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Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1874-11-03
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34355551z
Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34355551z/date
Type : texte
Type : publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 164718
Description : 03 novembre 1874
Description : 1874/11/03 (Numéro 292).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG63
Description : Collection numérique : BIPFPIG69
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Description : Collection numérique : France-Brésil
Droits : Consultable en ligne
Droits : Public domain
Identifiant : ark:/12148/bpt6k2753927
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
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EN mat de préface
̃
II y .a quelque temps, le Figaro a pu- blié avec succès des portraits de préfets et de sous-préfets. Nous avons ensuite esquissé pour nos lecteurs tout ce qui a une certaine valeur dans la Représentation nationale. Aujourd'hui nous faisons passer sous leurs yeux ce qu'on pourrait appeler le gouvernement spirituel de la France, les évêques et les archevêques. Plus tard, ce sera le tour do nos régiments; nous raconterons Vbistoire de certains drapeaux, dont la célébrité 'est universelle, comme celui du 2e zouaves, par exemple, qui porte à sa hampe la croix de la Légion d'hon. neur; nous y joindrons une étude sur lés généraux commandant en chef, les Chanzy, les d'Aumale, les Bourbaki. Cette série comprend tout ce qui personnifie, dans notre pays, l'ordre, la religion et la force, trois choses solidaires entre elles, et que le Figaro a toujours respectées et défendues. Il n'est plus besoin maintenant d'expliquer à nos lecteurs le but de cette galerie épiscopale. Si, par son caractère particulièrement sacré, elle sort un peu de notre domaine ordinaire, d'un autre côté, elle touche de trop près à la cause que nous défendons pour que nous ayons pu la négliger.
En temps de révolution, la première pensée des émeutiers est de fermer les églises et de fusiller les prêtres. La tradition veut aussi qu'ils assassinent les généraux, comme ennemis du peuple. Hélas le pauvre peuple, on le trompe étrangement Sans le savoir, il frappe ses propres enfants, et les meilleurs. Car la plus grande partie des généraux et des évêques, les neuf dixièmes certainement, sortent du peuple; partis des sphères les plus modestes, s'ils parviennent très haut, c'est à force de courage, ou de science, ou Ge ^;a-v«'l, ou do v<wtw. Ilya a en ce moment, sur l'un des plus beaux sièges de France, un archevêque cardinal qui a gardé les moutons, quand il était petit enfant. Le peuple voudrait-il le fusiller comme aristocrate, celui-là? C'est que, précisément, il n'y a rien 'de plus démocratique au monde que l'église et l'armée. Qu'importe le nom et la naissance? Le fils du plus simple ouvrier, quand il a conquis ses grades, ne s'appelle plus que Monseigneur, ©u Mon général. On ne le connait plus que sous ce titre. Il marche maintenant de pair avec ceux que ses parents ont peut-être servis. Nous connaissons en Vendée une famille illustre par le nom et l'antiquité. Il y a trente ans, elle fit élever à ses frais le fils d'un pauvre fermier. L'enfant est devenu un évêque, un prince de l'église et quand il retourne aujourd'hui isas cette famille, il occupe de droit et naturellement la place d'honneur. Il en est de même pour les officiers.
Ce fait a sa raison d'être, parce que l'armée et l'église sont en effet des centres.d'honneur et de- moralité. Imaginez une société qui ne serait composée que de prêtres et de soldats. Quel peuple admirable cela ferait! C'est à se demander s'il y aurait même besoin de Justice pour Je contenir et le diriger.
Les portraits que nous allons publier, démontreront amplement cette vérité, pour ce qui concerne l'Eglise. Comme on le verra, les prélats français sont tous naturellement des hommes instruits, laborieux, vertueux, charitables, aimés et respectés du troupeau qu'ils commandent. C'est même là l'écueil de ce travail que nous avons confié à das plumes autorisées, et qui est signé Plures; nous avons à lutter contre la monotonie du bien. Nous naviguons en pleine vertu. Pour obtenir quelque variété, nous avons dû renoncer à dire de chacun ce que tous possèdent nécessairement, les vertus primordiales de leur profession. Nous nous bornerons à ce qui distingue l'un de l'autre, à signaler les qualités dominantes de l'orateur, ou de l'écrivain, ou de l'administrateur. Les faire connaître, c'est les faire par cela même aimer et estimer. C'est notre seul but.
