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Titre : Bulletin de la Société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot

Auteur : Société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot. Auteur du texte

Éditeur : Impr. A. Laytou (Cahors)

Date d'édition : 1911

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb343873149

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb343873149/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

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Description : 1911

Description : 1911 (T36).

Description : Collection numérique : Fonds régional : Midi-Pyrénées

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5512586b

Source : Société des études du Lot

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 17/01/2011

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BULLETIN TRIMESTRIEL

DE LA

SOCIÉTÉ DES ÉTUDES

LITTÉRAIRES, SCIENTIFIQUES ET ARTISTIQUES

DU LOT

T O M E T R E N T E - S I X I E M E PREMIER FASCICULE

« JANVIER FEVRIER MARS »

CAHORS IMPRIMERIE F. DELPÉRIER, C. ROUGIER Sr, 4, RUE DES ÉCOLES

1911

La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans son BULLETIN.

Le gérant : L. DELPÉRIER.



BULLETIN

DE LA

SOCIÉTÉ DES ÉTUDES DU LOT



BULLETIN TRIMESTRIEL

DE LA

SOCIÉTÉ DES ÉTUDES

LITTÉRAIRES, SCIENTIFIQUES ET ARTISTIQUES DU LOT

TOME TRENTE-SIXIEME PREMIER FASCICULE

« JANVIER FEVRIER MARS »

CAHORS IMPRIMERIE F. DELPÉRIER, G. ROUGIER Sr, 4, RUE DES ÉCOLES

1911

La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises les auteurs des articles insérés dans son BULLETIN.

BIBLIOTHEQUE

Le gérant : L. DELPERIER.



LA DÉFECTION DE MURAT

LA MISSION DE FOUCHÉ

(DÉCEMBRE 1813 — MARS 1814) d'après LE PRINCE EUGÈNE ET MURAT de M. H. WEIL

« De toutes les campagnes de la Révolution et de l'Empire, écrit le Ct M.-H. Weil aux premières lignes de son introduction, une seule était restée jusqu'ici injustement plongée clans l'ombre et presque clans l'oubli.

« Pas plus en France qu'à l'étranger, on n'avait songé à étudier en détail et dans leur ensemble les opérations militaires qui, d'août 1813 à avril 1814, ont eu pour théâtre le Tyrol, les provinces illyriennes, la Haute-Italie, l'Istrie et la Dalmatie jusqu'aux bouches du Cattaro. »

C'est à une copieuse réparation de cette injuste indifférence que M. le Ct Weil a consacré les cinq volumes de son ouvrage Le Prince Eugène et Mural, résultat de dix années de recherches et de travail à la découverte et à l'utilisation un peu fruste de documents dispersés dans les archives publiques et privées de France, d'Angleterre, d'Autriche et d'Italie.

Il appartient aux spécialistes de l'art militaire de prononcer si un pareil effort était en rapport avec l'intérêt réel des opérations et avec l'influence que put avoir sur la catastrophe de l'Empire, cette campagne qui, en dehors de quelques engagements plus sérieux, mais de bien minime importance comparés aux grands événements militaires , de cette période, n'offre, de l'aveu même de l'auteur, qu'une longue liste de petits engagements, d'escarmouches et d'opérations exécutées par des colonnes volantes, et dont le résultat fut l'abandon, étape par étape, presque sans combat, des possessions françaises de l'Adriatique et de la Haute-Italie, confiées à la garde du prince Eugène. De la responsabilité qu'il en devrait supporter, M. Weil fait tous ses


— 6efforts

6efforts dégager le vice-roi d'Italie, invoquant à sa décharge la vaste étendue du théâtre des opérations, la médiocre qualité de ses troupes, l'insuffisance de la plupart de ses généraux, les instructions de l'empereur. Ici encore, c'est aux techniciens et à eux seuls de décider et de décerner le blâme ou l'éloge. D'ailleurs, restreint à ce cadre, l'ouvrage de M. Weil ne se rattacherait à aucun titre aux travaux de notre Société.

« Mais ce n'est pas seulement au point de vue exclusivement militaire, observe l'auteur, que la campagne d'Italie de 1813 à 1814 présente un intérêt qu'on avait trop négligé jusqu'ici. Les événements politiques qui se sont succédé au cours de ces huit à neuf mois y occupent une place si considérable, ont pesé d'un tel poids sur la marche même des opérations qu'ils mériteraient à eux seuls de faire l'objet d'une étude à laquelle, à cause de notre inexpérience et du caractère particulièrement délicat des questions qui s'y rattachent, mais surtout en raison des glorieux états de service, de la triste fin du brillant soldat que son ambition et les détestables conseils de son entourage le plus proche ont conduit à sa perte, nous n'avons pas osé donner tous les développements qu'elle comporte.

« S'il nous a été impossible de passer sous silence les agissements de Murât, les négociations qui ont abouti à sa déplorable entrée dans la coalition, on comprendra aisément pourquoi, toutes les fois qu'il s'agit du roi de Naples, nous nous sommes, par respect pour sa mémoire, fait un devoir de reproduire presque toujours in extenso les documents authentiques, et pour la plupart inconnus et inédits, qui ont trait à sa lamentable évolution ; pourquoi nous avons tenu à mettre en lumière les déceptions, les humiliations qui lui firent si vite, mais trop tard, hélas, regretter la fatale résolution qu'on avait arrachée à sa faiblesse, à son orgueil, à son aveuglement. » (1).

De ces considérations, que nous avons tenu à reproduire, est résultée une abondante documentation qui fait.pour nous le principal intérêt de cet ouvrage, d'une lecture et d'une utilisation peu faciles par le défaut presque absolu de composition qui le caractérise. '

S'il peut être d'une bonne méthode pour l'écrivain purement militaire de se servir de cette forme, qui consiste à relater journée par

(1) Le Prince Eugène et Murât, avant-propos, p.-VIII.


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journée la situation ou les effectifs des troupes et le détail des opérations sur les divers points où elles se produisent, il n'en est point de même lorsqu'il s'agit d'événements politiques ou de négociations diplomatiques, qui, dans leur préparation non plus que clans leurs, conséquences souvent éloignées, ne se laissent point contraindre à ce cadre rigoureux ni à ce fractionnement par tranches journalières.

Ce qui demeure, en dépit de cette mise en oeuvre défectueuse, c'est la mise au jour de nombreux et très utiles documents, absolument précieux pour qui veut étudier cette période douloureuse de l'histoire de Murât.

Mais, en dépit du respect qu'il professe pour la mémoire du roi de Naples, il nous a paru que trop souvent les jugements de M. Weil sont d'une sévérité, parfois même d'une injustice à laquelle ne préparent certes point les déclarations qu'on vient de reproduire. Il nous a paru qu'entraîné en quelque manière par le titre même de son ouvrage, il a voulu faire de Murât l'antithèse et comme le repoussoir du héros à la justification et la glorification duquel il s'est consacré.

Certes, l'adhésion de Murât à la coalition est, malheureusement pour sa mémoire, un fait incontestable. Mais les circonstances qui l'accompagnèrent et peuvent, en partie, non l'excuser, mais l'expliquer, demeurent sujettes à la discussion ; et de celle-ci peut résulter plus ou moins de sévérité dans le jugement que doit provoquer l'acte de Joachim.

De ces circonstances, l'intervention de Fouché, investi par l'empereur d'une mission officielle auprès du roi de Naples, au moment même où la crise touchait à son dénoûment, n'est assurément pas l'une des moins intéressantes. Sans aller jusqu'à prétendre qu'elle ait été déterminante, et sans avoir la prétention de démêler les intentions, d'affirmer le rôle de l'énigmatique et tortueux personnage que fut, dans tous les actes de sa vie, le duc d'Otrante, on peut se demander s'il n'a pas exercé sur Murât une influence peu conforme, sinon toute contraire à ce qu'attendait de lui Napoléon, pour faire concourir Murât à ses vues personnelles.

En groupant autour de cet épisode les faits qui le précédèrent ou l'accompagnèrent, nous essaierons, et c'est là l'objet de cette étude, d'apprécier la valeur des jugements portés par M. Weil sur le roi Murât.


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I LE RETOUR DE MURÂT APRÈS LEIPZIG

Le 4 novembre 1813, à neuf heures du soir, Murât rentrait à Naples. C'est à peine si un courrier parti de Florence, où le roi s'était arrêté auprès de la grande-duchesse Elisa, l'avait précédé de quelques heures, apportant à la reine Caroline et à la cour la nouvelle d'un retour absolument inattendu.

Après le désastre de Leipzig et la retraite de l'armée, il avait accompagné Napoléon jusqu'à Erfurt, et là, il lui avait demandé, certains disent arraché l'autorisation de retourner dans son royaume, dont la situation devenue chaque jour plus précaire par suite des succès de l'armée autrichienne et des menaces de l'armée anglo-sicilienne, réclamait, avait-il affirmé, impérieusement sa présence.

Quittant Erfurt le 24 octobre à.six heures du soir, il avait pris, en évitant le territoire français, la route du Simplon ; une tourmente l'avait obligé à abandonner sa voiture au milieu des neiges. Poursuivant sa route à cheval, il était arrivé le 31 à Milan. Il s'y était arrêté quelques heures, le temps d'écrire à l'empereur une lettre qu'il convient de reproduire, en la faisant suivre des considérations qu'elle a inspirées à M. Weil.

« Sire, lui disait-il, je m'empresse d'annoncer à Votre Majesté mon « arrivée à Milan; ayant laissé ma voiture dans les neiges du Simplon, « je ne pourrai me rendre à Monza faire ma cour à la vice-reine. « Mais je vais voir M. Mejean et je lui dirai ce qu'il faudra lui dire. « On savait déjà en Suisse les événements de Leipzig et on les connaît « ici. Mais comme tout est exagéré, j'espère que mon passage aura « rassuré les esprits et fait connaître ce qu'il faut que le public con« naisse. On est tout alarmé ici. Le quartier général du vice-roi était à « Sacile et on ne doute pas qu'il viendra derrière l'Adige. J'ai annoncé « que j'allais marcher à la tête de 40,000 hommes, et je suis persuadé « que cette nouvelle produira un bon effet.

« Au reste, le vice-roi se retire fort tranquillement sans être suivi et« on assure qu'il ne se tire pas un coup de fusil. Les Tyroliens sont « venus jusqu'à Roveredo qu'ils ont, dit-on, évacué.


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« La conduite de la Bavière a fait ici une grande sensation, d'autant « plus qu'on dit que le roi travaille à assurer au vice-roi une princi« pautè en Italie. J'ai le même avis de Munich. C'est à Votre Majesté « d'apprécier tous ces rapports. On ne voit pas avec plaisir la retraite « de votre armée sans bataille et sans être inquiétée.

« Je vais tout disposer pour faire marcher 30.000 hommes. Mais j'ai « besoin de connaître vos intentions d'une manière positive. Je prie « Votre Majesté de me les faire connaître sans retard. Ce n'est plus le « moment de temporiser ni d'éluder les réponses. J'ai le plus grand « désir de vous seconder, mais encore faut-il savoir comment je peux « y parvenir.

« J'ai besoin d'avoir le commandement des Etats romains si je « marche ; et en cas de réunion avec le vice-roi, qui commandera ?

« Je prie Votre Majesté de répondre de suite. Cependant je vais « mettre tout en oeuvre pour mobiliser mon armée. Je serai, toute ma « vie, Sire, le meilleur et le plus attaché de vos amis. »

Commentaires de M. Weil : Murât, qui ne s'était arrêté que quelques heures à Milan, n'avait eu que le temps d'écrire à l'empereur une lettre singulière, lettre dans laquelle, tout en essayant d'une part de se justifier, tout en promettant de concourir avec 40,000 hommes à la défense de l'Italie,il prenait déjà vis-à-vis de l'empereur une attitude qu'il ne se serait certainement pas permise quinze jours auparavant, lui posait des conditions d'un ton hautain et presque menaçant et allait jusqu'à lui mettre, à peu de choses près, le marché à la main.

Et plus loin : Ce qu'il n'eût jamais osé dire à l'empereur, même après le désastre de Leipzig, il ne craignait pas de le lui écrire, maintenant qu'il était loin de lui. Non content de prendre avec lui un ton inaccoutumé, de lui parler presque d'égal à égal, d'exiger comme prix de son concours les Etats romains et le commandement en chef dont il a besoin pour réaliser le vaste projet qui hante son esprit : l'unité de l'Italie sous son sceptre, il n'hésite pas à avoir recours à des moyens indignes de lui. Il ne suffit pas de remplacer Eugène à la tête de l'armée d'Italie. Il tient à en finir avec ces Beauharnais qu'il déteste. Il veut, lui qui n'a pas hésité à entamer les négociations de Ponza, jeter le doute dans l'esprit de l'empereur et lui faire croire que le vice-roi a prêté l'oreille à des propositions que le roi de Bavière lui a faites au nom des alliés.

C'est ligne par ligne, presque mot par mot, qu'il faudrait discuter ce commentaire. Quelques observations suffiront, on l'espère, pour en


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établir l'àpre injustice. Et d'abord, où M. Weil a-t-il vu que Murât a cherché à se justifier, et de quoi ? En second lieu,n'était-il pas naturel, indispensable même que le roi de Naples, qui dans d'autres circonstances avait écrit à l'empereur des lettres demeurées sans réponse, tînt à connaître, et cette fois d'une manière aussi précise que l'exigeait la gravité de la situation, clans quelles conditions il serait appelé à coopérer à la défense de l'Italie pour laquelle il allait mettre en mouvement toutes les forces de son royaume ? En fait, et par là sa demande d'explication se justifiait, lui seul pouvait commander l'armée napolitaine parce que seul il pouvait l'entraîner au secours d'une cause que la très grande majorité de la nation ne servait, nous le verrons par la suite, qu'avec une répugnance nullement dissimulée. :

Signalant à l'empereur les déplorables conditions dans lesquelles s'opérait la retraite de l'armée d'observation d'Italie, il constatait simplement la vérité, et il suffit de lire les rapports mêmes du vice-roi pour être pleinement édifié.

Quant au grief principal, à celui qui certainement, aux yeux de l'apologiste du prince Eugène, prime tous les autres, à savoir l'allusion aux propositions que le roi de Bavière fît porter à son gendre en même temps qu'il lui annonçait son accession à la coalition, s'il est à l'honneur du prince Eugène de ne les avoir pas acceptées, le fait demeurait, non sans importance, de la démarche du roi de Bavière, que Murât se bornait à signaler.

Enfin quand M. Weil ajoute, comme pour porter lui-même le dernier coup à l'homme qu'il accuse d'en vouloir finir avec ces Beauharnais qu'il déteste, que Murât avait moins que tout autre le droit de se faire l'écho des bruits qu'il avait recueillis, lui qui n'avait pas hésité à entamer les négociations de Ponza avec l'Angleterre, il néglige deux circonstances de nature, semble-t-il, à retenir son indignation.

En ce qui concerne les négociations de Ponza, il ressort des documents de M. Weil que les premières insinuations sont venues d'agents anglais ; que les pourparlers à peine ébauchés en vue de la conclusion d'un armistice et de la reprise des relations commerciales n'ont pas été, du moins jusqu'alors, sérieusement suivis, et que d'ailleurs le retour de Murât à la grande armée au mois d'août 1813 leur a enlevé toute portée.

En second lieu, faire allusion à ces négociations, n'est-ce pas vouloir


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attirer l'attention sur une démarche du vice-roi que Murât aurait pu signaler à l'empereur, en la présentant comme la conséquence des propositions de son beau-père ?« Le hasard, lui écrivait-il, dans la « réponse que, le jour même où il l'avait reçue, il faisait à sa lettre, m'a « offert une occasion de faire pressentir le général Hiller sur un arran« gement tacite, par lequel nous demeurerions, lui et moi, dans les « positions que nous occupons sur les deux rives de l'Isouzo. Je ne sais « ce qu'il répondra,' mais, vous le sentirez, je ne puis rien faire au « delà. » Ce n'était évidemment, pas tout ce que souhaitait le roi de Bavière ; mais c'était bien cependant quelque chose que cette négociation d'armistice engagée de son propre mouvement par le vice-roi sans en avoir référé à l'empereur. Quant à l'invocation du hasard qui lui donnait l'occasion de faire pressentir Hiller, elle paraît assez mal placée, si l'on songe que le général d'Anthouard chargé, dès le lendemain, de cette mission, demeura plusieurs jours sans parvenir à joindre le général Hiller.

Il est inutile d'insister. Nous n'entendons point faire la contre partie de la thèse de M. Weil, mais seulement justifier nos réserves.

Quant au principal intéressé, à l'empereur auquel était destinée cette lettre si durement critiquée, l'impression qu'il en éprouva ne paraît pas davantage autoriser un pareil commentaire. Le 3 novembre, au moment où il venait de la recevoir; il écrivait de Mayence au viceroi :

« Mon fils, le roi de Naples me mancb qu'il sera bientôt à Bologne « avec 30,000 hommes. Cette nouvelle vous permettra de vous main« tenir en communication avec Venise et donnera le temps de pouvoir « attendre l'armée que je forme pour pouvoir reprendre le pays de « Venise. Agissez avec le roi le mieux qu'il vous sera possible : envoyez« lui un commissaire italien pourassurer la nourriture de sa troupe, « et faites-lui toutes les prévenances possibles afin d'en tirer le meil« leur parti. C'est une grande consolation pour moi que, moyennant « cette arrivée, je n'ai plus à craindre pour l'Italie. »

Tout autant qu'avec le jugement de M. Weil, il serait difficile de concilier le ton de cette lettre en ce qui regarde Murât, avec les ordres que, s'il fallait en croire les confidences de Savary à Pasquier, l'empereur aurait donnés quelques jours avant au sujet du roi de Naples.

Pasquier raconte dans ses Mémoires (T. II, p. 97) que lorsque Murât quitta Erfurt, un courrier expédié en toute hâte apporta au ministre


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de la police l'ordre de le faire arrêter et enfermer à Vincennes s'il se présentait aux portes de Paris. C'est un fait dont, ajoute-t-il, il ne peut douter, le tenant de Savary lui-même qui lui avait enjoint de mettre tous les agents aux aguets et de le faire avertir à la première nouvelle qui lui serait donnée de l'apparition du fugitif. L'empereur avait-il craint que Murât ne voulût recommencer la tentative toute récente du général Malet ? Ou bien Savary, dont on connaît l'hostilité contre Murât, a-t-il exagéré la portée des instructions qu'il affirmait avoir reçues ? Il est difficile de le savoir.

En tout cas, Napoléon dut être rapidement rassuré par la lettre reçue de Milan et à laquelle il fit indirectement, la faisant passer par le vice-roi, une réponse si peu en harmonie avec les sentiments qu'indiqueraient les ordres envoyés à Savary. .

Mais, dit M. Weil, l'empereur aurait assurément tenu un autre langage s'il avait été au courant des circonstances mêmes qui avaient accompagné le retour de Murât dans ses Etats ; qui l'avaient, ajouteronsnous, précédé ; qu'il ignorait absolument lui-même, et qu'il n'a peut-être jamais connues.

De Milan, il avait passé par Florence crû il avait vu sa belle-soeur, la grande-duchesse Elisa. Il s'était arrêté quelques instants à Rome, où il avait conféré avec le général Miollis, commandant le corps d'occupation des Etats romains. Il ne lui aurait pas caché, s'il en faut croire le Précis historique de Bellaire, qu'il considérait la cause de Napoléon comme perdue, sans cependant lui faire connaître qu'il songeait à se déclarer contre lui. Enfin il était arrivé à Naples le 4 novembre.

« // revenait de la grande armée, écrit M. Weil, avec les mêmes sentiments qu'il y avait emportés, les mêmes prétentions, les mêmes arrièrepensées, les mêmes rêves ambitieux, plus profondément, plus fortement ancrés dans son esprit par les inquiétudes que l'avenir lui faisait concevoir pour sa couronne, par les rapports des agents qui entretenaient, sur son ordre, des relations avec les souverains alliés, par les insinuations de son entourage en grande partie hostile à la France, par le dépit qu'il éprouvait de devoir ou servir sous les ordres d'un rival qu'il exécrait, ou lui confier ses troupes que des engagements solennels l'obligeaient à mettre à la disposition de l'empereur. » M. Weil veut bien cependant reconnaître qu'il est bien clair, bien certain, ce sont ses propres expressions, que Murât n'avait pris à' ce moment aucune résolution bien arrêtée, qu'il n'avait pas encore lié partie avec la coalition, qui pourtant,


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remarquons-le, ne lui ménageait pas les avances, et qu'il continuait à chercher sa voie.

Mais dans celle qu'il devait choisir définitivement, et qui devait, à travers d'incessants retours vers la cause de Napoléon, le mener au fatal traité de janvier 1814, d'autres l'avaient déjà engagé à son insu, tandis qu'il combattait aux côtés de Napoléon, et tout au premier rang la reine Caroline, la soeur de l'empereur, à laquelle lors de son départ pour Dresde il avait confié la régence.

Napoléon ayant, malgré les supplications de Caulaincourt, rejeté les conditions de paix proposées par les alliés au congrès de Prague, Metternich avait, le 11 août, expédié les actes qui en enregistraient la clôture, et rédigé celui par lequel l'Autriche, après avoir passé de l'alliance avec la France à la médiation, entrait dans la coalition. Le jour même de l'arrivée de Murât à Dresde, 17 août, l'empereur recevait des alliés la notification de la rupture de l'armistice et de la reprise des hostilités, dès longtemps prévue, et préparée par l'Autriche.

Du côté de l'Italie, elles s'ouvraient effectivement le 19 août par des combats d'avant-garde entre les troupes autrichiennes et l'armée du vice-roi chargé de défendre la Haute-Italie et les provinces illyriennes, et dont les opérations devaient être secondées, dans les plans de l'empereur, par les troupes napolitaines.

Mais ce concours était incertain. Le 19 août, la reine régente écrivait au vice-roi que, par les dispositions faites par le roi au moment de son • départ, elle avait les mains liées pour tout envoi de troupes hors du royaume ; que c'était de Dresde quelle devait attendre les instructions pour se diriger, et qu'elle ne perdrait pas un instant pour agir dès qu'elle en aurait reçu l'autorisation.

Sans vouloir contester la sincérité de Caroline à ce moment, en admettant qu'elle se crût liée par ies instructions du roi, il n'est que juste de remarquer que ces instructions remontaient à une date où la situation était toute différente. Le congrès de Prague s'occupait des négociations de paix générale, l'Autriche était encore officiellement l'alliée de Napoléon, et il ne pouvait dès lors être question à ce moment de la défense de l'Italie contre ses armées. Et d'un autre côté, peut-on ne pas signaler dans ce premier acte de Caroline régente, ce singulier contraste entre l'affirmation de sa soumission à des ordres du roi, sur lequel retomberait dès lors l'entière responsabilité de l'inaction de son armée, et l'indépendance avec laquelle, quelques jours plus tard, elle


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allait, à l'insu de Murât, faire vis-à-vis de l'Autriche des démarches d'une extrême gravité en vue de la conclusion d'une alliance ?

Dans la même lettre, elle ajoutait à la protestation de son dévoûment à la cause de son frère des renseignements peu favorables sur l'état d'esprit de l'armée napolitaine : « Cette opération, disait-elle en parlant de sa mise en marche vers le Pô, sera très difficile, et je ne puis vous cacher la répugnance presque insurmontable que montrent nos troupes à franchir nos limites, persuadées que c'est à la grande armée et au nord qu'on les envoie en effet, et que la destination pour Vérone et l'armée d'observation d'Italie n'est que simulée. Cette opinion répandue dans nos régiments et que le roi lui-même, avant son départ, a vainement essayé de détruire, a causé déjà beaucoup de désertions avec armes et bagages qui se sont p'ortées à 750 en 4 jours seulement dans le mouvement que vient d'effectuer une division envoyée dans les Abruzzes pour être plus près de la frontière. Cette situation n'est pas tranquillisante. Tous nos efforts vont être d'en écarter les dangers et de ne pas être, autant que possible, au dessous des circonstances. »

Et ce n'était point là un vain prétexte pour expliquer les retards dans l'envoi des soldats napolitains au vice-roi. Toujours hostile, même dans le détail, M. Weil semble bien cependant l'insinuer quand il affirme que si la lettre de Caroline au vice-roi n'a pas été inspirée et dictée par les partisans d'une alliance avec l'Autriche, si nombreux à la cour de Naples, elle a été certainement communiquée au ministre de ' cette puissance. La preuve ? C'est que celui-ci, dans une dépèche adressée quelques jours après à sa cour, a constaté, lui aussi, ces désertions. Mais il n'était point le seul à connaître ces faits ; il suffit de parcourir la correspondance du baron Durand, ministre de France à Naples, pour s'en convaincre et qu'il n'était point besoin d'une communication de la régente pour être instruit de ces dispositions de l'armée. En dépit de ses démarches presque incessantes pour hâter le départ des troupes, Durand était obligé de reconnaître, dans une dépêche du 31 août, adressée à Bassano, que tout envoi de troupes hors du royaume était plus difficile que jamais.

Mais ce qui était autrement grave et symptomatique que l'inaction de l'armée, en somme explicable par des raisons sérieuses, c'était le fait que, malgré la notification officielle à la cour de Naples de la déclaration de guerre de l'Autriche à Napoléon et de la reprise des hostilités, les relations diplomatiques n'étaient point suspendues entre


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Vienne et Naples. Non seulement, lisons-nous dans les dépêches de Durand, le comte de Mier, ministre d'Autriche, continuait à résider à Naples, mais il ne paraissait pas s'attendre à recevoir de son gouvernement l'ordre de quitter son poste. Le duc de Gallo, ministre des relations extérieures, le comblait, ainsi que son secrétaire Esterhazy, de prévenances et d'attentions, pendant que le prince Cariati, ambassadeur de Naples à Vienne, était, de son côté, maintenu dans ses fonctions.

Ce fut seulement le 10 octobre que Gallo informa officiellement le comte de Mier que, la guerre déclarée par l'empereur d'Autriche à la France devant nécessairement interrompre toute communication entre le roi des Deux-Siciles et la cour d'Autriche, Sa Majesté n'a pu s'empêcher d'ordonner à son ministre des affaires étrangères de passer au prince Ca.riati les ordres de quitter Vienne et les Etats autrichiens, et de déclarer en même temps que toute relation officielle entre les deux cours ne pouvant plus exister, ses fonctions diplomatiques devaient prendre fin. En conséquence de cette déclaration, il mettait à la disposition du diplomate autrichien les passeports nécessaires pour lui et sa suite.

La remise de cette note officielle avait été, le matin du même jour, précédée d'une communication officieuse faite à Mier par la régente elleTmême. L'ayant fait appeler, elle lui donna à lire une lettre du roi qui, tout en se plaignant des procédés de Napoléon, n'avait pu que se conformer à sa volonté et ordonner de lui remettre ses passeports. Elle lui avait exprimé tous ses regrets de cette détermination forcée du roi, et l'espoir que la cour de Vienne voudrait bien l'apprécier à sa juste valeur. Elle comptait que l'interruption momentanée des relations officielles ne porterait point atteinte aux sentiments d'amitié et d'intérêt si heureusement établis entre les deux gouvernements.

Pendant les jours suivants, une active correspondance s'échangea entre Mier et Gallo, au sujet des garanties que le premier demandait pour pouvoir traverser en toute sécurité d'Italie et rejoindre sa cour. Gallo ayant apporté à lui donner satisfaction moins d'empressement et de soins que n'en attendait Mier, celui-ci s'en plaignit avec une certaine raideur, et la reine envoya Gallo lui faire des excuses

Sur ces entrefaites arriva à Naples le chevalier Schinina, diplomate napolitain, qui apportait de Vienne des ouvertures de la part de Metternich. Il fit, en même temps, connaître à la régente la véritable posi-


-10tion

-10tion l'armée de Napoléon, la défection de la Bavière, et lui parla, lisons-nous dans le rapport que Mier adressa à Metternich dès son retour en Autriche, avec tant de force sur les événements à prévoir et le parti que le gouvernement napolitain devait embrasser dans les circonstances actuelles pour se sauver d'une perte inévitable, qu'il la décida à se ménager quelques communications avec l'Autriche.

Dès le lendemain matin, Caroline faisait appeler le comte de Mier. Elle lui dit combien elle avait été touchée des procédés de l'empereur d'Autriche ; que la position personnelle du roi ne lui avait pas permis d'en profiter ; que l'empereur ne consentirait pas pourle moment à son retour dans ses Etats ; que, présent à l'armée française, il ne pouvait faire aucune démarche ni entrer dans un arrangement qui pourrait mettre son honneur sous un faux jour ; mais qu'elle, comme régente du royaume, était autorisée par l'acte même de la régence, qu'elle fit lire à Mier, à prendre dans les occasions extraordinaires telles déterminations et partis qu'elle trouverait convenable à la tranquillité et conservation du royaume; que, par conséquent, mettant une entière confiance clans les promesses de l'empereur François, elle était décidée à entrer en négociation avec l'Autriche, s'assurer de sa protection et contribuer de toutes ses forces à l'accomplissement de ses vues. Elle demanda à Mier de lui rédiger un mémoire et de lui développer ses idées à cet égard.

Mier ne manqua pas, on le comprend, de satisfaire à ce désir. Il se hâta de rédiger le mémoire demandé, où rien, affirme-t-il, n'était négligé pour décider la reine à prendre un parti décisif conforme aux intérêts de son royaume et à ceux de sa propre cour. Après avoir insisté sur les mauvais procédés de Napoléon à l'égard de Murât, et sur l'impossibilité pour celui-ci de regagner la confiance de l'empereur en dépit des nouvelles preuves de dévouement qu'il venait de lui donner, il rappelait que, depuis plus de deux ans, Tempereur avait déclaré son projet de réunir le royaume de Naples à l'empire, et il affirmait que, s'il sortait victorieux de sa lutte contre l'Europe, il ne manquerait point de le mettre à exécution. Il n'y avait donc de salut pour ce royaume que clans la protection des alliés. Il ne fallait donc pas compromettre l'avenir par quelque démarche irréparable, telle que l'envoi de l'armée napolitaine au secours du vice-roi. Et d'un autre côté on devait avoir toute confiance dans les promesses de l'Autriche (assertion singulièrement osée, disons-le en passant, au lendemain même du jour où


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l'Autriche venait de déclarer la guerre à Napoléon, son allié de la veille, et gendre de son souverain.) Le gouvernement napolitain devait donc s'adresser directement à cette puissance, lui faire connaître ses intentions, et prendre avec elle des arrangements sur la marche à suivre dans les circonstances actuelles et futures que les chances de la guerre pourront amener.

Or, le roi, en quelque sorte prisonnier de Napoléon qui, commel'avait dit Caroline, ne lui permettra certainement pas de revenir dans ses Etats, ne peut entamer ni suivre cette négociation que rendent urgente pour son trône les progrès des armées autrichiennes en Italie. La reine doit donc considérer qu'elle se trouve dans ces circonstances extraordinaires où elle est autorisée par l'acte de régence à prendre un parti décisif. « C'est, dit Mier en terminant ce rapport que nous nous bornons à résumer, c'est le moment, et peut-être le seul qui se présentera jamais, où la reine puisse déployer ses grandes qualités que le ciel lui a si richement prodiguées et dévoiler aux yeux de l'univers les vertus indispensables pour un souverain qu'elle possède dans un degré aussi éminent. »

Flatteries plus ou moins exagérées, mais assurément inutiles pour décider Caroline, car le mémoire de Mier n'était à vrai dire que le reflet très exact des pensées que la reine lui avait ou dévoilées ou laissé deviner dans l'entretien de la veille. Le 28 octobre, Caroline fit appeler Mier, et lui déclara qu'elle était fermement décidée à négocier avec l'Autriche et qu'elle profiterait de son départ pour le charger d'ouvertures à sa cour; que, ne pouvant consulter auparavant le roi, son époux, sur ses intentions actuelles à cause de son éloignement, elle se bornerait simplement à lui communiquer ses décisions. Mettant une entière confiance dans les vues généreuses et amicales de l'empereur François et pour lui donner une preuve qu'elles sont justifiées, elle chargea Mier de déclarer à son souverain qu'elle se confierait entièrement aux directions qu'il lui plairait de lui donner ; qu'en attendant de connaître ses intentions elle promettait de ne pas faire sortir un homme du royaume, si même elle en recevait l'ordre du roi; qu'elle donnerait des ordres pour rendre son armée mobile et la îaire marcher si telles seraient les intentions de l'Autriche.

Il fut enfin convenu que la reine recevrait encore Mier avant son départ,retardé jusqu'au 6 novembre, le bâtiment sur lequel il devait partir ne pouvant être prêt qu'à cette date.


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C'est sur ces entrefaites que, le 4 novembre, se produisit le coup de théâtre du retour de Murât dans sa capitale.

Dès qu'il fut connu, Mier se mit en mouvement pour en connaître les motifs. L'opinion générale était, d'après lui, que le roi s'était sauvé de l'armée sans en prévenir l'empereur. Mais quelques heures après, Caroline lui envoyait son secrétaire pour lui dire que Murât avait quitté l'armée avec le consentement de l'empereur afin de veiller à la sûreté et 'à la défense de son royaume, et qu'il avait d'ailleurs l'intention de faire des propositions à l'Autriche en vue d'obtenir la garantie et l'indépendance de ses Etats.

Mais là ne se bornait pas la communication de Caroline. Surprise, comme tout le monde,par le retour inopiné de Murât, et se rendant compte de l'imprudence qu'elle avait commise en s'engageant si avant avec le diplomate autrichien, elle faisait prier celui-ci, afin, disait-elle, de ménager l'amour-propre du roi et de ne pas heurter son caractère jaloux du pouvoir royal, de ne pas faire mention, dans l'entretien que Murât se proposait d'avoir avec lui, des pourparlers et arrangements qu'elle avait pris avec lui pour les communications à établir entre les deux cours, et les propositions qu'elle devait le charger de porter à Vienne. Elle voulait, ajoutait-elle, que toutes ces idées et déterminations aient l'air de venir du roi. Du reste, elle promettait de lui faire faire tout ce que l'Autriche exigerait.

Le désir de ménager l'amour-propre de son royal époux était-il réellement le motif pour lequel elle tenait à lui cacher ses démarches? On en peut au moins douter lorsqu'on la voit en même temps promettre de se rendre maîtresse de ses décisions. Dès l'arrivée de Murât, elle a pu se rendre compte.que si, dans son esprit,s'agitent des velléités de défection à la cause de Napoléon et d'entente avec la coalition, son esprit est loin d'y être encore définitivement arrêté ; que, comme le reconnaît M. Weil, il cherche encore sa. voie; qu'un brusque revirement, comme celui qui, deux fois déjà, l'a ramené à l'empereur, peut se produire, et bouleverser tous les plans qu'elle a formés pour conserver sa couronne et préparer à ses enfants des alliances matrimoniales avec la maison de Hasbourg. Elle a compris, d'un autre côté, que si, en dernière analyse, Murât se décide contre Napoléon, il n'entendra pas se livrer à l'Autriche sans conditions, et faire, précisément ce qu'elle a promis pour son compte, tout ce que l'Autriche exigera de lui.


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Bien loin que Murât soit prêt à céder aux vues et aux suggestions de Caroline, ses premiers actes témoignent d'un état d'esprit tout contraire. Le 6 novembre, surlendemain de son arrivée, Gallo fait insérer dans les gazettes napolitaines un article qui cause à Mier une douloureuse surprise. De cette communication officielle il ressort que, contrairement aux premiers bruits qui ont couru, c'était non pas contre le gré, mais avec la permission de Napoléon que le roi avait profité de la retraite de l'armée après Leipzig pour venir embrasser sa femme et ses enfants, et qu'il retournera à l'armée dès qu'on aura besoin de lui.

D'un autre côté, déjà et non sans raison ému par ces déclarations, Mier attendait avec une impatience non dissimulée l'audience que la reine lui avait fait annoncer. Ce ne fut que le 8, quatre jours après son retour, que Murât le fit prévenir qu'il le recevrait; et dans quelles conditions ! en particulier, à onze heures du soir, dans la maison du grand maréchal. Le roi manifestait clairement sa volonté de ne point se compromettre ouvertement et d'enlever à cette audience tout caractère diplomatique.

Dans son rapport à Metternich, Mier a reproduit tous les détails de cet entretien, qui se prolongea jusqu'à quatre heures du matin et qui dut lui faire comprendre qu'il n'aurait peut-être pas aussi facilement raison du roi que Caroline le lui avait fait espérer.

« Le premier pas est fait, déclara Murat; j'ai quitté l'armée française conformément au désir de l'Autriche et de l'Angleterre. Je suis décidé à ne pas fournir les troupes qu'on me demande, mon parti est pris : je veux m'unir aux alliés, défendre leur cause, contribuera chasser les Français de l'Italie et j'espère qu'on me fera participer aux avantages qui en devront résulter. Je promets de renoncer franchement à mes relations avec la France. Je veux me lier avec l'Autriche et agir entièrement dans ses vues; pourvu qu'elle me soutienne en toute occasion et me procure des avantages indispensables, si elle veut que je ne lui sois pas à charge et puisse au contraire lui être utile. »

Des avantages, c'était là précisément le point délicat auquel la reine n'avait jamais fait allusion. Les vues de Murat allaient bien au-delà de la garantie pure et simple de la couronne de Naples. Il ne les dissimula pas à Mier, pas plus d'ailleurs qu'il ne les avait dissimulées à l'empereur dans sa lettre de Milan. Or, Mier n'ignorait point que les vues de l'Autriche sur l'état futur de l'Italie, en cas du triomphe de la


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coalition, ne pouvaient s'accorder avec les prétentions mises en avant par Murat. Mais il se borna à quelques observations, d'ailleurs très discrètes,sur l'étendue de ces prétentions. Il estima préférable, puisque la reine avait promis de le faire souscrire aux exigences de l'Autriche, de s'en rapporter à elle, à ses ministres et aux personnes de sa confiance, pour l'amener, sans prendre d'engagement avec lui, à faire le pas décisif qui devait le brouiller, sans retour possible, avec l'empereur. Comme Caroline, il s'était rendu compte que, malgré les déclarations de Murat, son adhésion à la coalition n'était point arrêtée dans son esprit ; qu'elle pouvait dépendre des circonstances, et que l'essentiel était de le compromettre par quelque démarche qui le mettrait à la merci des alliés.

Cet entretien se termina sur une note que l'on serait tenté de taxer de haute comédie s'il ne s'agissait d'aussi graves intérêts. Murat était à ce point ignorant des démarches que s'était permises Caroline avant son retour, qu'il pria Mier de la voir avant de quitter Naples. « Parlez-lui franchement, lui dit-il, faites-lui bien comprendre la position des affaires ; elle a de la confiance en vous ; vos discours ne pourront donc que la raffermir dans ses bonnes dispositions. » Murat ne se doutait point du degré de bonté des dispositions de Caroline envers l'Autriche, ni des témoignages qu'elle en avait déjà donnés à son ministre.

Celui-ci n'eut garde de manquer l'occasion si opportunément offerte de revoir la reine. Il lui fit comprendre combien les prétentions du roi, par leur exagération, risquaient de faire échouer la négociation dans laquelle elle-même s'était engagée ; qu'il fallait se hâter et ne pas laisser échapper le moment de pouvoir favoriser les opérations de la coalition, sous peine de perdre le bénéfice d'une coopération inutilesi trop tardive. Les mêmes propos furent tenus à Gallo, et selon le désir de Mier, rapportés à Murat.

Murât sentit qu'il s'était trop découvert et il autorisa Gallo à déclarer à Mier, la veille du jour où celui-ci devait quitter Naples, que ce qu'il lui avait fait entrevoir de ses vues d'agrandissement n'était que des idées dont la réalisation serait très avantageuse et désirable pour son pays, mais que ce n'était point son dernier mot; qu'il fallait discuter la chose et qu'il était sûr de s'entendre avec l'Autriche.

Quelle que dût être la conduits postérieure de Murat, il n'en est pas moins certain, et c'est ce que nous pensons avoir établi, que tandis que


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Caroline, soeur de Napoléon, avait déjà prononcé les paroles décisives de la défection, il hésitait encore, à ce moment, à se jeter dans les bras de la coalition et qu'il cherchait sa voie. Certes so i ambition est déme. surée. Ce n'est pas seulement la conservation de Naples qu'il poursuit: il r ve la constitution à son profit d'un royaume d'Italie dont le Pô serait la limite ; il ne peut douter combien sont différents les plans d'avenir de l'Autriche et des alliés. Tous ses efforts vont tendre, par l'occupation des pays qu'il aspire à gouverner, à se créer un titre de fait à invoquer au moment de la signature de la paix générale, que, d'accord avec tous les serviteurs du régime impérial, il conjure Napoléon d'accepter, quand il est encore temps, on le croit du moins, de l'obtenir honorable pour le souverain et pour la France. Ce qu'il cherche à se garantir en cas de triomphe de la coalition, il l'a d'abord demandé à Napoléon, et l'on peut, à bon droit semble-t-il, discuter le point de savoir si Napoléon n'eût pas mieux fait de se l'attacher par des concessions auprès desquelles celles que son obstination le contraignit à subir furent bien autrement onéreuses et humiliantes.

En tout état de cause, et de quelque côté que les événements dussent le porter, Murat avait d'abord à consolider sa situation à l'intérieur, et pour cela il devait songer à donner certaines satisfactions aux aspirations et aux besoins du peuple que Napoléon lui avait donné à gouverner etqui entendait, peut-on s'en étonner? être gouverné non pas seulement dans l'intérêt de l'empereur, mais aussi pour son propre intérêt. Le 6 novembre, il adressa un ordre du jour à ses soldats : « Le roi, disait-il, reprend aujourd'hui le commandement de son armée. Elle est prévenue que les troupes napolitaines, qui ont combattu avec tant de gloire dans le Nord, sont en route pour rentrer dans le royaume. L'armée napolitaine ne se verra plus exposée à l'avenir à aller combattre dans les climats rigoureux pour lesquels elle n'est pas faite ; et ce n'est plus qu'en Italie qu'elle pourra être appelée pour la défense et l'indépendance de la patrie. »

Cette promesse pouvait seule sinon arrêter, du moins diminuer le mouvement de désertion qui devait se produire au premier signal de la mise en mouvement des troupes napolitaines.

C'est à une préoccupation du même ordre, tout autant qu'au désir de s'assurer l'adhésion de l'Angleterre à l'entente éventuelle avec l'Autriche, qu'il convient d'attribuer le décret du n novembre, qui ouvrait les ports du royaume au commerce étranger, et dont le préambule

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indiquait les motifs d'ordre économique. Cette mesure produisit immédiatement des résultats favorables, non moins pour les intérêts du pays que pour la popularité du roi.

Par là se trouvait fortifiée l'autorité dont, plus que jamais, il avait besoin pour faire supporter à ses sujets les charges financières et militaires de la campagne à laquelle il se préparait avec activité. Des appels incessants lui étaient adressés pour hâter la mise en mouvement de son armée qui devait, comme il l'avait si justement demandé, former un corps séparé, placé uniquement sous ses ordres.

Le 14 novembre, Gallo remettait au ministre de France une communication officielle aux termes de laquelle le roi allait porter sur le Pô 30,000 hommes, par Ancone et Bologne. Il avait déjà fait passer au gouvernement italien et aux autorités des départements romains et toscans les offices nécessaires en vue des mesures à prendre pour assurer la subsistance de ses troupes, et Durand avait reçu l'ordre d'en aviser le ministre impérial.

Cette communication avait d'ailleurs été impuissante à rassure. Durand et il n'avait point caché ses appréhensions à Bassano. Le représentant de Napoléon à Naples n'était certes pas de taille à lutter d'habileté et d influence avec celui de l'Autriche. Il ne voit point ce qui se passe à la cour; sur les sentiments de Caroline il se méprend absolument. Il écrit le 14 novembre que celle-ci fera ses efforts pour empêcher le roi de céder à l'influence des ennemis de la France, bien que se voyant dans une incertitude absolue sur les intentions de l'empereur ; mais que le roi se sentant plus fort, elle craint qu'il n'échappe même aux habitudes de sa confiance en elle. C'est après une partie de chasse où il avait été invité que la reine lui a fait ces confidences qu'il s'empresse de transmettre sans paraître soupçonner qu'elles sont tout le contraire de la vérité.

Après l'audience de la reine, il a été reçu par Murat. Le roi a commencé par lui déclarer que, bien que l'empereur lui eût laissé carte blanche, il ne voulait en user qu'en conciliant les besoins de sa propre conservation avec les intérêts de la France. Après avoir parlé de la mauvaise situation des affaires en Allemagne, il a insisté non sans amertume sur la gravité de l'état des choses en Italie, suite de la retraite précipitée du vice-roi, et sur l'inquiétude des esprits qu'il a remarquée à Milan, à Florence et à Rome. Partout, sur sa route, on lui disait que, seul, il pouvait sauver l'Italie. Il a ensuite parlé d'une


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lettre que deux jours auparavant il a adressée à l'empereur. On ne la connaît, le texte n'en ayant pu être retrouvé, que par une communication de Clarke au vice-roi. Murat y annonçait à Napoléon qu'il allait se mettre en mouvement à la tête de 40,000 hommes, et il lui deman. dait de proclamer l'indépendance et l'unité de l'Italie, comme le seul moyen d'animer les Italiens à la défendre. Mais, sans attendre la réponse qu'il sollicite, il a mis 50.000 hommes sous les armes ; dans trois jours le mouvement vers la frontière commencera, et à la première réquisition de Miollis, gouverneur des Etats romains, il marchera sur le Pô. Et même il pressera sa marche, parce qu'il craint que, si les Autrichiens pénétraient sur le territoire de l'empire et au coeur de l'Italie, on ne lui en reproche la perte. Que deviendraient la Toscane et Rome? Que deviendrait-il lui-même, privé de ses communications avec la France? En empêchant le passage du Pô, il conserverait le plus important des débouchés et assurerait les moyens de faire passer en Italie tous les renforts nécessaires. Il a, en dernier lieu, essayé de justifier le décret sur la liberté du commerce.

Après avoir consigné ces déclarations, Durand ajoute en terminant sa dépêche : « Le roi est dans une position difficile. Sa pensée se porte « d'une combinaison à une autre. Tantôt il ne songe qu'au maintien « et à l'indépendance de sa couronne, et alors il lui suffirait que ses « armées et l'affection qu'il croit avoir inspirée à son peuple lui garan« tissent son état actuel. Tantôt il s'élance vers un avenir de gloire et « d'ambition dont il ne voit pas le terme. »

Intimement convaincu du danger que les résolutions de Murat ne peuvent manquer de faire courir à la domination et à l'influence françaises en Italie, Durand ne craint pas, dit M. Weil auquel cette formule est familière, de donner à son chef à la fois son opinion et un conseii.

« Les dispositions que le roi fait aujourd'hui ont, sans aucun doute, « pour objet principal, en propageant en Italie l'impression de son « influence, de montrer à la fois ce qu'il peut faire pour la défense de « l'Italie aux cours de Vienne et de Londres ; ce qu'elles doivent redou« ter ou espérer des forces qui sont en son pouvoir. D'un lcôté ou de « l'autre, le roi voudrait peut-être se préparer un meilleur arrange« ment II n'y aurait pas alors un moment à perdre pour empêcher « une explosion tout à fait hostile, et pour retenir cette cour au moyen


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« de quelques avantages. Cette cour est déjà trop ébranlée pour qu'elle « reste dans son système naturel. »

« Le conseil que Durand prenait sur lui de donner, déclare M. Weil, était sage. On ne le suivit pas. D'ailleurs il eût été déjà trop lard. Durand l'ignorait, il est vrai ; mais, comme il le laissait entrevoir lui-même dans la dernière phrase de sa dépëche, « on avait laissé passer trop de temps ». L'empereur avait trop longtemps gardé le silence. Il n'avait pu se résigner à faire à des intérêts majeurs le sacrifice de ses légitimes rancunes et de son juste ressentiment. Les concessions auxquelles il aurait consenti après la réception de la dépêche de Durand seraient vraisemblablement arrivées trop lard, et en tout cas après l'entretien secret que Joachim avait eu avec le comte de Mier. Elles auraient paru insuffisantes à l'ambition d'un souverain grisé par les adulations des courtisans, aveuglé par les habiles menées des agents de l'Autriche et surtout de l'Angleterre; inacceptables et presque outrageantes à ce prince affolé par ses rêves chimériques de grandeur et de toute-puissance, qui se croyait sûr d'être avant peu l'arbitre des destinées, le maître, le premier roi de l'Italie une et indépendante depuis les Alpes jusqu'au détroit de Messine. »

Ces affirmations trouvent leur correctif clans l'exagération même dont elles sont empreintes. M. Weil veut bien reconnaître que certains torts se trouvent du côté de l'empereur. Mais il déclare que le parti de Murat était pris irrévocablement, que des concessions tardives ne pouvaient le ramener à Napoléon, comme si Joachim n'eût pas déjà donné la preuve qu'il savait se dégager des influences et des intrigues antifrançaises d'une partie de son entourage.

Cette appréciation veut s'appuyer à la fois sur l'état d'avancement des pourparlers engagés avec les agents de l'Autriche et de l'Angleterre, et sur le caractère démesuré des ambitions du roi de Naples : ce qui est difficile à concilier.

Si réellement Murat aspire à devenir le souverain de l'Italie unifiée, il n'est pas assez aveugle, quelque peu de sens politique qu'on lui concède, pour ne pas prévoir l'irréductible hostilité de l'Autriche à de pareilles visées. Dans cet entretien avec Mier, déterminant d'après M. Weil, c'est à des avantages singulièrement plus modestes qu'il a fait allusion. Il y a été répondu par une réserve significative, encore précisée par les déclarations faites ensuite à la reine et à Gallo. Singulier encouragement, il faut l'avouer, à des ambitions tellement disproportionnées au peu qu'on lui refuse de ce côté.


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Serait-ce donc surtout aux habiles menées des agents de l'Angleterre qu'il faudrait attribuer, avec M. Weil, cet inconcevable aveuglement de Murat ? L'on ne sait en vérité comment apprécier cette assertion, lorsque, par les documents mêmes_ de son ouvrage, on voit les sentiments et l'attitude du principal de ces agents, lord Bentinck, capitaine général en Sicile. Ce ne sont même plus les réserves du ministre autrichien. C'est l'hostilité la moins dissimulée. C'est le refus obstiné opposé à une proposition d'armistice. C'est la volonté de renverser Murat, pour rendre leur trône aux Bourbons et établir la main-mise de l'Angleterre sur la Sicile.

Telle était la situation au moment où le ministre de France conseillait, dans sa dépêche, une attitude conciliante à l'égard de Murât. Telle elle devait se maintenir assez longtemps encore pour qu'il soit au moins téméraire d'affirmer qu'il était trop tard.

Par une curieuse coïncidence, c'est le même jour où Durand expédiait cette dépèche que l'empereur ordonnait à Fouché de se rendre à Naples. Trois jours après, écrivant au prince Eugène, il l'avisait de cette mission confiée, ou, pour mieux dire, imposée à l'ancien ministre de la police. « J'ai, lui dit-il, envoyé le duc d'Otrante à Naples pour éclairer le roi et l'engager à se porter sur le Pô. Si ce prince ne trahit pas ce qu'il doit à la France et à moi, sa marche pourra être d'un grand effet. »

Cette marche de l'armée de Naples vers la haute Italie, Fouché, qui recevait ainsi mission de la provoquer, devait la trouver, à son arrivée à Naples, en pleine voie d'exécution.

Dès le 16 novembre, en effet, douze jours après le retour de Murât, son ministre de la guerre écrivait au général Miollis, commandant des départements romains, pour lui demander des explications sur la manière dont seraient organisés les services pendant le passage et le séjour dans sa division de l'armée napolitaine. Le 19, au camp de Capo di Chino, Murât passait en revue 14 escadrons de cavalerie et 9 bataillons d'infanterie, et donnait l'ordre de départ vers Rome de la première division de son armée. Le jour même, le général Aymé, chef de l'étatmajor général, informait Miollis que ce mouvement commencerait le surlendemain, et lui communiquait l'itinéraire des divers régiments dont l'arrivée à Rome s'échelonnerait du 25 novembre au 2 décembre. « Sa Majesté, ajoutait-il, m'a chargé de vous prier de faire préparer, « tant sur les lieux de passage dans l'Etat impérial qu'à leur arrivée à


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« Rome, les établissements qui leur seront nécessaires et de leur faire « assurer en même temps leur subsistance et les moyens de transport. « Le lieutenant-général Carascosa, qui a le commandement de toutes « les troupes désignées dans l'itinéraire ci-joint, a pour instruction « spéciale de n'exécuter absolument que les ordres qu'il recevra direc« tement de Sa Majesté. Sa Majesté espère que ses troupes sauront se « concilier l'estime des habitants par leur bonne conduite et qu'elles se « feront généralement chérir des peuples chez lesquels elles vont « séjourner. »

Un lecteur non prévenu trouverait, semble-t-il, cette lettre simple et naturelle. M. Weil en juge d'autre manière : « Il y aurait bien des choses à relever dans la teneur intentionnellement ambiguë de la dépêche du général Aymé, dans le ton quelque peu arrogant et comminatoire et poulle moins bizarre dont le chef d'état-major général de Murat se servait à l'égard d'un homme d'honneur tel que le général Miollis. »

Bien qu'il ne les fasse pas connaître, M. Weil doit avoir ses raisons de parler ainsi. La principale nous paraît bien être la déclaration que Carascosa n'aura d'ordres à recevoir que du roi de Naples, et ne sera pas soumis à l'autorité des fonctionnaires des départements romains. On se souvient que, dans sa lettre de Milan, Murat avait demandé à l'empereur le commandement de cette région. Si Napoléon n'a pas répondu directement à son beau-frère, toute sa correspondance, tous ses ordres soit au vice-roi, soit à Miollis, indiquent qu'il veut le satisfaire à tout prix, tant il juge indispensables et précieuses sa collaboration à la défense de l'Italie et l'entrée en ligne de son armée.

C'est, entre autres preuves de cet état d'esprit, un passage des instructions qu'il a, le 20 novembre, rédigées pour le général d'Anthouard retournant auprès du vice roi. « Le roi, y lisons-nous, est un homme 1 très brave, il anime, il enlève, il mérite des égards. » Remarqueronsnous que c'est précisément par ces qualités d'entraîneur que Murât est utile en ce moment? Ce n'est qu'à contre-coeur que les troupes napolitaines s'éloignent de leur pays. Il a suffi que soit publié l'ordre de départ pour que les désertions se multiplient, en dépit de l'assurance publiquement donnée par le roi que l'armée ne sera pas conduite hors de l'Italie. Seul, et Napoléon ne l'ignore point, Murat peut avoir raison de ces répugnances, seul il peut entraîner ses soldats et les amener sur le Pô. Voilà pourquoi il se réserve de les commander et d'être le seul à donner des ordres à ses généraux. Son chef d'état-major en informe


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le général Miollis. Qu'y a-t-il là d'arrogant? Quoi surtout d'intentionnellement ambigu? Le vrai, c'est que Miollis n'a cessé de se montrer hostile à Murat : ce n'est qu'à contre-coeur qu'il exécutera, d'après M. Weil lui-même, les ordres qu'il a reçus de Paris sur la conduite à tenir à l'égard des troupes napolitaines. En faut-il davantage pour expliquer le jugement de l'auteur sur la dépêche du chef d'état-major de Murat?

Question de détail, si l'on veut, mais trop significative de l'esprit dans lequel l'ouvrage a été composé. L'auteur ne se préoccupe même pas toujours, on le verra plus d'une fois, des contradictions qui sont à relever entre ses assertions et les. documents, plus ou moins dignes de foi, qu'il s'empresse de reproduire parce que défavorables à Murât.

C'est ainsi qu'à propos de cette mise en mouvement de l'armée napolitaine M. Weil écrit : « Murat croyait qu'il lui serait peut-être possible de s'assurer la possession des territoires qu'il convoitait, non point par des victoires décisives et par une action combinée avec les alliés, mais par une simple main mise. Il tenait de toute façon à ce que les opérations éventuelles de son armée fussent absolument indépendantes et parfaitement distinctes aussi bien de celles du vice-roi que de celles de Hiller ou de Nugent afin d'être et de demeurer seul maître des provinces occupées par ses troupes ».

Il est possible que tel fut le plan de Murat. Pour le moment nous ne discutons point l'affirmation de M. Weil. Mais il nous sera permis de trouver singulier que pour lui donner un fondement il fasse état d'un rapport de M. de Norvins, directeur général de la police à Rome, en date du 21 novembre, dont il extait ce qui suit : « L'opinion est que ce pays « va être occupé par l'armée napolitaine et ponr le compte du roi qui « fait partie de la coalition. La prise de Ferrare par les autrichiens « menace Bologne, et une fois cette ville occupée par l'ennemi, la grande « duchesse de Toscane et les départements romains sont à la merci de « l'archiduc ou du roi de Naples. Ce sont les hommes les mieux instruits « de ce qui se passe à Naples qui certifient le projet d'occupation et l'in« telligence existant entre le roi de Naples et les coalisés. Les articles « du Moniteur Napolitain se multiplient dans ce sens ». Et pour terminer, Norvins regrette que « général Miollis n'ait pas fait arrêter Murat « lors de son passage à Rome. »

Il est difficile à première vue de comprendre pourquoi M. Weil apporte à l'appui de sa thèse un document qui lui est plutôt contraire. D'après lui Murat tient de toutes façons à ce que ses mouvements


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soient absolument indépendants et parfaitement distincts des mouvements de l'Autriche. D'après Norvins, le roi fait partie de la coalition, son intelligence avec les coalisés est certaine. La contradiction n'a pu échapper à M. Weil, mais pouvait-il s'empêcher de reproduire un document, fut-il de police, affirmant la trahison de Murat, et où est exprimé le regret que Miollis ne l'eût pas fait arrêter ?

Ce qui ne parait pas douteux c'est que, quelles que pussent être ses hésitations, Murat n'était pas encore l'allié des coalisés. Le 24 novembre il eut un entretien avec Durand : il lui annonça qu'il avait reçu une lettre de l'empereur, que les exhortations qu'elle renfermait l'avaient trouvé tout prêt à agir dans le sens convenu ; que la première division était déjà à quelques journées de Naples: que les autres allaient partir et qu'il les suivrait bientôt pour se mettre à leur tète. Il fit cependant observer au ministre de France que, depuis son retour, il avait plusieurs fois écrit à Napoléon afin de bien détailler ses propres vues sur la défense de l'Italie. Il attendait, espérant les recevoir bientôt, des réponses le mettant en mesure de donner à ses opérations toute l'énergie qui pourrait en assurer le succès. Il insista ensuite sur les précautions qu'il avait dû prendre, à cause de l'esprit public, pour faire sortir ses troupes du royaume et les conduire sur le théâtre de la guerre Mais, une fois à leur tète et les tenant dans sa main, il saurait bien les mettre en jeu. C'étaient ces ménagements qui l'avaient forcé à laisser dans une espèce de vague ses instructions et ses vues et qui le conduisaient encore à engager Durand à ne pas trop parler de l'accord convenu entre l'empreur et lui. Et tout ceci est vraisemblable.

Durand qui avait reçu l'ordre de demander à Murât de presser son mouvement sur Bologne profita, pour pénétrer les intentions du roi, de l'occasion que celui-ci lui en avait offerte, involontairement peutêtre, dit M. Weil, au cours de l'entretien. Murat lui avait annoncé qu'un parti autrichien paraissait se diriger sur Bologne, et il avait fait lui-même la remarque que sa division des Abruzzes se portant sur Ancône et Rimini pourrait prendre ce parti à dos et le forcer à une prompte retraite. Singulières préoccupations d'un esprit qui serait déjà absolument engagé à la coalition !

Si, comme nous l'avons pu constater au sujet de Caroline, la clair voyance n'était pas toujours le fait de Durand, il savait prévoir. Comme s'il eut eu, nous dit M. Weil, le pressentiment des événements, il annonçait à Bassano dans la dépèche où il lui rendait compte de cet en -


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tretien, qu'il reviendrait à la charge sur ce sujet auprès du duc de Gallo et tacherait que cette direction fut suivie.

Dès le lendemain Aymé informait Miollis que la deuxième division commandée par le lieutenant général d'Ambrosio avait reçu l'ordre de se mettre en route pour être réunie à Ancône du 2 au 4 décembre ; quant à la garde royale, ses premiers détachements devaient partir de Naples le lendemain, et elle devait être réunie en entier à Rome le 8 décembre.

Aussitôt qu'il eût connaissance de ces ordres, Durand se rendit chez Gallo et insista pour que la division des Abruzzes fut vivement poussée sur Rimini, Ravenne et Bologne. Mais, à sa grande surprise, Gallo lui laissa entendre que l'occupation de Bologne était prématurée.

Que tel fut l'avis de Gallo, l'occupation de Bologne n'en était pas moins décidée dans l'esprit de Murat si l'on se reporte aux instructions que, quatre jours auparavant, le 22, il avait remises au général Colletta, commandant en chef du génie, qu'il envoyait à Bologne, avec la mission d'établir dans cette ville son quarner général et de reconnaître toute la région de la rive droite du Pô. Ces instructions se terminaient par la recommandation de cultiver de bonnes relations avec les autorités italiennes, de lâcher surtout de se lier avec le général Pino et autres généraux qui pourraient se trouver à Bologne : « Vous devez, ajou« tait le roi, être extrêmement réservé dans vos discours et vous borner « à dire que les Italiens peuvent compter entièrement sur le secours « de nos troupes. »

En rédigeant ces instructions Murat ne se doutait pas qu'elles fourniraient une arme terrible contre lui à l'historien du prince Eugène. « Même sans cette dernière phrase qui révèle, écrit-il, les véritables intentions de Murat, la teneur des instructions qui précèdent le paragraphe final aurait suffi pour édifier un observateur quelque peu attentif sur les projets secrets du roi de Naples. Il est évident, en effet, que dès ce moment, Murat est en réalité décidé à maintenir ses troupes sur la rive droite du Pô. Il ne songe en aucune façon à aller se joindre à l'armée française d'Italie. Il craint évidemment que le vice-roi n'ait vu clair dans son jeu, n'ait eu vent de ses menées, des ouvertures qu'il a faites à l'Autriche et à l'Angleterre, puisqu'au lieu de demander à son allié, à son compatriloe, à son parent, au prince Eugène, voilà le grand mot lâché, des renseignements que celui-ci n'aurait pu, Veut-il même voulu, refuser à des troupes amies en route pour le rejoindre


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et venant combattre à côté de ses régiments, Murat préfère avoir recours à des reconnaissances. Il est si peu disposé à prêter son concours au viceroi, à l'empereur et à la France qu'il recommande aux officiers de Colletta de noter toutes les bonnes positions qu'ils trouveront sur la route de Florence à Bologne et de Florence à Modène.

« De semblables ordres, telle est la conclusion de cette tirade, rendent inutiles et superflus tout commentaire, toute remarque sur le caractère de celte lettre et la nature de cette instruction. »

Mais a-ton jamais demandé à Murat, depuis son retour à Naples, autre chose que de porter ses troupes vers le Pô, qui va être, grâce aux retraites successives du vice-roi, le théâtre des prochaines opérations ? Les instructions envoyées à Durand lui prescrivent de faire activer la marche sur Bologne, et c'est à Bologne même que, sans avoir attendu la communication de Durand, Murat envoie Colletta pour y établir son quartier général et reconnaître la région où se dérouleront les opérations, ce qui est le premier devoir d'un chef d'armée. Mais, et voilà le grief impardonnable, c'est à un de ses généraux qu'il a confié cette mission. Que ne s'est-il, pour être renseigné, adressé au" vice-roi? Celui-ci n'aurait pu, même s'il l'eût voulu,-ce qui est de la part de M. Weil une supposition au moins maladroite, refuser ces renseignements. Soit : encore faudrait-il pouvoir affirmer que le vice-roi eût été en mesure de les fournir. Or il se plaint sans cesse, ou son historien se plaint pour lui, de la déplorable insuffisance des renseignements qu'il reçoit sur les mouvements de sa propre armée, dans la haute Italie. Qu'en serait-il donc pour la région au delà du Pô ?

Et d'ailleurs de ce que Murat prescrivait à Colletta de reconnaître la rive droite du Pô, est-il permis de conclure avec cette assurance qu'il était décidé à ne pas franchir ce fleuve ? Cette reconnaissance s'imposait tout autant pour en préparer et en affectuer le passage.

Par un contraste assez piquant, tandis que Murat mettait ses troupes en marche pour les porter sur le Pô, le vice-roi. auquel on lui reproche avec tant d'amertume de refuser son concours et sa confiance, songeait à la conclusion d'un armistice avec l'-Autriche. Le 22 novembre le prince de Taxis lui avait apporté une nouvelle lettre du roi de Bavière, aussi désireux de procurer à sa fille et à son gendre un établissement en prévision de la chute du régime napoléonien, que de seconder les vues de la coalition. Ce fut par un nouveau et catégorique refus qu'Eugène répondit aux propositions qui lui étaient faites : sa


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loyauté demeurait intraitable. Mais ce refus d'avantages qu'il ne voulait pas acheter au prix de sa défection, était, comme la première fois, accompagné d'une proposition d'armistice faite sans l'assentiment préalable de l'empereur. Il lui en rendait compte, il est vrai, le même jour, en lui affirmant qu'il n'avait eu en vue que son avantage.'

A Murat, non plus, la coalition n'avait ménagé, nous l'avons vu, ni les ouvertures ni les avances. Que sa fidélité à la cause de Napoléon n'en eût point été ébranlée, qu'il fut hésitant sur le parti à prendre, il serait contre toute évidence de le soutenir. Ses ennemis reconnaissent eux-mêmes que s'il n'eût écouté que son coeur il serait resté fidèle. Mais sa raison était moins assurée. Il est certain qu'il a envisagé la possibilité d'une pacification générale dans laquelle l'empereur n'hési teraitpas à le sacrifier s'il ne s'était à l'avance assuré ou, tout au moins, préparé quelque appui du côté de la coalition et particulièrement de l'Autriche qu'il n'ignorait pas être hostile à une restauration des Bourbons sur le trône de Naples. Mais ce qui est tout aussi certain c'est qu'encore à ce moment il n'avait pris aucun parti décisif. Il n'avait signé aucun arrangement avec l'Autriche dont les vues sur l'organisation future de la péninsule étaient si différentes de celles que ses détracteurs prétendent qu'il envisageait lui-même, qu'on lui prétait, même dans les milieux les plus hostiles, la volonté de maintenir son action militaire indépendante de celle de l'Autriche. Un mois ne s'était pas encore écoulé depuis son retour à Naples et déjà l'armée napolitaine était tout entière en mouvement pour se diriger vers le Pô, comme l'avait demandé Napoléon.

Il est donc souverainement injuste de vouloir trouver dans chacun de ses actes, dans chacune de ses démarches la preuve qu'il était définitivement et irrévocablement décidé à trahir la cause de Napoléon, au moment où arrivait à Naples le personnage considérable auquel l'empereur avait confié la mission de resserrer les liens, certainement relâchés, mais non encore rompus entre les deux beaux-frères.

II

FOUCHÉ A NAPLES

C'était, nous l'avons indiqué à sa date, le 15 novembre que l'empereur, rentré depuis six jours à Paris, avait prescrit à Fouché, alors en Italie, de se rendre à Naples en toute diligence. D'après les instruc-


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tions qui lui furent adressées de St-Cloud, il devait faire sentir au roi l'importance qu'il marche avec 25.000 hommes sur le Pô, le faire connaître aussi à la reine, et faire tout son possible pour empêcher que, dans ce pays, on se laisse fourvoyer par les promesses fallacieuses de l'Autriche et le langage mielleux de Metternich.- Insistant sur l'importance et l'urgence de la marche de l'armée napolitaine vers le Pô, Napoléon ajoutait : « Il est très facheux qu'une partie de cette « armée n'y soit pas venue dès le commencement de la campagne : « elle aurait pu aider à donner une autre tournure aux affaires. On « arme et on marche de tous côtés en France. La circonstance est « majeure. Vous prendrez le parti soit de revenir avec l'armée napoli« taine si le roi est fidèle à l'honneur et à la patrie ; soit de revenir en « toute diligence à Turin où vous trouverez de nouveaux ordres. « Passez par Florence et par Rome, et donnez à tous ces gens là les « conseils que pourront exiger les circonstances. »

« Quelque singulière que puisse paraître cette résolution de l'empereur, elle s'explique cependant, écrit M. Weil, asse^ aisément. Il est évident que, si Napoléon était bien décidé à prévenir par tous les moyens en son pouvoir le retour de Fouché à Paris, il avait été d'autre part guidé par des considérations autrement sérieuses dans ce choix qui devait avoir des conséquences aussi graves pour Murat et pour lui. Tout en continuant à se défier de Fouché, Napoléon croyait cependant que le duc d'Otranle poussé par le désir de rentrer en grâce, très gravement compromis du reste par4ous les actes de sa vie publique, chercherait par son zèle et Son dévouement à mériter de nouvelles faveurs. Aussi, oubliant ses perfidies passées pour ne se souvenir que des services qu'il lui avait rendus, parfaitement au courant des relations qu'il n'avait jamais cessé d'entretenir avec Murat et Caroline, comptant sur l'influence que sa présence et ses paroles pourraient exercer sur eux, l'empereur n'hésita pas à confier au duc d'Otrante une mission que nul n'aurait pu mieux remplir que lui, si le besoin de l'intrigue ne l'avait porté à tromper une fois de plus les espérances et la confiance de son souverain.

« Entre temps Fouché n'était pas resté inactif. A la première nouvelle du départ de Nugent de Trieste et de l'approche des troupes de Marschall, se souciant peu de se voir enfermé à Venise, il s'était rendu à Milan, où il espérait trouver l'autorisation de rentrer en France.

« En attendant, comme s'il avait eu le pressentiment de la mission qui allait lui être donnée, il avait songé à profiter de ses loisirs pour se rap-


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piocher précisément de Murat. Ce n'est évidemment pas au hasard qu'on doit en effet attribuer son départ subit de Milan pour Bologne, au moment même où il savait devoir y rencontrer La Vauguyon qui se rendait à Naples pour reconquérir les bonnes grâces et la faveur de Murat. Tout semble tout au moins avoir été préparé et prémédité par Fouché, puisque c'est aussitôt après avoir exposé à La Vauguyon les chances que l'état présent des affaires en Italie offrait à Murat, la possibilité pour lui de se rendre maître de l'Italie en proclamant son indépendance, que, satisfait de son oeuvre, il retourne immédiatement sur ses pas dans l'espoir de rentrer en France. Il ne se doutait pas, il est vrai, au moment où il quittait Bologne, le 10 novembre, pour retourner à Milan, qu'à sa grande surprise et à sa non moins grande satisfaction, il allait trouver le lendemain, à Parme, la lettre de l'empereur que nous venons de citer, l'ordre de se rendre à Naples, cet ordre qui lui donnait et la possibilité de jouer à nouveau un grand rôle et l'occasion de pêcher une fois de plus en eau trouble. » Complétons, avant de l'analyser, cette vue d'ensemble sur le rôle de Fouché, en rappelant un premier jugement que M. Weil en a porté, lorsqu'il en a, à sa date, indiqué l'origine : « Malheureusement pour Mural, Fouché, comme l'un de ces génies infernaux qui se trouvent toujours à point nommé partout où il y a du mal à produire, allait achever de porter le trouble dans l'esprit du pauvre roi de Naples, de l'égarer, de le perdre par des conseils qui, venant d'un pareil aigrefin, ne pouvaient être que mauvais, dangereux et perfides. »

Ou les mots n'ont plus de sens, ou il parait bien clair pour M. Weil que Fouché a joué un rôle, un rôle actif dans la défection de Murat, qu'il l'a, par ses conseils, définitivement engagé dans cette voie. L'adhésion du roi de Naples à la coalition n'était donc point un fait accompli, et c'est donc à tort qu'on a voulu, à tant de reprises, tirer de ses démarches antérieures à cette date l'affirmation ou l'insinuation du contraire. Non seulement Fouché n'a point retenu Murat, mais il l'a poussé.

Qu'il ait trompé la confiance de l'empereur, cela va de soi. Qu'il ait trompé ses espérances, on en peut douter. Il est difficile d'admettre, avec M. Weil, que Napoléon ait eu, dans cette affaire, des raisons autrement sérieuses que la volonté d'éloigner Fouché. Certes la mission qu'il lui confie, à moins qu'il ne la lui impose, exige de l'habileté, et c'est le fort du personnage. Mais il y faut surtout du dévouement, de la loyauté, et l'empereur connaît trop bien son ancien ministre de la


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police pour mesurer ce qu'il en peut attendre de ce côté, spécialement à la veille d'une crise que chacun prévoit, et si loin de l'oeil du maître. La mission à Naples n'est qu'un prétexte, ce que veut Napoléon c'est empêcher le retour de Fouché à Paris.

Et c'est là précisément, l'empereur ne s'y trompe point, le seul objectif de Fouché. Aussi ne pouvons-nous partager davantage cette assertion que la satisfaction n'a pas été, chez lui, moins grande que la surprise à la réception des ordres qui l'expédiaient au fond de l'Italie. lia pu faire contre mauvaise fortune bon visage. Expert à tirer parti de toutes les rencontres, il a transporté à Naples l'intrigue qui lui était interdite à Paris, y trouvant une revanche de sa déception. Mais, sur le moment il y a eu certainement bien plus de surprise que de satisfaction.

Là ne doivent pas se borner nos observations. A côté de ce que nous croyons être des erreurs d'appréciation, après tout discutables, il n'est pas sans intérêt de relever des inexactitudes dans l'exposé des faits eux-mêmes.

Ce serait, on l'a vu, de son propre mouvement, et ne se souciant pas de se voir enfermé à Venise menacée de blocus par les troupes autrichiennes, que Fouché aurait quitté cette ville pour se rendre à Milan où il espérait trouver l'autorisation de rentrer en France. Mais entre la composition du second et du troisième volume l'auteur a-t-il perdu de vue ce qu'il avait écrit précédemment : « Fouché, prévenu à temps par le prince Eugène, avait malheureusement pour le vice-roi, pour l'empereur et pour Murat, pu sortir de Venise avant l'établissement du blocus et gagner Bologne. » Mais ce n'est pas seulement un avis, c'est un ordre que le vice-roi a donné à Fouché. Nous en trouvons la preuve dans la lettre, reproduite par M. Weil, que Fouché adressait le 6 novembre à l'empereur, dès son arrivée à Bologne, et où nous relevons les passages suivants : « D'après l'invitation du vice-roi, j'ai quitté Venise pour me rendre à Bologne, où j'apprends, à mon arrivée le passage du roi de Naples et les nouvelles de votre armée. » Et plus loin : « Le vice-roi m'a invité à quitter Venise, à m'établir à Bologne et à diriger les employés d'Illyrie sur Parme. Ses intentions sont remplies. » Un plus grand souci de l'exactitude aurait épargné à M. Weil le soupçon certainement injuste d'avoir voulu écarter la responsabilité, en vérité bien légère ici, du prince Eugène.


— 33 -3Quoiqu'il

-3Quoiqu'il soit, sorti de Venise, Fouché se dirige non sur Milan, mais sur Bologne, se conformant à l'invitation du vice-roi.

Dans son important ouvrage sur Fouché, dont la publication avait précédé celle du Prince Eugène et Murat. M. Madelin a fait, lui aussi, arriver le duc d'Otrante à Milan : « Il quitta Venise, courut à Milan, « tout prêt à franchir le Simplon, à gagner Paris en bon serviteur qui « vient mettre ses talents au service du maître menacé. Il fallait cepen« dant l'autorisation de l'empereur ; en attendant il songeait à sonder « Murât, fort curieux de ses vrais desseins, pensant peut-être utiliser, « comme en 1808, ce brillant cavalier, à des projets encore malformu« les en son esprit, si Bernadotte en marche vers la France ne pouvait « servir.

« Est-ce en apprenant la présence à Bologne du lieutenant général « La Vauguyon qu'on disait chargé par Murât d'organiser un mou« vement patriote dans le Nord que Fouché quitta Milan sans motifs « appréciables et se rendit à Bologne s'éloignant ainsi des Alpes ? « Quoiqu'il en soit, La Vauguyon se rendant de Milan à Rome où ij « comptait s'attarder, et s'arrêtant à Bologne fut fort surpris d'y « trouver le duc d'Otrante. Celui-ci y était en effet le 13 et y avait écrit « une fort longue lettre à l'empereur, dans laquelle toujours empressé « et important, il s'étendait avec complaisance sur l'état troublé de « l'Italie. Mais s'il faut en croire une contemporaine (la duchesse d'Ace brantés) écho de La Vauguyon, Fouché parut animé d'un esprit moins « loyaliste lorsque, saisissant au passage le lieutenant de Murat, il le « convia à dîner avec le général Pino, lieutenant d'Eugène qu'il, avait « vu en Illyrie. Aux deux hommes il laissa entrevoir que Murat « pouvait arriver à de hautes destinées en proclamant l'indépendance « de l'Italie ; il impressionna La Vauguyon qui prévint immédiatement, « le roi de Naples de cette intéressante conversation. Le fait est « vraisemblable puisque Murât expédiait le 22 novembre au général « Colletta l'ordre de se rendre à Bologne et d'y rendre visite au duc « d'Otrante, désireux qu'il était sans doute de sonder plus compléte« ment son machiavélique ami. Mais Colletta ne put rencontrer « Fouché à Bologne. Dès le 20, celui-ci avait quitté la ville, résolu à « rentrer en France par Parme et Milan. Au moment où il arrivait à « Parme le 21, il y fut atteint par une lettre de l'empereur, datée de « St-Cloud, le 15 novembre, et qui le rejetait bien loin des Alpes et de « la France. »


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Telle est la version de M. Madelin sur cet épisode préliminaire de la mission de Fouché : version un peu confuse puisqu'elle montre à la fois Fouché quittant Milan où il se serait rendu en quittant Venise, pour se rendre à Bologne où lui a été signalée la présence de la Vauguyon, et La Vauguyon arrivant à Bologne et fort surpris d'y rencontrer Fouché. La lettre, plus haut citée, adressée par Fouché le 6 novembre à l'empereur permet de discerner laquelle des deux hypothèses est la vraie. C'est incontestablement la seconde qui s'impose. La Vauguyon a, par hasard et à sa grande surprise, rencontré Fouché installé à Bologne depuis le 6 novembre. Il faut donc renoncer, sur la foi des documents mêmes de M. Weil à cette invention de Fouché arrivant de Venise à Milan, quittant subitement cette ville, sans motifs appréciables, pour aller à Bologne où il appris que doit passer La Vauguyon, auquel il a hâte, pensant bien qu'elles seront transmises à l'intéressé, de confier les vues que ses loisirs forcés à Milan lui ont fait élaborer sur l'indépendance de l'Italie et le rôle destiné à Murat.

Et d'un autre côté il faut aussi renoncer à Murât répondant à ces confidences par l'envoi de Colleta. Nous savons que le but de la mission de ce général était purement militaire. Dans les instructions qui lui furent remises à son départ pour Bologne une simple phrase se rapporte à Fouché : « Vous ferez une visite au duc d'Otrante s'il est encore à Bologne. »

On peut donc supposer que le désir de se rencontrer et de se concerter n'a pas été aussi vif, ni aussi pressant que le laissent entendre M. Madelin et après lui M. Weil, entre les deux personnages que seule la volonté irréfléchie de l'empereur allait rapprocher. Tout à son idée de tenir Fouché loin de Pans, mais croyant nécessaire de lui donner un rôle, qui voilant la disgrâce, pouvait, dans une certaine mesure, le maintenir dans une fidélité dont il connaissait le peu de solidité, Napoléon n'a pas calculé les conséquences presque fatales de cette imprudence ; ou, s'il les a envisagées, ce qui est possible, il n'en a point tenu compte. A-t-il, comme le dit M. Weil, voulu voir .dans les relations que Fouché n'avait jamais cessé d'entretenir avec les souverains de Naples le gage d'une influence salutaire dans la crise qui se préparait? A moins qu'elle ne soit cruellement ironique cette affirmation est surprenante ; la connaissance qu'il avait de ces rela


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tions devait être plutôt pour l'empereur une cause de méfiance. Il convient d'en rappeler quelques épisodes.

La constante préoccupation de Fouché avait été d'assurer la stabibilité et la durée du régime qui avait fait de l'ancien petit professeur de l'Oratoire le tout puissant ministre du grand empire. Dès 1805, il aurait, s'il faut en croire les confidences de Bourrienne, exposé ses idées sur ce point au secrétaire de Napoléon avec une terrible netteté : « Il serait à souhaiter que l'Impératrice vint à mourir ; cela lèverait « bien des difficultés. Tôt ou tard, il faudra qu'il prenne une femme « qui fasse des enfants. Car, tant qu'il n'aura pas d'héritiers directs, il « est à craindre que sa mort ne soit le signal de la dissolution. Ses « frères sont d'une incapacité révoltante et l'on verrait surgir un nouée veau parti en faveur des Bourbons et c'est ce qu'il faut prévenir. » L'on sait d'ailleurs comment, dix ans plus tard, Fouché n'ayant pu prévenir cette éventualité sut s'en accommoder.

L'Impératrice ne mourant pas, Fouché songea au divorce. Il y pensait constamment, nous dit son historien, encore que, jusq'en 1807, cette pensée ne se fût pas fait jour, retenue de se produire par une considération d'un poids égal à celle dont cette pensée même était issue. Il était clair,qu'aussitôt divorcé l'empereur solliciterait la main d'une princesse de famille régnante. Or, de 1805 a 1807, deux maisons paraissaient seules pouvoir être mises sur les rangs, la Saxe et l'Autriche, qui, toutes deux, passaient pour les plus ancien. régime de l'Europe, et dont l'influence aux Tuileries eût été sinon le signal de réaction contre les idées et surtout contre les hommes de la Révolution, du moins un singulier encouragement à ceux qui la prônaient et le régicide,, le terroriste Fouché n'en voulait à aucun prix. La paix de Tilsit, en 1807, vint modifier cette situation en ouvrant la perspective d'une alliance matrimoniale avec la famille des Romanof, sans alliance avec les Bourbons ni l'ancien régime, et dont l'entrée aux Tuileries ne pourrait être, dit M. Madelin, une menace ni pour les hommes de 1789, ni pour les votants de 1793.

Dès lors, dans l'esprit de Fouché, Joséphine est condamnée. La campagne en vue du divorce commence dès Tilsit, menée avec la plus perfide et la plus audacieuse des habiletés par le ministre de la police. Il a d'ailleurs compris que, paraissant vouloir forcer la main à l'empereur pour le bien de l'empire, il va au-devant des désirs inavoués et peut-être encore inconscients de Napoléon. Ni les observations, ni les

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menaces du maître ne l'arrêtent : il les juge de pure forme. C'est tout au plus si, vers la fin de 1807, il s'interrompt un moment. Mais couvrant sa retraite par cette phrase insinuée dans un rapport de police : « On ne parle plus du divorce, non seulement par respect, mais parce qu'on croit la chose résolue. »

Il se reprend bientôt à en parler. Le 29 janvier 1808, il écrit à Napoléon : « On parle peu aujourd'ui du divorce, mais on y pense depuis qu'on croit avoir la certitude que l'Impératrice ne peut plus avoir d'enfants. » Et les allusions au divorce émaillent à nouveau les bulletins de police, inspirées par le ministre, mises en circulation par ses agents et renvoyées au souverain comme l'expression spontanée et incompressible de l'esprit public.

De ces allusions, il en est une qu'il n'est point, pour notre sujet, sans intérêt de relever au passage. Dans le bulletin du 14 mars 1808, il est raconté que le petit Achille Murat, fils de Joachim et de Caroline, a été salué avec enthousiasme à la promenade, qu'il a arraché des soupirs : « Si c'était, disait-on, le fils de l'empereur, on lui embrasserait les bottes. »

Si ce jeune prince n'était pas le fils de l'empereur, il était celui de l'homme qui, dans la pensée toujours prévoyante de Fouché, pourrait quelque jour être appelé à remplacer son impérial beau-frère, au cas, nullement impossible où les hasards de la guerre ouvriraient sa succession, soit par une défaite irréparable, soit parla mort, avant qu'une nouvelle union lui eût donné un héritier direct.

Or, dans les derniers mois de 1808, les circonstances étaient telles que cette éventualité pouvait être sérieusement envisagée. La situation générale pouvait à bon droit inquiéter les plus loyaux serviteurs de Napoléon, tel Caulincourt, et se révélait éminemment propice aux intrigues des hommes qui, tels Talleyrand et Fouché, songeaient à leur avenir plus qu'à celui de leur maître.

Napoléon était rentré à Paris le 19 octobre. Il ne rapportait que de fort minces résultats de son entrevue avec Alexandre à Erfurt. Il n'avait pu le décider à des démarches comminatoires envers l'Autriche dont les armements n'indiquaient que trop clairement le dessein de profiter des embarras que les affaires d'Espagne apportaient à l'empereur. Et quant au projet de mariage avec une princesse russe, Alexandre s'était tenu dans une extrême réserve, laissant prévoir de la part


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de sa mère une résistance sur laquelle, d'ailleurs, il devait s'appuyer pour esquiver la demande de son allié du moment.

Nous ne saurions mieux faire que d'emprunter au magistral ouvrage d'Albert Sorel, L'Europe et la Révolution Française, la page où il résume, dans un de ces aperçus brefs et singulièrement lumineux où il excelle, la situation de l'empire à ce moment précis où l'Europe, comprenant enfin la cause des victoires inouïes des Français, se rendait compte, à la vue de l'Espagne tout entière soulevée, qu'il fallait leur opposer leurs moyens : l'offensive, l'entraînement des peuples.

« Napoléon, en rentrant à Paris, y trouva de l'inquiétude dont il lui « convint de ne pas approfondir les causes. Il observa des signes mena« çants dont il lui convint de ne pas tenir compte. Il avait appelé « 80.000 conscrits des années 1806 et 1807, et les levées ne s'opéraient « point.... Partout, et à toutes les questions les mêmes réponses : La « soumission de l'Espagne rétablira toutes les affaires; elle rendral'af« fection aux Français et les remettra clans la discipline, elle désar« mera les Autrichiens, elle tranchera le conflit avec l'Eglise, elle assu« rera le blocus, et, par le blocus, la capitulation de l'Angleterre; la « Russie retombera dans les sollicitations, l'Europe clans l'obéissance; ee la paix du grand empire régnera sur le monde. Ainsi, depuis 1792, « la fin de la révolution, le bonheur des hommes et l'avènement de la « justice toujours renvoyés au lendemain d'une journée qui résoudrait « tous les conflits; et la journée ne découvrait qu'un nouvel obstacle, « une barricade à emporter, une bastille à prendre qui serait la dernière. « Pendant quatorze ans, de 1794 à 1808, on a espéré la fin de la guerre ; « il reste toujours une citadelle à enlever d'assaut, un pays à envahir, « une frontière à protéger. La France, pour compléter, assurer, garan« tir la conquête des limites, avait été obligée de conquérir sans fin; « elle se débordait sur l'Europe, dans l'illusion que chaque conquête « nouvelle affermirait les autres; que les fondements assis sur des « bases aussi étendues, il ne s'agissait plus que d'édifier le comble qui, « de sa masse, tasserait toute la bâtisse. Désormais, il faut changer « d'illusion : les piliers s'enfouissent dans la terre et se dérobent, les « murs se crevassent, les charpentes craquent; le comble, si on le « place, écrasera l'ouvrage et précipitera la chute; on est contraint de « reprendre les soubassements mêmes et jusqu'aux contreforts. »

Et tout, à ce moment, est subordonné à la soumission de l'Espagne. L'empereur ne reste que dix jours à Paris; le 29 octobre il quitte sa capitale


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pour aller prendre le commandement de son armée au delà des Pyrénées. Or, écrit M. Madelin, jamais départ de l'empereur ne souleva plus de commentaires passionnés, jamais guerre n'avait été vue de plus mauvais oeil. Le souci était général à Paris. Il devenait urgent pour ceux qui songeaient au lendemain, Fouché y songeait depuis longtemps, de trouver un successeur éventuel à l'empereur engagé cette fois dans la plus périlleuse des aventures, exposé non plus seulement aux hasards de la bataille, mais au suprême danger de tout un peuple soulevé et surexcité par les plus terribles passions. Il pouvait être vaincu; il pouvait être tué.

Fouché entendait bien se rendre l'artisan indispensable, maître par suite d'en dicter les conditions, de la transmission du pouvoir rendu vacant par l'une ou l'autre de ces éventualités, de manière à sauvegarder les conquêtes de la Révolution, au premier rang desquelles se plaçaient naturellement sa situation personnelle et son influence prépondérante dans les conseils d'un nouveau maître.

On sait comment il préluda à cette nouvelle campagne non moins audacieuse, mais plus dangereuse que celle du divorce, par sa réconciliation avec Talleyrand, qui, au dire de Pasquier, apparut à tous, amis et ennemis de l'empire, comme la plus grave des manifestations politiques qui se fût vue depuis longtemps. Elle s'était effectuée dès les premiers jours d'octobre par l'entremise de M. d'Hauterive, chef de la division des archives aux affaires étrangères, par là, demeuré en relations avec Talleyrand, et ancien oratorien, d'où des rapports suivis avec Fouché. Le plus innocemment du monde, sans se douter de la portée de la rencontre qu'il ménageait, ce parfait fonctionnaire croyait faire merveille en contribuant à cette réconciliation qui semblait de de nature à être agréable à l'empereur.

Quelles furent les vues qu'échangèrent alors ceux que, dans une note rédigée à Vienne le 4 décembre, Metternich appelait les deux conjurés ? N'avaient-elles eu, comme le pense, d'après les on-dit, le diplomate autrichien, rien en soi de séditieux ni de révolutionnaire ? Voulait-on seulement, en toute loyauté et fidélité, consolider le nouvel état de choses, reporter les regards de l'empereur sur l'intérieur, travailler à une pacification générale ? L'attitude frondeuse affichée par Talleyrand, ses propos sur la politique espagnole de Napoléon, après ses confidences, proches d'une trahison, à l'empereur Alexandre pendant l'entrevue d'Erfurt, ne permettent pas de s'en tenir, à cette


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hypothèse. Rien n'établit d'ailleurs qu'on eût projeté une révolution contre l'empereur. Ce qui est à peu près certain, d'après les confidences faites plus tard à Pasquier par La Valette et par Savary, c'est une entente en vue de la mort possible de Napoléon.

Pour des raisons diverses, les frères de Napoléon étaient jugés incapables de lui succéder. L'empereur lui-même l'avait déclaré quelques mois auparavant à Talleyrand, lorsqu'à Erfurt il l'avait chargé de faire des ouvertures à Alexandre pour le mariage avec la princesse russe. « Comme Français, vous pourrez lui dire tout ce que vous voudrez. Joseph, Lucien, toute ma famille vous offre un beau champ... Ils ne sont rien pour la France. » Le bruit courut cependant, le comte de Maistre le mentionne dans une correspondance du mois de décembre, que Fouché et Talleyrand avaient songé à Joseph. Mais l'opinion la plus accréditée donnait leur choix comme s'étant porté sur le roi de Naples. Par une de ces roueries dont il était coutumier, Fouché consignait lui-même dans une note ministérielle, pour se donner le prétexte de le démentir quelques jours après, ce qui était une double occasion d'en entretenir l'opinion, le bruit qui courait que le ministre avait organisé entre Naples et Paris une série de relais nouveaux pour faire arriver Murat aux Tuileries.

Avant même que la présence de Fouché à une réception de Talleyrand eût rendu publique, leur réconciliation, Madame, mère de l'empereur, avait été informée de leurs premières entrevues secrètes, de leurs propos inquiétants et significatifs sur la politique impériale, sur les dangers qu'elle faisait courir à la France. Une note de M. de Mosbourg, reproduite par le comte Murat dans Murat lieutenant de l'empereur en Espagne, nous fait connaître que Madame transmit ces renseignements à Napoléon, qui entretint à ce sujet une correspondance avec elle et lui indiqua les moyens de pénétrer les démarches des deux hommes dont il se méfiait.

« Dans les rapports faits à l'empereur, ajoute M. de Mosbourg, le roi de Naples avait été nommé. C'était lui, disait-on, qui suivant le plan de Talleyrand et de Fouché, devait prendre en cas d'événement le commandement général des armées et une grande part dans la direction des affaires. Cette idée fut celle qui excita le plus vivement la colère de l'empereur. Elle le rendit furieux contre son beau-frère qu'il supposa d'intelligence avec Fouché et à qui cependant celui-ci n'avait fait aucune communication. Etait-il vrai qu'on eût pensé à


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Murat ? Etait-il vrai que Fouché et Talleyrand eussent conçu le projet d'en faire un instrument de leurs desseins, pour le perdre ensuite lui-même ? Ou faut-il croire que les ennemis du roi avaient mêlé calomnieusement son nom dans cette affaire afin de le ruiner entièrement dans l'esprit de l'empereur ? C'est ce que j'ignore. Mais ce qui est certain, c'est que depuis cette époque les défiances de Napoléon à l'égard de Murat allèrent toujours croissant, et se manifestèrent souvent par des éclats très offensants pour le roi de Naples. »

Madame n'avait pas été la seule à être renseignée. Parmi les personnes qui, à Paris, avaient l'oeil ouvert sur tout ce qui pouvait intéresser Napoléon et entretenaient avec lui une correspondance suivie, se trouvait, nous apprennent les Mémoires de Pasquier, un de ses anciens aides de camp, M. de La Valette, qu'il avait placé à la direction générale des postes, admirable position pour un observateur, après lui avoir fait épouser Mlle de Beauharnais, nièce de Joséphine. La Valette avait épousé en même temps toute l'hostilité, et, si l'on veut, toute la haine que les Beauharnais avaient vouée à la famille de l'empereur et à Murat en particulier, comme nous avons eu l'occasion de le relever dans une étude précédente. Bien loin de l'aveugler, son dévouement passionné le rendait clairvoyant de la situation critique de l'empire. Il dut attacher une grande importance à l'accord inattendu de deux hommes dont l'un, Talleyrand, ne lui avait jamais inspiré ni estime ni confiance, dont l'autre, Fouché, avait toujours été l'objet de son aversion singulièrement accrue par le rôle du ministre de police dans l'affaire du divorce, et que tous deux il jugeait, d'après ses confidences à Pasquier, capables de tout. Il écrivit à l'empereur tout ce qu'il pensait d'une liaison qui n'avait pu se former que dans un but politique fort opposé à ses intérêts, et ses appréhensions se trouvèrent confirmées par un fait qui jetait les plus grandes lumières sur les mystères de l'intrigue et en dévoilait la tendance. De ce fait Pasquier n'a point tenu les preuves en main, mais les confidences de La Valette et de Savary ne lui ont pas permis d'en douter. En cas de mort de l'empereur, il fallait, dans le premier moment et quelque parti qu'on voulût prendre par la suite, un homme à mettre à sa place. On jeta les yeux sur Murat qui venait d'être appelé à remplacer Joseph à Naples et que ses ennemis prétendaient profondément ulcéré de n'avoir pas reçu la couronne d'Espagne. La reine Caroline se trouvait justement à Paris, elle était l'amie intime de Fouché, et il est possible


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qu'elle ait été mise au courant des projets c'oncertés au profit de Murat. On n'hésita pas à faire savoir au roi de Naples qu'il eût à se tenir prêt à venir au premier signal. Mais La Valette veillait. A la hâte, il avertit le prince Eugène qui, à leur passage en Italie, intercepta les avis adressés à Murat et les transmit à l'empereur.

