux port aulx ». Ils prennent aussi toutes les mesures nécessaires pour la conservation du patrimoine : estimation des reliquaires, calices et joyaux de Saint-Eloi (5) ; inventaire des dîmes dues à la maladreest

maladreest et contigu d'un autre petit jardin appartenant auxd. religieuses... lequel autre petit jardin tient a leur réfectoire et que, pour agrandir icelluy réfectoire, il leur estoit besoing y employer led. petit jardin a elles appartenant ; pour quoy ont fait supplyer et requérir auxd. seigneurs les eschevins que leur plaisir fut leur permettre et tolérer de enclore et fermer de murailles led. jardin... et mettre a leur enclos, offrans... etc. » (Bibliothèque nationale, collection de Champagne, t. 150, pièce 40, 28 février 1528-1R29).

(1) Archives communales, Comptes des léproseries, 1, f" 97 v".

(2) Ibid., 4, f° 4a v" (1481-1482) : « Aux conseillers qui ont fait le mémorial pour envoyer quérir en court de Rome une monition générale sous peinne d'excommuniement dont ne peult absoldre que le pape et ses commis, pour ammonester et excommunier tous ceulx et celles qui retiennent aucune chose appartenant ausd. hospitaux ou qui scèvent les détenteurs et les recèlent, pourl'impelration d'icelle et pour le messager » 57 s. 4 d. p.

(3) Archives communales, liasse 34, bulles, nos 10 et 11 (Avignon 5 avril 1323).

(4) Ibid., id., n° 14 (Rome, 1er juin 1473).

(5) Ibid., Comptes des léproseries, 13, f° 539 v°.


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rie (1); état des biens (2) ; arpentage des terres (3). Ils visitent ou font visiter les fermes (4), les huches à poissons (5), les étaux à boucher, ici faisant refaire les portes des sauvoirs (6), là demandant un avant-toit « pour éviter que le soleil ne corrompe la chair » (7). Au xvi* siècle l'habitude s'établit d'une visite annuelle de toutes les maisons et possessions de Saint-Ladre, pendant laquelle les gouverneurs et le procureur de l'Echevinage, assistés d'experts, dressaient un état des réparations nécessaires (8). Les réparations décidées, les gouverneurs les surveillent. Une sage économie préside à ces travaux : en 1S47, ils rachètent une partie des matériaux qui ont servi aux estrades et aux scènes dressées pendant le sacre de Henri II (9); en 1480, ayant à installer une couverture provisoire au-dessus

(1) Archives communales, Comptes des léproseries, 2, f° 166 (1463).

(2) Ibid., Conclusions du Buffet, 3, f°75 v°(1510). —Comptes, 3, f 188 (1479).

(3) Ibid., Comptes, 11, 60 v°.

(4) Ibid., Conclusions, 2, f° 209,V (1497).

(5) Ibid., id., 2, f° 112 (1483).

(6) Ibid. comptes des léproseries, 3, f° 199 v°. . (7) Ibid., Conclusions du Buffet, 8, f° 223.

(8) Ibid,, id., 6, f° 91 (22 février 1561, n. st.) : « Ont esté déléguez pour faire la Visitation ordinaire et accoustumée faire par chacun an des maisons et manoirs des hospitaulx S. Ladre de Reims, scavoir quelles réparations y sont a faire, le prevost de céans », le procureur, le greffier, les 2 gouverneurs et des maîtres maçon, charpentier et couvreur. Les gouverneurs et autres officiers de l'Échevinage touchent 50 s. t. pour assister à cette visite (Comptes de 1577, f° 83 v°).

(9) Ibid., Comptes, 12, f° 17 v° : « A Me Guillaume Vaurouart, prevost de TEschevinage commis a l'ofice des cérémonies faites pour le sacre du roy notre sire Henry... pour ung demi doubleau, etc.. qui ont esté rendues après led. sacre des teastres et misleres faicts pour icelluy. »


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d'un chantier établi à Saint-Eloi, ils font chercher par la ville de vieux tonneaux qu'on leur abandonne par charité et qu'on transforme en lates (1). — Au xvr* siècle le système de l'adjudication aux enchères est adopté pour ces travaux. Les mises en adjudication sont publiées au prône et l'adjudication se fait au rabais au Buffet de FÉchevinage.

En même temps que leurs biens, les gouverneurs ont à conserver leurs droits : de là toute une foule de procès, dont il importe de signaler quelques-uns, pour montrer l'activité, infatigable sur ce point, des administrateurs de l'hôpital.

Presque tout le xiv" siècle est rempli d'une longue affaire des échevins contre l'archevêque. On se souvient que les droits de Saint-Ladre sur la foire avaient été convertis au début du xm° siècle en une rente de 100 setiers de froment. La redevance fut régulièrement payée par les archevêques du xin" siècle. Mais en 1323, les agents de Guillaume de Trie refusent les 100 setiers (2). L'archevêque, duc et pair, prétendant n'être jugé qu'en Parlement (3), l'affaire est portée à la Cour. Le 30 décembre 1329, Guillaume de Trie est assigné à comparaître aux prochains Jours de Vermandois (4),

(1) Archives communales., Comptes des léproseries, 3, f° 200 : « A Person Preudon et Poncelet Simonnet pour avoir esté par la ville quérir des vieilles queues aulmosnées pour later la couverture dessus lad. vossure de S. Eloi, où ils ont vacqué par n. journées et demye, mi s. mi d. p... A Jehan Mannet tonnelier pour avoir dolé et redressé les douves desd. queues pour faire lates, xv s. vin d. p. »

(2) Archives nationales, XI*. 46, f° 328 v°. — VARIN, Archives administratives, III, 907.

(3) A 5, foires, dossier 15.

(4) A 5, foires, 3, n° 5.


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et alors commence une longue procédure(l) reprise par tous les archevêques successivement, interrompue par les guerres anglaises et qui aboutit enfin à un arrê t du Parlement (2j en date du 7 juin 1391. Vainement les échevins avaient rappelé l'origine de cette redevance : vainement ils avaient nié la prescription (3). Les archevêques avaient opposé qu'ils ne pouvaient être obligés parles donations de leur prédécesseur, qu'ils n'en étaient ni les héritiers, ni les exécuteurs ; ils avaient prétendu que leur prédécesseur n'avait pas le droit de disposer du temporel sans licence du pape, du roi, du chapitre et que ces autorisations n'avaient point été obtenus. Le Parlement donna raison au défendeur, l'archevêque était « absolz » de la poursuite des échevins.

Mais ceux-ci ne se découragèrent pas : en 1400 (4), l'affaire était déjà reprise. Rogier dans ses Mémoires (5), affirme que le procès était achevé en 1401 : en réalité, il était encore pendant devant les Requêtes de l'hôtel vers la fin du xve siècle (6). Un arrêt du 20 novembre 1483 (7) relève les gouverneurs de Saint-Ladre de l'interruption du procès. C'est le dernier acte que nous

(1) Voyez sur cette procédure, Archives nationales, Xlc, 2B, n° 329 ; X1', 33, f° 193 v° ; 1474, f° 213 v° et 214 ; 1474, f° 10 v» ; et Archives de l'Hôpital général, A 5, foires, dossier 10, et A 5. n° 12 (intéressante description des moulins).

(2) Archives nationales, X" 46, f° 328 v°. Cf. VARIN, Archives administratives, III, 907.

(3) Ibid., X 1'. 4786, f° 14 v».

(4) A 5. Foires, n° 15.

(5) Mémoires, 1, f° 51 v° ; dans VARIN, Archives administratives, 1, 2e partie, 446.

(6) Sur cette procédure, voir Archives nationales, X'% 4786, f° 14 v° (7 décembre 1402) et X 1' 52, f°219 (9 mai 1405).

(7)A»,8,nM.


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ayons retrouvé de cette procédure plus que séculaire : en 1489-1490 (1), les échevins semblaient prêts à un accord ; ils renoncèrent sans doute à prolonger la lutte plus longtemps : les moulins sur lesquels était établie la rente étaient d'ailleurs disparus ou tout au moins ruinés (2).

S'il était possible à l'archevêque de nier ainsi cette dette, quelles contestations ne devaient pas faire naître d'autres redevances moins bien établies ? Le 12 juillet 157a, la chambrière, chargée d'aller à l'Hôtel-Dieu chercher les pains que les religieux distribuaient chaque semaine à la léproserie, fut accueillie par un refus. Cinq jours après, les échevins faisaient citer en justice les maîtres de l'Hôtel-Dieu (3). La procédure est engagée. En novembre (4) une enquête est faite au Présidial : les domestiques, le maîlre boulanger, les servantes de la léproserie interrogés tour à tour fournissent ainsi des renseignements intéressants et sur l'Hôtel-Dieu et sur Saint-Ladre. Il est bien prouvé que chaque semaine, 4 pains blancs et 3 pains bis étaient délivrés aux lépreux. D'autre part, les échevins fournissent des titres, des extraits de leurs comptes du xiv° siècle (5), une copie déjà bullede CélestinIII(6), pour « aydier et conforter » l'enquête verbale. Le procureur de l'Hôtel-Dieu prétend

(1) Comptes des léproseries, 4, f° 209.

(2) A 5. 1, dossier 1, nu 1, article 32.

(3) A«. 1, n° 49.

(4) A°. 1, n°s39et 38.

(5) Cf. E. 16, 1, f° 3 v°.

(6) Archives communales, liasse 34, bulles, n° 2 (Latran, 22 janvier 1196). Cette bulle mentionne en effet les prébendes de pains, mais non ceux de l'Hôtel-Dieu : les échevins font 'd'ailleurs remarquer qu'il n'est question que des prébendes contestées.


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pour sa défense que cette distribution de pain n'est qu'une aumône et nul n'est tenu à l'aumône (1). Et les échevins de répliquer (2) que si ce n'eût été que pure libéralité, et non dette, l'Hôtel-Dieu n'aurait sans doute pas continué à fournir toujours la même quantité de pains et du même poids quel que fût le nombre des lépreux. Mais il est surtout curieux de voir les deux hôpitaux alléguer l'un contre l'autre le triste état de leurs finances pour refuser ou réclamer ces prébendes. Condamné une première fois par arrêt du 5 août 1579 (3), l'Hôtel-Dieu fut de nouveau condamné sur appel par arrêt du Parlement du 10 mars 1584 (4). Dès lors, le droit des lépreux fut respecté jusqu'à la fin de la maladrerie. En 1636 encore, après la disparition de Saint-Lazare, les lépreux obtenaient paiement d'un pain de 20 onces (5) et même en 1639, Pierre Jarlot, pauvre lépreux, recevait à lui seul les 7 pains dûs par l'Hôtel-Dieu (6).

Naturellement Saint-Pierre-les-Dames et Saint-Remi essayèrent de même de se libérer de celte prébende. En 1553 (7) commence avec les religieuses de SaintPierre un procès où les gouverneurs, après avoir réclamé 7 pains, réduisirent leur revendication à 2, et qui sans doute n'a pas abouti. Avec Saint-Remi les contestations furent plus fréquentes. Déjà, en 1196, la bulle de Célestin III qui vient d'être rappelée signale une première contestation. Des lettres de mars 1235 attribuent

(1) A«. 1, n°s 4 et 24.

(2) A". 1, n° 50.

(3) A<\ 8, n° 1.

(4) Archives nationales, X1*, 244, f° 309 v°.

(5) Ibid., y. 138, liasse de 1636, 54 (10 septembre 1636).

(6) Ibid., V. 139, liasse de 1639, 53 (19 juillet 1639).

(7) A«\ 7, nos 1 — 15.


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21 pains par semaine aux lépreuses (1). Mais en 1319 il fautune sentence de l'official pour obliger l'abbaye à tenir sa promesse (2). En 1430, autre difficulté : les religieux invoquent la séparation de la mense abbatiale, contestent la quantité de pains prébendes, soutiennent que cette distribution n'est que pure aumône. L'affaire portée devant l'officialité (3), puis devant le bailli de Vermandois (4), se termine par la condamnation de Saint-Remi (5). A la fin du xvi° siècle, nouveau procès : Jacques Godinol, commis à la recelte des revenus de l'abbaye, refuse, on 1592, de délivrer à Saint-Ladre 18 setiers de seigle pour une année et demie de cette prébende ; les gouverneurs font saisir les revenus de la censé de la Coulure dépendant de l'abbaye et un jugement du Présidial oblige le censicr à s'acquitter envers les échevins (6).

L'activité et la persévérance des administrateurs se déploient encore en une foule de petits procès. Il faut faire rentrer les cens contestés : difficultés dès le xiue siècle avec M* Aubert, curé de Saint-Hilaire, pour un surcens de 30 s. p. (7), avec Raulet Le Papelard pour un cens de 40 d. (8), avec Gautier de Neufville, seigneur de Muire, pour les renies de SaintLadre à Muire (9). Il faut poursuivre ceux qui fauchent

(1) Ces pains devaient sans doute être d'abord attribués aux malades sans distinction.

(2) A". 4, n° 1.

(3) Ibid.

(4) A 6. 0, n" 1.

(5) A«. 5, n" 1.

(6) A". 10, n° 1 (25 septembre 1595).

(7) Archives communales, inventaire de 1478, 1" 50 v° (1298).

(8) VARIN, Archives administratives, H, lre partie, 23 (1302).

(9) A». 1, n" 9 (1375).


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dans les marais de la léproserie (1). Il faut défendre la maison de Muizon contre Baudouin de Vendières (2), la grange de Bétheniville contre la Chancellerie de France (3). A Marcelot, au xiv" siècle, Thomas de Vervins, seigneur de Saint-Loup, refuse à Saint-Ladre les droits d'usage que l'hôpital avait dans ses bois et sur ses prés ; il prétend à un droit sur les viviers et sur la maison attenant à la chapelle. Un accord du 3 juin 1315 reconnaît aux frères le droit de pâture (i) ; un accord de 1321 (5) leur reconnaît tous droits sur les étangs et les autorise à couper le bois alentour pour « plus aise peschier et nourir le poisson » (6), tirer les herbes hors du vivier, faire des fossés, prendre toutes les mesures nécessaires à l'exploitation. Plus tard, une revendication semblable de Jean Le Vergeur, seigneur d'Acy, est semblablement écartée (7). A Beaufuy (8), les seigneurs de Voncq interdisent aux censiers de faire paître les bêles, réclament un droit de visite en chassant dans les bois, «font des entreprises » contre la propriété de l'hôpital (9) : et ce sont autant deprocès. — A Reims,

(1) E. 15, 8,f°5 (1359).—Conclusions du Buffet, 2, f" 68 (1479).

(2) Archives communales, Comptes des léproseries, 1, f"" 43-48 (1353).

(3) E. 16, f' 03 (138 i). Saint-Ladre possédait une grange à Bétheniville de moitié avec Oudin Malequin. Celui-ci poursuivi pour « certains maléfices envers le roi » est condamné à une amende de 200 francs, et la Chancellerie fait vendre. L'Échevinage réclame sa part.

(4) B. 14,1, n°2

(5) B. 14, 1, n° 12.

(6) Inventaire de 1478, f°7t.

(7) B. 14, 1, n°" 15-44 (1570-1592).

(8) Inventaire de 1478, fos 70-71 (1407).

(9) Archices communales, Conclusions du Buffet, 2, f" 130(1483).


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autres difficultés : avec le Chapitre « pour raison d'un canal » construit pour « rafreschir le poisson des sauvoirs » (1) ; avec les fermiers de ces huches (2), etc., et devant tant de procès, tant de démarches, on ne peut contester le souci avec lequel les gouverneurs ont défendu les intérêts del'hôpital et gardé « le bien publicq et des paouvres en recommandation » (3).

Cette gestion si active a-t-elle été heureuse? D'une façon générale le budget se solde par un reliquat. Certains exercices cependant (par exemple ceux de 13841385, 1408-1409, 1423-1424, 1612-1613) présentent des déficits plus ou moins considérables. On doit remarquer que de temps à autre l'absence de malades permet facilement aux administrateurs de rétablir l'équilibre. On doit aussi remarquer que les réquirendes aggravent singulièrement le chapitre des mises : ces réquirendes deviennent généralement des non-valeurs. Cependant le « bon mesnage » des gouverneurs sut éviter les emprunts jusque dans la seconde moitié du xvie siècle. En 1572, pour relever les sauvoirs détruits pendant les troubles, on dût en hâte emprunter 450 1. (4). Le prêt fut d'ailleurs remboursé dès 1575 (5). Cependant en 1574 (6), les gouverneurs avaient dû recourir à un nouvel emprunt : le gouverneur de l'année précédente avait exigé la restitution d'avances par lui faites ; le chapelain de Saint-Eloi avait fait saisir une partie du revenu ; Henri Bazin, gouverneur actuel avait déjà avancé plus de 150 1. t., ui pro(1)

pro(1) communales, pièces comptables (1576).

(2) F 2. 42. Ce procès commencé en 1552 dure encore ei 1563.

(3) A». 1, n° 26.

(4) A». 1, n° 41.

(5) A«. 1, n° 40.

(6) A". 1, n° 44.


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ces à propos de la Vagnerie avait coûté très cher : l'Echevinage conclut un emprunt de 1000 1.1. (1). Les comptes de 1592-1593 mentionnent une somme de 175 1. 16 s. 6 d. pour rentes servies à divers prêteurs (2). Une rente de 80 1. est payée de 1596 à 1604 à Claire Godet, veuve de Thomas de Paris (3). En 1604, les échevins achèvent le remboursement d'une somme de 1000 1. t. « principal vendu et constitué » en 1575 à Claude Mothe (4). Mais la même, année ils doivent emprunter 900 1. t. à la paroisse Saint-Hilaire de Reims, moyennant 56 1. 10 s. de rente (5). En 1632, ils remboursent à Jehanne Coquebert, veuve de Nicolas Lespagnol la moitié du « fonds » d'un emprunt contracté en 1627 et continuent à verser pour l'autre moitié de la rente constituée une somme de 1001. t.

Cette crise est en partie une conséquence delà Ligue : on sait assez quel mal les guerres ont fait à la maladrerie, surtout en 1359 et en 1591 ; et il faut tenir compte des années comme celle de 1472, où Marcelot, Beaufuy ne sont de « nul prouffict », où tout le domaine des Grandes Loges ne rapporte que 12 setiers de grains (6). Il faut aussi se souvenir des transformations économiques qui, là comme partout, ont lentement affaibli une fortune qui au xve siècle ne s'accroissait plus : les cens sont dépréciés par l'avilissement de la livre tournois el la diminution du pouvoir de l'argent ; la terre perd de sa

(1) A« 1, n° 43 (24 septembre 1574).

(2) Archives communales, Comptes des léproseries, 21, f°s 323330.

(3) Ibid., 23 (non folioté), passim.

(4) Ibid., 23 (non folioté). (5)I6id., 23.

(6) A». 1, n° 2.


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valeur. Enfin on verra qu'alors que tant d'autres maladreries devenaient vides, la léproserie de Reims devait au xvie siècle supporter la charge régulière des pensions de dix lépreux.

Et cependant, malgré les mauvaises conditions dans lesquelles se sont trouvés les gouverneurs, ils ont su, pour tant qu'il était possible, maintenir le patrimoine de la léproserie. En 1313, lors du premier compte que nous ayons (1), les recettes sont de 59 1. 7 d. pour les « receptes des vies années » et de 381 1. 8 s. 6 d. pour l'année courante. Au xvnB siècle la moyenne des recettes est environ de 3000 1. ; en 1633, au moment de la disparition de la maladrerie, les recettes sont de 3459 1. 9 s. 3 d. t. C'estdire que le revenu ne s'est trouvé, si nous ne nous trompons, réduit après trois siècles que d'un quart environ (2).

(1)E. 15, n" 24.

(2) Suivant M. d'Avenel, un même capital mobilier de 1000 1. rapportant 6400 fr. en 1300, ne rapportait, en 1600, que 417 fr. et une terre rapportant 10 °/„ au xvc siècle ne rapportait que 6, 35 °/„ à la fin du xvic siècle, f Histoire économique de la, propriété, des salaires, des denrées, 1, 137 et 360.) On sait, d'ailleurs, avec quelles réserves on pcul tenir compte de ces moyennes.


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CHAPITRE VI.

La Léproserie aux XVe et XVIe siècles : les chapelains; le convers.

Sans avoir encore au xve siècle le rôle important qu'il jouait souvent au xiu°, le chapelain tient cependant une grande place dans la vie des malades.

La présentation du chapelain appartient à l'Echevinage. D'après une note du Livre Rouge « se li chapelerie de S. Ladre eschiet à donner » l'Échevinage a « un. mois de pourveance de présenter (t). » En réalité, les candidats ne laissaient jamais s'écouler un tel délai (2). Le candidat se présentait au Buffet et adressait sa requête aux échevins. Au moins en théorie, information était faite de ses « sens, littérature et suffisance », dont on lui délivrait lettres. On stipulait alors les charges et avantages du bénéfice (3). Le candidat promettait d'observer ces conditions, jurant « en parolle de Dieu la main mise au pis comme preslre de non jamais à cause de lad. cure demander ou faire demander autre chose que l'on a acoustumé a bailler (4) ». Il s'engageait en outre, au cas où il désirerait

(1) Archives communales, Livre Rouge de l'Échevinage, p. 20 et p. 116. — VARIN, Archives administratives. II, lre part., 13.

(2) Archives Nationales, XI». 5040, f° 130 v° (1572) : « Ceste chapelle vacquant par lé deces de feu trere Gobert dernier chappelain, plusieurs se présentèrent... Et s'il (le chapelain actuel) ne se contente pas de son sallaire, ung autre Tacceptra... ».

(3) A8 3, doss. Il, n° 24, p. 2.

(4) Ibid., id.,n° 21, p. 7.


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renoncer au bénéfice, à résigner purement et simplement entre les mains des échevins. — Les échevins adressaient alors une lettre de présentation à l'archevêque, lui demandant de mettre le candidat ou son représentant" en possession corporelle... a toutes solempnités requises en tel cas (1). » En certaines circonstances délicates, la présentation se faisait même personnellement (2). Le chapelain était ensuite installé par un délégué de l'archevêque et prenait possession » per tactum altaris et calicis et per pulsationem campanarum et per tactum libri. » (3).

Ce droit de présentation fut toujours énergiquement maintenu par les échevins, et le roi même le leur reconnut. Quelques tentatives furent bien faites pour les supplanter, à la faveur des permutations, mais elles échouèrent. En 1424 (4), Pierre Grantcolin, devenu curé par permutation et présenté par le vicaire de l'archevêque, reconnaît l'insuffisance de cette présentation ; en 1558 (5) une sentence de l'officialité de Reims annulle la permutation faite entre Pierre Jolyvet et Nicolas Bloyn, chapelain de Saint-Eloi, sans l'assentiment des échevins, et reconnaît les droits de Valenlin Cal hier présenté par eux.

Le chapelain de Saint-Ladre aux hommes a charge des malades de l'hôpital. Il les visite et leur administre

(1) Archives communales, Livre Rouge, p. 117. — VARIN, Archives administratives, t. II, lr" part., p. 418.

(2) Voy. pour Saint-Ladre aux femmes, Pièces justifie, VI.

(3) Archives communales, liasse 34, Renseignements (pièces sur la juridiction).

(4) I&id., Inventaire de 1178, f" 86 (24 février 1423-1424).

(5) Ibid., liasse 34, renseignements.


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les sacrements (1). Il célèbre le service divin le mardi et le vendredi et les dimanches et fêtes. Il dit les messes de réception à l'entrée des ladres et le service « que l'on fait a les enterrer (2) ».

Mais ce chapelain n'est pas seulement institué pour les ladres. Les textes l'appellent en effet avec une certaine ambiguïté « curé et chapelain de Saint-Éloy ». Au xv 8 siècle l'église n'est pas uniquement réservée aux lépreux ; les maisons bâties près de Saint-Ladre deviennent plus nombreuses ; le faubourg Saint-Éloi se fonde et les « prochains » de la chapelle viennent y assister à l'office. C'est probablement à ce mouvement que correspond la reconstruction de l'église que nous avons signalée. Sans doute au xvi 6 siècle ou au XVIIe, quand les administrateurs y auront intérêt, on soutiendra le contraire. En 1690, quand ils désireront la suppression du bénéfice, ils déclareront que le chapelain ne célèbre l'office que pour les lépreux (3) ; en 1572, quand le chapelain réclamera une augmentation de pension, ils sembleront insinuer que ce pourrait bien être le- curé de Saint-Éloi qui serait devenu par surcroît chapelain des lépreux (4). En réalité, malgré ces déclarations, malgré une allégation de Bidet (5) affirmant que l'église Saint-Eloi fut « ensuite réduite en chapelle sous le titre de Saint-Ladre aux hommes », il semble bien que la chapelle des lépreux soit devenue la « parroiche » Saint-Ladre. On trouve celte

(1) Archives nationales, XI*. 5040, f° 150 v°.

(2) Archives communales, Compt. des lépros., 3, f° 110 v°.

(3) A 8. 2, n°7.

(4) Archives nationales, XI". 5040, f° 150 v° et sqq.

(5) Mémoires, t. II, ch. III, p. 20, dans VARIN, Archives adminis tratives, t. II, 2e part., p. 1149.


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mention dès 1369 (1). Au xvi" siècle, le « chapelain ou curé » de Saint-Eloi est inscrit pour 12 d. p. à la taille de la ville (2). Il n'y avait pas d'autre église en ce quartier, et cet isolement expliquerait que l'on n'ait pas à signaler ici les difficultés qui s'élèvent si fréquemment entre les chapelains des hôpitaux et les curés des paroisses voisines (3).

De plus, c'est à Saint-Eloi que se trouvait la chapelle des orfèvres de Reims (4). Ils y faisaient fréquemment célébrer des services et on les y enterrait. D'autres encore sans doute y faisaient célébrer leurs obsèques (a). Le 21 juillet 1596, les restes de CatherineMarie de Lorraine, soeur du Grand Cardinal et femme de Louis de Bourbon, duc de Montpensier, y furent déposés pendant la nuit pour être le lendemain portés à Saint-Pierre-les-Dames (6).

Le curé de Saint-Ladre figure, dans les comptes de la fin du xiv° siècle et du xve, pour une pension de 32 s. p. par mois (7). Il reçoit en même temps 17 pitances d't s., pour 17 jours de l'année, qui lui seront continuées jusqu'au xvi" siècle (8). Au xvi* siècle, la pen(1)

pen(1) communales, liasse 3 4, ■< Juridiction », n" 22.

(2) Cartulaire D du Chapitre, f" 168, dans VARIN, Archives administratives, t. Il, 2' part., 1-149.

(3) Voy. p. ex., Archives nationales, L. 32V, n 11 3 (fac-similé de l'École des Charles 219).

(4) Archives communales, liasse 34, « Administration », n" 7. i.îi) Ibid., Compt. des léproseries, 12, f" 228 v°.

(fi) PUSROT, Journalier (Ed. Henry et Loriquet), p. 68. — TARBK {Heims, p. 22) dit qu'elle fut enterrée à Saint-Eloi.

(7) E. 10. 1, f° 15 (1381-1382). — E. 16, C.M (1407-1408,. — E. 16, 14, fu 7 (1408-1469).

(8) F. 2, 172.


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sion était de 50 s. t. par mois (1). Frère Valentin Cathier, nommé chapelain en 1558, entame en 1572 un procès pour obtenir une augmentation, et du coup réclame 140 I. par an, vd « que la charge du bénéfice est grande. » L'affaire portée devant le lieutenant de Reims va en appel au Parlement (2). Cathier s'appuie sur l'ordonnance d'avril 1561 qui règle la nomination des administrateurs d'hôpitaux, la reddition de leurs comptes et leurs gages en fixant un maximum de 140 1. (3). Cathier réclame donc le maximum. Les échevins, défendant le bien des pauvres, répliquent avec raison que celte ordonnance ne s'applique qu'aux titulaires chargés non seulement du service religieux, mais de toute l'administration des revenus de leur maladrerie ; ils rappellent à Cathier qu'il a promis de se contenter de ce « sallaire » et qu'il est libre de résigner son bénéfice. Finalement, la Cour, par provision, accorde au chapelain la pension demandée. En 1579 le procès durait encore (4) ; mais au xvn° siècle le curé touche 7 1. t. par mois : la pension des malades était à ce moment de 110 s.

D'autre pari, comme le faisaient remarquer les échevins à Valentin Cathier, cette pension est accrue par le casuel. Au xme siècle toutes les oblalions appartenaient à Saint-Ladre (5). Mais au xve, nous voyons Pierre

(1) F!. 19 (1562).

(2) Archives nationales, XI*. 5040, f" 150 v'\

(3) Recueil des édils et déclarations concernant les hospilaux (1675), p. 27.

(4) Archives communales, Conclusions du Buffet, 8, fc' 240.

(o) Ibid., liasse 34, Inventaire de 4i78, f° 64 (1231) : «... Ceulx aussi de lad. maison de S. Ladre en ce faisant ont retenu a eulx et a lad. maison toutes les oblations qui se


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Sauvage, chanoine de Reims, curé de Saint-Éloi, réclamer et obtenir une part au moins des oblations. Il s'attaque à la fois aux échevins et aux orfèvres de Reims (1). Aux uns, il conteste le droit de faire dire, sans son congé, messe haute au maître-hôtel par autre que par lui ; d'ailleurs, par qui que soit dite la messe, toutes les offrandes qui se font au baise-doigt lui appartiennent. Aux autres, il déclare qu'il ne leur loise faire chanter messe, obit, obsèques sans son autorisation, ni « cueillir » les offrandes qui « viennent au baise-doigt » de l'officiant.

Un compromis intervient le 18 avril 1423 : le curé d'une part, et de l'autre les échevins « comme ayant la garde » de Saint-Ladre et « aussi comme ayans pris l'adveu et deffence » des orfèvres s'en remirent à l'arbitrage de Jean de Châlons. Après un changement de chapelain, l'affaire se termina par un accord le 24 février 1424 (2). Les offrandes et particulièrement celles de la fête de Saint-Eloi étaient restituées au curé.

Enfin il jouissait d'un certain nombre d'avantages. Il avait droit à un jardin (3), il partageait avec l'hôpital le revenu d'un grand pré attenant à Saint-Eloi (4). Il recevait, quand il y avait peu de malades, une part des pains aumônes par les établissements religieux de

feront en lad. chapelle aux femmes et en celle aux hommes et n'y aura riens led. chapellain si ce n'est de don et grâce especial d'icelle maison- ».

(1) Archives communales, liasse 34, « Administration », n° 7 (16 avril 1423).

(2) Ibid., « Juridiction », n° 22, pièce XVII.

(3) Ibid., Conclusions du Buffet, 3, f° 172 v°.

(4) Ibid., liasse 34 « Pétitions ».


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Reims (1) : ce n'était pas une redevance de droit, mais il en profitait fréquemment par grâce spéciale. C'est ainsi qu'en 1504 les gouverneurs retirèrent au curé la permission de percevoir les pains de l'Hôtel-Dieu et de Saint-Pierre-les-Dames pour les restituer aux lépreux (2). Mais en 1453, Jean Doynel, curé, se plaignant que l'abbesse de Saint-Pierre lui donnait des pains différents des pains distribués aux religieuses, les échevins étaient intervenus pour le soutenir contre l'abbesse, tout en faisant réserve de leurs droits (3).

Le chapelain du xiv" siècle était enfin logé et chauffé, et la maison lui fournissait une servante. Mais au moins à partir de 1407 (4), il ne bénéficia plus de ces avantages, et c'est vainement que Jean Doynel en 1453 (5) réclame à ce sujet. Au milieu du xvi" siècle seulement, semble-t-il, le curé reçoit à nouveau le logement. Le 1" avril 1549, les échevins décident l'érection d'une « maison curialle » dans le jardin, près de l'église (6) : la charge de l'entretien et des réparations en revenait aux curés : mais ils durent peu satisfaire à cette servitude, car en 1623 la maison menaçait ruine et ses gouverneurs payaient les réparations par une retenue sur la pension du curé (7).

A côté du chapelain des lépreux se retrouve le chapelain des femmes que l'on a vu officiellement exister dès 1231.

(1) Archives communales, Inventaire de 4i78, f°94v°(14mai 1336).

(2) Ibid., Conclusions, 3, f° 21.

(3) A 6, 1, n" 33.

(4) E. 16,1, f 15.

(5) A 6, 1, n°33;

(6) Archives communales, Conclusions du Buffet, 5, f° 198.

(7) Ibid., Comptes des lépr., 28, f° 228.


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Au xve siècle, la présentation de ce chapelain se fait dans les mêmes conditions que celle du curé de SaintÉloi : mais les droits de l'Échevinage sont en fait moins anciens et moins solides. L'acte de fondation do la chapellenie donnait le droit de présentation à Saint-Ladre, mais sous la réserve d'un assentiment du grand archidiacre de Reims (1). En 1246, en effet, les maître et frères désirant réserver désormais ce bénéfice à l'un des membres de la communauté doivent obtenir le consentement de l'archidiacre Gomelius (1). Mais dès 1301, les échevins présenlent un clerc du nom de Hue Lermitte (2), sans que rien indique qu'il soit en effet frère de la maison;et d'autre part, ils ne prennent nullement l'avis de l'archidiacre. Le 11 août 1310 seulement. Aimé de Savoie obtient des échevins des lettres de nonpréjudice (3) de ce qu'ils avaient ainsi agi sans son « conseil », et ces lettres mêmes semblent employer une formule assez embarrassée ; « Nous volons, disent les échevins, et consentons que, par ceste présentation par nous faite, si comme dit est, au devanl dit arcediacre ou a ses successeurs en leur droit, s'il li ont ou puent avoir quant a la propriété ou possession, préjudices en aucune manière ne soit engerez au temps à venir. »

Dès lors, il n'est plus question de l'archidiacre, et les échevins présenlent directement le candidat à l'archevêque. Nous avons de janvier 1341 (n. st.) un long procès-verbal notarié de la présentation de Philippe

H) Voy. ci-dessus, pp. 27-28.

(2)VABIN, Archives administratives de Reims, t. II, 1" part, p. 13. (3) Archives communales, liasse 34, «Administration», n° 1 (collation du ,xive siècle).


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de Ruel fait par deux des échevins, délégués à Courville, résidence de Jean de Vienne (1) ; il n'y est pas fait mention de l'archidiacre ; et il n'intervient pas davantage dans la présentation de Mauseot Pentouf en 1362 (2), de Thibaut Mosse en 1367 (3). Au xv 8 siècle le droit de l'Échevinage est incontesté (4). — Le chapelain de Saint-Ladre aux femmes, comme celui de SaintÉloi, jure de « ne délaisser lad. chappelle qu'il ne la vienne résigner es mains des eschevins » (5). L'archevêque de son côté ne fait aucune difficulté à reconnaître les droits des échevins. En 1301, Robert de Courlenai (6) avait commencé par se refuser à recevoir le candidat présenté sous prétexte que les échevins étaient « pur lay » ; mais les échevins prouvent leur droit, et l'archevêque cède (7). Désormais, les chapelains de Sainte-Anne sont mis en possession sans difficulté. En 1367 même, dit le Livre Rouge (8), Jean de Craon, (9) « reçut lad. présentation courloisement et aimablement et led. Messire Thiebaut Mosse mit en possession d'icelle chapellenie. . . en la manière acoustumée ».

En 1557, cependant, le Cardinal de Lorraine, au moment où il cherche à rétablir partout le contrôle de l'archevêque sur l'Échevinage, pourvoit directement

(1) Pièces justificatives, pièce VI.

(2) Archives communales, Livre Rouge, f° 142. — VARIN, Archives administratives, III, 118.

(3) Ibid., id., 1M54.

(4) Ibid., Conclusions du Buffet, 2, f° 151.

(5) A', 4, n° 8 (1474).

(6) Archevêque de 1299-1323.

(7) VARIN, Archives administrai ces de Reims, t. II, 1" part., p. 13.

(8) Archives communales, Livre Rouge, p. 154.

(9) Archevêque de 1353-1373.


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Jean Martinet, et aux poursuites des échevins, le procureur de l'archevêque oppose cette thèse que, en cas de permutation, l'archevêque a droit de pourvoir « spretis patronibus » (1). En réalité, en 1489, Gérard Pourjon avait résigné la chapelle aux mains des échevins, qui, à sa requête, avaient nommé Jean Colomb (2) et, en 1521, Regnault Cauchon avait dû être autorisé par eux à résigner en faveur de Me Camus (3).

Il n'y a pas lieu d'insister sur les fonctions du chapelain. Notons seulement que la fêle de la SainteAnne (4) était célébrée avec un certain éclat et que d'autres prêtres pouvaient être autorisés à dire la messe dans la chapelle (5). Le chapelain a fréquemment un desservant qui assure le service divin. — Il est inscrit aux comptes des décimes pour 8 s. en 1545 et pour 4 s. en 1616 (6).

Comme le curé de Saint-Éloi, il reçoit les offrandes. Le chapelain du xin" siècle, frère de la maison, n'avait naturellement pas ce droit : il lui esl définitivement acquis au xve siècle et au début du xvi", où nous voyons les échevins soutenir Guillaume Cauchon, chapelain, contre le curé de Saint-Martin revendiquant les offrandes faites à la chapelle aux obsèques d'une lépreuse (7). Mais il ne figure aux comptes pour aucune pension. C'est qu'en effet il doit percevoir directement la part des dîmes de Saint-Souplet donnée par M. Mainier

(1), (2), (3). Liasse 34, « Juridiction », n° 22 (pièces non cotées).

(4) Archives communales, liasse 34, « Pétitions ».

(5) E. 16, 1, f° 17.

(6) Archives Nationales, S. 4883.

(7) Archives communales, Conclusions du Buffet, 3, f" 104 (1514).


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pour la fondation de la chapelle. Mais cette perception était garantie par l'Échevinage et c'est l'hôpital qui supporte au xvi° siècle les frais d'un procès engagé devant le conservateur des privilèges de l'Université par le curé de Saint-Souplet revendiquant un droit sur la part du chapelain (1). Au xvie siècle, ce revenu semble insuffisant aux chapelains (2) : l'un d'eux se plaint d'être plus mal traité qu'un lépreux (3). Les échevins, s'appuyant sur les engagements pris par les chapelains à leur nomination (3), ne se décidèrent qu'en 1580 à accorder une pension de 10 1. t. par an (4). — En même temps, le chapelain percevait le loyer de terres et jardins sis autour de la chapelle. Au xvu" siècle, M. Petit, chapelain, âgé, ayant quelque mal à faire ses rentrées, abandonna tous ses droits sur ces héritages moyennant une pension de 25 1. (5), au moment où une sentence des officiaux obligeait les échevins à payer au curé de Saint-Souplet, à cause de leur dîme, une part de sa « pension congrue » (14 août 1610) (6). Son successeur, Claude Lescaillier, se plaignant que la maladrerie est loin de la ville, qu'il doit fournir le vin de la messe, payer son servant, se transporter fréquemment pour donner les sacrements aux lépreuses, finit par obtenir 30 1. t. (7).

(1) Archives communales, Compt. des léproser, 12, f- 99 (1548).

(2) Il était amodié au début du xvn' siècle, 18 1. par an (liasse 34, « Pétitions »).

(3) Archives communales, Conclusions du Buffet, 8, f° 187 v° (1578).

(4) Ibid., id., 8, f° 268 v» (25 février 1580).

(5) Ibid., Compt., 28, f° 461 v° .

(6) Ibid., liasse 34, « Pétitions ».

(7) F* 30.


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A côté du curé de Saint-Éloi et du chapelain de Sainte-Anne figure au xv° siècle un convers. C'est à ce seul convers qu'est réduit le personnel des frères sains de la maison, et encore change-t-il de caractère pour devenir une sorte d'officier laïque (1). Même vers la fin du xiv 8 siècle, le convers n'apparaît plus dans les comptes ; on n'y trouve qu'un officier, appelé le « prouvendier » logé à l'hôpital et recevant une pension de 10 s. par mois (2). Il remplit sans doute les fonctions de surveillance du convers. En 1369-1370, mention est faite aussi d'une prouvendière (3), sans pension ; en 1407, elle est désignée sous le titre de converse et inscrite pour une pension de 10 s. p. par mois (4). Nous n'avons plus retrouvé au xv° siècle de prouvendier que dans les lettres de provision des gouverneurs (5) parmi les personnes placées sous leur administration : ce qui semble n'être que de formule. L'existence de ce personnage doit correspondre à la transformation de la léproserie que nous avons signalée.

Le convers du xv' siècle est institué avec un certain cérémonial. Les gouverneurs le reçoivent à SaintLadre. Il prête serment sur les Évangiles de bien remplir ses devoirs (6). Ce serment le lie à l'hôpital : il cesse d'être « séculier », il ne doit plus quitter SaintLadre et est tenu de résider : à sa mort ses biens seront

(1) Cf. DU GANGE, Glossarium, v° « Convèrsus». (2)E. 16, 1, f 18. (3)E. 15, 15. f°13. (4)E. 16, 6,1" 4.

(5) Pièces justificatives., IX.

(6) Conclusions du Buffet, 2, f° 66 v (1479).


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acquis à la maladrerie (1). — Il est alors « ordonné » convers. Pour son « entrée et hébergement », il est tenu de payer un droit de bienvenue de 12 1. (2), payable en une fois ou par termes (3). Dès lors, il fait partie de la « mainie », il a certains droits, et dans certains procès, il donne procuration (4) aux gouverneurs, comme les malades.

Il prend alors possession du logement qui lui est réservé dans l'enclos, apportant ses meubles ou rachetant aux gouverneurs ceux qu'a laissés son prédécesseur (5). Ce logis comprit d'abord une ou deux pièces situées dans la maison de la Petite Censé Saint-Éloi et de quoi « herbergier une vache et la pourveance d'icelle » : le locataire de la censé devait s'engager à accepter cette charge (6). Plus tard, en 1481, on construisit une grande maison qui pourrait recevoir le convers et ses gens (7). Il devait d'ailleurs tenir son logement en état et faire toutes réparations grosses et menues (8).

Il jouit encore d'autres avantages : il louche une pension de 5 s. 4 d. par mois (9). S'il renonce à

(1) Liasse 34, « Meubles », n° 6.

(2) Conclusions du Buffet, 2, f° 66 v°. (3; Compt. des lépros., 2, î° 35 (1420J. (Y) Ibid., 2, f° 59 v°.

(5) Ibid., 3, f° 181 v°.

(6) B. 29, 2, n°47.

(7) Pièces justificatives, XII.

(8) Conclusions du Buffet, 2, f° 201 (8 janvier 1496 n. st.) : « ... Se Jehan Maulevault [convers] ne retient la maison ou il demoure de toutes réparations grosses et menues on lui ostera le logis et le boutera l'on dehors ». — Puis on lui accorda une subvention pour ces travaux {Ibid., f° 203).

(9) Ibid., 2,f°66 v°.


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« prendre gages » on lui accorde par compensation la jouissance d'une autre maison (1). Il peut avoir des gratifications supplémentaires ; les échevins accordent à Vinoyen Baussant « pour ce qu'il a bien longuement servy oud. hospital » une pension de 2 grands blancs par semaine (2). — A l'entrée des ladres, il touche un droit de 5 s. égal à celui du curé (3) ; il a sa part des jardinages (4) el il participe encore aux distributions extraordinaires (5). Enfin il reçoit la housse de brunette qu'il est tenu de porteries jours de fête elles mardi et vendredi de chaque semaine(6). D'autre part, rien ne l'empêche de faire des profits comme fermier (7) ou en donnant à boire aux passants (8).

Les convers du xin 0 siècle se répartissaient sans doute les divers services intérieurs de la maladrerie. Au xve siècle, le convers n'a plus guère que la garde et l'entretien de l'église. Il en ouvre et ferme les portes ; il en garde les reliques et le linge sous sa responsabilité (9). Il en dispose même parfois de telle sorte qu'il

(1) Conclusions du buffet, 2, f° 71 v°.

(2) Ibid., 2, f° 11 v°(1475).

(3) Pièces justificatives, XI.

(4) De là des difficultés avec les ladres. Compt. des lépros., 4, f" 369 (1499-1500) : « En despens faiz en alant visiter es jardins des ladres et des ladresses pour le différend qui estoit entre lesd. ladres et le convers... ».

(5) Conclusions, 2, fu 27 v°(147a) : distribution du poisson de la pêche de Marcelot.

(6) Compt. des lépros., 3, f" 188.

(7) Pièces justificatives, XIV.

(8) E. 16, 10, f° 6 v" (1429-1430) : « A Guiot [convers] pour despens fais en son liostel par Guienne le herault du Roy, avant la venue du Roy... xn. s. p. »

(9) Pièces justificatives, XIV.


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range ses « mines et vaisseaux » dans l'église (1) ou qu'il vend les nappes d'autel, une aube ou un amict [2). Les jours de fête et les jours où le curé vient célébrer la messe, il porte les « joyaux » sur l'autel et, vêtu de sa housse, il reçoit les oblations. Il vend des cierges aux fidèles et il doit tous les menus services qui incombent par exemple à un sacristain. Il prend d'ailleurs les ordres des gouverneurs et est responsable « sans autre procès » devant les échevins. Il devient, par là même, une sorte de fonctionnaire, et c'est ainsi que les échevins l'emploient le jour des élections échevinales.

Même, à la fin du xv° siècle, il est purement « séculier » et indépendant. En 1483, Jean Maulevault, convers, conclut avec les échevins un accord (3) qui lui laisse la liberté de « soy départir et délaisser led. hospital toutes et quantes fois que bon lui semblera », en avertissant les gouverneurs et « non obstant le serment par lequel il estoit abstraint aud. hospital ». En même temps, — par une faveur, qui sera aussi accordée aux ladres, et qui se justifie plus encore pour un convers chargé de famille, travaillant et acquérant, « pour regard et considération de ses dis enfans et affin aussi qu'il puisse plus honestement vivre et plus asseurement s'emploier a faire de nouveaux acquestz et amasser des biens qui puissent estre et appartenir a sesd. enfans après son trespas ou autres ses linagiers », — une autre clause reconnaît aux héritiers de Maulevault sa succession testamentaire ou ab intestat. En 1506, Coles(1)

Coles(1) du Buffet, 3, f° 21 v».

(2) lbid., 3, f° 15 v°.

(3) Archives communales, liasse 34, « Meubles », n° 6.


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son Voiturot est reçu convers dans des conditions plus particulières encore : pour douze ans, sans droit de bienvenue, « sans que l'on puisse en fin dudit bail ses biens estre acquis audit hospital (il)..' » Ce n'est, en somme, qu'un locataire astreint à certaines servitudes. Ce fut d'ailleurs le dernier convers.

(1) Pièces justificatives, XIV.


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CHAPITRE VII.

La Léproserie au XVe et XVIe siècles : les lépreux ; réception et régime intérieur.

I.

L'entrée d'un lépreux à la maladrerie, très simple sans doule au début, s'accompagne au xve siècle de toute une procédure, où l'on peut distinguer comme trois actes : la Visitation, l'expulsion, la réception.

La première partie de cette procédure, qui, dans la seconde moitié du xvi" siècle et au xvn% se déroulera devant les échevins, se poursuit à partir de la fin du xiv* siècle devant un commissaire royal nommé « juge des lépreux » dont nous aurons plus tard à expliquer l'intervention. Mais devant l'un et l'autre de ces tribunaux, cette procédure reste sensiblement la même. Ce juge, qui peut être échevin, et dont nous avons un petit registre de sentences de 1511 à 1530 (1), tient ses plaids, assisté d'un greffier (2), soit au marché, soit à la cour Saint-Éloi (3). Il reçoit une pension de Saint(1)

Saint(1) communales, Juridiction de l'Échevinage (30 f"). Ce registre comprend surtout les sentences d'entrée des lépreux : des notes indiquent pour quelques-uns le jour d'entrée et le décès. Une cote inscrite sur ce registre semble le rattacher à la juridiction de l'Échevinage : « ces ordonnances viennent d'un seul échevin prenant la qualité de juge. »

(2) Ibid., Compt. des lépros., 3, f> 122 (1477-78); « A Regnault Brochard, greffier du commissaire et juge des lépreux ».

(3) Registre des sentences, f" 18 et 19.


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Ladre (1), payée sur les frais et actes de procès des lépreux (2). Le « procès » du « soupçonné de lèpre » peut être engagé d'office ou sur requête (3). Quand la rumeur publique apprend au juge des lépreux ou au procureur de l'Echevinage que, selon l'humble formule d'une requête, « il ayt pieu a Dieu visiter de la maladie de lesprc (i) » un habitant de la ville, assignation (5) lui est donnée à comparaître devant le juge ou l'Echevinage.

Le « juge » ou le procureur disposaient donc ainsi d'une autorité dont ils pouvaient abuser et qui pouvait devenir vexatoire. Il s'en trouve au moins un exemple. En 1421, Jean (louvion, quartenier et « commissaire de par le roy pour le débat de la congnoissance des ladres », satisfait des rancunes personnelles en faisant arrêter Martin Baillot avec lequel il avait déjà eu des démêlés et en le faisant visiter « comme ladre, ouquel n'en avoit aucune apparence, et fu trouvé sain » (6). L'affaire portée en Parlement, le commissaire fut con(1)

con(1) communales, Conclusions du Buffet, 2, f° 26 (S mars 1476 n. st.) : « M* Nicole Jaquemin [ juge des lépreux ], bailli de Chappitre, est venu devers Messieurs les remercier de la pension qu'ils lui ont présenté et donné qui est de il. s. p. » — Comptes; 2. f" 81 (1420-1430) ; « A Jaques de Chaumont, commis de par le Moy il la. Visitation des ladres, pour pluseurs procès qu'il a fait, lesquelz il a monstre par escript, contre pluseurs personnes touchans le fait de la maladie de lèpre, xl. s. p. ».

(2) Conclusions, 2, I" 27 (1473)-

(3) A2 3, dossier 11, nn 22 :.requête de Pierre Coquillart demandant à entrer à Saint-Ladre (16 juin 1546).

(4) Conclusions du Buffet, 8, f" 117.

(5) F*, 133.

(6) Archives Nationales, X", 4793, f°'109 et 117.


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damné à des dommages-intérêts et sa commission suspendue (1422) (1).

Devant l'Echevinage, le procureur expose que « le défendeur est suspect a plusieurs » de la maladie de lèpre (2) et requiert qu'il subisse une visite médicale. Le défendeur se reconnaît lépreux ou présente quelques mots de défense, tout en déclarant qu' « il n'a moien d'empescher » la visitat-ion. Le procureur et le malade conviennent alors du choix des médecins (3), de manière à donner des garanties et au poursuivant et au poursuivi : il n'y a pas de médecins-experts en titre. Puis jour est pris pour la Visitation. Elle se fait devant le juge des lépreux ou au Buffet de l'Echevinage (4) : les sergents de l'Echevinage amènent le malade : le procureur, un notaire assistent à la Visitation (5).

Jusqu'au xiv" siècle, le malade avait été inspecté et « palpé » par les ladres de l'hôpital (6), suivant un usage gardé en certaines léproseries jusqu'au xvi" siècle (7). Mais ce système présentait peu de garanties : les

(1) Archives nation., X ", 63, f° 3S4 (7 mars 1422, n. st.).

(2) Archives communales, liasse 34, renseignements.

(3) Pièces justificatives, XVIII.

(4) F, 1. 4. — F. 1. 14. n° 14.

(5) Compt. des lépros., 4, f 46, v° (1481-1482) ; « A Toste de la Crevisse pour despens faiz en son hostel le jour de lad. Visitation par les procureur, notaire, sergens et aultres officiers qui prirent et firent visiter led. Clerpoint... ».

(6) Archives nationales, X", 21, f° 333 (1368)'; «... Magistrum Johannem Prepositi qui eum inspexit et palpavit una cum aliquibus de domo leprosorum Remis commorantium, prout est fieri consuetum. »

(7) On le trouve fréquemment dans les maladreries de Lorraine (BUVIGNIER, Les maladreries de la cité de Verdun, p. 36). A Saint-


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lépreux avaient trop d'intérêt à ne pas admettre un confrère, dont la présence pouvait diminuer leur part des revenus ou tout au moins les avantages dont ils profitaient. De là, les contre-visites médicales ; de là, sans doute aussi, l'habitude de conduire les suspects à l'épreuve dans une autre ville, c'est ainsi qu'on les amenait à Saint-Ladre depuis Épernay (1). Au xve siècle, la visitation est confiée à des hommes de Fart : médecin, chirurgien et barbier, après avoir prêté serment, procédaient à leur enquête (2) et rédigeaient un rapport. Ces rapports souvent peu circonstanciés, sont, au xvi" siècle, de véritables consultations (3) qui peuvent fournir des indications pour l'étude des symptômes de la lèpre (4) et l'examen comparé de la lèpre du moyen âge et de la lèpre actuelle(5). Les praticiens ont sinon beaucoup

Lazare de Paris, les médecins ne font qu'une contre-visite de contrôle (L. LE GRAND, Les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris, p. 317). A Saint-Quentin, le malade « battu de lèpre », subit T « espreuve » de 3 médecins et de 3 ladres (GOIIART, Études Saint-Quentinoises, V, p. 302).

