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Titre : Bulletin de la Société archéologique du Midi de la France
Auteur : Société archéologique du Midi de la France. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Toulouse)
Date d'édition : 1903-11-03
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32723569b
Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32723569b/date
Type : texte
Type : publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 10459
Description : 03 novembre 1903
Description : 1903/11/03 (SER2,N32)-1906/07/03 (SER2,N36).
Description : Collection numérique : Fonds régional : Midi-Pyrénées
Description : Collection numérique : Bibliothèque Rosalis (Toulouse)
Description : Collection numérique : Presse locale
Description : Collection numérique : Revues savantes
Droits : Consultable en ligne
Droits : Public domain
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5473984m
Source : Société archéologique du Midi de la France, 4-Lc18-103 (BIS)
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 19/01/2011
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BULLETIN
DE I.A
SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE
DU
MIDI DE LA FRANCE
FONDÉE EN 1831 , ET RECONNUE ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE PAR DÉCRET DU 10 NOVEMBRE 1850
Gloriae Majorum
NOUVELLE SÉRIE N° 32
Séances du 17 novembre 1903 au 22 mars 1904.
Adresser la correspondance au siège de la Société, Hôtel d'Assézat.
TOULOUSE
EDOUARD PRIVAT, LIBRAIRE-ÉDITEUR
14 , HUE DES ARTS , 1,4
1904
SOMMAIRE DE CE BULLETIN
LAMOUZEI-I.E. — Uno affiche de 1783 sur les aérostats .... 16
DELUIIME. — Médailles en l'honneur des frères Montgolfior '. 17
J. DE LAIIONDÈS. — Origines de l'art moderne, par Courajod 19
— Tète sculptée de saint Louis, à Saint-Germain 19
— Monogrammes de Jésus sur les maisons de Toulouse. ., 23
PASQUIER. — Bijoux de la maison do Foix au XV" siècle 27
Aug. VIDAL. — Additions à l'Histoire du grand prieuré de Toulouse. . . 28
BARRIÈRE-FI.AYY. — Armes do deux évoques do Pamiors 37
— Assemblée de l'assiette du diocèse do Toulouse à Montgiscard, 1625. . 38
— La valeur de la monnaie au XVII" siècle 41
LAIIOUZELLE. — Fonctionnaires municipaux de Toulouse au XVIIe siècle. 42
Concours «le l'année 1003 — Rapport général par M. LÉCR1VAIN. . 50
J. DE LAHONDÈS. — La Lcnaissance à Toulouse, Nicolas Bachelier. ... 62
Baron DESAZARS. — Les miniatures du Capitolo, XIII" et XIV" siècles.. . 71
BARRIÈRE-FLAVY. — C. r. : Fouilles d'Azy, de M. O. Camuzon 75
LAPIERRE. — C. r. : Aulon, monographie communale du Fr. Irenéc. . . 77
BARRIÈRE-FLAVY. — Les monuments civils et religieux d'Autcrive. ... 78 Abbé SALTET. — C. r. : Trésor et reliques do Saint-Sernin, les Inventaires,
par Ma' Douais 81
— C. r. : Los étudiants clercs de l'Université do Toulouse, 1482-1498, par
M. l'abbé Annat '. . . 82
CARTAILHAC. — C. r. : La fabrique de la Graufesenque, Aveyron (céramique
gallo-romaine), par M. J. Decheletto. , 86
Abbé LESÏUADE. — Les statues dos quatre Evangélistcs, par Lucas, bail à
besogne '..... 90
M»' BATIFFOL. — C. r. critique de « Vigilance do Calagurris », par M. A.
Reville *..,'. 91
LAPIERRE. — C. r. : Ambassade -en Espagne de Jean Ebrard, soigneur de
Saiut-Sulpico, etc., 15C2-1566, par Ed. Cabié. . .' 94
DE BOURDES. — Sur un bloc de maçonnerie antique à Toulouse 96
BARRIÈRE-FLAVY. — Sceau. oWconsulat d'Alan, XIII" siècle 98
Abbé J. LESTRADE. — Pages d'histoire et d'art sur Saint-Sernin de Toulouse ( 102
Abbé BAICHÈRE. — Etat de l'argenterie do l'église de Saint-Papoul, 1760. 104
— Argenterie, saintes reliques* ornements, meubles do Saint-Nazaire do Carcassono, XVI" et XVII" siècle. . 105
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE
DU
MIDI DE LA FRANCE
Fondée à Toulouse en I83I, la Société archéologique du midi de la France a été reconnue établissement d'utilité publique, par décret du 10 novembre i85o. Elle se compose de membres honoraires, de membres résidents, de membres libres et de correspondants, qui ont le droit d'assister à toutes les séances et d'y faire des communications.
Les séances ont lieu, de droit, tous les mardis soir, à 8 heures 1/2, du dernier mardi de novembre au troisième mardi de juillet.
Le siège de la Société est fixé à l'hôtel d'Assézat-Clémence-Isaure (palais des Académies).
La bibliothèque est ouverte au public, le mardi et le mercredi, de 2 à 4 heures de l'après-midi. Le prêt des livres est autorisé, mais nul ne peut emporter un ouvrage sans avoir inscrit le titre et signé sur un registre spécial.
La Société a publié : i° quinze volumes de Mémoires in-4°; le seizième est en cours de publication; 20 le compte rendu de ses séances depuis 1869 : Bulletin de format in-41 ou première série, de 1869 à 1887 ; de format in-8° ou deuxième série, de 1887, à ce jour.
Dans la deuxième série du Bulletin, chaque année académique forme deux fascicules et la pagination recommence, mais à partir du fascicule 25, de 1899, deux ou trois années forment un seul volume avec titre et tables générales analytiques.
La Société décerne tous les ans des prix de 200 et 3oo francs et des médailles d'encouragement en vermeil, argent et bronze, soit à des travaux manuscrits et inédits, soit à des ouvrages imprimés, soit aux personnes qui lui signalent ou lui adressent des objets anciens.
Adresser tous les manuscrits, imprimés ou objets avant le Ier avril au Président de la Société, hôtel d'Assézat, Toulouse. •
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE
DU
MIDI DE LA FRANCE
FONDÉE EN 1831, ET BEGONNUE ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE PAB DÉGBET DU 'lO NOVEMBRE 1850
Gloriae Majorum.
DEUXIEME SERIE, Nos 3a à 36 3 novembre 1903 au 3 juillet 1906. ^>
Adresser la correspondance au siège de la Société, Hôtel d'Assézat
TOULOUSE
EDOUARD PRIVAT LIBRAIRE-ÉDITEUR Librairie de l'Université
14, RUE DES ARTS ( SQUARE DU MUSÉE) ^ —
v 1906
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE
DU MIDI DE LA FRANCE
TABLEAU DES MEMBRES
QUI CONSTITUENT LA SOCIÉTÉ (MAI 1904)
-»~OS>*-
BUREAU MM.
Président: J. DE LAFIONDÈS.
Directeur : E. MÉRIMÉE.
Secrétaire général : E. CARTAILHAG.
Secrétaire adjoint :
Archiviste : Bar.on de RIVIÈRES.
Trésorier : Louis DELOUME.
MEMBRES RÉSIDANTS
(Le nombre en est limité à 10 par les Statuts). MM.
Date de leur nomination.
E. CARTAILHAC, #, I. Q, correspondant de l'Institut,
rue de la Chaîne, 5. . . 26 février 1867
J. DU LAHONDÈS, rue Perchepinte, 14 27 février 1877
E. MÉRIMÉE, &, ®, I. p, doyen honoraire de la
Faculté des lettres, rue des Chalets, 54 20 mai 1872
Le baron DESAZARS DE MONTGAILHARD, rue Merlanc,
Merlanc, .... . 15 juin 1880
BULL. 32, 1004. 1
— 2 — MM.
Date de leur nomination.
E. DELORME, 1.f|, archiviste de la Chambre de commerce, rue de Metz, 28 7 mars 1882
Le baron DE RIVIÈRES 8 avril 1884
SAINT-RAYMOND, rue Merlane, 5 4 mai 1886
. BRISSAUD, 1. p, professeur à la Faculté de droit, rue
Matabiau, 26 29 juin 1886
Louis DELOUME, #, rue Saint-Georges, 2 8 mars 1887
Le D' CANDELON, rue Temponière, 10 19 avril 1887
ROMESTIN, H, architecte, inspecteur des travaux des
monuments historiques, rue de Rémusat, 38 3 janvier 1888
Le baron DE BOUGLON, rue Mage, 13 16 avril 1889
MASSIP, I. p, bibliothécaire de la Ville, directeur des
archives municipales, rue de la Pomme, 30 11 juin 1889
ROCHER, architecte, rue Lakanal, 14 11 juin 1889
C. BARRIÈRE-FLAVY, A. p, rue du Taur, 38.. . . 15 mars 1890
DE REY-PAILHADE, rue Saint-Jacques, 18 25 mars 1890
F. RÉGNAULT, I. ||, rue de la Trinité, 19 22 avril 1890
LÉCRIVAIN, I. Q, professeur à la Faculté des lettres,
rue des Chalets, 37 24 mars 1891
JEANROY, I. Q, professeur à la Faculté des lettres . 20 décembre 1893 PERRODD, O. #, recteur de l'Académie de Toulouse,
rue Saint-Jacques, 20 24 avril 1894
DURRBACII, I. p, professeur à la Faculté dés lettres,
rue du Japon, 40 . 25 juin 1895
P. DE CASTERAN, rue Sainte-Anne, 20 25 juin 1895
PASQUIER, 1. Q, archiviste de la Haute-Garonne,
rue Saint-Antoine-du-T, 6 3 décembre 1895
JOULIN, O. &, ingénieur en chef, en retraite 22 décembre 18*.)6
GRAILLOT, &$, professeur agrégé de l'Université, rue
de la Dalbade, 17 22 décembre 1896
A. DELOUME, #, I. Q, doyen de la Faculté de droit,
place Lafayette, 4 21 décembre 1897
L'abbé AURIOL, rue de l'Université, 9 25 janvier 1898
G. DEPEYRE, avocat, rue Ninau, 15 24 mai 1898
Edouard PRIVAT, archiv. paléographe, rue des Arts, 14. 7 février 1899 P. BATIFFOL, p, prélat de S. S., recteur de l'Institut
catholique, rue de la Fonderie, 31 6 mars 1900
P. MARIA , agrégé à la Faculté de droit, place de la
Bourse, 19 6 mars 1900
JAUDON, $f, procureur de la République, rue du
Vieux-Raisin, 3
L. BAUZON, I. ©, directeur du petit Lycée 22 avriH902
NAVARRE, Q, professeur à la Faculté des lettres,
boulevard Armand-Duportal, 57 22 avril 1902
L'abbé SALTET, professeur à l'Institut catholique.. . 22 avril 1902
— Q — MM.
Date de leur nomination.
PLASSARD, professeur agrégé au lycée, place ArnaudBernard, 2 6 janvier 1903
DE BOURDES, O. #, colonel en retraite, rue SaintJoseph, 51 6 janvier 1903
Le comte BÉGOUEN, <$, rue Vélane, 16 l<" décembre 1903
L'abbé DEGERT, directeur de la Revue de Gascogne, professeur à l'Institut catholique 5 janvier 1901
Dr TACHARD,0. &, médecin de 1™ classe en retraite, rue Montplaisir, 11 5 janvier 1904
MEMBRES LIBRES
(Anciens membres résidants fixés à Toulouse ou dans la région).
MM.
E. LAPIERRE, I. Q, rue des Fleurs, 18, à
Toulouse Janvier 1873-juin 1891
E. PESSEMESSE Avril 1871-juin 1896
G. V1REBENT, rue de la République, 25.. . . Janvier 1882-déc. 1900 E. TRUTAT, #, I. Q, docteur es sciences, à
Foix février 1867-avril 1902
Le comte V. D'ADHÉMAR, rue Perchepinte. . 4 février 1867-avril 1902
L. DEMALAFOSSE, rue Vélane, 3 18 février 1868-avril 1902
L. GÈZE, A. P, Jardin-Royal, 7 23 mai 1876-avril 1902
MEMBRES HONORAIRES
MM.
J. CAPELLINI, O. $s sénateur du Royaume d'Italie,
professeur à l'Université de Bologne 9 janvier 1872
ANTHYME SAINT-PAUL, rue des Chartreux, 6, à
Paris 2 juillet 1889
Le comte F. DE RESSÉGUIER, secrétaire perpétuel de
l'Académie des Jeux-Floraux, à Toulouse. . .... 2 juillet 1889
G. PERROT, G. O. #, membre de l'Institut, directeur
de l'Ecole normale, à Paris 3 mars 1891
Le comte R. DE LASTEYRIE, $s membre de l'Institut,
rue du Pré-au**Clercs, 10 bits, Paris. 3 mars 1891
ROSCHACH, #, I. $|, correspt de l'Institut, à Toulouse. 16 février 1892
Mgr DOUAIS, évéque de Beauvais 25 janvier 1898
Elie ROSSIGNOL, p, à Montans, par Gaillac (Tarn). . 22 janvier 1901 8. A. le Prince Philippe DE 8AXE-COBOURG-GOTHA. 15 décembre 1903
MEMBRES CORRESPONDANTS
(L'astérisque (*) désigne les anciens membres résidants.) MM.
Date de leur nomination.
H. SCHUERMANS, premier président de la Cour d'appel, à Liège (Belgique) 7 juillet 1868
Edmond CABIÉ, à Roqueserrière (Haute-Garonne).. . 15 mars 1872
P. CAZALIS DE FONUOUCE, à Montpellier 7 décembre 1875
A. COUGET, ancien magistrat, à Saint Gaudcns. . . . 31 juillet 1877
Albert NIVEDUAB, à Alet (Aude) 28 mai 1878
DE GROUCHY, 29, avenue Montaigne, à Paris. . . . 18 février 1879
BARBIER, chanoine, à Ramiers 23 décembre 1879
LUCHAIRE, professeur à l'Université de Paris. . . . 29 juin 1880
PARFOURU, archiviste dTIle-et Vilaine, à Rennes.. . 28 juin 1881
F. POTTIER, chanoine, président de la Société archéologique de Tarn-et-Garonne, à Montauban. 19 juin 1883
G. DE MONBRISON, château de Saint-Roch, par Auvillar
Auvillar 19 juin 1883
W. TUCKERT, à Boston (Massachussets) 25 mars 1884
HOFFMANN, à Washington (Etats-Unis) 13 janvier 1885
Edouard FORESTIÉ, à Montauban 27 janvier 1885
* Abbé CAU-DURBAN, curé de Lavclanet (Ariège). . 24 février 1885 ESPÉRANDIEU, correspondant de l'Institut, capitaine
d'infanterie, 59, route de Clamart, à Vanves (Seine). 26 mai 1885
H. PÉRAGALLO, chef d'escadron au ll« d'artillerie,
à Bordeaux 21 juillet 1885
*L. DE NEUVILLE, à Livarot (Calvados) 15 féviier 1887
* DELORT, colonel, commandant en second de l'Ecole polytechnique, à Paris 15 février 1887
* GRINDA, architecte, boulevard de Strasbourg, 24, à Toulon-sur-mer (Var) 15 février 1887
Léon GERMAIN DE MAIDY, secrétaire perpétuel de
la Soc. d'arch. lorraine, rue Héré, 26, à Nancy. . . 19 avril 1887
Cte DE BERTIER-PINSAGUEL, château de Pinsaguel
(Haute-Garonne) 19 avril 1887
Gilbert GOUDIE, trésorier de la Société des antiquaires
d'Ecosse, à Edimbourg 6 mars 1888
Louis FÉDIÉ, président de la Société des Arts et
Sciences, à Carcassonne 13 mars 1888
* A. THOMAS, professeur en Sorbonne, rue Lôopold
Robert, 10, à Paris 5 février 1889
DEMÉLY, château du Mesnil, parFervacques(Calvados). 10 décembre 1889 E. TRAVERS, trésorier de la Société française d'archéologie, rue des Chanoines, 18, à Caen 17 juin 1890
MM.
Date de leur nomination.
Baron DE BAYE, avenue de la Grande-Armée, 58, à Paris. 8 juillet 18'JO
Henri de MONTÉGUT, château des Ombrais (Charente). 13 février 1891
Abel FERRÉ, à Martrcs-Tolosano (Haute Garonne). . 26 avril 1891
VIALETTE (abbé), archiviste du diocèse de Rodez.. . juin 1891
PONS, architecte diocésain, à Rodez juin 1S91
LEMPEREUR, archiviste de l'Avoyron, à Rodez. . . juin 1891 A. DE HOYM DE MARIEN, capitaine au 34e d'infanterie,
à Mont-de-Marsan (Landes).. décembre 1891
* Dom Antoine DU BOURG janvier 1892
Baron Alfred DE LOE, secrétaire de la Société d'archéologie de Bruxelles, 11, rue de Londres,-à Bruxelles. . mars 1892 Jules MOMMÉJA, conservateur du musée d'Agen (Lotet-Garonne) mars 1892
Paul DE FONTENILLES, château des Auriols, par Villemur
Villemur mai 1892
J. BERTHELË, archiviste de l'Hérault, à Montpellier. juin 1892 GALABERT, curé à Aucamville, par Verdun (Tarn-etGaronne) 3 janvier 1893
SALABERT, chanoine honoraire, à Albi. ...... 24 janvier 1893
ARAGON (abbé), curé de Saint-Simon, près Toulouse
(Haute-Garonne) 23 mai 1893
DUBARAT (abbé), aumônier du Lycée de Pau. . . . 4 juillet 1893 *MALE, professeur au lycée Louis-le-Grand, à Paris. 20 décembre 1893
MARSAN (abbé), curé de Saint-Lary (Rtes-Pyrénées).. 20 mars 1894
ESQUIROL, à Poitet (Haute-Garonne) r, mars 1895
TAILLEFER (abbé), curé à Cazillac (Tarn-et-Garonne). 23 avril 1895
DOUBLET, professeur de rhétorique au lycée de Nice. 2 juillet 1895
DELBREL(abbé),àVillefranchede Périgord (Dordogne). 16 juillet 1895
PORTAL, archiviste du Tarn, à Albi 10 décembre 1895
Aug. MAURETTE (abbé), à Lôdar (Ariège) 21 janvier 1896
R. P. Marie-Bern.FLORAN, curé de Conques (Aveyron) 21 janvier 1896
"Charles DE SAINT-MARTIN, à Verdun (Tarn-et-Gar.). 19 avril 1896
Marquis DE CHAMPREUX, à Montgeard (Haute-Gar.). 5 mai 1896
Mgr DE CARSALADE DU PONT, évêque de Perpignan. 12 mai 1896
A. LAVERGNE, à Castillon-dc-Batz (Gers) 6 juillet 1896
TH1ERNY, archiviste du Gers, à Auch 6 juillet 1896
BRANET, à Auch 6 juillet 1896
CALCAT, juge d'instruction, à Bellac (Haute-Vienne). 6 juillet 1896
BAR-FERREE, à New-York 8 décembre 1896
NICOLAÏ, secrétaire général de la Société archéologique de Bordeaux, rue d'Albrct, 17 2 février 1897
ÊRANCESCO MESTRE Y NOË, à Tortose (Espagne). 9 mars 1897
VIDAL, chef de bureau à la Préfecture du Tarn, à Albi. 23 mars 1897 TREY-SIGNALÈS , à Saint-Bertrand-de-Comminges
(Haute-Garonne) 25 mai 1897
MM.
Date de leur nomination.
Comte DE YILLÈLE, à Caraman (Haute-Garonne). . . 29 juin 1897 Marquis DE SAINT-GENIEZ, capitaine au 3e régiment
d'artillerie, à Castres 21 décembre 1897
* Abbé LESTRADE, curé de Gragnague (Haute-Gar.). 25 janvier 1898 Pierre AUBRY, archiviste paléographe, avenue de
Wagram, 74, à Paris 1" mars 1898
Pclegrin CASADES Y GRAMATXES, D' de l'Assoc.
archéol. de Barcelone, calle do la Canuda, 4 12 juillet 189S
Raymond PONTNAU, à St-Sulpice-de-la-Pointe (Tarn). 25 avril 1899
Jean DECAP, instituteur, à Muret (Haute-Garonne). . 6 juin 1899
Théodose BESSERY, à Lava tir (Tarn) 27 juin 1899
Robert TRIGER, aux Talvasières, par Le Mans(Sarthe). 4 juillet 1899
*S. E. Mgr MATHIEU, cardinal de Curie, à Rome. . . Décembre 1896
Robert ROGER, à Pamiers (Ariège) 30 janvier 1900
AbbéLouisBLASY.curéàMontoulieu, prèsFoix(Ariège) 13 février 1900
Urbain CABROL, à Rodez (Avcyron) 27 mars 1900
Abbé HERMET, curé à L'Hospitalet (Aveyron). . . . 29 mai 19(111 Abbé Camille DAUX, grand'rue de Sapiac, 47, à Montauban 11 juin 1901
G. SAIGE, correspondant de l'Institut, directeur des
archives, à Monaco avril 1902
*LANES, O. $:, intendant militaire, directeur du service, à Marseille ;'2 avril 1902
LAMOUZÈLE, docteur en droit, conseiller de préfecture à Tulle '. . 21 janvier 1902
Abbé QUEREL, curé à Arthés, par Sl-Juéry (Tarn). . 11 mars 1902
Roger ROOIÈRE, à Montrcuil-sur-Mer 17 février 1903
Abbé BAGNERIS, curé de Saint-Clar 9 juin 1903
Léon DE LOTH, à Manosqiie (Basses-Alpes) 16 juin 1903
CAZAC, proviseur du lycée de Bayonne 2 février 1901
DE SANTI, médecin en chef à l'hôp. mil. de Bayonne. 22 mars 1904
Jean BOURDETTE, allées St-Michcl, M bis, à Toulouse. 22 mars 19uï
_ 7 -
SOCIÉTÉS AVEC LESQUELLES IL Y A ÉCHANGE DE PUBLICATIONS
France.
AGEN. — Société d'agriculture, sciences et arts (Lot-et-Garonne).
AIX-EN-PROVENCE.— Société d'études provençales (Bouches-du-Rhàne).
ALAIS. — Société scientifique et littéraire (Gard).
ALBI. — Société des sciences, arts et belles-lettres (Tarn).
ALENÇON. — Société historique et archéologique (Orne).
AMIENS. — Société des antiquaires de Picardie (Somme).
AMIENS. — Académie des sciences, belles-lettres et arts (Somme).
ANGERS. — Société nation, d'agriculture, se. et arts (Maine-et-Loire).
ANGOULÈME. — Société archéologique (Charente).
ANNECY. — Société florimontane (Haute-Savoie).
ARRAS. — Commission des monuments historiques (Pas-de-Calais).
AUCH. — Société historique de la Gascogne (Gers).
ACCH. —Société archéologique (Gers).
AUTUN. —• Société éduenne des lettres, sciences et arts (Saône-et-Loire).
AUXERRE. — Société des sciences historiques et naturelles (Yonne).
AVESNES. — Société archéologique (Nord).
AVIGNON. —Académie (Vaucluse).
BAGNÈRES-DE-BIGORRE. — Société Ramond (Hautes-Pyrénées).
BAR-LE-DUC. — Société des lettres, sciences et arts (Meuse).
BASTIA. — Société historique et archéologique (Corse).
BAYONNE. — Société des sciences et des arts (Basses-Pyrénées).
BEAUNE. — Société d'histoire, d'archéol. et de littérature (Côle-d'Or).
BEAUVAIS. — Société acad. d'archéologie, sciences et arts (Oise).
BELFORT. — Société belfortaine d'émulation.
BESANÇON. — Société d'émulation (Doubs).
BESANÇON. — Académie des sciences, belles-lettres et arts (Doubs).
BÉZIERS. — Société archéologique (Hérault).'
BLOIS. — Société des sciences et lettres (Loir-et-Cher).
BÔNE. —Académie d'Hippone (Algérie).
BORDEAUX. — Société archéologique (Gironde).
BOURGES. — Société historique, littéraire et scientifique (Cher).
BOURGES. — Société des antiquaires du Centre (Cher).
BREST. — Société académique (Finistère).
BRIVE. — Société historique et archéologique (Corrèze).
CAEN. — Société des antiquaires de Normandie (Calvados).
CAEN. —Société française d'archéologie (Calvados).
- 8 -
CAHORS. — Société des éludes littéraires et scientifiques (Lot).
CANNES. — Société des sciences nat. et hist. (Alpes-Maritimes).
CARCASSONNE. — Société des arts et sciences (Aud'e).
CARCASSONNE. — Société des études scientifiques (Aude).
CHALON-SUR-SAÔNE. — Société d'histoire et d'archéologie (Marne).
CHALONS-SUR-MARNE. —Société d'agriculture, sciences et arts (Marne).
CHAMBÉRY. —Académie des sciences, belles-lettres et arts (Savoie).
CHAMBÉRY. — Société savoisienne d'histoire et d'archéologie (Savoie).
CHARTRES. — Société archéologique (Eure-et-Loir)-.
CHATEAUDUN. — Société dunoise (Eure-et-Loir).
CHÂTEAU-THIERRY. — Société historique (Aisne).
CHERBOURG. —Société académique (Manche).
COMPIÈGNE. -r- Société historique (Oise).
CONSTANTINE. — Société archéologique (Algérie).
DAX. — Société de Borda (Landes).
DIGNE. — Société scientifique et littéraire (Basses-Alpes).
DIJON. — Académie des sciences, arts et belles-lettres (Côte-d'Or).
DIJON. —■ Commission des antiquités (Côte-d'Or).
DOUAI. — Société d'agriculture, sciences et arts (Nord).
DRAGUIGNAN. — Société d'études scientifiques et archéologiques (Var).
EPINAL. — Société d'émulation (Vosges).
EVREUX. —■ Société libre d'agriculture, sciences et arts (Eure).
FOIX. — Société ariégeoise des sciences, lettres et arts (Ariège).
GAP. — Société d'études historiques (Haulçs-Alpes).
GRENOBLE. — Académie Delphinale (Isère).
GUÉRET. — Société des sciences naturelles cl archéologiques (Creuse).
HAVRE (LE). — Société nationale havraise d'études diverses (Seine-Inf.).
LILLE. — Commission historique (Nord).
LILLE. — Société d'agriculture, sciences et arts (Nord).
LIMOGES. —■ Société archéologique et histor. du Limousin (Hte-Vienne).
LAON. — Société académique (Aisne).
LONS-LE-SAULNIER. — Société d'émulation (Jura).
LYON. — Académie des sciences, belles-lettres et arts (Rhône).
LYON. — Société littéraire, historique et archéologique (Rhône).
MAÇON. — Académie des sciences, arts et belles-lettres (Saône-et-Loire).
MANS (LE). — Société historique et archéologique du Maine (Sarthe).
MARSEILLE. —Société de statistique (Bouches-du-Rhône).
MARSEILLE. — Société provençale d'archéologie (Bouches-du-Rhône).
MENDE. — Société d'agriculture, sciences et arts (Lozère).
MONTAUBAN. — Société archéologique (Tarn-et-Garonne).
MONTAUBAN. — Académie des sciences, b.-lettres et arts (Tarn-el-Gar.).
MONTBÉLIABU. — Société d'émulation (Doubs).
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MONTBRISON. — Société historique du Forez, La Diana (Loire).
MONTPELLIER. — Société archéologique (Hérault).
MONTPELLIER. — Académie des sciences et lettres (Hérault).
MOULINS. — Société d'émulation du Bourbonnais (Allier).
NANCY. — Société d'archéologie lorraine (Meurthe-et-Moselle).
NANTES. — Société archéologique (Loire-Inférieure).
NAIIBONNE. — Commission archéologique (Aude).
NEVERS. — Société nivernaise des lettres, sciences et arts (Nièvre).
NICE. — Société des lettres, sciences et arts (Alpes-Maritimes).
NÎMES. —Académie (Gard).
NIORT. —Société de statistique, sciences, lettres et arts (Deux-Sèvres).
NOYON.—• Comité archéologique et 'historique (Oise).
ORAN. — Société de géographie et d'archéologie (Algérie).
ORLÉANS. —Société archéol. et historique de l'Orléanais (Loiret).
PARIS. — Académie des inscriptions (Institut).
PARIS. — Société française de numismatique et d'archéologie.
PARIS. — Société nationale des antiquaires de France.
PARIS. — Société philolechnique.
PARIS. —Comité des travaux historiques et archéologiques, auMinistère.
PARIS. — Société de l'histoire de France.
PARIS. — Société d'anthropologie.
PAU. —Société des sciences, lettres et arts (Basses-Pyrénées).
PÉRIGUEUX. — Société historique et archéol. du Périgord (Dordogne).
PERPIGNAN. — Société agricole, scient, et litt. (Pyrénées-Orientales).
POITIERS. — Société des antiquaires de l'Ouest (Vienne).
PUY (LE). — Société d'agriculture, sciences et arts (Haute-Loire).
QUIMPER. —• Société archéologique (Finistère).
RAMBOUILLET. —Société archéologique (Seine-et-Oise).
REIMS. — Académie nationale (Marne).
RENNES. — Société archéologique (Ille-et-Vilaine).
ROCHECHOUART. — Société des amis des sciences et arts (Hte-Vienné).
ROCHELLE (LA). — Académie (Charente-Inférieure).
RODEZ. — Société des lettres, sciences et arts (Aveyron).
ROMANS. — Comité d'histoire et d'archéologie (Drôme).
ROUEN. — Commission départementale des antiquités (Seine-Inf.).
ROUEN. — Les amis des monuments rouennais (Seine-Inférieure).
SAINT-BRIEUC. — Société d'émulation (Côtes-du-Nord).
SAINT-GAUDENS. —Société des études du Comminges (Haute-Garonne).
SAINT-Lô. — Société d'agriculture, d'hist. el d'archéologie (Manche).
SAINT-OMER. — Société des antiquaires de la Morinie (Pas-de-Calais).
SAINT-QUENTIN. — Société acad. des sciences, arts et b.-lettres (Aisne).
SAINTES. — Sociétédes archives historiques de\laSaintonge(Char,-Inf.).
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SAINTES. — Commission des arts et monuments (Charente-Inférieure).
SEMUR. — Société des sciences historiques et naturelles (Côte-d'Or).
SENLIS. — Comité archéologique (Oise).
SENS. — Société archéologique (Yonne).
SOISSONS. — Société archéologique, scientifique et historique (Aisne).
SOUSSE. — Société archéologique (Tunisie).
TANANARIVE. — Académie malgache (Madagascar).
TARBES. — Société académique (Hautes-Pyrénées).
TOULON. — Académie (Var).
TOURS. — Société archéologique de la Touraine (Indre-et-Loire).
TUNIS. — Institut de Cartilage.
VALENCE. — Société d'archéologie et de statistique (Drôme).
VANNES. — Société polymatique (Morbihan).
VENDÔME. — Société archéologique, scient, et litt. (Loir-et-Cher).
VESOUL. — Société d'agriculture, sciences et arts (Haute-Saône).
VITRY-LE-FRANÇOIS. — Société des sciences et arts (Marne).
TOULOUSE. — Académie des jeux Floraux.
TOULOUSE. — Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres.
TOULOUSE. — Académie de législation.
TOULOUSE. — Société de médecine, chirurgie et pharmacie.
TOULOUSE. — Société d'agriculture de la Haute-Garonne.
TOULOUSE. — Société de géographie.
Allemagne, Luxembourg, Autriche-Hongrie.
METZ. — Académie.
STRASBOURG. — Société des monuments historiques d'Alsace.
TRÊVES. — Gesellschafl fur Mutzlich Forschungcn, Provinzial Muséum.
ARLON. — Institut archéologique du Luxembourg.
HEIDELBERG. — Neue Heidelberger Iahrbùcher.
IÉNA. — Verein fur Thiiringische Geschichtc und Altertumskunde.
AGRAM. — Bullctino di Societa archeologica Croala. Musée national,
Zareb, Croatie. SPALATO. — Bullctino di archeologia e storia dalmala. PRAGUE. — Musée archéologique de la Bohême.
États-Unis, Amérique.
CHICAGO. — Académie des sciences. DAVENPORT. — Academy of natural science, lowa. WASHINGTON. — Smithsonian Institution. WASHINGTON. — Bureau of ethnology. — Geological and geographical Survey.
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WASHINGTON. — Anlhropological Institution. MEXICO. — Société scientifique Antonio Alzate.
Angleterre, Canada.
CAMBRIDGE. — Société des antiquaires. EDIMBOURG. — Société des antiquaires d'Ecosse. LONDRES. — Royal archseological Institute of Great Brilain. LONDRES. — Royal institution of Great Britain. MONTRÉAL. — Société de numismatique et d'archéologie.
Belgique.
ANVERS. — Académie d'archéologie de Belgique.
BRUXELLES. — Société d'archéologie.
BRUXELLES. — Académie royale de Belgique.
BRUXELLES. — Commission royale d'art et d'archéologie.
BRUXELLES. — Société royale de numismatique belge.
BRUXELLES. — Société des Bollandistes, 14, rue des Ursulines.
CHARLEROY. — Société paléonlologique et archéologique.
GAND. — Société d'histoire et d'archéologie.
LIÈGE. — Société libre d'émulation.
LIÈGE. — Institut archéologique liégeois.
MAESTRICHT. — Société historique et archéologique.
MONS. — Cercle archéologique.
NAMUR. — Société archéologique.
NIVELLES. — Société archéologique.
TERMONDE. — Cercle archéologique.
TOURNAY. — Société historique et archéologique.
Danemark et Suède.
COPENHAGUE. — Société royale des antiquaires du Nord. STOCKHOLM. — Académie d'histoire et d'archéologie. UPSAL. — Université.
Egypte. LE CAIRE. — Institut Egyptien.
Espagne, Portugal, Italie.
BARCELONE.—Associationdes excursionnistes catalans (Pa.radis,\0,2° a).
BARCELONE. — Association artistica arqueologica.
MADRID. — Real Academia de la historia (Calle de Léon, 21).
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PALMA (de Mayorque). — Socielad arqucologka Luliana. LISBONNE. — Academia real das scicncias e bellas lettras. LISBONNE. — Real associacao dos architeclos e archeologos. MODÈNE. — Académie royale des lettres et arts. CAMERINO. — Bullctino di numismatica e sfragislica. ROME. — Accademia dei Lincei. ROME. — Commissione archeologica communale. NAPLES. — Academia di archeologia, lettere e belle arli. TURIN. — Societa di archeologia e belle arti.
Russie, Grand-Duché de Finlande.
SAINT-PÉTERSBOURG.— Commission impériale archéologique. Moscou. — Société impériale archéologique. HELSINGFORDS. — Société finlandaise d'archéologie.
Suisse.
BALE. — Société d'histoire et d'archéologie. BERNE. — Société d'histoire du Canton. GENÈVE. — Société d'histoire et d'archéologie. NEUCHATEL. — Société de géographie. SOLEURE. — Société d'archéologie. ZURICH. — Société des antiquaires.
REÇOIVENT AUSSI LE BULLETIN
Grand Musée des Augustins, à Toulouse.
Musée Saint-Raymond, —
Bibliothèque universitaire, —
Bibliothèque de la ville, rue Lakanal, —
Archives départementales, à la Préfecture, —
Archives municipales, donjon du Capitule, —
Institut catholique, rue de la Fonderie, —
Bibliothèque pédagogique, —
Société de jurisprudence, au Tribunal, —
Le Bulletin est régulièrement envoyé, en outre, en dehors de Toulouse, à un certain nombre de Bibliothèques publiques, de Bibliothèques universitaires et de dépôts d'archives départementales.
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LISTE DES REVUES QUE REÇOIT LA SOCIÉTÉ
Revues des Pyrénées et de la France méridionale. — Toulouse.
Annales du Midi. — Toulouse.
Revue de Gascogne. — Auch.
Revue du département du Tarn. — Albi.
Revue de l'Agenais. — Agen.
Revue Méridionale. — Carcassonne (Aude).
Revue de l'Art chrétien. — Lille, 41, rue de Metz.
Revue archéologique. — Paris.
Bulletin monumental. — Paris.
Romania. — Paris.
Journal des Savants. — Paris.
Bulletin archéologique (Ministère). — Paris.
Bulletin historique et philologique (Ministère). — Paris.
Bulletin du comité des beaux-arts (Ministère). — Paris.
Revue belge de numismatique. — Bruxelles.
The archxlogical Journal. — Londres.
Notizie degli scavi di antichita. — Rome.
Revue du Roussillon. — Perpignan.
Bulletin historique du diocèse. — Lyon, 25, rue du Plat.
Société Saint-Jean, notes d'art et d'archéologie. — Lyon.
Revue d'histoire de Lyon, rue Gentil, 4.
La Tradition, 8, quai des Orfèvres, Paris..
Revue des Eludes historiques, rue de l'Université, 47, Paris.
Revue Tunisienne, hôtel des Sociétés françaises, Tunis.
Le Pyrénéen. — Pau.
La Revue provinciale. — Toulouse.
Le Lauraguais. — Villefranche (Haute-Garonne).
L'Avenir de l'Ariège. — Foix.
Portugalia, matériaux pour l'hist. du peuple Portugais. — Porto.
ANNÉE ACADÉMIQUE 1903-1904
Séance de rentrée du 17 novembre 1903.
Présidence de M. DU LAHONDÈS.
La Société a reçu, pendant la période des vacances, et comme d'ordinaire, une série considérable de publications françaises et étrangères envoyées par les Académies et Sociétés dont la liste est ci-dessus.
La correspondance manuscrite comprend une lettre du Maire de Toulouse informant que, par arrêté en date du 24 octobre, le Président de la Société archéologique du Midi est nommé membre de la Commission de surveillance du Musée de peinture et de sculpture. « En lui confiant cette mission, l'Administration a voulu donner un témoignage de gratitude à la Société archéologique du Midi do la France, dont le dévouement éclairé a su augmenter dans de notables proportions les richesses archéologiques de notre Musée. »
La Société entend la lecture de cette lettre et apprend cette nouvelle avec la plus vive satisfaction. Elle exprime sa gratitude à la Municipalité toulousaine.
M. LE PRÉSIDENT lit une lettre de M. Emile Cartailhac, secrétaire général de la Société, s'excusant de ne pas être présent à la reprise des séances. En collaboration avec M. Boule, professeur de paléontologie au Muséum et le Dr Verneau, professeur assistant d'anthropologie au même établissement, il poursuit dans le nouveau Musée anthropologique de Monaco l'étude des collections retirées des grottes des Baousse-Rousse, près de Menton, grâce aux fouilles ordonnées depuis neuf ans par le prince Albert et effectuées, avec un soin admirable et un grand succès, sous la direction de M. le chanoine L. de Villeneuve. Le prince de Monaco entend que ces belles trouvailles soient publiées avec tout le soin désirable.
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M. CARTAILHAC informe la Société que le nécessaire a été fait pour l'associer aux événements qui viennent de se passer à Autun. Les 19 et 20 septembre, la Société Eduenne a rendu un solennel hommage à la mémoire de M. Gabriel Bulliot et ainaugurô un monumont commômoratif à Autun et un autre au sommet du mo'it Beuvray, au centre de l'oppidum de Bibracte, que cet archéologue a si magistralement fait connaître au monde savant. Los délégués do l'Institut et d'un grand nombre de compagnies s'étaient rendus à l'appel do la Société Eduenne. Notre confrère, M. Graillot, quodes liens particuliers rattachaient d'ailleurs à l'illustre historien, avait bien voulu représenter la Société archéologique. De plus, une dépêche a été envoyée do Toulouse le jour même et lue à la cérémonie pour témoigner davantage de nos sentiments cordiaux pour nos savants confrères d'Autun et de notre admiration pour l'oeuvre féconde do Bulliot. M. Dochelette, dont les beaux travaux sur la céramique gallo-romaine ont éclairé si largement notre archéologie méridionale, est le neveu de Bulliot et continue ses traditions sur le terrain et dans le superbe Musée d'Autun.
M. LE PRÉSIDENT adresse les félicitations de la Société à M. Lécrivain, membre résidant, à l'occasion de la haute récompense que l'Académie des Inscriptions vient de lui décerner (Prix Bordin).
M. DB CASTERAN, membre résidant, offre à la Société une pierre sculptée trouvée près de la clef de voûte de l'église récemment restaurée de Bertren-Basse-Barousse. Il est assez difficile d'identifier le personnage qu'elle représente très grossièrement ; le buste est nu et très grêle, sans proportions avec la tête ceinte d'un bandeau; le cou paraît orné d'un collier ; la pierre est cassée au niveau de la ceinture. Elle appartenait sans doute à l'un de ces monuments funéraires dont la même région a fourni de nombreux spécimens. Elle serait romaine, d'une époque très tardive et de la main d'un sculpteur très malhabile.
Communication de M. LAMOUZÈLE, membre correspondant : Une affiche curieuse relative à l'invention des aérostats.
Le 5 juin 1783 eut lieu, à Annonay, en présence des Etats provinciaux du Vivarais, l'ascension de la première Montgolfière inventée par les frères Joseph et Etienne de Montgolfîer. La môme expérience fut renouvelée à Paris, le 27 août de la même année.
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Le gouvernementcraignit que cette invention extraordinaire pour l'époque ne causât une panique, surtout en province. Pour rassurer la population, il fit insérer dans la Gazelle de France du 2 septembre 1783, une note explicative sur la nouvelle découverte. Cet avis fut reproduit dans des affiches dont nous possédons un exemplaire imprimé à Montpellier, chez JeanFrançois Picot, imprimeur du roi et de la ville. En voici la copie in extenso : Extrait de la Gazelte-de France, du mardi 2 septembre 1783.
o On a fait une découverte dont le gouvernement juge convenable de donner connaissance, afin de prévenir les terreurs qu'elle pourroit occasionner parmi le peuple.
» En calculant la différence de pesanteur entre l'air appelé inflammable et l'air de notre atmosphère, on a trouvé qu'un ballon rempli de cet air inflammable, devait s'élever de lui-même vers le ciel, pour ne s'arrêter qu'au moment où les deux airs seraient en équilibre; ce qui ne peut être qu'à une très grande hauteur. La première expérience en a été faite à Annonay, en Vivarais, par les sieurs Montgolfior, inventeurs : Un globe de toile et de papier, de 105 pieds de circonférence, rempli d'air inflammable, s'est élevé de lui-même à une hauteur qu'on n'a pu calculer. La même expérience vient d'être renouvelée à Paris (le 27 août, à 5 heures précises du soir), en présence d'un nombre infini de personnes; un globe de taffetas enduit de gomme élastique, de 36 pieds de tour, s'est élevé du Châmps-de-Mars jusque dans les nues, où on l'a perdu de vue; il a été dirigé par le vent vers le nord-est, et on ne peut prévoir à quelle distance il sera transporté. On se propose de répéter cette expérience avec des globes beaucoup plus gros. Chacun de ceux qui découvriront dans le ciel de pareils globes, qui présentent l'aspect de la lune obscurcie, doit donc être prévenu que loin d'être un pbénomônc effrayant, ce n'est qu'une machine toujours composée de taffetas, ou de toile légère revêtue de papier, qui ne peut causer aucun mal, et dont il est à présumer qu'on fera quelques jours des applications utiles aux besoins delà société. »
A propos de la communication précédente, M. DELORME, membre résidant, présente deux médailles frappées en l'honneur des frères Montgolfier et dont voici la description :
1» Têtes superposées des frères Montgolfier. Légende : JOSB. ET ETIE.V. MONTGOLFIER.
Exergue : POUR AVOIR RENDU L'AIR NAVIGABLE. (N. Gatteaux f.) fî). Vue du Champ-de-Mars, à Paris, et d'un ballon élevé au-dessus des nuages. Exergue : EXPÉRIENCE DU CHAMP-DE-MARS, 27 AOÛT 1783.
BDLL. 32, 1904. 2
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EN VERTU D'UNE SOUSCRIPTION SOUS LA DIRECTION DE Mr FAUJAS DE S1 FOND.
2° Buste du roi Louis XVI.
R]. La terre couronnée de tours, assise sur un lion, étonnée de voir dans les airs un ballon sous lequel un génie tient une torche enflammée; à ses pieds, des clefs.
Légende : ATTONITUS onms TERRARUM. (L'Univers étonné.) Exergue : ITINERE PER AERAFELICITKR TENTATO.
ANNO MDccLxxxiii. (Gatteaux F.) (Voyage à travers les airs entrepris avec succès en 1783.)
M. J. DE LAHONDÈS appelle l'attention de la Société sur un article de la Revue Archéologique, p. 2(52-301, 1903, qui est une description du Musée chrétien dans la chapelle de Saint-Louis au château de SaintGermain-en-Layc. Ce Musée est composé, en grande partie, de moulages choisis avec soin parmi les objets en pierre relatifs à l'histoire du christianisme dans la Gaule romaine et mérovingienne. Il a été ouvert en 1902, et son succès a été si considérable que le public y est admis même les jours fériés et après l'heure réglementaire de fermeture. On y remarque surtout des sarcophages et des inscriptions ; plusieurs moulages sont des reproductions d'originaux appartenant au Musée de Toulouse, à la collection J. Sacaze, aujourd'hui àBagnères-de-Luchon, àl'églisode Valcabrcre, au Musée etàla cathédrale de Narbonne ; beaucoup viennent d'Arles. Mais la chapelle qui renferme cette collection précieuse offre un intérêt plus attirant encore peut-être avec les têtes sculptées à la clef de voûte et sous les retombées des croisées d'ogives, dans lesquelles M. Salomon Reinach croit pouvoir reconnaître celles de saint Louis et de la famille royale. La chapelle fut en effet construite par Louis IX, de 1230 à 1240. Longtemps abandonnée et presque ruinée, elle fut restaurée avec le château après 1862 par MM. Millet Lafollye et Daumet qui y ont mis au jour ces têtes curieuses.
La tête qui peut être prise pour celle de saint Louis est sculptée sur la clef de la première croisée d'ogives à l'est. M. de Lahondès ne voit pas de contradiction entre cette supposition et le petit nombre de représentations que l'on connaît de la ligure du saint roi. Il retrouve, dans la sculpture de Saint-Germain, les yeux largement ouverts, le nez long, le menton fort et les larges boucles de cheveux encadrant les traits, la physionomie à la fois douce et ferme. II la
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rapproche de la statue qu'il a signalée au portail de Saint-Vincent de Carcassonne, qui est certainement celle du saint roi, puisqu'elle porte le sceptre et la couronne d'épines, mais à un âge plus avancé, tandis que le buste de Saint-Germain est celui d'un homme de vingtcinq à trente ans. La statue de Carcassonne montre aussi l'inclinaison habituelle de la tête qui était une caractéristique du personnage (1). Une tête de femme portant la couronne serait cello de Blanche do Caslille. M. le Président fait remarquer l'expression énergique et volontaire des yeux fixes, des lèvres minces, du menton proéminent, expression qui manifeste en effet le caractère do la reine, tandis que les peintres romantiques qui avaient à la représenter lui donnaient plutôt une figure délicate et douceâtre. M. Salomon Reinach a publié les photographies de ces têtes avec dos explications dans la Gazette des Beaux-Arts du 1" septembre 1903 et la Revue Archéologique do septembre-octobre de la même année.
Séance du mardi 24 novembre 1903.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Lecture est donnée de deux lettres signalant des découvertes archéologiques à Vic-Fezenzac (Gers) et à Revel (Haute-Garonne) qui paraissent peu intéressantes.
M. PASQUIER offre, au nom de l'éditeur fuxôen, M. Gadrat, l'Almanach patois de l'Ariège pour 1904.
Parmi les publications déposées sur le bureau, le secrétaire signale le tome III des leçons de Louis Courajod, acquisition de la Société ; ce volume est intitulé : Origines de l'art moderne.
M. J. DE LAHONDÈS analyse cet ouvrage en ces termes :
Leçons de Courajod : Origines de l'art moderne.
Le troisième volume des leçons de Courajod n'offre pas le même intérêt que les deux premiers. Il n'est guère rempli tout entier que des plaintes, fort légitimes il est vrai, mais parfois un peu excessives, au sujet de la déviation de l'art national français, par l'éducation académique et classique
(1) Bull. arch. du Comité des trav. hist., 1899, 483.
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du dix-septième siècle. La première renaissance avait été mue par une inspiration idéale et pure; celle de Henri IV, et surtout de Louis XIV, fut artificielle et pédante. Quelle différence entre la souplesse et la grâce naïve des vertus clc Germain Pilon, l'indépendance personnelle de leur conception, le sentiment naturel de leur facture, et celles de Prieur autour de la colonne supportant le coeur d'Anne de Montmorency, froides, convenues, servilement imitées de l'antique; entre les cariatides de Jean Goujon, qui semble avoir deviné, sans les avoir vues, celles del'Erechteïon, tantsajuste conception de l'art de la statuaire se rapprochait de celle de l'art grec, et les allégories pompeuses et sans accent qui alourdissent tant de frontons et de façades; plus tard aussi entre la grâce émue et exquise de Prudhon cet autre grec et les figures de David dont toules les femmes sont des Vénus de Médicis, et tous les hommes des Antinous.
L'historien critique oppose sans cesse l'art du moyen âge issu librement du concours des forces naturelles, qui s'agitaient dans le pays aux sept premiers siècles de notre ère , expression harmonieuse et spontanée de la personnalité nationale, à la déviation amenée par la copie servile non pas même de l'art antique, mais de l'interprétation de l'art antique par l'Italie, étudié dans Vignole plus que dans Vitruve. L'art chrétien, l'art occidental avait rejeté justement l'élément latin et païen que l'on faisait revivre. On ne peut nier cependant que l'art monumental chrétien, s'il emprunte une part de son ornementation à l'Orient, à l'Asie antérieure et aux peuples du nord, s'il s'inspire d'un sentiment nouveau exprimé par des lignes et des formes qu'il crée, dérive logiquement des constructions romaines. La Gaule était devenue romaine par la langue, par l'organisation administrative que les évoques eux-mêmes avaient suivie en lui empruntant les divisions et le nom même des diocèses. L'architecture romane adopte les principes de la construction romaine et l'architecture gothique tout en devenant profondément originale, n'en est que le développement.
Le fétichisme de l'art italien fut entretenu surtout par l'académie fondée par Louis XIV; il s'est continué jusqu'à nos jours par l'école de la villa Médicis. Il a fortement contribué à désintéresser l'esprit français du sentiment et du goût de l'art, qui était instinctif aussi cliez nous au moyen âge, mais qui s'est détourné, lorsqu'on a cessé de créer des monuments, des statues et des peintures inspirées par les nécessités du climat, les souvenirs nationaux et chrétiens qu'on affectait de mépriser, pour ne lui montrer que d'inutiles mensonges, de froides images étrangères à ses croyances et à ses traditions, exigeant un effort et souvent une torture de l'esprit pour se faire comprendre.
. La colonnade de Perrault, par exemple, artificielle et contradictoire avec le monument admirable qu'elle prétend compléter et qu'elle faussa, inhabitable et vain décor, est d'ailleurs une imitation si maladroite des temples
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antiques, qu'elle ne tient que grâce à des goujons et \ des chaînages de fer embrochant tout les claveaux des linteaux, et devant la ligne monotone et dure, sans combles et sans cheminées , qui détache sur le ciel la façade de Versailles, Saint-Simon s'écrie qu'il croit voir un palais incendié, dont on n'a pas rétabli les toitures.
Toutes nos églises copièrent celles de Rome, le Gésu surtout, leurs colonnes et pilastres d'ordre colossal, leurs façades aux ordres superposés, leurs frontons brisés si ridicules. Le règne du baroque et le rococo qui en dérive vinrent aussi d'Italie. La statuaire adopta les mouvements tumultueux, les draperies agitées comme par la tempête du Bernin et de Jean . do Rologne, ce Français qui voulut devenir Italien.
Le génie français sut cependant se dégager de ces serviles contraintes, . et produire des oeuvres où éclate le sentiment spiritualiste, et le goût noble et fin de la race. Il sut aussi caractériser pour la postérité l'époque triom 1 phale et pompeuse du grand règne. Dans la première moitié du siècle, toutefois, il s'était mieux conformé aux traditions nationales et avait suivi le mouvement généreux et fécond dirigé par François de Sales, Vincent de Paule, Ollier, de Bérulle, et tant d'autres.
D'ailleurs l'art national n'avait jamais cessé de résister depuis Montaigne qui, en pleine Renaissance, continuait à s'émouvoir dans « la vastité sombre de nos églises, » jusqu'à Mmo de Stac), se plaignant que la littérature et l'art académique aient fait perdre à la France et à l'Allemagne le sens dé leur nationalité et à Bernardin de Saint-Pierre, raillant les allégories païennes qui s'étalaient dans les cathédrales sur les tombeaux des chrétiens. Plusieurs églises gothiques furent encore construites pendant le dixseptième siècle ; les jésuites eux-mêmes, fort maltraités par Courajod, au point de vue monumental s'entend, en élevèrent un grand nombre qui viennent d'être étudiées tout récemment dans le Bulletin Monumental, et c'est un jésuite, Courajod nous le rappelle, le père Laugier, qui, en 1753, . proclame son admiration pour Noire-Daine, la convenance avec la destination, la hauteur.et les dégagements des vastes nefs, tandis qu'il ne voit à Saint-Sulpice que des épaisseurs et des masses, grosses arcades, gros pilastres et lourde voûte, dont la pesanteur fait craindre même pour l'insuffisance de si gros appuis.
Le servage de l'art national sous la tyrannie antique a persisté jusqu'à Winchelman, idolâtre exclusif des Grecs dont il ne connaissait pas les créations les plus pures et les plus belles, qui regardait l'Apollon du Belvédère et le Laocoon comme les chefs-d'oeuvre suprêmes qu'il était interdit désormais au génie humain de dépasser, jusqu'à David qui, comme malgré lui, s'affranchissait de celte tyrannie en s'inspirant de la nature dans ses admirables portraits, jusqu'à Cigognara, Seroux d'Agincourt et Qualremère de Quincy, écrivait encore, en 1832, que si les flèches et les voûtes gothi-
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ques pouvaient étonner par leur hardiesse, élevées sans règles et sans proportions, elles ne méritaient pas plus d'admiration que les constructions surprenantes des castors.
Courajod observa aussi que l'art académique uniformisa toutes les écoles provinciales qui perdirent leur caractère particulier, et ne produisirent plus guère que des imitations des Bolonais. N'oublions pas que deux des théoriciens de cet art classique imposé furent des Toulousains : Hilaire, Pader et Dupuy Dugrez, et que l'homme de grand goût cependant, à qui nous devons nos belles promenades, M. de Mondran, demandait que toutes les façades de nos églises gothiques fussent détruites et remplacées par des superpositions d'ordres antiques, afin de ne pas détourner les yeux des modèles de la belle architecture.
Le sens des beautés de l'art médiéval est aujourd'hui rentré dans les esprits, en même temps que l'art grec original et créateur qu'ignoraient encore nos deux siècles classiques, celui d'Egine, d'Olympie et de l'Acropole, était révélé dans son essor puissant et pur, après que la victoire de Navarin eut ouvert la radieuse péninsule aux artistes et aux archéologues. C'est pourquoi le goût de l'art, mieux connuet mieux compris, s'est répandu de nouveau et est redevenu populaire.
Le mérite de Courajod est d'avoir contribué à ce retour en faisant mieux apprécier nos monuments et nos statues du moyen âge, d'avoir appelé l'attention et ramené les yeux sur ceux du quatorzième et du quinzième siècle, trop négligés par les admirateurs exclusifs du grand treizième. C'est aussi d'avoir montré la part considérable de l'émotion et du réalisme venus du nord, plus grande que celle de l'influence antique ou italienne, dans l'art de cette renaissance. C'est surtout, sans se dispenser, certes, de scruter sans cesse les documents d'archives, d'avoir examiné les oeuvres, étudié les tendances, les caractères des diverses écoles, et professé les cours en présence des oeuvres, d'après nature. Car, ainsi que l'ajoute l'un de ses éditeurs, M. André Michel, dans l'excellente préface qu'il a écrite sur son enseignement, « on n'a pas fait l'histoire de l'art quand on a aligné bout à bout des extraits de comptes et des minutes notariées. »
Msr BATIFFOL offre un exemplaire de l'article qu'il a publié dans leBulletin de littérature ecclésiastique de Toulouse, juillet-octobre 1903, sur la légende de Thaïs, et que la Revue Archéologique de Paris a signalé en ces termes :
L'histoire de la courtisane|Thaïs convertie par le moine Paphnuce a fourni à M. Anatole France la matière d'un charmant livre et à M. Gayet celle d'écrits divers et de conférences un peu bruyantes sur la pécheresse
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égyptienne, dont on a prétendu qu'il avait découvert la momie à Antinoë. Mgr Batiffol rappelle que la légende est une simple « moralité », sans le moindre fondement historique, et que la découverte archéologique n'est pas plus sérieuse que la légende, M. Gayet a lu, sur le plâtre d'une niche voisine du prétendu tombeau de Thaïs, l'inscription suivante :
-f- EKOIMH0H MA KAPIA OAIAI 0ECCA-.
Il traduit : « Ici repose la bienheureuse Thaïs...; puis un mot qu'il est difficile de préciser ». Mais l'adjectif naxàpioç ou naxapïa est toujours précédé de l'article et Thaïs ne s'appelle pas, en grec, 0a(aç, mais Tataîa. Mgr Batiffol a songé à lire : 'Exot^eo Maxapux 0a£oeç, c'est-à-dire : « Ici repose Makaria, fille de Thaia ». En tous les cas, l'épitaphe (sans doute mal copiée) n'a rien à voir avec la légendaire Thaïs. L'étiquette qui contribue à propager cette erreur devrait disparaître du musée Guimet.
Séance du 1er décembre 1903. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.. M. DE LAHONDÈS lit la note suivante : Monogrammes de Jésus sculptés sur des portes de maisons de Toulouse.
Les monogrammes du Christ formés par le X et le P grecs apparaissent dès les catacombes et furent très multipliés à l'époque romane, sur les portails des églises, sur les tombeaux. Parfois toutes les lettres du mot XpuToç sont représentées; le T par une barre au-dessus de la tige du P, l'O par un cercle ou un losange ouvert au centre de la figure, le S par une S tracée au-dessus. On voit une S à cette place sur le moulage du chrisme de l'église de Montsaunès, exposé dans la salle de la Société.
A l'époque gothique le chrisme est remplacé par le monogramme do Jésus, figuré par les trois lettres initiales et finales du mot IHESOTS diversement entrelacées. La dévotion au nom de Jésus le plus souvent accompagné du salut à la Vierge AM. se répandit surtout pendant le quinzième siècle, en même temps que le culte de Notre-Dame-de-Pitiô. Quelques actes, particulièrement les délibérations des Conseils de ville, sont précédés par les initales Ihs, A M. les scribes du temps ayant pris pour une h l'êta du lhaou;.
A Toulouse, cette double invocation prit un plus grand développement à
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la suite des prédications du cordelier Thomas lllyricus ou de Illyrico, comme l'appelle Lafaille, en 1518. Il attirait une si grande foule d'auditeurs à son église conventuelle, qu'on se décida à établir sur la place SaintGeorges des estrades et une chaire. Il y prêcha de la fête de Saint-Thomas à Pâques, et obtint des Capitouls qu'ils plaçassent sur les cinq portes de la ville, le monogramme de Jésus dans un cartouche supporté par deux anges. Il les amena aussi à rendre une ordonnance par laquelle ils interdisaient l'usage des masques que l'on portait habituellement et non seulement dans le temps de carnaval, et aussi les jeux de caries. Le commerce des jeux de cartes fut même supprimé, et l'on donna à ceux qui s'y livraient la permission d'exercer le métier qu'ils voudraient en les dispensant de fournir l'oeuvre de maîtrise obligatoire en pareil cas.
Thomas lllyricus prêcha dans les mêmes conditions et la même année à Montauban, ainsi que l'a constaté M. l'abbé Pottier, dans une communication à la société sur le même sujet, le 2 décembre 1890.
11 prêcha aussi à Foix avec autant de succès en 1530.
Il ne reste qu'un seul des monogrammes sculptés sur les cinq portes de la ville. C'est celui que l'on voyait au-dessus de la porte Matabiau et qui est aujourd'hui déposé au Musée, dans les galeries du Petit Cloître.
Le médaillon circulaire, soutenu par deux anges agenouillés, porte dans son milieu les trois lettres en belle majuscule romaine. Il est accosté de deux pilastres dans le goût de la renaissance italienne, sur lesquels les instruments de la Passion s'entourent d'enroulements do rinceaux et de banderoles. Une légende latine circule autour du médaillon que surmonte la couronne d'épines.
L'entablement porte deux cartels sur lesquels on voit INRI et la date 1519.
Cette sculpture serait donc la première manifestation à Toulouse du style de la renaissance.
L'élégance et la finesse des majuscules, de même que celles de l'inscription de l'hôtel Maynier, comparées aux lettres épaisses et lourdes du salut à la Vierge inscrites sur la frise du portail de la Dalbade, montrent que ces lettres n'ont du être gravées que sous Louis XIII, au moment d'une nouvelle renaissance religieuse.
Mais le monogramme très élégant sculpté sur la porte de la maison de Pierre Delfau, marchand et capitoul, rue de la Bourse, 20, construite vers 1495, est antérieur aux prédications de l'éloquent cordelier. Il conserve les formes gothiques; l'S s'entrelace autour des deux premières lettres. Il est encadré, à la pointe de l'arc en accolade, dans une bordure de feuilles de chardon ou plutôt de panicaut (fig. 1).
On voit un monogramme absolument analogue à la chef de voûte de la vis de la maison n» 20, de la rue Mage.
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La maison de M. de Saint-Germain, trésorier général en 1590, rue des Changes 19, où sont conservés dans la cour deux escaliers hardis en charpente,
charpente, sur deux portes de la même cour, un cartouche entouré d'imitations de cuirs enroulés et aussi de ramures encore dans le goût de la renaissance. L'ensemble est d'une élégante et riche ornementation.
C'est vers le même temps que dut être sculpté le monogramme de la petite rue Sainte-Ursule, dont le cartouche est supporté par deux anges, malheureusement fort mutilés.
On voyait aussi, il y a peu d'années, un monogramme du IHS et de l'AM entouré de la couronne d'épines et accosté de deux têtes d'anges, et daté
de 1607, surmontant un oculus richement encadré d'imitations de cuirs enroulés, au-dessus de la porte de l'ancien hôtel de l'Ecu, rue du PoidsFIG.
PoidsFIG. — 20, RUE DE LA BOURSE.
FIG. 2. — RUE DU FOUREASTARD.
FIO. ;. — RUE DE L'HOMME-ARMÉ.
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de-1'Huilc, aujourd'hui démoli et où, dit-on, Molière avec sa troupe avait donné des représentations.
Le plus grand nombre des monogrammes qui nous restent datent du commencement du dix-septième siècle, époque de ferveur religieuse, de réformes et de fondations fécondes. Quelques-uns sont encadrés par des enroulements de cuirs, comme celui d'une maison de la rue fort écourtee du Fourbastard (fig. 2). D'autres sont cerclés par la couronne d'épines comme celui de la rue de l'Homme-Armé, qui a l'avantage de porter sa date 1611 (fig. 3).
L'ordre de la Merci avait adopté ce monogramme avec sa couronne d'épines pour ses armes, et la Compagnie de Jésus le prit de même en y ajoutant les trois clous. Aussi le voit-on à l'hôtel de Bernuy.
Plusieurs autres monogrammes se montrent encore au-dessus des portes dans les vieux quartiers demeurés intacts. Mais si leurs encadrements, la plupart en forme de cuirs enroulés, ont résiste, les trois lettres du nom de Jésus etl'AM de la Vierge ont été martelés. 11 en est de même d'ailleurs à celui de la rue des Changes, qui ne paraît pas avoir jamais porté les initiales de la salutation angôlique.
Séance du 8 décembre 1903.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. DELORME, membre résidant, propose la nomination d'un nouveau membre honoraire ; la proposition est renvoyée, conformément aux statuts, à l'examen d'une Commission composée de MM. Delorme, Lôcrivain, Pasquior, Bauzon.
La môme Commission est chargée du rapport sur une candidature au titre de membre correspondant.
M. l'abbé RAYNAUD, curé doyen de Saint-Papoul (Aude), communique dos indications sur le nouveau dallage de son église, l'ancienne cathédrale :
L'ancien dallage en pierre, posé vers 1750 par l'évoque do Langlc, était dans un état de vétusté et d'usure qui ne pouvait être maintenu. Il a été remplacé en 1902, d'après l'indication de l'architecte du ministère des Beaux-Arts, par un dallage en mosaïque de granit. Quelques anciennes dalles retaillées ont pu être utilisées pour daller le porche et les fonts baptismaux.
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Trois dalles tumulaires seules étaient comprises dans le dallage. Sur la demande expresse de M. l'abbé Raynaud, appuyée par M. l'architecte, ces trois dalles ont-été conservées et replacées dans l'église ; la première, en pierre, à l'entrée intérieure de l'église ; les deux autres, en marbre blanc, et on marbre noir, l'une à côté de l'autre, devant l'autel éc la chapelle Saint-Pierre et Saint-Paul, à la place même qu'elles occupaient autrefois.
La Société félicite M. le curé de Saint-Papoul pour le soin et le respect avec, lequel il a conservé les dalles anciennes, bien qu'aucune inscription n'indiquât quel était le personnage dont elles protégeaient les restes.
M. PASQCIER fait une lecture : Engagement des bijoux de la maison de Foix au quinzième siècle, d'après un livre privé d'un marchand de Toulouse, trouvé (1) aux archives notariales de la Haute-Garonne. Au mois d'août 1438, Mathieu, comte de Commingos, Jean de Fourtou, évêque de Tarbes, Mainaud d'Amiot, abbé exécuteur testamentaire de Jean Ier de Grailly, comte de Foix et de Béarn, choisirent comme procureur Guillaume de Porto, prieur d'Ocagne au diocèse d'Urgel ; ils le chargèrent d'aller engager jusqu'à concurrence de 2.000 écus divers bijoux et objets d'art appartenant à la maison de Foix. Pour s'acquitter de sa mission, le mandataire s'adressa à Jean Lacrose, marchand à Toulouse. Celui-ci fit l'avance des 2,000 écus et prit en nantissement une vingtaine de pièces d'orfèvrerie dont la description est donnée dans le contrat d'engagement. Cette nomenclature témoigne du luxe des princes de la maison de Foix et fait supposer quelle devait être la richesse de la collection d'objets précieux par eux formée. Gaston IV, fils et successeur de Jean Ier, se plut à la développer et y fit entrer une croix garnie de 764 pierres précieuses. Cette pièce, au quinzième siècle, dans le midi de la Franco et dans le nord de l'Espagne, acquit une telle réputation qu'elle était connue sous le nom do croix des comtes de Foix.
Cette communication provoque un échange de vues sur l'orfèvrerie et le luxe des bijoux au quinzièmo siècle. M. Dopeyre mentionne une autre pièce d'orfèvrerie célèbre de la même époque, le reliquaire do la vraie croix de la chapelle du château de Bourbon.
(1) Ce livre a étn découvert par M. Macary, archiviste de la portion notariale.
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M. AUG. VIDAL, membre correspondant à Albi, communique le travail suivant :
Additions et corrections à l'Histoire du grand prieuré de Toulouse par M. du Bourg.
En compulsant les registres des notaires de Montdragon, déposés aux archives départementales du Tarn, nous avons mis la main sur un certain nombre d'actes intéressant un commandeur de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem imparfaitement identifié par M. du Bourg. L'auteur de VHistoire du grand prieuré de Toulouse fait des commandeurs de Condat et do SainteEulalio deux personnages distincts. Le premier, qui portait le nom de Jean de Verneuil-Villeneuve, bailli de l'Aigle, aurait occupé la commanderie de 1650 à 1656; le nom du second serait Jean de Bernuy-Villeneuve ; il aurait été commandeur de Sainte-Eulalie de 1638 à 1646. . Les documents qui suivent vont nous permettre d'établir que Jean de Bernuy-Villeneuve et Jean de Verneuil-Villeneuve doivent se confondre, et que Jean de Bernuy-Villeneuve était, de 1653 à 1656 tout au moins, titulaire des deux commanderies de Condat et de Sainte-Eulalie. Ces mêmes actes nous fourniront d'autres détails qui ne figurent pas dans l'oeuvre si estimable de M. du Bourg.
Mais avant de les reproduire, il est nécessaire de rappeler ce que dit de ces deux commanderies l'historien du grand prieuré de Toulouse. Condat est situé dans cette partie du Périgord qu'arrose la Vczère, non loin de l'antique abbaye de Tcrrasson. L'autorité du commandeur s'étendait sur toute la légion périgourdine et les membres les plus importants de la commanderie étaient Sarjeac. Saint-Nexans, Montguiard, Bonnefarc, Combarenches, Soulet et Andrivaux. En 1752, les revenus de la commanderie de Condat s'élevaientà 20,635 livres et les charges à 5,218 livres.
La commanderie de Sain'e-Eulalie, désignée dans nos actes sous le nom de Sainte-llaullarye et Aullaryc, avait été le plus important établissement de l'Ordre du Temple dans le Midi ; elle conserva soiï importance sous les religieux de Suint-Jean de Jérusalem, puisque ses revenus atteignaient, à la fin du dix-huitième siècle, le chiffre do 4l,00t) livres, réduites par les charges à 31,466 livres. Cetle commanderie comprenait la ville de SainteEulalie, protégée par un château à trois grosses louis, la seigneurie et juridiction île tout son territoire, les places fortes de la Cavalerie et de la Convcrtoirade, des censés et des domaines dans de nombreuses localités situées tant sur le plateau de Larzac que dans les vallées environnantes du bas Languedoc. Les membres qui se rattachaient à cette commanderie étaient Montcls, Saint-Sernin et Mayonnolte (I).
(1) Histoire du grand prieuré de Toulouse, p. 503-528, et 57G-583.
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Nous pouvons aborder maintenant la lecture des actes que nous avons recueillis dans le registre des cèdes de Jean Mouzels, notaire de Montdragon, coté E 642. Ils sont inédits et M. Emile Jolibois les mentionne à peine dans son Inventaire sommaire.
« L'an mil six cens cinquante quatre et le quinzième jour du mois » d'avril, avant midy, dans le château de la Martinié (1), diocesse do Cas» très, sénéchaussée de Carcassonne, régnant très chrestien prince Louis, » par la grâce de Dieu roy de France et de Navarre, par devant moy notère » rcyal subsigné et présans les tesmoings bas nommés; personnellement » estably inlustrissime seigneur frère Jean de Bernouy-Vileneufvc, cheval» lier de l'Ordre Saint-Jean de Jérusalem, baliff de l'Egle, baron de Vile» neufve et comandeur des comanderies de Saint-Aullarye, Trinquatailho » et Condat, lequel agréablement, sans révocation de ses précédantes pro» curations, a de nouveau nommé par le présant acte, faict et constitué ses » procureurs espécials et générais, l'une clauze ne desrogeant à l'autre, » ains au contrère, savoir est frère Pol de Buon Cazaux (2), chevallier » dud. ordre et recepveur au grand prieuré de Tboloze, et le sieur François c Pion, escuyer, absans, moy dic't notère pour eux eslipulant et acceptant, » pour et au nom du dict seigneur constituant, pour retirer et recepvoir, » des fermiers de lad. comanderie de Condal, toutes les sommes et prix » des affermes des membres d'icelle comanderie de Condat aud. seigneur, » des années et culhettes mil six cens cinquante deux et cinquante trois, » et donner receu desd. sommes et faire toutz acquitzet quittances bonnes » et valables au proffict des paieurs, et autrement en ce faire tout ce que » led. constituant pourroit faire, avec promesse d'agréer lesd. paiements et » d'apruver lesd. quittances et d'en relepver les susdicts de Cazaux et » Pion, soubs les obligations de toutz et chesquns ses biens qu'il a soubmis ■a à toutes rigueurs des justices du présant royaume. Et l'a promis et juré > en présance de M« Anthoine Cbarlet, prebtre, et M» Anthoine Verniette, » docteur, soubsignés avec led. seigneur et moy (3). »
Voici maintenant un acte relatif à la commanderie de Sainte-Eulalie ; on y verra que c'est bien par Sainte-Eulalie qu'il faut traduire le Saint-Aularye du document.
a L'an mil six cens cinquante quatre et le troisième jour du mois de may,
(1) Fait aujourd'hui partie de la commune da Saint-Genest-de-Contest, canton de Lautrcc, arrond. do Castres ; formait à cette époque une communauté distincte.
(2) Le vrai nom de ce receveur général de l'ordre est François-Paul de BéonMusses-Cazaux. Il occupa cette charge de 1653 à 1656, et fut grand prieur du prieuré de Toulouse de 1673 à 1688. C'est lui qui acheva l'hôtel prieural qui existe encore. Cf. Hist. du gr. prieuré de T., p. 26, 27 et 48.
(3) F" 63-64.
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» avant midy, dans le château de la Martiniô en Albigeois, etc. ; a esté •> présant en sa personne inlustrissime seigneur frère Jean de Bcrnouy» Vileneufve, chevallier de l'Ordre Saint-Jean de Jérusalem, ballif de l'Egle » et comandeur des comanderies de Saint-Aularye, Trjnquatailhe et » Condat, qui a dict avoir affermé cy-devant à Pierre Conslans, marchant » du vilage de Bouissoudes, dismes, quartz, quinlz, rantes, revenons, lodz » et vantes et toutz autres droietz et obligations seigneuriaux du mambre » de Montelz et Saint-Sernin, dépandans de la comanderie de Saint-Au» larye, pour le temps et terme de trois années, et pour le prix et somme, » chaque année de huict cens livres; desquelles trois années led. Constans » en a joui une année qui a finy le dernier jour du mois d'avril dernier » passé; mais d'aulant que led. seigneur ne peut attaindre les payemans » portés par le contrat dud. afferme et en nécessité, pour le bien des affa» neurs de lad. comanderie, et pour subvenir aux frais de plusieurs répa» rations qu'il y convient faire et deniers anticipés, led. seigneur ballif, » pour ces considérations et pour ce subject, révocquant led. contrat d'af» ferme, a vandu et vand purement et simplement à M» Valcnlin Vergery, » bachelier en théologie, Louis Labauré, sieur de Saint-Marlin, fils d'autre » Louis Labauré, et Jean Alricy, fils aussi d'autre Jean Alricy, tous hubi» tans dud. Saint-Sernin, lesd. Labauré et Alricy absans, led. Vergery y » présant, estipulant et acceptant tant pour lui que pour les autres sus» nommés, ausquels il promet faire rattifier le présant contrat, à payer de » toutz dépans, domages et inthéréts, savoir est toutz les fruietz, dismes, » rantes et revenus desd. mambres de Montelz et Saint-Sernin qui luy » peuvent appartenir et tels qu'il les avoit arantés and. Constans et dont » luy et les présédants fermiers ont cy-devant jouy ; laquelle vante de » fruietz a faicte led. seigneur ballif auxd. Labauré, Vergery et Alricy pour » le temps et terme de deux années prochaines et conséqutives, à comanser » le premier du courant et finir à pareilh jour de l'année mil six cens cin» quante six, moyenant le prix et somme pour les deux années, en tout de » seize cens livres tr. que les achapteurs seront tenus de paier paradvance » et deniers anticipés aud. seigneur ballif dans trois jours prochains à n payne de nullité du présent actte qui, du consantement des parties et » par expresse convantion, demurcra comme non advenu à desfaut d'avoir » faict led. payemant aud. terme ; déclarant led. Vergery, comme prosséde, » qu'il accepte lad. vante des fruietz à ses risques, azarlz, périls et for» tunes, sans que led. seigneur luy soict tenu d'aulcuns cas fortuitz, aus» quels, par exprès, led. Vergery a renoncé et renonce; et led. seigneur » a promis, moyenant ce payement, de le faire jouir paisiblement et leur D estre attenu de toutes évictions et garantis. Auquel esfect les parties, * l'une envers l'autre, chaqune en ce qui les concerne, ont obligé et ippoa tôqué toutz leurs biens qu'ils ont soubmis à toutes rigueurs de justice.
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o Présans, M. Vergnietle, docteur et juge de l'Espitalet, M. Marcellin » Grès, bachelier en théologie, soubsignés avec led. seigneur et Vergery » et moy. »
Signé Le ballif de Lôgle-Villeneufve, Vergely, Verniette, Grès, prébendairc, Monzels, notaire (I).
Nous avons vu que le bailli de l'Aigle était commandeur de la commanderie de Trinquetaille ; elle faisait partie des établissements de l'Ordre de la Langue de Provence. C'est ce qu'établira l'acte suivant.
« L'an mil six cens cinquante cinq et le septième jour du mois de may, » avant midy, dans le château de la Martinié, etc., etc., constitué en per» sonne inlustrissime seigneur, frère Jean de Bernouy-Vileneufve, chevnl» lier de l'Ordre Saint-Jean de Hiôrusalem, ballif de l'Egle, comandeur des » comanderies de Saint-Aullarye, Trinquetailhe et dud. Condat, lequel de o son bon gred, franche et pure vollonté, a faict cession et transport par » ce présent actle mandatoire, à frère François Paul de Buon-Cazaux, che» vallier de l'Ordre Saint-Jean de Hiérusalem, comandeur d'Arxin (2) et » recepveur général pour led. Ordre au grand prieuré de Tholoze, icy pré» saut et acceptant à prandre et recepvoir des mains des sieurs Revel, » Thomasy et Grefulle, bourgeois de la ville d'Arles, en Provence, et ses » fermiers de sa comanderie de Saint-Thamars (?) de Trinquetailhe, la » somme de neuf mille livres. Led. sieur de Ca'zaux promet et s'oblige paier » ou donner compte aud. seigneur balif pour tout le présant mois et luy » rapporter quittance, en bonne et deube forme, tant des charges, décimes » que pansions qu'il aura acquittés à sa descharge. Et c'est soubs Pobliga» tion de toutz et chaquns ses biens qu'il a soubmis à toutes rigueurs de » justice du présant royaume; et l'a ainsin promis et juré en présanec » de M. Marcellin Grez, docteur en théologie, soubsigné avec parties, et » Pierre Arthoul, ne sachant escripre et moy. »
Signé Le ballif de Lègle-Villeneufve, le chler de Béon-Cazaux, comandeur rTArxuin, Grès, pbre, Mouzels, notaire (3).
L'acte qui suit est un nouveau bail à ferme des revenus des membres de Saint-Sernin et Montels, mais plus détaillé que le précédent.
« L'an mil six cens cinquante cinq et le setzièmejour du mois d'octobre, n avant midy, dans le château de la Martinié, etc., etc., constitué en sa » personne inlustrissime frère Jean de Bernuy-Vileneufve, chevallier de » l'Ordre Saint-Jean de Jérusalem, balhif de Lègle, compte de Condat,
(1) F" 78-79.
(2) Aujourd'hui Arecins, situé dans cette partie du Médoc enserrée entre l'Océan et le lit de la Gironde. Il garda cette commanderie de 1654 à 1668. Cf. Uist. du gr. prieuré, p. 463 et 481.
(3) F» 236.
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» baron de Vileneufve et comandeur des comanderies de Saint-Aularye, » Trinquetailhe et dud. Condat, lequel, de son bon gred, a aranté et, par » tiltre d'affermé, bailhe et arante à MM. Guillaume Cluzel, bachelier en » sainte théologie, Jean Cluzel, marchant de Saint-Sernin en Rouergue, et » Anthoine Burlas, habitant du vilage de Mazct, juridiction de Poustomis, » icy présants et acceptant, savoir est toutz et chaquns les dismes, rantes, » revenus, droits de champart, censives, lods et vantes et autres droicts « que led. seigneur ou ses prôsédans fermiers ont acoustumé de prandre, » lever et jouir tant en la ville et paroisse de Saint-Sernin que à Monlels » et dans le distroict de leurs parroisses, et généralement ce qui dôpan du » présent afferme et que lesd. présédants fermiers ont acoustumé de jouir » et lever; auquel présant afferme demure comprins le domnyne qui apar» lient aud. seigneur aud. Montelz, qui consiste en terres labouratives et s preds. Le présant afferme a faict led. seigneur balif ausd. Cluzel et Hurlas » pour le temps et terme de cinq années compleltes et rôvollucs, qui » comanseront le premier jour du mois de may de la prochaine année mil » six cens cinquante sept et finiront à pareil] jour M VIe soixante un ; et » c'est pour et moyenant le prix et somme, pour chaqune desd. années, de » neuf cens livres ts. et quatre semais de poumes raynettes, payables » lesd. poumes à chaque feste Saint-Martin, et lesd. neuf cens livres, la » moytié à chaque fesle de'Pâques et l'autre moytié à chaque feste de la » Magdeleinc, dont les premiers payements comanseront savoir pour les i poumes à la Saint-Martin de l'année M VIe cinquante six, et de l'argent i> aux festes de Pâques et de la Magdeleine de l'année M Vie cinquante » sept, et ainsin conséqutivement ausd. festes jusques à fin do terme. Et » le tout soubs les pacttes et conditions qui s'ensuivent : en premier lieu o que lesd. fermiers seront tenus d'aporter l'argent et poumes dans le pré» sent château de la Martinié à leurs frais, despans, azards, périlz et for» tunes. Secondement que lesd. fermiers seront tonus de bien et deument » entretenir et conserver led. domayne et terres en bons pères de famille, » sans leur estre permis de despopuler les arbres d'icelles ; et finallement » que led. seigneur sera tenu ausd. rantiers à toutz cas fourtuitz en cas de B perte notable, tout ainsi que les messieurs du chapitre de Vabre ont » acoustumé de demurer à leurs rentiers. Et avenant aucun cas fourtuit, B lesd. rantiers seront tenus de le venir desnoncer dans huict jours aud. sci» gneur balhif, pour s'acorder des esperts à l'esfaict de faite l'extimation ; » laquelle extimation faicte, led. seigneur sera en obligation de leur en » demurer de ce à quoy led. domage sera extime, ou bien de prendre ceste » récolte à luy et en subroger une autre au mesme prix ausd. fermiers, en «'considération de celle que led. seigneur prendra à soy. Et pour le faict » et assurance de ce dessus, lesd. parties, l'une envers l'autre et chaquue » comme leur concerne respectivement, mesmes lesd. fermiers l'un pour
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» l'autre et un chaqun pour le tout, sans division ni dixcussion des biens, » en ont obligé et ippothéqué toutz et chaquns leursd. biens présants et n advenir, et encore lesd. fermiers leurs personnes propres aux forces et » rigueurs des courtz de Tholose, Carcassonne et autres du présent o royaume de France. Et ainsin l'ont promis et juré en présance de M. Mar» cellin Grès, docteur en théologie et M» Anthoine Vergniette, docteur n soubsignés avec parties et moy (1). »
Nous avons-gardé pour la fin l'acte le plus intéressant de la série de ceux que nous avons relevés dans les cèdes du notaire Mouzels. On y verra qu'en 1654, les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem étaient encore exposés aux brutalités des Turcs.
« L'an mil six cens cinquante quatre et le cinquième jour du mois de » septambre après midy, dans le château de la Martinié, etc., etc., person» ncllement estably en personne inlustrissime seigneur, frère Jean de » Bernouy-Vileneufve, chevallier de l'Ordre Saint-Jean de Hiérusalem, » ballif de Lègle, comandeur des comanderies de Saint-Haullarye, Trinn quetailhe et Condat, baron de Villeneufve, lequel sachant par décret du B conseil!) et bulle expédiée en chancellerie à Malte, le ncufvièmc juillet n mil six cens cinquante trois, avoir esté nommé et créé curateur de frère » Ramond de Villeneufve la Reququelle, chevallier dud. Ordre, esclave » entre les mains des Turqs, led. seigneur balhif, agréablement en ceste » qualité, a dict et déclaré et confessé avoir reçu présantement, en cens » huictante restalles Espaigne, quarante neuf escus sol, trois cens nonante ■> louis blanqs, quartz d'escus et autre monnoye, la somme de sept mille » livres que luy a esté réalleraent contée par noble Tristan de Vileneufve, » seigneur de la Reququelle, frère dud. sieur chevalier, icy présant, esti» pulant et acceptant, qui a délivré la susd. somme aud. seigneur balihf à » l'esfect de paier partie du prix de la ransson dud. sieur chevallier son » frère, pour icelluy rachapter des mains desd. infidelles d'esclavitude ; » laquelle d. somme de sept mille livres led. seigneur balhif a promis et > promet, pourTesfaict susd , de la faire conter et paier à tels des officiers » dud. Ordre, au temps que par son éminance et autres seigneurs dud. » Conseilh lui sera prescrit et ordonné; à quoy il soumet et oblige ses » biens à toutes rigueurs de justice du présent royaume de France. Pré» sans M» Marcellin Grez, docteur en théologie, et M« Anthoine Ver» gniette, docteur et'juge de l'Espitalet, soubsignés avec parties (2). B
Des actes qui précèdent, on peut tirer quelques conclusions qui ne manquent pas d'intérêt. Et d'abord, les commandeurs n'étaient pas astreints à la résidence. Pendant deux ans au moins Jean de Bernuy-Villeneuve n'a
(1) F" 279 V à 282.
(2) F»' 119-120.
BULL. 32, 1905. - 3
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pas quitté le château de Lamartinié; bien plus, l'acte du 16 octobre 1655 stipule que les revenus de Saint-Sernin sont portables, cinq années durant, au château, On a remarqué que, dans la plupart des actes, figurent, à titre de témoins, le prêtre Grès et le juge de l'Espitalet, Vcrniette. Le premier était certainement l'aumônier du commandeur, le second, son homme d'affaires, son conseil.
Au reste la résidence aurait été bien difficile aux commandeurs qui généralement cumulaient, autre conclusion, plusieurs commanderies. On sait que le cumul, avant la Révolution, était la plaie des institutions ecclésiastiques ; on voyait des évêques titulaires de riches abbayes et même d'opulents archevêchés ; le plus mince chanoine était pourvu de bénéficescures qu'il faisait gérer par des vicaires. L'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem n'échappait donc pas à la contagion.
Nous aurions voulu faire plus ample connaissance avec la famille de Jean de Bernuy-Villeneuve, que le notaire Mouzels qualifie d'illustrissime. Malheureusement les documents nous font défaut. Jean de Bernuy, le Président du Parlement de Toulouse, un des fils du Bernuy que François I" avait appelé en France, épousa Marguerite de Foix-Caraman, baronne de Vénès. De ce mariage naquit une fille unique, Adouce, qui épousa en premières noces Gui de Castelnau de Clermont-Lodève, et, en secondes, Jacques de Montgommery, gouverneur de Castres en 1588 (1). Les de Bernuy avaient donc des attaches dans la vicomte de Lautrec. Il est probable qu'un de Bernuy s'allia avec les de Villeneuve, originaires de Lavaur, dont les branches sont nombreuses. De là le double nom de Bernuy-Villeneuve.
Nous ne connaissons qu'un autre membre de cette famille, Lucrèce de Bernuy-Villeneuve que nous rencontrons pour la première fois prieure du Monastère bénédictin de Saint-Pierre de la Salvetat à Montdragon, le 6 juin 1650 \2). Jeanne de Capriol de Cuq Saint-Maurice lui succède en 1662 (3).
On s'est demandé sans doute si le château de Lamartinié, où se passent tous les actes qu'on vient de lire, faisait partie des biens patrimoniaux des Bernuy-Villeneuve. Nous croyons qu'il était la propriété de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem et qu'il servait de retraite aux commandeurs, originaires de la région, que l'âge rendait incapables de tout service. La seigneurie de Lamartinié appartenait à cette époque aux de Corneillan ; en 1675, lcseigneur était Pierre de Corneillan, baron de Villeneuve-le-Comtal (4).
(1) Revue du Tarn, vol. II, p. 132 à 135.
(2) Arch. départ, du Tarn, E, 639.
(3) Ibid., E, 643.
(4) Ibid., E, 650.
— 35Dans
35Dans dernier acte nous allons voir un chevalier de l'Ordre, Jean-Philippe de Soubiran d'Arifat, résider dans ce même château.
« L'an.mil six cens septante six et le trante uniesme jour du mois de » mars, après midy, dans le chastcau de la Martinié, etc., etc. A esté » constitué en personne, frère Jean Philippe de Souviran d'Arifat, che» vallier de l'Ordre Saint-Jean de Jérusalem, lequel en vertu du nouveau B afferme qu'il a fait de la commanderie de la Selve de Mr le chevallier de » Ledein (ou Ledoin), procureur de Mp de Roquetaillade, commandeur B dud. la Selve, par acte retencu par Mr« Guilhaume Gabriel... (1), No" B Royal du lieu de la Gardclle, le sixiesme novambre dernier, prolonge » l'afferme à Jean Monsarrat, laboureur, natif du masage de las Cousteillès, B consulat de Lautrec, icy présant et acceptant, faisant tant pour lui que « pour Bernard, Barthélémy et Barlabé Monsarratz ses frères, comme » faisant mesme domicilie ensamble, d'icy absans, ausquels promet faire » agréer le contenu au présant contrat, scavoir est de la métairie de B Bagnart, moulin, censives et leurs appartenances, et c'est pour le temps B et terme de deux années et deux récoltes, et c'est aux mesmes pactes » et conditions portées par led. contrat d'arrantement retenu par Mr« B Bczombes, notaire royal de la ville de Lautrec, les an et jour en icelluy ■ contenus, en vertu duquel tant led. Monsarat que Anthoine Marseil ont » jouy les quatre récoltes dernières esche'ues ; auquel contrat, retenu par B M™ Bezombes, promet d'effectuer de poinct en poinct, selon sa forme et B teneur, sauf et excepté que led. Monsarat sera tenu de donner aud. sieur, B pour augmentation de la rante portée par led. contrat, retenu par led. » Bezombes, tous les ans la somme de vingt livres et six paires gélines ; « moyenant quoy led. sieur promet de le faire jouyr dud. moulin, métairie, • censives et tout ce qui en dépand, pendant lesd. deux années, et led. s Monsarat de payer lad. rante contenue dans led. contrat retenu par led. » Bezombes, nore, ensamble lad. augmentation de la somme de vingt livres » et six paires gélines, aux termes portés par led. contrat, soy réservant » led. seigneur ce que luy est deub de lad. rante des dictes quatre années » escheues tant par led. Monsarat que led. Marseil. Et à ces fins et pour B l'observation de ce dessus, lesd. parties... ont obligé... »
Signé : Le cher de Soubiran Darifat, P. Bothonet, Grabier, Barrau not. (2).
M. du Bourg nous apprend que la commanderie de Lascive était située dans la partie méridionale du Rouergue, près de Cassagnes. Il n'a pu déterminer le nom du commandeur qui succède à Charles de CommingesGuitaud, pour la période comprise entre 1667 et 1686 (3). L'acte qu'on
(1) La fin du nom est illisible.
(2) Arch. départ., E, 650.
(3) Hist. du gr. prieuré de Toul., p. 563.
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vient de lire comble donc une lacune : Le commandeur est le chevalier de Roquetaillade.
Ajoutons que les de Soubiran-d'Arifat ont fourni des membres à l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem ; un Jean était grand prieur de Toulouse, en 1595-1597; un Philippe fut commandeur de Saint-Félix de Sourgues, de 1611 à 1632 (1).
Nous connaissons, dans les archives départementales du Tarn, un certain nombre d'actes intéressant l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Nous ' en ferons l'objet d'une seconde étude.
Séance du 15 décembre 1903. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. LE PRÉSIDENT communique un numéro du Journal des Arts indiquant les résultats de la vente faite à Paris de diverses sculptures provenant du château de Montai on Quercy.
M. MÉIUMÉE, membre résidant, annonce qu'un membre de l'Ecole française du Caire, M. Palanque, d'Auch, fera cette année à la Faculté des lettres un cours libre d'égyptologie. Ce jeune érudit a trouvé les éléments d'une thèse, qui fut remarquée, dans les collections égyptiennes du Musée Saint-Raymond à Toulouse.
M. BAUSON présente le rapport de la Commission sur la candidature du Prince PHILIPPE DE SAXE. La Société vote conformément à ses statuts et nomme le Prince membre honoraire.
Après avoir entendu la lecture d'une lettre de M. Antonin DELOUME, exécuteur testamentaire de M. Ozenne, et les explications de M. le Président, la Société délibère et délègue deux de ses membres, le Président et le Secrétaire général, pour faire partie de la Commission chargée de veiller sur le service intérieur de l'Hôtel et sur les intérêts communs aux diverses sociétés qui l'occupent.
M. BAUSON, à propos d'un passage remarqué dans une des publications reçues par la Société, fait connaître l'oeuvre d'un graveur français qui vient de mourir, le vosgien Herb. Pons-Carme. Il indique l'importance de l'influence qu'il exerça sur la réforme heureuse de la médaille française.
(1) Hisl. du gr. prieuré de Tout., p. 26 et 587.
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M. BARRIÈRE-FLAVY, membre résidant, présente quelques observations sur les Armes de deux évoques de Pamiers du commencement du dix-septième siècle, au sujet de Y Armoriai des Evêques de Pamiers, de feu Lafont de Sentonac.
Cette publication donne en effet pour armoiries à l'évêquo J. d'Esparbèsde Lussan (1608-1625) : d'argent à la fasce de gueules, accompagnée en chef de trois ôperviors de sable; — et à H. do Spondo : écartclô, aux l'r et 4« d'azur a deux truites d'or de fasce, la 2e contropassante ; aux 2e et 3e, de gueules à une croix de calvaire d'or sur une montagne de même, la couronne d'épines de sable passée en coeur.
Or, d'après les sceaux mêmes de ces deux prélats, apposés en regard de leurs signatures sur des pièces autographes, leurs armes paraissent devoir être rectifiées de la manière suivante :
En ce qui concerne d'Esparbès de Lussan, la fasce est accompagnée de trois merlettes posées, deux en chef et une en pointe.
Pour H. de Sponde, les poissons des 1er et 4e quartiers sont tous deux passants à gauche ; et la croix, portant la couronne en sautoir, est de grande dimension et occupe presque tout le champ, reposant sur un roc minuscule, ce qui est exactement le contraire dans les armoiries reproduites par Lafont de Sentenac.
M. LE PRÉSIDENT fait observer que les armoiries de H. de Sponde, au-dessous de son buste, au chevet du choeur de Saint-Etienne, montrent encore, bien qu'elles aient été martelées, les dispositions indiquées par M. Barrière-Flavy.
Séance du 22 décembre 1903. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. le baron DESAZARS DE MONTGAILLARD lit la notice qu'il a rédigée à la prière de la Société sur notre regretté confrère M. Axel Duboul. Elle sera publiée dans les Mémoires, suivant les traditions de la Société.
M. l'abbé J. R. MARDOUTIN, membre de la Société des lettres, sciences et arts d'Agen, envoie les brochures suivantes : Le château de Foulirou, Agen, 1902. — Notice historique sur La Sauvetat de Sa-
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vères, Agen, 1901. —Deux séditions àLaugnac, 1719-1709, Agen, 1903. — Le château de Fauguerolles, Agen, 1903. — Un moine paléographe, dom Delpech, de Pérignac, Agen, 1901. — Fête célébrée à Laroque-Timbaut en l'honneur de la naissance du duc de Bordeaux en 1820, Agen, 1901.
M. BARRIÈRE-FLAVY communique une note relative aux dépenses faites à l'occasion de la
Tenue de l'Assemblée de l'assiette du Diocèse de Toulouse à Montgiscard, en 1625.
L'Assemblée se tenait annuellement et tour à tour dans une des villes maîtresses du diocèse. Cet honneur échut à Montgiscard en juin 1625.
Les personnages qui en faisaient partie, ne pouvaient certes s'accommoder des hôtelleries ou auberges que cette petite localité devait renfermer.
Le syndic du diocèse qui était alors M» Arnaud Dauriac avocat en la Cour, reçut mandat de faire ce qui serait en son pouvoir pour recevoir et traiter aussi convenablement que les circonstances le lui permettraient, les membres de cette assemblée.
Il confia à un maître cuisinier de Toulouse, Bernât Lcziam, moyennant un prix convenu, le soin de fournir le matériel nécessaire et de préparer les repas pendant la tenue de l'assiette qui dura cinq jours. Ce dernier s'adjoignit un second, Bernât Soubie, et un pâtissier, Antoine Picot, tous deux également de Toulouse.
La vaisselle d'étain, les broches, les landiers et autres ustensiles furent transportés de Toulouse à Montgiscard à dos de cheval, par deux hommes ; les verres et les couteaux furent confiés à un seul garçon. Les premiersreçurent 2 livres chacun, le second 1 livre.
Les chevaux étaient logés chez les habitants auxquels on accorda d'ailleurs une indemnité à cet égard.
La dépense totale pour toutes les fournitures de table se chiffra par une somme de 177 livres 12 sols; et M6 Dauriac paya à divers habitants de Montgiscard pour le logement et la nourriture des chevaux et autres menues dépenses, 80 livres, 13 sols.
En résumé, les frais occasionnés par cette assemblée des députés du diocèse, du 23 au 28 juin 1625, s'élevèrent à la somme de 258 livres, 5 sols.
Les documents auxquels nous avons emprunté ces renseignements sont conservés aux Archives de la Bauto Garonne, série C, lias. 712.
Diverses quittances sont revêtues de la marque du cuisinier B. Lcziam, un gril, signe caractéristique de sa profession.
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Il n'est pas sans intérêt de citer quelques articles dit rolle de ce qui feiU achepté pour la despance de Messieurs les Commissaires de l'assiette, et plusieurs reçus d'habitants notables de Montgiscard au sujet du logement et de l'entretien des chevaux.
Premièrement a esté achepté quatre jambons de Bayonne
rebenant à 10 1. 10 s.
Plus trante livres lart à quatre soûls livre, monte : 6
Plus vingt livres bure à cinq soûls livre, monte 5
Un cabas pour iceluy mettre. ............... 2
Plus quinze paires pouletz à six solz paire, monte 4 10
Plus quinze paires pigeons à sept s. paire, monte. . . ... 5 5
Plus sine paires cotdindes à vinct et huit "soulz paîre, monte. 6 5', Plus dix paires chapouneaux à douze soulz pa"ire, monte. ." . 6
Plus dix paires gelinottes à douze soulz paire, monte 6
Dabantage six lebrautz à trante soulz piessé, monte. .'...' 9
Plus six soulz graisse ." . . . . ..... ' 6 .
Plus vinct livres beaudelet à huit soulz livre, monte. . . . . 8'
Plus sexe livres mouton à sept soulz livre, monte. . . . .' . "5 12 .
Plus dix livres beuf à 5 s. livre, monte. ... . . . . ... * 2 10 ,
Plus douxe livres chandeles à 5 s. livre, monte. ....'..' 3" '
Plus arthichautz ".'......'. 10
Plus leteues 16
Plus pourpier 10
Plus bounhons (1) 8
Pois '.. 1 4
Guines ou serisos ' . . . . 14
Plus huille douse livres à 5 s. livre .3
Plus vinegre 10
Plus sarde de mair douse livres à 4 s. livre . 2 8
Poisson ou anguiles, crante six livres à 5 s. ... . . ... 11 - 5
Plus quatre cens heufs à vinct et sine soulz cent 5 .
Plus un boueseau et demy sel. . . 18
Plus pour le louage de laistain, broches, landiers. ...... 4 '■■'•• >
Plus pour le louage des veres tant de ceux qui sont coupés que pour le louage des autres et ensamble des couteaux
qui se monte en tout. 2
Plus pour le garson qui a pourtes les veres. 1
Plus une gerbe aux (2) 6
(1) Oignons.
(2) Gerbe d'ail.
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Plus pour le louage de deus chcbautz et deux hommes pour faire apporter le susdit estain, broches, branches et partie du contenu au présant rolle a esté paie a cheqnn la somme de qrantc soulz que monte 4 c
Plus pour le retour dud. estaing, broches et branches a esté loué un chebal à Mongiscart esdictes fins (1) 2
Rolle des espiceries qui ont esté prinses dans Tholose le 23 juin.
Sucre un pein pe 5 1. t. à 12 s. I. 3 I. 6 s.
Cassonnade blanc 6 à 8 2 8
Escorce de cittrons 1 à 32 3 4
Petits cittrons 1 à 32 1 12
Courinte (2) 2 à 5 10
Pignions 2 à 5 10
Gerofle 8 o. à 4 s. o. (3) 1 12
Muscade 8 à 2 16
Canele 8 à 2 16
Espisse ff 8 à 2 16
Safran 2 à 14 1 8
Poivre 8 à 1 s. 6 d. 12
Dattilx (4) 1 1. «/a à 12 s. 1. 18
Jean Esquirol merchant de Monlgyscard a receu de Me Auriac du dioceze de Tholose la somme de unze livres tretze soulz pour avoir longé Messieurs de Biguier cl Gautail rccepveur du dioceze de Tholose pendant la teneu de lassietle et pour avoir forni iccluy trente cinq jusles vin à raison de trois soulz juste, de quoy lenquilte et sest signé ce 28juing 1625.
I ESyVIROL.
Je soubs signé pour et au nom de George Azam mon père, avoir receu de M» Dauriac scindic du diocesse de Tholose la somme de neuf livres et cest pour avoir nourri trois chevaux de M. Ficubet pendant la teneu de la siette, de laquelle somme prometz luy tenir quitte. Enfoy de quoy ay esciit et signé le présent. Faict à Montgiscard ce 28 juinq 1625.
Azam.
Je soubsigné ay receu de M» Auriac scindic du dioceze de Tholose la
(1) Tous les chiffres de ce compte doivent être évalués à raison de 3 fr. 07 la livre. Nous avons la mémo remarque à faire pour l'article suivant.
(2) Raisins de Corinthe.
(3) 11 s'agit de l'once : soit ici 8 onces do girofle à 4 sols l'once.
(4) Dattes.
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somme de trente livres et cest pour la despance faictc en ma maison pendant la tenue de l'assiette pour huict chevaulx de Messieurs de lassietle de quoy le quitte. A Montgiscard ce 28 juing mil six cens vingt cinq. . pour XXXI. Delpy.
Je soubssigné confesse avoir rescou de M. Arnaud Dauriac advocat en la cour scindic du diocèse de Tolose, la somme de trante livres pour touts les frais et despanse qu'il m'a conveneu fere tant pour avoyr fourny le linge, nourry cinq chevaulx que aultres petites fornitures qu'il m'a conveneu fere pendant la tenue de l'assiette teneue chez moy la présente année en la ville de Montgiscard. Faict à lad. ville le 28°>e juin 1625.
Gail.
A la suite do la lecture de cette note, M. E. LAPIERRE présente quelques observations et exprime le désir que M. Barrière-Flavy détermine les valeurs indiquées au taux d'aujourd'hui.
Séance du 29 décembre 1903.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. DELORME, membre résidant, transmet une lettre do remerciements de S. A. le prince PHILIPPE DE SAXE-COBOURG-GOTHA, nommé membre honoraire.
Communication est donnée de plusieurs candidatures aux titres de membre correspondant et de membre résidant. La Commission spéciale comprend MM. Delorme, baron Desazars de Montgaillard, colonel de Bourdes.
On remarque, dans la correspondance du jour, l'envoi qu'a bien voulu faire M?r Douais, membre honoraire, du Lomé II de ses Docucuments sur l'ancien Languedoc. Ce volume contient notamment les inventaires du trésor de Saint-Sernin. M. l'abbé Saltct est prié d'en rendre compte.
Lecture est donnée d'une lettre de M. BARRIÈRE-FLAVY s'excusant de ne pouvoir assister à la séance, et s'exprimant en ces termes :
La valeur de la monnaie au dix-septième siècle. Dans la dernière séance de la Société, notre distingué collègue M. La-
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pierre a soulevé, au sujet de ma communication, la question de la valeur de la monnaie, notamment au dix-septième siècle, époque à laquelle se place le fait qui a fait l'objet de ma lecture.
Je crois pouvoir donner satisfaction et à M. Lapierre et à ceux de nos collègues qui ont pu s'intéresser à ma note en vous faisant connaître l'évaluation de la livre tournois sous Louis XIII fournie par M. Maurice Prou, professeur à l'Ecole des Chartes, et dont la compétence est bien connue en cette matière.
Selon lui, en effet, la livre valait alors 3 fr. 07 de notre monnaie actuelle. Dans ces conditions, étant donné que la dépense occasionnée par l'assemblée du diocèse de Toulouse à Montgiscard en 1625 s'éleva à 258 livres 5 sols, la somme équivaudrait aujourd'hui à celle de 792 fr. 21 cent.
Communication de M. E. LAMOUZÈLE, membre correspondant :
Quelques fonctionnaires municipaux de Toulouse à la fin du dix-septième
siècle.
Les registres de comptes du trésorier de la ville de Toulouse déposés au donjon nous donnent quelques renseignements sur les noms, le traitement et le costume d'un certain nombre de fonctionnaires municipaux aux différentes époques de l'histoire. C'est d'après les comptes de l'année 1684 que nous avons dressé la petite liste que nous donnons plus loin.
Dans cette liste figurent, à côté des fonctionnaires proprement dits, quelques personnages qui, à des titres divers, émargeaient au budget de la ville.
Le traitement des « officiers de la ville » (c'était le nom que l'on donnait aux fonctionnaires municipaux) était en général assez minime, mais des gratifications fréquentes venaient l'augmenter.
Enfin, un certain nombre d'entre eux recevaient, en sus de leurs gages, une indemnité annuelle destinée à l'achat d'une partie ou même de la totalité de leur costume officiel.
1° JUSTICE ET ADMINISTRATION.
Etienne d'Ambis, conseiller du roi et juge mage, pension annuelle, 20 livres.
Les quatre assesseurs, chacun,' par an, 60 livres; plus, chaque année, un bonnet carré de 2 livres.
Germain de Lafaille, syndic de la ville, par an, 150 livres; plus, chaque année, un bonnet carré de 2 livres.
Jean Clausoles, greffier et secrétaire des Capitouls, par an, 100 livres ; plus, chaque année, un bonnet carré de 2 livres.
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Michel Duclus, greffier et conhôleur du domaine de /'llôlel-de- Ville, par an, 100 livres; plus, chaque année, un bonnet carré de 2 livres.
Garaud de Laroche, procureur en la Cour pour M. le syndic de la ville, par an, 6 livres.
Jean Raynal, procureur au sénéchal pour M. le syndic de la ville, par an, 0 livres.
Gaspard Treil, solliciteur pour les affaires de la ville, par an, 150 livres.
Bernard Vaissier, juge de la police, par an, 200 livres; plus, chaque année, un bonnet carré du prix de 2 livres.
Jean Douât Calmens, verguier des Capitouls, par an, 50 livres, plus une somme de 36 livres « pour 20 pans de drap rouge pour sa robe de livrée, à raison de 11 livres la canne, 6 livres pour 6 pans d'estaniet pour ses hauts de chausses et 50 sols pour un chapeau que la ville a accoustumé de lui donner tous les ans. B
Jean Teissier, exécuteur de la Haute-Justice, par an, 12 livres, plus « la somme de 10 livres, 15 sols à lui ordonnée, savoir : 6 livres, 5 sols pour 10 pans d'estaniet jaune à 5 livres la canne pour sa casaque; 10 sols pour 2 pans de cordelat pour les bords de ladite casaque ; 3 livres pour 12 pans de cordelat pour ses hauts de chausse et 20 sols pour un chapeau que la ville lui donne annuellement. »
Jean Caldaguès, syndic au fait des visites, par an, 72 livres; plus, chaque année, un bonnet carré de 2 livres.
Les huit verguiers des Capitouls, à chacun, par an, 36 livres , plus 1 livre 10 sols de gratification le jour de Noël.
Jacques Fourlup, huissier du Consistoire, rien que des gratifications : 6 livres à la Noël, 6 livres à Pâques, 6 livres à la Toussaint; plus, chaque année, « la somme de 27 livres à lui ordonnée, savoir : 20 livres pour 20 pans de drap violet pour sa robe de livrée, attendu qu'il n'a point de gages; 6 livres pour 6 pans d'estaniet pour un haut de chausses et 20 sols pour un chapeau que la ville lui donne annuellement. »
Antoine Cayla, commis aux divers Capitoulats « pour le brouillard qu'il a fait de chaque Capitoulat pour faire la cotisation », à savoir : pour le Capitoulat de la Daurade, 40 livres; pour le Capitoulat de Saint-Etienne, 45 livres; pour le Capitoulat du Pont-Vieux, 19 livres, 10 sols; pour le Capitoulat de la Pierre, 19 livres, 10 sols; pour le Capitoulat de la Dalbade, 27 livres; pour le Capitoulat de la Pierre, 27 livres; pour le Capitoulat de Saint-Sernin, 22 livres, 10 sols.
2» POLICE.
François Gendre, capitaine du guet, par an, 466 livres, 13 sols, plus certaines gratifications, à l'occasion des fêles, ou pour le payer de sa peine dans des circonstances extraordinaires ; plus « la somme de 25 livres à lui
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ordonnée pour 6 pans de serge de Fleurance pour se faire un manteau suivant la coutume; » plus le logement à l'Hôtel-de-Ville.
Jean Civarol, lieutenant du guet, par an, 150 livres, plus cert.ines gratifications; plus « la somme de 15 livres à lui ordonnée pour une aulne de serge pour se faire un haut de chausses que la ville a accoustumé lui donner tous les ans à chaque jour de feste de Saint-Sébastien. »
Les 40 soldats du guet, à chacun, par an, 120 livres, plus certaines gratifications dans des circonstances extraordinaires; plus, à chacun, une casaque de 12 livres et un chapeau à 22 sols pièce que « la ville a accoustumé de leur donner annuellement. »
Les quatre gardes de la police, à chacun, par an, 144 livres, plus certaines gratifications dans des circonstancesextraordinaires ; pluso la sommede50livres 18 sols, savoir : 32 livres 6 sols pour 5 aunes de drap bleu à 6 livres 10 sols l'aulne pour leur manteau délivrée; 12 livres pour 6 aulnes de cordelat bleu pour leurs chausses à 40 sols l'aulne; 40 sols pour une aulne dudit cordelat pour les bords do leurs manteaux et 4 livres 8 sols pour un chapeau à raison de 22 sols pièce que la ville leur donne annuellement. »
Les huit sergents de la suite des Capitouls, à chacun, par an, 72 livres, plus certaines gratifications dans des circonstances extraordinaires; plus «la somme de 200 livres (25 livres pour chacun) à eux ordonnée, tant pour 20 pans de drap moitié rouge et moitié bleu pour leurs robes de livrée que la ville leur donne annuellement à chaque fête de Saint-Sébastien que pour 7 livres pour un bonnet rouge de Rouen suivant la coutume. »
3° VOIRIE.
Julia François, balayeur de la place Saint-Etienne, par an, 5 livres.
Pierre Lafont, balayeur de la place Saint-Georges, par an, 5 livres.
Antoine Marques, balayeur de la place Matabiau, par an, 5 livres.
Jean Escarre, balayeur de la place du bout du Pont, par an, 5 livres.
Jean Bêcas, balayeur de la place du Salin, par an, 5 livres.
Jean Malelier, balayeur de la place de la Daurade, par an, 5 livres.
Jean Filouse, balayeur de la place Saint-Etienne, par an, 5 livres.
François Noguier, balayeur de la place Rouaix, par an, 5 livres.
A ntoine Marques, dit Bardct, balayeur de la place de la Pierre, par an, 5 livres.
François Tournier, balayeur de la place, devant le Châleau-Narbonnais, palan, 5 livres.
Georges Ségui, garde du radeau de Tounis, par an, 5 livres.
Jacques Labal, garde du radeau de Tounis, par an, 5 livres.
Jacques Deville, garde du radeau de Tounis, par an, 5 livres.
Antoine Impirial, garde du radeau du moulin du Château, par an, 5 livres.
Louis Mercier, garde de la place de la Pierre, par an, 5 livres, plus « 21 livres 2 sols pour sa robe de livrée que la ville lui donne annuellement. »
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Rougi Roussignol, garde de la place Saint-Georges, par an, 6 livrer, « plus 21 livres pour 20 pans de drap moitié rouge et moitié bleu pour sa robe de livrée que la ville lui donne de 2 ans en 2 ans et pour un chapeau. »
Guillaume Bousigue, garde de la Halle, par an, 8 livres, « plus 20 livres pour 20 pans de drap moitié bleu et moitié rouge pour sa robe de livrée que la ville lui donne annuellement et 22 sols pour un chapeau, •>
Pierre Clarenc, garde du Port-Garaud, par an, 30 livres.
Jean-François Gallac, garde des ormeaux du quai, par an, 30 livres.
Jean Dellil, commis-greffier à la porte Montoulieu, par an, 60 livres.
Antoine Bieusse, commis-greffier à la porte du Bazacle, 60 livres.
Alexandre Duclos. commis-greffier à la porte Saint-Etienne, 60 livres.
Ginier Roques, commis-greffier à la porte du Château, par an, 60 livres.
Jean Lagarde, commis-greffier à la porte d'Arnaud-Bernard, par an, 60 livres.
Antoine Gasc, commis-greffier à la porte Malabiau, par an, 60 livres.
Bernard Hélier, commis-greffier à la porte Sainl-Cyprien, par an, 60 livres.
Jean Congé, portier à la porte Montgailhard, sans traitement fixe, mais une gratification de 30 livres en 1684.
4" CUIEURS PUBLICS. — TAMBOURS ET TROMPETTES DE LA VILLE.
Nicolas Henry, dit Bourguignon, trompette juré de la ville, par an, 140 livres.
Bertrand Villelard, trompette juré de la ville, par an, 36 livres, « plus la somme de 26 livres pour 2 cannes et demi de drap de couleur pourpre ou rose séché cramoisi que la ville lui donne annuellement pour son manteau de livrée, à 10 livres la canne, et 20 sols pour un chapeau, » « plus la somme de 12 livres, pour l'employer au logement de la maison où il habite jusqu'à ce que la ville le puisse loger. »
Pierre Péguilhan, crieur juré de la ville, par an, 36 livres, plus la même somme que le précédent pour son costume et son logement.
Bertrand Sénac et Jean Faure, tambours de la ville, à chacun 12 livres, a pour leurs casaques de livrée et accomodage de leurs tambours. »
5» FINANCES.
Le trésorier de la ville, par an, 800 livres, plus 33 livres de gratification à la fin de l'année et un bonnet carré de 2 livres.
6° POIDS ET MESURES.
Pierre Palaisse et Antoine Masana, peseurs-jurês du pain et de la chair, à chacun, par an, 10 livres, « plus 42 livres pour leurs robes de livrée que la ville leur doit bailler la présente année, n'en ayant pas eu depuis 1681, et 20 sols à chacun pour un chapeau. »
7° HYGIÈNE PUBLIQUE.
Jean Lapierre, maître chirurgien, visiteur-jurê au fait de la contagion, par an, 100 livres.
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Jean Gage, maître chirurgien, visiteur-juré au fait de la contagion, par an, 100 livres.
Olivier Durand, capitaine de la santé, par an, 100 livres, « plus la somme de 37 livres à lui ordonnée pour 2 cannes de drap rouge de Paris que la ville lui donne annuellement le jour de Saint-Sébaslien pour la casaque de ville. »
Les quatre gardes de la santé, par an, 144 livres, plus des gratifications dans des circonstances extraordinaires ; » plus la somme de 32 livres 18 sols pour 5 cannes de drap bleu à 6 livres 6 sols la canne pour leurs manteaux délivrée; 12 livres pour 6 cannes de cordelat bleu pour leurs chausses à 40 sols la canne; 40 sols pour une canne dudit cordelat pour les bords de leurs manteaux, et 14 livres 8 sols pour un chapeau à chacun, à raison de 22 sols pièce que la ville leur donne annuellement. »
8° BEAUX-ARTS. — ARCHIVES.
Joseph Pages, mailre de musique, « la somme de 400 livres à lui ordonnée pour les gages de la présente année, pour jouer et faire jouer des instruments musicaux ; • o plus la somme de 200 livres pour le soin qu'il se donne d'élever et enseigner des enfants dans l'art de musique et à jouer des instruments. »
Pierre Rivais, peintre de l'Hôlcl-de- Ville, « la somme de 1,000 livres pour faire les peintures et portraits de MM. les Capitouls de la présente année, » o plus la somme de 100 livres à lui ordonnée pour ses gages de la présente année que la ville lui donne annuellement. »
Jean Campa, greffier de la gaie science, par an, 5 livres, « plus la somme de 20 livres à lui ordonnée pour la robe de drap violet et pour son chapeau, suivant l'ancienne coutume. »
Les six hautbois de la ville (pas de traitement fixe, mais des gratifications chaque fois qu'ils escortaient les Capitouls en jouant de leurs instruments).
Germain de Lafaille, avocat, syndic et garde des archives de l'Ilâtel-de- Ville, par an, 12 livres.
9° ARSENAL DE LA VILLE. •
Etienne Joly, maître fondeur et canonnier, par an, 8 livres. Jean Pages, jeune, canonnier, par an, 8 livres.
Jean Pages, vieux, canonnier « pour le nettoiement de armes de l'arsenal, par an, 100 livres. »
M. l'abbé TAILLEFER, curé de Cazillac, membre correspondant,, communique des Recettes de remèdes singuliers encore en usage au dix-huitième siècle extraites des minutes de M" Bordaries, notaire à Puycornet.
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Un emplâtre pour les douleurs de jambes où des ventrées do chiens nouveau-nés s'unissent à la graisso de blaireau, aux escargots et à quelques herbes fortes; puis une tisane composée do racines et de sels minéraux qui, prise trois fois dans l'année, amena M. de Sainte-Catherine à vivre jusqu'à près de cent-vingt ans. Le nom et le chiffre ne sont-ils pas de fantaisie ?
M. l'abbé GALABERT, curé d'Aucamville, communique une chanson satirique lancée contre l'évèque cou stitutionnelSermet et une chanson dont la valeur littéraire n'est pas supérieure en l'honneur des prêtres qui refusèrent le serment; plus une note, prise dans le registre do la Société populaire de Grenade, signalant la présence de l'évoque dans cette ville, où il résida du 2 au 4 juillet pour y remplir les fonctions.de son ministère et où, avant de partir, il assista à une séance du club et y prononça un discours sur les affaires du temps.
M. l'abbé GALABERT a envoyé encore un mémoire sur les derniers seigneurs de Gimoés qui a été transmis à M. le Directeur de la Revue de Gascogne.
Séance du 5 janvier 1904. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. BAUZON, membre résidant, informe la Société qu'il a récemment constaté le mauvais état de la toiture de l'église dos Jacobins, et lui demande de seconder ses efforts en vue d'obtenir les réparations nécessaires.
M. le baron DESAZARS présente le rapport de la Commission chargée d'examiner une dos candidatures annoncées. La Société vote au scrutin secret. M. le DrTachard, médecin principal de lre classe en retraite, est élu membre résidant.
M. l'abbé DEGERT fait hommage de ses Notes et documents sur l'ancien collège de Dax, 54 p. in-8°.
M. CARTAILHAC dit qu'en octobre dernier il se rendit à l'Hospitalet, sur le Larzac, afin de visiter notre confrère, M. l'abbé Hermet. Il eut ainsi l'occasion de voir l'étonnante collection recueillie dans les fouilles récentes exécutées au bord du Tarn, près Millau, dans le domaine de la Graufesenque, gisement gallo-romain depuis long-; temps célèbre.
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Les découvertes de M. l'abbé Cerès avaient été intéressantes, mais exécutées assez légèrement, et presque rien n'avait été publié. Les recherches de M. l'abbé Hermet et de quelques collaborateurs dévoués qu'il a su trouver à Millau, — on tète desquels il convient de citer un industriel retiré des affaires et fixé dans ce pays, M. de Carlhausen, — ont été beaucoup plus méthodiques et très fécondes. Ce sont surtout des vases sigillés en terre rouge et des moules que l'on a mis au jour. Avec une patience vraiment admirahle. M. l'abbé Hermet a pu rapprocher des milliers de fragments et reconstituer plus ou moins complètement des vases ornés en nombre considérable. L'ensemble est fort remarquable, et d'importantes publications vont suivre. Il serait à désirer que M. l'abbé Hermet voulut bien comprendre notre Musée au nombre de ceux qui'pouvent ulilcment recevoir une partie do cette récolte lorsqu'elle sera subdivisée. M. Cartailhac reviendra sur ce sujet.
M. SAINT-RAYMOND annonce qu'une société dite Société du vieil Arles, vient d'être fondée et publie un bulletin. Il serait désirable d'entrer en relation avec elle sans tarder.
Séance du 12 janvier 1904. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
La correspondance comprend une série d'ouvrages offerts par M.Jean BOURDETTE , d'Argelès-en-Labeda, érudit bien connu, et dont les travaux consciencieux sur sa petite patrie honorent une longue vie. En voici la liste :
Le Labéda (ou Lavedan), récits, 326 p. in-8°.
Histoire du tribut des médailles payé à la vallée d'Aspe par les vallées de Darre-Ayga en Labeda, 1893, 100 p. in-8°.
Mémoire du pays et des états de Bigorrc par Louis de Froidour, publié avec introduction, notes et compléments, 1892, 390 p.
Notes historiques sur les seigneurs de Monlblanc à Esquieza en Barege, 1898, 68 p. in-8°.
Notice des seigneurs du Doumec d'Ouroul et d'Ourout, 1900, 276 p. in-8°.
Notice des vicomtes de Labeda, 1900, 466 p. in-8".
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Notice des seigneurs de Doumec et abbaye Laye d'Arros, 1902, 262 p. in-8°.
Notice des seigneurs d'Arcizas, 1902, 200 p. in-8°.
Notice du Nébouzan, 1903, 202 p. in-8°.
Notice des seigneurs d'Arzaas, 1903, 188 p.
M. Louis DELOUME, trésorier, rend compte do la situation financière de la Société. Son rapport est renvoyé à la Commission économique, suivant la règle.
Il est procédé au renouvellement partiel du bureau ; sont nommés : directeur, M. MÉRIMÉE, et trésorier, M. Louis DELOUME.
M. DURRBACH, à la prière du présidont, raconte son récent voyage à Délos, où il a repris dos fouilles depuis longtemps commencées, et grâce au don magnifique de M. le duc de Loubat, qui avait mis 30,000 francs à la-disposition de l'Institut et de l'Ecole d'Athènes. M. Durrbach avait un personnel de cent soixante hommes. Il avait établi plusieurs voies ferrées sur lesquelles circulaient cinquante wagons, et chaque jour on portait à la mer sopt à huit cents mètres cubes de déblais. On a ainsi entrepris et achevé le déblaiement du terrain sur les anciennes fouilles. D'autre part, on a poussé dans des directions nouvelles et commencé l'exploration de la ville proprement dite et avancé colle des quartiers marchands le long du rivage.
Au cours de ces travaux, on a eu des surprises heureuses ; ainsi, on a trouvé un puits comblé dont on a retiré plus d'une vingtaine d'inscriptions diverses. Ailleurs, un second amas d'inscriptions fut mis à jour. Partout on a pu éclaircir et compléter le plan des ruines. Le grand effet que produit aujourd'hui le champ de Delphes sur tous les visiteurs, permet do présager l'aspect que prendra Délos quand le nettoyage et la toilette du sanctuaire auront mis en pleine valeur le groupement et l'ordonnancemont de ses édifices. Quant à la ville, on sait qu'elle est intacte dans le remblai; les murs restent debout sur une hauteur qui aLteint fréquemment trois ou quatre mètres. Il y a là un Pompéi hellénique. Le travail sera long et coûteux, mais il s'impose. Outre l'intérêt topographique, le déblaiement des maisons, on le sait déjà par expérience, satisfera certainement l'espoir de belles découvertes.
Le bénéfice de la campagne de 1903 est sur tous les points très rémunérateur, mais ces premiers résultats ne prendront toute leur BULL. 32, 1904. 4
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valeur que lorsqu'ils auront été complétés par des recherches ultérieures.
M. LE PRÉSIDENT, interprète des sentiments de la Compagnie, félicite M. Durrbach et fait des voeux pour que bientôt paraissent les publications qu'il prépare et qui lui feront grand honneur.
M. BADZON a la satisfaction d'annoncer que la Ville est disposée à affecter 20,000 francs aux travaux de réparation que réclame l'église des Jacobins si l'Etat s'engage de son côté à fournir la même somme.
Séance publique du 17 janvier 1904. Présidence de M. JEANROY.
La séance s'est tenue, suivant l'habitude, dans le grand salon des Académies, à l'hôtel d'Assézat, devant une nombreuse assistance.
M. JEANROY, qui avait été prié d'accepter la présidence, lut son Eloge de M. l'abbé L. Couture, notre regretté confrère. (Cet éloge sera publié, suivant les traditions de la Compagnie, dans les Mémoires, t. XVI.)
L'assistance entendit ensuite le
Rapport général sur le concours de l'année 1903, par M. LÉCRIVA.IN, membre résidant.
MESSIEURS,
Ma tâche serait fort difficile et demanderait une compétence singulièrement large si, à cette séance de distribution do prix, je n'étais surtout le porte-parole des rapporteurs spéciaux qui ont lu et apprécié les travaux soumis à leur examen. Le rapporteur général a, cependant tous les ans, un rôle particulier à jouer. Il importe qu'au risque de répéter ce que ses prédécesseurs ont déjà beaucoup mieux dit, il s'efforco de rappeler le but que poursuit la Société Archéologique ot les résultats généraux que produisent ses concours. Elle a ou le mérite, dès ses origines (et elles sont déjà lointaines, 1831!), de ne point tomber sous le coup des reproches spirituels adressés par M. Bladé à ses soeurs provinciales. Elle a été grave et sérieuse au berceau. J'en prends à témoin les premiers volumes do
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nos Mémoires : on n'y trouvera ni sonnets ni madrigaux, mais d'austères et solides dissertations, vraiment archéologiques. En vieillissant nous n'avons jamais abandonné cette bonne tradition. Par les exemples que nous cherchons à offrir dans notre Bulletin et dans nos Mémoires, par le caractère que nous nous efforçons de donner aux oeuvres soumises à notre appréciation, nous voulons, dans notre domaine, substituer aux généralités vagues et aux déclamations la précision des détails authentiques, faire pénétrer dans toutes les recherches l'esprit scientifique, large et impartial.
Les mémoires et les livres dont les auteurs ont sollicité cette année les récompenses do la Société, no sont pas très nombreux, mais ils se recommandent tous par dos mérites divers et constituent des appoints notables à toutes les branches de la science depuis l'archéologie préhistorique jusqu'au Folklore, en passant par l'histoire du droit et de l'éducation.
La Société a décerné sa plus haute récompense, le prix Ourgaud, à M. BÉNÉTRIX, archiviste, bibliothécaire d'Auch, pour son travail intitulé :
« Un collège de province sous la Renaissance. Les origines du Collège d'Auch (1540-1590) d'après des documents en grande partie inédits » ( l).
L'histoire du collège d'Auch, sous l'ancien régime, se divise en trois périodes : la première, celle des régents, clercs ou laïques, de 1565 à 1489, la deuxième, colle des jésuites, de 1589 à 1762, la troisième, celle des prêtres séculiers, do 1762 à 1794. Les deux dernières périodes sont suffisamment connues; au contraire, la première période n'avait pas encore été l'objet d'un travail satisfaisant, fondé sur les documents originaux. Léonce Couture avait indiqué sommairement l'intérêt et les sources de ce sujet et il avait même promis de le traiter. Sa promesse a été réalisée par M. Bénétrix. Son Mémoire comprend environ 150 pages, y compris deux appendices, documents déjà imprimés, l'un, le poème latin de B. du Poey sur le collège, l'autre, le programme latin, d'un des principaux, Massé (p. 137-149), imprimé à Toulouse «ex officina Jacobi Colomerii » en 1565 ; et le plan du quartier scolaire d'En vignes, au XVIme siècle.
Les sources manuscrites étaient malheureusement peu nombreu(1)
nombreu(1) spécial : M. Lécrivain.
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ses ; il ne reste que le fonds du collège, aux Archives communales de la ville et les délibérations consulaires, de 1556 à 1581.
Une introduction de dix pages retrace succinctement l'histoire do l'enseignement, surtout dans le sud-ouest et la Gascogne depuis la fin de l'empire romain jusqu'au XVI'"e siècle. Co chapitre n'a pas la prétention d'être original ; c'est un simple résumé, cependant utile et bien placé, puisqu'il nous montre à quels courants d'idées, à quels besoins nouveaux est due la fondation du collège d'Auch, en ce milieu du XVIme siècle où les deux religions luttent sur le terrain de l'enseignement pour conquérir ou garder les jeunes générations et où cette rivalité amène une magnifique éclosion de « grandes écoles. »
Le Mémoire lui-même forme six chapitres : 1° La Ville d'Auch et ses archevêques au XVIe siècle; 2° Les ressources financières du collège; 3° Les bâtiments du collège; 4° Les premiers principaux ; 5° Le collège sous la direction do Massé ; les études ; 6° Le collège de 1565 à 1588 ; 7° Les professeurs du collège; 8° Les Jésuites au collègo (1589-1590) et une conclusion. Le début du premier chapitre jusqu'à la nomination à l'archevêché d'Auch du cardinal de Tournon en 1538, eût pu à notre avis être considérablement réduit, car l'auteur ne pouvait guère ici que reproduire et résumer tous les travaux antérieurs relatifs à Auch et au cardinal de Tournon. Nous entrons dans le coeur de notre sujet à l'arrivée du cardinal de Tournon à Auch en 1538. Préoccupé d'arrêter la propagande protestante, il fonde le collège d'Auch et obtient à cet effet, en 1543, une série de lettres patentes de François Ier, qui l'autorisent en même temps à attribuer au nouvel établissement la plupart des revenus légués aux pauvres de la ville par l'archevêque précédent, Guillaume de Clermont-Lodève, malgré les protestations assez légitimes do la famille de Clermont. Dans le chapitre suivant sur les ressources financières du collège, l'auteur étudie avec une grande sagacité le budget du collège et fait justice sur ce point de nombreuses erreurs. Le collège d'Auch a toujours eu une situation très précaire. Il n'était entré en possession que d'une partie seulemeut du legs Clermont-Lodève. Les dîmes archiépiscopales de diverses paroisses de la région, dont le cardinal de Tournon lui avait abandonné le produit, n'ont jamais été perçues qu'en partie, après des procès, des résistances de toutes sortes. En tenant compte, en outre,
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des subventions de l'archevêché (100 livres), de la municipalité (100, plus tard 300 livres), du chapitre métropolitain (400 livres), des petites rentes servies par divers particuliers (en moyenne 250 livres), on voit que le revenu annuel du collège, qui aurait dû s'élever à environ 4000 livres, n'atteignit que rarement 2000 livres, .pour tomber quelquefois à 1000. Il n'est pas étonnant que la ville ait dû très souvent recourir à dos emprunts pour entretenir les bâtiments, payer les maigres traitements des principaux et des professeurs. Le chapitre sur les bâtiments du collège nous raconte d'une façon fort intéressante la construction du collège, nous décrit les bâtiments, les classes, le mobilier scolaire, si pauvre et si rudimentaire, les chambres des professeurs et des élèves internes, le réfectoire, la cuisine, la dépense, la vaisselle, les caves. Il n'est pas question de bibliothèque. En revanche le collège avait ses étables (vides, il est vrai) et son écurie. Puis l'auteur réunit tous les renseignements que nous avons sur les premiers principaux, Testaut, Jelequin, Fontano, Sentotz, Vermcilh. Les principaux choisissent librement leurs maîtres : mais quelle lourde tâche leur incombe, en face de professeurs peu dociles, qui no font que passer, et d'élèves indisciplinés, turbulonts ! Ils n'ont même pas de maîtres d'études pour les seconder! C'est sous Vcrmeilh que les Auscitains obtinrent de Charles IX, en 1564, des lettres patentes transformant leur collège en Université, à l'imitation de Bordeaux et do Toulouse. C'était un projet absurde ; l'Université d'Auch n'exista jamais que de nom. Pour le principalat de Massé, nous avons un document pédagogique très important, le plan d'études rédigé par ce principal lui-même, qui était d'origine italienne. Ce texte nous donne, d'une manière très précise, l'emploi du temps, les programmes et les livres des sept classes, depuis la sixième (la classe des alphabétaires ou abécédaires) jusqu'à la philosophie.
M. Bénétrix l'a soumis aune critique judicieuse ; il a montré que les méthodes n'offrent presque rien de particulier, ce sont celles qu'on trouve à peu près partout à cette époque et que Quicherat à résumées. C'est une période do transition ; la Renaissance a rompu avec la pratique exclusive de la dialectique, a mis à la base de renseignement la grammaire, la littérature, introduit les devoirs écrits, mis le grec sur le même pied que le latin. Mais il n'est toujours pas question d'un enseignement de la langue ou de
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la littérature française. Cependant on enseigne à Aueh, les jours de fêle, par do simples lectures, les éléments de l'histoire de Franco !
Combien y avait-il d'élèves au collège d'Auch? On ne sait pas exactement. Les quatre-vingt-dix ou cent jeunes nobles, cités en 1563, n'étaient probablement que les internes. Un document inédit nous fournit do curieux renseignements sur le costume, les dépenses de tout genre d'un écolier. A partir de 1569 c'est la période des guerres religieuses, la décadence ; en 1569 Auch est menacé par Montgomméry, le collège fermé ; il se rouvre avec trois régents seulement; un nouveau principal. Jean de Saint-Pierre, exige la suppression de la classe de philosophie et une augmentation de son trailement (1000 livres au lieu de 900) ; son bail précise et augmente ses obligations et celles des régents on matière religieuse. En 1589 les six régents séculiers sont remplacés parles Jésuites. Avant leur arrivée, les professeurs ont dû être très nombreux en quarante-cinq ans, mais ils nous sont restés presque totalement inconnus. En majorité ecclésiastiques, ils étaient choisis et payés par le principal. Leurs gages paraissent avoir été très faibles, sans doute comme ceux du collège de Condom, de 50 à 150 livres, outre le logement et la nourriture. Le chapitre sur « Les Jésuites au Collège (1589-1590), » est un épisode de la conquête par les Jésuites des grands collèges du sud-ouest. Pourquoi ont-ils réussi à s'emparer du collège d'Auch? Est-ce parce que le recrutement des régents était devenu impossible?Est-ce parce qu'ils étaient suspects d'hérésie ? La meilleure raison est probablement celle que donne l'auteur du mémoire ; les Jésuites, déjà maîtres de Toulouse et de Bordeaux, devaient convoiter Auch, et leurs avances furent aisément accueillies par la municipalité d'Auch, lasso do l'instabilité de l'ancien personnel du collège.
Nous assistons ensuite à l'installation des Jésuites, aux difficultés do leurs débuts, puis à leurs succès : dès 1598, il y avait plus de cinq cents élèves au collège d'Auch.
Conclusion. — Y a-t-il eu décadence du collège d'Auch ? La conclusion de l'auteur est un peu embarrassée. Dans une note il estime que le chiffre dos pensionnaires ayant été de cent-vingt élèves, on peut accopter un chiffre total d'élèves quatre ou cinq fois plus élevé. Cette opinion paraît fort discutable. Il est fâcheux que nous n'ayons pas de texte décisif sur ce point capital. Au fond, l'auteur
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du Mémoire paraît plutôt croire à la décadence et il en voit la principale raison dans l'instabilité des maîtres. Il y en a certainement une autre aussi importante, les malheurs de cette époque.
En somme, l'auteur a tiré un excellent parti des matériaux trop peu nombreux qu'il a eus entre les mains. Son mémoire est bien composé, écrit avec soin et élégance. Il aura sa place à côté des bonnes monographies que nous avons déjà des collèges de l'ancien régime.
La seconde récompense du concours, la médaille de vermeil, est revenue à juste titre aux Contes populaires recueillis par la"Société traditionniste de Comberouger (près de Verdun-sur-Garonne) sous la direction de M. Ant. PERBOSC, instituteur. Vous savez, Messieurs, et l'élogo de Léonce Couture vous le rappelait tout à l'heure, quelle place a prise dans l'histoire de la littérature l'étude dos traditions, des jeux, des croyances, des superstitions, des formules, des bons mots, des contes, des poésies populaires, en un mot de tous ces souvenirs vivaces du passé le plus lointain, qu'on a groupes sous le nom de Folklore. Dans touto l'Europe, une armée de travailleurs; folkloristes simples et aussi philologues, s'applique à recueillir ces traditions où se conservent encore obscurément, dans les terroirs locaux, l'âme et le génie des vieilles races que le progrès de la civilisation moderne menace de destruction. Cette recherche est un des travaux scientifiques les plus agréables qu'on puisse espérer* « Vous trouverez à cette tâche, » disait Gaston Paris à la Sorbonnèj « pour peu que vous vous y livriez avec simplicité de coeur, uii attrait qui vous la rendra de plus en plus chère. Vous serez étonné de ce que vous découvrirez de charmant ou de curieux dans ces vieilleries dédaignées ; vous y surprendrez, an milieu do bien.des grossièretés et des vulgarités, des délicatesses que vous ne soupçonniez même pas, et plus d'une fois vous serez ravis et émus d'onteni dre dans ce qui vous semblait d'abord un gazouillement enfantin ou môme un balbutiement informe, d'entendre vibrer l'âme môme; la vieille et toujours jeune âme de notre chère France. » Le. Folklore a trouvé une ample moisson dans notre Sud-Ouest. Je n'ai pas besoin de vous citer l'oeuvre de Bladé sur les traditions de la Gascogne. Personne ne connaît mieux les traditions du comté do Foix que tels membres de notre Société, collaborateurs de l'Almanach patois de l'Ariège. M. Perbosc a compris que nul n'était.raieux
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placé que l'instituteur pour recueillir les traditions de chaque pays, pour fairo ainsi connaître les choses locales, faire aimer le village et la vie rurale ; il nous a exposé son programme on termes excellents dans un article de YEscolo Gaston-Febus (1" may 1902), et passant dos paroles aux actes, il a fondé la Société traditionniste de Comberouger. Il s'est adressé de préférence aux enfants de dix à quinze ans, garçons et filles, les a initiés à sa méthode et a chargé ces petits folkloristes, pourvus d'une excellente mémoire, de recueillir sincèrement les traditions, notées dans la langue du contour. C'est là une besogne de longue haleine qui demandera plusieurs années. M. Perbosc nous envoie aujourd'hui la première moisson, un recueil de cinquante-neuf pièces (1), classées selon la division courante en contes épiques ou romanesques, contes mystiques et superstitieux, randonnées et récils. Les récits sont d'un intérêt médiocre. Les randonnées sont d'une monotonie rapidement fatigante. C'est, par exemple, un voleur surpris dans un champ ; on va chercher le chien, le chien refuse de mordre le voleur ; le bâton refuse de frapper le chien, le feu refuse de brûler le bâton, l'eau refuse d'éteindre le fou, et ainsi de suite; on finit par trouver Dieu ou le diablo qui vient tout ramener à l'ordre. Les autres morceaux sont beaucoup plus intéressants. Dans les contes épiques ou romanesques apparaissent les personnages habituels du merveilleux païen et chrétien, les bêtes qui parlent, les fées avec leurs baguettes, la chatte blanche, la sainte Vierge, les diables, le bonhomme Misère, les Draks. C'est le monde des contes de Perrault, des aventures merveilleuses qui aboutissent toujours à la punition de la méchanceté et à la récompense de la vertu. Dans les trois contes mystiques nous signalerons la métamorphose du loup-garou en une passerelle qui fait tomber les imprudents dans le ruisseau. Les contes familiers forment la moitié du volume sous quatre rubriques : les gens avisés, les niais, la comédie dos animaux, contes divers. Les procédés des gens avisés, l'homme à la fève, l'homme au chapeau d'argent, grain do millet, ressemblent fort à des escroqueries; j'ai retrouvé l'un d'eux récemment sur une imago d'Epinal sous le tilie de La Mère Turlendu. Le niais Jean est l'ancêtre do Gribouille et se retrouve, lui aussi, sur des images d'Epinal. Dans la comédie des
(1) Rapporteurs particuliers : MM. Cau-Durban et Jeanroy.
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animaux, le loup, le renard, le coq, la chèvre jouent les rôles de dupcur et do dupé que leur a do tout temps attribués la Fable. Un des contes divers, Saint Cramaire, est un échantillon de la vorvo légèrement sceptique do nos ancêtres. Ils sont tous, d'ailleurs, d'une moralité irréprochable ; le ton est souvent narquois, la langue simple, claire et naïve; le dialecte est le gascon du Tarn-et-Garonne, mais fortement pénétré de languedocien, et il n'a pas encore été l'objet d'une étude approfondie. Les différents collaborateurs ont visiblement subi l'influence d'un directeur qui a le sentiment et l'expérience de la littérature populaire ; la rédaction n'est, d'ailleurs, pas définitive; M. Perbosc nous promet des modifications do l'orthographe. Son recueil renferme quelques expressions un peu crues, rabelaisiennes : faut-il rappeler le patois aux règles de la bienséanco française? Ce serait peut-être aux dépens de son originalité. Nos ancêtres avaient l'oreille moins prude que la nôtre. Nous devons reconnaître qu'une bonne partie de ces contes a déjà été publiée dans d'autres recueils, tels que la Revue des Langues romanes, les Contes de Bladé, divers almanachs provençaux ou ariégeois ; le fonds est le même, les personnages et les circonstances sont souvent identiques, mais nous trouvons dans la plupart assez do traits originaux, assez de variantes locales pour qu'on ne puisse soupçonner un plagiat : c'était une matière commune que chaque région assaisonnait à son goût. En tout cas, pour ma part, j'ai éprouvé un grand plaisir à parcourir ces contes, à la fois naïfs et moqueurs, comme les paysans eux-mêmes, et je serais fort tenté, Messieurs, de vous en lire ici quelques morceaux dans le texte patois si je no vous savais tous ou presquo tous beaucoup plus familiers que moi avec cetto littérature qui a bercé votre enfance, et surtout si j'avais le bonheur d'avoir l'accent méridional.
Il y a quelques années, un enfant de Toulouse, M. ROQUES, aujourd'hui sergent à la 19e section de commis et ouvriers militaires d'administration en Algérie, envoyait à notre Musée d'histoire naturelle une curieuse collection de silex taillés qu'il avait recueillis à l'entrée du Sahara, dans le sud algérien (I). M. Cartailhac l'encouragea à continuer ses recherches, et M. Roques, guidé par un questionnaire précis, a recueilli, avec une ardeur et une patience vrai(1)
vrai(1) spécial : M. Cartailhac,
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ment louables, aux environs d'Hassi-Inifel, au milieu des dunes, une magnifique collection de haches taillées et polies, de perles en coquille d'oeufs d'autruches et en autres matières, de fragments de poteries ornées. Il a fait généreusement encore cadeau de sa récolte au Musée de Toulouse. Ses découvertes ont fourni au juge le plus compétent en la matière, à M. Cartailhac, dos conclusions très importantes pour l'archéologie préhistorique du nord de l'Algérie. Ces objets sahariens ressemblent à beaucoup d'objets trouvés récemment en Egypte par Flinders Pétrie et Morgan, et vont relier la civilisation de l'âge de la pierre en Egypte à cette même période de l'AIgôrio. M. Roques est un soldat qui a contribué pour sa bonne part à la conquête scientifique de l'Algérie. Il mérite bien la médaille d'argent que la Société lui décerne.
M. Jules BARBOT, de Mende, s'était déjà révélé à la Société comme un archéologue de talent et de goût, doublé d'un excellent dessinateur, dans son petit travail « Zigzags en Lozère, » description charmante et précise des villes, villages, châteaux, et de tous les monuments do cet admirable pays, où je cite seulement Marvéjols, Le Monestier, Montferrand, Saint-Saturnin, Banassac, La Canourguo, Nasbinals, et que nous no connaissons pas encore assez, malgré les billets circulaires. Il nous a envoyé ensuite pour notre concours un travail imprimé : « Recherches sur les anciennes fortifications de ta ville de Mende » (81 pages avec une lithographie et 8 dessins) (1). C'est une histoire complète et sur beaucoup do points tout à fait neuve de ces fortifications qui avaient si longtemps protégé la ville, depuis la construction attribuée vraisemblablement à l'évoque Aldebert au douzième siècle jusqu'à la démolition autorisée en 1769 sur la requetedes consuls par l'intendant du Languedoc, M. de Saint-Priest. Grâce aux registres municipaux, nous avons les renseignements les plus précis sur la construction, les réfections de ces murailles, surtout pendant la guerre de Cent Ans, pendant les guerres do religion et encore pendant les troubles dos Gévennes, sur les impôts affectés à leur entretien. L'auteur nous décrit dans le détail les tours, les cavaliers, les gabions, les fossés, la citadelle construite en 1583 et démolie en 1597, les restes qui subsistent de nos jours. Sa méthode est excellente , chaque assertion est accompagnée do sa source. Une
(1) Rapporteur particulier : M. de Lahondès.
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médaille d'argent n'est pas une trop haute récompense pour co travail, qui atteste le goût des recherches précises et l'amour éclairé de la petite patrie.
MM. J.-P. DOUMENC et Bené GADAVE ont présenté au concours « La coutume de Malvezie » (canton de Barbazan) (I). La première partie de leur mémoire comprend le texte avec des notes brèves, une notice géographique sur Malvezie et la vallée, puis l'histoire et l'analyse du document. Ce texte, publié d'après une copie de 1673 conservée aux archives départementales de la Haute-Garonne, est un acte de transaction du 25 octobre 1590 entre les gens de Malvezie et leur seigneur, Jean d'Orbessan, aussi seigneur delà Bastide-Paumès. La deuxième partie du mémoire est consacrée à la comparaison de la coutume de Malvezie avec d'autres coutumes du Comminges, avec celle de la Bastide-Paumès, concédée en 1610 parle même seigneur, Jean d'Orbessan, et avec celles d'Orbessan, d'Omezan et de Fonsorbes, concédées également par des seigneurs d'Orbessan en 1320, en 1322 et en 1205. Sauf quelques différences qui tiennent naturellement à la différence de la nature du sol et des cultures dans les deux localités, il y a entre les deux coutumes de Malvezie et de la Bastide-Paumès la plus étroite ressemblance, et il est très probable que la plus récente a été copiée sur la plus ancienne. Il y a également, malgré la différence des temps, des ressemblances notables entre la coutume de Malvezie d'un côté, et les coutumes d'Orbessan, d'Omezan et de Fonsorbes de l'autre. Les autours concluent donc avec beaucoup de vraisemblance que quand les seigneurs d'Orbessan avaient une charte à accorder, ils s'inspiraient do colles qui avaient été concédées antérieurement par des membres de leur famille. Ce travail est consciencieux el soigné. C'est une page de plus pour cette histoire de nos coutumes du Midi qui s'élabore graduellement, comme nous le montrait l'année dernière M. Maria, sous le double patronage de la Société et de l'Université. La Société lui décerne une médaille d'argent.
C'est la même récompense qu'elle accorde au travail imprimé de M. l'abbé TAILLEPER, curé de Cazillac : Lauzcrte (Essai historique) (2). M. l'abbé Taillefor est un de nos plus infatigables collaborateurs et
(1) Rapporteur spécial : M. Maria.
(2) Rapporteurs spéciaux : MM. de Rivières et Lécrivain.
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60nous déjà récompensé plusieurs de ses travaux. Celui-ci est, sans contredit, son meilleur. Lauzerte (chef-lieu de canton de l'arrondissement de Moissac), ancienne place forte, admirablement située sur un plateau élevé, à l'entrée du Quercy, sur la route do Valence-d'Agen à Cahors, est une de ces nombreuses petites villes do l'ancienne France, aujourd'hui déchues, mais qui ont ou jadis une histoire et une vie intéressantes. Sa rivalité perpétuelle avec Cahors, Montauban et surtout Moissac, eût fourni dans l'antiquité le sujet d'un poème épique. Fondée par le comte do Toulouso, Raymond V, entre 1148 et 1194, sans doute en 1176, sur un territoire concédé par Arnaud-Gausbert de Castanher, soigneur d'Aucastels, ollo obtient de Raymond VII, en 1241, une charte qui confirme d'anciens privilèges; déjà chef-lieu de bailliage, elle devient, en 1271, ville royale et chef-lieu d'une châtellenie ; puis, à une époque inconnue, siège d'une petite sénéchaussée, sorte de lieutenanco de celle du Quercy, ayant juridiction sur un territoire assez considérable; elle est une des villes où se réunissent les Etats de Quercy; par sa situation, elle joue un rôle assuz important pendant les guerres des Albigeois et de Cent Ans, pendant les guerres de religion, pendant la Fronde, où elle se laisse entraîner un instant du côté des rebelles ; puis vient la période do décadence, la détresse financière; Lauzerte garde cependant jusqu'au bout sa sénéchaussée contre toutes les attaques ; mais, à la Révolution, Moissac l'emporle et obtient le collège et le tribunal! Pour compléter les travaux de Lacoste, de Cathala-Coture, do Lagrange-Fossat, M. l'abbé Taillofer a utilisé de nombreuses sources : les riches archives municipales de Lauzerte et celles d'autres villes voisines, la collection Doat, des archives particulières et surtout des archives de notaires. Il a pu ainsi suivre pas à pas et refaire l'histoire de Lauzerte. Il nous a décrit les anciennes institutions municipales et leurs transformations aux dix-septième et dix-huitième siècles; le rôle des consuls, réduits successivement de douze à dix et à quatre; les nombreux procès soutenus par la ville; les écoles laïques et religieuses, surtout celle des Carmes et celle des Mirepoises; les corps do métiers, les chapellonies; les Obits, dont les desservants forment une communauté distincte jusqu'en 1673; l'hôpital, fondé on 1222; la léproserie; la Confrérie des Pénitents bleus. Un chapitre est consacré à Ja charte, en langue romane, de 1241; elle était déjà connue par
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l'original conservé à la mairie de Lauzerte et une copie du dixseptième siècle. M. l'abbé Taillefer a eu le mérite d'en retrouver une copie plus complète, du quatorzième siècle, aux archives de M. P. de Fontenilles. Cette charte est calquée, parfois textuellement copiée, sur celle de Moissac. M. l'abbé Taillefer s'est trop astreint à l'ordre chronologique; il eût dû adopter une exposition plus systématique d'après les matières. Son livre n'en constitue pas moins une très bonne monographie communale.
M. PEYRONY, instituteur aux Eyzies (canton deTayac, Dordogne), a le bonheur, que lui enviorait un paléontologiste, do vivre dans un des pays de Franco les plus riches en antiquités préhistoriques, auprès de ces gisements classiques de Cro-Magnon, do Gorge d'Enfer, de Laugerie, qui ont livré à la science des trésors incomparables. M. Peyrony s'est intéressé à ces richesses. C'est lui qui le premier a remarqué les curieuses peintures préhistoriques de la grotte de Fonds de Gaumes et qui a mis ainsi MM. le docteur Capitan et l'abbé Breuil sur la voie d'une dos plus belles découvertes de notre époque. A ce seul titre, il méritait la reconnaissance de l'anthropologie. Sur l'invitation de M. Cartailhac. il a su trouver dans ses rares loisirs le temps de dresser la « Carte des gisements préhistoriques de la région des Eyzies (l) », sur laquelle il a indiqué avec précision les emplacements de vingt-deux abris, grottes et trouvailles notables. La Société lui adresse ses félicitations et lui décerne une médaille de bronze, en exprimant le voeu qu'il complète son travail et l'étende aux cantons voisins, et, s'il se peut, à l'arrondissement de Bergerac.
Si à cette analyse déjà longue je joignais, Messieurs, la liste do tous les travaux qui affluent de toutes parts à notre Bulletin et à nos Mémoires, nous verrions plus clairement encore combien ce sol provincial renferme d'énergie, de zèle et de bonne volonté. La Société archéologique est fière de contribuer pour sa part, avec ses maigres ressources, à l'entretien du feu sacré. Peu à peu, aidés par tous ces collaborateurs vaillants, désintéressés, qui se groupent autour de notre drapeau, nous rectifions des erreurs, nous éclairons d'un jour plus vif et nous apprécions plus exactement, sans préjugés d'aucune sorte, d'aucun parti, les hommes, les oeuvres et les monuments de
(1) Rapporteur particulier : M. Cartailhac.
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notre passé, nous reconstituons morceau par morceau l'image fidèle de notre vieille France, et nous contribuons ainsi à lui garder l'amour et le respect des jeunes générations, à maintenir en face des âmes des autres pays l'âme française! Les railleurs diront-ils que nous nous exagérons notre importance? Non ; tout se tient dans la vie d'un peuple. Une multitude do petits efforts peut donner un grand résultat. Regardons en dehors de nos frontières! C'est avec une véritable passion que les Allemands s'occupent de leurs antiquités. Ils n'oublient point que c'est surtout par l'étude de leur histoire qu'ils ont retrempé leur patriotisme et retrouvé leur conscience nationale. Dans tous les peuples de l'Europe actuelle, c'est en grande partie avec les souvenirs du passé que sont faites les les espérances de l'avenir. C'est aussi de ses plus profondes racines que la France doit laisser monter la sève dos années futures pour garder son rang dans le monde, sans cesser de poursuivre son idéal de justice et de vérité.
Après la distribution des prix et médailles, la séance fut terminée par une causerie, avec projections photographiques, sur les Musées d'autrefois, cabinets des curieux, chambres de merveilles, par M. Emile CARTAILHAC.
Séance du 19 janvier 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. DELORME , au nom du Comité économique, approuve les comptes de M. le Trésorier, et lui exprime les remerciements de la Société.
M. J. DE LAHONDÈS communique la notice suivante :
La Renaissance à Toulouse , Nicolas Bachelier.
Mgr Douais a terminé, ou du moins arrêté, la publication des traités conclus avec les maîtres d'oeuvres pour la construction de maisons à Toulouse ou dans le voisinage de la ville, à l'époque de la Renaissance. C'est donc le moment de dégager les conclusions par l'examen des monuments, caria lecture des textes seuls demeurerait stérile.
La première et la plus importante est donnée par l'érudit prélat lui-même
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à la fin de son travail. Elle détruit la légende qui attribuait aux Italiens les constructions de cette ère brillante et féconde. Tous les noms relevés par lui dans les baux cà besogne ont une physionomie française très accentuée. Un seul sur soixante, celui de Lorohi, présente la voyelle finale qui pourrait faire penser à une origine italienne, mais cette finale fut souvent adoptée en France, surtout dans les provinces méridionales, pour relever un nom sans prestige, celui de Durant par exemple par celui de Duranti ; pendant le moyen âge même, quelques uns de ces noms ont pour origine un génitif pris dans les chartes latines. D'ailleurs Lorchi était un verrier, et l'art do la peinture sur verre est l'art français par excellence.
D'autres noms, trouvés dans les archives du Donjon, sont français de même, celui de Guiraud Mellot, par exemple, l'auteur de la belle porte du Consistoire que Toulouse s'est vu récemment enlever.
Certes, il serait puéril de nier l'influence de l'art italien sur celui de notre Renaissance. Aucun art d'ailleurs n'est absolument indépendant, car l'art, et c'est là sa gloire, unit tous les peuples plus encore que les intérêts, plus que les idées philosophiques et religieuses. Il s'échappe des vallées du Nil et de l'Euphrate, d'un côté vers la Perse, l'Inde, la Chine elle-même peut-être l'Amérique, où d'ailleurs les Normands apportèrent vers le dixième siècle un art plus raffiné qu'ils avaient reçu aussi de l'Orient, par les fleuves tributaires de la mer Noire, comme les autres peuples de l'Europe septentrionale; de l'autre, par l'intermédiaire de la Phénicie, vers l'Asie antérieure, les rivages de la Grèce et de l'Italie. Les historiens de l'art monumental en ont suivi la filiation continue à travers le monde, et en ont montré les analogies, les dérivations évidentes, malgré le caractère particulier que chaque peuple imprime aux formes importées de proche en proche.
L'influence italienne se manifeste en France dès les dernières années du quinzième siècle; elle devint universelle et dominatrice après les campagnes de Charles VIII et de Louis XII. Toulouse et les provinces méridionales furent séduites dès le premier soufle que leur apportait le vent des Alpes. La terre latine tressaillit à cet appel, qui lui rappelait les premières origines de sa culture intellectuelle et artistique. Tandis que l'art gothique n'y avait pénétré qu'avec lenteur et peine, n'avait été admis qu'en se transformant, ou parfois par une importation directe et imposée, comme dans les choeurs des cathédrales de Toulouse, de Narbonne et de Carcassonne, celui de la Renaissance s'enracina promptement comme une plante qui retrouve avec joie le sol natal. Mais à Toulouse comme sur les bords de la Loire il demeure indépendant et créateur, il conserve à travers l'inspiration si volontiers reçue sa grâce native et sa libre allure, celle qu'avait su garder de même les Grecs et les Maîtres de notre moyen âge. Il ne s'inféode pas servilement aux formes qu'il imite, si bien que, bientôt, les sectateurs fana-
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tiques de l'antiquité romaine de par Vuruve le traiteront de barbare tout autant que le gothique, et que Boissoné, par exemple, contemplant avec Marguerite de Valois, qui, j'imagine, dut s'étonner en elle-même doses sévérités, le premier essor magnifique de l'art nouveau à l'hôtel de Bernuy, s'indignait contre l'oubli ou le dédain des bonnes règles architecturales.
On n'a'guère faitque du gothique en France jusqu'en 1530, et c'est justement à ce moment que le riche marchand de pastel, Jean de Bernuy, fait construire la cour enchanteresse de son hôtel. Mais une première manifestation de l'art nouveau s'était déjà révélée à Toulouse, sur un petit monument bien modeste, mais déjà significatif, que l'on voit au Musée sous les arcades du petit cloître. C'est un de ces monogrammes du Christ dont nous avons parlé dans un de nos premiers entretiens de l'année. Il fut placé, en 1519, au-dessus de la porte Matabiau, de même que quatre autres sur les autres portes de la ville, après les prédications et la demande du Cordelier Thomas lllyricus. Des pilastres, où les instruments de la Passion s'entremêlent aux enroulements de handerolles et de ramures, supportent une arcature cintrée et de gracieux angelots voltigent à l'entour. Ils se rapprochent des fresques décoratives presque contemporaines des loges du Vatican.
Les baux publics dans la Revue des Pyrénées ont éclairé mieux la carrière artistique de Bachelier, sans toutefois permettre de la déterminer pleinement. Il y a un quart de siècle à peine que l'on attribuait encore à Nicolas Bachelier, tout ce qui s'était bâti ou sculpté à Toulouse pendant le seizième siècle, même les oeuvres les plus disparates, les plus distantes parle temps ou par le caratôre, depuis les portes fines et discrètes de Saint-Sernin ou de la Dalbade, et la tourelle d'escalier de l'hôtel Maynier de pur style François Ier, jusqu'aux figures hardies et mouvementées des fenêtres du même hôteld'une exubérance exaspérée. Puis, comme on ne connaissait en somme avec certitude que deux de ses oeuvres, la porte du Capitolc et celle de l'Esquile, on en vint, par une de ces réactions fréquentes chez nous, à contester sa valeur et son influence, et pour un peu, on serait arrivé à dire que peut-être il n'avait jamais vécu. Nous connaissons maintenant quelquesunes de ses oeuvres capitales et nous pouvons mieux fixer sa place dans l'art toulousain.
C'était surtout dans le premier essor d'élégance et de grâce de la Renaissance que l'on se plaisait à retrouver la main de Bachelier Dès qu'un collectionneur pouvait mettre sa main conquérante sur le moindre panneau où de fins rinceaux se terminaient en profils fantaisistes, ou en m.tscarons tirant la langue, il ne manquait de s'écrier triomphalement : « C'est de Bachelier. r> Or, non seulement le nom de l'illustre tailleur de pierre n'a jamais été trouvé encore accolé à une oeuvre de ce genre, mais il est probable, au contraire, que Bachelier fut un des premiers, le premier peut-
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être, qui rompit avec lui. C'est à lui que nous devons, nous le savons aujourd'hui, la cour de l'hôtel de pierre, ou apparaissent pour la première fois jusqu'ici, ces fenêtres à deux étages de colon nettes cannelées avec bases et chapiteaux imitées de l'antique qui se répandirent aussitôt dans la ville et aux environs. C'est donc lui qui aurait été l'introducteur à Toulouse du retour à l'antiquité romaine qui fit dévier le courant de la Renaissance originelle et devait bientôt asservir son élan personnel, sincère et initiateur. Toutefois, comme si une fée maligne s'obstinait à nous voiler la pleine lumière au moment où nous croyions la saisir, le traité fut passé le 5 mars 1538 par Jean de Bagis avec deux maîtres maçons, Nicolas Bachelier et Antoine de Lescale. Nous ne pouvons pas ainsi attribuer avec certitude à chacun d'eux la part qui lui revient. Mais comme, le 8 avril 1559, deux ans après la mort de Bachelier, Lescale s'engagea à terminer le château de Lasserre que M"" de Bernuy faisait construire près de Montastruc, avec croisières et fenêtres ornées à la mode antique, d'après le plan tracé, en mai 1555, par Nicolas Bachelier, nous sommes autorisés à penser que Bachelier avait tracé de même le plan de l'hôtel de Jean de Bagis.
Pressentiment étrange de notre regretté collègue Joseph de Malafosse ! Suivant en 1891, avant la découverte du traité de Jean de Bagis, le cours de l'art de la Renaissance à Toulouse, il parlait de l'art discret, mesuré et fin qui avait décoré tant de demeures toulousaines, surtout par ces croisières où les colonnettes se superposent et forment comme un tableau en pierre de taille se détachant sur le rouge de la brique, il ajoutait : « De 1535 à 1557, nous constatons la grande popularité dont jouit l'architecte Nicolas Bachelier. N'y a-t-il pas lieu de croire que ce style particulier est justement le sien? Les oeuvres que nous possédons encore de lui ne contredisent pas cette théorie. »
L'hôtel d'Assézat se sépare magnifiquement de ce style si caractérisé qui a dominé à Toulouse dans le milieu du seizième siècle. Sa superbe ordonnance n'en offre plus aucune trace, et c'est à la cour du Louvre contemporaine qu'elle fait penser dès le premier regard. Il me souvient, qu'examinant un jour ce joyau de notre renaissance toulousaine avec un de nos collègues, trop rare, dont le goût est sûr et l'oeil très avisé, M. Virebent, je lui disais : « Il est singulier qu'à Toulouse, où on attribue à Bachelier tout ce qui s'est fait dans la ville pendant le seizième siècle, on n'ait jamais osé mettre son nom à côté de cette construction souveraine. » « Oh ! me dit-il, c'est qu'elle est autrement puissante que tout ce qui nous reste. » Et voici que maintenant le nom de Bachelier s'en trouve rapproché dans le tiaitô qui, le 26 mars 1555, donne à bâtir les murs de ce palais à Jean Castanyé, dit Nicot, maître maçon a soubs les articles qu'il a dit avoir faitz escripre et ordonner à M" Nycolas Bachelier. » Mais, ici encore, le texte demeure ambigu. Nicolas Bachelier fut-il le BULL. 32, 1904. < 5
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véritable architecte? Avait-il vraiment tracé le plan ou ne fut-il que l'ordonnateur, l'entrepreneur, si l'on veut, d'une construction conçue et dessinée par un autre? Ce ne serait pas le seul exemple d'une construction ainsi conduite à cette époque.
D'abord, la différence prodigieuse entre la riche ordonnance de l'hôtel d'Assézat et les oeuvres certaines de Bachelier est une forte présomption contre l'attribution à ce maître du plus beau des hôtels toulousains. On n'y saurait saisir nul rapprochement possible avec l'art délicat, ingénieux, mais sobre, et, pour tout dire, un peu grêle de la porte du Capitule, de la porte de l'Esquile, de la cour de l'hôtel de Bagis. Non seulement l'ampleur et la magnificence de l'ensemble dépasse singulièrement ces morceaux d'architecture, mais les profils diffèrent autant.
Le profil est l'expression la plus caractéristique de la main de l'artiste ; il accentue le style; il donne leur signification aux éléments divers de la structure. La forte saillie des moulures de l'hôtel d'Assézat, produisant les belles ombres qui font valoir leur importance, l'opposition habile des surfaces planes avec les reliefs, contrastent avec la maigreur des sculptures des constructions de Bachelier, avec la profusion de petits ornements en bossages d'un effet maigre et confus qui, à la porte du Capitole, aujourd'hui au Jardin-des-Plantes, couvrent des fonds qui auraient dû demeurer unis pour ne pas attirer l'attention aux dépens des colonnes et des frises.
Il faudrait attribuer à Bachelier une extraordinaire puissance sur luimême pour penser que le même artiste a pu produire des oeuvres aussi dissemblables. Un artiste peut progresser sans doute, mais ne se dément pas, n'abandonne pas le trait caractéristique de son talent.
Et puis, le texte est vraiment trop sommaire. Après avoir lu simplement que le maître maçon a exécuté son travail d'après les articles qu'il a fait ordonner par Nicolas Bachelier, pouvons-nous dire que Bachelier est l'architecte de l'hôtel? Quand Bachelier, sculpteur et architecte, s'apprête à construire en 15501a chapelle de la Conception à la Daurade, les moindres détails sont spécifiés avec une précision minutieuse, et, plus encore, quand il prend l'engagement en 1545 d'élever le portail du château du juge Mage du Faur à Saint-Jory, comme il avait été prescrit d'ailleurs lors de la construction de l'hôtel de Jean de Bagis.
Bachelier avait bien, il est vrai, construit avec superposition des ordres la travée de la porte du château de Saint-Jory, mais cette ornementation, aujourd'hui disparue, ressemblait peut être beaucoup plus à celle de la porte du Capitole qu'à celle de la cour de l'hôtel d'Assézat.
La porte elle-même du château, si minutieusement décrite dans le bail de 1545, n'est pas sans analogie avec la porte de l'hôtel d'Assézat, qui fut construite, toutefois, comme on sait, après la mort de Nicolas Bachelier.
Les conceptions architecturales s'inspiraient les unes des autres à ce
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moment, et les superpositions d'ordres si remarquables à l'hôtel d'Assézat s'étaient déjà présentées à Toulouse, particulièrement à l'hôtel de la Mammye, conseiller au Parlement, rue de la Dalbade, sur trois étages de la galerie qui réunissait dans une cour étroite les deux corps de logis, selon la pratique très répandue à cette époque et dont plusieurs hôtels de Toulouse offrent l'exemple.
Enfin, il convient de rapprocher de la cour de l'hôtel d'Assézat celle du Louvre, que Pierre Lcscot venait de terminer au moment même où se construisait l'bôtel d'Assézat.
Nous sommes donc autorisés à penser que le pacte pour le plan de l'hôtel d'Assézat, surtout pour la partie ornementale et sculpturale qui n'est nullement indiquée dans le bail passe avec Jean Castanié, n'a pas encore été trouvé. Il n'est pas possible qu'à une époque, surtout où les moindres détails de construction et d'ornementation étaient précisés avec soin dans les conventions, que des oeuvres aussi importantes et aussi belles que les colonnades des façades, les encadrements des portes et les termes de l'escalier, que sa merveilleuse lanterne, aient été exécutées sans avoir été prévues, indiquées et spécifiées avec leur prix. Nous pensons aussi que le véritable auteur de l'hôtel d'Assézat est encore à trouver.
