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Title : Bibliothèque de l'École des Chartes

Author : Lespinasse, René de (1843-1922). Auteur du texte

Author : Lelong, Eugène (1847-1925). Auteur du texte

Author : Dieudonné, Adolphe (1868-1945). Auteur du texte

Author : Samaran, Charles (1879-1982). Auteur du texte

Author : Marichal, Paul (1870-1943). Auteur du texte

Author : Van Moé, Émile-Aurèle (1895-1944). Auteur du texte

Author : Société de l'Ecole des chartes. Auteur du texte

Publisher : Impr. de Decourchant (Paris)

Publisher : DrozDroz (Paris)

Publication date : 1933-07-01

Relationship : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb343785784

Relationship : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb343785784/date

Type : text

Type : printed serial

Language : french

Format : Nombre total de vues : 64497

Description : 01 juillet 1933

Description : 1933/07/01 (T94,PART4)-1933/12/31 (T94,PART6).

Description : Collection numérique : Arts de la marionnette

Rights : Consultable en ligne

Rights : Public domain

Identifier : ark:/12148/bpt6k12473z

Source : Bibliothèque nationale de France

Provenance : Bibliothèque nationale de France

Online date : 15/10/2007

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BIBLIOTHÈQUE S~ ̃" DE L'ÉCOLE ̃•̃

DES CHARTES REVUE D'ÉRUDITION

PUBLIÉE PAR LA SOCIÉTÉ -DE L'ÉCOLE DES CHARTES

ET CONSACRÉE SPÉCIALEMENT A L'ÉTUDE DU MOYEN AGE

XCIV ̃

QUATRIÈME-SIXIÈME LIVRAISONS Juillet-Déeembre 1933

PARIS' 4 LIBRAIRIE AUGUSTE PICARD 1933


QUATRIEME-SIXIEME LIVRAISONS ^M

TABLE DES MATIÈRES ^PUHBI

I. L'avènement de, la dynastie carolingienne et lés origines de Psgea l'Etat pontifical (749-757). Essai sur la chronologie et l'inv terprétation des événements, par Léon Levillain 225 II. L'histoire des textes et les éditions critiques, par Félix GRAT. 296 III. Nicolas Clément est-il l'auteur de la Défense de l'antiquité. de la ville et du siège épiscopal de Toul? par E.-G. Ledos. 310 IV. Fragments de comptes royaux'des années 1289 et 1290, par Ph.LAUER 317 V. Uri sénéchal du xme siècle Guillaume de Combreux, par Henri Stein. 328 V VI. Albisse del Bene, surintendant général des finances françaises en Italie. Etude de six registres de ses comptes de

.1551 à 1556,. par Michel François .337 VII. Bibliographie. 361 R. F. Treharne, The baronial plan of reform, 1258-1263 (Petit-

Dutaillis), 361. Gustave Dupont-Ferrier, Etudes sur les institutions financières de la France à la fin du moyen âgé. T. II Les finances extraordinaires et leur mécanisme (Jules Viard), 364. In., Nouvelles études sur les institutions financières de la France à la fin du moyen âge. Les origines et le premier siècle de la Chambre ou Cour des aides de Paris (Id.), 364. Henri Jassemin, La Chambre des comptes de Paris au xve.siècle, précédé d'une étude sur ses origines (Id.), 366. ID., Un document financier du XIIIe siècle. Le mémorial de Robert II, duc deBourgogne (1273-1285) (Id.), 366. Pierre RoBiu.La compagnie des secrétaires du roi (1351-1791) (P.-M. Bondois), 368. –René LA BRUYÈRE, L'empoisonnement du prince de Condé (1588). Henri IV, Charlotte de la Trémoille et son page (Id.), 368. –Claude FAURE, Lettres inédites du cardinal Le Camus, évêque et prince de Grenoble (1632-1707) (Id.), p. 369. Ernest CoRNAz, Le mariage palatin de Marguerite de Savoie (1445-1449) .(Ch. Samaran), 370. – Paul Harsin, Crédit public et banque d'Etat' en France du xw au xviiie siècle (E.-G.. L.), 371. Fausto Ghisalber'ti, Arnolfo d'Orléans, un cultore di Ovidio nel secolo xn .̃'̃; (Robert Bossuat), 374. Chanoine J.-M. Meunier, La Vie de saint Alexis, poème français du'xie siècle, texte du manuscrit de Hildesheim, traduction littérale, étude grammaticale, glossaire (Id.), 376. Jean d'ARRAs, Mélusine (Id.); 378. E. M. Mei- jers et A.-S. DE BLÉcouRT, Le droit coùtumier de Cambrai (Etienne Delcambre), 379. Jules Gloson. Un évêque de Liège peu connu de la fin xiue siècle Jean d'Enghien (1274-1281) (Id.), 380.– Société d'histoire du droit des pays flamands, picards et wallons comptes-rendus des journées d'histoire régio- nale tenues à Liège du 20 au 23 mars 1932 et à Douai du 10 au 12 avril 1933 (Id.), 382. Henri LAURENT, Actes et documents anciens intéressant la Belgique conservés aux Archives de l'Etat à Vienne (Haus-Hof-und Staatsarchiv). Niëderlândische Ur- kunden), 1196-1356 (Jules Viard), 383. H. LAURENT, La loi de Gresham au moyen âge. Essai sur la circulation monétaire entre la Flàndre et le Brabant à la fin du xive siècle (A. Dieudonné), ̃ 384. Henri Carré, Le Journal d'émigration de Louis, marquis Aymer de la Chevalerie (1791-1777) (H. Gaillard), 385. F. Ket- nèr; De oudste Oorkonden van het Kloôster Bethlehem bij Doe- tinchem (Ch. Samaran), 386. Carl Wehmer, Die Namen der '̃̃ gotischen Buchschriften. Ein Beitrag zur Geschichte der latei- ̃; nisçhen Palàôgraphie (Id.), 387.^ Geofroy Tort, Champ Fleury


L'AVÈNEMENT

DE

LA DYNASTIE CAROLINGIENNE ET LES ORIGINES DE L'ÉTAT PONTIFICAL (749-757)

ESSAI SUR LA chronologie ET L'INTERPRÉTATION DES ÉVÉNEMENTS

A la mort de Thierry IV, en 737, Charles Martel avait continué de gouverner sans donner de successeur au roi défunt. Après lui, ses deux fils, Pépin et Carloman, ne purent maintenir ce régime découronné plus de seize mois au Champ de mars de l'année 743, ils rendirent le trône au Mérovingien Childéric III 1. Cette restauration prouve qu'il y avait encore un parti puissant de grands restés fidèles à la dynastie royale, dont les deux maires du palais désarmèrent l'opposition en abritant leur pouvoir réel derrière le pouvoir nominal d'un roi fantôme.

Les deux princes n'eurent pas part égale dans la restauration monarchique que Carloman ait partagé les sentiments loyalistes des grands et que Pépin ait eu la main forcée par son frère, cela ne paraît pas douteux. C'est, en effet, à Carloman que Childéric III fait honneur de son rétablissement sur le trône 2 et quand, trois ou quatre ans plus tard, Carloman va se faire moine au Mont-Cassin et confie à son frère son fils 1. Sur les dates de l'interrègne, voir Br. Krusch, Chronologica regum Francorum stirpis Merowingicae, dans les Mon. Germ. hist., in-4°, Scriptores rerum Merovingicarum, t. VII, p. 507.

2. « Hildricus, rex Francorum, viro inclito Karlomanno majore domus, rectori palatio nostro, qui nobis in solium regni instituit. » Diplôme de Childéric III en faveur de Stavelot et Malmédy (Pardessus, Diplomata et chartae, t. II, p. 387, 575. Halkin et Roland, Recueil des chartes de l'abbaye de Stavelot-Malmédy, Bruxelles, 1909, in-4°, t. I, p. 43, 16).


Drohon et la part du royaume qu'il avait gouvernée, le chroniqueur contemporain Childebrand, frère de Charles Martel, de qui nous tenons ce dernier détail, écrit dans un raccourci évocateur « Par cette succession, Pépin fut affermi dans son gouvernement, roboratur in regno 1. »

Pépin reconstituait à son profit la puissance paternelle il n'avait plus à compter avec l'opposition d'un égal étayée par l'opposition légitimiste. Il pouvait reprendre à son compte les visées ambitieuses de sa famille, attestées dans le passé par la tentative de Grimoald 2, justifiées par l'omnipotence d'un Pépin d'Herstal et d'un Charles Martel, à demi réalisées pendant l'interrègne récent. Les contemporains ne pouvaient pas s'y tromper. Aussi bien les adversaires de la politique de Pépin le Bref, faisant flèche de tout bois pour la combattre, se trouveront-ils bientôt aux côtés de Carloman et du roi des Lombards, Aistulf.

C'est contre eux que Pépin fut amené à chercher l'alliance de la papauté et l'appui d'un parti ecclésiastique dont l'animateur fut le prêtre Fulrad 3.

Fulrad était le chapelain du maire du palais la fonction n'avait pas encore l'importance qu'elle prit dans la suite, lorsque la chapelle palatine devint l'organisme le plus important du nouveau gouvernement royal néanmoins, par sa situation auprès du prince, par sa valeur personnelle et par son ambition légitime, Fulrad était appelé à jouer un rôle considérable, le premier, dans les événements qui aboutirent à fonder la dynastie carolingienne et l'État pontifical il le 1. Chronique de Childebrand, c. 30 (= 2e Continuation des Chroniques du Pseudo-Frédégaire) « Carlomannus devotionis causa inextinctu succensus, regnum una cum filio suo Drohone manibus germano suo Pippino committens, ad limina beatorum apostolorum Petri et Pauli Romam ob monachyrio ordine perseveraturus advenit. Qua successione Pippinus roboratur in regno. » Édition Br. Krusch, Mon. Germ. hist., in-4°, Scriptores rerum Meroçingicarum, t. II, p. 181. Johannes Haller, Die Quellen zur Geschichte der Entstehung des Kirchenstaates, Leipzig-Berlin, 1907, in-8°, p. 63. Nous citerons, dans la suite, ce recueil simplement par le nom de son auteur.

2. En 656, Grimoald, écartant du trône d'Austrasie le jeune Dagobert II, fils de Sigebert III, avait intronisé son propre fils Childebert, qui ne régna que quelques mois. L. Levillain, La succession d'Austrasie au VU" siècle, dans la Reçue historique, t. CXII, 1913.

3. Sur ce personnage, voir l'abbé Rapp, Saint Fulrad, abbé de Saint-Denis, Paris-Strasbourg, 1883, xtv-258 p., et le P. Marc Dubruel, Fulrad, abbé de Saint-Denis, Colmar, 1902, in-12, 157 p.


joua certainement puisqu'il fait partie des missions les plus importantes et que dans chacune d'elles ses collaborateurs changent, c'est donc bien lui qui, dans toutes, conserve à la politique de Pépin son unité de vues et son unité d'action. Les faveurs dont il est comblé par le roi et par le pape Étienne II témoignent qu'il a tenu ce rôle à la satisfaction de ceux qui tirèrent tout le profit d'une activité dépensée au service des deux pouvoirs auxquels l'Occident devait être soumis le spirituel, auquel on assurait des assises temporelles, et le temporel, auquel on conférait un fondement spirituel. Lorsque Pépin le Bref estima le moment venu de reléguer le roi mérovingien dans un couvent et de prendre pour lui la couronne royale, il envoya Burchard, évêque de Wurzbourg, et Fulrad, son chapelain, à Rome, pour obtenir du pape Zacharie l'adhésion du chef de l'Église universelle au changement de dynastie.

Selon la version accréditée dans les milieux francs, les négociateurs n'auraient eu à soumettre au jugement du pape qu'une question de principe ils auraient demandé au Souverain Pontife, « touchant les rois de France qui n'exerçaient plus le pouvoir royal, s'il était bien ou mal qu'il en fût ainsi » et le pape aurait répondu « qu'il valait mieux appeler roi celui qui avait le pouvoir que celui qui restait sans pouvoir royal ». Mais l'annaliste, dont nous reproduisons le témoignage dans toute sa gaucherie, continue « Pour que l'ordre ne fût pas profondément troublé, le pape enjoignit per auctoritatem apostolicam de faire roi Pépin 1. » Burchard et Fulrad avaient donc dû exposer à Zacharie les craintes qu'un changement de dynastie ne provoquât une vive opposition des grands et l'amener à jeter dans la balance l'autorité de saint Pierre qui avait reçu du Christ et transmis à ses successeurs le pouvoir de lier et de délier. Aussi, quand le chroniqueur Childebrand veut que la démarche ait été faite 1. Annales regni Francorum « DCCXLVIIII. Burghardus Wirzeburgensis episcopus et Folradus capellanus missi fuerunt ad Zachariam papam, interrogando de regibus in Francia, qui illis temporibus non habentes regalem potestatem, si bene fuisset an non. Et Zacharias papa mandavit Pippino, ut melius esset illum regem vocari qui potestatem haberet, quam illum, qui sine regali potestate manebat ut non conturbaretur ordo, per auctoritatem apostolicam jussit Pippinum regem fieri. » Édition Fr. Kurze, dans les Scriptores rerum Germanicarum. Hanovre, 1895, in-8°, p. 8.


auprès du pape « sur le conseil et du consentement de tous les Francs s1, est-il permis de penser que le pape avait, en définitive, été pris comme arbitre par les partisans de la révolution dynastique et par ceux qui voyaient d'un mauvais œil la substitution au Mérovingien d'un prince qui n'était pas du sang privilégié de Clovis. La décision de Zacharie de couvrir de son autorité apostolique l'avènement de Pépin, pour le maintien de la paix dans le royaume, était, à n'en pas douter, un succès diplomatique des deux délégués du maire du palais, ou, si l'on veut que Burchard ait pu être le porteparole des légitimistes, du seul Fulrad.

Il est possible que ce soit au retour de sa première mission en Italie que, pour prix de ses services, Fulrad ait reçu l'abbaye de Saint-Denis cette mission est de 749 ou des premiers mois de 750 l'abbé de Saint-Denis, Amalbert, est signalé pour la dernière fois le 11 février 748 2 Fulrad, qui lui a succédé, n'apparaît pour la première fois comme abbé de SaintDenis que le 17 août 750 3.

« Pépin fut donc élu roi selon l'usage des Francs 4. » Comme les rois mérovingiens appelés à régner sur un peuple que leurs prédécesseurs n'avaient point encore régi, il dut être élevé sur le pavois dans une assemblée générale, vraisemblablement au Champ de mars de l'année 751. Puis « il fut oint de la main de l'archevêque Boniface » et consacré par les évêques, en vertu de l'autorité et selon le commandement du pape. Les grands le reconnurent pour leur roi et se soumirent à lui. Il fut alors intronisé avec la reine Bertrade « selon l'ancien rite 5 ». La cérémonie du sacre et du couronnement avait 1. Chronique de Childebrand, c. 33 « Quo tempore una cum consilio et consensu omnium Francorum missa relatione ad sede apostolica, auctoritate praecepta, Pippinus. sublimatur in regno. »> Édition Krusch, p. 182 J. Haller, p. 63. 2. Jugement du maire du palais, Pépin, 748, 11 février. Pardessus, Diplomata, chartae. t. II, p. 403, 589, sous la date de 747.

3. Jugement du maire du palais, Pépin, 750, 17 août. Pardessus, Diplomata, chartae. t.II, p. 414, 603, sous la date de 749.

4. Annales regni Francorum « DCCL. Pippinus secundum morem Francorum electus est ad regem. Édition Kurze, p. 8.

5. Chronique de Childebrand, c. 33 « auctoritate praecepta, praecelsus Pippinus electione totius Francorum in sedem ragni cum consecratione episcoporum et subjectione principum una cum regina Bertradane, ut antiquitus ordo deposcit, sublimatur in regno. » Krusch, p. 182 J. Haller, p. 63. Annales regni Francorum, a. 750 «. et unetus per manum sanctae memoriae Bonefacii archiepiscopi et elevatus a Francis in regno in Suessionis civitate. » Fr. Kurze, p. 8-10. Clausula de unctione Pippini « Nam ipse praedictus domnus floren-


eu lieu « dans la cité de Soissons 1 » la date de cet événement n'a pu, jusqu'à présent, être précisée elle se place entre le 31 octobre 751 et le 23 janvier 752 2. Nous verrons par la suite que le terminus ad quem doit être reporté au mois de décembre 7513.

Malgré l'intervention du pape, la révolution dynastique ne s'était pas accomplie dans le calme absolu il y eut des troubles populaires, moins graves peut-être qu'on eût pu le craindre, mais il y eut des troubles 4.

Le nouveau roi n'en avait pas moins contracté une dette de reconnaissance envers la papauté celle-ci tira bientôt une lettre de change sur son débiteur. En favorisant l'accession de Pépin au trône, Zacharie avait escompté l'avenir. L'Église romaine était depuis longtemps déjà en butte aux attaques des Lombards on n'avait pas oublié que le pape Grégoire III avait fait appel contre leur roi Liutprand à Charles Martel, qui avait bien accueilli les envoyés romains, mais avait évité de s'engager 5. Il y avait là toutefois un précédent auquel on ne put pas ne pas songer lorsqu'en 753 le péril lombard se fit de nouveau pressant.

tissimus Pippinus rex pius per auctoritatem et imperium sanctae recordationis domni Zachariae papae et unctionem sancti chrismatis per manus beatorum sacerdotum Galliarum et electionem omnium Franchorum tribus annis antea in regni solio sublimatus est. » Édition Arndt, Mon. Germ. hist., in-4°, Scriptores rerum Merovingicarum, t. I, p. 465. J. Haller, p. 67.

1. Le manuscrit C2 de l'édition Kurze des Annales royales porte à la place des mots « in Suessionis civitate », qui ont été grattés, les mots « in monasterio sancti Medardi » et en marge l'addition « Quod situm est in Suessionis civitate », le tout d'une main du xie siècle. C'est sur cette correction, sans valeur historique, qu'un grand nombre d'auteurs placent le couronnement dans la basilique de Saint-Médard, qui n'était pas en réalité dans la cité, mais hors des murs. Le texte des Annales invite, au contraire, à placer le sacre dans la cathédrale de Soissons.

2. Br. Krusch, Chronologica regum Francorum stirpis Merowingicae, p. 508512.

3. Les Annales sancti Amandi, qui dérivent de la même source que les Annales royales, donnent la date exacte de 751.

4. Vita Bonifatii, auctore Willibaldo « Cum vero Pippinus, Domino donante, regale Franchorum, felix supradicti germani successor, ragnum recepit, et jam aliquantulum sedante populorum perturbatione, in regem sublevatus est. » Ëdition Levison, Scriptores rerum Germanicarum in usum scholarum. Hanovre, 1905, p. 44. Willibald est un contemporain il a écrit sa Vita entre 755 et 768, donc sous le règne même de Pépin le Bref.

5. Chronique de Childebrand, c. 22. Krusch, p. 178-179. J. Haller, p. 62. Cf. Vita Gregorii 111, dans le Liber pontificalis, édition L. Duchesne, t. I, p. 420, recensions BD. J. Haller, p. 7, note 1.


Le roi Aistulf, qui avait succédé à Liutprand en 750, venait d'enlever les villes de l'Exarchat de Ravenne et celles de la Pentapole au pape Étienne II, qui les tenait au nom de l'empereur d'Orient. Le Souverain Pontife avait alors dépêché des envoyés à Constantinople mais le Basileus ne s'était pas hâté de répondre à son appel. Étienne II s'était tourné vers le roi de France.

Il avait résolu de venir lui-même en Gaule demander à Pépin aide et assistance contre Aistulf il sollicitait l'envoi de délégués chargés de le protéger au cours de ce déplacement. L'abbé de Jumièges, Droctegang, portait à Rome la réponse favorable de son souverain. Puis, l'évêque de Metz, Chrodegang, et le duc Ogier (Autcharius) se rendirent auprès du pape.

Les préparatifs du départ étaient terminés quand arriva de Constantinople le silentiaire Jean, porteur de l'ordre impérial enjoignant à Étienne II de se rendre auprès d'Aistulf et de lettres exigeant du roi lombard la restitution des villes dont il s'était emparé. Après avoir obtenu d'Aistulf un sauf-conduit pour lui et sa suite, Étienne II quittait Rome le 14 octobre de la VIIe indiction (753), non sans avoir prié une dernière fois à la Confession de saint Pierre et mis son peuple sous la protection de l'apôtre. Mais, arrivé à Pavie, ni lui ni le silentiaire ne parvinrent à se faire rétrocéder les territoires revendiqués. Le 15 novembre, malgré les tentatives d'intimidation du Lombard et grâce à l'intervention énergique du duc Ogier, le pape s'éloignait de Pavie, par la voie romaine qui, par Cozzo, Verceil et Aoste, le conduisait au col du « Mons Jovis », non sans qu'Aistulf eût tenté de le faire dévier de sa route. Les Alpes franchies, le cortège pontifical arrivait à Saint-Maurice d'Agaune.

La distance de Pavie à Saint-Maurice était d'environ 250 kilomètres elle pouvait être franchie en cinq jours mais c'était là un véritable « record » de vitesse dont la suite assez nombreuse du pape devait être incapable en toute circonstance en raison des efforts d'Aistulf pour retarder la marche du pape et des difficultés du passage des montagnes à cette époque de l'année, on peut supposer que Saint-Maurice ne fut pas atteint avant le 25 novembre.

Le pape avait pensé que le roi de France se serait avancé


jusque-là pour le recevoir. Il fut déçu. Il dut s'arrêter « quelques jours » en ce lieu.

Un court séjour dans le monastère d'Agaune pourrait s'expliquer par la seule nécessité de prendre un peu de repos après un voyage déjà long et pénible. Mais, en réalité, les « quelques jours » dont parle l'historiographe du pape ont dû s'étendre à quelques semaines et alors ce long arrêt ne peut se justifier que par l'incertitude où l'on était de ce que l'on devait faire, par la nécessité de recevoir des instructions de la cour de France et aussi de régler les détails de la rencontre du pape et du roi.

Étienne II fut rejoint à Saint-Maurice par deux envoyés de Pépin, l'abbé Fulrad et le duc Rothard, qui avaient mission de le conduire auprès de leur souverain 2.

C'était la première fois qu'un des successeurs de saint Pierre quittait la Ville Éternelle pour venir se réfugier à la cour d'un roi franc. Comment y serait-il reçu? Y viendrait-il en suppliant qui demande protection, ou en vicaire du Christ envers qui un récent passé créait des obligations? Serait-il traité, comme il l'était à Constantinople, en simple évêque de Rome, ou, au contraire, en chef de l'Église universelle? A quel titre invoquerait-il l'intervention de Pépin contre les Lombards? a Serait-ce au nom de l'évêque de Rome encore engagé dans des liens étroits à l'égard de l'Empire, ou en qualité d'un véritable souverain libéré de toute obligation envers le Basileus ?

Autant de questions que la cour romaine ne pouvait pas ne pas s'être posées et qui devaient être résolues avant qu'on ne se remît en route. Le Constitutum Constantini 3 répond si 1. Tous les détails sur le voyage du pape, de Rome à Saint-Maurice, sont empruntés à la Vita Stephani II du Liber pontificalis, édition L. Duchesne, I, p. 442-447. J. Haller, p. 15-19.

2. Vita Stephani II, p. 447. J. Haller, p. 19.

3. Le seul texte correct a été publié par Zeumer, dans le Festgabe für Rudolf von Gneist, p. 47-59, et a été réimprimé par J. Haller, p. 241-250. Plus connu sous le nom de Donatio Constantini, ce document n'a pas trouvé de sérieux défenseurs depuis qu'en 1443 Lorenzo Valla en démontra la fausseté sans arriver à déterminer la date et les motifs de la supercherie dans son mémoire De falso credita et emenlita donalione Constantini, publié par Ulrich de Hutten en 1517 (Laurentii Vallae Opera, Bâle, 1543, in-fol.). Dans la seconde moitié du dernier siècle et jusqu'à nos jours, de nombreux auteurs se sont évertués à découvrir la date et le pourquoi de la falsification. Voici la biographie de ce sujet Doellinger,


exactement à ces questions qu'on peut s'étonner que tant de trésors d'ingéniosité aient été dépensés pour lui attribuer une autre date et lui prêter d'autres fins 1. Ne se méprend-on pas sur la valeur exacte de ce document quand on n'y veut voir Die Schenkung Constantins, Mainz, 1866 (extrait de la Civilta cattolica) cf. du même, Die Papstfabeln des Mittelalters, 1862 (2e édition, 1890). Grauert, Die Konstantinische Schenkung, dans Historisches Jahrbuch der Gb'rres- Gesellschaft, t. III-V, 1882-1884. Bayet, Remarques sur le caractère et les conséquences du voyage d'Étienne III en France, dans Revue historique, t. XX, 1882. Bayet, La fausse donation de Constantin, dans l'Annuaire de la Faculté des lettres de Lyon, 1884. -Bresslau, Das Constitutum Constantini, dans Festgabe fur Rudolf von Gneist, 1888. Zeumer, Die atteste Text des Constitutum Constantini, ibidem. Hauck, Zur Donatio Constantini, dans Zeitschrift für Kirchliche Wissenschaft und Kirchliches Leben, t. IX, 1888. Friedrich, Die Konstantinische Schenkung, 1889. Weiland, Die Constantinische Schenkung, dans Zeitschrift fur Kirchenrecht, t. XXII (nouv. série, t. VII), 1889. Scheffer-Boichorst, Neuere Forschungen über die Konstantinische Schenkung, dans Mitteilungen des Instituts für ôsterr. Geschichte, t. X-XI, 1889-1890; réimprimé dans les Gesamelte Schriften von Paul Schef fer-Boichorst, t. I, 1903 (Historische Studien hgg. von E. Ebering, XIII). Loening, Die Entstehung der Konstantinische Schenkungsurkunde, dans Historische Zeitschrift, t. LXV, 1890. Schnürer, Die Entstehung des Kirchenstaates, 1894. Maromir, De Schenking van Konstantijn, 1900. H. Bôhmer, dans la Realenzyklopàdie fur protestantische Theologie, t. XI, 1902. Ernst Mayer, Die Schenkungen Constantins und Pipins, dans Deutsche Zeitschrift für Kirchenrecht, t. XIV et suiv. (articles réunis en un volume, Tubingen, 1904, in-8°). Crivellucci, Delle origini dello Stato pontifici, 1909 (Studi storici, XI). J. P. Kirsch, Die sogenannte « Confessio der Konstantinischer Schenkung, dans Rômische Quartalschrift, t. XXVII, Geschichte, 1913. A. Schônegger, Die kirchenpolitische Bedeutung des Constitutum Constantini im frühern Mittelalter, dans Zeitschrift fiir Katholische Theologie, t. XLVII, 1918. W. Levison, Konstantinische Schenkung und Sylvester Legend, dans Miscellanea Francesco Ehrle, II, Scritti di storia e paleografia, 1924. G. Laehr, Die Konstantinische Schenkung, 1926. Enfin, M. Buchner a annoncé un mémoire de lui à paraître dans sa collection des Quellenfàlschungen aus dem Gebiete der Geschichte. 1. Trois courants se dessinent nettement dans la masse d'ouvrages cités dans la note précédente. Il y a les partisans d'une fabrication très tardive, entre 820 et 830 (Kirsch), entre 840 et 850 (Grauert), entre 848-853 (Schntirer) c'est l'opinion la moins raisonnable. Il y a ceux qui croient le faux forgé sous Léon III, entre 813-816 (Brunner), ou sous Étienne IV, après 816 (Weiland), en 816 (Buchner, Das Vizepapsttum des Abtes von St-Denis, Paderborn, 1928, in-8°, p. 89 et note 3). Enfin, d'autres reportent la fabrication au vme siècle, Friedrich dit même au vne ou au vme siècle, ce qui est inadmissible, au début du pontificat d'Hadrien Ier en 774 (Bayet, Schônegger) ou sous Paul Ier, 757-767 (Scheffer-Boichorst), et enfin sous Étienne II en 753 (Bôhmer). Ce sont ces derniers qui ont incontestablement raison. La plus ancienne copie du faux se trouve dans la Collectio Sancti Dionisii, qui, quoi qu'on en ait dit, date des dernières années de l'abbatiat de Fardulf (-j- 806), comme l'a montré Levison, et le pape Hadrien Ier fait une allusion certaine au faux dans l'une de ses deux lettres du 8 mai 778, comme l'a noté Bayet (Codex Carolinus, 60 édition Gundlach, Mon. Germ. hist., in-4°, Epistolae, t. III, 1892, p. 587. J. Haller, p. 193-194). Enfin, le faux a certainement été fabriqué dans l'entourage du pape, à Rome, et non en France, comme le pensent Kirsch et Buchner, et s'il s'est trouvé à Saint-Denis, où l'on en a pris copie, c'est qu'il fut apporté par Étienne II lors de


essentiellement qu'une « donation de Constantin » fabriquée en vue d'obtenir d'un souverain franc une donation plus substantielle, mais aussi plus restreinte? En réalité, le Constitutum Constantini est surtout un décret protocolaire supposé de Constantin, qui assigne au successeur de saint Pierre et vicaire de Jésus-Christ le premier rang dans le monde entier, et spécialement en Occident la très sainte chaire de l'Apôtre est élevée au-dessus du trône terrestre de l'empereur luimême le siège de Rome l'emporte sur ceux d'Antioche, d'Alexandrie, de Constantinople et de Jérusalem, comme sur toutes les autres églises la cathédrale romaine est proclamée la tête altière de toutes les églises de l'univers'. Le pontife romain est le plus élevé et le premier des évêques de la terre il est le Souverain Pontife et l'évêque universel qui décide de toutes les questions de discipline et de foi. Et c'est pour que nul n'ose porter atteinte à cette primauté du pape au spirituel et au temporel 2 que Constantin a transporté la capitale de l'Empire à Byzance, qu'il a laissé à saint Silvestre et à tous ses successeurs son propre palais, la ville de Rome et toutes les provinces de l'Occident 3.

Ainsi, en Occident du moins, le pape n'a pas d'égal l'empereur lui-même, qui s'est dépouillé de ses ornements impériaux pour en revêtir le Souverain Pontife, a tenu à remplir auprès de lui l'office d'écuyer en tenant la bride de son cheval. Mais ce n'est pas seulement le droit de préséance du pape son séjour dans ce monastère en 754. Le vieil adage Is fecit cui prodest ne trouve pas de meilleur usage qu'en 753, appliqué à Étienne II. Pour nous, c'est Bôhmer qui a donné la solution juste.

1. Constitutum Constantini « Quamque sacrosanctam ecclesiam caput et verticem omnium ecclesiarum in universo orbe terrarum dici, coli, venerari ac predicari sancimus ». Édition Zeumer, p. 55. J. Haller, p. 247. Cf. la lettre d'Étienne lia à Pépin, Codex Carolinus, 11 « Sancta omnium ecclesiarum Dei mater et caput. » Édition Gundlach, p. 504. J. Haller, p. 99. Un autre passage de la même lettre semble encore inspiré du Constitutum. Cf. Constitutum « Pro concinnatione luminariorum possessionum predia contulimus » (Zeumer, p. 55 Haller, p. 247) Codex Carolinus, 11 « Omnia proprietatis suae percipiat, unde. luminariorum concinnatio Dei ecclesiis permaneat » (Gundlach, p. 506. Haller, p. 103).

2. Constitutum Constantini « Unde et non pontificalis apex vilescat, sed magis amplius quam terreni imperii dignitas et gloriae potentia decoratur, ecce. » Zeumer, p. 58. Haller, p. 249.

3. On semble admettre aujourd'hui que la donation de Constantin a été établie de bonne foi, d'après une tradition alors admise à Rome. Cf. Joseph Calmette, Le monde féodal, Paris, s. d. [1934], p. 135 (« Clio ». Introduction aux études historiques, 4). Il est permis de rester sceptique.


que le Constitutum Constantini établit, c'est aussi le rang que doivent avoir les membres de la curie romaine. Si le pape a droit aux ornements impériaux diadème d'or, amict de broderie, pallium blanc, chlamyde de pourpre, tunique écarlate, sceptre et autres insignes de la puissance suprême, les membres de la curie romaine sont assimilés aux sénateurs impériaux et en portent aussi les ornements distinctifs. L'Église romaine a, comme Je palais impérial, ses cubiculaires, ses huissiers, ses gardes du corps. Les clercs de cette Église ont aussi le privilège, quand ils chevauchent, d'habiller leurs montures d'une housse blanche et, comme les sénateurs de l'Empire, de passer par-dessus leurs chaussures des chaussons de toile blanche.

Enfin, comme si le pape avait prévu qu'il aurait à débattre ces questions de protocole avec quelques conseillers du roi susceptibles de se laisser allécher par des privilèges aussi honorifiques, le Constitutum reconnaît au Souverain Pontife la faculté d'agréger de sa seule autorité au clergé de l'Église romaine qui bon lui plaît des conseillers du prince. Le pape doit donc être reçu comme l'eût été l'empereur d'Occident le roi doit remplir auprès de lui l'office d'écuyer pour bien marquer sa dépendance à l'égard de son souverain. Dans les cérémonies, nul ne peut lui disputer le premier rang, et les membres de sa suite passeront devant les conseillers du prince. Et l'on ne peut douter que ces prétentions furent admises par les envoyés de Pépin la suite des événements le prouve. Le Constitutum Constantini est la charte qui a réglé les rapports du pape et du roi.

Ces questions résolues à Saint-Maurice, on se remit en route, après avoir dépêché un courrier pour informer le roi que le pape, ayant franchi le « Mons Jovis », se hâtait d'accourir auprès de lui. Ce courrier trouva Pépin à Thionville où, après avoir traversé la forêt d'Ardenne, le roi résidait et célébrait la fête de la Noël x. C'est donc au plus tôt le 25 décembre 1. Chronique de Nibelung, c. 36 (= 3e Continuation des Chroniques du PsaudoFrédégaira) « Per Ardinna silva ipse rex veniens, et Theudone villa publica super Mosella resedisset, nuntius ad eum veniens, quod Stephanus papa partibus Rome cum magno apparatu et multa munera, jam monte Jove transmeato, ad ejus properaret adventum. » Édition Krusch, p. 183. J. Haller, p. 63. Annales regni Francorum, a. 753, ms. D1 « Hoc anno natalem Domini in Theodone villa. » Édition Kurze, p. 10*


au soir que Pépin quitta la ville pour se rendre au palais de Ponthion où le pape devait le rejoindre et c'est au cours de ce déplacement de Thionville à Ponthion, qui ne demandait que quatre ou cinq jours en suivant la voie romaine de Thionville, Toul et Naix, que le roi envoya son fils Charles au-devant du pontife romain « jusqu'à près de cent milles 1 ». Or, cette distance de « près de cent milles » est sensiblement celle de Toul à Langres que reliait une voie romaine et qui sont à 120 kilomètres l'une de l'autre à vol d'oiseau. Langres se trouvait, d'autre part, sur la voie romaine qui, de Saint-Maurice, passait par Vevey, Lausanne, Orbe et Besançon, pour atteindre la vallée de la Marne. Il n'est donc pas douteux que le pape avait emprunté cette dernière voie, qu'il dut mettre une dizaine ou une douzaine de jours à pascourir les 250 kilomètres qui séparent Saint-Maurice de Langres, et que c'est dans cette dernière ville que les deux cortèges de Charles et d'Etienne se rencontrèrent. Les délais de route autorisent à dater leur rencontre du 1er ou du 2 janvier. En effet, la dernière partie du voyage de Langres à Ponthion n'exigeait pas plus de quatre ou cinq jours, à raison de 30 kilomètres par jour, et c'est le 6 janvier 754, le jour de l'Épiphanie, que le pape fit son entrée dans cette résidence royale 2.

A l'approche du pape, Pépin, sortant de Ponthion, se portait à sa rencontre jusqu'à trois milles et, dès qu'il l'aperçut, il mit pied à terre avec tous les siens, se prosterna jusqu'au sol sous la bénédiction du vicaire du Christ, et, « comme un écuyer, marchant pendant quelque temps à la hauteur de la selle d'Etienne, il conduisit son hôte au palais 3 ». 1. Vita Stephani II « Audiens vero hisdem rex ejusdem beatissimi pontificis adventum, nimis festinanter in ejus advenit occursum una cum conjuge, filiis etiam et primatibus. Pro quo et fere ad centum milia filium suum nomine Karolum in occursum ipsius quoangelici papae direxit cum aliquibus ex suis obtimatibus. Ipseque in palatio suo in loco qui vocatur Ponticone. » Liber pontificalis, édition Duchesne, I, p. 447. J. Haller, p. 19. Cf. Chronique de Nibelung, c. 36 « Haec audiens rex cum gaudio et laetitia et ingente cura recipere eum praecepit, et filio suo Carlo ei obvius ire praecepit, qui usque ad Ponteugone villam publicam ad ejus praesentiam adducere deberet. » Krusch, p. 182. J. Haller, p. 63.

2. Voir la note suivante.

3. Vita Stephani II « Ipseque in palatio suo, in loco qui vocatur Ponticone, ad fere trium milium spatium descendens de equo suo cum magna humilitate terrae prostratus una cum sua conjuge, filiis et optimatibus, eundem sanctissi-


Étienne II avait donc été reçu avec tous les honneurs qui lui étaient dus', et, conformément au précédent supposé de Constantin, Pépin avait rempli la fonction d'écuyer du pape. Jusque-là, les sources romaines et les sources franques s'accordent et se complètent si heureusement qu'elles ont permis de donner certaines précisions qu'aucune d'elles ne contient et de suivre, pour ainsi dire, pas à pas le pape dans son déplacement de Rome à Ponthion.

Mais, à partir de l'instant où Étienne et Pépin ont franchi le seuil de cette résidence royale, nos sources cessent de concorder. Le moment est venu de les présenter brièvement à nos lecteurs pour justifier l'emploi que nous en faisons dans la suite.

Les sources romaines sont les lettres du pape Étienne II et la biographie de ce pape dans le Liber pontificalis de l'Église romaine.

Les lettres d'Étienne II ont été conservées dans le Codex Carolinus. Le Codex Carolinus fut composé en 791, par ordre de Charlemagne, pour sauver de la destruction les lettres envoyées par les papes et les empereurs aux princes francs, lettres dont quelques-unes avaient péri et quelques autres étaient détériorées seules les lettres pontificales nous sont parvenues. Ces documents, écrits sous la poussée même des événements, sont les plus précieuses de nos sources d'informamum papam suscepit, cui et vice stratoris usque in aliquantum locum juxta ejus sellarem properavit. Tune praedictus almi ficus vir cum omnibus suis extensa voce gloriam et incessabiles laudes omnipotenti Deo referens, cum hymnis et canticis spiritalibus usque ad praefatum palatium pariter cum jamdicto rege omnes profecti sunt sexta Januarii mensis die in Apparitionis domini Dei et salvatoris nostri Jesu Christi sacratissima solemnitate. » Édition Duchesne, I, p. 447. J. Haller, p. 19. Cf. Constitutum Constantini « Et tenentes frenum equi ipsius pro reverentia beati Petri stratoris officium illi exhibuimus. » Édition Zeumer, p. 57. J. Haller, p. 248. M. Robert Holtzmann, Der Kaiser als Marschall des Papstes. Eine Untersuchung zur Geschichie der Beziehungen zwischen Kaiser und Papst im Mittelalter, dans Schriften der Strassburger Wissenschafil. Gesellschaft in Heidelberg, nouv. série, fasc. 8, Berlin-Leipzig, in-8°, a fait ici le rapprochement des deux textes, mais voit dans la Vita la source du Constitutum. Cf. ci-dessus, p. 233, note 1, les rapprochements entre le Constitutum et l'une des lettres d'Étienne II.

1. Chronicon Moissiacense Ibique veniens praedictus papa, a Pipino rege honorifice susceptus est. » Édition Pertz, Mon. Germ. hist., in-fol., Scriptores, I, p. 293. J. Haller, p. 75. Sur la valeur de cette source, voir plus loin, p. 245 et suiv.


tion. Si nous devons, en les utilisant, nous tenir en garde contre l'esprit passionné qui les a dictées, nous devons aussi reconnaître que nulle source contemporaine ne peut leur être comparée pour la précision des détails et pour l'absolue certitude des données chronologiques qu'elles renferment ces données s'expriment par l'indiction pour les années. L'indiction en usage à la cour romaine était traditionnellement l'indiction constantinopolitaine, c'est-à-dire qu'elle s'étendait du 1er septembre d'une année au 31 août de l'année suivante. Malheureusement, les lettres ne sont pas datées mais leur contenu permet de leur attribuer une date approximative et suffisante.

La Vita Stephani II du Liber pontificalis est l'œuvre d'un ecclésiastique romain resté anonyme. Elle a été écrite peu de temps après la mort du pape et, selon toute vraisemblance, sous le pontificat du frère et successeur de ce pontife, Paul 1er (757-767). L'auteur était certainement très bien informé il disposait de renseignements de première main et des documents des archives romaines il a eu sous les yeux la donation de Pépin à l'Église de Rome, et il a utilisé les lettres du pape que le Codex Carolinus contient. C'est donc encore une source de premier ordre. Mais cette biographie est un panégyrique l'auteur a parfois déformé la vérité pour exalter son héros dont les lettres permettent de le prendre en flagrant délit. Quelques menues erreurs se sont aussi glissées sous sa plume, sans tirer à conséquences graves. Enfin, en raison de certains procédés d'exposition, son récit a pu paraître à quelques-uns confus ou même mal informé sur les événements qui se sont accomplis en France on lui doit reprocher seulement, dans ce cas, de manquer de précision chronologique. Les dates d'années sont exprimées par le moyen de l'indiction constantinopolitaine.

Les sources franques principales sont la Chronique de Nibelung, les Annales royales et un fragment annalistique qui a pris place dans la Chronique de Moissac et dans les Annales Mettenses priores.

La Chronique de Nibelung est ce que l'on désigne communément sous le titre de 3e Continuation des Chroniques de Frédégaire. Nibelung était le fils du chroniqueur Childebrand, par conséquent le neveu de Charles Martel et le cousin


germain de Pépin le Bref. Sa parenté avec le prince dont il s'est fait l'historien lui vaut d'être, en quelque manière, un chroniqueur officieux. Membre de l'aristocratie laïque, il s'intéresse surtout aux faits d'ordre militaire, auxquels il semble bien avoir pris part, tant il entre dans le détail des opérations il présente souvent les autres événements, et même de très importants, en raccourci, quand il ne les passe pas tout simplement sous silence. Sa Chronique, qui fait suite à celle de Childebrand, prend les événements après le sacre de Pépin à Soissons et en poursuit l'exposé jusqu'au couronnement de Charlemagne à Noyon et de Carloman à Soissons, le 9 octobre 768 c'est donc l'histoire du règne de Pépin qu'elle raconte. L'auteur, écrivant après cette dernière date, a mis en œuvre peut-être ses souvenirs personnels, mais sûrement aussi des notes annalistiques officielles, car il suit, dans l'exposition des faits, un ordre chronologique rigoureux que n'altèrent pas les quelques erreurs de date assez singulières relevées sous sa plume, et il présente avec les autres sources franques des ressemblances qui, à notre avis du moins, ne peuvent pas être attribuées à une utilisation de la Chronique par ces sources, mais bien à une utilisation des mêmes notes officielles par Nibelung et les auteurs de ces sources. Sa chronologie est fondée sur la base des années du règne, calculées à partir du sacre de Soissons 1. Cette constatation est d'une extrême importance, on le verra plus loin. Nous avons noté plus haut que le point de départ de ce comput était actuellement à chercher entre le 31 octobre 751 et le 23 janvier 752.

1. Chez Nibelung, le début de l'année est antérieur au 1er mars et même au 15 février, comme cela résulte des deux passages suivants Chronique de Nibelung, c. 37 « Evoluto anno, praefatus rex ad kalendas Martias omnes Francos. ad se venire praecepit », et c. 51 « Evoluto igitur eo anno, cum in Betoricas resederet, mediante Febroario, omnem exercitum suum, quem in Burgundia ad hyemandum miserat, ad se venire praecepit. » Édition Krusch, p. 183 et 191. Et à deux reprises il identifie l'année dont il parle avec l'année du règne c. 42 « Evoluto anno, id est anno decimo regni ipsius. », et c. 43 « Sequente anno, id est anno xi regni ipsius. » Krusch, p. 186 et 187. Il n'est donc pas douteux qu'il opère le changement d'année- au jour anniversaire de l'avènement du roi, comme le faisaient avant lui les chroniqueurs mérovingiens et son propre père (Chronique de Childebrand, ce. 26 et 27, Krusch, p. 180). C'est du reste ce que laissait prévoir le début même de sa Chronique le récit de Childebert prend fin avec la mention du sacre de Pépin (c. 33 ci-dessus, p. 228, note 5) celui de Nibelung commence en ces termes « His transactis, sequente anno. » (c. 34; Krusch, p. 182).


Les Annales regni Francorum sont un recueil de notes historiques dans lequel les événements sont classés année par année, et disposés, à l'intérieur de chaque année, sans lien entre eux, selon un ordre chronologique qui n'est pas rigoureux car c'est un fait bien observé que les événements furent consignés dans cette sorte d'ouvrages non pas à la date où ils se produisirent, mais à celle où l'annaliste en fut informé. Les Annales royales s'étendent de l'année 741 à l'année 829. Elles furent écrites par des auteurs successifs, dont le dernier en date seul est maintenant identifié Hilduin, archichapelain de Louis le Pieux; mais on ne doute plus aujourd'hui qu'elles furent composées dans la chapelle palatine. On a vainement cherché jusqu'à présent à distinguer la part qui revient à chacun des auteurs anonymes dans la rédaction de l'ouvrage aucune des coupures proposées ne s'impose.

Ce qui paraît certain, c'est que l'entreprise de réunir en un corps d'annales les mentions historiques qui composent les parties les plus anciennes des Annales royales fut conçue tardivement, sous le règne de Charlemagne peut-être faut-il descendre jusqu'à l'année 791 où ce roi se montrait soucieux de conserver la correspondance des papes et des empereurs d'Orient avec les princes francs. Quoi qu'il en soit de cette dernière hypothèse, il est incontestable que, pour les années du gouvernement de Pépin le Bref (741-768), les Annales, telles qu'elles nous sont parvenues, ne sont pas contemporaines des événements qu'elles rapportent elles ne constituent pas un texte primitif.

Quelles sont leurs sources? Dérivent-elles de ces courts recueils de mentions brèves et sèches que l'on désigne du nom de Petites Annales et qui ont leur origine dans les notes historiques inscrites aux marges des tables pascales? En vérité, l'invraisemblance d'une telle dérivation eût dû suffire à en faire écarter l'idée, même si récemment on n'avait pris la peine de démontrer l'extraordinaire fragilité des raisons sur lesquelles la dépendance des Annales royales à l'égard des Petites Annales était fondée 1. Mais, d'autre part, le rapport 1. L. Halphen, Études critiques sur l'histoire de Charlemagne, Paris, 1921, in-8°. En sens contraire, Reginald Lane Poole, Cronicles and annals a brief outline of their origin and growth. Oxford, 1926, in-8°. Cf. aussi Levison, dans le Neues Archiv, t. XLV, p. 390-394.


inverse entre ces sources n'est pas admissible, étant données l'époque tardive de la rédaction des Annales royales et, au contraire, la nécessaire contemporanéité des mentions marginales des tables pascales, sources des Petites Annales. De même, si l'on a montré très justement la précarité des rapprochements établis entre quelques passages des Annales royales et des Chroniques de Childebrand et de Nibelung pour justifier la thèse d'une dépendance des premières à l'égard des secondes, il est, d'autre part, certain que les Chroniques sont antérieures aux Annales. Et alors n'est-il pas évident que les ressemblances sporadiques, mais indéniables, constatées entre les Annales royales et les Petites Annales, d'un côté, entre les Chroniques de Childebrand et de Nibelung et les Annales royales, d'autre côté, ne se peuvent expliquer que par l'utilisation d'une source commune à laquelle ont puisé les Petites Annales par l'intermédiaire de leurs archétypes des tables pascales, les chroniqueurs officieux Childebrand et Nibelung, et les annalistes de la chapelle palatine? Évidemment aussi, cette source commune nous devons la chercher dans les notes que des clercs du palais écrivaient sur les événements jugés dignes de mémoire. L'existence d'un bureau historique, à l'imitation du scrinium memoriae de la cour impériale, ne peut guère faire de doute. Et ne serait-il pas souverainement paradoxal de croire que, si de simples particuliers, moines ou autres, tenaient à conserver par écrit le souvenir des faits historiques les plus notables, les rois n'auraient pas eu le souci de garder trace des événements dont la connaissance précise pouvait être un jour nécessaire à leur politique et importait sûrement à leur gloire a

Le caractère officiel de cette source et des Annales royales qui en découlent s'exprime, dans ces dernières, par le choix des faits, par l'élimination, dans ceux qui ont été retenus, de tout détail qui n'était pas favorable à l'intérêt du roi, par la déformation même de la vérité pour atténuer ou dissimuler l'échec d'une manœuvre diplomatique ou d'une opération militaire. Le témoignage est donc sujet à caution. Enfin, quand on recourt à ces Annales, il est quelquefois important de savoir à quel comput se rattachent les années qu'elles indiquent autrement dit, quel était le point de dé-


part de l'année dont on se servait dans le bureau historique de la chapelle palatine 1? Une formule que nous lisons de façon constante à la fin de chaque annale de 758 à 807, « et inmutavit se numerus annorum in. », oriente facilement la recherche. Il faut d'abord observer qu'elle a une valeur intrinsèque et vise la fin de l'année comme un fait historique, indépendamment de toute autre date de jour précédemment exprimée, puisqu'on la trouve en 758 isolée de toute autre indication chronologique d'où il est logique de conclure que la a fin de l'année est postérieure de peu ou prou à la dernière date de jour qui la précède dans l'annale et que, si nous trouvons la formule tantôt après Noël et tantôt après Pâques, c'est après la plus tardive de ces deux fêtes que tombait régulièrement le terme final de l'année.

En outre, de 759 à 798, la formule apparaît trente-quatre fois sur quarante après la mention que le roi a célébré la fête de Pâques dans un lieu déterminé 2 pour les six années restantes, elle vient après l'indication du lieu où le roi a fêté la solennité de la Noël 3. Mais, les six fois, on observe que l'annale suivante comporte, sous la même date d'année, deux fêtes pascales. N'est-ce pas la preuve évidente que la formule de mutation du nombre s'appliquait à Pâques et se rattachait à la coutume de fixer au cierge pascal le samedi saint la tablette ou le morceau de parchemin portant le nombre de la nouvelle année et diverses autres données chronologiques? Les six fois aussi nous constatons que le roi n'était pas à la 1. Cette question a été traitée par M. l'abbé R. Macaigne, dans son livre L'Église mérovingienne et l'Etat pontifical (Paris, 1929, in-8°), p. 360-369. Bien que cet érudit arrive aux mêmes conclusions que les nôtres, nous croyons devoir asseoir plus solidement les résultats obtenus. M. Macaigne a fait une remarque très juste que nous lui empruntons d'après l'office liturgique, toute fête est à cheval sur deux jours elle commence la veille par les premières vêpres les annalistes carolingiens qui signalent comme le dernier événement d'une année la célébration de la Noël ou de Pâques ont considéré comme dernier jour de l'année celui où l'on a commencé cette célébration, c'est-à-dire où l'on a chanté les premières vêpres, et comme le premier jour de l'année suivante celui qu'aujourd'hui, nous, qui sommes étrangers aux usages liturgiques, nous considérons comme le seul jour de la fête. Pour le style de Pâques, cela convient aussi à la coutume dont nous parlons plus loin d'attacher au cierge pascal, le samedi saint, la tablette portant le nombre de la nouvelle année et d'autres indications chronologiques. 2. De 759 à 766 inclus, de 768 à 774 inclus, de 776 à 779 inclus, de 781 à 783 inclus, en 785, de 787 à 792 inclus, de 794 à 798 inclus.

3. En 767, 775, 780, 784, 786, 793.


cour ni à Noël, ni à Pâques, qu'il était au loin à guerroyer ou en Italie à voyager, et que le récit de l'expédition ou du voyage est toujours coupé en deux, comme si l'annale avait été close après la réception d'un premier rapport sur le déplacement du monarque, rapport qui ne pouvait parvenir qu'assez longtemps après Noël, puisqu'il indiquait le lieu où le roi avait célébré cette fête de telle sorte que, sous la plume de l'annaliste, la formule de changement du nombre visait encore en fait la date habituelle de ce changement, c'est-àdire Pâques, bien que la solennité pascale n'ait pas été indiquée. L'annale suivante n'était commencée qu'après réception d'un second rapport exposant la fin de la guerre ou du voyage et mentionnant l'endroit où le roi avait assisté à la cérémonie de Pâques, par conséquent quelque temps après la mutation de l'année à la date accoutumée1. Il y a là un cas spécial où se justifie encore ce que nous disions tout à 1. (767) « reversus est Bituricam. Ibique. celebravit natalem Domini. Et inmutavit se numerus annorum in DCCLXVIII. Domnus Pippinus rex iter faciens et Remistagnum coepit. Et inde sanus reversus pascha celebravit in castro, qui dicitur Sels. Et celebravit. rex natalem Domini in villa, quae dicitur Aquis, et pascha in Rodomo civitate. » – (775) «. et celebravit natalem Domini in villa, quae dicitur Scladdistat. Et inmutavit se numerus annorum in DCCLXXVI. Tune domnus Carolus rex Italiam ingressus est. ad Tarvisium civitatem pascha celebravit. Et celebravit natalem Domini in Haristallio et pascha in villa, quae dicitur Niumaga. »– (780) « Tune sumpto consilio, ut iter perageret orationis causa partibus Romae, Et celebravit natalem Domini in Papiam civitatem. Et inmutavit se numerus annorum in DCCLXXXI. Et supradictum iter peragens celebravit pascha in Roma. Et celebravit. rex natalem Domini in supradicta villa Carisiacum, et pascha similiter. » (784) « Ibique (Worms) inito consilio cum Francis, ut iterum hieme tempore iter fecisset supradictus domnus rex in Saxoniam quod ita et factum est. Et celebravit natalem Domini juxta Skidrioburg in pago Waizzagawi super fluvium Ambra in villa Liuhidi. Et inmutavit se numerus annorum in DCCLXXXV. Tune domnus rex Carolus supradictum iter peragens usque ad Rimee pervenit super fluvium Wisora, ubi confluit Waharna. Et propter nimiam inundationes aquarum inde reversus est Eresburgum. Ibi tota hieme residens et ibi pascha. celebravit. Et in eadem villa (Attigny) celebravit. natalem Domini et pascha similiter. » –(786) « Tune domnus rex. sumpsit consilium orationis causa ad limina beatorum iter agendi. natalem Domini celebravit in Florentia civitate. Et inmutavit se numerus annorum in DCCLXXXVII. Tune domnus rex Carolus supradicto itinere ita peragens Romam venit. et celebravit pascha cum domno apostolico in Roma. Et celebravit natalem Domini in villa, quae dicitur Ingilenhaim, similiter et pascha. » (793) « Rex autumnali tempore de Reganesburg iter navigio faciens usque ad fossatum magnum inter Alcmana et Radantia pervenit. Inde per Radantia in Mohin navali iter peragens, natalem Domini celebravit ad Sanctum Chilianum in Wirzinburg. Et inmutatus est numerus annorum in DCCXCIIII. Pascha celebratum est in Franconofurt. Rex ad palatium, quod Aquis vocatur, rediit ibique natalem Domini celebravit et pascha. »


l'heure les faits ne sont pas toujours dans les Annales sous leur date vraie, mais sous la date à laquelle ils sont venus à la connaissance de l'annaliste.

Il est donc certain que, dans la chapelle palatine, le début de l'année était fixé à Pâques dans la période de 759 à 798. Dès 799, le style de Noël apparaît, non sans quelques retours offensifs du style pascal dans les années suivantes1. Mais avant 759 ?

Nous n'avons aucune raison de croire qu'en 759 la chapelle palatine eût substitué le style de Pâques à un autre, et nous devons, au contraire, conjecturer d'après les Annales royales que, avant 759, le changement de l'année se produisait au jour de la solennité pascale.

En 753, les Annales royales nous disent que le pape Étienne II est venu en France, de même que le moine Carloman, frère de Pépin le Bref 2. Nous avons vu que le pape était arrivé à la cour de Pépin le 6 janvier 754, et les Annales Petaviani disent expressément que Carloman arriva après le pape 3. En mettant en 753 la venue de ces deux personnages, qui est postérieure à Noël, l'annaliste étend cette année 753 sur une partie de l'année suivante. Et, précisément pour cette année 753, le meilleur des manuscrits de la famille D dans l'édition de Kurze, famille dont le prototype paraît à 1. L'utilisation du style de Noël est rendue certaine par le cas des années 806 et 807. La formule « Et inmutatus est numerus annorum in DCCCVII » suit la mention de la Noël 806 et l'annale suivante commence ainsi « Anno superiore no non. Septembr. fuit eclypsis lunae. hoc autem anno pridie kal. Febr. fuit luna xvn ma. » Le début de l'année se trouvait donc bien entre le 2 septembre et le 31 janvier. Mais qu'il y ait eu des retours au style de Pâques, c'est ce que prouvent les années 804, 808 et 809. En 804, l'annaliste, après avoir dit que l'empereur et le pape célébrèrent la Nativité à Quierzy-sur-Oise, rapporte qu'ils gagnèrent Aix-la-Chapelle, où le pape resta encore huit jours auprès de Charlemagne (les Annales Juvanenses majores, a. 805, mentionnent qu'ils y célébrèrent l'Epiphanie), et c'est alors seulement qu'apparaît la formule de mutation d'année. Or, dans l'annale de 805, il n'est pas fait mention de la fête pascale de 805. En 808, où il est parlé de la Pâque du 16 avril, la fin de l'année est reportée par la formule « Et mutatus est. » après la Pâque du 8 avril 809. Enfin, en l'année 809, où la formule de changement d'année a disparu pour toujours, l'annaliste qui cesse aussi désormais de signaler la célébration des deux grandes fêtes signale des événements postérieurs à la Noël, dont l'un est daté « circa idus martias » (15 mars 810), Pâques étant en cette année 810 le 31 mars. 2. Annales regni Francorum, a. 753 « Eodemque anno Stephanus papa venit in Franciam. similiter et Carlomannus. in Franciam venit. » Édition Kurze, p. 10.

3. Annales Pelaviani, a. 753 « et papa Stephanus venit ab urbe Rom a in Franciam et Karolomannus post eum. » Édition Pertz, Scriptores, t. I, p. 11.


l'éditeur avoir été copié à la cour, ajoute au texte la mention finale « Hoc anno natalem Domini in Theodone villa, pascha in Carisiaco celebravit 1. » La présence de Pépin à Thionville en décembre 753 nous est attestée par la Chronique de Nibelung 2 cela donne du poids au témoignage de ce manuscrit, qui rejette la fin de l'année après Pâques.

Le cas de l'année 757 est plus topique encore. Le même manuscrit Dl indique que le roi a célébré la Nativité et la Résurrection du Christ à Corbeny. Le même renseignement nous est fourni par tous les manuscrits de la famille C, qui ajoutent « Et inmutavit se numerus annorum in DCCLVIII3. »

Aussi quand, sous le nombre 756, après avoir parlé de la mort accidentelle du roi lombard, Aistulf, qui se produisit à la fin de décembre 756 comme l'atteste une lettre d'ÉtiennelI et dont la nouvelle ne put parvenir en France qu'au début de 757 au plus tôt, l'annaliste annonce l'avènement de Didier en ces termes « Et quomodo et qualiter missus est Desiderius in regno, postea dicamus », promesse qu'il n'a pas tenue, nous n'avons plus besoin de supposer avec M. Halphen que c'est là une mention ajoutée après coup nous devons croire que l'information relative à l'élection de Didier, qui avait eu lieu en mars 757, était parvenue à la cour de France avant Pâques, qui, en cette année-là, était le 10 avril, mais qu'elle était muette sur les circonstances dans lesquelles l'avènement au trône de Didier s'était produit la lettre du pape Étienne II qui renseigne Pépin le Bref par le menu sur cette élection du nouveau roi lombard fut écrite au plus tôt dans les derniers jours de mars ou les premiers jours d'avril et ne parvint à son destinataire qu'après Pâques 5. Un clerc palatin avait donc consigné la nouvelle de l'élection dès qu'elle lui était parvenue il se promettait de compléter l'information dès que de nouveaux renseignements lui auraient été apportés. L'annaliste officiel a reproduit cette note contemporaine.

Donc, avant 759 comme après, c'est le style de Pâques que 1. Édition Kurze, p. 10*

2. Voir plus haut, p. 234, note 1.

3. Édition Kurze, p. 16*.

4. Édition Kurze, p. 14.

5. Sur l'élection de Didier, voir la fin du présent mémoire.


l'on suivait dans la chapelle palatine pour le compte des années et c'est peut-être à cette ancienneté de l'usage de commencer l'année à cette fête mobile, autant qu'à sa diffusion ultérieure dans notre pays, que ce style a mérité d'être dit le style de France, car alors c'est chez nous qu'il a sûrement pris naissance.

On verra par la suite quel parti l'historien doit tirer de cette constatation, et ce sera notre excuse de nous être si longuement attardé à résoudre ce problème.

Venons maintenant à notre troisième source franque, le fragment annalistique qui nous a été conservé dans la Chronique de Moissac, écrite vers 818, et dans les Annales primitives de Metz, composées vers 830 1. Les érudits allemands le considèrent comme un témoin d'une Chronique de SaintDenis perdue, écrite en 805 M. Halphen, comme un fragment dérivé d'une rédaction perdue des Annales royales intermédiaire entre celle des Annales regni Francorum et celle des Annales qui dicuntur Einhardi, faite en 805 à SaintDenis. Il en faut certainement chercher l'auteur soit à SaintDenis, soit à la cour, dans le milieu ecclésiastique qui évoluait autour de Fulrad, chapelain du roi et abbé de Saint-Denis et c'est probablement encore le même qui avait composé cet autre fragment que nous trouvons également dans la Chronique de Moissac et dans les Annales primitives de Metz, concernant la politique italienne de Pépin en 773-774. Aussi, pour la commodité de l'exposition, l'appellerons-nous le Fragment de Saint-Denis, sans attacher à cette désignation la valeur absolue d'un certificat d'origine.

Le Fragment de Saint-Denis expose les événements de 753 à 756.

1. Chronicon Moissiacense, édition G. Pertz, Mon. Germ. hist., in-fol., Scriptores, t. I, p. 282-313 spécialement, p. 292-294. Annales Mettenses priores, édition B. von Simson, Scriptores rerum gerrnanicarum in usum scholarum, Hanovre, 1905, in-8°, p. 44-49. Les Annales Mettenses priores (687-830) sont une compilation composée à la gloire de la maison carolingienne à partir de Pépin d'Herstal. Pour la période primitive 687-787, l'auteur a utilisé la première continuation de la Chronique de Frédégaire, les Annales Petaviani et d'autres sources non identifiées de 788 à 805, il a suivi le texte A des Annales royales de 806 à 829, le texte C de ces mêmes Annales en 830, il donne une présentation originale des événements. Voir, en dernier lieu, Wilhelm Levison, Zu den Annales Mettenses, dans les Kritische Beitràge zur Geschichte des Mittelalters (Festschrift für Robert Holtzmann zum sechzigsten Geburtstag). Berlin, 1933, in-8 p. 9-21.


Sa comparaison avec les autres sources contemporaines est très instructive. La venue du pape Étienne en France y est rapportée en des termes qui apparentent le texte celui de la Chronique de Nibelung. Le récit de l'entrevue de Ponthion entre le roi et le pape est entièrement original. Mais, quand l'auteur du fragment relate le déplacement d'Etienne II, de Ponthion à Saint-Denis, et l'envoi d'une ambassade de Pépin à Aistulf, son exposé et celui de Nibelung se ressemblent comme deux frères jumeaux. Mentionnant ensuite le sacre de Pépin et de ses fils par le pape, sacre dont Nibelung ne souffle mot, il s'exprime tout autrement que les Annales regni Francorum et la Vita Stephani II, et l'originalité de ce passage est soulignée par deux indications importantes dont l'une est confirmée par la Clausula de unctione Pippini, qui est un document écrit en 767 à Saint-Denis, et dont l'autre lui appartient en propre. Ensuite, il est seul avec la Chronique de Nibelung à parler du plaid de Berny ou fut décidée la campagne d'Italie. Dans le récit de cette campagne où seul il fait mention d'une ambassade de Carlontan il parle aussi de l'envoi d'une ambassade de Pépin à Aistulf avant le franchissement des Alpes, ce dont la Vita Stephani II a, elle aussi, gardé le souvenir. Sur le traité de paix qui a mis fin à l'expédition, il a eu des précisions qu'on chercherait vainement ailleurs. Il sait, en outre, que ce traité n'a pas même eu un commencement d'exécution, ce que Nibelung se garde bien de dire et ce que les Annales regni Francorum laissent à peine deviner, et il le dit en termes plus nets que la Vita Stephani II, son témoignage ne trouvant pleine justification que dans les lettres d'Étienne II à Pépin. Après quoi, il note la mort de Carloman dans les termes mêmes dont se servent les Annales regni Francorum, et le martyre de saint Boniface selon une formule qui n'est plus celle des Annales royales, mais celle des Annales Nazariani, des Annales Mosellani et des Annales Laureshamenses. Enfin, revenant légèrement en arrière avec le manquement d'Aistulf à ses engagements, il signale la marche des Lombards sur Rome et le siège de la ville d'une façon brève qui lui est personnelle mais quand il raconte enfin la seconde intervention de Pépin en Italie, 1. Il est vraisemblable que cette mention placée en cet endroit constitue une erreur.


son récit retrouve une grande analogie avec celui de Nibelung qui est cependant plus étendu l'emploi des mêmes expressions dans des phrases de contexture très voisine pour parler des mêmes faits souligne là, comme ailleurs, la parenté des deux textes.

Il semble donc que la trame du fragment de Saint-Denis est fournie par la Chronique de Nibelung, à moins que l'on admette que les ressemblances de ces deux sources historiques puissent s'expliquer par l'utilisation des mêmes documents trouvés au dépôt des archives de la chapelle palatine par les deux auteurs et copiés plus ou moins servilement par eux les similitudes sporadiques avec les autres corps d'annales inciteraient à le faire croire, d'autant mieux que les parties originales du Fragment de Saint-Denis attestent que l'auteur avait eu entre les mains des documents officiels ou avait été renseigné par quelqu'un qui avait pris part aux négociations diplomatiques, si fort négligées par Nibelung, et auxquelles, c'est incontestable, il porte un intérêt particulier ce qui nous ramène au palais du roi et à l'entourage de Fulrad. Le Fragment de Saint-Denis est encore, en définitive, une source importante à consulter, puisque, dans ses parties originales, il nous apporte l'écho de témoignages contemporains qui, sans lui, ne nous seraient pas connus.

Dans les Annales de Metz, ce fragment a reçu une division chronologique par années de l'incarnation, qui est J'oeuvre propre du compilateur de ces Annales les erreurs qu'elle contient et que nous signalerons, comme aussi le fait que la Chronique de Moissac ne l'a pas connue, prouvent qu'il n'y a pas à en tenir compte pour fonder sur elle quelque construcsion solide 1.

1. A ces sources romaines et franques, il faudrait adjoindre le Fragmentum Fantuzzianum, qui serait un texte d'un intérêt capital, s'il était authentique, ou si seulement on y pouvait retrouver, avec une suffisante certitude, les éléments du document qu'il prétend être, le pacte conclu entre Pépin le Bref et Ëtienne II. Personne n'a jamais osé soutenir son authenticité mais MM. Gustav Schnürer et Diomedes Ulivi (Das Fragmentum Fantuzzianum, dans les Freiburger Historische Studien, fasc. II, Freiburg'(Schweiz), 1906, in-8°, 128 p.) et récemment M. René Macaigne (L'Église mérovingienne et l'État pontifical, spécialement Appendice Il la Donation de Quierzy, p. 447-504) ont tenté de dégager de ce faux le texte authentique qu'il est censé recouvrir. Ils ont du faire subir tant et de si graves corrections ou amputations arbitraires au Fragmentum pour aboutir à un résultat qui n'est encore pas satisfaisant, du point de vue de la diplomatique


Revenons maintenant à nos moutons. Nous avons laissé le pape et le roi au moment où ils entraient dans la résidence royale de Ponthion, le 6 janvier 754.

Le jour même, semble-t-il d'après la Vita Stephani II, dans l'oratoire du palais, à la prière du pape, Pépin s'engageait sur-le-champ par serment à prendre en main « la cause de saint Pierre et de la république romaine ». Nibelung ne dit rien de tel selon lui, le pape se serait borné à distribuer des présents au roi et aux grands et à présenter sa requête contre les Lombards et leur roi, « pour arracher de leurs mains le peuple romain et les obliger à renoncer aux tributs et présents qu'ils exigeaient indûment des Romains », sans que Pépin se fût lié par une promesse quelconque 2. Mais ici Nibelung semble avoir gardé un silence diplomatique, un silence qui équivaut peut-être à une désapprobation de la politique romaine de Pépin. Car le Fragment de Saint-Denis nous fait un récit de l'entrevue de Ponthion qui tend manifestement à atténuer la valeur morale de l'engagement pris par le roi, ce qui revient à reconnaître l'existence de cet engagement dont le biographe romain d'Étienne tendait de son côté à exagérer la portée.

Évidemment, il est peu croyable que, dès le premier jour, Pépin se soit engagé par serment. Ce ne serait que le lendemain, 7 janvier, qu'Étienne II, avec tout son clergé, en position de suppliant, prostré en terre, couvert de cendres et revêtu d'un cilice, aurait demandé au roi de le délivrer, lui et le peuple romain, de la puissance lombarde et de la servitude comme de celui de l'histoire, qu'il faut considérer leur tentative comme non avenue. Le document est donc inutilisable. Voir notre compte-rendu de l'ouvrage de M. l'abbé Macaigne dans Le Moyen Age, 1930, p. 203-214.

1. Vita Stephani II « Ibique intus oratorium pariter consedentes, mox ibidem beatissimus papa praefatum christianissimum regem lacrimabiliter deprecatus est, ut per pacis fœdera causam beati Petri et reipublice Romànorum disponeret. Qui de praesenti jurejurando eundem beatissimum papam satisfecit omnibus ejus mandatis et ammonitionibus sese totis nisibus aboedire, et ut illi placitum fuerit exarchatum Ravennae et reipublicae jura seu loca reddere modis omnibus. » Édition Duchesne, I, p. 448. J. Haller, p. 19-20. 2. Chronique de Nibelung, c. 36 « Ibique Stephanus papa Romensis ad praesentia regis veniens, et multis muneribus tam ipso rege quam et Francis largitus est, auxilium petens contra gente Langobardorum et eorum rege Aistulfo, ut per ejus adjutorium eorum oppressionibus vel fraudulentia de manibus eorum liberaret, et tributa vel munera, quod contra legis ordine ad Romanos requirebant, facere désistèrent.» Édition Krusch, p. 182. J. Haller, p. 63.


que leur imposait Aistulf. Étienne, nous est-il dit, « ne voulut pas se relever avant que Pépin, avec ses fils et les grands, ne lui eût tendu la main et ne l'eût levé de terre en signe d'un concours futur et d'une délivrance prochaine. Alors le roi accomplit toute la volonté du pape 1 ».

