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Titre : Le Figaro. Supplément littéraire du dimanche

Éditeur : Le Figaro (Paris)

Date d'édition : 1920-08-01

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb343599097

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb343599097/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Description : 01 août 1920

Description : 1920/08/01 (Numéro 70).

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k273338w

Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-246

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 15/10/2007

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pha.nt refusa l'alcool, donnant ainsi à l'humain une leçon de tempérance.

On se lasse de tout, même d'un éléphant. Comme il refusait obstinément de se livrer à la boisson, le Mage se demanda, anxieux Qu'allons-nous en faire?

-L'adopter, conclua Chalier; il vient du pays des mages. Tu' feras, ce matin, ô Maître une entrée triomphale, rue d'Alésia, Se laisse-il monter? consulta le Mage. Grimpé toujours, je servirai de cornac. Chalier prêta ses deux mains, en guise d'étrier, et le Mage monta sur l'éléphant qui se laissa faire. Le cortège, suivi d'une foule respectueuse, prit la direction de la lue Montmartre.

-Tu te tiens? demanda le cornac au Mage.

Comme, dans un fauteuil, répondit l'homme inspiré des dieux.

L'un portant l'autre, ils franchirent les boulevards sans incident. Tout alla bien jusqu'aux Halles. Mais là, les lumières, l'odeur de la marée, des légumes, et que sait-on ? '? produisirent sur le pachyderme un effet inattendu. L'animal, abandonnant sa marche tranquille et lente, exécuta le pas de l'oie et entra dans le carré des champignons qui se liquidaient aux enchères les paniers furent écrasés, les crieurs renversés, les acheteurs bousculés; une clameur formidable s'éleva dans la foule; les femmes épouvantées prirent la fuite, les'porteurs se servirent de leurs hottes comme boucliers, les forts brandirent leurs chapeaux pour effrayer le monstre.

A ce moment tragique, une bande d'énergumènes déboucha de la rue Montorgueil, en hurlant

V'la Tissapherne 1

C'était les noctambules sectaires. Il y eut une mêlée indescriptible.

Sans plus s'émouvoir du bruit, des menaces et des coups, l'éléphant s'engagea dans la rue Baltard, renversant les étalages, piétinant les carottes, les choux et les navets, pendant que le Mage, debout sur la bête, chantait à tue-tête

Un éléphant se baladait, You You 1

Derrière une planche à bouteilles.

Le cornac Chalier ne se sentant plus maître du pachyderme, le précédait, levant les bras et criant

Sauve qui peut! La bête est piquée, par une mouche tsétsô 1

Le coup de la mouche tsétsé eut un effet immédiat les plus braves disparurent dans le frigorifique.

Heureusement, la police veillait. Bientôt l'animal fut entouré de H. C. (1) qui lui firent prendre la rue des Prouvaires et le conduisirent au poste comme un vulgaire manifestant socialiste ou royaliste. Le Mage dut s'aplatir sur le dos de sa monture pour passer sous la porte-cochère et la voûte, qui existaient encore. La cohue envahit le poste. L'éléphant resta dans la cour, parce qu'il était trop gros.

Devant le brigadier de service s'engagea une discussion confuse. Tous les assistants parlèrent à la fois. Qui était le propriétaire de l'animal? v .̃̃

Moi, affirma quelqu'un..

Vous vous appelez? questionna le brigadier.

Charlequin.

C'est pas vrai, s'écria le Baron.

Comment, je ne sais pas mon nom? protesta l'interpellé.

Tu n'es pas propriétaire,, Le Mage qui avait sauté à terre, intervint et dit

-r- Le propriétaire de ce pachyderme. Pachyderme toi même 1 injuria le Docteur.

Idiot riposta le Mage.

Cette épithôte fit bondir le Docteur qui ferma l'œil gauche du Néo-Chaldôen avec son poing droit. Une bagarre épique s'ensuivit qui nécessita l'intervention de la force publique.

Pendant que les humains se colletaient, l'éléphant, oublié, quittait la cour du poste et gagnait la rue Berger; comme il arrivait devant le pavillon de la boucherie, un gamin de Paris, commis au pavillon des poissons et qui portait un homard à la criée, croisa l'animal géant; une idée saugrenue lui traversa l'esprit; il lança son homard sur l'éléphant. Le décapocle pinça le pachyderme au seul endroit sensible -que la nature lui avait infligé. Sous le coup de la douleur, l'éléphant lança une ruade qui renversa une voiture de viande, puis il pénétra* tête baissée, dans le café des Deux-Clairons. < Le homard ne lâchant pas prise, l'éléphant brisa le comptoir, arracha la suspension et saccagea le débit que les clients avaient évacué dare-dare, laissant, qui, son chapeau, qui, ses paquets.

La pauvre bête eut la malencontreuse iSée de démolir la conduite de gaz; elle provoqua un incendie et voulut fuir mais les flammes l'entourèrent bientôt. Elle poussa un lamentable cri de détresse, comme seuls en savent clamer les éléphants.

Quand les pompiers arrivèrent, l'éléphant avait cessé de vivre.

Une enquête fut ouverte; elle n'a jamais été fermée. et ceci se passait en 1908. Louis Thinet.