(1) Archives nationales, JJ. 64, f° 240 (1326-1327) : « Et doit lidiz abbés administrer despens aus soupeçoneus de meselerie en eux menant a Reins a esprueuves et a ceulx qui les compaignent pour ce... » Cf. L. LE GRAND, Le règlement de la léproserie d'Epernay, dans Bulletin du laboratoire expérimental de viticulture et d'oenologie de la maison Moèt et Chandon, 6e ann., t. II, n° 7, p. 131.

(2) F. 1, 4.

(3) Voy. pièces justificatives, XIX-XXII.

(4) Cf. A. PARÉ, OEuvres (éd. de Lyon, 1641), liv. XX, chap. VII-XIV, pp. 476-480. — P. G. HËNSLER, Vom abendldndischen Aussatze im Miltelalter (Hamburg, 1790; in-8°).

(1) Cfr. Dr BURET, Le gros mal du Moyen Age et la syphilis actuelle, p. 72. Dp H. LELOIR : Existe-t-il dans des pays réputés non lépreux des vestiges de l'ancienne lèpre:- 1 Voy. une bibliographie médicale du sujet dans DOM SAUTON, La léprose, pp. 472-484.


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de science, du moins beaucoup de conscience. Ils examinent principalement la tête (1) et ne concluent à un cas de lèpre que quand ils ont trouvé un certain nombre de « signes univoques ». Ils cherchent si l'oeil est fixe, la voixrauque (2),l'haleine fétide (3), la bouche ulcérée (4), le poil non adhérent au corps (5). Ils s'inquiètent surtout de la sensibilité de l'odorat et de la sensibilité nerveuse en général (6). — L'examen terminé, les médecins concluent que le suspect doit être relaxé ou qu'il est séquestrable.

Leurs honoraires sont portés au compte de la léproserie. Les docteurs en médecine, les chirurgiens, les barbiers sont rétribués suivant la hiérarchie. En 1428, deux médecins touchent 22 s. p. pour une visite (7). En 1563, un médecin et un chirurgien, 35 s. t. (8). En 1577, pour la visite de Jaquette Dargent (9), les échevins taxent le salaire des deuxmédecinsà 16 s. p., du chirurgien et du barbier à 12 s. p. En 1614, la visite de trois lépreux est payée 9 livres à Simon Hervet, docteur

(1) Cf. P. GUIDAULT, La léproserie de Bourges, 44. — GOMART, Études Saint-Quentinoises, V, p. 302.

(2) Archives communales, pièces comptables, liasse de 1593. Cf. BOUCHET, Serées, 36e série (éd. Lemerre, t. V, p. 112).

(3) F'. 4.

(4) Pièces comptables, liasse de 1593.Voy. lespièues justificatives.

(5) Archives communales, pièces comptables de 1593.

(6) Ibid. Cf. CIBRARIO, Précis des ordres de Saint-Lazare et SaintMaurice, traduct. H. FERRAND, p. 4. Voy. pour la représentation figurée de la lèpre, P. RICHER, l'Art et la Médecine^. 274-313 ; et H. HOLLANDER, Die Medizin in der klassischen Malerei, pp. 79 sqq.

(7) E. 16, 10, f° 6 : « A Maistre Jehan de Floricourt et Maistre Adam d'Origni, pour leur salaire d'avoir visité Merson la Josiere souppeçonnée d'estre ladre, XXII, s. p. »

(8) F3*. 27.

(9) F'. 14, n° 14.


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en médecine, et Jean Bourgeois, chirurgien (1) ; une. autre visite leur est payée 4 1. 10 s. t. (2). En 1631 (3), Claude Giilet, médecin, reçoit 48 s. p., et Pierre Richelet, chirurgien, 40 s. Ces sommes doivent être remboursées par le malade (4). Quand il ne peut payer, la visite est faite « aux despens » de l'Echevinage (5). Mais plus souvent, par un système de remboursement partiel très commun, une retenue est faite sur les pensions mensuelles du ladre jusqu'à concurrence du montant de ces frais (6). Le malade peut payer directement les médecins (7).

Cette visite est la condition préalable de toute réception. Elle est même imposée aux Rémois, habitant d'autres villes, qui ont déjà été déclarés séquestrables par les autorités locales (8). C'est, qu'en effet, la vie peu fatigante et sûre des pensionnaires des maladreries devait tenter et tentait des gens peu scrupuleux (9)- Naturellement d'autres font tous leurs efforts pour fuir cet internement. Beaucoup, craignant d'être effectivement lépreux, essaient d'échapper à la visite, et quelques-uns portent leurs protestations jusque devant le Parlement. Un prieur des Augustins de Reims fait une

(1) Archives communales, G. 185, compte 1614-1615, f° 29.

(2) Ibid., G. 186, compte 1613-1614, f° 89 V.

(3) F 2. 134.

(4) Conclusions du Buffet, 3, f° 60. (a) A 3. 4, n° 8, p. 3.

(6) A 2. 4, n° 6.

(7) Conclusions, 2, f" 201.

(8) Ibid., 6, f° 12.

(9) Archives nationales, V. 132, liasse de 1626, n° 244 : «... Et qu'il s'estoit vanté que, pourveu qu'il eust une heure libre auparavant que l'on le visitast, il sçavoit un moyen pour se faire enlever la chair et boutons qui le feroient infailiblement juger lépreux. »


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longue résistance : il y gagne tout au moins du temps (1). On invente des raisons, des explications. Une suspecte prétend que « ce qu'elle avoit au visaige estoit du feu qu'elle avoit eu au lieu de Troyes (2) ». On compte sur Tignorance du médecin : on use même de ruse : on demande une contre-visite à Paris et on envoie un autre se faire visiter pour soi (3). On accuse les médecins de partialité : Guillaume L'Auditeur, barbier, prétend qu'ils veulent se débarrasser d'un concurrent gênant « ayant déjà essayé de luy faire interdire de povoir besongnier de son mestier (4) » ; Jaquette Dargent refuse d'être examinée par. M' Pierre Pasté qu'elle dit « luy estre ennemy » et- l'avoir menacée plusieurs fois (5). Les contre-visites sont fréquentes : on change de médecins, on en fait venir d'ailleurs, on va à Paris. Jaquette Dargent subit quatre ou cinq visites et gagne ainsi plusieurs années (6). D'autres demandent franchement des délais, sous un prétexte quelconque : celui-ci est souffrant, celui-là prend médecine (7). Les échevins consentent quelquefois à ces délais. Pierre Le Vergeur apporte un certificat de Paris : il n'est encore que menacé de la maladie et « on le povoit commuer, qu'il usast de régime <> : le juge des lépreux lui permet de rester enfermé chez lui quelque temps « pour veoir comment lad. maladie se pourroit terminer (8) ». Le 4 novembre 1477,

(1) Comptes des léproseries, 3,f 0581 et v° (1475) et f° 130.— Ibid., 4, f° 47 v° (1482-1483).

(2) Registre des sentences du juge des lépreux, f° 15.

(3) Conclusions du Buffet, 4, f° 104.

(4) Registre des sentences, f° 10 v°.

(5) F. 1. doss. 14, n°5 (1577).

(6) F. 1, 14, n° 1.

(7) Registre des sentences, f° 30 v°.

(8) Liasse 34, renseignements (octobre 1462).


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M" Cristofle Labbé obtient la même faveur jusqu'au jour de Noël (1). Mais souvent les échevins se lassent. La femme d'un avocat, M8Jean Briffaut, répond à toutes les sommations par le dédain (2) : elle est retirée à Châlons-sur-Vesle, qui dépend de l'abbaye de SaintThierry : l'abbé demande qu'elle soit expulsée de sa seigneurie : à la fin, le procureur de l'Echevinage demande à la faire arrêter. Quelques-uns même, à bout de résistances, prennent la fuite (3).

La visite médicale est suivie d'une déclaration officielle, faite dans les formes. Sur la requête du procureur, le malade entendu sur ses moyens de défense, les échevins rendent une sentence par laquelle le suspect est « prononcé, jugé et déclaré lépreux (4) » et condamné « sous peine du feu », suivant la formule'du xvic siècle, à quitter l'enceinte de Reims et à se retirer « au lieu de sa nativité » pour y être séquestré. Le lépreux est banni de la ville.

Les Rémois présentent alors requête pour entrer à Saint-Ladre. Les non-Rémois n'ont plus qu'à quitter Reims : ce qui ne va pas toujours sans résistance (5).

(1) Conclusions du Buffet, 2, f°57. C'est peut-être durant un de ces répits qu'un lépreux « soy pensant retourner en son hostel » est pris de douleurs violentes, entre à Sainte-Anne et y meurt (Conclusions, 4, f° 182 v°, 15 avril 1536, n. st.).

(2) Liasse 34, n° 6, 2e pièce (1555).

(3) Archives communales, Comptes des lépros., 10, f° 183 (15371538) : « A Maistre Remy Chevalier, docteur en médecine pour avoir palpé et visité Pierre Herbot... lequel Herbot s'est rendu fugitif. »

(4) F<- 14, 10.

(5) Archives communales, Compt. des léproser., 2,f° 178 v°.—Ibid., f° 177 v° : « A Guillaume Coquillart, pour avoir minué le mandement pour mettre hors de Reims les souppeçonnéz de la maladie de lèpre et hors des' faubours et avoir esté du conseil des gouverneurs en ceste partie, pour ce xi. s. p. » (1465-1466).


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En effet, suivant le système commun du moyen âge, la léproserie de Reims est uniquement réservée aux Rémois (1). Etre Rémois est la condition nécessaire et suffisante. Il n'y a pas besoin d'être, comme par exemple pour entrer à la maladrerie du Val près d'Abbeville (2), bourgeois-juré (3). Il faut être né Rémois. Certains règlements excluaient les bâtards, et Beaumanoir (4) déjà s'élève contre cette coutume, les maladreries étant fondées, dit-il, « sur aumosnes et pour commun porfit, pour desseurer les sains des enfers de lièpre. » A Reims, une lépreuse bâtarde est reçue sans difficulté en 1531 (5),

La « prise » de la maladrerie est donc très restreinte. En dehors de Reims, la séquestration et la surveillance des lépreux retombent entre les mains de l'archevêque, qui n'en est privé dans la ville que par exception. Mais, fréquemment, l'évêque abandonne soit à l'archidiacre, soit au Chapitre une part de son autorité sur les hôpitaux du diocèse. C'est ainsi qu'au xine siècle, une constitution d'Innocent IV (6), portant règlement des droits

(1) Cependant certaines léproseries-sont entretenues à frais communs par plusieurs villages, par exemple, celle de la Banlieue près d'Arcueil qui recevait tous les lépreux des paroisses de la banlieue parisienne situées sur la rive gauche de la Seine.

(2) A. LEDIEU, Admission d'un lépreux dans la maladrerie du Val près d'Abbeville en 1494, dans Bullet. historiq. et philologiq. du Comité des Trav. historiq., 1895, p. 296.

(3) Inversement à Calais, le descendant d'une famille de lépreux ne pourrait être reçu bourgeois, d'après A. de LOISNE (La maladrerie du Val de Montreuil, p. 27).

(4) BEAUMANOIR, Coutumes de Beauvoisis, éd. Beugnot, t. II, p. 326. Cf. P. GUIDAULT, La léproserie de Bourges, p. 34.

(5) Conclusions, 4, -f» 98.

(6) 16janvier 1254 (VARIN, Archives administratives de Reims, 1.1, 2e part., 753).


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de l'archevêque et de l'archidiacre, avait reconnu à l'un et à l'autre en commun et solidairement le droit de nomination, correction et destitution des administrateurs dans les léproseries et maisons-Dieu du diocèse. Un curieux procès de 1368 (1) montre de même l'archidiacre réclamant contre l'archevêque la Visitation et séquestration d'un lépreux de Champfleury, dans la banlieue rémoise. Nous ne connaissons pas l'issue du procès. Au xvi° siècle, un lépreux du même village est « séparé d'avecq les personnes saines » par sentence de l'officialité de Reims (2). — Le Chapitre avait également droit d'institution clans un certain nombre d'hôpitaux rémois (3) ; et de même, on le voit au xvi" siècle réclamer le droit de séquestration des lépreux habitant dans les limites (4) de sa haute justice. Mais ces contestations laissaient en fait entier le droit des échevins à intervenir dans.tous les cas de lèpre qui se déclaraient à Reims.

Cette règle qui réservait aux seuls Rémois une institution purement locale, s'explique d'elle-même. L'auteur anonyme du Liber praclicus de consuetudine remensi avait cependant voulu, dans une tentative intéressante, l'appuyer sur des textes (o). Un lépreux, né à Fismes, n'avait pas été admis à la maladrerie de cette ville sous raison qu'il habitait Reims depuis trop longtemps. La sentence de l'official, rendue à ce propos, est

(1) Archives nationales, X,a, 21, f° 333. Cf. VARIN, loc. cit., t. III, p. 324.

(2) Archives communales, Conclusions du Buffet, 7, f° 171 v° (1574).

(3) Ibid., layet. 21, liasse 32, n° 1 : sentence arbitrale entre le Chapitre et l'archidiacre (1265).

(4) Ibid., layet. 3, liasse 3, n° 7 (1517).

(5) Ch. 250. VARIN, Archives législatives, t. Il, p. 199.


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hérissée de textes du Code et du Digeste(1). La résidence dans une autre ville, quelque prolongée qu'elle soit, ne peut détacher un Romain de son pays d'origine : « Nec mutalur origo nec in bonis nec in malis propter domicitiam adjutum ». Il ne peut fuir les charges que la ville natale lui impose, mais elle ne peut refuser les services qui lui sont dûs. « Jus originis in honorions obeundis ac muneribus suscipiendis non mutatur. » Ces textes sont applicables aux curiales qui eussent ainsi évité les charges qui pesaient sur eux. Les juristes romains ne s'attendaient guère à ce qu'ils servissent un jour pour ou contre les administrateurs d'un hôpital.

Il ne suffit pas de se déclarer Rémois ; il faut faire la preuve (2). Tantôt le lépreux produit lui-même ses témoins devant le juge, tantôt une enquête est faite, de l'aveu du malade, par le greffier (3) ou par un officier dé l'Echevinage (4). On a quelques-unes de ces informations (5) : on interroge les parents et les voisins sous serment et ils touchent chacun une légère indemnité.

Ce système restrictif devait être gênant pour plus d'un lépreux. En 1474, une « foraine » sollicite son entrée à la léproserie, en faisant remarquer que « dès son jeune âge et dès l'âge de trois ans, elle a tous jours demouré en ceste ville de Reims, mariée à un bourgeois et par ce bourgeoise (6) ». Au xive siècle, les échevins avaient

(1) Digeste, L, 1, 15, in fine. — Code, X, 38, 4.

(2) Pièces justif., X.

(3) Archives communales, Comptes des léproseries, 4, f" 98 v°.

(4) Pièces justificatives, XI.

(5) Archives communales, pièces compt. (1562). Cf. Digeste, XXXIX, 3, 2,- § 8, dans Liber practicus (VARIN, Arch. législatif, de Reims, t. 1, p. 199).

(6) A3. 4, n° 7 (15 juillet 1474).


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même eu à défendre la règle contre le Saint-Siège. En 1342, Robert de Bours, dit Peuboir, clerc du diocèse de Thérouanne, lépreux, obtient par grâce spéciale de Clément VI, d'être reçu à Saint-Ladre. Les échevins rappellent aussitôt leurs anciens privilèges et refusent d'admettre un étranger. Ils sont excommuniés et le pape remet l'affaire au jugement de l'abbé de SaintNicaise (1); mais, le 30 août, Peuboir, reconnaissant le droit des échevins, l'organisation laïque de la maladrerie et son caractère local, renonce à poursuivre davantage (2). Il est vrai que, si les administrateurs maintinrent d'abord très strictement cette règle, elle dut fléchir quelquefois par la suite. Un fort droit de bienvenue pouvait adoucir bien des rigueurs. En 1479, la femme de Jean Costart, cirier, est reçue « non obstant qu'elle soit native de Touraine », moyennant une compensation de cent livres tournois (3).

La léproserie étant uniquement réservée aux Rémois, il est tout naturel qu'on n'ait pas songé à établir des conditions de nombre. Le nombre des pensions ne fut fixé qu'au xvi" siècle. Jusque-là, ce chiffre est des plus variables. Sans se livrer à une statistique complète, on peut dire que la léproserie compte, en général, de 3 à 5

(1) Archives communales, liasse 34, Renseignements (15 et 20 août 1343).

(2) F. 1. 1 (30 aolït 1343) : « ... Quia domus leprosarie remensis citm omnibus redditibus et peiiineneiis suis ex fundatione sua et de consuetudine antiquissima ad totalem dispositionem civium seu scahinorum, non alicujus ecclesiastice persone pertinent et pertinet et quod nulti leprosi... ibi. recepti fuerint nec recipi debent nisi de civitale remensi or lundi... »

(3) Conclusion, 2, f° 70 (7 sept. 1479). — Comptes, 3, f° 181 v». — De même, réception de Jean Le Villain, curé de Suippes (cahier isolé de conclusions, 1480-1481, f" 4 v°).


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malades. Il y en a 5, dont 2 femmes et 2 prêtres en 1471-1472; 5 en 1474-1475. On en trouve 2 en 1372, en 1470-1471 ; un seul en 1338-1339, 1359-1360, 13601361, 1422-1423, 1453-1454, 1463-1464. La maladrerie est assez fréquemment vide (1382, 1429, 1430, 1433, 1449, etc.). Au xvi° siècle, au contraire, elle sera plus peuplée. De 1511 à 1519, 13 lépreux sont reçus. En 1540, 2 hommes et 6 femmes; en 1519, 11 malades; 12 en 1537 et en 1538. En 1549, il y avait 2 femmes et 6 hommes : cette année, le nombre des pensionnaires fut officiellement fixé à 10. 11 importe d'avoir ces chiffres présents à l'esprit en poursuivant cette élude. Ils permettent de se faire une idée plus précise de ce qu'était cet hôpital spécial et d'éviter une sorte de grossissement que produirait le groupement des faits, présentés ici en raccourci.

Reconnu « infect etentichié » de lèpre, jugé séquestrable « de la compaignie des saines personnes », reconnu Rémois, le ladre va enfin être reçu à la léproserie. Mais la réception au xv" siècle est encore précédée d'une sorte de contrat où les échevins spécifient, avec le lépreux, les charges et avantages qui vont résulter de cette réception. Le malade présente ses requêtes au juge des lépreux (1), ou bien les gouverneurs de l'hôpital vont le trouver à son domicile (2). Ils lui indiquent ce qu'il recevra « pour son vivre et gouvernement », lui fixent un délai pour se préparer et lui donnent jour pour son entrée. Acte est dressé de leurs déclarations.

Ce contrat indique en même temps les « droits et devoirs » que le nouvel arrivant aura à acquitter. Ce

(1) Registre du juge des lépreux, f° 22 (1528).

(2) F. 1, 6. — Pièces justificatives, XI.


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droit de bienvenue qui ne s'explique plus guère au xv» et au xvi 8 siècles est, semble-t-il, un souvenir dénaturé de l'ancienne discipline. Au XIII" siècle, il était tout naturel qu'un méseau riche ou aisé, devenant le « frère » de malheureux que le même mal avait frappés, ne voulût pas diminuer encore le peu qu'ils pouvaient avoir et essayât d'apporter à ses compagnons plus pauvres quelque bien être matériel. De là ces donations de surcens signalées déjà : un fils donne pour sa mère ; une mère donne pour « la part et portion» de son fils (1). Au xive siècle, cette « bienvenue » répond déjà peut-être à une autre inspiration. Un malade de plus, ce sont des avantages de moins. Ainsi, il arrivera au xvi" siècle que les anciens refuseront au nouveau sa part des aumônes, du bois, des fruits du jardin (2). Le nouveau est heureux de pouvoir, de cette façon, apaiser leur humeur. A Troyes, il leur offre un régal qui, souvent, tourne à l'excès (3). A Reims, il paie 60 (4) ou 40 s. (5), qui sont partagés entre les anciens (6). A la fin du xive siècle, ce droit semble obligatoire. Il est désormais fixé à 10 l. p. (7), et les lépreux n'en touchent plus rien. Il a donc perdu entièrement son caractère. Les gouverneurs ne l'en réclament pas moins avec énergie, poursuivant au

(1) Archives communales, inventaire de 1478, f° 35.

(2) Ibid., Conclusions du Buffet, 4, f 110(1531).

(3) [HARMAND], Notice historique sur la léproserie de Troyes, dans Mémoires Société d'agriculture de l'Aube, années 1847 et 1848, p. 450.

(4) E. 15, 3, f° 2 V (1350).

(5) E. 15, 15, f» 22 (1370).

(6) E. 15, 1, f° 5 v° (1338). — Un lépreux touche 6 d. de « vivailles de la venue Wedeline famé Piet de bos ».

(7) E. 16, 2, f° 4 (1338). —Comptes des léproseries, 3, f° 36 v" (1471). —Pièces justificatives, XI.


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besoin les parents ou les amis(l) du nouveau venu.

Cette taxe est accompagnée, depuis le milieu du xve siècle, de menus droits aussi peu explicables : 5 s. au curé, 5 s. à chacun des gouverneurs, autant au convers, au prévôt, aux clercs de l'Échevinage (2). Au xvie siècle, le lépreux doit ainsi, outre les 10 1., payer 15 1. aux différents officiers et 2 cierges de cire de 1 livre (3). Il peut s'acquitter par une créance (4). Quand il ne peut suffire à ces frais, on fait une retenue sur sa pension jusqu'à concurrence des sommes dues (5).

Ces taxes d'entrée disparurent au milieu du xvie siècle. Après en avoir vainement demandé la suppression aux échevins (6), les malades profitèrent de l'intervention du pouvoir central dans les affaires de l'hôpital pour les faire supprimer (7). Une décision de maître Martin Ruzé, commissaire du Grand Aumônier de France, condamne, en 1551, les échevins à les restituer et défend de plus rien prélever à l'avenir pour cette bienvenue (8).

Il reste à parler d'une dernière formalité appelée au xve siècle 1' « ejectio », la « separatio leprosoritm ». C'est une cérémonie religieuse par laquelle le lépreux est définitivement reclus. Cette « separatio » semble

(1) Archives communales, Conclusions du Buffet, 4,f°110. — Ibid., 4, f° 48 (1524) : « Aussy a esté conclud que ou les maistres et gouverneurs ne pourrait estre payez des réceptions des lespreux et lespreuses, qu'ils facent obliger les père, mère ou gens souffisans pour payer lad. réception a telz jours qu'ils verront estre affaire. »

(2) Pièces justificatives, xi. — Comptes, 3, f° 5.

(3) Registre du juge des lépreux, f° 7 v° (1515).

(4) Conclusions du Buffet, 4, f» 199 v°.

(5) A3. 4, n° 6.

(6) Archives communales, Conclusions du Buffet, 5, f° 202v°(1549).

(7) Ibid., id., 5, f° 202.

(8) F*. 1(12 juillet 1551).


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n'avoir été imaginée que dans les derniers siècles (1) : en tous cas, nous ne croyons pas qu'il y ait à Reims, avant le xv" siècle, de trace de ce cérémonial. Les anciens rituels rémois n'en font aucune mention, et l'on ne voit rien qui le rappelle parmi les obligations du chapelain de Saint-Ladre. Un inventaire de productions, faites dans un procès du xvn" siècle (2), indique bien un ancien « livre en veslin » dont nous avons déjà signalé la perle et qui renfermait « les cérémonies qui se font à la réception des lépreux ». Mais ce livre semble pouvoirêtre assimilé à un livre écrit en 1474-1475 (3) et ce serait seulement à cette date que remonterait, dans les Archives de l'hôpital, la première mention de cette cérémonie.

Marlène (4), au xviu 6 siècle, l'a fort longuement décrite, et même toute une partie de son texte est spécial au diocèse de Reims. Il a eu, en effet, pour sources :

(1) On trouve, au xiie siècle, à Montgeron, une procession faite à l'entrée d'un lépreux (L. LEGRAND, Les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris, 69); le règlement de la léproserie d'Epernay, au xive siècle, semble indiquer un certain cérémonial (L. LE GRAND, Le règlement de la léproserie d'Epernay, dans Bulletin du laboratoire de la maison Moèt et Chandon, 6e année, t. II, n° 7, p. 125). A la maladrerie du Val de Montreuil, un texte de 1464 signale des usages qui remonteraient au xne siècle (A. DK LOISNE, La maladrerie du Val de Montreuil, p. 91-92). Mais ce ne sont là, semble-t-il, que des exceptions.

(2) A 2. 3, n" 44, f° 15 V.

(3) Archives communales. Comptes des léproseries, 3, f" 110 : « Pour ung livre fait pour mettre a S. Ladre aux hommes, ouquel a la bénédiction de l'eaue, le service que l'en fait a enterrer les ladres, la messe que l'en dit quand on les reçoist en l'ospital et la manière qu'on y tient avecques les deffenses qui leur sont faites a leur entrée aud. hospital, xv s. vin. d. p. »

(4) De antiquis ecclesise ritibiis, éd. de Lyon, t. III, p. 332. Ed. d'Anvers (1736), t. II, 1011.


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d'une part, le Rituel de Reims de 1585, cité aussi par Moléon (1) et qui reproduit, sur ce point, le Rituel de 1554 édité par Bacquenois(2) ; et, d'autre part, un missel incunable (3) de 1491, dont un exemplaire est à la Bibliothèque de Reims (4) et un autre, venant de SaintT Aubin d'Angers, au musée diocésain de cette ville (5). Ce missel reproduit le texte d'un règlement de la « separatio leprosorum » donné au temps d'un archevêque Renaud, qui est probablement Renaud de Chartres, le prédécesseur de Juvénal des Ursins (1414-1444) (6).

Quoi qu'il en soit, ces textes ne sauraient s'appliquer qu'imparfaitement à la léproserie de Reims. Plus d'un détail ne convient qu'à de petites maladreries de campagne, où ne se trouvait qu'un lépreux soumis au curé de la paroisse (7). Le curé de Saint-Eloi devait donc ne faire usage du règlement du xve siècle qu'avec une certaine liberté. D'autre part, les textes reproduits par Martène ne donnent aucun rôle aux échevins. Voici donc comment on pourrait à Reims se représenter cette cérémonie.

Au jour fixé, les gouverneurs de Saint-Ladre, accompagnés des officiers de l'Échevinage et de notaires (8),

(1) Voyages liturgiques de France (1718), 177.

(2) Manuale seut (ut vocant) Agenda ad usum insignis ecclesim rhemensis (1554, in-4°), fs 55 v°-57 v°.

(3) « Ex vetere Codice », dit Martène.

(4) Bibliothèque de Reims, Incunables, n° 12 : Missale ad usum remensis ecclesiee, f° 238.

(5) C'est cet exemplaire qu'a connu Martène.

(6) Ce texte se retrouve également dans le Missale ad consuetudinem insignis ecclesie remensis, publié par Simon Vostre en 1505, fM XLVIII sqq. (Bibliothèque Nationale, Rés. B. 27774).

(7) De même à Reims, le lépreux n'est pas enterré « juxta domunculam suam », etc.

(8) Archives commima/es/Comptes des léproseries, 7,fe 196 (1524).


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allaient prendre avec le curé de Saint-Eloi ou le chapelain de Sainte-Anne, le malade qui attendait chez lui. Le prêtre est en étole et en surplis. La procession se rend alors, « la clochette sonante », à Saint-Ladre où le prêtre célèbre la messe (1). L'office ne comporte, et c'est un point sur lequel insiste le Rituel de Reims (2), ni Requiem, ni chant funèbre. Ce n'est donc point l'enterrement d'un vivant sur lequel on a si souvent déclamé : « quia non est mortuus cor pore, sed propter morbum leprx ab omnibus expulsus. » Les textes de l'Épître et de l'Évangile rappellent le miracle de lépreux guéris : le miracle de Naaman, guéri en se plongeant dans le Jourdain sur le conseil d'Elisée (3), et le miracle des dix lépreux guéris par Jésus (4). La messe s'achève. Le lépreux est conduit dans la cour de l'hôpital : c'est alors qu'il est « séquestré du monde ». Le prêtre lui jette par trois fois de la terre sur les pieds (5). Au xvn° siècle, on creuse même une petite fosse (6) et le malade y place un pied : symbole qui apparaîtra moins douloureux quand on connaîtra la vie des lépreux à cette époque. Le prêtre lui donne l'eau bénite.

A ce moment, l'un des gouverneurs ou un officier de l'Échevinage, tenant en mains un « petit livre de parchemin couvert d'aix et de cuir blanc », lui fait à haute voix lecture des « ordonnances et deffences » (7) de

(1) Registre du juge des lépreux, f" 22 v° (1528).

(2) MARTÈNE, De antiquis ecclesix rilibus, t. II, 1005.

(3) Rois, II, 5, 9.

(4) Luc, XVII, 11.

(5) Archives communales, liasse 34, Renseignements.

(6) Ibid., Pièces comptables de 1615 (6 décembre 1615).

(7) Pièces justificatives, XIII. Cette copie n'est pas datée : mais un des quatre jurisconsultes qui ont signé la consultation, N. de Hacqueville, semble être un maître des Comptes cité en 1540 (VARIN, Archives législatives de Reims, 2e part., Statuts, t. I, p. 695).


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l'Échevinage qu'il devra observer « sur peine du feu », durant son séjour à la maladrerie. Le petit livre de parchemin a disparu, mais on a une copie de ces « deffenses » faite pour une consultation juridique au xvi° siècle, et ce texte diffère par plusieurs additions intéressantes du texte des rituels du xvi 8 siècle (1). Ce n'est point malheureusement, comme on pourrait s'y attendre, un règlement intérieur. En réalité, trois articles seuls s'appliquent au régime de la maison. Les autres, qui reprennent le thème général des défenses de cette nature, règlent la conduite du ladre en dehors de l'hôpital, dans la rue, dans la campagne, et c'est l'énumération des mesures prises contre la contagion, contre la « maladie ragieuse » (2).

Ces défenses entendues, le nouveau venu prête serment aux échevins ; ce serment (3), si l'on en juge par le résumé qui suit le texte des défenses que l'on a conservé, est assez peu ordonné : il comprend, avec une promesse d'obéissance, de fidélité et de respect aux échevins, juges et seigneurs, une prescription d'ordre public et une prescription de régime intérieur. Cette prescription d'ordre public est d'autant plus intéressante qu'elle pourrait se rattacher à un texte plus ancien. Le ladre devra dénoncer secrètement et en diligence, tous les complots qu'il pourrait découvrir contre les rois, les seigneurs de son sang ou les échevins. Celle partie du serment s'applique naturellement aux manquements à la discipline, aux révoltes qui se préparent à l'intérieur de la maladrerie et dont le lépreux pourrait

v(l) Il diffère aussi par quelques mots anciens que les rituels ont supprimés. (2) Conclusions du Buffet, 2, f" 30 v°. 43) Pièces justificatives, XI11.


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avoir vent. Mais peut-être cette formule a-t-elle un autre sens encore. A Autun, au moment de son entrée, le lépreux s'engage à prévenir la justice s'il apprend quelque complot contre l'État, ou que l'on « veuille empoisonner les eaux vives » (1). C'est ici, manifestement, un souvenir de la terrible affaire de 1321 où les lépreux, accusés d'avoir, de connivence avec les Juifs, en un vaste complot, empoisonné tous les puits de France, furent l'objet d'une si épouvantable répression (2). Il pourrait en être de même à Reims. Il faut remarquer, en effet, que la répression eut lieu dans tout le royaume et que le texte de l'une des ordonnances promulguées à ce propos par Philippe-le-Long (3) est précisément connu par une copie adressée au bailli de Vermandois (4). Nous n'avons pas retrouvé dans l'histoire des lépreux de Reims de trace de cet événement. On pourrait voir, dans ce serment, sinon une preuve directe que cette affaire ait eu un retentissement à Reims, du moins un souvenir de l'impression qu'elle fit sur l'esprit public et un signe de la défiance qui continua à s'entacher aux malheureux lépreux (5).

(1) BULLIOT, Séquestration des lépreux dans le diocèse à"Autun, dans Bulletin Société d'émulation de l'Allier, t. VI, p. 55.

(2) LE HUGEUR, Philippe-le-Long, t. I, p. 421.

(3) Poitiers, 20 juin 1321.

(4) DUPLÈS AGIER, Ordonnance de Philippe-le-Long contre les lépreux, dans Bibliothèque de l'Ecole des Chartes, 18° année (4e série, t. III), p. 265.

(5) On peut en voir un autre dans l'article défendant au lépreux de sortir sans son habit de mésel. Cet article, placé où il est (Pièces justificatives, XIII), semble indiquer que l'on veut pouvoir surveiller les agissements des lépreux hors de la léproserie. Il ne fait d'ailleurs que renouveler un article des défenses. Cet article et la promesse de révéler les complots, qui le suit, rappelleraient donc peut-être un texte plus ancien inséré plus tar4 dans ce serment composite.


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Une chambre ou une borde a été préparée pour recevoir le nouveau malade, construite à neuf (1) ou tout au moins appropriée (2). Le curé prend le lépreux par. la main et le mène jusqu'à la porte, en lui adressant ses conseils et ses consolations (3), lui montrant, suivant les paroles rapportées par Martène, « le royaume de Paradis où il n'y a nulle maladie, ni nulle adversité, mais sont tous purs et nets, sans ordure et sans quelconque tasche (4)... » Le prêtre et les assistants lui remettent alors une aumône et se retirent : le lépreux est séquestré.

Si ces « solennitéz » n'ont, dans cette forme, été organisées qu'assez tard, elles furent, du moins, strictement observées. Person François étant venu tout simplement s'installer dans une borde, on songea d'abord à l'expulser (5) ; puis on finit par transiger à condition que François serait « contrainct de rentrer en la ville pour ce qu'il est sortiz sans le congié » des échevins, et qu'on le recevrait avec les « solempnitéz en tel cas requises» (6). En 1577 quelqu'un ayant, semble-t-il, demandé la suppression de ce cérémonial, les échevins concluent que pour mener les ladres « aud. hospital sera gardée la forme ancienne » (7).

(1) Archives communales, Comptes des léproseries, 8, f° 227 (1527-1528) : « Pour faire de neuf une borde ou maison Jehan Leclerc, lespreux... »

(2) Ibid., 3, f° 22 (1469-1470) : « A Raulin'Rousseau pour sa peine d'avoir nettoyé et vidé les terres qui estoient en la chambre dud. Anthoine Wladé... xvi. d. p. »

(3) Pièces justificatives, XIII.

(4) MARTÈNE, De antiquis ecclesias ritibus, II, 1005.

(5) Conclusions du Buffet, 4, f" 49 (1525, n. st.).

(6) Ibid., 4, f° 50.

(7) Ibid., 8, f 117 v"(1577).


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Le malade passera désormais sa vie dans l'enclos. Cependant il n'est pas interné sans recours (1) : il peut encore demander, à ses frais (2), un nouvel examen médical (3) et être mis en liberté. Ce sont là, au xive et au xv" siècles, des exceptions. Eu 1488, Martin Vyet et Colette Liezot sont ainsi conduits à Châlons et reconnus sains (4). Ou bien ce sont les échevins qui font faire cette contre-visite pour alléger les charges de la maison (5). Le lépreux, remis en liberté, peut être remboursé de son droit de bienvenue (6).

II.

Le lépreux une fois reçu, essayons de nous représenter son existence à l'intérieur de la léproserie.

Ce qui caractérise la vie du lépreux aux xve et xvic siècles, c'est son indépendance. Sans doute cette liberté

(t)A Montpellier, le méseau a un délai très court pendant lequel il peut encore se retirer (A. GERMAIN, De la charité publique et hospitalière à Montpellier au moyen âge, 9). A Bourbourg, il peut même ne pas entrer du tout pourvu qu'il acquitte les droits de bienvenue (L.DE COUSSEHAKER, Maison des lépreux lez Bourbourg, 10).

(2) Archives communales, Conclusions du Buffet, 2, f° 209 (1497). Cf. Pièces justificatives, XXII.

(3) E. 15, 16, f° 26 : « Item a Gerardin le barbier pour sainier Jesson Herpelin quant il fu esprouvéz a savoir s'il estoit malades de meselerie ou non v. s. p. » (Comptes de 1368-1373).

(4) Archives communales, Comptes des léproseries, 4, f° 180 v".

(5) Ibid., Conclusions, 6, f" 85 v° (1561 n. st.). — E. 15, 16, f° 28 (1371).

(6) Ibid., Comptes, 3, 34 v°. De 2 terres louées à Martin Vyet « rien n'a esté receu pour ce que Messieurs ont ordonné le rembourser par chacun an de LXIH. S. p. jusques a plain remboursement des fraiz par lui soustenus quant il fut mys comme lépreux qu'on l'avoit jugié en l'ospital... »


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est limitée sur plus d'un point, mais il n'est pas astreint à un règlement minutieux, qui fixerait étroitement l'emploi de sa journée. La léproserie de Reims, toute laïque, n'a rien au xv° siècle d'une communauté religieuse : la vie commune n'existe plus, et chacun des malades semble à l'intérieur de la maison et dans certaines limites, pouvoir organiser son existence comme il l'entend. Et le manque de renseignements précis sur le régime intérieur de la maladrerie à cette époque tient non seulement à la disparition de textes, mais à cette liberté même laissée aux malades.

Chacun d'eux vivra suivant son rang et sa fortune. La léproserie fait à tous les mêmes avantages, assure la même pension : mais il est certain que maistre Jehan Beguyn, licencié en lois (1), ou frère Jehan Triplot, docteur en théologie, religieux de l'ordre des Frères Prêcheurs (2) ne vivront pas de la même façon que tel autre pauvre diable. Et il doit en être ainsi tout naturellement dans une maison qui n'est pas seulement un hôpital où se réfugient les pauvres, mais une sorte de lazaret, où sont reclus, de par l'autorité municipale, tous ceux qui pourraient être un danger pour la santé publique.

Un point certain, c'est qu'à Reims les lépreux ne purent pas exercer de métier, comme à Bordeaux (3) ou en Bretagne (4) ; ils ne font rien et invoquent sans cesse

(1) Comptes des léproseries, 7, f° 10 v° (1518-1519).

(2) Comptes de 1612, f° 35.

(3) Ils pouvaient remplir certaines professions que M. F. DURODIK (Etude de la lèpre tuberculeuse et les léproseries fondées à Bordeaux et en Guyenne au moyen âge, p. 14) déclare les plus viles : vidangeurs, charpentiers, tonneliers, cordiers et ménétriers.

(4) Ils n'étaient et ne pouvaient être que cordiers (L. ROSE.NZWEIO, les Cacous de Bretagne, p. 8).


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l'impossibilité où ils sont de gagner leur vie (1). Les échevins lés déclarent eux-mêmes « pauvres beaucoup plus recommandables que tous autres... a cause de leur maladie qui les rend inutilz » (2). Cependant, à l'intérieur de la léproserie, le malade peut rendre quelques petits services (3), ou au besoin travailler, de son ancien métier (4). Un exemple curieux peut nous renseigner sur ce point. En 1513 les maîtres de l'artillerie, manquant d'ouvriers, apprennent qu'un homme du métier est reclus à Saint-Ladre. Sur leur requête, un des gouverneurs conduit le lépreux à la « grange » de la ville pour y voir « les bassins et aultres choses qui sont de metail propices a faire de la pouldre à canon pour lad. ville »; mais les échevins ne lui permettent pas de travailler sur place et il est ramené à l'hôpital « pour y besongner de son art » (5).

Le lépreux n'étant astreint à aucun travail reste assis devant l'hôpital, mendiant, s'il est pauvre, cliquetant pour appeler l'attention des passants et des voyageurs, nombreux à l'entrée de la ville, sur les routes de Paris et d'Epernay ; il se promène dans la « gallerye » ; il se retire dans sa borde, entre sa servante et ses chats (6). Il s'occupe de sa petite basse-cour, élevant des canards ou des lapins : cette basse-cour est réservée à son usage

(l)Par exemple : Conclusions du Buffet, 4, f° 231.

(2) A 3. 4, n° 13.

(3) VARIN, Archives administratives, II, 2e partie, 746 : « It. xn d. a Davoudet pour fouées entasser ».

(4) Archives communales, pièces comptables (1519): Reçu pourJ. Gibre, lépreux, du gouverneur de Saint-Ladre, la somme de 5 s. t. pour « avoir fait l'aire de terre de la maison faite nuefve oud. hospital pour Jehan Dufour, lépreux » (6 juillet 1519).

(5) Ibid., Conclusions du Buffet, 3, f° 100 v° (7 juin 1513).

(6) Archives communales, conclusions du Buffet, 4, f° 89 v°.


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particulier ; il lui est interdit, si nous en croyons une défense de 1603(1). de vendre cette volaille au dehors, de même qu'une règle générale interdit aux marchands de se fournir dans les léproseries (2). Au xv" siècle le jardin des «haitiéz » est loué avec la censé. L'autre partie, « le grant jardin des lépreux », est divisépar carrés. Chacun d'eux cultive sans doute dans le sien les légumes qui lui sont nécessaires. Les fruits sont partagés entre les malades, et le raisin des treilles sert à faire du verjus. On ne voit pas en effet aux comptes que lesfruitssoientordinairemenl vendus ; et les conclusions décidant l'admission des lépreux, comportent qu'ils recevront leur part « des aulmosnes, arbres, bois, fruict et verjus » (3). Les malades doivent naturellement respecter le jardin qui leur est confié, ne pas accaparer les fruits, ne pas arracher les arbres pour se procurer du bois de chauffage (4).

Le soir venu, le lépreux se couche. A Reims, comme en d'autres villes (5), des précautions devaient être prises contre le feii. Nous n'avons relevé que deux indications d'incendies, l'une en 1447 (6), l'autre en 1524 (7), et la léproserie était assez abondamment pourvue d'eau pour que ces accidents ne fussent pas trop graves.

Quel était le costume des lépreux? Ici nous n'avons que très peu de renseignements. Il semble cependant

*

(1) Ibid., pièces comptables, liasse de 1603.

(2) VARIN, Archives administratives, III, 485.

(3) Conclusions du Buffet, 4, 1° 110.

(4) A 2. 3, dossier 11, n° 29 (1629). Interrogatoire d'Edme Guérin : « S'il scait pas qui a arraché deux arbres fruictiers depuis peu au jardin desd. lespreux et de ce qu'ils ont faict du boys ».

(3) Saint-Omer (Règlement de 1464, dans DESCHAMPS DE PAS, Etablissements hospitaliers de Saint-Omer, 21), Amiens, etc.

(6) E. 16, 13, f° 4 v".

(7) Archives communales, Comptes des léproseries, 8, f° 121.


i58

naturel de distinguer un vêtement d'intérieur et un vêtement de sortie. A l'intérieur ils s'habillent comme ils veulent ; pour sortir, ils revêlent une housse (1) d'étoffe grise (2). Ils portent sur ce costume une marque. Le moyen âge qui imposait un signe distinctif (3) à certains groupes de la société marquait également les malades atteints de maladies contagieuses ou les personnes qui pouvaient être en contact avec eux (4). Au xvie siècle, à Reims, les religieux qui soignaient les pestiférés étaient tenus de porter « verges blanches apparamment de longueur trois pieds » (o). Les servantes des lépreux avaient, au xvie siècle, sur leur robe de drap gris une « marque de drap jaulne sur l'espaule en forme de clicquette » (6). Peut-on par analogie supposer que le même signe était imposé aux malades? Cependant on voit en 1478 les échevins bailler à un officier dépendant de l'hôpital une livrée aux armes de la ville (7). « L'habit du mesel » se complétait par des

(1) Archives communales, Conclusions du Buffet, 2, f° 72.

(2) Ibid., Comptes des léproseries, 10, f° 134.

(3) U. ROBERT, Des signes d'infamie au moyen âge.

(4) LANGLET, Un bureau de santé au XVI(° siècle, p. 9.

(5) Des conciles (Lavaur, 1368), une ordonnance de François II de Bretagne, des règlements de léproseries imposaient une marque soit aux frères sains soit aux méseaux : un coeur, un carré de drap, une lettre.Voir: LABBE et COSSART, Concilia, XI,1890; U. ROBERT, loc. cit., p. 91; E. VIGNAT, Les lépreux et les chevaliers de Saint-Lazare de Jérusalem, 48 (ordonn. du 14 juin U77).

(6) Conclusions du Buffet, 7, f° 137.

(7) Ibid., 2, f° 52 (28 mars 1478 n. st.) : « Conclud a esté que les gouverneurs de S. Ladre baillent a Husson Petit de Terron, procureur illecq dud. S. Ladre, pour ses peinnes oud. office du temps passé une robe de livrée moitié verde et moitié perse doublée sur la manche perse de laquelle sera fait ung rainseau verd et une fleur de lv dessus ».


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gants, un petit baril qu'il portait en bandoulière et une cliquette, petit instrument de bois dont M. U. Robert à signalé quelques rares représentations figurées.

Le lépreux reçu à Saint-Ladre y entrait seul : sa femme, sa famille ne pouvaient l'accompagner « au moustier ». La question du mariage et du divorce avait été très discutée dans la première partie du moyen âge (1). Au xve siècle, à Reims, la lèpre n'entraîne pas le divorce ; les époux restent unis, et nous les voyons même parfois faire un effort pour ne point se séparer matériellement (2). — Les enfants du ladre purent habiter la léproserie avec lui (3) : ce qui est à la fois acte de charité et mesure de prudence. Les échevins, pouvant craindre l'hérédité, plaçaient l'enfant comme en observation à l'hôpital. Cette mesure fut même généralisée au xvne siècle par le pouvoir central, qui admit les enfants des lépreux dans les maladreries jusqu'à 16 ans, âge auquel ils devaient être « mis hors » s'ils étaient reconnus sains (4). Mais dans un tel délai, l'enfant, né sain, pouvait devenir lépreux par contagion. Aussi plus sagement les échevins confiaient-ils ces enfants à des amis ou à des parents en dehors de la léproserie (5).

Quant au mesel entré célibataire à la léproserie, il se trouvait placé entre un article des « défenses » qui lui interdisait de n'habiter « a autre femme qu'a » la « sienne espouse », et la règle que les échevins ont toujours voulu

(1) Le Livre de joslice et de plet, éd. Rappetti, p. 190. — Les assises de Jérusalem, II, 118.— Cf. ESMEIN, le Mariage en droit canon, II, pp. 12, 65, 82.

(2) A 2. 4, n°8, p. 2(1474).

(3) Conclusions du Buffet, 2, f° 32 v» (1477).

(4) Archives nationales, Vr. 132, liasse 626, n° 244.

(5) Archives communales, liasse 34, renseignements. — F'. 17.


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maintenir, dans la pensée d'éviter les dangers de l'hérédité, el qui défendait au lépreux de se marier à l'intérieur de la léproserie, même à une lépreuse, « à qui que ce soit ». Aux malades qui sollicitent l'autorisation de se marier, les gouverneurs répondent par une menace d'expulsion (1). Mais dans la seconde moitié du xvic siècle, cette menace parait avoir été inefficace. En 1572, Jean Blondel se marie à l'hôpital ; un autre lépreux se prépare à se marier : les échevins inquiets chargent le procureur d'en conférer avec l'archidiacre (2). D'anciennes servantes des malades consentent à les épouser et on trouve, au xvi"siècle, une fille de servante,servante elle-même et femme do lépreux (3).

Depuis le xve siècle, ces chambrières ne figurent plus aux comptes des hôpitaux. Chaque malade peut donc avoir sa servante qu'il paie et entretient à ses frais. Une lépreuse pauvre peut être très heureuse de gagner quelque argent à servir les autres lépreuses (4). La servante prépare la nourriture de son maître (5), fait la lessive à la léproserie (6); c'est elle qui va au dehors chercher ce qui est nécessaire au malade et le met en communication avec le monde (7). A certaines époques, les

(1) Archives, communales, Conclusions du Buffet, 3, f° 16 (1504 et 4, f° 33.

(2) Ibid., Conclusions du Buffet, 7, f» 113 (1er août 1572).

(3) A*. 1, n° 38. De même en 1613, « Jehanne Huguet, pauvre vieille servante, femme, fille de lespreux » (Archives communales, G. 185, compte 1613-1614, f° 83 v°).

(4) Conclusions du Buffet, 2, f> 148 (6 juin 1486) : « Conclud a esté que les gouverneurs donnent pour Dieu et en aulmosne le lit de feue Rauline... a une jeune fille lépreuse qui sertlesautres lépreuses. »

(5) Ibid., 7, f° 23 v°.

(6) Pièces comptables, liasse de 1603. (Conclusions, 7, f° 137.


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chambrières vont faire appel à la charité, quêtant « aulmospes publicquement et partout tant en pains qu'en deniers » (1). Elles sont logées dans des chambres attenantes à celles des lépreux. Au xvne siècle, celles qui avaient longuement servi finirent par obtenir à nouveau, comme au xive siècle, d'abord des gratifications (2), puis des pensions régulières.

Mais ces servantes devaient surtout assister le malade . dans ses souffrances : elles seules lui donnent quelques soins. Pas de « mises » pour les médicaments au chapitre des dépenses. Pas de médecin attaché à la léproserie. Chaque malade consulte, s'il le peut, qui il veut. Nous n'avons là qu'un fait du xvir 9 siècle : dans une enquête faite le 19 janvier 1606 (3) sur la mort d'un lépreux, J. Roze, chirurgien, répond que le matin « il s'est transporté aud. hospital pour panser et médicamenter Raulin Deson, lespreux ». Mais peut-être les ladres du xve siècle trouvaient-ils moins facilement du secours, si l'on en croit un règlement de 1473 (4), qui interdit au maître-barbier, à ses valets et apprentis de « faire office de barbier a mezel ou mezelle ». Dans un mémoire du xvne siècle (5), les échevins déclarent bien que le malade reçu était « nourry et pensé ». Mais nous n'avons aucune indication sur ces soins donnés. Quelques malades vont chercher la guérison dans de longs pèlerinages (6) : en 1486, les échevins accordent des

(1) A«. 1, n° 15.

(2) Conclusions du Buffet, 9, f° 69 v° (1588).

(3) Pièces comptables, liasse de 1606.

^4) VARIN, Archives législatives, 2e partie, Statuts, t. I, 983.

(5) A 2. 3, n° 49, f° 15. ■

(6j Archives communales, liasse 34 « Juridiction », n° 22, VII : Pour ce que Laurent Bailli « est encore jeune et peuït avoir remède de lad. maladie, il est délibéré d'aller en loingtain pais pour cercher guérison s'il peult la trouver».


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lettres de recommandation à deux lépreux qui partent ainsi pour Saint-Jacques de Compostelle (1 ).

Il faut cependant remarquer que plus d'une fois les gouverneurs se trouvent être des médecins : Jean Cauchon de 1497 à 1505, Rémi Chevalier en 1506, etc., et, sans doute ne devaient-ils pas refuser l'aumône d'un conseil ou d'un pansement aux malheureux qu'ils voyaient dans leurs visites à l'hôpital.

A défaut de traitement, des mesures semblent avoir été prises pour assurer l'hygiène de la maison. On sait que l'eau s'y trouve en abondance, — puits et canaux, — au point que parfois les bordes sont inondées, et alentour le sol doit être surélevé avec de la grève. Les canaux en communication avec la Vesle font « fluer l'eaue par la maison » (2), et c'est une dépense régulière de les faire visiter, nettoyer, et d'en assurer le parfait écoulement. L'eau ne manque donc pas pour la lessive. Le mobilier de la maladrerie comprend un certain nombre de baignoires et de cuveaux. Les « chambres aisies » sont l'objet de soins spéciaux. Au xiv" siècle, les maisons construites dans l'enclos par certains malades peuvent avoir leurs aisements particuliers (3). Ils sont maçonnés (4) et souvent « nestiés » (5).

(1) Ibid., Conclusions du Buffet, 2, 1° 149 (1486) : « Messieurs ont ottroyé à M" Thomas Barbette et Martin Vyet lépreux estans en l'ospital lettres certificatoires et recommandatoires pour aler a Saint Jacques en Galice, et jusques a trois mois durant leur absence les gouverneurs payent a leurs femmes leurs gaiges ».

(2) Archives communales, Comptes des léproseries, 15, f° 152 v°.

(3) Ibid., 1, f° 16 (1337-1338) : « .. .pour u. journées de menouvriers qui widèrent les chambres aisies Davoudet ».

(4) Ibid., « Item un. s. pour remassonner les dittes chambres et les fondemens. »

(5) E. 15, 3, f» 5.


