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Titre : Le peintre Louis Gauffier / Paul Marmottan
Auteur : Marmottan, Paul (1856-1932). Auteur du texte
Éditeur : Gazette des Beaux-arts (Paris)
Date d'édition : 1926
Sujet : Gauffier, Louis (1762-1801)
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34162285k
Type : monographie imprimée
Langue : français
Format : 20 p. : fig. et planche ; in-4
Format : Nombre total de vues : 25
Description : Appartient à l’ensemble documentaire : GTextes1
Description : Avec mode texte
Droits : Consultable en ligne
Droits : Public domain
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5480187f
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-LN27-62194
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/02/2009
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LE PEINTRE
LOUÏS GAUFFIER
PARIS
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
1926
Arch. pliot. d'Art et d'Hist.
l'.TI DES DE POHTHAIT! (Musée de Versailles.)
LE PEINTRE LOUIS GAUFFIER
CET aflisle ([tti, à vingt-deux tins, obtint à l'Académie le grand prix de peinture (1784), n'était pas né à La Rochelle ou à Rocheforl en 17(53 connue l'ont écrit Landon, Sirel, Bellier de la Cliavignerie et Thieme 1, qui se sont répétés. Son portrait à l'aquarelle, que nous reproduisons (coll. Arlus), porte bien mention de La Rochelle, mais l'exactitude de la méthode scientifique ne nous permet pas de maintenir cette légende. C'est à Poitiers, paroisse de Montierneuf, qu'il vit le jour, le 10 juin 171)2 -. — 11 était fils d'un ouvrier qui entra à l'Arsenal de Rocheforl peu de temps après sa naissance. Les registres paroissiaux de l'état-civil attestent qu'en 17(>7 un frère lui naquit dans celle ville, c'est ce qui a produit la confusion. Louis Gauffier avait alors cinq ans. ("est là que, protégé par un membre de la famille de Vaudreuil, qui était Commissaire de marine, il reçut les premiers encouragements.
1. Landon, Annales du Musée, vol. IV in-S", p. 89, qui reproduit dans ce môme tome, gravé au trait par Normand, un dessin de Gauffier ayant pour sujet : L'Amour endort le Temps; Bellier de la Cliavignerie et Auvray, Dictionnaire des Artistes de l'Ecole française; Thieme, Kiïnstler-Lexikon.
L>. L. Moinet dans la Revue de Saintonge et de l'Aunis de 1895, t. XV, pp, 436 a 440.
2 LE PEINTRE LOUIS GAUFFIER
Il n'existe jusqu'ici sur lui que de trop brèves notices imprimées, dont quelques-unes anciennes et rares. Gauffier mérite pourtant qu'on essaye de reconstituer sa vie.
C'était un arlistc d'élite mort si jeune, a trente-sept ans, que la critique eut à peine le temps de s'occuper de lui. Entré à l'École de Rome le 25 novembre 1784, il en sortit le 25 novembre 1788. Sur celle période de ses éludes on est assez documenté grâce à la publication intégrale de la Correspondance des Directeurs due a l'initiative de la Société de l'Histoire de l'Art français '.
Il avait obtenu le premier prix en 1784, e.v oeqno avec Germain Drouais. Tous deux sont élèves de David et s'en prévalent. Arrivé à Rome le 25 novembre 1784, Gauffier se met aussitôt au travail. Dès ses débuis, il inspire confiance-au directeur alors en fondions, le peintre Ménagcol.
Les passages de lettres qui le concernent sont fréquents. El d'Angiviller, le surintendant, ne larde pas à partager la bienveillance du directeur. Gauffier est, comme le jeune sculpteur Chaudel, son camarade d'alors, sympathique pour sa bonne éducation et son talent. Ses contemporains lui reconnaissent un caractère aimable, doux el modeste, qui se reflète dans ses ouvrages.
Gauffier, pour ses débuts, avait exposé une académie peinte el une esquisse au Salon de 1785.
« Il est moins fort que Drouais, mande Lagrenée l'aîné a d'Angiviller, le 19 octobre 1785, mais il promet beaucoup. Peu accoutumé a peindre le grand, je crois qu'il fera beaucoup mieux la prochaine fois*. »
Dans une autre lettre de Pierre a d'Angiviller datée de Rome, 7 novembre 1786, Gauffier est qualifié de second Lesueur. Son académie est faible, mais elle se recommande par les draperies. Lagrenée, d'autre part, annonce à d'Angiviller que Gauffier a sur le chevalet un tableau représentant Laban et ses fûtes qu'il proclame devoir être beau comme un Lesueur".
Sous le Consulat, probablement à la vente posthume de son atelier, ce tableau, considéré comme un des meilleurs de l'artiste, fut acheté par le Ministère de l'Intérieur.
En 1787, le rapport des commissaires, nommés pour l'examen des ouvrages envoyés par les élèves de l'Académie de France à Rome, lui
1. La Gazette des Beaux-Arts dans son I. Il de 1872 (pp. 411 à 418) en avait déjà publié des extraits.
2. Pour ceci el lout ce qui va suivre jusqu'en 1787 inclusivement, nous suivrons la Correspondance des Directeurs de l'Académie de France à Rome, vol. XV, publiée par A. de iMontaiglon et Jules OuilTrey (période 1785-1790).