La note de M. de Mosbourg nous a montré quelle impression il en ressentit à l'égard de son beau-frère, soupçonné d'avoir été dans cette intrigue le complice de Fouché.

Cette impression s'était-elle modifiée à la fin de 1813, lorsque dans une situation plus critique encore qu'à la fin de 1809, il se décidait à confier à Fouché disgracié, plus prêt encore à l'intrigue et à la trahison, la mission d'arracher le roi de Naples aux intrigues de la coalition ? S'était-il souvenu que Murat et Fouché s'étaient trouvés d'accord pour lui conseiller, après le divorce, le mariage russe et le détourner de cette alliance autrichienne qu'il avait alors préférée, et qui maintenant, conformément aux prévisions du parti dont Murat avait été l'organe dans le mémorable conseil du 21 janvier 1810, se retournait contre lui? Se flattait-il que Fouché, rappelant lui-même à Murât leur commune hostilité d'alors contre l'Autriche, aurait assez d'autorité pour le soustraire à l'influence de cette puissance sous les auspices de laquelle se préparait son accession à la coalition ? Mais Murat n'était pas le seul dont se fussent modifiés les sentiments antiautrichiens de 1810. Ne prêtait-on pas à l'impératrice Marie-Louise un propos surprenant qu'elle aurait tenu au moment de la disgrâce du ministre de la police en juin 1810 ? Elle s'en était étonnée, le duc d'Otrante étant le seul homme auquel l'empereur d'Autriche eût engagé sa fille à accorder sa confiance, conseil qui en disait long sur la volte-face de Fouché.

D'un autre côté, l'empereur pouvait-il avoir oublié que c'était à la cour de Naples qu'en 1810 Fouché disgrâcié, condamné à l'exil, avait cherché un refuge? Autorisé à se retirer dans sa sénatorerie d'Aix, ou à voyager en Italie, il choisit ce dernier parti comme plus sûr pour sa personne. Brûlant les étapes, il passait le Simplon le 10 juillet, le 12 il était à Parme, le 15 à Florence qu'il affectait de visiter en touriste. Après des allées et venues qui déconcertent les autorités, entre Fle>rence, Pise et Livourne, il se trouvait le 29 dans cette dernière ville, chez une de ses créatures, Oudet Ducrozet. ancien oratorien, devenu par sa protection commissaire général. Le lendemain, le préfet Capelle apprenait avec surprise qu'il avait loué un petit bâtiment et fait des dispositions


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en vue de s'embarquer pour Napes avec son fils et trois domestiques. Il s'embarqua en effet le 2 août, mais le 3 il débarqua au sud de Livourne et déclara au préfet que, n'ayant pu supporter la mer, il allait gagner Naples par terre.

Quelles intentions cachaient tous ces manèges ? Avait-il réellement voulu, s'est demandé M. Madelin, se réfugier entre les bras de Murat? On pourrait le croire, puisqu'à deux reprises et à deux jours d'intervalle, les 16 et 18 juillet, il lui avait écrit pour lui demander asile, se lamentant sur les calomnies dont on l'avait chargé près de l'empereur. Mais le 2 août, au moment de son embarquement à Livourne, il n'avait pas encore reçu l'autorisation sollicitée. C'est seulement le 5 septembre que Murat se disposait à lui envoyer les passeports nécessaires, en même temps que dans une lettre de ce jour à l'empereur, il atfimait n'avoir reçu aucun avis d'un départ du duc d'Otrante pour Naples. Il est cependant prouvé par ses lettres que Fouché a sérieusement songé à chercher auprès de Murat un refuge contre les suites possibles de la colère impériale, tout en essayant par certaines démarches de faire croire à un départ pour les Etats-Unis.

Le retard apporté par Murât à répondre à sa demande lui donna le temps de se ressaisir. Deux mois ne se sont pas écoulés depuis sa disgrâce retentissante, il entrevoit déjà et prépare la possibilité d'un retour de faveur. Il écrit à l'empereur, il fait faire auprès de lui des démarches par la princesse Elisa qui se trouve à Paris, il fait intervenir Murat. La duchesse d'Otrante obtient l'autorisation pour lui de rentrer en France. Il ne l'a pas attendue, et, tandis que les agents chargés de le surveiller le croient sur la route de Naples, il arrive le 13 août à Lyon, et y reçoit la permission de s'établir à Aix.

Napoléon semble l'y avoir oublié. Une année, et plus, s'écoule avant qu'il lui permette de rentrer à Ferrières. Il le consulte, mais ne lui rend pas sa confiance. Les bruits qui coururent sur sa participation, d'ailleurs fort incertaine, à la conspiration du général Malet ne purent qu'augmenter la défiance de Napoléon. Peu de jours avant son départ pour l'Allemagne, il lui avait dit : « Vous êtes trop habile pour l'impératrice. » Et dès lors s'était formé est précisé dans son esprit le dessein de l'éloigner de la capitale en l'accablant de missions qui l'exilent plus réellement que la disgrâce de 1810, tout en le conservant dans de hautes fonctions, qui, peut-on l'espérer, le maintiendront en un loyalisme relatif.


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En mai 1813, après Lutzen et Bautzen. l'empereur le mande à Dresde sous le prétexte-de lui confier le gouvernement de la Prusse. Quand Fouché arrive, il lui annonce qu'il le destine à remplacer Junot, devenu fou, dans le gouvernement des provinces Illyriennes. Pendant le mois qui s'écoule avant son départ pourLaybach, Napoléon l'emploie à diverses besognes. La première qu'il lui confie et qui seule intéresse notre sujet, c'est d'écrire à Murat qui, depuis son départ oe la grande armée au mois de janvier précèdent, s'est enfermé, à Naples, dans une attitude qui n'est pas sans inquiéter l'empereur, bien qu'il se refuse à l'en dégager lui même par une simple démarche confiante et affectueuse qui eût, sans doute", suffi à calmer les susceptibilités de son beau-frère.

Très habilement, nous dit son historien, le duc d'Otrante ne fit d'abord appel ni aux sentiments de famille, ni aux considérations politiques : il s'adressa à l'amour-propre du soldat : l'armée était choquée de voir le vaillant Murat se tenir en sûreté à l'abri de la guerre et des dangers que courait la France. Du reste, tout devait l'amener à Dresde : un congrès allait se réunir à Prague, le sort des Etats napoléoniens allait s'y régler et les absents ont tort.

La lettre était habile. Eut-elle, seule, lemérite de déterminer Muratà répondre à cet appel, depuis longtemps attendu, que lui faisait adresser Napoléon? Sans nier son influence, nous croyons plutôt que la décision de Joachim fut emportée par la lettre que Napoléon se décida enfin, le 4 juillet, à lui écrire lui-même. C'est sept jours après l'avoir reçue que Murat quittait sa capitale pour aller à Dresde reprendre sa place de bataille auprès de Napoléon. Vers le même temps, Fouché arrivait à Laybach, siège de son gouvernement.

Par une fortuite, mais curieuse coïncidence, c'est à deux jours près que, quelques mois plus tard, Murat rentrait à Naples après Leipzig, et que Fouché, chassé successivement, par les progrès des armées autrichiennes, de Laybach, de Trieste, de Goritz, d'Udine et de Venise, arrivait le 6 novembre a Bologne.

Nous avons vu les circonstances de sa rencontre toute fortuite dans cette ville avec La Vauguyon, et les propos qu'il lui avait tenus sur le grand rôle que pouvait prendre Murat en se faisant le champion de l'indépendance italienne. A les tenir pour exacts, il ne faudrait pas leur accorder plus d'importance que ne le faisait Fouché lui-même, et vouloir y trouver l'indice d'un plan arrêté. Bien loin de songer à entrer dans


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une telle aventure, Fouché désirait surtout rentrer en France et arriver au plus vite à Paris. Il en reprenait le chemin, lorsqu'il reçut à Parme, le 21 novembre, la lettre impériale qui l'expédiait à Naples.

Le voilà donc officiellement investi d'une mission auprès du prince avec lequel il n'a cessé,depuis longtemps, d'entretenir les relations les plus étroites. Elles ont plus d'une fois, nous venons de le voir, trop violemment excité les soupçons de Napoléon pour qu'il soit raisonnable de chercher dans la pensée d'en tirer cette fois un utile emploi la cause de sa détermination, bien plus probablement dictée par la volonté d'éloigner Fouché de Paris.

D'ailleurs, quelle qu'ait été la pensée de l'empereur, quelle qu'ait pu être la déception de Fouché, ses premiers actes nous le montrent prenantsur l'heure le parti de remplir sa mission, ou du moins d'en affecter la volonté.

Le jour même, sans perdre un instant, il écrivit à Murat dans le sens des instructions qu'il venait de recevoir. Il lui disait qu'on attendait à Bologne avec la plus vive impatience le roi de Naples et ses soldats contre les Autrichiens. Et après quelques lignes flatteuses sur les brillantes qualités du roi, il ajoutait que celui-ci était naturellement appelé à défendre l'Italie et l'empire- français, et avec eux son propre trône. « Notre fortune, sire, quel que soit l'intervalle du rang, notre « fortune n'a qu'une même base, nous la devons à l'empereur. Elle « repose sur lui, sur l'intégrité de sa puissance. Ce n'est point nous « qu'on pourra persuader de détacher nos intérêts des siens ; et s'il est « quelque danger, que tous les loyaux serviteurs de sa maison s'unis« sent plus étroitement à lui. Pourrions-nous balancer, lors même que « le sentiment de l'honneur et de la patrie serait éteint dans nos coeurs ? « D'un côté, le génie et le caractère de l'empereur, les ressources im« menses que la France remet entre ses mains ; de l'autre, des princes « faibles et bornés, des espérances qu'ils sont dans l'impuissance de « réaliser, des promesses incertaines ou plutôt fallacieuses, car les « puissances liguées contre nous ne forment qu'un voeu : l'anéantisse« ment de la dynastie impériale et le rétablissement des anciennes « dynasties sur des trônes que, au mépris des traités les plus solennels, « elles s'obstinent à regarder comme usurpés. » Il terminait sa lettre en annonçant à Murat que, chargé par l'empereur d'une mission au delà des Apennins, qui demeurait dans le vague, il espérait rencontrer le


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roi Joachim en route, ajoutant qu'il serait heureux d'aller présenter ses hommages à la reine Caroline.

Le loyalisme ne pouvait être plus complet. Il est vrai qu'autant et peut-être plus qu'à Murat, la lettre qui en contenait l'expression était destinée à l'empereur, auquel Fouché en adressait le texte en même temps qu'il l'expédiait à Naples.

Il renvoya en France les derniers fonctionnaires illyriens réfugiés à Parme, quitta lui-même cette ville le lendemain avec sa famille, repassa par Bologne et arriva à Florence le 23 novembre. Il n'y put rencontrer la grande-duchesse Elisa qui était aux eaux de Pise. Il en exprima son étonnement avec une certaine raideur au prince son époux, et après quelques heures de séjour partit pour Rome où son arrivée, le 25, fit grand tapage, d'autant, nous dit son biographe, qu'il semblait disposé à jouer un personnage.

Bien que le titre de gouverneur des Etats romains, qu'il avait reçu le 3 juin 1810, fût périmé et comme annulé de fait par l'ordre d'exil du 1er juillet suivant, il se l'attribuait encore volontiers, le poste étant demeuré vacant. La mission officielle dont il était chargé, mais dont il n'avait même pas jugé bon de préciser l'objet dans sa lettre à Murât, restait mystérieuse; il lui paraissait utile, plaisant tout au moins, par son goût invétéré de l'intrigue, de la dissimuler sous divers prétextes. Tout ce qu'on put savoir, c'est qu'à un titre ou à un autre il était le représentant de l'empereur. Cela suffisait pour lui assurer les hommages des autorités. Il les reçut et. paraît-il, les stupéfia par le sans-gêne de ses manières, donnant, par exemple, audience au saut du lit, en déshabillé du matin et en train de se raser, au premier président entouré des cours en grand costume, et les ahurissant par la singularité de ses propos.

Le 26 au soir il partit pour Naples, confiant à quelques hauts fonctionnaires qu'il allait faire marcher Murat, mais prétextant, pour le public, un simple voyage d'agrément avec ses enfants. Après des retards considérables occasionnés par le débordement des rivières, il arriva à Terracine, où il rencontra Mme Récamier qui, elle aussi, se rendait à Naples, et, fort galamment, il lui offrit de faire route ensemble. A Mole di Gaeta, la crue du Garigliano ayant coupé les chemins, les voyageurs durent s'arrêter. Fouché en profita pour écrire de nouveau à Murat, le pressant d'agir, et à l'empereur pour lui rendre compte de son voyage. Il lui faisait connaître les observations et les


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conseils qu'il avait dû présenter à Florence : il manifestait, sans en rien dissimuler, le mécontentement que lui avait causé l'état des esprits à Rome, où « chacun, disait-il, ne paraît occupé que de ses inquiétudes particulières, où l'on n'avait rien fait pour rassurer l'opinion, la diriger et dissiper les bruits absurdes qui se répandaient ».

Il se pourrait bien que ce fussent ceux que nous avons vu M. de Norvins consigner dans ses rapports de police touchant l'attitude et les intentions de Murat. En tout cas, ce blâme sévère à l'adresse des autorités françaises de Rome, notoirement hostiles au roi de Naples, valait d'être relevé comme un indice des dispositions de Fouché.

Le 30 novembre il put se remettre en route et arriva à Naples le soir du même jour. Le roi lui avait offert un logement au palais : il préféra descendre dans un hôtel, pour mieux accréditer sans doute la version d'un simple voyage d'agrément, qu'il faisait insérer dans les gazettes napolitaines du 1er décembre.

Dès le lendemain de son arrivée, il était reçu par les souverains, et eut avec eux un entretien qui dura presque toute la journée et dont il rendit compte le 3 décembre à l'empereur dans une lettre que M. Weil se borne à mentionner sans en citer une ligne, malgré et peutêtre à cause de son importance pour la connaissance de l'état d'esprit où se trouvait alors le roi de Naples.

Murat avait protesté en termes véhéments de son dévouement personnel à l'empereur, « Je n'ai pas besoin, avait-il dit à Fouché, « d'être provoqué à le servir. Mon coeur est à lui. Mais, dans les « circonstances où je me trouve, je ne puis agir autrement sans corn« promettre la sûreté de mes Etats. Les 25.000 hommes que j'ai promis « à l'empereur sont en route, les pluies continuelles, les débordements « des rivières sont la seule cause de la lenteur de leur marche, je laisse « croire aux Anglais que j'agis pour mon compte. A cette condition « mes côtes ne seront point inquiétées et mon royaume sera tran« quille; l'empereur doit compter sur-moi. »

Et Fouché, rapportant ces déclarations, après tout fort plausibles, affirmait qu'il se fiait à la sincérité de Murat. Faut-il, s'est demandé M. Madelin, croire à la sienne? bien que, dans cette même lettre, il affectât pour Napoléon une affection fort exagérée, désireux, disait-il, de lui donner des preuves de fidélité clans cette circonstance où la fortune lui a été infidèle, de le consoler de tous les chagrins que lui ont


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fait éprouver la pusillanimité et les lâches trahisons. C'était touchant, conclut, non sans ironie, son historien.

C'était sans doute pour ne pas ajouter aux chagrins de l'empereur qu'il avait omis de mentionner dans le compte-rendu de cette première visite aux souverains napolitains les déclarations de Caroline. Elles étaient trop graves pour que le silence de Fouché ne fût pas prémédité. « Monsieur le duc, lui avait-elle dit, vous venez trop tard. Le coeur du roi est à l'empereur, mais son imagination est séduite. » Ce n'est que bien plus tard et après avoir quitté Naples que Fouché devait révéler ce propos, pensant peut-être y trouver une excuse à invoquer de l'insuccès, voulu ou non, de sa mission.

Ni ce propos de Caroline, ni l'état d'esprit qu'il révèle ne sont faits pour nous étonner, après les révélations de Mier qui ne laissent aucun doute sur les engagements qu'elle a pris avant le retour de Murat à Naples et à son insu. Si, malgré sa gravité, Fouché ne l'a point aussitôt révélé à l'empereur, c'est peut-être que la reine lui a demandé le secret vis à vis de son frère comme elle l'avait demandé à Mier vis à vis de son mari. Et ce peut bien être aussi parce que Fouché ne veut point encore d'une rupture qui serait un obstacle à l'accomplissement de ses plans personnels.

L'attitude de la reine ne laisse d'ailleurs rien soupçonner de ses sentiments à ceux qui ne sont point ses confidents. Elle s'étudie au contraire à donner le change. Depuis l'arrivée de Fouché elle affecte une tristesse qui inquiète Durand. « Elle paraît craindre, écrit-il dans une dépêche du 4 décembre, les résolutions funestes. Ces résolutions, à savoir la trahison de Murat devenant l'allié de l'Autriche, c'est elle, ne l'oublions pas, c'est elle, soeur de Napoléon, qui les a préparées et s'est engagée à les faire adopter à Murat. Celte tristesse, cet air de crainte sont-ils autre chose qu'un raffinement, dans la trahison déjà consommée envers son frère ?

Et malgré tout, un doute vient à notre esprit. En vérité, il ne serait nullement impossible que depuis l'arrivée de Fouché elle ait quelque raison de tristesse, quelque motif de craindre des résolutions funestes. Ce qu'elle a préparé de longue date, ce qu'elle a promis et ce qu'elle travaille à obtenir du roi, c'est un abandon complet entre les mains de l'Autriche qui, pour prix de la trahison, garantira à sa famille la couronne de Naples, et consentira peut-être plus tard à une alliance matrimoniale, gage plus assuré de sa protection. Là se borne son


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ambition, et l'on ne peut que rendre hommage à sa prévoyante sagesse. C'est uniquement pour assurer le pain de ses vieux jours qu'elle trahit la cause de son frère et celle de la France, que ses plans confondent dans un égal et complet oubli.

Et voici que de tout autres projets sont agités entre le roi de Naples et le missionnaire impérial. Il ne s'agit plus d'obtenir de l'Autriche, que tous deux ont également détestée, la simple garantie du royaume de Naples, garantie dont l'établissement de son influence anti-française sur cette partie de l'Italie sera d'ailleurs la naturelle et inévitable conséquence. Il ne s'agit même plus d'obtenir ces agrandissements auxquels Murat a fait allusion dans son entretien avec Mier et auxquels la reine doit s'employer à le faire renoncer parce qu'ils contrarient les vues autrichiennes. En face de sa combinaison raisonnable, pratique, d'une réalisation facile parce qu'elle n'est point en opposition avec la politique de la maison de Hasbourg, plutôt hostile à la restauration sur le trône de Naples d'une branche de la maison de Bourbon, Murât et Fouché en dressent une seconde, d'une allure singulièrement grandiose, mais dont la réalisation pleine de périls peut aboutir à une catastrophe, après avoir suscité l'irréductible opposition de l'Autriche et enlevé ainsi à Murat le seul appui sur lequel il peut compter pour défendre son trône dans les conseils de la coalition.

Caroline a promis de faire adopter au roi le plan qu'elle a combiné avec le comte de Mier. Mais y parviendra-t-elle ? Autant elle est décidée, autant le roi est hésitant à se lier à l'Autriche. Ce n'est pas seulement, comme il le dit et le répète, comme le reconnaissent ceux mêmes qui, comme Durand, appréhendent sa défection, parce que son coeur est à l'empereur. C'est aussi parce que, quelque peu de clairvoyance politique qu'on lui accorde, il ne peut pas ne pas se demander si les avances et les promesses de la coalition ne sont pas un leurre. L'Autriche lui donne l'assurance que l'Angleterre est d'accord avec elle pour lui garantir sa couronne : que devient la valeur de cette assurance en présence de l'attitude du représentant de l'Angleterre, lord Bentinck, se refusant à la conclusion d'un armistice, affichant contre Murat la plus grande hostilité, et ne faisant nullement mystère de son dessein bien arrêté de le chasser de Naples pour y rétablir les Bourbons qui paieront leur restauration de l'abandon de la Sicile à l'Angleterre? Ce sont là des réalités dont Murat ne peut pas faire abstraction. Et d'un autre côté, tandis que rien n'est moins sûr que l'adhésion de l'Angleterre à la


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politique muratiste de l'Autriche, rien n'est encore arrêté avec cette puissance elle-même.

M. Weil a cité de nombreux extraits de la correspondance de Menz qui, en l'absence de Mier, représente l'Autriche à Naples, pour établir qu'au moment de l'arrivée de Fouché, on y tendait de plus en plus à se rapprocher de la coalion. Le 2 décembre, Gallo avait affirmé à Meuz que le roi était bien déterminé à faire cause commune avec les hautes puissances alliées. Mais il avait ajouté : « moyennant des arrangements d'une convenance réciproque. » La difficulté précisément d'accorder ces convenances diminuait fort la portée de son affirmation. Deux jours après, le même Gallo priait Menz de faire savoir à Hiller, commandant des troupes autrichiennes en Italie, que les Napolitains marchaient sur le Pô sans intentions hostiles et ne franchiraient pas ce fleuve jusqu'à l'arrangement définitif avec la cour de Vienne ; que les négociations ouvertes avec l'Autriche et l'Angleterre ne pouvaient aisser aucun doute sur la sincérité du roi ; que, par conséquent, le général en chef ne devait pas se gêner dans ses opérations ; enfin que le général d'Ambrosio, commandant des troupes napolitaines dirigées sur Ancône, serait chargé d'entretenir une communication permanente avec Hiller, et qu'on lui donnait l'ordre d'expédier au plus vite au quartier général autrichien les dépêches portant cet avis. Menz put acquérir la certitude que cet ordre avait été envoyé à dA'mbrosio.

Et cependant il n'était point sans inquiétude. Eut-il quelque soupçon que ces mesures de la cour de Naples avaient pour but d'entraver l'action des généraux autrichiens et de permettre à l'armée de Murat d'occuper sans être inquiétée les pays de la rive droite du Pô ? Le 7 décembre il demanda à Gallo des explications sur certains faits qui étaient de nature à lui donner des doutes sur les vraies intentions du roi et contribuaient, lui dit-il, à répandre dans le public le bruit que le roi aurait définitivement embrassé le parti de la France.

Parmi ces faits, Menz ayant spécialement relevé l'arrivée de Fouché, l'accueil qu'il avait reçu, son assiduité auprès du roi, Gallo répondit que le duc d'Otrante, ancien ami de Joachim, avait été envoyé à Naples avec mission de catéchiser le roi et de mettre en usage l'influence que cette vi.ille amitié pouvait lui procurer sur son esprit pour le raffermir dans l'alliance avec Napoléon et l'engager à joindre toutes ses forces à celles de la France. Il avoua même que Fouché s'était adressé à lui, Gallo, pour lui demander son concours. Ils avaient, le roi et lui,


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protesté de leurs sentiments de reconnaissance envers l'empereur, en lui faisant toutefois sentir que la France, au milieu des désastres qu'elle venait d'essuyer, ne se trouvait guère en état de soutenir le royaume : « Jamais enfin, avait conclu Gallo, Fouché ne parviendra à changer les déterminations du roi. »

Le même jour où avait lieu cet entretien destiné à dissiper les inquiétudes de Menz, Durand, que l'éloignement dans lequel il était tenu ou se tenait volontairement rendait de plus en plus méfiant, transmettait à Bassano les bruits contradictoires qui circulaient à Naples. Les envois de troupes que tout le monde croyait, disait-il, dirigés contre le vice-roi, ayant cessé, on y voyait l'effet des représentations de Fouché. Remarquons en passant que M. Weil, qui reproduit tous les détails, même les plus insignifiants, de la dépêche de Durand, s'ils se rapportent à des bruits défavorables au roi de Naples, ne fait aucune mention de ce passage plutôt favorable à Murat et à Fouché, et que nous empruntons à M. Madelin.

Comme symptôme alarmant, Durand signalait l'arrivée d'un courrier autrichien porteur de dépèches pour Mier et pour Gallo. Le fait était en réalité sans importance, ces dépêches contenant des réponses à des ouvertures ayant précédé le retour de Murat dans ses Etats.

Ce qui était plus grave, c'était le fait que, pour essayer de désarmer l'hostilité de Bentinck, le roi venait de faire rendre les prisonniers anglais pris à Capoue cinq ans auparavant.

C'était encore que, depuis son retour, Murat n'avait cessé de faire ramasser tout l'or du pays. Durand était convaincu que cet or lui servait pour entretenir des intelligences en Italie et y exercer une grande influence, et pour couvrir les dépenses secrètes de ses négociations avec les souverains alliés, comme si la mise en mouvement de son armée ne suffisait pas à expliquer la constitution de ce trésor monnayé.

« Chaque jour, concluait Durand, rend les choses plus critiques. Nous approchons du dénouement, puisse-t-il démentir les craintes que je suis forcé d'exprimer. »

C'était d'une manière toute différente qu'à la même date, Fouché dépeignait la situation dans une lettre qu'il adressait au prince Camille Borghèse le 8 décembre d'après M. Weil, le 6 d'après M. Madelin. « Nos affaires vont bien dans l'Italie méridionale, lui écrivait-il. Les « alarmes se dissipent. Les hommes pusillanimes reprennent courage, « et les troupes du roi de Naples, qui avaient été retardées par le dé-


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« bordement des rivières et par d'autres causes, sont en marche sur le « Pô. Les divisions qui étaient à Rome et à Ancone se portent en avant. « La troisième division est partie de Naples avec la garde royale ; le « roi lui-même va se rendre à Bologne. »

La confiance dont témoigne cette lettre était-elle destinée à donner le change au prince Borghèse ? M. Weil affirme qu'elle n'était point simulée, et il reconnaît en même temps qu'il paraît presque inadmissible que Murat ait su cacher son jeu au rusé policier qui avait plus d'une fois réussi à démêler des intrigues bien autrement compliquées. Ce double aveu n'est point sans intérêt, rapproché de ces affirmations si souvent répétées que Murat a pris son parti de la défection.

Que Fouché n'ait pas été la dupe de Joachim, il est à peu près certain. A-t-il été, en fournissant soit à l'empereur, soit au prince Borghèse, des renseignements contraires à la vérité, le complice, non pas aveugle et inconscient, mais très clairvoyant et très utile d'une politique qu'il a précisément pour mission de combattre ? Faut-il aller plus loin ? Fautil penser qu'au lieu de la combattre, il l'a encouragée ; qu'au lieu de chercher à la modifier, il a contribué par ses conseils à l'accentuer et à la poussera ses dernières conséquences? Avec un pareil intrigant toutes les hypothèses sont possibles et sa conduite à ce moment ne défend pas de s'y arrêter.

Pourquoi, s'est demandé M. Madelin, le duc d'Otrante s'attardait-il à Naples, lui si pressé naguère de rentrer en France ? Formait-il déjà le dessein de n'y parvenir qu'en croupe du brillant Joachim? Il constatait de son propre aveu que « les Napolitains ne semblaient mesurer leur attachement pour leur prince que sur l'éloignement qu'ils espéraient lui inspirer pour les intérêts de la France ». Comment pouvaitil croire que le roi résisterait à cet entraînement ? Restait-il pour contrebalancer cette influence, pour emmener lui-même, sous sa surveillance et sa tutelle, le roi vers Rome, Florence, Milan, peut-être Lyon et Paris, derrière les troupes envoyées dans le Nord dans un but demeuré si problématique ?

Il semblait, en tout cas, partager la colère de Joachim contre les autorités de Rome qui accueillaient avec défiance les troupes napolitaines, et dans une lettre du 10 décembre à l'empereur il blâmait la conduite de Miollis dans ses rapports avec le général Carascosa. Puis, comme pour se défendre par avance de toute accusation ou de duperie ou de complicité, il exposait à l'empereur, vantait l'étrange politique

i


- 54qu'il

54qu'il et disait pratiquer avec le roi traité en grand enfant . « Lors même que j'aurais la preuve que le roi négocie avec la coalition, « loin de l'irriter par des reproches, je redoublerais de soins pour toute cher son coeur. Il n'y aurait même plus qu'un moyen de le ramener « dans les intérêts de la patrie, ce serait qu'il ignorât lui-même qu'il « en est sorti. » Il se flattait d'ailleurs que sa présence en imposait au roi et le retenait « en mettant sous ses yeux le rôle glorieux que les « conjonctures lui offraient ».

Mais précisément Fouché ne jouait-il pas sur les mots et ce rôle glorieux ne portait-il pas dans sa pensée Murat bien au-delà des Alpes, sur la route des Tuileries? Ces interrogations, M. Madelin se contente de les poser. Il n'y a point répondu. Cette réserve du consciencieux et averti biographe de Fouché ne commande-t-elle pas la nôtre? N'est il pas téméraire d'essayer de déchiffrer l'énigme devant laquelle il ne s'est point prononcé?

Essayons cependant. Il ne sera point inutile pour apprécier la conduite de Murat. '

Il est possible que Fouché ait eu l'arrière-pensée de rentrer à Paris en croupe de Joachim, de l'installer aux Tuileries, et naturellement de s'y installer en maître avec lui. Mais aucun document ne permet de l'affirmer. Il n'est pas, en revanche, défendu de dégager de sa lettre du 10 décembre à l'empereur le reflet de sa pensée. En réalité, sous une phraséologie entortillée, destinée à masquer pour le moment aux yeux du maître l'aventureuse audace d'un serviteur indiscipliné, n'est-ce point la demi-révélation ou, si l'on préfère, comme l'amorçage de cette combinaison qui inquiète Caroline, et qui doit procurer à Murât dégagé de l'intrigue conjugale et autrichienne un rôle glorieux, de nature, malgré les apparences, à s'accorder avec les intérêts de la France ?

Reportons-nous aux propos tenus à Bologne, en présence de La Vauguyon et du général Pino, sur les hautes destinées auxquelles peut atteindre Murat en proclamant l'indépendance de l'Italie. A cette idée, jetée alors comme en passant dans une conversation de rencontre, mais non sans doute à la légère, est-il probable que Fouché ait renoncé, lorsqu'il s'est trouvé investi d'une mission officielle auprès de l'homme auquel il a précisément pensé pour la réaliser?

Sur cette idée, M. Madelin pense que, suivant ses habitudes, il a échafaudé deux plans dont les circonstances indiqueront celui qui doit être adopté, et qui, par des voies opposées, doivent concourir au même


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but, amener Murat sur le Pô, les Alpes et peut-être le Rhône. L'un consiste à rester l'allié de l'empereur et son unique lieutenant dans la péninsule, à apporter à Napoléon l'appoint d'une Italie unie, groupée derrière Murat : partant, à ne pas repousser absolument les avances des patriotes, pas même celles des alliés qui pouvaient, grâce à l'équivoque soigneusement entretenue, lui permettre d'arriver sans encombre jusqu'au Pô.

L'autre plan est celui de la trahison : si le roi veut rompre avec Napoléon, il ne faut pas qu'il hésite; il doit faire la part du feu, obtenir de l'Autriche la possession de l'Italie, s'y faire, malgré tout, le protecteur des petites colonies, des administrations françaises contre une réaction qui peut, dans cet ardent pays, devenir terrible ; épargner à ceux qui ont servi la Révolution et l'Empire de succomber, victimes de nouvelles Vêpres siciliennes, créer en un mot un régime de transition. Dans les deux cas le roi sert les Français avec ou contre l'empereur. Dans les deux cas aussi, Murat se trouve en temps utile prêt à entrer en France et à se porter promptement sur Lyon et Paris. Qui sait si, par cette manoeuvre, les Tuileries ne se trouveront pas en temps utile avoir un nouveau maître?

« Que ce fût là, conclut M. Madelin, une conception très personnelle « à Fouché, il n'y a pas de doute possible; qu'en la présentant à Murât « le plénipotentiaire de Napoléon ait outrepassé et jusqu'à un certain « point trahi son mandat, cela est encore moins contestable. Mais qu'il « ait de parti-pris, dès le début, poussé Murat à la défection, il est plus « difficile de l'admettre, d'après les documents que nous fournit la « correspondance des trois acteurs du drame. »

Ces deux plans, que M. Madelin suppose avoir été dressés par Fouché, devaient cependant concourir au même but. Ce but était-il précisément l'arrivée du roi de Naples aux Tuileries? Fouché prévoyait-il dès ce moment la chute de Napoléon? Questions auxquelles il est malaisé de répondre avec certitude. Ce qui est certain, c'est que la seconde combinaison, à la tenir pour réellement envisagée par Fouché, ne pouvait être qu'un pis-aller : elle impliquait de la part de l'Autriche une adhésion et une coopération qu'il est très difficile d'admettre ; elle risquait par cette coopération, même si on l'obtenait, de compromettre la popularité de Murat devenu l'allié des ennemis de la France, et de lui fermer par là l'entrée des Tuileries. Si Fouché, comme le pense son historien, dut avec son cynisme ordinaire proposer les deux plans à


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Murat, ce fut, à n'en pas douter, le premier qui fut l'objet principal de leurs entretiens. Fouché trouvait d'ailleurs, dès son arrivée, l'esprit et l'imagination du roi tout disposés à ces ouvertures.

Murat n'avait pas eu besoin, en effet, des insinuations que La Vauguyon lui avait apportées de Bologne pour envisager le rôle glorieux que pouvaient lui donner la proclamation et la réalisation de l'indépendance italienne. Son ambition y trouvait son compte, mais il y avait vu aussi l'obstacle le plus efficace à opposer à l'invasion et à la conquête de la péninsule par les armées autrichiennes. Et cette vue était si peu chimérique que la coalition, tant elle escomptait le prestige de l'indépendance, ne devait pas hésiter un peu plus tard à faire luire ce décevant mirage aux yeux des peuples italiens qu'elle voulait arracher à l'influence de la France.

Dès le 12 novembre, dans une lettre dont le texte n'a pu être retrouvé, mais dont le sens nous est connu grâce à un rapport de Caulaincourt, Murat déclarait à Napoléon qu'il regardait l'indépendance de l'Italie comme le seul moyen d'animer les habitants à la défendre, et il lui demandait de proclamer cette grande mesure et de réunir l'Italie en une seule nation.

Ce n'est qu'à la fin de décembre que Caulaincourt fut chargé par l'empereur de lui faire un rapport sur la situation en Italie. Dans ce travail qui comprend deux parties, rédigées l'une le 27, l'autre le 30 décembre, le ministre des relations extérieures étudie, entre autres questions, celle de l'indépendance italienne : il est d'avis que sa proclamation actuelle serait inopportune. Mais il reconnaît que, décidée un mois plus tôt, elle aurait pu produire d'heureux résultats.

Mais la lettre de Murat du 12 novembre demeura sans réponse, quelle que fût l'importance des questions qu'elle posait.

Les entretiens du roi de Naples avec Fouché ne pouvaient que développer ces vues. Son esprit en était à ce point obsédé que, malgré la réserve qu'il gardait vis à vis de Durand, il n'avait pu s'empêcher d'y faire devant lui des allusions qui avaient fort ému l'ambassadeur. Engagé le 12 décembre à un déjeuner que le duc de Gallo offrait à Fouché et auquel assistaient les souverains, Durand avait eu avec Mural un entretien au cours duquel le roi lui avait dit qu'une des choses qu'il redoutait le plus en passant à Rome, à Florence, dans toutes les villes de l'Italie, c'était de recevoir des propositions qui l'embarrasseraient, et avait même ajouté qu'il en avait déjà reçu.


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Durand fit observer que de telles ouvertures ne présentent de danger que quand on les écoute. Peu après, n'ayant pu obtenir du roi les renseignements et les assurances qu'il demandait sur les mouvements de l'armée napolitaine, et ayant appris que les divisions réunies à Rome ou dirigées vers Ancône demeuraient stationnaires, il s'adressa à Gallo pour lui répéter combien il était nécessaire d'accélérer leur marche. Au lieu de lui répondre, Gallo ne fit que lui parler de l'indépendance de l'Italie avec une telle insistance, que Durand ne put s'empêcher de rapprocher ces propos de ceux qu'il venait d'entendre de la bouche même du roi. Il répondit que sans doute le roi avait dû faire connaître à l'empereur ceux de ses sujets qui manifestaient de telles dispositior s. Gallo, craignant d'en avoir trop dit, rompit l'entretien sur ce point, affectant de n'attacher à ces faits aucune importance.

Ces propos de Murat, ceux non moins significatifs de Gallo, qui prouvaient que les entretiens du roi et de Fouché n'étaient point demeurés confidentiels, indiquent clairement les préoccupations de la cour de Naples à ce moment. C'était la combinaison de Murât et de Fouché, non celle de la reine, qui semblait prévaloir. Quelques jours après se produisait un fait qui ne pouvait qu'accroître les répugnances de Murat à se lier avec l'Autriche. Le 18 décembre, il voyait revenir à Naples Schinina envoyé en mission auprès de Bentinck pour lui faire connaître les propositions qu'à la date du 7 octobre l'Autriche, d'accord avec les alliés, avait faites au roi de Naples en vue de lui garantir sa couronne, et pour tâcher d'obtenir la conclusion d'un armistice, à la faveur duquel il pourrait porter ses troupes vers le Pô sans avoir à redouter une descente de l'armée anglo-sicilienne dans le royaume de Naples. Bentinck s'y était refusé, alléguant d'ailleurs que la part prise par Murat à la bataille de Leipzig avait enlevé toute portée aux propositions qui avaient pu lui être faites auparavant ; qu'il n'avait plus aucun droit à l'appui et à la bienviellance des alliés. Il s'était, de plus, déclaré bien décidé à ne pas consentir à un arrangement qui déposséderait les souverains légitimes de Naples. Schinina ayant alors demandé l'autorisation de se rendre en Angleterre, Bentinck la lui refusa, et il d'ut rentrer à Naples.

Devant cette attitude du représentant de l'Angleterre, que fallait-il penser de la sincérité de l'Autriche affirmant à Murat que cette puissance était d'accord avec elle pour lui garantir sa couronne? Ses


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engagements personnels auraient ils plus de valeur que ceux qu'elle prenait au nom de son alliée? Mais d'un autre côté le départ de Fouché laissait le champ libre à l'influence de la reine tout acquise, nous le savons, à l'alliance autrichienne.

Il n'est point sans intérêt, on le verra tout à l'heure, de déterminer la date exacte de ce départ. M. Madelin nous dit que Fouché partit de Naples le 19 décembre, mais, quelques lignes plus loin, il nous le montre à Rome dès le 18, et c'est en effet ce jour-là qu'il y arriva, comme il l'indique lui-même dans une lettre à l'empereur.

D'autre part il faudrait conclure d'un passage de M. Weil qu'il avait déjà quitté Naples le 15, date manifestement erronée, qu'il s'est chargé lui-même de rectifier en fixant le départ du duc d'Otrante à la nuit du 16 au 17, mais qui lui était utile pour renforcer le réquisitoire dressé contre Murat à propos d'une lettre écrite par lui ce même jour à la princesse Elisa.

Par cette lettre, le roi informait sa belle-soeur que, de même qu'il avait prescrit à Miollis de ne plus recevoir les ordres du vice-roi, il étendait cette mesure à la Toscane, et que, s'il éprouvait des difficultés ou des refus pour l'exécution de ses ordres dans tous les pays occupés par ses troupes, il arrêterait leur marche et se bornerait à la défense de ses Etats.

Et M. Weil de triompher : c'est le masque presque complètement jeté ; c'est la déclaration de rébellion ouverte contre l'empereur ; c'est la demande à Elisa comme à Miollis de se faire les complices de sa félonie, « Enfin, il semble qu'on soit en droit de conclure de cette lettre qu'à partir de ce moment Murat avait pris le parti de déserter la cause de la France. Il savait bien qu'avant de lui répondre Elisa communiquerait à Napoléon cette lettre par laquelle il s'adjugeait de sa propre autorité le commandement, pour ne pas dire la possession de toute l'Italie française jusqu'à la rive droite du Pô. Il ne pouvait s'imaginer que l'empereur, cédant devant une pareille manifestation, devant une semblable révolte, pousserait la condescendance jusqu'à enlever au vice-roi un commandement, une autorité qu'au début de la campagne il n'avait pas voulu mettre entre les mains du roi de Naples, et qu'il consentirait à s'incliner devant la détermination de Murat, en partageant entre lui et le vice-roi, séparés par le cours du Pô, la direction des armées qui auraient opéré dans la Haute-Italie. Une pareille supposition est inadmissible. Murat n'avait jamais dû s'y arrêter, malgré la folie ambitieuse qui l'aveuglait.


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Aussi nous paraît-il plus logique de croire que la lettre à Elisa n'a été, dans son esprit, qu'une espèce de mise en demeure, d'ultimatum indirect adressé par une voie détournée à l'empereur et à la France. »

Il est en vérité trop facile de répondre à M. Weil. Que le pagényriste du prince Eugène déclare inadmissible la supposition que l'empereur consentirait à partager entre le vice-roi et Murat un commandement qu'au début de la campagne il a refusé à celui-ci, il est naturel. Qu'il juge encore plus inadmissible cette autre supposition que son opinion a pu être modifiée précisément par les résultats de cette campagne qui a démontré le peu de capacité du vice-roi, on n'en saurait douter, et on hésite à lui demander de tenir compte de cette objection. Il faut pourtant se rendre à l'évidence. En dépit de la folie ambitieuse qui l'aveuglait, Murat a très bien pu s'arrêter à l'espoir que l'empereur lui donnerait satisfaction. La preuve en est, aussi éclatante qu'on la peut souhaiter, dans ce rapport de Caulaincourt dont nous avons plus haut reproduit un passage. Le duc de Vicence y proposait à l'empereur de « laisser tacitement au roi l'autorité supérieure civile et militaire dans les lieux qu'occuperont ses troupes, pourvu qu'elles soient conduites à l'ennemi, d'autoriser les gouvernements généraux de Toscane et de Rome et les préfets des départements italiens situés sur la rive droite du Pô à déférer aux autres demandes du roi en ce qui concerne les opérations militaires et ne touchant pas aux droits de souveraineté ». N'était-ce point l'acceptation des demandes de Murat? Et n'est-ce point la réfutation de toute l'argumentation de M. Weil ?

Il convient, au surplus, de remarquer que Murat n'a pas attendu le 15 décembre pour indiquer, pour poser, si l'on veut, à l'empereur les conditions que, justement selon nous, il jugeait nécessaires pour la bonne conduite des opérations, et qu'il les lui avait fait connaître dès son retour en Italie. Il n'est donc pas besoin, pour expliquer sa lettre à la princesse Elisa, de dire comme M. Weil : « Le roi de Naples semblait croire que le départ de Fouché lui avait rendu son entière liberté. » La lettre est du 15, Fouché était encore auprès de Murat qu'il n'a quitté, c'est M. Weil qui nous le marque, que dans la nuit du 16 au 17.

Son premier soin, en arrivant à Rome, fut d'écrire à l'empereur pour lui rendre compte de sa mission.

« Sire, j'ai pris congé du roi de Naples. Je l'ai laissé dans la résolu« tion de faire continuer la marche de ses troupes et d'établir son « quartier général à Bologne.


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« Sans doute il négocie avec la coalition; il attend même une lettre « de l'empereur d'Autriche; mais lors même qu'un traité serait signé, « le roi peut nous servir encore; tant qu'il croira n'être pas sorti du « devoir, il sera possible de l'y faire rentrer.

« Je ne dois dissimuler à Votre Majesté aucune des causes qui ont « arrêté l'activité naturelle de ce prince.

« 1° La première est l'incertitude où vous l'avez laissé sur le corn« mandement des armées d'Italie. Le roi, clans ces deux dernières « campagnes, vous a donné tant de preuves de son dévouement et de « ses qualités militaires qu'il s'attendait à recevoir de vous cette mar« que de confiance ; il se sent humilié à la fin et de vos soupçons et de « l'idée de se trouver placé sur la même ligne que le vice-roi.

« 2° On dit sans cesse au roi : Si, pour conserver l'Italie à Tempê« reur. vous dégarnissez votre royaume de troupes, les Anglais vont y « opérer des débarquements et y exciter des séditions d'autant plus « dangereuses que les Napolitains de toute espèce se plaignent haute« ment de l'influence de la France. Les moindres relations de dépen« dance leur semblent un avilissement de la dignité de leur roi qu'ils « aiment et de la dignité duquel ils sont jaloux. Et dans quel état, « ajoute-t-on, se trouve la France?

ee Sans armée, découragée par une campagne que ses ennemis ne « regardent pas comme le terme de ses maux, puisque le Rhin n'est « plus une barrière et que l'empereur, loin de pouvoir garantir l'Italie, « a peine à s'opposer à l'envahissement de ses frontières d'Allemagne, « de Suisse et d'Espagne. Songez à vous, lui écrit-on de Paris; ne « comptez que sur vous-même. L'empereur ne peut plus rien, même « pour la France. Comment garantirait-il vos Etats? Si dans le temps « de sa toute-puissance il eut la pensée de réunir Naples à l'empire, « quel sacrifice sera-t-il porté à faire pour vous? Il vous sacrifierait « aujourd'hui à une place forte. Sire, les circulaires de vos ministres « semblent appuyer cette correspondance.

« 3° D'un autre côté (ont dit les partisans de la coalition), vos enne« mis opposent au tableau de la situation de la France celui des avan« tages immenses que présente au roi son accession à la coalition. Ce « prince consolide son trône, agrandit ses Etats. Au lieu de faire à l'em« pereur le sacrifice inutile de sa gloire et de sa couronne, il va répan« dre sur l'une et sur l'autre l'éclat le plus brillant en se proclamant le « défenseur de l'Italie, le garant de son indépendance.


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« Se déclare-t-il pour Votre Majesté, son armée l'abandonne, son « peuple se soulève. Sépare-t-il sa cause de celle de la France, l'Italie « tout entière accourt sous ses drapeaux. Tel est le langage que par« lent au roi es hommes qui tiennent de près à votre gouvernement. « Et les circulaires de vos ministres semblent appuyer ce langage.

« II faut tout dire, Sire; peut-être ne fait-on en cela que s'abuser sur « les moyens de servir Votre Majesté. La paix leur paraît nécessaire, « est nécessaire à tout le monde. Déterminer le roi à se mettre à la « tête de l'Italie est à leurs yeux le plus sûr moyen de vous forcer, ainsi et que toutes les puissances, à faire la paix.

« Je suis arrivé hier à Rome, le 18. Ici, comme dans toute l'Italie, le « mot d'indépendance a acquis une vertu magique. Sous cette ban« nière se rangent sans doute des intérêts divers, mais tout le monde, « tous les peuples veulent un gouvernement local. Chacun se plaint « d'être obligé d'aller à Paris pour des réclamations de la moindre « importance. Le gouvernement de la France, à une distance aussi « considérable de la capitale, ne leur présente que des charges pesan« tes, sans aucune compensation. Conscriptions, impôts, vexations, « privations, sacrifices, voilà, se disent les Romains, ce que nous con« naissons du gouvernement de la France. Ajoutons que nous n'avons « aucune espèce de commerce, ni intérieur, ni extérieur, que nos pro« duits sont sans débouchés, et le peu qui nous vient du dehors, nous « le payons un prix excessif.

« Sire, Votre Majesté avait le droit d'attendre de moi toute sincérité, « je ne lui ai rien dissimulé. Elle seule peut faire cesser cette situation « du roi et de l'Italie. Je crois que ce changement est encore en son « pouvoir. Si Elle attend plus tard, si les coalisés envoient des ren« forts dans cette contrée, je crains qu'ils ne s'y rendent maîtres, et par « les mêmes moyens qui sont aujourd'hui en votre puissance.

« J'ai l'honneur..., etc. »

C'est le lendemain même de son arrivée à Rome que Fouché, il le dit lui-même, écrit sa lettre, en fixant au 18 la date cette arrivée. La minute découverte par M. Albert Lumbroso dans les papiers de Fouché porte cependant la date.du 27. D'après M. Weil, le retard mis par Fouché à l'expédition de cette correspondance doit être attribué à une entente avec Murat et à la volonté de faire coïncider son envoi avec celui de la lettre que, de son côté, le roi adressait à l'empereur le 25 décembre sous l'inspiration, peut-être même d'après la rédaction de


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Fouché, à en juger par l'analogie des arguments développés et par la similitude des termes clans les deux documents.

« Sire, j'ai reçu votre lettre du 4 en réponse à la mienne du 23 « novembre. Vous me croyez sur le Pô, vous supposez que l'ennemi, « à mon aspect, a fui loin de ses rivages, et vous désirez que je me « mette à même de passer ce fleuve et de faire lever le blocus de « Venise.

« Sire, je vais vous parler avec franchise et vous faire connaître ce « que la position de mon royaume me permet d'entreprendre en ce et moment pour la France.

« 35.000 hommes et un train d'artillerie de 50 pièces de canon sont « en marche pour Florence et Fano. Cette armée fait toute la force « disponible de mon royaume, et je n'ai pas hésité à la porter au delà « des Apennins, parce que, de la Romagne, j'exerce sur mes Etats la « même influence que si j'étais à Naples ; parce que, par une contre« marche, je puis me porter en peu de jours sur les points menacés de « mon royaume ; parce que, de Bologne, je contiens toute l'Italie « méridionale, et que je suis puissant contre toute agression étrangère « et contre toute tentative de mouvement révolutionnaire ; parce que « je vous sers en même temps que j'arrête les opérations de vos enne« mis sur Milan et Turin. En effet, le premier mouvement de mes « troupes a suspendu celui de l'ennemi ; les deux armées sont, depuis te cette époque, dans une espèce d'armistice ; j'ai donc rempli le but « que Votre Majesté m'avait d'abord indiqué. Mais aujourd'hui Votre « Majesté exige de moi de nouveaux sacrifices ; elle demande que « mon armée passe le Pô et se porte sur la Piave. Elle oublie sans « cloute que j'ai laissé mon royaume sans défense et que la reine et « mes enfants n'ont d'autre sûreté que l'amour de mes sujets. Cepen« dant les Anglais peuvent, quand ils voudront, porter la guerre au sein « de mes Etats, détruire la tranquillité de mes provinces et venir jeter « des bombes dans ma capitale et presque dans mon propre palais.

« Sire, je ne saurais vous tromper. J'ai fait pour la France, pour « Votre Majesté, tout ce qu'il était en mon pouvoir de faire : j'ai rempli « les devoirs de la reconnaissance comme Français, comme votre ami, « comme votre beau-frère.

« Je me suis déterminé à faire marcher mon armée sur le Pô pour « arrêter les progrès de l'ennemi sur Milan et Turin, pour faire une « diversion en faveur de vos armées, pour couvrir mes Etats, pour


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« favoriser par là les négociations de paix ; mais si ma démarche « n'obtenait pas le but principal que j'ai en vue, celui de la paix, Votre « Majesté ne penserait-elle pas elle-même qu'ayant rempli mes obli« gâtions envers elle, je me verrais forcé de remplir mes devoirs « envers mes peuples, en songeant sérieusement à ma propre défense, « à la conservation de mon royaume ; et alors Votre Majesté devrait « renoncer à l'espoir qu'elle pourrait avoir conçu de me voir passer le « Pô ; car, en mettant ce fleuve entre mes sujets et mon armée, « comment pourrais-je m'opposer aux efforts que l'ennemi fait en ce « moment en Toscane, dans la Romagne et dans mes propres Etats ? « En divisant mon armée? Mais en la divisant je la rends impuissante; « j'ai hasardé jusqu'à mon existence politique, et je deviens alors la « fable du monde et de l'armée. J'avais indiqué à Votre Majesté le seul « moyen qui restait à prendre. Elle l'a dédaigné ou du moins elle « a gardé le silence, et ce silence a dû m'avertir que mon plan et n'entrait pas dans ses combinaisons.

« Sire, croyez-moi, la proclamation de l'indépendance de l'Italie en « une ou deux puissances qui auraient le Pô comme limite, sauverait « l'Italie. Sans cela l'Italie est perdue sans ressources. Elle va de nou« veau être démembrée, et le but de votre sublime pensée d'affranchir « l'Italie, de la rendre nation après l'avoir couverte de gloire, est à « jamais détruit. Mettez dès à présent à ma disposition les provinces « au delà du Pô, et je garantis à Votre Majesté que l'Autriche ne « passera pas l'Adige ; vous serez encore, dans les négociations de la « paix générale, l'arbitre de l'Italie et vous vous serez créé en moi un « allié sûr et puissant. Je puis faire d'un mot ce que les Anglais et les « Autrichiens ont vainement tenté à Livourne, à Lucques et à Ravenne. « Réfléchissez, Sire : l'ennemi exhorte les Italiens à l'indépendance « qu'il leur offre : l'espoir qu'ils mettent clans mon armée les a rendus « indifférents à ces propositions. Mais resteraient-ils sourds à ces offres, « si le roi de Naples ne réalisait pas leurs espérances et contribuait, au « contraire, à affermir sur eux la domination étrangère ? Non, non, « c'est une erreur de le penser. Les Italiens sont prêts à se livrer à « celui qui voudra les rendre indépendants. Que Votre Majesté réponde « et daigne s'expliquer sur un point aussi important pour elle. Le temps « passe, l'ennemi se renforce, je suis réduit au silence, et le moment « ne peut être loin où je serai forcé de m'expliquer à mon tour envers « la nation et envers l'ennemi. Un plus long silence de ma part, suite


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« de celui que vous me gardez, me ferait perdre l'opinion, et l'opinion « fait ma seule force ; une fois perdue", je ne puis plus rien, ni pour « vous, ni pour moi. Répondez, répondez positivement.

« Je tirerai de ces pays toutes les ressources qu'ils renferment ; leurs « habitants sont disposés à tous les sacrifices; les autorités françaises « n'en obtiendraient aucun.

« De grâce, secondez de si nobles sentiments; je vous le redis encore, « cette noble détermination est digne de Votre Majesté. Que l'Italie, « qui lui doit déjà son premier affranchissement, lui doive encore son « existence politique et son indépendance. Vous connaissez mon coeur ; « les sentiments que je vous porte me feront tout entreprendre ; et « possédant plus de pays, j'aurai plus de ressources pour vous aider « et pour vous seconder. Répondez, répondez, je pourrai recevoir votre « réponse à Florence ou à Bologne ; je pars demain pour aller me « mettre à la tête de mon armée.

« Je suis de Votre Majesté, Sire, le très affectionné frère et beaufrère.

« JOACHIM. »

« P. S. — Sire, au nom de tout ce que vous avez de plus cher en « ce monde, au nom de votre gloire, ne vous obstinez pas plus « longtemps. Faites la paix, faites - la à tout prix ; gagnez du « temps et vous avez tout gagné : votre génie et le temps feront le reste. « Si vous vous refusez aux voeux de vos sujets, de vos amis, vous nous « perdrez tous. Croyez-moi, l'Italie est encore fidèle, parce qu'elle « croit entrevoir un meilleur avenir ; mais elle ne le sera pas longtemps, « si ses espérances sont trompées. D'un mot on peut la porter à tous « les sacrifices; mais ces bonnes dispositions sont conditionnelles; « vous pouvez encore la conserver dans vos intérêts, mais les moments « sont chers et précieux : si vous n'en profitez pas, attendez-vous de « l'avoir pour ennemie. Les Italiens une fois déchaînés sont capables « des plus grands excès comme ils le sont encore des plus grandssacri« fices. Croyez-moi une fois. Mettez de côté toute prétention, toute « passion. Il est encore temps de sauver l'Italie, mais expliquez-vous. »

Nous laissons au lecteur qui a sous les yeux la lettre de Murat et celle de Fouché le soin de décider si, comme le prétend M. Weil, la similitude des termes et des arguments constitue la preuve que Fouché a inspiré,


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peut-être rédigé la lettre du roi de Naples. Pour nous, c'est plutôt à la conclusion opposée que nous amènerait la comparaison de ces deux documents, bien révélateurs de deux caractères aussi contraires que ceux de l'ancien ministre de la police et de l'impétueux roi de Naples. Sans doute elles concourent au même but: faire adopter à l'empereur, comme le suprême et le seul moyen d'arracher l'Italie à l'influence des coalisés, la proclamation de son indépendance. Les longs entretiens de Murât et de Fouché avaient établi entre eux une parfaite communauté de vues sur cette question, et il n'était certes pas besoin d'une entente spéciale pour la présenter à l'empereur; encore moins d'une manoeuvre concertée pour que les deux lettres prennent en même temps la route de France.

Pour compléter l'impression sur laquelle doit être jugée la lettre de Murat, il convient de la rapprocher de celle que quatre jours auparavant, le 21 décembre, il avait'écrite à Napoléon à l'occasion de la nouvelle année qui allait s'ouvrir.

« Sire, une nouvelle année va commencer, m'est-il permis d'offrir à « Votre Majesté tous mes voeux ? S'ils étaient exaucés, il ne manquerait « plus rien à votre bonheur, ni à celui de votre famille. Que cette an« née soit le terme des malheurs de la guerre : que l'année qui va « commencer nous amène des jours plus tranquilles. Puissiez-vous « vous reposer longtemps à l'ombre de vos lauriers ! Votre Majesté a « tout fait pour sa gloire ; qu'elle fasse quelque chose pour son bonheur ; « qu'elle nous donne la paix et qu'elle commande à l'Europe un nou« veau genre d'admiration en lui présentant le modèle des gouverne« ments. Mes voeux seront toujours pour elle, alors même que les cir« constances feraient soupçonner mes sentiments.

« Sire, je vous aimerai toute ma vie, mon attachement à Votre Ma« jesté sera toujours indépendant des événements politiques.

« Je suis de Votre Majesté, Sire, le très affectionné frère Tet beaufrére. « J. NAPOLÉON. »

« Lettre pleine de réticences, d'hypocrisie et de menace mal dissimulée, déclare M. Weil, sous de creuses protestations de reconnaissance et d'attachement. »

Encore une fois, M. Weil a tort. Lettre fut-elle jamais plus nette, plus de première inspiration, moins calculée pour masquer la pensée ? Ce voeu en faveur de la paix n'est-il pas sincère ? N'est-il pas, d'abord, celui qui, de toutes parts et de la bouche même des serviteurs du ré-


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gime les plus dévoués et les plus clairvoyants dans leur dévouement, s'élève vers l'empereur inflexible dans son orgueilleuse et folle obstination? Ne doit-il pas être en particulier celui du roi de Naples que, seule, la paix, peut tirer de l'inextricable situation que lui ont faite les événements bien plus que sa volonté ? Et n'est-ce pas, pour le cas où sa voix ne sera pas entendue, la déclaration nullement dissimulée d'une divergence d'intérêts politiques qui n'enlèvera rien à la force des sentiments personnels qu'il n'est d'ailleurs pas possible de contester à Murât à l'égard de Napoléon, puisqu'ils survivront à la rupture, et que leur réveil ne sera pas plus tard sans influence sur le lamentable dénouement de sa destinée ?

Quant à la lettre du 25 décembre, en dépit de l'importance que cependant il lui reconnaît expressément et qui à vrai dire n'est pas contestable, M. Weil ne la discute pas. Il se borne à la juger d'un mot qui, du reste, vaut tous les commentaires.

Qu'en pensera-t-on, écrit-il, lorsqu'on comparera les grandes phrases de Murat avec ses actes, avec certains faits incontestables enregistrés par Gabriele Pepe ?

Pepe raconte clans ses Notes qu'il a accompagné et fait passer aux avant-postes autrichiens le chevalier Schinina, qui portait au grand quartier général des alliés des dépêches importantes adressées par la cour de Naples à l'empereur d'Autriche, à Metternich et à l'ambassadeur de Naples à Vienne. Chemin faisant on a causé politique, Schinina lui a dit qu'on pouvait considérer l'alliance autrichienne comme conclue. La seule chose qui avait manqué jusque-là, c'était l'adhésion de la reine.

C'était ce consentement qu'il emportait, et c'était là une pièce d'autant plus importance que l'empereur François et le prince Metternich en avaient fait une condition sine qua non. Pepe ayant exprimé sa surprise, Schinina crut devoir lui révéler tout le mystère : ee Les puissances alliées savent que c'est à la reine que Joachim doit son trône et qu'elle . exerce une grande influence sur son esprit. Les souverains coalisés savent de plus que le roi est faible, qu'il aime la France, et connaissent sa passion pour la guerre. Le moindre revers des alliés, la moindre victoire de Napoléon suffiraient pour le décider à se tourner contre eux. C'est pour cette raison qu'ils ont tenu à avoir entre leurs mains l'adhésion de la reine, d'abord pour la compromettre aux yeux de son frère et rendre tout rapprochement impossible entre Napoléon et Joachim,


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ensuite pour être plus sûrs des intentions et de la coopération du roi, parce qu'ils savent qu'il fait tout ce que veut la reine. »

Après avoir consigné ces confidences de Schinina, Pepe qui est» avant tout, animé d'un ardent patriotisme italien, comprend qu'il faut renoncer au rêve de l'Italie une et indépendante réalisé par son souverain.

On ne saurait savoir trop de gré à M. Weil d'avoir reproduit ces notes de Pepe, alors encore inédites et publiées depuis par le baron Lumbroso. Elles permettent de répondre à la question posée par lui à propos de la lettre du 25 décembre, mais dans un sens probablement différent de celui que laissent entendre la forme et l'esprit de l'interrogation. Elles ont même une portée plus haute.

Ce n'est qu'avec des hésitations, des réserves et des doutes que nous avons essayé de démêler dans le jeu dissimulé des intrigues qui ont préparé le dénouement, maintenant tout proche, du drame, les sentiments et le rôle des personnages qui en ont été les protagonistes. Les confidences de Schinina, si heureusement recueillies par son compagnon de route, viennent enfin les préciser. La lettre du 25 décembre est bien l'expression de la pensée de Murat, doublée en quelque sorte et fortifiée de la pensée de Fouché, telles que nous avons cru les saisir, l'une et l'autre, parfaitement concordantes, arrêtées sur une combinaison politique nullement exclusive, dans leur esprit, ni du loyalisme, ni du souci de l'intérêt français; mais en face de laquelle se dresse, probablement dès le premier jour, l'impérieuse volonté de Caroline engagée par la promesse donnée à l'Autriche de faire faire à Murât tout ce que l'Autriche exigera de lui, et ardente à la tenir parce que, aussi peu soucieuse de l'intérêt français que de l'intérêt de son frère, méfiante des grands projets auxquels se complaît l'imagination de Murât, elle voit dans la soumission à l'Autriche la seule garantie raisonnable et possible de la sécurité de son trône. Son triomphe est proche; il n'aura pas été obtenu sans peine.

Il est indéniable que le roi a prêté les mains à cette négociation. Fouché, nous l'avons vu, ne l'a point caché à Napoléon. N'y a-t-il pas été amené, en dehors même de l'influence de Caroline, un instant gênée et balancée par celle de Fouché, par l'éventualité possible et que les partisans de l'Autriche lui représentent certainement comme fatale, d'un refus opposé par l'empereur à ses propositions ? Le silence obstiné de Napoléon, qui doit attendre la fin de décembre pour les faire étudier


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par Caulaincourt, ne peut que donner plus de force à ces représentations qui ne parviennent pas cependant à triompher de ses répugnances, ou même plus simplement, si l'on veut, de ses hésitations à prendre un parti aussi contraire à ses sentiments qu'à ses ambitions.

Les alliés ne l'ignoraient point, non plus que les généraux autrichiens qui commandaient en Italie. Les troupes de Murat étaient en marche vers le Pô. Une partie se trouvait déjà en vue des corps autrichiens. L'entente la plus parfaite, dit M. Weil, semblait régner entre les deux armées dont les avant-postes, presque au contact, évitaient soigneusement de s'aborder et de s'engager. Et cependant il reconnaît que l'incertitude qui régnait encore, (nous sommes à la fin de décembre), au sujet de l'attitude ultérieure des Napolitains, et l'importance militaire des positions qu'ils occupaient n'étaient pas sans donner quelque souci au général Nugent. Celui-ci avait fait savoir à Carascosa qu'aux termes de l'entente qui allait être conclue avec le roi de Naples il devait occuper Rimini, mais en en informant le commandant en chef Bellegarde, il avouait que le consentement du général napolitain paraissait peu probable ; et de fait, au' lieu des Autrichiens de Nugent, c'étaient les Napolitains de Carascosa qui entraient à Rimini, et Carascosa s'en excusait auprès de Nugent en invoquant l'ordre formel de Murât. Ses mouvements révélaient ses préoccupations, et M. Weil reconnaît que, si peu probable que fût le cas où les Napolitains prendraient parti contre les alliés, il était sage et prudent de le prévoir. Ce n'est que dans la première huitaine de janvier que ses appréhensions devaient être calmées, quoique non encore absolument dissipées par un avis parti de Naples le 3 janvier 1814. « J'engage et j'invite M. le général comte de Nugent « de ne plus opérer sur la grande route entre Rimini et Bologne si la « présence des troupes napolitaines a éloigné de ces contrées les troupes « ennemies, et si mon invitation ne s'oppose pas à des ordres supérieurs « de Son Excellence M. le maréchal de Bellegarde.

« Je prie M. le comte de Nugent de prévenir le général en chef que « mes négociations semblent prendre une tournure favorable et que « dès que le traité sera entièrement développé et signé, nous pourrons « compter sur une coopération de l'armée de S. M. le roi de Naples. » Cet avis était adressé à Nugent par le comte de Neipperg, envoyé à Naples par l'Autriche pour négocier et conclure un traité d'alliance avec Murat. Il était arrivé à Naples dans la nuit du 30 au 31 décembre. Le traité ne devait être signé que le 11 janvier. Les péripéties qui


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marqueront les derniers jours de cette crise douloureuse, dont l'avenir et l'honneur du roi de Naples sont l'enjeu, ne différeront point de celles qui se sont succédé depuis ses débuts, et seront plutôt de nature à confirmer qu'à modifier nos impressions et nos jugements. Nous allons assister à la lutte des mêmes influences, au développement des mêmes sentiments, qu'il s'agisse de Murat, de Caroline, de Fouché ou de Bentinck.. La signature seule du traité semblera y mettre un terme en consacrant la victoire de la reine. Encore ne sera-ce qu'une apparence.

Le 3 janvier Murat écrivait à Napoléon.

« Sire, me voilà parvenu au jour le plus douloureux de ma vie, me « voilà livré aux sentiments les plus pénibles qui jamais aient agité « mon âme. Il s'agit de choisir. Et je vois, d'un côté, la perte inévitable « de mes Etats, de ma famille, de ma gloire peut-être ; de l'autre, des « engagements contraires à mon éternel attachement pour Votre « Majesté, à mon inaltérable dévouement à la France.

« Depuis quatre jours, un plénipotentiaire autrichien (le comte de « Neipperg) est ici pour me proposer au nom de son souverain un « traité d'alliance. Il m'a présenté, avec une lettre infiniment obligeante « de l'empereur d'Autriche, les offres les plus avantageuses pour mon « royaume. Et ce matin pendant que mon ministre dès affaires étran« gères était en conférence avec lui, une frégate anglaise sous pavillon « parlementaire a porté un officier muni de l'autorisation de lord « Bentinck pour signer un armistice, en attendant la paix que ce « dernier est autorisé à conclure par des pleins pouvoirs expédiés de « Vienne avant le départ du comte de Neipperg.

« Ces démarches éclatantes, faites au milieu du bouleversement « actuel de l'Europe, par deux grandes puissances qui triomphent et « qui, dans les temps les plus prospères de l'ancienne monarchie, « exigeaient tant de déférence de la cour de Naples, ont enivré « d'espérances, que peut-être accompagne un peu d'orgueil, tous les « habitants de ma capitale. Ils voient que je suis le maître de leur « donner la paix, et, de toutes parts, ils la sollicitent. La force de « l'opinion sur ce point est si puissante qu'elle ne saurait être bravée « sans imprudence par un prince dont toute l'autorité se fonde sur « l'opinion et sur l'amour de ses sujets.

« Cependant, sire, j'ai temporisé, je temporise encore. J'ai voulu « attendre et j'attends une réponse de Votre Majesté aux propositions, « aux instances que je lui ai faites pour obtenir d'elle les moyens de la

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« servir, de défendre l'Italie, de défendre mon royaume avec quelque « chance de succès.

« Daignez relire mes lettres des 23 novembre et 25 décembre. Je vous « parlais avec toute la loyauté qui appartient à mon caractère, avec « toute la franchise que les circonstances commandaient si impérieu« sement, et ce que Votre Majesté m'a écrit jusqu'ici n'a pu avoir que « le malheureux effet d'accroître mes embarras et mes incertitudes.

« Vous m'avez dit de faire marcher mon armée sur le Pô, et je l'ai « fait avancer. Vous ne m'avez donné aucun pouvoir dans les pays que « je devais traverser, que je devais couvrir, et où nécessairement je « devais avoir mes dépôts, mes approvisionnements, toutes mes « ressources. En sorte que partout j'ai rencontré des difficultés, des « oppositions, des obstacles ; partout j'ai vu l'autorité royale et le « service compromis.

« Vous m'avez marqué de me porter sur la Piave, quoique j'eusse « déclaré à Votre Majesté et qu'Elle sût parfaitement que je ne pouvais « passer le Pô sans exposer aux périls les plus imminents ma famille « et mon royaume, menacés par plusieurs expéditions maritimes. Mais, « en manifestant celte intention, vous n'avez pas déterminé à qui « appartiendrait le commandement lorsque mon armée se trouverait « réunie à celle du vice-roi. Un tel silence rendait évidemment « inexécutables des opérations dont le succès, s'il était possible, ne « devait être attaché qu'au plus parfait ensemble, à la plus parfaite « combinaison des mouvements.

« Vous m'avez annoncé, sur mes demandes réitérées, que vous aviez « accepté des préliminaires de paix et qu'un congrès allait se réunir, « Mais vous n'avez pas daigné me dire sur quelles bases on allait « traiter ; vous ne m'avez même pas parlé de la garantie de mes Etats, « Vous n'avez rien répondu aux instances que j'ai faites et que j'ai fait « faire par mes ministres pour intervenir dans les négociations en « envoyant au congrès un plénipotentiaire napolitain. Je suis forcé « d'ajouter qu'on m'a assuré que Votre Majesté aurait proposé des « stipulations très contraires aux intérêts du roi de Naples. Mais je me « serais cru coupable envers elle si un seul instant j'avais pu le croire.

« Je ne saurais m'empècher d'être frappé du contraste que présentent « avec moi les relations du souverain à qui j'ai consacré ma vie entière « et celles des princes que je n'ai cessé de combattre. Le premier me « montre une défiance que vingtans de service et d'attachement devaient


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« éloigner à jamais de mon (?) coeur ; les autres me prodiguent, avec les « témoignages les moins équivoques de considération,'d'estime, de « bienveillance, les offres les plus flatteuses.

« Toutefois, je ne balancerais pas si Votre Majesté m'avait donné, si « Elle pouvait encore me donner les moyens de lui être utile et d'être « utile à cette France ma première patrie, dont la gloire et la prospérité, « tant que je respirerai, me seront si chères.

« Oui, Sire, si Votre Majesté avait mis à ma disposition les ressour« ces que je pouvais trouver dans l'Italie méridionale, j'aurais 80.000 « hommes prêts à combattre pour Elle, et je crois qu'une telle armée « ne laisserait aucune incertitude sur les chances de la guerre en Italie, « ou plutôt je crois qu'elle aurait fait cesse» pour la France les désas« très de la guerre en déterminant les ennemis à une paix honorable « pour toutes les puissances.

« Encore aujourd'hui, je le déclare, si je croyais, par le sacrifice entier « de mes intérêts, si je croyais, en me perdant personnellement, sauver « la France des malheurs qui la menacent, je consentirais à tout sacri« fice, je consentirais à me sacrifier ! Mais dois-je sacrifier de même « sans objet, sans espérances, les intérêts les plus chers des peuples « que la Providence m'a confiés et qui me montrent tant d'affection ? « Dois-je perdre sans retour tant d'hommes qui sesont consacrés à moi « avec un si noble et si entier dévouement ?

« Les événements se pressent et deviennent à chaque instant plus « menaçants. Certes, je sais braver les dangers ; mais il est dans les « devoirs d'un roi de savoir calculer ses forces.

« J'ai la certitude que l'Autriche fait passer en Italie dans ce moment « des troupes très nombreuses.

« Toutes les lettres qui viennent de France annoncent que les alliés, « après avoir traversé la Suisse, inondent les provinces françaises et se « portent dans la Savoie. Déjà, vraisemblablement, les passages du « Saint-Gothard, du Simplon, du mont Cenis sont interceptés, et « bientôt peut-être les troupes de la coalition viendront par les mêmes « routes attaquer l'Italie, qu'elles tiennent maintenant comme bloquée « avec des forces immenses et qui s'accroissent sans cesse.

« D'un autre côté, je suis informé par des rapports dont je ne puis « révoquer en doute la véracité qu'il se prépare en Illyrie une expédition « qui pourrait être destinée contre mon royaume. Et si les arrange« ments que Votre Majesté m'annonce avoir faits avec les Espagnols


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« déterminent les Anglais à évacuer l'Espagne, il y a lieu de croire « qu'ils viendront débarquer leurs troupes sur les côtes de l'Italie.

« Que puis je faire, ainsi menacé de toutes parts et ne pouvant compte ter sur aucun secours ? Si je commandais une armée française, je « hasarderais tout, je combattrais partout où je trouverais des ennemis, et et en tout événement je chercherais une retraite, qui cependant te serait peut-être bien difficile, par la rivière de Gènes. Mais, Sire, « pensez-vous que je puis agir ainsi avec des troupes napolitaines ? « Croyez-vous que je puisse me flatter de les conduire au delà des « Alpes? Croyez-vous, quel que soit leur attachement pour moi, qu'el« les n'abandonneraient pas un souverain qui abandonnerait leur et patrie ?

« De telles circonstances peuvent me faire un devoir d'embrasser un « parti contraire aux plus chères et aux plus constantes affections de « mon âme. S'il en arrivait ainsi, que Votre Majesté me plaigne ! j'au« rai fait à mes sujets, à mes enfants, à ma couronne le plus doulou« reux sacrifice qui puisse m'être arraché.

te Mais il en est peut-être temps encore ! Ah ! s'il en est temps, prê« venez les effets de ces circonstances cruelles.

« Je vous en conjure de nouveau. Au nom de tout ce qui vous est « cher, au nom de la France, au nom de l'Europe entière, et par tous « les chagrins qui me tourmentent en ce terrible moment, je vous en « conjure, faites la paix ! Daignez vous rappeler que je vous faisais « cette prière avant la bataille de Dresde, que je vous la faisais après « cette bataille, que je vous la fis avant de me séparer de Votre Ma. « jesté en Allemagne, que je n'ai jamais cessé de vous l'adresser depuis « votre retour à Paris. Je vous la renouvelle aujourd'hui, avec des « instances d'autant plus fortes que je me vois à la veille de me trouver « sans communication avec Votre Majesté et dans l'impossibilité de « combattre encore pour elle.

« Quelque détermination que la fatalité m'impose, croyez, Sire, que « mon coeur sera toujours français, que je serai toujours l'ami de la « France, que chaque Français, partout où je serai, aura en moi, dans « toutes les circonstances, un protecteur affectionné et que je trouverai « mes seules consolations dans les services que je pourrai leur rendre, « Sire, croyez aussi que votre élève, votre beau-frère, votre ami le « plus dévoué, se montrera toujours digne de Votre Majesté. Croyez « que l'attachement qu'il vous porte est inaltérable et parle à son coeur


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« avec d'autant plus de force qu'il vous voit en lutte contre la fortune « que votre génie a si longtemps maîtrisée. Ne lui ôtez pas votre ami« tié; vous savez ce qu'il a fait depuis vingt ans pour la conquérir et la « conserver, et il saura, n'en doutez pas, trouver encore des moyens « de s'en montrer digne, ainsi que de l'estime de la France.

« Sire, si la dure nécessité m'entraîne, comme j'ai lieu de le redou« ter, dans des relations en apparence contraires à vos intérêts, mais te qui peut-être seront utiles à Votre Majesté et à la France, en me « donnant quelque influence dans les négociations pour la paix, j'ose « espérer que vous me jugerez avec calme, avec impartialité, avec la et raison d'Etat, et en considérant que j'ai fait tout ce que j'ai pu faire « pour prévenir un tel malheur.

« Je suis de Votre Majesté, Sire, le très affectionné frère et beau« frère.

J. NAPOLÉON.

et P.-S. — J'apprends à l'instant que l'ennemi est à Genève et mar« che sur Chambéry. »

te // serait assurément superflu, écrit M. Weil, d'ajouter le moindre commentaire à cette lettre d'autant plus étrange que,quoi qu'en dise le roi de Naples, l'accord avec l'Autriche était déjà sinon signé, du moins arrêté dans son ensemble et dans ses grandes lignes au moment où l'estafette emportait la dépêche de joachim à Paris. D'ailleurs,par une coïncidence bizarre, qui saurait d'autant moins être l'effet du hasard que pareil jait s'était déjà produit peu de jours auparavant, le 25 décembre, pour les lettres que le roi de Naples et le duc d'Otrante adressaient à l'empereur, l'un de Naples le 25, l'autre de Rome le 27 décembre, celle fois encore Fouché profilait probablement du passage du même courrier venant de Naples pour exposer à nouveau à son souverain ses idées sur la situation de Murat, pour essayer d'expliquer ou de défendre la conduite de Joachim, et pour faire prévoir, en enveloppant sa pensée de toutes sortes de réticences et de périphrases, l'entrée imminente de ce prince dans la coalition.

« Par suite d'une singularité non moins curieuse, le duc d'Otrante se servait d'arguments et, qui plus est, de termes absolument semblables à ceux que l'on trouve dans la lettre même de Murat. »

« Le roi de Naples, écrit Fouché à Napoléon le 3 janvier, est tou« jours dans des irrésolutions continuelles. Son coeur ne saurait être « ingrat envers vous et envers la patrie; mais son caractère a plus


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« d'héroïsme que de fermeté. Il lui manque la force de repousser « les séductions de ses ennemis. La France ne lui semble plus un « appui et les adresses qu'on lui envoie de tous les coins de l'Italie, et « qu'il prend pour les voeux des Italiens, flattent son amour-propre, « Les caresses de la coalition qu'il croit désormais invincible le tien« nent dans une inaction qui compromet à la fois son honneur, la di« gnité de sa couronne et sa propre sûreté. Une partie de son armée « est en présence des Autrichiens. Les avant-postes, au lieu de se bat« tre, se mêlent et s'occupent de questions politiques. Je lui ai écrit « hier pour le conjurer de se rendre à la tête de ses troupes. J'ai mis « sous ses yeux sans ménagement le tableau des dangers qui lemena« cent... »

Passant ensuite à l'examen de l'état de l'opinion à Naples, Fouché, toujours habile courtisan (c'est le résumé de M. Weil), constate que le mot d'indépendance a égaré les têtes napolitaines, tout comme les mots de Liberté et d'Egalité avaient égaré les Français en 178g.

C'est en vain qu'il aurait essayé de démontrer à Murat que sous ce nom d'indépendance, un parti cachait la pensée d'avoir un roi citoyen, et qu'un autre voulait s'en servir pour remettre sur le trône l'ancienne dynastie. Et il ajoute aussitôt : « L'esprit de ce prince est convaincu, son coeur « est ouvert à toutes les vérités. Il veut le bien. Toutefois, son imagi« nation est sans cesse détournée par les idées qu'on lui donne de « votre éloignement pour lui, de votre préférence pour le vice-roi, de « l'arrière-pensée qu'on vous suppose de lui ôter son trône, et enfin « par les offres et les flatteries de la coalition qu'on oppose sans cesse « à la sécheresse qu'il croit voir dans vos lettres. »

Obligé défaire allusion à des négociations dont il lui était impossible de nier l'existence, Fouché en parle négligemment comme d'un simple bruit qui court à Rome. Il lui est d'autant moins possible de passer ces faits sous silence que la reine Caroline lui en a fait la confidence et qu'il n'a pu faire autrement que d'en parler dans la dernière lettre qu'il a adressée à l'empereur. Mais Fouché compte toujours sur le coeur du roi; puis, avec cette audace qui lui a valu ses plus beaux succès de policier, il ne craint pas d'aller jusqu'à dire : « J'espérerais encore, lors même que je verrais un traité signé. » Parce que, ajoutera-t-il un peu plus loin, « le roi est dans la persuasion qu'il ne peut servir Votre Majesté qu'en ménageant ses ennemis et en secondant les idées d'indépendance de l'Italie ».


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Sentant toutefois que ces explications ne seront guère de nature à satisfaire l'empereur, il ne manque pas de lui répéter qu'il a épuisé avec Murat, et en présence de Caroline, toutes les questions relatives à sa situation ainsi qu'à celle de l'Italie et de l'empire. Lorsqu'il a quitté Naples, il a laissé Murat bien persuadé que son intérêt, sa gloire, son devoir lui imposaient l'obligation de tout sacrifier pour la défense de l'empire. Il lui a démontré et prouvé que les offres de la coalition ne pouvaient être sincères : et qu'au moment où elle recevrait ses services, elle calculerait l'époque où il serait possible de se défaire de lui. » Le rusé duc d'Otrante craint même d'être allé trop loin, de s'être compromis par des affirmations trop formelles. Aussi s'empresse-t-il de trouver un moyen dese tirer d'embarras, de se mettre hors de cause dans le cas où les événements se chargeraient de donner un démenti à sa belle assurance.

« Telle est, se hâte-t-il d'ajouter, l'incertitude de ce prince que les « sentiments les plus opposés trouvent accès dans son coeur. Avec un « courage à toute épreuve, avec une âme héroïque, l'idée de n'être pas « soutenu par la France et de se trouver seul en scène contre la coali« tion effraie son imagination. Plein d'attachement pour Votre Ma« jesté, il est sans cesse en défiance contre elle. Le refus qu'elle lui fait « de lui confier le commandement général des troupes d'Italie lui « paraît une injustice. Son ambition serait satisfaite de l'indépendance « de sa couronne, et, pour sortir des liens de la France, il s'expose à « tomber sous le joug de la coalition. »

Mais, malgré toute son habileté, Fouché, sans vouloir avouer à l'empereur toute la vérité, ne peut pourtant pas s'empêcher d'enregistrer dans un post-scriptum les nouvelles inquiétantes parvenues à Rome, de parler des entretiens entre Nugent et les généraux napolitains, ainsi que de l'arrivée de Neipperg à Naples. « On m'assure, dit-il, que cet envoyé est à Naples et qu'il a remis au roi une lettre de l'empereur d'Autriche. »

En revanche, il donne comme certaine la nouvelle du départ pour Rimini, sur l'ordre de Murat, du chef d'état major de l'armée napolitaine, _ chargé de « proposer à Nugent de se retirer au delà du Pô jusqu'à ce que des arrangements définitifs soient intervenus entre le roi et l'empereur d'Autriche ».

Il convient de compléter ce résumé que donne M. Weil de la lettre de Fouché par le passage qu'en donne M. Madelin et qui contenait les voeux de nouvelle année du duc d'Otrante : « De plus heureux destins « vont s'accomplir pour la France ; l'attitude de Votre Majesté dans


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« nos malheurs a relevé tous les courages. Les Français s'unissent « autour d'elle pour arrêter les progrès d'une coalition qui, au nom de « son indépendance, veut imposer son joug de fer aux peuples qui sont « assez aveugles pour se livrer à lui. »

« Est-ce sans sourire, ajoute M. Madelin, que le duc d'Otrante écrivait ces voeux et exprimait ces espérances? Assurément il voyait aux Tuileries, pour la fin de 1814, Napoléon II, Joachim Murât, Bernadotte, Louis-Philippe d'Orléans ou le comte de Lille, tout autre, en tout cas, que le vaincu de Leipzig. »

Quelles que fussent en réalité les arrière-pensées ou les prévisions que M. Madelin suppose à Fouché; quel que pût être le désir, que lui attribue M. Weil, d'expliquer et de défendre la conduite de Murât, sa lettre du 3 janvier nous paraît, autant au moins que par cette considération, inspirée par la préoccupation, dont la suite de sa correspondance marquera la persistance, de se justifier lui-même aux yeux de l'empereur de l'insuccès de sa mission, en lui affirmant qu'il a fait tous ses efforts pour lui conserver l'appui et la fidélité du roi de Naples, qu'il est d'ailleurs, on peut s'en rendre compte, loin déménager. Prima sibi cari tas.

Il est possible (c'est l'avis de M. Weil, mais une simple analyse ne permet pas de le discuter), qu'il se servît d'arguments et, qui plus est, de termes absolument semblables à ceux que l'on trouve dans la lettre même de Murât. Ce n'est pas, en tout cas, sur les passages textuellement cités que peut être établie la similitude des termes. Quant à celle des arguments, bien que fort relative, elle s'explique d'elle-même, les deux lettres ayant pour objet une situation unique. Mais ce qui diffère profondément de l'une à l'autre, c'est l'accent, révélateur des sentiments et des états d'âme des deux correspondants de Napoléon. Il est impossible de n'être point impressionné douloureusement par les angoisses et les effusions du roi de Naples, dont la franchise un peu brutale de ses récriminations et de son orgueil attestent la sincérité. Il écrit tout ce qu'il a dans le coeur, et nous ne croyons pas qu'on puisse ici l'accuser de feinte ou de dissimulation.

Neipperg est arrivé à Naples, décidé à obtenir à tout prix et dans le plus bref délai l'adhésion de Murat aux propositions de l'Autriche, dont les mouvements se trouvent en fait arrêtés dans la région du Pô par l'incertitude où elle se trouve encore des véritables intentions de Murât. Afin de ne pas contrarier les négociations et de n'en pas compromettre


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l'heureuse issue, ses généraux n'osent se refuser aux exigences des généraux napolitains qui, sur les ordres instants et formels du roi, la correspondance d'Aymé et de Nugent en fait foi, prétendent qu'aucun obstacle ne soit apporté à la jonction des différents corps et que les troupes napolitaines puissent ee s'étendre jusqu'aux limites que leur assigne la configuration du pays et qui sont, pour les deux armées, si naturellement délimitées par le Pô ». Chaque jour de retard apporté à la conclusion du traité est employé par les généraux napolitains à fortifier leurs positions, de sorte que dans le cas improbable, mais après tout possible, où Murat se déroberait au dernier moment et se déclarerait contre l'Autriche, il se trouverait placé, par le bénéfice de cette équivoque habilement entretenue, dans une situation éminemment favorable pour combiner son action avec celle du vice-roi.

Il était donc urgent pour l'Autriche d'emporter la décision de Murât. Son négociateur, dit M. Weil, mena les choses militairement, et comme Mier devait l'écrire plus tard à Metternich, « la crainte fit plus sur Murat que la persuasion, la crainte de perdre jusqu'à son existence en ne se mettant pas de notre parti, et aussi la nécessité de fixer en deux ou trois fois vingt-quatre heures les déterminations définitives ne lu 1 laissant pas le temps d'entamer de longues négociations et discus sions». En vérité, ce n'était point une négociation que venait développer Neipperg. Il apportait un ultimatum : accepter purement et simplement les propositions et les conditions de l'Autriche, ou bien rompre définitivement avec elle en s'exposant à voir le peuple napolitain tout entier se soulever contre lui et le chasser de ses États. C'est tout au plus s'il accorda au roi quelques instants de réflexion qu'il employa à conférer avec ses ministres, presque tous acquis à la cause de la coalition, et avec quelques-uns de ses généraux présents à Naples, dont les avis étaient partagés.

Le 4 janvier, Durand eut un très long entretien avec Gallo qui ne lui dissimula pas la réalité de la situation, et lui déclara qu'il ne voyait aucun moyen de ne pas recourir à l'alliance de l'Autriche, la France ne pouvant plus rien pour Naples ni Naples pour la France ; les Autrichiens et les Anglais ne voulant plus entendre parler de neutralité. Durand ayant élevé des doutes sur la confiance que Murât pouvait avoir dans les promesses des alliés, Gallo lui répondit qu'avant que la France pût de nouveau influer sur les destinées de l'Italie, le trône de Naples serait perdu pour Murât et ses enfants, et il ajouta : « La reine elle-même


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est de cet avis. » On aurait voulu gagner du temps, mais Neipperg exigeait une réponse catégorique et immédiate. Quant à l'agent anglais Graham, envoyé par Bentinck et dont Murat avait annoncé dans sa lettre à l'empereur l'arrivée à Naples, il avait le pouvoir, dit Gallo, de signer un armistice, dès que Naples serait d'accord avec: l'Autriche. Dans le cas contraire, il menaçait le royaume de 20.000 hommes qui étaient à Trieste et à Fiume, prêts à être embarqués pour faire une descente sur le territoire napolitain : et Nous sommes trop engagés, conclut le ministre de Murat, il faut en finir. Le traité n'est pas encore signé, je vous en donne ma parole d'honneur ; mais je ne vous réponds

pas qu'avant quatre ou cinq jours »

Gallo se trompait sur un point essentiel, mais de très bonne foi. Tandis qu'il révélait à Durand et qu'il était persuadé, comme Neipperg lui-même, que Graham avait pouvoir de signer un armistice, il ne se doutait point que les instructions données par Bentinck à son agent étaient tout à l'opposé; que la mission de cet agent n'était qu'une nouvelle manoeuvre pour entraver, sinon pour empêcher toute conclusion d'une entente par laquelle l'Autriche garantirait sa couronne au roi de Naples. Ce serait un intéressant chapitre d'histoire diplomatique que le récit détaillé de cette manoeuvre de Bentinck et de l'adresse avec laquelle Graham sut pendant plusieurs jours cacher à tous, à Neipperg comme à Gallo, son jeu, dont le but, auquel il arriva d'ailleurs, était de ne se prêter à aucun arrangement et se faire délivrer un sauf-conduit pour se rendre au quartier général des alliés pour faire savoir à lord Aberdeen que le roi Ferdinand refusait de renoncer à la couronne de Naples, et travailler à la rupture de l'alliance entre Murat et l'Autriche. Lord Bentinck était absolument résolu à ne tenir aucun compte des ordres de son gouvernement. Il reçut à Palerme, le 8 janvier, une lettre du général Manhès qui, au nom de Murat, lui annonçait l'arrivée à Naples de Neipperg, muni de pleins pouvoirs pour conclure un traité d'alliance, et porteur de la nouvelle officielle que le prince régent d'Angleterre venait d'en envoyer à son ministre plénipotentiaire en Sicile pour traiter avec le roi de Naples. Il lui demandait en conséquence soit de venir lui-même à Naples, soit de recevoir à Palerme un plénipotentiaire de Murat. Après avoir communiqué cette lettre au roi Ferdinand, qui remit entièrement son sort entre ses mains, Bentinck répondit qu'il se rendrait à Naples, mais sans fixer la date de sa venue, subordonnée ainsi que sa


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conduite ultérieure aux instructions qu'il espère recevoir de son gouvernement. Il ne se rendit point davantage aux instances de Neipperg qui, dans une longue dépèche du 8 janvier, lui démontrait l'urgente nécesité de s'assurer le concours de Murat, et auquel il ne devait répondre qu'à la date du 21 janvier.

Mais l'adhésion du plénipotentiaire anglais n'était point indispensable: Neipperg pouvait craindre que son obstination a se refuser à toute entente ne contribuât, par le soupçon qu'elle pouvait inspirer à Murât sur la sincérité des coalisés, à augmenter ses hésitations. Il avait hâte d'en finir et non moins 'que lui la reine Caroline. C'est, le déclare M. Weil, grâce à son appui et à son concours que Neipperg acheva de triompher des dernières hésitations, des derniers scrupules de Murât. Elle justifia la confiance de l'Autriche par sa fidélité à tenir les promesses qu'elle avait faites à Mier avant le retour de Murat et qu'elle avait formellement confirmées à la fin de décembre dans les dépêches confiées à Schinina, au reçu desquelles Metternich, le 7 janvier, annonçait à Mier revenu à Naples que « d'après les nouvelles apportées par Schinina, il avait tout lien de penser que Neipperg devait avoir conclu l'arrangement désiré. »

La correspondance de Durand nous édifie d'ailleurs sur l'attitude de la reine pendant ces dernières heures de la crise. « Le roi, écrit-il dans une dépêche du 5 janvier, avait promis au maréchal Pèrignon qu'il le préviendrait du moment de la signature. Le maréchal vient de dîner à la cour et la reine lui a dit assez légèrement que c'était sans doute pour la dernière fois. Le roi était très soucieux, mais il n'a rien annoncé au maréchal. »

Deux jours après dans un entretien avec Graham, le duc de Campochiars, ministre de la police, lui déclarait que c'était la reine qui menait toute la politique.

Dans une dépêche du 9, Durand constatait que ee si la contenance du roi était aussi douloureuse que sa position, s'il était évident que cette alliance lui répugnait et que peut-être ce prince attendait et espérait encore une réponse de l'empereur il n'avait pu s'empêcher de remarquer avec surprise que la reine était plus tranquille. » Dans cette dépêche Durand faisait allusion aux bruits qui couraient de projets de mariage de la princesse Laetitia avec un prince de la maison d'Autriche et du prince Achille avec la fille du prince héréditaire des deux Siciles; monyen ingénieux de concilier le maintien à Naples des enfants de


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Murat avec les prétentions jusqu'alors irréductibles des Bourbons à leur restauration sur le trône occupé par Joachim. Avant de clore sa lettre le ministre de France ajoutait encore quelques renseignements, quelques appréciations qui paraissent à M. Weii, et non sans raison, dignes d'être enregistrées : Murat continuait à se griser avec ses idées d'agrandissement en Italie ; la reine au contraire ne portait pas ses vues si loin, mais elle était peut-être plus décidée sur l'association complète avec l'Autriche. « Elle la regarde comme son propre ouvrage. »

Au moment où Durand écrivait cette dépêche, le 9 janvier, le traité était-il déjà signé ? Il parait bien que, quoique les signatures n'aient été échangées officiellement que le II, le principe en avait été posé le 7 janvier. La lettre de ce jour écrite par Murat à l'empereur d'Autriche, conservée aux archives de Vienne et publiée par le baron Lumbroso ne semble laisser aucun doute sur ce point, bien que sa décision fut encore en suspens, « Monsieur mon frère.

« M. le compte de Neipperg m'a remis la lettre que Votre Majesté « Impériale et Royale a bien voulu m'adresser de Francfort sous la « date du 10 décembre dernier.

« La mission dont cet officier général a été chargé est une nouvelle « preuve de l'intérêt et de l'amitié que Votre Majesté m'a toujours « témoignés. Je la prie de vouloir bien en agréer mes sincères « remerciments et d'être persuadée de mon vif désir de trouver des « occasions pour lui donner les preuves les plus convaincantes de ma « sincère amitié et de ma reconnaissance. J'envoie au quartier général « de Votre Magesté le lieutenant général prince de Strongoli-Pignatelli, « l'un de mes aides de camp pour lui remettre cette lettre et pour lui « réitérer de vive voix mes sentiments. Je partage entièrement et bien « sincèrement le voeu que Votre Majesté et ses alliés ont manifesté « pour le rétablissement de la paix fondée sur un juste équilibre et sur « l'indépendance des puissances. Votre Majesté peut compter sur mon « empressement à concourir à ce but salutaire avec tous les moyens « qui sont en mon pouvoir.