H. DÉ VlLLEMESSANT.
ARCHEVÊQUES
Me1 GUIBERT (Joseph-Hippolyte), archevêque de Paris.
Né Aix le 13 décembre 1802, sacré évêque de Viviers le 11 mars 1842; transféré â l'archevêché de Tours par décret du 4 février 1857, puis à l'archevêché de Paris par arrêté du chef du pouvoirexéCutifdul9 juillet 1871, préconisé le 27 octobre suivant, installé le 27 novembre de la même année; créé cardinal dans le consistoire du 22 décembre 1873, du titre de Saint-Jean devant la jflrte latine.
Archevêque de Paris et cardinal de l'église romaine; à ce double titre, Mgr Guibert mérite d'ouvrir cette longue série de noms illustres dont doit M composer notre galerie
épiecopala,
LES ÉVÊQUES DE FRANCE
•<Cest Un grand personnage qu'un archevêque de Paris 1 La curiosité publique est tou iours fortement éveillée à son sujet. Le nom de sette capitale incomparable où il siége, non moins que la fin tragique qui a terminé la vie de trois archevêques, a contribué à faire de l'archevêque de Paris un homme à part, un prélat auquel on s'intéresse tout particulièrenient.
Grand, maigre, froid, les cheveux plats, rares et à peine grisonnants, l'archevêque de Paris a toutes les apparences d'un anachorète, comme il en mène l'existence. Il est du reste Religieux il appartient à la société des Oblats de Marie, fondée à Marseille, vers 1820, par Mgr de Mazenod, évêque de cette ville. L'abbé Guibert était jeune encore quand il entra dans cette société. Il y acheva ses études ecclésiastiques, y reçut les ordres sacrés et commença, n'étant encore que diacreji, so consacrer a l'œuvre des missions. Digne, dès le début, de remplir les premiers postes humble et modeste comme s'il devait vivre aux derniers, il laissa dans le sanctuaire de do N.-D. du Lans les traces les plus fécondes do son ministère apostolique.
C'est de là qu'il fut envoyé en Corse pour y fonder et y diriger un grand séminaire. Dans cette haute et délicate fonction, le jeune supérieur révéla de remarquables aptitudes pour l'administration, jointes à une véritable science théologique.
En peu d'années le séminaire d'Ajaccio était devenu florissant, quand une ordonnance du roi Louis-Philippe, en date du 30 juillet 1841, désigna le R. P. Guibert pour l'évêché de Viviers.
Etonné d'être poursuivi par les honneurs, lui qui les aimait si peu, l'humble religieux fit, à cette nouvelle nomination, la plus vive et la plus sincère résistance, et il ne céda enfin que sur l'ordre formel de ses supérieurs. Mgr Guibert gouverna, pendant quinze ans, l'église de Viviers. A peine âgé do quarante ans, il se montrait déjà le champion infatigable de la,sainte Eglise et le défenseur do ses droits méconnus. Déjà on le regardait comme un des grands évoques de France; ses collègues eux-mêmes le consultaient dans les circonstances délicates. C'est dire que l'évêque de Viviers était désigné pour un siège plus élevé.
En 1857, quand le cardinal Morlot fut transféré à Paris, Mgr Guibert fut appelé à le remplacer â Tours.
Ici se place une anecdote touchante qui peut, mieux que tous nos éloges, faire connaître la grande simplicité du prélat. En arrivant à Tours, nous dit la chronique, il trouva à l'archevêché un magnifique jardin anglais on avait même eu l'attention d'y ménager quelques embellissements nouveaux pour la bienvenue du prélat. Immédiatement il le fait labourer, et l'année suivante de splendides pommes de terre prospéraient à la place des arbustes d'agrément. Pas n'est besoin de dire que les pauvres profitaient des essais horticoles de l'archevêque.
Toutefois Mgr Guibert était de plus en plus en relief aussi nul ne s'étonna de le voir quelques mois plus tard promu à l'archevêché de Paris.
Homme de devoir et de dévouement, Mgr Guibert saura se tenir, en toute circonstance, à la hauteur de sa sublime et difficile mission.
L'archevêque de Paris n'est pas orateur il parle avec onction et âutorité, mais sans éclat ni mouvement oratoire.. Ses mandements sont bien écrits, quelquefois un peu vifs dans la forme. 1
Celui qu'il'publia le 2 juillet de cette année, à son retour de Rome, contenait quelques passages un peu durs à l'égard du gouvernement italien. On s'en émut dans les hautes sphères politiques et l'on craignit un instant un conflit international. De pareils incidents sont toujours fâcheux on les éviteraitassurément si nos évêques, d'ailleurs si sages et si bons patriotes, ne mettaient pas quelquefois le pied sur le terrain brûlant de la politique, ce qui est généralement inopportun, et, dans les circonstances présentes, particulièrement dangereux.