TAXES D'HIER ET D'AUJOURD'HUI

Le droit fles pauvres au Théâtre Il est à peine nécessaire de rappeler que les nouvelle taxes d'Etat étaient à l'origine du récent conflit qui s'gst élevé entre les directeurs d'établissements de spectacles et l'Assistance publique. Cette dernière prétendait percevoir le nouveau droit des pauvres de 25 0/0 sur le montant des recettes, augmenté du produit de ces taxes, tandis que les premiers soutenaient que l'Assistance publique n'avait rien à connaître de ces taxes. L'amendement de M. Henri Auriol, voté par la Chambre, vient de donner raison aux directeurs, mais ce petit drame fiscal est une intéressante occasion de constater que l'Assistance publique n'avait fait qu'y défendre des traditions très anciennes et une immuable manière de voir.

̃»•

L'histoire du droit des pauvres remonte qui s'en douterait? jusqu'aux débuts du théâtre, jusqu'aux Confrères de la Passion en 1541, en effet, un arrêt du Parlement de Paris imposait cette troupe de comédiens religieux d'une somme de huit cents livres parisis au profit des hospices de la ville et, dix ans plus tard, on voit le receveur de la Grande Aumône prélever une certaine redevance sur les recettes de leurs représentations, à Valenciennes.

Ce précédent ne fut cependant pas appliqué aux acteurs de l'Hôtel de Bourgogne qui remplacèrent les Confrères, ni à ceux du théâtre du Marais, non plus qu'à la troupe de Molière. Lorsque la Comédie-Française (1) Brigade spéciale des gardiens de la paix des Halles Centrales.

elle-même s'organisa en 1680, elle ne paya aucun impôt semblable; seulement quand, en 1689, elle abandonna la salle de la rue Mazarine pour celle de la rue de l'AncienneComédie, elle décida de prélever chaque mois sur ses recettes une certaine somme qui devait être distribuée aux couvents et communautés religieuses les plus pauvres de Paris et ce fut à qui serait le plus nécessiteux, des Capucins, à qui cette mesure charitable fut accordée en premier lieu, et des Cordeliers ou des Augustins qui revendiquèrent bientôt la faveur d'en bénéficier aussi

Il faut attendre le début de 1699 pour trouver une ordonnance royale qui créât un impôt vraiment régulier d'un sixième sur les spectales en faveur des pauvres, et ce fut un grand émoi de voir mettre, à cette occasion, à dix-huit sols les places de parterre Mais, pour faciliter la perception de cette taxe, on convint que l'Opéra et la Comédie-Françaire prendraient chacun un « abonnement » fixe à 40.000 livres pour le premier, et à, 25,000 pour la seconde. Puis, il apparut que cet arrangement favorisait trop les théâtres et, dès 1701, une nouvelle ordonnance la supprimaitetdécidaitque les pauvres recevraient le dixième des recettes « sans aucune diminution ni retranchement, sous prétexte de frais ou autrement ». A partir de cette date, les hospices devinrent intraitables, et l'on rapporte que les comédiens essayèrent sans succès de se prévaloir de la stricte conscience avec laquelle ils acquittaient les droits, pour obtenir la levée de l'excommunication qui les frappait alors!

En 1713, cet impôt fut étendu à quelques petits théâtres qui venaient de s'établir aux foires Saint-Germain et Saint-Laurent; puis, en 1716, quelque impitoyable prédécesseur de M. Mesureur trouva probablement le taux trop modeste et taxa tous les théâtres à un neuvième en sus, ce qui portait l'impôt à 25 0/0. Ce furent déjà de belles protestations dans le monde des théâtres, mais en vain, car des ordonnances rendues successivement en 1718, 1719, 1720, maintinrent cette lourde redevance les intéressés tentèrent bien de lutter, mais les hospices n'hésitèrent pas à saisir, sans plus de façon, le montant des droits qui leur revenaient.

Ce « quart des pauvres », comme on l'appelait à cette époque, subsista sous cette forme jusqu'à la Révolution. On le supprima en 1791, quand les théâtres devinrent libres, mais, dès le 11 nivôse anIV (1er janvier 1796), toutes les scènes de Paris furent « invitées » à donner chaque mois une représentation au bénéfice do la caisse des hospices du moins déduisait-on alors les frais journaliers et la part d'auteur Ce traitement à pou près équitable ne dura pas. Par une loi du 7 frimaire an V (27 novembre 1797) un impôt d'un décime par franc fut prélevé pour les pauvres sur chaque billet, dans les grands théâtres et, le 8 thermidor suivant (26 juillet 1798), une seconde loi, confirmant la première, frappa d'une taxe du quart do leurs recettes tous les petits établissements de plaisir public concerts, bals et spectacles divers. Enfin, en 1809, l'impôt fut porté de 10 0/0 à 11 0/0 et, durant tout le dix-neuvième siècle, l'Assistance publique a perçu le onzième de la recette brute des théâtres, avec une rigueur qui est un frappant exemple du goût que l'on a de puiser dans la poche du voi-

sin.

>ïo r<t': .*̃̃̃'̃'̃ François Boûohers

«. ̃̃•̃ ̃ri?o:l:

La rampe ciselée où courent les glycines Tressaille aux doux contacts de tes doigts effilés, Ton corps souple se plie et tes grâces félines Ont la souplesse aussi des roseaux et des blés. A l'horizon, là-bas, les flammes purpurines Du soleil qui se meurt sur les monts dentelés Caressent, visions étranges et divines,

Nos souvenirs d'amour, de rêve et d'or voilés, Oh! vivre auprès de toi, comme est belle la vie Aux éblouissements ton être me convie.