3. Procès-verbaux de l'Académie de peinture, I. IX, pp. 309, 333, document n° 8703.
LE PEINTRE LOUIS GAUFFIER ;î
fui très favorable' : o Informés que le sieur Gauffier esl dans une grande faiblesse de santé, nous n'avons pas été surpris de ne point voir sa ligure finie ; mais nous avons élé instruits (\i\ mérite d'un lablcau qu'il vient d'exécuter à Rome, el, d'après le rapport qui nous en a élé l'ail, nous
l'invitons à suivre la roule qu'il a prise. » Ces commissaires étaient Vieil, Relie, Doyen, Bachelier, Mouchy, Voiriol, Le Comte, Renou.
Le Kl mai 1787, Lagrenée écrit à d'Angiviller : « Le jeune Gauffier vient de faire un tableau déli. cicux, encore mieux ([lie celui de l'année passée. Ce tableau esl pour M. le président Bernard. Ditesmoi, je vous prie, si après la Saint Louis 2, je puis vous l'envoyer par la poslc : il n'es! pas grand, à peu près comme celui des Chevaliers Danois. J'ai trouvé le joint de proposer au jeune Gauflier de vous faire un tableau de la grandeur el du prix de celui que vous a l'ait M. David, ce qu'il a accepté avec beaucoup de reconnaissance, mais il esl très long, vu sa mauvaise santé, car quand
il a travaillé trois ou quatre jours, il esl obligé de se reposer et est souvent malade. » Le magistral ici désigné esl messire Anne-Gabriel-Henri Bernard, marquis de Boulainvillicrs qui, d'après l'AImanach Royal de 17S7, siégeait à
i. A i A.M i I.I. K il i: N'A itïisT i: (Collection Arlus, l'm-ls.)
i. Ibid., document H77.">.
'_'. Les expositions d'élèves dans le local de l'Académie, au palais Mancini, suc le Corso, avaient lieu chaque aimée le jour de la fêle du Roi.
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LE PEINTRE LOUIS GAUFFIER
la Grand'Chambre comme président des enquêtes el requêtes. Il devait être fort âgé, sa nomination remontant à 1746.
Le 9 juillet, d'Angiviller répond de Versailles A Lagrenée : « Je ne puis qu'approuver, Monsieur, la proposition que vous a faite le sieur Gauffier de copier le beau tableau du Dominiquin, qui esl a Grolta-Fcrrata, vu que ce tableau n'a pas encore été copié pour le Roi et que celle copie servira à remplir pour le sieur Gauffier le devoir imposé A chaque pensionnnaire de fournir pour S. M., pendant les .quatre ans de son séjour à Rome, la copie d'un morceau capital de quelque grand maître. »
Lagrenée répond A d'Angiviller de Rome, le 28 août : « Le sieur Gauffier en revenant de Grolla-Ferrala, où il vient de faire sa copie pour le Roi, esl tombé malade d'une grosse fièvre : il lui sera impossible de satisfaire A l'obligation d'envoyer une académie peinte ; à l'impossible nul n'est tenu : mais son joli tableau el sa belle copie prouveront que, pour un jeune homme d'aussi mauvaise santé, il a employé fructueusement son temps ». Il s'agit ici de la Gnèrison du Possédé du Dominiquin 1.
Le Suisse Conrad Gcssner mande A son père Salomon Gcssner : « Rome Ie 1' septembre 1787... Les pensionnaires français viennent de faire l'exposition de leurs tableaux. Il y a parmi eux, celle année, des jeunes gens d'un talent marqué : B. Corneille 2, Lclhiôre, Drouais, David, Fortin 3, Ramey', Chaudel, Fontaine, Percier pour n'en citer que quelques-uns, qui peuvent sur tous les points disputer l'avantage aux Allemands 3.
« J'ai remarqué cuire autres un petit tableau dont le sujet esl Jacob el Rachel par un jeune artiste nommé Gauflier. Les figures ont six pouces de haut : elles sont groupées avec goût, bien dessinées et du plus beau coloris. Le paysage semble l'ait par un artiste de profession : aucun tableau d'histoire ne m'en a offert de semblable; les moutons seraient dignes du pinceau de
. 1. La copie de Gaufrier l'ut envoyée en 1804 par Dcnon au Musée de la ville de Genève, alors chcf-Iicu du département français du Léman. Cf. liigaud, Les Beaux-Arts à Genève, pp. 23 cl 24 (troisième partie).
2. Corneille (Barthélémy), le sculpteur marseillais, émule de C.luirdigny. Il décéda en 1812. On voit de Corneille au musée de Montpellier un beau buste eu marbre blanc d'Allieri signe et date de 1798 (Legs iïabrc).
3. Fortin, sous l'Empire, eut avec Le mot cl Chaudel une commande pour la cour du Louvre el fit une des fontaines de Paris pour le quartier Popincourl, transportée depuis au musée Carnavalet. Il est aussi railleur du fronton du Louvre en l'ace le Pont des Arts.
I. Ramey père, auquel on doit le Napoléon en costume du sacre, de la salle Chaudel au Louvre, statue de marbre en pied, qui se trouvait avant 1870 au palais de SaintCloud, mais qui avait été l'aile primitivement pour le Scnat-Conscrvalcur.
5. Un autre Allemand, flackcrt. qui l'a connu à Rome, parle en bons ternies de Gauffier dans une lettre a Goethc du 4 mai 1800, citée par Thieme.
LE PEINTRE LOUIS GAUFFIER à
Iîoos. En général ce tableau se distingue par une belle ordonnance, une belle composition el ^m goûl très pur. »
A son tour Drouais, qui estimait beaucoup Gauffier, va donner son opinion sur ce tableau'. Il est piquant de l'entendre juger son camarade el rival. Il s'exprime ainsi dans une lettre à David : « Il tant que je vous parle du Salon. Gauffier a exposé un petil tableau qui esl charmant et surtout étonnant pour le rendu, c'est comme de la miniature.