Nous ne rappellerons pas la noble et belle conduite que tint à Tours Mgr Guibert, lors du siége de Paris et quand la délégation du gouvernement du 4 Septembre était installée à son archevêché. Ce sont de tristes jours pour la patrie; oublions-les, s'il se peut.
Mgr BERNADOU (Victor-Félix), archeveque de Sens.
Né à Castres (Tarn), le 25 juin 1816, sacré évêque. de Gap le 29 juin 1862, nommé archevêque de Sens par décret du 16 mai 1867, préconisé le 10 juillet suivant.
Ne jugez jamais sur les apparences. A première vue, Mgr Bernadou a l'air lourd et insouciant; on le croirait grand partisan du far-hienle, laissant à ses grands vicaires le soin de l'administration, et ne recueillant de l'épiscopat que les douceurs et les distractions. Certes il n'en est rien. L'archevêque de Sens est un des hommes les plus actifs que l'on connaisse. Il laisse si peu aux autres le soin et la gestion des affaires, que l'on cite de lui cette parole significative. A son arrivée à Sens, le prélat recevant ses vicaires capitulaires, leur parla en ces termes « Messieurs, je vous maintiens comme grands-vicaires mais pour les affaires, vous n'aurez pas à vous en occuper, cela me regarde. »
On m'a parlé d'un pieux évêque qui ne décidait jamais rien sans l'avis de son chapitre, et qui, quand il osait régler de son chef une affaire, disait avec bonhomie au curé qui l'avait consulté x* Surtout ne parlez de rien à mes grands-vicaires». A Sens, ce serait plutôt le contraire qui aurait lieu là l'évêque est tout.
Voici en quelques mots la biographie sacerdotale de Mgr Bernadou.
Soit par zèle pour la propagation de la foi, soit par curiosité d'imagination, soit par tout autre motif, l'abbé Bernadou, àpetae ordonné
prêtre, s'expatria et alla exercer en Algérie le saint ministère.
Nous supposons qu'il y réussit, car nous le retrouvons, quelques années après, curé de la cathédrale d'Alger.
Élevé sur le pinacle, la cure d'Alger en est un, l'abbé Bernadou ne tarda pas à être promu àl'épiscopat. Un décret du 14 janvier 1862 le nomma à l'évêché de Gap. Il y succédait à un savant et pieux prélat, Mgr Dépéry, qui, pendant plus de vingt ans, avait administré le diocèse avec une prudence et une bonté qu'on n'a pas encore oubliées. La succession était difficile, je voudrais dire que Mgr Bernadou sut la remplir en tout point.
Quoiqu'il en soit, il ne resta que cinq ans à Gap.
L'archevêque de Sens, Mgr Mollon-Joly, songeait depuis quelques années déjà à donner sa démission ses infirmités et son grand âge lui rendaient difficile la charge épiscopale. Enfin, après avoir obtenu l'agrément du souverain Pontife, Mgr Joly prit sa retraite et l'évêque de Gap fut nommé en sa place.
Une fois installé à Sens, le nouvel archevêque commença cette vie active qu'on lui connaît. Il visita les principales villes de son diocèse, Auxerre, Tonnerre, Joigny, etc. Partout il était chaleureusement accueilli; c'étaient de véritables ovations.
Sans être un orateur supérieur, Mgr Bernadou parle bien il a un organe puissant et un gostc énergique. On sent en lui l'autorité de l'apôtre
Dernièrement à Pontivy, en présence d'un nombreux auditoire d'Anglais, venus en pèlerinage au tombeau de Saint-Edme, de Cantorbéry, Mgr de Sens fit entendre des paroles où le patriotisme du Français se mêlait à la foi de l'évêque.
Mgr DE BONNECHOSE, archevêque de Rouen.
Né à Paris, le 30 mars 1800; Promu à l'évêché de Carcassonne, le 30 janvier 1848. Transféré à Evreux, le 1" novembre 1854. Nommé à Rouen, le 2t février 1858. Créé cardinal le 21 décembre 18G3. -̃ ̃̃̃̃
un arciievcquo «ioudio d'un gentilhomme et d'un magistrat. Avant de méditer la Somme de Saint-Thomas, Mgr do Bonnechose avait étudié les Pandectes de Justinien. Déjà même il avait le titre de procureur-général, lorsqu'il déserta le Palais-de-Justice pour se tourner vers la chaire évangélique.