Mon cœur est enivré de tendresse et de foi. Tout disparaît, tout fuit devant mes yeux sincères Et, seuls, nous demeurons au seuil de nos mystères, Car le monde c'est nous. non, le monde, c'est toi! v Elie Brachet.

Carnet de brousse

I Odîn furleux

3 août 1914.

Une orgie triste et lourde. Un bruit d'assiettes, de verres heurtés. Madina, Zélébé et Sossou, la pipe aux lèvres, bavardent, frappent des mains à contretemps, se trémoussent. Madina a enlevé son foulard pourpre et fait admirer ses cornes chevelues que lustre un onguent à la rose. Mais Joald Zeyer ne la regarde pas il aligne, sur la nappe maculée, les cadavres vingt bouteilles Von Trignis, taciturne, songe à la Bavière, à l'usine en briques rouges où son père fabrique des fromages avec du suif. Schœn, lieutenant de marine, montre du doigt une énorme lithographie du Kaiser qui resplendit sous les feux d'une lampe à acétylène.

Camarades, portons un toast à l'Empereur.

Déboutées business-men, vident leur coupe. Zeyer a son compte et s'écroule. Schoen ricane

Ce Poméranien ne sait pas boire. Dites, Trignis, si les nôtres se décidaient à attaquer Grand-Popo ? Pourquoi ne viennent-ils pas nous délivrer? Les Français ne sont qu'une poignée. Quelle noce ? Nous inviterions ces dames tandis que leurs maris iraient en prison. Hein la résidente est une Flamande à mon goût et la petite femme de l'adjoint n'est pas mal non plus. Laquelle préféreriezvous ?

1 Comme au tennis, mon lieutenant, pourvu que j'aie ma partenaire je vous laisserai le choix.

Vous avez le sens de la hiérarchie, Trignis, je vous proposerai pour l'avancement si vous servez sous mes ordres. Un Martell, mon ami 1

Je n'en veux plus.

Je boirai pour trois, rugit Schoen. Vive l'Empereur!

Le boy met en marche un gramophone. Trignis a des nausées. Le disque tourne Deutschland ùber ailes! Le soudard saisit le flacon, avale l'alcool doré et se cramponne à la table. La terre, les étoiles tremblent. La ville aux toits de carton, de zinc, tangue dans la nuit,

«*•̃•̃

Les Allemands vont quitter Grand-Popo et seront internés en Nigéria. Les Français ont pris rendez-vous aux bords de la lagune. Les pirogues sont là; les gardes surveillent la valetaille qui charge les bagages. Les boutiquiers noirs prennent les dernières instructions de leurs maîtres. Joald Zeyer, à voix basse, rassure da Souza, le gérant de la

Deutscb, graisseux, bedonnant, aux doigts cerclés de bagues

Prenez note de tout ce que feront les Français. Nous reviendrons dans trois semaines.

Obséquieux, l'indigène s'incline en sonriant.

La luneenduit d'un vernis clair les cocotiers, les villages riverains. On n'entend que des chuchotements et les clapotis des vagues qui battent les rôniers du pont. L'angoisse contracte nos gorges. La guerre Est-ce possible ? Il y trois jours, nos ennemis jouaient au bridge chez l'administrateur et chez eux nous goûtions la bière allemande. Seuls, les commerçants et les douaniers se réjouissent moins de concurrence et de connaissements. Mais les autres Chacun s'essaie à être correct.

Von Trignis, gêné, serre des mains. Schoen goguenarde

Nous nous reverrons.

Un « bonsoir, messieurs » dur répond à cette impertinence. '>

Joald Zeyer, roide à la proue de sa barque, tête nue, dédaigne de se retourner. Il n'a salué personne. Ses cheveux rouges, ses habits sont inondés de lumière, la lune le revêt d'une armure blanche il ne manque que le cygne.

Le Couvent

A mi-côte de la masse rocheuse, le couvent dresse ses murs percés de meurtrières. Une tour courte, boiteuse, crénelée le domine. A l'intérieur s'élèvent des cases au chaume violet, des autels de terre. C'est un va-et-vient de féticheuses le cou, les poignets, les chevilles chargées de cauris. Des prêtres, accroupis aux portes, somnolent.

Dehors, juchée sur une pierre, une folle, la face putrescente, sourit, interpelle un monde invisible. La marmaille, vautrée au soleil, l'écoute. Nulle majesté n'enveloppe le temple où les sacrificateurs gardent les secrets de la race. L'ombre do la montagne écrase le morne collège. Une place, où jaillit le filt desséché d'un baobab, l'entoure. Çà et là des niches basses abritent le fétiche sensuel, guérisseur des jeunes hommes.

L'idole est arrosée d'huile de palme, piquée devînmes de poulets.

Des boucs affamés reniflent ces offrandes. Chasse

Je tirai doux coups de feu. Je la vis s'arrêter, puis repartir mais elle était trop éloignée pour qu'il me fût possible de définir son espèce. La plage, le large, le ciel formaient un seul plan, comme glacé, où la bête avait creusé un trou. Elle hurlait, blessée sans doute.