« Il est fâcheux qu'avec le grand mérite qu'a son tableau, il ait pillé et écorché Raphaël : c'est une chose impardonnable. Vous savez comme Raphaël a traité ce sujet : je puis me tromper, mais ce n'est pas au-dessous, comme vous le verrez. J'attends voire jugement pour savoir si je me trompe.
« Le paysage esl fait comme un ange, et pour bien dire c'est un charmant tableau*. »
Le !>(> septembre 1787, Lagrenée envoie à d'Angiviller une petite caisse contenant le tableau du sieur Gauffier, destiné au Président Bernard '.
1. Drouais ;'t David, 13 juin 1787. Jules David, Le /'cintre Louis David, p. IL'.
2. !l)id., p. 45.
3. Lagrenée à d'Angiviller, lettre du li(i septembre 17S7.
i i.vssi:, icAittcs I;T C I:.N I:I.D C I: (illAVUlti: D'AI'HBS l.\ TABLEAU 11 K OAUFFIKII
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LE PEINTRE LOUIS GAUFFIER
Si bien traitées que soient ces loiles, elles ont selon nous quelque chose d'un peu froid dans le choix des sujets empruntés presque tous A la Fable ou A l'histoire romaine. Ce classicisme, sans doute, comme base d'enseignement, ne pouvait que favoriser un lalenl où se montrait déjA du goût, de la finesse. Mais, avec tous nos contemporains, nous lui préférons ce naturalisme sain et nuancé dont Gauffier a tiré un parti merveilleux dans ses portraits.
En 1788, il livre un tableau commandé par l'Etal. 11 l'a exposé A l'Académie, ce qui lui a .valu l'envoi de plusieurs sonnets d'amateurs ; son sujel est : Cléopàtre, Le directeur, qui s'en montre toujours satisfait, écrit A ce propos A d'Angiviller : « Sa santé faible el chancelante, un goût naturellement porté aux sujets simples et doux, l'ont éloigné des études plus vigoureuses qu'il aurait pu faire A Rome. Le sieur Gauffier est présentement A Naples, ayant fini son temps d'études ' ». Ce voyage a élé fort approuvé par d'Angiviller *. Il compte y passer trois semaines.
Son Directeur A Rome ajoute qu'il n'a pas cru devoir l'engager A changer son genre, désirant seulement qu'il s'y perfectionne. Tous les talents ne peuvent se ressembler; le contraire serait malheureux pour l'Ecole.
En novembre, Gauffier est encore en Italie ayant obtenu de prolonger de six mois la durée de ses éludes au palais Mancini, ce que d'Angiviller n'accordail qu'aux élèves de mérite' 1.
Le 28 avril 1789, il quille Rome après avoir louché la gratification habituelle pour rentrer A Paris. Il était 1res aimé A l'Académie de France el il emporta les regrets de tous ceux qui le connaissaient. « Pour ma part, ajoute son directeur Ménagcol dans sa missive du 29 avril 1789, je n'ai eu qu'A me louer de son honnêteté el de son exactitude A remplir ses devoirs de pensionnaire ; il a un talent agréable qu'il perfectionnera encore par la pratique. »
Gauffier envoya au Salon de 1789 un Alexandre el Epheslion el son Jacob venant trouver les filles de Laban dont nous avons déjà parlé, enfin une Entrevue d'Auguste el de Clèopàlre après la bataille d'Aclium.
Le 24 août de cette même année, il fut agréé A l'Académie, mais il ne devint jamais académicien. Il se maria à Rome en mars 1790 avec une demoiselle Pauline Chatillon, son élève, qui avait aussi étudié avec Drouais et qui a laissé quelques portraits'. Elle le suivit A Florence. Ce fut
1. Ménagcol à d'Angiviller, Rome, 10 septembre 1788.
2. D'Angiviller à Ménagcol, du 27 septembre 1788.
3. Ménagcol A d'Angiviller. Rome, 12 novembre 1788 el 5 novembre.
I. Mme G. exposa au Salon de 1798. Rartolo/./.i a grave plusieurs de ses tableaux.
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un mariage d'inclination : car il n'avait pour toute fortune que son talent. Au Salon de 1791, nouveau lot de sujets antiques signés de Gauflier : Alexandre niellant son anneau sur la bouche d'Epheslion ; Générosité des dames romaines ; Prédiction de la naissance de Samson ; Achille reconnu par Ulysse, etc.
Lu Générosité des dames romaines, actuellement au Palais de Fontainebleau, ligure (huis les inventaires du Louvre sous le litre plus explicite de :
Cornélie, mère îles Gracques, sollicitée par les dames romaines de donner ses
bijoux éi la pairie.
Le Louvre possède un autre tableau d'histoire de Gauffier : Trois jeunes hommes apparaissent éi Abraham dans la nuitée de Mambré et lui prédisent (/ne sa femme concevra un /ils.
A rail. |ihot. d'Art ut d'ittsl.
1)1 A.VI! JOI :ÈE l'Ail Vl;:.\l S, UKSSIÏN (Musée de Montpellier.)