A cette époque, la chaire de philosophie à la Faculté de Strasbourg était occupée par le célèbre M. Bautain. Avec une conviction inébranlable, un talent littéraire hors ligne, une éloquence irrésistible, cet homme avait réuni autour de lui une jeunesse ardente et studieuse, qui l'écoutait comme un oracle M. de Bonnechose était un des plus assidus aux cours de M. Bautain. Près de lui venaient s'asseoir les Gratry, les Carvignie, les Goschlor, les Level, les Karl, les Ratisbonne. C'était une vraie pléiade d'esprits éminents. Bautain, entraîné vers le sacerdoce par un attrait irrésistible, vint demander à l'évêque do Strasbourg de l'admettro dans son clergé tous ses disciples l'y suivirent.
Mgr. de Bonnechose échangea donc sa toge de magistrat, contre le vêtement sacerdotal. Pendant quelques années, il se consacra à l'instruction de la jeunesse, d'abord à Strasbourg, puia au collége de Juilly. Appelé au siége de Carcassonne en 1848, il fut le dernier évêque nommé par Louis-Philippe. Il était jeune encore il voulait voir ses ouailles et parcourait, dans ce but, les hameaux les plus reculés de son diocèse. En arrivant à Evreux, Mgr de Bonnechose succédait à un homme brillant comme orateur, actif comme administrateur. L'abbé Ollivier était aimé de son clergé et do son peuple. Le remplacer était une chose qui ne demandait pas moins que la prudence et les brillantes qualités de l'ancien magistrat. Mgr de Bonnechose comprit si bien sa tâche qu'on l'appelait quatre ans plus tard au siège métropolitain de Normandie. »
La noble simplicité de ses manières, sa franchise de gentilhomme, le caractère de bonté empreint sur sa physionomie lui concilièrent toutes les sympathies.
Lorsque le cardinalat lui ouvrit les portes du Sénat, il fit preuve souvent d'une fermeté et d'une vigueur que sa douceur habituelle ne semblait pas permettre d'attendre de lui. Du haut de là tribune, il s'opposa de toutes ses forces à l'expédition d'Italie.
Le 15 mars 1865, Mgr de Bonnechose s'é- criait au Sénat « Mon clergé est comme un régiment, il doit marcher et il marche. i 11 s'agissait d'une discussion dans laquelle cértains sénateurs avaient pris en main la défense du presbytérianisme. L'ignorance ou le mauvais vouloir ont si souvent dénaturé le sens des paroles de l'archevêque de Rouen, que nous tenons à en donner ici une interprétation véritable. Mgr de Bonnechose voulait dire simplement « Vous prétendez que le clergô paroissial est soulevé contre les évêques ? Erreur. Nos relations sont tellement réglées par les canons, les droits si bien définis, chacun est si bien à sa place, que nous marchons comme un régiment qui doit toute sa force à l'harmonie de ses membres et à la discipline hiérarchique. » Et, de fait, la conduite de Mgr de Bonneehose dans son diocèse n'est que l'application de cette théorie. Lorsque dans la guerre néfaste de 1870, la ville de Rouen fut occupée par les Prussiens, le cardinal de Bonnechose se rendit à Versailles pour demander àl'empereur Guillaume une forte diminution de l'exorbitante contribution de guerre imposée à cette ville. Il fut ass,ez heureux pour l'obtenir, et ses diocésains n'oublieront pas cet acte de courage. Si vous demandez aux habitants do Rouen
ce qu'ils pensent de leur archevêque, ils vous
répondent c II est bienveillant et gracieux comme un prince de l'église digne et grave comme un magistrat; grand et généreux comme un représentant de la noblesse, »
Mgr BROSSAIS SAINT-MARC, archevêque de Rennes.
