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Titre : Le Monde artiste : théâtre, musique, beaux-arts, littérature

Éditeur : [s.n.] (Paris)

Date d'édition : 1877-10-27

Contributeur : Lemoine, Achille (1813-1895). Directeur de publication

Contributeur : Gourdon de Genouillac, Henri (1826-1898). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32818188p

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32818188p/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 19764

Description : 27 octobre 1877

Description : 1877/10/27 (A17,N43).

Description : Collection numérique : Arts de la marionnette

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5454215q

Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, Z-1096

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 03/12/2008

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17e Année. — N° 43.

BUREAUX A PARIS: 17, RUE PIGALLE

Samedi 27 octobre 1877.

LE

Adresser correspondances et mandats

à M. A. LEMOINE Directeur du Journal.

MUSIQUE — THEATRES — BEAUX-ARTS ACHILLE LEMOINE DIRECTEUR

Il sera rendu compte des ouvrages dont deux exemplaires seront adressés à l'Administration.

Les abonnésau texte et à la musique recevront avec le numéro de ce jour :

TROISIÈME VALSE DE SALON, pour le piano, par Louis DIÉMER.

Puis viendra : LE SABOT DE MAD'LON, chansonnette par M. HORACE POUSSARD.

L'Administration et la Rédaction du Journal, ainsi que les bureaux de l'Agence du Monde Artiste, sont maintenant réunis rue Pigalle, n° 47. C'est donc là que doivent être adressés lettres, articles et journaux.

Nous prions nos lecteurs de vouloir bien prendre note de ces avis important.

Concerts Pasdeloup. — Réouverture.

Les portes du Cirque d'Hiver se sont rouvertes, dimanche dernier, à la vive satisfaction des amateurs de musique classique. Même empressement que les années précédentes : salle comble.

Outre la symphonie en ut mineur de Beethoven et l'ouverture de l'Etoile du Nord, le programme contenait une gavotte de Lulli, l'ouverture de Ruy-Blas, de Mendelssohn, la Jeunesse d'Hercule, poëme symphonique de M. Saint-Saëns et la sérénade d'Haydn.

L'ouverture de Ruy-Blas, magistralement exécutée, a obtenu un succès encore plus grand que de coutume. L'oeuvre de M. Saint-Saëns, grâce à un début heureux et à un ensemble mélodique où l'harmonie, cette fois, ne tient pas trop de place, a été bien accueillie du public. La gavotte de Lulli et la sérénade d'Haydn lui ont particulièrement plu et il les a redemandées,

Qu'il nous soit permis, à ce propos, de faire remarquer que l'introduction dans le répertoire de morceaux très-courts, dans le genre de la sérénade d'Haydn, est de date récente et que, si on consulte les programmes anciens, on n'y trouve, sauf de très-rares exceptions, que des oeuvres qui, par leur étendue, semblent mieux rentrer dans le cadre des concerts de musique classique. E. MATHIEU D'AURIAC.

Le Cirque Fernando ne se contente pas d'être un théâtre intéressant et très-fréquenté, il veut absolument avoir une renommée musicale ; ce n'est pas nous qui l'en blâmerons.

On vient d'y inaugurer les concerts Sainte-Cécile. C'est mercredi qu'a eu lieu cette fête artistique, avec le concours de Mlles Mauduit, Marie Boulanger ; de MM. Kowalski, Mole, Lamaury et Sautet. L'orchestre, qui est excellent, a pour chef M. Léon Martin.

Le public a beaucoup applaudi Mlle Mauduit, qui a chanté avec un beau style et un sentiment assez juste, le bel air de Marie Magdeleine, de Massenet, et M. Lamoury, violoncelliste de grand talent, qui se sont deux fois fait entendre à la satisfaction de l'auditoire.

Le pianiste Kowalski a exécuté sa grande paraphrase de Faust, e cela avec une virtuosité qui lui a valu un succès d'enthousiasme. Kowalski est du reste habitué à ces auditions où les timides et les demi-virtuoses échouent. Il a fait écouter et applaudir le piano dans les immenses salles de l'Angleterre et de l'Amérique. Il a l'autorité et l'imperturbable sûreté du jeu ; avec cela une rare puissance de son.

La marche Tzigane de Dimitri, de M. Joncières, est une page ravissante qu'on a fort applaudie. La grande marche de la Reine de Saba a produit son effet ordinaire.

Beau concert, excellent début pour la nouvelle Société SainteCécile

Dimanche a eu lieu, à l'Imprimerie centrale des chemins de fer, la distribution des prix aux élèves de l'école professionnelle et l'inauguration du buste de M. Napoléon Chaix, fondateur de l'établissement.

L'immense et monumental atelier avait été, pour la circonstance, décoré d'une façon charmante.

L'excellente musique de l'Harmonie de Montmartre, sous l'habile direction de son chef, M. Muratet, prêtait à cette fête son brillant concours.

M. A. Chaix, qui a succédé à son père dans la direction de l'établissement, présidait la séance ; il avait à ses côtés: M. Ferry, maire du neuvième arrondissement, MM. Charles Robert, vice-président de la Société de protection des enfants dans les manufactures, et M. Jules Périn, secrétaire de cette Société, ainsi que plusieurs personnes des plus estimées dans l'administration et la presse.

Après une allocution dans laquelle M. Chaix a fait connaître le double but do la réunion, M. Fleurant, chef du service de l'Imprimerie, a prononcé l'éloge de M. Napoléon Chaix, sous la direction de qui il a débuté, il y a près de trente ans, comme apprenti de la maison. Ce discours, qui mettait en lumière l'oeuvre de l'éminent industriel qui a fondé le bel établissement de la rue Bergère, et créé les publications sur les chemins de fer que le monde entier connaît, a vivement intéressé l'auditoire et a provoqué de nombreux applaudissements.

M. Berger, employé de la maison, à qui est confiée la direction de l'École professionnelle, a pris ensuite la parole pour exposer le programme de cette institution, ainsi que les résultats obtenus pendant l'année scolaire qui vient de s'écouler.

Avant la proclamation des noms des lauréats, M. Ferry a donné lecture d'un lettre de M. Edmond de Rothschild, annonçant un don de 100,000 francs en faveur des écoles professionnelles d'apprentis de l'arrondissement.

Au nombre des élèves le plus souvent nommés, nous avons remarqué le jeune Leclerc, apprenti lithographe, qui a obtenu treize


LE MONDE ARTISTE

récompenses, et son camarade Toudouze, élève typographe, dont le nom a été cité presque autant de fois.

La séance s'est terminée par une remarquable allocution de M. Charles Robert, sur les avantages des institutions ouvrières fondées par M. Chaix, et notamment de la participation aux bénéfices.

Belle et intéressante matinée, véritable solennité du travail dirigé dans la voie féconde de la philanthropie bien comprise.

CLARIS.

Cluny. — Les Six Parties du Monde, pièce en cinq actes et huit tableaux, par M. Louis Figuier. Première représentation le mercredi 17 octobre.

Depuis quelque temps, au théâtre; nous assistons à un véritable steeple-chase scientifique; la scène est devenue une chaire pour les savants. Les thèses doctrinaires sont au repos ; elles cèdent actuellement le pas aux problèmes géographiques et aux voyages d'exploration. Dans ce steeple-chase d'un nouveau genre, M. Louis Figuier, qui arrive bon troisième, a le tort considérable d'avoir été précédé par MM. Jules Verne et Cortambert. Le premier, avec le Voyage autour du Monde en 80 jours, a su inspirer le maître d'Ennery, sans compter les dramaturges restés à la cantonnade; le second, avec un Drame au fond de la Mer, a eu tout au moins une puissance égale sur M. Ferdinand Dugué. Inspiré par le savant auquel nous devons des ouvrages précieux, entre autres les Merveilles de la Science et les Merveilles de l'Industrie, mises à la portée de tous, M. Louis Figuier s'est donné la tâche de nous démontrer qu'il y a une sixième partie du monde. Jusqu'à présent, les cinq que nous connaissons avaient suffi à notre bonheur ; mais, puisqu'il juge à propos de nous prouver qu'il y en a une sixième, nous ne le contredirons pas.

Pour y parvenir, il a transporté à la scène ce voyage d'exploration dans lequel le capitaine Dumont-d'Urville, dont L'émouvante carrière se termina si malheureusement dans un wagon en feu, en 1842, découvrit au pôle austral une terre qu'il dota du nom d'Adélie. Les moyens qu'il emploie en vue d'intéresser le public et de lui administrer une maîtresse infusion de géographie ne sont pas de la plus grande ingéniosité. Rien de bien neuf non plus dans l'exposé des situations calculées pour imposer une intrigue élémentaire chez tous les dramaturges. — D'action proprement dite, il n'y en a pas; nous traversons les déserts de l'Afrique, les montagnes de Madagascar, les curiosités architecturales de la Chine et les solitudes de l'Australie, sans trop savoir pourquoi, et guidés presque en aveugles. Au delà des neiges et des banquises, on nous montre la terre Adélie en nous disant que c'est la sixième partie du monde. Nous nous inclinons devant tant de science, en attendant qu'un concurrent vienne, en dernier ressort, nous affirmer l'existence d'une septième partie. Mais une particularité que nous devons signaler et dont M. Louis Figuier, le savant, ne saurait se formaliser, c'est que M. Louis Figuier, le dramaturge, est encore dans l'enfance de l'art, quoique sa pièce, véritable revue géographique, soit pavée de bonnes intentions dont nous voulons lui tenir compte.