Si les choses se sont ainsi passées, le roi ne pouvait laisser se prolonger une situation pénible pour tous en relevant le pape, il prenait un engagement qui lui était arraché par une douce violence un tel engagement n'oblige pas moralement et laisse la porte ouverte à des négociations ultérieures en vue desquelles le roi envoyait le pape passer l'hiver en Parisis, dans le monastère de Saint-Denis 2.

A partir de ce moment, la Vita Stephani II, qui jusqu'alors avait suivi l'ordre chronologique des faits, y renonce et adopte un plan méthodique qui lui permet de raconter dans l'ordre où elles ont débuté, mais d'un seul trait, les négociations entre le pape et le roi de France, puis celles que dirigea Carloman, frère de Pépin, envoyé en mission diplomatique à la cour de France, enfin celles qui se poursuivirent entre Pépin et Aistulf jusqu'à la rupture finale. Le biographe du pape nous avertit du procédé les adverbes « interea » et « porro » qui unissent les trois parties de l'exposé prouvent que les trois séries de pourparlers furent, en partie du moins, simultanées. C'est parce qu'on n'a pas observé le procédé d'exposition de cet auteur qu'on a pu déclarer le récit confus et l'auteur mal informé. Non La Vita Stephani II n'est pas 1. Fragment de Saint-Denis « Ibique veniens praedictus papa, a Pipino rege honorifice susceptus est. Sequenti die una cum clero suo aspersus cinere et indutus cilicio in terram prostratus, per misericordiam Dei omnipotentis et merita. beatorum apostolorum Petri et Pauli Pippinum regem obsecrans, ut se et populum Romanum de manu Langobardorum et superbi regis Haistulphi servitio liberaret, nec antea de terra surgere voluit, quam sibi rex praedictus Pippinus cum filiis suis et optimatibus Francorum manum porrigerent et ipsum pro indicio suffragii futuri et liberationis de terra levarent. Tune rex Pippinus omnem pontificis voluntatem adimplens. » Chronicon Moissiacense, édition Pertz, Scriptores, I, p. 292-293. J. Haller, p. 75. Cf. Annales Mettenses priores, édition Simson, p. 45.

2. Chronique de Nibelung, c. 36 « Tune Pippinus rex praefato Stephano papa apud Parisius civitate monasterio sancti Dionisii martyris cum ingenti cura et multa diligentia hiemare praecepit. » Édition Krusch, p. 183. J. Haller, p. 63. Cf. Fragment de Saint-Denis Tune rex Pippinus omnem pontificis voluntatem adimplens, direxit eum ad monasterium sancti Dionysii martyris eumque summo honore et diligentia hiemare praecepit. » Voir la note suivante.


une chronologie, c'est une biographie et la loi du genre n'oblige pas l'auteur à suivre un ordre chronologique absolu. Prenons-la pour guide, et voyons d'abord ce qu'elle nous dit des négociations entre Étienne et Pépin.

Comme la saison s'annonçait glaciale, le roi pria le pape de se rendre avec toute sa suite à Saint-Denis pour y passer l'hiver. Ceci fait de point en point, « quo peracto », le pape et le roi se réunirent dans ce même monastère, et quelques jours plus tard, « per aliquantos dies », Pépin fut sacré roi de France avec ses deux fils, Charles et Carloman, par le Souverain Pontife. Le pape tomba si grièvement malade à cause de l'excessive fatigue du voyage et de la variabilité de la saison que tous, ceux de sa suite comme les Francs, désespéraient de lui mais l'ineffable clémence de Dieu, qui n'abandonne pas ceux qui espèrent en lui, voulant sauver le plus chrétien des hommes, on trouva celui-ci subitement guéri le lendemain, alors qu'on s'attendait à le trouver mort le matin. Le roi Pépin congédié s'éloignait chargé des recommandations, remercîments et bénédictions du Saint-Père, et se rendait à Quierzy-sur-Oise, où il assembla tous les grands de son royaume pour leur faire part de la sainte exhortation du pape, et il y prit avec eux la décision d'exécuter ce qu'avec l'aide du Christ il avait résolu d'accomplir d'accord avec le pape

Les faits qui sont ici énumérés ont été commentés ainsi la présence du roi à Quierzy-sur-Oise aux fêtes de Pâques en 1. Vita Stephani II Sed quia tempus inminebat hyemalis eundem sanctissimum papam cum suis omnibus in Parisio apud venerabilem monâsterium beati Dionisii ad exhibernandum pergere rogavit. Quo peracto et eo in elodem venerabile monasterio cum jamfato christianissimo conjungente, Domino annuente, post aliquantos dies hisdem christianissimus Pippinus rex ab eodem sanctissimo papa Christi gratia cum duobus filiis suis reges uncti sunt Francorum. Et beatissimus papa prae nimio labore itineris atque temporis inequalitate fortiter infirmavit, ut etiam omnes tam sui quamque etiam et Francorum ibidem existentium homines eum desperarent. Sed domini Dei nostri ineffabilis clementia, qui etiam non deserit sperantes in se, salvum cupiens hominem christianissimum, dum eum mane mortuum invenire sperabant, subito alio die sanus repertus est. Pippinus vero jamfatus rex cum ammonitione, gratia et oratione ipsius venerabilis pontificis absolutus, in loco qui Carisiacus appellatur pergens ibique congregans cunctos proceres regiae suae potestatis et eos tanti patris sancta ammonitione imbuens, statuit cum eis, que semel Christo favente una cum eodem beatissimo papa decreverat perficere. » Liber pontificalis, édition Duchesne, I, p. 448. J. Haller, p. 20.


754 est attestée par une annale franque. La maladie du pape, antérieure à l'assemblée de Quierzy, se place avant Pâques, qui, en cette année-là, tomba le 14 avril ce qui est confirmé par le fait que ce sont la fatigue du voyage et la rigueur de la saison qui ont causé cette maladie le pape est donc tombé malade en hiver. Le sacre est antérieur à la maladie, et puisqu'il a eu lieu quelques jours après que le pape eut accompli le voyage de Ponthion à Saint-Denis et eut été rejoint en ce dernier lieu par le roi, il faut le placer avant le plaid général de Berny, qui eut lieu le 1er mars 754 et où fut décidée la guerre contre Aistulf vers le 19 ou le 20 février, dit l'un vers le 20 janvier, dit l'autre1.

Un tel raisonnement, en apparence rigoureux, ne résiste pas à l'examen. Reprenons l'étude du texte.

Comment, tout d'abord, faut-il entendre le « quo peracto »? Signifie-t-il simplement que le pape s'est rendu de Ponthion à Saint-Denis? Ou bien s'applique-t-il à la fois au déplacement du pape et à l'hivernage qui a suivi dans le monastère san-dionysien? Il n'y a aucun doute que la seconde interprétation est la seule logique le « quo peracto » n'a d'utilité dans la phrase que si tout le programme tracé par le roi a été de point en point réalisé. Or, Pépin n'a pas seulement prié le pape d'aller à Saint-Denis, mais de s'y rendre et d'y passer l'hiver. « Quo peracto » ne retombe pas seulement sur le verbe « pergere », mais sur l'expression « ad exhibernandum 1. Ce raisonnement a été fait, en dernier lieu, par M. Max Buchner, qui renvoie aux auteurs précédents, Duchesne, Martens, etc., Das Vizepapsttum des Abtes von St-Denis, p. 9-16, et spécialement pour la bibliographie de la question, p. 163-164 (notes 2 et 3 de la p. 9). Signalons, en passant, que cet érudit, en traduisant dans le texte cité à la note précédente « post aliquantos dies hisdem » par « quelques jours après le déplacement rapporté dans le passage précédent » (p. 14 et p. 168, note 4 de la p. 14), c'est-à-dire en faisant de « hisdem » un ablatif qui s'appliquerait aux faits mentionnés dans la phrase précédente, commet un contre-sens inimaginable. Comment peut-il ainsi détacher du texte ces quatre mots? « Hisdem » n'est pas un ablatif, mais un nominatif, « hisdem christianissimus Pippinus rex » (cf. dans la même Vita « Isdem excellentissimus Pippinus », « hisdem eximius Francorum rex », « beatissimus hisdem papa » etc.). Il n'est'donc pas discutable que « per aliquantos dies » retombe sur « eo. conjungente », que c'est quelques jours après la réunion du roi et du pape à Saint-Denis qu'eut lieu le sacre, et non pas quelques jours après l'arrivée du pape dans ce monastère. C'est sur ce contre-sens, je le répète, inconcevable, que repose la date du 20 janvier imposée par M. Buchner à la cérémonie du sacre. La date du 19 ou du 20 février indiquée par Martens a été justement combattue par M. Buchner lui-même.


pergere ». Et c'est même le verbe « exhibernare » qui exprime l'idée principale de la requête du roi au pape, puisque c'est lui qu'appelle la raison invoquée au début du passage, « sed quia tempus inminebat hyemalis ».

En conséquence, l'entrevue de Pépin le Bref et d'Étienne II à Saint-Denis eut lieu après l'hiver, et la « temporis inequalitas », cause déterminante de la maladie du pape, n'est pas la « rigueur de l'hiver », mais les sautes de température de la saison où le sacre avait eu lieu. Alors, si réellement le pape a failli mourir et si les causes de son mal sont bien celles que son biographe indique, force est de croire que le pape débilité par l'excessive fatigue d'un long et pénible voyage n'a pas présenté une suffisante résistance physique aux variations trop brusques d'un printemps incertain ou même d'un été maussade, comme il nous arrive d'en connaître dans nos régions les fluxions de poitrine se gagnent en toutes saisons. Mais, en outre, peut-on admettre sans contrôle le témoignage du biographe romain sur la maladie quasi mortelle et sur la guérison soudaine du pape? Dans une oeuvre panégyrique comme la Vita Stephani II, l'élément merveilleux éveille immédiatement le soupçon d'une supercherie qui tendrait, dans l'espèce, à prouver que Dieu ne se désintéressait pas de la cause de son Eglise, puisqu'il en sauvait miraculeusement le protagoniste.

La réalité historique que le biographe a dramatisée nous est heureusement connue par le principal intéressé, Etienne II lui-même, dont les lettres ont fourni au panégyriste les éléments de son récit et l'inspiration de sa trouvaille merveilleuse.

Dans une lettre qu'il adresse en 755 aux trois rois qu'il a sacrés, Étienne II leur rappelle que, confiant dans leur fidélité à l'égard du Saint-Siège, il s'est livré corps et âme aux grandes fatigues du voyage qui l'a conduit dans leur lointain et vaste pays, qu'il a souffert de la neige et du froid, de la chaleur et du débordement des eaux, qu'il a couru mille dangers au passage de fleuves torrentueux et dans la traversée des montagnes, qu'il a été exposé à d'autres périls encore'. 1. Codex Carolinus, 7 « Tradidimus enim corpus et animam nostram in magnis laboribus in tam spatiosam et longinquam provintiam, valde fisi in vestra


Et, plus loin, il revient sur ce sujet pour ajouter qu'en raison de la fatigue du voyage il a subi un affaiblissement de ses forces physiques, une « diminution de sa chair », selon sa propre expression 1.

Nulle part il ne parle d'une maladie qui aurait mis ses jours en danger nulle part il ne fait allusion à une intervention miraculeuse de Dieu en sa faveur. Comment ne se serait-il pas prévalu d'un tel miracle auprès des princes qui en auraient été les témoins, si c'eût été vrai?

Mais, s'il n'est pas question de maladie dans cette lettre, on y trouve les causes attribuées par le biographe à la prétendue maladie du pape, la fatigue physique et la « temporis inequalitas », puisque le pape se plaint d'avoir souffert du froid et de la chaleur.

Enfin, dans la même lettre, mention est faite d'un miracle qui n'a rien à voir avec une guérison merveilleuse. Mais le pape en parle dans une lettre antérieure de telle façon que le biographe à la recherche de tout ce qui pouvait servir à exalter son héros ne devait pas résister à la tentation de transformer le miracle d'une victoire inespérée en un miracle personnel au pape 2.

fide per Dei nutum illuc profecti sumus, adflicti in nive et frigore, aestu et aquarum inundatione atque validis fluminibus et atrocissimis montibus seu diversis periculis. » Édition Gundlach, p. 491. J. Haller, p. 85. 1. Codex Carolinus, 7 « Cunctus namque noster populus rei puplice Romanorum magno dolore et amarissimis lacrimis una nobiscum tribulantur pro eo, dum ad tam longam et spatiosam provintiam properavimus et pre phatigio validi itineris caro nostra minuata est, si vacui et infructuosi sine aeffectu justitiae revarsi sumus. » Édition Gundlach, p. 493. J. Haller, p. 88. 2. Qu'on rapproche du texte cité dans la note précédente le passage correspondant de la lettre antérieure d'Étienne II, Codex Carolinus, 6 « Unde et sine aetrectu justitiae Petri ad proprium ovile et populum nobis commissum sumus reversi. Omnes denique christiani ita firmiter credebant, quod beatus Petrus princeps apostolorum nunc per vestrum fortissimum brachium suam percepisset justitiam, dum tam maximum ac praefulgidum miraculum vestris felicissimis temporibus demonstravit talemque vobis inmensam victoriam dominus Deus et salvator Jesus Christus per intercessiones sui principis apostolorum pro defensione sancte sue ecclesie largiri dignatus est. » Édition Gundlach, p. 489. J. Haller, p. 83. On pensera peut-être avec nous que la tentation devait être grande pour le panégyriste d'Étienne II de voir dans ce miracle éclatant, suivi d'une victoire non moins brillante, une restauration merveilleuse de la « caro minuata », bien que la lettre suivante ne laisse aucun doute que miracle et victoire ne font qu'un. Codex Carolinus, 7 « Sed omnipotens Dominus, qui conterit bella ab initio (Judith, IX, 10), qui superbos humiliat et humiles exaltat (Matth., XXIII, 12), ilico justitiam beati Petri vestre bonitati et omnibus christianis demonstravit et tale praefulgidum miraculum ostendit, quale omnino gloriosum


On peut donc douter de la réalité de la maladie et de la guérison invraisemblable, sans être taxé d'hypercritique. Mais que l'on accepte ou que l'on rejette sur ce point le dire du biographe romain, il est certain qu'on ne peut tabler sur lui pour dater le sacre sans commettre une pétition de principes.

Quant à l'assemblée des grands à Quierzy-sur-Oise, que l'on place à Pâques en 754, parce que l'on apprend par une autre voie que le roi a célébré la fête de la Résurrection en ce lieu, elle peut être d'une autre date. Le roi ne s'est-il donc rendu qu'une seule fois à Quierzy en cette année 754? En outre, les historiens qui ont invoqué le témoignage de l'annale franque, attestant la présence du roi à Quierzy lors des fêtes pascales, n'ont-ils donc pas observé que cette annale met expressément la cérémonie du sacre après la célébration de ces fêtes1? Si l'on attache quelque prix aux données de cette source, il faut conclure de ce que le roi était à Quierzy le 14 avril, ensuite à Saint-Denis pour le sacre, que Pépin Je Bref est venu deux fois au moins dans son palais des bords de l'Oise en cette année, puisque l'assemblée des grands est postérieure au sacre. C'est après cette assemblée que le pape dut se rendre lui-même à Quierzy, où il accorda aux moines de Brétigny une consultation sur des questions de droit ecclésiastique et où il reçut la promesse des rois et des grands que les territoires dont Aistulf s'était emparé lui seraient concédés 3.

est referendum [suit le récit de la çictoire). Édition Gundlach, p. 491. J. Haller, p. 85-86. Il ne faut pas oublier que l'auteur de la Vita Siephani témoigne lui-même qu'il a disposé des archives de l'Église romaine, ce qui est confirmé par l'usage qu'il a fait de la lettre d'Étienne II (Codex Carolin\is, 8) dans son récit de l'expédition de 756 il lui emprunte des expressions caractéristiques. 1. Annales regni Francorum, ms. d1 « DCCLIII. Hoc anno natalem Domini in Theodone villa, pascha in Carisiaco celebravit. DCCLIIII. Supradictus apostolicus Stephanus confirmavit Pippinum unctione sancta in regeto. » Édition Kurze, p. 10-12. J. Haller, p. 69.

2. « Stephani II papae responsa, quae, cum in Francia esset in Carisiaco villa, Brittaniaco monasterio dedit ad varia consulta, de quibus fuerat interrogatus, anno Christi 754. » Sirmond, Concilia antiqua Galliae, t. II, p. 14. J. Haller, p. 20, note 1. Brétigny, Oise, canton de Noyon.

3. Vita Hadriani «. promissionem illam, quam ejus sanctae memoriae genitor Pippinus quondam rex et ipse praecellentissimus Carulus cum suo germano Carulomanno atque omnibus judicibus Francorum fecerant beato Petro et ejus vicario sanctae memoriae domno Stephano juniori papae, quando Franciam perrexit, pro concedendis diversis civitatibus ac territoriis istius Italiae provin-


Enfin, se servir du plaid de Berny pour avancer le sacre jusqu'en janvier ou en février n'est admissible que si cette réunion générale des Francs est bien du 1er mars 754 or, nous allons prouver de façon indiscutable que l'assemblée est du 1er mars 7551.

De toute cette discussion, il résulte que le seul renseignement d'ordre chronologique à tirer de la Vita Stephani II est que l'entrevue de Saint-Denis est postérieure à la fin de la saison hivernale, que les négociations qui suivirent durèrent quelques jours ou quelques semaines avant d'aboutir au sacre. Nous avons vu qu'une mention annalistique rejetait le sacre après Pâques. Tous les manuscrits des Annales royales mettent en l'an 754 la cérémonie de Saint-Denis puisque nous savons que dans ces Annales le premier jour de l'année est celui de Pâques et que, d'autre part, le roi était à Quierzy le 14 avril, le sacre ne peut avoir eu lieu au plus tôt que dans la seconde quinzaine de ce mois d'avril.

L'abbé de Saint-Denis, Hilduin, dans ses Gesta, écrits en 834, impose à cette cérémonie, qui s'était jadis déroulée dans son monastère, la date du 28 juillet 2. On a objecté à cette ciae et contradendis beato Petro ejusque omnibus vicariis in perpetuum possidendis. ipsam promissionem, quae Francia in loco qui vocatur Carisiaco facta est. » Liber pontificalis, édition Duchesne, t. I, p. 498. J. Haller, p. 54. C'est peut-être sous l'influence de ce texte, ou parce qu'il savait par une autre voie qu'Étienne II avait fait un séjour à Quierzy, que le remanieur des Annales royales a commis l'erreur de placer la première entrevue du pape et du roi non à Ponthion, mais à Quierzy. Annales qui dieuntur Einhardi, a. 753 « Eodem anno Stephanus papa venit ad Pippinum regem in villa, quae vocatur Carisiacus. » Édition Kurze, p. 11. J. Haller, p. 69.

1. Voir plus loin, p. 271 et suiv.

2. Hilduin, Gesta (ou Dedicatio altaris) « Gesta sunt autem haec in beato Stephano papa divina clementia, adjuvantibus sanctis apostolis Petro et Paulo, per beatissimum martyrem Dyonisium hoc anno, qui est ab in incarnatione domini nostri Jhesu Christi septingentesimus quinquagesimus quartus, v. kal. Augusti. Qui (Stephanus), Christi roboratus virtute, inter celebrationem consecrationis praefati altaris et oblationem sacratissimi sacrificii unxit in reges Francorum florantissimum regem Pippinum et duos filios ejus Karolum et Karlomannum. » Édition G. Waitz, Mon. Germ. hist., in-fol., Scriptores, t. XV, p. 2, ou M. Buchner. Das Vizepapsttum des Abtes pon St-Denis, p. 251. J. Haller, p. 68, note 1. – Un manuscrit des Annales regni Francorum, le C3 (édition Kurze, p. 12*), donne la date du « vi kal. Augusti », 27 juillet mais cela ne constitue pas une source indépendante des Gesta d'Hilduin. Les additions propres à ce manuscrit ont une origine rémoise (cf. édition Kurze, p. 84*), et, comme ce manuscrit est le manuscrit de Saint-Omer, qui, originairement, contenait aussi les Annales Berriniani, il n'est pas douteux que ces additions proviennent du manuscrit autographe d'Hincmar de Reims dont dérive celui de Saint-Omer Hincmar,


date qu'elle était impossible, puisque les Annales regni Francorum mentionnent le sacre avant le martyre de saint Boniface, qui eut lieu le 5 juin 1. L'argument n'est pas sans réplique. On oublie, en effet, que, même dans des annales absolument contemporaines des événements (ce qui n'est pas le cas des Annales royales), la place occupée par les mentions n'est pas celle que leur assignerait la date réelle des faits qu'elles relatent, mais celle que leur vaut l'ordre dans lequel les faits sont parvenus à la connaissance de'l'annaliste. Précisément, nous avons des raisons de croire quel la nouvelle de la mort du martyr ne fut connue que très tardivement au palais le prêtre mayençais Willibald, qui écrivit la Vita Bonifatii entre 755 et 768 et la dédia aux évêques Lull, successeur de saint Boniface sur le siège de Mayence, et Mégingoz, raconte que saint Boniface, tombé sous les coups des Frisons qu'il évangélisait, avait été inhumé à Utrecht, en attendant que fussent arrivés de Mayence les envoyés et les bateaux qui devaient ramener le corps dans cette ville, puis à Fulda. La dépouille du martyr arriva à Mayence le jour même où Lull, revenant du palais royal et ignorant tout, rentrait lui-même dans sa ville épiscopale, le 30e jour après la mort du saint, c'est-à-dire le 4 juillet 2. Cela suffit déjà pour qu'on ne fasse pas du 5 juin 754 un terminus ad quem du ancien moine de Saint-Denis et disciple d'Hilduin, connaissait certainement les Gesta de ce dernier. L'erreur d'un jour est imputable soit à une erreur de mémoire d'Hincmar, soit plutôt à un lapsus calami du copiste de C3 1. Annales regni Francorum « DCCLIIII. Supradictus apostolicus Stephanus confirmavit Pipinum unctione sancta in regem et cum eo inunxit duos filios ejus, domnum Carolum et Carlomannum in regibus. Et domnus Bonifa'cius archiepiscopus in Frisia nuntians verbum Domini et praedicando martyr Christi effectus est. » Édition Kurze, p. 12. Il n'est pas sans intérêt de remarquer que le texte des Annales ne donne pas la date de jour qui nous est livrée par la Vita Bonifatii et quelques autres sources. L'époque tardive de la rédaction des Annales royales permettrait d'expliquer, ici comme ailleurs, le désordre chronologique. L'objection que nous combattons est de M. Buchner, Das Vizepapsttum. p. 9. 2. Vita Bonifatii, auctore Willibaldo Sicque statim reddituin est corpus et a praedictis sanctae recordationis fratribus cum psalmis hymnisque honorifice ablatum ac sine remigantium labore tricesima die obitus sui periluctum est ad civitatem supradictam Magontiam. Sed et supradictus Domini; antistes, tam venerandae dignitatis successor, qui regali illo in tempore praesens erat palatio, hujus omnino ignarus causae adventusque sancti corporis inscius ad civitatem quam praediximus velud sub uno eodemque horae momento pervenit. » Édition Levison, Vitae Bonifatii, dans les Scriptores rerum Germanicarum in usum scholarum, Hanovre, 1905, p. 53-54.


sacre des rois, même si l'on admet, selon l'opinion actuellement régnante que le martyre de saint Boniface est de 754. A plus forte raison, l'objection que l'on tire de cette date s'effondre-t-elle, si Boniface est mort en 755.

Aux sources que l'on invoque en faveur de 7542 s'opposent quelques témoignages plus anciens, plus précis et, à notre avis du moins, de plus haute valeur, qui plaident pour 755. Saint Boniface écrit au pape Étienne II une lettre où, rappelant qu'il a servi l'Église romaine sous « deux Grégoires et Zacharie », les prédécesseurs immédiats de son correspondant, il dit « Nam si quid in ista legatione Romana, qua per triginta et sex annos fungebar, utilitatis aecclesiae praefatae peregi, adhuc implere et augere desidero 3. » La lettre fut incontestablement rédigée dans la 37e année de la « legatio Romana ». Nous avons encore l'acte par lequel le pape Grégoire II, ayant donné à Boniface les reliques qu'il demandait, lui confiait la mission d'évangéliser toutes les nations infidèles qu'il visiterait, de les baptiser suivant l'usage de l'Église romaine et d'avertir le pape de ce qui lui serait nécessaire pour l'exécution de cette légation cet acte est daté du 15 mai 719 4.

Willibald, qui a parlé de cette délégation romaine du mois de mai 719 5, sans indiquer l'année, il est vrai, signale plus 1. M. Tangl, Das Todesjahr des Bonifatius, dans la Zeitschrift des Vereins fur hessische Geschichte und Landeskunde, nouvelle série, t. XXVII (t. XXXVII de la collection), 1903, p. 223 et suiv. Franz Flaskamp, Dos Todesjahr des hl. Bonifatius, dans l'Historisches Jahrbuch, t. XLVII, 1927, p. 473-478. 2. La date de 754 est fondée sur la Continuatio Bedae, a. 754 (Mon. Germ. hist., in-fol., Scriptores, t. XIII, p. 154), sur les Annales Fuldenses antiquissimi, a. 754 (édition Kurze, Scriptores rerum Germanicarum in usumscholarum, p. 137), et sur quelques autres annales, sur la Vita Sturmi d'Eigil, c. 15, 23 (Mon. Germ. hist., in-fol., Scriptores, t. II, p. 372, 376), sur la Nota de dedicatione ecclesiae Fuldensis, a. 819 {Mon. Germ. hist., in-4°, Poetae latini, t. II, p. 205), enfin sur quelques chartes de Fulda.

3. Bonifatii epistolae, 108 édition Duemmler, Mon. Germ. hist., in-4°, Epistolae, t. III, p. 394.

4. Ibidem, 12, p. 258. On trouve dans les Epistolae Viennenses une lettre de Grégoire II à Austrobert, métropolitain de Vienne, du 31 août 719, recommandant Boniface en ces termes « Reverendum fratrem Bonifacium rudibus gentibus episcopum designavimus, quem vestra caritas principibus Francorum insinuare non gravetur, ut legationem nostram adimpleat. » Édition Gundlach, Mon. Germ. hist., in-4°, Epistolae, t. III, p. 93. On sait que ces Epistolae Viennenses sont fausses. Celle-ci avance de trois années la désignation de Boniface comme évêque.

5. Vita Bonifatii, auctore Willibaldo, c. 5 édition Levison, p. 21-22.


tard que Boniface, lors d'un nouveau séjour à Rome, se vit imposer par le pape Grégoire II « la dignité de l'épiscopat et du nom de Boniface » le 30 novembre d'une année qu'il ne précise pas mais qui est certainement l'année 722 (ou 723), puisqu'il ajoute que Grégoire mit le nouvel évêque sous la protection de Charles Martel, la lettre du pape à ce dernier nous étant parvenue et appartenant à un groupe de documents dont quelques-uns sont datés du 1er décembre 722 (ou 723) 2.

Mais Willibald a commis une erreur certaine, bien excusable du reste, quand il a cru que c'était au jour de sa consécration épiscopale que Boniface avait changé son nom anglosaxon de Wynfreth contre le nom gréco-romain sous lequel il est surtout connu 3 Wynfreth était encore prêtre qu'il portait déjà le nom de Boniface, sa correspondance le prouve. M. Levison, qui l'a justement constaté et qui s'est servi de cette correspondance pour dater ce changement de nom de 719, a, par une hypothèse ingénieuse et, à notre! avis comme au sien, pleinement justifiée, du même coup fixé le jour de cette substitution de nom au 14 mai de cette année et découvert la raison qui avait décidé du choix du nouveau nom c'est le 14 mai que le missionnaire anglo-saxon avait reçu la 1. Ibidem, c. 6 « Summus sanctae auctoritatis pontifex diem constituit ordinationis, id est pridie kalendarum Decembrium. Cumque sanctus sacrae sollempnitatis dies et natalicius sancti Andreae et praefinitae ordinationis inluxisset, jam sacer sedis apostolicae pontifex episcopatus sibi et nominis, quod est Bonifatius, inposuit dignitatem eique libellum, in quo sacratissima ecclesiasticae constitutionis jura pontificalibus sunt digesta conventibus, accommodavit. Et Carli ducis gloriosi suis sacratissimis litteris regni munimine ac devotione sanctum hune virum episcopatus gradu pollentem subjugavit. Édition Levison, p. 29-30.

2. Cette lettre fait partie d'un groupe de documents en' rapport avec la cérémonie du 30 novembre serment de Boniface lettres de Grégoire II à tous les chrétiens, au clergé, aux religieux et au peuple confiés à l'évêque, aux chrétiens de Thuringe, à Charles Martel, enfin, aux Vieux Saxons (ainsi désignés pour les distinguer des Anglo-Saxons). Ces documents, dont quelquesuns sont datés du 1er décembre 722 (ou 723), ont été conservés dans la correspondance de saint Boniface. Bonifatii epistolae, 16-21 édition Duemmler, p. 265-269. A la suite, on trouve le mandement de Charles Martel par lequel, en 723 ou 724, il prend Boniface sous sa protection (Ibidem, 22, p. 270). 3. C'est, en effet, dans une circonstance analogue, lors de sa consécration épiscopale, que Willibrord avait reçu du pape Sergius, le 21 novembre 695, le nom romain de Clément. Vita Sergii, dans le Liber pontificalis, édition L. Duchesne, t. 1, p. 293. Bède, Historia ecclesiastica Anglorum, V, 11 édition C. Plummer, Bedae Opera historica, Oxford, 1896, 2 vol. in-8°, t. I, p. 303.


« legatio Romana » dont l'acte daté du lendemain définissait les termes, et ce jour-là on commémorait dans l'Église romaine la mort du martyr de Tarse, Boniface, dont les reliques apportées à Rome étaient vénérées dans une église de l'Aventin, sur l'emplacement actuel de la basilique de SaintAlexis 1.

Boniface ne pouvait pas ne pas avoir gardé fidèlement le souvenir de ce jour du 14 mai 719. Si sa lettre à Étienne II est datée à compter de ce jour-là, elle a été écrite entre le 14 mai 755 et le 5 juin suivant, jour de sa mort, au cours même de sa dernière mission évangélique. Mais, comme il exprime le désir de remplir encore et d'accroître son œuvre de missionnaire romain, ce qui peut s'entendre comme une demande de permission de la reprendre, il est possible que Boniface, dans le calcul des années de sa « legatio Romana », ait compté l'année 718 comme une année pleine alors sa lettre aurait été rédigée dans les premiers mois de 755. Il ne peut pas être mort le 5 juin 754

Quand donc Willibald, qui certes pouvait se tromper sur des événements antérieurs de cinquante ans environ à l'époque où il écrivait, mais le pouvait plus difficilement sur ceux dont il était le témoin, nous dit que Boniface a été martyrisé le 5 juin 755, et prend même le soin d'exprimer cette date par le synchronisme de l'indiction et de l'année de l'incarnation, ce qui ne permet pas de supposer une inadvertance qui lui aurait fait écrire 755 pour 7542, son témoignage de contemporain est confirmé par saint Boniface lui-même, comme il l'est aussi par Lull, successeur du saint sur le siège de Mayence.

Celui-ci avait des raisons toutes personnelles de se souvenir 1. W. Levison, Wann und weshalb wurde Wynfreth Bonifatius genannt?, dans Willibrordiana, dans le Neues Archiv, t. XXXIII, 1908, p. 9-14. 2. Vita Bonifatii, auctore Willibaldo, c. 8 édition Levison, p. 55. Willibald ajoute que Boniface « sedit. in episcopatu annos xxxvi, menses vi et dies vi ». En remontant de trente-six ans six mois et six jours, à partir du 5 juin 755, on trouve pour le début de l'épiscopat le 30 novembre 718 ce qui est erroné. L'erreur du biographe résulte probablement de ce qu'il a emprunté le nombre trentesix des années à la lettre 108 de Boniface que nous avons citée, sans observer que trente-six ne pouvait convenir à l'année 722 ou 723, et de ce qu'il a ensuite compté les mois et jours compris entre le 30 novembre et le 5 juin. En réalité, l'épiscopat de Boniface a duré trente-deux ans six mois six jours, à compter de 722.


de l'année du décès de son maître et ami, qui l'avait associé au gouvernement de son église et lui avait conféré la dignité épiscopale Boniface, avant de partir pour sa dernière mission, l'avait désigné à Pépin le Bref comme son successeur et avait prié Fulrad de hâter la nomination. A vingt-cinq ans de là, Lull datait encore une de ses chartes de la douzième année du règne de Charlemagne et de la vingt-cinquième de son pontificat 2, c'est-à-dire d'un jour compris entre le 9 octobre 779 et le 8 octobre 780, ce qui reporte le début de son pontificat à l'année 755.

Notons, enfin, que les Annales Laurissenses minores placent le martyre de saint Boniface en 755 3, et que la plupart des Annales qui le mettent en 753 ou 754 rapportent sous la même date la première expédition de Pépin en Italie et le décès de Carloman, quand elles ne le rejettent pas après ces événements 4 qui, nous allons le voir, sont de 755 et non de 754. On ne peut donc, en bonne et saine critique, invoquer la place assignée dans l'annale de 754 par l'auteur de cette partie des Annales regni Francorum au martyre de; saint Boniface pour dater le sacre des rois.

Hilduin avait composé ses Gesta pour accréditer son faux, la Revelatio Stephani Il, qui expliquait par une intervention miraculeuse des apôtres Pierre et Paul et de saint Denis comment le pape avait été guéri de la maladie dont nous a entretenus la Vita Stephani Il et avait été de la sorte amené à consacrer l'autel principal de la basilique san-dionysienne pour en faire un autel privilégié 5.

Il était tenu, en quelque manière, de faire appel à des évé1. Ibidem, c. 8 « Et Lui suum ingeniosi indolis discipulum ad erudiendum tantae plebis numerositatem constituit et in episcopatus gradimj provehit atque ordinavit eique hereditatem, quam in Christo instanti adquisierat labore, inplicavit. » Édition Levison, p. 45. 2. Charte de Lull « Anno duodeno regni domni nostri Carli, pontificatus mei xxv. » Édition Bohmer-Will, Regesta archiepiscoporum Maguntinensium, t. I, p. 41, 49. Cité par W. Levison, dans une note de son édition des Vitae Bonifatii, p. 55, à qui je l'emprunte.

3. Annales Laurissenses minores, édition Pertz, Mon. Germ. hist., in-fol., Scriptores, t. I, p. 116.

4. C'est ce que font les Annales du groupe de Murbach, Ànn. Alamannici, Guelferbytani, Nazariani, édition Pertz, Scriptores, I, p. 26-27. De même, le Fragment de Saint-Denis, voir ci-dessus, p. 246.

5. Reçelatio, édition G. Waitz, Mon. Germ. hist., in-fol., Scriptores, t. XV, p. 1 édition M. Buchner, Dos Vizepapsttum des Abtes von St. Denis, p. 250.


nements de notoriété publique au nombre de ces événements célèbres était le sacre des rois par Étienne II, qui évoquait le souvenir du long séjour du pape dans le monastère de Saint-Denis il empruntait la plupart des renseignements qu'il donnait sur cette cérémonie à la Clausula de unctione Pippini. Peu importait à l'illustre faussaire que le sacre eût eu lieu à une époque de l'année plutôt qu'à une autre et, lui qui connaissait le passage de la Vita Stephani II relatif au sacre des rois et à la prétendue maladie du pape, puisqu'il s'en est inspiré, lui qui aurait dû, sous l'influence de ce texte, être tenté de mettre le sacre en hiver, il lui assigne la date précise du 28 juillet il devait avoir, étant donné son dessein, une raison sérieuse d'adopter cette date. Il ne suffit pas de dire qu'il voulait paraître bien renseigné. Non la date lui était certainement fournie par la commémoration annuelle de la consécration de l'autel dans la basilique de Saint-Denis, commémoration inscrite le 28 juillet au calendrier liturgique de l'abbaye1 et assurant à la consécration de l'autel la notoriété publique qui répondait aux fins qu'Hilduin se proposait. Une tradition antérieure existait elle à Saint Denis qu'Étienne II avait bien consacré l'autel et qu'il y avait 1. Un sacramentaire de Saint-Denis, du milieu du ixe siècle, porte « xv. kl. [Augusti], in Gallis, Parisiacense, consacratio altaris Petri et Pauli apostolorum in ecclesia sanctorum martyrum Dionysii, Rustici et Eleutherii, quod Stephanus papa de ipsorum reliquiis consecravit. » L. Delisle, Mémoires sur d'anciens sacramentaires, dans les Mémoires de l'Institut de France, Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, t. XXXII, lre partie, 1886, in-4°, p. 315. Cf. le sacramentaire de Senlis, de 880 environ, Ibid., p. 318. Voir aussi V. Leroquais, Les sacramentaires et les missels manuscrits des bibliothèques publiques de France, Paris, 1924, in-4°, t. I, p. 19 et suiv. et p. 32 et suiv. La rédaction de cette mention dérive de la Reçelatio et des Gesta d'Hilduin, comme l'observe M. Buchner mais cela ne prouve pas qu'il n'y ait pas eu antérieurement, au calendrier de SaintDenis, une fête de la consécration de l'autel. Un argument même en faveur de l'opinion que cette consécration aurait pu être de 754 pourrait être tiré de ce fait qu'en 754 le 28 juillet tombait un dimanche. Une des bulles d'Étienne II conservées dans la Collectio Sancti Dionisii, et adressées à l'abbé Fulrad, confère au monastère de Saint-Denis, « ad honorem sacri altaris », le privilège d'avoir six diacres revêtus de la dalmatique pour la célébration de la messe (Collectio Sancti Dionisii, 5 édition Dom Félibien, Histoire de l'abbaye royale de SaintDenys en France, pièces justificatives, p. xxvni, 39). Cette bulle n'est pas datée Dom Félibien la met « vers 755 » Dom François Thomas, dans son Inventaire manuscrit des chartes de Saint-Denis (Archives municipales de SaintDenis, GG 1, p. 780), la place en 754. Elle ne peut être mise en toute certitude qu'entre 754 et le mois d'avril 757. En tout état de cause, elle crée une présomption en faveur de la consécration de l'autel par le pape, si elle est bien authentique, comme je le crois.


corrélation entre cette cérémonie liturgique et le sacre des rois par le pape? Ou bien Hilduin a-t-il imaginé de toutes pièces et l'intervention du Souverain Pontife dans la consécration de l'autel et le rapport qu'il établit entre les deux événements? Les textes dont nous disposons ne permettent pas de répondre à ces questions. Dans ces conditions, la date du 28 juillet pour le sacre ne peut être retenue de façon ferme. Le document qui nous fournit le plus de détails sur la cérémonie du sacre et qui a été la source principale des Gesta d'Hilduin, la Clausula de unctione Pippini, dont il n'y a aucune raison de suspecter l'authenticité et de contester la date de rédaction, 767, qu'elle s'attribue 1, ne précise pas le jour de l'événement il se borne à noter de deux façons^ différentes qu'il y eut un intervalle de trois ans entre le sacre de Pépin à Soissons et le sacre des rois à Saint-Denis 2. Si l'on était tenu de prendre à la lettre son témoignage, il faudrait reculer le second de ces faits jusqu'après le 31 octobre 754 et mettre l'assemblée de Quierzy-sur-Oise à la fin de cette année ou au début de l'année suivante et l'on pourrait alors invoquer le témoignage, bien tardif cependant, d'Hariulf, qui, bien qu'il 1. L'authenticité de ce document a été contestée par M. Max Buchner, défendue par différents critiques auxquels M. Buchner a répondu, assez faiblement d'ailleurs, dans son livre déjà souvent cité, Das Vizepapsltum. Exkurs VII Zur Frage der Echtheit der « Clausula », p. 246-249, où il énumère! avec complaisance et ses adversaires et ses partisans. A la liste des adversaires, il faut ajouter L. Levillain, De l'authenticité de la Clausula de unctione Pippini, 'dans la Bibliothèque de l'École des chartes, t. LXXXVIII, 1927, p. 20-42 H. Zatschek, dans les Mitteilungen des osterreichischen Instituts für Geschichtsforchung, 1927, p. 311-312 réponse de Max Buchner, p. 430-434 réplique de Zatschek. p. 434435. Il faut aussi rayer du nombre des partisans M. L. Halphen (Revue historique, t. CLXI, 1929, p. 176-177), bien que cet érudit persiste «jà faire des réserves sur la valeur de la Clausula ». Nous espérons que l'interprétation que nous donnons plus loin de la version du sacre présentée par la Clausula pourra contribuer à faire disparaître ces réserves.

2. Clausula de unctione Pippini, édition Arndt, Mon. Germ, hist., in-4°, Scriptores rerum Merovingicarum, t. I, p. 465. J. Haller, p. 67. L'auteur de ce texte identifie l'année 767 avec la seizième année du règne de Pépin, cinquième indiction, et avec la treizième année du sacre des fils de Pépin. Et, plus loin, il dit expressément que le sacre de Pépin avait eu lieu « tribus annis antea », c'està-dire trois ans avant la cérémonie de Saint-Denis. Le Fragment de SaintDenis, en insérant le sacre de 754 entre la mention de l'envoi d'une ambassade à Aistulf et la mention du plaid de Berry (voir Annales Mettenses priores, a. 754, édition Simson, p. 45, le texte du Chronicon Moissiacense est ici défaillant), inviterait aussi à rejeter la cérémonie de Saint-Denis à la fin de l'année. Mais, si chaque élément de cette source paraît avoir de la valeur, le classement des événements par rapport les uns aux autres peut être sujet à caution.


se soit servi de la Revelatio Stephani et des Gesta d'Hilduin à l'exclusion, semble-t-il, de toute autre source, impose au sacre la date de Noël 1. Mais ne serait-ce pas donner à l'indication fournie par l'auteur de la Clausula une valeur absolue quand, dans l'esprit de ce dernier, elle n'avait peut-être qu'une valeur relative? Et ne serait-ce pas aussi nous mettre en contradiction avec la Vita Stephani II, qui ne semble pas autoriser un aussi long délai entre la fin de l'hivernage et le sacre? On n'imaginerait pas que le roi eût laissé le pape se morfondre à Saint-Denis pendant huit ou neuf mois avant de venir le rejoindre. Si l' « aliquantos dies » du biographe romain paraît avoir eu, sous sa plume, une signification assez élastique pour qu'on le puisse étendre sur quelques semaines, il ne peut s'allonger jusqu'à désigner plusieurs mois. On ne peut donc admettre une solution qui cadrerait mal avec le texte de la Vita Stephani Il, à laquelle nous revenons maintenant pour connaître les négociations engagées entre le roi lombard et le roi de France.

Pendant que se déroulaient les événements que nous venons d'étudier, le roi Aistulf avait dépêché du monastère bénédictin du Mont-Cassin des ambassadeurs en robe de bure à leur tête était le propre frère de Pépin, Carloman, qui avait pour mission de faire échec à la politique du pape 2. Aistulf, qui, nous l'avons vu, avait cherché à entraver le dessein du pape de passer en Gaule, n'avait certainement pas pris au hasard comme négociateur le moine Carloman. Il ne pouvait ignorer les anciennes divergences de vues politiques de Pépin et de Carloman, la dépossession dont le fils de Carlo1. Hariulf, Chronicon Centulense, II, 6 « Praedictus autem papa cum diutius Parisius moraretur, contigit eum gravissime infirmari, sed, apparentibus sibi sanctis apostolis Petro et Paulo sanctoque Dionysio, quod et sanandus ad propriam sedem esset cum pace reversurus, audivit quique, sospitate recepta, cum in ipsa Dominicae Nativitatis solemnitate apud beatum martyrem Dionysium divina celebraret officia, inter ipsa missarum sacrosancta mysteria unxit Pippinum cum uxore Bertrada et duobus filiis in reges Francorum. » Édition F. Lot, dans la Collection de textes pour servir à l'étude et à l'enseignement de l'histoire, Paris, 1894, in-8°, p. 51.

2. Vita Stephani II « Interea nefandissimus Aistulfus Carolomannum fratrem benignissimi Pippini regis a monasterio beati Benedicti, in quo devote per evolutum temporis spatium monachice degebat, diabolicis eum suasionibus suadens, Franciae provinciam ad obiciendum atque adversandum causae redemptionis sanctae Dei ecclesiae reipublice Romanorum direxit. » Édition Duchesne, I, p. 448. J. Haller, p. 20.


man avait été victime de la part de son oncle ce |n'était donc pas l'influence de Carloman auprès de son frère qui avait guidé le choix fait par le roi lombard de son négociateur. Aistulf avait dû bien plutôt escompter les anciennes relations de Carloman avec le parti des grands et chercher à exploiter la situation politique intérieure du royaume franc pour peser sur les décisions de Pépin avant que celui-ci ne se fût engagé de façon ferme envers le pape. C'est pourquoi il eût été fort désirable que Carloman pût devancer Étienne II. Mais, quelque diligence que l'ambassadeur d'Aistulf ait mise à hâter son départ et à brûler les étapes, Étienne II avait sur lui l'avance que lui avait assurée la nécessité pour Aistulf d'envoyer chercher son négociateur au Mont-Cassm et pour Carloman de traverser du sud au nord la péninsule italique. Celui-ci n'arriva que le second c'est ce que soulignent les Annales Laureshamenses et les Annales Petaviani\ qui, d'autre part, mettent la venue du pape et celle de Carloman en France en l'année 753, comme les Annales regni Francorum 2 les négociations entre le roi Pépin et l'envoyé d'Aistulf s'engagèrent, par conséquent, après le 6 janvier 754, mais avant Pâques, terme final de l'année 753 selon le: comput des Annales royales, peu de temps après l'entrevue de Ponthion. Carloman mit à remplir sa mission un zèle et une activité que le biographe d'Étienne II ne cherche pas à cacher « Il besognait de toutes ses forces et bataillait fougueusement pour ruiner de fond en comble les affaires de la sainte Église de Dieu, ce pourquoi il avait été envoyé par le susdit tyran Aistulf, dont on ne devrait pas prononcer le nom. » Ce fut en vain, ajoute immédiatement notre auteur le roiidéclara s'en tenir aux promesses que depuis un certain temp^ (pridem) il avait faites au pape, et, d'accord avec ce dernier, il fit enfer1. Annales Laureshamenses, a. 753 « Et papa de Roma venit, ,et Carlomannus post illum. » Annales Pelaviani, a. 753 « Et papa Stephanus venit ab urbe Roma in Franciam et Karolomannus post eum » (Édition G. Pertz, Mon. Germ. hist., in-fol., Scriptores, t. I, p. 26 et p. 11).

2. Annales regni Franeorum, a. 753 « Eodemque anno Stephanus papa venit in Franciam, adjutorium et solatium quaerendo pro justitiis sancti Petri. Similiter et Carlomannus monachus et germanus supradicti Pippini regis per jussionem abbatis sui in Franciam venit, quasi ad conturbandam petitionem apostolicam (ms. Dl Hoc anno natalem Domini in Theodone villa, pascha in Carisiaco celebravit). » Édition Kurze, p. 10. J. Haller, p. 69 (sous la date de 754).


mer le négociateur lombard dans un monastère, où Carloman mourut quelques jours (aliquantos dies) plus tard 1. Nous devons admettre que l'historien pontifical, nous disant tout d'une traite ce qu'il sait de Carloman, a condensé en quelques lignes le récit de négociations qui durèrent longtemps. L'internement de Carloman est un fait incontestable longtemps après, à la fin de mars ou au début d'avril 757, le pape Étienne II transmettait à Pépin le Bref la requête de l'abbé du Mont-Cassin, Optatus, demandant la mise en liberté des moines qui avaient accompagné Carloman dans sa mission il la transmettait sans avis favorable, laissant expressément au roi le soin de décider du sort des prisonniers, tant était grand le ressentiment qu'il gardait contre ceux qui l'avaient si énergiquement combattu et qui, selon toute vraisemblance, avaient dû mettre un instant en péril la diplomatie pontificale 2. Mais l'arrestation des plénipotentiaires d'Aistulf n'avait pu raisonnablement se produire qu'après l'échec définitif des dernières négociations entre Pépin et le roi lom1. Vita Stephani Il « Dumque illuc conjunxisset, nitebatur omnino et vehementius decertabat sanctae Dei ecclesiae causas subvertere, juxta quod a praefato nec dicendo Aistulfo tyranno fuerat directus. Sed propitiante Domino minime valuit sui germani christianissimi Pippini regis Francorum in hoc firmissimum cor inclinare. Potius autem conperta nequissimi Aistulfi versutia, tota se virtute isdem excellentissimus Pippinus Francorum rex professus est decertari pro causa sanctae Dei ecclesiae, sicut pridem jamfato beatissimo spoponderat pontifici. Tunc pari consilio hisdem sanctissimus papa cum denominato Francorum rege consilio inito, juxta id quod praefatus Carolomannus Deo se devoverat monachicam degere vitam, in monasterio eum illuc Franciam collocaverunt, ubi et post aliquantos dies divina vocatione de hac luce migravit. » Édition Duchesne, I, p. 448-449. J. Haller, p. 20-21. Si l'on prend dans un sens strict « illuc » au début de ce passage, on sera tenté de mettre l'entrevue de Pépin et de Carloman à Quierzy, qui est le dernier nom de lieu cité précédemment toutefois, l'auteur ne le prend pas ainsi, mais dans un sens vague, comme le prouve « illuc Franciam » à la fin du passage, et alors, au début, il se rapporte aussi à « Franciae provinciam », qui se trouve quelques mots plus haut (voir le texte cité p. 263, note 2). « Dumque]illuc conjunxisset » doit donc se traduire « à peine fut-il arrivé en France » (sur le sens de « conjungere », cf. « dum enim saepefatus sanctissimus papa conjungeret Romam. Ibid., p. 451; J. Haller, p. 23, et nombreux autres exemples sous la plume du biographe d'Étienne II). Quant à « pridem on sait qu'il indique un passé plus long que « nuper et moins long que « dudum » ou « jamdudum ».

2. Codex Carolinus, 11 « Nam et ex hoc praecelse et a Deo custodite excellentiae vestrae innotescimus, quia petiit nobis Obtatus religiosus abba venerandi monasterii sancti Benedicti pro monachis suis, qui cum tuo germano profecti sunt, ut eos absolvere jubeas. Sed qualiter tua fuerit voluntas, ita de eis exponere jubeas. » Édition Gundlach, p. 507. J. Haller, p. 104.


bard. Or, c'est en juin ou en juillet 754 qu'Aistulf dut être informé de la mauvaise tournure que prenaient pour lui les événements, et qu'en vue d'une attaque possible de l'adversaire il mobilisa ses forces1. Toutefois, comme la mort de Carloman est certainement de 755, nous le verrons, si elle s'est produite peu de temps après l'internement du personnage dans un in pace, il faut croire que, durant des mois encore, l'envoyé d'Aistulf tenta de prévenir le conflit entre les rois.

C'est donc certainement quand la rivalité diplomatique entre Étienne II et Carloman autour de Pépin le Bref battait son plein, et que le pape vit le moment venu de jouer sa dernière carte, c'est, dis-je, dans ces conjonctures qu'après plusieurs jours de négociations à Saint-Denis eut lieu le sacre des rois francs par le pape.

Replacée de la sorte dans le cadre des luttes diplomatiques où elle s'insère normalement, la cérémonie du sacre prend sa pleine signification. Elle apparaît comme un acte de la diplomatie des deux cours romaine et franque et nous fait connaître quels avantages durables procurait aux souverains de France leur politique romaine et aux évêques de Rome leur politique franque.

Dans la basilique de Saint-Denis, le roi Pépin et ses deux fils, Charles et Carloman, furent oints et bénits par Étienne II comme rois de France et patrices des Romains. Le pape bénit ensuite la reine Bertrade il confirma par la bénédiction du Saint-Esprit les plus grands personnages du royaume, et, sous la menace de l'interdit et de l'excommunication, il fit à tous une obligation de ne jamais choisir leur roi en dehors de cette famille que Dieu avait daigné exalter et, grâce à l'intercession des saints apôtres, confirmer et consacrer par la main du vicaire de Pierre et Paul 2.

1. L'évêque de Lucques, Walprand, ayant reçu l'ordre de suivre le roi à l'armée, fait son testament en juillet 754 (Carlo Troya, Storia d'Italia del medio aevo, Naples, 1839-1859, 17 vol. in-8°, t. IV, pars la, nos 686 et 695 cf. R. Macaigne, op. cit., p. 444). Un autre Lucquois, Ostribert, qui mourut probablement au cours de la guerre de 755, avait fait aussi son testament au mois de juillet 754 (Ibid., no 697 R. Macaigne, loc. cit.),

2. Clausula de unctione Pippini « Postea per manus ejusdemque Stephani pontificis denuo in beatorum praedictorum martirum Dionisii, Rustici et Eleutherii aecclesia, ubi et venerabilis vir Folradus archipresbiter et abbas esse


Ainsi, le pape, en vertu du droit que lui conférait le Constitutum Constantini en Occident, instituait les rois de France en qualité de patrices des Romains, en même temps qu'il « confirmait » de ses mains la consécration royale de Pépin par saint Boniface et qu'il sacrait les fils du roi comme rois de France1. Par là, il faisait de ces princes, avec leur assentiment, les défenseurs de la papauté, des droits de l'Église et de la république romaine dans ses lettres ultérieures, Etienne II ne cesse de leur rappeler que l'onction royale qu'ils ont reçue était le prix de l'engagement qu'ils avaient contracté de protéger Rome et son Église contre ses adversaires 2. Mais en échange des obligations que cette qualité de cognoscitur, in regem et patricium una cum predictis filiis Carolo et Carlomanno in nomine sanctae Trinitatis unctus et benedictus est. In ipsa namque beatorum martyrum aecclesia uno eodemque die nobilissimam atque devotissimam et sanctis martiribus devotissime adhaerentem Berteradam jamdicti florentissimi regis conjugem praedictus venerabilis pontifex regalibus indutam cicladibus gratia septiformis Spiritus benedixit, simulque Francorum principes benedictione sancti Spiritus gratia confirmavit et tali omnes interdictu et excommunicationis lege constrinxit, ut numquam de alterius lumbis regem in aevo praesumant eligere, sed ex ipsorum, quos et divina pietas exaltare dignata est et sanctorum apostolorum intercessionibus per manus vicarii ipsorum beatissimi pontificis confirmare et consecrare disposuit. » Édition Arndt, p. 465-466. J. Haller, p. 67-68.

1. Annales regni Francorum, a. 754 « Supradictus apostolicus Stephanus confirmavit Pippinum unctione sancta in regem et cum eo inunxit duos filios ejus domnum Carolum et Carlomannum in regibus. » Édition Kurze, p. 12. J. Haller, p. 69. Fragment de Saint-Denis « Stephanus autem papa ipsum piissimum principem Pippinum regem Francorum ac patricium Romanorum oleo unctionis perunxit secundum morem majorum unctione sacra filiosque ejus duos felici successione Carolum et Carlomannum eodem coronavit honore. » Chronicon Moissiacense, édition Pertz, Scriptores, I, p. 293 Annales Mettenses priores, a. 754, édition Simson, p. 45. J. Haller, p. 75.

2. Codex Carolinus, n° 6 « Conjuro vos. per beatum Petrum principem apostolorum, qui vos in reges unxit, ut doleat vobis pro sancta ecclasia, et juxta donationem, quam eidem. offerre jussistis, omnia reddere et contradere sancte Dei ecclesiae studeatis. » 7 quia ideo vos Dominus per humilitatem meam mediante beato Petro unxit in reges, ut per vos sancta sua exaltetur ecclesia et princeps apostolorum suam suscipiat justitiam. » N° 8 « Adjuva nos et auxiliare nostri sub magna velocitate, christianissimae, sic adjutorium sumas a Deo omnipotente, qui te unxit super turbas populorum per institutionem beati Petri in regem. » 10 (saint Pierre, par la plume d'Etienne II, s'adresse aux princes et à tous les Francs) « Declaratum quippe est, quod super omnes gentes, quae sub celo sunt, vestra Francorum gens prona mihi apostolo Dei Paetro extitit, et ideo ecclesiam, quam mihi Dominus tradidit, vobis per manus vicarii mei commendavi ad liberandum de manibus inimicorum. » Édition Gundlach, p. 489-490, 493, 496, 503. Les successeurs d'Etienne II agissent de même.


patrices leur imposait, et même pour qu'eux et leurs successeurs jusqu'à la fin des temps pussent tenir leurs promesses, la cérémonie de Saint-Denis assurait dans le présent et dans l'avenir la possession du pouvoir royal à Pépin et à ses descendants.

En effet, dans le présent, elle consolidait le trône en confirmant ce qui avait été accompli trois ans plus tôt à Soissons, le changement de dynastie et cela montre en toute évidence que, depuis son accession au trône, Pépin n'était pas sans avoir à compter encore avec les partisans irréductibles de l'ancienne dynastie', ceux dont l'opposition était exploitée par Carloman, comme il pouvait craindre aussi qu'après lui son œuvre ne fût remise en question par un retour offensif des légitimistes mérovingiens. Aussi, pour ménager l'avenir le plus prochain, Pépin avait obtenu du pape l'association à sa couronne de ses deux fils, afin que, par une « heureuse succession », s'effectuât la paisible transmission du pouvoir 2 le rôle de la papauté nous apparaît ici tel qu'il s'affirmait à nous en 749, lorsque Zacharie intervenait dans le changement de dynastie pour le maintien de l'ordre à l'intérieur du royaume franc.

Prévoyant même le cas d'une régence, le roi faisait conférer, par la bénédiction de Bertrade, une autorité accrue à la reine-mère, qui devait, selon l'usage établi par de nombreux précédents, exercer le pouvoir aux côtés et au nom de ses fils ou petits-fils mineurs 3. Enfin, par la bénédiction des grands et l'obligation à eux imposée de choisir à l'avenir leurs rois dans la seule descendance de Pépin, sous peine d'interdit et d'excommunication, le pape et le roi écartaient dans le présent toute revendication possible de Drohon, fils de Carloman 4, comme ils condamnaient, en cherchant à la 1. Voir plus haut, p. 229, note 4.

2. Voir plus haut, p. 267, note 1, le texte du Fragment de Saint-Denis. 3. Rappelons que la reine avait sa place marquée dans une cérémonie de ce genre, puisque, selon l'usage, elle était intronisée en même temps que son mari. Voir ci-dessus, p. 228, note 5, le texte cité de la Chronique de Childebrand. 4. Les Annales Petaviani et les Annales Laureshamenses, après avoir mentionné la venue de Carloman en France en 753, ajoutent et filii sui tonsi ». C'est donc seulement pendant le séjour de Carloman en France que ses fils, dépossédés depuis plusieurs années, furent enfermés dans quelque couvent c'était le moyen auquel les princes soupçonneux recouraient pour se débarrasser des rivaux dangereux.


prévenir, toute tentative contre la dynastie dont le fondateur venait d'opérer l'union étroite de la monarchie franque et de la papauté.

La cérémonie de Saint-Denis, dans tous ses détails, répond si exactement aux besoins du présent et de l'avenir, aux préoccupations actuelles et futures du consécrateur et du consacré, que la Clausula de unctione Pippini qui nous l'a racontée trouve dans cette correspondance étroite des faits et des nécessités en 754 sa plus parfaite justification. Écrite à Saint-Denis, sous l'abbatiat de Fulrad, elle émane, comme le Fragment de Saint-Denis, de l'entourage de l'abbé, qui, en sa qualité de chapelain du roi, avait sans doute pris une part active aux pourparlers de Saint-Denis. Ne serait-ce pas pour reconnaître les services rendus par lui en cette circonstance que, précisément en 754, mais un peu plus tard, à Verberie, Pépin le Bref restituait, à la prière de son chapelain, la « villa » de Taverny au monastère de Saint-Denis 1 que le pape concédait à la basilique, qui venait d'être le théâtre de cette grande scène historique, le privilège exceptionnel d'avoir six diacres revêtus de la dalmatique pour la célébration de la messe 2, et que, s'autorisant du Constitutum Constantini, qui permettait au Souverain Pontife d'agréger au clergé romain tout conseiller du prince, conférait à Fulrad la faveur exclusivement personnelle de porter l' « ornatum apostolici vestimenti » sans être évêque, la chaussure sénatoriale des bas et des chaussons blancs, d'user de la housse de selle quand il irait à cheval, tous ornements qui devaient être, à la mort de Fulrad, enfermés avec lui dans son cercueil3? Clausula et Fragment sont les sources qui éclairent le mieux les dessous d'une politique que l'abbé de Saint-Denis devait connaître plus que quiconque, s'il en fut bien, comme nous le pensons, l'actif négociateur.

1. Diplôme de Pépin le Bref, édition Mühlbacher, Mon. Germ. hist., in-4°, Diplomata Karolina, t. I, p. 11, 7. L'acte est daté de Verberie et de la troisième année du règne. L'éditeur le met entre janvier et juillet 754, parce qu'il suit la chronologie qui place la guerre d'Italie de cette année entre juillet et la fin de 754.

2. Voir ci-dessus, p. 261, note 1.

3. Bulle d'Étienne II, s. d., Collectio sancti Dionisii, 4 édition Félibien, Histoire de l'abbaye royale de Saint-Denys en France, pièces justificatives, p. xxvn, 38.


En somme, à Saint-Denis, le roi, selon l'expression du pape, avait étendu la protection de son bras puissant sur Rome et sur l'Église de saint Pierre, et le pape avait couvert de son manteau spirituel la dynastie dont son prédécesseur, Zacharie, avait favorisé l'avènement.

Il restait maintenant à obtenir, selon l'usage des Francs, l'adhésion des grands au pacte conclu par leur roi. Ce fut l'objet de l'assemblée de Quierzy-sur-Oise. Que s'est-il passé dans cette assemblée? La Vita Stephani II, la seule source contemporaine qui nous parle de ce conciliabule du roi et des grands, ne nous en fait connaître que le résultat les grands ont approuvé la politique romaine du prince 1. Et, d'après le témoignage postérieur du pape Adrien Ier, Étienne II vint à Quierzy recevoir la promesse que les biens de l'Église romaine usurpés par Aistulf lui seraient rendus 2. Mais il n'est pas interdit de croire que l'opposition d'une partie des grands à cette politique avait obtenu une concession importante. N'est-ce pas, en effet, à ce moment qu'il convient de rapporter ce que nous apprend Éginhard, que, parmi les grands dont Pépin avait coutume de prendre conseil, quelques-uns s'opposèrent à sa décision jusqu'à déclarer sans ambages qu'ils abandonneraient le roi et se retireraient chez eux 3 N'est-ce pas à leur ferme résolution qu'il faut attribuer la conduite ultérieure de Pépin, qui, avant de recourir aux armes, devait épuiser toutes les ressources de la diplomatie en vue d'arriver à un règlement pacifique du conflit? Je sais bien que l'auteur de la Vita Stephani II fait honneur au pape de ces ultimes négociations entre Pépin et Aistulf mais pouvait-il dissimuler autrement le caractère véritable des événements? Ce n'est pas la seule fois où il a eu recours à ce subterfuge pour dissimuler un demi-échec de la diplomatie pontificale. 1. Voir plus haut, p. 250, note 1, le texte cité de la Vita Stephani II. 2. Voir plus haut, p. 254, note 3, le texte cité de la Vita Hadriani. 3. Ëginhard, Vita Karoli magni imperatoris, c. vi Quod (la guerre contre les Lombards) prius quidem et a patre ejus, Stephano papa supplicante, cum magna difficultate susceptum est, quia quidam e primoribus Francorum, cum quibus consultare solebat, adeo voluntati ejus renisi sunt, ut se regem deserturos domumque redituros libera voce proclamarent. Susceptum tamen est tunc contra Haistulfum regem et celerrime completum. » Édition Halphen, dans la collection Les classiques de l'histoire de France au moyen âge, 1923, in-12, p. 18-20. J. Haller, p. 76.


Pépin envoyait donc des ambassadeurs à Aistulf pour conclure la paix, à la condition que celui-ci restituerait ses conquêtes à l'Église romaine. A deux et trois reprises, « bis et tertio », il tenta de l'amadouer en lui promettant des présents s'il consentait à cette restitution. Mais Aistulf ne se laissa pas convaincre, et le roi de France lança l'ordre de mobilisation générale contre lui, « generalem contra eum decrevit facere motionem ».

C'est donc bien quand, par l'obstination d'Aistulf, tout espoir d'éviter la guerre fut perdu, que Pépin recourut à l'ultima ratio. Et même, l'expédition commencée, Pépin tentera d'arrêter le conflit par une dernière démarche l'horreur de verser le sang chrétien aurait poussé le pape à exiger cette tentative suprême de paix, au dire de son biographe. Ne peut-on croire aussi bien que Pépin avait voulu vaincre, par une dernière concession, les dernières résistances de ceux qui, à contre-coeur, allaient verser leur sang pour une cause qui leur restait étrangère? a

De toutes ces longues négociations, les sources franques ne retiennent que peu de choses. Nibelung, qui ne parle même pas du sacre des rois par le pape, résume toute la campagne diplomatique dans l'envoi d'une seule ambassade de Pépin à Aistulf, et la façon dont il s'exprime ne laisse aucun doute qu'à ses yeux seule compte la dernière démarche dont l'échec a provoqué la décision d'en appeler aux armes. « Lorsque le susdit roi n'eut pu obtenir ce qu'il avait demandé, ce qu'Aistulf méprisa de faire, l'année étant révolue, evoluto anno, le susdit roi lança l'ordre à tous les Francs, selon l'usage, de 1. Vita Stephani II « Porro christianissimus Pippinus Francorum rex ut vere beati Petri fidelis atque jamfati sanctissimi pontificis salutiferis obtemperans monitis direxit suos missos Aistulfo nequissimo Langobardorum regi propter pacis foedera et proprietatis sancte Dei ecclesie reipublice restituenda jura. Atque bis et tertio, juxta sepefati beatissimi pape ammonitionem, eum deprecatus est et plura ei pollicitus est munera, ut tantummodo pacifice propria restitueret propriis. Sed ille peccato imminente oboedire distulit. Ad hec hisdem eximius Francorum rex, cernens quod atrocissimi Aistulfi nequaquam valeret quoquo modo saxeum mollire cor, generalem contra eum decrevit facere motionem. » Édition Duchesne, I, p. 449. J. Haller, p. 21. « Porro » ne peut pas avoir ici le sens de « postérieurement », car cela rejetterait l'envoi de la première ambassade de Pépin à Aistulf après la mort de Carloman, ce qui est impossible il faut ou bien lui donner le sens d'une conjonction explétive comme jam, autem, ou celui d'une conjonction complétive comme denique. Voir Forcellini, Lexicon totius latinitatis, vo porro.


venir auprès de lui pour le 1er mars, dans le domaine public de Berny. Ayant pris conseil des grands, on partit pour la Lombardie, à l'époque où les rois ont coutume de procéder aux guerres, avec le pape Étienne et des troupes de tous les peuples qui demeuraient dans le royaume et avec l'armée franque, en passant avec toute cette multitude par Lyon et Vienne, et l'on parvint en Maurienne1. »

A la lumière du rapprochement de la Vita Stephani II et de la Chronique de Nibelung, il est impossible de douter que la mobilisation générale dont parle le biographe romain fut décidée, selon l'usage, au plaid de Berny. Dès lors, il est certain que ce plaid de Berny ne peut pas être du 1er mars 754, comme on l'admet généralement aujourd'hui il y a une impossibilité matérielle à ce qu'il en soit ainsi 2.

En effet, entre l'arrivée du pape à Ponthion, le 6 janvier 754, et le plaid de Berny, le 1er mars suivant, il faudrait insérer les négociations de Pépin avec Étienne II et avec Carloman, l'entrevue de Saint-Denis et, quelques jours après, le sacre des rois, les trois ambassades de Pépin à Aistulf, puis, evoluto anno, la convocation du plaid.

La convocation et la réunion de tous les Francs exigeait des semaines l'ordre du roi était porté à la connaissance des comtes et, par l'intermédiaire de ceux-ci, à celle des fidèles du 1. Chronique de Nibelung, c. 36 et 37 « Tune Pippinus rex praefato Stephano papa apud Parisius civitate monasterio sancti Dionisii martyris cum ingenti cura et multa diligentia hiemare praecepit. Legationem ad Aistulfo rege Langobardorum mittens, petens ei, ut propter reverentia beatissimorum apostolorum Petri et Pauli partibus Romae hostiliter non ambularet et superstitiosas has impias vel contra legis ordine causas, quod antea Romani nunquam fecerant, propter ejus petitione facere non deberent. Cumque praedictus rex Pippinus quod per legatos suos petierat non impetrasset et Aistulfus hoc facere contempsit, evoluto anno praefatus rex ad kalendas Martias omnes Francos, sicut mos Francorum est, Bernaco villa publica ad se venire praecepit. Initoque consilio cum proceribus suis, eo tempore, quo soient reges ad bella procedere (Reges, II, xi, 1), cum Stephano papa vel reliquas nationes, qui in suo regno commorabantur, et Francorum agmina partibus Langobardie cum omni multitudine per Lugduno Gallie et Vienna pergentes usque Maurienna pervenerunt. » Édition Krusch, p. 183. J. Haller, p. 63-64. Berny-Rivière, Aisne, canton de Vic-sur-Aisne, se trouve sur la rive droite de l'Aisne, en aval de Soissons, à une vingtaine de kilomètres au sud de Quierzy-sur-Oise.

2. Pour la chronologie des deux expéditions de Pépin en Italie, nous arrivons aux mêmes conclusions que M. l'abbé Macaigne et, en partie, à l'aide des mêmes arguments (op. cit., p. 302 et p. 513-521). Mais nous tenons à rappeler ici que la présente étude était rédigée avant que nous n'ayons eu connaissance du livre de cet auteur. Voir Le Moyen Age, 1930, p. 204.


prince auxquels il fallait bien accorder les délais nécessaires pour réunir leurs hommes et se rendre au lieu assigné. Où trouvera-t-on dès lors le temps indispensable à l'accomplissement des faits antérieurs, si le plaid est du 1er mars 754? Les seules ambassades de Pépin à Aistulf, qui comportent une navette pour que, le résultat négatif de chacune d'elles étant connu, on pût faire de nouvelles propositions, exigeaient plus de temps que celui dont on aurait pu disposer avant la convocation du plaid de Berny. De Paris à Pavie, la distance est de 600 kilomètres à vol d'oiseau la poste carolingienne, qui était le moyen de communication le plus rapide, ne pouvait la franchir en moins de dix jours. Ainsi, sans compter les longueurs supplémentaires des routes du GrandSaint-Bernard ou du Mont-Cenis, les retards occasionnés par les obstacles d'une traversée des Alpes en hiver, les préparatifs de départ d'une ambassade et les lenteurs des négociations, les trois ambassades de Pépin à Aistulf exigeaient soixante jours de voyage.