Y a bien touché, fit mon compagnon, mais c'est pas moyen chercher; 'c'est noir maintenant et l'eau c'est venir beaucoup. Le flot montait, crachait une poussière humide. \Des milliers de crabes émergeaient du sable et la nuit mangeait, l'une après l'autre, les palmeraies. S'en aller! il était temps, mais la plainte de l'animal persistait et les démons de la barre lui répondaient. Je restai sur place, effrayé par le reproche de la Mer.

Jean-Francis Bœuf.

EN VOYAGE

Un cloître inconnu

(TCTBH3A.X:)

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Prendre au hasard un sentier, sans but, pour le simple plaisir de se promener, pousser une porte banale et se trouver tout à coup devant une chose tellement enchanteresse qu'involontairement une exclamation monte aux lèvres, quel plaisir Cette sensation d'enthousiasme, je la dois à un cloître d'Espagne; bien que situé à deux pas de la frontière française et de la route dont les lacets mènent à il Pampelune, en passant par.Elizondo, pays de Carmen, il est à peine connu et les guides se contentent de le mentionner en deux lignes. Rien de plus secret que l'endroit où se cache ce cloître abandonné. Les capucins de San-Norvcrto, qui l'édifièrent au dix-septième siècle, le choisirent sans doute pour son éloignement de toute cité,' pour les murailles que lui font les montagnes, pour sa profondeur de bas-fond arrondi en cirque et dont l'accès exige quelque fatigue. ,̃<

Je venais de quitter le^village basque d'Ainhoa. Le soleil était si chaud, la route si sèche, si nue, que j'allais m'en retourner lorsque j'aperçus à droite, sous des chênes bas, un sentier qui avait dans ses sinuosités je ne sais quoi de paresseux qui allait à merveille avec la lenteur indolente de ces chars à bœufs particuliers au pays basque et dont le conducteur marche toujours en chantant. Je le pris. Le sentier descendait, franchissait un pont de pierre, puis s'arrêtait devant un vieux village, dont les maisons aux portes ogivales étaient surmontées presque toutes d'un écusson armorié. Je sus par une inscription qu'il s'appelait Urdax. Autour de ces maisons, tout près, la montagne couleur de vieux bronze dresse un rempart si fermé, si sauvage, qu'on ne peut croire qu'après, il y ait des êtres, des régions habitées, de la vie. Je demandai à ce passant si ce village contenait une cùriosité quelconque, il me répondit: aucune. Je voulus tout ou moins voir l'église. Je la trouvai sur une sorte de place très longue, entièrement veloutée par l'herbe. Massive, carrée, ridée, sans autres ouvertures que des espèces de meurtrières percées très haut, elle avait l'air rébarbatif. Je voulus ouvrir la porte, elle était verrouillée j'allais partir, lorsque j'aperçus dans un bâtiment long, bas, collé à l'église, une autre portp, qui était entre-bâillée. Je la poussai.

Où suis-je Se peut-il qu'en une seconde le décor ait changé à ce point! 1 Derrière moi, à trois pas, cette place de village aveuglante de soleil, puis brusquement ceci. De quelles verrières tombe la lueur verdâtre qui règne en cet endroit; à travers quelles nappes d'eau marine passe-t-elle, de quelles dalles monte cette fraîcheur de souterrain; et ce silence qui a l'air d'attendre du mystère, d'où vient-il ?.Est-ce la fantaisie d'un rêveur qui a composé ce lieu romanesque, ou le hasard; est-il la demeure d'un poète épris de silence ou de quelque princesse recluse; et n'est-ce pas sacrilège d'y entrer?. Lieu enchanté! II me donne cette sorte de saisissement qui vous force à parler bas une fascination telle en émane que je n'ose avancer il me semble que le moindre de mes mouvements, le moindre bruit, ne serait-ce qu'un éclat de toux, briserait l'extraordinaire charme au pouvoir du-

quel sont toutes choses ici et en brouillerait cette lumière mystérieuse que je n'ai vue nulle part ailleurs. Le cloître Haut et carré, entouré de deux galeries superposées aivmilieu desquelles a grandi un faible jardin, tout en cette pierre dupaysquiestexactementrose,ilestsans architecture, sans sculptures, sans ornements, il est même d'une simplicité qui indiquerait que ses constructeurs étaient pauvres; et sa beauté pourtant est incomparable. Des éléments occultes, les siècles, l'abandon, l'humidité la composèrent, mais on dirait qu'une main en dirigea sans cesse le lent travail, qu une volonté tenace voulut qu'ils fussent les seuls artistes de ce lieu, tout en le préservant de l'effondrement et de la ruine. Ce cloître, quand on le regarde bien, il 'semble qu'il n'ait été qu'une armature dressée jadis pour recevoir les coloris que lui mettraient les saisons et les siècles, qu'un moyen de voir quelles beautés saurait en faire le temps. Et mainte-"nant, le chef-d'œuvre est à son point de perfection, à ce moment fragile où les choses semblent donner dans un effort suprême leur plus grande beauté, à cette limite au delà de laquelle commence l'effritement.