En prévision, nul doute, d'un succès, sinon égal à celui de la Porte-Saint-Martin, ce qui serait téméraire, du moins en rapport avec le théâtre qu'il dirige, M. Paul Clèves, suivant les traces de M. Larochelle, son prédécesseur dans l'un comme dans l'autre, s'est mis en frais de décorations qui dénotent, de sa part, un excellent goût et une parfaite entente de la scène. Les soins qu'il apporte à monter les pièces témoignent de son aptitude méritoire. On ne regrette qu'une chose, c'est de le voir si rarement prendre un rôle pour son compte, car il est artiste de valeur et l'a souvent prouvé.

MM. Hodin, Delettraz (jeune transfuge du Château-d'Eau), Chefer, Vavasseur, etc., etc., et Mmes Sarah Rambert et Jane Morand, s'acquittent fort gaillardement de leur tâche ; ils amusent, c'est beaucoup. M. Herbert est un jeune comique appelé à un avenir artistique capable de lui faire des jaloux.

Nous savons gré à M. Louis Figuier de nous apprendre ce que sont les lucioles et pourquoi le simoun souille plutôt en Afrique que dans tout autre pays, et nous nous ferons presque un devoir de ne pas oublier nos longitudes. H. DE FOVILLE.

Château-d'Eau. — Les Pauvres de Paris, drame en sept actes, de

MM. E. Brisebarre et E. Nus. Première représentation, à ce théâtre,

le vendredi 19 octobre,

Encore une reprise, nous direz-vous ? Oui, et ce ne sera pas une reprise perdue, à en juger par l'empressement du public qui accourt de tous les points pour voir ou revoir ce petit coin des moeurs parisiennes dont les deux collaborateurs ont si habilement soulevé le voile.—Il faut dire aussi que, dans le bagage dramatique de Brisebarre et Nus, il était difficile de choisir un sujet qui fût plus dans le goût de ce public déjà familiarisé avec les vaillants artistessociétaires. Que de scènes émouvantes, que de douleurs silencieuses, de dévouements se heurtent dans ce drame des Pauvres de Paris, véritable élégie de la misère sous toutes ses formes, contre les ruses, les scélératesses, les infamies, les bassesses des ennemis des déshérités de la fortune! Combien de tableaux touchants!

Toutes les ficelles de l'art dramatique sont en jeu, les caractères suffisamment en opposition, et l'action marche d'une allure convenable vers un dénoûment tout à fait inattendu.

Ce théâtre tient un succès de bon aloi, grâce à l'interprétation très-entendue de MM. Pougaud, Gravier, Péricaud, Duchesnois et Mmes Laurenty, Duchesnois, ainsi que de la gracieuse et toujours charmante Louise Magnier, qu'on voit trop peu.

Nous applaudissons à cet heureux résultat de leurs efforts réunis et habilement combinés. H. DE FOVILLE.

UN BON AVIS

Nous apprenons que le Théâtre de la Tour-d'Auvergne, dont notre journal parlait encore il y a quelques jours, vient de fermer ses portes. Cela nous étonne au plus haut point, car la précédente saison avait été excellente et celle-ci s'annonçait fort bien.

La cause de cette fermeture ne nous regarde nullement, du reste. C'est de l'avenir de cette jolie salle que nous nous préoccupons. Il nous semble nécessaire, ce gentil théâtre de la Tour-d'Auvergne, qui a tant produit d'artistes et dont la clientèle désire ardemment la réouverture. Il a un public, et un public fidèle et intelligent, ce théâtre.

Quel sera donc le directeur bien avisé qui, fatigué de courir la province, voudra venir là se faire tranquillement et sûrement six mille livres de rente? C'est facile, croyez-le. De la prudence, de l'activité, de l'économie, qualités que sont contraints de posséder les directeurs des petites villes provinciales, et le résultat est assuré.

A la Tour-d'Auvergne, on trouvera une salle en bon état, un matériel complet et un public ; c'est une des plus jolies affaires de Paris. A qui présenterait quelques garanties, nous nous chargerions bien de faciliter les préliminaires, tant nous aimons ce bon petit théâtre. C.

PROVINCE

MARSEILLE. — GRAND-THÉATRE. — Mercredi dernier, l'affiche annonçait Guillaume-Tell, pour le 3e début de notre fort ténor, M. Salvani ; éprouvé depuis son arrivée à Marseille par les variations de notre climat, toujours si brusques à cette époque, ce charmant artiste, qui l'année dernière, a fait l'admiration des Toulousains, n'a pu se produire dans la plénitude de ses moyens sur notre scène lyrique ; poussé par un sentiment de susceptibilité trop grande, et sans attendre le verdict de la majorité qui lui paraissait douteux et auquel il lui répugnait de se soumettre, il a préféré se démettre, afin de conserver saufs son amour-propre et sa dignité ; sa résiliation était annoncée au public après le 2e acte. Ajoutons que le surlendemain, dans Lucie, il interprétait d'une façon très-brillante le rôle d'Edgard, et s'y faisait rappeler deux fois. Le départ très-regrettable de ce vaillant artiste laissera un vide difficile à combler. A propos de ce dernier opéra, constatons le magnifique succès qu'a obtenu dans le rôle de Lucie, Mlle Glaire Cordier ; notre salle de spectacle serait toujours trop exiguë, si l'empressement du public était en rapport avec le talent, si correct déjà, de notre jeune cantatrice.


LE MONDE ARTISTE

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Nous avons à enregistrer une nouvelle représentation. — disons plutôt une exécution — de la Juive. Notre éminente falcon, Mlle Ferrucci, condamnée à louvoyer pendant cinq actes, entre M. Guillabert-Éléazar, un nouveau venu, un ténor... comme on n'en voit guère; M. Bordeneuve-Brogny, une basse... comme on n'en voit pas beaucoup, et Mme PerniniEudoxie, qui joue en attendant son remplacement, avait toute la peine du monde à se maintenir à flot dans un pareil milieu. Les deux premiers, en effet, sont loin d'être mûrs pour une scène comme la nôtre, et Mme Pernini l'est au contraire un peu trop ! N'oublions pas de dire combien a été vive, au 4e acte de Guillaume-Tell dans la scène si touchante des adieux, l'émotion produite par Mlle Douau, dans le personnage de Gemmy, et par notre brillant baryton Dumestre, dans celui de Guillaume, qu'il chante et qu'il mime comme nul autre ne saurait le faire.

M. Soria, 1er danseur, que nous ne connaissions pas encore, nous est apparu dans cet opéra ; il nous pardonnera — tout en accordant à ses jarrets les éloges qu'ils méritent— d'oser demander quand donc on achèvera la réforme commencée, en faisant complétement disparaître de nos ballets le sexe fort, toujours si disgracieux, quoi qu'il fasse.

Deux mots en terminant, sur une reprise de Mignon, donnée pour le 3e début de M. Leroy; cet artiste a la tenue si correcte, le jeu si subtil, le chant si délicat, et il détaille si bien, qu'il a réussi, avec des moyens vocaux assez restreints, à s'imposer au public, qui a proclamé son admission, au milieu d'applaudissements nourris, troublés à peine par quelques sifflets malveillants. M. Neveu est un Lothario irréprochable ; Mlle Cordier, qui jouait, par complaisance sans doute, le rôle de Philine, devait ne l'avoir pas suffisamment étudié ; son chant n'avait pas toute la netteté voulue ; elle peut faire beaucoup mieux ; quant à Mlle Douau, nous sommes forcés d'avouer que le rôle de Mignon lui est peu favorable ; sa voix très-juste, mais trop incisive, ses traits un peu durs, ses gestes trop saccadés, s'harmonisent médiocrement avec la douce, poétique et juvénile figure de Mignon ; ajoutons qu'elle avait à lutter contre les souvenirs laissés à Marseille, dans cette oeuvre, par Mlles Faivre et Julia Reine, ses deux jolies devancières.

GYMNASE. — L'opérette, très-remarquablement interprétée cette année sur notre seconde scène, y fait chaque soir salle comble ; cette semaine a fourni, trois fructueuses représentations des Brigands, avec Mmes Suzanne Leblanc et Morin, et MM. Carrier, Bouchet, Carré, Ortel, Roche, Dublaix, Ortoni, etc. ; Mme Morin est pétillante de grâce et d'esprit sous les traits de Fragoletto, sans compter le charme de sa voix, et Mlle Leblanc est pleine de séductions sous ceux de Fiorella ; elle a eu l'honneur d'entendre le duc d'Edimbourg, présent à la représentation, lui demander de bisser la tyrolienne du 2e acte. Le rôle d'Antonio est insuffisant, selon nous, pour un artiste de la valeur de Bouchet. Carré est toujours inénarrable de naïveté bouffonne sous la veste du bandit Pietro ; ce théâtre a donné en outre, ces jours derniers, la Vie parisienne et la Fille Angot, avec les mêmes artistes moins M. Carrier, que M. Laborde remplace avantageusement dans les rôles qui exigent de la distinction, du sentiment, et une voix mélodieuse et agréablement timbrée. M. Morin joue le rôle d'Ange Pitou avec plus d'intelligence scénique que ses devanciers, et il a la désinvolture élégante et le physique agréable, ce qui n'est pas sans prix au théâtre.

Au premier jour, représentation de Mme Mary-Albert, des Folies-Dramatiques. — E. H. NOEL.