Bien plus, l'année, chez Nibelung, se termine le 23 janvier au plus tard. Non seulement nous ne pouvons placer entre le 6 et le 23 janvier tant d'événements antérieurs à la convocation du plaid, mais encore c'est à peine si l'on peut, entre le 23 janvier et le 1er mars, avoir le délai nécessaire pour la convocation et la réunion de l'assemblée générale des Francs. S'il nous fallait reporter le début de l'année du règne à un jour intermédiaire entre le 6 janvier et le 23, l'impossibilité matérielle de caser les événements en serait plus manifeste et si le terme final de l'année chez Nibelung devait être reporté entre le 31 octobre et le 6 janvier, les faits rapportés par ce chroniqueur avant la révolution de l'année étant de 754, ceux qui suivent la mention « evoluto anno » seraient nécessairement de 7551 ce à quoi nous serions encore conduits si l'on voulait prétendre que l'année dont il s'agit dans ce passage n'est pas l'année du règne, mais l'année ordinaire, puisque, selon les styles, celle-ci n'a commencé qu'à Noël ou au 1er janvier, donc avant la date de l'entrevue de 1. Voir ci-dessous, p. 285, où nous sommes conduits, en effet, à admettre que le terme final de l'année chez ce chroniqueur se place entre le 31 octobre et un jour indéterminé de décembre.


Ponthion, ou au ler mars, au 25 mars et à Pâques, donc postérieurement à la convocation du plaid.

De toute façon, le plaid de Berny est du 1er mars 755. Et, puisque c'est là que fut décidée la mobilisation générale, nous aurons le moyen de contrôler l'exactitude de cette date quand nous seront connus les événements ultérieurs jusqu'en 757 alors il suffira de remonter le cours de ces événements pour être ramené à cette même date de 755 pour ? plaid de Berny, et nous aurons ainsi « bouclé la boucle ». La conséquence immédiate de la fixation de cette date est que la première expédition d'Italie eut lieu en 755, et non pas en 754. C'est, du reste, cette date de 755 que lui assignent les Annales regni Francorum1, les Annales Sancti Amandi2 2 et une note additionnelle aux Annales Petaviani qui fournit un synchronisme précieux 3 les Petites Annales qui mettent cette première campagne en 7544, et à plus forte raison celles qui la placent en 753 5, ont été victimes d'un glissement, sous une date inexacte, de la mention annalistique de la table pascale qu'elles ont reproduite.

Mais les Annales regni Francorum, en inscrivant la mention de cette campagne sous l'année 755, indiquent que l'expédition n'avait peut-être commencé qu'après Pâques, c'est-àdire après le 6 avril. La citation biblique de Nibelung, « eo 1. Annales regni Francorum, a. 755 édition Kurze, p. 12. J. Haller, p. 70. 2. Annales Sancti Amandi, a. 755 édition G. Pertz, Mon. Germ. hist., in-fol., Scriptores, t. I, p. 10. r~

3. Annales Petaviani, a. 755, mss. A et B « In hoc anno domnus Remedius adeptus est sedem ecclesiae Rotomagensis, et Pipinus superavit Langobardos, cum magno munere reversus est in regnum suum. » Édition Pertz, Scriptores, t. I, p. 11. Cf. Gesta abbatum Fontanellensium, c. 11 « Praenominatus autem Raginfridus pro insolentia morum ac pravitatibus suis etiam a clericis Rothomagensibus apud Pipinum regem accusatur, anno videlicet xm postquam regimen istius coenobii Fontanellensis amiserat. Quo ejecto de episcopatu ejusdem ecclesiae, datus est Remigio fratri ejusdem gloriosi regis Pipini hoc anno, qui est ab incarnatione Domini nostri J. C. septingentesimus quinquagesimus quintus. » Édition Pertz, Mon. Germ. hist., in-fol., Scriptores, t. II, p. 286. Le caractère additionnel de la mention des Annales de Petau ressort de ce que tous les manuscrits ne la donnent pas, et aussi de ce que ces Annales indiquent une expédition de Pépin en Italie en 754 et une autre en 756, ce qui ferait trois avec celle de 755, quand il est certain qu'il n'y en eut que deux. Cette addition est d'origine rouennaise, soit de Rouen même, soit d'un des grands monastères voisins. 4. Annales Petaviani, A. Laureshamenses, A. Juvavenses minores, A. Sangallenses Baluzii, A. Sangallenses breves, A. Sithienses, A. Fuldenses, A. Mettenses priores.

5. Annales Alamannici, Guelferbytani, Nazariani.


tempore, quo soient reges ad bella procedere », n'y contredit pas, puisque c'est au printemps que l'on entreprenait le plus souvent les opérations militaires 1. Le traité de paix qui mit fin à la guerre ayant été signé dans la VIIIe indiction, d'après la Vita Stephani 112, donc avant le 1er septembre 755, et même dès la fin de juin au plus tard, puisque le roi Pépin, de retour en France, promulguait à Ver un capitulaire le 11 juillet 3, la guerre d'Italie n'aurait duré que deux mois et demi environ. Est-ce possible?

Les récits les plus détaillés de l'expédition sont ceux de Nibelung et du biographe d'Étienne II il suffit de les combiner pour avoir un exposé complet des faits, je veux dire un exposé auquel les autres sources n'ajoutent aucun détail, si menu soit-il.

L'armée franque, passant par Lyon et Vienne, avait gagné 1. C'est ainsi que M. Max Buchner interprète cette citation des Rois je crois qu'il a raison. Mais il a tort d'adopter la date de 754, à l'établissement de laquelle il a consacré tout un appendice de son livre Das Vizepapsttum. Exkurs I Zur Datierung des ersten Langobardenkrieges im Jahre 7ô4, p. 216-217. Le 5 avril de la VIIe année de son règne et de la VIII- indiction, Aistulf date de son palais de Pavie une donation à l'église de Farfa (Carlo Troya, Storia d'Italia, t. IV, pars la, n° 702 R. Macaigne, op. cit., p. 445). Il y a discordance entre l'année du règne et l'indiction, la première correspondant à 756, la seconde répondant à 755. M. Macaigne laisse la date dans l'indécision. Cependant, en 756, Aistulf était encore le 1er avril sous les murs de Rome, puisque c'est ce jour-là qu'il se décida à lever le siège de la ville il ne pouvait être le 5 avril suivant à Pavie de Rome à Pavie, soit par la voie Cassienne, la col de la Futa et la voie Émilienne, soit par la voie Aurélienne, le col de la Cisa et Plaisance, il y avait 550 à 600 kilomètres environ. Pour parcourir cette distance, à la vitesse moyenne de 60 kilomètres par jour, qui était celle de la poste carolingienne, il eût fallu de neuf à dix jours en forçant même les étapes jusqu'à 90 kilomètres, il eût encore fallu de six à sept jours. Il est donc vraisemblable qu'Aistulf n'était pas à Pavie le 5 avril 756, et que c'est l'indiction qui fournit la date exacte du diplôme. Mais alors, si Aistulf résidait encore dans son palais le 5 avril 755, il est à supposer que les opérations militaires n'étaient pas encore commencées, ainsi que le remarque justement M. Macaigne.

2. Vita Stephani II « confirmato anteriore pacto, qui per elapsam VIII indictionem inter partes provenerat. » Édition Duchesne, I, p. 453. J. Haller, p. 25. La VIIIe indiction s'étend du 1er septembre 754 au 31 août 755. Des actes italiens datés de septembre 755 montrent que la guerre était terminée depuis quelque temps déjà (Carlo Troya, Storia d'Italia, t. IV, pars la, nos 695 et 697 R. Macaigne, op. cit., p. 444-445).

3. Capitulare Vernense, 755, 11 juillet « Dat. v idus Julii, anno quarto regnante domno nostro Pippino gloriosissimo rege. » Édition Boretius, Mon. Germ. hist., in-4°, Capitularia, t. I, p. 33. Le 20 juillet 755, Aistulf fait une donation à l'église de Bergame cela montre que la guerre était terminée (Carlo Troya, Storia d'Italia, t. IV, pars la, n° 693 R. Macaigne, op. cit., p. 445.).


Saint-Jean-de-Maurienne 1. C'est pendant cette marche, et probablement même avant d'avoir atteint Lyon, que Pépin et le pape envoyèrent inutilement une dernière ambassade à Aistulf 2 et, comme les Annales royales nous apprennent qu'on avait laissé à Vienne, avec la reine Bertrade, Carloman, qui y était tombé malade et qui y mourut, on a incidemment confirmation de l'exactitude du récit de Nibelung 3. De 1. Voir plus haut, p. 272, note 1, le texte cité de la Chronique de Nibelung. 2. Vita Stephani II « Et dum fere medium itineris spatium Francorum exercituum graderentur cunei, rursum ipse sanctissimus vir praelatum benignissimum deprecatus est Pippinum regem, demum sevissimo Aistulfo dirigi Langobardorum regi, si quo modo potuisset vel sero tandem ejus sedare sevitiam, et propria propriis saluberrime suaderet reddere absque humani effusione sanguinis. Et ita factum est. Atque denuo ipse benignissimus Francorum rex suos eidem Aistulfo misit missos. Sed et beatissimus hisdem papa ut vere pater et bonus pastor, ne sanguis effunderetur christianorum, ammonitionis et obsecrationis apostolicas ei direxit litteras, per quas et fortiter per omnia divina mysteria et futuris examinis diem conjurans atque obtestans, ut pacifice sine ulla sanguinis effusione propria sanctae Dei ecclesiae reipublice Romanorum reddidisset. Sed iniquitate ejus obsistente nequaquam adquiescere maluit, potius autem e contrario minas et indignationes praefato pontifici et excellentissimo Pippino regi vel cunctis Francis direxit. » Édition Duchesne, I, p. 449-450. J. Haller, p. 21. De Paris à Pavie, par Lyon, Vienne et Saint-Jean-de-Maurienne, il faut compter environ 1,000 kilomètres Lyon est à peu près à mi-chemin (512 kilomètres de Paris à Lyon par la voie ferrée). Cf. Fragment de Saint-Denis « Pippinus itaque Alpes transiens, legatos suos ad Haistulfum mittens, postulavit, ut sanctam Romanam ecclesiam, cujus ille defensor per ordinationem divinam fuerat, non affligeret, sed omnem justitiam de rebus ablatis faceret. Haistulphus vero in superbia elatus, convitia etiam in praefatum pontificem per inepta verba imponens, nihil ei se facere promittens, nisi viam se praebere, quatenus ad propria remearet. Illi vero missi promittebant, non aliter domnum Pippinum a finibus Langobardiae esse profecturum, nisi prius Haistulfus justitiam sancto Petro faceret. Haistulfus autem requisivit, quae illa justitia esset cui legati responderunt « Ut ei reddas Pentapolim, Narnias et Cecanum et om« nia, unde populus Romanus de tua iniquitate conqueritur. Et hoc tibi mandat « Pippinus, quod si justitiam sancto Petro reddere vis, dabit tibi duodecim milia « solidorum. » Haistulfus, his omnibus spretis, legatos absque ullis pacificis verbis absolvit. » (Chronicon Moissiacense, édition Pertz, Scriptores, t. I, p. 293. J. Haller, p. 75-76. Annales Mettenses priores, édit. Simson, p. 46-47). Curieux texte dont on ne peut évidemment garantir tous les détails, mais qui est le seul à nous faire entendre comme un écho des conversations diplomatiques 3. Annales regni Francorum, a. 755 « Carlomannus autem monachus Vienna civitate remansit una cum Bertradane reginae infirmus. Languebat dies multos et obiit in pace. » Édition Kurze, p. 12. J. Haller, p. 70. La même mention de lieu se retrouve dans les Annales Laurissenses minores, qui paraissent indépendants des Annales royales « Karlmannus monachus in Franciam fratrem visitare veniens, Viennae moritur. » Édition Pertz, Scriptores, I, p. 116. Les Annales Fuldenses donnent Lyon au lieu de Vienne « Non post multos dies Lugduni vita decessit. » Édition Kurze, Monumenta rerum Germanicarum in usum scholarum, Hanovre, 1891.


Saint-Jean-de-Maurienne, une avant-garde fut lancée en pointe pour occuper les défilés du Pas de Suze. Elle fut attaquée à l'improviste par toute l'armée lombarde. Mais celle-ci, malgré sa grande supériorité numérique et malgré l'avantage de la surprise, toujours si considérable dans une bataille, fut mise en déroute cette victoire franque, enlevée de haute lutte dans des conditions pourtant si défavorables, fut considérée par les contemporains comme un miracle dû à l'intervention toute-puissante de saint Pierre en faveur des troupes qui combattaient pour la défense de son Église et de son successeur 1.

Le gros des forces passa donc les Alpes sans encombre. Aistulf, vaincu, courut s'enfermer dans Pavie. Il y fut assiégé par les vainqueurs, qui pillèrent et dévastèrent le pays d'alentour 2. Le siège ne dura que quelques jours, « aliquantos dies ». Aistulf demandait la paix.

L'impression qui se dégage de la lecture des textes est bien que la campagne de 755 fut courte, très courte cette brièveté des opérations a frappé l'imagination des contemporains, et longtemps après on gardait encore le souvenir de ce succès rapide Éginhard nous en est garant 4.

Ici une comparaison s'impose à nous, entre la campagne de 755 et l'expédition d'Italie de 1859, la dernière des temps modernes où l'on n'utilisa pas les chemins de fer pour le transport des troupes et de leurs approvisionnements. En 1859, la déclaration de guerre à l'Autriche par Napoléon III fut lancée le 26 avril deux corps d'armée franchirent les Alpes au Pas de Suze (les deux autres vinrent par mer et débarquèrent à Gênes). Les opérations des troupes françaises durèrent du 15 mai au 24 juin; les préliminaires de paix 1. Voir plus haut, p. 253, note 2, les passages cités des lettres d'Étienne II. Cf. Vita Stephani 11, édition Duchesne, I, p. 450 J. Haller, p. 21-22. Chronique de Nibelung, c. 37, édition Krusch, p. 183-184 J. Haller, p. 64. Annales regni Francorum, a. 755, édition Kurze, p. 12 J. Haller, p. 70. 2. Chronique de Nibelung, c. 37 édition Krusch, p. 184. J. Haller, p. 64. 3. Vita Stephani 11, édition Duchesne, I, p. 450. J. Haller, p. 22. 4. Éginhard, Vita Karoli magni imperatoris, c. vr. Voir plus haut, p. 270, note 3, la fin du passage cité. II y a dans ce chapitre vi des détails qu'on ne trouve que chez cet auteur, mais qui répondent si exactement à ce que les contempotains nous font entrevoir qu'on ne peut douter de leur exactitude.


furent signés à Villafranca le 12 juillet 1. Ainsi, de la déclaration de guerre à la signature de la convention qui mit fin aux hostilités, il s'était écoulé deux mois et demi, c'est-à-dire exactement le temps que nous attribuons à l'expédition d'Italie de 755 qui s'est déroulée pendant les mêmes mois d'avril à juin, qui a emprunté la même voie de terre et qui, tout de même, n'eut pas l'extension prise par l'expédition de 1859. La chronologie que les textes nous imposent ne se heurte pas à une impossibilité matérielle.

Les Annales regni Francorum insèrent entre la victoire de l'avant-garde franque au Pas de Suze et le siège de Pavie le retour à Rome du pape, qui fut reconduit dans la Ville Éternelle par Fulrad et d'autres délégués du roi 2. Il est incontestable que ce renseignement s'est glissé à une place indue par la faute de l'annaliste, écrivant son œuvre longtemps après l'événement car toutes nos autres sources signalent le départ du pape pour Rome après la conclusion de la paix. La Vita Stephani II prête même au pape dans la décision de terminer la guerre un rôle que le Souverain Pontife n'a pas tenu. Le panégyriste, qui toujours et partout représente son héros comme un saint homme pacifique ayant horreur du sang répandu, veut que ce soit Étienne II qui ait poussé Pépin à mettre fin aux hostilités et à faire la paix 3. Mais 1. R. Jallifier et A. Buchner, Cartes et croquis des campagnes de 1789 à 1900 avec sommaires explicati.1s, Paris, s. d., in-4°, p. 34-36.

2. Annales regni Francorum, a. 755 « Eodemque anno, Stephanus papa reductus est ad sanctam sedem per missos domni regis Pippini, Folradum et reliquis, qui cum eo aderant. Édition Kurze, p. 12. J. Haller, p. 70. Les Annales Fuldenses font reconduire le pape par Jérôme, frère de Pépin « Stephanus papa duce Hieronimo fratre Pippini Romam revertitur. » Les manuscrits de la recension BD du Liber pontificalis donnent l'addition suivante au texte de la Vita Stephani II « Dirigensque cum eo saepefatus christianissimus atque Deo amabilis rex Francorum missos suos, fratrem suum Hieronimum atque alios proceres suos cum non paucis hominibus, qui eum, usque dum Roma reverteret, in obsequium ejus essent. » Édition Duchesne, p. 451. J. Haller, p. 23, note 1. II n'est pas douteux que Fulrad accompagna le pape à Rome, car Étienne II, dans une de ses lettres, invoque le témoignage de Fulrad et de ses compagnons sur la violation par Aistulf de la convention de paix dès le jour où Pépin et le pape se sont séparés. Codex Carolinus, 7, édition Gundlach, p. 492. J. Haller, p. 86. 3. Vita Stephani II « Tune jamfatus beatissimus et coangelicus papa Pippinum saepefatum deprecatus est benignissimum regem, ut jam amplius malum non proveniret neque sanguis effunderetur christianorum, inminens salutifera praedicatione, ut pacifice causae finirentur. Ad haec christianissimus Pippinus Francorum rex ejusdem beatissimi patris et boni pastoris audiens adimplensque


c'est Étienne II en personne qui dénonce ici la flatterie il n&is dit, en effet, que la paix fut conclue malgré ses avertissements par Pépin, qui se moquait de ses craintes et se riait de ses avis, qui préférait croire aux discours trompeurs et aux promesses mensongères du roi lombard plutôt qu'aux véridiques prophéties du successeur de Pierre 1.

En réalité, l'initiative des négociations en vue de la paix avait été prise par Aistulf, qui, voyant sa cause perdue, fit demander la paix à Pépin par l'intermédiaire des prélats et des grands de l'entourage de ce dernier 2. Qu'Aistulf ait pu faire parvenir ses propositions de paix à Pépin par l'entremise de ceux-ci, n'est-ce pas encore une fois constater qu'il avait des intelligences dans la place? Et ne faut-il pas qu'il ait trouvé parmi les grands et jusque dans les milieux ecclésiastiques des concours précieux pour que, vaincu par les armes, il ait pu prendre sa revanche sur le pape, en obtenant, malgré ce dernier, une paix inespérée aux conditions qu'il avait luimême présentées au vainqueur, « dictiones superdicto rege Pippino faciens? »

Par le traité signé à la fin de juin 755, Aistulf remettait aux mains des délégués de Pépin un gage par lequel il se dépouillait de Ravenne, de la Pentapole, de Narni et de Ceccano, et ammonitionem, Deo dilectam pacem inientes atque in scripto foedere pactum adfirmantes inter Romanos, Francos et Langobardos, et obsides Langobardorum hisdem Francorum rex abstollens, spopondit ipse Aistulfus cum universis suis judicibus sub terribili et fortissimo sacramento atque in eodem pacti foedere per scriptam paginam adfirmavit, se ilico redditurum civitatem Ravennantium cum diversis civitatibus. » Édition Duchesne, I, p. 450-454. J. Haller, p. 22. 1. Codex Carolinus, 6 « Nimis namque lugeo, excellentissimi filii, cur verba nostrae infelicitatis non audientes mendacium plus quam veritatem credere voluistis, inludentes vos et inridentes. Unde et sine aeffectu justitiae beati Petri ad proprium ovile et populum nobis commissum sumus reversi. » 7 « Videns namque suam deceptionem iniquus Haistolfus rex cum suis Deo destructis judicibus per blandos sermones et suasiones atque sacramenta inluserunt prudentiam vestram. Et plus illis falsa dicentibus quam nobis veritatem asserentibus credidistis. Magno namque dolore et tristitia, excellentissimi filii, cor nostrum repletum est, quur minime bonitas vestra nos audire rennuit. Omnia denique, quae per Dei jussionem vobis locuti sumus, veraciter ediximus et jam patefacta sunt, ut facta ipsa demonstrant. » Édition Gundlach, p. 489 et 492-493. J. Haller, p. 83 et 86.

2. Chronique de Nibelung, c. 37 « Hec cernens Aistulfus rex Langobardorum, quod nullatenus se evadere potuisset, pacem per sacerdotes et obtimates Francorum petens, dictiones superdicto rege Pippino faciens, et quicquid contra Romanam ecclesiam vel sedem apostolicam contre legis ordine fecerat, plenissima solutione emendaret. » Édition Krusch, p. 184. J. Haller, p. 64-65.


de tout ce qu'il avait pris à l'Église de Rome. Il versait au roi de France 30,000 sous et s'engageait à payer un tribut annuel de 5,000 sous au trésor de ce prince. Il prêtait serment avec tous ses grands d'exécuter loyalement le traité et donnait en garantie quarante otages pris dans les rangs de la noblesse lombarde 1.

La paix rétablie, Aistulf comblait de ses présents le roi Pépin et les grands, laissant à Pépin le soin d'agir de même à l'égard du pape 2.

Étienne II et Pépin se séparèrent alors le premier regagnait Rome sous une bonne escorte, dont faisaient partie un frère du roi, Jérôme, et Fulrad 3. Pépin reconnaissait sans doute encore les nouveaux services de ce dernier en concédant à l'abbaye de Saint-Denis le territoire et le château de Saint-Mihiel en Verdunois 4. Le roi de France repassait les Alpes 5.

1. Fragment de Saint-Denis « His minis Heistulfus perterritus, per manus (lisez Ravennam), Pentapolim, Narnias et Cecanum et reliqua debita, quae sancto Petro debuerat, missis domini Pippini regis per vadium reddidit et xxx milia solidorum Pippino regi tribuit, spondens se singulis annis in tributum v milia solidorum partibus Francorum se fore redditurum. Haec omnia jurejurando Heistulfus cum suis optimatibus et omnibus nobilibus Langobardorum se adimpleturum esse spopondit et pro firmitatis causa dedit regi Pippino de nobilibus Langobardorum XL obsides. » Annales Mettenses priores, édition Simson, p. 47. Chronicon Moissiacense, édition Pertz, p. 293. J. Haller, p. 76. « Per manus » est une faute évidente que nous proposons de corriger en « Ravennam », y étant autorisés par la suite même de ce texte « Pippinus vero, accepta benedictione domni apostoli, in pace eum abire permisit, tradens ei Ravennam, Pentapolim, Narnias et Cecanum, et quidquid in illis partibus continebatur. » On ne peut guère douter que nous ayons là une analyse fidèle de ce « scriptum foedus » dont parle la Vita Stephani (voir ci-dessus, p. 278, note 3), car on trouve la confirmation partielle de ce texte dans la Vita Stephani (édition Duchesne, I, p. 451. J. Haller, p. 22), dans la Chronique de Nibelung, c. 37 (édition Krusch, p. 184. J. Haller, p. 65), dans les Annales regni Francorum, a. 755 (édition Kurze, p. 12. J. Haller, p. 70), et dans les Annales Laurissenses minores (édition Pertz, I, p. 116).

2. Chronique de Nibelung, c. 37 « Praefatus rex Pippinus clemens ut erat, misericordia motus vitam ei et regnum concessit, et multa munera Aistulfus rex partibus praedicto rege donat. Nam et obtimates Francorum multa munera largitus est. His itaque gestis, Pippinus rex praedicto Stephano papa cum obtimatibus suis et multa munera partibus Rome cum magno honore direxit et in sedem apostolicam incolomem, ubi prius fuerat, restituit. » Édition Krusch, p. 184. J. Haller, p. 65.

3. Voir plus haut, p. 278, note 2.

4. Diplôme original de Pépin le Bref, Compiègne, 755, 29 juillet. Édition Mühlbacher, Mon. Germ. hist., in-4°, Diplomata Karolina, t. I, p. 12, n° 8. 5. Chronique de Nibelung, c. 37 « His transactis Pippinus rex cum omni exer-


Mais à peine ses adversaires de la veille s'étaient-ils éloignés qu'Aistulf manquait à ses engagements et armait refusait de rendre à l'Église romaine large comme la main de terre et se livrait à toute sorte de violences contre les sujets du pape 2.

Étienne II se hâtait de dénoncer à Pépin les violations de la paix dont Aistulf se rendait coupable. Dans une première lettre, il invoquait le témoignage de Fulrad et de ses compagnons, en termes tels qu'il n'est pas douteux que le porteur de la lettre était Fulrad lui-même, revenant de la mission qu'il avait remplie auprès du pape 3. Dans la seconde, qui fut citu suo vel multis thesaris hac multa munera Deo adjuvante reversus est ad patria. » Édition Krusch, p. 184. J. Haller, p. 65.

1. Codex Carolinus, 6 « Tanto quippe a die illo, a quo ab invicem separati sumus, nos affligere et in magna ignominia sanctam Dei ecclesiam habere conatus est, quanto non possunt hominum lingue aenarrare, quia etiam et ipsi lapides, si dici potest, tribulationem nostram magno ulutatu flerent. » 7 «. A die illo, a quo [a] melliflua bonitate vestra separati sumus, tantum nos affligere et tribulare nisus est, quantum non potest os hominis enarrare. In magna namque despectione sanctam Dei ecclesiam et nostram humilitatem [et] vestros missos habere visus est, quia etiam et ad nostram propriam animam auferendam mala ejus inperatio et summissio facta est. » Édition Gundlach, p. 489 et 492. J. Haller, p. 83 et 86. Cf. Fragment de Saint-Denis « His omnibus peractis, Pippinus victor ad propria remeavit. Quo revertente in Francia, Haistulfus perfidus rex omnia quaecumque promiserat contumaciter postposuit et Stephanum papam cum armis a finibus suis expulit. » Chronicon Moissiacense, édition Pertz, I, 293. J. Haller, p. 76. Annales Mettenses priores, édition Simson, p. 48. Le renseignement fourni par les chroniqueurs est confirmé par une charte italienne un Lucquois, Goiprand, qui avait pris part à la campagne précédente, fait, au mois d'août 755, une donation à l'église de Fridiano, « quia exercitio ad Francos iteratus sum ambulandum » (Carlo Troya, Storia d'Italia, IV, pars ia, 696. R. Macaigne, p. 446). Voir ci-dessous, p. 282, note 3. 2. Codex Carolinus, 6 « Nec unius enim palmi terrae spatium beati Petro sanctaeque Dei ecclesiae rei publice Romanorum reddere passus est. » 7 i< omnia, quae per sacramentum beato Petro per vestros missos restituenda promisit, irrita fecit et nec unius palmi terrae spatium beato Petro reddere voluit. » Édition Gundlach, p. 489 et 492. J. Haller, p. 83 et 86. Le pape exagère. Le biographe d'Étienne II, qui a dit aussi « Et post hoc ab invicem segregati, solite in perjurii reatum infidelis ille Aistulfus Langobardorum rex incidens, quod jurejurando promisit reddere distulit », écrit cependant plus loin « Castrum itaque illum Narniensem, quem pridem reddiderat misso Francorum, a jure beati Petri abstulit » (édition Duchesne, I, p. 451 et 452. J. Haller, p. 22 et 23). Or, le pape lui-même, dans une autre lettre, signale que, pendant le siège de Rome, les Lombards ont repris Narni et se sont saisis d'autres villes. Codex Carolinus, 8 édition Gundlach, p. 495. J. Haller, p. 91. Narni avait donc bien été restitué par Aistulf, et le traité de 755 avait reçu un commencement d'exécution.

3. Codex Carolinus, 6 « De omnibus vero tribulationibus nostris, quas passi sumus vel denuo patimur, Deo auxiliante Folradus filius [noster], vester consi-


écrite peu après, tant les pensées du pape se succèdent dans le même ordre et s'expriment parfois dans les mêmes formes, il faisait encore appel au même témoignage1 et invoquait aussi celui de l'évêque Wilharius, qui était chargé de la remettre au roi de France 2. Ces lettres, qui sont tout au plus postérieures de quelques mois au traité dont elles signalent l'inexécution, sont nécessairement de la seconde moitié de l'année 755, car elles nous commentent deux textes historiques qui semblent inspirés d'elles celui du biographe d'Étienne II, qui atteste que, peu de temps après le retour du pape à Rome, « per aliquanta temporum spatia », Aistulf non seulement ne tenait pas ses promesses, mais mobilisait toutes ses forces et venait camper sous les murs de Rome 3 et celui de Nibelung, qui note que Pépin, ayant appris « per internuncios » le manquement du roi lombard aux engagements pris envers lui et la marche d'Aistulf sur Rome, était entré dans une violente colère et avait convoqué l'armée des Francs 4.

Or, grâce à une nouvelle lettre d'Etienne II, nous retrouvons maintenant une chronologie précise et indiscutable. Aistulf avait mis sur pied trois armées. Le 1er janvier 756, liarius, et ejus socii enarrent vobis. » Édition Gundlach, p. 490. J. Haller, p. 84.

1. Codex Carolinus, 7 « Tamen omnia vester consiliarius Fulradus presbiter et abbas una cum suis sociis, si Deum pre oculis habent, omnia vobis enarrare possunt. Édition Gundlach, p. 492. J. Haller, p. 86.

2. Codex Carolinus, 7 « Tantopere direximus ad vos Wilharium reverentissimum et sanctissimum fratrem et coepiscopum nostrum et fidelem, qui vobis omnia de nostra tribulatione et causa beati Petri proprio ore enarret, cui in omnibus credere jubeatis et exitum bonum in causa beati Petri ponere. » Édition Gundlach, p. 493. J. Haller, p. 89. Ce Wilharius était alors évêque de Numentana (Mentana) et devint métropolitain de Sens.

3. Vita Stephani 11 « Dum enim saepefatus sanctissimus papa conjungeret Romam, post aliquanta temporum spatia, furore vehementi repletus adversarius ille et sue anime inimicus Aistulfus, Deo sibi contrario, non solum quia ea quae promiserat minime adimplevit, sed etiam generalem faciens motionem cum universo regni sui Langobardorum populo contra hanc Romanam advenit urbem. » Édition Duchesne, t. I, p. 451. J. Haller, p. 23.

4. Chronique de Nibelung, c. 38 Sequente anno Aistulfus rex Langobardorum fidem suam, quod contra rege Pippino promiserat, peccatis facientibus fefellit. Iterum ad Romam cum exercitu suo veniens, finibus Romanorum pervagans atque regionem illam vastans, ad ecclesiam sancti Petri veniens, et domos, quos ibidem repperit, maxime igne concremavit. Hec Pippinus rex, cum per internuncios hoc audisset, nimium furore et in ira motus, commoto iterum omni exercitu Francorum. » Édition Krusch, p. 185. J. Haller, p. 65.


celle qui venait de Toscane s'installait sur la rive droite du Tibre, près des portes de Saint-Pierre, de Saint-Pancrace et de Porto la seconde, commandée par Aistulf en personne, fixait ses tentes sur le front septentrional de la ville, près de la porte Salaria et des autres issues de ce côté la troisième, composée de Bénéventains, au sud, campait aux portes de Saint-Jean-Baptiste et de Saint-Paul, surveillant les autres sorties. La ville était donc complètement investie 1. Le cinquante-cinquième jour du siège, c'est-à-dire le 24 février, le pape réussit à faire passer à travers les lignes ennemies une mission de quatre personnages, l'évêque Georges, l'abbé Garnier, qui était un des missi de Pépin et qui, sous la cuirasse, avait pris part jour et nuit à la défense de Rome, et deux grands Thomaricus et Comita. A grand'peine, par la voie de mer, ces envoyés porteront à Pépin deux longues lettres qui sont un appel au secours, émouvant et presque désespéré 2.

Le siège dura trois mois 3 Aistulf, qui se vantait de prendre 1. Codex Carolinus, 8 « ln ipsis Januariarum kalendis cunctus ejusdem Haistulfi Langobardorum regis exercitus Tusciae partibus in hanc civitatem Romanam conjunxerunt et resederunt juxta portam beati Petri apostoli atque portam sancti Pancratii et Portuensi, ipse vero Haistulfus cum aliis exercitibus conjunxit ex alia parte et sua fixit tentoria juxta portam Salariam et ceteras portas. Sed et Beneventani omnes generaliter in hanc Romanam urbem conjungentes resederunt juxta portam beati Johannis Baptiste seu et juxta portam beati Pauli apostoli vel ceteras istius Romane civitatis portas. » Édition Gundlach, p. 495. J. Haller, p. 90.

2. Codex Carolinus, 8 « Quinquaginta et quinque dies hanc adflictam Romanam civitatem obsidentes et ex omni parte circumdantes prelia fortissima die noctuque cum pessimo furore incessantes contra nos ad muros istius Romane urbis commiserunt et non deficiebant inpugnantes nos, ut suae potestati, quod avertat divinitas, subiciens omnes uno gladio isdem iniquus Haistulfus interimeret. Opere namque direximus ad vestram christianissimam excellentiam praesentem nostrum missum Georgium reverentissimum ac sanctissimum fratrem et coepiscopum nostrum, atque Warneharium relegyosum abbatem missum vestrum, seu Thomaricum et Comitam, magnificos idem missos nostros, qui vobis nostros omnes dolores et cunctas dissolationes, quas a Langobardorum gente et eorum protervo rege passi sumus et assidue patimur, vobis subtili enarratione, sicut propriis oculis viderunt, viva voce debeant. » Édition Gundlach, p. 497. J. Haller, p. 94. Plus loin « Praefatus vero Warneharius abbas pro amore beati Petri loricam se induens per muros istius afflicte Romane civitatis die noctuque vigilavit et pro nostra omnium Romanorum defensione atque liberatione ut bonus atleta Christi totis suis viribus decertavit. » Gundlach, p. 498. J. Haller, p. 94-95. Cf. Vila Stephani II (édition Duchesne, I, p. 452. J. Haller, p. 23-24), qui nous fait savoir que les envoyés du pape prirent la voie de la mer, « per marinum iter » (voir ci-dessous, p. 284, note 2). 3. Vita Stephani Il « Aistulfus. generalem faciens motionem cum uni-


Rome, qui avait sommé les habitants de capituler et de livrer le pape sous peine d'être passés au fil de l'épée avait dû décamper au début d'avril pour faire face à l'attaque qui se préparait au delà des Alpes.

Pépin le Bref avait été informé de la marche d'Aistulf sur Rome. L'appel du pape lancé le 24 février et apporté par l'abbé Garnier ne fit sans doute que hâter les préparatifs commencés d'une intervention nouvelle en Italie 2. Il ne put parvenir à Pépin que vers le milieu de mars au plus tôt. Pâques étant tombé le 28 mars en 756, c'est avec raison que les Annales royales placent la seconde expédition de Pépin outre-monts sous la date de 756, par conséquent après Pâques 3 une fois de plus elles s'avèrent plus exactes que toutes celles des autres annales qui datent de 755 la nouvelle verso regni sui Langobardorum populo contra hanc Romanam advenit urbem. Quam et trium mensuum spatia obsidens atque ex omni circumdans parte cotidie fortiter eam expugnabat. Édition Duchesne, I, p. 451. J. Haller, p. 23. Le biographe romain avait sous les yeux, pour écrire son récit du siège de Rome, la lettre d'Étienne II, à laquelle il emprunte certaines expressions; mais il ajoute quelques détails précis, comme l'indication de la voie de mer prise par les envoyés pontificaux, et comme la durée du siège que le pape ne pouvait pas encore connaître, puisqu'il écrivait pendant le siège.

1. Codex Carolinus, 8 «. et nobis direxit dicens « Aperite mihi portam « Salariant et ingrediar civitatem et tradite mihi pontificem vestrum, et habeo in vobis compassionem alioquin muros subvertens uno vos gladio interficiam « et videam, quis vos eruere possit a manibus meis. » Édition Gundlach, p. 495. J. Haller, p. 90. – Cette dernière phrase, tendancieuse, est un défi à Pépin le Bref, car plus loin le pape prête à Aistulf cet autre propos « Ecce circumdati estis a nobis et non effugietis manus nostras. Veniant nunc Franci et eruant vos de manibus nostris! » (Gundlach, p. 495; J. Haller, p. 91). Cela est évidemment destiné à exciter Pépin à se hâter d'accourir, et l'intention se décèle d'ailleurs dans les appels pressants du pape « Adjuva nos. Occurre, occurre, fili, occurre. » (Gundlach, p. 496 J. Haller, p. 92), et de saint Pierre lui-même « Currite, currite. » (Codex Carolinus, 10; Gundlach, p. 502; J. Haller, p. 97). Ces appels, qu'il faut lire en entier, révèlent la terreur qui règne dans Rome, réduite à la dernière extrémité.

2. II semble, en effet, résulter d'un passage de la Vita Stephani Il que Pépin avait été informé avant même que le pape lui eût écrit « Haec itaque impie ab eodem Aistulfo quanto sepedicti Francorum insonuit regis in aures. Sed et beatissimus pontifex per marinum iter suos ordinans et ad eum Franciam dirigens missos una cum quodam religioso viro, Warnario nomine, qui ab eodem Francorum rege hic Roma directus fuerat, cuncta, quae gesta sunt et crudeliter tirannus ille peregit Aistulfus, subtili refertione suis apostolicis relationibus sepefato christianissimo et Dei cultori Pippino Francorum intimavit regi. » Édition Duchesne, I, p. 452.

3. Annales regni Francorum, a. 756 édition Kurze, p. 14. J. Haller, p. 70.


guerre l, et que les Annales Sancti Amandi, qui, par un glissement inverse, la mettent en 757 2.

De son côté, Nibelung, qui vient de signaler le retour en France de Pépin après sa première campagne d'Italie, rapporte ceci « L'année suivante, sequente anno, le roi Aistulf manqua, non sans pécher, à la foi qu'il avait promise au roi Pépin. Il marche de nouveau à la tête de son armée sur Rome, parcourt en tous sens les territoires romains, dévaste toute la région, arrive devant l'église de Saint-Pierre et, dans d'immenses incendies, brûle les maisons qu'il y trouve. » Puis il raconte la seconde expédition de Pépin 3.

Ainsi, sous son « sequente anno », il place le manquement d'Aistulf à ses serments et la marche sur Rome, qui sont antérieurs au 1er janvier 756, et puisqu'il vient de parler d'événements qui sont, nous l'avons vu, de 755, force est bien maintenant d'admettre que, chez ce chroniqueur, le commencement de l'année est compris entre le 31 octobre et le mois de décembre au plus tard 4.

Les récits que nous possédons de la seconde expédition d'Italie montrent qu'elle ne fut pas moins rapide que la première. Ayant mobilisé ses forces, Pépin a traversé la Bourgogne en passant par Chalon-sur-Saône pour gagner Genève, puis Saint-Jean-de-Maurienne 5 cet itinéraire prouve sans doute ou bien qu'il a voulu donner le change à l'ennemi sur le point choisi pour traverser les Alpes, ou bien que, hâté.d'accourir, il a cru prendre la route la plus courte. Il a passé la montagne au Mont-Cenis, bousculé les postes ennemis qui tenaient le val de Suze 6. Accompagné de son neveu, le duc 1. Entre autres, les Annales du groupe de Murbach (Alamannici, Guelferbytani, Nazariani édition Pertz, Scriptores, I, p. 26-27) et les Annales Mettenses priores, édition Simson, p. 49. Ces dernières soulignent leur erreur, quand, sous l'année 756, elles disent « Hoc anno, Pippinus. in nullam partem exercitum duxit », ce qui ne convient qu'à l'année 757.

2. Annales Sancti Amandi, a. 757 « Franci obsederunt Papeia. » Édition Pertz, Scriptores, I, p. 10.

3. Voir plus haut, p. 282, note 4, le texte cité de Nibelung.

4. Voir plus haut, p. 273 et la note.

5. Chronique de Nibelung, c. 38 « Hec Pippinus rex cum per internuncios hoc audisset, nimium furore et in ira motus, commoto iterum omni exercitu Francorum, per Burgundiam, per Cavalonnum urbem et inde per Januam usque ad Maurienna veniens (lisez venit). » Édition Krusch, p. 185. J. Haller, p. 65. 6. Chronique de Nibelung, c. 38 « Rex Aistulfus cum hoc repperisset, iterum


de Bavière, Tassilon, il a planté ses tentes sous les murs de Pavie 1. Aistulf, perdant tout espoir d'échapper à l'étreinte, a de nouveau recouru aux services des grands et des ecclésiastiques de France, offert de se soumettre au jugement d'une assemblée de laïques et de prêtres, et, de nouveau, grâce à l'intervention des grands, Pépin lui a laissé la vie sauve et son royaume. Le roi lombard a obtenu de traiter à des conditions plus lourdes que celles de l'année précédente il a dû ad clusas exercitum Langobardorum mittens (lisez mittit), qui rege Pippino et Francos resisterent et partibus Aetalie intrare non sinirent. Rex Pippinus cum exercitu suo, monte Ciniso transacto, usque ad clusas, ubi Langobardi eum resistere nitebantur, perveniens (lisez pervenit), et statim Franci solito more, ut edocti erant, per montes et rupes erumpentibus in regno Aistulfo cum multa ira et furore intrant, Langobardos, quos ibi repperiunt, interficiunt, reliqui, qui remanserant vix fuga lapsi evaserunt. » Édition Krusch, p. 185. J. Haller, p. 65.

1. Chronique de Nibelung, c. 38 « Rex Pippinus cum nepotem suum Tascilone Baiovariorum duce partibus Italiae usque ad Ticinum iterum accessit, et totam regionem illam fortiter devastans, et circa muros Ticini utraque parte fixit tentoria, ita ut nullus exinde evadere potuisset. » Édition Krusch, p. 185. J. Haller, p. 65. La présence de Tassilon aux côtés de Pépin est un fait notable. Sa venue à l'assemblée générale des Francs fut un événement considérable qui frappa l'esprit des contemporains; mais les Annales donnent des dates différentes Annales Nazariani, a. 754 « Venit Dessilo ad Martis campum, Francique absque bello quieverunt » (cf. Annales Alamannici, a. 754 « Venir Dasilo ad Martis campum »). Mais, ces Annales ayant mis la première expédition d'Italie en 753 au lieu de 755, il y a un décalage de deux années qui permet de ramener 754 à 756 et de faire concorder leur donnée avec celle de Nibelung. Annales Petaviani, a. 755 « Venit Thasilo ad Martis campo, et mutaverunt Martis campum in mense Maio » (cf. Annales Laureshamenses, a. 755 « Venit Tassilo ad Marcis campum in mense Madio ».) Ce serait donc au plaid de Berny que Tassilon serait venu et qu'on aurait décidé de changer désormais la date de l'assemblée générale des Francs en la reportant du 1er mars au 1er mai. Mais là encore les Annales de Petau et celles de Lorsch, ayant mis en 754 l'expédition de 755 et fournissant la date exacte de 756 pour la deuxième expédition d'Italie, il est manifeste que le plaid dont elles intercalent la mention entre ces deux expéditions est celui du 1er mars 756, ce qui concorde avec la présence de Tassilon dans les rangs de l'armée de Pépin en cette dernière année. Mais voici qui est plus embarrassant. Les Annales regni Francorum disent en l'année 757 « Et rex Pippinus tenuit placitum suum in Compendio cum Francis ibique Tassilo venit, dux Baioariorum, in vasatico se commendans per manus. et fidelitatem promisit regi Pippino et supradictis filiis ejus, domno Carolo et Carlomanno, sicut vassus. » (édition Kurze, p. 14-16. Cf. Annales qui dicuntur Einhardi, a. 757 ibidem, p. 15-17). Faut-il admettre une erreur des Annales royales? Faut-il supposer que Tassilon est venu deux années de suite au plaid et que la seconde fois seulement il s'est engagé dans la vassalité du roi? Je pencherais plutôt pour l'erreur. Tassilon était fils du duc Odilon de Bavière et de Chiltrudis, sœur de Pépin le Bref (Chronique de Childebrand, c. 25, édition Krusch, p. 180). La brouille des deux familles était ancienne Chiltrudis avait épousé Odilon contre le gré de ses frères.


abandonner le tiers de son trésor qui était à Pavie, faire des présents plus larges, jurer de ne jamais plus prendre les armes contre le roi Pépin et ses Francs, et payer tous les ans les tributs « que les Lombards avaient accoutumé de verser au roi de France 1 ou mieux qu'ils s'étaient engagés à payer l'année précédente, ce qu'ils n'avaient pas fait. Nibelung, qui décidément s'intéresse peu au pape et à l'Église de Rome, oublie de signaler à quelles obligations le vaincu fut tenu à l'égard des Romains. Le Fragment de Saint-Denis, dont le texte est en cet endroit si voisin de celui de Nibelung, le complète Aistulf, nous dit-il, dut rendre tout ce qu'il avait promis à saint Pierre et au pape Étienne « les années précédentes 2 », ce que confirment les Annales regni Francorum en précisant 3 et ce que la Vita Stephani II 1. Chronique de Nibelung, c. 38 « Haec Aistulfus rex Langobardorum cernens, et jam nullam spem se evadendi speraret, iterum per subplicationem sacerdotum et optimates Francorum veniam et pacem praedicto rege subplicans, et sacramenta, quod contra praefato rege dudum dederat hac contra sedem apostolicam rem nefariam fecerat, omnia per judicio Francorum vel sacerdotum plenissima solutione emendaret. Igitur rex Pippinus solito more iterum misericordia motus ad petitionem obtimatibus suis vitam et regnum iterato concessit. Aistulfus rex per judicio Francorum vel sacerdotum thesaurum, quod in Ticino erat, id est tertiam partem praedicto rege tradidit et alia multa munera majora, quam antea dederat, partibus rege Pippino dedit. Sacramenta iterum vel obsides donat, ut amplius numquam contra rege Pippino vel proceris Francorum rebellis et contumax esse non debeat, et tributa, quod Langobardi ad rege Francorum a longo tempore dederunt, annis singulis per missos suos desolvere deberent. » Édition Krusch, p. 185. J. Haller, p. 66.

2. Fragment de Saint-Denis « Haec Heistulfus cernens, nullam spem evadendi habens, per supplicationem sacerdotum veniam a praecellentissimo rege Pippino postulavit et ea quae contra jus vel sacramenta perpetraverat secundum judicium optimatum Francorum se plenissima voluntate emendare spopondit. Rex ergo Pippinus solito more misericordia motus regnum ei et vitam concessit. Heistulfus autem per judicium Francorum thesauri, quod in Ticino erat, tertiam partem Pippino tradidit, sacramenta iterum renovans obsidesque tribuens, promisit se partibus Francorum semper esse fidelem et annuale tributum, quod Francis debuerat, per missos suos annis singulis esse transmissurum, et ea quae sancto Petro vel Stephano papae annis preteritis promiserat, cuncta reddidit. » Annales Mettenses priores, a. 755 édition Simson, p. 48-49. Cf. Chronicon Moissiaeense, édition Pertz, I, p. 293-294. La comparaison de ce texte avec celui de Nibelung cité dans la note précédente montre que les deux auteurs travaillent sur le même texte l'auteur du Fragment, évidemment un ecclésiastique, distingue la part respective des ecclésiastiques et des grands dans les négociations, et sur la question du tribut est plus exact que Nibelung le tribut annuel avait été imposé par le traité de 755. En outre, on notera que l'expression « annis preteritis » ne s'expliquerait pas si on laissait ce rapport sous l'année 755. Il y a là une allusion aux promesses d'Aistulf au cours des négociations de 754 à 756. 3. Annales regni Francorum, a. 756 « Pippinus rex. magis magisque de


parachève en disant « Le pacte antérieur, qui était intervenu entre les parties dans le cours de la VIIIe indiction écoulée, étant confirmé derechef, Aistulf restitua les cités nommées plus haut en y ajoutant Comacchio 1. »

En se servant de l'expression « per elapsam VIII indictionem », l'auteur romain indique évidemment que l'indiction suivante, dans laquelle le second traité de Pavie fut conclu, n'était point arrivée à son terme cela nous autorise à chercher la date du nouveau traité avant le 1er septembre 756. Or, voici qu'un texte hagiographique nous ramène à la fin de juin ou au début de juillet pour la conclusion de la paix, comme l'année précédente.

C'est la Translatio vetustissima Germani episcopi Parisiensis. Depuis que M. Bruno Krusch nous a donné le texte de ce document hagiographique débarrassé des scories qui le rendaient suspect à juste titre, la Translatio a repris toute sa valeur originelle de source historique écrite peu après l'événement qu'elle célèbre le savant éditeur a parfaitement établi que le transfert du corps saint avait eu lieu non pas en 754 ou en 755, comme on le croyait jusqu'alors, mais le 24 juillet 756. Un seul point du récit de l'hagiographe paraissait encore douteux à l'érudit allemand la Translatio atteste, en effet, que ce jour-là Pépin assistait à la cérémonie, alors que, selon l'opinion régnante, le roi était en Italie. Mais nous venons de voir que l'expédition d'Italie de 756 s'était déroulée d'avril à juin. Rien ne fait plus obstacle à ce que le roi fût de retour dans la région parisienne à temps pour prendre part à la translation du 24 juillet 2.

Que le traité de paix de 756 ait été signé à la fin de juin, nous en avons la confirmation dans une observation de Nibelung. Ce chroniqueur, après avoir mentionné le retour du roi en France, ajoute « Et la terre se reposa des combats deux justitiis sancti Petri confirmavit, ut stabiles permanerent, quod antea promiserat et insuper Ravennam cum Pentapolim et omni Exarcatu conquisivit et sancto Petro tradidit. » Édition Kurze, p. 14. J. Haller, p. 70. Cf. Annales qui dicuntur Einhardi, ibidem.

1. Vita Stephani II « Et denuo confirmato anteriore pacto, qui per elapsam VIII indictionem inter partes provenerat, restituit ipsas praelatas civitates, addens et castrum, qui cognominatur Comiaclum. » Édition Duchesne, I, p. 453. J. Haller, p. 25.

2. Translatio antiquissima Germani episcopi Parisiensis, édition Krusch, Mon. Germ. hist., in-4u, Scriptores rerum Mcrovingicarum, t. VII, p. 422-428.


années durant1. » Nous ne trouvons plus, dans nos annales et chroniques, après la guerre d'Italie terminée en juin 756, mention d'une nouvelle expédition franque qu'en 758, où Pépin dirigea une incursion en Saxe mais alors l'ancien Champ de mars était devenu le Champ de mai 2 et c'est dans l'assemblée générale de mai que, selon l'usage, l'opération militaire contre les Saxons fut décidée, la date initiale de ce « raid » demeurant imprécise. Ainsi se justifie l'assertion de Nibelung à quelques semaines près, deux années s'étaient écoulées entre la fin de la guerre d'Italie et l'expédition de Saxe.

Maintenant que nous savons que ce même chroniqueur place le début de l'année en novembre ou décembre, nous voyons bien qu'il passe à une année nouvelle dans le chapitre suivant où, sans nous prévenir du changement d'année, il rapporte la mort d'Aistulf et l'avènement au trône lombard de Didier3, deux faits que les Annales royales attribuent encore à l'année 756, parce qu'ils sont antérieurs à Pâques suivantes, mais dont le premier seul appartient aux derniers jours de 756, le second étant du mois de mars 757, comme la suite va le montrer.

Avant de repasser les Alpes, Pépin avait fait une donation par écrit de toutes les villes rendues à Étienne II par le second traité de Pavie. Cette chàrte de donation, qui devait être déposée et conservée dans les archives de l'Église romaine fut remise entre les mains de l'abbé Fulrad, à qui Pépin confiait la mission de présider à l'exécution du traité.

Rejoint dans l'Exarchat de Ravenne par les délégués d'Aistulf, Fulrad se fit remettre, les unes après les autres, toutes les villes de l'Exarchat, de la Pentapole et de l'Émilie, livrer dans chaque ville des otages pris parmi les principaux personnages. Puis, se rendant à Rome, il déposa sur l'autel 1. Chronique de Nibelung, c. 38 Et quievit terra a proeliis annis duobus. » Édition Krusch, p. 185. J. HaUer, p. 66.

2. Voir plus haut, p. 286, note 1, le texte cité des Annales Petaviani. 3. Chronique de Nibelung, c. 39 édition Krusch, p. 186. J. Haller, p. 66. 4. Vita Stephani II « De quibus omnibus receptis civitatibus donationem in scriptis beato Petro atque sancte Romane ecolesiae vel omnibus in perpetuum pontificibus apostolice sedis emisit possidendas. Que et usque actenus in archivo sancte nostrae ecclesiae recondita tenetur. » Édition Duchesne, I, p. 453. J. Haller, p. 25.


de la Confession de saint Pierre les clefs de ces cités et l'acte de donation de Pépin vingt-deux villes, y compris Narni, détachée du duché de Spolète, furent ainsi remises au successeur de l'Apôtre 1.

Les choses avaient traîné en longueur, probablement du fait qu'Aistulf songeait de nouveau à rompre ses engagements, lorsqu'il mourut 2.

C'est, en effet, pendant que Fulrad assurait l'exécution du traité qu'Aistulf, au cours d'une chasse en forêt, fit une chute de cheval dont il mourut trois jours après3. Le pape Étienne, dans l'ultime lettre qu'il écrivit à Pépin et dans laquelle il rappelle que l'an passé, « elapso anno isto », Rome avait été sauvée par l'intervention franque, rapporte qu'Aistulf a été frappé par la main de Dieu exactement un an après qu'il avait marché sur Rome, donc à la fin de décembre 756, et que, par l'industrie de Fulrad, Didier avait été fait roi de la nation lombarde 4 la lettre se trouve datée, par ce dernier événement, de la fin de mars ou du début d'avril, Didier étant devenu roi dans la seconde moitié de mars 5, et le pape 1. Vita Stephani II édition Duchesne, I, p. 454. J. Haller, p. 25. Les vingt-deux villes de la donation de Pépin étaient Ravenne, Rimini, Pesaro, Conca, Fano, Cesena, Sinigaglia, Jesi, Forlimpopoli, Forli cum castro Sussubio », Montefeltro (aujourd'hui San Leo), Acerreagio, Montelucati, Serra, San Marino, Vobio (aujourd'hui Sarsina), Urbino, Cagli, Lucioli, Gubbio, Comacchio et Narni.

2. Annales regni Francorum, a. 756 édition Kurze, p. 14. J. Haller, p. 70. 3. Codex Carolinus, 11 édition Gundlach, p. 505 J. Haller, p. 101. Vita Stephani II édition Duchesne, I, p. 454 ;-J. Haller, p. 26. – Chronique deNibelung, c. 39 édition Krusch, p. 186 J. Haller, p. 66. Annales Mettenses priores, a. 756 édition Simson, p. 49. Annales regni Francorum, a. 756 édition Kurze, p. 14 J. Haller, p. 70. Parmi les autres annales qui ne nous apprennent rien de particulier sur l'événement, quelques-unes comme les Annales Nazariani et les Annales Alamannici placent la mort d'Aistulf en 755. 4. Codex Carolinus, 11 « In ipsis quippe diebus, quibus hanc Romanam urbem devastandum profectus est, post anni spatii circulum ita divino mucrone percussus est, ut profecto in eo tempore, quo fidem suam temptans diversa piaculi scelera perpetratus est, in eo suam impiam finiret vitam. Nunc autem Dei providentia per manus sui principis apostolorum beati Petri simul et per tuum fortissimum bracchium, prçcurrente industria Deo amabilis viri Folradi, tui fidelis, nostri dilecti filii, ordinatus est super gentem Langobardorum Desiderius, vir mitissimus. » Édition Gundlach, p. 506. J. Haller, p. 101-102. 5. Catalogi regum Langobardorum et Italicarum Brixiensi et Nonantulo « Ipse Aistulfus rex obiit. Gubernavitque palacium Ticinense Ratchis gloriosus germanus ejus. a decembrio usque martium. In mense vero Martio suscepit regnum Langobardorum vir gloriosissimus Desiderius rex anno incarnationis Domini DCCLVII, indictione X. » Mon. Germ. hist., in-fol., Scriptores rerum Langobardorum, p. 503.


lui-même étant mort au palais de Latran le 25 avril et inhumé le 26 dans la basilique de Saint-Pierre.

Fulrad avait-il agi de sa propre initiative ou avait-il reçu l'ordre de rester à Rome pour travailler au règlement de la succession ouverte par le décès d'AistuIf? La seconde hypothèse semble plus plausible, car le pape écrit à Pépin que Fulrad a exactement agi en toutes choses selon les instructions de de son roi. Toujours est-il que, dans la compétition qui mit aux prises le duc lombard Didier et Ratchis, frère d'Aistulf, qui s'était emparé de la couronne, le pape et Fulrad se prononcèrent en faveur du premier, firent triompher sa cause x et obtinrent de lui la promesse de cession de nouveaux territoires à l'Église romaine. Didier, par leur intermédiaire, recherchait l'amitié de Pépin le Bref 2.

Non contents de ces résultats, ils amenèrent aussi les ducs de Spolète et de Bénévent à se rendre indépendants de la puissance lombarde et à se placer sous la protection du roi de France 3. En agissant ainsi, Fulrad avait, par son avisée diplomatie, mis Rome à l'abri d'une attaque nouvelle, du moins on pouvait l'espérer il avait poursuivi l'œuvre à 1. L'auteur de la Vita Stephani (Duchesne, p. 454-455 J. Haller, p. 26) raconte longuement les faits et taille une large part dans le succès à Fulrad, qui se porta même au secours de Didier avec une petite troupe de Francs et qui avait prévu l'intervention de plusieurs armées ro.maines en cas de nécessité. 2. Codex Carolinus, 11 Et in praesentia ipsius Folradi sub jurejurando pollicitus est restituendum beato Petro civitates reliquias, Vaventia, Imulas, et Ferrarias cum eorum finibus, simul etiam et saltora et omnia territoria, necnon et Ausimum, Ancona et Humana civitates cum eorum territoriis. Et postmodum per Garrinodum ducem et Grimoaldum nobis reddendum spopondit civitatem Bononiam cum finibus suis. Et in pacis quiete cum eadem Dei ecclesia et nostro populo semper mansurum professus est atque fidelem erga Deo protectum regnum vestrum esse testatus est et petiit nos, quatenus bonitatem tuam deprecaremur, ut cum eo et cuncta gente Langobardorum magnam pacis concordiam confirmare jubeas. Édition Gundlach, p. 506. J. Haller, p. 102. D'après la Vita Stephani, Didier tint ses promesses au moins partiellement « Dum vero haec agerentur, direxit missum suum praelatus sanctissimus pontifex et abstulit de ipsis civitatibus, quas sepedictus Desiderius rex reddere promiserat beatissimo eodem papae, id est Faventias cum castro Tiberiaco seu Cabellum et universum ducatum Ferrariae in integro. » Édition Duchesne, p. 455. J. Haller, p. 27. Ainsi aux vingt-deux villes antérieurement cédées s'ajoutaient Faenza (avec Bagnacavallo), Imola, Ferrare, Osimo, Ancône et Numana.

3. Codex Carolinus, 11 « Nam et Spolaetini ducatus generalitas per manus beati Petri et tuum fortissimum brachium constituerunt sibi ducem, et tam ipsi Spolitini quamque etiam Beneventani omnes se commendare per nos a Deo servatç excellentiae tuae cupiunt et inminent anhelantius in hoc deprecandum bonitatem tuam. » Édition Gundlach, p. 506. J. Haller, p. 102.


laquelle il avait travaillé depuis 749 et qui faisait de Pépin le patrice des Romains; il avait assuré l'extension de l'influence franque en Italie aux dépens des influences rivales des Lombards et des Grecs. Il avait de la sorte bien mérité de son roi et du pape. La lettre d'Étienne II en apporte le témoignage.

Dans cette dernière missive, qui est, en quelque sorte, le testament politique du Souverain Pontife, Étienne II mettait à l'honneur ceux qui avaient été, avec lui, les principaux artisans de la fondation de l'État pontifical. Il célébrait sur le mode lyrique le monarque, « nouveau Moïse et brillant roi David », qui avait mis ses forces au service de saint Pierre et de son Église et pensé qu'il y allait de sa gloire de ne point permettre que les Lombards ou les Grecs reprissent ce qu'il avait offert par une solennelle donation à l'Église romaine 1. Par une discrète allusion au sacre de Saint-Denis, il associait à la louange du prince les fils, la femme, la descendance et la nation de ce roi « Que le Seigneur, beauté de justice, te bénisse », s'écriait-il avec le prophète Jérémie, « toi et tes enfants bien-aimés, mes fils spirituels, les seigneurs Charles et Carloman, institués par Dieu rois de France et patrices des Romains, avec leur très chrétienne mère, la très excellente reine, ton épouse et la fidèle de Dieu, notre commère spirituelle Qu'il vous ait en sa garde et vous protège en toutes choses Que Dieu accroisse votre descendance, qu'il la bénisse éternellement, qu'il lui accorde de jouir perpétuellement du trône royal et qu'il garde intacte la nation franque placée sous votre autorité » Puis, après avoir recommandé à Pépin de continuer à protéger l'Église de l'apôtre Pierre et de demeurer le défenseur de la sainte foi catholique et apostolique contre les Grecs, et l'avoir prié de le tenir, lui le pape, 1. Lors de la seconde expédition d'Italie, Pépin avait été rejoint, non loin de Pavie, par un envoyé de l'Empereur, Georges, « proto a secreta », qui, ayant faussé compagnie au délégué du pape qui l'accompagnait avait cherché à obtenir du roi de France que Ravenne et les autres villes de l'Exarchat fussent replacées sous la domination impériale; mais Pépin avait répondu que pour nulle raison il ne soustrairait de la puissance de saint Pierre ces cités. et que tous les trésors du monde ne pourraient le convaincre d'enlever ce qu'il avait une fois donné à saint Pierre. » Vita Stephani II, édition Duchesne, I, p. 453. J. Haller p. 24-25. C'est presque dans les mêmes termes qu'à la veille de la guerre de 1866 Napoléon III annonçait qu'il ne souffrirait pas que fût enlevé à l'Italie ce qu'il avait contribué à lui donner.


au courant des conversations échangées avec le silentiaire impérial et des lettres remises à cet envoyé du Basileus, « afin, disait-il, de savoir quelle ligne de conduite nous devons tenir en étroite et cordiale union avec le bien-aimé de Dieu, Fulrad », il rendait cet hommage à celui qui avait été et était encore leur principal collaborateur « Car, lui, notre cher fils Fulrad, a exécuté à la lettre en tout tes instructions, et nous lui avons exprimé nos remerciments les plus vifs pour le bon combat qu'il a soutenu1. »

La reconnaissance du pape à l'égard de Fulrad ne s'était pas manifestée seulement en paroles elle avait pris une forme plus substantielle. Complétant ses faveurs antérieures, Étienne II lui avait fait don d'un logement situé dans la basilique de Saint-Pierre près du tombeau du pape saint Léon et tenu auparavant de cette basilique même par le moine Ratchis, sans doute le frère d'Aistulf, et aussi d'une maison voisine du monastère de Saint-Martin avec son enclos et un petit jardin, tenue du monastère de SaintÉtienne antérieurement par le moine Nazarius logement et maison que Fulrad possédera à partir de la Xe indiction présente jusqu'à la fin de ses jours et qui feront retour après lui aux églises propriétaires2. D'autre part, le pape accordait à l'abbé Fulrad et à ses successeurs dans l'abbatiat de SaintDenis le privilège de pouvoir construire partout en France sur des terres leur appartenant des monastères exempts, et à Fulrad personnellement la faveur spéciale de ne pouvoir être élu évêque par un concile sans son propre assentiment et sans le consentement du roi et de pouvoir porter en cour de Rome les causes de son monastère et les siennes cette faveur particulière ayant pour objet manifestement de maintenir à Fulrad, s'il le voulait, la situation exceptionnelle dans le clergé franc que lui avait procurée la bulle pontificale antérieure qui lui avait concédé, à lui simple prêtre, le droit de porter les ornements pontificaux 3.

1. Codex Carolinus, 11 édition Gundlach, p. 504-505, 506-507 J. Haller, p. 100 et 103.

2.. Bulle d'Étienne II, 756, lor septembre-757, 25 avril, dans la Collectio sancti Dionisii, n" 7 (Zeumer, Formulae, p. 500) édition Dom Félibien, Hisioire de l'abbaye royale de Saint-Denys en France, pièces justificatives, p. XXVII, 40. 3. Bulle d'Étienne II, s. d., dans la Collectio sancti Dionisii, 12 (Zeumer, Formulae, p. 503) édition Dom Félibien, p. xxvi, n° 37. Nous avons dit ail-


Tant d'honneurs et d'avantages qui faisaient de lui, comme nous dirions aujourd'hui, un citoyen de Rome logé aux frais de la république, un abbé mitré « praelatus nullius » et un prince de l'Église, attestent qu'il avait eu, dans l'avènement de la dynastie carolingienne et dans la fondation de l'État pontifical, une part telle qu'il mérite de voir son nom associé à ceux du pape et du roi dont la politique eut pour l'Église et pour la France de si profondes répercussions à travers les siècles.

Léon LEVILLAIN.

Nous résumons les résultats de la présente étude sous la forme d'un tableau qu'il suffira de comparer à la dernière édition des Régestes de Bôhmer-Mùhlbacher pour voir ce qu'il y a ici de nouveau.

leurs pourquoi cette bulle devait être du 26 février 757 (Études sur l'abbaye de Saint-Denis à l'époque mérovingienne, dans la Bibliothèque de l'École des chartes, t. LXXXVII, 1926, p. 332, note 1).

753, octobre 14, Rome.

Pavie.

novembre 15,

Mons Jovis.

Saint-Maurice.

décembre 25, Thionville. 26,

28, Toul.

754, janvier 1-2, Langres.

6, Ponthion.

7,

Saint-Denis.

avril 14, Quierzy-sur-Oise. Saint-Denis.

Quierzy-sur-Oise. juillet 28, Saint-Denis.

Verberie.

755, mars 1er, Berny-Rivière.

Départ d'Étienne II pour Pavie. Négociations d'Étienne et d'Aistulf.

Départ d'Étienne II pour la Gaule. Le pape franchit les Alpes.

Séjour du pape. Arrivée de Fulrad et Rothard.

Pépin venant de l'Ardenne célèbre la Noël.

Départ de Pépin et de la cour.

Envoi de Charles à la rencontre d'Étienne.

Rencontre de Charles et d'Etienne. Réception d'Étienne par Pépin. Ouverture des négociations.

Étienne hiverne dans le monastère. Ambassade de Carloman.

Pépin célèbre la fête de Pâques. Sacre des rois.

Assemblée des grands. Venue du pape.

Consécration de l'autel.

Bulles du pape en faveur de Fulrad.

Diplôme en faveur de Saint-Denis. Échec des négociations de Pépin et d'Aistulf.

Plaid général.


755, avril 6, Lyon,

Lyon.

Vienne.

Maurienne.

Pas de Suze.

juin 5, Frise.

Pavie.

juillet 4, Mayence.

11, Ver.

29, Compiègne.

août? 17?, Vienne.

août

décembre fin,

756, janvier 1er, Rome.

Narni.

février 24, Rome.

mars 1", Compiègne?

28,

31, Rome.

avril

Chalon-sur-Saône.

Genève.

Mont-Cenis.

Val de Suze.

Pavie.

juillet 26, Saint Germaindes-Prés.

juillet à Italie.

décembre

décembre fin,

757, février 26, Rome?

mars

Rome.

avril 25,

26,

Fête de Pâques.

lre expédition d'Italie.

Ambassade de Pépin à Aistulf.

Passage de l'armée.

Passage de l'armée. Carloman et Bertrade s'y arrêtent.

Passage de l'armée.

Victoire de l'avant-garde franque. Mort de Boniface.

Siège de la ville. Traité de paix. Retour du pape à Rome.

Translation de s. Boniface. Retour de l'évêque Lull du palais.

Capitulaire promulgué par Pépin. Diplôme de Pépin en faveur de Saint-Denis.

Mort de Carloman.

Violation de la paix par Aistulf.

Lettres d'Étienne II (Codex Carolinus, 6 et 7).

Marche d'Aistulf sur Rome.

Investissement de la ville.

Prise de Narni par Aistulf.

Lettres d'Étienne II (Codex Carolinus, 8, 9, 10).

Plaid général. Tassilon y assiste. Changement de date du plaid

annuel.

Fête de Pâques.

Aistulf lève le siège de Rome.

2e expédition d'Italie.

Passage de l'armée.

Passage de l'armée.

L'armée traverse les Alpes.

Victoire franque.

Siège de la ville. 2e traité de paix. Donation de Pépin à l'Église de

Rome.

Pépin assiste à la translation du corps de saint Germain.

Fulrad fait exécuter le traité et dépose la Donation de Pépin à la

Confession de saint Pierre.

Mort d'Aistulf. Ratchis lui succède. Bulles d'Étienne II en faveur de Fulrad.

Didier est fait roi des Lombards.

Dernière lettre d'Etienne II à Pépin (Codex Carolinus, 11).

Mort d'Étienne II.

Inhumation du corps dans la basilique de Saint-Pierre.


L'HISTOIRE DES TEXTES ET LES ÉDITIONS CRITIQUES

Depuis une dizaine d'années, des recherches de savants, au premier rang desquels il faut citer Dom Henri Quentin 1 et M. Joseph Bédier2, ont attiré l'attention sur la question de l'édition des textes. Le public érudit s'est rendu compte qu'avant de livrer à l'impression le texte de la plus modeste chronique il fallait faire de nombreuses recherches et résoudre beaucoup de problèmes, et les éditeurs eux-mêmes qui, trop souvent, se contentaient de quelques investigations superficielles, ont été secoués de leur torpeur. C'est que le travail d'édition n'est pas un travail d'amateur on ne fait pas une édition digne de ce nom en recopiant les variantes des éditions antérieures, comme cela s'est fait dans bien des éditions classiques, et sans se donner la peine de consulter certains manuscrits pourtant importants on ne fait pas davantage une édition digne de ce nom en combinant tant bien que mal les leçons de quelques manuscrits, comme cela s'est fait pour tant de textes du Moyen Age, sans examiner attentivement ce que sont les exemplaires qu'on a choisis et sans se demander si ceux qu'on néglige peuvent être laissés de côté.

Un des grands bienfaits du mouvement d'idées provoqué par les recherches de Dom Quentin et de M. Bédier a été justement de condamner ces éditions faites avec facilité, où l'on se dispensait d'étudier la tradition manuscrite qui, pourtant, servait de base au texte.

Les recherches entreprises depuis dix ans ont eu aussi un 1. Dom Henri Quentin, Mémoire sur l'établissement du texte de la « Vulgate », Rome-Paris, 1922, et Essais de critique textuelle, Paris, 1926.

2. Joseph Bédier, La tradition manuscrite du lai de l'Ombre, dans la Romania, avril-juillet-octobre 1928.


autre mérite grâce à elles, la question du classement des manuscrits a été examinée d'une façon approfondie. Certes, il faut reconnaître que, dans le cas d'une tradition contaminée, où les exemplaires des diverses familles ont influé les uns sur les autres, la reconstitution de la filiation manuscrite est parfois impossible mais les cas vraiment désespérés sont plus rares qu'on ne le pense.

De toute façon, il est un point sur lequel tous ceux qui ont étudié la question sont d'accord (et je suis sûr que M. Bédier lui-même ne me contredirait pas), c'est que le classement des manuscrits doit toujours être tenté. Souvent on parvient à retrouver la généalogie des exemplaires, mais, quand bien même on n'aboutirait pas à bâtir un schéma rigoureux, le travail doit être fait, car il permet toujours de distinguer les principales familles et de voir dans chacune d'elles quels sont les manuscrits les plus remarquables qui serviront de base à l'établissement du texte.