Né à Rennes, le 5 février 1813, nommé évêque de la même ville en 1841, archevêque en 1859. Quelques semaines après son voyage en Bretagne, l'ex-impératrice disait Je n'a jamais entendu conversation plus spirituelle que celle de l'évêque de Rennes. » Cette appréciation ne nous étonne pas au sujet de Mgr Saint-Marc. Il est difficile, en effet, de, rencontrer un causeur plus attrayant. Les observations piquantes, les aperçus ingénieux, les ripostes pleines de gaieté et d'à-propos semblent sortir naturellement de ses lèvres. Aussi, en face de lui, soyez prudent sur le terrain de la discussion sans cela, vous risqueriez de vous attirer des réparties écrasantes. Un jour, il était en train d'exécuter certain individu ayant eu, devant lui, la malencontreuse idée de tourner en ridicule la reli-. gion'et ses'ministres. L'évêque releva le gant avec cette verve et cet esprit, qui le rendent parfois si redoutable. Au bout de quelques minutes, le maladroit plaisant, voyant ses arguments démolis par l'évoque, ne sut que lui répondre t Monseigneur, vous oubliez que vous avez pour devise In omnibus caritas, » « Mais, mon cher, lui fut-il répliqué, je ne prends pas tout le monde dans mon omnibus. »
Mgr Saint-Marc, est grand, maigre, élance ses traits sont fins et distingués, et rien n'égale la grâce et la dignité avec lesquelles il remplit ses fonctions épiscopales. Artiste distingué, il avait eu, dans sa jeunesse, la manie des collections, et avait réuni bon nombre de tableaux. Dès qu'il fut évéque, il se défit de ces richesses et en employa le prix à la restauration de sa métropole.
Bon, aimable pour tous, d'un accès facile, il se trouve à Rennes entouré d'affection et de dévouement. Il semble né, du reste, pour exciter les sympathies. Au séminaire SaintSulpice, ses condisciples aimaient sa belle humeur, ses plaisanteries de bon ton et son égalité de caractère. Lorsqu'il devint plus tard vicaire-général de Rennes, le clergé du diocèse s'oubliait déjà à l'appeler « Monseigneur. > C'est à cette époque qu'il donna des conférences religieuses dont on a tant parlé.
Nommé évêque sous le gouvernement de Louis-Philippe, archevêque-sous l'Empire, il IVy «l pas ite mlsuu puuv que, oovlb la République, Mgr Saint-Marc n'obtionno pas un jour le chapeau de cardinal. Du reste, à Rennes, on s'y attend un peu, et dernièrement la ville exprimait ce désir aux députés d'Ille-otVilaine.
Mgr DESPREZ, archevêque de Toulouse. Né à Ostricourt (diocèse de Cambrai), le 14 avril 1807. Sacré évêque de Saint-Denys (île de la Réunion), le 5 janvier 1851. Transféré à Limoges, le 19 mars 1857. Promu à l'archevêché de Toulouse ,1e 30 juillet 1859.
C'est aux colonies que MgrDesprez gagna ses premiers galons dans l'épiscopat. On sait combiea il faut de dévoûment pour aller exercer le ministère dans ces pays lointains, sous un climat parfois dangereux. Après six ans de séjour à l'île de la Réunion, Mgr Desprez fut transféré à Limoges, où il ne resta que doux ans.
En I&59, le siège archiépiscopal de Toulouse devint vacant. A cette époque, Mgr Desprez était dans les meilleurs termes avec la famille de la Guéronnière, dont l'un des membre», on se le rappelle, mourut préfet de Toulouee. N'était-il pas naturel de faire valoir alors les droits de l'amitié, surtout quand par ailleurs on était parfaitement autorisé à mettre en avant les vertus et les qualités administratives du prélat? Depuis longtemps la ville et le clergé de Toulouse ont ratifié ce choix par le respect et l'affection dont ils entourent Mgr Desprez. Il a tout ce qu'il faut, du reste, pour se concilier les sympathies.
D'une haute taille, d'une prestance romarquable, d'une dignité peu ordinaire, l'archevêque de Toulouse frappe de prime abord par son extérieur. Sa figure sérieuse et sympathique tranche d'une façon fort heureuse au milieu des visages mobiles des méridionaux. Sa chevelure, autrefois remarquable, tourne fortement au gris et commence à déserter le crâne.
Mgr Desprez ne craint pas, à l'occasion, de se charger lui-même des fonctions les plus humbles du ministère. En 1858, nous l'avons surpris faisant, dans sa cathédrale, un cours d'instruction préparatoire aux enfants qui devaient, quelques jours plus tard, recevoir la confirmation.