BORDEAUX, 24 octobre 4877. — Le 6 octobre je vous faisais pressentir la chute de notre premier ténor léger. Le soir même de la première représentation de Faust, M. Dardignac résiliait son engagement, n'attendant pas l'épreuve des Mousquetaires de la Reine, qui, pourtant, lui eût été plus favorable. Ce ténor auquel il ne manquait, peut-être, pour réussir à Bordeaux, qu'un peu de voix et d'expérience, a eu raison de ne pas s'exposer à l'improbation trop complète du public ; s'il nous revient jamais, plus façonné, il lui sera tenu certainement compte de cet empressement à condescendre aux exigences des dilettanti.

C'est le seul sinistre que j'aie à vous signaler ; notre troupe est désormais au complet ; artistes, spectateurs et chroniqueurs prennent maintenant leurs positions respectives, cherchant un modus vivendi qui ne sera pas difficile à trouver, si j'en dois juger sur les apparences. Je suis pour mon compte assez satisfait et je me prépare à déguster de nombreuses jouissances artistiques.

Nous sommes assez heureusement partagés du côté de mesdames les cantatrices.

A tout seigneur tout honneur ; je commence par le grand opéra .

Mme Van-den-Berghe (une Flamande évidemment) est une falcon di primo cartello ; ses débuts dans la Juive et le Trouvère l'ont classée. La voix est puissante, audacieuse, dans le haut surtout, le jeu est dramatique et empoignant, la femme est intelligente et de riche constitution ! Qui donc ne serait pas satisfait ? ?

Mme Parizzi — nous sommes voués aux noms étrangers — est un contralto puissant aussi, voix bien timbrée, suffisamment grosse et ample. Grand succès dans la Favorite, réussite complète dans le Trouvère.

La chanteuse légère de grand opéra est encore Mlle Caroline Delcroix ; encore est, ici, employé dans un sens favorable à l'intelligente et consciencieuse artiste dont les progrès sont incessants. Nous l'avons retrouvée dans Guillaume et la Juive plus irréprochable que par le passé.

Changeons de sexe !

M. Vitaux a fait sa réapparition sur notre première scène en qualité de premier fort ténor. M. Vitaux a ses fanatiques !... Je ne vais pas aussi loin : sans lui contester un talent de chanteur, sans discuter son ut — dont il abuse trop souvent — chaque fois que la tonalité lui en fournit le prétexte, je déplore son manque de grâce, son maintien emprunté, l'exiguité de sa taille, la défectuosité de son accent, etc., etc ; il n'en est pas moins un artiste consciencieux et dans Guillaume Tell, la Favorite et la Juive, il a été, à une ou deux exceptions près, toujours applaudi.

M. Gally s'est fait, comme première basse noble, une situation magnifique à Bordeaux; l'avenir est à lui, car il est jeune et admirablement doué ; c'est au cardinal de Brogni qu'il doit, cette année, ses plus belles ovations.

M. Aubert serait le modèle des barytons, si sa voix n'était sujette à quelques défaillances et s'il ne cumulait pas le grand et le petit opéra. Depuis l'ouverture, la Favorite, Guillaume, Faust, le Maître de chapelle ont été pour lui autant de succès.

Qu'il se présente sous les traits du tyran Gessler, du statuaire Pygmalion ou de Méphistophélès, M. Paravey est sûr d'être acclamé par un public qui apprécie le mordant de sa voix et la correction de son jeu ; il est peu de basses-chantantes en aussi bon chemin,.et méritant de plus chauds encouragements.

L'Opéra-Comique n'est pas chez nous, cette année, moins bien partagé; nous n'avons eu, encore, que les Mousquetaires de la Reine, Galathée et le Songe d'une nuit d'été ; c'est un peu maigre ; nous ne comptons pas le Far fadet et le Maître de Chapelle ; mais enfin, sur ces échantillons, nous augurons bien de la campagne entamée.

Mme Gally, je vous l'ai déjà dit, est une chanteuse légère de valeur, douée d'une belle prestance et d'une jolie voix; elle s'est fait agréer sans* conteste ; ses vocalises pourraient avoir plus de légèreté ; dans le dialogue, elle pourrait être plus vive, plus intentionnée ; mais il ne faut pas oublier qu'elle chantait les chanteuses légères de grand-opéra et qu'un peu de familiarité avec son nouvel emploi développera, bien vite, des qualités qui sont, évidemment, en elle, à l'état de diamant non taillé.

Notre première dugazon, Mlle Marina Allary, est une spirituelle Berthe de Simiane, une intéressante miss Olivia; elle a de la grâce et du naturel, elle dit bien et se sert, avec beaucoup de goût, d'une voix un peu faible, mais très-agréable.

Une jolie personne, Mlle Thémine, tient fort convenablement l'emploi de deuxième dugazon.

Mme Hénault-Chevalier est une duègne pleine de conviction.

Mais finissons par où nous aurions dû commencer.

M. Anthelme-Guillot est venu prendre la place laissée vacante par M. Dardignac ; ce ténor léger nous était connu ; il n'y a pas eu à rompre la glace avec lui; il a chanté le rôle de Shakespeare, comme il avait chanté, autrefois, à Bordeaux, celui de Wilhelm Meister, c'est-à-dire avec goût et sentiment, sans dépenser plus de voix qu'il n'en n'a ; on l'a applaudi et rappelé. Il chante Faust ce soir, et, selon toute probabilité, on l'applaudira encore... et tout sera dit.

Notre second ténor léger est M. Baretti — une voix charmante que je vous signale — beaucoup à faire encore comme expérience de la scène et comme désinvolture; mais une bien jolie voix...

Mlle Vollain continue à faire les délices des amateurs du ballet, dont M. Cluzeau est le grand maître, — Mme Dardignac nous reste, comme je le prévoyais.

Les choeurs sont revenus à de bons sentiments !

La rentrée de M. Mézeray, comme chef d'orchestre de grand opéra, a été un heureux événement artistique, en même temps qu'une grande satifaction pour ses nombreux amis.

L'Opéra-Comique est entre les mains habiles de M. Ch. Calendini et l'orchestre compte des solistes tels que MM. Fréry (premier violon), Delâtre (hautbois et cor anglais), Stewens (violoncelle) et bien d'autres que je mentionnerai à l'occasion.

Décidément, nous pouvions être plus mal partagés.— A. C.

ROUEN. — THÉATRE-FRANÇAIS. — Faisant trêve avec les flons-flons de la Timbale, que Mmes Grégoire et Claudia n'ont pu réussir à sauver du naufrage, au point de vue des recettes, M. A. Carion vient de monter Dora avec un succès complet, et nous n'avons que des éloges à adresser à la direction pour la somptuosité apportée dans l'ameublement des divers salons que comporte l'oeuvre de Victorien Sardou.

Du reste, la pièce, distribuée avec soin, est bien interprétée par la tête de troupe de comédie, et M. Montlouis s'est taillé un succès de bon aloi dans le rôle d'André de Maurillac, où il a apporté toutes les ressources de son art ; la grande scène du troisième acte a été rendue par notre jeune premier avec un pénétrant réalisme qui a « empoigné » la salle entière. Chargé du rôle de Favrolle, M. Edouard. Laty s'en est acquitté avec une aisance, une distinction et un entrain tout à fait de circonstance pour la personnification de ce nouveau Desgenais. Quant à M. Fleury-Goeury, il a joué Tekli en véritable comédien : donc, tous nos compliments.

Mlle Hadamard, au talent de laquelle nous nous sommes complu à rendre justice lors de ses débuts et que nous sommes toujours disposés à proclamer à première occasion, n'a pas paru saisir toutes les nuances délicates du beau rôle de Dora, qui demande non-seulement de la sensibilité vraie, mais aussi de la chaleur parfois fiévreuse, propre à caractériser les angoisses de cette héroïne faussement accusée ; par le fait,


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LE MONDE ARTISTE

ce personnage important est resté au second plan. Néanmoins, le public a cru devoir, tout de même, associer Mlle Hadamard au rappel si bien mérité, par M. Montlouis, à la fin du troisième acte. Le rôle de la comtesse Zuka, confié à Mme Dorback, est bien le rôle le plus odieux de la pièce, mais tous les effets en ont été si finement étudiés et si bien amenés par Mme Dorback, que le public a reconnu, une fois de plus, combien est profond et rare le talent de notre excellent premier rôle. Mme Mario-Guyaz, première coquette (la princesse Bariatine), a effectué un premier et tardif début qui paraît de bon augure pour sa réussite, et Mme Perreymond, duègne (la marquise de Rio-Zarès), a été admise, à l'unanimité, après la fameuse consultation inévitable !

MM. Baron, Berry, Chevalier, etc., chargés de rôles secondaires, ont complété un ensemble peu commun en province. Bref, depuis la première, cette belle comédie se joue quotidiennement devant une salle qui, cependant, pourrait être plus garnie.

Par suite d'une persistante maladie du chef d'orchestre Roger, la direction a traité avec M. Cappa ; le second chef se nomme M. Virgnon.

THÉATRE DU CIRQUE.— Le succès des Cloches de Corneville, loin de diminuer, va toujours crescendo et la 23e représentation consécutive sera donnée demain, dimanche ; c'est dire qu'une salle bondée acclamera Mmes Lefort, Valgallier, MM. Pichet, Viala, Berthon et Pothier, sans oublier l'ouverture si bien dirigée par M. Boucquin. Il en sera de même des interprètes du Dîner de Madelon, le lever de rideau obligé, fort bien enlevé par Mme T. Valgallier, MM. Pothier et Bosquet.