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Rien de plus silencieux que l'aspect du jardin qui, lentement, a poussé à l'ombre de ces murs; mais peut-on appeler jardin quelques arbustes d'où fuse un magnolia, dont les feuilles vernies comme du caoutchouc semblent faire un effort désespéré pour dépasser ces murs et atteindre la vaste lumière qui est pourtant là, si près? Le vent, qui n'est jamais descendu ici, ne les a pas contrariés, aussi ont-ils poussé droit, mais la privation de lumière, l'humidité du sol, l'étreinte de l'ombre leur ont donné un je ne sais quoi d'étiolé que n'ont pas les arbres venus au grand air, un aspect de consomption, un air mélancolique, comme le regret d'avoir vécu dans un endroit qui est presque ce quelque chose de si particulièrement triste qui se, nomme un préau. Quand on sort de là galerie d'eu bas pour voir le ciel, on a l'impression d'en regarder l'azur du fond d'un puits. Autour de la galerie supérieure, sur labalustrade, un pot de géranium vif rouge est posé; dans ce décor d'abandon, cette plante éblouissante est seule à indiquer une présence humaine, et on ne sait pourquoi elle a l'air, toute seule là, si seule, d'appartenir à un prisonnier. En bas, c'est le domaine de la mousse et de l'humidité. Je fais quelques pas sur les dalles dont l'une est un tombeau; lentement, je fais le tour de la lueur verdâtre. Dans le mur, deux portes presque démolies donnent sur des couloirs déserts et pleinsd'ombre; si je laissais aller mon imagination, j'aurais presque peur, tant est complet le silence, tant sont sonores les échos de mes pas, tant sont menaçantes ces portes béantes sur de la nuit sinistre. Mais voici qu'un pas, un pas qui n'est pas le mien, vient de résonner sur les dalles; et c'est tellement inattendu que je ne puis réprimer un sursaut, rapide comme l'effet de la terreur. Une vieille femme, dont le dos courbé est recouvert d'un long châle noir, s'avance, vient à moi, fait de sa main droite qui tient une énorme clef, un geste circulaire, tremblant, lent, puis me dit sans préambule; comme se parlant à elle-même « Le cloître. » Gardienne de ce lieu désert, habitante de la galerie où brille le géranium, on ne sait?. Le cloître, répètet-elle puis, silence; après une respiration longue, la voix cassée qu'un souffle court arrête à chaque mot, reprend et dit: «Autrefois, des moines habitèrent ici; ils étaient pauvres, ils vivaient de la charité publique. Pendant deux siècles, ils eurent la paix; puis vint la guerre carliste, alors le cloître servit de caserne et d'arsenal; le général Zumalacarrôguy. avait dans les moines, des soldats dévoués, prêts à défendre le drapeau de son maître Don Carlos, puis, quand le roi Charles V fut vainqueur, il les chassa. Zumalacarréguy mourut au siège de Bilbao; et depuis, le cloître est seul, et personne, jamais, ne vient le vi- siter, personne. Ces choses du passé, elle les adites lentement, en épelant les syllabes, en les détachant une à une, donnant l'impression qu'à chaque mot, il lui fallait faire provision de souffle. Au nom du généra! illustre, de celui qu'un poète .appela L'homme, à la grande épée, du soldât dont lés hautes qualités furent t ternies par des actes cruels, la voix faible s'est, arrêtée comme si la vieille femme avait voulu fixer sa mémoire un instant sur les souvenirs lointains du Carfisme, puis elle s'est tue tout à fait. Uu instant la vieille reste là, exténuée, les coudes à ses hanches maigres, son visage couleur de buis tourné vers les arbres, et elle va vers une des portes sinistres, puis s'accroupit sur la pierre, à l'entrée de l'ombre.

':•• "«a»- v.

Mais que vois-je? En face, sur le balustre de la partie supérieure, une tache rose vient de se former; on dirait une fleur qui vient d'éclore la tache grandit puis bouge lentement, devient d'un rose de flamme de Bengale; un instant jesuis là, fasciné; je n'avais point reconnu le soleil. Rien n'a plus de mélancolie que ce soleil qui entre à pas sourds, pose une fleur vermeille sur la pierre, continue son court trajet sur ce balustre et s'en va, disparaît peu à peu, telle une buée qui s'évapore.

Je pense à ceux qui vécurent ici. Quel prix devait avoir pour les solitaires de ce cloître ce soleil du soir qui arrive discrètement et ne fait que passer! Avec quelle tristesse' ils devaient regarder défleurir la pâle tache rose 1 J'entends bouger derrière moi la femme à la clef. La nuit va descendre vite, il faut partir; la vieille se lève, me fait signe de là suivre. Quelques pas, elle pousse une porte basse qui est tel1ement couleur de la muraille qu'elle ne paraissait pas, et un autre spectacle est devant moi, aussi étrangeque le cloître l'église. Presque sans fenêtres, elle ne doit pas être déjà très claire en plein jour; maintenant, à l'entrée du soir, la nuit y est complète. Sur le sol dallé, des petits tapis noirs sont étalés, et sur chacun d'eux estposée une corbeille pleine d'une cire enroulée dont l'extrémité verticale est allumée. Selon une antique coutume, chaque famille en deuil met à sa place ce tapis noir, cette cire, et l'allume à chaque office. Une cérémonie vientde finir; toutes les corbeilles de cire portent au sommet leur fleur lumineuse, les petites flammes brûlent au ras de terre Tout d'à- bord, on ne comprend pasy cela est magi-

Il

que,on dirait un phénomène du sol, des feux produits par des gaz souterrains. Mais peuà peu, mes yeux s'habituant àla pénonibre, je distingue là-bas, agenouillées les formes noires, hermétiques, de deux femmes. De leurs longs voiles noirs s'échappe un bruit de prières, à peine distinct, pareil à un chuchotement. Autour, c'est le silence, ce silence endprmeur qui envahit les églises quand les offices sont terminés, quand il ne reste plus que quelques fidèles éparpillés dans l'ombre.