Nous n'affirmons pas que cet auteur n'est pas Bachelier, puisque nous n'en savons rien. Il serait possible, à la rigueur, que Bachelier se fut chargé de l'édification complète de la belle demeure et qu'il ait confié à Jean Castanyé la construction des murailles, se réservant toute la partie sculpturale. Mais nous n'en pouvons avoir la certitude tant que le bail complet ne sera pas retrouvé.
Les baux publiés par Mgr Douais (1) ont projeté une vive lumière sur des oeuvres de la renaissance toulousaine, mais les registres des notaires ont encore sans doute beaucoup à nous apprendre. Quel sculpteur a fait s'enrouler les ornementations délicates de la porté de Saint-Sernin? quel autre a tiré violemment de la pierre, pour les faire vivre d'une vie si intense, les vigoureuses figures de l'hôtel Maynier, les lions de la tourelle d'escalier des Tornoër? quel est l'architecte des hôtels Buet, de Cheverry, de SaintFélix ? celui du château de Pibrac est-il encore Bachelier, ou un imitateur de sa conception des fenêtres encadrées de colonnes, qu'il paraît avoir ouvertes pour la première fois à l'hôtel de Jean de Bagis?
Mais, grâce aux découvertes de Mgr Douais et aux études de Joseph de Malafosse, dont la sagacité d'observation semble les avoir prévues et devinées, le cours successif et rapide de l'art de la Renaissance à Toulouse
(1) Cette publication a été faite par la Revue des Pyrénées durant les années 1900 à 1903.
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se dessine désormais nettement et attend avec plus de patience et aussi plus de certitude déjà acquise les trouvailles nouvelles.
M. le baron DESAZARS présente des observations, et pense que l'on est autorisé aujourd'hui à attribuer l'hôtel d'Assézat à Nicolas Bachelier.
M. Antonin DELOUME demande aussi à faire deux observations à l'occasion de la lecture de M. do Lahondès :
La première est sur la question de savoir si Nicolas Bachelier est vraiment l'architecte de l'hôtel d'Assézat.
M. A. Deloume fait observer que les détails contenus dans le traité avec de Bagis qui vient d'être lu, émanent évidemment de Bachelier. Les détails techniques et architectoniques qui abondent dans ce traité, ne sont évidemment que la traduction en langue écrite du plan que l'architecte lui-même avait dessiné, et qu'il avait sous les yeux en détaillant le traité. II est vrai, peut-on dire, que le traité avec d'Assézat ne contient pas les mêmes détails techniques, mais Bachelier y prend les mêmes titres que dans le traité avec Bagis ; pourquoi lui ferait-on jouer un rôle différent?
« M. do Lahondès fait, il est vrai, très justement observer la différence de goût et de style qui se manifeste entre l'hôtel d'Assézat d'une part, et les précédentes oeuvres de Bachelier à Toulouso d'autre part. Mais beaucoup des plus grands artistes n'ont-ils pas eu, dans le cours de leur vie, différentes manières successives ?
» Le fait s'explique avec une clarté particulière en ce qui concerne Bachelier. L'hôtel d'Assézat est postérieur à ses autres oeuvres, et notamment à l'hôtel de Bagis. Or, depuis cette dernière construction, le Louvre s'était édifié à Paris, et M. de Lahondès lui-même s'est constamment plu à remarquer l'influence évidente du Louvre sur l'architecture de notre hôtel.
» Que s'est-il donc passé? Bachelier a vu le Louvre ou bien il en a vu les dessins ; ce dernier point au moins est certain ; or, son âme d'artiste s'est émue à l'aspect de l'oeuvre admirable de Pierre Lescot, et il a grandi, il a passé à une nouvelle manière sous cette puissante inspiration. Voilà pourquoi les maigreurs de style qu'on pouvait lui reprocher jusqu'alors ont fait place à l'harmonie savante et forte qui étonne dans son oeuvre nouvelle.
» La perfection des sculptures de la cour, des clefs de voûte, et spécialement du mascaron de la voûle du passage entre les doux cours,
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très admiré notamment par Jean-Paul Laurens en ma présence, tout montre l'oeuvre du grand architecte qui était ou même temps un grand sculpteur. »
M. A. Deloume, par tous ces motifs, revendique le nom glorieux do Nicolas Bachelier comme un honneur do plus pour cet hôtel toulousain où les lettres, les sciences et les arts ont reçu un abri princier.
La seconde observation de M. A. Deloume porto sur les tourillons qui couronnent le pavillon d'entrée de l'hôtel. A l'occasion du rapprochement fait par M. de Lahondès des divers monuments construits par Bachelier, ou de son temps à Toulouse et dans les environs, M. A. Deloume a fait apporter à la séance la double photographie se référant à ces tourillons rétablis par ses soins, sous la direction de M. Curvale, en 1899. Cette photographie est mise en vue dans la salle du Conseil d'administration de l'hôtel.
« Une première photographie de 1898 montre la trace très visible des anciens tourillons enveloppés dans les murs. Une photographie de 1899, juxtaposée dans le même cadre, montre les tourillons dégagés de leur gaîne de briques. M. Deloume ajoute que sur le troisième tourillon, côté sud-ouest du pavillon, on a retrouvé des moulures et encadrements en relief, identiques à ceux de la porte du parc du château de Pibrac; la forme des tourillons est la môme, ce qui prouve que les tourillons de Pibrac ont été exactement copiés sur ceux qui existaient à l'hôtel depuis déjà quelques années. Les briques constituant les reliefs et encadrements ont été conservées à ce tourillon, où on peut constater leur présence. Or, il manquait aux tourillons de l'hôtel leur pignon supérieur, et on y a reproduit la forme de celui de Pibrac.
» Il y avait trois motifs décisifs de procéder ainsi :
1° On avait la certitude de rester, par cette copie, dans le style et le goût de l'époque, et do reprendre ainsi à Pibrac ce qu'il nous avait emprunté ;
2° Cet emprunt est justifié par l'exactitude absolue des reproductions pour les 3/4 inférieurs retrouvés au troisième tourillon sudouest ;
3° C'est très sûrement à l'hôtel qu'appartenait le pignon ainsi reproduit à Pibrac et reconstitué par nous, car deux volutes en sons inverse superposées dans les reliefs, au-dessous de la sphère supé-
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Heure, reproduisent exactement le dessin de la tour avec ses volutes pareilles se profilant de môme en sens inverse, aux deux étages audessous de la lanterne.
» Ce rappel au sommet du portail de ce qui se passe au sommet de la tour est manifestement intentionnel. Donc ce que nous supposons est démontré. Sur la porte de Pibrac on a copié scrupuleusement les tourillons de l'hôtel, et nous avons pu reprendre avec certitude sur cette copie le sommet de l'original, qui seul nous manquait. »
Séance du 26 janvier 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. E. CARTAILHAC, secrétaire général, s'excuse par lettre d'être encore éloigné de Toulouse. M. le Président dit que notre confrère fait cette semaine même deux conférences à Paris : l'une au Musée Guimet sur Les peintures préhistoriques des cavernes, l'autre dite conférence annuelle Broea, à la Société d'anthropologie sur Les monuments primitifs ou eyelopéens de la Méditerranée. Il n'est pas douteux que M. Cartailhac obtiendra ses succès ordinaires, et la Société lui adresse tous ses compliments.
Lecture est donnée du projet de règlement préparé en Commission spéciale pour les Sociétés occupant l'hôtel d'Assézat et de ClômenceIsaure. Après discussion et délibération, la Société approuve ce règlement et confirme les pouvoirs de ses délégués à la Commission administrative.
Sur le rapport de M. le baron DESAZARS au nom de la Commission spéciale, la Société élit membre correspondant M. Cazac, agrégé de l'Université, proviseur du lycée de Bayonne.
M. DE LAHONDÈS montre une série de dessins de monuments toulousains, oeuvre de M. de Malbosc, édités par la lithographie Constantin, vers 1840.
M. l'abbé J. LESTRADE offre sa brochure sur Dominique Lacombe, de Montréjeau (1749-1823). Saint-Gaudens, 1903, 24 p. in-8°.
M. le baron DESAZARS DE MONTGAILHARD fait une lecture sur Les
premiers enlumineurs des Cartulaires et des Annales manuscrites de l'Hôtel de ville de Toulouse :
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Les miniatures du Capitole aux treizième et quatorzième siècles.
Ces miniatures ss trouvent principalement dans deux catégories distinctes de cartulaires municipaux, dont l'une fut établieau mois de février 1205 par le notaire consistorial, Guillaume Bernard, pour y transcrire les privilèges et titres primordiaux intéressant la commune de Toulou-o, et l'autre fut ordonnée le 4 septembre 1295 par les Consuls en exercice pour y consigner chaque année les noms des magistrats municipaux et de leurs officiers, ainsi que les titres et documents établissant les droits de la commune et ses privilèges au fur et à mesure de leur survenance.
Le Cartulaire de 1205 fut dressé en double exemplaire, l'un pour le Bourg et l'autre pour la Cité. Ces deux exemplaires contiennent un texte identique et s'arrêtent à l'époque de leur confection. Ils diffèrent seulement par leurs modes d'illustration.
Le Cartulaire, au contraire, ordonné en 1295 et inauguré par le greffier consistorial, Bernard de Sainte-Eulalie, s'augmenta chaque année, et son texte devint peu à peu une véritable chronique annuelle qui relata les faits locaux, puis s'augmenta d'indications historiques d'abord très sommaires et finit par s'étendre jusqu'à des dissertations d'une prolixité plus encombrante qu'instructive. Il se continua jusqu'en 1792, et forma ainsi plusieurs registres qu'on a appelés : Les Douze livres de l'Histoire, et qui ont été l'objet d'une étude critique des plus complètes par M. Ernest Roschach, dans l'ouvrage consacré à TOULOUSE, à l'occasion de la seizième session qui y fut tenue en 1887 par l'Association française pour l'avancement des sciences.
Suivant les goûts du temps, des enluminures furent ajoutées au texte de ces divers cartulaires. Ce furent d'abord des lettrines initiales avec des entrelacs et des feuillages, puis des vigncturesle long des marges. Dès le premier jour, on voit dans la lettre initiale de chaque cartulaire, puis de chaque chronique, la figuration de divers personnages.
Ainsi, sur le premier feuillet de chacun des cartulaires de 1205, se trouve un I majuscule formant la première lettre du mot initial IN {nomine Domini lhs Xri). Ces deux I diffèrent de modes d'ornementation, et, tout en appartenant au style gothique, ils rappellent par certains points le style roman.
L'I initial du Cartulaire exécuté pour la Cité est orné de trois médaillons superposés dans le corps du jambage, tandis que l'I initial du Cartulaire exécuté pour le Bourg est orné d'un seul médaillon placé dans la partie médiane du jambage. Chacun de ces médaillons porte un personnage sur fond d'or, et tous les personnages sont variés do figure, d'attitude et de CISIUIIK,I accusant un certain naturalisme bien rare à cette époque.
Un seul de ces I, celui du cartulaire exécuté pour le Bourg, est orné
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d'entrelacs rappelant la tradition romane. Sur chacun d'eux s'épanouissent des rinceaux se terminant par de larges fleurs chimériques.
Le tout est exécuté d'une main habile et délicate. Le gothique commence à se manifester, mais se ressentant encore de l'époque romane.
La série la plus considérable des miniatures capitulaires se trouve dans le cartulaire qui est devenu Les Douse livres de l'Histoire. Les miniatures s'y renouvelaient chaque année et avaient fini par avoir pour but principal la figuration des Capitouls. Mais le premier de ces livres ne commençait qu'à l'année 1295, et les miniatures qui l'ornaient en ont été entièrement détachées en 1793 pour les brûler sur la place du Capitole comme étant des a vestiges de la féodalité. » Pour se rendre compte de ces miniatures, il faut donc s'en rapporter soit à ceux qui les ont vues avant leur destruction, soit à celle de ces miniatures qui ont été dérobées à l'auto-da-fé révolutionnaire et qui ont été réintégrées aux archives municipales du Donjon de l'Hôtel de ville.
Les miniatures exécutées de l'an 1295 à l'an 1347 ont disparu. Pendant ce temps, d'après Lafaille, les Capitouls étaient représentés avec le viguier royal d'une façon tout à fait impersonnelle, presque symbolique, dans le cadre d'une initiale, et la miniature était « peu délicate, n Les miniatures de la fin du treizième siècle étaient donc inférieures à celles du commencement de ce siècle, qui étaient, au contraire, remarquables par leur délicatesse. Cependant, les enlumineurs variaient les attitudes, précisaient les costumes, composaient même des scènes conformes à la nature.
A partir de l'an 1348, la miniature des Annales ne se borne plus à une lettrine. Elle s'agrandit progressivement jusqu'à atteindre, en 1351, toute la largeur du feuillet au-dessus de la chronique manuscrite, ce qui est fort rare partout ailleurs, à cette époque. La décoration se dépouille peu à peu du caractère purement ornemental et conventionnel. Aux fonds d'or de la tradition latine se sont substitués, tout au moins à partir de 1367, les fonds de couleurs imités des verrières et des carrelages d'églises. Pour rendre leurs miniatures plus pittoresques, les miniateurs font des emprunts à l'architecture civile, militaire et religieuse du temps. En 1351, ils y ajoutent des écussons portant des armoiries qui, toutes conventionnelles qu'elles sont, rendent plus personnelle la figuration des Capitouls restée insuffisante quant à la ressemblance.
Quoique conventionnelle et fixe comme les premiers types byzantins, quoique rappelant vaguement ces derniers, la représentation des Capitouls ne procède nullement de l'art grec de Byzance, mais de l'art latin. On n'y trouve plus les formes grêles, émaciées, de l'art byzantin, mais, au contraire, les types courts et trapus, et les têtes trop fortes de l'art roman.
Tandis que les enlumineurs allemands et italiens étaient parvenus à extraire de l'art latin et de l'art roman un certain naturalisme qui annonçait
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73la prochaine du portrait, tandis que les enlumineurs toulousains du Cartulaire remontant au début du treizième siècle rivalisaient avec les enlumineurs allemands et italiens, c'est à peine si les enlumineurs capitulantes de la fin du quatorzième siècle cherchaient à donner quelque individualité aux effigies des Capitouls en les rangeant deux par deux sous des travées architecturales et en reproduisant exactement, mais sans art, leur pittoresque costume. Si, dès 1352, on trouve quelques différences dans la couleur et la coupe des cheveux et de la barbe des personnages représentés, ce n'est qu'en 1368 qu'on voit les enlumineurs chercher à rendre le ton des chairs et marquer les yeux par des points blancs et les lèvres parties points rouges. Il faut arriver jusqu'au quinzième siècle pour constater dans les miniatures du Capitole une véritable recherche dq portrait.
D'autre part, les enlumineurs toulousains ne se servent jamais du paysage pour y mettre les Capitouls. Cela semble tout naturel, puisqu'ils les représentent avec leur costume officiel, et, par conséquent, dans l'exercice de leurs fonctions à l'Hôtel de ville. Mais ce n'est pas la véritable raison. Ils agissent en cela comme les enlumineurs des écoles italiennes et des écoles allemandes qui n'usaient que des compositions architecturales empruntées au style du jour : arcaturcs gothiques trilobées, créneaux, mâchecoulis et tourelles à combles pointus placées en échauguettes. A partir de 1353, les Capitouls sont représentés rangés sous des décorations ogivales formant comme des niches où ils sont encastrés. Elles reviennent an plein cintre en 1392 et 1393, et de fines colonnettes séparent les Capitouls par groupes de deux.
Les personnages sont sur fond d'or en 1352 et 1353. Les fonds sont tantôt entièrement d'or et tantôt mêlés de couleurs en 1367. L'or devient moins dominant en 1392 et 1393, mais il est toujours employé pour rendre la décoration plus riche. Quant à la couleur proprement dite, elle se fait plus solide à mesure qu'on avance dans le quatorzième siècle et la gouache commence à se montrer pour donner à l'enluminure plus de vigueur ou plus de douceur suivant le sujet représenté. La peinture des manuscrits capitulaires tend à redevenir un art. Les Capitouls font appel à de véritables artistes pour se faire a écrire » et « peindre. » Il leur reste toutefois à figurer dans des scènes peintes formant tableau. La miniature n'est pas encore chargée de raconter en peinture « l'histoire » rapportée par l'écrivain de la chronique : ce sera pour le siècle suivant.
Quant aux auteurs de ces miniatures ils sont restés inconnus. On a pu seulement relever dans les comptes du trésorier municipal et dans les mandements des Capitouls quelques rares noms d'enlumineurs employés pour l'illustration des Annales capitulaires. Tels sont ceux de P. del Vilar pour l'année 1302 et de Jehan Noguier pour les années 13^6 à 1388 et 1406. Quant à celui de Mariai Marti, il n'est mentionné par les comptes municipaux
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de 1385 que pour des besognes subalternes : des drapeaux et des armoiries pour l'entrée à Toulouse du duc de Berry, ce qui n'excluait pas sa capacité artistique. Dans tous les cas, ces trois noms indiquent une origine indigène.
Par suite de l'agrandissement de la miniature représentant les Capitouls, l'illustration de la lettrine initiale de la chronique annale a perdu de son importance. Après avoir enfermé dans ses lignes un dessin de figures ou une scène historiée, cette initiale A du mot Anno par lequel débutent toutes les chroniques n'a plus que des rinceaux de feuillage ressortant tantôt sur un champ d'or, tantôt sur un fond colorié.
Le long des marges du vélin couvert des « vignettes, « ainsi appelées parce que les dessins qui ornent ces marges serpentent autour des pages comme la vigne cultivée en espalier s'étend capricieusement le long des murailles où elle est plantée ; mais la plupart des miniatures «■ vignetées » le sont d'une façon assez discrète, sinon parcimonieuse.
Somme toute, les enlumineurs du Capitole au quatorzième siècle pratiquent un art semblable, mais inférieur, à celui des écoles italiennes et des écoles flamandes. Ils ne sont pas non plus à la hauteur des enlumineurs de l'Ile-de-France de cette époque. Ils ne sauraient même valoir les enlumineurs du Cartulaire municipal du début du treizième siècle.
Cette infériorité est d'autant plus surprenante qu'on retrouve à Toulouse, pour le quatorzième siècle, d'autres manuscrits enluminés témoignant d'un art très élevé, ce qui pourrait faire douter qu'ils fussent exécutés à Toulouse. Tels sont le Missel des Minimes et le Missel de Jean Tissandier, évoque de Rieux. Mais peut-être aussi les enlumineurs attachés au clergé ou en faisant partie étaient-ils plus habiles que ceux qu'employaient les laïcs.
A cette époque, l'art pictural avait l'ait de grands progrès en France, et surtout dans le Midi, par le fait de l'établissement de la papauté à Avignon en 1309. De nombreux artistes italiens, et, en particulier, Giotto et Simone Memmi, étaient venus en la nouvelle cité papale pour y exercer leur profession. Ils durent rayonner dans toutes les régions environnantes. L'on reconnaît, sinon leur propre main, du moins leur influence dans les fresques toulousaines qui nous sont restées, telles que celle de la chapelle des Sept-Dormants, aujourd'hui devenue la sacristie de la basilique de SaintSernin remontant au premier tiers du quatorzième siècle, et celle de la chapelle de Saint-Antonin, faisant partie de l'église des Jacobins, datée de l'année 1351, toutes deux antérieures à la peinture du Voeu de Charles VI dans le cloître du couvent des Carmes, qui ne fut exécutée que dans les dernières années du quatorzième siècle. On pourrait en citer d'autres qui ont disparu, en tout ou en partie, telles que celle de l'église du Tanr représentant la généalogie de Jacob, dont une copie a été prise par M. Joseph Engalière et est conservée au Musée Saint-Raymond, celles des églises des
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Cordeliers, des Grands-Augustins, des Minimes, des Chartreux, etc., encore visibles au dix-huitième siècle et même au commencement du dix-neuvième. Il y avait donc à celte époque, à Toulouse, des peintres, soit étrangers, soit indigènes, susceptibles d'exécuter de la façon la plus satisfaisante tous les travaux d'art qui pouvaient leur être demandés. Et il serait surprenant qu'il ne put en être de môme des enlumineurs en une ville aussi importante que Toulouse par son Clergé et par son Université, habitués à faire appel à leur concours. Il est plutôt à supposer que, si les enluminures des Annales au quatorzième siècle laissent à désirer, c'est que les Capitouls ne s'adressèrent pas aux enlumineurs toulousains les plus capables et se contentèrent sans doute de ceux qui étaient employés journellement pour leurs cartulaires et pour les actes du greffe consistorial.
Il en fut autrement au quinzième siècle, époque à laquelle devinrent d'autant plus intéressantes les miniatures capitulaires. Elles feront l'objet d'une prochaine étude complémentaire de l'époque gothique.
Séance du 2 février 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. LE PRÉSIDENT fait part de la mort de M. l'abbé Couret, membre correspondant à Saleich (Haute-Garonne), rappelle ses travaux qui lui valurent d'être distingué dans nos concours et exprime tous les regrets de notre compagnie.
La correspondance imprimée comprend, en outre des périodiques, une brochure in-4° de M. Ch. Palanquo, qui fait un cours libre d'égyptologie à notre Faculté, Note sur quelques jouets coptes en terre cuite. Le Caire, 1903.
On signale encore l'Histoire de la Bastide de Saint-Lys depuis son origine jusqu'à nos jours, par P. Delaux et F. Liberos, frères des écoles chrétiennes. Toulouse, 1904, 422 pages in-8°. Cet ouvrage a remporté le prix de Clausade à notre concours de 1902.
M. BARRIÈRE-FLAVY lit une note sur la brochure intitulée :
Fouilles d'Azy, de M. 0. Camuzon.
La commune d'Azy est située dans la partie méridionale de l'arrondissement de Château-Thierry, le plus pauvre en sépultures barbares des cinq arrondissements du département de l'Aisne, qui a donné environ deux
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cents cimetières, presque tous fouillés à ce jour. 11 est opportun toutefois de faire observer que la fameuse nécropole de Caranda, où Frédéric Moreau recueillit de si admirables pièces, se trouve dans cet arrondissement même, mais au nord.
L'auteur de la brochure dit avoir ouvert des tombes de tous les âges, depuis l'âge de fer jusqu'à l'époque carolingienne. Assurément il y avait à Azy des inhumations gauloises et gallo-romaines ; mais en ce qui concerne la distinction établie par l'auteur entre objets francs d'une part, et carolingiens du septième et du huitième siècle de l'autre, la chose semble un peu risquée. Les Carolingiens n'étaient-ils pas des Francs? et peut-on, sans que cela paraisse prématuré, donner l'étiquette de carolingiens aux objets du septième siècle ?
Les boucles simples, en bronze, maintenues à l'aide de goupilles, sont, par l'auteur, qualifiées de carolingiennes, alors qu'il est manifeste pour tous les archéologues qui se sont occupés de l'époque barbare, qu'elles remontent aux Francs des invasions.
Parmi les armes se trouvent, une épée dont les dimensions ne sont pas indiquées, et des fers de lance francs.
Deux boucles-agrafes présentent quelque intérêt : ce sont, une agrafe complète en fer, plaquée ou incrustée d'or, et une plaque en bronze, arrondie, où se voit une grossière face humaine formant le centre d'une série de cercles alternant avec des chevrons, des zigzags, des dents de scie et des grecques. Cette pièce est la reproduction presque identique d'une agrafe recueillie par Baudot dans la vaste nécropole de Charnay (Saône-et-I.oire), — aujourd'hui au Musée des antiquités nationales de Saint-Germain-enLaye, — et d'une seconde plaque, trouvée à Angy (Oise), et qui figurait dans la collection, aujourd'hui dispersée, de feu le D' Baudon, à Clermont (Oise).
Il est fort regrettable que cette brochure ne renferme qu'un trop laconique exposé des fouilles, et, qu'en outre, on ait joint au texte des planches dont le coloris enlève toute netteté aux dessins, dont les objets, d'une reproduction exiguë, paraissent ornés.
Séance du 9 février 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. Emile CARTAILHAC, de retour de son dernier voyage à Paris, à Rouen et Beauvais, remercie ses collègues de la cordialité qu'ils ont bien voulu lui témoigner et donne dos détails sur les faits les plus intéressants qu'il a pu rapidement observer. Il a la satisfaction d'annoncer que M. Emile Guimet accepte avec empressement de
- 77venir
77venir Toulouse faire une conférence sous les auspices de la Société archéologique. Le 22 avril il sera au milieu de nous et nous parlera de la Syrie et de la Palestine, d'où il revient avec une belle moisson de vues archéologiques nouvelles.
M. LAPIERRE, membre libre, présente l'ouvrage suivant : Anlon, monographie communale (Comminges et Nébouzan).
Encore des documents et toujours des documents. Aujourd'hui, toute l'histoire est là. Les archives sont fouillées par des travailleurs infatigables, et, parmi ceux-là, il faut ranger Fr. Irénée, du couvent des frères mineurs capucins, à Rome.
Aulon, ancienne seigneurie du Comminges, puis du Nébouzan, est maintenant une commune du canton d'Aurignac, département de la HauteGaronne. Le Fr. Irénée, tout fier de son. village d'origine, en écrit l'histoire, remontant aux âges les plus reculés.
Un autel votif, en marbre, qui se trouve au musée de Toulouse, porte cette inscription :
ABELLIO
NI
MINICIA
JUSTA
V. S. L. M.
Abellioni
Minicia Justa
Volum solvit libens merito
(en accomplissement légitime
d'un voeu spontané).
Abellion était là le dieu protecteur, dont le culte avait de nombreux partisans dans les Pyrénées.
La silencieuse vallée d'Aulon fut, à deux reprises, habitée par les religieux bénédictins. L'église d'Aulon accuse l'oeuvre des moines, mais combien elle a été modifiée depuis l'origine. A côté de l'église abbatiale, on éidifia une petite église paroissiale.
Les seigneurs se sont succédé à Aulon. Un donjon démantelé atteste l'ancienne puissance. Parmi les seigneurs d'Aulon, il faut citer l'illustre famille de Benque, les comtes de Foix, les barons de Ramefort, Pierre de Sarrecave (1593), le baron de Lagarde, Verdelin de Montégut, Joseph Tranquillin de Médidier, le dernier.
Les moines avaient gardé le titre de curé primitif de la paroisse d'Aulon, et ils choisissaient le prêtre séculier qui devait remplir en leur nom le ministère paroissial. En 1630, l'évêqùe de Comminges fit un rapport très détaillé sur l'état de la paroisse : c'est presque une histoire complète de la localité.
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La période révolutionnaire eut son contre-coup à Aulon. Un-curé héroïque, M. Bon, tint tête à l'orage jusqu'au bout, et administra la paroisse pendant plus de trente ans.
A côté du pouvoir féodal, il faut placer l'organisation communale. Les consuls ou magistrats municipaux avaient des attributions considérables. Ils devaient surtout défendre et conserver intacts les anciens privilèges et les coutumes consacrées.
L'auteur consacre deux chapitres à l'histoire d'Aulon pendant la révolulion. Ici, les documents officiels abondent. Les élections municipales font grand bruit. Les idées nouvelles, les revendications populaires se produisent avec fracas, et les affaires ne marchent pas plus vite.
Enfin, les derniers chapitres concernent la paroisse d'Aulon de 1803 à 1902. Il faut lire, dans l'ouvrage, ce récit impartial, souvent émouvant, de faits contemporains, cet hommage très mérité et très juste à des hommes du dévouement le plus absolu et le plus désintéressé.
Le Livre du Fr. Irénée se termine par cent pages de pièces justificatives puisées dans les meilleurs dépôts d'archives, et, jusqu'au bout, l'historien reste impeccable ; il a toute la rectitude d'esprit, toute la patience de recherche, tout le savoir qui distinguent ces bénédictins dont il parle souvent.
Les éditeurs Privât et Abadie ont mis leur griffe sur cet ouvrage, ce qui ne gâte rien.
Les monuments civils et religieux d'Auterive.
M. BARRIÈRE-FLAVY fait une communication sur les édifices civils et religieux disparus ou existant encore dans la ville et la commune d'Auterive (Haute-Garonne).
Il signale en premier lieu les substructions de l'église primitive d'Auterive, dite Sainte-Marie-et-Saint-Paul, datant du onzième siècle, qui se voient dans le cimetière Saint-Paul.
Cette église fut ruinée, ainsi que l'église Saint-Michel située dans la ville, lors de la prise d'Auterive par les Huguenots, en 1574.
L'église Saint-Michel fut seule rebâtie de 1599 à 1618. Des baux à besogne retrouvés dans les Registres des Notaires d'Auterive (étude actuelle de M. L. de Cazis) permettent de suivre les travaux de restauration.
Le prieuré Saint-Paul d'Auterive avait deux annexes : Labruyère, aujourd'hui commune, et Notre-Dame, plus tard Saint-Barthélémy deMouzens, dont l'église ruinée n'offre plus qu'une partie de sa façade dans laquelle s'ouvre la porte ogivale.
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La ville d'Auterive renfermait autrefois un monastère de religieuses Clarisses, dont l'église a complètement disparu, et un couvent de religieux de la Morcy qui possédait également une chapello aujourd'hui détruite et dont il ne subsiste qu'un bénitier de pierre aux armes de l'ordre.
Au midi et hors des murs de la ville dont elle formait un faubourg, existait la paroisse et l'église de Saint-Pierre do-Bouzonville, dépendant du djocèse d'Alet. Elle fut démolie à la Révolution.
Le faubourg actuel de la Magdeleine, sur la rive gaucho de l'Ariège, comprenait deux paroisses faisant partie du diocèse de Rieux. La Magdeleine, annexe de la paroisse de Grazac, dont la vieille église fut emportée par l'inondation do 1875, et Saint-Martinde-Lufliac, depuis longtemps disparue.
Passant aux édifices civils, M. Barrière-Flavy fait la description des fortifications de la ville, dont il subsiste encore de nombreux restes.
Au nord, sur le point culminant de la ville, s'élevait le château, plusieurs fois reconstruit, notamment en 1525, et définitivement ruiné en 1574.
La cité d'Auterive, entourée de remparts maintes fois réparés, principalement en 1438-1441 et en 1610, communiquait avec ses faubourgs par trois portes : celle du Château, au nord; celle du Mercadal, la plus importante, au couchant; celle de Lèze, au levant. Il y eut bien jadis une quatrième porte, dite Porte-Neuve, au midi, qui était déjà murée au commencement du dix-septième siècle.
Les murailles étaient flanquées do tours, de guérites, que l'on peut aisément identifier.
Dans l'intérieur de la vieille ville subsistent encore des maisons ou parties de maisons de bois du seizième siècle, notamment dans la rue Mage, au coin Rabigues, et dans la rue de la Trilhe.
Enfin deux constructions de brique du seizième siècle méritent de retenir l'attention. M. Barrière-Flavy, au moyen de nombreux documents, a pu en reconstituer presque intégralement l'histoire. La première, située rue Saint-Michel, appartenait, au milieu du quinzième siècle, à Jacques Ysalguier, coseigneur d'Auterive, dont les descendants la vendirent en 1532 à Henri II, roi de Navarre, qui l'inféoda ensuite à un bourgeois de la ville. Elle passa successivement aux Saint-Etienne, seigneurs de Camparnaud, aux Corn-
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menges, barons de Péguilhan ; enfin, aux dix-septième et dixhuitième siècles, aux familles parlementaires de Caulet et de Rességuier.
La seconde, sise rue du Four, fut reconstruite par le roi de Navarre, de 1532 à 1545, alors qu'il était le plus important coseigneur de la baronie d'Auterive. Il l'inféoda de même à noble Simon de Bourges, juge d'Auterive, dont les descendants la conservèrent presque sans interruption jusqu'au commencement du dix-huitième siècle.
Elle fut ensuite vendue à une famille de marchands de la ville.
M. Barrière-Flavy signale ensuite les quatre principaux domaines situés dans l'ancienne juridiction, et actuellement dans la commune d'Auterive.
I. A l'est, dans les coteaux, la seigneurie avec le château d'Ychaussas, qui appartint longtemps aux Seguy ou Seguin, marchands de Toulouse.
IL Non loin et au sud-est de la ville, le domaine et château dit de la Tour de Montfort, possédés durant le dix-septième et partie du dix-huitième siècle par la branche cadette des Garaud, de Vieillevigne; puis, de 1725 à 1757, à Guillaume Vadier, père du conventionnel.
III. Au nord, sur la rive droite de l'Ariège, le domaine et châleau de Roquebrune, qui passèrent successivement de la famille de Montels à celle de Fa y, baron do Launaguet ; de Chaubard, seigneur de Bonneval ; puis aux Madron et aux Bécave de Fontalbe.
IV. Au sud-ouest, le domaine et le manoir de Lavornièro, conservé et restauré par M. F. Pons, bâti par noble Jehan de Durand, seigneur do Gameville, greffier en la Cour de Parlement, dans la seconde moitié du seizième siècle. Cette terre demeura presque pendant deux siècles dans la famille de Boysset, dont plusieurs membres furent conseillers au Parlement de Toulouse.
M. CARTAILHAC annonce la fondation, à Marseille, d'une Société provençale d'archéologie et propose de prendre l'initiative d'adresser à ses premiers membres, qui sont déjà une quarantaine, dos compliments et des voeux.
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Séance du 23 février 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. l'abbé SALTET présente à la Société un court compte rendu d'un volume de M&r Douais, récemment paru sous le titre de
Trésor et reliques de Saint-Sernin, les Inventaires (1).
Les publications de textes du moyen âge sont très en honneur chez les érudits de notre temps. Cependant, parmi eux, c'est un bien petit nombre qui pourrait soutenir la comparaison avec Mgr Douais quant à l'étendue et au bonheur des recherches. Il n'est pas indifférent de le constater une fois de plus, puisque c'est l'histoire méridionale qui bénéficie surtout de cette infatigable activité. Il y a trois ans, Msr Douais commençait une collection intitulée Documents sur l'ancienne province de Languedoc, et nous donnait un premier volume consacré à Béziers religieux. Les trois volumes suivants formeront une série consacrée à la basilique Saint-Sernin de Toulouse sous le titre général : Trésor et 7'eliques de Saint-Sernin. Voici le titre particulier de chaque volume : I. Les Inventaires. II. La confrérie des Corps Saints, son administration. III. Les Corps-Saints, Donations, Inventions, Elévations. De ces trois volumes, le premier vient de paraître; il est consacré aux inventaires du trésor et des reliques de la basilique.
Ces inventaires sont au nombre de douze et peuvent être rangés en deux séries de six. La première série comprend six inventaires qui se placent entre les années 1468 et 1524. Ces documents sont de plus en plus étendus et précis. Us nous renseignent sur les reliques, les livres, les ornements et les parements contenus dans le trésor. Quatre de ces pièces sur six appartiennent aux premières années du seizième siècle, années qui ont vu le conflit des capitouls et des abbés de Saint-Sernin au sujet de la propriété et de la surveillance du trésor. Pendant cette période, les inventaires sont particulièrement soignés. Mais ce fut là une maigre consolation pour les Toulousains lorsqu'ils apprirent que le fameux camée, cause principale de ces difficultés, fut remis, en 1533, à François I«r, à Marseille. Depuis cette date, les inventaires perdirent beaucoup de leur intérêt et furent dressés à peu près uniquement pour la transmission du service du gardien. Ce sont les six derniers inventaires de la série. Ces documents sont présentés et expliqués au lecteur dans une introll) Paris» Picardi
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duction détaillée qui montre une fois de plus quel méridionalistc très informé est Mgr Douais. Un appendice contient une série de pièces relatives au passage du suaire de Cadouin à Toulouse et une étude critique très concluante sur l'arrivée des reliques de saint Gilles à Toulouse.
Tel est le premier volume de la collection commencée par Mgr Douais ; les deux suivants vont paraître sans aucun retard. On le voit, celte publication sera le digne couronnement des travaux de Mgr Douais sur la basilique du Midi de la France ; c'est aussi un beau souvenir adressé aux Toulousains qui ont le culte de leur passé !
M. l'abbé SALTET analyse un travail de M. l'abbé Annat, dû diocèse de Bayonne, et étudiant à l'Institut catholique, et communique à la Société les principales conclusions de cette étude.
Les étudiants clercs à l'Université de Toulouse de 1482 à 1498.
Les archives de la Haute-Garonne possèdent de précieux registres des ordinations conférées, à Toulouse, de 1482 à 1498. Pareils registres ont dû être tenus à jour, au moins depuis le quinzième siècle (1).
Malheureusement, en dehors de la série qui va de 1482 à 1498, c'est à peine si on trouve quelques courts renseignements sur certaines ordinations détachées pour les années 1455 à 1458, 1500, 1503 et 1522-1523. Ces données, cependant, peuvent fournir quelques points de comparaison.
La série qui semble complète commence avec l'année 1482 pour finir en 1497. Durant cette période, les ordinations se succèdent régulièrement : un seul vide se produit, en l'année 1494, pour laquelle les registres ne donnent aucune ordination.
Le nombre d'ordinands qui, durant cette période de quinze ans, reçurent à Toulouse les ordres sacrés est considérable. On ne compte pas moins de 4,880 sous-diacres, 4,522 diacres et 4,334 prêtres, ce qui, pour chacune des 71 ordinations, donne une moyenne de 68 sous-diacres, 62 diacres et 61 prêtres.
D'où venaient tous ces clercs ? Les registres nous renseignent sur ce point, et c'est ce qui permet de faire encore quelques constatations intéressantes soit sur le diocèse de Toulouse, soit sur le recrutement de l'Université.
11 ne peut être question ici d'étudier l'état du clergé dans le diocèse de Toulouse, mais simplement de tirer des registres d'ordinations quelques renseignements intéressants en se bornant aux prêtres.
(1) Arch. départ., Toulouse, Fonds de l'Archevêché, G. 452, 454, 455, 456 «t 457.
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Leur nombre, à la fin du quinzième siècle, dut être considérable dans te diocèse de Toulouse, car, de 1482 à 1498, le contingent de clercs ordonnés prêtres fut chaque année relativement élevé : il fut de 42 dans l'année la moins heureuse, en 1495, et il monta jusqu'à 88 en 1488. Au total, pendant cette période de quinze années, le recrutement du clergé de Toulouse compta 959 nouveaux prêtres, soit une moyenne de 64 prêtres chaque année.
Dans quelles classes se recrutait le clergé? Quoiqu'on ne puisse pas répondre à cette question d'une manière très "précise, il semble bien certain cependant qu'en grande partie les prêtres appartenaient à la classe des roturiers. La mention nobilis se rencontre très rarement : on pourrait pour ainsi dire compter sur les doigts ceux à qui les registres l'attribuent. La particule de n'est pas un indice suffisant pour conclure à une origine noble : d'ailleurs, sur 959 prêtres, on n'en trouve que 209 qui la portent.
Los clercs des diocèses environnants venaient nombreux étudier la théologie à l'Université. Les étrangers y venaient peu, et cela se comprend, d'ailleurs, car, à cette époque, les écoles théologiques étaient disséminées un peu partout : à la fin du quinzième siècle, les diverses nations n'avaient pas à envier à la France ses universités comme aux treizième et quatorzième siècles : elles en avaient fondé elles-mêmes, et si elles n'avaient pas l'éclat et la renommée des écoles françaises, elles suffisaient cependant en grande partie à l'éducation du clergé : c'est la raison pour laquelle on ne voit plus les étrangers, en particulier les Espagnols, affluer dans l'Université de Toulouse comme au quatorzième siècle. M. Fourniera relevé, pour l'année 1370, la liste des étudiants qui se trouvaient à Toulouse : on y compte 79 espagnols, dont 43 pour le seul diocèse d'Urgcl. On ne voit rien de tel de 1482 à 1498. Les registres d'ordinations, il est vrai, ne nous renseignent pas complètement sur les étudiants de l'Université, puisqu'ils ne nous donnent que les noms de ceux qui reçurent les ordres sacrés, mais ils nous donnent cependant des indications précieuses et assez concluantes, car les étudiants clercs, obligés de passer plusieurs années à Toulouse, y recevaient ordinairement la prêtrise.
Or, durant cette période de quinze années, on ne trouve que douze étrangers ordonnés prêtres à Toulouse qui se décomposent ainsi : 1 du diocèse de Genève (1490), 2 du diocèse de Bisccglia, en Italie (années 1488 et 1493), 9 appartenant à divers diocèses d'Espagne. A part ce nombre insignifiant d'étrangers, les prêtres ordonnés à Toulouse sont tous Français, soit 4,322, et si, de ce nombre, on en retranche 50 dont les registres ne nous indiquent pas le diocèse d'origine, il en reste 4,272 qui peuvent nous fournir des renseignements intéressants.
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84Il tout d'abord distinguer les réguliers et les séculiers : les premiers au nombre de 472, les seconds au nombre de 3,800.
Parmi les religieux, les Frères Mineurs viennent, en premier lieu, avec 121 prêtres ordonnés. On compte ensuite 84 Frères Prêcheurs, 58 Carmes, 54 Augustins, 37 Cisterciens, 33 Bénédictins, 23 religieux de l'Ordre de la Merci, 19 de la stricte observance, 10 Trinitaires, 9 Prômontrôs, 9 religieux de l'Ordre de Cluny, 5 Franciscains terliae regulae, 5 Chevaliers de Saint-Jean, 3 religieux de l'Ordre de la sainte Croix, 1 de l'Ordre de saint Bernard et 1 Chartreux.
Un siècle plus tôt, alors que l'Université de Toulouse était en pleine prospérité, les religieux, semble-t-il, n'y étaient pas plus nombreux. Ainsi, la liste des étudiants pour l'année 1370, publiée par M. Fournier (I), nous apprend qu'il y avait alors 92 religieux appartenant à 5 ordres différents : 43 Bénédictins, 25 Augustins, 13 religieux de l'Ordre de Cluny, 10 Cisterciens et 1 Trinilaire. A la fin du quinzième siècle, les ordres religieux représentés à l'Université étaient au nombre de 16 : la moyenne annuelle des religieux ordonnés prêtres durant la période qui nous occupe, de 1482 à 1498, n'est que de 31, il est vrai ; mais comme les étudiants passaient plusieurs années à Toulouse, on voit qu'à la fin du quinzième siècle les religieux étaient à peu près aussi nombreux qu'en 1370.
Les séculiers se recrutaient presque uniquement dans le midi de la France, dans les diocèses qui forment le bassin de la Garonne ou qui le limitent. Le nombre de ceux qui venaient d'ailleurs, des diocèses relativement éloignés de Toulouse, était insignifiant.
C'est ainsi que, de 1482 à 1498, les registres des ordinations nous donnent les noms de 5 prêtres appartenant au diocèse de Poitiers : 4 des diocèses de Dax et du Puy; 3 des diocèses de Bayonne, d'Agde, d'Elne, de Mende, de Lyon et d'Orléans ; 2 de Bordeaux, de Lodève, de Gap et de Luçon, et enfin un seul prêtre dans chacun des diocèses suivants : Tulle, Tours, Rouen, le Mans, Autun, Châlons, Bayeux, Mâcon, Besançon, Viviers et Embrun.
Sur les 3,850 prêtres français ordonnés pendant cette période, 1,622 appartiennent à la province ecclésiastique de Toulouse (Toulouse, 959; Montauban, 163; Lavaur, 167; Rieux, 107; Lombez, 75; Mirepoix, 65; Pamiers, 50 ; Saint-Papoul, 36). Et si l'on y ajoute les contingents fournis par les diocèses circonvoisins, on voit que les dix-huit départements groupés autour de l'Université ont fourni à eux seuls 3,522 prêtres, soit les neuf dixièmes du chiffre total. Les autres prêtres (328) sont fournis par quarante diocèses différents.
Lo diocèse qui en a fourni le plus est celui de Cahors : 588 dans quinze
(1) Fournier, Les statuts et privilèges des universités françaises, t. I, p, 631.
r- 85 -,
années ; et ce fait est assez curieux à constater, car la ville de Cahors elle aussi possédait depuis 1332 une université. Le nombre vraiment extraordiT naire de clercs de ce diocèse qui ont reçu la prêtrise à Toulouse porte à croire que la tentative de Jean XXII, pour doter sa ville natale d'une école thcologique, n'eut pas un grand succès.
Le diocèse de Rodez est représenté par 424 prêtres.
Après ces deux diocèses, qui méritent une place à part, ceux qui envoyèrent le plus d'étudiants à l'Université sont : ceux d'Agen, de Montauban, de Lauvaur et de Castres, qui figurent sur les registres avec une moyenne de neuf à quinze prêtres ordonnés annuellement.
En somme, cette période de la fin du quinzième siècle marque un relèvement très prononcé de l'Université de Toulouse.
Les symptômes de décadence s'y étaient fait sentir vers la fin du siècle précédent, et, pour lui donner plus de vie et d'activité, on avait essayé, vers 1391, une réforme dans les règlements. Mais cette tentative ne produisit aucun bon résultat ; on eut beau réduire le temps des études, supprimer les examens publics, faciliter de toutes manières aux étudiants l'obtention des grades, les étudiants ne vinrent pas, de sorte que, vers 1411, l'Université de Toulouse était abandonnée. Et si, à ces causes générales de» décadence, on ajoute les guerres « qui, en dépeuplant le Midi, en rendant » les communications difficiles, éloignaient les étudiants, les rendaient » moins nombreux, on comprendra facilement pourquoi la décadence de » l'Université de Toulouse fut si rapide (y. »
La situation ne s'améliora guère avant le milieu du quinzième siècle. Les suppliques envoyées de Toulouse à Rome à cette époque le prouvent bien clairement, ainsi que les rares renseignements que les registres d'ordinations nous donnent pour cetle période.
Un fragment très endommagé d'un registre nous donne deux listes d'ordinands qui ont reçu les ordres sacrés à Toulouse dans l'année 1455. Leur nombre est de beaucoup au-dessous de la moyenne, que l'on constate, plus tard, dans la période qui va de 1482 à 1498. — Dans l'une des ordinations, on compte 14 ou 15 diacres et 21 ou 22 prêtres ; dan3 l'autre, 15 sous-diacres, 16 diacres et 17 prêtres.
Vers cette époque cependant on se préoccupa de rendre à l'Université son ancien éclat. —L'évêque de Mirepoix, Guillaume Dupuy, y avait fondé, dès 1434, le collège de Mirepoix, et, le 26 septembre 1457, le cardinal Pierre de Foix le Vieux y établissait de son côté un autre collège destiné à recevoir vingt-cinq boursiers. Par ailleurs, on réformait les collèges déjà existants, et tous ces efforts parvinrent à rendre à l'Université de Toulouse un peu de son ancienne prospérité.
(1) Histoire de Languedoc (éd. Privât), t. VII, p. 607.
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86La s'améliora ; il dut' y avoir à Toulouse, dans les dernières années du quinzième siècle, une population scolaire de près de deux mille étudiants clercs. Ce n'est là, il est vrai, qu'une conjecture basée sur le nombre de prêtres ordonnés; mais elle ne semble pas cependant téméraire, car la durée des études, qui n'était pas la même pour tous, dut être, en moyenne, d'au moins trois années.
M. CARTAILHAC analyse en ces termes l'ouvrage de M. J. Dechelette :
La fabrique de la Graufesenque (Aveyron) (1).
A deux kilomètres à l'est de Millau , dans un de ces sites pittoresques qui sont l'orgueil des montagnes du Rouergue, les eaux limpides du Tarn, débouchant du Causse noir, opèrent leur jonction avec la Dourbie. C'est là, dans une vallée au sol argileux, fermée par de hautes murailles rocheuses, que la voie romaine allant de Segodunum à Lodève rencontrait une des trois localités connues des Rulenes, le Condatomagus ou « champ du . confluent. » Ces lieux, qui portent le nom de la Gaufrescnque, sont aujourd'hui déserts.
Vers 1882, un archéologue zélé de l'Aveyron, l'abbé Cérès, y découvrait un important gisement de débris céramiques appartenant à la série des vases sigillés. Il retira du sol des fragments et des moules assez nombreux pour révéler l'existence d'un centre important de fabrication. Il ne publia presque rien (Mém. Soc. lelt. Aveyron, t. XIII, 82, t. XIV, 448-458), mais il avait du moins dressé le relevé des marques que, revu et complété, publia en 1894 l'abbé Vialcltcs (Mém. Soc. lell. Aveyron, t. XV, 5).
En 11)01, quelques habitants de Millau , accessibles au culte désintéressé de nos antiquités nationales, eurent l'heureuse pensée de reprendre les fouilles à la Graufesenque. Les travaux conduits avec méthode par M. l'abbé Hermet et M. de Carlshausen, poursuivis en 1902 (et en 1903 depuis la publication du Mémoire que nous analysons) n'ont encore porté que sur une étendue de terrain relativement restreinte. Ils ont suffi pour mettre au jour une récolte considérable d'échantillons céramiques de toute nature, moules, débris de fours, cales et supports de vases, mêlés à une grande quantité de poterie rouge unie et ornée.
M. Déchelette, qui voyageait à travers toute l'Europe pour étudier la céramique gallo-romaine, assista une journée à ces intéressantes explorations, put en examiner le produit et eut la confirmation d'un fait que
(1) J. Décheletto, La fabrique de la Graufesenque (Aveyron), il p. in-8', fig. et pi. (Rev. des Eludes anciennes, t. V. Bordeaux, 1903).
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l'étude des noms de potiers précédemment connus et le style des vases ornés du Musée de Rodez lui avaient déjà suggéré, à savoir que les ateliers du Condatomagus des Rutènes, constituaient durant la seconde moitié du premier siècle de notre ère, le centre de fabrication céramique le plus important, non seulement de la Gaule, mais de tout l'empire romain.
Au temps de la conquête do la Narbonnaise, l'industrie céramique des Gaulois était déjà en possession d'une technique très avancée. A côté d'un assez grand nombre de vases de fabrication commune et parfois grossière, quelques-uns se distinguaient par l'élégance recherchée et la pureté presque hellénique du galbe, la finesse de la pâte et l'homogénéité de la cuisson. D'autres, plus originaux et plus intéressants, étaient peints et à décoration géométrique.
La romanisation de l'industrie céramique s'accomplit en Gaule avec une étonnante rapidité. Le beau vase noir ovoïde, dépourvu d'anses, fit place à la cruche blanche ansée, à panse renflée. Les bols peints disparurent devant les potiches sigillées, qui, grâce à leur éclat et leur brillante couleur rouge, eurent bientôt achevé la conquête des Gaules.
La Gaule fut un certain temps tributaire de l'industrie Italique. Le champ de foire de Bibracte (qui fut l'origine de la ville d'Autun) recevait de petits vases à pâte blanchâtre, peut-être originaires de la Cisalpine, et des coupes à vernis rouges d'Arezzo. Le génie assimilateur des artisans gaulois ne tarda pas à manifester sa souplesse : Chez les Arvernes, quelques fabriques, Saint-Remy-en-Rollat et Gannat, imitent les pâtes claires, tandis que des fours se construisent chez les Rutènes pour la fabrication exclusive des vases rouges. Presque à la même date, vraisemblablement, se placent les débuts, tout d'abord modestes, d'une fabrique qui prendra plus tard une importance sans égale, celle de Lezoux en pays Arverne (Puy-de-Dôme).
On se contente tout d'abord d'employer exclusivement la technique arôtine, puis peu à peu, à mesure que s'opère le développement de cette industrie gallo-romaine, que les officines se multiplient, que la clientèle extérieure s'élargit, les potiers transforment leur matériel et inventent de nouveaux procédés. Très inférieures sous le rapport du décor plastique aux vases d'Arezzo de la belle époque, vases que le génie artistique de la Grèce a marqués de son empreinte, les poteries de la Gaule se recommandent par la variété de leur technique. Elles forment quatre groupes :
1» Les vases moulés. Il n'y a pas de moules d'assemblage en plusieurs pièces, mais le pied et les lèvres sont façonnés à part ;
2° Les vases à reliefs d'applique, fabriqués au tour et ornés ensuite de reliefs obtenus à l'aide de moules le plus souvent en forme de médaillons et soudés à la barbotine ;
3° Les vases ornés à ta barbotine, nom moderne d'une pâte argileuse assez fluide. L'emploi du moule est abandonné et le décor toujours en relief,
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obtenu par un procédé tout à fait semblable à celui de nos confiseurs coulant sur un gâteau des enjolivures en sucre fondu. Au début on n'en faisait usage que pour agrémenter d'une bordure de feuilles d'eau lés lèvres de certains petits vases en forme de soucoupes. Plus tard on rencontre des oiseaux, des animaux divers, et même des personnages exécutés par ce procédé ;
4° Les vases à décor incisés. Presque toujours linéaire et non figurée, la décoration consiste ici en desimpies incisions ou enlevages, pratiqués très habilement dans la pâte crue, à l'aide d'instruments analogues aux gouges de nos sculpteurs. Ces enlevages dessinent le plus souvent des étoiles et divers motifs rayonnants.
A côté de ces quatre groupes principaux, il y a quelques catégories plus rares, des vases ornés à l'aide de procédés divers.
Comme Arezzo, la Graufesenque n'a connu que la première et la deuxième technique.
M. Déchelette, après avoir fait observer que ce genre d'industrie exigeait un ensemble de conditions difficiles à réunir, argile, outillage, artistes, énumère les ateliers connus régions du Sud, du Centre, Rhénane. Ils sont très peu nombreux (1), et c'est à eux que correspondent presque tous les spécimens que conservent les musées de l'Europe.
Le vernis rouge de ces centres de fabrication a, dans une certaine mesure, des caractères distinctifs, mais des accidents de cuisson ont souvent modifié le lustre et. la nuance.
Le vernis des vases Arvernes (Lezoux) est d'une nuance orange clair et presque mat. Celui des vases Ruthènes (la Graufesenque) est d'un rouge plus foncé et très brillant.
De plus, la Graufesenque a eu la spécialité d'un vernis particulier, d'ailleurs rare, jaune à veines rouges imitant l'aspect du marbre.
il y a dans tous les ateliers trois formes classiques constituant les neuf dixièmes de la production : a) le bol carrené, aux lèvres guillochées, orné de moulures intérieures et d'une exécution généralement très soignée; b) le bol hémisphérique aux bords lisses dont le décor est délimité dans le haut par un rang d'oves ; c'est à la Graufesenque le plus abondant; c) le bol cylindrique.
Les trois quarts de ces formes, dans cette fabrique, présentent une décoration ornementale. Des rinceaux et des feuillages variés développent
(1) La Graufesenque est le lieu principal de l'industrie céramiste; mais il y avait d'autres ateliers, par exemple celui de Canassac, dans la cité des Gabales, célèbre par les belles inscriptions ou légendes décoratives gravées en relief sur la pâte des coupes. Citons encore l'officine du Rozier, récemment découverte par M. HeriiK'l ; enfin, dans l'Albigeois, probablement sur le territoire des Ruteni provinciales, la fabrique de Montans , prés Gaillac.
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-89leur sur la partie cylindrique des bols carénés, et parfois aussi sur sa panse, mais celle-ci porte très souvent de simples cannelures. D'autres fois, les feuillages font place à de petites représentations animées, quadrupèdes, oiseaux, gladiateurs, encadrés dans des compartiments rectangulaires qui alternent avec des combinaisons géométriques. Les types mythologiques n'apparaissent guère que sur les deux autres formes en même temps que certains sujets de genre. Cent cinquante sujets ont été relevés par M. Dechelelte à la Graufesenque, nombre relativement faible comparé à celui des poinçons de Lezoux. Ils sont d'une exécution artistique très inégale et, en général, trahissent l'inexpérience complète et la naïveté du modeleur.
11 n'y a pas la moindre ressemblance entre les types d'Arezzo et ceux de la Graufesenque ou do tout autre fabrique gauloise. Aucune influence en Gaule n'est imputable aux fabriques de la péninsule. Le répertoire s'y est constitué à l'aide d'emprunts gréco-romains. Les modeleurs des matrices sont allés puiser sans cesse au vieux fonds des créations helléniques. Mais les éléments varient avec les différents centres et les diverses périodes de fabrication. Chaque région possède ses sujets favoris. Neuf fois sur dix, le lieu de fabrication des vases ornés peut être déterminé avec certitude par le simple examen des sujets qui le décorent.
Très délicate est la fixation des dates des différents types, mais on y arrive en étudiant la succession des formes principales et des sujets d'ornementation, en examinant, d'autre part, les gisements datés où on les découvre. Vers l'an 20 après l'ère chrétienne, les poteries des Ruthènes ne font pas encore parler d'elles dans l'empire romain. Aucune des marques de la Graufesenque n'apparaît ni au mont Beuvray, ni à Haltern, localités de Saône-et-Loire et de Westphalie dont les dates finales sont connues. Elles se montrent au contraire en nombre dans la vallée du Rhin, cimetière d'Audernach qui remonte au temps de Tibère et finit au troisième siècle.
Presque toutes les villes gauloises ont livré les preuves d'une prodigieuse diffusion des poteries ruthènes. Ces preuves se retrouvent en Bretagne, en Italie, dans le forum do Rome, à Pompôï sous les cendres du Vésuve, et jusqu'à Carthago d'un côté et au Portugal de l'autre. Aucune autre région de l'empire, ni en Gaule ni en Italie, n'a possédé durant cette période un centre de fabrication d'une telle importance. Il fallait donc que les fabriques d'Arezzo et autres, jadis si renommées, fussent déjà tombées en décadence. D'autre part, ces mêmes vases de la Graufesenque n'auraient pas pu pénétrer abondamment dans la Gaule centrale si les ateliers de l'Auvergne s'étaient déjà trouvés en pleine activité.
L'apogée de la prospérité des at- liers d'Arezzo se place au premier siècle avant l'ère chrétienne. Les symptômes d'un déclin déjà sensible apparais-.
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sent sur les vases ornés de l'époque d'Auguste, et l'on constate à Rome même que les bols ornés de la Graufesenque ont été l'objet d'une véritable contrefaçon en Italie, tentatives maladroites d'imitation. Il y eut donc une lutte industrielle, et la Gaule triompha avant l'an 79 de notre ère.
Mais à partir de l'époque des Antonins ce sont les ateliers de Lezoux, en même temps que ceux de la Germanie, qui répandent de tous côtés leurs produits. M. Déchelette est porté à croire que, dès le commencement du deuxième siècle, les manufactures ruthènes avaient en effet atteint le terme de leur existence, existence très courte suivie sans doute d'une disparition brusque, problème dont l'éminent archéologue étudie la solution.
L'article ici analysé n'est qu'un aperçu d'un ouvrage considérable préparé par M. Déchelette depuis plusieurs années et qui a pour sujet l'ensemble des vases ornés de la Gaule romaine.
A la suite d'une communication de M. le baron DESAZARS, une discussion a lieu sur les ossements humains découverts en nombre très considérable dans le sol de la place Saint-Barthélémy, rue Alsace-Lorraine prolongée. On suppose qu'ils appartiennent au cimetière de la chapelle de Saint-Barthélémy, qui se trouvait à cette place même, et qui fut démolie après la Révolution.
M. Emile CARTAILHAC rappelle que les religieuses du couvent voisin, installé dans les anciens bâtiments de la Monnaie, en modifiant les cours et jardins, trouvèrent aussi, il y a bon nombre d'années, quantité de squelettes qu'on accumula dans une cave, qui fut murée.
Séance du 1er mars 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. l'abbé J. LESTRADE communique un bail à besogne conclu en 1766 entre lo^culpleur François Lucas et le curé de Lézat :
Statues des Quatre Evangélistes, par Lucas.
o Entre nous, Jean-André Gely, curé de Lézat, d'une part, et François Lucas, professeur de l'Académie de Toulouse, il a été convenu que moy Lucas m'oblige à faire en terre cuitte quatre statues représentant les quatre evangélistes avec leurs attributs, de la hauteur de cinq pieds deux pouces
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y compris le plinthe, et les faire transporter jusqu'à Capens pour de là, les faire charger sous ma direction sur des charrettes fournies aux frais de moy dit curé, et ensuite les placer au sanctuaire de l'église paroissiale dudit Lézat, à l'emplacement qui leur est désigné, et ce pour le prix et somme de trois cents livres dont j'ai reçu actuellement cent livres, et les deux cents livres restant pour entier acquit lorsque ledit ouvrage sera placé, ce qui ne pourra être porté plus loing que du premier novembre prochain. » A Lézat ce 24 juin 1766. » A été fait double. F. LUCAS. »
Au verso, on lit .' « Je déclare avoir reçu de Monsieur Geli, curé de Lézat, la somme de deux cents livres pour fin de paye des Statues des Evangélistes dont la police est derrière, dont je le quitte. » A Lézat ce 9 novembre 1766.
» F. LUCAS. »
M. l'abbé J. LESTRADE ajoute qu'on lui a assuré que les statues faites par Lucas en 1766 sont actuellement reléguées dans quelque pièce accessoire du presbytère do Lézat. N'y aurait-il pas lieu de savoir si elles no risquent pas d'être dégradées ou vendues ?
M. l'abbé LESTRADE fait passer sous les yeux de ses collègues uno gravure du dix-septième siècle, provenant de la Table Notre-Dame du pain bénit de l'église Saint-Etienne de Toulouse. Cette gravure représente la Vierge mère assise. Le siège est engagé sous une arcaturo à plein cintre et accosté de doux colonnes. Dans le soubassement de cet édicule on lit : « Playra à M... envoyer dimanche prochain à sept heures du matin à la Table Nostre dame du pain bénit de leglise métropolitaine Saint-Estienno de Tolose un pain pour bénir du poids de 50 1. le surplus estant remis à leur dévotion qui sera distribué le dit jour à l'issue de-la grand Messe paroicialle, délibéré à ladite table ce... » — Au bas de la gravure et en dehors de la ligne d'encadrement, on lit en écriture du dix-huitième siècle : Mouras, trésorier.
Ms* BATIFFOL, membre résidant, présente quelques notes critiques à propos du travail de M. Albert Réville, Vigilance de Calagurris (Paris, 1902).
Vigilance de Calagurris.
La voie romaine qui conduisait de Toulouse à Dax, la voie la plus courte de la Méditerranée à l'Océan, est décrite dans cet itinéraire du quatrième
— 92siècle
92siècle appelle « Itinéraire d'Antonio. » La voie quittait Toulouse par a Saint-Cyprien » et la première étape était au XV» mille (22e kil.), à Vernosolis (Ox); la seconde au XIII» mille plus loin (17e kil.), à Aquaesiccae (Laffitte) ; la troisième au XIX» mille plus loin (23» kil. = 23 kil. 704), à Calagurris ; la quatrième au XXVI» mille plus loin (38« kil. — 38 kil. 506), à Lugdunum Convenarum. Donc, sur la voie, à 38 kilomètres de SaintBertrand-de Comminges et à 29 kilomètres de Laffitte était Calagurris.
Cette donnée de 1' « Itinéraire d'Antonin « permet de fixer chez nous la Calagurris, dont nous allons trouver mention dans l'histoire littéraire, et que certains auteurs, le cardinal Baronius entre autres, ont jadis voulu identifier avec Calahorra (Calagurris), en Aragon.
Les archéologues ont beaucoup discuté sur la question de savoir où placer exactement Calagurris. Incontestablement, il faut la chercher dans la plaine de Martres-Tolosane, mais, d'après M. Joulin, ce ne saurait être ni Martres ou Chiragan, comme le pensait Dumège, ni Saint-Cirq, comme le voulait Gantier. M. Joulin pense que Calagurris serait plutôt à chercher vers Mancioux, village de la rive gauche de la Garonne, à 2 kilomètres en amont de Boussens, à 7 kilomètres de Martres, au débouché de la vallée du Salât dans la vallée de la Garonne (1).
De cette Calagurris était originaire Vigilantius, qui semble avoir été d'abord une sorte d'intendant aux ordres de Sulpice Sévère. Il nous est signalé pour la première fois par une lettre de saint Paulin de Noie à Sulpice Sévère, en 395 : il est, à cette date, simple catéchumène. Il a été envoyé à saint Paulin, à Noie, en Campanie, par Sulpice Sévère, alors à Primuliacum, en Narbonnaise; Paulin répond à la lettre qu'a apportée Vigilantius de la part de Sulpice Sévère.
Cette même année 395, Vigilantius est à Bethléem, où il a apporté une lettre de saint Paulin à saint Jérôme. Nous avons la réponse de Jérôme à Paulin, mentionnant avec force louanges « sanclum Vigilantium presbylerum. » Entre son passage à Noie et son passage à Bethléem, Vigilantius est donc devenu prêtre, de simple catéchumène qu'il était. Je ne sais où M. Réville a pris (p. 10) que Vigilantius avait reçu la « consécration prcsbitéralo » à Barcelone, et que Paulin de Noie l'avait « probablement connu en Espagne. » Ce n'est d'ailleurs pas la seule inexactitude que renferme la dissertation de M. Albert Réville.
En 396, une lettre de saint Jérôme nous montre Vigilantius revenu dans notre région et travaillant à se faire une réputation d'orthodoxie en accusant Jérôme d'origénisme. L'origénisme était à celte époque l'équivalent de l'esprit critique! Jérôme écrit à Vigilantius pour le rappeler à la modestie
(1) Joulin, Les établissements gallo-romains de la plaine de Marlres-ToloSanes (Paris, 1900), p. 5,
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93qni à un domestique déclassé : « Scilicet et gloriari cupis, et in patria tua iactilas me non poluisse respondere eloquenliae luae... » Voilà déjà une assez bonne silhouette de gascon ! « Aliud a parva aelate didicisti, aliis assuelus es disciplinis : non est eiusdem hominis et aureos nummos et scripluras probare, et degustare vina et prophelas inlellegere... » Autant d'allusions sarcastiques à la profession première de Vigilantius.
Le silence se fait ensuite. Mais en 404, Riparius, un prêtre peut-être toulousain, a dénoncé à saint Jérôme de nouvelles outrecuidances de Vigilantius. Jérôme, dans sa réponse à Riparius, que nous possédons, s'étonne que l'évéque, « in cuius parochia esse presbyler dicilur, » tolère les incartades doctrinales de Vigilantius. Envoyez-moi, conclut-il, les élucubrations de Vigilantius.
En 406, Riparius et Desiderius ont envoyé à Jérôme les écrits de Vigilantius, et, en réponse, Jérôme leur adresse son petit traité Adversus Vigilantium. On y retrouve quelques-uns des points de l'enseignement de Vigilantius, la critique acerbe qu'il y fait des usages alors nouveaux dans l'Eglise, dévotion aux reliques, engouement pour les moines, etc. Le traité de Jérôme est d'un ton à décourager nos journalistes les plus injurieux d'aujourd'hui. Mais passons. Ce qui est plus curieux pour nous, c'est ce que ce traité renferme de plus local.
Jérôme traite Vigilantius de a Caupo calagurritanus, » ce qui est une allusion à sa profession première d'intendant. L'on serait bien aventureux à conclure de là, avec M. Réville, que Vigilantius était » fils d'un modeste aubergiste » et qu'il avait « exercé quelque temps lui-même la profession paternelle » (p. 10).
Jérôme donne le même Vigilantius comme né en Comminges : « Respondet generi suo, ut qui se lalronum et Convenarum natus est semine... » Le sarcasme est spirituel, mais ce peut-être simplement une méchanceté, et il ne faudrait pas trop se presser de conjecturer que Vigilantius fut prêtre au diocèse des Convenae, ou que sa famille même fut sortie de Convenae. La polémique de Jérôme comporte ici quelques à peu près.
Retenons que la lettre de Riparius et de Desiderius a été apportée à Jérôme par Sisinnius, un moine de Toulouse. Sisinnius repartit pour Toulouse, rapportant le petit traité Adversus Vigilanlium, où je note cette indication : a Haec sanctorum presbyterorum rogalu unius noclis lucubralione diclavi, feslinante admodum fralre Sisinnio etpropler sanctorum refrigeria ad Aegyplum ire properanlem. « Sisinnius, de Bethléem, se rendait en Egypte pour y distribuer aux saints anachorètes et cénobites les aumônes qu'il apportait de la part des Toulousains. 11 en avait laissé, vraisemblablement, une part notable déjà à Bethléem, si bien que saint Jérôme, pour n'être pas en reste, crut devoir envoyer à l'évéque de Toulouse son commentaire sur le prophète Zacharie, orné d'une belle dédicace « ad Exsuperium tolo*
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sanum episcopum. » Nous avons encore et le commentaire et son prologue, où nous lisons : « Ultimo iam autumni tempore frater noster filius tuus Sisinnius monachus tuae mihi dignationis epislulam reddidil : qua lecta gavisus sum esse te sospitem et memorem mei omniumque fratrum qui in sanctis locis domino serviunt, in quorum refrigeriis facis tibi amicos de iniquo mammona .. »
Saint Exupère avait donc envoyé lui-même ou lui aussi, par les mains de son moine Sisinnius, d'abondantes aumônes (refrigeria), à Bethléem, aux moines, à Jérôme. C'est un indice du chemin que prenaient les générosités des Toulousains et un signe de la grande richesse de leur église au début du cinquième siècle.
Passé 406, il n'est plus question de Vigilantius, et à quelque temps de là l'église de Toulouse était ruinée par l'invasion.
Toutes ces données d'histoire littéraire sont fort connues : on voudrait que M. Rëville, qui n'en apporte aucune de nouvelle, eût du moins exposé avec une critique plus exacte ce que l'on savait avant lui.
M. LAPIERRE présente un nouvel ouvrage de M. E. CABIÉ :
Ambassade, en Espagne, de Jean Ebrard, seigneur de Saint Sulpice, et mission de ce diplomate dans le même pays (1562-1566) (l).
Cet ouvrage comprend le texte et l'analyse do nombreux papiers provenant de Jean de Saint-Sulpice, ambassadeur de Charles IX en Espagne. Ce sont des lettres ou des mémoires politiques se rapportant à une des périodes les plus tourmentées de nos annales. La Bibliothèque nationale possède une copie complète des dépêches officielles de notre diplomate, mais la plus grande partie des pièces composant le présent ouvrage n'existent que dans la collection particulière où M. Cabié les a puisées. Parmi les documents les plus importants, il faut signaler les lettres et les diverses instructions que Jean de Saint-Sulpice reçut en sa qualité d'ambassadeur, et, notamment, celles qui lui furent adressées par le roi, la reine-mère ou les ministres. M. Cabié croit, avec raison, que les documents qu'il met au jour serviront à préciser les caractères des grands faits politiques de l'époque, et, en outre, feront connaître une foule de particularités ou d'épisodes dignes de figurer dans l'histoire générale.
A côté des pièces officielles, les papiers de Jean de Saint-Sulpice renferment des missives intéressant et expliquant son ambassade. Elles répandent une lumière très vive sur les usages et sur les moeurs de la Société pendant le seizième siècle.
. (1) Un vol. in-8° de 472 pages. Albi, imprimerie Nouguiès, 1903,
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Jean de Saint-Sulpice appartenait à une famille noble du Quercy, appelée Hcbrard ou Ebrard, qui avait acquis la seigneurie de Saint-Sulpice. Elle contracta des alliances avec toutes les maisons nobles de la région. Antoine Ebrard épousa, en 1518, Marguerite de Lévis, et de ce mariage naquit le futur ambassadeur. Il fit ses premières études à Cahors et à Toulouse. Il servit sous les ordres du connétable de Montmorency. Il fut choisi pour traiter de l'élargissement du connétable fait prisonnier, et en même temps de la paix. Il s'acquitta si bien de cette mission que la reine Catherine de Médicis lui témoigna la confiance la plus absolue en qualité de négociateur politique. Il fut envoyé à Madrid, à Lisbonne, et obtint le poste d'ambassadeur à Madrid. Dans les circonstances les plus délicates, il manoeuvra avec une telle habileté qu'il parvint à déjouer tous les projets de Philippe II et de ses ministres. En 1566, la reine Catherine envoya SaintSulpice en Espagne à propos de la naissance de la fille de Philippe II ; plus tard, en 1569, elle le nomma gouverneur de son fils, le duc d'AIençon. Saint-Sulpice eut alors son logement dans le Louvre. Le duc d'AIençon devint un révolté, mais, grâce à son gouverneur, il fit bientôt amende honorable. Jean Ebrard suivit la reine dans ses voyages en Guyenne, en Languedoc. Enfin, il se fixa désormais dans le Quercy. Il mourut dans son château en 1581.
M. Cabié expose ensuite la méthode qu'il a suivie pour publier les textes. Il en donne l'analyse et ne reproduit in extenso que les plus importants. Aux lettres qu'il possède, il ajoute le sommaire de celles qui sont conservées à la Bibliothèque nationale. Il rectifie l'orthographe primitive du seizième siècle ; il détermine les dates vraies; il donne plus de clarté aux textes par des notes nombreuses et scrupuleusement exactes.
M. Cabié déclare, à la fin de sa préface, qu'il n'est pas à l'abri de la critique, et qu'on relèvera dans son livre de nombreuses imperfections. Que M. Cabié se rassure ; son érudition sûre, éclairée, n'a d'égale que sa modestie. C'est un travailleur qui peut douter de lui, mais nous pouvons certifier qu'on ne s'égarera jamais en se confiant à lui, et que, après la lecture de ses ouvrages, nous nous sentirons toujours un peu plus instruits.
Maintenant, nous laissons la parole aux documents et aux textes ; ils sont assez éloquents. Nous ne pourrions que les gâter et les dénaturer par une sèche analyse.
M. le baron DESAZARS donne lecture d'une lettre de M. le Curé de Montpezat (Tarn-et-Garonne), rendant compte des péripéties qui ont amené la disparition, de la chasse de Montpezat. Cette lettre fort naïve (publiée dans la Revue des Pyrénées) montre en réalité comment les curés facilitent la dilapidation des trésors, inventoriés ou
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non, confiés à leur garde. Leur devoir est clair : sous aucun prétexte ils ne devraient entrer en relation avec les marchands d'antiquités. Il semble, d'autre part, que dans cette affaire, l'autorité départementale n'a pas pris les mesures nécessaires pour seconder les démarches tardives du curé désabusé.
Séance du 8 mars 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. le colonel DE BOURDES lit la note suivante :
Sur un bloc de maçonnerie antique à Toulouse.
En démolissant une maison entre la rue Nazareth et la rue Alsace prolongée, en face la rue Darquier, les ouvriers de M. Cazaux, entrepreneur, ont découvert le mois dernier, au-dessous du sol, un massif de maçonnerie antique, dont les dimensions, la forme, et surtout la consistance sont dignes d'attention. Ce massif, dont ils ont dû abattre le saillant situé dans l'angle sud-est de cette maison, se prolonge sous la rue Nazareth vers la rue Darquier et sous la maison voisine dans une direction qui rejoint la rue Nazareth. La partie abattue mesurait de 3m,50 à 4 mètres de hauteur entre le sol vierge et la surface supérieure, laquelle était à 0m,50 environ au-dessous du sol de la rue; elle formait un saillant de deux mètres contre la rue Nazareth et de 3m,50 environ sur les deux côlôs intérieurs. Cette maçonnerie était faite de cailloux et de briques mélangés, réunis par de la chaux vive, et remarquable surtout par son extrême dureté; il a fallu de quinze à vingt jours à deux ouvriers armés d'outils spéciaux et de coins en acier, dont plusieurs ont été brisés, pour abattre ce saillant. L'entrepreneur trouve beaucoup d'analogie entre la nature de cette maçonnerie et celle des ruines du cirque romain de Blagnac.
Non loin de là, à cinquante ou soixante mètres, se trouvait l'église, ou plutôt la chapelle Saint-Barthélémy, qui existait encore en 1790, desservie, comme la chapelle Nazareth, par des prêtres obiluaires. Tout d'abord, on se demande si ce bloc de maçonnerie n'était pas l'un des soubassements de cette petite chapelle ; mais, outre que celle-ci était notablement au sud-ouest, la direction de la maçonnerie, sous la rue de Nazareth, vers le Château-Narbonnais, ne saurait laisser aucun doute (voir l'extrait du plan Jouvin-Rochefort pour cette partie de la ville).
Il est regrettable que nos auteurs anciens, même Noguier, qui en a cependant vu démolir les derniers restes en 1555, ni Catcl après lui, ne
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nous aient pas laissé des données positives sur la configuration du ChâteauNarbonnais et de son entourage. Depuis, des chercheurs distingués, tels que MM. de Montégut, Fons, Duboul et Joseph de. M al a fosse, ont bien cherché à élucider la question, mais ils n'ont pu y parvenir suffisamment, faute de plans ou de documents assez anciens. Cependant, on s'accorde généralement à dire que le Château-Narbonnais était de construction romaine et qu'il devait s'étendre par lui-môme sur l'emplacement du Palais de justice actuel ; mais il était sans doute entouré de murs d'enceinte, avec fossés et bastions, pour en défendre les approches, aussi bien contre les habitants de la ville que contre les ennemis de l'extérieur ; et ces dépendances devaient s'étendre assez loin, d'un côté vers la Garonne, de l'autre vers la ville et vers les Hauts-Murats.On sait qu'il fut occupé par les Romains durant les quatre premiers siècles de notre ère, ensuite par les rois Wisigoths et par les comtes de Toulouse ; Simon de Montfort l'habita, et, selon M. de Montégut, il fit détruire toutes les fortifications du côté de la ville et creuser un large fossé entre celle-ci et le château.
Il n'est pas téméraire de penser que la maçonnerie en question n'est que la substruction d'une partie de quelque mur d'enceinte du château, d'un bastion peut-être, dont le saillant était dirigé vers la ville. Le sous-sol voisin des rues Darquier et Nazareth, quand il sera creusé, donnera sans doute des indications plus grandes sur l'objet de cette maçonnerie.
Les ouvriers de M. Cazaux ont trouvé, au pied de la paroi qui regardait la rue du Vieux-Raisin, deux poteries d'une forme assez primitive et sensiblement pareilles. Ils ont trouvé aussi, mais à quelque distance et à 2ln,50 de profondeur, deux monnaies romaines; l'une de ces pièces est un denier fourré d'Adrien, qui régna de 117 à 138 de notre ère; on y lit :
IMP. CÂE8AR. TRAIAN. HADRIANUS AVG., avec la tête laurôe à droite; et, au revers :
P. M. TR. P. COS. III, avec l'équité debout.
L'autre pièce est un moyen bronze de Germanicus, qui fut César dé l'an 4 à l'an 19 ; on y voit :
GERMANICUS CAESAR TI(6erii), AVG VST. F(ilius), AVG(uj<t), N(ep<w), avec la tête à gauche ; et, au revers :
P. M. TR. POI. C. CAESAR. AVG. GER., avec les lettres S. C, senatu consulta, au centre.
L'une de ces poteries, et les deux pièces de monnaie, sont présentées à la Société.
A la suite de cette communication , une discussion s'engage au sujet de l'étendue du château Narbonnais, sans ajouter de nouveaux renseignements.
BULL. 31, 1901. 7
-9SM.
-9SM. membre résidant, communique la note suivante :
Le sceau et le consulat d'Alan à la fin du treizième siècle.
Alphonse de Poitiers, comte de Toulouse, continuant la politique de son prédécesseur Raymond VII, fonda ou reçut en paréage de nombreuses bastides et les dota de coutumes qui diffèrent peu entre elles.
La communauté d'Alan (1) était sur le point de recevoir aussi les siennes lorsque la mort vint surprendre le comte Alphonse en août 1271. Néanmoins, les franchises promises aux habitants leur furent octroyées l'année suivante par Bertrand, évêque de Comminges, et Eustache de Beaumarchais, sénéchal de Toulouse et d'Albigeois, au nom du roi de France Philippe III, et rédigées le 6 des nones d'octobre 1272 (2 octobre).
Cet évêque de Comminges, qui n'est pas indiqué par les Bénédictins, figure dans le Trésor de chronologie de Mas-Latrie, col. 1412, à la date de 1276, sous la dénomination de Berlrandus III. Cependant, à l'époque qui nous occupe, la série de Mas-Latrie donne Guillelmus IV (1269-1274).
Ces coutumes servirent ensuite de type à la rédaction de celles de Blajan, données le 10 septembre 1347 par le comte de Foix Gaston Pbôbus et l'abbé de Nisors ; de celles de Montmaurin, octroyées par Raymond de Bertrand le 5 juin 1317, et des Chartes de Saint-Plancard et de Sarremezan en 1391 (2).
Elles comprennent trente-cinq articles. On y retrouve à peu près les mêmes libertés contenues dans la plupart des coutumes de cette époque, accordées aux habitants, de tester, d'aliéner leurs biens, — sous certaines restrictions, — de marier leurs filles ou bon leur semblerait, de n'être contraints au payement de tailles, albergues, quêtes qu'avec leur assentiment, etc.. Les gens d'Alan avaient aussi la faculté d'avoir des fours pour cuire leur pain et celui des autres, sans payer aucun droit.
Plusieurs articles ont trait aux différents entre les particuliers et fixent les peines pour les délits et crimes, faux poids, vols, adultère, coups et blessures, meurtre.
Des marchés furent établis tous les lundis, et les droits de leude et de banc sont déterminés dans un article spécial.
Six habitants catholiques d'Alan devaient être annuellement choisis à l'Assomption par les coseigneurs ou leurs bailes pour exercer les fonctions de consuls, assistés dans leur- administration par vingt-quatre conseillers élus par le peuple.
. (1) Alan, commune du canton d'Aurignac, arrond. de Saint-Gaudens.
(2) Mémoires de la Soc. arch. du Midi de la France, t. XVI, 1903, J. Décap, Les chartes de Coutumes de la Haute-Garonne du Xlll' au XVI' siècle.
-99L'organisation
-99L'organisation comportait nécessairement la confection d'uni sceau dont l'apposition au bas des chartes sanctionnait les actes publics des magistrats municipaux.
Ce sceau, que j'ai pu me procurer grâce au généreux concours de M. l'abbé Robert, curé de Bajou (Ariègel, servit longtemps de poids au fil à plomb d'un maçon des environs de Saint-Ybars. Néanmoins, il est encore en parfait état de conservation.
Il est rond, et porte en légende :
* SIGILLV(m) CONSULATV(s) VILLE DE AANO.
À»centre, une grande croix perronnée et alaisée qui divise en quelque sorte le champ de l'écu en quatre quartiers, dans chacun desquels nous remarquons : au premier, la crosse de l'évéque-de Comminges, coseigneur ;
au deuxième, la fleur de lys du roi de France, également coseigneur; enfin, aux troisième et quatrième, un demi-vol ou ala, radical étymologique d'Alan.
Alan fut, de tout temps, une des résidences préférées des évoques de Comminges qui y possédaient déjà un château à la fin du treizième siècle, où résida, en 1296, Bertrand de Goth, plus tard pape sous le nom de Clément V.
L'évéque Jean-Baptiste de Foix (1471-1501), premier abbé commandataire de Boulbonne et fils du dernier comte de Comminges, Mathieu de Grailly, le décora de remarquables sculptures. Il mourut dans son château d'Alan le 18 octobre 1501.
cr Une curieuse porte subsiste encore, » écrit M. Roschach (1), « au tympan "de laquelle apparaît la vache de Béarn portant au cou l'écu écartelô
(1) E. Roschach, Foix et Comminges, 1862, p. 167.
FIG. 4. — SCEAU DU CONSULAT D'ALAN.
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de Poix et de Comminges. Au-dessous, on lit l'inscription suivante, dont le premières lettres sont un peu mutilées :
» Diligentes pacem quiescite nobiscum, » et au-dessus :
» Signum Dei vivi. »
M. BARRIÈRE-FLAVY dit ensuite que le sarcophage de Sicard de Miremont, conservé dans l'église de La Grâce-Dieu, relégué jusqu'à
ces derniers temps dans une obscure chapelle, a été, par les soins de M. le curé Azam, placé en un lieu bien éclairé, au fond de la nef, et sera très prochainement protégé par une grille. " Au-dessus, M. Azam vient de faire enchâsser dans le mur une pierre sculptée que nous découvrîmes récemment dans le jardin de son presbytère, et qui n'est autre qu'une clef de voûte de l'ancienne église, gravée aux armes d'une prieure du monastère de La Grâce à la fin du seizième siècle : Jeanne de Montaut. L'écu entouré d'une couronne de feuillage porte : Ecartelé : aux lor et A", partie d'or à deux mortiers de sable qui
FIG. <j. — ARMOIRIES DE JEANNE DE MONTAUT.
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est Montaut, et de gueules à deux otelles d'argent (partio dos Comminges); aux 2e et 3°, de gueules fretté d'or, qui est de Toulouse, seigr de Quint.
Des armes semblables se retrouvent à une clef do voûte des cryptes do Saint-Sernin ; elles ont été reproduites par M. J. do Lahondès : Armoiries toulousaines. Ms. inédit à la Bibliothèque do la Société archéologique du Midi de la France, pi. VI, f° 1.
Les deux parties du sarcophage d'Honor de Durfort, femme dé Sicard de Mircmont, signalé par Duzan dans la Revue archéologique, il y a une quarantaine d'années, servent toujours d'auges à abreuver les bestiaux à la métairie dite des Pères, — autrefois aux Pères doctrinaires de Miremont. Toutes les démarches faites pour obtenir la cession de cos pièces, sont encore demeurées sans résultat.
Séance du 15 mars 1904. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. le PRÉSIDENT donne lecture d'une lettre de M. Bourdette, offrant à la Société une nouvelle série de ses ouvrages :
Annales des sept vallées du Labeda, 4 vol. in-8°, 1898. — La noblesse des sept vallées du Labeda, 10 et II. Notice, Les seigneurs de Bieouzac et de Sen-Pastous, 2 vol. in-8", 1903.
M. le Dr DE SANTI a offert de son côté deux brochures intitulées : Le château de Montmaur, La maison de Levis-Montmaur.
MM. le baron DESAZARS, LAPIERRE, DE BOURDES, sont chargés d'examiner deux candidatures.
M. le PRÉSIDENT annonce une triste nouvelle, la mort do notre excellent confrère M. Noguier, un des doyens des érudits méridionaux. Il contribua beaucoup au développement et aux travaux de la Société archéologique de Béziers. Correspondant de la nôtre depuis une quinzaine d'années, il avait souvent pris part à nos séances et même à nos excursions. C'était un esprit instruit, artiste et charmant.
Lecture est donnée d'une circulaire annonçant que la Société des antiquaires de France doit célébrer le centenaire de sa fondation le 12 avril, et souhaiterait voir à cette fêto un délégué des Sociétés savantes avec lesquelles elle est en correspondance.
La Société archéologique du Midi ne peut que se réjouir de cette
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heureuse pensée. Elle est en relation avec la Société des antiquaires depuis son origine, et elle possède la collection complète des publications admirables do cette soeur ainée. M. Pasquier, membre résidant, archiviste de la Haute-Garonne, voudra bien la représenter à la solennité du 12 avril.
M. le MINISTRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE écrit pour annoncer que le Comité organisateur du Congrès archéologique international à Athènes, en 1905, souhaiterait une large participation des Sociétés savantes françaises. Le Ministre le désirerait aussi et voudrait qu'une entente intervint entre les différentes Sociétés savantes pour l'organisation en commun de cette participalion ; on pourrait causer de ce projet au prochain congrès des Sociétés savantes.
La Société archéologique du Midi émet, à son tour, le voeu que le Ministère comprenne quelques membres des académies provinciales au nombre de ses propres délégués audit Congrès.
Séance du 22 mars 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Lecture est donnée d'une lettre de M. le curé de Lézat, relative aux statues conservées dans son presbytère. Elles sont au nombre . de cinq : deux statues de la Vierge, saint Jean, saint Pierre, saint Paul.
M. le baron DESAZARS présente le rapport sur deux candidatures au titre de correspondant. Sont élus au scrutin : M. Jean Bourdotte et M. leDrde Santi.
M. le PRÉSIDENT a la satisfaction d'annoncer que M8r Bougerie, évêque de Pamiers, vient d'instituer dans son séminaire un cours d'archéologie qui sera fait pendant les cinq années d'études.
M. l'abbé Jean LESTRADE donne lecture d'un mémoire intitulé :
Pages d'histoire et d'art sur Saint-Sernin de Toulouse (1).
Dans ce travail, notre collègue passe en revue les Etudes dont l'église Saint-Sernin a été l'objet pendant ces vingt dernières années. Les plus
(1) Voy. ce Mémoire in extenso dans la Revue, des Pyrénées, 1904.
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étendus de ces travaux sont dus à Up Douais, évêque de Beauvais, qui a édité en 1887 l'important Cartulaire de Saint-Sernin, et, tout récemment, le premier des trois volumes qu'il consacre à cette église et qui comprend les Inventaires. En dehors de ces publications considérables, il en a paru bon nombre d'autres, de valeur inégale, dont quelques-unes d'un grand intérêt pour la future monographie de Saint-Sernin. Après avoir ônuméré ces contributions artistiques ou historiques, M. l'abbé Lestrade apprécie les principales et marque le parti qu'on en pourra tirer plus tard. Il apporte de son côté une série de baux à besogne inédits, extraits des archives notariales de Toulouse, et relatifs soit au monument lui-même, soit au mobilier d'art dont la célèbre église abbatiale était ornée, soit enfin au personnel capitulaire.
1° Un des textes du dossier formé par M. Lestrade nous apprend que quelques années avant 1644, les capitouls firent démolir puis reconstruire sur un plan nouveau deux des chapelles de la crypte dédiées aujourd'hui comme alors à saint Philippe et saint Jacques, et à saint Simon et saint Jude, apôtres. En 1644, à l'occasion de l'élévation des reliques de saint Edmond, la chapelle dédiée à sainte Suzanne et, à cette date, consacrée à saint Edmond, subit un agrandissement et fut réédifiée comme l'avaient été ses voisines. Quatre chapelles cryptales se trouvent bâties d'après les mêmes plans adoptés alors ; telles qu'on les voit, elles ne remontent pas au delà du dix-septième siècle.
2» Dans l'ordre du mobilier artistique, les documents mis en lumière par notre collègue nous montrent que les grilles actuelles de l'abside et du choeur ont été faites à Toulouse en 1688; seule, l'élégante bordure qui court sur la longueur de la barre supérieure (fleurs épanouies sur tiges allongées), provient des grilles antérieures. — La communication de M. l'abbé Lestrade se réfère aussi à la confection de cinq reliquaires ou châsses destinés aux ossements de saint Hilaire (1638), des Quatre Couronnés, martyrs (1639), de sainte Suzanne (1640), de saint Edmond (1642), de saint Jacques, apôtre (1662), — Il sera également facile de se représenter désormais l'aspect et le caractère de la composition architectonique érigée en 1645 à Saint-Sernin, et contre laquelle fut adossé l'autel du.chapitre, dans le choeur. Le bail à besogne de cette pièce est des plus détaillés. La construction monumentale, toute dans le goût classique alors régnant, se dressait entre les deux derniers piliers qui supportent le clocher, au bas des degrés donnant accès au mausolée de Saint-Sernin. En venant du choeur, on pénétrait à l'autel des reliques du saint martyr (partie isolée et que la clôture de 1645 rendait invisible), grâce à deux ouvertures pratiquées dans le rétable. On verra les chanoines de Saint-Sernin s'emmurer complètement plus tard pur l'adjonction d'un « contre-choeur » ou jubé, partie terminale des stalles du côté du peuple. Ce nouveau monument, appuyé
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au pilier actuel de la chaire et à celui qui lui fait face (on sait que le choeur se prolongeait jusque-là), réalisa à Saint-Sernin le rêve des chapitres d'alors : se mettre entièrement chez soi et former, dans ce but, une église dans une autre.
A la fin de sa communication, M. l'ubbô Lestrade parle de l'érection de rétables secondaires à Saint-Sernin , au dix-septième siècle, de la décoration de certaines chapelles, de l'exposition des châsses à l'autel du choeur, les jours de fête, des tapisseries appliquées aux murs de la collégiale, etc., etc. (1).
M. l'abbé Ed. BAICHÈRE, professeur au Petit Séminaire de Carcassonne, donne communication des documents qui suivent :
Etat de l'argenterie qui se trouve dans la sacristie de l'église cathédrale de Saint-Papoul (1760) :
1<> Six calices dont deux ont le pié de cuivre jeaune argenté et la coupe seulement argent, l'un de ces deux calices dont le pié est du cuivre jaune apartient même à la chapelle champêtre de l'ermitage de la fontaine de Saint-Papoul ;
2° Trois croix processionnelles dont l'une qui sert à distinguer les faistivités est fort entique, le manche est en quivre dauré, la croix en vermeil fort déliée garnie des reliques, d'un coté couvertes par diverses stations d'un petit cristal, et l'autre coté est rempli des représentations des mistères en émail, en sorte qu'il ne si trouve que fort peu d'argent, l'autre croix proscssionnclle est toute en argent fort légère, la troisième est une petite croix que l'offisient porte à la main aux offrendes, processions et exorcismes ;
3° Dus bâtons ou bourdons dont les manches sont de bois couvert d'une feuille d'argent et le sommet composé des petites feuilles d'argent fort déliées ; les dits bourdons sont portés par deux chanoines revêtus d'une chape, ce qui distingue dans le coeur, et aux posestions (sic pour processions) les festivités des autres jours, le peuple y est même si fort accoustumé qu'ils seroint scandalisés s'ils etoient suprimés ;
4° Une père de buretes avec leur cuvète et un instrument de paix fort petit ;
5° Un encensoir avec sa navette et culier, un goupilion et une boielte à pain ;
(l) Voy. la suite de cette communication dans le présent Bulletin, séance du 17 mai.
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6» Une masse pour le bedau de la hauteur de quatre pans dont le manche est en fer couvert d'une feuille d'argent ;
7° Un ciboire, un ostensoir et un petit porte Dieu pour les malades ;
8» Dus bustes à pied-d'estal de boix argenté, le corps aussi en bois dont parti n'est quargenté, et l'autre partie couvert de fort minces feuilies d'argent ; toute la têle du bois incarné surmontée d'une petite courone plate d'argent en filagrame ; chaque buste a a ces cotés dus petites figures d'ange dont toute la figure est en bois argenté et les ailes de feulies d'argent fort petites; chacune des bustes renferme des reliques des saints, trois crémières d'argent appartenant au cors du clergé de ce diocèse servent a la consécration des saintes huilles et pour être distribuées ensuite par notre sacristain à toutes les paroisses et communautés religieuses de ce dioceze.
Nous, prevost et chanoines de l'église cathedrallc de Saint-Papoul, déclarons le présent état qui nous a été remis par notre secrétaire contenir vérité en chaque article, sans qu'il puisse ny rien augmenter ny diminuer; en surplus, reconnoissons que toutes les articles cy contenues nous paressent absolument nécessaires pour la descence des divins offices, en foi de quoi nous avons signé le présent état avec notre sacristain et secretère.
Suivent les signatures : le comte Prévôt Mariéjol, chne theol.; G. Bardichon, chn" ; Gortassin, chne ; Cuillens, chne ; Rubeyran, chne ; Pages, chne; Estup, chne • Laplagniolle, chne ; Camboyé de Reynes, chne ; Molinier, chn» ; Guibert, sacristain, Olivier, secretère.
On lit sur une autre feuille détachée de la précédente :
17 avril 1760. « Nous, prévôt et chanoines soussignés, déclarons que toute l'argenterie que nous avons, jugé pouvoir absolument envoyer à la monoye pour nous conformer aux désirs et intentions de Sa Majesté, en conservant quelque décence pour le service divin ; notre église, quoyque cathédrale étant très pauvre, consiste dans les pièces suivantes, à savoir :
» En deux burettes et leur cuvette, en une boette à pain, en un instrument de paix.
» Ainsi conclu et délibéré en assemblée capitulairc à Saint-Papoul ce septième d'avril mil sept cent soixante. En foy de quoy nou3 avons signé et donné la présente déclaration.
• Certifié conforme : MARIÉJOL, vie. gén. »
Inventaires de l'argenterie, des saintes Reliques, des ornements et des meubles de l'église Saint- Nazaire de Carcassonne aux seizième et dix-septième siècles.
On trouve, dans l'un dos registres des déclarations de l'ancien chapitre çathédral de Garcassonne( conservés aux archives de l'Aude, plusieurs jq-
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ventaires relatifs à l'argenterie, aux reliques et aux ornements de l'église Saint-Nazaire. Le premier de ces inventaires fut dressé, le 2 mai 1571, par noble Bertrand de Saint-Martin, abbé de Caunes, syndic du chapitre, et par d'autres chanoines délégués pour installer M» Antoine Radel, hebdomadier, dans sa nouvelle charge de sacristain. Une vingtaine de lignes de cet inventaire ont été déjà publiées, par MM. les archivistes de l'Aude, dans les tables sommaires des archives départementales (série G. 69 bis). A cause surtout de son ancienneté, cet inventaire mérite l'attention des archéologues, bien qu'il soit assez sobre de détails; nous croyons bien faire de le donner in extenso. La première partie concerne les effets contenus dans le grand sacraire (folio $63 du registre) ; la seconde partie indique les ornements et les meubles du petit sacraire (folio 367 du même registre).
Au folio 421 (Ibidem G. 69 bis) se trouve l'inventaire, très détaillé, cette fois, des saintes Reliques, de l'argenterie et des effets de toutes sortes qui se trouvaient dans l'église cathédrale de Carcassonne dans les premières années du dix-septième siècle. Ce second inventaire remonte, en effet, à l'année 1639, c'est-à-dire à l'époque où Bertrand Florensse, prêtre et prébendier de l'église Saint-Nazaire, fut chargé de l'office de sacristain. Cette première partie de l'inventaire concerne le grand sacraire; mais on trouve,, dans le môme registre des délibérations, l'inventaire des effets du petit sacraire, à la date du 20 septembre 1633 (folio 316), de sorte que ces deux inventaires, bien que séparés et d'année différente, forment un tout complot et peuvent être considérés comme donnant le relevé exact des richesses mobilières du culte possédées par l'ancienne église cathédrale de Carcassonne au dix-septième siècle. L'inventaire des effets du petit sacraire (1633) présente, en outre, à la marge du registre et dans les interlignes, quelques détails d'ordre secondaire et d'une époque plus moderne dont il n'est pas tenu compte dans cette publication.
Dans le même registre des délibérations (G. 69 bis), on trouve encore d'autres inventaires analogues aux précédents ; à vrai dire, ce ne sont que des copies plus modernes des inventaires de 1633 ou de 1639 et ne donnent comme nouveautés que des renseignements accessoires insignifiants; nous ne les mentionnons ici qu'à titre d'indication aux archéologues qui tiendraient à en prendre connaissance.
L'inventaire des effets du grand sacraire (année 1639) donne une description très détaillée de la châsse qui contenait, avant la Révolution, le corps saint de Saint-Gimer, évêque de Carcassonne ; on y trouve également la description de la châsse ou antique main de Sainte-Anne avec la nomenclature de tous les bijoux dont la piété des fidèles l'avait ornée dès le seizième siècle ; on sait que la relique de la main de sainte Anne est possédée aujourd'hui par l'église Saint-Vincent de Carcassonne. Nous dirons enfin que le même inventaire donne quelques détails sur d'autres reliques conservées
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jadis dans la basilique de Saint-Nazaire, notamment sur le corps saint de Saint-Lupin, dans un coffre de bois doré, sur le reliquairequi contenait l'oreille de saint Jean-Baptiste et sur les capses où étaient enfermées des parties notables des ossements de saint Sébastien et de saint Nazaire.
Nous publions l'inventaire de 1639.
Toutes ces descriptions des saintes Reliques jointes à d'autres détails sur les croix, les images ou statues, les ornements et les autres effets du grand et du petit sacraire, font que cet inventaire présente un véritable intérêt historique, tout en servant à donner une idée exacte de la plupart des objets du culte au dix-septième siècle.
Inventaire des saintes Reliques, ornements et meubles qui sont dans le grand sacraire de l'église cathédrale Saint-Nazaire de la cité de Carcassonne (1).
ARGENTERIE.
Premièrement le coffre dans lequel repose le corps de M' Saint-Gimer tout d'argent auquel coffre et du costé ou est l'image Saint-Pierre. Le dit image porte une clef a la main droicle et unes heures a la gauche, ayant led. image une colonne de chasque costé portant un double bouton sur la teste et suit après une tournelle a laquelle manque la poincte faicte en forme de piramide, ladite tournelle accompaignôe de troys images.
L'image suivant tient un bourdon a la main droictc et unes heures a la gauche avec une colonne du coslé gauche portant le couvert de la teste a double bouton, après lequel image du costé gauche y a une tournelle manque de sa piramide garnie de troys images.
L'aultre image derrier tient unes heures a la main et une colonne de chasque costé ou manque le double bouton sur la teste ; du costé gaucho dud. image qui faict le bout de la chasse ou coffre y a une tournelle sans poincte garnie de huict images, du costé droict dud. Saint-Pierre suit une tournelle avec sa poincte sans image.
L'image qui vient après tient unes heures a la main gauche ayant une colonne de-chasque costé avec un double bouton sur la teste, après lequel image du costé droict y a une tournelle avec sa pointe garnie de troys images, mais la susd. main tenant les heures estant desmontée fust baillée par M« Pierre Thuberi sacristain a Grès orphevre avec d'aultrcs pièces pour accomoder les chaisnons des encensoirs du mand' de Mr Pcch lors scindic ainsin que led. Thuberi a faict apparoir par sa descharge.
(1) Cet inventaire a été dressé par Jean Larozo, notaire royal de Carcassonne, le 11 juin 1G39. Voir ci-après.
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Et l'image qui suit après est sans teste et sans mains, lad. teste avec une desd. mains estant au pouvoir du sacristain. Led. image a de chasque costé une colonne avec le double bouton après laquelle image suit une tournelle sans poincte qui va jusques a la teste, lad. tournelle garnie de deux images.
L'image suivant faisant le bout de lad. chasse tient un baslon d'argent a la main droicte ayant la main gauche ouverte du costé de laquelle y a une colonne sans double bouton, l'aultre colonne du costé droit y manquant, et au bout de lad. chasse est la tournelle sans poincte garnie de huict images, sur laquelle tournelle y a quatre fuelhages qui accompaignent le double bouton du sommet.
Au bout droict de lnd. chasse est l'image de Notre-Dame portant unes heures a sa main gauche et dud. costé est un ange de mesme grandeur que led. image Notre-Dame avec ses aislçs ayant la teste et la main gauche desmontée, lad. main estant es mains du sacristain et la teste fust baillée par M« Pech au susd. Grès orphèvre pour l'employer comme dessus, la main droicte estant perdue avant que led. Thubery fust en exercice de sacristain comme résulte des inventaires précédents, lesquels dits images sont au milieu de troys colonnes avec l'image de Notre-Seigneur qui est Sur leur teste y ayant cinq trous qui monstrent par le passé y avoit quelque chose pour dehors. La tournelle qui suict après faisant l'un bout de lad. chasse du costé S.iint-Jacques est sans poincte montant loutcffois jusques a la première fleur laquelle poincte y manque, et lad. tournelle est garnie de neuf images au dessus de laquelle y avoit quatre fuelhages a présent ny en a que troys estant le quatrième destaché et est es mains du sacristain.
L'image qui suict après lad. tournelle tient unes heures a sa main gauche avec une colonne dud. costé gauche, celle du costé droit y manquant, et n'a point de double bouton sur la teste après lequel image suit une tournelle avec sa piramide garnie de troys images a laquelle manque la poincte.
L'image qui suict après (1) tient des heures à la main gauche et un coteau à la main droicte ayant une colonne de chasque costé faietc en double bouton sur la teste, après lequel image suict une tournelle avec sa poincte et piramide garnie de troys images.
L'image suivant tient des heures a la main droicte au milieu de deux colonnes et a le double bouton sur la teste auquel manque le fleuron, après lequel image suict une tournelle sans poincte a laquelle n'a point aulcun image.
L'image qui suit après est Mr Saint-Jacques tenant un bourdon a la main gauche et des heures a la droicte estant au milieu de doux colonnes sans
(1) Saint Barthélémy.
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le double bouton sur la teste, après lequel image suit une tournelle sans poincte garnie de troys images.
L'image Monsieur Saint-Jean qui suit après porte un calice a la main gauche et a l'aultre n'y a rien ayant une colonne du costé droict et l'aultre y manque ensemble le double bouton de dessus la teste, suit après une tournelle avec sa piramide garnie de troys images, lad. piramide est desmontée estant es mains du sacristain.
L'image de Saint-Mathias qui suit après porte une sir (1| a la main droicte au milieu de deux colonnes sans double bouton sur la teste, l'une desquelles colonnes est desmontée et a la main gauche manque un doigt. Après lequel image et au bout de la dite chasse est une tournelle sans poincte a laquelle y a neuf images et au dessus d'icelle y a quatre fueilhages pour accompaigner le double bouton qui est au sommet.
Et au bout de la dite chasse sont les images des Saints-Nazaires et Celze portant le dit Saint-Nazaire une palme a la main droicte et des heures a la gauche et led. Saint-Celze des heures entre deux mains, estant lesd. saints au milieu de troys colonnes portant quatre enchâssements desquels les troys sont garnis et sur la teste de Saint-Nazaire est un enchâssement garny de sa pierre et sur la teste de Saint-Celze y en a deux garnis de leurs pierres et au dehault y a un aultre enchâssement garny d'une pierre violette, et au sommet de lad. chasse du costé Mr Saint-Nazaire y a quatre fueilhages accompaignant le double bouton.
Au milieu et plus hault de lad. chasse est la tournelle composée de quatre colonnes a laquelle est.deffait haut le double bouton et dans icelle est l'image Saint Gimer tenant une crosse a la main, ayant une mitre sur la tête et au dessus de la ditte chasse y manquent unes fleurs de lys desquelles le sacristain en avoit quatre, mais a pressent il n'en a qu'une, les autres troys ayant esté baillées a Grès orphèvre du mandement dud. Pech pour accomoder les chaisnons des encensoirs comme est dict cy dessus, lad. chasse ou coffre est portée par quatre lions de bronze un desquels est destaché et a esté led. coffre remis dans la chapelle du monument qu'est derrier le grand autel.
Dans lad. chapelle y a aultre coffre de bois couvert d'un drap toile d'or au dedans duquel est le corps de Monsieur Saint-Lupin.
La main de Madame Sainte-Anne enchâssée en argent avec un anneau d'or au doigt du milieu garny d'une pierre turquoise et un autre au poulce avec aultre pierre turquoise, et au dernier et milieu de lad. main y a une pierre couleur rouge destachée a présent avec une rose surdorôe enchâssés et sept bagues d'or qui pendent à lad. main, l'une qu'est une rose garnie de neuf diamantz comprins celuy du milieu qu'on estime environ vingt cinq
(1) Pour scie.
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escus, deux aultres bagues garnies de pierres turquoises et aultres deux garnies de rubis, une garnie d'une hiacinthe et une aultre garnie d'un diamant a poincte un peu gastée. Plus une bague d'or appelée muge, aultre bague d'or a laquelle y a une pierre a façon de Moulinet faisant en tout neuf bagues. Plus quatre bagues d'argent a l'une desquelles y a un chiffre esmalhé, un brasselet d'ambre jaulne contenant trente neuf grains, troys rangs de petits courais ayant chaquun un pam et quart de longueur, aultre corde de petits courais entrelassés de grains d'argent tirant deux pams et demi, une petite chaisne de jayet garni de grains d'argent tirant environ unze pams, une petite lame d'argent esmalhée de vert sortie de la susd. relique despuis que led. s* Thubery est en exercice de sacristain a esté donné cinq bagues d'or une fort grosse ou est enchâssé un beau rubis et les aultres quatre sont petites sans pierre, plus une petite bague d'argent, en oultre deux petites croix l'une d'or esmailhée qui se peult ouvrir propre a tenir des reliques et l'aultre d'argent avec l'image du crucifix d'un costé et la vierge de l'aultre, toutes lesquelles bagues, croix, patinostres et autres choses cy dessus expresses sont en mains dud. sacristain.
Et au pied de lad. relique y a deux images, l'un de Saint-Jean-Baptiste et l'aultre Saint-Jean Pévangéliste, lesquels images scavoir Saint-JeanBaptiste porte a la main gauche un aigneau avec une petite croix dessus et son estandart, et sur la teste un diadème de Saint-Jean l'évangéliste porte a sa main droicte des heures, a la main gauche une petite branche d'argent et sur la teste un diadème, avec un priant chaquun au devant, et y est aussi une corde patinostres coural marqués de jaspe en nombre de quatorze grains et au dedans dud. reliquaire estant l'image de lad. madame Sainte-Anne enchâssée et celuy de Notre-Dame la tenant par la main, lequel image Notre-Dame porte des heures a la main, mais a présent led. image Sainte-Anne est démonté estant es mains du sacristain.
Plus pend a lad. main Sainte-Anne une corde de menues perles ayant un pam et demy de long et au bout y a un anneau d'ambre, coural et grains d'argent et une corde de petits courais d'environ trois pams ayant a lad. main un petit cadenat fermé a clef.
Aussy dans led. sacraire y a une croix de christalin.
Ung reliquaire, ou est l'orelhe Monsieur Saint-Jean-Baptiste avec deux anges ayant chaquun deux aislcs d'argent et au dessus y a une lanterne surdorée avec une croix au bout enrichie de sept pierres de diverses couleurs et dans lad. lanterne y a un petit Saint-Jean-Baptiste et autour du pied sont six petits images les deux sans teste.
La croix d'argent avec un crucifix que porte le soubs diacre aux feste3 solempnelle a la grand messe, où est l'image Notre-Dame d'un costé et de l'aultre Saint-Jean, lad. croix esmalhée portée sur quatre lions d'argent avec quatre petites piramides au milieu.
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Plus le grand reliquaire ou l'on porte le Corpus Domini tout complet avec quatre fort petites chaisnes d'argent surdorées, led. reliquaire estant aussi d'argent surdoré, lesq. chaisnes servant pour ouvrir les colonnes qui portent led. reliquaire auquel manquent deux escoubes de bas et deux espines autour de la couronne et a l'un des anges deffaict le doigt du milieu. Au dessus de la coronne y a un chapiteau avec une croix, un image de chasque costé et quatre petits trous; oultre ce dessus aud. reliquaire y a un priant portant l'autmusse et huict images a l'entourdu canon led. reliquaire porté par huict colonnes d'argent, l'une des aisles qui est couppée ensemble une des espines estant en mains du sacristain.
Plus l'image Madame Sainte-Anne avec un diadème a façon de patène celuy de Notre-Dame avec sa coronne et le petit Jésus et y manque un petit reliquaire que portait Notre-Dame a la main droite n'y ayant a présent qu'un tuyeau d'argent a lad. main ou se tenait led. reliquaire au lieu duquel on met un bouquet et le petit Jésus a une colombe a la main gauche ; au bas dud. reliquaire y a deux fuelhages d'argent surdorés un de chasque costé et au pied d'icelluy sur le denier y a quatre petits trous et une rose d'argent a la poictrine dud. image.
Plus l'image Saint-Nazaire portant la palme a une main et des heures a l'aultre, le tout d'argent et le diadème surdoré a demy avec trois fuelhages et armoiries ou il y a un lion, le porte-pied estant de cuivre ensemble lesd. troys fuelhages.
Plus la capse ou est la teste Saint-Gimer garnie d'une guirlande d'argent avec pierreries ou y a unze fleurs et deux pendants d'argent a la mittre garnie de pierreries attachées avec de fisselle et un coulet d'argent avec huict armoiries et pierres enchâssées et sur la teste y a un grand trou rond, a laquelle capse manquent deux fleurs ou il y avoit deux pierres, la susd. guirlande estant aussi attachée avec une fisselle.
Plus la capse ou est la teste Saint-Sébastien et uneflesche d'argent desmontée avec pierreries au long et tour du pied vray est qu'il y en manque beaucoup, et une guirlande d'argent avec unze poinctes estant la corniche qui fermoit la tour de lad. teste desmontée et est en mains du sacristain ensemble la susd. flesche.
Plus l'espaule de Saint-Nazaire garnie de pierreries ou en manquent plusieurs, mais il y en a encore soixante huict comprins dix huict desmontées qui sont es mains du sacristain.
Un eaubenislier d'argent surdoré avec Taspersoir aussi d'argent au fonds duquel eaubenistier souloit avoir quatre armoiries les deux en estant encore, la troisiesme y manque et la quatriesme est deffaicte et destachée estant en mains du sacristain ayant chascune desd. deux armoiries attachées leur anneau.
Un libre des Evangilles couvert d'argent ou sont quatre boutons de
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cuivre aulx bouts avec deux crochets d'argent, l'un desquels crochets est desmonté estant en mains du sacristain, ayant led. libre d'un costé un crucifix et lesd. images Notre-Dame et Saint-Jean et de l'aultre costé Dieu le père, auquel libre sont les marques des quatre evangélistes du costé de Dieu le père.
Deux tasses d'argent pour servir a la communion.
Une boitte d'argent a tenir les osties pour servir aux festes solempnclles.
Un encensoir d'argent garny de quatre chaisnes avec son anneau aussy d'argent.
Une navette aussy d'argent pour tenir l'encens.
Plus sept pectoraulx d'argent, les troys esmailhés avec pierreries et a deux des aultres y a un tompas avec les armoiries de feu Monsieur d'Auxilhon évesque de Carcassonne qui sont desmontées estant dans la boitte, a un aultre y a un grand christol et a l'aultre l'image de la résurrection garni de pierreries, a un desd. pectoraulx manque une des sept pierres emailhécs qui l'environnent.
Un anneau episcopal garny de pierreries et de soixante troys perles.
Trois paires burettes d'argent, les deux paires grandes et l'aultre moyenne, a une desquelles burettes manque le cercle du pied et le bout du tuyeau d'icelle est rompu estant en mains du sacristain.
Plus quatre grands calices d'argent avec leurs patènes aussy d'argent le 'tout surdoré, ensemble un aultre calice, patène et burettes d'argent, le tout surdoré et donné par feu M« François de Bellissend, chanoine precenteur ou sont ses armoiries.
Plus aultre calice patène et burette d'argent, le tout surdoré et donné par feu M8 Jean Arnaud, prêtre et recteur de Floure, baillé par les héritiers dud. feu Arnaud au temps de la contagion a M. le trésorier pour le remettre devers la présente église comme il a fait.
La grande croix d'argent surdorée avec son crucifix a laquelle manquent troys boutons, et un aultre desmonté qui est en mains du sacristain, y manque aussy une piramide et plusieurs pierreries ensemble une tournelle de la lanterne qui est a lad. croix estant le baston d'icelle croix d'argent.
Une petite croix d'argent avec troys bouttons de courails et cinq petites pierres rouges enchâssées au milieu de laquelle y a de Ligno crucis et dans la boitte ou se tient lad. croix y a septante cinq pierres de diverses couleurs.
Vingt sept petites pièces d'argent, desquelles y en a trois servant à la chasse Saint-Gimer et trois aultres de diverses chasses.
Ung petit crucifix de laton surdoré sans croix qui est en mains des vicaires servant aux malades.
Ung bourdon d'argent que porte Monsieur le precenteur.
Deux bourdons a grandes lanternes d'argent ou estoient les images de
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Saint-Nazaire et Saint-Celze qui sont a présent desmontés ensemble une platine et deux petits bourdons, le tout estant en mains du sacristain.
Autres deux bourdons moindres a chacun desquels y avoit un pelicant sans aisles, l'un desd. pelicants estant en mains du sacristain et l'aultre fust employé par le commandement de M. de Lasset l'année mil Vie. vingt huict pour accomoder les grands bourdons apparaissant de la descharge que lesd. Thubery en a devers soy.
Plus troys petites pièces argent surdorées qui sont de Pespaule saint Nazaire estant en mains dud. sacristain.
Plus deux grands chandelliers d'argent pour servir aux festes solempnelles portés de troys lions d'argent chascun ayant besoing de repparation.
Davantage y est la chappelle d'argent léguée au chappitre de lad. csglisc par feu Messire Xpôfle (chrislofe) de l'Estang evesque de Carcassonne composée d'une croix avec un crucifix, six chandelliers, un calice, patène et burettes, une boitte pour tenir les osties et une clochette, le tout d'argent pezant nonante marcs troys onces et un quart.
Une crosse d'argent baillée par Monsieur l'Evesquc d'Allet, héritier dud. Seigneur évesque de Carcassonne, surdoréc, entourée de douclze images esmailhés pesant avec le baston d'icelle bois et fer en tout neuf marcs dix onces.
Cinq mittres, les troys de toile d'or avec leurs pendants doublés de satin, une toile d'argent et l'autre damas blanc.
Une petite boitte d'ivoire sans couvert et une grande avec sa couverte.
Un petit reliquaire et canon rond d'argent de la longueur de demy pied grave ou souloit avoir deux dents de saint Estiennequi furent remises avec les aultres reliques.
Un petit eaubénistier de christal avec une pièce de croix aussy christal.
Quatorze petites platines d'argent esmailhécs qui souloient estre a un maniple.
Une boitte de bois avec le pied d'argent et troys lames d'argent avec sa couverte aussy garnie d'argent et un Jésus au sommet qui est aussy d'argent.
Sept boutons d'argent surdoré dans un papier, ensemble une petite pièce d'argent destachée des reliques ou chasse et un aultre papier, le tout mis dans lad. boitte.
Huict petits passeman d'or qui ont jadis servi aux ornements tirant en tout environ cinq cousdes.
Le paliot de feu Monsieur de Bigor, archevesque de Narbonne.
CHAPPES ET ORNEMENTS QUI SONT DANS LES CANCELS.
Au premier cancel bas du costé du grenier y a une chasuble, deux dalBULL. 32, 1904. g
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matiques, deux estoles et trois maniples brocat blanc ou sont les armoiries de feu Messire Xpofle de Lestang evesque de Carcassonne par luy légués a lad. église.
Plus la chasuble donnée par feu Mr de Belissend, precenteur de satin vert et jaulne et la croix et passeman d'or avec son estolle et maniple.
Plus une cbappe damas vert qu'estoit de feu Mr Castanier, chanoine théologal, avec son estole et maniple de mesme estoffe.
Plus une estolle et maniple brocart acheptée des hers de feu M. Geraud Cazemajouz et un aultre grande estolle et maniple brocart double de satin vert qui souloit estre dans le grand coffre avec un linceul aux dessoubs lesd. ornements.
Au second cancel y a trois chappes processionaulx, chasubles, deux dalmatiques, une estole, trois maniples et deux coulets brocart blanc a fonds d'or, a chascun desquels coulets y a un bouton d'argent et aux dalmatiques deux boutons d'argent a chascune, plus une estole de velours blanc avec son linceul au dessoubs.
Au troisième y a deux chappes processionaulx, chasubles, deux dalmatiques, deux estoles, troys maniples et deux coulets de drap d'or frizés de rouge avec un linceul au dessoubs.
Au quatriesme y a deux chappes processionaulx, chasubles et deux dalmatiques de velours rouge semées d'escarjoffres d'or, deux coulets avec deux gros bouttons d'argent, une estole et deux maniples avec un linceul au dessoubs.
Au cinquiesme y a une chappe processional, une chasuble et deux dalmatiques de velours rouge couvertes de soleilhs d'or avec deux estoles, un maniple et un linceul au dessoubs.
Au sixiesme une chappe processional, chasuble et deux dalmatiques de satin cramoisin rouge semé de larmes d'or, une estole, un maniple et deux coulets de mesme estoffe, aultres estolles et maniples de velours aussy rouge avec un linceul au dessoubs. *
Au septiesme quatre chappes processionaulx, une de drap d'or que souloit porter feu M'de Belissend precenteur, deux de velours vert semées de bourrages d'or et une de velours bleu broché d'or que souloit porter l'evesque des Innocents avec un linceul au dessoubs.
Au huictiesme six chappes processionaulx a l'une desquelles sont les offres de la vieilhe chappe qu'estoit cy devant dans le mesme cancel, deux chasubles a l'une desquelles sont aussy les offres de l'ancienne, deux dalmatiques, deux estoles, troys maniples et deux coulets, le tout de velours noir avec un linge au dessoubs.
Au nuviesme troys chappes processionaulx, chasubles, deux dalmatiques, deux estoles, troys maniples et deux coulets de velours vert avec un linceul au dessoubs.
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Au dixiesme deux palets velours noir servant au grand autel avec une frange et du passemant soye blanche et noire a l'un desquels y a trois armoiries et a l'aultre deux de feu Monsieur de Carcassonne, plus la trinité aussy velours noir servant au grand autel, sans aulcun linge ni linceul.
A l'unziesme le palet de bas du grand autel de velours blanc avec un frontal toile d'argent et frange soye blanche, deux aultres petits palets aussy velours blanc pour le milieu dud. grand autel ; plus trois palets de velours rouge avec le frontal toile d'or et frange de soye rouge au dessoubs le brocal servant au milieu et debas d'icelluy. Et la trinité qui sert au dessus dud. grand autel les festes solempnelles, de velours violet obscur avec les. . figures des quatre evangélistes aux quatre coings avec un linceul au dessoubz.
Au doutziesme cancel un pavillon de velours violet avec quatre armoiries et des estoiles de filet d'or et d'argent tout a l'entour servant à la procession du jour du sacre doublé d'un taffetas couleur changeant et au dessus de toile blanche avec quatre escharpes taffetas violet; plus un petit pluvial de brocatel blanc doublé de taffetas blanc avec fange d'argent ; la couverture de la chasse Saint-Lupin qu'est de damas vert avec quatre petits manchets de mesme estoffe pour couvrir les branches du bois qui servoit pour porter lad. chasse. Et la couverture du tabouret sur lequel se met le reliquaire du Saint-Sacrement le jour du sacre qu'est de satin façonné a diverses couleurs avec un linceul au dessoubz.
Au trectziesme et dernier cancel dud. costé y a deux dalmatiques taffetas rouge fort passé avec bandes de broderie, deux aultres dalmatiques salin blanc avec un galon d'or, deux aultres taffetas blanc avec un galon soye rouge et deux aultres taffetas violet avec un galon d'or et un linceul en dessoubs.
Au premier cancel bas derrier l'autel dud. sacraire y a deux chappes processionnaulx de damas blanc et un aultre chappe aussy damas blanc a fleurs, chasuble, deux dalmatiques, deux estoles, trois maniples et deux coulets aussy damas blanc avec un linceul dessoubs.
Au second y a troys chappes processionnaulx damas blanc a chapeaux de triomphe et au milieu une escarjoffe d'or enrichie de soye alentour, chasuble, deux dalmatiques deux estoles troys maniples et deux coulets de mesme estoffe, lesd. dalmatiques garnies de troys boutons d'argent sur-: dorés un de soy, lesd. maniples et estoles ayant esté faicts de la moitié d'une robe Notre-Dame de mesme estoffe qui estoit dans led. cancel avec un linceul au dessoubs.
Au troisiesme cancel y a troys chappes processionaulx, chasuble, deux dalmatiques deux estoles troys maniples et deux coulets de velours blanc avec leurs offres données par feu Mr Carrien en lad. église avec un linge au dessoubs.
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Au quatriesmc troys chappes processionaulx chasuble deux dalmatique9 doux estoles troys maniples et deux coulets damas rouge ou sont les armoiries de feu Monsieur de Saint-André evesque de Carcassonne avec un linceul au dessoubs.
Au cinquiesmc troys chappes processionaulx chasubles, deux dalmatitiques, deux estoles trois maniples deux coulets damas gaffard, les dalmatiques n'ayant point d'offres mais au lieu d'icelles y a de bandes taffetas rouge avec un linceul au dessoubz.
Au sixiesme troys chappes processionaulx chasuble deux dalmatiques deux estoles trois'maniples et deux coulets diaspre bleu avec un linceul au dessoubz.
Au septiosme cinq chappes processionaulx chasuble deux dalmatiques trois estoles troys maniples et deux coulets diaspre bleu brochés d'or avec un linge en dessoubz.
Au huictiesme troys chappes processionaulx chasuble deux dalmatiques deux estoles troys maniples et deux coulets diaspre violet brochés d'or avec un linge en dessoubz.
Au neuviesme quatre chappes processionaulx deux rouges a images, un de soye pour Mr le precenteur et un aultre pour le serviteur avec un linge au dessoubz.
Au dixiesme y a troys chappes processionaulx, chasuble, deux dalmatiques deux estoles troys maniples deux coulets diaspre verd brochés d'or sans linge au dessoubz.
A l'unzieme cancel deux dalmatiques velours noir, deux estoles et trois maniples le tout fort vieulx sans linge.
DANS LE GRAND COFFRE DD COSTÉ DU GRENIER.
Troys palets satin changeant rouge et jaulne servant le jour et feste Sainte-Croix ou sont les armoiries de fou Monseigneur de Faulcon, evesque de Carcassonne.
Un grand drap satin rouge que l'on met au lieu de la Trinité enrichi d'images et broderies d'or bas.
Ung palet d'or fin et de soye faict a l'esguilhe pour mettre au grand autel contre le retable ou est figurée la passion de Nostre Seigneur Jésus Christ.
Cinq palets communs pour le grand autel, scavoir un de damas blanc, aultres de diaspre violet broché d'or, aultre de satin rouge a oyseaux et aultre testés d'or fin dict le palet de Saint-Gimer, aultre broche d'or bas tout rompu et l'aultre de damas blanc qui est a l'autel du Saint-Sacrement.
Bix sept palets de diverses couleurs et diverses estoffes tant bons que usés partie desquels sont aux autels de lad. église et le reste dans led. coffre
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a esté comprins troys qu'il y en a de ceux d'Espaigne et sans a ce comprendre ceux des autels Notre-Dame et Sainte-Anne qui sont desd. cha- ■ pelles.
Deux frontals l'un ou est la vie de saint Jean-Baptiste faict a l'csguilhe d'or fin et soye avec frange soye verte servant a la chese du prédicateur et l'aultre qui est attaché au surciel de lad, cheze et en dehors ordinairement.
Huict grenials scavoir trois blancs l'un de velours l'aultre de damas et l'aultre de satin duquel la pièce du milieu est de diaspre vert un de damas bleu avec cinq armoiries, aultre taffetas violet ou amaranthe avec des armoiries au milieu ou sont de griffons et lions d'or, un de damas rouge avec toile en brocart d'or au milieu, aultre de taffetas rouge fort passé et le milieu de diaspre vert et amarante et l'aultre taffetas noir façonné et mouchetté.
Trois draps servant au poulpitre de l'évangille un damas rouge, aultre damas blanc et Paulire de toile de filousol parsemé de fleurs de lis d'or fort vieulx.
. Quatre voiles taffetas pour mettre sur le calice scavoir trois rouges et un blanc.
Deux courtines ou rideaux de camelot soye blanc et rouge donnés par feu Mr Phil. de Belissend precenteur qui sont aux costés du grand autel et deux aultres rideaux taffetas noir.
Trois quarreaux deux de velours vert et l'autre velours noir.
Seictze pièces d'estoffe diverse et de diverses couleurs toille et roiquettes de chappes et vingt deux pièces broderie d'or ou soye tirées du garniment des aulbes, deux palets velours bleus à l'un desquels y a un crucifix et les images de Notre-Dame et Saint-Jean en broderie et l'aultre garny de six galons d'argent avec les armoiries de Messire Vital de l'Estang a présent evesque de Carcassonne à chascune.
Quatre bures deux de velours une desquelles est fort vieillie et l'aultre de taffetas a gros grain noir et un drap de morts velours noir, une pièce toile d'or fort vielhe tirant environ vingt' pams de long, des offres de broderie d'or une chappe processional et une dalmalique en huict pièces acheptées de feu Mr Ferandier.
Ung pavillon velours violet servant de surciel au grand autel attaché aud. quatre cordons de soye.
TAPISSERIE.
La tapisserie de la cheze de Monsieur l'evesque et du coeur de l'église ou est figuré l'histoire des saincts Nazaire et Celze en dix pièces a présent tendues.
Huict pièces d'aullres tapisseries pour parer les presbytères de lad. église
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sans comprendre la trinité qu'est aussy en tapisserie servant ordinairement •au dessus du grand autel qu'est en tout neuf pièces.
Un grand drap damasquin rouge et gris servant de drap de pied l'escu du Roy.
Une vielhe tapisserie de celles de M' de Plaine.
LINGE.
Unze aulbes aultant de cordons et neuf capitels dont Monsieur de Carcassonne a une aulbe avec son capitel et cordon.
Douctze nappes finies dont les cinq sont bonnes, les aultrescomprins une presque neufve que mademoiselle d'Espinelly a donnée.
Neuf nappes grossières assez bonnes.
Plus troys nappes finies l'une desquelles sert pour la communion et les deux aultres pour mettre soubz les reliques.
Troys petites serviettes rouan servant au grand autel, une grossière assez grande et une finie de flandre donnée par lad. damoiselle d'Espinelly.
Six corporaulx avec deux bourcesa ce comprins celluy que Mr de Bellissend précenteur donna avec sa bource et sept pâlies ou petits corporaulx, deux de broderie scavoir l'un damas vert et l'aultre avec une croix et les quatre restant de toile.
Un tableau de toile ouverte assez fini.
Une lingère pour mettre la croix avec frange fort vielbe.
La grande courtine ou riddeau toile blancbe qui servoit jadis pour mettre au devant le presbitère en temps de caresme.
Oultre les susdits corporaulx y en a deux grands qui servent le jour du sacre a la procession.
Unze purificatoires fort bonnes.
Quatre soyes taffetas une blanche, une rouge, aullre verte et violette.
Quatre petits tableaux de moresques.
AULTRE MEUBLES.
Ung image de Dieu le père d'or esmaillé enchâssé a un bois.
Les troys crémières ou phiolles d'estaih et un plat bassin de laton servant pour mettre les sainctes huilles les jeudi sainct estant dans un armoire aud. sacraire avec un linge en dessoubs.
Plus les grandes crémières d'argent qui sont en mains du vicaire.
Six vases estain a tenir fleurs pour mettre sur le grand autel.
Les armoiries du Roy et celles de Monsieur le prince.
Une espoussette.
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LIBRES.
Quatre libres pontificaulx l'un couvert de velours blanc et troys de bazane.
Ung collelaire pour les festes solempnelles.
Ung libre d'Invitatoire.
Le libre des passions.
Deux cayers desd. passions.
Deux libres des litanies couverts de bazanne rouge.
Deux rolles de parchemin ou sont descripts tous les bénéfices du diocèze de Carcassonne servant le jour du synode.
Ung libre do Saint-Jean de Cclhe et de Saint-Salvy de Gougens.
Ung libre d'ordre des pénitenciers couvert de bazanne blanche commençant tertia pars en baz. rouge.
Deux libres de chant excripts en parchemin et nottés commençant in festo Sancti Gabrielis.
L'Inviolata en parchemin.
Ung bréviaire du Concile donné par M' Ducup chanoine et vicaire général couvert de bazanne rouge.
Quatre aultres libres de parchemin couverts de aiz avec bazanne.
Ung grand coffre fermé a clef dans lequel est une partie des documents du chappitre, deux aultres grands coffres sans clefs ou font partie des ornements et deux quaisses avec leurs serrures et clefs pour tenir le linge.
L'an mil six cens trente neuf et le unziesme jour du moys de juin avant midy régnant très chrestien prince Louis par la grâce de Dieu roy de France et de Navarre dans le grand sacraire de l'église cathedralle de la Cité de Carcassonne devant moy notaire royal et tesmoings bas nommés ont esté personnellement constitués noble et egriege Mr Jean Pech chanoine en l'ad. église faisant la charge de premier scindic au lieu et place de Mr de Robert chanoine et précenteur et Jean de Calmés sr de Saint-Julia aussy chanoine en icelle, second scindic du chappitre de lad. église, lesquels poulet au nom dud. chappitre et comme depputés par délibération d'icelluy ont baillé et baillent la charge dud. grand sacraire ornements sainctes reliques meubles d'icelluy a Mr Bertrand Florensse prestre et prebendier en lad. église icy présent et acceptant pour une année qu'a commencé le présent jour du mois de may dernier passé, pendant laquelle led. Florensse sera tenu comme il promet de bien et duement s'acquitter de la charge de sacristain, garder soigneusement et fidèlement lesd. saintes reliques ornements et meubles dud. grand sacraire contenues ,et a plain desclarées et expressées a l'Inventaire cy dessus escript faict.a sa pre-
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sence et veriffiôes tant par noble et egriege Monsieur Vincent Pujol chanoine et trésorier en lad. église que susd. sieurs scindicsqui ont baillé et laissé en mains dud. Florensse tant les clefs de la porte dud. grand sacraire que desd. reliques et ornements et meubles dont le dit Florensse s'est chargé avec promesse de donner bon et loyal compte de tout ce dessus a la fin de lad. année moyennant le gaige accoustumé de troys cestiers bled froment troys charges bon vin mesure dud. chappitre et neuf livres tz {tournois) argent payables aux termes accoustumôs.
Et pour l'observation de ce dessus lesd. parties chascune comme le con- . cerne ont obligé scavoir lesd. sr scyndics les biens dud. chappitre et led. Florensse les siens propres présents et futurs soubmis respectivement aux rigueurs du scel maige de Carcassonne et aultres du présent royaulme de France avec les renunciations nécessaires et pour plus grande asseurance de ce dessus led. Florensse sacristain a présenté en caution Vincent Florensse son frère habitant de lad. Cité lequel icy présent et en personne constitué de son bon gré et franc vouloir s'est rendu pleine caution et principal respondant pour sond. frère pour satisffaire au contenu du présent contract rendre et restituer lesd. saintes reliques, ornements et meubles du grand sacraire cy dessus inventoriées auxquelles fins il a obligé solidairement sans division ni discution tous ses biens présents et advenir qu'il a ainsin soubmis aux rigueurs dud. scel maige do Carcassonne et aultres du présent royaulme avec toute renunciation de droict a ce contenues.
Ainsin l'a juré en présence de Mr Pierre Alquier procureur et Jean Valette, greffier en la cour de Monsieur le sencchal de Carcassonne soubsigné avec led. grand Trésorier et parties et moy Jean Laroze, notaire royal de lad. Cité et secrétaire dud. Chappitre requis.
Suivent les signatures : Jean Valette, Pech pour M. Robert, de SainetJulia, scindic, Vincent Florensse caution, Floren3se, sacristain, Alquier, Laroze, notaire.
(Archives départ. Aude, G. 69 bis, folio 421.)
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Séance du 29 mars 1904.
Présidence de M. J. OE LAHONOÊS.
Sur la proposition de son Président, la Société décide d'offrir deux médailles d'argent à la Société de photographie, qui compte ouvrir un concours de vues archéologiques toulousaines. Il serait à souhaiter que les amateurs fussent invités à reproduire de leur mieux, le plus artistiquement qu'ils pourront, les fragments d'architecture, les morceaux de sculpture, tout ce qui ne figure ni dans les planches publiées ni dans les cartes postales.
M. J. DE LAHONDÈS entretient la Société d'un ouvrage de M. de Jouy, de l'Académie française, intitulé L'Hermite en province, moeurs françaises, publié à Paris en 1819 et donnant dans le tome deuxième les impressions de voyage dans le Midi et à Toulouse en 1818.
Joseph Etienne, qui se fit appeler de Jouy, du nom du village proche de Versailles, où il était né en 1764, servit d'abord dans les Indes, puis dans les guerres de la Révolution, et se livra ensuite uniquement à la littérature. Il écrivit tragédies et comédies, livrets d'opéras, celui de Guillaume Tell entre autres, et surtout des brochures politiques qui lui attirèrent quelque popularité. Elle s'accrut par la publication de l'Hermite de la Chaussée-d'Antin, de YHermite en province, où à travers anecdotes et impressions de voyage, il attaquait le gouvernement de la Restauration. Le volume qui est présenté à la Société raconte un voyage dans les provinces du Midi, et les observations sur l'état des villes visitées il y a déjà près d'un siècle, sur les différences des moeurs de cette époque avec les nôtres ou aussi sur les analogies qui subsistent, relevées d'ailleurs par un tour piquant d'expression, ont paru mériter d'être ramenées sous les yeux, bien que personne aujourd'hui ne lise plus ces livres qui eurent leur moment de vif succès. Il est toujours curieax de voir les jugements portés sur les monuments ou les hommes par des étrangers ou par do lointains prédécesseurs, différant des nôtres par l'espace ou par le temps.
BULL. 33, 1904.
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Séance du 12 avril 1904. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS. M. DELORME, membre résidant, fait la communication suivante : Une trouvaille de monnaies des quinzième et seizième siècles à Cazères.
• Il y a quelques mois, un habitant de Cazères, en creusant le sol de sa maison pour établir un chai, découvrit une certaine quantité de monnaies d'argent remontant aux quinzième et seizième siècles.
Ce lot, que M. Delorme a eu entre les mains, se composait de testons de François I«r, de Henri II, de Charles IX et de Henri III, la plupart frappés à Toulouse ; on y voyait aussi quelques pièces du Comtat-Venaissin mêlées à des monnaies de Castille et Léon aux noms de Ferdinand et Isabelle.
Poursuivant ses recherches, cet heureux propriétaire exhuma, presque au même endroit, un pot en terre contenant un millier de douzains variés. Ce vase a été brisé et ses fragments n'ont pas été conservés.
Ce petit trésor, qui devait constituer la fortune d'un Cazérien au seizième siècle, avait été, sans aucun doute, enfoui à l'époque troublée qui suivit la mort de Henri III.
Les plus anciennes pièces appartiennent au règne de Charles VIII, ce -qui prouve qu'elles avaient encore cours à la fin du seizième siècle, cent ans après leur émission, aussi l'usure d'un grand nombre de ces monnaies, principalement dans les règnes les plus anciens, témoigne d'un long usage.
On y voyait, en outre des monnaies de Charles VIII, des douzains de Louis XI, de Louis XII, dont un au porc-ôpic, des douzains et des dizains de François Ier, de Henri II; de nombreux Gros de Nesle de Charles IX, la plupart frappés à Toulouse, ainsi que des douzains de Henri III, ces derniers en grand nombre, et quelques douzains de Henri IV. Il y avait encore une certaine quantité de douzains de Grégoire XI11 frappés à Avignon pour le Comtat-Venaissin.
M. DELORME fait passer sous les yeux de ses collègues quelques pièces de cette trouvaille, notamment :
Un Carolus de Charles VIII frappé à Crémieu (Isère).
Un douzain de François Ier pour le Dauphiné.
Un douzain à la Cioisettc de François Ier frappé à Toulouse.
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Un douzain de Bretagne de François i«r frappé à Rennes. Deux dizains à l'F du même souverain, l'un d'eux frappé à Chambéry. Un Gros de Nesle de Henri II frappé à Paris. Un douzain de Henri II frappé à Lyon. Un douzain de Henri III frappé à Toulouse. Et enfin un douzain du pape Grégoire XIII frappé à Avignon. Ces monnaies ont été vendues à un orfèvre de notre ville et sont aujourd'hui dispersées.
Les fêtes du Carnaval à Toulouse vers 1700.
M. GARTAILHAC, membre résidant, donne lecture d'un certain nombre de lettres historiques et galantes de deux dames de condition, dont l'une était à Paris et l'autre en province, par Mmo Du Noyer, Amsterdam, 1738, 5 vol. in-12. L'auteur naquit à Nimes vers 1663, et mourut en 1720. D'un esprit cultivé et indépendant, elle abjura le protestantisme, dans lequel elle était née, pour épouser M. Du Noyer, gentilhomme fort distingué, paraît-il ; puis étant revenu à la religion de sa famille elle fut obligée de fuir en Hollande avec ses deux filles, et sa plume lui fut une ressource dans ce pays de liberté. Ses lettres nous intéressent beaucoup, car plusieurs sont écrites du midi de la France, de Nimes, de Carcassonne, de Toulouse. Dans cette dernière ville, le personnage que fait parler Mme Du Noyer, si ce n'est elle-même, séjourna quelques mois et fut en rapport avec toute la bonne société contemporaine. Les lettres sont assez détaillées sur les petits événements du jour, sur les historiettes contées dans les salons et maintes fois croustilleuses. A première lecture on peut juger qu'elles renferment certainement un fond de vérité et qu'une faible part doit être attribuée à l'imagination de l'auteur, qui montre cependant les qualités distinctives des bons journalistes d'aujourd'hui. On y trouve une quantité de renseignements curieux, souvent fort'amusants, sur les hommes et les choses, et elles donnent une idée des moeurs aimables et plutôt légères de Toulouse et du Midi au début du dix-huitième siècle.
Voici un passage (p. 256, t. I) sur les fêtes du Carnaval. « Le Carême a mis des bornes aux plaisirs des Dames de Thoulouse, et quoi qu'ils aient recommencé après Pâques, ce n'est pourtant pas avec la même vivacité que dans le Carnaval, où, au pied de la lettre, il ne fait pas sûr d'aller dans les rues; on baisse les glaces des Ca-
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rosses de peur qu'elles ne soient cassées par la quantité de Confitures et de Dragées qu'on se jette à la tète, et il ne reste personne aux maisons ces jours-là, les Artisans abandonnent leurs boutiques, les Domestiques sont dispensés d'obéir à leurs Maîtres, et les autres courent les rues depuis le matin jusques au soir, les Dames sont en Carosse, les Messieurs à cheval et le petit Peuple à pied; d'autres font des Mascarades en Charrête, où l'on représente le Tems, les Saisons, les Goûts, les Passions, et autres choses de cette nature; on fait imprimer des Vers qui expliquent l'emblème et l'on jette ces vers dans les carosses des dames ; outre cela, ceux qui ont des maîtresses leur donnent ce jour-là de Massepain; ce Massepain est une boëte grande comme un coffre toute pleine de Confitures, couverte d'une étoffe d'or dont on peut faire une Jupe, et nouée avec des rubans d'or; on a soin d'en mettre ce qu'il faut pour une garniture; on promène tout le jour ce Massepain sur un cheval ou dans une chaise de poste, et après qu'on l'a bien fait admirer et qu'on a jeté à droite et à gauche quantité de Vers à la louange de celle à qui on le destine, on le lui fait donner par des gens masqués qui choisissent, pour le lui présenter, l'endroit où il y a le plus de monde. Après qu'on a couru les rues pendant le jour, on court toute la nuit le Bal, et, du train dont y va, il n'y aurait personne qui pût résister à cette fatigue, si le Carême n'arrivait à propos pour calmer ses fureurs : chaque saison a pourtant ici ses plaisirs, mais un peu plus modérés, et. chaque Dimanche de Carême a un des fauxbourgs de la ville où l'on va célébrer le Fcnélra; dans le fauxbourg du Basacleon mange des huîtres; dans les autres, on mange quelqu'autve chose ; et enfin le beau Fcnélra est celui du fauxbourg de saint Severin (1), qui est celui où est le Cours ; toutes les Dames s'y rendent le Lundi de Pâques, parées de leur mieux; les Messieurs y font de belles Cavalcades autour des Carosses; et enfin, on voit arriver quantité d'hommes à pied, les uns déguisés en garçons Pâtissiers, d'autres en Bergers, qui portent chacun un Fenêtra sur sa tête : \e fe né Ira esl un grand gâteau d'une pâte fort excellente, tout piqué d'écorcé de Citron, et d'autres Confitures; ils sont chacun sur une planche cou(1)
cou(1) n'a pas compris le nom local de san Subra, saint Cyprien, et l'a transformé. L'erreur est facile à reconnaître et ne surprend pas de la part d'une française, étrangère au dialecte du pays. Ce fénétra de Saint-Cyprien était dit « gourmand ».
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verts de petits Rubans et Colifichels, et c'est tout ce qu'un homme peut porter, on les jette en dansant dans les Carosses des Dames, et l'on fait que les deux bouts du Gâteau sortent par les portières. Ce présent ne tire pas à conséquence comme le Massepain du Carnaval; ainsi on en donne aux Femmes tout comme aux Filles. Je demandai d'où venait l'origine de cctle Cérémonie et j'appris qu'elle était d'institution dévote. J'avais bien remarqué qu'on la commençait toujours par recevoir la bénédiction dans une église du Fauxbourg où l'on devait se réjouir et où l'on expose le saint Sacrement exprès ce jour-là, mais je ne savais pas que ces parties de plaisir eussent succédé à des repas do Charité que les premiers chrétiens faisaient autrefois auprès des tombeaux des martyrs; c'est ce qu'on m'en a dit et ce que le mot de fenêtra signifie en je ne sais quelle Langue (1). »
Séance du 19 avril 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONOÈS.
Lecture est donnée de la liste dos ouvrages manuscrits ou imprimés envoyés au Concours de cette année; ils sont renvoyés à l'examen d'une Commission composée de MM. BRISSAUD, abbé DEGERT, DE BOURDES, LÉCRIVAIN, DE LAHONDÈS, BARRIÈRE-FLAVY, PLASSARD.
M. DELOHME, membre résidant, fait passer sous les yeux de la Société un Christ en bois dans un beau cadre Louis XIV en bois sculpté.
M. PASQUIER, membre résidant, rend compte de la réunion annuelle des Sociétés savantes à la Sorbonne et de la fête du Centenaire de la Société des antiquaires de France qui a été fort réussie.
M. le SECRÉTAIRE GÉNÉRAL a le plaisir d'annoncer que M. Emile GUIMET accepte de faire devant la Société et ses invités une conférence le 22 avril prochain. C'est une bonne fortune pour notre Compagnie et pour le public toulousain.
(1) On sait que le fénélra est un souvenir des feralia ou fêtes funèbres des Romains Le plus ancien est précisément celui de Saint-Michel où le mot de feretra a été conservé à un lieu dit, cl où passait la voie romaine bordée de tombeaux suivant l'usage. Aujourd'hui, comme autrefois , on y vend des raisins secs, des figues, des noix, des châtaignes-sèches.
— 126 — Séance du 26 avril 1904.
Présidence de M. J. DE LAIIONDÈS.'
M', LE PRÉSIDENT annonce la mort do M. de Crazanne, ancien membre résidant do 1874 à 1887, et correspondant depuis son départ de Toulouse. Il fut pendant plusieurs années un collaborateur fort zélé et son aimable caractère lui avait assuré toutes les sympathies.
Il était fils du baron Chaudruc de Crazanne, qui appartint à la Société dès sa fondation, en 1831, au titre de correspondant. Né à Figeac en 1833, sorti de l'école de Saint-Cyr dans l'arme de l'infanterie, il prit part à diverses campagnes en Algérie, à celles d'Italie et de 1870. Il a terminé sa carrière comme intendant militaire, directour des services administratifs au Ministère de la guerre, commandeur do la légion d'honneur. Il avait épousé la soeur de notre confrère, M. Louis de Malafosse. Il passa à Paris la dernière partie de sa vie.
M. le PRÉSIDENT dit qu'il convient de mentionner au procèsverbal le succès de la conférence publique sur les antiquités de la Syrie et de la Palestine de M. Emile GUIMET. Que le savant fondateur et directeur du musée Guimet veuille bien recevoir les remerciements de la Société.
La seconde conférence aura lieu le 24 mai. M. JEANROY parlera sur la chanson de la croisade. Le 26 mai, M. J. DE LAHONDÈS dirigera une visite du couvent des Jacobins et étudiera spécialement les peintures de la chapelle Saint-Antonin.
Rappel est fait d'une candidature au titre de correspondant, sur laquelle MM. Degert, Lécrivain et Bégouen sont priés de faire le Rapport.
Lecture est donnée d'une lettre de M. Bressolles, secrétaire du Conseil d'administration de l'hôtel d'Assézat, demandant à la Société de ratifier la nomination de M. Ant. Deloume, secrétaire perpétuel de l'Académie de législation, comme président dudit Conseil. Cette ratification statutaire est effectuée avec empressement.
M. DE LOTH, membre correspondant, qui assiste à la séance, offre la photographie d'un buste romain trouvé aux environs de Lombez.
M. le comle BÉGOUEN, membre résidant, donne lecture d'une cor-
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respondance échangée entre Auguste Caffarelli et son frère Joseph pendant la campagne des Pyrénées orientales de l'an II. Il y ajoute quelques renseignements sur la famille Caffarelli.
Séance du 3 mai 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. LE PRÉSIDENT annonce la mort de M. l'abbé Bazy, chanoine, lauréat de la Société :
M. PASQUIER rend compte en ces termes de l'ouvrage suivant, dont M. Paul Deslandres, archiviste-paléographe, attaché à la bibliothèque de l'Arsenal, a bien voulu offrir un exemplaire à la bibliothèque de la Société :
L'ordre des Trinitaires pour le rachat des captifs.
L'ordre des Trinitaires ou Matburins se rattache au Midi par l'un de ses fondateurs, saint Jean de Matha, originaire de Provence. Concurremment avec les religieux de la Merci, les Trinitaires étaient chargés de racheter les chrétiens tombés au pouvoir des infidèles.
M. Paul Deslandres (t), archiviste-paléographe, s'est proposé défaire connaître ce qu'était l'ordre des Trinitaires dans son organisation, dans l'accomplissement de son oeuvre libératrice et dans les principales phases de son histoire. Cette importante étude comprend deux volumes : le premier est consacré au récit des faits et à l'exposé succinct des institutions; le second contient des documents inédits judicieusement choisis dans divers dépôts d'archives.
Une bonne table rend les recherches faciles dans le texte et dans les pièces justificatives; l'ouvrage est illustré de planches représentant des fic-siniilés de manuscrits, des statues, des portraits, etc.
De la fin du douzième siècle à la Révolution, le rôle des Trinitaires fut considérable, à mesure qu'ils se répandirent dans les diverses contrées de l'Europe. En France , il n'y avait pas moins de six provinces, entre lesquelles l'ordre répartissait ses nombreux couvents. L'auteur ne pouvait suivre les religieux à travers les siècles et dans les pays où ils s'étaient
(1) Paul DESLANDRES, L'Ordre des Trinitaires pour le rachat des captifs. Toulouse, PRIVÂT, et Paris, PLON-NOURRIT, 1903. 2 forts vol. in-8».
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établis ; c'eût été entreprendre un ouvrage qui eût ressemblé aux Annales que certains ordres, comme les Bénédictins, les Capucins, n'ont pas hésité à consacrer à la gloire de leur institut. Telle n'était pas l'intention de M. Deslandres pour les Trinitaires; deux volumes n'eussent pas suffi à un pareil travail. Il s'est tracé le plan, dont nous venons d'indiquer les limites; il a eu le mérite de s'y maintenir et a pris soin de mettre en appendice les sujets qui, donnant matière à digressions, l'auraient détourné de son but, s'il les avait traités lorsqu'il les rencontrait sur son chemin.
M. Deslandres est sorti de l'École des Chartes ; habitué à fouiller les archives et à consulter les sources, il a cherché à faire oeuvre originale ; il est un des premiers qui, de notre temps, se soit occupé de l'ordre des Trinitaires dans son ensemble, qui lui ait restitué son caractère propre, en montrant qu'il était distinct de l'ordre de la Merci, avec lequel on est porté à le confondre par suite de l'identité du but.
Le premier volume, non compris les appendices, est divisé en quatre parties. La première débute par une biographie du principal fondateur, saint Jean de Matha ; c'était le moyen de raconter les débuts de l'ordre, d'en faire connaître la règle , d'en montrer l'organisation intérieure et la hiérarchie. La seconde partie est consacrée à l'histoire générale de l'institution : rapports avec les papes, les évéques, les rois de France, les principaux bienfaiteurs. Viennent ensuite les récits relatifs aux vicissitudes qu'a traversées l'ordre aux époques de la bonne et de la mauvaise fortune. L'union n'a pas toujours régné parmi les religieux; les uns, en vue de remédier aux abus, se constituèrent en réformés, formaient bande à part; les autres se groupèrent en congrégation et s'appelèrent les Déchaussés. L'auteur, dans une narration rapide, conduit le lecteur jusqu'au moment où, par suite des décrets de la Constituante, les couvents furent fermés en France.
La troisième partie, à notre avis, la plus intéressante et la plus originale, traite de ce qui était la raison d'être de l'ordre, de la rédemption des chrétiens détenus dans les Etats barbaresques. C'est par cette oeuvre que les religieux de la Trinité et leurs confrères de la Merci ont eu droit à la reconnaissance de l'Europe, tant que la France, en s'installant en Algérie, n'eut pas mis fin à la piraterie.
Dans la quatrième partie, l'auteur donne la monographie sommaire, par ordre alphabétique, de tous les couvents de Trinitaires qui ont existé en France. Il n'y a pas de dérogation en faveur du couvent de Toulouse et de ceux du Sud-Ouest. Pour les courtes notices qui concernent chaque maison, l'auteur a fait usage de documents existant dans les archives locales; il en a reproduit quelques-uns parmi les pièces justificatives. En ce qui concerne les provinces de l'étranger, il n'en est question, dans le cours de l'ouvrage, que si elles ont eu des relations avec celles de France.
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En résumé, M. Deslandres a fait oeuvre utile, en rappelant à l'attention l'existence d'une institution dont les services méritent de perpétuer le souvenir.
M. MARIA, membre résidant, offre une belle série (50) de cartes postales représentant des vues de Timgad, et raconte l'excursion qu'il vient de faire dans ces ruines et à Carthage.
M. J. DE LAHONDÈS dit que l'attribution à Tailiand dit Manceau des initiales T. M., gravées sur le portail de la Dalbade, semble être confirméo par deux travaux du même sculpteur dans le quartier, que lui a indiqués M. Macary : une croix pour le quartier de Tounis et divers ornements à l'hôtel de l'avocat Maynior.
Séance du 10 mai 1904. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
S. A. le Prince DE SAXE COOOURG ET GOTHA a bien voulu envoyer plusieurs brochures : Curiosités oi-ieîitaks de mon cabinet numismatique. — Deux monnaies des pirates bédouins du Chatt el Arab. — Une médaille commémoralive de la fondation et de l'achèvement de la villa de Sultanige (1305-13).
La Société a reçu le superbe volume que la Société des Antiquaires de France a publié à l'occasion de son centenaire et qu'elle a généreusement offert aux Sociétés qui se sont fait représenter auprès d'elle ce jour de fête. Ce recueil de 496 pages in-4° comprend cinquante-quatre mémoires. Malheureusement il n'y est pas question de notre midi toulousain.
lie premier Bulletin de la Société française de fouilles archéologiques fournit des renseignements sur la fondation et les premiers succès de cette nouvelle Compagnie dont le but est parfaitement indiqué par le titre môme. Bien que notre Société soit fort obérée, elle décide, après discussion , de s'inscrire parmi les membres titulaires annuels et versera une souscription do 20 francs.
Communication est faite du programme du Congrès international d'archéologie qui se tiendra à Athènes, en 1905, pendant les vacances de Pâques, sous la présidence du prince royal dos Hellènes, duc de Sparte. Les membres du Congrès ne versent aucune cotisation.
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Il suffit de donner son adhésion et d'être admis par la Commission du Congrès. Le Directeur de l'Ecole française d'Athènes est secrétaire du Comité et du Congrès.
M. BARRIÈRE-FLAVY, membre résidant, offre le tirage à part de son article publié dans le Bulletin archéologique : Portails des églises de Caujac-Toulza (Haute-Garonne).
M. Emile BONNET, membre correspondant à Montpellier, a envoyé une brochure : Des variations de valeur de la monnaie melgorienne.
Le SECRÉTAIRE signale enfin le premier Bulletin de la Société des archéologues de Provence.
M. J. DE LAHONDÈS, à propos de la vente des tableaux du dixseptième siècle de M. de Monlbrison, qui est annoncée, est amené à parler du prétendu portrait de Racine par Rigaud, que possède le Musée de Toulouse. C'est le portrait d'un inconnu, peut-être de quelque intendant du Roussillon, patrie du peintre. Le vrai portrait de Racine peint par Santerre se voyait chez notre concitoyen M. de Naurois, allié à la famille do l'illustre poète. Il a été légué à la Bibliothèque Nationale, et a été reproduit par la maison Hachette en tête du premier volume de la grande édition des classiques français.
M. J. DE LAHONDÈS lit la note suivante :
Diverses armoiries de Saint-Nazaire de Carcassonne.
Les armoiries signent et datent les monuments. Il est donc utile de les relover.
Elles s'échelonnent du treizième au seizième siècle dans l'église de SaintNazaire.
Quelques archéologues croient même pouvoir reconnaître sur le beau vitrail de la rose du transept nord, celles de Pierre de la Chapelle Taillefer, évéque de 1292 à 1298. Mais outre que le vitrail est postérieur de quelques années, le couperet, d'ailleurs assez indistinct, qui figure sur ce blason et qui serait une arme parlante , no paraît pas sur celui publié par Mahul ni dans celui fort différent d'un armoriai des évoques de Toulouse conservée l'archevêché. L'évêque de Carcassonne occupa en effet le siège de Toulouse de 1298 à 1305.
Le blason le plus ancien serait donc celui de l'archidiacre Sanche Morlane, mort en 13H, publié dans notre Bulletin (1906, p. 204); trois besans posés deux et un. Les besans figurent plus tard en plus grand nombre sur le blason de la famille Morlane de Toulouse, que l'on voit à la clef de voûte
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de la chapelle Saint-Hyacinthe de l'église des Jacobins, servant aujourd'hui d'entrée dans la nef superbe.
Le transept était donc construit à cette époque, sinon entièrement voûté.
C'est Févêque Pierre de Roquefort (1300-1321) qui fit terminer le choeur et les transepts et ses armes, d'azur à trois rocs d'or, figurent à la clef de voûte du choeur (Viollet-Ie-Duc, Dict., III, 71), sur les vitraux du choeur et sur celui du transept méridional.
L'évêqne Pierre de Rodier (1324-1330) fil construire, dans son court épiscopat, la chapelle Saint-Laurent, sur le flanc méridional de la nef romane, et ses armes sont peintes sur le vitrail de cette chapelle : d'argent à la bande d'azur chargée de trois fleurs de lis d'or et à la crosse d'or.
Sur les vitraux du choeur à grands personnages datant du seizième siècle, se montrent les armoiries de Martin de Saint-André, évéque de 1522 à 1546, château d'argent surmonté de trois étoiles du môme sur champ d'azur, tantôt seules, tantôt écartelées avec celles de Pierre d'Auxillon, son prédécesseur et son cousin germain ; trois roues d'or sur champ de gueules, posées deux et une.
Ces deux blasons, non plus écartelé3, mais accolés, figurent au-dessus de la porte du collège, aujourd'hui Musée Saint-Raymond à Toulouse, reconstruit par Martin de Saint-André, fils du premier président au Parlement. Mais le sculpteur, gêné sans doute par la difficulté de détacher les rayons des roues, a plutôt représenté trois meules.
Une élégante sculpture sur le pilier ou avant de la chapelle septentrionale de la nef montre encore les armoiries de Martin de Saint-André, sommés de la crosse et de la mître , et entourées d'une banderole où se lit : Fiat pax in virlule tua et abundantia in turribus luis; légende qui répond au château à trois tours.
Le tombeau en marbre de diverses couleurs de Christophe de Lestang, évéque de 1603 à 1621, élevé après sa mort dans Fentrecolonnement de la chapelle actuelle de Saint-Sernin, reçut ensuite les restes de son neveu et successeur Vital de Lestang. Le tombeau fut détruiten 1793, mais les deux blasons en marbre blanc sont conservés, l'un au-dessous des orgues, l'autre sur la porte de l'ancienne église de Saint-Gimer. Les poissons, arme parlante, que l'on y voit, se retrouvent sur le blason du président de Lestang au vitrail du choeur de Saint-Etienne de Toulouse, côté de FEpître. Le tombeau du président, représenté agenouillé devant la Vierge, est toujours conservé, bien que remanié, aux côtés de la porte méridionale du choeur. Il est aussi en marbres de diverses couleurs. Arthur Legoust aurait-il aussi été l'auteur du tombeau de Carcassonne il)?
(1) Histoire de Haint-Elienne, p. 271.
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Christophe de Lestang fit construire à Toulouse, rue Saint-Jacques, l'hôtel qui est aujourd'hui celui de l'Université.
Enfin, au-devant de l'autel de la chapelle Saint-Laurent, une dalle de marbre de Caunes recouvrant le caveau funéraire de l'évêque Louis-Joseph de Grignan (1681-1722), montre son blason fort compliqué par les insignes héraldiques des Adhémar, des Castellane et des Ornano.
Le pieux évéque qui a laissé tant de marques de ses libéralités, l'hôpital général, la grande caserne aux lignes monumentales, avait fait exécuter à l'antique cathédrale des transformations moins heureuses.
Sur le mur faisant face à la dernière chapelle du transept méridional, près de la porte de la sacristie, une inscription mentionnant une fondation de messes par Antoine de Tournis, seigneur de Serres, est accompagnée du blason de ce lieutenant général du sénéchal de Carcassonne dans les dernières années du quinzième siècle, ,
Aux clefs de voûte de la sacristie figurent saint Celse et saint Nazaire, et un écusson échancré surmonté d'une double croix ; cinq rnerlettes, trois à sénestre, deux à dextre séparées par une bande.
M. Emile CARTAILHAC lit une note sur Les monuments pélasgiques ou cyclopéens dont l'étude fut commencée en 1804 , il y a juste cent ans et simultanément par l'Institut de France et l'Académie des Lynx à Rome, grâce à l'influence heureuse de Petit Radel (Cette note est publiée dans l'Anthropologie, 1904).
Séance du 17 mai 1904.
Présidence de M. J. DE LAHO.NDÈS.
M. R. PONTNAU, membre correspondant, a le regret d'annoncer qu'une des plus importantes parties du vieux Cordes, la porte dite de la Jane, l'arceau et l'une des deux grandes tours, est sur le point d'être démolie sous le prétexte qu'elle menace ruine. Déjà ce projet déplorable avait été envisngô l'an dernier, et M. Rocher, notre confrère, avait bien voulu se rendre à Cordes. Il résulte de son examen que des réparations sans importance supprimeraient les chances d'écroulement. Mais les matériaux ont de la valeur, l'utilisation de la porte et des tours est d'un faible rapport, le propriétaire veut vendre, et le conseil municipal, ignorant des vrais intérêts de la .ville, l'encourage. En revanche nous pourrions, à peu de Irais relativement, acquérir ses droits. M. Pontnau pense que cinq à
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six cents francs suffiraient pour avoir sa part, la porte et une tour, et la part des copropriétaires, la seconde tour.
La Société, après discussion, vote une provision de 50 francs, et décide que des lettres seront écrites aux syndicats d'initiative du sud-ouest, à diverses sociétés archéologiques, au Touring-Club, pour les aviser de l'acte de vandalisme menaçant, et solliciter leur appui.
M. l'abbé J. LESTRADE donne connaissance de la seconde partie de son mémoire :
Pages d'histoire et d'art sur Saint-Sernin de Toulouse (1).
La nouvelle série de baux à besogne inédits dont M. Lestrade entretient la Compagnie révèle des travaux importants accomplis à Saint-Sernin de 1656 à 1671. A la première de ces dates on commanda aux maîtres charpentiers Pierre Ingres et Pierre Pratviel deux galeries ayant chacune deux langées de sièges où le chapitre avait résolu de se placer pour a ouyr la prédication. » Une de ces galeries fut posée du côté de la chaire, l'autre en face, dans l'espace libre entre deux piliers, avec saillie dans la nef. — En 1668, un jubé ou « contre-choeur » fut entrepris par Gervais Drouet, maître sculpteur de Toulouse, que le rétable de Saint-Etienne avait mis en vogue. Le contrat passé avec l'artiste à l'occasion de ce travail en fixe le prix à 2,700 livres.
Ce fut après l'érection de cette clôture que le chapitre de Saint-Sernin et l'abbé, Jean Ruzé d'Effiat, formèrent le projet de meubler le choeur de stalles nouvelles. Le bail à besogne de ce travail considérable porte la date du 28 février 1670. Les entrepreneurs s'appelaient Jean Bureau dit Montargy, Pierre Palis et Jean Dubois, maîtres menuisiers de Toulouse. Le chapitre leur imposa l'obligation expresse et plusieurs fois renouvelée d'imiter les stalles et boiseries du choeur de Saint-Etienne non seulement pour le plan général de la composition , mais pour le détail des cintres, courbes, frises, architraves, colonnes, traverses, montants, panneaux des dossiers, museaux, appuis, parcloses et selcttes. Les sièges, établis sur double rang, haut et bas choeur, devaient partir des deux premiers gros piliers de la coupole et joindre le jubé de Gervais Drouet. Une galerie avec balustre et accoudoir devait régner sur les stalles supérieures et s'appliquer, en partie, au plein des piliers. L'ensemble de ce travail coûta 8,000 livres.
On exécutait depuis vingt mois les boiseries du choeur dans une des salles louées ad hoc par les collégiats du Collège Saint-Raymond, lorsque MM. du chapitre songèrent à la belle stalle archiépiscopale de Saint(1)
Saint(1) Bulletin 32, séance du 22 mars 1904.
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Etienne ! Il n'avait pas été fait mention de stalle abbatiale dans le contrat de 1670. Il fallut réparer au plus tôt cet oubli afin de rivaliser dignement avec le chapitre de la Métropolitaine. On sacrifia donc, par contrat du 26 octobre 1671, deux stalles hautes et deux stalles basses avec partie correspondante de dossier et de galerie contre le pilier de la coupole, au côté droit du choeur. C'est là que l'on fixa ensuite la stalle abbatiale réalisée par les mêmes entrepreneurs au prix de 300 livres. Le siège de l'abbé, érigé alors, se voit encore à Saint-Sernin , point initial des stalles ses contemporaines ; mais depuis la réorganisation du culte à Toulouse, la série des sièges de choeur est incomplète. Trente slallcs ont été vendues, lors du raccourcissement du choeur, à la fabrique de l'ancienne collégiale SaintVolusien de Foix, et quelques autres à la fabrique de Saint-Paul de Jarat, au diocèse de Pamiers, et à l'église de Villemur, au diocèse de Toulouse. Elles s'y trouvent actuellement.
A la fin de sa communication , M. Lestrade entretient ses collègues de travaux secondaires effectués à Saint-Sernin en 1670-71 , tels que pupitres ouvragés, carellement du choeur, etc., le tout aux frais des chanoines et du même abbé, qui rivalisaient de zèle et de générosité pour l'embellissement de leur église. Il ajoute qu'il a récemment découvert le testament d'un des chanoines de Saint-Sernin le plus justement estimé à Toulouse au dixseptième siècle : Jean de Cambolas, décédé en odeur de sainteté en 1668, et dont la vie fut donnée au public. Le testament de cet ecclésiastique est de 1664; Jean de Cambolas léguait mille livres à ses confrères pour les stalles. Cette générosité décida le chapitre; grâce à M. de Cambolas, les boiseries du choeur furent aussitôt entreprises et menées à bonne fin.
M. J. DE LAHONDÈS, après cette lecture, dit que la ressemblance absolue des stalles de Saint-Sernin avec colles de Saint-Etienne avait été reconnue et signalée depuis longtemps, malgré l'obstination de quelques historiens qui voulaient voir on elles une oeuvre de la renaissance. La différence des temps se marque seulement par les formes un peu lourdes, d'un style Louis XIII attardé, de la stalle abbatiale qui cesse d'imiter la svelte élégance de la stalle archiépiscopale datant, comme l'ensemble do la boiserie, de 1G101611, et paraissant, elle, dater du seizième siècle. Les formes et les modes s'attardent dans les provinces.
M. l'abbé LESTRADE présente à ses confrères un calice en argent doré, style Louis XIV, appartenant à l'église de Gragnague (HauteGaronne) et provenant, à ce que l'on croit dans cette paroisse, des anciens Chartreux de Toulouse.