Par suite de l'engouement du public pour les Cloches, les artistes du drame jouissent de quelques loisirs que la direction a cru devoir rompre en organisant une matinée (?) dramatique dimanche dernier, matinée dans laquelle on a joué Fnaldès, drame en huit tableaux. MM. A. Desrieux (Bancal) ; Pothier (Fualdès) ; l'Hostys (Jausion) et Mmes Desrieux (Manson) ; Bosquet (la Bancal) et Boucquin (Madeleine) ont obtenu un franc succès devant un public tout spécial qui n'a pas été chiche de rappels. Enfin, cette matinée s'est terminée par une désopilante pochade : le Célèbre Vergeot, enlevée avec brio, par MM. Gacon et Bosquet

Du reste, ces matinées seront poursuivies, sinon dramatiquement, du moins musicalement, car la direction est en train d'organiser des concerts populaires, avec le concours des instrumentistes de la Société symphonique qu'a dirigée M. Lemarié.

Mme Vernhes, jeune première, et M. Estival, grand premier comique, ont résilié leur engagement. Par contre, M. Dupoux-Hilaire vient de traiter avec M. Lenoir, un jeune baryton rouennais qui aborde la carrière théâtrale et auquel nous souhaitons boune réussite. — A. LE ROY.

P. S. Pour des causes de voisinage, le théâtre-concert qui devait s'établir, rue aux Ours, est maintenant en voie d'aménagement dans la rue Centrale, située île Lacroix. On pense que cet établissement ouvrira en décembre sous le titre : les Fantaisies Rouennaises.

NANTES. — Depuis quinze jours, notre troupe lyrique nous a donné un répertoire composé des pièces principales. Après les Huguenots et Guillaume Tell, qui ont valu à M. Doria, fort ténor, son. admission à l'unanimité des voix, et par conséquent, un grand succès ; Robert le Diable, le Trouvère et Lucie pour le Grand-Opéra, Faust, les Dragons de Villars, le Songe, la Fille du régiment, les Noces de Jeannette, pour l'Opéra-Comique, ont été autant de succès pour les artistes suivants acclamés par notre public.

Mlle Félicie Arnaud, que chaque opéra fait apprécier de plus en plus, Mlle Reggiani, une jeune débutante qui a conquis, dans ses deux débuts, toutes les sympathies, M. Trémoulet, notre charmant ténor léger, M. Guillemot, l'enfant gâté du public nantais, M. Plain et M. Dangon, nos deux basses, puis notre personnel chorégraphique si bien dirigé par M. Alessandri, dont le talent de danseur ne le cède en rien au savant maître de ballet; nos deux gracieuses et charmantes premières danseuses Gina et Isabella Ottolini, n'auront pas à se plaindre : jamais les Nantais n'ont applaudi avec autant de frénésie la danse et les divertissements; aussi ce public n'avait jamais eu l'occasion d'être gratifié d'un aussi charmant assemblage. Enfin, tout marche bien. Nous aurons demain la reprise d'Hamlet, puis après Viendra Roméo et Juliette; ensuite des nouveautés comme Paul et Virginie et Aïda, pour lesquels on a fait faire tous les décors neufs.

Nous lisons dans l'Union bretonne :

« Sur 20 votants, au scrutin de samedi, M. Grondard, deuxième basse, a obtenu 19 voix, et M. Auger-Miraman, baryton d'opéra comique, 6. Ce vote a été parfaite justice.

» Mme Leslino a sollicité du directeur sa résiliation, même elle aurait employé les instances de quelques abonnés pour y réussir. Elle n'avait pas tant à faire. M. Coulon, après quelques instants de réflexions, lui aurait accordé la rupture de l'engagement, et l'en avait prévenue. Par un revirement d'esprit dont elle ne saurait justifier elle-même, Mme Leslino a fait déclarer qu'elle ne voulait plus de résiliation, et qu'elle entendait se maintenir. Il était trop tard, paraît-il, pour les intérêts de M. Coulon. Cet administrateur avait déjà pris des dispositions, afin de ne pas infliger au public un vide dans le répertoire, même de quelques jours.

» Un procès surgira-t-il de ce conflit? Pour les abonnés et habitués la nouvelle du remplacement de Mlle Leslino avait été accueillie sans regret de la voir s'éloigner de notre scène. Cette artiste, admise à une majorité de deux ou trois voix, n'avait dû son succès qu'à quelques morceaux

d'étude, et surtout à l'indulgence. Dépourvu de médium, son chant est sans attrait. Puis, avec d'autres ouvrages, Mme Leslino aurait-elle joué Mignon ?

» Chaque dimanche, un public plus nombreux se dirige vers le Théâtre de la Renaissance. On s'y amuse et on y pleure quelquefois. Hier, le drame de M. Dupeuty, la Poissarde, ou les Halles en 1804, a eu une salle bien garnie. Ce drame renferme toute la vie accidentée des braves vendeurs à la halle, les jours fortunés, puis les revers, les larmes de la famille Pailleux, sous la main criminelle d'un traître qui se cache.

» Mme Riga, dans le rôle de Madeleine; M. Charley, dans celui de Jérôme le Coctier, et M. Bouland, ce brave homme de Pailleux, ont été fort applaudis. Mme Sainti a témoigné d'nne grande sensibilité dans'le rôle d'Aurélie; Mmes Marval et Billy ont complété cette excellente soirée. »

TOULON, 22 octobre. — Au moment où les feuilles tombent, lorsque les rossignols de la nature sont partis depuis longtemps et que les fauvettes silencieuses grelottent dans les buissons, les fauvettes et les rossignols de l'art nous reviennent et recommencent à gazouiller.

Le Monde artiste a eu maintes fois l'occasion d'enregistrer les succès obtenus sur notre première scène par Mmes Arnaud et Dujardin. Il y a longtemps que notre public les connaît et le triomphe qui les a accueillies, dès leurs premiers débuts, n'étonneront personne.

Mme Arnaud, cette créatrice inspirée de Pétrarque, nous est revenue, après quelques excursions sur les principales scènes italiennes, avec toutes ses brillantes qualités. Sa voix n'a rien perdu ; c'est toujours ce timbre pur, argentin, sympathique, que nous avons pris la bonne habirude d'applaudir.

Les débuts de la troupe de M. Hugh-Cas se sont effectués par la Fille du Régiment, Lucie et la Juive.

L'ensemble de la troupe est parfait, à part toutefois quelques irrégularités de détail qui disparaîtront certainement après les premières représentations.

M. Lecoudray, fort ténor, a une voix très-sympathique. Il a eu de beaux moments dans Lucie et la Juive. Aussi les applaudissements ne lui ontils pas fait défaut. Nous lui prédisons les plus brillants succès.

La Juive a servi de premier début à Mlle Marie Fortier. Notre forte chanteuse possède un puissant organe, nous avons rarement entendu une voix aussi bien timbrée et aussi nette. Ajoutez à cela un physique fort agréable, ma foi ! ce qui ne gâte jamais rien, et vous saurez tout le bien que nous pensons de la nouvelle pensionnaire de M. Hugh-Cas.

Le rôle de Rachel ne nous paraît pas convenir au genre si puissamment italien de Mlle Marie Fortier.

Ce rôle, un des plus originaux qui soient au répertoire, demande une grande préoccupation scénique, et il est fort rare de rencontrer une. cantatrice, — fût-elle d'un talent à toute épreuve, — réunir dans le personnage d'Halévy le jeu de la scène à l'expression musicale.

Mlle Fortier a tout ce qu'il faut pour faire une cantatrice .de premier ordre. Ses notes, qu'elle prodigue avec l'insouciance d'une fée, sont d'une éclatante sonorité. Quand elle aura une plus grande habitude de notre public, elle verra que le genre français diffère essentiellement du genre italien. En France, on applaudit pour une phrase bien dite, pour un mot. En Italie, au contraire, en dehors de la cavatine, les meilleures intentions passent inaperçues.

Elle a chanté avec beaucoup de justesse son duo du quatrième acte avec Mme Arnaud (Eudoxie).

Nous espérons la revoir bientôt dans un rôle qui fera mieux ressortir tous les talents dont elle est douée. Pour nous, nous ne doutons pas de son succès.

M. Romani, première basse, paraît avoir acquis les sympathies de notre public. Quant à M. Louvrier, c'est la meilleure acquisition que M. HughCas ait pu faire. Tel nous l'avons connu, tel nous le revoyons.

En somme, l'impression générale est bonne. Les débuts ont été très-, favorables à la direction et nous pouvons assurer, — sans crainte d'être démenti, — que M. Hug-Cas, grâce à sa popularité et à ses talents incontestables, ne peut manquer de remettre à flot la barque directoriale que la plupart de ses prédécesseurs ont fait échouer.

A bientôt de plus amples détails sur les débuts. — FÉLIX ROUX.

NIMES. — Nous avions annoncé l'admission de MM. Guille, fort ténor, et Garino, première basse de grand opéra. Bien que le résultat du scrutin leur ait été favorable, ces deux artistes viennent de résilier avec la direction. Et cela, parce que quelques spectateurs du parterre, huit ou dix au maximum, se donnent le malin plaisir de venir tous les soirs témoigner leur mécontentement par des chut et autres manifestations plus bruyantes, dès que ces deux chanteurs paraissent en scène. On ne leur donne pas même le temps de se faire entendre, ce qui démontre bien jusqu'à l'évidence que c'est une hostilité de parti pris.