Dehors, le jour, bien que unissant, me blesse; il me semble que je sors d'un sommeil à travers lequel j'aurais vu ce cloître et cette église. -Paul-Faure.

Paul-Faure.

CHEZ LE LI~RA~RE UN CŒUR VIERGE

Par Eugène Mont fort Ernest Flammarion, éditeur.

Un jeune artiste peintre aborde certain jour à l'île d'Houat, au large de Quiberon, île fortunée qui semble avoir survécu à l'âge d'or, les mœurs sont simples comme les cœurs, «où tout est ordre et beauté», et qu'enveloppent de leur chant les grandes orgues duvent.Illoge quelques jours dans la famille **tlu pêcheur Toussaint Leblanc, puis, passionné do solitude, établit sa demeure dans un vieux fortin démantelé.

Un gentilhomme ruiné, le comte do Kéras, habite dans l'île avec sa femme et sa fille Anne. Le peintre rencontre la jeune fille et il s'explique à sa vue l'attirance secrète qui l'a guidé vers ce pays et à laquelle, inconsciemment, il a obéi. Anne a été élevée loin du monde, dans l'ignorance de tout; vierge pure et naïve, elle ne connaît que ses chèvres et jamais elle n'a lu que des contes do fées. Aussi l'artiste dont le pinceau reproduit la nature lui apparaît comme un magicien.

Une,idylle, cependant, les rapproche, et Anne, dans sa chasteté candide, s'abandonnerait dangereusement à l'amour ardent du jeune homme, si celui-ci, touché par tant d'innocence, no maîtrisait son désir. Epouser Anne est néanmoins impossible, car ses parents ne consentiraient pas à son mariage. Son amoureux, alors, décide do s'enfuir avec elle. Yvon, le fils de Toussaint Leblanc le pêcheur, l'aide à préparer son enlèvement et à frétor un bateau qui les emportera loin de l'ile. Un drame rapide, hélas met fin à l'aventure d'àmour. L'embarcation fait naufrage et Anne disparaît dans les Ilots sous les yeux de son ravisseur désespéré.

On retrouvera dans ce roman d'une exquise fraîcheur de sentiments les rares qualités d'un écrivain dont les lecteurs de ce journal ont pu souvent apprécier le talent sobre, vigoureux et net.

NELSON BROWN

DÉTECTIVE PRIVE. DE TOUTE INTELLIGENCE par Adrien Vély. La Renaissance du Livre. M. Adrien Vély nous offre le roman comique de l'art policier. Magnanime comme Don Quichotte, plus riche d'imagination que Sherlock Holmes ou qu'Arsène Lupin, son héros n'a qu'un défaut il manque totalement d'intelligence, do jugement, de bon sons et c'est pourquoi ses plus belles hypothèses s'effondrent régulièrement dans le ridicule le plus plat.

La vocation de détective s'est pourtant dessinée chez Nelson Brown d'és l'âge de neuf ans. Le petit garçon découvre un jour dans la maison paternelle un objet suspect qu'il prend pour une bombe il ne doute pas que la vieille bonne Dorothée n'ait machiné un épouvantable attentat et il commence aussitôt son enquête. Force lui est bien de reconnaître que l'engin infernal n'est qu'une boite do cacao, pleine de poudre délectable, mais bien inoffensive.

Plus tard, pendant la guerre, il trouve chez ses amis Sermeuse nu papier qu'il déchillre â grand'peinc et le voilà convaincu qu'il tient la preuve d'un complot contre 1 Italie. La mystérieuse dépêche n'est qu'une vulgaire ordonnance de médecin

Admis dans l'intimité de Mlle Charlcquine, fort galante personne, il se persuade que son logis est hanté par des revenants. Il surprendradoncces visiteurs importuns et ils'en ferme de nuit dans la chambre de la belle. Les bruits qu'il a entendus émanent d'un phonographe Si Nelson Brown croit, en outre, qu'il a été frappé de cécité par les esprits des ténèbres, c'est qu'il a tourné à l'envers le commutateur électrique Il sied d'ajouter que l'accorte Charlequine est elle-même une demoiselle bien naïve, qui, souffrant d'un enrouement, n'hésite pas aller réclamer sa voix perdue au quai des Orfèvres.

Cent autres mésaventures ne parviennent pas à tuer, chez Nelson Brown, le démon du détective. Un jour, cependant, résolu à mener une enquête secrète avec un soin particulier, il se fait passer pour mort.

Il a compté sans, les oraisons funèbres des journaux qui, le lendemain, rappellent la série de ses exploits.

Brown n'en croit pas ses yeux. Un tel dépit l'accable que vraiment, cette fois, il disparaît à jamais du monde.