Je n'ai pas l'intention de reprendre la question du classement des manuscrits sur qui se sont concentrées depuis dix ans les recherches des critiques' je m'attacherai, au contraire (ne pouvant faire plus dans un article), à examiner quelques points restés davantage dans l'ombre en particulier l'histoire des textes, c'est-à-dire la transmission des œuvres de l'Antiquité et du Moyen Age jusqu'à nous, et aussi l'établissement pratique des éditions critiques, en indiquant quelles recherches de manuscrits elles demandent et comment les apparats critiques de variantes peuvent être établis. I. HISTOIRE DES TEXTES

On s'est fort peu préoccupé jusqu'ici de l'histoire des textes. Fascinés pour ainsi dire par la question, si importante d'ailleurs, de la filiation des manuscrits, les chercheurs ont négligé souvent le reste on s'est efforcé de trouver la méthode la plus propre à reconstituer la généalogie des exemplaires, mais, par contre, on ne s'est guère inquiété de 1. On trouvera un bon exposé de la question du classement des manuscrits dans l'ouvrage de P. Collomp, La critique des textes, Strasbourg, 1931 (Publications de la Faculté des lettres de l'Université de Strasbourg, Initiations et méthodes, fasc. 6).


savoir comment ont été établis, conservés et transmis à travers les âges les manuscrits sur lesquels reposent les éditions actuelles.

Et pourtant quels services ces connaissances ne rendraientelles pas aux éditeurs

Si l'on édite le texte de la Thébaïde de Stace, il n'est pas indifférent de savoir que le manuscrit si intéressant de Madrid1, inconnu jusqu'à ces derniers temps, provient de la cathédrale de Tolède, de Tolède, centre de culture classique pendant la domination des Maures en Espagne et où les œuvres des auteurs latins, venues directement de Rome en Espagne, ont continué à être étudiées et recopiées. On comprend alors l'excellence du texte du manuscrit de Madrid on comprend aussi pourquoi on trouve dans ce codex la présence simultanée de leçons appartenant à des familles différentes.

Si l'on édite un texte du Moyen Age, il n'est pas inutile de s'inquiéter des rapports des abbayes et des églises entre elles, de chercher où était conservé le manuscrit original et d'où proviennent les exemplaires qu'on possède encore aujourd'hui. C'est par l'histoire des textes que Traube a pu déterminer quel était le meilleur manuscrit de la Règle de saint Benoît 2, et, pour citer un exemple plus célèbre encore, je rappellerai que c'est par des données purement historiques, en suivant les exemplaires à travers les bibliothèques de la Renaissance italienne, que M. de Nolhac a retrouvé l'original du Canzoniere de Pétrarque 3.

L'étude de l'histoire des textes ne doit pas être négligée, bien plus, elle doit constituer pour l'éditeur critique sa première initiation certes, les recherches particulières sur l'origine de tel ou tel manuscrit varient avec chaque exemplaire, mais il est des connaissances qui ne changent pas, c'est l'histoire générale des textes pendant l'Antiquité, pendant le Moyen Age et pendant la Renaissance, c'est l'histoire qui a 1. Ms. de la fin du xie siècle, 10039 de la Biblioteca nacional de Madrid. (Communication à l'Académie des inscriptions, 7 juillet 1933.) 2. Ludwig Traube, Textgeschichte der Regula S. Benedicti (Abhandlungen der historischen Klasse der kôniglich bayerischen Akademie der Wissenschaften, t. XXI, 1898), 2e édition par H. Plenkers, München, 1910.

3. Pierre de Nolhac, Le « Canzoniere » autographe de Pétrarque, Paris, 1886. (Communication faite à l'Académie des inscriptions et belles-lettres.)


pour but de nous faire connaître suivant quels principes les manuscrits étaient transcrits et corrigés, comment on les conservait et on les communiquait.

Si on laisse de côté les œuvres grecques qui ont une tradition spéciale, et dont je ne m'occuperai pas, l'histoire des textes classiques ou médiévaux forme un bloc la séparation si absolue souvent et si néfaste entre l'Antiquité et le Moyen Age n'existe plus. C'étaient les mêmes moines qui recopiaient César, Ovide, Virgile et qui reproduisaient les vies de saints ou les chroniques latines ou françaises ces œuvres étaient exécutées de semblable manière, revisées de même façon, conservées dans les mêmes bibliothèques, échangées entre les mêmes monastères.

Cette histoire des textes, si utile, est, hélas mal connue encore, et dans ce domaine bien des choses restent à faire. On n'a pas réuni jusqu'ici tous les documents qui permettraient de mieux connaître comment étaient établis les manuscrits antiques on sait peu de chose sur les éditions de l'Empire romain, moins encore sur les revisions exécutées aux me et ive siècles les renseignements ne sont pas abondants, dira-t-on, c'est exact, mais encore faut-il se donner la peine de les chercher.

Si de l'Antiquité on passe au Moyen Age, on constate également que nos connaissances sont bien faibles. Cependant, au début du vie siècle en Italie, dans l'entourage de Cassiodore, on lisait et l'on copiait les œuvres des écrivains sacrés et profanes en Espagne, moins d'un siècle plus tard, Isidore de Séville, pour écrire ses Étymologies 1, avait en main presque tous les auteurs classiques en Irlande et en GrandeBretagne, au vne siècle, les études des lettres s'épanouissaient. On s'est quelque peu occupé de l'histoire littéraire de ces centres sur lesquels rayonnent les figures d'un Cassiodore, d'un Isidore de Séville ou d'un Bède le Vénérable, mais on n'a pas cherché suffisamment comment étaient établis et transmis les textes qu'on lisait autour d'eux, et, pourtant, des traités comme les Institutiones 2 de Cassiodore ou 1. Isidore de Séville, Originum sive Etymologiarum libri XX, Migne, Patr. lat., t. 82.

2. Cassiodore, Institutiones divinarum et saecularium lectionum, Migne, Patr. lat., t. 70, col. 1105 et suiv.


même comme le De Orthographia de Bède peuvent fournir déjà quelques utiles indications.

On connaît la Renaissance carolingienne, mais que sait-on sur les éditions, car il y eut de véritables éditions, données par Alcuin et ses disciples? Que sait-on sur les copies des humanistes de ce temps, sur les échanges de manuscrits entre les monastères? Et pourtant les textes ne manquent pas il suffit de consulter les traités d'enseignement de l'époque et de puiser dans la correspondance de ces clercs lettrés, dont Loup de Ferrières est le type le plus accompli. Il est au Moyen Age une autre Renaissance plus importante encore que celle de Charlemagne, c'est la Renaissance des xne et XIIIe siècles, qui annonce à bien des égards le grand mouvement du xve siècle. Renaissance latine au premier chef, où les auteurs profanes de l'Antiquité sont étudiés avec passion quiconque a manié les manuscrits des classiques n'a pu manquer d'être frappé par le nombre considérable de copies exécutées à cette époque. Mais le xne et le xme siècle ne sont pas seulement des siècles d'humanisme intense, ils sont aussi des siècles de création qui voient naître dans tous les domaines des œuvres originales écrites en latin ou en langue vulgaire et dont nous n'avons parfois que des manuscrits profondément différents les uns des autres.

On voudrait être renseigné sur la façon d'éditer les textes de cette époque certes, la manière peut varier, et une chanson française, texte vivant, n'était pas reproduite de la même façon qu'un traité de Cicéron mais, quel que soit le genre de l'œuvre, les renseignements sûrs font souvent défaut. A parler franc, on est en pleine nuit, parce qu'on ne s'est jamais donné la peine de faire les recherches nécessaires.

On est mieux renseigné sur la Renaissance du xve siècle l'humanisme a été étudié aussi bien en Italie qu'en dehors, avec un soin amoureux, mais bien des problèmes restent encore à résoudre en particulier, la question, si importante pour les textes classiques, des manuscrits d'humanistes et 1. Bède, De Orthographia, Migne, Pair, lat., t. 90, col. 123 éd. Keil, Grammatici latini, t. VII, Lipsiae, 1880.


des rapports de ces manuscrits avec les premières éditions n'a pas fait encore l'objet de recherches suffisantes. Ainsi, on sait bien peu de choses sur l'établissement des textes depuis l'Antiquité jusqu'à la Renaissance, mais ce n'est pas tout combien de critiques ignorent aussi la composition des grandes bibliothèques pendant le Moyen Age et n'ont aucune notion des échanges qui ont pu se faire entre elles. Cependant, il est plus facile de se documenter sur ce point de nombreux travaux de détail et quelques ouvrages d'ensemble sur les bibliothèques médiévales1 peuvent servir de point de départ à des recherches plus approfondies là encore il serait utile de réunir les résultats acquis et de les compléter par des études nouvelles.

Si l'on embrasse maintenant d'un seul coup d'oeil l'histoire des textes de l'Antiquité jusqu'à nous, on voit tout ce qu'il reste à faire, mais on sent aussi l'obligation qui s'impose de ne plus se contenter à présent de quelques vagues connaissances. L'Histoire des textes, avec ses données précises, les règles qu'elle fait connaître, les dates qu'elle fournit, les filiations qu'elle permet d'établir sur des bases indiscutables, peut rendre les plus grands services on l'a souvent négligée jusqu'ici par insouciance et aussi par crainte de l'effort on a voulu aller vite et on a laissé de côté cette aide précieuse qui aurait permis d'éviter la médiocrité où sont tombées souvent tant d'éditions critiques.

II. ÉDITIONS CRITIQUES

La première besogne que doit accomplir l'éditeur de texte est la recherche et l'étude des manuscrits. Quelles que soient ses connaissances, il ne peut se dérober à cette tâche et le bon sens indique qu'on ne peut songer à donner une édition, c'est-à-dire une publication qui prétend fournir le texte le plus proche de l'original, sans connaître les manuscrits de l'oeuvre et sans les avoir étudiés.

Cependant, si surprenante que la chose paraisse, rares sont les éditeurs qui se donnent la peine de faire une re1. En particulier le travail de Theodor Gottlieb, Ueber mittelalterliche Bibliotheken, Leipzig, 1890.


cherche et une étude sérieuse des manuscrits ils se contentent pour la plupart de ce que les autres ont trouvé avant eux ils ne se soucient pas de savoir s'il existe des exemplaires inconnus ou si un manuscrit négligé ne devrait pas être utilisé de préférence pour eux tout est trouvé, tout est connu t

On se demande alors à quoi peuvent servir ces éditions, utilisant, sans nouvelles recherches, les mêmes éléments que les éditions précédentes et dont toute l'originalité consiste à mettre quelques termes à la place de quelques autres et à remplacer des conjectures anciennes par des conjectures nouvelles dont la nécessité ne s'impose pas toujours. Quand il s'agit d'une œuvre inédite, on comprend qu'on la fasse connaître d'après les premiers manuscrits découverts et l'on excuse dans ce cas un travail précipité mais, quand on est en présence d'un texte publié déjà de nombreuses fois, on est en droit d'exiger que l'éditeur critique accomplisse son travail, qu'il fasse les recherches nécessaires pour bâtir une œuvre solide et donner autre chose qu'une retouche plus ou moins heureuse des éditions antérieures.

L'insouciance en matière de recherche de manuscrits est générale il ne faut pas croire que les textes de l'Antiquité latine soient seuls à en souffrir, les œuvres du Moyen Age sont souvent aussi mal partagées, et, si l'on constate une pareille indifférence, ce n'est pas parce que les éditeurs, dont certains sont des esprits distingués, ne se rendent pas compte de l'utilité de la recherche, mais c'est que le travail les effraie par son ampleur.

Pour grouper l'ensemble des manuscrits d'une chronique française du Moyen Age, il faut fouiller les bibliothèques de France et certaines de l'étranger pour retrouver les copies d'une œuvre de l'Antiquité latine, il faut parcourir presque toutes les bibliothèques où l'on conserve des manuscrits. La tâche peut paraître écrasante, cependant, quelques esprits rigoureux n'ont pas reculé devant elle je citerai l'exemple du P. Laurand, qui a recherché méthodiquement les manuscrits de Cicéron x, et celui de certains médiévistes 1. L. Laurand, Les manuscrits de Cicéron (Reçue des Études latines, 1933, 11e année, fasc. 1).


qui ont collationné eux-mêmes, dans les archives et les bibliothèques, les originaux et les copies des Actes des souverains français1.

Mais ces exemples sont rares pourtant il est clair qu'on ne peut songer à améliorer des textes maintes fois publiés sans prendre la question par la base, sans réunir tous les matériaux qui peuvent servir à l'édition, en un mot sans rechercher tous les manuscrits dispersés dans toutes les bibliothèques. Et, puisque ces vastes enquêtes à travers les bibliothèques du monde sont absolument nécessaires pour renouveler les textes et préparer les éditions définitives, il faut avoir le courage de les entreprendre.

De pareilles tâches sont, d'ailleurs, moins difficiles à réaliser qu'elles ne le paraissent j'ai montré, pour les œuvres latines de l'Antiquité, qu'on pouvait fort bien établir un relevé complet et critique des manuscrits des classiques en un mois, j'ai pu inventorier une partie des bibliothèques d'Espagne, prendre plus de 1,600 clichés, relever un nombre considérable de manuscrits inconnus, parmi lesquels plusieurs de tout premier ordre 2 en quelques années, si je puis continuer mon travail activement, le relevé des manuscrits classiques pourra être mené à terme avec sa double collection, comprenant, d'une part, les fiches où sont notés tous les exemplaires et, d'autre part, les photographies où sont reproduits les « codices » les plus remarquables.

Mais des recherches de ce genre ne doivent pas être limitées aux auteurs latins classiques, d'autres enquêtes doivent être menées pour les textes du Moyen Age en latin et en langue vulgaire, d'autres équipes doivent se constituer elles rechercheront pour les œuvres latines médiévales les manuscrits historiographiques, les manuscrits théologiques et philosophiques, les manuscrits des œuvres littéraires et scientifiques pour les textes en langue vulgaire, elles s'occuperont de dresser l'inventaire critique des manuscrits français et provençaux3.

1. Collection Chartes et diplômes, publiée par l'Académie des inscriptions. 2. Communication à l'Académie des inscriptions, 7 juillet 1933. Voir aussi Revue des Études latines, lie année, fasc. 1 (premier semestre 1933), p. 62, et l'Illustration, 30 décembre 1933, p. 599.

3. Bien entendu, les textes français et provençaux ne sont pas les seuls textes en langue vulgaire qui méritent de faire l'objet de recherches, et si je ne parle


Point n'est besoin d'organisation internationale, de rouages compliqués, de rapports et de congrès non, quelques poignées d'hommes énergiques, méthodiques et tenaces, romanistes ou latinistes, suivant le cas, habitués au maniement des manuscrits, voilà ce qu'il faut pour mener à bien de pareilles enquêtes. Grâce à eux, les travailleurs auront enfin la liste des diverses œuvres dispersées à travers les bibliothèques et pourront consulter les photographies des exemplaires les plus importants 1.

Pareilles entreprises doivent être réalisées si l'on ne veut pas continuer à piétiner sur place nous sommes arrivés à une époque où le fonds, sur lequel on travaille depuis longtemps, commence à s'épuiser. Depuis des siècles que l'on édite certains classiques d'après les exemplaires déjà connus du temps de la Renaissance, depuis plus de cinquante ans que l'on publie certains textes du Moyen Age d'après les mêmes manuscrits, il n'y a plus beaucoup de neuf à trouver dans une édition nouvelle. Mais nous sommes aussi à une époque où de nombreux travaux d'approche et des moyens techniques perfectionnés (notamment en photographie) permettent de poursuivre avec succès des enquêtes irréalisables autrefois. Et c'est pourquoi les recherches de manuscrits, base des éditions critiques, doivent prendre nécessairement une direction et une ampleur nouvelles.

L'étude et le classement des manuscrits sont liés à la recherche des exemplaires je n'ai pas l'intention de reprendre la question du classement et d'examiner les méthodes qui visent à retrouver la filiation des exemplaires, je veux simplement dire combien l'étude de la tradition manuscrite est indispensable et combien aussi elle a été négligée. Bien des critiques modernes, qu'ils éditent des textes de pas des autres, c'est qu'ils intéressent moins en général les travailleurs français je ne puis m'empêcher cependant de signaler l'intérêt considérable qu'il y aurait à poursuivre une enquête sur les manuscrits des œuvres espagnoles du Moyen Age, les manuscrits de ces œuvres sont très mal connus et les bibliothèques espagnoles en renferment un grand nombre.

1. Je ne parle pas des moyens financiers nécessaires à l'accomplissement de semblables travaux ils n'ont pas besoin d'être aussi importants qu'on le croirait et les organismes officiels peuvent fournir les crédits nécessaires. En ce qui me concerne, j'ai mené mon enquête sur les manuscrits classiques d'Espagne sans demander rien à personne, et je sais que les frais nécessités par mes recherches n'ont rien eu d'excessif.


l'Antiquité ou du Moyen Age, non seulement ne font aucun effort pour trouver des manuscrits nouveaux, mais encore se dispensent d'étudier sérieusement ceux qui sont déjà connus une pareille étude, pensent-ils, serait une tâche immense et sans doute stérile ils veulent aller vite et ils se bornent à consulter quelques exemplaires, ceux qu'ils peuvent atteindre le plus commodément.

On ne s'élèvera jamais avec assez de vigueur contre cette façon de procéder, d'abord parce qu'elle est extrêmement répandue, ensuite parce qu'elle est la négation même du travail d'édition. Celui qui publie un texte, quelle que soit sa méthode d'édition, qu'il combine plusieurs manuscrits ou qu'il se base sur un seul, a l'obligation absolue d'examiner soigneusement la tradition, d'expliquer pourquoi il prend tels exemplaires et pour quelles raisons il néglige tels autres opérer autrement, c'est tomber dans l'arbitraire, c'est aboutir aussi le plus souvent à donner une édition médiocre, car on néglige des témoins de la tradition qui auraient dû être utilisés.

Mais, me dira-t-on, le nombre de manuscrits connus est considérable, quatre-vingt-dix, cent peut-être, raison de plus dans ce cas pour faire une étude approfondie. Mais le classement a déjà été établi, dans une édition précédente, par un érudit de valeur et l'on ne peut espérer faire mieux, alors, pourquoi donc entreprendre une nouvelle publication? Il faut réagir contre cette tendance à la facilité qui a envahi le domaine de l'édition des textes certes, quand on recherche les exemplaires inconnus, lorsqu'on examine l'ensemble de la tradition manuscrite, on accomplit beaucoup de travail qui ne paraît pas au grand jour, et l'édition nouvelle ne peut être établie en quelques mois mais on fait alors quelque chose de durable, on bâtit une œuvre solide sur laquelle l'historien et le philologue peuvent se baser avec sécurité.

D'ailleurs, quiconque a étudié les manuscrits d'une tradition même étendue sait très bien que certains manuscrits, assez proches entre eux, se classent pour ainsi dire d'euxmêmes, et que les grandes familles se dessinent assez rapidement les véritables difficultés se présentent lorsqu'il s'agit d'établir les rapports des principales familles entre elles.


L'éditeur s'efforcera de résoudre ces difficultés il se servira des données que fournit l'histoire des exemplaires il appliquera les méthodes que je n'ai pas à étudier ici comparaison des particularités autres que les variantes (décoration, grandes omissions, additions, interversions) comparaison des variantes suivant divers systèmes (système de Dom Quentin, méthode des fautes communes) il s'appliquera à aboutir au classement le plus complet possible et il y parviendra souvent même dans les cas les moins favorables, il arrivera toujours à dégager les manuscrits qui représentent les différentes formes de la tradition et sur lesquels il pourra se baser. Et, qu'il fasse son édition en combinant les manuscrits des diverses familles ou en prenant pour base un manuscrit-type, il donnera toujours un texte solide reposant sur les meilleurs exemplaires, un texte en qui chacun pourra avoir confiance, et cela d'autant plus qu'on pourra en contrôler la valeur, grâce aux variantes relevées soigneusement dans l'apparat critique au bas des pages. Nous touchons ici à un point important de l'édition l'établissement de l'apparat critique.

Or, que l'on examine une édition moderne d'un classique latin ou d'un auteur du Moyen Age, on s'aperçoit fréquemment que l'apparat est établi de façon assez incohérente les apparats qui donnent le plus de satisfaction sont ceux des œuvres représentées par deux, trois ou quatre manuscrits dans ce cas, en effet, comme les variantes sont peu nombreuses, on les met toutes mais, dès qu'on arrive à huit ou dix manuscrits, on est le plus souvent en pleine fantaisie. La place laissée au bas des pages pour caser les variantes n'est pas grande et l'on ne peut songer à les mettre toutes alors, vaille que vaille, on fait un tri, on s'efforce de sauvegarder celles qui paraissent les plus intéressantes, mais sans idée d'ensemble les uns mettront presque toutes les variantes d'un manuscrit et sacrifieront les autres exemplaires, d'autres puiseront à peu près également partout, d'autres, enfin, tourmentés par des questions d'orthographe, relèveront dans leur maigre apparat critique les variantes orthographiques les plus insignifiantes et négligeront des leçons remarquables fournies par certains manuscrits. Et si, d'aven-


ture, un esprit critique éprouve quelque regret, il se consolera en pensant que l'imprimeur aurait dû lui laisser plus de place et qu'après tout les variantes ne servent pas à grand'chose, puisqu'on ne les regarde jamais

Mais, si les éditions modernes présentent tant d'apparats médiocres, la faute n'en est pas aux seuls imprimeurs, la faute en incombe surtout aux éditeurs de textes, qui ont bien rarement des idées nettes sur la question, qui ne se rendent pas toujours compte de ce que doit contenir un apparat critique, qui ne savent pas non plus toujours ce qu'est exactement une variante et qui mettent sur le même plan une menue différence d'orthographe et une profonde différence de sens.

Pourtant la définition de la variante est simple et il est aisé de comprendre quelle doit être la composition d'un apparat. La variante est une forme nouvelle du texte une divergence graphique, une particularité due au dialecte ne sont pas des variantes à proprement parler, et c'est par une sorte d'abus qu'on emploie le terme de variante orthographique adsensus et assensus, obprimere et opprimere ne constituent pas des variantes, mais, par contre, perdere et pergere en sont, car il existe entre ces deux mots une différence de sens. D'autre part, que demande-t-on à un apparat critique de permettre au lecteur de contrôler le texte de l'éditeur et de le corriger au besoin par conséquent, l'apparat devra obligatoirement donner les différents états du texte fournis par les manuscrits.

Les manuscrits dérivés de codices encore existants n'ont pas à figurer dans l'apparatus, car leurs leçons n'ont pas d'intérêt pour le texte, mais les variantes des autres exemplaires doivent s'y trouver, et le moins qu'on puisse demander dans le cas d'une très vaste tradition, c'est que soient relevées les variantes de tous les manuscrits qui sont comme les types de chaque famille enfin, les différences purement orthographiques et dialectales peuvent être aisément sacrifiées. Dans la pratique, comment opérera-t-on pour composer un apparat critique? On éliminera d'abord les manuscrits dérivés de ceux qu'on possède encore, puis on procédera à l'établissement de l'apparat.

Si l'œuvre est connue par un petit nombre de manuscrits


(quatre ou cinq environ), toutes les leçons pourront figurer dans l'apparat critique qui ne risquera pas d'être encombré toutefois, si les variantes orthographiques sont par trop insignifiantes, on fera bien de les négliger il ne sert à rien d'encombrer le bas des pages d'une édition de formes comme conpositus et cèdes pour compositus et caedes, au milieu desquelles les variantes intéressantes seront comme noyées. Si l'on est en face d'un texte représenté par un nombre moyen de manuscrits (une dizaine environ), il faudra sacrifier sans hésiter les particularités orthographiques ou dialectales, à moins qu'elles ne présentent un intérêt vraiment exceptionnel. L'apparat critique sera réservé aux variantes proprement dites, mais elles devront toutes y figurer aucun manuscrit ne doit être négligé, tous ayant leur valeur, puisqu'on a éliminé dès le début ceux qui n'étaient que des dérivés d'exemplaires connus.

Quand on est en présence d'une vaste tradition, l'apparat critique doit être établi d'après les mêmes principes il doit permettre de se rendre compte des différentes variations du texte, il doit comprendre toutes les variantes des manuscrits qui ne sont pas des exemplaires dérivés.

Mais, va-t-on dire, avec ce système, il faudra caser au bas des pages les variantes d'un nombre' incalculable de manuscrits Non pas le travail d'étude et de classement auquel l'éditeur critique se sera livré (et l'on en sent une fois de plus toute l'utilité) aura permis de déterminer quels manuscrits peuvent être considérés comme les chefs des différents rameaux de la tradition. Dans tout classement sérieusement fait, on pourra discerner aisément deux groupes, en dépit même de quelques incertitudes de détail d'une part, les manuscrits principaux qui sont comme les types des diverses familles d'autre part, les exemplaires secondaires dérivés des manuscrits principaux, et de beaucoup les plus nombreux.

Seules, les variantes des manuscrits du premier groupe auront à figurer dans l'apparat critique la masse des leçons dérivées subira le même sort que les différences orthographiques on ne s'en inquiétera pas, à moins que certaines ne présentent un intérêt exceptionnel (correction admise par les éditeurs, interpolation importante, etc.).


Même avec une tradition extrêmement étendue il est toujours possible de bâtir un apparat critique logique et complet, il suffit d'avoir fait au préalable une étude sérieuse des manuscrits, et l'on n'aura nul besoin de disposer d'une place considérable, car les exemplaires non dérivés des autres, les exemplaires-types, seront moins nombreux qu'on ne le croit. Il me suffira de citer comme exemple l'édition de la Vulgate qui possède à coup sûr la plus vaste tradition qui soit parmi les centaines de manuscrits de la Bible, une quarantaine seulement ont été retenus, dont les variantes figurent dans l'édition donnée par Dom Quentin1, et le savant bénédictin ne peut être suspecté par personne de manquer de rigueur ou d'avoir écarté des manuscrits à la légère, pour se rendre le travail plus facile.

Telles sont, réunies dans un court article, les remarques que j'ai voulu faire sur l'Histoire des textes et l'édition critique. Je n'ai pu, en quelques pages, examiner complètement des questions aussi vastes, et d'ailleurs telle n'était pas mon intention; j'ai voulu simplement rappeler l'importance des problèmes d'édition de textes, indiquer ce qui restait encore à faire et montrer aussi par quels moyens on pouvait se renseigner.

Mon but a été d'examiner quelques points de critique textuelle, assez négligés d'habitude, mais j'ai voulu faire autre chose aussi réagir contre la facilité qui a exercé tant de ravages sur les éditions critiques. Je suis resté sur le terrain des principes et n'ai voulu blesser la susceptibilité de personne je désire de tout cœur que ceux qui peuvent avoir donné des éditions trop hâtives se rendent compte de l'utilité d'un travail plus rigoureux je désire aussi que ceux qui se trouveront attirés vers la critique textuelle sachent que l'établissement d'une édition est une œuvre toujours réalisable, qui demande des recherches et du travail, mais qui procure la joie de bâtir quelque chose de solide tout en renouvelant le texte d'un auteur.

Félix GRAT.

1. Dom Henri Quentin, Bibha sacra mxta latinam vulgatam versionem. iussu PU PP. XI. edita. Liber Genesis. Romae, 1926.


NICOLAS CLÉMENT EST-IL L'AUTEUR DE LA

« DÉFENSE DE L'ANTIQUITÉ DE LA VILLE ET DU SIÈGE ÉPISCOPAL DE TOUL »?

On attribue assez communément à Nicolas Clément la Défense de l'antiquité de la ville et du siège épiscopal de Toul contre la préface d'un livre qui a pour titre Système chronologique et historique des évêques de Toul. Paris, impr. de Simon Langlois, 1702. In-8° de 2 ff. pour le titre et la dédicace, 50 p. et 1 p. pour la permission d'imprimer 1. Cette permission, datée de Versailles, 30 juillet 1702, est donnée au nom du « sieur d'Antimon 2 ».

Le premier livre imprimé, à ma connaissance du moins, qui donne cette attribution à Clément est la Bibliothèque historique de la France du P. Jacques Lelong. Paris, C. Martin, 1719, infol., p. 206, 4425, sous cette forme « Nicolas Clément, de 1. Il existe au moins deux tirages de cette édition à la Bibliothèque nationale (8° Lk3. 659 et 659. A). Ils se distinguent en ce que l'un porte à l'adresse, après Langlois, ruë Saint Estienne des Ggrès, et que dans l'autre cette faute typographique a été corrigée et qu'on y lit correctement des Grès. L'ouvrage contre lequel la Déf ense est écrite est intitulé Sistème chronologique historique des évêques de Toul, avec des Mémoires historiques et chronologiques pour la vie de saint Dié, évêque de Nevers, et fondateur de l'insigne église de Saint-Dié en Lorraine, par M. l'abbé de Riguet. Nancy, chez Paul Barbier, 1701. In-8° de 8 ff. pour le titre et la préface et 358 p. La préface est du fameux abbé d'Étival, Louis-Charles Hugo, qui ne l'a pas signée. L'ouvrage est coté à la Bibliothèque nationale 8° Lk3. 658 et est relié avec la Défense et avec la Dissertation critique, dont il sera parlé plus loin.

2. M. Aug. Digot, dans son Éloge historique du R. P. Benoît Picart. Nancy, impr. de Grimblot et Ve Raybois, 1845, in-8° (extrait des Mémoires de la Société royale des sciences. de Nancy, 8° Ln27 16233), n. 25, p. 46, dit que le numismate Mory d'Elvange a mis de sa main sur son exemplaire cet ouvrage est de M. d'Antimon, chanoine de Toul.


Toul, l'un des gardes de la Bibliothèque du Roy, s'est déguisé sous ce nom il est mort en 1712 ». Lenglet Du Fresnoy, mentionnant ld.Défense dans sa Méthode pour étudier l'histoire, nouvelle édition, t. IV. Paris, P. Gandouin, 1729, in-4°, p. 254, dit prudemment « On prétend que cette dissertation est de M. Clément, sous-bibliothéquaire de la Bibliothèque du Roy. » Le Supplément de Moreri paru en 1736 reprend l'assertion du P. Lelong. Dom Augustin Calmet 1, qui avait « beaucoup profité, comme beaucoup d'autres, étant à Paris, de la bonne volonté de M. Clément, qui nous prétoit, dit-il, volontiers et agréablement les livres dont nous avions besoin de la Bibliothèque du Roi », se réfère à l'abbé Langlet [sic] et au Supplément de Moreri, dont il cite ces paroles « On trouve à la suite de cet ouvrage une Dissertation du P. Benoît Picard, capucin, pour prouver que la ville de Toul est le siège épiscopal des Leuquois. » Il ajoute « Je crois que l'auteur de ce Supplément a confondu ici le P. Benoît avec M. Clément car plusieurs personnes ont cru que l'œuvre de M. Clément étoit du P. Benoît et ces deux ouvrages ici n'en font qu'un, imprimés in-4° et in-8°. L'édition in-4° s'est faite à Nancy chez Barbier l'autre est sans nom d'auteur et d'imprimeur 2. » Un peu plus loin, il dit « S'il n'est pas l'auteur de la Défense de l'antiquité. comme quelques-uns semblent en douter, on ne peut du moins lui enlever la gloire d'avoir beaucoup aidé par ses savantes recherches. à celui qui l'a fait. »

Fevret de Fontette, dans sa réédition de la Bibliothèque historique de la France, t. I. Paris, J. Th. Hérissant, 1768. Infol., p. 678, 1067, dit dans une note additionnelle « La plus grande partie de ce livre est de Claude de Lisle de Lerissel, frère de Guillaume le géographe », et il rappelle que Dom Calmet assure que plusieurs l'attribuent au P. Benoît. Le renseignement sur de Lisle est pris, sans aucun doute, au Catalogue des livres de feu M. Lancelot, de V Académie royale des belleslettres. Paris, G. Martin, 1741. In-8°, qui porte, p. 377, 4217 « Dissertation critique. », n° 4218 « Défense de l'antiquité » 1. Bibliothèque lorraine. Nancy, A. Leseure, 1751. In-fol., col. 284-285. 2. M. Aug. Digot (op. cit., p. 61) dit qu'il n'a jamais pu trouver d'édition in-4° et qu'il croit que Dom Calmet ne l'a pas vue, qu'il en parle sur la foi d'autrui et qu'il se trompe. Je n'ai trouvé nulle part, moi non plus, trace de cette édition in-4".


(la plus grande partie de ce livre est de Simon-Claude de Lisle Lerissel ou de Herissé).

Antoine-Alexandre Barbier, dès la seconde édition de son Dictionnaire (la première est muette sur ce point), accepte, sans discussion et sans référence, la paternité de Clément. Et, depuis, on l'a généralement suivi. Mais M. Auguste Digot, dans l'ouvrage que nous avons déjà cité, nous dit (p. 60-61, n. 25) « On a longtemps attribué à Clément la brochure dont nous parlons, mais le P. Benoît déclare formellement qu'il en est l'auteur dans un passage de son Histoire de Toul (publiée du vivant de Clément), passage auquel on n'avait généralement pas fait attention. On le trouve au bas de la page 16 nous devons seulement faire observer que, par suite d'une faute de typographie, l'opuscule en question est indiqué comme ayant été imprimé en 1700, tandis qu'il ne l'a été que deux années plus tard. »

Il ajoute « Il y a eu au moins deux éditions de l'ouvrage du P. Benoît. L'une est intitulée Défense, etc. Le titre de l'autre édition est ainsi conçu Dissertation critique pour prouver que la ville de Toul étoit la capitale et le siège épiscopal des Leuquois; que Grand n'a pas été la capitale des mêmes Leuquois ni le siège épiscopal de saint Eucaire; et que ce saint n'a pas été évêque des Leuquois. Contre le Système cronologique des évêques de Toul, composé par M. l'abbé de Riguet, et contre la Pré f ace mise à la tête de ce livre par un auteur anonyme 1. » Il dit encore qu'il est certain que cet opuscule est sorti des presses d'Alexis Laurent, imprimeur du roi, à Toul.

Tandis que des auteurs lorrains, comme M. Favier dans son Catalogue. du fonds lorrain de la Bibliothèque municipale de Nancy. Nancy, A. Crépin-Leblond, 1898. In-8°, 5768, ont accepté pleinement les conclusions de M. Digot, ailleurs on les a ignorées ou l'on n'en a pas tenu compte. Au Catalogue général des livres imprimés de la Bibliothèque nationale, on a porté le livre à la fois au nom de Clément et à celui du P. Benoît, en indiquant la double attribution, mais 1. La description de M. Digot, qui correspond très exactement à l'exemplaire que nous avons à la Bibliothèque nationale (8° Lk3. 660), montre que l'exemplaire qu'il a eu entre les mains n'avait pas d'autre titre que le titre de départ, comme le nôtre.


en laissant la Dissertation critique sous le nom seul du second auteur et comme un ouvrage différent.

Il n'est peut-être pas inutile de noter sur ce point le témoignage de nos vieux catalogues.

Je rappelle que Nicolas Clément, après avoir dressé, de 1675 à 1684, un premier catalogue, méthodique et alphabétique, de la Bibliothèque qu'il avait lui-même classée méthodiquement, avait eu le courage, en 1688, de reprendre son travail, de modifier, parfois assez profondément, ses classements et de refondre en conséquence son catalogue. En 1697, l'entrée de Jean Buvat à la Bibliothèque lui avait permis d'utiliser les services précieux et la belle écriture de cet auxiliaire dévoué pour établir une copie de son second catalogue. Une première copie fut découpée pour servir à l'établissement d'une seconde copie mieux ordonnée. C'est Jean Buvat lui-même qui nous donne ces précisions dans son précieux Mémoire journal, dont nous devons la publication à M. Omont1.

Cette seconde copie, dans laquelle on avait réservé quelque place pour les accroissements, est toujours conservée au département des imprimés. La confection en fut suivie d'une mise au net du Catalogue des auteurs par ordre alphabétique, qui ne remplit pas moins de vingt-deux volumes in-folio. Les quatorze volumes du Catalogue méthodique ont reçu du premier au dernier une foliotation continue. Dans le tome XVII, consacré à l'histoire de France (L), on trouve, en contre-page du feuillet 2439, l'indication du Sistème chronologique historique de l'abbé Riguet sous la cote 2224 et en marge cette addition 2 Défense de l'antiquité de la ville et du siège épiscopal de Toul contre le livre précédent par led. P. Benoist. A Paris, 1702, 8°2. Dissertation critique qui est la mesme Défense, imprimée à Toul.

Cette double addition marginale, sans cote spéciale, in1. Mémoire journal de Jean Buvat, écrivain de la Bibliothèque du Roi (16971729). Paris, 1900, in-8° (8° Ln27 51270), p. 6.

2. La mention, ledit P. Benoist, s'explique parce que plus haut un autre ouvrage du P. Benoît Picard est catalogué.


dique que ces deux pièces se trouvent reliées avec l'ouvrage précédent, et c'est en effet l'état dans lequel se présente le volume relié en maroquin rouge aux ar.mes qui se trouve actuellement sous la cote Lk 3. 658-660.

Ces additions sont, si je ne me trompe, de la main même de Clément. En tout cas, elles ont été portées au catalogue avant l'année 1708, car Buvat nous apprend que c'est entre le 9 janvier et le 11 juillet 1708 qu'il a fait la mise au net du Catalogue alphabétique pour la lettre B et c'est bien à l'article « Le P. Benoist (Picard) de Toul, capucin, fils de Jean Picard, notaire royal à Toul », qu'il a enregistré dans les termes mêmes de Clément la mention de la Défense et de la Dissertation. Voilà donc, semble-t-il, justifiée par avance par Clément lui-même l'assertion de M. Digot relative à la paternité du P. Picard et à l'impression à Toul de la Dissertation. Cependant, un point au moins reste troublant. La Défense s'ouvre par une adresse « à Messieurs du clergé, du présidial et de l'hôtel de ville de Toul », dans laquelle l'auteur s'affirme comme natif de Toul, et qu'il termine en disant sa « satisfaction. de pouvoir protester publiquement, quoy qu'éloigné et peut-être encore plus inconnu, que je suis avec un véritable respect, Messieurs, votre très-humble et très-obéissant serviteur ».

Ces paroles, qui s'appliquent parfaitement à Nicolas Clément, ne sauraient convenir au P. Benoît, qui était rentré dans sa ville natale depuis 1695 et qui était déjà connu par sa Vie de saint Gérard et par son activité comme religieux capucin.

Ces paroles ne s'appliqueraient pas davantage à ClaudeSimon de l'Isle, dont le père était bien Lorrain, mais qui, lui, était né à Paris en 1675.

Dans le remaniement complet de la Dissertation qu'offre la Défense, qui a bouleversé l'ordre des matières et ajouté plusieurs choses nouvelles, il est fait usage et mention à diverses reprises de manuscrits de la Bibliothèque du Roi, et il semble assez naturel de penser que l'usage de ces manuscrits est l'œuvre de Clément.

Et, cependant, après la mort de Clément ses successeurs 1. Je note que Charles Bulteau, qui a contresigné la Permission d'imprimer de


crurent devoir lui attribuer l'ouvrage. On a cancellé la mention portée par Clément sur le Catalogue méthodique et l'on a réinscrit au Supplementum novum, sous la cote L. 2224 A et sous le d'entrée 163, la Défense, en l'attribuant formellement à Clément. Cette insertion est postérieure à 1736. L'on a de même, au tome IX du Catalogue alphabétique de Buvat, inséré en contre-page un article nouveau, ainsi libellé M. Clément, garde de la Bibliothèque du Roy, autheur de ce catalogue.

Défense. L. 2224 Al.

On est assez porté à croire que l'auteur de cette double insertion a été influencé par Lelong, Lenglet Du Fresnoy et le Supplément de Moreri. Mais peut-être aussi avait-il des témoignages autorisés qui justifiaient l'attribution du livre à Clément.

Il est d'ailleurs certain que Clément peut rester en possession de « la gloire, comme dit Dom Calmet, d'avoir beaucoup contribué, par ses savantes recherches », à aider le P. Benoît dans l'établissement non seulement de ce travail, mais de ses autres œuvres. Le P. Benoît a lui-même reconnu les services que lui rendait son compatriote parisien et M. Digot proclame, en plusieurs passages de sa notice, les mérites à cet égard du bibliothécaire du Roi.

Peut-être et cela me paraît vraisemblable le capucin de Toul, sentant ce qui manquait à sa Dissertation et voyant ce que lui apportait Clément, l'a-t-il chargé de remettre sur un meilleur pied son travail Clément aurait ainsi une grande part non seulement dans la recherche des documents qui semblaient de nature à rendre la Défense plus solide, mais aussi dans la disposition nouvelle et dans la rédaction de la Défense. N'y avait-il pas intérêt, bien que la la Défense, en possédait un exemplaire, ainsi que de la Dissertation et que le catalogue de sa bibliothèque, publié dès 1711 Bibliotheca bultelliana seu Catalogus librorum bibliothecae v. el. D. Caroli Bulteau. a Gabriele Martin. Parisiis, apud P. Giffart et Gabr. Martin, 1711, 2 vol. in-8°, t. II, p. 548, 5114, les enregistre sans donner aucun nom d'auteur.

1. La cote ancienne ne figure pas sur le volume coté aujourd'hui 80 Lk3. 658660. Le second tirage, 80 Lk3. 659. A, n'est entré que beaucoup plus tard à la Bibliothèque, et celle-ci ne possède pas d'exemplaires doubles de ces ouvrages.


Dissertation et la Défense fussent, dans le fond, le même ouvrage, à les laisser prendre pour deux ouvrages distincts, de manière à assurer l'écoulement de l'édition de Toul en même temps que de celle de Paris. Souvent les deux ouvrages sont liés et décrits comme les deux parties d'un seul livre. On ne pouvait guère ignorer à Toul que le P. Benoît fût l'auteur de la Dissertation critique. La dédicace de la Défense pouvait laisser croire que l'on avait affaire à un livre nouveau. Quant à la collaboration de Claude-Simon de l'Isle, il me paraît difficile de rejeter complètement le témoignage de Lancelot, qui était lié avec les frères de l'Isle. Il ne faut pas oublier non plus que c'est à Guillaume de l'Isle, frère de ClaudeSimon, que le P. Benoît demanda les cartes de son Histoire ecclésiastique et politique de la ville et du diocèse de Toul, parue en 1707. Seulement, il est peu vraisemblable que la part du collaborateur de Claude-Simon ait été aussi grande que l'insinue le catalogue de Lancelot.

E.-G. LEDOS.


FRAGMENTS DE COMPTES ROYAUX DES ANNÉES 1289 ET 1290

La Bibliothèque nationale vient d'acquérir, grâce à l'obligeance de notre confrère M. Perrat, que je tiens à remercier ici, trois fragments d'un rôle authentique de comptes royaux des années 1289 et 12901. Ces fragments de parchemin, mesurant respectivement 390, 450 et 480 mm. de long sur 300 mm. de large environ, se font suite sans interruption, ainsi que j'ai pu le constater par la coupure des hastes de deux lettres de la première ligne du second fragment et par le total des sommes additionnées en tête du troisième. Malheureusement, le début et la fin de ces comptes nous manquent mais, tels qu'ils sont, ils méritent d'être publiés et rapprochés d'autres fragments édités par N. de Wailly et L. Delisle dans le tome XXII du Recueil des historiens de France, en particulier de celui de 1285, de Jean d'Aix, dont le nom y reparaît à plusieurs reprises. Les comptes originaux de cette époque sont, en effet, fort rares 2. Celui-ci se rapporte à ces années où Philippe le Bel fit plusieurs voyages dans le Midi pendant les hostilités avec l'Aragon, en particulier pour se rencontrer avec Sanche, roi de Castille, à Bayonne, en 1290. On y relève aussi la trace de ses relations tantôt hostiles, tantôt amicales, avec les agents du roi d'Angleterre en Gascogne, parmi lesquels il essayait de se créer des intelligences. Ces comptes concernent principalement les dépenses faites par Jean de Soisy et Jean de L'Hôpital pour l'achat de blés 1. Ils proviennent de l'ancien Collège héraldique, dont ils portent l'estampille étoilée.

2. Voy. les introductions de MM. Ch.-V. Langlois et R. Fawtier dans le Recueil des historiens de France, Documents financiers, t. 1 (1899) et II (1930), et Borrelli de Serres, Recherches sur divers services publics du XIIIe au XVIIe siècle, t. I (1895), p. 8.


ou de vins à Moissac (ville royale depuis la toute récente acquisition du Quercy) et leur transport à Bordeaux et Bayonne, et d'autres achats analogues à Mont-de-Marsan, Dax et Bayonne, notamment par Jean de Colonna, ainsi que pour l'expédition par bateau de vins de Bayonne à Harfleur, Rouen et Paris, par Thomas l'Anglais, avec détails sur le débarquement à Paris. Il y est ensuite question d'achat de baleine à Bayonne et de cire à La Rochelle, puis de frais de voyage des envoyés (nuntii) de Jean d'Aix, enfin du change des monnaies, car les diverspaiements en monnaie locale sont toujours ramenés en livres tournois. On y voit les dépenses pour les mulets et les chevaux. Puis ce sont les prêts faits aux barons, notamment au connétable de France et au sire de Montmorency, et les dépenses pour la garnison de Bayonne. On y trouve mentionnées aussi quelques recettes de froment, d'avoine et de vin. Enfin, pour terminer, les dépenses du roi et de la cour à Dax.

Ph. LAUER.

Expensa per Johannem de Soisiaco et J. de Hospitali. Pro xixx. sextariis frumenti ad mensuram Moysiaci, facientibus ad mensuram Parisius circa 1111e. XL. sextarios, emptis a diversis personis apud Moysiacum et circa primo mercato, ciXX. XIII. lb. tur. Item pro iiic. LVI. sextarios avene ad mensuram Moysiaci, facientibus ad mensuram Parisius circa vnc. x. sextarios, emptis per eosdem apud Moysiacum et circa a diversis personis, vnxx. mi. lb. vi. s. Pro dicto grano defferendo per terram et aquam a Moysiaco et locis vicinis usque Burdegalam, lxxvii. lb. xi. s. x. d. Pro navibus atilliandis apud Moysiacum, pro dicto grano defferendo, ix. lb. xvi. s. h. d. Pro dicto grano exhonerando partim Burdegalam et partim Bayonnam, et locagio orreorum x. lb. xvi. s. IIII. d. Pro locagio cujusdam magne navis que partem dicti grani detulit a Burdegala usque Bayonam, iinx*. lb. Pro saccis emptis per Arnaldum Sancii de Sanguineto pro predicto grano, morl. vu. lb. vi. s. Valent ad tur. x. lb. un. sol. x. d.

J[. Item per Remundum dictum Bonum Hospitem et Fastredum de Meriaco, pro me. imxx. conquis frumenti empti apud Montem Marciani, morlen. x. s. ix. d. pro qualibet conqua reddita molta a Monte Marciani usque portum de Aquis, morlen. lIe. un. lb. v. s.


Valent ad turon. iiic. xxxi. lb. xvm. s. i. d. Pro dicta farina extrahenda de navi et in celaria reponenda apud Aquis, morlen. LIII. sol. m. d. Valent ad tur. un. lb. v. s. IIII. d. Pro locagio orreorum pro dicta farina reponenda ibidem, morlen. vi. lb. n. s. Valent ad tur. ix. lb. XVIII. s. m. d.

5[ ITEM, per Johannem de Columpna civem Aquensem, pro nnc. nnxx. IIII. conquis frumenti empti apud Aquis morlen. nu. s. pro qualibet, morl. IIIIXX. xvm. lb. x. s. i. d. Valent ad tur. vnxx. xix lb. xin s. x. d. Item pro xxx. conquis avene empte a Vitali Barate cive Aquensi ohapot. x. lb. Valent ad tur. vin. lb. Item pro LX. conquis avene empte per dictum Johannem de Columpna a Bernardo de Burdegala, morl. ix. lib. Valent ad turon. xiiii. lb. xii s. vi d. Pro claustro ecclesie Aquensis obstruendo, quadam gouteria reparanda et quadam porta de novo restituenda, morl. xviiii. s. i. d. Valent ad tur. xxxix. s. i. d. Et pro quindecim quintalibus feni empti per Petrum hostiarium morl. xvin. s. x. d. Valent ad turon. xxx s. vi. d.

5f Summa pro grano M. III. lb. xix. s. IIII. d.

ALIA EXPENSA per Johannem de Hospitali. Pro viiiixx. XII. doliis vini et decem pipis emptis apud Moysiacum a diversis personis et ad diversa pretia, m0, LVIII. lb. VIII. s. xi. d. tur. Pro predictis vinis rabatandis apud Moysiacum, circulis, donnis et aliis minutis factis ibidem, XLII. lb. xm. s. xi. d. Pro fretu dictorum vinorum per aquam a Moysiaco usque Burdegalam chapot. Lx. v. lb. v. s. Valent ad tur. Lu. lb. un. s. Et pro restauro partis dampni facti Arnaldo Marre de Moysiaco in arrestatione vinorum predictorum facta per gentes regis Anglie, apud Marmandam et Sanctum Maquerium, per ix. di. arnaldinorum XL. s. Valent ad turon. XXXII. s. 1. Item pro eisdem exhonerandis, rabatandis et recoverandis Burdegala guindagio et arrumagio et aliis minutis factis per Gerardum Balene apud Burdegalam, xxxiiii. lb. vi. s. Item pro costuma de xxvni. doliis vini domini regis soluta gentibus regis Anglie, et apud Royans prope Blaviam videlicet Petro Senebre clerico et Gombaudo, pedagiariis dicti loci, per Petrum de Furno Moysiacensem, custodem dictorum vinorum, pro quolibet dolio n. dob. tur. v. s. x. d. tur.2.

5f ITEM per Remundum Bonum Hospitem et Festredum de Me1. En marge « In debitis dampna sunt regis Anglie estimata xl. cum istis XXXII. s.

2. En marge In debitis et dampna que habita fuerunt propter hoc. »


riaco, pro c. x. doliis vini et n. pipis emptis Burdegalae per eosdem redditis in navi, vc. Ib. XLV. s. tur., pro quolibet dolio un. lb. x. s. vi. d. Item pro c. pipis vini empti apud Meditinium in Vasconia redditis in portu de Aquis, morl. vnixx xmi lb. XIII s. Valent ad turon. n0. LXXVIII. lb. ix. s. vin. d. pro qualibet XXXIIII. s. x. d. morl. Item pro inior. pipis vini emptis per eosdem Aquis, morl. vi. lb. Valent ad tur. ix lb. xv. s. tur. Item pro predictis vinis extrahendis de navi in portu Aquis, vectura eorumdem a portu usque celaria et eisdem supra canteria assetiandis, morl. vi lb. xini s. vin. d. Valent ad tur. x. lb. xv. s. v. d.

5| ITEM per Guillelmum de Lauro civem Bayonensem, pro c. n. doliis vini emptis per eumdem Bayone, morl. imc. vin lb. Valent ad tur. vic. LXIII. lb. Pro Li. pipis vini emptis per eumdem apud Bayonam, morl. c. mi. lb. Valent ad tur. vmxx. ix. lb. Pro dictis pipis honerandis in navim [et fretu earumdem a Bayona usque Aquas, morl. Lvm. s. vi. d. Valent ad tur. mi. lb. xv. s. Pro predictis en. doliis vini onerandis in navim]1 in portu Bayone statis et aliis minutis, morl. ix lib. vi. d. Valent ad tur. xiiii. lb. XIII. s. III. d. Item pro xvn doliis vini emptis per Arnaldum Sancii de Sanguineto chapot. mxx. mi. Ib. Valent ad tur. lxvii Ib. mi s. Item pro fretu predictorum c. x. doliis a Burdegala usque Bayonam per Guillelmum de Lauro morl. imxx. vi. lb. vi. s. Valent ad tur. vnxx. lb. mi. s. ix. d. Item pro fretu de vixx. vu. doliis vinorum predictorum a Bayona usque Aquis, soluto per Johannem de Columpna, morl. vu. lb. ix. s. vi. d. Valent ad turon. XII. lb. n. s. xi. d. Item pro vectura en. doliorum de vinis predictis a portu Aquis usque domum Fratrum Minorum, per eumdem, i. morl. nu. lb. v. s. Valent ad tur. vi lb. xvm. s. i. d. canteriis morl. ix s. VIII. d. Valent ad tur. xv. s. vin. d. Pro L de pipis vini predictis et honerandis Aquis et vectura eorumdem a portu Aquis usque celaria, morl. XLVIII s. un d. Valent ad tur. LXXVIII S. vi. d.

5f Item per Thomam Anglicum de Harifluvio. Pro fretu vnxx. vu. doliorum de vinis predictis in navi Narremon de Laredo civis Bayonensis a Bayona usque Harifluvium n°. ix. lb. x. s. tur. Item per eumdem loniannis maris et Secane .xxxn. s. Pro eisdem exhonerandis apud Harifluvium et recoverandis in aliam navim, eisdem assetiandis et guindagio vm. lb. n. s. vi. d. Pro fretu eorumdem a Harifluvio usque Rothomagum. xxix. lb. vu. s. Pro 1. Les mots entre crochets ont été ajoutés en interligne.


eisdem exhonerandis apud Rothomagum et recoverandis in alia veissello im. lb. xv. s. arrumagio ibidem xxxv. s. Pro eisdem ibidem beligandis xv. lb. v. s. caagio xxv. s. Pro fretu eorum a Rothomago usque Parisium XL. lb.

5f ITEM per dictum Thomam. Pro fretu de ixxx. IIII. doliis et x. pipis de vinis predictis a Burdegada usque Harifluvium in navi que dicitur « Legiere de Loire » viiixx. XVII. [lb.] xvi. s., lonianno Secane xx. s., guindagio et arrumagio vi. lb. xvm s. Pro eisdem deferendis a Harifluvio usque Rothomagum xxiii. lb. xvn. s. Pro eisdem religandis apud Rothomagum et caagio, xxm. lb. Pro eisdem exhonerandis et reonerandis ibidem vi lb. arrumagio ibidem XLVI s. Pro fretu eorumdem a Rothomago Parisius Lvi. lb. v. s. Pro expensis dicti Thome veniendo pluries a Harifluvio usque Rothomagum pro vinis predictis et pro denariis querendis apud Caletum et pro expensis custodum vinorum predictorum factis circa predicta mc. xxxi. doliis vini et pro salario aliquorum ipsum jurantium ad predicta xm. lb. v. s.

5f ITEM per Johannem Poing Lasne civem Parisiensem. Pro vnxx. doliis de vinis predictis extrahendis de navibus in portu Parisiensi eisdem carrecandis canteriis et eisdem in celaria assetiandis Parisius paris. vi. lb. vu. s. x. d. Valent ad tur. vu. lb. xix s. Pro triginta doliis de vinis predictis carrecandis a Parisius usque ad boscum Vicennarum pro .inior. de predictis doliis carrecandis in celarium Sancti Jacobi Lx. s. v. d. tur. Pro eisdem analandis in celarium xxv. s. x. d. tur. Canteriis apud boscum x. s. n. d. Pro aliquibus de predictis doliis religandis et reparandis per Nicholaum Bidaut .xv. s. Item pro ixxx. n. doliis vini de predictis vinis extrahendis de navi in portu Parisiensi, vectura eorumdem usque celaria xxx. molis canthorum et eisdem ibidem assetiandis et pro aliquibus eorumdem religandis et reparandis per Johannem de Aquis xxm. lb. x. s. vu. d. Item pro salario custodum vinorum dictorum in villa Parisiensi et locagio celariorum ibidem L. lb. tur.

Summa pro vino inm. mi", lb. xxvm. s. tur.

BALENA. Pro quatuor quintalibus balene emptis per Guillelmum de Lauro civem Bayonensem morl. vi. lb. un. s. Valent ad tur. x. lb. xvm. d. Pro sarpilleriis et cordis morl. m. s. vi. d. Valent ad tur. v. s. vu. d.

5f Summa x. lb. vin. s. i. d.

CERA. Pro quinque quintalibus cere empte per Guillelmum


de Lauro morl. xxv. lb. Valent ad tur. un. s. x. d. Item pro decem balis cere emptis per sigilliferum de Ruppelle ixxx. xvn. lb. v. s., vectura ejusdem a Ruppella usque Aquis. XL. s. III. d. per Gerardum Balene et Johannem de Columpna.

Summa nc. XL. lb. n. s. vi. d.

NUNTII MISSI. Pluribus et diversis nunciis missis ad diversa loca per Johannem de Aquis seu ejus mandatum pro garnisione predictis xvi. [lb.] vin s. vi. d. tur. Jf Partes a tergo. 5f Item pro litteris contractus domini de Blavia et scriptura litterarum de conductu, vi. lb. per Johannem de Aquis 1.

5f Summa xxii. lb. vin. s. vi. d.

DEFECTUS ET CAMBIUM MONETE. Per Johannem de Soisiaco LIIII. s. VIII. d. tur. Pro vectura de ixc. L. lb. a Burdegala usque Bayonam per Guillelmum de Lauro, morl. xxxv. s. Valent ad tur. lvi s. x. d. pro vectura de M. vc. lb. a Caturco usque Burdegalam per Gerardum Balene, un. lb. un. s. et pro vectura de vnc lb. a Caturco usque Burdegalam per dictum Gerardum, XLV. s. tur. Item pro defectu de ixc lb. habitis a receptoribus Caturci per dictictum Gerardum, xx. s. tur. pro vectura de vc. lb. tur. de Burdegala usque Moysiacum per Johannem de Soisiaco et Johannem de Hospitali, xxvm. s. Et pro cambio de inc. imxx. xvi. lb. de predictis vc. lb. habitis a receptoribus Caturci per Gerardum Balene in grossis ad viginti denarios pro libra perditis in qualibet libra, un d., vi. lb. vi s. VIII. d. per denarium defferendis a Turonis usque Ruppellam, per castellanum Turonensem, LXVI s. Summa xxnn. lb. xim d.

RESTAURUM EQUORUM. Pro duobus muletis emptis mortuis .xxi. lb. tur. Pro quodam equo mortuo .xx. lb. tur. Pro quodam roncinno liardo empto Moysiaci .c. s. tur. Pro expensis trium equorum remanentium in camino per Johannem de Soisiaco et Fastredum .c. xnn. s. Item per castellanum Turonensem pro expensis cujusdem equi Petri Hostiarii remanentis Turonis .Lx. s: Item pro restauro cujusdam equi dicti Petri mortui xn. lb. x. s. 5f Summa lxvii. lb. un. s.

PRESTITA FACTA. Nuncio comitis Augi apud Aquis morl. c. s. Valent ad tur. vin. lb. n s. vi. d. Redduntur in rotulo baronum supra ipsum. Item eidem comiti de Veteri. L. lb. [supra ip1. En marge « In debitis habuerit rex intentum de concensu c. s. de illis vi. lb. »


sum in rotulo baronum] 1. Constabulario Francie per litteras vixx. xii. lb. xhi. s. mi. d. [perlitteras]. Domino de Blavia xnXÏ lb. tur. numerantes [per litteras] Petro de Paniz servienti armorum vi. lb. episcopo Silvanectensi [Petro] vixx. xvi. lb. x. s. i. d. Domino Guillelmo de Masticonio militi x. lb. Guillelmo de Esponis pro Herberto Bruni chap. ix. lb. Valent ad tur. vu. lb. nu. s. Magistro Johanni de Sancto Justo per Alexandrum auxiliatorem .iiiic. x. lb. Eidem pro palefredo domini de Blavia L. lb. tur. Gubernatori et juratis Burdigala iiic. xxxvn. lb. x. s. Domino de Montemorenciaco lxxv. lb. Domino Helie Ridelli domino de Pontibus vie. lb. restituendas ad Omnium Sanctorum .xc°. CL. lb. et sic quolibet festo Omnium Sanctorum debet etc., capiendum super redditum suum apud Ruppellam.

5f Summa (xiinc. LXII. lb. xix. s. XI. d.) nm. LXII. lb. xix. s. xi. d.

5f Item pro expensis Johannis de Aquis, Petri Hostiarii, Johannis de Soisiaco, Remundi Boni Hospitis et Fastredi procurando predictam garnisionem fieri a festo Purificationis anno .ix°. usque Penthecosten sequentem viiixx. lb. c. xix. s. tur. Partes a tergo, summa per se.

Expensa pro veteri garnisione de anno .iiiixx. ix°. restante per compotum P. Hostiarii. Pro locagiis domorum et horreorum in quibus reposita fuerunt avena et fenum, residua de garnisione predicta, apud Aquis et aliis minutis, xxvii. lb. xix. [s.] xi. d. morl. Valent ad tur. XLV. lb. ix. s. xi. d. Partes a tergo. Solutum per Johannem de Columpna, civem Aquensem, et pro eodem apud Bayonam per P. Hostiarum, morl. vi lb. v. s. Valent ad tur. x. lb. III. s. i. d. Item pro mi0, conquis avene veteris garnisionis defferendis ab Aquis usque Bayonam morl. xxxiii. s. mi. d. Valent ad tur. LIIII. s. i. d. Pro dicta avena mensuranda et exhoneranda Bayonam et eadem ibidem remensuranda, morl. xxi s. ni. d. Valent ad tur. XXXIIII. s. vi. d. Scriptura et pergameno, lx. s. Cerrateriis vinorum venditorum Parisius, x. lb.

[Partes a tergo :] Partes nuntiorum missorum, Bernardo Valleto, Remundi Boni Hospitis, ab Aquis usque Burdegalam pro 1. Les mots entre crochets sont ajoutés en interligne. On lit en marge « In litteris domini de Blavia confitetur ipse se debere Johanni de Aquis xn^x lb. et sunt sigillate sigillo regis », et plus loin « In debitis super Xanctonis super ipsum. »

2. Total exponctué.


blado mutando, xx. s. tur. Johanni Falconnerio ab Aquis usque Harifluvium pro vinis lxxv. s. per Remundum Bonum Hospitem, eidem Johanni pro visitandis farinis et vinis apud Aquis et circa, per Johannem de Columpna, morl. XL. s. Valent LX. v. s. tur. eidem Johanni alias pro vinis a Parisius usque Harifluvium x. s. Cuidam alio nuncio pro eodem et ibidem x. s. Cuidam alio nuncio a Parisius mandato Aurelianis pro inior. doliis vini pro rege x. s. Cuidam nuncio Geraldi Balene a Parisius usque Burdigalam XII. s. vi. d. per J. Poinge Lasne. Quatuor nunciis per Fastredum xxxvi. s. Item per J. de Aquis, tribus nunciis a Parisius usque Burdigalam, mi. lb. x. s.

5f Summa xvi lb. vin. s. vi. tur.

Partes de xxvn. lb. xix. s. xi. d. morl., ut patetin albo per J. de Columpna de Aquis. Petro Arnaldi Sausenier pro vil. XL. conquis avene a festo Penthecostes anno .ix°. usque Pascha sequens, lui. s. vin. d. morl. Vitali de Beluque «pour)) M. iii°. IIIIxx. ii. conquis termino predicto lui. s. viii. d. Hospitali Sancti Jacobi pro xnxx. xv. conquis termino predicto xxi s. Heredibus defuncti Arnaldi Seguini, pro nc. iiiixx. x. conquis, eodem termino, xxim. s. n. d. Item hospitali predicto pro eodem et eodem termino, xxv. s. Menaldo de Sombron pro eodem x. s. Item eidem pro alia domo pro eodem vu. s. Vitali Ad Dentes pro eodem xii. s. Domine Petrone de Petardo pro eodem xvi. s. Item eidem pro alia domo pro eodem x. s. Vitali de Soisy pro eodem vin s. Item eidem pro alia domo pro eodem vu s. Remundo Arnaldi Daribiere pro eodem xvi. s. Remundo Dombertin pro eodem xim. s. Pro quodam campo in quo repositum fuit fenum, un. s. Pro dicta avena pluries ventilanda et volvenda XL. s. Pro parte dicte avene carrecanda ab ortis usque portum, pro ea portanda Baionam vi. s. vi. d. Pro feno ponderando xm. s. Pro salariis custodum garnisionis predicte tempore predicto et plurium juvantium ad predictam, un. lb. vi. s. xi. d.

Nova garnisio. Item Petro Arnaldi Sausenier pro xxv. pipis vini et uno dolio umi repositis in celario suo xxvi. s. Vitali de Pino pro L. pipis vini L. s. Dominico de Pino pro xxvm pipis vini xxviii. s. Petro de Fossa pro xxvm. pipis vini xxvm s. Summa xxvn lb. xix s. xi. d. morl.

Partes expense Johannis de Aquis.

5f Pro expensis dicti Johannis et ejus societatis factis per Fastredum, Johannem Falconerii et J. de Hospitali, IIIIxx. vu. lb.


viii s. il d. Pro expensis Remundi dicti Boni Hospitis et Fastredi per lix. dies xxx lb. Pro expensis Petri Hostiarii xi. lb. v. s. x. d. Pro expensis Johannis de Soisi xx. lb. Pro expensis Johannis de Hospitali a die sabbati ante Reminiscere anno .ix°. usque octabam Penthecostes anno nonagesimo partim cum Johanne de Soisiaco et Remundo dicto Bono Hospite xmi. lb. Pro expensis Petri Juliani de Moysiaco Lx. VI. s.

Summa vmixx. lb. c xix. s.

[Expliciunt partes a tergo.]

Summa LXXIII. lb. xix d.

î[ Summa totalis expense (vim. c. LII. lb. xi. s. i. d.) x vim. vnc. LII. lb. xi. s. i. d.

Restat quod debet Johannes de Aquis vc. iiiixx. vi. lb. xim. s. ii. d. tur. -In debitis Parisius super ipsum debentur ei xiii. lb. v. s. x. d. tur.

EXPENSA GARNISIONIS. RECEPTA FRUMENTI. A Johanne de Soisiaco et Johanne de Ho ut patet summa imc. XL. sextarios ad mensuram Parisiensem, et a Remundo Bono Hospite iiiic. iiiixx. conquas ad mensuram Montis Martiani a Johanne de Columba cive Aquensi IIIIe. IIIIXX. IIII. conquas ad mensuram de Aquis. EXPENSE. Domino regi per J. Cordumbennarium compoto facto Aquis LIX. pipas plenas farina continentes nm. vi. conquas et dimidiam ad mensuram Montis Marciani. Item eidem ex alia .iiii°. Linior. conquas farine ad mensuram de Aquis. Item traditas baronibus, ut patet in rotulo baronum, c. xix. conquas et dimidiam. Item venditas Poncio de Monte Rodato, bajulo Sancti Johannis de Pede Portus, ixc. xvi. conquas per litteras pretio IIIIXX. xi. Ib. xiiii. s. IIII. d. morl. ad Sanctum Martinum anno nonagesimo. Item venditas Garsie et Xanctio de Belsunce militibus fratribus vnxx. x. conquas ad mensuram Bayonensem, precio xv. lb. morl. perlitteras ad Omnes Sanctos nonagesimo 2. Item venditas Gerardo Balene de Burdigala imxx. escartas ad mensuram Burdigalensem precio XLIII. lb. xix. s. n. d. Redduntur in recepta. Item venditas Johanni de Columpna civi Aquensi xxxvi. conquas precio x. lb. im. s. ix. d. Redduntur de recepta. 5[ RECEPTA AVE NE. A Johanne de Soysiaco et Johanne de Hospitali vnc. x. sextarios ad mensuram Parisiensem. Item a Jo1. Total exponctué.

2. 1er novembre 1290.


hanne de Columba, ad mensuram de Aquis, iiiixx. x. conquas. Item de veteri garnisione inm. ix. conquas.

EXPENSE. Domino regi per Guerinum de Scutiferia nm. xx vin. conquas. Item baronibus ut patet in rotulo baronum nm. mi", LVIII. conquas et dimidiam. Item venditas Stephano Le Français de Burdigala in vico Sancti Jacobi .nc. escartas avene ad mensuram Burdegalensem precio vnxx. xvi. lb. chapot. Valent ad tur. vixx. mi. lb. xvi. s. ad Candelariam anno nonagesimo per litteras. Item venditas Guillelmo de Pino, Vitali de Pino et Johanni de Mirobeu, civibus Aquensibus, xvi. conquas avene ad mensuram de Aquis pretio XL. VII. s. vi. d. morl. Valent ad tur. LXXVII. s. ii. d. per litteras ad Omnes Sanctos nonagesimo. Item venditas Guillelmo de Pino, Johanni de Mirabeu et Vitali de Pino .viiixx. vi. conquas avene ad mensuram Aquensem precio xxv. lb. morl. Valent ad tur. XL. lb. xn. s. vi. d. per litteras ad Omnes Sanctos nonagesimo. Item venditas Garsie et Xanctio de Belsunce militi fratribus .ixxx. h. conquas avene ad mensuram Bayonensem pretio xiii. lb. morl. per litteras ad Omnes Sanctos anno nonagesimo. Item venditas comiti Petragoricensi .xli. conquas precio vi. lb. xi s. ii. d. redduntur in receptum. Item venditas Constabulario Francie lxxvi. conquas precio xvm lb. xvi. s. Redduntur in receptum. Item vendite duci Burgundie ixxx. conque precio XLI. lb. vin. s. IIII. d. Redduntur in recepta 1. Item vendite senescallo Tholose magistro J. de Wassourne, domino Mauricio de Craon xvn. conque precio 1111. lb. xvmi. s. xi. d. Redduntur in recepta 2. RECEPTA VINI. A Johanne de Hospitali vin», xn. dolia x. pipas vini. A Remundo Bono Hospite c. x dolia et c. vi. pipas. Item a Guillelmo de Lauro c. xix. dolia et LI. pipas. Summa recepte mi° nnxx un. dolia et i. pipam. Cadunt pro vinis traditis gentibus regis Anglie, pro faciendis presenciis domino regi, xx. dolia que scancionarii noluerunt computare Johanni de Aquis, set ea deduxerunt de compoto dicti Johannis. Sic restant in summa recepte vini iiiic. lxiiii. dolia et i. pipa.

Expense. Domino regi apud Aquis, pro hospitio suo per Robertum Bouterum, mixx. v. dolia pretio vc. xlii. lb. xim. s. x. d. parisiensium. Valent ad tur. vic. Lxxvm. lb. vm. s. vi. d. Reddit magister Johannes de Sancto Justo. Item domino regi Parisius et 1. En interligne « in duabus partibus. »

2. En interligne « in tribus partibus. »


circa pro hospicio suo per Gerardum barillerium, c. xi. dolia et unam pipam. Item domine regine per dictum Gerardum, xm. dolia unam pipam. Item per eumdem Gerardum, filio domini regis in. dolia. Item baronibus, ut patet in rotulo eorumdem, nnxx. xi. dolia 1 unam pipam. Item datum de mandato domini regis, per Ansellum de Casteneto et Johannem de Aquis, xxx. dolia. Partes a tergo. Item vendita Dominico de Pino et Petro Donard, civibus Aquensibus, vin. dolia precio xxxvi. lb. morl. Valent ad tur. LVIII. lb. x. s. per litteras ad Omnes Sanctos anno nonagesimo. Item vendita Petro Arnaldi Fanfanar, Bartholomeo de Campo et Dominico de Pino civibus Aquensibus, xn. dolia precio .lx. lb. morl. Valent ad tur. IIIIxx. xvii. lb. x. s. per litteras ad Omnes Sanctos nonagesimo. Item vendita domino Radulfo de Tournella 2, domino de Lineriis, militi, xx dolia precio iic. lb. tur. per litteras ad Ascensionem Domini nonagesimo .i0., c. lb. et ad Omnes Sanctos sequentes c. lb. Item vendita Johanni Fourre et Philippo Forre fratribus civibus Parisiensibus xx. dolia precio vnxx. x lb. parisiensium, valent ad tur. ixxx. vu. lb. x. s., perlitteras ad Pascham anno nonagesimo i°. Item vendita Petro Creponmari de Coleteriis civi Parisiensi et Ameline ejus uxori, un. dolia precio xxii. lb. paris., valent xx. VII. lb. x. s. tur., per litteras ad Omnes Sanctos nonagesimo. Item datum pluribus personis, militibus et aliis, per Robertum Bouterium per taillias i. dolium. Item Johanni Lalemant et Johanni dicto presbytero ix. pipe precio xxix. lb. XII. s. [super] recepta 3.