Le départ de ces deux artistes désorganise complètement notre troupe d'opéra et nous offre la triste perspective de nouveaux débuts. En attendant, la direction annonce les engagements de MM. Pelletier, premier ténor léger, et Mertel, baryton. Ce dernier vient d'échouer à Saint-Étienne: sera-t-il plus heureux à Nîmes? l'avenir nous l'apprendra. Dans les premiers jours de novembre auront lieu aussi les débuts d'une première basse et d'un fort ténor.


LE MONDE ARTISTE

5

M. Jourdan-Savigny, qui aspirait sans doute à recueillir la succession de M. Guille, s'est fait entendre jeudi dernier dans le rôle de Robert. Hélas! quelle triste soirée ! nous n'en parlerons que pour mémoire. Jamais l'oeuvre de Meyerbeer n'avait été aussi mal représentée... Le fort ténor qui prêtait ce soir-là son concours à la direction avait entrepris une tâche au-dessus de ses forces; il y a succombé. Les autres artistes n'étaient pas en voix, et sans Mmes Anna Azibert et Lefort, toujours irréprochables, Dieu sait si la représentation aurait pu se terminer.

C'est aussi dans Robert le Diable que Mlle Valérie Léoni et non pas Léonie Valérie, comme nous l'avions annoncé aux termes de l'affiche, — l'un de ces deux prénoms s'est transformé depuis en nom propre, — c'est dans Robert, disons-nous, que Mlle Léoni se présentait pour la première fois devant le public nîmois. Celui-ci, sans doute mal disposé par l'interprétation plus que faible du premier acte, n'a pas trop bien accueilli la nouvelle Isabelle, et l'opposition dont nous parlons plus haut a continué à se manifester de plus belle. On comprend quel devait être, dans ces conditions, le trouble de la débutante ; aussi ce n'est guère qu'après une deuxième épreuve, dans Haydée, que l'on a pu se faire une opinion sur les mérites de notre nouvelle chanteuse légère. L'impression première ne lui a pas été très-favorable, et nous croyons que Mlle Léoni aura beaucoup à faire pour s'attirer les suffrages des habitués de notre scène. Sa voix, d'un petit volume, manque de souplesse et se prête difficilement à l'exécution des vocalises. Suffisante comme dugazon, la chanteuse nous paraît manquer d'autorité pour tenir l'emploi d'une première chanteuse légère.

M. Sylvan, deuxième ténor, et Mlle Jolly, première soubrette, ont terminé leurs épreuves, le premier dans le Chalet, la seconde dans le Meurtrier de Théodore. Ces deux artistes ont été admis à l'unanimité. M. Sylvan est un de nos meilleurs seconds ténors de province, et l'on sait combien il est difficile de rencontrer un artiste tenant bien cet emploi, aujourd'hui que les seconds ténors s'empressent d'aborder et de chanter les premiers, dès qu'ils se sentent un peu de voix ou obtiennent quelque succès, oubliant trop facilement le conseil du poëte : « Tel brille au second rang qui s'éclipse au premier. »

Mlle Jolly a fort bien joué le rôle de Mariquita, et son talent de comédienne serait encore mieux apprécié du public nîmois, si celui-ci ne sacrifiait la comédie à son goût prononcé pour l'opéra, son genre de prédilection, le seul qui fasse faire de l'argent à tous les directeurs.

F. N.

BREST, 22 octobre — La semaine qni vient de s'écouler a vu se produire de nouveaux artistes : Mlle Falconnet, dugazon, M. Marris, premier ténor léger, et M. Ledérac, baryton (1). M. Marris a fait son premier début dans le Barbier de Séville. Il est jeune et possède un organe qui nous a paru agréable et d'une grande souplesse dans les rares moments où nous avons pu l'entendre; car, il faut bien le dire, la voix de M. Marris ne dépasse guère la rampe, surtout quand l'orchestre accompagne un peu fort ; dans les ensembles, elle est complètement annihilée.

L'inconvénient de cette faiblesse ne s'est pas trop fait sentir dans le Barbier, dont la musique légère n'exige pas une grande puissance vocale.

Mais il n'en était plus de même dans la Dame blanche, qui a servi de second début à M. Marris et où il s'est montré tout à fait insuffisant, notamment dans l'air d'entrée et le finale du premier acte. Nous ne pensons pas que ce ténor puisse se faire agréer des abonnés.

Quant à M. Ledérac, c'est tout autre chose. Ce baryton a une voix puissante et bien timbrée et il s'en sert avec un art accompli. L'air d'entrée de Figaro, enlevé avec beaucoup de rondeur et d'agilité, lui a conquis d'emblée la faveur du public. Le lendemain, nouveau succès dans le Maître de chapelle, dont le grand air et le duo ont été chantés par lui avec un goût parfait et une virtuosité merveilleuse. Cette acquisition est une bonne fortune pour notre théâtre, et le directeur, M. Kermarec, a droit à tous nos.remerciements pour avoir eu la main si heureuse.

M. Ledérac ne fait pas de débuts ; il est engagé en représentations pour toute la durée de l'année théâtrale. Le talent remarquable de cet excellent baryton excuse pleinement cette petite irrégularité, et nous ne pensons pas qu'elle, soulève la moindre réclamation.

Mlle Falconnet nous est apparue dans la même soirée sous les traits de Gertrude, du Maître de chapelle, et de Jenny, de la Dame blanche, ce qui indique déjà une artiste vaillante et ne redoutant pas la latigue. Notre nouvelle dugazon a produit une impression très-favorable; la voix est bonne, d'une étoffe solide et suffisamment exercée. Comme comédienne, Mlle Falconnet montre beaucoup d'entrain et de bonne humeur ; elle nous parait très-bien douée pour l'opérette.

Mlle de Joly continue à faire les délices des dilettanti brestois. Elle obtient un véritable triomphe dans la leçon de chant du Barbier avec l'air du Carnaval de Venise, morceau bien fait pour mettre en lumière la légèreté et la souplesse merveilleuse de sa voix; elle en exécute les variations avec une facilité et une délicatesse de détails tout à fait remarquables.

Nous avons eu, cette semaine, une très-bonne réprésentation du DemiMonde. Mme Geslin doit être citée en première ligne pour le grand talent

(1) M. Benaben, le baryton dont nous avions annoncé l'engagement, avait, en effet, accepté les conditions de M. Kermarec ; mais le directeur du théâtre de Versailles, où il est actuellement, n'a pas voulu consentir à sa résiliation.

qu'elle a déployé dans le rôle de la baronne d'Ange. Son jeu d'une distinction et d'une finesse exquises, sa diction irréprochable et sa grande expérience scénique en font une artiste hors ligne qui ne craindrait pas la comparaison avec telle comédienne en renom des scènes parisiennes. Et croyez bien que ceci n'est pas de l'exagération ; c'est l'expression de la pure vérité.

M. Giraud est un Olivier de Jalin spirituel et mordant (2); il est seulement fâcheux que ses fonctions de régisseur de la scène lui occasionnent une fatigue vocale qui se trahit quelquefois par un léger enrouement. M. Dorn interprète avec talent le personnage ombrageux et un peu âpre de Raymond de Nanjac.

Mlle Bruck a rendu avec émotion la touchante et mélancolique ligure de Marcelle. Quant à Mme Grisard, elle manque un peu de tenue dans le rôle de la vicomtesse de Vernières ; en outre , la mémoire lui fait quelquefois défaut. A part cette légère critique, nous n'avons que des éloges à adresser à l'ensemble de l'interprétation, en y comprenant M. Lignel (Hippolyte Richond), et Mlle Anglade (Mme de Santis). La pièce de Dumas fils a été montée avec un soin et un luxe de mise en scène qui font honneur à la direction.

Mlle Anglade a effectué son troisième début dans le rôle de Blésinct, de l'Amour, que qu'c'est qu'çà ? où elle a oblenu un tres-joli succès. 17 voix sur 50 ont prononcé l'admission de cette excellente soubrette.

M. Rigeasse, deuxième basse, troisième rôle, et Mlle Bruck, jeune premier rôle, ont été moins heureux; le scrutin les a condamnés. Nous nous permettrons de trouver un peu rigoureux le verdict de MM. les abonnés. M. Rigeasse nous paraissait très-suffisant pour un emploi à l'égard duquel on ne doit pas se montrer très-exigeant. Quant à Mlle Bruck, nous comprenons encore moins qu'on ne l'ait pas admise ; nous ne pouvons attribuer son échec qu'à la légèreté inconcevable avec laquelle elle a l'ait son troisième début, dans Une Tasse de thé, sans savoir un mot de son rôle. Dans tous les cas, cette négligence accidentelle ne méritait pas un arrêt aussi sévère.

M. Champenois, chef d'orchestre, est enfin arrivé et a pris, depuis le 20, possession de ses fonctions. — A. C.

VERSAILLES. — Les débuts de notre troupe lyrique sont presque terminés ; or, nous pouvons nous prononcer sur la valeur de chaque artiste.

Nous n'imiterons pas nos confrères du Libéral et de l'Union qui, après avoir crié haro sur M. Ludovic, ont abaissé leur diapason jusqu'à venir implorer l'indulgence du public- Quels sont les motifs puissants qui ont déterminé la presse versaillaise à prendre ainsi fait et cause pour la direction nouvelle, nous l'ignorons ; mais elle aura beau faire, elle ne pourra effacer les tristes souvenirs que M. Ludovic a laissés parmi nous, lors de sa direction, il y a quelques années.