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Sur le pied sont représentées, en demi-relief : l'Annonciation, l'Adoration des Bergers, l'Adoration des Mages, scènes séparées l'une de l'autre par trois têtes d'anges. Sur le noeud l'artiste a ménagé trois niches accostées chacune de deux fines colonnes et couvrant les statuettes, en pied, du Bon-Pasteur, de la Vierge-Mère, et de saint Bruno, fondateur des Chartreux. La coupe offre, en un relief atténué, les images du Crucifiement, de la Cène et de la Résurrection de JésusChrist : trois figures d'anges séparent chacune de ces représentations. Sur la bordure, circulant autour du pied, en forme de couronne ajourée, on voit les apôtres à mi-corps et avec attributs, en douze médaillons réunis les uns aux autres par douze fleurs de lis épanouies. La bordure intérieure du pied porte gravée cette inscription : DONNÉ EN FAVEUR DE DOM BRUNO LE PELLETIER.
La scène de L'Assomption de la Vierge, debout, soutenue par deux anges et couronnée par deux autres, est figurée sur la patène (1).
M. Lestrade signale en môme temps un ciboire de Muret, style Louis XIV, qui porte l'inscription : Collegium Socielalis Jesu Tolosae.
M. CARTAILHAÇ entretient la Société de la nouvelle organisation du musée des antiques aux Augustins. Les collections que Dumègo et les anciens membres de la Société archéologique avaient étalées d'une manière assez pittoresque, mais nullement méthodique, dans les galeries du grand cloître, avaient été inventoriées avec soin par M. Roschach dans un catalogue remarquable et qui a rendu d'inoubliables services. Mais ce savant, mal secondé, ne put pas établir un classement rationel ; il avait dû se borner à faire faire un grand nombre d'étiquettes qui, pendant longtemps, accompagnèrent les principaux monuments. La municipalité, après avoir entrepris le percement de la rue Alsace-Lorraine et la démolition stupide et à jamais regrettable du réfectoire des Augustins, voulut « restaurer » le Musée, le cloître et ses annexes. Finalement, avec le concours de la Commission des monuments historiques, on a abouti à une série de reconstructions volumineuses qui n'ont aucun rapport avec l'architecture toulousaine, avec le style du monastère des Augustins ;
(1) Cette belle pièce d'orfèvrerie religieuse a appartenu, pendant et après la Révolution, à M. l'abbé Amouroux, mort chanoine de Saint-Etienne. Il la légua à son neveu, M. Amouroux, qui la donna, plus tard, avec des burettes Louis XVI, à l'église de Gragnague, sa paroisse.
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elles ont absorbé des sommes énormes et ne seront jamais achevées.
Pendant ces travaux, qui ont duré trente ans, les antiquités ont été souvent déplacées et souvent détériorées. On les considérait volontiers comme des matériaux gênants. Enfin, le calme et l'ordre renaissent dans les galeries, et les conservateurs actuels du Musée, MM. Rachou et Yarz, se sont mis à l'oeuvre pour faire vraiment un musée de ce qui n'était qu'un magasin pénible à voir. Ils ont entrepris une révision des caves et réduits où se trouvaient entassés de nombreux objets, ils ont trouvé des pierres sculptées de réelle valeur, souvent inconnues et dont l'origine n'est pas toujours facile à établir.
Quelques monuments, par exemple une statue tombale, que nous n'avionsqu'en fragments désordonnés ont été rapprochés, restaurés, et sont d'admirables nouveautés.
En même lemps, ils commençaient à mettre de l'ordre dans notre série de chapiteaux incomparable, unique au monde, et pour l'installation décente de laquelle la ville sera bien forcée do faire les dépenses nécessaires. L'opinion publique l'exigera. Le classement préliminaire a déjà augmenté d'une manière sensible la valeur de nos collections.
Enfin, MM. les conservateurs ayant obtenu le transfert au Musée des statues dites « des bienfaiteurs » délaissées dans les combles de l'église de Saint-Sernin, l'un d'eux, M. Rachou, a eu la patience de consacrer plusieurs mois à l'enlèvement du badigeon sous lequel ont reparu les couleurs du quinzième siècle fraîches et vives. Les costumes des personnages, l'aspect du visage qui semble modelé sur celui du mort, la technique de ces statues aux attitudes étonnantes font de cette série une merveille non seulement do notre musée mais de la France. Ces statues sont remarquées, d'ailleurs, depuis longtemps, et elles ont été plusieurs fois figurées d'une façon très fantaisiste d'abord, très convenablement, il y a huit ans, par les soins de M. E. Cartailhac, dans Y Album des monuments et de l'art ancien du Midi. Tome Ier, article de M. Anthyme Saint-Paul. Celte planche XXXVI est une photo-collographie soignée, et c'est elle qui a appelé l'attention sur ces oeuvres précieuses.
L'opinion publique, déjà, félicite hautement MM. Rachou et Yarz qui, d'autre part, remanient aussi de fond en comble et très heureusement le musée des peintures. La ville a le strict devoir de favoriser ces efforts intelligents et désintéressés.
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Séance du 31 mai 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. LE SECRÉTAIRE signale dans la correspondance les ouvrages suivants :
1° Les dix premiers volumes de la Revue Tunisienne, organe de l'Institut de Carthage. M. le Dr Bertholon, secrétaire général, qui a bien voulu faire répondre ainsi largement à notre demande d'échange est sincèrement remercié.
2° Documents relatifs au comte de Champagne et de Brie, H72-i361, publiés par Auguste Longnon. t. II : Le domaine comtal, Paris, Imp. Nat., 1904. (Envoi du Ministère.)
3° Enquêtes campanaires, notes, études et documents sur les cloches et les fondeurs de cloches du VIII au XXe siècle, par M. Jos. Berthelé, Montpellier, 1903, 760 p. in-8°. L'auteur, archiviste do l'Hérault, est correspondant de la Société.
4° Le n° 1 du Bulletin de la Société archéologique de Provence. Marseille, 1904.
5° Une circulaire du directeur du manuel bibliographique Handbook lo Learned Societies and institution, fondé à Washington par l'Institut Carnegie. M. Herbert Putnam demande des renseignements sur notre Société ; ils lui seront fournis bien volontiers. L'oeuvre entreprise sera d'intérêt général pour tous ceux qui font des recherches.
La Société entend la lecture des lettres reçues de divers côtés et concernant l'affaire de la porte Jane de Cordes qu'il s'agit de sauver. Notre correspondant M. PORTAL, archiviste à Albi, membre de la Société des lettres du Tarn, auteur d'une remarquable Histoire de Cordes, annonce qu'il se propose de former une Société des amis du vieux Cordes et soumet les statuts do ladite association. Le 12 juin une réunion publique sera tenue à Cordes même pour décider les habitants à s'intéresser sérieusement au sort de leurs vieux édifices et à la formation d'un musée historique local.
M. LB SECRÉTAIRE fait connaître l'offre par notre confrère M. lo baron do Bouglon d'une somme de 50 fr. M. Raymond Pontnau donne de son côté 100 francs, à la condition que la Société archéoBOLL. 33, 1904. 10
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logique du Midi deviendra propriétaire des édifices de Cordes qu'il convient d'acquérir.
M. l'abbé Baichère, de Carcassonne, communique l'empreinte d'un sceau trouvé récemment à Gibaleaux, commune de Laure, canton de Peyriac-Mincrvois.
C'est un sceau rond de la judicature de Lauraguais; un semé "de fleurs de lis avec la légende en lettres gothiques : SIGILLVM JUDICATURE LAURAGUESII.
Le Lauraguais était entré dans le domaine royal en 1259, et n'en sortit que lorsque Louis XI l'eut donné au comte d'Auvergne en échange du comté de Boulogne.
M. LE PRÉSIDENT rend compte des préparatifs de l'excursion projetée au château de Najac, et il donne lecture de la circulaire chaleureuse et entraînante de M. le chanoine Pottier, président de la Société archéologique du Tarn-et-Garonne.
M. LE PRÉSIDENT dit que la Société adresse ses félicitations à deux de ses membres dont les travaux ont obtenu de hautes récompenses. L'Histoire du droit français de M. Brissaud a obtenu le prix Koeagswarter à l'Académie des sciences morales et politiques, et l'Académie française a couronné la Vie du P. Gabriel de Dom Dubourg.
M. Paul BORDEAUX, ancien président de la Société française de Numismatique, qui, sur l'invitation de notre confrère, M. E. Delorme, assiste à la séance, répond aux compliments de M. le Président en offrant une brochure : Classement de monnaies carolingiennes inédites. Paris, 1900, 54 pages in-8°.
M. JEANROY fait une communication sur le soulèvement de i24i-2, dans la poésie des troubadours. Il étudie surtout trois sirventes de Peire del Vilar, Guilhem Montanhagol et Durau de Pernes, qui marquent assez nettement les trois phases essentielles de la lutte. Le premier (mai-juillet 1241, publié dans les Mélanges L. Couture, p. 115) est un vigoureux appel aux armes, où percent néanmoins quelques craintes; le second, postérieur à la défection du comte de Foix (octobre), est plein de regrets et de reproches, mais laisse encore entrevoir la possibilité d'une intervention anglaise ; quand le troisième fut écrit (hiver 1242-3), le roi de France triomphait sur toute la ligne, et les espérances des coalisés étaient définitivement ruinées. C'est surtout au dernier que M. Jeanroy consacre son
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étude ; il en établit le texte, le traduit et en explique les nombreuses allusions aux faits ou aux personnages contemporains. Ce travail a paru sous une forme plus complète dans les Annales du Midi (juillet 1904, p. 311-29).
M. le baron DE RIVIÈRES lit le travail suivant :
Le tombeau de deux chanoines dans le cloître de l'église Saint-Salvy
à Albi (Tarn).
Dans son Dictionnaire d'architecture (1), Viollet-le-Duc a dessiné un remarquable tombeau dti treizième siècle qui se voit encore à l'angle sud du cloître de la collégiale de l'église Saint-Salvy. Mais l'épitaphe étant effritée et devenue complètement illisible, le savant architecte a fait complètement fausse route, et il a cru que cette sépulture était celle d'un homme et d'une femme. Un examen un peu moins sommaire aurait dû le convaincre de son erreur.
Nous avons eu, il y a quelques années, l'heureuse chance d'avoir; d'un de nos amis aujourd'hui décédé (2), la communication de l'épitaphe de ce tombeau. Cette copie remontait à la seconde moitié du XVIII» siècle. Le texte épigraphique, en belles majuscules du treizième siècle, parlait de deux défunts : deux frères appartenant à la famille de Malo-Vicino dont le nom doit se traduire : de Mau-Vesin.
En voici le texte en vers léonins, remontante l'an 1273. Une croix pattée sert d'initiale, et chaque mot précédé par trois points superposés. La dalle qui porte l'épitaphe gravée en belles majuscules est encastrée dans le mur septentrional de l'église, à gauche du tombeau.
* ;' ANNO ': DNI : MCCLXXIII J VITALIS ] DE ; MALO | VICINO • FECIT • FIERI ; HVNC • TVMVLVM J ET • ACQVISIVIT ■ ET ;
STATVIT • PRO • VT ; SEQVITVR • CLAVSTRVM | VITALIS • SIT [ MERCES '; SPIRITVALIS ■ ILLI • DICTAVIT J ET • POST • HAEC J HOC • RENOVAVIT ; ISTI ; DONAVIT • DOMVI ; FRATREM J SOCIAVIT • JAM ; BIS ; DUPLORVM • PRETIVM ; DECEM '; SOLIDORVM. ; CONTVLIT : ISTORVM • PATER • FRATERQVE J BONORVM • HVNC ; ILLVSTRAVIT • CONVENTVS ; CANONICORVM •
(1) Tome IX, pp. 29 et 30.
(2) M. l'abbé Berbié, chanoine d'Albi, correspondant de la Société archéologique du Midi.
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NAM • SIBI • DONAVIT • TVMVLOS • PROPRIOSQVE • DVORVM •
FRATREM ; QVAESIVIT ; AD j IPSVM • TVMVLARI ;
NEC • CVIQVAM • TVMVLI • JAM • DEBENT '; APPROPRIARI •
SEMPER ; IN AVRORA j LUCIS ; DVM • PRAEMINET ; HORA ;
VIRGINIS ;ALTARI ; MISSAM [ STATVIT | CELEBRARI ;
HOC j VOLUIT I FACE11E \ REQUIEM • QUOD ; POSSET ■ HABERE ■
SEDIBVS • IN • LAETIS ; OMNI j DVLCORE | REPLETIS •
hoc i SIBI ; DET ; MVNVS j QVI | RÉGNÂT • TRINVS • ET • VNVS •
Ces deux frères étaient chanoines du chapitre collégial de Saint-Salvy. Vital fonda à perpétuité une messe qui devait être célébrée au lever du jour à l'autel de la Vierge, et ce tombeau ne devait servir à aucune autre sépulture que pour les deux frères.
Le dessin ci-joint, exécuté par notre président M. de Lahondès, d'après une photographie, reproduit Giclement les ornements du tombeau. Au centre, une niche cintrée abrite une statue de la Vierge tenant de son bras gauche l'Enfant Jésus. Le divin enfant pose sa main droite sur le cou de sa mère. La Vierge a les pieds et les mains nus, sa tête est vulgaire et porte une couronne fleuronnée. Vierge et enfant Dieu sont vêtus de longues robes.
A droite et à gauche sont, chacune dans une niche plus basse, les statues des deux chanoines à genoux, vôtus d'une longue robe, avec mains gantées, capuchon, et dans l'attitude de l'adoration. Ils ont les cheveux longs, non rasés, et le menton rasé. La tête du chanoine à gauche de la Vierge a disparu. Au-dessus des trois niches est une sorte de fronton très obtus.
Au-dessous est un cordon mouluré séparant les trois personnages du bas du tombeau. Le bas est formé d'une double arcade ogivale trilobée d'une forme très élégante. Le haut du tombeau se ressentait des formes romanes. et les arcades trilobées du bas reproduisent les formes gothiques dans son plein épanouissement. Les deux arcades supportent une double voûte avec chapiteaux, l'un avec têtes, les autres avec feuillages, le tout très élégant. Sur le fond de la double arcade étaient peintes deux figures d'anges ailés dont la tête d'une seule est à demi-conservée.
La colonnette séparant les deux arcades ogivales porte une statue figurant l'apôtre saint Paul , statue mutilée où manque la tête. Sa main droite tient une ôpée en pal aussi mutilée, et de sa main gauche il tient un livre; les pieds manquent.
Voici la proportion des personnages :
Statue de la Vierge avec sa couronne, hauteur : 0m,y6.
Statue du chanoine do droite à genoux, 0m,86.
Niche de la Vierge, hauteur : lm,W.
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Toutes ces sculptures sont sculptées en pierre de grès. Elles sont un peu effritées par les intempéries. L'ensemble du monument avait été entièrement peint, et des traces de peinture s'y voient partout. Le seuil du tombeau,
tombeau, certainement recouvrait la sépulture des deux chanoines, était formé d'un cordon semi-circulaire de 0n',20 de large.
Un petit bénitier de 0m,26 de diamètre est engagé dans le mur à gauche du tombeau.
L'épitaphe est inscrite en belles majuscules gothiques presque entièrer ment effacées, formant vingt lignes. Tout autour régnait en bordure une
FIG. 6. — TOMBEAU DE L'ÉGLISE SAINT-SALVY, A ALBI.
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tige ondoyante fleuronnée dont un dragon couché était sculpté au commencement. La triple arcade cintrée abritant la Vierge et les statues des deux chanoines se raccordent, comme style, parfaitement avec les arcades du . cloître de Saint-Salvy dont un seul côté, la galerie nord, est conservée, et l'on peut, sans nul doute, donner le millésime 1273 comme date de ce cloître vénérable dont le préau est maintenant le jardin du presbytère de la vieille église. Ce préau servait jadis de lieu de sépulture aux membres du chapitre collégial. D'après un très ancien usage, les évoques d'Albi visitaient, dès leur entrée dans leur ville épiscopale, cette vénérable église dédiée à leur saint prédécesseur (1).
Séance du 14 juin 1904. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
La Société remarque dans la correspondance imprimée les ouvrages suivants :
Inventaire sommaire des Archives départementales {Haute-Garonne), Archives civiles. Série B, nos 1 à 92 N, tome premier de la série judiciaire. 564 p. in-4°, 1903.
Ce volume, rédigé par M. Charles ROQUES, archiviste adjoint, est consacré à la période de 1444-1585, depuis la création du Parlement de Toulouse jusqu'aux débuts de la Ligue, et remplaco les deux feuilles auxquelles l'inventaire avait été malheureusement réduit en tête de l'ancien troisième volume. Le dépouillement a compris : 1° les quatre-vingt-douze premiers registres des arrêts du Parlement; 2° les registres des arrêts du Parlement ambulant à Carcassonne, à Béziers, à Castelsarrasin ; 3° les sept registres des arrêts de la Cour des Grands-Jours à Nimes, au Puy, à Béziers, au Puy, à Nimes.
Idem. Sério B, n°* 93 à 592. Ce volume, édité avec la tomaison III et devenu le second, a 418 p. in-4°. Il est rédigé par M. J. JUDICIS, archiviste adjoint, et renferme la période de 1585 à 11338. L'inventaire est précédé par une notice historique de M. LAPIERRE sur le
(1) Grégoire de Tours, dans son Historié Francorum, a raconté d'uno façon très intéressante la vie de saint Salvy dont il fut le contemporain et l'ami. Ce saint évéque, le plus illustre évéque d'Albi, vivait au milieu du sixième siècle de notre ère, II mourut en 584.
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Parlement de Toulouse, remplaçant celle de la première édition qui a été jugée insuffisante.
Idem. Série C, tome II, n°" 2276-2432. Procès-verbaux des états do Languedoc, 1477-1789, avec table rédigée par M. Ad. BAUDOUIN, archiviste, complétée par M. F. PASQUIER, archiviste. 800 p. in-4° 2 col.
Ces oeuvres considérables, fruits do longues années d'un patient labeur, exciteront la reconnaissance de tous les érudits.
L'archiviste actuel, M. Pasquier, l'un des auteurs, et notre confrère, est particulièrement remercié do nous avoir procuré ce don de la Commission départementale.
II a bien voulu offrir une brochure tirée à petit nombre et qui sera fort utile : Etat général par fonds des archives départementales de France. Extrait : Département de la Haute-Garonne. 22 p. in-4°.
La correspondance imprimée comprend encore les brochures suivantes envoyées par l'auteur, M. l'abbé J.-R. Marboutin : Le château de Fauguerolles ; — Dom Delpech, moine de Perignac; — Fête célébrée à Laroque-Timbaut en l'honneur de la naissance du duc de Bordeaux, 4820; — Le Château de Poutirou; — Deux séditions à Laugnac, 1719. 4790 ; — Notice historique sur la Sauvelal de Savères.
M. CARTAILHAC expose l'état des négociations relatives à la conservation de la porte de la Jane à Cordes ; il communique les lettres de M. Baillif, président du Touring-Club, qui nous annonce une souscription de 250 francs ; de M. Lefèvre-Pontalis, président de la Société française d'archéologie, qui donnera 50 francs; de M. Guénot, secrétaire général du Syndicat d'initiative de la Haute-Garonne souscripteur de 50 francs. M. Dubois, membre de la Chambre de commerce de Toulouse, a bien voulu s'inscrire pour 20 francs.
Il résulte des renseignements oraux donnés par M. Pontnau, qui a vu l'un des notables de Cordes, et par les lettres de MM. Portai, le zélé archiviste du Tarn, fondateur delà Société des amis du vieux Cordes, et du Dr Mellier, président du Syndicat d'initiative du Tarn, que l'affaire est assez compliquée et qu'il est dangereux de la traiter do loin.
Une discussion s'engage entre les membres présents, et finalement la Société décide de s'en remettre à la Société des amis du vieux Cordes. Ses membres pourront mieux que nous s'informer,
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juger la situation, et choisir la décision la plus convenable. Nous nous on rapportons à elle, et les sommes souscrites seront versées entre ses mains.
Mais la Société archéologique du Midi reste à la disposition de M. Portai et de ses confrères s'il en était besoin.
La Société a atteint son but. Elle est en mesure d'empêcher un acte déplorable de vandalisme; elle exprime à toutes les personnes qui ont bien voulu répondre à son appel et lui venir en aide, sa vive reconnaissance.
Elle remercie en particulier M. le comle de Lasteyrie, membre de l'Institut, qui a écrit pour engager la Société à poursuivre résolument son oeuvre en faveur de Cordes, et lui assure un largo concours du Ministère de l'Instruction publique et des Beaux-Arts.
M. lo Dr Basset fils, délégué du Touring-Club, et qui avait plaidé la cause auprès du bureau de cette puissante et bienfaisante association , demande dans une lettre si la Sociôlô archéologique n'a pas pris de décision, afin de protéger si possible les anciens hôtels de la rue d'Aussargues à travers laquelle on projette d'ouvrir la rue Ozenne. S'il y avait utilité, le Touring-Club joindrait volontiers ses efforts à ceux do la Société archéologique.
M. DE LAHONDÈS, président, à propos de cette communication, rappelle qu'il a été déjà question au soin de la Société archéologique des dégâts que va faire le percement de la rue Ozenne. La Société ne se dissimule pas que tantôt sur un point, tantôt sur un autre, tous les ans, un morceau du vieux Toulouse disparaît. Mais elle ne juge pas utile de faire une opposition qui serait, on en a l'assurance, absolument inefficace. A quoi bon agiter l'opinion pour aboutir à une défaite certaine. La rue Ozenne est décidée, votée et commencée aux deux extrémités. Pour empêcher la disparition des façades monumentales si intéressantes de la rue d'Aussargues , il faudrait modifier dans tout le quartier les plans en partie réalisés. Peut-on demander une telle concession à nos administrations préoccupées d'haussmaniser la ville et d'ouvrir partout de larges voies?
L'administration municipale, qui est plutôt amie dos arts et de l'archéologie, a cru suffisant d'épargner la tour renaissance aux superbes sculptures du parlementaire de Tournoër, et une ou deux fenêtres voisines. Mais que deviendra, en bordure de la rue neuve et
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englobé dans les constructions neuves, ce vieux monument mutilé? Pourra-t-on l'isoler convenablement dans son intérêt et dans l'intérêt du voisinage? Et de quelle manière? Comment le protéger contre les fantaisies des constructeurs nouveaux ? Sur ce point restreint, on peut appeler toute l'attention et la sollicitude du Maire et du Conseil municipal. C'est co qui sera fait.
M. E. CARTAILHAC fait observer qu'il convient do prendre note du secours assez inattendu que le Touring-Club nous a donné avec tant de bonne volonté. Cette association puissante par le nombre de ses adhérents (95000), par le chiffre élevé de ses revenus (450 000 fr.), est une force dans notre pays, et il faut se féliciter de voir l'esprit qui l'anime. Ses directeurs estiment que rien de ce qui intéresse la beauté de notre patrie ne lui est étranger. Le Touring-Club est disposé à prendre toutes les initiatives dans cette voie. En souscrivant pour la conservation du vieux Cordes, il a montré avec quelle largeur de vues il comprend sa mission.
Au nom do la Commission spéciale, M. l'abbé DEGERT fait un rapport favorable sur une candidature. La Société procède au vole. M. l'abbé J.-R. Marboutin, membre do la Société des lettres, sciences et arts d'Agen, est élu membre correspondant.
M. LE PRÉSIDENT rend compte de l'excursion du 7 juin. Excursion à Najac, Aveyron, et à Varen, Tarn-et-Garonne.
La-Société a consacré sa promenade annuelle au château de Najac et à - l'église de Varen.
Suivant unejpensée qui avait germé l'année dernière en passant, au retour de Villefranche, sous les ruines du vieux château féodal, elle avait convié la Société archéologique do Montauban, et M. le chanoine Pottier, qui mobilise si facilement son bataillon de chevaliers et d'amazones, a conduit à sa rencontre une soixantaine de pèlerins de l'art, bien qu'il vînt à peine de les ramener d'une tournée en Roussillon et en Catalogne.
Le château de Najac, dressé sur une arête rochouse dont les méandres do l'Aveyron forment une presqu'île, est l'une des forteresses du moyen âge les plus formidables de notre contrée qui soit encore assez bien conservée pour laisser apparaître nettement l'appareil des défenses. Il a appartenu d'abord, à des seigneurs particuliers, bientôt sous la suzeraineté des comtes de Toulouse, puis entra dans leur possession directe et passa du
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domaine d'Alphonse de F'oitiers, héritier du dernier comte, dans celui de la couronne.
L'histoire du château semble symboliser ainsi celle de la formation de la France.
Les pentes abruptes du rocher, surtout du côté de l'est, mettaient le château à l'abri d'une surprise. Deux enceintes, d'ailleurs, en défendaient l'approche et toutes deux venaient se joindre au château sur sa façade orientale. La première enceinte a été construite ou reprise au treizième siècle , ainsi que l'indique la belle porte encore debout sur le flanc nord ; mais la seconde, ainsi que les assises inférieures des murailles du château, datent du douzième.
Alphonse de Poitiers, dont la prise de possession souleva une vive résistance , résolut, dès son avènement, d'augmenter la puissance de sa forteresse. Il reprit, dans son entier, vers 1253, la construction du château , en se contenlant toutefois d'utiliser la base des murailles et de conserver l'ancien donjon de forme carrée, à l'angle nord-ouest, qu'il suréleva. Il fortifia les courtines par cinq autres tours rondes, dont la plus élevée devint le nouveau donjon. C'est de la base au faîte un des beaux ouvrages du treizième siècle militaire; construit en pierres d'appareil, en trois étages voûtés dont le premier servait de chapelle, ainsi que le montre une piscine et une peinture du quatorzième siècle représentant un seigneur et sa femme, agenouillés sous la protection de leurs patrons, devant un saint couronné qui était sans doute saint Louis. Le donjon n'était pas couvert par une toiture comme les autres tours rondes, mais par un dallage, ainsi que la tour carrée de l'ancien donjon, sur lequel on pouvait disposer des machines de guerre.
Les visiteurs ont examiné avec une curiosité mêlée d'admiration les ingénieuses ressources qui rendaient ces forteresses vraiment imprenables autrement que par la faim ou surtout la soif; les escaliers intérieurs aux combinaisons compliquées desservant les courtines et les tours, les meurtrières les plus longues que le moyen âge ait ouvertes, menaçantes pour l'assaillant, sans danger pour les assiégés à cette hauteur, surtout grâce aux rodants qui empêchaient les flèches parvenues à franchir la fente de les atteindre.
La leçon vivante de stratégie militaire se joint au pittoresque de l'aspect pour donner une des premières places au château de Najac dans les visites archéologiques.
Il rappelle plusieurs dispositions des tours et courtines de la cité de Carcassonne construites peu après. Il n'a guère de supérieur dans nos provinces, pour l'ampleur du plan général et la beauté de son donjon carré, que le château de Puyvert, élevé au quatorzième siècle.
Deux excellentes monographies, l'une de M. Dusan, parue en 1866 dans
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la Revue archéologique du Midi, Ier vol., p. 9, l'autre par M. Nodet dans le Bulletin monumental, 1886, p. 352, et 1887, p. 142, décrivent avec soin et justesse tous les détails de la construction du château.
Les excursionnistes se sont réunis, avant de le quitter, sur la terrasse qui s'étend au-devant du donjon , pour admirer une fois de plus le panorama des collines boisées qui entourent la pyramide rocheuse si magnifiquement couronnée. La terrasse occupe la place de l'ancienne salle clejus, tice et conserve encore à l'est la muraille percée de deux fenêtres géminées avec leur colonnette, leur tympan ajouré d'un quatrefeuille et leurs bancs de pierre. La façade méridionale du château se dresse au-dessus d'elle, montrant à gauche le fier donjon, à droite la tour d'angle sud-est, et, entre les deux, la conduite, en pierre saillante sur la muraille, amenant l'eau de pluie à la citerne défendue par un mur puissant en demi-cercle, muni de créneaux.
En redescendant par un rude sentier pierreux on atteint, à cent mètres environ au-dessous de la porte ogivale de la première enceinte, rappelant une porte analogue du château de Lordat, l'église du village, à chevet plat, appuyée sur de robustes contreforts que nécessitait la pente abrupte du terrain, tandis qu'à l'intérieur l'architecte semble s'être plu à montrer son habileté dans la légèreté des nervures des voûtes et la hardiesse de leur point de départ au-dessus d'une petite colonnette s'arrêtant à mi-hauteur sur un culot. Les fenêtres sont ajourées par des dalles dans lesquelles un quatrefeuille est percé. Une belle croix reliquaire avec filigranes d'un bon style du treizième siècle est conservée dans l'église.
Les inquisiteurs avaient ordonné la construction de l'église contre remise aux habitants des peines encourues pour leur révolte et leur adhésion à l'hérésie. Elle fut terminée en 1269. Bientôt après, un nouveau village s'étendit au sud du château; ses maisons arrivèrent même plus tard jusqu'à franchir les murs de la première enceinte. Le château avait en effet perdu toute importance militaire; aussi ne fut-il nullement modifié lors de l'apparition de l'artillerie.
On voit sur une petite place de cette partie du village une fontaine monolithe, avec colonnetles en saillie sur les angles, têtes assez grossières sur les huit panneaux, dont l'une est celle d'un évéque bénissant et la date MCCCLXV.
Après un déjeuner fort bien servi aux quatre-vingts excursionnistes dans le buffet de la gare deLexosetles toasts échangés entre les deux présidents, le cortège a repris sa marche, à pied ou en voiture, pour atteindre l'église de Varen, s'élevant à deux kilomètres, sur les bords de l'Aveyron. C'est la plus belle église romane du département de Tarn-et-Garonne. Elle présente trois nefs, celle du milieu voûtée en berceau où la pointe ogivale commence à poindre, contrebutée par celles des bas-côtés dont la voûte cintrée
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est presque à la même hauteur. C'est le mode des voûtes poitevines qui fut adopté aussi à Saint-Nazaire de Carcassonne. La particularité la plus curieuse do cette église est offerte sur son entrée, révélée aujourd'hui par les chapiteaux de l'ancienne porte qui s'ouvrait dans un mur plat à l'orient à la place habituelle de l'abside. Les exigences de la sécurité dans ces temps de luttes fréquentes et de surprises avaient imposé sans doute celte dérogation à l'usage universel. On ne pénétrait ainsi dans l'église qu'après avoir franchi la porte fortifiée du village, tandis que la façade occidentale,, où la nouvelle porte a été percée, se dressait comme aujourd'hui sur un chemin. Un mur avec trois longues baies en tiers-point a remplacé l'ancienne entrée.
Aux deux côtés de l'entrée, deux absidioles voûtées en cul de four terminent les deux bas-côtés. Le sol en est surélevé aujourd'hui au-dessus de l'ancien sur lequel on distingue encore l'autel en pierre, dans celle du midi, par une étroite fenêtre qui l'ajourait et servait aussi aux pèlerins pour vénérer les reliques de l'extérieur.
Les piliers de cette partie do l'église sont seuls munis de colonnes et de chapiteaux, ce qui peut faire supposer qu'elle était en effet un sanctuaire avec l'autel majeur plus en avant dans la grande nef que d'habitude. On distingue sur les chapiteaux, à travers le badigeon, les souvenirs des volutes ioniques avec des personnages grossièrement taillés et l'arbre sacré, le toth oriental, entre des animaux affrontés. L'art romain puisait à des sources multiples ses inspirations variées.
L'église était un prieuré de l'abbaye de Saint-Géraud d'Aurillac. Le cloître détruit s'étendait au midi de l'église. Une grande salle s'élève encore au levant et montre le large manteau d'une cheminée dont lo canon de forme ronde se termine au-dessus de la toiture par une mître ajourée de même forme.
M. le curé de Varen adonné, avec autant de compétence que d'amabilité, les détails sur l'histoire et la construction de son église et développé, dans une allocution de forme très littéraire, les liens qui unissent l'art chrétien aux vérités de la foi.
Les mâchecoulis et les tourelles en encorbellement du château attirent les objectifs des photographes, et au retour, un dernier enchantement est offert aux excursionnistes par les facettes des maisons de Cordes que dore le soleil tombant, pyramidant sur leur cône fier avec l'aigrette de leur clocher, au point de rappeler à quelques-uns l'aspect inoubliable et féerique du mont Saint-Michel.
Une belle journée de plus pour les deux Sociétés amies, unies, une fois encore, dans la joie des plus nobles sentiments de l'âme, la confraternité sympathique resserrant des liens chers, le respect du noble passé, l'admiration des oeuvres d'un art qui fut tantôt si puissant et tantôt si pur.
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Séance du 21 juin 1904. Présidence de M. J. OE LAHONDÈS.
M. E. CARTAILHAC appelle l'attention de la Société sur deux nouveaux cadres de dossins qui viennent enrichir la collection exposée dans la salle des séances.
L'un renferme plusieurs aquarelles de notre regretté confrère Mazzoli, l'auteur de l'ouvrage déjà rare : Toulouse disparu. Ce sont les originaux de deux vues de la porte de l'Inquisition et d'une vue inédile de l'îlot de Tounis devant la Dalbado, enfin il y a la porte Arnaud-Bernard, au crayon.
Une vue de la même porte, crayon de Virebent (?), se voit dans l'autre cadre. Toutes ces oeuvres appartenaient à notre regretté confrère Louis Lartet. Le second cadre contient •encore une vue du rempart, devant l'église de Saint-Pierre-des-Cuisines, par Soulié, don du docteur Bonneau, et une eau forte de Mazzoli, deux vieilles tours d'escalier de la rue Saint-Rome, don de M. Cartailhac.
M. Edouard FORESTIÉ, membre correspondant, présente un précieux manuscrit sur vélin, superbement enluminé, de la fin du quinzième siècle : c'est un bréviaire bénédictin de l'abbaye de Moissac, composé sans doute pour l'abbé Pierre de Carmaing, qui avait reconstruit l'abbaye. La ville de Moissac espère trouver une combinaison pour en acquérir la possession. Prix demandé : 15,000 francs. Ce manuscrit a, en dernier lieu, appartenu à Zola.
Le Bréviaire de Moissac.
Le bréviaire présente, au point de vue de sa confection, un intérêt particulier montrant comment les scribes et les enlumineurs procédaient. Plusieurs encadrements ne sont pas terminés, de même que certaines lettres initiales'; enfin il y a deux miniatures qui n'ont pas été exécutées ou ont été simplement silhouettées.
On voit par là que, non seulement le manuscrit était l'oeuvre de plusieurs personnes, mais qu'il était susceptible d'être ornementé pendant qu'on s'en servait.
En effet, il n'est pas douteux que Pierre de Carmaing ou ses successeurs ont usé de ce bréviaire, et que suivant leurs loisirs ou leur fantaisie les enlumineurs aient continué à l'orner.
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Cela a duré assez longtemps pour qu'on constate plusieurs mains dans les miniatures, et surtout dans les bordures.
Ainsi nous y trouvons toute une série de saints peints simplement comme de petits portraits avec une finesse de louche et une expression extraordinaire , mais sans mise en scène comme dans les miniatures plus grandes. Il y a là de petits chefs-d'oeuvre.
Dans les grandes miniatures, qui sont au nombre de cent onze, nous citerons les plus remarquables.
La série des prophètes et des patriarches : Isaïe, Osée, Jérémie, Job, Salomon, Tobie, lsaac, Moïse, etc., est remarquable par l'observation du type sémite et montre que ces figurations étaient traditionnelles à cette époque et qu'elles se conservèrent plus tard, puisqu'on les retrouve avec leurs mêmes costumes archaïques dans les statues du choeur do la cathédrale d'Albi et dans les vitraux célèbres de Sainte-Marie d'Auch.
La série du Nouveau Testament et des saints est d'autant plus curieuse qu'elle donne de précieux documents sur le costume du quatorzième et du quinzième siècle.
Par exemple, les bourreaux de saint Etienne portent des chausses de couleur différente, comme ce fut l'usage au quatorzième siècle, et les sybilles et les prophètes qui encadrent cette page sont vêtus dans le style du quinzième.
La scène du massacre des saints Innocents présonte la même particularité.
Le roi Hôrode est sur un trône d'or de style renaissance comme l'architecture de la salle.
L'adoration des bergers est un petit tableau charmant. L'enfant Jésus, porté sur les genoux de la Vierge, reçoit dans une boîte l'or que lui offre le mage qui, par respect, a déposé sa couronne; les autres, dont un nègre, attendent en tenant des vases d'or contenant l'encens et la myrrhe. Les figures ont une grande variété d'attitude.
Le Christ montrant ses plaies au sortir du tombeau est d'une conception originale. Il presse son côté droit et fait couler le sang. La tête de Jésus est remarquable d'expression.
Un très beau paysage entoure Dieu créant la terre ; c'est une des plus jolies miniatures.
Bien naïve celle de l'arche de Noé, dont la porte en ogive fleuronnôe laisse voir le patriarche et sa femme regardant si les eaux se retirent.
La Résurrection , le Cénacle , sont des compositions dénotant une main exercée et un sentiment exact du mouvement et de l'anatomic. L'Ascension offre un curieux exemple de l'ingéniosité naïve do l'enlumineur. Ne pouvant mettre la figure entière du Christ, il n'en a représenté que les pieds au haut du tableau.
Une délicieuse figure qui rappelle les madones des primitifs italiens est
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celle de Notre-Dame de Pitié : Noslro Damo de Consolacio ; c'est un tableau remarquable. A Moissac il y a une chapelle sous ce vocable dans laquelle on remarque un groupe sculpté et daté du quinzième siècle.
Puis viennent les psaumes. Et depuis le jeune David tuant Goliath, jusqu'à David chantant les psaumes de la pénitence , il y a six miniatures qui le représentent dans ses diverses attributions.
Plus loin, à côté d'une Trinité dans le style de l'époque, c'est-à-dire Dieu le Père tenant le Christ en croix surmonté de l'Esprit saint, on remarque dans la bordure un Cupidon voilé dont l'expression de tristesse est remarquable. C'est là une de ces étrangetés chères à la Renaissance.
La série des saints avec leurs attributs est aussi très curieuse. Nous y avons fait cette remarque que saint Pierre, patron de l'abbé pour lequel était fait le bréviaire, présente dans toutes les miniatures un type tellement identique que le peintre a dû avoir un modèle et que ce modèle pourrait bien être, suivant l'usage d'alors, Pierre de Carmaing lui-même. Du reste, au-dessous se trouvent souvent dans la bordure les armes de l'abbé. .
L'Annonciation fait songer à Fra Angelico, tant est suave l'expression de la figure do la sainte Vierge. Deux jolies scènes sont celles des fiançailles et eelle dans laquelle l'ange apprend à saint Joseph la maternité de Marie.
La Nativité de saint Jean-Baptiste est un véritable tableau d'intérieur très intéressant à cause des détails de costumes, de mobilier et des attitudes, qui montrent combien le miniaturiste connaissait son Ecriture sainte.
Au point de vue de l'hagiographie locale et méridionale, les offices et les miniatures se rapportant à saint Julien, à saint Géraud, saint Cyprien, saint Amans, fondateur du monastère de Moissac, et saint Sernin offrent un intérêt particulier.
L'apôtre toulousain est représenté avec une cuve baptismale, et dans la bordure son martyre est dessiné au milieu d'un paysage rappelant vaguement, dans le lointain, le donjon du Capitole, le Taur, Saint-Sernin et la Dalbade.
Le martyre de sainte Foy d'Agen est peint avec une naïveté charmante. Il en est autrement du miracle d'Abagarus, qui fut guéri de la lèpre par la vue du portrait de Jésus.
La Dédicace do l'église rappelle ou plutôt semble avoir servi de modèle à l'une des célèbres tapisseries de Montpezat.
- Lecture est donnée d'une note envoyée par M. l'abbé François MARSAN, curé de Saint-Lary (Hautes-Pyrénées), membre correspondant, et concernant deux épisodes de l'histoire du Parlement de Toulouse (8 juillet, 15 août 1761). Ces événements so.nt bien con-
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nus, et les textes retrouvés par M. Marsan précisent quelques menus détails. Ils seront classés dans nos archives, et M. l'abbé Marsan est remercié d'avoir songé à nous les communiquer.
Le T. C. F. protecteur des ruines archéologiques.
Lo Président du Touring-Club de France, M. Baillif, écrit pour demander à la Société do l'aider à dresser l'inventaire, la description sommaire des sites et beautés naturelles de la France, des ruines pittoresques. Son but est de les faire connaître des touristes, do les protéger contre les menaces de dégradation ou de destruction dont ils peuvent êtro l'objet; c'est servir utilement le goût des voyages, source nouvelle de prospérité pour notre pays.
M. Baillif précise qu'il entend parler « de curiosités archéologiques, de ruines pittoresques à l'exception de celles qui sont classées comme monument historique. » En réalité, ce sont les plus nombreuses : vestiges romains, débris de cirques, de villas ou de remparts, tours féodales, enceintes défensives, châteaux, ponts, églises, croix de carrefour, sont autant de monuments qui rentrent dans la catégorie dont le Touring-Club désire la conservation. Son oeuvro patriotique nous est donc particulièrement agréable, et nous devons y contribuer do notre mieux.
Le Touring-Club demande qu'une fiche soit établie pour chaque « curiosité archéologique » et porte lo nom des propriétaires, des indications sur les facilités d'accès, les améliorations désirables, les menaces de dégradation ou de destruction par suite d'installatious ou d'exploitations industrielles, de réclames commerciales, de travaux publics ou autres, etc., sur les mesures do préservation à prendre, la dépense approximative.
Des exemplaires d'un questionnaire ad hoc sont envoyés par le Touring-Club.
La Société archéologique du Midi répondra à l'appel qui lui est fait. Elle collaborera volontiers à ce travail do longue haleine. Peutêtre conviendrait-il de fédérer les sociétés, associations et syndicats d'initiative de la région pour unir leurs efforts, et aboutir méthodiquement et plus vite à dresser l'inventaire désiré et qui rendra de réels services. Celte question est mise à l'étude, et plus tard il en sera délibéré.
— 153 — M. J. DE LAHONDÈS lit la note suivante :
La plus ancienne poésie de la bibliothèque des Jeux Floraux.
Tous les manuscrits en langue romane de l'Académie des Jeux Floraux sont aujourd'hui publiés.
M. Gatien-Arnould fit imprimer, de 1841 à 1843, Las flors del gay Saber avec la traduction revue et complétée que MM. d'Escouloubre et d'Aguilar avaient commencée avant la Révolution et qu'ils terminèrent après le rétablissement de l'Académie.
C'est le traité des lois de la poésie composé d'après le mandat des sept fondateurs, par le chancelier Guillaume Molinier, de 1340 à 1356, année où il fut terminé, ainsi que l'indique l'Explicit.
Le second manuscrit, composé presque en même temps, mais qui ne fut toutefois achevé qu'après le premier, porte le nom de Lays d'amors. 11 traite les mêmes sujets, mais ouvre des vues d'ensemble plus vastes sur la rhôtorique et la philosophie, sur l'histoire de la fondation de la compagnie du Gai savoir, et semble avoir été destiné à l'usage particulier des mainteneurs pour leur tracer les règles à suivre dans le jugement des pièces qui leur étaient soumises.
Ecrit en superbes caractères, enluminé par de belles miniatures, il est le plus précieux de ceux que l'Académie a conservés.
Il a été publié, en partie seulement, d'abord par Lafaille dans le premier volume de ses Annales, puis par Dumège qui n'a donné, il est vrai, que la table des rubriques dans son édition de l'Histoire de Languedoc; enfin avec une grande étendue par M. Chabaneau dans une trentaine de pages du dixième volume de la nouvelle édition de la même histoire.
M. Chabaneau faisait espérer, lors de l'impression de ce volume, en 1885, qu'il donnerait une publication intégrale de cet important monument de la littérature provençale.
En 1849, M. Noulet publia, avec traduction et notes, Los Joyas del Gay Saber, manuscrit qui contient un grand nombre de pièces récompensées pendant le quinzième siècle par l'églantine, la violette ou le souci, et conservées dans le registre dit de Gaillac, parce qu'elles furent réunies par Guillaume de Gaillac de 1458 à 1484.
Enfin, MM. Noulet et Chabaneau ont complété l'oeuvre en publiant, en 1888, mais cette fois sans traduction, le registre dit de Raymond Cornet. 11 est ainsi appelé, parce qu'il parait avoir été composé pour réunir les pièces de ce poète. Mais il contient aussi les vers de quelques-uns de ses émules et d'autres même qui avaient été écrits avant la fondation doa sept troubadours, au printemps de 1323, dans le jardin des Augustines. — C'est le manuscrit le plus ancien que possède l'Académie.
BULL. 33, 1904. U
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Parmi ceux-ci se trouve un sirventes du père du poète, qui doit avoir été écrit peu de temps après la mort de Boniface VIII, c'est-à-dire vers 1305. C'est donc la plus ancienne poésie que conserve la bibliothèque des Jeux Floraux. C'est à ce titre que j'ai essayé de la traduire avec l'obligeant secours de M. Jeanroy pour quelques mots inquiétants, sans me dissimuler que si les traductions trahissent les textes, suivant le vieux dicton, elles trahissent surfout les vers. C'est que la pensée naît dans le cerveau avec le mot qui l'exprime. Elle n'a de réalité et de vio que par lui, elle n'existe que par lui. Que sera-ce lorsque l'harmonie et la sonorité des vers sont en jeu? Imaginez ceux de Racine transformés par la prose anglaise aigre et sifflante I
La composition en stances monorimes de huit alexandrins est une satire violente des moeurs de ce temps. Raymond Cornet suivit la même inspiration , avec plus d'apreté encore dans une longue pièce qui a été publiée dans nos Mémoires (1). Et c'est, il faut le dire, celle de son recueil qui, donnant du moins un tableau d'histoire, présente le plus d'intérêt pour nous au milieu de toutes celles qui, si elles sont animées parfois par une inspiration sincère, commencent aussi à tomber dans une poésie de convention , subtile et obscure, raffinée dans ses efforts de difficulté vaincue.
Les invectives du père de Raymond Cornet sont arrachées, comme on va le voir, à une âme droite que frappe douloureusement le mal moral dont elle est le témoin.
J'ai fait un sirventes, soupirant et pleurant, Qu'inspirent des motifs bien amers et cuisants. Je souffre et tous aussi; je les plains, et moi autant; Je vois l'erreur monter, et la foi descendant, 5 Et le mal qui s'accroit, dont j'ai le grand tourment; L'orgueil louche et cruel qui sans cesse s'étend. Par tout co siècle-ci que frère ni parent Ne peut se voir l'un l'autre si de son bien ne prend.
Voyez nos pasteurs qui devraient nous gouverner 10 Et la sainte clergio comme elle fait ses affaires.
Ils ont convoité le monde, et tous vous le savez;
Si l'on veut aujourd'hui élire ou choisir un évéque
Ou quelque autre prélat, ou donner une prébende,
Cela no se fait pas selon Dieu, mais vous les verrez s'armer 15 Et posséder par la force tout ce qu'ils pourront.
Aussi nous les voyons trop régner par simonie.
Puis, quand ils se sont intronisés sans justice, selon leur fantaisie, Ils lancent contestations et défis là où ils n'ont aucun droit.
(1) T. III, p. 33. M. Moquin-Tandon, qui l'a publiée, la croyait de Pierre Cardinal. MM. Noulet et Chabaneau la restituent à Raimond Cornet.
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Et les Ordres, l'un contre l'autre, se livrent aux mêmes luttes. 20 Ils n'avaient pas édicté de pareilles règles, saint Augustin, [déments.
Saint François, saint Dominiquo, et cela ne se fait pas sur leurs commanPar ces luttes nous perdons Acre par l'orgueil et les rivalités; Le Toulousain est en grand trouble, l'Albigeois en plus grand, Et nous, nous sommes dans la crainte. Dieu nous garde de mal !
ïb Les pasteurs temporels, seigneurs et barons,
Nous gardent comme loups qui gardent les moutons ;
Ils guerroyent l'un contre l'autre et suscitent des querelles
Pour prendre au peuple l'argent blanc ou roux,
Ils demandent des subsides le cinquantième et le don 30 Chevaux armés, sergents ; ils changent nos monnaies
Puis font la paix entre eux quand les petits sont écrasés,
Et Bordeaux est rendu ; voyez les dommages et les profits.
Sénéchaux et baillis sont les maîtres du pays ;
Ils violent les coutumes et les consulats petits; 35 Ils mettent tout sans dessus dessous, et des cailloux sur les chemins.
Pour de largent vous aurez des lettres à votre désir;
Tantôt en aura contre vous votre mortel ennemi;
Si un riche a commis un méfait, il s'en tirera avec sa bourse,
Et le pauvre sera pendu qu'il soit blond ou gris. 40 Ce n'est pas ainsi que nous régissait le bon roi saint Louis.
Nous avons d'autres pasteurs dans les consulats bons et commodes, Qui sont toujours consuls, eux ou leurs parents; L'un fait consul son frère ou son neveu, l'autre son cousin germain. Ils lèvent quêtes et tailles qu'ils gardent dans leurs mains. 45 Et Dieu sait comme ils chargent les médiocres pour décharger les riches, Comme ils pèlent le peuple, dont ils sont les gardiens; Et personne ne peut savoir si leurs comptes sont certains ; Mais il ne me semble pas, car ils sont trop secrets.
Et si quelqu'un a une affaire en leur conseil, 50 Ils opposent raisons et prétextos ; tantôt l'un répondra :
Aujourd'hui, nous ne pouvons, mais revenez demain.
Ils nous mèneront de mardi à jeudi, de vendredi à lundi,
Et devant eux vous ne serez pas plus avancés que coux qui attendent Artus,
Si vous ne leur mettez devant deux ou trois ou plus ; 55 Mais si vous êtes de leur bande ce sera vite conclu.
Ainsi de sauts en sauts nous mènent les consuls.
Si les pasteurs sont méchants, les disciples le sont davantage. Nous tuons et volons avec des paroles mortelles ; Nous nous subornons les uns les autres, et faisons du vrai lo faux. C0 Nous disons du mal des rois, nos seigneurs temporels, Et encore des évêques, nos seigneurs spirituels. On a dit que le pape Bonifaco fut hérétique ; Quelques petits avortons; ce ne sont pas de loyaux fils. Cela a paru à la sépulture que lui ont faite les cardinaux.
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65 Jamais vous ne trouverez parmi vous si vous m'avez prêté quelque chose
Qu'il ne soit nécessaire d'avoir le billet si vous voulez le recouvrer.
Et après la sentence encore m'appellerez-vous ;
De même je vous enlèverai à mon gré pour toujours.
Vous trouverez sur terre grand nombre de petites gens 70 Qui plaident contre les consuls, et ce n'est pas bien.
Ils fabriquent ruses et usures, mensonges et mauvaise foi;
Et tant d'autres maux régnent, que je ne pourrais en dire la millième partie.
Mais prions Jésus-Christ, celui qui annonça la paix,
Qu'il nous la donne bientôt, qu'il nous guérisse par l'épreuve, que les croisés 75 Partent pour le Saint-Sépulcre, que des méchants payens Nous recouvrions la Terre Sainte, et que Dieu soit honoré.
ENVOI.
Beau miroir clair et pur, j'ai fait ainsi mon sirventes.
Que lo Saint-Père, les évéques et le noble roi français,
Et tous les souverains, et tous les sujets
Deviennent tous meilleurs, car autrement le meilleur n'en vaut rien.
Le texte littéral du dernier hémistiche semblerait dire : un millier n'en vaut pas trois. Cette subtilité ne serait pas pour étonner, mais on peut supposer cependant une légère altération de lettres et rétablir le sens que nous donnons, qui semble d'ailleurs indiqué parla répétition voulue du mot meilleur.
Quelques notes éclairciront les allusions du poète aux calamités de son temps :
19. Et les ordres. — Les frères mineurs s'unissaient aux habitants des villes qui se plaignaient des inquisiteurs frères prêcheurs. Bernard Délicieux venait d'exciter, en 1304, les habitants de Carcassonne et de Limoux à livrer leur ville à l'infant de Majorque. Dans le sein même de l'ordre de Saint-François, quelques moines avaient adopté les doctrines de Jean d'Olive prêchant un mysticisme exalté, et avaient organisé la secte des béguins, plus tard appelés fratricelles.
22. Acre. — Saint-Jean-d'Acre avait été repris par les Sarrasins en 1271. Mais les chrétiens ne perdaient pas de vue les événements et les destinées de la Terre Sainte et n'abandonnaient pas la pensée d'une nouvelle croisade pour reconquérir Jérusalem.
23. Le Toulousain. — La province venait d'être troublée profondément par la lutte de Philippe le Bel contre Boniface VIII, dont l'évêque de Pamiers, Bernard Saisset, avait ardemment soutenu la cause. Les habitants de Toulouse s'étaient aussi révoltés contre les excès de sévérité des inquisiteurs; les habitants de Carcassonne les avaient chassés, et ceux d'Albi de même en s'insurgeant contre leur évoque, Bernard de Castanet.
24. Et nous. — Les Rouergats pris entre les Français et les Anglais,
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Saint-Antonin, patrie du poète, appartenait au roi de France. Les familles mêmes étaient divisées. Raymond Cornet s'était attaché aux Anglais, mais son père était demeuré fidèle au roi Philippe.
27. Ils guerroient. — La guerre éclatait entre les comtes de Foix et d'Armagnac. Le roi vint dans la province pour tâcher de l'arrêter et aussi pour apaiser les difficultés entre les communautés et les inquisiteurs. Il séjourna à Toulouse du 8 décembre 1303 au 2 janvier 1304 (n. st.) et revint passer à Toulouse la journée du 23 janvier.
29. — Le roi ne cessait de demander des subsides pour la guerre de Flandre, qui fut comme le prologue du grand drame des guerres anglaises. Il avait établi, en mars 1303, un impôt à lever dans tout le royaume du cinquième de tous les revenus et du vingtième de la valeur des meubles. Dans les premiers jours du printemps de 1305, il imposa la nouvelle taxe du cinquantième des revenus. La sirvente ne peut donc dater au plus tôt que de l'été de 1305.
30. Sergents. — Le roi avait demandé, en outre, au commencement de l'année 130-4, aux communautés du royaume de fournir un sergent pour là guerre de Flandre par chaque centaine de feux, ou de payer 20 livres tournois ou 10 livres toulousaines par chaque sergent. Dans le courant de mars, les communautés du Languedoc s'engagèrent, mais presque toutes préférèrent s',exonérer en argent. :
Monnaies. — On sait que le roi changeait la valeur des monnaies. Il venait d'être obligé, en avril 1304, de promettre que les monnaies seraient rétablies sur le pied qu'elles avaient du temps du roi saint Louis et défaire fabriquer des pièces de bon aloi qui auraient cours dans un an.
32. Bordeaux. — Bordeaux, en effet, avait été repris en 1303; et le roi Edouard d'Angleterre avait ressaisi toutes ses possessions d'Aquitaine.
40. Saint Louis. — Vers touchant. Le souvenir de saint Louis, d'ailleurs très récent alors , s'est conservé toujours dans le coeur reconnaissant du peuple; le saint roi avait été bon et pitoyable pour les petits et avait organisé les métiers.
43. Frères et cousins germains. — Les abus de cette nature commençaient déjà; ils augmentèrent et s'aggravèrent dans les siècles suivants. Un édit du Parlement de Toulouse, du 25 février 1546, défendit aux consuls de Pamiers d'élire et de mettre en leurs places leurs parents jusqu'au quatrième degré.
53. Artus. — Il était passé en proverbe que ceux qui espéraient toujours sans jamais voir rien venir, ressemblaient à ceux qui attendaient le retour d'Artus.
62. Boniface. — Le roi avait assemblé au Louvre, le 17 juin 1303, les Etats généraux du royaume, qui demandèrent la convocation d'un concile pour déposer le pape contre lequel furent portés yingt-neuf chefs d'accusa-
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lion et surtout celui d'hérésie. Il obtint sept cents adhésions demandées aux seigneurs, aux évêques, aux communautés. L'assemblée des trois états, tenue à Montpellier, en juillet, envoya aussi son adhésion.
77. Beau-Miroir. — Les troubadours donnaient volontiers des noms symboliques aux personnages, surtout aux dames qu'ils chantaient et à qui ils adressaient leurs vers.
78. Saint-Père. — Clément V, élu le 5 juin 1305, ou Benoit XI, mort le 6 juillet 1304. Boniface VIII était mort le 11 octobre 1303.
Le registre qui suit celui de Gaillac, appelé le Livre Rouge, mentionne ou cite les poésies couronnées de 1513 à 1584. Il ne contient que des vers français et mentionne seulement au début, sans les citer, quelques pièces encore en langue romane. Dès le second quart du seizième siècle on ne parlait donc plus que français à la Compagnie du Gai-Savoir. Déjà, d'ailleurs, dès 1471, elle avait accordé la violette aux vers français de Bérenger de l'Hôpital. Ainsi tombent à faux les invectives des félibres contre Simon de Laloubère, qui aurait, disent-ils, fait perdre sa nationalité et sa langue à la création des troubadours en la faisant ériger par le roi en Académie par les lettres patentes de 1694.
L'archivaire pseudo-Renaissance de l'Académie contient encore un manuscrit en langue romane, celui qui fut mystérieusement déposé un soir de février 1810, comme venant de Saint-Savin, sur la table des séances. Mais celui-là ne sera jamais publié et pour cause. Notre collègue, M. Roschach, en a détaillé la piquante histoire dans les Varialions du roman de dame Clémence.
Séance du 28 juin 1904.
Présidence de M. J. OE LAHONDÈS.
Dans la correspondance, le Secrétaire signale en premier lieu une lettré de M. le MINISTRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE ET DES CULTES qui, sur la demande de M. de Lastoyrie, membre de la Commission des monuments historiques, accorde à la Société archéologique une somme de mille francs à titre de subvention , pour l'aider à faire l'acquisition de l'ensemble formé par les édifices de Cordes menacés de destruction.
Le Ministre se réserve do saisir la Commission des monuments historiques d'une proposition de classement de la porte de la Jane et des deux tours, au moment où la Société en sera devenue régulièrement propriétaire.
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Cette lettre, qui émane de la Direction des Beaux-Arts, provoque la reprise des discussions concernant la voie la meilleure à suivre pour protéger les monuments de Cordes. La Société persiste à penser que la Société des amis de Cordes est en mesure d'agir mieux qu'elle. Le Président écrira au Ministère pour exposer la situation et obtenir que la somme allouée soit remise directement ou par notre entremise, à M. Portai, archiviste du Tarn , vice-président de la Société des amis de Cordes, et notre délégué.
Le Président exprimera au Ministre et au Directeur des BeauxArts la gratitude de la Société.
M. Portai a envoyé quelques exemplaires du règlement de la nouvelle société Les Amis du Vieux Cordes, qui sont distribués aux membres présents.
Lecture est donnée d'une lettre de M. le chanoine F. Pottier, président de la Société archéologique du Tarn-ot-Garonne, invitant à prendre part à une solennité qui aura lieu lo 3 octobre, à SaintNicolas-de-la-Grave, pour la pose d'une plaque en l'honneur d'Antoine Laumet de la Mothe Cadillac, fondateur de la ville de Détroit (Canada), juillet 1701.
Concours de l'année. — Rapports et décisions.
La Commission du concours de 1904 fait la lecture des rapports. La discussion est ouverte sur ses propositions. Les résultats suivants sont proclamés :
Prix Ourgaud(200 fr.). — Décerné à M. Adrien ESCUDIER, maire de Fronton, pour son Histoire de Fronton.
Médaille de vermeil. — A M. MULLOT, président de la Société d'études scientifiques de l'Aude : Voyage de Castelnaudary au château de Marquein.
Médailles de bronze. — A M. Jules CHALANDE, à Toulouse: Numismatique languedocienne, période carolingienne; — A M. X... (L'auteur ne s'est point encore fait connaître) : Coutume de Cadeillan (Gers); — A M. LAURENS : Coutume d'Arligue (Haute-Garonne); — A M. l'abbé BAICHÈRE : Ancien musée lapidaire de Carcassonne ; — A M. L. JERY : Monographie de la commune de Revel.
M. PLASSARD est chargé de faire le rapport général qui sera lu dans la séance publique en décembre.
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M. DEPEYRE, membre résidant, offre à la Société une excellente photographie du porche de l'hôtel de Sevin, rue Ninau, 15.
C'est une des plus élégantes créations de la renaissance à Toulouse. L'hôtel construit vers 1535, selon Joseph de Malafosse, pour Pantaléon Jaulbert, président au Parlement de 1528 à 1547, montre ses sévères façades de briques relevées seulement par des cadres de fenêtres fort sobres et par ce porche abritant le perron avec la porte aux côtés de laquelle on voit oncore les cornets de tôle posés pour l'extinction des torches. Au-devant se dressent encore les montoirs qui aidaient à monter à cheval à l'époque où on n'usait guère d'autre mode de locomotion (figure ci-contre).
Les proportions de cet édicule sont, comme on le voit, d'une justesse très étudiée, et les détails des chapiteaux ioniques d'une finesse — comme aussi d'une fantaisie exquises. La renaissance classique prenait déjà possession de l'art monumental à Toulouse. L'escalier, le premier peut-être disposé en rampes droites, est couvert encore du premier au second étage par une voûte à nervures gothiques.
L'escalier à rampes droites de l'Hôtel de pierre, commencé seulement en 1537 par Nicolas^ Bachelier, est très probablement postérieur de trois ou quatre ans.
Les porches devant les portes des maisons particulières sont assez rares pendant le moyen âge et à la renaissance, à cause de l'étroitesse des rues. Les cours intérieures étaient d'ordinaire elles-mêmes assez resserrées, et les abris que l'on y trouve le plus souvent sont les portiques qui joignaient les deux corps de logis. Quand on voulait abriter une porte de la pluie ou du soleil, on se contentait d'un auvent.
Séance du 5 juillet 1904.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. PASQUIER présente le rapport sur la candidature de M. Eugène Martin-Chabot, sorti premier récemment de l'Ecole des Chartes , et membre de l'Ecole française de Rome, au titre de membre correspondant. M. Martin-Chabot est élu.
M. DELOUME , trésorier, donne lecture du rapport sur l'état des finances de la Société. Il l'engage à la prudence afin de pouvoir publier décemment le Bulletin et les Mémoires.
= m -=
FIG 7. — PORCHE ET MONTOIRS DANS LA COUR D'UN HÔTEL DE TOULOUSE, RUE NLNAU, 15, CONSTRUIT VERS 155$.
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La commission des finances, rapporteur M. DELORME, approuve les comptes du trésorier, auquel la Société vote des remerciements.
M. LE PRÉSIDENT communique une lettre de M. l'abbé du Bernet, curé de Saint-Julien-du-Boissnguel (Lot-et-Garonne), qui avertit de la présence, au château de Pôrussac, de deux manuscrits des archives de Saint-Sernin. Le premier, coté n° XI, serait une histoire de l'abbaye ; mais après un examen du catalogue de Cresty, il semble que cette histoire, mentionnée en effet sous la cote XI, ne serait, selon le résumé du catalogue, que la nomenclature des cérémonies, services solennels, processions, sermons en usage dans l'abbaye.
Le second manuscrit, relié en basane, commele premier, contient les pièces concernant un conflit élevé entre les chanoines et l'abbé.
M. le Président lit ensuite une lettre do M. Adrien Lavergne demandant l'avis de la Société sur une statue do là Vierge conservée dans la chapelle de Tudet (Lot-et-Garonne) dont il envoie la photographie. Au risque d'enlever des illusions au chapelain , les membres présents reconnaissent dans cette Vierge une oeuvro de la fin du seizième siècle, sinon même du commencement du siècle suivant.
Enfin M: le Président présente, avec une lettre do M. l'abbé Baichère, la photographie d'une inscription du treizième siècle (fig. 8) et une vingtaine d'empreintes de sceaux envoyées par notre zélé correspondant.
L'inscription tumulaire du franciscain Jacques de Pomars, mort en 1319, vient d'être retrouvée contre le mur extérieur du sanctuaire de l'église des Cordeliers de Carcassonne, actuellement en démolition, côté de l'épitre. L'église des Cordeliers n'a été construite qu'en 1613, mais elle fut un agrandissement de la chapelle des Clarisses qui, après avoir habité leur couvent depuis le commencement du quatorzième siècle, le quittèrent en 1477, fuyant la peste, pour aller s'établir à Azille. Des Pères cordeliers résidaient parfois dans le couvent au centre de la ville basse, et une chapelle à côté du sanctuaire, précisément sur le point où l'inscription a été trouvée, était réservée aux sépultures de la maison, comme le dit un manuscrit des archives de l'Aude. Après la destruction de leur couvent pendant les guerres religieuses, les cordeliers en construisirent un nouveau sur l'emplacement de l'ancien couvent des Clarisses. La belle maison gothique, ancienne maison Grassalis, aujourd'hui
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démolie et dont le Bulletin a donné le dessin (10 juillet 1894), en faisait partie.
Les Pomars étaient connus à Carcassonne dès le treizième siècle (Mahul, V, p. 569), Arnaud de Pomars était archiprêtro <Ju chapitre oh 1320 (Id., p. 564). Us étaient probablement originaires ou seigneurs du village de Pomars, entre Carcassonne et Limoux.
L'inscription, en beaux caractères, est accompagnée d'un blason
avec un arbre fruitier, armes parlantes, et d'une croix qui semble indiquer que Jacques de Pomars était prieur de son couvent.
La Revue archéologique (1904, 1, p. 14-91) contient un article dé M. l'abbé HERMET, Les Graffltes de la Graufesenque (Aveyron), qui mérite une mention spéciale. Notre correspondant; au cours des fouilles que la Société connaît (voir ci-dessus, p. 86), a remarqué cinq graffltes écrits à la pointe sèche, et après cuisson, sur des fonds do plats à vernis rouge. On en avait déjà signalé deux (Mém. Soc. des lettres, Aveyron, XIII, 1886). M. Hermet étudie ces sept docu->
FIG. 8. — INSCRIPTION TUMULAIRE D'UN FRANCISCAIN, 1)19.
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menls avec beaucoup do soin et d'ingéniosité. Ce sont en général des comptes de potiers portant sur plusieurs colonnes, généralement trois, les noms plus ou moins abrégés des artisans, des abréviations désignant les formes des vases, le nombre des vases fabriqués. Il est souvent malaisé de découvrir si les sigles désignent un nom d'homme ou un type de céramique. On peut croire, à la manière dont ils sont nommés, que les potiers étaient de condition servile et non libre. Certaines signatures doubles paraissent désigner des affranchis; mais on a supposé aussi que ces noms doubles indiquaient une association de potiers plutôt qu'une relation de maître à esclave ou de patron à affranchi.
Ces graffltes peuvent fournir, mais indirectement, leur date approximative. M. Hermet arrive à la fixer de l'an 37 à 79 de notre ère.
Enfin l'usage et les formes des vases mentionnés sont déterminables. Quinze formes différentes sont indiquées, quoique assez vaguement : 1. CATINOS, 2. SENARIOS, 3. ROSTRATOS, 4. NANOS,
5. PANNAAS, 6. SEXTIALIS, 7. BISSEXTIALIS, 8. ACÉTABULA, 9. CANNAS, 10. VINARIA, 11. TARICHOS, 12. MORTARUS , 13. BOLETAR, 14. CATILLI,
15. PARADISI. Les uns (2, 6, 7) éveillent l'idée de capacité; les autres (8, 10, 9, 11, 13, 12) indiquent la destination des vases, pour le vinaigre, le vin, l'huile, le poisson salé, les champignons, ou enfin des mortiers. M. l'abbé Hermet paraît renoncer à préciser la forme de ces quinze vases, à nous en donner l'image. Il compare les graffltes de la Graufesenque à celui de l'atelier céramique de Montans (Tarn), publié par Lacroix, Rev. Arch., 1887. Il y a identité de méthode et d'aspect. M. l'abbé Hermet termine en examinant l'orthographe de quelques noms. Il se pourrait qu'on ait quelquefois écrit Lovisos et Cosoivs pour Lvcivs ou LVCCE, et Cosivs.
La même livraison de la Revue Archéologique annonce, par un magistral article de M. Salomon Reinach, le grand ouvrage de J. DECHELETTE, Les Vases céramiques ornés de la Gaule romaine, Narbonnaise, Aquitaine et Lyonnaise, 1904. Deux volumes in-4°, illustrés de plus de 1700 dessins et de nombreuses planches.
M. Emile CARTAILHAC, à propos de la fondation à Paris de la Société des fouilles archéologiques (voir ci-dessus, p. 129) à laquelle notre Compagnie s'est affiliée et dont le succès paraît dès maintenant assuré, donne lecture de la lettre suivante qu'il avait reçue en
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1878 de notre regretté confrère et secrétaire général Albert Lebègue qui venait d'arriver à Toulouse peu après son séjour à l'Ecole française d'Athènes et ses fouilles à Délos, et inaugurait avec éclat le cours d'antiquités à notre Faculté. Avec son grand amour de l'archéologie et son enthousiasme juvénile, Lebègue propose de fonder une société libre pour faire des fouilles en différents pays. C'est justement ce qu'on vient de réaliser à Paris vingt-six ans plus tard. La publication de cette lettre remarquable fera honneur à la mémoire d'Albort Lebègue et sera pour ses amis l'occasion de rappeler que c'est à lui que l'on doit d'avoir vu recommencer les fouilles et les découvertes sensationnelles à Martres-Tolosane.
Lettre d'Albert LEBÈGUE sur l'utilité d'une Société libre des fouilles
archéologiques.
« Le moment serait peut-être venu de fonder une Société libre pour faire des fouilles en différents pays. Comme mes occupations ne me laissent guère de loisirs, je voudrais vous faire part de mes idées et les livrer à votre initiative. A vous reviendrait le mérite d'organiser une oeuvre que je crois fort utile, mais qui n'est pas facile à créer. Vous auriez besoin de toute votre expérience, de tout votre dévouement, et aussi de toutes vos relations.
» Vous savez quelles précieuses découvertes on fait tous les jours en Orient; il suffit qu'une fouille soit bien conçue et qu'on y puisse dépenser quelque argent pour qu'elle amène les plus beaux résultats.
» Ne parlons que de la Grèce et de l'Asie-Mineure. Les Autrichiens ont découvert à Samothrace des sanctuaires de la plus haute antiquité. Les Prussiens sont à Olympie ; chacun de leurs bulletins mentionne une nouvelle découverte. Je ne sais pas si M. Schliemann a découvert Troie, il est certain qu'il a déblayé une ville fort ancienne et trouvé un trésor. A Mycènes, il a fouillé des sépultures d'une époque primitive, et des tombes royales. Mais pourquoi vous raconter ce que vous savez et vous parler de Delphes, de Délos, de Dodone, de Milet et de Didymes, et des superbes trésors de Chypre? La science vit aujourd'hui de toutes ces découvertes. Comme l'histoire de la civilisation humaine est à refaire, au moins à compléter, on attend avec impatience les documents inédits que l'archéologie fournit tous les jours. Les idées générales ont fait trêve en quelque sorte. Quand les renseignements dont elles ont besoin auront été exhumés avec les documents qui les portent, de grands systèmes, appuyés sur des faits incontestables, se feront jour de nouveau. 11 est fort important que l'huma-
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nitô recueille ses archives le plus vite possible pour continuer ensuite à écrire son histoire.
» Cette nécessité n'échappe à personne. Cependant, ces fouilles qui intéressent assez de monde pour être mentionnées même à la quatrième page des journaux frivoles, ne sont entreprises que par quelques missions, quelques sociétés, quelques riches particuliers, bien rares. Il existe en Grèce une société, la Société archéologique d'Athènes, aux trois quarts grecque, protégée par son gouvernement, chargée à la fois de faire des fouilles et de conserver les antiquités ; elle n'a pas assez de ramifications en Europe pour être bien riche ; elle ne fait par an qu'une fouille sérieuse. Nous trouvons en outre des missions payées chacune par son gouvernement. Elles sont temporaires. L'Ecole française d'Athènes fait des fouilles, mais elle a bien d'autres occupations, et son budget est restreint.
» Cependant en Grèce, en Asie-Mineure, on trouve, dans des pays sains, presque à la surface du sol, des ruines très faciles à déblayer, de la plus grande importance, et que le temps ou les habitants détruisent tous les jours. Les marbres du grand temple de Tégée servent à paver une route. 11 serait facile de sauver les débris qui restent. On trouverait peut-être des chefs-d'oeuvre de l'art. A Epidaurc, le plus beau théâtre grec qui ait jamais élé construit, est envahi par los broussailles. Près du théâtre s'élevait le fameux temple. Rien de plus facile que de le déblayer, et cette fouille serait d'un succès certain : on a découvert à Athènes un autre temple d'Esculape, moins célèbre, et qui pourtant recelait un vrai trésor épigraphique. A Délos, il y a encore bien des fouilles à faire, et très faciles : les emplacements des temples sont dessinés sur le sol. Ces ruines, que ne couvre aucune maison moderne, coûteraient peu à déblayer. Pour fouiller Delphes et Eleusis, il faut au contraire de fortes sommes, mais on est sûr de revenir les mains pleines de découvertes. Aucune de ces fouilles n'est dangereuse. — Et que n'aurais-je pas à dire sur l'Asie-Mineure et sur. l'Afrique, où des villes entières comme Cyrène, comme Patare, situées sur le bord de la mer, sont à peine explorées. Ces ruines se détruisent, et chaque année perdue cause à la science un dommage irréparable.
» Notre patriotisme est intéressé à ces travaux. Un pays qui Tait une fouille s'en occupe avec passion : de là un double profit, pour la science en général et pour le pays qui s'instruit en la faisant avancer. Nos voisins le savent, et pour nous vaincre dans cette libre concurrence, ils ont beaucoup de bonne volonté et de grandes ressources. Vous verrez bientôt ce que l'Angleterre fera avec l'île de Chypre, si riche en anciens monuments.
» Essayons de maintenir en Orient au moins notre influence scientifique, et de nous faire estimer par des travaux désintéressés.
» A cet effet, vous pourriez fonder une société. Chaque ami de la science paierait selon ses moyens (on pourrait fixer un minimum de 10 francs).
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Le caractère de cette Société serait d'être composé d'un nombre indéterminé de personnes, d'être indépendante, de no pas sortir de sa mission spéciale qui serait de faire des fouilles et de les publier. Elle deviendrait l'alliôe fidèle des sociétés déjà constituées en province et demanderait l'aide de tous les corps savants. Par exemple, si un érudit chargé d'une mission par l'Etat, si un membre de l'Institut ou de l'Ecole d'Athènes trouvait une fouille à exécuter, la Société pourrait, après délibération prise, lui en fournir les moyens. Elle demanderait des conseils à l'Institut, à la Commission des voyages et missions scientifiques, elle se ferait protéger à l'Etranger, par nos ambassadeurs et nos consuls.
» Pour les sommes à verser, vous feriez passer une liste de souscription, mais on ne verserait que le jour où les offrandes dépasseraient 20,000 francs. Au-dessous de ce chifire, il est inutile de constituer la Société. Avec ce chiffre on ne ferait qu'une fouille, de préférence en Orient et en Grèce, puisque c'est là que s'éveillent surtout les concurrences étrangères. Plus tard, si on s'enrichissait, on ferait plusieurs fouilles à la fois dans des pays divers. Vous verriez avec vos adhérents comment le bureau devrait être constitué, et quels seraient les règlements. En cas de succès, on proposerait la fonction de trésorier à quelque banquier ami des études archéologiques.
» Si mon idée vous paraît viable, je vous l'abandonne complètement; je vous aiderai de tout mon pouvoir; mais je n'aurai pas le temps de prendre une part active à cette organisation difficile. »
M. Emile CARTAILHAC, après la lecture de cette lettre, expose pour quels motifs elle n'eut pas de suite. Il ne parut pas possible de lancer l'affaire à Toulouse. On n'aurait jamais eu le concours nécessaire des autres régions, et surtout de Paris. Quelques avis sollicités en haut lieu et donnés avec bienveillance, comme toujours, le firent nettement comprendre. La province est condamnée, par des habitudes invétérées, à ne pas prendre d'initiatives de ce genre, ni bien d'autres.
Le souvenir des insuccès de M. de Caumont consacrant en vain sa vie, sa dévorante activité, sa belle fortune, ses grandes relations mondaines à doter la province d'institutions analogues à celle que Lebègue souhaitait est une leçon décourageante. Aujourd'hui comme en 1878, l'ambition de nos Sociétés départementales, de la nôtre en particulier, doit rester modérée. Nous sommes trop isolés et délaissés à côté des Universités de jour en jour plus puissantes, mais absorbées par le soin de leurs propres intérêts, pour tenter de faire aboutir des oeuvres d'une telle envergure.
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M. Emile CARTAILHAC dit quelques mots sur l'organisation des Musées de Toulouse dont il est l'un des administrateurs. Les commissions administratives, que le maire préside assidûment, ont bien voulu entrer dans ses vues et lui laisser une grande liberté pour installer l'archéologie préhistorique et préromaine suivant le plan qu'il a formé. Seulement, comme il est seul pour accomplir la besogne matérielle, le travail réclamera encore de longs mois.
Les deux musées étant municipaux , ne doivent pas se faire concurrence. Les collections y seront classées de façon à former une suite unique et méthodique. Le Musée d'histoire naturelle a dû se limiter à l'âge de la pierre; il a cédé au Musée Saint-Raymond tout ce qu'il avait de l'âge du bronze et des époques subséquentes. Les catalogues sommaires des deux établissements paraîtront en 1905 et se feront également suite.
Ici et là les antiquités régionales ont été mises à la meilleure-place. Ce sont elles qui ont pour nous la plus grande valeur et que le visiteur sérieux vient étudier. Les autres séries les accompagnent au second rang, mais se présentent aussi en ordre chronologique, de sorte que l'enseignement s'en dégage à première vue.
Des étiquettes explicatives sont multipliées autant que possible, manuscrites d'abord, elles seront bientôt imprimées; des cartes géographiques, des séries spéciales de dessins et de photographie ont pris place à côté des objets dont le nombre n'a cessé de grandir.
M. LE PRÉSIDENT nomme les membres de la Commission des vacances, MM. Candelon, Delorme, L. Deloume, Pasquier, Tachard, et invite les sociétaires qui se trouveront à Toulouse à se réunir le mardi soir de chaque semaine.
Il donne rendez-vous à tous ses collègues au dernier mardi de novembre.
ANNÉE ACADÉMIQUE 1904-1905
Séance de rentrée du 29 novembre 1904. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. LE PRÉSIDENT souhaite la bienvenue de retour à ses collègues. Il est assuré d'avance que les séances de l'année qui s'ouvre seront aussi fructueusement remplies que celles de l'année écoulée. Les quatre mois de vacances, qui sont des mois de travail pour les archéologues, puisque ce sont ceux, où ils examinent les monuments inconnus ou méconnus, auront fourni les éléments d'observations, de mémoires et de photographies dont bénéficieront les soirées des mardis.
Mais à ce mot de vacances, notre âme se heurte aussitôt à une immense douleur. A peine étaient-elles commencées, que nous apprenions la mort rapide de notre collègue M. Brissaud. L'érudit professeur de la Faculté de droit était un des hommes les plus éminents de notre ville. Il joignait à un savoir très étendu le don de le présenter sous une forme séduisante, et il écrivait avec une plume incisive où l'élégance s'alliait à la précision et à la profondeur de la pensée. Il manifesta ces qualités dans le rapport qu'il nous donna sur le concours de 1900. Lorsque, malgré ses nombreuses et graves occupations, il venait assister à nos séances, c'était surtout pour nous entretenir des sujets qui formaient le fond de ses études : l'histoire de nos institutions anciennes par lesquelles il se rattachait à l'archéologie. Et lorsqu'il parlait, — vous vous rappelez avec quelle bonne grâce et quelle simplicité ! — il semblait s'excuser de prendre la parole. La modestie n'accompagne-t-elle pas, en effet, souvent le plus haut mérite ?
A ces qualités M. Brissaud en joignait une autre bien précieuse BULL. 34, 1905. 12
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pour nous. Il se plaisait à diriger quelques-uns de ses élèves les mieux doués vers l'étude de nos antiquités communales qui les attirait vers nous, surtout en ne séparant pas les fortes constitutions de nos vieilles villes provinciales de leur art original et fécond. Les concours de la Société ont bénéficié souvent de cette impulsion du savant professeur.
M. Brissaud aimait les jeunes gens ; les plus studieux devenaient ses amis. La bienveillance n'était-elle pas le fond de son caractère? Nous n'oublierons jamais les heures trop rares qu'il nous donnait, l'aménité de son sourire et la clarté de son regard qui reflétait une si vive intelligence. Il est enlevé au moment où sa carrière, déjà si honorablement remplie, allait prendre son plein développement, puisqu'il disparaît à un âge qui paraît presque la jeunesse à plusieurs d'entre nous.
Nous offrons à Mme Brissaud et à ses jeunes fils, qui ont le malheur de perdre leur si digne père au moment où sa direction leur était le plus tutélaire, avec l'expression de nos regrets, celle de nos profondes condoléances.
Ce n'est pas la mort mais la maladie qui éloigne de nous M. Bauzon. Notre collègue avait éprouvé la plus grande douleur qui puisse frapper le coeur de l'homme : la perte de deux jeunes filles enlevées dans la pleine grâce de leur adolescence. Une exaltation de chagrin lui était restée de celte épreuve. Il tâchait de la calmer par l'étude et la constance au travail, ces deux grandes consolatrices, mais un deuil de famille et les cérémonies funèbres auxquelles il a dû assister cet été, à Dijon, ont renouvelé cruellement son affliction et gravement altéré sa santé.
11 s'était plu à se réunir tous les mardis à des collègues qui avaient apprécié bien vite ses qualités aimables et son goût pour l'art français. Il ne manquait pas surtout de célébrer, comme certes il le mérite, celui de sa chère Bourgogne. Son assiduité était la marque de l'union cordiale qui s'était établie entre lui et nous. Il avait même voulu prendre quelques-uns de ses moments, cependant si remplis par ses occupations au petit Lycée, pour mettre de l'ordre dans nos archives.
Nous prions Mme Bauzon de lui exprimer nos regrets, et nous partageons son affliction ainsi que celle de sa fille, l'aimable et vaillante compagne de nos excursions archéologiques.
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La mort ni la maladie ne sont heureusement pour rien dans une autre séparation que je dois vous annoncer. M. Chauvin, qui était l'imprimeur de la Société depuis plus d'un demi-siècle, se décide à prendre un repos bien gagné et ferme sa maison. Nous savons tous, et les divers secrétaires qui se sont succédé savent surtout l'accueil empressé que nous trouvions chez lui, le soin qu'il prenait à présenter dignement nos publications, les préférées de son imprimerie, sa complaisance aussi dans le service délicat des corrections.
Nous tenons à coeur de lui témoigner notre reconnaissance au moment toujours pénible où se rompt une si longue alliance qui, personnellement pour celui qui vous parle, date déjà de plus de vingt-cinq ans.
Vous devinez tous vers quelle maison nous nous dirigeons aussitôt. M. Privât est le père du jeune collègue que nous avons accueilli dès sa sortie de l'Ecole des Chartes. Il est l'ami de la plupart d'entre nous; il a aussi édité plusieurs de leurs oeuvres, après la publication superbe de l'Histoire de Languedoc. Nous entrons sans cesse dans le hall de la rue des Arts, devenu un musée, et nous y entrerions plus souvent encore sans la crainte d'être indiscrets, si encourageante que soit la façon avec laquelle nous sommes reçus.
La maison est d'ailleurs une des plus importantes de la province. C'est l'Hachette du Midi, et nous ne saurions mieux abriter les intérêts et le bon renom de la Société.
Le SECRÉTAIRE GÉNÉRAL présente la correspondance, toujours considérable, arrivée pendant les vacances. Il signale en particulier le beau volume publié par la Société nationale des Antiquaires de France à l'occasion de son centenaire, 1804-1904.
M. CARTAILHAC lit la note suivante :
Tombe romaine place Saint-Sernin.
On construit une maison place Saint-Sernin, devant le jardin du musée Saint-Raymond. Les fouilles avaient été poussées jusqu'à 3m60 de profondeur, lorsqu'on trouva un crâne humain qui attira l'attention d'un ouvrier intelligent. L'entrepreneur eut la bonne idée de faire aussitôt arrêter le travail sur ce point où apparaissaient aussi des briques posées de champ. L'architecte, M. Rocher, notre confrère de la Société archéologique, voulut bien m'appeler et je reconnus à. première vue un
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tombeau d'un type fréquent dans notre Midi toulousain, mais dont malheureusement aucun spécimen n'a été jusqu'ici conservé.
Il fallait l'exhumer et cela était difficile. On étaya le terrain, on pratiqua un tunnel surbaissé et finalement on put enlever la plus grande partie du squelette et, l'une après l'autre, toutes les briques à rebord formant le long sarcophage. Le tombeau pourra être reconstitué au Musée, auquel Mme de Lagarrigue, propriétaire, a bien voulu l'offrir.
Il résulte des observations que le sol habité était alors à 2"| 140 au-dessous du niveau de la place. On avait donc mis la tombe à lm20 de profondeur. Elle n'est pas isolée. Elle écrasait un squelette et aux environs étaient d'autres débris humains. Il y avait donc là un cimetière, ce qui ne surprend pas, puisque à quelques mètres passait la voie romaine dont la rue du Taur suit le tracé.
La tombe est faite avec les briques à rebord qui sont romaines, mais qui ont été assez longtemps en usage; elles ne paraissent pas cependant descendre jusqu'à la période carlovingienne. Il est possible que la tombe soit des environs du, quatrième siècle. Aucun objet ne permet une plus grande précision. L'absence des quatre briques formant la couverture laisse croire "à une violation du tombeau à une époque très reculée.
M. Emile CARTAILHAC donne les renseignements qui suivent, et présente des dessins que l'on trouvera sur la planche ci-jointe (pi. I).
Fouilles du temple de Vénus, à Vendres (Hérault), par H. F. Houret.
Au sud de Béziers est un village appelé Vendres, placé sur les pentes d'une légère colline, à 20 et 30 mètres à peine au-dessus du niveau de la mer. Les plus basses maisons sont sur la rive d'un étang assez vaste qui communique avec la mer, c'est l'étang de Vendres. La carte de l'état-major, au 80 millième, indique au sommet de cette nappe d'eau un petit îlot et y signale les « ruines du temple de Vénus ».
Il y a longtemps que cette mention avait frappé ma curiosité et, dès 1868, lors de mes premières promenades dans la montagne de la Glape, entre Narbonne et la mer, avec mon ami regretté Tpumal, le fondateur du riche musée de Narbonne, j'avais fait le projet de visiter la localité et d'y pratiquer des fouilles.
Tous les ports fréquentés autrefois par les navigateurs étaient sans aucun doute encombrés de prêtresses de Vénus, et bon nombre en ont gardé un nom caractéristique; nous avons ici le village de Vendres, c'est-à-dire de Vénus ; plus bas, sur la côte, dans une situation
SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE DU MIDI
BULLETIN' 1904 - S •
Fouilles du temple de Vénus à Vendres jHérault ,par M. F. Mouret.
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maritime plus favorable, est Port-Vendres, et ce ne sont pas les seuls.
On ne sait rien d'ailleurs sur les origines et l'histoire ancienne du, village en question. Le nom du village, peut-être une vague tradition, tels sont les seuls motifs sur lesquels le géographe s'est appuyé pour appeler « temple de Vénus » les ruines visibles de l'Ilot.
Un propriétaire du voisinage immédiat, M. Félix Mouret, qui s'est
vivement intéressé aux antiquités romaines et du moyen-âge qu'offrent
. ses beaux domaines et ceux de son frère, au Nègre et à Savoye, voulut
bien se charger d'interroger les ruines elles-mêmes et essayer de leur
arracher quelques-uns de leurs secrets.
Ses premières fouilles lui procurèrent des accès de fièvre, ce qui n'était pas encourageant. Quelques mois se passèrent; il oublia ses ennuis, et il fit, en 1904, poursuivre les recherches. Les eaux étant très basses cette année, il put même exécuter des tranchées dans le lit du marais alors à sec sur ces bords. Il a bien voulu m'appeler pour examiner ses trouvailles.
Le résultat d'un travail long et pénible n'est pas merveilleux. Il ne réalise certainement pas nos espérances; néanmoins, on a des faits très bons à noter, à défaut de découvertes sensationnelles.
M. Mouret compte poursuivre ses fouilles; mais, dès à présent, on constate que l'îlot était couvert de constructions. Le croquis sommaire (fig. i) que nous avons pu lever montre qu'il s'agit d'un édifice à subdivisions inégales, souvent petites. Les murailles sont généralement solides et élevées avec de bons matériaux. On comprend que les habitants du village voisin ont pu, durant des siècles, s'approvisionner là de pierres toutes taillées. Ils continuent et les fondations mises à découvert par M. Mouret ont déjà attiré leur attention.
En certains points abondaient les cubes des mosaïques qui ont dû recouvrir le sol et peut-être même les parois des salles. Il y avait deux qualités de mosaïques : l'une fine, en émail bleu d'azur; l'autre de pierres grises.
On a recueilli dans les déblais quelques gros clous, pattes ou fiches, une sorte de couteau en bronze ou cuivre (fig. 2 à S), et de rares fragments de poterie rouge vernissée, qui revient à la fabrique de la Graufesenque (Aveyron). Un tesson offrant une signature courante en relief, signature du moule, par conséquent, a £té soumise à M. Déchelette, qui l'a déchiffrée et la trouve intéressante. Cette poterie nous donne une indication chronologique : le premier siècle. Elle ne suffit pas à dater les constructions. Ni statuettes, ni monnaies n'ont été trouvées. M. Mouret pouvait s'attendre à rencontrer aux abords de l'île des amas de débris jelés à l'eau, et parmi eux quelques objets intéressants; jusqu'ici,
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cet espoir ne s'est pas réalisé. En tous cas, M. Mouret a rendu service à nos études et mérite nos remerciements bien vifs.
M. CARTAILHAC dit que pendant les vacances il a pu se rendre à Milhau (Aveyron), sur l'invitation de notre correspondant M. l'abbé Hermet, qui poursuit ses fouilles patientes et fructueuses à la Graufesenque. Les découvertes de cette année sont très intéressantes.
M l'abbé Hermet, d'autre part, se préoccupe toujours de la recherche, autour de Saint-Sernin (Aveyron), des statues menhirs, aujourd'hui nombreuses (£5) et déjà célèbres. Il a découvert deux nouveaux exemplaires dont l'un, notamment, devrait venir à Toulouse à côté de la statue menhir que M. l'abbé Hermet a bien voulu déjà nous accorder. Des démarches seront faites pour obtenir cette cession. Nous aurions ainsi les deux types de ces monuments si curieux.
Séance du 6 décembre 1904. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. le Dr CANDELON offre à la Société une série de cartes postales du département du Gers, et M. Emile CARTAILHAC une série de l'Aude, de Narbonne principalement. Le PRÉSIDENT exprime le voeu que ces exemples soient suivis, et que tous les membres et amis de la Société contribuent à enrichir ses albums spéciaux. Grâce aux cartes postales, quantité de monuments inédits ont été photographiés et publiés. Le nombre de ces documents est énorme, et il convient d'en recueillir et d'en classer le plus possible, car peut-être la mode de ce genre de publication qui est venue assez brusquement disparaîtra de même. On constate déjà que les monuments et sites sont noyés dans le flot des cartes fantaisistes et sans valeur, plutôt déplorables. Le budget de la Société, bien que très faible, permettra cependant l'achat de quelques centaines.
M. Raymond PONTNAU , membre correspondant, qui assiste à la séance, donne des renseignements sur les actes relativement heureux de la Société des Amis du vieux Cordes. M. Portai, archiviste du Tarn, se propose de publier bientôt une note sur l'acquisition et la restauration de la porte de la Jane.
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M. Louis DELOUME fait la communication suivante :
Un menu de Capitouls au dix-huitième siècle.
Au mois de janvier 1876, M. Victor Fons, ancien magistrat, notre regretté et distingué confrère, comme il a été distingué et regretté dans toutes les compagnies dont il a fait partie, fit à la docte Académie'des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse une lecture qui fut fort appréciée. Il l'intitula Buvettes et festins des Capitouls de Toulouse.
Il profita de son passage aux Archives du Capitole, auxquelles il fut attaché du 7 septembre 1872 au 30 septembre 1877, pour faire des recherches sur les habitudes intimes de messieurs les Capitouls.
Il fut frappé de leur passion pour banqueter aux frais de la ville et de l'empressement qu'ils mettaient à profiter de toutes les occasions de satisfaire leur alléchante habitude.
Non seulement il existait, comme chez nos députés d'aujourd'hui, une buvette à peu près permanente où, s'il se consommait peu de bière, il se faisait une grande dépense de limonades, orgeat, gâteaux, dragées, chocolat, bavaroises, ratafias, et surtout de topètes de sirop de capillaire, mais, ce qui scandalise le plus M. Fons, on s'administrait une quantité de grands repas ou festins, d'abord à des époques fixes, comme pour les élections des nouveaux capitouls, le 30 janvier jour de la fête de saint Sébastien et saint Fabien, patrons de l'Université, le 17 mai jour de la procession commémorative de la délivrance de la ville en 1562, le jour de la Pentecôte pour la fête des reliques, celui de la Fête-Dieu, le 1er avril et le 3 mai à l'occasion des jeux floraux avec cadeaux de veaux de lait (ceux-ci cessèrent en 1694, quand le corps des Jeux Floraux fut érigé en académie par Louis XIV). Et, en outre, ils profitaient de toutes les occasions de quelque nature qu'elles fussent pour renouveler leurs agapes.
Il y avait des repas où les nouveaux Capitouls, par réciprocité, étaient tenus, suivant une fort ancienne coutume, de donner à chacun des anciens Capitouls une grande corbeille pour emporter sa portion de dessert qui consistait en perdrix en plume, fromage de Roquefort, biscuits, macarons, pièces de guise, tartes sucrées, confitures, poires, prunes, jusqu'à des pièces dé four, des perdrix rôties, des levrauts et même des chapons.
J'ai va pour ma part, dans ma jeunesse, des restes bien réduits "de cette habitude d'emporter les soldes du dessert. Cela se passait au moulin du Bazacle, qui a conservé plus longtemps qu'aucun autre établissement les vieilles traditions*, aux repas que prenaient les régents en guise
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d'honoraires pour les soins d'administration qu'ils fournissaient gratuitement. A la fin du dtner, un très vieux serviteur que je crois voir encore, appelé Louiset, remettait à chacun des convives une grande feuille de fort papier où ils enfermaient ce qui pouvait leur convenir de ce qui n'avait pas été consommé.
Chose curieuse, les grands festins officiels des Capitouls étaient annoncés au son des cloches par le carillonneur de l'église du Taur, car ils avaient lieu à l'Hôtel de ville où une cuisine était installée. M. Fons ne fut pas le premier à se scandaliser des abus de victuailles faits par les Capitouls. Il raconte que le Parlement s'en émut et rendit, le 4 décembre 1663, un arrêt par lequel il fit inhibitions et défenses aux Capitouls d'employer en leurs festins une somme supérieure à 600 livres pour quelque prétexte que ce fût, à peine de 500 livres d'amende et la confiscation des viandes qui excéderaient cette somme de 600 livres au profit de l'hôpital Saint-Jacques.
Après 1741 on ne trouve plus aux Archives, paraît-il, des dépenses exagérées comme précédemment. Mais M. Fons constate que l'habitude des festins a duré jusqu'à la Révolution, et se demande à l'aide de quels expédients MM. les Capitouls arrivaient à en payer la dépense.
M. Fons n'a donné copie d'aucun des menus des repas des Capitouls; mais le hasard a mis entre mes mains la preuve que les festins n'avaient point cessé, tout au moins avant 1774.
J'ai trouvé chez une de mes parentes, dont un ancêtre a été Capitoul au dix-huitième siècle, le projet de menu du festin officiel de la SaintFabien Saint-Sébastien du 30 janvier 1774.
J'ai pensé que vous pourriez trouver intéressant d'en prendre connaissance. Vous y verrez que les fortes têtes du Capitule devaient avoir de solides estomacs.
Suit la copie du menu à la cote : Menu du repas de SaintFabien, 1774.
Pour une table de 36 couverts. 1 cartié pour la paine.
6 potages :
2 a la purée verte, 2 de santé, 2 à la Cressy.
6 relevés :
2 deindes à la Perigeux,
2 pâtés chauts de lapin ou autres,
2 vole levant de foi gras s'il s'en trouve ou jambon à la broche.
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16 entrées :
2 nois de veau glacé,
2 de perdreaux à Lespagnole,
2 de cuisses de lapereaux piqués aux truffes
1 de palais de boeuf à Lespagnolle,
1 des emences à la Béchamel,
2 cotte de boeuf,
1 de fillets de canards à la nivoirnoise, 2 de petits pâtés, 1 de croquettes mellées, 1 des oreilles d'agneau au soleil, 8 plats des huîtres. Second service :
1 jambon pour la paine,
2 pâtés froids diferants,
2 homelettes à la Noailles,
2 tourtus,
2 gâteaux d'amandes. 8 plats roty :
2 de bécasses,
2 de vaneaux ou pluviés,
2 de perdreaux,
2 de volaille ou de veau. 12 entremets chauts :
2 de begnés diferants,
2 de gâteaux souflés,
2 de truffes la Hache,
2 de chouffleurs sauce tournés,
2 de truffes en ragoût,
2 des épinards à la crème,
4 sallades. Decert :
12 compotes diferantes.
4 assiettes pommes rainettes,
4 assiettes poires,
4 assiettes goffres,
4 assiettes pralines,
2 assiettes fromage,
2 assiettes macarons,
2 assiettes tourons,
2 assiettes marrons,
4 assiettes bisquits.
(En marge) Il sera ajouté une grosse pièce de boeuf tremblante avec coulis et une cuisse de veau rôtie avec son saussicon dessus. Vu pour être exécuté au consistoire le 17 janvier 1774. Mellis capitoul signé.
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M. Emmanuel DELORME donne ensuite lecture d'une lettre du cardinal Maury qui fait partie de sa collection :
Lettre du cardinal Maury.
« Paris, 9 janvier 1811. « Monsieur Jamme, recteur de l'Académie impériale, à Toulouse. « C'est un pâté métropolitain, mon cher confrère, que vous avez eu la bonté de m'envoyer. Je n'en ai jamais vu de si beau, et je n'en ai jamais mangé de meilleur. Il ne manque à son triomphe ou plutôt au mien que le bonheur de vous compter au nombre des convives dont il excite l'admiration au plus haut degré. C'est par mes regrets que je me plais à vous exprimer ainsi tous mes remerciements. Quand aurai-je donc le bonheur de vous revoir à Paris? Vous y serez reçu à bras ouverts, vous et tout ce qui vous appartient. Je désire que vous ayez été content de l'adresse présentée par le Chapitre de Paris à l'Empereur. En la rédigeant, j'ai voulu éclairer et fixer l'opinion sur ce point de droit ecclésiastique. Le succès en est complet. L'ignorance et le fanatisme n'ont rien à répondre à celte exposition des fails et des principes. Une poignée de factieux sans instruction et sans talents en a rendu la publication nécessaire et en fait une rude pénitence dans les prisons d'État. C'étoit un grand vicaire de Paris, nommé Dastros, qui était à leur tête et qui maneuvroit à Paris avec ses correspondants à Savone. Je suis très-content de la réponse que vous avez reçue de M. le comte de La Cépèdë. Il est très-malheureux pour vous d'appartenir à un corps, et de ne pouvoir marcher qu'en escadre. Votre affaire seroit finie depuis longtemps si vous étiez isolé au lieu d'attendre le tour de vos nombreux collègues. Bon jour, bon an, je me flatte que vous n'attendrez guère, et que l'Université ne tardera pas de recevoir son contingent. La naissance du Prince impérial doit terminer ces délais à la fin du mois prochain. Je vous aime et vous embrasse, mon cher confrère, du meilleur de mon coeur. — Le Card. MAURY. »
M. BARLUÈRE-FLAVY expose l'examen qu'il a pu faire des Archives de M. de Breltes-Thurin. Il y a trouvé des documents inédits et précieux, par exemple des lettres d'Henri IV.
M. DE LAHONDÈS entretient ses collègues d'une importante question :
Les récents travaux à Saint-Étienne de Toulouse.
En attendant l'emploi des fonds de la loterie et ce qu'il est convenu d'appeler l'achèvement de la cathédrale, la Direction des cultes vient
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d'envoyer quelques milliers do francs pour des réparations 1 .urgentes à la toiture et aux balustrades, et pour le dégagement des 'contreforts. >
Ceux du chevet ont été délivrés des logettes qui s'étaient casées entre eux et ont repris ainsi leurs lignes architecturales, leur direction ascen^; sionnelle et leurs profils. Il conviendra maintenant de les entourer d'une grille circulaire permettant de pénétrer autour d'eux, et de ne pas se contenter de petites grilles dressées d'un contrefort à l'autre.
On conserve toutefois, du moins encore, celles qui longent la rue des Cloches, voûtées avec art et ayant pu jadis servir au culte. On a même reconstruit l'ancienne arrière-chapelle du Sépulcre qui, elle, était récente, pour ouvrir une entrée latérale à la sacristie. Non seulement cette entrée directe sera plus commode pour les ecclésiastiques, mais elle évitera le passage par l'église aux personnes qui n'ont affaire qu'avec la sacristie et qui, parfois, n'avaient guère plus de respect pour la vénérable nef que pour un vestibule.
On aurait pu conserver de même Pédicule construit contre le chevet de la chapelle Saint-Joseph. Il ne gênait nullement, puisqu'il était pris sur la cour Sainte-Anne, et il aurait pu être utilisé pour une chapelle capitulaire qu'on sera obligé de construire bientôt à grands frais. C'est la conséquence des singulières dispositions qui régissent le service des MU fices diocésains, confiés à des architectes habitant Paris, qui les voient à peine quelques heures par an, entre deux trains, comme le disait l'abbé Barthez dans le spirituel Monument historique.
Cette élégante construction était d'ailleurs digne de respect, com'me le montre son histoire.
C'était une chapelle funéraire, construite, vers 1612, par Hugues de Rudelle, conseiller au Parlement. Elle vint occuper, sans doute, une dépendance de l'ancienne sacristie qui s'ouvrait, suivant la coutume, près du choeur, sur la galerie orientale du cloître disparu, où -elle était suivie par la salle capitulaire et souvent par une chapelle particulière, comme on peut le voir encore à Toulouse au cloître des Jacobins et à celui des Augustins. '
Cette sacristie était devenue inutile depuis que le cardinal d'Orléans avait fait construire la grande sacristie terminée en 1527 sur le côté opposé de l'abside.
La chapelle des Rudelle était couverte par une voûte dont les moulures, gothiques encore au premier aspect, étaient absolument semblables à celles de la voûte du choeur et de cette sorte de transept qui joint le choeur à la vieille nef, voûte construite par Levés ville en 1611.
Il est donc probable que Levesville donna aussi le plan de la chapelle.
Il ne faut pas, en effet, se fixer pour la dater sur les trilobés percés dans.
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une dalle qui surmontaient les fenêtres simplement carrées. Ils n'étaient que rapportés et venaient d'ailleurs.
Hugues de Rudelle et Marie Daffis, soeur de Jean Daffis, prévôt de Saint-Étienne et évéque de Lombez, eurent trois fils et une fille,
L'un des fils, Jean de Rudelle, chanoine théologal de Saint-Étienne, recteur de l'église paroissiale Saint-Nicolas, vicaire général de Louis de Nogaret de Lavalelte, archevêque de Toulouse, fut, aux débuts de cette dernière charge, mal accueilli par le chapitre, qui ne voulait pas reconnaître ses pouvoirs parce que l'archevêque n'était pas encore sacré. Les chanoines poussèrent la résistance jusqu'à refuser d'assister à la collation que l'archevêque offrait, selon l'usage, bien qu'il fût absent encore, la veille de Saint-Jean, dans la maison de la prévôté, pour ne pas admettre l'autorité du vicaire général 1.
Jean de Rudelle était un prêtre austère, d'un caractère très feime, qui prescrivait des règlements sévères dans les églises qu'il visitait. Sa part fut importante dans le relèvement de foi et d'oeuvres qui remplit à Toulouse, comme partout en France, la première moitié du dix-septième siècle.
Il mourut le 6 octobre 1621, à l'âge de quarante-quatre ans. Dès le 28 juin 1614, il avait écrit son testament dans la maison rectorale de Saint-Nicolas 2. Il demandait à être enseveli « au sépulcre que mon très honoré père a faict bastir en l'église Saint-Estienne », faisait son père héritier, distribuait des legs à ses frères Guillaume et Jean-Étienne, le premier avocat au Parlement, le second chanoine de Saint-Sernin, à sa soeur Jeanne, veuve de l'avocat au Parlement de Védelly, aux chanoines Toupignon, Boyer, Védelly, à diverses maisons religieuses de Toulouse, et partageait sa riche bibliothèque entre les Jésuites, les Dominicains, les Augustins, les Minimes, les Récollets, les Clarisses et les Feuillantines de Saint-Cyprien.
Il fonda un obit à perpétuité dans l'église Saint-Étienne, avec messe haute dans le choeur et Libéra sur le lieu de sa sépulture, et l'inscription apposée au-dessus de la porte du choeur et de la porte de la chapelle sépulcrale : Fais ce que tu voudras avoir fait quand tu mourras. Il voulut encore que cette sentence, à laquelle il attachait un. grand prix et qu'il écrivit dès la première ligne de son testament, fût fixée à son cercueil le jour de son enterrement et apposée sur le mur de la chapelle funéraire vis-à-vis la pierre du sépulcre.
1. Archives de la Haute-Garonne, fonds de Saint-Etienne. Délibérations du chapitre, registre 146; délibérations des années 1618, 1619.
2. Archives notariales du Parlement. Eegistre du notaire Brassac, 1621 (2). f" 177 et suiv.
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Et, en effet, pendant la démolition de la chapelle, on a ouvert le caveau dans lequel on a trouvé les ossements dispersés de six squelettes et une plaque de marbre noir dont on à pu recueillir les morceaux qui ont donné l'inscription :
JOANNES DE RVDELLE
HVIVS ECCLESI.E CANONICVS
THEOLOGVS & ARCHIEPISCOPATVS
TOLOSANI VICARIVS GENERALIS
HOC SIBI ET POSTERIS PIETATIS
MONVMENTVM TESTAMENTO
RELIQ.UIT
FAIS CE Q.VE TV VOVDRAS AVOIR FAICT Q.VAND TV MOVRRAS
OBIIT PRID NON OCTOB ANNO MDCXXI .ETATIS SViE XLIIII
Hoc monumentum s'applique à la sentence et non à la chapelle.
Guillaume de Rudelle, devenu président aux enquêtes, écrivant son testament le 10 décembre 1642, dans sa maison « située près de l'église Saint-Barthélémy, confrontant avec la Trésorerie et maison du roy », demandait à être enseveli dans la chapelle que son père avait fait bâtir à l'entour du choeur de l'église Saint-Étienne.
Le tombeau avait été déjà ouvert. Presque tous les tombeaux ont été violés, depuis ceux des Pharaons et depuis les dolmens, par les révolutions, par l'instinctive curiosité qui nous pousse à poursuivre le troublant mystère de la mort, surtout par la cupidité.
Les ossements ont été recueillis, mis dans un cercueil et déposés dans le caveau de la chapelle Saint-Joseph, si voisin de celui des Rudelle. On a trouvé aussi dans ce caveau les ossements dispersés de plusieurs corps. C'était de même une sépulture familiale, et parmi les rares objets qui y avaient été laissés par ceux qui l'avaient ouverte une première fois se trouvaient un chapelet et un dé à coudre. Les ossements ont été réunis dans un autre cercueil.
Le caveau de la chapelle Saint-Joseph avait été entaillé dans un massif de briques qui s'étendait au-dessous des chapelles du rond-point et supportait les piles et les contreforts. Il montre le soin et les précautions de solidité que prenaient les architectes gothiques pour assurer la durée de leurs monuments.
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Séance du 13 décembre 1904. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. A. FERRÉ, membre correspondant à Martres-Tolosane, en réponse à une lettre du Président, écrit que divers journaux ont annoncé à tort la vente probable des colonnes antiques qui sont placées dans la chapelle de Saint-Vidian. Il s'agit de celles qui se trouvent au fond de l'église, qui proviennent d'un ancien rétable et n'ont pas d'intérêt pour nous. M. Ferré exprime son vif regret de n'avoir pas été secondé par la ville de Toulouse pour la formation d'un musée de moulages à Martres-Tolosane. Des promesses pourtant avaient été faites. Le désintéressement et le zèle des habitants de Martres pour favoriser la réunion au Musée de Toulouse de toutes les antiquités méritait plus d'égards.
Le Secrétaire général annonce une candidature au titre de membre correspondant.
Deux places de membre résidant ayant été déclarées vacantes, le fait ayant été publié et des candidatures s'étant produites, le PRÉSIDENT désigne MM. Pasquier, Massip et Lécrivain, puis MM. Batiffol, Antonin Deloume et Maria pour former les Commissions chargées de faire les rapports.
M. Emile CARTAILLAC présente en ces termes le superbe ouvrage en deux volumes grand in-8° que M. Joseph Déchelette vient de publier :
Les Vases céramiques ornés de la Gaule romaine 1.
Il a été souvent question ici des travaux entrepris avec tant de succès par deux de nos confrères, M. Élie Rossignol et M. l'abbé Hermet, pour rechercher les vestiges si intéressants de deux grands ateliers de céramique gallo-romaine à Montans (Tarn) et à Millau (Aveyron), et pour les interpréter. A plusieurs époques et dans diverses contrées maints auteurs ont étudié ces vases rouges, ces poteries sigillées 2, si
1. Paris, 1904, I, 808 p., 152 fig., XV pi.; — II, 380 p., 1185 + 12 + 155 + 165 fig., XIV pi.
2. Pline nous a laissé rémunération des fabriques de vases les plus renom-
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abondamment représentés dans les collections publiques et privées.
On avait compris depuis longtemps l'intérêt scientifique que présente leur étude, on avait enregistré leurs innombrables estampilles dans les Instrumenta dômestica du Corpus latin; mais la plus grande partie de ces curieux produits d'une élégante industrie restait inédite. L'étude détaillée de la technique et de l'ornementation des vases était encore à faire.
M. Déchelette a été entraîné peu à peu à remplir complètement ces lacunes de notre archéologie nationale. Neveu du savant historien de Bibracte, associé à ses recherches méthodiques, M. Déchelette joint à une érudition solide une connaissance exceptionnelle des musées. Sa fortune lui a permis les longs voyages et ses relations lui ont fourni de sérieux avantages. La science en a profité. Ses publications depuis dix ans ont rapidement conquis l'estime, et la Revue archéologique, l'Anthropologie comptent en lui un collaborateur de premier ordre '»
Il se proposait d'abord uniquement de décrire l'importante collection de céramique gallo-romaine qu'un habitant de Lezoux, le Dr Plicque, avait réunie; mais pour y parvenir, il fut amené à entreprendre l'étude d'ensemble des vases ornés fabriqués dans trois provinces de la Gaule, c'est-à-dire dans une région où l'industrie céramique a été particulièrement florissante et féconde. 11 eut enfin assez de matériaux pour établir un système de classification chronologique et géographique.
Les textes étaient silencieux sur le commerce d'exportation des vases rutènes et arvernes dans les péninsules ibériques, italiques et même au delà des frontières de l'empire. M. Déchelette put néanmoins mettre le fait en lumière, en reconstituer l'histoire, en fixer la date approximative, déterminer l'étendue de la clientèle de nos ateliers. Sans doute, de louables efforts avaient été faits pour établir la chronologie des vases sigillés; on cite surtout la Terra sigillata de M. Hans Dragendorff. M. Déchelette a complété les premiers résultats acquis. De sorte que maintenant les moindres fragments de poterie gallo-romaine aideront à préciser la date des stations où leur rôle est analogue à celui que remplissent les « fossiles directeurs » dans les stratifications géologiques. En outre, grâce à la variété de leur ornementation, ils constituent pour l'histoire de l'art antique une source précieuse d'informations. Emprunté à des modèles hellénistiques, leur décor nous aide à connaître ce que
mes de son temps. En première ligne, il cite la poterie de Samos comme excellente pour la vaisselle de table. C'est en souvenir de ce passage du célèbre écrivain que l'on avait donné le nom de poterie samienne à ces produits de terre rouge que l'on a mieux appelés terra sigillata, vases sigillés.
1. Il a publié, en outre, avec M. Eleuthère Brassart, un grand et superbe volume sur les peintures murales du Moyen-âge et de la Renaissance en Forez.
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l'on pourrait appeler la période gauloise de l'art classique. Toute l'industrie de cette période est éclairée par les renseignements ainsi dévoilés.
Dans son introduction, M. Déchelette résume avec des faits nouveaux ce que l'on sait des origines de la céramique gallo-romaine, et en particulier des vases d'Arezzo, à'Arretium, dont les ateliers étaient particulièrement célèbres.
Lés potiers de la Grèce, malgré leurs efforts constants pour améliorer leurs produits et perfectionner ou varier leur technique, n'avaient pas réussi à garder le monopole de leur industrie. Des ateliers nouveaux s'établirent dans quelques-uns des principaux centres d'exportation. La clientèle des ateliers attiques fut accaparée par les manufactures de la grande Grèce et de la Campanie à la fin du quatrième siècle avant J.-C.
De là, l'industrie se répandit dans la péninsule au troisième siècle; les vases en terre rouge étrusco-campaniens perlaient une couverte noire. Il en est de même pour les plus anciens vases arrétins qui succèdent aux précédents. Les vases sigillés paraissent à Arrezzo, en Toscane, au deuxième siècle; la période de prospérité des ateliers se place au siècle suivant. Les produits portent des signatures apposées dans le moule à l'aide d'un timbre. Elles sont donc en relief sur la panse du vase et le nom abrégé de l'ouvrier est souvent accompagné des lettres initiales du nom du maître et même du prénom. La forme de ces petits cartels est variée et fournit des indications chronologiques. Les vases se recommandent par le soin apporté à l'exécution, finesse de la pâte, homogénéité du vernis. La confection du moule était particulièrement habile. Le potier devait tout d'abord se pourvoir d'un riche assortiment de poinçons matrices, modelés dans l'argile, oeuvre d'artistes exercés. Appliqués sur la paroi intérieure du moule avant cuisson, ils y laissaient une empreinte en creux. Le moule achevé était soumis à une cuisson assez élevée pour que la pâte en fût très absorbante. On évitait ainsi l'adhérence de l'argile contre ses parois. Les vases soumis à une première dessication avant cuisson éprouvaient un retrait qui permettait de les retirer aisément du négatif. En conséquence, pas de moules d'assemblage en plusieurs pièces, comme pour la fabrication des figurines. Avant d'être portés au four, les vases recevaient sur le tour leurs parties complémentaires, c'est-à-dire le pied et les lèvres.
Leur pâte est d'une nuance orangée un peu jaunâtre et leur vernis d'un beau rouge, corallin ou capucine, homogène, bien adhérent et formant une épidémie d'une extrême ténuité, n'ayant pas l'éclat brillant et l'aspect vitreux des vases rutènes.
Les poinçons matrices sont faits d'après des modèles hellénistiques de très beau style, et ils sont admirables pendant le premier siècle
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avant notre ère. Par la pureté du dessin, le fini et la souplesse du modelé, les poteries arrétines rivalisent avec la belle vaisselle métallique.
Les vases unis d'Arezzo ont été importés en Gaule par quantités considérables, comme le démontrent les relevés de signatures publiés dans le Corpus; mais on n'a retrouvé au nord des Alpes qu'un petit nombre de vases ornés. La fragilité de ces poteries, en forme de calice, en rendait le transport difficile. Eh outre, la clientèle gauloise, tant qu'elle, ne fut pas pénétrée par la civilisation romaine, ne pouvait que s'intéresser médiocrement à cette céramique dont les motifs d'ornementation étaient empruntés souvent à des scènes de la mythologie gréco-romaine qui ne lui était pas familière.
M. Déchelette, après avoir précisé les caractères différentiels de la céramique gallo-romaine et de la céramique d'Arezzo, énuïnère et figure les spécimens de celle-ci trouvés en Gaule.
Outre les vases rouges d'Arezzo, l'Italie importait en Gaule, à l'époque d'Auguste, d'assez nombreux spécimens de poterie ornée, qui .n'ont encore été l'objet d'aucune étude d'ensemble. Ce sont les prototypes d'une céramique gallo-romaine. M. Déchelette les classe et les fait connaître.
Ce sont les habitations de l'oppidum de Bibracte, qu'il connaît si bien, qui ont livré les plus nombreux spécimens de ce genre; mais on en connaît d'autres, jusqu'en Artois d'un côté, en Pannonie de l'autre. La haute Italie parait être le point de départ de ces gobelets et autres modèles, généralement de pâte blanche ou de couleur claire. - La Gaule romanisée se mit à fabriquer des pièces semblables, particulièrement à Saint-Remy-en-Rollat (Allier), localité située à 7 kilomètres de Vichy. Les fouilles récentes de MM. Déchelette et Bertrand, conservateur du Musée de Moulins, ont multiplié les informations. Cet atelier fut en activité assez peu de temps; il livrait au commerce ses produits en une sorte de terre de pipe fine, d'un blanc terne tirant sur le jaune clair, assez fragile : des déesses mères ou Vénus Anadyomènes, semblables à celles d'autres officines de la région de l'Allier, et bien connues ; d'autres pièces encore, des médaillons, puis des vases unis ou ornés dont le savant auteur énumère les formes et les particularités de décoration. Ni les moules ni les vases ne sont marqués d'aucune estampille.
Les fabriques de Vichy et de Gannat ont donné ces mêmes poteries blanches ; elles fonctionnaient au milieu du premier siècle après notre ère. Leur exportation était fort étendue.
La date est fixée par la présence de ces vases dans des cimetières d'époque certaine : à Lisieux, Roanne, Bourges, surtout à Andernach. Elle est confirmée par les détails de quelques décors et de leurs rares BULL. 34, 1905. 13
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figures : cavaliers gaulois, etc.; l'influence de la haute Italie demeure confirmée.
Les vases à pâte rouge sont dérivés directement des vases arrétins. C'est à eux que M. Déchelette consacrera la majeure partie de son ouvrage. Énumérons de suite les centres de fabrication qu'il va passer en revue.
lo Dans la région du Sud : officines situées sur le territoire des Rutènes et des Gabales (la Graufesenque à Millau, Montans, Banassac et quelques petits ateliers voisins; ;
2° Dans la région du Centre : officines arvernes du Lezoux et des localités voisines de la vallée de l'Allier ;
3° Dans la Germanie : ateliers de Reinzabern (Bavière rhénane), auxquels il faut joindre ceux de Westerndorf, en dehors de la Gaule, dans la Vindélicie.
Le premier chapitre, consacré à la Graufesenque, ayant été publié à part, il y a un an, j'ai eu l'occasion de l'analyser dans notre Bulletin (v. ci-dessus. 1904, p. 86); il faut donc aujourd'hui être très bref à son sujet. Rappelons seulement que ce nom est celui d'une terre au bord du Tarn, près de son confluent avec la Dourbie, immédiatement avant Millau, le Conladomagus ou « champ du confluent » de la Table de Peutinger. Tous les passants instruits avaient remarqué les innombrables tessons de poterie rouge que renferment les champs; M. l'abbé Cerés y commença, vers 1882, des fouilles trop vite interrompues, et reprises naguère par M. l'abbé Hermet et ses collaborateurs. Là vécut une population laborieuse qui, la première, sut imiter les vases d'Arezzo, concurrencer avec succès la fabrique italienne et la remplacer sur les principaux marchés de l'empire.
Pline, qui énumère avec soin les ateliers provinciaux en concurrence avec Arezzo, ne fait point mention de l'industrie des Rutènes. C'est que son ouvrage était composé lorsque le mouvement d'importation en Italie commençait. Mais antérieurement à l'ensevelissement de Pompéi, les marchés de la Campanie et de la côte d'Afrique, de la Gaule, de la péninsule ibérique, de la Bretagne s'alimentaient aux ateliers de Condatomagus.
Des potiers rutènes ont dû recevoir à l'origine, de quelques ouvriers taliques et sans doute arrétins, une première formation. Mais à cette époque les produits d'Arezzo témoignent d'une décadence sensible.
"" "•'•■ i>-.r. MPII.IHUI 1;> première période, les décors ne sortent guère . ... ... . i.uu, . s u^iu'us u Aie/.zo ne sont pus importées
dans les ateliers gaulois. Lorsque les représentations animées entrent
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en scène, succèdent au décor végétal, les modeleurs de matrices ont constitué leur recueil de types non pas en s'inspirant directement des produits des figlinae italiques, mais en puisant comme tous les artistes de la Gaule, sculpteurs, peintres, bronziers, orfèvres et verriers, au vieux fonds des créations hellénistiques.
M. Déchelette décrit la technique et les formes des vases rutènes; il insiste sur l'ornementation et, dès ses premières pages, commencent ses tableaux de renseignements groupés, ses statistiques, qui donneront à son oeuvre une exceptionnelle valeur. C'est d'abord l'état numérique de types classés par fabriques, d'où il résulte que plusieurs fabriques gravitent autour des deux principales, la Graufesenque et Lezoux, et chacune de celles-ci a ses types caractérisés ; il est presque toujours possible de déterminer la provenance régionale d'une vase sigillé orné, de fabrique gauloise, donc le décor n'est pas purement ornemental.
Les marques de potiers, qui diffèrent nettement de celles de l'Italie et que caractérise souvent la lettre f. ou les lettres fec. fecit, ou encore le commencement du mot officina, ont donné pour les vases ornés les noms de quarante-trois artisans. Sur 232 vases, Mommo parait 63 fois, Germanus 38, Masclus 13, Macer 12. Pour les vases unis, la liste est infiniment plus longue.
L'abbé Cerés, l'abbé Hermet et M. de Carlhausen, de Millau, ont découvert en tout une dizaine de précieux graffltes, écrits après cuisson, avec la pointe d'un style, sur des fragments de plateaux en terre sigillée. (V. ci-dessus le compte rendu d'un mémoire spécial de M. Hermet, p. 163.) Ces graffltes ont une colonne de noms des potiers, une colonne pour l'indication des vases fabriqués par chacun d'eux, une autre enfin pour les quantités. De ces pièces de comptabilité dont M. Déchelette a perfectionné la lecture, il déduit de très variées observations. Ainsi, la majorité des ouvriers de la Graufesenque ne devaient pas appartenir à la race latine. Malcès, Mommo, Cosoius, Lousius, Vacaca, Magio, Andoca, Meddilus sont sûrement indigènes. Mommo exportait ses produits jusqu'à Pompéi, et le bordereau porte à son actif le chiffre de neuf mille pièces.
M. Déchelette s'est attaché à mettre hors de doute la période d'activité de cet atelier. Les preuves ne lui manquent pas. L'exportation des poteries de la Graufesenque a débuté entre l'an 16 de notre ère et l'avènement des Flaviens. D'autre part, les fabriques rutènes n'ont pas subsisté bien au delà de l'époque de Trajan, ou tout au moins la période de leur prospérité ne s'est pas prolongée a.u delà de ce terme.
La ruine prématurée de Condatomagus est due à la création et au développement progressif de nouveaux centres de fabrication.
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Presque toutes les grandes villes gauloises ont livré des spécimens de Condatomagus. Les cendres de Pompéi en recouvraient çà et là une remarquable série. A Rome même, au Forum, dans le Tibre et passim, ils abondent. On les retrouve en Sicile et le R. P. Delattre les a rencontrés à Carthage. Les listes du Corpus montrent en nombre en Espagne les produits signés de la Graufesenque.
Singulière destinée des oeuvres humaines : l'histoire est muette sur la céramique rutène, tandis que les vases de Sagonte, mentionnés par Pline, Juvénal, Martial, demeurent encore inconnus à l'archéologie.
Il n'y a pas une seule station importante, pas une nécropole riche en poterie, datant de la seconde moitié du premier siècle, où les vases rouges de la Graufesenque fassent défaut.
Il ne faut pas s'étonner s'ils furent, sur le sol italique, l'objet d'une véritable contrefaçon, maladroite d'ailleurs, et dont les échantillons abondent dans les magasins du Musée national à Rome. L'un des imitateurs était d'Arezzo, où l'on a plusieurs fois découvert son estampille. Les potiers italiques étaient réduits à imiter les ouvrages de leurs concurrents gaulois. Dans la lutte industrielle, la Gaule triompha.
M. Déchelette passe ensuite aux fabriques de Banassac (Lozère) et de Montans (Tarn).
Banassac, du territoire des Gabales, fut exploré à ce point de vue en 1868,1869 et 1871. Les produits des fouilles passsèrent à la collection de l'abbé Cerés (aujourd'hui Musée de Rodez), au Musée de Saint-Germain, au Musée de Mende.
Les vases ornés de Banassac correspondant à la forme cuvette se classent en deux séries sous le rapport de l'ornementation : les vases épigraphiques, portant des légendes décoratives, vases qui constituaient une spécialité exclusive de cette fabrique, et les vases figurés, de style ordinaire, soit à décor de transition, soit à décor de métopes semblables à ceux de la Graufesenque et de Montans. On trouve cependant quelques rares spécimens du décor à médaillons. Aucun vase orné ne porte de marque de potier. Les types spéciaux à Banassac sont défectueux. Les fabricants ne possédaient pas de modeleurs de poinçons matrices expérimentés. Ils ont copié des types de la Graufesenque, en y ajoutant un certain nombre de sujets nouveaux d'une exécution fort rudimentaire.
1. La Graufesenque a eu la spécialité exclusive d'un vernis particuler, d'ailleurs assez rare; il s'agit d'une sorte de glaçure jaune à veines rouges, imitant l'aspect du marbre et employé tant pour les vases unis que pour les bols ornés
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Les légendes décoratives, qui sont la caractéristique de Banassac, sont des acclamations portant l'ethnique d'un peuple de la Gaule : Gabalibus féliciter, Remis féliciter, Sequanis féliciter, Treveris féliciter, Lingonis féliciter ; ou des acclamations sans ethniques : Bonus puer, Bonus puella, Ave divina, Veni ad me arnica, Bibe amice de meo, etc.
La première série est une preuve directe du commerce d'exportation des vases de la Gaule. Ces « spécialités », s'adressant chacune à une clientèle particulière et à une région géographique parfois très éloignée du territoire des Gabales, se fabriquaient à Banassac et, par l'entremise des negocialores artis crelariae, parvenaient à leur destination.
Quelques-uns de la seconde série ont été jusqu'à Naples. M. Déchelette suppose qu'ils étaient offerts en cadeau à certaines dates de l'année ou à l'occasion de fêtes domestiques. Si l'on note que certains vases sigillés de la Graufesenque portent, imprimées en petites lettres sur le fond intérieur et à la place de l'estampille du fabricant, des formules similaires, telles que Ave vale, Salve lu, felicen (pour felicem te), nous serons portés à penser que les légendes des poteries gabales dérivent simplement des précédentes.
M. Déchelette expose ses motifs de croire que, vers l'an 70, des potiers, sans doute partis du Condatomagus des Rutènes, sont venus fonder chez les Gabales de nouveaux ateliers. Ils réussirent grâce au trafic des vases à inscriptions. Mais leur brillante prospérité fut éphémère. Ils paraissent n'avoir pas persisté durant le siècle des Antonins.
Montans est un ancien oppidum sur la rive gauche du Tarn, à 4 kilomètres environ en aval de Gaillac. Dés le dix-huitième siècle on signalait ses antiquités, et, parmi celles qu'il a livrées de nos jours, on doit citer un collier et un bracelet d'or. M. Rossignol, à partir de 1859, recueillit tout ce que le hasard mit au jour et fouilla même avec succès le terrain d'un établissement céramique. Il put explorer d'anciens puits comblés riches en débris divers. L'un d'eux précisément livra deux vases, cruches à deux anses, à couverte blanche à dessin géométrique, peints en noir et en rouge, qui se rattachent à une série d'exemplaires recueillis à Bibracte et autres oppida, à Stratonic en Bohême, dans la région rhénane. Mais ce sont ici et là des produits locaux d'un type courant et de transition. A Montans, on fabriquait ces poteries avant de faire la céramique rouge et sigillée.
En 1860, on mit au jour, sur un autre point, près de Montans, un second gisement de poteries rouges, toutes signées : VALÈRE. Les moules portent le même nom. Enfin, en 1882, M. Lacroix fit de nouvelles fouilles et découvrit à son tour des vases et des moules (Revue du déparlement
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du Tarn, VI, 1887, p. 82), et en a fait profiter le musée d'Albi. Les collections de M. Élie Rossignol ont été donnés par lui au musée SaintRaymond, à Toulouse. Quelques fragments sont conservés au musée de l'Isle-sur-Tarn.
Les potiers de Montans voyaient leurs produits partir pour le sudouest de la Gaule. La courte distance qui sépare cette localité du confluent du Tarn et de la Garonne se franchissait aisément. Une grande voie fluviale leur ouvrait en Aquitaine de larges débouchés, de là l'abondance des poteries de Montans à Lcctoure et à Bordeaux.
Trois fragments de viises différents trouvés à Montans rappellent'les poteries épigraphiques de Banassac, mais ils en diffèrent par les ornements accessoires, par les particularités épigraphiques et par le sens de l'inscription en grandes lettres saillantes, préalablement tracées en creux dans le moule.
Sur un des fragments on lit : JOVOLLES AENEA SOMIIALLOBOESIO...
Sur le second : QUENOVISSIMUS HÈRES VIO
Sur le troisième : GRANDISOM
La lecture est certaine; toutes les interprétations ont échoué. M. Déchelette admettrait volontiers que ces vases ont été fabriqués pour servir de modèle de lecture aux écoliers. On peut, en effet, établir par de nombreux exemples que des briques et des vases d'argile ont été employés à diverses époques et chez plusieurs peuples de l'antiquité comme abécédaires.
Le plus important des alphabets étrusques, de Bomarzo, est sur le pied d'un vase d'argile, tracé dans la pâte avant cuisson. Le vase a donc été fabriqué pour servir d'abécédaire. M. Déchelette énumère une série de faits de ce genre. A Rome, on gravait les alphabets sur le marbre. Au fond des provinces la brique suffisait.
Notre confrère a particlièrement soigné les chapitres consacrés à la fabrique de Lezoux, dont l'importance d'ailleurs n'est égalée par aucune autre sur tout le territoire romain à partir des premières années du second siècle.
Lezoux est une petite localité de l'ancienne Arvernie que l'histoire ignore, à 27 kilomètres est de Glermont. A 7 kilomètres à l'ouest se trouve l'Allier, qui permettait aux poteries expédiées de gagner "aisément le cours de la Loire.
Là on fabriqua d'abord des poteries peintes à engobe blanc et à décor géométrique, qu'on a retrouvées sur place et en beaux spécimens dans un tumulus avec sépulture gauloise à incinération, dans la vallée de l'Alagnon et dans la nécropole de Roanne.
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De nombreuses découvertes ont attesté depuis longtemps l'importance des manufactures de vases rouges. C'est à partir de 1879 que le Dr Plicque, domicilié dans le pays, ayant découvert un four de poterie sigillée dans son jardin, se passionna pour ces antiquités. Après sa mort, sa collection énorme, heureusement intacte, fut acquise par le Musée Saint-Germain, mais on regrette l'absence de procès-verbaux des fouilles. L'auteur n'a laissé que de courtes notices, il a su déterminer assez bien l'ordre de succession des principaux types et indiquer l'époque de la ruine des ateliers lédosens.
Outre des vestiges d'ateliers et de maisons, le sol de Lezoux renferme encore des nécropoles à incinération. L'abondance des fours et des ateliers, des sépultures, le grand nombre des noms de potiers, établissent l'importance de ce centre industriel.
Il se distingue des autres par la variété de ses produits : vases moulés, vases à relief d'applique, vases barbotinés et incises, vases unis à pâte rouge et à pâte blanche, toutes les poteries sigillées et d'autres encore, sont abondamment représentées dans les débris accumulés autour de ses fours.
M. Déchelette s'occupe d'abord des vases moulés, de leurs formes au nombre de douze, mais en quantité très inégales; puis des potiers de Lezoux, dont les estampilles donnent lieu à diverses remarques intéressantes. On voit à chaque liste d'inventaire l'énorme dispersion de leurs oeuvres.
La fabrication comprend trois périodes : 1° de l'an 40 à l'an 75; 2» de l'an 75 à l'an 110 environ; 3* de l'an 110 à la seconde moitié du troisième siècle, époque probable de la ruine, ou tout au moins de la décadence complète des fabriques. C'est pendant la deuxième période que les potiers de Lezoux voient commencer le développement de leur commerce d'exportation, que favorisa la paix profonde dont jouissait l'empire grâce aux sages Antonius.
M. Déchelette expose en détail l'évolution des produits bien plus soignés que ceux des Rutènes, obligés de satisfaire par une production intensive à l'abondance des commandes. Trois maîtres en particulier de la deuxième période sont à citer : Libertus, Butrio et Putriu (peut-être ces deux dernières marques correspondent au même artiste). Ils ont perfectionné l'ornementation.
Ainsi, jusque là, les potiers avaient donné la préférence au décor -d'ornement ou introduit timidement quelques sujets figurés à travers les rinceaux de feuillages et les guirlandes. Brusquement apparaît à Lezoux, comme une floraison spontanée, une abondante série de sujets figurés, modelés avec art.
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Les innombrables produits de la Graufesenque avaient procuré 177 sujets, y compris quelques ornements. Or, à eux seuls, les ouvrages connus de Libertus ont donné 142 numéros, le 18 °/o de l'ensemble des types de Lezoux (816 types ou variantes). Tous les potiers venus après lui ont puisé à son répertoire ou se sont inspirés du choix de ses modèles pour la confection de, nouveaux poinçons.
La qualité artistique des reliefs de Libertus ne le cède en rien, à leur abondante variété. Il avait une prédilection marquée pour les figures minuscules, dont la finesse du détail égale celle des ouvrages en cire.
Le catalogue des marques de la Graufesenque comprenait 232 exemplaires répartis en 43 potiers. Lezoux a 96 noms et 1005 exemplaires. En examinant la répartition des trouvailles on constate les faits suivants :
L'exportation dans la péninsule ilalique, qui représente pour la Graufesenque plus de la moitié de l'exportation totale en dehors de la Gaule, devient presque nulle pour Lezoux. C'est seulement dans l'Italie du Nord que se rencontrent quelques spécimens de fabrication averne de la troisième période.
La clientèle romaine, à l'époque de Trajan, semble s'être lassée de cette poterie. La vaisselle d'argent et de bronze se répandait de plus en plus avec les progrès du luxe, et Martial cherchait en vain à réhabiliter les modestes vases arrétins :
Arretina nimis ne spernas vasa monemus.
Lezoux trouva, au contraire, un large débouché dans les pays de l'Europe du Nord. L'Angleterre a connu tous les principaux potiers arvernes, tant de la deuxième que de la troisième période. Ils allaient jusque dans l'Ecosse méridionale, d'un côté; de l'autre, à Reichenhall en haute Bavière, dans la Prusse orientale, à Prague et jusqu'en Bohême.
Nous passerons rapidement sur le chapitre consacré aux officines diverses, aux vases de fabrique indéterminée, aux vases à légende de fabrique arverne. L'analyse même très rapide d'un ouvrage aussi volumineux et nourri de faits pourrait entraîner fort loin. L'auteur insiste sur les deux fabriques de vases sigillés les plus importants, celle de Rheinzabern en Germanie et celle de Westerndorf en Vindelicie. Les formes et le décor des produits de la première correspondent au second siècle. Ils pourraient bien être dus à l'influence de quelques ouvriers arvernes. Et à défaut d'estampille, le décor fait assez bien reconnaître leur origine germaine, mais la production de ces fabriques ne peut être comparée à celle des centres rutènes ou arvernes.
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M. Déchelette, dans le chapitre suivant, se préoccupe de développer le thème qu'il a indiqué au début de son oeuvre, l'origine hellénistique des modèles des potiers de la Gaule. Il est étrange qu'on ne trouve trace dans leur industrie d'aucune influence celtique.. Aucune représentation . de divinité gauloise n'y parait. Rien ne révèle un usage sacré. On n'a que des poteries purement domestiques.
M. Déchelette montre l'origine et les transformations des formes de vases rouges et de leur ornementation. Lorsque l'on cessa de s'inspirer des vases d'Arezzo et qu'un nouveau répertoire de types dut être constitué de toutes pièces, les éléments en furent empruntés non point, comme on l'avait parfois conjecturé, à des vases céramiques d'origine italique, mais à des objets de toute nature, vases de métal, statues, bas-reliefs, petits bronzes, pierres gravées, etc. Ce procédé de compilation fut usité à l'époque romaine pour tous les ouvrages d'art industriel. A Rome et dans les autres centres de production des pays classiques, les artistes les plus expérimentés recouraient tous à cette méthode. Les sculpteurs grecs qui travaillaient à l'embellissement des palais, de jour en jour plus nombreux et plus somptueux, avaient fait eux-mêmes abandon de toute originalité.
M. Déchelette a donc pu reconstituer pour les vases de la Gaule, sous la forme d'un catalogue numéroté, le répertoire des sculpteurs de cette école. On y trouve la série des Vénus : Vénus pudique, Vénus Anadyoméne, Vénus rattachant.sa sandale, etc., etc., Mercure et la plupart des autres divinités; Neptune avec son cortège ordinaire, mais plus fréquent chez les Arvernes que chez les Ruthènes. On a trente représentations d'Hercule; plusieurs rappellent les ouvrages connus de la statuaire, d'autres sont empruntés aux bas-reliefs. Les héros, les personnages des légendes sont rares, la clientèle celtique n'aurait pas compris ces sujets. Des sujets de genre, des tableaux champêtres ne manquent pas; on constate l'influence des artistes gréco-égyptiens. Les jeux de-l'amphithéâtre ont fourni une série de reliefs. Les potiers gaulois savaient la passion des Romains pour ces combats sanglants. Communs sont les sujets de chasse, en particulier chez les Arvernes, et surtout à partir de la troisième période de Lezoux. Toutes les bêtes fauves dé l'arène y passent, attaquées par les bestiaires, guettées par les sagittaires agenouillés.
De nombreuses pièces exceptionnelles à certains égards sont présentées à part dans la suite du texte de M. Déchelette. Une d'elles est une coupé comprise dans le trésor de Caubiac, près de Toulouse, et décrite successivement par Montégut, en 1788, et A. de Longpérier, en 1883, qui est la copie d'un vase d'argent.
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M. Déchelette poursuit l'énumération et l'explication des sujets, et son texte est sans cesse accompagné d'excellentes illustrations.
Nous arrivons ainsi à la fin du premier volume. Un appendice fournit le détail de la classification des types, la série spéciale à chaque fabrique, les types communs à plusieurs, ceux dont l'origine est encore indéterminée. Une deuxième partie présente l'inventaire descriptif des poinçons, moules et vases portant une marque de fabrique. Pour chacun d'eux, le lieu d'origine est indiqué, le lieu de dépôt, la nature de l'objet, le mode de décor, le relevé de la marque, les types de l'ornementation et enfin les renseignements bibliographiques.
Le second volume est rempli d'abord par le recueil général des types, lous les types figurés et les principaux motifs d'ornementation que M. Déchelette a pu recueillir sur les poinçons, moules et vases sortis des officines de la Narbonnaise, de l'Aquitaine et de la Lyonnaise. Les potiers de la Gaule ayant l'habitude de grouper arbitrairement, au hasard des rapprochements et sans tenir compte des mythes et des légendes, les poinçons variés dont ils disposaient, l'auteur a pu sans inconvénient dissocier toutes ces figures. Ce n'eût pas été possible pour les vases d'Arezzo. Onze cent soixante-deux dessins accompagnent chaque article, qui se compose d'une série de renseignements précis. C'est une admirable Corpus qui sera désormais d'un puissant secours pour classer les collections et étudier le produit des fouilles nouvelles.
La quatrième partie traite des vases à reliefs d'applique. Façonnés d'abord au tour, comme la poterie lisse, après une première dessiccation ils recevaient sur la panse l'application d'un certain nombre de reliefs moulés dont les uns présentaient la forme de médaillons orbiculaires, et d'autres des contours irréguliers. Ils étaient flxés à l'aide de cette pâte argileuse, à demi fluide, à laquelle on donne actuellement le nom de « harbotine ».
C'est au troisième siècle que l'emploi du relief d'applique s'est généralisé et substitué à la technique des vases moulés. Les uns proviennent de Lezoux et des fabriques voisines, et les autres d'un centre encore indéterminé, mais situé dans la vallée du Rhône. Ce sont souvent des vases à liquides, ovoïdes ou sphéiïques.
M. Déchelette, aveo sa méthode habituelle, les décrit, les ligure, classe leurs sujets, trèa différents de ceux des vases sigillés, supérieurs à plusieurs points de vue. Les gladiateurs, les masques, têtes et bustes sont particulièrement remarquables.
La fabrique inconnue de la vallée du Rhône a fourni une curieuse et nombreuse série de médaillons céramiques dont maints savants se sont
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occupés et qu'ils ont souvent publiés avec de belles illustrations. Mais on n'en connaissait que quatre-vingt-dix-huit, et M. Décheletie porte leur nombre à cent cinquante-trois. C'est sur la panse de petits vases globulaires ou ovoïdes qu'ils étaient appliqués : forme fragile et dont quatre exemplaires sont seuls intacts. Les légendes explicatives rehaussent l'intérêt de l'oeuvre d'art. Les unes brèves, le nom des personnages figurés : dieux, héros, acteurs, citharistes, cochers, gladiateurs, etc. D'autres formules d'acclamation : Genio populi féliciter, Nica Prasine, Prasine logismus. Enfin, trois sont des inscriptions métriques dont la forme littéraire est médiocre comme les reliefs qu'elles commentent. Un d'eux appartient à Martres-Tolosane. C'est le seul qui soit en dehors du bassin du Rhône. Il y en a soixante-dix-neuf à Vienne, trente-trois à Lyon, vingt-neuf à Orange. C'étaient sans doute des vases vendus à l'issue du spectacle, portant l'image du vainqueur ou la représentation de quelque belle scène de tragédie. Seize portent une signature.
M. Déchelette, dans ce chapitre comme dans tout son ouvrage, a proscrit de l'illustration les sujets erotiques qui, d'ailleurs, ne sont pas nombreux. Mais le texte les mentionne nécessairement.
Enfin, la cinquième et dernière partie est consacrée aux vases barbotinés et incisés et aux vases divers.
En Gaule méridionale et centrale on ne s'est servi de la barbotine que pour agrémenter d'une bordure de feuilles des vases unis, ou pour modeler des rinceaux sur des vases à reliefs d'applique. Procédé expéditif, peu artistique, peu employé en Grèce et en Italie.
Dans le nord de la Gaule on en fit un usage fréquent. On connaît les urnes à visage en terre rouge ou jaune de la vallée du Rhin, du premier siècle de notre ère. Cette technique semble dérivée de l'imitation des vases de verre. Un centre important de fabrication de vases à la barbotine est dans l'île de Bretagne, à Castor, et date probablement du troisième siècle.
Nous touchons à la céramique mérovingienne avec les vases estampés, généralement de pâte grise, d'autant plus intéressants qu'on commence seulement à les bien distinguer, et qu'ils sont les premiers à porter des motifs symboliques de l'art chrétien. On en a recueilli des spécimens près de Saint-Flour, en Auvergne, aux environs de Marseille et dans le sol même de cette ville, à Narbonne, à Vieille-Toulouse, à Bordeaux, où M. Jullian les sut parfaitement reconnaître et les signala. Cette céramique n'a rien à voir, bien qu'on ait assuré tout récemment le contraire, avec la céramique préromaine, ligure ou néolithique. Les poteries estampées du mont Beuvray et de la fin de l'époque gauloise n'ont rien de commun avec elle. Toutes les trouvailles se localisent dans les provinces
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occupées par les Wisigoths et les Ostrogoths, et surtout dans les centres de la domination gothique. Pour en avoir l'origine, il faut sans doute s'orienter vers les pays danubiens.
L'ouvrage de M. Déchelette se termine par une note étendue qui nous renseigne sur les procédés techniques et le matériel de fabrication.
Les céramistes recherchaient les argiles propres à leur industrie ; celles de la vallée de l'Allier, les unes blanches, ont été employées pour la fabricalion des figurines.
La cuisson modifie la couleur naturelle de la terre crue. Mais on ne pouvait faire des vases blancs avec l'argile rouge; on les couvrait d'un engobe blanc.
La nature de la pâte ne permet pas d'indiquer le lieu d'origine d'une poterie sigillée. Il n'en est pas de même du vernis et de la nuance.
On ne sait si la coloration rouge était obtenue par le choix d'une argile naturellement, ferrugineuse ou par l'addition d'un colorant. On n'a pas réussi à fabriquer des vases absolument semblables par leur pâte et leur vernis.
L'argile était améliorée en la conservant pendant de longues années dans des fosses à air libre qu'on a retrouvées à diverses reprises. Le procédé est connu en Chine.
Les potiers avaient adopté les formes qui rendaient faciles le transport et l'emballage des vases : de là la rareté des anses, parties fragiles.
Les fours grecs, édicules en superstructures, ont été détruits naturellement et ne nous sont connus que par des représentations figurées.
Les fours de l'époque romaine étaient en partie souterrains; aussi a-t-on retrouvé leurs vestiges (inférieurs seuls), non pas encore à SaintRemy et à la Graufesenque, mais à Lezoux, à Vichy et ailleurs. On a recueilli des tuyaux de chaleur faisant communiquer le foyer avec le laboratoire; des isolateurs servant de support aux piles de vases; des supports élevés, de forme tronconique, servant de base à chaque pile d'assiettes ou de plats, percées de trous permettant à l'air chaud de pénétrer à l'intérieur, de simples galettes en argile crue, saupoudrées de sable fin, servaient au même usage; des débris de cazette, enveloppes cylindriques en argile, dans lesquelles les pièces fragiles et délicates étaient placées pour être à l'abri des coups de feu ; des cales en terre molle que le feu a durci ; de petites masses d'argile, simples pincées de terre, qui servaient à saisir les vases encore brûlants.
Il y avait des accidents, des coups de feu, etc. : de là des déchets considérables accumulés près des fours. Parfois une température trop élevée soudait les vases les uns aux autres en vitrifiant la pâte. Montans (Musée de Toulouse) a livré ainsi une pile de vases unis, soudés, qui ne portent
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pas la même estampille (CRISPVS ÂMANDI) ; donc C. et A. travaillaient ensemble au service du même maître.
Un long index de personnes et de lieux termine l'ouvrage.
Chacun des deux volumes est accompagné d'un certain nombre de planches qui ajoutent leur enseignement plein d'attrait à cet ensemble considérable de notions bien ordonnées, véritable monument élevé à l'archéologie nationale.
Séance du 20 décembre. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
La correspondance imprimée comprend, en outre du lot ordinaire des mémoires et bulletins des Sociétés savantes et des Revues deux volumes de la Société de l'histoire de France : Mémoires du maréchal de Villars, par le marquis de Vogué, t. VI, et Chronique de Jean le Bel, par MM. Viard et L. Déprez, 1.1.
M. PASQDIER offre, au nom de l'éditeur M. Gadrat, de Foix, YAlmanac paloues de VAriejoper l'annado 1905. — Ensuite, il présente un tirage à part de sa note : l'Orfèvrerie à Toulouse aux quinzième et seizième siècles., 1460-1550. Extr. du Bull, archéol., 1904.
M. Palanque, vice-président de la Société archéologique du Gers, a envoyé une brochure : Liste des arrêtés des représentants du peuple en mission dans le Gers, 1793.
M. l'abbé DEGERT communique le travail qui suit :
Les mosaïques de l'ancienne Daurade, à Tolose.
Les mosaïques de notre ancienne Daurade sont plus célèbres que connues. Elles ont fait donner à cette église le nom qu'elle porte encore; elles sont signalées par nos historiens de l'art, par M. Gerspach * notamment, comme les plus anciennes de l'époque franque, et tout ce qui nous en reste se réduit à six cubes minuscules au musée Saint-Raymond, à une dizaine de lignes dans Chabanel, à une douzaine dans Dom Martin.
Le docte curé de la Daurade, qui avait journellement ces mosaïques
1. La Mosaïque, par Gerspach. Paris, s. d.. p. 45.
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sous les yeux, se borne à nous en dire 1 que « la recherche et magnificence de ces petites pièces de marquetteries enduites et croustées d'or, de la grosseur et forme d'un dez, transparentes comme cryslal et peintes de diverses couleurs dont sont composées les images des 12 Apostres et autres saints qui couvrent la vieille muraille de ceste église et environnent le grand autel, monstrent évidemment que c'est un ouvrage royal ». Quant à l'auteur de la Religion des Gaulois, il ne s'intéresse au sanctuaire de la Daurade que dans la mesure où il nous aurait conservé un temple gaulois*. S'il s'arrête à décrire les mosaïques, c'est donp tout à fait incidemment : « Tout le massif du mur, écrit-il, est incrusté d'une mosaïque admirable, principalement les niches, dans chacune desquelles est représenté un saint de l'Ancien et du Nouveau Testament, JésusChrist, quelques Apôtres et Évangélistes, les anges saint Michel, saint Gabriel, saint Raphaël, saint Huriel, Hérodes, Ezéchias 3 et plusieurs autres dont quelques tableaux qui les couvrent dérobent la vue4... La mosaïque consiste en de petits morceaux de verre diversifié de couleurs, taillez quarrément, artistement rangez et mastiquez sur un fond de stuc. La couleur jaunâtre qui- règne et l'emporte sur toutes les autres couleurs jointe à l'éclat de tout l'ouvrage a pu faire naître le nom Latin et François de cette église Deaurata, Daurade, comme qui dirait Dorée*. » C'est un peu maigre pour notre curiosité d'archéologues, et on comprend que notre ancien confrère M. Joseph de Malafosse se soit plaint avec quelque humeur des Bénédictins qui nous avaient laissé si peu de renseignements sur leur église prieurale 6. Où il se trompe, c'est quand il ajoute : « Pas un Bénédictin ne monta sur les échafaudages pour calquer les curieuses mosaïques ou du moins pour en relever une fidèle description 7 ». Au lieu d'un Bénédictin, il y en eut jusqu'à six qui grimpèrent sur les échelles, et pendant plus de quarante jours ils s'employèrent à épousseter, frotter et gratter ces vénérables mosaïques, car il paraît qu'une ignoble poussière les rendait méconnaissables.
1. De l'antiquité de l'église Nostre-Dame de la Daurade à Tolose, par Jean de Chabanel, Tolosain ... recteur de la même église. Tolose; Raymond Colomiez. 1621, p. 19.
2. « Venons au Temple, qui est l'unique chose qui entre dans notre dessein... Il est constant que le corps du bâtiment en lui-même et sa forme sont vraiment gaulois » ; La Religion des Gaulois, t. I. (Paris, 1727, p. 150.)
3. Ezéchias n'y est point.
4. Id., p. 148.
5. Id., p. 149.
6. Joseph de Malafosse, Etudes et notes d'archéologie et d'histoire. Documents toulousains, critiques, souvenirs et Impressions. Toulouse, 1888, p. 70.
7. Ibid.
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Ils s'estimèrent payés de leur peine, quand ils virent apparaître, « à peu près dans tout leur éclat primitif, ces rares et admirables mosaïques ».
C'est le récit même d'un des acteurs de cette quasi-résurrection archéologique, Béni Odon Lamothe, que je traduis ici. Ce religieux était si bien pénétré de l'importance de l'opération à laquelle il venait de se livrer avec ses cinq collaborateurs, qu'il en a consigné les. résultats dans une chronique latine où il signale au jour le jour les événements qui accompagnèrent ou suivirent l'introduction des Bénédictins de Saint-Maur à la Daurade.
Dom Odon Lamothe n'est pas un inconnu pour les travailleurs du Sud-Ouesl. Plusieurs d'entre eux ont déjà pu mettre à profit ses nombreuses notes aujourd'hui conservées à la Bibliothèque nationale dans l'ancien fonds de Saint-Germain-des-Prés'. Originaire de' Saint-Clar (canton de Muret), il entra de très bonne heure chez les Bénédictins de Saint-Maur et fit partie de la première colonie qui prit' possession de la Daurade, le 17 avril 16272. Mais attaché déjà au séminaire bénédictin de Saint-Louis dès 1623, il commença dés cette date sa chronique qu'il conduisit jusqu'à la fin de 1636. Elle a été transcrite par lui en deux exemplaires 3 qui ont été reliés avec quelques autres notes 4 dans le tome XXIII du Monasticon Benedictinum. Il y a là pour cette époque des renseignements curieux pour notre histoire municipale ou religieuse; Je me bornerai "aujourd'hui à en dégager ce qui concerne les mosaïques de la Daurade.
Dom Odon Lamothe profita donc de leur réapparition, vers la fin de 1633, pour en tracer dans sa chronique une minutieuse description en latin. Comme nous le verrons, l'ordre qu'il a adopté n'est pas des mieux inspirés. Je le suivrai cependant dans ma traduction pour qu'il soit aisé, au besoin, de recourir à son texte. Pour comprendre cet ordre, qu'on veuille bien jeter les yeux sur la reproduction que Dom Martin nous a laissée du choeur de la Daurade 5 et qu'on trouvera ci-après.
1. Cf. Douais, La réforme de Saint-Maur à Saint-Savin-de-Lavedan, dans Revue de Gascogne, 1890, pp. 433, 455 et suiv. — L. Saltet, Saint Vidian de Martres-Tolosanes, dans Bulletin de littérature ecclésiastique, 1902, p. 51. — A. Degert, Les reliques de sainte Quitterie, dans Revue de Gascogne, 1903, p. 206. — L'Histoire littéraire de la congrégation de Saint-Maur, Bruxelles, 1770, lui consacre une notice, p. 18; elle l'appelle Odon de Lamothe; lui-jnême se nomme toujours dans sa chronique Odon Lamothe.
2. Bibl. nat., f. lat., 12680, f° 213 v.
3. Même ms. La première va du f" 213 au f° 240; ellecommence au 23 août 1624, la deuxième va du f» 249 au f» 275 v».
4. Sur une inscription et diverses reliques de la Daurade, f" 277-286 v°.
5. La religion des Gaulois, pi. I, entre les pages 146 et 147. Reproduction chez de Malafosse, op. cit., p. 71.
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On y voit^cette abside à pans coupés divisée par trois rangs de niches superposées; la gravure ne semble pas d'ailleurs se piquer d'une rigoureuse
rigoureuse elle ne comprend que quinze niches dans le rang le plus élevé, dix-huit dans le second, seize dans le dernier. En réalité, ces
FIG. 1. — Reproduction de la Planche de Dom Martin dans son Traité de la Religion des Gaulois.
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FIG. 2. — Deux des colonnes de marbre qui ornaient le choeur de la Daurade, et entre lesquelles étaient les mosaïques.
BULL. 34, 1905. 14
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trois rangs contiennent respectivement, d'après la description de Dom Lamothe, vingt-deux, vingt-deux, vingt et une niches.
Dans chacune de ces niches étaient représentés des sujets distincts, pour la plupart indépendants les uns des autres. Voici, d'après notre guide, comment ils se groupaient dans les trois rangées de l'abside :
lre. Au rang le plus élevé, la première niche à gauche représentait le martyre des saints Innocents. Au centre, le bourreau debout, l'épée dégainée, au-dessus de sa tête nue, tenait de sa main gaucher par les cheveux, un enfant qu'il égorgeait; à ses pieds glt un enfant mort, à sa droite, un autre à demi mort pousse des cris. Le tout sur fond d'or et pré verdoyant. Pas d'inscription.
2e. Hérode assis donne l'ordre d'exécuter ces enfants; son visage est enflammé de colère, il tient de sa main gauche un sceptre carré et lève sa droite vers le bourreau; il est vêtu d'une robe rouge et violette, un nimbe d'argent orne sa tête. On y lit : HERODIS. Fond d'or.
3e. Pas d'inscription. On croit reconnaître un mage en adoration devant la crèche ou s'en éloignant par un chemin autre que celui qui l'y a amené; sa tête est entourée d'un diadème; il porte quelque chose dans sa main; son visage est tourné vers le berceau de l'Enfant Jésus. Fond d'or et pré verdoyant.
4e. Vitrail dans une baie cintrée : figures de sainte Anne et de Marie avec l'Enfant Jésus; sur l'encadrement, en mosaïque, on voit des deux côtés trois perdrix.
5e et 6e. Présentent deux mages comme la niche 3, couverts d'un bonnet, dans chaque niche, et en attitude d'adoration ; celui de la niche 5 a les cheveux longs et les mains jointes; il semble vêtu en prêtre; celui de la niche 6a la main droite étendue sur la poitrine; il porte une sorte de capuchon multicolore et l'habit à larges manches rattaché au genou par des rosettes. Pas d'inscription.
7e et 8". Grande fenêtre du côté de l'évangile.
9e. Quoique déchirée par des crevasses et écrasée par le poids de la voûte, cette niche laisse voir un homme assis dans l'attitude d'un juge; on distingue son bras et son visage dur et furieux; des crevassss laissent peu voir le reste. Inscription : ERODIS.
10<>. Une figure bien exécutée, droite, avec légère inflexion, en extase, les bras nus, les mains jointes élevées; les yeux tournés vers le ciel et comme pleurants; à ses pieds un agneau entièrement visible et bien dessiné. Inscription vers la tête : PASTUR.
11e et 12e. Grande fenêtre en face du maître-autel.
Sur le même rang, mais en partant de l'extrémité de droite, la première, la deuxième et la troisième niches présentent chacune un mage,
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assez semblable à ceux que nous avons déjà décrits; ils ne diffèrent entre eux que par quelque détail de costume ou d'attitude.
4e. Vitrail comme précédemment au même numéro.
5e. Marie porte Jésus sur sa main droite reposant sur sa poitrine; Jésus, souriant, bénit les mages de sa main droite; Marie est voilée et chaussée; sa robe bleue et rouge est admirablement variée; sur sa tête est écrit le mot : MARIA.
6e. Un homme de haute stature, la tête tournée vers Marie; son bras est nu jusqu'au coude; sa main droite montre une étoile placée un peu au-dessus de sa main gauche, une brebis est à ses pieds ; sur sa tête le mot : PASTOR.
7e et 8e. Grande fenêtre du côté de l'épltre.
9e La sainte Vierge, la tête couverte d'un bonnet, est assise comme sur un siège épiscopal, les pieds chaussés; sa main droite reposant sur sa poitrine lui donne un air majestueux; sa gauche tient une croix d'or qui repose sur son pied droit et glisse vers sa tête; elle se tourne vers l'Enfant Jésus qui repose dans une crèche sous des traits fort jeunes, mais vénérables. Comme inscription, vers la tête du personnage principal : MARIA.
10e. L'Enfant Jésus, couché dans une crèche, emmailloté dans des langes; un âne, bien dessiné du côté de l'évangile, regarde, tourné vers l'épltre, Jésus couché ; un boeuf dont la tête s'élève au-dessus de Jésus.
Au second rang, dans la première niche en commençant par la gauche, comme précédemment, on voit :
lre. Esdras qui, d'un air méditatif, soutient son manteau de sa main gauche ; de la droite, il tient un livre sur les genoux; il se tourne un peu vers l'autel; ses pieds portent des sandales. Inscription sur la tête : ESDRAS.
2e. Abimélech, revêtu d'un manteau d'argent, avec inscription sur la tête : ABIMELECH.
3e. Philippe, les mains jointes, la tête nue, les yeux respectueusement tournés vers le Sauveur. Inscription sur la tête : FILIPPUS.
4e. Sous le vitrail du nord, Simon, la tête nue, regarde aussi le Sauveur; sa main droite s'élève un peu dans l'air; sa gauche repose sur la cuisse. Sur la tête, on lit : SIMON.
5e. André lève sa main droite vers le Sauveur; de sa gauche, il soutient sa toge, porte des sandales. Inscription sur la tête : ANDREAS.
6e. Luc, tourné un peu vers le Sauveur, la tête couverte d'un bonnet; sa main droite posée sur sa cuisse ; il tient de la gauche un livre assez grand qui repose sur sa poitrine dans la région du coeur ; il est très
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vieux; porte un peu de barbe, a des sandales aux pieds. Sur sa tête, on lit : LUCAS.
7e. Jean, de traits assez juvéniles, tient de sa main gauche un livre doré et peint de diverses couleurs; sa droite se porte sur les feuillets; les pieds nus dans les sandales; il regarde le Sauveur; porte, écrit sur sa tête : JOHANNIS.
8e. Saint Pierre, l'air âgé, tète nue et chauve entourée d'un grand diadème; comme les autres, les pieds chaussés de sandales, il tient la toge de sa main gauche et porte des clés. Sur sa tête, on lit : PETRUS. Les crevasses du mur ont déchiré en deux la mosaïque.
9e Uriel, un jeune ange, assez semblable à son voisin Michel; porte comme inscription : URIHIL.
10fi. Saint Michel, couronné d'un diadème, les cheveux bouclés, des sandales aux pieds avec des ailes pendantes et déployées vers la terre; de sa gauche, il tient un triple globe diversement coloré. Sa tête est coiffée d'un bonnet avec cette inscription : MICAHIL.
Ile. Le Sauveur Jésus montre de sa main gauche un livre ouvert; de sa main droite, il semble bénir; sur le livre, on lit en caractères rouges : Pax vobiscum; sa tète nue est entourée de trois nimbes; a l'air très vénérable avec ses longs cheveux autour desquels est écrit le mot : SALVATOR. Entre cette niche et la suivante se dressait la fameuse statue de Notre-Dame la Noire.
12e. La sainte Vierge près de l'image du Sauveur, voilée jusqu'à la poitrine; figure admirable, recueillie, légèrement tournée vers l'image du Sauveur; on ne voit ni ses mains ni ses pieds; sa tête est ornée d'une auréole; on lit tout autour : SANCTA MARIA.
13e. Gabriel, dans la même attitude que saint Michel et Raphaël, couvert d'un bonnet en forme de diadème, figure jeune; il tient dans sa main gauche un bâton assez long; dans sa droite, trois globes ronds et verts de grosseur inégale. Inscription autour de la tête : GABRIEL.
14e. Raphaël; à peu près même attitude, mêmes traits et mêmes attributs, avec l'inscription : RAFAËL. • 15e. Saint Paul, tête nue, barbe courte, avec diadème; il lève sa main droite dans l'attitude de l'extase; de sa gauche, il tient un grand livre orné de cubes rouges; autour de sa tête, on lit : PAULUS.
46e. Saint Mathieu, la main droite posée sur sa poitrine; sa gauche tient un livre également sur la poitrine, les pieds nus dans des sandales. Inscription autour de la tête : MATTHAEUS.
17e. Saint Marc, la main droite pendante sur les genoux, la gauche tient un livre d'or sur sa poitrine; sa tête découverte se tourne légèrement vers le Sauveur. Inscription autour de la tête : MARCUS.
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18e. Saint Barthélémy, la main droite levée en l'air, la gauche soutient et soulève un peu la toge; il semble marcher, porte des sandales; autour de la tête, l'inscription fautive : MARTALAMEUS.
19e. Saint Thomas, tourné vers l'image du Sauveur, vers lequel se dirigent aussi ses mains dans l'attitude de l'admiration (cette figure, placée sous la fenêtre qui regarde le midi, est coupée en deux, des pieds à la tête, par une fente du mur). On lit sur la tête : THOMAS.
20e. Jacob regarde le Sauveur, la main droite élevée autour de la poitrine et étendue vers le peuple, la gauche ne paraît pas. Inscription sur la tête : IACOBUS.
21e. Isaïe : l'obscurité, la saleté, l'éloignement, le danger de chute ne permettent pas de voir la figure de cette niche pas plus que la suivante; elle s'est cependant très bien conservée et on la voit entourée d'un brillant manteau. Inscription autour delà tête : ESAIAS.
22e. Ezéchiel apparaît orné d'un très riche manteau sur fond d'or et pré verdoyant. Sur la tête, le mot : ESECHEL.
Le troisième rang avait beaucoup souffert; il était effacé sur plusieurs points.
La chapelle Sainte-Luce, enfermée sous les niches d'Esdras et d'Abimélech, entre deux arcades, contenait les quatre figures suivantes :
3e. Judas, un jeune homme, tête entourée d'un nimbe; le bas du corps, de la poitrine aux pieds, complètement effacé. Autour de la tête on lit : JUDAS.
4e. Lèvi, le visage tourné vers le maître-autel, la main gauche un peu élevée et étendue (le reste du corps effacé). Autour de la tête le mot : LEV-VIS.
5e. Siméon, tête grosse, yeux grands ouverts; tête nimbée avec le mot : SEMEON (le reste du corps effacé).
6e. Jacob, en face de la chapelle Saint-Pierre où se trouvait anciennement la porte de l'église : visage vénérable, tête entourée d'une auréole avec l'inscription : IACOB (le reste du corps effacé).
7e et 8e. Dans l'arcade qui forme la chapelle Saint-Pierre, où était jadis la porte de l'église, se trouvent deux figures de prophètes; l'une porte écrit autour de la tête : ENOC; l'autre : ELIAS.
9e. Isaac, le visage tourné vers son père avec l'inscription : HISAC. . 10e. Abraham, l'air vieux, austère et grave, la barbe longue, les cheveux épars, la tête penchée vers son fils; on lit : HABRAAM.
Ile et 12e. La porte et l'autel en forme de pyramide qui soutient la Vierge noire empêchent de voir le contenu de ces niches.
13e. A côté de la Vierge noire, à gauche, on n'aperçoit que la moitié inférieure du corps d'un prophète ; le reste est effacé. Pas de nom.
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14e. Joël, tête nue, avec l'inscription fautive : NOËL. Le reste de la niche est effacé
15e. Porte du couloir menant à la sainte Image et à la sacristie; dans l'embrasure, deux figures de prophètes dépourvues d'inscription depuis 1628; sur l'une on lisait jusqu'alors : ABDIA; l'autre n'a pu être découverte.
16e. Ananias, un des trois jeunes gens de la fournaise de Babylone, dans un coin derrière l'autel de la Nativité; les mains étendues, il regarde l'ange Gabriel qui est devant lui. Inscription autour de la tête : ANNANIAS.
17e. L'ange Gabriel, au coin de l'épltre de l'autel de la Nativité, regarde les trois jeunes gens dans la fournaise ; il semble envoyé pour en éteindre les flammes et y répandre de la rosée; il porte des ailes; sur sa tête, on lit : GABRIEL.
18e. Azarias, tout jeune, couvert d'un grand bonnet, les cheveux assez éparpillés; vêtu d'une tunique à manches courtes, étroites, riche, de couleur variée, il lève et étend les deux mains dans le geste d'un prêtre qui salue le peuple. Sur sa tête se lit le mot : AZARIAS.
19e. Mizaol, l'air très jeune, est coiffé d'un grand bonnet; les cheveux un peu éparpillés; tunique étroite comme Azarias; mains élevées, avec pour inscription : MIZAEL.
20e. Benjamin, revêtu d'un riche manteau, visage jeune, appuie le doigt de la main sur un doigt de la gauche; la tête découverte, sur la tète le mot : BENIAMIN.