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En réalité, le traitement de la lèpre a été avant tout prophylactique. Le grand remède est l'isolement. En recueillant le malade, on n'assurait pas seulement un asile au malheureux que la méfiance ou la répugnance publique empêchait de gagner sa vie, on évitait la propagation de son mal. Le système est d'ailleurs général : c'est ainsi que l'on combattit d'abord la syphilis (1) ; c'est ainsi que l'on combattait la peste (2), et c'est encore à peu près le seul moyen qu'on ait aujourd'hui de combattre la lèpre même (3). On peut, d'ailleurs juger de la méthode par les résultats ; la léproserie de Reims a été assez fréquemment vide ou presque vide, et déjà, au xv° siècle, certaines maladreries n'ont subsisté qu'en vue d'un retour possible de la maladie. Ce fait prouverait que le but de ces maisons a été atteint (4) et qu'elles ont rendu le service qu'on en attendait (5).

Cet isolement, au xn% auxm 8 siècle apu être complet.

(1) Arrêt du 4 mars 1496, dans Edicts, ordonnances et règlement sur l'administration des hôpitaux (1585, in-8"), p. 4.

(2) Règlement du bailli de Reims (24 avril 1522) dans LANGLET, Un bureau de santé au XVil' siècle, p. 9.

(3) La conférence internationale de Berlin (octobre 1897) concluait que l'isolement est le meilleur moyen prophylactique à appliquer. (Mittheilungen und Verhandlungen der internationalen wissenschaftlichen Lepra-Conferenz zu Berlin, II, 194).

(4) En 1351 la population lépreuse des maladreries du diocèse de Paris s'élève à 35 personnes (LE GRAND, Les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris, p. XCI).

(5) Ce fait prouverait peut-être en même temps un progrès des connaissances médicales, un diagnostic plus sûr, une distinction plus radicale des lépreux et des syphilitiques ; par là, la clientèle des maladreries a diminué, tandis que grossissait celle d'autres hôpitaux. Cf. A. HIRSCH, Die chronischen Infections-und Intoxications-Krankheiten, parasitdre Wundkrankeiten und chronischc Ernahrungs-Anomalien vom historisch-geographischen Standpunkte (Stuttgart, 1883, 2» éd.), p. 5-6 ; DOM SAUTO.N, La léprose, p. 8-14.


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Au xve siècle, en fait, il n'en est plus de même. Il est bien interdit aux méseaux de vendre au dehors les produits de leur basse-cour ou de faire laver leur linge en ville (1); il leur est bien interdit de s'approcher du puits commun qui sert aux cerisiers et au convers (2) ; il est bien défendu aux chambrières « de ne pas aller au puis publicque ne cuyre au four des boulangers » (3). Il peut même se trouver,en 1549, un huissier qui n'ose pas pénétrer à l'intérieur de la léproserie (4). Mais en réalité, même depuis le xiue siècle, cet isolement n'a souvent dans la plupart des maladreries été que relatif (5). Par exemple, les malades rémois ne doivent en principe recevoir personne (6), même des lépreux (7).

(1) Pièces comptables (1603). Cf. DESCHAMPS DE PAS, Établissements hospitaliers de Saint-Omer, p. 21.

(2) Pièces justificatives, XIII.

(3) Conclusions du Buffet, 7, f° 23 v° : « attendu qu'il y en a plaintif », ajoute la conclusion : ce qui prouve que la règle était peu observée.

(4) F 1. 3. Signification aux lépreux du règlement de 1549.

(5) Dès 1264, les statuts de Pierre de Minci pour le Grand Beaulieu de Chartres comportaient un paragraphe intitulé : De modo exeundi.ÇR.. MERLET, dans Rulletin historiq. et philologiq. du Comité des travaux historiq., 1895, p. 563.) Au xive et au xv° siècles des lépreux circulent à travers la France. Cf. L. LE GRAND, Le Règlement de la léproserie d'Epernay, dans Bulletin du laboratoire expérimental de la maison Moét et Chandon, 6e année, t. II, n° 7, p. 131 ; et P. H. DENIFLE, La désolation des églises, t.1, n° 286. A Reims même il ne devait pas être plus facile d'isoler entièrement les malades. Voy. Archives communales, Conclusions du Buffet, 2, f° 52 v° (1477); « On fera wider son fils (le fils d'un lépreux) de l'ospital pour les plaintifz des censiers et pour ce qu'il vad entre leurs enfans ».

(6) Archives communales, Conclusions du Buffet, 3, f° 160 (1510): Défense à J. Gibre, lépreux, de recevoir une petite fille de 3 ans.

(7) Ibid., 2. f° 104 (1482) : « Ordonné aux gouverneurs de S. Ladre qu'ils deffendent aux ladres d'en loger nulz en l'ospital a peinne de privation de leurs gaiges...»


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Pour les malades passants, pour les « ostes », une chambre spéciale était encore réservée au xiv" siècle et c'était aux gouverneurs qu'il appartenait de les recevoir (1). Mais au xv° siècle ce service public semble ne plus exister à Saint-Ladre : les malades donnent alors au « forain », malgré les défenses, une hospitalité qui n'est peut être pas toujours gratuite. D'autre part les personnes saines entrent aussi à la maladrerie. Un charbonnier porte du charbon à une malade (2) ; la servante d'un chanoine qui a son frère à Saint-Ladre va a faire des messages » au lépreux (3). En 1520, les pages du duc de Guise entrent à Saint-Ladre aux femmes et s'y livrent à leurs facéties (4). On devine un va-et-vient fréquent.

Le lépreux, qui ne doit pas recevoir, ne doit pas à plus forte raison sortir. Mais très tôt un correctif est mis à cette règle sévère. Il ne doit pas entrer en ville, « sans autorisation ». Même les « deffences » (5), ainsi qu'on l'a déjà vu, ne s'appliquent guère qu'à la conduite des lépreux en dehors de la maladrerie. Il doit porter son habit de mesel « affin qu'on le congnoisse », ne pas se mêler à la compagnie des personnes saines, ne pas entrer dans les lieux publics. Il lui est défendu de toucher à l'eau ou aux objets de consommation qui pourront servir aux « sainctz », ou de manger avec eux. Il doit prendre, en leur causant, certaines précautions

(1) E. 15, 1, f° 6 v°. Il en était de même à Orange {Archives nationales, MM. 226, f° 236 v°), à Epernay (L. LE GRAND, Le règlement de la léproserie d'Epernay, loc. cit.) ; à Rouen (P. H. DENIFLE, La désolation des églises, monastères et hôpitaux en France, I, n° 186), etc.

(2) E. 15, 16, f° 2.

(3) AVI, n° 38.

(4) Archives communales, Comptes des léproseries, 7, f° 82 v°. (3) Pièces justificatives, XIII.


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observées dès l'antiquité (1). Ces prescriptions mêmes indiquent qu'au xiv" ou au xva siècle, on tient non pas tant à assurer l'isolement total qu'à éviter le contact immédiat (2).

Ces défenses ont pour sanctions les peines les plus sévères. Mais les lépreux n'en tiennent pas toujours compte. Ou bien, une fois sortis, ils ne s'y astreignent pas, « voisant » par la campagne sans cliquettes, buvant et mangeant avec les sains (3), ou bien ils sortent sans congé des gouverneurs (4). Ils entrent d'abord « EntreDeux-Ponts »(5), puis dans la ville même. Les échevins prennent des mesures : des pensions sont supprimées (6); les sergents de la ville reçoivent l'ordre (7) de conduire aux portes les lépreux qu'ils trouveront « sur le pavé ». Mais ces mesures ne sont pas toujours efficaces: en 1526, Me J. Béguin, lépreux, pénètre jusqu'aux loges du Marché (8), et si certains malades montrent quelquefois du regret d'avoir ainsi « offencé... Dieu et les hommes » (9), d'autres n'en continuent pas moins à fréquenter en ville, même durant l'été « ce qui est chose scandaleuse, dangereuse et pernicieuse pour les habitans » (10).

(1) Luc, XVII, 12.

(2) La médecine moderne a reconnu que les bacilles lépreux, qui se trouvent surtout dans le mucus nasal, s'éliminent principalement par le nez et la bouche. (Bulletin médical, n° du 8 novembre 1897, pp. 1039 et 1040.)

(3) Aa. 3, dossier 11, n° 29.

(4) Conclusions du Buffet, 2, f° 6. (a) Ibid., 2, f° 148.

(6) Ibid., 7. f° 157 v°.

(7) Ibid., 3, f° 240 v° (1503 n. st.).

(8) Registre du juge des lépreux, f» 19.

(9) Conclusions, 4, f° 89 : « ...De quoy ilz sont a présent courroucés et leur poise avoir commis la faulte et vouldraient bien ne l'avoir point faite » (1530Ï.

(10) F'. 9.


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En dehors de ces sorties fréquentes, — et encore est-ce au xvie siècle qu'elles se sont surtout répétées, — il semble que les gouverneurs surent en général maintenir dans la léproserie la discipline et l'ordre. La moralité des lépreux devait particulièrement être surveillée. Une seule fois, nous avons trouvé dans l'histoire de la léproserie un cas de viol (1). Un article des défenses commande au malade de n'habiter « a autre femme » qu'à la « sienne espouse». Il arrive cependant qu'une lépreuse reçoive « un certain Nicolas Libergier » (2), qu'un lépreux « entretienne » une femme (3), que des lépreux fréquentent avec les lépreuses (4). Mais ces exemples sont en somme peu nombreux.

11 était plus difficile d'assurer la paix entre les malades. Des disputes naissent assez souvent. Un des lépreux vient s'installer dans la borde d'un de ses compagnons morts et refuse de la restituer (5). Un autre frappe la chambrière de son voisin (6). Des lépreuses s'injurient (7). Des lépreux se battent (8). Les « ladresses » -sont en délicatesse avec le fermier qui tient le grand jardin de leurs enclos; (9); le convers frappe, eu pleine église, le fils du censier (10). Mais ces dissentiments s'apaisent facilement : les gouverneurs souvent n'ont pas besoin de punir; ils se contentent d'inviter les

(1) Archives communales, Comptes des léproseries, 4, f° 352.

(2) Ibid., Conclusions du Buffet, 4, f» 136 v° et 8, f° 133.

(3) Ibid., id., 4, f» 226 v°.

(4) Ibid., 8, f° 219 v».

(5) Ibid., 4, f" 232.

(6) Ibid., 3, f» 69 v».

(7) A 2. 4, n° 8, p. 4.

(8) Archives communales, liasse 34, n° 4, f° 2 V.

(9) Ibid., Comptes des léproseries, 4, f° 369.

(10) A 2. 3, dossier 11, n°25.


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malades à « eulx gouverner doulcement ensemble » (1).

Quelquefois cependant les agitations sont plus sérieuses. Les lépreux revendiquent leurs prétendus droits jusque devant le Parlement (2), et en attendant se livrent au désordre. Une fois même, c'est une véritable révolte. En 1528, un personnage très violent, Jean Delabarre, coupant les arbres du verger, enlevant de force aux pauvres mendiants devant Saint-Hilaire les aumônes qu'on leur a données(3), réunit ses cinq compagnons lépreux, leur tient un discours, et à leur têteentreen ville, proférant des menaces, criant tout haut : « Je suis leur capitaine, je suis leur abbé, je les mène ». Jugés, ils continuent leur résistance : Delabarre insulte le juge et traite les échevins de larrons (4). Il est mis en prison ; et les autres se rassemblent et tentent de démolir la prison pour le délivrer (5). Mais une telle agitation est exceptionnelle.

D'ailleurs, des pénalités assez sévères menacent les manquements à la discipline, C'est l'amende, fixe (6) ou arbitraire. C'est la suppression de pension : celui qui entre en ville sans habit (7) ou se livre à des « battures et excès » (8) est privé pour trois mois de ses « gages ».

(!) Conclusions du BuRet, 3, f" 160.

(2) Archives nationales, Xla. 4863, f° 83 v° et 4887, f» 106. — F. 1, ' dossier 9.

(3) Conclusions, 4, f" 93 v".

(4) Registre du juge des lépreux, fos 23-24 v°.

(5) Archives communales, Comptes des léproseries, 8, f° 232.

(6) Par exemple, 4 s. à celui qui « fera noise » (A 2. 4, n° 8, p. 5).

(7) Archives communales, registre isolé des Conclusions du Buffet, année 1480-1481, f° 3.

(8) Ibid., Conclusions, 3, f" 69 v".


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C'est le sep (1), C'est la prison : cette prison n'ayant d'abord été qu'une chambre spéciale, une véritable prison est aménagée auxvi" siècle (2). C'est l'expulsion : cette peine très grave —car le lépreux chassé de l'hôpital était en même temps banni de la ville (3) — n'était pas seulement une menace inscrite au règlement de la maison : elle a dû quelquefois être appliquée soit contre uri malade (4), soit contre une servante (5). Ce code pénal renfermait une peine plus rigoureuse encore : les défenses lues aux ladres à son entrée lui étaient faites « sur peine du feu » (6) », et nous voyons, au xvi° siècle, le procureur requérir qu'un lépreux indocile soit « are et brûlé ». Une telle peine ne pouvait être appliquée : en 1506, Jeanne Labassée s'étant enfuie de SainteAnne chez son mari, commandement est fait à celui-ci de la ramener sous peine de 100 1. (7). Les échevins, embarrassés de ce texte, finirent par demander au cours du xvie siècle une consultation à des juristes parisiens, qui proposèrent de remplacer le feu par la fustigation, et, après une double récidive par l'expulsion (8).

Au début de chaque mois, l'un des gouverneurs venait à Saint-Ladre distribuer les pensions des lépreux. Cette distribution se faisait le plus simplement. Au xvi* siècle

(1) Archives communales, Conclusions 2, f° 68 (1479) : « Ordonné... que, se Jehan Chrestien fait plus nulles insolences en l'ospital, que le prevost le face pugnir et mettre ou sep. ».

(2) Comptes des léproseries, 7, f° 79.

(3) Conclusions du Buffet, 2, f° 151 v°.

(4) E. 13, 16, f» 6 (1372).

(5) Conclusions, 3, f° 23.

(6) Pièces justificatives, XIII.

(7) Conclusions, 3, f° 42 y".

(8) Liasse 34, n° 3.


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seulement (1), ou en cas de difficultés (2), pour assurer leur comptabilité, les gouverneurs exigèrent des quittances. Quand le pensionnaire est un enfant, la pension est remise à son père (3), lépreux ou sain. Du jour où le nombre des lépreux diminuant, la vie commune, cessant d'être économique et pratique, avait disparu, les malades avaient ainsi reçu des « gages » dont ils disposèrent à leur guise.

Le taux de cette pension, comme on peut s'y attendre, n'a pas été immuable. A la fin du xive siècle ou au début du xve siècle, le malade touche tantôt 20 s. p. (4), tantôt 18 (5) par mois. Au xve siècle la pension annuelle est fixée à 10 1. t. (6). Au début du xvi" siècle, elle est portée, vu la cherté des vivres, à 12 1. t. (7). Sur les incessantes requêtes des malades, requêtes que nous ne pouvons suivre une aune, le taux de la pension s'élève : en 1545, elle est de 24 1. (8) ; en 1549 de 301. t. (9). Quelque temps après ils obtiennent un supplément de 10 s. par mois, qui de temporaire devient régulier (10). Une conclusion de FEchevinage du 16 février 1574 leur accorde 4 1. t. par mois, et la léproserie ayant dû admettre des malades non rémois, la pension de ces forains est haussée de 50 à 60 s. t. En 1582, ils obtiennent une augmentation annuelle, les uns de 10 1., les

(1) E. 16, 16, f° 93. — F*. 10, n° 1.

(2) Archives communales, Comptes, 16, f° 178.

(3) Ibid., Conclusions du Buffet, 3, f° 160 v°.

(4) E. 15, 15, f° 17 (1369).

(5) E. 16, 3, f" 18 (1393). — E. 16, 6, f» 4 (1409).

(6) F'. 5 (1455).

(7) Conclusions du Buffet, 3, f° 171 v° (1519).

(8) Archives communales, liasse 34, renseignements.

(9) Pièces justificatives, XVI.

(10) Archives communales, Conclusions du Buffet, 6, f° 16' (1565).


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autres de 6 (1). Enfin, en 1613, un règlement fixe les « gages » à 6 1. 10 s. pour les Rémois, à 110 s. pour les autres (2). D'autre part, dans la seconde moitié du xvie siècle, les lépreux étaient déchargés du salaire de leurs servantes.

Cette pension était-elle suffisante ? Ces appréciations sont véritablement trop délicates pour que nous puissions y insister. Cependant, devant les plaintes des lépreux du xvie siècle se dépeignant « en grande langueur et paouvreté » et « quasi mors de faim » (3), il faut remarquer que (pour tant que l'on puisse tenir compte des conclusions approximatives des économistes), 20 s. p. parmois, en 1369, ou 50s.t.,en 1549, représentent à peu près la pension de retraite faite aujourd'hui à beaucoup d'ouvriers (4); et la pension fournie au malade du xv° siècle lui assure environ le salaire d'un ouvrier agricole du temps de Louis XII (5). Les échevins savaient d'ailleurs d'eux-mêmes, dans les moments difficiles, « renforcer » la pension ordinaire. En 1369 ils accordaient au malade une gratification de 12 d. par mois (6), et au xve siècle et surtout au xvie, il en est plus d'une fois ainsi (7).

Il faut, en outre, tenir compte des avantages accessoires faits aux lépreux.D'abord, ils reçoivent un certain

(1) F'. 16.

(2) Archives nationales, V. 128, liasse de 1613, n° 184.

(3) Archives communales, liasse 34, renseignements.

(4) D'AVENEL, Histoire économique de la propriété, des salaires, des denrées, 1, p. 481.

(5) Ibid., I, 20.

(6) E. 15, 15, f" 17.

(7) Par ex., Archives communales, Conclusions du Buffet, 4, f° 77 V (5 juillet 1529).


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nombre de « pitances » : 17 pitances de 1 s. auxiv" siè^ cle-(i); au xv", 6 pitances de 2 s. 8 d. p. aux quatre grandes fêtes de l'année et aux deux fêtes de Saint-Eloi d'été et d'hiver (2); au xvie (3), ces « bons jours » sont de 2 s. 6 d. t.; à la fin du siècle, ils sont réservés aux lépreux rémois (4). De plus, une gratification en nature ou en argent est distribuée aux malades le jour de l'élection des échevins (5).

On se rappelle que les méseaux du xiv° siècle recevaient une part des « vivailles » de la bienvenue des nouveaux malades. Ils recevaient aussi, à la mort de leurs compagnons, quelques deniers de « mortailles » (6). Leurs bois et charbon leur étaient également payés (7). Ces droits ont généralement disparu au xv° siècle. Mais jusqu'à la fin les lépreux jouissent des fruits et revenus des jardins. Au xiv° siècle la vente de ces fruits n'étant mentionnée que très rarement aux comptes, il faut supposer que. l'usage en est laissé aux frères sains et malades, et lorsqu'on vend l'herbe ou les fruits (8), une part du prix est donnée à chaque malade. Au xve

(1) E. 16, 6. f° 14.

(2) F 1. 5 (1455).

(3) F 2. 186.

(4) Conclusions du Buffet, 3, f° 99.

(5) Fs. 29 (7 s. 6 d. t.).

(6) E. 15, 1, f° 11 : « .. .vi d. à la Guillette pour les mortailles de la fille Jehan d'Ausson ».

(7) E. 15, 16, f° 2 (1369) : « Item pour un sextier de brese de four pour la malade, u s. p. ; item pour un,setier de charbon, nus. vi d. p. ; item au porteur qui porta led. charbon ...vuid.p.» Les comptes de 1382-1383 mentionnent 41.16 s. 6. d. de chauffage pour une malade ; ceux de 1389, 4 I. 8 s. 8 d. (E, 16. 1, f" 17 V. — E. 16, 7, f° 21 V).

(8) E. 15, 16.


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siècle il a sa « part et portion des jardinages » (1) ; au xvie, sa part « des arbes, bois, fruict et verjus » (2). Exceptionnellement enfin, au moment des pêches de l'étang de Marcelot(3) ou des viviers de Saint-Ladre (4), les gouverneurs font distribuer quelques poissons aux lépreux.

Parmi ces secours en nature, qui viennent ainsi s'ajouter à la pension, un des plus sérieux consiste dans les prébendes de pains « aumônes » par l'Hôtel-Dieu, Saint-Remi et Saint-Pierre-les-Dames. Les uns sont destinés à Saint-Ladre aux hommes, les autres à Saint-Ladre aux femmes. Mais s'il n'y a pas de de lépreuses, les pains donnés par Saint-Remi sont laissés aux hommes (5), s'il n'y a pas de lépreux, les pains donnés par l'Hôtel-Dieu sont distribués aux femmes (6). Le curé de Saint-Eloi prend parfois une part de ces prébendes (7). Au xvie siècle, elles sont uniquement réservées aux lépreux nés à Reims. Cependant en 1630, une sentence delà Chambre de réformation des hôpitaux oblige l'Hôtel-Dieu à fournir à P. Jarlot, non rémois, 7 pains de 20 onces chacun (8). Quand la maladrerie est vide, ce revenu est affermé (9).

(1) Pièces justificatives, XI.

(2) Conclusions du Buffet, 5, f° 117. — Comptes des léproseries, 14, f° 424 v° (1561-1562) : « .. .pour une pierre a eaue et a piller le verjus qui a esté achepté la présente année pour la commodité et nécessité des lespreux de l'hospital S. Ladre aux hommes».

(3) Conclusions, 2, f° 27 V (1473).

(4) E. 16, 6, f° 6 v° (1407).

(5) Pièces justificatives, XI.

(6) Archives communales, Conclusions du Buffet, 9, f° 41.

(7) A«. l,n°33(1453).

(8) A«. 11, n° 1.

(9) E. 16, 1, f» 56 (1384-1385) : « Item de Jehan Leneveu pour vin. miches que S. Ladre doit prendre chacune sepmaine a S. Rémi venduz a lui pour led. an » 16s.


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En temps ordinaire, les lépreux envoient prendre ces pains par un homme (1) ou plutôt par leurs servantes à tour de rôle. Le mardi ou le mercredi de chaque semaine, une chambrière s'en va par exemple à l'HôtelDieu, les cliquettes en main, le panier au bras. Elle se présente au fournil, cliquette, et les boulangers l'« ayant ove » lui portent les pains. Les pains lui sont alors remis sur présentation d'une « enseigne », « qui est un petit loppin de bois creux, et dedans le creux y a un papier », sous verre, où se trouvent la date de l'année, la signature du receveur de l'hôpital et une inscription : Les Bons Malades (2).

Enfin, pour subvenir à leur entretien, les lépreux trouvaient quelques ressources dans les quêtes, que les échevins, lassés de leurs doléances, les autorisaient parfois à faire faire, soit par leur femme (3), soit par toute autre personne saine (4). Ces quêtes se faisaient en ville ou dans les villages environnants (5). Des certificats étaient délivrés à leurs représentants (5). Quelquefois même, le malade était autorisé à aller en personne « se pourchasser par les villages » (6). Cette formule indique

(1) E. 16,10, 7 : « A Jehan Lebesgue pour sa salaire d'avoir esté quérir le pain a S. Rcmi... »

(2) A». l,n° 38.

(3) Conclusions du Buffet, 2, f" 147 (i486) : « Congié a esté donné a Martin Vyet lépreux de soy faire pourchasser par sa 'emrne en ceste ville le jour du grant vendredi prochain ».

(4) Ibid., 2, f° 103 (1482 n. st.) : « Veu la supplication des lépreuses .. ottroyé leur a esté qu'elles se puissent faire quester en ceste ville par personne sainne durant ce quaresme ».

(5) Ibid., 2, f» 152 (1487 n. st.) : « Congié ...aux lépreuses estans en l'ospital qu'elles se puissent faire pourchasser par les villages par personne sainne et qu'elles en ayent lettres toutes ensemble ou chacune a part ».

(6) Ibid., 2, f» 135 (1485).


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que cette permission leur fut d'abord refusée pour la ville : en 1529, le jour des Rameaux, le gouverneur fait ramener à Saint-Ladre des lépreux qui étaient venus s'installer devant le portail de Saint-Timothée (1). Cependant cette habitude s'établit au xvie siècle et l'on tolère que les malades aillent, sinon mendier « hostiatim », du moins dresser à la porte des églises « une petite table près de laquelle ils se mettent et attendent les aulmosnes que on leur veult donner » (2).

Ces autorisations de faire quêter en ville ne sont d'ailleurs que temporaires : elles sont accordées pour certaines fêtes (3), ou pour une période, durant le Carême (3) par exemple, ou à des jours déterminés, le vendredi et le dimanche de chaque semaine (4). Les échevins semblent préoccupés de suspendre ce « pourchas » durant les chaleurs (5).

Chacun des lépreux « se faisait quester » ainsi pour son compte. Quelques-uns affermaient même leur droit de pourchas. En 1534, les échevins organisent un autre système. Déjà en 1487, les lépreuses avaient été autorisées à se faire pourchasser toutes ensemble (6). En 1534 (7), le Buffet décide que les malades délégueront une femme ou un homme pour chacune des deux mai(1)

mai(1) communales, comptes, 8, f° 282 (1529-1530) : « A six povres gens la somme de six s. t. pour par eulx le jour de Pasques flories dernier avoir mené trois ou quatre des lespreux dud. hospital trouvés par les gouverneurs et procureur au devant du portail de Saint Thimothieu...»

(2) A«. H, n» 14.

(3) Conclusions du Buffet, 2, fos 103 et 147.

(4) Ibid., 2, PM57 V.

(5) Ibid., 3, f°s 1 v« et 2 v° (1501-1502).

(6) Ibid., 2, f» 152.

(7) Pièces justificatives, XV.


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sons ; les gouverneurs feront faire à chacun des délégués une boîte de fer (l)avec laquelle ils iront chaque semaine quêter en ville. Des clefs seront remises à trois lépreuses et à trois lépreux et les aumônes partagées par boîte entre les malades de chaque hôpital. Les boîtes furent faites et le système fonctionna un moment. Mais en 1549 un nouveau règlement (2) défendit aux lépreux de mendier par la ville. Ils n'étaient autorisés à cliqueter que devant la porte de l'hôpital, sans que les aumônes ainsi reçues pussent être déduites de leur pension. En réalité, ils ne tardèrent pas à quêter de nouveau dans les rues de Reims, d'abord en sollicitant une autorisation (3), puis en dépit môme des défenses (4).

Comme presque tout dans le régime intérieur, les obligations religieuses des malades se sont transformées depuis le xin" siècle. Le lépreux assiste à l'office les jours de fêtes et les dimanches. En outre, une messe est dite deux fois par semaine (5). Ces messes ont lieu, au moins au xvi" siècle, en été à 8 heures, et en hiver, de Pâques à la Saint-Remi, à 9 heures (6). Nous ne savons si la léproserie garde le souvenir des fondations pieuses du xiue siècle. Mais des services sont célébrés en l'honneur des lépreux riches habitant ou ayant habité l'hôpi(1)

l'hôpi(1) communales, Comptes des léproseries, 9, f° 252 V (1534-1535) : « A Collard Le Bergier et Remyon Rogier, qui queslent les malades en portant leur boitte de fer, a esté baillé et auhnosné en suivant la conclusion du Buffet, x. s. t.

(2) Pièces justificatives, XVI.

(3) Archives communales, Conclusions du Buffet, 6, f° 193(1565).

(4) Ibid., 7, f» 144 (1374).

(5) Archives nationales, X,a, 5040, f° 150 v°.

(6) Archives communales, Conclusions du Buffet, 6, f° 212.


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tal (1). Les gouverneurs ordonnent des prières à la mort d'un lépreux ou d'un convers (2). Un texte mentionne des « prières qui se font pour la guérison des lépreux » (3).

Le lépreux du xvesiècle assiste à la messe dans l'intérieur de l'église même. Tarbé, dans sa description de Saint-Eloi (4), reprenant une allégation de Bidet (5), montre les ladres debout dans la cour hors de l'église, écoutant l'office par une étroite fenêtre grillée. « Telle était la seule voie de communication que ces malheureux avaient avec le monde. » A première vue cependant, il semble étrange que les lépreux n'eussent pas le droit d'entrer dans une chapelle qui n'existait primitivement que pour eux; un texte mentionne, en effet, un lépreux enterré dans l'église « au devant du siège ou il avoit accoustumé de seoir » (6). La vérité est qu'au xvie siècle, les habitants du voisinage venant assister à l'office, il fallut prendre des mesures à la fois pour trouver plus de place et pour éviter un contact trop direct entre lépreux et sains. Une sorte d'arrière-chapelle couverte (7) et plancheiée (8) fut construite pour rece(1)

rece(1) communales, Comptes des léproseries, 14, f° 330.

(2) Ibid., Conclusions, 2, f» 66 V.

(3) A 2. 3, n» 41, f" 15 V.

(4) Reims, essais historiques sur ses rues et ses monuments, p. 22.

(5) Mémoires, II, ch. 3, p. 20, dans VARIN, Archives administratives, I, lre partie, 12 (note).

(6) Conclusions du Buffet, 2, f° 66 v° (1479).

(7) Archives communales, Comptes des léproseries, 5, f° 35 v° (1503-1504) : « Pour douze piedz de planches de chesne mises et employées sur le toict du lieu près de l'église ou les malades oyssent la messe pour recevoir l'eau chéant de dessus le hault de lad. église... »

(8) Ibid., 11, f° 199 : « Faict ung planchier par terre a la chambre ou les lespreux sont quant ilz oyent la messe » (1545-1546).


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voir les malades, en saillie, sans doute, sur la chapelle des ladres (1). Peut-être une clôture de bois à jour séparait-elle cette « chambre » de l'église (2). A SainteAnne cet « entre-deux » existait sûrement en 1534 (3). En 1612 des dispositions furent prises pour que les lépreux ne se rencontrassent pas, en entranl, avec les personnes saines (4).

Avec les dimanches, les fêtes apportaient quelque animation à la maladrerie. La Saint-Eloi était célébrée avec un éclat particulier. Il semble que la Saint-Eloi d'hiver (1er décembre) ait été d'abord seule fêtée (5). Puis, pour des raisons peut-être moins religieuses, les échevins firent célébrer la Saint-Eloi d'été, et dans la la chapelle des femmes, la Sainte-Anne (6).

(1) Les comptes de 1592 font mention de 1'« appentif des bons malades attenant » la chapelle Saint-Eloi (Archives communales, comptes, 21, 306 v°).

(2) C'est au inoins ce qu'on peut supposer d'après ce texte : » A Foucquet Pussot, charpentier, pour une closure en bois de chesne par lui faicte a barreaux d'arrelte en la chappelle S. Eloy du costé des lépreux depuis le bas jusqucs a la vausure de lad. église avec un planchier de bois par embas ; aussi pour une autre closure de chesne pareille a la précédente. » (Comptes, 5, f° 121, 1506-1507). Il faut remarquer que du « costé des lépreux » peut vouloir dire simplement du côté où se trouve le maladrerie et que la fin du texte indique que cette » closure » n'était pas spécialement réservée à la « chambre » des ladres.

(3) Conclusions du Buffet, 4, f° 145 : » Encores que par lesd. gouverneurs soyl faicl faire ung entredeux de boys en la chappelle de S. Anne... aflin que les lespreuses ne approchent et n'ayt communicquation avec les personnes saines qui vont en la messe en lad. chappelle ». Cf. Comptes, 9, f° 216.

(4) Conclusions, 11, f» 113 V.

(5) Liasse 34, bulles, n° 7 : Innocent IV accorde des indulgences aux visiteurs de l'église « in ejusdem sancti fcstivitate ».

(6) Archives communales, liasse 34, pétitions.


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A l'avance on se préparait. Les gouverneurs faisaient porter dans les églises de la ville « les mandemens et cédules pour remonstrer les pardons qui estoient à S. Ladre le jour S. Eloy » (1). Des gratuités étaient accordées aux prêtres qui recommandaient l'hôpital dans leurs sermons (2). Des précautions étaient prises pour que rien ne vint entraver la fête (3). Les reliques étaient remises en état (4), le moustier et l'autel parés (5). Pour la fête d'hiver, le censier (6) apportait de la paille, dont, suivant la coutume (7), on couvrait le sol. Dès la veille, les fidèles venaient assister à vêpres (8) et baiser la paix (9).

Le jour de la fête, les offices sont célébrés avec une pompe inaccoutumée : des prêtres étrangers doivent venir soulager le curé, des chantres supplémentaires sont engagés (10). Les échevins assistent à la grand messe, assis à un banc d'honneur (11). Le luminaire, auquel ont contribué les charretiers (12) et surtout les

(1) E. 16, 1, f° 32.

(2) Comptes des léproseries, 3, f° 203 v°.

(3) E. 16, 10, f° 6 v° (1428) : « Aux charpentiers qui ont refait le pont de Porte a Vesle pour le vin a eulx donné adfin qu'ils ne défissent le pont le jour S. Eloy ».

(4) E. 16, 1, f° 32. (5)E. 15, 2, f°9 v°.

(6) F 2. 86, p. 4.

(7) A. FRANKLIN, Ecoles tt Collèges, p. 168.

(8) Conclusions du Buffet, 3, f» 150. (9)E. 15, 1, f- 8.

(10-11) Archives communales, Comptes des léproseries, 3, f° 7.

(12) E. 15, 5, f° 10 v° (1553) : « Item donné de courtisie as chertons de Reins qui font la feste S. Eloy, et fu pour ce qu'il avoit reprins a faire le sierge de leur compaignie, lequel il avoient entrelaissiet a faire par la mortalité ; et il dirent as dis maistres que il ne donroient mie led. sierge en l'église se li maistres


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orfèvres, est des plus brillants (1). Après une pro- j cession (2), un Cordelier (3), un Augustin (4) ou un Carme (5), prêche dans l'église ou dans le jardin de Gloriette sur la vie et les miracles de Saint-Eloi (6). Les reliques restent ensuite exposées près du portail (7) sous la surveillance d'une béguine (8) ou d'une soeur (9) au xivc siècle, d'une femme laïque au xv" (10), plus tard encore des sergents de l'Echevinage (11). Cette exposition durait ainsi pendant les octaves.

L'affluence était grande. Des anneaux de fer permettaient aux cavaliers d'attacher leurs chevaux dans un coin de l'enclos et un valet les soignait et les faisait boire (12). Ayant rempli leurs devoirs et déposé leur offrande, les fidèles allaient, sans doute, visiter les lépreux qu'ils pouvaient connaître. Les échevins, de leur côté, retirés dans la chambre qui leur était

ne leur faisoient courtisie, et pour ce que lidit maistres ne volwient mie que lad. église en vaussil pis, si leur donnèrent, vu. s. p. » Cf. DEMAISON, Inventairede1349, dans Travaux Académie de Reims, 72, p. 121.

(1) E. 16, 10, f° 6.

(2) Comptes, 9, f» 164 v°.

(3) E. 10, 10, f° 6 : « A l'rere Jeh. Bourgeois, cordelier, pour le sermon de ce jour, un. s. p. »

(4) Comptes, 2, f° 71 v° (1423).

(5) Conclusions du Buffet, 2, f» 97 v° (1481) : « Conclud a esté que le prieur des Carmes presclrera de S. Eloy lundi prochain matin ou jardin de Gloriette devant l'église » (22 juin 1481).

(6) Archives communales, Comptes des léproseries, 4, f° 17.

(7) E. 16, 14, f° 12 V.

(8) VARIN, Archives administratives, II, 2e partie, p. 747.

(9) E. 16, 1, f° 12.

(10) Comptes des léproseries, 2, f° 133. (H) Conclusions du Buffet, 6, f° 47 v°. (12) E. 15, 15, f» 25 v".


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réservée dans l'hôpital (1), recevaient leurs amis. Là, sur une table, était dressée une collation : du pain, du fromage (2), des cerises (3). Cependant le curé et les clercs « festoyaient » dans la maison du convers (4), et les lépreux, de leur côté, faisaient un goûter : presque toutes les aumônes de la journée, même quelquefois plus, étaient consacrées à leur acheter du pain, du vin, du fromage (5). Ils pouvaient aussi recevoir leur part en argent (6). Cette distribution était faite par les gouverneurs; au xviie siècle, par un sous-ordre(7). Enfin, le soir, un dîner réunissait les gouverneurs, les officiers de l'Echevinage, le curé dans une hôtellerie de la ville : lorsqu' « on ne disnoit pas ce jour », le curé recevait une gratuité (8).

Outre ces fêtes, il semblerait que les sacres des rois, si magnifiquement célébrés à Reims, dussent avoir quelque écho à l'intérieur de la léproserie rémoise. On a déjà vu qu'il n'en est rien. D'après Jean Foulquart, lors de l'entrée de Charles VIII à Reims, en 1483, des tables couvertes de verres étaient dressées devant SaintLadre, et le convers » et des aides servaient à boire aux passants (9). Il est aussi de tradition que le jour du sacre de Louis XIII, on avait élevé, devant la cour de Saint-Éloi, un salon de repos et une estrade où le

(1) Comptes des léproseries, 3, f° 34 v°.

(2) E. 16, 14, f° 12 v°.

(3) Archives communales, Comptes des léproseries, 3, i° 34 v°.

(4) Ibid., id., 2, f 181.

(!5)I6id., Conclusions du Buffet, 2, f" 130 v°.

(6) Ibid., id., 5, f° 80 (1544) : 4 s. t. à chacun.

(7) Ibid., Pièces comptables, liasse de 1606.

(8) Ibid., Comptes, 2, f° 153 v°.

(9) TAHBÉ, Reims, p. 23.— Jean FOULQUART, Mémoires (1479-1499), dans Revue de Champagne et Brie, t. H, p. 49.


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jeune roi entendit les nombreux discours des magistrats rémois (1) Mais ce voisinage n'était d'aucun profit à la maladrerie. Les années de sacre ne sont (sauf une fois) signalées aux comptes par aucun don spécial : les oblations et aumônes qui, par exemple, en 1545, sont de 341. (2), ne sont que de 32 l'année du sacre de Henri II (3). Il y a plus : le sacre royal n'est guère connu dans l'histoire de Saint-Ladre que comme le passage des ennemis : par des déprédations sur les terres de l'hôpital, par une diminution des revenus. Après le sacre de Charles VII, les gouverneurs doivent rabattre 14 1. au censier de Saint-Ladre sur le louage de sa censé « pour la perte qu'il a eu en la moisson, de ce que les gens d'arme de la compaignie du Roy luy ont gasté ses biefs et aveinnes (4) ». Après le sacre de Louis XIII, le censier demande de même une indemnité, en compensation des dégâts commis par « la cavallerie et autres de la suitte du Roy venant pour assister à son sainct sacre (5). »

Telle est, avec ses rares joies, et autant que nous pouvons nous la représenter, la vie d'un lépreux reclu à Saint-Ladre au xve ou au xvie siècle. Cette vie, sans être « l'enfer » qu'on a voulu souvent imaginer, devait cependant apporler à quelques-uns de ces malheureux assez de souffrances physiques pour qu'ils aient salué la mort comme une délivrance.

Le lépreux mort, l'office funèbre est célébré à la cha(1)

cha(1) BERGIEII, Le Bououet royal, p. 11.

(2) Archives communales. Comptes, 11, f° 120 v°.

(3) Ibd., 12, f" 12 v°.

(4) E. 16, 10, f° 7.

(5) Archives communales, Conclusions du Buffet, 11, f" 58 v° et 88 v°.


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pelle (1). Les gouverneurs et les compagnons du défunt, ses parents sans doute, assistent à l'enterrement (2). Aucune dépense n'est indiquée aux comptes pour l'inhumation des lépreux; ou quand les gouverneurs font quelque mise de ce chef, ils sont remboursés par la famille (3). D'ailleurs, une formule courante mentionne que l'hôpital a un certain droit de succession sur les biens du défunt « sans charges d'aucunes debtes... funérailles, obsèques ne autres frais ou charges quelconques (4). » Les lépreux, mis en bière (5), sont inhumés dans le cimetière qui leur est réservé depuis le concile du Latran de 1179(6). Un lépreux, s'étant suicidé, est inhumé au bout de l'enclos, en terre profane (7). Ils sont, sans doute, ensevelis dans leur robe. Leur attachait-on, comme ailleurs, leur cliquette à la ceinture(8)? Étaient-ils inhumés la face contre terre (9)? Nous n'avons pas d'indication sur ce point. Les plus riches se faisaient enterrer dans l'église Saint-Eloi (10). L'un d'eux demande à reposer devant la place qu'il occupait d'ordinaire à l'office (11). Vers la fin du xv"

(1) MARTÈNE, De antiquis ecclesix ritibus (édition 1736), II, 1009.

(2) Archives communales, Comptes des léproseries, 3, f° 138 v°.

(3) E. 16, 9, f° 9 (1360-1361) : «De D. Daubigny et W. Chevrerondel, exécuteurs du testament de feue Ysabin... pour l'enterrement de lad. Ysabin. »

(4) Archives communales, liasse 34, « Meubles », n° 2 (1399).

(5) E. 16, 9, f° 9.

(6) Archives communales, Pièces comptables, liasse de 1606.

(7) LABBE et COSSART, Concilia, X, 1520.

(8) RENAULT, Nouvelles recherches sur les léproseries en Normandie, dans Mémoires de la Société des antiquaires de Normandie, 28, p. 109.

(9) GOMART, Études Sainl-Quenlinoises, t. V, p. 307.

(10) Archives communales, Comptes, 2, f° 162.

(11) Ibid., Conclusions du Buffet, 2, f° 66 v° (1479) : « Accordé a


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siècle, le prix de cette faveur semble fixé à 4 1. p. (1). Une fois même, en indemnisant l'hôpital, l'un d'eux est autorisé à élire sépulture en ville, sous réserve du consentement des paroissiens (2). Mais on peut douter que ce consentement ait été accordé. Dans la seconde moitié du xvie siècle encore, la méfiance publique prétend maintenir la séparation des lépreux et des sains jusque dans la mort, et Claude Haton (3) s'indigne de cette exclusion d' « un fidelle qui a catholiquement vescu et qui n'est excommunié. »

A qui revenait la succession du ladre défunt? C'est poser la question de la capacité juridique des lépreux(4).

esté que Anthoine Wladé, après son trespas, soit enterré en l'église de S. Ladre au devant du siège ou il avoit acoustumé de seoir, en aulmosnant pour ce a l'ospital lx. s. p. comme il a fait offre. »

(1) Conclusions du Buffet, 2, f° 124 v° (1483) et 5, f° 50 v°.

(2) Ibid., 2, f° 208.

(3) Mémoires, 1579, éd. Bourquelot, II, 1009.

(4) Jusqu'au xne siècle, semble-t-il, nulle incapacité. Le Concile de Worms (868) interdit simplement aux lépreux de prendre part aux repas des sains (LABBE et COSSART, Concil,, VIII, 952 canon 31). Le pouvoir civil semble, à cette époque, ne pas prendre davantage de mesures d'exclusion : le capitulaire de 789 leur défend seulement de se mêler au peuple (PERTZ, Leges, I, 69); dans les Usatici barchinone pairie, nous ne voyons pas figurer les lépreux à côté des personnes dont le témoignage est récusé en justice (Usatici, 164, dans GIRAUD, Essai sur l'histoire du droit français, t. II, p. 500). Ce ne serait donc qu'au xne siècle qu'aurait élé restreinte, à ce point de vue, l'activité des lépreux. D'ailleurs, à cette époque même, et durant le reste du moyen Age, leur situation juridique, suivant les régions, a été des plus variables (P. VIOLLET, Histoire du droit civil français, 2" édition, p. 370). M. GUILLOUARD {Étude sur la condition des lépreux au moyen âge, dans Mémoires de la Société des antiquaires de Normandie, 29, 176), conclut que leur capacité n'a guère été restreinte qu'en Normandie et en Beauvoisis. Certains textes, par exemple un règlement de 1505 pour la léproserie d'Orange {Archives nationales, MM., 226, f° 236), qui


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Il semble qu'à Reims, ils soient, d'une façon générale, demeurés capables (1). Dans une plaidoirie de 1414, un procureur compare les gouverneurs aux tuteurs d'un mineur (2). Sa comparaison est, sans doute, plus flatteuse que vraie. On voit, en effet, les ladres agir librement en justice, soit comme défendeurs (3), soit comme demandeurs (4). En 1519, Jehan Gibre, lépreux, prête serment en justice « soubz l'obligation de tous ses biens et des biensïde ses hoirs et successeurs (5). » Dans une affaire jugée devant le Lieutenant de Reims, un lépreux embarrassé refuse de jurer, sous prétexte qu'il est hors du monde, et le juge doit lui faire commandement, de par le roi, de lever la main (6). Il arrive même que la

donne à l'hôpital la nue propriété de tous les biens acquis parles malades postérieurement à leur réception, permettraient peutêtre d'élargir cette conclusion.

(1) Nous ne parlons pas de certaines incapacités spéciales, par exemple l'interdiction faite au boucher, dès l'instant où il est soupçonné de lèpre, de continuer à « tenir cher » (Registre du juge des lépreux, f" 210).

(2) Archives communales, liasse 34, Renseignements, registre isolé.

(3) Déjà une lettre d'Alexandre III à Henri de France pourrait être invoquée pour établir ce droit d'ester en justice (Cf. MARTÈNE, Amplissima collectio, II, 870). Mais peut-être dans ce texte Leprosus, est-il un nom de famille? En tous cas nous trouvons, par exemple (Archives communales, Registre isolé des conclusions du Buffet, année 1480-1481, f° 4), à l'époque qui nous occupe, M" Christofle Labbé, lépreux, défendeur dans un procès contre Mougin Petit, charpentier.

(4) Archives communales, Livre rouge de l'Échevinage, p. 44, dans VARIN, Archives administratives, t. I, 2e partie, p. 775 : Fournier, ladre, fait assigner devant le prévôt, en paiement de dette, Aubert le porcher (1257). —Ibid., Conclusions, 8, f° 159 v° : un lépreux poursuit un autre lépreux (1478).

(5) Ibid., liasse 34, Renseignements.

(6) F. 1, 12, n» 1 (1552).


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partie adverse, n'ayant pas d'autres recours contre le plaideur, fasse, entre les mains des gouverneurs, opposition au paiement de sa pension (1). La capacité des lépreux ne semble pas non plus limitée quant à l'administration de leurs biens. On trouve parfois mention d'un curateur de lépreux (2), mais il est loisible de supposer que dans ce cas le lépreux est encore mineur. A la fin du xvie siècle cependant, le lépreux reclus ne garde pas l'administration des biens de ses enfants. Une veuve lépreuse étant reçue à l'hôpital, il y a lieu dénommer un tuteur àsa fillemineure (3). En 1613, JeanBuart, lépreux, entré à Saint-Lazare depuis un an, reconnaît (4) que « attendu la maladie dont il a pieu à Dieu l'affliger, il ne peult vacquer » à l'administration des biens de ses enfants, et la garde bourgeoise et tutelle est donnée à sa femme, avec nomination d'un curateur. Enfin, les actes de disposition leur sont permis. D'abord entre vifs : ils peuvent aliéner leurs meubles, et en 1528, lors de l'agitation déjà signalée (5), les malades révoltés se plaignent de mourir de faim et de ne subsister qu' « en vendant aucuns petits meubles » qu'ils ont. Deux lépreux peuvent contracter entre eux (6); seul, le malade peut disposer de sa pension, et en 1459, Jaquotin Leroy, ayant loué une partie du jardin des lépreuses, moyennant une retenue à faire sur les « gages » de sa femme, recluse à Saint-Ladre, il faut préalablement obtenir le consentement de celle-ci (7). De même, à cause de mort :

(1) Archives communales, Conclusions du Buffet, 4, f° 44 v°.

(2) Ibid., id., 3, f° 169. — Comptes des léproseries, 7, f° 15 V.

(3) F. 1, 17 (1588).

(4) Archives communales. Pièces comptables, liasse de 1613.

(5) Voy. ci-dessus, p. 168.

(6) Registre du juge.des lépreux, f° 23.

(7) B. 29, 2, n° 15.


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le lépreux peut tester (1); on voit même, à la fin du xve siècle, un malade riche léguer ses biens à SaintLadre (2). La Coutume de Reims (3), laissant à toutes personnes franches le droit de tester, ne fait aucune réserve à l'égard des lépreux, et quand, en 1628, les échevins, dont un testament venait de léser les intérêts, prétendent soutenir que le lépreux « n'a pouvoir de faire aulcun testament à cause de sa qualité (4) », le procureur du roi réplique aux échevins (qui le savent aussi bien que lui), que les lépreux ne sont nullement « exclus » de ce droit (5), et le Présidial déboute les demandeurs (6).

La vérité est que ce droit de tester se trouve restreint en un point : les meubles du reclus reviennent toujours à Saint-Ladre. Ce droit de l'hôpital, qui s'applique également au convers, peut s'expliquer, soit par un déveoppement des droits seigneuriaux auxquels prétendent les échevins (7), soit par une mesure d'hygiène qui devait éviter, en principe, le transport hors de l'hôpital de meubles « rempliz d'ung air sy mauvais (8). » Cette incapacité se retrouve presque partout : dans le diocèse de Troyes, par exemple, les meubles reviennent au

(1) Conclusions du Buffet, 4, f° 163 v°.

(2) Comptes des léproseries, 3, f° 188 v° (1479-1480).

(3) § 292. VARIN, Coutumes, 925.

(4) Archives communales, liasse 34, « Meubles », n° 12, f° 2 v°.

(5) Ibd., f" 5.

(6) Ibid., f» 6.

(7) C'est du moins à ce titre que l'archevêque, en 1456, prétend « prendre et avoir » les meubles et héritages des lépreux décédés « es termes de sa justice, terre et seignourie » (Liasse 34, Meubles, n° 4).

(8) Archives communales. Conclusions, 3, f° 15 — Liasse 34, Meubles, n° 12, f" 5 v°.


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curé (1) ; à Reims, ils reviennent à l'hôpital, c'est-à-dire aux lépreux et aux lépreuses (2). Au xiv° siècle, le droit de « mortailles », distribué aux malades, représentait sans doute leur part de cette succession. Par la suite, cette distribution cessa ; il en resta cependant des traces jusqu'au xvi° (3) et même jusqu'au xvn" siècle (4). Mais souvent, depuis le xvi° siècle, les échevins laissaient les enfants des lépreux recueillir ces biens (5).

De bonne heure, en effet, les héritiers s'étaient élevés contre un tel principe : mais, vainement, ils avaient allégué la « coustume générale de ce Royaume, par laquelle le mort saisit le vif son plus prochain héritier (6). » Les échevins avaient maintenu le privilège de la maladrerie, même contre tel lépreux (7), fils et héritier de lépreux et l'avaient fait reconnaître en justice (8). C'est que cette succession, qui souvent n'était que de peu de profit, pouvait être considérable (9). Et ce n'étaient pas seulement les meubles trouvés à l'intérieur de Saint-Ladre que revendiquaient les gouverneurs, mais tous les meubles du défunt « ou qu'ils

(1) DURAND DE MAILLANE, Dictionnaire, v° Lèpre.

(2) Conclusions du Buffet, 4, f° 34.

(3) En 1535, une' de ces maigres successions est utilisée à acheter un lit à un nouveau malade (Conclusions du Buffet, 4, f° 16).

(4) En 1624 encore, les comptes mentionnent une somme de 10 1. 8 s. t. provenant d'une vente de meubles (liasse 34, Meubles, n° 10).

(5) Ibid., n° 9.

(6) Ibid., n° 2.

(7) Conclusions, 4, f° 121 v° (1532).

(8) Liasse 34, Meubles, n° 2 : sentence du lieutenant de Reims, 1399. — A 2. 4, n° 55, f" 26 ; sentence du bailli de Reims, 1456.

(9) Colesson Richier laisse 500 1. en 1399 (liasse 34, Meubles, n°2).


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fussent en France (1). » Aussi, la « poursuite » de ces successions ne se faisait-elle pas toujours sans difficulté : les malades prenaient leurs précautions pour faire disparaître leurs meubles (2) ; leurs compagnons , au besoin, les aidaient à frustrer les administrateurs (3) ; les parents ne restituaient qu'avec peine l'argent qu'ils avaient en garde (4), et les gouverneurs devaient fréquemment recourir à la justice pour obtenir restitution. Les biens recueillis sont mis en vente. Tantôt la vente se fait à l'hôpital, et les compagnons du défunt rachètent ce qui peut leur être utile (5) ; tantôt les meubles sont portés en ville à la Pierre-aux-Changes (6). La vente se fait généralement aux enchères, quelquefois en bloc (7). Mais, souvent aussi, avant la vente, une transaction intervient, soit avec le malade prévoyant(8),

(1) Inventaire de 1478, f° 85. Les gouverneurs font ainsi saisir, en 1505, les biens meubles laissés par Jean Ledouble à Wez, Thuisy et Sept-Saulx (Conclusions du Buffet, 3, f° 30); en 1540, une pièce de toile entre les mains d'un « tellier » de Reims (Ibid., S, f° 17).

(2) Conclusions du Buffet, 4, f° 77 (1529). A la mort de P. François, lépreux « en sa chambre ou maison dud. hospital, n'y avoit esté trouvé nulz biens meubles, pourquoi conclud a esté que... sera obtenue une monition générale pour excommunier les détenteurs des biens meubles dud. François. »

(3) Ibid., 5, f° 60 v°.