Occupons-nous maintenant des artistes.

Mlle Sanzia (première chanteuse) est la seule qui mérite des éloges ; la voix est pure et a surtout la fraîcheur de la jeunesse ; elle vocalise facilement; malheureusement, elle est peu comédienne; mieux entourée peutêtre son jeu y gagnerait-il.

M. Léo Lucas (ténor) n'a pas été accepté, et c'est justice, car il a tout à apprendre.

Le baryton, M. Ben-Aben, est un comédien vulgaire ; comme voix il ne possède que des éclats, son grand défaut est de vouloir occuper la scène à lui seul ; mais, quoi qu'il fasse, il ne parviendra jamais à faire oublier son charmant prédécesseur, M. Marris.

Mlle Mey, première dugazon, s'est montrée inférieure à l'année dernière, aussi croyons-nous devoir lui conseiller de travailler et de ne pas s'endormir sur les succès qu'elle avait obtenus.

M. Valdy, au contraire, a beaucoup gagné ; son jeu est moins froid et ses gestes plus variés.

Le trial, M. Moreau, est un excellent comédien, mais il a fort peu de voix.

Mme Valdy est une charmante seconde dugazon, la voix est peut-être un peu faible, mais suffisante pour l'emploi.

Pour le moment, nous nous abstiendrons de parler de M. Longrois, première basse; nous nous contentons seulement de témoigner notre surprise de son admission.

En résumé, l'ensemble de la troupe lyrique, sinon détestable, est trèsinsuffisant ; quelle différence avec celui de l'année dernière? De plus l'orchestre est très-faible et incomplet.

Que M. Ludovic y prenne garde, il a pris une lourde tâche malgré les faveurs dont il a été comblé par l'administration municipale actuelle, dans laquelle il compte de nombreux amis.

En présence d'une semblable situation, c'est au public de faire justice en se montrant très-sévère et en réclamant strictement l'exécution des obligations imposées à M. Ludovic. — A. C.

(2) Par suite d'une réclamation de quelques abonnés, M. Giraud, d'abord reçu en qualité de troisième rôle, est obligé de faire de nouveaux débuts comme premier rôle, emploi qu'il tient depuis le départ de M. Leroyer ; c'est là une question de pure forme, et nous ne doutons pas un seul instant du succès de cet artiste estimable.


LE MONDE ARTISTE

ÉTRANGER

BRUXELLES. — Depuis une quinzaine, un véritable événement artistique a porté quelque tort à la reprise d'Aïda. C'est le grand et l'immense succès obtenu par Mlle Minnie Hauck dans la Traviata, qu'elle a chantée en italien. Il est impossible de rêver, pour ce rôle, une plus remarquable interprète : Mlle Minnie Hauck y a montré une incroyable virtuosité et, en outre, de très-sérieuses qualités de comédienne. Le public lui a fait une véritable ovation, et c'était de toute justice; car, accent à part, Mlle Minnie Hauck est bien décidément une cantatrice de grand talent. MM. Bertin et Guillen l'ont parfaitement secondée.

Malgré ce que je vous disais en commençant, Aida n'en attire pas moins un très-nombreux public. M. Tournié est toujours le ténor acclamé et fêté qui ne laisse pas de prise à la moindre critique et qui, en dehors d'une voix admirable, sait bien donner à chacun de ses personnages le caractère qui lui convient. Son entourage, dans Aïda, est excellent, et nous devons nos plus sincères félicitations à MM. Devoyod, Dauphin et Queyrel. Ce dernier, dont j'ai déjà eu occasion de vous parler, est très-apprécié. Quant à Mme Fursch-Madier, c'est la perfection même, et le jour où M. Halanzier montera Aida, il devra impitoyablement nous reprendre sa pensionnaire, qui partage ici toutes les ovations faites à M. Tournié.

Mlle Redouté, dont vous avez dit un mot dans votre dernier numéro, d'après les journaux belges, a eu des débuts très-heureux dans la Dame Blanche et a reçu du public le meilleur accueil. Il faut l'attendre dans un rôle où ses qualités pourront se mieux développer. Enfin, M. Lefèvre et Mlle Lurie méritent une mention toute spéciale pour la façon dont ils ont joué le Chalet.

Dans nos autres théâtres, les étoiles se suivent..., sans se ressembler. Nous venons d'avoir aux Galeries Mme Pierson, qui nous a joué, avec le talent qu'on lui connaît, Dora et la Dame aux Camélias. Nous possédons en ce moment Judic, aux Fantaisies-Parisiennes, qui donnent, en son honneur, Madame l'Archiduc. Succès très-grand et maximum des recettes.

A. F.

STRASBOURG, 21 octobre. — Mon cher Directeur, après une absence de quelques semaines, je reprends la correspondance du Monde Artiste avec d'autant plus de plaisir que je viens d'obtenir enfin ce que j'attendais depuis longtemps.

M. Hessler, directeur du Grand-Théâtre, désirant être agréable aux artistes de la troupe de comédie française, vient de m'offrir très-gracieusement mes entrées pour le service du Monde Artiste.

Je m'empresse de vous faire part de cette bonne nouvelle, car cette faveur toute spéciale que M. Hessler vient d'accorder au. Monde Artiste me permettra désormais d'étendre ma correspondance en vous rendant compte des représentations hebdomadaires, de la troupe française.

N'ayant pris mon service au théâtre que hier pour la première de Fromont jeune et Risler aîné, je ne puis vous donner une juste appréciation du talent de chacun des artistes et je me réserve le plaisir de vous parler plus longuement de chaque sociétaire, dans ma prochaine correspondance, en me contentant pour aujourd'hui de vous dire que la troupe est bonne dans son ensemble.

Pour ces soirées françaises, M. Hessler a confié les rênes de l'administration à M. Darmand, l'artiste consciencieux dont le jeu franc et profond avait laissé de bons souvenirs au public des samedis de l'année dernière.

Dans Fromont jeune et Risler aîné, la comédie-drame de MM. Adolphe Belot et Alphonse Daudet, M. Molina a été superbe, on ne saurait mieux interpréter le rôle de Risler. Très-émouvante surtout a été la scène du 5e acte entre Risler et Fromont, scène qui souleva de longs applaudissements.

M. Darmand a rendu avec feu et avec beaucoup de sentiment le rôle de Franz Risler.

Mlle L. Lenoir a parfois trouvé des accents vrais dans le rôle de la cynique Sidonie.

Un enrouement des plus regrettables avait enlevé à Mlle Jeanne Abraham (Claire Fromont), une partie de ses moyens ; elle s'est rattrapée à la fin et elle a dit avec une dignité pleine de charme la scène avec son mari, au 5e acte.

Mlle Berthe Gaignard a été tout bonnement adorable dans le charmant rôle de Désirée.

N'oublions pas Mme Narbert (Mme Chèbe), ni MM. Manin (Fromont) et Moreau (Chèbe), et réservons une bonnenote à MM. A. Favre, un Sigismond Planus au jeu plein de naturel, et H. Armand, très-réussi dans le personnage de Delobelle et qui a jeté une note gaie dans l'ensemble. A huitaine des nouvelles du Casino. — A. O.

Mlle Louise Mascart, première chanteuse d'opérette, est sérieusemen indisposée et ne viendra pas remplir son engagement.

L'emploi de première dugazon et celui de première chanteuse d'opérette seront tenus par Mlle Caroline Massart, que nous avons eue en représentation à Anvers pendant quelque temps, il y a plusieurs années.

Les débuts de Mlle Massart et de M. Solve commenceront cette semaine.

Jusqu'ici il n'y a pas eu de ballottages ; selon toutes probabilités, le premier scrutin aura lieu vendredi prochain.

Ce retard a été occasionné par des indispositions et par les résiliations dont je parle précédemment.

Mme Laville-Ferminet a terminé ses épreuves réglementaires par le rôle d'Alice dans Robert le Diable et la façon supérieure dont elle s'est acquittée de sa tâche lui ménage une belle admission. Depuis plusieurs années l'emploi important des falcons n'a été tenu avec plus de talent et d'autorité.

Je puis vous en dire tout autant de Mlle H. Leavington, dont le superbe contralto a fait merveille dans le rôle de Léonor, de la Favorite. Le quatrième acte a été admirable, la salle entière a redemandé le duo chanté par cette excellante artiste et par M. Rodier, ténor léger, remplaçant M. Merrit, indisposé. Mlle Leavington a aussi chanté pour début le rôle de Pygmalion de Galathée et d'une façon irréprochable.

M. Larrivé s'est ménagé un brillant succès dans le rôle de Bertram de Robert et, lui aussi, a conquis son acte de bienvenue. Mlle Blanche d'Ervilly, chanteuse légère de grand opéra, a chanté Galathée et Isabelle, et non sans succès.

A la prochaine, l'opéra comique et le ballet. — PAUL.

2me correspondance, 21 octobre. — Ma dernière lettre n'ayant pu paraître dans le numéro de samedi, je n'ajouterai que quelques mots sur la marche de notre théâtre et j'écris spécialement pour vous annoncer le résultat des ballottages.