Cependant Gauflier s'était installé avec sa femme à Florence. Il y était déjà dès 1 79.'{ avec son ancien camarade de l'Ecole de Rome, Fabre 1. D'après son portrait, il esl de tournure el d'aspect aristocratiques. Renouvier confirme celte impression lorsqu'il dit que fabre el lui sont les seuls élèves
I. Correspondance des directeurs, i. XVI, p. 334.
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de Rome qui refusent leur adhésion A la République et demeurent monarchistes 1. Autre preuve de cet étal d'esprit: dès le 26 décembre 1793, en effet, en séance de la Société populaire el républicaine des Arls, du 6 nivôse an II, qui se lient au Louvre sous la présidence de Wicar, il esl donné connaissance de correspondances d'Italie dénonçant Desmarais « émigré » à Pise, Corneille el Gagneraux l'ainé. Gauffier y esl particulièrement visé comme étant « le peintre en titre de l'infâme lord Hervey, l'ambassadeur d'Angleterre, el comme protégé par le soi-disant prince Auguste, l'ennemi acharné de la France », enfin comme frayant avec la société du Cardinal de Bernis 2. Ces milieux ne peuvent que lui plaire pour leur distinction ; il y trouve aussi des clients.
En 1796 et 1797 et les années suivantes, tant A Rome qu'A Florence el A Naples, Gauffier exécuta des portraits de généraux français, de diplomates anglais ou fiançais. Pour l'iconographie historique de ces années jusqu'A 1801, ses effigies ont une valeur de ressemblance el d'exactitude dans les costumes. C'est ainsi qu'on lui doit un Portrait du général J. J. Dessolles 3, qui fit toutes les campagnes de la République el de l'Empire, représenté en pied, tenant A la main les préliminaires de Leoben el une branche de laurier. Le Musée de Versailles en possède la copie par Rioull, l'original étant demeuré dans la famille du général*.
Le Musée de Versailles conserve aussi de Gauffier onze charmantes petites études non poussées, d'une hauteur de 0™11 el de 0m28 sur 0"'15 ou 0"'24 de largeur qui représentent : 1° Le général Dessoties ; 2° Un personnage assis le bras gauche appuyé sur une carte ; 3° Un général debout sur une jetée au bord de la mer (c'est le n° 4848 du catalogue Soulié).
Le numéro suivant offre trois personnages dont l'un esl Léopold Berthier, frère du maréchal ; les autres, dans un même cadre, sont : 1° Un homme assis, le bras gauche appuyé sur une table où se trouve un portefeuille ; 2° Une dame jouanl du clavecin ; 3° Son mari en costume de général, assis, le bras droit appuyé sur une table où se trouve une carte.
Le n° 4850 A la suite offre un cadre avec quatre esquisses représentant : 1° Un homme debout, portant un cordon bleu el appuyé sur un fragment antique. (Nous pensons qu'il s'agit ici de Louis Ier roi d'Etrurie, la poitrine barrée par le grand cordon de Charles III) ; 2° Une dame appuyée sur une borne devant une fontaine antique ; 3° Un homme debout au milieu de fragments antiques ; 4° Deux enfants cueillant des raisins.
1. L'Art sous la Révolution, 18(13, p. 10.
2. Lapauze. Procès-verbaux de la Commune des Arts, 1 vol. (1923), p. 201-202.
3. Né à Auch, le 3 juillet 1767.
4. H. 0"'67x L. 0m51.
PORTRAIT DE JEUNE HOMME par f,ouis GAUFFIER
I Collection Kautiackeff. )
GAZETTE DliS SEAUX-ART t
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LE PEINTRE LOUIS GAUFFIER 9
Le n" 4851 (catalogue Soulié) esl l'esquisse d'une famille inconnue. Un personnage avec sa femme el ses six enfants cueillent les fruits d'un oranger planté dans un grand vase de terre cuite.
Le n° 48512, enfin, fixe l'image de la famille du diplomate français accrédité à Florence sous le dernier grand duc avant l'an VII, Miol, l'ami de Joseph Bonaparte 1. Miol esl ligure avec sa femme el ses trois enfants dans son intérieur. Esquisse intéressante reproduite sous le nom erronné de Gauthier,
dans, Les Arts, l'asc. de septembre 190(5. La toile originale existe encore dans la famille Miol.
Grâce à ces petites répliques à l'huile que le maître avait conservées de tableaux achevés, on peul se faire une idée de la fécondité de son talent.
Celles, au nombre de onze également el de mêmes dimensions, qui figurent sous le n° 535 1, au Musée de Montpellier, oui élé inventoriées au catalogue de l'Exposition universelle de 1900 (Section rétrospective) sous l'attribution erronée à Gros; elles sont de Gauffier,
1. Pour quelques précisions de plus voyez, sur ces petits portraits prèles à l'Exposition de David el de ses élèves à Paris, le Bulletin de la Société de l'Art français de 1913. Rectifications au catalogue par MM. G. Prière el L. Rosenthal.
2. Catalogue du Musée lfabre à Montpellier, par lï. Michel.
Ai-eh. plinl. d'Art cl d'illsl. lllictlI'VlilITK DU IIH.MI I.IS i: T 1)1! UK.MI'S, I1HS.SIX (Musée de Montpellier.)
10 LE PEINTRE LOUIS GAUFFIER
Il y a notamment au Musée de Montpellier quatre portraits de généraux de la Ire République ayant guerroyé en Italie et faits sur place par Gauflier avec fonds de débris antiques. Nous y voyons également la réduction du petit portrait du jeune officier cisalpin venu A Florence avec le corps du général Pino en 1801. Ces esquisses de Montpellier proviennent du legs Bruj'as. J'ai déjA dit ce que j'en pensais en 1901 après l'exposition qui en fut faite A Paris '.
Elles sont bien de Gauffier el je suis allé jusqu'A penser que dans deux d'entre elles, on pourrait trouver l'image de diplomates représentant la France A Florence el A Rome sous le Directoire : Reinhard el Cacaull. Mais ces dernières identifications, comme celle de Louis Ie1', roi d'Elrurie, sonl A approfondir.