« II me sera toujours bien agréable de resserrer les liens qui nous « unissent, ne doutant pas, d'après la connaissance que j'ai du carac« tère personnel de Votre Majesté, que les nouvelles liaisons qui vont


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« se former entre nous et nos couronnes ne tournent au plus grand « avantage de nos intérêts communs et au bien être de nos peuples.

« Veuillez agréer, Monsieur Mon Frère, les assurances de la consi« dération distinguée avec laquelle je suis, de Votre Majesté Impériale « et Royale le bon frère. « J. NAPOLÉON. »

Le traité n'est pas encore signé, mais de nouvelles liaisons vont se former entre Naples et l'Autriche. Certes dans l'esprit de Murât la conservation de sa couronne en est l'objet immédiat. Mais n'est-ij point sincère lorsque tenant à l'empereur François le même langage qu'il a tenu à Napoléon, il exprime ses voeux en faveur de la paix. L'espoir, l'illusion, si l'on veut, qu'il pourra concourir à sa conclusion, et que son alliance avec les coalisés ne l'entraînera point dans la douloureuse nécessité de porter les armes contre l'empereur et centre les Français, n'ont-ils pas pu, dans une certaine mesure lui dissimuler la gravité de l'acte devant lequel il a si longtemps reculé, mais auquel le poussent, tout autant que le désir de conserver sa couronne, l'insistance menaçante de Neipperg, l'hostilité si peu déguisée de Bentinck, le silence de l'empereur, l'influence de son entourage et, plus que tout, les impérieuses sollicitations de l'épouse qui le domine.

L'hésitation de Murat persistera jusqu'à la dernière minute. On a beau dire que dès le 7 janvier son parti était pris; sa correspondance, où, grâce à cette affirmation, on a voulu voir la preuve de sa duplicité, permet au moins d'en douter. C'est le 7 janvier qu'il fait savoir à Elisa qu'on négocie toujours mais sans rien conclure, en ajoutant qu'il croit que les difficultés et les lenteurs qu'il peut rencontrer nesontquepour donner le temps aux expéditions que préparent les Anglais de s'emparer des ports les plus importants, tels que Gènes, la Spezia et Livourne. C'est le 10 janvier qu'il écrit à Miollis qu'il n'a voulu encore rien conclure définitivement avec Neipperg, parce qu'il attend les réponses de l'empereur. Autant de mensonges, dira-t-on, destinés à tromper à la fois la grande duchesse de Toscane et le gouverneur des Etats Romains, et à contenir leur opposition aux projets militaires du roi de Naples. Il est possible, étant toutefois utile d'observer que la situation à ce moment des armées napolitaines, et l'impossibilité, soit pour Elisa soit pour Miollis, de leur opposer une résistance quelconque rendaient inutile, tout au moins superflue cette dernière manoeuvre de Murat.


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Admettons l'intérêt de Murat à tromper Elisa et Miollis. Où découvrir celui de Caroline à tromper Fouché. Le 10 janvier, celui-ci qui avait quitté Rome pour Florence s'empressait de transmettre à Napoléon une lettre qu'il venait de recevoir de la reine..

« Tout est encore une fois changé dans notre politique depuis votre te départ, lui écrivait-elle. Les rapports sinistres sur la situation de « l'Empire, sur l'invasion de nos ennemis qui attaquent à la fois toutes « les parties de la France, l'arrivée du comte de Neipperg, plénipoten« tiaire d'Autriche et de M. Graham envoyé par lord Bentinck ont fait « tout à coup sur les imaginations l'impression la plus vive.

« L'éruption du Vésuve n'a pas été plus prompte et plus éclatante « que le bouleversement des têtes napolitaines. J'ai vu s'évanouir sans « espérance de retour le résultat de nos entretiens avec le roi et de « votre mission près de lui. Nous n'avons plus à délibérer que sur les « conditions de notre alliance avec les puissances coalisées. Jusqu'à « présent le roi a rejeté la proposition d'entrer clans la guerre qu'on « fait à la France ; mais on persiste à ne vouloir accepter aucune « neutralité. Jugez de notre situation, vous qui connaissez mon amour « pour l'empereur. Si le fatal traité est signé, vous en serez prévenu « sur le champ. »

Espérance évanouie sans retour ! amour de l'empereur ! fatal traité ! En vérité pour qui connaît la conduite et les sentiments de Caroline, l'hyperbole dépasse la mesure. C'est qu'en réalité Fouché n'est qu'un intermédiaire ; le vrai destinataire de cette lettre est Napoléon auquel le duc d'Otrante s'empresse de la transmettre, et auquel la reine espère donner le change, comme elle y a réussi auprès de sa soeur Elisa. Ecrivant à l'empereur le 9 janvier, celle-ci déplore la faiblesse du caractère du roi qui l'empêche de résister à l'influence des étrangers, ce dont la reine est désolée.

A plusieurs reprises M. Weil s'est arrêté à relever, soit dans l'esprit, soit dans les termes, soit dans les dates d'envoi, de la correspondance de Murât et de celle de Fouché avec l'empereur des concordances plus ou moins précises, indicatrices, selon lui, de leur entente en vue de le tromper. Bien plus justement, il aurait pu relever dans la lettre de Caroline l'évident dessein de fournir à Fouché un moyen de se justifier lui-même. C'est la seule explication possible de cette allusion aux résultats de leurs entretiens et de sa mission, pour peu qu'on veuille bien se souvenir combien différaient du plan exposé par Fouché


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les idées beaucoup plus modestes, mais aussi plus raisonnables et plus pratiques de Caroline.

L'envoi à Napoléon de ce que Fouché appelait un avis que venait de lui faire tenir la reine était accompagné d'une lettre personnelle.

« Sire, écrivait Fouché, je viens d'affliger Votre Majesté. J'aurais « voulu au prix de mon sang épargner à votre âme ce dernier coup. « J'ai fait tous mes efforts pour arracher le roi à sa capitale, parce que « j'avais le pressentiment des pièges qu'on lui préparait. Son caractère « facile lui a fait accueillir des négociations dangereuses. Il n'y a vu « d'abord que la conservation et la paix de ses Etats. Son coeur se « soulevait quand je lui représentais qu'on finirait par venir lui pro« poser d'unir ses armes à celles de la coalition. C'est, lui ai-je souvent « répété, la première liaison avec nos ennemis qu'il faut craindre, « parce que là commence la chaîne de toutes les autres.

« Je vais encore essayer d'écrire au roi qui cependant ne répond « plus à mes lettres. J'acquitterai envers lui un dernier devoir en « mettant devant ses yeux le tableau de l'avenir. S'il pouvait y croire, « il en serait épouvanté, car il aime votre Majesté.

« J'ai eu l'honneur de vous écrire que le plus fort obstacle que j'ai « trouvé près de ce prince en l'engageant à faire marcher son armée « sur le Pô était son antipathie contre le vice-roi. L'idée de se voir sur « la même ligne que lui et peut-être la crainte de contribuer à ses « succès militaires ont toujours arrêté ses meilleures résolutions. « L'ennemi connaît cette disposition du roi : il lui offre le commande« ment général de toutes les armées coalisées en Italie ; il lui promet « les moyens de repousser le vice-roi. On dérobe ainsi par cet artifice « à sa vue ce qu'il y a de révoltant dans les propositions qu'on lui fait. « Il croira ne se battre que contre le vice-roi en signant un traité « contre sa patrie.

« Sire, la position de la grande-duchesse va devenir délicate et « difficile. Vous approuverez sans doute que je ne l'abandonne pas « dans cette circonstance. Je resterai à Florence jusqu'à ce que j'aier « reçu de nouveaux ordres de Votre Majesté. Quel que soit Pévène« ment, il ne sera jamais au-dessus de mon courage et de mon « dévouement.

« P. S. — Je n'ai pas besoin de dire à Votre Majesté que j'ai donné « connaissance au vice-roi des dispositions de la cour de Naples et du « traité qu'elle est dans le cas de faire avec la coalition. »


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Le regret de ne pouvoir, au prix de son sang, épargner un chagrin à l'empereur, le courage et le dévouement de Fouché à la hauteur des pires événements complétaient heureusement l'amour fraternel et la désolation de Caroline, pour adoucir la blessure faite au coeur de Napoléon par la trahison de Murat.

Il serait difficile cette fois de supposer que cette lettre de Fouché est . le résultat d'une entente entre lui et le roi de Naples. Elle offre un singulier contraste avec celles où, jusqu'à ce moment, le missionnaire de Napoléon lui avait rendu compte des dispositions et de l'état d'esprit de Murat ; elle constitue contre lui un accablant réquisitoire, faisant de son hostilité jalouse contre Eugène Beauharnais la principale, presque l'unique raison de sa défection.

Le rapport que deux jours plus tard, le 12 janvier, il adressa à Caulaincourt, nous éclairera peut-être sur les mobiles d'une volte-face dont on aurait lieu d'être surpris s'il ne s'agissait de Fouché. Nous en empruntons l'analyse à M. Weil.

«Quoiqu'il en dise, la signature du traité entre Naples et l'Autriche n'avait pas pu surprendre Fouché. Il ne lui en jallait pas moins essayer de fournir à Caulaincourt des explications, et c'était là chose d'autant moins aisée pour lui que, dans ses dernières lettres, il avait donné au duc de Vicence des espérances sur Naples. Fouché n'était pas homme à s'embarrasser pour si peu. Quand il a adressé son dernier rapporta Caulaincourt, Neipperg n'était pas encore arrivé à Naples, et il ne pouvait pas s'imaginer que Murat, après avoir paru comprendre le danger de négocier avec la coalition, en viendrait à traiter à nouveau et ouvertement avec elle, à signer même une convention avec elle. Il lui faut bien reconnaître le fait, puisque la grande duchesse Elisa ne va pas manquer de communiquer à l'empereur la lettre (en date du 9 janvier) par laquelle, sans lui avouer encore toute la vérité, Joachim la prévient qu'il envoie deux régiments à Livourne sous prétexte de s'opposer à une descente des Anglais, et 2.000 hommss de sa garde à Florence pour garantir cette ville contre les insurgés.

Après avoir enregistré le bruit répandu dans le pays par les émissaires de Murât que le grand duc de Wurzbourg (archiduc Ferdinand III ancien grand duc de Toscane), est destiné au grand duché de Toscane, Fouché, non content de critiquer vivement la conduite du roi de Naples, examine les conséquences, fatales pour lui, de l'acte qu'il vient de commettre. Lui aussi, il pense que le roi de Naples va forcément ouvrir l'ita-


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-85lie des princes qui ne croiront à la solidité de leur établissement que lorsqu'ils auront renversé le seul trône qui reste encore debout de tous ceux que l'empereur a fondés. Il se propose encore d'écrire à Murat pour lui reprocher sa conduite peu loyale avec la grande-duchesse. Enfin, lui qui n'a jamais eu peur de s'engager dans les voies les plus tortueuses, il ne craint pas de s'écrier emphatiquement: «Aussi longtemps qu'il me sera permis de lui écrire, je ne me lasserai pas de lui dire la vérité : car c'est la chose qui manque à tous les souverains. On la dit partout et à tout le monde excepté à eux. »

Pensant peut-être que ces déclamations auront suffi pour donner le change sur le rôle, pour le moins bizarre, qu'il a joué à Naples, à Rome et même à Florence, Fouché se décide enfin à aborder la véritable question et la traite avec toute la lucidité de la merveilleuse intelligence dont il était doué et dont malheureusement il fit trop souvent un si mauvais usage. « Je répète au roi de Naples chaque fois que je lui écris, dit-il, que, si la coalition est assez puissante pour ébranler le trône de l'empereur, elle n'épargnera pas le sien lorsqu'il ne sera plus appuyé par la France. Il faut être dans un profond aveuglement pour ne pas voir ce que voient tous ceux qui pensent et même ceux qui ne pensent pas.

Revenant à nouveau sur les conseils qu'il prétend avoir donnés à Murat, il va même juqu'à affirmer que « si le roi de Naples l'avait écoulé, il dicterait des lois aux coalisés en Italie, au lieu d'être réduit à recevoir leurs . ordres, et qu'il aurait pu à la fois remplir le voeu d'une noble ambition et ses devoirs envers l'empereur et la patrie. »

et C'est une chose humiliante pour l'espèce humaine, ajoute-t-il encore, que le contraste et la confusion de ses idées. Le roi sacrifierait sa vie pour l'empereur et il va signer un pacte avec ses ennemis. Il a de l'attachement pour la grande-duchesse et il la trompe et la compromet. Il cherche son indépendance et ne songe même pas à sa sûreté. »

Enfin, après avoir décoché en passant un trait au général Miollis dont la droiture ne pouvait sympathiser avec son besoin d'intrigues, obligé d'avouer et de reconnaître l'insuccès total de sa mission à Naples, il a l'audace de choisir un singulier avocat, un défenseur bien inattendu de sa conduite. C'est la reine de Naples qui dira un jour à l'empereur avec quel dévouement et quelle persévérance il a rempli cette mission.

En réalité l'audace n'était pas extrême puisque, nous l'avons vu, la lettre que lui avait écrite Caroline lui fournissait précisément un thème pour sa justification, mais ce détail est de peu d'importance.

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Ce qui en a davantage, c'est la possibilité de trouver dans ce document l'explication de cette attitude inattendue de Fouché vis-à-vis du roi de Naples. Nous y voyons le dépit à peine voilé, exprimé sous une forme presque méprisante, de voir compromise, par l'alliance deMurat avec l'Autriche, la puissance qui passe pour la plus réactionnaire de l'Europe, la combinaison qu'il avait imaginée, en prévision de l'écroulement du système napoléonien, pour sauvegarder, autant qu'il était en son pouvoir, les intérêts nés de la Révolution, sans oublier les avantages qu'elle avait procurés à l'ancien professeur de l'Oratoire. Murat, dont il avait compté faire le pivot de cette combinaison, non seulement se dérobait alors qu'il croyait l'avoir conquis par cette perspective de remplir le voeu d'une noble ambition et ses devoirs envers l'empereur et envers la patrie ; mais il passait armes et bagages clans le camp ennemi, assez naïf et assez aveugle, faute impardonnable aux yeux de l'habile politique, pour ne pas discerner les risques à peu près inévitables de l'aventure.

Quant à son insistance à attribuer la défection de Murat presque uniquement à sa jalousie envers le vice-roi. il y faudrait voir l'indice d'une nouvelle intrigue qui aurait consisté, d'après M. Weil, à aviver l'antagonisme qu'il tenait plus que jamais à entretenir dans les circonstances du moment entre Joachim et Eugène et à exciter l'ambition de ce dernier, dans un dessein que d'ailleurs M. Weil n'indique point et ' dont il est assez difficile de discerner l'intérêt.

Fouché devait bientôt se reprendre et, selon son habitude, chercher à tirer le meilleur parti possible de la position nouvelle du roi de Naples. Il sera, huit jours après, l'auxiliaire le plus utile de la reine Caroline pour vaincre chez Murat des hésitations qui ont survécu à la signature du traité avec l'Autriche et le pousser enfin à des résolutions irréparables. Mais, sur le moment, son désappointement, son dépit ont dû être vifs, et par là s'expliquent sa lettre à l'empereur et son rapport au duc de Vicence, l'un et l'autre si durs pour Murat et en si complet désaccord avec sa correspondance antérieure.

C'est à M. Weil que nous voulons emprunter l'analyse des causes et des mobiles qui ont amené Murat à signer, le u janvier, le traité par lequel il devenait l'allié de l'Autriche. Il y manque le rappel de certaines circonstances qui pourraient être invoquées à la décharge deMurat. Il y aurait à relever certaines exagérations en ce qui concerne le caractère de Caroline, maisles responsabilités y sont nettement établies par un juge


-87dont

-87dont avons cru devoir à plusieurs reprises signaler l'excessive et parfois injuste sévérité à l'égard deMurat; dont, par conséquent, le témoignage est ici doublement précieux, en dépit d'expressions outrées.

« Le sort en était jeté. Grâce à l'attitude énergique de Neipperg, et plus encore grâce à la pression et à l'influence de la reine Caroline, la France avait un ennemi de plus sur les bras, et la coalition s'était assuré un nouvel allié. A partir de ce moment, l'infortuné roi de Naples courait aveuglément à sa perte. Son inexpérience, sa dissimulation, son manque absolu de sens politique auraient à eux seuls suffi, peut-être même sans la haine irréconciliable que lui avait vouée Bentinck, à précipiter sa chute, et, comme l'empereur François d'Autriche devait le dire le20. juillet 1814, un peu plus de six mois après la signature de ce traité qui semblait assurer à Joachim la réalisation de ses rêves ambitieux : « Murat allait devenir lui-même l'auteur de sa ruine. » Il n'avait pas compris que les alliés, dès qu'ils seraient redevenus les maîtres de l'Europe, ne verraient plus dans le fils de l'aubergiste, improvisé roi de Naples par la volontéel les victoires de Napoléon, qu'un aventurier, qu'un soldat de fortune déplacé sur un trône.

Plus encore que les autres membres de la famille de l'empereur, Murat avait poussé l'aveuglement et la folie jusqu'à croire qu'il lui serait possible, non seulement de conserver sa couronne après la chute de Napoléon, mais d'agrandir son royaume en faisant cause commune avec les alliés. Ne songeant plus qu'à sa personne et à sa dynastie, il tomba de lui-même dans le piège que lui avait tendu la diplomatie de la coalition, et s'y précipita avec tant d'éclat qu'il démontra du même coup son incroyable incapacité politique.

Usant de l'ascendant que la supériorité de son intelligence lui avait facilement assuré sur un caractère aussi faible, aussi mobile et aussi changeant que celui de Murat, ce fut surtout la reine Caroline qui le poussa dans cette voie néfaste. Dans l'âme de Caroline, la soif du pouvoir était parvenue peu à peu à l'état de folie. Elle avait pris en elle la forme impérieuse d'un vice. Elle se sentait comme Napoléon capable de régner sur le monde; elle se croyait l'étoffe d'une Marie-Thérèse ou d'une Catherine. Elle cherchait à remplacer le génie qui lui faisait défaut, les grandes vues qui lui manquaient par la duplicité, par l'audace, par l'absence de scrupules. Elle ne craignait pas d'étouffer ses bons instincts, d'oublier tous ses devoirs, et de devenir tout à coup insensible à toutes ses affections.

Malgré son incontestable esprit, son grand caractère et sa tête forte, Caroline n'avait, pas plus que Murat, entrevu les pièges que cachaient les


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clauses de ce traité qui contenait une foule de promesses vaines et illusoires à côté de stipulations dont la réalisation était manifestement impossible. Elle n'avait pas songé au danger que devait cependant lui faire pressentir l'altitude nettement hostile de Bentinck.

Elle aussi n'était pas arrivée à comprendre que l'alliance avec Naples était nécessaire, indispensable au succès de la coalition. Elle n'avait pas su tirer parti d'une situation qui permettait d'exiger des garanties formelles au lieu de se contenter de simples promisses et de l'offre de bons offices qui ressemblaient à une aumône. Sa soif immodérée du pouvoir et de domination l'avait empêchée de voir que la coalition n'avait aucun intérêt à presser la ratification d'un traité qu'un seul de ses membres avait réussi à faire accepter presque sans discussion, qu'on ne manquerait pas d'amuser, de berner Murat pendant quelque temps, qu'on n'avait voulu que le jeter dans la lutte sans pour cela se lier avec lui par des engagements formels ; qu'il allait devenir entre les mains des alliés un jouet et un instrument, en un mot qu'on le tenait et qu'on pourrait désormais faire de lui tout ce qu'on voudrait.

Si Murat avait eu autant de sens politique qu'il avait d'ambition, autant de perspicacité qu'il avait de courage sur le champ de bataille, avant même de jeter le dé, il aurait compris qu'il n'y avait désormais de salut pour lui que s'il parvenait à retremper le peuple, à transformer l'Italie par de nouvelles institutions. Il ne suffisait pas dejaire une levée de boucliers contre la France. Il fallait, au nom de la liberté et de l'unité, soulever ouvertement et dès le premier jour de son retour la péninsule tout entière contre ses oppresseurs, et profiler, pour tenter d'affranchir l'Italie, de celle occasion unique, du fait que, forcée par les circonstances du moment, loin de s'opposer à ce mouvement, l'Autriche avait besoin de son concours et de son appui. Alors seulement le roi de Naples, à la tête de ce peuple italien qui l'aurait reconnu pour chef aurait pu se faire valoir auprès des alliés et jouer un grand rôle dans l'histoire du monde. Mais ce rôle, il ne sut pas et ne pouvait pas le jouer par cela même qu'il était au-dessus de ses forces. Ce brillant sabreur, cet incomparable entraîneur de cavalerie n'avait rien de ce qu'il fallait pour rallier autour de soi tout un peuple au nom de l'indépendance, de la liberté et de l'unité. Aussi incapable de régner sur une grande nation que de commander en chej une grande armée, il hâta par sa défection la chute de son bienfaiteur et ee devint (pour employer les expressions du général d'Ambrosio), bien avant ses malheurs et sa triste fin un objet d'indignation pour la France


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et pour l'Italie, de raillerie pour l'Autriche et de mépris pour le reste de l'Europe. » Telle devait être, quelques semaines plus tard, la conséquence inévitable de la politique incertaine, de l'altitude douteuse et suspecte de Murat. »

Il y aurait bien des réserves à formuler sur ces appréciations. Peuton, par exemple, s'accorder avec M. Weil sur ces vastes ambitions de domination mondiale prêtées à la reine Caroline dont le rôle.dans toute cette crise, fut précisément de combattre les desseins du roi qu'elle jugeait démesurés et de l'amener à se contenter, pour prix de son accession à la coalition, de la modeste garantie du trône de Naples ?

N'est-ce point, en revanche, faire trop peu justice à Murat que d'attribuer uniquement à son incapacité dans les grandes choses l'incertitude et la faiblesse d'une politique dont les conséquences lui furent en effet lamentables? M. Weil ne s'est point fait faute de relever, pour lui en faire autant de griefs, tous les actes, toutes les tendances qui, depuis son retour en Italie après Leipzig, dénotaient dans son esprit le dessein de l'indépendance italienne, dont l'entreprise était selon lui, on vient de le voir, la seule chance de salut qui s'offrît à Joachim, mais que son incapacité, ajoute-t-il, ne lui permettait pas d'accomplir. Il est à observer que la solution du problème repose sur des données, à ce point différentes qu'elles sont opposées, dans la conception deMurat et dans l'hypothèse de M. Weil, telle du moins que nous croyons la comprendre, et d'après laquelle le roi de Naples se serait déclaré le champion de l'indépendance et de L'unité de la péninsule contre la domination française, pour se faire valoir auprès des alliés et entrer, pour ainsi dire, dans la coalition par une plus large porte. Il suffira, pour établir que toute autre était la pensée de Murat, de rappeler que c'est à Napoléon qu'il a, dans toutes ses lettres, demandé la proclamation de cette indépendance, qui certes devait satisfaire ses vues d'ambition personnelle, mais qui se serait faite contre la coalition, et dans des conditions qu'il pouvait, d'accord sur ce point avec Fouché, considérer comme favorables aux intérêts de la politique française.

Mais l'empereur demeura trop longtemps sourd à ses appels. Son silence et l'hostilité, qui en était la conséquence, de la plupart des agents militaires ou civils de l'administration française en Italie, paralysèrent son action qui ne pouvait se déployer ouvertement. Il dut louvoyer, temporiser, s'en tenir à des demi-mesures, pleines d'équivoque, qui le compromettaient à la fois vis-à-vis de l'empereur et de la coali-


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tion. Et, cependant, l'implacable hostilité de Bentinck qui pouvait d'un moment à l'autre provoquer l'invasion et le soulèvement de ses Etats, la pression menaçante de Neipperg rendaient sa situation d'heure en heure plus critique. L'Autriche ne voulait plus souffrir cette neutralité de fait où il avait réussi à se maintenir jusqu'à ce moment : elle lui mettait le marché à la main. Elle ne parvenait point néanmoins à lui arracher son adhésion. Il y fallut toute l'influence de la reine. Le traité du 11 janvier fut, avec ses lamentables conséquences, bien plus que celle de Murât, l'oeuvre voulue avec ténacité, préparée de longue date par les promesses faites à l'Autriche, de la soeur de Napoléon.

Il s'en fallait, encore toutefois, que la signature du plénipotentiaire napolitain apposée au bas du traité lui donnât cause gagnée. L'Autriche avait voulu, pour nous servir de l'expression de M. Weil, jeter le roi dans la lutte. Son but était de le compromettre irrémédiablement en le menant à un acte décisif d'hostilité contre la France, par lequel il s'interdirait tout retour en arrière. Son ambition, depuis son retour à Naples, a été d'obtenir de l'empereur le commandement suprême des armées françaises destinées à défendre l'Italie contre l'Autriche. C'est une armée autrichienne, destinée à les combattre et à les chasser de la péninsule, dont le traité signé par son ministre lui donne le commandement. En face de la réalité qui brutalement déchire les voiles de l'équivoque et de l'illusion, il ne peut se résoudre, il essaie de se dérober aux conséquences de l'acte arraché à sa faiblesse et à ses craintes. Et d'un autre côté l'envoi de Caulaincourt au quartier général des alliés fait espérer la conclusion prochaine de la paix générale : cette éventualité ne peut que le pousser dans la voie d'expectative et d'atermoiment où l'engagent des sentiments qui, malgré tout, ne sont pas éteints dans son coeur. Mais de nouveaux efforts de la reine auront raison de cette suprême indécision. Et, contre toute attente, eile sera puissamment secondée par les instances que Fouché, tout en prétendant rester fidèle à la politique française, envisagée maintenant du point de vue nouveau créé par l'alliance autrichienne, va prodiguer à Murât pour le pousser à l'action. Le roi s'y engagera, mais encore sans décision irrévocable pendant tout un mois. Quelle que soit l'animosité qu'on lui prête contre le prince Eugène, il lui promettra de ne pas ouvrir les hostilités sans l'en prévenir. Il tiendra sa promesse, et ce ne sera que le 15 février qu'il lui fera porter sa déclaration de guerre, conséquence presque fatale, mais que, tout ce temps, il espérera encore


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éviter, des démarches, bien graves cependant, auxquelles vont l'entraîner l'hostilité de plus en plus déclarée de la reine contre tout ce qui est français, et les encouragements, si dangereux par leur ambiguité, qu'il reçoit du duc d'Otrante.

« Sire, lui écrivait Fouché, de Florence, le 20 janvier, j'ai reçu les « lettres de Votre Majesté, et la copie de celles que vous avez écrites à « l'empereur. Je les conserve pour en faire usage, lorsque l'occasion « s'en présentera. Si vous lisez le compte que j'ai rendu à l'empereur « de la situation de l'Italie et des motifs qui vous ont déterminé à « négocier avec les puissances coalisées, vous seriez convaincu que' je « n'ai pas besoin d'être encouragé à oser dire la vérité. J'ai toujours « pensé que c'est trahir les princes que de la leur cacher.

« Vous croyez que votre alliance avec la coalition est le seul moyen « de conserver le trône, et que cette alliance servira mieux que vos « armes les véritables intérêts de la France et de l'empereur. Il serait « superflu de vous répéter les objections que je vous ai faites à ce sujet; « mais je dois insister sur la nécessité où vous vous trouvez de consti« tuer une bonne armée. C'est votre seule garantie, c'est le seul moyen « d'avoir de l'influence dans la coalition. Ne craignez point de défec« tions parmi vos officiers et vos soldats, quand vous serez à leur tête, « quand ils seront convaincus que vous servez votre patrie. Qui plus « que vous a exposé sa vie pour elle et d'une manière plus glorieuse ! « Faîtes-leur connaître que vous ne mettez en mouvement votre armée « que pour le bonheur de la France et celui de votre pays.

« On vous a cru indécis jusqu'à ce jour, et alors toutes les opinions, « tous les sentiments n'ont eu aucun centre, aucun appui, aucune « direction. Votre armée, au lieu de former son moral et sa discipline, « a perdu son temps dans des débats politiques. Vos généraux ont jeté « eux-mêmes de l'incertitude dans les esprits en demandant ce qu'on « ne pouvait ni leur accorder ni leur refuser.

« Je vous en conjure au nom de l'attachement que je vous ai voué « pour la vie : sotfgez surtout à vous créer une grande considération « morale, une force militaire imposante. C'est votre intérêt et celui de « la patrie que vous aimerez toujours, ce doit être la politique de la « famille impériale que vous défendrez toujours et nécessairement « contre les anciennes dynasties. Il est urgent d'agir. Faites estimer « votre caractère. Songez qu'en entrant dans la coalition, vous avez « besoin d'opposer à ceux qui vous parleront sans cesse de leurs aïeux,


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et à leurs éternelles prétentions, à leurs préjugés nobiliaires, la gloire « de vos armes et la force de votre armée. Ce sera à la longue votre « seule puissance, ce sera la seule barrière qu'on n'osera franchir. Quel « souverain voudrait s'attirer le reproche odieux d'avoir violé la foi « qu'il vous a donnée? L'ambition n'est pas aveugle à ce point. Votre et Majesté m'invite à la défendre contre la calomnie. Qui donc pourra « vous atteindre à la hauteur où vous devez vous élever? C'est par « l'énergie et l'étendue de vos vues, c'est par de grands résultats que « vous imposerez silence à tous vos ennemis.

« Ne vous inquiétez pas du jugement qu'on portera sur le parti que vous avez pris. Je ne vous l'ai pas conseillé. Il était de mon droit de « vous en détourner. J'ai rempli ce devoir avec conscience. Mais au« jourd'hui que votre décision est arrêtée, je dois à l'amitié que vous « avez pour moi de vous dire que la moindre hésitation serait funeste. « Elle donnerait à vos nouveaux alliés le droit de se défier de vous et « de vous demander des garanties. La conduite de Votre Majesté dans « cette circonstance sera appréciée, comme toutes les choses de ce « monde, par les succès. Si vous pouvez contribuer à la pacification « générale, si votre suffrage acquiert assez de poids dans la balance « des affaires de l'Europe pour relever la dignité des trônes et garantir « l'indépendance des peuples, on vous bénira sur la terre. Hâtez-vous « de proclamer que vous n'avez fait alliance avec la coalition que « parce qu'elle prête son appui à ce noble dessein. Montrez à l'Italie « l'étendue et la solidité de vos vues positives pour sa prospérité. Des « espérances vagues ne feraient que l'agiter et n'obtiendraient pas sa « confiance. Si Votre Majesté veut ranger tous les Italiens sous son « drapeau, qu'elle les tranquillise sur leur avenir, que son armée soit « le garant que leurs efforts ne seront pas compromis.

« Je vois avec peine les soulèvements dans les campagnes ; ils détrui« ront vos ressources et amèneront une anarchie que vous ne pourrez « plus comprimer. Défiez-vous des hommes bornés qui croient sou« mettre les Etats en remuant les passions de la multitude. Si vous « êtes obligé de faire des levées en masse, il faut de l'ordre et de la. « discipline : y mettre de l'activité sans doute; y mettre surtout de la « mesure. L'ordre et la discipline ne nuisent pas à l'activité. Veillez « surtout à ne remuer que les passions que vous pouvez satisfaire, et J'espère toujours que j'aurai l'avantage de voir bientôt Votre Majesté « à Florence. Je vous y attendrai à moins que l'ennemi n'y arrive


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« avant vous. N'oubliez point la situation délicate où se trouve la « grande-duchesse. Si elle est obligée de quitter Florence, elle doit « l'abandonner avec dignité et pouvoir se retirer tranquillement et « honorablement dans sa principauté de Lucques. On lui écrit que « vous envoyez Maghella à Florence. Il a la réputation d'un agitateur : « sa présence contrarierait Son Altesse sans faire aucun bien. Je vous « invite à le laisser à Rome tant que la grande-duchesse restera à « Florence.

« Pardonnez la franchise de mes conseils au désir que j'ai de vous « voir heureux et assez puissant pour rendre à l'empereur et à la « France ce que vous en avez reçu. Le temps n'est peut-être pas éloi« gné où je pourrai, sans être accusé d'infidélité, retourner à Naples. « En attendant, j'y laisse un gage auquel j'attache plus de prix que « vous ne pensez. Il m'est cher parce que je le tiens de vous et qu'il « sera un lien de plus dans votre amitié pour moi. La reine peut y « ajouter une valeur nouvelle en se chargeant de ce dépôt et en l'or« nant d'une partie de ses grâces et de sa raison.

« J'ai l'honneur d'être avec respect, Sire, de Votre Majesté, le plus

« fidèle serviteur.

« Le duc d'OTRANTE. »

« A cette lettre qui, écrit M. Weil, malgré les vues politiques d'une incontestable justesse et d'une réelle élévation qu'elle contenait, n'en était pas moins de nature à fortifier les rêves chimériques de Murat, à cette lettre qui se terminait par des phrases tellement ambiguës qu'elles sont en réalité presque inexplicables, Fouché avait ajouté un post-scriptum :

« Je reçois à l'instant la lettre dans laquelle vous m'invitez à mettre « par écrit les réflexions que j'ai eu l'honneur de vous faire sur la « Constitution qu'on vous demande. Je vais m'occuper de ce travail, « Ne vous laissez pas entraîner, je vous prie, à jeter au milieu de ce « peuple napolitain des idées auxquelles il n'est pas préparé. Traitez-le « comme vous avez traité vos enfants ; ne lui accordez que ce qu'il « convient. Je crains que ce mot de Constitution que j'entends sur « toute ma route ne soit dans le grand nombre tju'un désir de ne pas « obéir. »

Ce post-scriptum, qui a une saveur toute particulière sous la plume du futur ministre de la royauté constitutionnelle, ne dépare point le chef-d'oeuvre de rouerie et de cynique équivoque que nous paraît être cette lettre. Il convient au surplus, pour être entièrement édifié, de la


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compléter par celle que le lendemain, et de la même plume à peine séchée, il adressait au vice-roi :

« Monseigneur, une lettre de M. de Metternich a décidé la reine de « Naples à entrer clans la coalition. Je ne connais pas le traité, mais je « sais qu'il est conclu. La lettre de M. de Metternich est perfide : « après avoir fait le tableau des forces de la coalition et des désastres « de la France, elle ajoute que l'empereur Napoléon, dans des négo« ciations avec les puissances coalisées, cède toute l'Italie et même « Naples; toutefois, qu'il a fait demander par le roi de Bavière le Mila« nais pour Votre Altesse. Le projet de la coalition est simple : c'est « de remettre les choses comme elles étaient avant 1789. Le roi de « Naples en sera convaincu trop tard. »

Sa lettre de la veille à Murât ayant sans doute épuisé son éloquence. Fouché, on le voit,ne se met pas en frais pour composer cette manière d'oraison funèbre anticipée et il semble prendre facilement son parti du désastre que préparait au roi de Naples son défaut de clairvoyance. Discrétion de bon goût en écrivant au rival de cet incorrigible maladroit.

M. Weil a expliqué cette lettre, dont l'objet apparent était de renseigner le vice-roi, par le désir de Fouché d'aviver l'antagonisme qu'il tenait plus que jamais à entretenir dans les circonstances du moment et d'exciter l'ambition du vice-roi. Hypothèse plausible après tout, et par laquelle, la trouvant indiquée par l'auteur, nous avons essayé d'expliquer plus haut l'insistance mise par Fouché, dans sa lettre du 10 janvier à l'empereur, à donner la jalousie de Murat contre Eugène de Beauharnais comme le pricipal mobile de sa défection.

Mais ce billet a une importance plus piécise. Il établit que, pour Fouché, c'est bien la reine Caroline qui a tout mené, c'est elle qui est entrée dans la coalition. Ce témoignage a, sous la plume de Fouché, d'autant plus de valeur que le long séjour qu'il venait de faire à Naples, les entretiens intimes qu'il avait eus s: nombreux avec les souverains, lui avaient fourni les éléments de son jugement sur le rôle de la reine, qu'il n'avait d'ailleurs, dans une lettre au vice-roi, aucun intérêt à charger pour dégager la responsabilité de Murat.

Quant à cette courte phrase où se découvre son indifférence pour l'avenir du roi de Naples, elle nous permet de juger de Ta sincérité des sentiments qu'il lui avait exprimés dans sa lettre de la veille et dont l'emphatique effusion ne pouvait que donner plus de poids à des con-


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seils dangereux, plus d'attrait aux décevantes perspectives de grandeur offertes à l'ambitieuse imagination du roi, plus de séduction aux fallacieux raisonnements destinés à lui persuader qu'il pouvait encore servir les intérêts de la France en s'alliant à ses ennemis, et dont l'objet immédiat était de le décider à se jeter dans la lutte.

Ifn'est que juste, d'ailleurs, d'observer que la lettre de Fouché ne provoqua pas, si elle put contribuer à les encourager, les premières démarches effectives de Murat en vue de l'exécution du traité du n janvier. Peut-être même n'arriva-t-elle à Naples qu'après le départ du roi : elle ne lui parvint en tout cas qu'après que la décision en avait été déjà arrêtée sous l'influence de la reine.

M. Weil nous montre Murat cédant aux sollicitations de Carolinequi ne voyait plus que par les yeux de Neipperg et de Mier, renonçant à attendre, comme il aurait cependant désiré le faire,le retour du colonel Berthemy envoyé à Palerme. avec un agent de Neipperg, mission qui fut du reste sans résultat, pour vaincre l'obstination de Bentinck, et finissant par prendre des résolutions suprêmes devant lesquelles il cherchait vainement à reculer et que la volonté et l'ambition de la reine avaient fini par lui arracher.

Le 22 janvier, le général Gifflenga, que le vice-roi avait envoyé à Naples pour connaître les intentions de Murat, en était reparti, après avoir eu la veille une audience qui n'avait pas duré moins de trois heures, n'emportant que de très vagues déclarations, mais accompagnées de l'assurance formelle du roi que s'il se trouvait forcé à prendre un parti décisif, il ne ferait aucun mouvement qui puisse menacer l'armée du vice-roi sans l'en avoir préalablement informé : promesse fidèlement tenue et suivie d'ailleurs, entre Joachim et Eugène, d'une correspondance bien faite, nous le verrons, pour attester la persistance des sentiments de Murât en dépit des décisions que Caroline, unissant ses efforts à ceux des négociateurs autrichiens, réussit à lui faire prendre le jour même où Gifflenga le quittait. .

C'était d'abord la remise de ses passeports à l'ambassadeur français Durand, équivalant, par la rupture des relations diplomatiques, à une déclaration de guerre.

C'était ensuite l'envoi à l'empereur d'Autriche d'une lettre que le duc de Campochiaro était chargé de lui remettre, et où se trouvaient exprimées les mêmes vues que clans celle qu'il lui avait adressée le 7 janvier, et le même espoir de la paix générale.


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« Monsieur mon frère, « M. le duc de Campochiaro, l'un de mes ministres d'Etat, aura « l'honneur de présenter cette lettre à Votre Majesté Impériale et « Royale. Je l'ai chargé de se rendre auprès d'Elle et de son cabinet « pour traiter et conclure avec Votre Majesté ou, par sa médiation, « avec les puissances, ses alliées, toutes les stipulations qui résultent « du traité d'alliance qui vient d'unir si heureusement nos couronnes, « Je prie Votre Majesté Impériale et Royale de bien vouloir accueillir « ce ministre avec la môme bonté qu'elle m'a témoignée clans toutes « les occasions et d'ajouter foi à tout ce qu'il aura l'honneur de Lui « dire de ma part. Je l'ai chargé surtout d'exprimer à Votre Majesté « Impériale et Royale les sentiments d'amitié et de reconnaissance qui « m'animent pour Sa personne et l'empressement que je mettrai à lui « donner les preuves les plus sincères de mon inviolable attachement, « ainsi que de mon zèle à concourir avec tous mes moyens au rètablis« sèment de la paix générale qui est le but des efforts communs. Je ne « doute pas que Votre Majesté Impériale et Royale ne désire aussi « vivement que moi le résultat heureux qui rendrait le repos à l'Eu« rope. En faisant un traité avec Elle, il m'a été doux de penser que je « m'alliais au père de l'Impératrice des Français, et qu'il n'y ait pas te moins d'accord dans nos sentiments personnels pour la Maison de « France que dans les vues de notre politique.

« Veuillez bien recevoir. Monsieur mon frère, l'assurance de la con« sidération très distinguée avec laquelle je suis de V. M. 1. et R. le « bon frère et allié.

« J. NAPOLÉON. »

C'était enfin, décidé pour le lendemain, le départ du roi pour aller prendre le commandement de son armée : mesure à laquelle tenaient par dessus tout la reine qui allait exercer la régence, et le comte de Mier, qui dès le lendemain en rendait compte à Metternich. Le départ du roi lui avait paru le seul moyen de mettre fin aux intrigues des Français qui remuaient ciel et terre pour lui inspirer de la défiance contre les alliés et qui avaient été servis à merveille par les difficultés que Bentinck mettait à la conclusion d'un armistice, en persuadant au roi que les alliés n'agissaient pas de bonne foi. Ce départ était, d'un autre côté, chose capitale et indispensable parce qu'une fois à l'armée, Murat ne songera plus qu'à se battre et à soutenir son ancienne repu-


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tation militaire, « Le roi, disait Mier, a pris enfin son parti et il faut espérer que tout ira bien. Il est parti à quatre heures du soir pour Rome, s'y arrêtera deux jours et ira droit à l'armée qu'il veut rassembler aux environs de Bologne.

Parlant ensuite de la reine, le diplomate autrichien s'exprime ainsi : « La reine est parfaite. Elle a déployé en cette occasion une fermeté de caractère qu'on ne lui supposait pas. Les napolitains sont bien revenus sur son compte. C'est elle qui a le plus contribué au renvoi de Durand et à la détermination que vient de prendre le roi de ne plus s'obstiner à vouloir garder les Français qui veulent s'en aller. Elle dit à qui veut l'entendre qu'elle désire qu'ils partent tous. Elle a engagé le roi de nommer d'avance les remplaçants aux emplois qu'ils possèdent... La reine qui reste régente du royaume saura mieux et avec plus de fermeté tenir tête à tous les clabaudages et ne se laissera pas déranger de la ligne de conduite à suivre pour satisfaire aux engagements contractés avec l'Autriche. »

Il est inutile de lire entre les lignes de ce rapport pour soupçonner la violence de l'assaut que dut soutenir Murat, enfin vaincu par ce que, si courtoisement, Mier appelle la fermeté de caractère de la reine. Mais l'un et l'autre se trompèrent sur le moment dans leurs calculs. Si, par son départ, Murat laissait le champ libre à Naples à l'influence de la régente et du parti autrichien, il se trouvait dégagé lui-même de cette influence. Nous ne tarderons pas à en constater les conséquences.

Il quitta sa capitale dans la soirée du 23 janvier faisant annoncer à ses sujets par le Moniteur Napolitain que le roi, espérant; être ramené bientôt dans ses Etats par la paix générale, confiait, pendant son absence, la régence à la reine.

Il arriva à Rome le 24. A deux reprises, dans la soirée, il envoya un de ses aides-de-camp à Miollis retiré au château Saint-Ange pour protester de son dévouement à la France, et proposer au général de se retirer avec ses troupes sur Gênes. Comme on devait s'y attendre la réponse de Miollis fut négative. C'est seulement un mois après, le 27 février que Miollis devait rendre la vieille forteresse pontificale, en vertu d'une convention signée, le 24, entre le général Lechi représentant le roi de Naples et le plénipotentiaire de l'empereur chargé, en vertu d'un ordre adressé à Clarke le 8 février, de remettre à Murât la Toscane et les Etats Romains et ce plénipotentiaire n'était autre que Fouché,


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De Rome Murat se dirigea sur Ancône où il arriva dans la matinée du 30 salué par les batteries de la ville et du port, mais dont la citadelle était occupée par le général Barbou. Murât ne fut pas plus heureux avec lui qu'avec Miollis et ne put le décider à se retirer. Le même jour il adressait à son armée un ordre du jour, daté de Bologne où il avait sans doute compté être rendu à cette date, que, pour ne rien dissimuler, nous devons reproduire.

« Soldats ! Aussi longtemps que j'ai pu croire que l'empereur Napo« léon combattait pour la gloire et la paix de la France, j'ai combattu « à ses côtés; mais aujourd'hui il ne m'est plus possible de conserver « aucune illusion : l'empereur ne veut que la guerre.

« Je trahirais les intérêts de mon ancienne patrie, ceux de mes Etats « et les vôtres, si je ne séparais pas sur-le-champ mes armées des sien« nés pour les joindre à celles des puissances alliées dont les intentions « magnanimes sont de rétablir la dignité des trônes et l'indépendance « des nations.

« Je sais que l'on cherche à égarer le patriotisme des Français qui « sont dans mon armée par de faux sentiments d'honneur et de fidé« lité comme s'il y avait de l'honneur et de la fidélité à assujettir le « monde à la folle ambition de Napoléon.

« Soldats, il n'y a plus que deux bannières en Europe! Sur l'une « vous lisez : Religion, morale, justice, modération, lois, paix et bon« heur ! Sur l'autre : persécutions, artifices, tyrannie, guerre et deuil « clans toutes les familles. Choisissez !

« Signé : JOACHIM. »

Encore qu'on ait quelque difficulté à voir Murat se ranger sous la bannière de la religion, au moment où il visait à mettre une main définitive sur les Etats du pape ; encore qu'on puisse observer que Murât avait bien tardé à se rendre compte de la néfaste et irréductible ambition de l'empereur; on peut admettre ses critiques; mais en s'empressant d'ajouter qu'il était, moins que quiconque, celui qui devait les formuler contre l'homme auquel il devait sa fortune. Cette proclamation était en outre une maladresse. Si désireux fut-il, comme le pense M. Weil d'affirmer aux moins par des paroles son entrée officielle dans la coalition, et d'obtenir enfin, ce que M. Weil aurait pu ajouter, la ratification de son traité; quelqu'espérance qu'il eut de dissiper les soupçons des Autrichiens et de provoquer l'enthousiasme des Italiens, ce n'était point par de telles paroles qu'il pouvait rassurer le patrio-


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tisme des Français qui étaient dans son armée : encore moins qu'il pouvait obtenir la retraite volontaire des généraux français qui tenaient encore dans les départements romains, et avec lesquels il avait cherché jusque là à éviter toutes hostilité ouverte.

Cette proclamation de Bologne est, dans ses termes au moins, injustifiable. Elle est de plus, à peu près inexplicable, car l'état d'esprit de Murat ne s'est point modifié. Trois jours après, le 2 février, il répondait à une lettre du vice-roi qui, au retour de Gifflenga, s'était empressé, en lui exprimant sa douleur de sa détermination, de lui rappeler la promesse donnée de ne point ouvrir les hostilités sans l'en prévenir à temps.

« Monsieur mon cher neveu, lui écrivait-il, j'ai reçu hier sur la roule « d'Ancône, la lettre de Votre Altesse Impériale. Je vous réitère encore « la promesse que vous avez reçue de ne point commencer les hostili« tés sans vous en avoir prévenu, et je fais des voeux bien sincères pour « que la paix, si nécessaire au monde, vienne m'épargner la douleur « d'en venir aux mains avec les troupes de Votre Altesse Impériale, « avec mes compatriotes.

« Mais je ne puis prendre le môme engagement pour les troupes du « comte de Bellegarde dont j'ignore entièrement les projets.

« Je vous prie d'ajouter foi à tout ce que j'ai dit à votre officier d'or« donnance sur les sentiments d'amitié que je vous conserve toujours, « Je vous prie de présenter mes hommages à Son Altesse Impériale la « Vice-Reine.

P.-S. « Soyez assez bon, mon cher Eugène pour me rappeler au sou« venir de l'empereur et pour lui parler de ma douleur. Je verse des te larmes en vous écrivant ce peu de mots. Je vous embrasse très tente drement. »

Quelque sévère que puisse et doive être le jugement que l'histoire inexorable portera sur Murat, écrit M. Weil ramené à une plus juste appréciation par le cri de ce coeur déchiré, on ne peut cependant se défendre d'une pitié réelle pour cet homme qui sent toute la gravité de sa faute, qui recule épouvanté devant un crime qu'il voudrait ne point commettre et qui n'a plus déjà ni la force ni les moyens de s'arrêter sur la pente qui va le conduire à sa perte. En ce moment il est seul à Bologne, et il lui est possible défaire un retour sur lui-même, sur son glorieux passé. Il ferme l'oreille aux conseils des courtisans qui l'ont jeté et poussé, avec l'aide de Caroline, dans les bras de la coalition. Il est d'autant plus sincère qu'il


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n'y a, pour le moment, auprès de lui aucun des représentants des souverains alliés, qu'il est d'autre part justement inquiet et préoccupé du long silence qu'on garde à son égard, du regard inexplicable qu'on met à ratifier son traité.

Il est arrivé à Bologne sur le théâtre môme des opérations et son armée ne bouge point. Malgré les instances pressantes qu'on lui fait à tout instant tenir du quartier général des souverains pour l'inviter à entrer en ligne, il résiste toujours, d'abord parce qu'il tient à avoir la réponse de l'empereur d'Autriche aux lettres qu'il lui a adressées, ensuite parce que dans son entourage, bien que le nombre des Français soit fort réduit de ceux qui sont restés à son service, il s'en trouve encore quelques uns, comme Mier l'écrit à Metternich le 13-février, qui font valoir à ses yeux le mérite comme français de n'avoir pas tiré un coup de fusil contre ses compatriotes. C'est là, ajoute le diplomate autrichien arrivé depuis peu à Bologne, la véritable raison de la lenteur que le roi met dans toutes ses démarches et dans l'accomplissement de ses promesses et engagements.

C'est dans cet état d'esprit que le trouva une nouvelle lettre du vice-roi, datée de Mantoue le 4 février et qui se terminait par le conseil de temporiser, ee Que Votre Majesté temporise encore quelque temps, « L'empereur a quitté Paris. Dans peu de jours le temps des dangers « et des incertitudes sera passé et Votre Majesté pourra trouver la « politique d'accord avec les sentiments de son coeur. »

Le Conseil ne pouvait qu'être bien accueilli : Murat ne cherchait qu'à temporiser, son inaction lui offrait le double avantage de retarder le moment où un engagement de ses soldats avec les troupes françaises le compromettrait irrévocablement, avec la chance escomptée et possible que la conclusion de la paix générale lui épargnât cette douloureuse autant que dangereuse extrémité : et, d'un autre coté, d'employer ses troupes à prendre, en son nom, possession des Etats Romains, des Marches, de la Toscane, avec l'espoir que lors du règlement de compte définitif la coalition s'inclinera plus facilement devant le fait accompli et hésitera à le dépouiller des territoires occupés par son armée.

C'est en vain que, le 5 février, le comte de Bellegarde, commandant en chef des forces autrichiennes, essaie de vaincre cette résistance passive qui contrarie son action, en prescrivant à Nugent avec lequel il doit opérer sur la rive droite du Pô, de lui faire savoir qu'un des aides de camp du vice-roi a dit aux habitants de Pozzolo qu'Eugène


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veut passer le Pô à Plaisance et attaquer Murat. Vrai ou faux l'avis laisse Murat indifférent.

C'est en vain que pour lui enlever tout prétexte de se refuser à soutenir immédiatement les mouvements de Nugent, il a placé ce général sous ses ordres.

Pour toute réponse, et ce n'est qu'un moyen dilatoire, Murât lui demanda communication de son plan de campagne.

La convention signée à Bologne le 7 février pour établir une ligne militaire entre les armées Napolitaine et autrchienne, qui attribuait à cette dernière la plus grande partie de l'ancien duché de Modène ; et 48 heures plus tard, la prise de possession de cet état par Nugent qui y installa un gouvernement provisoire en attendant « qu'on ait reçu les ordres de l'archiduc François IV d'Este légitime souverain de ce pays », n'étaient point faites pour dissiper les défiances de Murât.

Il ne se borne point à retarder sa coopération. Il entrave l'action des Autrichiens. Le 8 février Carascosa renouvelait dans les termes les plus formels au général Campana la défense de laisser aucune troupe autrichienne dépasser la ligne de l'Enza qu'occupent les avant-postes napolitains. Lorsque, deux jours après, le général Strarhemberg, à la tête d'un des corps de Nugent, arrive à Reggio, il informe Campana, qui y commandait l'avant-garde napolitaine, de sa résolution dépasser le jour même l'Enza. Campana s'oppose, en vertu des ordres formels qu'il avait reçus, à l'exécution de ce mouvement. Et ce ne fut qu'après une discussion des plus orageuse que fut levée cette opposition.

A ces quelques indications, et elles ne sont point les seules en ce sens que l'on pourrait relever dans l'ouvrage de M. Weil, dont le IVe volume long de plus de 600 pages est consacré à la période qui va de février à juin 1814, à ces quelques indications on peut juger de l'état vraiment singulier des relations existant entre les deux puissances dont le traité du 11 janvier venait de consacrer l'alliance et de spécifier la coopération contre les armées françaises en Italie.

Il convient, en regard, d'indiquer l'état non moins singulier des relations, pendant la même période, entre Murat et le vice-roi. C'est l'Autriche qui semble l'ennemi éventuel, c'est le vice-roi qui semble l'allié possible de demain.

Nous avons vu qu'avant même son départ de Naples Murat avait promis au prince Eugène de ne point l'attaquer sans l'avoir prévenu : qu'il lui avait, de Bologne, renouvelé cet engagement ; Le vice-roi en

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avait profité pour prendre ses dispositions militaires qui devaient aboutir à la bataille du Mincio entre ses troupes et celles de Bellegarde.

Si, comme on l'a maintes fois prétendu, écrit M. Weil, il est impossible d'établir d'une façon précise et certaine que le roi de Naples ait entretenu à ce moment une correspondance des plus suivies avec le vice-roi, que ses émissaires et ses officiers se rendaient à l'insu de Nugent, presque journellement au quartier général d'Eugène les indices ne manquent point de relations plutôt amicales.

Le général d'Anthouard ayant retenu à Plaisance un officier napolitain que Murat envoyait à Turin auprès du prince Camille Borghèse, le vice-roi avait autorisé d'Anthouard à lui laisser continuer sa route te en lui donnant un officier pour l'accompagner comme pour sa sécurité personnelle » et il ajoutait : et C'est ainsi qu'ils en usent avec les nôtres. »

Le 12 février, le général Bataille, aide de camp du vice-roi, envoyé par lui au quartier général napolitain, sur quelques ouvertures, lisons-nous dans une de ses lettres à la vice-reine qu'il aurait reçues de Murat, avait conclu et signé, à Bologne, avec le colonel Giulani, aide de camp du roi de Naples une convention accordant « le libre passage par les Etats du roi aux militaires et employésfrançais, venant des Iles Ioniennes, ou prisonniers des alliés en Italie qui se présenteraient dans les provinces-au pouvoir du roi avant le i" mars pour se rendre à l'armée du vice-roi. » Celui-ci s'engage;iit, de son côté, à laisser passer jusqu'à cette date ee les militaires et employés napolitains venant de l'armée du Nord ou d'Espagne pour rejoindre le roi. »

Singulière préparation, on l'avouera, à une ouverture d'hostilités que cette convention de Bologne par laquelle Murat et Eugène s'accordaient réciproquement toute facilité pour renforcer leurs armées !

En revanche, deux jours plus tard, le 14 février, Nugent ayant fait demander à Carascosa s'il pouvait compter sur lui dans le cas où il aurait besoin de secours ou d'appui, le général napolitain se contentait de répondre diplomatiquement, le mot est de M. Weil, qu'il agirait conformément à ses ordres. Ces ordres qu'il demandait aussitôt positifs, formels et immédiats n'étant pas venus, Nugent était forcé de rester immobile sur ses positions toute la journée du 15.

Jusqu'à ce moment, Murat, on ne saurait en douter, hésite, M. Weil, le constate, à prendre une résolution qui coûtait à son coeur de Français.


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Et subitement, ce même jour, 15 février, il ordonne à son chef d'État major, le général Millet, de signifier une déclaration formelle de guerre au général Vignolle, chef d'état-major du vice-roi. Le prétexte invoqué c'est que le général Barbou, qui tient encore la citadelle d'Ancône, a tenté une sortie, ouvrant ainsi les hostilités contre l'armée napolitaine. Prétexte réel sans doute, mais en vérité de trop peu d'importance pour motiver une aussi grave décision dont l'explication doit être cherchée ailleurs.

M. Weil, dont on ne saurait, surtout en cette circonstance, suspecter le jugement de partialité en faveur du roi de Naples reconnaît qu'on ne peut vouloir aller jusqu'à prétendre que, connaissant la loyauté, la droiture, l'honnêteté natives du vice-roi, Murat ait intentionnellement et de propos délibéré, tout mis en oeuvre pour abuser sa bonne foi. La prétention eût été en effet insoutenable. Comment donc expliquer cette évolution subite, cette résolution en contradiction avec les déclarations mêmes du roi, bien décidé jusque-là à attendre dans le statu quo la réception de la ratification de son traité avec l'Autriche ? D'après M. Weil la décision de Murat aurait été emportée par l'annonce officielle de l'échec subi par Napoléon à la Rothière, apportée la veille au soir à Bologne par le général Pignatelli Strongoli qui revenait du quartier général des alliés, et par l'imminence de l'audience qu'il allait être contraint d'accorder au colonel Catinelli, envoyé par Bentinck, qu'il avait, invoquant son état de santé, refusé de recevoir quelques jours auparavant, et qui en avait profité pour se rendre au quartier général de Bellegarde, mais qui devait être de retour à Bologne le 17 février.

« Quarante-huit heures plus tard, écrit M. Weil, lorsque le vice-roi fit tirer le canon à Lotta pour célébrer les victoires que l'empereur venait de remporter sur Blucher (Champaubert et Montmirail), Mural regretta amèrement de n'avoir pas eu la force de résister trois ou quatre jours de plus aux conseils et aux sollicitations de ceux qui, en lui arrachant cette déclaration venaient de le jeter à corps perdu dans les bras de la coalition dont il allait être la dupe parce qu'il lui était impossible de la servir loyalement... A partir de ce moment l'issue de la lutte sourde et acharnée qui allait s'engager entre le roi de Naples et ses puissants alliés était certaine. La déclaration de guerre du 15 février marque la première étape de la route semée de déboires, de désillusions et de catastrophes, qui devait, en menant l'infortuné roi de Naples de Tolentino au Pizzo, lui coûter le trône et la vie. »


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Pendant les heures tragiques, où se livrait dans l'âme déchirée de Murat, la lutte angoissante et douloureuse dont le dénouement devait avoir de si terribles conséquences, que devenaient les deux personnages dont l'influence et les conseils l'avaient conduit à signer le traité du n janvier, et à se jeter dans la lutte : la reine Caroline, et Fouché ? Depuis longtemps, nous ne le savons, le parti de Caroline était pris. Libre de ses mouvements par le départ de Murât, régente du royaume, elle n'avait pas hésité nous dit M. Weil, à jeter complètement le masque, à briser les derniers et bien faibles liens qui unissaient encore Naples à la France. Par un rescrit adressé à ses ministres, le 12 février, elle leur faisait savoir qu'elle venait d'ordonner la prise de possession défiinitive des principautés de Bénévent et de Ponte-Corvo, la saisie de tous les bâtiments français de guerre ou de commerce, le renvoi à Corfou ou en France de tous les officiers ou agents du gouvernement français en mission à Otrante ou dans d'autres places ; la rupture de toute communication entre Naples et l'Empire ; enfin l'apposition des scellés sur toutes les caisses appartenant à la France. Déplus, afin de faire complètement disparaître les doutes qu'on avait pu concevoir, peut-être aussi, afin d'obliger le roi à s'engager définitivement dans la voie qui lui était tracée par le traité du 11 janvier, elle avait cru nécessaire de terminer son rescrit par cette phrase que n'aurait jamais dû écrire la propre soeur de Napoléon : « En vous donnant connaissance de ces dispositions, mon désir est que vous me proposiez le complément de toutes les autres mesures qui sont une suite nécessaire de notre état de guerre avec la France. »

Cette guerre était bien la sienne : tandis que Murat hésitait encore, elle tenait à ce qu'aucun doute ne put s'élever sur sa fidélité à remplir jusqu'au bout la promesse de trahison donnée à l'Autriche trois mois auparavant. Étrangère aux ambitions illusoires mais non sans quelque grandeur de son époux, uniquement pour assurer le pain de ses vieux jours, elle trahit son frère, sans remords, sans retour en arrière. Moins heureuse, en un sens, que Murat, auquel sa fin tragique fut une sorte d'expiation et de rachat; elle n'y perdit que le trône... et l'honneur.

Quant à Fouché, il ne perdit rien. L'échec des combinaisons, pour le moins fort équivoques, élaborées par cet intrigant de haute volée, et dont le roi de Naples devait être l'instrument, fut, au contraire, compensé par un succès d'argent. L'auteur des mémoires de Fouché affirme nous dit M. Madelin, qu'il sut se faire payer par le roi Murat, succès-


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seur à Rome, disait-il, des droits et charges de l'empereur Napoléon, une somme de 270.000 livres qui lui étaient dues sûr le trésor. L'aide de camp de Miollis, Bellaire, déclare, de son côté que c'est avant l'arrivée à Rome du roi Joachim que Fouché se fit donner par l'intendant du trésor une somme considérable. C'était, en vérité une assez modeste récompense de la couronne d'Italie posée par lui, au moins en espérance, sur la tête de Murat.

Liirbnie du sort lui réservait encore, avant qu'il ne quittât l'Italie, une dernière et étrange satisfaction. Le 8 février, Napoléon ordonne à Clarke d'écrire à Élisa et à Miollis que, la trahison de Murât ayant rendu intenables la Toscane et les États Romains, ils doivent remettre ces provinces au roi de Naples, en mettant comme condition que tous les employés se retireront au delà des Alpes. Le duc d'Otrante, s'il se trouve encore en Toscane, devra aller vers le roi de Naples pour arranger cette convention.

L'empereur l'avait envoyé à Naples pour arrêter la défection de Murat. Avec son indépendance coutumière, accrue par la sécurité que lui donnait l'éloignement, et par le déclin de la toute puissance du maître, il avait proposé au roi de se tailler dans les dépouilles du grand empire, un état indépendant avec les pays italiens directement soumis à la domination française, de la frontière Napolitaine à la rive droite du Pô; colorant d'ailleurs cette initiative d'un loyalisme très mitigé du prétexte, vrai ou faux, qu'il jugeait que c'était là le meilleur, l'unique moyen de remplir le but de sa mission.

L'influence de la reine ayant été plus forte que la sienne, Murat était devenu l'allié de l'Autriche. Un moment dépité, Fouché n'avait pas été long à accepter le fait accompli, ne cherchant qu'à le tourner à ses fins, et n'hésitant pas à pousser Murât dans la voie néfaste où l'avait engagé le traité du 11 janvier.

Et voici que, par un extraordinaire revirement, Napoléon le chargeait de remettre à Murat, passé à l'ennemi, ces mêmes pays italiens dont la possession avait dû assurer sa fidélité. En accomplissant cette dernière cérémonie Fouché ne devait guère s'illusionner sur la précarité de cette investiture. Seule la ratification de la coalition pouvait lui donner une valeur, et, dans ses conseils, le sort des états de la péninsule était depuis longtemps décidé, en dehors de Murat et contre lui.

C'est le duc d'Otrante qui a, d'après M. Madelin, conseillé à Napoléon l'évacuation complète de l'Italie. S'il a eu, un moment, le désir


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d'aviver l'antagonisme entre Joachim et Eugène, il cherche maintenant, et jusqu'à son départ il multipliera les démarches dans ce sens, à éviter à Murat la nécessité d'en venir aux mains avec les troupes françaises. L'évacuation de l'Italie par celles-ci devait rendre cette rencontre impossible : elle servait trop bien les vues de Fouché pour qu'il ne s'y soit pas employé. Aucune lettre de lui n'a été retrouvée ou du moins publiée soit par M. Madelin soit par M. Weil, qui établisse qu'il agissait d'accord avec Murat ou qu'il l'ait tenu au courant de sa démarche : on peut cependant le présumer à la lecture de la lettre que Murat lui avait écrite le 8 février, le jour même où Napoléon, cédant à ses arguments, se résignait à l'évacuation.

« Combien je suis touché de votre tendre sollicitude! je ne saurais jamais vous exprimer combien je sais apprécier vos nobles et généreux procédés : ils ne m'ont pas étonné. Je vous avais toujours regardé comme un homme d'honneur, comme un ami loyal et courageux. Recevez mes remercîments bien sincères. »

Fouché reçut à Lucques le 17 février les ordres de l'empereur : il se mit immédiatement en mesure de les remplir. Le lendemain il écrivait à Napoléon pour lui rendre compte de ses premières démarches et des difficultés qu'il avait rencontrées.

Il racontait qu'au reçu des ordres du ministre de la guerre, il était parti pour Bologne où se trouvait Murat ; qu'à Florence on l'avait arrêté, qu'on lui avait signifié l'ordre de rétrograder jusqu'à Prato pour y attendre la réponse du roi auquel il expédiait un courrier. Mais que le séjour de Prato étant peu sûr, il était rentré à Lucques : « Je « ne sais, ajoutait-il, ce qui sera permis au roi de me répondre. Les « ministres autrichiens et anglais lui reprochent d'être français et « d'avoir surtout trop d'attachement à Votre Majesté. Les révolu« tionnaires qui gouvernent Florence aujourd'huy disent hautement « que le roi de Naples s'entend avec les Français, qu'il trahit les « Italiens. Ils attribuent à mes conseils l'inaction des troupes napo« litaines que les coalisés voulaient faire marcher contre le vice-roi au « moment qu'il allait être attaqué par le général de Bellegarde. Le « roi est malade de chagrin. Il sent parfaitement aujourd'hui la « situation où il s'est piacé. Il m'est difficile de lui faire arriver des « conseils, s'il avait dans le caractère autant de décision qu'il a de « qualilés clans le coeur, il serait plus fort en Italie que la coalition. »


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Cette lettre est un chef-d'oeuvre. Sous couleur de plaider la cause de Murat, il se défend lui-même contre tout soupçon de félonie. Il insinue fort habilement que c'est à ses conseils que sont dus les retards de Murat à marcher contre le vice-roi, et c'est fort possible. En même temps il dégage sa responsabilité pour l'avenir en assurant qu'il lui est difficile de faire arriver au roi des conseils.

Que contenait celle que de Florence, ne pouvant arriver jusqu'à lui, il a adressé à Murat, et qui est demeurée introuvable? M. Weil est disposé à croire qu'elle portait d'autres communications que celles qui avaient trait à la convention d'évacuation. Et à ce propos il déclare extraordinaire, inexplicable cette intervention soudaine de Fouché, qui n'était pourtant que la suite toute naturelle des instructions de l'empereur. Difficile à expliquer lui paraît encore l'empêchement apporté à la continuation du voyage de Fouché : Comment se fait-il que le duc de San Arpino, commissaire général de Murat en Toscane, ait arrêté à Florence le plénipotentiaire de l'empereur porteur de pleins pouvoirs qui devaient donner cette province à son roi? N'avait-on pas eu assez de confiance en lui pour le mettre dans la confidence? Ou bien agissait-il dans les intentions de Joachim désireux d'éviter la présence de Fouché à Bologne, qui ne pouvait qu'augmenter les défiances déjà grandes des Autrichiens? M. Weil déclare plus probable cette dernière hypothèse, sans s'apercevoir que de pareils ordres de la part de Murat impliqueraient la connaissance de la mission de Fouché, qu'il ignorait certainement, celui-ci s'étant mis en route aussitôt que lui était arrivée l'instruction de Clarke. Mais cette explication jDermet à M. Weil d'affirmer que : « Grâce au petit coup de théâtre de Florence, à l'envoi assuré de la lettre du duc d'Otrante au roi, Murat n'évitait pas seulement une foule de questions qui n'auraient pas manqué d'aggraver sa situation, mais il pouvait recevoir et garder pour lui ces communications confidentielles, et ne faire part au comte de Mier que des pièces relatives à la Toscane. Tout est du reste surprenant et anormal dans ces négociations. Il s'agit du règlement d'une question essentiellement militaire et, avant de donner au général Lechi l'ordre de discuter avec Fouché les conditions de la convention, ce n'est ni un militaire, ni un diplomate que Murat choisit pour l'envoyer à Lucques, c'est le comte de Mosbourg, son ministre des finances. » N'est-ce point en vérité poser les difficultés pour avoir le plaisir de les résoudre, ou de les déclarer des énigmes inexplicables ?


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Le comte de Mosbourg et le général Lechi, autorisés par Murat à traiter avec Fouché, arrivèrent à Lucques le 19. Le jour même Elisa autorisait le colonel Dupré, commandant d'armes à Livourne, à signer avec eux la capitulation de cette place, Fouché lui ayant représenté qu'il n'y avait pas un moment à perdre pour prévenir tant l'attaque des Anglais que les difficultés d'une retraite des troupes françaises.

Cinq jours après, entre Joseph, duc d'Otrante, ministre d'Etat, grand aigle de la Légion d'honneur, et autorisé par sa majesté l'empereur des Français, et le comte Joseph Lechi, aide de camp de Murât, était signée à Lucques la convention qui remettait la Toscane et les Etats romains au roi de Naples, M. Weil a jugé fort sévèrement, et il n'a point tort la conduite de Fouché en cette circonstance : ee Pressé d'en finir, écrit-il, fort des pleins pouvoirs dont il était investi... Souscrivant, presque sans discussion, aux conditions exorbitantes que tenait à lui imposer le général napolitain, il consentit à laisser imposer aux troupes françaises, à des garnisons qui n'avaient même pas été attaquées le sort réservé ordinairement à celles qui sont réduites par la force. Loin de se conformer aux règles les plus élémentaires, aux instructions qu'il

avait reçues........... il stipula sans hésiter que les troupes ne serviraient pas

d'un an contre les alliés, et qu'elles seraient transportées en France par la mer qui lui était fermée par la flotte anglaise au lieu de se réunir aux troupes sous les ordres du prince Félix pour revenir en masse sur les Alpes et se rendre par le mont Cenis à Briançon.

Lorsque Napoléon eut connaissance de cette convention qu'il traita de ridicule, il chargea Clarke d'exprimer son mécontentement à Fouché, et de prendre ses dispositions pour diriger en toute hâte par terre sur Gênes les troupes que la stipulation de leur départ par mer mettait à la merci des Anglais. Clarke devait en aviser le duc d'Otrante. Mais au moment où Napoléon donnait ces ordres le duc d'Otrante avait déjà quitté l'Italie et repassé les Alpes.

Il ne sut pas d'ailleurs s'en tenir à une légèreté qui confinait à la trahison. Il fut cynique. Son ennemi le général Miollis qui tenait encore le château St-Ange devait le remettre aux Napolitains. Fouché lui fit connaître la convention de Lucques par une lettre étonnante, même écrite par lui.

« Général, je vous ai adressé, il y a quelques jours une dépêche du « ministre de la guerre qui vous annonçait que j'étais chargé par et l'empereur de conclure une convention avec le roi de Naples pour


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« l'évacuation des Etats romains et de la Toscane. Je vous envoie copie « de cette convention, et j'ai obtenu plus qu'on ne l'espérait dans les « circonstances où nous nous trouvons. J'ai exigé un-inventaire. Je vous « prie d'en surveiller l'exécution.

« J'avais d'abord pensé à faire une stipulation particulière pour « vous et pour les généraux Lasalcette et Simon. Mais le roi parait « tellement disposé à faire ce qui pourra vous être agréable que je n'ai « pas cru devoir insister.

« Je vais me rendre à Paris où j'espère que je ne tarderai pas de « vous revoir, ainsi que vos compagnons d'armes. J'aurais du plaisir « à vous y revoir. »

On peut douter de la réciproque.

Miollis se borna à répondre : « Monsieur le duc, j'ai reçu votre lettre et la convention. J'en suis désolé. J'espère vous revoir sous d'autres auspices. »

Quelle que fut sa satisfaction, Fouché n'en sentit pas moins la nécessité de fournir à l'empereur quelques explications. Il les lui adressa le 26 dans une lettre où il expose ce qu'il considère comme les avantages de la convention qu'il a signée. Le château St-Ange ne pouvait tenir que peu de jours et c'est grâce à ses efforts que sa garnison et celle de Civita Vechia pourront conserver leurs armes, alors que les anglais même en manquent en Italie. Il est vrai qu'elles ne pourront point s'en servir en Italie, mais l'empereur a ordonné de les diriger sur la France. S'il a consenti à les y envoyer par mer, c'est uniquement que ce transport lui a paru plus prompt, moins fatigant et plus sûr.

L'empereur n'avait du reste point attendu de connaître le beau travail exécuté par son plénipotentiaire pour se repentir de lui avoir confié cette nouvelle mission. C'était le 8 février qu'il lui avait fait donner par Clarke ses instructions. Cinq jours après, par une lettre datée de Château-Thierry, le 13 février, il lui ordonnait de rentrer en France : « J'ai reçu vos différentes lettres. La conduite du roi de Naples et celle de la reine n'a pas de nom. J'espère vivre encore assez pour venger moi et la France d'un tel outrage et d'une ingratitude aussi affreuse. Rendez-vous à Lyon ou à Marseille selon l'endroit par où vous venez et arrivez à Paris.

C'était à Gênes, où il avait annoncé sa prochaine venue que devait le trduver cet ordre de rappel. Il ne le reçut jamais ou fît exactement

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comme s'il ne l'avait pas reçu. Pendant quelques jours il fut insaisissable aux agents de Savary qui le cherchaient, faisant répandre, pour les dépister, les bruits les plus contradictoires sur son compte, sur ses déplacements : on alla jusqu'à dire qu'il avait été fait prisonnier par les alliés : il était paisiblement à Lucques, réglant avec les envoyés de Murât le sort de l'Italie française. Il quitta Lucques le 1er mars, se dirigeant vers Florence et Bologne. Il ne voulait pas repasser les Alpes sans avoir une dernière entrevue avec Joachim qui le reçut à Modéne, et auquel, avant de le quitter, il recommanda avant tout d'éviter tout conflit avec Eugène. Le 9 mars il était à Turin, d'où il écrivit à Elisa, la priant de s'entremettre pour empêcher une rencontre entre le roi de Naples et le vice-roi. Il ne restait plus qu'à adresser à celui-ci la même recommandation. Fouché l'alla trouver à son quartier général de Volta, et, ce dernier devoir accompli, le loyal serviteur reprit enfin le chemin de Paris. Il ne devait y arriver qu'après la chute de Napoléon, trop tard pour jouer son rôle. Ce lui sera une leçon, et, après les cent jours, il saura prendre ses mesures pour ne point se laisser oublier.

« Ah ! qu'on est sévère pour Fouché ! a écrit M. Madelin à propos de sa mission et de son rôle auprès de Murat. Celui-là du moins était un politicien, et Murat était deux fois traître, car il était soldat. »

Ce n'est point en tout cas le politicien qui eut écrit et signé la lettre que, trois semaines après l'envoi de sa déclaration de guerre, le roi de Naples, plus hésitant et plus déchiré que jamais, adressait le 4 mars à Napoléon.

« Sire, votre Majesté court des dangers. La France est menacée te jusque dans sa capitale, et je ne puis mourir pour vous, et l'ami le « plus affectionné de Votre Majesté est en apparence son ennemi.

« Sire, dites un mot, et je sacrifie ma famille, mes sujets. Je me « perdrai, mais je vous aurai servi, je vous aurai prouvé que toujours « je fus votre meilleur ami. Je ne demande pour le moment autre « chose, pourvu que le vice-roi vous fasse connaître ma conduite...

« Les larmes qui remplissent mes yeux m'empêchent de continuer. « Je suis ici seul au milieu d'étrangers. Je dois cacher jusqu'à mes « larmes. Cette lettre vous rend entièrement, Sire, le maître de mon « sort. Ma vie est à vous; aussi bien avais-je fait le serment de mourir « pour Votre Majesté. Si vous me voyiez et si vous pouviez vous faire « une idée de ce que je souffre depuis deux mois, vous auriez pitié de


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« moi. Aimez moi toujours. Jamais je ne fus plus digne de votre « tendresse. Jusqu'à la mort votre ami. »

Que la réponse à ce cri de pitié soit la conclusion de cette trop longue étude ! Son but n'est point de réhabiliter le roi de Naples. Nous avons seulement essayé, à l'aide des documents mis au jour par un historien, certes consciencieux jusqu'au scrupule dans ses recherches, et dont il serait difficile de suspecter la partialité en faveur de Murât, d'apporter une justification à l'assurance que témoignait M. de Mosbourg lorsque dans l'introduction, déjà composée, de l'ouvrage qu'il s'était proposé de consacrer à la mémoire de son roi, comme lui fils de notre Quercy, il écrivait :

« Ce sont ces événements dont je ne craindrai pas d'évoquer successivement l'histoire. En rectifiant les erreurs qui l'ont obscurcie, en réfutant les faussetés qui la déshonorent, je ferai voir qu'on a jeté sur un monarque infortuné, bien plus que coupable, des torts qui ne Turent pas les siens et des malheurs dont il ne fut pas la cause. »

ETIENNE DEPEYRE.



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LA FONTAINE DU DÉGAGNAZÈS Source pure du Frau, fontaine mon amie, Tu n'as point le renom que le Romain donna A ta soeur des coteaux de Murcens : Polémie, A celle des coteaux de Cahors : Divona !

Nul César ne capta, pour remplir les piscines De ses thermes, l'afflux cristallin de tes eaux, Il ne les mena point de vallons en collines ; Pour toi nul aqueduc n'arrondit ses arceaux...

Dans la fraîcheur des bois, solitaire et recluse, Tu dors depuis toujours, confinée en ton coin. Tu n'as point le souci qu'on t'égale à Vaucluse Et que ton pauvre nom se répercute au loin.

Goutte à goutte, à l'écart, tu distilles tes larmes. Elles sourdent sans bruit des mousses du rocher ; Les chênes, les tilleuls, les frênes et les charmes Te gardent des passants qui pourraient t'approcher.

Un sentier, jusqu'à toi, descend des métairies ; Mais il fait des zig-zags pour mieux nous égarer. Un écran de ronciers et de menthes fleuries Te dissimule encor, en voulant te parer.

Au-dessus du bassin où ton miroir palpite, Suspendue aux rameaux qui se penchent sur toi, Certains étés, j'ai pu voir une clématite Enchevêtrer ses brins pour te former un toit...

Ton flot semble à regret s'enfuir de cette cage Que le bois d'alentour resserre autour de lui ; Il s'attarde longtemps aux joncs d'un marécage Où, sous les nénuphars, discrètement il luit.

Mais la prairie est là... L'herbe te sollicite. Ton ruisselet s'y risque en un étroit fossé ; Des saules argentés reçoivent sa visite ; Il y muse longtemps, voyageur peu pressé,


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Là-haut, sur le sommet qui domine la berge.

Une église romane étale ses murs gris,

Ses murs parfois, sonnants d'un cantique à la Vierge...

Le cours d'eau nouveau-né s'effarouche à ces cris !

Il glisse cependant. — il faut suivre sa pente, — Il saute quelquefois, ou du moins fait semblant ; Puis, au val élargi, reprend sa marche lente Et semble s'arrêter dans les prés du Mas-Blanc.

Comme un serpent surpris s'éclipse entre deux pierres, Il disparaît soudain dans un replis du sol Pour jaillir de nouveau plus loin, parmi les lierres Qui dérobent aux yeux l'iguede Graffiol.

Ainsi s'en va ton flot menu, douce fontaine, Tantôt dans le soleil et tantôt clans la nuit ; Son ruisseau gagnera la Dordogne lointaine... J'aime, en toi, ce qui reste et non pas ce qui fuit !

Peu m'importe que l'Ourajou prenne sa course, Vire sous Thédirac et gagne le Céou ; Amoureux exclusif du sommeil de ta source, J'oublie, auprès de toi, la fuite de ce fou !

Agenouillé sur le velours vert de ta couhe, Je te vole un peu d'eau dans le creux de ma main, Et ta fraîcheur et ton parfum charment ma bouche... Chasseurs ou pèlerins feront ainsi demain !

Qu'il soit rustique ou bien raffiné, qui t'approche, Par hasard, se souvient du bois mystérieux Où ton eau se distille aux mousses de la roche, Dans un recoin du Frau, loin du bruit, loin des yeux !

E. GRANGIÉ E. de SURGÈS


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PROCES-VERBAUX DES SÉANCES

DE LA SOCIÉTÉ DES ÉTUDES DU LOT

PENDANT LE 1er TRIMESTRE DE 1911

Séance du 9 janvier 1911 Présidence de M. PAUMÈS, président semestriel

Étaient présents : MM. le comte d'Armagnac, Billières, lieutenant de Chomereau, Combes, Crudy. Daymard, Dois, Fourastié, Girma, Grangié, Rames, lieutenant Tourné, Albe.

M. le président signale,dans la dernière livraison du Bulletin de la Société du Périgord, un article intéressant sur le savant abbé de Lespine, qui a beaucoup fait pour l'histoire de sa Province, et dont les notes conservées à la Bibliothèque nationale renferment beaucoup de choses même sur le Quercy. Il donne lecture ensuite des voeux que nous envoie, comme chaque année, dans la langue des muses latines, la société archéologique de Montauban, et de la réponse, non moins poétique, mais dans la langue du Parnasse français, que notre collègue, M. Grangié, lui adresse en notre nom.

M. Rames donne lecture de ses comptes dont on ne peut qu'admirer la clarté et la précision. Il est bien dommage que notre cher trésorier n'ait pas à s'occuper de plus fortes sommes.

M. Fourastié lit au nom de M. Louis Caillet, conservateur de la |bibliothèque municipale de Limoges, un document de l'année 1501, concernant Bertrand de l'Hôpital, receveur de la sénéchaussée du Quercy.

M. le secrétaire général communique une lettre de M. A. Lambert, secrétaire d'un comité qui s'est formé à Rabastens (Tarn) pour des fêtes en l'honneur d'un ancêtre de nos modernes félibres, Auger Gaillard, dit lou Roudié de Rabastens, auquel on va ériger un buste. La société des Etndes du Lot est heureuse de pouvoir encourager une telle manifestation.

M. le chanoine Gary fait hommage du dernier numéro de sa Revue religieuse, où il a reproduit l'inscription qui se lit sur le gros bourdon de la cathédrale et que M. P. de Fontenilles a oubliée clans son recueil ; il y a également dans ce numéro un article de M. Arthur Lolh (Univers) où


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il est question des tentatives faites par Jean XXII et le roi Charles IV pour l'union des Eglises grecque et latine.

M. Albe lit une lettre denotie confrère, M. Armand Viré, relative au projet de loi sur les fouilles dont il a été question dans la dernière séance, et dans laquelle aussi est reproduit un curieux questionnaire, que nous ne pouvons insérer en détail, de M. Emile Rivière, sur le rôle du fer de cheval dans la légende et la superstition. Il y a un pied de mule ou de cheval au puits de Padirac, au Roc de la Pucelle, près de Rignac, à Catus... ; il y a un ou plusieurs fers à cheval dans les armoiries des d'Arnaldy Destroa et des Laborie de Campagnac. C'est pour le moment tout ce qu'on peut dire.

M. le lieutenant de Chomereau, qui s'occupe de préhistoire, demande qu'on mette dans le Bulletin une note pour provoquer une statistique aussi complète que possible de tous les monuments mégalithiques, dolmens, tumuli, cavernes habitées, camps, oppida, etc, que possède notre pays. La société le prie de vouloir bien rédiger celte note qui sera insérée dans la prochaine livraison du Bulletin et qu'on tâchera de faire connaître aux instituteurs et aux curés.

M. Combes continue la lecture de ses analyses des registres municipaux de Cahors pendant la période révolutionnaire, du 7 septembre au 15 novembre 1794.

Séance du 23 janvier 1911

Présidence de M. PAUMES, président semestriel

Étaient présents : MM. Billières, Combes, comte d'Armagnac, commandant Saint-Éloi, docteur Bergougnioux, de Fontenilles, chanoine Gary, Girma, Daymard, Marre, Rames, Albe.

M. le secrétaire général signale dans divers journaux des articles relatifs au projet de loi sur les fouilles scientifiques ; dans le Progrès de Lyon une circulaire ministérielle du 11 janvier, au sujet des abus de l'affichage qui, en certains endroits arrive à altérer gravement l'aspect d'un paysage. Il est décidé qu'on fera connaître cette circulaire à la prochaine réunion du syndicat d'initiative, dont font partie plusieurs membres de la société. Au sujet de ces abus une discussion intéressante s'engage sur ce qu'il y aurait à faire pour l'éducation du goût chez les enfants et aussi chez les grandes personnes. Si cette éducation du goût parvenait à se répandre on n'aurait pas à déplorer tant d'actes de vandalisme inconscient.


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La Quinzaine du Quercy donne la description, en style archaïque, d'un banquet ou « repast » des amis du vieulx Figeac, la nouvelle société récemment fondée pour sauvegarder les intérêts archéologiques de la région orientale de notre département. Suit le compte rendu d'une réunion mensuelle des membres de cette société, où nous remarquons le voeu émis à l'unanimité pour l'érection à Champollion d'un monument plus convenable que le maigre obélisque de la place de la Raison. La société des Etudes du Lot s'associe de tout coeur à ce voeu.

M. le président fait savoir qu'il a adressé, au nom de la société des Etudes des compliments de condoléances à monsieur le préfet du Lot, un de nos présidents d'honneur, pour le deuil cruel qui vientdele frapper. Il annonce que M. l'Inspecteur d'Académie a promis de faire imprimer dans son Bulletin de l' Enseignement primaire, et M. le chanoine Gary dans sa Revue lieligieuse le questionnaire de M. le lieutenant de Chomereau relatif aux monuments préhistoriques du département. Il signale dans le Temps du 10 janvier un article au sujet de ce qui se fait actuellement en faveur du musée Ingres de Montauban, et rappelle à ce propos que le père du célèbre peintre fut professeur de dessin à l'école centrale de Cahors.

M. Grangié envoie en communication un livre de poésies d'une jeune quercynoise, Yvonne Vayssié, récemment paru à Nantes, sous le titre de la Nature, avec une préface de Th. Botrel.

M. de Fontenilles fait connaître que les plaintes jadis formulées parla société sur la façon dont on opère la restauration de certains monuments historiques dans notre région n'ont pas été suffisamment entendues, à en juger parce qui se passe au Vigan. De nouvelles observations après enquête seront transmises à M. le sénateur Rey, si plein de dévouement pour tout ce qui concerne les vieux monuments du Quercy.

M. Combes continue la lecture de ses analyses des registres municipaux de la période révolutionnaire du 19 novembre 1796 à la fin de janvier 1797.

M. Albe commence la lecture d une monographie du doyenné de Carennac.

Sé.ince du 6 février 1911

Présidence de M. PAUMÈS, président semestriel

Étaient présents : MM. Bergougnioux, lieutenant de Chomereau, Crudy, Daymard, Depeyre, commandant Saint Eloi, Gary, Rames Albe.


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M. Rames signale dans la Revue du Touring-Club un article sur les légendes de Bort dont quelques traits rappellent un usage superstitieux de certaines pèlerines de Roc-Amadour, et un autre qui nous monlre à Aubepeyre un « pas du cheval » analogue au « pied de la mule » de Padirac.

M. Paumès lit quelques passages du travail que publie M. Albe, sur les possessions d'Obasine en Quercy, dans le Bulletin de la société de Brive, relatifs au déboisement de la région de l'Ouysse et de l'Alzou.

M. de Chomereau rappelle la découverte faite par M. l'abbé Malga, curé de Cels, d'une station néolithique sur le plateau de l'Impernal de Luzech.

M. Daymard détache du gros volume de M. Michel sur la propriété les résultats qui concernent notre département et qui sont trislement significatifs puisqu'ils le mettent le 81e au point de vue de la fortune mobilière et de la fortune immobilière ; le Lot en revanche est un des moins chargés au point de vue de la dette hypothécaire.

M. Albe continue la lecture de sa monographie du doyenné de Carennac.

M. Depeyre reprend son étude, trop longtemps interrompue, du livre de M. le commandant Weil sur le Prince Eugène et Murat. Le parti-pris de cet auteur en faveur du prince Eugène le rend injuste à l'égard du roi de Naples, ce qui amène notre collègue à faire un travail presque complètement original des plus intéressants que le présent Bulletin donne en entier.

Séance du 20 février 1911

Présidence de M. PAUMES, président semestriel

Etaient présents : MM. Rames, Bergougnioux, Girma, Dols, lieutenants Tourné et de Chomereau, Billières, Crudy, Daymard, Depeyre, Albe, Viguié, Gary.

M. le Président fait savoir que la Société préhistorique de France a envoyé: l° le texte du projet de loi déposé sur le bureau de la Chaeiibre le 25 octobre 1910 relatif aux fouilles archéologiques; 2° les protestations adressées à cette Société contre ledit projet, parmi lesquelles est celle que notre président a envoyée en notre nom.

Il signale dans la Révue de l' Agenais la suite de l'article de M. Momméja sur les plaques de foyer ; une des plaques étudiées se trouvait dans


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l'ancien collège Pélegri de Montauban, succursale du collège Saint-Nicolas de Pélegri de Cahors.

M. le Secrétaire général dépose de nombreux bulletins régionaux. Il relève dans le dernier numéro de celui de la Société historique et archéologique du Limousin divers articles renfermant des détails intéressants pour notre pays. : travail de M. A. Maurat sur la période révolutionnaire où il est question de notre compatriote le conventionnel Etienne Clédel qui fut envoyé en brumaire de l'an III clans les départements de la Vienne, de la Haute Vienne et de la Creuse; étude de M. Delage sur le savant Marc-Antoine Muret, qui fut en relations avec notre Olivier de Magny; article de M. A. Petit sur un abbé de Bénévent en Limousin au XVIe siècle, dont les réformes mal accueillies amenèrent l'intervention d'un abbé de Souillac, François de la Saigne. Il signale dans l'Illustration du 8 février 1911 une petite statistique sur la population active de la France où l'on voit que dans le Lot, parmi ceux qui exercent une profession,740/0 appartiennent a l'agriculture ; enfin dans la Revue provinciale au 1er février 1911, une conférence que notre collègue le lieutenant Tourné a faite aux officiers et sous-officiers du régiment sur les Libertés communales de Cahors.

M. le Président donne lecture d'un passage curieux de la petite notice nécrologique consacrée par M. l'abbé E. Sol à son prédécesseur dans la cure de Bégoux, M. l'abbé Castanié, qui fut intimement lié à la famille de Gambetta et dont l'intervention aurait eu une grande influence sur l'avenir du jeune Léon que son père destinait à continuer son commerce. M. l'abbé Sol a envoyé un travail sur l'organisation des Archives nationales qui renferme, réunis en quelques pages, de nombreux et précieux renseignements pour ceux qui voudront faire des recherches.

M. le Président rappelle que sur les instances de M. le sénateur Rey, toujours dévoué à nos anciens monuments, le sous-secrétaire d'Etat aux Beaux-Arts a alloué pour l'exercice de l912 une somme considérable qui devra être employée à commencer la restauration du cloître de la cathédrale.

M. Albe continue la lecture de sa monographie de Carennac et M. Combes de ses extraits des registres municipaux de Cahors pendant la période révolutionnaire, du 1er janvier au 12 mars 1797.


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Séance du 9 mars 1911

Présidence de M. PAUMES, président semestriel

Étaient présents : MM. Albe, Bergougnioux, Billières, Crudy, Daymard, Depeyre, Dols, Gary, Girma, Marre, Rames,Tournié, Saint-Éloi, Viguié.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

M. le Secrétaire général dépose les publications reçues. Il signale, dans l'Histoire de la Ville et du Comté de Corbie (des origines à 1400), par dom Grenier, que vient de publier luxueusement la Société des Antiquaires de Picardie, quelque menus faits intéressant notre Quercy. En 1194, Witichind ou Widekin, abbé de Corbie d'Or, en Saxe, fit le pélerinage de Roc-Amadour... En 1231-1232,l'abbaye de Corbie, en Picardie, était fortement obérée, par suite d'emprunts considérables que ses abbés avaient faits « à divers marchands du Quercy ». Comme on le voit par ce nouvel exemple, les banquiers Caorsins avaient des clients au loin, et des clients de marque.

« Lou Gorrit del Quercy », Société amicale des originaires de l'arrondissement de Gourdon résidant à Paris, nous communique une délibération par laquelle il s'associe aux justes et légitimes protestations émises par la Société des « Études du Lot » contre le projet de loi qui voudrait faire de Montauban le chef-lieu d'une nouvelle circonscription électorale formée par le Lot et le Tarn-et-Garonne ; il estime que ce choix est regrettable ; il émet le voeu, au nom des 3000 originaires de l'arrondissement de Gourdon à Paris, que le chef-lieu de la nouvelle circonscription, si elle est créée, soit fixée à Cahors qui en est le centre au point de vue topographique et pour les facilités de communication ; enfin, il félicite la Société des Etudes de l'initiative qu'elle a prise, en vue de faire prévaloir les droits économiques et historiques de Cahors à rester la capitale du Quercy.

La Société des Etudes offre « ol Gorrit del Quercy » ses meilleurs remerciments.

M. le sénateur Rey communique à la Société une note sur la restauration du Palais des Papes, à Avignon, bâti par Clément VI qui fut, après Benoit XII, le successeur de notre compatriote Jean XXII. De magnifiques fresques ont été mises à jour et, dans quelques années, ce monument, un des plus beaux que nous ait laissés, le moyen âge, aura repris au moins une partie de sa primitive splendeur.


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La section littéraire de l'Académie des sciences, Belles-Lettres et Arts de La Rochelle met au concours, pour l91l, une Ode en l'honneur du célèbre maire Jean Guiton, à l'occasion de l'érection d'un monument destiné à perpétuer le souvenir du héros du siège de 1628. Un prix de 150 fr. sera décerné à l'auteur de la meilleure composition. Les manuscrits doivent être déposés avant le 30 juin 1911 au siège de la Société Littéraire, Bibliothèque municipale, rue Gargoulleau, à La Rochelle, et porter une devise qui sera reproduite sur l'enveloppe fermée d'une lettre contenant le nom et l'adresse du concurrent.

M. Albe communique à la Société, de la part de notre confrère M.l'abbé

Taillefer, l'acte de fondation d'une chapellenie de Saint-Michel, en l'église

St-Hilaire de Tourniac (13 mai 1670), par Manuel Ladoux, bourgeois

dudit lieu. Ce document est précédé d'une note de M. Taillefer sur les

chapellenies.

L'église de Tourniac existe encore. Elle est située dans la commune de Saux, canton de Monlcuq.

M. Albe nous donne la fin de ses notes sur le Prieuré de Carennac.

M. Depeyre continue la lecture de son étude sur Joachim Murat, roi de Naples, à propos de la publication du commandant Weil.