(4) Comptes des léproseries, 6, f° 91 v° (1513-1514) : « De Marson, seur dud. Jacquet, qui avoit en sa garde de l'or et argent de sondit frère, et pour lequel avoir elle a esté poursuye par les gouverneurs et procureur par devant le juge a ce commis... »

(5) Ibid., 5, f" 59.

(6) Ibid., 4, f° 49 v° (1481-1482).

(7) Liasse 34, Meubles, n° 2.

(8) Comptes des léproseries, 3, f° 36 v° (1470-1471) : « Dud. Messire Nicole pour le rachapt de ses biens meubles a lui accordé par Messieurs les eschevins a leur Buffet le premier jour de juillet dernier passé, mi. 1. xvi. s. p. »


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soit avec les héritiers (1), qui rachètent le droit de disposer des meubles ou de les recueillir librement. Même au xve siècle, un chapitre des recettes est intitulé aux comptes : « Compositions pour rachat des successions . et mortes-mains de ladres » (2). Les archives de l'hôpital gardent un certain nombre de ces conventions (3) : elles comportent d'abord une reconnaissance des droits exclusifs des administrateurs de la léproserie : droit de garder, saisir et inventorier les meubles, « comme succédans au droit et lieu des héritiers » ; droit de « traictier et composer » ; droit de « quicter, donner et remettre lesd. biens » ; puis les clauses de rachat qui portent, soit sur la totalité des meubles du défunt, soit seulement sur les meubles existants en dehors de l'hôpital (4). Mais, à la fin du xvi" siècle, ces « rachats » ne sont plus en usage, et les lépreux s'arrangent, comme on l'a vu, pour ne rien laisser après eux. Les poursuites sont surtout fréquentes à cette époque.

Il reste à dire quelques mots de certains lépreux jouissant d'un régime particulier, et des lépreux forains. Ces lépreux privilégiés sont, soit des laïques payants, soit des religieux. Ils sont reçus quelquefois à- SaintLadre aux hommes ou à Saint-Ladre aux femmes, mais plus fréquemment dans une annexe de la maladrerie située à l'extrémité opposée de la ville, en dehors de la Porte-Chacre,non loin de l'église, aujourd'hui disparue, de Saint-Marc-à-Cachot. Cette partie de la ville était comprise au xiv" siècle « en la terre » du trésorier de Notre-Dame. En 1330, le trésorier, ayant sans doute

(1) Liasse 34, Meubles, n° 7.

(2) Comptes des léproseries, 3, f" 102 (1476-1477).

(3) Liasse 34, Meubles, n° 4.

(4) Ibid. n° 7 — Comptes des léproseries, 6, f° 15.


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voulu interdire aux échevins de construire une nouvelle borde sur cet emplacement, dût, après enquête, leur reconnaître le droit d'y élever des maisons pour les ladres sans autre autorisation (1). Dès lors, et jusqu'au xvie siècle, cet emplacement est utilisé par les gouverneurs. Mais ce n'est pas une léproserie permanente ; quand un lépreux doit y être reçu, une borde y est élevée (2), qu'on peut démolir à sa mort (3). D'autre part, elle semble avoir été généralement réservée à des mar lades de régime spécial : en 1363, la malade qui y est reçue, ne touche pas de pension (4).

C'est, qu'en effet, à côté des lépreux pensionnaires, on trouve parfois des lépreux payants, qui prennent une borde en location : l'un d'eux même (5) construit sa maison. Ce ne sont, le plus souvent, que des locations conditionnelles et à court terme. En juillet 1543, un lépreux, retiré dans un village des environs, mais sans cesse malmené par les troupes de passage, loue une borde aux échevins jusqu'au 1er février suivant, moyennant 30 s. t. : il sera soumis à la discipline ordinaire, subviendra lui-même à son entretien et, si la guerre est

(1) Archives communales, Inventaire de 1478, f° 60 v°.

(2) VARIX, Archives administratives, t. III, p. 48. —Archives communales, Comptes des léproseries, 1, f° 88 v°: « Ce sont mises pour une maison que on a fait a Saint Marc pour une malade appelléè Ennourée la sepmaine après Pasques cluse... somme : vi 1. mis. » (1362-1363).

(3) Archives communales, Comptes des léproseries, 5, f° 186 (1508) : «. De Jehannin Hazart, demeurant aux bourgs de Porte Chacre, pour vendicion faite a luy du bois dont estoit faite ausd. bourgs, par delà Saint Marc, la borde de feu en son vivant masson et lépreux trespassé aud. hoslel, receu n. s. t. »

(4) VARIN, Archives administratives, III, p. 48.

(a) Archives communales, Comptes des léproseries, 13, f° 198.


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terminée avant février, il videra les lieux (1). Jean Oudin, de Lavannes, loue de même, par deux fois, une chambre, sous condition de se retirer à la première invitation des gouverneurs (2). Mais parfois, c'est une location pure et simple (3), comme il s'en faisait, dès le xive siècle, à la léproserie de Saint-Denis et à SaintLazare de Paris, au xv" (4).

C'est à Saint-Marc aussi que se retirent les malades qui veulent continuer à vivre avec leur femme ou leur mari : ce que le règlement de Saint-Ladre n'eût pas permis. C'est, d'ailleurs, une faveur qu'il faut payer (5). Le malade doit donner un droit d'entrée* outre le loyer annuel (6). Il doit réparer ou même construire sa borde. Il vit à ses frais. Il lui est naturellement interdit d'entrer en ville, et il est défendu à ses enfants de l'aller voir.

Le séjour des religieux à la maladrerie présente aussi quelques particularités. D'une façon générale, il semble que le religieux, atteint de lèpre, ait dû être gardé à l'intérieur ou dans les dépendances du monastère (7) :

(1) Archives communales, Conclusions du Buffet, 5, f° 66 v°.

(2) Ibid., 5, f» 186 et 6, f° 53 v°.

(3) Ibid., 6, f° 64 : location d'une chambre à Arnoul Brachet, moyennant 100 s. par an (1559).

(4) LE GRAND, Les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris, p. 112 et p. 316.

(5) Conclusions du Buffet, 2, f° 16 (1474) : « Les gouverneurs traicteront avecques Gobin Barbier, mareschal, pour loger sa femme lépreuse à Porte Chacre, en réparant par elle son logis et payant à l'ospital le plus qu'ilz en pourront avoir... Et ne pourra lad. femme jamais entrer en ceste ville ni ses enfans aler vers elle. »

(6) Ibid., 5, fu S (60 s. par an et une aube à Noël).

(7) A Paris, en 1432, un Célestin, devenu lépreux, est logé à côté du couvent, à quelques pas de ses frères qui peuvent ainsi


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d'après un règlement de Saint-Remi de Reims (1212), le lépreux doit être transféré à l'aumônerie de l'abbaye (1), et au xvne siècle encore, un Dominicain rémois rappelle que, selon la règle de l'ordre, les frères lépreux doivent être « retenuz en l'enclos du couvent » (2). Cependant, très tôt, les religieux ont voulu isoler davantage les frères ladres (3), et au xv" siècle, les clercs rémois, atteints de lèpre, ne peuvent pas plus rester dans la ville que les laïques. En 1465, Thierry Carzy, curé de SaintJean, est ainsi expulsé (4) ; en 1473 (n. st.), Etienne Péricot, prieur des Augustins, reçoit commandement de se retirer au lieu de sa nativité (5).

Quant aux religieux reçus à Saint-Ladre ou à SaintMarc, ils sont soumis à la discipline générale de la léproserie : ils subissent la visite (6), paient les droits de bienvenue (7), gardent l'isolement; leurs meubles,

aller lui porter leurs consolations (Archives nationales, LL. 1503, f° 13) ; dans le diocèse de Coutances, chaque abbaye est tenue de disposer une léproserie intra muros suos (P. LE CACHEUX, Essai historique sur ï'Hôtel-Dieu de Coutances, 211).

(1) Bibliothèque de Reims, ms. 346, f°215.

(2) Conclusions du Buffet, 9, f° 223 v° (1608).

(3) Dès 1279, à Paris, Saint-Martin des Champs envoie ses lépreux à la maladrerie du Roule (LE GRAND, Les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris, p. 300) ; ceux de Sainte-Geneviève sont reçus à Saint-Lazare (DE LASTEYRIE, Cartulaire de Paris, n° 675).*

(4) Archives communales, Comptes des léproseries, 2, f° 178.

(5) F'. 7.

(6) Ibid. — Comptes des léproseries, 2, f° 174 v°.

(7) Conclusions, 2, f° 150 v° (1486) : « Congié a esté donné et ottroy lait de grâce a Messieurs les bourciers, frères et suers de l'Hostel Dieu de Reims qu'ils puissent faire reparer une maison en lad. maladrerie de devant Saint Marc a Cachot pour y loger Messire Jeh. Mercier, lépreux, frère dud. Hostel Dieu et qu'il y soit mis en payant le droit des officiers et sans pourchas par la ville. »


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sauf rachat, appartiennent à l'hôpital (1), mais la construction (2) ou la réparation de la borde et l'entretien du malade restent à la charge du couvent, sauf parfois autorisation de pourchas (3). En 1572, les échevins refusent de recevoir sous d'autres conditions D. Girard Vanier, religieux de Saint-Rémi, « attendu qu'il est religieulx en lad. abbaye ou il a logis, vivre et vestiaire (4). » Cependant, en 1599, après intervention du pouvoir central, ils doivent payer pension à Anne Langlet, religieuse de l'Hôtel-Dieu, reçue à SainteAnne (5), et même, en 1608, à Jean Triplot, Frère Prêcheur, qui cependant continue à résider aux Dominicains (6).

Plus encore que sur les religieux lépreux, la surveillance des échevins s'exerce sur les lépreux étrangers à la cité. Comme à Paris (7), comme presque partout, l'entrée de la ville est interdite aux lépreux passants ou à ceux qui résident dans les environs de Reims. L'Echevinage adresse des appels au bailli de Reims pour qu'il fasse défendre « par cry publicque » à tous ladres de pénétrer dans la ville (8). Les sergents reçoivent l'ordre d'expulser tous les lépreux qu'ils verront circuler dans les rues (9). Mais la répétition même de ces prohibitions

(1) Comptes des léproseries, 3, f° 127 v°.

(2) Conclusions, 2, l'° 5.2.

(3) Ibid., 2, f° 54 v° (1477).

(4) Ibid., 7, f° 120.

(5) Pièces comptables, liasse de 1599.

(6) Conclusions, 9, f° 223 v°.

(7) Règlement du 5 février 1535-1536, dans : Loix, statutz et ordonnances roiaulx faiclcs par les feuz roys de France puis le règne de Monseigneur Sainl-Loys (1544), 2° partie, f° 121 v°.

(8) Conclusions, 2, f" 7 v° (1474) et 4, f° 161 v° (1535).

(9) Ibid., 3, f" 24 V (27 janvier 1505 n. st.).


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montre qu'ici, comme ailleurs, elles ont été vaines. Les forains obtiennent, du reste, parfois droit de pourchas (1), et le jour du Vendredi-Saint, au xvi" siècle, un dîner est offert, sur le Marché aux draps, à tous ceux qui sont présents(2). Mais, ce que les échevins semblent surtout avoir voulu éviter, c'est que ces forains demeurassent la nuit dans Reims. On a déjà vu que défense était faite aux malades de l'hôpital d'héberger ces passants (3). Mais on dut sans doute, plus d'une fois, rappeler cette prescription. Les censiers recevaient la même défense (4). Au xvi 6 siècle, ces mesures n'empêchaient plus les ladres de demeurer ainsi plusieurs jours à Reims : les habitants des faubourgs consentaient à leur donner abri, et les échevins, impuissants, demandaient au bailli d'intervenir contre les lépreux et lépreuses qui « affluent et viennent a gros nombre en ceste ville (5) »..

(1) Ibid., 2, f° 201 V, et f° 66 v°.

(2) Ibid., 7, f" 154 v».

(3) Conclusions, 2, f° 21 (1474).

(4) Ibid., f° 191.

(5) Ibid., 4, f° 85.


1D6

CHAPITRE VIII.

La léproserie et l'archevêque.

De droit commun la garde des hôpitaux dans chaque évèché appartient à l'évèque (1). C'est à lui que reviennent, sauf délégations, le choix du maitre, l'admission des frères, le contrôle de l'administration. La théorie est très nette sur ce point : Beaumanoir affirme ce principe (2) ; les évèques rappellent fréquemment leurs droits (3) ; et des faits nombreux viennent appuyer la théorie (4). Toutes les oeuvres de charité sont sous la

(1) L. LE GRAND, Les Maisons-Dieu dans Revue des questions historiques, juillet 1896, p. 100 et janvier 1898, p. 42.

(2) Coutumes de Beauvoisis, éd. Beugnot, II, 34 : « Voirs est que de droit commun la garde des maladeries apartient a l'evesque enquele evesquiée eles sunt assises ».

(3) Archives nationales, X,a. 8, f" 70 v° (1339) : L'évèque de Meaux revendique ses droits sur la léproserie de Mitry (canton de Claye, arrondissement de Meaux) : « .. .disposicionem, ordinationem leprosarie, bonorum ad ipsam perlinencium, leprosorum fratrum et sororum, tam spirilunliter quam temporaliter adipsum solum, pleno jure et de jure commun! pertinere ».

(4) En 1264, le règlement de la léproserie du Grand Beaulieu de Chartres est donné par l'évèque Pierre de Minci (R. MERLET, dans Butlet. historique et philologique du Comité des travaux historiques, 1895, p. 561); en 1270, l'évèque de Paris triomphe dans unejaffaire contre les frères de Saint-Lazare de Paris « quia domus leprosorum et domus pauperum Dei ornnes sunt in proteclione et custodia episcopi (GUÉRARD, Cartulaire de Noire-Dame de Paris,], 184); en 1348, le Parlement reconnaît à l'évèque de Paris le droit de pourvoir h la léproserie de Montlhéry «rationesue parisiensis ecclesiè »(Archives' nationales, X,s. 10, f° 120. Cf. L. LE GRAND, Les Maisons-Dieu du diocèse de. Paris, p. 137), et au xvie siècle, c'est encore l'opinion publique qu'il « n'appartient qu'aux evesques et a leurs offleiaux decognois-


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surveillance de l'ordinaire. L'évèque est le tuteur des pauvres : les rapports intimes de la société laïque et de la société ecclésiastique, la pénétration réciproque de la vie religieuse et de la vie civile au moyen âge rendent ce rôle tout naturel (1). Les évêques essaient d'ailleurs de légitimer à d'autres titres leur intervention dans les léproseries : ainsi ils assimilent les lépreux à de véritables religieux (2), tandis que les pouvoirs civils en font des personnes laïques (3) ; ainsi encore ils soutiennent que la « separatio » étant un acte purement religieux, les questions d'entretien, de logement, de gouvernement des lépreux qui s'y rattachent subsidiairement sont en dehors de la compétence des autorités civiles (4).

tre de telles matières de séparer les ladres d'avec les gens sains ». (C. HATON, Mémoires 1579, éd. Bourquelot, II, 1008). Le registre des visites faites dans le diocèse de Paris par le délégué de l'évèque, publié par M. LE GRAND, permet d'ailleurs d'étudier cette intervention dans tous ses détails (Les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris au milieu du XIV-siècle d'après le registre de visites du délégué de l'évèque).

(1) Cf. LE GRAND, op. cit., p. LXXXIV. — Au moins dès le vie siècle les textes conciliaires lui attribuent ces droits sur les léproseries (Concile d'Arles (549), can. 21, dans LARBE et COSSART, Concilia, V, 396; Concile de Lyon (583), can. 6; DURAND DE MAILLANE (Dictionnaire de droit canonique (2° éd., 1770), III, 123 v°Jurisdiction), rappelle qu'au xne siècle les lépreux furent avec les veuves, les orphelins, les pèlerins, <• les personnes sur qui les évêques, se rappelant les anciens usages à cet égard, s'arrogèrent la connoissance des causes qui les concernoient ».

(2) Archives nationales, MM. 220, f° 293. — Le Songe du Vergier, II, ch. 205 et 206.

(3) Archives nationales, Xla. 8, f° 70.

(4)/6id.,4870,f° 68 (1522) :Unnommé Boiteux,né dans un village du diocèse de Langres, habitant un autre, devientlépreux. Lequel des deux villages paiera l'entretien? Procès, sentence de l'official ; les condamnés font d'abord appel au métropolitain de Lyon, puis au bout de quatre mois en appellent comme d'abus au Parlement.


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Mais dès le xm 8 siècle au moins les prétentions des évêques étaient combattues: les autorités laïques, seigneurs terriens, pouvoirs communaux, pouvoir central, entendirent plus ou moins tôt intervenir dans l'administration des hôpitaux (1), et au xvie siècle, les évêques étaient vaincus (2). Un des plus anciens exemples de cette exception au droit commun est l'administration de Saint-Ladre par l'Echevinagc rémois.

A quel titre les échevins interviennenl-ils. Sont-ils

L'évèque de Langres présente alors sa thèse et récuse la compétence de la cour. Le procureur du roi répond qu'il s'agit d'une question de police et de santé publique : « Nullus est magis idoneior quam César ad conservationem salutis rei publiée ».

(1) BEAUMANOIR (Coutumes de Beauvoisis, éd. Beugnot, II, 327), à la suite du texte que nous avons cité fait cette restriction : « Neporquant, noz savons aucunnes maladeries qui especialement sunt de la garde des signeurs terriens, et y poent mètre et osier por le porflt de le me«on tex gens comme il lor plest».Dès 1212, Blanche de Navarre promulgue un règlement pour l'administration de l'Hôtel-Dieu-le-Comte à Troyes (D'ARBOIS DE JUBAINVILLE, Histoire des ducs et comtes de Champagne, V, p. 71, n° 812). Au xme siècle, l'hôpital de la Rue Grande à Cahors est exclusivement communal (P. LACOMBE et L. COMBARIEU, dans Bullel. Soc. études du Lot, i, 268274; il, 116-119,123-128). En 1316, les habitants de Bruyères-sousLaon sollicitent du Parlement l'homologation d'une vente de biens dépendant de la maladrerie, dont l'administration leur appartient (BOUTARIC, Actes du Parlement, n° 4495). A Amiens dès 1152 (A. THIERRY, Monuments inédits de l'histoire du Tiers-Etat, I, 62),au Val de Montreuil dès 1203 (A. DE LoisNE,Ja Maladrerie du Val deMontreuil, pièces justificatives, 111) et peut-être même dès 1173 (cf. le compte rendu de G. Espinas, dans le Moyen Age, 2e série, t. ix. p. 47-48), la léproserie semble sous l'autorité des échevins.

(2) En 1534, le procureur du roi combat juridiquement cette théorie de l'évèque, tuteur des pauvres, à propos des hôpitaux de Troyes (Archives nationales, X la, 4897, f° 97), et l'ordonnance de Blois défend de choisir des ecclésiastiques comme administrateurs d'hôpitaux (art. 66, dans ISAMBERT, Recueil général des anciennes lois françaises, XIV, 398).


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fondateurs? Est-ce une conccesion de l'évèque? Une usurpation? On a vu combien cette question restait obscure. Dans les procès qu'ils engagent contre l'Echevinage, les archevêques ne produisent jamais de litre : ils font seulement appel au droit commun. Une lettre qui semble émanée de Pierre de Laval (1) indique par ses termes mêmes que l'archevêque ne prétend à aucun droit sur la léproserie (2); le Rituel de Reims de 1585 est obligé à des restrictions qui sont l'aveu du droit des laïques (3).

D'autre part, les échevins pouvaient dès le xin° siècle appuyer leurs revendications sur deux reconnaissances officielles de leurs droits. C'est d'abord un accord passé en 1240 et qui attribue aux échevins seuls « l'institution et destitution des frères et suers, la garde et administration des maisons de S. Ladre, soit qu'il y ait mezeaux, soit que non » (4) : la bulle d'Innocent IV de 1246 peut être la confirmation de ces privilèges (5). C'est en

(t) 1473-1493.

(2) Archives communales, liasse 34, juridiction, n° 22, VII (sans date, signée Pierre, connue seulement par une collation). Il demande aux échevins de recevoir, quoique non Rémois, un de ses offi iiers devenu lépreux : il nous a prié, dit-il, « que vous vouseissions escripre... que vouseissez en faveur de nous qu'il; eust... place. Par quoy vous prions que ainsi le veuillez faire a nostre requeste et en faveur de nous et vous nous ferez agréable plaisir que recongnoistrpns se d'aulcune chose que puissions nous vouliez requérir ».

(3) MARTÈNE, De antiquis eccelesiae ritibus, éd. 1736, II, 1006 : « Ubi paraeco quemquam ex suis paroecianis lepra infeclum esse certo constiterit, videlicet aut ex seniencia judicis ecclesiastici aut alias légitime... »

(4) Inventaire de 1478, f° 83 V.

(5) Archives communales, liasse 34, bulles, n° 6 (27 septembre 1246).


— 200 — outre un accord (1) qui, sur l'intervention de saint Louis, termine, le 25 mars 1258, de longs démêlés entre les bourgeois et Thomas de Beaumets. Entre autres griefs, les échevins reprochaient à l'archevêque d'avoir interdit à la léproserie l'usage d'un certain bois. Un article de la convention promet qu'il sera fait droit à Saint-Ladre et reconnaît indirectement l'autorité des échevins sur la maison.

Les archevêques n'en ont pas moins, comme on peut s'y attendre, fréquemment revendiqué les prérogatives de l'ordinaire. En 1292 (2), Pierre Barbet ayant voulu imposer de force Rémi Levillainà l'hôpital, les échevins le font expulser. L'archevêque les cite alors à comparaître devant lui, dans sa résidence de Courville. Ils refusent de s'y rendre (1er novembre 1292) (3). Pierre Barbet fait arrêter leur procureur (4). Les échevins en appellent au pape (10 novembre). L'archevêque les excommunie et essaie de mettre la main sur les aumônes faites dans la chapelle à la Saint-Eloi et à la Saint-Jean(5):

(1) VARIN, Archives administratives, I, 2° partie, 777. Le maître, dit le texte, oul'undes frères demandera la restitution et l'archevêque s'exécutera. MARLOT (Histoire de Reims, III, 610) en conclut que <c les actions devaient être intentées par le maître, les eschevins estant seulement proviseurs ». Mais ils n'en sont pas moins proviseurs, c'est-à-dire que le contrôle de l'administration leur appartient, et le maître n'agit parfois, comme nous l'avons vu, que du consentement des proviseurs. En tous cas, le concordat ne reconnaît aucun droit à l'archevêque sur ce point, et Saint Louis en faisant faire la réclamation pour le maître a peut-être voulu simplement ménager certaines susceptibilités.

(2) VARIN, Archives administratives de Reims, I, 2e part., pp. 10761080.

(3) Archives communales, liasse 34, renseignements.

(4) VARIN, loc. cit., p. 1079.

(5) Archives communales, liasse 34, Administration, n° 2 (16 avril 1295). — Inventaire de 1478, f» 90.


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puis il accuse les échevins d'avoir profané les reliques placées sur l'autel et renouvelle l'excommunication. Boniface Vlll (1) confie l'affaire à l'évèque, au chancelier et à un chanoine de Paris (1295). Nous ne connaissons pas la sentence finale. Mais, en 1301, un nouveau débat s'élevait. L'archevêque Robert de Courtenai refusait de « recevoir » un nouveau chapelain que les échevins présentaient pour Saint-Ladre aux femmes ; il niait que des laïques pussent avoir droit de présentation (2) ; et ce. n'est qu'après enquête (3) qu'il consacra le candidat présenté.

En 1338, autre procès (4). Les biens de Saint-Ladre sont saisis. Le bailli de l'archevêque fait aussi saisir, au fur et à mesure, les offrandes des fidèles sur l'autel de Saint-Eloi (5). Mais le maître de Saint-Ladre, Gile de la Foulerie, refuse de livrer les titres et les clefs de la maladrerie. Jean de Senlis, gardien de la saisie, le fait arrêter. L'archevêque Jean de Vienne réclame même la « chapelerie » de Saint-Ladre vacante par permutation(6*. L'affaire portée au Parlement ne finit qu'en 1347 par un

(1) Pièces justificatives, V.

(2) Voir pour la réplique des échevins, Archives communales, Livre rouge, p. 116, dans VARIN, Archives administratives, II, ^partie, 13.

(3) Les échevins gardèrent soigneusement le procès-verbal de cette enquête dans leur^chartrier. Cf. Livre rouge, p. 117 : « Et sont H tesmoins et l'informations en l'escrin de la ville ».

(4) VARIN, Archives administratives, II, 2e partie, 834.

(5) Liasse 34, Administration, n° 5 (24 juin 1338): le jour de la Saint-Jean, les maîtres ayant sommé les envoyés du bailli de déposer ces offrandes dans le tronc de l'église, suivant l'habitude, ceux-ci répondent qu'ils n'y consentiront qu'à condition d'avoir une clé du tronc. — Ibid., n° 4 : lettres de Philippe VI, Crépy-enValois, 13 août 1338.

(6) VARIN, Archives administratives, U, 2? partie, pp. 837-839.


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accord qui reconnaît à TEchevinage l'entière administration de Saint-Ladre (1).

A la fin du xiv° siècle, commence un long conflit, un conflit permanent qui durera jusqu'au xvi° siècle. 11 est assez difficile de dégager ce débat des luttes politiques qui agitent la ville. L'archevèque-duc perd de plus en plus son autorité politique : la ville échappe à son influence, et le pouvoir central s'introduit dans l'administration de la cité. Pour l'archevêque, réclamer la juridiction de Saint-Ladre, c'est réclamer non seulement un privilège spirituel, mais une part de son influence politique. Le débat porte à la fois sur la visitation des lépreux et sur les pouvoirs administratifs et judiciaires des deux parties. De là le caractère tout particulier de ce litige. Mais pas plus à Reims qu'ailleurs, l'archevêque n'a réussi à faire triompher sa cause, et la série des comptes montre que les échevins gardent l'administration jusqu'à la fin de la maladrerie.

Un procès du milieu du xvc siècle (2), auquel semble se rattacher un arrêt du Parlement du 13 décembre 1464 (3), peut donner une idée de la complexité des revendications des archevêques. Il s'agit d'un criminel qui s'était réfugié à Saint-Ladre, sans que les échevins, au dire de l'archevêque, eussent rien tenté pour en faire justice. Dans cette affaire l'archevêque poursuit à la fois comme seigneur justicier, comme tuteur des pauvres, ayant action sur les hôpitaux et maladreries, et comme évèque, ayant action sur les établissements religieux aux(1)

aux(1) communales, Livre blanc de l'Echevinage, f° 316 v° (6 juin 1347).

(2) Archives communales, comptes des léproseries, 2, f° 176 v° (1466-1467).

• (3) Archives nationales, Xla. 4809, f° 20.


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quels il assimile Saint-Ladre (1). Une autre fois, il tend à faire traiter le lépreux en personne religieuse. Jean de Craori, soutenant une thèse que reprendra plus tard l'évèque de Langres (2), récuse la compétence du Parlement (3) sur une question de Visitation et de séparation, et l'on sait qu'à celte question l'admission, l'entretien et le régime du lépreux peuvent se rattacher par voie subsidiaire.

En 1469, autre thèse. Deux pourceaux égarés entrent dans la censé Saint-Ladre (4). Ils sont mis en garde comme « vacans » chez le censier. Au bout de quelque temps, ils sont supposés acquis à l'hôpital « à cause de la seignourie et justice d'icellui hospital, et lesquelz, comme vacans, lesd. gouverneurs en usant du droit et

(1) Archives communales, G. 186. Mémoire pour l'archevêque (sans date) : « Premièrement pour ce que led. arcevesque sceut que lesd. eschevins maintenoient qu'il avoient le gouvernement et administration de lad. maladerie, il leur dit et monstra qu'il estoit fondé* de droit commun de avoir toute l'administration et de y conmectre personne suffisante pour administrer le temporel et pensser des malades, et qu'il avoit toute la justice, haulte moyenne et basse, et que de ce estoit en possession... Item, et que supposé qu'ilz eussent aucun droit en ce qu'ilz maintenoient, si devoit savoir l'arceyesque de qui ilz tiennent la justice et le demainne appartenant a cause de lad. maladerie, et se ilz en avoient tiltres ou advertissemens, et se ilz estoient amortiz, et par qui : et mesmement que par diverses fois led. arcevesque a fait assavoir et commander que toutes gens d'esglise missent hors de leur main se qu'il avoient en sa haulte justice, moyenne et basse, sur peinne de le appliquer a son demeinne, et n'en ont voulu riens faire : par quoy appert que led. arcevesque s'est bien mit/, en son devoir et qu'il a cause en effet de soy défendre contre les complaignans ».

(2) Archives nationales, X'a. 4870, f" 68 (1522).

(3) VARIN, Archives administratives, III, 324 (1368).

(4) Archives communales, comptes des léproseries, 3, f° 9.


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seignourie dud. hospital, ont esté criez et exposez publiquement en vente » (1). Le procureur de l'archevêché intervient alors et réclame le prix de la vente, sous prétexte que la censé est sur les limites de la seigneurie de Muire revenue à l'archevêque par droit de saisie féodale (2). Les administrateurs prennent fait et cause pour le censier ; le procureur, « saichiant non estre en la matière bien fondé » laisse « discontinuer la cause » (2).

Au milieu du xvie siècle, les échevins trouvèrent un adversaire redoutable dans le Cardinal de Lorraine. Cette fois la question est nettement posée : les échevins devront rendre compte de l'administration des hôpitaux et des chaussées devant le bailli de Reims : « ce que n'avoit jamais esté veu ne sceu » (3). Dès 1543-1544 il formule ses revendications : tous les privilèges de l'Echevinage ne sont que bienfaits des archevêques (4). Les échevins opposent leur possession immémoriale, l'absence de titres de la partie adverse (5). L'affaire plaidée devant le bailli de Reims (6) et au Parlement (7) n'avance que lentement, et le Cardinal de Lorraine meurt (1574) sans avoir obtenu satisfaction. Son successeur, Louis de Guise reprend le procès : en mars 1585, un arrêt du Conseil renvoie l'affaire au Parlement (8).

(1) Archives communales, Comptes des léproseries, id., f° 5 v°.

(2) Ibid., f» 10 v°.

(3) Ibid., 11, f° 10(1543-1544).

(4) Ibid., liasse 34, renseignements.

(5) Ibid., Conclusions du Buffet, 5, f° 14b (16 mars 1546).

(6) Ibid., id., 5, f° 182 v" (9 mars 1547).

(7) Ibid., id., 5, f» 211 v° (1549).

(8) Liasse 34, Juridiction, n° 10.


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En dehors de ces grands épisodes, une série de faits suppose la continuité de cette lutte judiciaire aux xve et xvi 8 siècles. L'archevêque intervient en 1456, dans un procès pour la succession d'un lépreux et fait réserver ses droits (1). En 1489-1490, les échevins prennent des mesures « poiir adviser s'on pourroit accorder avec Monseigneur de Reims touchant les differens qui sont entre lui etMessieurs les eschevins tant pour la jurisdiction de S. Ladre que pour la rente des molins Entre deux Ponts » (2). En 1520 il y a au moins deux procès en Parlement entre l'Echevinage et l'archevêque pour la Visitation, la « jurisdiction. .. en tous cas tant criminelz que civils, ensemble... tous cas commis et perpétrez es personnes et biens des demourans es hospitaulx S. Ladre » et « la superintendance et gouvernement desd. hospitaulx et personnes » (3).

Mais à ce point de vue,le faille plus important est l'existence d'abord temporaire, puis permanente, semble-t-il, du «juge des lépreux » (4). La Visitation des bons malades, objet de tant de débats, est dès la fin du xiv" siècle mise dansla main du roi. Ce « juge des lépreux » est un commissaire procédant de par le roi aux enquêtes et formalités qui précèdent l'entrée du lépreux à la maladrerie. Il existe avant 1388 : à cette date le commissaire est Robert de Courcelles (5). Gérard d'Ambly et Oudart Roberchamp sont nommée juges en 1397. Ces fonctions sont ensuite remplies par Jean Visage, et Jean

(1) Archives communales, liasse 34, Meubles, n° 4.

(2) Ibid., Comptes, 4, f" 209 v°.

(3) F*. 9.

(4) Voy. ci-dessus, p. 133

(5) F*. 3.


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Gouvion (1) destitué en 1421 (2); Jacques de Chaumont, mentionné en 1429-1430 (3) ; Nicole Jaquemin, en 1462 (4), 1467 (5), 1474 (6), 1475(7); Jean Bourgnet, de 1476 (8) à 1516, Martin Chuffet, du U juillet 1516(9) à 1541 (10); enfin Laignelet (11), qui fut le dernier de ces commissaires (12). Le Parlement charge d'abord le bailli de Vermandois ou* son lieutenant de désigner ce juge (13). Puis le choix se complique. Les échevins présentent un nom (14). L'archevêque l'accepte (15). Le candidat est alors soumis « au bon plaisir du roy et de la court » (16), qui donne des lettres de commission (17). Enfin le lieutenant de Reims installe le commissaire et en reçoit le serment (18). Quand une

(1) F'. 4. — Pièces justificatives, X.

(2) Archives nationales, X" 1 63, f° 354.

(3) Archives communales, comptes des léproseries, 2, f° 81.

(4) Ibid., liasse 34, renseignements.

(5) E. 16, 14, 13 v°.

(6) E. 16, 2, f° 17 v°.

(7) Ibid., 2, f 26.

(8) Archives communales, Conclusions du Buffet, 2, 32.

(9) Ibid., 3, f° 134 v".

(10) Ibid., 5, f° 32.

(11) Ibid., 5, f° 60.

(12) Ibid., Comptes des léproseries, 10, f° 112 v°.

(13) F'. 3.

(14) Archives communales, Conclusions du Buffet, 3, 134 v° et 2, f» 26.

(Ici) Ibid., 5, f° 43 v° (1542 n. st.). Le premier n'ayant pas été agréé, le procureur de l'Echevinage en présentera deux autres.

(16) Ibid., 5, f° 32.

(17) Ibid., 2, f° 112 v°. Ces lettres sont payées par moitié par les parties (Conclusions, 3, f° 135).

(18) Ibid., Comptes des léproseries, 3, t° 110 (1475-1476) : « En despens faiz par M. le lieutenant du bailli de Vermandois, quant il prit et receupt le serment de Me Jehan Bourgnet et qu'il le


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difficulté se présente, qu'un lépreux condamné à être interné appelle de ce jugement, c'est l'Echevinage qui poursuit généralement l'application de la sentence (\). Il semble que ce soit l'archevêque lorsque le lépreux est clerc (2). Parfois même on voit l'Echevinage et l'archevêque, qui réserve par là ses droits, intervenir de pair (3).

Ainsi ce long débat n'avait pas abouti. L'administration de la léproserie reste aux possesseurs : l'archevêque n'avait pas tiré d'avantages de ses sacrifices. Pendant que les parties soutenaient à grands frais ce procès interminable, les lépreux en profitaient pour se livrer au désordre (4), et l'autorité centrale s'introduisait dans l'administration de l'hôpital. Au moment où le Cardinal de Lorraine réclamait la vérification des comptes de Saint-Ladre, les édits royaux confiaient cette révision au Grand Aumônier de France, représentant du Roi.

commist de l'autorité de la court de Parlement juge des lépreux a Reims, par led. Me Jehan, par le clerc du bailli de Vermandois, et par plusieurs de Messieurs les eschevins, xx s. p.»

(1) Archives nationales, X,a. 4867, f° 85 V. — X'» 4882, f> 10. X,a 4887, f° 106.

(2) Archives nationales, Xu. 4868, f° 442.

(3) Archives communales, liasse 34, renseignements.

(4) F*. 9 (1520).

15


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CHAPITRE IX.

La léproserie et le Pouvoir central. La léproserie au XVH» siècle.

La léproserie de Reims ne dépendait nullement de l'autorité royale. Si le nom de certains établissements charitables de la ville, comme l'Aumône Saint-Remi ou Saint-Antoine de Reims, figure dans la liste des hôpitaux de fondation royale, c'est-à-dire à la collation du roi ou de son Grand Aumônier, dressée par Jean d'Aussy, évêque de Langres, aumônier de Charles YII (1), on n'y trouve pas celui de Saint-Ladre. Les échevins étaient en droit maîtres chez eux, et il suffirait, pour le prouver, de citer certaine lettre close (2) où un roi de France leur recommande, pour la cure de Saint-Ladre, son chapelain d'honneur, Pierre Richier, ou d'une autre lettre de Charles VI, en faveur de Jean Prudhomme, bachelier en théologie de l'Université de Paris (3).

Mais ce que le roi ne pouvait faire comme patron, il le fit comme roi, chef de la justice et de la police du

(1) Publiée en appendice par Sébastien BOUILLARD, Le Grand Aulmosnier de France (1607). Cf. Bibliothèque Nationale, Ms. fr. Nouv. acquis., 1440.

(2) A 2. 3,11, n" 36 (collalion). Edité dans Annuaire de la Marne, 1872, p. 80 : « Et pour ce qu'a vous appartient la provision et disposition (Ficelle, vous prions et requérons... que lad. cure vous donnez et confiez a notre chappelain d'honneur. » Nous n'avons pu identifier ce roi, nommé Charles dans cet acte dont il n'existe qu'une collation.

(3) BIDET, Mémoires, 11, eh. 20, dans VABIN, Archives administratives, t. I, p. 13.


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Royaume. Il y a là un très intéressant développement du contrôle royal sur tous les hôpitaux de France, et il faut comparer ce progrès à tous les mouvements parallèles qui, dans les diverses parties de l'administration, aboutirent, malgré des résistances inévitables, à l'organisation de la monarchie du xvne siècle. Sans tenir compte des mesures financières par lesquelles le pouvoir central put atteindre le patrimoine des hôpitaux, l'organisation judiciaire permettait souvent au roi de mettre la main sur l'administration des établissements charitables. On vient d'en trouver un exemple à propos de la longue lutte de l'archevêque et des échevins de Reims. En 1381-1382 et 1388, à la suite de démêlés entre malade et administrateurs, Bertrand Bricart est commis de par le roi au gouvernement de Saint-Ladre (1) : sans doute il gouverne sous la surveillance des échevins dont les droits se trouvent reconnus (2), mais il n'en administre pas moins par la main du roi (3) et il est responsable devant les officiers de la justice royale. On voit de même intervenir les agents de l'autorité centrale à l'appel des échevins incapables un moment de maintenir la discipline, pour empêcher les lépreux de troubler la sécurité publique (4). Mais le roi n'est pas seulement chef de la police du royaume ; il est le « père » des pauvres. A maintes reprises, les édils royaux affirment ce « droit de la couronne (5). » Les rois sont les

(1) E. 16, 1, f" 1 (1381-1382) : « Ce sont les receptes et mises faitez par Bertrand Bricart, commis de par le Roy notre sire au gouvernement des maisons de S. Ladre de Reims. — Ibid., î° 16.

(2) E. 16, 4, f° 1.

(3) Archives communales, Livre rouge de l'Echevinage, p. 220.

(4) Pièces justificatives, VIII.

(5) Recueil des edits concernant les hospitaux (1675), p. 42. — Bibliothèque de Reims, ms. 835-830, 4.


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« protecteurs et conservateurs » des maladreries (1). Et cette théorie leur offrait trop d'avantages pour qu'ils ne la missent pas en pratique (2).

Au xv" siècle, on trouve organisée une sorte d'inspection générale des établissements hospitaliers : l'aumônier royal, chargé de la « réformation des hôpitaux », délègue, dans chaque province, des commissaires visiteurs. Saint-Ladre reçût cette visite le 3 juillet 1481 : le commissaire, délégué dans le Vermandois, était un personnage de marque : le chroniqueur Mathieu d'Escouchy (3), garde du sceau royal à Compiègno (4). 11 se présenta devant les échevins, en compagnie du bailli de Reims et du substitut du procureur du roi au bailliage de Vermandois, et leur fit lecture de ses lettres de commission. L'Echevinage, ayant pris l'avis de ses conseils ordinaires, se déclara prêt à obéir au bon plaisir du roi (5). Le même jour, les deux gouverneurs,

(1) Rtcueil des édils concernant les liospitaux, p. 6(17 mai 1544). — François Ier se déclare «protecteur et garde... des pouvres pèlerins, passans, malades, indigens et souffreteux. » (Catalogue des actes de François Ier, I, n° 1150, 1er mars 1520).

(2) Dès le xive siècle, Philippe-le-Bel veut imposer une lépreuse étrangère à la léproserie de Saint-Quentin (GOMART, Études SaintQuentinoises, t. V, p. 317). L. LE GRAND (Les Maisons-Dieu, dans Revue des questions historiques, janvier 1898, p. 102) signale une série de maladreries où le roi prélendit de bonne heure exercer un droit de joyeux avènement.

(3) Pièces justificatives, XII.

(4) Mathieu d'EscoucHY, Chronique, édition G. DU FRESNE DE BEAUCOURT (Société de l'histoire de France, 1863). Introduction, p. XXI.

(5) Conclusions du Buffet, 2, f° 97 V (4 juillet 1481) : « La certiffication de la Visitation faite des hospitaulx S. Ladre par Mahieu d'Escouchy, commis de par Mc Jeh. Brunet, conseiller et aumosnier du roy noslre sire, commissaire d'icellui seigneur en


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M" Robert Choilly et Jehan Chinoir, accompagnés d'un de leurs collègues et des procureur et clercs de l'Echevinage, lui montrèrent en détail les deux hôpitaux, où se trouvaient trois lépreux et deux lépreuses, les jardins, les chapelles; il examina les travaux d'une maison nouvelle que l'on construisait pour le convers, se fit expliquer le régime de la maison, vérifia plusieurs comptes. La visite fut interrompue par une collation où les échevins firent honneur au délégué royal. A la fin, Mathieu d'Escouchy se déclara satisfait et délivra aux échevins, sous son seing, un certificat de leur bonne administration (1). Les termes mêmes de ce rapport établissent l'autorité avec laquelle le roi prétendait intervenir dans la régie des hôpitaux. Inspecter, instituer et destituer les gouverneurs , réparer les abus, tels sont les droits qu'il reconnaissait à son aumônier, et aucune distinction n'était faite entre les maisons de fondation royale et les autres. Mathieu d'Escouchy, après avoir constaté le bon état de la léproserie, ajoutait : « Et a ceste eause en avons delaissié la charge d'administracion. .. comme devant ausdis eschevins et a leur dis commis sans leur

ceste partie, a esté veue au Buffet, et a esté ordonné qu'elle se monstre aux conseillers, et selon qu'ilz en diront, qu'elle se face et au surplus qu'on donne aud. Mahieu ung escut d'or. »

(1) Cette inspection dura deux jours. Comptes des léproseries, 4, f° 16 : « A Mahiet d'Escouchy, commissaire réformateur de par le Roy nostre syre des hospitaux et maladeries de Vermendois pour son salaire d'avoir esté par deux jours a visiter les hospitaulx S. Ladre et les comptes de l'administration d'iceulx, xl. s. p. — En despens faicts par lui et ceulx qui, de par Messieurs, le conduisoient, en l'ostel de Jehan Legay, xxi.s. vin. d. p.— Pour ses lettres de récépissé et certifflcation et pour le double de sa commission, vin. s. p. — Pour l'approbation de son scel faicte par Pierre Boulet, notaire royal, vin, d. p. u. d. t. »


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y mettre ou donner aucun destourbier ou empeschement. » Aurait-il donc pu la leur enlever? Au xvn" siècle, les chevaliers de Saint-Lazare tireront argument de celte visite pour essayer de faire de Saint-Ladre une maladrerie royale (1). Les échevins avaient certainement compris la gravité de celte inspection. Comment l'avaient-ils permise sans résistance? D'abord par soumission aux ordres du roi. Mais aussi parce qu'ils pouvaient admettre une théorie qui sauvegardait leur indépendance. Cet inspecteur, visitant indistinctement tous les hôpitaux, il n'y avait pas lieu de conclure que, par ce fait même, un hôpital était de la fondation ou de la collation du roi. Et ils distinguaient le droit d'administration propre qu'ils gardaient et cette « espèce de droit éminent et supériorité » que peut avoir le roi sur les établissements de charité « comme père des pauvres » et en vertu duquel il peut examiner les comptes (2).

Mais comprirent-ils qu'avec une telle distinction, ils s'engageaient dans une voie dangereuse ? Cet examen des comptes permettait une surveillance directe de la gestion administrative. Sans doute, le roi n'entendait pas faire des hôpitaux des services publics, dirigés par des agents de l'autorité centrale. Mais laisser, par exemple, aux échevins de Reims, l'administration, en réservant au roi le droit de supprimer dans leur compte tel ou tel article, c'est-à-dire tel ou tel acte de leur administration,c'était organiser un contrôle qui limitait singulièrement la liberté des administrateurs. L'exercice de ce contrôle (3) et les résistances des échevins occu(1)

occu(1) 3, n° 49.

(2) Ibid.

(3) Le représentant du roi dans l'exercice de ce contrôle fut leGrand Aumônier. L'aumônier royal, chargé d'abord de la dislri-


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pent toute l'histoire de la léproserie au xvi* siècle.

On ne tarda pas dans les hôpitaux, parmi les malades et les lépreux, à savoir qu'au-dessus des administrateurs, il y avait une autorité à laquelle on pouvait avoir recours. En 1519, les lépreux de Reims, ayant vainement sollicité une augmentation de pension, avaient demandé aux gouverneurs de leur montrer leurs comptes (1). Leur demande resta sans réponse. Ils s'adressèrent audacieusement au cardinal Le Veneur, Grand Aumônier, se plaignant de l'absence de contrôle (2). Le cardinal Le Veneur fit faire une enquête par l'abbé d'Igny (3). Malgré les remontrances présentées à l'enquêteur (4), les échevins durent laisser examiner leurs comptes (5), et, inquiets, se décidèrent à augmenter la pension des malades de 5 s. t. par mois (6).

Mais ceci n'était qu'un prélude. En même temps que les édits royaux (7) organisaient, sous la direction du

bution des aumônes de la Cour, avait eu de bonne heure un droit de visite et de juridiction sur certains hôpitaux, puis sur tous les hôpitaux de fondation royale. Au moment où le pouvoir central, sous prétexte de réformation des maladreries, entreprenait au xvie siècle de s'assurer la surveillance de tous les hôpitaux de France, le Grand Aumônier se trouvait tout désigné pour diriger celte réformalion et exercer cette surveillance.

(1) Conclusions du Buffet, 3, f° 169.

(2) Conclusions de l'Echevinage, 3, f» 169 ; 4, f° 267.

(3) Ibid., 4, f° 267 v°.

(4) Ibid., 4, f° 167 V (1535).

(5) Ibid., 4, f" 168.

(6) Ibid., 4, f° 170 (19 octobre 1535). De même, requête au Grand Aumônier, pour la suppression des droits de bienvenue (1549: Concl., 5, 202); requête de Claudine Vincent, lépreuse (1628 : Archives nationales, V 7. 134, n° 77).

(7) Catalogue des actes de François Ier, nos 3.063, 13.497, 14.685, 15.584.


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Grand Aumônier, une vaste enquête sur l'administration, l'état, la fortune des établissements hospitaliers, ils décidaient une révision des litres qui fixerait les droits des seigneurs, des évêques ou des villes sur les hôpitaux et établirait s'ils en étaient réellement fondateurs et patrons. En effet, une autre théorie rattachait à la couronne l'administration de toutes les maladreries qui n'étaient « de fondation ou patronage d'aucun prince, archevesque, evesque, seigneurs et communauté/ (1). » Le 16 août 1545, le lieutenant du bailli de Vermandois à Reims demandait aux échevins d'exhiber les chartes et titres de fondation de Saint-Ladre (2). Des copies des actes les plus anciens furent envoyées au Grand Aumônier (3). Quatre ans plus tard, Pierre du Chastel, Grand Aumônier, imposait un nouveau règlement à la maladrerie de Reims.

Le grand moyen d'action du pouvoir central fut, comme on l'a dit, la révision des comptes : il y a à la fin du xvi* siècle et au début du xvu" siècle, toute une législation sur ce point. Mais la royauté alla plus loin : elle disposa même des reliquats de ces comptes : ces fonds furent employés tantôt à des oeuvres locales, mais à la disposition du Grand Aumônier, tantôt à des fondations royales déterminées. Diverses commissions furent organisées, de composition ou de pouvoirs variables, sous le nom de Chambre de la charité chrétienne ou de Chambres de réformalion des hôpitaux.

Les échevins de Reims, comme tous les administrateurs d'établissements charitables, durent subir l'in(1)

l'in(1) des édits concernant les hospitaux, p. 42 (édit du 8 février 1593).

(2) Archives communales, Conclusions du Buffet, 5, f° 118.

(3) Ibid., 120 v».


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tervention de ces commissaires. Ils doivent d'abord présenter leurs comptes devant les commissaires de 1577 (1), et, sur leur jugement (2) ils paient, en 1582, 2 écus soleil à la requête de Nicolas Houel, maître et intendant de la Maison de la charité chrétienne de Paris (3). En 1607, nouvelle révision : le 5 janvier, ils sont invités à déposer, au greffe du Présidial, un rapport sur l'étal de la maladrerie (4). Us essaient d'abord d'échapper à cette révision, ou tout au moins de ne pas aller rendre leurs comptes à Paris. Les relations amicales qu'ils pouvaient avoir avec les officiers du Présidial, expliquent sans doute cette tentative (5). De là, une requête au moins étrange (6) où ils demandent anxieusement, au cas où les administrateurs devraient se rendre à Paris, ce que deviendraient les pauvres lépreux « sans nourriture et gouvernement » ; à la fin ils se

(1) Conclusions du Buffet, 8, f" 132 (13 octobre 1577).

(2) En 1579, Laurent Cauchon, lieutenant du bailli de Vermandois à Reims, « commissaire en ceste parlye », fait un volumineux recueil dé collations d'après le chartrier de l'Echevinage (Liasse 34, Renseignements).

(3) Archives communales, Pièces comptables, liasse de 1582. Organisée par Nicolas Houel, en 1576, pour servir d'école de pharmacie et de dispensaire (Les Édicts, ordonnances et règlement sur l'administration du revenu des hôpitaux [1585], p. 98), la Maison de charité chrétienne avait obtenu que les reliquats des comptes des hôpitaux et malversations des administrateurs lui seraient attribués (Ibid., p. 102). Sur Houel, voy. J. GUIPFRET, Nicolas Houel, apothicaire parisien, fondateur de la Maison de la charité chrétienne, dans Mémoires de la Société de l'histoire de Paris et de l'Ilede France, t. XXV (1898), p. 179 sqq.

(4) Ibid., Conclusions du Buffet, 9, f° 162.

(5) II est déjà singulier de les voir rédiger eux-mêmes ce rapport sur l'administration et l'état de la léproserie, dont l'édit confie le soin au substitut du procureur.

(6) Archives communales, liasse 34, Juridiction, n° 11.


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décident à envoyer à Paris M. Garlache Souyn, gouverneur de Saint-Ladre (1). Il s'acquitte fort bien de sa mission, si l'on en juge par un arrêt de la Chambre du 12 décembre 1608 (2). Les commissaires, très occupés, semblent avoir accepté avec facilité certaines transactions avantageuses au trésor de la Maison de charité. Au lieu de se livrer à un examen complet de la gestion financière, ils acceptaient une somme qui devait représenter le reliquat des comptes depuis la dernière révision. C'est ainsi que Saint-Ladre se trouva déchargé de la vérification des comptes depuis 1580, moyennant une somme de 500 1. préalablement versés à la recette des hôpitaux (3).

Pour activer et assurer cette reddition des comptes, les commissaires faisaient procéder à la saisie des biens des hôpitaux et nommer des administrateurs provisoires. Cette saisie atteignit, en 1613, l'hôtel-Dieu et la léproserie de Reims (4). Nicolas Colbert, marchand drapier (5), était nommé « commissaire de par le Roy notre sire au régime et gouvernement de tout le revenu dépendant » de la maladrerie (6). Les échevins présentèrent aussitôt leurs comptes, et le 3 décembre, la

(1) Archives communales, Conclusions du Buffet, 9, fos 230-231.

(2) A". 1, n° 13.

(3) Archives communales, liasse 34, Juridiction, n° 11 : reçu de Lucas, greffier de la Chambre de charité (10 décembre 1608).

(4) Archives nationales, V 7. 128, liasse de 1013, n° 56.

(5) Cf. P. CLÉMENT, Lettres, instructions et mémoires de Colbert, t. I, p. 483.

(6) F 1. 25, n° 1 (23 octobre 1613). Agé, père de huit enfants, récemment blessé, comme il le fit constater par certificat notarié, N. Colbert essaya d'éviter cette commission : il en fut déchargé par arrêt de la Chambre de réformation du 3 décembre (F 1. 25, n° 4).