: '21e. Joseph, l'air tout jeune, les mains jointes, la tête découverte, des sandales aux pieds, couvert d'un très riche manteau; il regarde vers son frère Benjamin; sur fond d'or, avec le mot : ÏOS-EB autour de la tête.
Au premier rang des niches, à la naissance de la voûte, au-dessus des ehapiteaux des vingt-deux colonnes de jaspe étaient dessinés sur la mosaïque vingt-deux perroquets. Dans l'intervalle des colonnes, six ou huit paons merveilleusement dessinés prennent leurs ébats autour d'un vase rempli d'eau. Dans le rang inférieur des niches, huit ou dix figures d'anges, dont on ne voit que le buste, semblent exciter à la piété.
Telle est la description que nous a laissée des mosaïques de la Daurade le frère Odon Lamothe. Quoique nous l'ayons suivie pas à pas, nous ne nous dissimulons pas qu'elle est peu propre à nous donner une idée exacte de la loi qui a présidé à la répartition et au groupement des diverses figures sur nos trois rangées de niches. Cette loi ne nous semble pas cependant difficile à saisir. A regarder directement les mosaïques, il est évident que, dans la première frise, Jésus dans sa crèche.
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asssisté de sa mère et entouré du boeuf et de l'âne, forme la scène centrale autour de laquelle l'artiste a groupé à droite et à gauche les personnages ou les événements que l'histoire évangélique rattache à la naissance du Christ. Les bergers, les premiers accourus, se tiennent dans l'attitude de la surprise, de l'admiration et de l'adoration extatique ; l'un d'eux montre l'étoile qui va attirer les mages. A droite, Hérode voit passer ces mages qui se retirent; à gauche, ceux-ci sont en adoration devant l'Enfant Jésus que leur présente Marie ; Hérode prend ombrage des hommages rendus à l'Enfant Jésus, et ordonne le meurtre des Innocents que nous voyons s'exécuter à l'extrémité droite de la mosaïque.
.Dans la seconde rangée, Marie et le Sauveur occupent encore le centre. Vers eux se dirige à droite et à gauche, sur les deux zones, cette longue théorie où, depuis Abraham jusqu'à Marie, prennent place les patriarches, les prophètes, les apôtres, les évangélistes, les fondateurs de l'Église romaine, les anges. A ce plan, dont j'esquisse les grandes lignes, il est bien parfois dérogé, mais il semble qu'il faille mettre ces dérogations sur la maladresse ou l'inadvertance des ouvriers. Passe encore de représenter à nouveau Gabriel au troisième rang, alors qu'il a déjà figuré au second; il joue ici, dans la scène des trois Hébreux de la fournaise empruntée au livre du prophète Daniel 1, — c'est pour cela sans doute qu'elle est placée dans la région des prophètes, — le rôle que lui prêtait la tradition biblique; mais Benjamin ni Joseph ne devaient nullement prendre place avant les prophètes Abdias et Joël.
Si on veut bien faire abstraction de ces quelques méprises d'exécution, on ne peut guère refuser à notre mosaïque ni la simplicité de composition, ni la fécondité du plan.
Autant qu'on en peut juger par la description d'Odon Lamothe la souplesse du dessin et la richesse de la coloration allaient de pair avec la beauté de l'ordonnance. Telle scène, celle du massacre des Innocents par exemple, trahit un artiste en possession de tous les moyens d'expression. Quant aux couleurs soigneusement relevées par Odon Lamothe, on voit que si les ors y dominent, il s'y ajoute encore une assez abondante variété de vert, rouge, argenté, bleu, violet. Pour le costume, si nous en croyons notre guide, il est encore à peu près entièrement romain. Les personnages portent la toge, le pallium, le pileus. — N'oublions pas le motif de décoration, des paons s'ébattant autour d'un vase plein d;eau. Celui-là aussi est tout traditionnel, c'est le sujet bien connu sous le nom de «Colombes de Pline » ; seulement ici lespaons ont remplacé les colom•1.
colom•1. III, 49; III, 92; IX, 21.
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bes du Grec Sosus dont Pline décrit l'oeuvre au livre XXXVIe (ch. 25) de son Histoire naturelle.
Tous ces caractères attestent que les traditions de l'antiquité sont encore bien vivantes. Chabanel et Dom Martin attribuaient ces mosaïques aux Wisigoths (418-506) du cinquième siècle. Je ne crois pas qu'on puisse élever au nom de l'archéologie des objections sérieuses contre cette attribution, ou du moins contre cette date. L'histoire n'y contredit pas davantage. Le peu de développement qu'a pris le culte des saints, strictement limité ici aux personnages évangéliques, atteste que nous sommes avec les auteurs de notre mosaïque aux premiers siècles du christianisme. Le culte important rendu à Uriel 1, considéré comme archange, correspond bien aussi à la même période, puisque au huitième siècle l'invocation de cet ange était considérée comme hérétique et proscrite, comme telle, dans un concile romain de 7452. Enfin les mages n'y sont pas encore réduits à trois, comme il le seront dès le haut moyen âge 3; si l'ensemble de la mosaïque date du cinquième siècle, il se peut que certains détails aient subi plus tard des retouches ou des restaurations. Quelques feuillets reliés à la suite de la description d'Odon Lamothe nous ont laissé le brouillon ou la première ébauche de son travail (f» 282). La description y était parfois plus abondante, les délails plus nombreux. Ainsi, parmi les traits relevés là dans la description du bourreau (1er rang, Ie niche), je lis : tibialia seu ocreas (bottes) habel cum calcaribus parvis juxla modernum modum (porte des bottes avec des petits éperons à la mode moderne). — Plus caractéristique est encore ce détail du costume du niage.de la troisième niche : habel ocreas inserlas liliis, « fleur de lis » ; la traduction est d'Odon Lamothe.
Voilà qui nous ramène à une daté assez basse, mais ce ne sont là, je le répète, que des détails de notre mosaïque. Pour l'ensemble elle parait bien contemporaine de celles de l'ancienne église de Sainte-Marie-Majeure, de Saint-Paul-hors-des-Murs à Rome, du baptistère des orthodoxes de Ravenne ou du mausolée de G alla Placidia. On trouve ici comme là les mêmes scènes de l'Adoration des mages, du Massacre des Innocents, le même cortège d'anges avec des bâtons, d'apôtres et d'évangélistes portant mêmes attributs, souvent les mêmes motifs de décoration (perdrix, perroquets ou autres oiseaux prenant leurs ébats sur le bord d'un vase rempli d'eau). On ne peut que déplorer davantage la différence du sort
1. Cet archange n'est nommé que dans des textes apocryphes (Esdras, IV, c. i, 20; x, 28).
2. Harduin, Acta conciliorum (Paris, 1724), t. III, col. 1940.
3. Ma'rtigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes (Paris, 1877), v° Mages.
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qui a été fait à celles de la Daurade. Avec ses soixante-six figures humaines de grandeur naturelle (si on en juge par la hauteur des colonnes qui séparaient les niches), nos mosaïques pouvaient supporter la comparaison avec les meilleures qui nous sont restées de cette époque. La description d'Odon Lamothe, en nous renseignant pour la première fois sur toute l'étendue de notre perte, ne peut qu'accroître nos regrets.
Nous donnons ici le texte d'Odon Lamothe :
1633'
[Fo 231 v».] — Hoc anno MDCXXXIII, a die 18 octobris ad finem Novembris Ecclesiae sanctae Mariae Deauratae antiquissimum opus musivum triplici aedicularum sacrarum altare majus ambiens ordine, studio et labore sex monachorum Sancti Benedicti Servitarum ejusdem sacratissimae virginis, mundatum, expulveratum, tersum suoque fere primaevo raro et admirando fulgori redditum est.
Cum très aedicularum (vulgo Niches) ordines altare majus Ecclesiae Santae Mariaé Deauratae ex opère musivo confecti (faictes à la Mosaïque) ambiant et illustrent, visum est ad rei notitiam hactenus a multis saeculis desideratâm, singulos ordines singulis numeris esse distinguendos.
Primus igitur ordo brève dabit omnium figurarum intra supremum et altiorem ordinem seu semicirculum expressarum inchoando a parte organi seu Evangelii ad partem Epistolae remotiorem.
Secundus ordo singulas dabit aediculas eodem fere gradu vel modo quo primus, ita ut 1» aedicula secundi ordinis a parte Evangelii remotior sit ipsamet quae conspicitur sub prima supremi et altioris usquedum aedicularum numeris in medio majoris respective tam a parte organi seu Evangelii quam a parte claustri seu epistolae remotiori sacris imaginibus Salvatoris et Sanctae Mariae connectantur.
Tertius ordo exhibebit omnes et singulos scrobiculos duobus primis correspondentes deducta interdum disparitate quae successu temporis accidit tum ad capellas très et exitus a sacristia ad altare majus. De his ergo ad laudem et gloriam Dei opt. max. et Bmae Virginis Mariae sit.
Primus ordo superior qui habet a parte organi aediculas sequentes quorum
Prima sanctorum Innocentium martyrium exprimit : in ea enim cernitur carnifex erectus dislricto super nudum caput gladio occidens quem sinistra capillis apprehensum sustinet : habetque ad pedes occisum
1. Biblioth. nat., ms. lat. 12680.
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unum et ad latus dextrum alium ejulantem et morti prôximum. Figura est in campo aureo et prato viridi. Anonyma. •
2» est Herodis sedentis et mandantis puerorum occisionem, vultu horrido et irato, habetque laeva sceptrum quadratum, inductus rubea et violacea veste, dextram ad carniflcem versus levât: circulo argenteo ornatum habens caput cum hoc verbo HERODIS in campo aureo.
[F° 232.] 3a Creditur esse unius Magi adoratoris ad praesepe currentis vel ab eo per aliam viam recedentis circumdati diademate ad caput, certum quid manu gestantis in campo aureo et prato viridi facie ad cunas Christi versa. Figura anonyma.
4» Est fenestra vitrea in uno arcu habens imagines Sanctae Mariae cum puero Jesu et S. Annae, hinc inde in opère musivo perdices très in quadris aureis conspiciuntur.
5a Creditur esse unius Magi adoratoris, ut supra quia ibi homo exprimitur pileolo tectus manibus junctis adorantis instar, capillis promissis, se sacerdotem indutum praebet. Figura anonyma.
6a Creditur esse unius Magi adoratoris ut supra, quia ibi homo piloleo acuminato tectus sub gravitate magna conspicitnr; dexlra ad pectus expansa cuculo vario et larga manica veste ad pectore ad genua rosulis- et ambulis connexa. Figura anonyma.
7a et 8a Fenestra major a parte Evangelii.
9a Scissa licet ob maximas Ecclesiae rimas et crassum testudinis pondus, hominem judicantem sedentemque monstrat cujus dextrum bracchium apparet vultu horrido et feroci, reliqua ob rimas confusa ad caput habet verbum ERO-D1S.
10a Est imago satis erecta, perfecta et parum inclinata, extalica, bracchiis nudis elevatis, manibus junctis et inter se connexis : caelum faciès respicit plorantis instar, ad cujus pedes visitur Agnus integer et perfectus, habetque ad caput imago hominis verbum istud PASTUR.
lia et 12a Est fenestra major ecclesiae médium arae majoris respiciens quae cum sit ad orientem posita magnum ex se ingerit templo lumen.
Primus etiam ordo superior a parte epistolae remotiori ad fenestram majorem ecclesiae jam ultimo dictam habet x aediculas et figuras ex quibus
Prima quae est e regione martyrii sanctorum Innocentium, licet anonyma, est imago unius Magi in procinctu positi passu incedentis et utraque manu munus suum Christo offerentis.
[F°, 232 v.] 2a E regione Herodis item anonyma sed certi unius Magi in procinctu positi grandi passu incedentis et utraque manu mftnus suum Christo offerentis. Hujus autem imaginis caput ob multorum annorum pluvias amplius non apparet.
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3a Item anonyma sed certe unius magi in procinctu positi grandi passu incedentis et utraque manu munus suum Christo Jesu in ter bracchia Sae Mariae virginis benedictionem dextra annuente offerentis.
4a Est fenestra yitrea ut supra : supra claustrum et meridiem versus.
5a Est imago beatae Mariae puerum Jesum deferentis ad pectus et dexteram suam sacris pueri pedibus supponentes; Jésus autem quasi arridens Magis dextera sua dat benedictionem. Beata autem virgo velata cernitur et calceata et veste tum caerulea tum purpurea mira circumdata varietate; habet ad caput verbum istud sacrum et sanum MA-RIA.
6a Est hominis staturae magnae qui caput ad figuram B. V. M. vertens, dextra stellam monstrat nudo bracchio ad partem laevam desuper apparente; habetque ad caput verbum PAS-TOR.
7a et 8» Fenestra major Epistolae.
9a Est B. V. Mariae quae pileolo ad caput tecta et sedens ut in sede episcopali [pedibus calceatis dextra ad pectus posita majestatem indicans laeva sustmet crucem auream a capite ad pedem dextrum transversam tenet ipsa ad puerum Jesum in praesepio positum sub juvenili vultum, sed veneranda facie conversa habetque ad caput sacrum istud verbum MA-RIA.
10a Est pueri Jesu recumbentis ad praesepe fasciolis ligati; ibi asinus apprime factus a parte Evangelii ad Epistolam respicit Jesum subtus guttur bovis positum et reclinatum.
[F° 233.] Secundus ordo intermedius a parle organi
ad altare majus.
la Juxta organum et supra altare seu capellam sanctae Luciae est Esdras qui sinistra ad laevam palliUm sustinet meditantis instar, dextra ad genu librum defert altare parum respicit, sandaliis utens, habet ad caput verbum istiid ESDRAS.
2a Ahimelech pallio ornatus argenteo habens ad caput verbum ABIMELEC.
3a Philippus manibus junctis (nudo capite) ad pectus Salvatoris imaginem etninus positam respicit reverenter habetque ad caput verbum istud FILIPPUS.
4a Simon subtus fenestram aquilonarem vitream nudo capite Salvatorem respicit, dextra in aéra levata laevam ad fémur plicatam tenet habetque ad caput verbum istud SIMON.
5a Andréas dextram levatam tenet ad imaginêm Salvatoris, laeva togam levatam portât, sandaliis utens cum hoc verbo ad caput : ANDREAS.
6a Lucas parum versus ad imaginêm Salvatoris capite pileolo tecto,
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dextra ad fémur posita, laeva librum ad regionem cordis defert satis magnum, sandaliis utens, barbatus parum et multum senex cum hoc verbo ad caput LUCAS.
7a Joannes juvenis satis librum deauratum et vario colore figuratum laeva sustinet et dextram ad folia defert imaginêm respiciens Salvatoris, nudis pedibus, sandaliis utens, habens ad caput verbum IOHANNIS.
8a S. Petrus senili modo nudo capite et calvo magno redimitus diademate sicut et céleri sandaliis utens laeva togam portât, claves tenet, habetque ad caput verbum PE-TRUS. Haec imago est scissa per médium et a capile ad pedes et ultra ob rimas templi.
9a Uriel Angélus juvenili modo eandem fere quam proximus Michael fîguram praebet habetque ad caput verbum istud ffVR-IHIL.
10a S. Michael redimitus diademate crispantibus capillis alalus multum pendentibus et expansis ad terrain alis laeva triplicem orbem quendam vario colore distinctum et expansum tectum pileolo caput gerit, sandaliis utens in pedibus. Circa caput hoc verbum habet MICAHIL.
[F" 233 v.] lla Dum Salvator Jésus sinistra librum apertum monstrat, benedictionem innuit in aperto libro litteris rubeis portât scriptum PAX VOBISCUM, triplici radio redimitum gerens caput nudum, sed crine multo et venerando ac promisso circa quod habet hoc verbum ' SALVATOR. Ad cujus fere pedes sacra imago B. V. quam Nigram nuncupant inter aediculas 11 Salvatoris et 12 Mariae intra concavum Pyramidis externae et elevatae eminet ante et supra majus altare Deauratae.
12a Sancta Maria juxta imaginêm Salvatoris a capite ad pectus velata, facie admirabili et devota modicum proximam Salvatoris imaginêm respiciens, manus ejus nec pedes elevans et deferens inter se dispares. Habet ad caput verbum hoc GABRIEL.
13a Gabriel eodem modo visitur et gestu ac Michael et Raphaël crispanti crine, pileolo tectus in diadematis formam, alatus juvenili modo, baculum oblongum laeva sustinens, dextra très orbes rotundos et virides elevans et deferens inter se dispares habet ad caput verbum hoc GABRIEL.
14a Raphaël crispanti, crine pileolo tectus in diadematis formam alalus juvenili modo baculum peregrini a capite ad pedes longum laeva sustinens, dextera très orbes rotundos et virides levans ac deferens inter se aequaliter seu proportionaliter dispares habetque ad caput secum verbum istud sic RAFAËL.
15a Paulus modo capite barba modica, diademate redimitus dexteram elevans quasi extasim patiens, laeva librum mngnum rubeum praefert aureis capillis ornatum, habetque ad caput verbum hoc PAULUS.
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16a Matthseus dextra ad pectus posita, laeva librum ad pectus praefert et sustinet, nudis pedibus, sandaliis utens habet ad caput hoc verbum MATTH^US.
17a Marcus dextra pendenti ad genu, sinistra librum aureum ad pectus defert aperto capite facie paalulum ad Salvatorem conversa, cum hoc verbo ad caput MAR-CUS.
18a Bartholomaeus dextra in aéra levata, laeva togans incedentis instar laevatam parum sustinet, sandaliis utens habetque ad caput verbum hoc distincte et clare positum MARTA-LAMEVS.
[F» 234.] 19a Thomas Salvatoris imaginêm respiciens dextera ad eandem levata cum sinistra admirantis instar (hujus figura sub fenestra meridionali posita per médium a capite ad pedes scissa et divisa conspicitur ob rimas templi) habetque ad caput verbum hoc TO-MAS.
20a Jacobus Salvatorem respicit dextera circa pectus elevata et ad populum expansa, sinistra non ita apparente. Habet ad caput verbum hoc IACOBUS.
21a Isaias hujus figura cum sequenti non potuit ex integro clare cognosci ob tenebras, sordes et distantiam et periculum casus : verumtamen fuit omnino tersa et intégra inventa, insigni pallio antiquo circumdata, habetque ad caput verbum hoc ESA-IAS.
22a. Ezechiel pallis ornatus pretiosissimo conspicitur in campo aureo et prato virido habetque ad caput verbum hoc ESE-CHEL.
Terlius et ultimus ordo inferior a parle organi seu Evangelii ad altare majus multum deletur et dbrasus et ab ara majori ad claustrum.
la Capellae lae Luciae quae est juxta organum solo tenus infra binos arcus seu aediculas conclusa sub scrobiculis Esdrae et Abimelech habet versus altare majus scamnum Capitolini et figuras quatuor sequentes (quarum la seu 3a in ordine est) 1.
3a Judas juvenis apparet radio circumdatus in capite cujus imago a pectore ad pedes ex integro abrasa et deleta habetque ad caput verbum istud IV-DAS.
4a Levi facie ad altare majus versa laeva parum elevata et expansa (reliquum corporis truncum et abrasum) ad caput habet verbum istud LEV-VIS.
fja Simeon magno capite oculis patentibus et apertis habet ad caput radio circumdatum (reliquo corporis abraso) verbum istud SEM-EON.
6a Jacob juxta capellàm S. Pétri in qua olim an tiqua janua ecclesiae
1. N'est pas dans le texte du folio 271.
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ad Evangelium habet caput magnum radiis circumdatum cum veneranda facie (reliquo corporis abraso et deturpato) circa quam legitur verbum istud JACOB.
[F" 234 v°.] 7». et 8a In arcu constituente capellam S. Pétri (sub qua olim porta ecclesiae) sunt duae imagines duorum prophetarum quarum. una habet ad caput verbum istud ENOC et altéra e regione, item ad caput verbum istud ELIAS.
9» Isaac facie conversa ad patrem suum habet ad caput verbum istud HISAC.
10a Abraham senex severo et gravi vultu promissa barba, crispanti crine, caput inflectit ad filium circa quod hahet verbum istud HABRA-AM. lla et 12a Duo aut très sequentes non apparent tum ob pyramidem S. Mariae Virginis juxta positam et altare majus constituentem, tum ad portam seu concavum médium altaris primarii respiciens sed fornice munitum, vallatumque sub pedibus aedicularum Salvatoris et Sanctae Mariae ne lumen ad altare usque protendatur. Reliquae aediculae initium habent ab angulo epistolae proximo ad epistolae partem remotiorem et claustri proximiorem transitum sacristiae altare Nativitatis et scamnum senatorum Parlamenti complectentem.
13a Prope sacram imaginêm a latere epistolae ordinis inferioris média tantum prophetae cujusdam apparet faciès anonyma et trunca ob abrasionem inibi olim commotam. Unde sacra imago B. V. Mariae Nigra nuncupata est in Pyramide sua inter Abraham a dextris et istam abrasam a sinistris multum tamen prominens.
14a Noël nudo capite apparet habens verbum hoc NOËL, reliquo totius aediculae abraso.
15a Porta seu via ad sacram imaginêm et sacristiam duas habens in arcu suo se invicem e regione respicientes imagines Prophetarum, sed anonymas tantum ab anno 1628 e quibus una erat ABDIAS, ut et ipse vidi, alteram vero detegere non valui.
16a Ananias, unus e tribus pueris fornacis Babylonicae, rétro altare Nativitatis in angulo expansis manibus respicit praecedentem angelum Gabrielem habetque ad caput verbum istud ANNA-NIAS.
17a Gabriel Angélus (cujus aedicula in angulo epistolae arae Nativitatis) ad quatuor sequentes imagines conversa facie conspicitur sedandas fornacis flammas et rorem ministrandum habetque ad caput verbum istud GABRIEL.
18a Azarias pileolo magno tectus juvenis valde crispante satis crine colobio collo ad genua ornatus stricto, sed vario et pretioso dexteram oxpansam habet item et laevans instar sacerdotis populum salutantis habetque ad caput verbum istud AZARIAS.
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[F» 235.] 19a Mizael pileolo magno tectus juvenili valde modo apparet crispanti satis capillo colobio seu scapulari ornatus stricto, sed vario et pretioso : utramque manum elevatam tenet habetque ad caput verbum istud MIZA-HEL.
20a Benjamin pallio tectus pretioso juvenili facie apparet digitum unius manus digito laevae applicans, cernitur capite aperto in campo aureo habetque ad caput verbum istud appositum BENIAMIN.
21a Joseph juvenis valde manibus junctis aperto capite, sandaliis utens, pallio ornatus pretiosissimo conversus ad fratrem suum Benjamin, conspicitur in campo aureo cum hoc verbo ad caput IO-SEPH.
At in ordine superiori juxta fornicem ecclesia ex eodem opère musivo dispositi graphice xxn psyttaci
Séance du 27 décembre 1904. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Conformément aux statuts, la Société entend les rapports concernant les candidats aux places vacantes, et elle vote, au scrutin secret, l'admission de M. GALABERT, archiviste paléographe, membre résidant; M. J. FOURGOUS, avocat, membre résidant; M. Félix MOURET, à Béziers, membre correspondant.
M. J. DE LAHONDÈS fait passer sous les yeux de la Société une statuette de bronze, une Minerve avec casque orné d'un haut cimier, la chouette posée sur sa main gauche, le bras droit, privé de sa lance, élégamment levé. Eu un mot, une réplique du type figuré sous le n° 5, p. 280, t. II du répertoire de Reinach. Ce bronze provient, assure-ton, de Villeneuve-sur-Lot. Il a été offert au Musée Saint-Raymond ; mais les exigences du vendeur n'en permettront pas l'achat.
M. LE PRÉSIDENT donne lecture du discours qu'il se propose de lire à la séanca publique.
LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL, en dépouillant la correspondance, signale une récente communication faite à l'Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse, dont il importe de cousigner le résumé dans nos procès-verbaux, car il s'agit d'un objet dont
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notre Société s'est plusieurs fois occupé et dont elle a publié une belle photographie dans ses Mémoires, t. XV, p. 67.
Le Camayeu de Saint-Sernin.
M. ROSCHACH lit une étude sur le camée de Saint-Sernin, actuellement . au cabinet impérial de Vienne.
A l'aide de documents inédits ou publiés de façon fort incomplète, il précise, sur quelques points, l'histoire de cette précieuse agate, consacrée au culte augustal et rappelant les succès définitifs des armes.romaines en Dalmatie et en Pannonie, sous les ordres de Tibère et de Germanicus. Il expose, notamment, avec détails, le curieux procès plaidé devant la grand'chambre du Parlement de Toulouse en 1445, sur appel d'un jugement du sénéchal, à l'occasion des démarchés tentées par le cardinal de Saint-Marc, opulent collectionneur vénitien, devenu pape quelques années plu3 tard sous le nom de Paul II, pour s'assurer la possession du camée. Ces tentatives, demeurées infructueuses grâce à la résistance de l'abbaye et de la municipalité, furent renouvelées, sans plus de succès, après l'élévation du prétendant à la chaire de SaintPierre, par l'intermédiaire de son légat, le cardinal d'Arras, Jean de Jouffroy, évéque d'Albi. Abordant ensuite l'histoire de l'enlèvement du camée sous François 1er, l'auteur rectifie l'opinion accréditée sous forme dubitative par le chroniqueur municipal de l'année 1533, Julien Taboue, et répétée ensuite, sans aucune réserve, par tous les historiens, d'après laquelle la célèbre agate aurait été emportée à Rome par le pape Clément VII, Jules de Médicis, après le mariage de sa nièce à Marseille. De nombreux témoignages officiels lui permettent d'établir que François 1", en demandant le camée, après son passage à Toulouse, parlait simplement de le montrer au pape et non de le lui offrir; que ses désirs rencontrèrent une opposition obstinée de la part du Chapitre, de la confrérie des Corps-Saints et du-Conseil de ville, qui ne se résignèrent qu'à la troisième demande. Quand le camée fut remis au roi dans le couvent Saint-Antoine-de-Vienne, le 24 novembre, il y avait déjà quatre jours que Clément VII avait quitté Marseille à bord de la nef du comte Toude pour atterrir à Livourne et s'embarquer sur les galères d'André Doria. Emportée à la feuite de la cour, malgré l'insistance de la députation toulousaine qui suivit le roi jusqu'à la Côte-Saint-André, l'agate augustale paraît avoir séjourné longtemps au château de Fontainebleau, où on la retrouve mentionnée dans un inventaire de 1560 et où Nicolo dell' Abbate, principal auxiliaire du Primatice, en fit une copie peinte. Donné par Catherine de Médicis aux dominicaines de Saint-Louis de
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Poissy, le camée y fut volé, à la faveur des guerres civiles, et passa, après d'obscures péripéties, aux mains de marchands qui le vendirent 10,000 ducats à l'empereur Rodolphe II.
Après avoir rappelé que Rubens, averti par plusieurs lettres de Peyresc, prit un vif intérêt à ce joyau exceptionnel, projeta de le publier avec le camée de la Sainte-Chapelle, en fit faire une gravure sur cuivre, et suggéra à son fils Albert la pensée d'écrire, à ce sujet, une fort érudite dissertation, le lecteur résume sommairement les travaux de Pierre Lambeck, de Bernard de Montfaucon, de Mariette, du marquis Simon Maffei, qui fit dessiner l'agate par Daniel-Antoine Bertoli d'Udine, et la fit graver par François Lucchi, de Venise, et, enfin, ceux de M. Belhomme et de M. de Mély, qui, par le simple rapprochement de l'inventaire descriptif de 1489 et des gravures du dix-septième siècle, a constaté le premier l'indiscutable identité du camayeu de Saint-Sernin: et de la Gemma Augustea, de Vienne. •
Séance du 3 janvier 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. LE PRÉSIDENT souhaite la bienvenue à notre nouveau collègue M. Jean Fourgous, et rappelle les preuves qu'il a déjà données de son zèle et de son savoir archéologique. Il fut un des meilleurs disciples de notre regretté M. Brissaud ; il est, de plus, un habile photographe. Il voudra réaliser toutes les espérances que sa jeunesse nous inspire.
M. le Président, suivant la tradition maintenant établie, a échangé, particulièrement avec le savant et infatigable Président de la Société archéologique du Tarn-et-Garonne, les meilleurs souhaits de nouvel an.
A la carte, accompagnée des mots suivant le sigle antique : VSLM. Valele Socii Làborate Magislri,
M. le chanoine Fernand Potier a répondu :
Cura soror, veterum assidue memor esto parentum,
Ardentir, prisci temporis acta, coli, Sicque novum, studio, traduces leniter annum Quod, credi, ex toto corde peropto tibi ! BULL. 34, 1905. 15
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M. PLASSARD donne lecture du Rapport sur le concours qu'il doit lire en séance publique et qui est approuvé.
M. l'abbé GALABERT, membre correspondant à Aucamville, a envoyé la notice suivante :
Hôtels de ville de Montpezat et de Caussade en Quercy.
Quand, après la guerre de Cent ans, la prospérité et l'abondance furent revenues dans notre pays de Guienne, les bourgs édifièrent leurs églises, leurs hôtels de ville et leurs halles. Les églises sont restées; en fait de halles de l'époque (du moins en pierre), je ne connais que celle de Caylus qui vient d'être classée au nombre des monuments historiques; encore jadis faisait-elle corps, m'a-t-il semblé, avec l'hôtel de ville et les boucheries.
Quant aux hôtels de ville proprement dits, ils ont disparu ou ils ont changé de destination, comme partie de celui de Martel, fort remarquable d'ailleurs 1. Il est donc utile de faire connaître par les documents ces monuments dont les pierres ont été dispersées.
Celui de Montpezat-en-Quercy fut construit en 15112. Les consuls y avaient réuni, selon l'habitude du Moyen-âge, les divers services municipaux, l'horloge, la halle, le mazel (du latin macellum) ou boucherie, le poids public, les mesures.
Le rez-de-chaussée, ouvert par des arceaux en ogive, servait de halle ; on l'appelait loge, comme on dit encore à Saint-Antonin, à Verfeil et même sur la plage méditerranéenne. Sur les côtés se trouvait la boucherie 3. Dans les bourgs plus importants, comme à Caussade, il y avait, disposées de même, la grande et la petite boucherie : la grande, qui fournissait la viande de choix ; la petite, où l'on débitait la viande de vache, de brebis et de chèvre 4.
A "Caussade encore, la statue de saint Barthélémy, patron de la corporation des bouchers, dominait les étaux; elle fut momentanément déplacée quand fut baillée à l'entreprise la charpente de l'ala ou hôtel de
1. Congrès archéologique de France, XXXII" session, p. 361. Nous ne parlons pas des hôtels de ville de Cordes ni de Saint-Antonin ; ils sont antérieurs et paraissent bâtis pour une autre destination.
2. Archives de Montpezat, BB 28, hwentaire.
3. « Per lo loguier de los taulas acostumadas de loga al entorn del cossolat et mazel del d. loc de Montpezat. » (Archives de Montpezat, Comptes consulaires de 1529.)
4. Archives communales de Caussade, DD 1.
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ville, le 11 mars 15151. Ladite charpente coûta ,139 livres tournois; l'entrepreneur soumissionnaire fut le noble Hugues Arno; il fut payé sur le prix du fermage annuel des poissons péchés dans les fossés de la ville.
Défense expresse était faite par les consuls de Montpezat d'écorcher aucun animal dans la boucherie, ni d'y laisser entrailles, cornes ou autres détritus 2.
A Montpezat, comme à Caussade du reste, on voyait, encastrées dans le mur, des auges de pierre qui servaient de mesures pour le grain; on les voit encore à Caylus, on les voyait naguère à Verfeil (Tarn-etGaronne).
Outre la grande balance 4, il y avait aussi une balance fine pour peser le safran 5, dont la culture en grand se poursuivit jusqu'au dix-huitième siècle 8.
La façade de l'hôtel de ville de Montpezat, ouverte sur la porte du Morcadial ou gâche du Marché (ainsi à Caylus), était décorée au premier étage d'une tourelle en encorbellement qui portait l'horloge 7.
1. « Item los que ho pendran affa levaran sanct Bertholmieu devant lo obrado de R. Cayla, per pendre l'aiga a fiai an la dicha ala.
« ... Et lo noble Hue Arno hi sobredisset mens i lieura; et y foguet lieurat a sept vins mens una lieura. »
Nous estimons que avec ce bail, qui se trouve in extenso au cadastre de Caussade de 1458, f° 245, un homme de l'art pourrait rétablir la physionomie du monument.
Quant au mot ala, voici ce que dit Du Cange, v° Halla : « Domus.domicilium, aula, palatium. Maxime vero ita appellant nostri aulas majores et publicas in quibus communioe congregantur pro communibus negotiis, ùbi etiam mercatores merces suas venum exponunt. »
2. « No tendran ny laissaran negunas banas ny negunas ventralhas del bestial que tuaran, ny negun autre oresie, et tendran net lo dit masel, et lo orresie farangitar deffora lo d. mazel. » (Arch. de Montpezat, Livre des Mazels, HH1, art. in.)
3. « Item'lo vi jorn de desembre l'an desus aven fach recubri la cuberta que es en las mesuras... Per adobar certanas qartieras que avia en lo eossolat. » [Comptes consulaires de 1529.)
4. « Item may lo v de desembre... al entorn del cossolot et per lo pes. » (Idem.)
5. « Item l'an desus et per la fiera des Advens avem logada una balansa per pesa lo saffra et autra marchandisa, a causa que la balansa de la vila no es pas bona ny flna per peza lo d. safra; avem ipagat del loguie de la d. balansa la soma de v sos torn. » (Idem.)
6. « Le 10 novembre 1658, les collecteurs de l'impôt éprouvaient de la difficulté à percevoir les tailles, attendu que les cultivateurs n'avaient pas encore vendu leur récolte de safran. En 1686, les pauvres gens ne se faisaient pas faute de piller la fleur de safran, bien qu'il fût expressément défendu d'entrer dans les safranières. » (Archives de Caussade, Délibérations consulaires.)
7. Lo gaychil del rebotge... A Caussade, avec l'horloge, était le beffroi muni-
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Le premier étage comprenait deux salles : la petite, par derrière, était la chambre des archifs, où, dans un grand coffre, étaient conservés les titres, papiers et parchemins de la communauté, soigneusement classés et cotés par lettres distinct!ves et numéros.
« Pendant les guerres de religion, la chambre des archifs servit d'arsenal ; on y voyait dans un coin un baricquot de poudre, d'un autre côté un faisceau d'armes, arbalètes, mousquets à rode, quatre alabardes, des moules à balles, des mèches à feu, un tambour forcé *. »
La grande salle, qui servait de concislory ou bien de réunion poulies assemblées consulaires, était appelée auditoire quand les consuls y siégeaient en qualité de juges au criminel ; l'histoire dit qu'ils s'acquittaient avez un gros bon sens qui déconcertait les scavanteaux" 1.
Cette salle était éclairée par trois croisées que les consuls de 1527 voulurent orner de vitraux; ils s'adresssèrent pour cela à Jean Couderc, verrier, de Caussade; à cette époque de décentralisation, nos petites villes avaient des artistes qui ne pourraient pas y vivre aujourd'hui.
Jean Couderc se chargea de faire, dans le court délai de seize jours, au prix de 4 livres tournois, plus la nourriture au jour de la pose, six panneaux à petits carreaux, montés en plomb et retenus par des vergettes de fer; dans chacun d'eux il peignit les armes parlantes de la ville : d'azur à la balance d'or.
Suivant les instructions du Comité des Beaux-Arts, nous donnons in extenso le bail à besogne; c'est un document de plus pour l'histoire de l'art.
L'hôtel de ville de Caussade fut détruit en 1628; celui de Montpezat tombait en ruines et fut démoli à la Révolution.
« L'am mil VcXXVlI et lo XXVIII jorn del mes de décembre, a Montpezat en Quercy, satges homes Gualhard Causse, Johan Quercy, merchans, et Me Arnauld Hugounenc, cossols per l'an presen de Montpezat, tan per els que per tota la comunotat de Montpezat, balheguo a far en la maiso comunal del d. Montpezat, a Johan Coderc, beyrie, filh d'autre Johan, de Caussada, presen, so es assaber très corssieras fenestratges, conprendan sfes panneux, an dos pactes que s'en segon : per los d. panneoux, seran de petit carreux, e n'y aura en cada panneou ung escussol am las armas de la vila, so es lo camp de pers color de cel, et las balansas d'or, et aquellas armas seran en cada panneou, que n'y
cipal qui sonnait le couvre-feu, tous les soirs à dix heures. Le couvre-feu est encore marqué à Caussade par cent coups de cloche.
1. A Buzenac, La légende du pont de Beloy..., publié dans le Bulletin archéologique de Tarn-et-Garonne, 1903.
2. A Buzenac, La légende du pont de Beloy..., déjà cité.
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quai vi. Item lo d. Coderc sera tengut de fornir tôt plom et verges de fer assos despens, et aquo dessus sera fach et perfessit d'ayssi a xvi jorns prochans venens. Et per far so dessus los d. senhors ly donan la soma de quatre lieuras tornes, et la despenssa quant las d. verrieras se pausaran ; de laquala soma lo d. Coderc a aqui metes près des d. cossols vingt sol tornes; et lo resto ly am promes de pagar de jorn en jorn, quant aura perfissida la d. obra. « DE RUPPK, notarius1.- »
Séance du 10 janvier 1905.
Présidence deM. J. DE LAHONDÈS.
M. LE PRÉSIDENT souhaite la bienvenue à M. Galabert. Son titre d'archiviste paléographe le désignait à notre estime, et sa situation à la tête du dépôt d'archives du donjon permet de compter que ses communications seront nombreuses et importantes. Lui aussi apporte à la Société l'inestimable trésor de sa jeunesse. MM. Fourgous et Galabert nous font présager pour notre Compagnie comme un renouveau d'études et de découvertes.
M. Louis DELOCME, trésorier, fait le rapport semestriel d'usage sur l'état de la caisse. Le budget des dépenses est chargé d'articles inattendus, l'Administration des contributions directes ayant iiOr posé pour la première fois les Sociétés savantes de Toulouse. D'autre part, la Société doit contribuer à certains frais généraux de l'hôtel des Académies.
M. Emile CARTAILHAC pense que la Société archéologique sera obligée de demander à ses membres une cotisation annuelle si elle ne veut pas supprimer une partie de ses publications.
La Société vote des remerciements à M. le Trésorier. II est procédé aux élections, conformément aux statuts, pour la formation du bureau.
Sont successivement élus au scrutin secret :
MM. J. DE LAHONDÈS, président;
Emile CARTAILHAC, secrétaire général ; le baron DE RIVIÈRE, archiviste. FOTJRGOUS, secrétaire-adjoint.
1. Arch. de Montpezat, Livre des Mazels, HH 1, f° LIX. Communiqué par M. Le Boscus, membre de la Société archéologique, de Tarn-et-Garonne.
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Le Directeur et le Trésorier ne sont pas soumis cette année à cette formalité.
M. PASQUIER, en remettant le volume des comptes rendus du Congrès archéologique de France, session de Poitiers, insiste sur l'intérêt que prennent de plus en plus, grâce à une très habile direction, la Société française d'archéologie et son Congrès annuel.
Lecture est donnée d'un document envoyé par M. Aug. VIDAL, membre correspondant à Albi.
Un certificatoire de l'officialité d'Albi en 1573.
Le document qu'on va lire offre un intérêt purement anecdotique. Cependant, il nous a paru, pour sa rareté, digne d'être recueilli. Il date de 1573. La France était en pleine guerre religieuse; l'Espagne se défendait de tout son pouvoir contre l'invasion du protestantisme, qui était l'occasion de tant de troubles par delà ses frontières pyrénéennes. Elle exigeait des Français qui se rendaient sur son territoire un certificat de catholicité.
C'est un de ces passeports religieux que nous avons relevé dans les registres du notaire albigeois Gorsse (étude de M. Reynès). Comme il est rédigé en latin, nous nous permettons d'en donner une longue analyse. Il émane de Pierre Combanne, docteur en théologie et en décrets, chanoine, pénitencier et officiai d'Albi.
Donc, le 6 janvier 1573, dans l'église épiscopale de Sainte-Cécile, à l'heure de vêpres, comparaissait maître Jacques Falcon, praticien d'Albi. Il expose que la noble demoiselle Antoinette de Caraman de Foix, issue d'une noble famille, d'une race de comtes et de vicomtes, épouse de noble et puissant Biaise de Mirabel, baron de Val de Conac, dans le comté de Roussillon, seigneur de Saint-Hippolyte et de Rosières en Albigeois, a l'intention de se rendre en Espagne pour certaines affaires qui intéressent son mari. Il lui est nécessaire d'établir qu'elle est bonne et fidèle catholique, qu'elle n'est point suspecte d'hérésie. Falcon affirme que, presque tous les jours et aux solennités religieuses, elle se confesse et reçoit la communion. Mais sentant que son affirmation aurait peu de poids auprès du pénitencier, si elle n'était appuyée de témoignages plus désintéressés que le sien, il s'était fait accompagner par un certain nombre de témoins. C'est d'abord le frère Sausce de Riat, de l'ordre de Saint-François, prédicateur du monastère de Sainte-Claire d'Albi. Il déclare qu'il a très souvent entendu en confession la demoiselle Antoinette de Caraman de Foix, qu'il lui a souvent administré le sacrement d'Eucha-
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ristie ; qu'elle est très fidèle et très dévote chrétienne. Comparaissent ensuite noble FrançoisRouave de Comminges, protonotaire du Saint-Siège apostolique, chanoine de Sainte-Cécile; vénérables Jean Reynès, licencié, chanoine et chantre; Bernard Grimaut, Antoine Carrier, prêtres bénéficiers de Sainte-Cécile; frère Félix, de l'ordre de Saint-François, attaché au monastère de Sainte-Claire, et Pierre Jourdan, prêtre de la cathédrale. Tous déclarent qu'Antoinette de Caraman de Foix est dévote et fidèle chrétienne, de bonne vie, de conversation honnête, ni prévenue ni suspecte d'hérésie ou de tout autre crime. Falcon demande qu'attestatoire de ces déclarations soit retenu par le notaire greffier de l'officialité et remis à celle dont il est mandataire, pour lui servir en temps en lieu. C'est pour se conformer à cette demande que le péniteneier délivre les lettres qu'il signe et scelle de son sceau.
Une pièce conservée aux archives départementales du Tarn (E 259), datée de 1579, nous permet de^compléter les renseignements qui précèdent. C'est la vente de la place de Saint-Hippolyte, commune de Monestiés, par la demoiselle Antoinette de Caraman de Foix. Il est constaté dans ce documeut, établi à Barcelone, que « dame Anthoinette de Cara« maing et de Foix, baronesse de Conac en Espaigne, seigneuresse haulte, « moyene et basse de la place de Sainct Ypolit, au royaulme de France « et province de Languedoc, séneschaussée de Tholouse et dans le dio« cèze d'Alby », est héritière universelle de feu son mari, Biaise de Mirabel, décédé « pendant le temps de six ans qu'il y a qu'elle est en Espaigne ». Antoinette était donc partie d'Albi dès qu'elle avait été en possession dn passeport qui lui avait été délivré par l'officialité, et, depuis cette époque, n'avait pas quitté Barcelone.
Biaise de Mirabel avait laissé, à son décès, quelques dettes; de plus, sa succession avait provoqué un procès. Les créanciers s'étaient emparés d'une partie de ses biens Le document ajoute : « Pour à quoy prouvoir a et aussi pour subvenir aux extrêmes afères qu'elle a en la dicte ville de « Barcelone, pour occasion de son procès et entretènement de sa perte sonne et pour accomplir en partie les charges que son d. feu mary « luy a laissées », Antoinette se décide à vendre la seigneurie de SaintHippolyte avec son château, le bois adjacent, douze séterées de terre labourable, deux prés dits l'un le Prat nou, l'autre le Prat de sos aygues, le tout dépendant du château. Elle joint à la vente la justice haute de la place de Rosières que Jacques de Rabastens, vicomte de Paulin, avait, dans le temps, disputée à son mari, et qu'un arrêt du Parlement de Toulouse avait adjugée à de Mirabel.
C'est Bourjine d'Olmières, seigneuresse de Saint-Sernin-de-Mailhoc, épouse de noble Durand de Lustrac, chevalier de l'ordre du roi, qui
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devint acquéreur de ces deux seigneuries, au prix de 4(000 livres tournois. Sur cette somme, 3,600 livres devaient, dans les quinze jours, être versées entre les mains de Bernard des Plas, seigneur de Gragnague et maître des ports et passages des sénéchaussées de Toulouse, de Bigorre et d'Armagnac; les 400 livres restantes étaient payables dans deux ans, soit à Barcelone, si l'état des troubles du pays n'y mettait pas obstacle, soit à Toulouse, entre les mains de des Plas ou d'un marchand solvable. L'acte de vente avait été reçu par le notaire Piezona.
Antoinette de Caraman de Foix, qui n'avait plus d'intérêts en France, mourut trois ans après à Barcelone. Le fonds des Jacobins d'Albi, conservé aux archives départementales du Tarn, nous apprend qu'elle testa en 1582; elle léguait 300 livres de rente aux Jacobins de Toulouse et d'Albi. Le recouvrement de cette rente devait être très difficile, puisque les Jacobins d'Albi la cédèrent, en 1618, pour un capital de 335 livres, à Géraud Lebrun, receveur des tailles du diocèse.
« Petrus Cumbanus, sacre théologie et decretorum doctor, canonicus, penitentiarius, et officialis Albiensis, cunctis fidelibus christianis présentes nostras litteras inspectais salutem. Notum facimus et harum tenore attestamur quod, die et anno infrascriptis, intra ecclesiam episcopalem sancte Cecilie Albie, hora vesperarum, comparait magister Jacobus Falcon, practicus Albie, coram nobis, narrans quomodo nobilis domicella Anthonieta de Caramaing et Foix, ex nobili prosapia et génère comitum et vicecomilum procreata, uxor et conjungata cum nobili et potenti viro Blasio de Mirabel, barone de Vale Conachi, in comitatu Rossilhoni, et domino de Sancto Yppolito et Roseriis, prétendit ire apud Hispanias pro certis negotiis et bonis dicti de Mirabel ejus viri ; et ad demonstranduin quomodo ipsa est bona et fidelis catholica christiana et nullomodo de heresi suspecta, que ferre singulis diebus divinis et feslinitatibus confiteturet sacrosanctum Corpus Christi recipit; et ad has fines produxit, coram nobis, fratrem Sanxium de Riat, ordinis Sancti Francisci, predicatorem monasterii Sancte Clare Albie, qui dixit dictam domicellam sepissime in confessione sacramentali audivisse et eidem corpus Christi ministrasse, esseque fidelissimam et devotissimam christianam ; necnon nobilem Franciscum Roavinus de Convenis, prothonotarium sancte sedis apostolice, canonicum in dicta ecclesia Albiensi, venerabiles viros et dominos Johannem Reynès, licenciatum, canonicum et cantorem, Bernardum Grimault, Anthonium Carrieri presbiteros et beneficiatos in eadem ecclesia, fratrem Felicem ordinis sancti Francisci, dicti monasterii sancte Clare, et Pelrum Jordan, presbyterum dicte ecclesie ; qui omnes predicti dixerunt et affirmaverunt dictam domicellam Anthonietam de Caramaing et Foix esse devotam,
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fidelem christîanam, bone vite et conversationis honeste, nullomodo de heresi nec de aliquo crimine preventam minusque suspectam. Quibus testibus per nos, juramento medio, auditis, idem Falcon, nomine quo supra, petiit premissa pro notorio haberi et certificatoriam seu attestationem per notarium, curie noslre graffarium ordinarium, retineri et eidem domicelle expediri ad eidem serviendum loco et tempore; presentibus magistro Johanne Mitissudi, vicarii dicte ecclesie, et Francisco Solierio, clerico dicte civitatis Albie et pluribus aliis. In quorum fidem présentes litteras per nos signatas et sigillatas et per dictum nostrum graffarium presignatas duximus concedendas. Actum Albie, in dicta ecclesia, die décima tertia mensis Januarii, anno dpmini millesimo quingentesimo septuagesimo tertio.
« De dicti domini penitentiarii et offlcialis mandate, « GOBSSE, notarius. »
Séance du 17 janvier 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
En dépouillant la correspondance, le SECRÉTAIRE GÉNÉRAL signale dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de France, t. III, 1902, un article de M. Pasquier sur la décoration du choeur de la cathédrale de Rieux en 1527.
Le journal le Lauraguais, de notre confrère M. le baron Desazars de Montgailhard, continue à faire une large part aux articles historiques; le numéro du 15 janvier 1905 reproduit une notice du Dr J.-B. Noulet sur les pierres de Naurouse et leur légende, extraite des Mémoires de l'Académie des sciences de Toulouse. Parmi les notes dont M. le baron Desazars a enrichi ce texte, il en est une surtout que nous devons retenir parce qu'elle apporte un renseignement nouveau pour expliquer le nom de Naurouse.
« Il n'y a pas eu « changement de nom », comme le dit M. Noulet, mais simplement différence de désignation pour le même lieu.
« Aujourd'hui encore, on le désigne dans le pays tantôt sous le nom de « Pierres d'Alsonne ou d'Elsonne » et tantôt sous le nom de « Pierres de Naurouse ». Le nom d'Alsonne ou d'Elsonne est le nom gallo-romain de l'ancienne Mansio d'Elusione qui se trouvait non
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loin de là sur la voie romaine, ainsi que l'indique l'Itinéraire de Paris à Jérusalem. Quant au nom de Naurouse, c'est le nom patois venant de ce que cet endroit est toujours « venteux », aourous. Le mot de Naurouse devrait donc s'écrire plus correctement N'aourouso, signifiant En Aourouso. »
M. LE PRÉSIDENT apprend à la Société le deuil qui vient de frapper un de ses membres, et il se fera auprès de M. de Saint-Raymond l'interprète de nos sentiments de douloureuse sympathie.
MM. Félix RÉGNADLT et J. FOTJRGODS, membres résidants, offrent de belles séries de cartes postales, les unes de la Haute-Garonne, Saint-Bertrand, etc., les autres du Lot.
M. LÉCRIVAIN, membre résidant, en offrant son volume sur l'Histoire Auguste que l'Institut a couronné l'an dernier, ajoute la communication suivante :
Les usurpateurs gaulois du troisième siècle dans l'Histoire Auguste.
Depuis les travaux de De Witte 1, de Schiller 2, il n'y a plus grand'- chose à dire de nouveau sur les usurpateurs gaulois du troisième siècle. Les documents littéraires et archéologiques, les médailles n'ont presque plus rien à fournir. Cependant, la critique attentive de notre principale source, des biographes de l'Histoire Auguste 3, peut encore conduire à quelques résultats appréciables.
Dans mes Etudes sur l'Histoire Auguste*, j'ai été amené à cette conclusion que, pour les Trente Tyrans, le compilateur Pollion n'avait utilisé que deux sources : l'historien grec Dexippe que nous connaissons par Zosinie, et une Chronique d'un auteur inconnu, rédigée probablement sous Dioclétien, qui a été une des sources principales des Caesares d'Aurelius Victor et d'Eutrope, et qu'avec Enmann j'ai désignée par le nom de Chronique impériale*. Or, Dexippe s'intéressait fort peu aux événements de l'Occident; la source principale pour les usurpateurs occidentaux a donc été la Chronique impériale, souvent mal compilée, mal abrégée. Par suite, pour les faits essentiels et certains, la tra1.
tra1. sur les empereurs qui ont régné dans les Gaules au troisième siècle.
2. Geschichte des rômischen haiserzeit. Gotha, 1883, I, 2. pp. 827 et suiv.
3. Scriptores hislorioe Augustoe. éd. Peter, 2e éd. Trig. tyr., 3, 1-11, 424-24.
4. Paris, Fontemoing, 1904.
5. V. mes Etudes, pp. 423-436.
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dition de Pollion, qui figure à la fois dans les Vies des usurpateurs et dans celle de Gallien, est la même que celle de Victor et d'Eutrope; et on peut dire d'avance que tous les détails qu'il donne de plus sont de son invention et complètement apocryphes. Pollion trouvait peu de chose dans ses sources sur les usurpateurs; pour plaire à ses lecteurs, il leur a fourni les inventions et les falsifications dont il est coutumier.
Une de ses idées de prédilection est le dénigrement de Gallien. C'est à ses dépens qu'il exalte tous les usurpateurs, qu'il les transforme en héros. Aureolus, Ingenuus, Ballista, Odenath, Zenobie ne nous intéressent pas ici; tenons-nous-en aux usurpateurs gaulois. —Pour nous donner d'abord une idée favorable du premier d'entre eux, Postumus, il invente une de ces lettres apocryphes qui remplissent l'Histoire Auguste, une prétendue lettre de Valérien aux Gaulois*. J'ai montré en général* le caractère apocryphe et le mode de fabrication de ces documents. Celui-ci est un des plus évidemment faux 3. Il renferme une prédiction absurde sur lé rôle de Postumus, une adresse vague « ad Gallos », des fonctions imaginaires « Transrhenani Umitis dux, Galliae praeses »; la source disait simplement qu'il commandait l'armée du Rhin 4. Postumus, chargé de l'éducation et de la garde d'un des fils de Gallien, de P. Cornélius Lucinius Valerianus, l'aîné, et non de Saloninus, le plus jeune (comme le dit à lort Pollion d'après Dexippe5), avait assiégé dans Cologne le prince et Sylvanus, les avait fait tuer et s'était proclamé empereur. Telle était la version vraie, celle de Dexippe; Pollion la connaît et la donne en partie. Mais il fait semblant de refuser d'y croire parce qu'elle ne convenait pas au caractère de Postumus, et il invente, en la mettant au nom de plerique 6, une autre version absurde, mais beaucoup plus honorable pour son héros : ce sont les Gaulois qui, détestant Gallien et ne pouvant supporter le règne d'un enfant, auraient tué le prince, proclamé Postumus, et celui-ci aurait été ainsi accepté par toute l'armée et par tous les Gaulois. La fausseté de ce récit saute aux yeux; depuis longtemps, les Gaulois, en tant que population civile, sont inertes, passifs; c'est l'armée seule, l'armée barbare du Rhin qui agit. Pollion exagère encore son panégyrique ; il oppose aux débauches et à la paresse de Gallien l'activité de Postumus 7. Il lui attribue une restaura1.
restaura1. 8-11.
2. Etudes, pp. 45-101.
3. Ibid., pp. 52-53.
4. Caes., 33, 7.
5. Zos., I, 38; Zonar., 12, 24.
6. Plerique (3, 2).
7. 3, 4. ■
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tion complète de la Gaule, l'expulsion de toutes les tribus germaniques; il nous le montre, comme dans la Vie de Gallien 1, devenu l'idole de la Gaule reconnaissante. Que Postumus ait remporté quelques succès sur là frontière, qu'il ait lutté courageusement, c'est certain, puisque Aurelius Victor 2 le rapporte également d'après la même source; mais qu'il ait refoulé complètement les Barbares, c'est ce qu'on ne peut pas admettre. Ensuite, la bonne notice sur la guerre entre Postumus et Gallien, dans laquelle ce dernier est blessé, et qui est déjà plus complète dans la Vie de Gallien s, vient évidemment de Dexippe *; mais ici Pollion a sottement dissimulé la défaite infligée par Gallien à Postumus et à son allié Victôrinus, alors qu'il l'avait racontée précédemment dans la Vie de Gallien et qu'il avait dû en cette occasion rendre justice au malheureux empereur. Pollion donne pour le règne de Postumus la durée de sept ans; Eutrope donne la durée exacte, dix ans (258-268); mais les sept années peuvent à la rigueur s'appliquer à la période postérieure à 281, où Gallien commence la lutte contre Postumus. — En somme, sauf un petit noyau historique certain, tout le reste de la Vie de Postumus, y compris la réflexion sur les Gaulois « novarumrerum semper cupidi », est de l'invention du compilateur.
Postumus le jeune, appelé par son père César, puis Auguste, fut tué avec lui au moment de l'usurpation de Laelianus ; il fut très habile dans l'art de la déclamation. Voilà ce que dit de lui son biographe. Postumus le jeune est une création de Pollion. Pour trouver le nombre classique des trente tyrans, il a inventé six biographies, presque de toutes pièces : Postumus le jeune, Victôrinus le jeune, Saturninus, Tetricus le jeune, Timolaiis, Celsus. Il n'y a pas une médaille au nom de Postumus le jeune; il n'a donc, sans doute, pas existé; Pollion lui prête, comme à des héros du même genre, Gordien II, Timolaùs, des talents littéraires.
Il est très difficile d'établir la série chronologique des empereurs gaulois entre Postumus et Tetricus. De Witte et Schiller ont adopté des systèmes que nous ne pouvons suivre. Les sources grecques ignorent Lollianus (de son vrai nom Laelianus), sauf Jean d'Antioche, mais qui, sur ce point, copie Eutrope. Pollion n'a donc pu utiliser que la Chronique Impériale, mais en la défigurant maladroitement. D'après lui, Laelianus se serait révolté contre Postumus, l'aurait tué, aurait ensuite arrêté de nouvelles invasions de Germains et aurait été, à son tour, tué
1. Vit. Gall., 4, 3-5.
2. 33, 7, « explosaque Germanorum multitudine ».
3. 4, 4; 7,1.
4. Zonar., 12, 24, p. 598.
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par ses soldats 1 révoltés, d'accord avec le fils de la mater castrorum Victoria, Victôrinus. D'abord, ces succès de Laelianus sur les Germains sont encore une invention de Pollion, qui continue à opposer à la mollesse de Gallien le courage de ces usurpateurs qu'il appelle « asserlorés Romani nominis 3 ». Il avoue lui-même qu'on ne savait rien sur Laelianus3- En second lieu, la véritable tradition se trouve dans Victor et dans Eutrope 4 : Laelianus est battu et tué par Postumus; celui-ci, à son tour, est tué par ses soldats à qui il n'avait pas voulu laisser piller Mayence révoltée avec Laelianus. Le successeur immédiat de Postumus a donc été, à notre avis, non pas Laelianus, mais Marius.
Marius 5, ancien forgeron, règne trois jours. Pollion suit encore ici la Chronique pour l'origine de Marius et la durée de son règne, sauf qu'au lieu de biduum 6 il met, par erreur, triduo''. C'est tout ce qu'on savait sur ce règne; par conséquent, les longues réflexions de Pollion, les anecdotes sur la force de Marius, son discours à ses soldats sont de pur remplissage. "
Marius a pour successeur Victôrinus. Les faits historiques de la Vie de Victôrinus, son association à l'empire par Postumus, la_défaite des deux associés par Gallien, les débauches de Victôrinus, son assassinat a Cologne par un actuarius, se retrouvent en partie dans Victor et Eutrope et viennent de la Chronique. Tout le reste, y compris l'extrait du prétendu livre de Julius Atherianus sur Victôrinus, est une falsification de Pollion.
Victôrinus le jeune, petit-fils de Victoria, créé César au moment de l'assassinat de son père et tué avec lui, est une création de Pollion, ainsi que l'épitaphe des deux Victorini.
Nous arrivons à Tetricus l'ancien. Après la mort de Victôrinus, l'empire est transmis par Victoria à Tetricus, sénateur 8, gouverneur de la Gaule, Auguste, et à son fils César. — Cette notice répète Loll., 5, 3, et Viclorin., 6, 3, avec quelques additions et quelques suppressions; le fond, d'ailleurs exact, vient de la Chronique 9. Nous savons, d'autre
1. 3, 7; 5, 1-2.
2. 5, 5.
3. 5, 8.
4. Caes., 33, 7-12; Eutrop., 9, 9,
5. 8, 1-13.
6. Eutrop., 9, 9; Caes., 33, 9.
7. A en juger par le nombre de ses monnaies, Marius a peut-être régné plus de trois jours.
8. Caes., 33. 12; Eutrop., 9, 9. Cf. De Witte, Rev. num., 1859, p. 458; Eckhel, 7, 447.
9. Caes., 33, 14; Eutrop., 9,10.
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part, que Tetricus avait la Bretagne et une grande partie de la Gaule ; Claude avait gardé l'Espagne et une partie de la NarbonnaiseJ. Mais pour exagérer l'importance de Tetricus, Pollion a transformé son vrai titre de gouverneur d'Aquitaine en un titre imaginaire, celui de gouverneur de toute la Gaule, et il y a ajouté sa parenté avec Victoria.
Viennent ensuite 2 les succès de Tetricus sur les Barbares et sa soumission volontaire à Aurélien 3. Les succès de Tetricus sont apocryphes; les révoltes de ses soldats et sa soumission à Aurélien viennent de la Chronique, qui avait beaucoup plus de détails 4, et citait notamment la révolte contre Tetricus du gouverneur Faustinus et le lieu de la bataille, Châlons-sur-Marnes. La notice qui suit, sur le triomphe d'Aurélien, vient de la Chronique 6; mais le caractère d'Aurélien est une addition de Pollion. Vient ensuite 7 la nomination de Tetricus comme « corrector lolius Ilaliae, id est Campaniae, Samni, Lucaniae, Brittiorum, Apuliae Calabriae, Etruriae atque Umbriae, Piceni et Flaminiae omnisque annonariae regionis ». Cette notice a donné lieu à de nombreuses discussions sur le caractère exact de la fonction conférée à Tetricus par Aurélien. La source est la Chronique, qui faisait certainement de Tetricus un corrector Lucaniae 9. A mon avis, l'énumération des provinces est une glose de celui qui a réuni toutes les biographies de l'Histoire Auguste à l'époque de Constantin 9. En second lieu, il devait y avoir, dans le texte de la source, corrector Ilaliae regionis Lucaniae. On connaît, en effet, au troisième siècle, des correcteurs extraordinaires de certaines provinces d'Italie, Vénétie, Gampanie 10; ils s'appellent, jusque sous le règne de Dioclétien, correclores Ilaliae 11, plus exactement corrector Ilaliae (regionis) transpadanae™; il se peut donc qu'on ait eu besoin d'un correcteur spécial pour cette région de la Lucanie, toujours en proie au brigandage; puis, Dioclétien établit définitivement les correcteurs réguliers des provinces d'Italie, de sorte que Vopiscus, qui écrit
1. C. inscr. lat., 7, 1150-1154; Rev. épigr. du Midi, 1895, p. 525.
2. 24, 2-3.
3. Cf. Vit. Aurel., 32, 3-4.
4. Caes., 35, 4; Eutrop., 9, 10-13.
5. Sur le règne de Tetricus et l'extension des invasions en Gaule à cette époque, voir Homo, Essai sur le règne de l'empereur Aurélien. Paris, 1904, pp. 114-121.
6. Eutrop., 9, 13; Caes., 35. 5.
7. 24, 5.
8. Eutrop., 9, 13; Caes., 35, 5. Cf. Vit. Aurel., 39, 1.
9. Voir, sur le rôle de ce compilateur final, Etudes, pp. 395-398.
10. Epitome, 38, 6; Caes., 39, 10 ; C. inscr. lat., 10, 304, 1655.
11. C. inscr. lat., 6,2817, 1707, 1418-1419; 5, 8205; 11,1594.
12. 6, 1418-1419.
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après la réforme, et ensuite Victor et Eutrope écrivent simplement corrector Lucaniae; mais Pollion, pour grandir Tetricus, a fait de lui un corrector totius Ilaliae. C'est une absurdité. Aurélien eût-il confié toute l'Italie à son ancien ennemi et à un sénateur?
On nous dit de Tetricus le jeune 1 que, nommé César par Victoria, il fut mené en triomphe avec son père et nommé ensuite sénateur. — L'existence de Tetricus II est certaine, ainsi que son titre de sénateur 2; mais Pollion ne savait sur lui que ce qu'il avait déjà dit plus haut; il a inventé tout le reste : les références à Dagellius Fuscus, à la maison des Tetrici et à ses peintures.
Victoria 3. — Pollion nous donne le rôle de Victoria, qui éleva à l'empire Tetricus après la mort de son fils, de son petit-fils, de Postumus, de Laelianus, de Marius, son titre de mater caslrorum, une référence à des monnaies de Victoria frappées à Trêves, les divergences des auteurs sur sa mort. — Le rôle de Victoria est la répétition de notices précédentes 4; la notice sur les monnaies est probablement du compilateur final; le reste appartient à Pollion.
Cette analyse montre donc qu'il y a, dans les vies des usurpateurs gaulois comme dans les autres biographies de Pollion et des autres auteurs de l'Histoire Auguste, un noyau historique solide et des inventions dépourvues de valeur. Quelques-unes cependant sont intéressantes parce qu'elles nous montrent l'état d'esprit des compilateurs : Pollion a encore le patriotisme romain; il oppose nettement Rome et l'Empire romain aux Barbares 5. Ch. LÊCRIVAIN.
Séance publique du 22 janvier 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
La séance est tenue, selon l'usage définitif, dans le grand salon de l'hôtel d'Assézat que remplit une foule élégante. Plus de quatre cents personnes ont répondu à l'invitation de la Société. Aux premiers rangs, on remarque les autorités locales et les représentants de l'Université et des Académies et Sociétés savantes.
1. 25, 1-4.
2. Caes., 35, 5; cf. Vit. Aurel., 39, 1.
3. 31, 1-4.
4. 5,3; 6,3.
5. Trig. tyr., 5, 5-8; 8, 10-11.
— 232 -- M. LE PRÉSIDENT prononce le discours suivant :
Les primitifs à Toulouse.
Les jours où l'art se renouvelle, en découvrant des interprétations plus pénétrantes de la nature et de la vie, charment comme une aurore. Us séduisent parce qu'ils font luire les rayons de l'espérance; leurs essais ingénieux, leur gaucherie naïve elle-même plaisent ainsi que les élans de l'enfance vers l'existence qui s'ouvre.
Toutes les époques de l'art ont eu leur première période de tentatives neuves et hardies où s'ébauchent, en de souriantes tentatives juvéniles, les splendeurs des temps radieux. Elles ne présentent à ce moment rien d'appris ni de convenu; leurs impressions sincères, leurs fidèles imitations se traduisent par des formes où tous retrouvent leur émotion propre, parce qu'elles sont simplement inspirées de ce que nos yeux voient et de ce que nos âmes éprouvent. Elles n'ont pas encore subi le joug artificiel des écoles et des académies, et en elle, l'âme des aïeux parle directement à la nôtre.
Ainsi quand l'art d'Egine précéda celui du siècle de Périclès; ainsi quand le premier âge roman créa un art puissant en se dégageant de l'étroite imitation antique ou byzantine, et quand l'art gothique émit sur ce tronc vigoureux une riche et féconde floraison nouvelle. Mais nous entendons généralement par le nom de primitifs les précurseurs de la Renaissance, c'est-à-dire les artistes des quatorzième et quinzième siècles, de cette époque trop longtemps négligée, non seulement par les classiques obstinés du siècle de Louis XIV, surtout du siècle dédaigneux de Voltaire, mais aussi, plus récemment, par les admirateurs trop exclusifs du grand treizième, qui ne voyaient après lui qu'abaissement et décadence.
Ce sont les peintres et les sculpteurs de ces deux siècles qui ont attiré pendant plusieurs semaines, au pavillon Marsan, les artistes et les hommes de goût, étonnés et ravis des émouvantes nouveautés qu'ils y découvraient. Des richesses ignorées s'y sont rassemblées de toutes parts, et montré pour la première fois, dans un ensemble révélateur, le caractère intime et touchant du sentiment artistique développé avec des initiatives qui furent si fécondes dans cette aube déjà si lumineuse.
I.
Plusieurs provinces de France ont contribué à l'éclat inattendu de cette exposition. Toulouse n'avait rien envoyé, parce qu'elle a perdu la plupart des oeuvres contemporaines de celles qu'on y voyait, et que les
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fresques ou les grandes statues qui lui restent ne peuvent guère être transportées.
Le treizième siècle, glorieux dans les autres provinces, avait été stérile à Toulouse parce qu'il fut pour la ville et la région un temps de rudes épreuves. La guerre albigeoise les avait dévastées, et l'invasion des conquérants du Nord avait frappé jusqu'au fond de son âme la nationalité méridionale. Mais, cinquante ans à peine après ces luttes cruelles, elle se ressaisit. La cathédrale commencée en 1211, dans le moment même où Simon de Monlfort assiégeait la ville, se complète par un choeur élevé, il est vrai, dans un tout autre sentiment sur le modèle de ceux de l'Ile-de-France et de la Picardie. Mais les églises des Jacobins et des Cordeliers dressent presque en même temps leurs fières murailles, bientôt suivies d'autres que nous voyons encore, celles-là demeurées fidèles à la nef spacieuse et si parfaitement adaptée au culte chrétien qu'avait inaugurée la nef de SaintEtienne. Cet essor soudain manifeste, avec la prospérité revenue grâce au commerce, la poussée vivace et puissante de la sève artistique de la race qui, au douzième siècle, avait construit la plus belle église romane qui soit encore debout en France et sculpté les chapiteaux et les statues des cloîtres, gardant depuis une place de premier ordre dans l'évolution de l'art français.
Deux oeuvres de haute signification sont encore sous nos yeux pour nous montrer que, dès la première moitié du quatorzième siècle, Toulouse était redevenue une ville d'art, comme elle était un centre de lumières par son Université : les fresques de la chapelle de Saint-Antonin et les statues de la chapelle de Rieux. Les deux ordres conventuels des Frères Prêcheurs et des Frères Mineurs rivalisaient de zèle artistique comme de studieux labeur.
Sur la galerie orientale du cloître des Jacobins, à côté de la salle capitulaire, Dominique Grima, ancien religieux du couvent, évéque de Pamiers depuis le 13 mars 1326, fit construire la chapelle de Saint-Antonin, patron de son diocèse, et la destina à la sépulture de ses frères en religion et aussi à ceux des chanoines de Pamiers qui mourraient à Toulouse. C'est un des édifices les plus élégants par la justesse des proportions que l'art du Moyen-âge ait laissés dans la province. Il fut terminé en 1341, et il semble bien que les peintures qui recouvrent les voûtes et la partie supérieurs des murs étaient déjà exécutées à ce moment d'après le texte cité par le père Percin : perfectam et omnino consumryatam capellam Fralrum lego anno I3411. Elles sont du moins de très peu postérieures et d'ailleurs l'évêque, qui unissait ainsi le souvenir des
1. Histoire du couvent, p. 76.
BULL. 34, 1905. 16
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jeunes années de sa vie religieuse à son zèle pour son siège, ne mourtrf qu'en 13't7. Il repose dans le sanctuaire de la chapelle.
Les peintures de la voûte représentent la vision de l'apocalypse. Au centre, le Christ bénissant, assis sur un trône aveele livre à sept sceaux à ses côtés et l'agneau sur ses genoux, est entouré des quatre animaux symboliques, ailés de six ailes couvertes d'yeux, et des vingt-quatre vieillards revêtus de robes blanches doublées de rouge, tenant les harpes et les vases d'or, comme une offrande de prières.
La gravité douce du visage du Christ, la largeur et la simplicité des plis des vêtements, la noblesse des gestes, la grande allure des symboles évangéliques impriment à cette vaste scène un caractère-à la fois imposant et attendri. Les colorations sont harmonieuses et brillantes par l'opposition des tons francs orangés et bleus sans nuances affadissantes, unis seulement par des gris fauves ou violacés. Les stries d'or des ailes et des auréoles complètent l'éclat 1.
Sur la partie supérieure des murs latéraux, à partir de la naissance des voûtes, sont figurées des fenêtres pareilles à celles de l'abside ; aux côtés, des anges vêtus de robes claires d'un blanc rosé ou d'un jaune pâle encensent le Christ ou chantent en s'accompagnant d'instruments divers, qui pourraient être un curieux sujet d'étude pour l'histoire de la musique au Moyen-âge, de même que ceux qui sont sculptés aux retombées de voûte de la chapelle du château de Puyvert.
Le grand style des anges adorateurs est à la hauteur de celui de la scène principale. Il est manifeste qu'une inspiration italienne l'anime. L'élégance et le suave mysticisme des Siennois s'y révèlent. Dominique Grima, prélat éclairé, docteur en théologie, auteur de nombreux ouvrages sur les Saintes Ecritures, avait exercé la charge de maître du palais apostolique à Avignon, où le pape Benoît XII avait appelé Simone de Martino. Le peintre avait travaillé pour les dominicains de Pise et d'Orvieto ; c'est même, paraît-il, pour soutenir les intérêts des dominicains de Sienne, dans un procès devant la cour papale, qu'il se rendit à Avignon, en 1339. Il y mourut cinq ans après, et il ne serait pas impossible qu'un de ses élèves ou lui-même ait été l'auteur de cette fresque.
Sur le revers du mur de façade, saint Antonin, entre saint Dominique et saint Pierre de Vérone, contemple sa chapelle, et ce groupe semble être le couronnement de l'oeuvre.
Au-dessous du fenestrage peint des murs latéraux se déroulent, sous des arcatures trilobées, les quarante scènes de la légende de saint Anto1.
Anto1. Rouillard, Mémoires de la Société archéologique du Midi de la France, t. XIV, p. 509.
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nin, qui fut très populaire pendant le Moyen-âge dans le comté de Foix, le Rouergue et à Toulouse même. Mais ces peintures, curieuses par leur naïveté même et par les détails de costume et de moeurs, sont très inférieures à celles de la voûte et du haut des murs. Elles ne furent peintes que bien des années et peut-être un siècle après. Elles disparaissent d'ailleurs chaque jour, dévorées par l'humidité des murs.
Absolument à la même époque, vers 1345, Jean Teissandier, religieux . franciscain, évéque'de Rieux de 1324 à 1348, fit construire contre le chevet de la grande église de son ordre la chapelle qui conserva le nom de son siège épiscopal et entoura le sanctuaire de vingt superbes statues du Christ, de la Vierge, des Apôtres, de saint François et de saint Louis, évéque de Toulouse, aujourd'hui au Musée. Elles sont empreintes d'un sentiment de réalité qui se manifeste par l'imitation plus directe de la nature dans les traits détaillés du visage et dans les articulations énergiques des mains. Si elles ne montrent déjà plus le calme suprême des figures d'apôtres de Saint-Nazaire de Carcassonne, antérieures d'un quart de siècle, elles conservent dans leur variété saisissante un caractère d'imposante austérité. Les plis des vêtements plus accusés creusent de fortes ombres et accentuent les attitudes qui commencent à se contourner; les chevelures et les barbes s'enroulent en tire-bouchons, indice déjà de manière et de préciosité, mais l'âme intérieure anime toujours les graves visages. Leur robustesse, qui frappe dès le premier abord, s'attendrit dans l'expression des figures, surtout dans celles de saint Jean, de saint François et de saint Louis.
C'est par le portrait et particulièrement par les statues et les pierres tombales que l'imitation de la nature s'imposa dans l'art des imagiers. Elle se montre avec une habile maîtrise dans la belle statue du fondateur de la chapelle, conservée aussi au Musée. C'est un des plus précieux gisants du Moyen-âge, par son exécution très artistique et les détails du costume.
De même en Grèce, le goût du portrait ne s'éveilla que sous les successeurs d'Alexandre. Jusqu'à ce moment, l'art n'avait créé que des types généraux, en négligeant ce qui n'était qu'individuel. C'était aussi le sentiment religieux qui d'abord l'avait seul conduit en lui inspirant de créer des images reproduisant les idées des poètes épiques sur les puissances suprêmes par lesquelles le monde était gouverné 1 >.
La statue de l'archevêque Jeoffroy de Vayrols (1371-137o), postérieure de quelques années, d'une factnre moins fine et moins recherchée, témoigne aussi de la préoccupation scrupuleuse d'exprimer la ressemblance.
1. Perrot, Hist. de l'art dans l'antiquité, VIII, 124.
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Des tombeaux cette expression gagne la statuaire, les images, comme on disait alors, de la Vierge et des saints. Si les imagiers du treizième siècle demeurent près de la nature tout en l'idéalisant, ils excluent toute imitation trop directe de la réalité et évitent les détails personnels. L'oeuvre d'art demeure religieuse avant tout, et rien ne la détourne de son but élevé.
Les statues de Rieux décèlent une tendance à serrer la nature de plus près. Elles montrent que si l'art français maintenait les traditions de sentiment idéaliste, il ne lui était pas indispensable d'attendre la poussée de l'art flamand pour produire des oeuvres de saisissante réalité. Des observations nouvelles viennent de prouver d'ailleurs que la statuaire de l'Ile-de-France avait profondément influencé celle des provinces flamandes avant que l'art des Flandres ait exercé son empire, indéniable d'ailleurs, quoique exagéré par Courajod, sur notre art national.
Les dalles tumulaires étaient souvent préparées d'avance chez les tombiers, avec des traits sans signification individuelle et des costumes spéciaux qui permettaient de les vendre indifféremment lorsque un bourgeois, un chevalier ou un ecclésiastique venait à mourrir. Il est probable cependant que les dalles des tombeaux d'évêques n'étaient exécutées qu'après leur mort et que l'artiste ou plutôt l'artisan, dont le ciseau parfois ne livrait qu'un travail vulgaire, cherchait du moins à reproduire les traits du défunt. Celte intention est frappante dans la pierre tombale gravée au trait du savant archevêque de Toulouse Bernard deRousergue, représenté au milieu de ses livres et manuscrits à fermoirs, surtout dans celle de Jean de Cardaillac, mort le 7 octobre 1390, dont la tête, reposant sur un coussin, montre des traits évidemment personnels, avec la moustache et la barbe. Ce n'est plus une figure idéalisée comme au treizième siècle, c'est un modèle.
II.
Le règne réparateur de Charles V fut une ère de répit, entre Poitiers et Azincourt, pendant laquelle la France reprit haleine et put se livrer à la culture de l'art, que d'ailleurs elle n'a jamais abandonnée même dans ses temps d'épreuves, tant le goût en est inhérent à l'esprit de la race. Le roi en fut l'actif protecteur. 11 fit construire palais et châteaux, transformant les forteresses féodales en demeures plus appropriées aux moeurs nouvelles. Ses frères de Bourgogne, d'Anjou et de Berry répandirent dans leurs provinces le culte éclairé des arts divers. Si la Bourgogne prit surtout l'initiative avec la part la plus glorieuse, parce qu'elle demeura à l'abri des guerres anglaises, Toulouse et sa province, apanage de Jean de Berry, profitèrent de l'impulsion donnée par ce prince, non
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sans souffrir toutefois de ses exactions. Ce fut dans tout le royaume comme une première Renaissance, et sans le retour de la guerre avec l'Angleterre, la Renaissance en effet aurait surgi brillante et jeune un siècle plus tôt, et déjà aussi excitée par le souffle que le vent des Alpes amenait d'Italie, non pas encore d'une Italie pédante et académique, servile imitatrice d'une antiquité mal comprise, que l'art français ne connaîtra plus tard que trop, mais d'une Italie fidèle aux purs enseignements de la nature, unissant les tendresses de l'âme à la virilité, suivant ainsi la voie féconde que Giotto avait ouverte.
Les malheurs qui accablèrent le royaume n'arrêtèrent pas cependant l'élan qui s'annonçait aux débuts du quinzième siècle. Toulouse le reprit, surtout lorsque la fin de la guerre l'eut délivrée du voisinage des Anglais. Les églises commencées pendant le siècle précédent se continuèrent et se revêtirent, ainsi que les principales demeures de la ville, de belles ornementations. Mais que reste-t-il des orfèvreries, des ivoires, des tapisseries et des peintures qu'on y voyait? L'énumération de ce que nous pouvons voir encore sera, hélas 1 bien courte.
En sculpture, ce sont, au Musée, deux Vierges dont une maternelle tendresse remplace le caractère céleste des siècles précédents, et dont le déhanchement, désormais constamment répété, manifeste un art qui s'épuise. Mais un secours nouveau arriva à l'art français par l'éternelle rénovatrice, la féconde nature. Il lui vint surtout de la Bourgogne, excitée elle-même par les maîtres de Flandre; mais il convient de remarquer toutefois que Claux Ilutter, Jean de Marville et leurs compagnons ou leurs élèves ne produisirent qu'en France leurs belles créations et que nulle de leurs oeuvres en Belgique n'égale ou ne rappelle même le Puits de Moïse ou le portail des Chartreux de Dijon. Ne pouvons-nous pas nous appliquer en effet, nous, les inspirés de l'âme grecque, ce que Platon disait de la race mère de l'art européen? « Tout ce que nous autres Grecs empruntons aux Barbares, nous le transformons pour en faire quelque chose de plus beau. »
Deux groupes d'une allure naïve et familière manifestent au Musée la tendance nouvelle : la Vierge, d'un attirant abandon, tenant l'enfant divin sur ses genoux, qui retient le visiteur au moment où il monte l'escalier conduisant à la grande salle, et l'Annonciation, venue de la chapelle de Fourqnevaux à l'église des Récollets, où malheureusement la tête de la Vierge qui avait disparu a été remplacée par une terre cuite banale et inexpressive qui peut induire en erreur un visiteur inattentif.
La Vierge avec l'Enfant, drapés de vêtements aux larges plis, est absolument analogue à celle que l'on voit recevant l'adoration des bergers au portail de Saint-Nicolas. Ces trois morceaux, d'un art vivant, datent
des dernières années du quinzième siècle, peut-être des premières du suivant, se rattachant à celui des statues d'Albi, de Monestier, à la Pieta de Saint-Nazaire de Carcassonne.
Le Musée a recueilli depuis peu des statues étranges, mystérieuses jusqu'au jour où nous découvrirons leur origine. Leur aspect saisissait le visiteur et le troublait même dans le demi-jour qui les enveloppait autrefois à l'abside de Saint-Sernin, et sous le badigeon blanc qui leur donnait un air de spectre. L'acuité d'observation que décèlent leur traits ridés, leur réalisme brutal frappaient au point que les visages passaient pour avoir été moulés sur le vif, bien que l'on aperçoive nettement la bouche et les yeux ouverts, les dents même et la langue. Loin d'être inertes, ils semblent parler. Que disent-ils et de qui traduisent-ils le langage ? On les appelle « les bienfaiteurs » depuis Daydé, sans qu'aucun texte ancien justifie cette vague attribution. Ne seraient-ils pas une personnification des sybilles et des prophètes, assez répandue à ce moment autour des sanctuaires, à côté de nous, à Albi, par exemple?Ce qu'ils annoncent par leurs lèvres frémissantes et leurs gestes, n'est-ce pas l'attente du Sauveur et sa passion douloureuse? Ce qui est sûr, c'est que le sentiment pathétique qui dramatise ces attitudes et ces visages en fait une des oeuvres les plus étonnantes du Moyen-âge expirant.
Nous n'en connaissons pas l'auteur, que peut-être nous ne connaîtrons jamais, et pas davantage ceux des oeuvres précédentes que ces modestes et ces vaUlants n'ont pas signées. Mais des noms de peintres apparaissent assez nombreux aux registres et aux comptes de l'Hôtel-de-Ville. En revanche, presque toutes leurs oeuvres attachées à des monuments ont disparu, ainsi Y Entrée de la reine Marie d'Anjou et du Dauphin, le Couronnement de Louis XI qu'Antoine Gontarini peignit au Consis• toire; ainsi le Voeu de Charles VI, que l'on voyait au cloître des Carmes, et tant d'autres.
On voit seulement au Musée Saint-Raymond les débris fragmentés d'une peinture que l'on aurait dû laisser à la chapelle de la Dalbade où elle fut retrouvée derrière un retable en 1891. Elle est datée de 1454 et représente un pape et un ange avec des personnages se rendant au pèlerinage de sainte Catherine, sur le Sinaï. Le modèle des figures du pnpe et de l'ange, l'allure naturelle des pèlerins en marche, les fonds de paysages indiquent la sincérité de l'artiste curieux de reproduire ce qu'il voyait autour de lui, car les têtes ont un accent de portrait.
Au Musée Saint-Raymond aussi est venu échouer un Christ en croix qui, depuis 1440 environ, jusqu'en 1793, élait demeuré dans la Grand'- Chambre du Parlement. Le réalisme émouvant des visages douloureux, la Vérité humaine des altitudes, les détails curieux du paysage et des
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personnages divers, en costume du quinzième siècle, qui se rendent de Jérusalem au Calvaire, font regretter davantage la disparition d'un si grand nombre de peintures du même temps ».
Charles VII et le Dauphin sont agenouillés aux côtés de la croix, et on retrouve le roi et le jeune Louis XI sur un vitrail de la chapelle SaintJoseph, à Saint-Etienne. C'est le plus précieux de la cathédrale par son exécution soignée et ses portraits historiques. Malheureusement le panneau du côté de l'épltre est le seul conservé dans son intégrité. On y voit le Dauphin vers l'âge de quatorze ans; saint Louis, évéque de Toulouse; sainte Catherine, avec la figure de la fille du roi qui venait d'épouser le duc de Bourgogne, et Denis du Moulin, archevêque de Toulouse, le donateur sans doute de la verrière, à moins qu'elle n'ait été donnée par le roi lui-même au prélat qui lui avait témoigné sans cesse un dévouement absolu dans les jours difficiles.
Deux autres vitraux plus anciens jettent encore leur éblouissement juvénile dans l'ombre des collatéraux; celui de la chapelle Saint-Augustin, autrfois de Sainte-Catherine, le plus beau" de la cathédrale par l'intensité de ses colorations, où l'on voit, au-dessous des figures de l'Annonciation, de sainte Catherine et de saint Martial, les portraits de l'archevêque Pierre de Saint-Martial, mort le 29 avril 1401, et de son frère le cardinal Hugues de Saint-Martial, qui mourut deux ans sprès; puis celui de la chapelle précédente, autrefois de Saint-Dominique, postérieur d'une vingtaine d'années, mais déjà affadi par les jaunes et les blancs trop multipliés.
Ces verrières, avec quelques fragments du commencement aussi du quinzième siècle, épars entre les meneaux des fenêtres, caractérisés par la teinte brique uniforme des visages, nous rappellent que les peintres verriers étaient nombreux à Toulouse à cette époque. Ils renouvelèrent leurs statuts, en 1506, en se plaigant que les anciens se fussent perdus par l'omnipotence absorbante qu'avait acquise un maître fameux du siècle précédent, Guillaume Viguier, dit Papillon, dont la réputation était si grande qu'il exécutait ou dirigeait à son gré tous les travaux de province.
Les peintures de Saint-Sernin ne rentrent pas dans le cadre des primitifs : l'une, représentant saint Augustin, abritée des pluies de l'ouest sur la muraille du transept septentrional par une porte de fer, parce qu'elle date de la fin du douzième siècle; les autres, celles de l'abside, parce qu'elles ont été exécutées ou reprises au seizième. Seuls, le Crucifiement de la sacristie, ancienne chapelle des Sept-Dormants, daté par le blason du premier archevêque de Toulouse, Jean de Gomminges, mort
1. E. Roschach, Revue de l'art ancien et moderne, 1903.
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en décembre 1327, et les scènes de la légende de sainte Catherine ont été peints au quatorzième siècle, mais une restauration trop complète leur a enlevé la fleur de leur sincérité.
Une peinture contemporaine peut encore se voir au Taur, du moins sous la boiserie d'un banc d'oeuvre, si toutefois l'humidité ne l'a pas aujourd'hui complètement dévorée. Une reproduction par M. Engalière, en maintient le souvenir au Musée Saint-Raymond. Elle représente une quarantaine de personnages : ancêtres du Christ, prophètes et sibylles, tenant, dans des attitudes fort mouvementées, les phylactères sur lesquels se lisent les annonces de la venue du Messie.
Nous ne pouvons que signaler ici les plus importantes de ces oeuvres et appeller votre attention sur elles, sauf à les étudier de plus près, avec vous, dans nos promenades à travers les monuments de la ville. Moins encore nous serait-il possible de décrire, d'énumérer même les miniatures des Annales de l'hôtel de ville, le trésor précieux de notre donjon capitolin, signées presque toutes, elles, et signées de noms français et même de noms de notre terroir. C'est que l'art d'illustrer les manuscrits est essentiellement français. Dante l'appelle l'art de Paris.
Les miniatures trop rares, échappées' au pillage et à l'incendie du 10 août 1793, ont été étudiées par M. de Quatrefages, par M. Roschach et plus récemment, avec une richesse définitive de documentation, par notre collègue M. le baron Desazars. Nous vous engageons à les eixàminer, non seulement par un rapide regard amusé, mais une par une et avec une attention qui bientôt vous retiendra en vous charmant. Vous y suivrez la marche progressive de l'art de la miniature et les caractères nouveaux qui rapidement apparaissent. Les capitouls du milieu du quatorzième siècle, rigides et grêles, se désignant l'un à l'autre d'un doigt indicatif démesurément long, puis se parlant deux à deux, peu à peu s'animant davantage, sous des arcatures trilobées comme on en voit sur un manuscrit de Charles V à la Bibliothèque nationale. Dès les premières années du quinzième siècle, les figures des magistrats municipaux prennent un caractère de personnalité. L'intention de portrait se manifeste. Les groupes se complètent et forment un tableau avec des personnages surnaturels, des anges d'abord; puis, en 1412, c'est dans une composition, qui semble trahir une influence italienne, la Vierge bénissant les capitouls; en 1346, une Descente de croix avec les douze capitouls à genoux. Mais déjà aussi, l'année précédente, ce n'est plus une scène mystique et attendrie, mais l'attaque d'une ville; en 1447, l'entrée du dauphin à Toulouse, qui y laissa un vivant souvenir et qui a souvent tenté les artistes locaux, car on la retrouve deux fois encore sur les miniatures des Annales. Puis apparaissent encore des impressions de
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choses vues, une porte de ville cintrée avec mâchicoulis et créneaux
Les scènes historiques s'entremêlent dès lors avec des tableaux religieux; les entrées royales avec l'Annonciation, ou avec les langues de feu que la colombe envoie, comme sur les apôtres, sur la tête des capitouls agenouillés. Une curieuse page clôt le quinzième siècle. Diverses scènes figurent les événements de l'année, le roi Louis XII recevant la soumission du duc de Milan, la reddition d'une ville, une flotte de guerre sur une mer que des montagnes bleues bornent à l'horizon, les réconciliations et les aumônes du jubilé séculaire.
- Le paysage apparaît ainsi pour la première fois et prendra une posession nouvelle, en 1502, avec le siège d'une place forte par des assiégeants rangés sur le bord d'une rivière qui serpente dans la campagne. Le paysage, en France, n'était-il pas né dans les Très Riches Heures du duc de Berry, par Pol de Limbourg, pour prendre un superbe développement dans le manuscrit d'Etienne Chevalier que peignit Jean Fouquet?
Sur la même page, la Renaissance proclame déjà son prochain triomphe avec des colonnes et des arcades d'imitation italienne, imitant ellemême l'antiquité. De charmantes petites scènes d'un goût encore gothique viennent toutefois séduire le regard, comme en 1512 celle de l'Institution des repenlies de Sainte-Madeleine, d'un sentiment exquis par l'expression émue et recueillie des pénitentes, le geste des capitouls et les figures des assistants qui expriment leur ravissement. Ainsi, dans l'incomparable manuscrit de Chantilly, dont je viens de parler, voit-on la Vierge tenant son divin Fils sous les arcatures d'un portail ogival, tandis qu'Etienne Chevalier implore sa protection, agenouillé dans un portique Renaissance.
Mais la Renaissance l'emporte de plus en plus. Elle s'impose par le grand portique doré d'architecture classique encadrant l'entrée de François 1er et du Dauphin en 1533, surtout par le frontispice dominateur et superbe de Charles Pingault ouvrant, en 1535, le second livre des Annales.
Bientôt apparaîtront les scènes historiques dues à des artistes d'un mérite supérieur, Servais Cornouailles, Jacques Bolvène, et surtout Jean Chalette, dont les portraits de capitouls expriment avec une saisissante maîtrise la personnalité individuelle et de race avec la gravité des moeurs de la magistrature municipale. C'est vraiment une collection de chefsd'oeuvre.
L'évocation rapide des oeuvres qui nous restent des quatorzième et quinzième siècles, exécutées à Toulouse, montre la continuité de l'essor artistique de la ville, depuis les églises romanes et gothiques jusqu'aux palais de la Renaissance. Si elles contribuent à affirmer l'originalité de l'art français que nous nous efforçons depuis longtemps de proclamer, la
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sincérité de l'émotion qui les anime, particulièrement dans les figures de la statuaire, ne cessent de manifester le génie particulier de la race habile à exprimer l'âme intérieure et l'action dramatique. Elles méritent de ne pas demeurer ensevelies dans l'ingrat oubli où les avait abandonnées le culte idolâtrique de l'antiquité. Elles méritent surtout d'être préservées et conservées avec la plus jalouse sollicitude.
Rapport sur le concours de 1904.
M. PI.ASSARD, rapporteur général du concours de l'année, s'exprime en ces termes :
La tâche d'un rapporteur de votre Commission du concours annuel est relativement facile : ce rapporteur, dont la compétence dans le champ vaste et compliqué de l'archéologie ne peut être partout suffisante ni égale, s'efface modestement derrière les compétences particulières de ses collègues, juges spéciaux, pénétranls, rigoureux, quoique bienveillants et équitables : il n'a d'autre ambition que de donner, compendieusement, de leurs arrêts motivés, un résumé fidèle, auquel on ne peut reprocher, comme on le faisait malignement, autrefois, à un secrétaire perpétuel de l'Académie française, l'illustre lettré Abel Villemain, de noyer ses incompétences de détail et ses incompréhensions d'ensemble sous les flots d'une brillante rhétorique.
Des ouvrages qui ont été proposés au concours de 1904, nous avons retenu les trois Mémoires de M. Jules CHALANDE.
Deux de ses mémoires intéressent directement les Toulousains. Il s'agit des ruines romaines qui nous permettraient, avec beaucoup de défiance et de prudence, de conjecturer ce que fut Toulouse, si importante à l'époque celtique des Volkes-Tectosages et, plus tard, à l'époque des rois wisigoths, dans cette semi-éclipse de l'Empire romain, où Toulouse n'était qu'un simple chef-lieu de circonscription municipale sous la dépendance administrative de Narbonne, et où, pourtant, nous le savons par les magnifiques résultats des fouilles successives de MartresTolosanes, la civilisation latine et gallo-romaine florissait au bord de la Garonne. Le premier de ces Mémoires est relatif à l'enceinte romaine et aux débris mis à jour à l'angle de la rue Dutemps et du boulevard Lazare-Carnot, nos 57 à 61. Après MM. de Lapasse, de Malafosse, Deloume et Joulin, résumant les recherches qui ont été faites par des membres de notre Société, M. Chalande appelle l'attention sur la conservation de ces précieux débris, dont seul le fragment du square du Capitole révèle aux promeneurs et au public enfantin qui joue à l'ombre du
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Donjon capitulaire, l'existence de la Civitas de la Notice impériale et de YUrbs Tolosatium de Grégoire de Tours (Miracul., VIII).
Pour son second travail sur les Ruines gallo-romaines de SaintMichel-du-Touch, M. Chalande avait également dans notre Société des précurseurs et des guides, en particulier M. de Sevin. A-t-il dissipé le mystère de ces amas informes de débris? Ces restes, dont M. Chalande a fait des croquis très soignés, sont-ils des souterrains pour les belluaires et les bêtes fauves, des mines pour amener dans l'arène les eaux do Purpan et la transformer en naumachie?
La question n'est pas encore résolue, et se la poseront longtemps encore les Toulousains qui vont le dimanche errer du côté de Blagnac.
Le troisième travail est sur la Numismatique carolingienne. Après M. Gariel et son Étude de 1883 sur le trésor dit d'Auzeville et M. Charles Robert, M. Jules Chalande a étudié 19 pièces, qu'il reproduit par la photographie de l'atelier monétaire du Languedoc, se rattachant à la période qui s'écoule depuis Louis le Débonnaire (781-840) jusqu'à Eudes (887-898).
Si 8 de ces pièces (1, 2, 3, 6, 12, 13, 15 et 10) se trouvent déjà dans l'ouvrage de Gariel, les autres numéros, 11 pièces, soient 4, 5, 7, 8, 9,10, 11, 14, 17, 18,19, ne se trouvent effectivement pas avec tous leurs détails dans le texte de M. Charles Robert, au Ville volume de Y Histoire de Languedoc (éd. Privât, Toulouse).
S'il n'y a pas là de types vraiment nouveaux, il y a des variétés de monnaies intéressantes, pouvant en particulier servir à dater les royautés régionales de Pépin I et de Charles le Chauve, quand, fils de Judith la bien-aimôe et préféré de Louis le Débonnaire, il obtint par avancement d'hoirie le royaume d'Aquitaine : c'est une contribution à l'histoire de la numismatique toulousaine; aussi, pour l'ensemble de ces trois Mémoires, la Société décerne à M. Jules Chalande, dont le père nous a appartenu comme membre résidant, une médaille de bronze.
Le Musée de Carcassonne, l'un des plus riches en tableaux modernes de la province, grâce aux libéralités d'un amateur qui, pendant quatre à cinq ans, a donné 20,000 francs pour acheter les bonnes toiles des JeanPaul Laurens et des Benjamin Constant, possède aussi une importante collection lapidaire. Mais les statues, les sculptures, les inscriptions sont entassées (Toulouse, où les Musées des Augustins et de la Collégiale Saint-Raymond sont classés maintenant, peut bien se permettre ce jugement provisoire) avec un tel désordre dans un étroit espace qu'il n'est pas possible de les examiner, encore moins de les étudier. Aussi est-ce une oeuvre méritoire d'avoir dressé le catalogue, et puisse celui que nous couronnons donner l'idée de mettre en ordre les richesses
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locales et de les présenter comme elles le méritent! M. l'abbé BAICHËRB l'a rédigé avec exactitude, s'appuyanl d'ailleurs, comme il le déclare modestement, sur un travail déjà ancien de M. le chanoine Barthe. Aussi quelques pièces doivent-elles être ajoutées, notamment la belle croix de Villanière, entrée depuis peu au Musée. Il sera bon de publier aussi les inscriptions et de ne pas se contenter de les signaler; de même, autant que possible, d'attribuer les blasons. Il n'était pas difficile, par exemple, de noter que celui conservé sous le n° 19 appartenait à l'évêque Natalis de Lestang.
Depuis quelques années, M. l'abbé Baichère communique à la Société des notes précieuses et la tient au courant des découvertes survenues dans sa ville si riche en souvenirs et en oeuvres d'art; aussi c'est avec un égal sentiment de reconnaissance et de justice que la Société lui accorde une médaille de bronze.
Deux étudiants de notre Faculté de droit, sous l'impulsion d'un maître si actif, si instigateur, si promoteur d'activité, notre regretté collègue M. Brissaud, ont porté leurs recherches sur l'étude des coutumes de la région.
M. Vincent ARNAL a publié d'une façon érudite la Coutume de Cadeilhan (Gers).
La Coutume fut concédée en 1305 par Bernard de Revel, commandeur de Monlsaunès, alors à l'ordre du Temple. Relativement courte, elle porte uniquement sur le droit de paissance et d'usage accordés aux habitants de Cadeilhan sur la forêt de Faisy, sur les amendes à encourir en cas de contravention, sur les conditions exigées pour la jouissance des droits octroyés.
L'auteur a puisé au fonds de Malte la base du texte original qu'il publie et qu'il fait suivre d'une traduction de 1755, traduction parfois obscure et très large, il le reconnaît, mais qui dans son ensemble respecte le sens général et a de plus l'avantage de révéler certains remaniements dont la Coutume de 1305 a dû être l'objet à des époques inconnues. L'auteur, d'ailleurs, ne manque pas de relever minutieusement les divergences qui séparent les deux textes, latin et français; il arrive même parfois, avec un vrai bonheur de divination, à retrouver sous certaines étrangetés de la traduction les erreurs de lecture qui ont dû les occasionner. Il a, par une conjecture ingénieuse, proposé de combler les lacunes trop évidentes de la Coutume de Cadeilhan par la Coutume de la commanderie de Montsaunès.
On pourrait peut-être reprocher à notre auteur de trop larges emprunts à VHisloire du Prieuré de Malle de M. du Bourg, des références bibliographiques parfois imprécises, le caractère parfois élémentaire de
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certaines de ses notes Mais ce sont là des taches aisées à faire disparaître ou des lacunes très faciles à combler; elles n'atteignent pas le fond de l'oeuvre qui est sérieuse et bien menée : à cette estimable contribution à l'histoire de notre droit méridional, la Société décerne une médaille de bronze.
Encore une bonne contribution à l'histoire des Coutumes forestières du Midi et de notre département. C'est un travail sur la Coutume d'Artigue (canton de Bagnères-de-Luchon) de M. LAURENS, étudiant en droit.
L'auteur a étudié cette Coutume sur une copie conservée au greffe de la Cour d'appel de Toulouse et présentée à la grande-maîtrise de Toulouse en 1668, lors de la réformation générale des eaux et forêts confiée à M. de Froidour, le célèbre collaborateur de Colbert. La commune d'Artigue avait dû à cette date, lors de la revision générale des coutumes, titres et privilèges, justifier ses droits sur les forêts de Ferrère et d'Ordies.
Ils étaient contenus dans la charte qu'étudie notre auteur : charte du 18 septembre 1484, dans laquelle Odet d'Aydié, comte de Comminges, seigneur de Lescuns, chambellan de Louis XI, puis de Charles VIII, avait reconnu et confirmé à nouveau la juridiction des consuls d'Artigue et l'inféodalion du territoire et de ses forêts moyennant la redevance annuelle de 50 sous. Non seulement l'auteur a analysé et expliqué la Coutume et l'a commentée sobrement, nettement, en la complétant d'un petit lexique, complet, exact, mais il a, dans une introduction d'une . vingtaine de pages, décrit rétrospectivement, avec des extraits des archives, ce coin de l'ancienne dépendance du Comminges, avec son aspect, ses richesses naturelles, ses cultures, ses moeurs, en érudit et en fin lettré : ces pages de résurrection locale donnent de l'agrément à une sérieuse contribution à l'histoire du droit coutumier et à un bon début d'un des élèves de notre Faculté de droit.
M. Henry MULLOT nous a présenté un Voyage de Castelnaudary au château de Marquein. La désignation est modeste; c'est un récit d'excursion, mais reprise par un érudit qui est président de la Société d'études scientifiques de l'Aude.
Sous le titre de Foix et Comminges, un de nos collègues a écrit un livre tellement précieux que les rares exemplaires qu'on peut encore trouver sont disputés avec empressement; on peut, pour un guide de réseau restreint de voie ferrée, pour le compte rendu d'une promenade dans un pays, pagus, faire oeuvre d'archéologie, de critique et d'histoire : c'est ce qu'a tenté M. Mullot.
Il ne parle que d'un coin de ce Lauragais, pays de cocagne, pays de ce pastel détrôné, fin du dix-septième siècle, par l'indigo venu des Indes, mais qui avait fait la fortune de nos Bernuy (ils avaient des fiefs en
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Lauragais) et de nos d'Assézat. Il part de Castelnaudary, la ville des moulins, mais qui n'est qu'un Castelnau : avec M. d'Arbois de Jubainville, il ne croit plus à l'hérétique étymologie : Caslellum novum Arionorum. Il arrive à Villeneuve-le-Comptal, dont l'origine est attribuée à un de noà Raymond; puis à Payra, patrie d'un des célèbres professeurs de notre vieille Faculté de droit toulousaine, Louis d'Auriol; puis à Salles-sur-l'Hers qui, sûrement, datant de 1271, n'est pas d'Alphonse de Poitiers, mort sous Tunis. Mais le but du voyage est le château de Marquein, trop oublié dans ce Lauragais dont Jean-Paul Laurens, dans la galerie des Illustres, a représenté le paysage abrupt et étrange entre Avignonet, la ville des inquisiteurs, et Mazères, la ville des comtes de Foix, d'Henri de Navarre et de la seconle Marguerite de Valois, du fait de sa mère, Catherine de Médicis, comtesse de Lauragais.
M. Mullot a fait une étude minutieuse du château de Marquein, qui subsiste avec ses parties aristocratiques et ses parties bourgeoises; demeure mi-militaire et mi-seigneuriale, et surtout il a essayé de faire la généalogie compliquée des maîtres du castel.
Les Montbrun-Roquecourbe, venus du Nord, du côté de la MontagneNoire; les Roquefort, venus du Sud, du côté des Pyrénées ariégeoises : ce furent de bons gentilshommes, bienveillants pour leurs subordonnés, perdant leur temps entre eux dans d'interminables procès : l'un ^dure de 1573 à 1074, une année de plus que la guerre de Cent ans. Mais, prud'¬ hommes à plusieurs reprises, ils sont chargés par les maréchaux de France d'empêcher les duels entre les nobles de la province; ils servent le roi, plusieurs sont mousquetaires, et l'un d'eux, qui en septembre rédige son testament, se fait tuer le 27 octobre 1521, sous l'amiral Bonnivet, devant les murs de Fontarabie.
Nous trouvons un Roqucfort-Marquein à Sainte-Cécile d'Albi, et au Musée de Toulouse une inscription tumulaire venant de l'ordre de SaintJean-de-Jérusalem : Au grand prieur de l'ordre de Malte, Charles de Roquefort de Marquein, commandeur des galères. Ils ne sont pas arrivés à la très haute illustration; pourtant une Roquefort épouse JeanBaptiste Colbert, marquis de Seignelay, fils du grand Colbert et son successeur à la marine royale. M. Mullot a écrit un livre d'apparence ingrate, fort intéressant dans le détail, avec des références aux sources manuscrites, même non classées; avec de l'esprit critique, il démolit, sans les avoir méprisées, les légendes locales.
Le livre de M. Mullot, quoique n'étant que le récit d'une excursion, a obtenu une médaille de vermeil.
M. Victor AURIAC, qui a dirigé l'école des Frères de la Doctrine chrétienne de Revel, a voulu sans doute, avant tout, être utile à ses élèves.
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11 nous a donné les glanes et les layettes de plusieurs années de recherches dans les archives de la mairie de Revel, mais il n'y a pas dans son travail : Monographie de la commune de Revel {Haute-Garonne), assez d'études et de condensation.
Il a publié quelques documents : charte constitutive de Philippe VI de Valois de 1341, cinq ans avant Poitiers, avec les confirmations de Charles VII et de Louis XI ; charte de Charles V, confirmant aux habitants de Revel le droit de chasse et de pêche, avec pièces annexes et subséquentes; transactions et accords signés parles consuls avec les seigneurs et les simples particuliers; pièces diverses concernant les couvents, les hôpitaux, les léproseries, etc., etc., mais ces pièces ont été copiées et n'ont pas été publiées d'une façon critique et scientifique.
Quant au travail lui-même, il relèverait davantage de notre voisine la Société de géographie que de la Société d'archéologie. Il est surtout discursif et descriptif.
L'histoire de la Bastide de Revel est présentée d'une façon trop fragmentaire. Dans ses rapports avec l'histoire plus générale, on ne voit pas assez son rôle de citadelle sur laquelle, par périodes, s'appuient de grands chefs s'opposant à la royauté et au gouvernement central : à la fin du quatorzième siècle, Gaston Phoebus, le comte de Foix, ennemi de l'oncle et du lieutenant du roi en Languedoc; le duc de Bêrry, dans les guerres de Religion ; Montmorency-Dam ville, alternativement l'ennemi et l'allié des réformés, et au dix-septième siècle, le grand chef protestant dans les Cévennes, le duc de Rohan, avant sa soumission.
L'histoire de Revel pendant la Révolution pourrait être plus intéressante. Nous aurions préféré, au lieu d'une notice assez étendue de la milice reveloise d'avant la Révolution, simple troupe de police contre les brigands et les braconniers des forêts de la Montagne-Noire, une étude plus fouillée des contributions de Revel et de son district aux volontaires, aux réquisitionnaires, aux levées de la Défense nationale, de 1791 à 1705.
L'auteur a le culte des hommes distingués de sa petite patrie reveloise ; mais il ne faudrait pas exagérer singulièrement leurs mérites ; il doit surtout recommander à ses élèves de ne lire qu'avec la plus extrême défiance le Mémorial de Sainte-Hélène, du comte Las Cases : c'est un livre de dévotion bonapartiste et pas autre chose; on ne peut en faire état sérieux, depuis la publication des Mémoires authentiques, de la Correspondance impériale, du Journal de Sainte-Hélène écrit au. jour le jour, non après coup, par le général Gourgaud.
Néanmoins, la Société décerne à ce travail, où il y a de bons et utiles matériaux, une médaille de bronze.
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Elle a décerné sa principale récompense de l'année, le prix de Clausade (valeur 200 fr.), à M. Adrien ESGUDIER, pour son Histoire de Fronton et du Frontonnais.
M. Brissaud avait fait de ce manuscrit une étude approfondie, savante et compétente, que ses fils et héritiers, malheureusement, n'ont pu retrouver encore dans ses papiers : je ne puis donner que le faible linéament du jugement motivé de notre savant et regretté collègue et ami.
M. Escudier fait l'histoire de Fronton et du Frontonnais depuis le commencement du douzième siècle jusqu'à la fin du dix-huitième siècle. On y voit comment une commanderie de Saint-Jean-de-Jérusalem, relevant du grand-prieuré de Toulouse, devint une commune dotée de cowtumes et de libertés; comment dans cette cité, due à des moines-soldats, le populaire, les bourgeois à l'esprit frondeur et insurgé, sous la conduite du consulat, lutte contre le grand-prieur et leurs maîtres jusqu'à l'émancipation définitive.
Nous voyons Fronton et le Frontonnais pendant les guerres civiles et religieuses du seizième et du dix-septième siècle, et comment sous ce règne de Louis XIII, que nous parons, à travers nos souvenirs des Trois Mousquetaires, des Beaux Messieurs de Bois-Doré et même de Cyrano de Bergerac, d'un panache chevaleresque, les luttes intestines étaient dures et cruelles : c'est une illustration locale, un peu triste, du beau et curieux livre de M. Louis Battiffol : Au temps de Louis XIII.
Est-ce en souvenir de ces jours d'épreuves et de guerres plus que civiles que Fronton, pour sa quote-part, donne si vaillamment, sous la Révolution, aux armées qui volent à la frontière et vont défendre avec les principes nouveaux le seul héritage territorial de la monarchie ?
Le travail de M. Escudier, puisé aux archives de Fronton, Grisolles, Reymès et autres lieux circonvoisins, complété par des notices sur les châteaux, les églises, les communautés de l'ancien ressort de la commanderie de Fronton, des documents d'état-civil, des délibérations communales, des extraits des registres des confréries, des reproductions des documents de l'ordre de Saint-Jean, est solide, complet, sérieux, écrit avec une précisiou érudite, et je dirai administrative. M. Escudier, qui est maire de Fronton, doit, dans l'intérêt de ses administrés d'abord, de tous les méridionaux, amoureux de l'histoire locale, publier son livre en librairie.
Tels sont messieurs, les résultats de notre concours de 1904.
Les oeuvres que vos suffrages ont couronnées sont d'inégale valeur, mais elles ont cela de commun d'avoir trait, toutes, à la région que commande Toulouse. Si notre Société archéologique s'intéresse comme
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le veut son titre à tout le Midi, ainsi qu'elle le témoigne en toute occasion, elle réserve ses plus vives préoccupations pour Toulouse., le Languedoc et ses dépendances. — En outre, quelles que soient l'étendue et la portée de ces travaux, ils marquent tous un réel progrès dans la conscience des recherches, dans le souci de la rigueur et de l'exactitude, dans l'application des bonnes méthodes qui ne sont l'apanage d'aucune école, d'aucun grand corps, mais qui ressortent de l'expérience et du labeur même de l'histoire et de l'archéologie : quoi qu'en disent des beaux esprits des bords de la Seine, il n'y a pas une science d'Institut et une science d'Académies de province : il n'y a qu'une recherche, une probité scientifique, une méthode : il n'y a que la Science...
Le SECRÉTAIRE GÉNÉRAL donne ensuite lecture de la liste des personnes dont les travaux ont été distingués au concours de l'année par la Société archéologique du Midi.
Prix de Clausade (300 fr.) : décerné à M. Adrien ESCUDIER, maire de Fronton, pour son Histoire de Fronton.
Médaille de vermeil : M. MULLOT, président de la Société d'études scientifiques de l'Aude, Voyage de Castelnaudary au château de Marquein.
Médailles de bronze : M. Jules CHALANDE, à Toulouse, Numismatique languedocienne. — M. Vincent AURIOL, étudiant en doctorat, Coutume de Cadeillan (Gers). — M. LAURENS, étudiant en doctorat, Coutume d'Artigues (Haute-Garonne). — M. l'abbé BAIGHÈRE, Ancien musée lapidaire de Carcassonne. — M. AURIAG, Monographie de la commune de Revel.
La séance est continuée par une conférence de M J. FOURGOUS, membre résidant, sur une série de Châteaux de Quercy. De magnifiques projections agrémentent son récit.
Séance du 24 janvier 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS,
M. MÉRIMÉE offre le Bulletin hispanique de l'année 1904. Cette revue, publiée sous les auspices des Universités du Midi, fait place à l'archéologie à côté de l'histoire et de la littérature hispaniques. M. Mérimée, qui est un de ses directeurs, annonce qu'il en continuera personnellement le service; la Société l'en remercie vivement.
BULL. 34, 1905. 17
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M. le baron DESAZARS DE MONTGAILHARD fait une lecture sur lès Miniatures des Annales de Toulouse pendant le quinzième siècle. Il avait déjà fait connaître à la Société archéologique leurs origines à la fin du treizième siècle et les avait étudiées pendant le siècle suivant sans pouvoir les décrire toutes à cause de leur mutilation en 1791'. Il continue celte étude pendant le reste de la période gothique jusqu'à la Renaissance.
Les Miniatures des Annales de Toulouse pendant le XVe siècle.
Les miniatures avaient débuté, en 1295, par de simples lettres « imaginées ». Elles représentaient les Capitouls d'une façon impersonnelle, prêtant serment devant le viguier royal et tenant dans le cadre restreint d'une initiale (1295-1347). Celte phase, purement symbolique, s'est continuée pendant tout le quatorzième siècle, mais dans des tableaux détachés du texte et .en rendant la représentation encore graphique des Capitouls plus personnelle grâce à leurs armoiries (1348-1397).
A partir de 1398, les miniatures prennent une importance plus grande, et les Capitouls sont associés à des scènes empruntées à l'histoire sainte ou profane. L'enlumineur, voulant éviter la monotonie des figures simplement alignées de face, fait entrer les Capitouls dans une ordonnance plus compliquée et donne, par suite, à ses miniatures de plus grandes dimensions. Malheureusement, la miniature qui a ainsi innové a disparu. Nous savons seulement qu'elle avait 6 pouces de haut (162 millimètres) et qu'elle représentait la Passion de Jésus-Christ avec Joseph et Marie. — Cette innovation devait faire la fortune artistique des Annales au siècle suivant.
En ce moment, une évolution caractéristique se préparait en France dans l'art de la miniature comme dans l'art de la peinture. Elle avait commencé sous Charles V, ce lettré couronné, qui fut aussi un grand politique et que la postérité a appelé le Sage (1360-1380). Elle s'était accentuée sous Charles VI (1380-1422), malgré les désastres militaires que la France avait subis de la part des Anglais. Elle devait se manifester plus brillamment encore avec Charles VII, dont le long régne (1422-1461) clôtura l'ère du moyen-âge, et avec Louis XI (1461-1483) qui prépara définitivement les temps modernes.
En effet, les Anglais avaient été définitivement expulsés de France et la guerre de Cent ans s'était terminée par la prise de Bordeaux le
1. Bulletin de la Société archéologique, n<> 32, année 1904, pp. 71 et suiv.
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19 octobée 1453. De 1436 à 1444, Gultenberg avait fait à Strasbourg ses premiers essais d'imprimerie tabellaire ; il les avait complétés avec Johan Fust et Peter Schoiffer, en 1450, par l'invention de la fonte des caractères et de la clicherie typographique. Le poète Villon
Débrouillait l'art confus de nos vieux romanciers.
Comines, conseiller de Louis XI, se montrait et est resté un de nos plus grands historiens. L'Italie elle-même exaltait « le beau parler de Maistre Alain Chartier, la sublimité de Jehan de Mun et la main de J'ehan Foucquet », le maître miniaturiste par excellence dont Louis XI avait fait son peintre attitré.
Toulouse avait aussi ses enlumineurs. Et, si ceux dont usaient les Capitouls pour leurs Annales laissaient souvent à désirer, s'ils ne pouvaient égaler les habiles miniateurs de Jean de Berry, du moins ils tendaient à abandonner les procédés conventionnels de la tradition romane et ils s'essayaient à rendre la nature.
A partir de 1430, a écrit Joseph Malliot, qui vivait à la fin du dixhuitième siècle et qui avait vu et étudié en artiste et en érudit les Annales capitulaires avant l'auto da fé de 1793, « le style avait bien changé et les têtes étaient bien rendues ». Les enlumineurs étaient devenus de véritables artistes. Ils cherchaient à copier la nature et ils tendaient à arriver au portrait individuel. S'ils ne poussaient pas encore très loin la ressemblance physique, c'est, sans doute, qu'ils n'avaient à reproduire que des figures excessivement réduites. Mais leur ardent désir d'être sincères les faisait s'appliquer aux accessoires, le costume et le mobilier. Et, lorsqu'ils représentaient quelque événement politique, ils s'inspiraient de la situation et trouvaient le tableau d'histoire. Ils se préoccupaient de la couleur locale et ils inauguraient le paysage urbain.
Les scènes historiques abondaient dans les Annales capitulaires du quinzième siècle, et quelques-unes étaient remarquables par leur exécution. C'est ainsi qu'on peut encore voir YEntrée du Dauphin (depuis Louis XI) en 1438-39, YEntrée de Charles VII en 1441-42, YEntrée du Dauphin (depuis Louis XI) avec sa mère en croupe en 1442-43. Beaucoup d'autres ont disparu, que nous ne pouvons juger que par ceux qui nous en ont conservé la description, comme le Siège de Metz par Charles VII en 1444; le Sacre de Louis XI en 1460-61; YEntrée à Toulouse de Louis XI en 1462; Y Histoire de Louis XI et du comte de Charolais en 1465; la Réception de Guillaume Bruni portant les lettres de rétablisssement du Parlement et de la Cour des Aides en 1468, dont Antoine Rivalz nous a du moins conservé l'ordonnance générale; Y Histoire du roi Louis XI et du roi d'Angleterre à Amiens en
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1474-75 ; la Bataille de Nancy où fut tué le duc de Bourgogne en 1476 77; le Mariage de Louis de France, duc d'Orléans (Louis XII) avec Jeanne de France, duchesse de Berry, fille de Louis XI, en 1477-78; le Couronnement de Marguerite d'Autriche, fille de Maximilien, fiancée du roi Charles VIII en 1484-85 ; le Baptême de Charles Orland, fils de Charles VIII, on 1491-92; Une marche d'armée, peut-être sur Boulogne, en 1492-93 ; le Sacre de Louis XII en 1497-98; Y Expédition contre le Milanais en 1498-99.
Pour représenter ces diverses scènes historiques, les enlumineurs se sont préoccupés des lieux où elles se passaient; et comme, le plus souvent, il s'agissait de sièges de villes fortifiées, d'entrées triomphales dans les villes, d'assemblées publiques ou privées dans les édifices municipaux, ils débutent par le paysage urbain et monumental, et l'on peut en voir plusieurs spécimens, tels la Ville assiégée en 1434-55, le Pré communal en 1487 et 1440, la Rupture du Pont- Vieux en 14S3-1484.
Les miniateurs n'ont pas négligé les scènes religieuses, et, si les Saints Patrons de Toulouse (1440) sont peints d'une façon assez banale et les Dons du Saint-Esprit d'une manière un peu bizarre, combien sont remarquables, comme la Descente de Croix (1436) où, pour la première fois, nous voyons paraître le nu le plus correct, sans fausse modestie, et Y Annonciation (1446), si intéressante par sa simplicité et sa naïveté même! Malheureusement, nous ne pouvons juger de plusieurs autres qui ont disparu, comme Y Adoration des Mages, deux fois représentée en 1448 et en 1453, et les Capitouls invoquant Sainl-Roch pendant la peste de 1473.
En 1480, nous voyons apparaître le tableau de genre avec un Cavalier poursuivant un sanglier-, des tableaux allégoriques et satiriques avec la Dispute de l'assesseur Villamur et du secrétaire de l'Hùtelde-Ville, Fraxine surnommé Peironis, en 1489, et la Malebéle en 1496.
Enfin, les miniatures tendent de plus en plus à s'agrandir. C'est ainsi que nous voyons pour la première fois celle de 1483-84, représentant la Rupture du Pont- Vieux, tenir toute la page.
A n'en pas douter, les Capitouls ont abandonné les simples praticiens pour s'adresser à de véritables artistes, et ces artistes semblent varier tous les ans. Ils sont donc nombreux à Toulouse, et les Capitouls n'ont que l'embarras du choix entre les enlumineurs indigènes et les enlumineurs étrangers.
Quelques noms nous sont connus, non par les oeuvres des enlumineurs qui ne les signent jamais, mais par les comptes des Trésoriers municipaux et par les mandemeuts tirés sur ces derniers par les Capitouls. Ce sont Antoine Contarini, un Vénitien que nous voyons pour
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la première fois en 1442-43 peignant YEnl e du Dauphin (depuis Louis XI) portant sa mère en croupe, et que nous retrouvons vingt ans plus tard, en 1461-62, peignant le Sacre du roi Louis XI à Reims, et en 1463-64 YEntrée de Louis XI à Toulouse; — Antoine de Longny, mentionné dans deux mandements capitulaires de 1460 et qui pourrait bien être originaire de l'Ile-de-France; — Daniel de Saint-Valéry et Colin de Thrysia, tous deux employés dans la même année 1465; — Guilhem Viguier, dit Papilhon, un indigène possédant une maison sur la place du Capitule, près de l'église Saint-Martial, que l'Hôtel de Ville a occupé en 1469, en 1487 et en 1498 et qui jouissait de la plus grande réputation comme artiste peintre, enlumineur et verrier, au point d'absorber à lui seul toute la corporation et d'annihiler tous ses confrères ; — Laurent Robyn, appelé également Roby et Bobini, qui devait être un des enlumineurs en vogue, car il fut employé par les Capitouls en 1475, 1485, 1488, 1489, 1494, 1497 et 1503, et auquel on ne pourrait guère attribuer que la miniature des Annales 1500-01 ; mais c'est plus quQ douteux, car cette miniature est vraiment supérieure par sa composition comme par son exécution et accuse un art nouveau, plus voisin de la Renaissance italienne que de l'époque médiévale française; — Jacques de Mostier, « pinctre », figurant sur les comptes municipaux de 1488-90 et probablement d'origine française; — Liénard de la Chieze, « historiayre », mentionné dans les comptes de 1498; — Jean de Gayan et Gibert Fiente, le premier d'origine indigène et le second d'origine italienne, accusant la double influence qui va s'exercer désormais à Toulouse comme partout ailleurs, celle de l'Art Gothique et Français, et celle de la Renaissance Italienne.
Mais pendant que les miniateurs se perfectionnent, un grave danger les menace. L'imprimerie date de quelques années à peine et déjà elle détruit l'industrie des enlumineurs toulousains. Nous en trouvons la preuve dans la naïve requête, en date du 16 mars 1748, présentée aux Capitouls par cinq enlumineurs qui leur dénoncent un « suppôt de l'Université » : Guyot Brisson, simple relieur et entreposeur de livres imprimés à l'étranger, « comme d'Allemaygne, JAome, Venisse, Paris, Lyon et d'autres bonnes villes », lequel « devroyt vendre lesdits livres sans ny mesler d'enluminer, car ung chascun vivre de son office et nécessité, qui est bien l'opposite... et à iceluy Guyot entreprins et délibéré destruire et mettre à néant et pouvreté lesditz pouvres enlumineurs... car û a trois ou quatre ans que aucun d'eulx avoit aucun compaignon besoignant dudict office d'enluminerie, icelluy Guyot les subornoit et faisoit saillir de leur maison et les tiroyt à lui, et fait encore, et de jurés il en a trois ou quatre èsquels il baille ou fait bailler toute la besoigne
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qui est de ladicte ville dont il ne eulx ne payent nulles tailles ne subsides d'icelle ville ».
Les cinq enlumineurs qui se plaignaient ainsi, et dont la requête est relatée dans le registre des Statuts des Métiers conservé aux archives municipales (fo 323), se nommaient Jehan Jehannet, Laurent Robyn, Pierre Du Claus, Mace Cochen et Pierre Pasquier. Ce sont des noms qui n'appartiennent pas à la langue d'Oc et leur requête est, en outre, écrite en français, tandis que les actes des corporations indigènes sont toujours rédigés en langue romane.
Leur requête fut-elle entendue? Cela parait difficile à croire. La découverte de l'imprimerie devait porter un coup mortel à la confection des manuscrits et par suite à l'industrie des calligraphes et des miniateurs. Si les « docteurs et seigneurs de la Ville » tendaient à se passer de leur concours, ce n'étaient pas les Capitouls qui pouvaient sauver leur institution en leur faisant peindre leurs Annales pour la modique somme de quelques écus ou même de quelques livres tournois.
Au reste, les plaintes de ce genre étaient générales. Un miniateur de Sienne écrivait en 1493 : « Del arte mia non si fa piu niente; l'arte mia e finitaporl'amordei libri che si fanno en forma che non si miniamo piu'.»
Ces plaintes durent s'accentuer à Toulouse lorsque Henri Alaman Mayer vint y établir ses presses et y mettre au jour plusieurs ouvrages, notamment une traduction de Ylmilalion de Jésus-Christ qui porte la date de 1488 et qui figure aujourd'hui à la Bibliothèque nationale parmi les premiers livres imprimés les plus importants 2. Mais si l'imprimerie tua la calligraphie, elle ne put détruire la miniature. Nous voyons les enlumineurs lutter avec succès contre la destinée qui les menace et faire encore des progrès dans la période qui suit en transformant leur manière au contact des Italiens. Les guerres de Charles VIII et de Louis XII avaient préparé celte évolution. Elle s'accomplit surtout sous François Ier.
1. Gaye, Carteggio inedito d'artisti, I, 267.
2. Marchand, dans son Histoire de l'Imprimerie, attribue à Henri Alaman II Peregrinage de la vida humana compuesto per fray Guillelmo Gralleville, abad de Senlis, traduzido en volgar caslelano per fra Vincentio Marmello, en Tolosa, por Henrique Alaman, 1480. On a prétendu qu'il s'agissait de Tolosa en Espagne. Mais, au bas d'un cantique de saint Jacques en langue romane, on lit ces mots : Se vend à l'hostal de Jean Grant Jean, libraire hereder de Enric Alaman Mayer, demoran al cantou de la Portaria, mila VCI, et la rue de la Porterie se trouvait sur la partie nord de la place actuelle du Capitole qui l'a absorbée. On ne peut donc douter qu'il s'agisse de Toulouse sur la Garonne et non de Toulouse en Espagne. (Cf. Du Mège, Histoire des institutions de la ville de Toulouse, t. II, p. 171, et Desbarreaux-Bernard, La question des deux Tholosa, dans les Mémoires de la Société archéologique du midi de la France, t. VIII, pp. 305 bis et s.)
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Durant le quinzième siècle, les miniateurs avaient supprimé les fonds d'or de la tradition latine ; mais ils n'avaient pas abandonné l'or. Ils l'avaient mêlé discrètement aux autres couleurs pour éclairer de rayons lumineux les plis d'une robe, la trame d'une étoffe, le pli d'une cuirasse, la lame d'une épée, la monture d'un bijou. Ils ont ainsi donné plus de variété, de chaleur, d'éclat ou de délicatesse aux tons les plus ternes et les plus froids. C'était là un procédé, une « ficelle », si l'on veut. La nature et la vérité sont offensées, cela n'est pas douteux. Les nuances sont menteuses; mais elles ne sont pas faussées. Au contraire, le mensonge est charmant et on ne saurait le condamner, car il a pour but de mieux rendre les effets naturels de la lumière. Parfois, sans doute, l'enlumineur a exagéré lorsque, voulant reproduire un trompe-l'oeil, il a promené la pointe sèche sur les ors, de manière à graver en creux ses hachures comme dans la miniature des Dons du Saint-Esprit (1447) ; mais nous sommes loin de la dureté et de l'invraisemblance des fonds uniformément dorés de l'École byzantine.
Enfin, pendant que Jean Van Eyck inventait de nouveaux procédés siccatifs pour transformer la pointure de chevalet, les miniateurs avaient usé de la gouache pour donner à la peinture à l'eau plus de tenue, de relief et de velouté. Ils ont ainsi fait progresser leur art par les modes d'exécution, en même temps que par le perfectionnement du dessin et une meilleure entente de la composition.
Séance du 31 janvier 1905.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. le baron DESAZARS DE MONTGAILHARD continue son étude sur les Miniatures des Annales de Toulouse au quinzième siècle, dont on vient de lire le résumé.
M. PERROUD annonce que la ville de Toulouse va prendre à bail l'ancien Hôtel Dubarry, situé place Saint-Sernin, et qui deviendra une dépendance du Lycée déjeunes filles; il offre à la Société de le lui faire visiter. Cet immeuble présente encore de curieuses décorations et deux plafonds peints du style et de l'époque de Boucher. Plusieurs membres prennent la parole à son sujet et signalent notamment la description qu'en a donnée Arthur Young dans son Voyage en France.
M. DE LAHONDÈS, au nom de la Société, remercie M. le Recteur, et il est décidé que la visite aura lieu le samedi 4 février, à deux heures.
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M. FOORGOUS décrit un coffret du douzième siècle en cuivre cloisonné qui fait partie du trésor de Saint-Sernin.
Coffret du XIIe siècle du Trésor de Saint-Sernin.
Ce reliquaire a été trouvé en 1901 dans la châsse de Saint-Gilbert '. Il contenait de petits sachets de soie avec des fragments d'osselets munis d'inscriptions manuscrites.
Sa hauteur est de 0ra14, sa longueur de 0m16 et sa largeur de OC®. La forme est rectangulaire, les quatre pieds losanges au pointillé sont à angle droit et formés par le prolongement des côtés du coflret. Le couvercle, en forme de toit triangulaire, porte sur le faîte quatre petites boules; quatre trous sur l'une des faces laissent supposer que celle ci portait jadis une applique. (Figure ci-jointe.)
Le fond du mêlai champlevé était autrefois garni d'émail; on çn voit à peine la trace aujourd'hui.
Comme dessins, sur les deux grands côtés, dans des médaillons de forme ronde, trois anges en pied, les ailes éployées; la gravure de ces personnages est assez grossière, les rinceaux qui séparent les médaillons sont plus délicats et leur enroulement se terminent en fleurs de trèfle.
Le grand côté du couvercle, dans des médaillons semblables aux précédents, comprend quatre autres anges, à la tète nimbée, mais on ne voit que le haut de leur corps qui semble émerger des nuages. Eux aussi ont les ailes éployées.
Le tout, en haut comme en bas, est encadré d'une bordure.
Sur les côtés, le corps du coffret offre aussi un ange; le couvercle seulement des arabesques.
Ge coffret, qui date de la fin du douzième ou du treizième siècle, offre une grande analogie avec un reliquaire que possédait récemment encore dans son trésor l'église de Montpezat (Tarn-et-Garonne). M. le chanoine Pottier, qui a publié une étude sur ce dernier dans le Bulletin de la Société archéologique de Tarn-elGaronne, en signale aussi plusieurs autres 2. Celui de Montpezat était dans un état de conservation parfait et d'un faire plus archaïque ou plus grossier que le reliquaire de Saint-Sernin.
1. Cf. Bulletin de la Société archéologique du Midi, n° 29, année 1901-1902, p. 22.
2. Cf. Bulletin âe la Société archéologique de Tarn-et-Garonne, année 1904, 38 trimestre, p. 241.
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On sait que ce reliquaire de Montpezat a été subrepticement ravi à l'église. On ignore ce qu'il a pu devenir 1.
M. Emile CARTAILHAC a visité récemment au Plan, près Cazères, la collection qu'avait formée un instituteur de la Haute-Garonne, J.-M. Baptiste Pégot, décédé l'an dernier, à soixante-sept ans, lauréat de l'Académie des sciences de Toulouse. Pégot avait eu l'occasion de rencontrer de bonne heure notre regretté collègue le Dr Noulet, et il avait pris de ce savant maître le goût, la passion même, des recherches d'histoire naturelle. Il avait été mis aussi en rapport avec le
1. N. B. — Une erreur et une transposition de mots doivent être rectifiées à la page précédente in fine. Il faut lire : Celui de Saint-Sernin est dans un état de conservation moins parfait et d'un faire plus archaïque ou plus grossier que celui de Montpezat.
BULL. 35, 1905. 18
■FIG. 1. — Coffret du douzième siècle du trésor de Samt-Semin. (Photographie de M. J. FOURGOUS.)
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professeur Lëymerie, auquel pendant de longues années il avait fourni des fossiles intéressants. Pégot récolta de même pour d'autres géologues français et étrangers et avec tant d'ardeur qu'un certain nombre de gisements classiques des environs d'Ausseing ont été presque épuisés. Il avait cependant conservé pour lui de très nombreux spécimens. M. Cartailhac a surtout examiné chez sa veuve les tiroirs d'archéologie préhistorique, et d'après les renseignements donnés il aurait dispersé peu d'objets de cette partie. On remarque dans sa collection environ soixante quartzites taillés, un seul en silex, du type paléolithique le plus ancien, de Gensac, quelques autres de Montbereau; un, exceptionnellement en silex, de Tourtouse (Ariège). Au paléolithique récent appartiennent quelques silex d'une grotte de Tourtouse, près Fabas; d'autres, avec un harpon en os cylindrique barbelé, d'une grotte de Montfort, près SaintLizïer, etc. Le néolithique a fourni une centaine de haches de pierre polie, de Gensac, dont une eu pétrosilex polie et retaillée, la plupart en roches grises, en quartzites. Un bel exemplaire de grande taille (0m22) est de Saint-Michel. Une hache plate en bronze, également de Gensac. M. Cartailhac a cru convenable de conserver dans notre Bulletin le souvenir de ce zélé amateur et de ses trouvailles. Le sort des collections n'est pas fixé.
M. Emile CARTAILHAC rappelle que le 7 avril 1903 il fit une conférence publique sur la statue-menhir, originaire des environs de Lacaune, que M. l'abbé Hermet voulut bien nous accorder, et qui est un des plus curieux monuments préhistoriques du Midi. Il lui paraît opportun de revenir sur quelques points de son étude :
A propos des statues menhirs de l'Aveyron et du Tarn.
Les monuments signalés par M. l'abbé Hermet en 1891 et 1892, dans une étude 1 intitulée : Sculptures préhistoriques dans les deux cantons de Sainl-Affrique et de Saint-Sernin (Aveyron), publiée dans les Mémoires de la Société des lettres, sciences et arts de l'Aveyron, 1892, avaient une importance exceptionnelle qui fut d'abord reconnue. Ils étaient au nombre de six. M. Hermet en connaît aujourd'hui vingt1.
vingt1. avec reproductions de figures dans l'Anthropologie, 1892, p. 224 et suiv. Voir aussi Ibid., 1900, pp. 251 et suiv.
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sept, disséminés dans ces cantons ou dans les cantons voisins de Belmont, de Saint-Rome-de-Tarn, delà Salvetat, de Lacaune, de Murât, de Vabre, par conséquent, dans l'Aveyron et le Tarn. De semblables statues menhirs ont été signalés dans l'Hérault. (Statues menhirs de l'Aveyron et du Tarn, par l'abbé HERMET. Paris, Bull, arch., 1898.)
Trois mégalithes sculptés un peu différemment, et néanmoins de la même famille, avaient été remarqués parmi les pierres de deux dolmens du Gard et furent décrits par M. Lombard-Dumas (Nîmes, 1887 et 1892). D'autres, depuis plus longtemps connus, appartiennent à des allées couvertes des environs de Paris, Eure, Oise et Seine-et-Oise. Des bas-reliefs dus aux mêmes inspirations nous ont été montrés par M. le baron de Baye sur les parois des curieuses grottes sépulcrales de la Marne. Des menhirs enfin, les uns à Guernesey, les autres en Sardaigne et en Corse, rentrent sans aucun doute dans la même catégorie d'antiquités. Tous ces vestiges forment un bloc dont l'attribution aux âges préhistoriques n'est pas douteuse. Ils ont un grand intérêt pour l'histoire de l'art et des idées religieuses. Ils établissent une sorte de lien matériel et moral entre les populations de ce vaste territoire ; peut-être même sont-ils apparentés à certains monuments de la Méditerranée orientale.
Il est donc très utile d'enregistrer avec soin les observations qui peuvent se produire à leur sujet.
Ainsi, M. Salomon Reinach, qui les apprécie fort et les a inventoriés dans un ouvrage devenu très rapidement classique : La sculpture en Europe avant les influences gréco-romaines (l'Anthropologie, 1894), vient de leur consacrer, par occasion, deux pages complémentaires dans l'Anthropologie, 1904, no 6, pp. 654-6. C'est le post-scriptum d'un article intitulé : Quelques tombes mycéniennes explorées en Crète. Notre ami, M. E. d'Acy, croyait avoir reconnu que « dans les statues anciennes de l'Aveyron, ce que l'on prenait pour des jambes, n'est autre chose que les bouts de la ceinture ornés de franges ». Son opinion se fondait sur quelques statuettes en terre cuite chypriote ou carthaginoise qu'il se proposait de faire connaître. M. d'Acy avait dans ce but réuni quantité de dessins. Mais la maladie l'arrêta; il est mort; et, pieusement, M. Reinach sauve de l'oubli cette interprétation qui l'avait séduit; il l'accepte. Il établit les droits de priorité de M. d'Acy en reprenant sa thèse :
« C'est une chose bien étrange qu'une constatation à nos yeux si évidente n'ait pas été faite depuis par d'autres archéologues... Mais voici que M. Myres vient de publier une étonnante statuette de femme en terre cuite, peinte, découverte àPetsofa, en Crète; elle porte une grosse ceinture à longs bouts, dont l'analogie avec celles de nos statues de l'Aveyron est évidente. Cette statuette n'est pas mycénienne, mais minoenne ; elle
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remonte à l'an 2000 avant J.-C. ou même au delà. C'est, de beauCoup, le plus ancien exemple de la série que M. d'Acy aurait voulu constituer et publier, série qui comprend aussi la terre cuite de Siteia en Crète, autrefois publiée par moi dans l'Anthropologie (1902, p. 32), qualifiée inexactement de mycénienne; elle est minoenne. » (Nos fig. 1, 2 et 3.) M. S. Reinach reproduit côte à côte la statuette de Petsofa et le menhir anthropoïde de Saint-Sernin : « Il n'est nullement prouvé pour moi,
ajoute-t-il, que le menhir soit plus ancien que la statuette. Ce peutêtre la traduction en pierre d'un motif sculpté en bois qui avait déjà évolué pendant plusieurs siècles avant qu'on ait songé à le reproduire en pierre; mais il est évident que le corsage ouvert, la double ceinture et les bouts longs pendants de celle-ci constituent les éléments de deux costumes féminins très caractéristiques et très nettement apparentés.
« Dans la statuette de Petsofa, les bouts ne se terminent pas par des franges; mais des franges pouvant donner l'illusion de cinq doigts se reconnaissent dans plusieurs figurines phéniciennes et grecques qui ont été réunies par M. d'Acy. »
J'étais lié aussi avec M. d'Acy, et j'avais reçu également la confidence'
FIG. 1. — Statuette de Petsofa, Crète.
PIG. 2. — Menhir anthropoïde de Saint-Sernin.
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de ses idées et de son projet. Mais je connaissais autant que lui les statues
statues de l'abbé Hermet, et ce qu'il me disait ou m'écrivait, la vue
des dessins qu'il avait eu la bonté d'étaler un jour à mes yeux ne •J m'avaient nullement converti à sa manière dé voir.
FIG. 3. _ Statuette de Sisteia, Crète.
FIG. 4 et 5. — Les Menhirs de Guernesey.
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J'ai été surpris que M. Reinach soit entré complètement dans les vues de notre regretté confrère et qu'il n'ait pas hésité, réflexions faites, à rendre publique son adhésion dans les termes formels que l'on vient de lire. Sa vaste érudition, sa connaissance approfondie des monuments et de l'art ancien lui donnent une autorité de premier ordre; les théories
qu'il met en circulation ou qu'il prend sous son patronage sont lues de tout le public qu'intéressent ces études d'archéologie ancienne; elles font leur chemin, elles restent.
Or, convaincu qu'il s'est trompé cette fois, et qu'il s'engage à tort sur une piste sans aucun doute erronée, je dois à mon tour publier mes franches réserves.
Pour alléger le débat, je puis faire abstraction des sculptures de Guernesoy, du Vexin normand, de la Champagne, de la Provence. Elles n'offrent pas, en effet, ces reliefs litigieux que M. Reinach regarde comme des bouts de ceinture. Mais avant de les mettre de côté, je noterai qu'elles sont plus schématisées. Les détails que le sculpteur a mis en relief sont réduits à un minimum. Il ne s'est occupé que de la partie supérieure du corps humain. - Sur les unes, on ne voit que deux mamelons qui pointent; il faut con. naître des images plus complètes pour certifier qu'il s'agit de seins. Sur d'autres, des colliers sont joints aux seins. Ailleurs, le visage humain est
FIG. G. — Support sculpté du dolmen .d'Ecos (Eure). Colliers et seins.
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rappelé à côté par quelques traits essentiels. Deux ou trois fois les bras aussi sont apparents. On voit dajis plusieurs de ces images des figures de haches de pierre emmanchées, un poignard ?, des crosses qui sont peutêtre des boomerangs. Dans toute cette série de monuments, pas de ceinture.et rien plus bas. (Voir nos fig. 4 à 8.)
La série Aveyron-Tarn-Hérault s'offre à nous avec plus d'homogénéité, avec des caractères particuliers s'ajoutant aux traits généraux. Ce ne sont plus de simples bas-reliefs, des pierres sculptées sur une face, ce sont des oeuvres complexés. M. Hermet a eu raison de les appeler statues menhirs. Ce sont des menhirs qui furent plantés en terre jusqu'à un niveau presque toujours facile à déterminer; ce sont des statues ciselées sur toutes leurs faces, tantôt sommairement, tantôt avec une multiplicité de détails qui sollicitent notre curiosité. Le groupe est très homogène d'allure, de style ; à tel point que sur le vu dés dessins représentant les premières
Fia. 7. — Support sculpté du dolmen d'Aubergenville (Seine-et-Oise). Figure humaine, colliers et seins.
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pierres découvertes, des campagnards en signalèrent aussitôt quelques autres- " *««£É*
Dans ces statues-menhirs^ deux séries : l'une représente :des femmes,
FIG. 8. — Statue menhir d'un dolmen du Gard. (Visage, crosse, seins, bras.) ■
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l'autre des hommes. Le soin que l'on a mis à figurer des seins saillants caractérise les images féminines. L'absence de seins distingue les masculines. Les sexes ne sont jamais indiqués plus. clairement ; on dirait que «et art préhistorique a d'inconscientes délicatesses. Cependant,
quelques reliefs supplémentaires, des colliers chez les uns,'une sorte de; baudrier chez les autres viennent confirmer ce dualisme, rien ne le contredit '■'.''
. Je.n'ai pas à'reprendre l'étude déjà faite et bien faite par l'abbé Hermet. Je n'envisagerai dans ces monuments qu'un point, le détail visé par M; Reinachi Sur ces statues-menhirs a-t-on sculpté des jambes ou bien s'agit-il tout simplement des bouts flottants de la ceinture et, dans
FIG. 9. Homme. — Les Maùrels, canton de Saint-Affrique (Aveyron).
FIG. 10. Homme. — Pousthomy, canton de St-Sernin (Aveyron).
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ce cas, doit-on établir quelque parenté avec des statuettes Cretoises, phéniciennes ou autres?
La ceinture existe, toujours très apparente, dans la plupart des exemplaires. Elle est quelquefois simple et lisse, plus souvent couverte
couverte dessin rudimentaire, révélateur de son décor. L'artiste la figure, même lorsque les autres détails sont réduits au minimum. C'est quelquefois tout ce qui reste visible sur le monument rongé par les agents atmosphériques. Quand le bloc est bien conservé, quand il est sculpté plus minutieusement, celte ceinture est justifiée par la présence d'un large vêtement, semblable à un manteau, dont les plis verticaux sont creusés du sommet de la tête aux pieds, surtout sur les côtés de la statue, quelquefois sur le dos.
FIG. 11. Femme. — Serregrand (Aveyron).
FIG. 12. Homme. — Pousthomy, canton de Saint-Sernin (Aveyron).
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Jamais l'ornementation de la ceinture ne passe aux deux reliefs sousjacents. Il suffirait d'un seul exemple pour justifier la thèse d'AcyReinach. Cet exemple n'existe pas. Le sculpteur a donc voulu représenter autre chose qu'une suite de la ceinture.
Notre figure 12 montre que les deux appendices ne touchent pas toujours à ladite ceinture. Dans l'exemplaire superbe que Toulouse et la Société archéologique du midi de la France doivent à l'amabilité de M. l'abbé Hermet, entre la ceinture et les reliefs il y a un intervalle plus large encore. (Voir la figure ci-après, p. 271.) C'est une nouvelle preuve qu'il s'agit de choses tout à fait distinctes, et que les prétendus bouts de ceinture avec franges terminales sont tout simplement des jambes.
FIG. 13. Femme. — Mas-Capelier, canton de Saint-Affrique (Aveyron).
FIG. 14. Homme. Puech réal, canton de Vabre (Tarn).
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Il y a identité dans la façon de représenter les bras et les jambes, les mains et les pieds. Le lecteur en jugera par les dessins ci-joints. On n'a pas le droit, ce me semble, de ne pas tenir compte de ce parallélisme si constant et si complet. Qu'on note le nombre des doigts et aussi ce sillon qui les limite, aux mains et aux pieds, dans quelques figures; est-il assez démonstratif?
Les bras sont dessinés deux ou trois fois avec une légère flexion. Le sculpteur a tenu à se rapprocher de la vérité. Le haut de ces membres se trouve alors à sa vraie place et se confond avec l'épaule; mais le plus souvent les bras sont grossièrement traités, comme les jambes, jamais mieux.
On pourrait objecter que ces jambes sont étrangement courtes. Les bras, qu'on ne peut discuter et qu'on ne discute pas, n'offrent-ils pas des aspects également anormaux? Mais peut-être l'artiste a-t-il eu l'intention de montrer des personnages assis. Incapable de creuser profondément son bloc avec ses marteaux de quartz ou de cuivre, n'imaginant pas d'ailleurs qu'on pût arriver à plus de ressemblance, il a marqué ce qu'on voit de face, la partie inférieure, du genou au pied. Le genou est très nettement limité dans plusieurs cas; c'est une indication qu'on doit retenir. ,
Il faut, dans de telles antiquités, envisager les spécimens les plus détaillés, les plus soignés. Ils permettent seuls d'interpréter les autres. Et ce n'est pas de jeu, si je puis ainsi dire, que de prendre les moins nets, les plus vagues, pour les rapprocher d'oeuvres exotiques et forger des hypothèses.
Ai-je besoin d'ajouter qu'ils me semblent bien légers les liens que d'autre part M. Reinach veut établir entre l'élégante et très claire statuette crétoise et nos mystérieuses et massives images sculptées. La proéminence du sein dans celles-ci suffit-elle pour justifier un tel rapprochement? ne serait-ce pas se contenter de peu?
La poitrine est-elle nue dans nos statues-menhirs? L'ample manteau dont les plis descendent de la tête aux pieds s'arrête au bord des seins, mais la ceinture est soutenue par une sorte de tige qui va s'accrocher autour du cou. Est-ce une bretelle ? N'est-ce pas la bordure et le col du corsage, d'un vêtement de dessous assez léger pour couvrir les-formes sans les dissimuler?
N'oublions pas que les populations qui dressaient les statues-menhirs tenaient essentiellement à indiquer les seins, puisque souvent c'était la seule partie du corps représentée, avec ou sans le collier à plusieurs rangs de perles. Ils suffisaient à rappeler que la pierre était le simulacre d'une femme. Qu'était cette image? Nous sommes réduits au.x_b.ypo-
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thèses en l'air, mais peu importe. Les contemporains étaient fixés. Le sculpteur avait souligné, accentué le détail essentiel. Cela ne prouve pas que le sein des femmes restait nu en Gaule comme dans l'entourage des dieux qu'adorait Minos.
Reinach m'a reproché, dans son Etude de la sculpture en Europe, d'avoir attribué nos bas-reliefs de la Marne et autres à l'époque néolithique. Il les réclame sans hésiter pour le premier âge des métaux, pour l'époque du cuivre, « qui est en France celle de la plupart des dolmens ».
De grâce, entendons-nous. Mes fouilles, dès 1866, et les nombreuses collections que j'ai données au Musée national de Saint-Germain ou au musée de Toulouse, ont mis précisément en lumière ce fait que les dolmens des Cévennes voient l'aurore de la métallurgie. Dans la France préhistorique, et en maintes occasions, j'ai déclaré que bon nombre de dolmens bretons appartiennent aussi à cette période de transition. Même quand ils ne contiennent pas d'objets en cuivre, c'est la forme des haches, ce sont d'autres faits qui le démontrent. Mais la civilisation a mis des siècles à évoluer! Il y a des sépultures mégalithiques qui sont franchement plus anciennes et néolithiques. Les grottes funéraires de la Marne, dont les bas-reliefs sont si remarquables, si typiques, sont précisément dans ce cas. Le baron de Baye, qui nous les a révélées, a insisté sur ce point, certes avec raison. Nous aurions en revanche, dans le Midi, à rajeunir nos statues-menhirs. Les bas-reliefs des dolmens du Gard, où abondent les perles de cuivre, où sont déjà des bronzes, nous y engagent. Je le reconnais volontiers.
Mais je ne suis pas de ceux qui croient aisé de manoeuvrer dans les âges préhistoriques comme si nous les connaissions très bien. Je ne sais pas dans quelle mesure des populations parisiennes ou champenoises, ignorant encore le cuivre ou le bronze, ont vécu en même temps que d'autres plus favorisées de l'Ouest ou du Midi. Je ne sais pas distinguer l'ordre relatif d'un grand nombre de gisements. Les arrêts de culture, les retours à la sauvagerie, toujours possibles, m'échappent absolument. Un jour, peut-être, après une étude générale de la céramique, nous y verrons plus clair. Il faut savoir attendre pour régler toute cette chronologie comparée.
En tous cas, nos sculptures mystérieuses seraient-elles toutes de l'âge du cuivre qu'il faudrait les maintenir en face des petites idoles en pierre et des vases à figure humaine et à seins de femme exhumés par Schliemann de la seconde ville de Troie, je veux dire d'Hissarlik. M. de Morgan a recueilli en Perse de pareils vases, de pareilles figurines, dans des couches qu'il ne serait pas éloigné de faire remonter au troisième millénaire et au-delà. Voilà les termes de comparaison que j'accepte.
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Je pense bien que nous trouverions en Crète le même niveau, quelque part dans le subslratum des couches minoennes, mais pas plus haut. Il s'agit donc d'une civilisation et d'une époque de beaucoup antérieures à l'épanouissement des modes étonnantes qui donnent tant d'attrait aux prêtresses et aux femmes de Petsofa et de Gnosse et de Phoestos.
M. l'abbé HERMET, membre correspondant de l'Hospitalet (Aveyron), communique la note suivante 1 :
La statue-menhir de Frescaty, commune de Lacaune (Tarn).
La statue-menhir offerte par M. l'abbé Hermet à la Société archéologique du Midi, qui l'a honorablement installée à l'hôtel d'Assézat, provient des environs de Frescaty 2, ferme de la commune de Lacaune.
Elle fut découverte par le sieur Bru, charron de la Trivalle, pendant qu'il était occupé à défoncer, pour y planter des choux, un champ dit la Resse-Neuve, située à 50 mètres ouest de la ferme de Frescaty, confrontant, du nord, avec le ruisseau de Laucate, et du levant, avec le chemin d'intérêt local qui se détache de la route départementale près de la
1. Cette note est parvenue à la Société au mois de juin, mais il a paru au secrétariat utile de l'imprimer à la suite du Mémoire de M. Cartailhac qu'elle complète et réciproquement.
2. Frescaty est à peu près à 7 kilomètres de Lacaune, à l'intersection du méridien 0°25', avec 43°42' latit. N. (V. Cart. Ministère Intérieur, feuille XVII, 34.)
Bibliographie des statues-menhirs.
Procès-verbaux des séances de la Société des Lettres, Sciences et Arts de l'Aveyron. Communications diverses de M. l'abbé HERMET, 1891 et sqq.; 1900, pp. 28, 191).
Abbé HF.RMET : Sculptures préhistoriques dans les deux cantons de SaintAftrique et de Saint-Sernin (Aveyron), 22 pp. in-8», 1892, XIV pi. ext., des Mémoires Soc. Lett. Se. Aveyron, t. XIV, Rodez. Analysé dans l'Anthropologie, 1892, p. 222, et dans Revue mensuelle de l'Ecole d'anthropologie, 1892, p. 88; art. de G. DE MORTILLET, 316-320; art. d'Ad. DE MORTILLET, avec indications d'autres menhirs de l'Hérault.
Abbé BARTHE et CARAVEN-CACHEN : Note dans Albia Çhristiana, août 1897, p. 79.
Abbé HERMET : Statues-menhirs de l'Aveyron et du Tarn, 40 p. in-8», IV pi. ext. du Bulletin archéol., 1898. Analysé avec figures dans l'Anthropologie, t. XI, 1900, pp. 251-254.
Le même : Statues-menhirs de l'Aveyron, du Tarn et de l'Hérault, pp. 325-338. Congrès intern. d'anthr. et d'arch. préhist. C r., Paris, 1900.
Salomon REINACH : La sculpture en Europe avant les influences gréco-romaines, dans l'Anthropologie, pp. 25 et sqq., et Y Anthropologie, 1904, pp. 654-656.
Emile CARTAILHAC : A propos des statues-menhirs. Ci-dessus, Bull. Soc. arch. du Midi, 1905> p. 257.
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Trivalle et va à Lacaune en passant par Frescaty et les Vidais. Elle était sur la lisière ouest du champ, à 50 mètres du chemin et à 100 mètres
mètres ruisseau. La statue, enfouie à 30 centimètres sous le sol, était
couchée à plat, la tête tournée vers le ruisseau et la face tournée en bas.
Bru se rappelait exactement la place où il l'avait trouvée et, avec un
FIG. 1. —Statue-menhir de Frescaty près Lacaune (Tarn), découverte par l'abbé Hermet et donnée par lui à Toulouse.
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désintéressement fort louable, il sacrifia un carré de choux pour l'exécution des fouilles qui furent poussées jusqu'au sol vierge (lm50), faites avec un soin minutieux, mais qui ne donnèrent aucun résultat.
Cette statue est en grès rouge permien, et comme cette qualité de pierre ne se rencontre nulle part dans le canton de Lacaune, elle ne peut provenir que de la carrière de La Maurelle, près de Camarés (Aveyron), où les habitants du pays vont encore prendre la pierre de taille pour leurs constructions.
Quoique transplantée dans le Tarn, elle est néanmoins originaire du Rouergue; d'ailleurs, elle n'avait pas émigré fort loin en terre étrangère, puisqu'elle n'était qu'à 1 kil. 1/2 de la limite de l'Aveyron.
Cette statue-menhir est de belle taille; elle mesure lm67 de hauteur sur 0m65 de largeur et 0m20 d'épaisseur. Comme elle a pu être recueillie peu de jours après son exhumation, elle est dans un état d'excellente conservation. De toutes les sculptures similaires, la statue de Frescaty et celle de Saint-Sernin sont les deux où les traits sont le mieux accusés.
Elle est de la catégorie des statues dites féminines, caractérisées par l'absence du baudrier et la présence de deux seins bien accentués, ainsi que de plusieurs colliers concentriques.
Les mains et les avant-bras sont placés horizontalement. La ceinture qui entoure complètement la pierre est ornée sur le devant de trois traits semi-circulaires qu'on serait tenté de prendre au premier coup d'oeil "pour trois C (CGC) majuscules pouvant indiquer une date; mais un examen attentif ne permet d'y voir que l'indication de feuilles imbriquées (???).
Autre détail intéressant : on dirait que la statue ou la femme représentée par la statue est assise et que les genoux sont saillants ; cette saillie serait indiquée par un trait transversal qui semble indiquer que les jambes ne montent pas jusqu'à la ceinture; mais les plis de la robe qui tombent perpendiculairement contredisent cette position et cette interprétation.
Il est surtout évident pour moi que ce que j'ai toujours appelé les jambes sont des jambes, et je ne suis nullement de l'avis de M. Salomon Reinach ', qui veut y voir les deux extrémités retombantes d'une ceinture terminée par des franges. En comparant les pieds et les mains de toutes les statues-menhirs et en voyant la façon identique dont l'artiste a représenté les doigts des mains et les orteils, il est certain que les prétendues franges ne sont que les pieds de la statue; enfin, dans la statue de
1. Voir Anthropologie, 1904, n°6.
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Frescaty, on voit nettement que le haut des jambes, n'étant pas en contact avec la ceinture, n'a rien à faire avec elle.
M. EMILE CARTAILHAC fait observer que M. l'abbé Hermet arrive exactement aux mêmes conclusions que lui au sujet des jambes sinon des genoux du personnage figuré. (Voir ci-dessus, p. 267.) Il se réjouit de cet accord et espère que l'hypothèse des bouts de ceinture avec franges sera abandonnée promptement. La statuemenhir de Frescaty ne laisse place à aucune incertitude.
Séance du 7 février 1905.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. de LAHONDÈS exprime tout l'intérêt qu'a pris la Société à la visite de l'hôtel Dubarry et adresse à nouveau ses remerciements à M. Perroud. Il présente le dessin de la rampe du grand escalier dont les visiteurs avaient constaté la disparition, et qui n'a pas la valeur qu'on avait d'abord supposée. A propos de la chambre avec alcôve formée par des colonnes doriques près du grand salon, il signale une pièce analogue dans un hôtel de la même époque, situé rue Saint-^Etienne et occupé par le statuaire M. Monna. Il rappelle également que Dubarry possédait une importante collection de tableaux, depuis longtemps dispersée. M. Roschach en a publié un catalogue dans les Mémoires de l'Académie des Sciences de Toulouse, année 1888, page 193. Notre confrère M. Lamouzelle a d'autre part imprimé dans notre Bulletin, année 1902, p. 197, un inventaire de l'hôtel de Jean Dubarry en 1794.
M. le baron DESAZARS pense que le plafond du grand salon pourrait être attribué au Toulousain François Cammas; cet artiste est l'auteur du Saint-Bruno qui est à la Dalbade et d'un Rétablissement du Parlement que l'on peut voir au Musée.
M. LAPIERRE rappelle l'existence d'un autre salon lambrissé du dix-huitième siècle, au n° 42 de la rue des Récollets; une description en a été donnée à la Société par M. de Bouglon, à la séance du 2 décembre 1895. Le même jour, M. Lapierre avait signalé le salon du château de Reynerîe, à quelques kilomètres de Toulouse; cette deBUXL. 35, 1905. 19
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meure était la propriété de Guillaume Dubarry, et le salon, décoré dans le goût le plus exquis et le plus pur, offre en particulier, dans des médaillons, deux portraits de Mme Dubarry.
Il est communiqué trois lettres portant candidature au titre de membres correspondants. Une commission, composée de MM. Delorme, baron Desazars et Lécrivain, est chargée d'examiner ces demandes.
M. le Dr TACHARD, au nom de M. Gauckler, directeur des Antiquités de la Régence de Tunis, offre trente-sept pièces de céramique funéraire. M. le Président se charge de transmettre les remerciements de la Société à M. Gauckler. Ces objets seront joints à la collection de la Société et exposés au musée Saint-Raymond.
La Société décide d'ouvrir au public toulousain sa prochaine séance où M. le Dr Tachard présentera ces objets et exposera les découvertes récentes faites en Tunisie.
M. FOURGOUS, comme complément à sa communication de la précédente séance, présente une série de photographies du Trésor de Saint-Sernin qu'il a reproduit presque entièrement.
Il décrit à cette occasion une croix processionnelle inédite du seizième, siècle, qui se trouve à la sacristie de la même église.
Croix processionnelle du seizième siècle.
Cette croix, dont l'armature en chêne est entièrement recouverte de lamelles d'argent avec dessins exécutés au repoussé, est d'une hauteur de 0m58; la longueur totale des traverses est de 0m47; les branches ont comme largeur moyenne 01104 et se rejoignent sur un carré central.
Les croisillons et la partie du sommet se terminent par un trèfle précédé d'un renflement ; celui-ci se retrouve à la partie inférieure avant une douille plate fixée sur la boule qui supporte le tout. Cette douille n'offre aucune trace de reliquaire comme eh contiennent parfois les croix processionnelles.
Quant aux ornements, ils consistent en rinceaux et fleurons. On remarque aussi, aux extrémités, les symboles des Évangélistes dans une rosace quadrilobée, à l'endroit du renflement. Ces symboles se trouvent exactement à leur place habituelle d'après l'iconographie : au sommet, l'aigle (saint Jean); à l'opposé, l'ange (saint Mathieu); à droite, le lion (saint Marc); à gauche, le taureau (saint Luc). Les animaux sont d'une
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allure très fiére et ont les ailes éployées ; comme l'ange, ils ont la tête entourée d'un nimbe et tiennent une banderole, où le nom du saint qu'ils représentent est inscrit en lettres gothiques, en latin et au génitif. Les deux faces de la croix sont semblables comme ornements. L'une d'elles porte un petit Christ en cuivre, mais il est moderne, ainsi que la boule supportant l'ensemble.
M. ForjRGorjs communique également à la Sociélé le catalogue d'une magnifique et riche collection d'anciennes étoffes recueillie par une dame belge, Mme Isabella Errera, et exposée au Musée du Cinquantenaire, à Bruxelles. Ce remarquable ouvrage, dont la couverture est une imitation d'étoffe syrienne du douzième siècle, contient, avec description et étude critique, quatre cent vingt reproductions.
M. FOORGODS est ainsi amené à parler de la chape d'Ascoli-Piceno. Cette oeuvre magnifiquement ornée, d'un prix inestimable et don de Nicolas IV, élu pape en 1288, à la cathédrale de sa ville natale, fut volée il y a environ deux ans. Pendant longtemps on ne sut ce qu'elle était devenue, lorsque M. et Mme Errera la reconnurent un jour dans la collection Pierpont Morgan, exposée au South Kensigton Muséum de Londres. Leur découverte, qu'ils signalèrent dans des revues d'art italiennes, rappela l'attention sur la chape et la mit tellement d'actualité qu'on vit en vente des cartes postales la représentant. On eût l'idée de comparer la reproduction avec la seule photographie qui eut jamais été faite de la chape, alors qu'elle était encore à la cathédrale; cette photographie était l'oeuvre d'Alinari, le célèbre photographe de Florence. La carte postale n'avait avec elle aucun rapport et les plis de l'étoffe, notamment, n'étaient pas les mêmes sur les deux épreuves. Le cliché de la carte était donc fait depuis le vol et l'enquête qui suivit amena l'arrestation de son auteur, un certain Hocchigniani, qui fut reconnu pour le voleur.
Quant à la chape, le pape et le gouvernement italien font actuellement des démarches pour en obtenir la restitution. Elles sont près d'aboutir. Mais M. Pierpont Morgan, qui ferait preuve du plus grand désintéressement, exigerait que la chape ne fit pas retour à Ascoli, où elle avait été mal gardée, et devînt la propriété de l'Etat.
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Séance publique du 14 février 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Conférence de M. TACHARD sur les antiquités et les vieilles villes
de Tunisie.
La séance s'est tenue dans la grande salle de l'hôtel d'Assézat où l'assistance était des plus nombreuses.
Après un rapide résumé historique, M. le Dr Tachard montre d'intéressantes projections sur la disposition des nécropoles puniques à Carthage. Il indique comment à Garthage les plus anciennes nécropoles se trouvent au voisinage du port, tandis qu'à la fin de la période carthaginoise elles se trouvent sur les hauteurs, marquant ainsi les limites de l'ancienne capitale.
Après la destruction de Carthage par Scipion, une nouvelle et riche cité s'élève sur les décombres de l'ancienne. L'ère de paix et de prospérité qui suivit la conquête permit aux Romains, durant une période de cinq siècles, d'enrichir la ville nouvelle de monuments grandioses d'une richesse sculpturale admirable.
Après la chute de l'Empire romain, les Vandales réduisirent à leur tour en poussière la vaste capitale africaine, qui se trouve à l'heure actuelle ensevelie sous une couche de 8 à 10 mètres de terre.
Les fouilles faites à Carthage et dans toute la régence ont mis à découvert des documents archéologiques de la plus haute importance, qui ont été réunis dans le musée du Bardo à Tunis, et dans le musée Lavigerie à Carthage.
C'est dans ces deux musées qu'il faut aller étudier le passé des deux peuples dont lès luttes remplirent l'histoire ancienne. Les poteries exposées devant l'assemblée proviennent des nécropoles de Carthage; aux premiers temps, la composition du mobilier funéraire était scrupuleusement réglementée. Les échantillons entrés en notre possession, dB fabrication punique, ont été découverts dans les fouilles de 1899 à 1904, dans les tombeaux de Douimès, de Dermech et sur les premières pentes de la colline de Bordj-Djedid.
Les nécropoles de Douimes appartiennent à la première période de l'occupation, aux septième et sixième siècles; les poteries qui y ont été trouvées révèlent l'influence égyptienne, modifiée à la fin par l'influence
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grecque archaïque des îles, surtout Chypre et Rhodes. A cette époque le mobilier funéraire contenait réglementairement : une jarre en forme d'obus et une jarre en amphore souvent recouverte d'un couvercle; une lampe à soucoupe protopunique, très plate, très grande, épaisse, sans peinture; une patère très aplatie et sans décor; un oenochoé abouche tréflée, et un oenochoé à bouche ronde, très aplati d'abord, puis en disque ou en simple anneau.
On y trouve, en outre, de petites coupes, avec ou sans anse, de forme plus ou moins hémisphérique, toujours sans couvercle.
A la deuxième période, pendant les cinquième et quatrième siècles, on voit grandir l'influence grecque modifiant peu à peu les modèles égyptiens; les nécropoles à cette époque se trouvent à Bermech, sur lespremières pentes de la colline de Bordj-Djedid.
Le mobilier de cette époque encore réglementaire contient : une jarre à queue pointue bien détachée ; une amphore à goulot plus resserré ; une lampe à soucoupe plus petite qu'à la première période, à bords plus pinces, et décorée de touches de peinture brune ou rougeâtre; deux oenochoés, l'un à bouche ronde, l'autre abouche tréflée.
A la troisième période, pendant les troisième et deuxième siècles, dans les fouilles pratiquées sur les pentes de Bordj-Djedid jusqu'au sommet de la colline de l'Odéon, on constate une véritable fantaisie dans la composition du mobilier funéraire et l'abandon absolu du modèle égyptien, remplacé par le modèle grec rapporté de Sicile.