Ce Bourbon arriva A Florence avec Murât le 10 août 1801. Gauffier, qui devait mourir A Livourne le 20 octobre, vécut encore assez pour avoir le temps de saisir les traits du premier roi intronisé par Bonaparte dès le Consulat.
Au cours du xix° siècle, deux toiles réunissant vingt-deux très petites études du même genre, par Gauffier encore, passèrent A la vente de feu Augustin, le miniaturiste. Mais en 1839, année de cette vente, le nom de Gauflier n'était pas coté ; ces esquisses n'atteignirent qu'un prix infime.
Néanmoins le double fait d'avoir retenu l'attention du peintre Gros, qui en possédait aussi, et d'Augustin venge la mémoire de Gauffier de cette indifférence des habitués de l'hôtel Bullion, le Drouot d'alors. En 1811, A la vente Jaufï'ret, une réplique de son tableau : Dames romaines faisant don à la pairie de leurs bijoux, atteignit 321 francs, et, en 1862 (Vente X), un Portrait de l'artiste, de sa femme et de sa belle-mère, 290 francs seulement *.
Mais depuis... les choses ont bien changé I
Si des esquisses nous passons maintenant aux portraits achevés de Gauffier, nous citerons : en 1900, A l'Exposition cenlennale A la National Portrait Gallery A Londres, celui en pied peint A Florence en 1796, de Henri Richard Vassal Fox dit : lord Holland (1773-1840) 1. Il esl daté de Florence 1796 el signé en toutes lettres suivant la coutume de l'arlisle. De la même année est également ce délicieux portrait de jeune homme en bras de chemise que nous reproduisons en hors-texte.
1. Paul Marmotlan. Les Arts en Toscane sous Napoléon, note 80.
2. Mircur. Dictionnaire des ventes d'Art (1911).
3. N° 1382 du catalogue. Dimensions: 11. 0'"26 1/4xL. 0»"1U 3/1. Notre confrère, M. Dimicr, en a l'ait aussi mention dans le volume de la Société de l'Art français de 1924.
LE PEINTRE LOUIS GAUFFIER
1 I
Dans ces dci[\ pages distinguées, à remarquer dans les fonds, les aspects 1res exacts de Florence cl les jolis costumes Directoire.
La même vue de Florence, mais d'un autre côté (côté de Boboli avec la tour du Palais-Vieux) se retrouve dans le fond d'un poitrail d'égale dimension (Gauffier affectionnai! ces dimensions: IL 0"'63> L, 0"'5I) d'un jeune officier de la légion cisalpine du corps d'occupation de Pino sous
Miollis, alors en Toscane, portrait pris à Florence en 1797-1798 d'après nature (collection Paul Marmottait) '.
Il est signé el dalé ainsi: Gauffier. Florence, 1801. L'uniforme esl vert, couleur nationale. Le jeune militaire imberbe, au teint coloré, porte la tète penchée un peu à gauche. II a une extrême finesse dans le regard. Il est représenté en pied et porte des demi-bottes collantes à la hongroise découpées en coeur vers le haut el avec glands. L'habit est long, boutonné el à très haut col droit rigide.
Il y a sur la ligure de ce ebarmant officier, galonné d'or sur toutes les coutures, un très joli jeu de lumière qui l'éclairé avantageusement el en fait
1. A figuré A VExposition de David el de ses élevés, organisée au Petit Palais des Champs-Elysées, en 1913.
A II II plinl. (l'Art, el d'HIlt. I.'AM 11 ASSA II Kl'll HUIT HT s\ I' A M I I. 1.1!. i:s o t; i ss i: (Musée de Vcrsnllles.)
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valoir l'agrément. Sur un pilastre du vestibule, qui meuble la droite du tableau, .d'autres reflets apparaissent d'un accent do vérité très bien saisi.
L'auteur n'a rien négligé dans les détails. Je signalerai, par exemple, l'élégance de la cravate haute se détachant sur une chemise plastron ornée d'un camée el d'un gilet blanc dépassant le dessous de l'habit sous sa ceinture.
Le .chapeau basique cet Adonis lient de la main.gauche, porte la cocarde aux trois couleurs el un beau plumet blanc, rouge el vert. Gauffier le fait poser, le bras gauche appuyé sur un sabre du plus pur style de l'époque et 1res exactement réglementaire. Celte arme de luxe avec sa dragonne est de forme légèrement recourbée. Un gant est négligemment posé et tenu sur la poignée: Le fond est formé par une terrasse où se distingue un oranger dans un vase de terre qu'a déjà employé l'artiste dans d'autres tableaux ; les verts, après plus d'un siècle, ont naturellement poussé au noir.
Madame Jules Hollande, née Berthier de Lasalle', possède A Paris, venant d'héritage de famille, le petit portrait original du général de brigade Léopold Berthier (H. 0"'(55 x L. 0'"51), dont l'esquisse est à Versailles.
Le héros a le visage jeune cl imberbe ; sa chevelure esl frisée ; il est vu de profil, en pied, el il appuie sa main gauche sur le parapet d'un quai. Le fond du tableau est la baie de Naples avec le Vésuve fumant : la rade esl remplie de voiles latines ; au premier plan, un brick battant pavillon américain. Berthier a déposé, près de lui, sa canne ainsi que son chapeau bas à cocarde el plumet tricolores. On peut étudier son élégant uniforme Directoire en détail, tant le peintre l'a traité avec conscience: babil noir- assez, long à haut col rabattu rouge, écharpe bleue, ceinturon de cuir rouge avec ornements et parements dorés, sabre surmonté A la poignée d'un casque ciselé el doré de style à la Romaine, culotte collante noire, bottes à la hongroise. L'oeuvre esl signée : L. Gauffier. Fior, an 7e. c'est-à-dire 1799, année ou le général vint à Naples, avec Championnel, en qualité de chef d'élat-major.