M. Paumes lit un travail très intéressant de notre confrère M. l'abbé Sol sur « le Dépôt des Archives nationales, aperçu historique ».

Séance du 20 mars 1911 Présidence de PAUMES, président semestriel

Etaient présents : MM. Albe,Bergougnioux, de Chomereau de St-André, Crudy, Daymard, Gary, Girma, Grangié, Marre, Rames, Tourné, St-Eloi, Viguié.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

M. le secrétaire général dépose les publications reçues. Il signale dans le tome Ve des Lettres et documents pour servir à l'histoire de Joachim Murat, qui vient de paraître.

1° Page 220, une note d'Agar, comte de Mosbourg, ministre plénipotentiaire du Grand-Duc de Berg, qui raconte, de façon bien vivante, une audience que lui avait accordée l'Empereur, et où le caractère de Napoléon, de Murat et d'Agar lui-même s'accuse en quelques traits d'une vérité saisissante ;

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2° P. 268, une lettre de Joachim Murat à son frère André où il déclare qu'il « ne veut absolument pas que personne de sa famille s'adresse directement ni indirectement aux ministres ou autres fonctionnaires publics pour leur faire des recommandations. » Ils diront « avec politesse à tous ceux qui s'adresseront à eux pour en obtenir qu'ils ne peuvent rien faire par eux-mêmes et lui feront passer la demande.

M. Crudy annonce l'apparition du 9° fascicule, 2e partie des lettres communes de Jean XXII, analysées par G. Mollat, d'après les registres dits d'Avignon et du Vatican, et la publication, par un savant allemand, le Dr Emile Goller, des registres des recettes de la chambre apostolique sons Jean XXII. Cet ouvrage est précédé d'une introduction où l'auteur venge, une fois de plus, le grand pape cadurcien du reproche d'avarice qu'on lui a trop souvent adressé. Jean XXII avait bien un trésor privé, alimenté par sa fortune propre avant son élection et par des dons considérables reçus par lui à titre personnel, mais il y puisait très largement pour les besoins généraux de l'Eglise.

M. Paumes donne quelques détails sur la production des noix dans le Lot et le dénoisillage, industrie encore prospère dans l'arrondissement de Gourdon et à Gourdon surtout, mais qui tend à dépérir. Ces renseignements sont tirés d'un article de Mme Louise L. Zeys, publié dans la Revue des Deux-Mondes, 1er mars 1911.

A propos des petites industries locales, M. Daymard nous apprend que les chalumeaux de paille de seigle dont on se sert à Paris et ailleurs,pour humer les boissons glacées, sont fabriqués, pour une grande part, à Saint-Pierre-Toirac, où la culture du seigle a remplacé celle du chanvre, aujourd'hui à peu près abandonnée.

Un industriel de Cahors, M. Bonnet, occupe de nombreuses ouvrières, en ville et surtout dans les campagnes, à la fabrication de vêtements féminins en tricot. Il vient aussi d'installer, dans son usine du faubourg St-Georges, des machines destinées à la fabrication de robinets en bois.

Les journaux ont annoncé qu'on avait trouvé à Gagnac, des squelettes ayant pour cercueils des troncs d'arbres. La Société des Etudes désirerait avoir des renseignements précis sur cette découverte.

M. le chanoine Gary communique un article de l'Express du Midi, où M. Armand Praviel résume les leçons que M. le professeur Graillot,de la faculté des Lettres de Toulouse, vient de consacrer aux « Tombeaux des Papes d'Avignon ». Un des plus beaux, parmi ces monuments funéraires, était celui de notre compatriote Jean XXII, à Notre-Dame des Doms, en


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Avignon. Il existe encore aujourd'hui, mais mutilé, et une restauration tardive permet à peine de deviner ce qu'il put être primitivement.

M. Albe établit, avec documents à l'appui, que le premier évèque de Montauban s'appelait Bertrand de Vistours et non pas Bertrand du Puy, comme on l'a cru jusqu'ici. Il était originaire de l'Albigeois. Il fait connaître également qu'Antoine deLuzech était archiprètre de Cordes, avant d'être nommé évêque de Cahors et qu'il conserva ce bénéfice après son élévation à l'épiscopat.

A la réunion du « Syndicat d'initiative » qui eut lieu à Figeac le 12 mars, quelques membres de la Société des Etudes se sont rencontrés avec la Société des Amis du Vieux-Figeac et ont inauguré des rapports qui se resserreront, espérons-le, et ne pourront qu'être profitables aux deux Sociétés.

M. Albe communique une note de M. l'abbé Taillefer sur les Coutumes de Montcuq, à propos d'une copie du XVe siècle offerte à la Société par l'intermédiaire de M. l'abbé Viguié. Cette note, très détaillée et fort intéressante, servira d'introduction au texte des Coutumes de Montcuq, déjà publié par M. E. Dufour, mais que la Société prie M. Taillefer de rétablir de façon plus exacte. Ce travail paraîtra dans le Bulletin.

M. Lucie, publiciste, présenté par MM. Depeyre et Dols et M. Marty, banquier à Figeac, présenté par MM. Rames et Aymard, demandent à faire partie de la Société en qualité de membres correspondants.



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Analyse des Registres Municipaux de la commune de Cahors

(Suite)

3° prairial an II (18 juin 1794). — COMITÉ DE LA GARDE NATIONALE. — Le service étant très, lent depuis qu'il est fait par compagnies en entier, les capitaines sont invités à tenir la main à ce que l'activité et l'exactitude soient rétablies.

On décide d'établir un petit corps-de-garde à côté de la porte du « Château national ». L'accusateur public en sera prévenu.

Le trésorier est autorisé à payer au citoyen Delpech la somme de 12 livres pour des ouvrages sur la manoeuvre du canon, qu'il a fait venir de Toulouse.

Il sera payé aux porteurs de billets quinze jours de service, suivant le traitement fixé.

Chaque capitaine gardera désormais les amendes de sa compagnie et en rendra compte.

La municipalité est priée d'alléger le service pour deux mois, à cause de la récolte à recueillir.

Le Comité adopte les conclusions du rapport du chef de légion sur l'organisation des musiciens. Le citoyen Lange est nommé chef de musique, le citoyen Vayssade sous-chef et le citoyen Armand, caporal. Les musiciens devront se trouver à 8 heures et demie précises sur la place d'armes; les capitaines sont invités à y faire trouver leurs hommes pour leur faire filer la parade et se rendre au poste de la commune.

La municipalité est priée de statuer sur le traitement des instructeurs des jeunes élèves.

Ier messidor an II (19 juin 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Les citoyens Lacroix et Lafage, officiers municipaux, dénoncent la femme de Verdier, boulanger, comme ayant tenu devant des témoins, des propos injurieux pour le Corps municipal, disant que ses membres devaient être bien payés, que certains d'entre eux n'avaient pas de pain avant d'y entrer et que maintenant tout allait bien chez eux. Le Corps municipal renvoie cette femme devant la police correctionnelle et, en attendant, la consigne dans la Conciergerie.

Le maire est autorisé à prêter 50 livres sur les fonds de la commune au citoyen Renaldy, commissaire de la commission des subsistances, qui en a besoin pour se rendre à Montauban.


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Prestation de serment du citoyen Barré, autorisé par le Conseil général à remplacer provisoirement le citoyen Cangardel, tambour. Il jure de « maintenir de tout son pouvoir la liberté, l'égalité, la République française une et indivisible, ou de mourir à son poste en les défendant, comme de remplir avec fidélité, exactitude, zèle et courage les devoirs de tambour ».

Le citoyen Lafage, officier municipal, rapporte que la femme Gouget a tenu devant témoins des propos outrageants contre la municipalité. Faisant allusion au citoyen Lacroix et à lui, elle s'indignait que des cordonniers eussent fait mettre sa soeur en réclusion; elle ajoutait que, avec leurs mains graissées de poix, ils prenaient ce qu'ils voulaient à la Maison commune, qu'on les pendrait, ainsi que les autres officiers municipaux. Le Corps municipal renvoie la femme Gouget devant la police correctionnelle et, par mesure de sûreté, la consigne à la Conciergerie.

4 messidor an II (22 juin 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Un membre du comité de surveillance de la société montagnarde, chargé de relever les infractions à la loi sur le maximum, dénonce le citoyen Méric, cordonnier, pour avoir enfreint la loi et le citoyen Francoual, de Peyrilles, pour n'avoir pas dénoncé la contravention.

Le Corps municipal condamne solidairement les délinquants à une amende double de la valeur des souliers dont s'agit, la moitié de cette amende applicable au dénonciateur; déclare Méric et Francoual suspects à cet égard seulement et les met en surveillance chacun dans sa demeure.

Prestation de serment du citoyen Fauré, de Castelnau, âgé de 56 ans, qui a servi 42 ans comme soldat, et qui est admis à remplacer un des soldats de la commune, réformé.

6 messidor an II (24 juin 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Le citoyen Sallèles, député à la Convention, en congé, ci-devant receveur des consignations et commissaire aux saisies réelles, se présente pour rendre ses comptes en ces deux dernières qualités, conformément à la loi du 16 germinal dernier. Le maire et un officier municipal sont chargés de recevoir lesdits comptes, de les vérifier et de faire un rapport écrit dans un délai de deux mois.

Le directoire du district écrit de nouvelles instances pour que le travail sur l'emprunt forcé lui soit envoyé sous 24 heures, faute de quoi il ne pourra se dispenser de sévir contre la municipalité. — Le Corps


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municipal, attendu que le citoyen Dazemard, un de ses membres (non présent à la séance), est chargé de ce travail, qu'il a dit verbalement avoir fait, le requiert, sous sa responsabilité la plus rigoureuse, de déposer son rapport.

7 messidor an II (25 juin 1794). — Le CORPS MUNICIPAL, sur la demande du citoyen Biloin, ingénieur ordinaire, charge le maire de viser les états des dépenses qui seront faites pour les plans, nivellements, profils, sondes et autres opérations relatives à la construction du nouveau pont.

Le directoire du district demande, conformément à une décision de l'administration du département, un état de la population agricole de chaque commune. Deux officiers municipaux sont chargés de faire ce travail, avec l'aide de citoyens pris dans les différents hameaux de la commune.

Les commissaires nommés le 23 prairial font leur rapport, duquel il résulte que la plupart des seigles et orges arrivent à maturité. La population manquant presque absolument de subsistances, les propriétaires, fermiers et colons sont invités, sous leur responsabilité la plus Vigoureuse, à récolter le plus tôt possible les seigles, orges et autres denrées précoces, et à en faire la déclaration sous 24 heures, sous peine d'être réputés suspects. Ceux qui ont cultivé des fèves, pois, haricots, choux, salades, fruits, et généralement tout ce qui peut servir d'aliment, sont tenus sous la même peine de mettre en vente ces denrées tous les matins sur la place de la Révolution.

(Copie d'un arrêté du Comité de sûreté générale de la Convention, ordonnant la mise en liberté immédiate du citoyen Sartre, ci-devant procureur général syndic du département du Lot, qui a fourni sa justification.)

17 messidor an II (5 juillet 1794). Le CORPS MUNICIPAL arrête que l'enfant de la citoyenne Filliol sera nourri aux frais de la République, sa mère ne pouvant le nourrir.

Le citoyen Albaniac, de Mercuès, déclare devoir à feu le citoyen Burgère, de Cahors, une rente constituée de 50 livres, au capital de 1.000 livres.

2/ messidor an II (9 juillet 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Copie d'un arrêté du directoire du district conforme à celui du représentant du peuple Romme, portant réquisition générale des fers, fontes, bois de charpente et autres matériaux des châteaux démolis. Le District


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nomme des commissaires pour faire le recensement de ces objets et les invite à comprendre dans le tableau qu'ils en feront les grilles et vieux fers qui pourraient encore se trouver dans les ci-devant églises.

Les auteurs et complices d'un vol de gerbes de blé et de pampres de vigne, accompli la nuit dernière, sont renvoyé» devant le juge de paix, officier de police.

Le citoyen Martin, juge de paix des sections de Valendres et du Pont-Vieux, vient déclarer que, ayant été chargé en 1779 par plusieurs personnes, cohéritières pour une partie de la succession de feue Chevaille d'Arcambal, de Cahors, il ne sait ce que ces personnes sont devenues depuis la Révolution et que toutes ses recherches pour les retrouver ont été inutiles. Bien qu'elles ne soient pas comprises dans la liste générale des émigrés, le citoyen Martin, craignant qu'elles aient encouru ou encourent à l'avenir par quelque autre cause la confiscation de leurs biens, déclare avoir entre ses mains, pour leur compte, la somme de 719 livres 13 sols, représentant des intérêts de sommes dues, l'une par Cagnac, émigré, l'autre par Durfort, aussi émigré.

Copie d'un acte de baptême que le citoyen Rey, directeur des subsistances des troupes en marche et des transports militaires, fait enregistrer, afin qu'il puisse lui en être délivré des collationnés.

22 messidor an II (10 juillet 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Des réquisitions sont adressées à 59 citoyens restant de la première levée.

Le Corps municipal arrête que, sauf approbation du Conseil général, la citoyenne veuve Dellard, qui ne peut nourrir son enfant sans secours, sera comprise au tableau des nourrices des enfants qui sont à la charge de la République, et payée comme telle.

Un officier municipal est chargé de recevoir et quittancer une somme de 3000 livres avancée à la commune par le District et remboursable sur les premiers produits du salpêtre.

24 messidor an II (12 juillet 1794). — CORPS MUNICIPAL. - Une plainte du citoyen Hudry, surveillant des prisonniers espagnols, concernant des vols commis par certains de ces prisonniers, est renvoyée au juge de paix, officier de police.

Le citoyen Barthes, tailleur, se déclare débiteur d'une rente constituée au capital de 2.000 livres en faveur de Leblanc St-Fleurien neveu, qui est en réclusion.

Le citoyen Alquié, ancien trésorier de la ci-devant chapelle de l'Ado-


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ration, remet au Corps municipal 128 livres 15 sols, reste des fonds de ladite chapelle, avec les mandats tirés sur lui par les anciens marguilliers delà ci-devant cathédrale, qui justifient l'exactitude de ce reliquat ; plus deux mandats qu'il n'a pu recouvrer; enfin des papiers relatifs à ladite chapelle. Le Corps municipal arrête que le tout sera remis au District.

Vu les lettres par lesquelles le District affirme ne pouvoir alimenter la commune sans les ressources qu'offrent les seigles et les orges déjà récoltés, le Corps municipal adresse aux particuliers qui possèdent ces grains des réquisitions pour qu'il en soit versé 500 quintaux sans délai dans le grenier du dépôt du district.

Le citoyen Desplas, commissaire du district, demande des charrettes et des sacs pour le transport de 800 quintaux de grain. Il est arrêté que toutes les charrettes de la commune seront requises et que le District sera invité à faire aussi des réquisitions dans les communes voisines, celle de Cahors ne pouvant suffire à ce transport.

Attendu qu'il est très urgent de presser les opérations préparatoires à la construction du nouveau pont, le Corps municipal charge le citoyen Brives aîné de s'entendre pour cela avec les ingénieurs. Le citoyen Rouziers est invité à surveiller de, la manière la plus rigoureuse tous les agents chargés de ce travail et à dénoncer, « avec le zèle républicain qui l'anime », quiconque « se permettrait la plus petite des négligences ».

Le Corps municipal choisit deux commissaires qui sont chargés de vérifier, de concert avec ceux nommés par le bureau d'administration de l'hôpital, les comptes du citoyen Tailhade, officier municipal et trésorier dudit bureau.

Une députation de la Société républicaine et montagnarde vient présenter le projet proposé hier soir par le comité de surveillance pour la fête du 14 juillet. Il lui est répondu que ce projet est déjà adopté par le Corps municipal au point qu'on a fait ce matin une pétition au département pour obtenir les 30 livres de poudre nécessaires. Le Corps municipal arrête en conséquence :

1. La fête sera annoncée la veille par 3 coups de canon tirés devant la Maison commune.

2. La générale sera battue à 4 heures du matin et la garde nationale sera rendue à 5 heures sur la place d'armes.


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3. La « représentation » de la Bastille sera placée sur un amphithéâtre au milieu de la place Gaillard.

4. Les autorités, à la tète de la garde nationale, se rendront à la place Gaillard, où 3 coups de canon seront tirés à leur arrivée.

5. Le monument de la Bastille sera détruit par les sapeurs et remplacé par le drapeau tricolore, des piques et des bonnets de la liberté, avec cette inscription : « C'est en détruisant ce monument horrible que le peuple français a reconquis la liberté le 14 juillet 1789. »

6. Tous les citoyens présents renouvelleront le serment de vivre libres ou de mourir, et un orateur prononcera un discours.

7. Le peuple sera invité à se rendre, à 5 heures du soir, au temple dédié à l'Etre suprême, pour y entendre des discours analogues à la fête. Le soir, il y aura illumination générale.

Le citoyen Lacroix est nommé commissaire à l'effet de faire rassembler les jeunes citoyens de la première levée qui viennent d'être requis, et de veiller aux préparatifs de leur séjour à Cahors et de leur départ.

Le citoyen Disses, officier municipal, remet 7 billets de diverses valeurs, trouvés chez le nommé Bergougnoux, prêtre reclus au séminaire, lors de la visite faite à cet établissement par le citoyen Dissès et le citoyen Guyot, membre du comité de surveillance révolutionnaire, lesquels billets avaient été omis dans le rapport.

27 messidor an II (15 juillet 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Le citoyen Fournié, capitaine commandant le poste de la commune, rapporte que, le 25 au soir, faisant sa ronde dans la ruelle dite du Four de Celse, il fut.assailli par le chien du citoyen Raymond Cougot, boulanger. Ce dernier reçut mal les observations qu'il lui fit et le traita d'insolent. — Le Corps municipal, attendu que l'affaire serait de la compétence de la police correctionnelle, si le citoyen Fournié n'avait la générosité de renoncer à l'action que la loi lui donne, invite le citoyen Cougot à être plus circonspect à l'avenir dans ses propos et à tenir son chien enfermé.

Vu des lettres du Département et un arrêté du District portant que la municipalité est tenue de terminer dans une décade les comptes des fournitures de grains faites en 1792 et 1793, le Corps municipal arrête que les officiers municipaux, actuels ou anciens, qui ont opéré les distributions de grains, en rendront compte dans huit jours au plus tard.

Le citoyen Hudry, surveillant des prisonniers espagnols, dénonce la nommée Toubine, demeurant à La Barre, comme ayant chez elle


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deux filles de mauvaise vie ; il ajoute que c'est pour « soutenir ces coquines » que les Espagnols commettent les vols qui leur sont reprochés. — Les trois femmes, mandées et interrogées, se retranchent derrière des dénégations vagues. Le Corps municipal, jugeant qu'il y a « suspicion raisonnable de mauvaise conduite quant au moeurs et même autrement », arrête que ces trois personnes seront consignées dans la conciergerie de la Maison commune et dénoncées au juge de paix, officier de police.

29 messidor an II (17 juillet 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Conformément à une lettre de l'agent national du district, les femmes désignées au précédent arrêté sont renvoyées devant le juge de paix, officier de police.

Les commissaires de police sont invités à faire conduire à l'hôpital général tous les cochons qui seraient trouvés vaguant dans les rues, places et autres lieux publics, et a dénoncer les propriétaires de ces animaux.

Le citoyen Ouillié père déclare devoir une somme de 1000 livres au citoyen Regour-Vaxis.

1er thermidor an II (19 juillet 1794). — CORPS MUNICIPAL. — « Il a été remarqué avec la plus grande surprise et avec la plus vive douleur » que, bien que la plupart des blés, orges, seigles, etc., soient déjà récoltés, la distribution de pain faite aujourd'hui dans les sections a été plus forte que jamais, au point qu'il a manqué 20 quintaux de pain. Le Corps municipal, persuadé que cette augmentation tient à ce que des particuliers négligent de préparer leur première récolte et à ce que d'autres, bien que possédant des grains, se permettent d'aller prendre du pain dans les sections, arrête que les commissaires de police, avec des officiers municipaux, feront, dans les fours et moulins, le recensement des individus qui font moudre des grains et cuire du pain, pour tâcher de découvrir ceux qui prennent indûment du pain aux sections et les dénoncer. Le présent arrêté sera adressé au District pour le convaincre des soins que prend la municipalité pour économiser les subsistances qu'il fait distribuer.

3 thermidor an II (21 juillet 1794). — LE CORPS MUNICIPAL, sur la demande d'une commission de la Société républicaine et montagnarde, arrête :

1. Trois officier municipaux sont chargés de visiter les boutiques et de vérifier si les marchands ont apposé les tableaux de leurs marchan-


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dises dans des endroits où ils puissent être lus commodément, afin d'assurer l'exécution des « salutaires lois du maximum » ; les contrevenants seront dénoncés et punis.

2. Il est défendu plus que jamais aux propriétaires, fermiers ou jardiniers de vendre des denrées dans leurs maisons ou jardins ; tous les comestibles devront être portés au marché sur la place de la Révolution, à peine de confiscation et autres. Les bons citoyens sont invités à dénoncer les contrevenants, vendeurs et acheteurs, ainsi que les marchands, ouvriers, journaliers, et généralement tous ceux qui enfreindraient les lois.

3. Les bons citoyens sont de plus invités à surveiller les gens qui se précipitent sur les comestibles portés au marché, soit parceque cette précipation favorise les contraventions, soit parcequ'elle enlève aux citoyens le moyen de s'approvisionner, enfin parce qu'il est nécessaire que les citoyens de la campagne puissent vendre tranquillement leurs denrées. Les dénonciateurs sur cet objet seront bien accueillis par les autorités constituées.

4. Le présent arrêté sera publié en la forme ordinaire.

4 thermidor an II (22 juillet 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Un courrier extraordinaire apporte de la part du maire de Toulouse un arrêté pris par le représentant du peuple Chaudron-Rousseau, en séance à Foix, portant ordre de retenir jusqu'à nouvel ordre, dans la commune où ils se trouvent actuellement, les citoyens de Mirepoix envoyés au tribunal révolutionnaire; on devra en outre les interroger sur le traitement qu'ils éprouvent, les frais de route ou autres qu'on exige d'eux, la manière dont ils voyagent, enfin s'informer s'ils sont traités avec humanité. Cet ordre paraît concerner dix hommes arrivés hier soir et qui sont conduits au tribunal révolutionnaire, l'un en vertu d'une réquisition du citoyen Fouquier (1), accusateur public dudit tribunal, les autres sur une réquisition du comité de Pamiers, par ordre du comité de sûreté générale. Ils ont passé la nuit à la conciergerie de la Maison commune, où ils ont été gardés à vue.

Le Corps municipal les interroge. Le premier, nommé Guillaume Malroc, dit Lafage, propriétaire cultivateur à Mirepoix, et qui a été, jusqu'à la Révolution, auditeur des comptes à la ci-devant chambre des comptes de Montpellier, dit avoir été conduit de Pamiers à Tou(1)

Tou(1)


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louse avec huit de ses compagnons ; quoiqu'il n'y ait que 8 lieues du pays, sous prétexte qu'on avait employé trois journées, on exigea d'eux 1062 livres (1), pour leur dépense, celle des 6 gendarmes, et la charrette traînée par 3 chevaux. Les gendarmes disaient avoir ordre de les enchaîner, mais ne le firent pas. De Toulouse à Cahors, ils ont payé environ 400 livres ; à Grisolles, ils ont loué une voiture pour aller jusqu'à Paris, moyennant 3000 livres (2). Dans ce même lieu ils payèrent aux gendarmes 25 livres pour frais de garde, plus 30 livres pour frais de la voiture jusqu'à Grisolles. Ils n'ont jamais eu à se. plaindre de ceux qui les ont conduits ou gardés, gendarmes ou autres.

Cette déclaration est confimée par les autres prisonniers de Mirepoix, savoir : Rivel, fils du commis au bureau des émigrés; Rouvairollis, propriétaire cultivateur; Simone, ancien capitaine d'infanterie; Dénat, ci-devant auditeur des comptes de Mirepoix; Montfaucon, cidevant capitaine de grenadiers; Rivel,-ci-devant homme d'affaires du seigneur de Mirepoix ; Dufrêne, ci-devant notaire et chargé d'affaires du même seigneur; Vidalat, rentier. Tous affirment que c'est de leur plein gré qu'ils ont fait manger les gendarmes avec eux et à leurs frais.

Le dernier prisonnier, arrêté par ordre de Fouquier-Tinville sous la prévention « de propos tendant à l'avilissement de la représentation nationale », se nomme Paul Barthes, dit Labiche, journalier à Castelnaudary; il ne fait route avec les autres que depuis Toulouse et ne se plaint de personne.

Le Corps municipal, considérant que Barthes ne peut être compris au nombre des individus dont il est question dans l'arrêté de Chaudron-Rousseau, arrête qu'il continuera sa route vers Paris et que copie du présent sera adressée au maire de Toulouse (3).

7 thermidor an II (25 juillet 1794). — Le CORPS MUNICIPAL arrête que, sur les 20 déserteurs espagnols qui doivent rester dans cette commune, 12 seront occupés à brûler les herbes inutiles, pour la fabrication du salpêtre. Ils travailleront dans les fonds qui n'appartiennent à personne, les propriétaires des autres terres étant invités à faire brûler ces

(1) 1062 livres en assignats valaient alors 415 livres en numéraire.

(2) 1170 livres en numéraire,

(3) Barthes ne devait pas être encore arrivé à Paris le 9 thermidor, jour de la chute de Robespierre, et échappa sans doute à la guillotine. — On peut se demander si l'ordre donné par Chaudron-Rousseau a quelque rapport avee les événements qui, à ce moment, se préparaient à Paris


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herbes chez eux, et à porter les cendres aux ateliers à salpêtre, conformément à la loi du 29 germinal.

9 thermidor an II (27 juillet 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Trois revendeuses, la Longairoune mère, sa fille, et la Blondine, sont accusées d'avoir acheté, au lieu dit les Durands, plusieurs comportes de pêches que le citoyen Derrupé, de Luzech, et son domestique Caminade, portaient à Cahors pour les vendre. Le prix fut fait à 10 sols la douzaine. Le Corps municipal, attendu que les ordonnances de police défendent d'acheter les denrées ailleurs qu'au marché, mais que les citoyens Derrupé et Caminade pouvaient ignorer les ordonnances récentes à ce sujet, les met hors de cause; condamne les trois revendeuses à 8 jours de prison par forme de correction, et ordonne que les pêches seront vendues au marché au profit du citoyen Derrupé. Le présent arrêté sera publié et affiché.

Le Corps municipal retire la réquisition faite au citoyen Mercier pour la levée en masse, ledit Mercier étant employé aux réquisitions de vivres.

La plupart des aubergistes et cabaretiers n'exécutant pas la loi qui leur ordonne d'inscrire ceux qui logent chez eux, sur un registre qui doit être présenté chaque matin à la Maison commune, le Corps municipal leur rappelle leurs obligations et les peines portées dans la loi en cas de contravention.

Même jour. — Le CORPS MUNICIPAL charge deux de ses membres de dresser, dans le délai de trois jours, l'état des cloches qui ont été descendues des clochers des ci-devant églises de la commune et remises au District.

10 thermidor an II (28 juillet 1794). — CORPS MUNICIPAL.— Dans la nuit, deux volontaires de Thédirac qui se rendaient au bureau de la guerre, à Cahors, ont été attaqués sur la route ; l'un, nommé Guillaume Bessières, a été tué ; l'autre, Antoine Dantony, grièvement blessé, a été transporté à l'hôpital. Des déserteurs espagnols, soupçonnés de ce crime, ont été arrêtés. Un détachement de la garde nationale, précédé d'officiers municipaux et de notables, a été chercher le corps de Bessières hors des limites de la commune et l'a conduit à la Maison commune, où il a été exposé a la vénération du public. A 3 heures, le Corps municipal s'étant rendu au temple dédié à l'Être suprême, pour la fête civique du décadi, on a annoncé au peuple le sinistre événement ; il a été donné lecture du rapport de David sur les


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honneurs du Panthéon à décerner aux jeunes Barra et Viala (1), imprimé par ordre de la Convention, et le citoyen Lagasquie, agent national du district, a prononcé un discours plein d'énergie sur ce sujet. A 6 heures, les autorités constituées, la Société républicaine et montagnarde et la garde nationale se sont réunies sur la place de la Révolution. Le corps de Bessières a été porté par des gardes nationaux, et accompagné par un membre de l'administration du département, l'agent national du district, un membre du comité révolutionnaire et l'agent militaire supérieur du district, portant chacun un ruban tricolore. La musique a joué un air guerrier qui a pour refrain : « Mourir pour la patrie, c'est le sort le plus doux, le plus digne d'envie » (2). Le corps a été porté au cimetière au milieu de la garde nationale et inhumé après un autre discours de l'agent national du district (3).

12 thermidor an II (30 juillet 1794).— CORPS MUNICIPAL. — Conformément à un arrêté du Comité de Salut public, tendant à empêcher le trafic sur les espèces d'or et d'argent qui appartiennent aux prisonniers de guerre, le Corps municipal nomme des commissaires chargés de faire verser dans les caisses nationales tout le numéraire métallique que possèdent les prisonniers de guerre réunis à Cahors et d'en rembourser le montant auxdits prisonniers en assignats.

La femme Alazard, du faubourg « ci-devant St-Georges », qui a été prendre du pain à sa section, lorsque, depuis plusieurs jours, elle avait chez elle cinq quartes de blé, est condamnée à huit jours de prison. Son

(1) Barra, jeune tambour, entouré par les Vendéens et sommé de crier : Vive Louis XVIII, répondit : Vive la République ! et tomba percé de coups. — Viala, enfant de 13 ans, fut tué par les insurgés royalistes du Midi, au moment où il tentait de couper le câble d'un ponton qui devait leur servir pour l'attaque d'Avignon.

(2) Ce refrain, dû à Rouget de l'Isle, a été intercalé par Alexandre Dumas et Maquet dans un chant connu sous le nom de Chant des Girondins, qui fait partie de leur drame le Chevalier de Maison-Rouge, représenté en 1847.

(3) A Saint-Vincent-Rive-d'Olt, canton de Luzech, une pierre encastrée dans la façade d'une maison porte, grossièrement tracée, une tête d homme coiffée du bonnet phrygien, avec cette inscription : Aux mânes de 1793. — Gailh"" Bessières, martir de la liberté. On raconte, dans le pays, au sujet de ce personnage, une légende semblable à l'histoire du jeune Barra, que nous mentionnons ci-dessus. N'y aurait-il pas confusion entre les deux récits? Le volontaire assassiné en venant de Thédirac était peut-être né à Saint-Vincent, où les Bessières sont assez nombreux.


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mari est requis de remettre dans le grenier du district quatre des cinq quartes de blé qu'il possède, lesquelles lui seront payées au taux du maximum.

14 thermidor an II (1er août 1794). — COMITÉ DE LA GARDE NATIONALE. — Le Comité décide l'adoption, et la transcription sur le registre, d'un ordre de sûreté générale du chef de légion, commandant delà place de Cahors, pris le 11 du courant, à l'occasion de l'assassinat commis par trois déserteurs espagnols détenus dans cette commune, sur deux volontaires allant aux frontières, lequel ordre a reçu l'approbation de la municipalité, avec une modification.

Cet ordre défend aux prisonniers de guerre ou déserteurs, allemands ou espagnols, de vaguer dans l'enceinte de la commune sans la permission du commissaire surveillant des maisons où ils sont détenus, sous peine d'être conduits dans les prisons de la commune. — Il ne pourra sortir de ces maisons de détention que des approvisionneurs, dont le nombre sera fixé d'après celui des détenus; ces approvisionneurs ne pourront circuler en ville que de 5 heures du matin à 8 heures du soir, sous peine d'arrestation. — Tout factionnaire, commandant, ou autre, qui se prêterait à l'inexécution de cet ordre, serait;poursuivi comme suspect.

Le corps municipal, en approuvant cet ordre, ajoute que les citoyens qui voudront employer comme ouvriers lesdits déserteurs et prisonniers, devront se rendre garants de leur conduite.

Le Comité décide que le commandant du poste établi à la porte d'entrée des ci-devant chanoines réguliers, où sont détenus des Espagnols, aura la clef de ladite porte; la sentinelle arrêtera toute personne qui demanderait à communiquer avec les Espagnols, sous n'importe quel prétexte.

Le Comité envoie une commission prier la municipalité de prendre les mesures nécessaires pour la célébration d'une fête rappelant la journée mémorable du 10 août (vieux style), époque de l'acceptation de la constitution républicaine (1).

Le Comité charge les citoyens Delord et Brécy de choisir un tambour-major, en remplacement du citoyen Cazes, parti pour les frontières, et de présenter à la prochaine séance celui qu'ils auront choisi.

(1) Il s'agit de la Constitution dite de l'an II, dont l'acceptation par presque toutes les municipalités de France avait été célébrée à Paris par une grande fête le 10 août 1793. — Cette Constitution ne fut jamais appliquée.


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Retour de la commission envoyée à la municipalité. Celle-ci a pensé aussi à la fête du .10 août, un projet sera présenté par le Comité de surveillance, et la garde nationale pourra se rassembler, si elle le juge à propos.

On renvoie à la municipalité une plainte du citoyen Cahours, fusilier de garde la nuit dernière, au sujet d'insultes qu'il aurait reçues de la part du citoyen Latourmante, concierge de la maison commune.

Sur la proposition du président, il est décidé que chaque capitaine fera faire pour sa compagnie une oriflamme, dont le prix sera payé sur le produit des amendes ; ces oriflammes devront être prêtes pour la fête du 10 août.

Les « capitaines d'espérance », présents à la séance, sont invités à régler leurs compagnies de mieux en mieux et à les rassembler les tridi et septidi, comme cela fut arrêté le 15 floréal.

Les capitaines qui n'ont pas de tambour sont invités à s'en procurer au moins un chacun, afin que les gardes nationaux ne soient plus en retard, soit pour le service journalier, soit les jours de parade.

14 thermidor an II (1er août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — La citoyenne Rouquette, aubergiste, est condamnée à huit jours de prison pour avoir vendu à la citoyenne Lafage une mesure de son 4 livres ; en outre, elle remboursera ce qu'elle a perçu en trop.

La citoyenne Rouquette avait acquis ledit son de la veuve Bit, boulangère: comme tout le son des boulangers est requis pour les besoins de la République, la veuve Bit est condamnée à huit jours de prison et, de plus, ne participera plus aux distributions de grains qui sont faites aux boulangers.

16 thermidor an II (3 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Procèsverbal dressé par l'officier de police en permanence. — Vers minuit la femme de Périé, concierge à la maison de justice, est venue lui annoncer ce qui suit : Vers 8 heures du soir, les nommées Maynard et Pelras, ci-devant religieuses, et Marianne, leur servante, toutes trois détenues, lui avaient demandé à passer une heure au jardin, comme elles en ont l'autorisation écrite de l'agent national. La femme Périé les y introduisit et se retira pour surveiller les autres prisonniers, son mari étant occupé à la salle d'audience, où on jugeait un prévenu de meurtre. L'audience finie et tout le monde étant sorti, elle voulut faire rentrer les trois prévenues, mais ne les trouva plus dans le jardin : elles s'étaient sans doute évadées en sortant avec le public de l'audience. Elle


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alla aussitôt chez la citoyenne Pelras, parente de l'une des prévenues, qui était venue les voir dans la journée, et qui cependant commença par le nier ; mais elle fut ensuite forcée d'en convenir. La femme Périé vint alors à la Maison commune à la place de son mari, qui ne pouvait s'y transporter, ayant été frappé d'une attaque à l'idée de la responsabilité qui pesait sur lui. — Sur ce, l'officier de police a fait perquisitionner, mais sans succès, chez la fille Pelras et l'a consignée elle-même clans la maison d'arrêt de la Maison commune. Il a pris des mesures pour qu'on ne laissât sortir de la ville que des personnes connues. Un détachement de la garde nationale, avec 3 officiers municipaux, a été chargé de faire des recherches clans toute la commune; enfin, les gendarmes de Cahors étant occupés à conduire des prévenus au Tribunal révolutionnaire (1), ceux de Caussade et de Lauzerte ont été chargés de porter des lettres aux communes voisines, afin de faire arrêter les fugitives.— On n'a trouvé à la maison de justice aucune trace d'effraction.

Le Corps municipal condamne à huit jours de prison le citoyen Bras, fondeur, pour avoir voulu, en dehors de la place de la Révolution, acheter des oeufs à une femme de la campagne qui refusait de les lui vendre ; il a, de plus, injurié le citoyen Annès, surveillant, et pour ce fait, il est dénoncé au juge de paix, officier de police.

20 thermidor an II (3 août 1794). — CORPS MUNICIPAL — Procè-verbal. Le maire et les officiers municipaux se sont rendus à la maison de justice et ont constaté (ce qu'ils avaient déjà remarqué depuis longtemps et fait connaître à plusieurs reprises aux administrateurs du district) qu'il est impossible d'empècher les prévenus de communiquer entre eux ; que, sur les six pièces dont se compose la prison, deux sont inhabitables et ne devraient pas « être destinées à renfermer des individus à figure humaine » ; que tout d'ailleurs est dans un tel délabrement que toute réparation est impossible ; qu'il est indispensable de reconstruire au plus tôt cette prison ; et qu'on ne peut sans danger laisser dans un si petit espace les 120 ou 130 détenus qui s'y trouvent ordinairement.

Le Corps municipal charge les citoyens Palluel et Bonhomme de recevoir les grains de la commune, de les distribuer aux boulangers et

(1) Ce détail explique pourquoi on ne trouve trace que de cinq ou six exécutions capitales à Cahors pendant la Terreur : la plupart des prévenus étaient envoyés au Tribunal révolutionnaire, plus expéditif et moins accessible à la pitié que les juges de province.


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de délivrer, à ceux qui apporteront des grains, des bons payables sur les premiers fonds qui rentreront à cet égard (i).

18 thermidor an II (5 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Procèsverbal constatant que des billets de confiance de la commune, pour une somme de 20.813 livres, ont été brûlés ce matin, à 10 heures, sur la place de la Révolution, en présence de la population convoquée à cet effet, et du Corps municipal.

Le citoyen Souquet, officier municipal, a découvert que la nommée Marie Bousquet, demeurant chez Toinette Monteils, à La Barre, est une ancienne soeur grise. Cette personne, appelée devant le Corps municipal, dit avoir quitté depuis 4 ans le couvent de Bazas ; par conséquent, elle ne se croit point obligée de prêter le serment, et refuse de le prêter. Le Corps municipal arrête qu'elle sera mise en réclusion à la ci-devant Daurade et que la femme Monteils, qui l'a reçue chez elle, sera appelée pour rendre compte de sa conduite.

21 thermidor an II (8 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Le Corps municipal, formé en tribunal de police de sûreté générale, procède à l'interrogatoire de Marie-Anne Serres, ancienne soeur converse au couvent de la Daurade, qui a été arrêtée à la ci-devant maison des Augustins, immeuble appartenant aujourd'hui au citoyen Sallèles, représentant du peuple à la Convention. Elle dit être sortie du couvent depuis environ deux ans, avoir habité six mois chez Annetou Papou, à La Barre, puis être allée demeurer aux Augustins, où logeaient déjà plusieurs anciennes religieuses de la Daurade. Elle déclare n'avoir pas cru, en conscience, pouvoir prêter serment, elle reconnaît comme lui appartenant une image qui représente deux coeurs, l'un traversé d'une épée, l'autre d'une croix, ce qui constitue « les signes de rébellion et de ralliement des conspirateurs de la Vendée » ; mais elle dit que ces objets se vendaient couramment à la porte de la Daurade et qu'elle n'y a pas attaché d'importance.

Le Corps municipal, après réquisitoire de l'agent national, arrête qu'il sera décerné un mandat d'arrêt contre Marie-Anne Serres et un mandat d'amener contre les citoyennes Papou et Sallèles, qui l'ont reçue chez elles.

22 thermidor an II (9 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Interrogatoire de la citoyenne Sallèles. Elle dit que c'est à son insu que la dame

(1) Ce procès-verbal n'est pas signé.


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Parayre, ci-devant religieuse à la Daurade, attira chez elle Marie-Anne Serres, il y environ un an ; il est vrai qu'elle en fut avertie lors du paye, ment du premier semestre. Elle perçut encore un autre semestre, mais ne voulut pas recevoir le troisième, parceque, ne voulant plus garder chez elle ni soeurs, ni religieuses, elle avait congédié celles qui s'y trouvaient ; elle avait d'ailleurs recommandé à ses locataires de mettre sur la porte leurs noms, prénoms, etc., conformément à la loi ; de plus elle avait signalé leur présence à une commission de la municipalité qui faisait une inspection, mais elle n'avait pas fait de déclaration à la Maison commune, ignorant qu'il fallût le faire. — Après qu'elle eut refusé le troisième semestre, elle croyait Marianne Serres partie de chez elle ; ses nombreuses occupations et ses infirmités ne lui permirent pas de s'en assurer.

Interrogatoire d'Anne Besse Papou, âgée de 73 ans, célibataire. Elle reçut chez elle Marie-Anne Serres à sa sortie du couvent ; elle ignorait que cette personne fût assujetie à prêter un serment, et, ne la regardant pas comme suspecte, elle n'a pas fait de déclaration, comme aussi elle ne savait pas alors qu'il fallût mettre une inscription sur sa porte. Le Corps municipal condamne à huit jours de prison quatre femmes qui étaient sorties sans porter la cocarde tricolore.

Le citoyen Lacoste, du lieu d'Englandières, vient déclarer qu'il devait à Constans Labarthe, de Pradines « de guillotineuse mémoire », la somme de 10.081 livres, plus une rente de 2 quartes de blé et 2 de mixture. Il déclare aussi qu'il doit 1.000 livres à rente constituée à Fouillac de la Roumegouze, ancien commandant à Bordeaux, qui a disparu depuis deux ans; il ignore si «cet individu» est mort ou a émigré. 23 thermidor an II (10 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Procèsverbal de la célébration de la fête civique du 10 août 1792. — Le cortège, comprenant les autorités constituées, la Société républicaine et montagnarde et la garde nationale, est parti de la Maison commune au son des tambours et de la musique, a descendu les Fossés et, remontant par la Grand Rue, s'est formé en bataillon carré sur la place de la Révolution. Sur un trône burlesque était un buste « représentant le dernier des tyrans détrôné ». Un administrateur du district a prononcé un discours énergique contre les tyrans, les conspirateurs et les « fanatiques ». Le trône et le buste ont été renversés et on y a substitué la statue de la Liberté et d'autres emblêmes ; après quoi on s'est retiré en se donnant rendez-vous pour l'après-midi clans le temple, afin de célébrer la fête de la Raison.

(A suivre) A. COMBES.


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LE

Dépôt des Archives nationales

APERÇU HISTORIQUE

I

ÉPOQUE ANTÉRIEURE A 1789

On n'a conservé que très peu de documents des temps anciens. Ce n'est qu'assez tard qu'on a eu l'idée d'un dépôt d'archives. On commença seulement au XIIIe siècle à déposer les archives en un lieu spécial. D'après M. Giry, nos rois eurent simplement « des archives ambulantes ». On ne peut pas douter que les rois Mérovingiens et les rois Carolingiens aient eu leurs archives. Cependant la plupart des pièces de cette époque ont été perdues. On n'a de ces temps reculés que quelques fonds ecclésiastiques.

Les archives royales n'occupèrent pour la première fois un lieu fixe que sous Louis IX (1226-1270). Etablies tout d'abord au Louvre, elles furent déposées par ordre du roi à La Sainte Chapelle et y restèrent jusqu'en 1 783. Le Trésor des chartes se trouva fondé dès le jour où des locaux furent attachés aux archives.

Dans un article de la Grande Encyclopédie, M. Giry nous a décrit les origines de ce dépôt central. Longtemps avant l'avènement du roi Philippe-Auguste (1180-1223), des clercs, des conseillers du roi se mirent à copier sur des registres des titres perdus, dont on pouvait trouver des copies. Les minutes des actes émanés de l'autorité royale furent transcrites, dans la suite, sur ces mêmes registres. Tous les titres intéressant les domaines ou les droits de la couronne furent, dès cette époque lointaine, déposés dans « des coffres de bois ou layettes» (1).

(1) Grande Ecyclofédie (III), article Archives, p. 748.


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Au xive siècle, le roi Charles V (1364-1380) fit, d'une façon définitive du Trésor des chartes un dépôt central des fonds de l'administration politique et domaniale. Au XVIe siècle, le roi Henri II (1547-1559) fit encore verser au Trésor des chartes les titres [domaniaux et les documents de toute sorte relatifs à la couronne de France. Ce dépôt central allait toutefois bientôt disparaître. Après 1560, il ne devait plus recevoir aucun versement ayant trait aux domaines royaux et aux évènements sociaux et politiques du royaume. Sous Charles IX (1560-1574), on ne versa plus au Trésor des chartes que les diplômes concernant les faits les plus marquants de l'histoire de France. D'autres dépôts d'archives se constituèrent à mesure que se développaient les organismes administratifs de la royauté, mais il n'y eut plus de dépôt central d'archives.

On fonda des dépôts spéciaux au siège des diverses juridictions royales. On ne remettait plus les actes administratifs de l'époque dans un dépôt unique, mais les esprits les plus cultivés du temps le regrettèrent : ils étaient hantés par certaines idées de centralisation.

A la Chambre des comptes, on réunit les titres anciens de la royauté. Un grand nombre de ces documents furent brûlés lors d'un incendie survenu.en 1733. Quelques années plus tard, en 1750, on conçut le projet de collectionner tous les titres anciens et de les déposer en un même lieu. On eut même l'idée de faire faire des copies de tous les diplômes inédits et de les réunir aux titres anciens dans le même dépôt. Machault, contrôleur général des finances, qui eut de telles conceptions, fut traité d'utopiste. Son dessein parut irréalisable. Sous son successeur, le projet reçut toutefois un commencement d'exécution. Le contrôleur général Silhouette se mit à l'étude de l'entreprise de Machault et arriva à créer une Bibliothèque des Finances. Le directeur en fut Moreau. Dans l'esprit de son fondateur, cette bibliothèque devait devenir « le centre de tous les dépôts d'archives administratives du royaume ».

En 1760, le ministre Bertin établissait un Dépôt de législation. Deux années plus tard, en 1762, le même ministre fondait un Cabinet d'histoire. Il voulait « une collection de copies des titres et chartes de (tous les dépôts particuliers) à la quelle les sçavants puissent recourir comme aux originaux, soit en attendant qu'elles soient imprimées, soit après leur impression » (1). C'est aux religieux de la Congrégation de Saint(1)

Saint(1) : Archives de l'Histoire de France, Introduction, p. VI.


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Maur que fut confié ce travail de transcription. Mais une telle entreprise n'était-elle pas trop vaste? Moreau le crut. Sans doute, un pareil travail lui paraissait utile mais il le jugeait impossible à réaliser. Il estimait qu'on pouvait tout au plus faire prendre des copies des actes les plus importants renfermés dans les dépôts du royaume. Donc Le Noir croyait lui aussi « qu'on perdrait un temps infini à copier des titres sans nombre qui figuraient mal dans la collection des chartes et qui ne feraient qu'en augmenter le volume (1). » Le ministre lui-même se rendit à l'évidence ; il modifia plus tard son plan primitif. Les copistes reçurent de Bertin, après 1764, l'ordre de faire un choix, de ne transcrire que les documents les plus marquants. Une transcription intégrale des archives de l'histoire de France était certainement impossible; une transcription partielle offrait toutefois des inconvénients des plus graves. Les transcripteurs pouvaient considérer comme peu importants des originaux qui pouvaient avoir leur utilité; les supprimer était de leur part chose tout-à-fait préjudiciable à la documentation pour l'historien de l'avenir.

Les services que dirigeait Moreau furent transférés en 1764 de Versailles à Paris. C'est à cette date qu'on doit faire remonter la fondation du Cabinet des chartes proprement dit.

Pendant que les Bénédictins, attachés au nouveau service, transcrivaient dans les chartiers de France les documents inédits de l'histoire du royaume, des savants étaient envoyés à l'étranger pour y faire un travail analogue à celui des religieux de Saint-Maur en France. M. de Bréquigny allait à Londres; Dom Berthod se rendait dans les Pays-Bas autrichiens et Dom Colloz partait pour le Luxembourg et le duché de Bouillon. Le projet était de recueillir à l'étranger tous les documents ayant trait au droit public français.

En 1773, de Bréquigny écrivit que Rome était le pays du monde qui avait le plus de documents. Les archives du Vatican devaient, et après lui, fournir bien des pièces de nature à éclairer beaucoup de points de notre histoire de France. Aussi le roi voulut-il envoyer quelqu'un dans la ville des papes pour y faire des recherches identiques à celles qu'on avait organisées en Angleterre et ailleurs. Laporte du Theil fut envoyé à Rome, en 1776, par le roi Louis XVI A cette époque l'administration

(1) LANGLOIS, Opere cit., p. VIII. — Ch. X. Charmes : Le comité des travaux historiques et scientifiques, Paris 1886, in-4°. I. p. 43


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des Archives vaticanes n'avait pas la largeur d'esprit qui caractérise l'administration actuelle des Archives de la Papauté. L'envoyé français ne fut pas admis facilement à travailler au Vatican. Il n'aurait abouti dans ses démarches que « grâce à de toutes puissantes recommandations ». Le succès de sa mission fut immense. Durant les dix ans que du Theil travailla à Rome, il put prendre cinq mille copies d'actes pontificaux.

Grâce à cette exploration de dépôts d'archives, faite dans une grande mesure, le cabinet des chartes put s'enrichir considérablement. En 1780, vingt-neuf dépôts avaient été explorés et on avait réuni déjà à cette date plus de vingt-cinq mille pièces, d'après l'estimation même de Moreau. Dans la seule Angleterre, on avait pris plus de 12.000 copies de pièces. Avec de si nombreuses acquisitions, le service du cabinet des Chartes prit une très grande importance ; aussi finit-on par le détacher du Contrôle général des finances.

Les archives de l'histoire de France se trouvaient ainsi centralisées en une certaine mesure. On n'ignorait plus où se trouvaient les pièces essentielles de l'histoire du royaume ; on en avait même la copie et à portée, dans le dépôt du cabinet des Chartes. Cette centralisation n'était cependant rien à côté de celle que vont opérer les hommes de la Révolution.

Avant 1789, il y avait dans le royaume environ dix mille dépôts d'archives. Personne ne pouvait y pénétrer. Ils étaient tous fermés au public comme le sont encore de nos jours, en certaines parties de l'Europe, certains dépôts réputés par tous les historiens d'une grande valeur pour l'histoire de l'Eglise et pour celle du protestantisme, ainsi que pour l'histoire générale de l'Europe. En Italie, à Florence et à Rome par exemple, beaucoup de dépôts restent absolument fermés à tout érudit. A Florence, on ne peut nullement pénétrer dans les archives des familles les plus illustres. A Rome, les savants ne peuvent pas travailler dans tous les dépôts. On y trouve des dépôts non seulement privés, mais encore d'ordre administratif, comme ceux du chapitre de la Basilique de Saint-Jean de Latran, de la Daterie apostolique et, au Vatican même, de la Consistoriale, où personne ne peut aisément entrer.

De grands et très louables efforts avaient était faits, avant la Révolution, pour recueillir le plus de copies possible de documents, mais, somme toute, on n'avait pu réunir que des copies. Très souvent,


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le chercheur ne pouvait se dispenser de recourir aux originaux, et ceux-ci étaient épars dans d'innombrables dépôts.

Il est resté toutefois, après l'époque révolutionnaire, quelque chose de très fécond du travail de centralisation conçu au milieu du XVIIIe siècle par le contrôleur général Machault. On devait tirer grand profit des transcriptions opérées, sur le plan du ministre Bertin, par les Bénédictins, les Bréquigny, les Laporte du Theil et les Dom Berthod. Les copies prises par les érudits de l'époque dans les dépôts étrangers devaient rendre de signalés services. L'entreprise de Napoléon de réunir à Paris toutes les archives de l'Europe ne sera pas couronnée de succès. Le décret révolutionnaire du 7 messidor au 11 échouera lui aussi.

II PÉRIODE RÉVOLUTIONNAIRE

Avec l'Assemblé constituante apparaît pour la première fois le mot même d'Archives nationales. La célèbre assemblée conçût le projet de conserver toutes les pièces de ses délibérations et de ses décisions. Il lui fallut assurer la conservation de telles archives ; aussi, établit-elle un dépôt spécial qui prit le titre & Archives nationales. Un archiviste fut attaché à ce service. L'avocat Camus fut élu le 4 août 1790. Le décret du 12 septembre 1790, qui donna le nom d'Archives nationales au dépôt des archives parlementaires, le définissait « le dépôt de tous les actes qui établissent la constitution du royaume, son droit public, ses lois et sa distributions en départements. » Les Archives nationales devaient encore recevoir les titres conservés clans les dépôts des administrations provinciales, des justices seigneuriales et de tous les corps supprimés. Leurs locaux devaient être ceux-là mêmes des Académies supprimées, au Louvre. Le décret du 12 brumaire an II le régla ainsi. Il ordonnait,en outre,la fondation de deux sections : une section domaniale et une section judiciaire. Désormais, l'archiviste qui avait pour charge de diriger tout travail d'organisation, de classement des fonds, allait prendre le titre d'Archiviste de la République au lieu de celui d'Archiviste de l'Assemblée, qui était en usage sous la Constituante.

Le principe d'un dépôt central d'archives, énoncé dans le décret du 12 septembre 1790, fut confirmé par la loi du 7 messidor au 11. La


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Convention établissait,aux termes mêmes de cette loi, un dépôt central pour toute la République. Elle portait, de plus, un règlement nouveau, à savoir que toutes les archives de la nation seraient désormais publiques. « Tout citoyen, porte l'article 37 de cette loi, pourra demander dans tous les dépôts, aux jours et aux heures qui seront fixés, communication des pièces qu'ils renferment ; elle leur sera donnée sans frais et sans déplacement, avec les précautions convenables de surveillance. »

Ainsi, d'après la loi du 7 messidor au 11, il ne devait plus y avoir en France qu'un seul dépôt d'archives, ouvert à tout le monde, les Archives nationales. Cet unique dépôt devait recevoir tous les titres qui existaient en France et que contenaient les dix mille dépôts de l'ancien régime. « La Révolution, a écrit le marquis de Laborde, fut pour les archives ce qu'elle a été pour la Société elle-même, un épouvantable bouleversement et une régénération ; à la hache et à la torche qui détruisent succéda la liberté qui féconde ; à des dépôts riches de documents, accumulés par les siècles, mais fermés aux études et à la publicité, succédèrent des archives publiques offrant libéralement à tous ce qui restait de ces trésors historiques (1). »

La Convention venait de compléter l'oeuvre de l'Assemblée Constituante. Sans doute, depuis le 4 août 1789, les archives de toutes les anciennes administrations, des cours souveraines, des ordres religieux, de tous les corps supprimés, étaient devenues propriétés nationales. Mais la Convention fit davantage. Son gouvernement assuma la charge de doter la France d'un seul dépôt et donna à tout Français le droit absolu de se faire communiquer toute pièce. M. Giry se plaît à rendre hommage sur ce point à la Révolution et, à propos de la réorganisation de nos archives, il aime à dire « que les assemblées révolutionnaires ont travaillé sans relâche, de 1789 à 1796, à organiser pour l'étude des dépôts jusqu'alors inaccessibles, et que la base de la législation sur la matière jusqu'à nos jours a été une loi révolutionnaire, le décret du 7 messidor an 11 (25 juin 1794) (2) ».

Par l'article 8 de cette loi de Messidor, la Convention chargeait le Comité parlementaire des archives « de faire trier sans délai dans les

(1) Marquis de Laborde : Collection de sceaux, p 17.

(2) GIRY: articles sur les Archives dans la Gr. Encyclop., p. 750.


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dépôts des départements les titres domaniaux utiles pour le recouvrement des propriétés nationales et de les envoyer à la section domaniale à Paris (1). »

Les pièces acquises à la nation étaient considérablement nombreuses. La Convention ne put qu'être effrayée de la masse énorme de documents à faire expédier à Paris; aussi, ordonna-t-elle de faire faire encore une autre opération de triage, consistant à séparer les titres anciens de la royauté et ceux qui avaient un intérêt historique, des titres féodaux et des titres jugés inutiles pour l'histoire. Une telle disposition était malheureuse. L'opération demandée devait amener la perte de beaucoup de documents originaux. Sur l'ordre de la Convention, en effet, on anéantit tous les titres seigneuriaux et toutes les pièces qu'on croyait d'aucune utilité pour l'histoire de la France. On ne conserva de toutes les archives de l'ancien régime que les titres à consulter pour l'histoire du royaume et les titres anciens de la royauté.

Ce travail de triage des titres fut confié à une commission spéciale, composée de neuf membres, nommés pour six mois. On lui donna le nom d'Agence temporaire des titres. Le 28 brumaire an III (18 novembre 1794), le nouveau bureau fut définitivement constitué. Il perdit ses pouvoirs en 1796. Le Directoire le réorganisa. Un arrêté du 5 floréal an IV substitua le nom de Bureau du triage des titres à celui d'Agence temporaire des titres. Pour faire partie de ce bureau, il fallait avoir une connaissance approfondie des chartes et de la législation française.

Comme on pouvait s'y attendre, le triage qui se fit fut, dans beaucoup de cas, des plus arbitraires. On détruisit un grand nombre de pièces qu'on considérait de peu d'importance. On anéantit ainsi onze mille liasses ou registres du ministère de la maison du Roi.

Dans bien des milieux on se rendit compte que tous ces documents n'étaient pas détruits par les membres du bureau à cause de leur inutilité pour l'histoire des institutions de la royauté. Le peuple crut comprendre qu'ils étaient anéantis à cause du régime disparu qu'ils rappelaient et qu'ils auraient pu servir à reconstituer (2). C'est pourquoi on put le voir se charger, pour sa part, d'aider puissamment la commission instituée par l'Etat dans cette oeuvre de véritable vanda(1)

vanda(1) opere cit. p. 6.

(2) Grande encyclopédie, p. 750.


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lisme. La populace fit des feux de joie avec les registres de droits féodaux et les titres de noblesse.

Malgré les ravages de ce vandalisme populaire et de la destruction systématique de tant de pièces de la part des membres de l'Agence ou du Bureau, « la France, dit M. Giry, se trouve être le pays de l'Europe possédant le dépôt d'archives les plus nombreuses, les plus riches. »

En organisant les archives départementales, le Directoire porta atteinte à l'entreprise d'un seul dépôt d'archives constitué à Paris. La loi du 5 brumaire an V (26 octobre 1796) atténua la portée de la loi du 7 messidor an 11. Il ne devait plus y avoir de dépôt absolument unique. La loi du 5 brumaire statua, en effet, que tous les titres et papiers d'une circonscription départementale devaient être réunis au chef-lieu de chaque département.

On doit bien reconnaître que cette loi de l'an V était plus mesurée que la loi de l'an II. Celle-ci avait été trop radicale et trop violente. On ne pouvait réaliser l'idéal conçu par le législateur ; de fait, il ne fut pas réalisé.

A l'heure actuelle, la centralisation des archives françaises reste basée sur la loi du 5 brumaire. Nous n'avons pas, à proprement parler, de dépôt d'archives qu'on puisse appeler national. Le nom d'Archives nationales n'a gardé sa raison d'être que parcequ'elles reçoivent les versements des diverses administrations centrales de Paris, comme ceux des ministères par exemple.

III EPOQUE DU CONSULAT ET DE L'EMPIRE

Au moment du coup d'Etat de brumaire, les archives parlementaires étaient encore réunies aux Archives nationales. Un arrêté du 8 prairial an vin (28 mai 1800) les en sépara.

Le premier consul voulut s'arroger le pouvoir de nommer l'archiviste, au lieu de le laisser élire par les représentants de la nation. Le directeur des archives prit le nom de Garde des Archives nationales. Camus fut le premier à avoir ce titre. L'ancien archiviste de la République fut, en effet, maintenu clans ses fonctions par le premier consul, le 4 thermidor an VIII (23 juillet 1800).

Camus était depuis déjà longtemps en conflit avec le Bureau du triage des titres. En 1796, il avait fait suspendre les pouvoirs de chacun


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des membres de l'Agence temporaire des titres. Le Directoire donna à ce service une désignation différente, mais le maintint. Directeur du personnel des archives, jouissant de l'entière confiance du premier consul. Camus fit supprimer ce bureau. Ce qui fut fait en vertu de l'arrêté du 1er pluviose an IX (21 janvier 1801).

Les membres du Bureau du triage des titres étaient en fonctions, depuis l'an III. D'après la loi du 7 messidor, ils n'avaient cependant été nommés que pour six mois. Après l'arrêté de l'an IX, ils sont encore restés aux Archives nationales,.où ils feront partie d'un bureau qui deviendra plus tard la Section historique, et qu'on appela alors le Bureau des monuments historiques.

Camus mourut le 2 novembre 1804. On vient de le voir, il joua un grand rôle dans la constitution de nos archives. Celles-ci furent à peine instituées qu'il proposa « la réunion dans un seul et même dépôt de tous les actes relatifs à l'état ancien de la monarchie, ainsi que des actes émanés des cours et autres établissements qui seront supprimés, de manière que tous les dits actes puissent être conservés sûrement comme monuments historiques » (1). La Révolution Française semble n'avoir opéré de réforme à propos de nos archives que sous l'inspiration de Camus.

Son successeur fut Daunou. Le nouvel archiviste devait installer nos archives nationales à l'hôtel Soubise.

C'est dans des maisons de la capitale qu'on avait déposé plusieurs fonds, lors de l'acquisition des titres anciens. Un tel état de choses ne pouvait durer longtemps ; les originaux de notre histoire nationale ne pouvaient être en lieu sûr dans ces divers immeubles où on les avait placés. Le 6 mars 1808, Napoléon acheta l'hôtel Soubise dans le but d'y installer nos archives. Les locaux étaient alors assez vastes pour les contenir. Plus tard, on les trouvera insuffisants, à mesure que se feront des acquisitions nouvelles. On leur adjoindra d'autres bâtiments.

Le prince qui a voulu faire de Paris la capitale de l'Europe voulut aussi en faire le siège des archives de toutes les nations. « Je voudrais, écrivait l'Empereur au ministre de l'Intérieur, le 15 février 1810, un projet de décret général sur les archives. Il y a, à Versailles, à Rome, et dans les départements beaucoup de papiers qu'on pourrait réunir dans les archives centrales (2). »

(1) Grande Encyclopédie, article Archives, p. 750.

(2) LANGLOIS : Archives de l'histoire de France, Introduction, p. v.


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Ainsi les pays conquis allaient se voir obligés de transporter à Paris leurs propres archives. Cette année-là même de 1810, arrivèrent d'Espagne à Paris trente voitures chargées de parchemins. Par ce moyen, les archives si riches de Simancas devenaient notre propriété. On expédia d'Italie les archives du Piémont et celles du Vatican. Les dépôts de Vienne, d'Amsterdam et de Berlin furent centralisés dans notre capitale. Il fallut 3.139 caisses pour apporter les archives de Vienne.

Le transfert à Paris des célèbres archives vaticanes n'était pas, comme on le pense, chose facile à réaliser. Les opérations exigèrent la présence de Daunou à Rome. Le garde des archives de l'Empire dut faire préparer 12.147 caisses pour contenir tous les papiers de la Curie romaine. Les frais de transport furent énormes. On rapporte qu'ils s'élevèrent à 600,000 francs. Les archivistes du Vatican accompagnèrent les archives des papes à Paris. Ce furent le prince Carlo Altieri, l'abbé Marini et l'abbé Martorelli.

L'hôtel Soubise ne put renfermer une masse si considérable d'archives apportées de toutes les parties de l'Europe. M. Giry a fait le récit de l'encombrement que produisirent au Palais des Archives tant de papiers arrivés de tous les coins de l'Europe. « Les documents remplissaient, dit-il, le palais, débordaient dans les couloirs, s'amoncelaient dans les combles, s'entassaient dans la colonnade, dans les baraquements provisoires élevés au milieu de la cour d'honneur et jusque dans des maisons du quartier qu'on louait à mesure des besoins ; souvent même des caisses n'étaient pas ouvertes (1). »

Il aurait fallu un palais démesurément grand pour recevoir toutes ces archives de l'Europe. Napoléon conçut le projet de faire bâtir ce palais immense, devenu nécessaire. Il en ordonna la construction par décret du 21 mars 1812. Dans le plan de l'Empereur, il devait s'élever entre le pont d'Iéna et le pont de la Concorde.

L'oeuvre qu'on devait accomplir à Paris, à l'arrivée de tous ces matériaux historiques, était le classement de chaque fonds. Daunou le prit sous sa direction. Dès 1812, il publia un état sommaire des archives des pays étrangers apportées à Paris. La partie des archives italiennes comprenait à elle seule : I° Archives de Rome. Chartes par ordre chronologique, du IVe au XIVe siècle. — Registres des bulles,

(1) GIRY, loc. cit. p. 751.


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brefs et suppliques. — Possessions et prétentions de la cour de Rome. Matières ecclésiastiques et gouvernement pontifical. — Nonciatures et légations. — Secrétairerie d'Etat. — Daterie. — Chancellerie. — Pénitencerie. — Congrégations du concile de Trente, de la Propagande, du Saint-Office, des évêques et des réguliers, des rites. — Archives administratives. — Archives judiciaires. — Inventaires, tables et répertoires ; 2° Archives de Pérouse et de Spolèle ; 3° Archives de Toscane (Florence, Pise, Sienne) : 4° Archives de Parme et de Plaisance ; 5° Archives Liguriennes ; 6° Archives du Piémont et de la Savoie.

On ne dépouilla pas de leurs archives tous les dépôts de l'Europe. L'Angleterre, les Etats Scandinaves et la Russie gardèrent leurs titres.

D'après M. Giry, les vues de l'Empereur auraient été toutes politiques dans ce bouleversement des archives des pays étrangers. De même qu'on avait jadis fait déposer au Trésor des Chartes, sous l'ancien régime, les archives des provinces réunies à la couronne pour pouvoir en faire usage à l'occasion contre des revendications possibles, de même Napoléon séquestrait les titres de l'état antérieur de l'Europe afin d'avoir sous la main « un véritable arsenal diplomatique » où il pût aller puiser tous les secrets de la politique historique de chaque pays, rechercher des moyens « de faire valoir éventuellement de nouveaux droits ou de faire revivre d'anciennes prétentions ». L'Empereur croyait mieux garantir la nouvelle situation faite aux Etats divers de l'Europe en possédant les archives de chacun d'eux.

Il faudrait ajouter à de telles raisons « l'illusion d'une pensée fiscale ». Napoléon aurait cru « que, lorsque des contrées les plus éloignées de son empire on devrait s'adresser à Paris pour trouver les documents concernant les familles et les propriétés, les taxes élevées imposées aux intéressés compenseraient les frais de garde et d'entretien et pourraient même créer une nouvelle source de revenus publics » (1). Les Archives de l'Empire n'étaient plus, en effet, ouvertes au public. On ne pouvait y pénétrer que moyennant finances. Seuls quelques fonctionnaires et les ministres avaient le droit d'y entrer à titre gratuit.

On venait de mettre à exécution, non sans succès, le projet impérial d'archives nationales transformées en archives européennes, lorsque

(1) GIRY, loc. cit., p. 752.


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se produisit la chute de l'Empire. Il ne devait presque rien rester à Paris de toutes ces archives apportées dans la capitale et que devait contenir le palais dont Napoléon avait décrété la construction en 1812. On ne conservera guère de tout ce Trésor d'archives étrangères que quelques pièces éparses, répandues dans de nombreux fonds de l'hôtel Soubise. Après l'invasion de 1814-1815, tous les pays spoliés de l'Europe firent entendre de nombreuses revendications et la France crut devoir leur restituer leurs archives.

IV

DEPUIS LA RESTAURATION DE 1815 JUSQU'A NOS JOURS

Le chevalier de la Rue fut nommé par la Restauration à la tête de nos archives. Il succéda à Daunou et prit le titre de Garde général des Archives du royaume. C'est lui qui dirigea la restitution des archives de l'Europe installées à Paris. La Révolution avait confisqué au profit de la nation les archives des émigrés et des princes du sang ; de la Rue les leur rendit.

Ainsi, peu à peu, les Archives nationales perdaient de leur importance de jadis. Elles se voyaient dépouillées, dans une très grande mesure, des richesses de documents que l'Empire et la Constituante avaient accumulées à l'hôtel Soubise. Elles étaient destinées à n'être ni un dépôt central des archives de l'Europe, ni un dépôt central des archives de la France. Elles vont garder le nom d'Archives nationales, mais ce ne sera qu'en 1855 que ce qualificatif pourra leur être rigoureusement appliqué. A cette date de 1855, une loi du second Empire autorisa certains ministères à faire au palais des archives des versements périodiques. En conservant les papiers de plusieurs départements, nos archives pouvaient être légitimement appelées nationales.

A l'heure actuelle, on trouve aux Archives nationales les dépôts qui restèrent alors à Paris, après ces diverses opérations de restitution. L'hôtel Soubise ne s'est accru, depuis la Restauration, que des archives judiciaires (fonds du Parlement de Paris), de celles de plusieurs ministères et des documents anciens dont M. Lelonga donné l'indication dans un article du Répertoire général alphabétique du droit français. La Révolution de 1830 ramena Daunou à la direction générale des


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Archives. Letronne lui succéda en 1840. Lors de son passage à la tête des Archives, en 1847, un décret du 15 septembre ordonna le transfert aux Archives nationales du fonds des Archives du Parlement de Paris, conservé jusque-là au Palais de Justice.

Après Letronne, on a vu se succéder à la direction générale des Archives : de Chabrier, de Laborde, A. Maury et G. Servois. Ce dernier fut remplacé il y a quelques années par M. Dejean.

En 1855, M. Bordier publia un inventaire du dépôt des Archives nationales dans ses Archives de la France. C'était pour la première fois que paraissait un travail de ce genre.

M. Grün conçut, en 1863, le projet d'un inventaire des inventaires pour la section judiciaire et le mettait en même temps à exécution. Un semblable projet fut encore réalisé, en 1882, pour la section administrative. Seulement, ces travaux sont restés manuscrits. Inutile de dire qu'on peut les consulter avec fruit, quand on a à faire des recherches à l'hôtel Soubise.

Napoléon III donna ordre à M. le marquis de Laborde, directeur général des Archives de l'empire, d'entreprendre quelques publications sur les Archives nationales. En 1867, l'Inventaire général sommaire des Archives de l'Empire était publié. L'auteur adopta pour cette publication le genre de divisions des fonds eux-mêmes. Pour donner une idée de notre dépôt national de Paris, je transcris ici les titres des diverses séries qui constituent nos Archives centrales :

Série A. — Lois et décrets rendus pendant la Révolution ;

Série B. — Elections et votes;

Série BB. — Versements du ministère de la Justice;

Série C. — Minutes des procès-verbaux des assemblées nationales et pièces y annexées ;

Série D. — Missions des représentants du peuple;

Série E. — Conseils du roi ;

Série F. — Administration générale de la France ;

Série G. — Administrations spéciales ;

Série H. — Administrations locales ;

Série J. —Trésor des Chartes; layettes et registres ;

Série K. — Monuments historiques ; cartons et registres ;

Série L. = Monuments ecclésiastiques ; cartons et registres :

Série M. — Mélanges ;

Série N. — Cartes et plans;


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Série Q. — Archives de la couronne ;

Série P. — Chambre des comptes ;

Série R. — Papiers des princes ;

Série S. — Biens des corporations supprimées;

Série T. — Séquestre ;

Série U. — Extraits et copies provenant de diverses juridictions ;

Série V. — Grande chancellerie et conseils ;

Série W. — Parquet, tribunaux révolutionnaires, commissions militaires, haute cour de justice ;

Série X. — Parlement de Paris ;

Série Y. — Châtelet de Paris ;

Série Z. — Juridictions spéciales et ordinaires, tribunaux intermédiaires ;

Série ZZ. — Offices, greffes et bureaux d'enregistrements.

Certains ministères ont bien fait, comme on le voit, des versements aux archives nationales, depuis le décret de 1855, daté du 22 décembre. D'autres n'ont rien remis à l'hôtel Soubise. Les ministères des colonies, des affaires étrangères, de la marine, de la guerre et des finances ont gardé leurs papiers et n'ont fait aucun versement. On ne saurait donc y trouver tous les fonds relatifs à l'administration générale de la France. On peut seulement regretter que tous les ministères n'aient pas effectué le versement de leurs archives.

Le dépôt central de nos archives fut, en 1870, mis sous la dépendance du ministre de l'instruction publique. Jusqu'à cette date, le dépôt de l'hôtel Soubise avait été attaché tantôt à un ministère, tantôt à un autre.

En 1871, la direction générale des archives publia un inventaire sommaire et un tableau méthodique des fonds concernant l'ancien régime (1). Ce travail devait remplacer l'Inventaire général sommaire de M. le marquis de Laborde (2).

M. Alfred Maury, dans son Inventaire de 1871, voulait procurer aux historiens un instrument de travail plus précieux que l'ouvrage de M.

(1) Voici le titre exact de cet inventaire : Inventaire sommaire et tableau méthodique des fonds conservés aux Archives nationales, 1re partie, régime antérieur à 1789. 1 vol. in-h°.

(2) Inventaire général sommaire. 1 vol. in-40.


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de Laborde. Il jugeait que seuls des archivistes pouvaient utiliser l'inventaire de 1867.

L'Inventaire sommaire de 1871 avait trait à l'époque antérieure à 1789. Cette division en deux parties bien distinctes se comprend très bien, en raison de la séparation si grande qui existe entre l'ancien régime et le nouveau (1).

(1) Voici le tableau des divisions et subdivisions de l'Inventaire général de 1867 : I. Archives politiques et administratives

1. Trésor des Charles ,

2. Monuments historiques ;

3. Conseil du roi ;

4. Pairie ;

5. Chancellerie de France ;

6. Ministère de la maison du Roi ;

7. Maison du Roi ;

8. Ministère des affaires étrangères et papiers diplomatiques.

9. Ministère de la guerre ;

10. Contrôle général des finances et administrations s'y rattachant ;

11. Principauté des Dombes ;

1 2. Duché de lorraine et de Bar. 13. Principauté de Montbéliard ;

14. Greffe des Etats de Languedoc ;

15. Ville de Paris.

II. Archives judiciaires

1. Grand conseil ;

2. Parlement de Paris ;

3. Requêtes du palais et requêtes de l'hôtel ;

4. Châtelet de Paris ;

5. Justices royales ordinaires ;

6. Chambres des comptes de Paris ;

7. Cour des aides de Paris ;

8. Cour des monnaies ,

9. Juridictions spéciales ;

10. Notariats, tabellionnages et consignations.

III. Archives ecclésiastiques

1. Bullaire ;

2. Agence générale du clergé ;

3 Archives ecclésiastiques du département de la Seine ;

4. Abbayes, prieurés et corporations religieuses classées par départements ;

5. Ordre de Malte ;

6. Ordre de Saint-Lazare ;


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En 1891 parut un Etat sommaire par séries des documents conservés aux Archives nationales, qui complétait l'Inventaire général sommaire, paru en 1867 et publié à un petit nombre d'exemplaires seulement.

L'Inventaire de 1867 « présentait le recolement sommaire des documents que renferment les Archives nationales et passait successivement en revue chacune des séries selon l'ordre des articles qu'elle contient, liasses, cartons ou registres (2). » L'Etat sommaire de 1891 est aussi « un miroir fidèle de la classification actuellement existante » ; du moins, il reproduit à grands traits, à ce qu'à écrit M. Servois, l'image de chacune des séries. De plus, il est plus étendu que le travail de 1867. Il serait parfois d'une exactitude plus rigoureuse. C'est à cet Etat sommaire de 1891 que l'érudit doit se rapporter pour ses recherches à faire aux Archives nationales. Ce travail est pour le moment définitif (3).

IV. Archives de l'Université et des collèges de Paris

1. Universités ;

2. Collèges.

V. Archives et maisons princières et papiers de famille

1. Archives des maisons princières ;

2. Papiers de familles ;

3. Cartes et plans.

VI. Documents imprimés

(3) Préface de l'Inventaire général p. 1.

(3) Voici le tableau des divisions de l'Etat sommaire de 1891 :

A. Lois et décrets rendus pendant la Révolution ;

B. Elections et votes ;

C. Procès verbaux des Assemblées nationales et pièces annexes ; CC. Sénat conservateur, Chambre et Cour des pairs ;

P. Réunion des représentants du peuple et comités des assemblées ;

E. Conseil du roi.

F. Administration générale de la France. Dans cette série on trouvera le fonds concernant le Ministère des Affaires étrangères ;

G. Administrations financières et spéciales ;

H. Administrations locales et comptabilités diverses ;

J. Trésor des Charles ;

K. Monuments historiques ;

L, Monuments ecclésiastiques ;

M. Ordres militaires et hospitaliers, universités, collèges, titres nobilaires.

N. Plans et cartes ;

O. Maison du roi et maison de l'empereur;


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Celui qui voudrait connaître la réglementation qui présentement régit le dépôt de l'hôtel Soubise, trouverait le dernier décret paru sur ce point dans le quarante huitième volume de la Bibliothèque de l'Ecole des Charles. Le décret est daté du 14 mai 1887 et l'arrêté ministériel qui le suivit est du 16 mai de la même année.

Par lettre ministérielle du 13 août 1887, il fut défendu de communiquer au public divers inventaires sur fiches dressés par les archivistes, mais il était permis de communiquer les répertoires manuscrits dressés sur registres.

Par ailleurs, on a mis à la disposition du public, dans la grande salle de travail, tous les inventaires imprimés que l'on possède.

Le Directeur des Archives nationales s'est préoccupé de mettre à exécution aussi fidèlement que possible le décret de 1887 ; pour cela, il a établi en 1888 un règlement intérieur.

On fréquente beaucoup nos Archives nationales. Aussi, les communications de documents sont-elles très nombreuses. Il est des années où elles atteignent et dépassent même le chiffre de 20.160.

Le gouvernement de la République dépense beaucoup pour la conservation des archives centrales. Une somme de 200.000 francs était inscrite en 1891 au budget à cet effet ; depuis lors, ce chiffre n'a pas diminué.

Le Directeur de l'hôtel Soubise fait chaque année son rapport au Ministre de l'Instruction publique. Il y fait connaître l'état de nos archives nationales. On a imprimé plusieurs de ces rapports. Leur

P Chambre des Comptes de Paris ;

Q Titre domaniaux ,

H. Papiers des princes ;

S. Biens des corporations supprimées ;

T Séquestre ;

TI. Affaires et biens des religionnaires fugitifs ;

V. Grande chancellerie, prévôté et requêtes de l'hôtel, et Conseils ;

W. Parquet, tribunaux révolutionnaires, commissions militaires. Haute cour de Justice de Vendôme ;

X. Parlement de Paris ;

Y. Châtelet de Paris et prévôté de l'Ile-de-France ;

Z. Juridictions spéciales et ordinaires, tribunaux intermédiaires ;

ZZ. Notariats et tabellionnages ; Bureau des saisies réelle-, ; Bureau des consignations ;

AA. Collections particulières entrées aux archives nalionales (1846) ;

BB. Versements du Ministère de la justice ; etc., etc. 3


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lecture offre le plus grand intérêt. On a l'impression, en les parcourant, d'une parfaite organisation de ce service important et on se persuade vite du grand soin apporté par le personnel dans la rédaction de nombreux travaux destinés à faciliter à tous l'accès de nos très riches Archives nationales.

EUGÈNE SOL.

BIBLIOGRAPHIE

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du 14 mai 1887) ; BORDIER (H.) : Les Archives de la France. Paris, 1855, in-8° ; Bulletin des Bibliothèques et des Archives. Paris, depuis 1883, in-8° ; CHARMES (X.) : Rapports annuels sur la situation des archives nationales, départementales, communales et hospitalières — voir Journal

officiel, partie du mois d'août, depuis 1887 ; CLARETIE (J.) : Une visite à l'hôtel Soubise, dans Un enlèvement au

XVIIIe siècle, documents tirés des archives nationales. Paris, 1882,

in-16. DELISLE (Léopold) : Cabinet des manuscrits (à propos des fonds du

Cabinet des chartes, versés à la Bibliothèque nationale durant la

période révolutionnaire) ; DELPIT (J.) : Documents français conservés en Angleterre. Paris 1847,

in-4°, p. 24 et suiv. (à propos de la mission de M. de Bréquigny en

Angleterre) ; GIRY (A.) : article Archives, dans la Grande Encyclopédie ; HUILLARD-BRÉHOLLES (J.-L.-A.) : les Archives de l'Empire, leur passé et

leur état présent, dans Revue contemporaine, t. XXXII, p. 863 ; Inventaire sommaire et Tableau méthodique des fonds conservés aux

Archives nationales, Ire partie, régime antérieur à 1789. Paris,

1871, 1 vol. in-4° ; LABORDE (marquis L. de) : Les Archives de la France, leurs vicissitudes

pendant la Révolution... Paris, 1867, in-12 ;


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LACOUR (Louis) : Annuaire du bibliophile, du bibliothécaire et de l'archiviste, 1860-63, 4 vol. in-16 ;

LACROIX (Octave) : Les Archives nationales, dans Journal officiel mars, avril 1873 ;

Le cabinet historique. Paris 1855-82, 29 vol. in-8°; vol. III, p. 282;

LELONG : v. article sur les Archives dans le Répertoire généralet alphabétique du droit français. Un tirage à part a été fait de cet article. Paris, 1889, in-4° ! M. Langlois dit, dans un chapitre préliminaire aux Archives de l'histoire de France que cet article « rédigé avec beaucoup de soin, épuise la matière, surtout au point de vue juridique. Nous y renvoyons pour ce qui concerne les « dispositions communes à tous les dépôts d'archives » : Questions de propriété, de prescription, de réintégration, dispositions pénales, règles générales touchant les communications et expéditions. Nos 50-92.

MAURY (Alfred) : Rapports du directeur général sur les archives nationales pour les années 1876, 1877 et 1878. In-8° ;

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PAUNIER (L.) : Etat des inventaires sommaires et autres travaux relatifs aux diverses archives de la France au 1er janvier 1875, dans Bibliothèque de l'Ecole des chartes, tome XXXVI, p. I-80; XXXVII, p. 572;

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Revue historique, septembre 1890 (publication de l'introduction des Archives de l'histoire de France, de M. Langlois ;

RICHOU : Traité théorique et pratique des archives publiques. Paris, 1883, in-8° ;

SCHICKLER (de) : L'histoire de France dans les archives de la Grande

Bretagne, Paris, 1878, in-8° (jugement sur l'oeuvre du ministre Bertin et de ^historiographe Moreau) ;

SERVOIS (G.) : article Archives dans le Dictionnaire des finances, de M. Léon Say. — Sous sa direction a paru en 1891, chez Delagrave, à Paris : Archives nationales. Etat sommaire par séries des documents conservés aux Archives nationales. A publié un rapport sur les archives nationales dans Bulletin des Bibliothèques et des archives 1889, p. 259. A publié encore un Rapport au Ministre sur l'administration des archives nationales, départementales, suivi de l'état


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des inventaires des archives nationales. Paris, Imprimerie Nationale, janvier 1902 ; TEULET (A.) : Layettes du Trésor des chartes. Paris, 1863 (voir l'Introduction pour i'histoire du Trésor des chartes).

CONTRAT

Réglant les conditions de la démolition du château d'Assier en 1768 et de la vente des matériaux provenant de cette démolition.

Ce contrat passé le 21 juin 1768 entre le représentant du duc d'Uzès, propriétaire du château d'Assier et les entrepreneurs de la démolition figure sous le numéro 246 au volume numéro 2, des minutes passées du 2 février 1768 au 8 juin 1771, par Me Olivier, notaire royal héréditaire à Cahors pendant toute la seconde moitié du XVIIIe siècle.

Un heureux hasard l'a fait découvrir à M. Sourdrille, notaire de notre ville, qui possède les actes passés par Me Olivier et qui met avec tant de gracieuse obligeance ses archives anciennes à la disposition des chercheurs et des amis de l'histoire locale.

Comme nous étions présent, dans son étude, au moment de sa trouvaille, occupé à des recherches sur les anciens chirurgiens de Cahors, il nous en fit part immédiatement en ajoutant que cette pièce intéresserait la Société des Etudes. Nous le remerciâmes vivement de son excellente idée et c'est pour la réaliser que nous avons pris copie de cet acte. Sa connaissance vient donner toute la précisision nécessaire à la tradition conservée à Assier et aux environs, que c'est le duc d'Uzès qui fit démolir le château pour vendre le plomb qui existait en quantité considérable dans la toiture, et au renseignement fourni en 1831 à ce sujet, par Delpon, à la page 497 du tome Ier de sa Statistique du


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Lot. Après avoir décrit les ruines de ce joyau de la Renaissance, Delpon s'écrie non sans indignation :

« Est-ce le vandalisme révolutionnaire qui a renversé ce bel édifice? Est ce la fureur populaire qui a détruit cette demeure féodale? Non: la Révolution n'a brisé que la statue équestre de François i". Une sordide spéculation en fit vendre tous les matériaux, vers le milieu du dernier siècle, parce qu'il coutait cent francs d'entretien par an ; on se réserva seulement qu'on laisserait subsister la partie du midi où était la principale porte d'entrée, et quelques années après même, on l'aliéna avec toute la terre d'Assier »,

Il est possible que le duc d'Uzès ait voulu éviter la dépense pour l'entretien du château, qui devait sans doute dépasser cent francs par an. Inhabités depuis longtemps, les bâtiments devaient se délabrer tous les jours. Le château était situé dans un pays où rien n'attirait le propriétaire, qui devait trouver incommode et inconfortable la vieille demeure, par comparaison avec l'hôtel qu'il occupait dans la rue Montmartre. Tout édifice antérieur au XVIIe siècle passait en 1768, pour barbare et digne des Goths. Les gens de ce temps n'avaient pas pour les monuments du passé le respect qu'en ont les hommes d'à présent, quoiqu'à vrai dire, ce sentiment subisse parfois certaines défaillances, témoin, non loin d'ici, une récente histoire de vieux pont rasé sur laquelle il n'y a pas lieu d'insister.

Enfin l'argument suprême aux yeux de Monseigneur le duc d'Uzés de 1769, devait sans doute être le plaisir de toucher une somme ronde de 14.000 livres, peut être en un besoin pressant d'argent —les grands seigneurs y sont sujets comme les autres hommes — et en échange simplement des ferrailles, des poutres et des moellons, d une vieille bâtisse qui ne rappelait en rien Trianon, Louveciennes ou les hôtels bâtis au faubourg Saint-Germain par les ducs de Luynes et de Biron.

C'en était assez pour condamner le château et voici le document par lequel est prononcée cette condamnation.


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ETUDE DE Me SOUDRILLE, NOTAIRE A CAHORS

Minutes de Me Olivier, notaire-royal héréditaire à Cahors. Reg. n° 2, 2 février 1708. 8 juin 1771, n° 246

L'an mil sept cent soixante-huit et le vingt et deuxième jour du mois de may, dans ladite ville de Cahors en Quercy, après midy par devant nous notaire royal, héréditaire habitant ladite ville soussigné, présents les témoins cy-après nommés, fut présent Messire Arnaud Philippe Joseph de Fouillac, seigneur de Mordesson, baron de Gramat, habitant de la présente ville, faisant pour et au nom de très haut et très illustre seigneur, Monseigneur François-Emmanuel de Crussol, duc d'Uzès, premier pair de France, prince de Sogon (il, comte de Crussol, marquis de Monsalés, Montespan et Gondrin, baron de Florensac, Biard, Aymargues, Bellegarde, Remoulins, Saint-Geniés, Puycornet, Asssier, Capdenac, seigneur de plusieurs autres terres et seigneuries, seigneur pour moytié du duché de Chatelleraud et de la terre de TounnayBoutonne, première baronnie de Saintonge et Angoumois, maréchal des camps et armées de sa Majesté, demeurant à Paris, en son hôtel rue et porte Montmartre parroisse, Saint-Eustache, auquel seigneur duc d'Uzès, ledit seigneur de Mordesson promet faire approuver et ratifier le contenu au présent dans un mois, à peine de tous dépens dommages et intérêts : lequel faisant comme dit est a vendu et vend aux sieurs Jean Barayre dit Lacrose marchand, Jean Vilhiés me menuysier et Jean Lafage maître masson, habitants de la présente ville, solidairement l'un pour l'autre et un d'eux et seul pour le tout, avec renonciation expresse aux bénéfices d'ordre de division et discussion, icy présents stipulants et acceptants, faisant tant pour eux que pour et au nom de Jacques Carbonel me menuysier habitant du lieu d'Assier d'icy absent avec promesse de luy faire approuver et ratifier le présent sous toutes ces clauses dans le mois, ou en cas de refus de la part dudit Carbonnel s'engageant les susdits Carayre, Villiès et Lafage de fournir audit sei(1)

sei(1)


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gneur dans ledit delay un quatrième acheteur aussy solidaire bon et solvable sçavoir des materiaux du château d'Assier appartenant à mondit seigneur le duc d'Uzès sous ses réservations.

Neantmoins et aux prix clauses et conditions suivantes :

En premier lieu lesdits acheteurs prendront touts les bois ferrures grilles fer plomb toits planchers dudit château, ensemble toute la bâtisse intérieure du corps de logis qui se présente en face en entrant dans la cour dudt château comme aussy toute la bâtisse intérieure de l'aile droite et de l'aile gauche dudt château.

En second lieu ils prendront toute la massonerie des murs extérieurs dudt corps de logis et desdtes deux ailes qu'ils ne pourront démolir que jusqu'au niveau des clefs de voute du Rais de de Chaussée, lesquelles voutes cependant lesdts acheteurs pourront démolir et leur appartiendront en laissant la partie des murs extérieurs a la hauteur susdite.

En troisième lieu lesdts acheteurs laisseront intactes toutes les bâtisses tant extérieures qu'intérieures du corps de logis d'entrée et des deux tours qui le flanquent. Pourront néanmoins lesdts acheteurs prendre et leur appartiendra l'escallier qui est à gauche de la cour en entrant et dont la balustrade est en pierre.

En quatrième lieu pourront lesdts preneurs faire lad" démolition et prendre lesdts matériaux quand bon leur semblera et lesquels dits matériaux ils auront la liberté de laisser sur place pendant l'espace de douze années après lesquelles ce qui pourra rester des matériaux sur la place appartiendra à mondit seigneur le duc d'Uzès sans que lesdtr preneurs puissent être tenus de les emporter non plus que les décombres desdites démolitions.

Laquelle vente ledit seigneur de Fouillac de Mordesson a fait et fait aux susdits acheteurs, faisant comme est dit cy dessus au prix et somme de quatorze mille livres, payables sçavoir : trois mille livres en huit jours portée et rendue chez ledt seigneur de Mordesson, quatre mille livres dans six mois à compter de ce jour et les sept mille livres restantes dans un an à compter dudit présent jour, portée et rendue comme dessus.

Demeurant néanmoins convenu malgré lesdts attermoyements qu'au cas où lesdts acheteurs vendraient avant ledt terme desdts matériaux pour de plus grandes sommes que celles promises auxdts termes ils seront tenus de les compter d'avance audit seigneur de Mordesson,


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jusques à concurrence des sommes qu'ils devront et jusques au parfait payement de la susdte somme de quatorze mille livres, laquelle dite somme lesdts acheteurs faisant comme il est dit cy dessus tant pour eux que pour leur associé absent promettent et s'engagent de payer sous ladite clause solide par toutes voyes dues et raisonnables même par corps le cas y echeant et à l'observation de ce dessus les dites parties se sont obligées et tous et chacun leurs biens présents et à venir. Fait lu en entier et passé en présence de MM. Jean Guillaume Moysen, docteur en droit avocat en parlement et Jean Barayre cordonnier habitant lad" ville soussignés après mondt seigneur de Mordesson et ledt Vilhiès non les autres parties qui ont déclaré ne sçavoir de ce requises et nous. — Signé Fouillac de Mordesson, Villiés, Moysen, Barayre, Olivier ne royal.

Le 29 may 1768 — mêmes minutes n° 248 — le sieur Carbonel, maître menuisier à Assier absent le jour de la rédaction de l'acte précédent entend lecture de cet acte, déclare l'approuver et le ratifier solidairement avec les autres acheteurs.

BERGOUGNOUX.


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LES COUTUMES

DE MONTCUQ

I

M. E. Dufour a publié, en 1861, le texte des anciennes coutumes de Montcuq et s'est servi pour cela d'une copie trouvée aux Archives municipales de cette ville et datée de 1606. Au point de vue philologique cette copie est très défectueuse ; on voit bien que le scribe avait de vagues, notions de la langue romane parlée au XIIIe siècle. Mais le 22 mars 1909, M. l'abbé Viguié déposait au siège de la Société des Etudes une copie sur parchemin de ces mêmes coutumes, vidimée en 1463 par le sénéchal du Quercy, noble Pierre de Ramon. Ce nouveau texte nous a été gracieusement communiqué et nous avons pu relever un grand nombre de fautes, parmi lesquelles quelques-unes ayant une certaine importance. Nous les signalerons article par article, afin de rétablir autant que possible le vrai texte. Mais auparavant, il y a un détail que ne pouvait noter M. Dufour, parce qu'il l'ignorait; nous voulons parler de la procédure qui a précédé et suivi la confirmation des coutumes faites le 30 novembre 1463. Ces actes que nous avons extraits des minutes de Natalis, notaire à Montcuq (K n° 74 — fos 87 à 89, 89 à 91, 91 à 92, et 127 à 132, aux Archives départementales de Tarn-et-Garonne), nous paraissent de nature à compléter l'étude de M. Dufour, en fournissant des explications à la fois intéressantes et inédites. C'est ce qui nous a engagé à rédiger cette note.

Louis XI venait de succéder à Charles VII, en 1461. Aussitôt, suivant l'usage, les différentes villes du royaume lui envoyèrent des délégations pour obtenir confirmation de leurs privilèges. Nous disons « suivant l'usage », car nous avons eu sous les yeux une série d'actes de ce genre concernant la ville de Lauzerte, en attendant les lettres patentes datées de Nogent, mai 1464.