Sur 17 artistes présentés au scrutin, il n'y a que deux échecs : M. Vandamme, basse chantante, et M. Ramonot,

L'artiste la plus favorisée est Mlle Leavington, contralto : un seul suffrage négatif lui a été donné ; encore dois-je vous dire qu'il a été émis par un mauvais plaisant, les 17 noms ont été trouvés effacés sur son bulletin.

M. Larrivé, basse d'opéra, a réuni la presque unanimité des votes.

Mme Laville-Ferminet a conquis son droit de cité haut la main, malgré les menées de soi-disant connaisseurs.

Les autres artistes, M. Rodier, ténor léger, M. Maugé, baryton, Mlles Julia Reine et d'Ervilly, chanteuses légères, et les toutes charmantes demoiselles Reuters, danseuses, ont été acceptées à la plus grande satisfactions des Anversois.

je réserve pour une prochaine l'appréciation de la Juive et des Diamants de la Couronne, opéras dont l'exécution a été très-applaudie. — PAUL.

P. S. — J'apprends à l'instant l'engagement de M. Pother. Cet artiste tiendra l'emploi de première basse d'opéra-comique et débutera dans SaintBris, Lothario et Méphistophélès.

On parle aussi de la rentrée de l'excellent Mengal. — Bravo ! — p.

ANVERS, 13 octobre. — J'ai à vous annoncer divers remaniements qui viennent de s'effectuer dans le personnel de notre théâtre.

Mlle Mariani, dont je vous ai annoncé la résiliation, reste attachée à la scène et tiendra l'emploi de seconde dugazon, en partage avec Mlle Dupouy.'

M. Cransade, baryton de grand opéra, a résilié son engagement et a été remplacé par M- Solve, un baryton qui a déjà fait ses preuves à Anvers.

TURIN. — THÉATRE VITTORIO - EMANUELE. — Suivant notre promesse, nous venons vous donner, cher Directeur, l'appréciation du public et la notre en particulier sur l'exécution de l'oeuvre de Gounod, Faust, qui attira un nombreux auditoire le mercredi , 10; pour cela, il y avait deux puissants motifs. D'abord la musique, qui est délicieuse depuis la première note jusqu'à la dernière, ensuite le sujet de la pièce, qui est palpitant d'intérêt.

La curiosité était piquée par le désir d'entendre une charmante artiste que nous avions déjà entendue, en octobre dernier, au théâtre Carignano. Saluée à son entrée en scène, Mlle Vincenzina Ferni, désireuse de répondre à ce bienveillant accueil, a redoublé d'efforts, et nous pouvons dire qu'elle a été constamment à la hauteur de son rôle. D'abord, hâtons-nous de constater qu'elle a été la Marguerite idéale telle que l'a rêvée Goethe. La scène des bijoux, coquettement enfantine, sera, dans un jour donné, peu éloigné, une scène qui enlèvera toute la salle, car elle la rendra selon les idées du maestro.

Le rôle de Méphistophélès, échu au signor Mailini, a été rempli d'une manière peu satisfaisante. Aussi, l'administration a-t-elle pourvu de suite à son remplacement. M. Giovanni Valle a, samedi, pris possession du rôle. N'ayant pu assister à cette représentation, à notre grand regret, nous avons lu, dans la Gazzetta di Torino, que cet artiste avait complétement réussi à satisfaire le public.

Le signor Priani — Valentin, — a été fort apprécié du public ; comme dans son autre rôle, cet éminent artiste s'est fait remarquer par son excellent jeu et son agréable voix.

Mlle Luigia Partenopeo, dont nous avons parlé maintes fois dans le Monde Artiste, a fait un Siebel charmant ; tout ce que nous pouvons dire , c'est qu'elle a été délicieuse, elle a été fortement applaudie à la romance des fleurs et aux couplets du troisième acte.

Le ténor Augusti, remarquable par sa belle voix, bien naturellement posée pour l'opéra demi-sérieux, fait plaisir au public : belle tenue, physique agréable, réputation déjà faite. C'est une bonne acquisition pour la salle Vittorio-Emanuele.

Les choeurs ont fait grandement plaisir, l'orchestre, toujours vaillamment conduit par le signor cav. Bozzelli, se fait applaudir.


LE MONDE ARTISTE

Le ballet, Bianca di Nevers, occasionne toujours à la protagoniste, la brillante étoile parmi les célébrités dans l'art de la chorégraphie, Mlle Victorine Legrain, les plus chaleureux applaudissements, avec rappels de toute une salle enthousiasmée.

Nous avons lu avec un grand plaisir dans Il Trovatore, de Milan, un bel article concernant la signora Grosso Benedettina, une chanteuse légère en ce moment au théâtre Ristori à Vérone. Puis deux autres dans Arena Adigo de Vérone. Notre correspondance particulière nous donne ce qui suit :

« Mlle Grosso n'est point seulement une cantatrice remarquable, mais une comédienne très-distinguée, à la taille élevée, svelte et aux allures théâtrales bien comprises.

Dès ses débuts, cette charmante artiste n'a marché que de succès en succès. Des circonstances de famille l'ont forcée à se retirer du théâtre. mais, elle se livra au professorat, et naturellement, elle ne fit que perfectionner ses études tout en continuant à développer ses moyens vocaux. Aussi est-ce une chanteuse de qui nous pouvons dire, rendant uniquement justice à ses brillantes qualités, que sa rentrée au théâtre fera sensation.

Ainsi dans le rôle d'Amina, de la Somnanbula, devant une salle pleine, dès ses premières notes, l'enthousiasme a fait explosion, il n'a cessé d'aller croissant jusqu'à la fin de la représentation.

C'est une belle rentrée triomphante, qui n'a pas trouvé un seul réfractaire. Mais aussi, quelle voix pure, agile-, vibrante, quel goût exquis, quel sentiment délicat, quelle méthode parfaite'!

Il nous reste à dire que Mlle Grosso qui possède le jeu, le sentiment et l'expression, avec le don de caractériser son personnage, peut prétendre à la scène française, connaissant la langue. Avis aux directeurs, notamment à l'agence du Monde artistc, dont nous sommes le correspondant principal en Italie.

A Milan, est disponible une belle, gracieuse artiste (mezzo-soprano), la signorina Nina Pedemonti. Nous avons plusieurs fois donné les appréciations des journaux italiens, concernant le beau talent de cette jeune cantatrice.

La signorita Vencenzina Ferni, dont nous avons parlé plus haut, sera libre pour le 10 décembre. Il en est de même de Mme Bianca Blume, l'excellent soprano-dramatique que possède en ce moment le théâtre Vittorio-Emanuele, et dont nous avons mentionné le succès obtenu dès la première représentation de Virginia. Voir le numéro 41, du 13 courant.

CHARLES LESUEUR.

MONS, 23 octobre. — Les débuts de notre troupe sont commencés ; notre nouveau directeur, M. F. Lemaître, qui est un homme intelligent, déploie une grande activité. Malheureusement il n'est pas récompensé de toutes les peines qu'il se donne.

La ville de Mons accorde une subvention de douze mille francs pour six mois d'exploitation et le public montois est plus exigeant que dans les villes où le directeur reçoit trente et quarante mille francs. Ajoutez à cela que le théâtre est cet année très-peu suivi et que l'abonnement est d'un chiffre moitié au-dessous des autres années.

Le répertoire est très-varié ; depuis quinze jours on nous a donné à entendre, pour l'opéra, Faust, la Fille du Régiment, la Traviata, Galathée, le Postillon et Lucie ; et pour là comédie et le drame : Bataille de Dames, la Dame aux Camélias, Par droit de conquête, les Femmes qui pleurent.

Le premier ténor, la première chanteuse et la dugazon ont résilié. M. Vert, seconde basse, M. Dupin, première basse, M. Rey, baryton, ont été admis.

Dans ma prochaine lettre, je vous parlerai de la troupe de comédie qui est composée d'artistes comme nous n'en avons jamais eu à Mons.

Nos félicitations à M. Lemaître. — E.

PETITE CHRONIQUE

M. Jules Christophe, première basse, dont nous annoncions dernièrement la disponibilité, a signé avec M. Vizentini un brillant engagement pour le Théâtre-Lyrique. Ce jeune chanteur rentre dans le théâtre où il fit ses premiers débuts. Tant mieux pour l'artiste et pour la direction.

C'est avec le plus vif plaisir que nous apprenons, par une correspondance de Rio-Janeiro, le brillant succès de la Traviata, à ce théâtre.

Mme Vanda Miller, et M. Frédéric Devillier — notre vieille et chère connaissance, et que nous entendrons encore cet hiver aux « Italiens » — ont eu des ovations éclatantes !

Aujourd'hui, nous nous bornons à ces courtes nouvelles de leur début, et, au prochain numéro, nous parlerons plus complétement du spectacle.

Mme Christophe-Bonnefoy continue à se faire applaudir, rappeler et fleurir par les dilettantes enthousiastes de Béziers. Ses derniers succès ont été le Barbier et la Fille du Régiment, ouvrages qui lui ont valu de longues ovations.

Au Théâtre-Louit, de Bordeaux, Mlle de Kercy a fait une brillante apparition dans la Fille Angot. On augure bien de la saison pour la charmante chanteuse.

— Mme Delpratto qui a pris, comme on le sait, le grand répertoire où sa voix puissante est plus à l'aise que dans le genre léger, a fait dernièrement un bon début à Dijon dans le rôle de Rachel de la Juive. Nous attendons un article de notre correspondant.

Il est arrivé à Paris, par dépêches télégraphiques, des nouvelles du début de Mlle Dica-Petit au théâtre Michel, de SaintPétersbourg.