D'après l'indication de la signature, Gauffier aurait peint ou, tout au moins, achevé ce portrait à Florence, sa ville de prédilection qui, après ses années d'école de Rome, le retint le restant de sa vie.
L'Académie des Beaux-Arts de Florence exposait assez mal son portrait par lui-même avec sa famille (H. 0n,70xL. 0,n53). Il y a 1A sa femme, née Pauline Chatillon, et deux enfants; ce tableau si intéressant, qui était
1. Nous remercions ici Madame Hollande de nous avoir permis l'étude du tableau.
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au palais de la Crocella. sérail passé depuis peu à la Galerie des Offices.
Un second portrait authentique de l'artiste à l'étal d'aquarelle esl conservé à Paris dans la collection Artus. Il esl particulièrement attachant, car il groupe Gauffier et sa famille.
Sous le n" 255 du catalogue de 1904, on voit au Musée de Montpellier, (II. 0"'()7xL. 0"'50), une toile de Gauflier représentant un homme de .'55 à
40 ans, en costume civil, datée ci signée de Florence 1797. Le fond représente une vue des environs de cette ville. Le personnage appuie sa main droite sur ym balcon de pierre orné de vases de (leurs. Cette main lient un crayon. A terre, le long du mur, est un carton à dessins.
Ces accessoires semblaient désigner, comme l'onl pensé les rédacteurs des anciens catalogues, un artiste français de l'époque Directoire, sans doute un des camarades français de Gauffier.
Depuis peu d'années, grâce à une vieille mention à l'encre transcrite derrière le châssis vierge et de l'écriture de Fabre, qui l'a donnée à la ville
Arcli. pliot. d'Ail et d'HIst. l'DIITIt A IT D'IIO.MAII! DANS I ' \ l'AYSAOK, I! S 1.1 U I S S I! IMiINTK (Musée de Montpellier.)
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de Montpellier, l'on sail que celte toile représente le peintre wallon van Vyck Coklers, élève de Pécheux à Turin.
Ce peintre, d'après Thieme, était né à Liège le 5 mai 1741'. La mention en a élé relevée par M. Joubin, conservateur honoraire du Musée Labre, aujourd'hui directeur de la bibliothèque d'Ail el d'Archéologie de Paris.
Pour un autre tableau du même genre, M. Joubin a découvert derrière le châssis, également avec une écriture i\u temps, la mention du célèbre archéologue danois, C. Zoëga (1755-1809)l.
Quant à Cahiers, sa lètc rasée el encadrée de cheveux bouclés a du caractère, môme une physionomie grave. Il se détache sur un ciel 1res clair, tandis que l'artiste a lixé des effets de soleil d'Italie dans d'autres parties du tableau. Toul cela esl très vrai, 1res saisissant, la pose fort naturelle el le rendu des êloffes parlai!. Les jeux de lumière, du soleil spécialement, sont toujours très justes chez Gauffier. L'habit gris est celui du Directoire;
la culotte courte de nankin esl jaune, les bas et le gilet blancs. Au bas de ce gilel pend une breloque à cachet. Le. chapeau mou a ses bords relevés.
Ce portrait esl très instructif [jour juger la technique davidienne de
il ri- I i:l Mil (USA l.l'IN, IHOt (Collection l'uni Miu'nioUnn, Parla.)
1. II mourut en 1817. L'âge, qu'il a sur le portrait exécuté en 1797, concorde, semblc-t-il, avec ces renseignements.
2. Aujourd'hui dans la collection 11. de Rothschild depuis la vente llanzi en 1019 (Chiquel expert ).
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l'auteur ; el, par ailleurs, il est précieux pour le rendu scrupuleux des modes contemporaines '.
Mais revenons à de nouvelles petites éludes authentiques de Gauflier, faites certainement par l'artiste pour conserver le sou venir de tableaux exécutés.
Il est passé en vente à l'hôtel Drouot, le 19 décembre 1913, huit très petites réductions, plutôt qu'ébauches, encadrées et réunies (Sortais, expert; vente de Madame A. IL), cataloguées à tort sous l'appellation « Ecole anglaise». Deux d'entre elles représentaient des personnages de l'époque Directoire, dont l'un en costume officiel de ministre plénipotentiaire assis sur un fauteuil, les fonds formés par des paysages vaporeux des environs de Florence. Ces études, rappelaient de manière frappante celles qui sont conservées à Versailles, sans être toutefois les mêmes ([liant aux sujets. Le prix obtenu Cul de 2.800 francs ; elles furent rachetées par la propriétaire. Elles n'avaient
atteint que 24 l'r. 50 à la vente de l'eu Augustin, en 1839s.
l'O lt 111 A II'
DU i; é.\riîn \ i. i.i'.oi'in.o ni:iî ru i i:n, 171)1) (Collection île M"" Jules Hollande, Paris.)
I. lia élé reproduit dans la Gazette des Beaux-Arts en 1923.
'i. Augustin, le célèbre miniaturiste, catalogue rédigé par M. Ch. l'aillel, commissaire expert honoraire du Musée Royal, petit in-8°, p. 17. Les huit petites esquisses figurent sous le n" 11. Au n" 12, sont mentionnes les il autres esquisses de personnages de la même époque (du Directoire principalement), qui obtinrent le prix de 51 francs. (Catalogue avec les prix manuscrits appartenant n M. Hector Lefuel.)