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Donc, à l'avènement du nouveau roi,les habitants de Montcuq décidèrent de lui demander confirmation de leurs coutumes. En conséquence, le 25 octobre 1463, une assemblée générale de la communauté se tint dans l'église Saint-Hilaire sous la présidence des consuls qui étaient « nobles et puissants seigneurs Guillaume de Luzech, chevalier, seigneur de la baronnie de Luzech et des Tours, Pierre de Ferrières, seigneur de Bagat, en la juridiction de Montcuq, Pierre de Lapeyrière, Guillaume de Vessia als Grezels, Jean de la Vigaria, Pierre Coyne et Aymeric de Sabatier. Ils étaient assistés de leur conseiller « honorable et circonspect Jean de Valle, docteur ès-droits et recteur de ladite église Saint-Hilaire ». Chaque paroisse ou section de la juridiction était représentée : noble Bertrand d'Orgueil, seigneur de Marcilhac, Galhard de Baynac, seigneur de Floressas, Raymond de Maresc, prêtre et recteur des églises de Sainte-Croix, Saint-Félix et Belmontet, annexes, Me Durand Pagès, Raymond de Nasses, bourgeois, Pierre Lacarrière, als Volve, savetier, Jean Sabatier, marchand, Jean Chevalier, als Pechmécha, noble Pierre Correch, forgeron, Jean Dautefage, als Dossa, forgeron, Raymond de Brueil, als Vitrac, préparateur de draps, Bernard de la Carrière, forgeron, Antoine Solabellis, tisserand, Guillaume Roguié, tailleur, Bernard Compastier, tailleur de pierre, de Montcuq ; Jean de Bosc et Géraud de Ségui, laboureurs, du lieu et paroisse des Cabanes de Saint-Georges ; et Jean de Montméja, als Dutcorn, et Jean Filhol, du lieu et paroisse d'Escayrac: Hugues Lacquié,de St-Cyprien; Raymond Medici. als del Boys, de Montlauzun ; Bertrand Penne et Géraud Turlan, de St-Daunès ; Guillaume Adhémar, de Lacapelle près Tozac ; Arnaud del Castanhier, de Lebrel ; Pierre del Garric, de StGéniès ; Jean Mirc, de Sainte-Croix ; Jean de Belmas, als de Belugo, de Sérinhac.

D'un commun accord, ils avaient décidé pour le bien de la communauté, de supplier « noble, magnifique et puissant homme Me Pierre de Ramon, chevalier, seigneur de Folmont, en ladite juridiction, chambellan et conseiller du seigneur roi de France, et son sénéchal pour le Quercy, l'Agenaiset la Gascogne, de vouloir bien leur obtenir confirmation de leurs coutumes, franchises et libertés ». Celui-ci avait répondu « qu'il était fils de la ville et de l'honneur de Montcuq,comme ses prédécesseurs l'avaient été dans le passé et comme ses successeurs, Dieu aidant, le seraient à l'avenir, et qu'alors, si les consuls et habitants voulaient bien lui donner la somme de 300 écus d'or, monnaie de


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France courante, il se faisait fort de leur obtenir confirmation de leurs privilèges et libertés, et de leur apporter ici même l'acte de confirmation signé et notarié ». A cela les consuls avaient répliqué qu'ils ne pouvaient s'engager sans avoir au préalable pris l'avis de la communauté. Aussitôt l'assemblée délibère et, reconnaissant combien les libertés et coutumes ont été utiles, dans le passé, et combien elle en attend du bien pour l'avenir, décide d'en demander la confirmation par l'intermédiaire dudit Pierre de Ramon, moyennant la somme fixée de 300 écus d'or, qu'elle s'engage à payer. (L'acte en latin est rédigé en présence de Jean de Valle, docteur es-droit, Jean de Luzech, écuyer, et Me Pierre Sabatterii, notaire de Lauzerte.)

Immédiatement après, les consuls, en leur nom et au nom de la communauté s'engageaient par obligatiou à payer les 300 écus d'or aux conditions fixées, se réservant, si la confirmation des coutumes n'est pas obtenue et apportée comme il est dit, de faire casser leur obligation et de ne point verser la somme convenue. (Autre acte en latin, passé en présence de Jean de Valle, recteur de St-Hilaire, Raymond de Maresc, recteur de Sainte-Croix, seigneur Jean de Luzech, écuyer, et Me Pierre Sabatterii.)

Le lendemain 26 octobre, nouvelle assemblée convoquée par les consuls sur la place publique appelée « lo canto des mal cosseilh » pour la répartition de l'imposition nécessitée par le vote des 300 écus d'or. Etaient présents avec les consuls déjà nommés noble Jean de Montaigu et Jean de Bosc, autres consuls ; puis vieunent Me Pierre Solabellis, notaire, Pierre Grégoire, Rolland Rigal, savetier, Pierre de Corno als Boet, Pierre Couderc, Raymond Viguié, tailleur, Arnaud de Lagrèze, Guillaume de Garrigue als de Podio, Pierre de Boyé, als de Pechméja, Jean de Raynes, Me Guillaume Castainh, prêtre, recteur de Lebrel, Barthélemy de Lacombe, Hugues de Murat, als Vaca, Raymond del Caria, air Rabié, Btrnard del Garric, als Rabié, Jean de Lanie, Arnaud Dandrieu, Jean Drovinhac, Pierre de Vessia, Raymond de Cayrel, Galhard de Salevaque, Marot de Verdie, Antoine de Coste, Raymond de Miraval, Barthélemy de Borredon, Raymond Vassal, jeune, Jean Dagran, Jean de Ferrussac, Pierre de Murat, als Vaca, Raymond de Pleysse, Pierre Brugel, als Dupuy, Raymond Girart, Pierre del Caria, als Rabié, Jean de Lolmie, tisserand, Etienne Pages, savetier, de Montcuq) Guillaume de Corno, de Roulhac. Il fut rappelé ce qui avait été décidé la veille, à savoir qu'on payerait la somme de


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300 écus d'or au sénéchal du Quercy, noble Pierre de Ramon, et moins, si cela était possible, pour obtenir confirmation de leurs coutumes; et ce en présence de Me Barthélemy Blandès, prêtre de Montcuq, et de nobles Jean de Luzech et Raymond de Cézérac, de Lauzerte.

La confirmation des coutumes fut accordée par lettres patentes du roi Louis XI, datées d'Abbeville, le 30 novembre 1463 (1). Donc les habitants de Montcuq avaient obtenu satisfaction. Il ne leur restait plus maintenant qu'à payer à noble Pierre de Ramon la somme de 300 écus d'or souscrite en sa faveur par obligation du 25 octobre précédent. Mais la difficulté était de répartir équitablement cette somme entre les habitants de Montcuq et ceux de la juridiction. N'ayant pas été d'accord, comme en fait foi l'acte qui suit, ils décidèrent de nommer des arbitres et de s'en remettre à leur solution.

Donc le vendredi, 12 février 1463 (v. s.), il y eut assemblée générale clans la maison de Pierre de Lapeyrière. Etaient présents : noble Guillaume de Luzech, chevalier, seigneur baron de Luzech et des Tours, noble Bertrand de Saint-Géry, seigneur de Saint-Géry, noble Marqués de Saint-Gilles, seigneur de Genebrède, noble Pierre de Ferrières, seigneur de Bagat, Pierre de Lapeyrière, Guillaume de Vessia, als Grézels, Aymeric de Sabatier, Pierre Coyne, consuls ; Pierre de Carrière, als Volve, Jean Dautefage, als Dossa, Armand Dandrieu, Raymond Viguier, Guillaume Roguier, Bertrand Compastie, Bernard Salinié, Pierre Couderc, Barthélemy de Brocart, Raymond de Narcès, et Barthélémy de Lacombe, de Montcuq ; Pons de Las Bouygues, Bertrand de Causet, de Saint-Pantaléon ; Jean de la Croix, Antoine de Prat, de Saint-Daunès ; Armand del Cazals, als novi loci, de Bagat ; Etienne Raymond et Guillaume de Breuil, des Cabanes Si-Georges ; Jean Marlhac et Jean Espinasse, d'Aussac ; Jean Filhol d'Escayrac ; Hugues Lacguié, de St-Cyprien ; Raymond de Blay et Jean de Coste, de Lolmie ; Raymond Aymeric et Gèraud de Coste, als Volvènes, de Tréjouls ; Gasbert Simonet, de Monllauzun ; Raymond de Bouc, de Bouloc ; Armand del Castanhier, Jean de Coste et Jean del Boyssou, de Lcbrel ; Etienne del Solié, als de Maus, de Sainte-Croix ; Guillaume de Lacombe, als de Rollan, des Tours ; Guillaume de Vayssière, de Belmontel ; Jean Serres, de Saint-Matré ; Jean Daymart, de Sérinhac ;

(1) Mais la publication n'en fut faite que le 14 mars suivant.


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Jean de Lafaurie, de Floressas. Les consuls et habitants de Montcuq prétendaient que la somme de 300 écus d'or devait être répartie par feux « per belugam », indistinctement « le fort supportant le faible, et le riche supportant le pauvre », entre tous les habitants tant de la ville que de la juridiction. De leur côté, les forains affirmaient que, de toute ancienneté, ils avaient coutume de participer aux impositions » de trois parts les deux et non autrement, et ils entendaient qu'il en fût ainsi pour le présent ». Ils n'étaient donc point d'accord et il fallait cependant une solution prompte.

Ils décidèrent alors d'un arbitrage et nommèrent à cet effet, savoir, les consuls et les habitants de la ville de Montcuq, Raymond de Narcès et Barthélemy de Lacombe, et les forains, Arnaud dels Cazals, als de novi loci, de Bagat, et Bertrand Causel, de Saint-Pantaléon, pour la section « pro brachio », de Saint-Pantaléon ; Jean Mailhac, de Pechpeyroux, et Jean Filhol, d'Escayrac, pour la section des Cabanes de St-Georges ; Hugues Lacquiè, de St-Cyprien, et Gérard de Coste, de Tréjouls, pour la section de St-Cyprien ; Gasbert Simonet, de Montlauzun, et Etienne del Solié, als de Maus, pour la section de Montlauzun, de Bouloc, de Lebrel, de Sainte-Croix, de St-Félix et des Tours ; Jean Daymart, de Serinhac, et Jean de Lafaurie, pour la section de Belmontet, Saint-Matre, Sèrinhac, Floressas, Ferrières, Cabanac et Mauroux, Tozac et Lacapelle près Cabanac, Amra et Orgueil. Tous ces élus promirent par serment de solutionner au plus tôt le différend et de rendre leur sentence à laquelle souscrivirent d'avance les délégués pour eux et les absents. Et ce, en présence de Pierre Grégoire et Guillaume de Borredon. de Montcuq, Vital et Antoine Rouzières, de Saint-Félix et de Jean Natalis, notaire qui avait reçu l'acte (en latin).

La nuit, dit-on, porte conseil. C'est pourquoi le lendemain, samedi, 13 février, étant donné que « ubi est multitudo ibi est conjusio, et etiam quoi capila tot sensus », les arbitres élus la veille se réunirent de nouveau dans la même maison de Pierre Lapeyrière, c'est-à-dire : Noble Guillaume de Luzech, noble Bertrand de Saint-Géry, noble Marqués de Saint-Gilles, noble Pierre de Ferrières, damoiseau,Pierre de Lapeyrière, Guilhaume de Vessia, Aymeric de Sabathier, Pierre Coyne, consuls, Raymond de Narcès, Barthélemy de Lacombe, Arnaud dels Cazals, Bertrand Causet, Jean Marlhac, Jean Filhol, Hugues Lacquié, Gèraud de Coste, Gasbert Simonet, Etienne de Solier, Jean Daymart, et Jean de Lafaurie. Après s'être communiqué leurs impressions, ils


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reconnurent qu'ils étaient trop nombreux pour terminer vite et bien le débat qui existait entr'eux et leurs commettants, et résolurent de s'en remettre à la décision de quelques-uns. En conséquence, de leur plein gré, ils choisirent et nommèrent en leur lieu et place noble Guillaume de Luzech, consul l'an présent, noble Bertrand de Saint-Géry et noble Marqués de Saint-Gilles, promettant, à peine d'une amende de 100 liv. tournois, de s'en tenir à leur décision sur toutes les questions qui devraient être traitées. Présents : Harnot Rigal, des Tours, Jean Pages, de la Brugaria, Jean Lacaze, de Montcuq. (Acte en latin).

Le même jour, en vertu de leur mandat, les arbitres élus, Guillaume de Luzech, Bertrand de Saint-Géry et Marques de Saint-Gilles, se réunirent avec tous les délégués, et, s'étant assis sur un banc de bois, « super quoddam scamnum fustis sedenlibus, more majorum », ils prêtèrent serment la main sur les saints évangiles, se signèrent du signe vénérable de la sainte croix et rédigèrent ainsi leur sentence :

1° Il est entendu que les parties, savoir les habitants de Montcuq, d'une part, et les forains de l'autre, seront bons amis, que tout débat cessera entre eux pour faire place à la concorde ;

2° Au sujet de la somme de 330 écus d'or (1), les forains devront en fournir 240, et les habitants de Montcuq, 90 ;

3° Les frais de procédure s'élèvent à la somme de 4 écus d'or, ils seront payés de moitié ;

4° En rendant leur sentence, les arbitres n'entendent point préjudicier en quoi que ce soit aux privilèges, coutumes, franchises et libertés droits et possessions de la ville et de la juridiction ;

5° Les arbitres s'engagent et sont prêts à s'interposer entre les parties, toutes les fois qu'il sera fait appel à leur concours pour le bien de la paix.

Cette sentence fut acceptée par tous les délégués présents faisant pour eux et leurs mandants et ils s'engagèrent à s'y conformer de point en point:

L'acte, également en latin, est reçu par Jean Natalis, notaire de Montcuq, en présence de Harnot Rigal, des Tours, Jean Pages, de la Brugaria, et Jean Lacaze, de Montcuq.

B. TAILLEFER. Cazillac, 8 mars 1911.

(1) Les 30 écus d'or en plus sont pour divers frais.

(A suivre)


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PROCES-VERBAUX DES SÉANCES

DE LA SOCIÉTÉ DES ÉTUDES DU LOT

PENDANT LE 2e TRIMESTRE DE 1911

Séance du 3 avril 1911 Présidence de M. PA UMES, président semestriel

Etaient présents : MM. Albe, Crudy, Gary, Dois, chanoine Tourné, Rames, Girma, Daymard, St-Eloi, Billières.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

M. le Secrétaire général dépose les publications reçues.

Il signale dans la Revue de l'Agenais, (janvier-février 1911) les Extraits de la correspondance de Jean-Jacques de Cossonne, brigadier de cavalerie (17721788), publiés par M. J.-B. Guilhaoeon.

Le chevalier de Cossonne, de la noblesse d'Agenais, était brigadier des gardes du corps de la compagnie écossaise et tenait garnison à Beauvais. C'est de là qu'il écrivait à son cousin, messire Lagrange de Ladoux, lequel habitait chez son frère Jacques et sa cousine la baronne de Ferussac, au château de Meaux, paroisse de Saux, en Quercy.

M. de Cossonne semble avoir été un fin gourmet, qui appréciait particulièrement les produits de notre pays. Il parle, dans sa correspondance d'un certain « vin del Cantou » qui le rendait « sûr de ses coups » quand sa cousine lui en faisait boire « avant de partir pour la chasse ». Il demande à M. de Ladoux de lui « envoyer une bouteille de ratafia de noix... infiniment meilleur à cause de labonne eau de vie du pays ». Il faisait aussi expédier des oies en baril par « le bureau de roulliers » de Cahors. Il nous apprend qu'au printemps de 1777 il a fait tellement froid « que les fruits ont été emportés et les vignes endommagées... qu'il y a beaucoup de misère, que tout est manqué dans le pays ». II prie son cousin de lui envoyer « une boite pleine de truffes » dont il veut faire présent, à condition que la truffe « soit un peu présentable et qu'elle ne soit pas exhorbitament chère ». La truffe était donc très appréciée et se vendait bien à cette époque.


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M. le Secrétaire général communique à la Société le texte d'une pétition adressée au Parlement par « des artistes, des écrivains et des savants de toutes croyances, sans distinction de partis », pour protester contre « de nombreuses et récentes destructions d'églises » et « demander... qu'une protection analogue à celle des monuments historiques, des sites pittoresques et des réserves artistiques soit attribuée à ces modestes sanctuaires ».

La Société des Etudes adhère à celte pétition et décide qu'elle en fera présenter un exemplaire, signé de M. le Président et des membres du Bureau, à M. le Président de la Chambre des Eéputés.

MM. Lucie et Marty, présentés à la dernière séance, sont admis à faire partie de la Société, à titre de membres correspondants.

M. Paumes donne lecture d'un article de l'Opinion (16 juillet 1910) dans lequel M. Frédéric Barbey raconte les enthousiasmes inconsidérés, les déceptions, la ruine du premier partisan des Nauendorff en France, M. François Albouys, arocat à Cahors, fils du député du Lot à la Convention.

M. le Dr Bergougnoux établit, à l'aide d'un « contrat réglant les conditions de la démolition du château d'Assier en 1768, et de la vente des matériaux provenant de cette démolition », que ce n'est pas « la bande noire », comme on l'a dit souvent, mais son propriétaire, le duc d'Uzès lui-même, qui a démoli le château bâti par Galiot de Genouillac, un des chefs-d'oeuvre de la Renaissance française. Ajoutons, toutefois, à sa décharge, que ce château, depuis longtemps inhabité, commençait à tomber en ruines. Les matériaux du château d'Assier furent vendus 14000 livres.

L'acte à propos duquel M. Bergougnoux a écrit cette étude qui sera publiée dans le Bulletin de la Société, a été découvert par lui récemment, dans les archives de Me Sourdrille, notaire à Cahors.

Séance du 24 avril 1911 Présidence de M. PA UMES, président semestriel

Assistaient à la séance : MM. le Dr Cadiergues, Combes, Crudy, Daymard, Depeyre, Gary, Girma, Viguié.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

M- le Secrétaire-général dépose les publications reçues. Il signale :


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1° Dans le Bulletin archéologique de la Corrèze (Brive), 4e livraison 1910, une publication de noire confrère M. l'abbé Albe : « Titres et documents sur le Limousin et le Querci » 3e partie ;

2° Dans la Revue de la Haute-Auvergne (1910, 4e fascicule) du comte de Dienne : « Le maître Guillaume de Carlat dans la tentative d'envoûtement de Bernard VII d'Armagnac » ;

3° Dans le Bulletin trimestriel de la Société des Antiquaires de Picardie : « Vieux Lutrins », de M. Brandicourt ;

4° Dans la Quinzaine du Quercy, 15-30 avril 1911, la suite des articles de M. Cavalié sur les familles célèbres ou distinguées de Figeac : Les Séguier ;

5° Dans la Revue Religieuse du diocèse de Rodez, 21 avril 1911, un article critique de M. Molinié, docteur ès-lettres, sur les Poésies de M. le comte d'Armagnac, que nous avons déjà signalées.

M. le Secrétaire-général lit une lettre de M. Cavalié, président de la Société des Amis du Vieux-Figeac. Notre confrère se réjouit de l'aimable accueil que notre Société a fait à M. Malrieu, membre de la Société-soeur. Il sera très heureux de faire avec nous l'échange du Bulletin et de nouer entre les deux Sociétés des relations amicales.

M. l'abbé Viguié signale la publication d'un nouveau volume de l'Inventaire sommaire des Archives départementales de Tarn-et-Garonne. Ce volume, qui contient tout le « fonds d'Armagnac », est présenté au public par M. Ch Samaran, archiviste aux Archives Nationales, en une substantielle introduction. Il a pour nous un intérêt particulier, à cause du rôle considérable que la puissante famille d'Armagnac a joué en Quercy au XIVe et au XVe siècle et il serait à souhaiter qu'un de nos érudits pût y relever et analyser les documents ayant trait à notre histoire locale.

M. Crudy donne lecture d'une plaquette publiée le 30 octobre 1820 par le comte de Mosbourg, sous ce litre»: Réponse à une calomnie. Candidat à l'élection législative du 5 novembre 1820, il avait appris qu'on se proposait de mettre en suspicion son patriotisme, en raison du rôle qu'il aurait joué, en 1814, auprès de J. Murat, roi de Naples, dont il était le ministre des finances. Pour se justifier, il fait connaître la lettre qu'il écrivit à Murat, le 24.janvier 1814. Ayant appris, y disait-il, que le roi se déclarait contre la France, il considérait comme un devoir de lui adresser sa démission et le priait de l'autoriser à rentrer dans son pays. Cette lettre est suivie de la réponse de Murat : il rend hommage aux


- 174motifs

174motifs ont inspiré cette démarche, refuse d'accepter la démission de son ami d'enfance, mais lui accorde un congé illimité. Mosbourg cherche ensuite à expliquer la conduite du roi de Naples et s'efforce de prouver qu'en s'alliant aux ennemis de Napoléon il restait Français de coeur. Malgré cette belle défense, le comte de Mosbourg ne fut pas élu.

M. Maratuech, entreposeur des tabacs en retraite, demande à faire partie de la Société à titre de membre résidant. Il est présenté par MM. Paumés et Daymard.

M. Combes continue la lecture de son analyse des registres municipaux de la commune de Cahors pendant la Révolution.

Séance du 8 mai 1911 Présidence de M. Paumes, président semestriel

Etaient présents : MM. Combarieu, Combes, Crudy, Daymard, Depeyre, Dois, Gary, Rames, Albe.

M. le Secrétaire général rend compte des publications reçues. Le dernier numéro (19) de la Quinzaine du Quercy renferme la deuxième partie d'une lettre de Louis XI (1475) par laquelle il donne aux habitants de Figeac la maison de Balène et une rente de 200 livres tournois due par eux au comte d'Armagnac. Cette lettre intéressante est publiée à propos d'une notice sur Séguier (bien qu'il n'y soit fait aucune allusion à ce personnage), par M. Cavalié, le distingué président des Amis du Vieux Figeac, qui depuis quelque temps écrit dans cette revue des notices sur ses compatriotes illustres.

Le Bulletin de la Société historique et archéologique du Périgord de mars avril 1911 contient deux documents relatifs à Fénelon. La collation à la cure de Calviac et Sainte-Mondane venait d'être acquise par le frère aîné du jeune doyen de Carennac, seigneur de cette paroisse, qui avait présenté l'abbé de Pinhol aux vicaires généraux de Cahors pour recevoir l'investiture ; mais son oncle, l'évêque de Sarlat, qui avait des droits aussi comme prieur, le prieuré de la paroisse étant uni à sa mense épiscopale, se plaignit assez vivement. Le curé écrit à Fénelon au sujet de cette aflaire. Le second document est l'élection, par les chanoines de Saint-Avit-Senieur, de Fénelon, déjà doyen de Carennac, comme prieur de leur monastère (23 janvier 1688). Ce document absolument inconnu jusqu'ici des historiens de Fénelon ne nous prouve pas que celui-ci ait joui de ce prieuré.


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Le Bulletin historique et philologique du Comité des travaux historiques et scientifiques (année 1910) renferme une communication de M. Joseph Durieu sur Fénelon en 1709. Ce mémoire confirme ce que l'on savait déjà de la charité de l'archevêque de Cambrai. « Le Fénelon de la légende est à vrai dire le Fénelon de l'histoire. » Le même bulletin contient sous ce titre : un Projet d'alliance monarchique sous la Terreur une étude de M. Paul Feuillâtre sur les négociations poursuivies de 1792 à 1794 entre la France et la Suède par l'intermédiaire de Raymond de Verninac de Saint-Maur, notre compatriote. L'habile diplomate réussit à obtenir un projet d'alliance défensive et il ne tint pas à lui que le projet, qui d'ailleurs servit à notre pays, ne devint une alliance très effective. L'étude est précédée d'une courte notice sur Raymond de Verninac et sa famille.

M. Rames, trésorier du Syndicat d'initiative, dépose sur le bureau de la Société, dont plusieurs des membres, comme c'est assez naturel, font partie du Syndicat, deux exemplaires du compte rendu de l'Assemblée générale qui s'est tenue à Figeac le 12 mars 1911.

M. Albe lit la première partie de nouvelles notes sur Carennac : Carennac pendant la période révolutionnaire, et M. Combes continue la lecture de ses analyses et extraits des registres de Cahors pendant la même période (cette fois du 6 juin au 30 juillet 1797).

Entre temps on procède à l'élection de M. Maratuech, ancien entreposeur des tabacs à Souillac, présenté à la dernière séance. Le nouveau membre est admis à l'unanimité.

Séance du 22 mai 1911 Présidence de M. Paumés, président semestriel

Assistaient à la séance : MM. Albe, Combes, Gary, Grangié, Rames, Saint-Eloi, Viguié.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

M. le Président dépose les publications reçues et donne lecture d'une lettre de M. T. de Montalembert demandant des renseignements sur les mines de fer du Quercy qui ont pu être exploitées par les Gaulois, sur les statues, monnaies, vases ou autres objets qui auraient été découverts aux alentours, sur les « chemins ferrés » et l'étymologie de cette appellation, etc., etc.


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M. Grangié lit une note sur la dépopulation du Quercy après la guerre de Cent ans, qui confirme les renseignements publiés par noire confrère, M. Albe, sur ce sujet.

M. Paumés fait connaître à la Société un curieux document extrait des registres municipaux de la commune de Marcilhac pendant la Révolution. C'est un discours prononcé par le maire de cette commune, M. Falret de Lagasquie, le 9 juin 1791, à propos du Bref du pape Pie VI condamnant la Constitution civile du clergé (10 mars 1791).

L'orateur traite de faux « cette pièce monstrueuse faite pour provoquer le courroux du ciel et de la terre » ; il annonce qu'il va « venger le premier pasteur de l'Eglise d'une calomnieatroce en recommandant à l'exécration publique la main sacrilège qui l'a témérairement compromis » ; il s'efforce de justifier l'Assemblée nationale, qui a « rétabli la religion sur son trône usurpé par les prêtres » et la Constitution civile du clergé par laquelle « nos législateurs n'ont pas cru offenser Dieu en faisant pratiquer les préceptes de l'Evangile ».

Il essaie ensuite de réfuter point par point, avec une violence de langage tout à fait dans le goût de l'époque, ce « prétendu bref » qui met « dans la bouche du successeur de St-Pierre les expressions du fanatisme et de l'impiété. » Enfin il affirme que ce document « ne peut qu'être l'ouvrage de l'abbé Rayou qui l'a contresigné. »

« Livrons, s'écrie-t-il en terminant, livrons cet homme à l'indignation, au mépris de toutes les générations et vengeons le chef visible de l'Eglise du ridicule et de l'opprobre dont cet écrivain téméraire a voulu le couvrir. En conséquence, Messieurs, pour prouver au pape notre respect pour sa personne et notre invincible attachement à la religion, je demande qu'il soit arrêté que l'ouvrage que je viens de vous dénoncer sera exposé dimanche prochain, 12 du courant sur la place publique où il sera à une potence afin que tous les citoyens de notre commune puissent lui payer ainsi qu'à son auteur leurs tributs de mépris et d'indignation et que à l'issue des vespres paroissiales, en présence du corps municipal, de la garde nationale et du peuple assemblés, cet écrit scandaleux sera livré aux flammes et jeté dans un bûcher, là, dressé à cet effet ; qu'il sera imprimé douze cents exemplaires de votre arrêté pour être envoyés aux municipalités, corps administratifs et sociétés palriotiques du département du Lot et finalement qu'il en sera adressé . un extrait traduit en latin à M. le cardinal Zelada, notre ci-devant seigneur (ce fut le dernier abbé de


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Marcilhac) avec une lettre pour le prier de la présenter au pape comme un hommage solennel rendu à ses vertus sa piété et ses lumières. »

Ajoutons que ce Bref était parfaitement authentique et que depuis sa publication il avait amené un grand nombre de prêtres à rétracter le serment qu'ils avaient prêté à la Constitution civile du Clergé. De là l'irritation qu'il provoquait parmi les partisans de la Révolution.

M. l'abbé Albe signale dans le Correspondant (10 mars 1911), un article de M. Imbart de La Tour sur ta crise religieuse du XIVe siècle, où le rôle joué par notre illustre compatriote, le pape Jean XXII, est fort justement apprécié.

Il donne aussi lecture de documents relatifs à la fondation, par les Bénédictins de Saint-Maur, dans les bâtiments de leur monastère de Souillac, d'un collège où ils donnaient gratuitement l'instruction aux enfants de la ville et des environs. Ce collège, ouvert le 31 octobre 1788, fut bientôt fermé par suite de l'expulsion des religieux, malgré les protestations du Conseil Général de la commune.

M. l'abbé Viguié lit un article de M. Armand Praviel sur le Quercy, ses sites merveilleux, ses curiosités naturelles, ses vieilles églises, ses monuments, les divers aspects de son sol, ses poètes, ses artistes, ses écrivains.

Al. Paumes signale une note de la Revue historique où M. Monod cite, à propos de Gambetta, l'article nécrologique sur M. l'abbé Castagne, publié par notre confrère M. Sol dans la Revue religieuse.

M. Combes continue la lecture de ses analyses des registres municipaux de Cahors pendant la Révolution. Les faits qu'il signale sont compris dans la période qui va du 6 au 31 juillet 1798.

Séance du 12 juin 1911 Présidence de M. Paumes, président semestriel

Etaient présents : MM. Albe, Combes, Crudy, Gary, Girma, Daymard.

M. le Secrétaire général, parmi les publications reçues signale : La Quinzaine du Querci : Un article de M. Cavalié concernant la topographie de Figeac et le récit d'une excursion faite par la société-soeur, les Amis du Vieux Figeac, à Capdenac, qui pour nos voisins a toujours été Uxellodunum.

La Revue de l'Agenais : La suite d'une étude déjà signalée de M. Momméja sur les plaques de cheminées périgourdines et agenaises et du»


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même M. Momméja une note sur le classement dans les archives du Tarn-et-Garonne du fonds d'Armagnac.

La Reçue Religieuse de Cahors et de Rocamadour : Une note de M. l'abbé Albe sur les prêtres morts pendant leur déportation ou au retour de cette déportation, au Séminaire de Cahors, où ils avaient été emprisonnés pendant l'époque révolutionnaire. M. Albe serait reconnaissant à ceux de nos confrères qui pourraient lui apporter quelques renseignements précis et authentiques sur ces prêtres.

M. le Secrétaire général lit une lettre de M. de Monzie, député du Lot et notre confrère où il promet de s'intéresser à notre pétition concernant la conservation des monuments religieux les plus modestes de notre pays.

M. Albe lit un testament qu'il a trouvé dans les papiers de la famille de Limayrac. Il est intéressant pour l'histoire de l'expansion de nos quercinois au XIIIe siècle. Il s'agit d'un certain Guiral Trapas, un marchand de Castelnau-Montratier, qui laisse quelques legs aux hôpitaux et maladreries de Londres, de Glocester, de Southampton, de Canterbury, de Salisbury, de Stafford et aux hôpitaux et maladreries de Burgos, de Palencia, de Tolède, de Santander. Le testament est de 1283. Il est écrit en roman.

Séance du 26 juin 1910 Présidence de M. PA UMÈS, président semestriel

Assistaient à la séance : MM. Albe, de Chomereau de Saint-André, Crudy, Daymard, Gary, Girma, Grangié, Marre, Viguié.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

M. le Secrétaire général dépose les publications reçues.

Il signale dans le dernier numéro de la Quinzaine du Quercy (15 30 juin 1911), un article de M. Cavalié sur l'éducation et l'enseignement à Figeac à travers les âges, et un compte-rendu très intéressant de la dernière réunion mensuelle de la société « Les amis du Vieux Figeac ».

Le bulletin de la Société archéologique de la Corrèze (janvier-mars 1911) publie une lettre de P. Brunies, professeur d'éloquence à l'école centrale du Lot, écrite probablement au cours du mois de pluviôse, an 7 de la République. Cette lettre nous apprend que Brunies était en relations avec Cabanis et Treilhard.


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La Revue du Touring-Club annonce que cette Société, à la demande du Syndicat d'initiative de Cahors et du Quercy, vient d'allouer deux crédits de 150 francs chacun, pour l'amélioration du sentier conduisant au château des Anglais, à Brengues, et pour la remise en état du chemin de Livernon à la Pierre Martine.

M. Daymard dépose une collection de lettres de part mortuaires intéressant un grand nombre de familles de Cahors et de la région.

M. le lieutenant de Chomereau de St-André signale, dans le Bulletin de la Société préhistorique française (séance du 25 mai 1911), une note de M. Malga, curé de Cels, sur des objets provenant d'une grotte magdalénienne située à Luzech, et d'une station néolithique sise à l'Impernal, près de Luzech. Ces objets, dont deux gravures jointes au texte représentent les principaux, consistent en outils d'os et de silex, poinçons, grattoirs, burins, lissoirs, provenant de la glotte, et en haches de basalte et de silex, grattoirs de jaspe, pointes de flèches à ailerons en jaspe rougeâtre, extraits de la station. La station découverte et explorée par M. Malga a cela de particulièrement intéressant qu'elle est le seul habitat néolithique signalé jusqu'ici sur les plateaux du Lot.

M. l'abbé Albe donne lecture de quelques documents recueillis par notre confrère M. l'abbé Allemand, curé de Cremps, pour sa monographie de Fons.

Le premier a trait à la peste de 1628; le second est un récit du combat de l'Estang, qui eut lieu près de Fons le 10 mars 1622, entre les protestants, commandés par Sully et son fils, et les troupes catholiques du maréchal de Thémines ; le troisième est une lettre très curieuse sur la prise du Fort du Port de Capdenac, occupé par les religionnaires, le 26 mars 1622.

Ces documents complètent ceux dont M. Cavalié a donné lecture à la société des Amis du Vieux-Figeac, dans la séance du 7 juin. Ils montrent que le vieux Sully, exilé dans sa forteresse de Capdenac, ne s'y tint pas tranquille, comme beaucoup l'ont affirmé, mais prit une part très active aux querelles des partis et pour chassa de son mieux les catholiques, à la tête de ses soldats protestants.

M. Girma dépose plusieurs exemplaires de la brochure illustrée intitulée « Le Tourisme sur le réseau des Chemins de fer de Paris à Orléans » et des affiches de la Compagnie P. O. éditées sous forme de cartes postales. Ces publications sont offertes gracieusement à la Société des Etudes par la Compagnie d'Orléans, à laquelle nous adressons nos remerciements,


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Notre confrère M. de Laroussilhe fait hommage à la société d'un volume de nouvelles « Les Remembrances Quercinoises (Choses de mon Pays) », et d'une élégante plaquette « Le secret d'amour de Galiot de Genouillac », qu'il vient de publier chez J. Girma. La Société le remercie bien cordialement.

M. Emmanuel AEgerter, publiciste à Cahors, demande à faire partie de la Société à titre de membre résidant. Il est présenté par MM. Marre et Paumés.

Il sera statué sur son admission à la prochaine séance.

MM. Paumés, Grangié, Marre, lisent diverses pièces d'Olivier de Magny, où ce poète s'affirme non seulement comme un bel esprit, plein d'imagination et de verve, mais aussi comme une âme noble et forte qui sut adresser de fermes remontrances à son roi, et comme un quercynois de race qui aima et chanta sa petite patrie.


Analyse des Registres Municipaux de la comme de Cahors

(Suite)

Sur un réquisitoire de l'agent national de la commune, le Corps municipal, considérant qu'il résulte de l'instruction ouverte contre Marie-Anne Serres que cette personne n'était pas en réalité cachée aux ci-devant Augustins ; qu'elle n'a habité chez la Papoune qu'à titre provisoire; arrête qu'il n'y a lieu à délibérer contre les citoyennes Sallèles et Papou; quant à Marie-Anne Serres, elle est renvoyée devant l'accusateur public près le tribunal criminel.

26 thermidor an II (13 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Vu une circulaire de l'employé civil de la marine chargé du service des classes, réclamantes marins cadurciens qui ne se sont pas encore rendus à leur poste, le Corps municipal dresse une liste de ceux qui ne peuvent s'y rendre pour cause de décès, d'absence ou d'incapacité physique; réclame la radiation d'un ancien marin dont les services sont très utiles à la commune; signale à la gendarmerie trois jeunes gens qui ont refusé jusqu'à présent d'aller servir dans la marine; enfin en désigne quatre qui peuvent très bien devenir marins, quoiqu'ils ne figurent pas encore dans le tableau dressé à cet effet.

Sur la demande de la Société républicaine et montagnarde, tendant à ce que la municipalité s'occupe activement de réunir de la charpie et du vieux linge à l'usage des blessés; le Corps municipal arrête :

1. — Le Ier fructidor, les femmes conduiront, à 8 heures du matin, leurs jeunes enfants sur la place de la Révolution, avec du vieux linge qu'elles mettront ou feront mettre en charpie par leurs enfants.

2. — Ce travail se fera sous des tentes. Les vieillards sont invités à s'y rendre, ou à s'y faire porter, pour «exciter le courage des guer riers, prêcher la haine des rois et l'unité de la République ».

3. — La charpie préparée et le vieux linge offert ce jour-là et les jours suivants seront déposés dans le magasin du district, qui en fera la répartition aux hôpitaux des armées et autres.

Procès-verbal relatant que, aujourd'hui à 4 heures du soir, on a brûlé dans la cour de la commune des billets de confiance non signés pour 16.498 livres, plus des billets retirés de la circulation s'élevant à la somme de 481 livres 2 sols.

28 thermidor an II (15 août 1794).— CORPS MUNICIPAL.— Vu une circulaire du directoire du district, relative au recensement des grains et fourrages, il sera ouvert un registre sur lequel les citoyens seront


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invités à venir faire inscrire lesdites récoltes ; ce registre restera ouvert pendant un mois, à cause de la difficulté que crée la rareté des ouvriers pour le battage des grains.

Le Corps municipal désigne des commissaires chargés de faire l'inventaire des meubles et effets existant-dans cette commune et ayant appartenu à Laroche-Lambert fils, guillotiné.

L'atelier à salpêtre des citoyens Brives et Moles ayant été réuni à celui de la commune, le Corps municipal invite les administrateuts du district à faire l'avance d'une somme de 6.000 livres, savoir : 3.558 livres pour payer au citoyen Brives la valeur des objets contenus dans son atelier, et le reste pour les dépenses des deux ateliers réunis. Cette somme sera remboursée sur le produit desdits ateliers, ou autrement en cas d'insuffisance.

29 thermidor an II (16 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Le citoyen Souquet est nommé commissaire pour recevoir III quintaux de grain, qui doivent être fournis à la commune selon un arrêté du District, à la charge par elle d'en payer le montant entre les mains du commissaire pour les grains.

Conformément à une lettre du District, le Corps municipal ordonne un nouveau recensement des cuirs qui se trouvent dans la commune.

2 fructidor an II (19 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Les citoyens Lacroix et Lafage sont chargés de recevoir les III quintaux de grains dont il est question ci-dessus et de les distribuer conformément au tableau qui leur sera remis.

4 fructidor an II (21 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Une revendeuse nommée La Bartasse, qui a été surprise par le notable de permanence au moment où elle voulait acheter du fruit sur le marché, est condamnée à huit jours de prison.

La même peine est infligée à la fille Laurens, 2e née, qui s'est présentée à la Maison commune sans porter la cocarde tricolore.

Conformément à un arrêté du Département, le chef de légion de la garde nationale est invité à donner la liste de ceux de ses hommes qui sont âgés de 18 à 25 ans ; d'autre part, les commissaires de police rechercheront dans la commune les jeunes gens qui peuvent être dans ce cas (1).

6 fructidor an II (23 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Réquisition

(1) Sans signature.


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écrite sur le registre par Mercier, « préposé instructeur pour l'extraction du salin et charbon dans le département du Lot », qui rappelle à la municipalité ses obligations en ce qui concerne l'extraction du salpêtre, et réclame qu'on lui fournisse dans le plus bref délai un local pour un atelier d'instruction, avec un laboratoire pour lui.

Le Corps municipal, dans sa délibération, constate qu'il a fourni pendant plusieurs mois, et bénévolement, un beau logement gratuit au citoyen Mercier; que ce dernier peut fort bien établir son laboratoire à l'atelier à salpêtre dont la surveillance lui est confiée ; il lui offre d'ailleurs secours, assistance et protection. — Le citoyen Mercier se déclare satisfait et n'insiste plus sur sa demande (1).

Vu la pétition dudit citoyen Mercier tendant à ce qu'il soit procédé à la vente d'un cheval qui lui a été livré à Commune-Affranchie (2), le Corps municipal arrête que ledit cheval sera examiné par un officier municipal et un vétérinaire.

g fructidor an II (26 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Le citoyen Delpech, serrurier, a vendu au citoyen Lescalle 32 livres de vieux fer à 11 sols la livre. Or, le prix maximum est de 5 sols: en outre, le fer ayant été pesé avec une romaine petit poids (3), il ne pèse en réalité que 20 livres; d'où une double contravention. Le Corps municipal ordonne la confiscation de la romaine, condamne Delpech à rembourser à Lescalle ce qu'il a perçu en trop, le déclare suspect et le fait mettre en réclusion.

Un membre dénonce des abus qui se sont glissés dans le service de la garde nationale; des citoyens sont fort embarrassés pour sortir de la ville, par suite de consignes données à l'insu de la municipalité, ce qui est contraire à la loi sur la garde nationale. Le Corps municipal arrête :

1. — Il est défendu aux commandants de la garde nationale de donner aucune consigne qui ne soit délivrée par la municipalité, et cela par écrit.

2. — Le commandant de service viendra chaque soir, à 5 heures, prendre le mot d'ordre.

(1) La suite de cette délibération porte en marge la date du 9 fructidor.

(2) Lyon.

(3) C'est-à-dire graduée selon les anciens poids de Cahors, dont l'usage était interdit. Le poids légal était à cette époque le poids de marc.


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3. — Toutes les dispositions légales sur la garde nationale seront ponctuellement exécutées.

4. — Le présent arrêté sera affiché à la porte de chaque corps-degarde; « la sentinelle veillera à ce qu'il ne soit point touché ».

5. — Il sera communiqué au chef de légion et aux commandants.

6. — Il sera publié à la tète de la garde nationale en présence de trois officiers municipaux.

7. — Le procès-verbal de cette publication sera signé par le chef de légion et les quatre commandants.

Sur la réquisition du citoyen Duc, agent national, on transcrit sur le registre un récépissé par lequel le receveur du district reconnaît avoir reçu dudit citoyen Duc la somme de 6.000 livres, destinée à l'échange des billets de confiance de la commune qui restent encore en circulation.

12 fructidor an II (29 août 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Le Corps municipal proteste contre la plainte adressée au District par la commune de Laroque-des-Arcs, qui prétend n'avoir pas participé aux précédentes distributions de savon ; elle a été traitée comme les habitants de Cahors et des autres communes du canton, dont le quart à peine a pu avoir l'absolu nécessaire, à cause de la pénurie de savon. Il en sera de même pour la distribution qui va avoir lieu, et pour laquelle on ne dispose que de 5 quintaux de cette denrée. Les citoyens Saintour et Bonhomme sont désignés pour distribuer et vendre ce savon aux personnes munies de bons de la municipalité.

Une députation de la Société républicaine et montagnarde vient demander qu'il soit pris des mesures pour extirper le « fanatisme » qui règne encore, surtout les ci-devant jours de fêtes et dimanches, pendant lesquels on voit notamment des femmes « faire parade de leur fainéantise superstitieuse clans les rues, sur les places et promenades, avec des parures scandaleuses » ; elle demande aussi que les citoyens soient engagés à se rendre au temple de la Raison, les décadis et autres fêtes civiques, avec plus d'assiduité que par le passé.

Le Corps municipal déclare avoir fait son possible pour faire revenir certaine partie du peuple des erreurs du fanatisme et lui inspirer le goût de travailler les ci-devant jours de dimanche et fêtes, soit par des exhortations fraternelles, soit même en sévissant avec modération contre les plus récalcitrants ; il a aussi fait ce qui dépendait de lui pour rendre les assemblées au temple de la Raison nombreuses et attentives à la lecture des lois, des rapports et des discours prononcés à la Con-


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vention. Néanmoins, toujours disposé à seconder les voeux de la Société, « avec laquelle il a juré de ne faire qu'un », il arrête ce qui suit :

1. — Les jours de ci-devant fêtes et dimanches, il sera fait de fréquentes patrouilles, ayant un officier municipal à leur tête. Les individus qui seraient surpris dans l'oisiveté, ou manifestant autrement la célébration desdits jours, seront invités fraternellement à travailler ; en cas de refus, ils en seront requis ; et s'ils refusent de nouveau, ils seront conduits à la Maison commune, pour être traités selon l'exigence des cas.

2. — Le District sera invité à faire ouvrir le plus tôt possible des ateliers pour y occuper « ces sublimes fainéants ».

3. — Les mères de famille et les vieillards sont requis de se conformer tous les jours à l'arrêté sur la préparation de la charpie. (Voir le 26 thermidor).

4. — Le comité de surveillance est invité à continuer de désigner des orateurs pour prononcer des discours, ou même établir des colloques, au temple de la Raison, les jours de décadi et de fêtes civiques.

5. — La musique de la garde nationale continuera de jouer les décadis. Ces jours-là, après la fête au temple de la Raison, il y aura des jeux et des danses sur les places publiques, ou, en cas de mauvais temps, dans les salles qui seront désignées.

6. — Copie du présent arrêté sera envoyée à la Société républicaine et montagnarde.

19 fructidor an II (5 septembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Vu un arrêté du District, un membre du Corps municipal est chargé de faire le recensement du suif existant chez les bouchers et les fabricants de chandelles.

Il est arrêté que, le 29 fructidor, il sera procédé à l'adjudication pour la fourniture de la chandelle de suif nécessaire à la commune pendant trois ans ;

— qu'il sera requis des charrettes pour aller chercher à Gourdon environ 120 quintaux de fer destinés à l'approvisionnement du district ;

— que le secrétaire est chargé de remplir, après avoir pris tous les renseignements nécessaires, les tableaux envoyés par le District, relatifs à la situation des tanneries, et de soumettre son travail au Corps municipal ;


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— que le secrétaire est aussi chargé de recevoir, chez le préposé du payeur du département, la somme de 718 livres, que la municipalité a avancée, du 6 germinal au 18 fructidor, pour fournir des vivres à des déserteurs étrangers.

28 fructidor an II (14 septembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Un boucher qui a pris à des volontaires des bons pour 4 rations de viande, tandis qu'il n'en fournissait que 3, est condamné à 8 jours de prison et à la confiscation des trois rations de viande. En outre, comme il est soupçonné de se servir de poids autres que le poids de marc, seul adopté dans toute la République, ses balances et poids seront vérifiés.

Le citoyen Lacroix, l'un des commissaires chargés de recevoir les grains pour l'approvisionnement des marchés, ne pouvant continuer ces fonctions pour raison de santé, le citoyen Lafage reste seul chargé du service ; il est autorisé à se choisir un adjoint et le Corps municipal arrête qu'ils recevront l'un et l'autre « une juste indemnité révolutionnaire ». Pour le payement desdits grains, le citoyen Lagarde est nommé à la place du citoyen Celse, occupé à rendre ses comptes au District.

Le Corps municipal, considérant que, malgré toutes les mesures qu'on a prises, les habitants de Cahors sont encore réduits à une nourriture insuffisante, n'ayant par jour, chacun, que 8 onces (1) de pain, fait avec de mauvais méteil ; que le district de Cahors, produisant peu de blé, ne peut alimenter les marchés de la ville ; que si les autres districts ont, jusqu'à présent, négligé de faire dans leurs territoires les réquisitions qui leur étaient demandées, c'est parce qu'ils ont trouvé exagérées les demandes qu'on leur adressait et qu'ily a lieu de réduire le nombre des communes auxquelles on devra s'adresser, arrête :

1. — (Liste des communes du district de Lauzerte qui doivent porter du blé au marché de Cahors.)

2. — (Liste analogue pour le district de Gourdon.)

3. — Les administrateurs des districts de Lauzerte et de Gourdon sont invités au nom de l'humanité, et même en vertu des lois, à prendre les mesures nécessaires pour que les communes ci-dessus désignées reprennent incessamment l'usage où elles étaient de fréquenter les

(1) 8 onces poids de marc égalent 245 grammes.


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marchés de Cahors, fixés aux tridi, sextidi et nonidi de chaque décade.

29fructidor an II (15 septembre 1794). — Procès-verbal de l'adjudication de la fourniture, pour 3 ans, de la chandelle nécessaire à la Maison commune, aux corps-de-garde et à l'illumination des lanternes. La municipalité s'engage à fournir le suif et l'adjudicataire devra fournir la main-d'oeuvre et le coton. La fourniture est adjugée, moyennant 8 sous par livre, au citoyen Soulès, sans concurrent.

4e jour complémentaire (sansculottide) an II (20 septembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Une députation de la Société républicaine et montagnarde vient se concerter avec la municipalité pour la célébration de la fête civique du 5e jour complémentaire. Après discussion, le Corps municipal arrête :

1. — Les volontaires blessés sont invités à se faire inscrire à la Maison commune et le citoyen Roques, officier de santé, fera connaître ceux qui se trouvent à l'hôpital et sont en état de sortir.

2.— Les citoyens se réuniront demain à 3 heures au temple de la Raison et le Comité de surveillance désignera des orateurs pour prononcer des discours et continuer les dialogues familiers.

3. — Au sortir du temple de la Raison, les sociétaires et les blessés se rendront en pompe, avec la musique, dans la salle de la Société ; ladite Société est priée d'offrir aux volontaires blessés « un souper frugal et républicain révolutionnaire ».

4. — Pendant la fête, la musique jouera des airs « harmonieux et républicains » ; on pourra danser et se livrer à tout autre amusement.

5e jour complémentaire, an II (21 septembre 1791). — CORPS MUNICIPAL. — La municipalité a été avertie que la commune du Bousquet voulait commencer à vendanger demain ; il y aurait un désordre nuisible aux propriétaires si le ban des vendanges n'était pas fixé uniformément dans les deux communes. On a écrit à la municipalité du Bousquet et les propriétaires vignerons ont été convoqués pour 2 heures à la Maison commune, où ils se sont rendus en grand nombre. Après ample discussion, et de l'avis unanime des citoyens présents, le ban des vendanges a été fixé au 8 vendémiaire prochain ; en conséquence, il est défendu aux habitants de la commune de vendanger leurs vignes avant ce jour, sous les peines portées par les lois.

3 vendémiaire an 111 (24 septembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Vu deux arrêtés du District, qui exige l'avis motivé du Corps munici-


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pal pour la vérification des comptes des officiers municipaux qui ont été chargés de vendre le blé fourni par la nation, le citoyen Celse est chargé de vérifier lesdits comptes et de faire un rapport.

Deux commissaires sont désignés pour vérifier, de concert avec ceux du bureau d'administration de l'hôpital, les comptes du citoyen Tailhade, trésorier dudit hôpital.

6 vendémiaire an III (27 septembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Le citoyen Mercier, préposé instructeur pour l'atelier à salpêtre, demande qu'on recueille les lies de vin, les tartres des tonneaux et cuves et les rafles des raisins, et qu'on fasse brûler les plantes inutiles, conformément à la loi du 29 germinal. Le Corps municipal charge un de ses membres de faire, avec deux pharmaciens, un recensement immédiat de tous ces objets.

8 vendémiaire an III (29 septembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Le maire et un officier municipal se sont transportés à la maison de Leblanc St Fleurien oncle, où ils ont trouvé environ 300 quintaux de blé attaqué par les pucerons.

Le Corps municipal, considérant que, dans ce temps de disette, il est urgent de procéder au plus tôt à la vente de cette précieuse denrée, soit pour en prévenir le dépérissement total, soit pour fournir du pain aux citoyens qui en manquent, demande au District l'autorisation de faire cette vente incessamment.

Vu un arrêté du Comité de salut public, un officier municipal est chargé de faire le recensement de toutes les pierres à fusil qui peuvent se trouver chez les marchands de la commune.

16 vendémiaire an lll (7 octobre 1794). — Le CORPS MUNICIPAL, VU l'arrêté du District portant injonction à la municipalité de tenir les marchés à la halle et non dans des dépôts particuliers; considérant l'affreuse situation de ses administrés, réduits depuis huit mois à une demi-livre de pain, formé de toute qualité de grains; considérant que le peu de blé apporté aurait à peine suffi pour qu'on en donnât à chaque habitant une demi-livre; que, en supposant même que l'affluence du peuple affamé en eût permis la distribution, chaque citoyen n'aurait pu tirer aucun parti d'une si modique quantité de grain ; qu'il était bien plus utile de distribuer, au lieu de grain, du pain tout préparé; considérant néanmoins que le premier devoir des vrais magistrats du peuple est de faire respecter les lois; que le District, parfaitement au courant de la situation, a sans doute pesé les conséquences de son


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arrêté et doit être disposé à prendre les mesures nécessaires pour arracher Cahors à la famine; que, dans l'hypothèse contraire, il serait responsable « des malheurs sans nombre qu'entraînerait un seul marché non approvisionné », arrête :

1. — Les marchés se tiendront à la halle, et le grain apporté sera distribué aux citoyens en raison de leurs besoins.

2. — Deux officiers municipaux y veilleront au maintien de l'ordre et pourront requérir la force publique.

3. — Le District est invité de plus fort à faire approvisionner les marchés.

4. — Copie du présent sera adressé au Comité d'approvisionnements de la République, qui est invité à venir au secours de la commune de Cahors, en attendant que le District démontre que son arrondissement est sans ressources.

5. — Les municipalités qui ont été requises d'approvisionner Cahors et qui refuseront de le faire seront dénoncées aux autorités compétentes.

23 vendémiaire an III (14 octobre 1794). — Le CORPS MUNICIPAL, VU une lettre de l'inspecteur en chef aux réquisitions des fourrages militaires, qui demande que tout le son des boulangers lui soit livré; considérant que les habitants de la ville sont réduits à une demi-livre de pain, fait avec de mauvais méteil, qui ne produit presque pas de son; qu'il faut d'ailleurs procurer du son aux maîtres de poste pour les chevaux qui font un service public; mais désirant néanmoins ne rien négliger pour remplir ladite réquisition, arrête que tous les sons des boulangers et particuliers seront versés dans un magasin à la Maison commune, et qu'il n'en sera livré à personne que sur un bon de la municipalité.

Rapport détaillé du citoyen Celse, chargé de vérifier les comptes de ventes de blé fourni par la nation, ventes faites par Lafage et Laval, autrefois officiers municipaux, et Souquet et Disses, qui le sont actuellement. Le District y avait relevé un certain nombre d'erreurs et d'irrégularités, que les citoyens susdits ont expliquées presque toutes d'une manière satisfaisante : ainsi, un déficit de 9 quartes provient de ce que ce blé fut volé à la halle pendant des soulèvements populaires, à deux marchés différents. — Les prix de vente varient de 23 à 28 livres la quarte. — Le Corps municipal, reconnaissant que les quelques erreurs qui subsistent ne sont pas imputables à la mauvaise foi des comptables, approuve les états dont il s'agit.


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27 vendémiaire an III (18 octobre 1794). — Le CORPS MUNICIPAL a reçu de la Commission de santé établie à Paris trois billets contenant des questions à résoudre par le citoyen Delsèriès, chirurgien élève chez le citoyen Lafage, officier de santé. Le candidat, convoqué à une séance particulière du Corps municipal, à laquelle assistaient deux membres du Comité de surveillance révolutionnaire, a reçu communication de l'une des questions, et on l'a enfermé à clef, seul, dans un cabinet, après qu'on s'est assuré qu'il n'avait ni livres, ni autres instructions écrites. Quand il a averti qu'il avait traité la première question, les deux autres lui ont été successivement remises de la même manière.

28 vendémiaire an III (19 octobre 1794). — Le CORPS MUNICIPAL, pour l'exécution de la loi du 25 pluviôse, écrit à toutes les municipalités du canton pour que les commissaires vérificateurs de chaque commune se réunissent à Cahors le 29 vendémiaire. Ils formeront un jury chargé de prononcer sur les difficultés qui auraient pu s'opposer aux payements qu'on devait faire aux parents des défenseurs de la République. Le Corps municipal désigne ensuite six commissaires pour la commune de Cahors.

30 vendémiaire an III (21 octobre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — L'agent national du district a donné avis que la loi lui fait une obligation de faire des tournées dans les cantons, pour y entretenir l'esprit public ; en conséquence, et quoiqu'il ait souvent parlé à la Société populaire comme particulier, il parlera aujourd'hui décadi au temple de la Raison en qualité de fonctionnaire public. Cet avis ayant été publié, il a en effet prononcé un long et énergique discours, propre à entretenir et ranimer l'esprit de la Révolution, « dont le terme va mettre au comble la félicité publique ».

Ce matin, l'adresse de la Convention au peuple français a été publiée avec toute la pompe et l'éclat possibles. (1)

3 brumaire an III (24 octobre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Aujourd'hui, à 10 heures du matin, devait avoir lieu l'adjudication au rabais des fourrages, cordes, litières et autres objets nécessaires pour les bestiaux de la République qui passeront par colonnes à Cahors. Personne ne s'étant présenté, le citoyen Andréa, inspecteur de route des subsistances militaires, fait avec le citoyen Mazaré, déjà fournisseur de

(1) Adresse datée du 18 vendémiaire, recommandant au peuple le calme, la prudence et la fermeté.


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cette commune, une convention par laquelle ce dernier s'engage à fournir le foin à 4 livres le quintal, ainsi que les autres choses nécessaires ; il lui reviendra 4 sols par boeuf.

Malgré toutes les mesures prises pour engager certaines communes des districts de Lauzerte et Gourdon à porter du blé aux marchés de Cahors, aucune d'elles n'a fait le moindre envoi. Cette négligence coupable de la part des municipalités de ces communes réduit les habitants de Cahors à une très modique ration de pain et les tient dans la crainte continuelle de manquer de l'absolu nécessaire. Le Corps municipal, considérant « qu'il importe au salut de la trop malheureuse commune de Cahors » de prendre des mesures vigoureuses, invite l'agent national du district à dénoncer et poursuivre devant les autorités compétentes les municipalités qui ont négligé, au mépris des lois, de répondre aux réquisitions qui leur ont été adressées.

6 brumaire an III (27 octobre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — L'officier municipal de permanence la nuit dernière a reçu avis qu'un prisonnier détenu à la maison d'arrêt de la commune s'est évadé en brisant un barreau d'un grillage de fer.

Le citoyen Cagnac, préposé aux convois militaires, n'a pu trouver de voiture pour transporter à Caussade dix prisonniers de guerre espagnols qui sont hors d'état de marcher, toutes les voitures étant occupées au transport des fourrages pour l'armée. Il est autorisé à fournira ces prisonniers des rations de vivres pendant leur séjour.

Deux commissaires sont chargés d'estimer les dégâts commis par les prisonniers de guerre espagnols à la maison ci-devant St-Géry, où ils sont détenus.

Deux commissaires par section sont nommés pour faire le recensement des laines, avoines et fourrages, conformément à la demande du directoire du district.

14 brumaire an III (4 novembre 1794). — Le CORPS MUNICIPAL, sur l'invitation du directoire du district, arrête que le tableau contenant le prix maximum des objets et denrées consommés d'habitude dans le district, sera transcrit sur les registres, publié et affiché, ainsi que le décret de la Convention et l'arrêté du District relatifs à cet objet.

Le citoyen Lagarde, maire, est autorisé à prendre, pour son usage personnel, 7 planches de sapin non ouvrées qui sont dans la Maison commune; le citoyen Bès, chapentier et notable, estime séance tenante


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la valeur de ces planches à la somme de 21 livres, que le citoyen Lagarde remettra au trésorier.

Le citoyen Aymond, chargé par le District de faire le recensement des « animaux ruraux », demande que ses pouvoirs soient enregistrés. Le Corps municipal arrête qu'il n'y a lieu à délibérer, cette formalité ayant déjà été remplie, et indique au citoyen Aymond les citoyens suivants comme pouvant l'aider efficacement dans son travail et comme bien connus par leur patriotisme : Vacquié, de St-Henri; Annès, de Lacapelle; Jourdanet, de St-Cirice, et Célarié, de Bégous.

Le maire et un officier municipal sont chargés de se rendre à l'hospice, ci-devant hôpital général, pour faire une enquête sur certains bruits qui courent au sujet de dilapidations qui seraient commises dans cet établissement.

Il est procédé à l'examen du citoyen Viala, âgé de 52 ans, officier de santé, chirurgien au 22e régiment de cavalerie légère. (Voir pour les détails, le 27 vendémiaire ci-dessus.)

16 brumaire an III (6 novembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Sur la plainte de la citoyenne épouse Baudel, à qui la nommée Anne Vezi, épouse Miquel Pons, a vendu trois quarts et demi d'huile de noix à raison de quatre francs la livre, alors que le prix fixé par le tableau du maximum est seulement de 22 sols, ladite femme Pons est interrogée; elle avoue le fait et est renvoyée devant le juge de paix, officier de police de La Barre et du Pont-Neuf.

16 brumaire an III (6 novembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Les administrateurs de l'hospice annoncent le décès de Pierre Placlard,de Biars, qui avait été transféré de la maison de justice, où il était détenu comme prévenu de crime capital, à l'hospice ; il y est mort le 13, d'une apoplexie nerveuse.

Sur l'invitation du citoyen Gensac aîné, négociant, ancien collecteur, on transcrit sur le registre deux délibérations du directoire du département du Lot.

Par la première, datée du 23 août 1791, les sieurs Gensac et Vincent, collecteurs de l'année 1783, sont déclarés créanciers de la commune de Cahors pour la somme de 2.154 livres 3 sols 1 denier. — Par la seconde, en date du 10 mars 1792, le sieur Gensac est déclaré créancier de la commune, en sa qualité de collecteur de l'année 1776, pour une somme de 92 livres 8 deniers. Lesdites sommes devront être payées aux ayantsdroit sur les impositions de 1791.


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17 brumaire an III (7 novembre 1794). — Le CORPS MUNICIPAL, ayant à distribuer 612 livres de savon qui sont mises à sa disposition par le District, et voulant prévenir les abus qui se sont produits lors des distributions précédentes, ainsi que les murmures et rassemblements de citoyennes qui en ont été la suite, désigne pour chacune des 4 sections un marchand chargé de la distribution. Il est attribué à chaque section un quintal de savon ; le surplus sera délivré aux hospices, maisons de justice, d'arrêt, de réclusion, aux barbiers et aux blanchisseuses. Le savon sera vendu au prix du maximum. Il ne sera délivré que sur un bon des commissaires distributeurs de grains. Ces derniers sont invités à se concerter pour fixer la quantité de savon qui devra être donnée à chaque maison en proportion du nombre d'habitants.

Le maire est invité à écrire aux fabriques de savon et aux négociants pour tâcher de procurer à la commune 400 quintaux de savon et pareille quantité d'huile.

23 brumaire an III (13 novembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — L'agent national remet une lettre par laquelle son collègue de Martel l'avise qu'un arrêté du Comité de sûreté générale ordonne la mise en liberté de 35 détenus ou détenues. Il a exécuté l'arrêté en ce qui le concerne mais l'un des 35 individus désignés, nommé Elie Barre, a été conduit à Cahors, par ordre du représentant Bo, et doit être clans les prisons de cette ville. — A cette lettre est jointe une copie de l'arrêté du Comité de sûreté générale.

Vu l'arrêté du Comité des secours publics portant que les quatre hospices de la commune de Cahors seront réduits à deux, un pour les hommes, l'autre pour les femmes, le Corps municipal arrête que les commissaires déjà nommés par le Conseil général pour procéder à la nouvelle organisation, sont chargés de l'exécution dudit arrêté.

25 brumaire an III (15 novembre 1794). — Le CORPS MUNICIPAL, sur la demande du citoyen Souquet, enregistre une quittance de « 47 livres 50 centimes », somme que ledit citoyen Souquet a payée pour l'achat d'un cheval dont la vente a été ordonnée par le District.

Le citoyen Lacoste, d'Englandières, est requis de porter sur-lechamp à Cahors 10 quintaux de grain qu'il doit pour remplir la réquisition qui, lui a été faite, et ce sous peine d'être mis en réclusion et d'être rendu responsable des événements qui pourraient résulter d'un refus ou d'un retard.

27 brumaire an III (17 novembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — La


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Commission de commerce et approvisionnements de la République a pris, le 13 brumaire, un arrêté portant que les districts de Franc-Céré(1 ) et Gourdon sont requis de fournir à la commune de Cahors chacun 3.000 quintaux de grains, un tiers en froment, un tiers en seigle ou orge, le dernier tiers en maïs et menus grains, et ce dans le délai de 4 décades. Le Corps municipal désigne deux commissaires chargés d'aller, l'un à Franc-Céré, l'autre à Gourdon, pour faire exécuter sans délai le susdit arrêté.

28 brumaire an III (18 novembre 1794). — Le CORPS MUNICIPAL, sur la plainte du citoyen Roussel, libraire, à qui la citoyenne Dellard, marchande, a vendu pour quinze sols une chandelle de suif du poids de demi-quart de livre, alors que cette denrée n'est taxée qu'à raison de 22 sols 6 deniers la livre, renvoie ladite Dellard devant le juge de paix, officier de police.

Sur la demande du citoyen Disses, officier municipal, on transcrit sur le registre une déclaration du receveur des domaines nationaux constatant qu'il a reçu dudit citoyen Disses sept billets de diverses sommes et souscrits par divers signataires, dont 5 sont en faveur de Bergougnoux, prêtre reclus, et 2 en faveur de Baudus, ci-devant curé de Pontcirq.

5 frimaire an III (25 novembre 1794). — Le CORPS MUNICIPAL, VU un arrêté du directoire du district, fixe ainsi qu'il suit le prix de la livre, poids de marc, du pain fait avec différents grains :

Blé, 1re qualité 5 sols 6 deniers

id. 2e — 5

Méteil (moitié blé, moitié seigle), 1re qualité 4 10

id. id. 2e — 46

Seigle, 1re qualité 4

id. 2e — 3 10

Orge, 1re qualité 3

id. 2e — 2 10

Maïs, 1re qualité 3

id. 2e — 2 10

Sarrazin, re qualité 3

id. 2e — 2 10

Le Corps municipal charge les citoyens Brives premier né et Lafage,

(1) Saint-Céré.


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architectes, de faire un devis estimatif en vue de l'acquisition par la commune de la maison adjacente à la Maison commune et ayant appartenu à Laroche (1) ; ledit devis et autres pièces seront envoyés aux autorités supérieures, afin d'obtenir l'autorisation nécessaire.

Le citoyen Lezeret, chargé de pouvoirs des propriétaires du moulin de Coty, vient déclarer qu'il a perçu le fermage de ce moulin pour une année, qui s'élève à 3.686 livres 12 sols, sur laquelle somme il revient à Laroche-Lambert père celle de 614 livres 11 sols 6 deniers et à Lassagne, reclus, 460 livres 18 sols 9 deniers.

13 frimaire an III (3 décembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Sur l'invitation du directoire du district, les citoyens sont convoqués pour le 15, à l'effet de faire la déclaration des chanvres qu'ils ont récoltés.

Le capitaine commandant le poste de la commune a constaté la veille au soir que, à la caserne appelée ci devant Languedoc, une très grande quantité de paille avait été allumée dans la cheminée, et que le feu s'était déjà communiqué à un lit. Il a fait transférer à la maison d'arrêt 9 déserteurs d'armée (2) qui se trouvaient dans ladite caserne, quoiqu'ils niassent avoir allumé ce feu. — Le Corps municipal, attendu que, depuis quelques jours, plusieurs commencements d'incendie ont eu lieu dans cette caserne, renvoie les neuf inculpés devant le juge de paix, officier de police, arrête que tous les prisonniers de guerre et déserteurs détenus dans ladite caserne seront transférés dans 1' « édifice ci-devant St-Gèry », et charge un de ses membres de constater les dégâts commis.

Sur l'invitation des citoyens Pierre Ouradou et Martial Descouture, leurs actes de naissance sont transcrits sur le registre.

19 frimaire an III (9 décembre 1794). — Le CORPS MUNICIPAL, VU la lettre par laquelle le citoyen Mercier, agent salpètrier, réclame du charbon ; considérant que, quoique tout le charbon-soit mis en réquisition, il est indispensable de s'en procurer pour la fabrication-du salpêtre; envoie la lettre du citoyen Mercier au directoire du district avec invitation pressante d'appuyer auprès du District d'Aubin la demande de la municipalité de Cahors; charge le citoyen Blanc, qui se rend à Aubin, dé donner ses soins à l'expédition du charbon par bateaux.

Vu un arrêté du District, un officier municipal est chargé de faire le

(1) M. de Laroche-Lambert fils, qui avait péri sur l'échafaud. — La bâtisse dont il est question fait partie de l'hôtel de ville actuel.

(2) Sans doute des déserteur s étrangers.


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recensement de tous les cochons gras mâles âgés de plus d'un an, excédant les besoins des particuliers.

23 frimaire an III (13 décembre 1794). — Le CORPS MUNICIPAL, VU un arrêté de la Commission du commerce et approvisionnements de la République, et un autre du directoire du district, relatifs tous deux à la répression des abus qui existent dans la vente des suifs et cuirs, ordonne la publication de ces deux arrêtés; le citoyen Lagarde continue à être chargé de la surveillance de cet objet.

Vu un autre arrêté du District, concernant la distribution de la somme de 4.819 livres 28 centimes, mise à la disposition du département du Lot, en exécution de la loi du 11 septembre 1791, pour servir à l'encouragement de l'agriculture, le Corps municipal charge le citoyen Tailhade de faire, de concert avec divers propriétaires de la commune, le tableau de ceux qui pourraient bénéficier de cette distribution, tableau qui sera soumis au Corps municipal.

25 frimaire an III (15 décembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Est ordonnée la transcription sur le registre d'un nouvel arrêté de la Commission du commerce et approvisionnements, relatif à la réquisition de 3.000 quintaux de grains, adressée au district de Gourdon en faveur de la commune de Cahors. Ladite commission, pour que le district de Gourdon puisse plus facilement exécuter la réquisition de 8.000 quintaux dont il a été frappé pour l'armée des Pyrénées-Occidentales, le décharge de celle qui regarde la commune de Cahors, et fait peser cette dernière sur le district d'Aubin. Le grain sera payé au prix du maximum décrété le 19 brumaire.

Le Corps municipal charge le citoyen Lamoulère, propriétaire, de se rendre à Aubin sans délai pour veiller à la prompte exécution de cet arrêté; ce citoyen engagera les administrateurs du district d'Aubin à y mettre toute la célérité possible, « tant au nom de la loi qu'à celui de la fraternité et de l'humanité souffrante, car les trop malheureux citoyens de Cahors sont à la veille de manquer du très modique morceau de mauvais pain qu'ils mangent depuis plus d'un an ».

(A suivre) A. COMBES.


LES COUTUMES

DE MONTCUQ

(Suite)

II

Donc, à la demande du sénéchal de Quercy, les coutumes de Montcuq avaient été confirmées par le roi, à Abbeville, 20 novembre 1463.

Il ne restait plus maintenant audit sénéchal qu'à rapporter, selon sa promesse et pour toucher le prix convenu, la copie duement authentiquée et scellée. Ce qu'il ne tarda pas sans doute à faire, au lieu même de Montcuq, et sur la principale place appelée « Lo canto de mal cosseilh », où préalablement avaient dû se rendre, sur convocation des consuls, « les manans et habitans de la ville et de la juridiction. » (1)

La charte n'est point datée, et il serait peut-être téméraire de trancher cette question. Cependant si nous considérons que la ville de Montcuq existait déjà au milieu du XIIe siècle, puisque nous trouvons à cette époque un troubadour loué par Raynouard, Bernard Arnaud de Montcuq, et que d'autre part mention en est faite dans la charte de Cayrac, en 1176, il est permis de conclure que l'assertion de Guillaume Lacoste a eu une certaine base.

Cet historien fixe à 1224 la charte des coutumes qui fut octroyée à la ville de Montcuq, par Raymond VII, le jeune. Nous allons plus loin. Prenant pour base le texte même des coutumes, nous répétons ici, ce que nous avons dit au sujet de Lauzerte : il n'est point fait mention, ici comme là, de ce qui a trait à l'administration municipale, élection du bayle et des consuls. Il est dit seulement que la coutume les veut au nombre de douze, et c'est tout, D'autre part, l'article premier porte que, dès la fondation de la ville, les habitans ont été exempts de toutes quêtes et mauvaises impositions. Mais cela suppose tout au moins, de la part du fondateur, l'octroi de certains articles en forme de coutumes ;

(1) Il y avait outre cette place commune dans l'intérieur de la ville la place de la « Conqua », près de la rue « Carreyra » publique et la place dite « lo patz de Pena », et à l' extérieur la place « del mercadiel » et la place de la Madeleine,


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et nous sommes naturellement amenés à la même conclusion que nous formulions pour les coutumes de Lauzerte, c'est que la charte que nous publions en ce moment n'est elle-même qu'une confirmation, considérablement augmentée, si l'on veut, de celle qui fut accordée lors de la fondation de la ville, c'est-à-dire dans la seconde moitié du XIIe siècle.

Nous ajoutons, sur ce point, une dernière réflexion qui nous est suggérée par l'article 42. Il y est fait allusion à Lauzerte où il y a « assisatge », c'est-à-dire trois genres de juges, savoir le bayle et les consuls, le juge ordinaire et enfin le sénéchal. Or la charte de Lauzerte porte la date de février 1241. Il s'ensuivrait donc, si nous n'admettons pas pour lors le mot de « confirmation », que celle de Montcuq est postérieure à cette dernière date.

Nous disons plus haut que dans le travail publié par M. Dufour il y a des corrections à faire au point de vue orthographique, le copiste étant peu familiarisé avec la langue romane, et quelques lacunes a combler.

Le vidimus qui nous a servi à dresser le texte authentique des coutumes est un parchemin de 120X20, en deux pièces, coté ainsi au verso : Vidimus des privilèges et coustumes de Montcuq ; puis plus bas, Moncuq à St-Hylaire, coustumes de Moncuq ; enfin sur un côté, coustumes de l'original en neuf pièces, pour Mlle Jeanne de Combarieu.

Nous trouvons en tête la déclaration de Pierre de Ramond, sénéchal de quercy, au sujet des lettres de confirmation du roi ; puis vient le texte même des coutumes, et à la fin l'acte de cancellation, fait à Abbeville et la formule d'authenticité ajoutée par le même sénéchal à la date du 14 mars 1460 (v. s.).

Nous avons également numéroté les différents articles, bien qu'ils ne le soient pas dans le texte, si ce n'est, en marge, l'article 32, objet sans doute du litige pour lequel la demoiselle de Combarieu fit dresser le vidimus.

Voici maintenant les additions, corrections ou variantes que nous avons annoncées au sujet des articles.

Art.1er. — Aven en facultat 40 s. torn.des dugs sos caorc, au lieu de : dies lhieuras torn. et d'un sol caorc. (à la fin).

Art. 6. — Qui dins un an ageo revellat al senhour ; autromen, si non o fazio, lou fios serio encorregut al senhour feuzal. Ce passage n'existe pas dans le vidimus. (à la fin).


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Art. 7. — (Vers le milieu). Que non s'accorde, el daman rel lo clam perpassat ; ces mots sont en plus dans le vidimus.

Art. 8. — (A la fin) de maynada del senhour, ny home que sio del senhour ; ces mots manquent dans le vidimus.

Art. 14. — Iradamen au lieu de ito damen ; un peu plus bas am pung o am ma, se clam senfa ; ces mots sont en plus dans le vidimus.

Art. 21. — No deu per causa civiel, mot en plus dans le vidimus.

Art. 25. — Talhar, au lieu de tabar, et moriozas, au lieu de mormosas.

Art. 28. — (A la fin), en plus : als habitans del loc ny de la honor.

Art. 30. — Occupava o forsava. (Mot en plus, qui a sa raison d'être, car nous avons présenté au congrès de Toulouse en 1899, un acte intéressant Sauveterre, de 1298, ou il était question en partie d'actes criminels commis sur les chemins publics).

Art. 36. — Guinier, n'est pas mentionnné dans les arbres indiqués au vidimus.

Art. 38. — Coeg, (qui veut dire tomber) et non pas crieg.

Art. 39. — No era jutgeat e conogut, en plus dans le vidimus.

Art. 43. — Pago al senhor la pena que los cossols el bayle, en plus dans le vidimus.

Art. 46. — O per prendre la causa en si, en plus dans le vidimus ; que la menat, au lieu de que la nommât; (à la fin) que en aychi apelat o fach, au lieu de que en aichy aura fach appellar.

Pour la traduction on voudra bien se rapporter au texte de M. Dufour auquel il sera facile d'ajouter ou de corriger, suivant les notes qui précèdent.


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III

COUTUMES DE MONTCUQ

A touts ceulx quy ces présentes lettres verront et oiront Pierre de Ramond, chevaillier, seigneur de Folmont, maistre d'ostel, chambellan et conseiller du Roy, nostre sire, et son seneschal de Quercy et d'Agennois, commissaire en ceste partie par le Roy, nostre seigneur, commis et depputé, salut et dilection. Savoir faisons nous avoir veu, tenu, palpé et de mot à mot leu certaines lettres royaulx, esquelles sont incorporées certaines coustumes, usatges, privilèges, libertés et franchises à nos consuls, manans et habitans es chastel et ville de Moncuc par feu le comte Ramon de Tholose données et octroyées, et aussi confourmés par le Roy Loys, qui à présent est, ainsi que en icelles est faicte mention, saines et entières en selz et scripture, non cancellées et non viciées et sains aucune suspection avoir en icelles, desquelles lettres la teneur s'ensuit.

Loys, par la grâce de Dieu roy de France, sçavoir faisons à tous présens et avenir nous avoir receu humble supplication des manans et habitans es chastel et ville de Moncuc contenant que par feu le comte Ramon de Thoulose leur feut donné et octroyé certaines coustumes, usages, libertés et franchises, lesquelles leur ont esté par ces successeurs confermées pour lesd. chastel et ville [de Moncuc de] les Valz et la houneur, desquels privilèges, usages, libertés et franchises dont ilz ont tousiours depuis joy et usé la teneur s'ensuit.

Aysso son las costumas, usatges, privilegis e libertatz et franquesas sa en reyres donadas e autreiadas per lo comte Ramon de Tholosa e per sos successors confermadas als habitans del castel de la vila de Moncuc de las Vais e de la honor, de que an uzat e son en possessio.

1. — Premieramen, tugh los habitans el dig loc de Moncuc e en tota la honor e contributio son an estat de la fundatio del loc en sa e devo esser e estar francs e quitis de totas questas e de totas malas enpositios e forsas e servituts. si per lor voluntat far non o volian, exceptat solamen host o cavalgada gênerai, el cal cas an acostumat de donar al rey nostre senhor sucsidi per un an, so es assaber se tan dura vi (6) sols


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par. ces plus per cascun foc, aven en facultat XL (40) s-, tor. des dugs sos caors. e tôt sos deudes pagat, exceptat dot de fenna.

2. — Item el dig loc son e an acostumat a estre per lo temps dessusd. XII (12) cossols, VI (6) de la part dels nobles e VI (6) del popular, losquals se creo al cap de l'an per aquels de l'an preceden, e juro al bayle en nom del Rey, nostre Senhor, e lodig bayle a lor fieutat que seran bos e liais lan a lautre en lors officis, e far drey al paubre e al rie, e que no grevo may lo paubre quel rie ny lestranch quel privât.

3. — Item los digs cossols son per lo rey nostre senhor e an uzat e acostumat per lo temps dessus dig esser jutges essemps am lo bayle e totas las causas civials e criminals emergens el dig loc e en la honor en lasquals contestatio es necessaria, en aychi que lo bayle no pot recebre contestatio ny sagramen de calumpnia, ny receptio, ny examinatio de testimonis, ny donar interloqutoria, ny deffenitiva ces los cossols, ny los cossols ces los bayle, e si per ignorensa o en autra maniera se fazia séria nulh en aychi coma dig per jutge no competen, exeptat dicio de tutela e de cura e décret, e causa en laquai se remet lo sagramen duna part a lautra, quar aquo pot far lo bayle ces lor, e si no es causa menuda da part à part en laquai lo bayle pot procedir tro asentencia.

4. — Item los digs cossols an e an acostumat ha averper lo temps dessus dig lo regimen e governamen del dig loc e de la honor e la conoychenssa de deoes e de torts, e de malas fâchas, e de vanelas, e de get e de forget, e de aguieras, e de privadas, e de aytals causas senblans a aquestas sols, e els tots ses serveia e a lor hobedir hom en aquestas causas, e lo bayle e sos sirvens la ordenansa que ylh fan sobre aysso manda e deu mandar a exequtio si nés per lor o per alcuna de las partidas a cui tota requeregut per salari razonable.

5. — Item los digs cossols apelat am lor dels prohomes ce la vila e de la honor aquels que lor sera vist fazedor en pauza e en dizo e an acostumat a en dize e a en pauzar questas e talhas als habitans del loc e de la contribucio, e aquelas levar e recebre de lor e mectre els comunals usatges, e constrenge e compellir ho far compellir per lor sirven los negligen a pagar, e daysso son e an estât en pocessio per lo temps dessus dig.

6. — Item tota persona no nobla del loc et de la honor pot sas heretat et sas possessios en tôt e en partida arrendar e donar a sobre fios, si carta no deffen, a ces e acapte per sa propria auctoritat a cui se


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velha, si no es persona deffenduda de dretz ses requesta del senhor feusal de cui o te, loqual es tengut de lauzar aquelarrendamen per sos deners la la on ne sera requeregut; e si lo segon feusatier pren la possessio lo senhor del fios ne pert per aysso son dreg, nyel ne porta pena.

7. — Item tota persona habitan al dig loc et el honor a quatorzena de pagar son deude, so es assaber que si sacorda am lo claman dins XIV (14) jorns quel clam lhi sera dig, e que aura lo deude coffessat lo senhor no aura res, mas se passa los XIV (14) dias que nossacorde el claman, ret lo clam perpassat, lo senhor naura V (5) sols ce. per justicia, e si plag si endeve, que aia contestatio, aura ne may II (2) sols vi (6) d. ce. per despessas, e per aquels deu tener cort à las partidas tro que lo plag sia deffenit, exceptât clam de renda que no a quatorzena ny selari de metge, ny davocat, ny de noyrissa, ny fag dalimens, ny ordilha, ny vaychela prestada, ny deude priviligiat, deude del senhor, ny scriptas no aponh de clamor, mas execucio; e aquo que es dig dessus de las despessas es entendut de tôt plag dapart a part en que aia contestatio.

8. — Item se entre los habitans del loc o de la honor ho autre de foras la honor am aquels del loc o de la honor plag ho contrast sen devenia per neguna causa, aquel plag se deu demenar en la cort del bayle e dels cossols engalemen per lor deffenre; essi ylh na o sabian deffenre devo aver cosselh de sams homes al cost de las partidas, el vencut deura ho pagar tôt à la fi de la causa: e si lo contrast ero entre lo senhor oson bayle, o sa maynada ab home del loc o de la honor,aquel se deu jutgar per los cossols e pronunciar en nom del bayle e de lor per lestimar, e en aquest fag no deu esser recenbut en testimoni neguna persona que sia de maynada o arrendador del senhor, ny del bayle.

9. — Item si per enjuria o per batemen de pe o de ma, ces escampamen de sanc, o per viel tenensa, o per terra, o per tort que aia lan a lautre se fa clamor per fag denjurias, aquela es de X (10) s. ce. quen deu aver lo senhor del vencut quant lo plag sera deffenit, fâcha premieramen emenda al claman si proa son entendemen ; mas si lo clam es de amparamen de cami o dessazimen de terra o de vinha ho dautias heretat, lo clam es de LX (60) s. ce, el cas quel claman proa son entendemen, e si nol pot proar el es tengut en x (10) s. ce. per clamor al senhor e en las despessas à la partida.

10. — Item si home molhcrat era trobat per bayle ab fempna mari-


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dada en adulteri, tugh sols nut e nuda en leg o en autre loc sospechos, lome sobre la fempna, baychadas las bragas o ces aquelas, si era nuto si non portaira, e la fempna nuda o sas vestimentas levadas tro a lenbonilh, e aysso se pot probar per n (2) ho per très testimonis dignes de fe, que nossio arrendadors, ny de maynada del bayle, ny del senhor, e si ilh ambedos o coffesso simplamen, aytals adultadors perdo tôt lo moble ques encorregut al senhor, e may que deu corre la vila essemps tôt nut, se no se volo acordar am lo bayle del cors ; e si alcus concubina en la vila se dins un mes quen sera requeregut per los cossols no la pren per molher o no la layssa, ambedos devo esser gitat de la vila, quar aytal peccat nosse fa a sufri que cayria nom en la yra de dio e %séria dopte que lo loc ne péris.

11. — Item, si alcus hom corrumpia o deflorava fempna vergis contra sa voluntat e ela sen rancura, el es tengut que la prenga per molher, si es de melhor conditio que el, o que lo maridesegon safacultat; mas si el es melhor home que ela fempna, deu la maridar segon la convenensa delhies; e si no la vol prendre, o no la pot maridar, que porte la pena que dreg vol, e tots sos bes seran de la fempna; e si alcus forsava fempna que no fos verges, o fasia son poder delhies conoycher carnalmen, e ela sen rancura, aquesta clamor, la fempna corrumpuda o no corrumpuda, si se pot prohar sera de LX (60) s. ce, e la enjuria sera émendada a la fempna a la conoguda del bayle e dels cossols segon la conditio del fag e la qualitat de las personas; e si la causa proar no se pot, la fempna restitura las despessas a! home a la conoguda que dessus.

12. — Item, si layronissis se fa de dias dins la vila o de foras de causas menudas, de v (5) sols ce. tro a xn (12) d. ce, lo layre, la hon proat sera oconecut, sera encorregut per x (10) s. ce. al senhor per justicia; e si se fa de nuegs en LX (60) s. ce. ; e si de xu (12) den. ce. o doqui en jos se fa io layronissi de dias, en v (5) s. ce, e si de nuegs, en x (10) s. ce, e si de v (5) s. en sus, de dias se fa lo layronissis en la vila o deforas, lo layre sera relegat del loc e de 1a honor ab layronissi al col, e tôt sos bes seran confiscat al senhor, e si de nuegs se fa lo layronissi, lencorremen es de cors e de bes a la voluntat del senhor, restituit lo panotori é pagal sos deudes primiereramen a sa molher sina; mas en tôt aysso podo lo bayle els cossols moderar segon lo temps et la qualitat del fag e de la persona.

13. — Item,-si alcus fasia homecedi a gâcha penat o ces causa raso-


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nabla, e se pot proar per leyals testimonis o per sa cofïessio, sera encorregut lo corps els bes a la voluntat del senhor, pagat sos deudes e sa molher ; mas si o fa son cors deffenden o en autre cas legut de dreg e o pot proar sufficiemmen no es en re tengut.

14. — Item, si alcus feria autre de cotel o dautre estrumen ferrinh, per loqual copl fos facha plaga o clamor sen fazia, aquela es de LX (60) s. ce, fâcha emcnda al claman; o si alcus tra cotel iradamen contra autres ces toquar, si clam sen fa, aquel es de X (10) s. ce; e dautre escampamen de sanc fag am pung o am ma, si clam sen fa, esde X (10) s. ce ; e si se fa ab fust o ab peyra, de LX (60) s. ce, fag dreg al claman en tôt aquest cas del damnatge e de lauta que auria près la hon seria prohat, mar se no podio proar el pagaria en cascu daquest cas X (10). s. ce per justezia e las despessas à la partida, e si clam no se fa, de re de tôt aysso lo bayle no sen a entremettre.

15. — Item, si alcus pren frucha o ortalessa dort o razins de vinha o granha de blat vert o erba de prat, de dias, ses voluntat claquel de cuy es, si clamor sen fa, aquela es de X (10) s. ce, e de nuegs es, de LX (60) s. ce, emendada la malafacha a la conoguda dels cossols.

16. — Item, si lo dia del mercat, loqual es disabde, e dura tôt lo jorn e lendema tro las messas son dichas, ol jorn de las fieras, alcus enporta li leuda o la rete que no la pague, sera encorregut per x (10) s. ce ; mar si la layssa a son hoste que la pague per Ihuy o autra persona del loc, e aquel no la paga al fermier lo jorn o lendema, lo mercadier sera quitis, e aquel que lauria preza sera encorregut en la pécha o del peatge quel rete e sen va que nol pague ny nol layssa sera encorregut per LX (60) s. ce, mar si la laycha sera coma de la leuda.

17. — Item, si alcus te e doza de fais pes et de falsa mesura que no sia senhada del senhal de la vila, o cana ab falsa auna, la pena sera de LX (60) s. ce, la on ne sera convencut. e la mesura o pes o auna deu esser ars en plassa comunal; mar si lo pes o la mesura es senhat del senhat de la vila, pert la mesura el pes e no es tengut en res, mar aura actio lo bayle per la pena contra aquel que laura senhada, si vios es ; e aysso entend ut de totas mesuras de blat, 0 de vi, o de notz, o doly, o de sal, e de tôt pes e de totas aunas, e de tota persona que venda blat o notz el mercat o en son hostal deu mesura am la mesura senhada del senhal de la vila, e si ab autra o fa sera encorregut en la pena.

18. — Item qui fa far ho uza sciemmen de falsa carta o de falsas prohansas deu esser reléguât del loc e tôt sos bes confiscat al senhor, e


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aquela pena mecha deu portar aquel que ho fa per do o per malvolensa o per als.

19. — Item, tota persona, donque sia, pot aportar vi, o far aportar dautre loc don se volhia en la vila per vendre del jorn de sanct Miquel de vendemias tro a la festa ensegnen de sanct Marti ces licencia dels cossols, e daqui en la no, e si o fazia lo vi séria encorregut al senhor e pagaria may LX (60) s. ce per justicia.

20. — Item, lo rey, nostre senhor, pren sobre cascu forn calfan dins la vila LX (60) s. ce cascun an e una olada de braza de la primiera fornada; el senhor del forn deu far calfar e tener lo forn condreg de tôt canl lhies necessari, e deu cozer una carta de pa de hostal per un den. ce e per très tortels que valha cascus de lor II (2) d. ce ; e lo par de las pestaressas al XIII (13e) pa, e pren XIII (13) d. ce. del primiera fornada, e de cascuna de las autras fornadas IX (9) d. ce ; e tot lo demoran de largen es del rey. E si a la primiera fornada nossa troba los XIII (13) d. ce, deu los per far daquela après, e sies pa dalmoyna o de nossas paga lo doble; el fornier deu venir a lostal daquel que aura a mandar per cozer e portar la pasta al forn, e tornar lo pa cueg a lostal ces autre cost.

21. — Item, tot home e tota fempna que venga vendre e comprar al mercat o a las fieras quesso a las festivitat de sanct Mart e de sanct Luc e VIII (8) jorns davan e autres VIII (81 après, cascuna es franxs, que pot venir sais e segurs que lo bayle ny sos servens nol deu per causa civiel prendre ny arrestar, ny prendre sas mercadarias ny sas dentradas, ny home que venga per la garda de la vila, e si o fazia, e aquel que seria arrestat cen anava non seria tengut, ny encorregut en neguna pena.

22. — Item tots los habitans del loc e de las perroquias d'Escayrac e de Sanct-Privat, e de Sanct-Genies, e tot home que aia hostal en la vila, e contrebuisca a las comunals enpocessios de la vila, so quitis e franxs de peatge compran ho venden el mercat o en las fieras, o dins la honor, ny dono re de passada ny dintrada; e los autres habitans en la honor de la Seona en sa dono meg peatge, venden o compran el mercat o en las fieras, o dins la honor, mar de tracha no re, ny per sepmana ; e aquels autres de la honor que estan de la Seona en la, compran e venden al mercat o en las fieras devo peatge entier, mar de tracha o per semana no re. Empero tug estranhs e privât devo


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leuda el mercat. si hi porto blat en sac per vendre mega carta o claqui en sus, mar de mega carta en jas no re, ny de blat, ny de nogalhos.

23. — Item, si malefecis se fa rescostamen de nuegs o de dias en la vila o en la honor, so es assaber que alcus aussizes buo o autra bestia grossa, o arces fenier o garbier o hostal, e no se podio proar per cuy séria fag, aquel malefecis se deu emenclar en aquel que aura près lo damnatge per la vila, si ces fag dins la vila, e si se fa deforas per la perroquia on séria fag, a la conoguda dels cossols.

24. —Item, tota persona habitan en la vila e en la honor pot far taverna de son vi e mètre a for comunal, mar quel mesure am la mesura senhada del senhal de la vila, e que poys que sera atavernat no cresca lo for, mermar lo pot be ces pena, ny no venda vi azatgat per pur, ny ly mescle aygua, quar si o fa, en cascu daquest cas sera encorregut per xx (20) s. ce, de la mesura no pagua re, si es senhada, marque la perdra; si senhada no es, paguara LX (6O) S. ce

25. — Item los mazeliers so franxs que no devo re per lor artiffici al senhor ny neguna servitut; mar no devo talhnr, ny vendre dins los mazels comunals carns miharguozas, ny moriozas, ny troia, ny cabra, ny ouelha, ny autras carns sino ero vezinans, e si o fasian, serian encorregut per LX (60) s. ce al senhor per justicia, e dun an ne talhara els mazels, car aytals cars se devo vendre foras dels mazels a part en loc que aparesca be evidemmen que avols cars so.

26. — Item, si alcus metia foc o ardia de dias o de nuegs en la vilao deforas hostal o mayo dautra persona o la sua maicha per donar damnatge als vezis, el damnatge, sen ensegnia, aquel séria ensegut de cors e de bes a la voluntat del senhor, la on proat e convencut ne séria; e si lo met en son camp, o en son prat, o en sa vinha sciemen per ardre aquo de sos vezis, o per damnatge donar, e no lescan cant es près de las fis daquo, el podia escantir si se volgues, el es tengut a emenclar lo damnatge que donat aura aquel foc, sin dona a conoguda dels cossols e del bayle, e sera encorregut en LX 60) s. ce al senhor, si es fag foras vila, mar si en la vila o d.' Costa la vila lo mec, sera encorregut corrra dessus; mar si el no la mes a malaffe, o fa son poder de lescantir, si pogues, dins aquo seu, no es en re tengut, sino emendar lo damnatge que auria donat, a la conoguda dels cossols.

27. — Item, tota persona no nobla de la vila e de la honor, si a de que, pot de persona nobla comprar e conquere ces e rendas e autres deners e afranquir sas pocessios e sas heretat, e mètre en franc aloy e


en ayssi franc aver, e tener, e possedir appertuitat en franc aloy, e far totas sas voluntat, ces mètre foras dessama a ces far e ces donar finansa, ny alcuna servitut, mar que no sia cap de fios que fos tengut en homenatge d.'l rey, nostre senhor, ny no sia de meri e de mexts enperi ab juridictio clauta e bassa, quar en aquilh dos cas séria tengut de mectre foras de sa ma o de far finansa.

28. — Item, los cossols essemps am lo bayle, e lo bayle essemps am lor, e a lor requesta e no outramen, far e an acostumat de far estatutz, e establimens, e ordenanssas per lo profeg, o de voluntat del cornu, o de la maior el melhor partida, totas vegadas que lor es vist fazedor a temps o a perpetuitat, losquals obtenô vigor de ley en jutgamen e de foras, e, si obs ez, los podo revocar, corregir è declarar als habitans del loc, ny de la honor.

29. — Item, la vila de Moncuc ab tota sa honor per privilegi es de la taula del rey, nostre senhor, e de son propri domayne, e no la deu mectre foras de sa ma, ny en autra persona transpostar per donatio, ny en autra maniera en tot ny en partida; e si o fazia, non auria valor.