Mlle Dica-Petit a débuté dans Dora, de Victorien Sardou. Trèsbelle soirée. Six rappels.

La charmante et sympathique actrice va jouer prochainement Nos Intimes et Diane de Lys. Nous attendons une lettre de notre correspondant.

Splendide soirée musicale avant hier à Suresnes, avec le concours de Mlle Arnaud, de MM. Manoury, Boudouresque, de l'Opéra ; de Mme Favart et de M. Dupont-Vernon, des Français; de MM. Frantz, Villaret, Deslandres et Max, etc.

Mlle Arnaud a obtenu le plus grand succès avec M. Manoury dans le duo de Mireille, puis seule dans le Papillon et Nina la Biondina. M. Manoury s'est chaleureusement fait applaudir en chantant l'Extase, fort belle composition de M. Deslandres. Le môme auteur a fait entendre une oeuvre remarquable intitulée : Secourons nos frères, qu'ont chantée MM. Villaret, Manoury et Boudouresque. Nous pouvons affirmer, après cette nouvelle audition, que l'Extase est un morceau hors ligne qui prendra promptement place au répertoire des concerts.

Belle séance, foule compacte, succès d'enthousiasme pour tous.

Mlle Kraëtzer, première chanteuse, a été l'objet, lors de sa représentation à bénéfice au théâtre de Batavia, d'une manifestation bien flatteuse pour la jeune artiste. Un Comité de dames de la ville lui a fait offrir, en scène, des cadeaux s'élevant à la somme d'au moins 25,000 francs, bijoux, objets d'art, etc. Cette représentation a été splendide : la recette a atteint le chiffre de 12,000 francs. Jamais on ne vit à Batavia soirée pareille ni enthousiasme plus grand.

Sur les instances de la Commission, Mlle Kraëtzer a contracté le lendemain, 4 septembre, un nouvel engagement de six mois, aux appointements de 10,000 francs par mois.

Les plus brillantes nouvelles nous sont arrivées de Madrid concernant Mlle Sanz, qui est allée donner quelques représentations dans la capitale espagnole. Le public madrilène a fait à la célèbre cantatrice un succès d'enthousiasme. Se rôle de Léonora, de la Favorita, qu'elle a chanté en premier, lui a valu des ovations extraordinaires. Succès plus grand encore dans l'Azucena, du Trovatore.

Le Nuevo Figaro, l'Epoca, le Pueblo, toutes les feuilles de Madrid, enfin, sont unanimes pour adresser les éloges les plus enthousiastes à Elena Sanz.

On lit dans le Courrier du matin de Clermont-Ferrand :

C'était bien une soirée extraordinaire que celle de dimanche : extraordinaire par la longueur du spectacle, extraordinaire aussi par la composition du programme.

On ne nous a pas habitués à donner, sur le théâtre de Clermont, du Casimir Delavigne. M. Delaunay a l'intention, nous dit-on, de persévérer dans cette voie. L'accueil fait dimanche aux Enfants d'Edouard ne peut que l'affermir dans cette résolution.

D'un autre côté, il est très-difficile de trouver, en province, une réunion d'artistes pouvant, sans trop d'inconvénients, aborder les pièces en vers.

Cette difficulté n'arrêtera pas M. Delaunay. M. Cayol a joué Glocester de la grande manière. Après avoir vu notre premier rôle dans deux rôles à peu près identiques (Chicot et Puycerdac), nous l'attendions dans le drame en vers, qui exige une diction plus savante, un jeu de scène plus varié. Après avoir posé, dans le premier acte, ce personnage haineux du duc de Glocester, M. Cayol a été superbe dans sa grande scène du deuxième acte il a eu de vrais rugissements de bête fauve qui voit venir sa proie.

J'ai gardé pour la fin Mme Delaunay, et là, je ne puis que regretter d'avoir épuisé pour elle toutes les formules laudatives. Cette excellente artiste nous a vivement ému, dans cette scène déchirante des adieux d'Elisabeth à ses enfants.


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LE MONDE ARTISTE

Extraits de nos correspondances de Toulouse et de La Haye, reçues trop tard pour être insérées dans le présent numéro :

TOULOUSE. — Refus de Mlle Dufau à la majorité de une voix. — Résiliations de Mmes Belgirard, Rizzio, Franchino et de M. Davy, second ténor.— Engagements de MM. Delabranche et Trinquier, en remplacement de MM. Voulet et Gillandi et prochain début de M. Choppin, en remplacement de M. Justin Boyer. — Réception de M. Jourdan dans la Juive.

Notre correspondant est fort mécontent. Il dira pourquoi dans le prochain numéro.

LA HAYE. — Admission de M. Caubet après Haydée. Succès de Brégal, de Chelli, de Mlles Linse et Jouanny dans l'Africaine.

A Amsterdam, tout va bien pour le chant et la comédie.

A huitaine articles détaillés sur les deux capitales hollandaises. — J. R.

Au prochain numéro Toulouse, La Haye, Amsterdam, Le Mans et Châlons-sur-Marne.

FAITS DIVERS

— Hier, relâche au Théâtre-Lyrique et à la Renaissance, pour répétitions générales de Si j'étais Roi et de la Tzigane.

— Le Gymnase a donné, avant-hier, les Petites Marmites. La pièce paraît avoir réussi. Nous en reparlerons.

— Après l'heureux début de Mlle Richard, M. Halanzier a fait venir dans son cabinet cette jeune artiste et lui a annoncé que ses appointements étaient doublés. A la bonne heure !

— Le Théâtre-Taitbout a fait sa réouverture par les Auberges de France, une jeune vieillerie qui a procuré au public spécial de ce théâtre quelques instants de douce gaieté.

— Nous sommes heureux d'apprendre que Mme Madeleine Brohan est complétement remise de l'indisposition assez grave que lui avait amenée l'absorption d'une dose trop considérable de laudanum.

— Mlle Noémie Marcus quitte le Théâtre-Lyrique. Elle a signé son engagement aux Bouffes de Saint-Pétersbourg.

— Aux Variétés, succès soutenu de Céline Chaumont dans la Cigale.

— On a annoncé la mort de M. Lockroy père, un de nos meilleurs librettistes. Le prétendu mort se porte heureusement fort bien ; M. Lockroy en a lui-même avisé la presse par une lettre très-spirituelle.

Le Directeur-Gérant : ACHILLE LEMOINE.

COURS ET LEÇONS

Mme Pauline Boutin, la cantatrice applaudie dans les grands concerts et l'excellent professeur annonce, pour être inaugurée le 1er novembre prochain, une classe de chant pour dames et jeunes filles.

Les cours auront lieu les mercredis et samedis, à une heure, 85, rue de Richelieu, chez M. Marcel Colombier, éditeur de musique.

Pose et élude de la voix. — Etude de style et de vocalisation. — Séances de musique d'ensemble. — Etudes des répertoires français et italien. — Leçons particulières.

— Mme Alexandre Bataille, cours de piano et de chant, 12, rue Richer.

— M. Guilmant, 62, rue de Clichy, leçons d'orgue.

— M. J. Deschaux, professeur de solfége, piano et chant. Leçons particulières pour l'étude du répertoire d'opéra, d'opéra comique, etc. Rue Duperré, 22.

— Travail spécial de la voix, de la prononciation et de l'interprétation par M. E. Berthemet, premier prix du Conservatoire de musique, ex-chef des choeurs du Théâtre-Lyrique. Auditions tous les jours de 4 à 6 heures, rue de Douai, 34.

— Mlle Patin, 13, rue du Rocher, leçons de piano d'après la méthode des plus grands maîtres.

— Harmonie et composition ; leçons par correspondance. Préparation aux examens de chef et de sous-chef de musique dans l'armée. Professeur : M. Danhauser, 42, rue Maubeuge.

— Cours d'orgue et de piano, chez M. Ch. Loret, 13, rue de Bruxelles.

AVIS

Pianos recommandés de Prouw Aubert, 35, Boul. du Temple.

— Nous recommandons à nos lecteurs la maison J. Fleurant, 15-17, passage Verdeau (suite du passage Jouffroy) ; ils y trouveront un assortiment complet de maillots de bonne qualité, à des prix très-avantageux. Si nous jetons un coup d'oeil sur le tarif qui sera envoyé aux directeurs qui en feront la demande, nous trouvons des maillots de soie (entièrement) cotés 40, 42, 45, 47 fr. jusqu'à 50 fr.; les maillots de soie avec buste, en fil d'Ecosse de même nuance, sont de 8 francs moins cher. Maillots de fil d'Ecosse toutes nuances imitant la soie, à 17 fr. et 16 fr. en blanc et chair ; maillots de coton depuis 4 fr., qualités supérieures à 5, 7, 8, 10 et 12 fr.

— GRANDE AGENCE THÉATRALE TAMBURIN et JULIENNE DEJEAN. Engagements d'artistes lyriques, dramatiques instrumentistes et chorégraphes. Chant, leçons, cours, mise en scène (Répertoire français et italien), 50, rue SaintLazare. — Location de la salle pour concerts, conférences, réunions privées et publiques.

— En vente chez Lissarrague, 4, rue Saint-Pierre, à Versailles, École du Pianiste, de PAUL ROUGNON, professeur au Conservatoire de Paris. Recueil d'études divisé en deux parties : 1re partie, Etudes élémentaires; 2e partie, Études de perfectionnement.