DANS LES MERS DU SUD

par Robert-Louis Stevenson

Edition de la Nouvelle Revue Française Malade depuis dix ans et sentant sa fin prochaine, Robert-Louis Stevenson décide de passer ses derniers jours dans les Mers du Sud. Il frète la goélette le Cosco, met à la voile à San-Francisco vers la fin de juin 1888, visite les îles de l'Est et arrive à Honolulu an début de 1889.

Sa santé s'étant améliorée, il continue son voyage sur la goélette marchande V Equateur, passe quatre mois aux Atolls (îles basses de corail du groupe Gilbert) et atteint Samoa vers la fin de 89. Retenu par le charme des îles, il décide d'y rester. Dans une troisième croisade sur le steamer Jane-Nicoll, il commence écrire ce livre, captivante relation de voyage aux îles Marquises, chez les Paumotu, aux îles Gilbert, où il nous donne une foule de détails amusants et pittoresques sur les mœurs, les coutumes, les superstitions religieuses des indigènes et nous conte les plus piquantes anecdotes.Nous apprendrons ainsi à connaître les Marquisans qui sont les plus doux des cannibales. Ces estimables anthropophages qui, fidèles aux rites d'une religion ancienne, sacrifient volontiers,dans certaines circonstances solennelles, le cochon long, c'est-à-dire leur semblable, n'ont jamais attenté en effet à la vie d'un blanc. Méprisent-ils la leur propre, ils ne sont pas sans excuse. L'accroissement de la population des îles fut tel en effet à une époque que la pléthore engendra la famine défense fut faite à chaque famille d'avoir désormais plus d'un enfant. Mais la tuberculose commença de règner à l'état endémique, exerçant de terribles ravages. Accablés par le sortj les survivants se réfugièrent dans le mépris de la vie et leur existence se passe à attendre placidement la mort. R. L. Stevenson nous dit encore notamment l'histoire de Mgr Dordillon, l'apôtre des îles polynésiennes, et celle du capitaine Hart, dont la popularité égalait alors celle de ce bienfaiteur chez les indigènes des Marquises.

COMMENT MOURURENT LES ROIS DE FRANCE par le docteur •& Witkowshi.

Bibliothèque des Curieux.

L'auteur de ce curieux ouvrage médicohistorique, illustré de nombreuses gravures, s'est proposé de reviser les diagnostics posthumes, portés par ceux qui ont traité de la

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mort dos souverains de France, « Le m y s- tore qui entoure, dit-il, lo 'décès des grands de la terre a sollicité, avec plus ou moins de succès, la sagacité d'une légion d'historiens, de littérateurs, de médecins et notamment l'auteur des Morts mystérieuses de ̃l'Histoire, le docteur A. Cabanes,- qui s'est particulièrement attaché à ce sujet paramédical.H

Le docteur Witkowski'no se fera pas faute de relever ainsi une foule d'erreurs, et surtout il nous apprendra quantité de choses généralement ignorées. Nous ne le suivrons pas à travers le cours de l'histoire depuis Charlemagne. Notons seulement quelques «^diagnostics » particulièrement intéressants. C'est Charles VII, qui n'est pas mort volontai*rainent de faim, comme on l'enseigne dans- nos lycées, mais d'un maUnd^éterminc qui ne lui permettait pas de « manger sans éprouver d'horribles souffrances »; Louis XI, qui a dû succomber à une troisième hémorragie cérébrale gauche et non pas à une attaque d'épilepsie; François Ier qui, selon toute vrai- ̃ s :• semblance, mourut de phtisie galopante. Le docteur Witkowski précise encore les causes de la mort do Napoléon I"; il établit que la mort de Napoléon III fut provoquée par une septicémie et qu'elle ne survint pas, comme l'ont consigné dans un rapport de complaisance trois médecins anglais et deux français, Connoau et Corvisart, « par suite d'arrêt de la circulation ». LaPalico n'eût pas mieux conclu, remar- que l'auteur, qui môle volontiers un grain d'ironie au sérieux do la discussion scien-* tifique, PIERRES DE LUXE

CAHIERS DE PAIXD'UNE JEUNE FILLE DE GUERRE, Par Rolande de Willenich, édition Devambez Mlle Rolande de Willenich nous confie,. on une élégante plaquette, les émois d'un cœur de jeune fille; qui mieux est, elle tâche à les expliquer et M. Julien Benda lui saurait gré de ce constant et sincèra effort pour échapper à l'emprise de Belphégor. Mlle de Willenich, sans doute, n'ignore pas le vague à l'âme et même il semble que parfois elle s'y complaise, mais c'est alors pour mieux s'interroger durant cet état, pour descendre plus profondémennt en elle- môme.

Avec une précision volontaire et une finesse d'analyse souvent pénétrante, elle note alors le chant joyeux ou plaintif qui lui monte du cœur et toutes les nuances du songe qui passe devant ses yeux.

Accès de mélancolie, de tristesse, aspirations ardentes vers un idéal entrevu, fugi- ̃' tives impressions de jeunesse, elle saisit au vol tous les papillons du rêve et les dépeint ensuite à loisir.