30. — Item, si alcus occupava o sappropriava aissi o forsava estrada publica per sa auctoritat, seria encorregut al senhor en LX (60) s. ce ; e si la estrecia de bolas en jus que no la occupe, ny la trenque, del tot en X (10) s. ce, cant ne sera convencut; e si es feudier privât e loccupa, del tôt en XX (20) s. ce, e si lo estreccia, en x (10) s. ce

31. — Item, si alcus fraudulozamen, per appropriar aissi la terra de son vezi, tra o derraygua la bola de fa devizio entre lor dos, en ort, o en vinha, o en terra, sera encorregut, se de dias o fa, en xx (20) s., e si o fa de nueg, en LX (60) s. ce, la on proat sera.

32. — Item, neguna persona, habitan en la vila o en la bonor, no deu esser tragh, ny citât, ny apelat al dreg foras del dig loc, e si o era no es tengut clanar, ny de obedir per negun contrahemen, ny per negun excès, e aysso per privilegi, exeptat lo loc de Lauserta per assisatge, e si en autra maniera expressamen no y era obliguat, de laquai obligansia apparegues al bayle e als cossols que remetedor era; e quar aqui a très jutge davan losquals devo estai- a dreg a tôt runcuran, so es assaber : lo bayle am los cossols, el jutge ordinari, el senescale, losquals an e executho aqui pel nom del rey, nostre senhor tota juridictio auta e bassa, en meri e mexts emperi.

33. — Item, los bayles, ny sos sirvens, ny autres justiciers, ny executos, no devo per negu deude prendre, ny penhora bestias arans, ny


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rauba dôme, ny draps de legh, sino ero dobles, ny vestimentis de fempna, ny esplegs am que nom ganha son pa, e si o fazia, e nom lo tolhies, non séria en re tengut.

34. — Item, los deguatiers que compro los dexs, no devo far compositio ny acordier am cleguna persona que ave quitia de dexs talan sos vezis per si, e am son bestial, e si o fa deu pagar per cascu daquels abque aura fag lacordier lo doble de la cort al senhor per justicia, la on ne sera convencut; e aquel que séria acordat atretan, e deu prendre de bestia grossa, si la troba en mala fâcha VI (6) d. ce de dexs, e de bestia menuda II (2) d. ce, del senhor de cuy es, e deu emencla la mala fâcha a conoguda dels cossols.

35. — Item, si alcus depopulava camps, vinhas o blat davan maturitat, e se pot claramen proar per testimonis clignes de fe, si se fa de dias, deura lx (60) s. ce per justicia, e de nuegs es encorregut de cors e en bes a la voluntat del senhor.

' 36. — Item, si alcus talha albres domerges, pomier, noguier, perier, vit dalbre e de trilha, empeut, prunier, figuier, frayse, albas, ces voluntat daquel de cuy es, si o fa de dias, pague XX (20) s. ce al senhor per justicia, la on proat sera ; e si o fa de nuegs, que sera encorregut per lx (60) s. ce al senhor, fâcha emencla an aquel quel damnatge aura près a la conoguda del bayle e dels cossols.

37. — Item, si alcus dels habitans del loc ho de la honor avoca o clona captenh a cosselh contra la universitat, sera encorregut en xxv (25) lhrâs al senhor, la on nessia convencut, e aysso per ordenanssa de cort e per compositio fâcha entre nobles e populars.

38. — Item, si alcus dels gentiels homes e delsborges e mercadiers de la vila o de la honor se rancura dalcun son feuzatier per so quar per aventura aura estât très ans o plu'iquenolhaurapagada sa rencla e dit que per aquest trazamen lo fios Ihes coeg en cornes o encorregut, si lo senhor es en colpa que no aia demandada sa rencla cascun an al jorn que lhes deguda sufficienmen, lo fios per aysso no ca en cornes, mar si apar leyalment quel feusatier requeregut sufficiemen a récusât a pagar per los m (3) ans continuât un près autre adoncas, lo fios ne en cornes al senhor, mar enpero el no lo deu pas prendre per sa auctoritat, ans deu far opelar al dreg lo feuzatier davant quai se volha daquels que executho juridictio orclenaria el dig loc, e aqui far sa demanda el feuzatier quelh responda a tôt lo negoci a pie examinât e auzidas las razos de cacla part que aquel ne fassa dreg ; e si lo


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feuzatier no vol venir al dreg que lhui apelat per iv (4) vegadas, e mes en de fauta o fâcha sa summaria de las causas expressadas en la demanda, quel senhor del fios sera mes en possessio del phios pel primier décret.

39. — Item, lo senhor, ny sos bayles, ny autre per lor no deu prendre el dig loc o en la honor als habitans del loc ny de la honor, las causas, ny las pocessios, ny re tolre, si primieramen no era jutgat e conogut per los cossols, ny de impausar, ny mectre sobre lor nulha servitut, ny mala costuma ; mar si alcus es acusatdecrimqui requeria encorremen de cors e de bes, que pot mectre los bes en eventari, essemps e apela-t am si los cossols e que demoro jots sa ma tro sia conogut e jutgat lo crim.

40. — Item, negus del loc ny de la honor no deu esser mes en preyo clausa per deude privat, quant que sia obliguat arest de persona, ny per negun crim o excès, si dona firmansas sufficiens destar a dreg e de pagar causa jutgada, o de satisfar a so crezedor, sil deude era .fiscal o privilégiât, exceptât crim de murtre, o de adulteri, o de gros layronissi, de que aparegues als cossols per enformacio sufficien que tenedor era, exceptât crim de leza magestat, e si lo bayle récusa a prendre las fermansas que sio presens, e se volha obligar e car prendre no vol la obliguanssa, els prendo la persona per cuy se volo obligar, e lhalh tolo o el se rescors del baylë o de sos sirvens, non seran en retengut ny él, ny las fermanssas, mar totas vegadas non contrastan a quo covendra que estie a dreg daquo de que es ensegut e que lo bayle lhi basta cort davan los cossols o davant si.

41. — Item, si alcus dels habitans del loc o de la honor es jDres es castel per crim o per conoyssensa dels cossols, el deu per intrada al geôlier x (5) s. ce, e si es près per deude o per causa civial, que no sia crim, de xn (12) d. ce e si es près per clamor, 0 per dexs, o per deude del senhor o per castelanatge no deu re dintrada.

42. — Item lo senhor, ny sos bayles no deu degu dels habitans del loc ny de la honor mectre en causa, ny en enquesta per negu excès, ny per Crim, si clam no y avia, que fes directa partida que sobligues a despessas, exceptât crim de leza magestat, e homecidi, e adulteri, e layronissi gros e manifest, e plaga en que aparegues perilh de mort, car en aquest cas pot anar avan per offici si apar, aïs cossols per enformacio sufficien que cargue lo criminos, o si conoysso que detenedor es e emetedor en aquesta, ho si y a denunciador, e el cas que


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seria mes en causa, lo bayle lhi deu donar cosselh e copia de denunciamen, si ni a, e de perventio e jornada sufficien per respondre e relaxar de sos bes de que segria la causa, sal que en omecidi e els autres III (3) cas dessus exceptât, deu respondre ces avocat e ces copia, mar que nom lho legia dayan en sa propria persona e ces dilatio.

43. — Item tôt home habitan del loc e de la honor, si troba dins la vila son mal fachor, o dins la honor, pot lo prendre, sil cas o requer e el es estranhs, e retener o menar, oiedre al bayle que Ihuy fassa dreg, e quel mal fachor done fermanssas destar a dreg, si pot, el bayle que lor fassa razo ; o si aquel que séria près no avia tort deuralhi emendar lo damnatge que lhaura donat 0 fag donar aquel que laura près a conoguda del bayle e dels cossols ; e si lo près es convencut daquo per que era près pagara al senhor la pena que los cossols el bayle conoycheran segon la calitat del fag e la condicio de sa persona.

44.—Item,si alcunrevenendeyrecompra dins la vila causa mengadoyra, e a alcus dels habitans del loc vol aquela cauza per sos obs, poyra la aver per aquel meteys for quel rafatier li auria promes o donat davans que la causa sia portada dins la mayo del rafatier, mar pueyh no, e que pague tantost aqui meih ; e si sobre ve quand si fa lo mercat de la causa aquela, e y demanda part, que o pot far, e partira si la causa en tantas partz coma sera aquilh que y auran demandada part am lo primier comprador quen aura aitant coma un dels autres, si la causa es tal que si posca devezir, e si devezir no se pot, remandra al primier comprador.

45. — Item, si alcus dels habitans del loc e de la honor despueys que séria nuegs e foc cubert, e el e sa maynada colgat, trobava home dins son hostal, deu lo prendre, si pot bonamen, vio, e menar al senhor quen fassa far drechura pel bayle e per los cossols ; e si aquel se deffen, e se met en rebelhio, e hom en la pressa laussi, aquel que lausseira sus la preza. fazen rebelhio no sera tengut en re al senhor, mar que aparesca que en aichi sia vertat per prohanssas sufficiens.

46. — Item, si alcus se clama clalcus dels habitans del loc o de la honor, elh fa demanda de bestia o de terra o dautras pocessios, e aquel a guirent daquela causa que hom lhi demanda e lo nompna e requer que sia apelat per. lhui garentizar o per prendre la cauza en si, lo bayle lhi deu donar jornada sufficien daver son guirent, o letras citatorias, o sirvens sin vol, ny lhuy fan obs ; e si al jorn quelh aura donat no a logiment, o non a fâcha tal diligensa que aparesca que no


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esta per el que fassa respondre e anar avan en la causa aychi cum si no hi avia gairent nompnat, mar si el fach'citar loguirent e compar am lhuy e vol en si prendre la causa, o se met en sa deffensa e dona sufficiens cautios destar a dreg e de pagar causa jutgada a conoguda del bayle e dels cossols que ane avant lo claman am loguirent en la causa en aichi coma feyra am lo principal, sino agues nompnat guirent o lo guirent no agues près lo fag en si. mar si lo guiren sufticiemen apelat no vol venir, e no esta per aquel que la menât que hom lapele am una peremptoria per totas à certana jornada ; e si no compar, e aquel que laura nompnat, si es causa criminal, aquela de que es ensegut pot sufficiemen informai- la cort et far prompta fe contra aquel que a nompnat per guiren de las causas que hom lhy demanda que delhuy o a agut, ses comectre frau, sera quitis del crim e civialmen fara o estara a dreg a la partida aychi cum si lo guiren no agues o nos fos nompnat, sera lhi salvat dreg contra aquel guiren que aura en aychi apelat o fag apelar.

Et nous ont iceulx supplians humblement fait requérir que nostre plaisir soit lesd. privilèges, coustumes, usatges, libertés et franchises avoir agréables, et les confirmer, ratifier et approuver, et sur leur impartir nostre grâce. Pourquoy nous, les choses dessusd. considérées, inclinans favorablement à la requeste desd. supplians, lesd. privilèges, coustumes, usatges, libertés et franchises dessus scripz, et tout le contenu en iceulx avons louez, ratifiiez, approuvez et confirmez, louons, ratifiions, confirmons et approuvons de grâce spécial, plaine puissance et auctorité royaul par ces présentes, en tout qu'ils en ont deuement et justement joy et usé. Si donnons en mandement par ces mesmes présentes au seneschal de Quercy, ou à son lieutenant, à toutz nous autres justiciers et officiers ou a leurs lieutenans et à chacun d'eulx, si comme à lui appartiendra, que de nostre présente grâce, confirmation et octroy, facent, souffrent et layssent les d. supplians et leurs successeurs joir et user paisiblement, sans leur faire mectre ou donner et seuffrir estre mis ou donné aulcun empeschement à contrare lequel se fait mis on donné estoit, voulons estre mis à plaine délivrance et au premier-estât el deu, car ainsi nous plaist-il et voulons estre fait. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours nous avons fait mectre nostre scel à cesd. présentes, sauf en aultres choses nostre droit et lautruy en toutes. Donné à Abbeville le damier jour de novembre l'an de grâce mil cccc soixante et trois,et de nostre règne le


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tiers. Ainsi signées. Collation fête parle roy les sires (?) Du Lau de Lasages, le seneschal de Quercy, maistre Estienne chevalier, Guillaume de Varie et autres présens, Rollant ; et en tesmoing de laquelle vision, inspection et lecture, nous, seneschal dessusd. à ces présentes avons mis et apposé le propre scel de nos armes, en l'absence du scel auctentique de nostre cl. seneschaucé de Quercy, et fait écrire et signer par nostre notaire et secrétaire de soubz escript le XIVe (14e) du mois de mars l'an mil quatre cens soixante et trois. — Par le mandement de mon d. seigr le seneschal et commissaire dessusd. Dumas, notaire roval et secrétaire dessusd.

B. TAILLEFER.


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UN MARCHAND

DE CASTELNAU-MONTRATIER (1283)

Nous donnons ici le texte d'un curieux testament trouvé dans les papiers et parchemins que M. Léopold Limayrac avait réunis pour faire son histoire d'une commune et d'une baronnie du Quercy. Il est dommage que l'éminent auteur n'ait pas lu le document et se soit contenté de l'analyse écrite au dos du parchemin ou insérée dans les importants registres d'inventaires des titres de la baronnie qui lui ont tant servi pour composer son ouvrage. Il y eût appris l'existence dans Castelnau, à la fin du XIIIe siècle, de deux hôpitaux et de deux léproseries, ce qui prouve bien, soit dit en passant, que la ville n'avait pas été aussi ruinée que le pensait Limayrac (1), puisque, à la date de 1283, nous y trouvons quatre maisons de charité en plein exercice. Si la ville eût été à cette époque récemment reconstruite, il est probable qu'elle n'eût pas encore été suffisamment peuplée pour être si richement fournie d'établissements charitables. On voit même par ce testament que Castelnau avait deux églises (celle du castrum, aujourd'hui remplacée par un édifice tout neuf, et celle de la vallée, Saint-Martin de Valausi, qui était l'église vraiment paroissiale), car il y a un legs pour Pierre Salamon, le recteur des églises de Castelnau.

Mais ce n'est pas ce qui constitue pour nous l'intérêt de ce document. Le testateur fait une grande quantité de legs pieux. Qu'un habitant de Castelnau donne aux églises des environs, comme Thézels ou Russac, c'est assez naturel ; qu'il donne à des religieux du pays, aux frères mineurs de Montcuq, ce n'est pas pour étonner; mais c'est déjà curieux de le voir distribuer des aumônes aux Cordeliers et aux Jacobins, aux Carmes de

(1) Voir son livre, p. 159. — Rien ne prouve la destruction de Castelnau au XIII, siècle, ni même de la vieille ville de Valausi située sur les versants de la combe quj est à l'E. de Castelnau. L'église Saint-Martin de Valausi, que M. Limayrac identifie à tort avec l'église du Castrum, existait encore plus d'uii sièele après, comme le prouvent de nombreux confronta indiqués, dans les actes.


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Cahors, aux Cordeliers et aux Jacobins de Montauban, aux Cordeliers de Figeac ; nous restons cependant dans le diocèse. Les Cordeliers et les Carmes de Saint-Antonin reçoivent aussi quelque chose; nous voilà déjà en Rouergue, mais la juridiction de Saint-Antonin s'étendait pour moitié dans le Quercy. D'ailleurs de tels legs ainsi dispersés, même faits par de simples bourgeois, n'étaient pas chose rare, et nos archives renferment des testaments de Cadurciens riches qui font profiter de leurs largesses les religieux mendiants non seulement de leur ville natale, mais de toutes les villes du diocèse.

Ce que nous n'avions jamais trouvé, car nous n'avons conservé aucun testament de nos marchands caorsins, ce sont les legs faits à des couvents et à des hôpitaux de villes situées hors de France. Le testament de Guiral Trapas ajoute un curieux paragraphe à l'article publié déjà dans le Bulletin de la Société des Etudis dn Lot sur les marchands de Cahors à Londres. Curieux à tous égards, car on ne soupçonnait pas que l'activité commerciale pût être aussi intense chez des gens éloignés des « chemins qui marchent ». Et voilà un habitant de Castelnau-Montratier qui a eu des relations avec Londres, Southampton, Gloucesler, Salisbury, etc., d'une part, avec Burgos, Palencia, Tolède, Santander del'autre. Il donne aux religieux cordeliers ou jacobins, aux hôpitaux et aux léproseries de ces villes d'Angleterre ou d'Espagne.

M. L. Limayrac, parlant de ce Guiral Trapas, assure qu'il était d'une famille noble considérable, bien qu'elle ne figure pas dans sa liste de la noblesse de la baronnie de 960 à 1479 (page 363). Que cette famille bourgeoise ait été anoblie plus tard, c'est possible : la fille de Guiral, Lombarde Trapas, épousa un Lapérarède, damoiseau de Boisse ; mais ni dans le testament où sont nommés trois frères de Guiral, ni dans d'autres documents, comme la charte de Castelnau, il n'est fait allusion à la noblesse de cette famille. Guiral est tout simplement, mais c'est là ce qui le rend intéressant pour nous, un marchand, comme ces Caorsins dont nous avons donné une longue liste, un marchand aux relations fort étendues. Bien que son testament soit très peu explicite, il est probable que sa conscience avait un certain nombre de choses à lui reprocher; mais dans l'impossibilité sans doute de restituer à tous ceux à qui il avait pu causer quelque préjudice, il tâchait de compenser par des fondations pieuses et des aumônes. Certaines phrases de ce testament laisseraient même supposer qu'il avait à se faire des reproches plus qu'en niatière de justice.


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Tel qu'il est, nous avons pensé que ce document était de ceux qui suggèrent plus encore qu'ils ne disent, et, sans avoir l'importance de celui qu'a donné un jour M Depeyre sur un marchand de Figeac qui faisait le commerce avec les Échelles du Levant, qu'il méritait d'être également publié dans notre Bulletin.

TEXTE DU TESTAMENT

Notum sit quod anno ab incarnatione Dominici MCCLXXXIII° régnante Philippo rege Francorum, et Raymundo episcopo Caturcensi, V° die mensisoctobris.

In nomine Patris et Filii et Spiritus sancti. Amen.

Que Guiral Trapas (1), malaudes de cors e sas de pessa, en.mo bo sen e en ma bona memoria aordoni mo compte e fauc mon testament en la maniera e en la forma que se sec.

Et tôt primierament doni e laichi marma a Dio e a madona santa Maria a e totz los sanhs e las sanhtas de paradis e causisi ma sobotura el cimiteri de ma dona santa Maria de la maio de la Garda Dio (2), et laichi

(r) Guiral Trapas. — Nous avons peu de renseignements encore sur ces Trapas. I a charte de commune de 1291 ne mentionne pas leur nom. Le testament nomme trois frères de Guiral : Hugues, Faure, Guillaume. El 1286, Hugues était donné comme caution de Halier de Castelnau dans un acte passé avec le seigneur de Lesparre, Pierre de Bel fort (Lacoste t. Il p.-567,1. Un Guillaume T. faisait partie en 1324 du couvent des Frères Prêcheuis de Cahors (Arch. Vat. miscellanea 1324). En 1343 Gm T., consul de Castelnau, s'occupait avec Arnaud Bernard de la Pérarèdi-, chevalier, consul également, de la charte des privilèges : un accord était passé à V illeneuve lès Avignon par le cardinal Bertrand du Pouget (Limayrac, p. 57^-585). Lombarde T., fille du testateur, épousa le damoiseau Bernard de la Pérarède, fi-ls du seigneur de Boisse (Limayrac, p. 425). La famille Trapas possédait des biens considérables dans la plupart des paroisses de la baronnie de Castelnau ; tous ces biens passèrent aux I.apérarède de Boisse et de Flaugnac, puis aux du Lac de Cayriech.

(2) — Lagarde-Dieu, abbaye cistercienne (commune de Molières) qui n'était que la primitive abbaye de Saint-Marlin-le-Désarnat transportée en terres plus riches. Voir Moulenq. Documents sur le Tarn-ej-Garonne, tome i,p. 266.


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per ma sobotura C sols de caorcens, e L sols de caorcens a la obra del mostier daquel loc, el leg (1) en que hom me portara.

E laichi al senher Peire Salamo governaire de las glieias (2) de Castel nuo L sols de caorcens.

E laichi a la lhumenaria de la glieia del dig castel II sols de caorcens, e als tortis autres II sols.

E autres II sols a la lhumenaria de la glieia de Russac (3).

E doni et laichi en almorna per tolz temps per amordeDioetdemarma II sols de caorcens de ces, et totas las senhorias que si aparteno, a la glieia de mosenhor s. Marti de Valauzi, et quel capelas de la dicha glieia ne pregue Dio per marma en fassa remembransa ; dels quais II sols dits que dévia W, de Pauti (4) los XII den. per 1 prat que ténia de lhui al trufe, en Ar. Merles los autres XII den.

Et laichi al espital ('6) del pug de la farga et al espital de Borriana a

(1) En certaines paroisses, ce lit (ou thoyre) sur lequel on portait le défunt aux funérailles revenait de droit à la fabrique. Souvent ce lit était paré de magnifiques draperies.

(2) Les églises de Caste'nau — Pierre Salamon, gouverneur des églises — nous voyons un legs pour le luminaire de l'église dudit castel et une rente de 2 sols à l'église de monseigneur Saint-Martin de Valausi ou Valansi. Cette dernière église était située dans la combe qui se trouve à l'orient de Castelnau II s'y trouve encore aujourd'hui une croix de Saint-Martin où l'on se rend quelquefois en procession. L'église Saint-Martin existait au XVe siècle.

(3) Russac, paroisse de la commune de Castelnau jadis annexe de Saint-Martin .

(4) W. de Pauti, ou de Pauci. — Le notaire qui a rédigé ou écrit les coutumes de Castelnau (1291) s'appelait Barthélemy de Pauci (Lira. p. 569).

(5) Les hôpitaux de Castelnau. — Doux hôpitaux en 1283. M. Limayrac n'en a connu qu'un : celui du pech de Lafargue : il devait être au nord de Castelnau, sur l'emplacement du foirai, au lieu encore appelé de ce nom, sur le plan cadastral de la ville. Le second, celui de Bourriane, était non loin de l'église actuelle, dans ce qu'on appelle aujourd'hui le barry de Bourriane ou le Barry tout simplement. M. Limayrac dit que l'hôpital du pech de Lafargue dédié à Saint-Martial avait une chapelle de Sainte-Madeleine ; il est probable qu'il fait quelque confusion. D'ailleurs ses références ne donnent aucune précision à ce sujet.

Nous pensons que ces deux hôpitaux, d'ailleurs petits, furent détruits pendant la guerre de Cent ans et qu'ils furentremplacés par un hôpitalunique, appelé ou XVe siècle hôpital de la Grand'rue, celui auquel se rapportent la plupart des documents utilisés par M. Limayrac.


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cadaun dels digs espitals XX sols de caorcens, e a la malaudia (1) del pug de la farga e a aquela de la Gossa a cadauna autresXX sols, que sio mes en draps en jago li paubre da ques locs.

E laichi 1 vestir de tela, entro en X sols de caorcens, a la glieia de Tazelhs (2) ab que hom cante inessas per amor de Dio e de marma.

E laichi als fraires menors da Caortz L sols de cnorcens, i als fraires predicadors daquel loc autres L sols, i als fraires del Carme daquel loc XV sols de caorcens.

Item als fraires menors de Montalba XXX sols de caorcens. Item als fraires predicadors daquel loc autres XXX sols de caor.

Item als fraires menors de S. Anthoni XXX sols, i a la obra del mostier daquel loc L sols, i a la obra des fraires del Carme (3) XX sols de caor.

Item als fraires menors da Fijac XXX sols de ca...

Item als fraires menors de Moncuc XX sols de ca.

Item als fraires menors da Lhondres (4) meg marc de slerlis. Item als fraires prezicadors daquel loc autre meg marc. I a totz los espilals i a las malaudias da Lhondres a cada maio, III sols desterlis.

Item als fraires menors de Gousester V sols de sterlis, i als fraires prezicadors daquel loc autres V sols, i a cada espital daquel loc i a cada malaudia i a cada espital (sic) daquel loc III sols de sterlis.

Item als fraires menors de Sus anthona meg marc de sterlis, i a cada espital, i a cada malaudia daquel loc III sols de sterlis.

(1) Léproseries de Castelnau.— Castelnau eutdeuxlépro eries, commeà la même époque Cahois, Gourdon, Figeac, Moissac, etc. L'une de ces léproseries, celle du nord, était située sur le pech de I.atargue, non loin de l'hôpital, à l'endroit qui a conservé encore de nos jours le nom de maladrerie ou malaudie.

L'autre, celle de la Gossa, dont le nom ne se retrouve plus à Castelnau, devait être au sud, soit à l'endroit appelé de la Madeleine, soit au lieu de Sainte-Quitterie, où les Clarisses du Pouget curent plus tard un dispensaire.

(2) Thézels, paroisse de la commune de Castelnau — dépendait du chapitre de Cahors.

(3) Carme de Saint-Antonin. — M. Moulenq (Doc. sur le T. et G. II p. 415) fait appeler seulement en 1 300 les religieux de cet ordre par les consuls et l'on voit ici qu'ils travaillaient déjà en 1283 à la construction de leur couvent.

(4) Angleterre. — Londres, Gloucester, Soulhampton, Saint-Thomas de Cantorbéry, Stafford, — je n'ai pas les éléments suffisants pour identifier Notre Dame de Nichola, — sont très reconnaissables sous les formes de Lhondresi G lusester, Susanthona, Çontierbier, Salaberri, Estanfort :


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Item laichi a la obra de S. Thomas de Contierbier V sols de st.

Item, autres V sols a Salaberri.

Item autres V sols a Nostra Dona de Nichola.

E laichi a una femna filha du barbier a Estanfort en Anglaterra V mars de sterlis e que hom los meta al prefeg del hies, i a autra femna a Lhondres laichi XX sols de sterlis.

Item als fraires menors da (1) Bures XXX [sols marabetis, i als fraires prezicadors daquel loc autres XXX sols, i als fraires del carme daquel loc autres XXX.

Item als fraires menors daPalessaXXX marabetis, i als fraires prezicadors daquel loc autres XXX, i als fraires del carme daquela vêla autres XXX.

Item als fraires menors de Toledo XXX marabetis, i als fraires prezicadors daquela vêla autres XXX.

Item als fraires menors de Sanh Ander XXX marabetis.

I a lotz los espitals i a las malaudias daques los que no iei nominatz a cadauna maio X marabetis, e que sio mes als paubres vestir.

Item laichi XXX lhb. de caorcens a Na Finas, molher den Ramon Batejat (2), e XXX lhb de tornes a Na Fauressa de lort; i aiso laichi lor per amor de Dio e per restitutio se tort lor avia de la companhia que tengui de lor paire.

E laichi a Na Faydida de Flurit (3) LX sols de tornes.

A Marchi mo mesalge LX sols de tornes.

E laichi a la filha den W. Faure, aiutori a maridar, Lsols de caorcens, i a la filha den Aymeric de Castelnuo (4) L sols de caorcens.

Item a la filha den Bernât de Clavelieras, aiutori a maridar, XXX sols de caorcens.

1 a cadauna de las noirissas que noiricho los meos efans a cadauna XX sols de caorcens.

(i) Espagne. — Burgos, Pa'encia, Tolède, SanUnder, sous les formes de Bures, Palessa, Toledo et Sanh Ander.

(2) Raymond Batejat. — Ce personnage est cité comme témoin dans la charte de 1291, avec un Gèraud Batejat (1 imayrac, p. 569V

(3) Faydida de Flurit. — Dans la même charte on trouve un Gasbert de Flont.

(4) Aymeric de Castelnau. — S'agit il d'Aymerie, fils de Ratier II, qui fut seigneur de La Bouffie et de Pcyrille ?


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E laichi a Peire, filh de Peirond ianta (?) so noiriment dels meos bes, tro a XV ans, i a la dicha Peirona L sols de caorcens. E si tant era que lo tutor dejos dich conoguesso que l'avant digs P. aprofeches, que ilh lhi desso dels meus bes X lhb. de tornes après XV ans.

E vuilh e comandi que na Guilhelma, ma molher an sos obs, be e leialment dels meos bes. aitant quant voira estar ab mos efans dejos digs, oab

l'un be e leialment ses marit, e se estava ab lor 111 ans complitz ses

marit, vuilh e comandi que hom lhi des dels meus bes L lhb. de tornes nègres ; estiers no ; e vuilh que sio suas totas sas raubas e sas joias.

E laichi a ma filha Lombarda per dreg d'institutio CC marcs d'argent, e leg, e vestir de drap vermeilh de grana, en las quais cauzas io la faug heretiera i ab aquo vuilh que la aondoza dels meos bes, e que re als no pusca querre ni demandar en re dels meos bes a moheretier dejosescrig. E se tant era que la dicha Lombarda moris, e ses efans que no atgues dichenden de si de leial matrimoni, vuilh e establisc que aco que io li laichi e sie autri be fosso a Guiral Trapas mo filh.

E se tant era que Na Guilhelma ma molher fosprenhs de filh o de filha, vuilh que si era filhs que fos hereLiersab mo heretier dejos [escrig] dig,o dos si dos navia, e si era filha laichi lhi C marcs d'argent, e leg, e vestir. Eselant era que aquel efas que naicheria de lhies, se prenhs era, o quans que nagues daquela prenhcssa, morio ses efant.o ses efans,queno aguesso dichenden de lor leial matrimoni, vuilh e establisc que aco que io lor laichi et totzlos aul,res bes foso a G. Trapas mo filh.

E fauc e establisc mon heretier uni versai en totas mas drechuras e en lolas mas autras cauzas G. Trapas mo filh, pupil, al quai comandi que el totas las laichas sobredichas e las almomac pague una velz tant solamenl, a aqueis a cui io las ie laichadas e que las pague del meu moble, ses terra vendre, e ses herelat, dins dos ans comptadors del temps de mon obi t.

Ese tant era que mobles no i apalegues, vuilh que de la renda que ichera de la mia terra sio pagadas mas laichas sobredichas, ses terra vendre, totas horal remazut a mon heretier sobredig daquel pogues perfurmir (?)

Ese tant era que negus daquels a cui ie laichat desus digs procures que ma terra fos venduda per laicha que io lhagues fâcha, vuilh que la laicha fos nulha, exeptada la laicha que ie fâcha a ma filha desus dicha.

E se lo dig- G. moria en alcu temps ses efant, o ses efans de leial ma-


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trimoni dichenden de lhui, substiluisc lhi la dicha Lumbarda, e en aquestcas lalh fauh heretiera.

Ese démos efans desus digs dezanava o ilh morioses heret que no aguesso dichenden de lor de leial matrimoni, vuilh i aordeni que tug mie be fosso als filhs den Hue de Trapas i als filhs den Faures de Trapas i als filhs denW. Trapas, mos fraires, per égals parlz, sal que hom des dels meos bes C lh. da tornes a Na Guilhelma ma molher, se viva era. e C marcs d'argent, obs de comprarrenda obs d'una capelania (1), laquai capelania vuilh, que sia assignada, se dezanava de mos efans sobredigs, a Castelnuo, per amor de Dio et de marina, e de mo paire e de tôt mo linhatge, e vuilh que aquela capelania sobredécha sia donada a persona convenhabla per totz temps per los filhs de mos fraires dessus digs, e que aquilh que dechendran dels efans desus digs aio per tolz temps poder de donar la capelania sobredicha i autre no, e aquel capelas que tendra la capelania sobrtdicha cante messas per amor de Dio et de marma e de tôt mo linhatge totas horas que pusca.

E doni tutors als digs mos efans e lor meteihs fauhs executors daquest meo testament Faure de Trapas mo fraire, en G. Catala, als quais doni i autregi plenier poder de exegre mia derriera voluntat, e de prendre e d'aministrar los meos bes e de pagar mas laichas e mas almornas e de demandas (sic) e decobrar mos deudes e mas rendas e mos ces e mos dregs et de gardar e da derzer mos efans e de totas autras cauzas far que tutor e executor podo far ; e que lun de mos efans sobredigs noirisca en Faures, mos fraire, la filha be e leial ment, en G. Catalas que noirisca lo filh e la filha, se voluntalz es del dig Faures.

E vuilh que las companhiasque ieo ie bailadas estio a la aventura de mo heretier universal entro que aquilh que las teno aio reduteompte als tutors sobredigs e que li dig tutor ambidoi acordadament las pusco bailar a personas convenhablas, a lor bona fe i a l'aventura del dig heretier.

(1) Chapellenie. — Elle ne devait, ce nous semble, être fondée que s'il ne restait aucun enfant du fils ou de la fille de Guiral Trapas. M. Limayrac pense qu'elle fut fondée par le fils G. Trapas et qu'à sa mort sa soeur Lombarde, épouse de B. de Laperarède, hérita du patronage. C'est que la cote du parchemin porte qu'il s'agit de la fondation de la chapelle Sainte-Mathaly au Cap del pic, M. 1 imayrac la place au faubourg Saint-Mathurin, au nord et à l'entrée de Castelnau. C'est possible. Peut-être y a-t-il quelque confusion entre Saint-Mathaly et SainteMadeleine de l'hôpital ?


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E revoqui ab aquest présent testament lo testament que m'atia fag davant aquest lo notaris dijos digs, que no vuilh que aia valor ni fermetat per nulh temps, e vuilh e establisc que tôt aiso que disus iefagedig, sia mos derriers testaments e mos ordenhs e ma derriera volontatz, e vtiilh que aia valor e que valha per dreg dé testament ode codicille o de derriera voluntat, e que per dreg ni per costuma ni per neguna razo no pusca esser revocatz ni aniilhatz. E preghi i apeli, per testimonis daquest meu présent testament que ie fag, maestre Aymeric Froment, en R. de Gnzargas (1), en W. de Bosanet, en R. Batejat, en Johan de Rigal, en Jame Olier, en B. Guiral ; lequal avant dig teslimoni foro apelat e preguata totas aquestas cauzas sobredichas pel dig G. Trapas.

Et ego, G. Aurici, publicus notarius castri novi, que a la requesla i a las pregarias del dig G. Trapas aquesta carta eschicha (escricha) da pauzie (?) en publica forma.

Et hoc est transcriptum predictum lestamenlum seu predicle carie.

Au dos du parchemin sur lequel a été faite cette expédition, on a écrit une analyse très brève qui mentionne le legs de 2 sous de rente à l'église Saint-Martin-de-Valausi, l'institution de l'héritier, lasubstitution de safille et des fils de ses frères, ainsi que lafondation delachapellenie, comme si cette fondation n'était passubordonnée à l'absence d'héritiers en ligne directe. Au contraire on a ajouté : Fondation de la chapelle de Sàint-Mathurin ou cap de pic. Le parchemin porte aussi l'indication que cette transcription a été faite pour Lombarde, sans doute àsa majorité ou à son mariage. Le copiste, quoique contemporain, ne semble pas avoir lu toujours bien juste, cependant son écriture est fort lisible, et le parchemin sauf en deux ou trois endroits n'est pas trop abîmé.

Ed. ALBE.

(1) R. de Guzergas. — On trouve dans des extraits d'actes notariés qu'en 1320 R. de Guzergues faisait un legs de 300 livres pour bâtir une chapelle, dotée de deux chapellenies dans l'hôpital de Pech de Lafargue (Limiyrac p. 42;).


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L'EGLISE SAINT-AMANS

DE

PR0MILHARGUES

On voit à un kilomètre environ en aval de Caylus, au bord des rochers qui dominent la verdoyante vallée de la Bonnette, perdue au milieu des bois de chênes, une église désaffectée il y a près de vingt ans. La porte, ouverte à l'aspect du midi, porte l'écusson de l'ordre de Malte, car elle dépendait de la commanderie de Lacapelle-Livron. Quoique voûtée en pierres, elle n'a pas grand caractère ; elle venait vraisemblablement d'être terminée, quand elle fut bénite, le 20 septembre 1519, sous l'épiscopat de Louis de Carrelo, évêque de Cahors, par un grand vicaire de ce prélat qui n'a énoncé que son titre d'évèque de Vevicen (Verissa), sans nous faire connaître ses nom et prénom, dans le procès-verbal que nous reproduisons plus bas.

C'est auprès de cette église que se passa le drame dont nous allons faire le récit, et que nous avons deviné à travers les lignes des minutes notariées de Caylus.

Le recteur Guillaume Delcusoul avait testé le 14 mars 1459 léguant aux pauvres 20 setiers de froment en pain et 24 setiers de vin à distribuer en deux fois, et il avait voulu reposer à Saint-Pierre de Livron, au tombeau de sa famille (Archives de Tarn- et -Garonne B. de Pris, not).

Chassé de sa demeure par la peste dite de bossa, qui infestait la région de Caylus, il avait testé de nouveau, le 12 août 1462, alors qu'il gisait dans une cabane, sise aux champs des héritiers de Foulques de Cos. Son frère Gèraud, qui partageait son malheureux sort, testa en même temps que lui.(Archives de Tarn-et-Garonne Rd. Canasier, not).

Il testa une fois de plus le 31 août, mais chassé par les émanations des cadavres, il avait fui le champ de Foulques de Cos et s'était trainé


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dans le champ de noble Guillaume de Metge (1). Comprenant que les corbeaux ne consentiraient pas à porter sa dépouille mortelle à Livron, il demanda seulement de reposer devant l'autel Saint-Biaise de son église. Il légua un de ses Bréviaires à Barthélemy Emeric, prêtre, un autre à Guillaume Bartha, clerc. Il ordonna à son héritier de rendre une chaîne d'or, valant 6 écus d'or vieux, qu'il tenait en dépôt de Jean de Trilhia, ainsi que une bourse en drap de Domax d'un côté et en fil d'or de l'autre, qui valait 28 à 30 écus d'or.

Toutefois il n'était pas mort le 2 septembre, où il résigna sa cure à M. Pons de Boria, bachelier en décrets, en échange de la chapellenie del Masel, fondée par N. D'Arribat. Il avait une fois de plus changé de champ, et il gisait dans une chenevière non loin de son église. Il est probable que la mort vint bientôt mettre un terme a ses souffrances, car nous ne trouvons plus mention de lui ultérieurement (Même notaire).

La peste continua ses ravages, et encore en 1465 Barthélemy Eméric, vicaire principal de la paroisse, recevait, faute de notaires car ils avaient été chassés par la peur du terrible fléau, le testament de Guillaume Maynard, et il y apposait le sceau de son église (Archives de Tarn-et-Garonne R. Canasier, not.).

En 1478 les revenus du prieuré étaient sous-fermés à un marchand de Saint-Antonin, par Pierre Paire, marchand de Lacapelle-Livron, au prix de 300 écus (Archives de Tarnel-Garonne. Jean de Boria, not.).

Le 15 février 1486, M. Guillaume Del Flery, prêtre de Castelfranc, au diocèse de Cahors, afferma pour deux ans à Jacques de Cos et à Jean de Boria, marchands de Caylus, les blés, vins, argent, carnelage, qui lui revenaient à titre de recteur, et ce au prix de 20 écus petits par an. Jacques de Cos fut chargé du service de l'église, (idem)

Il y avait des prêtres obituaires dans cette paroisse, lesquels constitués en syndicat le 12 mai 1563, chargèrent le syndic Pons Bés, recteur,d'acheter des ventes.(Archives de Tarn-et-Garonne. Du Solier, notj.

(1) En latin Medici. Les Metge de Caylus et de Saint-Antonin portaient les armoiries des Medicis. Y avait-il parenté entre les petits gentil-hommes et les brillants ducs de Florence ? Rien d'impossible, vu les relations des marchands saint-antoninois avec l'Italie. — Du reste les noms de Albenga, Arvengas, de Baudus, de Narbonne et de Saint-Antonin furent portés par des familles génoises et florentines.


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En 1648 la part de vin qui revenait au recteur de la paroisse était évaluée à 47 livres par an (Archives de Tarn-ct-Garonne. Cèd. volantes de Fontagne. not.).

Voici maintenant le procès-verbal de la bénédiction de l'église. Il se trouve aux Registres de l'Etat civil de Caylus, où le curé Prix le transcrivit, à la date du 12 octobre 1747, l'ayant trouvé dans de vieux parchemins.

« Universis et singulis, Nos Petrus, Dei et sancloe Sedis Apostolicoe « gratia Vevicen episcopus, vice et nomine reverendi in Christo « Patris et domini domini Aloysii de Carreto, eadem gratia episcopi « et comitis Caturcensis, salutem in Domino.

« Notum facimus et tenore proesentium attestamur anno et die in« frascriptis medietatem ecclesioe parrochialis sancti Amantii de Pro« milhargis a parte inferiori benedixisse cum aqua exorcizata et per « Nos benedicta, una cum etiam medietatem coemeterii prcedictoe « ecclesioe contiguis a parte inferiori etiam benedixisse ; cum alias « partes ecclesioe et coemeterii fuerint, ut proetenditur, benedictoe ; « Omnibusque et singulis Christifidelibus utriusque sexûs proedictam « ecclesiam et ccemeterium visitantibus die vigilioe et festi beati Mat« thoei apostoli, quadraginta dies de injunctis poenitcntiis misericor« diter in Domino relaxamus, proesentibus vero perpctuis temporibus « duraturis et permansuris.

« In cujus rei testimonium has proesentes literas per notarium in« frascriptum dicti Domini Caturcen. episcopi secretarium fieri et « subsignari fecimus.

« Actum et factum in dicta ecclesia Sancti Amantii die vicesima « mensis septembris anno Domini millesimo quingentesimo decimo « nono.

« De mandato Domini, Simonis sec. »

F. GALABERT.

Curé de Montpezat - de- Quercy


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LES DÉLÉGUÉS DU DISTRICT DE CAHORS

A LA

FÉDÉRATION NATIONALE DE PARIS

(14 JUILLET 1790)

La municipalité de Paris eut l'idée de grouper dans la capitale les représentants des gardes nationales du royaume et des troupes de ligne. Cette solennité grandiose devait symboliser l'union de toute la nation et sa cohésion définitive. Cette résolution fut présentée à l'Assemblée nationale le 5 juin. Le 9, un décret était présenté au roi qui dès le lendemain le sanctionnait. Dans toutes les communes les gardes nationales devaient être convoquées. Chacune devait élire 6 hommes sur 100. Ces premiers délégués se réuniraient au chef-lieu du district et là choisiraient les délégués qu'il faudrait envoyer à Paris.

Ce décret fut aussitôt expédié avec une invitation de la ville de Paris aux villes chefs-lieu de département) 1 ). Les communautés averties élurent leurs délégués dès le 24. Ceux-ci se rassemblèrent à Cahors le 27 juin. La salle du « Consistoire» de l'hôtel de ville était trop étroite. On se rassembla dans l'église des grands Carmes.

Il fallut d'abord vérifier les pouvoirs des délégués présents. Ce fut le travail de 9 commissaires choisis 1 par canton. Ce furent : Ramel, capitaine commandant pour le canton de Cahors. Bessiés, — — de Lalbenque.

Foujols, — — de Castelnau-Montratier.

Rey Delrieu, — — de Puy Levêque.

Constans Jean -Pierre, — de Luzech.

Martin, lieutenant pour le canton de Catus. Armand, capitaine — — de St-Géry.

Laulanié Ladevéze — — de Cabrerets.

Pradines, colonel — — de Limogne.

Les pouvoirs furent vérifiés dans la journée. Et le lendemain matin, 28, à 7 heures, il fut décidé qu'on nommerait 2 délégués pour 400 gardes nationaux. Or le district avait 9064 ou 9100 gardes. Il fallait donc 42

(1) L'invitation pour Cahors est du 18 juin.


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délégués. On les choisit de façon que chaque canton fut représenté. Il y eut donc plusieurs scrutins. Les élus furent :

Gensac cadet, capitaine, Bel aine fusilier, Lacoste cadet, Faydel jeune, Maraval Vaisset, (celui-ci n'ayant pas accepté fut remplacé par Soubira) de Cahors.

Laur, de Galessie. Delsol, de Crayssac. Agar Antoine, de Mercuès. Fournie Antoine, de Mercuès. Richard, capitaine, de Belfort, Clavel, fusilier, de Belfort. Valéry, fils capitaine, de Lalbenque. Delon, fils capitaine, de Lalbenque. Miquel Jean Baptiste, lieutenant d'Aujols. Vincens, fusilier, du Rau. Cayla Ferrières, de Castelnau. Guiches, fils, commandant, de La Molairette. Jean Austry, commandant, de Flaugnac. Parayre, fusilier, de Flaugnac. Taillade, lieutenant, de Castelnau. Jean Antoine Lascroux, commandant de Cabrerets. Dalat fils, capitaine de Limogne. Espéret, officier, de Pern. Rey-Delrieu de Puy-Lévêque. Bessières Latour, capitaine, de Prayssac (ce n'est pas le futur maréchal). Cambon, capitaine, de Puy-Levèque. Darquier, capitaine, de Duravel. Siscand, adjudant du canton de Puy-Levêque. Guilhou, commandant de Parnac. Valette, capitaine, de Douelle. Vialard, capitaine, de Castelfranc. Contou, capitaine, de Castelfranc. Couture-Mirandol, capitaine, de Castelfranc. Valette, commandant de Calamane. Pujol cadet, de Labastide. Pujolainé, de Lherm. Constans Jean Pierre, capitaine de Douelle. Pezet, lieutenant, de Labastide canton de Catus. Dois, capitaine, commandant de S'Cirq. Jean Cassan, commandant d'Orniac. Pierre Pellissier, capitaine, de Sauliac. Vernet, capitaine, de Sauliac.

Tous ces délégués devaient être rendus à Paris le 12 juillet, se présenter à l'Hôtel de Ville au Bureau de la Confédération pour y faire vérifier leurs pouvoirs et y recevoir une carte portant les mots Confédération générale.

Je ne puis affirmer que tous se soient rendus à Paris. Il fut alloué à chacun 5 livres par jour. Mais il durent faire l'avance de toutes leurs dépenses. Et même plus tard tous ne furent pas remboursés.

(Archives municipales).

B. PAUMES.


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Journal de M. de

Caors de la Sarladie

Le Journal de Route que nous publions, vient des riches archives du château de Blanat, près Saint-Michel de Bannières. Son auteur J. Joseph de Caors de la Sarladie fut le dernier mâle de la branche principale d'une famille noble originaire de Martel et établie à la Sarladie après la guerre de 100 Ans. Cathala Coture rattache les de Caors aux anciens comtes de Toulouse mais sans fournir les preuves.

Les de Caors de la Sarladie ont fourni plusieurs branches, la branche aînée demeurée à la Sarladie s'est éteinte au commencement du XIXe siècle dans les d'Aupias et dans les de Lapise de Lunegarde — une autre branche dite de Carman s'éteignit de bonne heure dans les de Lachapelle Carman qui existent encore — une troisième, dite de Laborie, détachée de la Sarladie en 1624, varia ses établissements et habita successivement Carnac, Montamel, Péchaut, Gramat, Marmignac, Labastide-Fortanière. Elle subsiste encore en la personne de Mlle de Caors qui demeure à Péchaut commune du Bastit. La Sarladie appartient de nos jours à la famille bien connue des de Blaviel.


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Journal de Jean Joseph de Caors fils de Jean Bertrand de Caors et de Margueritte de Tremeille

Moy Jean Joseph de Caors qui écris le présent journal suis nay le 19 septembre 1706 du mariage de Jean Bertrand de Caors mon père avec Margueritte de Tremeille ma mère ; dudit mariage sont venus, premièrement, Marie-Marte de Caors née le 20 may 1704 mariée le 2 juillet 1731 à Messire de... jober seigneur de Rassiol.

Second nay, Pierre-Joseph de Caors né le 3 may 1705 mort en bas âge.

Troisième, l'auteur du présent mémoire Jean-Joseph de Caors, né comme ci-dessus dit.

Quatrième, Jean-Louis-Gabriel de Caors né le 26 mars 1708 mort en bas âge.

Cinquième, Jean-Antoine de Caors né le 25 aoust 1711, chanoine à Montauban.

Sisième Marie-Margueritte de Caors née le....

Septième Marie-Rose de Caors née le 19 septembre 1718.

J'ay quité la maison paternelle au mois de mars 1721 pour aler ocuper une place de page ches monseigneur Philippe duc d'Orléans petit fils de France et régent du royaume ; j'ay été receu page de Philippe duc d'Orléans le 13 avril 1721 : j'ay suivi Philippe d'Orléans au sacre

du roy Louis 15 qui fut sacré à Rheims le 1722. Philippe

d'Orléans étant mort le 3 décembre 1723, son fils Louis duc de Chartre, en prenant le nom de duc d'Orléans, prit la maison de Philippe d'Orléans son père; de ce moment, je fus page de Louis d'Orléans ; en 1724 je fus attaché à (Auguste Marie Jeanne de Bade) de Bade Baden son épouse; en cette qualitté je fus ainsi que toute la maison qui avait été nommée pour être attachée à cette princesse, à Strasbourg pour y recevoir et la conduire à Paris. En 1725 Louis 15 ayant nommé Louis d'Orléans pour aler a son nom épouser à Strasbourg Marie de Pologne j'eus l'honneur d'acompagner dans le voyage Louis d'Orléans. Au retour de ce voyage je repris


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mes fonctions de page de madame d'Orléans que je continues jusques à la mort de cette princesse. Comme la maison de madame d'Orléans n'était composée que de cele de Louis d'Orléans, par sa mort, je continues mon service de pages auprès de Monseigneur due d'Orléans que a continués jusques au mois d'avril 1729 que Monseigneur duc d'Orléans me donna une Lieutenance dans son régiment de dragons d'Orléans.

En cette qualitté je joignis le dit régiment à Quimper en basse Bretagne ou il éttoit en quartier au moys de may de la ditte année 1729. Au mois d'août de la dite année 1729, le régiment fut envoyé a Doue en Flandre où nous restâmes en garnison jusques au mois de may 1730 que le regt fut envoyé à Aras où il restas en garnison jusques au mois de septembre 1731 qu'il en partit pour se rendre à Versaille ou le roy le passa en revue et eut la complaisance après l'avoir veu maneuvrer pendant cinq heures de le voir défiler par deux. Après quoi la reine ayant demandé à nous voir nous défilames également par deux dens la petite cour du château, honneur qui n'a été accordé avan ni depuis à aucun regt. Le lendemain que le roy eut veu le regt, il receu les ordre pour aler en quartier en Poitou, l'ettat majora Lamotte St-Heray.les compagnies distribuées dans la province.

Le regt restât en Poitou jusques au mois de may 1733, qu'il en parti pour aler en garnison à Touls en Loreinne ou restames jusques au mois de septembre que nous en partîmes pour nous rendre à Schelestat en Alsace ou nous fummes du nombre des trouppes destinées à composer un camp qui sasembloit sous cette place ou nous fumes campés jusques au 17 octobre que nous en décampames pour joindre l'armé de M. le maréchal de Barvic destinée a faire le siege de Kele. Je monté pour la première fois la tranchée devant cette place qui ne fit de résistance qu'autant que le gouverneur jugea devoir en faire pour obtenir les honneurs de la guerre. La prise de cette place termina la campagne. Larmée separée nous partimes pour aler hiverner en Franche Comté dans le baillage de Groy où nous restames jusques au mois d'avril 1734 que nous eumes des ordres pour nous rendre au Neuf brisac d'où nous partimes le 1er may, Le deux nous passames le rheims sous Strasbourg. Le 4 nous joignîmes l'armée à Rastat, nous fummes des trouppes destinées à l'attaque des iignes dEttelingue que les ennemis avoit formées pendant l'hiver, que nous forçames sans beaucoup de résistance. Les lignes forcées toute l'armée aux ordre de M. le ma-


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réchal de Barvic marcha à Philisbourg. Je Las aux historiens à faire le détail de la prise de cette place événement mémorable pour la nation. La perte que l'armée fit de M. le maréchal de Barvic son général qui fut tué d'un coup de canon pendant le siège en visitant la tranchée en fut une pour la nation difficile à reparer. Par la mort de M. le maréchal de Barvic, M. d'Asfel l'entien des lieutenants généraux de l'armée en prit le commandement, peu de jours après il receu le bâton de maréchal, nous finîmes la campagne à ces ordre. La campagne finie les trouppes qui composoil l'armée furent dens les quartiers de leur destinations pour y passer lhiverd. Le regt fut du nombre de celés qui le passèrent dens le Palatinat. Nos quartiers furent Kirguenpdlan et Westophen. Une maladie épidémique qui régnât pendent cest hiverd tant sur les bords du Rhim que dens le Palatinat coûta plus de trente mille hommes au roy. Le regt fut de ceux qui y perdirent le plus, et auroit etté hors d'ettat de faire la campagne de 1735, si l'on n'avoit pris le parti de l'envoyer au mois de Mars de la ditte année 173=; a Verdun et aux environs en quartier de rafrechissement ou il restât jusque au moy de may qu'il joigni l'armée campée auprès d'Hespir aux ordres de M. le maréchal de Coigni. La campagne finie le regt fut envoyé en quartier dens la haute Alsace. L'ettat maior à Thoune ou il restât jusques au 1er may 1736 qu'il fut envoyé aux environs de Colmar pour consommer les magasins de fourages qui avoit été faits sous le canon de cette place pendant l'hiverd. Les fourages consommés le regt receu des ordres pour aler en quartier en Normandie généralité de Rouan, lettat maior à Neuchatel. Le roy ayant fait pendent cest hiverd une réforme dens les troupes, Les compagnies de dragons qui ettoit à 41 homme montés furent misent à 15 à cheval et dix a pied Le regt était encore dens le mesme quartier au mois de février 1738 que j'y fus fait capitaine et y restat jusques au mois d'aoust de la dite année 1738 qu'il receu des ordres pour aler en quartier à Neuli ou il restat jusques au deux octobre 1739 qu'il receu des ordres pour aler en quartier dens la Loreinne Allemande, lettat maior à St Avold petite ville a 4 lieu de Sarre-Louis Le régiment restat à St Avold jusques au mois d'aous de l'année 1741 qu'il en partit pour aler camper a Sedan ou s'asemblérent parties des trouppes qui devoit composer l'armée que le roy destiné pour la Vesphalie dont le commandement fut donné à M. le Marechal de Maillcbois. Nous voici au moment que commence une guerre trop intéressante pour toute l'Heurope pour ne pas lesser


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le soin de la détailler a quelque plume digne d'un pareil ouvrage, je me bornere donca marquer les campagnes que j'ay faite, tant dans le regt dOrleans que dans celui du roy. Les trouppes qui composoit le camp assamblé sous Sedan en ayant decampé le 27 août de la dite année 1741, Le régiment étant du nombre des dittes trouppes en partit ledit jour. La composition des compagnies de dragons étant de 1 s hommes a cheval et dix a pied furent dettaché du corps et mits en garnison a Sedan.. Je fus destinés pour commander les dits dragons et rester a Sedan jusques aux premiers jours d'avril 1742 que j'en partis pour aler joindre le régiment qui avoit iverné ainsi que l'armée dens la Vesphalie. je trouve le regt campe a Oltremp petite ville peu distante de Munster. Les dragons que j'amenés de France furent montés de ce moment la, Le régiment y restât jusques à la fin de juillet quil vin camper près Duseldorf capitale du duché de Bergue. Au moment que nous nous atendions a repasser en France nous aprimes que l'armée aloit se mètre en mouvement pour se porter en Bohemme. Peu de jours après elle se mit en marche, et après un mois et demi de marche elle arriva sur les frontières de Bohemme Mr le maréchal de Maillebois ayant trouvé les débouchés par lesquels il setoit proposé d'entrer en Bohemme ocupé par les trouppes de la reine de Hongrie, après plusieurs tantatives pour les angager a lui livrer passage toutes infructueuse se détermina à ramener son armée en Bavière. Mr le maréchal de Maillebois ayant été rapele Mr le maréchal de Broille eut le commandement de l'armée.' Larmée restât campée jusques à la fin de décembre quelle fut mise en cantonement. Le regt quittât les quartiers quil ocupé près Broune frontière d'Autriche le 2 janvier 1743 pour en ocuper de nouveaux le Ion du Lee entre Osbourgt et d'Onaues (1) ou il arrive le 19 du dit mois. Peu de jours après l'arrivée du regt dans les nouveau quartiers Mr le marquis de Boufler colonel du regt qui le commandait receu des ordres de Mr le maréchal de Broglio pour commander un capitaine du regt avec un lieutenant et un maréchal des logis pour aler en France chercher les recrues tant en hommes quen chevaux que le roy destinet tant pour laugmantation de six hommes par compagnie que pour ramplacer ceux que l'on avoit perdu pendent la campagne. Je fus chargé de cette besogne, et après avoir receu mes instructions je quittes le régiment le 27 janvier pour me rendre à

(1) Donaueschingen probablement.


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Strasbourg conformément aux ordres que j'en avais; j'arrivais à Strasbour le 18 février 1743, des mon arrivée en cette ville Mr Depinc (?) lieutenant général et inspecteur chargé par le roy de la distribution des chevaux et des hommes de milices que le roy avoit destiné pour son armée de Bavière me remit ceux quil destinoit pour le regt. Je fus ocupé pandent mon séjour a Strasbourg a faire travailler à l'equiment tant des hommes que des chevaux qui mavoit été remis, quaux autres réparations nécessaires pour maitre le regt en état de rentrer en campagne, je partis de Strasbourg le 9 avril 1743, pour rejoindre le regt que je joigni le 20 may a quatre liçu d'ingoltat campé près d'une petite ville açelle. faubour g .Nous ocupames differens postes le Ion du Danube jusqu'à ce que Mrle maréchal de Broglio repliât toute son armée et la fit camper sous Insgolstat après quelques jours de seiour dens le camp Mr le maréchal fit passer le Danube à toute l'armée et la mena camper a d'Onaues dou l'armée se mit en marche pour revenir en France sur cinq colonnes qui se succedoit les unes aux autres. Le régiment fut de la seconde aux ordres de Mr le prince de Comti, toute l'armée se rassambla a Elbron ou elle passa le Nekre dou elle marcha a Spire ou elle passât le Rhein. Cette rivière entre nous et les ennemis, Larmée fut séparée en plusieurs corps le long du rhein et Mr le maréchal de Broillio rapellé le regt fut envo}'e dens la haute Alsace aux ordres de Mr le maréchal de Coigni qui eut le commandement de l'armée destinée a soposer aux entreprises des ennemis sur l'Alsace. Les ennemis ayant plusieurs fois tante le passage du rhein mes inutilement parles mesures que Mr le maréchal avoit prises pour s'oposer à leur entreprise, y ayant renonces mr le maréchal fit cantoné toute l'armée en atendant quil eut receù de la cour l'état des quartiers ou elle devait iverner celui du regt fut en Normandie ou je le suivis et ou il arriva le 19 décembre 1743. l'état maior à Neuchatel, quartier que nous avions ocupé il y avait quelques années. Au commencement de cette année 1744 Le roy ayant tiré une compagnie de chaqu'un des quinze regimens de dragons alors sur pieds pour en composer un qui portât son nom je fus destine pour commander le 4e escadron dudit regt et receùs mes ordres en conséquence pour me rendre avec ma compagnie a Mets ou ettoil le quartier destiné pour lassemblée dudit regt. Conformément aux ordres que j'en avois eu je parti du Neuchatel le 25 Février 1744 pour me rendre a Mets ou jarrivois le 13e mars, toutes les compagnies des autres regimens y arrivèrent successivement. M 1' le Cte de Creil fils du lieute-


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nant général de ce nom fut nommé colonel du nouveau regt qui par^ lordonance de création prit reng après le regt royal. Le regt restât a Mets le tems que Ion crut nécessaire pour y maître une uniformité, dans l'abillement et armement dou il parti le 2 may 1744 et fut a Longwi dou il parti les premiers jours de juin pour se rendre a un camp qui sasembloit sous Phalsbourg aux ordres mr le duc Darcour ou il resta camper jusques a ce que l'armée des ennemis qui ocupait une partie de l'Alsace se mit en mouvement pour repasser le rhein que le camp que commandoit mr Darcour joignit l'armée dont mr le maréchal de Noillo avoit pris le commandement. Les ennemis ayant repassé le rhein il y eut cinq regt de dragons trois dussars et 32 compagnies de grenadiers destines à observer la marche des ennemis. Le regt fut du nombre. Ce dettachement aux ordres de mr le cherde Belle isle lieutenant généralpassa le rhein à fort Louis le (manque une date rayée) et suivit l'armée des ennemis jusque a Camp tas petite ville sur le Neccrer a une petite lieu Destoukar (1) capitale du Vittemberg (?) (2) dou il se replia le long des montagnes de la foire (3) sur filingue (?) (4) dou nous décampament la 17 septembre pour nous rendre devant Fribourg dont l'armée formoit l'inveitissement Le regt fut campé a l'entrée de la gorge Debnet (5) ou il restât pendent tout le siège je fûts blessé très considérablement au siège. Après la reJittion de cette place je fus a Strasbourg ou ie restes jusque a ce que je fus en état daler a Paris pour y faire labillement général du regt dont j'étais chargé. Le regt hiverna dens la Souabe j arrives a Paris les premiers jours de janvier 1745 ou je reste jusques au 13 de may (L'abillement m'ayant retenu jusques à ce tems) que je pris la poste pour joindre le regt que trouve campé a Phorsen (6) dens le Villemberg ? mr le prince de Comti avoit le commandement de l'armée. La campagne finie le regt receu les ordres pour aler iverner dans la généralité de Paris 1 état maior a Sens dou il parti le 2 avril 1746 pour joindre l'armée dont le prince de

(1) Stutgard.

(2) Wurtemberg.

(3) Forêt noire.

(4) Villingen.

(5) D'Enfer.

(6) Pforzheim en Wurtemberg probablement. Aujourd'hui dans le duché de Bade.


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Comti prit le commandement. L'armée que commandoit ce prince après la prise de Mons et Charleroy cettant jointe a celé de m 1' le maréchal de Saxe, le prince ce retira et le regt fut de ce moment de la grande armée. Le siège de Namur ayant été résolu le regt fut du nombre des trouppes destinées a ce siège dont mr le prince comte de Clermon eut le commandement. Cette campagne finit par le guin de la bataille de Rocoux, après quoi le regt receû les ordres pour aler iverner en franche Comté, l'état maior a Jussé. Quatre jours après notre établissement dens nos quartier comme ie commandois le regt mr le duc de Random commandent dans la province menvoyat les ordres pour amener le regt en Provence, en conséquence desdit ordres je parti de Jussé le 23 novembre 1746 et arrive a Els (1) le 29 décembre Le regt en parti le 1 de l'an 1747 aux ordres de mr de Chever maréchal des camps et armées avec un gros corps de trouppes, tant espagnolles que françoises. Les trouppes des deux nations ne formant qu'un même corps d'armée dont mr. le maréchal de Belle isle venait de prendre le commandement sous les ordres de l'infan dom Philipe. Larmèe fut ocupée pendant les mois de janvier et février a faire repasser le Var et chasser de la Provence l'armée des ennemis qui y était depuis environ deux mois. Mr le maréchal ayant conctraint les ennemis a quiter la Provence distribuât des quartiers de rafrechissementà cette armée. Le regt eut le siens dans le Dauphine ou ie le conduisit, il fut dispersé dens les environs de Valance ou il restât jusque au premiers jours de juillet qu il vin camper sous cette ville dou il parti tout de su'tes pour se rendre à Briançon aux ordres de mr le chev. de Belle isle chargé par mr le maréchal son frère général de l'armée d'attaquer les retranchement que les ennemis ocupoit au col de lasiette, la droite a Exille et la gauche sur fenetrel, le gênerai ayant perdu l'ouïe dans cette entreprise mrde Villemeur comme lanlien officier général prit le commandement des trouppes qui avoit étoit employées a cette expédition el les ramena à Briançon dont nous étions peu de jour auparavant. Les expédition militaire ayant cesse dens cette partie par le mauves succe de notre entreprise sur les retranchemens du col de lasiette le regt finit la campagne campé sous le canon de Briançon dou il partit pour venir passer liverd dens la généralité de Paris lettat maior a Tonnere. Le regt destine a servir dens l'armée de Provence quittat les quartiers qu'il avoit ocupé pandent liverd les premiers jours de may

(1) Aix?


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1748 et fut cantone jusques au deux juin dens le buge dou il parti pour aler en dauphine consommer les magasins de fourages qu'on y avoit assambles et qui devenoit inutile, les préliminaires de paix venant detre signé. Le regt fut destines a consommer celui qui etoit a Cret petite ville du Dauphine. Le 20 de septembre mr de Mailly inspecteur et lieutenant général des armées y arriva pour y faire la reforme du regt compose pour lors ainsi que tous les regts de dragons de quinze compagnies de 50 hommes a cheval chaqu'une commandées par le colonel, lieutenant colonel et traise capitaines, un lieutenant un cornette et un maréchal des logis par compagnie et par la formation de la reforme les regts des dragons furent mis a douze compagnies dont huit a cheval de 35 hommes et quatre a pieds de soixante et dix hommes chaquunes La compagnie colonelle reformée, la lieutenance a celle du premier capitaine ; comme premier capitaine je fus de ce moment sans troupe, avec un brevet de commandent des quatre compagnies a pieds. Le 25 septembre 1748 le regt parti de Crect en Dauphine pour se rendre en garnison a Selestat en Alsace ou il essuiat une seconde reforme de 5 hommes par compagnie a cheval et de dix par compagnie a pieds. Le regt parti de Selestat le 2e septembre 1749 pour se rendre dens la généralité de Paris l'état maior et les 4 compagnies a pieds a Sens. Le regt parti de Sens le 3° septembre 1750 pour aler en garnison a Mets, il parti de mets le 2 septembre 1751 pour aler en quartier en Comté l'état major a Salin.

J'ay épouse le dimanche traise février 1752 demoiselle Marie de lapise Vidal fille de messire Jean de Vidal Lapise garde de sceaux de la chancelerie près le parlement de Toulouse, lieutenant général de la sénéchaussée de Gourdon et de feù dame marie Antoinette de Puismisson. De mon mariage est nay 1er le vendredi 8 juin 1753 a-quatre heures du matin une fille qui na vécu quenviron demi heure ; des affaires de famille m'ayant déterminé a demander ma retraite, je partis le 27 juin 1753 pour joindre le régiment et travailler a l'obtenir, je joignis le régiment a Salins a franche Comte ou il resta jusques au 1er septembre 1753 qu'il en parti pour aler a Verdun ouiele suivis. Ayant apris a Verdun que le roy mavoit acorde six cents livres de pantion de retraite du 22e dudit mois de septembre 1753 je quitais le régiment pour joindre ma famille dou ie ne prevois pas que je me sépare qu'à la mort heureux si j'emplois le peu de tems qui me reste pour remplir ma carière a reflechir serieusement sur le dernier moment. Le 27


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février de la presente année 1754 jours des cendres ma femme acouche avant le terme d'un enfan qui na vécu qu'au tant de tems quil en a falu pour recevoir le batheme. Le samedi huit fevrier 1756 ma femme est acouchée d'une fille qui a été batizee le mardi onze et tenue sur les fous par mr de Laval au nom de mr de Lapanonie mon beaupère et par ma mère et a été nommé Fleur margueritte : Monsieur de Lapanonie mon beau-père est mort à St-Projet le jeudi 29 novembre a dix heures du soir année 1756. Le jeudi premier juillet 1756 ma femme a acouchée a sept heures du matin d'un enfen qui a été battizè a Monvalent le lendemain vendredi 2e avec pour parin Jean Antoine de Caors mon frère chanoine a la cathédrale de Montauban, et pour marenne mdme Anne de Darnis famme a mr de Laval mon beau frère, a été nommé Jean Antoine Joseph. Le mercredi 26 octobre 1758 a quatre heures et un quart après midi ma femme a achouchée d'une fille qui a été battizee a monvalens le vendredi 28 dudit, a été parin messire Antoine de Vidal Lapize seigr de la panonie mon beau frère et marrenne Marie Marthe de Caors epouse de mr de rassiol, ma soeur. Cette année 1758 et mort deux de mes tantes religieuses de Malte à la maison de l'hôpital St-Dolus, L'une appellêe Me de Lasarladie le 8 février,et l'autre appellée Me de Molmor le 24 juillet. Madame Marguerite de Tremeuille ma mère et morte le mercredi 31 janvier 1759 environ les deux heures du matin et a été enterrée le jeudi premier février a mayrignac lieu de la sépulture de la maison. Le dimanche premier avril 1759 ma femme et acouchée a quatre heure après midi d'un garçon qui na vécu que peu de minute a receu le bateme et a été enteré le lundi 2e dudit a Mayrignac lieu dé notre sépulture. Le vendredi onze may 1759 a 6 heures du matin et mort Jean Antoine Joseph mon fils qui etoit nay le premier juillet 1756 a été enterre à Mayrignac lieu de la sépulture de la famille.


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Dans le même livre journal, quelques pages plus loin, parmi d'autres notes qu'il me parait inutile de relever, le même Jn. Jh. de Caors écrit :

Jay obtenu une pantion de six cens livres sur le trésor royal. La letre de Monsieur le comte Dargenson ministre de la guerre qui m'en fait part et du 4 octobre 1753. — nota ie suis sur letat des pansionnaire du premier septembre 1753, et ma pension cour dudit jour.

La pantion ci-dessus aujourdhui 7e may 1758 ma été payée pour deux années. J'ai été payé dans le courant du présent mois de mars 1759 d'une année de ma pantion. Ce qui fait trois années que j'en ay receu depuis que je l'ay obtenue le 17 mars 1759.

Archives de la famille d'Aupias de Btanat au château de Blanat à Si-Michel de Bannières-près Vayrac, (Lot) Fond de la famille de Caors, livre journal.

ACH. VILLE CURÉ DE ST-MICHEL


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AL BI

0 hi ! per te canla houdrioï abé la lyro Que fasquél d'Apoulloun un diou pes troubadous. l'u naû que la nigoul, que din loti cèl asiro, Faïoï mounta colzet soun ayré lou pu dous.

Mè soui rès qu'un bigal, pu fi qu'un gru d'aréno, Et din moun cûen escur de magre talhatlis, Al Iginoul de laï flous, qu'embaûmou la péléno, S'ennayro pa lou bruch de monn boulzinadis.

Alabé, coussi bos, diûzenc Izuc de la souco, D'oun t'es poudé m'aûsi. Te cadrio dabala. E bel quilha lou cap et bel durbi la bouco, Duscos à lu moun laûs Ijamaï pouira boula.

Cependent, al councert de la grando Naturo Cadun dis ço que sap. Atal farè per lu. Et se te canli pas d'uno bues prou siguro, Es perço que la set m'escano de countu.

Ambe io fasés qu'un : ei moun cor, ei moun àmo, Soun eyine, soun parla, soun aie, sa calou. Remèdi quand quicon la rousègo, la cramo, De sas plagos toui glouts amaisou la doulou.

Me demandi ço que, sans lu, saïo la bido. Ei lou mirai ouran fa pu bel l'agatza. Mémo l'abugle per la Irouba pus poulido Sus toun lutent cristal aïmo de se pcnlza.

Escaûduros l'hiber per abança la primo. Semenos de Izouns blus lou loting del calendriè. Ressort pel bras nouut del palari que trimos Fas del roc lou pu dur lou pu moufle cendrier.


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Et din moun goubèlet, oh ! qu'es plasent à beire. Toun pétil, à mous pots, fa béni la prusou. Es un rai de soulel que dins un paû de beire Lou païsan a boutai, per nous aûs en prisou.

Ralzo, ratzo pla fort, oli de la pensado Su la terro y a pas de diamant pu risent Del frets benedilziè mémo l'aïgo senhado N'es pas del paradis un ta ritzè presenl.

Es al dessus de tout, per io tzuc d'ambrouésio, Nègos lou pessoment, bolos de boun himour. Escampilhos pertout fèc, lun et pouèsio Donnos d'enlzin al frount et d'alos à l'Amour.

A bel tal, se ba bos, ô grando Proubidenço,

De ço que m'aï dounal, libro pos te serbi.

Se ba cal, abalis artzent or et semenço

Mè t'en pregui, toulzoun, oh ! daïsso nons lou bi.

Et taleû estourrit ma darnièrq boutelho

Tout o fèt arribat al cap de moun cami

Dins un cûen de moun hort à l'oumbro d'uno trelho

Lèn del pouls el del Irin souhèti de m'endourmi.

Aqui beleû un tzoun maï cendres assèdados Tout en beguent lou sang del rasin engrunat Din lou found de lour clop, de mai d'un oublidados A la binho rendraû tout ço que m'a dounat.


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LAI FLOUS DEL PASTOUREL

Es atal que parlabo, La beilho de parti, Un pastré, que cambiabo Dé bé per Saint-Marly.

Din lou traou rescoundul de la tébio granlzelto Ouran m'abès, tasouen, susprés à sangloutla, Podi pas, o bouquets de ma pastourelelto, Bouï daïssa mai de temps, mé cal bous népourta.

Pla décidat, alaï, su la roule fangouso, Bési l'aoulré béni ; dé lèn, mé dis : « baï-t'én ». Et, douma, cap baissât, la perpeillo glemouso, Pei toulzoun, d'apraïci partiré malcounlént,

Al se, poulidos tlous, boudrioï bé bous rescoundré ; Saiirioï pas en paquet prou pilzou bous pléga. Pel la terro de l'hort n'aûssi pas bous léboundré, Estimarioï pla mai din lou riou bous néga.

Mes, coumo boli pas que dé mas estranzéros En loc, dé cat dé biais, bous toucou dé lours dels, Tantos, àsoulel-court, darré las aùglanièros, Anireï bous brulla, ramelous et bouquets !

Et, qu'aïmi, cépendent, bostro senlou, pécairé ! Bous abioï, tsamaï plus, troublât tant dé parfun. Dire qu'abant la nech, din lou cel blu, pel l'ayré, Mous els trempés béraii s'ennayra bostré fun.

Ané, pel darnié cop, bénès prep dé ma poto, Pimparelos, coucuts, cantortos et broufbus ; A moun cur daïssas fa sa milhourio riboto. Espoutit pel malhur, a besoun dé poutous.


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Douma, saïo trop tard, laoutzero, bostro cendré Futsira, cal sap oun ? su l'alo dé l'alita. Mé, nou ; dins un pétas propre boli bous prendre. Ouran baii troubaré quicon per bous bouta.

D'ins un traii dé paret, Izous un rideou dé lèro, Pla prion té cugnaré, fino pousco d'amour, Et d'aquel mantel bert la felhetto planièro Té boutara toulzoun à l'assès de l'himour.

Cado ses, arrédut, o réliquos aïmados,

Aban d'ana, sul lech, ma lassière paiisa,

Pés trouns, dé tzinouilhous, pé-nut et mas Izuntados,

De glémoset dé sang béndrè bous arrousa.

Mes, aqui, tôt ou tard, brico suspreso, l'albo Troubara dé moun cur lou balan arrestat. Démandi que moun corp al pè d'uno bidalbo, Protzé dé bostré niou, o flous, siosqué boutât.

Et dins aquel récouen, tzoul pés de las annados, Quand peyros et cascuns sus io s'apilarau, Al foun del mèmoclop, dé toutis oublidados, Noslros cendrés, un tzoun, beleii, se mesclaraù.

CAZES

Instituteur à Martel Lot) 1909.


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DE LA SOCIÉTÉ DES ÉTUDES DU LOT

PENDANT LE 3e TRIMESTRE DE 1911

Séance du 10 juillet 1911 Présidence de M. PA UMÈS, président semestriel

Assistaient à la séance : MM. Albe, Billières, Crudy, Daymard, Dois, Gary, Girma, Rames, Tournié, Viguié.

M. le Secrétaire général dépose les publications reçues.

Il signale dans le dernier numéro de la Quinzaine du Quercy la suite du travail de M. Cavalié sur l'éducation et l'enseignement à Figeac à travers les âges.

Il donne lecture d'une lettre de M. J. Richepin, président de la Ligue pour le retour à l'ancien programme d'études classiques et le maintien de la vieille culture française. La Société des Etudes donne bien volontiers son adhésion aux idées soutenues par la Ligue.

M. le maire de Dôle sollicite une souscription pour aider la ville à acquérir la maison natale de Pasteur. Faute de fonds, la Société ne peut participer à cet hommage tendu à l'illustre savant.

M. Fourgous, notre confrère, offre à la Société une plaquette illustrée, extraite de l'Annuaire de la Société d'Archéologie de Bruxelles, contenant le récit d'une excursion archéologique dans l'Ouest de la France (Poitiers, Chauvigny, Saint-Savin), et deux numéros du Neuilly-Journal (13 et 20 mai 1911), où il décrit « un beau décor, grande place de Bruxelles ».

Notre confrère le Dr A. W. de Roaldès, chirurgien en chef de l'hôpital de la Nouvelle-Orléans (E. U.), nous envoie son rapport annuel, richement illustré.

La Société remercie MM. de Roaldès et Fourgous.

M. Em. AEgerter, présenté à la dernière séance, est élu membre résidant.

M. Gauthier, professeur d'histoire à l'école supérieure de Martel,


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demande à faire partie de la Société en qualité de membre correspondant. Il est présenté par MM. Daymard et Cazes. On procédera à son élection à la prochaine séance.

La Société des Etudes remercie le ministère des Beaux-Arts de tout ce qu'il a fait jusqu'ici pour la cathédrale de Cahors et émet le voeu que la restauration du portail Nord soit complétée le plus rapidement possible.

W. l'abbé Albe donne lecture d'un travail de noire confrère M. l'abbé Taillefer : « Addition à la coutume de Montcuq », qui sera publié dans le Bulletin.

M. le Président communique une note de notre confrère M. le Dr Bergougnoux sur la « proportion des décès par cancer dans le Lot, de 1906 à 1908, d'après M. Jacques Bertillon. »

M. Combes continue la lecture de ses extraits des registres municipaux de Cahors sous la Révolution (fin juillet 1797).

La Société décide qu'elle fera une excursion archéologique à Figeac dans la première quinzaine d'octobre. Ceux de nos confrères qui voudraient y prendre part sont priés d'envoyer le plus lot possible leur adhésion.

Séance du 24 juillet 1911 Présidence de AL PA UMÈS, président semestriel

Etaient présents : MM. Albe, Combes, Rames, Foissac, AEgerter, Gary, lieutenant Tourné.

M. le Président annonce qu'il s'est inscrit sur le registre déposé à l'occasion de la mort de Mgr. Laurans, évèque de Cahors, au nom de la Société dont le regretté prélat était membre honoraire, et qu'au nom de notre même Société il a pris part aux obsèques. Dans cette circonstance il croit être l'interprète de tous ses confrères en envoyant à la famille de Mgr. Laurans ses sympathies les plus respectueuses.

M. le Président lil ensuite de la part de M. l'abbé Foissac qui le tient de M. le curé de St-Michel de Bannières, un journal de route écrit par un membre dé la famille De Cahors, qui fut successivement page du Régent, puis du duc d'Orléans et enfin Capitaine dans un régiment de dragons. Son journal est une émunération sèche des étapes parcourues par l'officier, sans notes pittoresques qui éclairent la physionomie de l'au,-


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leur ni celle de son temps si fertile cependant en gentillesses militaires. Le journal paraîtra dans le bulletin.

M. l'abbé Albe nous signale d'après une note de M. l'abbé Robert curé de Bajous près du Fossat (Ariège)que le St-Amadour honoré en Portugal avait aussi ses fervents dans le Comté de Foix. Ce sont des offrandes de messes faites en pays de Foix les 13 avril, 10, 15 juin 1516 et 13 février 1517.

M. Albe signale aussi une ordonnance du 13 février 1640 de Jean de Ginoulhiac, évèque de Tulle et une lettre du même du 21 mai 1640. En sa qualité de seigneur de Rocamadour, le chef du diocèse voisin disputait à Alain de Solminihac, chef du nôtre, ses droits sur le clergé de Rocamadour. Dans celte dispute l'évêque de Cahors, chef spirituel de Rocamadour, eut gain de cause.

M. Gauthier, professeur d'histoire à l'Ecole supérieure de Martel, est élu membre correspondant de notre Société.

M. Combes continue la lecture de son analyse des registres de la commune de Cahors du 28 septembre au 8 novembre 1797.


Analyse des Registres Municipanx de la commune (le Cahors

(Suite )

28 jrimaire an III (18 décembre 1794). — CORPS MUNICIPAL. — Réquisitoire de l'agent national. Il dénonce les manoeuvres d' « hommes pervers, suant la calomnie », qui cherchent à ébranler la confiance du peuple en ses mandataires. Depuis plusieurs jours, notamment le 25 de ce mois, dans une des salles de récréation de la Société populaire, ces hommes ont dit que « les terroristes, les dilapidateurs », redoutant le moment ou ils allaient être forcés de rendre leurs comptes, avaient envoyé à Paris un homme intrigant, dont les menées pussent leur conserver leurs places; l'un d'eux a même proposé aux bons citoyens de le soutenir dans la lutte qu'il voulait commencer.

Le Corps municipal arrête que l'affaire sera renvoyée de suite au juge de paix de la première section, pour qu'il procède contre les auteurs, fauteurs, adhérents et complices des propos séditieux dont il s'agit. On désigne comme premiers témoins à entendre les citoyens Mailhes, homme de loi, Dubernad, ex-prêtre, d'Hillebard, propriétaire, Peyrat, Ier né, propriétaire,et Lagarde, médecin.

Procès-verbal de l'incinération, faite avec les formalités ordinaires, de 2180 livres 5 sols de billets de confiance, qui a eu lieu aujourd'hui à 4 heures du soir, sur la place de la Révolution.

3 nivôse an III (23 décembre 1794). — LE CORPS MUNICIPAL, VU que le citoyen Raymond Loudes, soldat du guet, passe en qualité d'invalide dans la compagnie des vétérans, le remplace par le citoyen Jean Delpech, ancien soldat du régiment ci-devant Royal-Marine, âgé d'environ 62 ans, originaire du district de Gourdon et qui réside à Cahors depuis 26 ans. Delpech a prêté le serment républicain en la forme ordinaire.

Le corps municipal désigne deux de ses membres pour assister le citoyen Labroue, administrateur du district de Cahors, chargé d'inventorier les papiers de Constans-Labarthe.

10 nivôse an III (30 décembre 1794). — LE CORPS MUNICIPAL, VU les besoins pressants des hospices, transmet au citoyen Disses, qui en est le directeur, une réquisition de 30 quintaux de maïs à fournir par la commune de Vaylats, avec invitation de la faire exécuter de suite.

19 nivôse an III (8 janvier 1795). — CORPS MUNICIPAL.— Délibération sur plusieurs arrêtés du district. Vu celui qui porte, entre autres dispositions : qu'il sera fait un recensement des vins ; qu'il sera dressé un état des vins rouges, tant vieux que nouveaux, existant soit chez les propriétaires, soit chez les marchands ; que la commuue de Cahors doit


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fournir 320 tonneaux (1) ; le Corps municipal désigne deux de ses membres pour faire le recensement et l'état dont il s'agit.

Un autre officier municipal est chargé de faire le recencement des fils.

Les commissaires pour l'atelier à salpêtre sont invités à redoubler de zèle et d'activité pour l'exécution exacte de l'arrêté du District qui les concerne.

Une commission est chargée d'examiner tous les articles de contributions en retard sur les trois exercices 1791, 1792 et 1793.

Lecture d'une lettre du District relative aux citoyens Berthon, Bouyssou, Lagarde et Roques, ces deux derniers officiers de santé, lesquels avaient donné leur démission de membres du Conseil général parce qu'ils avaient à remplir d'autres fonctions. Le District dit qu'il n'y a pas incompatibilité entre les diverses fonctions dont ces citoyens sont chargés; il invite le Corps municipal à les rappeler au sein du Conseil général et à leur dire qu' « ils se rendraient coupables envers le peuple qui les a honorés de sa confiance, s'ils ne se rendaient incessamment à leur poste ». — Le Corps municipal arrête qu'il se conformera aux intentions du District.

23 nivôse an III (12 janvier 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, VU une lettre du citoyen Soulages, agent militaire supérieur du département du Lot, arrête :

1°. — Les déserteurs qui, d'ici au 30 nivôse, se présenteront volontairement au bureau militaire, recevront des routes pour aller rejoindre leurs corps.

2°. — Ceux qui ne se présenteront pas seront arrêtés et traduits devant le tribunal militaire compétent.

3° — Les militaires qui ont obtenu des congés, même absolus, sont tenus de les faire vérifier au bureau militaire.

4° Ceux qui ont des congés limités doivent aussi les faire vérifier, et même, aux termes de la loi, se préparer à partir de suite, si leur santé est rétablie.

5° — Tous ceux qui, depuis le commencement de la Révolution, ont obtenu des récompenses ou secours militaires, doivent se présenter, afin qu'on sache s'ils ne sont pas encore en état de servir.

(1) 1 280 barriques.


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6°. — Les jeunes citoyens de la première réquisition à qui il a été accordé des permis pour rester dans leurs foyers jusqu'à leur entier rétablissement, sont tenus aussi de se présenter au bureau militaire, pour y être examinés de nouveau.

7°.. — Le présent arrêté sera affiché et publié à son de trompe et au bruit du tambour, en présence de deux officiers municipaux. Les citoyens sont invités à dénoncer ceux qui sont dans le cas du présent arrêté.

26 nivôse an III (15 janvier 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, pour l'exécution d'une lettre des agents généraux des subsistances, charge un de ses membres de se rendre chez le citoyen Cagnac, préposé aux étapes, et de constater quelles sont les provisions dudit préposé (1). Le citoyen Jean Fagonet, agent de la commission de commerce et approvisionnement de la République, demande quels sont lés prix des vins dans la commune. Le Corps municipal répond que les vins dits noirs, 1re qualité, se vendent 800 livres le tonneau ; ceux de la 2e qualité, 700 livres ; ceux de la 3e qualité, 600 livres (2). En cas de variation des prix, il sera adressé audit agent un prix courant chaque décade.

4 pluviôse an III (23 janvier 1795). — CORPS MUNICIPAL, — Le citoyen Thirion, chef d'escadron commandant un détachement du 9e dragons, qui vient d'être passé en revue sur la place d'armes par la municipalité, vient déposer sur le bureau une plainte contre un dragon de ce détachement, inculpé de tentative de vol avec menaces, commise contre une femme, sur la route de Sarlat à Gourdon. Le Corps municipal arrête que l'inculpé sera retenu à la conciergerie de la Maison commune, pour être conduit de brigade en brigade devant tel tribunal qu'il appartiendra.

5 pluviôse an III (24 janvier 1795). — LE CORPS MUNICIPAL autorise le. citoyen Chanut, concierge de la Maison commune, à recevoir les rations de fourrage nécessaires pour la nourriture de deux chevaux laissés en dépôt par le détachement du 9e dragons.

(1) Le paragraphe suivant porte en marge le chiffre 29, qui paraît être la date de sa rédaction.

(2) Ces sommes, en assignats, correspondaient respectivement, à cette époque à 174 livres, 152 livres et 130 livres, d'après le tableau publié par M. Paumés (Bulletin de la Société des Études, tome XXXIII, page 120), auqu 1 nous aurons plusieurs fois encore à recourir.


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Procès-verbal. — Le maire et les officiers municipaux, « profondément navrés de la situation affreuse où se trouve réduite la majeure partie de leurs concitoyens, privés de pain depuis plusieurs jours, qui se présentent les larmes aux yeux, pour demander de quoi alimenter leurs enfants mourants de faim » ; affligés de la misère cruelle de ces malheureux, au milieu des glaces et des neiges qui empêchent de recevoir les quelques grains qu'on pourrait apporter du dehors, et désespérés de ne pouvoir calmer leurs douleurs; déclarent s'être transportés chez tous les boulangers et n'y avoir trouvé aucune ressource ; ils ont visité les maisons des citoyens réputés aisés, où ils n'ont trouvé que l'absolu nécessaire pour ceux qui les habitent. Ils se sont retirés, « le coeur pénétré de la plus profonde, de la plus juste douleur », et font part de ces faits à l'administration du District, avec prière de délibérer, toute affaire cessante, sur l'affligeante situation du peuple et de ses magistrats, qui ne pourraient répondre de l'ordre si on ne venait à leur secours.

Le Corps municipal nomme une commission pour vérifier l'état d'une chaudière appartenant à l'atelier à salpêtre et qui a besoin de grandes réparations.

8 pluviôse an III (27 janvier 1795). — CORPS MUNICIPAL. — Le citoyen Lacroix, officier municipal, est nommé commissaire pour recevoir les grains mentionnés dans l'arrêté du District en date d'hier, et en donner décharge au garde-magasin du District.

9 pluviôse an III (28 janvier 1795). — CORPS MUNICIPAL.— Rapport des citoyens Mazaré et Machat, marchands chaudronniers, nommés commissaires le 5 pluviôse pour vérifier l'état d'une chaudière de l'atelier à salpêtre. Ils déclarent que celte chaudière est hors de service et doit être envoyée à Villefranche d'Aveyron pour être refondue. Le citoyen Tailhade, officier municipal, est chargé de cette opération.

/2 pluviôse an III (31 janvier 1795). —CORPS MUNICIPAL. — Après une longue discussion et une mûre délibération, le Corps municipal, considérant qu'il existe des chais où ont été ramassés depuis longtemps les vins des propriétaires qui ont été obligés de les vendre à bas prix pour faire subsister leurs familles ou travailler leurs biens ;

Que, depuis la réquisition, des hommes sans conscience cherchent à faire hausser les prix des vins et se sont vantés qu'ils feraient passer outre aux prix indiqués par la municipalité (voir le 26 nivôse) ;


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Qu'il importe que les gros chais soient vidés avant qu'on touche à l'approvisionnement des particuliers ;

Qu'il faut fixer les prix avec une juste sévérité, d'abord pour économiser les fonds de la nation, ensuite parceque ceux qui détiennent de grandes quantités de vin, « gorgés d'assignats par les profits immenses qu'ils auraient acquis », n'hésiteraient pas à payer à n'importe quel prix les objets de première nécessité, de sorte que les indigents seraient privés de tout ;

Qu'il est impossible de fixer les prix de certains vins où il entre de l'esprit de vin, non plus que celui d' « une liqueur appelée rogomme, qui sert à donner de la force et du corps aux vins faibles », mais qu'il est utile que l'agent du Comité de salut public surveille ces deux objets, afin de s'opposer à la cupidité des spéculateurs ;

Déclare que, dans la commune de Cahors, le prix des vins noirs n'a pas excédé 800 livres (1) pour la 1re qualité, 700 pour la 2e, 600 pour la 3e;

Que les vins dits rosés, non triés, (2) valent, pour la ire qualité, autant que la 2e qualité des vins noirs, et pour la 2e, autant que la 3e des vins noirs ;

Que, à son avis, les vins vieux noirs doivent avoir autant de valenr que les nouveaux, quoiqu'ils soient moins recherchés ;

Que les vins rosés vieux doivent valoir 12 pour 100 de moins que les nouveaux ;

Invite l'agent du Comité de salut public à ne pas dépouiller, dans l'exécution de la réquisition, le cultivateur peu aisé, en ménageant les gros spéculateurs, capables à eux seuls de la remplir, et à « avoir égard au secours que procure un peu de vin aux indigents » en trop grand nombre dans cette commune privée de subsistances depuis si longtemps ;

Arrête que le présent sera adressé au Comité de salut public, à son agent en ce moment dans la commune, au représentant du peuple Bordas, à Bordeaux, à l'agent maritime, au District, afin qu'ils se tiennent en garde contre les tentatives qui pourraient être faites auprès d'eux.

(1) Le tonneau, ou 4 barriques.

(2) Le vin noir était fait avec des raisins noirs choisis, et le vin rosé avec le reste de la récolte, qui comprenait toujours des raisins blancs.


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(A cette délibération est annexé l'avis d'une commission composée de propriétaires et de commerçants en vins, avis qui avait été soumis au Corps municipal avant qu'il prît sa décision).

13 pluviôse an III ( 1er février 1796). — LE CORPS MUNICIPAL, conformément à un arrêté du District, désigne deux de ses membres pour se transporter dans les maisons où ils pourront supposer qu'il se trouve des eaux-de-vie et faire le recensement de cette liqueur. (1)

Rapport des commissaires nommés ci-dessus. Il existe chez le citoyen Tévenot quatre pièces d'eau-de-vie et chez la citoyenne Rossignol une pièce et demie. Ce rapport est envoyé au Dictrict.

Vu un arrêté du District, un commissaire est nommé, pour constater le nombre de bateaux, patrons et mariniers qui sont dans la commune ; dans ce nombre, le Corps municipal désignera aux préposés aux réquisitions ceux dont ils peuvent se servir pour profiter de la crue des eaux et transporter à Bordeaux les vins qui sont en préemption pour le compte de la République, en réservant les bateaux et les hommes qui pourraient devenir nécessaires au transport des fourrages militaires. — Il sera défendu aux éclusiers de laisser passer d'autres bateaux que ceux qui sont chargés pour le compte de la République.

23 pluviôse an III (11 février 1795). — CORPS MUNICIPAL. — Procèsverbal constatant que le citoyen Toine (2) Malbert préposé à la levée des impôts, s'étant présenté chez le citoyen Pierre Pourpoint, tourneur, pour le contraindre au payement des contributions, a été injurié et frappé à coups de poing par ce contribuable et par son fils. Le Corps municipal dénonce les deux coupables au juge de paix.

Le Corps municipal, attendu que la commune manque de fonds pour acheter des grains et les distribuer aux gens hors d'état de s'approvisionner, ce qui est le seul moyen de maintenir la tranquillité publique, prie le District de lui prêter, pour cet objet, 20.000 livres remboursables dans deux mois (3).

Il demande aussi au District un autre emprunt de 6.000 livres,

(1) La reste de la délibération porte en marge la date du 1 5 pluviôse.

(2) Antoine.

(3) Une loi du 4 nivôse supprimait toutes celles qui fixaient un maximum pour le prix des denrées et marchandises ; elle modifiait aussi le régime des réquisitions. Ces dernières furent abolies le 2 thermidor suivant.


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remboursable sur les premiers fonds, pour le fonctionnement de l'atelier à salpêtre, dont les dépenses ont considérablement accrues par suite de l'augmentation de la solde des employés, et où le charbon va manquer.

26 pluviôse an III (14 février 1795). — Le Corps municipal se divise en bureaux de la manière suivante :

Bureau municipal : Les citoyens Durand, maire, Reygasse, Celse, Dazémar.

Bureau de la police : Les citoyens Graniou, Cadrés, Lagarde, Pinel.

Les 4 autres municipaux s'occuperont des affaires extraordinaires et en rendront compte au bur-eau municipal. (1)

28 pluviôse an III (16 février 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, sur la demande du District, charge deux de ses membres de constater le nombre de chevaux que possède la citoyenne veuve Guiches, maîtresse de poste, ainsi que la quantité de foin et d'avoine dont elle dispose.

Le citoyen Jacques Carriol, boulanger, chargé par la municipalité de lui procurer des grains, porte plainte contre le citoyen Philippe Carrier, du Bas (2), qui a pris l'engagement écrit de fournir 50 quartes de blé, et qui refuse de les livrer, quoiqu'il ait reçu un acompte de 2.400 livres (3). Le substitut de l'agent national est chargé de poursuivre le citoyen Carrier devant les tribunaux.