[Partes a tergo :] Partes xxxa. doliorum vini datarum per J. de Aquis, de mandato domini regis. Domino P. de Chambli vi. dolia. P. ejus filio, un. dolia. Domino P. de Machau, vu. dolia. Hugoni de Bouvilla, 1111. dolia. Decano Sancti Germani Antissiodorensi, i. dolium. Domino Gregorio de capella domini regis, i. dolium. Domino Guillelmo de Cresneto, n. dolia. Ansello de Casteneto, i. dolium. Roberto de Meudon, vi. dolia. Venatoribus, III. dolia. 5f Summa xxxa. dolia.

[Expliciunt partes a tergo.]

1. En interligne « c. dolia ».

2. En marge « Viromandensi. »

3. En interligne « in duabus partibus. La fin est abîmée par des déchirures.


UN SÉNÉCHAL DU XIIIe SIÈCLE GUILLAUME DE COMBREUX

Dans l'introduction au tome XXIV du Recueil des Historiens de France où Léopold Delisle a dressé un catalogue critique des plus anciens baillis et sénéchaux en esquissant leur biographie, une place très modeste est réservée à un personnage qui, sous le nom de Guillaume de Combruys, est signalé comme baile d'Agen 2 en 1294 et, sous celui de Guillaume de Combrouse, figure dans la liste des sénéchaux du Rouergue à l'extrême fin du xme siècle.

Sans aucun doute, il s'agit d'un seul et même personnage son nom a été défiguré par la prononciation locale, et il convient de lui restituer son véritable nom, qui doit être incontestablement Guillaume de Combreux. La localité dont il était seigneur 3 était voisine de Tournan-en-Brie, ainsi qu'il est facile de le prouver. Le plus ancien membre de cette famille que je puisse citer est Gervais de Combreux, qui apparaît comme témoin dans plusieurs documents non datés 4 et dans deux autres des années 1191 et 1192, avec d'autres seigneurs voisins (Aubert d'Andrezel 5, Simon de Courpalay 8, Raoul de Verneuil7, Raoul de Bussy8, Hubert de Presles 9, Simon de Marie10, André et Gaucher de Vignolles11) ces deux 1. P. *220 et *225.

2. Son sceau est aux arch. des Basses-Pyrénées (P. Raymond, Sceaux, 745). 3. Cant, de Tournan, arr. de Melun (Seine-et-Marne).

4. Arch. nat., S 1175", folios 33 vo, 34 et 34 vo.

5. Cant. de Mormant, arr. de Melun.

6. Cant. de Rozoy, arr. de Coulommiers (Seine-et-Marne).

7. Cant. de Mormant, arr. de Melun.

8. Cant. de Lagny, arr. de Meaux (Seine-et-Marne).

9. Cant. de Tournan, arr. de Melun.

10. Marie, cant. de Rozoy, arr. de Coulommiers.

11. Comm. de Gretz, cant. de Tournan, arr. de Melun.


chartes, publiées plus loin1, émanent d'Anseau II de Garlande, seigneur de Tournan, dont les parents ont occupé un rang influent dans la hiérarchie féodale 2 et une situation importante à la cour de Louis VI. C'est l'une de ces chartes qu'a signalée jadis l'abbé Lebeuf 3 après avoir cité une donation faite à l'église Saint-Denis de Tournan par les prédécesseurs de Gervais de « Combeus ». On retrouve encore Gervais de Combreux parmi les témoins de la charte par laquelle, en 1193, Anseau de Garlande octroie une commune aux habitants de Tournan 4 il y apparaît en compagnie de quelques petits seigneurs féodaux du voisinage déjà cités, auxquels on peut ajouter Jacquier de Fontenay 5, Ferry d'Égrefm6, Pierre de Retal', Liétry de Liverdy 8, Simon de Chaumes9, Ménard de Villemigeon 10.

Au milieu du xine siècle apparaissent Pierre et Guillaume de Combreux le premier, qualifié de chevalier, est cité avec Simon de Beaubourg11 comme caution d'un certain Jean de Champs 12, également chevalier, condamné pour avoir violé l'immunité du cloître de Notre-Dame de Paris (1242) il est encore mentionné avec Anseau de Garlande 13 dans une charte du 12 novembre 1268, qui nous a été conservée comme la précédente par le cartulaire de Notre-Dame1*. Le second, qualifié d'écuyer et peut-être fils de Pierre, apparaît en novembre 1257 comme témoin dans une charte du même An1. Arch. dép. de Seine-et-Oise, A 1089, et Arch. nat., S 1175, na 40. Pièces justificatives, noa 1 et II.

2. M. Joseph Despont a consacré une étude à cette famille {École nationale des chartes. Positions des thèses soutenues par les élèves de la promotion de 1924, p. 67).

3. Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paris, nouv. édit., t. V, p. 323. La sœur d'Anseau, Agnès, avait épousé Aubert d'Andrezel.

4. Layettes du Trésor des chartes, t. I, p. 173 (n° 410).

5. Fontenay-Trésigny, cant. de Rozoy, arr. de Goulommiers.

6. Comm. de Fontenay-Trésigny.

7. Comm. de Liverdy.

8. Cant. de Tournan.

9. Cant. de Tournan.

10. Comm. de Favières, cant. de Tournan.

11. Croissy-Beaubourg, cant. de Lagny, arr. de Meaux.

12. Champs-sur-Marne, cant. de Lagny.

13. Guérard, Cartulaire de Notre-Dame de Paris, t. II, p. 466. Il y est appelé « Petrus de Combereis ».

14. Ibid., t. I, p. 170.


seau de Garlande en faveur de l'abbaye de Saint-Maur-desFossés l.

Est-ce le même Guillaume de Combreux que nous retrouvons fonctionnaire royal à Agen et à Cahors? Les dates y contredisent, si l'on sait qu'en 1257 il avait déjà une fille mariée à Jean d'Origny2, chevalier 3. Mais il est permis de croire qu'il s'agit de son descendant et de supposer que le père a pu obtenir par la haute protection des Garlande, pour son fils, la fonction officielle à laquelle l'appela Philippe le Bel.

Nous aurons peu de chose à ajouter à la succincte biographie que nous devons à Léopold Delisle. Quelques détails cependant méritent d'être signalés à l'aide de documents nouveaux.

Guillaume de Combreux ne demeura sénéchal en Rouergue que peu de temps, trois ou quatre ans à peine, car on le voit cité avec ce titre pour la première fois en 1296 dans un document de l'année 1300, il est qualifié d'ancien sénéchal4, et déjà en 1299 il est mentionné comme chevalier au service du comte d'Artois 5, ce qui laisse supposer que dès cette époque il avait quitté le service du roi 6. On ne s'étonnera pas de voir notre personnage dans l'entourage du comte d'Artois il y fut sans doute attiré par son voisin et ami Aubert d'Andrezel, qui reçut une pension viagère de la comtesse Mahaut d'Artois pour services rendus à son père 7.

Le rôle le plus important qu'il ait été appelé à jouer se rapporte à la guerre entreprise par Philippe le Bel en Guyenne et Gascogne contre les Anglais en 1294-1295, alors qu'il n'était encore que baile d'Agen, et c'est peut-être après cette campagne qu'il obtint un poste de confiance à Rodez. En tout cas, les services qu'il rendit, notamment à Saint-Macaire 1. Pièce justificative III.

2. Comm. de Tournan.

3. Pièce justificative III.

4. Bibl. nat., coll. Languedoc, vol. 196, 57.

5. Demay, Sceaux d'Artois, 260 (quittance de ses gages, 8 décembre 1299). Le sceau porte un écu à la croix ancrée.

6. Il est encore en Rouergue le 26 mai 1299, présentant ce jour-lâ des lettres du roi ordonnant de révoquer les privilèges antérieurement concédés à une bastide construite au préjudice de la ville de Najac (Bibl. nat., coll. Doat, vol. 146, fol. 62).

7. Arch. dép. du Pas-de-Calais, A 50.


(Gironde), lui valurent une rente annuelle de 300 livres sur le trésor royal x et, par ailleurs, le compte de Robert Mignon2 fait allusion à une dette assez importante que, deux ans plus tard, le trésorier royal n'avait pas encore réglée et qui se réfère à la même campagne de Gascogne. Qu'advint-il de Guillaume de Combreux après cette période ? Nous l'ignorons. Il avait épousé la veuve de Gilles Le Hongre, chevalier, et la perdit avant le mois, d'octobre 1300, car nous le voyons à cette date confirmer les dispositions testamentaires qu'elle avait prises en faveur de l'abbaye de Malnoue 4, de l'église de Beaubourg et de l'église de Montfermeil 5.

Il lui survécut assez longtemps, mais était décédé en 1323, date à laquelle il est question de son héritage et de sa fille Guillemette, qui par son mariage était entrée dans la famille des seigneurs d'Andrezel, déjà citée6. Si l'on en croit Michelin7, son obit était mentionné dans le nécrologe de l'église de Coubert en Brie 8.

Tel est l'homme dont le nom a été si étrangement défiguré qu'on pouvait jusqu'ici le considérer comme languedocien, gascon ou rouergat, et l'identifier (par exemple) avec le nom de la terre de Combrouse, située dans la commune de Colombiès (Aveyron) 9 après Léopold Delisle, C. Couderc 10 aurait volontiers admis cette origine. Tout au contraire, ce sénéchal de Philippe IV est un chevalier briard, un homme du Nord, 1. Bibl. nat., ms. fr. 20684, fol. 235 « Philippus rex Guillelmo de Combrozio militi suo, pro serviciis presertim in castro Sancti Macarii impensis, dedit 300 libras annui redditus in thesauro suo » (23 mai 1296).

2. Édit. Ch.-V. Langlois, p. 304, no 2376 « Domini Guillelmi de Combrosio compotus, senescalli Ruthenensis, de guerraVasconie, M CG° IIIIxx XVI°, redditus per dominum J. de Domno Martino. Debentur dicto senescallo et aliis vnc xli lib. xix s. vu d. Compotus de expensis. Debentur ira0 xi lib. » 3. Arch. dép. de Seine-et-Oise, série D, fonds de Malnoue, carton 15. Pièce justificative n° IV.

4. Malnoue, primitivement le Bois-aux-Dames, comm. d'Émerainville, cant. de Lagny (Seine-et-Marne).

5. Cant. de Gonesse (Seine-et-Oise).

6. Viard, Journaux du trésor de Charles IV, col. 497, 667, 998, 1417. 7. Essais historiques et statistiques sur le département de Seine-et-Marne (1841), p. 526.

8. Cant. de Brie-Comte-Robert, arr. de Melun.

9. Cf. Rigal et Verlaguet, Notes pour serçir à l'histoire du Rouergue, I (1913), p. 93.

10. Bibliographie historique du Rouergue, 1 (1932), p. 266 et 631.


tout comme Eustache de Beaumarchais1, le célèbre bailli des montagnes d'Auvergne, qui, lui aussi, a longtemps passé pour un méridional. Et, tout bien considéré, j'incline à penser que beaucoup de représentants de l'autorité royale, dans les provinces du Midi, sous saint Louis et ses successeurs, ont été choisis dans la petite noblesse rurale de l'Ile-deFrance et du domaine royal je m'efforcerai de le démontrer ultérieurement.

Henri STEIN.

PIÈCES JUSTIFICATIVES

1

1191. Anseau de Garlande concède à la maison du Temple qu'il a fondée à Tournan divers droits. Parmi les témoins de l'acte Gervais de Combreux.

(Orig. jadis scellé. Arch. dép. de Seine-et-Oise, A 1089.)

Noverint universi tam presentes quam futuri quod ego Ansellus de Garlanda domui et fratribus Templi quandam plateam ad domum faciendam apud Turnomium in helemosinam donavi. Sita est autem hec platea inter pontem Turnomii et domum Hilduini Fabri, ita quod quatuordecim tesias tam in anteriori parte quam in posteriori in latitudinem habet, in longitudinem vero quinquaginta habet. Cum vero in predicta platea domus constructa fuerit, in eadem domo sive tota platea nec vicariam nec ullam justiciam retinui, sed eam omnibus illis qui in ea stabunt vel eam possidebunt, nisi servi mei proprie de corporibus suis fuerint, ab omni penitus consuetudine liberam et quietam dimisi, et omnia asiamenta mea sine calumpnia et contradictione concessi. Noverint verum universi quod prefati fratres Templi Berruero et successoribus suis prenominatam plateam pro tribus solidis censualibus annuatim persolvendis concesserunt, eodem tenore quod et eis concessi quod siquidem constitutum est assensu et voluntate mea. Facta est autem hec carta assensu et voluntate Johannis fratris mei, et tam sigilli mei impressione quam testium presencium subscriptis nominibus confirmata. Hujus rei testes sunt hii 1. Voir Le Moyen Age, 2e série, t. XII (1908), p. 3.


Garnerius, abbas de Hermeriis Radulfus, prior Turnomii Albertus de Andesel Radulfus de Vernolio Matheus filius ejus Manaserius Fortis Symon de Maria Gervasius de Combrosis Andreas de Vineolis Bartholomeus filius ejus. Actum anno ab incarnatione LXXXX» 1°.

II

1192. Anseau de Garlande noti fie les dons faits par lui-même, par son frère Jean, ses sœurs Agnès et Éce, à l'église Saint-Denis de Tournan, où l'abbé de Saint-Maar-des-Fossés entretiendra cinq prêtres, dont l'un célébrera chaque jour une messe pour le repos de son âme, de celles de leur mère et de ses successeurs. Parmi les témoins de l'acte Gervais de Combreux.

{Orig. jadis scellé de trois sceaux. Arch. nat., S 11?5, 40. Cf. Layettes du Trésor des chartes, t. I, 402 (d'après J 165).

Quoniam sub scripture testimonio omnia ad memoriam reducent, noverint tam presentes quam posteri quod ego Ansellus de Garlanda monachis ecclesie Beati Dyonisii de Turnomio, pro anima matris sue domne Rancie, assensu Johannis fratris mei, ex parte mea, viginti solidos in pedagio Turnomii in festo sancti Remigii annuatim reddendos concessi. Johannes siquidem frater meus assensu meo in eodem pedagio et in eodem termino pro anima matris sue predicte ecclesie monachis viginti solidos annuatim reddendos dimisit. Agnes vero soror nostra, assensu et voluntate mariti sui domini Auberti de Andesel, pro anima matris sue, viginti solidos in censu suo de Connis 1 jamdicte ecclesie monachis in festo sancti Remigii annuatim reddendos destinavit. Similiter Eva soror nostra, assensu mariti sui Anselli de Insula, pro anima matris sue supradicte, dicte ecclesie monachis viginti solidos annuatim reddendos in censu suo de Camporubro 2 tenaciter proposuit, de quibus sexdecim solidi reddentur in festo sancti Remigii et quatuor in festivitate sancti Johannis Baptiste. Censuales autem denarii de Connis et de Camporubro tali modo reddentur, quod prefati monachi de Turnomio nuncium suum ad receptionem census predicti in terminis assignatis mittent, et ei pacifice et 1. N'a pu être identifié.

2. Champrose, comm. des Chapelles-Bourbon, cant. de Rozoy (Seine-etMarne).


absque dilatione et contradictione tribuentur. Hujus siquidem beneficii intuitu domnus Isembardus, abbas ecclesie Fossatensis, et totus ejusdem ecclesie conventus nobis concessit in predicta ecclesia Beati Dyonisii de Turnomio quinque monachos presbiteros imperpetuum mansuros, de quibus unus ad hoc constituetur quod pro anima matris sue et pro nobismet ipsis et successoribus nostris missam pro defunctis singulis diebus celebrabit. Quod ut ratum et stabile consistat et ne alicujus perversi malicia (quod juste factum est) injuste de cetero destituatur, sigilli mei numinime roboravi. Et quia hec elemosina de feodo meo procedit, hujus pactionis me et successores meos dominos Turnomii prefate ecclesie monachis obsides et plegios concessi et constitui. Et ut firmius teneatur, dominus Aubertus de Andesel et dominus Ansellus de Insula sigillorum suorum impressione confirmaverunt. Hujus rei testes sunt Gislebertus presbiter Radulfus de Buci Ivo de Monci Manasserius Fortis Gervasius de Combrous Hubertus de Praheriis Gaucherius de Vineolis Petrus prepositus Berruerius Herbertus claviger. Anno ab incarnatione Domini MoC°LXXXXII°.

III

Octobre 1257. Devant l'officiaUté de Paris, Anseau de Garlande déclare tenir en fief de l'abbé de Saint-Maur-des-Fossés divers héritages sis à Favières en Brie, entre autres des terres et bois que tient de lui Jean d'Origny, chevalier, gendre de Guillaume de Combreux.

(Arch. nat., LL 46, fol. 161 v°.)

Omnibus presentes litteras inspecturis, officialis curie Parisiensis salutem in Domino. Notum facimus quod coram nobis constituti nobilis vir Ansellus de Gallandia, miles, dominus Turnomii, et Haoysis uxor ejus asseruerunt et confessi fuerunt, voluntarii non coacti, quod tota hereditas quam Petrus de Faveriis, miles, tenet et habet apud Faverias, tam ex successione patris et matris quam ex caduto fratrum suorum, videlicet magistri Droconis de Faveriis, quondam canonini Parisiensis, et Johannis de Faveriis, militis, exceptis centum solidis annui redditus, primo loco movet a dicto Ansello, et eam tenet dictus Petrus ab ipso Ansello, secundo autem loco movet a religioso viro abbate Fossatensi et dictus An-


sellus a dicto abbate eam tenet. Asseruerunt etiam et confessi fuerunt quod dictus Ansellus tenebat omnes censivas quas burgenses de Turnomio aliique circumcirca tenent ab ipso Ansello, tam in nemoribus quam in pratis sitis apud Faverias a dicto abbate in feodo. Asseruerunt insuper et confessi fuerunt quod tam hereditas quam conquestus, quam et quos Simon de Coceigniaco x. miles, suique heredes in nemoribus de Faveriis tenent, primo loco movent a dicto Ansello et secundo a dicto abbate, et ea tenet dictus Ansellus a dicto abbate. Asseruerunt etiam et confessi fuerunt quod dictus Ansellus tenet a dicto abbate omne feodum quod Johannes de Origniaco, miles, tenet a dicto Ansello, et quadraginta quinque arpenta nemoris que ille, qui habet in uxorem filiam Guillelmi de Combreus, militis, tenet ad icto Ansello, primo loco movet ab ipso Ansello et secundo loco a dicto abbate, et ea tenet dictus Ansellus a domino abbate, ac illud quod Simon de Villeines tenet a dicto Ansello ad censum. Asseruerunt etiam et confessi fuerunt quod ipsi habebant et possidebant octies vinginti arpenta nemorum juxta nemora Petri de Faveriis, militis, qui primo loco movent ab ipso abbate, et ea tenet dictus Ansellus ab eodem, sicut ipsi confessi sunt coram nobis, promittentes fide prestita quod contra assertionem et confessionem predictas per se per se alium non venient in futurum. Quod autem audivimus, hoc testamur, presentibus litteris in premissorum testimonium sigillum Parisiensis curie apponentes. Datum anno Domini Mo CGC0 L° VII0, mense octobri.

IV

3 octobre 1300. –Devant l'officialité de Paris, Guillaume de Combreux, chevalier, affirme sous serment quelles donations sa femme avait faites par testament à l'abbaye du Bois-aux-Dames (Malnoue), aux églises de Beaubourg et de Montfermeil et au desservant de celle-ci.

(Orig. Arch. dép. de Seine-et-Oise, série D, fonds de Malnoue, carton 15.) Universis presentes litteras inspecturis, officialis curie Parisiensis salutem in Domino. Notum facimus quod coram nobis constitutus dominus Guillelmus de Combreus, miles, asseruit sub 1. Cossigny, comm. de Chevry-Cossigny, cant. de Brie-Comte-Robert (Seineet-Marne).


prestito juramento quod domina Johanna, quondam uxor dicti militis, et relicta etiam defuncti domini Egidii dicti le Hongre, militis, tempore quo vivebat dicta domina, divine pietatis intuitu dedit et concessit abbatisse et conventui de Bosco Dominarum duos sextarios bladi capiendos et percipiendos singulis annis imperpetuum item ecclesie de Bello burgo unum minellum bladi item ecclesie de Monte Firmelio unum minellum item presbitero curato dicte ecclesie de Monte Firmelio unum minellum bladi super granchia ipsius defuncte que vocatur gallice de Perreus et hec omnia et singula voluit et precepit dicta domina in suo testamento seu sua ultima voluntate fieri totaliter, et etiam compleri, ab heredibus ejusdem defuncte pro suo anniversario annuatim et in perpetuum celebrando in locis supradictis et ecclesiis superius nominatis. In cujus rei testimonium sigillum Parisiensis curie litteris presentibus duximus apponendum. Datum anno Domini millesimo CCC°, die lune post festum beati Remigii.


ALBISSE DEL BENE

SURINTENDANT GÉNÉRAL

DES FINANCES FRANÇAISES EN ITALIE ÉTUDE DE SIX REGISTRES DE SES COMPTES DE .1551 A 1556

Les Archives nationales conservent, sous la cote KK 112, un registre dont la couverture, moderne, porte au dos cette mention, reproduite dans l'inventaire sommaire « Comptes des Affaires étrangères, 1551-1556. » En fait, sous cette couverture se trouvent réunis six cahiers de parchemin de format grand in-4° et qui comprennent respectivement 26, 16, 20, 32 et 12 feuillets. Chacun de ces cahiers a gardé sa foliotation particulière et se rapporte aux comptes d'une année établis par « Sire Albisse Delbeyne, conseiller du Roy, général aiant la charge, superintendence des deniers que le Roy faict tenir et paier, prandre et rembourser pour ses affaires, tant en Italye, Allemagne que autres pays, lieux et endroictz hors son royaulme, et ce depuis le premier jour de may M V° LI 1 ».

A ce titre, qui se trouve répété en tête de chacun des cahiers, la mention « Original » a été ajoutée. Ces registres étaient, en effet, rédigés en double exemplaire, comme le confirme d'ailleurs cette indication, portée au compte des dépenses « Pour la façon et escripture de ce présent compte contenant, comprins le double d'icelluy, la quantité de quarante feuilletz de parchemyn qui au feur de trois solz six deniers tournois chacun d'iceulx vallent la somme de vu livres 2. » 1. Fol. 1 du premier cahier. Nous verrons, au cours de cette étude, que les deniers inscrits sur les comptes d'Albisse del Bene seront uniquement destinés à l'Italie. D'autre part, le dernier cahier ne se rapporte qu'aux trois derniers mois de l'année 1556.

2. Fol. xviit du troisième cahier.


La façon de ces comptes ne diffère en rien de celle adoptée généralement pour les documents de cette nature d'un côté les recettes, de l'autre les dépenses, celles-ci réparties en plusieurs catégories, comme nous le verrons plus tard. L'intérêt d'un tel document, non encore utilisé jusqu'à présent, à notre connaissance, apparaîtra immédiatement à quiconque lui consacrera quelques instants d'attention. Mais, si l'on se rappelle les circonstances qui entourèrent sa rédaction et si on le replace au cœur même des événements dont il est le contemporain, il prend une singulière valeur et mérite une étude attentive. Cette étude, nous avons cru pouvoir l'entreprendre et nous avons voulu mettre en relief les indications nouvelles que nous apportait la lecture de ces registres en les éclairant à la lumière des faits déjà bien connus de cette époque et d'autres qui le sont moins, recueillis au cours de nos recherches.

Les registres de comptes dont nous nous occupons ici vont de 1551 à 1556 c'est dire qu'ils correspondent à la majeure partie du règne de Henri II, pendant laquelle la politique royale fit les derniers efforts et consentit aussi les plus grands sacrifices pour maintenir au delà des monts les conquêtes du règne précédent et sauvegarder le prestige qu'elle s'était acquis auprès des différentes cours italiennes. Nous ne voulons pas revenir ici sur les causes réelles, multiples, qui entraînèrent Henri II à soutenir en Italie une politique aussi active 1. Il semble bien que le roi n'intervint personnellement que fort rarement pour continuer la « guerre italicque » et, de fait, les premières années de son règne, qui marquent, d'ailleurs, une réaction générale à l'égard de la politique du roi défunt, là aussi témoignèrent de la volonté d'Henri II d'agir suivant d'autres principes. Ces principes, il les recevait d'Anne de Montmorency, revenu au pouvoir en même temps qu'il montait sur le trône, et le chancelier sera toujours opposé à l'intervention française en Italie, devenue pourtant traditionnelle.

1. M. Lucien Romier les a justement étudiées et estimées dans ses Origines politiques des guerres de religion. Paris, 1913, 2 vol. in-8° t. I, p. 30 et suiv.


La mort de Paul III, survenue le 10 novembre 1549, allait cependant obliger le roi et son entourage à jeter de nouveau les yeux vers l'Italie, où la France se devait de reprendre un rôle efficace sous peine d'y voir grandir au delà de toute mesure son vieil ennemi, Charles-Quint. La rivalité entre les deux grandes maisons régnantes de l'Europe avait alors plus d'une occasion de reprendre, au risque de se transformer en conflit d'une part, le choix d'un nouveau pape s'annonçait difficile de l'autre, l'Empereur insistait pour que le concile quittât Bologne et revînt à Trente, en terre d'Empire mais, surtout, il restait à régler la question du duché de Parme, disputé par Charles-Quint à Octave Farnèse, dont le frère, Horace, était promis à Diane de France, fille légitimée de Henri II.

Pour l'instant, la question du Conclave était la plus importante et celle qui devait recevoir la première une solution. Du choix du nouveau pape dépendait, en effet, le sort de la politique française en Italie il convenait d'agir vite et de se réserver de grands moyens d'action et, puisque le moment n'était pas encore venu de confier aux armes la défense de nos intérêts d'outre-monts, c'est d'abord une guerre d'influence qui allait se livrer, pour quoi il fallait de l'argent. Et de fait, le 28 janvier 1550 (n. st.), Henri II, par lettres données à Fontainebleau, notifiait la création « d'ung général, aiant la charge et superintendance des deniers et finances, que nous ferons tenir et payer, prandre et rembourser pour nosdicts affaires et service. tant en Italie, Allemaigne que autres pays, lieux et endroictz hors nostre Royaulme par lettres de bancque et mains de marchans de quelque nation qu'ilz soient », attribuant cet office nouveau à « Me Albisse Delbeyne, de la nation florentine, résidant en la ville de Lyon. lequel s'estoit ordinairement employé, sans aucunement y espargner ses facultez, moyens et crédit et mesmes en lieux et effectz importans et notables, tant du règne du feu Roy nostre très honoré Seigneur et père que depuys nostre advénement à la couronne ». Le préambule de l'acte précisait les raisons qui avaient poussé le roi à créer ce nouvel office « Comme. il soit requis et nécessaire faire tenir et paier en Italie et autres lieux et endroictz hors nostre Royaulme par lectre d'eschange et par mains de marchans quelque foys


grande somme de deniers et autres foys moindres, et considérant que davantaige, il peult advenir que noz ambassadeurs et autres que nous pouvons et pourrons avoir et depescher cy après en pays estrangés auroient promptement affaire pour nostre service d'estre secouruz de quelques sommes de deniers, au moyen de quoy il est très requis que en telles et urgentes occasions et nécessitez présentes, ilz sachent ou ilz pourront avoir recours sur les lieux, toutes lesquelles choses requièrent le plus souvent prompte et secrette expédition, car estans délayées ou publiées, ou lieu de nous porter honneur, commodité et utilité, il nous en succède l'effect tout au contraire 1.. » On sent dans ce texte le souci du roi de ne rien négliger pour la défense de sa cause hors des frontières du pays et, lorsque les cardinaux du parti français, Du Bellay, Châtillon, Vendôme, Guise et Tournon, arrivèrent à Rome, fort en retard, d'ailleurs, pour élire le nouveau pape, ils étaient porteurs de bonne somme de deniers qu'ils devaient employer à toutes fins utiles 2.

Ce n'est pas au hasard que Henri II avait choisi Albisse del Bene comme titulaire du nouvel office qu'il venait de créer. Celui-ci était alors le représentant à Lyon de la fameuse famille des del Bene, fuorusciti florentins qui s'étaient fait du royaume de France une seconde patrie en se consacrant tout entiers à son service 3. Marié à Lucrèce Cavalcanti, qui appartenait elle aussi à une famille florentine tout aussi puissante, Albisse, ou Albizzo 4, del Bene avait déjà connu, comme nous l'indique le préambule de sa lettre d'office, la faveur du roi défunt. Nous en avons quelques preuves si nous songeons que, par contrat du 10 décembre 1537, François I<* lui avait 1. Les lettres d'office d'Albisse del Bene sont transcrites en tête du premier registre, comme d'ailleurs tous les documents servant à justifier sa charge de comptable et l'utilisation des deniers qu'il maniait.

2. Cf. Ribier, Lettres et Mesmoires d'Estat, t. II, p. 257.

3. Cette famille est trop connue pour que nous insistions ici davantage. Nous renvoyons, pour plus de détails, à L'Hermite de Soliers, La Toscane française (Paris, 1661, in-4°, p. 273-295), et à Charpin-Feugerolles, Les Florentins à Lyon (Lyon, 1893, in-4°, p. 35-36). Cf. aussi L. Romier, Les origines politiques. t. I, p. 143 et suiv.

4. On rencontre ces deux formes dès le xvre siècle, mais la première se trouve beaucoup plus fréquemment, conformément à l'habitude alors fort répandue de franciser tous les noms c'est ainsi que del Bene devint Delbeyne, Delbène, d Elbenne ou encore d'Albène.


accordé, ainsi qu'à André Sormani, Milanais, pour dix ans, le bail de la ferme du tirage du sel dans la vallée du Rhône et dans celles de la Saône et de l'Isère, en Dauphiné, en Provence, dans le Comtat-Venaissin et dans la principauté d'Orange et les avait affranchis de tout droit d'aubaine après leur décès, bien qu'ils fussent étrangers 1 l'entrée d'Albisse del Bene dans l'administration royale lui conférait ainsi immédiatement des revenus et des avantages considérables. Quelques années plus tard, le 6 août 1543, Albisse del Bene était également autorisé par le roi à importer de l'alun dans le royaume pendant dix ans2. Mais surtout, un an après, le 18 juillet 1544, on lui confiait, ainsi qu'à Thomas Sertini, la ferme des gabelles du royaume et des impositions mises sur les épices3. Cet office était bien fait pour accroître la fortune, énorme déjà, de la famille del Bene désormais, Albizzo allait l'utiliser et la faire fructifier en devenant le créancier du roi lui-même. La charge nouvelle de « général aiant la charge et superintendance des deniers et finances pour l'étranger devait, en effet, bientôt le rendre indispensable dans le besoin, toujours plus grand, d'argent où se trouvait Henri II, et del Bene ne cachait pas la fierté qu'il en éprouvait en écrivant un jour au cardinal de Tournon « Nous sommes repputez par tout le monde la banque du Roy*. »

Nous avons vu que les lettres d'office d'Albisse del Bene étaient datées du 28 janvier 1550. Le 12 juin suivant, les généraux des Finances confirmaient le Florentin dans sa charge, après qu'il eut prêté serment devant eux, et ordonnaient au receveur général des Finances établi à Lyon de lui payer ses gages, soit 1,200 livres par an, à dater de ce jour5. Toutefois, 1. Catalogue des actes de François ler, t. III, p. 530 ce bail fut ratifié par le cardinal François de Tournon et Charles du Plessis, agissant au nom du roi, le 23 avril 1538.

2. Ibid., t. IV, p. 480.

3. Ibid., t. VII, p. 374.

4. A. del Bene à Tournon, 1557, 15 août, Lyon Arch. nat., K 92, 132 orig. Il existe dans ce carton une série de lettres adressées par del Bene à Tournon, alors en Italie, de 1557 à 1558, que nous aurons l'occasion de citer plusieurs fois ici. Une autre série de lettres d'Albizzo, celles-ci adressées en majeure partie à Montmorency, est conservée à la Bibl. nat., ms. fr. 20460, passim. 5. Fol. v du premier cahier. Nous ne savons pas pendant combien de temps del Bene toucha ce traitement toujours est-il que, dix ans plus tard, alors qu'il exerçait encore la même fonction, il donnait (16 avril 1560) une quittance à


ce ne fut pas sans quelques difficultés, sur lesquelles, d'ailleurs, nous sommes mal renseignés, que del Bene entra réellement en fonctions. Outre la ratification des généraux des Finances, il lui fallait obtenir, en effet, auparavant, celle des trésoriers de l'Épargne ceux-ci ne purent vérifier, dans le délai d'an et jour, ses lettres de nomination et, le 2 mai 1551, Henri II ordonnait à André Blondet, trésorier de l'Épargne, de confirmer del Bene dans sa charge1. On s'explique ainsi que le premier compte conservé aux Archives parte du 1er mai 1551, soit dix-huit mois après la nomination du général.

Les registres de compte tenus par Albisse del Bene, comme tous les registres de cette nature, comportent deux parties, l'une des recettes, l'autre des dépenses, dont la balance est établie au dernier feuillet de chacun d'eux. Il convient, cependant, de noter que les sommes portées en recette ne sont en fait, ici, que des remboursements de celles que del Bene avait avancées pour le service du roi 2. Le général devait, en effet, recueillir les deniers par emprunts sur sa fortune personnelle et sur les marchands des nations florentines et lucquoises établis à Lyon, qui constituaient ses recettes réelles. Ces recettes étaient portées sur un autre compte qui restait à l'usage propre du général, tandis que les registres que nous étudions ici étaient de simples instruments de contrôle qui devaient permettre aux officiers du roi de se rendre un maître Benoît Legrand, commis à l'exercice de la recette générale des Finances à Lyon, de 625 livres tournois pour son traitement du quartier de janvier à mars, ce qui correspondait alors à une somme annuelle de 2,500 livres. Bibl. nat., P. O. 988, n° 2209711, orig.

1. Premier cahier, fol. vu v°. La lettre d'André Blondet, datée du 10 mai 1551, a été transcrite également en tête du même cahier, fol. vi v°.

2. Ainsi, sur 125,000 1. t. fournies par Pierre Le Gay, trésorier de l'extraordinaire des guerres du Piémont, le 4 février 1553, à Albisse del Bene, 50,000 écus, soit 100,000 livres environ, reviennent à celui-ci qui les avait avancés. Transcrivons, à titre d'exemple, la formule employée par le rédacteur du compte à cet effet et que nous retrouvons toujours la même La somme de 125,350 1. t. a luy [del Bene] ordonnée par le Roy, scavoir est Lm écus pour son remboursement de semblable somme qu'il a faict fournir audict Venise pour les affaires dudict seigneur, 6,750 1. pour le port et voiture et 4,6001. 1. pour les interestz du prest de la somme » (fol. vi du deuxième cahier).


compte exact des sommes engagées. On comprendra alors aisément que, sur ces registres, les recettes proviennent de l'administration des finances royales de 1551 à 1555, ce fut toujours le trésorier de l'extraordinaire des guerres du Piémont qui fournit les deniers 1.

Les versements du trésorier de l'extraordinaire des guerres étaient effectués à dates variables, sur l'ordre du roi et suivant les possibilités du moment. Ainsi, du 10 mai au 31 décembre 1551, Nicolas Lefebvre fit deux versements en mai et quatre en octobre, un seul en septembre et novembre2. Entre temps, c'était à del Bene qu'incombait la tâche de pourvoir aux dépenses et de satisfaire aux exigences des créanciers et des hommes d'armes nous verrons que le général dut attendre bien des fois et bien longtemps le remboursement des sommes qu'il avait avancées 3. Nous devons noter, d'ailleurs, que les sommes inscrites au compte des recettes n'étaient pas toujours remises réellement à Albisse del Bene elles furent, en effet, plusieurs fois versées directement en espèces aux agents que del Bene entretenait en Italie 4.

1. De 1551 à 1556, on trouve alternativement Me Nicolas Lefebvre et Me Olivier Lefebvre, son frère sans doute, puis Me Pierre Le Gay et Me François de Chaluet comme trésoriers de l'extraordinaire des guerres ayant remboursé à del Bene des sommes par lui avancées. L'étude la plus récente qui ait été consacrée aux trésoriers des guerres est celle que M. Léon Mirot a publiée sous le titre Dom Béoy et les comptes des trésoriers des guerres essai de restitution d'un fonds disparu de la Chambre des comptes, dans Bibliothèque de l'École des chartes, t. LXXXVI (1925), p. 245-379. Le docteur Jules Sottas, dans son État militaire de l'Angoumois, Saintonge et Brouage entre les années 1599 et 1623 (La Rochelle, 1914, in-8°), a étudié plus particulièrement les trésoriers de l'extraordinaire des guerres que l'on voit apparaître à la fin du xve siècle.

2. Premier registre, au compte des recettes, fol. x et suiv.

3. Ainsi, le 7 juillet 1553, Montmorency prie del Bene de bien vouloir attendre jusqu'au mois d'août le remboursement des 50,000 écus qu'il avait envoyés à l'évêque de Lodève, Dominique du Gabre, et n'hésite pas à lui demander 200,000 autres livres toujours pour l'Italie (accusé de réception de cette lettre par del Bene du 12 juillet Bibl. nat., ms. fr. 20460, fol. 29, copie). Quelques années plus tard, le 6 mai 1557, del Bene se plaignait, dans une lettre au cardinal de Tournon, du retard apporté à ses remboursements « chascun se remect à moy et la despence est si excessive et les remboursements de deça si longz, avec tant de pertes et incommoditez, et ay avancé la despence de tant de moys que c'est une grande pitié » (Arch. nat., K 92, n° l18, orig.).

4. Nous voyons, par exemple, le 10 août 1554, del Bene donner quittance à Pierre Le Gay d'une somme de 44,000 écus d'Italie « à luy fournie comptant en la ville de Venise par Me Pierre du Souchay, commis dudict Le Gay audict lieu » (fol. iv du quatrième compte).


Au fur et à mesure que la politique française en Italie devenait plus active, absorbant toujours plus d'argent, les ressources normales ne pouvaient plus suffire pour assurer les versements à effectuer à del Bene. Ce n'est plus alors du seul trésorier de l'extraordinaire des guerres de Piémont que le Florentin reçoit de l'argent et nous voyons mentionnées dans les recettes du cinquième compte, correspondant à l'année 1555, des sommes provenant du receveur général des Finances à Paris, Jehan Courtin, de Me Vital de Contour, receveur général à Poitiers, et de Me Guyot de Godailh, receveur général à Agen 1.

Nous avons spécifié, il y a un instant, que les recettes inscrites par del Bene n'étaient, en réalité, que le remboursement des avances qu'il avait faites au roi. Aux prises avec des difficultés sans cesse grandissantes, Henri II dut intervenir un jour en personne pour prier le général de vouloir bien patienter et, pour que ses comptes demeurassent exacts aux yeux des correcteurs de la Chambre des Comptes chargés de les vérifier, il autorisa Albisse del Bene à ne consigner dans ses recettes que « pour mémoire » des sommes qui ne devaient pas lui être remboursées de sitôt. Pour justifier l'exactitude de ses comptes, del Bene transcrivit la lettre du roi en tête du compte de 1555. Elle présente assez d'intérêt et nous montre suffisamment les difficultés au milieu desquelles la politique royale évoluait pour que nous la reproduisions ici « Henry. a noz améz et féaulx les gens de noz comptes à Paris, salut et dilection. Nostre amé et féal conseiller Albisse Delbene, général ayant la charge et superintendance des paiemens que nous faisons faire hors nostre Royaume nous a faict remonstrer que, depuys peu de temps en ça, il auroit par devant vous rendu ses comptes de ce qu'il auroit faict 1. Recettes du cinquième compte, passim. Me Vital de Contour fournit 73,311 10 s. prises sur la taille d'octobre à décembre 1556, payable par anticipation, et 110,000 1. t. « provenans de la creue que ledict sieur [le roi] mettera sus oultre le principal de la taille en 1557 », et 10,780 1. t. a des deniers que ledict sieur fera lever durant l'année 1556 sur les prélatz, gens d'église et clergé Cette dernière mesure, qui frappait le clergé, avait été prévue dès 1553, alors qu'on avait demandé à tous les archevêques et évêques du royaume la liste exacte des bénéfices qu'ils y possédaient, de façon à pouvoir les imposer. Cf. lettre de P. Santa-Croce au cardinal del Monte, 1553, 14 décembre, Paris Arch. vat., Nunz. Francia, t. III, fol. 246, orig., et L. Romier, Les origines politiques. t. I, p. 491.


paier en Italie et autrement pour nostre service et des remboursements que nous luy aurions faict faire tant pour regard du principal que pour le port, change et avance desdicts deniers et ce jusques à la fin de l'année mil cinq cens cinquante quatre, et désireroit bien encore pouvoir maintenant faire le semblable pour l'année mil cinq cens cinquante cinq dernière passée pour, après ledict compte par vous cloz et arresté, pouvoir mieulx besongner et arrester des comptes particuliers qu'il a à faire avec ses compaignons, lesquelz il emploie pour la fourniture desdicts paiemens d'Italie car sesdicts compaignons et autres ses adhérens font difficulté de continuer à anticiper et fournir les deniers que nous vouldrons faire fournir en Italie ceste presente année sans premièrement veoir cloz et arresté le compte de l'année précédente, lequel compte ledict del Bene nous auroit remonstré luy estre impossible de pouvoir rendre de long temps sans y estre par nous pourveu, d'autant que ledict Delbene s'est bien voulu accommoder, à la requeste que nous luy aurions faicte, d'attendre jusques en l'année mil cinq cens cinquante sept et autrement son remboursement de plusieurs grosses sommes qu'il auroit faict fournir et paier pour nostre service en la dicte année précédente mil cinq cens cinquante cinq, au moyen de quoy, en rendant par devant vous ledict compte, il ne pourroit raisonnablement faire recepte des deniers qu'il n'auroit pas encores reçeu sans se mectre en évident danger, en cas que par faulte de fondz erreur ou autre inconvénient il ne peust, au temps contenu par les dicts mandemens, recevoir et toucher les deniers déclairez en iceulx de ne les pouvoir jamais plus répéter pour en avoir par ledict compte faict recepte et tacitement confessé de s'estre contenté desdictz mandemens, ce qu'il n'a jamais entendu ny entend jusques à ce qu'il aye par effect touché et receu lesdicts deniers contenuz esdits mandemens nonobstant que pour povoir retirer en ses mains lesdicts mandemens pour les remectre et consigner à ses compaignons et autres à qui appartiennent les deniers, il aye esté contrainct de bailler audict trésorier de l'extraordinaire ses quictances de semblables sommes contenues ausdicts mandemens pour deniers comptans, comme ledict trésorier de l'extraordinaire dict avoir baillé les siennes au trésorier de nostre espargne à quoi ledit Delbene se seroit à


nostre dicte requeste accommodé de bonne foy pour suyvre et garder l'ordre de noz finances en intention que nous serions tousiours obligé à sondict remboursement jusques à ce que par effect il eût receu et touché lesdicts deniers, nous suppliant luy vouloir accorder et permectre que, pour vous pouvoir pour les causes susdictes rendre ses comptes de ladicte année cinq cens cinquante cinq promptement, il puisse et luy soit loisible de faire recepte de tous les deniers dont nous l'aurions faict assigner ou, pour luy, Me François de Chaluet, trésorier de l'extraordinaire de noz guerres delà les montz, à la charge de déclairer par ladicte recepte qu'il ne fera la datte desdicts mandemens de noz trésoriers de l'Espargne, pour ce est-il que nous, ayant trouvé en cela la requeste d'icelluy Delbene bien civille et raisonnable, et ne voullant aussi que pour s'estre accommodé, comme dict est, d'actendre sesdicts remboursemens à plusieurs longs et divers termes, cela luy puisse tourner à aucune incommodité perte ou dommaige, ne diminuer la continuation du service qu'il a accoutumé de nous faire, vous mandons et enjoignons très expressément par ces présentes, signées de nostre main, que en rendant par ledict Delbene sesdicts comptes par devant vous de ladicte année cinq cens cinquante cinq et autres en suyvant, vous luy permectez et souffrez sans difficultéz qu'il puisse. faire recepte de sesdicts remboursements en mandemens et autrement, encores qu'il n'aye pas receu les deniers des sommes contenues esdicts mandemens comme dessus. à la charge toutes fois que, au plus tard dans six mois après que ledict Delbene aura receu et touché tous les deniers contenus es dicts mandemens et assignations dépendans de ladicte année mil cinq cens cinquante cinq, il sera tenu de bailler par devant vous déclaration de ce qu'il aura receu et en quel temps pour estre lors au pied de sondict compte rendu 1. » Quelle que fût la bonne volonté du roi pour rendre au général del Bene les sommes qu'il lui avait avancées, quels que fussent aussi les expédients auxquels on avait eu recours pour augmenter les recettes du trésor2, le déséquilibre grandissait 1. Cette lettre se trouve transcrite aux fol. n à vi du cinquième registre. Elle est datée de Blois, le 27 janvier 1556 (n. st.).

2. On sait qu'au mois de novembre 1553 Catherine de Médicis avait été jusqu'à engager les terres qu'elle possédait du chef de sa mère en Auvergne, et no-


tous les jours entre les sommes ainsi constituées et celles qu'exigeait la défense des intérêts français en Italie et c'est à Albizzo del Bene que, de nouveau, il fallait recourir. Le Florentin, d'ailleurs, était toujours prêt à répondre aux demandes nouvelles d'argent qui lui étaient faites. Sans vouloir mettre en doute outre mesure le dévouement qu'il entendait montrer à la cause française, qui était aussi celle de ses compatriotes bannis de leur cité, il faut bien dire que les avances de deniers répétées si souvent, et si considérables, étaient pour lui une source de revenus fort importants. Au lendemain de la piteuse défaite de l'armée royale conduite par le maréchal Piero Strozzi à Marciano (2 août 1554), del Bene écrivit une lettre fort belle au connétable de Montmorency, dans laquelle il lui disait toute la peine que cet échec lui avait causé « Nonobstant que à cause de ceste malheureuse et incroyable deffaicte de noz gens de Toscane j'aye esté en ung mesme instant navré de trois terribles playes, la principale que j'estime et estimeray tousiours sur toutes choses est le désavantage du service du Roy et le desplaisir que la personne de Sa Majesté et de la Royne et vous Monseigneur et autres principaulx ministres en pourrez avoir la seconde, le malheur de toute l'Italye et de ma patrie et du paouvre Mareschal Strozzi et de tant de gens de bien la tierce, la grande perte que j'ay faicte de mon bon frère le Panatier x, que avec grande raison 'estimoys et aymois quasi plus que moy-mesme joinct à ce les continuelles et grandes peines et travaulx que, comme Dieu et moy et beaucoup d'autres sçavent, j'ay ordinairement supporté pour ayder selon mon petit pouvoir à tamment la baronnie de La Tour, pour subvenir, disait le roi, « aux besoins de nos affaires de guerre et aux grandes et inestimables despences que nous avons à supporter et conduire ». Cf. Alexandre Vitalis, Correspondance politique de Dominique du Gabre, évêque de Lodève. Paris, 1903, in-8°, p. 291. Dans cette lettre, datée du 23 novembre 1553, Henri II donnait à l'évêque de Lodève, trésorier des armées à Ferrare, et à M. de Selve, ambassadeur à Rome, tous pouvoirs pour engager ces domaines aux mains de marchands et banquiers italiens. Une partie des sommes ainsi recueillies et remises à Me Pierre Le Gay, trésorier de l'extraordinaire des guerres du Piémont, servit à rembourser Albizzo del Bene, que l'on voit porter, aux recettes de l'année 1554, 44,000 écus, soit 99,000 t. t. pro« venans d3 l'engaigement que la Royne faict d'aucunes terres qu'elle a en Auvergne (fol. nu du quatrième registre).

1. Albert del Bene, frère de Pierre, avait, en effet, reçu le titre de panetier ordinaire du roi. Cf. L'Hermite de Soliers, op. cit., fol. 283 vo.


soustenir l'honneur et prospérité de Sa Majesté et de sesdictes entreprises, néantmoins, considérant d'autre part que le monde est composé de semblables afflictions et que, de tout temps, il est advenu et peult advenir de semblables et plus grandz malheurs et que les Roys de France et leurs ministres ne sont pas accoustumez de s'estonner de telz et plus grands malheurs et pertes et que mondict frère ne pouvoit mieulx ne plus à son gré et au mien employer sa vye que comme il a faict pour le service de son seigneur et maistre et de sa patrie, estant mort avec grant honneur, monstrant visage à l'ennemy et combattant vaillamment tenant en la main, ainsi qu'on m'a escript, l'enseigne de sa compaignye, abandonnée pour la mort de son guydon, et que aussy ma paouvre patrie et tout ce qui en dépend accompaignez de si juste cause et de la protection d'un si grand et bon Roy, ne peult espérer a la fin que bonne yssue d'une si violente maladye, je suys fort bien résolu, faisant de la nécessité vertu, m'accommoder de ma part au bon vouloir de Nostre-Seigneur, sans aulcunement me rendre ne à la maulvaise fortune ne à noz ennemys 1. » On ne peut, certes, mieux affirmer son attachement à la fortune du roi de France. De même, quelques années plus tard, alors que les troupes françaises avaient subi sous les murs de SaintQuentin un échec retentissant, del Bene adressa au cardinal de Tournon une lettre qui nous montre tout le désespoir qu'il en éprouvait 2. Mais aussi, après ce désastre, les nombreux créanciers du roi et, par suite, de del Bene refusaient leur confiance et cherchaient à sauver les capitaux qu'ils lui avaient engagés. Del Bene sentit que la ruine était proche. Redoutant l'écrasement total des forces françaises, il redouta aussi la banqueroute qui le menaçait et, dans la même lettre, il laisse percer, sous un patriotisme réel, la crainte que lui causait ce spectre « A présent, creignant chacun que à cause de ceste deffaveur des affères du Roy, nous ayons à faire mal noz besoignes, chacun nous courra sus pour ouster de noz mains tous les deniers. somme toute je vous supplye, Monseigneur, de asseurer Sa Majesté que je suis prest à bailler 1. A. del Bene à Montmorency, 1554, 13 août, Lyon Bibl. nat., ms. fr. 20460, fol. 43-49, orig.

2. A. del Bene au cardinal de Tournon, 1557,15 août, Lyon Arch. nat., K 92, 134, orig.


jusqu'a ma chemise, et encore que j'aymerois plus tost mourir cent fois que de faire banque rotte, il n'y auroit plus homme qui ousast pencer de soy mesler avecques le Roy en matière de deniers et pour ce, je vous supplye, Monseigneur, de croire que j'ay plus tost besoing qu'il me soit tiré la bonde que baillé l'esperon et que je bailleray plus volontiers que vous ne le recevrez et la vie et les biens et tout ce que je pourray et pourra estre que je pourray faire mieulx. » On constate, en tout cas, que la défense des intérêts français en Italie et aussi la protection accordée par Henri II aux bannis florentins s'accordaient admirablement avec les intérêts particuliers du général del Bene Celui-ci savait bien que le roi devait nécessairement s'adresser à lui pour obtenir l'avance de l'argent dont il avait besoin, et aux sommes dépensées en Italie s'ajoutaient celles que del Bene recevait comme intérêt et qui formaient, au chapitre des dépenses, un compte à part dans ses registres.

Ce chapitre particulier des dépenses est intitulé par del Bene « Ports, changes et dons gratuits » il alourdissait considérablement le montant total des dépenses2.

Ainsi, le 30 avril 1552, del Bene donne quittance à Me Pierre Le Gay de 135,700 1. t., dont 50,000 écus sont destinés au 1. Tournon se rendait un compte exact des réalités et, dans une lettre au cardinal de Lorraine, il fit un jour allusion aux dépenses excessives engagées par la France en Italie « Monsieur, j'ay oblyé par l'autre lettre que je vous ay escrit de ma main, vous escrire d'une dépesche que la Royne faict pour les Florentins, comme vous verrez, et, pour la provision qu'ilz demandent, vous en cognoistrez la cause. Et quant à cella, je croy, comme j'ay dit à ceulx qui la poursuyvent, que pour autant que nous avons plus de besoing de gens que d'argent à l'entreprise de Toscane, il seroit raisonnable que les sommes que de leur bonne volunté ilz veullent desbourser revint à la descharge du Roy plus que à augmentation de force. » (Bibl. nat., ms. fr. 20444, fol. 49 orig.). L'allusion est discrète, d'ailleurs, car Tournon, malgré son sens aigu des intérêts du royaume, craignait de mécontenter Catherine de Médicis, qui soutenait ardemment ses compatriotes, et, par suite, de se voir, une fois de plus, menacé de la disgrâce. 2. Au fol. x du deuxième registre, del Bene précise que ces ports, changes et dons gratuits ont été « ordonnez par le Roy pour supporter les frais par luy faictz et payès tant en Italye que à Lyon et ailleurs à plusieurs et divers marchans et autres qui, à sa requeste et pour le service dudict seigneur ont fourni et faict fournir en Italye les sommes de deniers contenues ou chappitre prochain précédent, que pour avoir aussi esté lesdicts deniers, sur la promesse, obligation et crédit dudict del Bene tousiours anticippez et advancez en Italye à temps et à propos et en avoir actendu deça les remboursementz telz qu'il a pieu au Roy. et à messieurs de son conseil luy ordonner et bailler, le tout à ses despens, intérests et fortunes ».


remboursement de la première moitié de 100,000 écus que del Bene avait fait envoyer à Venise 5,000 sont prévus pour l'indemniser des frais de transport et de change de ces 100,000 écus de Lyon à Venise et, enfin, 4,000 sont réservés à del Bene comme intérêt de la somme avancée. Nous trouvons ce détail au compte des recettes du deuxième registre (année 1552). Au compte des dépenses de la même année, del Bene inscrira 20,700 1. t., « assavoir 5,000 escuz pour le port et change de la ville de Lyon à Venise à raison de cinq pour 100 de 100,000 escuz qu'il [del Bene] a faict payer audict Venise à Me Jacques Arnoul, commis dudict Me Pierre Le Gay, le 14 febvrier 1551 [1552 n. st.] et 4,000 escuz soleil pour le don gratuit d'avoir accordé d'actendre son remboursement de ladicte somme de 100,000 escus jusques à la fin du mois de mars ensuivant oudict an ». Pour avoir avancé au roi 100,000 écus du 12 février au 30 avril 1552, soit pendant trois mois environ, del Bene recevait donc un intérêt de 4,000 écus bien qu'il fût de coutume, à cette époque, comme d'ailleurs pendant tout le moyen âge, de ne prêter de l'argent qu'à un taux fort élevé, cet intérêt de 16 auquel del Bene consentait à avancer au roi les sommes dont il avait besoin était considérable. Encore le roi était-il heureux de pouvoir compter sur les réserves du Florentin, qui semblaient inépuisables. Après le gros effort des Français en Toscane, qui coûta, comme nous le verrons, tant d'argent et aussi tant d'hommes, Henri II, quoique vaincu, voulut manifester sa reconnaissance à ceux qui l'avaient aidé de leurs deniers et, le 26 avril 1556, Albisse del Bene inscrivait dans ses dépenses 3,000 écus soleil, soit 6,9001. t., qu'il avait remis à Francesco Nazi, « conseiller de maistre d'hostel du Roy, Laurens et Pierre Cappon et Thomas Ranuccini, marchans florentins demourans a Lyon. de laquelle [somme] ledict sieur leur a faict don pour aucunement recongnoistre envers eulx les grandz, notables et recommandables services que durant les guerres ilz luy ont faictz en la compaignie dudict Albisse del Bene présent comptable. en temps et avec occasion si à propos que ledict sieur en est demeuré grandement contant et satisfaict2 ». 1. Fol. xi du deuxième registre.

2. Fol. XXIII du cinquième registre. Nous verrons plus loin quel rôle joua Fran-


Outre le soin de fournir les capitaux réunis aux officiers du roi, on avait confié à del Bene celui d'assurer le change de la monnaie et le transport des espèces. Les registres du général nous montrent que souvent les écus furent transportés réellement de Lyon à Ferrare ou à Venise, où ils étaient remis directement aux représentants que del Bene entretenait dans ces villes. On est étonné de voir employer ce procédé primitif, coûteux et dangereux aussi, alors que celui des lettres de banques ou lettres de change présentait tant d'avantages 1. Peut-être faut-il attribuer à la disette du numéraire en Italie la faveur que lui maintenait del Bene.

Le change de l'argent alourdissait également les charges supportées par le roi. Le cours des monnaies variait avec l'abondance plus ou moins grande des espèces et subissait le contre-coup de l'afflux des devises étrangères2. Del Bene vit-il dans ce fait la possibilité de réaliser un nouveau bénéfice ? Une note marginale ajoutée par les auditeurs de la Chambre des comptes sur le premier registre du général pourrait nous le faire supposer. En comparant ce registre de compte avec celui du trésorier de l'extraordinaire des guerres Nicolas Lefebvre, qui avait remboursé del Bene de ses avances, il apparut aux auditeurs que les remboursements avaient été effectués en écus d'or soleil, tandis que del Bene avait fourni les sommes en écus d'Italie. Le roi en subissait un préjudice évident 3. Del Bene réussit néanmoins à obtenir de Henri II cesco Nazi à Venise. Laurent Capponi fut le premier des membres de cette illustre famille florentine qui s'établit à Lyon il devint seigneur d'Ambérieu et baron de Crévecœur sa fortune était considérable. Nous examinerons tout à l'heure plus en détail la situation d'Albisse del Bene au milieu de ses compatriotes de Lyon après la fameuse institution du Grand Parti. Laurent Capponi et Th. Rinuccini furent les associés habituels du général et administrèrent la banque Guadagni. Cf. Roger Doucet, Le Grand Parti de Lyon au XVI" siècle, dans Revue historique, t. CLXXI (1933), p. 486.

1. « A Albisse d'Albeyne. la somme de six mil escuz d'or soleil de laquelle ledict sieur. luy a faict don pour supporter les fraiz, port, change, voictures et despences qu'il pourroit faire » (fol. xvii du premier compte). M. L. Romier, dans ses Origines politiques. (t. I, p. 145), a indiqué de quelle manière on transportait les deniers les voitures, souvent de véritables convois, exposés d'ailleurs à chaque instant aux attaques, remontaient le Rhône, puis suivaient la route des Grisons pour atteindre Brescia et, enfin, Venise. Sur l'emploi de la lettre de change, cf. Vigne, La banque à Lyon, Paris, 1903, in-80, p. 160-168. 2. Cf. Doucet, op. cit., p. 507.

3. M. Doucet a donné (op. cit., p. 471, n. 2) les fluctuations du cours de l'écu soleil de 1533 à 1575.


des lettres patentes par lesquelles celui-ci ordonnait aux généraux des Finances de ne rien réclamer au Florentin des bénéfices qu'il aurait pu ainsi réaliser 1. Cet incident est caractéristique et nous montre toute l'emprise que les banques lyonnaises avaient sur la politique royale et sur le roi luimême, qui n'osait même plus réclamer ce dont il avait été lésé.

Nous avons déjà signalé à plusieurs reprises les noms de quelques-uns des représentants que del Bene avait en Italie. Les deniers envoyés de France arrivaient à Venise, où ils étaient reçus par les agents que le trésorier de l'extraordinaire des guerres du Piémont y entretenait 2 et, de là, étaient répartis entre les différents corps de troupes français par les soins du trésorier général des armées d'Italie. Pendant la période qui nous occupe, ce fut Dominique du Gabre, évêque de Lodève et protégé du cardinal de Tournon, qui occupa cette charge.

Or, c'est par l'intermédiaire des représentants d'Albisse del Bene que ces officiers royaux percevaient les sommes amassées à Lyon. Dans les registres que nous avons étudiés, nous n'avons jamais trouvé que deux personnages ayant exercé cette fonction à Venise, Francesco Nazi à Ferrare, Alexandro Fiasco.

1. r Il appert le remboursement faict aud. d'Albeine, tant du principal que de l'interest luy avoir esté faict en escu d'or soleil toutes foys, par la despence par luy faicte cy devant soub les noms du seigneur de Selve et Georges Bohier, appert led. d'Albeine leur avoir fourni la plus part en escus d'Italye, combien que le Roy luy ayt baillé et fourni en escus soleil, sur quoy semble le Roy porter perte et tare grande, pour, à quoy satisfaire, rend cy led. d'Albeine les lettres pattentes du Roy, données à St. Germain en Laye, le vne jour d'avril M LUI par lesquelles led. Sr Roy mande à la Chambre. que ne veult que luy en soit aucune chosa demandé, ni perte pour tare que led. Sr en ayt en l'eschange et fournissement, mandant à lad. Chambre que, en rendant pour le dit d'Albeine ses comptes, le tenir quicte et deschargé de la tare et perte que l'on luy vouldroit reppetter et de laquelle, en tant que bezoing seroit, l'a deschargé et luy en faict don à quelque somme qu'elle se puisse monter » (fol. xvn V-xvm du premier cahier).

2. Ces agents sont Jacques Arnould, Pierre du Souchay, Claude Maillard, Georges Bohier et François Gaudart. En 1554 et 1555, ce furent les trésoriers de l'extraordinaire des guerres eux-mêmes, Pierre Le Gay et François de Chaluet, qui s'installèrent à Venise pour y recevoir les sommes venues de France. Arch. nat., KK 112, passim.


Comme del Bene, Francesco Nazi appartenait à une famille de f uorusciti florentins et s'était consacré à la défense des intérêts du roi de France en Italie. Il était d'ailleurs plus qu'un simple représentant de del Bene, car il avait installé à Venise une véritable banque qui lui permettait de faire des emprunts et d'avancer lui-même des sommes d'argent aux agents du roi, sans même que ceux-ci eussent reçu de lettres d'assignation de la part de del Bene 2.

Au contraire, Alexandre Fiasco était un personnage de moindre envergure. Il apparaît dans les registres de del Bene avec le titre de gentilhomme ou marchand ferrarais et, pour la première fois, au mois d'août 1553. On était alors à la veille de la guerre de Toscane et déjà il fallait prévoir et engager de nouvelles dépenses. Dans une lettre datée du 21 juillet 1553, l'évêque de Lodève proposa au roi un « parti 3 ». « En practicquant », suivant son expression, « avec plusieurs marchans chrestiens et juifs de trouver argent », il avait groupé « gens qui veullent faire une compaignie et entreprendre de fournir dans Venise et dans Bologne tous les moys cent et dix mille francs, que montent toutes vos despences des garnisons de Sienne et de Parme et de La Mirandola, en monnoye ayant cours aux lieux des garnisons. se contentant d'estre rembourcez en escuz à Lyon ou en monnoye grosse comme testons et réals, toute monnoye menus exceptée, de sorte qu'ils viennent à avoir déboursé deux cens vingt mille livres du leur pour les deux mois d'aoust et septembre avant que de touscher à vostre argent, pour lequel prest et advance ilz ne vous demendent aucun proffit ne intéretz ». Mais ces gens ne voulaient traiter qu'avec Albisse del Bene, « se voulant bien fier à luy seul de la seureté de leurs deniers pour la bonne réputation en quoy ils le tiennent d'estre homme de bonne foy et qui sçait conduire ses affaires », et c'était là le gros obstacle. Toutefois, dans l'impossibilité où il se trouvait de 1. Sur cette famille, cf. Charpin-Feugerolles, op. cit., p. 142.

2. On conserve aux Archives des Affaires étrangères (Mémoires et documents, Venise, vol. VII, fol. 181-185) un état des recettes et des dépenses de janvier à octobre 1557 le montant des recettes s'élève à 991,909 écus, qui proviennent, pour la majeure partie, d'emprunts faits à Francesco Nazi.

3. Cette lettre a été publiée in extenso par A. Vitalis, Correspondance politique de Dominique du Gabre, p. 62-66.


réunir des espèces en nombre suffisant, et peut-être aussi sur l'invitation expresse du roi, del Bene consentit à garantir les avances faites par les gens du parti de Ferrare 1; or, ce parti avait justement à sa tête Alexandre Fiasco.

Les comptes de del Bene nous apprennent dans quelles conditions les conventions ainsi passées entre lui-même et Alexandre Fiasco furent respectées. Le 5 août 1553, le général fit verser à Maillard 210,968 1. 9 s. t. en monnaie ayant cours en Italie (jules, demi-jules, testons de Milan, doubles testons et thalers d'Allemagne) comptant « en la ville de Ferrare à plusieurs et diverses foys. par le Sr Alexandre Fiasco gentilhomme Ferraroys, suyvant certain marché et accord que mons. l'évesque de Lodesve, superintendant des finances du Roy en Italye, par commission dudict Sr. auroit faict avec ledict Fiasco et autres que ledict Sr. sçayt et ne veult estre nommez ne déclairez, contenant que ledict Fiasco et ses consors fourniroient audict lieu de Ferrare aux commis du trésorier de l'extraordinaire des guerres en plusieurs et diverses fois la somme de 330,0001. t. en or ou monnoye d'Italye au mesme prix que lesdictes espèces d'or et de monnoye auroient cours aux garnisons du Roy, avec condition que pour regard de leur remboursement ilz n'entendoient avoir à congnoistre ne affaire avec autres personnes que ledict général del Bene, lequel seroit tenu de s'obliger envers les propriétaires desdicts deniers en son propre et privé nom de les rembourser, ou leurs commis, au 15e jour d'octobre oudict an 1553 en la ville de Lyon de la dicte somme de 333,0001. et davantaige leur payer, à raison de six pour cent, pour le port et change depuys Lyon jusques à Ferrare, lesquelles promesse et remboursement ledict Delbene a faict, le tout par commandement du Roy et pour le service de sa Magesté2 ». Fiasco assura, par la suite, le versement de l'argent aux agents royaux de Ferrare et, à partir de 1553, on le 1. Il est assez curieux de trouver ce terme de parti employé à Ferrare en 1553 pour une institution analogue au Grand Parti de Lyon constitué deux ans plus tard. Est-ce justement pour le distinguer du parti de Ferrare, inventé par l'évêque de Lodève et Alexandre Fiasco, qu'on qualifia de Grand Parti celui de Lyon? M. Doucet (op. cit., p. 492) note que cette expression ne sera employée en France officiellement qu'en 1557.

2. Fol. tx v°-x du troisième registre.


voit jouer ce rôle de bailleur de fonds en même temps et même plus souvent que Francesco Nazi.

Mais à quoi destinait-on plus précisément ces fonds? Dans l'étude qu'il a consacrée au Grand Parti de Lyon, M. Doucet 1 a montré dans quel besoin d'argent se trouvait le roi et de quelle façon ce recours au crédit permettrait d'assurer la protection du pays par les armes et la défense des intérêts français à l'étranger par la diplomatie. L'étude que nous avons faite des registres de comptes d'Albisse del Bene nous porte à croire que celui-ci vécut, pendant la période qui nous occupe, en marge du Grand Parti. Et, d'abord, del Bene devait cette situation spéciale au fait qu'il était en même temps un banquier et un officier royal. D'autre part, les sommes recueillies après la constitution du Grand Parti étaient employées indifféremment en Flandre, en Allemagne, en Piémont, partout, en somme, où il en était besoin. Au contraire, celles que del Bene porte dans ses comptes sont consacrées uniquement à l'Italie. En réalité, ces registres sont beaucoup plus les pièces comptables de l'officier du roi que du banquier florentin et c'est là ce qui en fait l'intérêt c'est sans doute aussi la raison pour laquelle ils sont encore à Paris, où ils avaient été envoyés pour être soumis au contrôle de la Chambre des comptes.

Del Bene a noté soigneusement dans ses registres l'emploi que l'on avait fait des deniers, soit qu'il portât ces deniers en recette lorsqu'ils étaient des remboursements, soit qu'il les inscrivît au compte des dépenses lorsqu'il en faisait l'avance. Ainsi donc, contrairement aux autres registres de comptes, dont la partie la plus intéressante est le plus souvent celle des dépenses seulement, les documents que nous a laissés del Bene nous fournissent à chaque page des indications précieuses. Ils sont, en quelque sorte, le miroir fidèle des événements et des différentes phases de la politique que la France suivit, tantôt pacifique, tantôt à main armée, au delà des Alpes on reste étonné de la somme des capitaux qui y furent consacrés. 1. Op. cit., p. 482.


Pendant toute l'année 1550, l'action de la France fut pacifique et les représentants du roi à Rome, M. de Termes, son ambassadeur, et les cardinaux de Tournon et de Ferrare, pratiquaient encore cette politique d'intervention diplomatique que Tournon devait bientôt être seul à défendre. Mais, pour être d'intervention, cette politique n'en demandait pas moins d'argent. Comme les représentants du roi ne recevaient aucun argent de France, comme, d'autre part, del Bene n'avait pas encore été chargé officiellement, à cette date, d'avancer les sommes qu'on lui demandait, l'ambassadeur et les cardinaux furent contraints d'emprunter à des banquiers résidant à Rome, Pierre, Antoine et Alleman Bandini, 12,000 écus soleil qui furent versés par le sieur de Sipierre au duc de Parme, Octave Farnèse ce fut là la première somme que dut avancer, augmentée des intérêts, le général del Bene pour satisfaire les créanciers du roi 1.

L'année suivante, alors que les Impériaux avaient mis le siège devant Parme et La Mirandole et que leurs rangs étaient grossis par les troupes de l'Église, ce fut à l'ambassadeur du roi à Venise, Odet de Selve, que les deniers furent versés par l'intermédiaire de Francesco Nazi. De mai à décembre 1551, c'est-à-dire pour une période relativement calme, del Bene avança à lui seul 736,0001. t. Or, cette somme ne comprenait pas l'argent destiné au Piémont, qui avait acquis une sorte d'autonomie financière 2.

En 1552, del Bene fit porter en Italie 1,067,200 1. t., dont 952,000 furent payées par Francesco Nazi à Jacques Arnould, à Venise, pour l'entretien des hommes d'armes qui défendaient Parme et La Mirandole, et 115,000 furent remises à l'évêque de Mirepoix, Claude de La Guiche, ambassadeur du roi auprès du Saint-Siège, « pour convertir et employer aux affaires dudict Seigneur 3 ». La Guiche, autre créature du cardinal de Tournon, venait en effet d'être nommé ambassadeur, au mois de mai de cette année 1552, et devait continuer l'oeuvre de son protecteur en maintenant les relations entre la France et la Papauté aux termes de la suspension d'armes signée par le cardinal le 22 avril.