On trouve dans ces nécropoles quelques amphores à queue, mais la forme en obus ne se rencontre plus du tout; les lampes puniques sont beaucoup plus petites et à bords pinces se rejoignant entièrement; elles sont accompagnées de lampes rhodiennes d'imitation grecque; des coupes et soucoupes de forme grecque et imitant des vases en métal ; de petites marmites à couvercle du genre de celle que l'orant carthaginois tient toujours dans sa main gauche, en ex volo à Taniti; des sébilles diverses en poterie rouge vernissée ou noire; des fioles à parfum et des alabastres souvent très élégants, portant quelques traits de peinture, et enfin un vase en biberon pourvu d'une tétine oblitérée.
Cet envoi contient encore un certain nombre de balles de fronde provenant de l'arsenal punique de Carthage, dont l'emplacement a été retrouvé par M. Gauckler, en 1902, au nord des lagunes actuelles qui sont le seul vestige de l'ancien port militaire.
Une mention spéciale doit être faite du manchon, d'un type tout à fait inédit, trouvé à Carthage et recueilli dans un four à potier dont le plan a été publié par M. Gauckler dans la Revue archéologique. Le manchon était destiné à recevoir un flambeau de résine, et les six godets
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à porter des bougies de cire. C'est donc un chandelier carthaginois à sept branches. L'exemplaire que nous avons reçu 1 constitue, jusqn'à présent, une très précieuse rareté.
Au cours des projections passent sous les yeux de la Société un tombeau punique du cinquième siècle ; la nécropole de Sousse, située non loin des catacombes chrétiennes récemment explorées, et le tombeau. lybico-punique de Dougga, ruiné en 1842 par Th. Read, pour s'approprier l'inscription bilingue apposée sur ce monument.
M. Tachard fait encore passer un grand nombre de projections montrant les ruines romaines de Aïn-Tounga, sur la route de Dougga. Cette dernière cité possédait un splendide capitule, un temple à Coelestis, un théâtre, un arc de triomphe, des aqueducs et des citernes immenses ; les fouilles y ont fait découvrir de riches et belles mosaïques exécutées par des maîtres habiles possédant une technique parfaite au service de connaissances anatomiques ressortant d'une manière spéciale dans l'oeuvre, aujourd'hui au Bardo, des cyclopes forgeant les armes d'Enée. Les belles ruines de Dougga mériteraient d'être relevées comme l'ont été celles de Timgad ; ces deux cités sont d'époque différente, et ont l'une et l'autre la plus grande importance dans l'histoire de l'art.
Les grands travaux hydrauliques des Romains en Tunisie ont été rappelés à l'occasion du temple des Eaux de Zaghouan, dont nous pouvons admirer une reconstitution intéressante due à M. Sardou, inspecteur du service des antiquités de la régence.
Sortant de Tunisie, M. Tachard attire l'attention sur les ruines romaines de Tebessad et montre l'arc de triomphe de Caracalla englobé par Solomon dans les fortifications byzantines de cette place; il fait passer sous nos yeux le temple de Minerve, qui a servi successivement depuis 1862 de bureau au génie, de cantine, de prison et d'église, et enfin de musée; il esquisse une description de sa belle basilique chrétienne, si intéressante et si utile à l'étude de l'art chrétien à ses débuts. . Après avoir très succintement décrit le prétoire de Lambessa et ses arcs de triomphe, il termine sa promenade archéologique par Timgad, en montrant l'arc triomphal de Trajan, le forum et enfin une belle statue d'Hygie, déesse tutélaire de la cité militaire, construite pour surveiller les tribus belliqueuses de l'Aurès.
1. M. Tachard a montré successivement à son auditoire les pièces typiques de la collection offerte à la Société par M. P. Gauckler, directeur des Antiquités dans la Régence.
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Séance du 21 février 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. RÉGNAULT offre à la Société une étude sur les peintures et. gravures préhistoriques de la grotte de Marsoûlas (Haute-Garonne), extraite du Bulletin archéologique du Comité des travaux historiques, année 1903.
M. l'abbé C. DATJX, membre correspondant, a également adressé sa brochure sur Jean I" d'Armagnac dans le Montalbanais.
La Société exprime aux donateurs ses remerciements.
La correspondance comprend une série de cartes postales de Paris et de Bruxelles adressées par M. Cartailhac.
M. Albert de PUYBUSQUE, M. Adrien ESCUDIÉ et M. l'abbé BAICHÈRE sont élus membres correspondants, après rapport favorable de la Commission nommée pour examiner leurs titres.
M. ROCHER communique à la Société archéologique une robe de mariée, en dentelle blanche, de l'époque du premier Empire.
Il fait remarquer l'élégante proportion de ce vêtement, dont la taille extrêmement haute devait donner au corps une très grande distinction.
Cette dentelle, faite d'une seule pièce, est composée d'un tulle de soie formant fond, sur lequel est un semis de fleurettes d'un très beau dessin.
La bordure du bas, d'une richesse extrême et d'une grande variété de détail avec des grilles merveilleuses, est très appréciée par les membres de la Société.
Cette robe est accompagnée de son voile, dont la dentelle et la bordure sont composées avec la même élégance et la même richesse de tissu.
M. DE LAHONDÈS présente les fiches du catalogue de la bibliothèque de la Société qu'il a colligées, les deux printemps derniers. Il les reproduira prochainement dans un registre plus facile à consulter.
Il explique le mode de classement qu'il a adopté, à la fois méthodique et alphabétique. Il a divisé les livreset plaquettes en diverses sections, selon les parties de l'archéologie qu'ils traitent : archéo-
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logie préhistorique, archéologie grecque et romaine, archéologie du Moyen âge et de la Renaissance, histoire, revues générales, revues des départements, revues ou ouvrages de l'étranger, ouvrages sur l'étranger publiés à Paris; enfin, il a réservé une section particulière pour les livres ou mémoires sur Toulouse.
Dans chaque section, les ouvrages sont disposés par l'ordre alphabétique des sujets traités.
Plus tard, un second registre pourra être dressé par noms d'auteurs suivant l'ordre alphabétique. . -
Les pages du registre sont divisées en trois colonnes : l'une pour les noms des auteurs, la seconde pour le titre des ouvrages, la dernière pour le format, le nombre des volumes de chaque ouvrage, et la place qu'ils occupent dans la bibliothèque qui remplit quatre salles, disposées chacune en travées numérotées. Le livre cherché sera ainsi facile à trouver.
La bibliothèque de la Société contient actuellement environ huit mille volumes ou plaquettes; mais elle s'augmente constamment.
Séance du 28 février 1905.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. le PRÉSIDENT dépose le nouveau livre que notre collègue Dom DU BOURG lui a remis pour l'offrir à la bibliothèque de la Société : Les Saints : saint Odon, 879-942, 214 p. in-12.
Dom du Bourg, ajoute-t-il, déjà bénédictin par sa vie et ses travaux avant de porter l'habit de l'ordre, continue, malgré les occupations et les épreuves de son priorat de la maison de Paris, ses travaux d'érudition et de recherches historiques. Cette fois, c'est la vie d'un de ses grands prédécesseurs qu'il a décrite avec la même rigoureuse précision à laquelle nous ont habitués ses précédents . ouvrages, mais aussi avec une langue plus vigoureuse, plus émue, plus variée et plus imagée que celle qu'il parlait lorsqu'il était encore dans le monde.
Saint Odon vécut il est vrai dans un siècle troublé que remplirent, avec des événements dramatiques, des inquiétudes si poignantes que l'on put se croire à la veille de la fin du monde. Il fut un des
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agents les plus énergiques des réformes qui arrachèrent l'Eglise et le pays à la barbare anarchie qui les rongeait et semblait les précipiter vers la mort. Un premier chapitre, écrit demain de maî^ tre, offre un tableau saisissant du terrible dixième siècle. Puis se déroule la vie à la fois active et mystique de saint Odon, fils d'Abbon, l'un des leudes de l'Anjou; préparé d'abord à la vie féodale auprès du comte Foulques, mais sentant bientôt s'élever dans son âme d'adolescent des aspirations vers un avenir meilleur, il entre dans l'abbaye de Saint-Martin-de-Tours, où sa formation littéraire se développe, ainsi que dans les écoles de Paris, sous la directionde Remy d'Auxerre, avec une promptitude et une ampleur que suscitent son intelligence vive et ouverte, son esprit à la fois arlisteet méditatif. C'est à Baume, auprès de l'abbé Bernon, qu'il accomplit ses années de noviciat, et lorsque après avoir reçu de Guillaume, comte de Gothie et duc d'Aquitaine, et de sa femme Myelberge le domaine et les vastes forêts de Cluny, Bernon sent approcher sa fin, c'est à Odon qu'il confie le soin de continuer son oeuvre. Odon, abbé de Cluny, ces deux noms inséparables prennent leur place dans l'histoire! Le monastère devient un foyer de culture et de vie morale. L'abbé est un formateur d'âmes, un directeur aussi des intelligences, un fondateur énergique. Les papes, Léon VII surtout, l'appellent du milieu des épreuves que leur font subir les désordres de Rome et de l'Italie pour mettre la paix entre les princes, et c'est après un second voyage, en 942, que la malaria le saisit au monastère de Saint-Paul-hors-des-murs et lui laisse à peine la force de rentrer pour y mourir à Saint-Julien-de-Tours.
Odon est un saint archéologique, puisque de Cluny qu'il a fondé sont sortis des moines maîtres des oeuvres qui ont couvert notre sol de monuments superbes. Saint Odon a laissé lui-même des oeuvres historiques, une vie de saint Géraud d'Aurillac, auquel une église toulousaine était consacrée sur la place de la Pierre; des traités de morale d'une profondeur si aiguë qu'on les appellerait réalistes aujourd'hui, et que d'ailleurs ils pourraient s'appliquer à notre temps tant ils pénètrent avec une effrayante vérité dans les mystérieux abîmes de nos âmes; des hymnes et jusqu'à des traités didactiques de musique, gardiens des méthodes de chant grégorien que les bénédictins de Solesmes viennent de ressusciter.
Par suite d'un transfert inexpliqué, probablement pendant les
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guerres religieuses de la Réforme, les reliques de saint Odon, qui en 1407 avaient été abritées dans une châsse somptueuse, reposent aujourd'hui près de nous, à l'ancienne collégiale de l'Isle-Jourdain.
La Société remercie vivement dom du Bourg de son hommage et de son souvenir.
M. DE LAHONDÈS donne également un compte rendu du dernier volume de l'Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse (année 1904). Ce volume comprend divers travaux de nos confrères, et entre autres une élude très complète de M. le baron Desazars, sur l'enseignement de l'art à Toulouse pendant l'ère moderne.
M. FOURGOUS présente un culot de voûte représentant une tête de moine. La sculpture, assez délicate, pourrait dater du quatorzième ou du quinzième siècle.
M. RÉGNAULT fait une communication sur la grotte de Marsoulas (Haute-Garonne).
Grotte de Marsoulas (H.-G.). — Nouvelles fouilles.
En 1883 et 1884, notre confrère M. l'abbé Cau-Durban, aujourd'hui curé de Lavelanet, fit dans la grotte de Marsoulas (H.-G.), à 3 kilomètres de Salies-du-Salat, les premières fouilles dans un gisement important de l'époque Magdelainienne. Il exhuma des silex finement taillés, des pointes de flèche, des aiguilles en os, des poinçons, des os gravés. M. Cartailhac, qui assistait un jour aux fouilles, découvrit un fragment de côte avec une remarquable gravure représentant un bovidé en entier d'une belle exécution artistique 1.
Les fouilles durent être abandonnées par suite des exigences toujours croissantes du propriétaire.
En 1895 et 1897, je fis quelques sondages superficiels. Je fus effrayé par l'encombrement des déblais que l'on ne pouvait rejeter au dehors, du temps et des dépenses qu'entraîneraient des fouilles. Il était indispensable d'obtenir un droit de fouille : ce qui fut fait par M. l'abbé Cau-Durban en août 1903.
En 1897, en compagnie de M. Hue, ingénieur de l'usine de Salies, nous remarquâmes diverses peintures d'animaux et des dessins géomé1.
géomé1. Matériaux, 3? S., 1883, et Revue du Comminge, t. IV, 1886.
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triques peints à là sanguine sur les deux parois de la grotte à 20 mètres environ de l'entrée. Ce souvenir est revenu souvent à mon esprit quand j'ai. eu communication des découvertes analogues dans les grottes de Pair-non-Pair (Gironde), d'Altamira (Espagne) et de la Mouthe (Dordogne).
Le 20 avril 1897, avec MM. Hue et Léon Jammes, maître de conférence à la Faculté des sciences de Toulouse, nous relevions sur place les
peintures de Marsoulas que je présentai à la Société archéologique de Toulouse le 18 mai de la même année (fig. ci-jointe).
M. Emile Rivière, le persévérant explorateur, dans son rapport sur les parois gravées et peintes de la grotte de la Mouthe 1, s'exprime ainsi : « M. Félix Régnault, de Toulouse, m'écrivait, le 25 avril 1897, que mes découvertes et peintures préhistoriques dans la grotte de la Mouthe avaient éveillé ses souvenirs et qu'il venir de revoir une caverne (la grotte de Marsoulas (H.-G.) qui renferme des dessins à la sanguine d'animaux et d'objets indéterminés dessinés sur les parois de la dite caverne. Je visitai, le 6 mai 1898, la grotte de Marsoulas sur son invita-' tion et sur celle de l'abbé Cau-Durban qui l'avait fouillée en 1883 et avait
1. Les parois gravées et peintes de la grotte de la Mouthe (Dordogne). Paris, 1903.
FIG. 1. — Les peintures de la grotte de Marsoulas (Haute-Garonne) signalées par M. F. Eegnault en 1897.
(Dessin de M.-L. -Jammes.)
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publié en 1885 une première brochure sur les recherches qu'il y avait faites. J'examinai avec le plus vif intérêt et avec tout le soin possible les dessins et les peintures qui m'avaient été signalés par M. Régnault. Si un ou deux d'entre eux me parurent présenter, au point de vue de la gravure, quelque analogie avec ceux de la Mouthe, par contre, je fus très perplexe sur l'antiquité des peintures ; je dirai même, très franchement, que d'aucunes me semblèrent, sinon récentes, du moins peu anciennes. J'avais certainement tort, puisque des nouvelles recherches qui y ont été entreprises depuis lors, ainsi que de la visite qu'y firent au mois d'août dernier plusieurs membres de la Section d'anthropologie du Congrès de Montauban,il ressort que les dites peintures seraient, selon l'expression même de M. E. Cartailhac, « une réédition de Altamira, de Font-de-Gaume, etc. '. »
Page 12. — « Bref, les peintures de Marsoulas sont bien de l'âge du renne, dont l'abbé Cau-Durban a recueilli dans les foyers de la grotte des restes plus ou moins nombreux, associés à une grande quantité de silex, à des instruments en os, et à des os et du bois de cervidés gravés de traits, parmi lesquels il faut citer— pièce des plus intéressantes — un fragment de côte portant une gravure d'ovibos, dessiné d'une façon remarquable. »
M. Cartailhac, dans une communication à l'Académie des inscriptions et belles-lettres de Toulouse (Xe S., t. II), s'exprime ainsi sur Marsoulas :
« ... Le 3 août 1902, ayant visité la grotte avec ces amis (Félix Régnault et M. Jammes, de la Faculté des sciences de Toulouse), je pus affirmer, au premier coup d'oeil, l'identité de ces fresques avec celles d'Altamira et de Font-de-Gaumes... Je vis, en outre, que des traits légèrement gravés à la pointe fine complétaient ces premiers dessins et formaient ailleurs des figures indépendantes. Je découvris ainsi et je pus montrer à MM. Jammes et Régnault, dès le seuil du souterrain, quantité d'animaux, les uns minuscules avec des tètes de 2 et 3 centimètres, tandis que d'autres avaient un mètre et plus de longueur. Quant aux peintures, elles continuaient dans un couloir surbaissé où nous ne pouvions passer qu'en rampant. Comme en Espagne et en Périgord, l'artiste avait tiré parti de certains accidents naturels de la roche. 11 avait nuancé avec du noir la robe des animaux, marqué les cornes, l'oeil, les pieds. En raclant la pierre, il avait bordé ses couleurs de bandes claires ou couvert de poils le corps entier. La bosse des bisons, leur barbe, leur garrot étaient exagérés de manière à aboutir à d'étranges profils 2. »
1. Assoc. franc. Congrès de Montauban, 1902. Comptes rendus, 1" partie, p. 246.
2. Nos cavernes ornées de dessins préhistoriques, par E. Cartailhac (Mémoi-
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D'autre part, M. Gustave Chauvet, dans le Bulletin de la Société archéologique et historique de la Charente, rendant compte de sa visite à Marsoulas (séance du 12 nov. 1902), dit : « Depuis les fouilles de M. l'abbé Cau-Durban, Félix Régnault y signala des dessins à la sanguine, et dans une visite ultérieure (4 août 1902), MM. E. Cartailhac, Jammes et Régnault aperçurent de nombreuses petites gravures disséminées sur les parois. J'ai pu examiner soigneusement le tout lors de notre excursion... L'authenticité de ces figures ne me paraît pas contestable. TD
Tels sont les résultats des documents publiés jusqu'à ce jour sur la grotte de Marsoulas. Dans un grand ouvrage, MM. Cartailhac et l'abbé Breuil vont publier les peintures et les gravures que ce dernier a très habilement relevées. Ma mission étant de continuer les fouilles, voici les résultats obtenus en plusieurs campagnes successives.
La grotte de Marsoulas, formée par une faille, a 60 mètres de longueur jusqu'à la partie où l'on peut pénétrer en rampant. Une bande de calcaire à miliolithes vient butter contre la roche verticale formant une •sorte de toit. Le Souterrain est large de 3 à 4 mètres et la hauteur varie de 4, 5 à lm50 dans le fond le plus étroit comblé par l'argile. Les 20 mètres depuis l'entrée présentent un sol recouvert de blocs de rochers de toutes dimensions tombés de la voûte qui s'effritte insensiblement, ce qui rend en certains endroits les fouilles dangereuses.
Après avoir relevé les points fouillés par M. l'abbé Cau-Durban, j'ai ouvert deux tranchées, la première à l'entrée de l'ouverture de la caverne, la deuxième en face des peintures d'animaux à la sanguine. Les récoltes de la première tranchée de lm50 de profondeur, sont : une quantité de silex taillés et d'éclats indiquant la fabrication. C'était bien là l'emplacement de l'atelier où les silex et les quartzites étaient taillés. Des foyers superposés renfermaient des os brisés, quelques-uns calcinés, des dents et fragments de mâchoires de cheval, de boeuf, de cerf, de carnassiers, de renne, et, autour des foyers, quelques pointes de flèches en os finement appointées, d'autres taillées en biseau. Certaines de ces pièces sont ornementées de stries, de rayures transversales.
La deuxième tranchée, profonde de 1*80, renfermait à ce niveau deux foyers intacts non remaniés qui ont donné les objets les plus intéressants. Dans cette partie de la grotte, les silex sont rares, mais les objets en os ouvrés plus nombreux. Ce sont des lissoirs offrant des dessins géométriques réguliers et très finement gravés, des pointes de
res de l'Ac. des scences de Toulouse, X' S., t. II). Voir aussi du même auteur sa communication à l'Institut (Acad. des inscriptions, séance du 5 sept. 1902).
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flèche en biseau, des poinçons, des aiguilles, associés à un fragment de mâchoire inférieure de renne, et une quantité de dents de grand boeuf, de cheval et de cerf.
C'est non loin de cette fouille que M. l'abbé Cau-Durban a recueilli un petit mortier de calcaire blanc, creusé avec soin, la cavité a un diamètre de 6 centimètres. Ce précieux récipient, malheureusement coupé par le milieu, pourrait être une nouvelle lampe préhistorique du genre de celle trouvée par M. Rivière dans les fouilles de la Mouthe, ou bien le godet destiné à la sanguine utilisée par les artistes de Marsoulas pour leur peinture murale. Son séjour dans les cendres du foyer et dans une terre argileuse très riche a enlevé toute trace de coloration.
C'est dans cette deuxième tranchée que j'ai recueilli six gros éclats en calcaire dur, taillés à la façon des haches dites coup-de-poing décrites par le D' Noulet des gisements de l'Infernet et de Venerque. Ces gros éclats, dont l'un a 22 centimètres de haut sur 10 de large, semblables aux quartzites de la grotte de Gargas (H.-P.) ou de Bize (Aude), semblent bien être des instruments destinés à briser les gros os de chevaux, de boeuf et de cerf éparpillés autour des foyers et qui ont servi à l'alimentation de la tribu qui habitait Marsoulas. La quantité énorme de déblais, de gros blocs et de terre qu'il a fallu enlever pour atteindre le sol primitif des foyers à lm50 et lm80 de profondeur a nécessité un travail considérable. Le propriétaire s'opposant à l'enlèvement des matériaux, on conçoit que les fouilles, aussi minutieuses que le permettait l'étendue du champ sur lequel nous travaillions, ont entraîné un travail long, pénible et onéreux.
Tels sont les résultats obtenus en septembre, octobre et novembre 1904, jusqu'au moment où le mauvais temps nous a obligés à abandonner les recherches pour les reprendre à une meilleure saison.
Séance du 14 mars 1905.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. DE LAHONDÈS souhaite la bienvenue à M. Albert de Puybusque, membre correspondant; il espère que notre nouveau confrère voudra bien communiquer fréquemment à la Société les archives de sa famille, si riches en souvenirs.
M. l'abbé Querel, membre correspondant, ayant adressé la photographie et la description d'une ancienne bannière existant à Cordes,
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les membres présents, après examen, estiment que celle-ci ne saurait êlre antérieure à l'époque de Louis XVIII. La forme pansue de sa fleur de lys et la légende Deo et Régi brodée sur l'étoffe suffiraient d'ailleurs à l'indiquer. Elle appartenait à la cohorte de Cordes, celte dénomination désignant sous la Restauration un bataillon de la garde nationale.
M. DE LAHONDÈS donne lecture d'une lettre de M. Abel Ferré, membre correspondant, qui signale à Martres la découverte d'un reste de mur auprès de la villa de Chiragan et dont la destination reste à expliquer. M. Abel Ferré annonce également qu'un propriétaire de Martres vient d'exhumer d'un de ses champs une stèle antique en pierre blanche qui semblait porter le buste d'un personnage et contenait au-dessous une inscription dans un cartouche entourée dé guirlandes. Malheureusement, la terre a tellement corrodé la pierre que le buste est méconnaissable et l'inscription est à peine lisible; un examen attentif permettra peut-être néanmoins de la reconstituer et elle deviendrait des plus précieuses dans la riche collection de Martres.
Ce petit monument funéraire dont M. Abel Ferré a adressé une photographie à la Société mesure 0m57 dé haut sur Om37 de largeur.
M. DE CHÂMPREUX offre un curieux Rapport sur la visite de quelques Monuments toulousains, par M. Charles Desmoulins, brochure de 1853.
M. PASQUIER fait hommage d'une notice qu'il vient de publier, Archives notariales, leur réunion aux Archives départementales. Communication faite à l'assemblée des archivistes français à Paris. (Extrait du Bibliographe moderne, n° 5, 1904, 12 pages in-8».)
La Société remercie MM. de Châmpreux et Pasquier.
M. PERROUD annonce qu'il vient d'être soutenu à la Faculté de médecine de Toulouse une thèse de doctorat sur les ancienne» e&roniques de celle-ci depuis le treizième siècle; l'autearest un de nos lauréats, M. Barbot.
A propos des archives de l'Université dont il est amené ainsi à parler, M. Perroud informe qu'il a fait prendre copie du registre des délibérations de la Faculté de médecine de 1773 à 1793. Le manuscrit original est entre les mains de M. le Dr Rességuet.
M. DE LAHONDÈS communique également une lettre de M. de
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Mély, membre correspondant, qui, faisant un travail sur les signatures des primitifs, demande des renseignements sur celles des statues de saint Thomas et de saint André qui étaient au cloître de la cathédrale Saint-Etienne, à Toulouse. M. E. Roschach, dans son Catalogue des antiquités, 18G5, p. 226, dit que la première porte, gravée sur le piédestal, la signature GILABERTOS ME FECIT, et la seconde VIR N INCERTUS ME CELAVIT GILABERTUS. M. de Lahondès a eu la tristesse de faire savoir à M. de Mély que. par suite de détériorations survenues pendant les travaux de construction du Musée, ces signatures ont disparu. Il ne reste que la première Jettre de l'une d'elles, le G en forme de faucille.
M. PASQUIER lit la notice suivante sur un correspondant, dont la Société déplore la mort.
Paul PARFOURU, archiviste départemental d'IUe-et-Vilaine (1846-1905), ancien archiviste du Gers.
Les membres de la Société archéologique du Midi, qui ont assisté aux séances pendant la période de 1880 à 1891, n'ont pas dû perdre le souvenir de l'archiviste du Gers, membre correspondant de notre Compagnie. Prenant au sérieux le titre qui lui avait été conféré, il tenait à prendre part à nos travaux, soit en faisant des communications dont nos bulletins ont conservé la trace, soit en assistant à nos séances, quand il avait l'occasion — assez fréquente — de venir à Toulouse. Il avait quitté le Midi depuis bientôt quinze ans, et cependant il devait conserver des relations avec ses amis qui, de leur côté, ne l'avaient pas ouhlié.
J'ai le regret d'annoncer à la Société que, le 26 janvier dernier, ce savant distingué a succombé à une maladie qui, depuis trop longtemps, minait sa santé. Ami particulier de cet aimable homme, mon camarade à l'École des Chartes et dont la carrière dans le Midi a débuté en même temps que la mienne, il y a déjà longtemps, je tiens à lui rendre un dernier hommage de sympathie et à rappeler les titres qui, dans la région du Sud-Ouest, doivent lui mériter la reconnaissance des archéologues et des savants.
Né le 19 août 1846 à Saint-Clair, près de Saint-Lô (Manche), AlfredPaul Parfouru fit de bonnes études dans un collège tenu par les Eudistes. Ses goûts et ses aptitudes le portant vers les recherches historiques, il n'hésita pas à entrer à l'Ecole des Chartes, d'où il sortit le 19 jan-
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vier 1874. Très attaché à sa province et à son pays natal, il avait pris un sujet d'histoire locale pour en faire l'objet de sa thèse ; il avait présenté une étude.sur la Maison-Dieu de Saint-Là.
Quoiqu'il eût manifesté le désir de ne pas s'éloigner de la Normandie ou tout au moins de la région de l'Ouest sur laquelle il portait de préférence ses recherches, il dut s'incliner, en 1874, devant la décision administrative qui l'envoyait dans le Gers en qualité d'archiviste départemental. Par son caractère aimable, par ses solides qualités de coeur et d'esprit, il parvint à s'habituer et à se faire estimer dans un pays nouveau pour lui. -
Il faut convenir qu'au point de vue professionnel le poste n'avait rien de bien attrayant. Le dépôt était installé dans une maison de location, haute de plusieurs étages, dont le rez-de-chaussée était occupé par un épicier; plusieurs fois, il y eut des commencements d'incendie qui menaçaient la sécurité des collections. Le classement des séries modernes était à entreprendre en entier; quant aux documents anciens, à peine étaient-ils débrouillés, et ceux qui venaient d'être réunis, tels que les papiers de plusieurs greffes, restaient en tas sur le sol. Le nouvel archiviste ne se découragea pas ; tranquillement, méthodiquement, il se mit avec courage à une oeuvre qui en aurait rebuté d'autres. Peu à peu, la série moderne se vit constituée. Le Conseil général, qui considérait les choses par les résultats pratiques, comprit que les archives n'étaient plus un simple magasin de papier à la garde duquel il aurait suffi de préposer un simple commis. Parfouru, sans rencontrer d'opposition, vit son traitement augmenter à mesure que les travaux de classement permettaient de faire apprécier l'utilité du dépôt. Modeste, n'aimant pas la réclame, satisfait de trouver sa récompense dans l'accomplissement régulier de ses fonctions, il ne cherchait pas à attirer l'attention sur son nom. L'inventaire de la série C, qui comprenait les papiers de l'intendance d'Auch, notamment la correspondance du célèbre d'Étigny, témoigne de la sûreté de sa méthode et du soin apporté dans la rédaction; il entreprit ensuite le dépouillement des fonds religieux dont il fit connaître l'intérêt.
Les recherches de l'archiviste ne se confinaient pas dans la limite des occupations prescrites par les règlements administratifs: La Revue de Gascogne, et d'autres périodiques, ont inséré des articles enlevés d'une plume alerte et pleins de renseignements. La constitution de la Société historique de Gascogne ne pouvait le laisser indifférent ; de concert avec le regretté abbé Couture, avec l'abbé de Carsalade du Pont, aujourd'hui évêque de Perpignan, sous le haut patronage de l'archevêque d'Auch, M*' Gouzot, il a été parmi les premiers fondateurs. Quelque temps après, BULL. 35, 1905. 20
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il publiait, aux frais de la nouvelle Société, un recueil dont l'abbé de Carsalade fut le collaborateur : il s'agit des comptes consulaires de la ville de Riscle au quinzième siècle, rédigés en langue romane. Quoique, par ses origines, l'archiviste du Gers ne fut pas à même de parler et de comprendre les dialectes méridionaux, il était parvenu à se les rendre familiers.
La fidélité avec laquelle il reproduisit les comptes de Riscle valut aux éditeurs, de la part de l'Académie des Inscriptions, une mention. Lors de l'Exposition de 1878, il donna pour le Ministère la transcription de l'immense charte gasconne de la ville de Condom remontant au commencement du quatorzième siècle.
Très attiré par les recherches archéologiques, Parfouru a fait, en diverses circonstances, preuve de sagacité; on lui doit la découverte, la publication, avec commentaires, d'un texte très curieux pour l'histoire de l'architecture dans la région du Sud-Ouest. Dans un registre notarial il avait trouvé un bail à besogne concernant la construction d'une partie de la voûte dans la nef de la cathédrale d'Auch, au dix-septième siècle. Au lieu de suivre les errements de l'époque, les architectes étaient restés fidèles au style gothique. C'était une preuve de la persistance des traditions du Moyen-âge jusqu'aux temps derniers de l'ancien régime. Cette découverte appela l'attention des savants ; d'autres trouvailles du même genre eurent lieu sur divers points de la région, et au lieu de vieillir certains monuments, les archéologues ont été obligés de les rajeunir.
Appelé par M. le marquis de Gonlaut-Biron, qui possédait dans le Gers la terre patrimoniale de Saint-Blancard, il classa le chartrier du château et en dressa un inventaire. S'il était publié, ce travail rendrait des services à l'histoire locale et même générale.
Malgré les marques d'estime qu'il rencontrait autour de lui, malgré les amitiés qui semblaient l'attacher à la Gascogne et la perspective de mener à bonne fin des travaux destinés à lui procurer une légitime réputation, Parfouru avait conservé pour sa patrie d'origine une affection qui lui donnait parfois la nostalgie du pays ; il cherchait à se rapprocher de sa chère Normandie où sa famille le réclamait. Quitter Auchpour un poste à peine équivalent dans l'Ouest eût été, pour un homme de sa valeur, une sorte de déchéance : il attendit; enfin, vers 1891, le poste de Rennes vint à vaquer.
Ce n'était pas une sinécure qui s'offrait : remanier un dépôt qui venait à peine d'être installé dans un nouveau bâtiment, faire réunir aux archives les collections du Parlement, restées dans les combles du palais de justice, c'était une tâche qui ne rebuta pas le courageux archiviste; il s'en est tiré avec succès, tout en mettant sa collaboration au service de
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l'érudition locale; ce ne fut pas sans porter à sa santé, déjà faible, une atteinte qui a amené une issue fatale. Laissons à d'autres 1 le soin de montrer ce que fut en Bretagne notre regretté collègue qui, dans le Gers, avait, par les services rendus, acquis des droits à notre reconnaissance et à notre souvenir.
Séance du 21 mars 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. le Dr CANDELON offre quelques cartes postales du Gers. Le secrétaire général insiste à ce sujet sur l'intérêt que présente l'album spécial de la Société et fait appel aux membres pour le compléter dans la plus large mesure, tant que la mode des cartes postales existe.
M. RÉGNAULT offre la reproduction en phototypie d'une lellre.de saint Vincent de Paul et d'une autre de saint François de Salles. La première., d'une écriture régulière et précise, est adressée à la supérieure de la Visitation à Toulouse; l'autre à M. le premier président Le Mazuyer; ces phototypies sont extraites d'un ouvrage de M«r Douais sur l'histoire de la Visitation à Toulouse.
M. DE LAHONDÈS fait la communication suivante :
L'ancienne Trésorerie à Toulouse.
La haute tour carré de la Trésorerie, flanquée de deux ailes, couronnées comme elle par des festons de mâchicoulis, donne encore un aspect pittoresque à l'antique place Saint-Barlhélemy. Cette physionomie de Moyen-âge était plus accentuée il y a quelques années encore, lorsque débouchaient sur la place de petites rues étroites, courtes, tortueuses, où se tassaient de vieilles maisons en pans de bois. Mais la tour, dressant fièrement ses angles aigus dans l'espace agrandi, fait encore figure et mérite certes d'être conservée.
Le logis était appelé la Maison du Roi dans le langage courant, plus souvent encore que la Trésorerie. C'était dans ses salles que se recueil1.
recueil1. la Bretagne, voir l'éloge de Parfouru, prononcé à la séance du 14 février 1905, par le président de la Société archéologique d'Ille-et-Vilaine.
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lait la recette du Domaine, qu'étaient conservés aussi les titres commeachats, pactes, reconnaissances de devoirs et d'hommages, et qu'étaient jugés les procès concernant les Domaines. Lorsque le nombre des trésoriers de France fut augmenté, ils se rassemblaient deux fois la semaine à la Trésorerie pour juger ces sortes d'affaires 1.
Le roi Louis XI, logé à la Trésorerie, comme ses prédécesseurs lorsqu'ils étaient venus à Toulouse, venait d'y arriver le 25 mai 1463, au retour d'une conférence avec le roi de Castrlle sur la frontière de Navarre, peu de jours après le terrible incendie qui, parti de la rue Sesquière, dévora une grande partie dés maisons de la ville jusqu'au quartier du Taur et des Cordeliers, jusqu'au Bazacle même. Il fut attiré à la fenêtre qui donnait sur la place du Salin par le tumulte de la foule courant pour voir pendre le boulanger et sa femme accusés d'avoir mis le feu si fatal à leur boutique de la rue Sesquière. Le roi s'informa, fut pris de pitié pour ces malheureux, coupables tout au plus d'imprudence, et les fit délivrer. Mais ils moururent le lendemain des suites de leur saisissement.
Le roi, frappé par les ruines causées dans la ville par l'incendie, la délivra des tailles pour cent ans. Mais les nécessités de l'Etat convertirent bientôt cette exemption en un abonnement qui demeura un des privilèges de la ville 2.
Le bâtiment que l'on voit encore ne devait pas avoir été construit depuis longtemps lorsque Louis XI y entra. Il porte, en effet, les caractères de la seconde moitié du quinzième siècle.
La tour carrée, sorte de donjon d'environ onze mètres de côté, se compose d'une salle voûtée au rez-de-chaussée, de deux étages, et d'une plate-forme munie de mâchicoulis, défigurée par une vulgaire construction récente. La construction est entièrement en briques, sauf les meneaux des fenêtres qui sont en pierre de Roquefort.
La salle du rez-de-chaussée, de 9 mètres de côté environ, est éclairée sur la place par une fenêtre carrée à meneaux surélevée au-dessus du sol et à laquelle on accède de l'intérieur par des degrés. La voûte a été tranchée à moitié de sa hauteur pour poser un plancher, afin de donner plus d'espace à l'étage supérieur. Les arcs ogives demeurés en place se composent d'un gros tore accompagné de deux filets arrondis, et les arcs formerets d'une robuste moulure carrée. Ils reposent sur des culots animés par des figures grotesques. On entre dans la salle par une porte cintrée étroite et basse.
1. Catel, Mémoires de l'Hist. de Languedoc, p. 261. 3, Lafaille, Annales de Toulouse, II.
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.Les étages supérieurs ont été modernisés pour l'habitation. La salle du premier est ornée d'une cheminée Louis XVI qui a remplacé la grande cheminée ancienne dont on voit l'arceau et les consoles de support dans la salle inférieure ; on voit dans une autre salle une cheminée Louis XVI plus élégante.
La plate-forme à mâchicoulis était couverte par une charpente, car on n'aperçoit nulle trace d'une voûte qui aurait supporté un dallage à découvert. La charpente reposait sur un bahut surmontant les mâchicoulis, dont on voit les restes en plusieurs parties de ce couronnement, surtout sur les deux ailes. On ne voit pas davantage la trace des créneaux, mais les mâchicoulis en tenaient lieu, car ils étaient ouverts sur leur face verticale, et ils n'ont que peu de saillie. Leur cintre a 48 centimètres d'ouverture et repose sur six briques disposées en retrait.
Deux ailes en équerre accostent la tour carrée, l'une sur la place, d'une dizaine de mètres de longueur, entièrement remaniée; l'autre, plus longue, sur la ruelle qui contournait autrefois le moulon et aboutissait vers le milieu de la rue du Vieux-Raisin.
Le rez-de-chaussée de cette aile se compose d'une ancienne cuisine avec cheminée monumentale, et d'une salle à deux travées de voûte dont les arcs reposent sur des culots montrant un aigle, un dragon et deux ânes ailés supportant un écusson sans figure aucune.
Mais la pièce la plus artistique du monument est la porte s'ouvrant autrefois de la cour intérieure sur cette aile. Elle unit les ornementations et les moulures du dernier âge gothique aux premières manifestations de la Renaissance.
Entre les branches d'un arc en accolade ornée de crosses en chou frisé d'une grande élégance, deux anges soutiennent I'écu fleurdelisé surmonté de la couronne royale, martelée ainsi que les fleurs. L'allure des anges n'est déjà plus celles du Moyen-âge, et les petits génies ailés se courbant sous les pinacles qui accompagnent l'arc en accolade montrent déjà les nus modelés, les musculatures, accentuées même, inspirés par l'art italien. Ils tiennent aussi dans leur mains l'écu royal.
Cette sculpture porte ainsi le caractère du temps de Louis XII.
La même époque est marquée dans la région par des oeuvres moins fines peut-être mais plus robustes et plus mouvementées. On en voit un exemple tout auprès, à l'entrée de la rue, à laquelle on aurait dû laisser l'ancien nom de Bernard Parayre, l'ingénieur des guerres de la croisade, qui prit ensuite celui de l'auberge du Vieux-Raisin et qu'on appelle aujourd'hui rue du Languedoc. La partie supérieure d'une porte seulptée, qui a été apportée d'ailleurs à la place où on la voit maintenant,
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montre aussi un arc en accolade se détachant sur des traceries ogivales, escaladé par des animaux chimériques de fière allure et de hardi mouvement. Cette composition, plus touffue, évidemment d'inspiration toulousaine,
toulousaine, à penser que la porte de la Trésorerie, d'une élégance plus fine, mais qui nous parait un peu grêle, a été sculptée peut-être par un artiste des bords de la Loire, envoyé par les officiers du roi.
L'aile sur la place a été prolongée, au dix-septième siècle, par un logis où s'ouvre une belle porte flanquée de colonnes classiques. Un escalier en bois du même temps est couvert par un plancher sur lequel est peint le double écusson de France et de Navarre, supporté par deux anges. La peinture est très commune.
Il importe de conserver la tour caractéristique et ses deux ailes d'un aspect si pittoresque, d'enlever la coiffure ridicule et vulgaire dont on l'a affublée, et de maintenir ce souvenir de l'histoire.
Il importe surtout d'obtenir qu'il soit rangé au nombre des monuments historiques, afin tout au moins de conserver la porte artistique déjà menacée. De déplorables pertes récentes témoignent du danger de ne pas veiller attentivement sur les monuments toulousains^
FIG. 1. — Porte de l'ancienne trésorerie à Toulouse. (Dessin de M. J. de Lahondès.)
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M; CARTAILHAC rend compte du voyage qu'il vient de faire en Belgique, en Normandie et dans l'ouest de la France. 11 expose l'organisation intelligente du musée du Cinquantenaire à Bruxelles et constate avec regret qu'en France nos collections publiques, même nationales, ne sont pas souvent installées avec le même souci de la méthode et de l'enseignement; nos musées sont en général de simples magasins. Parmi ceux qu'a vus dans son dernier voyage M. Cartailhac, celui de Périgueux fait exception et peut être considéré comme un modèle. Il est dirigé par M. le marquis de Fayole. M. Maurice Féaux est chargé des collections préhistoriques. Tous deux se sont admirablement acquittés de leur mandat.
M. CARTAILHAC signale à Toulouse, rue Sainte-Ursule, dans l'ancienne cour de la Poste, la détérioration d'un petit monument. Il s'agit d'une tour couronnée d'un épi en faïence, le dernier peut-être que Toulouse possède; on la restaure actuellement et on lui enlève son caractère et sa valeur en recouvrant la brique d'une couche de mortier teint en rouge; la coupole sera peinte en blanc ! If est vraiment regrettable que le mauvais goût de certains propriétaires gâte ainsi notre ville.
Séance du 28 mars 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. DE CHÂMPREUX offre deux pièces juridiques imprimées du dix-huitième siècle : 1° Mémoire pour messire Marie-Joseph Le Mazuyer, procureur général, contre le syndic des dames religieuses de Sainte-Claire du Salin; 2° Briève réfutation de l'avertissement du sieur de Bermond, ancien capitoul de Toulouse, pour messire de Papus, seigneur de Cugnaux. Le premier document offre de précieux renseignements sur la délimitation de certaines maisons dans les quartiers de la Dalbade et du Salin.
Annonce est faite du Congrès de la Société française d'archéologie, qui siégera à Beau vais du 20 au 28 juin, et lecture est donnée de la lettre d'invitation adressée par le Président, M. E. LefèvrePontalis.
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M. CARTAILHAC offre quelques cartes postales concernant' en général Toulouse et reproduisant des moulages du musée du Trocadéro.
M. PASQUIER informe la Société de la nomination de notre confrère M. Galabert à la fonction d'archiviste des hospices.
M. LE PRÉSIDENT félicite M. Galabert de cumuler ainsi deux services très importants pour les recherches historiques. Il est à craindre seulement que le conservateur des Archives de la "Ville et des Hospices ait ainsi peu de loisirs et ne puisse assister à nos séances aussi souvent que nous le désirerions.
M. l'abbé DEGERT lit la notice suivante :
Démolitions et reconstructions à la Daurade au dix-septième siècle.
Nous trouvons dans les livres fort peu de renseignements sur les mosaïques de la Daurade, mais nous en avons encore moins sur l'église elle-même qu'elles décoraient. Et cependant, c'était là la plus ancienne église de Toulouse, et elle remontait, d'après dom Martin, par quelquesunes de ses parties, jusqu'aux premiers temps du christianisme parmi nous.
On sait que nous devons à cet auteur un dessin de cette même église; mais il faut bien se garder d'y voir, comme lui, une représentation de l'église primitive. Ce qui nous est montré là, c'est l'état où cet édifice se trouvait vers 1730; or, près d'un demi-siècle auparavant, il avait subi des modifications qui avaient gravement altéré son plan originel. Ces modifications, dues à des démolitions et des reconstructions, aucun historien, à ma connaissance, ne les a signalées. A plus d'un titre cependant elles nous ont paru dignes d'être relevées. Elles permettent d'abord de retrouver, sinon le plan général, du moins quelques-unes des grandes lignes de l'ancienne Daurade; elles nous aident ensuite à nous faire une idée des goûts qui prévalaient alors à Toulouse en matière d'art en général, d'architecture en particulier.
Les renseignements que j'utilise ici me sont fournis encore par le Monasticon Benediclinum 1. Il y a là d'abord une sorte de devis très général, rédigé en latin, par le scribe de la communauté de la Daurade, qui, selon les prescriptions de la règle, l'envoie au supérieur de la congrégation. Je vais avoir l'honneur de vous en lire une'traduction.
1. Bibl. nat., f. lat. 12680, f» 296.
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Anno Domini millesimo sexcentesimo octuagesimo tertio ecclesia B. Mariae Deauratae instaurata in commodiorem et nobiliorem formam est relata.
Nam fornices et mûri totius ecclesiae qui erant jam vetustate subnigri, albo sunt illiniti; fornix et parietes presbiterii variis et praecîaris picturis ornati ; opus musivum quod ipsis parietibus inhaeret mirum in modum illustratum. Porticus quae ex utroque la. tere ecclesiae decem circiter pal mas in navim prominebant penitus sunt eversae; earum loco aliae porticus intra columnas quae fornicem ecclesiae portant sunt erectae et sub ipsas porticus quae sunt in parte meridionali très capellae de novo constructae. Organum de integro fuit restitutuin novis fistularum ordinibus adauctum et intra fabricam ligneam de novo constructam inclusum.
Fornices chori qui ceteris ecclesiae fornicibus erant multo inferiores et quatuor columnis rudibus et impolitis fulciebantur, unde ipse chorus angustus, obscurus et, ut ita dicam, horridus evadebat, cum ipsis columnis sunt penitus destructi, et alius fornix aequalis altitudinis etlatitudinis ac alii fornices ecclesiae est erectus et sub ipso fornice posita sunt sedilia chori non modica arte elaborata et variis picturis ornata. Denique destructus est munis qui claûdebat posteriorem partem chori et ecclesiae quae est in parte occidentali, quia tum ob parvitatem aperturarum tum ob densitatem et obliquitatem ipsius mûri permodica luce in ecclesiam diffundebatur et ejus loco alius constructus est murus, cujus per ingénies aperturas chorus et ecclesiae mirum in modum collustrantur.
F. Jacobus Hody, prior.
Fr. Carolus Desard, subprior.
F. Spiritus Favoris, senior.
Fr. Christophorus Tachon.
F. Franciscus Cavallier, senior.
Fr, Petrus Langeiret, scriba capituli.
En 1683, l'église de Notre-Dame de la Daurade,fut restaurée et reçut une forme plus commode et plus belle. Les voûtes et les murs de l'église que le temps avait noircis furent entièrement blanchis. La voûte et les murs de l'avant-choeur furent ornés de peintures remarquables. Les mosaïques qui couvraient les parois furent admirablement éclairées. Les porches qui s'adossaient aux deux côtés de la nef et avaient environ dix palmes de longueur furent complètement démolis ; à leur place, d'autres furent édifiés entre les contreforts qui soutiennent la voûte de l'église, et sous le porche qui est du côté du midi trois chapelles nouvelles furent construites. L'orgue . fut restauré, pourvu de nouveaux jeux et enfermé dans un buffet de bois construit à nouveau.
Les voûtes du choeur qui étaient beaucoup plus basses que celles du reste de l'église, et que soutenaient quatre colonnes grossières et mal polies, qui rendaient le choeur étroit, obscur et, pour tout dire, affreux, ont été démolies et remplacées par une autre de la même hauteur et de la même largeur que celles du reste de l'église. Sous la voûte, des stalles ont été placées, travaillées avec beaucoup d'art et ornées de peintures variées. Enfin, le mur qui fermait le chevet du choeur et la partie de l'église du couchant a été détruit, parce qu'à cause de la petitesse des ouvertures, de l'épaisseur et de l'obliquité du mur, l'église ne recevait que très peu de lumière. A sa place a été élevé un autre mur percé de grandes ouvertures, et l'église est ainsi admirablement éclairée.
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En somme, les parois des voûtes et des murs de la nef ont été badigeonnées, l'avant-choeur orné de peintures; la voûte du choeur a été surélevée; le mur du chevet a été rebâti du côté de l'ouest et percé d'ouvertures.
Quelques-unes de ces constructions et reconstructions ont été opérées à seule fin de donner plus de jour à l'église; on peut croire que d'autres aussi étaient commandées par le besoin de consolider l'édifice. Déjà au temps d'Odon Lamothe (le 2 févr. 1631) *, une pierre s'était détachée d'un de ces porches, aujourd'hui détruit, et était venu tomber aux côtés de messire d'Assézat; il s'en était fallu de trois doigts, dit le chroniqueur, que le pieux conseiller du Parlement, alors agenouillé, ne fût écrasé sur place.
Il y aurait bien des réserves à faire sur le badigeon qui fait ici sa
première apparition et sur quelques-unes des retouches qui ne nous
paraissent pas également heureuses. Mais peut-être vaut-il mieux vous
dire comment les apprécia le public toulousain de l'époque. Nous avons
là-dessus le témoignage du secrétaire, tout heureux de nous raconter
l'effet produit par cette réparation, la plus considérable qu'on eût faite à
la Daurade depuis l'arrivée des Mauristes.
Pax Christi ». « Mon Révérend Père,
« Les règles du secrétaire du chapittre portent que tous les ans sy on a fait quelque réparation considérable dans le monastère, il doit en faire un détail et vous l'envoyer au mois de mars. C'est ce que j'ai exécuté le mieux qui m'a esté possible et j'eusse souhaité qu'un autre plus habille que moy et plus entendu dans ces matières se feut trouvé en charge pour vous en écrire, sans doute qu'il s'en seroit acquitté plus dignement. Car je vous puis assurer que depuis l'establissement de nostre congrégation dans ce monastère on n'a pas fait une plus belle réparation, mieux entendue et plus approuvée unanimement de tous les habitants de cette ville que celle qu'a fait faire en moins d'un an nostre R. P. Prieur dans nostre Eglise, il faudroit l'avoir vue comme elle estoit et comme elle est a presant pour en juger. Jusques la mesme que les bourgeois et capitouls de cette ville la trouvent sy belle et si considérable qu'ils en ont bien voulu charger les registres de leur maison de ville. Je ne doute nullement que V. R. n'en fasse de mesme pour ce qui est de celui de nostre congrégation et qu'elle aura cette bonté que vouloir vous souvenir en vos fervantes prières de celui qui est avec respect,
Mon Révérand Père, vostre très humble et très affectionné confrère,
« Fr. Pierre LAUGECRET, M. B. « A Tolose, ce 22 mars 1681. »
1. Même ms., f» 236.
2, Bibl. nat„ F. lat., 2080, f» 296.
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Séance du 4 avril 1905.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. PERROUD offre la photographie du tombeau gallo-romain du musée de Cahors sur lequel est figuré une chasse.
M. FOURGOUS ajoute quelques mots au sujet de ce monument. - Le tombeau, auquel il manque son couvercle, a été découvert à Cahors, le 8 août 1903, lors de travaux effectués pour la construction d'un aqueduc dans la rue de la Liberté. Il est attribué au deuxième siècle, est en marbre blanc et n'offre de sculptures que sur l'Une de ses grandes faces. Les sujets représentés sont : à droite, une chasse au sanglier, à gauche une chasse au cerf; les scènes sont animées, surtout la seconde, où l'on voit notamment deux cavaliers et un animal mordu par les chiens aux flancs et au cou qui essaie de s'enfuir. Les personnages sont vêtus d'un ample sarreau descendant jusqu'aux genoux et serré à la taille; ils portent aussi un petit collet-à capuchon. Malheureusement des détails de la sculpture sont effacés par le temps et le bas-relief a subi des détériorations; l'oeuvre n'en est pas moins d'un grand intérêt.
M. le PRÉSIDENT exprime la déception de la Société qui espérait
voir M. le baron DE RIVIÈRES assister à la séance et lire^lui-même
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les notes qu'il avait annoncées. La Société regrette que sa santé le retienne loin de nous et se montre très touchée de l'intérêt qu'il continue à porter à notre compagnie et de son zèle inlassable à participer à nos publications.
Les~documents qu'il a adressés sont les suivants :
Refonte d'une cloche pour l'église de Sainte-Martiane à Albii (mai 1557).
Le mois de May 1557, par deliberacioun de council des paroussiens, feut aresté que une cloche que nous aviouns rompue ceroit refaicte, laquele feut poisée et poise 2791.
Plus, le dict moi fîmes marché avec maistre Jehan Joly, foundur de cloches habitant de Villefranche de Rouergue de founder et référé la dicte cloche à la mesure et pesantur de trois quintals, luy dounat pour la fecoun douze livres tournois.
Pour faire la dicte cloche, avons quislé et faict quister par les paroussiens de métal latoun et cuivre, que tout amasê a poisé 55'.
Plus, trouvâmes de latoun et de petites cloucheltes dans la sacristanie, pesant le tout 20'.
Plus, avons acheté de Peire Vedel et de Guillaume Desmassole, paîroulié 2 de Dounazac 3, 23' de métal à 3'; monte en tout 4>19s. -
Plus, avons acheté de Monsr Guillaume Vascarès 71 un cartoun estein vieux à 3 sous livre pour afiner le susdit métal.
Plus, le dict mois le sus dict métal feut foundu pour faire la dicte cb> che par le dict mestre Jehan Joly, lequel la falist et pour ce catre fois . par délibération de concel que serait refaicte de la mesure et pois de sinq quintals, et qui seroit donne au dict mestre Jehan Joly quinze livres tournoizes pour la fescoun de ce que Ion la ly fesoit fère plus grosse de deux quintals.
Pour fère ce dessus avons acheté de Monsr de Tourmilie ung mourtier de métal pesant 100 livres à 4 sous l'ivre se monte 21 livres 8 sous tournois, 21'8 s.
Plus, avons acheté de monsieur de Chambert ung aultre mourtier de métal fesant 531 à 4 sous monte 10'12 s,
1. L'église Sainte-Martiane était une des paroisses de la ville d'Albi. Elle fut supprimée en 1790 et a été démolie. Elle se trouvait à une petite distance de l'église collégiale et paroissiale de Saint-Salvy. Quant aux cloches, elles furent fondues pendant la période révolutionnaire.
2. Pairoulié, chaudronier.
3. Donazac, village aux environs de Cordes (Tarn).
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Plus, avons acheté du F« Jehan Jentoun une ouïe métal pesant 12' à 4 sous livre, monte 2'8S.
Plus, avons acheté de Martre Ferrasse 41 estein vieux pour afinerles dicts mourtiers à 3 sous livre, se monte 12 sous pour ce 12 sous.
Plus le mois de Juin 1557 par le dict mestre Jehan Joly ladite cloche fut refaicte et eumer le métal de reste (1001), lequel fut vendu aux par roussiens de Cunac comme apert par nostre resceu icy devant.
Il y a encore une page de petites fournitures sans grande importance.
Réparation d'une croix et de deux calices pour l'église Sainte-Martiane d'Albi(24 mars 1635) !.
Nous soubs signés Maistre Beranger Dilhan, ptre et recteur de l'esglise Ste Martiane, sr Sicard Arnal, md, vice-syndic de lad. esglise, sr Guillaume Forrac, sr François Rugires aussy mds et parrochiens de lad. esglise depputés, avons convenu et accordé avec Guillaume Folquier, me orphèvre de ceste ville, que ledit Folquier sera tenu de monter la croix grande de Jad. esglise sur ung aultre bois sendis et rejoindre ce qui sera disjoinct ou coupé en lad. croix, pesant 9 marcs 4 onces, laquelle est treuvé guarnie et ornée d'un Jésus crucifié au millieu d'icelle sur la teste duquel a une platte ronde servant de coronne; au bras droit une nostre Dame, et du bras gauche ung S'Jehan et au bout de la croix un pellican, et au pied d'icelle ung lazare, le tout relevé en bosse et tant aux bras qu'aux pieds est haut de la croix sont enchâssées quatre pierres cristal en obale, une agathe blanche et noire rompue en forme d'angle, plus aultre petite agathe blue et noire troys cristal blus sur doublets une tourquoise, ung autre petit cristal aultre qualtre (pierres) de nacre et le cartel escript sur la teste de nostre Seigneur en quatre lettres I.N.R.I, en platte d'argent et de Faultre costé au millieu de ladite croix est niché l'imaige de Saincte Martianne avec une platte en forme de coronne dernier la teste d'icelle est plus haut. Sur la teste de lad. saincte Martianne y a ung coronnement avec la représentation desquattre évangelist'es par ung ange, au bout de lad. croix ung lion, du costé du bras droit un aigle du bras gauche, et au pied un taureau relevé en bosse, plus une febite marine, deux petittes aguathes blu et noir, aultres deux pierres de cristal, l'un est rond et l'autre carré, d'une corneline toute lize dux cristal'sive doublets blus, ung doublet rouge, un coural et une pierre de nacre, et au.tour de lad. croix scavoir au bout bras et pied y a ungbou1.
ungbou1. départementales du Tarn.
tom d'argent attaché avec de clous aussy d'argent au pied de laquelle y a ung gros boutom aussy d'argent surdoré appuyé sur ung linteau entouré de huit boutons rompus sur une mollure et au dessus desdits boutons y a quattre coronements, laquelle croix led. Folquier a promis remettre à lad. esglise à la prochaine feste de la nontiation de N.-Dame, vingt cinquième du moys de Mars, avec toutes ses appartenances cy dessus escriptes, et l'accomoder en bonne et due forme, ensemble une imaige de Sainct Sébastien, pesant quatre marcs sept onces et demy, et se moyenant la somme de dix livres,
Plus, a promis acomoder deux calices pesant deux marcs quattre onces six ischauts pour le prix de vingt soûls, laquelle dite somme de unze livres avons promis paier audict Folquier qu'il rendra ladite croix, Sainct Sébastien et calices le toust net et en bon estât acomodé. En foy de tout ce dessus Nous sommes signés, Alby, ce dernier Février mil six cens trente cinq.
Le vingt neuviesme dudict mois de Mars Folquier a signé le contenu au susd. compromis recevoir la susdite croix S' Sébastien et calices dans la sacristie de lad. esglise racomoder et du mesme pois qu'il a fourny au rabilliage de lad. croix deux onces d'argent, lequel lui a estepeisé et partant demeuron expressément quitte. En foy de ce nous nous sommes signés : Delhom, Sicard, Arnal, Forrac, Rugin, Folquier.
M. CARTAILHAC, ayant vu le mois dernier, au musée du Mans, les urnes cinéraires que M. Chaplain-Duparc avait exhumées des sépultures de Garin, près Luchon, vers 1874, expose ce que l'on sait de ce cimetière préhistorique attribuable au premier âge du fer. Il rappelle les fouilles plus anciennes de Toussaint Lézat et de Poidenot. Il compare les antiquités recueillies avec celles que devaient fournir plus tard divers gisements de la Haute-Garonne, des HautesPyrénées et de l'Ariège. Il montre l'importance de ces nécropoles et de leur contenu. Il présente des plans, dessins et photographies des tombes, entourées généralement de cromlechs. Il résume ainsi les découvertes publiées, en partie seulement, par leurs auteurs, c'està-dire par Julien Sacaze, le colonel Pottier, Ed. Piette et l'abbé CauDurban. Il ajoute que M. Georges Ancely en remaniant les plantations de sa belle propriété de Saint-Michel-du-Touch, sur les bords de la Garonne, près. Toulouse, à exhumé, quelques antiquités analogaes.
Une conversation s'engage à la suite de cette communication et
M. Cartailhac dit que les collections dont il a parlé sont dispersées. Le musée de Saint-Germain-en-Laye possède la plus grande partie : les séries admirables de Piette et Sacaze et tout l'ensemble du général Pottier; M. l'abbé Cau-Durban a gardé sa belle collection; quelques piècesj surtout céramiques, sont demeurées entre les mains de la famille Sacaze, à Bagnères-de-Luchon; enfin notre confrère M. Régnault et le Musée Saint-Raymond, à Toulouse, se sont partagé la petite série de Saint-Michel-du-Touch, grâce à la complaisance de M. G. Ancely.
M. RÛMESTIN dit à ce sujet que les terres à briques des environs de Saint-Michel du-Touch livrent souvent aux ouvriers des vases que malheureusement on ne conserve pas; il serait bon de surveiller ces trouvailles.
Séance du 11 avril 1905.
Présidence, de M. J. DE LAHONDÈS.
La correspondance comprend une lettre de M. le chanoine POTTIER, président de la Société archéologique de Tarn-et-Garonne, nous invitant à l'excursion qu'elle compte faire à Burlats, au château de Ferrière, au Sidobre et à Brassac pendant les vacances dé Pâques.
MM. de Lahondès, baron Desazars, Pasquier, Lécrivain, Plassard et Cartailhac sont désignés comme rapporteurs des ouvrages présentés aux concours de l'année.
Divers documents de la correspondance concernent les objets d'art et les édifices religieux dont le sort est menacé par la séparation des Eglises et de l'Etat. La Société sera spécialement convoquée pour prendre une décision à cet égard, vu la gravité des circonstances.
M. DE LAHONDÈS donne lecture de la note suivante :
La fontaine de la place Saint-Etienne.
M. Joseph du Bourg, frère de notre collègue dom du Bourg, a eu l'amabilité de nous communiquer une note sur la fontaine Saint-Etienne,
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trouvée dans ses papiers de famille. Elle nous donne quelques indications précieuses et m'a conduit à poursuivre des recherches sur le petit monument qui orne la place de la Cathédrale, dont il n'est pas inutile de relever les dates diverses.
Pendant des siècles, Toulouse, de même qu'un grand nombre de villes, n'eut pour s'abreuver que l'eau des puits creusés dans les cours des maisons ou au milieu des placés et des carrefours.' Les noms des PuitsVerts, des Puits-Clos, de Perchepeinte en conservent le souvenir. Il n'y a pas cent ans encore que l'eau du fleuve lui arrive, jaillissant par des fontaines après avoir été filtrée par les sables du rivage.
La science actuelle condamne sévèrement le breuvage par l'eau des puits contaminée sans cesse par l'infiltration des boues, des ordures de. toutes sortes entraînées par les pluies, et qui devait l'être surtout à une époque où la propreté des rues, mal ou même nullement pavées, était moins bien surveillée qu'aujourd'hui. Et cependant, alors, la population s'accroissait sans cesse, non seulement par l'arrivée de nouveaux habitants, mais surtout par l'excédent de naissances.
Les Toulousains admiraient, avec un grand respect, les beaux ouvrages des Romains qui avaient amené l'eau, filtrée naturellement, des _ terrains diluviens de PArdenne par les aqueducs dont la rue des Arcs garde la mémoire, mais ils n'osaient entreprendre, non seulement de les imiter, mais même d'utiliser les conduites qui profilaient encore leurs arceaux sur plusieurs points et les réservoirs dont les restes ont été retrouvés, il y a quelques années, à la place d'Assézat, et, l'année dernière encore, à la place Rouaix, point culminant de la ville.
Sur la rive droite une seule fontaine d'eau de source paraît avoir donné, depuis le haut moyen-âge, une eau plus pure, celle de la place Saint-Etienne.
La première mention qui nous en reste est un acte du 2 janvier 1433 qui fut invoqué, en 1720, lors d'une nouvelle réparation de la fontaine. Il dit que Bernard de Rousergue, prévôt du chapitre, et JeanDeltil firent réparer le griffoul de la place Saint-Etienne, nettoyer les aqueducs et les puits ou regards établis sur leur passage. Le premier, qu'abritait une grande pierre au quartier Saint-Sauveur, près de la maison de Na Guilhem, fut ouvert et trois ouvriers y descendirent. Ils parcoururent un long espace souterrain, après lequel la frayeur les arrêta; mais, malgré cette interruption des travaux, la réparation produisit son effet, et tout le peuple se rendait sur le parcours des aqueducs et à la place pour admirer cesbeaux ouvrages 1.
1. Mémoires de l'Académie de Toulouse, III, 360.
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L'eau venait des coteaux de Guilleméry, mais avait été captée plus loin comme l'indiqua, en 1720, la découverte de deux acqueducs qui se dirigeaient l'un vers Montaudran, l'autre vers Balma. Elle était amenée par des tuyaux de bois ou de poteries protégés par un revêtement de maçonnerie, en partie aussi par des canaux creusés dans le roc que forme la marne arénacée appelée balme dans le pays toulousain.
Un siècle après, la fontaine ne coulait plus, soit par un nouvel engorgement des conduites, soit par une dérivation établie dans la cour de la prévoté. Un procès s'ensuivit entre la ville et le chapitre en 1512. On plaida sans cloute longtemps car, le 29 août 1523, le Parlement rendit un arrêt par lequel il fut décidé que l'eau du griffon « tombant à présent dans les fossés de la ville lès l'église métroplitaine, sera conduite à la place publique devant la porte principale de Saint-Etienne, en lieu propice pour l'usage des chanoines et des habitants, et aux frais de la ville 1 ».
Catel, citant cet arrêt, pense, avec justesse ou du moins vraisemblance, que les premiers travaux pour amener l'eau des sources avaient été exécutés par les chanoines de Saint-Etienne, qui, de même que tous les ordres religieux, possédaient une fontaine ou lavabo au milieu ou sur un des côtés de leur cloître. Au temps de Catel on voyait encore dans le cloître le couvert sous lequel avait jailli la fontaine. C'est pourquoi, ajoute-t-il, il est dit que la fontaine sera pour l'usage du chapitre*.
L'exécution de l'arrêt se fit attendre, car Lafaille, citant une délibération du Conseil de ville, dit que c'est aux soins des capitouls de 1545 que l'on doit la fontaine de la place Saint-Etienne, mais c'est surtout de sa décoration qu'il entend parler, et elle ne fut même exécutée que trois ans après.
C'est qu'en effet l'eau était regardée comme un trésor si précieux qu'elle était un objet d'orgueil pour les villes et que les magistrats municipaux se plaisaient à la présenter dans une ornementation qui célébrait sa valeur. L'élégance de quelques puits que l'on voit encore dans plusieurs maisons de Toulouse est un autre témoignage de ce sentiment.
Mais la fontaine du Moyen-âge conserva toujours son caractère d'utilité. Elle invite à s'approcher; elle facilite l'accès de ceux, ou plutôt le plus souvent, de celles qui viennent puiser, et ne les inonde pas par les cascades intempestives que multiplièrent plus tard les architectes pour faire valoir leurs compositions.
1. Roschach, Inventaire des archives communales, p. 283.
2. Catel, p. 190.
BULL. 35, 1905. 21
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Jehan Raincy dit Feuillette, appelé dans les comptes de l'hôtel de ville tantôt maître maçon, tantôt maître architecte, tantôt maître tailleur d'images, donna le plan du monument et le fit exécuter en 1548. Son travail fut vérifié et expertisé, le 7 décembre, par Nicolas Bachelier et Guiraud Mellot; le 11 mars suivant, il reçut des capitouls le dernier terme de la somme de 1,698 livres 2 sols qui lui était due, « tant à l'arvoult dessoubs la conque et à la dite conque et pierre de marbre par luy ouvrée que pour la manufacture et façon de la massonnerie de briques et pierre de marbre pour le griffoul. »
Jehan Raincy donna aussi le modèle des marmousets de bronze qui versaient de l'eau le plus naturellement du monde, de même que plusieurs autres que l'on voyait alors sur quelques fontaines, et qu'il fit fondre par Claude Pelliot. Le même fondeur devait, deux ans après, couler en bronze, d'après le modèle sculpté en bois par Jehan Raincy, la statue symbolisant la glorieuse Toulouse qui fut érigée sur le comble de la tour des Archives et qui est transformée aujourd'hui en Renommée proclamant dans les airs, du haut de sa colonne, la gloire du général Dupuy et de la 32e brigade.
Mais les marmousets furent refondus en 1649.
De nombreux travaux avaient précédé l'érection du petit monument. Dès 1546, Pierre de Naves avait reconstruit la voûte de l'aqueduc de Guillemery; Guillaume Castet et Jean Fornel, maîtres maçons, avaient reconstruit de même une longueur d'aqueduc de 54 cannes2pans etdemi pour la conduite des eaux du griffoul qui coûta 196 livres 2 sols 6 deniers. Guiraud Mellot construisit en bonne maçonnerie de pierres de taille, « pierre rosse 1 », hors la porte Saint-Étienne, d'après le « pourtraict » qu'il exhiba, « le réceptable commun des fontaines pour la conduite des eaux du griffoul ordonné être édifié à la place commune de Saint-Etienne ».
Le 13 novembre, Nicolas Bachelier et Laurent Clary expertisèrent la partie d'aqueduc « d'arvoult » exécutée par Guiraud Mellot, et de même, le 11 décembre, « les murailles, pieds droits et voltes faits par maître Pierre de Naves, à la vigne de feu Donadéi, en son vivant prêtre, pour la conduite du griffoul ».
Les tuyaux de terre cuite furent fabriqués à Beaumont-de-Lomagne, Gariès et autres lieux, et le peintre Dominique Vergés reçut 37 sous 6 deniers pour avoir vaqué quatre jours à aller porter les moules aux potiers.
1. Pierre de Roquefort, calcaire jaunâtre pris au confluent du Salât et de la Garonne, avec lequel sont construits presque tous les anciens monuments de Toulouse.
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Pierre de Naves avait commencé la construction de la tour des Archives en 1525, Laurent Clary l'avait terminée l'année suivante. Guiraud Mellot devait sculpter, en 1552, la porte du Grand-Consistoire vendue récemment et aujourd'hui loin de Toulouse. Nicolas Bachelier était à ce moment dans tout l'éclat de sa renommée.
Une vasque ou coupe de marbre, qui se trouvait alors dans la cour de la prévoté, fut transportée dans les premiers jours d'août, et malgré quelques résistances du chapitre, au devant de l'église des Cordeliers, par quatorze chevaux et seize hommes que dirigeait Jean Raincy, afin d'être gardée et préservée, peut-être aussi d'être ouvrée à nouveau. Les cordeliers faisaient exécuter à ce moment de grands travaux dans leur église, devant laquelle un important chantier de taille de pierres était établi, et Bachelier travaillait au beau rétable aujourd'hui perdu.
Le 19 novembre, le recteur des ouvriers de l'église Saint-Pierre-des Cuisines recevait des capitouls 6 livres tournois, prix de deux colonnes de marbre achetées pour supporter la coupe de marbre du griffoul de la place Saint-Etienne. Le prêtre et recteur Girard faisait observer que ces colonnes, qui de tout temps avaient appartenu à l'église, valaient bien davantage et demandait cette somme dont elle avait grand besoin poulie montage d'une nouvelle cloche qui venait d'êtrt fondue.
Si plusieurs éléments de la fontaine actuelle se retrouvent dans ces divers comptes 1, la pyramide n'y est pas mentionnée et il est probable que le petit monument devait ressembler à la fontaine à peu près contemporaine que l'on voit à Lacaune, dont M. Cabié a donné le dessin avec une notice dans le VIe volume de la Revue du Tarn, page 268.
Les aqueducs laissèrent bientôt se perdre le peu d'eau qu'ils amenaient.
Déjà, en 1618, Gaspard Antichan, capitaine de la santé, fit nettoyer les conduites de la fontaine à leur passage sous le pavé de la ville, car l'eau ne coulait plus au griffoul de la place. Les travaux furent exécutés par Horatio Ferrary, maître fontainier du roi 2.
Au mois de juin 1649, il fut dit au Conseil de ville que chacun savait l'embellissement donné à la place Saint-Etienne par le griffoul qui y a été de tout temps et aussi l'utilité dont il est pour les habitants; mais qu'à présent il n'est plus en état de donner de l'eau, les conduits étant bouchés par terres et immondices, principalement à l'aqueduc qui traverse le jardin du chanoine Thouzin, lequel est presque comblé, et qu'il
1. Nous devons la communication des comptes de ces deux années à M. Roschach qui les a recueillis, comme des milliers d'autres, dans les archives du Donjon et nous le remercions une fois déplus de son inépuisable obligeance.
2. Archives du Donjon. Registre des fontaines, I.
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est nécessaire de faire écouler l'eau des fossés de la ville afin de pouvoir rebâtir la muraille, sans doute le siphon, qui traverse ce fossé pour porter l'eau à la place 1.
La décision fut prise le 22 juin. Une vérification préalable de l'état de la fontaine fut faite par MM. de Montrouvier et de Comminihan, docteurs et avocats, et nobles Figuier et Cottin, bourgeois. Il n'y eut plus qu'à arrêter le marché au moins-disant avec l'ouvrier qui exécuterait le travail et à lui fournir 300 tuyaux de briques coûtant 3 sous pièces. Le Conseil approuva cette dépense de 245 livres environ.
Le contrat fut passé le 23 avril avec Horatio Ferrary, maître fontainier du roi, au prix de 300 livres ; savoir : 100 livres comptant, 100 livres à moitié travail et 100 livres à la fin de septembre, époque à laquelle le travail devait être terminé. Les capitouls s'engageaient à faire recueillir les eaux de source, à construire le réservoir avec porte de fer, à fournir les tuyaux et matériaux nécessaires, plus deux petites portes de fer pour fermer les témoins. Le réservoir de la porte de fer, qui remplace celui qu'avait construit Guiraud Mellot en 1546, se voit encore à l'entrée du Caousou.
Le premier terme fut payé le 1er avril 1650 à Horatio Ferrary, qui s'engagea en outre à tenir la fontaine en bon état pendant dix années, à raison de 60 livres par an.
Les mêmes commissaires visitèrent la besoigne terminée, reconnurent que l'eau coulait par les quatre marmousets posés à cet effet, visitèrent aussi le réservoir de Saint-Sauveur, la tour de la porte ne fer dans laquelle s'assemblent les eaux de source, la conduite qu'ils trouvèrent bien réparée en telle sorte que l'eau ne s'échappait point, et de même les regards 2.
C'est la fontaine qui fut exécutée à cette époque que nous avons encore sous les yeux, sauf quelques retouches. Les marmousets furent refondus montrant encore les mêmes libertés d'émission de l'eau et la date de 1649 fut creusée, comme on le voit, sur leur thorax. Un de leurs pieds s'appuie sur une tête de tortue. Est-ce un souvenir de la fontaine des Tarterughe à Rome? Horatio Ferrary avait sans doute visité Rome et y avait vu les obélisques ramenés d'Egypte ou d'autres élevés à leur imitation surmontant plusieurs fontaines monumentales de la ville, demeurée longtemps et peut-être encore la plus riche en belles eaux jaillissantes. Il éleva en marbre des Pyrénées la pyramide de la fontaine embellie. Au-dessous, un dé de même matière fut creusé de quatre niches où ses
1. Archives du Donjon. Délibérations du Conseil de ville; registreXXV, f" 219.
2. Archives du Donjon. Registre des fontaines, I et II ; premières pages.
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marmousets se logèrent. Auparavant ils dominaient peut-être le petit monument, comme à Lacaune.
Mais la fontaine renouvelée conserva le caractère si bien approprié à son usage pratique, visant seulement, dans son élégante simplicité, à
attirer d'abord en appelant l'attention par sa flèche de marbre, puis à retenir autour de sa vasque hospitalière, n'étalant nulle de ces ambitions monumentales encombrant l'espace avec plus de pierres que d'eau, et parfois arrosant sans mesure avant de désaltérer.
L'eau tombe sur une large cuve autour de laquelle des tuyaux ou, auparavant d'une façon plus artistique, des gueules demascarons offrent l'eau à tous venants. On y vient puiser en descendant quelques marches
FIG. 1. — La fontaine de la place Saint-Etienne, Toulouse (croquis de M. J. de Laliondès).
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autour d'une vasque inférieure octogone, et cette dépression ne provient pas seulement d'un exhaussement de terrain environnant, mais elle était d'usage, parce qu'il était avantageux d'abaisser le plus possible le point d'émission de l'eau, et aussi de ménager un espace où les gens qui se pressaient autour de la fontaine ne couraient pas le risque d'être dérangés par les passants.
Moins d'un siècle après, les eaux s'étaient encore perdues et le monument seul montrait sur la place Saint-Etienne ses marmousets inutiles.
Le 16 février 1719 on décida, sur le rapport des commissaires, de faire construire des aqueducs dans les différents lieux où le terrain s'était éboulé et de refaire les soupiraux nécessaires, en employant à ces travaux les briques des deux masures ou fausses portes qui étaient hors celles de Montoulieu et de Montgaillard, anciennes barbacanes sans doute, et l'on donna pouvoir aux capitouls de nommer un ingénieur, si besoin est, et tout au moins un inspecteur des travaux.
Le 4 juillet 1720, l'ingénieur, reconnu indispensable, fut choisi. C'était encore un Ferrary descendant de l'ingénieur du siècle précédent. 3,500 livres lui furent promises pour son travail, avec 300 livres de pension viagère pour l'entretien de la fontaine, à la condition néanmoins de l'entretenir un an entier gratuitement et sans autres frais que les maçonneries nécessaires 1.
La direction des aqueducs était même oubliée. C'est en la recherchant, dans leur^'parcours à travers le jardin de M. Alexandre de Cambon, aujourd'hui le parc du Caousou, au-dessus du réservoir à la porte de fer, que l'on découvrit sur une grande pierre servant de clef de voûte l'inscription Tholus. On devine quelle bonne fortune ce fut pour les antiquisants qui s'enflammèrent aussitôt et ne manquèrent pas d'affirmer de nouveau, avec la certitude d'une preuve tangible, la fondation de Toulouse par le fils d'Enée et la construction immédiate, dès les premiers jours de la ville, des aqueducs lui amenant l'eau bienfaisante. L'assertion leur était d'autant plus aisée que nul ne doutait que les travaux ne fussent une ceuyre romaine. N'était-ce pas une inconsciente justice qui faisait hommage aux maîtres du vieux monde de ces ouvrages dont ils avaient multiplié les superbes modèles dans toutes leurs provinces?
Cependant, des esprits avisés et de sens critique comme il y en avait à ce moment, soufflèrent sur l'orgueilleuse illusion patriotique en faisant remarquer que le mot tolus, du grec 60X09, point élevé, était employé par les architectes pour indiquer une clef de voûte.
1. Archives du Donjon. Délibérations du Conseil de ville, registre XXXVIII f- 30 et 39 recto.
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Les recherches firent découvrir cinq aqueducs, dont les deux principaux se dirigeaient l'un vers Montaudran, l'autre vers Balma, et plusieurs autres ouvrages construits en briques. Les fontainiers reconnurent qu'ils étaient de date très ancienne et que 1,200,000 livres ne suffiraient pas pour les établir. Les capitouls en firent lever les plans qui furent exposés et fort admirés.
La dépense des travaux exécutés en 1720 s'élève à 35,000 livres. Les derniers comptes furent payés en janvier et avril 1721.
Le détail en est conservé dans- le premier registre des fontaines, aux archives du Donjon. On y relève les noms de l'ingénieur Ferrary, de Jean Arcis, sculpteur, fils de Marc Arcis, qui refit à neuf, moyennant 190 livres 10 sols, le dé de marbre creusé pour les quatre niches et abritant les marmousets, posés simplement sans y être adaptés comme ils devaient l'être auparavant, et aussi, pour la somme de 938 livres, la vasque en marbre gris de Saint-Béat avec les quatre mascarons émettant l'eau par la gueule. Il copia probablement ceux de la vasque de 1649, car ils gardent le caractère de cette époque.
Ferrary, ingénieur, et la date 1720 en chiffres romains et en chiffres arabes sont inscrits sur le rebord extérieur de la vasque. Les tailleurs de pierre Dominique Lagrèze, Lamouroux et Menaud reçurent pour leur travail : le premier 109 livres ; les seconds, qui avaient réparé surtout la cuve octogone et ouvré les marches en pierre entourant la dépression du terrain, 248 livres 10 sols.
M. de Cambon, conseiller au Parlement, avait fourni la, pierre de taille qui coûta 267 livres 10 sols.
L'architecte Seguin reçut 750 livres ; le fontainier Davon 446 livres; Dufour, capitaine de la santé, commis pour inspecter les travaux, 1,008 livres 10 sols; Salles, son piqueur et son remplaçant pour la surveillance des travaux, 456 livres et 6,643 livres 7,sols 3 deniers.
D'après les mêmes pièces à l'appui des comptes, conservées dans le registre des fontaines, les travaux de 1720 consistèrent : à relever la pyramide sur un coussinet qui devait être en bronze mais qui fut exécuté seulement en briques, recouvertes en 1771 de plaques de fonte ; à fixer la pyramide sur ce coussinet avec quatre boules de bronze; à remettre les trois marmousets conservés dans les nouvelles niches de marbre et à faire fondre un quatrième qui avait disparu sur le même modèle et de la même matière; c'est celui que l'on voit à l'ouest faisant jaillir l'eau par la gueule d'un dragon enroulé autour de son bras.
La partie supérieure de la pyramide qui s'était rompue fut reproduite, mais simplement en pierre, comme on le voit.
Le parvis, autour de l'octogone, fut dallé en pierres de taille, et l'on
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posa de nouveaux supports au-dessous des robinets pour la pose des cruches.
Les deux marches furent refaites, l'inférieure en pierre, celle au niveau du sol de la place en briques.
Après ces dispendieux travaux, la fontaine ne livrait encore que trois pouces d'eau et beaucoup moins en été.
La nécessité de disposer d'une plus grande quantité d'eau devenait plus impérieuse avec l'accroissement de la population. Le roi, en 1769, fit remise à la ville de 53,443 livres 10 sols, à la charge d'employer cette somme à ses fontaines, mais elle fut dépensée tout entière à la fontaine de la place Saint-Etienne.
En 1770, les conduites furent réparées encore une fois, les deux marches furent refaites à nouveau en pierre de Carcassonne, et de même les supports.
A ce moment aussi, on décida la refonte des quatre marmousets que des scrupules de convenance avaient mutilés en faisant disparaître un jet d'eau trop naturaliste; les écussons de capitouls qui étaient au-dessus devaient être redorés, de même que la girouette. Mais ces derniers détails du devis ne furent pas exécutés.
Cependant, en 1780, on utilisa un ancien aqueduc pour une fontaine érigée au faubourg Saint-Etienne, à la place Saint-Sauveur, aujourd'hui place Dupuy. -
Mais la quantité d'eau diminuait toujours. De même, une fontaine à la porte Montgaillard, pour laquelle les capitouls de 1508 avaient capté les sources de la Béarnaise et de la Baraquette, avait bientôt perdu entièrement l'eau et cent cinquante ans après il n'en subsistait nul vestige 1. On voulut la rétablir en 1727 et il reste de cette tentative un plan de l'architecte Môlan dans le registre des fontaines.
D'ailleurs, l'eau venue des coteaux argileux du levant n'était ni très pure ni très saine, troublée sans cesse par des infiltrations dans les aqueducs.
Seule, la fontaine Sainte-Marie, à Saint-Cyprien, fournissait une eau vraiment pure, filtrée naturellement par les sableset les graviers des plateaux diluviens de l'Ardenne d'où elle venait.
Divers projets s'ébauchaient pour procurer à la ville une eau meilleure et plus abondante, lorsque le capitoul Laganne, mort en 1788, légua à la ville une somme de 50,000 livres pour l'établissement de ses fontaines.
Mais la ville n'entra en jonissance de ce legs qu'en 1817, après la mort de la veuve du donateur. Les projets reprirent; les uns voulaient deman1.
deman1. de Lafaille, II, p.. 302.
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der l'eau à l'Ariège, projet que l'on a repris récemment en proposant de saisir les eaux de la nappe de sable et de gravier entre l'Ariège et l'Hers, dans la prequ'lle duTramesaigues qui projette sa pointe aux confluents des deux rivières ; les autres dans le canal en la. prenant après Naurouze, où elles ne sont pas encore trop altérées; les plus raisonnablesdans la Garonne. Ce fut le plan adopté. Les filtres furent établis à la prairie qui en a pris le nom; le château d'eau, fort admiré alors et devenu insuffisant depuis, fut construit sur les plans de l'architecte Raynaud par l'entrepreneur Maurel. L'eau de la Garonne arriva enfin dans la ville en 1825, et quand la fontaine Saint-Etienne reçut d'elle ses six pouces, il y avait plus d'un an qu'elle ne coulait plus 1.
Séance du 18 avril 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
La correspondance imprimée comprend l'ouvrage de M. Barbot, déjà annoncé à la Société par M. Perroud qui a bien voulu l'offrir : Les Chroniques de la Faculté de médecine de Toulouse du treizième au vingtième siècle. 2 vol. in-8°. Toulouse. Tome I, vui-508 p.; t. II, 324 p.; 27 pi. hors texte, 3 plans.
Après un aperçu général sur l'Université de Toulouse, l'auteur aborde dans le premier volume l'histoire de notre Faculté de médecine, de ses maîtres et de ses étudiants ; les troisième et quatrième parties du même tome sont relatives aux chirurgiens, apothicaires et accoucheurs pendant la même période ; la cinquième retrace l'histoire de l'Hôtel-Dieu du seizième au dix-neuvième siècle.
Le second volume est relatif aux événements qui se sont passés de 17d3 à nos jours. Après la période révolutionnaire, nous assistons aux efforts persévérants et dévoués de la Société de médecine pour réorganiser un enseignement grâce à ses cours publics et gratuits. Puis, lorsque cet enseignement est redevenu complet, nous suivons l'histoire des écoles successives de noms divers jusqu'à la création,
1. Voir pour l'histoire des fontaines à Toulouse le mémoire de M. d'Aubuisson de Voisins dans les Mémoires de l'Académie des Sciences de Toulouse, t. I, p. 159, et celui de M. de Planet dans le même recueil, VIe série, t. IV, 166, p. 387.
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en 1891, de la Faculté mixte de médecine et de pharmacie. L'auteur nous amène enfin jusqu'à l'année 1905.
L'ouvrage comprend de nombreuses gravures, de confection un peu rapide, offrant surtout les porlraits des illustrations médicales de Toulouse. Cette contribution importante à l'histoire de la Faculté de médecine s'ajoute heureusement aux travaux d'un maître, de notre confrère, M. Anlonin Deloume, sur la Faculté de droit.
M. J. DE LAHONDÈS analyse une importante étude de M. Fleury sur la décoration des portails romans insérée dans la Revue du Maine, t. LVII, 1905.
M. Fleury dit que les portails du Midi diffèrent de ceux des provinces du nord en ne montrant pas, comme ceux-ci, des statuescolonnes sur les ébrasements. On n'en voit, dit-il, que sur le portail de Valcabrère. Il aurait pu ajouter celles des portails des salles capitulaires de Saint-Etienne et de la Daurade, aujourd'hui au musée de Toulouse. Il est vrai que ceux-ci ont très probablement reçu l'influence du Nord, le premier par son caractère, le second par son sujet, les ancêtres du Christ.
Le sagace archéologue distingue trois variétés dans le Midi : en Provence, en Languedoc et dans le Poitou.
A Saint-Gilles, à Arles, à Saint-Bernard-de-Romans, les statues sont un motif de décoration des façades dressées entre des colonnes séparées du mur et supportant un entablement avec frises à personnages et fronton. L'imitation de l'antique est manifeste, et aussi dans le caraclère des statues, robustes, un peu lourdes. Contrairement à l'opinion de M. Vogé, les statues d'Arles n'ont nullement inspiré celles de Chartres, auxquelles elles sont postérieures, ainsi que l'a démontré M. de Lasteyrie.
Dans les provinces languedociennes ou quercinoises, pas davantage de statues sur les côtés des portails, excepté dans les trois qui viennent d'être signalés. Quelques portails forment porche, comme à Moissac, à Beaulieu, à Souillac, à Cahors. Dans cette dernière région, les tympans prennent aussi une grande importance. Dans la région toulousaine, au contrare, le tympan manque le plus souvent. On n'en voit qu'un à Saint-Sernin, qui s'ouvre par quatre portes, et deux autres à Saint-Bertrand-de-Comminges et à Saint-Just-deValcabrère. La statuaire se présente par des figures isolées dressées
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sur le mur de façade, comme à Moissac et à Souillac, ou par des basreliefs plaqués, comme à Saint-Sernin. Mais la sculpture est d'une puissante originalité de caractère, mouvementée, agitée, avec une expression dramatique, et aussi une savante étude du nu sous le vêtement moulé sur les formes du corps, qualités qui se retrouvent sur les figures en haut relief des chapitaux contemporains. La finesse d'exécution finit parfois par dégénérer en préciosité. Mais comment M. Fleury peut-il en déduire la supposition que les deux statues étranges du Musée de Toulouse qui passent, quelquefois, mais à tort, pour avoir fait partie d'un zodiaque, ne datent peut-êlre que du seizième siècle? Les archéologues du Nord ont de la peine à reconnaître la richesse, la fécondité et la variété d'inspirations de l'art roman méridional.
Les portails romans du Poitou ne montrent pas des statues dans les jambages dont les angles rentrants sont garnis seulement de colonnes. Les voussures, peu nombreuses, sans profondeur, n'abritent pas de tympans. Un triple portail court sur toute l'étendue de la façade à Parthenay et à Notre-Dame-là-Grande de Poitiers comme à la cathédrale d'Angoulême ; de nombreuses statues d'apôtres et d'évêques en recouvrent toute la hauteur, au-dessus même de petites scènes se prolongeant sur un bandeau, ornementation trop chargée et sans unité d'ensemble.
Le remarquable travail de M. Fleury contient bien d'autres observations et en suscite d'autres aussi. M. le Président engage vivement ses collègues à le lire-en rapprochant cette lecture des monuments de notre province.
M. CARTAILHAC informe la Société que l'hôtel du premier président de Mansencal, enlevé aux dominicains et dont ils avaient d'ailleurs détruit en partie l'admirable façade de la cour, est maintenant loué à un particulier. Sans altérer la façade de la rue, du moins jusqu'à présent, le locataire a fait baisser le mur de clôture surmontant la porte d'entrée. On a ainsi donné de l'air et de la lumière à la petite cour extérieure et dégagé la. vue de l'édifice qui est un des bons morceaux du vieux Toulouse. Mais on a, d'autre part, établi une galerie vitrée qui dépare singulièrement le monument et a fait disparaître une élégante croisée. Il est fort regrettable que le Ministre des beaux-arts n'ait pas pris des mesures préalables pour informer les
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liquidateurs des biens des congrégations du respect que l'on doit aux vieux et beaux édifices qui sont un trésor national. M. Emile CARTAILHAC remet, au nom de l'auteur, une excellente
photographie offerte par M. Couzy, professeur à l'Ecole des arts, et qui représente un fort joli puits renaissance, naguère dans une cour de notre rue du Musée et qui vient d'être acquis et enlevé à notre
FIG. 1. — Puits de la rue du Musée récemment emporté loin de Toulouse.
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ville pour une destination inconnue. Il est bon d'en garder l'image dans notre Bulletin (fig. ci-jointe).
M. FODRGOCS offre un certain nombre de cartes postales rapportées par lui d'un récent voyage en Belgique. Il décrit les monuments qu'elles représentent, surtout églises et hôtels de ville, et raconte ses visites aux musées de Bruxelles, Bruges et Anvers. Il fait part également de quelques impressions sur la vie scientifique et universitaire à Bruxelles; il expose notamment la merveilleuse organisation des Instituts Solvay qui, dus à une fondation privée, offrent aux travailleurs, dans de luxueux et confortables bâtiments, les plus précieux et les plus complets instruments d'étude.
Séance du 9 niai 1905.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Parmi les publications reçues figurent quatre brochures de M. l'abbé Baichère, membre correspondant : Sur l'utilité de l'enseignement des sciences archéologiques dans les séminaires ; les noms latins et romans des communes de VAude; les reliques, l'argenterie et les ornements de l'église cathédrale de la cité de Carcassonne aux seizième et dix-septième siècles ; un nouveau document relatif au passage de Pie VII à Carcassonne.
M. J. Rozès, avocat à la Cour d'appel de Toulouse, a adressé trois Gazette des Tribunaux de Toulouse contenant des articles sur la bibliothèque de Me Guyot, léguée par son ancien propriétaire à la bibliothèque de l'ordre des avocats de notre ville. Cette collection comprend un certain nombre d'ouvrages qui, par leurs auteurs ou le nom de ceux qui les ont possédés dans le cours des deux derniers siècles, présentent quelque intérêt au point de vue toulousain.
M. l'abbé DEGERT offre l'année 1903 de la Revue de Gascogne qui manquait à la bibliothèque, la Société lui exprime ses remerciements.
M. DE POYBUSQCE offre le dessin d'un épi en poterie vernie du dixième siècle; cet épi, formé de six pièces et d'une hauteur totale
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de lm50, surmonte une des tours du château d'Auribail (HauteGaronne).
M. le PRÉSIDENT fait remarquer aux membres présents le travail de marqueterie exécuté par M. L. DELOOME sur le coffret qui doit désormais orner la table des séances et contenir les publications et manuscrits récemment reçus. Il exprime au donateur et a l'artiste les remerciements de la Société.
M. Emile CARTAILHAC à la tristesse d'annoncer à la Société la mort à Carcassonne de Gaston Jourdanne, docteur en droit, félibre majorai, maître es jeux de l'Académie des Jeux Floraux, qui disparaît à quarante-sept ans. Ses travaux de critique littéraire et d'archéologie sont fort honorables. En outre de mémoires et notices pnbliés par les diverses Sociétés savantes de l'Aude, par la Revue des Pyrénées, la Revue méridionale et autres, il faut citer son Histoire du fèlibrige, très documentée, d'une excellente rédaction, où déjà on a beaucoup puisé sans la citer toujours; Carcassonne, le meilleur des guides qu'aient à leur disposition les touristes qui affluent à la cité; Contribution au folklore de l'Aude, l'un des premiers ouvrages de ce genre parus dans notre Midi et que pour tous nos départements on pourrait imiter, alors qu'il est encore temps de recueillir les traditions et la littérature populaires.
Jourdanne était un laborieux, un ardent ami des choses de l'esprit. Accablé depuis deux ans par un mal qui brisait ses forces mais laissait intacte sa belle intelligence, il publiait hier encore de curieuses notes sur les bibliophiles de l'Aude. Il avait formé une très riche bibliothèque méridionale qu'il souhaitait voir conservée pour les érudits de sa chère ville ou de Toulouse, qu'il aimait aussi et où il était lui-même sincèrement affectionné. Il avait obtenu dans nos concours nos meilleures récompenses et nous avait souvent rendu de réels services.
M. FOURGODS dépose sur le bureau une notice sur l'Institut international de bibliographie de Bruxelles. Cette utile et importante organisation scientifique, fondée en 1895, a pour but, en concentrant les documents, de constituer un répertoire bibliographique universel. Ses collections, où la recherche est rendue facile par diverses classifications, comprennent déjà plusieurs millions de fiches; elles sont relatives à tous les ordres de sciences, et M. Fourgous, qui a eu l'occasion de les visiter récemment, signale notam-
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ment dans la partie archéologique une bibliographie très complète et très soignée des publications relatives à la cathédrale de Bruxelles.
Cet Institut international de bibliographie, trop peu connu, peut rendre les plus grands services; il tend par de sérieux efforts à découvrir les publications anciennes et à se tenir, autant que possible, au courant d'une production scientifique aujourd'hui considérable. Pour une somme très modique, il donne copie aux travailleurs des documents souvent précieux qu'il possède sur tel point spécial les intéressant.
En plus de la constitution de répertoires, l'Institut s'occupe également de la publication d'un Bulletin et de diverses brochures bibliographiques.
M. le baron DESAZARS DE MONTGAILHARD lit un mémoire intitulé Les Imagiers de Toulouse.
M. DE LAHONDÈS, après cette lecture, ajoute quelques mots sur les statues de Saint-Sernin dont il a déjà parlé à la séance publique.
Statues de l'église Saint-Sernin au Musée de Toulouse.
Ces statues 1, d'un caractère étrange et saisissant, frappaient surtout l'imagination lorsqu'elles apparaissaient comme des spectres sous le suaire blanc dont le badigeon les avait revêtues, dans le demi-jour du déambulatoire de Saint-Sernin. Depuis qu'on les en a délivrées et qu'on les voit dans les claires galeries du cloître des Augustins, elles frémissent au contraire d'une vie intense. Elles montrent, au plus haut degré, le caractère de réalité dont la sculpture française était empreinte dans les dernières années du quinzième siècle et les premières du siècle suivant, sous l'influence bourguignonne et flamande. Les costumes, bien que modifiés par la fantaisie de l'artiste, peut-être par l'imitation de ceux qui revêtaient dans les représentations des mystères les personnages de la Bible ou de l'Évangile, semblent révéler plutôt la première période, mais celui de la femme avec son corsage lacé et les cornettes recourbées de sa coiffure, comme on en voit sur quelques têtes dessinées par Léonard de Vinci, indiquerait une époque un peu postérieure. Toutefois, nulle trace de la Renaissance n'apparaît encore en elles. Aussi est-il permis de s'étonner de la désinvolture avec laquelle un critique d'art parisien, pourtant justement autorisé, dit qu'il ne serait pas impossible
1. Voir la planche XXXVI de l'Album des monuments du Midi.
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qu'elles fussent sorties des mains de Bachelier, si célèbre à Toulouse, Bachelier, dont la première oeuvre connue ne date que de 1537, et qui fut justement l'introducteur à Toulouse de l'imitation de l'antique, importée d'Italie.
Les figures ont-elles été moulées directement sur le vivant ou sur le mort, comme on le dit quelquefois ? Évidemment non, puisque les yeux sont ouverts et qu'on voit aussi les lèvres ouvertes, les dents et la langue même. L'artiste a-t-il du moins utilisé des moulages pris sur des figures? C'est possible; l'usage était fréquent à cette époque où l'on moulait non seulement les morts pour leurs statues sur les tombeaux, mais où des vivants même faisaient mouler leur traits d'avance, comme Catherine de Médicis, par exemple, qui voulut figurer à côté de son mari sur le tombeau de Saint-Denis. Toutefois, il convient d'observer que les sculpteurs de ce temps étaient des observateurs si fidèles et si pénétrants de la nature qu'ils n'avaient nul besoin pour la traduire de ce procédé artificiel. Les statues contemporaines abondent encore où la vie se manifeste avec la même réalité frappante. Celles d'Albi ne semblent-elles prêtes à entamer une conversation avec le passant qui les regarde?
Quels personnages représentent les statues de Saint-Sernin? Le titre vague de bienfaiteurs que leur donne Daydé, le premier qui ait parlé d'elles, n'a guère de portée précise pour le moment où elles furent modelées. L'avant-bras et les mains ont disparu et par suite les emblèmes ou les phylactères qu'elles tenaient sans doute et qui nous auraient fait connaître leur nom et leur personnalité. Mais on peut remarquer que toutes parlent, qu'elles parlent même avec animation et qu'elles ont l'air d'annoncer quelque chose. Ne seraient-elles pas les figures des prophètes et des sybilles très multipliées dans les églises à ce moment, à Albi par exemple, où elles se présentent avec un caractère et des costumes analogues, mais inspirés plus directement par celles du puits de Moïse, bientôt après sur les vitraux d'Auch? A cette époque aussi où les convenances liturgiques étaient rigoureusement observées encore, on n'aurait pas dressé dans une place aussi privilégiée que le voisinage du grand autel, dans le tour des corps saints comme on l'appelait à Toulouse, si vénérable par ses précieuses reliques, des figures qui n'eussent été que celles de simples particuliers, si nobles eussent-ils été.
Cette place était strictement réservée pour les personnages de l'Ancien ou du Nouveau Testament. Autour du, choeur de Sainte-Cécile, les prophètes sont disposés ainsi autour du sanctuaire et en dehors, et les apôtres de la loi nouvelle, à l'intérieur, entourent l'autel. Les statues de
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Saint-Sernin semblent marquer par l'outrance de leur réalisme un pas de plus dans cette voie que celles d'Albi, qui datent des dernières années du quinzième siècle et qui furent exécutées, sur les ordres de Louis d'Amboise, par des ouvriers qu'il avait amenés de sa province. L'analogie des sculptures des pieds droits et des dais de la clôture du choeur avec celles que l'on voit à la chapelle du château d'Amboise est manifeste.
Séance du 23 mai 1905. Présidence de M. J. DIS LAHONDÈS.
Le Secrétaire général dit que tous les membres de la Société ont reçu une convocation motivée. Il donne lecture d'une série de documents.
A la suite d'une discussion générale, le Président donne lecture l'un projet de délibération ainsi conçu et le met aux voix :
« La Société archéologique du Midi, en présence du projet de séparation des Églises et de l'État, considérant l'intérêt d'art et d'histoire que présentent les édifices religieux, considérant les intérêts fondamentaux de l'enseignement des beaux-arts et des arts industriels, considérant le respect dû aux oeuvres qui sont la parure de la France et très souvent le profit des plus humbles villages de par l'affluence des voyageurs et des touristes, insiste pour que les monuments religieux : églises, chapelles, mosquées, temples, synagogues, etc., et leur mobilier soient intégralement conservés et protégés, et que la loi n'en modifie pas la destination. »
Le voeu est voté à l'unanimité. Il sera envoyé aux Présidents du Sénat et de la Chambre des députés, au Président de la Commission de la séparation des Églises et de l'État, au Ministre Sous-Secrétaire d'État des Beaux-Arts, au Vice-Président de la Commission des monuments historiques.
Parmi les publications reçues, il convient de citer une brochure de M. le Dr de Santi, membre correspondant : Rabelais et J. C. Scaliger (extrait de la Revue des études rabelaisiennes, 3e année, 1" fascicule, 1905).
En dépouillant la correspondance imprimée, M. le Secrétaire général signale également dans le Bulletin pyrénéen un article BULL. 35, 1905. 22
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touchant à notre domaine, Y Esquisse toponymique de la vallée de Caulerels, par M. Alph. Meillon. C'est une étude consciencieuse et intéressante. Un travail analogue a été fait sur d'autres points de la chaîne pyrénéenne par M. Emile Belloc. Il est à souhaiter que ces érudits poursuivent leurs publications et aient des auxiliaires parmi nos archivistes.
La Société a reçu VHistoire graphique de l'ancienne province de Languedoc, texte et dessins par Ernest ROSCHACH, correspondant de l'Institut, cartes géographiques et notices explicatives par
Auguste MOLINIER, professeur à l'Ecole des chartes. Un fort volume grand in-4° de 720 pages, orné de plus de mille dessins à la plume.
Commencée en 1866, l'impression de l'Histoire de Languedoc se termine en 1904, après trente-huit ans, par cet ouvrage admiraSceau
admiraSceau Trencavel, vicomte de Béziers (1247).
(Une des gravures de VHistoire graphique de Vancienne province de Langitedoc.)
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Saint Augustin donnant sa règle au Chapitre de Saint-Sernin.
(Une des gravures de Y Histoire graphique de l'ancienne province de Languedoc )
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ble, son XVI 0 et dernier volume, qui d'ailleurs forme un tout complet en lui-même.
C'est une histoire par le dessin parallèle à l'histoire écrite, l'illustration superbu de l'oeuvre entière et en mênie temps un résumé par l'image; c'est le véritable musée languedocien, évocateur du passé, avec plus de mille dessins d'une haute valeur artistique, car M. Roschach dessine comme il écrit. Inédits pour la plupart, choisis habilement parmi les miniatures, les bijoux, les sceaux, les médailles, les oeuvres d'art de tous genres, de toutes les époques. En trois cents pages d'une critique pénétrante, l'auteur a caractérisé magistralement les différentes étapes de cette_ Longue route des siècles et dégagé les principales vues d'ensemble.
La collection héraldique, six cents armoiries, s'ajoute à cet ensemble, ainsi qu'un important élément numismatique : seize planches de monnaies gauloises, wisigothes, franques, carlovingiennes et féodales, décrites dans les mémoires de MM. Ch. Robert, Anatole de Barthélémy et Chalande.
Quant aux cartes de la province, au nombre de douze; elles nous montrent les différentes physionomies du Languedoc depuis les temps de la Gaule indépendante. Elles furent dressées, avec le soin scrupuleux qu'il apportait à toutes choses, par M. Auguste MOLINIER, qui n'aura pas eu la joie de voir son oeuvre livrée au public.
La Société ne peut que féliciter et remercier la maison Privât d'avoir couronné d'une façon superbe l'oeuvre monumentale accomplie avec tant de persévérance et de dévouement, et qui fait honneur à Toulouse et à la France elle-même.
M. PASQUIER rapporte quelques souvenirs du Congrès des Sociétés savantes, tenu à Alger pendant la période pascale et auquel il représentait la Société archéologique. Il entre dans quelques détails sur les travaux dont la plupart avaient trait à l'Afrique du Nord; il fait part des observations ou plutôt des impressions qu'il a recueillies dans les excursions archéologiques à travers l'Algérie et la Tunisie.
M. Pasquier constate que, pour l'étude des antiquités chrétiennes, l'Algérie offre des ressources peut-être plus complètes et plus variées que l'Italie. Les fouilles entreprises à Tipaza près Cherchell, à Timgad, à Tébessa, à Carthage et sur d'autres points, ont dégagé
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des basiliques, des cimetières, des baptistères par immersion, des mosaïques, monuments dont les plus anciens datent du quatrième siècle et les derniers de la domination byzantine (sixième-huitième Siècles). Grâce à ces ruines qui reparaissent, on peut se rendre compte de ce qu'était l'exercice du culte au début du christianisme dans le nord de l'Afrique jusqu'au moment de l'invasion arabe. Il y a lieu d'espérer que ces précieux vestiges seront conservés, que des relevés en seront faits pour le plus grand profit des études archéologiques dans le monde chrétien. On doit rendre justice au service des monuments historiques, au service des fouilles en Tunisie et à l'oeuvre du P. Delâtre, à Carthage.
Tout en admirant les splendeurs et l'originalité de l'art arabe, M. Pasquier en fait la critique en déclarant qu'après une brillante èfflôrescence, cet art est resté immuable, s'est rapidement épuisé et que la conception des architectes s'est tarie. C'est presque toujours la reproduction de types connus, de plans identiques. ~" Des photographies, des cartes postales sont mises sous les yeux "des auditeurs pour montrer quel, attrait doit avoir l'Afrique du Nord pour les savants.
M. Pasquier termine par cette réflexion d'apparence paradoxale, mais juste, que les archéologues sont en Afrique les pionniers et les précurseurs de la civilisation. En effet, en découvrant les ruines romaines, en révélant ce qu'était la civilisation antique dans une région aujourd'hui abandonnée, les savants recherchent les caus3s de ce développement, conduisent à la reconnaissance des travaux hydrauliques et à la découverte de l'eau. Le passé sert de guide au présent ; là où ont prospéré les Romains, peuvent bien vivre les colons du vingtième siècle.
En tous cas, l'étude des antiquités puniques, numides, romaines, vandales, bysantines et arabes est un honneur pour la science française.
Séance du 30 mai 1905.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. CARTAILHAC offre son Eloge de M. G. d'Hugues, prononcé à l'Académie des Jeux Floraux, le 3 mai dernier. M. d'Hugues fut membre de notre Société.
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M. LE PRÉSIDENT donne lecture d'une lettre de M. de Gaulejac demandant à la Société son appui près des pouvoirs publics pour obtenir le classement, comme monument historique, de l'église de Poucharramet (arrondissement de Muret), ancienne chapelle fortifiée d'une commanderie de Malte et qui date du treizième siècle ; l'aspect de cette église menace actuellement d'être défiguré par des bâtisses qu'un propriétaire voisin se propose d'y adosser. La Société émet le voeu qu'il soit donné suite à la demande formée par la fabrique et la municipalité, et M. le Président fera auprès du Préfet les démarches qu'elle mérite.
M. l'abbé Yves D. Dufor, curé de Labarthe-de-Rivière, ayant signalé la découverte récente d'un autel votif avec inscription à Valentine, M. LÉCRIVAIN fait à ce sujet la communication suivante :
Note sur une inscription romaine de Valentine.
M. l'abbé Yves Dufor a rendu compte, dans le journal La HauteGaronne , 25 mai 1905, d'une découverte faite à Valentine, dans le quartier appelé Arneps, qui a déjà fourni beaucoup d'objets gallo-romains. Il s'agit d'un cippe votif, de 0»>75 de haut, 0^,40 de largeur et 0*22 de profondeur, portant comme sculptures : sur le côté droit, un vase en forme de coeur; sur le côté gauche, un médaillon avec une tête de femme, et sur la façade l'inscription suivante :
I • O ■ M
TITVLIVS
CINIVCNA1I
F •EDVNXMAT
ER V S L M
La lecture que propose M. Dufaur :
Jovi oplimo Maximo
Titulius
(filius) Ciniucnaii
(femina) Edunxemater
votum.solverunt libentes merito
renferme évidemment plusieurs fautes ; la lettre f ne peut signifier femina, car le mot qui désigne habituellement l'épouse est conjux ; le mot Edunxemater est inadmissible ; il doit se décomposer en Edunx
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mater ; les mots féminins terminés en x ne sont pas rares dans l'épigraphie pyrénéenne. H faut donc lire l'inscription delà manière suivante :
I(ovi) 0(ptimo) M(aximo)
Titulius.
Ciniucnaii
f(ilius), Edunx mat
er . v(olum) s(olverunl) l(ibentes) m(erito).
C'est une dédicace à Jupiter Optimus Maximus, dieu fréquemment invoqué dans les Pyrénées 1, par deux indigènes, Titulius, fils de Giniucnaius, et sa mère Edunx. L'épigraphie pyrénéenne a déjà donné Tilulla, Tilul(lia), Tilullius, Titulius' 1 dans la même région (Saint-Béat, région de Luchon, Billère, Cazaux-I'Arboust, Garin, Ardiège). Les deux autres noms sont nouveaux.
M. FOURGOUS signale l'existence de documents intéressant Toulouse dans une collection factice de plaquettes en général rares existant à la BIBLIOTHÈQUE HISTORIQUE DE LA VILLE DE PARIS (Recueil des choses remarquables advenues en France, 63 vol.).
Il indique entre autres : L'histoire des schismes et hérésies des Albigeois par P. I, C.,,procureur en la Court de Parlement de Tholose. Paris, D. Millot, 1589, in 8», 76 fi ;
Un Discours véritable de ce qui s'est passé en la ville de Thoulouze depuis la tresve accordée le dernier jour d'aoust 1589 entre Messieurs les mareschaux de Montmorency et de Joyeuse jusques au 15e jour d'octobre dernier, envoyé par un notable bourgeois de ladite ville de Thoulouze à un sien amy à Bordeaux. Tours, Cl. de Montreuil et J. Richer, 1589, in 8°, 12 p. ;
La Copie d'une lettre envoyée par un avocat de Toulouse à un Avocat de la Cour de Parlement de Paris, contenant ce qui s'est passé depuis le 25 de janvier jusque au 8 février 1582, avec l'emprisonnement du premier Président grand politique de ladite ville, ensemble l'ordre tenu en l'élection du nouveau gouverneur. Paris, Pierre Hury, imprimeur, 1589 (pièce 41 du tome 36 du Recueil).
M. Foûrgous donne lecture de ce dernier document. Il s'ajoute à deux autres analogues racontant les derniers jours de Duranti, l'un
1. Voir. Sacaze, Inscriptions antiques des Pyrénées, p. 562.
2. Ibid., n" 190, 281, 349, 354, 356, 361.
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utilisé par de Thou, l'autre publié par Dom Vaissete'. Il ne va, il est vrai, que jusqu'à l'emprisonnement, mais raconte de plus l'élection du gouverneur.
Concours de l'année, rapport et décisions.
MM. PASQUIER, baron DESAZARS, DE LAHONDÈS, LÉCRIVAIN et PLASSARD donnent lecture de leurs rapports sur les Mémoires présentés aux concours de l'année. M. CARTAILHAC, absent, a envoyé le sien. Les récompenses suivantes sont accordées :
Prix Ourgaud (200 fr.). — M. l'abbé CORRAZE, curé de Balma, près Toulouse, pour sa Monographie de Saint-Michel-de Lanès.
Prix de la Société (100 fr.). — M. A. VIDAL, à Albi : Le vicomte et les vicomtes de Paulin.
Médailles de vermeil. — Mme A. BRIANT, à Toulouse : Au pays de Brassac; — M. l'abbé BAGNERIS, curé de Saint-Clar (HauteGaronne) : François-Louis le Mercier du Chalonge.
Médaille d'argent. — M. F.-B. TOURNON , directeur de l'école de Condom (Gers) : Inventaire partiel des découvertes préhistoriques du Gers, avec dessins.
Médailles de bronze. — MM. J.-B. BERTIN, ancien maire de Salon (Bouches-du-Rhône), et V. AUDIER, directeur d'école libre à Salon : Adam de Crapponne et son canal; — M. J. SANCE, instituteur à Saint-Soulan, Lombez (Gers) : Notes d'archéologie sur sa région.
M. le baron DESAZARS est chargé de faire le rapport général qui sera lu dans la séance publique en décembre prochain.
Il est décidé que la Société ira en excursion à Cordes le jeudi 8 juin.
Séance du 6 juin. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Il est donné lecture d'une communication de M. DECAP, membre correspondant, sur les Frères de la doctrine chrétierne à Mazè\:
Mazè\: Histoire véritable de ce qui s'est passé à Tholose en la mort du Président Duranti, d'après deux relations contemporaines, Toulouse, Auguste d'Abadie, libraire, 1861.
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res, comté de Foix, au dix huitième siècle, d'après les délibérations des consuls aux archives communales.
M. DE PUYBUSQUE, membre correspondant, fait la communication suivante :
La justice à Toulouse il y a quatre cents ans.
D'après une charte de 1518 écrite sur un parchemin de 0m60 de large, comprenant dix-sept penna réunies par des épingles, formant une longueur totale de 12m30 c.
Archives du Château d'Auribail (Haute-Garonne).
La plus grande partie du document est en latin, avec des portions en français et d'autres d'un mélange de roman et de patois : « Fa Ion assa« ber en tota persona que vouldra compra la mytat del loc et plassa « Dorival, ont y a seignoria haulta, moyenne et bassa, am sas mayso, « terras, prats, vinhas etbost... (puis) blat, civada, polailha, etc. »
La charte débute ainsi :
« In nomine domini. Amen.Noverint universi et singuli, pariter pre« sentes et futuri, quod anno ab incarnationeDomini millesimo quingen« tesimo decimo octavo régnante illustrissimo principe domino nostro « domino Francisco, dei gracia Francorum Rege, etc. »
Cet assez long préambule nous apprend que Jean et Pierre de la Fite, frères, coseigneurs d'Aurival, sur la plainte des habitants du dit lieu, ont été appréhendés et incarcérés, par ordre du sénéchal de Toulouse, Antoine Rochechouart.
Le document continue ensuite en français :
« Nous, juge maige, lieutenant susdict, veus les procès et informa« tions faicts par auctorité de la court de céans contre toy Jehan de La « Fita, coseigneur du lieu Daurivail, prisonier détenu es carces de la « salle heufve, les accusations des testmoings et les confessions et là re« quisition faicte par le procureur ad requirendi de très Révérend père « en Dieu Monsgr l'arcevesque de Tholose de toy renvoyer comme clerc « audit arcevesque ou son officiais, les playdoiers faicts en cette nature « tant par le procureur du Roy que de la partie de Domenge de Cam« pêne, Guynete Maffre, Peyrone Reynes famine de Jehan Bornhet« sargent royal et autres nommez audict procès, et tout ce que neste a « veoir eue sur ce bonne et meure délibération de conseil.
« Pour ce que par les dits procès, informations tes confessions et pro« procédure faicts en ladicte matière, nous est apparu et appert que les
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« an et jour conprins et contenus es dictes informations tu as agueyt et « pancé, acompaigne de Pierre de la Fite, ton père, aussi prisonnier et « autres tes complices assailhi sur le chemin ledit Domenge de Canpène « et icelluy batu et frapé et énormément blessé en plusieurs et divers lieux « de sa personne jusques a mort exclusivement, et en continuant ton « mauvays propos et ta mauvaise vie, dpuis, aveoir assailhi de voye de « faict et avec propos délibéré noble Jehan de Lapalu de l'aaige de dix« huit ou vingt ans et conseigneur dudit bien, avec ton dit frère et « autres tes complices dedans la maison de Pierre Heretier, habitant « du dit Aurival et icelluy sans cause aveoir batu, frapé et griesvement « nafvré. Pareilhement, rompue de nuyt la porte de la maison dudit « Jehan Bornhet, par force et violance, avoir raye et cognene charnellc« ment ladicte Peyronne famme dudit Bornhet et par deux nuyts suy« vantes et pareilhement aveoir prinse par force et violance et de « nuyt Guynete Maffre, fille de et en la maison dudit son père
« et icelle avoir amenée estant en ta compaignie le dit Pierre ton frère et « autres tes complices à ta maison et en habit dissimulé et illecques « l'aveoir cognene charnellement et aussi autres fammes du dit lieu « d'Aurival, desquelles est faicte mention esdictes informations.
« Et neanmoyns aveoir prins et fait prandre de nuyt et de jour, au « corps, plusieurs habitants du dit lieu et iceulx mys en prison, aux « fers et aux ceps et detenuz prisonniers certains jours et les aveoir fait « ranconer blé, vin, argent et autres chouses, et que plusieurs foys as « blasphémé le nom de Dieu et es acoustumier de ce faire et autrement « delinqué, comme plus aplain est contenu es dictes informations proie ces et procédures contre toy faicts.
« Par nos sentence, appoinctement et advait avons dit et déclairé, « disons et déclairons que tu ne seras poinct remys comme clerc audit « officiai ne autre juge eccletsiastique mays sera procédé contre toy « comme luy et en procédant par mes dictes sentences appoinctement et « adroit et pour réparation des dits crismes et maléfices par toy commis « et perpétrés te avons condempné et condempnons a estre baillé et « délivré entre les mains de lexequteur de la haulte justicelequel te fera « faire le cours par la présente cité de Tholose et lieux acoustumez sur « ung tumbareau la corde au coul, la trompeté et cry publicque de « ladicte ville précèdent, lequel denonsera tes crismes et maleffices, et « après seras amené au pilloire et chapus de ladicte ville ou par ledit « exequteur de justice te sera tranchée et couppée la teste, et en après « tes aultres principaulx membres de ton corps coupés et séparés et sera « la teste apportée au dit lieu d'Arrivai et illecques en ung pal et auda« vant la maison dudit Bornhet affligée, affin que en soit perpétuelle
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« mémoire et ton corps et autres membres seront aportés et pendus à la » Salade.
a Et aussi avons confisqué et confisquons tous et chascuns tes biens, .« au Roy notre sire desquels avons reserve et reservons la tierce partie « pour prier Dieu pour ton ame et des trespassés, desquels biens preala« blement seront prinses les sommes qui s'ensuyvent, c'est assavoir deux « cens livres tournoises lesquelles seront baillées, payées et délivrées « audit Romenge Canpene ; et autres deux cens livres à la dicte Peyrone « Reynes, et autres deux cens livres à la dicte Gaynete Mafifre, lesquel« les sommes pour satisfaction desdites forées, injures et violences leur « et a chascuns deulx, avons adjugé et adjugeons sus lesdits biens con? « fisqués. Et cinquante livres que nous avons adjugé et adjugeons estre « baillées à maistre Jehan de Luco, prestre, pour les domasges et iiite« restetdespenzpar luy soufferlsoultre la somme queluy a esté autrefoys » et par sentence de ladite court adjugée. Et avons aussi desdits biens « satisfaits les autres habitans dudit Aurival que ont esté par toy ranso« nés et intéressés, et payes diceulx biens tous frays et exploicts de jus« tice. Dit et prononcé en la sale neufve le treiziesme jour de aoust mil « cinq cent dix-huit.
« J. CHANANHACY, P. DENOGUERY ».
Suit la répétition des mêmes accusations et condamnations contre Pierre de la Fite, comme complice de son frère, avec cette particularité qu'il contenait Domenge de Canpene pendant que Jean de la Fite le frappait de son épée, et que sa tête sera plantée sur un pal « devant la maison et habitation dudit ton frère ».
D'où il appert que les abus de force et d'autorité des anciens seigneurs, infiniment moins fréquents qu'il n'est de mode de l'affirmer, loin d'être un de ces fameux droits leur appartenant, étaient, au contraire, considérés comme des incartades, sinon des crimes, et ainsi qu'on peut le voir, assez vertement réprimés.
Suivant le reste de la charte, la cour, réservant les droits des parents, au nombre desquels Galliane de Pardeilhan, mère des condamnés, leur soeur, dame de Ver, leur frère, François de la Fite, seigneur de Bartha, sindic du collège « de sancti Frontonis alias Petragoricense Tholose », une fille naturelle de Jean de la Fite et divers créanciers de. la succession des deux frères, ordonne la vente aux enchères de la moitié de leurs biens sur la mise à prix de 2,500 livres tournois.
; Divers encans successifs, dont trois à Auterive, trois à Saint-SulpiceLezadois, trois à Miremont et cinq à Toulouse, portent le prix des biens à 3,900 livres.
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Enfin, la vente poursuivie en dernier ressort,devant Jean deMontfort, trésorier royal à Toulouse, les biens en question sont adjugés pour 4,100 livres à noble Jean de Montpezat, écuyer, sénéchal « Basatensis », qui désintéressa toutes les parties.
Un fait curieux : il y a deux ou trois ans, des ouvriers qui exécutèrent une réparation aux vieux murs intérieurs de l'ancienne chapelle du château d'Arribail, servant actuellement d'église, ont mis à jour, à même le mur, une cavité renfermant deux crânes humains. - Ne serait-ce pas ceux des suppliciés qu'on ne pouvait jeter à la voirie et qu'on aurait déposé là, après leur exposition sur un pal, comme il avait été prescrit par le jugement de leur condamnation?
Dans lecourant desdocuments il est prescrit que GresseBaroh, habitant d'Aùribail, soit indemnisé : « pro una balista cum suis poligos et una la.ncea, ab eodem, per dictum Petsum de Fita rapta ».
Séance du 13 juin. Présidence de M. DE LAHONDÈS.
Lecture est donnée d'une lettre de la Société Française des Fouilles archéologiques invitant à l'inauguration de son Exposition qui aura lieu au Petit-Palais le 17 juin ; M. CARTAILHAC, actuellement à Paris, y représentera la Société.
M. FOURGOUS fait hommage d'une très belle photographie d'une porte de l'hôtel d'Assézat.
On remarque dans la correspondance imprimée un envoi du Ethnological Survey, au Département de l'Intérieur des Etats-Unis d'Amérique. C'est le fascicule 1 du volume II imprimé à Manille, et il s'agit d'un de ces groupes de pygmées qu'on rencontre çà et là au sud-est de l'Asie et en Malaisie, des Négritos de Sambales. Cet ouvrage superbe est la preuve de l'activité merveilleuse et digne d'eux qu'ont su mettre les Etats-Unis à organiser leurs nouvelles colonies, les Philippines.
Excursion de la Société à Cordes.
M. LE PRÉSIDENT entretient ses collègues de l'excursion à Cordes,-le jeudi précédent, journée qui s'est accomplie à la satisfaction de tous par un temps radieux qui a permis d'abord d'admirer les riches plaines
La porte de la Jane, à Cordes, Tarn. (Figure extraite de l'Histoire de Cordes, par M. Portai.)
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du Tarn et le panorama du cirque de collines aux longs sommets presque rectilignes, au centre duquel se dresse la pyramide portant les maisons étagées de la bastide de Raymond VI, couronnée par l'aigrette ' du clocher paroissial.
Quelques-uns des excursionnistes, quelques-unes surtout de nos aimables compagnes, voyaient Cordes pour la première fois ; les autres ont retrouvé avec joie leurs souvenirs, particulièrement celui de la promenade du 19 mai 1881, et comme ils ont disposé de plus de temps, ils ont pu examiner plus à loisir les détails de diverses constructions et particulièrement les dispositions intérieures de la maison Séguier, conservées presque intégralement depuis le moyen âge avec quelques-uns même de ses ustensiles, le saloir entr'autres, creusé dans le vaste tronc d'un chêne, dont on retrouverait difficilement les pareils aujourd'hui.
La petite ville, où les directions de rues, les murailles et les demeures n'ont guère changé depuis le treizième siècle, a été si souvent décrite et étudiée, elle l'est si bien surtout dans le récent volume de M. Portai, que peu d'observations nouvelles peuvent être présentées.
Toutefois, à l'église d'abord, deux dispositions spéciales ont été signalées. Le chevet, construit de 1263 à 1269, avec les deux chapelles formant transept, est carré. Cette forme, assez rare, s'explique ici par la nécessité de ménager l'espace d'ailleurs sur le sommet de la pyramide, dans une ville cerclée de murailles, et aussi par le tracé en ligne droite des rues d'une bastide créée de toutes pièces. Puis la nef, reconstruite au quinzième siècle, caractérisée par les nervures des voûtes pénétrant directement dans le fût des piles, nef unique avec chapelles établies entre les contreforts, présente un aspect d'élancement et d'espace dû à la hauteur des voûtes des chapelles s'élevant au niveau de la grande voûte. Cette disposition, imitée de la cathédrale d'Albi, se retrouve à la cathédrale de Perpignan et aussi à l'église de Grenade, autre bastide du pays Toulousain. Pour qu'elle soit possible, il est nécessaire que les contreforts s'élèvent jusqu'au faîte de l'église avee la même saillie hors des murs. '
Les murailles des trois enceintes ont été examinées en détail et photographiées avec parfaite réussite, particulièrement par M. Depeyre. De même les portes, portes ouvertes entre deux tours comme celle des Ormeaux, du Roux et de la Jane, ou dans une tour carrée comme celle du Planol. La porte de la Jane a attiré surtout l'attention, puisque la Société archéologique l'a sauvée par son initiative de la destruction qui la menaçait. Grâce à sa subvention, à celle de la Société française d'archéologie, à celle du Touring-Club devenu une puissante institution prolectrice des sites et des monuments, grâce surtout au don du Minis-
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tère des Beaux-Arts, la tour de l'ouest a été achetée, et de même les murs de la tour de l'est dont le propriétaire s'est réservé la jouissance intérieure, sans qu'il ait le droit de rien modifier. La Société a transmis ses droits de propriété à la Société des Amis du Vieux Cordes qui s'est formée aussitôt et qui est mieux en état de diriger et de surveiller les travaux de consolidation.
Ces travaux ont été déjà entrepris. L'arceau de la porte a été rejointe afin de prévenir la dislocation des claveaux. La brétêche de la fin du dix-septième siècle, démolie il y a peu d'années, mais dont les quatre consoles formant mâchicoulis avaient été conservées, a été rétablie dans les mêmes formes et les mêmes dimensions. Il a paru toutefois que la nouvelle construction ne reproduisait pas la rusticité robuste de l'ancienne avec ses assises en briques trop régulières et aux joints trop minces en mortier noirci par la poussière de charbon qui donnent à l'ensemble l'aspect de l'ardoise. Le temps se chargera de rétablir l'harmonie. Une logette pour animaux qui s'était glissée dans l'angle entre la tour et la muraille sera démolie.
Il est à désirer qu'une direction archéologique autorisée et active préside aux travaux de consolidation.
Les membres de la Société archéologique ont été aimablement reçus à la mairie par M. le Maire de Cordes, président de la Société des Amis du Vieux Cordes, qui leur a montré le précieux Libre ferrât et aussi l'état lamentable des étages supérieurs de la maison de ville, l'une des plus belles demeures du quatorzième siècle encore conservées. Elle a été classée au nombre des monuments historiques. Quelques restaurations furent entreprises, il y a une vingtaine d'années, entr'autres la réfection de quelques meneaux des fenêtres ; mais, depuis dix-huit ans, il n'y a plus été touché. La belle porte en bois de l'époque Louis XIII demeure remisée dans le vestibule; les arcades des anciennes boutiques sont toujours bouchées par des torchis; le délabrement des salles hautes est navrant, car la dignité de monument historique enlève à la municipalité le droit même de fermer les gouttières sans l'avis de la Commission.
La Société appelle l'attention de la Commission sur l'oubli dans lequel elle abandonne cette belle et rare construction et lui demande de reprendre les travaux interrompus depuis trop longtemps.
Les autres maisons des trois derniers siècles du moyen âge, dans lesquelles on retrouve toujours la grande salle du premier étage, ont été visitées ensuite. Les noms pompeux qui leur ont été donnés pouvent induire en erreur sur leur origine. Les comtes de Toulouse, et par suite leur grand veneur et leur grand écuyer, s'ils en eurent jamais à Cordes, avaient disparu lorsqu'elles furent construites. Sont-elles toutefois de simples
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maisons de marchands? Cette origine n'étonnerait certes pas les Toulousains, habitués à voir leurs plus beaux hôtels de la Renaissance construits par des marchands, tels que les Bernuy et les Assézat. Mais le commerce fut-il déjà assez prospère dès les premières années de la bastide pour permettre d'élever d'aussi belles demeures? N'est-il pas probable que les principales familles de la contrée se hâtèrent, à cette époque troublée encore parla guerre albigeoise, malgré le traité de Paris, de venir se mettre à l'abri derrière les murailles de la petite forteresse pour s'y trouver plus en sûreté qu'en rase campagne?
De nombreux et charmants détails de sculpture mériteraient d'être publiés en belles photographies, les figurines de la maison Séguier, par exemple, d'une exécution fine et hardie, de même que celle des chapiteaux et des bases de colonnettes accostant les fenêtres. Quelle ingéniosité et quelle fécondité artistique conservait encore la province malgré l'effroyable épreuve de la Croisade, et avec quel sentiment de regret on pense aux destructions innombrables qu'ont amenées dans les villes languedociennes l'élargissement et la rectification des rues! Il n'y a plus à Toulouse qu'une seule maison du moyen âge, et la dernière, à Carcassonne, n'a pu être préservée par sa rare et riche élégance. Elle vient d'être détruite sans qu'on ait tenté même le rétablissement de la façade, qu'il eût été facile cependant de dresser contre un des murs nus de la ville basse ou de la Cité, ou sur une promenade. Il n'en reste qu'une gravure, dans notre Bulletin. Quelles constructions d'art exquis élève-t-on aujourd'hui dans des petites villes comme Cordes ou Saint-Antonin?
Quant aux anneaux fixés aux côtés des fenêtres et qui ont fait surgir tant d'hypothèses singulières, leur raison d'être est cependant bien claire et elle donne une fois de plus l'occasion de remarquer l'instinctif tourment de l'esprit qui, presque en toutes choses, fuit l'explication la plus simple et qui semblerait devoir se présenter tout d'abord pour en chercher d'extraordinaires. Ces anneaux, en effet, supportaient des traverses de bois auxquelles étaient appendues des bannes d'étoffe préservant l'intérieur du logis des rayons du soleil et des regards indiscrets, tandis que les parties supérieures des fenêtres, celles que garnissent les meneaux, demeurées libres, laissaient entrer la lumière. Des étais de bois obliques appuyés sur les corniches, au-dessous des fenêtres, pouvaient d'ailleurs relever les bannes à demi en permettant d'éclairer davantage les salles et aussi aux habitants de regarder, sans être vus, ce qui se passai! dans la rue. Ces anneaux se retrouvent d'ailleurs dans les quelques maisons du moyen âge encore debout dans la province, à Saint-Antonin par exemple. On sait combien leur usage se maintient en Espagne.
Il ne faut pas toutefois chercher en eux la moindre liaison entre Cor-
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des et la ville presque homonyme de l'Andalousie. Le nom de Cordes vient-il vraiment d'ailleurs de Cordoue? C'est possible, car il plaisait alors volontiers aux fondateurs de bastides de leur donner un nom exotique, soit par quelque souvenir personnel, soit par une fantaisie décorative. Presque en même temps que Cordes, deux autres bastides s'élevèrent dans la province albigeoise, appelées Valence et Pampelonne, et auprès de Toulouse apparut celle de Grenade.
La belle journée consacrée à l'émotion des souvenirs et aux charmes de l'art se termina avec l'expression du désir de revenir bientôt dans la même région pour voir le donjon de la commanderie de Vaour, dominant encore, mais pour combien de temps? le plateau au pied duquel s'étend la forêt de la Grésigne.
M. l'abbé BAICHÈRE, membre correspondant, communique un Contrat pour oeuvre d'art passé devant maître Arnaud Bernard, notaire de Rieux-Minervois, le 24 août 1687, entre les consuls de Rieux-Minervois, les marguilliers [de la chapelle dite du Bout-duPont, consacrée à Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, et Pierre Viguier, doreur à Carcassonne, chargé par eux de redorer le rétable de la Chapelle, moyennant la somme de cent cinq livres; le travail devait être livré dans deux mois.
Le rétable figure le mystère des Sept-Douleurs. Deux anges présentent à la Vierge une couronne d'épines au centre de laquelle est inscrit le nom de Jesu. Le l ère éternel domine la scène, revêtu d'une robe d'or et d'un manteau couvert de rubis. Des anges en nombre entourent, les uns le Père éternel, avec leurs grandes ailes aux plumes d'argent, les autres plus petits, peints au naturel, se détachant sur un fond bleu d'émail, d'autres enfin ne montrent que leurs têtes entourées d'ailes d'or ou d'argent.
La tradition attribue la fondation de la chapelle au voeu d'un membre de la famille de Noailles assailli par une tempête. Elle est mentionnée pour la première fois dans l'acte d'un mariage qui y fut célébré le 25 octobre 1621. Elle fut agrandie vers 1727, à la suite d'un voeu des consuls et habitants délivrés d'une maladie contagieuse qui les avait décimés, voeu exprimé dans une délibération consulaire du 1er avril 1714. Tous les ans, le mardi de Pâques, une procession à laquelle se joignaient les pèlerins du Minervois quittait l'église paroissiale à neuf heures du matin, se rendait à la chapelle de NotreDame-des-Sept-Douleurs, située dans le quartier, sur la rive gauche BULL. 35, 1905. 23
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de l'Argent double, où la messe solennelle était célébrée, et rentrait à l'église paroissiale pour y recevoir la bénédiction.
L'église paroissiale, édifice circulaire, ou plutôt à sept pans presque insensibles, avec bas côtés, aujourd'hui monument historique, est une construction exceptionnelle et qui serait unique en France, si l'on ne voyait encore dans la Nièvre l'église analogue de NeuvySaint-Sépulchre.
Séance du 20 juin.
Présidence de M. MÉRIMÉE, directeur.
M le Secrétaire dépose sur le bureau, au nom de M. CARTAILHAC, l'Itinéraire par la voie ferrée de Toulouse à Albi et de Tessonnières à Lexos, par M. Louis de Combettes-Labourelie; ce volume, déjà ancien, est devenu d'actualité pour la Société depuis son dernier voyage dans la région.
La correspondance imprimée comprend également la 2e édition de l'Histoire de l'arrondissement de Gaillac (Tarn) pendant la Révolution de 1789 à 1800, don de l'auteur M. Elie ROSSIGNOL, membre honoraire de notre Société, et d'autant plus précieux que l'ouvrage n'a été tiré qu'à cent exemplaires.
Le tome premier, viu-646 p. in-12, Gaillac 1902, est consacré à la partie politique.
Le tome deuxième, 528 p. in-12, Gaillac 1905, à la partie administrative.
L'auteur, en 1859, soumettait à l'Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse son Histoire de l'abbaye de CandeiL De 1864 à 1886, il publiait les Monographies des communes de l'arrondissement de Gaillac et une Étude sur les Institutions seigneuriales et municipales. De 1875 à 1881, il écrivait l'histoire des assemblées des anciens diocèses d'Albi, de Castres, de Lavaur. M. Rossignol, après avoir passé tant d'années à écrire l'histoire des institutions dout il est question dans ces travaux et qui furent emportés en 1789, a tenu à raconter avec quelques développements les événements qui se rapportent à leur fin. Il a voulu donner ensuite l'histoire de celles qui les remplacèrent. Il l'a fait de telle manière que son ouvrage est un modèle d'érudition, de patient labeur et avant tout d'indépendance et de justice.
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MM. Em. DELORME et MASSIP, membres résidants, font la communication suivante :
Les Emblèmes de l'Inquisition d'Espagne.
I.
M. le commandant Robert Mowat a publié récemment, dans les Mémoires de la Société nationale des Antiquaires de France, une étude intitulée : Le plus ancien carré de mots, gravé sur le revers d'un jeton de compte à l'usage de la Trésorerie autrichienne, sous le millésime de 1572.
Ce diagramme forme cinq rangées de cases sur cinq, chacune renfermant une lettre. En les rapprochant, on obtient cinq mots dont la réunion forme dans le sens horizontal cette phrase : Salor arepo lenet opéra rotas, qui se trouve reproduite identiquement dans le sens vertical.
Notre collègue M. Massip, bibliothécaire de la ville de Toulouse, a fait connaître ce carré, en 1892, dans une étude d'ensemble sur les carrés magiques.
Or, M. le commandant Mowat a reçu depuis communication d'une petite médaille d'argent, de forme ovale, à bélière, conservée dans les collections du Musée ethnologique portugais, à Lisbonne, au revers de laquelle on remarque le même carré. C'est jusqu'à présent, si nous sommes bien informés, le seul exemplaire qui ait été retrouvé.
Le droit représente une croix longue, mouvant d'un tertre, accompapagnéé à dextre d'un rameau d'olivier et à senestre d'une épée nue posée en pal.
Le correspondant de M. Mowat, M. José Leite de Vasconcellos, professeur à la Bibliothèque nationale de Lisbonne, croit reconnaître dans cet emblème les attributs de l'Inquisition en Espagne.
Rien n'est venu confirmer cette hypothèse. Les érudits consultés se sont récusés, et nous avons été prié de rechercher des éclaircissements dans les collections méridionales où peuvent subsister encore des vestiges de l'Inquisition.
Nous avons publié ici même, en 1896, un document daté du 11 avril 1768 où cet emblème figure à côté de la signature de l'Inquisiteur général, Don Manuel Qintano Boniface, et au centre ou sur le tout des armoiries de ce prélat.
Cet écusson n'a rien de commun avec les armoiries personnelles du personnage, je veux dire qu'il est étranger au nobiliaire de sa famille et d'ailleurs de tout autre.
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On peut dés lors le rattacher à une institution, à une fonction, et sa place sur un bre/et officiel délivré par le Grand Inquisiteur de Madrid ne laisse plus de doute sur le caractère de ces attributs.
Il nous a paru intéressant, toutefois, de rechercher une preuve plus
certaine. Nous l'avons trouvée à la Bibliothèque de la ville, dans l'histoire de l'Inquisition, publiée à Amsterdam en 1692 par Philippe de Limborch. L'auteur, quoique Hollandais et n'ayant jamais visité les Espagnes, n'en est pas moins un témoin bien informé et digne de foi. Dans ses entretiens avec Isaac Orobio, juif de Séville, qui était sorti des prisons du Saint-Office et s'était réfugié à Amsterdam où il exerçait la médecine; dans la lecture des sentences de l'Inquisition de Toulouse, qu'il ajouta à la réimpression de son livre l'année suivante, il avait beaucoup appris sur le régime de cette institution. Voici ce qu'il rapporte, en un latin un peu diffus, de la bannière qui distinguait cette puissante juridiction.
« La croix, dit-il, est l'étendard de l'Inquisition, image de ce tribunal suprême où Jésus-Christ viendra juger les hommes, après la consommation des temps, précédé de ce signe glorieux; image aussi de la victoire que les inquisiteurs, champions de la foi et soutiens de la vérité chrétienne, doivent remporter contre l'hérésie.
« Posée sur champ de sable, elle est de sinople. Cette couleur la distingue des autres croix dont il est fait usage dans la République chrétienne, mais elle emprunte surtout son intérêt au sens mystique qu'on lui attribue. Elle est le symbole de la stabilité, de l'éternité, telle la foi, la vérité éternelle, dont les inquisiteurs sont les gardiens.
Fia. 1. — Les emblèmes de l'Inquisition d'Espagne.
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« C'est une couleur agréable à voir, douce et attirante, ce qui signifie que loin de porter les hérétiques à fuir le jugement qu'ils ont encouru, cet aspect doit les rassurer et les attirer en quelque sorte vers le sein maternel de l'Eglise par la pénitence dans la sincérité de la foi. Enfin, elle est l'emblème de la victoire, le signe du triomphe.
« Le rameau d'olivier à dextre et le glaive nu à senestre montrent que, dans les sentences de l'Inquisition, la miséricorde est la compagne de la justice, de même qu'on voit les verges à côté de la manne sur la table du tabernacle; ainsi la verge d'Aaron à la verdoyante frondaison servait à châtier les criminels.
« Le rameau d'olivier évoque les conseils de la clémence qu'il faut écouter d'abord et suivre avec longanimité; elle est pareille à l'olivier qui résiste aux ouragans, moins fragile que les autres arbres, et que les eaux elles-mêmes peuvent submerger sans décolorer sa verdure et sans corrompre son essence.
« Mais tous les efforts de la miséricorde ayant été épuisés sans effet, les inquisiteurs, quoique à regret, s'armeront alors du glaive que Dieu leur donna pour l'exécution de sa justice.
« Le champ noir de l'écu, dont la croix verte adoucit la tristesse, symbolise la pénitence et le regret tempérés par l'espérance du pardon.
« Autour de la bannière, de l'écu et peut-être aussi sur des médailles, car ce symbole parait avoir pris ces différentes formes, on lit ce passage du Psaume 73 : « Exurge Domine et judica causam tuam, » ce qui signifie que les inquisiteurs, en attendant la venue du Seigneur, punissent, quand il le faut, les méchants, pour tenir en respect les indifférents et protéger les bons. »
Telles sont, un peu abrégées, les interprétations que nous donne Limborch, d'accord avec Louis Paramo, qui écrivit, vers la même époque, un ouvrage sur les origines et les progrès de l'Inquisition.
La seconde partie du problème paraît beaucoup plus difficile à résoudre. Nous avons prié M. Massip de nous y aider et voici l'opinion qu'il a cru pouvoir nous donner comme étant la plus probable ou tout au moins la plus conforme à la doctrine ésotérique.
IL
Le Carré du Semeur est un carré magique. A ce titre, il est basé sur une combinaison des nombres ; cette combinaison est représentée par des signes phonétiques à valeur numérale équivalente. Dans ces conditions il a une signification.
C'est un carré magique altéré. A ce titre, la combinaison qui lui sert,
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de base est partiellement irrégulière, les valeurs phonétiques qui la représentent ne concordent que partiellement avec les nombres correspondants. Dans ces conditions, la signification est incomplète. Voilà pourquoi ce carré est grammaticalement intraduisible.
Qui dit altéré suppose un état meilleur. Cet état supérieur se trouve, selon toute probabilité, dans la forme hébraïque du carré, sa forme primitive. Il a disparu en passant dans la forme latine où la concordance des valeurs numérales et phonétiques a fait défaut.
Nous avons dit que ces carrés, quej'appellerai phonétiques numéraux pour les distinguer des carrés simplement arithmétiques, expriment une idée philosophique. Cette idée, signe de ralliement entre les adeptes d'une même doctrine de différente origine, tendait à la même expression à travers les différentes langues. Ce besoin d'unité est la raison d'être de notre traduction. Il explique en même temps le phénomène de la dislocation.
La question du sens caché sous les carrés magiques à forme ésotérique ouvrirait ici une inutile discussion. Nier l'existence d'une signification sous ces formes n'est pas plus raisonnable que de l'affirmer à tous propos. En général, on ne parle pas pour ne rien dire : il est impossible de le nier dans nombre de cas. Autre chose est la question de l'interprétation.
Celle-ci est fort délicate dans l'état actuel de nos connaissances par rapport à cette littérature très spéciale. Divers procédés ont été employés ; ce n'est pas le lieu d'en faire l'éloge ou la critique. Les hébraïsants en recommandent un auquel nous n'hésitons pas à donner la préférence. Il consiste à orienter la recherche dans la direction des formules de la kabbale juive. Son emploi semble tout indiqué dans l'étude d'un carré qui ne parait pas avoir une autre origine, et voici le résultat qu'il nous donne.
Le laboureur, la charrue, la terre, la moisson : une action unique se propageant du monde supérieur dans le monde inférieur pour produire la vie. Etendez l'image à l'universalité des êtres et vous aurez le mécanisme philosophique de la vie universelle. Si nous voulons la traduire en formule, sortant du monde concret, nous dirons : « Tout est dans l'Un en puissance, l'Un est dans tout en acte », et nous signerons Aba Ezra, un des ancêtres en ligne directe de Spinoza. Nous affirmons quelque chose de semblable aujourd'hui, dans un autre ordre d'idées, quand nous disons : l'Energie est une, le monde est énergie. La formule secrète du Salor serait donc le panthéisme. Que vient-elle faire sur les bannières du Saint-Office ? C'est le problème.
En la voyant à cette place, on incline à penser qu'elle a une autre
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essence, comme elle en a évidemment une autre sur les amulettes chrétiennes où nous la voyons, sur la prétendue lettre de Jésus à l'abgar d'Edesse, sur une bible carolingienne, ou même sur le jeton des comptes de la Trésorerie autrichienne, sans doute, mais c'est ce qu'il faut démontrer.
De la Kabbale, où elle prend sa source, gnose juive comme le dit Renan, la formule est descendue vers la gnose nouvelle. Elle est entrée alors dans l'ère de sa déformation, déformation plus apparente que réelle, car si nous avions le temps de la suivre dans les divers milieux où elle fut accueillie, nous verrions qu'elle ne cesse pas d'incliner vers la matière et qu'elle arrive, en se mêlant aux poétiques fictions du paganisme, à se prêter aux plus licencieuses interprétations.
On la trouve aussi sur « Le Grand Albert ». C'était un talisman pour faire danser les filles. La formule devait être tracée sur parchemin et non sur cuivre. D'ailleurs, elle n'avait pas de sens.
D'autre part, elle passe dans la gnose chrétienne, mais, là, elle s'épure en se transformant. Le Sator n'est plus que le Sator et Redemplor dont parle l'Ecclésiaste. Elle ne se déplaît pas au voisinage des noms des martyrs, comme dans la lettre de Jésus, ou de la Révélation divine comme dans la Bible carolingienne, quoique ici elle peut être suspecte. La gnose allumait son flambeau à tous les sanctuaires et, à moins d'avoir vérifié la sincérité du texte, on ne peut affirmer la sincérité de sa conversion. Il suivrait de là qu'elle a changé de doctrine en se joignant aux attributs de l'Inquisition. C'est ce que nous examinerons tout à l'heure quand nous l'aurons suivie un instant dans le monde profane, puisque le jeton de compte de la Trésorerie autrichienne nous y invite.
Si le carré n'est pas ici le signe distinctif d'une association, il ne peut être qu'une allusion plus ou moins ingénieuse aux procédés de la fabrication ou simplement aux avantages du travail. « Absque labore gravi non venit ulla seges. » Ce serait pure subtilité d'y chercher une idée métaphysique. Les pénétrations du Semeur dans le monde profane ne sont pas rares. 11 y prend l'intérêt de l'allégorie qu'il exprime, et c'est tout.
En résumé, le carré est panthéiste à son origine; il affirme cette doctrine et la développe sous diverses formes dans le gnosticisme; il est souvent suspect dans le christianisme; il est insignifiant ailleurs; qu'est-il associé à l'Inquisition ?
Les vexilla, les sigilla sont des insignes officiels d'une institution; les devises qui les accompagnent sont l'expression de leurs aspirations ou de leur but. Il faut que ces insignes soient caractéristiques, nettement
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distinctifs. Le Saint-Ofiîce tient particulièrement à bien déterminer son signalement: son écu est de sable, sa croix est de sinople. Le souci des règles héraldiques ne le préoccupe point; l'essentiel est qu'il ne soit confondu avec personne, supérieur à tous. Cependant, voici un cas où il adopte une forme équivoque, commune à tous les porteurs de phylactères, gens qu'il surveille; une devise à forme païenne où la souillure est au fond, ineffaçable alors qu'il n'a qu'à puiser dans le trésor ouvert de la sainte Ecriture pour y trouver le texte qui caractérisera son oeuvre et son autorité. C'est tout bonnement inadmissible et cependant le document existe.
L'hypothèse est réduite à chercher le vrai dans l'invraisemblable. Il n'y a pas ici d'alliance, il y a une opposition. Ceci tuera cela. Quelque étrange que paraisse cette supposition, elle n'est pas sans fondement. Le Sator est le Credo de l'hérôsiej: il est opposé sur une des faces du vexillum au Credo de la foi, comme le glaive est opposé au laurier sous les bras étendus du Rédempteur crucifié.
Il parait difficile d'admettre qu'une hérésie aussi protéiforme que le gnosticisme ait eu un Credo, mais il y a un fait qu'on ne peut nier, c'est qu'on a pu représenter les gnostiques, justement à cause de leur variabilité et de leur diversité, comme les types de l'hérésie en général. La persistance de leurs erreurs et leur popularité ont maintenu pendant longtemps cette opinion, et quand on feuillette le Guide officiel des inquisiteurs, on ne s'étonne plus, cela posé, de voir la place énorme que les gnostiques de toute robe occupent dans ce répertoire de là criminalité théologique. Dans de telles conditions, est-il étonnant, puisqu'on incarnait l'hérésie dans une catégorie, qu'on l'ait synthétisée dans une formule et qu'on ait affiché celle-ci à la porte du tribunal chargé de la réprimer ?
Limbrock raconte, en décrivant la procession des acta fidei, c'est-àdire des exécutions, que l'on tournait vers le groupe des repentis la face de la bannière où se trouvaient figurés les attributs que nous connaissons. C'était pour eux le signe de la miséricorde. La vue de ce signe était refusée aux relaps et aux condamnés. L'auteur ne dit pas ce qu'on voyait sur la face de la bannière qui précédait cette lamentable théorie. 11 n'y avait de ce côté, dit-il, que désespérance et réprobation. Y avait-il le Semeur panthéiste, négateur de Dieu, blasphémateur du Christ? Il figurait sur le sigillum ; nous en avons la preuve. Le sigillum et la bannière n'ont-ils pas le même objet?
Certains faits à côté ont la valeur des meilleurs arguments. Sur le sanbenilo constellé de flammes ascendantes qui désignait le condamné à tous les yeux, je vois un symbole non moins éloquent que le Semeur.
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Comme lui, il caractérise le panthéisme. C'est le soleil qui rayonne sur la partie inférieure de la dalmatique, et comme si l'allégorie n'était pas assez claire, il développe ses feux sur les parties génitales du condamné ; c'est de ce foyer que s'élèvent les faisceaux de flammes, c'est de cette formule en image qu'est sortie la damnation. Le soleil du sanbenito appelle une concordance, celle du Semeur sur la bannière. Je le conçois mieux ainsi que dévot et menteur à l'ombre de la croix.
Tout ceci peut paraître un système. Dans tous les cas, c'est hypothétique encore. On aura toujours mis un pied dans la question, en attendant des documents d'un caractère plus précis. Il est certain, si rien ne vient contredire ce qui précède, que le carré Sator a occupé une place importante et jusqu'à présent peu connue dans l'évolution du gnosticisme.
Le sort étrange de ce carré nous fait penser aux bouquins qui meublaient la bibliothèque de Don Quichotte et que le licencié Lope Perez, dans son désir de ménager la santé du Chevalier de la Manche, prit le parti de jeter en bloc par la fenêtre, les livrant au bras séculier de la gouvernante. Fatigué, il finit par les voir tous du même oeil ; tous romans de chevalerie. Chevalerie, condamnation. Ainsi du Saior, amulette souvent incomprise sans doute. Sator, gnosticisme, éternelle damnation. Serait-ce vrai? Pour moi, déclare M. Massip, j'ai fait ce que j'ai pu, et, comme dit Sancho, je ne prends la responsabilité de rien. Nihil scitur.
Séance du 27 juin. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. DE BOURDES, membre résidant, fait une lecture sur la généalogie de Dom Vaissete.
Généalogie de Dom Vaissete.
(Accompagnée d'un tableau hors texte.)
Cette notice a pour objet de compléter la généalogie de Dom Vaissete qui a été publiée dans le tome I de l'Histoire générale de Languedoc, nouvelle édition, page 100 des pièces justificatives; mais seulement en ce qui concerne la ligne ascendante du père du savant Bénédictin.
D'abord, il nous a été possible de faire remonter cette généalogie à trois générations plus éloignées, c'est-à-dire jusqu'à l'auteur des deux branches de la famille ; ensuite, nos recherches dans les anciens régis-
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très des paroisses et des notaires de Lisle-d'Albi et de Gaillac nous autorisent à combler les nombreuses lacunes que contient cette généalogie, et même do rectifier quelques erreurs que nous avons été amené à y découvrir. Cette généalogie qui se trouve reproduite dans l'Histoiregé* nérale de Languedoc est dite dressée par Dom Vaissete lui même; à ce titre, elle doit inspirer une grande confiance; cependant, les erreurs dont nous parlerons sont incontestables, et nous n'hésitons pas aies relever, en citant les sources authentiques auxquelles nous avons puisé. 11 faut croire que Dom Vaissete, au moins pour la période la plus reculée, s'en est remis à des intermédiaires qui ont commis les erreurs ou les lacunes dont il s'agit.
Originaire des environs de Gaillac, où elle est honorablement connue depuis plus de quatre siècles, la famille de Vaissete doit sa noblesse aux charges de robe occupées par plusieurs de ses membres. Elle s'est divisée, dès le commencement du seizième siècle, en deux branches principales, dont l'une, la branche aînée, s'est perpétuée jusqu'à nos jours, au lieu même où elle se trouvait déjà en 1500, et l'autre, la branche cadette, s'est éteinte en 1756 en la personne de Dom Vaissete.
Les armes de la famille de Vaissete sont : « de gueules à un laurier d'argent adextré de trois larmes du même, posées 2 et 1, au chef d'azur chargé d'un soleil d'or. » Elles sont dessinées au deuxième tableau généalogique qui accompagne cette notice.
Au point de vue généalogie :
Jean Vaissete, 1er du nom, qualifié bourgeois de Castelbeurs, près de Gaillac, vivait en 1490. Il laissa :
1° Gaspard, qui forma la branche aînée, représentée encore aujourd'hui à Castelbeurs par M. Aimé de Vaissete;
2" Jean, 2n»e du nom, auteur de la branche cadette, qui s'est éteinte avec le Bénédictin, et qui est la seule dont nous allons parler.
Jean Vaissete qui précède était notaire à Brens, village situé à un kilomètre de Gaillac, encore en 1519; il mourut en 1526, laissant un fils, Guillaume, qui vint habiter Lisle-d'Albi.
Ce Guillaume épousa à Lisle, vers 1520, Jeanne Duranti, fille de Jean Duranti, notaire à Lisle de 1515 à 1535 environ, et de Hélips Flotes; il est dit hoste à Lisle, en 1552, et aussi en 1557 (Fr. Chéreau, nolre, fo» 178 et 261); le 7 janvier 1553, il fait une vente à sa bellemère (R. Périer, notre, fo 68); il dut mourir vers 15G2, car son fils Barthélémy est dit, le 17 février 1503, praticien, et fils de feu Guillaume, dans un acte intéressant la succession de ce dernier (même not«>, f" 333); il laissa .trois enfants : Barthélémy, Guillaume et Marguerite; Antoinette Duranti, leur tante, les cite dans son testament du 9 août 1568 (Olivier,
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not", fo 28), en leur faisant des legs, et désignant comme héritière universelle sa soeur Jeanne Duranti, veuve de Me Guillaume Vaissete; Marguerite fut mariée, en premières noces, à Alexandre Metge et, en deuxièmes noces, à Dominique Lafage, dont elle est dite veuve à son décès à Lisle, le 17 octobre 1622.
Barthélémy épousa à Lisle, vers 1560, Catherine de Clédier, fille de Jean et de noble Cécile de Pradines, qui testent tous les deux, le premier en juillet, la seconde en août 1563 (Fr. Ghéreau, notre, f 08 170 et 174); la famille de Clédier était déjà nombreuse à Lisle-d'Albi; elle y a occupé pendant près de trois cents ans un rang des plus distingués. Barthélémy fut notaire à Lisle, de 1571 à 1692, et mourut entre le 8 novembre 1595, date à laquelle il est dit consul et avocat au siège de Lisle, et le 25 mai 1596, date à laquelle son frère Guillaume est dit son héritier particulier (Jean Chéreau, f» 531); il ne laissa qu'une fille, Madeleine, qui mourut à Lisle le 17 octobre 1617, veuve de François Pages.
Guillaume, frère de Barthélémy, est celui avec lequel commence la généalogie rapportée dans l'Histoire de Languedoc. Il ne fut pas, comme le dit cette généalogie, avocat à la chambre de l'Édit ; ou, du moins, il n'en exerça pas le métier; il est dit marchand à Lisle en 1569 et en 1579, et enfin au testament de sa veuve. Il ne fut pas non plus marié à N. de Touars; on trouve, en effet, à la date du 19 avril 1603 (Boisset, notie, fo 148) : t Testament de honneste femme Hélips de Bourdes, veuve de sire Guillaume Vaissette, marchand à Lisle. » Cette Hélips était fille de Géraud et de Catherine Raynalh; dans son testament, elle fait des legs à son frère Guillaume; à Pierre, fils de feu Pierre, son autre frère; à son second fils Pierre Vaissete, et fait héritier universel son fils aine David Vaissete, qualifié praticien; déjà, le 28 janvier 1599 (J. Chéreau, f* 38), la même Hélips est dite veuve de Guillaume Vaissete; ce dernier a dû mourir peu avant, car il passe encore un acte en février 1598 (Gaubert, notre à Lisle, f° 57). La date de son décès ne peut être précisée davantage, les registres paroissiaux de Lisle, qui commencent en 1588, ne contenant jusqu'en 1612 ni les mariages, ni les sépultures, mais seulement les baptêmes.
Des deux fils de ce Guillaume, le second, Pierre, que la généalogie de l'Histoire de Languedoc ne cite pas, vint habiter Toulouse, où il épousa Anne de Colomb, et fut procureur du roi au parlement; il est mentionné tel, ainsi que sa femme, le 19 septembre 1621, au baptême de son neveu Pierre, fils de David; il laissa un fils, du nom de David, qui est cité dans un testament du 29 juillet 1653, dont il sera question plus loin: mais ce rameau secondaire de la branche cadette des Vaissete ne dut pas laisser de descendance.
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David Vaissete, l'aîné, épousa à Lisle, en 1604, Jeanne de Clédier; l'acte de mariage n'a pu être retrouvé par la raison dite plus haut; mais nous avons pu découvrir les pactes de ce mariage; ils sont du 2 janvier 1604 (Boisset, f» 369); Jeanne y est dite fille de Eugène de Clédier et de Isabeau du Thorond; Eugène de Clédier était justement le frère de Catherine, femme de Barthélémy Vaissete; Isabeau du Thorond, que la généalogie de l'Histoire de Languedoc ne mentionne pas, était fille de feu Pierre du Thorond, qui fut longtemps marchand, et enfin bourgeois à Lisle, et d'une autre Catherine de Clédier, celle-ci fille de Jean, lieutenant principal du juge d'Albigeois, et de Catherine Garonne. Il y a lieu de remarquer, en passant, que la plupart des membres des familles marquantes de cette époque furent d'abord marchands, et ensuite bourgeois; c'est ainsi que ces familles, après avoir acquis la fortune, purent s'élever peu à peu dans l'échelle sociale, et môme arriver à des charges qui conféraient la noblesse. L'analogie du nom de Touars, que la généalogie de l'Histoire de Languedoc donne par erreur à la femme de Guillaume, avec celui du Thorond, qui est bien celui de la mère de Jeanne de Clédier, nous semble avoir pu occasionner la confusion.
Cette même généalogie dit que David, époux de Jeanne de Clédier, fut notaire royal à Lisle et mourut en 1620 après avoir abjuré le calvinisme. D'abord, nous n'avons vu nulle part qu'il ait jamais été calviniste; s'il le fut, ce ne put être que dans sa jeunesse, du temps qu'il étudiait à Toulouse; car, depuis le baptême de son premier enfant en 1605 jusqu'à son propre décès, tous les actes religieux de sa famille se passent à Notre-Dame de La Jonquière, seule église de Lisle; et, s'il avait réellement épousé les idées de Calvin, il lui eût été difficile d'exercer le métier de notaire si longtemps dans une ville qui resta essentiellement catholique. Ensuite, il s'en faut de beaucoup qu'il soit mort en 1620; on le voit, en effet, fonctionner comme notaire à Lisle encore en 1648 (Archives du Tarn, série E, 586); et, d'ailleurs, nous avons relevé son acte de sépulture à Lisle, à la date du 14 septembre 1651. Les Archives du Tarn (série E, no 589) mentionnent la vente en 1652, à François Mercadier, pour 1,100 livres, de l'office de notaire de ce David Vaissete par son fils Guillaume, en ajoutant que David le tenait de son père Guillaume, et celui-ci de son frère Barthélémy, ce qui concorde avec ce qui a été dit plus haut.
Nous avons vu que Hélips de Bourdes, dans son testament de 1603, citait son frère Guillaume et son neveu Pierre, fils de feu Pierre, son autre frère. Ce Guillaume, frère d'Hélips, est, en effet, parrain de Guillaume Vaissete, fils aîné de ce David; ce fils aîné, que la généalogie de l'Histoire de Languedoc fait naître en 1604, fut baptisé le 11 avril 1605,
i° Généalogie, de DOM VAISSETE
Telle qu'elle est reproduite page 100 du tome I de /'Histoire générale de Languedoc, édition de i8y4y
articles 22 et 23 des pièces justificatives.
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ART. 22. — Généalogie de DOM VAISSETE dressée par lui-même (autographe). Fonds de Languedoc, t. 181, f° i.
1. Marie DE PASSEMAR DE BERTOULE, mère de DOM VAISSETE, eut deux soeurs : 1° JEANNE-MARIE; 2" MARIE-THÉRÈSE, qui lit ses voeux au monastère des religieuses Dominicaines de Sainte-Catherine, à Toulouse, sous le nom de Soeur Saint-Augustin.
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e.t la marraine fut Elisabeth du Thorond, mère de Jeanne de Clédier, c'est-à-dire grand'mère du nouveau-né; Pierre, neveu d'Hélips, et cousin germain de David, futparrain de Pierre, fils dé ce dernier, le 20 août 1618, et il est qualifié bourgeois de Toulouse. Ce Pierre de Bourdes était déjà venu, en effet, habiter Toulouse, où il épousa Marie de Blandinières, et fut capitoul en 1634 pour le quartier de la Daurade; or, on lit textuellement ce qui suit dans son testament du 29 juillet 1652 (Bessier, notaire à Toulouse) : « Je donne et lègue à Guillaume Vaissete, procureur du Roy à la judicature d'Albigeois, mon cousin, la somme de quatre mille huit cents livres par moi prêtées tant au dit sieur Vaissete qu'à feu messire David Vaissete son père, solidairement obligés par contrat du 26 janvier 1639, retenu par Me Voulte, notaire de Lisle-d'Albigeois, pour, l'achat du dit office de procureur du Roy, etc.. »; et, plus loin, il fait un legs de mille six cent quarante-huit livres à David Vaissete, fils de feu Pierre, celui-ci époux d'Anne de Colomb, dont il a été parlé. La généalogie de l'Histoire de Languedoc ne parle que de trois enfants de David et de Jeanne de Clédier; il y en eut neuf, dont trois du nom de Pierre; nous avons relevé leurs baptêmes à Lisle, et nous en donnons le détail dans le tableau généalogique placé à la fin de cette notice.
Guillaume Vaissete, fils de David, né le 11 avril 1605, devint, en effet, procureur du roi à Gaillac; d'après la note autographe (non signée) placée à l'article 20 des pièces justificatives du tome I de l'Histoire de Languedoc, ce serait en 1638 que Me de La Garrigue aurait résigné cet office en sa faveur; nous venons de voir que ce n'est qu'en janvier 1639 que la somme nécessaire à cette acquisition lui fut prêtée; en réalité, il ne fut nommé à cet office que le 8 août 1644. (Archives du Parlement. — Offices.)
D'après l'article 23 des mêmes pièces justificatives, ce Guillaume épousa à Gaillac, le 12 février 1643, Jeanne de Pénard, fille de Jean de Pénard, juge royal en la terre d'Albigeois, et d'une mère dont le nom n'est pas indiqué; il eût été intéressant de découvrir ce nom; mais nous n'avons pu y arriver d'une manière certaine; les registres conservés à la mairie de Gaillac portent sur cinq ou six paroisses ou annexes, et contiennent beaucoup de lacunes; nous avons seulement trouvé, à la date du 7 juin 1627, le baptême d'une Jeanne de Pénard, fille de Bertrand et de Cécile Bonnet, ayant pour marraine une autre Jeanne de Pénard, sa soeur; or, la sépulture de Jeanne de Pénard, épouse de Guillaume, que nous avons relevée à Gaillac à la date du 16 janvier 1677, lui donne l'âge de cinquante-quatre ans quatre mois; elle a donc dû naître en septembre 1622, et a bien pu être marraine de sa soeur en 1627; nous pensons que c'est bien cette marraine qui fut l'épouse de Guil-
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laume ; nous avons aussi recherché les pactes de ce mariage; mais inutilement; dans le doute, il y a lieu de s'en tenir à l'indication sommaire de la généalogie de l'Histoire de Languedoc.
C'est ainsi que cette branche cadette de la famille de Vaissete, après un séjour d'environ un siècle à Lisle, revint à Gaillac, d'où elle était venue vers 1520; elle n'en sortit plus. Les enfants de Guillaume, époux de Jeanne de Pénard, y naquirent, ainsi que les huit enfants de son fils Jean-Géraud, dont le Bénédictin.
Nous n'avons pu retrouver le baptême de Jean-Géraud, ni celui de son frère Pierre, toujours à cause des lacunes des registres paroissiaux; mais nous avons relevé le mariage de Jean-Géraud à Gaillac, le 8 février 1676, avec Marie de Passemar; l'acte dit que Jean-Géraud est âgé de vingt-neuf ans, et Marie do vingt-huit ans; Jean-Géraud a donc dû naître vers la fin de 1646; son frère Pierre, présent à ce mariage, y est dit chanoine de Saint-Michel de Gaillac.
Dans la plupart des actes notariaux ou paroissiaux, et, entre autres, dans l'acte de baptême du Bénédictin, l'orthographe du nom de Vaissete est avec deuxT; mais, presque toujours, même du temps de Barthélémy, le notaire, vers 1572, les signatures sont avec un seul T ; la véritable orthographe est donc Vaissete.
La vie de Dom Vaissete est bien connue; nous rappellerons sommairement qu'il naquit à Gaillac le 4 mai 1685, y fit ses études classiques, et vint à l'âge de dix-neuf ans étudier le droit à Toulouse, où il fut reçu licencié en 1709, c'est-à-dire à l'âge de vingt-quatre ans, et à l'unanimité, bien qu'il eût obtenu une dispense d'âge d'un an; qu'enfin il entra comme novice au monastère de la Daurade au mois d'août 1710, quatre mois après la mort de son père. Il mourut à Paris, à l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, le 10 avril 1756, après avoir travaillé à l'Histoire de Languedoc à partir de 1714, c'est-à-dire pendant quarantedeux ans.
Dom Vaissete publia en 1740 un abrégé de cette histoire en six volumes in-12, et, plus tard, une géographie universelle en quatre volumes in-4°, ou en douze volumes in-12; cette géographie fut considérée comme une des plus méthodiques et des plus exactes de l'époque.
Au dire des biographes les plus autorisés, la simplicité et la candeur, jointes à beaucoup d'esprit, et à une immense érudition, furent la caractéristique du savant Bénédictin.
Nous faisons suivre cette notice de deux tableaux généalogiques; le premier reproduit intégralement la généalogie que l'on voit dans le tome I de l'Histoire générale de Languedoc, nouvelle édition, page 100 des pièces justificatives; le second reproduit cette généalogie avec toutes
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les additions et rectifications qui résultent de nos recherches, mais seulement en ce qui concerne la ligne ascendante du père de Dom Vaissete.
Séance du 4 juillet 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. L. DELOOME, trésorier, fait le rapport d'usage sur l'état de la caisse; le Comité économique en prendra connaissance.