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Chambre leur donnait main levée temporaire de la saisie pour leur laisser le temps de les faire vérifier (1). Le 17 décembre, ils obtenaient main levée définitive (2), et l'on trouve les noms de Saint-Éloi et de Sainte-Anne dans un manuscrit de la bibliothèque de Reims, oeuvre sans doute d'un secrétaire de la Grande Aumônerie, parmi les « maladeries dont les prétendus fondateurs se sont faict donner main levée par arrest tant du Privé Conseil, Parlement et Grand Conseil que sentences des Chambres de charité, réformation et autres » (3).

Mais, ces questions financières n'étaient pas tout. A la même époque, les échevins devaient subir d'autres interventions du Grand Aumônier qui transformaient complètement le caractère de la léproserie et d'une fondation purement locale, faisaient un hôpital régional. Dès lors l'admission des malades dépendit non plus seulement des échevins, mais aussi du Grand Aumônier. Le nombre des lépreux étant de plus en plus restreint, certaines léproseries avaient cessé de recevoir des malades et étaient tenues à des pensions dont disposait le Grand Aumônier; et on groupait les lépreux dans un certain nombre de maladreries de plein exercice : c'était toute une centralisation. Bon gré mal gré, Saint-Ladre de Reims devint une de ces léproseries de plein exercice. Le 6 août 1549, la maladrerie recevait du Grand Aumônier, Pierre du Chastel, un nouveau règlement (4). Le nombre des malades qu'elle devait entretenir, était fixé à dix, Rémois « si tant s'en trouvent

(1) Archives nationales, 'V 7. 128, liasse de 1613, n° 113.

(2) Ibid., id., n» 170.

(3) Bibliothèque de Reims, ras. 835-830, 1° 31. .

(4) Voyez pièces justificatives, XVI.


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à présent en icelle ville. . . sinon des aultres lieux plus prochains et voisins. » Ils touchaient une pension annuelle de 30 1. t., payable par mensualités au commencement de chaque mois ; une fois de plus, défense leur était faite de sortir et de mendier par la ville; ils pouvaient cependant « cliqueter » devant l'hôpital ; le droit de bienvenue était supprimé. Les échevins furent tenus d'assurer l'exécution de ce règlement, de veiller aux réparations, d'entreLenir le service divin dans la chapelle, sous le contrôle du lieutenant du bailli de Vermandois à Reims (1 ). Après délibération, après consultation de leur conseiller ordinaire, les échevins acceptèrent le règlement (2). Le 9 octobre, la « sentance » d^i Grand Aumônier élait signifiée aux lépreux de SaintEloi et de Sainte-Anne (3). Il était sous-entendu que le Grand Aumônier avait droit de pourvoir aux dix places fixées par le règlement (4) : le 10 avril 1551 (n. st.), une conclusion du Buffet décidait la réception à SaintLadre de Jean Dupressoir, suivant les lettres de provision de M. le Grand Aumônier (5).

Les échevins avaient, accepté sans prolester, semblet-il, le règlement de 1549; mais, quand il fallut passer à l'application, ils soulevèrent une foule de difficultés; ils discutèrent sur le taux de la pension, le nombre des

(1) F'. 12, n» 5.

(2) Conclusions du Buffet, 5, f° 204 (30 juillet 1549).

(3) F'. 10, n° 3.

(4) Une commission, réunie à Paris en 1543, sous la présidence du cardinal de Meudon, avait demandé la création d'une sorte de bureau, d'où le Grand Aumônier répartirait les lépreux entre les différentes léproseries du Royaume, comblant les vides, évitant les excès (Ordonnance du 19 décembre 1543, dans Recueil des édits concernant les hôpitaux [1675], p. 4).

(5) Conclusions, 5, f° 243 v°.


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pensionnaires, la qualité des personnes pourvues ; et leur administration ne fut, jusqu'au xviic siècle, qu'une qu'une longue suite de résistances souvent justifiées.

Sur les incessantes sollicitations des lépreux, le Grand Aumônier élevait sans cesse les pensions. Le règlement existait à peine depuis deux ans, que les malades remontraient aux gouverneurs que 50 s. t. par mois leur étaient insuffisants. Les échevins ne pouvaient manquer sur ce point de prouver leur obéissance au Grand Aumônier ; ils invoquèrent le règlement (1), et ils l'observent de même fidèlement chaque fois qu'ils peuvent y trouver profit (2). Chaque fois alors, les lépreux s'adressent au Grand Aumônier qui accorde l'augmentation, et les échevins refusent, plus ou moins, de payer. En 1570, le Grand Aumônier porte la pension de 60 à 400 s. t. par mois : le Buffet décide qu'on ne tiendra pas compte de l'augmentation (3). Il préfère même parfois de se laisser exécuter que de céder (4). En 1579, les lépreux obtiennent une nouvelle augmentation (5) : les échevins concluent qu'ils continueront à fournir la pension ordinaire (6). Après saisie d'un des censiers, ils finissent par payer les 30 s. t. de supplément, mais ils font opposition pour que la pension ne soit pas augmentée (7).

Ils cèdent donc partiellement. Mais le débat se renouvelle sans cesse : c'est qu'ils essaient de défendre à la

(1) Conclusions du Buffet, 5, f" 270 v° (3 mars 1552, n. st.)

(2) Ibid., id., 6, f° 69 v» (1560. n. st.).

(3) Ibid., 7, f° 51 v° (2 septembre 1570).

(4) E. 16, 15, f» 71 v» (1576).

(5) Archives communales, Conclusions du Buffet, 8, f° 228 v° (6 juin 1579).

(6) Ibid., 8, f» 235 (23 juin).

(7) Ibid., 8, f° 267 (22 février 1580).


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fois leurs intérêts et leur indépendance. La question de liberté semble leur tenir non moins à coeur que la question d'argent. Plusieurs fois, de leur propre mouvement et sans requête, on les voit accorder à leurs malades, des augmentations (1). S'ils résistent si souvent, c'est qu'ils voudraient se garder et de l'exploitation des lépreux et de l'assujettissement complet au Grand Aumônier. De là, tant de difficultés de détails. Par exemple, un lépreux, nommé Dimanche Montre, leur présente-t-il ses lettres de provision? Ils se rappellent un arrêt de la Chambre de réformation, du 19 avril 1608, et ils refusent de payer, sous prétexte que ces lettres n'ont pas été enregistrées au greffe de la Chambre (2) : et obligés de s'acquitter, ils discutent longuement pour faire partir les paiements, non de la date de la provision, mais du jour de la signification des lettres (3).

Un article du règlement fixait à 10 le nombre des pensionnaires : là encore des difficultés. Insouciance ou oubli, les secrétaires de la Grande Aumônerie délivrent des bulletins au delà du nombre fixé. Cependant, dès 1552, les Gouverneurs avaient remis, au greffe del'Aumônerie, un état de leurs lépreux, avec noms et surnoms, qui devait être tenu à jour (4). En 1618, la Chambre de réformation demandait de même un état des pensions payées par Saint-Ladre (5). Mais il ne semble pas que les bureaux aient tenu grand compte de ces états (6). Les échevins rappellent alors l'article du

(1) Concl. duBuffet,6,f°161(1565, n. st.); 9, f" 23 v°(1586).

(2) F 1. 24, n» 1.

(3) F». 22, n" 4.

(4) F 1. 12, n° 5.

(5) Archives nationales, V. 130, liasse de 1618, n° 263 (26 septembre 1618).

(6) E. 16, 17, f» 37. — Conclusions, 6, f» 254 v» (1557, n. st.).


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règlement, heureux de pouvoir rester dans la légalité en protestant (1). Us obtiennent d'abord raison et, par deux fois, en 1590, ils répondent à des bulletins de provision par un refus (2).

C'est alors un véritable concours entre lépreux pour enlever une pension. Une lépreuse est mise hors de Sainte-Anne pour faire place à une lépreuse plus pauvre (3). Thomas Maigret présente requête (4) pour être reçu au lieu d'Alizon Philippe, et il fait remarquer qu'elle est née à 10 lieues de Reims, qu'elle a de l'aisance personnelle, qu'elle tire pension d'autres maladreries. Débordés, les échevins organisent une sorte d'admission temporaire, qui se retrouve ailleurs (5). Un lépreux étranger, reçu momentanément, doit se retirer quand se présente un lépreux Rémois (6) ; une conclusion du 12 août 1579 autorise Jehan Hanin, de Champfleury, àoccupergraluitementune chambre à Saint-Ladre <( en attendant qu'il y ait une place vacante pour y estre receu avec les aultres (7). »

A la fin, les échevins durent céder et fournir ces pensions supplémentaires (8). Un second règlement, imposé au moment où ils présentaient l'ancien à l'homologation

(1) F 1. 12, n° 5, f 1 : procès au Parlement pour la réception de Gille Carré (1552).

(2) Conclusions, 9, f° 102 (12 juin 1590).

(3) Conclusions, 9, f° 37 (1587).

(4) Ibid., 3, f» 104(1590).

(5) Ibid., id. Dans sa requête, Th. Maigret dit qu' « il a esté quelque temps en l'hospital de Beauvais de laquelle il a esté contraint sortir pour faire place à des malades... natifz dud. Beauvais ».

' (6) Ibid., 7, f° 66 V (1571).

(7) Conclusions, 8, f° 241.

(8) E. 16, 17, f»s 37 et 38 (1612).


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de la nouvelle Chambre de réformation (23 décembre 1613), les obligea à 15 pensions (1). En 1608, ils avaient demandé que ce nombre fut réduit à 8 (2). En 1618, sur une nouvelle requête de leur part (3) et en raison des réparations à faire à l'hôpital, la Chambre de réformation leur accorda temporairement une réduction à 10 (4).

Forcés de céder si souvent, les échevins essayèrent, du moins, de maintenir quelques-unes des anciennes règles de la maison, et notamment, les conditions d'entrée. Le lépreux du xv° siècle devait subir une visite préalable. Mais, au xvi" siècle, plus d'un malade ou pseudo-malade, fort des lettres du Grand Aumônier, se refuse à une formalité qui aurait pu être dangereuse pour sa pension (5). Autrefois, le lépreux devait être Rémois : on a déjà vu suffisamment qu'il n'en était plus de même au xvi° siècle : en 1557, la léproserie payait la pension de 5 Rémois et de 6 étrangers. L'ancien système qui imposait à chaque commune l'entretien de ses lépreux, subsistait toujours en principe, puisque les léproseries, qui ne recevaient plus de lépreux, payaient des pensions à leurs malades, hospitalisés dans d'autres villes : mais ceci semble n'avoir été que la théorie : un

(1) Archives nationales, V 7. 128, liasse de 1613, n" 184. —Archives de l'Hôpital Général, F'. 26.

(2) Conclusions du Buffet, 9, f° 230 v°.

(3) Archives communales, Comptes des léproseries, t. 19 (non folioté).

(4) Archives nationales, V 7. 130, liasse de 1618, f° 360.

(5) F. 1, 12, n° 14 : procès pour la réception de Gille Carré (1552) : « Lequel n'auroit voulu exhiber aulcune Visitation faite de sa personne, pour la preuve de la malladerye (sic) de leppre par luy maintenu... »


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malade de telle ville, reclus à la léproserie de Reims, n'eût dû recevoir de pension que de sa ville ; un malade n'eût jamais dû avoir qu'une pension. Mais on peut considérer que les revenus de toutes les maladreries étaient comme confondus dans une caisse commune, le Grand Aumônier distribuait, pour ainsi dire, un peu au hasard, les malades dans les léproseries, et, le nombre des lépreux diminuant de plus en plus, les habiles savaient se faire donner plusieurs pensions.

Les échevins, effrayés de cette centralisation dont ils pâtissaient, avaient d'abord essayé d'exclure ceux qui étaient ainsi pourvus sur plusieurs hôpitaux. Chaque nouvel arrivant dut déclarer, sous serment, s'il n'avait pas « autre provision sur aultre malladerye » (1). Plusieurs fois des enquêtes furent faites, à ce sujet, sur les pensionnaires de Saint-Ladre (2), et en septembre 1586 (3), c'est seulement après avoir constaté de la sorte que leurs malades n'avaient pas d'autres pensions par ailleurs, que les échevins consentirent à une nouvelle augmentation des « gages ». En réalité, au moins au xvn" siècle, les exemples de ces multiples pensions ne sont pas rares (4), et, en 1609, deux lépreux rémois, Jean Marjollet et Anne Laurent, pour obtenir satisfaction, font saisir le fermier de la chapelle de Bourcq, dépendant du couvent Saint-Louis de Rethel (5).

(1) F 1. 12, n» 4.

(2) Conclusions du Buffet, 7, f» 23 v° (1569); 8, f°289 (1580).

(3) Archives communales, Conclusions du Buffet, 9; f° 19 (4 septembre 1586).

(4) Archives nationales, Z'\ 1, f° 3 (1613). — V 7. 128, liasse de 1613, n° 52 (9 novembre 1613).

(5) Archives nationales, V 7. 127, liasse de 1609, additions, n° 76 (11 juillet 1609).


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Inversement, des lépreux résidant en dehors de Reims, étaient pourvus sur Saint-Ladre : obligés de recevoir à l'hôpital des pensionnaires non Rémois, les échevins s'étaient vus obligés d'admettre des pensionnaires non-résidants. Vainement ils avaient rappelé cette règle fondamentale des anciennes léproseries « que les lespreux résideront en lieux d'où ilz tirent leurs pensions » (1) : ils avaient dû s'incliner. Dans un arrêt curieux de la Chambre de charité, les commissaires, sur la requête des échevins de Reims, offrent à Henri Chopin, lépreux, soit de résider à Reims avec une pension mensuelle de 110 s. t., soit de rester à Bourcq et, dans ce cas, les administrateurs de Saint-Ladre ne lui paieront que 60 s. (2). C'est donc, pour les échevins, renoncer à leur principe. Plus tard, ils paieront pension à des lépreux résidant à Châlons (3), à Bourcq, à Meaux (4), à Paris, à Soissons (5). Dans les comptes, un chapitre des dépenses a pour titre : « Mises. . . des pensions des lépreuses estant tant auxdits hospilaulx qu'ailleurs » (6). La seule garantie que peuvent avoir encore les administrateurs, c'est de demander à ces non-résidants un certificat de vie (7).

(1) F'. 1, 21, n°2.

(2) F 1. 19 (4 août 1607).

(3) E. 16, 17, f» 35.

(4) Archives nationales, V 7. 132, liasse de 1634, n° 52.

(5) Archives communales, Fonds de l'archevêché, G. 185, compte 1613-1614, f 83 v°.

(6) Archives communales, Comptes des léproseries, 28, f° 458 v° (1626).

(7) Ibid., Pièces comptables, liasse 1636 : certificat dévie donné à Marguerite Leboeuf par le chapelain de Saint-Jacques aux lépreuses de Châlons. — Un règlement de la Chambre de réformation imposait d'ailleurs cette formalité (Bibliothèque de Reims, ms. 835-830, f° 60 v°, 27 janvier 1614).


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Mais, non-résidants ou étrangers, ces intrus étaient encore, pour les échevins, des malades. Ils durent se résigner à pensionner des « personnes saynes ». Déjà les lépreux, même quand ils consentaient à subir la visite médicale, pouvaient n'être que des ladres de fantaisie. Au xvn' siècle, l'argent des malades est distribué de par le Grand Aumônier à une foule de personnes, dont les titres sont souvent discutables. Servantes de lépreux, femmes de lépreux, veuves de lépreux, enfants de lépreux s'introduisent, pour ainsi dire, dans les finances de l'hôpital. Les échevins font entendre leurs plaintes (1) : requête au Grand Aumônier en 1608 (2), requête à la Chambre de charité en 1611 (3), requête à la Chambre de réformalion en 1618 (4). Mais les provisions sont maintenues. Le règlement du 3 février 1618, déjà signalé, fait bien quelques suppressions, mais, aux comptes de 1629 (5), on voit figurer, parmi les pensionnaires, Marguerite Courcelles, veuve de Claude Lamequin, « vivant lesprcux, lad. Courcelles a présent résidante en la maladrerie » ; Andrienne Roze, servante de lépreux; Nicolle Sully, ancienne servante de lépreux.

Mais ceux qui, peut-être, au moment où vont disparaître ou se transformer les léproseries, abusent le plus de la situation, sont les « solliciteurs des lépreux », sortes de mandataires que les bons malades peuvent charger de leurs intérêts. Les lépreux de Meaux, par exemple, obtenant pension sur Saint-Ladre de

(1) F. 1. 27, n» 3.

(2) Conclusions du Buffet, 9, f° 228 v° (27 octobre 1608).

(3) Archives nationales, V 7. 127, liasse de 1611, nos 9 et 21 (26 mars 1611).

(4) Ibid., V 7. 130: liasse de 1618, n» 254 (26 septembre 1618).

(5) E. 18, 1, f° 88.


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Reims, et « reclus », au moins officiellement, dans leur maladrerie, sont obligés de recourir à des intermédiaires : de là l'intervention des solliciteurs des lépreux. Pourvus parle Grand Aumônier (1), surveillés par les Chambres de Réformation, soumis à leurs règlements (2), ils sont chargés surtout du recouvrement, par provinces (3), des pensions des malades (4). D'autres fonctions en font des sorles d'agents du Grand Aumônier (5). Des pensions leur sont assignées sur le revenu des hôpitaux, et ils sont logés dans les bâtiments des maladreries : le solliciteur de Champagne occupe une maison à Saint-Éloi de Reims (6). Ces avantages signifiaient que les solliciteurs ne devaient demander aucune rétribution aux malades : la plupart ne le pensèrent pas ainsi. Ils commirent de nombreux abus, prélevant des droits sur les pensions, continuant à toucher les provisions de lépreux morts, gardant même pour eux les pensions de lépreux vivants (7). En 1633, un procès s'engage entre les lépreux de Reims et le sollici(1)

sollici(1) nationales, V 7. 127, liasse 1609, additions, n° 30.

(2) Recueil des édils sur les hôpitaux (1675), p. 60 (24 octobre 1612).

(3) Bibliothèque de Reims, rns. 835-830, f» 30ler v°. Cette répartition par provinces n'a peut-être pas existé d'abord. P. Gorgibus s'intitule « solliciteur des lespreux du Royaume de France » (1610) (F 1. 23, n» 1).

(4) Archives nationales, V 7. 137 ; liasse 1634, n° 124 : règlement de la Chambre (1er août 1634) : Les lépreux ont été « pourveus. .. de pensions. .. et d'un solliciteur en chacune province pour la perception d'icelles. »

(5) Ibid.: la Chambre les charge de l'aire notifier ce règlement aux lépreux et de faire rapport, sur son exécution au procureur du roi. De même, Ibid., V 7. 120, liasse 1607, n° 165, f° 11 v°.

(6) Ibid., V 7. 137, liasse de 1034, n» 38.

(7) Ibid., V 7. 132, liasse de 1024, n° 127.


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teur de Champagne, d'abord devant l'Echevinage, puis, par évocation, devant la Chambre de réformation (1), et une sentence du 28 mars 1634(2) le condamne à payer une indemnité, à vider une partie des bâtiments qu'il occupe à la maladrerie et lui défend de plus molester les lépreux à peine de privation de ses fonctions.

En effet, depuis 1609 au moins, les échevins avaient à fournir une pension de solliciteur (3). On devine les efforts qu'ils firent pour éviter cette nouvelle charge (4) : ils n'avaient pas besoin d'intermédiaire pour payer les mensualités de leurs lépreux, et ils n'admettaient pas que ceux-ci eussent pension par ailleurs. Au bout de huit ans, le règlement de 1618(5) leur donna raison, pour un moment : le règlement n'était valable que durant quatre ans, et les derniers comptes de SaintLadre indiquent une pension de 6 1. 10 s. par mois (6) à Nicolas Chahureau, solliciteur des lépreux. Il y a plus : la pension du solliciteur subsistera après la disparition de la léproserie et sa réunion à un nouvel hôpital. Malgré les remontrances du Bureau de cet hôpital, qui rappelle l'inutilité d'un solliciteur à Reims (7), Jean Cluet obtient lettres de provision à ce titre (8). Au même moment, le Bureau doit payer une pension à la fille de feu Chahureau (9), et en 1652, un nouveau

(1) Archives nationales, V 7. 137, liasse de 1633, nos 53 et 78.

(2) Ibid., V 7. 137, liasse de 1634, n° 38.

(3) F'. 23, n° 1.

(4) Archives nationales, V 7. 127, liasse de 1611, n° 9 : requête des échevins (26 mars 1611).

(5) Ibid., V 7. 130, liasse de 1618, n° 360. (6)E. 18, l,f° 86(1629).

(7) E. 3, f° 121 (20 janvier 1647).

(8) Ibid., f° 123 (5 février 1647).

(9) Ibid., i° 118 (4 janvier).


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solliciteur est établi dans les bâtiments de l'ancienne léproserie (1).

Ainsi, malgré toutes ces résistances que nous avons cru devoir examiner en détail parce, qu'elles montrent l'intervention progressive du pouvoir central, la léproserie de Reims cesse d'être un établissement communal. Les échevins restaient administrateurs sous l'étroit contrôle des agents du Grand Aumônier. Ils faillirent même un moment perdre ce dernier privilège. En 1611, le Grand Aumônier, disposant de Saint-Ladre comme d'un de ces hôpitaux royaux devenus des sortes de bénéfices, en fait nommer Claude Calamart administrateur (2) ; le 8 août, Calamart prenait possession; l'Echevinage proteste; l'affaire est portée successivement au Grand Conseil, au Parlement, au Conseil privé, puis, à nouveau, au Parlement : un conflit de juridiction s'élève, dont profitent les échevins (3) : déjà lassé, Calamart préfère se retirer (4). Un arrêt de la Chambre de la générale réformation, en date du 14 décembre 1613, reconnaît les droits de l'Echevinage (5).

En résumé, à la fin du xvi° siècle et au début du xvii*, la léproserie de Reims se trouve être un établissement à la fois local et régional. Des malades qui y étaient reçus, les uns étaient pourvus par le Grand Aumônier, les autres admis par les échevins. Les uns étaient impo(1)

impo(1) 3, f° 183 v° (26 avril 1652).

(2) Archives communales, liasse 34, juridiction, n° 12 (14 juillet 1611).

(3) Ibid., id., n" 13.

(4) A 3. 1, n" 1 (2 octobre 1613). Il obtint, sans doute, à titre de compensation, l'administration d'une autre maladrerie (Archives nationales, V 7. 127, 32).

(5) Archives communale, liasse 34, juridiction, n° 15.


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ses par le pouvoir central sans conditions ; pour les autres, les administrateurs maintenaient l'ancien système de garanties avec enquête, Visitation, serment (1). Les Rémois gardaient certains avantages : leur pension était supérieure ; ils profitaient seuls des gratifications accordées les jours de fêtes. Les échevins avaient, essayé d'appliquer les anciennes règles des hôpitaux communaux à ce qui était, en somme, une fondation toute nouvelle. Obligés d'y renoncer, ils tentèrent du moins de faire vivre parallèlement les deux systèmes : de là, tant de difficultés. Un règlement de la Chambre de réformation de 1614 décida que les administrateurs municipaux des léproseries ne pourraient plus recevoir aucun lépreux sans bulletin du Grand Aumônier (2). Les échevins ne pouvaient plus résister. D'autre part, les cas de lèpre devenaient tout à fait exceptionnels (3). Au milieu du xvne siècle même, les maladreries régionales étaient inutiles. Il s'agissait de faire un meilleur emploi du revenu des hôpitaux vides. Tout ce mouvement devait aboutir à la suppression des léproseries et à la création des hôpitaux généraux.

On a déjà pu constater, par le tableau de ces résistances, quel devait être l'état de la léproserie à la fin du xvie et au XVII" siècle. Il n'y a qu'à ajouter quelques brefs détails.

Ces longues contestations avec l'archevêque ou le roi ne sont pas seulement coûteuses. Les administrateurs,

(1) Ibid., Conclusions du Buffet, 5, f" 289 V.

(2) Recueil des èdits concernant les hôpitaux (1675), p. 63.

(3) Ibid., Appendice. Ordre du roi du 30 septembre 1678 : tous les lépreux du Royaume seront réunis dans la seule maladrerie de Saint-Mesmin, près d'Orléans.


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préoccupés à l'extérieur, négligent parfois l'administration intérieure. Les droits ou les biens de la léproserie les intéressent plus parfois que les lépreux, d'ailleurs souvent peu intéressants. La surveillance des malades n'est pas des plus étroites. Il n'y a pas de surveillant permanent résidant à l'hôpital. Le convers n'existe plus. En 1606, deux lépreux se battent, l'un frappe l'autre d'un coup de serpe, ils font la paix et vont boire ensemble un pot do vin, sans qu'à aucun moment personne n'intervienne. Ce fait même prouve combien la surveillance eût été utile, d'autant que certains lépreux au courant des relations de l'fêchevinage et du Grand Aumônier, sachant qu'ils pourraient toujours s'adresser à une autorité supérieure, que les échevins ne sont plus les maîtres, ne gardent pas grand ménagement.

Ce qui semble avant tout préoccuper les lépreux ou les pseudo-lépreux qu'attire à la léproserie l'espoir d'une vie facile et sans travail, c'est la question d'argent. On a vu les requêtes incessantes qu'ils adressent aux échevins, au Grand Aumônier pour faire augmenlerleurs pensions : ils insistent sur la cherté des vivres, sur la disette qu'amène le passage des troupes, sur leurs dépenses(l); au besoin ils ne reculent pas devant la calomnie, insinuant que les gouverneurs touchent des pots de vin pour donner les baux à vil prix. Même augmentée

(1) Archives communales, liasse 34. Renseignements (1550) : « ...Attendu mesmemenl. l'assiette de la ville de Reims qui est pays lymitrophe près les frontières de Luxembourg et Renault, que les gens d'armes pour soy retirer en leurs garnisons, actendans leurs pnyemens et monslre,foiit long séjour par les champs en mangeant le bon homme et les choses qui devraient estre apportées aud. Reims, et aud. pris et marché sont si chères que ce qui vaull au meilleu de de (sic) France cincq solz se vend aud. lieu et pays environ dix solz ; oultre ce, la stérilité de bois est si


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leur pension ne leur suffit pas : ils en veulent d'autres sur d'autres léproseries : à peine reçue à Sainte-Anne, une ancienne soeur de l'Hôtel-Dieu se met en quête d'une nouvelle pension et elle vend son manteau de religieuse pour parer aux premiers frais (1). D'autres ne sont lépreux que le jour où l'on distribue les pensions, et le lendemain quittent l'hôpitalpour n'y revenir que le mois suivant (2). Les lettres de provision portent que les gouverneurs fourniront au malade pension, logis, «jardin bon et convenable » (3) : il n'a garde de rien oublier. En 1639, Pierre Jarlot réclame audacieusement pour lui seul les 7 pains de l'Hôlel-Dieu (i). Audacieusement les « bons malades » exigent sans délai le paiement de leur pension : Jean Marjollet et Anne Laurent, lépreux de Saint-Ladre, font saisir, en 1609, le fermier de la chapelle de Bourcq pour obtenir paiement d'une pension supprimée en 1608 (5). En 1618, le règlement de la Chambre de réformation interdit aux malades de se faire payer par les fermiers (6) : ils trouvent alors un autre moyen : en 1624, Thomas Guillemin vient de la maladrerie de Meaux s'installer à Saint-Eloi et refuse de déguerpir sans son argent (7).

grande au pays de Champaigne que le moindre mesnager ne scauroi t fournir sa maison de feu par chascun an qui ne luy faille xx s. t. ; leur fault aussi manteaus, robbes et autres accoustremens qui sont nécessaire a couvrir leurs corps, avec logis ; et si leur est chose très nécessaire avoir une chamberiere pour nectoyer les playes et nectoyer leurs paouvres linges... »

(1) Archives communales, pièces comptables (1599).

(2) Ibid., Conclusions du Buffet, 9, f° 193 (1607).

(3) F'. 28.

(4) Archives nationales, V 7. 137, liasse de 1639, n° 53.

(5) Ibid., V 7. 127, liasse de 1609. Additions, n° 76.

(6) Ibid., V 7. 130, liasse de 1618, n° 360.

(7) F'. 29, n» 2.


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On devine, dans ces conditions, ce qu'est la vie intérieure de la léproserie. Les « défenses » ne sont plus qu'une vaine cérémonie. La maladrerie a un peu l'air d'un hôtel où les malades sont réunis sans grande discipline : ils sortent librement ; ils sortent même parfois fièrement campés sur un cheval (1), le baril au côté, comme les représente Guillaume Bouchet (2). L'un d'eux, se plaisant peu à Reims, demande pour plus d'agrément à retourner dans son village aux environs de Mézières(3). Raulin Desonenvoie saservanteenvillefaire le ménage de sa femme, habiller ses enfants, laver son linge (4). Jaque Friqué entrant le matin dans une borde trouve deux de ses compagnons couchés dans la même chambre (5). Ils paressent, se lèvent à 9 heures (5). Ils s'empruntent leurs habits (6). Ils se volent les uns les autres, ils se battent (5). Jean Dartois insulte les échevins (7). Le chapelain lui-même ne donne pas toujours l'exemple de la dignité : en 1574, le jour de la SaintEloi, M* Florent Gallet se dispute avec les gouverneurs (8) ; un de ses successeurs boit et mange avec les lépreux et néglige parfois son ministère (9). Il y a dans

(1) A». 5, dossier 11, n° 27 (1629).

(2) Serées, 36e série (Ed. Lemerre), V, p. 129.

(3) Archives communales, Conclusions du Buffet, 9, f° 205 (1608).

(4) Ibid., pièces comptables, liasse de 1603.

(5)16t'd., id., liasse de 1606: enquête sur le suicide de Jacques Friqué.

(6) Ibid., id., liasse de 1625 : inventaire des meubles de Françoise Josuet, f° 4 v°.

(7) Ibid., liasse de 1615 : procès-verbal des « rebellions » de t. Dartois.

(8) Archives communales, Conclusions du Buffet, 7, f° 183.

(9) Ibid., 11, f° 126 : « ... ung nommé Laurent est décéddé depuis huict jours sans avoir esté administré de sacremens... »


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l'histoire de la maladrerie, à cette époque, de véritables pages de roman, comme le suicide de Jacques Friqué(l), ou les amours d'Anne Langlet, cette ancienne religieuse de l'Hôtel-Dieu qui, lépreuse à Sainte-Anne, reçoit de fréquentes visites de son « cousin », se promène bras dessus bras dessous avec lui au long des chemins, lui brode des bas, l'admet dans sa chambre sous raison d'y goûter (2) et fait un tel « abuz de son corps » que les échevins peuvent un jour lui demander « de quy elle avoit eu l'enffant par elle engendré » (3).

Peut-être, d'autres lépreux étaient-ils véritablement dignes d'intérêt; sans doute aussi ne faut-il pas exagérer le désordre intérieur. Mais le caractère dominant semble bien être celui que nous avons essayé, de marquer.

Cet état de choses devait prendre fin. Dans, le second tiers du xvn* siècle, la léproserie de Reims n'avait plus grande raison d'être ni comme léproserie locale, ni comme léproserie régionale. En 1635, une procession fut faite à Reims pour marquer la disparition de la lèpre (4). En 1633, sur 8 pensions payées par l'hôpital, 4 seulement étaient réservées à des lépreux résidant à Saint-Ladre ; 2 autres à des lépreux de Saint-Jacques de Châlons et de Saint-Lazare de Paris ; enfin l'hôpital avait la charge d'une servante de lépreux et d'un solliciteur, c'est-à-dire qu'il devenait en partie une maison de retraite. En 1632, plusieurs chambres avaient été utilisées à Sainte-Anne pour les pestiférés (5). On tendait

<1) Ibid., pièces comptables, (1606) : enquête sur ce suicide.

(2) Ibid., id., liasse de 1599 : interrogatoire d'Anne Langlet.

(3) Ibid., id. liasse de 1603 : autre interrogatoire.

(4) Archives communales, liasse 34, n° 10.

(5) Ibid., Conclusions du Buffet, 14, f° 65. — En Périgord les maladreries furent jusqu'au cours du XVHI* siècle habitées par


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à faire de la léproserie, vide de lépreux, un hôpital d'une autre nature. Il reste à indiquer cette suprême transformation.

des familles de lépreux plus ou moins simulés et se transformèrent en colonies de mendiants (R. Drouault, Comment finirent les lépreux dans Bulletin historiq. et philologiq. du Comité des travaux historiq.r 1902, pp. 318-328). Sur l'existence de lépreux au xvme à Belle Ile et en Auvergne, voy. A. Hirsch, Die chronischen Infections-und Intoxications-Krankheiten vom historisch-geographischen Standpunkte (2e éd. Stuttgart, 1883) p. 6.


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CHAPITRE X.

La fondation de la Maison de Charité et la fin de la léproserie.

La lutte entreprise par la royauté, au moins dès le règne de François Ier. contre le paupérisme, l'effort tenté contre le « fléau » de la mendicité (1) aboutit, au xvne siècle, à la création des hôpitaux généraux : c'était supprimer la mendicité en rendant le travail assuré, facile et obligatoire, c'était respecter la dignité du pauvre qui gagnait ainsi le pain qu'on lui donnait. Déjà, au xve siècle (2), des maisons-Dieu, comme l'hôpital du Saint-Esprit de Dijon ou l'hôpital de Neufchâteau, élevaient des enfants pauvres et leur apprenaient un métier. A Reims, les Chartreries des douzes paroisses faisaient de même. La fondation des hôpitaux généraux représente un mouvement plus général et plus vaste (3).

Dès le xvi" siècle, à Reims, une « taxe des pauvres » était levée sur les habitants (4) ; mais, en 1630, ces ressources étaient insuffisantes (5). Sous l'active présidence

(1) Bibliothèque nationale, ms. fr. 18605, f° 175 : Voeux présentés au roi pour pourvoir à la peste et réprimer la mendicité.

(2) H. DENIFLE. La désolation des églises, I, nos 743 et 789.

(3) D'après un rapport du xvn» siècle (Bibliothèque nationale, ms.fr. 11364, f° 37), la première tentative en ce sens aurait été faite à Chartres, en 1555 ; l'hôpital général de Lyon fut fondé en 1613, celui de Troyes en .1630, celui de Paris en 1656. Reims avait devancé la capitale.

(4) VARIN, Archives administratives de Reims, I, p. ïxxxiv.

(5) A 5. 1, n° 5 « Mémoire sur la fondation et l'organisation de la Maison de Charité ».


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de JeanMaillefer, lieutenant de Reims, le Conseil de ville résolut de prendre les mesures nécessaires pour supprimer entièrement la mendicité. Après s'être assuré l'appui de l'archevêque, il fit faire un recensement général des indigents de Reims (1). Une commission, désignée par le Conseil pour étudier la question, proposa simplement « d'entreprendre la nourriture de tous les pauvres indifféremment qui estoient en ceste ville. » Messieurs du Clergé consentent, offrant de fournir 400 livres de pain par jour (2). Les autres habitants suivent: une assemblée de notables est tenue le 22 mars (3) ; les plus riches acceptent de nourrir un, deux, trois, quatre pauvres ; pour les autres, la « taxe ordinaire des invalides » est quadruplée ; chaque habitant reçoit un bulletin lui désignant les pauvres qu'il doit entretenir. Les appels à la charité sont faits dans les églises ; il est défendu aux Rémois de donner l'aumône dans la rue (4), Le Conseil de ville organise une permanence à l'hôtel de ville pour recevoir les indigents. Il y a bien des contribuables qui se trouvent trop taxés et qui réclament : mais un généreux enthousiasme enflamme la cité, en sorte, dit l'ardent auteur d'un mémoire sur les débuts de l'hôpital, « que les premiers jours d'avril parurent plus beaux que le printemps qu'il amenoit en la cessation de la mandicité. » (5).

La taxe supplémentaire ne devait être levée que jus(1)

jus(1) communales, Délibérations du Conseil de ville, 33, pp. 30 et 142.

(2) Archives communales, Délibérations du Conseil de ville, 33, p. 149 (10 mars 1631).

(3) Ibid., id. p. 177.

(4) Ibid., id. p. 176.

(5) A» 1, n° 5, p. 4.


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qu'après la moisson : mais une série de délibérations la continuent « en attendant qu'on puisse parvenir à l'érection delà Maison de Charité»(1). Cependant, l'idée delà « Renfermerie » prenait corps. Après une conférence entre le Conseil de ville et les délégués du Clergé (2), une seconde assemblée des notables avait accepté la création du nouvel hôpital (3). Tandis que l'archevêque Henri de Lorraine semblait un peu se désintéresser de la question (4), le Conseil de ville avait résolument continué son oeuvre (5), préparant la réunion des diverses institutions charitables de Reims qui devait permettre la constitution de la Charité. Déjà, M. Claude Dorigny, trésorier de Notre-Dame, avait légué tous ses meubles au futur hôpital (octobre 1631) (6); plus tard, Charles Dorigny faisait à la Maison un legs de 16,000 1.1. Enfin, le 14 décembre 1632 (7), le Conseil arrêta un projet de règlement qu'on devait présenter au roi. Le 31, M. Maillefer et M. Josseteau partirent pour Paris, et quelques jours après, ils obtenaient des lettres patentes autorisant l'édification et l'établissement du nouvel hôpital « pour y tenir et renfermer lesd. pauvres en lieux séparés selon le sexe et condition des personnes, afin de les occuper et faire travailler ausd. manufactures qui seront a ceteffectestablies. » Le règlement intérieur proposé était approuvé ; la taxe des pauvres était appliquée à la Renfermerie ; les établissements charitables

(1) Archives communales, Conseil de ville, 33, p. 212.

(2) Ibid., p. 219.

(3) Ibid., p. 224(6 juillet 1631).

(4) Ibid., pp. 273 et 339.

(5) Ibid., p. 339.

(6) Ibid., 34, p. 33.

(7) A» 1, n° 5,


— 238 —

delà ville, sauf l'Hôtel-Dieu, étaient unis à la nouvelle maison.: c'était la fin de la léproserie (1).

Ces lettres de janvier 1633 soulevèrent de nombreuses difficultés. D'abord, M. Claude Lespagnol, procureur du roi au Présidial, s'oppose à l'enregistrement en ce qu'on n'avait appelé aucun conseiller du Présidial à l'administration du nouvel hôpital (2). Un arrêt du Conseil d'État lui donne raison. D'autres mesures assurent le contrôle des juges royaux (3). Mais des difficultés plus sérieuses allaient naître d'une autre clause — clause habituelle (4) et juste — des lettres de 1633 : les unions et contributions devaient être consenties par les parties.

L'Assemblée générale des habitants consentit facilement. Après avoir constaté qu'en droit la taxe des pauvres invalides n'était pas applicable à un refuge de mendiants valides, elle décida, dès le 14 août 1633, que cette taxe serait quadruplée pendant trois ans et le surplus versé à la Maison de Charité. En 1660, la taxe ordinaire fut doublée à perpétuité et l'argent partagé entre le « Bureau de miséricorde » et l'Hôpital Général. Le Collège des Ecrevés fut de même réuni sans peine (5). Les gouverneurs des Chartreries des douze

(1) Lettres patentes du roy pour Vestablissement de la Maison de Charité (1650), pp. 3-10.

(2) Almanach historique de la ville de Rheims pour l'année MDCCLXXVI1, p. 91.

(3) Lettres patentes du roy, pp. 11-13.

(4) VARIN. Archives administratives de Reims, I., pp. lxxxiv, lxxxix.

(5) A 3. 1, n° 5. — C'était une école fondée par Aubri Le Crevé (VARIN. Archives administratives de Reims, I, 2° partie p. 664, note) pour le logement des écoliers pauvres et dont la collation appartenait au doyen du Chapitre. Occupée par le collège des Jésuites en 1606, elle était revenue au doyen en 1611.


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paroisses de Reims montrèrent la même bonne volonté (1). Le 1" août 1633, les délégués des douze Chartreries se rassemblèrent à l'Hôtel de ville et, après avoir « communicqué ensemble », consentirent << tous concordament » à l'union de leurs héritages (2).

Mais d'autres fondations charitables ne furent réunies qu'avec peine, ou même ne furent point réunies du tout. L'auteur d'un mémoire du xvmB siècle, gardé aux archives de l'Hôpital Général (3), cite un arrêt du Conseil privé, en date du 15 juin 1635, reconnaissant que le roi, par ses lettres de 1633, n'a pas prétendu réunir l'Aumône Saint-Denis, et le même auteur constate que les abbayes de Saint-Remi et de Saint-Nicaise possèdent encore les biens de leurs aumônes. Il est certain aussi que le béguinage Saint-Agnès fut réuni en 1655, non pas à l'Hôpital Général, mais à l'hôpital SaintMarcoul (4).

Enfin, l'hôpital Saint-Antoine et la léproserie ne furent unis qu'après une longue résistance. L'hôpital SaintAntoine avait été fondé en 1201, par Guillaume aux Blanches-Mains, qui y avait établi des religieuses (5). En 1350, l'archevêque Jean de Vienne avait fait venir un religieux de l'ordre de Saint-Antoine pour les aider.

(1) Organisées pour donner des aumônes aux pauvres (A1.2, n°2, f° 1) et payer l'apprentissage d'orphelins ( Lettres patentes pour l'établissement de la Maison de Charité, p. 8), elles possédaient, soit en commun (A'. 2, n° 2), soit à titre particulier, un certain nombre d'héritages {Archives nationales, P. 773, 33 B.)

(2) A 1. 2. n° 1.

(3) B». 2. n° 16.

(4) Archives communales. Liasse 33, n° 1. Cf. H. JADART, Hôpital Saint-Marcoul, notes sur ses origines et ses curiosités, dans Travaux de l'Académie de Reims, 111, p. 182.

(5) Ibid., liasse 32, n° 1.


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L'hôpital était bien une oeuvre épiscopale. L'ordre cependant réclama la maison comme sienne. Mais un accord du 30 août 1407 ne reconnaissait à l'abbé que des prérogatives honorifiques (1). L'archevêque Henri de Lorraine n'usait donc que de son droit en accordant, sur les incessantes requêtes du Conseil de ville (2), la réunion de l'hôpital Saint-Antoine à la Maison de Charité (3). L'abbé, cependant, protesta malgré un accord de 1644 où il avait reconnu les droits de l'archevêque (4), l'ordre continua à plaider. A la fin, lassés, les membres du Conseil de ville consentirent à une transaction : la maison de Reims devenait la propriété de l'ordre ; les dépendances étaient partagées parmoitié, entre l'ordre et la Maison de Charité, qui prendrait à sa charge tous les malades du « feu Saint-Antoine » ; les religieux de Reims ne pourraient acquérir aucun nouvel enrichissement dans la ville ni à dix lieues à la ronde. Cette convention fut maintenue ; en 1777 seulement, le Conseil de ville consulta pour savoir s'il pourrait rentrer en possession de l'autre moitié si généreusement abandonnée (5).

De leur côté, les échevins n'acceptèrent la réunion qu'au bout de deux ans. En février 1633, une première conférence eut lieu entre l'Echevinage et le Conseil de ville (.6). Le 30 mars, M. Audez faisait au Conseil un rapport sur la question (7). On ne put s'entendre. En noyembre 1634, les échevins rédigeaient, pour les pré(1)

pré(1) communales, liasse 32, n° 2. — Sur le domaine de Saint-Antoine de Reims, cf. Arch. Nat., S. 4883, 7.

(2) Ibid., Conseil de ville, 34, pp. 203, 253, 261. (3-4-5) B. 9. 2, n° 16.

(6) Archives communales, Conclusions du Buffet, 14, f° 105.

(7) Ibid., Conseil de ville, 34, p. 361.


— 241 —

senter au Parlement des « défenses contre les Gens du Conseil de ville » (1). Les raisons qu'ils opposent à l'union n'ont rien de péremptoire. C'est d'abord le danger de la contagion : la lèpre ne fait peut-être que sommeiller ; brusquement, elle peut reparaître. Croit-on, disent-ils encore, répondre aux intentions des fondateurs en distribuant les revenus d'un hôpital établi pour des impotents, incapables de travail, à des pauvres valides? (2) Comment distraire la juridiction qu'ils ont sur le faubourg Saint-Eloi du reste de leurs pouvoirs administratifs, et peut-on transférer cette juridiction à la Maison de Charité ? Si l'on exempte THôtel-Dieu de l'union, pourquoi n'en pas exempter la léproserie? Et ils rappellent la conscience et la loyauté avec laquelle leurs prédécesseurs ont toujours administré ; ils n'ont pas démérité de la confiance de leurs concitoyens, ils sont dignes encore de conserver cette administration. Mais, on doit aussi remarquer que d'autres sentiments, — l'hostilité de l'Échevinage à l'égard du Conseil, constitué longtemps après lui et qui cependant a acquis maintenant une autorité supérieure, — ne sont peut-être pas étrangers à cette opposition; il faut se souvenir des conflits quelquefois aigus, qui ont éclaté entre les deux corps et que constatera, en 1636, l'arrêt du Conseil d'Etat réunissant le Conseil de ville à l'Echevinage (3). Les membres du Conseil de ville firent remarquer que lors de la délibération, les deux échevins délégués au Conseil n'avaient élevé aucune protestation ; ils étaient d'ailleurs peines de cette résistance qui donnerait un

(1) A». 4, n» 13.

(2) A 2. 4, n°55, f° 18 et v».

(3) VARIN. Archives législatives de Reims, 2e partie, Statuts, II, p. 550.


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mauvais exemple aux ecclésiastiques administrateurs des aumôneries. (1) Mais il est peu probable que les démonstrations du Conseil eussent servi à quelque chose, si d'autres influences que nous ignorons, n'avaient agi sur les échevins; peut-être après tout, n'avaient-ils voulu faire qu'une manifesfation autoritaire. Toujours est-il qu'ils cédèrent, mais en deux fois.

Ils proposèrent d'abord de donner le revenant-bon des léproseries, en en gardant l'administration. (2) Mais les membres du Conseil leur remontrèrent les inconvénients d'une telle combinaison — déjà refusée aux administrateurs des aumônes, — qui compliquerait les choses, risquait de faire diminuer les revenus et finirait par attirer l'attention du roi, qui attribuerait le revenant-bon à une de ses fondations ou du Grand Aumônier qui y assignerait des provisions. Ils proposèrent d'ailleurs certaines compensations aux échevins.

A la fin, ceux-ci se rendirent (25 avril 1635) (3) et le 1" mai, une assemblée des notables de Reims (4) approuvait l'union en acceptant les conditions proposées. L'accord du Conseil et de l'Echevinage fut conclu par devant notaires le 10 juin 1635 (5). Les échevins consentent à l'union des biens, mais conservent la juridiction, l'institution des chapelains, l'admission des lépreux. Le receveur de l'Hôpital Général paiera la pension des lépreux sur l'ordonnance des échevins ; l'un des échevins fera de droit partie du Bureau de l'hôpital, et l'un

(1) Archives communales, Conclusions du Buffet, 14, f° 138.

(2) Ibid., Conclusions du Conseil de ville, 34, f° 359 (25 mars 1635).

(3) Ibid., Conclusions du Buffet, 14, fos 148 et V.

(4) Ibid., Conclusions du Conseil de ville, 34, p. 399.

(5) A 3. 1, n°2.


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des deux échevins-conseillers de ville assistera à la reddition des comptes. Les administrateurs ne pourront faire aucune aliénation sans autorisation de l'Echevinage et du Conseil. Si la Maison de Charité venait à disparaître, les échevins recouvreraient tous leurs droits. Un certain nombre de mesures accessoires était adopté (1). L'accord fut homologué au Parlement le 17août 1635 (2).—Le 19 janvier suivant, l'Échevinage et le Conseil de ville étaient fondus en un seul corps (3).

A cette date, la Maison de Charité était déjà en plein fonctionnement. Dès le mois de décembre 1633, l'ancien Collège des Écrevés était prêt à recevoir les femmes que « l'on prétendait réduire au travail >>. Le 14 et le 15 décembre, les pauvres vinrent se faire inscrire; le 16 et le 17, après une rapide enquête, fut dressé le rôle de celles qui seraient admises (4). Le 21, s'ouvraient les portes de « ceste nouvelle cité de Dieu » (5). Moins d'un an plus tard, le 28 octobre 1634, les hommes étaient « renfermés » dans la maison du Saumon, nouveau « magasin de charité » (6) : les travaux de bonneterie commencèrent le 30 (7).

Dans le mémoire présenté par le Conseil de ville à l'Échevinage (8), il lui remontrait prudemment qu'il valait mieux ne pas attirer l'attention du pouvoir cen(1)A«.

cen(1)A«. n»2.

(2) Lettres patentes du roy pour l'establissement de la Maison de Charité, à la suite.

(3) VARIN, Archives législatives de Reims, 2° partie, Statuts, II, p. 550.

(4) A*. 2, n° 5, p. 34.

(5) A\ 1, n° 5, p. 26.

(6) Ibid., p. 28.

(7) A'. 2, n» 5, p. 34.

(8) Voy. ci-dessus, p. 242.


— 244 —

tral sur les affaires des Rémois. Le Conseil avait vu juste. Près de trente ans après la réunion, en 1663, Mathurin Blouyn, dit La Rivière, soldat, obtenait du Grand Aumônier des lettres de provision lui conférant l'administration de la léproserie de Reims. Le Conseil de ville fit opposition. L'affaire est portée au Grand Conseil. Blouyn remontre que la léproserie, en droit, dépend uniquement de l'Echevinage, et que le Conseil de ville n'a pas à intervenir. Le procureur du Conseil répond éloquemment que les uns et les autres sont désormais unis et, tous, ils ont un « même but qui est la charité chrétienne, la piété envers Dieu et le bien com mun de la ville » (1). Blouyn, dans une interprétation spéciale de l'ordonnance de 1593 (2), prétend que, en l'absence des litres de fondation, la possession, même immémoriale ne vaut pas contre le roi, toujours présumé fondateur (3). Le Conseil de ville réplique (4) par l'ordonnance de Blois (5) qui ordonne de choisir les administrateurs des hôpitaux parmi les simples bourgeois, marchands ou laboureurs. Le Grand Conseil repoussa la thèse de Blouyn, et, par arrêt du 21 septembre 1663 reconnut les droits du Conseil de ville (6). Le cardinal Barberini, Grand Aumônier, qui avait d'abord pris parti pour Blouyn, s'était désisté dès le 20 septembre (6).

Cependant, Blouyn ne se tient pas pour battu. Il

(1) Aa. 3, n° 42, i° 19.

(2) Recueil des édits concernant les hospitaux (1675), p. 42.

(3) A 3. 4, n° H, f°4.

(4) A 2. 3, n° 41.

(5) IsAiiBERT. Recueil général des anciennes lois françaises, XIV, 398-399, art. 66.

(6) A'. 1, n° 4 (imprimé).


— 245 —

obtient le 17 juin 1664, un arrêt assignant le Conseil de ville devant le Conseil privé. Mais il payait surtout d'audace: peu sûr, au" fond, de ses droits, il proposait en même temps au Conseil de ville de renoncer au procès moyennant 400 pistoles (1). Le Conseil refusa. Blouyn essaya sans doute de négocier ses chances ailleurs. En tout cas, on voit, en 1671 (2), Nicolas Binot, chevalier de l'ordre de Saint-Lazare, secrétaire du roi, reprendre les droits de Blouyn et continuer le procès, après s'être fait pourvoir par le Grand-Maître de son ordre (3). Le 18 décembre 1671, les membres du Conseil de ville sont assignés devant le Conseil privé : ils demandent le renvoi de l'affaire au Grand Conseil pour raison d'incompétence. (4) Nicolas Binot n'aurait sans doute pas mieux réussi que Blouyn. L'édit d'union de décembre 1672 vint à point lui fournir de nouvelles ressources. Par cet édit, Louvois réorganisant, pour le mettre entièrement dans la main du roi, l'ordre militaire de Notre-Dame du Mont-Carmel et de SaintLazare de Jérusalem (5), y faisait unir en même temps que les biens d'autres ordres déclarés éteints, comme l'ordre du Saint-Esprit de Montpellier, ceux des léproseries et autres hôpitaux où l'hospitalité n'était plus en exercice et les distribuait en « commanderies » à la disposition du roi « chef souverain dudit ordre » (6). Dès le 4 mars

(1) A'. 3, n°43, f°5.

(2) A». 4, n° 10, f° 9.

(3) A'. 4, n° 57 (11 novembre 1671).

(4) A 3. 4. n° 10.

(5) HÉLIOT. Histoire des ordres religieux (éd. de 1714), I, pp. 386392.