/er ventôse an III (19 février, 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, attendu que l'atelier à salpêtre manque de foin et de cendres, denrées indispensables à son fonctionnement; que dans la commune de Cahors, il n'existe pas même assez de foin pour l'approvisionnement des aubergistes; que, d'après les renseignement recueillis, les citoyens Armand Valette (4) de Doueltle et Ramel père, de Fontanes, possèdent une

(1) Un décret de la Convention chargeait les représentants en mission d'épurer et compléter les autorités des départements, des districts et des communes, et de réorganiser les comités révolutionnaires. (Ces derniers furent supprimés le 1er vantôse dans les endroits ayant moins de 50.000 habitants). — Le nouveau corps municipal de Cahors fut ainsi composé : Durand, maire ; Pinel, Cadrés Dazémar, Arnal, Reygasse, Graniou, Celse, Tailhade, Pouzergues; Lagarde, Relhié, officiers municipaux ; Berthon, substitut de l'agent national , Vaisset, secrétaire.

(2) d'Albas.

(3) Cet acompte faisait déjà 48 livres par quarte, mais en assignats, ce qui équivalait à 9 livres 17 sols en numéraire.

(4) Armand Valette a légué à la commune de Cahors une rente de mille francs,


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certaine quantité de foin ; invite le District à donner aux commissaires près l'atelier à salpêtre l'autorisation de prendre chez les deux particuliers susnommés, et au prix courant, le foin qui leur est nécessaire. — L'agent salpêtrier sera invité à demander aux communes de son ressort d'envoyer les cendres qu'elles pourront se procurer « pour fabriquer la matière nécessaire au triomphe de la Liberté et à la destruction des tyrans et de leur satellites ».

7 ventôse an III (21 février 1795). — CORPS MUNICIPAL. — Lettre du citoyen Duc, ci-devant agent national de la commune, relative au rassemblement des plaques de cheminée et autres objets en fonte, qu'il a opéré conformément à l'arrêté du District en date du 18 thermidor an II. Le Corps municipal arrête que ces objets, ainsi que le procès-verbal portant les noms des particuliers et des communes du canton qui en ont fait la remise, resteront déposés dans un local dépendant de la Maison commune jusqu'à l'arrivée des commissaires chargés d'en faire le triage.

On insère dans le registre copie d'une déclaration du citoyen Thêron, en date du II pluviôse. Ce citoyen donne décharge d'une boîte contenant de l'argenterie, appartenant à Henri Cassagnes, qu'il avait déposée à la municipalité en exécution de la loi du 25 juillet 1793, parceque, à cette époque, il ignorait la résidence de Cassagnes, que celui-ci lui a maintenant fait connaître. Il promet de représenter le susdit dépôt s'il en est requis, ou de fournir les certificats de prestation de serment et de résidence de Cassagnes.

Le Corps municipal, ayant appris que les prisonniers de guerre espagnols possèdent « certaines armes appelées stilés », charge deux de ses membres de se rendre au ci-devant Saint-Géry, où est le dépôt des prisonniers de guerre, et de leur enlever les stylets et autres armes dont ils pourraient être porteurs.

10 ventôse an III (28 février 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, conformément à un arrêté du Conseil général de la commune, ordonne la démolition de la montagne élevée sur la grande place (1), et la mise à l'adjudication des matériaux le 12 du courant.

qui, selon ses intentions, est partagée chaque année, le 14 juillet, entre deux rosières, dont le mariage a lieu ce jour-là.

(1) Une loi du 2 ventôse ordonnait la démolition « du monumeut élevé en forme de montagne devant la maison nationale des militaires invalides, ainsi que de tous ceux de ce genre qui existent dans toute l'étendue de la République ».


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Deux officiers municipaux sont chargés de constater les dégradations qui peuvent avoir été faites au presbytère de Saint-Laurent.

// ventôse an III (1er mars 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, considérant qu'il a été commis au ci-devant presbytère de Saint-Laurent des dégradations considérables qui ne peuvent être tolérées; que ce bâtiment est affecté à l'enseignement public et que l'instituteur attend, pour commencer, le moment où il sera logé; arrête que le citoyen Dellard, ci-devant possesseur de ce presbytère, sera poursuivi devant le tribunal compétent, pour qu'il y replace les portes, les vitres et fenêtres, qu'il a pu enlever et qu'il répare toutes autres dégradations qu'il a pu y commettre.

Le Corps municipal arrête les conditions de l'adjudication qui doit avoir lieu pour la démolition de la montagne et de la pyramide élevées sur la place. Les matériaux provenant de la démolition appartiendront à l'adjudicataire ; celui-ci devra niveler le terrain et enlever les matériaux dans la quinzaine; la mise à prix est fixée à 400 livres, non compris la flèche qui surmonte la pyramide ni le bonnet de la Liberté.

Le citoyen Anglade, propriétaire d'une maison ayant appartenu au ci-devant Bon-Pasteur, déclare céder gratuitement le terrain d'une cour qui en dépend, pour le tracé de la rue projetée, à condition que ce tracé ne sera pas modifié ; il se réserve les matériaux provenant des murs qui seront démolis.

13 ventôse an III (3 mars 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, afin de pourvoir à l'approvisionnement en grains de la ville, autorise le citoyen Relhié, un de ses membres, à toucher chez le citoyen Dolique, receveur du District, la somme de six mille livres, à compte de celle de cent mille livres que le District a mise à la disposition de la commune.

Déclaration du citoyen Dumeau, relative à la démolition de la pyramide et de la montagne élevées sur la Place.

Il fera ce travail moyennant les 500 livres offertes par la municipalité ; il s'engage à transporter tous les matériaux dans la cour de la Maison commune, à l'exception des grosses pierres et des moellons qui resteront sur la place.

Conformément à un arrêté du District, le Corps municipal, considérant qu'il est urgent de faire jouir les ci-devant soeurs de l'Hôpital général des avantages qui leur sont accordés, charge la citoyenne Serres, une des directrices de l'hospice, de remettre auxaites soeurs quatre lits complets ; on laisse à leur disposition les paillasses qu'elles avaient


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dans la maison de la Daurade(2), jusqu'à ce qu'on ait pu leur en procurer d'autres. La citoyenne Serres leur fournira aussi du linge de table. Comme l'arrêté du District leur attribue six lits, les citoyennes Vaisset et Ferrein leur livreront deux autres lits complets. Enfin on laisse à la disposition des soeurs les chaises et les armoires qu'elles avaient déjà, 13 ventôse an III (3 mars 1795). — CORPS MUNICIPAL. — Le citoyen Jouclas, commissaire nommé par le District pour faire le recensement des foins, avoines et chanvres, se présente pour remplir son office à Cahors. Il lui est répondu qu'il n'existe dans la commune ni avoine, ni chanvre, que le peu de foin qu'il y a est réparti chez tous les aubergistes, que ceux ci n'en ont même pas assez pour leur consommation et que, par conséquent, la commune ne peut faire aucun versement de ces denrées.

25 ventôse an III (15 mars 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, VU le rapport des commissaires près l'atelier à salpêtre, d'après lequel, la cherté excessive des denrées ayant nécessité une augmentation progressive du salaire des ouvriers, il ne reste plus assez de fonds pour solder le montant des travaux; considérant que le salut de la République exige le maintien de la fabrication du salpêtre ; demande au District un prêt de 4.000 livres, remboursable sur les premiers fonds.

26 ventôse an III (16 mars 1795). — CORPS MUNICIPAL. — Lettre du citoyen Périer, ingénieur en chef du département, demandant la fermeture du pont « ci-devant appelé de Notre-Dame », à cause de la ruine des boiseries employées à la construction des deux arceaux en bois. Le Corps municipal, vu la grande utilité de ce pont pour l'approvisionnement de la ville et pour le transport du foin destiné aux armées, arrête qu'il sera fermé seulement pour les rouliers, les grosses charrettes, les messageries et les diligences, et invite le citoyen Périer à accélérer la réparation autant que possible.

29 ventôse an III (19 mars 1795). LE CORPS MUNICIPAL, considérant que les dépenses de l'atelier à salpêtre s'accroissent sans cesse, à cause de l'augmentation continue et excessive des prix des denrées et de la main-d'oeuvre, lesquels ont plus que quadruplé ; que néanmoins, le prix auquel le salpêtre est payé à la commune reste toujours fixé à 1 livre 4 sols la livre poids de marc, ce qui est loin de compenser la

(1) En réclusion.


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dépense ; arrête qu'il sera demandé, au Comité de salut public une indemnité pour l'excédent de dépense que la commune est hors d'état de supporter.

A cette délibération est joint un tableau des recettes et des dépenses de l'atelier à salpêtre, duquel on conclut que le déficit supporté par la commune s'élève à 17.000 livres. (1)

2 germinal an III (23 mars 1795). — COMITÉ DE LA GARDE NATIONALE.

— Le président expose que le service journalier s'est beaucoup ralenti depuis quelque temps, que le corps-de-garde reste presque désert et que les citoyens de garde n'obéissent pas aux ordres. C'est d'autant plus fâcheux que, en ce moment, « le fanatisme fait tous ses efforts pour exciter des troubles dans certaines parties de ce département ».

Il propose, pour remédier à la situation, de réunir extraordinairement, demain, à 4 heures, les conseils de discipline des quatre bataillons, et ce, par billets envoyés à tous leurs membres, afin que tous soient exacts. Ces propositions, après mûre délibération, sont adoptées.

4 germinal an III (24 mars 1795). — RÉUNION EXTRAORDINAIRE DES CONSEILS DE DISCIPLINE DES QUATRE BATAILLONS DE LA GARDE NATIONALE.

— Le président, après avoir rappelé les dispositions de la loi sur les gardes nationales, invite chaque conseil de discipline à engager les citoyens de son bataillon à faire désormais régulièrement leur devoir. Pour alléger le service, il propose qu'il soit fait par la moitié seulement d'une compagnie. Ces propositions, « fortement applaudies », sont adoptées.

Sur une réquisition de la municipalité, il est décidé que toute la garde nationale sera rassemblée demain à 9 heures du matin, pour entendre la lecture d'un arrêté du District, dont la réunion prend d'abord connaissance. Cet arrêté est relatif à la permanence du service de la garde nationale, pour maintenir la tranquillité que les malveillants cherchent à troubler dans cette commune.

Deux membres de la réunion sont chargés d'inviter le citoyen Dominique Bras fils à accepter la place de tambour-major, actuellement vacante, et à entrer en fonctions demain matin, au rassemblement de la garde nationale.

(1) Ce tableau renferme des erreurs de calcul dont la rectification porterait le déficit à 20.519 livres.


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2565 an III [25 mars 1795).— LE CORPSMUNICIPAL, vu les « rassemblements de femmes égarées qui ont eu lieu dans les campagnes » et qui sont « provoqués sourdement par des malintentionnés », ce qui rend nécessaire la permanence de la municipalité et celle de la garde nationale, arrête :

La garde nationale sera assemblée et il lui sera fait lecture de la proclamation du Département et de l'arrêté du District en date du 3 germinal, concernant les mesures de sûreté générale. — Les patrouilles seront renforcées et la garde nationale sera en permanence autant de temps que l'exigera la sûreté publique.

7 germinal an III (27 mars 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, VU l'arrêté du District qui met à la disposition du Conseil général la somme de 25.000 livres pour l'approvisionnement de la commune ; attendu qu'il est urgent de venir au secours des hospices par un prêt, lequel néanmoins ne saurait être de longue durée, à cause des besoins de la commune ; arrête que, sur la somme précitée, 10.000 livres seront mis à la disposition de l'administration des hospices.

12 germinal an III (1er avril 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, attendu que le Comité de salut public accorde une nouvelle avance de 300.000 livres pour achat de grains destinés à la commune de Cahors ; considérant que l'avance de 125.000 livres, déjà reçues, est employée et que le prix des grains augmente journellement d'une manière alarmante ; invite le District à faire compter ladite somme de 300.000 livres. Une partie des approvisionnements de Cahors restera à la disposition du District pour secourir les communes de l'arrondissement qui seraient dans le besoin.

75 germinal an III (4 avril 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, VU l'arrêté du District qui met à sa disposition 275.000 livres (1) ; considérant que les besoins de la commune deviennent tous les jours plus alarmants, et que l'arrêté du District fait peser sur tous les membres du Conseil général une responsabilité personnelle, individuelle et solidaire ; arrête que ladite somme de 275.000 livres sera versée par le receveur du District et remise entre les mains des citoyens Richard père et fils, chargés d'en faire la distribution.

Le Corps municipal, vu la détresse où se trouvent les hospices de(1)

de(1) somme et les 25 000 livres dont il est question le 7 germinal, font les 300.000 livres accordées à la commune.


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puis plusieurs mois ; considérant qu'on a été obligé de partager avec eux les ressources accordées pour la subsistance des malheureux habitants de la commune, ce qui est au détriment de ces derniers, et ce qu'on ne saurait voir sans regret ; arrête qu'il sera fait les représentations les plus instantes au Comité de secours publics pour qu'il accorde aux hospices de cette commune les secours fixés par la loi et dont l'état a dû lui être adressé depuis longtemps.

/6 germinat an 111 (5 avril 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, VU la difficulté de faire donner dans les hospices de la commune les remèdes nécessaires à deux femmes qui souffrent de « maux contractés par les suites d'une cohabitation dont elles n'ont pu prévoir les suites funestes », autorise ces deux citoyennes à aller se faire traiter au dépôt d'Aussonne.

Vu la mauvaise foi que mettent certains particuliers à ne pas effectuer la remise des grains qu'ils se sont engagés à fournir à la commune, le Corps municipal charge le substitut de l'agent national de poursuivre devant les tribunaux quatre de ces personnes, qui sont désignées nominativement. (L'un de ces individus vendait le blé à raison de 85 livres la quarte) (1).

19 germinal an III (8 avril 1795). — CORPS MUNICIPAL. — Le citoyen Pujol, garde-magasin des subsistances militaires, vient déclarer que sur un chargement de blé envoyé par le préposé du magasin de Beauchamp, il s'en est perdu en route une certaine quantité, par suite de l'ouverture de sacs mal attachés.

22 germinal an III (11 avril 1795).— LE CORPS MUNICIPAL, VU la pénurie des subsistances, et la rapacité de quelques mauvais citoyens qui cherchent à exporter le blé ; attendu qu'on ne pourrait répondre de la tranquillité publique si le peuple manquait de pain ; invite le District à faire application de la loi du 4 nivôse en frappant de réquisition les grains déposés dans les greniers du citoyen L , ainsi

que ceux qui sont à l'hôtel des Sans-culottes, lesquels grains ont été achetés pour être transportés à Toulouse.

24 germinal an III (13 avril 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, VU la pénurie des subsistances et l'agiotage qui en est la suite ; vu que des agents chargés d'approvisionner la commune ont manqué à leur devoir,

(1) 11 livres 7 sols en numéraire.


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en faisant tourner leurs fonctions à leur profit personnel ; considérant que la liberté du commerce, accordée par la loi, ne peut aller jusqu'à favoriser l'agiotage ; arrête : Le citoyen Bessières premier né, marchand, aidé d'un ami digne de sa confiance, parcourra les communes où il croira pouvoir trouver des subsistances, se procurera des renseignements sur les manques de bonne foi qu'il pourra découvrir et prendra telles mesures que les circonstances, la loi et la prudence pourront lui suggérer.

Le Corps municipal, vu la lettre du Comité de sûreté générale contenant des mesures à prendre contre les prêtres mis en liberté ; considérant que la commune de Cahors, chef-lieu du département, renfermait tous les prêtres qui viennent d'être libérés, et dont l'affluence pourrait peut-être compromettre la tranquillité publique; qu'il importe par conséquent de connaître leur nombre et le lieu où ils prétendent exercer leurs fonctions ; arrête : Les prêtres sortis de la maison de réclusion du Séminaire seront convoqués et invités à signer sur le registre la déclaration du lieu de la commune où ils ont l'intention d'exercer leurs fonctions.

Suivent les déclarations de 17 prêtres insermentés dont voici les noms : François Lugan, Jean-Baptiste Delper, Charles Nicolas Bécave, Jean-Baptiste Antoine Beaufort, Augustin Pierre Olivier, Jean Pierre Goudal, Jean Pierre Aboulenc, Pierre Lalbenque, Barthélémy Pujol, François Lasserne, Charles Teyssendier, Bernard Boyé, Pierre Talayssac, Nicolas Ignace Boudres, Henri Boissières, Jean Sales, Jacques Baudus. — Chacun d'eux indique une maison située à Cahors, dans laquelle il habitera et exercera les fonctions de son ministère, sauf trois exceptions : Delper déclare ne pouvoir exercer aucune fonction, ni même signer, pour cause d'infirmités ; Pujol ira habiter la commune de Meyraguet ; Boissières fera ses fonctions ecclésiastiques dans une autre maison que celle de son habitation.

Vu le renchérissement progressif des denrées de toute espèce, le déficit occasionné par l'atelier à salpêtre, et le manque de réponse aux réclamations formulées à ce sujet par la municipalité ; attendu qu'il a été déjà empoyè pour cet atelier des fonds destinés à d'autres, objets, le Corps municipal, ne trouvant d'autre moyen de récupérer ces fonds et de maintenir l'atelier que dans un emprunt, demande au District l'autorisation d'emprunter dans ce but 5.000 livres à la caisse du receveur du District.


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27 germinal an III (16 avril 1795). CORPS MUNICIPAL. — Le citoyen Labro, commissaire nommé par le District pour faire le recensement des foins et avoines requis, se présente, et il lui est répondu qu'il n'existe dans la commune ni foin, ni avoine.

Sur la demande du citoyen Bilouin, ingénieur ordinaire des Pontset-Chaussées, le citoyen Reygasse, officier municipal, est nommé commissaire pour viser et approuver les comptes décadaires des réparations au pont Notre-Dame.

Un nouvel emprunt de 26.000 livres est demandé au District pour achat de grains destinés à la nourriture des indigents.

30 germinal an III (19 avril 1795. — CORPS MUNICIPAL. — La citoyenne Pelet, bouchère, se charge de fournir la viande aux dragons actuellement de passage, à raison de 8 onces par jour à chaque homme, moyennant le prix de 30 sols par ration.

6 floréal an III (25 avril 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, VU une lettre de l'agent national du District, relative à une absence hors de la commune du citoyen Bécave, faite sans que la municipalité en fût prévenue; considérant que « des bruits prêtent à certains prêtres des motifs contraires au repos public » ; que le citoyen Bécave paraît être « un coryphée d'un parti qui s'agite » ; qu'il reçoit chez lui quantité de gens qui doivent être surveillés ; arrête que le citoyen Bécave sera invité à rester chez lui et à ne pas recevoir un afflux de visiteurs.

Le Corps municipal, considérant que le citoyen Lugan, prêtre, est sorti de la commune sans prévenir la municipalité et a « exercé son culte» dans d'autres communes, le tout contre sa propre déclaration, invite le citoyen Lugan à rester chez lui et à n'exercer que là ses fonctions.

Le Ier floréal, le citoyen Cadres, officier municipal, délégué par ses collègues, alla chercher chez le citoyen Dolique, préposé du payeur général, 25.000 livres pour payer des grains. La somme lui fut remise en cinq paquets d'assignats qu'il ne vérifia pas et qu'il porta de suite à la maison commune; là on trouva un déficit de 1.550 livres, que le citoyen Dolique refusa de combler. C'est ce qu'il certifie dans une pièce dont copie est insérée au registre. Elle est suivie d'une déclaration du Corps municipal affirmant que les paquets d'assignats paraissaient intacts et que d'ailleurs la probité du citoyen Cadres ne saurait être suspectée. Les signatures sont légalisées par le directoire du District, qui rend aussi témoignage de la probité du citoyen Cadres.


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La municipalité demande l'accomplissement des formalités nécessaires pour qu'elle puisse prendre possession de la maison de Laroche, « contiguë à l'établissement déjà possédé par elle », et qui lui a été accordée par le Comité des finances, à la charge d'en payer le loyer ; cette maison lui est nécessaire pour l'installation des bureaux.

9 floréal an III (28 avril 1795). — LE CORPS MUNICIPAL, conformément à l'arrêté du Comité de salut public, nomme une commission chargée de faire le recensement des grains, farines et légumes secs qui se trouvent dans la commune chez les particuliers et dont la moitié du cinquième sera versée dans le magasin militaire.

L'Institut central devant être installé dans le ci-devant séminaire, les prêtres qui sont détenus dans ce dernier local seront transférés à Sainte-Ursule ; une commission est chargée de faire préparer dans cet édifice les logements nécessaires.

Procès-verbal dressé par deux officiers municipaux au sujet de

l'abandon d'un enfant que la fille G , sa mère, a laissé sur la porte

du citoyen H...., qui passe pour en être le père, en disant qu'elle ne pouvait plus faire nourrir l'enfant, et que le père n'avait qu'à s'en charger. — Le Corps municipal, considérant que les parents connus dudit enfant sont assez aisés pour se charger de sa nourriture, dénonce le fait au juge de paix, officier de police, pour que la personne qui a exposé l'enfant soit poursuivie.

Déclaration du citoyen Jean Félix Cassagnes, prêtre, qui résidera et exercera le culte à Cahors.

La commission chargée du recensement [des grains, etc., rapporte que la moitié du cinquième affecté à l'approvisionnement des armées et de la commune de Paris, s'élève à 202 quartes. Le Corps municipal arrête que ces grains seront portés de suite au magasin militaire et qu'il sera tenu registre des grains, farines et légumes secs fournis chaque jour.

Conformément à un arrêté de la Commission des mines, le Corps municipal ordonne la restitution aux citoyens du canton des plaques (1) remises par eux en exécution de l'arrêté du citoyen Romme, représentant du peuple.

(1) Plaques de cheminées.

(A suivre) A. COMBES


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LES COUTUMES

DE MONTCUQ

(Suite)

ADDITION AUX COUTUMES DE MONTCUQ

1336

I

La publication des coutumes de Montcuq a déterminé de façon claire les droits et les charges des consuls de cette ville. On a pu voir qu'au nombre de douze, choisis par moitié dans les « partis noble et populaire », ils devaient administrer et gouverner le lieu de Montcuq et la juridiction, imposer les tailles avec le conseil de prud'hmmes, régler par de sages ordonnances le bon fonctionnement de l'administration et pourvoir au bien public. Ces principes posés, il semble que tout devait marcher dans l'intérêt général. Toutefois il n'en fut point ainsi, et bientôt les réclamations des forains, se croyant lésés dans leurs droits, amenèrent un long procès qui fut heureusement terminé par l'intermédiaire « d'amiables compositeurs ». Ce n'est point là un cas isolé, car nous avons noté et signalé déjà un fait analogue entre les consuls de Septfons et les habitants des paroisses de Saint-Martin de Caussanilhes et de Saint-Georges de Salvanhac, 8 mai 1470, et plus tard, 7 janvier 1790, un différend du même genre entre les habitants de Rouilhac et les consuls de Montcuq. Et chaque fois, il est bon de le faire observer, les réclamations des forains étaient au moins partiellement fondées et ont abouti à une solution satisfaisante. Dans le cas qui nous occupe pour le moment et que nous allons analyser, avant d'en reproduire le texte, il n'en alla pas autrement. Les consuls durent rabattre de leurs prétentions, tandis que les réclamants eurent à peu près gain de cause sur toutes les questions.

a


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Le parchemin, qui nous a permis de dresser ce travail, servait de garde à un registre de Blandés, notaire de Montcuq, pour l'année 1478, côté n° 37. 11 est composé de deux peaux cousues ensemble, 130X67. Il a 164 lignes et le texte est en latin. Il présente quelques déchirures ou autres lacunes que nous avons soigneusement notées. M. Clédart, ancien notaire à Lauzerte, nous l'avait donné. Nous en faisons aujourd'hui hommage à la Société des Etudes du Lot, qui le conservera dans ses archives.

Donc il y avait procès, en 1336, entre les consuls de Montcuq, savoir : nobles Bernard de Narcès, chevalier, Giscard de Giscard, Raymond Bernard de Lolmie, damoiseaux, Arnaud de Cambon, Jean Flamenc, Me Pierre de Candelier et Raymond Cherry, faisant tant pour eux que pour leurs collègues absents, et leurs syndics Pierre Ebrart et Bernard Meliorat, d'une part, et les habitants de la juridiction représentés par nobles Guilhem de Lolmie, Guilhem Bernard de Lolmie, Arnaud de Bosc, Bertrand de Lezergues, damoiseaux, Gasbert de Lobéjac, Raymond de Lolmie, Armand Deithil, Jean Dadin, Etienne Dellatar, Guilhem de Lacaze, Raymond Gasc, Hugues de la Sudrie, Bernard du Roc. Galbaid de Ulmo, Raymond de Vigarie, Guilhem Gasc, Armand de Ruppe, Bernard Lauret, Raymond Rey, Bernard de la Clote, Arnaud Portas, Gasbert de Lacroze, Pierre de Sales, Guilhem Escholier, Arnaud de Ruppe et Guilhem de la Sudrie, d'autre part.

Pour éviter de longs débats et surtout les frais inévitables, les parties convinrent d'un accord à l'amiable, sous la présidence de Raymond Pacot, bayle royal, par l'intermédiaire d'arbitres choisis des deux côtés et avec l'assistance de Jean de Grèzes et Géraud de Cumba, notaires. Les arbitres principaux nommés furent nobles Jean de Bagat, Bernard d'Orgueil, chevaliers, Bernard de Giscard, Guilhem de SaintGeniès, Bernard de Narcès et Gasbert de Canophio, damoiseaux.

Voici maintenant les points contestés avec les différentes solutions données par les arbitres.

1. — Les forains, se basant sur l'article 1" des coutumes, se prétendaient francs et quittes de toute faction et réfection de ponts, fontaines et chemins existant ou à exécuter en ville ou dehors. Les consuls soutenaient que, en vertu de l'article 4, des mêmes coutumes, tous les habitants, sans distinction étaient tenus d'y contribuer et qu'eux seuls en avaient l'administration. Il fut décidé que dorénavant les forains


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seraient exempts de tout travail à faire aux ponts, fontaines, chemins et rues, en ville et au dehors, entre la ville et les ponts et rives de la Bargalonne et de Nèguevieille, mais resteraient astreints à la réfection des petits fossés et murs de la ville, à l'occasion.

2. — Les forains se disaient également exempts de toute contribution à la Charité de Pentecôte, établie dans la ville de Montcuq. Les consuls soutenant le contraire, on convint qu'à l'avenir cette immunité leur serait conservée, à la réserve toutefois des legs pieux faits dans le passé ou à faire dans l'avenir par les forains en faveur de cette même Charité de Pentecôte.

3. — Les forains réclamaient que, sous aucun prétexte, les consuls ne pussent imposer taille ou collecte dépassant la somme de 100 liv. tourn. et une fois l'an seulement. De leur côté, les consuls répliquaient qu'ils avaient le droit, de par les coutumes anciennes d'imposer aux habitants de la ville et de la juridiction telle taille ou collecte qu'ils jugeaient à propos et suivant les nécessités, pour le bien de la communauté et les affaires du consulat. Il fut accordé que dorénavant les tailles ou collectes imposées par les consuls annuellement ne devront pas dépasser la somme de 100 1. t., à moins qu'il ne s'agisse d'un subside réclamé pour l'armée par le roi ou d'une affaire exceptionnelle concernant la communauté. Dans ce dernier cas, cette augmentation de taille ne devra se faire qu'avec l'assistance de prud'hommes de la ville et du dehors, et non autrement.

4. — Les forains demandaient que l'allivrement des tailles et collectes se fit selon le règlement observé à Lauzerte ou à Montauban. A cela les consuls répondaient qu'ils avaient une façon acquise de procéder et qu'ils avaient le droit d'en user. Il fut entendu qu'à l'avenir l'allivrement se feraient au sol et à la livre, pro solido et libra, suivant le règlement adopté à Lauzerte ou à Montauban, au cas où ce mode serait adopté par les consuls et plusieurs prud'hommes de la ville et de la juridiction, chacune des paroisses ayant ses représentants.

5. - Les forains demandaient qu'au sujet de l'allivrement des tailles ou collectes et du compte-rendu fiscal, les forains, ou tout au moins la majeure partie d'entre eux, fut convoquée. Les consuls, ayant joui jusque-là du droit de régler seuls ces sortes d'affaires avec le concours de huit délégués, n'admettaient point cette réclamation. Il fut décidé qu'à l'avenir les consuls seraient tenus de convoquer deux notables de chacune des paroisses de la juridiction avec le concours desquels ils


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traiteraient des tailles et impositions et à qui ils rendraient compte de leur administration.

6. — Les forains voulaient que lors de l'imposition des tailles, quêtes et collectes, quelle qu'en fut l'occasion, la part contributive de chacun des habitants fut fixée par deux prud'hommes de chaque paroisse, en présence des notables, sans possibilité de « surtaille », et que la levée en fut faite aux frais communs des habitants du château et de la juridiction. Les consuls répondaient que les tailles imposées aux forains devaient être levées à leurs frais et dépens. Il fut décidé que, pour les tailles à imposer à l'avenir, la part ou portion affectée à chacun serait fixée par deux prud'hommes de chaque paroisse, en présence d'autres délégués appelés également de chaque paroisse, sans surtaxe aucune; et si les habitants étaient vexés sur ce point, le sergent des consuls aura la charge de faire faire la levée aux frais communs du consulat et de la communauté.

7. — Les forains prétendaient être en droit, eux et leurs syndics, de jouir des libertés et franchises du château de Montcuq, ce que d'ailleurs les consuls ne leur refusaient point.

8. — Les forains voulaient qu'annuellement, à la nomination des consuls, on choisit un homme probe et digne de foi, de Montcuq, pour, au nom des consuls et de toute la communauté, recevoir les tailles, collectes et autres revenus du consulat et en rendre un compte détaillé aux consuls, en présence de 15 ou 20 notables des paroisses de la juridiction. Les consuls répondaient que de toute ancienneté ils jouissaient pacifiquement du droit de lever les tailles et d'en rendre compte sans l'assistance des forains. Bref, ils pouvaient « cuisiner en famille » toutes les affaires de la communauté, sans que personne put y trouver à redire. Il n'y avait point de contrôle, ou si peu, que patexemple, le 13 septembre 1614, les forains de la juridiction de Lauzerte, se plaignirent clans un acte de protestations où ils disaient « que tous les ans, le jour de la Pentecôte, leurs syndics étaient invités à un grand banquet, où on leur faisait consentir telle imposition qu'il semblait bon aux consuls (1). Il fut convenu que tous les ans, à l'avenir, lors de la nomination des consuls, on chosirait un homme sage pour recevoir les revenus et émoluments du consulat et en rendre un compte

(1) Histoire de Lauzerte par l'abbé Taillefer, p. 183.


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fidèle, avec l'assistance, facultative pour eux, de 15 ou 20 notables du lieu de Montcuq et de la juridiction.

9. — Au commencement de l'an 1333, Philippe de Valois établit sur le pays une imposition pour le mariage de Marie, sa fille, qui épousa Jean de Brabant, duc de Limbourg, et pour la chevalerie de Jean, duc de Normandie, son fils. Mais les commissaires qu'il envoya pour lever cet impôt ne trouvèrent pas les peuples disposés à le payer. Ceux-ci prétendirent que cet impôt était contraire au droit et à la coutume, et que St-Louis et ses prédécesseurs n'avaient jamais rien exigé lorsqu'ils avaient voulu armer leurs fils chevaliers ou marier leurs filles. Ils insistèrent tellement sur leur refus, que le roi fit surseoir à la levée et restitua même les sommes qui avaient été versées. (1) Ce préambule était nécessaire pour l'intelligence de l'article qui suit. Les forains réclamaient aux consuls la part ou portion du subside à eux compétent, qu'ils avaient récemment payé au seigneur roi de France ou a son trésorier de Périgord et de Quercy, pour la chevalerie de son fils Jean, duc de Normandie, lequel subside le roi avait fait remettre par lettres patentes aux consuls de l'époque. A cela les consuls répondaient que si, en fait, la remise du subside avait été faite, c'était par manière de dette et obligation et non en argent ; qu'ils étaient d'ailleurs prêts a leur délivrer ces dettes et obligations jusqu'à concurrence des sommes versées par eux, et qu'ils rendraient un compte fidèle de tout ce qu'ils avaient reçu au sujet de ce subside, dont le montant avait dû être employé aux affaires de la communauté. Il fut arrêté que les consuls mettraient tous leurs soins à récupérer du susdit subside tout ce qu'il était possible d'avoir, qu'ils l'emploieraient aux affaires du consulat et de la communauté, suivant les besoins, et en seraient quittes et libérés a jamais.

10. — Au sujet du procès intenté par les forains aux consuls, entre les mains de Guilhem de Bressinholis et Guilhem Brac devant l'official de Cahors et où se trouvaient engagés Guilhem de Saint-Geniès, chevalier et Audoin-Jean Ebrard, les forains demandaient que s'il intervenait une sentence de la Cour royale de Toulouse portant amende ou demande de provisions, ils fussent tenus quittes et exempts de tout payement. La réponse des consuls est trop incomplète pour

(2) Histoire de la Province du Quercy, par G. Lacoste, t III, p. 68.


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pouvoir être formulée ; mais voici la conclusion : il fut décidé qu'on prendrait conseil de Bernard Gervais, Bernard Benoit, juris consultes, et Pons Molinier, docteur es lois, et, si une condamnation suivait chacun y contribuerait pour sa part.

II. — Il fut de plus arrêté que les consuls de Montcuq, tant modernes qu'antérieurs, a triginta annis, sont quittes, libres et exempts de tout compte à rendre au sujet de leur administration, à la réserve pourtant que les consuls actuels s'en tiendront à ce qui a été décidé à l'article 8.

12. — Les forains disaient que la dette contractée à l'égard de Raymond de Laboissière et Pierre de Siccoserrio devait être payée par les consuls de leurs biens propres et par ceux qui signèrent l'obligation. Les consuls répliquaient que la dette ayant été contractée en faveur de la communauté toute entière, elle devait être payée par tous sans distinction. Il fut arrêté que les choses resteraient dans le statu quo et que les consuls ne seraient nullement troublés au sujet des aliénations faites en faveur des créanciers et que pouvoir leur était donné de se libérer au moment opportun, mais aux dépens du consulat et de la communauté.

13. — Les forains réclamaient qu'un seul consul, à l'exclusion des autres, négociât les affaires du consulat tantum minoribus expensis. Les consuls répondaient que l'administration, abantiquo, dépendait d'eux seuls ad libitum. Il fut arrêté que parmi les consuls, un noble et l'autre non noble traiteraient les affaires du consulat aux frais communs de la ville et de la juridiction et rendraient leurs comptes, sans que les dépenses, dans les limites de la sénéchaussée de Périgord et de Quercy, puissent dépasser 5 s., petits tourn. pour cheval et hôtel, à la réserve des frais des avocats et notaires (scripturis) ; s'ils avaient à aller plus loin, ces dépenses seraient fixées de concert entre les consuls et les prud'hommes du lieu et de la juridiction.

14. — Les forains exigeaient qu'un compte-rendu fut fait par les consuls modernes ou anciens, ou par Me Jean de Narcès, Pierre de Candelier et Jean Calmète, autrefois consuls désignés pour lever la taille ou collecte imposée à tous les habitants de la ville et de la juridiction à raison de la finance faite entre les consuls d'alors et puissant homme Me Guillaume de Sentenac, chanoine, commissaire député par le roi, pour le payement des droits d'acquisition de fiefs nobles par des non nobles et la réception des quêtes des églises. Les consuls repli-


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quaient que les forains n'avaient rien à voir dans la susdite rddition de compte ; qu'un acte notarié sur ce point existait et qu'il fallait s'y rapporter, sans qu'il fut besoin de revenir en arrière. L'avis des consuls prévalut, et leurs prédécesseurs déclarés quittes.

15.— Les forains demandaient que les consuls ne puissent point leur intenter procès ou litige, au nom du consulat, sans avoir pris conseil d'hommes nobles du château et de la juridiction. Les consuls répondaient qu'ils jouissaient en paix de tout temps du droit d'entreprendre des procès, au nom du consulat, contre quiconque, d'eux-mêmes et seulement avec la présence et non le conseil et la volonté des prud'hommes de la ville et de la juridiction. Il fut décidé qu'à l'avenir les consuls, tous ou un seul, ne pourraient entreprendre aucun procès, ni faire affaire ou denonciation, au nom du consulat, que du consentement exprès de 15 ou 20 prud'hommes notables du lieu et de la juridiction.

16. — Les forains voulaient que dorénavant, chaque année, le jour de leur élection, les nouveaux consuls eussent à prêter entre les mains de plusieurs prud'hommes du lieu et de la juridiction, le serment de tenir et observer les bons usages et les coutumes du lieu et de traiter tous les habitants en bonne foi. Les consuls répliquaient que cela ne regardait nullement les forains, et que de tout temps il a été d'usage pour les consuls nouveaux de prêter serment entre les mains de leurs prédécesseurs et du bayle royal, en présence d'une assistance convoquée, mais non nécessaire. Il fut convenu qu'à l'avenir, tous les ans, lors de la création de nouveaux consuls, ceux-ci seraient tenus de jurer sur les saints évangiles de Dieu, à la demande des forains qui ne pourront être plus de 15 ou 20, pris dans les différents quartiers dépendant de la baylie de Montcuq.

Cet accord passé entre les consuls et les forains fut reçu par Jean de Grèzes, et signé par les parties qui s'engagèrent à le suivre de tous points, comme Jean de Baynac, Pons de Cazelles, Bernard de Laboissière, Bernard de Giscard, Gasbert de Canophio, Guillaume de St-Genes, Seguin de S. et plusieurs autres, à peine d'une amende de 1000 1. p. t. Une copie authentique devait en être envoyée au sénéchal de Périgord et de Quercy avec prière d'y apposer le sceau de son autorité pour « meilleure fermeté à jamais ».

Cinq autres copies en furent faites dont une pour les habitants du lieu de Montcuq, une pour le « bras ou membre » de Bouloc, une


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pour la partie des forains ou habitants du « bras ou membre » d'Orgueil, une pour les habitants de Saint-Pantalêon, et une pour le « membre » des Cabanes de Saint-Georges.

Le parchemin que nous venons d'analyser est un vidimus de l'acte original dressé à Cahors, le 19 mai 1393, par Jacob Sintonis et Durand Latalhe, als de Croci, notaire royal et signé de Guichard Dulphe, sénéchal de Périgord et de Quercy.

B. TAILLEFER.


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II

ADDITIONS AUX

COUTUMES DE MONTCUQ

(TEXTE)

Nos Guichardus dominus Dulphe

rege, notum facimus universis et singulis disse et commisse

sumptum et receptum per magistrum Johannem condam

notarium regium, videlicet die octava mensis anno

millesimo tricesimo sexto et suo sigillo atum ut prima

quasdam compositionem mihi

factas, habitas et concordatas inter habitatores

castri Montiscuci vallium, senescallise predicte ex una parte, et

ejusdem castri ex parte altéra, de et super questionibus

quibusin dicto instrumento sit mencio. Quod

inter ceteras in eodem instrumento contentas clausulas inferius

et incipit in hune modum. Noverint universi et singuli

instrumenti seriem, inspecturi et audituri quod lis, questio,

debatum, controversia et materia litis questionis controversie, debati verteretur et exstitisse dicimus ventilata ac etiam verteretur seu in posterum

posterum qui fuerunt et nunc sunt

et pro tempore fuerunt seu eorum sindicos ex unà parte et forenses habitatores honoris dicti castri et eorum judices ex parte altéra super

eo quod dicti forenses pretendebant se et eorum in

posterum successores esse quittos, liberos et immunes ex nunc in antea

ab omni factione et refectione ac factionis et refectionis et prestatione

prestatione fontium, plateorum et viarum que

in posterum fient et factione et refectione indigebunt apud villam Montiscuci et extra villam préexistantes de prope villam et in circum dicte ville. Dictis vero consulibus in contrarium asserentibus et dicentibus ipsos forenses habitatores dicti loci ad premissa tamen prout alii habitatores dicte ville tenentur. Item super eo etiam quod dicti forenses et eorum sindici pertinebant et petunt omnes eosdem forenses çî


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eorum in posterum successores esse perpetuo ulterius liberos quictos pariter et immunes ab omni datione, colucione et prestatione reysve faciende dictis consulibus Montiscuci, ratione charitatis Penttecortis que

fiet in postei'um in castro de Montequco dictis consulibus

contrarium asserentibus et dicentibus prefatos forenses debere, contribuere dicte charitati prout est acthenus consuetum. Item super eo videlicet quod dicti forenses et eorum sindici petebant et petunt quod dicti consules que nunc sunt vel pro tempus erunt de Montequco

nequeant facere vel indicere pro communibus expensis dicti castri

als quacumque de causa habitatoribus castri de Montequco et honoris. . . . aliquam talham seu collectam, nisi solum semel in anno que quidem talhia seu collecta in universo summo centum librarum turonensium non excederet. Dictis vero consulibus in contrarium dicentibus et asserentibus se esse et ab antiquo fuisse in pocessione paciffica et quieta per tantum tempus quod memoria hominumin contrarium non existit imponendi seu indicendi talhas seu collecta habitatoribus ville Montiscuci et ejus honoris intus et extra pro suo libito voluntatis, prout casus et négocia consulatus octinebant et eis visum erat expediens vel necesse. — Item super eo videlicet quod dicti forenses et eorum sindici petebant et petunt quod omnes et singule talhie et collecte que fient seu pro tempore fieri continget et nunc in antea aliqua ratione seu causa per consules antedictos habitatores Montisquci et ejus honoris intus et extra fiant et indicantur ulternis habitatoribus dicte ville et ejus honoris intus et extra pro solido et pro libra juxta modum et aliberationem de Lauzerta vel de Monte albano; dictis consulibus contrariun asserentibus et dicentibus quod talhie seu collecte debent indici et imponi per eosdem secundum modum et usum per ipsos et eorum predecessores diutius usitatum et observatum et non pro solido vel libra.— Item super eo videlicet quod dictiforenseseteorumsindici petebant et petunt quod in aliberatione per dictos consules habitatoribus dicti loci de Montequco et ejus honoris seu de eorum bonis faciendo et in ditione talharum seu collectarum ac in ratione reddenda seu in reddendo compoto de eisdem vocentur et sint présentes dicti forenses seu major pars eorumdem; dictis consulibus contrarium dicentibus et asserentibus se esse et eorum predecessores ab antiquo fuisse in pocessione paciffica et quieta indicendi talhas seu Collectas habitatoribus ville Montisquci et ejus honoris intus et extra ipsis forensibus non vocatis necpresentibusnisidumtaxatocto de dictis juxta


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quamdam compositionem nuper habitatorum inter consules dicti loci ex parte una et forenses predictos seu eorum sindicos ex parte alia.

Item super eopredicti forenses et eorum sindici petebant et petunt quod eo casu quo contingeret quod consules ante dicti indici super imponi vel lent aliquam talham seu collectam habitatoribus ville et honoris dicti loci de Montequco in quaeumque de causa quod pars seu portio contingens pro casu dicte talhe seu collecte jurium alibrantium predictarum unicuiqueparrochiarum dicte honoris indiccturautemquo imponatur et. ..... . habitatoribus uniuscujuscumque parrochie per

duos probos viros ejusdem parrochie vocatis piuribus probis viris ejusdem parrochie absque aliqua augmentatione sine sobretalha et quod dicti consules levare seu exigere faciant per sermentum consulum dictam talham seu collectam communibusexpensis totius universitatis dicti castri et ejus honoris ; dictis consulibus in contrarium dicentibus et asserentibus quod talhe seu collecte imposite vel in posterum imponende dictis forensibus debent levare et levari actenus consuete ab eisdem forensibus propriis expensis et sumptibus eorumdem forensium.

Item super eo quod petebant et petunt dicti forenses et eorum sindici quod ipsi forenses et eorum in posterum successores uti valeant et gaudere libertatibus et franchesiis dicti castri de Montequco; diecis consulibus dicentibus et asserentibus quod prcemissi eisdem consulibus in aliquo non pertinent.

Item super eo quod petunt dicti forenses et eorum sindici quod anno quolibet in nova creatione consulum de Montequco instituatur quidam probus vir, fide dignus de Montequco qui recipiat et recipere habeat, vice et nomine consulum, et universitatis dicti loci talhas seu collectas et alia emolumenta dicti loci consulatus, qui quidem probus vir de receptis et aministratis per eundem reddat et reddere teneatur légitime compotum et rationem consulibus ante dictis, vocatis et presentibus quindecim vel viginti probis viris de notabilibus forenciumpredictorum; dictis consulibus in contrarium asserentibus et dicentibus se esse et eorum predecessores ab antiquo fuisse in pocessione paciffica et quieta instituendi levacionem seu receptionem emolumentorum consulatus prcedicti et ab eodem recipere compotum et rationem si et quando eidem videbitur faciendum, absentibus forensibus predictis et ipsis vel eorum altero ad hoc minime convocatis.

Item super eo videlicet quod petebant et petunt dicti forenses et eorum sindici sibi reddi et restitui per.consules antedictos partem seu


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portionem ipsis et eorum singulis contingenti de illo subcidio per ipsos novissime soluto Domino nostro Francie Régi seu ejus thesaurerio petragoriensi et caturcensi racione militie Domini Johannis de

Francie ducis primogeniti dicti domini nostri Francie Régis, quod

quidem subcidium idem dominus noster francie rex per suas patentes litteras reddi et restitiui jussit et mandavit per dictum thesaurerium petragoracensem et caturcensem dictis consulibus et singulis illorum qui contribuerunt in eodem ; dictis consulibus contrarium asserentibus et dicentibus quod si aliqua restitutio fuit facta de dicto subcidio eisdem consulibus per dictum dominum thesaurerium, hoc fuit factum in debitis et obligationibus et non in pecunia et quod ipsi consules parati erant tradere et liberare dictis forensibus de dictis debitis et

obligationibus qui assendunt summas dictis forencibus contingentes

aut dictum subcidium et quidquid ex eodem recuperarepoterunt, convertere et revendare in negociis et causis ac necessitatibus et expensis omnibus subscidio necessariis predictis, et de hiis que recuperabunt de dicto subcidio reddere bon uni compotum et légale consulibus successoribus suis de Montequco, et aliis quorum interit, loco et tempore opportuno.

Item super eo quod dicebant et dicunt dicti forences et eorum sindici et asserunt quod lis, questio et causa diu nota pro jure regio contra consules dicti loci de Montequco qui tune erant ocasione Guillermi de Brissinhoriis, Guillermi Brac non conterint aut tangit universitatem ejusdem loci de Montequco et sjoecialiter dictos forences, sed pocessio tangit singulares personas utpote dominum Guillermon de Sancto Genesio, militarem, ac etiam Audoyum Johannem Ebrardi, qui ut principales debati fuerunt in curiam domini senescali Tholose ex

comissione regia petebant et petunt dicti forences et eorum sindici

quod eo càsu quod aliqua sententia de predictis per curiam regiam ferri contingat per quam consulibus et universitati dicti loci essent in

aliqua summa petunt quod consules dicti loci ipsos forences et

eorum singulos a predictis quitos teneant et immunes; dictis consulibus contrarium asserentibus et dicentibus quod hujus modi questio seu lis mota contra consules qui tune erant occasione compotionis Guillermi de Brecinholas tum subentarii Tholose erat sentencia communis et

concernit et tangit universitatem et consulatum quibus per

dictos deffensionis sunt inepta et per consequens ventilata

ventilata


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seu questione habita forenses

seu eorum sindici petebant et petunt

in tempore fuerunt. .

universitatis per eosdem de bonis talhis seu

eisdem forensibus in aliquo

citra successive

et rationem legitiman successoribus consulibus

suis

[Item] petebant et petunt dicti forences et eorum sindici

quod omnia illa bona que per dictos consules antiquos et modernos

bonis ipsius

consulatus utpote redditum, tradituminsolutum RamundodeBuxeria

et Petro de Siccosierio . universitatem nec

ipsos forences et dicebant et dicunt de bonis propriis consulum et illorum qui ad premissa erant obligati tantum recuperare, debere aut per ipsos acquirere dicto consulatui et universitati sive boni quantitatem — Dictis consulibus contrarium asserentibus et dicentibus quod

dictus Ramundus Dauli qui solutum tradit per ipsos consules et

predecessores suos dicti loci de Montequco Ramundo de Buxeria et Petro de Sicco serio predictis pro quibusdam debitis et obligationibus

et pro bonis per ipsos Ramundum et Petrum factis consulibus ante

dictis pro agendis et perfaciendis negociis communibus consulatus predicti sub certis convencionibus et pactis recuperandi eosdem redditus solvendo eisdem et eorum cuilibet sortem debitum eisdem cum expeniiis inde sequtis.

Item super eo quod petebant et petunt dicti forences et eorum sindici quod négocia consulatus agant unus consul tantum minoribus expensis quibus poterit exclusis omnibus aliis consulibus. Dictis consulibus in contrarium asserentibus et dicentibus quod hoc fietad libitum voluntatis consulum predictorum prout actenus per predecessores suos consules Montisquci est fieri consuetum.

Item super eo quod petebant et petunt dicti forences et eorum sindici sibi reddi compotum et racionem legitimam per consules antiquos vel modernos aut per magistros Johannem de Narcesio, Petrum de Candelier et Johannem Calmeta aliis per consules antiquos institutos ad recipiendum seu exigendum, quando talham seu collectam singulis habitatoribus ville et honoris, intus et extra, impositam racione cujus-


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dam finansie facte per dictos tune consules et alios forences eu m venerabili et potenti viro domino Guillermo de Sentenaco, canonico, ejusdem tune comissario deputato per regiam magestatem ad recipiendum finansias a personis in nobilibus peracquisitis per eosdem innobiles a nobilibus et questas ecclesiarum de omnibus hiis que dicti consules antiqui vel modérai aut dicti magistri Johannes de Narcesio, P. de Candelario, Johannes Calmeta, notarii receperunt racione talhe seu collecte ac finansie prelibatas. — Dictis consulibus contrarium asserentir bus et dicentibus quod compoti redditio premissa non pertinet nec débet aliquathenus pertinere dictis forencibus nec alteri eorum seu causa quia dicti notarii per dictos condam consules deputati ad recipiendum premissa de premissis bonis et légale compotum et rationem tam consulibus modérais quam antiquis reddiderunt, de quibus dicti consules sibi concesserunt publicum instrumentum seu pubhca instrumenta solutionis et quitationis ex quibus et ex quo reddiderunt compotum quibus interest, non oportet iterato computari.

Item super eo quod prefati forences et eorum sindici petebant et petunt quod predicti consules qui vel nunc vel pro tempore erunt Montisquci, nec aliquis ex ipsis non incipiant, nec incipere habeantseu debeant contra quemeumque vel quoscumque, nomine dicti consulalatus, litem vel lites, questionem vel questiones, in judicio vel extra, in agendo absque scientia, voluntate et consensu plurium proborum virorum de nobilibus castri de Montequco et ejus honoris, intus et extra. Dictis consulibus in contrarium asserentibus et dicentibus se fore suosque predecessores ab antiquo fuisse in jDocessione paciffica et quieta incipiendi lites seu questiones, nomine dicti consulatus contra quoscumque nomine cticti consulatus, contra quibuscumque tam in agendo quam in de reddendo prout eis videbitur faciendum probis viris de Montequco et ejus honoris vocatis nunc vel etiam expectatis.

Item super eo quod petebant et petunt dicti forences et eorum sindici quod consules qui pro tempore erunt de Montequco, anno quolibet, in nova creatione eorumdem jurare habeant, pluribus probis viris de Montequco et ejus honoris intus et extra, tenere et observare bonos usus et consuetudines castri de Montequco et ejus honoris, ac compositiones inter ipsos consules et habitatores loci de Montequco et ejus honoris, intus et extra, habitas vel habendas quanto melius poterunt bona fide. Dictis consulibus in contrarium asserentibus et dicentibus hoc ad ipsos forences minime pertinere et pertinere debere, cum ipsi


consules qui nunc sunt et pro tempore fuerunt, sunt et diu fuerunt in pocessione paciffica et quieta, jurandi antiquis consulibus eorum predecessoribus et bajulo Montisquci, dumptaxat probis viris de Montequco vel ejus honoris, intus aut extra, nunc presentibus seu vocatis.

Eadem die date hujus presentis publici instrumenti coram provido viro Ramundo Pacot, bajulo regio Montisquci pro Domino nostro Francie Rege. in presentia nostrorum notariorum et testium subscriptorum ad infrascripta vocatorum venientibus et existentibus apud Montemqucum, nobilis Dominus Bernardus de Narcesio, miles, Giscardus de Giscardo, Ramundus Bernardus de Olmia, domicelli, Arnaldus de Cambone, Johannes Flamenc, magister Petrus deCandelier et Ramundus Chery, consules castri Montisquci, pro se et aliis consulibus, sociis suis, de habitatoribus et universitate dicti castri de Montequco, ac Petrus Ebrardi, Bernardus Meliorati, nuper constituti sindici per universitatem et consules dicti loci de Montequco, ad infrascripta habentes ad hoc spéciale mandatum prout constat per quoddam publicum instrumentum sive quedam publica instrumenta, die date hujus predicti publici instrumsnti confectum seu confecta per magistros Johannem de Grezis et Geraldum de Cumba, notarios regios, cujus instrumenti ténor inferius est inscriptus, ex una parte; veneruntque etiam et comparuerunt nobiles Guillermus de Olmia, Guillermus Bernardus de Olmia, Arnaldus de Bosco, Bertrandus de Lezergis, domicelli, Gasbertus de Lobeiaco, Ramundus de Olmia, Arnaldus Deltilh, Johannes Daden, Stephanus Dellatar, Guillermus de Lacaza, Ramundus Guasc, Hugo de la Sudria, Bernardus de Ruppe, Geraldus de Ulmo, Ramundus de Vigaria, Guillermus Guasc, Arnaldus de Ruppe, Bernardus Lauret, Ramundus Rey, Bernardus de la Clota, Arnaldus Portas, Gasbertus de Lacroza, Petrus de Salis, Guillermus Eschalier, Arnaldus de Ruppe et Guillermus de la Sudria, procuratores sindici et iconomii habitalorum, forensium honoris castri de Montequco; de quo quidem procuratorio seu sindico constare dixerunt per quoddam publicum instrumentum inde confectum per magistrum dictum Johannem de Grezis, notarium publicum, cujusquidem sindicatus seu procurationis instrumentum inferius continetur, habentes potestatem et spéciale mandatum dicti procuratoris sindici seu iconemii et eorum singuli in solidum supra et infrascripta facienda contenta in presenti publico instrumento, ex parte altéra. . Qui quidem sindici et procuratores seu iconemi et eorum qui libet


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juraverunt ibidem in manibus dicti bajuli, in dicto procuratorio seu sindicatus officio, bene et fideliter se habere et utilia universitatis dicti castri de Montequco procurare et inutilia pro viribus evitare bona fide juxta et secundum potestatem eisdem et cuilibet eorum atributum.

Hos multos tractatus habitos super predictis et singulis predictorum, quibus discretis viris amicis dictarum partium intervenientibus et tractantibus super premissis questionibus, controverciis ettlebatiset super singulis capitulis eorumdem, volentes anfracta, indicianos et sumptus et expensa que ex inde sequi possent evitare ut dixerunt pro bonopacis et concordie, pro se et suis heredibus et successoribus universis et singulis, ac universitatis et habitatorum dicti loci de Montequco et ejus honoris. Protestato primitus et ante omnia per dictos nobiles procuratores sindicos seu iconemos, nec non per nobiles dominos Johannem de Baguato, Bèrnardum de Orgolhio, milites, Bernardum de Giscardo, Guillermum de Sancto Genesio, Bernardum de Narcès, Gasbertum de Canophio, domicellos, et per nonnullos alios nobiles ibidem persistentes, pro se et aliis nobilibus dicti castri de Montequco et ejus honoris, sibi adherere volentibus in hac parte, et per transactionem hujusmodi non intendunt suis libertatibus seu franchesiis acthenus et diutius usitatis in alïquo derogare, imo potius in eisdem volunt percistere altérais perpetuo, non obstantibus transactionibuscontentisin presenti publico instrumento, dicte partes et earum quelibet inter se amicabiliter se compromiserunt, pacificaverunt et transigerunt per hune modum :

Primo quod dicti forenses habitatores honoris dicti loci de Montequco, qui nunc sunt et pro tempore futuro erunt, seu eorum in posterum successores ex nunc in antea sunt quicti, liberi et immunes ab omnibus factionibus et refectionibus seu reparationibus itinerum, poncium, foncium, frontorum, viarum et peyratarum que fient in posterum in dicta villa Montisquci seu extra villam infra pontes et rivos de la Bargalona e de Nega Velha versus villam, salviset exceptis refectione murorum vallatorum seu aliarum fortaliciarum ejusdem ville pro tempore competenti.

Item quod dicti forences et eorum in posterum successores ex nune in antea sint quicti, liberi et immunes dandi, prestandi seu contribuendi caritati festi Penthacostes que fiet pro tempore et in posterum in dicto loco de Montequco, salvis et exceptis piis legatis et helemosynis, si aliqui de forensibus jam deffuncti aut présentes aut eorum in


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posterum successores fecerunt aut facere contingeret in futurum caritati predicte.

Item fuit actum et expresse inter partes predictas per viam pacis et compositionis predicte quod dicti consules qui nunc sunt seu pro tempore erunt in dicto Castro seu villa de Montequco, pro omnibus negociis, litibus seu expensis ejusdem consulatus decetero non facient seu facere possunt seu imponere habitatoribus dicti castri et ejus honoris aliam talham seu collectam excedentem summam centum librarum turonensium parvorum, et quod fiât semel tantum in anno,

eo casu quo erit necessarium

partes predictas quod pro subcidio ant exercitu dicti domini nostri

francie régis aut alio negocio quocumque

pro bonis comunibus acquirendis ville dicte de Montequco

ditus dicte talhe seu collecte valeant augmentum videlicet quod dictis bonis communibus acquirendis de concilio probo virorum loci dicti de Montequco et ejus honoris intus et extra, et aliter non.

Item fuit actum et expresse per viam pacis seu compositionis predicte quod omnes talhe sen collecte, ex quacumque causa fiant, per consules dicti loci, habitatores dicte ville et honoris ejusdem loci fiant de cetero pro solido et libra juxta modum et alibramentum loci de Lauserta et ejus honoris seu Montis albani, casu quo consulibus Montisquci et pluribus providis viris de Montequco et ejus honoris, intus et extra et de qualibet parrochia super hoc congregatis dictum alibramentum bonum seu expediens videretur.

Item fuit actum et expresse inter partes predictas quod de cetero in indicione seu impositione talhe que fient seu fieri continget per consules qui nunc sunt aut pro tempore erunt de Montequco habitatoribus ville et honoris ejusdem loci, et in racione reddenda eorumdem vocentur de qualibet parrochia ejusdem honoris per mutuum seu sermentum consulum predictorum duo probi viri de notabilibus ejusdem parrochie, et si vocati intéresse voluerunt per consules dicti loci ejusdem probis viris q ui vocati erunt présentes ostendatur nécessitas consulatus et quod indicatur talha seu collecta per dictos consules per modum predictum habitatoribus dicte ville et ejus honoris intus presentibus dictis probis, si vocati interesse voluerunt ad premissa ut prefertur ; et reddatur ratio et compotum per consules antiquos, ut est athenus fieri consuetum, consulibus successoribus suis et dictis probis viris presentibus, si vocati interesse voluerunt ad premissa.


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Item fuit actum et expresse, per viam pacis et compositionis predicte inter partes predictas quod eo casu quo contingeret per consules ante dictos seu eorum successores fieri taliam seu collectam aliquam habitatoribus dicte ville et ejus honoris ex quacumque de causa, quod pars seu portio coutingens unicuique dictarum parrochiarum seu habitatorum eorumdem, de cetero proponatur seu indicetur per duos probos viros cujuslibet dictarum parrochiarum vocatis et secum assistentibus pluribus probis viris uniuscujuscumque parrochiarum ante dictarumabsqueaucmentationesivesobretalham,qualemcumque, et quod si habitatores dictarum parrochiarum compellendi fuerunt pro dictis talhis sive collectis sibi impositis sirvens consulum eosdem compellendi intus et extra compellat et compellarehabeat ad sol vend uni communibus expensis dicti consulatus et totius universitatis predicte.

Item fuit ordinatum quod annis singulis in nova creatione consulum, in posterum, in dicto loco de Montequco creandorum per novos consules ut premictitur crear.dos, instituatur quoddam probus vir qui recipiat seu recipere habeat emolumenta et proventus consulatus predicti, et ille probus vir, ut premictitur institutus, anno quolibet, teneatur reddere compotum et legitimam rationem de receptis et administratis per eumdem bonis ejusdem consulatus, vocatis probis viris de notabilibus dicti loci de Montequco et ejus honoris, usque ad numerum quindecim, vel viginti, si vocati ad premissa voluerunt interesse.

Item fuit actum et conventum expresse inter dictas partes, per viam pacis et compositionis predicte, quod totum id quod dicti consules recuperare poterunt de dicto subcidio per consules et universitatem ejusden castri et ejus honoris, salvo domino thesaurerio regio petragoriensi et caturcensi, ratione milicie Domini Johannis de Francia, primogeniti dicti domini nostri régis francie, a dicto domino nostro rege seu ejus thesaurerio seu quibus aliis personis, ratione, donatione facte de dicto subcidio per dictum thesaurarium, ponant ipsi consules et expendant ac liberi convertant in communibus expensis ejusdem consulatus et universitatis castri Montisquci intus et extra factis seu etiam faciendis, et quod dicti consules antiqui et modérai de dicto subcidio perpetuo ulterius quicti sint, liberi et immunes, supredictis forencibus sen singulis eorumdem.

Item fuit actum et expresse inter partes predictas, per viam pacis et compositionis predicte quod dicti consules Montisquci, qui nunc sunt


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et atriginta annis citra fuerunt, sint quicti, liberi et immunes feddendo dictis forencibus seu sindicis eorumdem aut alteri alicui pro eisdem compotum et rationem de gestis, negociatis et aministratis per eosdem modernos consules et antiquos vel eorum alterum tempore sui consulatus predicti, hiis dumtaxat exceptis que consules modérai, anno presenti, egerunt, seu negociaverunt, aut facient, seu negociabunt tempore sui consulatus predicti.

Item fuit actum et expresse per viam pacis et compositionis istius, quod eo casu quo contingeret per magistratum regiam seu ejus curiam reverendam aut per aliquem a magestate regia seu ejus curia deputatum aliquam fieri sententiam contra consules et universitatem predictam, continentem aliquam condémnationem pro lite et occasione litis mote Guillermi de Benessinholas et Guillermi Brac venerabilis viri domini officialis caturcensis, qui nunc est, vel pro tempore fuerit, Bernardi Gervasii, et Bernardi Benedicti, juris periti, dominus Poncius Molinerii, doctor legum, decernere et declarare de jure habeant an dicti forences teneantur in aliquo contribuere in dicta condemnacione, si que sit, nec ne visis processibus et actis habitis supra lite predicta, quod dicte partes ad invicem et earum quelibet, gratis et sponte ex nune et ex tune, et ex tune ut ex nunc, ad premissa facienda, dicenda et declaranda de jure, unanimiter elegerunt et se jam ordinationi seu deefarationi dictorum dominorum, de jure tamen dicenda et declaranda totaliter submiserunt.

Item, fuit actum et expresse per viam pacis et compositionis predicte inter partes predictas, quod ea que per consules antiquos seu modernos

vendita seu alienata sint in solutum dictis viris Ramundo

de Buxeria, Petro de Siccoserio et quibus aliis personis, de bonis seu de redditibus ejusdem consulatus ex quo pro communibus expensis ejusdem consulatus facta fuerunt, firma remaneant et in suo robore et effoclu, quodque dicti forences, seu eorum aliqui, aliquid petere non habeant in iisdem, salvis remanenlibus consulibus et universitati, intus et extra, predictis pactis et conventis, factis et habitis inter dictos creditores et consules de revendendo eadem infra certum tempus in literis seu instrumentis super dicta venditione seu in solutum traditione confectiset...

Item, fuit actuni et expresse, per viam pacis et compositionis predicte inter partes predictas, quod consules antiqui et modérai et qui pro tempore erunt de Montequco et dicti magistri Johannes de Narcesio,


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Petrus de Candelaria et Johannes Calmeta notarii olim per consules ejusdem loci instituti ad recipiendam talham sive collectam impositam habitatoribus ville et honoris ejusdem loci, ratione illius financie facte cum venerabili viro domino Guillermo de Ventenaco per consules dicti loci, pro se et tota universitate ejusdem, intus et extra, pro acquisitis per habitatores dicti loci et ejus honoris in nobilibus a nobilibus, ex quo dicti magistri Johannes de Narcesio, Petrus de Candelario et Johannes Colmeta compotum et rationem reddiderunt de premissis dictis consulibus, per quos, ut preffertur, ad premissa recuperanda fuerunt deputali ad reddendum compotum et rationem de premissis, sint nunc et in pertetuum quicti, pariter liberi et immunes.

Item, quod dicti domini consules ex eis unusnobiliset alter innobilis négocia consulatus, sy vellint et sibi visum fucrit expediens, exercere valeant ad communes expensas consulatus dicti castri et ejus honoris, et quod quilibet dictorum consulum qui négocia ejusdem consulatus agcre, vel negociare voluerit, infra tamen senescalliam petragorensem et caturcensem, expendere nequeant, nec compulare habeant pro qualibet dicta cum roncino et loguerio ejusdem ultra quinque solidos turonenses parvos, scripturis et ad vocatis dumtaxat exceptis; si tamen extra senescalliam predictam habeant proficere sive negociare. . . . erat austeritas temporis, quod eo casu provideant consules inter se et alii probi viri dicti loci et honoris ejusdem.

Item fuit actum et convcntum expresse inter partes predictas quod in nova creatione consulum dicti loci in posterum creandorum, ipsi consules hanc presentem compositionem et contenta in eadem tenere et observare habeant et non contra facere, dicere vel venire aliquid per quod presens compositio seu transhactio poterit viiibus vacuare, seu quomodolibet deteriorari sen infingi ; et quod ipsi consules ad sancta Dei jurare habeant, si per forenses predictos aut eorum successores aut ab aliquo ex ipsis requirerentur, ita tamen quod in dicta requesta de dictis forencibus sint usque ad numerum quindecim vel viginti, in quo sint numéro de quolibet brachio dicte baylive Montisquci qui quidem forenses vice versa jurare habeant premissa tenere, et ita dicti consules pro viribus observare, quantum potuerit, bona fide.

Item fuit actum expresse et conventum inter partes predictas per viam pacis et compositionis predicte quod dicti consules, nec aliquis ,çx ipsis, vice et nomine dicti consulatus, nullam litem sen negociam


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ant denuntiationem, in agendo quoquo modo, incipere possint contra quemcumque vel quoscumque nisi de voluntate et expresso consensu quindeeim vel viginti proborum virorum notabiliorum loci de Montequco et ejus honoris, intus et extra.

Quam quidem compositionem, transactionem et pacemetomnia alia universa in hoc presenti publico scripta et contenta per dictos consules,

habitatores et sindici castri de Montequco supra et

procuratores et sindici forenses et predictorumquilibet pro se et quibus supra nomine quo supra omnia observare

Johannes de Baguato, Pondus de Cazello, Bertrandus de Buxeria ....

de Guiscardo, Gasbertus de Sancto

Genesio ac Seguenuis de S : .... et nonnulli alii probi viri

dicti loci et ejus honoris, intus et extra acistantes omni

appellationi ' emologaverunt et ratifficaverunt

ratifficaverunt ratam, gratam pariter et acceptam

habuerunt et habere /oluerunt perpetuo ulterius pariter et acceptam et earum quelibet ad invicem

solempni interveniente hinc inde et ad sancta Dei

evangelia juraverunt, sub pena mille librarum turonensium parvarum domini nostri régis danda et applicanda predictam compositionem, transactionem et pacem, et omnia alia universa et singula in hoc presenti publico instrumento contenta et scripta tenere, complere et non contra facere. . . vel venire. Et super hiis dicte partes et earum quelibet certe et de eorum siensiis ut dixerunt, requirentes nihilhominus dicte partes et earum quelibet presens instrumentum ferre et tenere. et etiam supplicanti dicto presenti et nihilhominus nobili et potenti viro domino senescallo petragorensi et caturcensi, licet absenti ut ad requestam simplicem latorum dicti presentis publici instrumenti eidem publico instrumento et in eocontentisauctoritatemsuam judiciariaminterponat pariter cum decreto ad majoi em perpetuo roboris firmitatem ; Et si partes tamen absentes tune vel présentes et earum quamlibet auctoritate sua judiciaria ad tenendum et servandum omnia et singula in presenti publico instrumento scripta pariter et contenta, causa cognita, similiter condempnet tanquam vere consistentes in judicio coram eo et curia sua, sigillumque auctentitcum dicte senescallie dicto presenti instrumento apponi faciat in fidem et testimonium premissorum. Et de hiis debent fieri quinque publica instrumenta, unum videlicet parte


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habitatorum loci sive castri de Montequco, et alium vero pro parte habitatorum forensium bracchii sive membri de Bono loco, aliud pro parte habitatorum forencium brachii sive membri castri de Orgolhio, et aliud pro parte forensium brachii sive membri Sancti Pantheleonis et aliud pro parte habitatorum sive forencium brachii sive membri Cabanarum Sancti Georgii, honoris de Montequco ; tociens facienda et reficienda quotiens per dictos forences vel aliquem eorumdem fuerit

requesitum vero instrumento. . . . potestatem procuratorum

seu sindicatorum predictorum senatum sequentium in

in hec verba et cetera. In quorum visionis, palpationis et diligentis transcriptionisfidem et testimonium, nossenescalluspredictussigillum regium dicte nostre senescallie caturcensis huic presenti transcripto et exsemplo seu vidimusapponi fecimusimpendenti per custodem ejusdem. Datum, transcriptum et exsemplatumCaturci, die decina nona mensis maii anno Domini millesimo trescentesimo nonagesimo tercio. Facta est collatio cum originali, nobiscum Jacobo Sentonis et Durando Latalho als de Croci notario regio Caturci.

Une Excursion à Figeac

Depuis longtemps, même avant que fut constituée la société des Amis du Vieux Figeac, les membres de la Société des Etudes du Lot qui résident à Cahors avaient projeté de faire une excursion dans cette ville de Figeac dont le Syndicat d'initiative disait tant de merveilles. Et cependant la visite, que le jeudi 19 octobre dernier firent quelquesuns d'entre nous fut à peu près improvisée, à tel point que nous fûmes seulement une dizaine et que nous ne laissâmes pas le temps aux Amis du Vieux Figeac, qui sont comme nous les amis du Vieux Quercy, de se concerter pour nous faire la réception qu'ils auraient souhaitée. Une autre fois, sans doute, nous ferons une visite plus officielle et en nombre plus imposant.


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Partis par une radieuse matinée qui nous permet de mieux admirer les nombreuses beautés de la vallée du Lot, nous décidons en chemin d'employer l'heure et demie que nous devions passer en gare de Capdenac à escalader le coteau escarpé qui peut-être porta Uxellodunum. Nous n'eûmes pas le temps d'examiner en détail ni les restes encore debout des remparts du moyen-âge, ni les vieilles maisons, jadis seigneuriales, qui se cachent dansées ruelles tapissées de fumier, ni même, sur le devant de la place forte, le gouffre aride qui fut peut-être la fontaine tarie par César ; mais nous eûmes largement de quoi rassasier nos yeux et nous emportâmes tous le désir de revenir pour une excursion spéciale. Laissons les chauvinismes locaux discuter si Uxellodunum est Capdenac ou Puy d'Issolud ; quoiqu'il en soit de la question, Capdenac le Haut mérite une visite détaillée.

Nous voici à Figeac. En attendant l'heure du déjeuner on fait une première visite au chapitre ou basilique Saint-Sauveur, si remarquable encore malgré tant et tant de destructions et de restaurations. M. Cavalié, le président si actif de la société des Amisdu Vieux Figeac, pour qui les vieux parchemins et les vieux registres municipaux n'ont plus de secrets, veut bien accepter de partager notre repas. Il regrette sincèrement que ce voyage un peu impromptu ne lui ait pas permis de réunir les membres de sa jeune Société pour nous faire avec eux les honneurs de la vieille ville. Quelques-uns de ces Messieurs, avertis au dernier moment, se joignent à nous à la fin de notre déjeuner, notamment M. Nigou, ingénieur, et M. Cadiergue, notaire, et c'est en leur compagnie que nous entreprenons la visite de Figeac. Ah ! que l'antique cité mérite bien d'avoir suscité une société d'amis ! comme on comprend, en parcourant ses rues anciennes, toutes remplies des souvenirs d'autretois, qu'elle soit aimée de ses enfants et même de ceux que les hasards de la vie ont fait entrer dans sa famille !

M. Cavalié est tout fier de nos exclamations, de notre admiration spontanée. Il voudrait nous faire voir tous les détails ; ce sont d'abord des modillons de l'ancienne église du faubourg Saint-Martin XVe siècle, à l'entrée du pont ; puis c'est la maison de Viguier d'Auglanat, au beau portail (muré) du XVe siècle ; à côté, le château de Balène, dont les magnifiques fenêtres sont murées, et donnent d'ailleurs sur une rue assez étroite ; quelques pas plus loin, dans la rue Orthabadial, où il nous fait admirer en passant des restes de belle demeures (toutes les rues, même les moins engageantes, en offrent de même), nous sommes


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en admiration devant la maison de la monnaie, véritable merveille, orgueil de la ville, un des plus beaux bâtiments civils du XIIIe siècle. Quel dommage que la façade méridionale, qu'éclairent huit superbes fenêtres géminées, ne donne pas sur une place qui permette de la mieux voir !

Nous suivons ensuite la rue Caviale (ou de la Sous-Préfecture), admirant en passant le splendide escalier monumental (XVIIe siècle) de l'hôtel de Lostange, les magnifiques cheminées (surtout celle du premier étage) de la maison dite de Louis X/, où ce roi aurait séjourné en 1463; notre admiration jamais lassée trouve encore à s'exercer sur la place Basse où se dresse la maison de l'armurier du roi, Cisteron (XVe siècle); sur la place Haute où nos yeux vont des fenêtres de la maison des Templiers aux fenêtres encore plus anciennes et plus curieuses de la maison située en face, récemment débarrassées de leur gaîne de mortier, et un peu plus loin aux fenêtres analogues de la maison du Viguier du roi. Ces restes supposent de splendides hôtels et une opulence que depuis longtemps Figeac ne connaît plus.

De là nous montons, non sans jeter un coup d'oeil à l'intérieur de l'ancienne maison Boutaric, au Puy ou colline qui donne son nom à l'église Notre-Dame. De là on a un très joli coup d'ceil sur la vallée du Celé, en aval de la ville, vers Bêduer. L'église du Puy est une église gothique du XIVe siècle, rebâtie sur des bases romanes et fortement retouchée au XVIIe siècle. Le portail principal, très abîmé, a dû être fort beau et mériterait une restauration, la nef principale est une des plus vastes qu'on connaisse parmi les églises à bas-côtés, le rétable du maître-autel, placé en 1696, est une véritable merveille. On en trouvera l'histoire et la description dans le livre fait par un ancien curé, M. B. Massabie, sur « la vie et les oeuvres de M. de Laborie, prieur de N.-D. du Puy à Figeac ».

Du Puy nous redescendons au Chapitre, qui mérite bien une seconde visite, plus détaillée que le coup d'oeil rapide d'avant déjeuner. Mais chemin faisant, M. Cavalié nous entraîne au long de la rue Droite ou du Pin pour voir... une porte; mais cette porte est remarquable entre bien d'autres par son encadrement, par les armoiries qui la surmontent, surtout par les délicates sculptures, « dignes de Bachelier, » qui en feraient un vrai joyau, si elle était un peu nettoyée et débarrassée du badigeon dont on l'a recouverte. Cette porte appartient à une maison dite de Sully parce que Sully y habitait, paraît-il, au temps de sa


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disgrâce quand il n'était pas à Capdenac ou à Béthune. Nous n'avons pas pu voir un magnifique escalier du XVIe siècle qui orne encore l'intérieur, très abîmé d'ailleurs depuis quelque temps, car la maison disputée entre plusieurs compétiteurs est pour le moment fermée aux curieux. Sans être aussi beaux d'autres encadrements de portes ou de fenêtres ont ici ou là frappé nos yeux, mais si souvent placés à côté de « modernités » tout à fait déplaisantes !

Si l'on excepte la cathédrale, Cahors ne possède rien de comparable aux deux principales églises de Figeac. La basilique Saint-Sauveur, paroissiale seulement depuis le Concordat, fut jadis église abbatiale, puis, l'abbaye sécularisée, église d'un chapitre de Chanoines qui subsista jusqu'à la Révolution; nous ne pouvons pas songer à décrire ici une telle église, mais seulement à dire l'impression faite sur tous ceux qui la voyaient pour la première fois et qui en emportèrent un souvenir qui ne s'effacera pas. Cette visite intéressante fut si longue que, l'heure du départ approchant à grands pas, après un coup d'oeil admiratif à l'imposant monument des combattants de 1870-1871 qui élève sa masse de granit et de bronze à côté de l'église qui ne l'écrase pas trop, un autre coup-d'oeil un peu déçu à l'obélisque médiocre dressé pour perpétuer le souvenir de l'égyptologue Champollion, une des plus pures gloires de Figeac, il faut renoncer au plaisir d'aller voir, à l'extrémité du faubourg d'Aujou, et l'hôpital Saint-Jacques et l'église Saint-Thomas (jadis des Grands Carmes).

On reprend le chemin de Cahors non sans avoir remercié chaleureusement de leur complaisance les Amis du Vieux Figeac devenus les nôtres et tout particulièrement leur aimable et érudit président qui ne nous avait pas abandonnés un seul instant.

UN EXCURSIONNISTE.


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DOCUMENTS SUR CAHORS

Dans les minutes de maître Sourdrille, notaire à Cahors, offertes de façon si obligeante à nos recherches, nous avons trouvé un registre consacré aux actes ecclésiastiques. Ce recueil provient des minutes de maître Olivier et contient l'acte d'installation de Monseigneur de Nicolay, à la date du 23 octobre 1777.

Ce document nous a paru intéressant à plusieurs points de vue, car cette cérémonie d'installation fut la dernière qui eut lieu sous l'Ancien Régime.

On est d'abord étonné de ne plus y trouver tous les détails si pittoresques qui accompagnaient autrefois les entrées solennelles ou installations des Evèques de Cahors. Non seulement il n'y est plus question de l'hommage si singulier rendu longtemps par les barons de Cessac et auquel renonça en 1693 Monseigneur de Briqueville, mais on ne va même plus joindre en procession le nouvel êvêque hors de la ville au delà du faubourg Saint-Georges, à la Belle-Croix : plus d'Université en corps, de harangue du Chancelier, et, partant, de remise de bonnet de docteur (1); plus de cortège à cheval d'officiers de l'Election ou du Présidial; plus de garde bourgeoise sous les armes ; plus de premier consul prenant la main droite de l'évêque, alors que le second tenait

(1) M. Baudel a publié en 1879 dans « l'Annuaire du Lot », un article intitulé : De quelques droits et privilèges de l'Evéque de Cahors. Au sujet de la remise du bonnet de docteur à Monseigneur de Sevin il cite la péroraison de la harangue du chancelier de l'Université « Pariel ». Ce bonnet était multicolore puisqu'il était rouge, vert, blanc, violet et bleu. Voici la fin de cette péroraison fort curieuse .

« Ces couleurs montreront à toute la France : le rouge, que vous avez heureusement suivi les traces de Papinien ; le vert, d'Innocent ; le blanc, de SaintThomas ; le violet, d'Hippocrate ; le bleu de Quintilien ; ou si vous l'aimez mieux, illustrissime pontife, nous aurons essayé d'exponer en faibles traits : par le rouge, votre zèle ; par le vert, la vigueur de votre esprit ; par le blanc la candeur de votre âme ; par le violet, la mortification du corps, et par le bleu, la contemplation céleste »


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la main gauche et que les autres marchaient à coté ; plus de remise des clefs de la ville. La cérémonie se passe de façon tout à fait simple. Les cloches sonnent bien à toutes volées, mais on n'entend plus les salves de mousqueterie de la garde bourgeoise ; le Chapitre va chercher l'Evêque dans son palais épiscopal, mais comme ce dernier touche à la cathédrale, le cortège n'a guère l'occasion de se déployer. Quelques nobles, quelques consuls, quelques notables tiennent seulement à honneur de former l'escorte de Monseigneur de Caors.

Toutefois l'acte de maître Olivier nous a conservé les noms de tous ces assistants, et il offre à ce titre beaucoup d'intérêt. Nous trouvons là, réunis, des hommes qui seront poursuivis, traqués, emprisonnés quelques années plus tard et à coté d'eux leurs proscripteurs. M. le marquis de Lavalette Parizot, coudoie M. d'Hillebart, qui supprimera sa particule avec autant d'empressement qu'il mettait alors à s'en parer, et qui sera le plus fervent adepte de la Révolution. M. Pontié, curé de Saint-Géry, prend peut-être dans cette cérémonie le germe de sa candidature à l'épiscopat constitutionnel ; Maître Olivier qui dresse l'acte d'installation, va faire partie de l'administration du district dès le début de la Révolution et, s'il signe aujourd'hui pompeusement Notaire royal et apostolique, il a un fils, Jean-Baptiste, qui sera un des orateurs les plus zélés et les plus violents lors de l'inauguration du temple de la Raison dans cette même cathédrale et qui signera, lui, sur les registres du Comité révolutionnaire : Un roc détaché de la Sainte Montagne.

Ce sont toutes ces considérations qui nous ont engagé à publier ce document qui devient ainsi intéressant pour notre histoire locale. Nous l'avons accompagné de quelques notes, et nous tenons, à ce sujet, à remercier M. l'abbé Foissac et M. Paumés, des indications précieuses qu'ils ont bien voulu nous donner, et qui nous ont permis de donner quelque intérêt à ces remarques.

A. CRUDY.


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Acte d'installation de Monseigneur

de Nicolay 23 Octobre 1777 (1)

(Minutes de Me Olivier, notaire royal).

L'an mil sept cent soixante-dix-sept et le vingt-troisième jour du mois d'Octobre, dans la Chapelle saint Martin de l'église cathédrale de la ville de Cahors, y étant à l'issue de vêpres capitulairement assemblés Messires de Bécave (2) grand archidiacre, de Belvèze (3), de Loyac (4 , de Palhasse de Salgues (5),de Bonnassies (6),de Durre (7) et de Gastor (?) chanoines et Messieurs de Gauléjac (8), grand vicaire chanoine du Vigan,de Dolive (9), de Beaufort (10), chanoines honoraires, par devant nous notaire royal

(1) Monseigneur de Nicolay s'intéressa beaucoup au collège de Cahors. Il songea à y emmener les Oratoriens. Il fonda le petit séminaire de Saint-Paulin qu'il annexa au grand séminaire. Parmi les élèves de ce petit séminaire fut Murât, le futur roi de Naples. qui. comme tousses camarades, suivait les cours du collège. Monseigneur de Nicolay fut député du clergé aux Etats Généraux, mais ne parut guère à l'Assemblée Nationale. Il mourut à Avignon.

(2) Souvent emprisonné pendant la Révolution. Nommé vicaire apostolique après la Constitution civile.

(3) Famille originaire de Frontenac qui a fourni plusieurs chanoines au XVIIe siècle ; la branche cadette existe à Larnagol ; dont l'ancien archiprêtre de la Cathédrale.

(4) Noblesse de robe de Brives, de Loyac de La Sudrie.

(5) Famille bourgeoise de Figeac, aujourd'hui éteinte.

(6) Famille bourgeoise de Gramat ; était chanoine hebdomadier principal du collège de Cahors.

(7) Famille originaire du Rouergue.

(8) De la branche de Marminiac.

(9) Famille cadurcienne qui a fourni de nombreux conseillers du roy au présidial ; chinoines de la cathédrale, régents à l'Université. Elle était alliée a la famille d'Helyot ; s'est retirée à Montech.

(10) De Beaufort (Lacoste) famille bourgeoise de Cahors et de Soucirac a fourni de nombreux consei'lers, régents, chanoines, un avocat général aux Aydes de Montauban.


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apostolique de ladite ville de Cahors et Secrétaire du Chapitre de la dfte église et les témoins soussignés;

Aurait été proposé par M. Bonnassies, chanoine et syndic, que Révérendissime père en Dieu, Monseigneur Louis-Marie de Nicolay, évêque baron et comte de Cahors, étant arrivé en cette ville mardy dernier au soir vingt unième du courant leur aurait témoigné qu'il désirait réaliser la possession de son évêché, circonstances et dépendances d'icelluy par lui prise par le ministère du dit sieur de Bécave, grand archidiacre, son procureur fondé, le seizième jour du mois de Mai dernier, dont l'acte fut retenu par nous dit notaire et secrétaire du dit Chapitre, et sans préjudice d'ycelle prendre ladite possession réelle actuelle et personnelle, et pour cet effet aurait indiqué ce aujourd'hui heure de quatre après vêpres et aurait chargé M. maître Jean-Baptiste Capuan(l) Amadieu.juge et premier consul de ladite ville, de présenter au Chapitre les bulles du dit évêché a lui accordées par notre Saint père le Pape,datées de Rome à saint Pierre l'an de l'Incarnation mil sept cent soixante dix sept, le 13 des calendes du mois de Mars duement signées, scellées en plomb et certifiées vrayes originales conformément à l'ordonnance et expédiées en la dite cour de Rome et contrôlées à Paris suivant les certificats du 6 Mars 1777 signées des sieurs Desbries et Loyson conseillers du Roy, avocats au parlement et expéditionnaires de Cour de Rome demeurant à Paris, c'est pourquoi il prie le Chapitre de délibérer.

Sur quoi a été unanimement délibéré que le dit Seigneur Evêque sera reçu et installé au dit évêché, circonstances et dépendances d'icelluy, avec toutes les solennités accoutumées en pareil cas, et en conséquence Mrs les Dignités et Chanoines ayant donné ordre aux porteurs du dit Chapitre de sonner au commencement des vêpres, toutes les cloches pour le premier appel, et ayant dit en présence de la partie la plus considérable des plus notables habitants de cette ville qu'ils recevaient avec tout le respect et la révérence possibles les dites bulles dont lecture aurait été faite aux acclamations de tout le peuple assemblé ont délibéré qu'ils iraient prendre le dit seigneur évêque dans son palais épiscopal pour le prier de vouloir se rendre dans la dite église cathédrale pour y être pro(t)

pro(t) de notaires qui a fourni un abbé de Sully.


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cédé à sa dite installation, mise de possession réelle actuelle et personnelle ; en conséquence les cloches sonnant pour la seconde fois, tout le Chapitie s'est rendu processionnellement précédé de la Croix, dans la salle de l'évèché, dans laquelle ayant trouvé le dit seigneur évoque revêtu de rochet et de camail il l'aurait prié et requis par l'organe de M. de Bécave, grand archidiacre, de vouloir se transporter dans la dite église cathédrale pour y être procédé à sa dite installation et mise de possession, à quoi le dit seigneur évêque ayant donné son consentement il serait parti du dit palais épiscopal précédé de tout le Chapitre marchant processionnellement et ayant à ses cotés Mrs de Bécave grand archidiacre et de Belvèze chanoine et suivi du maître des cérémonies, de Mrs Trouy, archiprêtre de Saint-André, Delluc, curé de la Daurade, Gras (1) curé de Saint-Urcisse, Laroche-Lambert (2) curé de Soubiroux ; Rulié (3) curé de Saint-Pierre; Aboulène (4) curé de Saint-Barthélémy ; Pontié (5) curé de Saint-Géry ; Serres, curé de Saint-Maurice ; Dellard, curé de Saint-Laurent, de M. Falret (6) prieur de Saux et plusieurs autres ecclésiastiques, de M. le marquis de Lavalette-Parisot (7), maire; Amadieu, Mailhe (8), Ramel (9) et Delvincdurt (10). consuls et échevins de la

(1) Célèbre par ses difficultés avec le Chapitre de la Cathédrale. On trouve à la bibliothèque de la ville un long mémoire imprimé pour le procès qu'il soutint contre le syndic du Chapitre « le Chapitre n'a jamais eu de curé dans son église et il veut tout à coup devenir le curé de toutes les paroisses, du moins pour les enterrements ».

(2) Famille originaire de Nyons qui vint à Cahors recueillir la succession d'Oroncefine, seigneur du Poujoulat. Celte famille qui a eu deux de ses membres guillotinés à Paris sous la Révolution s'est retirée a Toulouse vers 1850.

(3) Auteur de plusieurs ouvrages, entre autres d'un livre « Contre l'intérêt de l'argent ». Nous avons vu dernièrement chez un brocanteur de la ville un portrait du curé Rulié. Il tenait à la main ce dernier traité.

(4) Lazariste, adonné aux missions.

(5) Prêta le serment, fit un discours au sujet de l'échauffourée de Castelnau, fut candidat à l'épiscopat constitutionnel.

(6) Famille de Maricillac, parent de Falret Lagasquic.

(7) Seigneur de Lalbenque, dernier d'une grande famille dont le cardinal Lavalette, un illustre chevalier de Malte ; fut député de la Noblesse aux Etats généraux ; mort en 1 791.

(8) Ancien professeur à la Faculté de médecine de Cahors.

(9) Famille de notaires originaires de Lalbenque ; était procureur ; père des deux Ramel.

(10) Famille venue du uord pour occuper la charge de Conseiller du Roy.


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ville de Cahors, revêtus de leurs robes consulaires; de beaucoup de noblesse et des plus notables habitants de la ville de tout ordre et de tout état, et particulièrement de M. le comte de Durfort-Boissières (1), de M. le marquis de Guiscard (2), de M. de Belcastel de Monlezun (3), de M. Lacoste (4), avocat général honoraire de la Cour des Aydes, de M. Desplats (5), capitaine d'infanterie, de M. le chevalier de Solminiac (6), de M. d'Hillebart (7), de M. le chevalier de Mauroux (8), capitaine d'infanterie, de M. Mailhe (9), capitaine commandant d'infanterie, de M. Lapeyrière (10), de M. Mostolac Lafage (11), chevalier de Saint-Louis, de M. Laplace (12), ancien professeur royal en médecine, du sieur Valet,

(1) Sarrain-Alphonse-Emmanuel-Louis, comte de Durfort-Boissières né en 1753 au château de Sept-Fonds, commune de Saint-Germain. Maréchal de camp, envoyé en mission en 1791 vers Léopold II par Louis XVI, fut nommé lieutenant général sous la Restauration ; mort en 1823.

(2) Les Guiscard étaient comte de Labouriie, seigneurs de Lagardelle et du Cairou.

(3 )Seigneur de la Grezette et de Monlezun Parenté avec le général Ambert.

(4) Même famille que les Lacoste-Beaufort les Lacoste-Ribot. Avocat général des Aydes de Montauban, frère des deux chanoines ; fut marié à Mlle de Ramondy, nièce de Le Franc de Pompignan.

(5) Famille noble établie à Peyrilles en 1397 ; une branohe s'installa d'abord à Bédué, puis à Cahors. Seigneur du Carriol près le Montat. Cette famil le existe encore en Touraine.

(6) Parent du bienheureux Alain de Solminiac.

(7) Suédois de Stockolm, venu à Cahors depuis 1769 environ. II géra la manufacture de draps établie dans l'ancien collège Pellegry ; dès le début fut un

fervent adepte de la Révolution, fit partie des premières municipalités, devint maire après la visite de Jean Bon Saint-André à Cahors en 1793. Il fut toutefois épure en novembre « comme n'entendant pas le français ni la langue locale », et mourut en 1795 dans l'immeuble des ci-devant Augustins qu'il avait acheté en partie.

(8) Famille bourgeoise originaire d'Albas qui acheta la baronnie d'Orgueil de Mauroux en 1740.

(9) Devint commandant de la Garde Nationale au début de la Révolution.

(10) Homme de finance et de loi, beau-père du maréchal Bes bières, fut sous le premier Empire receveur général à Paris.

(11) Famille originaire de Beaulieu ; éteinte.

(12) Ancien professeur de la faculté de médecine de Cahors. On lui conserva ses émoluments après la suppression de l'Université jusqu'à sa mort en 1708.


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féodiste, du sieur Martin Cabessut, greffier en chef de l'Election de cette ville, témoins soussignés, et étant arrivé à la porte principale de la dite église et après avoir descendu le premier escalier de la porte d'entrée Monseigneur de Bécave lui aurait présenté le goupillon pour prendre de l'eau bénite que le dit seigneur évêque aurait pris et en aurait donné à MM. les chanoines selon l'usage et de suite Monseigneur de Bécave l'aurait encensé de trois coups d'encensoir et étant parvenus à un prie Dieu au devant duquel était une table couverte d'un tapis sur laquelle était une croix, une carte de Te lgitur et le Livre des statuts du Chapitre, Monseigneur de Bécave, grand archidiacre aurait harangué en latin le dit seigneur évêque et lui aurait représenté que ses prédécesseurs avaient toujours en pareil cas, prêté serment au Chapitre de garder et observer inviolablement et de maintenir de tout son pouvoir les statuts et privilèges du dit Chapitre comme aussi de conserver les dignités, chanoines et autres bénéficiers dans leurs droits et privilèges, et aurait prié et requis le dit seigneur évêque de prêter le dit serment, ce qut le dit seigneur évêque ayant offert de faire, il se serait mis à genoux sur le prie-Dieu, et ayant mis la main droite sur sa poitrine dans la forme observée par les seigneurs évêques regardant le Te lgitur et la Croix, et de suite sa main mise sur les dits statuts tenus par Monseigneur de Bécave grand archidiacre, il aurait promis et juré l'observation des statuts du dit Chapitre et de conserver de tout son pouvoir les Dignités, chanoines, bénificiers et habitués de la dite Eglise en leur Dignités, honneurs, privilèges et Charges comme à chacun d'eux appartient, ce qui ayant été fait, le dit seigneur évêque est descendu dans la nef et de là entré dans le choeur, se serait avancé vers le grand autel de la dite église ayant à ses cotés les dits sieurs de Bécave. grand archidiacre et de Bel vèze, chanoine et précédé du Chapitre marchant processionnellement se serait mis à genoux sur le marche-pied du dit maître autel pour y faire sa prière, Tous les Dignités et chanoines étant debout autour de lui dans le sanctuaire et tous les autres bénéficiers s'étant placés dans leurs stalles, la Croix processionnelle ayant été portée derrière le maître autel et n'a plus paru de toute la cérémonie, le dit seigneur évêque à qui Monseigneur de Bécave grand archidiacre et de Belvèze chanoine, ont donné la main, s'étant levé et ayant baisé le dit grand autel,il aurait été conduit par Mrs les Dignités et chanoines, chacun selon son rang, à son petit trône épiscopal qui est dans le choeur du coté de l'Epitre où il se serait assis et où les dits Dignités et chanoines l'auraient très-humblement salué et lui auraient


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promis de lui rendre en sa dite qualité d'évêque tous leurs devoirs, respect et obéissance, après quoi le dit seigneur évêque marchant le premier a été conduit par Mr de Bécave, grand archidiacre et de Belvèze chanoine et accompagné de Mrs les Dignités et chanoines à la porte principale du palais épiscopal, de laquelle le dit sieur de Bécave grand archidiacre lui aurait présenté le marteau et dont il aurait frappé trois coups, et à l'instant la porte ayant été ouverte, ils l'auraient introduit dans le dit palais épiscopal, d'où étant tous sortis dans le même ordre, ils l'auraient de nouveau conduit dans le choeur et l'auraient fait asseoir dans la première stalle à main droite en entrant dans le choeur, et moyennant tout ce dessus le dit seigneur évêque aurait été mis en la réelle actuelle et corporelle possession du dit évêché circonstances et dépendances d'icelluy. Le dit seigneur évêque ayant été de nouveau conduit au petit trône épiscopal par Mrs de Bécave, grand archidiacre et de Belvèze chanoine, ils se seraient placés à coté de lui, il a entonné le Te Deum qui a été chanté par la musique avec symphonie et de suite Mrs les autres Dignités et chanoines qui avaient accompagné le dit seigneur évêque à son trône lui ont fait une révérence et sont allés prendre leur place ; le le Deum étant fini le dit seigneur évêque aurait donné la bénédiction pontificale au peuple et de suite il est parti le premier ayant à ses cotés les dits sieurs de Bécave grand archidiacre et de Belvèze chanoine et suivi des autres Mrs les Dignités et chanoines pour se rendre dans la salle de l'évêché au son de toutes les cloches et aux acclamations du peuple, où le dit seigneur évêque étant arrivé avec les dits sieurs Dignités et chanoines et accompagné des Mrr ci-dessus nommés, de beaucoup de noblesse et des plus notables habitants de la Ville de tout ordre et de tout état qui lui ont présenté leurs respects et leurs hommages, ils ont tous signé le présent acte que le dit seigneur évêque et Mrs du Chapitre m'ont requis de retenir comme de passé et lu dans le dit palais épiscopal en présences des sus nommés qui ont été présents à tout ce dessus ainsi que moi dit notaire et secrétaire du dit Chapitre soussignés après le dit seigneur évêque, les dits sieurs Dignités et chanoines et nous.