M. DELORME fait la communication suivante :
Notre Société a reçu du Ministère de l'Instruction publique un ouvrage en trois volumes, publié en 1902, et-ayant pour titre : Les Médailleurs français du quinzième siècle au milieu du dixseptième, par M. F. Mazerolle, conservateur à la Bibliothèque de la Monnaie.
Cet ouvrage ayant exigé, pendant plusieurs années, le dépouillement de nombreux dossiers et registres d'archives, représente une somme de travail considérable. L'auteur n'a pas à regretter sa peine, car il a fait une oeuvre remarquable qui lui assigne une place prépondérante parmi les numismates français; son ouvrage est appelé à rendre les plus grands services aux chercheurs érudits que l'histoire de la médaille française intéresse.
Le tome I nous fait connaître les principaux graveurs français à qui nos collections nationales doivent de fort belles médailles' coulées ou frappées, depuis le règne de Charles VII jusqu'à celui de Louis XIII.
Les jetons, autrefois dédaignés par les collectionneurs, aujourd'hui très recherchés, n'ont pas été oubliés; M. Mazerolle nous donne la longue suite et la description de tous ceux dont il a pu découvrir les auteurs.
Rien n'a été négligé dans cet ouvrage pour le rendre intéressant et aussi complet que possible.
En outre de la liste très fournie des médailleurs français dont quelques-uns échappent ainsi à un oubli certain, M. Mazerolle, après nous avoir initié aux divers procédés de frappe usités tour à tour à la Monnaie du Moulin et à la Monnaie des Étuves, fait connaître des lettres patentes et des arrêts de la cour des Monnaies,
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ordonnant la frappe de médailles et jetons pour le compte du roi, ou encore l'autorisation accordée, à la suite de requêtes de tailleurs des monnaies, de graveurs et d'orfèvres, de graver pilles et trousseaulx à faire gectons, soit pour le service du roi ou la maison de la reine, soit pour le compte de princes, princesses ou de personnages divers.
A ces documents intéressants, l'auteur a ajouté la bibliographie des principaux articles traitant des médailles et jetons signalés par lui.
Dois-je le dire? c'est dans cette partie de son étude que M. Mazerolle nous a fait l'honneur d'une citation pour avoir publie\ dans une Revue parisienne, aujourd'hui disparue, un jeton devenu fort rare de l'amiral Coligny.
Le tome II comprend le catalogue des médailles et jetons dressé par ordre chronologique où chaque pièce est minutieusement décrite.
Le tome III enfin est un album où sont reproduites en nombreuses planches phototypiques, d'une exécution irréprochable, toutes les médailles décrites dans les deux volumes précédents.
En présence de la valeur incontestable de l'ouvrage de M. Mazerolle, nous estimons faire oeuvre bonne et utile en en fixant le souvenir dans les colonnes de notre Bulletin afin d'attirer sur lui l'attention des numismates qui pourront avec fruit l'étudier, soit dans les dépôts publics, soit dans notre bibliothèque. •
Dans le catalogue du tome II, nous avons relevé cinq médailles et deux jetons intéressant notre province.
I. — A la page 20, sous le n° 71, figure la description d'une médaille en or, avec anneaux de suspension, frappée au nom de FRANÇOIS DE BOURBON, comte d'Enghien, gouverneur de Languedoc (1519-1545).
L'auteur signale une médaille semblable en argent, mais sans anneaux de suspension, comme figurant au Cabinet de France.
II. — Page 91, sous le n° 441, médaille fondue, ovale, à l'effigie de GUY DU FAUR DE PIBRAC, président du Parlement de Toulouse (1529-1584).
III. — Page L08, n° 1009, médaille (fonte ovale), avec bélière, représentant JEANNE DE CUSTOS, femme de Guy du Faur de Pibrac, morte en 1602.
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IV. — Page 137, n° 688, médaille sans revers, frappée en 1622, à l'effigie de NICOLAS DE VERDUN, ancien président du Parlement de Toulouse, président du Parlement de Paris et chancelier de Gaston d'Orléans.
V. — Page 156, n° 777, médaille fondue par J. Hutin, en 1628, portant le buste, à droite, de F. JOACHIM DE MONTAGU, grand prévôt (?) de Toulouse, commandant à Metz et pays messin.
VI. — Page 188, n° 917, jeton d'argent, frappé par le graveur Nicolas Emery pour le comte ODET DE COLIGNV-CHATH.LON, êvêque de Beauvais et archevêque de Toulouse (1549 ou 1553). .
VII.— Et enfin à la page 203, sous le n° 992, .un jeton de bronze gravé par Jacques Reveloys, en 1583, au nom de RAOUL LECONTE, conseiller du roi et receveur général des finances .du Languedoc.
Séance du 11 juillet. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. DELORME, au nom du Comité économique, approuve les comptes de M. le Trésorier et lui exprime les remerciements de la Société.
Le Secrétaire offre de la part de M. PERRAULT-DABOT. inspecteur général adjoint des monuments historiques, les deux ouvrages suivants dont il est l'auteur :
L'ancienne église Saint-Nazaire, à Bourbon-Lancy. Les archives de la Commission des monuments historiques.
Lecture est donnée d'une lettre de M. le Préfet de la HauteGaronne au président de la Société l'informant que, dans sa séance du 29 juin dernier, la Commission chargée de signaler pour le classement les objets d'art conservés dans les édifices religieux a exprimé le désir que la Société archéologique du Midi voulût bien l'aider dans la mission qui lui est confiée :
« Déjà votre compagnie, par son intervention auprès des pouvoirs publics, a contribué à sauver un certain nombre d'objets dont l'aliénation eût été préjudiciable même au vendeur. En vertu de la loi du 31* mars 1887, elle s'est occupée de rechercher et de BULL. 25, 1905. 24
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proposer pour le classement un certain nombre de monuments et d'objets dans la Haute-Garonne.
« La Commission serait heureuse de voir que son voeu fût pris en considération; il importe, en effet, de reprendre sans retard l'oeuvre interrompue, et, sans porter atteinte au droit de propriété, d'assurer par des mesures prématurées la conservation d'une partie du patrimoine artistique de la France. »
M. le PRÉSIDENT dit qu'il n'a pas besoin de consulter ses collègues : leur collaboration est acquise à l'oeuvre poursuivie dans un intérêt général par ordre du Ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts. Mais à plusieurs reprises des inventaires ont été remis par les membres de la Société aux préfets et au Ministère sans qu'on sache le sort qui leur a été réservé. On n'a guère l'espoir, d'un autre côté, que la Commission qui siège à la préfecture ait les. moyens d'agir utilement, car elle n'a aucun budget à sa disposition et ses membres ne peuvent pas se déplacer! La Société archéologique enfin a publié à plusieurs reprises la plus grande partie des renseignements qu'on lui demande tardivement.
La Société a reçu une lettre de M. Soldi Colbert, secrétaire général de la Société française de fouilles archéologiques, mettant à sa disposition un certain nombre d'objets provenant des fouilles d'Antinoë, récoltes de M. Gayet, ayant figuré à l'exposition organisée au Petit-Palais ce mois dernier.
La Société archéologique du Midi accepte ce don et remercie vivement la Société française de fouilles archéologiques à laquelle elle a l'honneur d'être liée. Elle souhaite de grand coeur le succès de son oeuvre si profitable à lascience, à nos musées.
Les objets que nous allons recevoir seront adressés au musée Saint-Raymond, où ils prendront place à côté des étoffes de la même provenance.
Le Secrétaire perpétuel de l'Académie de Mâcon écrit pour annoncer que cette Compagnie, fondée le 22 fructidor an XIII, célébrera son centenaire les 9, 10 et 11 septembre prochain. Elle prie notre Société de participer à cette solennité.
Nous ne pouvons répondre à cet appel qu'en exprimant à l'Académie de Mâcon nos compliments, nos sentiments de bonne confraternité et de haute estime et nos voeux pour la continuation de son oeuvre si honorable et si féconde.
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Lecture est donnée d'une communication de M. A. VIDAL, membre correspondant.
Notes d'art sur Montagnac (Hérault).
(Quinzième siècle.)
Dans les comptes des clavaires de Montagnac (Hérault) du quinzième siècle, qu'il nous a été donné d'étudier longuement, nous avons relevé un certain nombre de dépenses intéressantes pour l'histoire de Tart. Elles ont leur place toute naturelle dans le Bulletin de la Société archéologique.
Il nous a paru utile d'accompagner de quelques lignes de commentaire ces textes romans un peu rébarbatifs et qui ne sont pas familiers à tout le monde. Voici tout d'abord la façon d'un reliquaire. L'église de Montagnac possédait une relique très précieuse, le pied de saint Sébastien. Les consuls voulurent la faire enchâsser. Le 20 octobre 1441, l'un d'eux, Philippe Alibert, accompagné de quatre autres personnes, se rend à Montpellier pour en emporter le reliquaire dont ils avaient confié la façon au maître Henri, « l'argentie ». On lira les minutieuses précautions qu'ils prirent pour sauver de tout accident cette oeuvre d'art.
Notons tout d'abord que l'artiste mit près de cinq années à confectionner ce reliquaire. Il en est question pour la première fois dans les comptes de 1436-1437 :
« Dihjous, a mi de jenoyer, de mandamen del cossel e de mos companhos, aniey ieu Guiraut Molinia, cossol, e Me Andrieu Paulet, trames a Monpeylia... e ayso per fa far lo reliquiari del pe de sant Abastia 1. »
On aura de la peine à voir dans la forme « sant Abastia » le nom de saint Sébastien. Ce n'est que dans un seul article, le dernier, que nous le rencontrerons sous sa vraie physionomie, « Sant Sebastia ». Nous avons d'ailleurs noté d'autres bizarreries philologiques encore plus extraordinaires dans les comptes de Montagnac.
Si la valeur d'une oeuvre d'art se mesurait au temps que sa confection a demandé, le reliquaire de maître Henri devait être un chef-d'oeuvre. Mais pas plus en art qu'en sonnets,
Le temps ne fait rien à l'affaire.
Le reliquaire de saint Sébastien n'existe plus ; il n'est donc pas possible d'apprécier le talent de l'orfèvre montpelliérain. On pourrait cependant,
1. Registre des comptes des années comprises entre 1434-35 et 1443-44, f» 59 r°. Il convient de remarquer que ces comptes n'ont pas encore été inventoriés.
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mais au prix de nombreuses recherches, en trouver l'exacte description. Les consuls avaient pris la précaution, en effet, de passer un acte notarié obligeant l'artiste et la commune de Montagnac. Malheureusement, le nom du notaire est resté dans l'encrier du « scriba de la mayso comuna».
Sans plus de commentaires, donnons les textes que nous avons recueillis.
A xx d'octobre [1441], de voluntat de mos companhos, aniey hieu Phelip Alibert, cossol, a Monpeylia, en la companhia de Me Andrieu Paulet e de sen Grassiot Pelissia, e menem an nos Jordy Raynart e Handrieu de Co, nostre vaylet, e haquo per ana querre lo reliquiari del pe de moss. sant Abastia; e despendem a Bonbarens 1, per nostres chavals e huna muola que menava Jordy, que monta xn s. mi d.
Plus, lo jorn meteys, anem jare a Monpeylia; e quant lay forem, lo reliquiari non fouc acabat, e hatendem que foue acabat entro al dissapte après venen a mieh jorn; e despendem a Monpeylia, per très jorns entiers que hi estem tostz v, e han très chavals e han la muola del dih Jordy, m lbr.
Plus, fouc paguat a maystre Anric, l'argentie, que avia fah lo dih reliquiari, e per enquarna 2 la himage de sant Abastia, la quai fes enquarna hun penheyre: quostet hun moto que val xv s.
Plus, fouc donat als vaylestz dels dih[s] argentins que demanderon lo vy, e fouc lus donat v s.
Plus, fouc pagat al notari que pre la obliguansa quossi lo dih Anric era hobliguat afarben e sufissienmen lo dih reliquiari, e nos de pagua; la quai obliguansa ferern trinqua 8, e paguem ne al notari t s.
May, ferem far huna cayssa al fustia per mètre lo dih reliquiari.
Plus, comprem huna cana e Ç4 de tela e huna lbr. e Ç de coto per envolopa lo dih reliquiari dedins la cayssa, per so que res non ses rompes, portan lo per lo cami; de que fouc paguat per tôt et per v d. de clavels (prix effacé).
Plus, comprem de linhas per lia la dicha cayssa e per estaqua la persona que aquel que la portara la portes mielhs, sen perilh.
Plus, fouc paguat a Monbarenc, al retorn, lo disapte sobredih, que venguem sopa e jare aqui 5. ;
1. Il faut lire Monbarenc; c'est peut-être le Montbazin d'aujourd'hui.
2. Donner la couleur de la chair.
3. Canceller.
4. Ce sigle, qui signifie demi, peut être représenté par un dzêta minuscule grec.
5. F" 155 v° et 156 r».
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Le prix du reliquaire fut payé à l'orfèvre avant livraison ; la dépense figure, en effet, dans les comptes de 1439-40, mais sans indication de date. Elle s'éleva à 30 livres :
An paguat a Me Andrieu Paulet que portet a l'argentie per lo pe de sant Sebastia, que monta xxx lbr. 1.
On se rendra compte de l'importance de cette somme quand on saura qu'en 1441 la journée d'un maître charpentier était payée 3 sous et 4 deniers. Elle représente donc la valeur de 195 journées.
Dépenses pour la réception de la reine.
Charles VII avait donné, en 1425, à sa femme Marie d'Anjou le comté de Pézenas dont Montagnac faisait partie. Au mois de juin 1442, la reine vint visiter son domaine et s'arrêta à Montagnac. Les consuls firent à leur auguste visiteuse une splendide réception et lui donnèrent six écuelles d'argent. Il nous a paru intéressant de relever les dépenses effectuées à cette occasion :
Sec se la despensa que hieu Felip Aliber ay fâcha per la venguda de la regina.
E primo, dilus, que teniam xix del mes de may [1442], aniey a Monpeylia per sabe de la regina corafora aqui, e per enforma an m' Stieyne Petit quora ela dévia veni en esta viela; e paguiey a Monbarenc per mon digna H s. vi d.
Plus, lo jorn meteys, a Monpeylia per mon sopa e de mon chival in s. mi d.
Plus, al vaylet de l'ostalia, v d.
Plus, l'endema que fouc dimas, torniey digna a Monbarenc.
Dijous, que era lo jorn del Corps de Dieu 2, que tenian xxxi de may, aniey hieu Felip Alibert, cossol, ha Monpeylia, per compra vi escudelas d'argen per présenta e far presen a la regina, quant fora en esta viela.
Plus, por v xnenas de penonsels que feri far, lo[s] quais devian porta los efans a la salhida de la dicha regina, los quais quosteron, n lbr. xiii s. n d.
Plus, feri bruni la[s] dichas vi escudelas, per so que fosson plus lisens e pus bêlas, que quosteron de bruni n s. vi d.
A ni de jun, aniey hieu Esteve Brossa, cossol, a Meso 3 per veze si la regina vendria aysis.
1. F° 146 r»
2. Le jour de la Fête-Dieu.
3. Mèze, chef-lieu de canton de l'arrondissement de Montpellier.
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Avem fah far quatre guafetz e quatre bolhetas 1 per porta lo parpalho que fouc portât quant la regina entret en esta viela.
A vi de jun, l'an miel CCGCXLII, comprem XH lbr. de confituras, per dona a la regina, las quais costeron mi motos, que valon m lbr.
Plus, per vin torchas que peravon xxim lbr., que han costat ni s. ix d. la lbr.
Per ï caaa de tela borgera 2 que fouc per présenta Ç xnena d'escudelas d'argen a la regina.
A xv de jun, aniey hieu Johan Marty a Quastel Nou per querre la mostra de la torela per la regina.
A xxiii de jun, avem paguat a hun home de la regina per reyeme* lo drap de la gleya un A4 que valon en lbr. v lbr. vi s. vu d. 5.
A x de setembre [1442], avem paguat a sen Johan Noguia, cambiador de la vila de Monpeylia..., LXXXXVIII lbr. e vm s. que ly eron degudas per raro de vi escudelas d'argen que peravon ix marcs, las quais foron donadas a la regina, quant venc en esta vila 6.
A xvi d'abriel [1443], fouc paguat a sen Peyre Perie, canabassie de Monpeylie, per l'enteres de las telas que foron preras per tendre l'ostal en que alotget la regina, quant say venc'.
Nous relevons, dispersées un peu dans tous les feuillets de ces comptes des clavaires, d'autres dépenses occasionnées par la venue de la reine. Nous faisons choix des plus intéressantes :
Han paguat a sen Guiraut Molinier per vu sest. de vin blan que fouc donat a la regina, i lbr. xvi s. xi.
Plus, han paguat a me Andrieu Paulet per Ç much 8 de vy que fouc donat a la regina, n lbr. vu s. vi d.
Plus, han paguat a sen Peyre Duran per hun much de vy que fouc donat a la regina, un lbr. xv s. 9.
1. Le mot est presque illisible; nous ne garantissons la lecture que pour etas.
2. Toile bourgeoise, toile de luxe.
3. Racheter. C'est une curieuse coutume. Les valets des grands personnages qui visitaient une ville avaient le droit de réclamer soit les tentures qui décoraient les rues, soit la futaille contenant le vin offert en présent. On pouvait racheter ce droit.
4. Ce sigle signifie écu. Il est représenté typographiquement par un delta majuscule grec renversé.
5. F» 8 171 et 172 r» et v».
6. F» 181 r».
7. F» 189 r».
8. Muid.
9. F° 176 r°.
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Plus, han paguat a Felip Alibert per torchas que baylet, quant la regina say venc darieyramen que intret hora tarda 1.
On voit que la ville de Montagnac s'était mise en frais ; elle avait dépensé, pour faire honneur à la reine, plus d'un dixième de ses revenus ordinaires qui, en 1443, s'élevèrent à 1,565 liv. 9 s. 5 d. Or, sait-on comment Marie d'Anjou reconnut le gracieux accueil qu'elle avait reçu? L'article des comptes qu'on va lire nous l'apprend. La dépense est du '23 juin, c'est-à-dire du lendemain de sa visite à Montagnac; le fait n'en est que plus piquant :
Aniey hieu Guiraut Molenier a Perenas, en la companhia de sen Guilhem Pelissia, et de sen Pol de Brinhac 2 e de sen Esteve Merquadia, e hayso per so quar la regina nos avia mandat que lay anessem per so que volia lo blat dels molis de n hans 3.
Marie d'Anjou semble bien avoir été une maîtresse femme qui ne perdait pas de vue ses intérêts.
Achat d'un rétable en 1453.
Si le reliquaire fabriqué par l'orfèvre Henri a disparu, le rétable dont 11 va être question eut un meilleur sort. Nous n'avons qu'un souvenir très vague de la jolie église de Montagnac que nous avons vue, sans l'étudier pourtant, une seule fois, voici quatre ou cinq ans. Mais l'historien anonyme de Montagnac 4 nous apprend qu'elle possède un rétable assez remarquable 5. Ce doit être, sans que nous puissons l'affirmer, celui que la ville acquit en 1453.
On pourrait s'étonner que la ville prenne à sa charge l'acquisition d'un mobilier de l'église; après un reliquaire, un rétable. La ville de Montagnac semble avoir été la maîtresse absolue de son église paroissiale; c'est elle qui la répare; elle établit ses archives au clocher; les comptes des clavaires nous font assister à deux ou trois fontes de cloches payées par les fonds de la commune. Il nous a paru utile de noter cette particularité.
Voici, sans plus de commentaires, les articles de dépenses intéressant le rétable :
Sec se la despensa que es estada fâcha per far senhar lo retaule nou dels xn apostols, que es estât mes a l'autar mage,
1. F» 176 v.
2. C'était le bayle de Montagnac.
3. F» 172 v».
4. Histoire statistique et historique de la ville de Montagnae, par M. *". Béziers. imprimerie de Jean-Joseph Fuzier; 1843.
5. P. 65.
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Et primo, a xxim del mes de desembre [1453], aniey ieu Janme Johan en Agde 1, e feri portar lo dich retaule a Janme Miquel, Peyre Garavielha, Benezech Bandinel e son frayré. que lo portavo a manest 2 per so que non se ronpes.
Per mos guatges e de mon chival, e per n perguas e i tralha en que se portet lo dich retaule, e per Ç lbr. de candelas de seu que se guasteron, lo vespre, quar era nuech negra, quant veuguem; que costet tôt vin s. ix d.
Plus, fouc paguat al merchan que vendet lo dich retaule, per alcuna despenssa que avia fâcha a l'ostal de Guabriel David, que monta I* lbr. 3.
Le tableau n'est point banal de ces quatre hommes portant le rétable sur un brancard, de Montagnac à Agde et d'Agde à Montagnac, par la nuit noire, éclairant leur chemin à la clarté de chandelles de suif. Mais un nouveau voyage à l'évêché est devenu nécessaire : A xv de jenoye [1455].., aniey ieu Mathieu Bona Speranssa, conssol, a Agde, per demandar lissencia a nioss. d'Agde de trincar hun petit del marchape de la ymage de Noslra Dama per assenai* lo retaule nou, e ayssis ben per ly demandar licenssia que los capelas poguesson cantar aqui 4,
Les comptes vont nous faire connaître le prix du rétable des douze Apôtres :
Avem paguat a maystre Andrieu Paulet per huna sertificansa que a fâcha d'un sturmen en que lo conselh donet lissencia als senhos consols de manlevar d'argen per lo retaule nou.
Plus, fouc paguat a Johan Lo Nostre 5, de Monpeylie, per l'enteres de xxx v que foron manlevatz per pagua lo retaule dessus dich, que monta n v que valon n lbr. xv s. 6.
Le retable coûta donc à la ville, pour achat seulement, 41 livres 8 sOus.
On peut voir par ces extraits que, même au point de vue archéologique, les comptes des clavaires sont intéressants à étudier. Nous espérons faire d'autres trouvailles dont nous ferons bénéficier la Société archéologique.
1. Montagnac faisait partie du diocèse d'Agde; c'est donc à l'évêché que Jacques Jean allait faire bénir le rétable.
2. C'est-à-dire à bras.
3. Troisième registre contenant les comptes des clavaires de 1411-45 à 1450-51, f» 132 r».
4. F» 155 v».
5. Est-ce un ancêtre de Le Nôtre, le fameux jardinier de Louis XIV?
6. F- 162 v».
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M. FOURGOUS, membre résidant, donne lecture de la communication suivante; il présente, à l'appui de ses descriptions, de nombreuses photographies et un très beau moulage de la croix processionnelle d'Issus.
Excursion archéologique à Venerque et Issus (Haute-Garonne).
J'ai eu récemment l'occasion, au cours d'une promenade à bicyclette, d'admirer deux oeuvres fort anciennes et des plus intéressantes qui vous ont été jadis signalées ; je veux parler d'un reliquaire de l'église de Venerque ] et d'une croix processionnelle existant à Issus 2. J'en ai rapporté des photographies, et je crois intéressant de vous en donner des descriptions détaillées et de compléter ainsi les brèves mentions qui figurent déjà dans notre Bulletin.
L'église de Venerque est surtout intéressante, vous le savez, par des fortifications qui montrent au loin leurs briques fauves et un donjon crénelé couronnant une abside dont la forme pentagonale est des plus originales. Du côté de cette dernière, l'aspect est imposant, et une absidiole placée sur la droite fait encore mieux valoir par le contraste la masse énorme de la grande abside et du donjon. L'ensemble serait encore meilleur si l'église était dégagée du côté gauche ; malheureusement, le presbytère est attenant à la grande abside elle-même, et, outre qu'il produit mauvais effet, il contient, cachée dans une cour intérieure, une gracieuse absidiole semblable à celle du côté droit. A l'intérieur, l'austérité du roman se joint à la grâce du gothique, et tandis que les trois absides du douzième siècle offrent le premier style, les voûtes des nefs présentent l'élégance d'une époque postérieure. Sans parler des chapiteaux et de quelques supports de colonne fort curieux, il convient d'y remarquer, dans un angle, au fond, une magnifique grille en fer forgé, d'une hauteur de 3 mètres environ, qui clôturait jadis le choeur et entoure aujourd'hui les fonts baptismaux. Par la richesse et l'élégance de son ornementation, elle peut soutenir la comparaison avec les belles grilles de Saint-Sernin. Sur un côté elle offre une série de fleurs aux pétales largement ouvertes et des pics portés en avant; sur l'autre, entre des bouquets aux feuilles retombantes, un petit Christ sur la croix avec, à droite et à gauche, deux anges. La porte, très ouvragée, appuie ses deux battants sur un montant central, et sur celui-ci, à l'in1.
l'in1. de la Société, année 1893, p. 66.
2. Ibid.., année 1895, p. 16.
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térieur, se lit l'inscription suivante, sans nom d'auteur : « Van milo v cents xv, et lé xxix dé jun furon faïls aqueslos pias ». L'ensemble a beaucoup de caractère. La grande abside contient des fresques intéressantes, assez bien
conservées et pas encore gâtées par la manie de la truelle. Au bas, quatre grands panneaux portent les quatre Évangélistes ; ils sont assis sur un siège sans dossier; un pupitre est placé devant eux et ils commentent les livres saints; au bas de chaque tableau sont figurés leurs symboles : le taureau, l'ange, le lion et l'aigle. — A la voûte se voient, dans de grands médaillons, quatre anges et un Père éternel.
Derrière l'autel, un large placard creusé dans le mur et fermé d'une grille contient les nombreuses et importantes reliques possédées par l'église, la plus riche à cet égard, après Saint-Sernin, dans notre département.
FIG. 1. — Eglise fortifiée de Venerque (Haute-Garonne), dessin de M. J. de Lahondès.
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Les reliquaires sont, en général, modernes. L'un d'eux cependant est, par son antiquité, d'une certaine valeur : c'est un coffret du douzième siècle, fait primitivement pour l'église d'Agen et contenant les ossements de son troisième évêque, saint Phebade. S'il faut vous expliquer sa possession actuelle.par l'église de Venerque, je ne vous dirai
point le problème de la translation 1, mais un miracle que raconte la tradition populaire.
A une époque que ne dit pas la légende, des brigands ayant pillé la cathédrale d'Agen et fuyant en Espagne avec leur butin, vinrent un soir camper près de Venerque. Quand le lendemain, à l'aube, ils voulurent reprendre leur marche, les reliques du saint refusèrent de les suivre, et comme les calices, les croix d'argent et les dalmatiques dorées n'orjposaient pas la même résistance, ils n'eurent garde d'entrer en lutte avec le Seigneur et saint Phebade et abandonnèrent la châsse en pleine campagne. Alors se renouvelèrent les épisodes bien connus dans le cycle des légendes : le reliquaire demeura obstinément immobile quand des paysans qui passaient essayèrent de l'enlever; le curé, qu'on alla quérir au presbytère, ne fut pas plus heureux; mais quand, enûn, la procession, croix en tête et bannière déployée, arriva au lieu du miracle, les chants
1. On sait, à n'en pas douter, que les reliques do saint Phebade ne quittèrent pas l'église d'Agen jusqu'aux dissentions religieuses du seizième siècle. A cette époque, elles furent transportées à Périgueux où leur trace paraît s'être perdue. Comment sont-elles venues à Venerque? On ne sait trop.
FIG. 2. — Reliquaire du xn» siècle de l'église de Venerque (cliché Fourgous).
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sacrés eurent raison du reliquaire, qui s'offrit de lui-même aux mains du prêtre et se laissa doucement porter jusqu'à l'église où il est encore 1.
Quoi qu'il en soit de son histoire, le coffret est des plus curieux pour l'histoire de l'art et, à ma connaissance, n'a pas encore été décrit. Il est déjà important par ses dimensions : sa longueur est de 0«>40, sa largeur de 0m15 et sa hauteur de 0m23. Il est en bois, recouvert sur chaque face d'une seule plaque de cuivre ouvragé ; certains auteurs qui le mentionnent le disent inexactement en bronze. Son toit triangulaire porte sur le faite six lentilles doubles (une septième manque). La fermeture est assurée par un simple cadenas moderne.
Comme ornements, l'oeuvre porte entre des enroulements au pointillé terminés en feuilles de lierre une série de personnages exécutés au repoussé sur la plaque même et sans y être appliqués. Sur l'une des grandes faces latérales, deux saints tenant l'un une croix, l'autre une épée et, au milieu, un évêque. Du côté opposé, plus intéressant, au centre, dans une rosace quadrilobée, l'agneau et la croix, l'animal regardant celle-ci et fléchissant le genou. A droite, un saint une palme à la main, et, à gauche, le même personnage tenant les livres saints et semblant les commenter; du doigt il montre l'agneau- Les bas-côtés offrent également deux figures d'évêque; l'un, crosse en main, donne sa bénédiction ; comme les autres, il représente probablement saint Phebade.
Sur le couvercle se voient des anges aux ailes éployées et dans l'attitude de la prière; sur le côté correspondant à l'agneau se trouve, au milieu, une figure du Père Eternel.
Les personnages sont de noble allure et l'ensemble, rehaussé de cabochons jaunes, violets et rouges, dénote un certain travail.
Telle est l'oeuvre dont je voulais vous dire quelques mots. Sans quitter l'art religieux, je vais à Issus vous décrire autre chose.
Cette dernière localité est un petit village situé à 6 kilomètres de Venerque et chef-lieu d'une modeste commune de deux cent quatre-vingtdix habitants,
L'église, qui porte sur sa façade une splendide horloge qui marche à merveille et fait l'orgueil de la population, n'offre comme architecture rien de particulier. Elle n'a qu'une nef assez décorée de peintures et quatre chapelles latérales ; l'une d'elles est la chapelle de la famille de Roquefeuille ; elle en porte à la voûte les armes et la devise : L'honneur me reste, cela suffit. On remarque aussi dans la nef quatre tableaux anciens : à droite, l'Annonciation et la Présentation; à gauche, la
1. E. Roschach. Foix et Comminges, p. 303.
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Visitation et la Purification. Pour compléter la série, derrière l'autel se voit l'Assomption.
Mais tout l'intérêt pour l'archéologue se trouve à la sacristie où l'on conserve précieusement une croix processionnelle que je puis vous dire
FIG. 3. — Croix processionnelle de l'église d'Issus.
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déjà être du treizième siècle. Quant à son histoire, je ne puis vous apprendre grand chose; on dit seulement qu'elle est depuis très longtemps possédée par l'église. Egarée à une certaine époque au fond d'un placard, elle fut sauvée de l'oubli par le curé actuel d'Issus, M. l'abbé Lennuyeux; depuis, elle préside à nouveau aux processions et s'est vu ainsi restituer sa vieille splendeur religieuse et artistique.
La croix est en cuivre rouge, superbement patiné par le temps et d'un ton bronzé. Sa hauteur est de 0m30, et les bras ont chacun 0m09. La largeur de chaque branche est de Omffê. Les extrémités sont terminées par des trèfles précédés d'un renflement, et trois d'entre eux portent des cabochons de verre bleu pâle (celui du sommet manque).
L'une des faces de la croix porte un Christ triomphant et couronné, vivant et vainqueur de la mort, la tête haute, légèrement tournée vers la droite; il a les bras légèrement fléchis et les mains fixées aux traverses par de larges clous. Il porte une tunique qui va des reins aux genoux et ses pieds reposent sur le suppedaneum ; ils n'y sont pas cloués et le rivet qui fixe le support se trouve entre les deux, sa large tête les maintenant appuyés contre la croix. Tous ces caractères dénotent une oeuvre du treizième siècle. Le dessin est bon, parfois détaillé, notamment sur la poitrine où l'on a recherché l'exactitude anatomique, et les plis de la tunique sont scrupuleusement exécutés.
La croix, dont le titre est I H S, est décorée elle-même d'ornements au pointillé ; un trait suit tous les contours contre lequel s'appuient de nombreux petits losanges; sous les mains du Christ, à l'endroit des renflements, sont exécutées deux saintes femmes. Un nimbe est figuré sous la tête du Christ.
Au revers de la croix, les ornements sont plus compliqués; ils tiennent toute la largeur des branches et consistent en rinceaux et feuillages. Au centre est représenté un Christ nimbé, d'un caractère très archaïque.
Cette croix, dont la photographie fera valoir l'intérêt mieux que toute description, est une précieuse richesse artistique pour l'église d'Issus.
J'ai demandé si par hasard on n'avait pas à la sacristie quelqu'autre objet ancien. Je n'ai pu découvrir qu'un vieux plat à offrande en cuivre présentant au centre un portrait de Ciceron !
Après la croix, il y a mieux à Issus, et je n'ai eu garde d'oublier une visite au sarcophage que vous avait signalé en 1889 M. de Malafosse 1 et qui se trouve aujourd'hui chez la famille de Roquefeuille, dans le vestibule de leur maison. Ce tombeau de l'époque mérovingienne, en
1. Bull, de la Soc. Arch. du Midi, année 1889, p. 85.
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marbre blanc, mais malheureusement dépourvu de son couvercle, a 2 mètres de long, 0m48 de la large et 0m70 de hauteur. La cuve est de forme évasée; une seule grande face est sculptée; elle est divisée en cinq compartiments séparés par des pilastres ; celui du centre contient
le monogramme du Christ inscrit dans une couronne, les quatre autres portent des plantes ornementales aux feuilles largement étendues qui se retrouvent également sur les bas-côtés. Le même ornement et une disposition analogue se retrouvent sur un beau sarcophage de Moissac, décrit par M. Edmond le Blant. Je rapprocherai également le sarcophage d'Issus d'une oeuvre analogue de notre musée, le sixième tombeau dans la galerie de droite du cloître 1.
1. Le sarcophage de Moissac comprend sept compartiments où les vignes ■alternent avec les plantes ornementales observées à Issus; au centre, il porte également le monogramme du Christ. (Cf. Edmond le Blant, Les sarcophages chrétiens de la Gaule, p. 127, n» 147, et pi. XXXVI, fig. 1.) Le sarcophage du musée offre la décoration d'Issus en sept compartiments sans monogramme du Christ.
Le Secrétaire général, Emile CARTAILHAC.
FIG. 4. — Sarcophage en marbre d'Issus.
Miniature des Leys d'Amors, 1536. Gravure extraite de VHistoire graphique de Vancienne province de Languedoc,
ANNÉE 1905-1906.
Séance de rentrée du 28 novembre 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Comme d'habitude, les envois se sont accumulés pendant la période dite des vacances. Le Secrétaire général présente les principaux ouvrages que la Société a reçus. La plupart résultent d'échanges réguliers avec les Académies et Sociétés savantes dont la liste est puhliée en tête de ce volume de Bulletins.
D'autres sont des hommages d'auteurs divers, étrangers à notre Société, ou de membres résidants ou correspondants.
M. FOURGOUS a offert : 1° une notice bibliographique sur notre regretté confrère M. Brissaud, professeur à la Faculté de droit; 2° un mémoire sur les fresques de l'église de Rampoux (Lot), extraits l'un et l'autre du Bulletin de la Société archéologique de Tarn-el-Garonne ; 3° le texte illustré d'une conférence sur le Quercy qu'il fit en avril dernier à la Société d'archéologie de Bruxelles.
M. ESCUDIÉ, membre correspondant, a envoyé son Histoire de Fronton et du Frontonais, couronnée par la Société à son dernier concours (prix de Clausade).
Dom ANTOINE DU BOURG, membre correspondant, a envoyé son ouvrage intitulé : La vie monastique dans l'Abbaye de SainlGermain-des-Prés.
M. PORTAL, membre correspondant, un extrait de la Revue du Tarn : Les Mégalithes d'Alban (Tarn).
En présentant la Revue des Pyrénées, dirigée maintenant par BULL. 36, 1906. 25
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MM. les professeurs de l'Université de Toulouse, le secrétaire signale dans le dernier numéro, p. 651, une note relative aux monuments toulousains et où certaines critiques semblent viser la Société archéologique. Mieux informés, l'auteur et les directeurs auraient supprimé ces insinuations. La Société n'a jamais failli à son devoir. Depuis sa fondation, elle a fait, en toutes circonstances, tout ce qu'elle pouvait faire, tout ce qu'il y avait à faire en particulier en faveur de l'hôtel menacé de la rue d'Aussargues Les autorités toulousaines et les propriétaires n'ont pas toujours suivi ses avis autorisés. Ses procès-verbaux imprimés rendent au moins témoignage de ses efforts.
M. le PRÉSIDENT dit qu'il saisira une occasion prochaine pour mettre en évidence le rôle de la Société, dans la Revue des Pyrénées elle-même.
M. POKTAL, archiviste à Albi, informe la Société qu'une exposition artistique s'ouvrira prochainement dans celte ville. Elle sera consacrée aux oeuvres concernant le vieil Albi : peintures, gravures, dessins, photographies, et surtout aux oeuvres de plus en plus appréciées d'un artiste albigeois, Léon Soulié. Les crayons et les aquarelles qu'il a laissés représentent admirablement, le vieil Albi et le vieux Toulouse. La Société accepte avec empressement de confier à cette exposition la série qu'elle possède.
M. J. de LAHONDÈS annonce le Congrès de la Société française d'archéologie qui se tiendra en 1906 à Carcassonne, Narbonne et Perpignan, sous la présidence de M. Eugène Lefèvre-Pontalis.
M. de LAHONDÈS présente le double catalogue de la bibliothèque delà Société dressé patiemment par lui, par nom d'auteur et par ordre des matières. Le Secrétaire général exprime au Président la gratitude de ses confrères. La Société est heureuse de constater que 8,000 ouvrages, parfaitement classés, ont été ainsi inventoriés.
M. PASQUIER donne lecture d'une note intitulée :
Sarcophage du quatorzième siècle, place Dupuy, à Toulouse.
Le 17 août 1905, des terrassiers ouvraient une tranchée à l'entrée de la place Dupuy, pour procéder à des travaux de canalisation. Parvenus à une profondeur de deux mètres, ils commencèrent à ren-
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contrer des ossements humains gisant pêle-mêle dans la terre; bientôt les pioches heurtèrent un bloc de pierre qu'on s'empressa de dégager. On reconnut qu'on avait affaire à un couvercle de sarcophage, que la cuve avait disparu. Des sondages pratiqués dans la tranchée et même dans les environs n'ont produit aucun résultat.
Prévenu de la découverte, M. l'adjoint Feuga s'est empressé de prendre des mesures pour l'extraction du monument et pour le faire transporter au Musée des Augustins. Grâce à l'obligeance de M. Feugn, M. Félix Regnault, M. Pasquier et M. l'abbé Cau-Durban, tous les trois membres de la Société d'archéologie du Midi, ont été autorisés à visiter les fouilles et à étudier le monument.
C'est un demi-parallélipipède dont la face unie et la plus large s'adaptent
s'adaptent les montants du cercueil; les quatre côtés de la partie supérieure sont rabattus en plans inclinés; ceux des extrémités sont moins larges que les autres. Un des plans formés dans la longueur est fruste, ce qui semblerait indiquer qu'il devait être placé le long d'une muraille. Le plan parallèle qui doit se trouver en vue porte sur le milieu une croix sculptée en relief, dont le pied allonge en pointe; les bras en sont arrondis.
A droite et à gauche de la croix se trouve un calice que surmonte une hostie. La coupe du calice est évasée; le pied est distribué en compartiments; la tige de support est traversée par une bague en forme de godet écrasé.
Sur chaque pan des petits côtés se détache un écu partagé par une croix latine. Croix, calice, hosties apparaissent nettement en relief, sauf une cassure d'angle faite pendant les fouilles et facile à réparer. Le monument est en bon état, et quand il sera nettoyé, il pourra prendre place dans les galeries du Musée.
A en juger par l'ornementation donnée aux angles des quatre versants, par la forme de la croix, par l'échancrure inférieure des blaFio.
blaFio. — Couvercle de sarcophage du cimetière de la chapelle Saint auveur,
à Toulouse.
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sons, par l'ornementation des calices, on peut supposer que ce couvercle appartenait à un sarcophage de la fin du quatorzième ou de la première partie du quinzième siècle.
D'où venait-il? Quel personnage recouvrait-il î Comment se trouvait-il caché en cet endroit? La seule réponse qu'on puisse faire aux questions de ce genre, c'est que ce monument incomplet a été découvert dans un terrain formant autrefois le cimetière de la chapelle Saint-Sauveur et qui, en maintes circonstances, a été bouleversé par des travaux de voirie.
M. de LAHONDÈS fait observer que la représentation du calice avec l'hostie indique que ce sarcophage a dû contenir le corps d'un prêtre.
Séance du 5 décembre 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Le SECRÉTAIRE GÉNÉRAL appelle l'attention sur les travaux importants pour l'histoire locale et générale que renferme le dernier volume des Mémoires de l'Académie des Sciences de Toulouse.
M. PASQUIER signale le mauvais état de la toiture de l'église de Saint-Sernin sur les bas-côtés, au nord. Il est à craindre que les voûtes ne soient plus à l'abri des eaux et des dégradations.
Cette situation sera signalée aux autorités compétentes par le Bureau de la Société.
M. PERROUD demande que la Société fasse, en outre, entendre sa voix autorisée en faveur de la tour des Jacobins. Son état de délabrement est déplorable et des travaux seraient urgents. M. Pasquier est chargé de rédiger une note au sujet de ce superbe monument en danger.
M. PEUROUD annonce qu'un professeur du Collège de Gaillac a découvert l'existence à Toulouse d'un collège qui était tombé dans l'oubli le plus complet. Il avait été fondé, en 1420, par l'évêque de Saint-Flour.
M. PASQUIER expose que, dans un des derniers numéros du Bulle - lin monumental, il a remarqué un article intitulé : Le Castelas de Belvezet, près d'Uzès, et dont l'auteur est un archéologue dis-
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tingué, M. de Saint-Venant, inspecteur des forêts. En cet endroit se trouvent les ruines d'une enceinte fortifiée qui présente des dispositions analogues à celles du Castrum de Caumont, en Couserans, décrites 1 par MM. l'abbé Cau-Durban et Pasquier. En comparant le plan du Castelas et celui de Caumont, on voit des logettes flanquant à l'intérieur le mur d'enceinte, un donjon central muni de logettes; le plan des deux châteaux ayant la forme d'une ellipse, chaque extrémité du grand axe se termine par une ouverture dont l'accès est protégé par une barbacane extérieure. A Caumont, comme à Castelas, la forteresse devait servir de refuge aux populations voisines en cas de danger. D'après des déductions, Caumont serait de l'époque romane; d'après des textes, le Castelas aurait existé au douzième siècle, c'est-à-dire remonterait à la même époque que la première.
Faut-il attribuer au travail les particularités qui caraclérisent les deux monuments, telles que les logettes de flanquement intérieur, les barbacanes défendant les deux portes? Il ne paraît guère probable que, dans les Pyrénées et dans les Cévennes, deux constructions aient obéi inconsciemment à une même inspiration. Toujours est-il que, grâce à la comparaison que l'on peut faire aujourd'hui, Caumont et le Castelas ne s'offrent plus comme des cas uniques et que le système de défense auquel ils appartiennent l'un et l'autre devait présenter des spécimens sur d'autres points du Midi. Des constatations faites dans ce sens font espérer que des découvertes confirmeront cette hypothèse
M. Emile CARTAILHAC, membre résidant, donne lecture delà note suivante :
L'ambre dans les dolmens et les grottes sépulcrales du Midi.
Parmi les substances utilisées par les Européens préhistoriques, l'ambre ou succin est une des plus remarquables. Cette résine fossile, originaire de terrains tertiaires bien connus, abonde dans quelques
1. Abbé Cau-Durban et F. Pasquier, Le Castrum de Caumont (Ariège), notice archéologique tirée du Bulletin archéologique. Paris, imp. nationale, 1899; 16 pages, planches.
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gisements clairsemés en Europe, notamment dans la région baltique. Arrachée par la mer aux couches qui la renferment, elle vient flotter à la surface des eaux qui, dans leurs mouvements, la jettent à la côte. Les Scandinaves de l'âge de la pierre, arrivés à une jphase relativement tardive, remarquèrent cette pierre légère d'un aspect agréable lorsqu'on a fait disparaître la croûte altérée par le temps. Ils l'utilisèrent pour leurs parures et fabriquèrent avec elle des perles de formes diverses, plus ou moins volumineuses. Ce fut la grande mode de l'époque qui correspond aux sépultures à galerie et qui vit l'apogée du néolithique proprement dit, notre néolithique B.
Lorsque nous entrons dans le néolithique C, l'énéolithique des Italiens, les grandes chambres sépulcrales de cet âge fournissent rarement l'ambre. Mais il existe des cachettes d'ambre contemporaines de ces tombes. Par exemple dans certaines tourbières on en trouve de pleins vases, et la forme typique de ces vases donne la date. Si donc on ne l'utilise plus dans la parure locale c'est qu'on a avantage à l'exporter pour le vendre très cher à de lointaines populations.
Il disparaît aussi de la parure locale pendant l'âge du bronze et réapparaît à l'âge du fer.
On a supposé que cette disparition momentanée était due à ce fait que des populations étrangères et même très éloignées, ayant eu de proche en proche et par diverses occasions, connaissance de cette substance, l'avaient à leur tour désirée. Un commerce spécial se serait créé pendant le néolithique C des Scandinaves et bientôt tout l'ambre dont ils pouvaient disposer aurait filé à l'étranger. Il est certain qu'à des époques historiques, le monde grec et le monde romain ont, en effet, recherché avec une véritable passion l'ambre de la Baltique ou de la mer du Nord. On connaît les grandes routes de l'ambre jalonnées par des trouvailles de monnaies et même de pacotilles de la précieuse matière. La plus ancienne voie partait de l'embouchure de la Vistule et arrivait au grand port d'Olbie, dans la mer Noire. D'autres aboutissaient au Danube ou à l'Adriatique. Une plus récente, purement romaine, atteignait Marseille.
Les routes commerciales historiques ont en général un passé préhistorique. Ainsi se trouve confirmée l'hypothèse que l'ambre du Nord, durant l'âge du bronze Scandinave, pouvait descendre vers la Méditerranée ou aller à l'Ouest, vers les îles anglaises.
Il y a certainement de l'ambre dans les gisements préhistoriques de l'Europe centrale et méridionale, de la Gaule et de l'Angleterre. Est-ce déjà l'ambre en question de la Baltique?
La discussion dure depuis bientôt un demi-siècle. Au superbe Congrès de Stockholm, elle provoqua de magistrales observations des archéolo-
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gués et des naluralistes les plus compétents 1. On a écrit des volumes sur le sujet. Finalement, les voiles ne sont pas tous tombés et la vérité se dissimule toujours.
La géologie et la chimie ont été naturellement invoquées. On a complété l'inventaire des gîtes naturels européens qui auraient pu concurrencer l'ambre de la Baltique, et même être exploités par des populations parfaitement ignorantes du produit septentrional. Par exemple, l'Italie n'a-t-elle pas été dès longtemps et uniquement tributaire des mines de succin du Bolonais et surtout de la Sicile?
On aurait pu trancher la question si la science était en mesure de distinguer avec précision l'ambre des divers pays. Mais partout cette résine a la même origine ; elle vient des forêts tertiaires, elle s'est conservée dans des conditions semblables. Les différences physiques, très sensibles parfois, peuvent, par accident, être fort atténuées. On peut doser l'acide succinique. L'ambre delà Baltique en renferme de 3 à 8 °/o, celui de la Sicile n'en a pas! Mais l'action de l'humidité peut abaisser singulièrement la proportion de l'acide succinique. Il en est de même de la couleur que la lumière modifie tout à fait. Même en Danemark et en Suède, l'ambre jaune local est devenu rouge dans certains dépôts archéologiques.
La forme, la technique des objets pourraient nous renseigner sur les origines. Montelius, dans son mémoire Sitr les relations entre la Scandinavie et l'Europe occidentale avant l'ère chrétienne, note avec empressement l'identité de certains boutons d'ambre danois, anglais et écossais. Mais cette forme originale se retrouve dans le néolithique d'autres pays, en pierre ou en os. L'argument tombe donc.
De sorte que nous demeurons certains que l'ambre du Nord s'est très anciennement disséminé; mais quand nous trouvons de l'ambre dans nos gisements préhistoriques, nous avons le plus souvent des raisons sérieuses pour rester incertains sur l'origine; cela est surtout vrai pour le néolitique B et le néolithique C de la Gaule.
C'est un motif pour nous engager à multiplier les observations et à étudier les faits.
Au Congrès de Stockholm, mon ami Cazalis de Fondouce avait men1.
men1. l'origine et le commerce de l'ambre jaune dans l'antiquité, par H. Stolpe. — Discussion par MM. Capellini, Wiberg, Virchow, Howorth, Pigorini, Evans, Cazalis de Fondouce, de Baye, Bellucci, Oppert, Franks, Dirks, Landberg et Schaafïhausen, pp. 777 et suiv. du C. E. du Congrès de Stockholm, 1874. — Consulter aussi P. de Cessac, L'ambre en France aux temps préhistoriques, Bull, monumental, 1874, et une notice spéciale de M. Gabriel de Mortillet, l'Ambre, Bull. Soc. d'Anthr., Paris, 1881.
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tionné que j'ai trois fois trouvé l'ambre dans les dolmens des Cévennes et des causses. Je viens tardivement préciser l'indication.
Ma première trouvaille fut faite, en 1888, dans un dolmen que M. l'ingénieur Aurès n'avait pas achevé de fouiller. Si j'en juge par le lot que mon regretté confrère a remis au musée de Saint-Germain, il avait laissé en place la meilleure partie du mobilier; je l'ai recueillie et donnée au muséum de Toulouse. Il s'agit du dolmen de Grailhe, duns la commune de Campestre, à la limite du Gard, vers l'Aveyron. (Voir ma notice dans les Comptes rendus du Congrès de Copenhague, pp. 199 et suiv., avec fig. et pi.)
Parmi les perles en os et en pierres diverses, je trouvai un petit grain d'ambre rouge. Il faut noter que le mobilier funéraire dont il fait partie est un des plus typiques, franchement néolithique C, c'est-à-dire énéolithiqne. La hache en pierre y parait pour la dernière fois. Les armes en silex, poignards et pointes de flèche, y sont en nombre et fort belles. Le métal n'y fait pas défaut. En cuivre ou bronze sont des perles, de petits tubes, des fils roulés en spirale, peut-être déjà des pendants d'oreille. Il y a, en outre, une perle en verre, semblable pour la forme et la grosseur aux grains de métal et aux perles en coquillage. Un lot de pendeloques, cardiums, pectoncles, columbelles, indique des relations avec la Méditerranée.
Une trouvaille de perle d'ambre fut faite dans les mêmes conditions aux environs de Saint-Affrique et une autre aux environs de Millau.
Le mobilier du dolmen de Couriac, commune de Saint-Rome-du-Tarn (voir Matériaux, t. XI, 1876, p. 514, notice et fig.). que j'ai donné au muséum de Toulouse est remarquable par le même mélange de bouts de flèches en silex taillé et d'objets en métal. Parmi les cuivres ou les bronzes, on note un fil roulé en spirales, qui ressemble à une bague, et une pointe assez particulière, fréquente dans nos dolmens et qu'on rencontre au même niveau archéologique jusque dans les palafittes de l'Autriche. Il y a aussi des coquilles méditerranéennes.
Ma troisième perle d'ambre rouge était dans le dolmen des Fialets, au nord de Saint-Germain, près Millau, avec des objets analogues.
J'ai eu l'occasion de voir et de dessiner d'autres perles d'ambre rouge dans une collection formée aux environs de Sauclières (Aveyron) et qui est entrée au Muséum de Toulouse. Elles sont associées, comme les miennes, aux silex et cuivres caractéristiques des dolmens de nos causses. L'une est de beaucoup la plus volumineuse, étant grosse comme un peson de fuseau ; la seconde est façonnée en cylindre évasé aux bouts, la troisième est un simple petit grain.
Je suis très surpris de ne pas trouver de semblables objets dans la
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collection de l'abbé Cérès que j'ai minutieusement étudiée soit chez lui, soit plus tard au Musée de Rodez et au Musée de Saint-Germain.
L'ambre manque également dans la collection du Dr Prunières, aujourd'hui au Muséum de Paris. Peut-être faut-il tenir compte de ce fait que les grains d'ambre se dissimulent aisément grâce à leur couleur et parce que leur surface altérée devient terreuse. Une de mes perles était incomplète, cassée de frais. J'ai en vain cherché l'autre moitié.
En résumé, nous avons constaté quatre fois la présence de l'ambre rouge dans les dolmens de l'Aveyron, c'est-à-dire à un niveau qui correspond exactement àla fin de l'âge de la pierre, à l'aurore de l'âge du bronze.
Cazalis de Fondouce a noté le même fait dans l'Hérault. Il a trouvé quelques perles d'ambre dans un mobilier tout à fait de transition, dans sa sépulture mégalithique fort originale de la Roquette, commune de Saint-Pargoire. Notre ami fait observer que les lignites de Barjac (Gard) ont pu fournir la matière en question, mais son observation est restée assez vague *.
Une observation semblable est due à Ollier de Marichard pour un dolmen de l'Ardèche.
D'une époque plus tardive est la grosse perle d'ambre qui accompagnait des perles en verre dans la cachette de bronzes de Saint-Ghely-du-Tarn, sur le causse Mejean (Lozère) 2.
Dans la vaste région pyrénéenne, l'ambre ne paraît que rarement. Je laisse absolument de côté un morceau d'ambre rouge, n'offrant aucune trace de travail, recueilli dans la station paléolithique d'Aurensan, à Bagnères-de-Bigorre. Il n'y a pas lieu de se demander s'il vient de la Baltique. D'abord, les terrains tertiaires du pays ont pu le fournir aux gens de l'âge du renne, qui savaient si bien apprécier et rechercher les jolis cailloux; en second lieu, et cela tranche la question, à l'âge du renne, l'ambre de la Baltique était inconnu et il n'y avait probablement pas encore d'habitants sur les bords de cette mer.
Nous avons de belles perles d'ambre rouge dans les sépultures du premier âge du fer à Garin, près Luchon, à Saint-Michel-du-Touch, près Toulouse. C'est un niveau archéologique qui ailleurs, en Europe, a fourni beaucoup d'ambre. Je me limite à une époque plus reculée, qui est celle de nos dolmens cébenniens et à laquelle appartient, en fin de compte, l'unique découverte pyrénéenne dont il me reste à parler.
Le Dr J.-B. Noulet a trouvé l'ambre dans le cimetière de la vaste grotte dite l'Ombrive, à Ussat (Ariège). Sa collection est au Musée de
1. Bull. Soc. d'anthrop., Paris, 1872.
2. Matériaux pour l'hist. de l'Homme, X, p. 368.
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Toulouse et elle a été publiée avec figures, en 1882, dans les Archives dudit Musée d'histoire naturelle. Sa trouvaille consiste en une série de petits grains et d'une perle plus volumineuse en forme de barillet.
De sorte que maintenant mes perles des dolmens et ses perles de l'Ombrive sont exposées non loin les unes des autres. Il est facile de voir qu'il n'y a pas de différences dans la matière : c'est le même ambre rouge. Enfin, comme les sépultures de l'Aveyron, du Gard et de l'Hérault, la grotte ariégeoise a reçu des morts à la fin de l'âge de la pierre, ou plutôt au début de l'âge du bronze. Quant à la forme des pièces, elle ne nous apporte aucune lumière.
Si nous mettons en regard de ces divers faits ceux qu'on a observés dans le reste du territoire gaulois, nous pourrons conclure. L'ambre paraît pour la première fois vers la fin du néolithique. Il est assez rare dans la période suivante, et commun, au contraire, au premier âge du fer des Pyrénées aux Alpes.
Rien ne s'oppose à ce que dès le premier moment on ait usé de l'ambre du Nord, car il y avait déjà des relations entre des peuplades fort éloignées les unes des autres. Le silex du grand Pressigny, retrouvé en Belgique, en Provence et dans le Toulousain, nous l'a prouvé. Les coquillages de la Méditerranée, de l'Océan, les fossiles de nos gîtes terrestres se sont entre-croisés. La coquetterie ou la superstition aidant, l'ambre a pu se répandre de proche en proche et jusque dans le Midi de la France. Mais, d'autre part, on n'a pas cherché à savoir si l'ambre de nos sépultures, de nos stations et même de quelques palafittes des Alpes n'aurait pas une origine plus ou moins locale. On n'a produit aucun échantillon de cet ambre de nos gisements tertiaires, qui aurait pu fournir les spécimens ènumérés, mais cet ambre fossile et local existe. En un mot, la question n'a pas fait un pas.
Je viens d'écrire le mot superstition. C'est en effet plutôt comme amulette que comme parure que l'ambre a dû faire à certains moments son chemin dans le monde européen. Pline explique longuement le rôle considérable de l'ambre dans les croyances et la médecine de ses contemporains. D'autres auteurs, Callistrate, Suidas, fournissent aussi les plus curieux renseignements. Les prédicateurs chrétiens se crurent obligés de réagir et de défendre l'usage des perles d'ambre. De nos jours encore, on croit que des colliers d'ambre préviennent les convulsions des enfants, guérissent des maladies nerveuses, etc. Toutes ces idées sont des survivances : nos perles des sépultures néolithiques étaient déjà des talismans protecteurs, il n'en faut pas douter.
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Séance du 19 décembre 1905. Présidence de M. J. DE LAHONDKS.
M. le SECRÉTAIRE GÉNÉRAL, eu présentant la correspondance, signale dans le Bulletin de l'Université de Toulouse un article de M. Louis Vie sur l'Université de Toulouse pendant la Révolution
M. le PRÉSIDENT offre à M. Jeanroy, qui vient d'être nommé correspondant de l'Institut, les félicitations de tous ses collègues de la Société. Il dit que les travaux de haute importance de M. Jeanroy sur la langue et la littérature romanes lui ont donné une des premières places parmi les romanistes de l'Europe. Ils ont maintenu à son rang la science française en face des nations voisines, et, grâce à lui, Toulouse, une des patries de cette langue, a pu garder sa prééminence. C'est avec une justice qui lui était due que l'Institut a consacré le mérite de l'éminent professeur de notre Faculté des lettres.
M. le Président rappelle que deux autres de nos collègues, le regretté abbé Couture et M. Thomas, actuellement professeur à la Sorbonne, ont contribué, avec autant d'érudition sûre que de charme d'exposition, à répandre la connaissance et le goût de cette branche de la linguistique et de notre littérature nationale.
Il ajoute que le titre de correspondant de l'Institut, très apprécié parce que très rare, n'a été accordé jusqu'ici à Toulouse, dans la classe des lettres, qu'à quatre de nos compatriotes, et que trois d'entre eux appartiennent à la Société archéologique, M. Roschach, M. Cartailhac et M. Jeanroy.
Le vieil Albi, Exposition Léon Soulié.
M. le Président parle ensuite de la promenade à Albi de quelquesuns des membres de la Société. Le but principal était l'examen des dessins de Léon Soulié, exposés dans une salle du Tribunal, ancien couvent des Carmes, par les soins de divers amateurs et particulièrement de notre vaillant collègue, M. Vidal. Il a d'abord le plaisir de constater que le dessin le plus important et le plus remarquable
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était justement la vue du palais archiépiscopal et de la cathédrale que M. Carlailhac nous a donnée, et qui figure dans la salle de réunion de la Société.
L'exposition montrait un grand nombre de dessins de l'artiste, qui sont très recherchés aujourd'hui, mais qui furent trop peu appréciés lant qu'il vécut. A leur valeur d'art se joint l'attrait d'aspects disparus par suite de la transformation des rues et des quartiers, dont il saisissait, avec une rare acuité de vue et un sens affloe du pitloresque, les lignes accidentées et le caractère archaïque.
Il vécut surtout à Toulouse, et plusieurs amateurs de Toulouse ont bien voulu contribuer à l'exposition albigeoise en prêtant quelques dessins de leurs collections. Mais il passa plusieurs années à Aibi, dont les tiers profils de la cathédrale dominatrice et du donjon féodal de l'archevêché, les bords de rivière aux berges hautes et aux maisons plongeant dans l'eau comme celles de Venise, séduisirent et retinrent son agile crayon.
Il eut à un haut degré le sens de la perspective dans les lignes de l'archilecture et les vues générales de quais ou de vastes horizons qu'il emplissait d'étendue et de lumière. Tels coins de rues ignorées, d'angles de vieux monuments auprès desquels les enfants jouent ou causent les ménagères, deviennent d'exquis tableaux de genre saisis avec une promptitude et une vérité qui devancent les instantanés actuels, mais avec plus île caractère, de verve et de naturel esprit.
Ces croquis rapides, lixés sur l'album au hasard des promenades journalières, sont les vrais Soulié. Ils sont parfois relevés d'une légère teinte d'aquarelle qui leur conserve la limpidité de l'atmosphère. Mais il usa, surtout dans ses dessins d'ensemble, d'un genre qui lui fut particulier, l'emploi d'encre de Chine ou de sépia produisant les effets, massant les ombres et faisant valoir les lumières qu'accentuent et que détaillent des traits de plume fins, élégants et précis.
Ses tableaux, d'une couleur sèche et parfois un peu aigre, ne valaient pas ses dessins.
LéonJSoulië était né à Pompignan, dans le Tarn-et-Garonne, en 18u7. Il vécut seul, en proie à des charges dont ne le délivra jamais le prix minime qu'il retirait de ses oeuvres. On le voyait sans cesse errant dans les rues, en chapeau mou, plus haut de forme que ceux que l'on porte aujourd'hui, son manteau sur le bras, en quête
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d'un aspect pittoresque ou d'une scène populaire à saisir. S'il entrait dans un atelier ami, bien que bienveillant et doux, il causait peu, et rarement le sourire animait son visage mélancolique 1.
Le lundi 5 mai 1862, vers cinq heures du soir, les ouvriers qui travaillaient aux restaurations de l'église Saint-Sernin que venait d'entreprendre Viollet-le-Duc, virent un homme circuler autour de la balustrade du clocher, comme pour contempler les divers points de l'horizon, puis disparaître un moment, — était-ce une seconde d'instinctive hésitation? —et tout à coup surgir de nouveau, se précipiter dans le vide et s'écraser sur la toiture de la nef.
C'était Léon Soulié.
A cette exposition ont été jointes quelques vues du vieux Albi par divers amateurs. On annonce un Catalogue illustré.
Les excursionnistes de la Société archéologique ne pouvaient traverser Albi sans consacrer une belle part de leur journée à SainteCécile.
Ils ont bien vu que les malencontreux clochetons avaient disparu, ainsi qu'en avait exprimé le voeu un rapport présenté à la Société le 13 juin 1882. Mais la faute était irréparable. L'arcalure du quinzième siècle posée par Daby sur les murailles robustes du treizième circule toujours autour du fier monument à la place du chemin de ronde couvert qui était évidemment projeté, et dont on n'avait à chercher le modèle qu'à quelques toises, au donjon de l'archevêché. Les deux monuments, conçus dans le même plan de défense, se tiennent, se relient et sont un ensemble qu'il ne fallait pas dissocier. Les voûtes des chapelles demeurent toujours aussi à découvert, et leurs peintures, admirablement conservées pendant plus de trois siècles, continuent à s'altérer. Un bandeau de pierre, dans la vaste église où n'était entrée que la brique, prolonge sa dure ligne horizontale contradictoire à la direction ascensionnelle des profils de l'art gothique, au-dessus des murs et des contreforts saillants. Enfin, si la tourelle de guet, redevenue heureusement unique, a retrouvé son sens et sa raison d'être, elle n'est pas reproduite dans les formes plus simples mais plus élégantes et plus élancées que montrait celle du treizième siècle.
1. L'Illustration du Midi a publié an portrait de Soulié. 1863. p. 33, et deux ou trois dessins de cet artiste, ibid, pp. 37 et passim.
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Les excursionnistes, conduits par M. Vidal et M. de Lapanouse, ont visité ensuite le palais de l'archevêché et remarqué le chevet de la cathédrale primitive sur une des cours. Ils ont été très aimablement accueillis par M«r l'Archevêque, auquel ils ont été désireux de présenter leurs hommages avant de quitter sa superbe demeure.
- Enfin, M. le Président présente un dessin à la plume rehaussé d'encre de Chine, confié par M. Rouzaud, étudiant en doctorat, à qui il avait été envoyé de Paris. comme étant de Subleyras et destiné au plafond du théâtre de Toulouse. Nulle indication précise n'accompagnait cette composition. Il n'est pas contradictoire qu'elle soit de Subleyras, mais si elle a été préparée pour Toulouse, ce ne peut être que pour la salle de l'Athénée, qui fut ouverte vers 1735. Appelée d'abord le Concert, elle abrita, en effet, des réunions musicales, mais plus tard des sociétés littéraires et même, pendant quelques années, l'Académie des sciences. La forme en carré long du dessin, analogue à celle de la salle, le sujet, Apollon entouré des dieux et des déesses de l'Olympe, et Vénus présidant le choeur des Muses, répondent de même à sa destination. Il est traité dans le sentiment décoratif et mouvementé des ordonnances de cette époque, avec moins d'allure, toutefois, que s'il eût été dessiné par Lafage. La salle fut décorée aussi par un bas-relief de Marc Arcis que l'on y voit encore. C'est encore Apollon entouré des Muses.
M. DE SANTI , membre correspondant, rend compte en ces termes d'un ouvrage envoyé à la Société :
Un prieuré-cure de l'ancien diocèse de Lodève : Sancta Maria de Faderia
(938-1791). Lavaur, in-8°, 86 pages.
Ce travail de M. de Fozières est une intéressante contribution à ce qu'on peut appeler la petite histoire ecclésiastique de France.
C'est, en effet, l'histoire très complète — presque trop complète—d'un de ces modestes prieurés ruraux, dépendance seigneuriale plutôt que siège paroissial, que la Révolution devait faire disparaître, le prieurécure de Santa Maria de Foderla, c'est-à-dire Sainte-Marie de Fozières, au diocèse de Lodève.
On voit immédiatement l'intérêt personnel que l'auteur a pris à cette étude; il y a apporté une conscience, une passion même des plus louables.
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Il a pu, en effet, à l'aide de longues et patientes recherches dans les archives départementales de l'Hérault et les archives diocésaines de Lodève, aidé de ses archives personnelles et d'une très sûre érudition, exhumer toute l'histoire de la paroisse de Fozières depuis le dixième siècle jusqu'à sa suppression, en 1791. Evidemment, cela n'a pas l'intérêt des Grandes chroniques de France et cette étude eût gagné à être élaguée; mais cela ne laisse point d'être fort intéressant, car on y voit revivre bien des rites et des coutumes oubliés.
Signalons en particulier une page très substantielle sur le mansus integer, la dotation territoriale, la manse des églises primitives, et de bons renseignements sur les dîmes, les décimes, la congrue, les droits synodaux et sur les privilèges des ecclésiastiques en matière d'impôt.
Quant à l'histoire de la paroisse de Fozières, elle est des plus complètes; mais ce qui, dans cette minutieuse étude, attire et retient surtout l'attention, c'est l'humble chronique du prieuré, l'histoire des desservants successifs de la petite paroisse. M. de F... les a, grâce à des documents précis, évoqués, exhumés de l'ombre indécise du passé, avec leurs physionomies caractéristiques, leurs jalousies, leurs ambitions, leurs passions parfois violentes, le plus souvent mesquines, mais aussi avec leur charité et leur bonhomie; et c'est là un tableau exquis qui remet sous nos yeux attendris la vie intime de nos pères, un coin d'histoire de la vieille France d'autant plus chère à nos coeurs que nous nous en sentons aujourd'hui plus loin.
De telles études sont, comme nous l'avons dit ailleurs, un bienfait et une nécessité. C'est par elles seulement qu'on résoudra les problèmes de nos origines et de nos tendances; c'est par elles qu'on expliquera tous ces faits, mystérieux en apparence, préjugés et coutumes, locutions et dictons, et aussi haines et sympathies populaires, rancunes ataviques, antagonismes de races et de croyances, qui se transmettent dans l'âme du paysan et y sommeillent obscurément, jusqu'au jour où une circonstance inattendue les met en lumière et révèle à l'historien pensif le fil ténu où la France continue des institutions et des idées à travers les siècles.
Je propose, en conséquence, que la Société adresse ses remerciements à M. B. de Fozières pour le travail qu'il lui a adressé.
M. PASQUIER lit la note suivante rédigée à la demande de la Société :
Clocher des Jacobins. — Voeu de consolidation.
Considérant que la tour du clocher des Jacobins (partie du Lycée)
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menace de plus en plus ruine, ainsi que l'on peut le constater même d'après un simple examen extérieur et rapide ;
Que les signes de ruine se manifestent notamment par la pente des colonnettes formant le pourtour de la galerie extérieure; que les marches de l'escalier s'effrondrent de distance en distance ;
Considérant que les choses en sont venues au point que, par mesure de prudence, l'autorité universitaire interdit aux élèves l'usage de la cour qui se trouve au bas du monument,
La Société archéologique du Midi de la France émet le voeu que la tour des Jacobins soit préservée de la ruine imminente qui la menace si des mesures de conservation d'abord ne sont pas prises en attendant la restauration nécessaire.
Monuments historiques. — Saint-Sernin. — Voeu.
Considérant que, si des travaux de restauration ont été exécutés dans un monument historique pour en assurer la conservation, il devient nécessaire de ne pas laisser perdre te résultat de cette restauration en ne pourvoyant pas à l'entretien des bâtisses et en ne prenant pas en temps utile les mesures pour remédier aux dégradations qui se produisent pour divers motifs, surtout par le fait des saisons ;
Considérant que l'abandon dans lequel on laisse les monuments fait perdre le bénéfice des premiers travaux et occasionne de nouvelles dépenses qui auraient pu être évitées si des mesures de surveillance avaient été prises;
Considérant que cet abandon provient souvent de ce que tel monument dépend de plusieurs administrations et qu'aucune n'ose prendre l'initiative d'appeler l'attention sur la situation dudit monument et qu'aucune ne trouve les fonds nécessaires à la restauration;
Considérant qu'actuellement c'est le cas de la basilique de Saint-Sernin de Toulouse dont la toiture du bas-côté nord est couverte d'une végétation de plus en plus touffue, qui de loin ressemble à une prairie, se parant même de fleurs au retour du printemps;
Considérant qu'une telle végétation est de nature à compromettre la solidité de la toiture et la conservation de la voûte, et que des réparations s'imposent avant que les ravages se soient étendus;
Considérant que, si la basilique appartient à la ville de Toulouse, la jouissance en est réservée à la fabrique paroissiale, et que la surveillance des bâtiments revient à la Commission des monuments historiques, qui a fait accorder des subventions importantes pour la réparation de l'édifice ;
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Considérant que chacune de ces administrations, par son attitude, semble indiquer que, malgré l'urgence, elle ne se préoccupe pas de la question et qu'il n'y a pas entente de la part de;s intéressés;
Considérant qu'un pareil état de choses ne peut se prolonger sans compromettre de plus en plus la conservation du monument,
La Société archéologique du Midi de la France émet le voeu que la toiture de la basilique de Saint-Sernin soit débarrassée de la végétation qui la recouvre et qui se développe de plus en plus au grand détriment de l'édifice.
La Société décide que ces deux voeux seront transmis au ministère.
M. BÀRRIÈRE-FLAVY, membre résidant, fait une lecture sur un épisode de l'insurrection royaliste de l'an VII à Auterive.
Après la lecture du Mémoire de M. Barrière-Flavy sur les débuts de l'insurrection royaliste de l'an Vil dans le canton d'Auterive, plusieurs membres manifestent l'intention de voir ce travail reproduit ou tout au moins analysé dans le Bulletin de la Société. D'autres membres font observer que si cette insertion avait lieu, ce serait contrairement aux statuts de la Société dont les études ne peuvent dépasser la fin de l'ancien régime. Lorsque, précédemment, des lectures relatives à des sujets de l'époque révolutionnaire ont été permises, le Bulletin en a fait à peine mention. Dans le cas où la Société devrait franchir la date de 1790 qui lui a été jusqu'ici imposée, il est nécessaire de provoquer la réforme des statuts. Eu admettant que la revision soit adoptée, observent plusieurs membres, il faudra toujours fixer une limite au delà de laquelle les explorateurs ne pourront s'étendre. Les uns voudraient prendre la date de 1815, les autres celle de 1£31 ou de 1848. D'après le débat, il semble résulter que les travaux de la Société devront s'arrêter au règne de Louis-Philippe.
M. PASQUIER fait remarquer que si les statuts sont modifiés dans le sens indiqué, on risque de porter atteinte au caractère de la Société et de la faire dévier de son but. En effet, les études de l'époque révolutionnaire sont sur bien des points plus attrayantes, plus vivantes et aussi plus faciles que celles relatives à certaines périodes de l'ancien régime. La Révolution ferait certainement tort au Moyen-âge, qui trouverait de moins en moins des amateurs. BULL. 36, 1906. 36
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Si la Société persiste à pénétrer dans l'histoire moderne, il convient alors de demander aux Pouvoirs publics de mettre à la disposition des chercheurs le plus grand nombre possible de documents et d'ouvrir des fonds hermétiquement fermés; en un mot, pour la période qu'on veut livrer à la curiosité des travailleurs, c'est-à-dire pour les régimes antérieurs à 183J, il importe de lever le secret professionnel, sauf pour des catégories spéciales de dossiers. Entre le secret professionnel et l'histoire il y a incompatibilité. Si pour la composition d'un Mémoire on ne peut consulter les documents servant à établir des faits, autant ne pas aborder le sujet. Il serait, en outre, singulier que dans un dépôt on pût largement consulter les pièces relatives à un événement, comme l'insurrection de l'an VII, et que dans un autre dépôt on se vît refuser communication de papiers de même provenance ayant trait au même objet, faisant la suite et le complément des autres. Telle est pourtant l'anomalie qui se manifeste à Toulouse. Aussi est-il à propos qu'un voeu soit émis pour que le secret professionnel soit levé pour les papiers auxquels le temps écoulé donne peu à peu le caractère de documents historiques.
En tout état de cause, M. Pasquier est d'avis que les questions soulevées ne reçoivent une solution que lorsque les membres de la Société, après discussion, auront décidé de modifier les statuts en vue de reculer la limite de la date à laquelle doivent s'arrêter nos étu.les et nos publications.
M. Emile CARTAILHAC a la tristesse d'annoncer à la Société la mort de l'un de ses correspondants, M. Gustave Saige, directeur des archives de la principauté de Monaco. Ce savant paléographe meurt à soixante-cinq ans, laissant après lui une quantité de précieuses publications. Il fit ses études à Toulouse et avait conservé pour cette ville une vive sympathie. Sa thèse d'archiviste paléographe, consacrée aux Juifs dans le Midi de laFrance, fut particulièrement remarquée. Attaché à la principauté de Monaco, il mit toute son activité à ordonner les archives des Grimaldi et à les publier. Le dernier ouvrage qu'il nous a donné est intitulé : Documents historiques sur la principauté de Monaco (14121641); 3 vol. in-4°.
M. Cartailhac dit qu'il perd en M. Saige un ami sincère auquel il, doit d'avoir été accueilli avec une extrême bienveillance par le
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prince Albert Ier. C'est grâce à M. Saige que Son Altesse décida de prendre sous son patronage la publication des peintures et des gravures des cavernes.
M. PASQUIER, membre résidant, lit un compte rendu d'un ouvrage reçu par la Société :
Le chanoine BÉGUIN, La Madeleine, poème provençal en douze chants, avec traduction française. Marseille, Aubertin, 1905; 1 vol. in-4°, xvi-574 p.; gravures.
La Société archéologique doit ses plus sincères remerciements à M. le chanoine Béguin, qui a eu l'amabilité de lui offrir un exemplaire de son superbe ouvrage. L'auteur a touché à l'histoire, à la légende, à la littérature, à la religion, à la philologie, à l'art et à l'archéologie. Nous ne pouvons en aborder la critique que pour les matières qui sont de notre compétence spéciale.
M. le chanoine Béguin n'a pas voulu se poser en historien de la sainte patronne de la Provence; il aurait fallu entrer dans des discussions qui ne sont pas du domaine de la poésie. Il a pris les traditions telles qu'elles se sont perpétuées dans la région; il accepte la légende d'après laquelle Madeleine, les autres saintes femmes et Lazare seraient venus miraculeusement aborder sur les côtes de Provence. Il admet "comme conséquence l'apostolicité de la Gaule dès le pontificat de saint Pierre. A la fin de chaque chant sont, placées des notes très variées pour expliquer les difficultés qu'une simple lecture ne permet pas de résoudre. C'est surtout à la fin des trois derniers chants que sont soulevées les questions qui, suivant l'opinion, appartiennent soit à la légende, soit à l'histoire. Pour la piété de notre poète, il n'y a pas de distinction ; à l'appui de sa thèse, il cite quelques auteurs dont la véracité ne lui semble pas douteuse. Il n'en serait peut-être pas de même pour d'autres critiques.
Grâce aux accessoires de l'édition, l'archéologie trouve moyen d'intervenir : toute une série de clichés héliographiques reproduit, avec une fidélité qui n'exclut pas le sentiment artistique, les principaux paysages entourant la sainte Baumei les divers aspects intérieurs et extérieurs de la basilique élevée en l'honneur de la Madeleine et divers objets du culte.
Quant aux planches hors texte, qui sont autant d'illustrations pour le poème, quelques-unes, teintes en couleur, visent à l'effet; c'est le cas de dire : ut pictura poesis. Les vers se déroulent avec une facilité que ne rebute aucun genre; le style, très imagé, éclairé de nombreuses compa-
- 388raisons,
388raisons, harmonieux; la versification, très variée, présente des strophes de rythmes qui se modifient suivant les sujets traités.
La langue employée est le provençal, et, comme celle de Mistral, elle est parfois un peu factice ou plutôt éclectique. L'adoption d'un idiome local n'était pas possible quand il s'agissait d'écrire pour toute la Provence; si le fonds est commun au dialecte de toute cette vaste région, l'auteur, quand il a été obligé de faire un choix entre certaines formes, entre plusieurs tournures, a jugé à propos de donner la préférence à cellesqui sont plus spécialement usitées dans le paysde la sainte Baume.
Notre mission n'étant que de signaler l'importance et la nature de l'ouvrage, nous ne pousserons pas plus avant noire compte rendu, qui devrait comporter une élude critique historique et prendre ensuite un caractère littéraire; constatons que les soins apportés à l'édition, que le fait d'avoir écrit en provençal la légende de la Madeleine assignent à l'ouvrage une place d'honneur dans les bibliothèques.
M. GALABERT, membre résidanL, archiviste de la ville de Toulouse, fait la communication suivante :
Jean Valette Penot, peintre montalbanais ; exposition de ses oeuvres à Bordeaux en 1766.
Jean Valette dit Penot est un peintre montalbanais très peu connu et sur la vie duquel on n"a presque aucun renseignement. Dans la Biographie de Tarnet-Garonne, publiée en 1860 par M. E. Forestié neveu, une notice non signée lui a été consacrée'; elle nous apprend qu'il naquit le 30 janvier 1710.
L'auteur de cette notice a donné la liste de plusieurs oeuvres de ce peintre; il cite notamment deux tableaux qui se trouvent au Musée de Montauban (une étude de noix et pêches, n° 42, et une grisaille représentant un bas-relief, n<> 16), et, dans différentes maisons montalbanaises, un Désordre, une Amphilrile sur un dauphin, une Junon, un Pigeon, un Trompe-l'oeil de 1767 et plusieurs portraits du peintre par lui-même (1771, 1777). A celte énumération, on peut ajouter le portrait fait en 1765 de Pierre Bosquet, mon trisaïeul. La lettre que Penot écrivit à Bosquet l'année suivante nous révèle encore le Buffet de liqueurs, lé Roy, la Reine, le Flamand, les Rafes, la Poularde crue et la Bibliothèque; elle nous donne quelques indications sur le Désordre.
1. P. 411-415.
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L'oeuvre la plus considérable de Penot semble constituée par l'ensemble des décorations qu'il exécuta vers 1770 à Beau-Soleil, dans la maison Garrisson. Ce sont quatre vastes tapisseries peintes sur toile à la détrempe; l'auteur de la notice sur Penot en a donné une description détaillée.
« L'antichambre, dit-il ', présente des scènes de vendange empruntées à un délicieux petit quadro de Bassan, conservé à Rome dans ja galerie Doria-Pamphili. Penot a reproduit avec bonheur la touche et le chaud coloris de son brillant modèle. Dans le salon se déroulent des paysages de la plus charmante fantaisie : ce sont des fleurs sans nom, des rivières sans cours, des cascades sans cause, des arbres impossibles, des ruines coquettes comme celles du Petit Trianon, des châteaux gigantesques, où les tourelles s'étagent en pyramide sur les donjons à des hauteurs qui donnent le vertige; des colonnades imprévues, des déserts avec des bergères poudrées, des charmilles prodigieuses, des montagnes fantastiques, et des premiers plans enrichis d'une végétation jusqu'alors inconnue. Tout cela est peint moelleusement et avec une couleur de convention parfaitement appropriée. Les mêmes scènes se reproduisent dans la chambre à coucher, mais avec une exécution plus froide et plus lâchée.
« La partie la plus curieuse de ce vaste travail est certainement la salle à manger. Ici la scène change brusquement, le pinceau devient énergique, furibond même, et il en a besoin, car il est impossible de voir une image plus vraie du chaos. Toutes les règles du goût et de l'art sont bouleversées ; c'est une débauche de talent et d'esprit à griser le spectateur, mieux encore que les vins généreux du cru. Il semble que le peintre ait voulu faire dans ce jour de folie une expiation complète de sa trop longue soumission aux règles de l'Ecole. Sous sa main, l'humble feuille prend des proportions à humilier le rocher le plus superbe; les premiers plans rageurs s'emparent de la place jusqu'alors réservée aux lointains paresseux; l'ornement architectural sort de terre en se tordant comme un reptile ; des animaux informes et des poissons monstrueux surgissent on ne sait d'où; des tentes d'un goût chinois se dressent avec les plus capricieuses"allures au milieu des forêts pour abriter d'étranges grandes dames qu'amènent des véhicules fantastiques. On aperçoit même un berger et une bergère en habits galants, sortis pour leur malheur d'un tableau de Boucher, et qu'un caprice ou une profonde pensée du peintre a placés sur un gouffre horrible, dont l'ordre actuel de la nature et de l'art ne peut donner aucune idée, et au fond duquel
1. P. 442.
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se dresse une vague menaçante et profonde. Ils se regardent amoureusement avec cette ingénuité qu'on leur connaît, sans paraître se douter du péril qui les menace et qui donne le frisson au spectateur. Ces peintures fournissent un vaste champ aux méditations. On croit y voir une image fidèle de cette société du dernier siècle, si raffinée dans ses élégances, si monstrueuse dans ses moeurs, si follement étrange dans son art et son goût, et qu'un grand cataclysme social allait bientôt engloutir. »
Quant à la valeur de cette oeuvre, l'auteur de la notice la juge assez sévèrement. Penot, dit-il, « n'a été qu'un peintre adroit, exercé sans doute, mais d'une valeur médiocre »; et c'est un jugement analogue que portaient naguère des connaisseurs sur le portrait de famille dont il a été question plus haut : « peinture sèche et dure », me disait-on.
Il n'y aurait donc pas lieu de s'occuper de ce peintre obscur malgré la célébrité locale dont il a joui, si une lettre inédite, qu'il adressa à son ami Pierre Bosquet (dans les papiers duquel je l'ai trouvée), ne fournissait de curieux renseignements sur un voyage qu'il entreprit h Bordeaux, en 1766, pour vendre plusieurs de ses oeuvres qui furent expo-. sées au pilier de la Bourse de cette ville. C'est un document dont l'importance dépasse la personnalité de Penot, en ce sens qu'il donne une idée des procédés usités alors par les peintres pour se faire connaître et pour trouver des acheteurs. La lettre est d'ailleurs écrite sur un ton enjoué et dément sur ce point le caractère de pédant que l'auteur de la biographie a cru pouvoir attribuer à Penot d'après un de ses portraits. Elle est assez longue, mais il faut conserver les détails accessoires pour faire ressortir l'insistance avec laquelle au milieu de sujets divers il revient sans cesse à ses tableaux et aux démarches qu'il multipliait pour les faire apprécier à leur juste valeur marchande.
A Monsieur Bosquet aîné, négociant sous la Couverte, à Montauban.
A Bordeaux, ce 24 juillet 1766.
« Très cher et généreux amy, nous avons receu votre aimable lettre et les nouvelles preuves que vous me donnez de votre affection sont préférables à la meilleure réussite dans mes affaires. C'est inutile, le sort ne veut point seconder vos voeux ny les nôtres, et nous sommes très déterminés à partir dimanche prochain 1 pour Montauban, un plus long séjour dans ce détestable endroit nous mettroit au tombeau, et je suis très convaincu que vous auriez un sensible regret et nos autres amis
1. C'est-à-dire le 27 juillet, la lettre étant écrite le 24, un jeudi.
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d'aprendre qu'après avoir été ruiné votre ami Penot et ses compagnes 1 ont été enterrées dans ce lieu. Monsieur Sol, toujours rempli d'un nouveau zelle aussi bien que son associé, doivent retenir nos trois places au carossepour dimanche prochain et en tirer le meilleur marché que faire se pourra; on dit qu'il faut quatre jours et demi pour arriver à Montauban. S'il est ainsi, vous devez scavoir quel sera le jour de notre arrivée et par quel chemin nous devons y arriver. Quelle sensible joye ne ressentirions-nous pas sy vous et le cher cousin aviez la complaisance de venir au devant de nous, ouy vous l'aurez ou bien vous ne pourrez.
« Mon petit tableau du désordre, comme étant un des plus séduisans, fut placé à la bource le jour que je vous avez marqué. Il eut autour de luy un concours de monde effroyable. Les éloges les plus flateurs luy furent prodigués. J'avois pris la précaution d'y faire afficher au-dessous un de nos grands affiches, et mis au bas de l'adresse qu'on ne pourrait voir tous les autres tableaux que pendant le courant de ce mois. Je distribuay moi même quatre cents de nos billets 2 aux personnes les plus remarquables qui étoient attachez à admirer le tableau ; on lisoit ces billets 3 avec avidité. J'enlevay mon tableau à une heure après midy, nous avions tout lieu d'espérer un grand nombre de visites, et nous ne vîmes de toute la journée qu'un pédant avec un bougre de moine, et jusques à ce moment il n'est venu que deux autres personnes. Mr Journu, puisque journu y a, ayant été averti par Monsieur Sol que mon départ était fixé à dimanche prochain sans faute, vint hier 22 * du courant, nous luy fîmes revoir tous les tableaux et voicy ceux qu'il avoit choisis :
« Le désordre,
« Le bufet de liqueurs,
« Le Roy,
« La Reine,
« Le flamand,
« Les rafes,
« La poularde crue.
« Il me demanda le prix de ses 7 tableaux. Je luy répondis que'le désordre et le buffet de liqueurs étoient de dix louis pièce et que je luy passerais les cinq autres à 6 louis chacun, ce qui faisoit en tout 50 louis. Cette demande le surprit et après bien des raisonnemens, il m'offrit du
1. Il s'agit de la femme et de la fille de Penot ; voir la suite de la lettre.
2. Ces trois mots ont été écrits au-dessus du mot affiches rayé.
3. Le mot billets écrit au-dessus du mot affiches rayé.
4. Ecrit au dessus de 23 rayé.
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tout 25 louis et ne démordit jamais de là jusques à ce qu'il nous souhaita le bonsoir. Jugez, cher amy, sy l'on doit avoir grande envie de courir après luy. Voilà donc une affaire qu'il faut mettre au nombre du néant. La dureté des circonstances m'a cependant fait dire à Monsieur Sol que s'il avoit occasion de voir ce monsieur, de luy dire que mon dernier prix étoit quarante louis ou qu'il ne faloit plus y penser. Et voilà où nous en sommes. Monsieur Ribote arrivera dans peu de jours à Montauban. Sans doute que vous le verrez et que vous parlerez de nos avantures. Il pourra vous dire qu'un de ses bons amis apellé Phelip m'offrit du tableau de la bibliothèque 6 louis. Je luy répondis qu'il étoit bien loin de compte, et que ce morceau ne sortirait point de mes mains à moins de dix louis. Il promit de me revenir voir et ne vient jamais, et je ne suis pas homme à m'uler jetter à la tête de personne, sachant trop bien que ce n'est pas le moyen de réussir. Enfin, cher Bosquet, voici mon dernier projet, et dont nous sommes convenus avec Monsieur Pitre-Sol, qui est de luy laisser tous mes tableaux avec la caisse. Il se charge de les faire placer l'un après l'autre et par ordre à la bource jusques à ce qu'ils soient vendus, avec cette inscription au bas : Le présent tableau est à vendre, on s'adressera à M*' Petit, graveur. Ce Mr Petit est précisément logé auprès du pilier de la bource où seront exposés chaque tableau; de son établi il verra tout ce qui se passera et aura soin de sa conservation, et pour cet effet nous sommes convenus avec monsieur Sol de luy donner un petit bénéfice lors de la vente de chaque pièce affin de le rendre plus zellé ; lorsqu'il se présentera quelque acquéreur, le sr Petit en donnera avis à Mr Sol et il arrengera le tout pour le mieux ; il est bon de vous dire que ce Mr Petit passe pour un très honnête homme et est amy de monsieur Sol.
« Si nous avons des nouvelles du parisien à qui nous avons écrit et que les propositions qu'il nous fera puissent convenir, on pourra lui faire passer les pièces qu'il demanderait aussi facilement de Bordeaux comme de Montauban. Messieurs Sol et Fourgassier ont grande opinion de cette manière de s'y prendre pour la vente avantageuse. Je ne scais ce qu'il en sera, mais je confie mes intérêts à ces messieurs comme je le ferais avec vous, c'est tout dire. Tout anonce dans ces deux personnes le caractère de l'honneur et de la probité au suprême degré.
« Voilà le projet, cher amy, l'aprouverez-vous? Lorsque l'on me verra arriver à Montauban dépourvu de tous mes ouvrages, on pensera sans doute qu'ils ont été tons vendus, et il est bon que nous laissions les gens dans cette erreur, elle ne scauroit m'être désavantageuse. Il faut dire encore plus, qui est, que je suis assuré de la vente de tous ceux que je pourrai faire dans la suitte, et sy la vente de ceux-cy se fait comme
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nous le désirons, il est très certain que lout ce que je pourrai faire à. l'avenir sera envoyé à Mr Sol, c'est de quoy nous sommes convenus au cas de réussite. Après un si long préambule, il me semble qu'il est bien tems de répondre à votre précieuse lettre.
« Je n'aurais jamais deviné que vous fussiez à S1 Naufary lors de la réception de ma précédente, et vous félicitons de ce que la gresle ne vous a pas traité sy durement que bien d'autres et que vous n'en mangerez pas votre soupe moins grasse. Quoy que Monsieur Portai fut jadis cause que mes pauvres doits furent terriblement écorchés, je suis véritablement touché de son malheur. Je crois que les personnes à qui je dois auront la patience d'atendre mon retour sans inquiétude, et vous suis très obligé des avances que vous auriez faites s'il avoit été nécessaire. Votre délicatesse ne permet point que je vous remercie des services que vous ne m'avez point rendus. Est ce que la bonne volonté d'une âme comme la votre n'est comptée pour rien ? Cette vertu que vous estimés tant dans les autres ne serait elle rien en vous ?
« Ma lettre est interrompue en cet endroit à l'occasion d'une figure qui vient de la part des directeurs de la Comédie pour scavoir à combien monloit la recette; je luy ay répondu que je croyois avoir 48 s. à leur donner. Il m'a dit, monsieur il s'agit d'acuser les choses de bonne foy pour ne pas vous mettre dans le cas d'être saisi. Je me suis transporté chez Monsieur Sol qui a eu la complaisance de m'acompagner chez les directeurs, et leur ayant exposé le malheureux succès de ma démarche et l'énorme dépense que j'étois obligé de faire tant pour le séjour que pour m'en retourner, ils ont paru être touchés de mon sort et n'ont pas voulu des 48 s. Sensible à leur générosité, je les ay invités à venir voir mes ouvrages affin qu'ils pussent juger par eux mêmes s'ils étoient dignes d'atirer la curiosité. Ils n'ont pas manqué de venir une ou deux heures après ; ils ont paru très satisfaits, et ont dit que ces tableaux étant bien connus, je devrais en former une loterie qui serait bientôt remplie et que j'en tirerais quarante mille livres, mais je m'en tiendray au premier projet. Ces messieurs nous ont tous invités à aller à la comédie, mais je doute que nous profitions de leur politesse, nous avons été avec monsieur Sol retenir nos places au carosse, il n'a pas été possible de partir à moins de dix écus par personne, tout ce que nous avons obtenu est 80 livres pesant qui ne payeront point de port; on tient déjà 18 1. d'airres.
« Jugez par là combien notre départ est sérieux pour dimanche prochain 27 du courant à midy ou une heure après. Je menay hier 23 du courant Madeleine à la comédie ; de sa vie elle n'avoit vu de troupe si bien montée. A notre retour Manette me remit 3 1. 12 s. pour trois per-
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sonnes qui étoient venues, mais tout aco es gru de mil en gorgo d'ase. Nous avons receu des nouvelles de mademoiselle Bernady. Je compte mener aujourd'huy Manette à la comédie, le raport de sa mère luy donne un ardent désir d'y aller ; vous devez bien penser qu'elle ne fera pas de grands progrès dans la musique pour une seule fois qu'elle pourra y aller, ainsi il faudra se contenter ces vendanges de son talant ordinaire. Monsieur Sol me dit hier qu'il a voit vu le sr Journu et qu'il luyavoit dit que ces offres n'étoient point du tout raisonnables, il luy répondit qu'il pourrait bien y mettre quelque chose de plus, à quoy le s 1' Sol réplique qu'il luy étoit absolument inutile de prétendre les avoir un liard moins de quarante louis et qu'il n'avoit pas de temps à perdre pour se décider, que nos places étoient retenues et les erres données pour dimanche pro. chain. Notés que le sr Journu ignore comme tout autre que mes tableaux doivent rester ici entre les mains de Mr Sol.
« Voilà cher a[mi l'éta]t * d[es c]hoses présentes. J'ignore ce qui se passera aujourd'huy demain et ap[rès demain]. Nous ne serons pas ici pour pouvoir recevoir de réponse", il est inutile que vous preniez la peine de m'écrire, ce sera par des tendres et sincères embrassements que nous nous communiquerons toutes choses.
« On n'avait pas manqué de mettre deux affiches à notre porte dès le commencement et dans tous les endroits nécessaires, mais ce n'est que du papier et de l'argent perdu. Je rends mille grâces à mon cousin comme à vous du véritable désir que vous auriez de me voir réussir dans mon entreprise, mais ce qui n'est point arrivé pendant mon séjour à Bordeaux pourrait arriver après mon départ, ce qui deviendroit égal et qui feroit que je n'aurois pas lieu de me repentir de ma démarche et de mes dépenses. Dieu veuille que cela arrive, car vousemoyle voulons bien.
« Je ne manque jamais de faire part à Messieurs Sol et Forgassier des marques que vous leur donnez de votre bon souvenir et vous rendent toujours la pareille.
« Cette lettre a été écrite à bâton rompu, ainsy jespère qu'en faveur de notre amitié vous en excuserez le désordre et les ratures 3.
« Il laloit que les mulles que nous avons mangées eussent perdu leurs fers en route, car elles n'en avoit point, ou peut être n'étoit elles pas encore en Age d'être ferrées. Adieu, tendre amy, jusques au bhonneur tant désiré de vous embrasser. Je doute que de ma vie je puisse m'éloi1.
m'éloi1.
2. Il y avait d'abord : «. lors de votre réponse ».
3. Il n'y en a que deux ou trois.
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gner de vous et du cher cousin comme j'ay été obligé de faire. Je crois
que toutes les puissances humaines ne scauroit m'y déterminer que par
la force et la violence.
« J. PENOT.
« Monsieur Pauvert Sol et Pugeol jouissent-ils d'une aussi bonne santé comme je le désire aussi bien que toute votre chère famille que nous assurons de nos profonds respects. »
Penot est, sans doute, rentré à Montauban sans ses tableaux, comme il avait été convenu. Furent-ils vendus ou M. Sol les lui expédia-t-il après son départ? Aucun document ne nous permet de le dire. Mais parmi les tableaux de Penot que M. Em. Forestié a vus à Montauban, nous retrouvons précisément celui du Désordre dont Penot demandait dix louis et qui avait servi d'appât «. comme étant un des plus séduisants ». D'après M. Forestié, il appartenait, en 1830, à MM. Boyer frères : « Cette toile, de 1 mètre de haut sur 60 centimètres de large, dit-il, est un bizarre amalgame d'objets divers, exécutés en manière de trompe l'oeil. Au milieu du panneau est un petit paysage, qui semble recouvert d'un verre cassé ; ici l'adresse du peintre a produit une véritable illusion : il faut un examen bien attentif pour s'assurer qu'on n'a point sous les yeux une vitre ébréchée. » Un portrait du peintre y était inséré 1. La présence de ce tableau à Montauban laisserait supposer que M. Sol ne fut pas plus heureux que Penot lui-même, et que les toiles revinrent à Montauban où, sans doute, elles furent vendues dans la suite.
Mais si ce voyage à Bordeaux n'a peut-être pas rapporté à Penot un grand profit, il nous a du moins valu un récit assez vivant qui nous révèle d'intéressants détails sur les procédés d'exposition de tableaux, sur la redevance due aux « directeurs de la Comédie », et qui peut ainsi contribuer dans une certaine mesure à montrer ce qu'était la vie d'un peintre en province à la fin du dix-huitième siècle.
M. J. DE LAHONDÈS lit la note suivante :
Une vue du quai de la Daurade en 1781.
M. Regnault a présenté, il y a quelque temps, la photographie d'un lavis, montrant le quai de la Daurade en 1781, et qu'un de ses correspondants lui avait communiqué.
1. P. 445.
- 3£6 —
A ce moment, les ouvriers déblayaient les terrains du rivage pour asseoir la muraille du quai. La construction des quais venait d'être décidée sous l'impulsion du cardinal de Brienne, qui avait obtenu des Etats du Languedoc des sommes importantes pour les embellissements de Toulouse. La grande artère de Saint-Cyprien, avec l'étoile des roules qui la termine, fut ouverte et les quais construits sur les plans de l'ingénieur Garipuy. Des façades monumentales étaient projetées sur l'entière longueur des quais, et elles auraient produit un effet grandiose. Mais deux maisons seulement furent montées jusqu'au faîte, et les constructions, arrêtées par les événements, ne dépassèrent pas les arcades uniformes des rez-de-chaussée.
Les évêques, à cotte époque, prirent l'initiative de grands travaux d'utilité publique et d'embellissements des villes dans leurs diocèses; ainsi l'archevêque de Choiseul, à Albi, qui construisit de même le quai qui porte son nom; ainsi l'évêque d'Agout, à Pamiers, qui fit voter par les Etats de Foix l'ouverture de routes et les constructions de ponts.
On voit sur le lavis la porte du pont en forme d'arc de triomphe avec la statue équestre de Louis XIII dans le tympan, construit par Jacques Lemercier, architecte du roi, en 1620. Lemercier avait donné, en 1614, les plans et devis du pont qui furent exécutés par Pierre Souffion, puis par Marcel Leroy et autres entrepreneurs ses associés. L'arc de triomphe présente de frappantes analogies avec les pavillons du château de Richelieu, que le grand cardinal avait fait construire en Touraine par Lemercier, mais que nous ne connaissons plus que par des gravures 1.
Cette construction monumentale a été détruite en 1866, et les pierres et briques n'ont plus été que des gravats de démolition.
On avait projeté, il y a une quarantaine d'années, d'ériger une statue au cardinal de Brienne. Le plâtre figura même pendant quelques mois suite point culminant du pont, et le prélat fixait les quais qui ont gardé son nom. Il demeura ensuite pendant plusieurs années dans le vestibule d'escalier du Capitule puis passa aux magasins du Musée. Qu'est-il devenu ?
Il n'est peut-être pas inutile d'appeler l'attention sur les ouvertures destinées à donner passage aux eaux du fleuve dans les jours d'inondation. Elles sont encadrées dans des dalles de pierre de taille dont le profil maigre et bizarre est assurément inexplicable pour la plupart de ceux qui les voient. Il devait figurer une peau de lion avec mufle et pattes retombantes comme on en voit en marbre ou en bois sur des
1. Boschach, Inventaire sommaire des Archives de la ville de, Toulouse, pp. 326, 346.
LE PONT DE TOULOl'SE EN 1781, »'APRÈS UN DESSIN A'! LAVIS.
Construction du quai de la Daurade.
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ouvertures ou des portes d'hôtel. Le projet attend encore son exécution. (Voir les figures ci-jointes.) On voit encore en face la flèche du clocher de la Dalbade pointer vers
le ciel. Elle avait 60 pieds de haut. Elle fut démolie dans les premières semaines de 1795, et la démolition qui devait être poursuivie jusqu'aux combles de l'église, ainsi que les autres clochers de la ville, suivant l'arrêté du district de Toulouse du 21 pluviôse an II (9 février 1794), fut interrompue, sur la demande des habitants du quartier, d'après un nouvel arrêté du 22 pluviôse an II (10 février 1795)». En 1881. une nouvelle flèche de plus de 30 mètres a été dressée par les
1. Abbé Julien, Histoire de la Dalbade, p. 451.
Fin. 2. — Etat actuel des ouvertures inachevées du pont de Toulouse.
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libéralités de l'abbé de Laportalière, curé de la Dalbade, sur les plans de l'architecte Henri Bach, et, succès rare, elle dépasse en élégante sveltesse celle d'autrefois qui, cependant, avait été construite sur les plans
de Nicolas Bachelier. Commencée en 1546, elle n'était pas terminée au moment de la mort du grand architecte.
Mais si grand qu'il fût, l'introducteur à Toulouse de l'imitation des arts antiques n'avait pas le sentiment de l'art du Moyen-âge que Henri Bach a possédé, au contraire, et surtout celui du treizième siècle, à un plus haut degré qu'aucun de ses contemporains.
On ne distingue nulle trace de la reconstruction de la Daurade dont les parties antérieures n'étaient pas encore achevées.
Mais on voit sur le fleuve les longs radeaux de bois flottés qui descenVia.
descenVia. — Les sculptures projetées aux ouvertures du pont de Toulouse.
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daient des Pyrénées. La plupart s'arrêtaient au Port-Garaud, où les marchands de bois les retenaient. Ceux que l'on voit sur le lavis n'auraientils pas été destinés aux échafaudages des chantiers sur le canal que le cardinal de Brienne faisait ouvrir pour joindre le fleuve d'amont au fleuve d'aval, en esquivant la chaussée du Bazacle?
Séance du 26 décembre 1905.
Présidence de M. J. de LAHONDÈS.
M. le PRÉSIDENT exprime à M. le professeur Jeanroy, membre résidant, qui assiste à la séance, les compliments de la Société, à l'occasion de sa nomination de Correspondant de l'Institut.
M. CARTAILHAC offre à la Société, au nom de M. Couzy, professeur à l'Ecole des Arts, plusieurs excellentes photographies de Saint-Pierre-des-Cuisines.
Pour répondre au voeu de la Société, M. de Lahondès écrira une notice descriptive de ce monument dont la porte fut naguère dégagée.
M. le comte BEGOUEN lit la note suivante :
Une stèle funéraire romaine trouvée à Saint-Girons en décembre 1905.
Il y a quelques jours, en faisant des travaux de terrassements pour la construction de la nouvelle gare de Saint-Girons (Ariège), les ouvriers ont mis à jour une stèle funéraire romaine fort bien conservée. Elle est brisée en deux morceaux principaux, mais la cassure n'atteintpas l'inscription qui est intacte. Le fragment principal qui a été trouvé le premier comporte le devant du monument, moins la corne gauche au-dessus de la corniche, et le côté droit au complet. La cassure suit un plan diagonal et le. second fragment, trouvé peu après et à peu de distance du premier, comporte la façade postérieure sans aucun ornementet une parlie du côté gauche. Ces deux morceaux se rajustent très exactement et permettent de rétablir le monument dans son aspect primitif. Auprès de ces deux fragments, on a retrouvé plusieurs blocs taillés de pierre semblable, dont quelques-uns avec moulures, mais qui ne paraissent pas provenir de ce tombeau. Il faut probablement faire exception pour une pierre d'angle ornée d'une moulure sobre, mais élégante, qui semble
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avoir servi de base. La stèle que nous décrivons ici aurait alors été posée sur un soubassement orné d'une corniche et l'ensemble total n'en aurait été que plus élégant.
Le bloc cubique mesure lm22 de hauteur et 0ln60 de largeur.
Ce monument est en marbre blanc d'une qualité qui n'existe pas dans la région et qui parait semblable au marbre de Saint-Béat.
Le sommet au-dessus de la corniche est orné à droite et à gauche de
deux rosaces quatrefeuilles inscrites sur la section d'un rouleau qui occupe les deux côtés.
Au milieu, sur les deux surfaces antérieure et postérieure, on a sculpté trois petits mamelons; celui du dessus est légèrement en arrière des deux autres.
C'est sur ce bandeau que sont inscrites les deux lettres D v M séparées par une feuille de lierre (ou un coeur).
L'inscription est entourée d'une moulure. La lecture en est facile.
BULL. 36, 1906. 27
FIG. 1. — Stèle funéraire romaine de Saint-Girons.
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Voici celle que nous proposons :
D(is) M(anibus). Memorioe Pompeia>, Q(uinti) F(ilioe) Primilloe Q(uintus) Pomp(eius) Avilus et Cominia L(ucii) F(ilia) Primilla parentes fil(ioe) piissimoe.
« A la mémoire de Pompeia Primilla, fille de Quintus. Quintus Pom« peius Avitus et Cominia Primilla, fille de Lucius, ses parents à leur « fille très pieuse. »
Les caractères très nets et bien gravés semblent d'une bonne époque. Les barres des E et des F sont d'égale longueur, les O sont bien en forme de cercle, les Q également; leurs queues très longues sont dirigées presque horizontalement vers la droite. Il y a à noter en fait de particularités que les I des noms propres sont généralement placés audessus des lettres qui les suivent ou précèdent et que l'M est inscrit dans l'O du nom de Cominia. Des petites feuilles de lierre séparent plusieurs mots, ainsi que les deux I de piissimoe.
Les abréviations sont régulières, sauf peut-être en ce qui concerne le gentilice du père. Si, en effet, les premières lettres Pomp sont généralement employées pour représenter le gentilice Pompeius, la façon dont elles sont gravées sur cette inscription est toute particulière. L'initiale P est, en effet, de la grandeur des autres de l'inscription, tandis que l'O, l'M et le P sont tout petits et placés en triangle dans l'étroit espace compris entre l'initiale et la bordure de l'inscription. On dirait qu'il y a là comme le repentir du graveur qui, n'ayant mis d'abord que l'initiale du nom, a corrigé ensuite en complétant l'abréviation usitée.
A noter que la fille a comme prénom le gentilice du père et le même gentilice que la mère. Le nom de Pompeius paraît avoir été assez fréquent dans la Gaule narbonnaise. J. Sacaze le cite dans une quinzaine d'inscriptions. Le prénom de la mère, Cominia, paraît être d'origine gauloise ou ibérique. C'est en tous cas un nom indigène. J. Sacaze a publié (Inscriptions antiques des Pyrénées, n° 15) l'inscription d'un certain Caius Cominius qui était préteur à Garcassonne. Ce nom s'est d'ailleurs conservé et nous le retrouvons sous la forme de Cominac, qui est le nom d'un hameau de la commune d'Ercé.
La forme des lettres que nous avons décrite plus haut, et en particulier la queue des Q, permet de supposer que ce monument date du temps des Antonins, ce que confirmeraient les deux observations suivantes.
La formule du début, Memorioe, « fréquente en Gaule narbonnaise, dit Cagnat (Cours d'épigraphie latine, 3e édition, p. 254), était peu usitée avant la fin du onzième siècle ou le début du treizième. » C'est vers cette même époque, d'après le même auteur, que l'on employa certains
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noms gentilices comme prénoms, ainsi que nous l'avons remarqué sur cette inscription.
Les faces latérales sont ornées : celle de droite d'un vase à libations et celle de gauche d'une patère avec manche. Ces deux objets de forme élégante sont sculptés avec soin. Tous les détails, d'ailleurs, sont bien traités : le profil des moulures est bon. Tout cela, joint à son bon état de conservation, font de cette stèle un très beau monument.
D'après le cahier des charges de l'entrepreneur des travaux, cet objet appartenait à l'Etat, qui en a fait don à la ville de Saint-Girons. Il a été transporté par les soins de M. Signoret, juge d'instruction, et avec le concours du président de la Société des études du Couserans, dans le parc du tribunal. C'est là, à l'abri des dégradations, que l'on a l'intention de le conserver, après avoir remis en place la partie brisée.
C'est à l'obligeance de M. Signoret que je dois les photographies cijointes et les renseignements sur les circonstances de cette découverte.
Il paraîtrait, d'après une tradition confirmée par notre érudit confrère M. Pasquier, qu'on aurait déjà trouvé il y a une quarantaine d'années, lorsqu'on construisait la gare de Saint-Girons, des objets d'origine romaine à cette même place. Mais les terrassements que l'on continue encore n'ont pas amené d'autres trouvailles. L'endroit cependant paraît propice, au confluent du Lez et du Salât. Il est contigu, si même il n'appartient pas à un quartier dénommé actuellement Le Luc, et l'on est en droit de se demander si ce nom n'a pas pour origine le mot latin lucus, bois sacré. Il n'y aurait donc rien d'étonnant à ce que dans son voisinage immédiat on trouvât des tombeaux. D'autant plus que si la voie romaine dont on a trouvé des traces sur la rive gauche du Salât, à Prat, à Caumont et à Saint-Lizier, continuait au delà de cette dernière ville, elle devait fatalement suivre l'emplacement occupé actuellement par la voie ferrée, entre la colline et la rivière. C'est à une centaine de mètres seulement du point où le tombeau a été découvert que s'ouvre la vallée du Lez où la pile de Luzenac, aussi bien que les nombreuses inscriptions de Betmale et du Castillonnais, prouvent non seulement la pénétration, mais même une vie romaine assez intense dans cette région des Consorani.
Séance du 9 janvier 1906.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
La correspondance comprend les brochures suivantes : de M. l'abbé BAGNERIS : Les mésaventures de quelques marchands
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de Sainl-Gaudens à Seysses-Tolosane en 1630. — Du MÊME : Les affaires de Montauban el les communautés de la châlellenie de Muret à Frouzins en 1629 (extraits de la Revue de Comminges, 1904 et 1905).
De M. ROGER RODIÈRE : Rapport sommaire sur les monuments liisloriques classés ou à classer du Pas-de Calais. — Voyage héraldique dans quelgues églises du Ponthieu. — Variétés archéologiques. — Supplément au carlulaire des établissements religieux et civils du Boulonnais.
M. le PRÉSIDENT donne lecture des voeux adressés par lui, au nom de notre Société, à nos confrères de la Société archéologique de Tarn-et-Garonne.
An que venetz als pros ainits Donatz plaser, vida gaujosa ; A nos d'auzir tots los bels dits Do Montalba ques gloriosa.
Disetz als hondrad, car es gays Que fizeltat et legalesa Per tots los jorns e mays que mays Lor gardara nostra corteza.
Nous avons, de notre côté, reçu de la Société archéologique de Tarn-et-Garonne les quatre vers suivants :
Ut vis et volutnus, valeas sine fine beata' 1,
El Pallas sludiis adsit arnica tuis; Collige majorum scripturas gestaque narra,
El tua, sub coelo, fama perennis erit.
M. DE PUYBUSQUE offre à la Société un long tableau généalogique dont il est l'auteur, établissant la descendance de Jean Séré, baron de Rivières, et Françoise de Martin, de 1707 à 1709.
M. Jean FODRGOUS, membre résidant, fait lecture des deux notes qui suivent :
Une statue de saint Pierre du treizième siècle.
Il existe dans la sacristie de l'église de Rampouoe (arrondissement de Gourdon, Lot), curieuse surtout par ses intéressantes fresques du quin1.
quin1. vers est emprunté A une correspondance de CharlemaKne.
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zième siècle 1, une statue de saint Pierre d'un caractère très archaïque et paraissant dater du treizième siècle.
Cette statue a un mètre de haut; l'apôtre, d'une physionomie très noble, est représenté assis, la tête légèrement inclinée à droite; il porte la barbe et a les cheveux frisés; sa coiffure est une tiare conique dépourvue des trois couronnes, dont l'usage est postérieur.
La main gauche tient les clefs ; elle est moderne, ainsi que les deux doigts de l'autre main levés pour la bénédiction à la latine. On a aussi ajouté, à une époque peu éloignée de nous, deux pieds chaussés de sandales; nous disons à dessein ajouté, car celui qui les a mis ne s'était point aperçu qu'ils existaient déjà, à vrai dire très vermoulus, et dans une position aussi bizarre que caractéristique, les talons en l'air et la pointe vers la terre, posée sur un coussin. Saint Pierre se trouve ainsi avoir quatre pieds, et les deux nouveaux, qu'il faudrait enlever, sont dans une position tout à fait anormale correspondant à un simple pli de la robe.
La chasuble est ample, pointue vers le bas, et au-dessus paraît l'amict à orfroi orné. Elle est échancrée sur les côtés, comme il était d'usage aux douzième et treizième siècles, et nous en retrouvons une de cette forme, avec amict tout à fait analogue, sur la statue de Matifas de Bussy, évêque de Paris, mort en 13042.
Un buste de femme du quatorzième siècle à Cahors.
Ce buste, des plus intéressants, se trouve dans le mur d'une maison, au n° 10 de la rue Donzelle, à Cahors. Il parait n'y avoir été placé qu'à une époque récente et semble avoir été l'ornement d'une fenêtre.
La physionomie, souriante et jeune, est gentiment encadrée par le haut de la guimpe et par le voile. Ce voile, qui laisse le front à décou- , vert, est surmonté d'une couronne et ses côtés laissent entrevoir les papillotes d'une chevelure.
On reconnaît là le costume de la Clémence Isaure dont la statue est sous la galerie de notre Hôtel ; cette statue du quatorzième siècle est, vous le savez, celle d'une dame Ysalguier; elle provient de la Daurade et a été transformée au seizième siècle s.
1. J. Fourgous, Notice sur les fresques de l'église de Rampoux, dans le Bulletin de la Société archéologique de Tarn-et-Garonne, 1905, p. 12").
2. Quicherat, Histoire du costume en France, pp. 120, 174, 222-23; Larousse, v" tiare, mitre, religieux.
3. E. Roschach, Variations du Roman< de Clémence [satire. Mi'in Acad. se. Toulouse, 9» s., t. VIII, 1896.
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Le buste de Cahors peut aussi se rapprocher de la statue de Marguerite d'Artois de 1311, qui est à l'abbaye de Saint-Denis et dont Violletle-Duc, notamment, a donné un dessin dans son Dictionnaire du mobilier 1.
M. CARTAILHAC dit qu'il a été avisé par M. Salles, ingénieur en chef des ponts et chaussées en retraite, membre du Comité du Musée Saint-Raymond, de la découverte au cours d'une plantation dans son domaine de Nolet, près Grenade, d'une série de médailles isolées. M. E. Delorme a bien voulu examiner ces monnaies et n'a pu déterminer que les suivantes; les autres sont trop frustes :
Colonie de Nîmes. Emporise, colonie de Tarraconaise. lo Denier d'Auguste (pièce fourrée). Droit : tête laurée d'Auguste à droite. Légende : GAESAR • AVGVSTVS • DIVI • F • PATERrçl
PATERrçl deux petits-fils d'Auguste. Caïus et Lucius, debout, tenant chacun une haste et un bouclier. Légende : L. CAESARES AVGVSTI F • cos ■ DESIG • PHINC • IVVENT.
M. Emile CARTAILHAC lit la note suivante :
Une cachette de haches de bronze près Millau (Aveyron).
Les carriers Aug. Lutran et Aug. Calmels exploitaient la pierre sur le territoire du domaine des Aumi ères-Hautes, non loin de Soulobres, près Millau (Aveyron). Un coup de mine faisant sauter plusieurs blocs de rocher et un chêne mit à découvert treize haches de bronze qui étaient à plus d'un mètre de profondeur. L'un des ouvriers en prit sept et en donna deux à M. Seguin, de Millau; l'autre ouvrier en prit six et en donna deux au petit musée de la mairie de Millau 2.
J'ai vu ces quatre haches et M. Seguin a eu la bonté de me remettre l'une des siennes que je viens de déposer au Musée Saint-Raymond, à Toulouse. Il semble que les autres soient égarées et perdues.
Ce sont des haches en bronze jaune, très plates, à bords droits renflés
1. Viollet-le-Duc, Dictionnaire du mobilier, t. III, p. 211.
2. Je remercie M. Artière, membre dévoué de la Société des lettres, sciences et arts de l'Aveyron, et notre correspondant à Millau, d'avoir fait une enquête pour moi sur cette trouvaille.
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légèrement au milieu pour en permettre la préhension â la main ou une plus grande solidité dans l'emmanchure; elles ont 16, 18, 19 centimètres de longueur et proviennent donc de plusieurs moules en coquille. Elles portent encore les bavures et n'ont pas été affûtées. Notre type est plus mince, plus étroit que le n" 661, pi. LXVI du Musée préhistorique, de G. de Morlillet.
Ce type d'instrument est bien connu et très répandu ; il appartient à la première partie de l'âge du bronze, à un niveau de civilisation qui a dû suivre d'assez près celui des mobiliers funéraires de nos dolmens.
Les cachettes de ce genre sont nombreuses en Europe. L'explication simpliste « trésor caché » n'est pas toujours suffisante. Il serait possible que l'enfouissement fût dû à des préoccupations d'ordre religieux.
La trouvaille est d'autant plus intéressante que le Rouergue a fourni très peu d'objets de l'âge du bronze. On a dû en découvrir, mais le fondeur en a le plus souvent bénéficié et aucune note n'a été prise.
M. E. DELORME, membre résidant, communique un curieux
Prospectus de marchand toulousain du dix-septième siècle ainsi conçu :
AVIS.
G ASC aîné, Marchand Bijoutier & Doreur, Rue des Balances, ci-devant rue de la Bourfe, Vend toute sorte de Miroirs, Trumeaux, Glaces en blanc pour équipage, Tables à confole, avec leur deflus de marbre ; Tringle de Paris de toute largeur; Lampes argentées pour Eglife, Encenfoirs, Croix de Proceffion, Croix Pastorales, Chandeliers ou Flambeaux, Bougeoirs, Eteignoirs, Porte-Mouchettes en argent haché & en fimilor, Toute forte de Bijouterie; Tabatières de Carton doublées & fans doubler, à la dernière mode; Toilettes, larretieres, Noeuds d'épée, Sacs à ouvrage brodés en or & en argent; Chaînes de Montre, Crochets pour femme en acier & autres métaux ; Breloques de toute efpece ; Boucles à la dernière mode, Ecrans, Chaifes de Canne, Commodes, Garnitures de Commode, Toiles cirées de toute couleur, Taffetas ciré, Papier à decraffer le vifage, Carmin, Toute sorte de Boutons pour habits à Pinchbec ; Moulins à caffé, Girandoles ou Bras de Cheminée dorés, argentés ou en couleur, & à fleurs, Chenets, Bonnets de Voyage, Joncs garnis & à garnir; Bourfes à tenir d'argent, Fiches, Jetons, Eventails, Cuiliers & Fourchettes de très-bonne compofition ; Fourchettes en acier, Fers à repaffer, Balais de filence en poil de fanglier pour appartemens, Broiffes à frotter, Cire d'Efpagne, Coliers de perle, Toute sorte de Mar-
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cafïites, Lanternes, Crayons, Porte-Crayons ; Bâtons d'Encre à la Chine, Evergettes, Cabarets, TalTes & Sous-Coupes en terre de pipe, Pots-à-1'eau, Sucriers, Globes ou Lanternes de Verre, Caffetieres du Levant, Chandeliers, Vases & Luftres de bois argentés & dorés; Soufléts, Parapluyes de Taffetas de toute couleur, Poupées, Falots, Fouets, toute forte de Colifichets pour amufer les Enfans, Portefeuilles, Poùdroirs, Houpes, Epingles de Paris, Cloux à lentille, dorés & argentés; Toute forte de Quinquaille, & autres articles qui ne font point compris dans le préfent détail ; le tout à jufte prix.
Séance du 16 janvier 1906.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Suivant les prescriptions du règlement, la Société procède aux élections partielles du bureau.
M MÉRIMÉE est réélu directeur et M. Louis DELOHME trésorier.
Mer BATIFFOL présente au nom de M. l'abbé Contrasty, curé de Seysses, la photographie d'un tableau ancien conservé dans la sacristie de son église. Le sujet principal est une procession de Carmes qui entre à Toulouse par la barbacane du Château Narbonnais. Ce tableau a été déjà signalé, mais on n'a pas insisté sur l'intérêt qu'il offre,pour l'histoire monumentale de Toulouse, et la Société pourrait le publier avec une notice spéciale.
M. le baron Desazars de Montgaillard est prié de rédiger cette note.
M. l'abbé H. BREUIL assiste à la séance.
M. Emile CARTAILHAC, en le présentant à ses confrères rappelle, en quelques mots les services que ce jeune érudit a déjà rendus à la science, ses études méthodiques sur l'âge de bronze dans la vallée de la Seine, ses fouilles heureusesdans la grotte du Mas-d'Azil(Ariège), et autres suivies d'excellents rapports, surtout ses découvertes de figures entaillées, gravées ou peintes sur les parois de certaines cavernes. M. l'abbé Breuil n'est pas seulement un savant consciencieux et avisé, c'est un artiste et nul n'a compris et rendu mieux que lui l'art de nos ancêtres de l'âge paléolithique. M. Cartailhac
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insiste sur sa bonne fortune de l'avoir eu pour collaborateur dans l'étude et la publication des grottes ornées de Marsoulas (HauteGaronne) et d'Altamira (Espagne).
M. LE PRÉSIDENT accueille M. Breuil et lui souhaite la bienvenue. Il lui demande de vouloir bien prendre la parole et faire une communication à la Société sur ce sujet bien digne de nous passionner, les débuts de l'art.
La dégénérescence des figures d'animaux et motifs ornementaux à l'époque du renne.
M. l'abbé Breuil dit que l'attention de la Société a été souvent appelée, depuis longtemps, sur les figures des animaux gravés ou sculptés sur os ou sur ivoire; plus récemment elle a entendu des communications relatives aux figures entaillées, gravées ou peintes sur les murailles ou le plafond de certaines cavernes. Généralement on a pu admirer le caractère réaliste des oeuvres laissées par ces vieux dessinateurs, le naturel des attitudes dans lesquelles ils ont fixé les traits des animaux qui leur servaient de modèle.
Dans la contemplation de ces remarquables oeuvres, on n'a guère accordé qu'une attention distraite à un groupe considérable de menues gravures, laissées de côté comme inintelligibles, ou bien interprétées isolément d'une manière forcément arbitraire.
M. Breuil a réuni un nombre très considérable de dessins des objets gravés disséminés dans les collections publiques ou privées; il a fait son possible pour les disposer en séries et pour les éclairer les uns par les autres, en suivant les méthodes usitées dans l'étude des arts sauvages modernes.
Il croit être en mesure d'établir la signification d'une partie de ces dessins, et de montrer comment d'autres en dérivent par une disparition graduelle, une atténuation de plus en plus grande de ce qui caractérisait tout d'abord la représentation figurée.
Un petit nombre seulement de ces dessins simplifiés se remarque sur les parois des cavernes ornées.
L'un d'eux résume en quelques traits sommaires la forme de la hutte II est bien connu déjà sous le nom de Tecliforme.
Un autre n'est que le schéma de la main et il se réduit souvent à une sorte de grille ou à un peigne. Ces mains gravées sont fréquentes aussi sur os et bois de renne. Très souvent on découvre le bras
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tout entier, avec des faciès linéaires variés. Ailleurs, c'est la queue de poisson, tantôt en os découpé, même percée d'un trou de suspension, une amulette sans doute, tantôt gravée seule ou géminés. Il y a aussi le poisson entier qui subit de nombreuses transformations. Ici la queue est de grandeur exagérée, là elle paraît aux deux extrémités, ailleurs le corps s'élargit ou s'allonge démesurément. Des traits obliques ou transversaux en font le remplissage. Certains dessins montrent des poissons rangés les uns à côté des autres et alternativement en sens inverse. Ils nous conduisent à d'autres où les unités voisines se sont fusionnées de manière à être méconnaissables.
Les dessins de serpents et leurs dérivés sont de même très répandus.
On peut distinguer, parmi les gravures ornementales des os, des empreintes de pas humains et de pieds d'animaux. De semblables figurations sont communes chez les peuples chasseurs primitifs, australiens, américains et autres. La jambe antérieure du cheval ou du bison est un motif fréquemment traité dans la sculpture et le bas-relief; ainsi que la ramure du renne, séparée du reste de la tète, Les yeux gravés séparément se rencontrent assez souvent,ceux du bison semblent avoir joué un rôle particulièrement intéressant, toujours accompagnés de la corne, gracieusement incurvée. Ils finissent par fournir de véritables spirales et aboutir à la volute.
Les plus nombreuses et les plus intéressantes séries de figures dégénérées proviennent des altérations de figures de tête.
D'abord la tête entière du cheval est sculptée au bout de baguettes d'os, la crinière et les oreilles figurées en saillie. D'autre.3 têtes sont découpées sur de minces lames, surtout dans la région pyrénéenne. Puis, avec des transitions, le sujet devient méconnaissable.
Nombre de dessins représentant des cervidés forment une catégorie importante. Les animaux sont figurés en raccourci, de dos, de ventre, de devant ou derrière, ou bien le corps se développe, se modifie.
La tête du cheval, du cerf, etc., par une série bien continue, évolue de même. Sur telles pièces ce sont des théories de têtes; sur d'autres, il ne reste que les oreilles ou les cornes. Quelquefois un objet vous fournit la succession révélatrice, depuis la tête bien dessinée juqu'au schéma géométrique.
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Ces dernières transformations jouent un grand rôle dans l'ornementation de l'âge du renne.
L'art de cette période s'est développé sans doute avec un degré extraordinaire de vérité et d'observation de la naturelles artistes qui en ont gravé et sculpté les chefs-d'oeuvre ou qui les ont peints sur les murailles des cavernes demandaient aune étude directe de la nature les sujets qu'ils exécutaient avec tant de perfection, mais, à côté d'eux, des copistes plus ou moins expérimentés et informés copiaient et défiguraient les oeuvres dont ils s'inspiraient, arrivant inconsciemment à modifier profondément, à abolir, et parfois à inverser même le sens d'une figure naturaliste, jusqu'à la réduire au misérable rôle de motif ornemental. Dans l'art quaternaire comme dans la plupart des arts sauvages, à côté du stock bien limité des plus rudimentaires ornements primordiaux et de ce qui résulte de la transformation en éléments décoratifs de particularités industrielles, l'ornementation est donc le fruit de l'altération de plus en plus profonde de l'art figuré.
M. le PRÉSIDENT remercie M. l'abbé Breuil de sa communication si originale qu'il a constamment éclairée par des dessins vivement et habilement tracés au tableau, aussi rapides et aussi nets que sa parole. M. Breuil va enseigner cette science française, la paléontologie humaine, aux nombreux étudiants de l'Université de Fribourg accourus de toute l'Europe centrale. Puisse-t-il nous revenir quelquefois. Les riches gisements de notre Midi le réclameront toujours. Qu'il tienne notre Société au courant de ses travaux et soit un de ses correspondants.
A la suite de cette proposition, la Société inscrit M. l'abbé Breuil au nombre de ses correspondants.
M. l'abbé F. GALABERT, membre correspondant à Aucamville, a envoyé la note suivante dont il est donné lecture.
Un manuscrit explicatif des hymnes du Bréviaire.
Le hasard des recherches m'a fait rencontrer, dans une gentilhommière du Quercy, un manuscrit qui gisait pêle-mêle avec des paperasses
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et des parchemins seigneuriaux. Je me hâte de dire qu'il n'a pas une grande importance; c'est une explication des hymnes du Bréviaire romain.
In-4° de 21 sur 29 centimètres, il a encore 33 feuillets, en papier, non numérotés, dont plusieurs ont été dégradés par l'eau de pluie malgré une couverture en parchemin ; celle-ci présente à l'intérieur un dessin d'arcatures de vitrail ou de fenêtre tracées à la pointe sèche. Le papier porte comme marque de fabrique, tantôt une grossière croix de carrefour avec piédestal parallélogrammatique, tantôt une couronne ouverte, décorée de deux fleurons et d'un trèfle.
La lecture du manuscrit est pénible et même difficile, tant elle renferme d'abréviations qui ne sont pas mentionnées dans le manuel de Chassang; la difficulté s'augmente de ce que souvent les lettres initiales des alinéas manquent, le rubriciste n'ayant pas fait son oeuvre; elles sont pourtant quelquefois indiquées en marge. Enfin, le texte des hymnes est celui d'avant la revision ordonnée par le concile de Trente.
Après cette invocation, fréquente dans les registres notariés du quinzième siècle :
Presens huic operi sit gracia Neumatis almi,
le manuscrit débute ainsi : « Iste liber dicilur liber ymnorum. »
La valeur scientifique de l'ouvrage est légère, car les explications sont presque toujours littérales et môme rudimentaires; vraisemblablement, dans l'intention de l'auteur, elles n'avaient d'autre but que d'initier de jeunes clercs à l'intelligence des mots savants ou poétiques. Voici, en effet, comment il commente la strophe suivante de l'hymne de Matines :
« Jam nunc, paterna claritas, « Te postulamus affatim, « Absit libido sordidans « Omnisque actus noxius.
« Jam postulâmes nunc, o paterna claritas, affatim id est habundantius, ut libido id est luxuria et mala concupiscencia. Libido dico sordidans nostra corpora. Et ornnis actus noxius id est omne malum opus. Absit id est longe sit, ut anima cum corpore non fedescat. »
Ailleurs, l'auteur va jusqu'à expliquer la syncope : « Dampnarat, id est dampnaverat, per syncopam. »
Ab uno disce omnes. Même dans l'introduction, où il s'est donné un peu plus libre carrière, l'auteur ne se montre pas plus scientifique ni plus théologien: témoin la légende suivante d'après laquelle, à la suite d'une descente au Purgatoire par saint Paul, les âmes n'y éprouveraient
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aucune souffrance depuis les premières vêpres du samedi jusqu'à l'heure de prime du lundi :
<> Dico diem dominicain esse majorem aliis diebus, quia mundus conditus fuit et Ghristus resurrexit eadem die, scilicet in dominica, et in eadem die beatus Paulus descendit ad Inferos cum angelo, et impetravit a Domino quod a die dominica vel a vesperis diei sabbati usque ad horam primarn diei lune sequentis, cessaret poena cruciatorum. Ergo habet primatum ante alias dies quia est major aliis diebus lacius a partibus enumeratis vel ab antécédente. » (F° 1 v<>.)
Me basant sur les restaurations et additions aux livres choraux, que le chapitre de Montpezat confiait quelquefois à l'abbaye de LagardeDieu, j'avais cru un moment que le manuscrit était l'oeuvre des moines cisterciens de cette abbaye, attendu qu'il n'y a pas loin de là à la gentilhommière en question; rien n'est venu confirmer cette hypothèse; en tout cas, peu après les premières années du quinzième siècle où, si nous en croyons l'écriture, il fut écrit, le manuscrit, dès 1423, appartenait à un notaire castrais, qui le prêta à Raymond Azémar, régent des écoles de Castres ; il passa plus tard, au seizième siècle peut-être, aux mains du bachelier castrais Antoine Olivier.
C'est ce que nous apprennent deux notes qui précèdent le feuillet final, où se trouvent transcrites deux hymnes à saint Nicolas de Myre et à sainte Catherine d'Alexandrie. Il n'est pas inutile de'faire observer que ces deux saints, très vénérés des écoliers du Moyen-âge, confirment nos dires touchant l'affectation du manuscrit à de jeunes clercs.
Voici les deux notes : « Iste liber est mei Ramundi Sabaterii, notarii de Gastris, quem, per modum accommodati, magistro Ramundo Adzemarii, in artibus bacalario, regenti scolas civitatis Castr. tradidi die XIIII marcii, anno Domini M° IIIIc XXIII 0, R. Sabaterii. »
Au-dessus de cette note barrée, et d'une écriture bien postérieure, un autre possesseur a écrit : « Iste liber est mei Anthonii Oliverii, in legibus bacallarii, habitatoris de Castris. »
Séance du 23 janvier 1906.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. le baron DESAZARS DE MONTGAILHARD présente les observations qui suivent sur le tableau dont la Société s'est entretenue dans la précédente séance.
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Le tableau de Seysses, un coin du vieux Toulouse
(Avec une planche hors texte.)
Pour résoudre le petit problème que propose la photographie soumise à la Société archéologique et qui représente une longue procession précédée de religieux portant le costume des Carmes, traversant une campagne et entrant dans une ville fortifiée, d'après un vieux tableau conservé en l'église de Seysses (arrondissement de Muret), il faut se reporter aux anciens plans de Toulouse, et, en particulier, à celui de Melchior Tavernier, daté de 1631, et à celui de Jouvin de Rochefort, gravé en 1770, qui donnent la figuration approximative des mouvements de terrain et des principaux monuments de la ville.
Cette procession semble venir d'une église située dans le lointain, à droite du tableau. Elle se déroule en longue file en passant devant une autre église occupant le milieu du tableau, arrive jusqu'à la porte de l'église fortifiée, placée à la gauche du tableau, et pénètre dans la ville en faisant un contour pour passer sur un pont à cheval sur le fossé longeant les remparts. Le pont n'est donc pas en face de la porte et la porte s'ouvre de biais par rapport au pont et parallèment aux remparts.
Cette situation convient essentiellement à l'entrée ancienne de Toulouse par la porte dite du Château-Narbonnais ou de SaintMichel, donnant accès dans la ville du côté du sud-est par les rues dites de Sainl-Michel et des Récollets ou de l'Observance. Seulement, la situation a été retournée : les édifices qui, dans la photographie, se succèdent en allant vers le midi, c'est-à-dire la porte, le pont et la tour avoisinant munie d'une horloge, auraient dû suivre l'ordre inverse en se dirigeant vers le nord.
En effet, si l'on examine le plan Tavernier (1631), on y distingue le même contour donné par la photographie du tableau pour arriver par le pont jusqu'à la porte. On y voit la même porte en plein cintre garni d'une herse dans la partie supérieure. On retrouve, après la porte, et presque en face du tournant sur le pont, une haute tour carrée dont l'étage supérieur porte un cadran d'horloge, comme dans le tableau.
Des indications semblables sont fournies par le plan Jouvin de
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FIG. 1. — Réduction d'une partie du plan mss. de 1680, — QUARTIER DU CHÂTEAU NARBONNAIS, — sur laquelle on a indiqué le tracé des voies actuelles.
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Rochefort (1770), qui mentionne en termes exprès la « tour de l'horloge » et la figure adossée à un grand éditice qui n'est autre que le palais du Parlement (fig. 1).
Après la porte, le tableau de Seysses nous montre la ligne des remparts continuant, et l'on aperçoit à l'intérieur un édifice rectangulaire flanqué, à chaque angle, de tours rondes à pignons aigus : c'est l'ancien Château-Narbonnais placé à l'intérieur des murailles et à moitié caché par elles. Nous en avons une figuration plus complète dans la miniature conservée aux archives du Donjon, qui
représente l'arrivée de Louis XIII à Toulouse en 1632. (Voir sa reproduction dans les Éludes et Notes d archéologie de Joseph de Malafosse, p. 57.) Nous y retrouvons la même porte que celle du tableau de Seysses, seulement vue de l'intérieur au lieu de l'extérieur, avec son plein cintre garni d'une grille en forme de herse, et nous y voyons les mêmes tourelles d'angles (fig. 2).
Il n'y a donc pas de doute : il s'agit de l'entrée à Toulouse d'une procession de Carmes, et cette procession y entre par la porte SaintMichel ou du Château-Narbonnais en se déployant en longue file et en suivant une route traversant la campagne qui s'étend sous les remparts.
Cette entrée solennelle des Carmes rappelle évidemment un fait
FIG. 2. — Entrée de Louis XI11 a Toulouse. Entrée de la Barbacane. La Porte Narbonnaise.
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historique rapporté par Catel dans ses Mémoires de Languedoc (p. 237), et ce fait est celui du transfert des Carmes de leur chapelle appelée Notre-Dame-du-Férétra, du temps de Catel, au couvent bâti par eux au treizième siècle « au coeur de la ville », c'està-dire sur l'emplacement aujourd'hui appelé la place des Carmes.
Or, le tableau de Seysses date, selon toute vraisemblance, du milieu ou de la fin du dix-septième siècle. A cette époque, les peintres avaient l'habitude, même lorsqu'ils étaient le plus disposés à faire de la couleur locale, de se contenter des monuments et des costumes de leur temps, et de composer leurs tableaux arbitrairement en déplaçant les édifices pour les replacer à leur guise, et souvent même en les défigurant sous prétexte de les rendre plus pittoresques. On peut en juger par les diverses représentations de Toulouse comme, par exemple, dans l'ouvrage de Bertrandi, datant du seizième siècle, et même sur les plans figuratifs du dix-septième siècle.
C'est, notamment, ce qu'a fait l'auteur du tableau de Seysses. Il a voulu rappeler l'éloignement des Carmes de la ville, leur isolement dans la campagne, et, en conséquence, il a supprimé toutes les maisons que l'on voyait de son temps en cet endroit. En revanche, il a fait figurer à leur place le couvent des Carmes déchaussés qui était situé en face de la porte Montgaillard et il l'a mis à la place de l'église Saint-Michel qui se trouvait normalement sur le passage de la procession, non loin de la Porte-Narbonnaise. Il ne peut y avoir de doute à cet égard, car l'église figurée au milieu du tableau ressemble assez exactement à celle des Carmes déchaussés figurée sur le plan de Melchior Tavernier (1631), avec son clocher à flèche pointue et son enclos de forme carrée, tandis qu'elle ne ressemble nullement à l'église Saint-Michel qui n'avait pas de clocher à flèche pointue, dont la façade était surmontée d'un Saint-Michel aux ailes déployées qu'on ne retrouve pas sur le tableau de Seysses et qui était entouré de maisons également absentes sur le tableau.
• M. CI. Lassalle, photographe de la Société, chargé par elle de prendre une copie du tableau de Seysses, écrit qu'il a été réencadré il y a une trentaine d'années, raccourci de 0"20 environ, et que dans la partie de la toile retournée derrière le BULL, m, 1906. 28
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châssis on lit l'inscription suivante en capitales noires sur fond blanc :
TRANSLATION DE L'IMAGE
MIRACULEUSE DE LA TRÈS
SAINTE VIERGE DANS CETTE
ÉGLISE L'AN 1204 (ou 1264).
Ancienne signature du tableau n'est apparente.
Séance publique du 26 janvier.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Suivant l'usage, la Société a tenu sa séance publique annuelle dans le grand salon de l'hôtel d'Assézat. Un nombreux auditoire était présent.
M. Jules DE LAHONDÈS a ouvert la séance et prononcé le discours suivant :
La restauration des monuments.
« Nos monuments du Moyen-âge ont subi des destinées fort diverses. Formés des énergies et des croyances de la nation, élevés pierre à pierre par ses efforts les plus spontanés, expression suprême de son âme, ils se sont vus dédaignés pendant trois siècles. La Renaissance avait détourné vers l'art antique l'attention exclusive et méconnu l'originale et puissante beauté de l'art médiéval. Les sculpteurs et les peintres, les architectes surtout ne surent plus voir la nature et la beauté qu'à travers les oeuvres des anciens. Et si, aux premiers jours, le goût, la mesure et l'élégance amenée par les Italiens, qui furent les premiers imitateurs de l'antiquité, réalisèrent une alliance exquise, mais qui dura peu, dans les ateliers de la Tour-aine, la tyrannie bientôt exercée par l'étude, non de l'Atlique radieuse mais des livres des commentateurs, imposa les règles d'une architecture froide et conventionnelle, en contradic-
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tion avec les moeurs, la foi de la France, comme avec son climat lui même.
« Un temps vint où la suprême injure à adresser à un monument fut de l'appeler gothique. Tandis que le président de Brosses la jetait au palais des Doges, à Toulouse, M. de Mondran, l'homme de grand goût à qui nous devons le plan de nos belles promenades et le développement de notre École des arts, proposait de détruire les portails de nos églises qui offensaient la pureté de ses attachements classiques et de les remplacer par des façades selon Vitruve, afin de faire oublier l'ordre gothique, seul moyen de faire naître le sens de la belle architecture.
Cependant, malgré les étranges, étrangères surtout, conceptions des pédants, l'âme populaire demeurait attachée aux monuments qui, dans leur langage familier, lui parlaient de ses souvenirs, de tout ce qui lui était cher, de tout ce qui faisait le fonds de sa vie. Les esprits sincères, chez lesquels les doctrines imposées n'éteignaient pas la voix du sentiment intime, s'abandonnaient aux mêmes émotions. Montaigne se laissait troubler par la « vastité sombre » de nos églises. J'imagine que Mme de Sévigné était saisie, malgré les souvenirs de Versailles, par l'austère simplicité des sanctuaires de Bretagne, elle qu'agitait un mouvement déjà presque romantique dans la sombreur des bois de Ligny, car dans sa verve impulsive elle ne reculait pas devant l'invention d'un mot pour exprimer un sentiment.
« Et c'est pourquoi le goût instinctif de la race, l'influence de la tradition et l'empire des habitudes comme des convenances liturgiques, firent encore construire dans plusieurs villes des églises gothiques pendant les dix-septième et dix-huitième siècles. Lés Jésuites eux-mêmes, dont on accole sans cesse le nom à une architecture selon les ordres antiques trop surchargés d'ornements et de festons, et je ne dis pas qu'ils en soient absolument innocents, élevèrent cependant plusieurs églises gothiques, surtout dans les Flandres, en Picardie et en Bourgogne. Et vous savez qu'ils avaient recommencé ici avec leur élégante chapelle de la rue des Fleurs.
« Mieux encore. Les traditions des maîtres d'oeuvres du Moyenâge étaient si vivaces, leurs méthodes étaient si sûres que les constructeurs d'églises faisaient du gothique sans s'en douter. SaintSulpice, par exemple, comme bien d'autres, est une église de struc-
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ture absolument gothique, en dépit de ses piliers et de ses arcades aux classiques profils. El Lassus a démontré que la Madeleine ellemême, à travers ses apparences mensongères de temple grec, était aussi une église gothique avec sa voûte dont la poussée s'appuie sur des contreforts entre lesquels s'ouvrent des chapelles, comme dans nos nefs toulousaines.
« On conservait aussi dans le même temps le respect des églises anciennes, même lorsque des nécessités nouvelles obligeaient à des adjonctions qu'on avait soin d'harmoniser avec les lignes de l'édifice, comme le rétable de Saint-Étienne, par exemple. Si trop d'ordonnances épiscopales ordonnèrent, sous l'influence des sécheresses jansénistes, le blanchiment des nombreuses nefs, elles savaient s'arrêter devant la beauté souveraine de quelques-unes, comme, auprès de nous, de celle de Sainte-Cécile d'Albi.
« D'ailleurs, le Moyen-âge n'était pas aussi oublié qu'on l'imagine, et bientôt une attention plus sérieuse et mieux avertie était ramenée vers son histoire, ses institutions et ses arts même. Les Bénédictins furent les premiers initiateurs de ce retour avec Mabillon, Montfaucon, surtout avec nos deux historiens de Languedoc nourris d'érudition dans l'abbaye de la Daurade.
« La Révolution et l'Empire arrêtèrent ce mouvement par une idolâtrique reprise de calque absolu de l'antiquité romaine. On fut tout à Brutus, on allait être tout à César. Mais, au moment même du passage rapide de l'un à l'autre, comme dans la scène ironique de Shakespeare, un homme écrivait et il écrivait dans une langue vibrante et colorée qu'il a imposée à son siècle et que tous ont parlée après lui. De même que Chateaubriand ramenait l'histoire nationale à ses sources en ouvrant la voie féconde et revivifiante où devaient s'engager Amédée Thierry et Michelet, de même qu'il demandait aux poètes d'être, non pas les copistes mais vraiment les imitateurs des anciens qui avaient chanté leurs dieux, leur patrie et eux-mêmes, leur mer harmonieuse et leurs forêts profondes, il disait aux artistes : « Au lieu de vous immobiliser dans de « froides redites qui ne sont plus que des imitations d'imitations où « rien ne reste des inspirations primitives, entrez donc dans ,les « églises où palpite l'âme des aïeux, où la vôtre ne peut s'.empê« cher d'être émue, et où des excitations nouvelles viendront la soulever. » .....■,-.-.• ';
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« Ne cessez pas, semblait-il dire encore, d'admirer les statues du Parthénon dans la sérénité olympienne de leur impassible beauté, mais arrêtez-vous parfois devant celles des portails de nos cathédrales dont la pensée grave ouvre le regard profond et dont une pathétique émotion plisse les lèvres.
« Chateaubriand a vraiment créé l'âme intellectuelle, le verbe poétique et l'art même du siècle qui s'ouvrait.
« Mais le courant facti^ de l'éducation classique avait creusé une empreinte si profonde que la direction vers des horizons plus lumineux et plus ouverts ne se dessina franchement qu'après quelques années. C'est en 1820 seulement qu'éclata le retentissement prodigieux des Méditations de Lamartine, du Chateaubriand en vers que l'on attendait depuis vingt ans, et c'est en 1831 que l'on entendit résonner en l'honneur de l'art français la claironnante fanfare de Notre-Dame de Paris. Les appels chaleureux de Montalembert suivirent avec les premières études de Mérimée, de Didron et de bien d'autres. Puis, après cette aurore d'enthousiasme pour l'art monumental du Moyen-âge dont on admirait le caractère et le pittoresque, mais dont on ne saisissait pas encore pleinement l'essence et la valeur architecturales, vinrent les analyses approfondies, les pénétrations sagaces de nouveaux écrivains critiques, particulièrement de Quicherat, surtout de Viollet-le-Duc, qui révélèrent l'originalité puissante et la profonde logique de la construction gothique.
On apprit alors que cet art, le seul vraiment original avec l'art grec qu'ait eu l'Europe, ainsi que. l'a dit notre collègue M. Maie, dans son beau livre l'Art religieux au treizième siècle, était régi comme celui dé l'Attique, à la grande stupéfaction des fervents de l'antiquité, par des lois précises réglant non seulement l'harmonie des lignes et l'élégance des profils, mais les conditions de stabilité dans la hardiesse et de résistance dans la légèreté. L'étude de l'art gothique était devenu une science positive.
Mais alors surgit un danger nouveau, inattendu, désastreux.
L'art traité, naguères de barbare avait obéi, au contraire, à. des lois mathématiques que les restaurateurs de nos monuments du Moyen-âge s'attachèrent à appliquer dans leur rigueur absolue, tandis que l'art pur et sincère du Moyen-âge, comme celui de toutes les belles époques, avait jalousement gardé sa liberté et sa souplesse
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pour s'harmoniser avec les variétés des moeurs locales, des convenances, des matériaux et du climat.
Et c'est ainsi que plusieurs de nos monuments, de nos monuments méridionaux surtout, mal compris par des architectes parisiens, ont été défigurés depuis déjà un demi-siècle.
Il serait trop long de les énumérer même, mais trois d'entre eux, auprès de nous, montreront les résultats déplorables de ces systématiques transformations.
Plusieurs Toulousains peuvent se rappeler encore le grave et robuste aspect que présentaient les lignes enveloppantes de la basilique Saint-Sernin. Elles traduisaient son austère et magistrale simplicité, elles révélaient dès le premier coup d'oeil ses dispositions intérieures. La restauration entreprise par Viollet-le-Duc, dès 1860, lui a enlevé son caractère de gravité imposante. Elle l'a pour ainsi dire amenuisé, je dirais presque mignardise par la succession, et vraiment les cascades de toitures couvrant les nefs diverses, par la guirlande d'arcatures entourant l'édifice comme d'une collerette que nul élément de la construction première n'appelait et ne justifie. Les toits en saillie protégeant les murs et projetant de larges ombres qui accentuaient sur le ciel les lignes dominatrices, propres d'ailleurs aux provinces méridionales, comme à nos voisines d'Italie et d'Espagne, dessinaient non seulement des profils plus pittoresques, mais s'adaptaient mieux aux exigences de la construction. C'est un des principes de l'art architectural, proclamés par Viollet-le-Duc lui-même, de manifester loyalement la fonction de tous les éléments d'un édifice et de ne pas les dissimuler.
« A Saint-Sernin, on semble avoir voulu ne pas laisser apparaître les toitures, et cette préoccupation a amené à ne pas leur donner une inclinaison suffisante, si bien que celles des bas-côtés retiennent complaisamment les poussières et l'eau de pluie et se transforment au printemps en une prairie émaillée de fleurs, où les botanistes pourraient entreprendre une excursion. La même pensée a fait surélever l'élégante porte des Innocents, de proportions si justes, par l'acrotère aux arcades aveugles qui l'alourdit. Que signifient encore les animaux fantastiques, venus du Nord, perchés aux pignons des transepts dont ils rompent la sereine ampleur? Rien de pareil ne s'y voyait.
« On avait surmonté, il est vrai, longtemps après la construction
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première, les murs de la haute nef par une courtine ajourée d'arcades cintrées, mais cette adjonction se justifiait par la nécessité d'aérer les voûtes et de les dégager du poids des tuiles qui reposaient à cru sur elles, en établissant une charpente. Bien qu'elle demeurât comme un témoin d'un des faits de l'histoire de Toulouse et qu'elle s'harmonisât aussi avec le couronnement de plusieurs édifices religieux ou civils de la ville, peut-être ne doit-on pas attaquer son enlèvement parce qu'il a restitué au clocher sa hauteur et son fier élancement.
«Dans l'intérieur, d'ailleurs très bien conservé, il n'a guère été possible de toucher à l'ordonnance robuste et sobre des piliers et des arcades. Seules les chapelles du sanctuaire et la vénérable tour des Corps-Saints, comme on l'appelait autrefois, ont subi des transformations regrettables. Il a semblé un moment, avant que la piété des fidèles eût voilé de nouveau la nudité des murs, qu'une armée de barbares les eût dépouillés des ornementations dont celle des ancêtres les avait couverts. Si informé que l'on soit des caractères et du style du douzième siècle, comment peut-on être assuré de rétablir absolument l'état premier d'il y a six cents ans? Et dans le doute, pourquoi avoir enlevé les bas-reliefs en bois retraçant les scènes de l'histoire de la primitive Toulouse chrétienne, qui donnaient dans leur naïve interprétation du temps de Louis XIII des indications précieuses sur les costumes comme sur les conceptions de l'art à cette époque? Pourquoi aussi, sous prétexte de pureté du caractère roman et d'unité de style, avoir fait descendre les statues d'une expression si étrange qui entouraient le sanctuaire ? On avait, il est vrai, sapé les colonnes adossées pour leur donner comme un socle et un dais dans une niche, mais combien elles ajoutaient à l'impression mystérieuse ressentie dans l'auguste déambulatoire!
Leur grave cortège autour de l'autel expliquait peut-être leur personnalité, et aujourd'hui égarées dans le Musée, si bien dégagées qu'elles aient été par les zélés et habiles directeurs du blanc suaire dont le badigeon les avait revêtues elles perdent leur signification et gardent plus jalousement encore leur impénétrable secret.
« Ces excès ont du moins fait prendre aujourd'hui la décision bien arrêtée de ne pas détruire, sous prétexte d'unité d'époque, les ornementations, souvent d'ailleurs très harmonieuses, que les gêné-
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rations diverses ont ajoutées aux édifices. Comme eux, elles méritent le respect; comme eux, elles traduisent la pensée pieuse et la volonté des ancêtres; comme eux, elles sont des témoins de l'histoire de l'art, elles font d'une église un organisme animé et toujours vivant dont le coeur jamais n'a cessé de battre.
« Les anciennes églises ainsi rajeunies se rapprochent trop des postiches gothiques géométriques et secs, rigides et froids que l'on voit aujourd'hui et qui ressemblent si peu aux nefs du Moyen-âge, variées et touffues, pleines d'âme.
« La grande oeuvre de Viollet-le-Duc est la restauration de la cité de Carcassonne. Il a d'abord vraiment révélé à l'admiration des archéologues, des artistes, et, on le peut dire, du monde entier, cet ensemble unique d'une ville fortifiée, cette Pompéï du Moyen âge militaire, dont il y a un siècle à peine, Millin, un archéologue, parcourant le Languedoc pour en étudier les antiquités, disait négligemment : < La cité est la vieille ville où les rues sont étroites. » Il en a rempli les pages de son dictionnaire en les éclairant d'innombrables dessins grâce auxquels son élégant et inimitable crayon est aussi démonstratif que sa plume d'écrivain. Il a analysé avec une sagacité qui tient de la divination l'ingéniosité des artifices de défense, leur multiplicité et leurs combinaisons pour déjouer l'attaque. Enfin, il en a poursuivi, pendant plus de vingt ans, une restauration qui est la moins contestable de toutes celles qui furent entreprises par le grand interprétateur de l'art monumental du Moyen-âge.
« Il était guidé, d'ailleurs, par les assises anciennes dont les supérieures seules étaient dégradées. Il ne pouvait guère s'égarer, et il n'était pas possédé, comme il le fut plus tard à Pierrefond, par exemple, du désir de réaliser une pensée personnelle, de créer pour ainsi dire un cours en nature de l'art superbe auquel il avait voué sa vie. Il se soumettait encore absolument au monument qu'il était chargé de relever.
« Les critiques cependant ne lui ont pas été épargnées. Quelquesunes furent injustes ou inconsidérées, celles, par exemple, qui attaquèrent les toitures des tours. Que les tours fussent couvertes, le doute n'était vraiment pas permis. Elles ne pouvaient être protégées par un dallage sur voûtes, puisqu'on ne voit nulle part des arrachements d'arcs qui auraient supporté les voûtes et qu'on remarque au
Société Archéologique du Midi
Bulletin 1906.
PEINTURE DU XVHC SIÈCLK DE L'EGLISE DE SEYSSES (HAUTE-GARONNE). Les Carmes entrant â Toulouse, vers 1260.
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contraire au-dessous des corniches les trous pour les solives d'un plancher.
«En contestant l'ardoise et l'abandon de la tuile romaine à laquelle la province avait été fidèle, on oubliait que les tours avaient été construites par les architectes du Nord, envoyés par saint Louis et Philippe le Hardi. Puis on n'a pas trouvé seulement dans les débris accumulés à leurs pieds d'innombrables fragments d'ardoises, mais on peut voir encore, à côté de la porte Narbonnaise, un bas-relief ancien qui la représente couverte d'une toiture en flèche dont la pente indique l'emploi unique de l'ardoise. L2 haut pignon voisin de la tour du Trésau le démontre de même.
« Mais s'ensuit-il que le restaurateur ait dû recouvrir toutes les tours de ce mode de toiture?
« Les tours visigothes, imitatrices fidèles des constructions romaines, durent être couvertes de tuiles, et de même les tours du château, construites sous la direction des comtes, par les ouvriers du pays. Celles-ci, d'ailleurs, rondes à l'extérieur, sont polygonales au dedans pour permettre d'établir sur les côtés une charpente à pans, appropriée à une couverture en tuiles.
«La variétédeces combles, en même temps qu'elle aurait été plus fidèle à la construction locale, aurait aussi présenté un aspect général de la cité plus pittoresque et lui aurait enlevé une uniformité systématique si opposée à l'art libre du Moyen-âge, attentif à suivre les usages et à utiliser les matériaux du pays.
« Me permetlra-t-on de citer la naïve et inconsciente critique de mon petit-fils, alors âgé de quatre ans, lorsqu'il aperçut des hauteurs de Grazailles le bataillon de pointes dardant vers le ciel : « Oh! « combien de moulins à vent !»
« L'éminent architecte, entraîné ensuite par la pensée devenue dominatrice de créer une démonstration monumentale plutôt qu'une restitution fidèle, modifia son propre plan initial de la restauration de la tour carrée Saint-Nazaire, la plus ruinée, il est vrai, dont les murs ébréchés surtoutes leurs faces présentaient un aspect à ravir un dessinateur ou un aquarelliste. Dans le tracé projeté, publié par les Archives des monuments historiques, cette tour figure avec un toit à quatre pans en ardoises, et, plus tard, en exécution, c'est un dallage à découvert sur lequel on aurait pu dresser un engin de guerre, baliste ou mangonneau.
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« Le Châtelet qui défend les aproches de la porte Narbonnaise paraît bien grêle au-dessous des lours imposantes. Puisque rien n'en restait, pourquoi cette construction complète improvisée?
« En vérité, on voit à la Cité trop de pierres neuves. Elles détruisent le caractère et le sentiment des siècles envolés, au Château surtout. La hauteur trop considérable des deux donjons aux pignons à degrés, qui n'était pas indiquée d'abord davantage, enlève à l'altière tour de guette son aspect dominateur et jusqu'à sa raison d'être.
« Trop de pierres neuves aussi peut-être à l'église Saint-Nazaire, surtout dans la partie romane. Quelle indication a pu amener à élever les pierres de grand appareil de la façade purement romane sur les assises anciennes qui sont en petit appareil? Les dispositions compliquées des hautes oeuvres n'étaient pas indiquées par l'état antérieur, comme on peut le voir par le dessin d'état actuel gravé d'après celui du maître lui-même dans les Archives des monuments historiques. Mais cet admirateur, peut-être trop exclusif, de l'art gothique et même de l'art seul du treizième siècle a restitué à souhait le merveilleux joyau du choeur qui évoque le souvenir de la Sainte- Chapelle par la vibrante harmonie de la sveltesse des lignes et de l'éclat des vitraux. Quelques ornementations sont toutefois purement modernes, comme, par exemple, le gable avec gargouilles, — des gargouilles à l'intérieur d'un édifice! — au-dessus de la niche de la pathétique Piéta.
« Le choeur de Saint-Nazaire est une oeuvre d'architecture de l'Ile-de-France directement importée par les maîtres d'oeuvre de saint Louis. La cathédrale d'Albi est, au contraire, un monument purement méridional, et elle offre même, par ses proportions comme par sa<late, le premier et le plus admirable modèle des nefs uniques avec chapelles entre les contreforts si multipliées dans nos provinces. Si à l'intérieur elle est un musée complet de l'art du Moyen-âge, elle présente, ou plutôt, hélas! elle présentait au-dehors un aspect dominateur et robuste de forteresse qu'expliquait son histoire, qui s'harmonisait avec les mu railles et le fier donjon du palais épiscopal contemporain et que tout commandait de respecter. Le couronnement des murs altiers n'avait pas été achevé; ils ne demandaient rien, toutefois, pour leur solidité inébranlée d'une ligne depuis six siècles; mais puisque l'on voulait à toute force les terminer, l'hési-
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tation du mode de complément n'était vraiment pas permise. Le modèle s'imposait, non seulement par les chemins de ronde couverts des Jacobins et des Cordeliers de Toulouse, mais surtout par celui du donjon de l'évêché qui forme avec la cathédrale un ensemble de défenses dont il importait de maintenir le caractère et l'unité. Et l'on a vu se dresser sur les contreforts un régiment de tourelles pointues dont les acuités multipliées détruisaient la tranquille puissance du monument, s'opposaient par leur répétition monotone au sentiment de l'art libre et varié du Moyen-âge et amoindrissaient le clocher. Tout condamnait cette bizarre adjonction inattendue; rien ne la justifiait, ni l'imitation hors de propos du petit pinacle d'une chapelle voisine, très postérieure, ni surtout la tourelle surmontant le contrefort du chevet dont la signification était ainsi détruite puisqu'elle était la lourde guette plongeant sur les rues populeuses et dominant la campagne.
« Les clochetons ont disparu sous la condamnation universelle que notre Société archéologique fut la première à provoquer; mais le mal est irréparable. Le chemin de ronde reste à découvert livrant aux ravages de l'humidité, malgré les précautions prises et vraiment dignes d'admiration, les hautes voûtes des chapelles; les arcatures du quinzième siècle finissant, empruntées au clocher de Louis d'Amboise, continuent à festonner irrévérentieusement les murs sévères du treizième, tandis que la pensée maîtresse des premiers constructeurs avait exclu toute saillie; un bandeau de pierre couronne le pourtonr de l'église, jurant avec la brique employée seule comme avec le goût de l'art gothique qu'offensent les longues horizontalités.
« En vérité, sainte Cécile a été martyrisée deux fois, la première sous Dioclétien, la seconde par... Mais le nommerai-je cet architecte mort aujourd'hui, qui fut un des princes de l'art monumental contemporain, un savant constructeur, un causeur étincelant, un écrivain de race, qui a laissé à Sainte-Cécile même des marques admirables de son talent, la charpente et surtout la voûte du porche? Que manqua -t-il donc à César Daly? la force sur lui-même pour résister à sa riche imagination L'imagination est une force pour celui qui cré3, elle est un danger pour celui qui restaure, parce qu'elle l'entraîne à ne pas demeurer le modeste serviteur de l'édifice qui lui est confié.
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« Nous pourrions nous attarder à Toulouse en nous promenant de la façade aux lourdes pierres, quelques-unes fort irrévérentes, qui profanent les nobles lignes de l'abbaye de la Daurade, lançant au soleil de quatre heures leurs briques ardentes vers l'azur, comme dans un air de bravoure, jusqu'au Capilole où nous ne retrouvons plus l'escalier aux larges degrés en pente douce semblant inviter à monler pour laisser admirer la superbe rampe en fer forgé qu'a remplacé un raide emmanchement encadré par des baluslres ne relevant que de l'art du tourneur. Mais ce serait moins le chapitre des restaurations que celui des destructions toulousaines.
« Aujourd'hui, les archéologues respectueux du passé sont en chemin de gagner leur cause, qui est celle de l'art lui-même. Et pour le dire en passant, si parfois on avait eu le souci de demander aux Sociétés archéologiques leur avis modeste et désintéressé, on aurait évité des destructions lamentables, d'énormes dépenses imprévues et aussi quelques bévues.
« Grâce aux plaintes nombreuses qui ont retenti à Evreux comme à Albi, à Reims comme surtout à Périgueux dont le Saint Front vénitien a absolument disparu, il demeure arrêté qu'on ne devra jamais rien détruire ni rien transformer, n'ajouter que ce qui est indispensable pour éviter la ruine. Il serait bon même de maintenir quelques témoins, fussent-ils à demi démantelés, afin de laisser aux artistes, aux poètes même qui ont des droits aussi, le sentiment intact du passé. La Vénus de Milo est-elle moins belle parce qu'elle n'a plus ses bras? Et n!avez-vous pas éprouvé un malaise et comme un choc de révolte lorsque vous avez vu des essais de restitution, sagaces, judicieux, exacts peut-être, mais qui troublaient l'aspect accoutumé du torse radieux?
« Que nul désormais n'oblige à mentir.les pierres vénérables! Que tous, archéologues, architectes et artistes, s'unissent pour obtenir qn'on les laisse nous donner sincèrement les leçons des vieux âges et nous faire entendre, sans trouble importun, la voix des ancêtres! »
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M. le baron DESAZARS DE MONTGAILHARD a lu ensuite le
Rapport général sur le Concours de l'année.
« MESSIEURS,
« Les Sociétés Archéologiques ont pour but l'étude de tout ce qui est relatif aux Anciens. Mais, dans le sens restreint qui est consacré par l'usage, le mot Archéologie s'applique principalement à la recherche et à l'interprétation de ce que nos Ancêtres ont laissé en oeuvres matérielles, arts et monuments.
« A cet égard, le concours de cette année est loin d'avoir été fructueux. Il se horne à quelques trouvailles dont vous avez cru néanmoins devoir récompenser les auteurs pour encourager leur zèle et leur susciter des émules encore plus méritants.
' « C'est dans ces sentiments que vous avez décerné une médaille.de bronze à M. J. Sance, instituteur à Saint-Soulan, près Lombez (Gers), et une médaille d'argent à M. F.-B. Tournon, directeur de l'École communale de Condom, dans le même département 1.
« M. J. SANCE a mis tous ses soins, depuis un quart de siècle, à recueillir des objets anciens en notantexactement leurs provenances. Ainsi, il signale la trouvaille de volumineux quartzites taillés dans une couche de gravier sur la rive gauche de la Gimone, près Simorre. D'autres proviennent de la surface du sol et ont été recueillis dans la commune de Bédéchan, canton de Saramon, à un kilomètre ouest de la Gimone. Enfin, il indique le résultat de fouilles dans un tertre funéraire du plateau de Lannemezan, remontant à l'âge de pierre, et il a donné à notre Société les fragments de l'un des vases qui y ont été recueillis.
« M. F.-B. TOURNON est un collectionneur d'objets d'histoire naturelle en même temps que d'archéologie. Il,en a réuni un grand nombre qui conviendraient à un musée public, et il faut espérer qu'ils y parviendront un jour. Nous pouvons juger d'autant mieux
1. Rapporteur général : M. Emile Cartailhac.
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de leur importance et de leur valeur, qu'il a pris la peine de représenter à l'aquarelle, et non sans talent, les principales pièces de sa collection. Cet album, auquel sont jointes de nombreuses noies, constitue un excellent dossier pour l'étude préhistorique du Gers, et montre que ce département est moins pauvre qu'on était disposé à le croire jusqu'ici en fait d'antiquités de l'âge de la pierre et de l'âge du bronze.
« Après les simples collectionneurs viennent les érudits. Les mémoires consacrés aux recherches historiques sont nombreux et étendus. Celui qui a été envoyé par MM. J.-B. BERTIN, ancien maire de Salon, et V. AUDIER, directeur d'école libre, est imprimé. Il concerne Adam de Craponne et son Canal 1.
« Cette étude a le mérite d'être exactement documentée et d'apporter de l'inédit. Mais elle est assez mal composée : bien des parenthèses auraient dû être rejetées des notes, et plusieurs digressions auraient pu être supprimées.
« Adam de Craponne ou de Carponne appartenait à une famille noble qu'on a longtemps dit d'origine napolitaine, attachée au duc d'Anjou, puis qui s'était fixée à Pise, et plus tard à Montpellier, mais qui serait plus probablement originaire du Puy-en-Velay. Il était né en 1519 à Salon, dans les Bouches-du-Rhône. Habile ingénieur militaire autant que savant ingénieur civil, il défendit Metz contre Charles-Quint, fortifia Nice et mourut empoisonné en 1559 à Nantes, parce qu'il avait montré l'absurdité des travaux des mauvais ingénieurs ultramontains venus en foule en France à la suite de Catherine de Médicis. On peut considérer Adam de Craponne comme un véritable précurseur du chevalier d'Expilly et de Vauban.