(6) C. ROUSSET, Histoire de Louvois, I, 255. M. Rousset loue hautement, à ce propos, l'initiative de Louvois et la délicatesse


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1673, les administrateurs de la léproserie de Reims étaient assignés devant la Chambre royale de l'Arsenal (1) créée pour l'application du nouvel édit. L'affaire de Nicolas Binot, chevalier de l'ordre de Saint-Lazare, prenait un nouvel aspect. Les biens de l'ancienne léproserie Saint-Eloi sont saisis (2) ; M. Mole de Sainte-Croix, conseiller du roi au Conseil d'État, maître des requêtes de l'hôtel, est nommé rapporteur (3). Mais le 21 mars

1674, M. de Coëgny, membre du Conseil de ville, recevait une lettre de M. Frizon, l'un des administrateurs de

avec laqu elle il procéda pour faire attribuer le revenu des hôpitaux en non-exercice à ses officiers sans «froisserleur misère hautaine... Il compulsa leurs archives, dit-il, rechercha les domaines qui leur avaient appartenu, les reprit à ceux qui s'en étaient emparés et les distribuant en prieurés et commanderies il en fit des récompenses ardemment recherchées par les officiers nobles. » Il faudrait peut-être voir les choses d'un autre point de vue. Au fond, le ministre met la main sur les revenus d'institutions locales pour les distribuer en pensions militaires : non pas, en effet, qu'on ne put souvent faire un meilleur usage du revenu de ces hôpitaux que celui qu'en faisaient certains administrateurs; sans doute aussi, une partie en était utilisée à l'entretien des hôpitaux militaires. Mais il ne semble pas, quoi qu'en dise redit, que celte ic application » fut des plus conformes « aux intentions des fondateurs des lieux pieux » ; d'ailleurs, l'édit de 1693 portant désunion des hôpitaux de l'ordre de Saint-Lazare, devait donner au problème une solution plus juste. Aussi comprend-on les résistances qui suivirent l'édit de 1672. Louvois les avait si bien prévues qu'une Commission spéciale avait été désignée, dès le 8 février 1673, sous le nom de Chambre royale de l'Arsenal pour régler les difficultés de toutes sortes qui allaient surgir. Les minutes de cette commission sont aux Archives nationales sous la cote Z'°ll et sqq.

(1) A 3. 4, n™ 66 et 67.

(2) A 2. 4, n» 74.

(3) A 3. 4, n" 81.


- 247 -

l'Hôpital Général, délégué à Paris pour cette affaire, qui lui annonçait l'apparition prochaine d'un nouvel édit sur les hôpitaux (1). En effet, le 24 mars, une déclaration du roi (2) apportait « un juste tempérament » à l'édit de 1672 : l'ordre de Saint-Lazare ne devait avoir aucun droit sur les léproseries unies à des hôpitaux généraux avant décembre 1672. C'était le cas de la léproserie de Reims. Le 11 mai 1675, les administrateurs de l'Hôpital Général obtenaient devant notaires un désistement des représentants de l'ordre de SaintLazare (3), et le 14, un arrêt de la Chambre royale leur donnait main-levée de la saisie faite de leurs biens (4). La même année, les titres des deux chapelles dépendant de la maladrerie étaient supprimés. Depuis 1635, la fusion de l'ancien et du nouvel hôpital s'était accomplie en fait. Le 22 septembre 1637, le Bureau de la Maison de Charité avait décidé la rédaction d'un inventaire des biens de la léproserie (5). En 1644, il avait opéré la réunion de la censé de Muizon dépendant de SaintLadre (6). Le 18 mai 1646, les membres du Bureau prièrent les lieutenant, conseillers et élus de Reims de transmettre à l'hôpital les titres des deux maladreries (7) : ces titres furent remis en 1652.

(1) A'. 4, n» 10.

(2) Déclaration du roy en faveur des hospitaux généraux et hostels Dieu du royaume du ving-quatrième mars 1674 (1674, in-4°).

(3) A 8. 4, n» 82.

(4) A 2. 4, n° 1. - Cependant, en 1683, un lieutenant de cavalerie, nommé Blondelet, en garnison à Stenay, fit une nouvelle tentative pour s'approprier le domaine de Beaufuy comme commandeur de l'ordre du Mont-Carmel (A* 5, n° 3).

(5)E. 13., p. 6. (6)I6id.,p. 8. (7) Ibid., p. 9.


— 248 —

En 1635, malgré l'opposition des chanoines, une grande procession avait été faite le dernier dimanche de septembre pour rendre grâce à Dieu de la disparition de la lèpre (1): on ne trouve plus, eu effet, qu'un lépreux à Saint-Eloi en 1639 (2), un lépreux en 1619 (3). Des lettres de provision de 1646 accordent encore une pension à un solliciteur de lépreux (4). De la léproserie, il ne restait que les bâtiments vides.

L'office était cependant toujours célébré dans les deux chapelles (5). Mais ces chapelles ne servaient plus qu'aux habitants du faubourg. C'était une charge inutile. Dès 1647, le Bureau de la Charité avait songea réunir Sainte-Anne à Saint-Eloi (6). En 1671, il résolut de demander la suppression des titres des chapelles. Une consultation (7) lui apprit que cette suppression pouvait se faire canoniquement et légitimement et qu'il n'était pas besoin de la poursuivre en cour de Rome. On pensa même à supprimer le service des fêtes et dimanches en même temps que le titre, les habitants du quartier pouvant un jour venir réclamer ce service comme un droit acquis (8). Le 13 avril 1673, le Conseil de ville donna son consentement officiel (9) « a cause que Dieu a dellivré lad. ville... de la maladie de lèpre », et le 15, Maurice Le Tellier éteignait définitivement les

(1) Archives communales, liasse 34, n° 10.

(2) Archives nationales, V7 139, liasse de 1639, n° 53. (3)E. 13, p. 17.

(4)E. 13, p. 12.

(5)E. 13, p. 157 v» (1649).

(6) E. 3, p. 120.

(7) A». 4. n» 35 (30 décembre 1671).

(8) A'. 4, n° 49.

(9) A'. 1, n» 5.


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titres de Saint-Eloi et de Sainte-Anne (1). Les titulaires actuels recevaient en compensation une pension viagère, l'un de 70 1., l'autre de 30 ; les revenus des deux chapelles serviraient à l'entretien d'un prêtre attaché à l'Hôpital Général pour instruire les pauvres en la religion catholique ; des services solennels seraient célébrés dans les chapelles aux fêtes de la Saint-Eloi et de la Sainte-Anne. Robert Bazin renonça à la chapelle Sainte-Anne le 22 juillet 1672 (2), et Hubert Pichelin, chanoine de Laon, à la chapelle Saint-Éloi le 22 août (3). Le 26 avril 1675, le Parlement, après enquête, homologuait la suppression (4). Quatorze ans plus tard, le Conseil de ville, pour plus de sûreté et « afin de joindre l'autorité royale à celle de l'Église », obtint des lettres patentes (5) enregistrées au Parlement le 1er septembre 1691 (6). Les chapelles se survécurent cependant, puisque l'on continuait à célébrer la fête des patrons. Elles furent « supprimées » en février 1758 (7).

(i)AJ. 1, n° 6.

(2) As. 1, n°7.

(3) A'. 1, n» 8.

(4) A'. 1, n» 12.

(5) A". 2, n°2(août 1689). (6)AJ. 2, n°9.

(7) Journal anonyme du xvui' siècle, publié par H. Jadart, à la suite du Journal de Dom Pierre Chastelain, p. 221.



PIECES JUSTIFICATIVES

i.

XIII' siècle. — INVENTAIRE DES MEUBLES DE SAINT LADRE. (B. 49. 4, dossier 35, f" 21 V.)

Ce sunt li biens meubles de Saint Ladre as houmes.

Premiers an la chapele a :

v. taules sourargentées. — i. livre sourargentet a evan giles.— i. crois sourargentée. — i. brac de saint Mor sorargenté. — i. filatère de saint Ladre. — i. cofret et i. buited'ivoire a mètre saintuaires. — i. crois ou il a de la vraie crois sorargenté. — i. grant filatère a pies sorargenté ou li saintueire sunt ; se an ia de xvn. manières, et une crois ou il a de la vraie crois et autres saintuaires que Oliviers donna laiens et la resut li prestres. — i. sautier a demi vers. — i. sautier de la vies lois. — i. Bible et n. chesures, une sestaule et une a diemenges ; et a tout les aournemens et les dras de l'autel. — n. chesures sor semaine et tous les aornemens et les dras de l'autel.— v. dras pourpoins pour parer la chapele.—n. chapes de cuer, de soie, tunicle et damaticle. — i. escrin ferret ou les filateres et les tables sourargentées sunt. — i. escrin ferret ou li paremens etli loris vestemans et les chapes de cuer sunt.

il. escrins nouis. — i. escrin as saintuaires de saint Eloi. :— i. calice. — i. messel. — n. bréviaires de l'anée. — n. sautiers. — i. agende. — i. tropier. — i. greel.

An la maison le curet a :

v. lis. — i. ciutte pointe qui fu Evrart. — i. grant bachin.

i. bouire d'estain.


— 252 —

Dou refrotoir as malades : m. grans pos de ceuvre et îv. pos que Ravous d'Auviler acheta. — m. petits pos vies. — îv. paeles a ceue. — H. chaudières. — m. chauderons. — i. bacin a boire. — i. rostier. — i. cheminée. — i. chemignon. — r. andier. — n. soufflés. — vin. lis anticrs et une ceute et i. lie pour le convers. — u. quartes ferrés pour avaine et pour froument. — i. demi quartel ferret. — m. vans. — i. cranmilié de fer.

Au refroitoir a : i. grant tauble et H. trestraus. — n. grans chandelabres de fer, t. a la converse et l'autre au prestre. — i. crau de fer et une louce a widier les fosses. — vu. lis entiers. — i. coussin par lui a ostes et a maisnie. — n. grans pos de ceuvre. — v. petis pos de couvant (?). — iv. paeles grans et petites. — i. petite. — i. chaudière. — i. pot. — i. paele qui fu Rogier de Germeni. — H. chemignons de fer. — i. andier. — i. grand rostier. — i. frigieur. — i. chauderon. — i. paele a couler fèves. — i. bachin pour boire. — iv. bachins pour mains laver. — i. grant vais. — i. tenailes. — i. traifeu.

De l'enfremerie : i. petit rostier. — i. andier. — i. soufflé. — i. grant tauble a la grant cheminée a tous les trestaus.

En la chapele au fammes a :

ii. chesures. — iv. amis. — v. aubes. — n. estoles. — ni. dras a autel. — i. calice. — i. messel. — i. sautier. — i. antephenier. — vm. lis a ostes et a maisnie. — iv. pos de ceuvre grans. — iv. moiens. — vi. petis. — m. grans peeles. — n. petites. — i. pot d'estain. — i. endier. — i. rostier. — i. cheminon de fer. — i. chaudière.

Et si doit avoir Sains Ladres entour sa maison et antour ses terres xxv fosses a tiens.

Ravous d'Auviler fist feire ce livre (1).

(1; Sur Raoul d'Hautvillers et cet inventaire, voy. ci-dessus, pp.22 et 50-53.


— 253 —

II.

16 novembre 1221. — SENTENCE DE L'OFFICIAL

DE L'ARCHIDIACRE DE REIMS CONDAMNANT

LE PRIEUR DE SAINT MAURICE A RESTITUER LES BIENS D'EVRARD,

RELIGIEUX DU PRIEURÉ QUI S'ÉTAIT AUPARAVANT

« DONNÉ » A SAINT LADRE.

(Archives communales, Carton des lépreux, liasse des Meubles, n° l.)

Magister Bonus, officialis domini Hugonis Burgensis, remensis ârchidiaconi, omnibus présentes litteras inspecturis salutem in Domino. Noverit universitas vestra quod, cum procurator domus leprosorum remensis priorem Sancti Mauricii remensis in curia domini nostri coram me traxisset in causam, proposuit contra ipsum quod, cum Evrardus clericus, ante susceptionem habitus monachalis, contulisset se et sua domui leprosorum, idem prior, retentis rébus ejusdem clerici, corpus ipsius in maximum ejusdem domus prejudicium presumpsit in suo cimiterio sepelire ; unde petebat dictus procurator de supradictis sibi plenariam fieri restitutionem ; verum hoc procurator dicti prioris in jure negavit, adiciens quod, et si verum esset quod asserebatur, idem tamen clericus nichilominus pretextu maioris religionis transire potuit ad regulam arctiorem, presertim cum inter leprosos sit nulla vel modica religionis régula constituta ; litigato itaque super hoc diùcius inter partes, et eidem procuratori domus leprosorum, ad probandam donationem taliter factam, testibus adjudicatis et receptis, cum sepedictus procurator leprosorum suam per testes ydoneos probasset sufficienter assertionem, sicut ex eorumdem testium depositionibus patuit evidenter ; ego, atteridens quod, licet dictus clericus pretextu majoris religionis transire potuerit ad regulam arctiorem, res tamen sue de quibus dicte domui plenariam inter vivos fecerat donationem remanere debuerant pênes domum eamdem, communicato discretorum consilio, procuratorem prioris supradicti procura-


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tori leprosorum jamdictorum ad restitutionem rerum ejusdem clerici per diffinitivam sententiam exigente justicia condampnavi. Actum anno Domini millesimo ducentesimo vicesimo primo, mense novembris, feria tercia post festum beati Martini (1).

(Le sceau manque.)

III.

Mars 1235-1236. — ACCORD ENTRE LA MAISON DE SAINT LADRE ' ET L'ABBAYE DE SAINT RÉMI

À PROPOS DES HÉRITAGES DE LA LÉPROSERIE.

(Archives de l'Hôpital général, A 6. 2 )

[Magister] Pes Lupi et Magister Johannes de Blesis, canonici et officiales remenses, omnibus présentes litteras visuris salutem in Domino. Noverit universitas vestra quod, cum discordia esset inter ecclesiam Sancti Remigii remensis ex una parte et magistrum et fratres domus Sancti Lazari remensis ex altéra super quodam l'ossato in jardinum Sancti Lazari ad feminas, juxta stagnum dicte ecclesie de Frichambaut, sito, per quod fossatum aqua cum piscibus dicti stagni poterat pertransire sine aliquo obstaculo ad jardinum et fossata intra jardinum dictorum magistri et fratrum domus Sancti Lazari ; quod fossatum dicta ecclesia penitus obstrui postulabat, vel saltem adeo preparari ne pisces dicti stagni illuc transire valerent ; — item cum discordia etiam esset inter dictos partes super quibusdam peciis terre et vinearum quas tenebant dicti magister et fratres domus Sancti Lazari in banno et dominio et justicia dicte ecclesie, sibi in elemosinam vel quolibet alio modo concessas vel acquisitas, videlicet quatuor jornalia terre sita in territorio de Taincoe juxta terram Wiardi La Gouge et

(1) Sur cette pièce, voy. ci-dessus pp. 29-30.


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Renaudi de Monte Sancti Pétri, item unam peciam terre in via quae ducit versus Escueil juxta terras domini Guidonis de Gorcelanceio, item unum jornale vinee situm in territorio de Murigni juxta vineam Radulti Bordelot, item très perticas vinee sitas in eodem territorio juxta vineam Vincentii de Frichambaut ; quas terras et vineas omnes dicta ecclesia infra annum jubebat alienari vel distrahi ; — tandem de bonorum virorum consilio, assensu utriusque partis adhibito super premissis, proi bono pacis ita fuit ordinatum : quod in introïtu dicti fossati fiât in terra dicte ecclesie ventallum perforatum, habens quinque pedum latitudinem in fronte et quinque pedum longitudinem in utroque latere de sallia, per quod aqua sine piscibus possit pertransire ad jardinum supradictum, nec alium meatum poterunt ulterius facere vel habere, per quem aqua dicti stagni possit ulterius ad dictum jardinum pertransire ; si vero foramina dicti vantalli contigerit obstrui limo vel alio quolibet obstaculo, dicti magister et fratres, requisita post sub testimonio bonorum virorum ecclesie supradicte licentia, et présente aliquo pro ea, si aliquem mittere voluerit, dicta foramina poterunt mundare ; quod si prefata ecclesia super hoc a dictis fratribus requisita quempiam mittere noluerit, dicti magister et fratres extunc poterunt ea mundare absque ventalli lesione ; et si contigerit dictum vantallum vetustate vel alia de causa destrui, dicta ecclesia poterit illud reticere secundum primum statum non obstante contradictione dictorum magistri et fratrum ; si vero per dolum vel machinationem eorumdem magistri et fratrum, vel ipsis facientibus vel procurantibus tieri, dictum vantallum contigerit disrumpi vel destrui, prefati magister et fratres tenebuntur illud reficere secundum priorem statum et alia dampna, si qua per hoc dicta ecclesia incurreret, restituere ; habebunt autem memorati magister et fratres duas naves ad herbas que rendum si velint, unam in stagno ante vantallum et aliam in suo fossato sepediclo ; — terras vero et vineas prenominatas ad census et redditus exinde hactenus debitos ecclesie memorate possidebunt quamdiu voluerint, sicut hactenus possède-


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runt, nichil de cetero sub ecclesia beati Retnigii acquisituri quod ultra annum et diem possint vel debeant retinere, nisi de permissu et licentia ecclesie memorate, nisi fuerit allodium, et hoc salvo jure ecclesie supradicte. In cujus rei testimonium présentes litteras, ad petitionem procuratorum utriusque partis ad hec specialiter destinatorum, sigillo remensis Curie dignum duximus roborare. Actum anno gracie millesimo ducentesimo tricesimo quinto, mense Martio (1).

(Sceau de cire brune sur lacs de soie rouge et verte.)

IV.

9 novembre 1246. — L'ARCHIDIACRE GOMETIUS,

À LA REQUÊTE DES FRÈRES DE SAINT LADRE DE REIMS,

LEUR PERMET DE CHOISIR DÉSORMAIS LE CHAPELAIN

DES LÉPREUSES PARMI LES MEMRRES DE LA COMMUNAUTÉ.

(Archives communales, Liasse 34, Renseignements.)

Universis Ghristi fidelibus présentes litteras inspecturis, Gometius, remensis archidiaconus, salutem in Eo qui salus est omnium. Noverit universitas vestra quod, cum.. magister et l'ratres domus leprosorum remensium in quadam capella infra fines domus leprosarum suarum constructa jus habeant patronatus, et institutio capellani qui in eadem deservire tenetur ad presentationem dictorum.. magistri et fratrum ad nos pertineat, nec eidem capellanie cura sit animarum annexa, iidem.. magister et l'ratres, paucitatem reddituuiu sive proventuum ejusdem capellanie considérantes, et quod periculosum est in eadem per capellanum secularem deserviri, maxime cum, propter curam que ibi non est animarum, et quod per aliquem de capellanis ejusdem domus leprosis et aliis in

(I) Sur cette pièce, voy. p 19 et pp. 81-82.


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eadem domo commorantibus curiosius ecclesiastica exhiberentur sacramenta et sepius celebrarentur divina, nobis humiliter supplicarunt ut eisdem concedere dignaremur quatinus, decedente seu cedente capellano qui nunc in eadem capellania deservit, in dicta capellania per unum de suis sacerdotibus, fratrem ejusdem domus, valeant facere deserviri, ita quod redditus seu proventus ejusdem capellanie in sustentatione pauperum leprosorum dicte domus convertantur. Nos igitur, eorum precibus benignius impertientes assensum, eisdem, quantum in nobis est et ad nostrum spectat officium, concedimus ut, si dicta capellania curam non habeat anima rum, decedente seu cedente capellano nunc ibidem célébrante divina, iidem.. magister et fratres in prefata capellania per aliquem de suis sacerdotibus, fratrem dicte domus, libère faciant deserviri et ad sustentationem dictorum pauperum leprosorum ejusdem proventus percipiant, prout in eorum petitione continetur. In cujus rei testimonium présentes litteras sigilli nostri appensione fecimus communiri. Actum anno Domini millesimo ducentesimo quadragesimo sexto, feria sexta ante festum beati Martini hyemalis (1).

V.

16 avril 1295. — BULLE DE BONIFACE VIII SUR UN CONFLIT

ENTRE L'ARCHEVÊQUE DE REIMS ET LES ÉCHEVINS.

(Archives communales. Carton des lépreux, liasse de l'Administration, n" 2 )

Bonifacius.episcopusservusservorum Dei, venerabili fratri. episcopo (2) et dilectis filiis.. cancellarioac magistro Stephano de Turenna canonico parisiensibus salutem et apostolicam

(1) Cf. pour cette pièce pp. 27-28 et 124.

(2) Simon Matifas de Bucy, évêque de 1290 à 1304 ; il avait été archidiacre de Reims.


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benedietionem. Significarunt nobis Droars dictus Liserons, Golardus Troycé, Guichars Corée, Thomas Erars, Renaudus Cocheles, Petrus de Careyo, Theodericus Barbette, Milo de Burgondia, Remigius dictus Chevalier, Johannes dictus Lilarges, Gochardus de Libéra, Thomas dictus Lalate, scabini remenses,ac Gerardus dictus de Cal vomonte et Henricus dictus Lepras, laici provisores domus sancti Lazari juxta Remis, quod, suggesto mendaciter venerabili fratri nostro.. archiepiscopo remensi quod scabini ac provisores predicti administrationem bonorum dicte domus communiter occupaverant et quod oblationes, que in nativitatis beati Johannis Babtiste et sancti Eligii festivitatibus fidelium oblatione obveneranl in ecclesia dicte domus, perceperant, et sanctorum reliquias super altari dicte ecclesie positas propriis tenuerantmanibuset eas populo in dictis festivitatibus ad ecclesiam ipsam causa dovotionis accedenti ostendi fecerant, nec non et clericos, quos idem archiepiscopus ad dictam ecclesiam causarecipiendi oblationes hujusmodi misisse dicebant, recedere ab ipsa ecclesia compulerant et predictas oblationes retinere et suam exinde voluntatem facere presumpserant, idem archiepiscopus ex arrupto sine aliqua cause cognitione scabinos et provisores predictos per Thomam de Trelodio, presbiterum. Egidium de S. Lupo ac Renaldum de Remis, clericos remenses, auctoritate propria moneri mandavit, ut infra certum terminum oblationes predictas ab eis, ut dicebat, receptas restituere ac de hujus modi excessibus, quos in premissis eos commisisse dicebat, condignam emendam prestare dicto archiepiscopo procurarent; alioquin presbiter et clerici predicti extunc eos communiter, in quos idem archiepiscopus excommunicationis sententiam promulgarat, excommunicatos publiée nunliarent. Ex parte vero scabinorumet provisorura predictorum fuiteoram eodem archiepiscopo excipiendo propositum, quod, cum de premissis, que vera non erant, ei aliquatenus non constaret, prout nec constare poterat, cum non essent notoria neque vera, contra eosparatos super hoc stare jure sine cause cognitione non poterat taliter processisse ; propter quod ab co humiliter


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petierunt ut processum huj usmodi revocaret ; et quia dictus archiepiscopus prefatos scabinos et provisores super hoc audire contra justitiam recusavit, ipsi sentientes ex hoc indebite se gravari ad sedem apostolicam appellarunt. Quocirca discretioni vestre per apostolica scripta mandamus quatenus, vocatis qui fuerint evocandi et auditis hinc inde propositis, quod justum fuerit, appellatione postposita, decernatis, facientes quod decreveritis auctoritate nostra firmiter observari. Testes autem qui fuerint nominati si se gratia, odio vel timoré subtraxerunt, per censuram ecclesiasticam appellatione cessante cogatis veritati testimonium perhibere. Quod si non omnes hiis exequendis potueritis interesse, tu, frater episcope, cum eorum altero ea nichilominus exequaris. Datum Laterani xvi kalendas Maii pontificatus nostri anno primo (1).

(La bulle manque.)

VI.

13 janvier 1340-1341. — PROCÈS-VERBAL

DE LA PRÉSENTATION DE PHILIPPE DE RUEL COMME CHAPELAIN

DE SAINT LADRE AUX FEMMES.

(Archives communales, Carton des lépreux, pièces non cotées)

In nomine Dei amen. Per hoc presens instrumentum cunctis pateat evidenter quod, anno ab incarnatione ejusdem Domini millesimo quadragesimo, indictione nona, tredecima die mensis januarii, videlicet sabbato in festo beatorum Remigii et Hilarii, hora vesperarum vel circiter, pontificatus sanctissimi patris ac domini domini Benedicti divina providentia pape duodecinii anno septimo, in nostrum publicorum notariorum et testium infrascriptorum ad hoc vocatorum et

(1) Pour cette pièce voy. pp. 200-201.


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rogatorum presentia, in villa de Curvilla, remensis dyocesis, in alta caméra domus reverendi in Christo patris ac domini.. Johannis Dei gracia remensis archiepiscopi (1) propter hoc personaliter constituti, venerabiles et discreti viri Thomas dictus de Rohais et Petrus dictus Pochars, cives ac scabini remenses, tam suo quam aliorum scabinorum consortium suorum ac scabinatus remensis nomine, per organum Pétri de Citreyo Remis manentis presentaverunt eidem reverendo patri ibidem presenti ad capellaniam perpetuam S. Lazary ad mulieres remensis, vacantem per mutationem status domini Reginaldi Fremeri, novissimi capellani ejusdem capellanie, venerabilem virum dominum Philippum de Ruel, dicti reverendi patris capellanum, presentem, supplicantes nomine quo supra dictum dominum Philippum ad presentationem predictam recipi et admitti ad dictam capellaniam et sibi eam conferri per reverendum patrem predictum. Dictus vero reverenduspater predictam capellaniam dicto domino Philippo, presenti et acceptanti, ad presentationem predictam contulit et de ipsa providit eidem, intuitu pietatis, cum suisjuribus et pertinentes ejusdem, ac ipsumdeeisdem capellania,juribus et pertinentiis omnibus ejusdem capellanie per sui traditionem anuli presentialiter investivit. Quibus actis, dictus reverendus pater declaravit, recognovit et confessus fuit, ad opus ipsorum scabinorum et scabinatus predicti, presentationem dicte capellanie sibi et suis successoribus, necnon vicariis et commissariis eorumdem, faciendam ad dictos remenses scabinos pertinere. Super quibus omnibus et singulis dicti Thomas et Petrus scabini, nomine quo supra, a nobis tabellionibus publicis infrascriptis petierunt sibi fieri et tradi publicum instrumentum. Acta l'uerunt hec, etc. (2).

(1) Jean de Vienne, archevêque de 1334-1351.

(2) Voy. pour cette pièce pp. 124-125.


— 261 -

VII.

1389. — « MISES POUR MUEBLES ACHETEZ POUR YSABIN FILLE RENIER LE POISSONNIER, MALADE. »

(Archives de l'Hôpital général, E. 16, 2, f* 16.)

Primo a Renier le Poissonnier pour H lis estofïés de queulx, de cussins et couverteurs achetez pour lad. malade et pour sa baisselle XLVIII s.

Item pour H orilliers nu s.

Item pour une nappe nueve de vin aulnes, ni touailles simples (?) nuevez xvm s.

Item pour H pos de queuvre et n paelles xvi s.

Item aud. Renier pour un pot de quarte d'estain et une paire vi s.

Item pour n paires et demi de draps a lis achetez en la Cousture le vme jour de juillet xix s.

Item pour un drap a lit despareil m s.

ItemaThiebaut de Berzieulz pour une chaudière et i chauderon neuf xxn s.

Item a Jehan Hutin pour H estuis achetés pour la malade xii s.

Item pour une clef a l'un desdis estuis xii d.

Item pour vin planches pour faire charlis mi s.

Item pour XII d.

Item pour estrain pour faire n lis H s.

Item a un charpentier pour faire challis et pluseurs menuez choses m s.

Item pour despens fais par Bertran (1) et pour i charreton qui mena les meubles qu'on mena a Saint Ladre aux femmes u s.

(1) Bricarl, gouverneur de Saint Ladre.


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Item pour une paire de draps a lis et une pièces de doubles pour faire m cuevrechief achetés a Gille Lawaille xv s.

Item le xixe jour de juillet un" et ix paie pour une table i mortier, i portail et une fourme. vi s.

Item a Jehan Le Malot tonnelier pour i baingnoir nuef x s.

Item pour un coustel a pain taillier et i taillour ajouté xvi d.

Item pour i aindier et i rotier nuef m s. vm d.

Item pour i soufflet xu d.

Item pour escuelle, platiaus, tranchouirs, queilliers de bos H s.

Item pour i caucier xu d.

Item pour i pennier et n selles xiid. (I).

VIII.

6 décembre 1398. — ARRÊT DU CONSEIL CONTRE LES LÉPREUX DE SAINT LADRE.

(Archives de l'Hôpital général, F 1. 2, n* 1.)

Charles, par la grâce de Dieu roy de France, au prevost de forain de Laon ou a son lieutenant et au premier nostre sergent qui sur ce sera requis, salut. Nos bien améz les eschevins du ban de nostre amé et féal conseiller l'arcevesque de Reins, aians le gouvernement et administration de la maison de S. Ladre emprès Reins et des malades estans en icelle, nous ont fait exposer en complaingnant que ja soit ce qu'ils ou leurs commis aud. gouvernement aient deftendu expressément ou fait deffendre a Colecon Richier, Gauchier Lebergot, Simonnet Le Chaussetier, Andrieu Catiin et Raoulin ,

tous ladres et pour ce mis en lad. maison de S. Ladre

(1) Voyez pour cette pièce pp. 79-80.


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depuis un an et demi en ça ou environ, que plus ilz ne alaissent, venissent, ne fréquentassent en lad. ville de Reins entre les sainnes personnes ad ce que aucun péril ou inconvénient ne s'en peust ensuir, neantmoins iceuls ladres ou aucuns d'euls n'ont a ce volu ne veulent obéir, ainçois s'efforcent chacun jour de aler, venir et fréquenter en lad. ville de Reins et entre les sainnes personnes, mais qui plus est ont menacié, ou aucuns d'euls, led. commis de leurs battures et injures ou content de lad. défense ou autrement, en telle manière qu'il n'ose seurement estre ne demourer en lad. maison, en venant contre lad. deffence et en commettant exemple de mal, si comme iceuls complaignans dient, requérant sur ce nostre provision gracieuse. Pour ce est-il que nous, ce considéré, voulans en ce estre pourveu de bon remède, vous mandons et commettons a chacun de vous qui sur ce sera requis que auxdis ladres et autres, s'aucuns en y a en lad. maison, vous faictes, ou ton prevost ou lieutenant fais, faire inhibicion et défense de par nous et a chacun d'eulz sur certaines et grosses painez a apliquer a nous que doresena-vant ilz ne voisent, viengnent, ne fréquentent en lad. ville de Reins ne entre les personnes saines demourans en icelle, ançois se tiengnentet face leur demeure selon que faire la doivent en lad. maison de Saint Ladre a ce ordonnée pour eulz et [en] laquelle ilz ont leur vivre et nécessité bien et convenablement, et aussi qu'ils ne meffacent ou facent meffaire auxdis complaignans ne a leur dit commis en corps ou en biens en aucune manière, lesquels quant ad ce nous mettons en nostre protection et sauvegarde, et ou cas que ilz ou autres ladres mis ou a mettre en lad. maison feroient le contraire de lad. deffence, punissiez lez, ou ton prevost ou lieutenant fay pugnir, par detemption de prison ou autrement, selon ce que vous et lesdis complaignans verrez au cas appartenir, tellement qu'ilz n'aient cause de plus aller, venir... et que ce soit exemple aux autres... Donné à Paris le sixiesme jour de décembre l'an mil CCCIIIIXI et dix-huit. Ainsi signé : par le roy, a la relation du Conseil,

Fleury.

(Collation. Vidimus du 19 décembre 1398.)


— 264 —

IX.

4 mars 1416. — LETTRES DE PROVISION DES GOUVERNEURS DE SAINT LADRE.

(Archives communales, liasse 34, registre isolé, f* 8.)

A tous ceulx qui ces présentes lettres verront ou orront les eschevins de Reims salut. Sachent tuit que nous, ausquelz appartient le gouvernement et administration des frères et suers malades des maladeriez de S. Ladre de Reins aux hommes et aux femmes, de leurs maynieez, prouvendiers, convers et converses, et de toutes les maisons, censés et appartenances dud. S. Ladre, confîans du sens, loyaulté et bonne diligence de nos bien améz Estienne Potier et maistre Pierre Le Roy, nos compaignons eschevins de Reins, iceulx et chacun d'eulx pour le tout par la teneur de ces présentes avons fait, constitué et establi, faisons, constituons et establissons pour et ou lieu de nous procureurs, proviseurs, maistres, gouverneurs et administreurs des malades, maladeriez et maisons de S. Ladre aux hommes et de S. Ladre aux femmes de Reins et des appartenances ;

Ausquelz procureurs, proviseurs, maistres, gouverneurs et administreurs, et a chacun d'eulx pour le tout, nous avons donné et ottroyé, donnons et ottroyons par ces présentes plain povoir, auctorité et mandement especial de faire et exercer led. office pour et ou lieu de nous jusques au jour des Cendres qui sera l'an mil CCCC et seze prochain venant, aux gages et pensions de douze 1. p. pour eulx deux, de gouverner, pourveoir,nourir et administrer lesd. malades et maladeriez, leurs gens et maynieez de toutes leurs nécessitez ainssy comme il appartiendra ; de bailler a ferme, censé ou louage les maisons, censés, terres, bois et préz a une ou pluseurs personnes a tant d'années et termes comme bon semblera ausdis gouverneurs ; de requérir, poursuir, demander, exiger et recevoir


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toutes les debtes, cens, seurcens, rentes, revenuez, proufis et émolumens et toutes aultres choses quelconques qui aud. S. Ladre et ausd. malades et maladeries sont et pouront estre deuez, et de ce qu'ilz en recevront baillier et passer lettres de quittance une ou pluseurs comme bon leur semblera ; de garder, maintenir, poursuir et deffendre les drois, privilèges, proufis, franchises et libertés, us et coustumes, possessions et saisines, et tous autres drois quelconques appartenant aud. S. Ladre, malades et maladeries envers et contre tous ; de opposer et soustenir oppositions, poursuir et deffendre et faire toutes manières de plaideriez partout, en jugement et dehors ; de prendre l'adveu et deifense de toutes les causes de tous les malades, con vers et converses, censiers et fermiers des maladeries et maisons appartenans aud. S. Ladre; de faire veue et ostencion de lieu ou de lieux et de la veoir faire, et avec ce, de faire et constituer procureurs ung ou pluseurs en lieu d'eulx, qui aient et puissent avoir povoir, autorité et puissance de faire les choses dessusd., leurs circunstances et deppendences pour et en lieu desd. gouverneurs et administreurs ; de plaidier pour eulx partout en jugement et dehors, contre toutes personnes, par devant tous juges, de garder et soustenir les causes desd. proviseurs, gouverneurs et administreurs et desd. malades et de leurs maisons comme feroient et faire pouroient lesd. gouverneurs et administreurs ; et généralement a yceulx procureurs proviseurs et administreurs avons donné et donnons par ces présentes plain povoir, autorité et mandement especial de faire, procurer, pourveoir, besoingner et ordonner pour et au proufit desdis malades, maisons et appartenances tout ce que nous ferions et faire pourriens se presens y estions et que a bons et loyaulx procureurs, proviseurs et administreurs puet et doit competer et appartenir, pourveu que de tout led. gouvernement et de toutes les receptes et mises qu'ilz feront en leur dit office, ilz nous en rendront bon et loyal compte touttefois que par nous ou nos successeurs eschevins en seront requis. En tesmoing de ce, nous avons scellé ces présentes lettres du seel de nostre


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Eschevinage de Reins, qui furent faites le jour des Cendres, quatriesme jour du mois de mars l'an mil quatre cens et quinze (i).

X.

20 juin 1411.— RÉCEPTION DE JEAN DE VENDERESSE, LÉPREUX (Archives de l'Hôpital général, F. 1. 4.)

A tous ceulx qui ces présentes lettres verront ou orront, Jehan Gouvion et Jehan Visaige, commis de par le Roy nostre sire a la Visitation et gouvernement des malades et infects de la maladie de lèpre estans et demourans en la ville de Reins, de laquelle Visitation et des deppendences procès et débat est meu et pendant en la court de Parlement en cas de saisine et de nouvelletté entre les eschevins de Reins complaingnant dud cas d'une part et très révérend père en Dieu Monseigneur de Reins opposant et deffendeur d'autre part, salut. Comme, par vertu des lettres contenant notre povoir dont la teneur

s'ensuit : « A tous ceulx (2) Ce fut fait a Reins vingt

huit jours ou mois d'avril l'an mil quatre cens et dix sept. Ainsy signé : R. Labarbe. », nous eussiens fait convenir et adjourner-par devant nous a certain jour passé Jehan de Venderesse, demourantaud. Reins, sur ce que l'on disoit et estoit renommée commune aud. Reinsque icellui Jehan estoit malade et infect de la maladie de lèpre, afin qu'il fust visité par gens en ce expers et cognoissans et se tel estoit trouvé qu'il fust séquestré et mis hors des sains et de lad. ville et ou lieu ou l'en avoit acoustutné de mettre les malades de lèpre de lad.

(1) Voy. pour cette pièce pp. 185-188.

(2) Suit le texte de la commission des deux commissaires.


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ville de Reins. Auquel jour vint et comparu par devant nous led. de Venderesse et par nous lui furent exposées les choses dessus dites ; lequel de Venderesse, loant Dieu nostre créateur, prenant lad. maladie en pacience comme il disoit, nous dist et confessa que la renommée estoit aud. Reins, que il estoit infect et malade de lad. maladie de lèpre et pour ce se tenoit et portoit pour infect de lad. maladie de lèpre, en nous disant oultre qu'il estoit natis de lad. ville de Reins, et requérant qu'il fust mis et séquestrés en l'ostel S. Ladre de Reins et que illec lui fussent bailliez et administrez parles eschevins de Reins ou les gouverneurs dud. S. Ladre l'ostel et les drois, prouffis et emolumens dud. S. Ladre comme il estoit acoustumé a faire d'ancienneté aux malades de lad. maladie natis de lad. ville de Reins, en offrant au surplus faire son devoir et paier ce que tenus estoit de paier a l'entrée dud. S. Ladre. Laquelle responce dud. de Venderesse oye, nous appoinctasmes que [lejdit de Venderesse nous admenistreroit tesmoings et informeroit s'il estoit natis dud. Reins, et au surplus lui feriens ce que raison devrait. Lequel nousadmenaetproduisy plusieurs tesmoings dignes de foy par la deposicion desquelz nous apparut icelui Jehan de Venderesse estre natif de lad. ville de Reins. Et ce fait, feismes venir et comparoir par devant nous a certain jour passé, led. de Venderesse pour le faire visiter et esprouver assavoir s'il estoit malade et infect de lad. maladie de lèpre ou non, et pour faire lad. Visitation, feismes venir honnorable homme et saige Maistre Jehan de Floricourt, maistre en médecine, et Jehan de Sept Saulz, barbier, demourans a Reins, ausquelz nous feismes faire serement solempnel de faire bien et diligemment lad. visitacion et de nous rapporter ce que trouvé en auraient; lesquelz médecin et barbier feirent lad. visitacion et nous feirent et baillèrent par escript leur rapport en une cedule signée du saing manuel dud. médecin, de laquelle cedule la teneur s'ensuit : « Sachent tuit que je, Jehan de Floricourt, maistre en médecine, avec ung appelé Jehan de Sept Saulz, barbieur, ay aujourd'huy, xve jour de juing quatre cens et dix sept, visité


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et palpé diligemment Jehan de Venderesse, demourant a Reins, souppesonné de la maladie contagieuse de lèpre, et, toutes choses veues et considérées, je certiffie led. de Venderesse estre infect et entichié de lad. maladie, telement que il est a séquestrer et mettre hors de la compaignie de sains. En tesmoing de ce, j'ay fait ceste cedule signée de mon sing manuel l'an et jour dessus dis. Ainsi signé : J. de Floricourt. »

Et après toutes ces choses, led. de Venderesse nous a requis que sur tout son procès nous lui feissiens raison et justice.

Savoir faisons que, veu et considéré la confession dud. de Venderesse, la deposicion des tesmoings dont dessus est faite mencion, le rapport dud. médecin et toutes les choses dessusd., et ce qui fait a veoir et considérer, eu sur tout grant et maeure deliberacion de conseil a plusieurs sages, Nous led. de Venderesse avons dit, pronuncié, jugié et declarié, disons, pronunçons et déclarons malade et infect de lad. maladie contagieuse de lèpre et l'avons condempné et condempnons à soy départir de lad. ville de Reins comme malade et infect de lad. maladie de lèpre et a aler demourer aud. S. Ladre ou ailleurs, comme les bourgeois natis de lad. ville de Reins ont acoustumé de faire ou temps passé. Sy donnons en mandement de par le Roy nostre sire aux eschevins de Reins et aux gouverneurs de l'ostel dud. S. Ladre et autres a qui il appartient que led. de Venderesse reçoivent begninement oud. hostel S. Ladre ou ailleurs ou il appartient et lui baillent et admenistrent l'ostel, drois, proffis, emolumens et autres solempnitéz ad ce appartenans, comme il est acoustumé de faire du temps passé aux autres malades de lad. maladie natis de lad. ville de Reins, en paiant toutes voies par led. de Venderesse les drois que tenus est de paier à l'entrée de l'ostel dud. S. Ladre. En tesmoing de ce nous avons scellé ces lettres de nos seaulx, qui furent faites et données en noz plais tenus aud. Reins le vintiesme jour du mois de juing l'an de grâce Nostre Seigneur mil quatre cens et dix sept (1).

(1) Pour celte pièce, voir pp. 133-147.


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XI.

30 mai 1455. — RÉCEPTION DE HERBERT JOBIN, LÉPREUX. (Archives de l'Hôpital général, F'. 5.)

A tous ceulx qui ces présentes lettres verront ou orront, Gobert Fournet, licencié en lois, chanoine de Laon, conseiller du Roy nostre sire et garde du seel de la baillie de Vermandois a Laon estably de par icellui seigneur, salut. Sachent tuit que le vendredi pénultième jour de may l'an mil CCCC cinquante cinq, nostre amé et féal Henry Payot, clerc, demouranta Reins, commis et estably de par nous pour oïr, entendre et a nous rapporter ce qui s'ensuit :

A la requeste de honnorables hommes et sages Jehan de Gravelle et Jehan Joffrin, eschevins de Reims, maistres et gouverneurs de l'ospital S. Ladre lez Reins, et de Jehan Maubrouet, procureur dud. Eschevinage de Reins, se transporta avec et en la compaignie des dessusdiz en l'ostel de Herbert Jobin, fevre, demourant aud. Reims, et illecq par lesd. gouverneurs et procureur, par la bouche dud. procureur, fut dit et exposé aud. Herbert Jobin en parlant a sa personne que vray estoit que nagueres il avoit esté accusé et souspeconné d'estre infect de la maladie contagieuse de lèpre, et depuis avoit esté palpé et visité par médecins, cirurgiens et gens en ce expers et congnoissans et finablement avoit esté trouvé entichié et infect de lad. maladie de lèpre, comme il apparoit par la certiftication desdis médecins et cirurgiens ; et a ceste cause avoit esté condempné a soy départir de lad. ville de Reins et estre mis hors de la compaignie des sainnes personnes non entichiées d'icelle maladie. Après laquelle condempnatiou ainsi faite, led. Herbert s'estoit dit et avoué bourgois natif de lad. ville de Reins et avoit requis estre receu oud. hospital : sur quoyavoit depuis esté faite certaine information


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et enqueste par lesdis eschevins de Reins ou leurs commis et pour ceste cause requéraient et requièrent aud. Herbert qu'il se volsist dire et declairier s'il se vouloit rapporter a l'information qui en estoit faite par mes dis seigneurs les eschevins : a qtioy respondit led. Herbert que du tout il se rapportoit a l'enqueste par eulx faite touchant sa nattivité et aussi se rapportoit a eulx et a leur bonne discrétion, disposicion et ordonnance de son logis, vivre et revenu et de tout ce qui s'en povoit ensuir. Apres lesquelles choses ainsi faites, fut dit par lesd. gouverneurs et procureur que par l'information faite de sa nativité il estoit souflisamment apparu a mes dis seigneurs les eschevins led. Herbert estre natif de lad. ville de Reins, et par ce povoit et devoit estre recepté et herbergié oud. hospital et y avoir son vivre, estât et gouvernement a la voulenté, disposicion et ordonnance desd. eschevins, en payant par led. Herbert son entrée avec les drois et devoirs en tel cas acoustumés. Et lors ordonnèrent et firent commandement aud, Herbert qu'il se preparast et s'en alast demourer au lieu et maison dud. hospital de S. Ladre hors et près de Reins dedans le mardi prochain ensuivant ; et au surplus pour son vivre et gouvernement en icellui hospital lui dirent et déclairerent qu'il aurait et prendrait chacun an sa vie durant les sommes de deniers et autres choses aux termes et par la manière qui s'ensuit. C'est assavoir qu'il aurait chacun an la somme de dix livres tournois, de mois en mois, par portion. Item aurait led. Herbert aux quatre festes solempnes (sic) et aux deux festes S. Eloy, a chacune desd. festes, deux solz huit deniers parisis pour pitance. Item aurait icellui Herbert part en pain deu par les Religieux de S. Remy de Reins a l'ospital S. Ladre aux femmes dud. Reins, ou cas touteffois qu'il n'y aurait femmes, ouquel cas il ne autres ladres n'y prendraient riens, mais l'auraient lesd. femmes pour ce que led. pain est de leur fondation. Item aurait sa part et portion des jardinages dud. S. Ladre aux hommes avec le curé et convers dud. hospital ; et pareillement y auront les autres ladres qui y pourront venir. Item et au regard de la maison qui est de présent elle se par-


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tira par moittié pour lui et un autre ladre également. Et moiennantles choses dessus d. icellui Herbert Jobin, en déduction des drois qu'il estoit tenu paier, a paie et baillié ausdis gouverneurs reaiment et de fait en la présence de nostre dit commis la somme de dix livres parisis pour son entrée et aussi a chacun desd. gouverneurs cinq solz parisis ; et avec ce, est et sera tenu rendre et paier aux curé et convert d'icellui hospital a chacun d'eulx cinq solz parisis avec les autres drois acoustumés a paier.—Desquel les ordonnances et déclarations dessusd. ainsi faites aud. Herbert comme dit est, icellui Herbert Jobin aesté d'accord et consentant, et icellesa eu pour agréables en la présence de nostre d. commis.

De toutes lesquelles choses lesd. gouverneurs et procureur requirent lettres et instrument a icellui nostre d. commis, lesquelles il leur octroya soubz ceste forme pour eulx valoir en temps et lieu ce que raison devra. En tesmoingde ce, nous, au rapport de nostre d. commis, avons mis a ces lettres le seel de lad. baillie. Ce fut fait les an et jour dessus diz.

(Signé) : H. PAYOT (i).

XII.

3 juillet 1481. — PROCÈS-VERBAL DE LA VISITE DES LÉPROSERIES PAR MATHIEU D'ESCOUCHY.

(Archives communales. Juridiction, n" 9.)

Sachent tuit que, le mardi troisiesme jour de juillet l'an mil quatre cens quatre vingts et ung, nous, Mahieu d'Escouchy, escuier, garde des seaulx royaulx establis aCompiengne, commissaire en ceste partie, député de par vénérable et discrète personne maistre Jehan Brunet, licencié en loiz et en

(1) Pour cette pièce, voy. pp. 145-146.

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décret, chanoine de Langres, conseillier et aumolsnier du Roy nostre sire, commis de par icelui seigneur a visiter et faire visiter tous les hostelz Dieu, hospitaulx et maisons de Sainct Ladre de ce royaume, commettre au gouvernement d'iceulx et a rechercher et réparer les faultes et abbus qu'il ou ses commis trouveraient ou et ainsi qu'il appartiendra parraison, nous transportasmes par devers les eschevins de Rains, gouverneurs et administrateurs des hospitaulx Sainct Ladre aux hommes et aux femmes hors et près dudit Rains, et es présences de nobles hommes et sages, maistres Jehan Chardon, licencié en loiz, conseillier du roy nostre sire, bailli dudit Rains, Jehan Cauchon l'aisné, licencié en loiz, substitut audit Rains du procureur du roy ou bailliage de Vermandois, Phelippe de Besannes, lieutenant du capitaine dudit Rains et commis de par le lieutenant du bailli de Vermandois, nous monstrasmes et fismes faire lecture du vidimus des lettres royaulx addressans audit maistre Jehan Brunet et de sa commission attachée en marge, par vertu de quoy nous besongnions, et leur requismes que d'iceulx hospitaulx et des comptes renduz par leurs commis et de leurs prédécesseurs eschevins touchant l'administracion d'iceulx hospitaulx ilz nous feissent apparoir affln que nous puissions acquitter de la charge a nous commise en ceste dite partie selon l'intencion et bon plaisir du roy nostre dit seigneur. A quoy de par iceulx eschevins nous fut dit et respondu que très volontiers en fournissant et obéissant de leur part au bon plaisir du roy et a ce qu'il mandoit par ses dites lettres, ilz nous menroient et feraient mener par lesdis hospitaulx et si nous monstreroient aussi les comptes renduz de ladite administracion depuis deux ou trois cens ans en ça et plus ancores si voulions, et de faict tantost après et des ce mesme jour par maistres Robert Choilly et Jehan Chinoir, licencié en loiz, commis par eulx ceste année audit gouvernement, et Jehan Charpentier, maistre es ars, eschevins, et par Henry Payot et Jehan Foulquart, leurs clers et procureurs, nous liront mener et conduire parles dits hospitaulx et chappeltes ou églises d'iceulx, esquelz nous


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trouvasmes les édifices, églises, manoirs et jardinages bien et honnestement entretenus et ung commencement de grant édifice nuef qui se fait audit Sainct Ladre aux hommes pour logierleconversetses gens; ouquel Sainct Ladre aux hommes estoient et trouvasmes trois lépreux de la nacion dudit Rains, et a Sainct Ladre aux femmes deux lépreuses, qui tous avec les curez et convers sont illecq nourris et entretenus aux despens desdis hospitaulx, comme il nous est apparu par plusieurs comptes renduz de ladite administracion, lesquelz nous trouvasmes très bien réglez. Et a ceste cause en avons delaissié la charge, administracion et gouvernement comme devant ausdis eschevins et a leurs dis commis sans leur y mettre ou donner aucun destourbier ou empeschement. En tesmoing desquelles choses, nous avons seellé ces présentes de nostre seel (1) et signé de nostre seing manuel l'an et jour dessus dis.

(Signé :) M. D'ESCOUCHI.

(Au verso : )

Le cinquiesme jour de juillet l'an mil nnc IIIIXX et ung, en la présence de moy Pierre Boulet, clerc, notaire royal, demourant a Reims, sont comparus en leurs personnes honnourables hommes et saiges, maistres Robert Choilly et Jehan Chinoir, licenciés es loiz, demourans à Reims, lesquelz et chacun d'eux ont certiffié et pour vérité affermé que le jour de hier furent en leur présence signées les lettres escriptes au blanc de ces présentes de la main de noble homme Mathieu d'Escouchy, garde des seaulx royaulx establis de par le roy nostre sire a Çompiengne et icelles feist seeller par Robert de Bresche de son seel duquel, comme il disoit, il usoit et avoit acoustumé user en toutes ses besôngnes et affaires. Desquelles choses honorable homme et saige Jehan Foulquart, procureur de l'eschevinaige de Reims, m'a requis lettres et instrument, que luy ay octroyées en ceste forme pour luy servir ce que

(1) Le sceau manque.


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de raison. Tesmoing mon seing manuel cy mis les ans et jour dessus dis.

(Signé : ) BOULET (1).

Xlll.

X VI» siècle. — « DÉFENSES » LUES AU LÉPREUX ET SERMEN r DU MALADE A SON ENTRÉE.

(Archives communales, liasse 34.)

Et la messe chantée et ce dit, ledit curé luy doit gecler la terre par trois foys sur ses piedz qui soient joinctz, comme dit est, et puis luy donner de l'eaue benoicte et, ce fait, de par les eschevins lui doivent estre faictes les deffences qui s'ensuyvent sur peine du feu :

Premier, je te deffens que jamais tu n'entre en moustiers quelzconques, en fours, en molins, en marchez ne en assemblées de gens sainctz

Item je te deffens que jamais tu n'entre en la ville de Reims, sinon par congié et licence de Messieurs les eschevins qui seront en icellui temps.

Item je te deffens que tu ne laves tes mains ne autres choses d'environ toy en ruisseaulx, en fontaines, ne que n'y boives : et si tu veulx de l'eaue pour boire, si la puise en ton baril et non a autre chose, auquel baril je te deffens d'y boire.

Item je te deffens que point ne voise sans ton habit demesel affin qu'on te congnoisse, et si ne vas point deschault et que tu ne touche a choses que tu barguignes ou que tu veuilles achecter.

Je te deffens que tu n'entre point en tavernes, et se tu veulx du vin, soit que tu l'achecte ou que on te le donne, faiz le

(1) Voir pour cette pièce, pp. 210-212.


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entonner a ton baril. Et si te deffens que tu n'abitte a autre femme que a la tienne espouse.

Item je te commande se tu vas par chemin et tu encontre aucunes personnes qui te raisonnent que tu te mecte au dessoubz du vent devant que tu responde et point ne vas par rues estroictes, affin que se tu encontre aucune personne qu'il ne puist pis valoir de toy.