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Si l'on pouvait réunir ces huit petites toiles aux vingt-deux de Versailles et de Montpellier, on aurait une très importante partie de l'oeuvre de Gauffier sous les yeux, et l'on pourrait se rendre compte de l'intérêt documentaire de ces portraits historiques. C'est, selon nous, par ce genre que la mémoire de cet artiste vivra.
Gauffier peignit Edgar Clarke, fils du minisire français à Florence, vraisemblablement aussi le futur duc de Feltrc, le général Dumas, le général baron d'Hévilly (1801) ' dans un paysage de la baie de Naples, où on aperçoit le Vésuve au fond.
Parmi ses portraits collectifs, l'un deux retrouvé en ces dernières années à Florence par le prince russe Serge Koudachelfesl passé dans une collection parisienne en 1925. Il esl signé en loules lettres : Louis Gauffier 1800. C'est une scène de famille dont la petite esquisse figure parmi celles de Montpellier 2.
Le tableau original mesure 0m73 de bailleur sur 1 mètre de largeur. Une jeune femme en robe blanche reposant de face sur un sopha Directoire montre de la main gauche sa mère assise près d'elle et s'accoudanl sur un guéridon de même style. La vieille dame en bonnet de dentelle, campée de profil, esl en Iraih de lui remettre ses bijoux. Un jeune fiancé tenant une lettre est appuyé sur le haut du sopha montrant du doigl le portrait appendu au mur du père décédé assistant en effigie A celle scène intime. Son visage traduit comme un sentiment de regret ou tout au moins de souci. La scène se passe dans un intérieur où figure, suspendu au mur, un paysage montagneux des environs de Florence occupé en partie par le bâtiment d'une propriété de famille.
Ce dernier point de repère, cette casa, pourrait aider un Florentin crudil connaissant bien son terroir A la reconnaître si la tenu ta' existe encore du côté de l'Apennin el A exhumer le nom de la famille à laquelle elle appartenait en 1800; dé celte façon l'on pourrait arriver à identifier les personnages. Leur type, leur mise distinguée, leur ameublement, tout annonce une origine aristocratique.
Il n'y a rien A reprendre dans ce joli tableau ; c'est une des pages les plus précieuses du maître.
Gauffier dessinait avec finesse et faisait 1res ressemblant ; il avail du
1. Collection Bernard Franck, IL 0m0flx L. ()'"50. Ce portrait a figuré a l'exposition rétrospective des oeuvres de David et de ses élèves, organisée au Palais des Beaux-Arts de la Ville de Paris en 1913.
2. André Joubin, Les Collections de Fr, X. Fabre au Musée de Montpellier, Gazette des Beaux-Arts, Août 1923.
.3. El) italien tenuta signifie: terre, possession, métairie.
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goût pour interpréter les accessoires el les costumes qu'il transcrivait très fidèlement.
Son modelé esl fondu dans la perfection. Sa louche imperceptible ne sent jamais l'effort. Sa technique, ici comme là (aux sujets près), s'apparente aux compositions d'un Lesueur, le dessin esl impeccable, le sens des effets de lumières absolument supérieur.
Ses l'omis sont ordinairement des vues de Florence ou de ses environs. Il
s'était exercé au paysage el on lui doit quelque vues de Vallombrense, notamment celle où il s'est représenté assis sur la terrasse du Paradisino, causant avec deux moines. Cette terrasse domine le val d'Arno el Carliste en a rendu avec aisance les oppositions d'éclairage el l'horizon qu'on devine immense.
Le Musée de Montpellier expose un tableau pareil à une réplique de ce sujet que nous possédons (IL 0m38xL. 0'"50), réplique signée des initiales de l'artiste: L. G.
Voici ce que dit un voyageur, d'un de ces paysages :
« Vallombrense. — Sur le penchant d'une colline à gauche, une pelouse
I M! MKItl: DONNANT K K s III.IOI.X A SA II 1! 1.1. K- Kl I, I. K, ISml (Collection l'uni Mnrnioltnn, l'.uis.i
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immense sert A la nourriture de nombreux troupeaux de bêtes A laine ; celte belle prairie, les animaux qui la couvrent, les attelages de boeufs qui font les transports de bois el de fourrages, les fabriques du hameau, celles du monastère, les lignes de grands arbres qui les environnent, les montagnes boisées qui les dominent, font de ce lieu un paysage ravissant, plein de mouvement el de vie, éclairé par les rayons d'un soleil couchant, il offre un des magnifiques tableaux de la nature.
« Un peintre français, M. GoilTier (sic), épris des beautés de celle solitude, les a reproduites dans une de ses compositions qui lui font honneur 1. »
On lui doit aussi une Vue générale de Florence que Landon a gravée au trait dans ses Annales du Musée 1. Elle fut achetée à la,vente posthume de l'artiste par le peintre Gros.
Gauffier étail fort apprécié de ses contemporains el notamment du peintre français Fabrc. Son talent étail déjà si bien classé qu'un connaisseur célèbre, Lebrun, mari de Mnie Vigôc, écrivait de lui, en 1800 à Lucien Bonaparte, minisire de l'Intérieur, dans un rapport sur les artistes, après avoir cité son tableau du Sacrifice de Gèdéon : « Artiste errant qui se rapproche de Lesueur et Laircsse ; digne d'être rappelé ». Gauffier était alors en Italie 3. Clément de Ris', organisateur el administrateur des musées de province sous Napoléon III, visitant celui de Montpellier, cite quinze dessins A la plume de Louis Gauffier dont le meilleur est le Saint Jean adorant l'Enfant Jésus. Style, élégance, originalité attestent selon lui les qualités de « ce rejeton de Taraval greffé de David », ainsi qu'il le définit en termes imagés.