« Homme à projets, ayant, suivant le mot de Talleyrand, « de « l'avenir dans l'esprit», il projeta le Canal de Provence, qui, maintenant, se termine au merveilleux palais de Lonchamp, un Canal du Charolais, actuellement le Canal du Centre entre Dijon et Chagny, et un Canal du Languedoc, que devait accomplir Riquet, et dont le point de départ était dans l'Ariège, pour se procurer l'eau nécessaire à son alimentation, et qui a été plus tard trouvée dans la
1. Rapporteur spécial : il. Plasssard.
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Montagne-Noire. Enfin, il réalisa un rêve de jeunesse dans son âge mûr en faisant le Canal d'irrigation (non de colmatage) et Canal d'industrie qui a enrichi Salon, sa patrie, et qui a transmis son nom à la postérité. Il l'a commencé « de ses deniers personnels », et il l'a continué avec le concours de sa famille ; mais il est mort avant d'avoir pu terminer son oeuvre, qui a été parachevée par la municipalité de Salon, longtemps opposée à ses projets, et finalement convaincue de leur utilité.
« La longueur de ce canal est d'environ 90 kilomètres Son débit total est de 24 mètres cubes d'eau par seconde, dont 14 sont absorbés par les irrigations; le surplus se perd dans le Rhône et l'étang de Berre. Il fertilise plus de 15,00.) hectares de terres dont il a triplé la valeur.
« MM Audier et Bertin ont voulu élever une cype digne de lui au grand Salonais mort martyr de son talent et de son dévouement. Si elle manque un peu d'art, elle a une réelle valeur historique. C'est pourquoi la Société archéologique lui décerne une médaille de bronze.
« Avec le mémoire intitulé Au pays de Brassac, nous arrivons à la série des ouvrages manuscrits et, par suite, inédits '. 11 porte pour exergue cette recommandation de Stendhal : « La première qualité « d'un historien, c'est de ne pas avoir assez d'esprit pour inventer ». Afin de montrer qu'il s'y était conformé, l'auteur s'empresse de nous indiquer, dans un avant-propos, les principales sources où il a puisé ses renseignements. Ces sources sont nombreuses, et cependant insuffisantes. Nous pouvons en juger dès son premier chapitre consacré à une introduction historique générale sur le pays castrais, qu'il aurait mieux fait d'ailleurs de supprimer, car ce préambule n'était pas absolument nécessaire à son sujet.
« Nous voici enfin au château de Ferrières, et nous y faisons connaissance avec ses seigneurs. Tout ce qui concerne Guilhaume de Lagarde, mort en 1575, est vraiment intéressant. La maison de Bayard lui succède. Puis viennent l'achat du château par les États de Languedoc pour le compte du roi, sa. transformation en prison
1. Rapporteur spécial : M. Lécrivain.
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politique (petite succursale de la Bastille), sa destruction partielle au début de la Révolution, la description des parties restantes avec ses sculptures du seizième siècle (bustes de François 1er et de sa femme Claude de Bretagne), un plan du château en 1774.
« Le chapitre suivant est consacré à Brassac-de-Caslelnau et à Brassac-de-Belfortès. Il renferme une jolie description du Sidobre et du domaine de Taillades, des renseignements sur le tissage dans la région de Brassac, sur les anciennes verreries et les forges de Brassac d'après quelques documents inédits, une dissertation sur les ruines énigmatiques de Castel-Sarrasy, où l'auteur est tenté, bien malheureusement du reste, de voir un ancien refuge des Maures d'après l'étymologie du mot et la découverte, dans les ruines, d'un dinar (étudié par le prince Philippe de Saxe-Cobourg, notre correspondant, et daté de l'an 541 de l'hégire, 1147 après J.-C), le texte d'une ballade patoise, YEscribote de Castel-Sarrasy, une étude sur les institutions municipales et les seigneuries de Brassac-deBelfortès.
« Nous passons ensuite à l'histoire des châteaux de Brassac et de Belfortès jusqu'à la fin de la Révolution, et enfin à celle de Castelnaude-Brassac, ville maîtresse, devenue royale en 1519, et pourvue d'une représentation aux Etats de Languedoc, son consulat, l'établissement et la perception des principaux impôts, ses différents seigneurs (le roi, le comte de Belle-Isle en 1718, le marquis de Malauze, la comtesse de Poitiers), le régime municipal aux derniers siècles de l'Ancien régime, la période révolutionnaire.
« Ce mémoire a de la valeur malgré ses défauts. L'auteur montre quelque inexpérience. Il ne connaît pas suffisamment la bibliographie du sujet. Il ne s'astreint pas à un plan sévère. Il réunit des notes plutôt qu'il ne compose un livre. Il aurait dû nous donner plus souvent le texte même de ses documents inédits, en indiquer plus exactement la provenance. Mais, d'autre part, son travail est agréable à lire. L'auteur fait bien revivre le pays castrais, la vallée de l'Agout, dans le présent et dans le passé. Il a eu le mérite de recueillir et d'utiliser un certain nombre de documents inédits.
« La Société archéologique avait soupçonné la plume d'une femme dans l'expression délicate de ses sentiments. Elle ne s'était pas trompée. Elle est d'autant plus heureuse d'attribuer à Mme A. BRIANT une de ses médailles de vermeil.
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« Le mémoire consacré à François-Louis Lemercier du Chalonge, le dernier évêque constitutionnel nommé à Pamiers avant le Concordat 1, fait connaître non seulement pour la première fois la biographie d'un prêtre qui fit quelque figure dans une période agitée, mais aussi la situation du clergé sous l'ancien régime, d'abord dans une petite paroisse à portion congrue, puis dans une paroisse plus importante de Toulouse, enfin pendant la Révolution jusqu'au traité qui a donné un siècle de paix à l'Église et à l'État en France.
« Ce mémoire est si bien pris dans les documents, la plupart inédits, qu'il en est une suite et forme une série discontinue de ces documents mêmes; de plus, ils n'ont guère une ligne qui ne soit accompagnée, dans un cahier annexe, de notes explicatives le plus souvent fort utiles.
« Malgré cette accumulation de renseignements, la physionomie du personnage dont l'histoire est racontée se dégage nettement, sans phrases inutiles, et, en même temps, celle du temps où il vécut.
« Le futur évêque, second fils de Georges Lemercier du Chalonge, maître particulier de la maîtrise royale des eaux et forêts du pays de Foix, et père de vingt-trois enfants, naquit à Pamiers le 28 avril 1729. Il fut élevé chez les Jésuites du collège de sa ville natale, ordonné prêtre en 1753, nommé vicaire — nous dirions aujourd'hui curé — de Villeneuve-de-Paréage, quatre ans plus tard transféré à Caussidières, dans le diocèse de Toulouse, dont la cure était à la nomination du Chapitre de Pamiers; puis, comme, en sa qualité de docteur en théologie, il était autorisé à demander iin bénéfice plus important, il -obtint la cure de Seysses-Tolosane en 1761. Sa vie pastorale y fut assez difficile, d'abord à cause de la contestation sur le droit de patronage de la cure entre l'archevêque de Toulouse et le Collège de Foix, puis parce que son caractère, quelque peu inquiet et querelleur, le mit en lutte avec la communauté. Il finit par résigner sa cure moyennant des réserves dues,
1. Rapporteur spécial : M. J. de Lahondès.
BULL. '36, 1906. 2'J
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suion l'usage des résignatioas, par son successeur. Il se retira à Toulouse et il y vécut douze ans sur lesquels on n'a aucune lumière.
« Rentré à Pamiers en 1788, peu après privé des bénéfices de ses deux prieurés en Limousin et en Rouergue, réduit à une pension minime, il prêta serinent à la Constitution civile qui le dépouillait, se rattacha au nouvel ordre de choses, devint avec Lakanal un des deux vicaires généraux de l'évêque constitutionnel de Pamiers, Bernard Font, n'évita pas d'être incarcéré à Toulouse en 1794, mais fut assez heureux pour vivre en prison, taudis que les autres victimes du vindicatif Vadier partirent pour Paris et y furent décapités.
« Lorsque le culte constitutionnel fut rétabli après la Terreur, le vicaire général paraît avoir eu de nouvelles difficultés avec son évêque. Mais, sur ces entrefaites, Bernard Font mourut, et, quatre mois après, François-Louis Lemercier du Chalonge fut élu évêque de l'Ariège dans l'église Saint-Volusien de Foix le 11 janvier 1801, puis sacré dans l'église Saint-Étienne de Toulouse par Sermet le 1er mars suivant.
« Appelé à siéger au Concile national tenu à Paris en juin de cette même année, pour amener Pie VII à signer le Concordat, il envoya sa démission au Premier Consul, se retira à Toulouse, au faubourg Saint-Michel, auprès de son vieil ami Taverne, ancien curé constitutionnel de la Daurade, nommé, après le Concordat, curé de la paroisse Saint-Michel, alors aux Récollets, et mourut le 3 mars 1804.
« Il fut inhumé au cimetière Saint-Roch, et par une dernière vicissitude d'une destinée agitée et troublée, sa pierre tombale, devenue la propriété de l'acquéreur du cimetière, couvre aujourd'hui un puits à Saint-Agne. Le Bulletin de notre Société a publié cette pierre en 1893, dans le procès-verbal de la séance du 21 mars.
« Cette étude biographique et historique est due à M. l'abbé BAGNÉRIS, curé de Saint-Clar. Elle est très développée, composée avec soin, et précieuse pour les historiens de la Révolution dans notre région et des années qui la précédèrent. Là Société archéologique l'a distinguée par une médaille de vermeil.
« Ici se présente un mémoire d'une réelle importance par le sujet
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et par les développements. 11 concerne Les vicomtes et la vicomte de Paulin dans le comté de Castres *.
L'histoire de cette localité est peu connue. Quelques-uns de ses seigneurs, à diverses époques, ont attiré l'attention en se révélant hommes de guerre et habiles administrateurs. Si, pour [certains de ces personnages, on trouve des renseignements dans les chroniques et dans les histoires, il n'en est pas de même^en ce qui concerne le fief. Un de vos anciens lauréats, M. Auguste VIDAL, chef de division à la Préfecture du Tarn, lauréat de l'Institut, a obtenu communication de documents conservés dans un dépôt [privé et il y a trouvé les principaux éléments d'une notice complétée par des emprunts faits à d'autres sources.
« Mais l'auteur s'est laissé entraîner par ses préférences. Il s'est étendu sur les personnages les plus notables des familles qui ont possédé Paulin et a négligé un peu trop le récit des faits dont la vicomte a été le théâtre. Il s'est arrêté avec complaisance aux époques qui lui avaient déjà fourni certains sujets d'étude. Il n'a pas toujours apporté le même soin lorsqu'il avait à étudier des périodes qui lui étaient moins familières que le quatorzième siècle, par exemple.
« Le récit consiste en une série de biographies ; et, quand la matière n'est pas assez abondante soit faute de renseignements, soit par l'insignifiance de la vie d'un des vicomtes, l'auteur se livre à des digressions qni occupent une place trop grande ou à des discussions purement juridiques qui nuisent à l'intérêt du récit. Parfois même, il y insère, des pièces qui auraient gagné à être rejetées à la fin de sou travail à titre de documents justificatifs. Certaines assertions manquent de preuves et sont même en contradiction avec les historiens les plus autorisés, comme celle qui fait de Baudouin, frère •le Raymond VI, comte de Toulouse, le fondateur de la maison de Toulouse-Lautrec.
« Au quatorzième siècle,, les Lautrec sont remplacés par les Rabastens, dont un membre, Pelfort de Rabastens, fut successivement sénéchal de l'A gênais, de Beaucaire et de Toulouse, et se fit distinguer par ses mérites pendant la guerre de Cent ans. M. Vidal en profite pour étudier avec détails cette période dans l'Albigeois et il
1. Rapporteur spécial : M. Pasquier.
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reproduit des lettres du duc d'Anjou assurément utiles à connaître, mais qui encombrent le récit et gagneraient à être placées en appendice avec l'in lication de leur provenance.
Au seizième siècle, un homme remarquable s'est encore révélé parmi lesRabastens : c'est Bertrand, un chef de bandes protestantes dans le Sud-Ouest. L'auteur en énumère les exploits sur les champs de bataille et le montre prenant une part importante aux négociations engagées entre les catholiques et les protestants.
« A sa mort, faute d'héritiers directs, le fief de Paulin, après une série de procès et à la suite d'une transaction, finit par passer à Charles Latour de Gouvernet, qui avait épousé en 1626 la veuve d'un héritier collatéral des Rabastens. La vicomte de Paulin resta dans la famille Latour de Gouvernet jusqu'en 1732, époque à laquelle le dernier héritier de cette famille, Jean de Latour, mourut sans postérité.
« La succession fut dévolue à une de ses cousines, qui avait épousé Henri de Carion, marquis de Nisas, appartenant à une vieille maison du Bas Languedoc et jouissant à la cour de France et à celle d'Espagne d'une grande considération par suite des services militaires qu'il avait rendus aux deux pays. La fin de l'ancien régime fut marquée dans la famille de Carion-Nisas par des scandales et par des procès, que l'auteur du mémoire raconte longuement, quand il ne les transcrit pas intégralement. Au début de la Révolution de 1789, HenriFrançois de Carion-Nisas élait officier. Il devint membre du Tribunat, puis rentra dans l'armée et fut appelé à remplir diverses missions de confiance par Joseph Bonaparte, roi d'Espagne, auprès de l'empereur. On le retrouve maître des requêtes au Conseil d'État sous la Restauration. Il mourut en 1842, ne laissant qu'une fille, décédée à Albi en 1868, qui fut la dernière représentante de la famille.
« M. Auguste Vidal termine son mémoire par la transcription de l'inventaire des titres conservés au château de Paulin, inventaire rédigé au dix-huitième siècle et qui contient la mention de 365 articles s'étendant de 1262 à 1770. Cette copie est d'autant plus précieuse qu'un grand nombre des actes qu'elle relate ont disparu et qu'elle peut fournir d'utiles indications à ceux qui s'occupent de l'histoire de l'Albigeois.
« Nous félicitons M. Vidal d'avoir ainsi entrepris cette importante
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monographie de la vicomte de Paulin, et nous espérons bien qu'il la publiera un jour. Mais, auparavant, il devra la reviser pour la présenter sous une forme plus concrète et plus exacte sur certains points qu'il serait trop long de préciser ici. C'est d'ailleurs un érudit très informé et un travailleur infatigable. Nous ne doutons pas qu'il apporte dans la revision de son étude l'esprit critique dont il a donné tant de preuve pour des travaux analogues concernant l'histoire de l'Albigeois. Sous le bénéfice de ces réserves et pour rendre hommage au mérite de sa nouvelle oeuvre, vous avez décerné à M. Auguste Vidal le prix annuel de la Société archéologique s'élevant à 100 francs.
« Nous voici arrivés au Mémoire qui a élé jugé le plus important et le mieux présenté du concours de cette année 1. Il est l'oeuvre de M. l'abbé Raymond CORRAZE, curé de Balma, près Toulouse.
« M. l'abbé Corraze a été déjà notre lauréat, et la Société archéologique se souvient avec satisfaction de son excellente monogragraphia de la Commanderie de Caignac.
« Quoiqu'il ait quitte le Lauraguais, M. l'abbé Corraze ne l'a pas oublié. Il lui a consacré une nouvelle étude en nous faisant connaître la communauté de Saint-Michel-de- l'Anès, dépendant autrefois du diocèse de Mirepoix et faisant aujourd'hui partie du département de l'Aude, à l'endroit où la rivière de l'Hers- Mort débouche dans le département de la Haute-Garonne. Jadis, les coteaux de cette région étaient couverts de bois et les combes étaient seules cultivées. On voit aujourd'hui ce coquet village descendre d9 la colline dans la vallée et se continuer, du côté de la rivière, sous les grands ormeaux séculaires plantes par ses derniers consuls.
« Pour nous raconter son histoire communale, seigneuriale, agricole et religieuse, M. l'abbé Corraze est parti de ce principe que «l'histoire est la mise en oeuvre de documents ». En conséquence, il n'a rien négligé pour recueillir le plus de documents possibles en les puisant aux sources les plus autorisées, dépôts publics ou archives privées. Puis, il s'est appliqué à les mettre en oeuvre en les classant méthodiquement et en les éclairant les uns par les
1. Rapporteur spécial : M. le baron Desazars de Montgailhard.
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autres. La besogne n'était pas petite, car tous ces vieux parchemins et tous ces vieux papiers étaient dispersés un peu partout. La plupart de ceux qu'il a pu recueillir étaient jaunis par le temps, rongés par les rats, délités par l'humidité. Quelques-uns avaient résisté, solidement protégés par de grossières reliures. D'autres avaient été pieusement conservés dans un coffret de bois, placé dans une niche du choeur de l'église, à l'instar d'une chose sainte. Mais la Révolution de 1789 en a détruit ou brûlé le plus grand nombre, par un revirement de l'esprit public qui avait fini par considérer les chartes communales du passé comme autant d'instruments de misères et d'oppression, alors qu'elles étaient pompeusement intitulées « franchises et privilèges ». Le dépôt le plus important provenait de l'ordre de Malte, qui possédait dans la juridiction de Saint-Michel de l'Anès la petite commanderie de Saint-Jean du Rival. Cet Ordre avait grand intérêt à soigner ses archives car elles établissaient ses droits vis-à-vis des seigneurs et des habitants de Saint-Michel de l'Anès.
« La plus ancienne charte de coutume concernant la communauté date de 12 J6. Elle est donc postérieure à la mort du dernier comte de Toulouse; mais elle est antérieure au Saisimentum de 1271 qui a fait du comté de Toulouse un apanage des rois de France. Elle fut concédée par les coseigneurs féodaux de Saint-Michel, sans l'intervention du pouvoir civil ni du pouvoir ecclésiastique, sur la demande des consuls de la communauté. Elle fut le résultat d'un commun accord entre les seigneurs suzerains et leurs vassaux. On traitait donc librement de chaque côté. Cette charte n'est d'ailleurs qu'une confirmation de coutumes plus anciennes remontant au ^ comtes de Toulouse. M. l'abbé Corraze en reproduit le texte et en commente avec sagacité les dispositions qui réglaient les droits politiques des parties et précisaient la compétence civile et criminelle des consuls ainsi que leurs pouvoirs de police et d'administration.
« A l'origine, le château seigneurial était chargé de protéger le castrum, et l'enceinte fortifiée était défendue par des fortalicia. D'où un seigneur principal résidant au château, et des chevaliers du faubourg (milites barrîarii) obligés à l'assister pour la défense commune. Mais de quelle époque date le château? Rien ne l'indique. Son nom lui venait sans doute du patron de l'église, qui était
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Saint-Michel. On y avait ajouté celui de Lanès à cause des « landes » qui l'entouraient. Les terres de la communauté se divisaient en terres nobles et en terres roturières pour la perception des impôts que M. l'abbé Corraze énumère en les expliquant d'une façon très judicieuse et très exacte.
« De l'organisation communale M. l'abbé Corraze passe à l'organisation seigneuriale. Le roi n'avait aucun droit. Tous les droits de seigneurie se cumulaient sur la tête du seigneur local qui exerçait les droits de haute, moyenne et basse justice. Vers le milieu du seizième siècle, le château avec sa seigneurie fut acheté par Pierre de Cheverry, trésorier général des finances au pays de Languedoc. Pierre de Cheverry appartenait à une famille basque, originaire de Pampelune, puis venue à Bayonne, qui s'était enrichie dans le commerce du pastel en France et en Espagne et s'était fixée à Toulouse. 11 était beau-frère de Pierre d'Assézat, et tous deux étaient gendres de Jean de Bernny. En 1559, Pierre de Cheverry faisait restaurer le château de Saint-Michel par Dominique Bachelier et, en 1579, il y recevait Catherine de Médicis à la recherche de son gendre, Henri de Navarre, qui s'obstinait à la fuir. Cette visite donne à M. l'abbé Corraze l'occasion de rapporter de piquants détails sur la reine et sur ces conférences avec les Réformés Puis il profite de la communication d'importants papiers de famille pour faire connaître très exactement la généalogie de la maison de Cheverry, qui s'est perpétuée dans le Lauraguais et dont une branche possède encore la terre de Prunet, dans le canton de Caraman, achetée à la famille de Lordat par Jean II de Cheverry, le 4 mai 1579.
« A la maison de Cheverry succéda celle de Marguerit, qui acquit le château de Saint-Michel en 1722 et le revendit en 1764 à la maison de Polastron, dont une héritière renommée par sa grâce et son esprit, Ylande-Martine-Gabrielle de Polastron, épousa le comte Jules de Polignac, devint « l'amie » de Marie-Antoinette et fit donner à son mari, en récompense de ses « services privés », a dit le conventionnel Loustalot — de ses « services d'alcove » chuchotaient les courtisans jaloux, — les charges les plus considérables et les mieux appointées, sans compter le titre de duc héréditaire et l'apanage du comté de Fenestrange, en Lorraine, qui rapportait 80,000 livres de rente.
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« M. l'abbé Corraze décrit ensuite l'organisation municipale de Saint-Michel, qui n'est guère différente de celle des autres consulats du Lauraguais, mais qui a cependant quelques caractères particuliers. Il énumère ses foires et marchés, ses fêtes locales, et donne la liste de ses consuls et de ses notaires.
« Il s'étend spécialement sur les écoles, dont la dépense était assurée depuis 1628 par un legs de 1,600 livres dû à Charles Ier de Cheverry. Le régent des écoles, qui recevait 30 livres en 1652 pour instruire gratuitement les enfants pauvres, voyait cette somme portée à 60 livres en 17U3, à 120 livres en 1723 et à 150 livres en 1727.
« L'organisation de la charité était ancienne à Saint-Michel. Dès 1389, on y dotait les filles pauvres à marier. En 1722, elles avaient un fond de revenu annuel assez considérable provenant de quatorze arpents de terre labourable. Les pauvres de passage étaient assurés d'un gîte et d'une certaine quantité de pain. Ceux qui étaient résidants et qui pouvaient travailler étaient employés à des travaux salariés par la commune. Les infirmes, les impotents et les vieillards abandonnés étaient à la charge de l'église qui leur réservait une part de ses dîmes.
« Un chapitre spécial, et non des moindres par l'étendue comme par l'intérêt, a été consacré par M. l'abbé Corraze à l'organisation agricole. Il montre la situation désastreuse des agriculteurs pendant le dix-huitième siècle par suite de l'intempérie des saisons, des disettes de récoltes, des épizooties, des guerres malheureuses et de la progression des impôts à la veille de la Révolution.
« M. l'abbé Corraze ne saurait oublier l'organisation ecclésiastique de Saint-Michel, et il parle en détail de l'église et de ses dépendances, du clergé et de ses revenus, de la vie paroissiale avant et pendant la Révolution.
« Il termine par une notice sur la commanderie de Saint-Jean-duRival, dont les fondateurs furent les seigneurs de Saint-Michel quelques années avant la seconde Croisade, et qui fut réunie en 1314 à la commanderie de Caignac.
« Quoique restreint par son objet, le champ d'études qu'avait choisi M. l'abbé Corraze était fertile en récoltes de toute sorte. Il l'a fouillé profondément avec une patience, un soin et une méthode dignes d'éloges Sa langue est claire, précise, non sans élégance. Sa
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monographie de Saint-Michel peut être donnée en modèle à tous ceux qui se proposent de faire des études semblables sur nos petites communautés méridionales. La Société archéologique lui a décerné sa plus haute récompense — le prix Ourgaud — s'élevant cette année à 200 francs.
« Messieurs,
« Ainsi que vous avez pu en juger par le simple compte rendu que je viens de faire, le concours de celte année n'a pas été sans valeur. Il montre que vos lauréats se préoccupent des nouvelles méthodes scientifiques et qu'ils se sont appliqués à ne rien négliger de ce qui, au premier abord, peut ne paraître que d'insignifiants détails. En effet, rien n'est indifférent pour faire revivre les choses mortes ou les figures disparues. Le plus petit document, les moindres révélations contribuent à leur résurrection. Le simple récit des vies les plus obscures, pour peu qu'elles aient participé au formidable et émouvant passé, a son importance. Souvent, un de ces minuscules détails, si méprisés naguère, suffit à montrer et à fixer dans le souvenir tel grand fait, beaucoup plus exactement et beaucoup plus inoubliablement que tout le fatras amorphe de certaines compilations historiques jadis si renommées.
« Tel était le voeu d'Augustin Thierry pour en arriver à une histoire définitive de la France. Il demandait que chaque province, chaque région, chaque localité eût sa monographie aussi détaillée et aussi précise que possible. II n'y a pas de petits côtés dans l'Histoire. Pour si raccourcis qu'ils paraissent être, elle y tient toute frémissante, suivant l'expression des frères Margueritte, « comme « le bruit de la mer dans un coquillage qu'on ramasse ».
« Si l'ancien genre oratoire a disparu, nul ne saurait le regretter. Mais il ne faudrait pas exagéi er la méthode contraire, n'accepter que la manière documentaire et proscrire la manière intuitive. Sans doute dans la bouche et sous la plume d'un visionnaire comme Michelet, l'histoire devient une épopée, et trop d'imagination peut se joindre à la réalité Mais Aristote allait jusqu'à dire que « la poésie était plus vraie que l'histoire », et cela, sans doute, parce qu'elle évoque en formes plus sensibles les fantômes d'autrefois, parce qu'elle montre l'âme des choses au lieu de s'en tenir à leur matérialité.
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« L'érudition la plus rigoureuse n'arrivera jamais à se défendre confre le crime de subjectivité vis-à-vis de ceux qui pensent avec Diderot que « l'homme s'amuse inutilement à rêver ou à étudier des « rêves évanouis ». Il en est même qui assurent que nous sommes condamnés à « ne faire jamais du passé que le rêve d'un rêve ». La véritable exactitude est donc une illusion. Mais cette conjecture serait funeste aux apprentis historiens, car elle abolirait en eux tout pouvoir d'évocation; elle les retiendrait craintivement à la rive, comme dit Montaigne, sans oser jamais explorer les terres inconnues qu'ils entrevirent dans le lointain.
«Puis, tout le monde ne sait pas la diplomatique et la paléographie. Il y a bien des gens qui veulent des livres qui les intéressent par la forme en même temps qu'ils les instruisent par le fond. Ils entendent rester fidèles à la tradition gréco-latine et à l'esprit français. Us ne sauraient se germaniser au point de pousser la superstition documentaire jusqu'au fétichisme. Ils veulent des historiens lettrés, à la fois savants et poètes, érudits et artistes, alliant le souci de l'information à l'agrément de la présentation. Ils n'ont pas tout à fait tort. Les gourmets ont aussi leurs droits, et il n'y a pas que les abeilles pour aimer le miel.
« Si donc nos futurs concurrents veulent s'essayer à fondre l'airain de Corinthe dans l'immense incendie des choses pour en frapper la médaille suprême qui consaciera l'histoire définitive d'une époque, d'un peuple, ou même d'un individu, ils seront certainement les bienvenus. Mais avant de songer à l'absolu, il faut bien s'assurer des réalités contingentes. Et dans ce but, qui est celui de la science archéologique, nous ne devons rien négliger pour rechercher et étudier tout ce qui émane de l'Homme dans les diverses manifestations*_de son industrie, de son art et de sa pensée. Nous devons tout connaître, depuis ses plus simples origines jusqu'à ses civilisations les plus développées, depuis ses usages les plus matériels jusqu'à ses conceptions les plus idéales. »
Le SECRÉTAIRE GÉNÉRAL a lu la liste des prix et récompenses (voir ci-dessus, p. 328) qui ont été remis aux auteurs des travaux distingués.
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Séance du 30 janvier 1906.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
La correspondance comprend le programme du prochain Congrès international d'anthropologieet d'archéologie préhistorique qui doit se tenir pendant les vacancesde Pâques à Monaco, sous le patronage de S. A. ALBERT Ier. La Société ayant souscrit aux sessions précédentes enverra sa cotisation et priera un de ses membres de la représenter au Congrès.
M. Jean FOURGOUS, membre résident, aeuvoyé un exemplaire de sa thèse de doctorat en droit sur l'Arbitrage dans le droit français aux treizième et quatorzième siècles.
M. MARIA, membre résidant et professeur à la Faculté, rend témoignage du succès obtenu par le jeune docteur. Il analyse sommairement sa thèse fort intéressante et d'une solide érudition.
M. FOURGOUS quitte Toulouse et par lettre il exprime à la Société ses vifs regrets de ne plus pouvoir assister à ses réunions. Il demande à lui rester fidèle dans le cadre des correspondants. La Société, qui avait apprécié son zèle et son labeur, exceptionnels dansla jeunesse actuelle, le considérera comme son secrétaire pour Paris et l'autorise à en prendre le titre.
M. E. CARTAILHAC présente, au nom de la Commission nommée à cet effet, un rapport favorable à la candidature de M. Jules Artières, de Millau (Aveyron) qui est nommé au scrutin membre correspondant.
Lecture est donnée du rapport de M. PASQUIER sur la candidature de M. le chanoine Béguin, au petit Séminaire de Brignoles (Var), qui est élu correspondant.
M. J. de LAHONDÈS donne lecture de la notice suivante :
Album de portraits de parlementaires toulousains.
Il présente un précieux album que le Musée Saint-Raymond vient d'acquérir. C'est un recueil de cent vingt-deux portraits de parlementaires
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toulousains accompagnés denoticessuccinctes sur chacund'eux joignant ainsi une documentation historique à sa valeur d'art.
Les portraits sont, les uns, dessinés au crayon noir, d'autres au crayons de couleurs variées; mais le plus grand nombre sont traités à l'aquarelle, et quelques-uns, les meilleurs, enlevés d'une main sûre en quelques coups de pinceau teinte d'encre de Chine. La plupart, mais ceux-ci surtout, révèlent un talent exercé. Les traits sont massés sobrement et ils précisent avec certitude les plans du visage et l'accentuation des lignes. Les figures présentent un caractère saisissant de réalité, et la ressemblance entre les membres d'une même famille donne encore une garantie de. sincérité. Quelques-unes sont indiquées, peintes « d'après le naturel ». Ce sont les plus remarquables par leur accent de vérité et aussi par leur finesse; mais, toutes à peu près, paraissent inspirées de même par la réalité.
Ces portraits ont été exécutés dans la seconde moitié du dix-septième siècle. Il estdit, en effet, an bas du portrait de Jean de Ulmo, que M. Fieubet, président du Parlement, occupait à ce moment la maison que Jean de Ulmo avait fait bâtir à la rue Ninau. Gaspard de Fieubet fut premier président du Parlement de 1G53 à 1687. Toulouse possédait à cette époque plusieurs artistes de mérite. La plupart avaient été'formés parChalette, et les portraits de l'album rappellent, en effet, sa manière large dans la conception de l'ensemble du visage, et une aussi dans l'expression des traits significatifs, les yeux et les lèvres.
Mais un grand nombre de portraits reproduisent les visages de parlementaires antérieurs, plusieurs même du seizième siècle. Il est donc évident qu'ils ont été dessinés ou peints d'après des portraits de leur temps ou même d'après de simples souvenirs. Il est dit, en effet, du portrait de Bertrand de Nupc.es, conseiller dans les dernières années du seizième siècle, qu'il a été fait sur la description que plusieurs personnes ont données au peintre du personnage plus de quarante ans après sa mort.
Ces portraits sont plus sommaires, moins creusés, moins poursuivis, mais enlevés d'une main aussi sûre, aussi libre et aussi, aisée construit sant les têtes avec un art savamment exercé.
Les portraits, d'ailleurs, ne sont pas tous du même artiste. Quelquesuns sont négligés, quelques autres durs et brutaux; mais tous appartiennent à la même époque. Si l'anologie de facture suffirait à le démontrer, une preuve directe de contemporanéitë est donnée par la similitude absolue de l'encadrement ovale avec imitations de cuirs retournés qui les entoure. Au-dessous un encadrement plus petit est réservé pour le nom du parlementaire et les dates de sa vie et de ses charges.
Ce recueil de portraits a donc été composé sans doute sur la demande
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d'un parlementaire désireux de posséder les images de ses prédécesseurs et de ses collègues. Il semble que ce magistrat ait été l'un de ceux de la famille de Papus. Trois Papus conseillers au Parlement durant le seizième siècle, figurent dessinés aux trois crayons sur les premières pages après messire.Jean de Fossé, évêque de Castres. L'album proviendrait de leur château où il aurait été oublié et pris par un ouvrier. C'est, dans tous les cas, des ouvriers de ce château, près de Cazères, qu'il serait tombé entre les mains du dernier vendeur.
Les portraits sont dessinés ou peints sur papier de fil ordinaire; les feuilles sont cousues négligemment et protégées simplement par une grossière reliure en carton gris qui ne répond nullement à la valeur artistique du précieux recueil, et particulièrement aux aquarelles fines et lumineuses, expressives et souvent énergiques qui font revivre avec leur gravité, leur esprit avisé, parfois aussi avec leur bonhomie, les puissants parlementaires qui furent pendant trois siècles les maîtres de Toulouse et de la province.
Mais les indications biographiques éclairent aussi plusieurs points d'histoire non seulement des familles, de leurs alliances, de leurs hérédités, mais encore de l'histoire de Toulouse. Ainsi pour, n'en citer qu'un exemple, car tout le livre pourrait être reproduit, et peut-être le sera-t-il un jour, la courte biographie de Jean de Ulmo, nommé deuxième président en 1526, année où la charge venait d'être créée par le roi, nous apprend que c'est lui qui fit bâtir l'élégante maison rue Ninau, que Joseph de Malafosse avait attribuée à Pantaléon Jaulbert, l'un des huit conseillers nouvellement créés en 1519, dont le portrait ligure aussi dans le volume. C'est, on le voit, la même époque, et peut-être les deux magistrats ont-ils occupé successivement la même maison. Mais la notice indique que la devise de Jean de Ulmo : Durum palienlia frango est inscrite au-dessus d'une porte sur la cour, et on l'y voit encore. La notice donne aussi ses armes parlantes : parti d'or à l'arbre arraché de simple et de gueules au lion rampant d'argent; mais malheureusement ce blason, qui serait une preuve plus démonstrative encore, ne se retrouve nulle part dans l'hôtel.
Les blasons des parlementaires qui accompagnent leurs portraits peints ou parfois simplement décrits fournissent une signature et une date précieuses, car on peut en retrouver quelques-uns sur diverses maisons de Toulouse. Mais bien d'autres indications peuvent être recueillies sur les principales familles de la ville dont plusieurs y sont encore représentées. Pour ne parler que d'une de celles qui sont éteintes, mentionnons en finissant celle des Catel, issue d'un capitaine écossais qui, passant à Toulouse, s'éprit d'une fille fort belle qu'il épousa bien
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que sa fortune fût loin d'égaler sa beauté; ies portraits de cinq Catel, conseillers au Parlement et l'un président aux enquêtes, et particulièrement celui de l'historien Guillaume de Catel : tête allongée, cheveux en brosse, expression méditative et avertie, et encore un portrait précieux par son exécution spéciale inachevée, celui de Charles de Catel conseiller en 1617, préparé seulement au crayon, avec une légère teinte d'aquarelle; enfin l'explication des trois coquilles qui figurent sur l'azur avec le chevron d'or qui proviennent d'un voeu fait à saint Jacques par un des Catel.
Un second volume, complétant le premier et d'égale importance, a échappé au Musée Saint-Raymond, mais il n'a pas quitté Toulouse où il est entré dans une collection particulière.
Séance du 6 février.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS, président.
La correspondance comprend un envoi de M. E. PRIVÂT, notre confrère : Positions des thèses soutenues par les élèves de la promotion de 1906, Ecole des Chartes.
M. Félix REGNADLT, membre résidant, offre une photographie d'une mauvaise, mais curieuse peinture de la sacristie de l'église de Lalande, exécutée en 1780; elle représente une procession de la paroisse de Lalande à Saint-Sernin le 22 novembre. On voit la procession dans les champs, puis elle passe devant les Minimes, traverse le pont du canal, le faubourg ; elle arrive aux remparts de Toulouse, derrière lesquels est Saint-Sernin.
M. J. DE LAHONDÈS présente en ces termes quelques observations
Sur le sentiment pathétique dans l'art du Moyen-âge.
M. E. Maie, notre collègue, a publié dans la Revue des DeuxMondes, un article, chapitre sans doute du volume sur le sentiment pathétique dans l'art du Moyen-âge, dont il nous fait espérer le prochain envoi.
Sur les statues du treizième siècle, dit-il, se révèlent la bonté, la douceur, les aspects ouverts et lumineux du christianisme. La pensée de la
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douleur ou delà mort n'y vient pas altérer la calme sérénité qui rappelle celle de l'art grec. Les statues du quinzième siècle, au contraire, sont tragiques et sombres. Jésus n'enseigne plus, il souffre; il apparaît nut sanglant, couronné d'épines, entouré des instruments de sa passion, mort sur les genoux de sa mère. Auparavant, la croix elle-même n'est pas l'instrument du supplice; à Bourges, elle se montre triomphale, constellée de pierreries. Mais la sensibilité jusque-là contenue déborde; le pathétique apparaît. Le mot suprême n'est pas d'aimer, c'est de souffrir. Les docteurs sévères du onzième et du douzième siècles transformaient les réalités en symboles et se mouvaient dans le pur éther de la pensée; mais maintenant une tendresse inconnue détend les âmes. Les mystiques communiquent le don des larmes. L'impulsion déjà manifestée par saint François se répand. Dès le commencement du quatorzième siècle, sainte Gertrude dit qu'aucun exercice ne peut se comparer à la méditation de la Passion. Une douleur ardente déborde dans les oeuvres de saintBonaventure, de sainte Brigitte, de Gerson, et les hymnes de leur époque éloquemment la traduisent.
La représentation des mystères inspire les scènes sculptées ou peintes de la Passion. De nombreuses oeuvres d'art se consacrent au tragique mystère. Les diptyques et les triptyques qui le montrent se répandent dans les demeures. Les vitraux, les tableaux, les sculptures en sont remplis.
Le Christ en croix tend ses bras élevés et les mains soutiennent tout le poids du corps. La tête n'est plus dominatrice et couronnée; elle s'affaisse au-dessous de la traverse, s'incline et saigne sous les épines. La couronne d'épines apparaît pour la première fois sur le parement d'autel de Charles V, au Louvre, vers 1370. Plus tard, cette touchante figure deviendra, sous l'influence des Italiens, le Prométhée aux membres saillants.
On voit parfois la figure du Christ, assis, les mains liées, dans une attitude accablée ; ce n'est pas un i?cce homo, mais la représentation de Jésus attendant la mort sur le Calvaire, plongé dans l'abîme d'une douleur morale. Elle apparaît vers la fin du quinzième siècle.
Elles sont touchantes la candeur et la bonne foi des artistes. Un art où la douleur n'apparaît pas n'exprime pas toute la nature humaine. Toutefois, ce que les artistes veulent glorifier, ce n'est pas la bonne foi, mais l'amour.
La passion de la Vierge accompagne celle du Christ. Le treizième siècle avait montré les sept joies de la Vierge; le quatorzième finissant montre ses sept douleurs. Au même moment apparaissent les Vierges de pitié, si répandues, peintes sur miniatures avant d'être sculptées
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Elles étaient inspirées par les méditations de saint Bonaventure sur la mort de .Jésus-Christ. La seule Piela sculptée qui soit datée est celle de Moissac, 1476. Combien d'autres montrent une désolation profonde, une douleur intense, toutefois contenue, sans rien de théâtral. La plupart sont du temps de Louis XII.
Parfois, saint Jean et Madeleine, portant un vase de parfums, sont auprès de la Vierge, saint Jean à la tête, Madeleine aux pieds du Christ. Plus tard, apparaissent Joseph d'Arimathie, Nicodème, les saintes femmes ; mais plus poignant est le simple groupe de la mère et du fils; le drame, ramassé, est plus expiessif.
Les mises au tombeau se montrent vers le milieu du quatorzième siècle ; auparavant, deux disciples seulement répandent des onctions sur le corps du Christ.
Au quinzième siècle, on voit Dieu le Père assistant à la Passion.
Ces divers groupes expriment la douleur avec une puissance angoissante, une émotion vraie, une profonde sincérité. Ils semblent dire : « Les hommes ont donc pu faire cela ».
M. de Lahondès ajoute simplement que l'art grec, le seul qu'on puisse comparer par son originalité et sa puissance à l'art gothique, selon M. Maie, a suivi une marche analogue de la sereine beauté impassible des statues du cinquième siècle au mouvement plus accentué de Polyclète de Scopas et de Praxitèle, surtout ensuite de Lysippe et aux scènes émues de la mort et des funérailles, peintes surtout sur les vases. Dans l'art grec, toutefois, l'expression de la douleur est toujours plus contenue et comme enveloppée de calme recueilli, élégant encore.
Il dit aussi que si l'on entend par l'expression de pathétique l'expression seule de la douleur, la sculpture du Moyen-âge ne l'a montré qu'au quatorzième et quinzième siècles, mais qu'une émotion profonde, une pensée grave, l'âme intérieure en un mot, rayonnent sur les traits et les attitudes des statues du treizième, le grand siècle de cet art superbe.
Le secrétaire général dit que le document suivant a été extrait des notes manuscrites que M«r DOUAIS voulut bien, en quittant Toulouse, laisser à la Société
Un contrat entre baladins à Tholose en 1663.
31 janvier 1663. — Association de Jean Boulanger, « joueur des menus plaisirs au Roy »; Christophe Morte, a. joueur des menus plaisirs du Roy»; Charles Richard dit La Fontaine, « danseur et volti-
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geur sur la corde », et Pierre Renouard, aussi « joueur des menus plaisirs du Roy » pour un an, à partir du 7 février suivant.
L'an mil six cens soixante-trois et le dernier jour de janvier, à Tholose et maison de moy notaire, avant midy, par-devant moyd. notaire et tesmoins, ont esté constitués en leurs personnes Jean Bolanger, sieur de Champaigne, joueur des menus plaisirs du Roy; Christofe Morte, joueur des menus plaisirs du Roy; Charles Richard dict La Fontaine, dansseur et voltigeur sur la corde, et Pierre Benouard aussy joueur des menus plaisirs du Roy, lesquelz se sont assossiés ensemble pour une année prochaine quy commencera le septième febvrier prochain, pendant lequel temps ilz jouèrent ensemble, et chascun faira son action et exercisse. Et tout le gain et proffit quy s'y faira sera partaigé ez quatre partz esgalles, et la perte, en cas il y en aura, de mesmes sera supportée esgallement chascun à son quatrième. Et ez cas aucun d'eulx viendroict malade pendant led. temps, les autres l'assisteront de leur possible sans diminution de sa portion. Sy a esté convenu par exprès que sy aucun d'eulx venoict à quitter sans légitime excuse, il ne le pourra faire qu'en payant preallablement la somme de quatre cens livres aux autres restans. Et pour les despences et autres frais qu'il conviendra faire seront fornies esgallement chascun sa portion, saufz pour les vallelz et chevaulx quy les serviront, chascun payera et nourrira les siens. Et neanmoingz les chevaulx, lorsqu'ilz travailheront pour le comun seront nourris à comuns frais. Et pour le contenu au présent acte observer et n'y contrevenir, les parties, chascun comme les conserne, ont obligés leurs biens presens et advenir qu'ont soubmis aux rigueurs de justice. Presens à ce le sieur Jean Fanjaux, vieulx marchant, et Me Pierre Apaora, procureur èz Tholose, signés ou marqués de leur sain et marque ordinaire avec les parties et moy. — Charle RICHART, — Jean BOULANGER, — FANJAUX, — P. POARRA, — D'ARNAULD.
Séance du 13 février 1906.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS, président.
La correspondance comprend :
Une circulaire du Président de la Société française d'archéologie, annonçant le Congrès archéologique de Carcassonne et de Perpignan, qui aura lieu du 22 au 30 mai 1906.
BDLL. 36, 1906. 30
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Une lettre du Président du Tribuual de commerce de Toulouse, annonçant l'envoi de l'Inventaire des Archives de la Bourse des marchands de Toulouse, antérieures à 1790, série D et E, par M. S. Macary, archiviste-adjoint de la Haute-Garonne, sous la direction de M. F. Pasquier, archiviste en chef, et avec la collaboration de M. Ph. Arnauné, ancien juge au Tribunal de commerce.
M. A. DELOUME, doyen de la Faculté de droit, membre résidant, fait hommage de l'ouvrage qu'il vient de publier sous le titre d'Histoire sommaire de la Faculté de droit (Bull, de l'Université, série B, n° 4. Toulouse, 1905, 206 pages in-8"), à l'occasion du centenaire et de la réorganisation de la Faculté de droit de Toulouse en 1804.
M«r BATIFFOL, membre résidant, a envoyé la note suivante :
Manuscrit toulousain au British Muséum.
Les personnes qui s'occupent de paléographie musicale connaissent, pour en avoir vu un fac-similé dans The musical notation oflhe midle âges (Londres, Masters, 1890), planche 5, un Graduel romain, que la publication que nous venons de citer présente comme un Graduale romanum ad usum ecclesiae Sancti Slephani Tolosam, ut videtur, scriplum. Ce manuscrit appartient au British Muséum où il est coté Harl. 4951. Il a été signalé par M. de Lahondès dans son Histoire de SaintEtienne (Toulouse, 1890, p. 193).
J'ai profité d'un récent voyage à Londres pour demander communication du Graduel de Saint-Etienne, avec l'espoir d'y trouver quelque donnée qui intéresserait l'archéologie toulousaine. Qui sait s'il ne renfermerait pas quelque miniature, ou quelque note, ou quelque office propre, quelque donnée en un mot contemporaine de la vieille église SaintEtienne I Ma déception a été grande en acquérant la certitude que ce Graduel d'abord ne contenait aucun office propre à Toulouse, et qu'ensuite rien ne donnait lieu de penser qu'il ait pu être écrit à Toulouse même. Les lettres ornées étaient sans caractère. J'avais affaire à un Graduel qui n'avait rien de toulousain.
D'où vient alors qu'on ait pu le donner comme écrit pour Saint-Etienne de Toulouse? Voici l'explication :
Le Graduel a été relié dans un volume dont il n'est que la seconde moitié; la première moitié est d'un autre manuscrit, d'une autre main, d'une autre nature. En tète du Graduel, sur trois feuillets qui ont dû être
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les gardes du graduel, sont copiées trois pièces extraites manifestement du cartulaire de Saint-Etienne.
D'abord, fol. 119 recto, une lettre à l'évêque de Toulouse, Amelius [Raymond du Puy, 1105-1139], dont l'incipit est Ego Riccardus albanensis ecclesiae ; le cardinal Richard, évêque d'Albano, tint un Concile à Toulouse en 1110. L'Histoire de Languedoc, t. II (Toulouse, 1872, p. 592), mentionne deux lettres distinctes adressées par Richard à l'évêque Amelius. La lettre contenue dans le Graduel pouvait être la seconde des deux. Je ne vois pas que le texte en ait été imprimé.
En second lieu, fol. 119 verso, un diplôme de 1138, dont l'incipit est Ego Ildefonsus. C'est la renonciation du comte Alphonse à la dépouille des évoques de Toulouse, en faveur du prévôt et des chanoines de SaintEtienne. Cette pièce est publiée d'après Catel. qui l'avait prise aux archives de la cathédrale de Toulouse, dans Histoire de Languedoc, t. V (Toulouse, 1875, p. 1025).
En troisième lieu, fol. 121, une bulle papale du 8 novembre 1105, dont l'incipit est Iustis vobis assensum praebere. Cette bulle manque aux Registres de Jaffé, et je ne vois pas que YHistoire de Languedoc la mentionne.
Ces trois pièces ont été copiées en tête du Graduel, au douzième siècle, et elles témoignent ainsi que le Graduel a été la propriété de SaintEtienne; mais elles n'ont pas été copiées par l'amamiensis qui a écrit le Graduel, et qui, du onzième siècle, est un calligraphe professionnel vraisemblablement étranger à Toulouse.
A l'occasion de la communication de M&r Batiffol, M. de LAHONDÈS dit qu'en 1889 il reçut du directeur du British-Museum les indications qu'il avait sollicitées sur ce manuscrit. Le directeur lui disait que le manuscrit coté 495 qui avait appartenu à Saint-Etienne de Toulouse contenait, dans la première partie, les sermons de diverses dates, de Jean de Sabatis-Villon et, dans la seconde, un Graduel occupât les folios de 123 à 295.
Ce Graduel est accompagné de neumes finement tracés et de processiones pour les principales fêtes de l'année. Les lettres initiales sont colorées généralement en mauve et en vert, .en jaune et en rouge Trois ou quatre pages manquent.
Au folio 119, commençant le manuscrit, est transcrite une lettre de Ricard, évêque d'Albano et légat de l'Eglise romaine, adressée à Amiel, évêque de Toulouse (1106-1139), se référant à une sentence d'excommunication lancée récemment contre son église.
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Sur le revers de cette page on lit une charte datée de U38 par laquelle Alphonse, comte de Toulouse et duc de Narbonne, abandonne les coutumes suivies par ses prédécesseurs de prendre possession des biens des évêques décèdes.
Suivent quelques antiphonaires dont plusieurs pour l'Avent. Le nom du scribe, accompagné de notes musicales, est ainsi tracé après la dernière ligne :
Gregorius presul meritis et nomine dignus unde genus duxil Rumenum conscendil honore rsnovavit monumenlum patrum suorum (une composuit hune libellum musice artis schole cantorum anni circuit, via parophonista dicunt psalmista.
A la fin du Graduel (f" 295 v°) sont marqués les tons pour les diverses parties de l'office. Ils sont intitulés : Autentus, Protus ad finales, Tonum I, Tonum II, Plagi, Protus, et ils sont accompagnés du curieuses figures ]d'hommes et de femmes dansent en jouant sur des instruments de musique.
M. de LAHONDÈS communique l'observation suivante sur
Les statues des deux femmes portant un lion et un bélier :
Si l'idée que ces statues, autrefois à Saint-Sernin sur le pilier auprès des fonts baptismaux et aujourd'hui au Musée, devaient faire partie d'un zodiaque se présente d'abord assez naturellement, elle est cependant toute récente et ne date guère que de Dumège qui, dans son Catalogue du Musée publié en 1835, regarde ce groupe comme un emblème de l'ascension de la déclinaison du soleil.
Bernard Gui, dans ses Chroniques des empereurs, cite le passage de saint Jérôme sur les trois miracles arrivés à Jérusalem, à Rome et à Toulouse, que Nicolas Bertrandi a reproduits, en disant que le dernier est représenté par les deux statues de Saint-Sernin.
Noguier, moins judicieux, croit qu'elles sont dues à Marcus Fonteius qui fit élever en divers lieux plusieurs statues en l'honneur de César, et que celles de Saint-Sernin, « élaborées au temps de cet empereur et par ainsi plus de cent ans avant la structure de la dite église », représentent la naissance de César sous le signe du lion qui surmonte en courage tous les autres animaux, et ses victoires sous le signe du bélier qui ouvre en triomphe le cours de l'année.
Raymond Daydé, qui publia son livre en 1661, juge avec raison cette
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solution fort compliquée et revient judicieusement à l'explication donnée par Bertrandi et avant lui par Bernard Gui dont il cite et traduit le
texte. Il ajoute, avec moins d'esprit critique mais avec une hésitation dont il convient de lui savoir gré, d'autant que nul à cette époque ne possédait davantage cet esprit, que l'inscription : hoc factum est tem\
tem\ du Musée de Toulouse, autrefois à Saint-Sernin. (Gravure extraite de VAlhum dm Monuments du Midi.)
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pore Cesaris signifie, ou que les statues ont été sculptées au temps de César ou que c'est de son temps que le miracle s'est produit.
Si Bertrandi se contentait d'égaler Toulouse à Jérusalem et à Rome, Daydé, et c'est un signe des temps nouveaux, ajoute Paris au trio glorieux.
Daydé émet ensuite une supposition, non inoins singulière que celle de Noguier qui voyait en elle une effigie do César due aussi à Mardis Fonteius, sur une statue en bas-relief dans une auréole que l'on voyait fixée à un pilier de l'église en y entrant par la porte de la Grand'Rue, mais qui en fut enlevée à cause de sa nudité, le samedi 17 juin 1651. Il croit d'après l'inscription
POST OBITUM GARNIS MERITUM PROPTER PIA CASTRA PARSQUE SIC ORITUR QUOD NON MORITUR PETIT ASTRA.
qu'elle représentait plutôt un prince catholique qui s'était [rendu plus apte à l'exercice de la guerre par le renoncement au mariage.
Il est probable que le bas-relief était une image fréquente au Moyenâge, bien que rarement dans d'aussi grandes proportions, de l'âme délivrée des périls du péché et montant au ciel.
Les statues des deux femmes miraculeuses, d'un caractère si saisissant et si étrange même qu'un critique d'art hazardeux croyait reconnaître en elles une influence indienne, sont évidemment sorties du même atelier que les statues, voisines maintenant, des apôtres de l'ancienne salle capitulaire de Saint-Etienne. Les jambes croisées, la ressemblance de l'une des femmes avec l'un des apôtres imberbes, sans doute saint Jean, établissent leur commune origine. Mais la matière employée, le marbre, a permis plus de finesse, avec plus de liberté aussi dans l'agitation des draperies. L'allure mouvementée des figures exprime le caractère particulier de la sculpture romane toulousaine.
Il peut être à propos de reproduire le texte de Bertrandi qui n'est pas dans toutes les mains :
« Ex dictis beati Ilieronymi invenitur quod tempore Julii Gn>sarisin diversis mundi partibus apparuerunt manifeste trio signa :
« Primum in urbe romanâ ortus fuit fons de quse oleum defluens in flumine Tiberis emanavit figurans, ut creditur, sacramentum solemne baptismatis quod cum oleo in aquâ perficiLur in quo baptismo humanuin genus regeneratur contra vetustatem peccati originalis.
« Secundum signum in civitate Hierusalem per très dies pluitaqua et sanguis significans ministerium passionis crucis in quo aqua et sanguis in redemptionem humani generis effluxit de latere salvatoris.
« Tertium signum fuit in civitate Tholose in quo due mulieres virgi-
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nés dictse civilatis generaverunt duas filias quorum una peperit leonem, altéra genuit agnum, figurans quod in die judicii dominus apparebit ut leo terribilis contra reprobos et justos marisuetus ut agnus. Et utrasque figuras représentant due imagines marmorice sculptai in intrôiitu ecclesie sancti Saturnini Tholose quorum altéra ante se leonem et altéra gestat agnum.
« Ex quibus colligitur per dictas très civitates scilicet Roma, Hierusalem et Tholosa super alias famosas ac nobiles representantur. In quorum singulis ex quadam prerogatius est Gapitolium locus commnnis ubi rectores dictarum civitatum ad decisiones causarum conveniunt et inde rectores tholosani Capitularii nominantur in laudem dicta? civitatisSingulam namque domum dicti illi contenditas quia cum dicte civitates propter bella ac seditiones in se ruinam et destructionem passse fuerunt sola Tholosa propter merito beati Exuperi dictoe civitatis episcopi qui ibi unâcum multis aliis sanctis gloriose requiescit ex tum mulhis annis in statu prospère militavit. »
(N. BERTRANDI, Gesta Iholosanorum, f° lxvi.
Séance du 21 février 1906. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
La Société reçoit du Ministère le tome III de l'Histoire littéraire de l'Afrique chrétienne depuis les origines jusqu'à l'invasion arabe, par Paul Moncaux.
De M. Mérimée, doyen honoraire à la Faculté des lettres, directeur de la Société, le Boletin de la Soc. Espanola de Excursiones, anno XIII, noa 143-155, Madrid. Superbe publication que la Société est heureuse de posséder.
M. le PRÉSIDENT fait compliment à M. Fourgous, qui vient d'être attaché à l'administration centrale de la Compagnie des chemins de fer d'Orléans pour s'occuper du service des beaux-arts et de la pu« blicité, guides, affiches, étalage de vues, conférences sur les sites et les monuments du réseau en France et à l'étranger.
M. DE LAHONDÈS fait passer sous les yeux de la Société une série de planches anciennes, des vues de Toulouse, panorama pris du coteau de la colonne, vers 1840; vues du faubourg Saint-Etienne et
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iiu rempart Saint-Etienne, dessinées par M. de Malbosc et lithographiées par Constantin.
M. J. DE LAHONDÈS communique la pièce suivante :
1650. — Oespanses pour les Jeux Floraux suivant le testament de Dame Clémence.
10 A Guillaume du Guet la somme de dix livres à eux ordonnée
ordonnée la peyne qu'ont prise le premier jour du moys courant et ce jourd'huy qu'a esté déclamé aux Jeux Floraux, suivant l'ancienne coutume, par mouvement du troisième jour de may mil six cent cinquante.
5 A M. François Gaie, escollier, la somme de cinq livres à
lui ordonnée pour avoir fait l'oraison le troisième jour du moys courant dans le consistoire de la maison de ville sur la distribution des fleurs d'or et d'argent, suivant l'ancienne coutume '.
3 La somme de trois livres payée aux huit sergents de la
suite de messieurs les Gapitouls â eux ordonnée pour la peyne qu'ils ont prize pendant les jours qu'a esté déclamé aux Jeux Floraux, suivant l'ancienne coutume 1.
5 La somme de cinq livres payée aux hautbois et trompettes
trompettes la ville pour avoir accompagné messieurs des Jeux Floraux à l'église de la Daurade allant chercher les fleurs et les apportant à la maison de ville. 16 5 La somme de seize livres cinq sols à Laurence Busquières
Busquières paiement de treize cents rameaux qu'elle a fournis, scavoir : quatre cents le premier jour du présent moys et cinq cents le troisiesme, iceux rameaux distribués les dicts jours avec les gâteaux â messieurs les mainteneurs et maistres des dicts jeux, ainsi que de coutume, les dits rameaux déclarés au compte sur ce baillé, clos et arrêté par M. de Campmartin et Viguerie, capitouls. 900 La somme de neuf cents livres à Jean Barrancoutre,
dict Bouchefrèche maistre pasticier, à luy ordonnée, pour payement tant du diner et festin qu'il a faict et fourny dans la maison de ville le troisième jour du présent moys
1' L'année précédente, la somme de cinq livres avait été accordée à l'escolier Guillaume Fraxines pour avoir fait i'oraison le trois may.
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de may pour les jeux Floraux, que des cachemuseaux 1, maquereaux, pommes, biscuits, pain et vin qu'il a fournys pour les collations faictes pour le même sujet les premiers jours d'apvril, premier et Iroisième de may.
258 16 La somme de deux cent cinquante huit livres seize
sols à Pierre Bernard, boulanger, pour paiement des gasteaux qu'a fournys du mandement à messieurs les capitouls, le premier jour d'apvril, le premier et troisiesme jour du présent moys, scavoir, le premier jour d'apvril deux cent cinquante quatre gasteaux à troys sols pièce, deux cent quatre vingt huit gasteaux de troys sols et quatre cent soixante de deux sols le premier may et troys cent dix huict de troys sols et quatre cent quatre vingt quatre de deux sols le troys may, iceux gasteaux distribués es collations qu'ont esté baillées les après disners des dicts troys jours, à la maison de ville, à messieurs du Parlement, à messieurs les mainteneurs des Jeux Floraux.
212 8 9 La somme de deux cent douze livres huict sols neuf
deniers paiées à maistre Loret, orphèvre de Toloze, scavoir, cent neuf livres six sols pour payement de trois marcs sept onces six grains argent qui ont pesé cinq fleurs qu'il à faictes la présente année, lesquelles fleurs ont été distribuées le troisième jour du moys de may aux mieux disants en l'art de poésie, suivant l'institution de Dame Clémence et ainsi que de coustume ; cent neuf livres huit sols tant pour l'or employé aux dictes fleurs, peinture et façon d'icelles, et trente sols pour un estui pour mettre une des cinq fleurs, dicte esglantine, laquelle s'est distribuée le troisiesme jour de may à Monsieur Colet estudiant de Paris, poète très excellent, pour avoir envoyé de ses oeuvres en la présente ville qui furent admirées de tous.
194 40 10 La somme de cent quatre vingt quatorze livres dix sols
dix deniers, paiées â François Costes pour paiement des veaux de lait qu'ont esté achetés des comprins et nommés au compte attaché au mandement, le tout du mandement de MM. les Capitouls, lesquels furent distribués,
1. Altération de cassemuseaux, sorte de gâteaux secs; maquereaux, macarons, d'abord mascarons,
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suivant l'ancienne coutume, à MM. les chanceliers, mainteneurs et juges des Jeux Floraux, à MM. les Capitouls et autres officiers auxquels ont accoutumé distribuer les dicts veaux et le poids de chacun d'iceux, le tout espéciffié au dict compte, vu et vériffié, clos et arrêté par Messieurs de Ghapuis et Fiquier, capitouls, iceluy compte attaché au mandement expédié le six septembre mil six cent cinquante et un. 16251 9ii Total : Seize cent vingt cinq livres, neuf deniers.
(Registre des délibérations du Conseil de ville.)
Séance du 6 mars. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
La correspondance comprend un don du Ministère des BeauxArts : Dictionnaire des Bijoux de l'Afrique du Nord (Maroc. Algérie, Tunisie, Tripolitaine), par Paul Eudel. Paris, 1906, 242 p. in-8°, avec de nombreuses figures.
M. le PRÉSIDENT appelle l'attention sur un article de M. le comte de Lasteyrie, inséré dans la dernière livraison du Bulletin monumental. L'éminent archéologue se prononce nettement contre l'interprétation symbolique de l'inclinaison du chevet sur l'axe de l'église que l'on n'observe que dans les églises construites à des époques successives, où elle résulte de la difficulté de préciser une direction rectiligne soit à travers les obstacles des constructions anciennes, soit par suite d'absence d'instruments d'observations suffisants.
M. GALABERT offre à la bibliothèque diverses plaquettes dont il est l'auteur : Le Club jacobin de Montauban, l'assemblée des protestants dans le Montalbanais en 1744 et 1745; les Archives révolutionnaires de l'Ariège ; les Travaux d'histoire moderne dans les provinces.
M. BARRIÈRE-FLAVY, membre résidant, communique un sceau ou contre-sceau du quinzième siècle, trouvé dans les fouilles faites sur l'emplacement de l'ancien château d'Auterive (Haute-Garonne).
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Il fut rencontré à une profondeur de 2m50 environ, dans des terres transportées.
Il porte un écu où figure un mont surmonté d'une branche pourvue de quatre feuilles.
En légende on lit :
S--- A>- GÏ- DELASORE^ S(igillum) k(rnaldi) G(uillelmi) DE LASORE.
Le contre-sceau porte un A.
Il est à remarquer que le nom du propriétaire de ce sceau est
entièrement inconnu au Moyen-âge dans la région. Cette pièce appartient vraisemblablement à quelqu'un des nombreux gentilshommes qui guerroyèrent dans le pays aux quinzième et seixième siècles.
M. dePuYBGSQuE, membre correspondant, lit le mémoire suivant :
Sceau et contre sceau de A. G. de Lasore, xv" siècle.
Comptes d'apothicaire au dix-septième siècle.
Je pourrais donner encore à celte communication le titre même d'un livre de L. Lenôtre : Vieilles maisons, vieux papiers, avec cette différence qu'au lieu de parler de personnages historiques évoluant dans les recoins du vieux Paris, je vous conduis simplement en province, dans un milieu infiniment plus modeste et, partant, d'un moindre intérêt.
Mes vieilles maisons sonljcelles de la famille Gorssé, située sur les lices de Rhonel, à Albi, et les deux voisines réunies dans l'ancien compois, car il n'y est question que d'un immeuble ayant pour confront sud l'hôtel de M. de Boyer-d'Anty, trésorier de France, devenu la préfecture.
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La première a été occupée longtemps par M. Hippolyte Crozes, auteur d'une monographie de la cathédrale Sainte-Cécile: elle appartient à un grand manufacturier récemment émigré du faubourg du Pont.
La seconde fut d'abord aux abbés Séré-de-Rivières, arrière grands oncles de notre collègue: elle a servi plus tard de résidence provisoire â Mgr Braud, lors de la restauration du siège archiépiscopal d'Albi. on 1823; elle est présentement occupée par un café.
La maison Gorsse est devenue telle qu'on la peut voir à cotte heure par une série d'adjonctions successives. Des documents authentiques de la fin du quinzième siècle et postérieurs, permettent de reconstituer l'histoire de l'habitation et celle de ses maîtres qui, de père en fils, furent investis pendant trois cents ans de charges importantes dans le diocèse.
Il y a une trentaine d'années environ, votre serviteur, s'étant allié à la descendante de la branche aînée des Gorsse, dut démolir — à son coeur défendant — certaines constructions du seizième siècle qui menaçaient de s'effondrer.
Les ouvriers étaient à l'oeuvre; déjà les débris de la toiture jonchaient le palier d'une mirande, lorsque notre attention fut attirée par quelques lambeaux de vieux papiers qui émergeaient des décombres; à tout hasard on se mit en devoir de les recueillir.
Comme on les relevait, on s'aperçut que ces feuilles volantes n'étaient que les éléments les plus écartés d'un amas volumineux, enseveli pêlemêle et caché, non seulement sous les matériaux qui venaient d'être projetés au cours de la démolition, mais encore sous une couche épaisse de détritus de toute sorte et de cette poussière sans nom que les intempéries accumulent, au cours des siècles, dans des galetas ouverts à tous lès vents.
Les travaux furent suspendus et, sans souci des microbes — qui étaient alors à peine inventés — on procéda laborieusement, à grand renfort de brosses et de plumeaux, au sauvetage de ces épaves, qui furent nettoyées sommairement et empilées dans une caisse, en attendant l'occasion d'en vérifier le contenu — dix ans après!
Ces épaves nous ont fourni une contribution assez inattendue à l'inoubliable scène de Molière que vous avez déjà pressentie; de plus, elles nous révèlent sur les origines de la maison voisine des données qui vont, si vous le permettez, nous arrêter un instant.
Cette maison appartenait, sous l'ancien régime, aux ancêtres maternels de M. Izarn ou d'Izarn, curé de l'église paroissiale Saint-Afric (du latin africanus).
Le vocable Saint-Afric, devenu Saint-Fric, n'est plus aujourd'hui
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connu à Albi que par une région basse, au bord du Tarn, au centré même de la ville, déshonorée par des maisons de tolérance.
Autrefois, la paroisse Saint-Afric comprenait tout le quartier environnant, et l'église de ce nom, depuis longtemps démolie, s'élevait à l'est de l'emplacement occupé par le Lycée.
M. Izarn desservit, en qualité de curé, la paroisse Saint-Afric pendant les quarante-cinq ou cinquante années qui précédèrent la Révolution.
11 fut, durant sa longue carrière, le voisin, comme l'ami et le commensal habituel des Gorsse dont il connut plusieurs générations; aussi, n'ayant plus aucun parents, laissa-t-il, quand il mourut, dans les dernières années du dix-huitième siècle, sa maison de ville et sa propriété du Colombier à Malhoc, à M 11» Louise Gorsse, fille aînée de quatorze enfants, devenue Mme de Cahuzac, — rien de commun, à notre connaissance, avec les Rocous, si honorablement représentés h Toulouse.
Le ménage Cahuzac prit possession de l'héritage du curé; mais il n'eut pas d'enfants et au décès de Mrae de Cahuzac, survenu très postérieurement à celui de son mari, tous ses biens firent retour â M. Clair Gorsse, son frère, ou aux enfants de celui-ci.
Voilà comment les archives de M. Izarn sont venues échouer — probablement inviolées — dans les combles de notre maison.
Il serait, à plus d'un titre, intéressant de soulever les voiles qui cachent l'existence de personnages datant de l'avant-dernier siècle, existences vouées à un calme et à une immobilité dont nous nous faisons difficilement une idée.
Peut-être trouverions-nous, â en suivre le cours, avec un spectacle oublié, autant qu'imprévu, au grand profit de nos contemporains et de nos neveux, l'art d'approprier à nos besoins nouveaux la réserve des forces accumulées par la longue suite des générations précédentes.
Une pareille étude dépasserait de beaucoup nos limites. Je ne résisterai point toutefois à en extraire un instantané que je dois à un témoin du commencement du dernier siècle :
Il paraît que M. de Cahuzac avait l'habitude, vers quatre heures du soir en hiver et un peu plus tard en été, de se retirer un instant dans sa garde robe, où il allait « se coeffer de nuict ». Il rentrait ensuite au salon, en savates, affublé d'une vaste robe de chambre, ayant arboré sur sa tête un gigantesque bonnet de coton, coquettement orné d'un large ruban de soie rose ou ponceau, avec un noeud bouffant sur le côté. — Ne vous semble-t-il pas, Messieurs, que nous nous rapprochons fort du malade imaginaire? — Malade, notre homme ne l'était nullement, niais c'est ainsi que chaque jour, en belle humeur, très grave, avec une pointé de
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cérémonie, il recevait les amis et connaissances et achevait de pas-er la soirée.
Mais revenons au curé de Saint-Afric et demandons-nous qui était M. Izarn?
Dans le courant de l'année de 1713, un tout jeune officier, M. do M..., cornette de dragons, à peine âgé de dix-huit ans, revint dans ses foyers, à Albi, à la faveur d'un congé de semestre. — La famille de M... existe encore et vous connaissez tous un nom qu'il me paraît au moins inutile de prononcer, d'autant moins que ses représentants actuels ignorent, sûrement, la particularité que je dois vous confier.
L'oisiveté engendre le désoeuvrement, et le désoeuvrement n'est pas sans danger, surtout pour la jeunesse.
Pour charmer les loisirs de sa villégiature, notre dragon fit connaissance avec une sémillante compatriote, M"e Catherine Bouzinac, plus familièrerement Catin, et la poursuivit de ses assiduités.
La demoiselle appartenait à une famille honorable, mais elle avait vingt-cinq ans et, quoique sage, une propension médiocre, sans doute, à coiffer sa sainte patronne; aussi bien considérait-elle un peu le séduisant officier comme un enfant, ce qui ne l'empêcha pas de l'aimer, — bien au contraire, — crevit amor, et cet amour, hélas! la perdit; elle devint mère, et, au bout de quelques mois, elle mit au monde un garçon.
Elle n'avait pas attendu ce dénouement pour pleurer amèrement sa faute; elle se consacra exclusivement à l'éducation de ce fils, qu'elle fit entrer ultérieurement dans les ordres, menant, elle-même dès l'abord et par la suite, une vie retirée et de tous points irréprochable.
Telle est l'origine du curé de Saint-Afric.
Le père de Catherine, Pons Bouzinac, receveur des tailles du diocèse, avait épousé une Mefgé, dont la mère, femme de François Metgé, était une Galaup, proche parente de Lapérouse; la mère de celle-ci s'appelait Martianne Salvan, arrière-aïeule, croyons-nous, de l'abbé Salvan, mainleneur des Jeux Floraux, dont vous pouvez vous souvenir.
A ces divers personnages étaient adressés par des apothicaires et des chirurgiens-barbiers des Mémoires fort étendus, qui ont inspiré notre communication, tout au moins ceux que nous avons pu recueillir, retrouvés seulement au nombre de sept.
Il ne nous reste qu'à vous introduire dans le domaine de M. Purgon, avec cette excuse que l'itinéraire de notre incursion vient d'être préparé en carnaval.
Nous constaterons, avant de commencer, que comme pour leur con-
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temporain M. Fleurant, « les parties de ces messieurs sont toujours fort civiles », vous allez en juger :
Doigt Madamoiselle de Metgé, vefve, à Me Bonet Apoticayre du second de janvier 1660
Je passe sur trois ou quatre articles, incolores et inodores, car je perçois votre attente ! — elle ne sera point déçue.
Plus du penultiesme de Février au dict an, pour Mr Metgé, son fils, un clystere purgatif, carminatif, avec catholicon fin et pulpe de casse ressamant extraite, que print. . ci 1 livre 5 sols.
Plus du pour elle, une médecine composée avec manne,
rhubarbe, tamarin, senne, syrop et autres que print de matin ci 2 1. 5 s.
La médecine et le clystere, dans la suite, sont plusieurs et souventes fois : reitlérés.
Plus du pour elle, un Uniment cordiel et confortatif composé avec lhuile de musquade, huile de coings et autres, contenant quattre onces, duquel, soir et matin, elle gresset la région de Lhestomac, chaudement ci 3 1. 4 s.
Plus du demy once de conserves de roses liquide delaquelle
elle en prenet se couchant. • ci 3 sols.
Plus du pour M"e Claire sa filhe, une boiste tablettes
rozades, desquelles elle en tenet souvant a la bouche, ci 11.10 s.
Plus du une phiole garguarisme composé, duquel elle garguarisait
garguarisait hors de froid ci 1 1. 12 s.
Plus du un sachet composé avec lhorge, amandes douces
pillées et autres duquel elle se froittet l'un et l'autre hypocondre, estant dans le demy bain ci 16 sols.
Plus du quattre prinses potions cordielles, composées avec
la pierre de Bezoard, magistère de coral, poudres cordieles, ambre gris, eau de canelle et eau de mélisse et autres que print en quattre matins de suite ci 12 livres.
— Douze livres!... Tout beau, M. Bonet, il faut vivre, avec les malades. —
Plus du un grand pot cathaplasme confortatif et abstringent,
abstringent, avec la poudre aromatici Rosatum, coral rouge préparé, santal citrin, noix musquade, cotignat, syrop et autres lequel elle appliquet sur la région du petit vantre. ci 3 1. 10 s.
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Plus du un potus histerique et pectoral pour en user a la
cuilhère, composé avec eau de Bardanna, oliban, nnthimoine diaphoretique, syrop de tussillage une once et demie, ci 11.5 s.
Plus du...., une epithème cordiele liquide, composée avec les poudres cordieles, eaux cordieles et autres delaquelle elle epithemet la région du foye, soir et matin, chaudement, ci 4 1.10 s.
Plus du pour M"e Marion, un bolus absorbant et narcotique composé, avec yeux d'escrevisse, confection laudanum et autres ci 10 sols.
Plus du quatre livres fomentation résolutive et hépatique ci 1 1. 4 s.
Plus du pour M 11" Câlin, cinq onces opiate fébrifuge et
absorvante pour soir et matin, composée avec kina, poudres dabsorvantes, seils d'absinthe et de centaurée, deux drachmes de chacun, syrop de cichorée composée de rhubarbe et d'absinthe et autres ci 3 1. 15 s.
Puis de l'eau ptisane pour son boire ordinaire,
de nombreux bolus, reittérés;
des onguants pompholix et basilicon
des huilles d'amandes douces, tirées sans fen, ou descorpion composée pour oindre les esmonitoires
douze onces conserve de chyporrhodon.
Les herbes, semances et autres pour des bouillons, etc.
Ensuite, nous avons un compte de Me Roques, chirurgien, pour la famille Bouzinac, année 1687 et suivantes.
Ce Mémoire ne contient pas moins de cent vingt-cinq opérations et se monte à la somme de 226 livres et 28 sous, y compris, pour M. Bouzinac, neuf années de barbe à 6 livres par année, soit 54 livres.
Il relate des saignées au bras et au pied au prix de 10 à 15 sous l'une, des applications de sangsues au fondement et de ventouses, scarifiées ou pas, à 25 sous, ou une livre et des extractions de dents à 15 sous.
Enfin, un compte adressé à M. Metgé, bourgeois, pour la maladie de son fils, par le sieur Boussac, chirurgien, dont les descendants occupent encore aujourd'hui une situation prépondérante dans le corps médical de la ville d'Albi.
Ce Mémoire consiste également en saignées et en applications de ventouses ou de sangsues; il indique entre autres pratiques curieuses :
Lnplication de sept Pijonaux seur le coeur et la plante des pies et Implication de deux chiens seur la teste.
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De tout ce qui précède, il me paraît résulter deux choses : que nos grandspères et nos grand'mères devaient avoir de fiers tempéraments pour résister aux assauts d'une artillerie aussi formidable et aussi meurtrière, et que Molière n'a rien inventé.
Qu'il me soit permis, en terminant, de m'excuser encore pour un badinage peu sérieux et surtout téméraire en regard des savants travaux auxquels nos collègues nous ont si bien et si exclusivement accoutumés.
Séance du 13 mars.
Présidence de M. DE LAHONDÈS.
La Société déclare la vacance de deux places de membre résidant par suite de l'éloignement de MM. Fourgous et Joulin, qui passent l'un correspondant et l'autre membre libre.
M. MÉRIMÉE, membre résidant, donne lecture du Mémoire de M. Léon Joulin, noire confrère, sur les établissements antiques de Toulouse, publié dans les Comptes rendus de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 1905, page 285, recueil peu répandu dans notre Midi. La reproduction de ce travail dans notre Bulletin a paru nécessaire, la lecture ayant provoqué une discussion qui sera ultérieurement reprise.
Les établissements antiques de Toulouse.
Par Léon JOULIN.
L'histoire nous apprend que Toulouse existait au commencement du troisième siècle avant notre ère, et que les Volkes Tectosages en avaient fait leur capitale. La grande ville gauloise et son territoire ont été réunis à la province romaine dans les dernières années du deuxième siècle. Au quatrième siècle, Toulouse occupait le quinzième rang parmi « les Villes Illustres » de l'Empire. On peut donc s'étonner que les nombreux documents archéologiques de la région ne forment pas encore un ensemble qui réponde à l'importance des textes.
Pour l'époque protohistorique, Toulouse et sa banlieue ont donné,
BULL. 36, 1906. 31
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depuis deux cents ans, des médailles variées, dont la première circulation dans la région a été limitée à une époque peu antérieure au premier contact romain. — Plusieurs nécropoles découvertes dans les trente dernières années ont été rapportées : Garin, Ayer et Saint-Gaudens, dans les hautes vallées des Pyrénées, au premier âge du fer; Saint-Sulpicela-Pointe, à la période celtique de cet âge; enfin, celles des environs d'Albi et de Castres, à l'époque voisine de la conquête romaine. A Toulouse, aucun débris ne répondrait aux temps qui ont précédé l'invasion Tectosage, et la période de prospérité, mentionnée par Posidonius, serait représentée seulement dans sa dernière partie.
Les ruines et les vestiges de l'époque impériale sont particulièrement nombreux. On a rencontré, à Toulouse, des témoins de l'enceinte, quelques substructions et deux cimetières aux quartiers de Saint-Boch et de Saint-Aubin. — Dans la banlieue, il existe, à Vieille-Toulouse, des substructions précisément à l'endroit où l'on trouve des médailles pré-romaines, et â Saint-Michel-du-Touch, un amphithéâtre et des restes de constructions. — Dans la vallée supérieure de la Garonne, les ruines importantes de la plaine de Martres-Tolosanes ont été attribuées à la ville de Calagurris, station de l'Itinéraire d'Antonin sur la voie de Toulouse à Dax. On a recueilli des débris de tout ordre à Saint-Bertrand-deComminges (Civ. Convenarum), à Saint-Lizier (Civ. Consoranorum), et dans beaucoup d'autres localités. — Dans les vallées du Tarn et de l'Agout, des vestiges ont été signalés à Saint-Sulpice-la-Pointe, Rabastens, Montans, Albi, Castres, etc. Sur les coteaux compris entre la Garonne et le Gers, il y a des villas à Montmaurin, dans la haute vallée de la Save, et Lectoure, avec ses monuments lapidaires, complète les stations romaines de la région.
Il paraissait invraisemblable que les premières périodes de la vie de Toulouse n'eussent laissé aucuns vestiges; d'un autre côté, les interprétations faites jusqu'ici, des ruines de Vieille-Toulouse et de la plaine de Martres-Tolosanes, soulevaient de nombreuses objections. Telles sont les raisons qui nous ont engagé à entreprendre l'étude d'ensemble des établissements antiques du bassin supérieur de la Garonne, que certaines circonstances devaient favoriser. Nous nous sommes proposé de fouiller méthodiquement des parties de Toulouse actuel, Vieille-Toulouse, Martres-Tolosanes, et d'examiner à nouveau les faits relevés dans les autres stations. Ce sont les résultats principaux de ces recherches que nous avons l'honneur de faire connaître aujourd'hui.
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E;TUDE DES RUINES ET DES VESTIGES. 1) Les stations.
Toulouse et sa banlieue. — A Toulouse, nous avons retrouvé au quartier de Saint-Roch des sépultures du premier âge de fer et un grand cimetière du deuxième. Nous avons étudié le tracé et la construction de la muraille romaine, la décoration des édifices publics et des couches à débris préromains et romains — Dans la banlieue, nous avons exploré et fouillé : des couches à débris d'une superficie de 25 hectares à VieilleToulouse, et des ruines et des substructions à Saint-Michel-du-Touch, à Lalande-Aucamville, à Saint-Roch-Rangueil et à Castanet. Les vestiges de Vieille-Toulouse s'échelonnent du premier âge de fer à la fin de la domination romaine ; la stratification archéologique de la même station établit deux périodes dans la portion du premier âge de fer représentée.
Autres stations. — Dans la vallée de la Garonne, nous avons exploré les environs de Muret et fouillé complètement les substructions de la plaine de Martres-Tolosanes. Autour de cette localité, située à 50 kilomètres au sud-ouest de Toulouse, on a retrouvé, sur une superficie de 100 kilomètres carrés, un groupe de six villas et de cinq vici, au milieu desquels s'élevait le somptueux Chiragan, dont la description a déjà fait l'objet d'une publication spéciale 1. Les autres stations, Saint-Gaudens, Saint-Bertrand-de-Comminges, Saint-Béat, Bagnères-de-Luchon et celles des vallées de l'Ariège et du Salât, ont été reconnues à nouveau. Enfin, nous avons visité les stations du bassin du Tarn, Saint-Sulpice-laPointe, Montans, Albi et Castres, et étudié les objets qui y ont été recueillis à diverses reprises. Il en a été de même pour les coteaux du Gers, notamment à Montmaurin, près de Boulogne-sur-Gesse, et à Lectoure.
2) Les principaux vestiges.
Ce premier travail a été complété par l'étude des principaux vestiges des diverses stations : céramique, sépultures, médailles, armes et bijoux 2.
La céramique s'accorde avec la stratification archéologique de Vieille1.
Vieille1. Les établissements gallo-romains de la plaine de Martres-Tolosanes (Mém. des sav. étr. de l'Académie des insc. et belles-lettres de Paris, t. XI).
3. Nous n'avons pas à rappeler ici les autres vestiges importants : les constructions et les sculptures ont été étudiées dans Les Etablissements de la plaine de Martres-Tolosanes. Julien Sacaze a publié en 1884 Les Inscriptions antiques des Pyrénées.
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Toulouse, pour rapporter à deux périodes différentes les établissements du premier âge du fer de la région ; ceux antérieurs au cinquième siècle et ceux du cinquième siècle. — Quatre séries céramiques distinguent, dans le deuxième âge du fer, deux périodes successives. La première, dont un vase attique â figures rouges de Vieille-Toulouse fait remonter l'origine au quatrième siècle, comprend les troisième et deuxième siècles, d'après les nombreuses poteries de la Grande Grèce recueillies à Toulouse. Les trois premières séries de poteries renferment des vases qui rappellent ceux trouvés sur divers points de la péninsule ibérique, et notamment des vases à décors mycéniens. Des poteries, la plupart de formes gréco-romaines, et des amphores italo-grecques représentent la deuxième période, celle du premier siècle avant notre ère. — La céramique en usage aux différentes périodes de l'Empire est représentée à Albi, Montans, Martres-Tolosanes, Toulouse et Lectoure.
Les sépultures préromaines se trouvent classées chronologiquement par la céramique. 11 y a pour chaque époque et période des dispositions communes et des particularités locales. A Toulouse, les sépultures du deuxième âge du fer, en puits ou en fosses et multiples, rappellent celles rencontrées dans plusieurs localités de la Gaule, et en Italie dans la région de Bologne. Les unes sont des troisième et deuxième siècles; les autres, notamment celles â amphores, sont du premier siècle. La plupart des sépultures à amphores ont été faites dans les puits ou fosses de la période précédente, après enlèvement de tout ou partie du mobilier funéraire. — Tous les modes de sépultures de l'époque romaine existent à Toulouse et dans les autres stations.
Les monnaies si variées de Toulouse sont, par leur première émission du moins, les unes antérieures au premier siècle avant notre ère, le6 autres postérieures. Les nombreux produits céramiques importés à Toulouse de pays grecs aux troisième et deuxième siècles, démontrent que les monnaies de Marseille, une partie des celtibériennes et les gauloises à la croix ont circulé dans la région dès ces époques.
Une arme d'une, sépulture de Castres est du premier âge du fer. Les bijoux de Fenouillet (env. de Toulouse) et de La Graisses (env. d'Albi) sont, le premier de l'époque marnienne, et les autres du troisième ou du deuxième siècle. Des fibules, des intailles, des boutons émaillés, de grosses perles de verre, trouvées à Toulouse, sont autant de témoins de la civilisation gauloise du premier siècle, si bien caractérisée à l'oppidum du Mont Beuvray.
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IL
LES ÉTABLISSEMENTS DES DIFFÉRENTES ÉPOQUES KT PÉRIODES, ÉPOQUE PROTOHISTORIQUE.
1) Les établissements d'après les documents archéologiques.
Premier âge du fer. — La stratification archéologique et l'étude des principaux vestiges montrent que Vieille-Toulouse était habité antérieurement au cinquième siècle. Les stations de Garin et d'Ayer peuvent être de la même époque que le premier établissement toulousain. Au cinquième siècle, il s'est formé à Toulouse, sur la terrasse de Saint-Roch, une nouvelle agglomération, dont les stations de Saint-Sulpice-la-Pointe, de la plaine de Saint-Gaudens et certaines des environs d'Albi et de Castres sont contemporaines.
Deuxième âge du fer. — Les établissements de l'âge précédent se développent considérablement, surtout à Toulouse et à Vieille-Toulouse, où la civilisation marnienne, la première période monétaire gauloise et le siècle de la conquête ont laissé les vestiges les plus importants. On peut évaluer à 5 ou 6,000 âmes la population groupée à Vieille-Toulouse au siècle qui a précédé notre ère.
2) Eclaircissements des documents historiques.
Origines de Toulouse. — A l'époque ibérique, Toulouse était sur le coteaux de Pech-David, près du village de Vieille-Toulouse. Autant qu'on en peut juger par l'industrie céramique et les sépultures, la civilisation procédait de celle de l'âge de bronze.
Au cinquième siècle apparaissent de nouvelles agglomérations dans la plaine de Toulouse, à Saint-Sulpice-la-Pointe, dans la plaine de Rivière, près de Saint-Gaudens, et aux environs d'Albi et de Castres. On peut donc attribuer à la première invasion des Celtes, dans le sud-ouest de la Gaule, la création ou le développement de ces établissements, ainsi que les transformations industrielles et les modifications des rites funéraires que l'on constate.
Pendant tout le deuxième âge du fer, on suit à Toulouse des manifestations industrielles, qui établissent à la fois des analogies avec les industries contemporaines de la péninsule ibérique et l'influence de la civilisation hellénique s'exerçant par le commerce. — Les grands ouvrages en terre, qui complètent à Vieille-Toulouse une position défensive dé 200 hectares de superficie, peuvent être attribués aux Volkes-Tectosages, qui se sont fixés dans la contrée au commencement du troisième siècle. — Enfin, la prépondérance au deuxième siècle du quartier de la plaine,
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à Toulouse, permet d'y placer le principal théâtre des événements des années 107 et 106 et le pillage de Gépion.
Contributions à l'étude des civilisations primitives. — Indépendamment des remarques déjà faites, le rapprochement des vestiges de Toulouse de ceux des principales stations de l'Europe occidentale apporte des contributions à l'étude de la civilisation celti'que, soit dans les périodes de migration des tribus, soit pendant le développement pacifique des nations qu'elles ont formées.
Les sépultures de la deuxième période du premier âge du fer à Toulouse sont un nouvel anneau de la chaîne qui se développe du Danube aux Pyrénées, en jalonnant la trajectoire de la première invasion celtique du sud-ouest de la Gaule, avec ses deux objectifs, la Méditerranée à Narbonne et le promontoire pyrénéen sur l'Océan. Cette invasion a amené des transformations profondes de l'industrie et des modifications dans les rites funéraires des indigènes et des envahisseurs. L'analogie des cavités funéraires de Garin et d'Ayer avec celles de Golasecca sur le Haut-Tessin a déjà été signalée; des armes, des bijoux et des poteries complètent le rapprochement.
Dans la première période du deuxième âge du fer, les analogies se poursuivent avec les stations de la Marne et celles de l'Italie septentrionale; dans la deuxième, Toulouse montre, au milieu de nombreuses ressemblances avec le Beuvray, des différences qui tiennent à des arrêts de développement de la civilisation celtique, dans une région soumise à la domination romaine, soixante ans avant les autres parties de la Gaule.
ÉPOQUE ROMAINE.
La région comptait quatre cités de peuples, au moins six villes et de nombreuses agglomérations de villas et de vici. L'étude des ruines et des vestiges de Toulouse et celle des établissements de la plaine de Martres-Tolosanes, permettent de restituer des éléments importants de la vie romaine dans cette partie de la Gaule.
Agglomérations. — Toulouse était défendu par une haute muraille, avec tours carrées, qui, d'après la construction, a été élevée au premier siècle. La population de la ville murée et de ses grands quartiers suburbains peut être évaluée de 50 à 60,000 âmes. Les édifices avec façades de marbre, et les riches habitations de la ville et de la banlieue, datent des Antonins, comme le proetorium de Chiragan.
Agriculture. — La vie rurale se manifeste tout entière dans les villas et les vici de la plaine de Martres-Tolosanes. Chiragan devient désor-
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mais le type des grands domaines du sud de la Gaule; les villas qui l'entouraient sont de moindre importance. Ces divers établissements font connaître à la fois les exploitations rurales de la Gaule romaine et la vie fastueuse de leurs maîtres, ainsi que l'organisation de la propriété moyenne; on y retrouve nombre de dispositions indiquées par Vitruve etparVarron. Les vici étaient occupés par la plèbe rurale, petits propriétaires et colons, dont l'existence est rappelée par les monuments lapidaires de la région.
Industrie. — L'enceinte de Toulouse, l'amphithéâtre de la Flambère et le prsetorium de Chiragan, font ressortir les particularités de la construction romaine dans la région. — C'est la décoration de Chiragan qui a permis de rapporter au milieu du deuxième siècle, l'inscription de Marignac relatant le développement complet des carrières de marbre de Saint-Béat. — Au milieu des autres vestiges, la céramique des diverses périodes de l'Empire est largement représentée à Albi, Montans, Martres, Toulouse et les autres stations.
Religion. — La décoration sculpturale de Chiragan renferme les images de tous les cultes professés aux trois premiers siècles de l'Empire. En effet, on trouve dans les médaillons d'un Ensemble, les grands dieux gréco-romains, accompagnés de dieux secondaires, Esculape, Hygie et Hercule, et des divinités orientales.
Avec la triade égyptienne et les compositions se rapportant aux philosophes grecs, ces sculptures forment une iconographie qui reflète le syncrétisme des hautes classes de la société romaine sous les Antonins et les Sévères, à une époque où les petites gens honoraient encore les dieux gaulois plus ou moins romanisés.
L'art. — On retrouve dans les sculptures de Chiragan la formule décorative de la villa d'Hadrien, complétée toutefois par les images des divinités favorisées sous les empereurs des deuxième et troisième siècles. Si de grandes compositions, en marbre du pays, ont été exécutées sur place par des praticiens étrangers à la région, les autres figures : statues et statuettes à sujets mythologiques, politiques, de genre et d'animaux, et bustes-portraits, toutes en marbres grecs et d'Italie, ont été apportées des grands centres artistiques de l'Empire, où se faisaient les copies, les réductions, les rappels d'oeuvres du grand art, de l'art hellénistique et de l'art gréco-romain, que réclamait la haute culture de l'aristocratie ; tandis que des productions locales, le plus souvent de médiocre valeur, satisfaisaient le besoin d'imitation des classes moyennes peu éclairées.
Sépultures. — Des sépultures des deux rites existent en grand nombre à Toulouse, à Martres et dans d'autres stations. Nulle part, il n'a été
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rencontré de puits et de fosses renfermant à la fois des débris préromains et romains, comme à Beaugency et au Bernard (Vendée). Mais l'étude de la nécropole de Saint-Roch, à Toulouse, ne permet plus de douter que les sépultures en question, qui étonnaient les archéologues ii y a quarante ans, ont utilisé, à l'époque romaine, des cavités funéraires gauloises, les scrobes profundoe de Silius Italiens.
M. J. DE LAHONDÈS dit que, sur la demande du nouveau propriétaire, il a visité la maison de Pierre Delfau, datant de 1495environ, rue de la Bourse. Cette maison, la seule à Toulouse de l'âge gothi" que, avec celle de la rue Croix-Baragnon, montre une porte surmontée d'un arc en accolade dans lequel est inscrit un monogramme du Christ que notre bulletin a publié l'année dernière; un couloir couvert par une voûte à nervures, une salle basse ancienne boutique voûtée de même, une cour avec façade au levant à fenestrage continu sur deux étages, une élégante tourelle d'escalier à vis avec niche ouvragée au-dessus de la porte et niches pour les chandelles ou les lampes dans le mur intérieur et une plate-forme sur la tour, rapprochée des diverses tours d'escaliers du quartier permettant de les étudier et surtout d'admirer, mieux que de partout ailleurs, les formes d'une sveltesse aussi robuste que fine de la tour de l'hôtel d'Assézat; enfin, une galerie à quatre étages d'arcades, ornées simplement, joignent les deux corps de logis.
Séance du SO mars. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. le Dr TACHARD, membre résidant, ayant recueilli une série de vues photographiques au cours de ses excursions en Poitou en a fait un choix qu'il présente en projections, tout en fournissant des renseignements précis sur les divers édifices anciens dont les membres présents sont appelés à voir ou à revoir l'ensemble ou les détails. Les monuments si remarquables de cette région sont passés en revue et la Société remercie l'auteur de cette très intéressante et très obligeante conférence.
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Séance du 26 mars. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
La Société reçoit entr'autres deux brochures offertes par M. Lafuste, instituteur :
Monographie de la commune de Cardeilhac, canton de Boulogne-sur-Gesse (Haute-Garonne); Notice généalogique sur la maison de Cardaillac de Lomné, par M. Martrin Donos.
M. le PRÉSIDENT se félicite de l'heureux retour de M. Romestin, membre résidant, qui vient de visiter les Indes, et nous a donné plusieurs fois de ses nouvelles par l'envoi de cartes postales. Il nous rapporte certainement une riche collection de vues photographiques pour de prochaines conférences.
M. E. CARTAILHAC, membre résidant, donne lecture d'une notice intitulée :
Les palettes des dolmens aveyronnais et des tombes égyptiennes.
(Avec une Planche hors texte.)
Quand on examine les belles séries de mobiliers funéraires des Dolmens des causses du midi de la France que j'ai données aux Musées de Toulouse et des antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye, on remarque cinq ou six plaquettes de schiste verdâtre. Je n'ai su comment les désigner. Ce ne sont pas des armes, cela est évident ; ce ne sont pas des outils ordinaires. Elles n'ont aucun, rapport avec les haches ou les herminettes; et ce ne sont certainement pas des ébauches. Leur forme varie et l'on peut voir que ce ne sont ;pas simplement des galets naturels; on les a découpées et polies sur les bords et sur les faces. On a voulu perforer l'une d'elles ; on voit à l'un de ses bouts deux trous commencés de chaque côté, ils ne se correspondaient pas et on n'a pas terminé le travail; ce détail cependant peut prouver qu'on a voulu faire une pendeloque avec cette plaquette. Mais parmi les très nombreuses pendeloques en pierre de ma collection des dolmens on n'en voit pas qui pourraient établir une transition. Mes plaques de schiste sont toutes bien plus grandes, hors de toute proportion. J'étais
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donc réduit à les colloquer dans le lot des amulettes où nous mettons si volontiers tout ce que nous ne pouvons pas expliquer parmi les vestiges de nos sauvages ancêtres.
J'ai dit que j'avais six exemplaires trouvés dans autant de dolmens voisins de Millau et de Saint-Affrique (Aveyron). Ils figurent au Musée de Toulouse et au Musée national de Saint-Germain. On voit deux autres plaquettes, dont une fort remarquable, â Rodez dans la collection de l'abbé Cerès au Musée de la Société des lettres, sciences et arts de l'Aveyron. Enfin, une neuvième vient d'être figurée sur la pi. IX t. XV des Mémoires de cette Société. Elle provient d'un dolmen de l'ouest du département.
Le nombre est donc plus que suffisant pour démontrer qu'il ne peut y avoir aucune méprise. 11 ne s'agit pas d'un apport, accidentel toujours possible dans ces cryptes sépulcrales très accessibles, fréquentées parles bergers et les chasseurs, dans lesquelles même on a porté des morts à l'époque gauloise et à l'époque romaine. Les plaquettes sont parfaitement contemporaines des dolmens et font partie de lpurs mobiliers ordinaires de la fin do l'Age de la pierre. De plus, leur nombre prouve que leur présence n'est nullement exceptionnelle.
Je suis même persuadé que de telles pierres plates qui n'ont pas une forme fixe, ne sont pas trouées, ni décorées, ont dû souvent passer inaperçues. Il est permis de voir au Musée de Toulouse et au Musée de Saint-Germain que, plus que mes confrères en général, j'ai recueilli les pièces qui sortent de l'ordinaire, coquilles, minerais, roches, ossements peu ou pas ouvragés. Malgré tout je crains d'avoir négligé, à l'origine de mes fouilles, bien des objets peu définis, par exemple lesdites plaquettes — inexpliquées jusqu'ici.
Je suis maintenant en mesure de proposer une explication.
Les sépultures prédynasliques de l'Egypte qui sont, comme nos dolmens, de la fin de l'Age de la pierre, d'une très lointaine aurore de l'Age du cuivre ou du bronze, renferment avec leur céramique si intéressante et leurs merveilleux silex une catégorie d'objets qu'on appelle des Palettes.
Les Palettes sont des plaques de schiste qui accompagnent la plupart des corps, suivant un usage très ancien, transmis par les Autochtones aux conquérants de l'Egypte.
Les plus anciennes ont la forme rhomboïdale et de l'avis de M. Flinders Pétrie, le savant explorateur de l'ancienne Egypte qui mieux que personne les a collectionnées et classées, elles reproduisent vraisemblablement quelque éclat naturel delà roche. D'autres sont découpées avec soin et reproduisent des silhouettes animales très variées, stylisées et
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réduites à certains traits caractéristiques. Dans certains cas une gravure fine complète l'image sur la face principale. Il y a, enfin, des plaques ciselées à fond, couvertes de figures en bas>relief infiniment précieuses.
Bon nombre et des plus petites sont percées d'un trou de suspension qui prouve qu'on pouvait les porter suspendues au corps comme ustensiles pour broyer le fard ou bien encore qu'elles s'étaient, au cours des âges, parfois transformées en amulettes ».
J'avais songé à mes plaquettes des dolmens et aussi aux plaques d'ardoise des sépultures portugaises, en lisant les ouvrages de MM. de Morgan, FI. Pétrie et Capart. La riche collection de M. le D>' Sturge, â Nice, m'avait familiarisé avec les belles palettes égyptiennes très différentes, incomparables. Mais â Bruxelles, dans la galerie égyptienne formée si habilement par M. Capart au Musée du Cinquantenaire, et chez M. de Morgan, dans sa galerie de Croissey-Chatou, près Paris, jene vis pas seulement des pièces de choix, je pus examiner des séries méthodiques, très complètes et en particulier une série de palettes rudimentaires, sans gravures, sans forme animale ni même régulière, tout à fait semblables aux miennes. La matière est la même ardoise schisteuse.
La plupart des plaques égyptiennes les plus anciennes sont des palettes ayant servi à broyer la couleur, surtout la malachite qui réduite en poudre et mêlée à un corps gras servait à faire autour de l'oeil une ligne assez large qui avait à côté de son rôle décoratif, un rôle utilitaire. On le sait par les monuments de la troisième dynastie et leurs claires inscriptions. On a des coquillages et une boîte d'ivoire encore garnis des résidus de la couleur verte; les petits cailloux qui servaient de polissoirs et qui sont en rapport avec les palettes en portent des traces. Quelques palettes ont gardé aussi des vestiges de peinture et souvent on remarque la dépression produite par la longue opération du broyage.
Pétrie a découvert parfois, également sur les palettes, des traces d'hématite, de rouge, la couleur favorite des primitifs.
Les peintures, les tatouages, véritable pictographie, ont joué chez les premiers Egyptiens un rôle considérable. Rien de surprenant à trouver les palettes dans les mobiliers funéraires avec les armes et les parures qiù orneront le mort dans le monde des esprits. Mais d'autres plaques ne sont plus que l'imitation des palettes, soit en petit format, soit en taille excessive. Elles deviennent des amulettes, elles doivent jouer un rôle dans les rites. 11 faut faire appel pour les expliquer aux idées religieuses et l'obscurité commence.
1. MASPERO, Revue critique, 1891, I. 123; CAPART; les débuts de l'art en Egypte, pp. 76-89; flg. 47-60,
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Nos palettes des dolmens du Midi restent également mystérieuses malgré leur analogie avec celles de l'Egypte. Mais peu importe, c'est cette parité qui a son importance et mérite notre attention. Il me semble qu'il ne s'agit peut-être pas ici d'un fait élémentaire que les primitifs peuvent avoir imaginé spontanément sur plusieurs points du monde.
Si c'est un lien positif entre les hommes des dolmens et les indigènes néolithiques de l'Egypte, il peut nous suggérer d'intéressantes réflexions et nous mettre sur la voie de lumières inattendues, laisser soupçonner, par exemple, une commune origine pas trop lointaine.
Sur la planche ci-jointe sont des croquis des plaquettes aveyronnaises que je signale.
Les plaquettes de schiste des dolmens de l'Aveyron ne sont pas isolées dans le matériel préhistorique de l'Europe méridionale. On les retrouve â l'ouest de la péninsule ibérique. En Portugal, les sépultures de la fin de l'âge de la pierre, qui, si souvent, sont semblables à nos dolmens et allées couvertes ont aussi des plaques d'ardoise, mais plus ouvragées et bien plus curieuses. C. Bibeiroi les signala, je pense, le premier, pi. IV et V, dans sa Nolicia de algumas estaçoes et monumentos prehisloricos, Lisboa, 1880. J'ai mentionné ses trouvailles et d'autres dans mes Ages préhistoriques de l'Espagne et du Portugal, 1886, p. 96 et sq. Une série incomparable de ces plaquettes est figurée dans le précieux ouvrage, si peu connu, d'Estacio da Veiga, Antiguadades monumenlaes do Algarve, Lisboa, 1886-1891. Le chev. da Silva en a publié plusieurs dans son Boletim da Soc. arch. do Carmo, passim. Enfin, J. Leite de Vasconcellos, dans ses Religioes de Lusitania, t. I, 1897, leur consacre un chapitre et en fait connaître d'inédites du plus grand intérêt.
Ces plaques de schiste ou d'ardoise qui portent toutes de petits trous de suspension, appartiennent à deux séries distinctes. Les unes, très rares, sont découpées en forme de crosses; les autres, communes, certains ossuaires en avaient des séries, sont rectangulaires et assez souvent elles se prolongent au sommet par un appendice plus étroit. Les crosses et les rectangulaires sont ornées, sur une de leurs faces, d'un dessin gravé au trait. Une d'elles, bien complète, figure une silhouette humaine complétée par le dessin gravé. Je l'ai signalée dans l'Anthropologie, en 1898, p. 720, en insistant sur les analogies certaines de cette
1. Je saisis cette occasion pour rappeler d'un mot les nombreux services que ce savant géologue a rendus à l'archéologie préhistorique. Avec une rare science et une méthode parfaite il fut un des promoteurs de ces études en Portugaf. Il fut l'organisateur du splendide Congrès de Lisbonne, en 1880, et de l'admirable galerie anthropologique de cette ville. II fit d'excellents disciples.
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image avec les statues menhii-s de l'Aveyron. Il serait possible que les autres, en majorité du moins, fussent aussi tenues par leurs auteurs pour des figurines humaines, stylisées, conventionnelles. Les dessins géométriques qui les recouvrent sur une face s'expliqueraient ainsi, à la rigueur, et en tous cas aucun d'eux n'a de signification plus nette.
Autrefois, je signalai ces plaques comme ornement ou amulette sans insister autrement. Aujourd'hui, à la lumière de l'archéologie égyptienne, je me demande s'il n'y a pas une autre explication, si ce ne sont pas des palettes, ou des représentations conventionnelles de palettes, comme en Egypte, où on les voit affecter des formes découpées avec gravures diverses ornementales, bien éloignées de leur destination.
En tous cas, quelle que soit l'explication, il y a un fait certain : c'est l'analogie des plaquettes d'ardoise ou de schiste dans les dolmens du Portugal, de l'Aveyron et les sépultures énéolithiques ou néolithiques de l'Egypte.
Séance du 3 avril. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS, président.
La Société s'occupe de nouveau du tableau de l'église de Seisses, dont M. Lassalle, le photographe habile de nos Académies, a fait une excellente photographie qui permet de mieux apprécier maints détails.
M. PERRODD, recteur de l'Académie, membre résidant, résume d'après un manuscrit inédit, le voyage en 1805 de Fourcroy, ministre de l'Instruction publique à Limoges, Périgueux, Bordeaux, Toulouse où il est logé à l'auberge du Grand-Soleil, Carcassonne, Narbonne, Béziers, Montpellier, Marseille, marqué par diverses particularité curieuses.
M. E. LAMODZÈLE, membre correspondant, communique une note dont M. E. Cartailhac donne lecture. Elle est accompagnée de dessins et d'une carte géographique.
Sur quelques outils en pierre taillée et en pierre polie de Castelmaurou (Haute-Garonne).
Dans le courant des années 1896, 1897 et 1898, j'ai trouvé dans la partie de la propriété de M. Debat-Ponsan, située clans la commune de Cas-
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telmaurou, plusieurs outils en pierre taillée ou polie. L'endroit où gisaient ces instruments confronte la limite extrême de la commune de Castelmaurou à l'est; il empiète même un peu sur la commune de Gragnague. Il se trouve exactement à mi-côte de la colline qui longe au sud la vallée du Girou et à 150 mètres du ruisseau de Préousse et. de la ligne ferrée de Toulouse à Albi. Là, sur une circonférence de 100 mètres de diamètre environ, les travaux du labourage ont ramené successivement à la surface du sol plusieurs outils dont nous allons donner une description sommaire.
Outils en pierre taillée. — Le premier et le plus important de ces outils est sans contredit une sorte de hache (?) en quartzite, taillée avec soin sur les deux faces. Les aspérités résultant de la taille se sont émoussées sous l'action des agents atmosphériques qui ont donné à la surface de la pierrre une sorte de poli et de velouté. Cet outil, qui rappelle des instruments analogues découverls à Venerque par M. le Dr Noulet, et dans plusieurs autres endroits de la région toulousaine, a été certainement taillé dans un gros caillou roulé. A plusieurs endroits, en effet, on reconnaît encore la surface primitive du caillou.
Un autre outil taillé, comme le précédent, dans un caillou en quartzite, présente la forme d'une sorte de serpe avec une entaille pratiquée sur le côté opposé au tranchant. Ici encore les aspérités de la taille disparaissent sous une surface polie.
Je signalerai ensuite des disques ovales, toujours en quartzite, dont deux sont échancrés aux deux bouts, tandis que le plus grand ne porte qu'une seule échancrure. Ces disques, en général très minces, semblent avoir été faits avec des éclats ou des fragments de gros cailloux roulés.
J'en dirai autant de deux disques en quartzite d'inégale grandeur. Le plus petit, très mince et taillé sur les deux faces, pourrait bien être une sorte de grattoir; quant au grand, taillé sur une seule face et seulement sur les bords, j'ignore à quel usage il était destiné.
La série des outils taillés comprend enfin un caillou en quartzite, taillé avec soin sur les deux faces, et en forme de coin.
Outils en pierre polie. — Ces outils, qui ont été trouvés au même endroit, comprennent d'abord deux hachettes bien conservées.
Viennent ensuite les fragments de deux haches qui devaient être relativement assez grandes.
Enfin, en même temps que ces deux fragments et sur le même point, j'ai trouvé une pierre de fronde en quartzite. Cette pierre se présente sous la forme d'une sphère dont les deux pôles auraient été fortement aplatis. Ces deux surfaces sont soigneusement polies, tandis que les parties bombées sont restées à l'état presque fruste.
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J'ajouterai, en terminant, qu'à l'endroit où ces objets ont été découverts on n'a jamais trouvé ni ossements, ni fragments de poterie, ni enfin aucune trace de foyer.
M. E. CARTAILHAC dit que M. Laraouzelle a bien voulu se dessaisir de cette intéressante série en faveur du Musée d'histoire naturelle de Toulouse.
Séance du 24 avril. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Le Ministre de l'Instruction publique ayant mis une nouvelle somme de 300 francs à la disposition de la Société pour continuer les fouilles aux environs de Toulouse et notamment à VieilleToulouse, M. L. Deloume, trésorier, est délégué pour en prendre livraison, suivant l'usage.
M. le baron Desazars est adjoint à MM. Louis Deloume et Delorme qui composaient déjà avec M. Joulin la Commission des fouilles à Vieille-Toulouse.
M. le baron DESAZARS, au nom de la Commission spéciale, fait son rapport sur les candidatures de MM. de Santi, médecin-major, officier de la Légion d'honneur, et Rachou, chevalier de la Légion d'honneur, artiste peintre, directeur du Musée des Augustins et du Musée Saint-Raymond, qui sont élus, au scrutin secret, membres résidants.
M. J. DE LAHONDÈS résume un article de M. Mâle qui a paru dans la Revue des Deux-Mondes du Ier avril 1906.
Le sentiment de la mort dans les derniers siècles du Moyen-âge.
Le treizième siècle avait représenté la mort sereine; les artistes, loin de la faire craindre, la faisaient aimer. Les figures tombales, gravées ou sculptées, sont calmes et paisibles, pures et suaves; elles dorment recueillies.
Mais, vers la fin du quatorzième siècle, la mort commence à montrer son horreur; ainsi au tombeau du médecin Guillaume de Harci-,
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gny à Laon, du cardinal Lagrange au musée Calvet d'Avignon. La Danse macabre est peinte au cloître des Innocents en 1424, et elle est reproduite ensuite partout; de même la légende des trois morts et des trois vifs, ceux-ci d'abord à pied, puis à cheval. Ensuite, au seizième siècle, on vit,sculptés en bas-reliefs et encastrés dans le mur des églises des cadavres et des squelettes (1526-57). Voir la mort du cimetière des Innocents au Louvre. Les inscriptions funèbres, les rappels de la mort se répandent sur les portes des maisons, sur les meubles.
L'austérité, la gravité chrétienne, l'attendrissement aussi des douleurs du Christ et des douleurs humaines furent propagées par les Franciscains et les Dominicains. Ils font pleurer l'Europe sur les plaies du Christ; ils exaltent la sensibilité.
La pitié qui apparaissait encore dans la représentation de la légende des trois morts et des trois vifs disparaît dans celle de la Danse macabre (de Machabée) qui montre surtout la brièveté de la vie, l'incertitude de la mort, ses représailles sur la vie passée. Dès le quatorzième siècle, la Danse macabre était représentée dans les églises comme un mystère, par des danseurs; l'un d'eux, seigneur, bourgeois, artisan, prêtre ou évêque même, disparaissait de la ronde à chaque tour de la danse. La danse était accompagnée d'un sermon, de même que le sermon sur la Passion était fortifié par la représentation du drame du Calvaire. Puis la Danse macabre parut sur les tréteaux comme une moralité. Le drame précéda ainsi l'oeuvre d'art.
Dans les danses macabres, la mort n'est pas la mort, mais le double du vif représentant ce que sera le vif après sa mort, sa figure posthume. Le seizième siècle ne comprit pas ce sens et représenta la mort, cadavre momifié ou squelette, s'emparant du vif. Ainsi Holbein. Elle fut alors surtout une satire contre les puissants. Un laïque alterne avec un prêtre.
Les danses macabres sont d'origine française. Il en reste une à Kermaria (Côtes-du-Nord) et à la Chaise-Dieu; celle-ci ébauche (1420) pleine de verve. Livres : Danse macabre de Guyot Marchant, 1-188, autres. Poèmes du Mors de la pomme, 1470. Puis Y Ars moriendi, avec gravures, très multiplié. Drame sérieux amenant la réflexion; la mort n'est plus une ronde bouffonne. L'Ars moriendt engage fortement à la préparation de l'âme devant le jugement
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suprême. Le premier, probablement français, est traduit dans toutes les langues de l'Europe. Texte pathétique, gravures redoutables ; lutte du bien et du mal. A la fin du Moyen-âge, l'image de la mort est partout. Les veilleurs de nuit eux mêmes annoncent l'heure en disant : « Réveillez-vous, gens qui dormez; priez Dieu pour les trépassés. »
Séance du 1er mai.
Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. LE PRÉSIDENT souhaite la bienvenue à M. Rachou. qui assiste pour la première fois à la séance. Notre nouveau confrère est un des plus brillants artistes de Toulouse. Mais, en outre, il est archéologue dans l'âme; il a fait une collection personnelle qu'il voudra bien nous admettre à visiter. 11 a contribué à la fondation du Musée que son illustre maître Bonnat adonné à Bayonne; enfin, depuis trois années, il s'est attaché à mettre en ordre et en lumière les collections archéologiques de Toulouse. Dans ses fonctions de conservateur, il a montré un zèle rare et d'éclatants succès ont couronné ses efforts. La Société, depuis longtemps, désirait le compter parmi ses membres résidants.
M. RACHOU remercie M. de Lahondès.
A la prière de M. le Président, M. CARTAILHAC rend compte du Congrès international d'anthropologie et d'archéologie préhistoriques qui vient d'avoir lieu à Monaco avec un grand concours de savants de tous les pays. Plus de cinq cents adhésions avaient été recueillies et il y a eu cent vingt communications. On a inauguré à celte occasion le Musée anthropologique de Monaco où sont réunies toutes les récoltes faites dans les grottes de Grimaldi, près Menton, et dans divers gisements de la principauté. Il y a là des trésors de paléontologie, d'anthropologie et d'archéologie qui, classés par MM. Boule, Verneau, Cartailhac, ont vivement attiré l'attention. Le prince Albert Ier, en ordonnant ces fouilles, une grande publication et l'installation des objets d'art dans un Musée spécial, a rendu un réel service à la science. 11 avait bien voulu accepter le protectorat du Congrès, et la réception a été BULL. 36, 1906. 32
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magnifique dans le pays idéal de Monaco. Des excursions finales ont eu lieu dans la direction de l'Italie, par Milan et les lacs de laLombardie, et, en France, dans les Alpes-Maritimes et à Marseille.
Le Musée antropologique a pour conservateur M. le chanoine L. de Villeneuve qui a dirigé les fouilles, pendant une dizaine d'années, avec une habileté et une patience admirables.
M. E. DELORME lit la note suivante :
Une médaille satirique du seizième siècle.
M. DELORME fait passer sous les yeux de ses collègues deux exemplaires d'une série de médailles que les protestants répandirent clandestinement dans le comté de Flandres, sous le règne du roi Philippe II, comme réplique aux décisions prises contre eux par le Concile de Trente.
Ces deux médailles, d'un diamètre de 34 millimètres sont coulées. L'une, en cuivre rouge, porte un anneau de suspension ; l'autre, qui est en laiton, n'en a point. Elles diffèrent dans certains détails, mais le sujet et les légendes sont les mêmes.
En voici la description :
Droit : Profil d'un pape coiffé de la tiare. En renversant la médaille, la même figure représente la tête d'un diable cornu.
En légende :
ECCLESIA PERVERSA -TENET • FACIEM • DIABOLI
Au recto : Même disposition d'une double figure, dont l'une représente un cardinal, l'autre est coiffé d'un bonnet de fou. La légende porte :
STVLTI -ALIQVANDO- SAPIENTES
L'attention de l'Inquisition d'Espagne fut appelée sur ces objets, comme en témoigne le passage suivant que nous avons traduit dans la Historia crilica de la Inquisicion de Espana, ouvrage en dix volumes, publié à Madrid en 1822, par Juan Antonio LIorente, ancien secrétaire de l'inquisition de cette cour.
A la page 146 du tome III, on lit :
§ 6. « Le Saint-Office de Séville écrivit au Conseil (suprême) qu'il avait ouï dire que les Luthériens avaient frappé dans les Flandres certaines monnaies injurieuses pour le Souverain Pontife, qu'à leur avers on
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voyait un Pape avec une tête, figure et cornes avec lesquelles le diable seul peut être représenté, où circulairement on dit :
MALI • CORNI • MASCVLI ■ OVIVM
et au verso, un cardinal romain avec une figure semblable à celle d'un fou, et autour la légende :
STVLTI • ALIQVANDO • SAPITE
« Le Conseil ordonna, le 15 novembre 1576, de saisir toutes les monnaies de ce genre, en quelqu'endroit où elles pourraient se trouver, et d'interroger leurs détenteurs sur leur origine, sur les motifs et l'objet de leur acquisition et, en outre, sur tout ce qu'il plairait au Saint-Office de savoir. »
Les Inquisiteurs parvinrent-ils à s'emparer de beaucoup d'exemplaires de ces médailles séditieuses? Don Llorente ne nous le dit pas; mais, étant donné le nombre assez considérable qui circulait, c'est probable; malheur aux infortunés surpris en possession de ces objets prohibés que les rigueurs du Concile de Trente avaient fait naître.
Poursuivis par l'anathème lancé par cette célèbre assemblée contre tout ce qui, de près ou de loin, touchait à l'hérésie, ils étaient d'avance condamnés au bûcher qui, à cette époque sombre de l'histoire d'Espagne, s'alluma trop souvent dans plusieurs villes du royaume, notamment à Valladolid, Cuença, Logrono, Séville, Grenade, Murcie, Tolède et Saragosse, où de nombreuses victimes périrent dans les flammes.
Séance du 8 mai.
Présidence de M. J. DF. LAHONDÈS, président.
La correspondance comprend une lettre de la Société archéologique d'Eure-et-Loir, invitant à assister à la célébration de son cinquantenaire, le 14 mai 1906, ou tout au moins à lui faire parvenir notre adhésion.
La Société archéologique du Midi ne sera pas représentée à cette fête, mais elle écrira pour exprimer tous ses regrets et pour adresser à la Société archéologique d'Eure-et-Loir ses compliments et ses voeux.
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La Société d'émulation d'Abbeville annonce son intention d'élever un monument à la mémoire d'un savant illustre, Boucher de Perthe, le promoteur des études d'archéologie préhistorique et des recherches sur l'homme fossile ou antédiluvien, eommeon disait alors. La souscription de la Société archéologique du Midi est sollicitée.
L'Académie d'Amiens demande à la Société archéologique de participer à une souscription pour élever un monument à la mémoire de Jules Verne.
Parmi les volumes adressés à la Société, on remarque :
1° Un envoi du Ministère, le troisième toaiedes Rôles gascons, par M. Bemont;
2° Le Compte rendu de la réunion des Sociétés des BeauxArts des départements pour l'année 1905.
M. l'abbé DEGERT, à propos d'une assertion de M. le Dr Tachard, au cours de sa conférence sur le Poitou, fait observer que La Hire, le compagnon de Jeanne d'Arc, n'est nullement originaire de Chinon.
M. l'abbé V. Foix, curé de Laurède (Landes), a publié dans le Bulletin de la Société de Bordeaux, un mémoire intitulé: Ouest né La Hire? (Dax, 1902). De nombreux textes et documents lui permettent de conclure en faveur de Préchac et du château seigneurial de Vignoles.
La Revue de Gascogne avait déjà publié en 1869 un article intitulé : « La patrie du valet de coeur. » (La Hire), par Alphonse Castaing, qui aboutit aux mêmes conclusions.
La Revue des Pyrénées, dans un article intitulé : «Les compagnons d'armes de Jeanne d'Arc », par M. A. Couret, s'exprime ainsi : le Commingeois Etienne de Vignolles, dit La Hire, né au château de Vignolles, commune de Vignolles, canton de Boulogne, arrondissement de Saint-Gaudens. Mais ce propos est extrait de la Nouvelle biographie générale de Didot, et d'une note publiée à Orléans 1855 : « Le 426e anniversaire de la délivrance d'Orléans. » Mais ce ne sont pas là des références sérieuses en mesure de contrebalancer les autres citées par MM. Castaing, Foix, et aussi par Tami - sey de Larroque.
— 485 — M. E. DELORME fait la communication suivante :
Jeton satirique contre les femmes 1. {Planche.) (XVII™ siècle).
La pièce qui fait l'objet de celte communication est connue d'un certain nombre de collectionneurs. Les auteurs 2 qui l'ont mentionnée se sont bornés à la décrire, quelques-uns en ont sommairement indiqué l'origine, aucun ne l'a accompagnée de commentaires.
11 m'a paru intéressant de combler cette lacune en essayant de pénétrer le sens de ses légendes et des sujets qui y sont figurés, et de
m'étendre aussi, plus que cela n'a été fait jusqu'à présent, sur la personnalité et le caractère original de son auteur.
C'est un jeton en cuivre, du module de 28 millimètres, frappé au millésime de 1660.
Sur une des faces, on voit un singe armé d'un fouet, assis sur un âne dont le bât est rempli de têtes de femmes, et comme légende :
OMNE • FERENS • MALVM.
1. Nous sommes heureux de remercier ici M. Gabriel Brousse, numismate à Toulouse, qui a obligeamment dessiné pour nous ce jeton.
2. Ce jeton est signalé dans le Manuel de l'Amateur de Jetons, J. de Fontenay, 1854; dans la Revue Numismatique, A. Lefebvre, 1866; dans l'Intermédiaire des Chercheurs, 25 octobre 1888 ; dans le Catalogue des Monnaies, Médailles, Jetons et Sceaux de la Bibliothèque de Montpellier, E. Bonnot, 1898.
Jeton satirique contre les femmes (XVII" siècle).
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De l'autre côté, deux forgerons martelant une tête de femme placée sur une enclume, avec l'inscription :
VNICVS- EST ■ SPECIE.
La signification de la première légende: Omne ferens malum, estfacile à comprendre : la femme, c'est le mal, tout le mal. Nous sommes d'accord pour admettre qu'une pareille maxime n'est qu'une boutade, mais le rapprochement que l'auteur établit entre la femme et le singe n'est pas dépourvu d'une pointe d'observation. Notoirement faux, et fort heureusement, au physique, il n'est peut-être pas sans apparence de vérité au moral. Nous nous contentons de dire apparence pour n'avoir pas l'air de faire cause commune avec un caricaturiste qui passerait de nos jours pour un homme de mauvais goût. La suite logique de cette allégorie parait être que l'homme qui porte ce fardeau docilement et sans regimber est comparable à une bête de somme et qu'il n'est qu'un âne dés qu'il se mêle à la société des femmes ou qu'il vit avec l'une d'elles. Telle était évidemment l'opinion de l'auteur, que nous ne partageons pas, cela va sans dire.
Quant aux forgerons martelant une tête de femme avec la légende : 'dnicus est specie, l'interprétation en est moins aisée. Qu'il y ait beaucoup de femmes dont le cerveau soit aussi dur que l'enclume, il y a longtemps que les mécontents le répètent dans les sentiers parfois épineux de la vie conjugale. Mais justement i'unicus de la légende n'autorise pas cette comparaison. Ils sont légions les cerveaux de cette espèce alors il devient bien difficile de savoir quelle oeuvre miraculeuse poursuivent ces enfants de Vulcain. à moins que l'auteur satirique n'ait voulu par là nous donner à entendre que les coups, les coups redoublés, sont l'unique moyen de redresser l'esprit et le coeur d'Eve autrement incorrigible.
Il y a là évidemment une allusion qui nous échappe, nous ne la saisissons pas. Ils façonnent, sans cloute, une femme nouvelle, la femme idéale, unique en son genre, et ce dur labeur n'enfantera qu'un rêve! « Car, voyez-vous, comme dit Gros-René dans le Dépil amoureux, alors très en vogue et que l'auteur avait certainement lu, quand sa vie durerait cent mille ans, la femme est toujours femme et jamais ne sera que femme ».
Il n'est pas permis de dire d'une manière absolue que tout en la femme est digne de damnation. Il faut avoir des raisons, et personne ne doute de prime abord que l'auteur n'en eut d'excellentes. On éprouve cependant un certain embarras à admettre que notre artiste, maître
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Pierre Janvier, choriste et chantre de la vénérable église Sainl-Elienno de Meaux, ait entretenu avec légitime motif une pareille amertume en son âme sacerdotale, et l'on serait presque excusable de soupçonner l'intégrité de ses moeurs si l'on ne connaissait et son caractère et son passé.
Fils et petit-fils de médecins, quoiqu'il parût destiné à la carrière médicale, il se consacra à la peinture où il se montra plutôt médiocre, et ce fut peut-être dans les promiscuités de l'atelier qu'il apprit à mépriser les femmes; ce qui tendrait à prouver, somme toute, qu'il ne se montra pas plus habile dans l'art de les courtiser que dans l'art de les peindre; ce qui accuse, en outre, un certain travers de jugement puisqu'il n'hésite pas à faire supporter à toute la plus belle moitié du genre humain la rancoeur que lui avaient inspirée quelques sujets, sans doute de qualité inférieure; à moins toutefois que cette impression fâcheuse ne se soit encore aggravée dans le mystère du confessionnal lorsqu'il embrassa la prêtrise, passé trente ans.
Toujours est-il qu'il détestait abominablement les femmes ou du moins, il en avait l'air. Il jouissait d'ailleurs de la réputation d'être l'homme le plus médisant de la Champagne. Les volumineux mémoires manuscrits qu'il a laissés et que l'on conserve à la bibliothèque de Meaux en rendraient au besoin un suffisant témoignage.
Nous aurions été réduits à arrêter ici nos explications si l'extrême obligeance de M. Andrieux, bibliothécaire de la ville de Meaux, n'était venue à notre aide. C'est avec le plus aimable empressement que M. Andrieux, a extrait des manuscrits 1 de Pierre Janvier, pour nous la communiquer, la curieuse note qui suit :
« En 1660, je fis un Almanach que Von appella « Lustucru ». C'était un forgeron qui raccommodoit les têtes 2 des femmes. Il eut grande vogue, on en fit des médailles ou d'un costé éloit écrit : unicus est specie, et de Vautre vu un asne chargé de filles et de femmes et éloit escrit omne ferer.s malum : . Les asnes et ignorans de Meaux m'en voulurent beaucoup dans cette affaire. On fit aussi des jetions. Les flatteurs auprès des Evesques, par ignorance, m'ont nui à avoir mieux que je n'ay, ils me promelloient beaucoup et ils m'ont manqué de parolles. »
Cette note est accompagnée du dessin original qui a servi de modèle pour la [frappe du jeton. Elle donne lieu à une explication assez cu1.
cu1. IV des Mémoires manuscrits, page 143. 3. Ce mot est illisible sur le manuscrit.
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rieuse : Je fis un Almanach, dit l'auteur, que l'on appela Lustucru. Il y a là un jeu de mots et un jeu d'idées. On n'a jamais dit : infaillible comme un almanach mais on a dit souvent : trompeur comme un almanach. On disait déjà plaisamment au dix-septième siècle, pour montrer qu'on n'ajoutait pas foi à la parole de quelqu'un : « On ne prend point de ses almanachs », témoin d'Ablancourt, qui écrit : « J'ai beau dire la vérité, l'on ne prend plus de mes almanachs », ce que Richelet traduit ainsi : « J'ai beau dire vrai, j'ai le malheur de n'être plus cru, Comme si l'on disait: Ceci vrai? le pronostic s'est par hasard réalisé! qui l'eût cru? L'eusse-tu cru? Voilà le sens. En réalité Lustucru était un personnage burlesque un peu bête, une sorte de Jocrisse dont Chapelle avait déjà découvert l'existence entre les feuillets d'un vieil almanach.
Ce personnage ne méritait pas la moindre considération et il se trouva tout indiqué pour servir de pavillon, dans les cercles enjoués, à toutes les divagations des pronostiqueurs de la pluie et du beau temps, c'està-dire des almanachs. Telle est l'origine.
C'est sur cette donnée que Pierre Janvier déclare que sa pochade n'aura pas plus de crédit qu'un « almanach » et ne pourra être taxée que de facétieuse invention.
Mais le crédit de la facétie dépassa les prévisions de son auteur, puisqu'il avoue que les ânes ne la lui pardonnèrent pas. Les ânes ne furent pas seuls! il donna la satire, il devait recueillir la persécution.
Les moines, dont il se disait le fléau, lui trouvèrent trop d'esprit quoiqu'il n'en eût pas étonnimment; les femmes, trop de malice, quoiqu'elles en eussent, sans aucun doute, plus que lui, et ses supérieurs, habilement circonvenus, lui donnèrent plus de promesses que de profits.
Il fut nommé vicaire perpétuel de Crégy en 1635 et curé de SaintThibaud, proche l'abbaye de Saint-Faron, à Meaux, en 1667. Il y mourut le 9 avril 1689, prosateur médiocre, poète plus médiocre encore, et sans avoir obtenu, autrement qu'en paroles, les dignités, les prébandes, les riches abbayes auxquelles il croyait avoir droit. Il eut le temps de s'en consoler en écrivant son épitaphe que Moreri nous a conservée.
Il s'y déclare l'ennemi des moines, le fléau des bénédictins et, par un sentiment de puérile vanité, le premier des nouvellistes et le plus fécond de tous les poètes.
Société archéologique du Midi
Bulletin n°36. 1906
PALETTES EN SCHISTE DES DOLMENS DE L'AVEYRON.
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Séance du 15 mai.
Présidence de M. .T. DE LAHONDÈS, président.
La correspondance comprend entre autres publications le n° 4, VIe année du Bulletin de la Société archéologique du Oers, renfermant un article sur une échauffourée au théâtre de Toulouse (an V) par M. Brégail. C'est une lettre d'un Toulousain et l'échauffourée eut lieu à propos d'une baladine « qu'on a vu tour à tour caresser tous les partis », la Cresson.
La correspondance imprimée comprend le n° 8, mai 1906, de l'excellent Bulletin des musées royaux des arts décoratifs et industriels à Bruxelles, qui renferme un article remarquable sur Les Musées de province et l'État. L'auteur, E. v. 0., préoccupé de l'intérêt général de la science et du public, examine la concurrence véritable qui s'élève parfois entre les musées de l'Etat et les musées locaux, provinciaux ou communaux, au sujet des pièces qu'ils revendiquent de part et d'autre pour leurs collections.
Le dogme de certaines personnes est que tout objet ancien trouvé dans leur province revient de droit'au musée du chef-lieu.
E. v. 0. déclare que cette conception est néfaste. Les,domaines territoriaux des musées provinciaux ne sont pas naturels, ils sont conventionnels. En outre, suivant la susdite théorie, dans les provinces on verrait tous les petits chefs-lieux s'élever contre les prétentions des musées provinciaux. Chaque ville voudra garder les objets recueillis près d'elle même si elle n'a pas un noyau d'hommes suffisamment éclairés pour se soucier de pareilles choses.
« Alors, c'est l'éparpillement, c'est l'émiettement de nos archives archéologiques nationales avec toutes les conséquences qui s'attachent à ces mots. C'est la perte de toute vue d'ensemble de notre passé le plus lointain. »
L'auteur rappelle la fable : Les membres et l'estomac.
Il proteste ne pas vouloir attenter à la liberté; « ce serait tuer les initiatives, glacer les enthousiasmes que de vouloir en quelque
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sorte les enrégimenter... Ce serait de plus peine perdue... Nous ne pouvons donc que formuler des voeux. »
Il trace un résumé historique de la Belgique. Son passé peut se diviser en deux parties : le passé en quelque sorte localisé, le passé de clocher, que peuvent revendiquer comme leur « propre » nos communes ou nos provinces actuelles, et cet autre passé plus lointain, plus diffus, répandu sur tous les points du pays, sans que personne puisse, pour le revendiquer, invoquer autre chose qu'une coïncidence géographique sans portée véritable
La valeur de ce passé est avant tout nationale. C'est une succession en quelque sorte vacante; elle revient à l'Etat. La province peut fournir les anneaux, mais la chaîne ne peut se constituer qu'au centre. Chaque province est la collaboratrice du tableau à former en la capitale. Particuliers, sociélés, institutions, musées comprenanl la stérilité d'une possession individuelle, par don, prèl ou dépôt, vei seront au musée central les pièces qui resteraient égarées chez eux. A Nuremberg, le musée germanique n'est pas autre choseC'est un exemple à suivre.
M. CARTAILHAC dit que la question est très intéressante, mais que le confrère belge n'a pas envisagé une solution, celle qui est réalisée dans notre admirable Musée des antiquités nationales à SaintGermain. Les objets importants ou simplement utiles, disséminés en France ou à l'étranger, ont été moulés, et, au milieu du plus grand nombre d'originaux possible, les moulages complètent l'enseignement.
Toutefois, un fait est évident. Il est absurde et dangereux de faire partout des musées. On a eu un moment en France la lubie des musées scolaires, des musées cantonaux. Le résultat a été nul po^r la science, mais les collections formées par les instituteurs ont été pillées par les inspecteurs primaires ou par les sous-préfets ou par les députés. Elles se sont évanouies au profit des amateurs de bibelots et surtout des marchands d'antiquités.
M. Cartailhac déplore que l'Etat se désintéresse de la conservation des petits musées départementaux. 11 faudrait assurer le sort de leurs richesses contre toutes éventualités. Un régime, comme celui des archives, serait un bienfait.
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M. DEI.ORMK présente à la Société un fragment de colonne sculpté qui provient du cimetière des Sept-Deniers, dans le ramier du Bazacle, l'ancien cimetière des pestiférés. Ce devait être le support
d'une croix; les sculptures représentent une lête de mort, des os de morts. M. de Lahondès rappelle à ce sujet combien les représentalions de la mort ont été fréquentes au quinzième et seizième siècles.
M. le colonel DE BOURDES fait la lecture suivante :
Support d'une croix, cimetière du Bazacle, Toulouse.
Un cahier de compte manuscrit de 1687, relatif au Parlement de Toulouse.
Ce cahier de compte est intitulé :
Estai de la recepte et dépense fait par M'» Mathieu de Comynihan, conseiller du Roy, procureur général, et payeur des gages, pensions et autres droits de tous les officiers du Parlement de Toulouse durant l'année mil six cent quatre-vingt-sept, et pour trois quartiers.
Ce compte nous fait connaître nominativement la composition du Parlement en cette année 1687, ainsi que les divers traitements affectés
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à chaque office. Il compte 32 feuillets, c'est-à-dire 64 pages, d'un format à peu près carré de 22' à 25l de côté; malheureusement, la partie inférieure du cahier a été un peu tronquée; ce qui fait que certains détails font défaut; mais l'essentiel s'y trouve.
On voit d'abord, en tête du cahier, « La Recepte « :
« 1° De la somme de quarante sept mil neuf cent quatre vingt dix sept livres seize sols dix deniers reçus du fermier général des gabelles pour le fonds du quartier de janvier, février et mars, qu'il devait remettre au dit s'' de Comynihan, suivant l'ampliation de sa quittance signée Martin, cy XLBiim IXCIIIIXI XBII> XBIS.
« 2° Dudit fermier général des gabelles pour ie quartier d'avril, mai et juin, la somme de cinquante neuf mil sept cent quatre livres neuf sols un denier, suivant autre ampliation signée Martin, cy LIX" 1 Biicmil IXSI<!.
« 3" Autre reiepte de franc salle :
Du fermier général des gabelles la quantité de sept cent quatre vingt deux minots deux quarts sel contenu dans Testât du Roy pour déparirt aux officiers dudit parlement comme apert de deux ampliations de deux quittances fournies par le comptable au dit fermier, signées Martin, cy BIIC mi» iim 2 q. »
Vient ensuite le chapitre intitulé : « Dépense en écus ».
Nous allons en décrire les différents articles, en citant les noms des membres du parlement qui y sont rapportés, mais en ne donnant le compte détaillé du traitement que pour un seul membre, dans chaque office important.
« 1° A messire Thomas Alexandre de Morant, premier président, pour ses gages ordinaires du quartier de janvier, février et mars, cy . ne XI BI 1 XXXIIII 8 Bld
« A Luy pour le quartier d'avril, may et juin, cy. . . II^LII 1 msiuid
« A Luy, quartier d'octobre, cy. Néant.
« A Luy pour son augmentation des gages pour lesdits trois quartiers, cy IIKLXXIII 1 LBIII 8 nd
« A Luy pour son droit de manteaux BIII 1 XX»
« A Luy pour son franc salle, et par une seule quittance,
cy. BIII mi°" (minots). »
2° Présidents : Messires : Hector-Estienne de Richard, prieur; Guy de Maniban; Joseph de Pujet de Gau ; Jean-Louis de Laurency de Monbrun; François de Nupces; Guillaume de Caulet. — Le compte de Me Guy de Maniban est le suivant :
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« A Luy pour ses gages du quartier de janvier, février et mars,
cy • . . ne L,!
« à luy quartier d'avril IICL'
« à luy quartier de juillet IICL 1
« à luy quartier d'octobre Néant.
« à luy pour le droit de manteaux BIII' XX»
« à luy pour son franc salle. BIII minots. »
« 3» Conseillers honoraires .- M 1' l'archevêque de Toulouse et Mr levéque de Comminge. « Le premier reçoit pour son franc salle L minots.
« 4° Conseillers clercs .- MM1-" de Layrac, au lieu et place de M1* Pierre d'Olivier, conseiller clerc, son oncle, pour le service rendu à la grand Chambre par ledit sieur d'Olivier; Georges Mathias de Lafont; François de Lucas; Jean de Roquette; François-Gabriel de Pujol Thésan; Jacques Saget (manque deux Conseillers).
Compte deM" Georges-Mathias de Lafont :
« Quartier de janvier, février et mars, cy . . . XXXBIII 1 XXII 1 imd
« à luy, ou à son héritier mons. Lafont Cagaroudes son frère, quartier d'avril, may et juin, cy XXXLIII 1 XLBIIS xid
« à luy, depuis le 1er juillet jusqu'au 24e août qu'il fut inhumé, cy , XXIII 1 XXXBIII» id
« à luy pour son droit de manteaux im' xs
« à luy pour son franc salle et par 2 quittances. . . . i, minots. »
« 5<> conseillers lays servant à la grand Chambre, et Tournélle : Mres Jacques de Caulet, doyen des conseillers servant à la grand Chambre; Jacques de Chastanel; Guillaume Boutaric; Jacques Ranchin; Valentin de Lagnes Junius; François de Cassaigi.au Glatens; Guillaume de Maran; François de Rességuier, président à la seconde Chambre des enquêtes; François-Siméon de Laporte; François-Estienne d'autherive; x.... ; Jean de Burta; Jean de Guillermin; Jacques Druilhet, président en la seconde Chambre des enquêtes; Claude de Juges; Jean Daiga, jadis procureur général en la chambre de l'Edit; Jean de Mua; Clément de Gach; Salamon de Fauré; Clément Delong; André de Sapte; Henry de Vedelly; Bernard de Nupces; X...; Samuel de Fermât; Pierre-Antoine ds Madron; Antoine de Valette et François de Chalvet. »
Les comptes varient dans cet article suivant que le conseiller sert a la grand Chambre ou à la Tournélle, ou qu'il est président eu celle-ci, ou encore pour divers motifs; c'est pourquoi nous détaillons trois comptes :
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« A M'" Jacques de Caulet, doyen des conseillers à la grand Chambre, quartier de janvier, février, mars XLBII 1 is md
« à luy quartier d'avril XLBII'xxxnsBiid
« à luy quartier de juillet xxx' XXBIIS
« à luy pour le temps des vaccations xxi 1 XBS
« à luy pour son franc salle, par 2 quittances i, minots.
« à Mre Jacques Druilhet, président en la seconde Chambre d'enquêtes, quartier de janvier, février, mars CXBI'XLS
« à luy quartier d'avril CXBI 1 XL«
« à luy quartier de juillet. . . . , CXBI 1 XLS
« à luy quartier d'octobre Néant
« à luy pour son franc salle et par 2 quittances. . . . ni minots. « à Mre Jean Daiga, servant à la Tournélle, jadis procureur gén» 1 en la
chambre de l'Eclit, quartier de janvier CLXXIIII'xis xd
« à Luy, quartier d'avril CLXXIIIII xBisBind
« à luy, quartier de juillet CLXXIII'BI»
« à luy pour son franc salle (manque la quittance). . . in minots.
« 6° Conseillers aux enquêtes, M'** : Jean-François Dumay; X...: François de Gach Villegly; Louis Lebrun; François-Lancelot de Maniban; Jean Daspe; Bernard de Théron; Bertrand de Comère; Jean-Guy Duval ; Jean-François Tournier; François Reynier; Pierre François de Comére; Guillaume de Prohenques; François de Colonges; Pierre de Marmiesse; Nicolas de Pancy; Guillaume de Caulet; Jean-Joseph de Senaux, par quittance de Mr de Coinère, conseiller au Parlement, héritier de feu M 1' de Comére, son frère, chanoine de S'-Etienne, héritier de feue dame Marie d'Assezat, sa mère; Jean de Rességuier; Jean-Ignace de Gras; François de Catellan; Pierre-Louis de Lombrail; Pierre-Michel de Lanes; Christophe de Maynard; Jean-Baptiste Déjean; Biaise Progen; François de Fauré-S'-Maurice; Guillaume de Cambon-Roussy; François Poulastre; Raymond Daldéguier; Bernard de Lhopital; François Boujat; Laurens Bosc; Jacques Paul; Barthélémy de Laroque; X...; François de Bertier; Jean Reynaldi; Jean de Viguerie; François de Catellan; François de Réquy; Pierre Dumas; François de Camboulas; X...; Antoine de Moûtilhet; Clément de Longt; Jean de Villespassan, prieur de S'-Béat; Jacques-Louis Dufaur-S'Jory ; Antoine de S'-Laurens; François de Juillard; Jean-Raymond de X...; Bonaventure-François de Costa depuis le 25e janvier qu'il fut reçu. Le compte de ce dernier est détaillé comme il suit :
« Du 25 janvier au premier avril, cy XXBII'BII»
« à luy, quartier d'avril XXXBIII 1 nsBid
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« à luy, quartier de juillet xxmi'xxs
« à luy, quartier d'octobre Néant.
« à luy, pour son augmentation XXII'XXXIIS
« à luy, pour son franc salle, 2 quittances L minots.
7o Chambre des requêtes. — Présidents, messires : Hector d'Ouvrier et Gabriel de Lagorrée. — Conseillers, m" 8 ; André Jougla ; JacquesPhilippe de Ciron ; Jean de Guibal; Biaise de Terlon; Jean-Louis de Cassaignau; Jean de Palarin; Jean-François de Fermât; Gaspard de Fieubet; Jean-François de Borista; X...; Depins, avocat général; Henry Le Mazuyer, procureur général; Jacques de Buisson d'Aussone.
Compte de m" André Jougla :
« à luy, pour ses gages du quartier de janvier. . . . . . XLI 1 XLS
« à luy, quartier d'avril XI.I 1 XL«
« à luy, quartier de juillet. XLI'XL»
« à luy, quartier d'octobre. . . , Néant.
« à luy pour son franc salle, par 2 quittances. . . . L minots. »
Comptes de M^es j)e Pins, avocat génér 1, et Henry Le Mazuyer, procureur général (semblables, ainsi que pour Jacques de Buisson d'Aussone) :
« Quartiers de janvier, avril et juillet, chacun CLXXB 1
« pour les trois quartiers, augmentation CLXXB'
« Quartier d'octobre, néant. — Franc salle L minots.
8» Greffiers en chef, civil, criminel et présentations : (Les noms manquent, ainsi que leur compte, sauf le franc salle qui est de 3 minots pour chacun).
9» Substituts des gens du Roy audit Parlement, chambre de l'Edit et des requêtes. — Mres : Géraud Margastaud ; François-Estienne Dautherive; Pierre-François de Comére; François de Camboulas; Joseph Davisard; X...; Galan, 1er huissier; Antoine Flottes, 2e huissier; Philippe Garripuy; Jean Salviac; Bernard de Villeneuve; Joseph-Marie Le Mazuyer; Benoist d'Héliot; Mathieu Blandinières ; X...; François Atheil, ou à d"e Cécile de Roch, femme de Jacques Villeneuve, son héritière, depuis le lerjanvier jusqu'au 25e avril qu'il fut inhumé (xx') ; Guillaume de Lacroix; Jean Rivière.
Compte de M™ Géraud Margastaud, substitut des gens du Roy :
« Quartier de janvier et quartier d'avril, chacun XXB 1
« Quartier de juillet et quartier d'octobre (pour tous). . . . Néant. « Franc salle, par deux quittances. . m minots.
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« Les 1er et 2e huissiers, Galan et Flottes, reçoivent chacun :
« Quartier de janvier et quartier d'avril, chacun. . . . ix'xxB'Bid
« Quartier de juillet et quartier d'octobre Néant.
« Droit de manteaux II>LS
« Suivent les greffiers de cette chambre des requêtes :
« X..., Jean Vietti, Jean Cabric et François Maçon chacun reçoit:
quartier de janvier, id. d'avril IIIL»
« et néant pour les quartiers de juillet et d'octobre, pendant lesquels
cette chambre devait être en vacances.
10» Garde des sceaux :
« A M" François de Fauré-S<~Maurice pour ses gages du quartier de « janvier XLI'XL 8
« Quartier d'avril et quartier de juillet, chacun XLIÏXL 8
« Quartier d'octobre Néant.
« de Messieurs les officiers du Parlement, pour ses gages en forme et « taxations ordinaires à raison de quatre deniers obole pour livre « de la recepte cy devant faite au précédant estât pour deux quar« tiers nie un» 1 XXXIIIS ixd
« à luy pour son franc salle L minots.
11" « A Mre Mathieu de Comynihan, receveur et payeur alternatif pre« sent comptable. ... LU" CXBII 1 BU 8 Bd
« à luy pour son franc salle L minots.
12° Viennent ensuite 18 à 20 huissiers, ayant tous les mêmes gages que le premier, dont le compte fait défaut; ce sont : X...; Pierre Gravière; Jean Ricaud; Charles Ducasse ; Gabriel Arquier; Jean Boudet; Guillaume Hérail ; Jean Compan ; François Bessier; Nicolas Lavergne; Gabriel Candeilh; Bernard Pech; Pierre Arribat; Isaac Ferrières: Etienne Costes; Georges Benavent; Jean Delpech; Nicolas Debugis; Jean Garripuy. — « A tous ces huissiers, il est alloué encore la somme « de soixante-quinze livres pour la moitié de cent cinquante laissées en « fonds dans Testât du Roy pour les quatre huissiers qui servaient à la « chambre de Tédit suivant et conformément à l'arrêt de la Cour des « comptes et aydes du 16e juillet 1683. »
13° Sous le titre : attributions héréditaires, cet article cite, chacun pour CXLB>LS (145 livres 50 sols), quatre officiers du Parlement, savoir :
« Mre Michel de Tournemire, receveur et payeur ancien pour deux quartiers de son attribution de deux deniers pour livre en hérédité attribuée au dit office.
Mre Mathieu de Comynihan, recevQiir et payeur alternatif pout deux quartiers de la dite augmentation.
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« Mre Jean François Tournier, receveur et payeur triennal, pour deux quartiers de la dite augmentation.
« Mre X (Manque au bas de la page.)
14» Article intitulé : Contrôleurs des receveurs et payeurs des gages. — On y voit : M«" Mathieu de Comynihan, controlleur ancien, et mre Jean François Tournier, contrôleur triennal, recevant chacun pour deux quartiers : mi" xi 1 XL* et pour le franc salle n minots.
Mre Mathieu de Comynihan, comme controlleur alternatif, touche encore une fois , . , mi» xi 1 XL 8.
Viennent à la suite :
« Mre X. . . . , secrétaire audiancier en la chancellerie du dit parlement pour deux quartiers LXX'.
« Messieurs les secrétaires du Roy, chauffe-cire et scelleur de la chancellerie de Toulouse, au nombre de dix sept, la quantité de vingt cinq minots deux quarts sel pour leur francjsallé, suivant Testât du Roy.
« Mre Pierre de Clerembaut, conseiller et secrétaire audiancier pour servir en la chancelerie près la dite chambre unie aud. Parlement. . . (Manque son compte.)
Vient ensuite le chapitre intitulé : Pensions à vie accordées à Messieurs les Présidents, avocats et procureurs généraux et de la chambre unie- aud. parlement,
Messire Thomas Alexandre de Morant, premier président, y est porté, toujours pour trois quartiers 3 mille 1.
Messire Charles de Vignolles, président à la chambre de l'édit réunie au dit parlement, pour (Manque.)
Messires Jean-Guy de Maniban; Joseph de Puget de Gau; Guillaume de Caulet; Henry Le Mazuyer, procureur gai ; Jacques de Buisson d'Aussonne ; Pierre Daiga, jadis procureur général en la chambre de TÉdit; et Jean Louis de Monbrun, y sont inscrits chacun pour XB cents livres; ce dernier reçoit en outre cim^xi 1 L8 pour autre pension à lui accordée par Sa Majesté.
Après cela, vient un chapitre ayant pour titre : « Autre dépense à cause « des augmentations des gages créez héréditairement par édit du mois « d'octobre 1683, acquises par les officiers de la dite cour de parlement « et autres sur le pié de trois quartiers de l'actuelle jouissance pour être « admis au droit annuel de leurs offices en conséquence de la déclara« tion du Roy du xxx« dud. mois d'octobre. »
En tête, les Présidents :
Mre Hector Estienne de Richard, prieur, comme acquéreur de l'augmentation financée par feu M. le président Ciron, suivant contrat du 2e juin 1685, pour la somme de un' XLIII 1 (?) 8. M'e» les Présidents Guy
BULL. 36, 1906. 33
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de Maniban, Joseph de Pnget, Guillaume de Caulet, François de Nupces, Jean de Catellan et Denis de Juillard, comme acquéreurs de diverses augmentations, pour la somme de (Manque.)
Suivent, an même titre des augmentations de gages :
1° Les Présidents aux requêtes, Mres Hector d'Ouvrier et Raymond d'Aldéguier, chacun pour ut LXRI' XIIIS il' 1.
2° Les conseillers clercs dont les noms suivent ou leurs ayantl droit, chacun pour la somme/le CLB' XI» id.
Ce sont : Messires de Laroche; Pierre d'Olivier (ou Me de Layrac, son neveu), Jean de Catellan; Mathias de Lafont (ou Me de Lafont Caragoudes, son frère et son héritier); les héritiers de sire de Fieubet-Cauinont; Antoine de Crozat; Jean de Roquette; Thomas de Thesan du Pujol, abbé d'Olargues; Jacques de Boyer.
3° Les conseillers lays, ou leurs ayant droits, dénommés ci-après,
chacun pour la somme de nl xxn 1 ni' Ld.
Clément de Longgarac, héritier de son père; dame Isabeau Thérèse d'Olivier, héritière de feu Me François d'Olivier, conseiller Lay ; François de Pira, avocat, au lieu et place de M 1' de Caulet, doyen du parlement; Jean Louis de Chastanet, héritier de Pierre de Chastanet'son père, au lieu et place de Me Jacques de Chastanet, conseiller, son frère; Gabriel de Lagorrée, au lieu et place de M'e Pierre de Barthélemy-Gramond; Jacques de Ranchin; Valentin de Lagnes; Peyré de Limoux, au lieu et place de Me Pierre de Sevin, conseiller; Jean de Cassaignau ; François de Cassaignau-Glatens; Guillaume de Maran; François de Juillard; Joseph de Valette, au lieu et place de Mre Jacques de Latger; Mre Antoine de Mouilhet, au lieu et place de Mr son père; Jean de Burta; Jean de Guillermin; François de Papus; Claude de Juges; Clément de Gach; Jacques Dupuy; Jean de Jossé; Pierre Montcalni-S'-Viran; Salamon de Fauré; Clément Delongt; Jean de Sapté; François de Vedelly; Gaspard de Fieubet, au lieu et place de Mre Pierre Antoine de Matlron; Jean Antoine de Valette; Pierre Louis de Reich; sr de Pennautier, au lieu et place de Me Louis Lebrun; Antoine de Crozat, au lieu et place de Me François de Chalvet (cet Antoine de Crozat perçoit un peu plus que les autres, 266M38 4d, au lieu de 2221 4S 5d); François Lancelot de Maniban; Jean Daspe; Dame Guillemete de Bource, au lieu et place de Mr Bernard de Théron; Bertrande de Comére; François Dagret; dame Marie de Garaud, au lieu et place de Mre Jean Louis de Boisset; Pierre François de Comére; Guillaume de Prohenques; François Colongez de Laurière; Pierre de Marmiesse; Jacques Ferran; dame Françoise de Bataille, veuve et héritière de M" Jean de Vignes; Nicolas de Paney; Jean de Hességuier; Jean de Gras; François de Catellan; Charles Fran-
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çois de Maussac; Pierre Louis de Lombrail ; Joseph de Valette, au lieu et place de Mre Antoine de Gargas; dame Marie Daliés, épouse de M. Donaud, au lieu et place de Mre Simon Chesne; Christophe de Maynard; Jean Baptiste Dejean Launac; Biaise Prougen ; François de FauréS'-Maurice ; Guillaume Debie, au lieu et place de Mfe Guillaume de Cambon, sieur de Roussy; Léonard Daignan: François Poulastré; François de Boujat; Laurens Bosc; Jacques Paul; Barthélémy Laroque; Nicolas Reversac de Celés; de Lagorrée, au lieu et place de M. François Bertier ; Jean Reynaldy ; François de Requy; Pierre Dumas; François de Camboulas; Henry de Burta, conseiller, acquéreur de l'office et augmentation de feu Mre Silvestre Desparbez-Lussan; dame de Viguerie, au lieu et place de M. de Fraust son fils; Jacques Louis Dufaur-S'-Jory, acquéreur de l'office et augmentation de feu M. de Rosel, et quatre ou cinq autres dont les noms ont été emportés, en tronquant le bas des pages.
4» Les conseillers aux requêtes dont les noms suivent : Jean Boger, au lieu et place de Mre Raymond de Maran; André Jougla; Samuel de Fermât père; Jean Boyer (une 2e fois), au lieu et place de Mre Jean Louis Laurancy; François de Gach Villegly; Philippe de Cam; Balthasar de Boutaric; Biaise de Terlon; François de (Glatens?) acquéreur de l'office et augmentation de Mr de Pugét-St-André.
« 5» Enfin, sous le titre Gens du Roy, figurent dame Gabrielle de Prohenques, au lieu et place de Mr de Pins, avocat général, son mari, pour la somme de trois cent cinquante livres, onze sols, un denier ;
et X , avocat du Roy en la judicature de Comenge, conformément à
l'état du Roy, pour la somme de XLIX 1 BIII 8 Bid.
On voit par Ténumération des différents articles de ce cahier de compte que les officiers du Parlement étaient déjà bien nombreux, puisque le chiffre des conseillers clercs ou lais s'élève à lui seul à plus de quatre-vingt-dix personnes ; on voit aussi que plusieurs d'entre eux recevaient des traitements à des titres divers ; enfin, que des mutations fréquentes se produisaient par suite d'héritage, ou d'acquisition, conséquence inévitable de la vénalité des offices. La comptabilité tenue par le procureur général Mathieu de Bumyniham, ne laissait donc pas d'être assez compliquée; nous avons vu, du reste, qu'au seul titre de receveur et payeur alternatif, présent comptable, il percevait sept cent soixantesept livres sept sols six deniers.
Ce cahier de compte nous a paru présenter assez d'intérêt, malgré son aridité, pour être l'objet d'une communication.
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Séance du 22 mai.
Présidence de J. DE LAHONDÈS, -président.
La correspondance comprend une lettre de candidature au titre de correspondant. MM. Lécrivain, Bégouen, Auriol sont priés de faire le rapport réglementaire.
M. MASSIP, membre résident, donne lecture de la communication suivante de M. Benjamin PAUMES, professeur au Lycée de Cahors.
Les étudiants et les régents du collège Saint-Martial à Toulouse.
J'ai l'honneur de présenter à la Société archéologique du Midi un document conservé aux archives du Lot, sous la cote C. 1273,. qui met en lumière d'une façon assez piquante la vie des collégiats de Saint-Martial et les pratiques administratives de quelques-uns des directeurs de cet établissement. C'est une lettre que François-Guillaume Falés, habitant de Cahors, qui avait étudié à Toulouse, adresse à Gaspard-César-Charles L'Escalopier, Intendant de Montauban, en réponse aune sorte de questionnaire officiel sur l'état de l'enseignement. Guillaume Falès déclare qu'il doit la plupart de ces renseignements à un sien ami, ancien étudiant à Saint-Martial. Il le cite sans le nommer. Sa lettre est datée de Cahors, 19 août 1751, Tannée même où fut décrétée la suppression de l'Université de Cahors, suppression qui provoqua l'annexion du collège quercinois de Pélegry à celui de Saint-Martial ; heureuse aubaine pour celui-ci qui devint le dispensateur des produits de la fondation cadurcienne.
« Si les choses étaient encore de la manière qu'elles étaient au collège quand je le quittai, il y aurait bien des abus à réformer, car quoique je n'aie jamais lu qu'un article des statuts qu'on ne laisserait peut-être lire qu'avec beaucoup de peine à ceux qui iraient et qui voudraient avoir inspection sur ce collège, il me parait bien évident cependant qu'on n'agissait pas dans les vues du fondateur. Pour ce qui est des demandes contenues dans le mémoire, je vais y répondre de la manière la plus exacte qu'il me sera possible.
« 1. Les Supérieurs qu'on reconnaissait comme tels de mon temps étaient principalement M. le Procureur général. Celui-ci était le refuge
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de ceux qui avaient quelque plainte à faire contre quelque collégiat, et il prenait la peine en passant de les faire appeler pour leur faire la mercuriale. Il venait aussi, à leur prière, à la nomination de leur prieur et autres officiers avec deux commissaires dont l'un était M. le Doyen, à qui on s'est aussi adressé dans certaines occasions, et qui fit même une fois une ordonnance à un collégiat qui parut ne s'y soumettre que dans la crainte de perdre sa place par arrêt. Voilà les seuls que nous appréhendions.
M. de Colbert, archevêque 1 prétendait bien, suivant ce que j'ai ouï dire, avoir quelque autorité dans ce collège; mais il perdit son procès, et la seule marque d'assujettissement que Ton donne à M. l'Archevêque, c'est de présenter devant lui ou ses grands vicaires le collégiat, dès que le collège lui a fait titre, afin d'en obtenir un visa, qui, â ce qu'on dit, n'est nécessaire qu'autant que l'usage Ta autorisé.
« M. TEvêque de Limoges écrivit une fois au Prieur tandis que j'y étais. Il le priait, autant que je peux m'en souvenir, de lui marquer qui est-ce qui nommait à ce collège ou qui en avait la direction. Je ne croi6 pas que la lettre fût communiquée en pleine assemblée; mais certaines personnes qui en eurent connaissance, suivant ce qu'on m'en dit, jugèrent qu'elle demandait une réponse bien ménagée. Je n'ai d'ailleurs jamais entendu dire que cet évêque eût quelque droit sur ce collège. Si j'avais bien lu les statuts, je pourrais peut-être vous donner des éclaircissements plus amples là-dessus.
« 2. Les collégiats qui étaient sur le point de quitter leurs places avaient soin de faire venir un sujet et, après avoir fait par écrit une démission pure et simple, ils le présentaient à cflaque membre en particulier, pour les prier tous de s'assembler et de le recevoir. Je ne sais s'il serait inutile d'ajouter qu'il y a des gens qui se rendent, pour ainsi dire, les collateurs de ces places, et qui, de successeur en successeur, envoient ceux qu'ils veulent. 11 y en a peut-être qui se feraient scrupule d'en envoyer d'autres que des pauvres, mais je ne sais si tous sont de ce nombre. Quoi qu'il en soit, l'assemblée reçoit ceux qui sont présentés sur la lecture que le notaire fait des certificats de baptême et de pauvreté signés par le curé et légalisés par les juges du lieu, et des certificats de philosophie signés par le professeur et confirmés par le cachet.
« La réception faite, on députe deux de l'assemblée qui introduisent le nouveau repu. On lui fait lire quelques lignes comme, par exemple, de l'Evangile; après quoi, on prononce comme une espèce de jeu ces
1. Jean-Baptiste-Michel Colbert de Villecerf, évêque de Montauban. fut nommé archevêque de Toulouse, le 15 août 1687 et installé en 1693.
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paroles : dignus est inlrare in noslro docto corpore ; c'était là du moins tout l'examen qui se faisait de mon temps, et, comme je l'ai dit ci-dessus, après le titre fait, dans lequel je crois qu'on rend témoignage de la capacité suffisante du sujet, on va chez M. l'Archevêque pour en obtenir le visa sur la lecture du titre ; après quoi, le prieur fait promettre, par serment, au collégiat de dire l'office de la'sainte Vierge tous les jours, suivant qu'il est ordonné, si je ne me trompe, par un cardinal neveu du fondateur qui lui avait, je crois, donné le pouvoir de changer ou d'ajouter ce qu'il trouverait expédient.
« Les boursiers se gouvernaient eux-mêmes, et je n'aurais pas conseillé à un prieur de vouloir tâcher de sa propre autorité de faire tenir dans leur devoir tous ceux qui s'en écartaient, à moins qu'il n'eût voulu, en même temps, pour le moins, entendre des injures. On le regardait seulement comme préposé pour les affaires. Les prêtres mêmes qui paraissaient être là pour quelque chose n'auraient pas été mieux reçus.
« Pour venir maintenant à la manière avec laquelle ils se gouvernaient, je peux dire en toute sûreté que, s'il y en avait qui, comme séminaristes, menaient une vie à l'abri de tous reproches, ou d'autres qui, logeant dans le collège ou partout ailleurs de la ville, paraissaient être sages et réglés, ou du moins n'étaient pas connus, il y en avait aussi d'autres qui n'abusaient que trop de leur liberté, et, pour m'expliquer, une des moindres fautes qu'ils faisaient était de ne point étudier du tout jusqu'à ce qu'ils ne pouvaient plus reculer, et qu'il fallait qu'enfin ils se préparassent pour prendre leurs grules, de dormir la grasse matinée même jusqu'à attendre midi les jours de dimanche et de fête, pour aller entendre la inesse; ce qui venait en partie du sommeil, en partie du temps qu'ils mettaient à leur frisure. Enfin, les deux vices les plus grossiers que j'ai connus, c'est de boire excessivement et d'introduire, pendant la nuit, des personnes du sexe, du moins quelquefois, vices que quelques-uns des collégiats de Sainte-Catherine avaient aussi, jusque-là que j'en ai connu deux qui quelquefois faisaient manger à leur table quelque malheureuse qui, à ce qu'on disait, se prêtait à leur infâme commerce. J'ai connu quelque collégiat de Saint-Nicolas encore, j'en ai connu de Foi (sic) qui donnaient chez eux dans ce dernier vice, du moins s'il fallait en croire quelqu'un d'entre eux ou ce que d'autres en disaient. Le jeu même, pendant la nuit, quelquefois de dupe (?)" et autres semblables n'était pas rare parmi quelques-uns de Saint-Martial et de Sainte-Cathe - ri ne tant dans le collège que dans les jeux publics de la ville qu'on a assez défendus.
Un autre abus encore qui est à Saint-Martial, et que mon directeur, dans le temps que j'y étais, me conseillait de tâcher de faire retrancher,
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c'est l'abonnement pour entrer à la Comédie, dont le prix se tire, à la vérité, de la pension de chaque collégiat et non de la masse.
« En voilà assez mon très vénérable père (ceci est raturé dans l'original), pour vous faire connaître le désordre de ce collège tel qu'il était alors. Il est vrai qu'un jeune homme qui y a encore une place et que je crois bien réglé non seulement par rapport aux sentiments que je lui aperçois, mais encore à cause du bien qu'on m'en a dit, m'a fait entendre que si la même conduite se gardaitdans la suite telle qu'elle se garde à présent entre eux, il croyait qu'on ne ferait pas difficulté d'ordonner ceux qui voudraient se faire prêtres, sans même avoir été dans le séminaire; ils ne vivent pourtant pas en commun.
« 4. Pour ce qui est du prieur et des officiers qui ont l'administration, ils ne font aucune réparation essentielle, sans une délibération du collège que j'ai vu quelquefois n'être pas suivie de son effet. Ceci était l'affaire du Prieur qui se mêlait principalement de ces sortes de choses. Les autres, dont il y en avait quatre de..-.., étaient pour prendre l'argent que les fermiers portaient pour les distribuer ensuite aux collégiats, et comme ils l'avaient en poche, ils en donnaient à qui leur plai. sait. Aussi, y en avait-il beaucoup de surpayés même à l'excès ; ils pouvaient garder celui qu'ils voulaient, sauf à eux ensuite de rendre leurs comptes chaque six mois et à recourir à ceux qu'ils voyaient les plus portés à les tirer d'embarras quand ils y étaient.
« Et pour cela, on les chargeait seuls quelquefois de l'argent que les fermiers portaient dans le temps de la reddition des comptes qu'ils faisaient servir pour le temps passé, et de cette sorte ils prolongeaient autant qu'ils pouvaient pour ne pas paraître surchargés ; ce qui allait à six mois, à la fin desquels seulement ils se trouvaient obligés de mettre en ligne de compte la réception de cet argent.
« 11 y a deux prieurs que Ton nomme le 1er rnai, avec les autres officiers qui restent toute Tannée. De ces deux prieurs, l'un est prêtre, et il commence son administration depuis le 1er mai jusqu'au mois de novembre, et le séculier depuis novembre jusqu'au temps de l'élection suivante. Le prieur prêtre me paraissait le plus occupé à cause des vendanges, temps auquel il fallait songer à partager, à Tournefenille, le vin avec M. le curé de Saint-Nicolas, et savoir ce qui pouvait revenir pour chaque boursier en particulier. Les boursiers, ensuite, étaient les maîtres de faire ce qu'ils voulaient de leur vin.
« Je ne vois guère d'autres embarras déplus pour le prieur prêtre que pour le séculier. Il y avait beaucoup de fermes dont il faisait le bail conjointement avec les autres officiers. Ils se trouvaient tous ensemble aussi pour recevoir l'argent que les fermiers portaient et auxquels ils faisaient
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quittance après en avoir écrit le reçu dans le livre des comptes. Je ne sais si on pourrait en dire de même de toutes les rentes, parce que le même collégiat qui m'a dit la bonne conduite de ses confrères me dit aussi une fois qu'un homme, de ceux qui faisaient rente, assara à ceux qui examinaient les comptes qu'il avait payé au collège depuis vingt et tant d'années un certain nombre de paires de poulets chaque année, qu'ils ne trouvèrent pourtant pas, si je ne me trompe, écrit dans le livre des comptes.
« Enfin, comme je n'ai jamais été guère en face des affaires de ce collège, je ne peux dire autre chose, si ce n'est qu'il y a des prieurs qui ne se sont pas conduits de bonne foi, ou qu'il y avait, de mon temps, des jugements téméraires et des calomnies sur leur compte.
« Je me rappelle, ou du moins il me semble bien qu'un prieur séculier me dit, à la vérité, une fois, qu'on ne pouvait guère voler, à moins que ce ne fût des choses considérables.