Je te deffens que, se tu passe par aucun tuiel, pontz ou passaiges, que tu ne touche point aux appuyés ne aux cordes ou crochectz des puys, sans avoir en tes mains mouffles ou gans.

Je te deffens que tu ne touche a jeunes enftans et ne leur donne aucune chose. Et si ne bois ne menget en aucuns vaisseaulx que au tiens ; avec ce, te deffens de boire ne menger avec gens quelz qu'ilz soient s'ilz ne sont malades de pareil mal a toy.

Je te deffens aussy que tu n'aproches le puys de la court de céans a huit piedz près.

Apres tout ce fait et dit le curé le doit prendre par la main et le mener a l'huys de sa borde, et presens les assistans, luy doit faire une petite collacion en prenant son theume : « Inantem nudum cum te natura creavit » ou autre a son plaisir; et, après ceste collacion faicte, led. curé luy doit offrir le premier, puys doit admonnester aux assistens de lui offrir de bien faire et a tant se départ.

Est assavoir aussy que depuis que led. mesel est receu aud. hospital, comme dit est, il est de la en avant subgect de mes dits seigneurs les eschevins de Reims en tous cas personnelz, criminelz et civilz, et non d'autre, sinon du Roy notre sire par souveraineté : ce qui luy doit estre dit et remonstré publicquement et doit jurer qu'il leur portera honneur et tiendra tout ce que ordonné et commandé lui sera par eulx, et que s'il va hors dud. hospital par le pays il portera tousjours son habit de mesel ; et s'il peult scavoir aucune chose qui se traicte contre les personnes du Roy notre sire, des seigneurs de son sang et des eschevins ou contre leur bien et honneur


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il le dénoncera et fera secrètement assavoir ausd. eschevins en toute diligence.

Semblablement doit jurer de non logier et haubergier oudit hospital autre lespreux qui ne sera mis comme luy de par lesd. eschevins, sans leur licence et congié exprès (1).

XIV.

3 avril 1505-1506. — RÉCEPTION DE COLESSON VOITUROT, CONVERS DE SAINT LADRE AUX HOMMES.

(Archives communales, Conclusions du Buffet, t. 3, f* 41 w)

Messieurs ont receu Colesson Voiturot a convers de l'ospital S. Ladre aux hommes pour le tenir et en joyr durant douze ans commencans au jour de leste S. Jehan Baptiste prochain venant, a la charge de garder bien et diligemment la maison a lui baillée comme convers, garder aussi l'église, les joyaulx en icelle, de porter la housse que ont acoustumé porter les aultres convers le temps passé, c'est assavoir le mardi et le vendredi de chacune sepmaine, aux deux festes S. Eloy et aultres jours es quelz y a pardon en l'église dud. S. Eloy, de demourer comme convers en l'ospital S. Ladre en la maison ou ilz ont accoustumé demourer. Sera tenu de retenir de torcheiz et couverture et de toutes aultres menues réparations a ses fraiz et despens la maison a lui baillée comme convers et que ont acoustumé tenir ses prédécesseurs. Sera tenu de clourre et ouvrir les huys du moustier dud. S. Eloy aux jours et heures acoustumés, de garder les joyaulx, les mettre sur l'autel ausd. festes et aultres jours acoustumés, recevoir les oblacions et mettre l'argent d'icelles es troncs d'icelle église. Sera aussi tenu de servir ausd. deux festes S. Eloy tant a vendre les chandelles pour l'église et recevoir les oblacions

(1) Voir pour cette pièce pp. 150-152.


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comme aultrement et faire tous aultres services acoustuméz aux jours des pardons. Sera aussi tenu de porter honneur a Messieurs les eschevins et gouverneurs dud. hospital qui sont et seront pour lors, garder leurs biens, honneur et prouffit, porter lad. housse le jour des Cendres d'ung chacun an et compaignier Messieurs, comme ilestdecoustume, et en fin dud. temps rendre lesd. joyaulx et reliquaires sains et entières sans aucune perte ou diminucion d'iceulx sur peine de lui l'aire amender en ce qui sera diminué ou perdu d'iceulx joyaulx et reliquaires. Et avec ce, se led. Colesson Voiturot convers fait ou commect aucune faulte en sond. office ou aultrement, il en tiendra jugement et ordonnance de mesdis sieurs les eschevins sans aultre procès. Et lui a esté baillée la maison dud. convers pour en joyr durant led. temps, sans que l'en puisse en fin dud. bail dire ses biens estre acquis aud. hospital, mais que lui ou ses ayans cause les puissent reprendre en fin dud. temps, sans pour sad. réception de convers payer aucune chose a mes dits sieurs ne a l'ospital; et tout sans préjudice a mes dits sieurs et a leur eschevinage et hospital pour le temps advenir, ausquelz appartiennent les biens d'ung convers rendu pour sa vye aud. hospital, attendu qu'il a pris a louage la maison ou demourait feu Jehan Maulevault et l'a augmenté a louage (1).

XV.

23 juillet 1534. — ORGANISATION PAR L'ECHEVINAGE DE QUÊTES PUBLIQUES POUR LES LÉPREUX.

(Archives communales. Conclusions du Buffet, t. 4, f° 148.)

Conclud a esté que deffences seront faictes aux lespreux et lespreuses des hospitaulx S. Ladre de Reims, pour évyter le scandalle quo l'en dit qu'ilz ont grande quantité de femmes

(1) Voy. pour cette pièce pp. 130-132.


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qui les pourchassent et qui tiennent a ferme d'eulx leurs pourchatz, que doresenavant ilz n'aient a envoyer leurs femmes ou autres, leurs chamberieres particulièrement, par lad. ville eulx mandyef ; ains qu'ilz aient ung homme ou une femme de chacun desd. hospitaulx, a leur choix, qui yront faire la queste pour eulx parmy la ville durant chacune sepmaine; auxquelz ainsi déléguez par eulx seront fait faire par les gouverneurs desd. hospitaulx deux boytes, a chacune desquelles y aura trois clefz, que porteront lesd. déléguez de par eulx avec leurs besaces, et seront lesd. clefz baillez a trois lespreux et trois lespreuses ; et ce qui aura esté baillé et aulmosné aux déléguez ainsi de par eulx se partira entre eulx tous, assavoir ce qui aura esté baillé aux déléguez des lespreuses aux lespreuses, et ce qui aura esté baillé aux déléguez des lespreux ausd. lespreux (i).

XVI.

2 mai 1549. — RÈGLEMENT DU GRAND AUMÔNIER DE FRANCE POUR SAINT LADRE DE REIMS.

(Archives de l'Hôpital général, F. 1. 10, n° 1.)

A tous ceulx qui ces présentes lettres verront Pierre du Chastel, conseiller du Roy nostre sire, ovesquc de Mascon et Grand Aulmosnier de France, gênerai réformateur des maladeries, leprosareries et lieux pitoyables dud. royaume, salut. Savoir faisons que, veu par nous le procès verbal de Maistre Hierosme Grossaine, lieutenant du bailly de Vermandois au siège de Reims, sur et louchant la Visitation de la malladerie de lad. ville de Reims, en ensuyvant les edicts du feu roy François, que Dieu absolve, sur le fait de la generalle refformation, certain compte mis es mains dud. lieutenant par les

'1) Pour cette pièce, cf. pp. 175-176.


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eschevins de lad. ville de Reims, eulx disans administrateurs et gouverneurs de lad. malladerie de Reims et administrateurs d'icelle pour une année commune, l'an mil cinq cens quarante et ung et finissant cinq cens quarante deux, pour monstrer et faire apparoir du revenu...

Nous disons et ordonnons que en lad. malladerie de Reims seront logés, nourriz et entretenuz jusques au nombre de dix mallades de lèpre natifz de lad. ville et faux bourgs, sinon des aultres lieux plus prouchains et voisins en préférant touteffois les mallades natifz du lieu et de la fondation aux aultres estrangiers.

Auxquels dix mallades sera baillé par les eschevins de lad. ville de Reims, soy pretendans gouverneurs de lad. malladerie, logis en icelle bon et convenable et tel qu'il appartient, et en oultre pour leur vivre, nourriture et entretenement la somme de trente livres tournois a chacun d'eulx par chacun an ; lesquelles sommes leur seront distribuées au commancement de chacun moys par egalles portions, et dont lesd. eschevins ou leur recepveur sera tenu en apporter quitance desd. mallades en bonne forme et vallable qui leur sera (sic), en la faisant allouer en leurs comptes qu'ils rendront doresenavant par chacun an en la manière acoustumée.

Et moyennant ce que dessus, avons faict et faisons inhibitions et deffenses ausd. mallades de plus aller ou envoyer quester, mendier, ni clicqueter par les villes ne aultres lieux hantés ne fréquenter avec les gens sains en aucune manière que ce soict, sur peine d'estre chassez de lad. malladerie et aultres peines que déraison. Pourront toutes foys, si bon leur semble, clicqueter au devant de la porte de lad. malladerie seullement, sans que ce qui leur sera donné en aulmosne en ce faisant leur soict précompté sur leurs provisions cy dessus ordonnées.

Et ordonnons pareillement ausd. eschevins d'entretenir les reparatfons de lad. malladerie, bien et deument faire célébrer le service divin en la chappelle de lad. malladerie, ainsi que de tous temps a esté acoustumé faire, selon l'intention des


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fondateurs Auxquels eschevins avons faict et faisons inhibitions et deffenses de faire par cy après aucunes despences, fraiz ne assemblées aux despens du revenu d'icelle malladerie, soict en rendant les comptes ne autrement, ne prendre aucune chose desd. mallades a leur réception sur peine de les repecter sur eulx en leur propre et privé nom.

Le tout de ce que dessus par manière de provision, non obstant oppositions ou appellations quelconques et sans préjudice d'icelle, en ensuyvant lesd. edictz et jusques a ce que autrement en soict ordonné. En tesmoing de ce, nous avons faict mettre a ces présentes nostre seel sur le faict de lad. generalle reformation a ce par nous ordonné, soubz le seing de nostre greffier.

Donné à Paris le second jour de may l'an mil cinq cens quarante neuf.

(Signé :) HUGUET (1).

XVII.

1554. — MÉMOIRE DE PONCELET ARNOUL, PEINTRE, POUR L'ÉGLISE SAINT ELOI.

(Archives communales, Pièces à l'appui des comptes, liasse de 1554.)

Mémoire de ce que Poncelet Arnoul painctre est tenu faire et racoustrer en l'église S. Eloy.

Premier, sera tenu racoustrer les ymaiges et relicquaires de l'église S. Ladre, assavoir : l'ymaige S. Ladre : l'habillement de gris et la robbe de dessoubz d'asur, bordées d'or fin, le bâton et la mallette de couleure de boys, les elyquettes et le dyadesme dorez d'or fin, la basse ou entrepied de vermillon et le chappeau de noir ;

L'ymaige Notre Dame : la couronne avecq les cheveulx et

(M Voy. pour cette pièce, pp. 217-218.


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ceulx de l'enffant d'or ; la robbe de dessus blanc sèment de fleurons d'or, aveq la bordure et liziere aussi d'or ; la robbe de dessoubz d'asur sèment de fleurs d'or, l'envers de la robbe de dessus de vermillon et le feuillaige de l'entrepied d'or ;

L'ymaige S. Eloy : la mithre d'or et d'asur, la chappe de blanc et la croisé aveq la bordeure d'or, fin l'envers d'asur, la tunicque de vermillon et les franges d'or, la crosse a hault d'or et d'asur et le batton d'argent, l'aube de dessoubz blanc, l'entrepied vert, la selle (?) de noire, brodée d'or et l'enclume de couleur de fer ;

L'ymage S. Augustin : le manteau noir et l'habit de dessoubz blanc ;

Ung aultre ymage de S. Eloy : la chasuble d'or fin, la tunique de vert semée de fleur d'or, l'aube de dessoubz blanc, la mithre blanche enrichye d'or et la crosse d'or ;

La table d'autel : ung crucifiement au milieu, une nativitté d'ung costé et une resurection de l'aultre ; le tout painct en huille;

Un bras servant de relicquaire, d'argent bruny et les filletz d'or bruny;

Ung aultre relicquaire : les molures d'alentour des relicquaires d'or et le reste d'asur ;

Ung aultre ymaige : de boys et vermillon, les lisières d'or(l).

XVIII.

27 avril 1577. — PREMIÈRE PROCÉDURE DU « PROCÈS » DE JEHANNE DERIEULX, LÉPREUSE.

(Archives de l'Hôpital général, F'. 14, n" 10.)

Du samedy vingt septiesme jour d'avril mil cinq cens soixante et dix sept, une heure de relevée. Entre le procureur de l'Eschevinage de Reims, demandeur,

(1) Cf. p. 78.


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comparanten en (sic) personne, et Jehanne Derieulx,chambriere de Philippes Liezot, marchand, demourantaud. Reims, deffenderesse, adjournée par Nicolas Girard, sergent dud. Eschevinage, comparant en personne.

Le demandeur a dit que la deffenderesse est suspecte a plusieurs de la maladie contagieuse de lespre, pour ces causes l'a faict appeler par devant nous, requiert qu'il soit dit qu'elle sera visitée par médecins et cirurgiens, nommant Pierre Pasté, Claude d'Ambraine, docteurs en médecine, Evrard Viscot et Nicolas Legrand,maistres barbiers et cirurgiens, pour, ce faict, prendre telles conclusions qu'il verra estre a faire par raison.

La deffenderesse a dit qu'elle estime estre saine et non attainte de lad. maladie ; touteffois n'a moien d'empescher lad. Visitation, qu'elle accorde estre faite par les sus noméz par le demandeur.

Partyes oyes avons ordonné que lad. deffenderesse sera visitée par les susdictz convenuz par les partyes et pour procéder a lad. Visitation est baillée assignation aux partyes a jeudi prochain, six attendant sept heures du matin, pardevant nous en ce lieu auquel jour et heure lad. deffenderesse se représentera en personne.

(Extrait des Conclusions de l'Échevinage.) (1).

XIX.

3 juin 1577. — VISITATION DE JACQUETTE DARGENT.

(Archives de l'Hôpital général, F'. 14, n° 8.)

Par l'ordonnance de noz seigneurs les eschevins de Reims, ce iu° jour de juin mil vc soixante et dix sept, nous soubsignés, Claude Dambraine, Nicolas de Blencourt, docteurs

(1) Voir pour cette pièce pp. 134-135


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en médecine (1), Gabriel Cartier (2) et Nicolas Le Grand, cirurgiens jurés, tous demourantz a Reims, certificions avoir veu et visité Jacquette Dargent, suspecte de lèpre, femme de Raulin Baillydemourantaud. Reims. Et la Visitation bien et deument faicte par toutes les partyes de son corps, avons trouvé : premièrement quelque cheute de cheveux d'entre les temples et une petite partyes (sic) de sourseilles, le -sceptum du né quelque peu corrodé avec une petite scabiesus la joue dextre, plusieurs tubercules granuleux dispersés par les bras ; symptômes touteffoys en nombre non suffisantz pour séquestrer lad. Jaquette de la société humaine, parce que les auteurs anciens, comme Guidon (3), Gordon (4) et plusieurs autres, ne veullent que l'on juge et sépare les suspectz de lèpre sinon par la pluralité des signes univoques, lesquelz principallement se manifestent au visage. Ce qu'ayant diligemment considéré et curieusement remarqué, avons trouvé l'oeil non terni (?) ny de regard terrible (?) ny enflammé, ains doux et gracieux, les narines non contractées ny pressées ny ramassées, l'odorat non offensé, ains jugeant et discernant de divers odeurs, ayant mesme les yeux bandés, mesme ayant le sentiment fort délicat de façon que par plusieurs foys l'ayant légèrement picqué en plusieurs et divers partyes de son corps a senti incontinent douleur et jugé du lièii de la picqueure. Oultre avons veu, en arrachant les cheveux, les racines n'estre corrompues, ains adhérer fort au cuir. Nule difficulté de respirer; la voix non rauque ny catelline ; le palais en son entier sans ulcération ny inflammation, le dessous de la langue sans granules ; les

(1) Voy. sur ces médecins et ceux cités dans les pièces suivantes : MALDAN, Histoire de la Faculté de médecine de l'Université de Reims, dans La Chronique de Champagne, ï. IV, 2» année (1838), p. 380 ; et Dr O. GUELLIOT, Les Thèses de l'ancienne Faculté de médecine de Reims.

(2) Demeurant au Marché aux chevaux, signalé de 15G0-15K9. (Note communiquée par le Dr O. Guelliot.)

(3) Guido Guidi, en latin Vidus Vidius, médecin italien, qui fut médecin de François I"' (1500-1569).

\k) Bernard de Gordon, médecin français du xni' siècle.


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oreilles non emaciéz et atténuez plus que le naturel ; les muscles non desséchés, mesme ceux des poulies que l'on considère plus que les aultrcs. Nulles grattelles parmy le corps, comme impétigo et psora, qui ont le plus souvent acoustumé d'accompagner la lèpre ; l'aleine non fétide ny puante, qui est la principale cause de gatter ceux avec lesquels hantent et fréquentent les lépreux. Toutes ces choses considérées, nous ne pouvons en seine et bonne conscience juger lad. Jacquette de présent séquestrante de la compaguye des seines personnes. Et pour certification de ce, nous avons signés ce présent rapport de noz signes manuelz le jour et an que dessus.

(Signé :) DAMBIIAINE. N. DE BLENCOURT.

CARTIER. N. LE GRAND (1).

XX.

4 juin 1593. — VISITATION DE FRANÇOIS GAULDRET.

(Archives communales, Pièces à l'appui des comptes, liasse de 1593 )

Par l'ordonnance de Messieurs les eschevins de Reims, nous soubz signez, Symon Hervet, Henry Viscot, docteurs en médecine, Jehan Testelette (2) et Claude Cartier, cirurgiens jurez, tous demourans a Reims, certifiions que ce jour d'huy quatriesme de juin mil cinq cens quatre vingtz et treize, avons veu et visité et palpé Francoys Gauldret, aagé de trente cinq ans ou environ, demourant au f'aulx bourc de Porte a Veesle de Reims, suspect de lespre. La Visitation par nous deuement faicte par touttes les partyes de son corps, ne le trouvons pour le présent sequestrable des sains pour n'avoir ulcères au

(1) Voir pour cette pièce et les suivantes pp. 136-140.

(2) Ou Testelel: fils et père de chirurgien, il fait son testament en 1602 (Note du D' O. Guelliot).


— 285 —

corps virulents, non plus que l'alaine puante pour nuire aux sains; et combien qu'il ayt le né enfoncé et aulcunement corrodé, avec quelques tubercules en la joue senestre, a la sourcile et au bras quy le menace de la maladie a l'aulte de tenir régime tel qu'il appartient, touteffois entendu qu'il a le sentiment exquis par touttes les partyes de son corps, l'oreille en sa forme, l'oeuil long et non rond, le poil adhérant au cuir, pour ces raisons ne le trouvons encore lépreux et consécutivement non sequestrable. Faict les jours et an que dessus. Signé : HERVET, VISCOT, TESTELETTE et CARTIER. (Collation.)

XXI.

29 avril 1594. — PREMIÈRE VISITATION DE LUC BAILLY.

{Archives communales, Pièces à l'appui des comptes, liasse de 1594.)

Nous, docteurs en médecine et chirurgiens jurez, tous demourans a Reims soubzsignés... nous avons veu et visité ledict Luc Bailly tant en ses yeulx, sourcilz, aspeetz, forme de ses oreilles, cartilage du nez, soubz la langue et au palais et aultres lieux de la face et resonnement de la voix que des aultres partyes de son corps esquelles on doibt remarquer les seignes de lespre tant univoques que équivoques, et lad. Visitation deuement et a loisir faicte par nous en touttes les susdiètes partyes nous n'y avons trouvé ny remarqué aulcun seigne de lespre... Ce pénultième jour d'avril mil cinq cens quatre vingtz et quatorze.

Ainsy signé : HERVET, DE BLENCOURT, TESTELETTE etWATRY(I). (Collation.)

(1) Simon Wntry, d'une famille de chirurgiens, habite en 1884 la rue de Tambour, et est cité comme témoin en 1576 dans une enquête sur le fait de religion relative à Lancelol de La Salle {Revue de Champagne et de Brie, 1896, p. 15).


— 286 —

XXII.

6 mai 1594. — AUTRE VISITATION DE LUC BAILLY. (Archives communales, Pièces à l'appui des comptes, liasse de 1594.)

Nous, soubz signez, docteurs en médecine et chirurgiens jurez, tous demourantz à Reims, certifiions que, ce jour d'huy sixicsme may mil cinq cens quatre vingtz et quatorze, a la prière de Luc Bailly, depuis quelques années en ça déclaré lespreux et séquestré de la société humaine, craindant d'infecter les sains, avons esté assemblé pour visiter le supliant, en présence de honorable homme Drouin Beuvry, recepveur des hospitaulx, maistres Jehan Berger, procureur de l'Eschevinage, Germain Lepoyvre, greffier, Adam Mothe et Nicolas Gérard, sergentz, après avoir, le corps nu, visité toute l'habitude du corps et dilligemment considéré les partyes d'icellui, sommairement aussy répété les signes de la susdicte maladie tant commungs que propres, d'un mutuel consentement déclarons que led. Bailly n'a aulcun signe de lespre, et que les signes, qui avoient contrainctz les expers a juger led. Bailly lespreux, ont esté corrigez par les hemoroïdes quy luy sont survenues depuis quatre ans en ça, par lesquelles ayant esté repurgé tous les moys, l'humeur causant les signes de telle maladie a esté retirée et évacuée tant des partyes nobles que des extérieures, quy a faict que le corps a esté mieulx noury et partant délivré des affections mélancoliques : ce que a fort bien remarqué Gallien en la sentence 33e, section 3e du libvre 6e des épidémies, en laquelle il a déclaré que ceulx quy ont des hemoroydes n'endurent ny ulcère chancreux, furoncle, pustules resemblantes aux grains de therebintes quy surviennent aux cuisses, ny la lèpre ; joint que ledict s'estant marié par la cohabitation a réfrigéré l'habitude du corps et corrigé l'intempérance d'icelluy; si peult aider la façon de vivre : soudainement changer de servitude en liberté, d'oisiveté en exercice, de mauvaise nourriture en meill eure, tristesse en


— 287 —

plaisir, la crainte en asseurance, estant libre de soy, quy sont les causes quy mitigent la lèpre, ce neantmoins, combien que en toute la face ny l'habitude du corps on ne voie reluire aucun segne sequestrable de lèpre, toutelfoiz s'il n'aporte dilligence a l'évacuation de sang par les hemorroydes, estant nay de père et de mère lespreux, est a craindre que les premières racines ne recommencent a pulluler et produire mesmes ou pires accidens quy se sont paruz dès la première Visitation, et advient souvent que un feu caché, racontrant matière propre comme les humeurs mélancoliques, produit pires effectz que les premiers. Faict le jour et an que dessus. Ce que certifions estre vray.

Signé : DAMBRAINE, VISCOT (i), PESCHEUR (2) et BOURGEOIS.

(Collation.)

(1) Erard Viscot figure parmi les chirurgiens de Reims, de 1560 à 1582; il est propriétaire en 1564 d'une maison, rue de la Poissonnerie.

(2> D'une famille de médecins, et chirurgiens, Antoine Pescheur est signalé de 1581 à 1620; il fut le premier chirurgien en titre de l'HôlelDieu (Notes dues à l'obligeance du D' O. Guelliot).

JO


— 288 — APPENDICES.

I.

Liste des maîtres et gouverneurs de la léproserie.

1313* Colars FRIZON. — Pierre MONFALOU.

1336-1349 Gile de LA FOULERIE. — Drouars d'EscRY.

1352-1385 Gile de LA FOULERIE. — Renier ERART.

1355-1363 Joffroy LE PETIT. — Renier ERART.

1363-1364 Robert de COURSELLES. — Renier ERART.

1370-1378 Robert de COURSELLES. — Pierre de GUIONNE.

1381-1393 Bertrand BRICART.

1407-1408 Pierre CROCHET.

1408-1409 Robert LÉVRIER.

1411-1412 Baudenet LESCOT. — Gérard LAMBERT.

1412-1413 Benoit DE GRAVELLE.

1416-1417 Estienne POTIER. — Pierre LEROY.

1420-1421 Esteve POTIER. — Gérard LAMBERT.

1421-1422 Benoît DE GRAVELLE. — Pierre LEROY.

1422-1423 Jehan CAILLART. — Pierre LEROY.

1424-1425 Jehan CAILLART. — Pierre LEROY.

1429-1430 Pierre LE FRAISNE. — Jehan FOURNIER.

1430-1431 Jehan NOËL. — Baudenet LIGNIER.

1431-1432 Jehan NOËL. — Jehan GIBOUR.

1433-1434 Jehan CAILLART. — Jean GIBOUR.

1435-1436 Pierre LE FRAISNE. —Baudenet DU MOLINET.

1436-1437 Pierre LE FRAISNE. — Jehan LAMAQUE.

1447-1448 Aubry COMMIN. — Jehan LOMBART.

1449-1450 Aubry COMMIN. — Jean COUSIN.

1453-1454 Jehan JOFFRIN. — Jehan de GRAVELLE.

1463-1464 Thierry NOËL. — Jehan SOUDANT.

(*) Au xiv* siècle, les années sont comptées de juin en juin Au xv siècle l'exercice annuel va de Carême à Carême : les dates sont données en nouveau style.


- 289 —

1466-1467 Jehan JOFFRIN. — Jehan CHINOIR.

1468-1471 Thomas CAUCHON. — Jehan SOUDANT.

1471-1472 Jehan CHINOIR le jeune. — Jacques FILLETTE.

Remplacés par Pierre HORIS.— Jehan SOUDANT.

1473-1474 Nicolas MOET. — Jacques WATIER.

1475-1476 Nicolas MOET. — Jacques WATIER.

1476-1477 Jacques CAUCHON. — Robert CHOILLY.

1477-1478 Jacques CAUCHON. — Robert CHOILLY. — Nicolas

GROSSAINE.

1479-1480 Jehan DE BEZANNES. — Robert CHOILLY.

1480-1481 Jehan CHINOIR. — Robert CHOILLY.

1484-1491 Jehan CHINOIR. — Robert CHOILLY.

1495-1496 Jehan CHINOIR le jeune. — Hubert CAUCHON.

1497-1502 Jehan CAUCHON. — Hubert CAUCHON.

1504-1505 Jehan CAUCHON. — Oudart NOËL.

1505-1511 Remy CHEVALIER. — Oudart NOËL.

1513-1514 Guillaume MOET. —Nicolas VIEILLART.

1516-1517 Martin CHUFFET. — Jacques LESCOT.

1517-1518 Philippe MOET l'aîné. — Nicolas VIEILLART.

1518-1523 Remy CHEVALIER.—Nicolas VIEILLART.

1523-1524 Nicolas JACQUEMIN. — Nicolas VIEILLART.

1524-1525 Nicolas NOËL. — Nicolas VIEILLART.

1525-1526 Philippe MOET. — Nicolas VIEILLART.

1526-1529 Nicolas VIEILLART. — Nicolas CHINOIR.

1529-1534 Gérard LE FLORINIER. — Nicolas CHINOIR.

1534-1536 Nicolas AUBERT. — Nicolas BÉGUIN.

1537-1538 Guillaume de RONNAY. — Nicolas AUBERT.

1538-1541 Guillaume de RONNAY. — Thomas CHARDON.

1541-1542 Nicolas AUBERT. — Thomas CHARDON.

1542-1543* Nicolas AUBERT. — Nicolas CHINOIR.

1543-1545 Germain FLORINIER. - Nicolas CHINOIR.

1545-1547 Nicolas CHIERTEMPS. — Nicolas CHINOIR.

1547-1548 Nicolas AUBERT. — Nicolas CHINOIR.

1548-1549 Oudard BACHELET. — Nicolas CHIERTEMPS.

1549-1550 Oudard BACHELET. — Jehan COCQUILLART.

1550-1551 Oudard BACHELET. — Claude VAUCHELET.


— 290 —

1551-1552 Oudard BACHELET. — Pierre DORIGNY.

1552-1553 Claude VAUCHELET. — Pierre DORIGNY.

1553-1554 Oudard BACHELET. — Philippe FRIZON.

1554-1555 Nicolas NOËL l'ainé. — Philippe FRIZON.

1555-1556 Robert BOURDON. — Philippe FRIZON.

1556-1557 Robert BOURDON. — Nicolas FRIZON.

1557-1558 Nicolas FRIZON le jeune. — Jacques HURTAULT.

1558-1559 Nicolas FRIZON le jeune. — Antoine MOREL.

1559-1561 Nicolas FRIZON le jeune. — Guillaume CHIERTEMPS.

1561 1564 Henri BACHELET. — Oudard NOËL.

1564-1565 Jehan RAINSSANT, — Oudard NOËL.

1565-1566 Jehan RAINSSANT. — Jérôme NOËL.

1567-1568 Jehan RAINSSANT. — Jérôme NOËL.

1568-1569 Thierry FRÉMIN. — Jérôme NOËL.

1569-1570 Jacques GODINOT. — Jérôme NOËL.

1570-1574 Jacques GODINOT. — Claude MOTHE l'ainé.

1575-1576 Jacques GODINOT. — Henri BAZIN.

1577-1578 Jacques GODINOT. — Simon CHIERTEMPS.

1578-1579 Claude CHARPENTIER. — Nicolas DUBOIS.

1579-1580 Claude CHARPENTIER. — Jacques ROLAND.

1580-1581 Claude CHARPENTIER — Henri BAZIN.

1581-1584 Jean BLERVACHE l'ainé. — Nicolas BACHELET.

1584-1587 Nicolas DORIGNY. — Gérard FRIZON.

1587-1588 Nicolas DORIGNY. —Simon COLBERT.

1588-1589 Jehan BAILLET. — Simon COLBERT.

1589-1593 Jehan MARLOT. — Oudart BACHELET.

1593-1594 Symon COQUEBERT. — Jean LEGAY.

1594-1595 Drouin BEUVRY. — Jean LEGAY.

1596-1597 François LEGAY. — Pierre CORDIER.

1597-1598 François LEGAY. — Jehan ROGIER.

1598-1599 François LEGAY. — Nicolas CHAALLONS.

1599-1600 François LEGAY. — Nicolas CHAALLONS.

1600-1601 Nicolas COQUEBERT. —Nicolas'CHAALLONS.

1601-1602 Nicolas COQUEBERT. — Nicolas THIÉRY.

1602-1604 Thiery COQUEBERT l'ainé. — Nicolas COQUEBERT.


- 291 —

1604-1605 Guillaume MARLOT. — Jean ROLAND le jeune.

1605-1606 Jean FRIZON le jeune. — Jean ROLAND l'ainé.

1606-1607 Garlache SOUYN. — Jean ROLAND le jeune,

1607-1609 Garlache SOUYN. — Lancelot LESPAGNOL.

1609-1611 Garlache SOUYN. — Henry COQUEBERT.

1611-1612 Charles COQUEBERT. — Henry COQUEBERT.

1612-1613 Nicolas DORIGNY. — Jean CLOQUET.

1613-1614 Drouyn BAROIS. — Guillaume COLBERT.

1614-1615 Nicolas COQUEBERT. — Drouyn BAROIS.

1616-1617 Nicolas LE CLERC — Pierre BOULET.

1617-1618 Symon HUSSON. — Nicolas LE FONDEUR.

1618-1619 Nicolas LE CLERC. — Charles MOTHE.

1619-1620 Raoul COPILLON. — Nicolas LE CLERC

1620-1621 Claude LE LARGE. — Jean AUGIER.

1621-1622 Claude LE LARGE. — Jacques MAUPINOT.

1622-1623 Raoul COCQUAULT. — Philippe NOËL.

1623-1625 Raoul COCQUAULT. — Henry JOSSETEAU.

1625-1626 Charles DUUHEMIN. — Henry JOSSETEAU.

1626-1627 Guillaume VISCOT. —Henry JOSSETEAU.

1627-1628 Guillaume VISCOT. — Jean COQUEBERT le jeune.

1628-1629 Guillaume VISCOT. — Pierre de LAVAL.

1632-1633 Gérard RAINSSANT. — Rémi de LAVAL.

II.

Liste des Chapelains de Saint Ladre aux hommes.

HUE Avant 1236.

Jehan RICHART En 1349.

Pierre d'ARCHEs 1364-1369.

MAURY 1370. Se trouve en 1392.

Jean MAYNART En 1408. Mort en 1416.

Nicolas ARNOUL.- 1416. Mort en 1418.

Pierre HONORÉ 1418-1420.

Pierre SAUVAGE Août 1420.


— 292 —

Pierre GRANTCOLIN 1420. Se trouve en 1425.

Nicole LE VACHER Présenté en 1425.

Nicole LE GILEREL Présenté en 1426.

Renaud QUINET De 1427-1435.

Jean LEQUATRE DE BACONNES .. 1435-1437.

Jean DOYNET 1447. Mort en 1457.

Mile DU MOLINET Présenté en 1457-1471.

Jacques de THUISY Présenté en 1471-1472.

Mile DU MOLINET 1472-1491.

Jacques de THUISY 1491-1492.

Thibaut GOULART 1492-1528.

Antoine DEVAULX 1528-1552.

Nicolas BLOUYN 1552-1558.

Valentin CATHIER 15 octobre 1558-1569.

Florent GALLET 1569-Août 1588.

Etienne VAULTRIN Septemb. 1589-Mars 1590.

Jean CAMUS 1590-1596.

Jean DE GOMMONT Février 1596-Sept. 1596.

Nicolas BOUY Sept. 1596-Janvier 1624.

Thomas PARENT 1624-1633.

III.

Liste des Chapelains de Saint Ladre aux femmes.

Hue LHERMITTE 1320.

Jean PENTOUF Mort en 1326.

Renaut FREMERY Présenté en 1326.

Philippe DE RUEI Présenté en 1340.

Nicolas DE RUEL Présenté en 1341.

Renaut FREMERY 1354-1357.

Mauseot PENTOUF 1361.

Jean PENTOUF 1362. Mort en 1367.

Thibaut MOUSSE Présenté en 1367.


- 293 —

Maître DENIS . Présenté en 1370.

Gérard BAYEN Présenté en 1382.

Maître DENIS 1388.

Huet LABARBE 1412-1423.

Jean BRAUCHE dit CHUREL 1424-1430.

D. JACQUET DE TREMERY 1431-1432.

Jean PETITQUEUX En 1433 et 1434.

Remy FAUCHOT 1436-1437.

Jean VIGOUREUX Mort en 1450.

Jean LEBRUN 1450.

Jean CUCHERI Présenté en 1450.

Jean DOYNET Mort en 1457.

Jean COQUAULT 1457.

Mile DU MOLINET 1457.

Hugues OLIVIER 1464.

André VIEZ Mort en 1486.

Gérard PORJON 1486-1489.

Jean COLOMB 1489. Mort en 1492.

Augustin MOET 1492.

Guillaume CAUCHON. 1492.

Pierre CAMUS 1521-1570.

Jean PETIT 1581-1606.

Bonaventure CACQUET 1606.

Claude LESCAILLER 24 juin 1606-1633.



TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION

Pages

Les archives de la léproserie : historique et répartition actuelle i

État de conservation des archives, pertes (p. i) ; dépôt à la Loge de l'Échevinage (p. n) ; inventaire de 1411-1412 (p. ii-in) ; classement et transport de titres à Saint-Pierre-le-Vieil et à SaintDenis (p. HI-IV) ; transport à l'Hôpital général et inventaire de 1652 (p. iv-v) ; inventaires de 1704, 1750 et 1854 (p. v) ; répartition actuelle des documents au dépôt de l'Hôpital général (p. vvi) et au dépôt des Archives communales (p. vi-vm) ; autres sources utilisées pour ce travail (p. vm-ix).

CHAPITRE I.

Pages

La léproserie du XIIe au XIVe siècle 1

Origine; le plus ancien document (1146) (p. 1) ; hypothèse sur la création (p. 2) ; prétention des échevins à la fondation (p. 3) ; droit des archevêques au Xlt" siècle (p. 4-5) ; théorie de Bidet sur les droits de l'Échevinage (p. 5-6).

Privilèges de la léproserie (p. 6) ; protection du Saint-Siège sur la personne, les biens, la chapelle des lépreux (p. 7-9) ; absence de donations royales (p. 9); lettres de sauvegarde (p. 10) ; donation de bois par Guillaume de Champagne (p. 10-11); fondation de la foire de Reims (p. 11-12); constitution d'une rente sur les changes, puis sur les moulins (p. 12-13).

Formation du patrimoine (p. 13); donations de particuliers au xii" siècle (p. 14); inspirations diverses des libéralités (p. 15-16); acquisitions par dons et achats (p. 16-18); développement de l'enclos (p. 18); contestation avec l'abbaye de Saint-Remi (p. 19).

CHAPITRE II.

Le régime intérieur de la léproserie, du XIIe au XIVe siècle 20

Aspect et description de Saint-Ladre aux hommes (p. 20-23).


— 296 -

Le personnel sain (p. 23); le maître (p. 23-24); les proviseurs (p. 26-27); le chapelain des hommes (p. 27); le chapelain des femmes (p. 27-28); les convers et converses (p. 29); procès du « donné » Evrard (p. 29-30); la règle de la léproserie (p. 30-31); devoirs du personnel (p. 31-32) ; exploitation du domaine (p. 32-34) ; les servantes et le portier (p. 34-35). Les frères lépreux : caractère religieux de la communauté (p. 35-36). Saint-Ladre aux femmes (p. 37). Transformation du régime intérieur au xive siècle et « laïcisation » de l'hôpital (p. 37-40).

CHAPITRE III.

Histoire de la léproserie du XIVe au XVIe siècle.. 41

La léproserie pendant la guerre de Cent ans (p. 41); le siège de Reims de 1359 (p. 41-42); démolitions à Saint-Ladre aux hommes et aux femmes (p. 42-44) ; sort de la malade (p. 44) ; reconstructions (p. 45-46) ; la léproserie au xV> siècle (p. 46-47j ; la Ligue (p. 47); démolitions de 1591-1592 (p. 48-49).

CHAPITRE IV.

La léproserie au XVe et au XVIe siècles. La fortune de la maladrerie; description des enclos. 50

Analyse de l'inventaire de Raoul d'Hautvillers au xme siècle (p. 50); cens (p. 50-51); revenus des maisons et fermes (p. 51-52); dîmes et redevances diverses (p. 52-53). — Etat du patrimoine au xve siècle (p. 53); propriétés sises à Reims (p. 53-54); propriétés hors de Reims (p. 54) ; fermes (p. 55-56) ; cens (p. 56) ; dîmes et rentes diverses (p. 57) ; recettes extraordinaires (p. 57) ; legs et offrandes (p. 58-59).

Description des maladreries (p. 59) ; leur situation écartée (p. 59-60); difficulté de cette description (p. 61). — Saint-Ladre aux hommes (p. 62-69); l'église (p. 69); historique (p. 69-70) et description (p. 70-75); mobilier et trésor (p. 75-78); les bordes ou chambres des malades (p. 78-79) ; leur mobilier (p. 79-81). — Saint-Ladre aux femmes (p. 81); rapports avec l'abbaye de SaintRemi au xme siècle (p. 81-82) ; description de l'enclos (p. 82-83) > la chapelle (p. 83-84).


— 297 —

CHAPITRE V.

La léproserie au XVe et XVIe siècles : les gouverneurs, l'administration 85

Les échevins-gouverneurs (p. 85) ; rapports avec l'Échevinage (p. 86); pouvoirs et co-responsabilité des gouverneurs (p. 86-88); pension (p. 89); droits seigneuriaux de la léproserie (p. 90-92 ; comptabilité des gouverneurs (p. 92-94); cens, dîmes, droits de nouveaux acquêts et taxe du sacre dûs par l'hôpital (p. 94-98) ; confusion des finances de la léproserie et de l'Échevinage (p. 98-99).

Administration du domaine (p. 99); faire-valoir et amodiation (p. 99-100); le domaine de Marcelot (p. 100-102); la Terre Saudée (p. 102) ; affermage des dépendances des maladreries (p. 103) et des pressoirs de Prouilly et d'Ormes (p. 103-105); conservation du domaine et administration courante (p. 105); sauvegardes, visites et adjudications (p. 106-108).

Procès à propos du domaine (p. 108) ; affaire de la rente des cent setiers contre les archevêques (p. 108-110); procès avec l'Hôtel-Dieu (p. Hl), Saint-Pierre-les-Dames et Saint-Remi (p. 111-112); procès divers (p. 112-114). — Conclusion : bonne gestion des gouverneurs (p. 114-116).

CHAPITRE VI.

La léproserie aux XVe et XVI" siècles : les chapelains ; le convers 117

Le chapelain des hommes (p. 117); présentation et nomination (p. 117-118) ; fonctions (p. 118); habitants du faubourg SaintEloi et orfèvres (p. 119-120); pension du curé (p. 120); casuel (p. 121-122); procès du curé contre les échevins et les orfèvres (p. 122); avantages divers (p. 122-123).

Le chapelain des femmes (p. 123); présentation et nomination (p. 124-125) ; non-intervention de l'archidiacre (p. 124-125) ; avan-' tages et pension (p. 126-127).

Le convers (p. 128); le « prouvendier » au xive siècle (p. 128); institution du convers (p. 128-129); habitation, gages et avan-


— 298 —

tages divers (p. 129-130); fonctions (p. 130-131); transformation de sa condition (p. 131-132).

CHAPITRE VII.

La léproserie aux XVe et XVIe siècles : les lépreux ; réception et régime intérieur 133

I. —Procédure d'entrée (p. 133); commencement du «procès » (p. 133-135); choix de médecins (p. 135); visite médicale (p. 135); rapports médicaux et caractères de la lèpre (p. 136-137); honoraires des médecins (p. 137-138); difficultés de l'examen médical et contre-visites (p. 138-139); « expulsion » du lépreux (p. 140); conditions d'entrée (p. 140); « prise » de la maladrerie (p. 140142) ; lépreux de la banlieue rémoise (p. 142); théorie du Liber practicus de consuetudine remensi (p. 142-144); enquête sur le lieu de naissance du lépreux (p. 143); exceptions à l'exclusion des nonRémois (p. 143-144); nombre des lépreux reçus (p. 144-145); détermination des charges et avantages du lépreux (p. 145); droit do bienvenue (p. 146-147); cérémonie de la « separatio >i (p. 147); la cérémonie selon Martène (p. 148-149); la cérémonie à Reims (p. 149-150); lecture des défenses (p. 150-151); serment du lépreux (p. 151-152); application de ces formalités (p. 153); mises en liberté exceptionnelles (p. 154).

II. —Régime intérieur (p. 154); indépendance relative (p. 155); la journée du lépreux (155-150); sa basse-cour et son jardin (p. 156-157); son costume et celui desservantes (p. 158-159); la famille des lépreux (p. 159) ; mariage p. 159-160) ; les servantes (p. 160-161); traitement (161-162); mesures hygiéniques (p. 162); règle de l'isolement (p. 163); exceptions à cette règle (p. 164-165'; conduite du lépreux hors de la maladrerie (p. 165); discipline et moralité (p. 165-168) ; la révolte de 1528 (p. 168) ; pénalités (p. 168-169); pension (p. 169-171); « pitances » (p. 171-172); avantages accessoires (p. 172); produits du jardin (p. 172-173); pains prébendes (p. 173-174':; quêtes (p. 174-175); règlement de 1534 (p. 175-176); devoirs religieux (p. 176-177); présence des lépreux aux offices (177-178); les fêtes de Saint-Eloi (p. 178-181); sacres royaux (p. 181-182); mort du lépreux (p. 182); enterrement (p. 183); sépulture (p. 183-184); capacité juridique (p. 184-187);


— 299 —

droit de la léproserie sur les meubles du lépreux (p. 187-189); rachat des successions (p. 190); la léproserie de Saint-Marc-à.Çachot (p. 190-191) ; lépreux payants (191-192); lépreux privilégiés (p. 192); régime des religieux lépreux (p. 192-194); mesures contre les a forains » (p. 194-195).

CHAPITRE VIII.

La léproserie et l'archevêque 196

Le droit commun (p. 196); autorité des évêques sur les hôpitaux (p. 196); intervention des échevins dans la léproserie (p. 198-199) ; reconnaissance de cette autorité parles archevêques (p. 199-200) ; efforts des archevêques pour maintenir leurs prérogatives (p. 200-202); permanence du conflit (p. 202-204); lutte contre le cardinal de Lorraine (p. 204) ; le juge des lépreux (p. 205-207); conséquences du conflit (p. 207).

CHAPITRE IX.

La léproserie et le pouvoir central. La léproserie au XVIIe siècle 208

Développement du contrôle royal sur les hôpitaux (p. 208-210) ; visite de Mathieu d'Escouchy (p. 210-212); intervention du Grand Aumônier (p. 213-214) ; contrôle financier de la Chambre de la charité et des Chambres de réformation (p. 214-217); règlement du Grand Aumônier en 1549 (p. 217-218); résistance des gouverneurs au sujet des pensions et du nombre des pensionnaires {p. 219-222) ; admission de non-Rémois (p. 222-223) ; pensionnaires non-résidants (p. 224) ; servantes de lépreux (p. 225) ; solliciteurs des lépreux (p. 225-228) ; transformation de la léproserie en léproserie régionale (p. 228-229); désordre intérieur (p. 229-231); relâchement de la discipline (p. 232-233) ; disparition de la lèpre (p. 233-234).

CHAPITRE X.

La fondation de la Maison de charité et la fin de la léproserie 235

Fondation des hôpitaux généraux (p. 235) ; réorganisation de la taxe des pauvres (p. 235-236) ; création de la Maison de charité


— 300 —

(p. 237-238) ; application au nouvel hôpital de la taxe des pauvres (p. 238); union du collège des Ecrevés (p. 238) et des chartreries (p. 238-239) ; refus d'union (p. 239) ; transaction relative à l'hôpital Saint-Antoine (239-240); résistances de l'Échevinage à l'union de la léproserie (p. 241-242); premières concessions (p. 242); clauses de l'union (p. 242-243; ; fonctionnement de la Maison de charité (p. 243); prétentions de Mathurin Blouyn et de Nicolas Binot à l'administration de la léproserie (p. 244-245) ; l'édit d'union de 1672 (p. 245-246); la déclaration du 24 mars 1674 (p. 247); administration de la léproserie par l'Hôpital général (p. 247) ; les derniers lépreux (p. 248) ; extinction des titres des chapelles Saint-Eloi et Sainte-Anne (p. 248-249).


TABLE DES NOMS

Abbeville (Somme), 141.

Acy (Ardennes), 113.

Alain de Condé, 16.

Alexandre III, 7, 12, 185.

Alleux (Les) (canton du Chesne, arr. Vouziers, Ardennes), 56, 101.

Almanaeh historique de la ville de Reims, 70, 238, 239.

Ambly (Gérard d'), v. Gérard.

Ambraine (C. d'), v. Dambraine.

Amiens (Somme), 157, 198.

Angers (Maine-et-Loire), 149.

Arbalète (rue de 1'), 56.

Arbois de Jubainville (D), Histoire des ducs et comtes de Champagne, 198.

Arches (Pierre d'), v. Pierre.

Arcueil (Seine), 141.

Ardennes (département des), 14.

Arles (Bouches-du-Rhône), 42, 197.

Arnoul (Nicolas), chapelain, 291.

Arnoul (Poncelet), peintre, 280.

Arnoul Boutri, 16.

Assises de Jérusalem (Les), 159.

Aubert, fils de Sebille, 22.

Aubert, curé de S'-Hilaire, 112.

Aubert (Nicolas), gouverneur, 289.

Aubert le Porcher, 185.

Aubilli (Thiébautd'), v. Thiébaut.

Auboncourt (cant. Novion-Porcien, arrond. Rethel, Arden. nés), 18, 24, 57.

Aubri Le Crevé, 16, 238.

Aubry (Commin), gouverneur, 288.

Audez, conseiller de ville, 240.

Augier (Guillaume), 91.

Augier (Jean), gouverneur, 291.

Augnstins, 138, 143, 193.

Anltry (Guy d'), v. Guy.

Ausson, 94.

Ausson (Jehan d'), v. Jehan.

Aussy (Jean d'), v. Jean.

Autun (Saône-et-Loire), 152.

Avenel (G. d'), Histoire économique de la propriété, 116, 171.

Bachelet (Henri), gouverneur,

290. Bachelet (Nicolas), gouverneur,

290. Bachelet (Oudard), gouverneur,

289, 290. Bacquenois (N.), imprimeur, 149. Baignoner (Lieu dit En), 16. Baillet (Jehan), gouverneur, 290. Bailli (Laurent), lépreux, 161. Baillot (Martin), 134. Bailly (Luc), 285, 286. Bailly (Raulin), 283. Barbacane (maison de la), 54,

62. Barbâtre (Rue), 16. Barbeau (Maison du), 90. Barbelet, maçon, 49, 82. Barberini (Cardinal Antonio),

Grand Aumônier, 244.


— 302 —

Barbet (Nicolas), maçon, 48. i Barbet (Pierre), archevêque, 19,

200. Barbette (Thomas), lépreux, 162. Barbette (Thierry), échevin, 258. Barbier (Gobiu), v. Gobin. Barois (Drouyn),gouverneur,291. Baudier (Frère), 34. Baudon Erart, 58. Bauduin Cauchon, 22. Bauduyn (Eslève), v. Estève. Baudouin de Vendières, 113. Baussant Vinoyen, 130. Bayen (Gérard), chapelain, 293. Bazin (Henri), gouverneur, 114,

290. Bazin (Robert), chapelain, 249. Bazoches) Roger de), v. Roger. Beaucaire (Gard), 42. Beaufuy (com. Voncq, cant. Altigny,

Altigny, Vouziers, Ardennes),

4,8, 10, 14, 33, 34, 41, 52, 55,

56, 97, 113, 115, 247. Beaumanoir, Coutumes, 141, 196

198. Beaumets (Thomas de), v. Thomas. Beauvais (Oise), 221. Beauvoisis, 184. Beguyn (Jehan), licencié en lois,

lépreux, 155, 166. Béguin (Nicolas), gouverneur,

289. Béranger (Henri), v. Henri. Berger (E.), Registres d'Innocent

IV, 7, 8. Berger (Jehan), procureur de

l'Échevinage, 286. Bergier(N.), Le Bouquet royal, 182. Berlin (Allemagne), 163.

Bernard de Gordon, médecin,

283. Bertrand, vani.er, 66. Bertrand Bricart, gouverneur,

209, 261, 288. Bertrand Lefèvre, 30. Berzieulz (Thiebaut de), v. Thiebaut.

Thiebaut. v. Bezannes. Bétheniville (cant. de Beine, arr.

Reims), 113. Beuvry (Drouin), gouverneur,

286, 290. Bezannes (cant. et arr. Reims),

52, 57. Bezannes (Jehan de), v. Jehan. Bezannes (Oudinet de), v. Oudinet.

Oudinet. (Philippe de), v. Philippe. Bezannes (Pierre de), v. Pierre. Bidet, Mémoires, 5, 57, 70, 84,

119, 177, 208. Bienfait (Rue), 62. Binot (Nicolas), chevalier de

Saint-Lazare, 245-246. Biaise (cant. et arr. Vouziers,

Ardennes), 52, 57. Blancpignon (Pierre),échevin, IV. Blencourt (Nicolas de), médecin,

282, 284, 285. Blervache (Jean), gouverneur,

290. Blesis (Johannes de), v. Jean. Blois (Loir-et-Cher), 11. Blois (Louis, comte de), 11. Blondel (Jean), lépreux, 160. Blondelet, lieutenant de cava« lerie, 247. Blouyn (Mathurin), v. La Rivière.


— 303 —

Blouyn (Nicolas), chapelain, 118,

292. Bofuy, v. Beanfny. Bois-Hubàult (lieudit), 54, 94. Boiteux, lépreux, 197. Boniface VIII, 26, 201, 257. Bons Malades (Chemin des), 61,

62. Bonus, officiai de l'archidiacre,

253 Bordeaux (Gironde), 155. Bordelot (Raoul), 255. Boucherie (Grande), 54. Bonchet (G.), Serées, 66,137,232. Boulet (Pierre), gouverneur, 291. Boulet (Pierre), notaire; 211,273,

274. Bourbon (Louis de), duc de Montpensièr,

Montpensièr, Bourbourg (Nord), 154. Bourcq (cant. et arr. Vouziers,

Ardennes), 223, 224, 231. Bourdon (Robert), gouverneur,

290. Bourgeois (Hugues), archidiacre,

253. Bourgeois (Jean), chirurgien, 138,

287 (?). Bourgeois ( Jehan), côrdelier, 180. Bourgnet (Jean), juge des lépreux, 206. Bours (Robert de), dit Peuboir,

lépreux, 144. Boutaric, Actes du Parlement de,

Paris, 11, 13, 198. Boutri (Arnoul), v. Arnoul. Bouverie (Maison de la), 62. Bouy (cant. Suippes, arr. de Châlons-sur-Marne),

Châlons-sur-Marne), Bouy (Nicolas), chapelain, 292.