1. Fol. xnii du premier registre.

2. Cf. L. Romier, op. cit., t. I, p. 145.

3. Fol. ix du deuxième registre.


Mais nous avons vu que cette trêve devait peu durer et que, sous prétexte de sauvegarder le Siennois, Henri II allait prendre en main la cause des juorusciti et reporter la lutte de Parme sous les murs de Sienne. Dès 1553, les versements de del Bene se font à un rythme plus accéléré à la fin de l'année, le montant total des sommes avancées sera de 1,544,100 1. 1. Sur cette somme, 159,000 1. étaient destinées à « rembourser mons. le cardinal de Ferrare de semblable somme qu'il a desboursée de ses deniers en l'année finie en décembre 1553, assavoir vim escus d'or d'Italye qu'il presta comptant de ses deniers pour le service du Roy ou mois d'octobre oudict an qui furent dès lors envoyez en l'isle de Corse à mons. de Termes et vicxxv escus qu'il avoit auparavant avancez de ses deniers au Sr Jourdan Ursin pour sa pension de trois quartiers d'année à raison de nm 1. par an ». Cette mention présente pour nous un gros intérêt, car elle éclaire d'un jour nouveau un moment fort curieux de notre histoire politique. En effet, tandis qu'au milieu de l'année 1553, les Siennois se plaignaient de l'administration du cardinal de Ferrare et que le duc de Florence prenait de jour en jour une attitude plus agressive vis-à-vis de la France, on apprit tout à coup que le chef des troupes françaises à Sienne, M. de Termes, était parti pour s'emparer de la Corse. On s'était demandé d'où venait une telle initiative le fait qu'Hippolyte d'Este avança sur sa fortune personnelle l'argent nécessaire pour financer l'expédition de Paul de Termes ne laisse plus aucun doute sur ses propres intentions ce fut lui-même qui décida d'écarter le vieux général de la ville qu'il était chargé de défendre et attira ainsi sur la France l'hostilité du pape, du duc de Florence et des Génois.

L'année suivante, la France allait donc avoir à fournir un effort énorme pour sauver Sienne des mains de Cosme de Médicis cette année allait aussi marquer un recul très net de notre influence dans la péninsule après la défaite de Piero 1. Fol. xiii du troisième registre. On sait qu'après le départ du cardinal de Tournon, en juillet 1552, Hippolyte d'Este, cardinal de Ferrare, avait été nommé légat du pape à Sienne et lieutenant général du roi dans cette même ville. La politique qu'il suivit alors, fort maladroite, compromit le succès que le roi aurait. pu remporter en Italie depuis que Tournon avait mis Sienne sous la protection de la France.


Strozzi à Marciano. La guerre de Sienne acheva de rompre l'équilibre du budget. Tous les mois, et même quelquefois plusieurs fois par mois, del Bene fit passer en Italie des sommes toujours plus considérables dont le total s'éleva à 2,054,057 1. 1. En plus de cette somme, le roi ordonna expressément à del Bene de verser 9,453 1. à Leone Strozzi, le prieur de Capoue, « pour la soulde et entreténement de ses trois gallaires avec son brigantin et sa fragatte durant le mois d'avril may et juing oudict an qu'il avait conduictes à Porthercules », et 6,750 1. « au Sr. Philbert Masselme, sr. de Sipierre, écuyer du Roy. pour s'acquicter de semblable somme qu'il estoit tenu payer au Sr. François Ysarre, espaignol, pour sa rançon d'estre demouré son prisonnier à la guerre de Parme 1 ». Après l'échec de Piero Strozzi à Marciano et le retrait des Siennois avec Blaise de Montluc à Montalcino, le grand rôle qu'Henri II avait espéré jouer en Italie prenait fin subitement. Il ne s'agissait plus alors que de sauver les dernières places que la France avait gardées autour de Montalcino et surtout de réparer par une action diplomatique les conséquences malheureuses de la guerre. Aussi, pendant toute l'année 1555, les versements de del Bene ne se firent-ils plus à Ferrare, mais à Venise leur total ne dépassera pas, d'ailleurs, 1,531,820 1. t.

A ce moment, une nouvelle phase commençait, la dernière, de la politique française au delà des Alpes. L'arrivée au trône pontifical de Paul IV Carafa, l'ennemi acharné de CharlesQuint, laissait entrevoir aux partisans de la guerre italique d'autres espoirs de conquête. C'est alors que le cardinal de Tournon, seul à Rome pour défendre une politique de paix, fut abandonné du roi et de toute la cour, que l'arrivée du cardinal Carlo Carafa, créé légat en avril 1556, avait définitivement acquise à la reprise de la lutte 2.

1. Fol. xvi du quatrième registre. Leone Strozzi, frère de Piero, avait été écarté du service du roi par Montmorency en septembre 1551 le connétable jugeait alors que l'ardeur du fuoruscito nuirait à la politique pacifique qu'il entendait suivre. En 1554, les choses ont changé et M. Romier a montré (op. cit., t. I, p. 399) comment le connétable, qui était devenu partisan de la guerre de Toscane, rappela Leone Strozzi, en lui offrant 400 écus soleil par mois pour chacune des six galères qu'il devait entretenir.

2. Nous avons plus particulièrement étudié cette partie de la vie du cardinal de Tournon dans notre article sur Le rôle du cardinal François de Tournon dans


Le succès de cette légation avait été total et le neveu du pape avait réussi à entraîner Henri II dans une nouvelle expédition et à le soustraire à l'influence de Montmorency. Carafa rentra à Rome le 7 septembre 1556. Avant d'envoyer le duc de Guise à la conquête du royaume de Naples, le roi fit passer en Italie les deniers nécessaires à la préparation de la guerre. Mais del Bene n'avait pas dans ses coffres l'argent disponible ce furent les banquiers allemands Israël Minkel et Georges Obrecht qui les avancèrent et del Bene ouvrit un compte spécial pour les rembourser de 180,000 écus qu'ils avaient avancés pour les mois d'octobre, novembre et décembre

la politique française en Italie de janvier à juillet 15S6, paru dans les Mélanges. de l'École française de Rome, t. L (1933), p. 293-333.

1. Les versements furent effectués en trois fois à Venise « par Lucca Rein et David Oct ou nom de Israël Minkel et George Obrech, marchans allemans demourans à Lyon pour icelle [somme] convertir et emploier au faict dudict extraordinaire de la guerre et mesmes pour le payement des gens de guerre et autres dépenses nécessaires pour la deffence de nostre Sainct-Père et accomplissement des promesses faictes en la ligue de Sa Sté. et de sa Magesté Cristianissime (fol. mi et suivants du sixième registre).

2. A. del Bene à Tournon, 1557, 18 juillet, Lyon Arch. nat., K 92, n° 122 orig.

Les registres du général conservés aux Archives nationales s'arrêtent à cette date et la dernière mention qu'ils portent nous montrent que l'on était prêt à la cour de France à d'autres sacrifices pour continuer la lutte contre l'Empereur et, cette fois, avec l'appui de Rome. « Et par ce que je puis entendre, nous serons encore bons papistes », écrira del Bene à Tournon un peu plus tard 2. Et, pourtant, si l'on fait le total des sommes avancées par le Florentin en Italie, augmenté des frais de transport, de change et des intérêts, on constate que, de mai 1551 à 1556, la dépense s'éleva au total impressionnant de 8,025,957 1. 12 s. t., qui se répartissent ainsi

1551 (mai à décembre). 780,004 1. 8 s. 1552 1,177,165 1. 12 s. 1553 1,691,1681. 1554 2,223,140 1. 14 s. 1555 1,740,4781.18s. 1556 (octobre à décembre) 414,000 1.


Or, il ne faut pas oublier qu'à côté des sommes versées par del Bene officiellement et conformément à la charge qu'il occupait de « général aiant la charge et superintendance des deniers et finances. en Italie », d'autres sommes étaient avancées, celles-ci sous le manteau, par des particuliers et surtout par la banque Strozzi. On comprend, dès lors, que la politique magnifique, sentimentale aussi, soutenue par Henri II au delà des Alpes ait mené la France à la banqueroute les dettes du Grand Parti, notamment, ne devaient jamais être payées entièrement. La correspondance de del Bene est remplie des plaintes que le général faisait à qui voulait l'entendre sur les difficultés qu'il avait à se faire rembourser. Il reste certain que ses propres intérêts ne furent pas lésés. Mais, aussi, cet effort financier qu'il fournit pendant tant d'années permit à Henri II de garder son prestige à peu près intact auprès des princes italiens, et, un jour qu'il demandait au cardinal de Tournon d'intervenir pour hâter le remboursement des sommes qui lui étaient dues, le Florentin notait « J'espère que à la court, ils ne vouldront pas faillir à eulx-mesmes et sont après d'y pourveoir, encore qu'ilz ne considèrent guyère que sans mes compaignons et moy, tous les affaires d'Italie seroient tombez cent fois pour faulte de deniers, en grand désordre »

Michel François.

1. A. del Bene au cardinal de Tournon, 1557, 13 juillet, Lyon Arch. nat., K 92, n» 1™ orig.


BIBLIOGRAPHIE

R. F. TREHARNE. The baronial plan of reform, 1258-1263. Manchester, University Press, 1932. xv-448 pages.

M. Treharne, professeur à l'Université d'Aberystwyth, nous donne un nouveau livre sur la révolution baronniale qui a, pendant plusieurs années, secoué profondément l'Angleterre à la fin du règne de Henri III. Le présent volume s'arrête à l'arbitrage de saint Louis, à la Mise d'Amiens du 23 janvier 1264. La matière est si intéressante, les archives anglaises si riches, que l'auteur n'épuise pas son sujet. Mais, après le Simon de Montfort, publié en 1884 par M. Bémont, qui l'a refait et réédité récemment, après les Studies in the Period of Baronial reform de M. E. F. Jacob, le Baronial plan of Reform, fruit de longues années de recherches, n'en fera pas moins date dans l'histoire constitutionnelle de l'Angleterre. M. Treharne n'a pas seulement mis diligemment à profit les travaux de la remarquable équipe de médiévistes que l'Angleterre possède actuellement, il n'a pas seulement étudié avec pénétration les chroniques, pour lesquelles, soit dit en passant, il est un peu injuste (combien nous voudrions avoir, pour le règne de saint Louis, l'équivalent de la collection des Annales Monastici !), il a fait de grands dépouillements au Record Office 1, et les documents financiers, notamment, lui ont permis de donner à nos connaissances beaucoup plus de précision l'itinéraire royal qu'il a dressé avec les comptes de l'Hôtel et les rôles de lettres patentes et de lettres closes nous montre, par exemple, qu'à partir de 1259 Henri III a cessé de faire de grands voyages dans son royaume et qu'en revanche, en six années, il a passé près de trois cent quarante jours en France, fait qui a eu à tous égards de grandes conséquences, bien mises en lumière par M. Treharne.

M. Bémont, tout en élargissant, de la façon la plus satisfaisante pour la curiosité du lecteur, le cadre indiqué par le titre de sa thèse, s'était appliqué surtout à la biographie de Simon de Montfort. M. Treharne ne 1. Un texte des Issue Rolls, publié p. 120, note 1, est à signaler aux historiens de la langue anglaise un clerc de l'Échiquier reçoit en 1258 cinquante shillings pour avoir composé des chartes « tam in anglico quam in gallico ydeomate confectas », destinées à tous les comtés du royaume.


déprécie pas, loin de là, le rôle joué par le comte de Leicester plus hardi que M. Bémont, il le considère comme l'inspirateur, dès le début, du soulèvement baronial et des réformes, alors que, pour s'en tenir à la lettre des documents, Simon ne semble passer au premier plan qu'en 1259. Mais M. Treharne n'a pas recommencé le livre de M. Bémont. Il a eu des desseins plus vastes. Son livre est une synthèse qui embrasse toute l'histoire politique de l'Angleterre pendant une période d'un intérêt passionnant. Il s'est tiré à son honneur de son ambitieuse entreprise. Il ne modifie sur aucun point essentiel l'idée qu'on pouvait se faire (en particulier depuis la publication des travaux de MM. Jacob, Powicke et Tout) des institutions monarchiques à cette époque, des réformes baronniales et de l'importance politique prise par les classes moyennes mais la lenteur et la plénitude de son exposé apaisent beaucoup de doutes et présentent en pleine lumière les événements. Sur deux points principalement, je ne suis pas de l'avis de M. Treharne. Selon lui, le clergé n'a joué un rôle dans la révolution qu'après la victoire de Simon de Montfort à Lewes, et, son exposé étant consacré à la période antérieure, il n'est fait, à partir du chapitre n, à peu près aucune mention de l'Église anglaise. Le lecteur ne sait pas ce qu'elle est devenue l'auteur n'a pas cherché à le savoir et à nous le dire. Il est vrai que les prélats se retirèrent du Parlement de 1258. Mais il faut regarder au delà des faits accidentels. Le clergé avait une énorme influence. Pendant la première partie du règne de Henri III, c'était lui surtout qui avait souffert de la tyrannie monarchique et de l'absurde déférence montrée par le roi aux désirs et aux convoitises de la papauté et de son entourage italien. Parallèlement aux barons, il avait opposé au despotisme une ferme résistance. Le prélude de la révolution fut la session tenue par la Convocation de la province de Cantorbéry, en août 1257, où l'Église anglaise décida de se défendre, fût-ce au prix de l'excommunication du roi lui-même. Dans la suite, quoi qu'en dise M. Treharne, nous voyons des évêques, des prêtres, des clercs, constamment mêlés au mouvement révolutionnaire. Comment les barons auraient-ils pu se passer du concours intellectuel et moral de la partie la plus instruite et la plus éclairée de la nation? La Curia, qui a constamment collaboré aux réformes de 1258-1259 et donné un corps aux idées vagues des grands seigneurs, était composée principalement de clercs. Enfin, Simon de Montfort, pour qui son ami, l'évêque de Lincoln Robert Grosseteste, avait écrit un traité sur les Principes de la Royauté et de la Tyrannie, a été avant tout, croyons-nous, un chrétien fanatique, comme le vainqueur des Albigeois, son père. Son idéalisme tenace était nourri d'idées religieuses, entretenu par l'indignation que lui avait causée la malfaisante politique du Saint-Siège et de son vassal Henri III à à l'égard de l'Église anglaise. Après sa mort, son parti l'a regardé comme


un martyr, mort « pour la restauration du royaume et de notre mère l'Église1 ».

M. Treharne a fait attentivement l'exposé des négociations qui ont abouti à la Mise d'Amiens. Grâce à lui, on voit très bien que l'arbitrage de saint Louis était désiré surtout par Henri III, et pour cause. Mais pourquoi Simon de Montfort a-t-il accepté cet arbitrage, pour refuser ensuite de s'y conformer? Évidemment, il avait espéré un succès. M. Treharne explique cette illusion d'une façon assez ingénieuse, mais peu convaincante. Simon, nous dit-il, quand il avait pris le contrôle du gouvernement en juillet 1263, avait promis que les Provisions seraient revisées en détail il réservait toutefois le principe que le pouvoir ne serait exercé que par des Anglais, et le principe que le roi devrait observer les avis d'un Conseil de barons. Aux yeux du comte de Leicester, ces principes ne pouvaient pas être mis en cause par un arbitrage, et saint Louis ne pouvait s'arroger le droit d'annuler les Provisions, mais seulement celui d'indiquer des modifications de détail. Malheureusement, les textes n'autorisent pas cette interprétation. Simon et ses alliés, un mois avant la rencontre d'Amiens, avaient donné leur consentement à un arbitrage du roi de France « sur toutes les provisions, ordonnances, statuts et obligations d'Oxford, et sur tout ce qui s'était passé jusqu'au 1er novembre », sans faire aucune réserve. Il y a eu, évidemment, un profond malentendu. Henri III, avec la cauteleuse habileté qui lui était habituelle, avait depuis longtemps préparé le terrain et savait à quoi s'en tenir. Saint Louis agit en toute bonne foi, mû non seulement par des raisons qui tenaient à l'essence même de ses idées sur le pouvoir royal, mais par des appréciations de faits, des impressions, des influences, que M. Treharne a bien su démêler. Simon de Montfort, de bonne foi aussi, ne s'attendait pas à voir sanctionner ainsi la déplorable politique de Henri III par un roi dont il avait pu maintes fois admirer la loyauté et la bonne volonté. Saint Louis avait souvent refusé d'adhérer à la politique pontificale et prouvé son indépendance il gouvernait sagement, en accord avec ses barons, était sévère pour les officiers oppresseurs, avait donné le modèle des enquêtes à faire sur les souffrances populaires il aimait tout ce qu'aimait Simon, voulait et faisait dans son royaume tout ce que Simon voulait et avait tenté de faire en Angleterre. Le comte de Leicester aurait pu ne point s'en tenir à ces considérations et se montrer plus perspicace. Il aurait pu se douter que le roi de France n'était pas informé exactement de ce qui s'était passé en Angleterre depuis 1258, et qu'il avait été circonvenu par Henri III pendant les longs séjours faits en France par celui-ci. 1. Voir mon livre La monarchie féodale en France et en Angleterre, 1933, p. 408 et suiv. J'exprime ici le regret de n'avoir pu utiliser le livre de M. Treharne, qui m'est arrivé à la fin de la correction de mes épreuves.


Simon se persuada que saint Louis lui donnerait raison. Ajoutons aussi que l'arbitrage paraissait à tous la seule issue et que, le roi d'Allemagne étant Richard de Cornouaille et le Saint-Siège ayant pour sa part annulé les Provisions, saint Louis était le seul arbitre possible. Et, enfin, rappelons un fait que M. Treharne n'a pas manqué d'indiquer, et qu'on oublie trop souvent Simon, s'étant malencontreusement cassé la jambe, ne put assister aux conférences d'Amiens. Fut-il trahi par les représentants du parti des barons? Il avait eu souvent à se plaindre de l'inconstance de la noblesse anglaise. En tout cas, le contrepoids manqua, et Henri III eut beau jeu. Il était menteur, et Louis IX, comme tous les saints, avait un fonds de candeur. Quant au refus de se conformer à l'arbitrage, c'est un fait dont l'histoire offre de nombreux exemples, et Simon, qui avait dans son caractère des traits d'un aventurier, ne se laissa point arrêter par des scrupules.

Des différences d'appréciation ne peuvent diminuer en rien la haute estime que mérite l'oeuvre de M. Treharne. Le second volume, qu'il nous promet, traitera d'une période plus troublée encore et moins bien connue. Les historiens ont tout lieu de penser qu'il y portera des lumières nouvelles.

PETIT-DUTAILLIS.

Gustave DUPONT-FERRIER. Études sur les institutions financières de la France à la fin du moyen âge. T. II Les finances extraordinaires et leur mécanisme. Paris, Firmin-Didot et Cie, 1932. In-8°, 454 pages.

Nouvelles études sur les institutions financières de la France à la fin du moyen âge. Les origines et le premier siècle de la Chambre ou Cour des aides de Paris. Paris, de Boccard, 1933. In-8°, 271 pages.

Dans son précédent volume, M. Dupont-Ferrier avait étudié les élections financières de la France et leur personnel. Voulant nous faire connaître aussi exactement que possible les institutions financières de notre pays depuis le milieu du xive siècle jusqu'à la fin du xve, c'est-àdire pendant la dernière partie du moyen âge, il consacre le deuxième volume de son travail aux finances extraordinaires et à leur mécanisme. Au moyen âge, le roi gérait son royaume comme un grand propriétaire gère ses domaines, et c'était dans les revenus retirés soit directement de son patrimoine, soit des fiefs en dépendant, qu'il puisait ce qui lui était nécessaire pour faire face aux frais de l'administration de son royaume. Mais, dès le XIIIe siècle et surtout à partir du xive, pendant lequel les guerres soutenues contre les Anglais épuisèrent souvent le trésor, nos rois furent obligés de demander à leurs sujets de leur venir en aide. Cet appel est l'origine de l'établissement des contributions ex-


traordinaires demandées au peuple, à la fin du moyen âge, pour aider son souverain à repousser l'ennemi qui avait envahi le royaume. Ces contributions ou finances extraordinaires touchaient à tout, et elles formèrent, à la fin du xve siècle, le revenu le plus important de la royauté. En 1460, « elles rapportaient trente fois plus que les finances ordinaires ou domaniales et peu avant la mort de Louis XI quarantecinq fois plus

Après avoir exposé l'origine des finances extraordinaires, M. DupontFerrier étudie d'abord les plus notables la taille, les fermes, la gabelle du sel. Dans les trois chapitres qu'il leur consacre, il montre successivement comment la taille était répartie et comment elle était levée, énumère les denrées et les objets donnés à ferme, et enfin, après avoir retracé l'histoire de la gabelle, explique comment la vente du sel était effectuée et donne des détails sur la contrebande dont il était l'objet. Dans le chapitre suivant, il étudie les finances extraordinaires moins notables, soit l'équivalent, les décimes, les emprunts, l'imposition foraine. Puis, ayant fait connaître les classes et les personnes qui jouissaient de l'exemption des finances extraordinaires ecclésiastiques, universitaires, nobles, officiers du roi, de la reine et du dauphin, il termine par l'étude de la comptabilité et du contentieux et par l'examen de tous ceux qui étaient chargés de la gestion et de l'administration de ces finances.

Le volume que M. Dupont-Ferrier consacre à la Chambre ou Cour des aides de Paris forme un bon complément de ses études sur les institutions financières de la France à la fin du moyen âge. Passant d'abord en revue les différents ouvrages traitant de la Cour des aides aux siècles derniers, l'auteur examine l'ordonnance du 28 décembre 1355, dans laquelle on a voulu trouver l'acte de naissance de cette cour. De cet examen, il tire la conclusion que la Cour des aides ne fut pas créée par cette ordonnance, mais qu'elle fut organisée plus tard, vers 1370 ou peu avant cette date. Si l'on peut constater l'existence de la Cour des aides à partir de 1370 et si elle fut organisée peu à peu entre cette date et 1390, il ne s'ensuit pas qu'elle eut, au cours des siècles, une existence bien régulière et suivie. Successivement, en 1418 et de 1462 à 1464, elle fut supprimée, et c'est seulement après 1464 qu'elle put jouir d'une vie plus stable.

Après avoir expliqué comment furent établies les Cours des aides de Montpellier et de Rouen, M. Dupont-Ferrier démontre que les titres de chambre et de cour furent autrefois indistinctement employés pour désigner cette institution. Dans la suite de son ouvrage, il étudie son personnel présidents et vice-présidents, généraux, conseillers, adjoints, procureurs et avocats du roi, greffiers, notaires, receveurs des amendes, payeurs des gages, huissiers et leur vie quotidienne. Puis, faisant ressortir les attributions législatives, administratives, financières


et judiciaires de cette Cour et ses relations avec le Grand Conseil, la Chambre des comptes, les Requêtes de l'Hôtel, l'Université et le Parlement, il termine par un catalogue des officiers de cette Chambre, de 1370 à la fin du règne de Louis XI, et un bon index alphabétique. Ces deux volumes, fruits de très nombreuses recherches effectuées tant dans les archives et les bibliothèques que dans les recueils de documents déjà publiés, forment vraiment une suite d'études qui feront bien connaître les institutions financières de l'ancienne France pendant les deux derniers siècles du moyen âge et dans lesquelles puiseront toujours avec avantage ceux qui s'intéressent au passé administratif de notre pays.

Jules Viard.

Henri JASSEMIN. La Chambre des comptes de Paris au XVe siècle, précédé d'une étude sur ses origines. Paris, A. Picard, 1933. In-8°, lxvii-353 pages et pl.

Undocument financier du XIIIe siècle. Le mémorial de Robert II, duc de Bourgogne (1273-1285). Paris, A. Picard, 1933. In-8°, xxxn-160 pages.

Après les nombreux travaux déjà publiés sur la Chambre des comptes, l'ouvrage de M. Jassemin sera encore lu et consulté avec profit par tous ceux qu'intéresse l'histoire de nos institutions. En tête de ce volume retraçant la vie de cette Chambre au xve siècle, c'est-à-dire depuis l'année 1436 jusqu'à la fin du règne de Charles VIII, se trouve une introduction dans laquelle est esquissé un bon tableau de son origine et de son existence dans les périodes antérieures. Divisée en trois parties, cette introduction donne successivement l'histoire de la Chambre des comptes, des origines à l'ordonnance du Vivier-en-Brie (1320) de 1320 aux États de 1357 et, enfin, de 1357 à 1436. Dans ces pages, M. Jassemin met à profit non seulement les travaux déjà consacrés à cette institution, mais encore il donne le résultat du dépouillement de pièces originales. Aussi ne devront-elles pas être négligées par les érudits qui, dans la suite, voudront étudier l'une ou l'autre de ces périodes d'une manière plus approfondie.

A la suite de cette introduction, précédée d'un bon tableau des sources dans lesquelles il puisa et d'un index bibliographique, M. Jassemin consacre plus de 300 pages à l'histoire de la Chambre des comptes au xve siècle. Dans la première partie, relative au personnel, il étudie successivement le rôle et les fonctions des présidents, des maîtres des comptes, des correcteurs, des clercs des comptes, des greffiers, des huissiers, du procureur et de l'avocat du roi et, enfin, des procureurs des comptes. Après avoir ainsi fait connaître les différents membres qui composaient la Chambre des comptes, il nous apprend comment se re-


crutait ce personnel, comment il employait son temps et quels étaient ses gages, ses droits et ses privilèges.

La Chambre avait un double rôle à remplir. D'une part, elle examinait et corrigeait les comptes des fonctionnaires qui avaient la manipulation des deniers publics et, d'autre part, elle veillait à l'intégrité du domaine, prenait part à son administration et jugeait certains litiges qui le concernaient. Ce double rôle est bien étudié et bien présenté dans la seconde partie de cet ouvrage. Enfin, après avoir exposé les rapports de la Chambre des comptes avec la Cour des aides et le personnel des finances extraordinaires, M. Jassemin termine son travail par une étude sur le Conseil du roi et ses relations avec la Chambre, sur le rôle des greffiers et sur les archives de la Chambre des comptes. L'index alphabétique qui clôt ce volume est appelé à rendre de grands services à ceux qui s'intéressent à l'administration des xive et xve siècles, car M. Jassemin a fondu « dans cet index une liste des officiers ou personnages attachés à la Chambre depuis les origines jusqu'à 1500, composée principalement avec les filiations et complétée (pour la Chambre aux deniers) grâce aux indications de Borrelli de Serres ».

En terminant, nous ne pouvons que nous associer aux félicitations données à M. Jassemin par le jury qui examina son travail et, à la suite de cet examen, lui donna le titre de docteur ès lettres. Le mémorial de Robert II, duc de Bourgogne, que publie M. Jassemin, fut déjà utilisé par M. Ernest Petit dans son Histoire des ducs de Bourgogne de la race capétienne. On trouve dans ce mémorial, conservé aux archives de la Côte-d'Or, un tableau complet et détaillé des revenus et des charges d'un grand seigneur au xnie siècle. Composé par Raoul de Beaune, aumônier du duc, ce registre formait une sorte de livre de raison des créances et des dettes de Robert II. Après avoir établi le compte de l'exécution du testament de Hugues IV, mort le 27 octobre 1272, Raoul dresse le bilan des prêts faits par lui au duc, prêts qui s'élevèrent en sept ans à la somme de 11,000 livres tournois. Les revenus de Robert II étaient ceux de ses terres, forêts, vignes, granges, châteaux, etc., et ceux qu'il tirait aussi de ses bailliages et de ses prévôtés, revenus auxquels il faut ajouter encore les sommes que lui rapportaient les impositions payées par les communes, les taxes levées sur les Juifs et les « Cahorsins », les foires de Chalon-sur-Saône, les monnaies, le droit de sceau, etc. C'était avec ces ressources, dont la gestion et le contrôle étaient très rudimentaires, que le duc devait faire face aux dépens de son hôtel, de l'administration de son domaine et des expéditions militaires. Il ne faut donc pas être surpris que, comme beaucoup de grands seigneurs de son époque, il n'ait pu toujours équilibrer son budget.

La publication de ce document est précédée d'une bonne étude qui en fait ressortir tout l'intérêt et suivie d'un index alphabétique des


noms de personnes, de lieux et de matières et d'un glossaire qui permettront de l'utiliser facilement.

Jules VIARD.

Pierre RoBiN. La compagnie des secrétaires du roi (1351-1791). Paris, librairie du Recueil Sirey, 1933. In-8°, 125 pages. L'étude de l'organisation administrative de la chancellerie royale française, quoique traitée par des érudits comme Campardon, Luçay, Spont, Viollet, Morel, Chassaing de Borredon, etc., n'est pas encore mise au point, car le sujet est vaste et la documentation considérable empêche la synthèse. Le petit travail que vient de donner M. Robin, et il résume rapidement l'histoire des groupements des notaires-secrétaires du roi, l'activité de ces « fonctionnaires », la vie intérieure de cette organisation et quelques-unes des opérations financières qui en résultaient, pourrait donc être utile. Mais ce travail est très incomplet et d'une documentation insuffisante aussi ne pourra-t-il pas servir à ceux qui voudront entreprendre sérieusement cette grande étude et qui n'ont pas à en tenir compte.

P.-M. BONDOIS.

L'empoisonnement du prince de Condé (1588). Henri IV, Charlotte de la Trémoille et son page, par René LA BRUYÈRE. Paris, Pierre Roger, 1932. Gr. in-8°, 260 pages et 8 planches. Le 3 mars 1588, Henri, prince de Condé et chef des armées protestantes, mourait subitement au château de Saint-Jean-d'Angély. Les médecins qui pratiquèrent l'autopsie conclurent à l'empoisonnement. Un jeune page de la princesse de Condé, Prémilhac de Belcastel, s'enfuit, et le secrétaire du défunt, Jean Ancelin de Brillaut, mis à la torture, accusa la seconde femme du disparu, Charlotte de La Trémoille, d'avoir attenté à la vie de son mari, avec la complicité de son ami, le page, par haine personnelle et sous l'influence des agents de la Ligue. Cet homme, qui fut écartelé, se rétracta d'ailleurs avant l'exécution. La jeune femme, qui était enceinte, fut mise en étroite surveillance dans le château, et c'est là que naquit celui qui devait être le grand Condé. Cette dame fut, en général, considérée comme coupable, mais Henri IV reconnut la légitimité de l'enfant et innocenta ainsi l'accusée. L'affaire ne fut donc pas éclaircie, d'autant plus que le page ne revint pas en France et mourut en Italie.

M. R. La Bruyère, en étudiant les pièces du procès conservées dans les archives de la famille de La Trémoille (chartrier de Thouars), conclut, après un examen approfondi et les diagnostics rétrospectifs de deux médecins réputés, les docteurs Paul et Lesné, que le prince suc-


comba à une péritonite résultant d'une ulcération duodénale-pylorique, mal soignée à une époque où les médecins ne connaissaient pas la pathologie et l'étiologie de l'ulcère rond, qui n'a été isolé par Cruveilhier qu'en 1830. Cependant, l'affaire reste étrange la conduite de la princesse et la fuite précipitée du page laissent planer des soupçons difficiles à dissiper.

P.-M. BONDOIS.

Lettres inédites du cardinal Le Camus, évêque et prince de Grenoble (1632-1707), publiées par Claude FAURE. Paris, éd. Aug. Picard, 1932. In-8o, 395 pages. (Académie delphinale. Documents relatifs au Dauphiné, 2e série, t. II.)

Étienne Le Camus, cardinal, évêque de Grenoble de 1671 à 1707, a joué un rôle important dans les dernières années du règne de Louis XIV. Fils d'un intendant aux armées, il eut une jeunesse mondaine et fut ami de Benserade, de Vivonne, de Bussy. Il se convertit, suivit les dures doctrines oratoriennes et connut les solitaires de Port-Royal, si bien qu'il a été accusé de jansénisme. En son diocèse, il se montra d'esprit réformateur, luttant contre les empiétements des moines et s'efforçant d'atténuer les effets funestes de la Révocation. Il fut aussi mêlé aux négociations avec la papauté, notamment pour la question de la régale. Cependant, il ne fut jamais bien vu du roi, car il tenait à ses idées et ne capitulait pas devant les exigences gouvernementales. Dès 1748, le chanoine Gros Du Villard publia quelques-unes des lettres de cet évêque. Puis d'autres missives furent utilisées par Gérin, Prudhomme, Lièvre, etc. Enfin, en 1892, le P. Ingold avait pu mettre à jour une intéressante publication de 417 lettres de Le Camus à ses amis, Henri de Barrillon, Sébastien de Cambout de Ponchâteau, le P. Quesnel, l'abbé Dirois, Antoine Arnauld. Cette belle édition fournissait d'intéressantes précisions sur la mort de Madame, la situation du diocèse de Grenoble, les difficultés résultant de la persécution des protestants. Mais le P. Ingold n'avait pas donné de nombreuses lettres conservées aux archives du Vatican et que le biographe du cardinal, l'abbé Charles Bellet, avait fait copier dès 1886, mais sans les publier. Les membres de l'Académie delphinale décidèrent de combler cette lacune, en faisant rassembler à nouveau ces missives adressées au pape et aux cardinaux. Puis des recherches furent entreprises dans d'autres dépôts d'archives, entre autres à Turin. Notre confrère M. CI. Faure, chargé de la publication, a pu en définitive réunir 286 nouvelles lettres du cardinal, originales ou autographes, provenant, outre les grands fonds déjà cités, des archives des ministères de la Guerre et des Affaires étrangères, de la Haute-Savoie, de l'Isère, de la bibliothèque de Carpentras et de la Bibliothèque nationale, etc.


Ces différents documents sont adressés à Louis XIV, à ses ministres Colbert, Louvois, M. Le Tellier, aux duchesses de Savoie Marie-JeanneBaptiste et Anne-Marie, aux ducs Charles-Emmanuel et Victor-Amédée, aux papes Innocent XI et XII et Alexandre VIII, aux cardinaux Grimaldi, Spada, Cibo, Paolucci, de Bouillon, aux abbés Genet, Maille, Lambert, aux évêques de Genève, de Pamiers, de Sisteron, aux marquis de Saint-Thomas et de Larray, à Baluze, Basset, Chamillart, etc. Ils sont très intéressants pour les rapports de Le Camus avec les gouvernants savoyards, rapports qui furent d'autant plus difficiles que le prélat se plaignait de l'état de son diocèse, où le petit clergé était peu recommandable et où le peuple « ne connoissoit pas Jésus-Christ ». Le volume contient aussi beaucoup de détails sur la conduite de l'évêque lors de l'assemblée de 1682. Cette publication est donc importante.

Faite avec soin et bien annotée, elle complète très heureusement la publication de 1892 et rend de réels services à ceux qui étudient l'histoire religieuse du siècle de Louis XIV.

P.-M. BONDOIS.

Ernest Cornaz. Le mariage palatin de Marguerite de Savoie (14451449). Lausanne, Payot, 1932. In-8°, 336 pages. (Mémoires et documents publiés par la Société d'histoire de la Suisse romande, 2e série, t. XV.)

Le mariage, conclu à Mayence le 22 octobre 1444, de Louis IV, comteélecteur palatin du Rhin, de la maison de Wittelsbach, avec Marguerite, fille cadette du ci-devant duc de Savoie Amédée VIII (Félix V) et de Marie de Bourgogne et veuve de Louis III d'Anjou, comte de Provence, n'est pas en soi un événement de haute portée politique. Il y a sans doute quelque excès à lui consacrer tout un livre. Cependant, les détails recueillis par l'auteur ne sont pas sans intérêt pour l'histoire de la vie seigneuriale à la fin du moyen âge. En outre, ils permettent de voir, par un exemple précis, comment fonctionnait une institution curieuse de cette époque, celle de l'otage conventionnel. De fait, les seigneurs, au nombre de douze, qui avaient garanti, chacun pour un douzième, le paiement de la dot, furent requis d'avoir à « tenir otage » à Bâle, personnellement ou par procureur, jusqu'à exécution et ils durent se conformer à l'usage.

Les pièces justificatives, au nombre de soixante, n'occupent pas moins de 200 pages. Elles sont presque toutes tirées des riches archives de la maison de Savoie à Turin. Parmi les plus intéressantes, il faut signaler plusieurs comptes de dépenses, en latin et en français. Malheureusement, le texte n'en inspire pas toujours confiance et l'annotation en


est parfois insuffisante ou erronée 1. L'illustration, en revanche, est assez abondante et soignée. A signaler un utile tableau généalogique de la maison de Savoie du XIIIe au xve siècle, des vues des châteaux de Morges et de Heidelberg, des reproductions de sceaux de Louis, duc de Savoie, du comte palatin Louis IV, du cardinal Aleman, de Georges de Saluces, évêque de Lausanne, de Jean de Blonay, de Jean, comte de Fribourg et de Neuchâtel, enfin de François, comte de Gruyère. Un répertoire des noms de personnes et de lieux termine l'ouvrage. Un glossaire des mots rares eût été le bienvenu.

Ch. SAMARAN.

Paul Harsin. Crédit public et Banque d'État en France du XVIe au X VIIIe siècle. Paris, E. Droz, 1933. In-8°, 223 pages. Professeur à l'Université de Liège, M. Paul Harsin mène de front les études relatives à l'histoire de la principauté et les travaux d'histoire économique. Dans ce dernier domaine, il nous a donné notamment un livre considérable sur les Doctrines monétaires et financières en France du XVIe au XVIIIe siècle (Paris, Alcan, 1928, in-8°, xxin-326 p.) et une Étude critique sur la bibliographie des œuvres de Jean Law (Liège, Vaillant-Carmanne, 1928, in-8°, 128 p.). C'est encore le fameux financier écossais qui est la figure centrale du nouveau volume que nous signalons ici.

« L'objet exact » de son livre, nous dit-il lui-même, est « l'étude de la notion de banque d'État ou de crédit public, expressions souvent prises comme synonymes à cette époque » (p. 1).

Son point de départ est le xyie siècle, parce qu'il « ouvre en matière de banque et dans l'Europe entière une ère vraiment nouvelle ». A défaut d'un organisme d'État dont il n'y a point trace, il y a des pratiques bancaires qui rappellent ce qui existait en Italie. Si la mention de projets de fondation de banque à Toulouse (1549) et à Rouen (1566) ne peut être retenue dans le vague de nos connaissances, il n'en va pas de même de deux projets parisiens sur lesquels M. Harsin s'arrête quelque peu projet en 1548 d'une banque de dépôt repoussé pour des raisons de théologie morale, le taux envisagé de huit pour cent parais1. Qu'est-ce qu'un trablar? (p. 86). « Pro uno Uno » (p. 87) il faut sans doute lire lono (pièce de bois, planche). « Pro filo janue » (p. 136) il faut lire sans doute Janue (de Gênes). « Uno quaterno papiri strassie » (ou scrassie) (p. 137). Ce mot aurait demandé explication. « Marescallo qui ipsum [equum] emolavit » (p. 168). Ne faut-il pas lire immolavit (sua)? Qu'est-ce qu'un « equus ponentus »? (p. 169). « Deux canons et certain stoqfir » (p. 231). M. Cornaz met en note « Mot inconnu, à rapprocher peut-être de staufifre, allemand. » La transcription était pourtant transparente (stockfeuer, bâton à feu).


sant usuraire projet en 1566 d'une banque ou, plus exactement, d'une espèce de mont-de-piété.

Pour le xvne siècle, trois projets seulement sont venus à la connaissance de l'auteur. C'est d'abord le projet soumis en 1608 au Conseil royal par Pierre de Fontenu, sur lequel, dès 1896, M. G. Fagniez attirait l'attention simple établissement de dépôt doublé d'un mont-depiété.

Vers 1644 un mémoire dont l'auteur, selon M. Harsin, serait un Vénitien, propose pour être soumis à Mazarin le projet d'une banque tout à la fois de dépôt et de virement M. Harsin publie le texte de ce mémoire, qui semble n'avoir abouti à aucun résultat, bien que vers la même époque d'autres institutions analogues se relèvent en diverses villes de France.

C'est à Marseille que se trouve trace du troisième projet, connu par un mémoire à l'intendant Roville, publié en 1913 par M. Mann et qui a trait à une banque d'escompte sur le modèle de Venise.

Mais ce n'est qu'au xvm» siècle que l'on rencontre un projet de banque d'émission, auquel M. Harsin consacre tout un chapitre (ni) de son livre. Il s'agit d'un projet soumis de Londres par un Français qui s'y y trouve à une dame que M. Harsin soupçonne être Mme de Maintenon et dont l'auteur serait un Anglais de nation qui signe Olivier Du Mont, pseudonyme sous lequel M. Harsin serait tenté de reconnaître John Law. Ce n'est assurément qu'une hypothèse et l'auteur ne la donne pas pour autre chose, les documents sont trop peu précis il admet même la possibilité qu'il s'agisse de trois projets et non d'un seul. Cependant, cette dernière hypothèse lui semble plus vraisemblable. Que les projets révélés par les documents inédits qu'il publie aient, en effet, été l'objet de délibérations, il en trouve la preuve dans la Correspondance des contrôleurs généraux des finances, publiée jadis par M. de Boislisle, et dans deux articles de la Gazette d'Amsterdam du 13 et du 16 février 1702. Il aurait pu y ajouter les deux articles suivants du Journal historique publié à Rotterdam et qui donnent quelques précisions nouvelles qui ne se trouvent pas dans dans la Gazette 1.

13 février 1702. « Paris, le 6 février. L'argent étant toujours rare, on tint vendredi dernier une assemblée chés Monsr. de Chamillard pour délibérer sur les moyens de le mieux faire circuler car on croit qu'il y en ait dans le roïaume. Cette assemblée étoit composée de Monsr. de Chamillard, de Mr. le Premier Président2, des deux Directeurs et de 1. Ce Journal se trouve à la Bibliothèque nationale sous la cote G. 4466. 2. M. Harsin, qui trouve dans les lettres qu'il publie la mention du Premier Président, met entre parenthèses, avec un point d'interrogation, le nom de Harlay. Je ne comprends pas ce point d'interrogation étant hors de doute que le premier président au Parlement était bien alors Achille de Harlay.


quelques autres personnes. On y examina une proposition de mettre des billets Roïaux dans le commerce. Cette affaire avoit été proposée sous le ministère de Mr. de Pontchartrain. Mr. le Premier Président fit venir chés lui tous les principaux Négociens pour les entendre là-dessus et il fut longtemps avec eux. Les Traitans proposent au Roi d'alliéner à perpétuité les biens de l'Église moïennant huit millions, persuadés que Sa Majesté en peut disposer sans la participation du Clergé. Le Cardinal de Noailles, à qui Mr. de Chamillard a fait part de cette proposition, a représenté fortement les intérêts du clergé, et l'on croit que cette affaire donnera lieu à une Assemblée générale. On parle aussi de faire fondre la vaisselle d'argent plate. »

26 février 1702. « De Paris, le 10 février. La proposition des billets Roïaux dans le commerce est tombée la chose s'est trouvée impossible Mr. le Chancelier et Mr. le Premier Président y ont été contraires 1. »

De 1702 à 1715, « une véritable floraison de projets est à signaler ». Les plus intéressants peut-être, au moins par le nom du personnage qui y joue le premier rôle, sont ceux que l'auteur range « sous le signe de Samuel Bernard », qui faillit sombrer dans l'affaire.

Après avoir ainsi étudié les projets qui se sont succédé avant l'Expérience de Law, M. Harsin consacre la deuxième partie de son livre à cette Expérience. Naturellement, il ne s'agit pas ici de nous donner sur le système une étude nouvelle et complète, mais simplement de marquer la place hors pair qu'il occupe dans l'évolution en France des idées de crédit public et de banque.

L'étude des projets divers qui ont été élaborés au cours du XVIIIe siècle jusqu'à la Révolution après l'Expérience de Lave forme la matière du IIIe livre de M. Harsin. L'échec retentissant du Système n'a point empêché, et c'est un des points que met bien en lumière notre auteur, la persistance d'une doctrine du crédit public. C'est grâce à elle que la Caisse d'escompte a pu s'établir en 1776 et qu'elle a conservé une certaine prospérité jusqu'à la Terreur.

Il y a dans ce travail intéressant et suggestif quelques lapsus, comme lorsque M. Harsin écrit Ponchartrain au lieu de Pontchartrain et, en guise de compensation, Fortbonnais pour Forbonnais. Je signalerai aussi page 14, note 5, cet étrange « Extrait du Saertryk av Bergens Historiske Forenings Skrifter », alors que Seertryk av (il faut laisser œ mariés et non séparés) veut précisément dire en danois Extrait de. 1. A propos du rôle qu'il attribue dans cette affaire à Mme de Maintenon et qui me semble douteux, M. Harsin regrette de n'avoir pu consulter le tome V de l'édition des lettres de cette femme célèbre par Lavallée. Il aurait pu le consulter à la Bibliothèque nationale, qui le possède. Il y aurait d'ailleurs constaté qu'aucune allusion d'aucun genre n'y est faite au projet.


Ces vétilles n'empêchent pas de souhaiter que M. Harsin poursuive, comme il nous le fait espérer, le cours de ses recherches et de ses publications si intéressantes pour notre histoire financière et économique. E.-G. L.

Fausto Ghisalberti. Arnolfo d'Orléans, un cultore di Ovidio nel secolo XII. Milano, Ulrico Hoepli, 1932. In-4°, 78 pages. (Memorie del R. Istituto lombardo di scienze e lettere, vol. XXIV, fasc. IV.)

Les travaux d'Hauréau, de Léopold Delisle et, plus récemment, ceux de M. Ed. Faral et de M. Ch. H. Haskins, ont mis heureusement en lumière l'activité des grammairiens du moyen âge. Mais si les plus notables d'entre eux, comme Jean de Garlande ou Mathieu de Vendôme, ont fait l'objet d'études spéciales, d'autres, comme Arnulf d'Orléans, sont demeurés jusqu'à présent dans une demi-obscurité. Aussi faut-il savoir gré à M. Fausto Ghisalberti d'avoir tenté de préciser la physionomie et de réunir l'oeuvre dispersé du philologue orléanais. Si l'on tient compte des nombreux textes qui le mentionnent au xne et au xme siècle, Arnulf doit avoir joui parmi ses contemporains et dans la génération qui suivit d'une assez grande notoriété. Mais la nature même et la matière de son enseignement cessèrent bientôt d'intéresser et nous n'avons guère, pour composer sa biographie, que de menus détails laborieusement groupés par Hauréau et L. Delisle. Toutefois, la connaissance de l'Ars versificatoria de Mathieu de Vendôme, facilitée par l'édition de M. Ed. Faral, nous l'a présenté sous un jour nouveau. Cet obscur grammairien aurait eu sur ses disciples et sur ses pairs une assez grande influence pour que Mathieu le jugeât digne de ses invectives. Comme l'observe finement M. Ghisalberti, la querelle entre Arnulf et Mathieu de Vendôme illustre surtout le conflit qui dut s'élever à cette époque entre deux conceptions diamétralement opposées, la formation du goût par l'analyse du style et des procédés d'expression et l'interprétation traditionnelle des textes classiques, telle qu'elle se pratiquait depuis des siècles aux écoles de Chartres, de Fleury et d'Orléans.

Dans ce conflit entre rhéteurs et grammairiens, Arnulf fut à la hauteur de son principal adversaire. S'il n'avait point à son actif de longs poèmes didactiques nourris d'idées novatrices, il possédait à fond l'oeuvre d'Ovide. Et, non content de l'expliquer à ses disciples, il s'était avisé de le rendre intelligible à un cercle moins restreint. De là une série de commentaires qui, certainement, n'ont pas tous survécu, mais qui devaient embrasser tous les poèmes d'Ovide connus de ce temps-là. Au commentaire déjà signalé des Fastes, aux notes sur l'Ars Amatoria, les Remèdes d'amour et les Pontiques, dont il donne de curieux extraits,


M. Ghisalberti ajoute les importantes gloses des Métamorphoses, identifiées par lui sur de très vagues indices, dans un manuscrit de Venise. Le groupement de ces indices, des comparaisons portant sur le style et l'emploi de certaines formules ne sauraient laisser de doute sur l'attribution à Arnulf. La copie, d'ailleurs incomplète, ne donne que l'introduction et quelques livres de gloses. Le plan, d'une façon générale, est celui des autres commentaires d'Arnulf après avoir résumé dans un accessus les traits essentiels du poème qu'il étudie, il aborde livre par livre le texte lui-même, en précisant les termes et les idées qui lui paraissent justifier cet effort. Mais l'accessus des Métamorphoses, plus ample et plus nourri que celui des Fastes, nous donne, avec une biographie d'Ovide assez différente de celles que nous possédons déjà, une sorte de dissertation sur les Métamorphoses. Celles-ci sont de trois espèces, naturelles, magiques et spirituelles, et cette division nous permet de classer les légendes contées par Ovide et d'en découvrir le sens profond. C'est que ce grammairien, homme d'Église, s'il prend soin de définir les termes deformes, grandes rudis, sine artificio Promethiades, Deucalion; Epimethida, Pirra, se double nécessairement d'un moraliste. Si, tenu par sa fonction à une besogne terre à terre, il ne songe pas, comme Mathieu de Vendôme, à goûter les raffinements du plaisir littéraire, clerc, il se préoccupe de faire servir son étude à l'amélioration des hommes. Et, tout compte fait, c'est peut-être moins le vocabulaire et la syntaxe d'Ovide qui retiennent son attention que son éthique. Pour lui, le poète, en collectionnant ces contes mythologiques, n'a eu d'autre dessein que d'opposer au caractère variable et passager des créatures l'immuable éternité du créateur. Aussi le maître orléanais prétend-il utiliser l'autorité des anciens pour justifier les lois de la morale chrétienne, en conciliant la sagesse antique avec le dogme évangélique. Il est clair que cette position doctrinale entraînait Arnulf à une étude particulièrement détaillée des Métamorphoses. Du moment qu'il prêtait à Ovide des arrière-pensées, il lui fallait trouver à ses fables une signification allégorique. C'est ce qu'il ne manqua pas de faire après chaque livre de gloses. Or, ce commentaire allégorique était déjà connu dans son intégrité, parce que l'enseignement scolastique l'avait fréquemment détaché de l'ensemble pour l'utiliser à des fins édifiantes. Souvent uni aux Integumenta de Jean de Garlande, il était tout naturellement attribué à cet auteur. Après M. Ed. Faral, qui mit le premier en doute cette attribution, M. Ghisalberti, d'une manière irréfutable, restitue son bien à Arnulf d'Orléans.

La publication complète des Allégories, d'après quatre manuscrits, fait l'objet d'un long appendice. Cette excellente édition de la partie la plus intéressante, et sans doute la plus originale, des commentaires d'Arnulf, est appelée à rendre des services. La faveur dont elles ont joui au moyen âge en a répandu la matière à travers le monde cul-


tivé. Plus d'un auteur, prenant tel détail à son compte, avec ce mépris du plagiat qui caractérise la littérature médiévale, l'a inséré dans ses propres œuvres et c'est peut-être là qu'on trouverait la clef de certains emprunts demeurés obscurs. Ainsi l'œuvre didactique d'Arnulf d'Orléans, si habilement mise en relief par M. Ghisalberti, précise et complète ce qu'on savait déjà sur la nature de l'enseignement littéraire et moral donné dans les écoles au xn» siècle. Mais, si elle nous renseigne sur le mouvement des idées, l'expansion des poèmes ovidiens, les méthodes universitaires et, d'une façon générale, sur cette renaissance latine qui orienta toute la pensée du siècle, elle se révèle aussi comme une source importante de la littérature en langue vulgaire, s'il est vrai qu'au xive siècle l'auteur des Métamorphoses moralisées s'en inspirait encore.

Robert Bossuat.

La Vie de saint Alexis, poème français du Xle siècle, texte du manuscrit de Hildesheim, traduction littérale, étude grammaticale, glossaire, parle chanoine J.-M. MEUNIER. Paris, E. Droz, 1933. In-8°, 434 pages.

Après les travaux de Gaston Paris sur la Vie de saint Alexis et son édition devenue classique, on peut se demander s'il était nécessaire d'entreprendre sur ce texte de nouvelles recherches et de le rééditer. Il est à croire cependant que, si le regretté chanoine Meunier a consacré à ce travail les dernières années d'une vie laborieuse, il entendait apporter, tant à l'établissement du texte qu'à son interprétation, des corrections originales. Ce qui est sûr, c'est que depuis l'époque déjà ancienne où Gaston Paris publiait sa remarquable étude, les idées sur la publication des textes romans se sont quelque peu modifiées. Au lieu d'essayer par un classement souvent arbitraire des manuscrits, par un dosage savant des différentes leçons, par l'analyse de la langue présumée celle de l'auteur ou de ses contemporains, de reconstituer un archétype illusoire, les éditeurs modernes, choisissant le meilleur manuscrit et le tenant pour un document respectable, le reproduisent strictement, sauf à rectifier çà et là les inadvertances manifestes. C'est pour se conformer à ces principes que le chanoine Meunier publie le manuscrit d'Hildesheim qu'il considère comme le meilleur. Il s'en acquitte avec le plus grand scrupule, allant jusqu'à respecter les erreurs du copiste, mais on ne voit pas pourquoi, cette position prise, il s'autorise à corriger les vers faux. La traduction 'qu'il nous offre, très littérale, si elle manque souvent d'élégance, fournit en revanche aux étudiants une besogne toute mâchée. Le malheur est que, placée en regard d'un texte altéré, souvent inintelligible, elle correspond non à ce texte, mais à l'édition de Gaston Paris, qui, on le voit, n'est pas remplacée.


La légende de saint Alexis a déjà fait l'objet de nombreuses recherches. Le chanoine Meunier rappelle avec raison que sa forme la plus ancienne est une vie syriaque répandue plus tard dans le monde byzantin et introduite à Rome au xe siècle, sans doute par l'archevêque syrien de Damas, qui fonda, après 977, une communauté sur l'Aventin. Si l'on admet avec Gaston Paris la date de 1040 pour la rédaction du poème français, celui-ci ne saurait être très postérieur à la rédaction latine dont il est certainement issu. On sait que le poème est anonyme. Le chanoine Meunier, suivant Gaston Paris, est disposé à l'attribuer sans preuves nouvelles à Tedbalt de Vernon, chanoine de Rouen. Tout ce qu'on peut affirmer, c'est que la langue, très archaïque, postule évidemment le xie siècle et que trois des plus anciens manuscrits, copiés en Angleterre, donnent à penser que l'auteur était originaire de Normandie.

Si, au point de vue de la transmission des légendes hagiographiques, la Vie de saint Alexis présente un vif intérêt, elle est à retenir aussi comme un document essentiel pour l'histoire de la versification fran, çaise. Disciple éminent de l'abbé Rousselot, phonéticien et métricien, le chanoine Meunier consacre à la versification de l'Alexis un chapitre substantiel. Il nous montre l'accent latin subsistant dans la langue savante comme accent d'acuité, tandis que le sermo plebeius, ignorant la métrique grecque et ses applications latines, s'en tient à l'accent d'intensité, qui détermine l'alternance des temps forts et des temps faibles. La disparition du rythme quantitatif, au cours de l'empire, assure le triomphe de la poésie populaire qui, évoluant avec la langue, survivra, par l'intermédiaire de la poésie latine chrétienne, dans la poésie française caractérisée par le nombre des syllabes, la pause au milieu du vers, l'assonance, puis la rime. Non content d'exposer cette théorie, le chanoine Meunier en poursuit la vérification dans les plus anciens textes romans en vers, de la Cantilène de sainte Eulalie à la Vie de saint Alexis.

Mais déjà la composition même de ce chapitre, où, à côté d'observations originales, l'auteur rappelle avec complaisance des faits trop connus, nous dénonce le caractère essentiellement didactique de son ouvrage. Cette tendance, qu'on peut approuver ou proscrire, apparaît mieux encore dans les notes grammaticales où, négligeant de s'en tenir aux particularités de langue, archaïsmes et dialectismes propres à nous fixer sur la date et le lieu d'origine de l'Alexis, il s'attarde à répéter ce que contiennent tous les manuels. Historien des parlers nivernais, il éprouve un certain plaisir à évoquer à propos de son texte des faits de phonétique et de morphologie nivernaise qui, même s'ils sont curieux en soi, n'ajoutent rien à sa démonstration. Il faut pourtant retenir de cet abondant commentaire, où s'entassent les notions les plus diverses, quelques observations judicieuses, comme l'explication de fuir et de


cuidier par *fugire et côgito, sans avoir recours à des types arbitraires qui ne conviennent pas aux autres dérivés romans. La partie syntaxique, beaucoup plus neuve, offre un relevé très complet de toutes les tournures et constructions employées par l'auteur d'Alexis. Malgré certaine confusion, on y trouvera un utile complément à la Syntaxe de Foulet, qui ne remonte pas au delà du xne siècle. Le glossaire, qui contient tous les mots du texte, présente les mêmes qualités et les mêmes défauts que le reste de l'ouvrage. L'histoire de chaque mot y est faite en détail, même quand I'étymologie n'est pas douteuse (absoluthe, achatet, amor, aneme, etc.), et l'on y trouve des explications de phonétique (ansemble, aurai, dam, etc.) ou de morphologie (asist, dimes, le, etc.), qui auraient pu trouver place dans les notes grammaticales. De cet ensemble se dégage une impression assez confuse l'auteur semble avoir voulu mêler dans un même ouvrage le résultat de ses propres recherches et les notions élémentaires destinées à ses élèves. Ainsi l'édition de saint Alexis offre le double aspect d'un travail érudit et d'un manuel d'initiation. On se plaît néanmoins à y retrouver la science abondante et sûre du chanoine Meunier, linguiste réputé, professeur écouté, qui sut mener de front les tâches les plus diverses, avec un égal succès. Robert BossuAT.

Jean d'Arras. Mélusine, roman du xive siècle publié par Louis STOUFF. Dijon, imprimerie Bernigaud et Privat, 1932. In-8°, xiv-334 pages, une planche. (Publications de l'Université de Dijon, fasc. V.)

Après avoir publié successivement une adaptation en français moderne et un Essai sur Mélusine, M. Stouff nous offre aujourd'hui le roman lui-même d'après le manuscrit de l'Arsenal. Le choix est bon des cinq manuscrits qui nous ont transmis cette longue histoire, c'est assurément le meilleur, le plus correct et le plus ancien. M. Stouff le reproduit avec le plus grand soin et donne au bas des pages les principales variantes des autres manuscrits. La méthode d'établissement du texte est des plus légitimes. On aimerait toutefois que l'éditeur eût signalé par des guillemets les passages au style direct et séparé par des tirets les divers interlocuteurs. Un emploi plus étendu du tréma eût évité la confusion entre des mots de même orthographe comme seure et seùre, meur et meür. Scot, scay, arcon, doivent s'écrire sçot, sçay, arçon, avec une cédille. Dans un texte généralement très correctement transcrit, on s'étonne de lire des formes étranges comme rams et ramssiaux, pour rains et rainssiaux, la lemelle pour l'alemelle, ferjoustee pour forjoustee, et ordonnonee, qui paraît n'être qu'un lapsus. Ne faut-il pas lire aussi mesprison et non mes prison, espié et non espie? On pourrait relever encore d'autres exemples, mais il serait vain de s'attarder sur ces vétilles. Il faut savoir gré à M. Stouff d'avoir rendu accessible un roman


en prose d'un grand intérêt et qui peut encore donner lieu à de nombreuses et utiles recherches.

Robert Bossuat.

E. M. MEIJERS et A.-S. DE BLÉCOURT. Le droit coutumier de Cambrai. Haarlem, H. D. Tjeenk Willink et Zoon N. V., 1932. Petit in-4°, 250 pages (Éd. dans Rechtshistorisch Institut; Institut historique de droit. Leiden, série 114.)

Cet ouvrage n'est autre qu'un recueil de textes relatifs au droit coutumier du Cambrésis. Il se compose de treize parties distinctes le premier document publié est la Lex Godefridi de 1227 puis viennent successivement les enquêtes de la maison de paix (XIIIe siècle), les coutumes des francs hommes (XIIIe siècle), le recueil de Siméon de Hennin (1384-1414), le recueil de Jean de Barbaise (1379-1432), les enquêtes de 1446 et de 1447, les conseils, sentences et enquêtes de 1429 à 1474, les enquêtes et conseils de 1518 à 1521, le recueil d'Antoine Rogier (14991533), le recueil de Charles de Hertaing (xvie siècle), le supplément de ce recueil (xvie siècle), les privilèges et ordonnances concernant le droit coutumier, et enfin des pièces diverses relatives au même objet. L'utilité de ce recueil n'est pas contestable. Les textes sont établis avec le plus grand soin les deux éditeurs ont utilisé sept manuscrits distincts et ont procédé ainsi à un dépouillement minutieux des sources ils ont poussé le scrupule jusqu'à noter toutes les variantes. Leur oeuvre apporte une contribution des plus précieuses à l'étude du droit coutumier dans le nord de la France et tous les juristes en sauront gré à MM. Meijers et de Blécourt.

Qu'on nous permette, toutefois, de regretter le caractère par trop impersonnel de cet ouvrage. Échelonnés du xme au xvie siècle, les divers textes publiés doivent correspondre à des stades différents du droit coutumier cambrésien les gloses de Charles de Hertaing sont, à ce point de vue, particulièrement suggestives or, le lecteur aurait souhaité de voir exposer, en quelques mots d'introduction, les grandes lignes de cette évolution il aurait ainsi mieux saisi l'intérêt des documents mis sous ses yeux. On peut s'étonner de même de ne trouver, dans l'avantpropos, aucune indication sur la filiation des manuscrits ayant servi à l'établissement des textes les auteurs expriment bien leur préférence pour telle ou telle version, mais sans toujours la justifier une plus grande précision eût été préférable. Enfin, le vocabulaire juridique du xme et du xive siècle présente quelques difficultés d'interprétations, encore accrues ici du fait du caractère très dialectal de la langue employée des notes explicatives destinées à élucider les passages obscurs eussent été les bienvenues. Ces réserves de détail ne doivent, toutefois, pas faire sous-estimer l'intérêt et la valeur de cet important recueil juridique.

dique. Étienne DELCAMBRE.


Jules CLOSO N. Un évêque de Liège peu connu de la fin du XIIIe siècle, Jean d'Enghien (1274-1281). (Extrait du Bulletin de l'Institut archéologique liégeois, t. LXII (1933), p. 41 à 82.)

M. Closon a eu l'heureuse idée de rattacher à l'histoire générale un épisode assez obscur des annales de sa patrie liégeoise. Une question domine, à la fin du XIIIe siècle, toute la politique des Pays-Bas, c'est la querelle de succession qui éclata entre les d'Avesnes et les Dampierre, enfants des deux lits de Marguerite de Constantinople, comtesse de Flandre et de Hainaut. On sait qu'appelé à arbitrer ce litige, saint Louis avait, en janvier 1246, attribué la Flandre aux Dampierre et le Hainaut aux d'Avesnes les premiers s'étaient déclarés satisfaits de cette décision et s'étaient appuyés sur la France pour la faire respecter les seconds avaient refusé de la reconnaître et, pour la combattre, avaient sollicité l'appui de l'Empire. Ce conflit n'eut pas pour unique théâtre l'héritage de la comtesse les deux partis rivalisèrent d'influence pour gagner à leur cause les principautés limitrophes, et notamment le pays liégeois. Faut-il attribuer à une action concertée du roi des Romains Rodolphe de Habsbourg, du Chapitre Saint-Lambert et du comte de Hainaut Jean II d'Avesnes, la désignation, en 1274, par le pape Grégoire IX, de Jean d'Enghien comme successeur d'Henri de Gueldre, l'évêque de Liége déposé? Rien ne le prouve, et l'hypothèse émise à ce sujet par M. Closon, pour timide qu'elle soit, semble un peu hasardée. Nous reconnaissons toutefois avec lui que cette nomination était favorable au parti du comte de Hainaut le nouvel élu était, en effet, le fils de Sieger d'Enghien, baron hennuyer des plus dévoués à la maison d'Avesnes.

Le comte de Hainaut ne put toutefois bénéficier de ce succès, car Jean d'Enghien se montra inférieur à sa tâche, fut sans influence à Liège et n'y subit que des échecs. Le plus retentissant fut celui qui résulta de la guerre dite de la Vache, épisode liégeois de la querelle des d'Avesnes et des Dampierre dès l'épiscopat d'Henri de Gueldre, un différend de caractère féodal avait surgi entre l'évêque de Liège et le comte de Namur, qui n'était autre alors que Guy de Dampierre, comte de Flandre. Le litige se serait sans doute apaisé de lui-même si un sectateur de la maison d'Avesnes n'avait, en la personne de Jean d'Enghien, succédé à Henri sur le siège épiscopal de Liège. Le conflit féodal dégénéra alors en une lutte de familles et s'envenima. La guerre tourna mal pour Jean d'Enghien abandonné par Rodolphe de Habsbourg, le prélat dut solliciter l'arbitrage du roi de France Philippe le Hardi, l'allié de Guy de Dampierre c'était pour l'évêque et, par-dessus lui, pour la maison d'Avesnes et pour l'Empire, un cuisant échec. A l'intérieur, la politique de Jean d'Enghien fut aussi malheureuse. Dès 1275, un conflit éclata à Liège entre la commune et le Chapitre


Saint-Lambert pour'une question fiscale les citains, en dépit des privilèges capitulaires, voulaient contraindre les chanoines et leurs suppôts à contribuer aux subsides levés par la municipalité et prétendaient enfreindre l'immunité du quartier de la Sauvenière, appartenance du Chapitre. Après avoir tenté de jouer le rôle de médiateur, Jean d'Enghien finit, en 1279, par embrasser le parti de la commune. Mal lui en prit. Il se heurta à une rébellion générale de son clergé celui-ci déclara la grève liturgique et interrompit l'office divin l'évêque eut beau riposter par l'excommunication des chanoines, et l'échevinage par le boycottage judiciaire au préjudice des clercs le Chapitre persista dans sa rébellion et l'autorité épiscopale sortit du conflit gravement compromise. La situation obérée de l'évêché liégeois acheva de perdre le prélat harcelé par ses créanciers, Jean tomba, en 1281, sous les coups des séides du plus redoutable d'entre eux, Henri de Gueldre, son prédécesseur. L'assassinat de Jean d'Enghien laissa le champ libre aux intrigues de l'adversaire des d'Avesnes le comte de Flandre, alors tout-puissant, réussit sans peine à faire nommer évêque de Liège son propre fils, Jean de Dampierre.

En dégageant son étude du cadre trop restreint de l'histoire locale, M. Closon en a accru l'intérêt. Il a procédé à un dépouillement minutieux des sources et, du point de vue critique, la biographie qu'il a dressée peut être considérée comme un modèle du genre elle ouvre des horizons nouveaux sur la querelle des d'Avesnes et des Dampierre et sur les rivalités d'influences franco-hennuyères dans le pays liégeois. Qu'on nous permette d'ouvrir une parenthèse sur un point de détail M. Closon fait allusion (p. 28) à une lettre curieuse adressée à Rodolphe de Habsbourg par un correspondant inconnu, identifié par Heller et par Franke avec Jean II d'Avesnes, puis par Redlich avec André de Rode, chanoine de Saint-Lambert et agent du roi des Romains. Ce document m'a vivement intrigué lors de la préparation de mon travail sur Les relations de la France avec le Hainaut1. il est tiré, si ma mémoire est fidèle, d'un recueil de lettres-types proposées comme modèles de style épistolaire. Sa forme grandiloquente et ampoulée m'avait surpris. S'agit-il vraiment d'une pièce diplomatique ou ne nous trouverionsnous pas, au contraire, en présence d'une simple fiction littéraire élaborée dans un but didactique. Plus séduit, je l'avoue, par la seconde hypothèse que par la première, je n'ai pas cru prudent de faire état de ce texte. A l'exemple de Heller, de Franke, de Redlich et de Schoolmeesters, M. Closon n'a pas partagé mes scrupules. Peut-être a-t-il eu raison, mais j'aurais aimé à voir l'auteur justifier son point de vue. Étienne DELCAMBRE.

1. Dans Mémoires et publications de la Société des sciences, des arts et des lettres du Hainaut, t. LXIX (1930).


Société d'histoire du droit des pays flamands, picards et wallons; comptes-rendus des journées d'histoire régionale tenues à Liège du 20 au 23 mars 1932 et à Douai du 10 au 12 avril 1933. Lille, 1932. Gr. in-8°, 46 pages et 1 plan. Lille, 1933. Gr. in-8°,' 16 pages.

La Société d'histoire du droit des pays flamands, picards et wallons, dont le siège est à Lille, a tenu sa session de 1932 à Liège et celle de 1933 à Douai. La première a été particulièrement brillante par le nombre et la valeur des communications qui y ont été lues les juristes et les historiens les plus éminents de la Belgique, de la Hollande et du nord de la France s'y étaient donné rendez-vous. Les sujets les plus intéressants et les plus variés y ont ainsi été traités force nous est donc de nous borner à en énumérer les titres.

M. Piétresson de Saint-Aubin, archiviste du département du Nord, a entretenu les sociétaires des Influences germaniques sur la diplomatique des évêques de Cambrai; M. Léonce Dubois, avocat au barreau de Douai, du Calendrier des échevins de Montreuil-sur-Mer au XVe siècle; M. Wagon, président honoraire de la cour d'appel de Douai, de la Réformation des mauvaises coutumes de Douai en 1519; M. Van Iterson, professeur à l'Université de Leyde, de Quelques observations à propos de la marche du Hoogland, près d'Amersfoort; M. Lepointe, professeur à la Faculté de droit de Lille, de Quelques difficultés dans le clergé du Hainaut à propos de ses finances après les conquêtes de Louis XIV; M. Ganshof, professeur à l'Université de Gand, du Sens de « contradicere » et de « tegenseggen » dans la charte de Kolmont; M. Lévy-Bruhl, professeur à la Faculté de droit de Paris, des Questions relatives au droit commercial en Artois au XVIIIe siècle M. Turpin, membre de la Commission historique du département du Nord, de la Survivance dans les noms de lieux de la notion de limite et, plus particulièrement, de limite de juridiction; M. Decroix, avocat au barreau de Lille, des Recherches sur les assemblées du pays de l'Allœu; M. Fairon, conservateur des Archives de l'État à Liège, de la Législation sociale à Liège aux XVIe, XVIIe et XVIlle siècles M. Espinas, archiviste honoraire au ministère des Affaires étrangères, de l'Organisation corporative des métiers de la draperie à Valenciennes dans la seconde moitié du XIVe siècle (13621403) M. Harsin, professeur à l'Université de Liège, de la Renonciation de Marie de Bourgogne à ses droits sur la principauté de Liège et ses conséquences juridiques; M. Poncelet, membre de la Commission royale d'histoire de Belgique, de la Nature de l'obligation dans les anciens pays de Liège et du Hainaut; M. Laurent, associé C. R. B. à l'Université de Bruxelles, des États de Brabant en 1380-1381. Le fascicule de 1932 se termine par deux articles plus étendus l'un, de M. Lévy-Bruhl, a trait à un Document inédit sur le droit commercial en Artois au XVIIIe siècle;


l'autre, de M. Polain, est consacré à la Formation territoriale de la cité de Liège; c'est une étude approfondie de géographie historique, complétée par une note annexe sur l'Emplacemment et l'époque des fortifications de la cité de Liège.