Au moment où le gouvernement, s'inspirant des conclusions de Lebrun, expert très écouté, s'apprêtait à faire revenir Gauffier en France pour lui confier des travaux, l'artiste mourut à Livourne le 20 octobre 1801, à l'âge de trente-sept ans 3. Sa femme, qui fut son élève, était décédée trois
1. Voyage en Italie, t. II, p. 25G, par feu André Thouin, rédigé sur le journal autographe par le baron Trouvé (d'après le manuscrit datant de 1797).
2. Extrait de la série de l'École moderne, t. II, p. 19 pi. 15, édition de 1833, in-8°.
3. Archives de l'Art français, vol. de 1872, p. 433.
4. Les Musées de Province, histoire et description ; deuxième édition, 1872.
5. Le Moniteur universel lui consacra une notice élogieuse le 28 brumaire an X. La date de la mort est aussi celle donnée par M. Moine! (Revue de Satntonge..., 1895, t. XV), mais ce dernier fait décéder l'artiste à Venise et non à Livourne. Il semble peu vraisemblable que la notice contemporaine du Moniteur soit erronée sur ce point.
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mois avant, el ce malheur contribua à aggraver la maladie qui conduisit Gauflier au tombeau.
Peu de jours avant de mourir, il avait l'ail parvenir à son vieux père (qui ne décéda que le 12 février 1808) un lableau représentant le Retour de l'enfant prodigue. Celait, dit Moinet, son portrait cl celui de son père. Ce l'ail est sans doute peu aisé à vérifier aujourd hui, mais ce n'est pourtant pas impossible, puisque nous possédons les Irails de Gauffier dans une
aquarelle de la collection Artus el dans une loile des l'lizzi à Florence.
En loul cas, son père légua ce tableau à un ami intime, M. Bouffard, négocianl à Rocheforl. On le voit aujourd'hui au musée de celle ville'.
Gauffier en mourant chargea deux de ses camarades alors à Paris, les citoyens Chaudel, sculpteur, et Mérimée, peintre, d'y vendre, pour venir en aide à ses deux orphelins, les tableaux et dessins de son atelier. Cette collection était leur seul patrimoine. Elle fut exposée dans la salle de la Société des Amis des Arts, cour du Louvre, les 17 et 18 floréal an X
1. Cité par Guédy.
I.A TKIiHAKHK DU VA I. I.O.M II H K1JS I! (Collection l'uni Munnollun, Parla.)
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(mai 1802), et l'on procéda A la vente les deux jours suivants depuis 5 heures du soir jusqu'A 8 heures '.
Le père de Mme Gauffier eut la tutelle des enfants. L'un d'eux, sa fille Fauslinc, fut adoptée par son camarade Desmarais qui, dès le 15 juillet 1807, après l'annexion de Carrare à la principauté de Lacques, devint professeur à l'Académie de celle ville, rétablie par la soeur de Napoléon, Elisa, princesse de Lucques el de Piombino.
Elisa prit même gratuitement à son Institut modèle de Lucques, sa fondation, cette fille adoplive de Desmarais * et se l'attacha par la suite en qualité de dame de compagnie.
Parmi les loiles de Gauffier qui furent achetées après sa mort, nous en retrouvons deux, à savoir : La Mère des Gracques et une Idylle, dans l'inventaire manuscrit et inédit 3 du château de Villiers, dressé en août 1808 sur les ordres de Napoléon après que Mural son possesseur, nommé roi de Naples, eùl cédé à l'Empereur, son beau-frère, ses propriétés de France avec leur contenu. Le ci-devant grand-duc de Berg (Murât) avait acquis ces tableaux pour sa galerie de Villiers (Seine) tant pour le talent qui s'y rencontrait que pour aider les deux enfants du peintre.
Les portraits, qu'on a de Gauffier, réunissent à un grand charme, d'expression iin joli coloris, du naturel el de la simplicité, el le souci du détail pittoresque, qu'il s'agisse d'un uniforme militaire, d'un meuble de slyle ou du fond de paysage dans lequel est campé le personnage.
Manière pure, fine et gracieuse, goût délicat, telles sont les qualités que lui reconnaît Siret. Nous ne saurions mieux faire pour nous résumer que de souscrire à ce jugement.
PAUI. MARMOTTAN
1. Landon, Nouvelles des Arts, 1802, II, 299.
2. Le décret admettant la fille de Gauffier à l'Institut-Elisa, avec pension entière, fut daté de Piombino le 8 mai 1808, signé <t Félix s> (le prince), contresigné par le ministre.secrétaire d'Etal Iucquois Vannucci et imprimé dans le Bollettino ufficiale délie Leggi e decreti del Principato lucchese, t. VI, p. 147.
Elle était née en 1792 ; elle ligure dans le portrait de famille que nous reproduisons. Sous la Restauration elle épousa à Lucques un sieur Malfatti et signa de jolies miniatures. Clic mourut en Italie (1837). — Renseignement particulier dû à notre confrère, M. Jeannerat. Voyez aussi Les Arts en Toscane sous Napoléon, p. 80-81.
3. Arch. Nat. 02707 et ibidem. Reçu de Denon, directeur général du Musée Napol.é'ôn.»