« Mon âme, dit-elle, est un coffret ou sèchent les Heurs de mes tristesses, de mes chagrins, et de très peu da mes souvenirs. Car je ne veux qu'en garder quelques-uns que je choisirai entre tous, mais qui seront fertiles en consolations etprobablcment en regrets». ̃ Cet éclectisme aussi est à la louange d'une âme de jeune fille qu'on excuserait au sur- v plus de s'abandonner paresseusement à sa ̃ sensibilité vibrante et on la félicitera do nous avoir offert ces « Pierres de lune » adroitement et délicatement serties.

CHANSONS FRANÇAISES .}'"̃

par Xavier Privas et Franchie Lorêè-Privas Eugène Figuière, éditeur

Xavier Privas et Francine Loréc-Privas ont réuni dans ce nouveau recueil, poésio et musiquo, un double choix de jolies chansons d'à- •'̃ vant-guerre inspirées par les douceurs de la paix, les charmes de la campagne et de laforêt et les tendres amours, puis de lières chansons de guerre dédiées à nos, soldats et à leurs chefs, à nos blessés, aux femmes de France, à nos orphelins. On retrouvera dans ces vers, parés ça et de grâce féminine, les rares qua!ités_g~i ,cH~tjng~l..en..t_I~ mâlo et vigoureux. Talent du çruicô"dos"Uhansoliino"ils,la sincé- rité profonde, la cordialité, la véhémence de ses accents toutes les fois qu'il exalte la no- blesse des sentiments les plus hauts et les plus purs, une for; ne sobre et solide, dépouillée de toute afféterie, assez simple pour s'imposer à toutes les mcmoiivs, assez doli- catc pour plaire aux artistes et aux lettrés. « Chantez, Xavier Privas écrivait un jour Laurent Tailhadc, chantez donc pour vos frères Donnez l'essor aux nobles mélodies que la joie ou la douleur, l'indignation ou 1, amour des hommes vous inspirent sans fin! 1 Chantez, et que monte en plein ciel un hymne triomphal

» Dites, et vous endormirez en nos cœurs la tristesse de vivre, l'injure des années, lo désenchantement des luttes civiques et des hautaines espérances, dites-nous vos berceuses pleines d'illusions et de songes, de rayons vespérals et de senteurs alanguies

«Chantez les souffrances éternelles. Chantez les brèves allégresses et l'espoir qui ne veut pas mourir Chantez le mal délicieux d'aimer, redites-nous cet intermezzo dont chaque poète, de Tibulle à Ronsard, de Virgile à Ghénier, déclamaà son tour une strophe mélancolique ou joyeuse, qui rassérène les cœurs, et pour un indéfectible mois de mai, ressuscite, on paroles d'or, les bonheurs éva- nouis et les roses marcescentes. » ̃ ̃ LE COMMANDEMENT D'AMOUR DANS L'ART APRÈS LA GUERRE

Par Aurel. Edition du « Carmel », Genève En des pages ardentes, toutes frémissantes ` de foi, Aurel exhorte nos artistes à puiser ` leur inspiration à la source d'Amour. Eloquemment, elle condamne lecubisme qui prétend renoverle secprincipe de porter la philosophie dans l'art. « Le cubisme, note-t-olle, arrivant au divisionnisme do la forme, nous recule à l'analyse fragmentée, quand l'art s'est toujours tant dépensé à s'élever à la synthèse ».

« Cubistes et futuristes, affirme-t-elle en- core, extravaguent au nom de la logique, comme eût dit Jean Dolent. »

Pour Aurel, l'art pictural a trouvé son expression la plus pathétique, la plus humaine dans les œuvres de Carrière. « Jamais poète n'alla plus profondément aux abîmes, de l'amour, aux gorges de l'âme impénétrée. » « Son art fut bien l'art de s'unir. » Ses œuvres, « ce sont des réalités d'un art qui est l'amour, ou, plus simplement, ce sont des réalités avant la magie de l'amour ».

Et Aurel cite cette belle parole de Carrière « Les dieux ne sont morts que dans le cœur des hommes. Ils ne sont pas morts dans la cœur des peintres. »

Vibrant commentaire appliqué à l'art pic-.tural du vers célèbre

Ah 1 frappe-toi le cœur, c'est là qu'est le génie. PARMI LES AUTRES UVRES

ROMANS. Pernette en escapade, par Char- les Foley La Nuit d'amour sur la montagne, par Pierre Mille Tltérèse ou la Bonne Education, par Marc Elder; Ledos, tapissier, par Willy Le Diamant vert, par Pierre Marodon LIVRES DIVERS. L'Entrée au Forum, par de Monzie -Le Capital, par J. Montagne; Sinistrés voici vos droits, par J. Marizis Pensions, par Pierre Lardy La République Argentine, par Pierre Denis La Guirlande des Masques, par Paul Sentenac; Mariage mixte et Divorce, par Amédée Delorme; Anthologie littéraire de l'Alsace et de la Lorraine du XIIo au XX° siècle, par Ad. Van Bever.

A PARAITRE prochainement. Histoire potitique, par M. Pierre Imbart de La Tour. Jacques Patin.

P.-S. Ce n'est pas au dix-huitième siècle, ainsi qu'il a été imprimé par erreur, mais au dix-septième que M. Maxime Forment a situé son joli roman Un Lys, dont nous avons parlé dans notre précédente revue des li- m vres. J. P,