Pendant tout le cours de sa carrière épiscopale, l'archevêque de Toulouse a fait preuve d'une entente hors ligne dans l'administration diocésaine. Il descend jusqu'aux moindres détails et tient à se rendre lui-même compte de tous les besoins, afin d'être en mesure d'y porter un remède prompt et efficace. Si vous rencontrez jamais Mgr Desprez, n'allez pas lui prôner l'instruction laique, gratuite et obligatoire, II prétend -et il a raison, selon nous, que le plus sûr moyen de former la jeunesse, c'est de l'élever sous le patronage de la religion. Aussi les communautés trouvent toujours près de lui encouragements, aide et protection.
Mgr DONNET, archevêque de Bordeaux. Né à Bourg-Argental (Loire) le 16 novembre 1795; vicaire de la Guillotiére, puis d'Irigny; curé de Villefr anche (Rhône). Vicaire général honoraire de Tours. Nommé en 1835 pour administrer, en 'qualité de coadjùteur, le diocèse de Nancy. Promu 4 l'Archevêché de Bordeaux le 30 pôvembrè 1836. Créé cardinal le 15 mars 1852. A Bordeaux on rappelle le papa Donnet! 1 Cette qualification dit assez clairement de' quelle notoriété jouit dans sa ville métropolitaine le vieux cardinal Il y a trente-huit ans qu'il y exerce le ministère épiscopal. Aussi sa présence dans la cité est devenue 'aussi natu*
relle que l'est au foyer domestique eelle du père de famille.
Souvent on peut rencontrer dans les rues de Bordeaux le cardinal Donnet se promenant en simple mortel, comme le ferait dans son village un bon curé de campagne. Il est tellement connu dans la cité gasconne, quelles enfants eux-mêmes font cercle autour de lui il fait alors à la ronde une distribution de friandises, pendant que les plus mutins de la bande se suspendent triomphalement aux glands de sa ceinture. Nous nous rappelons avoir surpris l'année dernière le cardinal dans l'une do ces promenades en famille; il était arrêté sur une petite place voisine du port. Sa magnifique tête blanche ressortait admirablemènt au-dessus d'un groupe de bambins hâlés par le soleil. Il portait la soutane noire ornée seulement de boutons rouges, et un chapeau qui n'eût pas fait trop mauvaise figure au musée des antiques. Malgré ses soixante-dix-neuf ans, le prélat est encore guilleret et porto avec aisance un embonpoint fort satisfaisant. Nous eûmes la curio-
sité de le suivre jusqu'à ce qu'il lut renne «* son palais. La route n'était pas longue, et pourtant elle ne dura pas moins de deux heures. A chaque pas, pour ainsi dire, il trouvait moyen de faire une station causant avec les mères, bénissant les enfants, serrant la main aux hommes; souriant à tout le monde. Chaque pauvre, en s'adressant à l'archevêque, est sûr de ses vingt sous jamais il ne donne moins, souvent il dépasse- la somme. Son clergé l'aime autant qu'il le vénère.
Après quelques années de vicariat à Lyon, Mgr Donnet se consacra aux missions. Sa parole pittoresque et facile laissa des traces, dont le souvenir n'est pas encore effacé. Lorsqu'on 1836 il succéda sur le siège de Bordeaux à Mgr de Cheverus, on trouva que ses mandements rappelaient les qualités oratoires et littéraires de son prédécesseur.
A l'archevêché de Bordeaux, on pratique largement l'hospitalité. Le cardinal n'est pas avare de ce vin bien connu dont il expédie des échantillons sur différents points de la France. Il est, du reste, un excellent convive, et ne dédaigne pas, au dessert, un de ces mots que la gaieté gauloise sait seule inspirer. Un jour qu'il avait dîné dans un presbytère, le curé, servit, pour accompagner le café, certaine eau-de-vie qui, depuis vingt ans, marinait dans un tonneau. L'amphitryon p.ut soin de glisser un mot au cardinal sur l'âge de la liqueur « Eh bien, mon brave curé, répondit Mgr Donnet en prenant son verre, puisque cette eau-de-vie a vingt ans, exemptons-la de la conscription, en la faisant entrer dans le corps sacerdotal. »
Il était allé un autre jour présider une bénédiction de cloches. Après la cérémonie, grand dîner auquel assistaient toutes les notabilités du cru. Entre la poire et le fromage, le maire de la localité éprouva le besoin de prononcer un petit speech à l'adresse du cardinal. Le pauvre homme avait peut-être un peu trop arrosé son repas. Aussi l'on voyait bien qu'il voulait dire de bonnes choses, mais la langue était légèrement embarrassée. En entendant cette éloquence si pénible, le cardinal se pencha vers son voisin et lui dit à demi voix « Décidément, ce cher homme manie mieux le.verre que la prose. »
M^ DUBREUIL, archevêque d'Avignon Né à Toulouse, le i8 janvier 1808. Professeur de
rhétorique et directeur au Petit-Séminaire de
Saint-Pons. Sacré évêque de Vannes le 8 septembre 1861. Transféré l'archevêché d'Avignon le 20 octobre 1363.