Brachet (Arnoul), lépreux, 192.

Brauche (Jean), dit Churel, chapelain, 293.

Bresche (Robert de), v. Robert.

Bretagne, 155.

Bretagne (François II de), 158.

Bricart (Bertrand), v. Bertrand.

Briffaut (Jean), avocat, 140.

Brissart-Binet, Histoire de la ville de Reims, 46.

Brunel, aumônier du roi, 210, 271, 272.

Bruyères-sous-Laon (Aisne), 198.

Buart (Jean), lépreux, 186.

Bncy (Simon Matifas de), v. Simon.

Bulliot, Séquestration des lépreux dans le diocèse d'Aulun, 152.

Bureau de miséricorde, 238.

Buret, Le gros mal du moyen-âge et la syphilis actuelle, 136.

Burgondia (Milo de), v. Milon.

Buvignier, Les maladreries de la cité de Verdun, 135.

Cachette (Thomas), 48.

Cacquet (Bonaventure), chapelain, 293.

Cahors (Lot), 198.

Caillart (Jean), gouverneur, 288.

Calais (Pas-de-Calais), 141.

Calamart (Claude), 228.

Calvomonte (Gerardus de), v. Gérard.

Camus (Jean), chapelain, 292.

Camus (Pierre), chapelain, 126, 293.

Cardinal (P.), couvreur, 69.

Careyo (Petrus de), v. Petrus.

Carmes, 180.


— 304 —

Carré (Gille), lépreux, 221, 222.

Carrouge (Rue du), 15.

Cartier (Claude), chirurgien, 92,

284-285. Cartier (Gabriel), chirurgien,

283-284. Carzy (Thierry), curé de SaintJean, 193. Catalogue des actes de François

1", 210, 213. Cathier (Valentin), chapelain,

118, 121, 292. Cattin (Andrieu), lépreux, 262. Cauchon (Bauduin), v. Bauduin

Cauchon. Cauchon (Guillaume), chapelain,

126, 293. Cauchon (Hubert), gouverneur,

289. Cauchon (Jacques), gouverneur,

87, 289. Cauchon (Jehan), médecin, gouverneur, 162, 289. Cauchon aîné (Jehan), substitut

du procureur du Roy, 272. Cauchon (Laurent), lieutenant

du Bailli de Vermandois, 215. Cauchon (Nicolas), 58. Cauchon (Regnault), chapelain,

126. Cauchon (Thomas), gouverneur,

289. Cauchon (Voisin), v. Voisin. Cauroy 'cant. liourgogne, arr.

Reims), 52. Célestin III, 7, 13, 09, 110, 111. Collier, graveur, (il, 82. Cérès (Quartier), 48. Cernay (cant. de Beine, arr.

Reims), 44, 54.

Chaallons (Nicolas), gouverneur,

290. Chacre (Porte), 14, 57, 191, 192.

v. aussi Saint-Marc-à-Cachot. Chahureau (Nicolas), solliciteur

de lépreux, 227. Châlons (Marne), 224, 233. Châlons (Jean de), v. Jean. Châlons-sur-Vesle (cant. Villeen-Tardenois,

Villeen-Tardenois, Reims), 140. Champagne (Thibaut V de), 18. Champfleury (cant. Verzy, arr.

Reims), 16,142,221. Champfleury (Chemin de), 102. Chapelains, 15, 56. Chapitre de Reims, 57, 61, 62,

81, 104, 109,114,141,142,238. Chardon (Jehan), bailli, 272. Chardon (Thomas), gouverneur,

289. Charles (?), roi de France, 208. Charles V, 10. Charles VI, 208, 262. Charles VII, 182, 208. Charles VIII, 10. Chariot (Nie), 92. Charpentier (Claude), gouverneur, 290. Charpentier ( Jehan ), échevin,

iv, 272. Chartreries, 95, 235, 239. Chartres (Eure-et-Loir), 35, 164,

196, 235. Chartres (Renaud de), v.

Renaud. Chartres (Robert de), v. Robert. Chastelain (Dom P.), Journal, 63,

84, 249. Chastelains (Rue des) (rue de

La Salle), 57.


30o

Chastillon (Claude de), topographe, 71, 74, 84.

Châtel (Guy du), v. Guy.

Châtillon (Gaucher de), v. Gaucher.

Chativiele (Rue), 17.

Chaudiaus (Wiard), v. Wiard.

Chaumont (Gérard de), v. Gérard.

Chaumont (Jacques de), v. Jacques.

Chaumuzy (cant. Ville-en-Tardenois, arr. Reims), 11.

Chaussetier (Simonnet Le), v. Simonnet.

Chauvillet (Jean), 90.

Chevalier (Rémi), échevin, 258.

Chevalier (Remy), gouverneur, 140 (?), 162, 289.

Chevrerondel (W.), 183.

Chiertemps (Guillaume), gouverneur, 290.

Chiertemps (Nicolas), gouverneur, 289.

Chiertemps (Simon), gouverneur, 290.

Chinoir (Jehan), gouverneur, 211, 272, 273, 289.

Chinoir (Nicolas), gouverneur, 289.

Choilly (Robert), gouverneur, iv, 211, 272, 273, 289.

Chopin (Henri), lépreux, 224.

Chrestien (Jehan), 169.

Chuffet ( Martin ), gouverneur, 98, 206, 289.

Chuffilly (cant. Altigny, arr. Vouziers, Ardennes), 17. — V. Raoul.

Churel, v. Brauche (Jean),

Cibrario (H.) Précis des ordres do

Saint-Lazare et Saint-Maurice,

137. Citreyo (Petrus de), v. Pierre. Clairmarais, 54, 56, 94. Clairmarais (Religieuses de), 42. Clément VI, 144. Clément (P.) Lettres, instructions

et mémoires de Colbert, 216. Clerpoint, 135. Cloche (Maison de la), 56. Cloquet (Jean), gouverneur, 291. Cochard de Loivre, échevin, 258. Cochelet, v. Renaud. Cochinart (Raulin). v. Raulin. Cochonet, fils de Thierri Fripier, 15. Cocquault (Raoul), gouverneur,

291. Cocquillart (Jehan), gouverneur,

289. Cocu (Etienne), 14. Coëgny (de), conseiller de ville,

246. Colars de Bay, chevalier, 55. Colars Frizon, maître, 288. Colart Le Teste, 43. Colard Troycé, échevin, 258. Colbert (Guillaume), gouverneur,

291. Colbert (Jean-Baptiste), 216. Colbert (Nicolas), drapier, 216. Colbert (Simon), gouverneur,

290. Colesson Richier, lépreux, 188.

.262. Colin, graveur, 84. Colomb (Jean), chapelain, 126,

293. Combarieu (L.), v. Lacombe (P,).


— 306 —

Commin (Aubry), v. Aubry. Compiôgne (Oise), 210, 271,

277. Condé (Alain de), v. Alain. Copillon (François), vi. Copillon (Raoul), gouverneur,

291. Coquault (Jean), chapelain, 293. Coquebert (Charles), gouverneur, 291. Coquebert (Henri), gouverneur,

291. Coquebert jeune (Jean), gouverneur, 291. Coquebert (Jehanne), 115. Coquebert (Nicolas), gouverneur,

290, 291. Coquebert (Symon), gouverneur,

290. Coquebert (Thiery), gouverneur,

290. Coquillart (Guillaume), 140. Coquillart (Pierre), lépreux,

134. Corbeil (Seine-et-Oise), 37. Corcelanceio, v. Courlancy. Cordelières, 105. Cordeliers, 57, 180. Cordier, ( Pierre ), gouverneur,

290. Corée, v. Guichard. Cormicy (cant. Bourgogne, arr.

Reims), 44. Cormontreuil (cant. et arr.

Reims), 83. Cornay (cant. Grandpré, arr.

Vouziers, Ardennes), v. Hermengarde.

Hermengarde. (Méline), v. Méline. Costart (Jean), cirier, 144.

Coulommes (cant. Ville-en-Tardenois,

Ville-en-Tardenois, Reims), 52. Courcelles (Marguerite), veuve

de Claude Lamequin, 225. Courcelles (Robert de), v. Robert. Courlancy, 45. Courlancy (Rue de), 63. Courlancy (Gui de), v. Guy. Couronne (Maison de la), 56. Courselles (Robert de), v. Robert. Courtagnon (cant. Châtiilon-surMarne,

Châtiilon-surMarne, Reims), 52. Courtagnon (Gile de), v. Gile. Courtenai (Robert de), v. Robert. Courville (cant. Fismes, arr.

Reims), 200, 260. Cousin (Jehan), gouverneur, 288. Coussemaker (L. de), Maison des

lépreux les Bourbourg, 154. Coutances (Manche), 193. Couture, 112. Craon (Jean de), v. Jean. Crépy- eu -Valois, (arr. Sealis,

Oise), 201. Crevé (Aubri Le), v. Aubri. Crevisse (Maison de la), 135. Croc en fer (Rue), 53, 95. Crochet (Pierre), gouverneur,

288. Croisié (Deniset), v. Deniset. Cucheri (Jean), chapelain, 293. Cumiéres (Lucyane de), v.

Lucyane. Curvilla, v. Courville.

Dambraine (Claude), médecin,

282, 284, 287. Dargent (Jacquette), lépreuse,

137, 139, 282-284. Dartois (Jean), lépreux, 232.


--ao1?1"-

Daubigny (D.), 183.

Daudet, graveur, 63.

Davoudet, lépreux, 22, 162.

Day (Colars de), v. Colars.

Déclaration du roy en faveur des hospitaux généraux et hostelsDieu du vingt-quatrième mars 1674, 247.

Delabarre (Jean)., lépreux, 168.

Délabre (Guillaume), 103.

Delacroix (Gérard), 48.

Delannoy (A.), Notice historique des divers hospices de la ville de Tournay, 24.

Delisle (L.). Catalogue des actes de Philippe-Auguste, 11, 13.

Demaison (L.), Inventaire des meubles de Saint-Ladre en13S9, 20,21, 22,36, 76,180. — Inventaire-sommaire des Archives départementales antérieures à 4790. Marne, série G., vin. — Liste des meubles vendus après le décès' de Jean Doynet, chapelain de Saint-Eloi (1459), 92. V. aussi Givelet (Ch.)

Denifle (Le P. H.), Arnaud de Çervole, 42. — La désolation des églises, monastères et hôpitaux en France au milieu du XVe siècle, 47, 164, 165, 235.

Denis, chapelain, 293.

Deniset Croisié,censierde SaintLadre, 46.

Denisme (Jean), louvetier, 60.

Derieulx (Jehanne), chambrière, 281, 282.

Deschamps de Pas, Etablissements hospitaliers de Saint-Omer, 157, 164.

Deson (Raulin), lépreux, 161,

232. Devaulx (Antoine), chapelain,

292. Dichon (Antoine), lépreux à Romans, 24. Dieu-Lumière (Hôpital), 15, 42. Dijon (Côte-d'Or), 235. Dominicains, 193, 194. Donchery (Renaud de), v.

Renaud. Dorigny (Charles), 237. Dorigny (Claude), trésorier de

Notre-Dame, 237. Dorigny (Nicolas), gouverneur,

290, 291. Dorigny (Pierre), gouverneur,

290. Doynet (Jean), chapelain, 92,

123, 292, 293. Draveny (Pierre), 105. Droars Liserons, échevin, 258. Drouars d'Escry, 288. Drouault (R.), Comment finirent

les lépreux, 234. Du Cange, Glossarium, 128. Du Chastel (Pierre), Grand Aumônier, 214, 217, 278. Duchemin (Charles), gouverneur,

291. Duchénoy (A.), Les Enseignes de

Reims du XIVe au XVIIe siècle,

54, 56. Duchesne (F.), Histoire de tous

les cardinaux françois, 13, 52. Dufour (Jehan), lépreux, 156. Du Molinet (Baudenet), gouver

neur, 288. Du Molinet (Mile), v. Mile. Duplès Agier, Ordonnance de


- 308 —

l'hilippe - le - Long contre les lépreux, 152.

Dupressoir (Jean), lépreux, 218.

Durand de Maillane, Dictionnaire de droit canonique, 188, 197.

Durodié (F.), Etude sur la lèpre tuberculeuse et les léproseries fondées à Bordeaux et en Guyenne au moyen-âge, 155.

Ebal Rigaud, 14.

Ecrevés (Collège des), 238, 243.

Ecueil (cant. Ville-en-Tardenois, arr. Reims), 255.

Edicts, ordonnances et règlement sur l'administration des hôpitaux, 163, 215.

Edouard III, 41, 44.

Ellebaut (Jean), donateur, 58.

Eloi (saint), 68, 69.

Ennourée, lépreuse, 191.

Entre-Deux-Ponts, v. Vesle (Rue de).

Epernay (Faubourg d'), 69.

Epernay, (Marne), 136, 148, 164, 165.

Erars, v. Thomas.

Erart (Baudon), v. Baudon Erart.

Erart (Renier), maître, 288.

Escouchy (Mathieu d'), v. Mathieu.

Escry (Drouars d'), v. Drouars.

Escueil, v. Ecueil.

Escut de France (Maison de P. 90.

Esmein, Le mariage en droit canon, 159.

Espinas (G.), [Compte rendu de A. de LOISNE: La Matadrerie du Val-de-Montrcuil], 198.

Estève Bauduyn, 58.

Etienne de Turenne, chanoine

de Paris, 257. Evrard, donné, 29, 251 (?), 253.

Falaise (Calvados), 11.

Fauchot (Remy), chapelain, 293.

Faverolles (cant. Ville-en-Tardenois, arr. Reims), 32.

Faverosus (Vicus), v. Sainte•

Sainte• (Rue).

Ferons (Porte aux), 57.

Fillette (Jacq.), gouverneur, 289.

Fismes (arr. Reims), 46, 142.

Flancourt (com. Faverolles, cant. Ville-en-Tardenois, arr. Reims), 14, 16, 32.

Flandre (Louis de Maie, cte de', 10, 41.

Flandrine, veuve d'Aubri Le Crevé, 16.

Fléchambault, 49, 254, 255.

Fléchambault (Vincent de), v. Vincent.

Fleury, 263.

Floricourt (Jehan de), v. Jehan

Florinier (Germain), gouverneur, 289.

Florinier, v. Le Florinier.

Fontanon, Les Edicts et ordonnances des rois de France, 95.

Fontaine Rocquerelle La\ lieudit à Muire, 16.

Forge (Maison de la), 53.

Foulerie (Gile de La), v. Gile.

Foulquart (Jehan), procureur de l'Eclievinage, IV, 272, 273. — Mémoires, 181.

Fournet (Goberl), chanoine de Laon, 269.


— 309 —

Fournier, lépreux, 185. Fournier (Jehan), gouverneur,

288. FrançoisIer, 98, 210, 213,214,278. François (Person), lépreux, 153,

189. Flancklin (A.), Ecoles et Collèges,

179. Fremeri (Renaud), chapelain,

260, 292. Fremyn (Philippe), échevin, 99. Frémin (Thierry), gouverneur,

290. Frichambaut, v. Fléchambault. Fripier (Thierri), 15. Friqué (Jacques), lépreux, 92,

232, 233. Frizon, administrateur de l'Hôpital-Général,

l'Hôpital-Général, (?), 246, 247. Frizon (Colars), v. Colars. Frizon (Gérard), gouverneur, 290. Frizon jeune (Jean), gouverneur,

291. Frizon (Nicolas), gouverneur, 290. Frizon (Philippe), gouverneur,

290. Fumée (Jesson), v. Jesson. Fussicians (Le), 30.

Gallet (Florent), chapelain, 233,

292. Garin, 36.

Garlache Souyn, v. Souyn. Gaucher de Chatillon, capitaine,

42,44. Gaucher de Neuville, chanoine,

25, 112. Gauldret (François), 284. Gérardd'Ambly, juge des lépreux,

205.

Gérard de Chaumont, proviseur,

258.

Gérard (Nicolas), sergent de l'Echevinage, 286.

Gérardin, barbier, 154.

Germain (A.), De la charité publique et hospitalière à Montpellier au moyen âge, 154.

Gibour (Jehan), gouverneur, 288.

Gibre (Jehan), lépreux, 156, 164, 185.

Gile de Courtagnon, 17.

Gile de La Foulerie, maître, 201, 288.

Gile de Saint-Loup, clerc, 258.

Gillet (Claude), médecin, 138.

Girard (Nicolas), sergent de l'Echevinage, 282.

Giraud, Essai sur l'histoire du droit français, 184.

Givelet, Jadart et Demaison, Répertoire archéologique de l'arrondissement de Reims, 69, 71.

Gobert, chapelain, 117.

Gobin Barbier, maréchal, 192.

Godeffrin, 90.

Godet (Claire), veuve de Thomas de Paris, 115.

Godinot (Jacques), receveur de l'abbaye de Saint-Remi, 112.

Godinot (Jacques), gouverneur, 290.

Godinot (Nicolas), gouverneur, 96.

Gomart (Ch.), Etudes Saint-Quentinoises, 4, 136, 137, 183, 210.

Gometius, archidiacre, 28, 31, 124, 256.

Gommant (Jean de), chapelain, 292.


— 310 —

Gordon (Bernard de), v. Bernard. Gorgibus (P.), solliciteur des lépreux, 226. Goulart (Thibaut), chapelain, 292. Gouvion (Jean), quartenier, 134,

206, 266. Grammaire (Gui), 21, 22, 39. Grantcolin (Pierre), chapelain,

118, 292. Gravelle (Benoit de), gouverneur,

288. Gravelle (Jehan de), gouverneur,

269, 288. Grossaine (Hierosme), lieutenant,

278. Grossaine (Nicolas), gouverneur,

87, 289. Guelliot(D' 0.), 283, 284, 287. — Les thèses de l'ancienne faculté de médecine de Reims, 283. Guérard(B.), Cartulaire de NotreDame de Paris, 37, 196. Guérin (Edme), lépreux, 157. Guéron (Jean de), v. Jean. Gui, v. Guy.

Guichard Corée, échevin, 258. Guidault (P.), La léproserie de

Bourges, 137, 141. Guidi (Guido), 283. Guiffrey (J.), Nicolas lioucl, 2)5. Guillaume aux Blanches Mains, archevêque, 4, 6, 10, 12, 16, 24, 52, 97, 239. Guillaume de Trie, archevêque,

108. Guillaume de Vaus, 43. Guillemin ( Thomas ), lépreux ,

231. Guillette, lépreuse, 172. Guillouard, Elude sur la condition

condition lépreux au moyen âge, 184.

Guionne (Pierre de), v. Pierre.

Guiot, convers, 130.

Guise (Louis II de Lorraine, cardinal de), archevêque, 204.

Guy d'Aultry, 14.

Gui de Courlancy, 255.

Guy du Chatel, 14.

Guyenne, 155.

Guyenne, héraut du roi, 130.

Hacqueville (N. de), maître des comples, 150.

Hanin (Jehan\ lépreux, 221.

Harmand, Notice historique sur la léproserie de Troyes, 146.

Haton(Claude),'Mémo/resl84,197.

Haute ville (Jacques d"), v. Jacques.

Hautvillers (Raoul de), v. Raoul.

Hazart (Jehannin), 191.

Héliot, Histoire des ordres religieux, 245.

Helluin (Jacques), proviseur, 25.

Henri 11, 97, 107, 182.

Henri Béranger, 15.

Henri de France, archevêque, 12, 185.

Henry (E. ), La Réforme et la Ligue en Champagne et à Reims, 47.

Hensler (P. G.), \om abendiândischen Aussalze im Mittelalter, 136.

Herbert du Jard, donateur, 15.

Herbot (Pierre), lépreux, 140.

Hermengarde de Cornay. 14, 16, 33.

Herpelin (Jesson), v. Jesson.


— 311 —

Hervet (Simon), médecin, 137, 284, 285.

Heurday (Alain), seigneur d'Orme, 17.

Hirsch (A.). Diechronischen Infections- und Intoxications-Krankheiten vom historisch-geographischen Stand-punkte, 163, 234.

Hollander (H.), Die Medizin in der klassischen Malerei, 137.

Honoré (Pierre), v. Pierre.

Honorius 111, 7.

Hôpital général, iv, v, vi, vu, 235-249.

Horis (Pierre), gouverneur, 289.

Hôtel-Dieu, 10, 15, 52, 57, 110, 111, 123, 173, 174, 193, 194, 216, 238, 287.

Houel (Nicolas), 215.

Hue, chapelain, 27, 291.

Hue Lhermitte, chapelain, 124, 292.

Huet (Frère), 30.

Huet Labarbe, chapelain, 293.

Hugo Burgensis, v. Bourgeois.

Hugues Olivier, chapelain, 293.

Huguet, 280.

Huguet (Jehanne), servante, 160.

Hurtault (Jacques), gouverneur, 290.

Husson (Symon), gouverneur, 291.

Husson Petit, 158.

Hutin (Jehan), 261.

Igny (Abbé d'), 213. Image (Maison de 1'), 56. Innocent III, 13, 37. Innocent IV, 7, 19, 69, 141, 178, 199.

Isabelle, v. Ysabel. Isambert, Recueil général des lois, 198, 244.

Jacopin (Renaud), maire de Saint-Eloi, 91.

Jacquemin (Etienne), 87.

Jacquemin (Nicolas), gouverneur, 289.

Jacques de Chaumont, juge des lépreux, 134, 206.

Jacques d'Hauteville, 18.

Jacques de Thuisy, chapelain, 292.

Jacques de Vitry, Historia occidentalis, 28, 31.

Jacquet, lépreux, 189.

Jacquet de Trémery, chapelain, 293.

Jadart (H.), La Chalcographie de la ville de Reims, 61. — Hôpital Saint-Marcoul, notes sur ses origines et ses curiosités, 239. — V. aussi Chastelain (Dom P.), Givelet.

Jaffé, Regesta, 7, 12.

Jaquemin (Nicole), juge des lépreux, 134, 206.

Jaquemin de Villiers, donateur, 58.

Jaquet, fils de Bertrand Lefèvre (Frère), 30.

Jaquet (Poncinet), v. Foncinet.

Jard (Herbert du), v. Herbert.

Jarlot (Pierre), lépreux, 111, 173, 231.

Jehan, ermite de Marcelaut, 100.

Jean II, roi de France, 10, 95, 96.

Jean XXII, 106.

Jean Amaury (Frère), 33.


— 312 —

Jehan d'Aussôn, 172.

Jean d'Aussy, évêque deLangres,

208. Jehan de Bezannes, gouverneur,

289. Jean de Blois, officiai, 254. Jean de Chalons, 122. Jean de Craon, archevêque, 125,

203. Jean de Floricourt, médecin,

137, 267, 268. Jean de Guéron, receveur de

l'archevêque, 11. Jehan de Noirval, convers, 34. Jean de Senlis, 201. Jehan de Sept-Saulx, barbier,

267. Jean Thomas, peintre, 55. Jehan de Venderesse, lépreux,

266-268. Jean de Vienne, archevêque, 125,

201, 239. Jehanne de Voisine, dite de Paris, 58. Jehannette, femme de Poncinet

Jaquet, 103. Jesson Fumée, peintre, 73. Jesson Herpelin, 154. Jésuites (Collège des), 238. Jobin (Herbert), lépreux, 269271.

269271. (Jehan), gouverneur, 269,

288, 289. Joifroy Le Petit, maître, 288. Johannes de Blesis. v. Jean de

Blois. Johannes Frepotiti, v. Prévôt. Jolivet (Jehan), entrepreneur, 45. Jolyvet (Pierre), 118. Josière (Merson La), v. Merson.

Josseteau (Henry), gouverneur, 237 (?), 291.

Josuet (Françoise), lépreuse, 232.

Juifs, 53, 152.

Juvénal des Ursins (Jacques), archevêque, 149.

Juvénal des Ursins (Jean), archevêque, 56.

Kahier (Jean), convers, 33, 34.

Labarbe (Huet), v. Huet. Labarbe (R.), 266. Labassée (Jeanne), lépreuse, 169. Labbe et Cossart, Concilia,!, 69,

158, 183, 184, 197. Labbé (Me Christofle), lépreux,

140, 185. Laborde (Guillaume), 17. Lacombe (P.) et Combarieu (L.),

Documents contenus dans le Te

Igitur, 198. Lacorde (Husson), fermier des

pressoirs d'Ormes, 105. Lacroix (A.), Inventaire sommaire

des archives hospitalières de la

ville de Romans, 24. La Flèche (Lieudit),à Reims, 18,

54. La Foulerie (Gile de), v. Gile. La Gouge (Wiard), v. Wiard. Laignelet, juge des lépreux, 206. Lajoye (Robert), arpenteur, 61. Lalate (Thomas), échevin, 258. Lamaque (Jehan), gouverneur,

288. Lambert (Gérard), gouverneur,

288. Lamequin (Claude), lépreux, 225. La Mure, près La Neuville-en-


- 313 —

Tourne-à-Fuy (cant. Juniville,

arr. Rethel, Ardennes). 55. Langlet (D'), Un bureau de santé

au XVII» siècle, 158, 163, Langlet (Anne), religieuse de

l'Hôtel-Dieu, lépreuse, 194,233. Langres (Haute-Marne), 197-198,

203, 208, 272. Laon (Aisne), 269. La Poulenée ou La Poulinée

(Thierri), v. Thierri. La Rivière (Mathurin Blouyn,

dit), 244-245. La Salle (Lancelot de), 285. Lasteyrie (R. de), Cartulaire de

Paris, 193. Latran, 183, 259. L'Auditeur (Guillaume), barbier,

139. Laurent, lépreux, 232. Laurent (Anne), lépreux, 223,

231. Laurent (Jean), lépreux, 78. Laval (Pierre de), archevêque,

199. Laval (Pierre de), gouverneur,

291. Laval (Rémi de), gouverneur, 291. Lavannes (cant. Bourgogne, arr.

Reims), 192. Lavaur (Tarn), 158. Lawaille (Gille), 262. Lebergot (Gauchier), lépreux,

262. Le Bergier (Collard), 176. Lebesgue (Jean), 174. Leboeuf ( Marguerite), lépreuse,

224. Le Bouché (Jacques), proviseur,

Lebrun (Jean), chapelain, 293.

Le Cacheux (P.), Essai historique sur l'Hôtel-Dieu de Coutances, 193.

Le Chaussetier (Simonnet), v. Simonnet.

Leclerc (Jehan), lépreux, 153.

Le Clerc (Nicolas), gouverneur, 291.

Le Clerc (Thibaut), donateur, 15.

Le Coqut (Henri), proviseur, 25.

Le Crevé (Aubri), v. Aubri.

Le Cuisinier (Etienne), religieux de Saint-Symphorien, 58.

Ledieu \A.), Admission d'un lépreux dans la maladrerie du Val près d'Abbeville en 1494, 141.

Ledouble (Jean), lépreux, 189.

Lefèvre (Bertrand, v. Bertrand.

Le Florinier (Gérard), gouverneur, 289.

Le Fondeur (Nicolas), gouverneur, 291.

Le Fraisne (Pierre), gouverneur, 288.

Legay (François), gouverneur, 290.

Legay (Jehan), gouverneur, 290.

Legay (Jehan), hôtelier, 211.

Le Gilerel (Nicole), chapelain, 292.

Le Grand (L.), Les Maisons-Dieu, 196, 210. — Les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris au milieu du XIV' siècle : 11, 28, 35, £2, 95, 98,136, 148, 163, 192, 193, 196, 197. — J!^s Quinze- Vingts depuis leur fondation jusqu'à leur translation


- 314 —

au faubourg Saint-Antoine, 95.

- Le règlement de la léproserie

d'Epernay, 136, 148, 164, 165.

Legrand (Nicolas), chirurgien,

282-284. Le Hugeur, Philippe Le Long, 152. Le Large (Claude), gouverneur,

291. Lelarge (Gérard), teinturier, 49. Le Large (Hugues), donateur, 3. Leloir (H.), Existe-t-il dans les pays réputés non lépreux des vestiges de l'ancienne lèpre, 136. Le Malot (Jehan), tonnelier, 262. Le Moine (Pierre-Camille), VI,

VII. Lenay (Thiebaut), charpentier,

42. Lenayn ( Mathieu ), mégissier,

103. Leneveu (Jehan), 173. Le Nyeullier (Nicolas), v. Nicolas. Le Petit (Joffroy), v. Joffroy. Lepoyvre (Germain), greffier de

l'Echevinage, 286. Lepras (Henri), proviseur, 258. Lequatre (Jean), chapelain, 292. Leroy (Jaquotin), 186. Leroy (Nicole), prêtre, 101. Leroy (Pierre), gouverneur, 264,

288. Lescaillier (Claude), chapelain,

127, 293. Lesco (Jean), proviseur, 25. Lescot (Baudenet), gouverneur,

288. Lescot (Jacques), gouverneur,

289. Lespagnol (Claude), procureur du roi au Présidial, 238.

Lespagnol ( Lancelot ), gouverneur, 291. Lespagnol (Nicolas), 115. Le Tellier (Maurice), archevêque,

248. Le Teste (Colars), v. Colars. Lettres patentes du roy pour l'establissement

l'establissement la Maison de

Charité, 238, 243. Le Vacher (Nicole), chapelain,

292. Le Veneur (Cardinal Jean),

Grand Aumônier, 213. Le Vergeur (Jean), seigneur

d'Acy, 113. Le Vergeur (Pierre), 139. LeVillain(Jean), curé de Suippes,

lépreux, 144. Levillain (Rémi), lépreux, 200. Lévrier (Robert), gouverneur,

288. Lhermitte (Hue), v. Hue. Liber practicus de consuetudine

remensi, 142, 143. Libéra, v. Loivre. Libergier (Nicolas), 167. Liezot (Collette), 154. Liezot ( Philippe ), marchand,

282. Lignier (Baudenet), gouverneur,

288. Lilarges (Jean), échevin, 258. Liserons, v. Droars. Le Livre de jostice et de plet, 159. Limoges (Haute-Vienne), 76. Loge de l'Echevinage, n, iv, 93,

98, 99. Loges (Les Grandes) (cant. et arr. Châlons, Marne), 8, 16, 44, 52, 54, 95, 115.


— 315 —

Loisne (A. de), La maladrerie du

Val de Montreuil, 141, 148,198. Loivre (cant. Bourgogne, arr.

Reims), 52. — V. aussi Cochard. Loix, statuts et ordonnances

roiaulx, 194. Lombard (Jehan), gouverneur,

288. Lorcignol ( Gérard ), carrelier,

102. Lorraine, 135.

Lorraine (Adam de),cuisinier,99. Lorraine (Catherine-Marie de),

120. Lorraine (Charles de'Lorraine,

cardinal de), archevêque, 125,

126, 204, 207. Lorraine (Henri de), archevêque,

237, 240. Louis IX, 9, 29, 200. Louis X, 95. Louis XI, 10. Louis XII, 10, 171. Louis XIII, 10, 182. Louvois, 245, 246. Lucas, greffier de la Chambre de

charité, 216. Lucquy (cant. Novion-Porcien,

arr. Rethel, Ardennes), 5, 18,

24, 52, 57, 103. Lucyanne de Cumières, 17. Lyon (Rhône), 197, 235.

Madeleine (Croix de la), 58. Madeleine (Rue de la), 44. Maigret (Thomas), lépreux, 221. Maillefer (Jean), lieutenant de

Reims, 236, 237. Mainier, donateur, 17, 27, 36,

126.

Maison de charité, v. Hôpital

général. Maldan, Histoire de la faculté de

médecine de l'Université de

Reims, 283. Malequin (Oudin), v. Oudin. Mannet (Jean), tonnelier, 108. Manuale seu (ut vocant) Agenda

ad usum insignis ecclesiae rhemensis,

rhemensis, Marcelot (comm. des Alleux,

cant. du Chesne, arr. Vouziers,

Ardennes), 33, 41, 52, 55, 56,

100, 101, 115, 130, 173. Marchés de Reims, 16, 17, 56,

105, 133, 166, 195, 283. Marjollet (Jean), lépreux, 223,

231. Marlot (Dom Guillaume), Histoire de Reims, 29, 70, 91, 200.

— Metropolis remensis historia,

73. Marlot (Guillaume), gouverneur,

291. Marlot (Jehan), gouverneur, 48,

290. Marson, soeur de Jacquet, lépreux, 189. Martène. Amplissima colle.clio,

185. — De antiquis ecclesiae ritibus,

ritibus, 149, 150, 153, 183,

199. Martinet (Jean), 126. Mastelot (Robert), proviseur,

25. Mathieu d'Escouchy, 210, 211,

271-273. Mathilde, veuve de Gerbert, 15. Maubrouet (Jehan), procureur de

l'Echevinage, n, 269.


- 316 -

Maulevault ( Jehan ), convers,

129, 131, 277. Maupinot(Jacques), gouverneur,

291. Maury, chapelain, 291. Mauseot Pentouf, chapelain, 125,

292. Maynart (Jean), chapelain, 291. Meaux (Seine-et-Marne), 95, 196,

224, 231. Meline Corneille, 92. Melun (Seine-et-Marne), 37. Menu (H.), Le premier plan de

Reims, 61. Mercier (Jehan), frère de l'HôtelDieu,

l'HôtelDieu, 193. Merlet (R.), Statuts et coutumes

de la léproserie du Grand-Beaulieu

Grand-Beaulieu XIW siècle, 35, 164,

196. Merson La Josière, 137. Meudon (Antoine Sanguin, cardinal de), 218. Meules (Ruelle des), 57. Mézières (Ardennes), 53, 232. Milart (J.), fermier de Chaumuzy,

Chaumuzy, Mile du Molinet, chapelain, 292,

293. Milet de Monclin, 5, 18, 27. Milon de Bourgogne, échevin,

258. Minci (Pierre de), v. Pierre. Minimes, 49. Missale ad consuetudinem insignis

ecclesix remensis, 149. Missale ad usum remensis ecclesiae,

149. Mitry (cant. de Claye, arr. de

Meaux, Seine-et-Marne),95,196.

Mittheilungen und Verhandlungen der internationalen wissen. schaftlichen Lepra - Conferenz zu Berlin, 163.

Moet (Augustin), chapelain, 293.

Moet (Guillaume), gouverneur, 289.

Moet (Nicolas), gouverneur, 289.

Moet atné (Philippe), gouverneur, 289.

Molé de Sainte-Croix, conseiller au Conseil d'Etat, 246.

Moléon, Voyages liturgiques en France, 149.

Molinet (Du), v. Du Molinet.

Monclin (cant. Novion-Porcien, arr. Rethel, Ardennes), 57.

Monclin (Milet de), v. Milet.

Monetariorum (Vicus), v. Monnoyers.

Monfalou (Pierre), 288.

Monneuze (Nicolas), peintre, 99.

Monnoyers (Rue des) (rue de Tambour), 17, 24.

Mons Sancti Pétri (Mont-SaintPierre, près Tinqueux, cant. et arr. Reims), 255. V. Renaud.

Mont-Carmel (Ordre du), 245,247.

Montlhery (Seine-et-Oise), 196.

Montpellier (Hérault), 154.

Montre (Dimanche), lépreux, 220.

Montreuil-sur-Mer (Pas-de-Calais), 148, 198.

Moranvillé (H.). Le siège de Reims de 1359-1360, 41, 44.

Moreau (E.), graveur, 84.

Morel (Antoine), gouverneur, 290.

Mosse ou Mousse (Thibaut), chapelain, 125, 292.


— 317 —

Mothe (Charles), gouverneur, 291.

Mothe (Claude), 115.

Mothe (Germain), sergent de l'Echevinage, 286.

Mouchy (Jean de), 92.

Mougin Petit, charpentier, 185.

Moulin-Brulé (Rue du), 62.

Mousse (Thibaut), v. Mosse.

Moyre, v. Muire.

Muire (com. Tinqueux, cant. et arr. Reims), 15, 16, 18, 54, 58, 63, 91, 94, 100, 112, 204.

Muizon (cant. Ville-en-Tardenois, arr. Reims), 17, 52, 54, 96, 113, 247.

Murigni, Murigny (comm. de Reims), 255.

Navarre (Blanche de), 198. Neufchàteau (Vosges), 235. Neuve (Rue), 105. Neuville (Gaucher ou Gautier

de), v. Gaucher. Neuville-en-Tourne-à-Fuy (La)

(cant. Juniville, arr. Rehel,

Ardennes), v. Mure (La). Nicolas, convers, 33. Nicolas Le Nyeullier, 89. Nicolas de Ruel, chapelain, 292. Nicole, lépreux, 189. Noël (Jehan), gouverneur, 86

(?), 288. Noël (Jérôme), gouverneur, 290. Noël (Oudard), gouverneur, 289,

290. Noël (Philippe), gouverneur, 291. Noël (Thierry), gouverneur, 288. Noirval (Jehan de), v. Jehan. Nolin (Charles), V. Normandie, 184.

Notre-Dame (Parvis), 15.

Obin, fils de Gérard, donateur, 18.

Olivier, donateur, 76, 77, 251(?).

Olivier (Hugues), v. Hugues.

Orange (Vaucluse), 165, 184.

Origni (Adam d'), médecin, 137.

Ormes (cant. et arr. Reims), 17, - 32, 36, 52, 54, 94, 103-105.

Oudard Roberchamp, juge des lépreux, 205.

Oudart de Wignicourt, donateur, 18.

Oudin (Jean), lépreux, 191.

Oudin Malequin, 113.

Oudinet de Bezannes, 43.

Ouen (Saint), Vita beati Eligii, 69.

Papelard (Raulet Le), v. Raulet.

Parent (Thomas), chapelain, 292.

Paris, 224; Banlieue, 141; Célestins, 192 ; Charité chrétienne (maison de la), 215, 216 ; Evoque, 196, 197; Filles-Dieu, 42; Foire Saint-Lazare, 11 ; Hôpital général, 235 ; Quinze-Vingts, 95 ; Roule (léproserie du), 193 ; Saint-Gervais (maison-Dieu), 95 ; Saint-Lazare (léproserie), 136, 196, 233 ; Saint-Martindes-Champs, 193 ; Sainte-Geneviève, 193.

Paris (Thomas de), 115.

Passe-Demoiselles (Rue), 62.

Pasté (Pierre), médecin, 282.

Payot (Henri), clerc de l'Echevinage, 269, 271, 272.

Pentouf (Jean), chapelain, 292.

Pentouf (Jean), chapelain, 292.

Pentouf (Mauseot), v. Mauseot.


— 318 —

Perdue (Rue), 16.

Pergant (F.-V.), Le siège de Reims

par les Anglais, 42. Péricot (Etienne), Augustin, 193. Périgord, 233. Perrière (Rue de la), 56. Person de Saint-Vincent, clerc

l'Echevinage, IL Pertz, Leges, 184. Pescheur (Antoine), chirurgien,

287. Pes Lupi, officiai, 254. Petit (Husson), v. Husson Petit. Petit (Jean), chapelain, 127, 293, Petit (Mougin), v. Mougin. Petitqueux (Jean), chapelain,

293. Petrus de Careyo, échevin, 258. Peuboir, v. Bours (Robert de). Philippe-Auguste, 9, 11, 13. Philippe IV, 210. Philippe V, 152. Philippe VI, 9, 201. Philippe (Alizon), lépreuse, 221. Philippe de Bezannes, lieutenant

du capitaine de Reims, 272. Philippe de Ruel, chapelain, 124,

125, 259, 260, 292. Philippe de Saint-Symphorien,

4, 97. Pichelin (Hubert), chapelain, 249. Pierre (Frère), 29. Pierre d'Arches, chapelain, 291. Pierre de Besennes, 43. Pierre de Citry, 260. Pierre de Guionne, gouverneur,

288. Pierre Honoré, chapelain, 58,291. Pierre de Minci, évêque de Chartres, 164, 196.

Pierre-aux-Changes, 189.

Piet-de-Bos, 146.

Pochars (Pierre), échevin, 260.

Poissonier (Renier le), v. Renier.

Poissonnerie (Rue de la), 57, 287.

Poncelet (Arnoul), v. Arnoul.

Poncinet Jaquet, 103.

Pontoise (Seine-et-Oise), 35.

Poperel, lépreux, 38, 79.

Porcher (Aubert Le), v. Aubert.

Porjon ou Pourjon (Gérard), chapelain, 126, 293.

Poternes, 15,16.

Potier ( Etienne ), gouverneur, 264, 288.

Pourjon, v. Porjon.

Povillon-Pierrard, 71, 73, 84.

Preudon (Person), 108.

Prévôt (Jean), 135.

Prouilly (cant. Fismes, arr. Reims), 52-54, 103-104.

Prouvais (cant. Neufchâtel, arr. Reims), 52.

Prudhomme (Jean), bachelier en théologie, 208.

Puits Harduin, 56.

Pussot (Foucquet), charpentier, 178.

Pussot (Jean), 48 (?). — Journalier ou mémoires, 48, 49, 61, 120.

Pussot (Nicolas), 48.

Quatre - Champs (cant. et arr.

Vouziers, Ardennes), 14, 33. Quicot (Roger), 4. Quinet (Renaud), chapelain, 292.

Rainssant (Gérard), gouverneur, 291.


31£h«-

Rainssant. (Jehan), gouverneur,?

290. Raoul de Chuffilly, chevalier, 17. Raoul d'HauviUers, maître, 22,

50, 52, 252. Raoulin, lépreux, 262. Raulet Le Papelard, 112. Raulin Cochinart, capitaine de

ville, 46. Rauline, 160. Recueil des édits et déclarations

concernant les hospitaux et maladreries

maladreries 121, 209, 210,

214, 218. Recueil des Historiens de France,

11. Remigius dictus Chevalier, v.

Chevalier. Remis (Renaldus de), v. Renaud. Renaud de Chartres, archevêque,

149. Renaud Cocheles* échevin, 258. Renaud de Donchery, 8. Renaud de Mont-Saint-Pierre,

255. Renaud de Reims, clerc, 258. Renault, Nouvelles recherches sur

les léproseries en Normandie,

183. Renfermerie, v. Hôpital Général. Renier Le Poissonnier, 261. Rethel (Ardennes), 223. Richart (Jehan), chapelain, 41,

291. Richelet (Pierre), chirurgien, 138. Richer (P.), L'art et la médecine,

137. Richier (Colesson), v. Colesson. Richier (Pierre), chapelain du

roi, 208.

Rigaud (Ebal), v. Ebal.

Roberphamp (Oudard), v. Oudard.

Robert (U.), Des signes d'infamie au moyen âge, 158, 159.

Robert de Bresche, 273.

Robert de Chartres, 76.

Robert de Courselles,205(?),288.

Robert de Courtenai, archevêque, 125, 201.

Robin de Vendeux, sergent du prévôt, 43.

Roger de Bazoches, 14, 16, 32.

Rogier, président au présidial, v.

Rogier (Jehan), prévôt de l'Echevinage, 290 (?). — Mémoires, 109.

Rogier (Remyon), 176.

Rohais (Thomas), échevin, 260.

Roland (Jacques), gouverneur, 290.

Roland jeune (Jean), gouverneur 291.

Roland aîné (Jean), gouverneur, 291.

Romans (Drôme), 24.

Ronnay (Guillaume de), gouverneur, 289.

Rosenzweig (L.), Les Cacous de Bretagne, 155.

Rouen (Seine-Inférieure), 165.

Rouillard (S.), Le Grand Aulmosnier de France, 208.

Rousset (C), Histoire de Louvois, 245.

Rouvroy (cant. Ville-sur-Tourbe, arr. Sainle-Menehould, Marne), 14, 52.

Roze (Andrienne), servante, 225.

Roze (J.), chirurgien, 161.

Rousseau (Raulin), 153.


-320 -

Ruel (Nicolas de), v. Nicolas. Ruel (Philippe de), v. Philippe. Rusé (Martin), commissaire du Grand Aumônier, 147.

Sacy, (cant. Ville-en-Tardenois,

arr. Reims), 52. Saint-Agnès (Béguinage), 239. Saint-Antoine (Hôpital), 239-240. Saint-Bernard (Prieuré de), 49. Saint Denis (Abbaye de), iv, 97.

Aumône de l'Abbaye, 239. Saint-Eloi (Faubourg), 34, 63, 68,

90, 98, 133, 248, 249; v. Vesle

(Rue de). Saint-Esprit de Montpellier (Ordre du), 245. Saint - Etienne (Église), 56. Saint-Hilaire (Église), 36, 112,

115. Saint-Jacques (Église), 78. Saint-Jean (Église), 193. Saint-Jacques de Compostelle

(Espagne), 162. Saint-Lazare (Ordre de), ix, 11,

158, 212, 243-247. Saint-Loup (Ardennes) (<), 113. Saint-Marc - à - Cachot (Église),

43, 46, 190-193. Saint-Marcoul (Hôpital), 239. Saint-Martin (Église), 126. Saint-Maurice (Prieuré de), 29,

30, 106, 253. Saint-Mesmin (Loiret), 229. Saint-Nicaise (Abbaye de), 52,

94, 144, 239. Saint-Omer (Pas-de-Calais), 157.

(M Deux communes du département des Ardennes portent ce nom : SaintLoiip-en-Ghampagne et Saint-Loup-etTerrier.

Saint-Paul (Maréchal de), 48. Saint-Pierre-le-Viel (Église), m. Saint-Pierre-les-Dames (Abbaye

de), 52, 111, 120, 123, 173. Saint-Quentin (Aisne), 4, 136,

210. Saint-Remy (Abbaye de), 19, 52,

54, 81, 82, 111, 112, 173, 193,

194, 239, 254-256. Saint-Sixte (Église), 83. Saint-Souplet (cant. Beine, arr.

Reims), 27, 57, 103, 126, 127. Saint-Symphorien (Église), 54. Saint-Symphorien (Philippe de ,

v. Philippe. Saint-Thierry (Abbaye de) (cant.

Bourgogne, arr. Reims), 57,

140. Saint-Timothée (Église), 175. Saint-Vincent (Person de), v.

Person. Sainte-Anne (Faubourg), 61, 81. Sainte-Geneviève (Église), 16,

63. Sainte-Marguerite (Rue), 15. Sancto Lupo (Egidius de), v.

Gille. Sanson, archevêque, 4. Saumon (Maison du), 243. Sauton (Dom), La léprose, 163. Sauvage (Pierre), chapelain, 122,

291. Savoie (Aimé de), 124. Senlis (Jean de), v. Jean. Sentelette (Jardin de la), 54. Sept-Saulx (cant. Verzy, arr.

Reims), 189. Sept-Saulx (Jehan de), v. Jehan. Schwingrouber (C), Reims, rues

et places publiques, 62.


— 321 —

Simon Matifas de Bucy, évêque de Paris, 201, 257.

Simonnet (Poncelet), 108.

Simonnet Le Chaussetier, lépreux, 262.

Sixte IV, 8, 106.

Soissons (Aisne), 106, 224.

Songe du Vergier, 197.

Sorine, converse, 30.

Soudant (Jehan), gouverneur, 288, 289.

Souyn (Garlache), gouverneur, 216, 291.

Stenay (Meuse), 247.

Strabo (Jean), proviseur, 23.

Suippes (arr. Châlons-sur-Marne, Marne), 144.

Sully (Nicolle), servante, 225.

Taincoe, v. Tinqueux. Taissy (cant. et arr. Reims), 52. Tambour (Rue), 17, 24, 285. Tarbé, Reims, essais historiques

sur ses rues et ses monuments,

70, 73, 120, 177, 181. Terre Saudée, 18, 51, 102. Terron (Ardennes), 55, 158. Testelette (Jehan), chirurgien,

284, 283. Thelines (Ardennes), 18, 37. Thérouanne (Pas-de-Calais), 144. Thiébault (Jehan), maçon, 48. Thiébaut d'Aubilli, 43. Thiébaut de Berzieulz, 261. Thierry (A.), Monuments inédits

de l'histoire du Tiers-Etat, 198. Thiéry (Nicolas), gouverneur,

290. Thierri La Poulénée ou La Poulinée,

Poulinée, 45.

Thillois(cant. et arr. Reims), 52.

Thomas de Beaumets, archevêque, 4, 11, 200.

Thomas Erars, échevin, 258.

Thomas de Tréloup, prêtre, 258.

Thomas de Vervins, seigneur de Saint-Loup, 113.

Thomas (Jean), v. Jean.

Thuisy (cant. Verzv, arr. Reims), 189.

Thuisy (Jacques de), v. Jacques.

Tinqueux (cant. et arr. Reims), 234.

Tooneel der vermaarsle Koopsteden, 84.

Tournay (Belgique), 24.

Tourtelet, peintre, 73.

Trelodio (Thomas de), v. Thomas de Tréloup.

Trémery (Jacquet de), v. Jacquet.

Trie (Guillaume de), v. Guillaume,

Trigny (cant. Fismes,arr. Reims), 96, 105.

Triplot (Jehan), Dominicain, lépreux, 153, 194.

Trois-Rois (Rue des) (ou des Trois-royaulx), 54, 56.

Tropmignot (Pierre), procureur de l'Echevinage, 99.

Troycé, v. Colard.

Troyes (Aube), 76, 139, 146, 187, 188, 198, 235.

Turenna (Slephanus de), v. Etienne.

Usatici barchinone patrie, 184.

Vagnerie (La), v. Marcelot. Val (Le), v. Montreuil-sur-Mer.


— 322 —

Vânier (Girard), religieux de Saint-Remy, lépreux, 194.

Varin (P.), Archives administratives de la ville de Reims, passim. — Archives législatives de la ville de Reims, passim.

Vauchelet (Claude), gouverneur, 289, 290.

Vaultrin (Etienne), chapelain, 292.

Vaurouart (Guillaume), prévôt de l'Echevinage, 107.

Vaus (Guillaume de), v. Guillaume.

Vauzelles (cant. Novion-Porcien, arr. Rethel, Ardennes), 57.

Venderesse (Jehan de), v. Jehan.

Vendeux (Robin de), v. Robin.

Vendières (Baudouin de), v. Baudouin.

Vervins (Thomas de), v. Thomas.

Vesle (Porte de), 43-45, 64, 65, 179, 284.

Vesle (Rue de), 13, 54, 62, 94, 166, 205.

Vieillart (Nicolas), gouverneur, 289.

Vienne (Jean de), v. Jean.

Viez (André), chapelain, 293.

Vignat (E.), Les lépreux et les chevaliers de Saint-Lazare 158.

Vigoureux (Jean), chapelain, 293.

Villedommange (cant. Ville-enTardenois, arr. Reims), 46.

Villers Franqueux (cant. Bourgogne, arr. Reims), 52.

Villiers (Jaquemin de), v. Jaquemin.

Vincent (Claudine), lépreuse, 213.

Vincent de Flichambaut, 255. Vinoyen (Baussant), v. Baussant. Viollet (P.), Histoire du droit

civil français, 184. Vironicle (Maison du), 56. Visaige (Jehan), juge des lépreux, 205, 266. Viscot (Evrard), chirurgien, 282,

287. Viscot (Guillaume), gouverneur,

291. Viscot (Henri), médecin, 284,

285. Vitry (Jacques de), v. Jacques. Voisin Cauchon, proviseur, 25. Voisine (Jehanne de), v. Jehanne. Voiturot ( Colesson ), convers ,

131, 132, 276. Voncq (cant. Attigny, arr. Vouziers,

Vouziers, 97, 113. Vostre (Simon), 149. Vouziers (Ardennes), 57. Vyet (Martin), lépreux, 154, 162,

174.

Waladé ou Wladé (Antoine^, 58, 96, 133, 184.

Warnier, chevalier, 18.

Watier (Jacques), gouverneur, 289.

Watry (Simon), chirurgien, 285.

Wedeline, femme Piet-de-Bos, 146.

Wez (cant. Verzy, arr. Reims), 189.

Wiard Chaudiaus, prêtre, 27.

Wiard La Gouge, 254.

Wignicourt (Oudard de), v. Oudard.


— 323 —

Wladé, v. Waladé. Worms (Allemagne), 184.

Tsabel (Soeur), 29.

Ysabin, fille de Renier le Poissonnier, lépreuse, 79, 261.

Reims, Imprimerie de l'Académie, rue Pluche, îi. (13000)






PUBLICATIONS

DE L AOA-DËM1E NATIONALE DE REIMS

i^^tmuoeîidg^'^cadémie, formant chaque année 2 yolii.Ki.es

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riients manuscrits (1841-1886), par H. JADART. In-8*, 2,fri

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provijRpè.de (1585-1598), publié par M. Gi HEITEIAE,

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)';[f &fi'4{iiS4), publiés par M. H; JADART. Un VOI^OT-S", 10 ïr.

:XJ.f Éèttres et Négociations de Claude de• M'ojtdoùcet, puSJ^^pâr-M. L. DIDIER. Deiix vol. in-8°, 12 frv'4

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JÉpfe chez L. MICHATJD, Libraire de l'Académie,

rue du Cadran-Suint-Pierre, 19.