« Voici de quelle manière on examinait les comptes de tous les collégiats chaque six mois. Le prieur qui entrait en administration était avec les quatre claviers. Ils avaient en mains tous les mémoires de ce que ce dernier avait employé pour les réparations, toutes les quittances qu'on lui avait faites; en un mot, on voyait si tout ce qu'il produisait s'accordait avec le livre des comptes, sur la marge duquel, autant que je puis me souvenir, était marqué ce qu'il avait reçu et ce qu'il avait donné. De toutes ces choses ils tiraient un compte exact pour le mettre ensuite par écrit dans le livre et se signaient tous. Ils rapportaient de plus les quittances des collégiats, et après avoir examiné s'ils avaient pris ou plus ou moins de ce qui était à revenir de leur semestre, ils mettaient ça pareillement en écrit.
« J'ai laissé jusqu'ici un autre article qui est celui des bâtiments. Il y avait certains endroits du collège qui avaient grand besoin de réparations, et pour ce qui est de la campagne, j'ai été dans un de leurs châteaux dont les escaliers étaient en si mauvais état que je n'osais monter qu'à force qu'un autre me prenait, et j'avais bien raison, puisqu'un degré s'abattit sous mes pieds.
« Je n'ai été si long qu'à cause que j'ai pensé qu'on voulait peut-être réformer les abus qui pouvaient s'y trouver encore, et je ne prétends rien dire qui puisse porter préjudice aux collégiats d'aujourd'hui, non plus qu'à ceux qui étaient de mon temps vertueux et studieux. Les choses peuvent maintenant avoir bien changé, parce qu'on m'a dit que M. le Doyen, qui a fait ajouter un syndic aux autres officiers, prenait beaucoup à coeur les intérêts du collège et des collégiats.
« Je vous prie de demander le secret pour moi qui serai toujours avec
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un très profond respect votre très humble et très obéissant serviteur. Surtout qu'on ne parle pas de la conduite que j'ai dit que les claviers tenaient, ce qui servirait à me faire connaître à eux. »
Les réticences et les réserves de notre correspondant ne trahissentelles pas l'existence d'un plus grand nombre d'abus que n'en révèlent ses déclarations ? On serait tenté de le croire. La réunion du collège de Pélegry apporta 8,000 livres de rentes au collège de Saint-Martial. Il n'est pas sûr, d'après ce qui précède, qu'elles aient toujours été exactement appliquées à leur affectation. Assurément, les récoltes sont irrégulières, les débiteurs peuvent être négligents; mais que penser des doléances du syndic Monna, si on les rapproche de l'enquête, lorsqu'il déclare qu'il est à bout de ressources et qu'il ne peut plus supporter seul la charge trop lourde de l'entretien des boursiers. Ceux-ci se plaindront plus tard de leur syndic, mais personne ne saura le sort mystérieux des arrérages.
Séance du 5 juin 1906.
Présidence de M. J. DE LAHONDËS, président.
Après avoir entendu le rapport favorable de M. LÉCRIVAIN, au nom de la Commission, spéciale la Société élit, conformément aux statuts, membre correspondant, M. Signorel, juge d'instruction au tribunal de Saint-Girons.
M. Henri RACHOU, membre résidant, fait la communication suivante :
Nouvel album de portraits de Parlementaires.
En décembre 1905, la Commission du Musée Saint-Raymond fit l'acquisition d'un manuscrit dont MM. de Lahondès et Roschach ont entrepris la description. Nous ne parlerons donc que fort peu de ce volume et nous nous bornerons à dire que, privé de ses premiers et derniers feuillets, il nous semble dater de la deuxième moitié du dix-septième siècle et qu'il renferme un très grand nombre de portraits de présidents et conseillers au Parlement de Toulouse. Représentés à mi-corps avec ou sans les mains, dans des médaillons d'attente ovales imprimés sur la feuille, nos personnages, dont les visages, parfois gouaches, sont la plupart du temps exécutés à la sanguine et au crayon noir, portent des
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mortiers et des robes peints au naturel à l'eau avec ou sans empâtements. Un texle très court, écrit au verso de chacune de ces enluminures, donne, en même temps que le nom du personnage représenté, quelques détails très succincts sur sa famille et décrit son blason figuré sur la même page avec ses couleurs et ses mélaux 1.
A la même époque, M. Abel Ferré, dont le nom reste intimement lié aux belles fouilles de Martres, que sa science et son dévouement si désintéressé ont rendues plus fructueuses encore, signala à notre vénérable et cher président l'existence d'un ouvrage semblable au nôtre dans les environs de Cazères d'où provenait le premier. Assez au courant des difficultés nombreuses que présentent d'habitude les achats d'oeuvres d'art pour nous demander comment procéder sans danger d'insuccès à l'acquisition de cetle précieuse épave, nous apprîmes que M. George Pauillae, auquel elle avait été proposée, l'avait retenue pour sa collection. Nous ne connaissions donc en janvier dernier que l'existence d'un manuscrit incomplet sans titre, sans date et sans nom d'auteur, l'enfermant des portraits de membres du Parlement de Toulouse déposé au Musée Saint-Raymond, et celle d'un ouvrage qu'aucun de nous n'a pu voir encore mais que des descriptions assez vagues nous disent semblable au nôtre, en la possession de M. Pauillae.
N'ayant examiné que très brièvement les miniatures confiées à notre garde, nous n'étions pas encore arrivé à nous faire une opinion sur elles et comptions, pour nous éclairer, sur l'expérience de nos deux collègues, quand une lettre de M. Henry Vivarez, ingénieur des mines, président de la « Société archéologique, historique et artistique du vieux papier », dont le siège est à Paris, nous signala un album de « Portraits de présidents et conseillers au Parlement de Toulouse ». appartenant à M. le commandant Martin, directeur de la « Sabrelache ». Collectionneur aussi savant que passionné, noire ami s'extasiait sur la rareté de cette trouvaille faite à Alger, et nous la décrivait en très peu de mots d'assez précise façon pour nous donner la certitude qu'elle avait avec la nôtre une très grande parenté.
Présenté par M. Vivarez à M. Martin, qui voulut bien nous réserver l'accueil le plus affable, nous fûmes introduit par lui dans un cabinet de travail rempli de documents précieux, de meubles anciens et d'émaux champlevés où nous aperçûmes, dès l'entrée, un livre semblable au nôtre par le format et la reliure. Nous en soulevâmes avec respect la couverture, aussi dépouillée que celle du manuscrit de Saint-Raymond, et
1. Voir ci-dessus la communication de M. J. de Lahondès sur ce volume de portraits, p. 443,
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pûmes nous rendre compte, dès les premiers feuillets, de la similitude absolue de l'ordonnance des deux ouvrages et de la facture des portraits dont nous allons brièvement parler.
Le manuscrit est complet Le titre : «. Portraits | et armes des | Présidents et | des | Conseillers du | Parlem 1 | de | Tolose | depuis Tan | 1444» est écrit en caractères rouges dans un cercle formé par l'inscription : « Je peins pour l'Eternité », tracée en capitales bleues et entourée d'un serpent qui se mord la queue, peint au naturel. Les trois feuillets suivants, ornés de trois grandes grisailles à la gouache qui représentent la création, la sentence et Adam et Eve chassés du Paradis, précédent une préface aussi longue que fastidieuse dédiée à « Messeigneurs les Présidents et Conseillers du Parlement de Tolose ». L'auteur y dit « qu'il ne saurait plus utilement passer le reste de ses jours qu'en les emploïant au recueil des Présidents et Conseillers»; il énumère ensuite, sans raisons, les termes généraux du blason, entreprend un historique du portrait depuis l'antiquité jusqu'au dix-septième siècle, et après avoir parlé, Ton ne sait pourquoi, d'un très grand nombre de peintres, raconte comment il a procédé pour dessiner les enluminures qui illustrent le manuscrit : « Dans Tolose, nous avons eu MM. Galori, Laboulvéne, Dujardin, Monsr Chalelte et en dernier lieu M. Duran, desquels j'ay pris la plus grande partie des portraits qui sont dans cet ouvrage; ce qui fait que les textes ne sont pas d'une force égale répondant à la bonté de leurs originaux. Il y en a que j'ai fait asais heureusement longtemps après la mort des personnes sur la seule description qu'on m'en a fait, côme Tayeul de M. de Nupces, M. Lemazuyer, premier président, M. de Tourreil, abbé de Saint-Amans. » Il réitère des considérations interminables et oiseuses et signe enfin : « Messeigneurs | votre très humble, très | obéissant et très obligé \serviteur | signé : Hilaire Pader, Tolosani », après avoir indiqué, dans la dédicace d'un sonnet adressé à « Monseigneur le Prem' Présid', sonnet accompagné des armes et du portrait du premier président Gaspard de Fieubet, la date du 3 mai 1664. » Les portraits viennent ensuite assez semblables à ceux de notre volume. En voici la liste complète :
Gaspard de Fieubet P. P.
Aynard de Bleterans P. P.
Jacques Meaulx P. P.
Pierre de Vasinier P.P.
Jehan Dauvet lJ. P.
Louis de la Vernède P. P.
Bernard Lauret P. P.
Jehan Sarrati P. P,
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Pierre Sarrati Cons.
Nicolas de Saint-Pierre P. P.
Arnaud de Saint-Pierre Cons. doyen.
Jean de Saint-Pierre Cons.
Pierre de Saint-André P. P.
Jacques de Minut P. P.
Jehan Bertrandi P. P.
Pierre de Bertrand Evêque de Cahors, Cons.
Nicolas de Bertrand P.
Jean de Bertrand P.
François de Bertrand P.
François de Bertrand Cons.
Guillaume de Bertrand Cons.
Jehan de Mansencal P. P.
Personnage inconnu Cons.
Jean Daffis P. P.
Guillaume Daffis A. G.
Charles du Faur P.
Jacques du Faur Cons.
Michel du Faur P.
Pierre du Faur. P. P.
Jacques du Faur Cons.
Nicolas de Verdun P. P.
François de Clari P. P.
Gille le Mazuyer P. P.
Henri le Mazuyer C.
Jean de Bertier Ev. de Rieux, C.
Philippe de Bertier P.
Jean de Bertier P. P.
Bertrand de Bertier
Jean de Bertier P.
Guillaume de Bertier C.
Pierre de Bertier Ev. de Montauban, C.
François de Bertier C.
George d'Armaignac Cardinal-archev.deToulouse.
Paul de Foix
François de Joyeuse Cardinal-archev.deToulouse.
Louis de la Valette Cardinal-archev. de Toulouse.
Charles de Montchal Archevêque de Toulouse.
Montchal Conseiller.
Pierre de Marca Archevêque de Toulouse.
Charles d'Anglure de Borlemon... Archevêque de Toulouse.
Jehan Dacy Président.
Gille Laqueatoris C. Clerc.
Elie de Pompador C. C.
Henri Gencien C. C.
Jacques Gencien C. Laïque.
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Hébert Malenfant Gencien C.
Pierre de Malenfant C.
Jacques de Malenfant C.
Etienne Malenfant Gencien C.
Pierre de Malenfant C.
Pierre Bariliet G.
Guillaume Bardin C. Ci.
Guille Bardin
Anthoine Marron C. C.
Jean Marron C, C.
Gibert Rubé CL.
Jean Desages Av. du roi.
Louys du Boix Procureur général.
Pierre Damien. C.
Pierre Viaut C.
Pierre de la Treille C. C.
Pierre des Crosses C.
Pierre Pichionis C.
Nicolo Berthelot C.
Philippe de Fontenay C.
Barthélémy Artigaloube C.
Jean Cbastilon C.
Jean le Baud 3e Président.
Adam Cousinot P.
Imbert Roger G.
Louis Luylier C. C.
Jean Rosignol C.
Geofroy Robiou C.
Pierre de Benquet C.
Guillaume du Bec C.
Bernard Olive C.
Bremond de Saint-Félix C.
François de Saint-Félix P. G.
Guilhe de la Marche G.
Jean de Pavie C. Doyen.
Jean Doulx C.
François Froment G.
Jean Séguier G.
Jean Séguier 4e Président.
Bertrand Séguier C. C.
Anthoine Boix C.
Claude de Vabres C.
Jean Bonami C.
Philippe Foulcandi C. 1483.
Philippe de Foucaud C. 1554.
Jacques de Foucaud C. 1632.
Clément de Brillac Ev. de St-Papoul. C. C. 1489.
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Hugues de Bause C.
Jean Briçonet C. 1491.
Amé Laubespin C. 1491.
Jean Nicolay C. 1491.
Jacques Durfort C. 1492.
Guilhe Durfort C. 1522.
Jean Bohier C. 1491.
Jean Doriole C. 1492.
Pierre Bohier C. 1493.
Déydé d'Isarny P. 1492.
Pierre de la Porte C. 1492.
Raymond Chabanes C. 1492.
Nicolas de Benoit C. 1492.
Guillaume Benoist C. 1503.
Guilhe de Saudouville C. 1492.
George de Marsan G. 1494.
Arnandde la Roquette C. 1496.
Raymond Michaelis C. 1497.
Jean Cailhe G. 1407.
Accurse Mainier. 3e Président.
Antoine du Faict C.
Guillaume Brissonet Evoque de Lodève. C. 1497.
Antoine Desteing C. 1499.
Cet examen, trop superficiel pour avoir une valeur sérieuse, nous a permis cependant de constater que les portraits du manuscrit de Paris rappellent en tout point ceux du manuscrit de Toulouse avec lesquels on pourrait les confondre. Il ne nous semble donc pas téméraire de conclure que nos miniatures sont aussi d'Hilaire Pader.
Nous nous sommes demandé sans raisons valables, « de chic », comme disent nos camarades, avant d'en causer avec MM. les membres de la Société, si ces volumes, faits pour le Parlement, n'auraient pas laissé quelques traces dans les archives du Palais. Notre savant confrère M. Lapierre, devant l'autorité duquel nous nous inclinons avec respect, n'étant pas de notre avis, nous attendons la solution de MM. Roschach et de Lahondès et terminons bien vile notre incursion dans leur domaine. Nous prions M. le commandant Martin et M. Henry Vivarez, qui sont à des degrés différents, mais avec la même complaisance les inspirateurs de ce rapport, de vouloir bien agréer l'assurance de notre affectueuse gratitude.
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Séance du 12 juin.
■Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. LE PRÉSIDENT lit une lettre de la Société des amis du vieux Cordes donnant l'indication des dépenses effectuées pour la conservation de la Porte-Jane. Il remercie M. POIITAL, le très zélé et savant archiviste du Tarn, de cette communication.
Le SECRÉTAIRE donne lecture du curieux petit document ci-dessous envoyé par M. Tabbé LESTRADE, membre correspondant.
24 septembre 1522. — Impression d'imagerie populaire à Toulouse.
Les spécimens de l'imagerie populaire à Toulouse, au seizième siècle, sont de toute rareté. Voici le titre de six feuillets ou placards commandés, le 24 septembre 1552, par le libraire Jean Campaigne à l'imprimeur toulousain Jean Damo3'seau. Moyennant le prix de sept livres tournois, celui-ci s'engageait à imprimer des feuilles « avec histoire », représentant les curieux sujets suivants, d'où l'intention satirique ne semble pas exempte :
1. — Le monde qui n'a rien perdu.
2. — Le monde menjal de ralz.
3. — Le monde qui n'a rien que frire.
4. — Le monde qui n'a plus que les os.
5. — Le monde sans croix.
6. — Le fou contrefaisant le sage.
(Arch. des not., Reg. de Capellis, II, f° 25.)
M. l'abbé GALABERT, curé à Aucamville, membre correspondant, a envoyé la note suivante :
Strophes janséniennes : Les quatre embarras.
La série complète des écrits ayant trait à Terreur janséniste est loin d'être mise au jour; pendant longtemps, on en trouvera encore. En effet,
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l'attrait du fruit défendu faisait copier et distribuer sous main nombre de pamphlets manuscrits qui faisaient les délices des salons el qui défrayaient la malignité publique.
Celui que nous reproduisons ci-dessous a été trouvé parmi les papiers et correspondance des châtelains de Mauvers; il est intitulé : Les quatre embarras. Comme il mentionne l'exil du Parlement de Paris, on peut le dater de 1753, et vraisemblablement même de 1757, car il semble faire allusion à l'attentat de Damiens.
Quoi qu'il en soit, il met en scène quatre personnages :
1° Le roi qui redoute le fanatisme d'un autre Jacques Clément, ainsi que les anathèmes de l'Eglise et les mercuriales du Parlement;
2° Le Parlement, ennemi des Jésuites;
3° Christophe de Beaumont, archevêque de Paris, adversaire déterminé des Jansénistes, plusieurs fois exilé pour ce. motif;
4« Enfin, un vicaire porte-Dieu, obligé de par arrêt du Parlement de porter, sous escorte d'huissiers et de recors, les sacrements aux appelants. Les quatre personnages disent, en strophes inégales, l'embarras ils se trouvent de contenter tout le monde et leur conscience.
LES QUATRE EMBARRAS.
Celui du Roi :
Si contre Beaumont qu'on déteste Je juge en faveur de Thémis, Le noir bourreau des deux Henrys, L'Eglise pire que la peste Ne respecteront pas les lys ; Si, malgré Thémis, au contraire, Je laisse triompher Beaumont, L'aréopage rodomont, Ne jugera plus nulle affaire, Tous les peuples murmureront. Comment faire?
Celui du Parlement :
Si. suivant un zèle intrépide,
Contre Christophe je décide,
Louis, ami de Loyola,
A Pontoise m'exilera.
Si, bon moliniste, au contraire,
Je fais recevoir au vulgaire
- siâ - .
L'Agneau de Dieu, le pain sacré, Tous, tous, jusqu'à la harangére Sans fin crieront : Toile, toile ! Comment faire?
Celui de l'archevêque :
Si j'accorde le pain des anges Aux ennemis de Loyola, Par un moyen des plus étranges La calotte m'échappera. Si je le refuse, au contraire, Le sénateur atrabilaire M'ajournera, décrétera Et peut-être m'exilera ! Comment faire?
Celui du porte-Dieu :
Si je donne le pain céleste A ceux que Loyola déteste, Mon archevêque m'interdit; Si je le refuse, au contraire, Le Sénat, outré, m'en flétrit. Comment faire?
M. DE LAHONDÈS entretient ses collègues du Congrès de la Société française d'archéologie tenu à Carcassonne et à Perpignan.
Les congressistes se sont réunis au nombre de plus de cent dont quelques membres étrangers et plusieurs dames et jeunes filles, le 22 mai à deux heures, à la mairie do Carcassonne.
La façade Louis XV de l'hôtel de Rolland se dresse en face, et l'aimable et heureux propriétaire a bien voulu agréer la demande qui lui avait été adressée de visiter sa belle demeure qui est aussi un musée. Les congressistes ont remarqué surtout trois tapisseries d'Aubusson reproduisant des tableaux de Téniers dont les originaux sont au musée de THermitage.
Les membres de la Société ont parcouru souvent la ville et la cité. De la ville basse il convient donc de mentionner seulement la visite au Musée lapidaire dont les pierres et les marbres avaient été disBULL. 36, 1906. 34
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posées provisoirement au bas de l'escalier. Un sarcophage chrétien avec rameaux de vigne, une statue tombale du treizième siècle, un fragment de statue en marbre blanc de la même époque, plusieurs chapiteaux, pierres tombales et inscriptions, cachés aux regards depuis plusieurs années, ont pu ainsi être examinés rapidement, mais assez pour faire désirer vivement que cette collection précieuse pour l'histoire de l'art et pour celle du pays soit disposée définitivement comme elle le mérite.
A la cité, ce sont les tours et murailles appelées visigothiques par Viollet-le-Duc, qui ont attiré d'abord l'attention.
Si l'attribution du grand archéologue n'a guère été contestée, ses restaurations et celles surtout de ses successeurs ont essuyé de rudes critiques. Les assises neuves trop régulières, en pierres cubiques plus grandes parfois que les anciennes, souvent privées de leur chaînage de briques, ont paru transformer trop absolument les constructions et leur faire perdre leur caractère. Les toitures pointues d'ardoise ont été condamnées aussi, car les Visigoths, fidèles imitateurs des Romains, durent certainement adopter leurs couvertures en tuiles comme tous leurs modes de bâtir.
L'imitation, bien naturelle d'ailleurs, car les envahisseurs n'apportaient pas une architecture nouvelle et ne purent employer que les ouvriers du pays déjà formés, est si absolue que plusieurs congressistes, se rappelant îles remparts analogues élevés en Gaule au quatrième siècle, prononçaient sans cesse le mot de gallo-romain. Il est bien probable toutefois que les Visigothts, encore à leur arrivée menacés par Narbonne, se hâtèrent de fortifier leur ville conquise, tandis que les Romains, couverts à la fois par Narbonne et Toulouse, étaient plus à l'abri.
Au château aussi trop d'ardoises et trop de pierres neuves. Viollet-le-Duc en était arrivé, aux dernières années de sa vie, à recomposer les monuments qui lui étaient confiés, non comme ils étaient, mais comme ils auraient dû être. Il est juste de reconnaître que les successeurs l'ont dépassé, car ses plans de château ne montraient pas les pignons élevés arrivant presque en exécution à la hauteur de la tour de guette à laquelle ils enlèvent sa signification.
Pour les murailles et les tours de Saint-Louis et de Philippe le Hardi, l'illustre révélateur et interprètateur, du Moyen-âge ne pouvait guère se tromper, car quelques assises supérieures seules
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manquaient et tout était indiqué. Les ardoises incontestables s'expliquent sur elles parce qu'elles ont été élevées par des architectes du Nord envoyés par les rois. Encore Vîollet-le-Duc s'est-il corrigé lui-même mal à propos à la tour Saint-Nazaire, où il s'est amusé à établir au sommet un dallage à découvert.
La restauration du choeur gothique de Saint-Nazaire est plus irréprochable, sauf toutefois encore trop de réfections et de nouveautés, et sauf le galbe intempestif avec gargouilles au-dessus de la niche deNotre-Dame-de-Pitié.
Quelques congressistes et des plus autorisés avaient de la peine à admettre que la nef romane put dater de 1096. D'abord, les termes employés pour mentionner que le pape Urbain II bénit en juin de cette année les pierres de l'église semblent indiquer que les pierres attendaient encore. Mais, d'ailleurs, l'abside et les transepts de Saint-Sernin s'élevaient déjà jusqu'à la hauteur des fenêtres, et l'église de Conques avait été commencée depuis plus de trente ans. La petite colonne adossée à la première travée de la muraille du nord, qui semble préparer une travée plus étroite, indique simplement peut-être un agrandissement de plan survenu pendant et dès le début de la construction, comme il est arrivé souvent à cette époque et à Saint-Sernin même. L'élégant chapiteau voisin peut n'avoir été sculpté que dans le milieu du douzième siècle, car, ii l'époque romane, les chapiteaux n'étaient souvent sculptés qu'après la pose. La nef de Saint-Nazaire peut donc bien être celle qui fut commencée à la fin du onzième siècle; il convient de ne pas perdre de vue la prospérité et l'état de civilisation avancée auxquelles étaient arrivées à ce moment les provinces méridionales.
La Société connaît aussi Saint-Hilaire et Alet, et il suffit de mentionner les ornements en stuc sur les montants et les cintres des fenêtres de l'abside d'Alet, artifice employé parfois à l'époque romane quand les ressources venaient à tarir.
A l'église de Caunes ont été remarqués surtout la voûte en coupole du porche dont les nervures en boudin se lient avec les assises horizontales et le gros boudin posé après coup au-dessous de l'archivolte d'entrée pour la soulager; au chevet, l'étroit passage couvert qui le contourne ainsi que les absidioles et les arcatures au-dessus postérieures peul-être, rappelant celles de Saint-Guilhem du-Désert, entre trois desquelles s'ouvrent des fenêtres; dans la
Fia. 1. — Maison gothique à Caunes.
Fio. 2. — Détail d'une fenêtre.
FIG. 3. — Fenêtre Kenaissance à Caunai.
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nef gothique, les arcs doubleaux qui ne supportaient d'abord qu'une charpente. Dans les rues de la pelite ville, les regards se sont arrêtés sur une petite façade gothique {ftg 1 et 2) ; sur une élégante fenêtre double en angle de la Renaissance (f\g. 3); dans une cour, sur trois étages de galeries analogues à celles qui décorent plusieurs cours toulousaines, et un puits de 1560 abrité par une calotte monolithe portée sur trois colonnes.
Dans la même matinée trop rapide fut visitée la curieuse église ronde ou plutôt heptagonale de Rieux, unique dans le Midi, mais dont on voit les analogues à Lanleff en Bretagne, à Neuvy-SaintSépulcre en Tourraine, à Charroux en Poitou, à Saint-Michel d'Entraygues en Angoumois, et plus près de nous au Puy, à Chambon.
Le plan heptagonal est une singularité; avec huit côtés, on aurait obtenu une disposition plus régulière et une alternance exacte de piliers carrés et de colonnes rondes.
Les chapiteaux extérieurs et intérieurs sont fort beaux.
Matinée trop courte encore à Fontfroide, solitaire maintenant dans son austère vallée rocheuse que les cistes printaniers égayaient toutefois de leurs tendres colorations. Le cloître aux quatre galeries inégales, le premier qui fut voûté d'ogives bien qu'il conserve les formes romanes, la salle capitulaire méritent toujours le pèlerinage des artistes. L'église, rappelant ses soeurs cisterciennes de Sénanque et de Silvacane, est une église de construction romane sous des lignes gothiques.
Narbonne, qui aurait démandé deux jours, l'un pour la ville romaine, l'autre pour la ville du Moyen-âge, n'a eu qu'une demijournée. Les Toulousains ont remarqué une fois de plus les ressemblances de Saint-Just avec Saint-Etienne, revu avec une ironique mélancolie les deux tombeaux dont ils ont la moitié au musée, mais on n'a pas même eu le temps de monter sur le dallage à découvert des collatéraux, l'originalité de la cathédrale narbonnaise que celle de Toulouse avait projeté aussi. L'église Saint-Paul ouvre des problème?, joie des archéologues. Celle de Lamourguier abrite le musée lapidaire le plus riche de France, disait M. Héron de Villefosse, et M Thiers, qui en est le gardien jaloux comme le créateur, ajoutait que les terrains entourant la ville recèlent encore peut-être un trésor d'inscriptions et de sculptures vingt fois plus considérable.
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Pendant la visite à Lamourguier, les Narbonnais étaient dans une anxieuse sollicitude sur le danger que couraient les archéologues s'attardant d'un bas relief en marbre à une épitaphe ou à un autel taurobolique. Un des doubleaux de la voûte montrait, en effet, une inquiétante brisure, et il s'est effondré quelques jours après. Les membres du Congrès ont tenu d'autant plus à émettre le voeu que l'église, menacée, paraît-il, soit consolidée, ce qui serait facile, et conservée.
Au musée, outre un autre ensemble d'antiquités romaines, on a pu admirer une collection de faïences superbes, formée tout entière par les dons des familles de la contrée, qui fut très riche sous l'ancien régime, comme elle Tétait encore, il y a quelques années.
Après Alet, wagons et voitures ont emporté les congressistes à travers les gorges de l'Aude dont le soleil de mai caressait les roches grises d'une lumière ambrée à ravir les coloristes. Puis, bientôt, le Canigou dressait fièrement dans l'azur ses lignes de grâce et de majesté, montant d'un jet de la plaine basse à 2,765 mètres, spectacle unique dans les Pyrénées, plus saisissant encore quand on le contemple de la mer d'où la montagne semble jaillir, comme jadis la déesse de la beauté.
Mais l'arrivée à Perpignan est lamentable. Le vide des remparts abattus entoure la ville d'un désert et le Castillet désemparé a pris un air confus et décontenancé. L'intérieur de la ville conserve encore les rues étroites, les portes de ses vieux hôtels aux énormes claveaux que surmontent les fines colonnettes de leurs fenêtres gothiques, ses églises avec leurs riches rétables espagnols et même sa loge de mer défigurée toutefois et profanée par un café; surtout son peuple au teint basané et au langage sonore, ses groupes bruyants d'enfants demi-nus, dont la peau déjà couleur de cuivre est relevée par les crépelures désordonnées de cheveux noirs à reflets bleus.
La nef unique de la cathédrale, flanquée de chapelles dont la voûte monte presque jusqu'à la hauteur de la voûte centrale, en laissant toutefois la place d'une petite baie ronde, rappelle ainsi Sainte-Cécile d'Albi, mieux éclairée par les fenêtres ouvertes sur les galeries qui atteignent le sommet de l'édifice. Mais M. Mayeux, architecte diocésain, a enlevé le crépi de la façade et montré par
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les arcatures en briques mises à découvert le projet abandonné d'une église à nef centrale avec collatéraux.
Puis, c'est presque tout le Roussillon qui a été parcouru, montrant sous les crêtes neigeuses du royal Canigou ses vignes d'un vert intense buvant le soleil, et, à chaque pas, ses monuments d'un caractère si spécial et cependant si varié; le fier pont de Céret, très analogue à celui de Saint-Jean-les-Abesses à Gérone, qu'il faudrait voir d'en bas et que Ton ne connaît pas si Ton se contente de la vue rapide prise de celui du chemin de fer parallèle qui en détruit l'effet; la piscine romaine d'Amélie-les-Bains et la gorge pittoresque argentée par la cascade de la chaussée d'Annibal ; l'église romane d'Arles-sur-Tech aux reprises qui font se dresser de nombreux points d'interrogation; les deux bustes en argent des saints Abdon et Sennen qui rappellent à plusieurs celui plus beau de saint Lizier; le linteau archaïque de la porte qui semble gardée par la statue tombale, dressée contre le mur, du chevalier Guillaume Gaucelme mort en 1210, qui voulut être inhumé et représenté en coule monastique; le cloître élégant dans les formes très simples, plus grand mais moins finement détaillé que celui de Saint-Hilaire qu'il rappelle; le cloître d'Elne, la merveille de la contrée où les congressistes ont été longtemps retenus et charmés par les démonstrations de M. Brutails et dont chacun des chapiteaux roman ou gothique tente le crayon ou l'objectif et mériterait un paragraphe qui pourrait être fort nourri ; la belle église qui fut cathédrale jusqu'en 1602, construite au onzième siècle, fortifiée au milieu du donzième par ses deux clochers du haut desquels on jouit d'une vue rare et superbe sur la mer et sur la montagne, menacée, au commencement du quinzième, d'être remplacée par une église gothique dont on voit à Test les premières assises bientôt abandonnées.
La course enchanlée s'est poursuivie encore de Prades au puissant cloître roman en marbre rouge de Saint- Michel-de-Cuxa, à la singulière église à deux nefs de Villefranche, à l'église romane aux trois nefs, fleurie d'ornements sur sa porte et ses fenêtres absidales de Corneilla-de-Confient, enfin à l'église austère ou plutôt aux deux églises superposées de Saint-Martin du Canigou construites avec les rudes matériaux que fournissait la montagne et que \:?r de Carsalade vient de relever en évêque courageux et archéologue avisé,
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avec une conscience qui devrait à beaucoup servir de modèle.
Le volume du Congrès résumera les discussions savantes des séances du soir.
Deux banquets ont rassemblé les congressistes habituellement séparés parce qu'aucun hôtel ne pouvait les réunir tous : l'un dans la grande salle aux fenêtres ogivales des tours narbonnaises de Carcassonne, fort surprise sans doute d'un spectacle oublié depuis bien des siècles, l'autre à Perpignan dans un hôtel dont le confort tout moderne éloigne singulièrement des fondas espagnoles, au patio sombre et frais et aux grandes pièces sévères que l'on voyait encore dans la vieille ville il y a quelques années.
Pendant ces nombreuses visites de monuments, les congressistes ont été séduits par l'art avec lequel leur éminent directeur, M. Lefèvre-Pontalis, saisit rapidement, analyse et dissèquo l'édifice, discute les dates et résout les problèmes.
Séance du 19 juin. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
Lecture est donnée des deux documents suivants extraits des notes manuscrites que Mgr DOUAIS voulut bien laisser à la Société en quittant Toulouse.
D'Assézat créancier d'un étudiant, 1555.
Antoine Sève écolier reconnaît devoir à noble Pierre d'Assezat la somme de 57 liv. dix sous (24 avril 1555). — Archives des Notaires, Bolaroti, regist. 23 mars 1544-23 avril 1556, fol. 72 v».
DEBTE DE NOBLE PIERRE ASSAZAT.
L'an mil cinq cens cinquante cinq et le vingt qualriesme jour du mois d'apvril, en Tholose et dans la maison d'habitation de moy notaire royal soubzsigné. régnant Henry, etc. Personnellement illec constitué èz présences de moyd. notaire et tesmoings soubz noumés, siMaistre Anthoine Sève, escollier, natif de Melun, naguieres estudiant de l'Université de Tholose, lequel scailhant et de son bon gré, a recogneu avoir eu et receu
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reallement de noble Pierre Assazat, bourgeois de Tholose, par les mains de sire Raimoad de Sainct Ylaire, son justiteur, illec présent, la somme de cinquante sept livres dix soubz tourn., que led. Assazat luy a fornyes du mandement de M« Me Nicolas de Fita, procureur au grand Conseil, qui a esté employée tant pour la norriture despuys ung mois que pour ses acoustremens, habilhemens et cheval qu'il a achaptés pour s'en retorner, et dix sept livres douze soubz que luy restent desd. cinquante sept livres dix soubz, en deniers contens pour fere sa despence jusques à Paris; laquelle somme de cinquante sept livres dix soubz, ensemble aultres sommes qu'il a receues cy devant, contenues en ses cedulles qu'il en a faictes, a promis payer ou faire payer à Paris aud. Assazat ou à son mandement, incontinent arrivé qu'il soit, par son père, M" Doux Sève, docteur ez droiclz, lieutenant gênerai au siège presidial dud. Melun, ou par led. de Fita. Et à ce faire a obligé et yppothecqué ses personne et biens iceulx soubans (sic) et volu estre compellé par les voyes et rigueurs des courtz et seelz du Chastelet de Paris, Melun ou aultres, et aultres courtz du présent royaulme de France, Tune court ou Tune exécution pour Taultre non cessant, et par arrestation de sa personne, en renonçant à toutes exceptions et actions tant de droit que de faict qu'il pourroit venir au contraire. Et ainsi Ta juré', etc.; de quoy, etc. Presens Estienne Cugniac et Rigon Destoeps, clercz de Tholose, et moy
BOLAROTI.
Testament de Pierre d'Assézat (18 août 1581) ; Ouverture du testament le jour de sa mort (20 août 1581). — Archives des notaires, Célery, Reg. Testaments depuis 1574 jusqu'en 1581, fol. 854, fol. 859.
TESTAMENT DE M 1' ASSEZAT.
Au nom de Dieu. Scaichent tous que, comme il n'y ait en ce monde chouse permanente ny rien plus certain que la mort ny plus incertain que l'heure d'icelle, moy Pierre Assezat, seigneur de Ducede, bourgeois de Tholose, en saincté grâces à Dieu, de mes sens, entendement et mémoire, bien voyant, ouyssant, parlant, entendant et cognoissant, comme aux notoire et tesmoings bas nommés peut aparoir, dezirant laisser pais en ma maison, invoquée Tayde du Benoist Sainct Sprit, muny du signe de la saincte croix, et recommandée mon ame à Nostre Seigneur Jesu Christ, le suppliant par le mérite de sa saincte mort et passion en avoir pitié et la recepvoir à son royaulme avec les bienheureux, ay faict et ordonné mon testement nuncupatif secret, en la forme que s'en suiçt.
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En premier lieu ay vollu et ordonné mon corps estre mis en sépulture et mes honneurs funèbres estre faictes ainsi que par ma femme et héritier universel ci après noumé sera asvisé et parl'ung d'eulx.
Item, donne et lègue au couvent de la Grand Observance où sera ensepvelli, la somme de deux cens livres tourn.; aux religieuses Saincte Claire à Sainct Ciprien, cinquante livres tourn., et cent escus sols à pouvres filhes à marier, à la disposition de ma femme cy après nommée; le tout par une fois après mon décès de moy dict testateur, payables par mon herritier universel cy après nommé.
Item, donne et lègue à Peyronne de Chevery, damoyselle, ma femme, pour la restitution de ses dot qu'en ay receu et son augment, la somme de dix mille livres tourn., par une foys payable sur tous et checuns mes biens, pour en faire |et dispouser à tous et checuns ces plaisirs et voluntez, quant les vouldra; et jusques à ce que luy aura esté payée, luy donne et lègue la somme de cinq cens livres pour pension chacungan, payables à deux termes, de six en six mois, la moytié devant main, avec l'habitation à un cartier de ma grand maison, condescent meuble et utencillée de tout ce que sera nécessaire, avec cave et greniers, ainsi que luy plarra. Et veulx aussi et ordonne que soict habilhée de robes et autres habilhemens de deulh selon sa qualité, aux despens demes biens, et que toutes et checunes ses robbes et autres habilhemens, ornemens, bagues et joyeaulx qu'elle a, precieulx et non precieulx, luy appartiennent, pour en faire et dispouser à tous et checuns ses plaisirs et voluntés, oultre et sans préjudice des sommes que je luy doibz par escripture privée ou publique. Si veulx et ordonne, oultre fere ce, qu'elle soict en liberté aller et demeurer en mes metteries et telle d'icelles que bon luy semblera, et quand il luy plarra avec ses chambrières, et que soict acompagnée et fornye de montures par mon héritier pour ce nécessaires et puysse et luy soict loysible user de tous et checuns les fruictz que y seront sans contrediction, et soict illec lotgée et meublée selon sa qualité par mond. héritier cy après nommé tant qu'elle vivra viduellement.
Item, moy dict testateur donne et lègue par droict d'institution particulière et héréditaire pourlion, àJehanne Assezat, damoiselle, mafilhe naturelle et légitime, que j'ay mariée avecques M 1' Jehan de Lamaymie, deux metteries quej'ay Tune au lieu deLobenx, et l'autre au lieu deRoqueceriere avec tous les ediffices, terres etpocessions que j'ay ausd lieuxet jurisdictionsd'iceulx, leurs appartenencesetdeppendences, avec tous les bestalz, meubles et ustencilles que j'auray en icelles au temps de mon décès, si aucuns en y a, sans y rien reserver, avec les fruictz que y seront pendeus;et où seroient parceus au temps de mon décès, soyent ensemencées pour ceste année des fruictz qu'en seront esté parceux s'il y en a ;
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pour par elle en faire et dispouser à tous checuns ses plaisirs et voluntés. Moiennant ce et les sommes qu'elle a receu et autres choses à son mariage, icelle Jehanne Assezat, mad. filhe naturelle et légitime, ay faiete et faictz héritière particulière de mes biens, et que ne puisse autre chose demander en iceulx, ny à mon héritier.
Item, et ayant en considération le long service qu'ay receu, reçois et espère recepvoir de Maistre Pierre Salgues, praticien, habitant en Tholose, donne et lègue aud. Salgues la somme de cent soixante six escus sol et deux tiers d'escu, par une fois seulement, payables après mon décès oultre et part les sommes à luy accordées par mad. femme.
Item, donne et lègue à Pierre Poutron/mon nepveu du lieu de Sainct Chely, et à Pierre Agut du lieu d'Espalion nepveu dud. Poutron, toutes et checunes les sommes de deniers et autres choses à moy deues par iceulx et checun d'eulx, par escripture privée ou publique et comme qu'il soict, et que ne leur en soict rien demandé.
Item, donne et lègue à François Haranbure, mon pour ses gaiges
du temps qu'il m'a servy, la somme de huict cens trente troys escus et ung tiers, laquelle veulx et ordonne luy estre précomptée sur les sommes èsquelles il se treuvera reddebvable envers moy de l'administration qu'il a eu de mes affaires et traffique du temps qu'il a demeuré le passé avec moy.
Et parce que le chef et fondement de tout testement est l'institution d'héritier, moy dict Pierre Assezat, testateur, faictz, institue et nomme mon héritier universel et gênerai en tous et checuns mes autres biens meubles et immeubles, noms, droictz, voix et actions, presant et advenir, où que soient et par quelques personnes qu'ilz soient détenus, scavoir est M" Pierre Assezat, docteur ez droictz, advocat au Parlement de Paris, mon filz naturel et légitime, pour en faire par luy et dispouser à tous et checuns ses plaisirs et voluntés. à la charge de payer et satisfaire à mesd. honneurs funèbres comme ayront esté ordonnées par mad. femme, les légats susd. et autres debtes par moy vrayemeni deubz, cassant et revocant tous autres testemens, codicilles et dispositions que ce trouveraient par moy cy devant faictz, cestuy mon présent testement secret demeurant en son entière efficace et vertu, lequel veulx et ordonne que valhe comme en icelluy est contenu par droict de testement et de codicilles, donation à cause de mort, et par toute autre disposition par aquelle peult et doict valloir. En foy de quoy, Tay faict escripre par le notaire soubz signé, moy causant ma maladie ne l'ayant peu escripre, en deux feulhetz precedens, et présent me suis soubz signé en foy de ce dessus, en Tholose, le dix huictiesme jour du mois d'aoust, l'an de grâce mil cinq cens quatre vingtz et ung. Pierre Assezat ainsi signé.
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Au nom de Dieu scaichent tous que ce jourd'huy dix huictiesme du mois d'aoust, Tan de grâce mil cinq cens quatre vingtz et ung, régnant très chrestien prince Henry, par la grâce de Dieu roy de France et de Poloigne, en la cité de Tholose, avant midi, en la maison de noble Pierre Assezat, seigneur de Ducede, bourgeois audit Tholose, par et devant moy notaire royal soubz signé et presans les tesmoings bas nommés, estably en sa personne ledit noble Pierre Assezat, seigneur de Ducede, lequel gissant au lit malade de sa personne, toutesfois en ses bons sens, entendement et parfaite mémoire, bien voyant, ouyssant. parlant, entendant et cognoissant, comme à moy notaire et aux tesmoings bas nommés pouvoict aparoir, de son gré et franche volunté a dicté,
attesté et declairé, dict, atteste et declaire cy dessus èz troys feulhetz
incluz le présent avoir faict escripre par moy notaire soubz signé son testament et dernière volunté, lequel avolluet ordonné, veult et ordonne que valhe comme en iceulx troys feulhetz par luy enchecune page signés est contenu, expecifié et déclaré, et nomme son héritier universel M« Pierre Assezat, son filz naturel et légitime, et légataire Jehanne d'Assezat, sa fille naturelle et légitime, et tout autrement (Cor. : entièrement) comme est contenu, priant aux tesmoings lllec eslans en estre recordz et moy notaire soubz signé du tout luy retenir instrument, et après son décès le tout, expédier à son héritier .et clauses aux légataires, si en suis requis sans autre publication ny auctorité de justice; ce que ay faict es presances de noble Pierre de Lancefoc, bourgeois; Mes Michel Sorerar, recepveur des talhes de Coumenge; Bernard Racolles, praticien, habitant en la paroisse de la Daurade; sr Estienne Seré, marchand, en laparoisse de Sainct Estienne;'RaimondGarrisson, praticien, en lad. paroisse de la Daurade ; Pierre Lavât, sirurgien. voysins dud. testateur, habitans aud. Tholose; François Haranbure, natif d'Aresse en Bearn, et Me Pierre Salgues aussi praticien en lad. parroisse de la Daurade, à ce pour tesmoins appelles par led. testateur, priés et requis, et avec luy soubz signés en la cède. Pierre Assezat. De Lancefoc tesmoing. Sererar tesmoing. Serre tesmoing. Pierre Lavât. Garrisson. Racolles tesmoing. Daharanbure. Pierre Salgues présent. Et le vingtiesme jour dud. mois et an, aud. Tholose et maison dud. sieur Assezat, environ les quatre heures après midi, illec decedé, led. précèdent testament a esté par moy notaire soubz signé, suivant sa volunté dessus escripte, leu et publyé à la susd. demoiselle Peyronne de Chevery, sa femme, et en sa personne au susd. Me Pierre Assezat, son filz, et damoiselle Jehanne de Lamaymie, sa fille, illec estans, et de ce requis estre retenue acte.èz presances de Monsieur Me François de la Porte, conseiller du Roy en la court de Parlement et comissaire èz requestes du palais; Messire Pierre de Clavery,
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chevallier, seigneur et baron de Sainct Michel de Lannes et La Reole et Montclar, conseiller du Roy et trésorier gênerai de ses finences en Tholose; nobles Bernard de Lafon bourgeois, Pierre de Lancefoc et François André marchant aud.' Tholose, soubz escriplz à la code et de may.
CELKRII. L'original signé est aux cèdes.
Séance du 26 juin 1906. Présidence de M. J. DE LAHONDÈS.
M. DE LAHONDÈS offre à la Société la photographie d'une vue panoramique d'Albi, dessinée au lavis, quelques années avant la Révolution, par M. Mariés, ingénieur.
L'aspect de la ville pittoresque perchée sur la berge du Tarn n'a guère changé depuis celte époque. Le grand couvent des Dominicains que Ton voit sur le premier plan de la rive gauche a cependant disparu, et il est remplacé par les constructions du couvent Notre-Dame et du grand Séminaire. On aperçoit ensuite les anciens fossés, qui ont conservé le nom de Lices, déjà convertis en promenade à cette époque ; mais leur terrain a été surélevé, au moins en amont. Puis c'est la chapelle des Jésuites, devenue celle du Lycée. Le petit clocher qui vient après est celui de l'église Saint-Affric, entièrement détruite. Paraissant à côté par la perspective, le clocher minuscule de l'église Saint-Julien ou de l'église voisine de SainteMartiane, disparues de même Tune et l'autre, se montre ensuite et après se dresse la tour de guette toujours debout de Saint-Salvy. Contre la cathédrale ou voit les pinacles de la chapelle de Fargues qui donnèrent de si fâcheuses inspirations à César Daly, et enfin la superbe cathédrale dominatrice et les bâtiments féodaux de Tévêché; au fond, le petit clocher de Saint-Loup qui pointe encore près du Calvaire.
Le pont, le moulin au-dessus du pont, les maisons du quai qui venaient d'être construites après l'établissement du quai par l'archevêque de Choiseul se montrent encore tels qu'on les voit sur le lavis.
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La tourelle de guette de la cathédrale apparaît avec sa fonction spéciale, L'aspect imposant dans la simplicité de ses lignes de Taltière cathédrale fait déplorer les changements qu'elle a subis. Puisqu'on ne pouvait savoir quels étaient exactement les plans du maître des oeuvres de Bernard de Castanet, il fallait laisser .-'ainteCécile telle que les siècles l'avaient gardée, et si à toute force on avait tenu à couronner les murs inachevés, on aurait dû simplement imiter le chemin de ronde du lonjonépiscopal pour maintenir, l'unité de cet ensemble de constructions défensives.
Le dessinateur s'est privé de l'aspect pittoresque que présentent, sur la rive droite, les maisons plongeant dans l'eau, comme celles de Venise. Il s'est représenté lui-même dessinant sur un premier plan d'arbustes et de masures dans le goût de l'époque.
Le nom de M. Mariés esta retenir. Nous lui devons la conservation de la cathédrale qu'il sauva, en 1794, de la destruction qui la menaçait en plaidant vigoureusement la cause de l'art.
Séance de clôture du 3 juillet.
Présidence de M. .1. DK LAHONDÈS, président.
M. PASQUIER, chargé du rapport sur le Mémoire envoyé au concours pour le prix de Clausade, lit ses conclusions entièrement favorables.
L'ouvrage est intitulé : La généalogie des Bu Faur de Pibrac, et l'auteur est M. Macary, auquel la Société, consultée, accorde le prix.
M. l'abbé LESTRADE, membre correspondant, curé à Gragnague, a envoyé les documents qui suivent :
Histoire de l'art à Toulouse : Nouvelle série de baux à besogne.
Grâce aux archives notariales de Toulouse, le passé artistique de cette ville se dégage, depuis quelques années, des fantaisies de la légende et de l'a peu près des vagues traditions. Divers documents publiés dans
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les derniers Bulletins de la Société archéologique du Midi, et ceux qui forment deux collections récentes : L'Art à Toulouse, par M«r Douais (1904), et Pages d'histoire et d'art sur Saint-Sernin de Toulouse (1905), par celui qui écrit ces lignes, permettent d'entrevoir sur quelles larges et fermes assises s'établira un jour l'histoire de l'art toulousain du seizième au dix-huitième siècles.
L'exploration d'un dépôt devenu l'auxiliaire indispensable de l'érudition locale, en train de justifier chacune de ses assertions, marche d'un pas plutôt lent au gré de notre curiosité impatiente, mais non sans fournir la joie de découvertes notables. C'est une partie de ces trouvailles que je livre en ce moment, réservant comme annexe d'une publication ultérieure d'autres indications artistiques de moindre intérêt et, en tout cas, plus sommaires.
La série des pièces qui suivent a pour dates extrêmes : 1471-1677. Les monuments visés ici sont : la chapelle Saint-Pierre et Saint-Géraud, le choeur de l'église Saint-Georges, les églises de Pouse, de Saint-Martindes-Pierres, de Deyme, de Saussens, de Muret, des Cordeliers de Montgiscard et de Saint-Jory. Au point de vue de l'architecture civile, nos textes fournissent des éclaircissements complets ou partiels sur la construction du château des Varennes en Lauragais, d'après le plan de Dominique Bachelier; sur les travaux entrepris à Balma et à Saint-Michel, résidences archiépiscopales, par l'initiative du cardinal François de Joyeuse; enfin, sur la réédification d'une des tours de Montesquieu en Lauragais, place détruite durant les guerres de religion.
Les travaux artistiques que je viens d'énumérer appartiennent au seizième siècle, excepté toutefois la restauration du clocher de Saint-Jory, de Muret et de l'église de Deyme, besognes que Pierre Levesville réalisa en 1611, 1612 et en 1624. Le dix-septième siècle est surtout représenté dans nos pièces par des oeuvres sur bois. Les stalles de Saint Etienne et de Saint-Sernin comptent parmi les plus remarquables entreprises de ce genre menées alors à bonne fin. On devra leur annexer désormais les vingt-deux sièges que notre compatriote, le sculpteur Dominique Dupuy, façonna, en 1608, pour le choeur des religieuses de Saint-Pantaléon. Quant aux rétables, aussi encombrants que « splendides », ils escaladèrent tous les autels et envahirent, dans les chapelles latérales, le moindre pan de mur demeuré libre. Nous énumérons quelques-uns de ceux que les sculpteurs Arthur-Georges Legoust, Antoine Guépin, Antoine Morizot, et le doreur Jean Martinet fournirent aux églises et communautés entre 1622 et 1677. D'ailleurs, la surproduction des rétables toulousains trouvait au loin d'utiles débouchés.
Tel de ces tableaux, à relief et colorié, s'en alla à Mont-de-Marsan,
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Agen, Bordeaux. Moissac 1, ravir « les spectateurs en son admiration », ainsi que s'exprimait, en 1645, Raymond Daydé, contemplant le grand rétable de la collégiale Saint-Sernin 2.
La nomenclature des objets sculptés sur bois à Toulouse, au cours du dix-septième siècle, s'allonge considérablement si Ton a soin d'exprimer, comme il convient, ces autres parties du mobilier religieux sorties de la main de nos artistes : chandeliers, pupitres, agenouilloirs, accoudoirs, confessionnaux, galeries, statues, vestiaires, armoires à reliques, portes ajourées, etc.
La décoration des édifices par la peinture figure dans la présente publication, mais avec moins d'abondance que la décoration sur bois. A noter cependant la décoration de la chapelle Saint-Exupère, à SaintSernin, en 1507, et les fresques commandées, en 1584, à maître Pierre Arnaud, peintre de Toulouse, pour l'église Saint-Georges. L'artiste représenta, en de « vives couleurs » et à « grands personnages », l'Histoire dit Mauvais riche et le Lazare. — Je ne donne qu'un texte relatif aux travaux d'orfèvrerie. C'est une croix d'argent demandée en 1623, . par une confrérie de Castelsarrasin, à Jean Boudet, argentier de Toulouse : ce bail est détaillé et intéressant.
Un jour viendra où il sera possible de rédiger l'inventaire des multiples manifestations de l'activité artistique de Toulouse, depuis la Renaissance jusqu'à la Révolution. La liste de nos richesses d'art, si odieusement ou si sottement détruites, excitera autant de surprise que de regrets.
I.
22 avril 1471.
Reconstruction de la chapelle Saint-Pierre et Saint-Géraud 3.
Le 22 avril 1471, Antoine de Pousolz, licencié es droits, officiai de Castres, procureur de Jean d'Armagnac, évêque de ce diocèse et abbé d'AurilInc, contracte avec Guillaume Isambert, maître maçon de Toulouse. 11 s'agit de reconstruire en cette ville la chapelle Saint-Pierre et
1. Voyez J. I.estrade, Trois rétables faits à Toulouse pour les Cordeliers de Mont-de-Marsan, à"Agen et de Bordeaux, en 1624. (Bull, de la Soc. arch., janvier 3903.) — A joindre cette note : Le 27 mai 1(556, Jean Cornus étant recteur de Saint-Michel de Moissac, les marguilliers de cette église achètent à Toulouse, au prix de 380 livres, « ung rétable pour lad. esglise de Moissac ». Reg. de du Toron, fol. 180.
2. Voyez l'Histoire de Saint-Sernin, p. 225.
3. Voy. Catel, Mémoires de l'Histoire de Languedoc, p. 203.
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Saint-Géraud, près la place dite « de la pierre », où cet édifice, dépendant comme l'église paroissiale de Bazus 1 de l'abbaye d'Aurillac, s'élevait précédemment.
« Le xxnm<» jour du moys d'avril, Tan 1471, fut faict et conclu marché entre très révérend Père en Dieu et mon très redoubté seigneur, M«r de Castres, abbé d'Aurillac, et Guillaume Isambert, masson de Tholose, touchant la réédification et bastiment de la chapelle sainct Girault de la Pierre, de Tholose, et premièrement, led. Isambert dessus dict sera tenu de faire rédifier et bastir lad. chapelle ainsi et par la forme et manière qu'il Ta baillée en pourtraicture à mond. seigneur, signée de sa main et du notaire dessoubs escript.
« Item, fera abatre totes les murailles et bastimens vieulx que à présent y sont tout en tour lad. chapelle, réservé le pan d'avant, lequel y demeurera pour ce qu'il semble estre assés bon.
« Item, fera vuyder toute la chapelle où qu'il se vouldra en aprofitant ce que en sera oslé au mieulx qu'il porra.
« Item, auront les muralles, de haulteur, l'une partie vu cannes, et Taultre sinq, et le clocher oultre tout... deux cannes de massonerie.
« Item, seront les quattre pilliers, portai et fenestrages de pierre, et les murrailles de brique, et les costés de brique fore que les clés.
« Item, fera tout à ses propres despens en fornissant pierre, teule, chaux, arène et boys, et couverture à teule cave, en manière que sera bien à dire d'ouvriers, et rendre la chapelle toute parfaicte selon la pourtraicture.
« Item, que led. masson fera les murailles espesses de largeur telles que puissent porter la voulte de dessus bonnes et raisonables, au dire des maistres.
« Item, et pour ce que le pam d'avant n'est pas bon, ny rasonnable, et pour ce, led. masson le fera tout neuf.
« Item, plus, led. maistre Guillaume fornira à ses despens toutz fers, ferratures, boys, portes et aultres chouses nécessaires à lad. euvre, exceptées les voirines et baylera la clef à mond. S«r.
« Et par ainsi mond. Ssr baillera et paiera aud. masson, pour toutes chouses, la somme de doze cens escutz d'or et une robe ... chascun an. Et au cas que led. Isambert y perdit, à dire d'ouvriers et maistres, mond. Ser ly estera à cause raisonnable.
« Item, pour paie de lad. somme de xir 2 escus, luy baille le bénéfice
1. Auj. paroisse dans le canton de Montastruc-la-Conseillère, diocèse de Toulouse.
BULL. 36, 1906. 35
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de Bazus pour l'espace de dozc ans, à cent escus par an, jusques à la tin de paie 1. »
(Arch. des Notaires de Toulouse, reg. de Jean Durand, fol. LXX.)
IL
25 février 1507.
Décoration de la clôture de la chapelle Saint-Exupère à Saint-Sernin.
Les bailes de la Table de Saint-Exupère contient à François de Labadie le soin de décorer la clôture ajourée (las riéges) de leur chapelle. — Les renseignements ci-après complètent ce que nous avons eu l'occasion de dire au sujet de la châsse de saint Exupère dans nos Pages d'histoire et d'art (p. 175).
« L'an 1506 (v. s.) et lo xxve de fevrie, en Tholosa, personaliler constituitz senhe Anthonii Vacant et Guilhem Bigonet conbailles de la Taula de sant Superi, de la gleysa de sanct-Serni, en nom de lors companhos et de la Taula, an baillât à pintar las rieges de la capella de saint Exupory à maistre Francès de Labadia, pintre de Tholosa, à qui présent, en la forma, et maniera, et pactes que se seguen :
« Et primo que lod. Francès de Labadia sera lengut de far los roms des piliers de la porta, d'or lin.
« llem, lo pinnacle de sus la porta, d'or lin. — Item, lo travercie, lo fulhage d'or et lo camp d'asur. — Item, la crotz de sus naut las flors de lys, d'or fin. — Item, los pomels de lad. crotz, d'or fin. — Item, los fulhages de lad. crotz, d'or fin. — Item, las quatre rosas, las duas d'argent fin et las autras duas de vermilhon bon. — llem, l'arbre de la crotz et lo feilhage bert et las girofladas blancas et rojas. — llem, tous los lires d'argent. —llem, los botons de dedins d'or bel. — Item, lo fulhage de Taglan vert, en cada camba del fulhage una fuelha d'or bel. — Item, los botons et aglans d'or bel. — llem, la platina traverciera d'asur, las rosas d'argent et de roje. — llem, las cambas de lasd. riegas, la una roje et Tautra verda. — Item, las quatre amellas que son à lad. crotz devant, et las moluras de color que apertendra.
1. Le 24 janvier 1574, les voisins de l'église Saint-Géraud de la Pierre nomment leurs procureurs, les bailles de la Table Notre-Seigneur et Notre-Dame et ceux du Purgatoire, de ladite église, afin d'obliger le prieur de Saint-Géraud à faire réparer le couvert de l'église : « Pour adviser et donner ordre à la réparation du couvert de lad. esglise allant en ruyne à faulte de réparation. » (Arch. des Notaires, reg. de Celerii, L, '/., Z, fol. 76.)
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« Et losd. bailles luy an promes de luy donar [tant] per lad. pintadurâ que de sos journals et despens, la somma de 7 livras tornadas, laquala somma desusd. losd. bailles luy an promes à pagar d'aysi à la festa de sanct Exuperi prochanament venent, et lod. Francès de aber fait lod. obrage sus la ypotheca de sos bes, et losd. bailles à lo pagar, et à tal ho an promes et jurât. »
(Arch. des Notaires, reg. de Simoneti.)
III.
1515-1516. Construction du choeur de l'église Saint-Georges' 1.
Les bailes de Saint-Georges contractent, en 1515, avec les maîtres maçons Jean Faure et Raymond Caraben, pour la construction du choeur de leur église. — Peintures exécutées en cet édifice en 1584.
« Praefagium passatum inter super Intendentes et Baiulos Ecclesie Sancti Georgii, Tholose, et magistros Johannem Faure et Ramundum Caraben, massonerios Tholose, super edificio chori dicte Ecclesie.
« Anno quo supra [1515] et die ultima mensis aprilis, existentes intra ccclesiam sancti Georgii Tholose, videlicet : Nobiles viii domini Petrus Buxi et Iohannes de Sancto Paulo, burgenses, civitatis Tholose habitatores, super Intendentes baiulorum dicte ecclesie, necnon Stephanus Ysalguier, Petrus Store, Johannes de Marsa, Johanhes Trebalhet et Bernardus de Lupo, baiuli antiqui dicte ecclesie, ac etiam Durandus Ydiïard, etc., baiuli novi anni presentis eiusdem ecclesie Sancti Georgii... tradiderunt magistris Johanni Faure et Ramundo Caraben, massoneriis Tholose, ibidem presentibus, ad faciendum chorum dicte ecclesie sancti Georgii, de massoneria, quod promiserunt facere sub pretio et condicionibus inter partes passatis sequentibus :
« Et primo es pacte et convengut entre las partidas dessus nommadas que losd. mestres massonies levaran ks muralhas del cor de lad. gleysa, de dos canas et miegia plus aut que no so de présent. Et aussi levaran las reprisas et Tarquipolan de quatre palms plus haut que non so, et se governaran per lo grant crosié que es après lod. cor.
« Item, plus es pacte et convengut entre partidas que losd. massonies deffaran los fenestrages que son commensatz ald. cor per mettre las verinas, et aquelz levaran ou destrenheran ainsi que sera raso et necessaiï de fe.
1. Voy. Catel, Mémoire de l'Histoire de Languedoc, p. 172.
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« Item, plus es pacte que losd. massons après que auran levadas las reprisas, sive chapileux, faran Tarbout à son degut, à mesa que se aparten de fe, et à dicta de mestres.
« Item, plus es pacte que losd. massonies forniran sindres et chafautz per far lad. massoniaria, et gardaran de domagiar la ymage de mossr Sainct George, et mes lo chival que no se domage.
« Item, plus es pacte que losd. massonies enlusiran lod. cor après que Tauran feyt, et junctaran la muralia de part defora, et bararan lous traux dedins et defora lad. muralia.
« Item, plus es pacte que losd. massonies talharan la clau filatieyra et veyrials deld. cor coma se aparten de fe, et aussi amortiran la caus que sera necessaria à lad. obra, et faran tôt so dessus à lor despens.
« Item, plus es pacte que losd. sobre Intendens et bayles dessus, forniran alsd. massonies per far lod. cor de gleysa, tota la teula, peyra, caussina, arena et terra que sera necessaria, et faran portar à lor despens auprès de lad. gleysa, et aussi forniran fer et plum que sera necessari. — Quod opus chori... etc.. »
« Anno Domini millesimo quingentesimo decimo sexto et die decimâ quartà mensis februarii, existentes intra ecclesiam Sancti Georgii Tholose, videlicet Johannes Faure et Ramundus Caraben massonerii Tholose, présentaient nobili Petro Buxi, burgensi, super Intendenti baiulorum ecclesie Sancti Georgii, Johanni Bosquet et Johanni de Lisia combaiulis, anni presentis, dicte ecclesie, pro eorum caucione, videlicet Petrum Arles, hospitem Tholose, ibidem présentera, qui gratis cavit 1 pro dictis Faure et Caraben, erga dictam ecclesiam, de compleri faciendo opus dicte ecclesie per ipsum Faure et Caraben receptum, modis et forma contentis instrumento praefagii super hoc passato... donec dictum opus fuerit rebisat per magislros et receptum per dictos baiulos, dum tamen dictum opus non perdatur à fauta de las muralhas...
« Paulo post supradicti Buxi, Ysalguié, Trebalhet, etc., realiter solverunt prefatis Faure et Caraben, massoneriis presentibus, pro principio solutionis operis dicti Chori ecclesie sancti Georgii Tholose, sex libras turonenses... »
(Arch. des Notaires, reg. de J. Scuderi, ad annum 2.)
1. Qui fournit caution.
2. « Liber cedarum instrumento rum mei Jacobi Scuderi, notarii Tholose, inceptus anno ab Incarnatione domini millesimo quingentesimo decimo quinto, régnante d"° Francisco, rege Francorum, et Rev.m" in Christo Pâtre
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« Bailh à peindre, faict par les bailhes de Tesglise sainct Georges à Pierre Arnauld, me peintre en Tholose. »
Le 30 janvier 1584, les bailes de l'église Saint-Georges donnent à Pierre Arnauld « à peindre de vives colleurs » une arcade de ladite église, où il représentera « l'Histoire du mauvais riche et le Lazare à grands personnaiges ».
(Arch. des Notaires, reg. de Chaussade, fol. 71.)
IV.
Mars 1516. Èeconslruction du couvert en bois de l'église de Pouse.
Un texte publié par M?r Douais nous apprend qu'en Tannée 1479 les bailes de l'église de Pouze (aujourd'hui canton de Montgiscard) firent refondre la cloche de leur église '. Comme on va le voir, en 1516, le prévôt de Saint-Etienne et Pierre de Laude, recteur de Pouze, fruits prenants en ce dîmaire, procurèrent la réfection du couvert de l'édifice.
« Instrumentum prefagii passatum inter Petrum de Lauda, rectorem de Posa, et dominum Guillelmum Riffelli et dominum prsepositum sancti Stephani, et Johannem David fusterium Tholose.
« Anno quo supra [1516] et die... mensis marcii, existens, etc.. dominus Petrus de Lauda, presbyter, rector loci de Montebruno, et Guillelmus Riffelli, presbyter et procurator, ut dixit, R. P. domini Pétri Buxi, jurium professons et praepositi ecclesie sancti Stephani Tholose, qui... in praefagium tradiderunt praefato Johanni David, Tholose, ... videlicet, ad construendum de officio fuslarie ecclesiam sancti Stephani de Posa sub pactis sequentibus :
« Et primo fait pactum... quod lod. David debastira la cuberta vielha de lad. gleysa de Posa, et an aquela torna fa de nau una autra cuberta de fustaria, laquala aura de large de très canas et miegia, et de lonc de sept ou hoeyt canas, ou plus.
« Item, plus es pacte que losd. de Lauda et Riffelli forniran tota fusta
d" Johanne d'Aureliano, miseratione divinâ tholosano archiepiscopo présidente. » — Le 10 février 1643, le chapitre de Saint-Étienne accorda aux bailes de Saint-Georges la permission de bâtir une sacristie. (Voy. Arch. des Notaires, reg. du Chapitre, ad annum, fol. 306.) 1. Voy. L'Art à Toulouse, p. 17.
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et postes, et fer necessari à far lad. cuberta de gleysa, laquala fusta et postes lod. David sera tengut de préparai' et rebotar al port de Tholosa, et losd. de Lauda et Riffelli, de far portar lad. fusta et postes à lors despens à lad. gleysa.
« Item, plus es pacte que lod. David sera tengut de fulhar lad. cuberta, et de far dos fenestras, sive vistas, ou mes se ny faut à lad. cuberta per donar claritat à lad. gleysa, et aussi de far una porta... » — Prix : 12 écus petits.
(Arch. des Nol., reg. de Jacques Scuderi, ad ann., fol. ccxxv.)
V.
1516-1517.
Construction de l'église des Cordeliers de Montgiscard.
L'historien de Roqueville, M. l'abbé Honoré Duffaut, curé de N.-D. la Dalbade, a indiqué certaines particularités de la construction du couvent et de l'église des Cordeliers de Montgiscard ». L'église, commencée en 1513, n'était pas terminée en 1521, mais peu de travaux restaient alors à faire. Les deux textes suivants permettent de constater que noble Jean de Garaud, fondateur du monastère des Observants de Montgiscard, activa la besogne en 1516 et 1517. A la première de ces dates, il achète ving cinq mille briques pour la construction de la voûte de l'église; à la seconde, il fait transporter du bois (cadrigare) sans doute pour le même objet 2.
1. — Le 8 juillet 1516, à Montesquieu de Lauragais, noble Jean de Garaud commande à Bernard Arnaud, briquetier de Montbrun : « ad faciendum et operandum viginti quinque mille teularum planarum, molle (du moule) teule plane magistri Vitalis de Ribas, dicti loci de
1. Voy. op. cit., pp. 117-118.
2. Le 16 juin 1513, Mandinelli, notaire de Toulouse, reçoit les conventions selon lesquelles Jean de Villeneuve et Jean Vidalhat, maçons de Toulouse, s'engagent à construire l'église des Cordeliers de Montgiscard. Malheureusement, le notaire n'a pas reproduit, en entier le pacte original précédemment arrêté entre les contractants. Voici la partie la plus importante de son texte : Les entrepreneurs ont deux ans pour : « fecisse uiuros pro cooperiendo ecclesiam et exinde orvoutar et coinplere residuum infra duos annos seu circa, et bastiran ben et degudamen, et sarcirau bien de reblo per tôt là que se appartiendra, et obraran en bon temps la massonaria, et non pas en mal temps per que fos domatge à la besonha, et faran bon mortier selon Dieu et lors consiensas et pastir bien i'arena ainsi que se aparliendra. » Prix : 700 écus. (Reg. de Mandinelli, ad ann., fol. 415 et suiv.)
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Montebruno, operando pro Observantiâ de Moritegiscardo, et hoc pro precio duoruin scutorum parvorum et viginti duplarum pro quolibet milhé portatarum in ecclesia dicte Observantie, expensis dicti taulerii.
« Item, plus, omne aliud opus quod opus erit ad perficiendum la voûta, sive sinori dicte ecclesie, coma sont dobleus, ogivas, formarelz, et hoc pro precio, tant ung que autre, duorum scutorum parvorum et viginti quatuor duplarum pro quolibet milhé, et débet perfecisse et aver fayl dictum opus in festo sancti Michaelis.
« Et primo débet operare dictam leula plana prumè. — Item, débet incipere dictum opus cum suis famulis incontinent, sine recipere aliud opus alibi. — Item, débet bene pastare et bardegiare terram dicti operis, et bene coquere ad fines quod dictum opus sit bonum et merchantem, et asportatum in ecclesia dicte Observantie... Testes : Johannes de Villanova, lapicida de Montegiscardo, etc.. »
2. — Le 24 juillet 1517, Jean de Garaud donne aux frères Gassiot et Pierre Prim, de Montesquieu, et à Arnaud Pujol, de Galhiaguet, diocèse de Rieux : « ad cadrigandum (charrier) totam fustam factam et derrocatam quam habet dictus Garaud in nemore de Capella, jurisdictionis de Montesquivo, et hoc de dicto nemore in dicto loco de Montesquivo, et debent portare Observantie de Montegiscardo quatuordecim carrada, si necesse sit, et hoc cum tribus cars et una carreta, et debent incipere ad cadrigandum prima die mensis augusti, eorum expensis, et sine aliud opus facere usque in finem operis, et hoc pro precio septuaginta quinque librarum turonensium. »
(Arch. des not., reg. de Bertrand Bruni, ad ann., fol. 127 et 173.)
VI. 1527 et 1611.
Église de Saint-Jory : construction de deux chapelles et réfection du clocher.
Deux des chapelles de la belle église de Saint-Jory — les plus voisines du sanctuaire — ont été construites en 1527. Leur auteur, Michel Colin, est celui qui édifia, en 1537, à Toulouse, le portail de N.-D. la Dalbade 1. Ces deux chapelles sont actuellement debout, ainsi que le monument auquel elles se rattachent. Le clocher de Saint-Jory, endommagé par la
1. Voy. M«r Douais, L'Art à Toulouse, p. 28. Le 23 novembre 1526, Michel Colin avait vendu aux paroissiens de Saint-Jory « uno carric de peyra », pointe prix de 3 livres 10 sols tournois. (Beg. de Jean Richard, ad ann.)
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foudre et restauré en 1611 par Pierre Levesville, a eu une destinée plus éphémère : il s'écroula peu de temps avant la Révolution.
1. — Le 29 septembre 1527, les syndics et habitants du lieu de SaintJory donnent à Michel Colin, maître maçon de Toulouse : « ad aedificandum.duas capellas in ecclesia praedictâ de Sancto Jorio... videlicet nnam vocatam la Capela de Nostra Dama, a parte sinistrà, prope corum ejusdem ecclesie, et aliam vocatam la Capela de sancl Laurens, a parte dextrà, prope corum ejusdem ecclesie, magistro Michaeli Colini, massonerio Tholose, ibidem presenti, et hoc per summam novem vigenti (180) librarum turonensium... »
Michel Colin : « sera tengut de basti lasd. duas capelas de NostraDama et sanct Laurens, de pila en pila, de longor et de larjor, ainsi que talha la segrestania devers la capela de sanct Laurens, et la de Nostra Dama aura de larjor, ainsi que talha la murailla vielha de ladita gleysa et autrement ainsi que es començada.
« Item, lodit Colin sera tengut de fa las ditas capellas d'hautor 4 canas del pasiment jusqu'os à la claù.
« Item, sera tengut de fa à cada una de lasd. capellas una vista, sive berruia, ainsi que se appartendra et sera de rason, segun las ditas capelas.
« llem, sera tengut lod. Colin de far à cada una de las ditas capelas un armari bon et suftïcient et ainsi [que] just et rasonable.
« llem, à cada capela un auta rasonable de teula, et à cado canto desdits autas una peyra.
« Item, sera tengut lod. Colin de far las cadieras de lasd. capelas bonas et sufficientes de teula, et, de part dessus de peyra.
« Item, fara lodit Coli las muraillas de las ditas capellas de la spessor que son las muraillas de la nau de la dita gleysa.
« Item, sera tengut lodit Coly de fa tôt so dessus à sos despens et forni teula. peyra, eaux, sable et autras fornituras, exceptât del fer. »
(Arch. des Not., reg. de Jean Richard, ad ann.)
2. — En 1611, Hector Potier de la Terrasse, seigneur de Castelnouvel. avocat en Parlement, agissant comme économe de l'archevêché de Toulouse, et Jean Saint-Lanes, recteur de Saint-Jory, signent un contrat avec l'architecte Pierre Levesville qui s'engage, aux conditions suivantes, à restaurer le clocher de Saint-Jory :
« Premièrement est nécessaire de resaper toute la fraction et trou que a faict le tonnerre au pillier du cousté de septantrion qui est entre les deux fenestres du clocher où led. tonerre a sorty. Ensemble fermer une ouye de chasque cousté dud. pilier de Tespesseur de deux demy tuille s
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et dans icelles ouyes y fault laisser une ouverture à chascune d'un pam et demy de larjeur et deux pams et demy haulteur pour prendre le soc des cloches. Ensemble faire les deux eschelles manières à neuf pour monter despuis les cloches à la gallerie dud. clocher. Plus fault au planpied de lad. gallerie, à la première naissance de la piramide boucher le trou et faute qui est du cousté de septentrion. Plus fault rebastir et bien liaisoner toute la grande fante qui est à lad. piramide despuis le planpied de lad. gallerie jusques au hault et fère toutes les estaiges nécessaires pour fère et parfère lad. oeuvre et après les estaiges faictes il fault abbatre la pointe de lad. piramide de la haulteur de deux canes ou environ jusques à la fante qui cerne tout à Tentour de lad. pointe et après rebastir la première assiette de pierre de tailhe bien cramponée et bien plombée affin de maintenir et arrester tout le reste de ce qui est corrompu et par dessus lesd. assiettes bastir de brique jusques à la haulteur de six pams et tailler la tuille suivant le plomb de pante et cordons qui sont sur lesd. coings, après rebastir le reste de lad. pointe de pierre de tailhe et les bien cramponner par tous les lits et joindre lesd. pierres affin que le vent ny les orraiges ne le puissent tomber, et le tout sera faict de bonne brique, bien cuyte, et de bonne chaux de Coloigne, et sable de rivière et pierre de tailhe, et led. entrepreneur fournira tous matériaux nécessaires pour lad. oeuvre sans que lesd. sieurs soyent tenus à aulcune chose sinon qu'on leur fere aporter les matériaux à pîed d'oeuvre...
« Seront tenus lesd. entrepreneurs oultre ce, de remettre le degré qui monte au clocher en bon et deu estât, et après rendre lad. esglise recouverte entièrement. » Prix : 1,200 livres tournois, payables par les fruits prenants, l'abbé de Saint-Sernin et le recteur 1. — Acte cancellé, après fin de payement, le 21 décembre 1611.
(Arch. des Not., reg. de De Ortis, ad ann., fol. 823.)
VIL
8 juin 1582. Construction du château des Varennes.
Le 8 juin 1582, M. de Saint-Félix, seigneur des Varennes en Lauragais, donne aux maçons Anglade et Lamouroux à construire le château des Varennes selon le plan qu'en a dressé Dominique Bachelier. — Dix
1. Parmi les signataires du bail se trouve Jacques Dutilh, recteur de Mau remont.
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ans avant cette date, le £9 mars 1572, noble Germain de Saint-Félix, seigneur de Clapiers et de Mauremont, contractait avec Antoine Spert, maître maçon de Villenouvelle, pour la construction d'un pigeonnier à Mauremont 1.
« Pactes faictz avec Jehan Langlade et Bernard Amouroux, m"s massons de la ville de Tholose, sur le bastiment qu'ils ont entreprins faire au lieu des Varènes en Lauraguès, pour monsieur de Sainct Félix, Conseiller du Roy en son Conseil privé et Procureur général en la Cour de Parlement dud. Tholose, Seigneur du lieu des Varènes en Lauraguès, suyvant le pourtraict que en a esté dressé par me Dominique Bachilier, mis en main desd. maistres massons.
« Premièrement ont lesd. Langlade et Amouroux promis fère ung corps de logis aud. Varènes, contenant en longueur vingt troys cannes ou plus, comprins deux tours que y sont aux deux boulz, et en largeur quatre cannes deux pans dans oeuvre, lequel sera fondé doutze pans dans terre, et plus s'il en estoit besoing; et où ilz seront tenuz faire troys estaiges, sçavoir la première vonltée que sera six pans dans terre, et huict ou neuf pans par dessus, et pour pourter lad. voulte ilz seront tenuz faire les muralhes que seront aboutissantes aux fossés, de largeur de troys tuylles de poincte, molle [moule] de Tholose, et celles que aboutiront à la basse cour, de largeur de deux tuylles et demy, et les mégencières de deux thuyles de poincte, mesme la viz à repoz, laquelle aussi seront tenuz voulter despuys le bas de lad. tour jusques au plus hault estage, pour y estre mis degrez de pierre ou boys, comme led. s' treuvera meilleur, et pour mieulx asseurer et conduyre led. estage, seront tenuz baslir la muralhe de dehors en tallus et conduyre icelle de sept à huict pans dans terre en haulteur, et laisser ung relays par dedans pour y assoir led. arvonltz, et audit estage seront tenuz fére les fenestrages, canonières et jours nécessaires, de tuille taillée, sinon que led. sr ayme mieulx fournir la pierre que y sera besoing, laquelle lesd. Langlade et Amouroux ne seront tenuz [é]labourer, sauf et réservé les gaffonniéres et barroulhères de portes que lesd. Langlade et Amouroux ont promis faire pur tout le bastiment, en toutz les lieux nécessaires, pour lequel estage conduyre au mieulx que se pourra led. sf sera tenu ouvrir les fondemens et ouster les terres que pourteront empêchement, comme aussi de fournir les enardz (?) nécessaires pour lesd. voultes; et lesd. Anglade et Amouroux faire les cindres et tailler toute la tuylle nécessaire tant pour fenestrages, portes, veues, cheminées que autres
1. Voy. le bail à besogne de ce travail dans Guillaume Codoing, not,, ad ann. ol. 353,
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choses requises, et de faire à Tendroict de deux tours la voulte d'arestes nécessaire, auquel estage y aura à main droicte de la viz à repoz une cuysine de longueur de quatre cannes et demye, et une rière cuysine que sera à la tour du bout, de longueur et largeur de troys cannes et demye, et une pastaudière et fourn de longueur de deux cannes et demye, de largeur de deux caunes ou plus, ensemble y sera norry le privé y laissant ung teneau, et à main gauche une cave ou cliay de longueur de six cannes et demye ou plus, et aultre cave à la tour de Taultre bout, de troys cannes carrées avec un lieu et armoyre pour tenyr les huylles de mesme largeur et longueur que la pasteudiére, après laquelle sera conduict aussi aultre voulte et teneau des privés, le tout bien voulté avec les portes et fenestres nécessaires, et ce, quant au premier estage, pour auquel descendre lad. vis à repoz sera conduytte dans terre.
« Item, seront tenuz lesd. Langlade et Amouroux faire Taultre et second estage sur lesd. voultes de haulteur de deux cannes quatre pans, auquel y aura oultre le degré à repoz que sera commencé sur icelluy du cousté de main droicte, une chambre de longueur de quatre cannes et demye, que sera sur lad. cuysine et une rière chambre de troys cannes carrées plus ou moings que sera sur la tour, ensemble ung garde-robe sur lad. pastaudière, et ung privé et passage pour aller à une gallerie, et du cousté de main gauche dud. degré à repoz, une salle de longueur de six cannes et demye, une chambre sur la tour de troys cannes carrées plus ou moingz, une garde-robe de pareilhe longueur et largeur que le bas et ung privé, avec un passage pour aller à la gallerie ou aultre corps de logis, lequel estage sera percé de portes, fenestres et canonyères suyvant led. pourtraict qu'en a esté dressé, et auquel sera laissé une platebande de dehors, comme aussy au dessus, que servira de retroyssir les muralhes, pour auquel estage monter seront tenuz faire un perron eslevé suyvant led. estage, voulté par dessoubz pour pouvoir entrer aux caves et cuysines du premier estage, la muralhe duquel seront tenu lever quatre cannes au dessus des marches.
« llem, seront tenuz et ont promis faire sur led. corps de lougis aultre et troysiesme estage, de haulteur de dix huict pams ou plus, auquel y aura du cousté de main droicte une chambre de longueur de quatre cannes et demye, comme la basse, et une rière chambre et privé, à proportion de ce que sera faict dessoubz, comme a esté exprimé au précédent article et du cousté de main gauche y avoir une salle haulte, chambre, garde-robe et privé, à proportion du dessoubz. Sur lequel estage sera faict deux torrelles ou cabinetz qui regarderont la basse-cour, et lesquelles, comme aussi tout led. estage seront conduictes et percées suyvant led. pourtraict dressé, et lesd, torrelles seront tenuz couvrir en
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poincte de bonne massonnerie qui régneront par dessus les galetas au plus près à proportion des tours carrées.
« llem, ont promis lesd. Langlade et Lamouroux de faire haulser et faire régner les deux tours dud. courtz [corps] de lougis par dessus la tuylade dud. troysiesme estage de deux cannes de haulteur, ensemble de faire régner la viz à repoz pour entrer au galatas, pour dud. galatas en là, pouvoir entrer auxd. deux tours et aux torreilhes, lesquelles tours seront percées de quatre fenestres, ou demyes fenestres pour prendre jour de toutz coustés, et y sera laissé à chascune tour ung chaufe-pance pour y pouvoir servir de chambrier.
« Item, ont promis faire aud. corps de logis toutes les cheminées nécessaires, sçavoir, au premier estage troys cheminées, une à la cuysine, aultre à la rière cuysine, et aultre à la pastaudière que servira pour le fourn, et au segond estage du costé de main droicte, troys cheminées qui respondront aux susdites, et du costé de main gauche, une à la salle que lesd. Langlade et Amouroux ont promis tailler et faire tout ainsi que la cheminée que led. Langlade a faict en Tholose au corps du logis neuf dud. sr de Saint Félix, et deux à la chambre et garde-robe; et au troisiesme estage, six que respondront aux susdites. Toutes lesquelles cheminées ilz seront tenuz fère tailler, juncter et bastir parfaictement, mesme comme celle de la salle, comme a esté dict dessus, et les aultres en la fourme commune et comme sera par eulx advisé.
« Item, seront tenuz, en tout led, corps de logis et par toutz lesd. estages, enlusir et fère les junctes par dehors, de joincte plate, et par dedans la basse-cour de joincte carrée, ensemble pazimenter tous lesd. estages, sçavoyr le second estage à Tendroict de la salle basse, et chambre, trépadou et perron, de tuylle taillée ou paziment par les joinctz en la forme de celluy qui est faict à Maurelmont, comme aussi le perron ou estages du degré à repoz, et générallement ont promis fère tout ce que sera de leur art et mestier de massonnerie pour la construction et entière perfection dud. corps de logis sans y rien laisser ou obmettre, auquel des deux coustés de cers et haulta seront tenuz fonder et faire une canne de muralhe pour servir de faire la suytte et liaison pour, quelque jour, si plaict à Dieu, pouvoir continuer la closture dud. logis.
« Et pour lad. besoigne et bastiment led. sieur de Sainct-Félix a promis payer ausd. Langlade et Amouroux la somme de deux mil six cens livres tournois, troys cestiers bled et une barrique vin, payable à proportion et mesure de la besoigne qu'ilz feront, ensemble leur bailler habitation et ung couvert près led. bastiment, et leur fournir aussi de deux lictz pendant lad. besoigne, pendant laquelle sera loysible ausd. Langlade et Lamouroux prendre le boys que leur sera nécessaire pour
— 541 —
cuyre leurs viandes des boys et tailhis dud. sr de Sainct Félix, s'estans lesd. Langlade et Lamouroux obligés à parfaire led. bastiment dans deux ans, en leur fournissant les matériaux nécessaires, Tung pour Taultre, et chascung d'eulx en seul pour le tout. »
Dans un nouvel article, il est stipulé que les entrepreneurs recevront un supplément de 18 livres pour voûter la vis jusqu'aux galetas.
« Témoins : Jehan Margailh, marchand de Mauremont. — Dominique
Bachelier, arquiteste pour le Roy en la Séneschaussôe de Tholose. —
Anthoine Pergué, fustier d'Aigues-Vives. — Ont signé : de Sainct-Félix.
- J. Anglade. — J. Margailh. — D. Bachelier. — A. Pergué. — De Codoing,
Codoing, »
(Arch. des Not., reg. de Codoing : Fardel, ad ann., fol. 235.)
VIII.
27 mai 1594. Construction de la lour de Montesquieu-en-Lauragais.
Les habitants de Montesquieu en Lauragais (place forte longtemps occupée par les huguenots et ensuite rasée par les catholiques) font reconstruire une des tours de leur ville. Allusion, dans ce contrat, à l'appareil de fortifications de Montgiscard.
Le 27 mai 1594, à Villenouvelle, les consuls de Montesquieu, Jean Boissonnade et ses collègues, contractent, de l'avis de maître Arnaud de Fieubet, secrétaire des Etats de Languedoc, avec Pierre Expert, maçon de Montgailhard, et Pierre Valadi'é, maçon de Villenouvelle : « pour édiffier de masonerie une tour de brique aud. Montesquieu, et là où souloit estre la porte aquilonère dans led. lieu, comme estoit auparavant, et de toute ansièneté. » Cette tour aura trois étages :
« Sçavoir est, le premier de vingt pans de hauteur avec les deux arbous pour servir d'entrées et de sorties, de largeur requise, comme il estoit d'ancienneté. » Les fondations auront de largeur « demy thuyle de poincte pour le moingz, suivant les fondemens anciens, s'il se trouve de plus grand espesseur seront tenus le fère. — La seconde estaige sera de deux canes de hauteur de une tuyle et demy, avec une cheminée. — La troysiesme estaige de hauteur de quatorze pams, de espesseur de demy thuille, avec aultres cheminées, et sur le devant, du coûté de la rivière, deux tourillions comme ceux de Montgiscart, avec les meurtries et machecoulieus comme il appartiendra, et du coûté de la ville, devers auta, une lour ronde joignant led. bastiment, de dix pams de largeur
-542 -
dans hubre qui servira de place de deux contés pour conduire le degré jusques au sommet de lad tour, de largeur de deux thuiles de poincte de bas, et Tespesseur de Taultre muraille, degré pour degré, à la charge de faire Tarbout du costé de la ville comme il estoit avant la desmolition, sur lequel estoit la prison, de faire dedans une muraille de une thuyle de poincte de la largeur de lad. estaige. » Les consuls s'engagent à faire enlever « la ruyne des environs de lad. muraille », et à fournir les matériaux. — Prix : 60 écus. — Acte cancellé le 5 juin 1594.
(Arch. des Not., reg. de Jean Donat, fol. 343 et suiv.)
M. Emile CARTAILHAC, membre résidant, annonce en ces termes la mort de l'un des plus éminents préhistoriens, de celui qui a fait dans les Pyrénées les plus longues et les plus belles recherches.
Edouard Piette, sa vie, ses oeuvres préhistoriques.
Nous venons de faire une grande perte. Edouard Piette est mort le 5 juin dernier, à Rumigny, dans sa maison familiale. Le mois précédent, à Monaco, au Congrès international d'anthropologie et d'archéologie préhistoriques, nous avions vivement regretté son absence; on avait à Tenvi rappelé ses services et salué par un chaleureux télégramme sa quatre-vingt-unième année. 11 avait répondu avec mélancolie, sentant le poids de l'âge, mais l'esprit encore intact. Il rédigeait à ce moment même son dernier mémoire, que l'Anthropologie vient de publier. Il aura ainsi travaillé jusqu'à la fin.
Dès 1855, dans son pays des Arderines, il publiait des notes d'histoire naturelle. De 1860 à 1870, il se consacrait à l'élude des fossilles des terrains secondaires et prenait un bon rang parmi les géologues. C'est en 1871 qu'il fut entraîné vers les éludes d'archéologie préhistorique et de paléontologie humaine. Il avait déjà exploré dans l'Aisne de vieilles tombes, lorsqu'il apprit, pendant un séjour estival à Bagnères-deLuchon, l'intérêt des stations primitives dans les cavernes. Son esprit instruit et curieux s'enthousiasma pour les vestiges de l'art et des civilisations des premiers hommes. Il s'engagea dans ces recherches avec une intelligente initiative, avec pins de persistance que ses devanciers, avec plus de méthode surtout que ses émules.
Il sut chercher et découvrir, à l'entrée des principales vallées pyré néennes, les abris sous roches longuement fréquentés par les chasseurs d'éléphants et de rennes. Il les explora à fond. 11 avait ce qui manquait aux autres amateurs et aux Musées : une fortune suffisante. Chaque
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saison lui coûta plusieurs milliers de francs. Il y eut des comptes de 12,000 francs. Il avait payé fort cher le droit aux fouilles et la propriété des trouvailles. Il avait formé des équipes d'ouvriers, qui se montraient exigeants et souvent le volaient. Nombre d'antiquaires plus ou moins sérieux envahissaient nuitamment ses domaines. Sa bonne volonté ne se lassa pas; il ne connut pas le découragement. Après avoir désiré d'abord colliger uniquement des faits nouveaux, il devint un ardent collectionneur. Il accumula soigneusement tout ce que lui procuraient ses fouilles incessantes. Il s'assura la possession, à chers deniers, de séries importantes de Tàge du renne, sa période de prédilection.
Les principales stations humaines paléolithiques explorées par lui sont celles de Gourdan, près Montréjeau (Haute-Garonne), de Lortet, au bord de la Neste, et d'Arudy (Hautes-Pyrénées), dé Brassempouy (Landes), du Mas-d'Azil (Ariège). Elles ont livré une incomparable série de gravures sur os et de sculptures en ivoire ou en bois de renne, des statuettes humaines les plus anciennes du monde, produits d'une civilisation que Piette nommait la période glyptique.. Il eut la chance de nous éclairer sur la fin de notre paléolithique : il découvrit, au Mas-d'Azil, les couches tardives, riches en galets coloriés de rouge, très singuliers et inexpliqués. Dans les cavernes indiquées, et bien d'autres, il rencontra des vestiges d'occupation néolithique. Il fouilla, avec un succès constant, de belles allées couvertes, des dolmens cachés sous les tumulus des Pyrénées, et dont les mobiliers funéraires appartenaient à divers moments de Tàge du bronze et du premier âge du fer. A ce point de vue, on peut citer ses recherches aux environs de Lourdes, à Bartres, Ossun et a Pontacq. C'est avec un fort distingué et charmant collaborateur, Julien Sacaze, qu'il découvrit et publia les majestueux alignements, les enceintes mégalithiques funéraires des environs de Luchon, de la montagne d'Espiaut, et aussi les incomparables tumulus d'Avezac Prat (Hautes-Pyrénées).
Il a fait imprimer plus de cinquante notes, mémoires et volumes sur ces découvertes, principalement dans les Matériaux pour l'hisloire naturelle de l'homme, dans l'Anthropologie, dans les Comptes rendus de l'Académie des sciences, les Congrès de l'Association française, le Bulletin de la Société d'anthropologie de Paris.
Dès Tannée 1876, il résolut de publier dans un album de grand luxe toutes les oeuvres de l'art primitif. Avec le concours de très habiles dessinateurs, M. Formant, du Muséum, M. Pilloy, un des maîtres de la chromolithographie, il accumula les planches que volontiers il étalait sous nos yeux. Mais la rédaction du texte a retardé vingt ans la publication. 11 faut souhaiter qu'elle ne soit plus différée.
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Ce zélé préhistorien eut la bonne fortune de voir ses travaux devenir classiques, si Ton peut ainsi parler. 11 était connu et fort estimé partout. C'était, d'autre part, un petit fonctionnaire, un modeste magistrat. Malgré sa fortune, il tint absolument à remplir de telles obligations, et comme il avait un esprit original et supérieur, ses collègues et les autorités lui rendirent souvent la vie dure. Il en riait avec nous. 11 était animé d'une excellente philosophie inspirée par l'histoire naturelle. Le Ministère, sans se douter de ses mérites, le transportait d'une Justice de paix à l'autre, d'un Tribunal à l'autre, à travers la France. 11 le remerciait de faciliter ainsi ses voyages archéologiques.
Comme savant, il n'eut jamais part aux honneurs officiels. C'est très tard, il y a un et deux ans, que l'Institut daigna lui accorder quelques prix. Ce fut à l'Académie des sciences, à la prière de M. Gaudry, notre éminent paléontologiste, et à l'Académie des inscriptions, sur les instances de M. Salomon Reinach. Personne, à Paris, ne fut assez habile, ni assez puissant pour obtenir en faveur de ce naturaliste et de cet archéologue de premier rang une de ces croix qu'on réservait jadis aux meilleurs serviteurs de la science et de la patrie.
On s'inquiétait du sort des collections de M. Piette. Après maintes publications, après nos Expositions universelles, où on les avait largement admirées, elles étaient célèbres dans le monde entier. C'étaient des documents de premier ordre pour l'histoire de l'art, de la civilisation, de l'esprit humain. Des Universités lointaines et opulentes firent des offres tentantes. Le parti de M. Piette fut vite pris. Il fit spontanément donation de tout son trésor à la nation française. Il stipulait seulement que sa collection serait placée au Musée national de Saint-Germain et n'y serait pas morcelée. Il s'en réservait pour dix années (on était en 1902) la propriété scientifique. Il voulut procéder lui-même à l'installation, et bientôt notre grand Musée ouvrira aux travailleurs la Salle Piette.
Ainsi, notre regretté confrère ne cessera pas de contribuer, par ses oeuvres généreuses, au progrès d'une science dont il fut, avec Boucher de Perthes, avec Larlet, avec de Mortillet, un des fondateurs. Peut-être, un jour, les réformateurs de notre enseignement public découvriront-ils cette science française, la paléontologie humaine, dans les programmes des Universités... étrangères. Elle y tient déjà bonne place.
Le Secrétaire général,
Emile CARTAILHAC.
TABLE ANALYTIQUE 1
( Bulletin n»« 32-36, 1903-1906. )
NOTA. — Les noms en caractères gras désignent les membres de la Société, résidants, honoraires, libres ou correspondants.
L'italique est employée pour les titres des ouvrages imprimés.
Affiche officielle concernant les aérostats, 16.
Age de la pierre en Algérie, ses rapports avec— en Egypte, 57; — à Gensac(H.-G.), 257; — du Gers, 429; objets de T — à Castelmaurou, 477.
Age du renne, art décoratif à 1' — 409:
Alan (H.-G.), le sceau et le consulat d' — fin xme s., 98.
Albi, tombes du cloître de Saint-Salvy, 139; officialité d'—, un certiticatoire en 1573,222; — comptes pour refonte de cloche et réparation de croix et calices, 300, 301; le vieil —, exposition de vues d' —, 379; panorama d' — fin xvni" s., 525.
Algérie, âge de la pierre, 57.
Alger. Congrès des Soc. sav. à—, C. r., 324^
Alsonne, pierres d' — à Naurouze explications du nom, 225.
Ambre dans les dolmens et grottes sépulcrales, 373.
Annales de Toulouse, leurs miniatures, 71, 250.
Anneaux près des fenêtres à Cordes, à Saint-Antonin et en Espagne, 336.
Apothicaire au XYII" S., ses comptes, 459.
Archives départementales delà HauteGaronne. Archives civiles, inventaires, 142.
Arènes romaines de Toulouse, 243.
Argenterie de Saint-Papoul et de SaintNazaire (Aude), 104, 105, 107.
Armoiries d'une prieure du monastère de la Gràce-Dieu, 100; — diverses de Saint- Nazairo de Carcassonne, 130; — des évèques de Pamiors rectifiées, 37.
Art, T — à l'âge du renne, 409 ; document pour l'histoire de T —, à Toulouse, baux à besogne, 526; — d'enluminer à Toulouse, 252 ; pages d'— sur Saint-Sernin de Toulouse, 102, 133; documents pour l'histoire de " — en Quercy, 220; — à Toulouse, 232, 526; documents concernant Montagnuc (Hérault), xv" s., 355; document pour l'histoire de Y — à RiuuxMinervois, 337 ; — moderne, ses origines, d'après Courajod et critiques, 19; — sentiment pathétique dans T — du moyen âge, 44G.
ARTIÈRES (Jules), élu correspondant à Millau, 443.
Artigues (H.-G.), sa coutume, 245.
Assezat, d' —, créancier d'un étudiant
1. Dressée par M. E. CARTAILHAC, secrétaire général.
BULL. 36, 1906.
36
546 —
(1555), 520; testament de P. —, 1581,
521. Assiette du diocèse à Montgiscard,
1G25, 38. Auch, origines de son collège, 51. Aulon (II.-G.), monographie d' —, 77. Aimiv: (Victor) : monographie do Revel
Revel 266. Autel votif gallo-romain d'Aulon( II.-G.),
77; — deValentine (H.-G.), 320. Auterive (H.-G.), ses monuments civils
et religieux, 78; débuts de l'insurrection royaliste, 385.
Bachelier (Nicolas) — ses oeuvres de sculpture et d'architecture, 63.
BAICHÉRE (abbé Ed.) : état de l'argenterie de Saint-Papoul, 1760, 101; Inventaire de Saint-Nazaire de Carcassonne, xvic et xvii" s., 105; contrat pour oeuvre d'art, rétable (1687). 337; élu correspondant, 279.
Baladins à Tholose en 1663, 448.
Banassac , céramique gallo-romaine de — chez les Gabales, 188.
BARIÎOT (Jules), fortifications do Mendc, 5S ; los chroniques de la Faculté de Médecine de Toulouse, 313.
BARRIÈRE-FLAVY, armes do deux évoques de Pamiers, 37; tonne de l'assemblée do l'assiette du diocèse de Toulouse, à Montgiscard, en 1625, 38 ; valeur de la monnaie au xvne s., 41 ; — fouilles, cimetière mérovingien d'Azy (Aisne), 75 ; monuments d'Autcrive (H.-G.), 78; le scoau et lo consulat d'Alan (H.-G.), â la fin du xiue s., 98; sarcophage de Sicard de Miremont, à l'église de La GrâceDicu, 100; insurrection royaliste à Auterive, 385; sceau du xv° s., château d'Autcrive, 458.
BATTFFOL : rectification d'une traduction mentionnant Thaia et non Thaïs à Antinoo, 23; Vigilance de Oalagurris, critique d'un article de A. Itevillo, 91 ; mss. toulousain au British Muséum, 450.
BEGOUEN (comte) : stèle funéraire romaine de Saint-Girons, 400.
BEGUIN (chanoine) ; son ouvrage La Madeleine, 387 ; élu corresp. de la Société, 443.
BENETKIX : Un collège de province sous la renaissance, le collège d'Auch,( 15401590), 51.
BERLIN ot AUDIER, lauréats, 430.
Bertren, Basse-Barousse, pierre sculptée de l'église de —, 16.
BOURDES (de) : un bloc de maçonnerie antique près la rue Darquier, 96; généalogie de Dom Vaissete, 345; comptes de 1687, parlement de Toulouse, 491.
Brassac, le pays de — (Tarn), 432.
BREUIL (abbé II.) : dégénérescence des figures d'animaux et motifs ornementaux de l'âge du renne. 409; — élu m. correspondant, 411.
Bréviaire, mss. de Moissac, 149 ; un mss. explicatif des hymnes du —, 411.
BRIANT (Me A.), lauréat, 432.
BRISSAUD, membre résidant, sa mort, 169.
Bronze, cachette de haches de — près Millau, 406; âge du — du Gers, 429.
CABIÉ : Ambassade, en Espagne, de Jean L'brard de Saint-Sulpice, 94.
Cadeilhiin (Gers), sa coutume, 21t.
Cahors, sarcophage gallo-romain du Musée, 404; buste de femme rappelant la statue de Clémence Isaure, 405.
Calagurris, Vigilance de — , Martres (H.-G.), 91.
Camayeu de Saint-Sernin, Toulouse, son histoire par E. ROSCHACH, 216.
Carcassonne, tête de saint Louis sculptée à — 18 ; Saint-Nazaire de —, inventaire, argenterie, etc., 105 ; armoiries de Saint-Nazaire à —, 130; inscriptions des Cordeliers, 162 ; Congrès à —, 513; critique des restaurations, 511 ; son musée, 243.
Carnaval à Toulouse vers 1700 d'après M"" Du Noyer, 123.
CARTAILHAC : C. r. de l'ouvrage de .1. Décheletto, La fabrique de la Oraufesenque (Aveyron), 86; C. r. de l'ouvrage do Dechelette sur les vases céramiques ornés de la Gaule romaine, 182; lo Musée des antiques, Toulouse, 135, 168; collection préhistorique de feu Pégot au Plan
— 547 —
(H.-G.), 257; tombe en briques romaines, place Saint-Sernin, 171; statues-menhirs de l'Aveyron et du Tarn, 258; fouilles du temple do Vénus à Vendres (Hérault), 172; sépultures de Garin près Luchon et autres, 303; l'ambre dans les dolmens et les grottes sépulcrales du Midi, 373; une cachette de haches de bronze près Millau (Aveyron), 406 ; les palettes des dolmens aveyronnais et des tombes égyptiennes, 473; sur l'organisation des musées, 400; la vie et les oeuvres préhistoriques d'Edouard Piette, 542.
Carte préhistorique de la région dos Eyzies (Dordogne), 61.
Castelmaurou, outils de pierre taillée et polio, 477.
Cannes, passage du Congrès archéologique à —, Aude, 516.
CASTERAN ; offre une pierre sculptée de l'église de Bertron.Basse-Barousse, 16.
Caussade (Quercy), son hôtel do ville, 218.
CAZAC, proviseur à. Bayonne, élu correspondant, 70.
Céramique gallo-romaine, fabrique de la Graufesenque, Millau (Aveyron), 86; de la Graufesenque, Millau, 163;
— ornée de la Gaule romaine, 182 ; estampée post-romaine en Gaule, 195.
Certificatoiro en 1573, 222.
CHALANDE (Jules) : enceinte romaine
de Toulouse, 212. Cimetière mérovingien d'Azy (Aisne),
75. Clémence, dame —, dispenses pour ses
jeux floraux, 456. Cloche fondue à Albi (1557), 300. Collège d'Auch sous la Renaissance,
51 ; — Saint-Martial, Toulouse, vie
des étudiants et régents, 500. Commission des objets d'art nommée
par le préfet, 353. Comptes d'apothicaire au xvne siècle,
459. Condat, commanderie de —, 28. Concours de 1903. séance publique,
rapports, 50; — de l'année 1904, 159 ;
— de l'année 1905, rapports, décisions, 328; rapport par M. le baron
Desazars, 429 , — de 1906, prix do Clausade décerné à M. Macary, 526.
Contes populaires do Comberouger (H.-G.), 55.
Cordes, la porte Jane menacée et sauvée, 132, 137. 143, 158; excursion de la Société à —, 332; Société des amis du vieux —, 511.
CORRAZE (abbé R.), de Balma, lauréat, 437.
Coutume de Malvesie (H.-G.), 59; — de Cadeilhan (Gers,) et d'Artigas (H.-G.), 245.
Cours d'archéologie au séminaire do Pamiers, 102.
Couzi : photographie d'un puits sculpté, 316.
CRAZANNE : mort de M. de —, membre correspondant, 126.
Croix processionnelle de Saint-Sernin, Toulouse, 274; — et sarcophage gallo-romain d'Issus, 365.
Dalbade, N.-D. la —, initiales gravées TM attribuables à Taillant dit Manceau, 129.
Daurade, N.-D. la —, démoliton et reconstruction au xvne s., 296.
DÉCHELETTE : Fabrique de la Grausefsenque (Aveyron). 86 ; — Les vases céramiques ornés de la Gaule romaine, 182.
DEGERT (abbé) ; les mosaïques de l'ancienne Daurade, à Tolose, 197 ; démolition et reconstruction de la Daurade au xvn s., 206.
DELORME ; affiche et médailles sur los aérostats, 17; trouvaille de monnaies des xv° et xyie s. à Cazères, 122; lot■ tre du cardinal Maury, 178; les médailleurs français du xv" s., 351 ; prospectus de marchand toulousain du xvne s., 4)7; une médaille satirique du xvi s., 482; jeton satirique contre les femmes, 485; support de croix, cimetière du Bazacle, Toulouse, 491.
DELORME et MASSIF : emblèmes de l'inquisition d'Espagne, 339.
DELOUME (Louis), un menu de capitouls au xviiie s., 175.
DELOUME (Antonin) ; 'Histoire sommaire de la Facilité de droit, 450.
BULL. 36, 1906.
36.
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DESAZARS de MONTGAILHARD :
enlumineurs dos Cartnlaires et des Annales do Toulouse, 71 ; le tableau do Seysses, un coin du vieux Toulouse, 414; rapport général sur le concours do l'année, 429.
DESLANDRES : L'Ordre des Trinitaires pour le rachat des captifs, 127.
Dolmens aveyronnais, palettes en ardoise, un rapport avec les tombes égyptiennes, 473.
Dordogno, carte préhistorique, 61.
DOUAIS (M«r) : documents inédits : un contrat entre baladins à Tholose on 1663,448; d'Assézat créancier d'un étudiant • (1555), 520; testament du P. d'Assézat, 521.
Dubarry(cle); son hôtel à Toulouse, 273.
DUBOURG ; (dom), son livre sur saint Odon, 280.
DURRBACH : son voyage d'exploration â Délos, 42.
Ebrard (Jean), de Saint-Sulpice, ambassadeur en Espagne (1562), 94.
Eglise fortifiée de Venerquo, 361.
Egypte, rapports de Y — avec l'Algérie à l'âge de la pierre, 57.
Emblèmes de l'inquisition d'Espagne, 339.
Enceinte romaine do — 242.
Engagement des bijoux de la maison de Foix au xve siècle, 27.
Enlumineurs des Annales de Toulouse au xv" s., 253.
ESCUDIER, élu correspondant, 279.
Etablissements antiques de Toulouse, 465.
Etudiants clercs de l'Université de Toulouse, de 1482 à 1498, 82; vie des
— du collège Saint-Martial, Toulouse (1751), 500; — débiteur de d'Assézat, 520.
Excursion à Najac et à Varen, 145; à
Cordes, 332. Exposition Léon Soulié à Albi, 379;
— des oeuvres du peintre montalbanais J. Valette Penot, 388.
Femmes, médaille satirique contre les
—, 486. Fénétra, nom d'une fête et d'un gâteau
à Toulouse en 1700, 24.
FERRÉ, signale des trouvailles nouvelles à Martres, 287.
FLEUR v ; Décoration des portails romans, 314.
Folklore du Toulousain, 55.
Fontaine de la place Saint-Etienne, Toulouse, 303.
FORESTIÉ (Éd.) : le bréviaire mss. de Moissac, 149.
FOURGOUS (Jean), élu membre résidant, correspondant à Paris, 465; coffret du xit" s. au trésor de SaintSernin, 250; sarcophage gallo-romain du Musée, 29;}; croix processionnelle du xvie s. â Saint-Sernin, Toulouse, 274; documents sur Toulouse, Bibliothèque de la ville de Paris. 327; excursion arch. A Venerque et à Issus (II.-G.),361 ;une statuedesaint Pierre du xme s., 404; un buste de femme du xive s. à Cahors, 405.
Frescaty, près Lacaune(Tarn) : sa statue-menhir, 270.
Fresque du cloître de Saint-Sernin, Toulouse : saint Augustin, 323.
Fronton, histoire do —, par Escudier, 248.
GALABERT (abbé) : hôtels de ville de Montpezatet de Caussade en Quercy, 218; un manuscrit explicatif des hymnes du Bréviaire, 411; strophes janséniennes, 511.
GALABERT, élu membre résidant, 215; Jean-Valotte Penot, peintre montalbanais; exposition de ses oeuvres à Bordeaux (1706), 388.
Généalogie do dom Vaissete, 345.
Graffitesde la Graufesenque (Aveyron), 163, 187.
Gragnugue, orfèvrerie de son église, 134.
Grand prieuré de Toulouse, son histoire, 28.
Haches de bronze, cachette près Millau, 406.
HERMET : les statues-menhirs de l'Aveyron et du Tarn, 258 ; la statuemenhir de Frescaty, Lacaune (Tarn), 270.
Histoire A uguste, les usurpateurs gaulois du ine s. dans 1' —, 226.
Histoire graphique de l'ancienne pro-
— 549 —
vince de Languedoc, par ROSCHACH. 322.
Hôtel d'Assézat, 1' — est-il de l'architecte N. Bachelier? 68; détails d'arch'tecture de 1' — et de leur restauration, 69.
Hôtels de ville du Quercy, 218.
Imagerie populaire à Toulouse (1522), 511.
Inquisition d'Espagne, ses emblèmes, 339.
Inscription do 1319 aux Cordeliers de Carcassonne, 162.
Inscription romaine de Valentine (H.- G.), 326; de Saint-Girons, 400.
Inventaires des trésors de la cathédrale de Saint-Papoul, 104; de Saint-Nazaire à Carcassonne, 105, 107; des archives do la Haute-Garonne, 112; des archives de la Bourse do Toulouse, 450.
Issus, croix processionnelle du xnr s.. 365.
Jansénisme, strophes on chanson, «los
quatre embarras », 511. JEANROY : le soulèvement de 1241-2
dans la poésie des troubadours,
138. Jeux floraux, la plus ancienne poésie
des —, 153; despanses pour los —,
456. JOULIN : les établissements antiques
de Toulouse, 465. JOURDANNE regrets, sa mort prématurée, 318. Justice; la — â Toulouse en 1518, 329.
La Gaufresenque, à Millau, fabriques de céramique, 186,
La Hire, son lieu de naissance, 484.
LAHONDÈS (J. de) : portraits sculptés de saint Louis, 18; leçons de Conrajod : Origines de l'art moderne, 19; monogrammes de Jésus sur los portes des maisons de Toulouse, 23; la Renaissance à Toulouse, 62; diverses armoiries de Saint-Nazaire de Carcassonne, 130; stalles de Saint-Sernin et de Saint-Etienne contemporaines, 134; la plus ancienne poésie de la bibliothèque des Jeux Floraux, 153;
les récents travaux à Saint-Étienne de Toulouse, 178; les primitifs à Toulouse, 232; offre son catalogue do la bibliothèque do la Société, 279; l'ancienne trésorerie à Toulouse, 291 ; la fontaine de la place Saint-Étienno, 303; à propos de la décoration des portails romans, 314; statues de l'église Saint-Sernin au musée do Toulouse, 319; excursion de la Société à Cordes, 332; le vieil Albi, exposition Léon Soulié, 379; une vue du quai de la Daurade en 1781, 395; la restauration des monuments, 418; album de portraits de parlementaires, 443; sur le sentiment pathétique dans l'art du moyen âge, 446; mss. do Saint-Etienne au Hrilish Muséum, 451; les statues dos deux femmes portant un lion et un bélier passées de l'église Saint-Sernin au musée, 452 ; 1650, despanses pour les Jeux Floraux suivant le testament de Daine Clémence, 456; vues anciennes de Toulouse, 455; maison gothique de Toulouse, 472; sur l'ouvrage de Maie : Le sentiment delà mort, etc., 479; Congrès archéologique de Carcassonne et Perpignan, 513; un panorama d'Albi fin xvnt" s., 525.
LAMOUZÉLE : quelques fonctionnaires municipaux de Toulouse, xvne s, 42; outils de pierre de Castelmaurou (H.-G.), 477.
LAPIERRE : Monographie d'Aulon, 77; Lauzorto (T.-et-G.), son histoire, 59.
LEBÉGUE : son projet de Société des fouilles archéologiques, 165.
LÉCRIVAIN : les usurpateurs gaulois du nie siècle dans l'histoire auguste, 226; rapport sur le concours de 1903, 50.
Lemercicr du Chalonge, évoque constitutionnel de Pumiers, 433.
LESTRADE (abbé .1.) ; bail à besogne pour lo sculpteur Lucas (1766), 90; pages d'histoire et d'art sur SaintSernin de Toulouse, 102, 1133; orfèvrerie de l'église do Gragnague, 134; impression d'imagerie populaire à Toulouse (1522), 511 ; histoire de l'art à Toulouse ; nouvelle série de baux à besogne, 526.
550 —
Lézat, l'église de — et quatre statues
do Lucas (1760), 90. Lezoux. céramique gallo-romain de —
(Allier), 190. Lombez, buslo romain trouvé à — , 126. Lucas, sculpteur (1765), bail à besogne
pour quatre statues, 9:).
MAOARY : la généalogie des du Faur de; Pibrac., 52!3 ; ce travail obtient le prix de Clausade, 526.
Maison gothique do Toulouse, 472.
MALE : le sentiment de la mort dans les derniers siècles du moyen âge. 479; sur le sentiment pathétique dans l'art du moyen âge. 416.
Mnlvezîe (H.-G.), coutume, 49.
Manuscrit concernant l'abbaye de Saint-Etienne de Toulouse. 162; — de l'église Saint-Etienne, au British Muséum, 150.
MARBOUTIN (abbé), d'Agen, élu correspondant, 145.
Marques de potiers gallo-romains, 187.
Marsouins (H.-G.). grotte, 282.
MARTIN-CHABOT (Eugène), élu correspondant, 160.
Martres-Tolosane, une inscription effacée, 287; — ses antiquités, 470.
Mascarades du carnaval à Toulouse vers 1700, 123.
MASSIP : emblèmes de l'Inquisition d'Espagne, 339.
Médailleurs (les) français du xve s., par Mazorolles, 351.
Médaille satirique du xvie s., 482; autre, contre les femmes, 485.
Monde, ses fortifications, 58.
Menu de cupitouls au XVIIIe s., 175.
MÉRIMÉE offre Bol. Soc. Es pan. de E.rea)'sioiles, 455.
Millau, fabrique do céramique galloromaine, 80; cachette de haches de bronze près —, 406.
Minerve, statuette de bronze trouvée à Villeneuve-sur-Lot, 215.
Miniatures du livre des Annales de Touliuse, 71; — idem, pendant le xv" s.. 250; — des Legs d'amors. (1536), 367.
Moeurs françaises et toulousaines en 1818, 121.
Moissac, bréviaire de —. 149.
Monastère do La Grâce-Dieu. 100. Monogrammes de Jésus sur les portes
dos maisons de Toulouse, 23. Montagnac (Hérault), notes d'art, XVe
s., 355 ; confection d'un reliquaire,
d'un ré table, etc. Montaus, céramique gallo-romaine de
— (Tarn), 189. Montesquieu en Lauraguais, construction do la tour (1594), 541. Montgiscard, assemblée do l'assiette
du diocèse, à — (1625), 38; église des
Cordeliers, 534. Montpezat (Quercv), son hôtel de ville,
218. Mort, sentiment de la — au moyen
âge, 479. Mosaïques de la Daurade à Toulouse,
description retrouvée, 197. MOURET ; sos fouilles à Vendres, 172;
élu membre correspondant, 215. Musée des antiques, Toulouse, 135. Musées de province, 489.
Nnjac, château de — (Aveyron", 145.
Nauronse, les pierres de — ou d'Alsonne, explications du nom, 225.
NOGUIER, correspondant à Bèziers,
sa mort. 101. Numismatique monnaies des xve et xvie siècles â Cazères, 122; — carolingiennes du Languedoc, 243; médaille satirique, 482 ; autre contre les femmes, 485.
Ordre de Saint Jean, grand prieuré de
Toulouse, 28. Organisation du musée do Toulouse,
135.
I3ages d'histoire et d'art sur SaintSerniu
SaintSerniu Toulouse, 102, 133. Palettes des dolmens et des tombes
anciennes de l'Egypte, |473. Pamiers, armoiries de deux évêques,
37. Panorama d'Alby, fin du xvm« s, 25. PARI'OURU, notice sur —, par PASQUIER,
PASQUIER, Parlement do Toulouse, portraits, 443
505; pensions, etc., des officiers du —
de Toulouse, 491. PASQUTER : bijoux de la maison de
— 551 —
Foix au xve s., 27; notice sur Parfouru, archiviste, 288; C. r. du Congrès des Sociétés savantes à Alger, 324; C. r. de La Madeleine, du chanoine BÉGUIN, 387.
Paulin, vicomtes et vicomte de—, comté de Castres, 435.
PAUMES : étudiants et régents du collège Saint-Martial, à Toulouse, 500.
Penot (Jean-Valette), peintre montalbanais, 388.
PERBOSO ; comtes populaires recueillis, 55.
PERRAULT-DABOT : offre plusieurs de ses ouvrages, 353.
PERROUD : sarcophage gallo-romain sculpté de Cahors, 299; le ministre Fourcroy, son voyage à Toulouse,etc , 477.
PEYRONY : carte préhistorique de la Dordogne, 61.
Pierre sculptée de l'église de BertrenBasse-Barousse, 16.
PIETTE (Edouard) : sa vie, ses oeuvres préhistoriques, 542.
Plan (le), près Cazères (H.-G.), haches polies et quartzites taillés, 257.
Poésies romanes des Jeux Floraux, 153.
Porche de l'hôtel de Sevin, rue Ninau, 160.
Portails romans comparés, 314.
Portraits de parlementaires toulousains. 443, 505.
Poucharramet (II.-G.), son église menacée, 326.
Pouze, canton de Montgiscard, reconstruction (1516), 533.
Primitifs, les — à Toulouse, 232.
Procession de Lalande à Saint-Sernin, peinture, 1780, 446.
Prospectus de marchand toulousain du xviie s., 407.
Protohistorique do Toulouse et environs, 469.
Puits sculpté de Toulouse, 316.
PUYBUSQUE (de) : Injustice à Toulouse il y a quatre cents ans, 329; comptes d'apothicaire au xviie s., 459; élu correspondant, 279.
RACHOU (Henri), élu membre résidant, 479 ; nouvel album de parlementaires toulousains, 505,
Réformés médaille des — contre les papistes, 482.
REGNAULT : grotte do Marsoulas (H.-G.), nouvelles fouilles, 282; photographie d'une peinture de Lalande, 416.
Reliquaire du xne s. au trésor de Saint-Sernin, 256; — de Venerque, 363.
Remèdes singuliers d'autrefois, 46.
Renaissance, la — à Toulouse, 62.
Restauration des monuments, 418.
Rétable de la chapelle du bout du pont, Rieux-Minervois, 377.
Revel (H.-G.), monographie, 247;
Rieux-Minervois, retable de 1687, 377.
RIVTÈRES (baron de) : tombeau de chanoines â Saint-Salvy, Albi, 120; cloche refondue à Albi (1557), 300; réparation d'une croix, de deux calices pour l'église Sainte-Martiane, (1635), 301.
ROCHER : présentation d'une ancienne robe de mariée on dentelle, 279.
ROQUES : découvertes de silex taillés au Sahara, 57.
ROSCHACH : le camayou de Saint-Sernin, 216 ; Histoire graphique de l'ancienne province de Languedoc, 322.
ROSSIGNOL (Elio) : publications historiques sur le Tarn, 338.
Ruines archéologiques protégées, 152.
SAIGE (G.-M.), correspondant ; sa
mort, 386. Saint Augustin donnant sa règle au
Chapitre do Saint-Sernin, fresque,
323. Saint-Etienne do Toulouse, travaux et
restaurations, 178; un de ses mss.
retrouvé en Angleterre. 450. Sainte Eulalie, commanderie de —, 28. Saint-Jory, chapelles et clocher, 535. Saint-Girons, stèle funéraire romaine,
400. Saint-Louis, les images taillées de —,
18. Sainte-Marie-de-Fozièros, son histoire,
382. Saint-Michol-de-1'Anes (Aude), histoire
de la communauté de —, 437. Saint-Nazaire de Carcassonne, 516.
552 —
Saint-Odon, par Dom Dubourg, 280.
Saint-Papoul, dalles tumulaires, 26.
Saint-Sulvy d'Albi, tombes de chanoines, 139."
Saint-Sernin, de Toulouse, Trésor et Reliques, 81 ; les « bienfaiteurs », statues au Musée de Toulouse, 319.
SALTET, C. r. de l'ouvrage de M" Douais : Trésor de Saint-Sernin, inventaires, 81 ; étudiants do l'U. do Toulouse.'xv° s., 82.
SANTÉ (J.), de Soulan (Gers), lauréat do la Société, 429.
SANTI (de) ; C. r. Un prieuré de l'ancien diocèse de Lodève, SainteMarie-de-Fozières, 382 ; élu membre résidant, 479.
Sarcophage gallo-romain de Cahors, 29!): — d'Issus (II.-G.), 367.
Sceau du consulat d'Alan au xur s., 98; — de Trencavel, vicomte de Béziers (1247), 322; — du xv» s., château d'Autcrive, 458.
Séparation de l'Etat et des Eglises, danger qu'elle fait courir aux édifices et aux objets d'art, 321.
Sépultures de Garin, près Ludion, premier âge du for, 303.
Seysse (II.-G.), tableau de son église ; procession entrant à Toulouse, 414.
Signatures de Gilabertus, sculpteur roman, disparues, 288.
SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE DU MIDI, sa participation à la gérance de l'hôtel d'Assézat, 36; S. A. le prince PHILIPPE de SAXE COBOURG-GOTHA, élu membre honoraire, 36, 41; D' TACHARD, élu membre résidant, 47; Concours de 1903, séance publique, 50; CAZAC, à Rayonne, élu correspondant , 70 ; mort do l'abbé COURET, membre correspondant, 75; mort do NOGUIER, correspondant à Béziers, 101 ; PASQUIER, délégué à la fête du centenaire de la Société des antiquaires do France, 101 ; Jean BOURDETTE et Dr de SANTI, élus memb. corresp., 102; participation pour deux médailles d'argent au Concours de la Société de photographie. 121 ; mort de M. de CRAZANNE, memb. corresp., 126; Conférence publique,
par M. GUIMET, 126; M. Antonin DELOUME. élu président du Conseil de l'hôtel d'Assézat, 126; M. MARIA offre des cartes postales de Zimgad, 129; souscription à la Soc. franc, des fouilles, 129; ses actes pour la sauvegarde de la porte Jane, à Cordes, 132, 137, 143, 158 ; abbé J.-R. MARBOUTIN, d'Agen, élu correspondant, 145; excursion â Najac et Varen,. 145; Concours de 1904, rapports et décisions, 159 ; Eugène MARTINCHABOT, élu correspondant. 160 ; mort de M. BRISSAUD, membre résidant, 169; M. BAUZON, membre résidant, pusse correspondant, 170; MM. GALABERT et G. FOURGOUS, élus membres résidants ; M. MOURET (Félix), â Béziers, memb. correspondant, 215; élections du bureau en 1905, 221 ; séance publique, janv. 1905, 231 ; PLASSARD, rapport sur le concours de 1905, 242; reçoit un don de céramique de Tunisie, 274 ; Conférence du D' TACHARD sur la Tunisie. 276: MM. Albert de PUYBUSQUE, Adrien ESCUDIÉ, l'abbé BAICHÉRE, élus membres correspondants, 279; Catalogue de la bibliothèque de la Société, 279; M. PERROUD offre les chroniques de la Faculté de médecine de Toulouse, par M. Barbot, 313; la Société manifeste ses appréhensions et ses voeux à l'occasion du projet de séparation de l'Etat et des Eglises, 321; excursion de la — à Cordes, 332; M. de LAHONDÈS présente le catalogue de la Bibliothèque, 370; ses doléances en faveur du clocher des Jacobins menacé de ruine, 372, 3813; M. JEANROY élu correspondant de l'Institut, félicité, 379; un plafond de théâtre? â — du xvme s., 382; voeu pour empêcher la dégradation des voûtes de Saint-Sernin, 383; mort de G. SAIGE, memb. corresp., 386 ; rapport de M. le baron DESAZARS snr le concours rie l'année 1905-1900,429 ; M. J. FOURGOUS passe correspondant et secrétaire pour Paris, 443; abbé Brrniil, élu correspondant. 411 ; ARTIÈRES, élu correspondant à Millau, 443;
— 553
Léon JOULIN passe membre libre, 465; De TACHARD, conférence sur le Poitou, 472; la Société reçoit une nouvelle somme de 30!) fr. pour fouilles à Vieille-Toulouse, 479; commission des fouilles de Vieille-Toulouse. 479; De de SANTI "et Henri RACHOU, élus membres résidants, 479: reçoit une photogr. panorama d'AIbi, fin xvnr s., 525; Concours de 1906, 526.
Société dos fouilles archéologiques , projet de LEBÈGUE, 165.
Société des amis du vieux Cordes (Tarn), 511.
Stalles des églises Saint-Sernin et SaintEtienne, Toulouse (1670-1), 131.
Stations romaines du Toulousain, 467.
Statues-menhirs de l'Aveyron. et du Tarn, 258. 270; — de femmes portant un lion et un bélier passées do Saint-Sernin au Musée, 452.
Stèle funéraire avec, inscription romaine. Suint-Girons, 400.
TACHARD (Dr) : conférence sur les antiquités de la Tunisie, 276; conférence sur les monuments du Poitou, 472.
TAILLEFER (abbé) : essai historique sur Lauzerte. 59.
Tapisseries de Saint-Nazaire, à Carcassonne, 117.
Temple de Vénus, V'endres (Hérault), 172.
Terre sigillée, son histoire, 183.
Testament de Pierre d'Assézat, 521.
Thaïs prétendue à Antinoë, 23.
Tombe en briques romaines place Saint-Sernin, 171.
Tombeaux romans du cloître de SaintSalvy d'AIbi, 139.
Toponymie des Pyrénées, 322.
TOULOUSE : quelques fonctionnaires municipaux au XYII" S., 42; la Renaissance à —, Nicolas Bachelier, 62 ; hôtel d'Assézat, son architecte, sa restauration, 66, 69; enlumineurs de —, 71; \es'mAnnales de —, 71 ; trésor et reliques de Saint-Sernin, 81; étudiants au xve s., 82; bloc de maçonnerie antique près la rue Darquier, 96; pages d'histoire et d'art
sur Saint-Sernin, 102. 133; voyage à — en 1818, 121; le carnaval à — en 1700 par M" Du Noyer, 123. Tailhmd dit Manceuu, sculpteur, 129; prétendu portrait de Racine au Musée, 130; hôtel d'Aussargues menacé, 144; archives, inventaires, 142; le Musée des antiques, 135; mss. de l'Acad. des Jeux Floraux, 153; porche de l'hôtel de Sevin, rue Ninau, 100 ; tombe romaine en briques, place Saint-Sernin, 171 ; un menu de Oapitouls au xvme s., 175; los récents travaux à Saint-Etienne, 178 ; mosaïques do la Daurade, 197; caniayeu do Saint-Sernin, 216; les primitifs à —, 232; nombreuses oeuvres d'art de — appréciées par M. de Lahondès, 232; J. CHALANDE, l'enceinte de —; 242; miniatures des Annales do — pendant le XVe s., 250; coffret du trésor de Saint-Sernin, xne s., 256; hôtel Dubarry, place Saint-Sernin, 273; collection de céramiquo tunisienne destinée au Musée, 274; croix processionnelle du xvi° s. à Saint-Sernin, 274; l'ancienne Trésorerie, 291 ; tour a épi de la rue Saint-Ursule 295; démolitions et reconstructions de la Daurade au xvne s., 296; fontaine de la place Saint-Etienne, 303; chroniques de la Faculté de médecine, 313; puits sculpté disparu de la rue du Musée, 316; statues de l'église Saint-Sernin au Musée de Toulouse, 319; histoire graphique, 322; fresque de Saint-Sernin, Saint-Augustin, 323; miniature des Legs d'amors (1536), 323; sarcophage du xiv' s., place Dupuy, 371 ; collège de Gaillac, fondé en 1420, â —, 372; une vue du quai de la Daurade et du pont de — en 1781, 395; un coin du vieux —, tableau de l'église de Seysses, 414 ; portraits de parlementaires, 443, 505*; procession do Lalande à Saint-Sernin, peinture ancienne , 446 ; contrat entre baladins en 1663, 448; inventaire des archives de la Bourse, 450; histoire de la Faculté de droit. 450; mss. d Saint-Etienne au British Muséum, 450; femmes portant un lion et un
5Û4 —
bélier â Saint-Sernin, 452; vues anciennes, 455; dépenses pour les Jeux Floraux, 456; les établissements antiques de —, 465, 469; maison gothique, 472; support do croix du. Bazacle, 491 ; pensions, etc., des officiers du Parlement, 491; comptes du Parlement (1687), 491; collège SaintMartial,500, imagerie populaire) 1522), 511; testament de Pierre d'Assézat, 521; baux à besogne, oeuvres artistiques, 526; travaux dans diverses églises, 526; cliapelle Saint-Pierre et Saint-Géraud, 527 ; décoration do la chapelle Ssint-Exupèro à Saint-Sernin, 530; choeur de l'église SaintGeorges, 531.
Touring-Club de France, souscrit pour sauver la porte Jane à Cordes. 143; — protecteur des ruines archéologiques, 152.
TOURNON (F.-B), de Condom (Gers), lauréat de la Société, 429.
Trésor de Caubiac, près Toulouse, 193.
Trésorerie, ancienne — à Toulouse, 291..
Trinitaires, ordre des —, 127.
Tunisie, conférence sur les antiquités et les vieilles villes de —, 276.
Université de Toulouse, 82. Usurpateurs gaulois du me s., 226.
VAISSETE (Dom), généalogie de —, 321
Vulentine (H.-G.), inscription romaine, 326.
Varcn, église et château de — (Tarn-etGaronne), 147.
Varennes, château des —, 1582, 537.
VIDAL (Aug) : grand prieuré de Toulouse, additions à son histoire, 28; un cortificatoire de l'officialité d'AIbi en 1573, 222; lauréat au concours de 1905, 437; notes d'art, xve s., sur Montaguac (Hérault), 355.
Vigilance de Calagurris, notice de M«' BATIFFOL, 91.
VIOLLET-LE DUC : critique des restaurations do — â Carcassonne, 514.
Vendras (Hérault), fouilles du temple de Vénus, 172.
Venerque, église fortifiée, son reliquaire du xne s., 361.
Wisigoths, auteurs des mosaïques de la Daurade, 208.
LISTE DES PLANCHES ET DES FIGURES DANS LE TEXTE
1 à 3 Monogrammes de Jésus sur des maisons de Toulouse 25
4 Sceau du consulat d'Alan ■ 99
5 Armoiries de Jeanne, de Montant 100
6 Tombeau de l'église Saint-Salvy, à Albi 141
7 Porche Renaissance, rue Ninau, 15, Toulouse 161
7 bis Inscription tumulairo d'un franciscain (1319) 163
8 Église de la Daurade, Toulouse 200
9 Colonnes de l'église de la Daurade, Toulonso 201
10 Coffret du xir siècle du trésor de Saint-Sernin 257
11 Statuette de Petsofa (Crète) 260
12 Menhir anthropoïde de Saint-Sernin 260
13 Statuette de Sisteia (Crète) 261
14 et 15 Les menhirs de Guernesey 261
16 Support sculpté du dolmen d'Écos (Eure) 262
17 Support sculpté du dolmen d'Auborgeiiville (Seine-et-Oise) 263
18 Statue-menhir d'un dolmen du Gard 264
19-20 Statues-menhirs des Maurels et de Pousthomy (Aveyron) 265
21-22 Statues-menhirs de l'Aveyron 266
23 Statue-menhir du Mas-Capelier (Aveyron) 267
24 Statue-menhir de Puech-Réal, Vabre (Tarn) 267
25 Statue-menhir de Frescaty, près Lacaune (Tarn) 271
26 Les peintures de la grotte de Marsoulas (Haute-Garonne) 283
27 Porte de l'ancienne trésorerie à Toulouse 294
28 Sarcophage gallo-romain sculpté de Cahors :.... 299
29 La fontaine de la place Saint-Étienne, Toulouse ; 309
30 Puits sculpté de la rue du Musée, Toulouse 316
31 Sceau de Trencavel, vicomte de" Béziers (1247) 322
32 Saint Augustin donnant sa règle au chapitre, fresque de St-Sernin. 323
33 La porte de la Jane, à Cordes (Tarn) 333
34 Les emblèmes de l'Inquisition (Espagne) 340
— 556 —
35 Église fortifiée-de Vonerque (Haute-Garonne) _. 362
36 Reliquaire du xiie siècle, Venerque (Haute-Garonne) 363
37 Croix processionnelle de l'église d'Issus (Haute-Garonne) 365
38 Sarcophage on marbre gallo-romain d'Issus (Haute-Garonne) 367
39 Couvercle de sarcophage de la chapelle Saint-Sauveur, Toulouse.. 371
40 Le pont de Toulouse en 1781 397
41 et 42 Les ouvertures du pont de Toulouse 398
43 Stèle romaine de Saint-Girons 401
44 Le quartier du Chàteau-Narbonnais (1680) 415
45 Entrée de Louis XIII à Toulouse par la porte Narbonnaise 416
46 Les femmes avec bélier et lion de Saint-Sernin, Toulouse 453
47 Sceau de A.-G. de Lasore (xve siècle) 459
48 Jeton satirique contre les femmes (XVIIe siècle) 485
49 Support d'une croix du Bazacle, Toulouse 491
50-51 Maison gothique à Caunes (Aude) 516
52 Fenêtre Renaissance à Caunes 516
PLANCHES HORS TEXTE.
PLANCHK I. Fouilles du temple de Vénus à Vendres (Hérault) 172
— il et m. Deux tableaux, généalogie de dom Vaissete 346
— iv. Le tableau de Soyssos (H.-G.), procession entrant à Toulouse.. 416
— v. Palettes des dolmens avoyronais 474
Toulouse. Imp. DOULADOURE-PRIVAT, rue St-Kome, 39. — 4756
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE
DU
MIDI DE LA FRANCE
FONDÉE EN 1831 , ET RECONNUE ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE PAR DÉCRET DU 10 NOVEMBRE 1850
Gloriae Majotum'
NOUVELLE SÉRIE N° 33
Séances du 29 mars 1904 au 5 juillet 1904.
Adresser la correspondance au siège de la Société, Hôtel d'Assézat.
TOULOUSE
EDOUARD PRIVAT. LIBRAIRE-ÉDITEUR
14 , HUE DES ARTS , 14 1904
TABLE SOMMAIRE DES PRINCIPALES NOTES
DU SECOND SEMESTRE 1904
J. DE LAiiONnÈs. — Voyage dans lo Midi et à Toulouse on 1818, par J.-E.
de Jouy 121
Ena. DELORME. — Une trouvaille de monnaies des quinzième et seizième
siècles à Cazères 122
E. CARTAILHAC. — Les fêtes du Carnaval à Toulouse vers 1700, par
M™' Du Noyer 123
PASQUIKU. — L'ordre des Triuitaires pour le iachat des captifs, par Paul
Deslandrcs 127
J. DE LAHONDÈS. — Diverses armoiries de Saint-Nazaire de Carcassonne. 130 Abbé LESTRADE. — Pages d'histoire cl d'art sur Saint-Sernin de Toulouse. 133
•— Calice on argent doré, de Gragnague, Haute-Garonne 134
E. CAnTAii-iiAu. — La nouvelle organisation du musée des Augustins, à
Toulouse 135
Baron DE RIVIÈRES. — Le tombeau du cloître do Saint-Salvy, à Albi,
Tarn 139
J. DE LAHONDÈS. — Excursion à Najac, Aveyron, et à Varen, Tarn-etGaionno
Tarn-etGaionno
E. FORESTIÉ. — Le bréviaire do Moissac 149
Le Tourina-Club Français protecteur des ruines archéologiques 152
J. DE LAHONDÈS. — La plus ancienne poésie à la bibliothèque des jeux
floraux 153
Concouru «le l'année. — Itapports et (IccUloim 159
DEPEYRE. — Porche d'un hôtel renaissance (1535) de Toulouse 161
Abbé BAIOHÈRE. — Inscription tumulairc de 131'.) à Carcassonne 162
Abbé HKRMKT. — Los Graffites de la Graufesenque, Aveyron. Compte
rendu par E. C 163
Albert LEHÈOUE. — Lettre écrite en 1878 sur l'utilité d'une Société libre
des fouilles archéologiques 165
E. CARTAILHAC. — Collections préhistoriques des Musées de Toulouse. . 168
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE
DU
MIDI DE LA FRANCE
FONDISE EN 1831, ET RECONNUE ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE PAR DECRET DU 10 NOVEMBRE 18Û0
Gloriae Majorum.
NOUVELLE SERIE N° 34
Séances du 29 novembre 1904 au 31 janvier 1905.
Adresser la correspondance au siège de la Société, Hôtel d'Assézat.
TOULOUSE
EDOUARD PRIVAT LIBRAIRE- KDITEUR Librairie de l'Université
14, RUE DES ARTS (SQUARE DU MUSÉE)
1905
SOMMAIRE DE CE BULLETIN
E. CARTAILHAC. — Tombe romnine, place Saint-Sernin, à Toulouse. 171 — Fouilles du temple de Vénus, à. Vendre* (Hérault), par M. Mouret
(avec une planche) 172
Louis DELOUME. — Un menu de Capilouls au XVIII" siècle 175
Em. DELORME. — Lettre du cardinal Maury 178
Jules DE LAHONDÈS. — Les récents travaux, de Saint-Etienne de
Toulouse 178
E. CARTAILHAC. — Analyse de l'ouvrage de M.Déchelette : les vases
céramiques ornés de la Gaule romaine 183
Abbé DEGERT. — Les mosaïques de l'ancienne Daurade, à Tolose
(avec figures) 197
E. RosciiACii. — Le Camayeu de Saint-Sernin 216
Abbé GALARERT. — Hôtels de ville de Montpezat et de Caussade
en Quercy 218
Aug. VIDAL. — Un certificatoire de l'officialilé d'AIbi en 1573 222
LÉCRIVAIN. — Los usurpateurs gaulois du IIIe siècle dans l'Histoire
Auguste 22G
Séance publique annuelle; 22 janvier 1905 :
Los primitifs à Toulouse, discours par M. J. DE LAHONDÈS 232
Rapport sur le concours de 1901, par M. PLASSARD 242
Liste des lauréats 24!»
Baron DESAZARS DE MONTGAII.HARD. — Les miniatures des Annales
de Toulouse pendant le XV" siècle ' 250
J. FOURGOUS. — Coffret du XIIe siècle du trésor de Saint-Sernin. . 250 (La suite dans la prochaine livraison.)
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE
DU
MIDI DE LA FRANCE
FONDÉE EN 1831, ET BECONNUE ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE PAR DÉCRET DU 10 NOVEMBRE 1850
Gloriae Majorum.
NOUVELLE SERIE N» 35
Séances du 31 janvier au 18 juillet 19015.
Adresser la correspondance au siège de la Société, Hôtel d'Assézat
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EDOUARD PRIVAT LIBRAIRE-ÉDITEUR Librairie de l'Université
14, RUE DES ARTS (SQUARE DU MUSÉE)
1905
SOMMAIRE DE CE BULLETIN
Pages.
Emile CARTAILHAC. — A propos des statues menhirs de l'Aveyron
et du Tarn (avec 14 ligures) 258
Abbé HERMET. — La statue menhir de Frescaty, près Lacaune,
Tarn (avec figure) 270
J. FOURGOUS. — Croix processionnelle du XVI" siècle de Saint-Sernin 274
TACHARD. — Sur les antiquités et los vieilles villes de Tunisie 276
F. REGN.U'LT. — La grotte de Marsoulas, Hte-Gar. (avec figure)... 282
PASIJUIEIS. — Notice sur Paul Parfouru, archiviste 288
DE LAHONDÈS. — L'ancienne trésorerie à Toulouse (avec figure)... 291 Abbé DEC EUT. — Démolitions et reconstructions à la Daurade
au XVII» siècle 296
FOURGOUS. — Sarcophage gallo-romain de Cahors (avec figure).... 299 Baron DE RIVIÈRES. — Refonte d'une cloche à Albi. 1557. — Réparation d'une croix et de deux calices, 1635 300
DE LAHONDÈS. — La fontaine de la place St-Etienne (avec figure). 303
— Statues de l'église Saint-Sernin au Musée de Toulouse. 319
LÉCHIVAIN. — Note sur une inscription romaine de Valenline 326
Concours de l'année, rapports et décisions 328
DE PUYBUSIJUE. — La justice à Toulouse il y a quatre siècles 329
DE LAHONDÈS. — Excursion de la Société à Cordes. Tarn (avec
figure) 332
DELORME et MASSIF. — Les emblèmes de l'inquisition d'Espagne
(avec figure) 339
DE BOURDES. — Généalogie de Dom Vaissele (avec deux tableaux
hors texte) 345
A. VIDAL. — Notes d'art sur Montagnac (Hérault) 355
FOURGOUS. — Excursion à Vencrque et à Issus, Haute-Garonne
(avec 4 ligures) 361
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE
DU
MIDI DE LA FINANCE
FONDÉE EN 1831, ET' RECONNUE ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE l'Ai; DÉCRET DU 10 NOVEMBRE 1850
Glorifie. Majorant.
NOUVELLE SERIE N° 36
Séances du 28 novembre 1905 au 3 juillet 1906.
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l-l, nUV. DES ARTS [SQUARF. DU MUSÉE)
1906
SOMMAIRE DE CE BULLETIN
Pages_
PASQUIER — Sarcophage du XIVe siècle, place Dupuy, Toulouse. . 370 CARTAILHAC. — L'ambre dans les dolmens et les grottes sépulcrales
du Midi 373
J. DE 1 .AIIONDÈS. — Le vieil Albi, exposition Léon Soulie 379
PASUUIER. —Clocher des Jacobins, v<eu de consolidation 383
— Voûtes de Saint-Sernin en danger 384
GALABERT. — J. Valette Penot, peintre montalbanais, exposition de
ses oeuvres à Bordeaux 1766 388
DE LAHONDÈS. — Une vue du quai de la Daurade et île la Garonne
en 1781 395
Comte liEnouEN. — Une slèle funéraire romaine à Saint-Girons... 400
J. FOURGOUS. — Une statue de.saint Pierre du XIII 0 siècle 404
— Un buste de femme du XlVe siècle à Cahors 405
CARTAILHAC. — Une cachette de haches de bronze près Millau 406
DELORME. — Prospectus de marchand toulousain du XVlIe siècle. 407 Abbé BRKUIL. — La dégénérescence des ligures d'animaux et motifs
ornementaux à l'époque du renne 409
Abbé GALABERT. — Un manuscrit explicatif des hymnes du bréviaire 411
Baron DESAZARS.— Le tiiblcau de Seysses, un coin du vieux Toulouse (i/r?c planche hors texte) 414
.1. DE LAHONUÈS. — La restauration des monuments 418
Baron DESAZARS DE MONTOAILHARD. — Rapport général sur
le concours de l'année 429
J. DE LAHONDÈS. — Album de portraits de parlementaires toulousains 445
— Sur le sentiment pathétique dans l'art du Moyen Tige 446
MKI' DOUAIS. — Un contrat entre baladins à Tholose en 1603 448
Me BATIKFOL. — Manuscrit toulousain au British muséum 450
J. DE LAHONDÈS. — Les statues des deux femmes portant un lion et
un bélier provenant de Saint-Sernin de Toulouse 452
— Dépenses pour les Jeux Moraux, 1650 456
BARRIÈRE-FLAVY. — Sceau du XVe siècle provenant d'Auterive.... 458
DE PI'YBUSOUE. — Comptes d'apothicaire au XVII'' siècle 458
JOULIN. — Les établissements antiques de Toulouse 465
CARTAILHAC — Les palettes des dolmens avoyronnais et des tombes égyptiennes (avec planche hors texte) 473
LAMOUZELLE. — Sur quelques outils en pierre de Castelmaurou . .. 477 J. DE LAHONDÈS. — Le sentiment de la mort dans les derniers siècles du Moyen âge, ouvrage de M. Mâle 479
E. DELORME. — Une médaille satirique du XVIe siècle 482
— Jeton satirique contre les femmes, XVII siècle 485
Col. DE BOURDES. — Un cahier de comptes de 1687 du Parlement
de Toulouse 491
B. PAUMES. — Les étudiants et les régents du collège Saint-Martial,
â Toulouse 500
RACHOU. — Nouvel album de portraits de parlementaires 505
Abbé LESTKADE.— Impression d'imageriepopulaire à Toulouse, 1522. 511
Abbé GALABERT. — Strophes janséniennes. '. 511
DE LAHONDÈS. — Congrès de Carcassonne et de Perpignan 513
Mer DOUAIS. — D'Assézat. créancier d'un étudiant. 1555 520
— Te-itaiiient de Pierre d'Assézat, 1Ô81 521
Abbé LESTRADE. — Histoire de l'Art à Toulouse, Baux à Besogne,
nouvelle série. 1™ partie 526
E. CARTAILHAC. — Edouard Piette : sa vie. ses oeuvres préhistoriques. 542 Tables générales du volume (1904-1906).
CONCOURS POUR LES PRIX ET LES MÉDAILLES
La Société dispose de deux prix décernés alternativement :
1° Un prix de la valeur de 300 francs, fondé par M. de Clausade et portant son nom.
Ce prix sera décerné en 1906.
2° Un prix de la valeur de 200 francs, fondé par le docteur Ourgaud et portant son nom. La Société ne désigne aucun sujet de concours; il suffît que les ouvrages soient inédits et du domaine de l'archéologie ou de l'histoire.
Un prix de 200 francs et des médailles pourront être accordés, chaque année, aux auteurs qui adresseront des travaux inédits sur des matières qui font l'objet des études de la Société.
Les ouvrages, imprimés dans l'année, relatifs à l'Histoire, à l'Archéologie ou au Folklore peuvent obtenir les prix réservés ou des encouragements.
La Société décerne aussi des prix et des médailles aux personnes qui lui signalent et lui adressent des objets anciens : chartes, manuscrits, inscriptions, monnaies, médailles, poids, peintures, sculptures, dessins, plans, meubles, vases, armes de pierre, de bronze oit de fer, bijoux, etc., ou qui lui en transmettent les descriptions détaillées, accompagnées de figures.
Adresser tous les manuscrits, imprimés et objets, avant le 1er avril, au Secrétaire général de la Société, hôtel d'Assézat.
PRIX DES VOLUMES DE MÉMOIRES.. FORMAT IN-4» :
TODie I*'1'. (Ne se vend pas séparément.)
— II 20f »
- III '. 20 »
— IV 20 *
-~ V 20 »
— VI. (Ne se vend pas séparément.)
Toiïie VII, (N<-' se vend pas séparément.)
— VIII or »
- IX 20 »
- X 8 »
— Xi. XII, XIII, XIV,
XV. Chacun C »
Prix de la collection des Mémoires, 180 fr. — Prix du volume des tables, 5 fr.
PRIX DU BULLETIN :
Un fascicule séparé (1869 est épuisé) 1 fr.
La collection des bulletins trimestriels in-4° (1870-1887) 20 fr.
La collection des bulletins semestriels in-8° (1887-1900) 30 fr.
RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX
Fondée à Toulouse, eu 1831, la Société archéologique du midi
de la France a été reconnue établissement d'utilité publique, par décret du 10 novembre 18ô(). Elle se compose de membres honoraires, de membres résidants, de membres libres et de membres correspondants, qui ont le droit d'assister aux séances et d'y faire des communications.
Les séances ont lieu, de droit, tous les'mardis, à 8 heures 1/2, du dernier mardi de novembre au troisième mardi de juillet.
Le siège de la Société est tixé à l'hôtel d'Assézat-Clémenee Isaure (palais des Académies). La bibliothèque est ouverte, le mardi et le mercredi, de 2 à à heures de l'après-midi.
La Société' publie un Bulletin périodique in-8° et des Mémoires in-4°. (Voir à la troisième page de cette couverture.)
Elle décerne, chaque année, des prix et des médailles'd'encouragement. (Voir le programme à la troisième page de cette couverture.)
Le terme pour l'envoi dos ouvrages destinés au concours est le 1er avril.
Les ouvrages et envois doivent être adressés à M. le' Secrétaire général de la Société, hôtel d'Assézat.
BIENFAITEURS DE LA SOCIÉTÉ
M. le Dr OURGAUD a fondé un prix qui porte son nom, d'une valent' actuelle,de 200 francs.
M. DM GLAUSADE a fondé un prix qui porte son nom, d'une valeur actuelle de 300 francs.
M. BONNEL.de Narbonne, a l'ait un legs de 1,000 francs.
M. OZENNE a compris la Société-archéologique du Midi au nombre des Compagnies qui doivent être logées dans l'hôlel d'Assézat et de Clémence Isaure qu'il a offert à la Ville pour servir, sous ce nom, de palais des Académies.
BUREAU DE LA'SOCIÉTÉ
MM. DE LAHONDÈS, président. MERIMEE, directeur. E. CARTAILHAC, secrétaire général.
MM'. Baron DI; RIVIÈRES, archiviste. . L. DELOt'ME, trésorier.
C01I!1ISSI0\ D'IMMIliSSlllN El' DE LIISIItMIIE
MM. AURIO'L.
LECR1VA1X. ED. PRIVAT.
COMMISSION FXOXOIIKP
MM. PASOUIfiR. DELORME. SAINT-RAYMOND.
'AUl, ,,.tr-..\ li'lj). llOUl.AUUl.Hl--l,HI,"Vr, lïli: S'-HultiC, '.>.>. - Ï" 50
CONCOURS POUR LES PRIX ET LES MÉDAILLES
La Société dispose de deux prix décernés alternativement :
1° Un prix de la valeur de 300 francs, fondé par M. de Clausade et portant son nom.
2° Un prix de la valeur de 200 francs, fondé par le docteur Ourgaud et portant son nom. La Société ne désigne aucun sujet de concours ; il suffit que les ouvrages soient inédits et du domaine de l'archéologie ou de l'histoire.
Ce prix sera décerné en 1908. . Un prix de 200 francs et des médailles pourront être accordés, chaque année, aux auteurs qui adresseront des travaux inédits sur des matières qui font l'objet des études de la Société.
Les ouvrages, imprimés dans l'année, relatifs à l'Histoire, à l'Archéologie ou au Folklore peuvent obtenir les prix réservés ou des encouragements.
La Société décerne aussi des prix et des médailles aux personnes qui lui signalent et lui adressent des objets anciens : Charles, manuscrits, inscriptions, monnaies, médailles, poids, peintures, sculptures, dessins, plans, meubles, vases, armes de pierre, de bronze ou de fer, bijoux, etc., nu qui lui en transmettent les descriptions détaillées, accompagnées de figures.
Adresser tous les manuscrits, imprimés et objets, avant le lor avril, au Secrétaire général de la Société, hôtel d'Assézat.
PRIX DES VOLUMES DE MÉMOIRES., FORMAT IN-4» :
Tome Ier. (Ne se vend pas séparément.)
— II.. 20f »
- m so »
— IV 20 »
— V 20 »
—- VI. (Ne se vend pas séparément.)
Tome VII. (Ne s» vend pas séparément.!
— VIII (Jf »
— IX 20 »
— X 8 ' »
— XI, XII, XIII, XIV,
XV. Chacun C »
Prix de li collection des Mémoires, 180 fr. — Prix du volume des tables, 5 fr.
PRIX DU BULLETIN :
Un fascicule séparé (1363 est épuisé) 1 fr.
La collection des bulletins trimestriels in-i° (1870-1887) 20 fr.
La collection des bulletins semestriels in-8° (1887-1905) 30 fr.
RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX
Fondée à Toulouse en 1831, la Société archéologique du midi
de la France a été reconnue établissement d'utilité publique, par décret du 10 novembre 18.~>0. Elle se compose de membres honoraires, de membres résidants, de membres libres et do membres correspondants, qui ont le droit d'assister aux séances et d'y l'aire des communications.
Les séances ont lieu, do droit, tons los mardis, à 8 heures 1/2, du dernier mardi de novembre au troisième mardi de juillet.
Le siège de la Société est lixé à l'hôtel d'Assézat-Clémence Isaure (palais des Académies). La bibliothèque est ouverte, le mardi et le mercredi, de 2 à 4 heures de l'après-midi.
La Société publie un Bulletin périodique in-8° et des Mémoires in-4°. (Voir à la troisième liage de cette couverture.)
Elle décerne, chaque année, des prix ot des médailles d'encouragement. (Voir le programme à la troisième page de celte couverture.)
Le terme pour l'envoi des ouvrages destinés au concours est le 1er avril.
Les ouvrages et envois doivent être adressés à M. le Secrétaire général île la Société, hôtel d'Assézat.
BIENFAITEURS DE LA SOCIETE
M. le D 1' OURGAUD a fondé un prix qui porte son nom, d'une valeur actuelle de 200 francs.
M. DK CLAUSADE a fondé un prix qui porte son nom, d'une valeur actuelle de 300 francs.
M. BONNEL, de Narbonne, a fait un legs do 1,000 francs.
M. OZENNE a compris la Société archéologique du Midi au nombre des Compagnies qui doivent être logées dans l'hôtel d'Assézat et de Clémence Isaure qu'il a offert à la Ville pour servir, sous ce nom, de palais des Académies.
BUREAU DE LA SOCIETE
MM. nr. LAHONDES, président. MÉRIMÉE, directeur. E. CARTAILHAC. secrétaire général.
COMMISSION D'IMPRESSION ET DE LIBRAIRIE
MM. AURIOL.
LECRIVAIN. ED. PRIVAT.
MM. J. FOERGOUS, secrétaire adjoint. Bo'i DE RIVIÈRES, archiviste. L. DELOUME, trésorier.
COMMISSION ECONOMIQUE
MM. PASOUIhR. DELORME. SAINT-RAVMOND.
Tuuiuubi:, h:ip. IluULADOUHK-i'lU'WT, rui! &'-HoMie, o'J. - H750
CONCOURS POUR LES PRIX ET LES MÉDAILLES
La Société dispose de deux prix décernés alternativement :
1« Un prix de la valeur de 300 francs, fondé par M. de Glausade et portant son nom.
2<> Un prix de la valeur de 200 francs, fondé par le docteur Ourgaud et portant son nom. La Société ne désigne aucun sujet de concours ; il suffit que les ouvrages soient inédits et du domaine de l'archéologie ou de l'histoire.
Ce prix sera décerné en 190ti.
Un prix de 200 francs et des médailles pourront être accordés, chaque année, aux auteurs qui adresseront des travaux inédits sur des matières qui font l'objet des études de la Société.
Les ouvrages, imprimés dans l'année, relatifs à l'Histoire, à l'Archéologie ou au Folklore peuvent obtenir les prix réservés ou des encouragements.
La Société décerne aussi des prix et des médailles aux personnes qui lui signalent et lui adressent des objets anciens : chartes, manuscrits, inscriptions, monnaies, médailles, poids, peintures, sculptures, dessins, plans, meubles, vases, armes de pierre, de bronze ou de fer, bijoux, etc., ou qui lui en transmettent les descriptions détaillées, accompagnées de figures.
Adresser tous les manuscrits, imprimés et objets, avant le 1er avril, aii Secrétaire général de la Société, hôtel d'Assézat.
PRIX DES VOLUMES DE MÉMOIRES, FORMAT IN-4» :
ToiîlG Ier. {Ne se vend pas séparément.)
— II 20f «
— III 20 »
— IV 20 »
— V 20 »
— VI. (Ne se vend pas séparément.)
Tome VII, (Ne se vend pas séparément.)
— VIII 6f »
— IX 20 »
— X 8 »
— XI, XII, XIII, XIV,
XV. Chacun 6 »
Prix de la collection des Mémoires, 180 fr. — Prix du volume des tables, 5 fr.
PRIX DU BULLETIN :
Un fascicule séparé (1869 est épuisé) 1 fr.
La collection des bulletins trimestriels in-4° (1870-1887) 20 fr.
La collection des bulletins semestriels in-8° (1887-1905) 30 fr.
RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX
Fondée, à Toulouse en 18'il, la Société archéologique du midi
de la France a été reconnue établissement d'utilité publique, par décret du 10 novembre 1850. Elle se compose de membres honoraires, de membres résidanls, de membres libres et de membres correspondants, qui ont le droit d'assister aux séances et d'y faire des communications.
Les séances ont lieu, de droit, tous les mardis, à 8 heures 1/2, du dernier mardi de novembre au troisième mardi de juillet.
Le siège de la Société est lixé à l'hôtel d'Assé/.at-CIémence Isaure (palais des Académies). La bibliothèque est ouverte, le mardi et le mercredi, de 2 à 'i heures de l'après-midi.
La Société publie un Bulletin, périodique in-8° et des Mémoires in-'i°. (Voir à la troisième page de cette couverture.)
Elle décerne, chaque année, des prix et des médailles d'encouragement. (Voir le programme à la troisième page de cette couverture.)
Le terme pour l'envoi des ouvrages destinés au concours est le 1er avril.
Les ouvrages et envois doivent être adressés à M. le Secrétaire général de la Société, hôtel d'Assézat.
BIENFAITEURS DE LA SOCIÉTÉ
M. lé Dr OURGAUD a fondé un prix qui porte son nom, d'une valeur actuelle de 200 francs.
M. DE CLAUSADE a fonde un prix qui porte son nom. d'une valeur actuelle de 300 francs.
M. BONNEL, de Narbonne, a fait un legs de 1,000 francs.
M. OZENNE ii compris la Société archéologique du Midi au nombre des Compagnies qui doivent être logées dans l'hôtel d'Assézat et de Clémence Isaure qu'il a offert à la Ville pour servir, sous ce nom, de palais des Académies.
BUREAU DE LA SOCIÉTÉ
MM. DE LAHONDÈS, président. MÉRIMÉE, directeur. CARTAILHAC, secrétaire général.
MM. FOURGOUS, secrétaire adjoint. B°» ni: RIVIÈRES, archiviste. L. DELOUME, trésorier.
COMMISSION inill'IlMN El DE EIIIIIAIIIIE
MM. AURIOL.
LEO RI VA IX. ED. PRIVÂT.
COMMISSION ÉCONOMISE
MM. PASQUIhR. DELORME. SAINT-RAYMOND.
luuiuu&e, linp. DOULADOUUE-1'UIVA.T, rue S'-Uome, U'J. - 3i45
CONCOURS POUR LES PRIX ET LES MÉDAILLES
La Société dispose do deux prix décernés alternativement :
1° Un prix de la valeur de 300 francs, fondé par M. de Clausade et portant son nom.
Ce prix sera décerné en 1904.
2° Un prix de la valeur de 200 francs, fondé par le docteur Ourgaud et portant son nom. La Société ne désigne aucun sujet de concours; il suffit que les ouvrages soient inédits et du domaine de l'archéologie ou de l'histoire.
Ce prix sera décerné en 1905.
Un prix de 200 francs et des médailles pourront être accordés, chaque année, aux auteurs qui adresseront des travaux inédits sur des matières qui font l'objet des études de la Société.
Les ouvrages, imprimés dans l'année, relatifs à l'Histoire, à l'Archéologie ou au Folklore peuvent obtenir les prix réservés ou des encouragements.
La Société décerne aussi des prix et des médailles aux personnes qui lui signalent et lui adressent des objets anciens : eliart.es, manuscrits, inscriptions, monnaies, médailles, poids, peintures, sculptures, dessins, plans, meubles, vases, armes de pierre, de bronze ou de fer, bijoux, etc., ou qui lui en transmettent des descriptions détaillées, accompagnées de figures.
Adresser tous les manuscrits, imprimés et objets avant le lor avril, au Secrétaire général de la Société, hôtel d'Assézat.
PRIX DES VOLUMES DE MÉMOIRES, FORMAT IN-4» :
ToiïlG Ier. (Ne se vend pas séparément.)
— II 20
— III. 20
— IV 20
— V 20
— VI. (Ne se vend pas séparément.)
Tome VU. (Ne se vend pas séparément.)
- VIII 6
— IX 20
- X 8
— XI, XII, XIII, XIV,
XV. Chacun. ... 6
Prix de la collection des Mémoires, 180 fr. — Prix du volume des tables, 5 fr.
PRIX DU BULLETIN :
Un fascicule séparé (1869 est épuisé) 1 fr.
La collection des bulletins trimestriels in-4° (1870-1887) 20 fr.
La collection des bulletins semestriels in-8° (1887-1904).., . . . . 30 fr.
RENSEIGNEMENTS GENERAUX
Fondée à Toulouse en 1831, la Société archéologique du midi
de la France a été reconnue établissement d'utilité publique, par décret du 10 novembre 1850. Elle se compose de membres honoraires, de membres résidants, de membres libres et de membres correspondants, qui ont le droit d'assister aux séances et d'y faire des communications.
Les séances ont lieu, de droit, tous les mardis, à 8 heures 1/2, du dernier mardi de novembre au troisième mardi de juillet.
Le siège de la Société est fixé à l'hôtel d'Assézat-Clémencc Isaure (palais des Académies). La bibliothèque est ouverte, le mardi et le mercredi, de 2 à 4 heures de l'après-midi.
La Société public un Bulletin périodique in-8° et des Mémoires in-4°. (Voir a la troisième page de cette couverture.)
Elle décerne, chaque année, des prix et des médailles d'encouragement. (Voir le programme à la troisième page de cette couverture.)
Le terme pour l'envoi des ouvrages destinés au concours est le Ie' avril.
Les ouvrages et envois doivent être adressés à M. le secrétaire général de la Société, hôtel d'Assézat.
BIENFAITEURS DE LA SOCIÉTÉ
M. le Dr OURGAUD a fondé un prix qui porte son nom, d'une valeur actuelle de 200 francs.
M. DE CLAUSADE a fondé un prix qui porte son nom, d'une valeur actuelle de 300 francs.
M. BONNEL, de Narbonne, a fait un legs de 1,000 francs.
M. OZENNE a compris la Société archéologique du Midi au nombre des Compagnies qui doivent èlre logées dans l'hôtel d'Assézat et de Clémence Isaure qu'il a offert à la Ville pour servir, sous ce nom, de palais des Académies.
BUREAU DE LA SOCIÉTÉ
MM. DE LAHONDES, président. MÉRIMÉE, directeur. CARTAILHAC, secrétaire.
MM. X..., secrétaire adjoint.
Bon I)E RIVIÈRES, archiviste. L. DELOUME, trésorier.
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AURIOL. LÉCRIVAIN.
COMMISSION ÉCONOMIQUE
MM. PASQUIER. DELORME. SAINT-RAYMOND.
TOULOUSE. — 1MP. A. CHAUVIS ET FILS, BUE DES SALBNQ0E8, 28.
CONCOURS POUR LES PRIX ET LES MÉDAILLES
La Société dispose de deux prix décernés alternativement :
1° Un prix de la valeur de :i()0 francs, fondé par M. île Clausade et portant son nom.
Ce prix sera décerné en 1904.
2° Un prix de la valeur de 200 francs, fondé par le docteur Ourgaud et portant son nom. La Société ne désigne aucun sujet de concours; il suffit que les ouvrages soient inédits et du domaine de l'archéologie ou de l'histoire.
Ce prix sera décerné en 19U5.
Un prix de 200 francs et des médailles pourront être aocorilés, chaque année, aux auteurs qui adresseront des travaux inédits sur des matières qui font l'objet des études de la Société.
Les ouvrages, imprimés dans l'année, relatifs à l'Histoire, à l'Archéologie ou au Folklore peuvent obtenir les prix réservés ou des encouragements.
La Société décente aussi des prix et des médailles aux personnes qui lui signalent et lui adressent des objets anciens : chartes, manuscrits, inscriptions, monnaies, médailles, poids, peintures, sculptures, dessins, plans, meubles, vases, armes de pierre, île bronze ou de fer, bijoux, etc., ou qui lui en transmettent des descriptions détaillées, accompagnées de figures.
Adresser tous les manuscrits, imprimés et objets avant le l 01' avril, au Secrétaire général de la Société, hôtel d'Assézat.
PRIX DES VOLUMES DE MÉMOIRES, FORMAT 1N-4» :
Toilie Ier. (Ne PC vend pris séparément.)
— II 20
— m 20
— IV 20
— V 20
— VI, (Ne se vend pas séparément,)
Tome Vil. (No so vend pas .séparément.)
- vin e
— IX 20
- X 8
— XI, X1J, XIII, XIV,
XV. Chacun.... 6
Prix de la collection des Mémoires, 1S0 fr. — Prix du volume des tables, 5 fr.
PRIX DU BULLETIN :
Un fascicule séparé (1869 est épuisé) 1 fr.
La collection des bulletins trimestriels in-4° (1870-1887). 20 fr.
La collection des bulletins semestriels in-S" (1887-1903) 30 fr.
RENSEIGNEMENTS GENERAUX
Fondée à Toulouse en 1831, la Société archéologique du midi
de la France a été reconnue établissement d'utilité publique, par décret du 10 novembre 1SÛ0. Elle se compose de membres honoraires, de membres résidants, de membres libres et de membres correspondants, qui ont le droit d'assister aux séances et d'y faire des communications.
Les séances ont lieu, de droit, tous les mardis, à 8 heures 1/2, du dernier mardi de novembre au troisième mardi de juillet.
Le siège de la Société est fixé à l'hôtel d'Assézat-Clémciicc Isaure (palais des Académies). La bibliothèque est ouverte, le mardi et le mercredi, de 2 à 4 heures de l'après-midi.
La Société publie un Bulletin périodique in-8° et des Mémoires in-4°. (Voir à la troisième page de cette couverture.)
Elle décerne, chaque année, des prix et des médailles d'encouragement. (Voir le programme à la troisième page de cette couverture.)
Le terme pour l'envoi des ouvrages destinés au concours est le 1er avril.
Les ouvrages et envois doivent être adressés à M. le secrétaire général de la Société, hùtoi d'Assézat.
BIENFAITEURS DE LA SOCIÉTÉ
M. le Dr OURGAUD a fondé un prix qui porte son nom, d'une valeur actuelle de 200 francs.
M. DE CLAUSADE a fondé un prix qui porte son nom, d'une valeur actuelle de 300 francs.
M; BONN EL, de Narbonne. a fait un legs de 1,000 francs.
M. OZENNE a compris la Société archéologique du Midi au nombre des Compagnies qui doivent être logées dans l'hôtel d'Assézat et de Clémence Isaure qu'il a offert à la Ville pour servir, sous ce nom, de palais des Académies.
BUREAU DE LA SOCIÉTÉ
MM. DE LAHONDES, président. MÉRIMÉE, directeur. CARTAILHAC, secrétaire général.
MM. X..., secrétaire adjoint.
Bon „E RIVIÈRES, archiviste. L. DELOUME, trésorier.
COMMISSION D'IMPRESSION ET DE LIBRAIRIE
MM. BRISSAUD. AURIOL.
LÈCR1VAIN.
COMMISSION ÉCONOMIQUE
MM. PASQUIER. DELORME SAINT-RAYMOND.
TOULOUSE. — IJIP. A. CHAUVIN ET FILS, HUE DES SALENQUES, 28.