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Signé à l'original : Louis-Marie de Nicolay, évêque de Cahors ; L. de Bécave, grand archidiacre ; Belvèze; de Palhasse de Salgues; Bonnassies; de Gaston; d'Olive, chanoine honoraire ; de Gaulejac, vicaire général chanoine honoraire ; Beaufort,chanoine honoraire; Trouy, archiprêtre ; Dellac, curé de la Daurade; Gras, curé de Saint-Urcisse ; Laroche-Lambert,curé des Soubirous ; Rulié, curé de St-Pierre ; Aboulène, curé de Saint-Barlhélemy ; Por.tié, curé de St-Géry ; Gras, curé de St-Maurice ; Dellard, curé de St-Laurent ; le marquis de Lavalette Parizot, maire ; Amadieu, juge et l,r consul ; Ramel, consul ; Mailhe, consul ; Delvincourt, consul ; DurfortBoissière ; Guiscard.; Belcastel de Montlezun ; Lacoste ; Des. plas, capitaine d'infanterie ; Lalour de Castanède ; Solminiac ; le ch. de Mauroux, capitaine d'infanterie ; Maille, capitaine d'infanterie ; Laplace, ancien professeur royal ; Lapeyrier ; Molles ; d'Hillebart ; Falret, prieur de Saux ; jMostolac-Lafage, chevalier de Saint-Louis ; Barthes, cadet ; Cabessut ; Compans, assistant du séminaire ; Valet, f odiste ; Conduché, cadet ; Olivier, notaire royal et apostolique.

(1) Guilhaunu-Louis-François de Castanède fils de Guilhaume de Castanède et de Jeanne de Lamothe Marcilhac, émigra le 30 octobre 1791 ; fit la campagne de 1792 à l'armée des frères du Roi Louis XVI comme agrégé aux Gardes du Corps ; fit ensuite partie de l'infanterie noble, Cle n° 4 du corps de Condé ; blessé le 1 3 août 1 796 au combat de Kamlach il reçut un coup de fusil à l'épaule dont il demeura estropié. Il revint à Boyé, commune de Flaugnac sous la Restauration et fut créé chevalier de St-Louis par lettres du 9 mai 1816.


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DESPLAS

Sieurs de Planis de Boissorn, de Lagrave Delbos, de Lafage, d'Agranet, Ladevéze, du Carriol, de St-Clément, etc.

Famille de noblesse ancienne qu'une tradition de famille au XVIIe rattachait aux De Plas de Curemonte en Limousin.

Les Desplas sont connus à Peyrille des la fin du XIVe, à Béduer à la fin du XVe, à Cahors à la fin du XVIe. La branche de Cahors existe encore en Anjou ; la branche de Béduer existe à Béduer ; celle de Peyrilles se perpétue à Peyrilles. Les branches de Béduer et de Cahors ont été étudiées en 1910 dans une revue de diocèse de Chartres ; nous allons compléter ce travail en publiant la généalogie de la 1re branche, celle de Peyrilles. Nous refondrons ensuite, et enrichirons de nombreux détails la généalogie de la branche de Cahors. Nous regrettons de ne pouvoir presque rien ajouter à la branche de Béduer.

Les détails sont fournis par les archives très délabrées de M. Desplas de Peyrilles, par les minutes assez riches de M. Brugalières de St-Denis, par les reg. par. de Peyrilles (1750-1789) de Cahors (XVIIe-XVIIIe) du Montat (XVIIIe) et par divers autres dépots.

En 1397 noble Jean Desplas de Peyrilles, donne quitance de 20 livres petit tournois à lui payées par noble Delphine de Laymerigua veuve de noble Amalvin de Félenon en déduction de la dot constituée aud. Desplas pour son mariage avec Finelle de Guerre, petite fille de Delphine et fille de noble Comtor de Guerre du lieu de Montamel ; près : Geraud Del Torriel et Bernard de Busirelho du château de Castelnau de Bretenoux. Denis Mejan notaire de Figeac. La présence d'un témoin de Castelnau ferait bien croire que J. Desplas venait du haut Quercy.

En 1459, (répertoire de M. Daynac à Gourdon), noble Marqués Desplas ou de Planis rend hommage au seigneur de Peyrilles et reçoit lui même une reconnaissance du sieur Delclaux pour une terre, sise à Lamadelaine, p. de Peyrilles.

En 1501, noble Jean de Planis, qualifié de fils de noble Marques, au


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nom de noble Jean de Planis de Béduer, baille en ferme les biens de Peyrilles que ce dernier avait encore à Peyrilles (F. 387).

En 1495, nobles Elie, Guidon et Jean de Planis de Peyrilles, frères nommés dans une reconnaissance (Daynac).

Ce noble Guidon, marié à Catherine Traversié, habitant le moulin des Plas dit de Guido Planis. Catherine Traversié reçoit de Pierre Traversié de Villefranche, son frère, en 1504, une robe achetée à un marchand de Puilévêque, (arch. Brugalières).

En 1530, noble et Me André Desplas, prêtre demandeur en excès contre Jean de Vervaix, seigneur de Peyrilles (Daynac).

En 1537, noble M. Desplas, marié à Noble Antoinette de Colom, très probablement des Colom verriers de Laverrière de Lavarcantiere, connus a Lavercantière depuis 1450. (Rousselly, notaire de Peyrilles).

En 1551, noble Pierre Desplas, dont la fille mariée vers 1550, au sieur Pons Terrié Desplas, qui habita le moulin des Plas bas ; En 1600, François Terrié Desplas, retire par droit de retrait limager un pred aliéné par son proche parent noble Pierre Desplas, au grand-père de Pons Feydel (Dumas), il se qualifie en 1633 de cosgr. de Lasbouffies, qu'il dénombre au roi en 1639, signant Desplas tout court (B 414).

Ier degré. — Noble Marquez Desplas qui hommage au seigneur de Peyrilles en 1459 père de Jean et des suivants :

1° Noble Jean Desplas fils de Marquez, qui vit en 1504 et reçoit procuration de son consin Desplas alias Malpla de Béduer pour affermer les biens que ce dernier avait conservés à Peyrilles, à Guillaume Desplas alias Saumelet du repaire Desplas (de Manso notaire, F. 387).

2° Noble Helie Desplas, mentionné avec Jean Desplas et Guinot ses 2 frères en 1495 (archives Brugalières).

3° Noble Guinot Desplas qui continue la postérité.

4° Noble André Desplas, prêtre, nommé dans le contrat de mariage de sa nièce Jeanne Desplas fille de Gui.

2e degré. — Noble Gui, ou Guinot Desplas du moulin Desplas, mentionné avec ses 2 frères Jean et Helie en 1495 ; il avait épousé (voir plus haut) Catherine Traversier, d'une famille de Ferriers qui eut des branches établie, au XVIe, à Lherm et à St-Denis-Catus ; père des suivants :

1° Noble Jean qui suit.

2° Noble Jeanne Desplas, mariée en 1516, contrat passé devant Fyelbard, notaire de Mechmont (archives de la Pannonie), à Antoine


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de Bertrand, fils d'Arnaud de la paroisse d'Uzech des Ouïes ; dot, 4 robes etc. et 50 liv. dont 11 liv. sont acquittées en 1517 par noble André Desplas, prêtre et oncle de la mariée (Fuelbard notaire).

3e degré. — Noble Jean Desplas, fils de Jean et nommé dans le contrat de mariage de sa soeur Jeanne, père présumé du suivant :

4e degré. — Noble François Desplas, habitant le repaire Desplas p. de Peyrilles ; il hommage en 1551 ses divers biens, à noble Ramond de Gontaud et Dlle Anne d'Auriole mariés, sgr et dame de Cabrerets, Roussillon et Peyrilles. (Rousselly), il teste en 1573. (Avezou notaire de Peyrilles) ; il prêtait en 1550, à noble Jacques de Durfort sgr de Boissières (De Garritgia) ; il faut, sans doute l'édentifier avec noble N. Desplas, marié en 1537 avec Dlle Antoinette de Colom, des verriers de La Vercantière, acte communiqué à la cours des aides en 1650 (archives de M« Desplas de Peyrilles), il est le père présumé d'autre François qui suit .

5« degré. — Noble François Desplas, qui hommage ce qui lui reste de biens, nobles en 1601 à noble Jean de Gontaud d'Auriole, à genoux les mains jointes mise ses mains aud. sgr de Gontaud, la teste descouverte en lui payant ung paire de guants, (Henry), notaire, arch. (Desplas), père de :

1° Noble Jean Desplas sieur de Lafage qui suit :

2° Noble Claude Desplas sieur de Lagrave, marié des 1613 à Uzech, avec Dlle Jeanne Dauriac, parente du baron d'Uzech, fille de feu Mr Durand et de Dlle Susanne de Ferran, celle-ci remariée à Me J. Pouderoux, procureur de Cahors. Il assiste en 1598 au mariage de noble Jean de Lavalette Parisot avec noble Isabeau de Bridier, fille de Gabrielle de Gontaud; il était rentier en 1607 de noble Jean de Verières (Salgues) ; il est séquestre en 1618 de la sgrie de Salvezou (Dumas) : il teste d'abord en 1615 (Dumas) : donne 150 fr. à ses enfants Jean et Pierre Desplas, et institue héritière sa femme ; celle ci teste en 1621 et donne 300 fr. à ses enfants Jean Pierre et Pierre Desplas (Dumas) ; noble Claude teste encore et meurt de la peste en 1628 ; il avait transigé avec son frère pour tous droits à 240 fr. livres (Dieuayde notaire); sa femme se remarie en décembre 1629 a Me P. Carbonel, chirurgien d'Uzech, dont elle est veuve en 1657, enfants :

1° Noble Jean (Pierre) Desplas, nommé au test de 1615,1621 et 1628,


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poursuivi en 1643 par le sgr d'Uzech et relaxé sur les humbles prières de la mère ; décédé sans alliance avant 1659.

2° Noble Pierre Desplas, nommé en 1615 et 1521, décédé avant 1628.

3° Dlle Susanne Desplas, mariée à Uzech avec Me Béral Desplas, notaire avant 1620, (Salgues notaire.)

Celui ci teste malade de la peste en 1628. Fonde un obit de 10 liv. donne 500 liv. à Marguerite et Louise ses filles et ses biens à sa mère Louise Galet, à sa femme il lègue l'habitation dans sa maison vivant viduellement, la suppliant si elle se remarie d'épouser un catholiqut et en ce cas il lui donne 100 liv., si non il la prive de tout legs, il vivait en 1640 dont :

A Dlle Louise, nommée en 1628.

B Dlle Marguerite Dumas, mariée en 1640(Salgues) avec Mr Jacques Corberan marchand d'Uzech fils de feu Me Etienne notaire de St-Germain, présents : Me Pierre Corberan notaire son frère aine, noble Aymeric François Dugarric baron d'Uzech, nobles Jean et Jean Desplas sieurs de Lafage et d'Agranet, noble Jacques de Pons sieur de Pechbru (Salgues).

7e degré.— Noble Jean Desplas sieur de Lafage marié en 1596 (Fournie) à Dlle Marguerite de Balaguier de Condat fille de feu noble Barthélémy et de Dlle Marguerite de Cornély ; celle ci à Figeac en 1599 fonde de procuration son beau fils le sieur de Lafage pour transiger avec noble François de Balaguier son fils (Montai). En 1616 (arc. de Mr Desplas de Peyrilles), il rend son hommage à noble Jean de Pugnet sieur de Peyrilles; en 1640 il est parrain aux Carrières de Peyrilles de sa petite fille Béraude Desplas ; il avait testé avec sa femme en 1637 demandant à être enterré selon le rite de la religion prétendue réformée; ils donnent à Marie Desplas 5 liv., à J. Avezou leur petit fils et fils de feu Jeanne Desplas 500 liv., à noble Isaac Desplas sieur de Planis 300 liv et instituent héritier noble Jean Desplas sieur d'Agranet qui rendra les biens à Jean son fils aine,ils lèguent aussi 300 liv. à Isaac et Antoine fils du sieur d'Agranet et à Dlles Anne Marguerite et Isabeau Desplas filles aussi du sieur d'Agranet, présent Antoine Terrié Desplas (Henry) dont :

1° Noble Jean Desplas qui suit :

2° Noble Isaac Desplas sieur de Planis qui suivra :

3° Dlle Marie Desplas nommée au test, de 1637 mariée au sieur Pierre Cassagnes d'Orniac (B...). En 1667 leur fille Dlle Catherine de


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Cassagnes épouse Mr Ramond Meiecase de Sénallac fils de feu Pierre Bourgeois et Dlle Marguerite de Lavergne (B 197), présents : M'Pierre Cassagnes, greffier de St-Sulpice frère, Antoine Cassagnes bourgeois de Brengues et Me Pierre Cassagnes curé d'Uzech.

4" Dlle Jeanne Desplas mariée au sieur Avezou de Peyrilles décédée avant 1637 et mère de J. Avezou.

8e degré. — 30 Noble Jean Desplas sieur d'Agranet habitant comme les précédents au repaire des Plas Haut ; légataire en 1625 de noble dame Catherine de Foix sgresse de Montcléra; marié à Dlle Catherine de Cabanes de Cabrerets dont :

1° Noble Jean Desplas héritier institué après son père de sieur de Lafage et de lé Dlle de Balaguier en 1637.

2° Noble Isaac Desplas sieur de Lafage, nommé au test, de 1637 il suit :

3° Dlle Marguerite Desplas nommée au test, de 1637.

4° Dlle Marie Desplas (it.), mariée après le décès du sieur d'Agranet avec Pierre Salgues fils de Pierre et de Catherine de Lafabrie d'Orniac par contrat passé au repaire de Plas Haut (B 197) présent : Noble Isaac Desplas sieur de Lafage fils de feu J.

5° Dlle Anne Desplas mariée en 1688 au sieur Soulages docteur médecin de Mongesty, présents : noble David Desplas sieur Delbos frère (Lapierre).

En 1690 elle est marraine à Montgesty avec Me Joseph Caviole avocat de Joseph Sagnes (reg.) ; elle décéda à Montgesty en 1754, âgée de 90 ans (reg.), après avoir donné tous ses biens à Messire P. Desplas prieur de Montgesty (de la branche de Cahors).

6° Noble Antoine Desplas nommé au test, de 1637.

7° Noble David Desplas sieur Delbos nommé en 1637 ; il assiste en 1667 au mariage de son frère Isaac et de sa soeur Marie (B 197) ; il était agent en 1664 de Mr de Cabrerets et faisait dresser l'inventaire du château de Peyrilles, écurie, cave, degrés, cuisine, courroir, antichambre, chambre de Monsieur, chambre jaune, salle, chambre haute, (Avezou).

9e degré. — Noble Isaac Desplas sieur de Lafage, marié des 1667 à Dlle Jeanne de Corberan. En 1668, le sieur de Lafage demande au curé de Peyrilles de lui laisser ensevelir sa petite Françoise dans l'église de Peyrilles et dans les anciens tombeaux dont il est possesseur depuis un temps immémorial où sont ensevelis ceux de sa maison vrais


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catholiques, (Avezou) ; il teste en 1669 (Dumas) : se recommande à la Ste-Vierge (signe de religion catholique), choisit son tombeau dans l'église de Peyrilles, lègue ses filles Dlle Catherine et Anne Desplas et laisse ses biens à sa femme et à Dlle de Cabanes sa mère (Avezou), celle ci, veuve en 1690, devait 180 liv. au sieur J. Parent de Catus, (Avezou), dont :

10e degré.

1° Dlle Françoise décèdée en 1677. 2° Dlle Catherine Desplas légataire de son père en 1969 , mariée en 1680 et à Messire Barthélémy de Fontanges sgr de Laborie, St-Germain, fils de feu noble Gabriel Aldon et Anne de Mirandol ; celui ci reçoit en 1682, de sa belle mère Jeanne de Corberan, partie de la dot de Catherine (Laborie) ; en 1690, faute par Mr Barthélémy de Fontanges d'avoir fait hommage au sgr de Cabrerets, il voit ses biens saisis (Avezou).

3° Dlle Anne Desplas, nommée en 1669.

BRANCHE DES CARRIERES

8e degré. — Noble Isaac Desplas sieur de Planis 2e fils de noble Jean, sieur de Lafage et de Dlle de Balaguier ; servit d'abord le roi, puis habita en 1633 le repaire de Fage p, de Peyrilles (Salgues) et encore le repaire de Panelot appartenant à noble Ramond Delom sieur de Vaylats en 1633 (Dumas) ; il fut légataire en 1625 de la dame de Montcléra laquelle avait fait héritier led. sieur Delom ; il épousa en face de l'église cathlolique en 1639 (Laborie) Dlle Marguerite de Blaty du village des Carrières, fille de feu M° Géraud de Blaty licencié et de noble Beraude de Thémines petite fille du maréchal de Thémines Mr Desplas de Peyrilles conserve une lettre destinée au roi écrite en 1620 à Auray par le maréchal de Thémines blessé à mort, recommandant à Louis XIII le sort de sa famille Isaac Desplas apportait aux Carrières 2.000 liv. gagnés par lui au service du roi. Sa femme hérita en 1642 de sa soeur Dlle Catherine de Blaty. En 1650 pour éviter la charge d'exacteur de la communauté noble Isaac Desplas sieur de Planis prouva devant la cour des aides de Montauban (arch.deM. D.)que, pour ètre entré gendre dans une famille bourgeoise, il n'en appartenait pas moins à la noblesse. Sa requête malheureusement à moitié déchirée et illisible mentionne divers actes produits plus haut. Le sieur de Planis testa et mourut en 1657. Il demande à être enterré dans l'église de Peyrilles, lègue 100 liv. à Jean, Géraud, Marie, Marguerite, autre Marguerite,


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Anne autre Anne et Catherine Desplas ses enfants et laisse l'héritage à sa femme (Laborie). Celleci testa aussi en 1657 puis de nouveau en 1689 léguant 1.800 liv. à ses filles Marie Marguerite, plus jeune à Anne et autre Anne Desplas ses filles, test, révoqué en 1694; elle avait également testé en 1688 en faveur de ses 6 enfants vivants Marguerite mariée à Charles Estival ; Marie femme de Mr Delort, Marguerite, Annette, autre Annette qui demeurait avec la Dlle du Cayrou, au Bas et Jean Desplas, marié à Dlle de Baldes'(brouillon).

Elle consigne en 1674 à noble François de Vervaix sgr. de Peyrilles la rente qu'elle lui doit (Laborie).

Elle vivait en 1696 dont :

1° Noble Jean Desplas qui suit :

2° Noble Béraude Desplas née en mai 1640 p : noble Jean Desplas grand oncle m ; Dlle Béraude de Thémines grand mère (livre de raison, arch. Desplas).

3° Dlle Marguerite 1642 p : Mr Durand Blaty des Landes m : Dlle Marguerite de Balaguier grand mère (livre de raison) ; elle épouse 1°, malgré sa mère Me Teyssedre juge de Toule p, de Thédirac et 2e en 1699 Me J. Giguet de Souillac fils de Guillaume conseiller et lieutenant de robe courte et de Dlle M. de Larnaudie, dot 2.000 liv. dont 700 fr. reste de 1694 liv. à payer par noble Jean Desplas, sieur de Planis son frère, présents : ce dernier, Me Martin Puyjalon curé de St-Michel, Me Bernard Verninac juge de Souillac, Guillaume Puyjalon juge de StMichel etc. (Laborie).

4° Dlle Catherine née en 1641 (it) p : Me Béral Dumas notaire m : Dlle Catherine de Blaty tante ; légataire de celle ci des 1642 ; assignée avec sa mère et ses frères Géraud Jean Marguerite et Marguerite à requête de P. Belly bg de Gourdon ; décédée avant sa mère.

5° Dlle Anne 1645 p : noble François de Gontaud comte de Cabrerets et m : Dlle noble Anne de Thémines Dlle de Breugier, tante de la mère; mariée au sieur Antoine Dufranc de Peyrilles fils de J. Dufranc et de Jeanne Chabert. En 1689 ils transigent pour les droits d'Annette avec le sieur Planis, moyennant 1.320 livres (Laborie)

6° Dlle Marguerite 1670 p : Me Jacques Corberan d'Uzech m : Dlle Marguerite de Blaty. tante et femme de noble Pierre Larode de Cascabel; mariée en 1682, à Charles Estival fils de Pierre procureur d'office de Peyrilles et de feue Jeanne de Lacoste, dot : le domaine de Saliac (Laborie) ; légataire de la mère en 1688.


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7e Autre Annette 1653 p : Pierre Larode de Cascabel m : noble Anne Desplas nièce du père. Elle vivait en 1694 chez Dlle Anne de Thémines sa grand tante veuve de noble Arnaud de Guiscard sgr de Cayrou, ayant été appelée parcelle ci en 1677 à la fondation qn'elle venait de faire de l'école Chrétienne du Bas ; en 1700 elle est en procès avec Dlles M. Dauliac et Anne de Barriéty, contre le duc d'Estrées, détempteur de l'hérédité de la Dlle du Cayrou et des biens de la susd. fondation (Germain).

8° Noble Géraud Desplas 1656 p : Géraud Blaty m : Dlle Marguerite Desplas soeur ; présent au mariage de Marguerite Desplas et Ch. Estival ; décédé avant le test, de 1688.

9° Dlle Marie, mariée des 1667(6.193) en présence de Jean Desplas son frère au sieur J. Delort de Mespouhé (Freyssinet) fils de Guillaume march. et de Marie Delort son mari reçoit, aux Carrières, de sa bellemère 200 liv. en déduction, présent : noble Géraud Desplas (Laborie) mère de :

A. Pierre Delort, 1678 p : noble Jean Deplas sieur de Planis m : Dlle Jeanne de Lagar (reg. de Freyssinet-le-Gélat).

B. Me J. Delort, marchant en 1704 donataire de sa mère (B 200).

9e degré. — Noble Jean Desplas, sieur de Planis comme son père, né en 1648 p : noble Jean Desplas neveu et filleul du père m : Dlle de Breugier, remplacée par noble Anne de Thémines ; marié en 1688 à Dlle Marie de Baldes fille de Jean sieur de Brugal (du côté de Durave!) et de Dlle Jeanne de Bardin, présent : noble Barthélémy de Fontanges (Laborie).

Il obtient en 1680 qu'on lui rende son droit de banc dans l'église de Peyrilles (Laborie) ; propriétaire en 1685 du moulin de Lavaysse ; maintenu aux privilèges de la noblesse par Lepelletier en 1699, sur des preuves fournies depuis 1550 (F...) en marge même famille que les Desplas de Béduer ; il paye en 1725, 4 liv. de capitation noble (signé, Imberties) ; il teste et meurt en 1737 laissant les biens à sa femme qui répudie l'hérédité en 1740 ; dont :

1° Noble Jean Desplas qui suit :

2° Noble Engelibert Desplas né en 1693 (liv. de raison) décédé en 1773 âgé de 80 ans non marié ; parrain en 1714 de son frère Gilbert ; héritier de son frère Jacques en 17.. ; maintenu avec son père en 1699.

3° Noble Pierre Desplas maintenu en 1699 ; il dut mourir jeune.


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4° Noble Antoine Desplas ; maintenu en 1699 ; cohéritier de son frère Jacques, il demande en 1740,100 liv. à lui léguées par la Dlle d'Aleyrac (?) dont son feu père détenait l'hérédité ; il teste en 1746 (Laborie), fait divers legs à sa mère, à Jean, et Joseph Desplas ses neveux, à Gilbert et Marguerite Desplas ses frère et soeur, et institue héritier noble Jean Desplas son frère.

5° Noble Jacques Desplas ; il était en 1737 au service du roi dans le régiment de Duras; héritier de sa mère ; décédé ab intestat. Ses biens furent partagés en 1749 entre son neveu Jean fils d'autre noble Jean son aine, Gilbert Desplas son frère, Marguerite Desplas sa soeur et Marguerite Vayssières fille, d'autre Marguerite Desplas sa soeur.

6° Noble Marguerite, non mariée déeédée en 1779, âgé de 80 ans (reg) ; elle détint quelque temps l'hérédité de Jacques ; et laissa ses biens à son neveu noble Jean fils d'autre Jean.

7° Autre Marguerite Desplas née en 1714 p : son frère Gilbert m : décédée eh 1771.

8° Autre Marguerite Desplas. En effet, en 1726 Dlle Marguerite Desplas née le 4 février 1689 âgée de 37 ans représente à son père qu'elle a trouvé un parti sortable en la personne de sr Pierre Vayssières et le prie de lui vouloir donner son consentement sa fille en 1749 était Marguerite Vayssières.

10° degré. — Noble Jean Desplas né en 1390 p : Mr J. Delort notaire de Frayssinet son oncle m : Dlle Jeanne de Bardin grand mère ; marié en 1724 à noble Dlle Françoise de Vassal d'Argenton en Agenais, de la célèbre famille des de Vassal du Quercy et du Périgord ; une Vassal d'Argenton entra à la même date chez Mr de Lapierre du Castela, sieur Delclaux à Moussac ; une autre devait entrer vers 1780 chez les de Latour d'Affaure de Labastide du-Vert. Elle teste en 1741 (ins.) choisit son tombeau dans l'église de Peyrilles, lègue à Jean et Joseph ses enfants 500 liv. et institue héritier son mari (Laborie) ; noble Jean Desplas mourut des 1769, dont :

1° Noble Jean qui suit :

2° Noble Joseph Desplas, nommé en 1741 ; demeuré sans alliage.'

3° Autre Jean Desplas, né avant le précédent en 1726 p : noble Jean de Vassal sieur d'Aigueparses en Périgord m : Dlle Marie de Baldes. Albiquiè, curé; décédé en bas age.

4° Noble Gilbert Desplas né en 1729 p : noble Engelibert Desplas


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son oncle m : Dlle Anne Desplas femme du sieur Soulages ; il resta sans alliance.

11e degré.— Noble Jean Desplas sieur de Planis, héritier du père né en 1727 p : le sieur Soulages de Cascabel m : Dlle Anne de Vassal d'Aygueparses ; marié en 1755 (Laborie) à Dlle Anne de Lasfargues fille du sieur Ramond et de Dlle Catherine de Cayla. Les arch. Desplas contiennent les détails de ce qu'il eut à souffrir en 1793 : il fut 13 mois tenu en réclusion avec sa femme, sous le prétexte de l'émigration de son fils ; il reçoit un legs au test, de Dlle Marguerite Desplas sa soeur p) en 1775 (Bargues) ; décédé avant l'an 13. dont :

i° Noble Raimond Desplas qui suit ;

2° Dlle N. Desplas née en 1762 (reg.) p : le sieur Jacques Balde de Duravel m : Dlle Toinette Vayssières ; elle est sans doute la même que Jeanne Desplas épouse du sieur P. Masclou que nous voyons en l'an 12 avec Dlle Anne Lasfargues et Raimond Desplas assister au test, de leur proche parent Me Lasfargues vieux prieur de Peyrilles (arch. Desplas).

3° Dlle Antoinette Desplas née en 1766 ; mariée en 1787 à J. Jardel du village de Labio près Gourdon, fils de feu J. et de Catherine Lacoste prés : noble Raimond Desplas son frère, M. J. Bouygues, bourgeois de Gourdon. Guillaume Malbec, juge de St-Julien; remariée 2°en 1825, a J. Garrigou de Labio.

12e degré. — Noble Raimond Desplas né en décembre 1755 p: sieur Raimond Lasfargues, m : Dlle Toinette de Vayssières ; rayé en l'an 5 de la liste des émigrés ; marié en l'an 11 après la mort du père, à Dlle Jeanne Deval de Dôme, fille de feu Léonard et de Jeanne d'Auricoste, dot : 4300 fr. ; décédèe vers 1806. Remarié 2° en 1809 à Dlle Marguerite d'Aube, fille d'un papetier de Vers, Mr Jacques d'Aube et de Dlle Elisabeth Baudy (Labié). En 1826 Mr Raimond Desplas obtint un brevet de capacité et fut maître d'école à Peyrilles ; La même année dans une pétition au roi il expose qu'il est d'ancienne race, qu'il a souffert de la révolution, il demande une place gratuite au lycée de Cahors pour un de ses enfants qui est boiteux, dont :

(1er lit : 1° Jean Baptiste Desplas décédé en 1807 âgè de 3 ans.

2e lit : 2° Mr J. Jacques Desplas qui suit :

3° Mr J. B. Desplas, marié à Peyrilles ; entrepreneur en 1842 de la maison de Mr Laborie à Dégagnazès ; décédé sans enfants ; laissant ses biens au frère aîné.


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4° Mr J. Louis Desplas entré gendre à La Brugue chez le sieur Hébrail ; dont :

2 filles l'une mariée à la maison, avec le sieur Brunet ; l'autre mariée avec le sieur Fournie.

5° Dlle Rosalie Desplas mariée à La Poujade de Concorès avec le sieur Delbos.

6° Dlle Joséphine Desplas, mariée au sieur Cazélou de Dégagnazès, décédée sans enfants.

13e degré. — Mr Jean Jacques Desplas des Carrières menuisier, marié dès 1845 à Perrette Bertrand de Concorès, dont :

1° Mr Jean Desplas qui suit :

2° MMr Marc François, Desplas, né en 1851, marié à Concorès et père de :

A. Adrien Desplas né en 1882, propriétaire à Concorès. (1912).

3° Mr Léon Desplas né en 1860 établi à Paris; il avait pris sa femme de Soucirac, décédé en laissant un garçon et une fille.

4° Marguerite Desplas décédée à l'âge de 13 ans.

5° Fernande Desplas décédée à 8 ans.

14e degré. — Mr Jean Laurent Desplas né en 1846, propriétaire aux Carrières, âgé de 54 ans, en 1911 ; marié à Marie Blaty, du village voisin de Montcuq ; décédée en 1910 : J. Desplas habite l'ancienne maison où était entré comme gendre noble Isaac Desplas en 1639 ; ses enfants :

15e degré. — Mr Lèopold Desplas né en 1887, soldat à Toulouse en 1910.

1° Elodie Desplas, mariée au sieur Philémon Brouqui demeurant en Périgord.

(A suivre) A. FOISSAC


PROCES-VERBAUX DES SÉANCES

DE LA SOCIÉTÉ DES ÉTUDES DU LOT

PENDANT LE 4e TRIMESTRE DE 1911

Séance du 9 octobre 1911 Présidence de M. le chanoine Albe, président semestriel

Assistaient à la séance MM. Combes, Crudy, Daymard, Gary, Girma, Grangié, Martin, Paumes, Rames, Saint-Eloi, Soulages, Tourné, Viguié.

Avant de passer à l'ordre du jour, la Société décide que la visite qu'elle a résolu de faire à Figeac aura lieu le jeudi 19 octobre courant.

M. le Secrétaire général dépose le programme du XLe Congrès des Sociétés savantes, qui se tiendra à la Sorbonne en avril 1912, et les publications reçues.

Il signale dans la Quinzaine du Quercy, n° du 1er août 1911, le récit d'une visite faite par les « Amis du vieux Figeac » au menhir de Rélinac, au dolmen de la Pierre-Martine, au château et à l'église d'Assier, le dimanche 9 juillet 1911 — et le commencement d'une étude sur le château d'Assier, par E. Trutat.

Le Bulletin Archéologique deTarn-et-Garonne a publié, durant l'année 1910, plusieurs travaux qui intéressent notre Quercy à divers titres :

1e Le récit, par M. Lagrèze-Fossat, des troubles, d'ailleurs assez bénins, qui eurent lieu à Moissac, le 13 mars 1793, à propos du recrutement de 300.000 hommes, ordonné par la Convention. Quatre jeunes Moissagais, accusés d'en avoir été les instigateurs, furent déférés au tribunal criminel du Lot, jugés et exécutés à Cahors le 10 avril 1793.

2° L'analyse, par M. l'abbé Galabert, de deux enquêtes sur les droits de justice réclamés par le seigneur d'Espanel en 1505.

3° Du même auteur, le résumé d'une autre enquête faite en 1580 contre un soudard huguenot d'Espanel, accusé de meurtre et de vol, et où il est question de pillages, « roberies » et assassinats commis à Saint-Céré, aux environs de Gramat, à Figeac, à Saint-Benoit, près Castelnau-Montratier.

4° Du même encore, deux lettres d'Honoré de Savoie, gouverneur de Guyenne, dont l'une datée de Cahors, le 8 février 1573, ordonnant à Jean-François d'Orgueil de Gauléjac, seigneur d'Espanel, de faire des le-


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vées de soldats pour défendre « le pays d'Espanel et de Montfermier et garder le château de Lastours, près Réalville, contre les protestants ».

5° Notes de M. Latouche sur la formation du département de Tarn-etGaronne (1808 -1809).

6° Une note de M. le chanoine Pottier intitulée : Vezin et Reyniès.

7° Dans la revue de l'Agenais (juillet 1910) une étude de M.Marboutin, sur le château de Castelnoubel, près d'Agen:« Son seigneur, Alain de Durfort, « se maria, en 1535, avec Françoise de Montai, d'une très ancienne « famille du Quercy. repuis le commencement du XVIe siècle, le château « de Montai, berceau de la nouvelle châtelaine, s'était embelli et paré de « ces sculptures fameuses, dont on connait les curieuses aventures. « Françoise de Montai avait, sans doute, reçu de ses père et mère, le « goût des habitations somptueuses et commodes. C'est elle probable« ment, qui poussa son mari à transformer leurs divers châteaux. De « fait, au lendemain de leur mariage, ils se mettent à l'oeuvre. Lafox

« change totalement d'aspect et un peu partout s'étale le chiffre

« d'Alain de Durfort et de Françoise de Montai à Castelnoubet ; sur

« une clef de voûte du cloître, en face de l'entrée, nous voyons les armoi« ries de la famille de Montai, trois coquilles posées 2 et 1, et, sur la clef de « voûte voisine, celles de la famille de Durfort, aux trois lions rampant.

Ouvrages offerts à la Société : La Monnaie de Figeac, par MM. L. Cavalié et Dieudonné ; Cahors, Vieilles pierres, Vieux souvenir.', par M. le lieutenant Tourné ; Curiosités littéraires : Le sermon prononcé le jour de la Magdelaine, avec préface et notes, par M. A. Crudy... La Société adresse aux auteurs ses meilleurs remerciements.

A propos d'un curienx procès qui eut lieu, vers le milieu du XVIIe siècle, entre les Consuls de Saint-Céré et les régents révoqués du Collège municipal, M. l'abbé Viguié donne quelques détails sur l'organisation de l'Instruction publique dans cette ville, sous l'Ancien Régime. On y comptait cinq écoles : une école de théologip, tenue par les Pères Recollets, une école secondaire dont les élèves étaient « mis jusqu'en Rhétorique », une école primaire de garçons, une école primaire gratuite de filles, dirigée par les Mirepoises et une autre école pour les filles de la bourgeoisie et de la noblesse, tenue par les Visitardines. Le collège, comprenant l'école secondaire et l'école primaire de garçons, était dirigé par des « Régents » tantôt ecclésiastiques et tantôt laïques, choisis par les Consuls et révocables à leur gré. Ces Régents recevaient de la ville, pour tout salaire, une somme de 150 livres. Le Collège de Saint-Céré, fondé au plus tard vers la fin du XVIe siècle, fut fermé par la Révolution,


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La plupart de ces renseignements ont été tirés du Livre de la Boucle. M. Viguiéfait remarquer l'intérêt qu'offrirait la publication de ce Registre pour l'histoire de la Vie municipale de Saint-Céré aux XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles. On lui répond que la Société des Etudes a dû suspendre, faute de fonds, la publication commencée des Registres municipaux de Cahors. Elle la reprendrait volontiers si la Ville, le Département ou l'Etat voulaient lui allouer les crédits nécessaires.

M. Saint-Marty, présenté par MM. Paumes et Girma, demande à faire partie de la Société à titre de membre résidant. Il sera statué sur cette demande à la prochaine séance.

M. Paumes propose à la Société, qui accepte, de demander le classement parmi les monuments historiques du Lot, de la chapelle N. D. de l'Ile, à Luzech, et de la tour de l'église Saint-Barthélemy de Cahors.

M. Daymaid signale l'état de délabrement dans lequel se trouve la tour du mur d'enceinte située entre la porte Saint-Michel et la Poudrière. Celte tour est classée comme monument historique avec l'ensemble des remparts. Quelques travaux de consolidation seraient nécessaires ; faute de quoi, elle risque de s'écrouler à bref délai.

Séance du 23 octobre 1911 Présidence de M. le chanoine Albe, président semestriel

M. le président fait part à la Société du décès d'un de nos confrères, M. Brugalières, notaire et conseiller d'arrondissement à LabastideMurat. La Société le prie d'offrir à Mme Brugalières et à sa famille l'hommage de ses condoléances.

M. le Secrétaire général dépose les publications reçues et annonce que la Société des Eludes du Comminges, du Nébouzan et des Quatre-Vallées , à Saint-Gaudens (Haute-Garonne), accepte d'échanger son bulletin contre le nôtre.

Le Syndicat d'initiative du Lot offre à la Société deux exemplaires de la nouvelle affiche illustrée qu'il vient de faire exécuter et qui représente quelques-unes des curiosités archéologiques de l'arrondissement. Cette affiche est l'oeuvre de M. Paul Bories, architecte diplômé à Figeac. la Société remercie le Syndicat d'initiative.

M. le Président signale dans la Revue du Touring-Club, n° d'août, un intéressant article de notre confrère M. Viré, intitulé : L'Agonie d'une Vallée. Il s'agit de la vallée de l'Ouysse, très boisée et très peuplée au moyen-âge, et qui se transforme peu à peu en désert.


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Le Conseil général a voté une subvention de 100 francs à la Société des Etudes. La Société lui adresse ses remerciements.

M. Paumes signale l'état de délabrement dans lequel se trouve la niche gothique placée à l'extrémité sud du pont Louis-Philippe. Cette niche, bâtie sur le modèle de celles qui ornent la cour de la gare de Charing - Cross, à Londres, et qui renferment les statues des reines d'Angleterre, abrite elle aussi une statue de reine, puisque le célèbre Pradier, qui la sculpta, a prêté à la Vierge qu'elle est censée représenter les traits de la reine Amélie, femme de Louis-Philippe.

Cet édicule et l'oeuvre du grand sculpteur pour laquelle il a été construit, donnent à notre pont un cachet artistique qui lui manque totalement par ailleurs et mériteraient, à ce titre, d'être réparés et conservés par le département et par la ville.

La Société décide qu'une démarche sera faite dans ce sens auprès des autorités compétentes.

M. Saint-Marty, instituteur public à l'école de la rue du Lycée, présenté à la dernière séance, est élu membre résidant.

M. Louis Gineste, pharmacien à Saint-Céré, demande à faire partie de la Société à titre de membre correspondant. Il est présenté par MM. Albe et Girma. Il sera statué sur son admission à la prochaine séance.

M. Combes continue la lecture de ses analyses des registres municipaux de la commune de Cahors pendant la Révolution.

A propos de la cherté du sucre, M. l'abbé Viguié fait connaître que le pape Jean XXII, notre compatriote, achetait à Marseille le sucre dont il avait besoin et le payait à raison de cinq florins d'or les vingt livres, soit cinquante francs de notre monnaie actuelle.

M. Albe Confirme ce renseignement et ajoute que dans les comptes du pape quercynois qu'il a soigneusement compulsés il est souvent fait mention du sucre qu'on désigne, presque toujours, sous le nom de succara cafoei. Le café, qu'on prétend n'avoir été introduit en France qu'au XVIe siècle, aurait-il été connu et en usage à la Cour des Papes d'Avignon au XIVe siècle ?

M. le président donne lecture de divers documents.

1° Une supplique adressée par les habitants de la paroisse SaintUrcisse, de Cahors, au Maréchal duc de Mouchy, commandant en chef de la Province de Guyenne, contre M. Gras, leur curé, à propos de la nomination des marguilliers. Cette supplique porte la signature des principaux notables, au nombre de plus de trente. (Papiers Valat)


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2° Une harangue « faite » par M. Prunières, bourgeois et syndic de la confrérie des Pénitents-Blancs de Gourdon, à Monsieur de Marzis, curé de Saint-Pierre, que Mgr Christophe de Beaumont, archevêque de Paris, avait prié de le représenter à la bénédiction de la cloche des RR. PP. Cordeliers. Ce document, écrit dans le style amphigourique du temps, nous apprend que Christophe de Beaumont, né au château de La Roque-Beynac, en Sarladais, était prieur de la confrérie des Pénitents-Blancs de Gourdon. Il avait fait une partie de ses études au Collège Royal de Cahors.

3° Un rapport du maire de Bagat relatant le pillage et l'incendie du château de Folmont, le 20 décembre 1790, par « un nombre infini de personnes de diverses communes voisines ... armées de fusils, sabres, épées, haches, faux et autres instruments. » (Archives de Folmont)

Séance du 7 Novembre 1911 Présidence de M. le chanoine Albe, président semestriel

Assistaient à la séance : MM. Albe, Crudy, chanoine Gary, Saint-Eloi, Combes, Tourné, lieutenant de Chomereau, Billières, Daymard, Maratuech, Saint-Marty, Viguié, Paumes.

Le procès-verbal des deux dernières séances est lu et adopté.

M. Gineste, pharmacien à Saint-Céré, est élu membre correspondant.

M. le Secrétaire général dépose les publications reçues. Il signale dans la Revue du Maine (T. 69e, année 1911, premier semestre), deux notes se rapportant à des Maneeaux dont la famille est originaire du Quercy : Monseigneur de Durfort, évêque de Langres, et M. Eugène Cavaignac, fils de l'ancien ministre de la Guerre, qui vient de publier une remarquable Esquisse de l'Histoire de France, où l'on a reconnu « la marque d'un talent de premier ordre ».

M. Paumes communique à la Société un acte du 16 juillet 1789, portant sommation à M. le lieutenant-général de la sénéchausée, de la part d'un certain nombre de membres de la noblesse de Cahors, d'avoir à convoquer une assemblée générale de leur ordre, dans le but de délibérer sur la nécessité de donner à leurs représentants aux EtatsGénéraux les nouveaux pouvoirs « dont ils ont besoin pour conserver leur activité dans lesdits Etats. »

Ce projet de convocation avait été inspiré par les scrupules qu'éprou-


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vèrant les députés de la Noblesse du Quercy, quand il leur fallut obéir à la déclaration du Roi du 23 juin et à son ordonnance du 27. Le premier de ces actes permettait aux députés qui se croyaient gênés par leurs mandats de demander à leur commettants des pouvoirs nouveaux, sans abandonner les délibérations des Etats. Le deuxième acte prescrivait que les députés pouraient s'adresser aux baillis et sénéchaux ou à leurs lieutenants à qui revenait le droit de convoquer les membres de leur ordre. Donc à la date du 16 juillet, à Cahors, les membres de la noblesse n'avaient pas été arrêtés par ce fait que depuis le 9 juillet, la fusion des 3 ordres était complète. Et ceci explique l'effervescence qui produisit les premiers pillages et la Grande Peur du 31 juillet. Le même lit une lettre très touchante écrite à sa femme par le chevalier de Cossonne, apparenté à plusieurs familles Quercynoises, au moment où il se préparait à monter sur l'échafaud, le 16 floréal, (5 mai 1794).

M. le lieutenant de Chomereau de Saint-André donne lecture de quelques extraits de deux lettres écrites de Niort, le 27 mai et le 2 juin 1793, par les commissaires du département des Deux-Sèvres, et où ils racontent la prise de Fontenay par les Vendéens. Les troupes républicaines qui prirent part à cette affaire, les gendarmes en particulier, comptaient de nombreuses unités originaires du Lot. A la suite de cette bataille,les conscrits sans-culottes de Figeac, envoyés à l'armée des Pyrénées, refusèrent de se rendre à destination et demandèrent à être dirigés sur la Vendée.

Il est longuement question dans la seconde de ces lettres, du fameux Biron, général de l'armée républicaine, qui n'est autre que le duc de Biron et Lauzun, seigneur de Roussillon, de Cabrerets et autres lieux, un des trois députés de la Noblesse du Quercy aux Etats-Généraux de 1789.

M. Albe lit une lettre de M. de Foulhiac de Mordesson à la Municipalité de Gramat, datée du 5 août 1789, et la réponse qui y fut faite, le 11 août suivant, par MM. Gardarens de Montignac, maire, Méjecaze et Lafon, consuls de Gramat. Ces deux documents nous donnent des détails très intéressants sur « la Grande Peur » que provoque à Cahors, à Gourdon, à Gramat et dans le Haut-Quercy la fausse nouvelle, colportée le même jour dans toute la France, de l'arrivée imminente de huit mille brigands et d'une armée étrangère. Pour s'opposer à celle invasion, les consuls de Gramat prétendent avoir « rassemblé 4.700 hommes en cinq heures prêts à combattre, avec des vivres pour quatre jours. Il n'est point douteux, ajoutent ils, qu'avec le secours qui nous venait du


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Rouergue, de Figeac et sur la route, nous aurions formé une armée de cent cinquante mille hommes !.. Avec le secours de Martel, Saint-Céré et Gourdon, nous avions tout disposé pour notre marche ; les chevaux et chariots étaient prêts, de même qu'un hôpital ambulant. En 3 heures de temps nous eûmes ramassé assez de munitions et fait faire assez de balles et de lingots en plomb pour la distribution. Le tiers de la troupe étoit armé de faux, piques et haches. Cet aspect était réellement formidable. »

L'ennemi attendu ne vint pas. « Ces braves citoyens » en furent pour leur « désir de se battre » et rentrèrent chez eux en assurant leurs chefs « du retour au premier signal. »

Séance du 20 Novembre 1911 Présidence de M. le chanoine Albe, président semestriel

Assistaient à la séance : MM. Bergougnoux, Billières, Combarieu, Combes, Crudy, Daymard, Depeyre, Fourastié, Gary, Maratuech, Paumes, Rames, Saint-Eloy, Saint-Marty, Tourné, Viguié.

M. le président communique à la Société un exemplaire de la revue du Roussillon « Ruscino », qui contient divers détails intéressant le Quercy et le n° du 13 novembre 1911 de l'Albia Christiana, où il est question d'une voie gallo-romaine reliant Béziers à Cahors par Albi.

Il dépose les années 1909, 1910 et les numéros parus en 1911, de la Revue du Comminges.

Il signale dans l'ouvrage de M. R. de Boysson : le Clergé périgourdin pendant la persécution révolutionnaire, le nom de quelques prêtres originaires du diocèse de Cahors et des détails intéressants sur Jean-Louis Penchenat, dernier abbé de Chancelade, né au château Laborie, près St-Germain-de-Bel-Air. Favorable aux idées nouvelles, il présida, en 1789, l'Assemblée du Clergé du Périgord qui nomma les députés ecclésiastiques aux Etats Généraux. En 1790 il fut chassé de son abbaye et alla mourir, quelques jours après, dans sa maison natale.

M. l'abbé Thamié, curé de Montfaucon, présenté par MM. Albe et Foissac, demande à faire partie de la Société en qualité de membre correspondant. Il sera statué sur son admission à la prochaine séance.

M. G. Rougier, directeur du Réformateur, offre à la Société un exemplaire de l'ouvrage qu'il vient de publier sous ce titre : Le Brésil en 1911. La Société remercie M. Rougier.


— 313Son

313Son le prince Albert de Monaco fait don à la Société de trois volumes in - folio, magnifiquement reliés, de la collection de documents sur le Carladais, publiés, sur son ordre, par MM. Gustave Saige et le comte de Dienne. L'un de ces volumes contient le Cartulaire de SaintFlour, publié par M. Boudet. Parmi ces documents il en est beaucoup qui intéressent notre pays à divers titres.

La Société offre à Son Altesse l'expression de sa vive reconnaissance.

M. le Secrétaire général dépose les publications reçues. Il signale dans le Bulletin de la Société agricole du Lot la série des observations météorologiques faites à l'Ecole Normale de garçons de Cahors, sous la direction de M. le professeur Cahier, depuis le mois de juin 1886. Ces observations et le tableau des moyennes météorologiques qui y est joint permettent de se faire une idée précise du caractère climatologique de notre région, particulièrement pendant l'année 1910.

M. Doumazane, négociant à Puybrun, offre à la Société une brique et un fragment de poterie samienne recueillis dans les ruines d'une villa gallo-romaine qu'il mit à jour, il y a quelques années, au sommet d'un coteau qui domine la plaine de la Dordogne. Parmi ces ruines il avait trouvé quelques monnaies en bronze du Haut-Empire et d'autres fragments de poteries sur lesquels se détachaient en relief des rinceaux et de jolies figures d'hommes et d'animaux. Il les offrit aussi à la Société. Ces divers objets et les fouilles qui en amenèrent la découverte furent décrits alors dans un rapport détaillé.

La Société remercie M. Doumazane de son intéressant envoi et le prie de lui communiquer les découvertes qu'il pourrait faire encore.

M. Depeyre signale une magnifique mosaïque gallo-romaine qu'on aperçoit près de Capnié, commune de Flaugnac, dans le lit d'un ruisseau. Il serait facile de l'enlever ou, du moins, d'en prendre un dessin. Une délégation de la Société ira la visiter aux beaux jours.

M. Paumes annonce que la souscription pour le monument à Olivier de Magny est ouverte et demande à la Société de s'y intéresser. La Société accepte bien volontiers et charge son Conseil d'administration de fixer le chiffre de la cotisation qu'elle versera d'après les ressources dont elle dispose.

M. Crudy donne lecture d'un Mémoire de la Cérémonie des honneurs funèbr s de Louis Xlll, roi de France, dans la vil e de Caors 23 juin 1643) et de l'ordre qui y fut observé. Ce curieux document sera publié dans le Bulletin.


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M. Combes continue la lecture de ses analyses des registres municipaux de Cahors pendant la Révolution (du 3 janvier au 9 février 1798).

Séance du 4 Décembre 1911 Présidence de M. le chanoine Albe, président semestriel

Assistaient à la séance : MM. le sénateur Rey, Billières, de Chomereau de Saint-André, Combarieu, Combes, Crudy, Daymard, Depeyre, Gary, Grangié, Maratuech, Paumes, Saint-Marty, Tourné, Viguié.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

M. le Secrétaire général dépose les publications reçues, entre autres une brochure de M. Poincaré sur la restauration des études classiques, dont il lit l'éloquente conclusion.

Il signale dans la Revue de l'Agenais (septembre-octobre 1911), 1° quelques notes 6ur une branche de la famille de Durfort, au cours d'une étude sur le château de Castel-Noubel, par M. J. B. Marboutin ; 2° la mention du pillage de l'abbaye de Saint-Maurin, en juin 1577, par notre compatriote le vicomte de Gourdon ; 3° un article très intéressant de M. P H. Guilhamon sur la Grande Peur de 1789 dans le Haut-Agenais.

La Société des Antiquaires de Picardie nous envoie une des luxueuses publications qu'elle fait paraître chaque année. Celle-ci a pour objet la reproduction en héliogravure des Chants Royaux et tableaux de la Confrérie du Puy-Notre-Dame d'Amiens, copiés, en 1517, par des miniaturistes parisiens, pour Louise de Savoie, duchesse d'Agoulême et conservés à la Bibliothèque Nationale.

M. le sénateur Rey signale des lacunes regrettables dans la restauration delà tour du pape Jean XXI. On n'a pas refait les meneaux des fenêtres ouest du premier et du 2e étage et on a négligé de déboucher les deux fenêtres supérieures des façades méridionale et septentrionale. La Société estime, avec M. Rey, qu'il serait à souhaiter que ces diverses ouvertures fussent rétablies dans leur état primitif.

M. Rey parle aussi de la construction de la Rampe des Mobiles et il en fait ressortir les avantages au point de vue touristique et pittoresque. Sur sa proposition, la Société émet le voeu que cette construction soit exécutée de façon aussi artistique que possible, particulièrement en donnant aux murs de soutènement la forme d'arcades en tiers point, ce qui ne coûterait pas beaucoup plus cher, offrirait un aspect plus agréable que des murs pleins et continuerait très heureusement la perspective


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formée par le Château du Roi, l'Eglise Saint-Barthélemy, les Remparts de Cahors.

M. Billières fait remarquer que les bases de la Barbacane de la Barre s'effritent et réclament dès réparations urgentes.

M. de Chomereau de Saint-André donne lecture d'un travail plein d'intérêt sur le Quercy militaire en 1789.

M. Billières communique à la Société une note publiée par divers journaux, d'après laquelle le trésor personnel du roi Murat aurait été enterré sur les bords d'une rivière Toscane par un de ses aides de camp à qui il l'avait confié.

M. Daymard signale la récente publication d'un ouvrage de M. Frédéric Masson, intitulé : Les trois derniers mois de Murat.

M. Thamié, curé de-Montfaucon, est élu membre correspondant.

M. Lorphelin receveur des Domaines en retraite demande à faire partie de notre compagnie. Il est présenté par MM. Albe et Combes. Il sera procédé à son élection à la prochaine séance, suivant le règlement.

D'après ce même règlement, les élections pour le renouvellement du Bureau devraient avoir lieu au cours de la séance d'aujourd'hui, mais le quorum n'étant pas atteint, elles sont renvoyées à la prochaine séance.

M. Combes continue la lecture de ses analyses des Registres municipaux de la ville de Cahors pendant la Révolution (9 février-19 avril 1798).

Séance du 18 décembre 1911 Présidence de M. l'abbé ALBE, président semestriel

M. le Secrétaire général présente les publications reçues : Il signale : 1° Dans le Bulletin de Brive (F. XXXIII. 3 livr.) : Un Humaniste Toulousain par M. R. de Boysson. C'est une étude attachante du rôle d'un ami de Marot, Jehan de Boysson plus connu sous le nom de Boyssonnet. Il était professeur à l'Université de Toulouse et fut condamné, comme coupable d'hérésie à faire amende honorable, en avril 1528. L'Université de Toulouse était agitée par les pensées nouvelles. Boyssonnet vit à Toulouse Clément Marot et Hugues Salel qui était alors secrétaire du premier président, Minut.

2° Le même Bulletin donne deux lettres d'un aumônier de l'armée de Condé, l'abbé Jean Jacques Philippe Suzanne de Montmaur, né à de Martel le 1er mai 1764. Ces deux lettres nous renseignent sur les déboires d'un


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émigré français qui crut toujours à la fortune de « ses princes » et qui n'eut jamais la consolation d'en recevoir la récompense si ambitionnée, une croix de St-Louis.

3° Dans la Revue du Clergé de France, M. Albe publie deux lettres du vénérable Alain de Solminihac sur les reliques de St-Cyprien de Moissac. Ce St-Cyprien pourrait être de Ginoulhiac.

4° Dans la Revue de Saintonge et Aunis (XXXIe vol. 6e livr.), les agissements révolutionnaires dans le district de Jouzac, d'un certain Benoist né à Cahors en 1757. « Il fut le grand délateur du district » et se fit le pourvoyeur du tribunal révolutionnaire. A son tour il fut arrêté par l'ordre du procureur syndic de Saintes, 90 jours emprisonné, mais le tribunal révolutionnaire l'acquitla (17-18 avril 1794).

4° Dans le Bulletin de Tulle, une note concernant 3 religieuses du Lot qui rétractent le serment qu'elles ont prêté et par ce fait sont l'objet de l'indignation du club des Jacobins.

M. Girma offre à la Société l'Almanach Annuaire de 1912, qu'il a édité suivant sa coutume.

M. Cahier, professeur à l'école normale, offre aussi un tirage à part de son étude sur le climat de Cahors pendant les 20 dernières années, étude qu'il a publiée dans le Bulletin de la Société d'Agriculture et qui a été signalée à sa date. La Société remercie les deux donateurs.

Le Secrétaire général lit un avis de l'Académie de Clermont annonçant que, d'après la fondation Fauchier, elle ouvre un concours poétique dont l'oeuvre principale doit être un sonnet à la Vierge.

M. Daymard propose à la Société d'émettre le voeu suivant: La Société ayant l'intention de publier dans son Bulletin les deux documents manuscrits connus sous le nom de Livre Noir et de Livre Tanné qui sont déposés à la Bibliothèque municipale, a l'honneur de prier M. le Maire de Cahors d'autoriser M. le Bibliothécaire à prêter successivement chacun de ces documents à M. le chanoine Albe qui en fera une copie, et cela pendant un temps limité.

La Société accepte ce voeu et décide qu'elle fera dans ce sens une démarche auprès de M. le Maire.

Sur la proposition de M. Saint-Marty, la Société décide aussi d'envoyer des exemplaires du Bulletin aux instituteurs dans l'espoir de les amener à se faire inscrire parmi ses membres. Elle décide aussi d'envoyer régulièrement son Bulletin aux deux écoles normales de Cahors, au collège


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de jeunes filles, au collège secondaire de Gourdon et au greffe du tribunal civil.

La Société désireuse de se faire connaitre et d'éveiller chez ses compatriotes le goût des recherches historiques et des curiosités locales décide qu'elle organisera des excursions. A cet effet elle nomme une commission qui sera chargée d'en étudier le programme et les moyens. Elle nomme MM. Crudy, Depeyre, Grangié, Rames.

M. Lorphelin, présenté à la dernière séance par MM. Combes et Albe est élu membre résidant à l'unanimité.

La Société procède ensuite au renouvellement de son bureau pour l'année 1912.

Sont élus :

Présidents semestriels : MM. Combarieu ; abbé Viguié.

Secrétaire général: M. Crudy.

Secrétaire des séances : M. l'abbé Albe.

Archiviste : M. Girma.

Trésorier : M. Rames.

Conseil d'administration : Le bureau et MM. Combes, Saint-Éloi.

Commission du bulletin : Le bureau et MM. A. Grangié, Saint-Marty, Billières, Fourastier, Gisbert.


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BIBLIOGRAPHIE DU LOT

ANNÉE 1911

Annuaire-Almanach, pour le département du Lot (1912), contenant les prévisions du temps, par J. Bivès (du Gers) et les adresses commerciales et industrielles des cantons, illustré de 400 gravures (34e année). Cahors, impr. G. Rougier; Jibr. J. Girma et chez tous les libraires du département. In-8 de 332-XXXI pages. 60 cent.

BOYER D'AGEN. — Les Chartreux : Les Trois Marches du Calvaire, par Boyer "d'Agen. Châtillon-sur-Seine, imp. A. Pichat. Paris, libr. Bloud et Cie. 1911. Grand in-8, VIII-256 p.

Bulletin mensuel de l'Union des syndicats agricoles du Périgord et du Limousin (Dordogne, Charente, Lot, Haute-Vienne, Corrèze, Creuse). re année. Nos 1 et 2. 5 juillet, août 1911. In-8, 64 p. avec couverture. Périgueux, imp. Cassard frères ; administration à Beauregard (Dordogne). Abonnement annuel individuel, 1 fr. 50 ; collectif pour les syndicats affiliés, 60 cent.

CABANES (Docteur). —Marat inconnu : L'Homme privé. Le Médecin. Le Savant. D'après des documents nouveaux et inédits ; par le docteur Cabanes, 2e édition, refondue et très notablement augmentée. Ouvrage orné de 5 planches et de 60 illustrations hors texte ou dans le texte. Tours, imp. E. Arrault et Cie. Paris, Iib. A. Michel. In-16, xn-559 p., 3 fr. 50.

CLARY (A.). — Léon Gambelta : Souvenirs d'enfance et de jeunesse, par le docteur Edmond Clary. Cahors, imp. A. Coueslant. 1911. In-16, 8 p.

CRUDY (A,). — Le Sermon prononcé le jour de la Magdeleine, avec préface et notes, par A. Crudy. Brochure grand in-8 de 12 pages. Lille, imp. Lefebvre-Ducrocq. (Extrait du Bulletin de la Société Archéologique, Historique et Artistique du vieux papier )

DELBOS (V.). — Membre de l'Institut, professeur adjoint à la Sorbonne : La Philosophie pratique de Kant, 1 volume in-8 de la Bibliothèque de Philosophie contemporaine. 12 fr. 50.


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DELONCLE (L.). — Statut international du Maroc, par Léon Deloncle, avocat à la cour d'appel de Paris. Montluçon. imp. Herbin. Paris, libr. J. Lechevalier. 1912. In-16, 351 p. 4 fr. Collection diplomatique, n° 1.

DEPEYRE (E.). — La Défection de Mural ; La Mission de Fouché (décembre 1813, mars 1814), d'après le prince Eugène et Murât, de M. H. Weil. Cahors, impr. G. Rougier. 1911. In-8, 111 p. (Extrait du Bulletin de la Société des Etudes du Lot, t. 36, premier fascicule, 1911.)

DUVIAU (E.) — Bernard de Cardaillac, capitaine au régiment Dauphin-cavalerie, gouverneur de Lourdes (1690-1723) ; par E. Duviau, archiviste de la ville de Lourdes. Tarbes, impr. Lesbordes. 1911. In-8, 18p. avec portrait, grav., fac-similé et 3 appendices.

J. FOURGOUS. — Voyage pittoresque dans le Cantal, conférence faite à Nantes, publiée dans le Bulletin de la Société de Géographie de Nantes, 4' trimestre 1910,p. 211 3233, 8illustrations.

Excursion archéologique dans P ouest de la France (Poitiers, Chauvigny et Saint-Savin), 16 pages, 8 illustrations. Bruxelles, Dewarichet, imprimeur. (Extrait de VAnnuaire içu de la Société d'archéologie de Bruxelles).

Un vieux décor d'autrefois : La Grand Place de Bruxelles. Numéros des 13 et 20 mai 1911 de Neuilly-Journal, 6 illustrations.

Paysages et monuments du Rouergue et de l'Albigeois. Lille, impr. Danel, 1911, 16 p., 10 illustrations. (Extrait du Bulletin de la Société de Géographie de Lille.)

Grand annuaire pour le département du Lot pour 1912 (contenant les prévisions du temps, par Xaintrailles d'Issoire). 1 vol .gr. in-8, illustré, de 400 p. Prix : 0 fr. 60. Toulouse, impr. Blanc. Cahors, libr. Delsaud.

LAFAGE (L.). — Le Bel Ecu de Jean Clochepin, par Léon Lafage. Mayenne, impr. Colin. Paris, libr. B. Grasset. 1911. In-16, 319 p., 3 fr. 50.

LACAVALERIE (L.). — Nos prêtres et la Révolution : Le Père Cyprien Naves de Calus, religieux capucin, premier curé de S'-Denis (1765-1830). Broch. in-8, de 24 p. Paris et Couvin Belgique. (Extrait des Etudes Franciscaines).

LACOMBE (P.). — Bibliographie des travaux de M. Lèopold Delisle


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(membre de l'Institut, administrateur général honoraire de la Bibliothèque nationale), par Paul Lacombe. Supplément, 1902-1910. Chartres, impr. Durand. Paris, libr. H. Leclerc. 1911. In-8, XXIII-88 p.

LACROIX (Mgr L.). — Un professeur de rhétorique : Notes et souvenirs sur M. le chanoine Dogny, du diocèse de Reims, par Mgr L. Lacroix, ancien évêque de Tarentaise, directeur d'études à l'Ecole des hautes études. Nevers, impr. G. Vallière. Paris, libr. Plon-Nourrit et Cie. In-16, xn-292 p., 3 fr. ço.

LAROUSSILHE (F. DE). — Les Remembrances quercinoises(Choses de mon pays), par F. de Laroussilhe (Marius Pracy). Cahors, impr. G. Rougier; libr. J. Girma. 1911. Petit in-8, V111-244P., 2 fr.

LAROUSSILHE (F. DE). — Le Secret d'amour de Galiol de Genouillac : l'aime. Fort. Une. Lonzac. Assier, par F. de L,aroussilhe (Marius Pracy). Cahors, impr. G. Rougier ; lihr. J. Girma. 1911. Petit in-8, 31 p., 1 fr.

MALG A (P.). — Légende de Padirac : Jean de l'Ourse (récit recueilli de la bouche d'un nonagénaire). Cahors, impr. G. Rougier; libr. J. Girma. Broch. in-8 de 16 p., o fr. 50. (Paru dans l' Annuaire Almanach du Lot de 1012).

REIBELL (Colonel). — Visions d'Afrique (discours prononcé à la distribution des prix du Collège de Jeunes filles de Cahors le 22 juillet 1911). Broch. in-8 de 10 p. Cahors, impr. Marmiesse.

ROUGIER (GEORGES). — Le Brésil en içn. 1 vol. in-18, 270 p. avec illustrations. Paris, Rio-de-Janeiro, Garnier frères, impr. G. Rougier Cahors. (Exposé très documenté, très clair des observations d'un voyageur qui a su vivement saisir la physionomie de cette grande République de grand avenir.)

ROUX (A.).— Le Château d'Anet, par Alphonse Roux, professeur au Collège de Dreux. Ouvrage illustré de 41 grav. et 1 plan. Evreux, impr. P. Hérissey. Paris, libr. H. Laurens. Petit in-8, 124 p., 2 fr. Petites Monographies des grands édifices de la France.

Souvenir de la Fêle du 7e Régiment (24-25 juin 1911), par le lieutenantcolonel Destré et le lieutenant Roi. Broch. in-8 de 40 p., ornée de dessins et musique, tirage à 150 exemplaires dont


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quelques-uns avec photographie. Cahors, impr. Ve Brassac; libr. J. Girma.

Sujets des compositions données dans les examens et concours de renseignement primaire dans le département du Lot (Certificat d'études primaires, Bourses d'enseignement primaire supérieur, Bourses des lycées et collèges, Brevet élémentaire, Concours aux écoles normales, année 1911). Publiés par L. Saint-Marty, instituteur, secrétaire de l'Association amicale des instituteurs. Cahors, impr. A. Coueslant. 1911. Petit in-8. 48 p.

SAHUC (J.). — Une voie gallo-romaine (de Béziers à Albi et Cahors), par J. Sahuc. Montpellier, Impr. générale du Midi. In-8, 34 p. avec grav. et carte.

SOL (E.). — Le'Dépôt des Archives nationales (aperçu historique),- par Eugène Sol, diplômé des Archives vaticanes. Cahors, impr. G. Rougier. 1911.In-8, 24 p. (Extrait du Bulletin de la Société des Etudes du Lot, t. 36, 2e fascicule.

VIRÉ (A.) et MALGA (Abbé). — Recherches de préhistoire dans le Lot. « Dolmens et Tumuli du Lot », par Amand Viré; « La Grotte du Bourgnétou, commune de Pinsac (Lot) », par Armand Viré. « Objets provenant d'une grotte magdalénienne à Luzech et d'une station néolithique à l'Impernal, près Luzech (Lot)», d'après l'abbé Malga (Cels, Lot). Le Mans, impr. Monnoyer. In-8, 16 p. avec fig. (Extraits du Bulletin de la Société préhistorique française).

VIRE (M. A.). — Sur la quatrième année d'activité de la Commission d'étude des enceintes préhistoriques et fortifications anhisloriques de la Société préhistorique française, par M. Armand Viré, docteur ès-sciences, président de la Commission, avec tables des matières contenues dans les rapports mensuels XXI-XL (4e année, 1.909-1910). Le Mans, impr. Monnoyer. 1911. In-8, p. 911 à 928. (Extrait du « Congrès préhistorique de France ». 6e session (Tours, 1910) (pagination conservée).

VIRÉ (A.). — Pseudo-éolithes de la rivière souterraine de Padirac (Lot), par Armand Viré. Le Mans, impr. Monnoyer. 1911. In-8, 8 p. avec fig. « 6e Congrès préhistorique de France, session de Tours, 1910 (p. 79 à 84). »

J. GIRMA.


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BUREAU DE LA SOCIÉTÉ DES ÉTUDES

POUR L'ANNÉE 1912

Présidents semestriels MM. COMBARIEU, O. I. M. A. (1er semestre) ; abbé VIGUIÉ (2e semestre).

Secrétaire général M. CRUDY.

Secrétaire des séances M. l'abbé ALBE, || A.

Archiviste-Bibliothécaire M. GIRMA, <|$f, I. libraire-éditeur.

Trésorier M. RAMES, rue St-Géry, Cahors.

Conseil d'administration Les membres du bureau, MM. Commandant SAINT-ELOI,^, COMBES l|JI,I

Commission du Bulletin

Les membres du bureau, MM. SAINT-MARTY, BILLIÈRES, FOURASTIÉ l|Jf, GISBERT 1||(, A. GRANGIÉ l|Jf, A.


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LISTE DES MEMBRES

COMPOSANT LA SOCIÉTÉ DES ÉTUDES LITTÉRAIRES, SCIENTIFIQUES ET ARTISTIQUES DU LOT

MEMBRES-NES :

Mgr l'Evêque de Cahors ; M. le Préfet du Lot ; M. le Président du Tribunal civil ; M. le Maire de Cahors ; M. l'Inspecteur d'Académie. Membre donateur : M. Fenaille, ^, industriel,17,rue de l'Elysée, Paris,

MEMBRES RÉSIDANTS :

MM.

1896. Albe (le chanoine), ^|, A., curé de Notre-Dame, à Cahors.

1873. Armagnac, (comte B. d'), à Cahors.

1889. Aymard, %$ I, #, M. A. docteur-médecin, à Cahors. 1911. AEgerler, Emmanuel, avocat, 3, rue de la Préfecture.

1910. Bergounioux, ^k 0., doct.-médecin principal en retraite, à Cahors. 1907. Besse (Pierre), avocat, rue Victor-Hugo, Cahors.

1893. Bessières (le chanoine), professeur à l'Ecole supérieure de Théolo.

gie, à Cahors. 1907. Billières, avoué, boulevard Gambetta, à Cahors.

1911. Bosc, instituteur, rue de la Barre, à Cahors.

1872. Combarieu (L.), I %g, ®, M. A. archiviste honoraire, à Cahors.

1872. Combes, $|, L, contrôleur de la Caisse d'épargne, à Cahors.

1874. Costes, $fe, ^ I. ancien sénateur, à Cahors. 1907. Crudy, boulevard Gambetta, à Cahors.

1910. Chomereau (de Valentin de St-André), lieulenant au 7e de ligne, rue Victor-Hugo, à Cahors.

1878. Depeyre (Etienne), avocat, à Cahors.

1873. Daymard, I.$$, ingénieur des arts et manufactures, à Cahors.


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1900. Fourastié, %£, A., archiviste départemental, à Cahors. 1900. Foissac (l'abbé Adrien), professeur à l'Ecole supérieure de Théologie, à Cahors.

1873. Gary (le chanoine),^, A.,directeur de la Revue religieuse,kC^hors,.

1884. Girma (J.) <$, libraire-éditeur, à Cahors.

1903. Girma (H)., rédacteur à la préfecture du'Lot, à Cahors.

1905. Grangié (Eug.), <|Jf, A. commis des ponts et chaussées, à Cahors.

1908. Gisbert, avocat, à Cahors.

1911. La Grappe du Quercy, 40, route d'Aubervilliers, à Pantin (Seine).

1897. Lagarde, %$, A., ingénieur des ponts et chaussées, à Cahors.

1909. Marre, avocat, rue Feydel, à Cahors.

1902. Martin (Georges), avocat, boulevard Gambetta, à Cahors. 1900. De Monzie, ^, député du Lot, à Cahors.

1911. Maratuech, boulevard Gambetta, Cahors.

1905. Paumes, L, A., professeur au Lycée Gambetta, à Cahors.

1885. Peyrissac, docteur-médecin, à Cahors.

1908. Rames, sous-ingénieur, rue Saint-Géry, à Cahors.

1F06. Rougier, fyjt, directeur du Réformateur du Lot, à Cahors.

1906. Roussel (Charles), $*, ancien conseiller d'Etat, ancien secrétaire

général de la chancellerie de la Légion d'Honneur, à Cahors.

1900. Séguy (F.), avoué, à Cahors.

1906. Saint-Eloi (le commandant) ^, à Cahors.

1910. Sauvêtre, avoué, rue Victor-Hugo, à Cahors.

1909. Soulages, ^, capitaine au 7e de ligne à Cahors.

1911. Saint-Marty, instituteur, avenue de la Gare, Cahors.

1898. Toulouse, <|Jf, A., architecte, à Cahors.

1910. Tourné, lieutenant au 7e de ligne, à Cahors.

1903. Valon (H. de), ®, M. A., avocat, à Cahors.

MEMBRES CORRESPONDANTS :

MM.

1901. Allemand (l'abbé), curé de Cremps (Lot). 1875. Ariiaùlt, rue de la Madeleine, 6, Toulouse.

9106. Andrieu (Léopold), <|Jf, A., capitaine au 95e d'inf. à Bourges


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1909. Amadieu (Ernest), à Verteilhac (Dordogne).

1903. Bar (Jos. de), à Argentat (Corrèze) et rue Martignac 5, à Paris.

1896. Bastide, ^, docteur-médecin, à Tunis. 1908. Ribliothèque de Moissac.

1897. Bladier, i|Jf, A., 38, rue des Menuts, Bordeaux.

1887. Blanc (Joseph), l|Jf L, docteur en droit, receveur particulier des

finances, à Saint-Affrique (Aveyron). 1911. Born, professeur à l'Ecole libre de Gourdon. 1887. Bourrières, professeur; allées des Zéphyrs, 13, Toulouse.

1900. Bouygues,conserv. des hypothèques en retraite,à St-Jean-d'Angély,

chaussée du Calvaire, 17.

1904. Briançon (Fr. de), château de Segadènes, par Soturac (Lot).

1899. Cadiergues (Georges), Dr enméd., à Tunis, l,rue Es-Sadikia.

1903. Cangardel (E.), notaire, maire de Marminiac (Lot).

1908. Calcas, à Neulet par Payrac.

1910. Carbonnel, avocat, à Figeac.

1909. Cavalié (Luc.) I. <|JI, principal de collège en retraite,quai Legendre,

à Figeac (Lot). 1906. Cazes, instituteur, à Martel. 1879. Cayla, conseiller à la cour de Poitiers (Vienne). 1899. Cayla, ^,Dren médecine, 31, aven, de Neuilly (Porte-Maillot),Seine.

1901. Cayla, 103, rue Notre-Dame-des-Champs, Paris. 1873. Claret, avocat, à Salviac (Lot).

1897. Combarel (du Gibanel de), au château de Cénevières (Lot).

1885. Combarieu (Jules), $fe, professeur au Collège de France, inspecteur

d'Académie, 56, quai Passy, Paris. 1899. Combelles (l'abbé), aumônier de l'hospice, à Figeac. 1894. Cros, instituteur, à Aynac (Lot). 1909. Couderc (l'abbé), curé de Pauliac, par Bretenoux (Lot).

1875. Delpon, conseiller général, àLivernon (Lot). 1873. Dois, notaire honoraire, à Tour-de-Faure (Lot).

1904. EscayracdeLauture (marquis d"), cours du Jardin public, Bordeaux1898.

Bordeaux1898. (Louis), $$, secrétaire de la Société historique, archéologique

archéologique scientifique du Finistère, 2, rue de Rohan, Rennes. 1898. Faret, (l'abbé), #, A., curé de Frayssinet-le-Gélat (Lot). 1896. Filsac (l'abbé), $?, curé de Peyrilles (Lot).


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1900. Folmont (H. de Testas de) chat, des Albenquats, par Castelfranc

(Lot).

1876. Fontenille (Jean-Baptiste de), propriétaire à Soucirac (Lot).

1872. Fontenille (Paul de), <|jf, A., inspecteur de la Société française d'archéologie, au château d'Auriol, par Villemur (Haute-Garonne).

1901. Fourgous (J.), docteur en droit, 16, boulev. St-Marcel, Paris. 1905. Foulhiac de Padirac (comte de), $fe, commissaire principal de la

Marine, rue Jeanne d'Arc, 36, Cherbourg (Manche).

1904. Gary (baron Fernand de), hôtel de Gary, rue Ninau, 12, Toulouse.

1904. Gary (baron Armand de), — — —

1902. Goudal (G.), comptable à Fumel (Lot-et-Garonne). 1900. Guiral (l'abbé), curé de La Madeleine, près Cahors. 1911. Gineste (Louis), pharmacien à Saint Céré.

1911. Gauthier, professeur d'histoire à l'Ecole primaire supérieure de Martel (Lot).

1888. Hébrard de Saint-Sulpice (marquis Fernand d'), avenue Elisée Reclus,Paris ; et au château de St-Sulpice, par Marcilhac (Lot).

1905. Karkowski, à Lacapelle-Marival.

1872. Lacombe ^, f|, I- inspect. général des arch., àCharenton (Seine). 1909. Lacoste (abbé), curé d'Anglars.

1903. Lacout (l'abbé), curé de Lissac (Lot).

1877. Lagane (l'abbé), chanoine, à Cabessut.

1880. Lalaurie, ||, I. directeur de l'Ecole normale de Montauban.

1873. Lamberterie (de)^, ancien député, place d'Iéna, 3, à Paris. 1908. Lapanonnie (de), à Couzou.

1897. Larnaudie, (l'abbé), curé de Reyrevignes (Lot).

1879. Laroussilhe (de), <||,percepteur, à Brienon-sur-Armançon (Yonne).

1878. Lascombes, ^, trésorier général au Mans.

1897. Lavaur (Raymond de), château de Laboisse, par Saint-Céré (Lot).

1894. Layral (l'abbé), curé, au Bourg (Lot).

1900. Lespinet (l'abbé), curé de Montcuq (Lot).

1901. Leyge, rédacteur à l'administration centrale des postes et télégraphes,

télégraphes, du Texel, 12. — Paris. 1911. Lorphelin, ancien receveur des domaines,place des Carmes,Cahors. 1911. Lucie, propriétaire à Saint-Cirq-Lapopie (Lot).


— 327 —

1901. Martel (E.-A.), ^, rue Ménars, 8, Paris.

1878. Maynard (baron de), rue du Jardin Royal, Toulouse.

1887. Mazelié (Justin), industriel, à Toulouse, 12, place du Pont. 1876. Miran (Sylvain), à Albas (Lot).

1901. Murât de Montai, à Assier (Lot). 1911. Marty, banquier à Figeac.

1897. Paulet-Cal, château de Ladevèze, près Labast-M 4 (Lot) et à Cahors.

1910. Péchai (abbé), curé de Corn (Loi).

1901. Pechdo, docteur-médecin, à Villefranche-d'Aveyron.

1888. Périer de Ferais, ^, place des Vosges, 13, à Paris. 1895. Planche, instituteur, à Léobard (Lot).

19 2. Pousargues (général de),^ O.château du Fossat,par Soturac (Lot).

1872. Rey, contrôleur, aux Roques, par Luzech (Lot). 1872. Rey, ^, sénateur, à Saint-Denis-Catus.

1909. Rey, étudiant à Dura vel (Lot).

1888. Roaldès (Arthur de), ^ O.,docteur-médecin, chef de l'hôpital spécial, à la Nouvelle-Orléans.

1902. Roaldès (Fernand de), au château de Figeac, près Montcuq (Lot). 1878. Rouquié (l'abbé), curé à Camburat (Lot).

1902. Roux (A.), professeur de l'Université, rue des Capucins, 27, Dreux (Eure-et-Loir).

1902. Sarrut (J.) 4$ L,professeur,rue Pascal, 24, Clermont-Ferrand (Puyde-Dôme). 1906. Sol (Eugène l'abbé), curé de Bégoux, près Cahors.

1891. Taillefer (l'abbé), %$, I., curé de Cazillac, par Lauzerte (Tarn-etGaronne).

1911. Thamié, curé de Montfaucon (Lot).

1906. Valat (J.), station électrique de Laforge, par Souillac, Lot.

1910. Valet de Régagnac, 6 bis, boulevard Pereire à Paris. 1910. Valon (de) Ludovic, chef de section à Brive.

1902. Vèze(Abel), négociant à Gourdon (Lot).

1895. Viguié (l'abbé J.-C), curé de St-Jean-Lespinasse, près St-Céré,Lot.

1898. Viré, naturaliste, f| L, attaché au Muséum d'histoire naturelle de

Paris, 8, rue Lagarde, Paris 5e, et à la Cave, par Souillac (Lot).


- 328. -

SOCIÉTÉS CORRESPONDANTES

FRANCE

DESIGNATION DES SOCIETE SIEGE DEPARTEMENTS

des Sociétés

Société d'agriculture, sciences et arts Agen. Lot-et-Gar.

Académie des sciences, agriculture, arts et

belles-lettres Aix. Bch.-d. R.

Société scientifique et littéraire Alais. Gard.

Albia Christiana Albi. Tarn.

Société des sciences, arts et belles-lettres du

Tarn Albi. Tarn.

Société des antiquaires de Picardie Amiens. Somme.

Société des lettres, sciences et arts de la

Haute-Auvergne Aurillac. Cantal.

Société archéologique du Gers Auch Gers

Société archéologique et scientifique Béziers. Hérault.

Société archéologique Bordeaux. Gironde.

Société académique de Brest Brest Finistère.

Société scientifique, artistique et archéologique de la Corrèze Brive. Corrèze.

Société des arts et sciences Carcassonne Aude.

Académie des sciences, lettres et arts Clermont Puy-de-D.

Société de Borda Dax. Landes.

Société ariégeoise des sciences, lettres et

arts Foix. Ariège.

Société des sciences naturelles et archéologiques de la Creuse Guéret. Creuse.

Société archéologique et historique du Limousin Limoges. Hte-Vienne.

Société historique et archéologique du Maine Le Mans. Sarthe

(


- 329 -

DÉSIGNATION DES SOCIÉTÉS SIEGE des Sociétés DEPARTEMENTS

Société archéologique de Tarn-et-Garonne.. Montauban, Tarn-et-Gar

Académie des sciences, belles-lettres et arts

de Tarn-et-Garonne id. id.

Société pour l'étude des langues romanes.. Montpellier Hérault.

Académie de Stanislas ; Nancy. Meurt. -et-M

Société archéologique de Nantes et de la

Loire-Inférieure Nantes. Loire-Infér.

Société historique et archéologique de l'Orléanais Orléans. Loiret.

Société des Antiquaires de l'Ouest Poitiers. Vienne.

Société de spéléologie Paris.

Musée Guimet id.

Comité des Sociétés des Beaux-Arts des

départements id.

Société des sciences, lettres et arts Pau. Basses-Pyr.

Société historique et archéolog. du Périgord Périgueux. Dordogne.

Ruscino, revue d'histoire et d'archéologie

du Roussillon. Perpignan Pyrén.-O.

Société des amis des arts Rochechouart. Haute-Vien.

Société des lettres, sciences et arts de l'Aveyron

l'Aveyron Aveyron.

Société des archives historiques de la Saintonge

Saintonge de l'Aunis Saintes. Char.-Infér.

Société des antiquaires de la Morinie Saint-Omer Pas-de-Cal.

Académie des Jeux-Floraux Toulouse. Haute-Gar

Société archéologique du Midi de la France. id. id.

Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres id. id.

Société d'Histoire Naturelle id. id.

Société des Etudes du Comminges St-Gaudens id.

Société des lettres, sciences et arts de la

Corrèze Tulle. Corrèze.


— 330 —

DÉSIGNATION DES SOCIÉTÉS SIEGE des Sociétés DEPARTEMENTS

ÉTRANGER

Smithsonian Institution Washington Etats-Unis.

Société Neuchàteloise de géographie Neuchàtel. Suisse.

La Société des Etudes reçoit en outre, à titre d'échange :

Le Journal d'hygiène, 162, Boulevard Péreire, Paris.

Le Bulletin de la Société agricole et Industrielle du Lot.

Publications du « Missouri Botanical Garden », de Saint-Louis (EtatsUnis). La Revue du Traditionnisme français et étranger, Paris, quai des Orfèvres, 60 The American Museum Journal, New York.


— 331 —

TABLE DES MATIERES

Pages

ALBE (E.). — Un Marchand de Castelnau-Montratier (1283) ,. 213

Une excursion à Figeac 282

BERGOUGNOUX. — Contrat réglant les conditions de la démolition

du château d'Assier, en 1768 160

Bureau pour l'année 1912 322

CAZES. — Al bi - Laï flous del Pastourel 238-240

COMBES (A). — Analyse des registres municipaux de la commune

de Cahors tenus pendant la Révolution 125,181,245

CRUDY (A). — Documents sur Cahors 286

FOISSAC (A.). — Desplas 295

DEPEYRE (Etienne). — La Défection de Murât. — La mission de

Fouché (décembre 1813 — mars 1814) 5

GRANGIÉ (Eugène). — La Fontaine de Dégagnazès 113

GALABERT (F.). — L'Eglise Saint-Amans de Promilhargues 222

GIRMA (J.). — Bibliographie du Lot pour l'année 1911 318

Liste des membres de la Société 323

Liste des Sociétés correspondantes 328

PAUMÉS (B.). — Les délégués du district de Cahors à la Fédération

Nationale de Paris (14 juillet 1790) 225

SOL (Eugène). — Le Dépôt des Archives Nationale 141

TAILLEFER (B.). — Les Coutumes de Montcuq 165, 197,261

VIGUIÉ (J.-C). — Procès-verbaux des séances 115, 171, 242, 306



BULLETIN TRIMESTRIEL

DE LA

SOCIÉTÉ DES ÉTUDES

LITTÉRAIRES, SCIENTIFIQUES ET ARTISTIQUES DU LOT

TOME TRENTE-SIXIEME DEUXIÈME FASCICULE

« AVRIL MAI JUIN »

CAHORS IMPRIMERIE F. DELPÉRIER, G. ROUGIER Sr, 4, RUE DES ÉCOLES

1911

La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans son BULLETIN.

Le gérant : L. DELPÉRIER.



BULLETIN TRIMESTRIEL

DE LA

SOCIÉTÉ DES ÉTUDES

LITTÉRAIRES, SCIENTIFIQUES ET ARTISTIQUES

DU LOT

T O M E T RENTE-SIXI E M E TROISIÈME FASCICULE

« JUILLET AOUT SEPTEMBRE »

CAHORS IMPRIMERIE F. DELPÉRIER, G. ROUGIER Sr, 4, RUE DES ÉCOLES

1911

La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans son BULLETIN.

Le gérant : L. DELPÉRIER.



BULLETIN TRIMESTRIEL

DE LA

SOCIÉTÉ DES ÉTUDES

LITTÉRAIRES, SCIENTIFIQUES ET ARTISTIQUES

DU LOT

TOME TRENTE-SIXIEME QUATRIÈME FASCICULE

« OCTOBRE NOVEMBRE DÉCEMBRE »

CAHORS IMPRIMERIE F. DELPÉRIER, G. ROUGIER Sr, 4, RUE DES ÉCOLES

1911

La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans son BULLETIN.

Le gérant : L. DELPÉRIER.




TABLE DES MATIERES

La défection de Mural. — La Mission de Fouché (décembre 1813—

mars 1814), par M. Etienne DEPEYRE 5

La Fontaine du Dégagnazès, par M. Eugène GRANGIÉ 113

Procès-verbaux des séances, pendant le 1er trim. 1911 115

Présidents : MM. Allie, O., (1er semestre); Paumes, (2e semestre). Secrétaire général : M. Crudy Secrétaire des séances : M. l'abbé Viguié. Secrétaire-Archiviste : M. Girma, 1. fr, , librairie-éditeur. Trésorier : M. Rames, rue. Saint-Géry, Cahors.

Conseil d'administration : Les membres du bureau, MM. Commaut St-Eloi, Combes. Commission du Bulletin : Les membres du bureau : MM. Dois, Billières, Kou rastié, Gisbert, Grandie.

AVIS

Avis important.- La Société des Etudes, dans sa séance du 22 décembre 1800, a fixé ainsi qu'il suit la teneur de l'article 10 de son Règlement intérieur :

Art. 10. — Les cotisations seront recouvrées par le Trésorier dans le courant du premier semestre, et sans avertissement préalable.

Dates des séances pour l'année 1911 : Lundi : Janvier 9, 23; Février 6, 20; Mars 6, 20 ; Avril 3, 24 ; Mai 8, 22 ; Juin 12, 20; Juillet 10, 24; Octobre 9 ,23 ; Novembre 6, 20 ; Décembre 4, 18.



TABLE DES MATIÈRES

Pages

Analyse des registres municipaux de la commune de Cahors tenus

pendant la Révolution, par M. A. COMBES (Suite) 125

Le dépôt des Archives Nationales, par M. Eugène SOL 141

Contrat réglant les conditions de la démolition du château d'Assier

en 1708, par M. BERGOUGNOUX 160

Les Coutumes de Montcuq, par M. B. TAILLEFER _ 165

Procès-verbaux des séances, pendant le 2° trirn. 1911. 171

Présidents : MM. Albe, o , (1er semestre); Paumes, I. Q (2e semestre). Secrétaire général : M . Crudy Secrétaire des séances : M. l'abbé Viguié. Secrétaire-Archiviste :. M. Girma, 1. y, libraire-éditeur. Trésorier : M. Rames, rue Saint-Géry, Cahors.

Conseil d'administration : Les membres du bureau, MM. Commaut St-F.loi, Combes. Commission du Bulletin : Les membres du bureau : MM. Dois, Billières, Fou rastié, Gisbert, Grangié.

AVIS

Avis important. — La Société des Etudes, dans sa séance du 22 décembre 1890, a fixé ainsi qu'il suit la teneur de l'article 10 de son Règlement intérieur :

Art. 10. — Les cotisations seront recouvrées par le Trésorier dans le courant du premier semestre, et sans avertissement préalable.

Dates des séances pour l'année 1911 : Lundi : Janvier 9, 23; Février 6, 20; Mars 6, 20 ; Avril 3,24; Mai 8, 22 ; Juin 12, 26; Juillet 10, 2'i ; Octobre 9 ,23 ; Novembre 6, 20 ; Décembre 4, 18.



TABLE DES MATIERES

Pages

Analyse des registres municipaux de la commune de Cahors tenus

pendant la Révolution, par M. A. COMBES (Suite) 181

Les Coutumes de Montcuq (Suite et fin), par M. B. TAILLEFER 197

Un Marchand de Castelnau-Montratier (12831, par M. ALBE 213

L'Eglise Saint-Amans de Promilhargues, par M. F. GALABERT 222

Les délégués du district de Cahors à la Fédération Nationale de

de Paris (14 juillet 1790), par M. B. PAUMES 225

Journal de M. de Caors de la Sarladie, par M. Ach. VILLE 227

Al Bi — Lai Flous del pastourel, par M. CAZES 238-240

Procès-verbaux des séances, pendant le 3e trim. 1911 242

Présidents : MM. Albe, O , (1er semestre) ; Paumes, I. Q (2e semestre). Secrétaire général : M. Crudy Secrétaire des séances : M. l'abbé Viguié. Secrétaire-Archivste : M. Girma, I. Q, libraire-éditeur. Trésorier : M. Rames, rue Saint-Géry, Cahors.

Conseil d'administration : Les membres du bureau, MM. Commant St-Eloi, Combes. Commission du Bulletin : Les membres du bureau : MM. Dois, Billières, Fourastié, Gisbert, Grangié.

AVIS

Avis important.—La Société des Etudes, dans sa séance du 22 décembre 1890, a fixé ainsi qu'il suit la teneur de l'article 10 de son Règlement intérieur :

Art. 10. — Les cotisations seront recouvrées par le Trésorier dans le courant du premier semestre, et sans avertissement préalable.

Dates des séances pour l'année 1911 : Lundi :. Janvier 9, 23; Février 6, 20; Mars 6, 20 ; Avril 3, 24 ; Mai 8, 22 ; Juin 12, 26; Juillet 10, 24 ; Octobre 9 ,23 ; Novembre 6, 20 ; Décembre 4, 18.



TABLE DES MATIERES

Pages

Analyse des registres municipaux de la commune de Cahors tenus

pendant la Révolution, par M. A. COMBES (Suite) 245

Les Coutunies de Montcuq (Suite et fin), par M. B. TAILLEFER. ..... 261

Une Excursion à Figeac, par M. ALBE. 282

Documents sur Cahors, par M. A. CRUDY 286

Desplas, par M. A. FOISSAC 295

Procès-verbaux des séances, pendant le 4e trim. 1911 306

Bibliographie du Lot, par M. GIRMA 318

Bureau pour l'année 1912 322

Liste des membres dé la Société 323

Liste des Sociétés correspondantes 328

Présidents : MM. Albe, O , (1er semestre); Paumes, L y (2e semestre). Secrétaire général : M. Crudy Secrétaire des séances : M. l'abbé Viguié. Secrétaire-Archiviste : M. Girma, 1. y, libraire-éditeur. Trésorier : M. Rainés, rue Saint-Géry, Cahors.

Conseil d'administration : Les membres du bureau, MM. Commant St-Eloi, Combes. Commission du Bulletin : Les membres du bureau : MM. Dois, Billières, Fou rastié, Gisbert, Grangié.

AVIS

Avis important.—La Société des Etudes, dans sa séance du 22 décembre 1890, a fixé ainsi qu'il suit la teneur de l'article 10 de son Règlement intérieur :

Art. 10. — Les cotisations seront recouvrées par le Trésorier dans le courant du premier semestre, et sans avertissement préalable.

Dates des séances pour l'année 1911 : Lundi : Janvier 9, 23; Février 6, 20; Mars 6, 20 ; Avril 3,24; Mai 8, 22 ; Juin 12, 26; Juillet 10, 24; Octobre 9 ,23 ; Novembre 6, 20 ; Décembre 4, 18.