Moins nombreuses, les communications faites à la session de 1933 ne le cèdent en rien en valeur à celles de l'année précédente. M. Wagon y a parlé de l'Histoire du palais de justice de Douai; M. Vanhaeck, docteur en droit, de la Désignation du nom du seigneur dans les actes d'échevinage en Flandre wallonne aux XIIIe et XIVe siècles; M. Dupire, professeur au lycée Pasteur, du Picard au XIIIe siècle dans la Flandre et le Hainaut; M. de Pas, secrétaire général des Antiquaires de la Morinie, de la Tutelle des orphelins à Saint-Omer au XIVe siècle; M. Thomas, professeur d'histoire au lycée de Lille, des Lacunes des gros briefs de Flandre aux XIIe et XIIIe siècles et de la Reconstitution possible des gros briefs de 1187, 1239 et 1295 M. Harsin, des Sources inédites de l'histoire du Grand Conseil des Pays-Bas, de 1417 à 1504; M. Espinas, de Jacques le Blond, patricien et drapier douaisien du temps des révolutions urbaines; M. Bauchond, avocat au barreau de Valenciennes, de la Punition du suicide dans le droit municipal valenciennois au début du XVIe siècle M. de Mereuil, avocat à la cour d'appel de Douai, des Avocats au parlement de Flandres et M. Monier, enfin, professeur à la Faculté de droit de Lille, a esquissé une Étude succincte de la procédure civile à Lille au moyen âge.

Chacune de ces communications, par sa valeur comme par son originalité, mériterait une analyse au moins sommaire aussi regrettonsnous de ne pouvoir, faute de place, offrir au lecteur qu'une énumération dont la sécheresse et le laconisme rappellent ceux d'une table des matières.

Étienne DELCAMBRE.

Actes et documents anciens intéressant la Belgique conservés aux Archives de l'État à Vienne (Haus-Hof-und Staatsarchiv. Niederlândische Urkunden), 1196-1356, publiés par Henri LAURENT. Bruxelles, Maurice Lamertin, 1933. In-8°, xiv-224 pages. (Commission royale d'histoire.)

Les Niederlândische Urkunden ne sont actuellement, dans les Archives de l'État à Vienne, qu'un débris de fonds d'archives enlevées précipitamment de Bruxelles, en 1794, par les Autrichiens évacuant alors les Pays-Bas. Cette collection, qui ne contient qu'environ 600 actes, formait, avant les restitutions faites à la France et à la Belgique au courant du xixe siècle, un fonds beaucoup plus important. Le chanoine Laenen avait déjà dressé un inventaire analytique de ce qui subsiste Les Archives de l'État à Vienne du point de vue de l'histoire de Belgique {Bruxelles, 1924. in-8°. Commission royale d'histoire) mais M. Henri


Laurent, bien connu par ses travaux relatifs à l'histoire de Belgique, pensa que la publication intégrale au moins des principales pièces des Urkunden ne manquerait pas de rendre service aux érudits qui s'intéressent aux anciens Pays-Bas.

Comme il le dit dans son introduction, le volume qu'il donne aujourd'hui, dans lequel sont publiés, soit en analyse, soit in extenso, 124 actes allant du 1er juin 1196 au 5 octobre 1356, n'est que le premier d'une série qui comprendra sinon tous les actes des Niederlàndische Urkunden, mais au moins tous ceux qui, antérieurs au xve siècle, en forment la partie la plus intéressante. Au reste, si l'on parcourt ce volume, on se rendra compte qu'il sera souvent utile à consulter pour l'histoire de France pendant la guerre de Cent ans et pour l'histoire des régions du nord de notre pays. Des notes, une bonne table et de nombreuses indications bibliographiques en font un précieux instrument de travail pour le xme siècle et la première moitié du xive. Jules VIARD.

LAURENT (H.). La loi de Gresham au moyen âge. Essai sur la circulation monétaire entre la Flandre et le Brabant à la fin du XIVe siècle. Bruxelles, éditions de la Revue de l'Université, 1933. In-8°, p. 1-106 (texte) et 107-208 (documents), 1 planche de monnaies et 1 table.

Il faudra décidément renoncer aux assertions simplistes qui trop longtemps se firent accepter 1° le prince exploite délibérément la monnaie aux dépens de la fortune privée pour des fins égoïstes 2° ni lui ni ses conseillers ne se rendent compte des répercussions qui vont s'ensuivre. Le cas de la Flandre et du Brabant à la fin du xive siècle (1380-1396) nous montre, au contraire, que Philippe le Hardi obéit aux circonstances que, si les embarras de sa trésorerie le poussaient aux mutations, le commerce flamand, dans son imprudence, n'en réclamait pas moins de lui, à cause de la pauvreté des stocks monétaires, la multiplication des signes que le Brabant, et non pas seulement la duchesse Jeanne, avait un intérêt évident à l'imiter pour sauver sa propre monnaie, intérêt méconnu par les États du pays, et que les gens des comptes de Lille, lorsque vint enfin la tardive riposte du voisin, comprirent la nécessité ou de s'entendre avec lui ou de le supprimer.

C'est ainsi que M. H. Laurent élève sa monographie, si riche de notes et de documents, à la hauteur d'une étude de doctrine, ce dont témoigne ce sous-titre « La loi de Gresham au moyen âge », c'est-à-dire « La mauvaise monnaie chasse la bonne. »

Philippe le Hardi, comte de Flandre, duc de Bourgogne, etc., a profité des relations monétaires pour mettre la main sur le Brabant, mais le mouvement économique attirait irrésistiblement ce duché dans l'or-


bite de sa voisine, outre que celle-ci avait besoin de cet appui pour tenir contre la puissante Angleterre, à qui elle devait acheter ses laines pour la draperie.

Donc, Philippe imagina d'imposer au Brabant la fabrication d'une monnaie commune, mais il ne s'interdit pas de concurrencer celle-ci par des frappes indépendantes en surenchère d'affaiblissement, et, lorsque la duchesse Jeanne imagina d'en faire autant, il apparut que la seule solution était l'absorption de l'État le plus faible par le plus fort. Par là, nous voyons à plein quelle fut la réaction que les faits d'ordre monétaire exercèrent sur les faits politiques, et cette mise en lumière est un autre mérite de M. H. Laurent.

Cette étude n'est pas moins instructive au point de vue français elle nous explique les difficultés terribles contre lesquelles dut lutter Charles V la monnaie faible de Flandre et de Brabant, qui envahissait le royaume, enrayait sa réforme et devait finir par la tuer. Il y a, enfin, des observations à retenir sur la question controversée de l'origine de la traduction française du Traité de Nicole Oresme. A. DIEUDONNÉ.

Henri Carré. Le Journal d'émigration de Louis, marquis Aymer de la Chevalerie (1791-1797). In-8°, 95 pages. (Extrait du Bulletin de la Société des Antiquaires de l'Ouest.)

Très précieux à consulter sur la période révolutionnaire est le témoignage d'un émigré, témoignage spontané, jaillissant des événements et des traverses de sa douloureuse carrière. On doit donc considérer comme une appréciable acquisition pour l'histoire l'étude que M. le doyen honoraire de la Faculté des lettres de l'Université de Poitiers vient de consacrer au journal d'émigration du noble poitevin Louis Aymer de la Chevalerie, officier d'ordonnance du prince de Condé en son armée de cidevants, combattant, intriguant pour le rétablissement des privilèges autant que pour le relèvement du trône en France. La brochure de M. H. Carré comporte une biographie de l'émigré poitevin, dont le journal et les lettres sont ensuite étudiés au point de vue de ses sentiments à l'égard des coalisés, Prusse, Autriche, Angleterre, puis à l'égard des patriotes, avec ses jugements sur les « Condéens », enfin à l'égard des neutres, chez lesquels les aventureux aristocrates jouissaient parfois des agréments de la vie mondaine. Entre autres contributions à l'histoire militaire et diplomatique que M. H. Carré a tirées savamment des écrits de Louis Aymer, on ne manquera pas d'attacher une particulière importance aux renseignements nouveaux fournis sur l'invasion de Brunswick et de Wûrmser en Alsace, au portrait que l'émigré trace de ces deux hommes, aux soupçons que lui inspirent les manœuvres du chancelier autrichien Tugut, se propo-


sant à la fois de « rendre les Alsaciens à l'Allemagne » et d'amadouer les patriotes français, qu'en sa qualité de politicien parvenu il n'est pas tenté de mépriser. On sera frappé de l'éloge accordé à plusieurs reprises par les émigrés et par des généraux coalisés aux qualités militaires du duc d'Enghien. Ses exploits auraient dû mériter estime et ménagements à la pitoyable victime de Napoléon.

On remarquera aussi chez les Condéens les discordes nées de prétentions ambitieuses, d'avidités faméliques, même d'exagérations fanatiques telles que celles de ces chevaliers chrétiens, « têtes chaudes » qui affectaient de « jeter la défaveur sur Condé » et qui furent l'objet de mesures sévères de la part de leur chef. Ces exaltés, voués au « rétablissement du trône et de l'autel », n'ont-ils pas, malgré tout, maintenu leur faction jusqu'au triomphe de la monarchie? N'ont-ils pas été, dans une certaine mesure, les précurseurs de ces Chevaliers de la Foi, dont le marquis de Roux a révélé, au début de la Restauration, l'ascendant sur le parti ultra-royaliste?

La valeur documentaire du journal de Louis Aymer de la Chevalerie fait vivement désirer la publication intégrale de ce texte, dont M. H. Carré a déjà tiré un si bon parti.

H. GAILLARD.

F. KETNER. De oudste Oorkonden van het Klooster Bethlehem bij Doetinchem. Utrecht, 1932. In-8°, [iv]-152 pages et un recueil in-4° de 14 fac-similés en 10 planches phototypiques. (Bijdragen van het Instituut voor middeleeuwsche Geschiedenis der RijksUniversiteit te Utrecht, t. XVII.)

En 1856, Nijhoff découvrait à Zutphen un lot important de chartes se rapportant au couvent de Bethleem, près Doetinchem, en Hollande. Ces chartes, aujourd'hui conservées aux Archives d'État à Arnhem, ont été l'objet de suspicions graves, en particulier de la part de M. Oppermann qui, dans son ouvrage intitulé Untersuchungen zur Nordniederlandischen Geschichte des 10 bis 13 Jahrhundert, les tient provisoirement pour des faux. M. Ketner a repris la question. Se fondant sur l'étude détaillée des caractères externes et internes de ces chartes, il conclut qu'elles ont bien été écrites au couvent de Bethleem, mais, selon toute apparence, vers la fin du XIIIe siècle, c'est-à-dire à une époque plus ou moins éloignée, selon les cas, de leurs dates respectives. Pour suivre utilement la discussion paléographique et diplomatique de M. Ketner et juger du bien-fondé de ses conclusions, il faudrait une connaissance approfondie, que nous ne possédons pas, de la langue néerlandaise. Il suffira de signaler ici ce travail, auquel ne pourront se dispenser de recourir ceux qui voudraient utiliser à un point de vue quelconque ces chartes de Bethleem.

Ch. SAMARAN.


Cari WEHMER. Die Namen der gotischen Buchschriften. Ein Beitrag zur Geschichte der lateinischen Palaographie. Halle, [1932]. In-8°, 48 pages. (Inaugural-Dissertation de Berlin.) Bon travail de séminaire. L'auteur a pris la peine de rechercher dans les textes les sens divers du mot gothique depuis la Renaissance jusqu'au xvme siècle, époque où il a été appliqué pour la première fois à un système d'écriture déterminé. Sur les noms portés par la seriptura libraria gothique aux époques mêmes où elle a été employée (textura, textus, fractura, littera formata, rotunda, bastarda, etc.), M. Wehmer s'est livré à des recherches analogues qui, dans l'ensemble, ne permettent guère de formuler de conclusions nouvelles, mais qui n'en seront pas moins utiles aux paléographes en raison du grand nombre de références, parfois peu connues, qui leur sont fournies.

Là ne s'arrêtait pas le travail de M. Wehmer. Il avait également rassemblé de nombreuses notes sur l'origine et le développement de l'écriture gothique. Seul un court résumé nous en est donné, mais l'auteur se propose d'en publier quelques chapitres. Nous les attendons avec intérêt et curiosité.

Ch. SAMARAN.

Geofroy Tory. Champ Fleury ou l'Art et science de la proportion des lettres. Reproduction phototypique de l'édition princeps de Paris, 1529, précédée d'un avant-propos et suivie de notes, index et glossaire, par Gustave COHEN, professeur à la Sorbonne. Paris, Charles Bosse, 1931. Gr. in-8°, xix-67 pages.

Ce célèbre Champ Fleury, d'une érudition vaste, mais touffue, plein d'idées neuves et fécondes, mais aussi de beaucoup de puérilités dignes de certains représentants du moyen âge scolastique, n'en restera pas moins l'un des monuments les plus précieux de la typographie française. Si Geofroy Tory n'y précise pas encore il devait le faire un peu plus tard sa pensée sur les signes nouveaux (apostrophe, c cédillé, accents sur les voyelles toniques), dont on lui doit, sinon l'invention, du moins l'introduction raisonnée dans les ateliers d'imprimerie, il y donne cependant, avec une défense et illustration de la langue française qui a le mérite d'être antérieure de vingt ans au manifeste de Joachim du Bellay, « cette admirable technique géométrique des lettres, d'une pureté de forme et d'une élégance qui ne furent jamais dépassées » (Thibaudeau, La lettre d'imprimerie, t. 1, p. 171).

C'est donc une idée heureuse que d'avoir songé à reproduire par le procédé anastatique le Champ Fleury, trop difficile à consulter dans les bibliothèques. Cette reproduction, que nous devons à M. Gustave Cohen, ne laisse rien à désirer pour la fidélité et pour la clarté. Elle est précé-


dée d'un avant-propos où l'éditeur a résumé la biographie de l'artiste érudit (dessinateur, graveur, typographe et libraire) que fut Geoffroy Tory et marqué brièvement ce qui fait l'intérêt de l'ouvrage. Les notes, très abondantes, qui viennent après la reproduction, renvoient aux folios et aux alinéas. Les mots difficiles y sont expliqués, les coquilles typographiques corrigées1, les citations vérifiées, les allusions éclair- cies. M. G. Cohen a réalisé là, avec une conscience digne de tous les éloges et une érudition qui m'a semblé donner fort peu de prise à la critique, un commentaire continu d'une richesse et d'une précision difficiles à dépasser. Une table onomastique et analytique, un glossaire des mots grecs, latins et français, rendent aisée l'exploitation historique et philologique du Champ Fleury et achèvent de donner tout son prix à une publication qui fait également honneur à M. Charles Bosse, l'éditeur commercial, à M. Gustave Cohen, l'éditeur scientifique, et à M. Abel Lefranc, à qui elle est dédiée.

Ch. SAMARAN.

Xurxo Lorenzo. Notas de diplomatica galega. 0 protcolo nos documentos do outo meio-evo. Sant-Iago, Imprenta Paredes, 1933. In-8°, 22 pages. (Pubricado en Arquivos do Seminario de Estudos Galegos, VI. Seiciôn de Hestoria.)

Ces notes sont le résultat du dépouillement d'un certain nombre de fonds d'archives ecclésiastiques de la Galice, et particulièrement de celui du monastère de S. Martifio Pinario, poussé jusqu'au milieu du XIIe siècle. Ce terme final, qui coïncide avec la disparition de l'écriture wisigothique, clôt un cercle diplomatique, celui du haut moyen âge galicien. L'auteur étudie les quatre parties du protocole initial, invocation, suscription, adresse et salut, et en relève les diverses formes. Étude de diplomatique purement formelle, mais conduite avec méthode et avec un souci méritoire de la classification. Les pages les plus intéressantes concernent le chrismon. Des dessins accompagnent le texte et permettent de suivre l'évolution de cette figure, où l'on retrouve, sous un tracé cursif et plus ou moins compliqué, les éléments constitutifs du monogramme constantinien complétés par la lettre S suspendue à l'extrémité inférieure du P.

Georges TESSIER.

Dom Thierry RuiNART. Mabillon. Nouvelle édition par un moine de l'abbaye de Maredsous. Paris, Desclée, De Brouwer et Cie et 1. Fol. LXIII r°, al. 2, M. Cohen ne paraît pas avoir aperçu que goffes pour gottes (gothiques) est une simple faute d'impression.


P. Lethielleux, et abbaye de Maredsous, 1933. In-12, 236 pages. (Collection « Pax », vol. XXXV.)

En septembre 1709, moins de deux ans après la mort de son maître, Dom Thierry Ruinart publiait à Paris un Abrégé de la vie de Dom Jean Mabillon. Le mot abrégé est pris exclusivement ici dans le sens de récit succinct et ne désigne pas le résumé d'un ouvrage antérieur. La relation se présente sous forme d'une lettre adressée au duc de Perth. En 1714 paraissait à Padoue une traduction latine de l'abrégé, œuvre d'un bénédictin anonyme que les bibliographes s'accordent à identifier avec Dom Claude de Vie.

Rappelons la portée exacte de cette biographie. Il s'agit avant tout d'un portrait moral, duquel émanera un parfum d'édification. Sur son dessein, Dom Ruinart s'explique sans ambages auprès du duc de Perth « Au reste, je me restreindrai dans cet écrit, comme nous en sommes convenus, à ce qui regarde principalement la vertu et la piété du Père Mabillon et si je rapporte quelque chose des ouvrages qu'il a donnés au public, ou des voyages qu'il a été obligé d'entreprendre, ce ne sera que pour servir de fondement à ce que j'aurai à dire de ses vertus, ou pour former quelque suite et quelque liaison entre les choses que je dois raconter. »

Ceci posé, veillons à ne pas déprécier la valeur historique, tant au point de vue des faits matériels qu'au point de vue psychologique, d['un document de première main. Ici encore, laissons parler l'auteur « Je ne puis pas nier qu'ayant eu le bonheur d'avoir été élevé dès ma jeunesse auprès de ce saint religieux, d'avoir été près de vingt-six ans le témoin de toutes ses actions et même d'avoir connu particulièrement des personnes qui avaient vécu avec lui dès ses premières années, dont j'ai appris aussi bien de lui-même plusieurs choses singulières, il n'y a personne au monde de qui on doive attendre davantage là-dessus que de moi. »

Rendons hommage au charme qui se dégage de ce livret écrit par le meilleur des disciples à la mémoire du meilleur des maîtres, dans la simplicité d'une âme bénédictine et l'émotion de la piété filiale, et remercions les éditeurs qui ont remis à notre portée l'oeuvre de Dom Ruinart.

Georges TESSIER.

Catalogue de la collection d'armes anciennes européennes et orientales de Charles Buttin [par François Buttin]. Rumilly, l'auteur, 1933. In-8°, 284 pages, pl.

La collection d'armes réunie à Rumilly, en Haute-Savoie, par M. Charles Buttin est célèbre parmi les spécialistes. L'érudition très


étendue de son auteur, ses connaissances en technique métallurgique, en histoire de l'armement et de l'ornementation des armes blanches et à feu, ses découvertes personnelles faisaient de lui un expert auquel les amateurs et les conservateurs de musées des divers pays de l'Europe avaient fréquemment recours. Très modeste, Ch. Buttin a peu publié et ne fit rien qui pût attirer l'attention du grand public sur lui-même ou sur l'ensemble remarquable d'armes de toutes les époques et de toutes les contrées que patiemment, judicieusement, il sut réunir. A sa mort, survenue il y a deux ans, il n'avait pas achevé le catalogue de cette précieuse collection, auquel il travaillait depuis longtemps, préoccupé surtout de perfectionner et de compléter les séries d'armes de son musée. Il songeait à faire à propos de ce catalogue l'histoire de l'armement en Orient et l'étude des influences réciproques de l'Europe et de l'Orient, étude qui eût été bien précieuse aux archéologues. Son fils, M. François Buttin, a repris l'oeuvre paternelle et achevé, puis publié, le catalogue de sa collection. Il compte 1,112 articles groupés en deux grandes divisions armes européennes et armes orientales. Il énumère, décrit et identifie successivement les casques, les boucliers, les armures, les dagues, épées et sabres, les arbalètes, les armes à feu, etc. puis pour l'Orient, de la Pologne au Japon, de l'Arabie au Maroc, les armes de chasse ou de guerre de ces lointaines contrées. Les plus anciennes de ces pièces datent de l'époque préhistorique et proviennent de fouilles, les plus récentes sont du xixe siècle beaucoup datent du moyen âge et de la Renaissance.

Il faut féliciter M. François Buttin d'avoir su mener à bonne fin, avec une parfaite compétence, ce délicat et utile travail, qui contribuera à faire mieux connaître en France une collection depuis longtemps célèbre à l'étranger.

Jean CORDEY.

Joseph CUVELIER. Travaux du cours pratique d'archivéconomie donné pendant l'année 1927. Archives générales du royaume. Tongres, Michels-Broeders, 1933. In-8°, cxxxv-701 pages. L'auteur de ce volume, en réalité, n'est pas notre collègue M. Cuvelier et le titre exact n'est pas celui que nous donnons. Nous sommes, en effet, en présence d'un très bel inventaire de l'Assistance publique de la ville de Louvain, établi par M. Marcel Bourguignon, archiviste-paléographe, et auquel ne manque, pour être complet, qu'une table onomastique qui, achevée dès maintenant, paraîtra prochainement. M. Bourguignon explique, dans sa longue et remarquable introduction, les conditions où les fonds des institutions d'assistance louvaniennes se sont constitués et fait l'histoire, succincte, mais claire et indispensable, pour comprendre l'économie de son inventaire, des organismes antérieurs à 1796 (institutions paroissiales, béguinages, hôpitaux, hospices et asiles)


ou des commissions postérieures à la réforme de l'époque révolutionnaire.

Si M. Cuvelier a pu introduire l'inventaire rédigé par M. Bourguignon dans sa belle collection de Travaux, c'est que le fonds inventorié a été déposé en 1925 aux Archives générales du royaume. C'est grâce à lui que ce dépôt a été fait et, sous son contrôle, l'inventaire établi. Félicitons à la fois M. Cuvelier et M. Bourguignon ils ont donné un modèle du genre, qui pourra être utile hors de Belgique même. Georges BOURGIN.

Joseph SIEMIENSKI. Guide des archives de Pologne. 1 Archives de la Pologne ancienne. Varsovie, Éditions des Archives de l'État, 1933. In-8°, 119 pages et 1 tableau.

M. Siemienski, directeur des Archives centrales de Pologne, s'est évidemment ingénié à faire coïncider l'apparition de son Guide avec la tenue, à Varsovie, du Congrès international des sciences historiques. Mais ceux même des historiens qui n'ont pu se rendre en Pologne en 1933 lui sauront gré d'avoir ajouté à ses soucis administratifs celui de mettre à la disposition des travailleurs étrangers cet excellent ouvrage, qui est bien plus que ce que son titre prétend indiquer, mais une sorte de contribution, conçue sur le plan archivistique, de l'histoire des institutions polonaises elles-mêmes. Cette observation préliminaire suffit pour souligner l'intérêt du Guide de M. Siemienski, dont l'idée maîtresse sera applaudie par tous ceux qui ne voient pas dans l'archivistique la desséchante énumération de fonds morts et poussiéreux, mais, bien au contraire, la méthode la plus propre pour comprendre le fonctionnement intime des institutions.

Le directeur des Archives centrales de Pologne connaît bien, d'une part, l'histoire constitutionnelle de son pays et, de l'autre, la dispersion intense des papiers élaborés, au cours des siècles, par les pouvoirs et les administrations qui y ont fonctionné. Ainsi, en partant du tableau dressé, en ordre hiérarchique, de ces pouvoirs et administrations, il a établi l'état des fonds d'archives, tels qu'ils devraient constitutionnellement et hiérarchiquement exister, état abstrait, par suite, et la répartition réelle de ces fonds, avec l'indication des groupements accidentels qui ont pu être opérés. Cette entreprise n'a pas manqué d'offrir des difficultés multiples, étant donné le caractère même de l'histoire de la Pologne, avec les partages territoriaux et la résurrection nationale que cette histoire comporte, avec les empiétements multiples des diverses hiérarchies au point de vue chronologique, territorial ou juridique, avec, enfin, les usages archivistiques propres aux divers pouvoirs et les « mises en ordre » artificielles imaginées par les archivistes eux-mêmes.


M. Siemienski semble avoir vaincu ces difficultés, et les dix-sept régimes dont il dresse la liste (p. 16-17) constituent la base du classement théorique des fonds d'archives polonais, compte tenu des fonctions des organismes centraux et locaux et des hiérarchies ecclésiastiques multiples du pays. Ce classement théorique, bouleversé par les circonstances historiques et les dangereuses théories des classificateurs dont M. Siemienski ne songe pas à masquer les efforts, s'oppose, si l'on peut dire, à la description concrète et localisée des fonds présentement dispersés (p. 67 et suiv. et 96 et suiv.).

Une bibliographie choisie d'archivistique polonaise (p. 100 et suiv.), des listes des institutions « créatrices d'archives » et des fonds d'archives, une chronologie des institutions correspondant à l'existence de la Pologne de 1772, premier partage, à 1795, troisième partage, complètent le Guide établi par M. Joseph Siemienski, à l'activité et à la consciencieuse intelligence duquel il convient de rendre l'hommage qu'elles méritent.

Georges BOURGIN.

Association des bibliothécaires français. Manuel pratique du bibliothécaire, par Léo CROZET, de la Bibliothèque nationale. Préface de MM. Pol NevEux et Charles SCHMIDT, inspecteurs généraux des bibliothèques. Paris, E. Nourry, 1932. Petit in-8°, viii-279 pages, figures.

Les inspecteurs généraux des bibliothèques avaient demandé, en 1929, à l'Association des bibliothécaires français, de rédiger des instructions précises qui pussent guider les conservateurs de bibliothèques et servir à l'instruction des étudiants qui se destinent à cette carrière. Le Comité désigna une commission composée de MM. Coyecque, Crozet, Giraud-Mangin, Joly, Lemaître et Vendel. Celle-ci, ayant précisé les directives à suivre, confia la rédaction à M. Crozet et, après plusieurs réunions d'étude, adopta le texte définitif du Manuel, le 19 avril 1932. Les divers chapitres concernent l'architecture de la bibliothèque, la constitution des fonds, leur classement, la rédaction des catalogues, les rapports avec le public, les rapports avec l'extérieur et les mesures de conservation. Un chapitre a été consacré aux bibliothèques pour enfants.

De nombreux documents sont réunis à la fin du livre cadre de classement méthodique, liste des principaux ouvrages constituant le fonds d'une bibliothèque d'étude, listes d'éditeurs et de libraires, modèles de règlements, modèles de bulletins et de fiches, etc.

Une oeuvre didactique soumise au jugement de bibliothécaires de formations si différentes que celles des membres de la commission ne pouvait réunir l'unanimité de leurs suffrages qu'à la condition de ne


traiter que les questions les plus courantes et, pour les autres, de renvoyer aux plus récentes et meilleures monographies. Le Manuel insiste donc sur les principes directeurs, dont les applications de détail se déduisent aisément. Les règles publiées par la bibliothèque du Vatican, pour la seule rédaction d'un catalogue, occupent 400 pages, et elles ne contiennent rien d'inutile. Le Manuel eût formé trois gros volumes d'un prix élevé si l'on y avait traité de certaines questions il indique les livres qui en donnent la solution, et c'est l'essentiel.

Malgré sa concision, l'on y trouvera des précisions que l'on chercherait en vain dans les manuels qui l'ont précédé sur le classement des cartes géographiques, des estampes sur les catalogues par sujets, du type alphabétique sur la méthode à suivre pour entreprendre une recherche bibliographique, etc. Et l'on y trouvera aussi, à chaque page, l'affirmation d'une tendance commune à tous les membres de la commission et à l'Association des bibliothécaires français moderniser nos vieilles bibliothèques, les adapter chaque jour davantage aux besoins sans cesse plus variés et plus étendus du public, en faire les collaboratrices des établissements d'enseignement des divers degrés et des différentes catégories, leur assurer enfin dans l'outillage des collectivités la place et le rôle qui leur reviennent.

E. C.

LIVRES NOUVEAUX

SOMMAIRE DES MATIÈRES

GÉNÉRALITÉS, 5, 30, 52, 64, 66, 75, 101, 102, 112, 128.

SCIENCES AUXILIAIRES. Bibliographie, 4, 32, 51, 91, 107, 114. Bibliothéconomie, 96, 115, 117, 147. -Bibliothécaires et bibliophiles, 55, 72. Diplomatique, 86. Typographie, histoire du livre, 54, 60, 79, 84. Papyrologie, 111. Expertise en écriture, 43. SOURCES, 133. Catalogues de bibliothèques, 21, 51. Catalogues de manuscrits, 31, 46, 57, 144. Catalogues d'archives, 98. Recueils d'actes, 6, 113. Correspondances, 42, 125.

BIOGRAPHIE. Jean Boinebroke, 49 Pietro Capocci, cardinal, 116 Charlemagne, 74 Conrad de Wurtzbourg, 100 Alexandre Farnèse, 142 Liutprand de Crémone, 83 Mazarin, 53 Peiresc, 72 Saladin, 65 Savonarole, 125 Sidoine Apollinaire, 134, Verdussen (les), imprimeurs, 79 Victor-Emmanuel II, 136 François Villon, 40.


HISTOIRE DE L'ÉGLISE, 7, 59. Ordres religieux, 6. Mysticisme, 104, 124.

HISTOIRE DU DROIT, 36, 68, 80, 92, 93, 103, 110. Droit canon, 16, 37. Droit romain, 33.

PHILOSOPHIE, 1, 94, 128.

ENSEIGNEMENT, 97. Universités, 27, 141.

HISTOIRE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE, 28, 29, 49, 73, 81, 126, 127, 129,137,143,145.

ARCHÉOLOGIE, 8, 11, 14, 47, 85, 108, 118, 130, 140, 149. – Gravure, 9. Peinture, 41, 105. Vitraux, 44. Miniatures, 46, 144, 151. Arts décoratifs, 58, 138. Musique, 109.

LANGUES ET LITTÉRATURES, 122, 131, 153. Français, 2, 3, 5, 15, 26, 35, 63, 67, 71, 77, 87, 97, 123, 126, 146, 150. -Anglais, 23, 50, 69, 104, 121, 122. Allemand, 99, 132, 152. Latin, 56, 148. – Roman, 107. Onomastique, 61.

SOMMAIRE GÉOGRAPHIQUE

Allemagne, 20 Aumale, 13 Autun, 17 Avallon, 18 Bayonne, 12 Beaupré (abbaye), 38 Berry, 90 Bourbonnais, 90 Bretagne, 127 Cambrai, 92 Champagne, 34 Dauphiné, 82 Gellone (abbaye), 139 Gergovie, 22 Lyon, 62, 84 Montreuil, 120 Nîmes, 48 Orléans, 119 Paris, 24, 25, 27, 39, 110 Reims, 19 Rome, 70 Russie, 45 Turin, 135 Valenciennes, 76.

1. ABÉLARD (Pierre). Philosophische Schriften, zum ersten Male herausgegeben von Dr. Bernhard Geyer. II. Die Logica « Nostrorum petitioni sociorum ». Die Glossen zu Porphyrius. Münster, Aschendorff, 1933. In-8°, paginé 505-648. (Beitrâge zur Geschichte der Philosophie. 21, IV.)

2. ADAM LE Bossu. Le jeu de la feuillée, édité par Ernest Langlois [réimpression]. Paris, Champion, 1933. In-8°, xx-67 p. (Les classiques français du moyen âge, 6.) 4 fr. 50.

3. AIMON VON VARENNES. Florimont, ein altfranzôsischer Abenteuerroman zum erstenmal. herausgegeben von Alfons Hilka. Gôttingen, 1933. In-8°, cxlii-640 p. (Gesellschaft für romanisehe Literatur, 48.)

4. ALBAREDA (Anselm M.). Bibliografia de la regla benedictina. Monastir de Montserrat, 1933. In-4°, xvm-670 p., ill. 75 pes. 5. Archives d'histoire doctrinale et littéraire du moyen âge. T. VIII. Paris, Vrin, 1933. In-8°, 446 p. 45 fr.


6. Archivum Fratrum Praedicatorum. Vol. II. Paris, Vrin, 1933. In-8°, 549 p. 60 fr.

7. ARENDT (Paul). Die Predigten des Konstanzer Konzils. Ein Beitrag zur Predigt-und Kirchengeschichte des ausgehenden Mittelalters. F'reiburg, Herder, 1933. In-4°, xi-267 p. 5 m.

8. AUBERT (Marcel). L'église Saint-Sernin de Toulouse. Paris, Laurens, 1933. In-12, 96 p., ill. (Collection des petites monographies des grands édifices de la France.) 7 fr. 50.

9. Audin (Marius). Étapes de la gravure sur bois. Paris, 7, rue Suger, 1934. In-4°, 100 p., ill. 70 fr.

10. BAESECKE (Georg). Der Vocabularius Sancti Galli in der angelsachsischen Mission. Halle, Niemeyer, 1933. In-fol., xi-171 p. et 44 pl. 40 m.

11. Basilica di Aquileia (La), a cura del Comitato per le ceremonie celebrative del ix° centenario della basilica. Bologna, Zanichelli, 1933. Infol., 400 1.

12. Bayonne sous l'ancien régime. T. I De Charles VII à Charles IX (1451-1560). Lettres missives des rois et reines de France à la ville de Bayonne, publiées et annotées par R. Cuzacq et B. Detchapare. Bayonne, impr. du « Courrier », 1933. In-4°, 244 p.

13. Beaurain (Georges). Aumale et sa région au xvie siècle, d'après les minutes notariales et d'autres documents nouveaux. Aumale, impr. Senville, 1933. In-8°, vm-158 p.

14. Benoist (Luc). Notre-Dame-de-l'Épine. Paris, Laurens, 1933. In-12, 96 p., ill. (Petites monographies des grands édifices de la France.) 7 fr. 50.

15. Bérinus. Roman du xive siècle, publié par Robert Bossuat. Paris, E. Droz, 1932. 2 vol. in-8°. (Société des anciens textes français.) 100 fr.

16. BERNARD (A.). La sépulture en droit canonique, du décret de Gratien au concile de Trente. Paris, Domat-Montchrestien, 1933. In-8°. 40 fr.

17. BONNEROT (Jean). Autun et le Morvan. Paris, Laurens, 1933. In-4°, 148 p. et 93 ill. (Les villes d'art célèbres.) 18 fr.

18. Bonnerot (Jean). Avallon. Paris, Laurens, 1933. In-16, 64 p., 32 ill. (Memoranda.) 5 fr.

19. BOUSSINESQ (Georges), LAURENT (Gustave). Histoire de Reims, depuis les origines jusqu'à nos jours. T. I Reims ancien, des temps préhistoriques à la mort d'Henri IV. Reims, impr. Matot-Braine, 1933. In-8°, xx-510 p., ill.


20. BRACKMANN (Albert). Deutschland und Polen. Beitrage zu ihren geschichtlichen Beziehungen. Berlin, Oldenbourg, 1933. In-8°, 279 p., ill. 6 m.

21. Britwell handlist (The), or short-title catalogue of the principal volumes from the time of Caxton to the year 1800 formerly in the library of Britwell Court, Buckinghamshire. London, Quaritch, 1933. 2 vol in-4", ill. 63 sh.

22. Busset (Maurice). Gergovia, capitale des Gaules, et l'oppidum du plateau des Côtes. Paris, Delagrave, 1933. In-8°, 152 p. 15 fr. 23. CHAMBERS (E. K.); The English folk-play. Oxford, the Clarendon press, 1933. In-8°, 250 p., ill. 10 sh.

24. CHAMPION (Pierre). La vie de Paris au moyen âge. L'avènement de Paris. Paris, Calmann-Lévy, 1933. In-16, 15 fr.

25. CHAMPION (Pierre). La vie de Paris au moyen âge. Splendeurs et misères de Paris (xive et xve siècles). Paris, Calmann-Lévy, 1934. In-16, 15 fr.

26. Chanson (La) de Roland. Fac-similé du manuscrit d'Oxford, Digby 23, édité avec un avant-propos par le comte A. de Laborde et une étude historique et paléographique de Ch. Samaran. Paris, E. Droz, 1933. In-8°. (Publications de la Société des anciens textes français.)

27. CHARLÉTY (S.) et BONNEROT (J.). L'Université de Paris, du moyen âge à nos jours. Paris, Larousse, 1933. In-8°, 223 p., ill. 45 fr. 28. CHIAUDANO (Mario). La finanza sabauda nel secolo xiii. I I rendiconti del dominio dal 1257 al 1285. Torino, 1933. In-8°, cVII-367 p. (Biblioteca della Società storica subalpina. 131.)

29. Contribution à l'histoire de la papeterie en France. Préface de H. Alibaux. Avec la collaboration d'archivistes départementaux. Grenoble, « Les Alpes », 1933. In-8°, 110 p. 12 fr.

30. CRAWFORD (S. J.). Anglo-Saxon influence on Western christendom, 600-800. Oxford, University press, 1933. In-8°, 118 p. 5 sh. 31. Codices hebraici Bibliothecae Ambrosianae, descripti a Carolo Bernheimer. Firenze, Olschki, 1933. In-fol., xvi-211 p. sur 2 colonnes et 10 pl. 500 lires.

32. CoLLiNET (Paul). Répertoire des bibliographies, vocabulaires, index, concordances et palingénésies du droit romain. Paris, librairie du Recueil Sirey, 1933. In-8°, 13 p. 10 fr.

33. COLOMBO (Alessandro). Cartario di Vigevano e del suo comitato. Torino, 1933. In-8°, xv-416 p. (Biblioteca della Società storica subalpina. 128.)


34. CROZET (René). Histoire de Champagne. Paris, Boivin, 1933. In-8°, 276 p. (Les vieilles provinces de France.) 20 fr.

35. Dâhne (Rudolf). Die Lieder der Maumarier seit dem Mittelalter. Halle, Niemeyer, 1933. In-8°, xn-203 p. (Romanistische Arbeiten. 20.)

36. Daudet (Pierre). Études sur l'histoire de la juridiction matrimoniale. Les origines carolingiennes de la compétence exclusive de l'Église (France et Germanie). Paris, librairie du Recueil Sirey, 1933. In-8°, 183 p. 35 fr.

37. DAUVILLIER (Jean). Le mariage dans le droit classique de l'Église au moyen âge, depuis le Décret de Gratien (1140) jusqu'à la mort de Clément V (1314). Paris, librairie du Recueil Sirey, 1933. In-8°, 517 p. 70 fr.

38. DEDENON (A.). L'abbaye de Beaupré. Sa place et son rôle dans le pays de Lunéville. Paris, Ficker, 1933. In-8°, xiv-210 p. 45 fr. 39. DEMANGEON (Albert). Paris, la ville et sa banlieue. Paris, éditions Bourrelier, 1934. In-8°, ill. 10 fr.

40. Desonay (Fernand). Villon. Paris, E. Droz, 1933. In-12, 200 p. 15 fr.

41. DIEHL (Charles). La peinture byzantine. Paris, les éditions d'art et d'histoire, 1933. In-4°, 112 p., ill. (Histoire de l'art byzantin.) 250 fr. 42. Diplomatie (The) Correspondance of Richard II, edited by Edouard Perroy. London, 1933. In-8°, xxxn-281 p., fac-similé. (Royal historical Society. Camden Series. III, 48.)

43. Doudon (M.). La question de l'expertise en écriture. Paris, Pédone, 1933. In-8°, ill. 15 fr.

44. Du RANQUET (Henry). Les vitraux de la cathédrale de ClermontFerrand (XIIe, XIIIe, xi,ve, xve siècles). Paris, A. Picard, 1934. In-fol., 290 p., ill. 400 fr.

45. EcK (Alexandre). Le moyen âge russe (organisation sociale de la Russie souzdalo-moscovite aux xme-xvie siècles). Préface de Henri Pirenne. Paris, Maison du livre français, 1933. In-8°, 600 p., carte. 60 fr.

46. Edhem bey (Fehmi), STCHOUKINE (Ivan). Les manuscrits orientaux illustrés de la Bibliothèque de l'Université de Stamboul. Paris, de Boccard, 1933. In-4°, 68 p., ill. (Mémoires de l'Institut français d'archéologie de Stamboul. 1.) 75 fr.

47. Elliger (Walter). Zur Entstehung und frühen Entwicklung der altchristlichen Bildkunst. Leipzig, Dieterich, 1934. In-8°. (Studien ûber christliche Denkmaler. 23.)


48. ESPÉRANDIEU (Émile). L'amphithéâtre de Nîmes. Paris, Laurens, 1933. In-16, 96 p., ill. (Petites monographies des grands édifices de la France.) 7 fr. 50.

49. Bspinas (Georges). Les origines du capitalisme. Sire Jehan Boinebroke, patricien et drapier douaisien au xme siècle. Paris, Raoust, 1934. In-8°, xxn-256 p., ill. 40 fr.

50. EVANS (Joan), SERJEANTSON (Mary S.). English mediaeval lapidaries. London, 1933. In-8°, xn-205 p. (Early English texts Society. Original series, 190.)

51. FAIDER (P.). Bibliographie des catalogues des manuscrits des bibliothèques de Belgique. Bruges, 1933. In-8°, 15 p.

52. Falco (Giorgio). La polemica sul medio evo. 1. Torino, 1933. In-8°, vn-414 p. (Biblioteca della Società storica subalpina, 143.) 53. Federn (E.). Mazarin (1602-1661). Paris, Payot, 1934. In-8°. (Bibliothèque historique.) 36 fr.

54. FRACCHIA (C.), Rizzo (B.). L'impressore tipografico. Manuale tecnico di stampa. Torino, 1933. In-8°, xxiv-444 p., ill. 25 lires. 55. Frati (Carlo). Dizionario bio-bibliografico dei bibliotecari e bibliofili italiani dal sec. xiy al xix, raccolto e pubblicato da Albano Sorbelli. Firenze, Olschki, 1934. In-8°, vn-707 p. 150 1.

56. GALLAY (Paul). Langue et style de saint Grégoire de Naziance dans sa correspondance. Paris, J. Monnin, 1933. In-8°. (Collection de philologie classique, 1.) 16 fr.

57. GAUDART (Edmond). Catalogue des manuscrits des anciennes archives de l'Inde française. Chandernagor et les loges du Bengale (17301815). T. III. Paris, Leroux, 1933. In-8°, xxn-422 p. (Société de l'histoire de l'Inde française.)

58. GAUTHIER (Joseph). Le mobilier des vieilles provinces françaises. Paris, Massin, 1933. In-8°, 230 p. et 220 ill. 90 fr.

59. GRAYZEL (Salomon). The Church and the Jews in the xmth. century. A study of their relations during the years 1198-1254 based on the papal letters and the conciliar decrees of the period. Philadelphia, the Dropsie college, 1933. In-8°, ix-377 p.

60. GRE GORI (Luigi DE). La stampa a Roma nel secolo xv. Mostra di edizioni romane nella r. Biblioteca Casanatense, aprile-mazgio 1933. Roma, Tip. Cuggiani, 1933. In-8°, 117 p., ill. 15 lires.

61. Grohler (Hermann). Über Ursprung und Bedeutung der franzôsischen Ortsnamen. II. Teil. Heidelberg, Winter, 1933. In-8°, xv491 p. (Sammlung romanischer Elementen- und Handbücher. V, 8, n.)


62. GROSCLAUDE (Pierre). La vie intellectuelle à Lyon dans la deuxième moitié du xvne siècle. Paris, Picard, 1934. In-8°, 465 p. 40 fr. 63. Gui de Warewic, édité par Alfred Ewert. Paris, Champion, 1933. 2 vol. in-8°. (Les classiques français du moyen âge, 74 et 75.) 64. Harsin (Paul). Comment on écrit l'histoire. Paris, E. Droz, 1933. In-8°, 150 p. 15 fr.

65. HARTMANN (Joh.). Die Personlichkeit des Sultans Saladin im Urteil der abendlândischen Quellen. Berlin, Ebering, 1933. In-8°, 131 p. (Historische Studien, 239.) 5 m.

66. HAUSER (Henri). La prépondérance espagnole (1559-1660). Paris, Alcan, 1934. In-8°, 596 p. (Peuples et civilisations. 9.) 60 fr. 67. Hilka (Alfons). Eine altfranzosische moralisierende Bearbeitung des Liber de monstruosis hominibus Orientis aus Thomas von Cantimpré, De naturis rerum, nach der einzigen Handschrift (Paris, Bibl. nat., fr. 15106). Berlin, Weidmann, 1933. In-8°, 73 p. (Abhandlungen der Cxesellschaft der Wissenschaften zu Gottingen. Phil.-hist. Klasse, 3. Fooger, 7.)

68. Hofmann (Karl). Der « JDictatus Papae » Gregors VII. Eine rechtsgeschichtliche Erklârung. Paderborn, Schôningh, 1933. In-8°, 150 p. (Gôrres-Gesellschaft. Verôfîentlichungen, 63.)

69. HOLTHAUSEN (F.). Altenglisches etymologisches Wôrterbuch. Heidelberg, C. Winter, 1934. In-8°, xxiv-428 p. (Germanische Bibliothek. IV. Reihe, 7. Band.)

70. Homo (Léon). A travers la Rome médiévale des vestiges du passé aux monuments du présent. Paris, Leroux, 1933. In-8°, 28 p. 71. HuGUET (Edmond). Le langage figuré au xvie siècle. Paris, Hachette, 1933. In-16, vi-256 p. 15 fr.

72. HUMBERT (Pierre). Un amateur Peiresc. Paris, Desclée, de Brouwer, 1933. In-8°, ill. (Temps et visages.)

73. Hyslop (Béatrice F.). Répertoire des cahiers de doléances pour les États généraux de 1789. Paris, Leroux, 1933. In-4°, 670 p. (Collection de documents inédits sur l'histoire économique de la Révolution française.) 80 fr.

74. Kleinglausz (A.). Charlemagne. Paris, Hachette, 1934. In-8°, ill. 50 fr.

75. Kritische Beitrâge zur Geschichte des Mittelalters. Festschrift für Robert Holzmann. Berlin, Ebering, 1933. In-8°, v-251 p., pl. (Historische Studien. 238.)


76. Lancelin (chanoine H.). Histoire de Valenciennes depuis ses origines. Valenciennes, P. Giard, 1933. In-8°, 310 p. 25 fr. 77. IAngfors (A.). Notice des manuscrits 535 de la bibliothèque municipale de Metz et 10047 des nouv. acq. du fonds français de la Bibliothèque nationale, suivie de cinq poèmes français sur la parabole des quatre filles de Dieu. Paris, Klincksieck,1933. In-4°, 155 p. (Notices et extraits des manuscrits.) 60 fr.

78. LANGLOIS (Ch.-V.). Notice sur le château du Plessis-Macé. Angers, 1932. In-8°. (Extrait de la Province d'Anjou.)

79. LE CLERCQ (L.). Les Verdussen, imprimeurs-libraires et bibliophiles anversois (1589-1834). La Haye, M. Nijhoff, 1933. In-8°, 129 p., ill., 4 Pi.

80. Lemercier (P.). Les justices seigneuriales de la région parisienne de 1580 à 1789. Paris, Domat-Montchr&stien, 1933. In-8°. 40 fr. 81. Lévy-Bruhl (H.). Histoire de la lettre de change en France aux XVIIe et xvme siècles. Paris, librairie du Recueil Sirey, 1934. In-8°, 428 p. (Bibliothèque d'histoire du droit. 5.) 100 fr.

82. LETONNELIER (G.). Mélanges d'histoire dauphinoise. Grenoble, éditions de la revue « Les Alpes », 1933. In-8°. 8 fr.

83. Lintzel (Martin). Studien über Liudprand von Cremona. Berlin, Ebering, 1933. In-8°. (Historische Studien. 233.)

84. Livre (Le) à Lyon, des origines à nos jours. Lyon, P. Masson, 1934. In-8°, 64 p. 20 fr.

85. Lonchamp (C.-F.). L'art européen du xne au xxe siècle. Paris, Fischbacher, 1934. In-16, 300 p., ill. 30 fr.

86. LORENZO (Xurxo). Notas de diplomatica galega. 0 protocolo nos documentos do outo meio-evo. Sant-Iago, 1933. In-8°, 22 p. (Extrait de Arquivos do Seminario de estudos galegos.)

87. Luc (H.), BERTRAND (E.). La pensée française et européenne, des origines à la Renaissance. Histoire littéraire et textes choisis. Paris, Delagrave, 1933. In-16. 20 fr.

88. LuzE (Albert DE). La magnifique histoire du jeu de paume. Paris, Bossard, 1933. In-4°, 416 p.

89. MACDONALD (A. J.). Authority and season in the early middle ages. London, Milford, 1933. In-8°. 6 sh.

90. MARION (Marcel). Histoire du Berry et du Bourbonnais. Paris, Boivin, 1933. In-8°, 320 p., ill. (Les vieilles provinces de France.) 20 fr. 91. Meier (W.). Bibliographie der Buchbinderei-Literatur. Ergânzungsband, 1924-1932, bei Hermann Herbst. Leipzig, Hiersemann, 1933. In-4°, vm-169 p.


92. Meijers (E. M.), BLÉ COURT (A. S. DE). Le droit coutumier de Cambrai. Haarlem, I. Willink, 1932. In-8°, x-250 p. (Rechtshistorisch Instituut, Leiden, série II, 4.)

93. MEIJERS (E. M.). Het ligurische erfrecht in de Nederlanden. Deel II Het west-vlaamsche erfrecht. Haarlem, T. Willink, 1932. In-8°, 142 p. (Rechtshistorisch Instituut, Leiden. Serie II, 5.)

94. Mélanges de philosophie offerts à J. J. Salverda de Grave. Paris, A. Nizet et Bastard, 1933. In-8°, 436 p. 75 fr.

95. Meurgey (Jacques). Les barons Mariani et leurs alliances. Nogent-le-Rotrou, impr. Daupeley-Gouverneur, 1933. In-4°, 119 p., ill. 96. MILKAU (Fritz). Handbuch der Bibliothekswissenschaft, 2. Band Bibliotheksverwaltung. Leipzig, Harrassowitz, 1933. In-4°, xv-732 p., ill

97. MILLET (Adrien). Les grammairiens et la phonétique, ou l'enseignement des sons du français depuis le xvie siècle jusqu'à nos jours. Paris, J. Monnier, 1933. In-8°. 20 fr.

98. Mon (Carlo Guido). Carte valsesiane fino al secolo xv conservate negli archivi pubblici. Torino, 1933. In-8°, ix-367 p. (Biblioteca della Società storica subalpina. 124.)

99. Moret (André). L'originalité de Conrad de Wurtzbourg dans son poème « Partonopier und Meliur ». Paris, Leroux, 1933. In-8°, 586 p., ill. 80 fr.

100. Moret (André). Un artiste méconnu Conrad de Wurtzbourg. Paris, Leroux, 1933. In-8°, 98 p. 20 fr.

101. NAU (F.). Les Arabes chrétiens de Mésopotamie et de Syrie du vne au vme siècle (étude sur les origines de l'Islam). Paris, Geuthner, 1933. In-8°, 136 p. 30 fr.

102. Nordstrom (Johan). Moyen âge et Renaissance. Traduit du suédois par T. Hammar. Paris, Stock, 1933. In-8°, 232 p. 20 fr. 103. Olivier-Martin. Précis d'histoire du droit. Paris, Dalloz, 1933. In-8°, 463 p. (Petits précis Dalloz.) 25 fr.

104. Olmes (Antonie). Sprache und Stil der englischen Mystik des Mittelalters unter Berücksichtigung des Richard Rolle von Hampole. Halle, Niemeyer, 1933. In-8°, vin-100 p. (Studien zur englischen Philologie. 76.)

105. Peinture (La) catalane à la fin du moyen âge. Conférences faites à la Sorbonne en 1931. Paris, Leroux, 1933. In-4°, 143 p., ill. (Université de Paris. Institut d'art et d'archéologie. Bibliothèque d'art catalan. 3.)


106. Petit-Dutaillis (Ch.). La monarchie féodale en France et en Angleterre, xe-xme siècles. Paris, la Renaissance du livre, 1933. In-8°, xvn-479 p. (L'évolution de l'humanité.) 40 fr.

107. Pillet (Alfred). Bibliographie der Troubadours, erganzt, weitergeführt und herausgegeben von Dr. Henry Carstens. Halle, Niemeyer, 1933. In-8°, xliv-518 p. (Schriften der Konigsberger gelehrten Gesellschaft. Sonderreihe, 3.) 26 m.

108. PLAT (Gabriel). L'église de la Trinité de Vendôme. Paris, Laurens, 1934. In-8°, 108 p., ill. (Petites monographies des grands édifices de la France.) 7 fr. 50.

109. Polyphonia sacra. A continental miscellany of the xvth century, edited by Ch. van den Borren. London, the Plainsong and mediaeval music Society, 1932. In-4°, Lv-294 p.

110. Pommeray (Léon). L'officialité archidiaconale de Paris aux xve et xvie siècles. Sa composition et sa compétence criminelle. Paris, librairie du Recueil Sirey, 1933. In-8°, 616 p. 80 fr.

111. Preisendanz (Karl). Papyrusfunde und Papyrusforschung. Leipzig, Hiersemann, 1933. In-8°, xvi-372 p. 20 m.

112. Radczun (Willi). Das englische Urteil über die Deutschen bis zur Mitte des xvii. Jahrhunderts. Berlin, Ebering, 1933. In-8°, 220 p. (Germanische Studien. 136.)

113. Ramackers (Johannes). Papsturkunden in den Niederlanden (Belgien, Luxemburg, Holland und Franzôsisch-Flandern). 1. Archivberichte. Berlin, Weidmann, 1933. In-8°, 82 p. (Abhandlungen der Gesellschaft der Wissenschaften zu Gôttingen. Phil.-hist. Klasse. III. Folge, 8.)

114. READ (Conyers). Bibliography of British history, Tudor period, 1485-1603. Oxford, the Clarendon press, 1933. In-8°, xxm-467 p. 115. Règles catalographiques à l'usage des bibliothèques de Belgique. Catalogue alphabétique d'auteurs et d'anonymes, par J. Van Hove, F. Remy, J.-F. Vanderheijden. Ixelles, R. Henriquez, 1933. In-8°, 256 p. 90 fr.

116. Reh (Friedrich). Kardinal Peter Capocci. Ein Staatsmann und Feldherr des xm. Jahrhunderts. Berlin, Ebering, 1933. In-8°, 183 p. (Historische Studien. 235.)

117. Revue (La) du livre. Cahiers mensuels de bibliothéconomie, librairie, bibliographie et science du livre publiés sous la direction de G. de Grolier. Paris, 30, boulevard Saint-Michel. 25 fr. par an. 118. REY (Raymond). L'art gothique du midi de la France. Paris, Laurens, 1934. In-8°, 352 p., ill. 80 fr.


119. RIGAULT (Georges). Orléans et le Val de Loire. Paris, Laurens, 1933. In-4<>, 160 p. et 116 ill. (Les villes d'art célèbres.) 18 fr. 120. Rodière (Roger). Le pays de Montreuil. Paris, A. Picard, 1934. In-4°, 459 p., ill. (Société des antiquaires de Picardie.)

121. Romance (The) of Alexander. A collotype facsimile of ms. Bodley 264, with an introduction by M. R. James. Oxford, the Clarendon press, 1933. In-fol., 52-402 p. £ 12.12.

122. Roy (Fr. van). English from Latin with French and Dutch equivalents. Paris, Leroux, 1933. In-8°, 472 p. 55 fr.

123. RUTEBEUF. Le miracle de Théophile. Transposition de M. Gustave Cohen. Paris, Delagrave, 1933. In-12, ill. 8 fr.

124. SABA (Agostino). Federico Borromeo e i mistici del suo tempo, con la vita e la corrispondenza inedita di Catarina Vannini da Siena. Firenze, Olschki, 1933. In-8°, xxxn-280 p., ill. (Fontes Ambrosiani. 7.) 901. 1.

125. Savonahola (Girolamo). Lettere, ora per la prima volta raccolte e a miglior lezione ridotte da Roberto Ridolfi. Florence, Olschki, 1933. In-8°, cxciv-272 p. et 20 pl. 150 1.

126. SCHILPEROORT (C.). Le commerçant dans la littérature française du moyen âge (caractère, vie, position sociale). Paris, Nizet et Bastard, 1933. In-8°, xi-158 p. 50 fr.

127. SÉE (Henri). Étude sur la vie économique en Bretagne (1772an III). Paris, Leroux, 1933. In-4°, 82 p.

128. SÉE (Henri). Science et philosophie de l'histoire, 2e édition revue. Paris, Alcan, 1933. In-16. 25 fr.

129. Simiand (François). Recherches anciennes et nouvelles sur le mouvement général des prix du xvie au xixe siècle. Paris, Loviton, 1932. In-8°, 677 p. et 16 pl. (École pratique des hautes études. Conférences d'histoire et de statistique économique.) 70 fr.

130. Simon (G.-A.). L'abbaye de Saint-Wandrille. Paris, Laurens, 1933. In-16, 64 p., 38 ill. (Memoranda.) 5 fr.

131. SINGER (Samuel). Die religiose Lyrik des Mittelalters (das Nachleben der Psalmen). Bern, Francke, 1933. In-8°, 142 p. (Neujahrsblatt der literarischen Gesellschaft Bern. Neue Folge, 10.)

132. STAMMLER (Wolfgang). Die deutsche Literatur des Mittelalters. Verfasserlexikon. Band I. Berlin, W. de Gruyter, 1933. In-8°, xni786 p. 27 m.

133. STASIEWSKI (Bernhard). Untersuchungen über drei Quellen zur altesten Geschichte und Kirchengeschichte Polens. Breslau, Millier


und Seiffert, 1933. In-8°, xx-178 p. (Breslauer Studien zur historischen Theologie. 24.) 9 m. 50.

134. STEVENS (C. E.). Sidonius Apollinaris and his age. Oxford, the Clarendon press, 1933. In-8°, 238 p. 12 s. 6 d.

135. Studi su Torino e il Piemonte. Torino, 1933. In-8°, 207 p., ill. (Biblioteca della Società storica subalpina. 139.)

136. Studi su Vittorio Amedeo II. Torino, 1933. In-8°, 389 p. (Biblioteca della Società storica subalpina. 140.)

137. TAEUBER (Walter). Geld und Kredit im Mittelalter. Berlin, Heymann, 1933. In-8°, 365 p.

138. THEOPHILE. Technik des Kunsthandwerks im x. Jahrhundert. Des Theophilus presbyter Diversarum artium schedula, in Auswahl neu herausgegeben, übersetzt und erlautert von Dr. Wilhelm Theobald. Berlin, VDI-Verlag, 1933. Gr. in-4°, xxxi-553 p., ill. 40 m. 139. TissET (Pierre). L'abbaye de Gellone au diocèse de Lodève, des origines au xme siècle. Paris, librairie du Recueil Sirey, 1933. In-8°, 243 p. 32 fr.

140. TOUTAIN (J.). La basilique primitive de Sainte-Reine sur le Mont Auxois. Paris, Leroux, 1933. In-8°, 26 p., 3 pl. (Pro Alesia.) 10 fr. 141. Université (L') de Caen, son passé, son présent (1431-1932). Caen, Jouan et Bigot, 1933. 2 vol. in-8°. 100 fr.

142. VAN DER EssEN (Léon). Alexandre Farnèse, prince de Parme, gouverneur général des Pays-Bas au xvie siècle (1545-1592). T. I. Paris, Les éditions d'art et d'histoire, 1933. In-8°, 350 p.

143. VAN Dillen (J. G.). History of the principal public banks, accompanied by extensive bibliographies of the history of banking and credit in 11 european countries. The Hague, M. Nijhoff, 1934. In-8°, xn-480 p. 12 fl.

144. VARILLE (Mathieu). Les manuscrits à peintures de la bibliothèque Vaticane. Lyon, P. Masson, 1932; Paris, A. Picard, 1934. In-12, 142 p. 20 fr.

145. VAUBAN. Projet d'une dîme royale, suivi de deux écrits financiers publiés. par E. Coornaert. Paris, Alcan, 1933. In-8°, lvi-296 p. ill. (Collection des principaux économistes.) 50 fr.

146. Vie (la) de saint Alexis, poème du xie siècle. Texte critique de Gaston Paris. 5e édition revue. Paris, Champion, 1933. In-8°, 50 p. (Les classiques français du moyen âge, 4.) 4 fr. 20.

147. VORSTIUS (Joris). Die Katalogprobleme im Spiegel der auslân-


dischen Fachliteratur seit 1930. Leipzig, Harrassowitz, 1933. In-8°, 48 p. (Sammlung bibliothekswissenschaftlicher Arbeiten. 44.) 148. VROOM (H.). Le psaume abécédaire de saint Augustin et la poésie latine rythmique. Nijmegen, Dekker. 1933. In-8°, 66 p. (Latinitas Christianorum primaeva. 4.)

149. WALTER (Joseph). La cathédrale de Strasbourg. Paris, Laurens, 1933. In-16, 96 p., ill. (Petites monographies des grands édifices de la France.) 7 fr. 50.

150. Wartbubg (W. von). Évolution et structure de la langue française. Leipzig, Teubner, 1934. In-8°, vm-256 p. 5 m. 40. 151. WEITZMANN (Kurt). Die armenische Buchmalerei des x. und beginnenden xi. Jahrhunderts. Istamboul, Deutsches archaologisches Institut, 1933. In-8°, 20 p., ill. (Istambuler Forschungen. 4.) 11 m. 151 bis. WEBER (Georg). Der Bau der englischen Sprache. Leipzig, Mayer und Müller, 1934. In-8°, iv-135p. (Palaestra, 192.) 152. WOLFRAM VON Bschenbach. Parzival. Traduction et notes par E. Tonnelat. Paris, éditions Montaigne, 1934. 2 vol. in-8°. (Collection des textes rares ou inédits.) 50 fr.

153. Young (Karl). The drama of the medieval church. Oxford, the Clarendon press, 1933. 2 vol. in-8°, ill. 63 s.

154. ZEDLER (Gottfried). Gutenberg und Schôffer im Lichte des Mainzer Frühdrucks. IL Gutenbergs alteste Type und die mit ihr hergestellten Drucke. Leipzig, Harrassowitz, 1934. In-4°, ix-131 p., 36 pl. (Verôffentlichungen der Gutenberg-Gesellschaft, 23.) 40 m. 155. Zwicker (Ioannes). Fontes historiae religionis celticae. Berolini, apud W. de Gruyter, 1934. In-8°, vn-110 p. (Fontes historiae religionum, V, 1.)


CHRONIQUE ET MÉLANGES

La soutenance des thèses de la promotion de 1934 de l'École des chartes a eu lieu les 29, 30, 31 janvier et 1er février derniers. Voici les titres des thèses présentées

Histoire de Cherbourg de 1354 à 1450, par Madeleine d'AuTUME. Le comté de Valois jusqu'à l'avènement de Philippe de Valois au trône de France, par L. Carolus BARRÉ.

La commanderie des Hospitaliers de Rayssac, par Henri Blaquière. Les finances communales de Lille de 1297 à 1369, par Marguerite-Marie BOMMIER.

La « Consolation » de Boèce, ses sources et son interprétation par les commentateurs latins du IXe au XIIIe siècle, par Pierre COURCELLE. Le droit familial de quelques grandes maisons féodales de l'ouest de la France du XIIIe au XVIe siècle, par Raymond DELATOUCHE. Histoire de la ville de Gisors (Xe-XVe siècle), par Françoise GOINEAU. Philippe le Bon et les institutions judiciaires, financières et militaires en Franche-Comté, par Marie-Antoinette Hosotte.

Le bourg Saint-Germain-des-Prés, des origines au X Ve siècle, par Françoise Jean-Lehoux.

La deuxième ambassade à Rome de Philippe de Béthune (1624-1630), par Madeleine LENOIR.

Le gouvernement temporel des archevêques de Lyon et leurs luttes avec le pouvoir royal de 1320 à la fin du XIVe siècle, par Pierre NEYRAND. La vie municipale de Riez au XVIe siècle, par Élisabeth Pellegrin. Jacques de Revigny, jurisconsulte à Orléans entre 1260 et 1289, par Edmond POGNON.

Étude historique sur la vallée de la Somme du XIIe siècle au milieu du XVIIe siècle, par René PRAT.

La condition des personnes et des terres dans l'archidiaconé de Paris du XIIe siècle à 1350, par Gabrielle REGNARD.

L'architecture religieuse flamboyante dans l'ancien diocèse de Coutances, par Gabrielle THIBOUT.

Histoire de la géomancie latine du milieu du XIIe siècle au milieu du XVIIe siècle, par Aloysius K. ZIEGLER.


Ont été proposés dans l'ordre de mérite suivant pour obtenir le diplôme d'archiviste-paléographe

MM. 1. BARRÉ (Carolus-AUred-Louis)

2. COURCELLE (Pie/re-PauI-Marie-Georges)

3 Pognon (Edmond-Émile)

Miles 4. Lehoux (Françoise-Marie)

5. Bommier (Marguerite-Marie)

6. Pelle grin (Elisabeth-3ea.ane-Ma.Tie)

7. Regnard ( Ga&TOZfe-Jeanne-Louise-Marie)

Mme 8. THiBoUT (Gabrielle-Marguerite-Marie, née Auge) MM. 9. NEYRAND (Pz'e/ve-Marie-Joseph-Jean)

10. BLAQUIÈRE (Henri-Émile)

Miles 11. HOSOTTE (Agnès-Marie-Antpinette)

12. GoiNEAu (i<V<mpoï.se-Henriette-Clémence-CaniiIle)

13. Autume (Lucie-Bulalie-Anne-Marie-Mffidefeine DE Masson D');

M. 14. PRAT (René-Paul-Henri).

Et hors rang 10 à titre étranger

M. Ziegler (Aloysius Kueran), de nationalité américaine. 2° Comme appartenant à des promotions antérieures (ordre alphabétique)

M. DELATOUCHE (Raymond-Hippolyte-Marie)

Mlle Lenoir (Madeleine-Flore-Berthe).

Le prix Auguste Molinier, fondé par la marquise Arconati-Visconti et destiné à récompenser la meilleure thèse, a été décerné à M. Courcelle.

Les thèses de MM. Courcelle, Barré, Pognon et de Mme Thibout ont été jugées dignes d'être particulièrement signalées au ministre. Trois bourses Pierron ont été attribuées en 1934 à nos confrères MM. René Gandilhon, Pierre Le Gentilhomme et Mlle Madeleine Dillay. Notre confrère M. Germain-Martin a été nommé ministre des Finances et du Budget (ministère Gaston Doumergue). Notre confrère M. Georges Huisman a été récemment nommé directeur général des Beaux-Arts.

Notre confrère M. Robert Latouche a été nommé professeur d'histoire du moyen âge à la Faculté des lettres de l'Université de Grenoble, à compter du 1er novembre 1933.

Par arrêté du 20 janvier 1934, notre confrère M. Betgé-Brezetz, archiviste départemental de Loir-et-Cher, a été nommé archiviste de la


Haute-Vienne, en remplacement de notre confrère M. Morel, démissionnaire.

Par arrêté du 23 janvier 1934, notre confrère M. Bayaud, archiviste départemental du Lot, a été nommé archiviste du Tarn, en remplacement de notre confrère M. Chanteux, précédemment nommé archiviste de la Mayenne.

Par arrêté du 26 mars 1934, Mlle de Saint-Exupéry, archiviste-adjoint du département du Rhône, est attachée, au titre de conservateuradjoint, au service des archives et bibliothèques de l'Indo-Chine. Ont été récemment nommés nos confrères MM. Michel de Boüard, bibliothécaire de la ville d'Orléans Bruno Durand, bibliothécaire-adjoint de la ville d'Aix Mlle Dobelmann, bibliothécaire de la ville de Poitiers.

Deux de nos confrères viennent d'être successivement élus, les 2 et 9 mars 1934, à l'Académie des inscriptions et belles-lettres M. Marcel Aubert, membre ordinaire, et M. Joseph Calmette, membre libre. Par arrêté ministériel du 9 avril 1934, notre confrère M. Charles Petit-Dutaillis a été nommé membre du Comité des travaux historiques et scientifiques (section de philologie et d'histoire, jusqu'en 1715). Ont été récemment promus dans l'Ordre de la Légion d'honneur commandeur, notre confrère M. Camille Bloch officier, notre confrère M. Édouard Giard, et nommés chevaliers nos confrères MM. Charles Braibant, Jean Mondain-Monval, Henry Patry, Maurice Pigallet, Amand Rastoul, Léon Rey.

L'Académie des inscriptions et belles-lettres a décerné la première médaille, au concours des Antiquités de la France, à notre confrère M. Étienne Delcambre pour son ouvrage sur le Consulat du Puy-en-Velay, des origines à 1610, et la deuxième médaille à notre confrère M. René Gandilhon pour son Inçentaire des sceaux du Berry antérieurs à 1515. L'Académie des inscriptions et belles-lettres a attribué récemment le prix Ordinaire à l'édition, par notre confrère M. Jules Viard, des Grandes Chroniques de France, publiées pour la Société de l'histoire de France et le premier prix Gobert à notre confrère M. Henri Jassemin pour son ouvrage sur La Chambre des comptes de Paris au X ve siècle, précédé d'une étude sur ses origines. L'attribution du deuxième prix a été continuée à notre confrère M. Félix-Olivier Martin pour ses Études sur les Régences, sous les Capétiens directs et les premiers Valois (1060-1375).

La même Académie a décerné à notre confrère M. Bossuat le prix de la Grange pour son édition de Berinus, publié pour la Société des anciens textes français.


La même Académie a attribué le prix Duchalais à notre confrère M. A. Dieudonné pour la deuxième partie de son Catalogue des monnaies françaises de la Bibliothèque nationale et pour son quatrième volume de Mélanges numismatiques.

L'Académie des Beaux-Arts a récemment attribué une part du prix Bernier à notre confrère M. Henri Waquet pour son ouvrage sur L'art breton.

L'Académie des sciences morales et politiques a récemment attribué deux parts du prix Michel Perret à nos confrères MM. Charles Du Bus, pour son livre sur Stanislas de Clermont-Tonnerre, et Robert Anchel, pour son ouvrage intitulé Crimes et châtiments.

L'Académie française a accordé une part du prix Catenacci à notre confrère M. Gustave Duhem pour Les églises de France Morbihan.