Mgr Dubreuil ne vise à l'élégance ni dans sa mise ni dans sa démarche: quand il se promène dans les rues d'Avignon, il accentue le pas à la façon du marin qui semble toujours lutter contre les effets du roulis. Il est, du reste, charpenté avec plus de solidité que de perfection et l'on dirait, qu'après l'avoir ébauchée, la nature a oublié de parfaire son œuvre. Il a surtout une chevelure pour laquelle il ne doit pas souvent mettre à contribution l'art du coiffeur. Mais l'archevêque d'Avignon n'est pas homme à s'arrêter à ces menus détails. Il possède par devers lui des qualités qui le recommandent suffisamment au respect et à la vénération de ses diocésains. Et, en l'envoyant administrer la ville qui servit autre- fois d'asile aux Papes, le ministère a été heu» reusement inspiré dans son choix.
Il possède la littérature comme un professeur dont les cours faisaient jadis le bonheur de la jeunesse qu'il instruisait. Causeur fin et ingénieux, il saura, pendant des heures entières, vous tenir sous le charme de sa conver.sation. En public, il a une parole élégante et imagée, mais le débit est parfois pâteux et embarrassé.
Sous l'Empire Mgr Dubreuil passait pour avoir de fortes attaches bonapartistes. Nous ignorons jusqu'à quel point ces allégations étaient fondées: ce qu'il y a de certain et d'incontestable, c'est que l'archevêque d'Avignon s'est toujours montré d'une grande impartialité vis-à-vis des hommes de tous les partis. Il est trop intelligent pour ne pas savoir qu'un évêque est l'homme de tout le monde, et pour ne pas pratiquer cette maxime.
Mgr FORCADE, archevêque d'Aix. Né à Versailles, le 2 mars 1816. Nommé évêque de Samos in partibus, et vicaire apostolique du Japon en 18Î6, sacré en Chine, a Hong-Kong, en 1847. Transféré au siège de la Basse-Terre (Guadeloupe) en 1853, puis à celui de Nevers en 1861. Promu a l'archevêché d'Aix en 1873.
Mgr Forcade est le meilleur nageur de l'épiscopat français. Cest un talent qui peut servir parfois, même à un évêque; En 1853, les Japonais, alarmés des progrès du christiaiism» au milieu d'eux, eurent recourt & ua
moyen radical ils mirent tout slaphm.' ~i le grappin sur leur vicaire apostolique et l'envoyèrent attendre en prison qu'il olût au gouvernement d'Yodo de lui couper la tête. On lui avait assigné comme résidence une pagode située sur le bord de la mer. Un jour, Mgr Forcade aperçoit au large un bâtiment fiançais ayant le cap sur la Chine. Le brave vicaire apostolique avait bien fait déjà le sacrifice de sa vie, mais c'est une forte tentation pour un nageur, quand quelques kilomètres d'eau seulement peuvent l'arracher à la mort. Aussi, Mgr Forcade trompe la surveillance de ses geôliers, ne garde pour tout vêtememj que les rayons du soleil, descend en tapinois à la mer, se confie aux flots et cingle de tous ses bras vers le bâtiment français. Après trois heures de cette course aquatique, on le hissait à bord. Dès qu'il s'est fait reconnaître, le capitaine lui dit Monseigneur, je suis précisément porteur d'un pli à votre adresse. » Puis, il lui remet une large enveloppe au sceau du ministère des cultes. Mgr Forcade en brise le cachet et y trouve, quoi?. sa nomination au siège épiscopal de la Basse-Terre. Je vous laisse à penser si les vieux loups de mer serrèrent la main de l'intrépide nageur, et s'il y eut fête à bord.
A ceux qui veulent se faire une idée exacte de la personne de Mgr Forcade, nous dirons de se représenter Napoléon I" à l'âge de soixante ans. Impossible de rencontrer deux types offrant une ressemblance aussi parfaite même taille, même embonpoint, même regard, et sur beaucoup de points mêmes idées. Sa parole brève et (impérieuse) effraie parfois les gens mais si vous pratiquez un peu l'archevêque d'Aix, vous verrez que c'est une riche nature et un cœur d'or. Interrogez à ce sujet et son clergé et ses diocésains.
Mgr Forcade, qui s'est toujours fait remarquer dans l'administration ecclésiastique, aurait pu, oroyons-nous, briller également à la tête d'une armée. Il aime beaucoup les militaires, les reçoit volontiers et se mélo à leurs conversations, presque en homme du métier. Ses conseils eurent une grande influence aux Tuileries pour décider l'Empereur à l'expédition de Chine.
Sa ressemblance avec Napoléon I*r a donné lieu, parfois, à des insinuations tout au moins malsonnantes. A Nevers même, une feuille écarlate osa se faire l'écho de ces cancans il y a des gens payés à tant la ligne pour inventer la calomnie. Mgr Forcado appréhenda alors l'écrivassier, dont le journal eut a jouer, devant le public, un rôle des plus mélanco- liques. '̃̃̃-••
L'archevêque d'Aix n'est ni un écrivain hors ligne ni un orateur extraordinaire. Mais il a un talent remarquable quand il s'agit de narrer. Sa vie, si accidentée, est pour lui une source d'anecdotes intéressantes qu'il raconte avec autant d'esprit que d'originalité.
Mgr FRUCHAUD, archevêque de Tours, Né à Trementines (Maine-et-Loire), le 30 juillet" ISil. Bacrû évoque do Limoges le 30 novembre; 1859. Transféré à l'archevêché de Tours le 30sejptombre 1871,
Dans le diocèse do Limoges, Mgr FruchaudT avait conquis à juste titre la réputation d'administrateur puissant. Les limousins, en effet, ne sont pas toujours faciles à conduire, et, quand un évêque arrive à les dominer, tout en les menant au bien, on peut dire qu'il sait unir une grande habileté à une vigueur de- caractère peu commune. A Tours il déploya sur un théâtre plus vaste encore les qualités qui avaient attiré sur lui les regards du mi-, nistère. Du reste, il trouvait dans l'Indre et Loire une besogne qui ne réclamait pas moins que son savoir-faire et ses aptitudes admi. nistratives.
Mgr Guibert, quand il se croyait engagé par, son devoir, ne reculait ni devant les difficultés, ni devant les luttes avec les administrations municipales. Aussi, lorsqu'il prit la route de Paris, ses anciens diocésains ne se désolèrent pas outre mesure de son départ. Mgr Fruchaud, lui, emportait les regrets de Limoges, il arrivait à Tours précédé d'une belle réputation. Il sut utiliser la position, profita des circonstances et dissipa en quelques mois les nuages qui assombrissaient le beau ciel de la Touraine.
Mgr Fruchaud est un homme solidement bâti, comme disent ses diocésains c'est vrai, tpour le physique aussi bien que pour le mo.ral. Sa démarche, un peu alourdie peut-être, ne manque pas cependant de majesté. Sa taille au-dessus de la moyenne se trouve réduite à des proportions ordinaires, parce qu'il n'a pas toujours soin de se tenir droit en marchant. Son visage, qui respire la bonté, est agrémenté de deux favoris naissants. Il pratique l'hospitalité comme un bon Angevin qu'il est. Sa conversation est fort agréable ses discours plus solides que brillants.
Mgr GERAULT DE LANGALERIE, archevêque d'Auch.
Né à Sainte-Foy (Gironde) le 20 août 1810. Professeur de physique et de mathématiques au grand séminaire de Bordeaux; préfet des études au petit séminaire, secrétaire général de l'archevêché professeur de droit canon à la Faculté de théologie. Curé de Saint-Louis à Bordeaux, vicaire général du diocèse. Nommé à l'évêché de Belley le 1" mai 1857. Transféré à l'archevêché d'Auch, le 30 septembre 1871.
L'archevêque d'Auch appartient à une antique famille de la Guyenne, qui, jusqu'à la révocation de l'édit de Nantes, se fit remarquer par son attachement au protestantisme. Sous le règne de Louis XIV, elle rentra dans le giron de l'église catholique, et sedistingua depuis lors par.son dévouement au SaintSiège. La lignée, des Langalerie compte du reste d'illustres alliances avec les plus nobles lamJHea du Bordelais, et ce nom a touiourj