NÉCROLOGIE

LÉON LE GRAND

Notre regretté confrère Léon Le Grand naquit à Saint-Pierre-lèsNemours (Seine-et-Marne), le 5 juillet 1861, mais il appartenait à une famille de bourgeoisie parisienne qui comptait dans ses alliances les Hallé, les Colin de Verdière, les Nourrisson. De bonne heure orphelin de père, et le plus jeune de quatre frères, il fit, à l'Institution SaintVincent de Senlis, de brillantes études qu'il poursuivit ensuite en préparant à Paris ses examens de droit, avant de songer à se présenter à ceux de l'École des chartes. Je le connus alors, et nos goûts communs nous rapprochèrent admis dans l'intimité de sa famille, à l'ombre de l'église Sainte-Clotilde, où elle demeurait, j'y respirais le parfum de touchante harmonie et de souveraine bonté qui y régnait. Nous eûmes grand plaisir à nous retrouver dans la vieille salle de la rue des FrancsBourgeois, où nous suivîmes les mêmes cours et d'où nous revenions presque chaque jour ensemble, devisant de nos travaux et de nos projets. Le Grand s'était fait particulièrement apprécier de Léon Gautier, qui lui confia une petite part de collaboration à ses Épopées françaises et lui facilita ensuite, après une année de service militaire, son admission aux Archives nationales, où il devait faire toute sa carrière. Rien de surprenant à ce que, épris, comme il l'était, de sollicitude pour les déshérités de la vie et plein d'admiration pour la haute personnalité de saint Louis, il ait choisi pour sujet de thèse la fondation parisienne de ce monarque, les Quinze-Vingts, dont les archives n'avaient pas encore été judicieusement explorées il en a tiré un beau volume, publié dès 1887 par la Société de l'histoire de Paris, et récompensé l'an-


née suivante par une médaille à l'Académie des inscriptions et belleslettres. Et dès lors sa curiosité reste attirée vers les établissements hospitaliers dont l'histoire fut l'une de ses principales préoccupations, et le restera jusqu'à ses derniers jours ne cessant d'accumuler des notes et de s'y intéresser, il donne un travail d'ensemble sur les Maisons-Dieu et léproseries du diocèse de Paris au XIVe siècle, fournit à la « Collection de textes pour servir à l'étude et à l'enseignement de l'histoire » un précieux recueil de textes du moyen âge, sous le titre de Statuts d'Hôtels-Dieu et de léproseries, étudie plus spécialement les Béguines de Paris, le règlement de la léproserie d'Épernay, la léproserie de Léchères au diocèse de Sens, l'hospice national du Tribunal révolutionnaire il nous parle de la prière des malades dans les hôpitaux de l'ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem (ce dernier article dans la Bibliothèque de l'École des chartes) et présente, dans la Revue de l'histoire de l'Église de France (1930), une remarquable étude d'ensemble, pleine d'aperçus nouveaux, sous ce titre Comment composer l'histoire d'un établissement hospitalier, sources et méthode.

Ces recherches ne lui interdisaient pourtant pas de faire des incursions dans d'autres domaines dans les Annales de la Société historique et archéologique du Gâtinais, on peut lire sous sa signature le récit d'épisodes qui se produisirent lors de l'occupation de Melun par les troupes du roi de Navarre en 1358, et une notice sur le prieuré de Train près de Nemours, voisin de propriétés qui avaient appartenu à sa famille. Appelé à collaborer avec moi pour étudier une question de frontière débattue pendant de longs siècles, il se montra, dans un domaine qui, jusque-là, lui était resté étranger, chercheur infatigable autant qu'historien scrupuleux le voyage d'exploration que nous fîmes en commun à Bar-le-Duc, à Verdun, à Clermont-en-Argonne et autres lieux m'a laissé d'agréables souvenirs et nous a permis d'écrire un livre sur la Frontière d'Argonne (843-1659), que d'autres plus récents n'ont pas fait oublier. L'histoire parisienne lui doit aussi beaucoup, et il suffira (outre ses communications au Bulletin de la Société de l'Histoire de Paris, par exemple sur la veuve d'Etienne Marcel) de signaler la part qu'il a prise à la publication, malheureusement interrompue, des Registres du Bureau de la ville, où, continuant l'oeuvre de Bonnardot, de Tuetey et de Guérin, il a édité le texte de ces registres pour les années 16051616 (t. XIV, XV et XVI).

Dans ces dernières années, le décès de Roland Delachenal ayant laissé son Charles V inachevé, ce fut à Léon Le Grand que la famille confia le soin de faire paraître les derniers volumes. Il se chargea de cette besogne avec sa conscience ordinaire et sa modestie coutumière, ne laissant paraître nulle part ce dont on lui est redevable et donnant à cette tâche le meilleur de son temps. Depuis longtemps, par ailleurs, il enrichissait la Revue des études historiques de chroniques bibliographiques que tout historien doit consulter et sait apprécier.


Mais ce serait faire connaître trop incomplètement son rôle que de passer sous silence les services qu'il a rendus, de 1887 à 1927, à l'administration des Archives nationales. Longtemps, il a été désigné pour présider la salle de travail, et c'est là une charge que l'on ne peut remplir efficacement qu'à la condition de connaître admirablement les coins et les recoins de notre grand dépôt national à ce point de vue, Léon Le Grand était admirablement outillé, et multiples étaient chaque jour les services qu'il pouvait rendre, non seulement aux débutants, mais même au public habituel, qui ne le consultait jamais en vain, et se félicitait du concours permanent que lui prêtait leur dévoué et inépuisable président. Aussi, le jour où, après de longues années de travail, celui-ci quitta sa chaire pour jouir d'un avancement bien mérité, les lecteurs, un peu désorientés mais reconnaissants, jugèrent bon d'ouvrir entre eux une souscription, à laquelle d'ailleurs collaborèrent ses collègues, et qui permit d'offrir à notre ami un délicat souvenir des livres, capables de l'aider dans ses travaux. Cet hommage peu commun donne à lui seul la mesure des sentiments d'estime unanime dont il jouissait.

D'ailleurs sa longue pratique des archives lui a permis de publier un livre, qui est un guide précieux des Sources de l'histoire religieuse de la Révolution aux Archives nationales (1914), et nous faisait espérer un autre volume, malheureusement resté inachevé, sur les Sources de l'histoire de France avant 1789 aux Archives nationales. Ses communications au Bibliographe moderne, sur Claude Sarasin, intendant des archives du chapitre de Notre-Dame de Paris, et sur la table des registres du Parlement de Paris, par Le Nain, une étude sur la valeur des papiers des secrétaires d'État de la maison du roi pour l'histoire de la ville et de la généralité de Paris (Mémoires de la Société de l'Histoire de Paris), sont de nouveaux témoins de son activité et de la parfaite connaissance qu'il avait du dépôt de la rue des Francs-Bourgeois. Appelé ensuite à diriger successivement le service des archives départementales, puis la section moderne des Archives nationales, il sut se faire apprécier dans ces nouvelles fonctions par son urbanité, son intelligence et la noblesse de son caractère. Notre camarade d'école, Ch.-V. Langlois, lorsqu'il devint, en 1913, directeur des Archives, trouva en Le Grand, dont il avait pu apprécier de longue date l'exceptionnelle valeur, un collaborateur précieux, d'un admirable dévouement Si plusieurs des entreprises scientifiques qui ont marqué la féconde administration de Langlois ont pu être poursuivies et menées à bien, c'est que Le Grand en a été toujours le meilleur ouvrier, parfois le discret inspirateur. C'est à sa suggestion que fut mis sur le chantier le grand inventaire analytique des Hommages de la Chambre des Comptes de Paris. Il prépara aussi le répertoire des anciens inventaires de la série T des Archives nationales, récemment paru. Sa part dans la rédaction de l' État sommaire des versements faits aux Archives nationales par les ministères


et les administrations qui en dépendent a été considérable, et, lorsqu'il prit sa retraite à la fin de 1927, notre ami tint à achever l'inventaire de la sous-série Fn (Bâtiments civils) qu'il avait commencé après sa nomination comme chef de la section moderne. L'honorariat qui lui fut alors conféré ne l'éloigna pas des Archives jusqu'à la veille de sa mort, il est resté fidèle à la vieille maison qu'il aimait, travaillant toujours et faisant bénéficier ses jeunes confrères des fruits de son incomparable expérience. Le successeur de Langlois, qui fut longtemps son compagnon de bureau, a perdu en lui, je le sais, en même temps que l'ami très cher, le plus sûr des conseillers.

Par son mariage, son frère aîné s'était allié à une des plus notables familles rémoises à son tour, il entra dans la famille Givelet, où l'érudition était en honneur 1, en épousant la soeur de sa belle-sœur. C'est à Cormontreuil, près de Reims, dans une propriété qu'il adorait et où il repose désormais, qu'il fut frappé le 13 septembre 1933, laissant les siens inconsolables. Un grand deuil avait assombri ce fervent chrétien à l'automne de 1915, au cours de la Grande Guerre, son fils aîné avait trouvé la mort en Argonne, et chaque année les parents allaient près de Sainte-Menehould s'agenouiller sur la tombe de celui qu'ils pleuraient ce pèlerinage leur était un réconfort, et, comme tant d'autres, ils ont supporté ce coup cruel avec une admirable sérénité. Leurs autres enfants, en particulier notre jeune confrère Michel Le Grand, trouveront ici l'expression des sentiments de tous ceux qui ont connu Léon Le Grand, et dont je me fais l'interprète. Un imagier du moyen âge, qui aurait voulu reproduire ses traits, les aurait accompagnés d'Honneur et de Droiture pour le représenter avec deux de ses plus éminentes qualités.

Henri STEIN.

CAMILLE COUDERC

Ceux qui n'ont connu ni la vieille École des chartes ni l'ancien département des manuscrits de la Bibliothèque nationale ne comprendront pas quels profonds souvenirs ils ont laissés à ceux qui ont eu la bonne fortune d'y commencer leur carrière et d'y nouer des amitiés qui ont fait le charme de leur existence. Ils deviennent rares ceux qui survivent l'un de ceux avec qui j'ai passé ma jeunesse, et je peux dire ma vie, vient de disparaître.

Couderc a brusquement succombé l'été dernier. Il était entré avec moi à l'École dans la promotion nommée par arrêté du 2 décembre 1882 et, depuis lors, jamais nous ne nous sommes quittés, nous retrouvant, à 1. Son oncle Charles Givelet a publié une importante monographie sur l'église et l'abbaye de Saint-Nicaise de Reims.


notre sortie, au département des manuscrits, sous le paternel gouvernement de M. Deprez, chef plein de mérites et d'une bonté dont il a emporté le secret qui devra sûrement se retrouver.

Un incident avait marqué notre dernière année par suite d'une décision que je regrette de n'avoir pas le droit de critiquer, deux élèves de la promotion précédente n'ayant pas pu, par suite de maladie, achever leur troisième année, furent autorisés non seulement à la redoubler, mais furent classés avec nous. Il n'est pas surprenant qu'ils aient ainsi enlevé les deux premières places et Couderc qui, jusque-là, s'était toujours assuré le second rang, fut rejeté au quatrième. Il fut ainsi privé à la fois de la pension et du droit d'être nommé à l'École de Rome, droit qui eût dû lui être acquis. Il fallut attendre un peu plus d'un an l'arrêté le nommant stagiaire au département des manuscrits, le jour même (1er avril 1887) qui conférait le titre de conservateur-adjoint à M. Deprez. C'est là que toute la vie administrative de Couderc s'est déroulée.

Mais, aux besognes propres à ce département1, il put joindre, grâce à une puissance de travail dont il n'a pas marchandé les preuves, une collaboration très importante à la rédaction de plusieurs catalogues des manuscrits des départements Chartres, Clermont-Ferrand, Bordeaux, etc. Là, il fut apprécié en particulier par Auguste Molinier, sans que la part qu'il prenait à ce travail, et il n'était pas le seul à le faire à la Bibliothèque nationale, lui ait valu autre chose qu'une mauvaise volonté inexplicable.

En revanche, tous ceux qui, soit au Cercle historique, soit au département des manuscrits, étaient en relations avec Couderc devinrent ses amis, de vrais amis, auxquels se joignirent ceux de ses compatriotes installés à Paris car l'un des mérites de son caractère était d'être demeuré foncièrement attaché au Rouergue. Il l'aimait et la vie de Paris, souvent si funeste à l'attachement au pays natal, n'avait pas altéré ses sentiments. Si bien que son dernier travail a été la mise au point et l'impression d'une bibliographie du Rouergue, dont sa mort n'arrêtera pas la publication.

Son caractère, d'une franchise absolue, n'avait rien de provoquant et sa droiture, sans la moindre compromission, lui assurait la confiante affection de ceux même qui n'avaient pas reçu la solide éducation morale qu'il devait aux siens.

Couderc obtint ainsi d'une amitié nouée dans son pays natal ce qui était légitimement dû à ses travaux, et il fut enfin promu au grade de conservateur-adjoint au département des manuscrits il le garda jusqu'à sa retraite. Il est pénible de constater que justice lui fut rendue sans le concours de ceux dont il devait l'attendre.

1. Faut-il rappeler sa collaboration si importante à la rédaction du catalogue des manuscrits du fonds français?


Parmi les amitiés qui l'ont soutenu à ses débuts, comment ne pas mentionner celle de Gabriel Monod et surtout celle de Jules Lair? Celui-ci, dont les débuts dans la vie n'avaient pas été très faciles, s'en souvenait et plusieurs de ses confrères ont éprouvé la bonté de son cœur et son affection pour la jeunesse laborieuse. Aussi sa maison était-elle ouverte par Mme Lair et par lui à bien des élèves de l'École des chartes, qu'ils aidaient, de toutes manières, avec une généreuse discrétion. Là, Couderc a trouvé un réconfort toujours utile et un appui moral sans prix pour un jeune homme isolé à Paris.

Sa principale distraction était, dans ses courts loisirs, de longer les caisses de livres sur les quais et nombreuses ont été ses trouvailles, même de manuscrits dont, libéralement, il a fait don au département des manuscrits 1. En outre, il trouva, également sur les quais, un exemplaire du « Cinquiesme et dernier livre des faicts et dits heroïques du bon Pantagruel, 1571 », et il en fit cadeau au département des imprimés. C'est au cours de ces promenades que Couderc a formé une très belle bibliothèque, aussi recommandable par le bon état des exemplaires que par le choix des livres. Un de ses meilleurs amis a assuré la conservation de cette importante collection 2 et tous les amis de Couderc lui en ont la plus vive gratitude.

La création de cette bibliothèque le délassait et lui donna cette connaissance des livres qui, d'une part, fit de lui un expert excessivement compétent, mais surtout le fit charger du cours de bibliographie à l'École des chartes. Ce fut le couronnement de sa carrière. Il est descendu de sa chaire à la fin de l'année scolaire 1933 et, dans la nuit du 17 au 18 septembre, il tombait foudroyé chez des amis, au château de Trioulou, près de Villeneuve-d'Aveyron, laissant un vide terrible dans sa famille et abandonnant un vieux camarade qui achève sa vie, après avoir perdu, un à un, presque tous ses contemporains3. MORANVILLÉ.

CHARLES GRANDJEAN

Notre confrère M. Charles Grandjean est mort le 6 novembre 1933. Il était né à Langres le 9 septembre 1857. Après des études secondaires, il entra à l'École des chartes, dont il sortit premier de sa promotion, le 1. Journal de voyage à Jérusalem de Louis de Rochechouart, manuscrit du xve siècle, et Journal d'une mission militaire en Perse (1839-1840), par le lieutenant Jules Pichon.

2. M. Henry Bousquet, président de la Société d'archéologie de Rodez. Son discours aux obsèques, célébrées à Livinhac, a été reproduit dans le Journal des Débats du 27 septembre 1933.

3. Notre confrère M. E. Ledos publiera dans la Revue des bibliothèques la bibliographie des œuvres de C. Couderc à la suite d'une notice nécrologique.


25 janvier 1881. Sa thèse sur l'organisation municipale de Toulouse au moyen âge n'a pas été publiée. Nommé membre de l'École française de Rome, il se consacra à l'édition des Registres du pape Benoît XI. De retour à Paris, il entra au Sénat comme rédacteur et y devint chef des secrétaires-rédacteurs chargés du compte-rendu. Henri Roujon, directeur des Beaux-Arts, l'adjoignit alors à son administration. Comme inspecteur général des monuments historiques, il prit une part très importante à la sauvegarde du Mont-Saint-Michel, du palais des Papes à Avignon, et fut à Versailles l'un des promoteurs de la réorganisation du Musée historique et de la conservation du palais. D'utiles réformes administratives lui sont dues.

Notre confrère, qui était membre de la Commission des monuments historiques et du Comité des travaux historiques, n'a rien publié, mais il faisait bénéficier ses confrères et ses collaborateurs de son érudition, qui était considérable et variée. Sa curiosité d'esprit en avait fait un spécialiste de l'histoire et des institutions du Consulat et de l'Empire autant qu'il l'avait été des questions italiennes.

Ceux qui l'ont connu ont gardé le souvenir de sa bonne grâce, de sa complaisance et de sa courtoisie.

J. C.

AUGUSTE LE SOURD

Notre confrère Auguste-Marie-Amédée Le Sourd est mort, après une courte maladie, le 7 février 1934, dans son cher et beau domaine de Saint-Maurice, à Baix (Ardèche). Il était né le 3 août 1875 à Vals, dans ce même Vivarais auquel appartenait, par d'anciennes et profondes racines, la famille de sa mère, née Galimard. Il fut élevé à Paris, où son père, le docteur Ernest Le Sourd, occupait une place importante dans la presse médicale, et il fit toutes ses études au lycée Henri IV. La haute culture qu'il avait reçue au lycée et dans son milieu familial, le goût qu'il marqua de bonne heure pour l'histoire de sa province natale, les tendances de son esprit avide de méthodes précises, le portèrent vers l'École des chartes, où il entra en 1895 cette promotion, dans laquelle s'institua dès le début une très vive et très amicale émulation, comptait notamment Charles de Lasteyrie, qui devait devenir ministre des Finances, et deux futurs membres de l'École de Rome, René Poupardin et Ferdinand Chalandon, prématurément enlevés à l'affection de leurs amis et à la science historique, qu'ils avaient déjà grandement servie. Aucun de ceux qui appartinrent à l'École entre 1895 et 1899 n'a oublié la physioniomie si distinguée et le regard si limpide d'Auguste Le Sourd on eut vite fait de découvrir, derrière son abord un peu réservé, l'âme la plus délicate et le caractère le plus charmant, le plus séduisant.


Non pas qu'il cherchât à conquérir les amitiés il était trop simple pour se livrer à un tel calcul l'aménité de son commerce, la finesse de son esprit, la souriante bonne grâce qu'il répandait dans les groupes que nous formions pour réviser nos notes de cours, lui attiraient tout naturellement l'affectueux attachement de ses camarades, tandis qu'il gagnait leur confiance par la parfaite droiture de son caractère. Sa conscience était scrupuleuse son œuvre historique en contient la preuve à toutes les pages, et il nous souvient encore avec une profonde émotion de la noblesse d'âme, de l'abnégation absolue, de la généreuse et toute chrétienne résignation avec lesquelles il s'oubliait entièrement soi-même, pour penser exclusivement aux siens, en un moment où il fallait prendre une décision relativement à une opération chirurgicale d'où pouvait dépendre sa vie et sur l'opportunité de laquelle les médecins n'étaient pas d'accord.

Ces qualités exquises s'épanouiront de plus en plus durant tout le cours de sa vie et nous les retrouvions avec joie dans les réunions de notre groupe chartiste versaillais, quand il vint, après la guerre, passer chaque année quelques mois dans la ville de Louis XIV. Possesseur d'une très riche bibliothèque, dans laquelle il avait réuni, avec les grands recueils de textes, les principaux périodiques et les instruments de travail essentiels, une collection incomparable et sans doute unique d'ouvrages anciens et modernes sur l'histoire de sa région, il en faisait largement bénéficier tous ceux qui désiraient avoir recours à ces trésors il y avait joint un fichier contenant des milliers d'analyses et de références, établies avec un soin méticuleux, et qu'il communiquait sans aucun égoïsme aux chercheurs et aux érudits. Un des hôtes de Saint-Maurice a fort bien dit la joie de ceux qui ont « pu goûter, dans la chaleur d'un foyer très uni. le charme de cet intérieur où tout avait une âme, même les choses inanimées, celui de la grande pièce à l'immense bureau central où l'on trouvait tant d'attrait à travailler en face de lui devant les horizons du Rhône ».

C'est à l'étude de sa chère province qu'Auguste Le Sourd consacra toute son activité scientifique à en mieux faire connaître et aimer les beautés pittoresques et le passé historique, il déploya un véritable apostolat. Il avait pris pour sujet de sa thèse de l'École des chartes (promotion de 1899) Les États du Vivarais des origines à la fin du XVIe siècle. Ce travail de débutant fut très favorablement accueilli par ses juges, mais Le Sourd, très sévère pour lui-même, ne voulait pas le livrer au public avant d'en avoir revisé les moindres détails encore fallut-il, après vingt-six années d'attente, les instances pressantes de notre regretté confrère Charles Hirschauer pour le contraindre (témoin de ces amicales négociations, nous ne croyons pas exagérer en employant cette expression) à publier enfin cette fort bonne étude et à la présenter


aux suffrages de l'Institut, qui lui décerna en 1927 son prix du Budget1.

Après un stage aux Archives départementales de l'Hérault, que dirigeait alors l'excellent archiviste et archéologue Joseph Berthelé, Auguste Le Sourd appartint pendant quelques mois au ministère des Affaires étrangères en qualité d'attaché à la division des archives. Mais bientôt son mariage le faisait entrer dans une vieille famille lyonnaise et le ramenait décidément dans le Sud-Est, où il devait désormais passer la plus grande partie de son existence.

Au début de l'année 1901, il avait extrait de sa thèse quelques Notes et documents qu'il publiait, avec le sous-titre Les États du Vivarais au XVIe siècle, dans la Revue du Vivarais, commençant ainsi à cet érudit périodique une collaboration qui sera singulièrement abondante, variée et, par surcroît, d'excellente qualité dans son fond et dans sa forme. Quand, au mois d'août 1911, après la faillite de l'imprimerie qui l'éditait (Imprimerie centrale, à Privas), la Revue paraissait condamnée à une mort certaine, notre confrère s'en rendit acquéreur et il la fit désormais imprimer à Aubenas mais, s'il en était le propriétaire et le principal animateur, il ne voulut jamais, avec son habituelle modestie, s'y considérer que comme un simple collaborateur de celui qui la dirigea après comme avant la crise de 1911, M. Auguste Benoît d'Entrevaux, puis de M. l'abbé Roche, archiviste diocésain de Viviers, qui en prit la direction après la mort de M. Benoît d'Entrevaux (16 décembre 1916). Afin de compléter l'action de la Revue, Auguste Le Sourd avait organisé, pour ses lecteurs, des excursions archéologiques au cours desquelles il savait évoquer avec beaucoup de précision, d'exactitude et de charme, le passé historique des localités visitées et en caractériser les monuments les habitués de ces promenades gardent un souvenir particulier de celle de Cruas, en 1931, où notre confrère Jean Régné sut, dans un toast à l' « Esprit vivarois » de Saint-Maurice, exprimer fort délicatement la reconnaissance de tous à l'égard de Le Sourd.

Nous ne pouvons donner ici la bibliographie complète des travaux de notre regretté confrère elle occupe quinze pages de la Revue du Vivarais (t. XLI, nos 1-2, janvier-février 1934, p. 7-22) et elle est l'œuvre de M. l'abbé Roche. Elle contient exclusivement des études relatives à sa province ou à des personnages originaires de cette province. Nous rappellerons seulement ici, à côté de son Essai sur les États du Vivarais, déjà mentionné les Campagnes de Jacques de Mercoyrol de Beaulieu, capitaine au régiment de Picardie (1743-1763), publiées en collaboration avec le marquis de Vogüé pour la Société de l'histoire de France (Paris, Laurens, 1915, vn-451 p. in-8°) les Mémoires de Jacques de Banne, 1. Auguste Le Sourd, Essai sur les États du Vivarais depuis leurs origines. Paris, Société générale d'imprimerie et d'édition, 1926, xxn-691 p. in-8°.


chanoine de Viviers (Aubenas, impr. Habauzit, 1917, xx-94 p. in-8°) Baix de 1619 à 1622. Petite chronique du temps des guerres civiles (Aubenas, impr. Habauzit, 1917, 60 p. in-8°) le Cartulaire du couvent des Cordeéiers d'Aubenas (Paris, J. Vrin, 1929, 80 p. in-8°). Au moment de sa mort, la Revue du Vivarais publiait, de lui, une série d'articles consacrés à la Vie de famille en Vivarais au XVIIIe siècle et dans lesquels il utilisait, avec beaucoup de finesse, une riche documentation tirée principalement de ses propres collections les pages consacrées aux eaux minérales de Vals sous Louis XV abondent en révélations nouvelles. Il avait commencé, en septembre 1933, l'inventaire du fonds de la collégiale de Tournon, aux Archives de l'Ardèche, et, écrit M. Jean Régné, il s'en acquittait avec un soin, une conscience et une compétence au-dessus de tout éloge. Il songeait à tirer de ce fonds et des minutes notariales une étude sur la Renaissance et la Réforme à Tournon, étude qui devait prendre place dans l'Histoire du Vivarais que publie M. Régné. La mort est venue brutalement mettre fin à ces travaux. Auguste Le Sourd a employé à faire le bien, sous toutes ses formes et avec une infinie délicatesse, l'indépendance que lui donnait sa fortune il a consacré à l'étude les loisirs que lui donnait cette indépendance, et il laisse après lui une oeuvre parfaitement « une » dans sa variété, très solide dans son information et sa rigoureuse critique. Il nous lègue ainsi le bel exemple d'une vie noblement occupée et d'un caractère très droit et très élevé.

André LEsoRT.

MADELEINE D'AUTUME

Peu de jours après avoir soutenu, en février 1934, sa thèse sur l'histoire de Cherbourg de 1354 à 1540, a été cruellement enlevée par la mort notre confrère Madeleine De Masson d'Autume. Née à Brest le 22 juin 1912, entrée à l'École en 1930, elle laisse à tous ceux qui ont pu la connaître de vifs regrets. Son goût pour l'étude, son ardeur à se consacrer à un travail parfois si écrasant lui avaient gagné toutes les sympathies.

C. B.

DIPLOME TECHNIQUE DE BIBLIOTHÉCAIRE1 Le ministre de l'Éducation nationale,

Vu l'arrêté du 22 février 1932 instituant un diplôme technique de bibliothécaire

1. Journal officiel du 27 janvier 1934, p. 966.


Vu l'arrêté du 6 juillet 1932 fixant la liste des bibliothèques où peut être effectué le stage requis des candidats au diplôme précité, Arrête

L'arrêté susvisé du 6 juillet 1932 est complété ainsi qu'il suit Paris. Bibliothèque du Conservatoire national des arts et métiers. Châlons-sur-Marne. Bibliothèque municipale.

Clermont-Ferrand. Bibliothèque universitaire.

Le Havre. Bibliothèque municipale.

Fait à Paris, le 26 janvier 1934.

A. DE MONZIE.

ÉPREUVES DU DIPLÔME TECHNIQUE

DE BIBLIOTHÉCAIRE1 1

Le ministre de l'Éducation nationale,

Vu l'arrêté du 19 juin 1933 relatif aux épreuves du diplôme technique de bibliothécaire

La section permanente de la Commission supérieure des bibliothèques entendue,

Arrête

L'article 5 de l'arrêté susvisé est abrogé et remplacé par les dispositions suivantes

« La durée des compositions et le maximum des points sont fixés chaque année par un arrêté ministériel. »

Fait à Paris, le 30 avril 1934.

Aimé BERTHOD.

Le ministre de l'Éducation nationale,

Vu l'arrêté du 30 avril 1934 abrogeant et remplaçant par de nouvelles dispositions l'article 5 de l'arrêté du 19 juin 1933 La section permanente de la Commission supérieure des bibliothèques entendue,

Arrête

La durée des compositions de l'examen du diplôme technique de bibliothécaire et le maximum des points sont fixés, pour l'année 1934, ainsi qu'il suit

Épreuve écrite et épreuve pratique. Durée globale des deux épreuves huit heures.

Maximum des points épreuve écrite, 50 points épreuve pratique, 40 points.

Épreuves orales. Maximum des points, 50.

Fait à Paris, le 8 mai 1934.

Aimé BERTHOD.

1. Journal officiel du 11 mai 1934, p. 4684.


A PROPOS D'UN ESSAI DE PLUME

DU MANUSCRIT EN ONCIALE

DES LETTRES DE PLINE LE JEUNE

(Collection Pierpont Morgan)

La bibliothèque Pierpont Morgan, de New-York, conserve un manuscrit fragmentaire, en onciale, des Lettres de Pline le Jeune. Ce précieux manuscrit a fait l'objet d'une très belle publication de l'institut Carnegie, de Washington 1 M. E. A. Lowe, lecteur en. paléographie à l'Université d'Oxford, s'est occupé du manuscrit proprement dit, de son histoire et de sa datation, tandis que M. E. K. Rand a étudié le texte même des Lettres. Douze planches, à la fin du volume, reproduisent en fac-similé le manuscrit qu'il a été permis d'assigner au vie siècle par comparaison avec d'autres manuscrits en onciale précisément ou approximativement datés.

La planche VII (ancien fol. 51 r°) porte en sa marge supérieure un essai de plume que M. E. A. Lowe a transcrit de la façon suivante dans son histoire du manuscrit Morgan (p. 21)

« A tous ceulz qui ces presentes lettres verront ou orront Jehan de Sannemeres garde du scel de la provosté de Meaulx & Francois Beloy clerc Juré de par le Roy nostre sire a ce faire Salut sachient tuit que par. » M. Lowe remarque fort justement que cette note émane d'une main notariale du xive ou du xve siècle, que la formule est courante en de nombreuses chartes de cette époque mais ses efforts pour identifier les deux personnages cités sont restés vains 2.

Quelques recherches dans les fonds d'anciens établissements religieux de la région de Meaux permettent de rectifier sans hésitation possible les noms du garde du scel, Sannevières 3, et celui du clerc, Belon, et de dater vraisemblablement à une quinzaine d'années près l'essai de plume en question.

GARDES DU SCEL ET TABELLIONS DE LA prévôté DE MEAUX (1371-1413). Dates Gardes du scel. Tabellions. 1371, 26 mai Jehan Pontiart Pierre Petit 4 1. E. A. Lowe and E. K. Rand, A sixth-century fragment of the letters of Pliny the younger, a study of six leaves of an uncial ms. preserved in the Pierpont Morgan library, New-York, publ. Institution Carnegie. Washington, 1922, in-4°. 2. Il ne cite, à la vérité, qu'une référence imprimée Dom Toussaint Du Plessis, Histoire de l'église de Meaux, Paris, 1731, 2 vol. in-4°, t. II (Pièces justificatives). 3. Jean de Sannevières tirait vraisemblablement son nom du village de Sennepières, anciennement de l'évêché de Meaux (cf. Du Plessis, op. cit., t. II, p. 650, « pouillié de Meaux »), auj. hameau de la commune de Chèvreville, cant. de Nanteuil-le-Haudouin, arr. de Senlis, dép. de l'Oise.

4. Arch. nat., S 5189B, liasse 36, 43 (vente).


Il résulte de ce petit tableau qu'un acte intitulé aux deux noms de Jehan de Sannevières et de François Belon doit avoir été rédigé entre 1378 et 1395 il y a tout lieu de croire que la probatio pennae du manuscrit Morgan remonte à cette époque on peut l'attribuer à quelque « petit-clerc » du tabellion désireux de se faire la main.

Nous ne croyons pas, en effet, nous trouver ici en présence de l'écriture de François Belon celle-ci était différente et, notamment, plus brisée, si l'on admet que le document du 23 mai 1411, signé par F. B., est tout entier de sa main, comme les apparences permettent de le croire.

Resterait à savoir comment ce manuscrit des Lettres de Pline le Jeune, ou tout au moins des fragments de ce manuscrit se trouvaient, à la fin du règne de Charles V ou au début de celui de Charles VI, dans l'étude d'un tabellion de la prévôté de Meaux. Sur ce point, il semble prudent de ne pas faire d'hypothèse, les feuillets conservés ne portant aucune indication de provenance.

Du moins avons-nous pu, à la demande de votre maître, M. Charles 1. Arch. nat., S 5189B, liasse 38, n° 2 (aveu de fief).

2. Arch. dép. Seine-et-Marne, G 113 (« permutation »).

3. Ibid., G 305 (vente).

4. Ibid., G 113 (vente).

5. Arch. nat., S 5189B, liasse 39, 4 (prise à ferme).

6. Ibid., liasse 39, 5 (prise à ferme).

7. Seine-et-Marne, G 305 (vente).

8. Ibid., G 113 (accord).

9. Arch. nat., S 5188B, liasse 24, 11.

10. Ibid., S 5188A, liasse 23, n" 20.

11. Seine-et-Marne, G 113 (vente).

12. Ibid., G 113 (n eschange »).

13. Ibid., G 113.

14. Arch. nat., S 5188A, liasse 21, 7 (vente) J

15. Ibid., liasse 20, n" 45 (abandon )

16. Seine-et-Marne, G 113 (vente).

1376, nov.

1378, 27 avril

1383, 4 avril

1386-7, 10 mars 1388, 27 juin

1388, déc.

1390, 12 juin

1390, 11 sept.

1394-5, 28 janv. 1395, 8 mai

1396, 16 juil.

1402, 7 mai

1404, 17 juil.

1404, 15 août

1411, 23 mai

1413, 28 nov.

Jehan de Sennevières Jehan de Sennevières Jehan de Sannevières Jehan de Sannevières Jehan de Sannevières Jehan de Sannevières Jehan de Sannevières Jehan de Sannevières Guillaume de Marcilly Guillaume de Marcilly Guillaume de Marcilly Guillaume de Mareilly Guillaume de Marcilly Guillaume de Marcilly Pierre de Melarcher Pierre de Melarcher

Symon Gaupin 1

Symon Gaupin 2

François Belon 3

François Belon 4

François Belon E

Aubelet Cornu 6

François Belon 7

François Belon 8

François Belon 9

François Belon 10 François Belon u Jehan Brazdelon 12 Jehan Brazdelon 13 Jehan Brazdelon u François Belon 15 François Belon 16


Samaran, qui nous a signalé ce petit problème, préciser le passage de ce manuscrit entre des mains françaises à une date que M. E.-A. Lowe n'avait pu déterminer que par conjecture.

L.-Carolus BARRÉ.

DATES DE DEUX OUVRAGES DE CHRISTINE DE PISAN Dans un précédent article 1, nous placions entre le 30 novembre 1404 et le 23 novembre 1407 la date de composition de deux ouvrages de Christine de Pisan, la Prod'homie de l'homme et le Livre du corps de Policie. Un passage de ce dernier ouvrage va nous donner une précision de plus. Au chapitre du Livre du corps de Policie intitulé « Comment le bon prince doit aimer justice », nous lisons « Justice, ce dit Aristote, est une mesure qui rent à chascun son droit, et plus longuement se pourroit estendre ceste parole en la descripcion de ceste vertu, mais, pour ce que aultre foys touchant ceste matiere en ay parlé par especial ou Livre de la descripcion de la Preud'ommiede l'omme, je m'en passe briefment à present quant à ce pas pour courrir aux exemples 2. » La Prod'homie de l'homme fut donc écrite avant le Livre du corps de Policie, la date de rédaction de ces deux ouvrages restant comprise entre le 30 novembre 1404 et le 23 novembre 1407.

S. SOLENTE.

DEUX NOUVEAUX MANUSCRITS

PROVENANT DES ABBAYES DE FOUCARMONT ET DE MORTEMER

On sait qu'une partie des manuscrits des abbayes cisterciennes de Foucarmont et Mortemer, au diocèse de Rouen, passèrent dans la collection de Colbert, puis dans le fonds latin de la Bibliothèque nationale.

Signalons un volume à ajouter aux quarante-cinq manuscrits de Foucarmont et un autre aux vingt-sept manuscrits de Mortemer cités par L. Delisle dans le Cabinet des manuscrits, t. I, p. 531 et 526. Le manuscrit latin 65 (Colbert 2926, puis Regius 37105), Genèse (I, 1. A propos d'un livre récent sur Christine de Pisan, dans la Revue belge de philologie et d'histoire, 1929, t. VIII, p. 356-357.

2. Bibl. nat., ms. franç. 12439, fol. 98 et v° cf. le passage de la Prod'homie de l'homme, auquel il est fait allusion ici, dans le ms. franç. 5037 de la Bibl. nat., fol. 208 v°.


CHRONIQUE ET MÉLANGES 423 îompagnée de la Glose ordinaire, coDiéB à la fin An ,“.

1-XLIX, 10), accompagnée de la Glose ordinaire, copiée à la fin du xue ou au début du xme siècle sur parchemin, ornée de belles initiales peintes, comptant 135 feuillets de 340 sur 225 mm., aujourd'hui reliée en maroquin rouge, aux armes et chiffre de Louis XV, provient de l'ab- baye de Foucarmont d'après une note postérieure du fol. 101 « Ce livre est de Fulcarmont, et apartient aux religieux du dict lieu. » Ce volume nous paraît correspondre au n~ 39 de la liste des manuscrits de Foucarmont entrés dans la bibliothèque de Colbert, le 14 avril 1682 (Cabinet des manuscrits, 1, 533-534). (Oct<e:

Le manuscrit latin 92 (Colbert 1442, puis Regius 39121°), partie de ~=15.S~ 19), Ruth (au fol. 37 v~) et Judith (au fol. 45), avec la Glose ordinaire. Ce manuscrit, écrit au 7:IIIe siècle sur parchemin, enrichi de belles initiales peintes, comptant 63 feuillets de 290 sur 215 mm., aujourd'hui relié en maroquin rouge, aux armes et chiffre de Louis XV, appartint à l'abbaye de Mortemer d'après la note du fol. 3 5; Liber sancte Marie Mortui Maris. » Ce manuscrit correspond au no 52 de la liste des volumes de cette abbaye entrés dans la bibliothèque colbertine en 1677 (Cabinet des manuscrits, 1, 525). ''°" (Ca;&Me: (~M TKMMMM~, I,

S. SOLENTE.

CORPUS CODICUM hSLANDICORUM MEDII AEVI M. le Ministre du Danemark à Paris vient d'aviser officiellement la Bibliothèque nationale du don important qui lui est fait, par le grand éditeur danois M. Einar Munksgaard, d'une précieuse collection de fac- simiJés qu'il édite, sous le titre de Corpus Codicum Islandicorum Medii aevi, et qui formera une série de cent volumes, réunissant les repro- ductions en phototypie des plus importants manuscrits islandais qui se trouvent dans les bibliothèques du Danemark et de l'étranger. A ce Corpus Codicum Islandicorum Medii aevi, dont cinq volumes ont déjà paru, viendront s'ajouter trente-cinq volumes d'une autre sér:ie de Monumenta typographica Islandica qui reproduira les premiers livres imprimés en islandais, souvent d'après des exemplaires uniques. Les cinq premiers volumes offerts au Département des manuscrits sont les suivants

1. Flateyiarb(5k (Codex Flateyensis), ms. no 1005 fol. in the Royal Library of Copenhagen. Introduction by Finnur J6nsson. In-fol., 1930. II. Codex Wormianus (the Younger Edda), ms. n~ 242 fol. in the Ar- nemagnean Conection in the University Library of Copenhagen. Introduction by Sigurdur Nordal. In-fol., 1931.

III. The Codex regius of Gragas, 1157 fol. in the Royal Li-


brary of Copenhagen. Introduction by Pâli Eggert Olason. In-fol., 1932.

IV. Codex Frisianus (Sagas of the Kings of Norway), ms. 45 fol. in the Arnemagnean Collection in the University Lfcrajy of Copenhagen. Introduction by Halldôr Hermannsson. In-fol., 1932. V. Modrwallahôk (Codex Môdruvallensis), ms. 132 fol. in the Arnemagnean Collection in the University Library of Copenhagen. Introduction by Einar Ól Sveinsson. In-fol., 1933.

Deux fac-similés des Monumenta typographica reproduisant des imprimés de 1540 et 1562 ont été offerts en même temps au Département des imprimés. Ph. hkvm.

UN RÉPERTOIRE DES COMMUNAUTÉS

SOUMISES A LA RÈGLE BÉNÉDICTINE

Le R. P. Dom Michel Bocksruth, de nationalité belge, appartenant à l'abbaye bénédictine de Praglia, près Padoue, a conçu le projet d'un répertoire alphabétique des établissements ayant appartenu à l'obédience bénédictine. Prendront place dans ce répertoire toutes les commu- nautés d'hommes ou de femmes, indépendantes ou affiliées à un Ordre ou à une congrégation, qui se sont réclamées à un moment donné de la règle de saint Benoît. Tous les rejetons de la souche bénédictine y seront donc représentés, moines et moniales de robe noire et de robe blanche, Clunisiens, Cisterciens, Feuillants, Maristes, etc. L'entreprise est internationale. A ce point de vue, elle intéresse particulièrement les érudits français qui éprouvent parfois quelque diffr culté à identifier avec précision tel ou tel établissement situé en territoire étranger. Les renseignements fournis seront d'ordre onomastique, topographique, historique et bibliographique. Précision et concision sont les mots d'ordre donnés aux collaborateurs. L'œuvre qui dépasse- rait les forces d'un seul homme est collective et Dom Bocksruth fait appel, pour la rédaction des notices, à la bonne volonté des érudits qua- lifiés par leurs recherches antérieures. Plus de trois cent cinquante lui ont offert le concours de leur expérience, surtout à l'étranger. Ceux de nos confrères qui voudraient grossir ce nombre ou obtenir des rensei- gnements complémentaires peuvent s'adresser à Dom Bocksruth, actuellement en résidence à l'abbaye d'Einsiedeln, en Suisse (canton de Schwyz). G. TESSIER.


CORRESPONDANCE DE J.-J. ROUSSEAU

Avec le vingtième volume, récemment paru à la librairie Armand Colin (1934), vient de s'achever la magistrale publication de la Correspondance générale de Jean-Jacques Rousseau, dont la Bibliothèque de l'École des chartes annonçait, en 1924 (t. LXXXV, p. 347-348), les deux premiers volumes, et, en 1928 (t. LXXXIX, p. 464), le dixième. Notre regretté confrère Théophile Dufour, avons-nous besoin de le rappeler, en avait patiemment rassemblé les éléments et, après son décès, survenu en 1922, c'est M. Pierre-Paul Plan qui, sacrifiant ses propres travaux, a assumé la tâche lourde et délicate de les mettre au point, de les compléter et de les préparer pour l'impression. C'est un ensemble de près de 4,200 pièces, en y comprenant les annexes, que nous apportent ces vingt volumes et ainsi se trouve plus que triplé le nombre des lettres de Rousseau fourni par les éditions antérieures de sa correspondance. Pendant dix ans, les volumes se sont succédé, de six mois en six mois, avec une régularité remarquable. Chacun d'eux est pourvu d'un index des noms propres. M. Plan, allant au-devant des vœux du public, promet plus et mieux encore une table analytique générale, qui est dès maintenant en voie d'exécution et qui sera le couronnement d'une œuvre à laquelle il s'est consacré avec une rare abnégation. L. A.

DÉPOTS D'ARCHIVES NOTARIALES DE LA SEINE EFFECTUÉS AUX ARCHIVES NATIONALES

AU 31 DÉCEMBRE 1933

Par application de la loi du 14 mars 1928, les Archives nationales ont actuellement reçu le dépôt des archives anciennes de quarante-sept études de notaires en voici la liste, le numéro en romain correspondant au rang occupé par l'étude dans les Notariats de Thomas VI. Me Collet. 1524 à 1808. 954 articles.

VII. Me Chavane. 1582 à 1808, 8 janvier. 600 articles.

VIII. Me Rafin. 1471 à 1810,19 mars. 1,385 articles.

IX. Me Laverne. 1543 à an XIV, 10 nivôse. 908 articles. XII. Me Destrem. 1598 à 1816, 2 mars. 858 articles.

XIV. Me Viénot. 1605 à an XIII. 573 articles.

XIX. Me Salle. 1477 à 1816, 17 août. 962 articles.

XX. Me Robineau (Pierre). 1480 à 1818, 25 décembre. 879 articles.

XXVI. Me Constantin. 1579, 4 novembre, à 1810. 963 articles.


XXIX. Me Moisy. 1538 à 1806, juillet. 711 articles.

XXX. Me Delarue. 1619, juillet, à 1807, 3 juillet. 600 articles. XXXIII. Me Chauveau. 1498, 30 juillet, à 1818, 28 mai. 1,001 articles.

XXXV. Me Poisson. 1574 à 1809, 5 juin. 1,062 articles. XXXVI. Me Salats. 1523 à 1813, janvier. 682 articles.

XXXIX. Me Godet. 1568, 24 octobre, à 1815, 28 janvier. 728 articles. XLI. Me Oudard. 1559, 7 novembre, à 1813, 3 novembre. 829 articles.

XLII. Me Labouret. 1568, 24 mars, à an XI, 23 vendémiaire. 728 articles.

XLV. Me Fleury. 1568 à an VII. 681 articles.

XLVI. Me Ader. 1568, 12 octobre, à 1810,16 février. 697 articles. XLIX. Me Faroux. 1500, novembre, à 1811, avril. 982 articles. LI. Me Houdart. 1571, 20 août, à 1806, 18 septembre. 1,292 articles.

LIII. Me Bertrand-Taillet. 1648, 25 avril, à 1808. 782 articles. LVII. Me Barillot. 1582 à 1813, 5 mars. 694 articles.

LVIII. Me Morane. 1595, 23 janvier, à 1810, juin. 669 articles. LIX. Me Jourdain. 1576 à 1808. 442 articles.

LX. Me Vincent (Pierre). 1558, 8 avril, à 1814, 4 mai. 619 articles.

LXI. Me Pascault. 1482, 15 juillet, à 1810. 738 articles. LXII. Me Pasteau. 1581 à 1809, 25 octobre. 808 articles. LXIV. Me Dauchez. 1601, 26 avril, à 1807. 541 articles. LXV. Me Dubost. 1641 à 1808. 627 articles.

LXVI. Me Durant des Aulnois. 1596 à 1807, 23 décembre. 770 articles.

LXIX. Me Bazin. 1562, 19 novembre, à 1810, 28 novembre. 913 articles.

LXXI. Me Trimoulet. 1768 à 1811, 16 septembre. 176 articles. LXXXVI. Me Thion de la Chaume. 1531 à 1809, 9 janvier. 992 articles. XC. Me Jarriand. 1568, 24 octobre, à 1813, 16 avril. 579 articles. XCVI. Me Chardon. 1595, 22 mars, à 1805. 650 articles. XCVIII. Me Picard. 1547 à 1814, avril. 782 articles.

XCIX. Me Naret. 1564, 11 avril, à 1807, 16 avril. 807 articles. CV. Me Robineau (Paul). 1569, 29 avril, à 1810, 20 août. 1,513 articles.

CVII. Me Laeuffer. 1532 à 1811, août. 716 articles.

CX. Me Pineau. 1539, 7 septembre, à 1808. 636 articles. CXI. Me Moreau. 1700 à 1814. 473 articles.

CXII. Me Bout de Marnhac. 1549, 22 avril, à 1807, 3 avril. 1,116 articles.

CXIV. Me Michelez. 1580 à 1813. 73 articles.


CXV. Me Decloux. 1618, 26 novembre, à an XIV, 10 nivôse. 1,093 articles.

CXVII. Me Delapalme (Pierre). 1555, 26 mars, à 1813.1,059 articles. CXLIV. Me Gillet, de Vincennes. 1636 à 1813 et 1820. 143 articles. Soit, au total, 47 études et 36,536 articles.

Un état numérique accompagne chaque dépôt on en trouve un exemplaire dans la salle de travail en outre, dans l'exemplaire des Notariats de Thomas, placé dans la même salle, l'apposition du numéro matricule d'une étude au haut de la page qui la concerne indique que ses archives anciennes ont été déposées.

On envisage le dépôt, en 1934, des archives des seize études suivantes celles de Mes Bachelez, Baratte, Benoist, Bezin, Blanchet, Cousin, Couturier, Demanche, Laurent, Legay, Letulle, Marotte, de Meaux, Paillât, Rémond et Simon.

E. C.

LES ARCHIVES NOTARIALES DE FLORENCE

L'un des meilleurs spécialistes de l'archivistique italienne, M. Antonio Panella, étudie, dans VArchivio storico italiano, 1934, ser. VII, vol. XXI, Le origini dell 'archivio notarile di Firenze. On connaît l'intérêt historique des archives notariales d'Italie. A Florence, le dépôt notarial est particulièrement important, et il n'est pas étonnant que les autorités de cette ville se soient particulièrement préoccupées de son organisation et de sa conservation. M. Panella signale qu'avant l'année 1285 le podestat et les deux conseils de la Cité avaient, parmi leurs fonctions, celle de concéder les protocoles des notaires morts ou absents à des collègues de ceux-ci, et, depuis le XIIIe siècle, les textes où les allusions se succèdent concernant le même objet, qu'il s'agisse du fonctionnement des institutions générales de Florence ou de celui des « arts individuellement considérés.

En dépit de cette réglementation, il fallut, au xvie siècle, instituer un contrôle plus efficace, et c'est ainsi que fut conçue la provision du 7 février 1519, publiée par M. Panella aux p. 67-69 de son article. En vertu de cette provision devait être établi un dépôt proprement dit, encore que, dès 1415, on puisse percevoir l'embryon d'un pareil dépôt, et bien que l'organisme institué en 1519 ne parût concerner qu'une seule partie des protocoles notariaux, un grand nombre de ceux-ci restant la propriété privée, et donc transmissible, des notaires eux-mêmes. C'est par une série de transitions que le caractère privé de ces actes notariaux leur fut enlevé, et M. Panella commente les textes qui, à partir de 1561, enregistrent ces transitions, avec le bando du 24 octobre 1561,


la loi sur « Parte dei giudici e notai della città di Firenze », le statut de l' « arte del Proconsolo » de 1566, enfin la loi sur les archives de 1569. La dictature de Cosme de Médicis, à qui est due cette loi, a donc bien mérité de l'archivistique, en organisant d'une façon rigoureuse le régime des archives toscanes. Sans doute, la loi de 1569 n'a pas été appliquée d'une façon absolument rigoureuse beaucoup d'articles d'archives sont restés, indûment, entre les mains de leurs détenteurs du moins, elle a fourni les bases d'une politique archivistique cohérente, et, pour le temps où elle fut imaginée, audacieuse et intelligente. Georges Bourgin.

LES CAHIERS ORIGINAUX DES ÉTATS DE BLOIS A LA BIBLIOTHÈQUE ROYALE

Au xvme siècle, les cahiers originaux des remontrances et doléances des trois Ordres aux premiers États de Blois étaient entre les mains d'un avocat au Parlement, Jean-Charlemagne Lalourcé 1. Le fait était connu des administrateurs et des savants. Aussi, à la mort du possesseur, survenue le 4 mars 1768, des négociations pour l'achat de ces documents furent entamées avec les héritiers par l'intermédiaire du procureur général Joly de Fleury. Elles aboutirent rapidement, et les trois manuscrits furent remis à la Bibliothèque du rois.

Ce dépôt n'était pas connu du public. Aussi, le 14 juin de la même année 17684, Joly de Fleury reçut la lettre suivante des agents généraux du clergé, les abbés de Cicé 5 et de La Luzerne 6

Monsieur, le Clergé fait travailler actuellement à la rédaction des procès-verbaux de ses assemblées7. Les États de Blois de l'année 1577 font partie de cette 1. Cet avocat plaida, de 1747 à 1763, d'importants procès pour des maisons de commerce de Marseille, pour l'intendant du Canada, François Bigot, et pour les habitants de la paroisse de Sainte-Geneviève-des-Ardents. Son fils donna en 1789, avec N. Duval, un important recueil en quatorze volumes sur les ÉtatsGénéraux.

2. Un par ordre.

3. L. Delisle, Le cabinet des Manuscrits, t. I, 1868, in-4°, p. 438. Actuellement, ces volumes font partie du fonds français, nofl 10870 à 10872. La mention de l'achat figure au premier feuillet du premier volume. H. Omont et C. Couderc, Catalogue général des manuscrits français, ancien supplément français, t. II, 1896, in-8°, p. 192.

4. Bibl. nat., Joly de Fleury 433, fol. 402.

5. Jérôme-Marie Champion de Cicé (1731-1810), évêque de Rodez, puis archevêque de Bordeaux.

6. César-Guillaume de La Luzerne (1738-1821), évêque de Langres. 7. Il s'agit de la publication de la Collection des procès-uerbaux des assemblées générales du clergé de France, publiée par l'abbé Ant. Duranthon de 1767 à 1778


collection. Nous vous supplions, Monsieur, de permettre que le rédacteur vérifie sur le texte original des cahiers des trois Ordres de cette assemblée, qui est entre vos mains, l'extrait qu'il en fait. Nous osons nous flatter que vous voudrez bien nous confier quelques jours seulement le volume, dont nous aurons tout le soin possible, et que nous ne tarderons pas à vous rendre avec la plus grande exactitude.

Le procureur général s'empressa de répondre en apprenant à ses correspondants qu'il ne possédait plus les précieux registres 1 J'ai reçu, Messieurs, la lettre que vous m'avés fait l'honneur de m'écrire au sujet des cahiers des États de Blois. Ils ont été effectivement pendant quelque tems entre mes mains, parce que j'avais été chargé d'en procurer au Roy l'acquisition. Mais, comme cette acquisition a été consommée, je présume qu'ils ont été remis à la Bibliothèque du Roy. J'ay l'honneur d'être, avec un respectueux attachement, Messieurs, votre très humble et très respectueux serviteur. P.-M. B.

LE DUC DE LA VALLIÈRE

ET LA BIBLIOTHÈQUE JOLY DE FLEURY

Le plus célèbre bibliophile de la seconde moitié du xYiiie siècle, LouisCésar de La Baume-Le-Blanc, duc de La Vallière, cherchait à satisfaire sa passion de collectionneur en enrichissant sa bibliothèque par tous les moyens possibles. Il ne craignait pas de recourir aux échanges, qu'il s'efforçait d'opérer de la manière la plus profitable. En 1755, il chercha à en faire un avec le procureur général Joly de Fleury, qui possédait des volumes intéressants. C'est ce que prouvent deux lettres qu'il écrivit alors au fils du grand magistrat, Guillaume-François-Louis. Voici le texte de la première de ces missives 2

A Marly, 21 mai 1755.

Il y a près de deux ans, Monsieur, que j'eus l'honeur de vous envoyer un petit ire,-folio, imprimé en caractères gothiques, intitulé le Code Justiniens, qui est en vers vous aviez bien voulu avoir la bonté de vous chargé (sic) d'en proposer à Monsieur votre père 4, pour échanger contre un manuscrit qu'il a, contenant trois ou quatre moralités ou mistères. Les affaires qui sont arrivées m'ont empêché en neuf vol. in-fol. Ce recueil, composé sous la direction de l'évêque de Mâcon, Gabriel Moreau, était imprimé sur l'ordre du Clergé sa publication avait été proposée et autorisée lors des assemblées de 1762 et 1765.

1. Ms. cité de la coll. Joly de Fleury, fol. 404.

2. Bibl. nat., Joly de Fleury 312, fol. 371.

3. Catalogue des livres de la bibliothèque de feu M. le duc de La Vallière, par G. De Bure, t. II, 1783, in-8°, p. 302, 2920.

4. Le procureur général Guillaume-François, qui avait cédé sa place à son fils en 1746.


de pouvoir vous proposer de suivre cette négotiation, mais dans ce moment-cy, où je fais mon catalogue et où il est nécessaire que je sçache si j'aurai le manuscrit, ou si mon Justinien me retourne je vous prie instamment de vouloir bien avoir la bonté de mettre une enveloppe cachetée à ce manuscrit et de me l'envoyer chez moi, à Paris, près le Carousel, rue de l'Échelle. S'il s refuse le troc, je vous prie de vouloir bien avoir celle de me renvoyer pareillement au mesme endroit le Justinien, que j'ay eu l'honneur de vous envoyer. Je vous auray une véritable obligation de vouloir bien terminer cette grande et importante négotiation 3. Je me fais un trop grand plaisir de pouvoir compter sur votre amitié, quelque peu à portée que je sois de la cultiver, pour craindre de vous importuner en vous priant de vous charger de cette proposition je vous prie d'estre persuadé combien je désire la conserver, et des sentimens avec lesquels j'ay l'honeur d'estre très parfaitement, Monsieur, vostre très humble et très obéissant serviteur,

LE DUC DE LA VALLIÈRE.

Mais le grand magistrat ne se montra pas favorable à ce projet. L'amateur enthousiaste revint à la charge. Le 2 juillet suivant, il écri vait à nouveau 4

Voudriez bien, Monsieur, avoir la bonté d'engager Monsieur vostre père à vous confier pour vingt-quatre heures le manuscrit, qui contient des mistères ou moralités, et que je désirois échanger contre lui. Je voudrais bien le voir et en prendre la notte. J'auray l'honneur de vous le renvoyer le lendemain j'envoyeray vendredi matin 4 juillet vous prier de me prêter ce livre, et vous pouvés estre sûr que samedi matin je vous le renvoyeray. Je suis toujours enchanté d'avoir une occasion de vous renouveller les assurances des sentimens avec lesquels l'ay l'honneur d'estre, Monsieur, vostre très humble et très obéissant serviteur, LE DUC DE LA VALLIÈRE.

En définitive, l'échange n'eut pas lieu, ainsi que le prouve péremptoirement une note de Joly de Fleury fils qui dit « Mon père n'a pas voulu se défaire du livre demandé 6 » c'est pourquoi ce manuscrit de « moralités et mystères » ne figure pas dans l'excellent catalogue de la collection La Vallière, qui fut dressé à la fin du xvine siècle par De Bure et Van Praët.

P.-M. B.

1. Le premier catalogue de la bibliothèque La Vallière, en deux volumes in-8° date de 1767.

2. Joly de Fleury père.

3. Cette expression, qui fait sourire, montre à quel degré était parvenue la manie du duc.

4. Même ms., fol. 372.

5. Ms. cité, fol. 370.


A PROPOS DE L'ENTRÉE D'UN REGISTRE

DE PHILIPPE-AUGUSTE

AU 'CABINET DES MANUSCRITS (1730)

Nous avons signalé l'acquisition, en 1730, par la Bibliothèque royale, du cartulaire de Philippe-Auguste, possédé par Hilaire Rouillé du Coudray Le procureur général de la Chambre des comptes, Charles-Michel Bouvard de Fourqueux, servit d'intermédiaire en cette transaction. Deux lettres de lui à Bignon, figurant dans les archives du département des Manuscrits, expliquent le rôle qu'il joua alors et complètent les renseignements déjà fournis.

A Paris, ce 16 Xbre 1729.

Il est bien vray, Monsieur, que M. Rouillé a légué à la bibliothèque du Roy le cartulaire de Philippe-Auguste 2 et j'eus l'honneur de vous en faire part à Versailles, dans le cabinet du Roy, le jour des compliments sur la naissance du Daufin nous comptons le présenter incessamment et prendrons vostre attache, Monsieur, pour la forme de le présenter,«afm que le Roy et S. É. sachent le mérite de ce manuscrit et soient excitez à faire quelque bien à une famille qui en a bien besoin.

A Paris, ce 6 mars 1730.

Monsieur, je suis honteux de n'avoir pas encore été vous porter le manuscrit de M. Rouillé, et je n'ay osé avoir l'honneur de vous voir sans cela, attendant toujours que M. son fils pût le présenter à M. le cardinal et l'exciter par ce petit présent à faire quelque chose pour luy. J'espère que d'icy à huit jours j'auray l'honneur de vous le remettre. J'ay fait une sotise purement par l'ignorance et je vous en demande pardon. J'ay demandé, sans prendre devant votre attache, à S. E. les estampes du cabinet du Roy, dont j'aprens que vous estes le maître et le dispensateur. Le Roy a bien voulu me les accorder pour me consoler du sacrifice que je luy ay fait d'un volume original du Trésor des chartes. J'auray l'honeur d'aller dès demain vous faire toutes mes excuses sur cela et vous demander vos bontés. M. le cardinal me mande qu'il vous en a écrit. 1. Bibliothèque de l'École des chartes, t. XC, 1929, in-S°, p. 224-228. 2. Arch. nat., JJ. 23.


TABLE DES MATIÈRES

Pages

Notice du manuscrit 60 de la bibliothèque de Rodez, contenant entre autres un sermon de saint Vincent Ferrier, par C. BRUNEL. 5 Deux chapitres de l'influence littéraire de Christine de Pisan, par S. SOLENTE · 27 Documents inédits sur la jeunesse de Thomas Basin, par Ch.SAMARAN. · 46 Les États-Généraux de Savoie sous les régences des duchesses Yolande de France (1468) et Blanche de Montferrat (1490), par Octave MOREL 58 Le trésor de Henri de Navarre, par Émile-G. LÉONARD 74 L'incendie du Palais de Justice et la disparition des archives de la Cour des Aides (11 janvier 1776), par H. LEMOINE.. 89 Leçon d'ouverture du cours de bibliographie et d'archives de l'histoire de France à l'École des chartes (8 novembre 1933), par Ch. SAMARAN 95 L'avènement de la dynastie carolingienne et les origines de l'État pontifical (749-757), par Léon LEVILLAIN 225 L'histoire des textes et des éditions critiques, par Félix GRAT. 296 Nicolas Clément est-il l'auteur de la « Défense de l'antiquité deIaviIledeToulD?,parE.-G.LEDos. 310 Fragments de comptes royaux des années 1289 et 1290, par Philippe LAUER. · · · · · · · 317 Un sénéchal du xiiie siècle, Guillaume de Combreux, par Henri STEIN 329 Albisse del Bene, surintendant général des finances françaises en Italie. Étude de six registres de ses comptes de 1551 à 1556, par Michel FRANÇOIS 337 Bibliographie 116, 361 Livres nouveaux 177, 393 Chronique et mélanges. 189,406


TABLE ALPHABÉTIQUE'

Actes et documents anciens intéressant la Belgique, 383.

*Anchel (Robert). Part du prix Michel Perret à l'Académie des sciences morales, 409.

Archives départementales. Nominations, 194, 407, 408.

Archives notariales de Paris, 425 de la Suisse, 425 de Florence, 427.

Archivum fratrum praedicatorum, 172.

Arvengas (Jean), élève de 3e année, 191.

*Aubert (Marcel), membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, 408. Compterendu Société des amis de la cathédrale de Strasbourg. Bulletin, 150.

*Autume (Madeleine d'), admise à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archiviste-paléographe, 407. Nécrologie, 418.

*Auvray (Léon), Correspondance de J.-J. Rousseau, 425.

*Babelon (Jean), chevalier de la Légion d'honneur, 195.

*Barré (L. Carolus), admis à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archivistepaléographe, 407. A propos d'un essai de plume d'un ms. en onciale des Lettres de Pline le jeune, 420.

*Bayaud (Pierre), archiviste du Tarn, 408.

*Betgé-Brezetz, archiviste de la Haute-Vienne, 407.

*Bezard (Yvonne). Prix Favre à l'Académie française, 195.

Bibliothécaires. Arrêtés concernant le diplôme technique, 201, 418. Examen, 207, 419. Leçons pour la préparation au diplôme, 208.

Bibliothèques municipales classées. Décret les concernant, 198. Cadres et traitement du personnel, 203. Conditions de recrutement, 206.

Bibliothèque nationale, 428, 431. *Billioud (Joseph), Pals ou lys des plus anciens emblèmes du comté de Provence, 149.

*Blaquière (Henri), admis à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archivistepaléographe, 407.

*Bloch (Camille), commandeur de la Légion d'honneur, 408.

Boisset (Anne-Marie), élève de lre année, 193.

Bommier (Marguerite-Marie), admise à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archiviste paléographe, 407. *Bondois (Paul). Une candidature au professorat de l'École des chartes en 1821, 210. Comptes-rendus La compagnie des secrétaires d'État, 368 L'emprisonnement du prince de Condé, 368 Lettres du cardinal Le Camus, 369. Notes sur divers manuscrits, 428431.

Bonner Urkunden (die) des frühen Mittelalters, 152.

1. Les noms précédés d'un astérisque sont ceux des archivistes paléographes ou anciens élèves pensionnaires de l'École des chartes.


*Bossuat (Robert). Prix de la Grange à l'Académie des inscriptions, 408. Comptesrendus Evrart de Trémangon et le « Songe du verger », 129 Études sur les Miracles Nostre Dame de Gautier de Coincy, 165 Guillaume de Digulleville, 166 Arnolfo d'Orléans, 374 La vie de saint Alexis, 376 Mélusine, 378. *Bouard (Michel de), conservateur de la bibliothèque d'Orléans, 408.

Bouches-du-Rhône (les), encyclopédie départementale, 147. Boucrel (Marie-Thérèse), élève de lle année, 193.

*Bourgin (Georges), Les archives notariales de Florence, 427. Comptes-rendus Travaux du cours d'archivéconomie, 390 Guide des archives de Pologne, 391.

*Bouteron (Marcel), Vincent Flipo, nécrologie, 195.

*Braibant (Charles), chevalier de la Légion d'honneur, 408.

Breillat (Pierre), élève de 3e année, 191.

*Brincat (Victor), archiviste départemental honoraire, 194. *Brunel (C.), Notice du ms. 60 de la Bibliothèque de Rodez contenant un sermon de saint Vincent Ferrier, 5. Comptes rendus Phénomènes généraux d'évolution phonétique d'après le parler de Vaux-enBugey, 145 Histoire du comté de Nice, 148.

Buffet (Henri), élève de 3e année, 191.

Buhot (Jacqueline), élève de 3e année, 191.

Buttin (Fr.), Catalogue de la collection d'armes Ch. Buttin, 389.

Byrne (C.-H.), Genoese shipping, 149.

Caillet (Maurice), élève de 3e année, 191.

*Calmette (Joseph), membre libre

de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, 408.

*Carré (Louis), Le journal d'émigration de Louis Aymer de la Chevalerie, 385.

Cartellieri (Alex.), Das deutschfranzôsische Bûndnis von 1187, 117.

*Chamson (André), conservateur adjoint au Musée de Versailles, 193.

*Chantérac (Bertrand de La Cropte de), officier de la Légion d'honneur, 195.

*Chanteux (Henry), archiviste du Tarn, puis de la Mayenne, 194. Charry (Jeanne), élève de lre année, 192.

Chartier (Auguste), admis à subir l'épreuve de la thèse, 192. Christine de Pisan. Son influence littéraire, 27. Dates de deux de ses ouvrages, 422.

Claude (Marie), élève de 2e année, 191.

Closon (Jules), Un évêque de Liège, Jean d'Enghien, 380. *Clouzot (H.), Niort et sa banlieue, 144.

Concasty (Marie-Louise), élève de lre année, 193.

Corbett (Jacques), élève de 3e année, 191.

*Cordey (Jean), membre de la Commission de publication, 195. Manuscrits français à miniatures au British Museum, 219. Nécrologie M. Grandjean, 414. Comptes-rendus Les Bouches-du Rhône, encyclopédie départementale, 147 Répertoire bibliographique de l'histoire de France, IV, 176 Catalogue de la collection Ch. Buttin, 389. Cornaz (Ernest). Le mariage palatin de Marguerite de Savoie, 370.

Corpus codicum islandicorum medii aevi, 423.

*Couderc (Camille), membre de la Commission de comptabilité, 195. Nécrologie, 412.

*Courcelle (Pierre), admis à subir


l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archivistepaléographe, 407. Prix Auguste Molinier, 407.

*Courteault (Henri), membre de la Commission de publication, 195.

*Coville (A.), Évrart de Trémangon et le « Songe du Verger », 129. Jean Petit, 131.

*Coyecque (Ernest), Dépôt d'archives notariales aux Archives nationales (1933), 425. Compte-rendu Manuel pratique du bibliothécaire, 392. Crozet (Léo), Manuel pratique du bibliothécaire, 392.

Cuvelier (Joseph), Travaux du cours d'archivéconomie, 390. Danchin (F.), Les imprimés lillois, 174.

Degros (Maurice), élève delre année, 192.

Delacotte (J.), Guillaume de Digulleville. Trois romans-poèmes, 166.

Delafosse (Marcel), élève de lre année, 192.

*'Delatouche (Raymond). ). Sa thèse, 406. Archiviste-paléographe, 407.

Delattre (Hélène), élève de 2eannée, 191.

*Delcambre (Étienne). ire médaille au concours des Antiquités de la France, 408. Comptes-rendus Recherches sur les tribunaux de châtellenie en Flandre, 139 L'avènement du régime démocratique à Bruxelles (1306-1423), 141; Le droit coutumier de Cambrai, 379 Un évêque de Liège, Jean d'Enghien, 388 Société d'histoire du droit des pays flamands, comptes-rendus des journées tenues à Liège, 382. *Deschamps (Paul), membre de la Commission de comptabilité, 195.

Didelin (Jeanne), élève de lre année, 193.

*Dieudonné (A.). Prix Duchalais à l'Académie des inscriptions,

408. La loi de Gresham au moyen âge, 384.

Dillay ( Madeleine ). Titulaire d'une bourse Pierron, 407.

Doctorat. Suppression de l'indemnité, 209.

Dousset (François), élève de 2e année, 191.

Drouin (Alice), élève de 3e année, 191.

Dubois (Jean), élève de 2e année, 191.

*Du Bus (Charles). Part du prix Michel Perret à l'Académie des sciences morales, 409.

*Ducrot-Granderye (A.). Prix La Grange à l'Académie des inscriptions, 194. Études sur les Miracles Nostre Dame de Gautier de Coincy, 164.

*Duhem (Gustave). Part du prix Catenacci à l'Académie française, 409.

Duparc (Pierre), élève de 2e année, 191.

*Dupont-Ferrier (G.), Études sur les institutions financières de la France, t. II, et Nouvelles études sur les institutions financières de la France, 364. Duraffour (A.), Phénomènes généraux d'évolution phonétique d'après le parler de Vaux-enBugey, 145.

Durand-Barthez (Maurice), élève de lIe année, 193.

Durantel (Madeleine), élève de 2e année, 191.

École des chartes. Examens, 189, 192. Thèses, 406. Décret concernant le personnel enseignant, 198. Leçons pour la préparation du diplôme de bibliothécaire, 208. Une candidature au professorat en 1821, 210.

Ermold le Noir, Poème sur Louis le Pieux et Épîtres au roi Pépin, 156.

Farault (A.), Niort et sa banlieue, 144.

*Faure (Claude). Lettres inédites du cardinal Le Camus, 369. Favresse (F.), L'avènement du


régime démocratique à Bruxelles (1306-1423), 141.

Fawtier (R.). Le premier budget de la monarchie française, 122. *Finot (Louis), membre libre de l'Académie des inscriptions, 194.

Flahiff (Georges), élève de 3e année, 191.

Flambard (Raymond), élève de 2e année, 191.

*Flipo (Vincent). Prix Thorlet à l'Académie des inscriptions, 194. Nécrologie, 195.

Forget (Mireille), élève de 3e année, 191.

*François (Michel), Albisse del Bene, surintendant général des finances françaises en Italie, 337.

*Gaillard (H.). Compte-rendu Le journal d'émigration de Louis Aymer de la Chevalerie, 385.

*Gandilhon (René). Titulaire d'une bourse Pierron, 407. 2e médaille au concours des Antiquités de la France, 408. Ganshof (F.-L.), Recherches sur les tribunaux de châtellenie en Flandre, 139.

Garreau (Albert), Saint Albert le Grand, 171.

Geisendorf (Paul), élève de lre année, 193.

Ghisalberti (Fausto), Arnolfo d'Orléans, 374.

*Giard (Édouard), officier de la Légion d'honneur, 408.

Gigot (Jean), élève de 3e année, 191.

Gjerlow (Lilli), élève de 3e année, 191.

*Goineau (Françoise), admise à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archiviste paléographe, 407.

Gomez (Eusebio), élève de lre année, 193.

*Grand (Roger), chevalier de la Légion d'honneur, 195. Vice-président de la Société de l'École des chartes, 195.

*Grandjean (Charles). Nécrologie, 415.

*Grat (Félix), L'histoire des textes et les éditions critiques, 296.

*Halphen (Louis), L'essor de l'Europe (xie-xnie siècles), 116. Comptes-rendus Genoese shipping, 149 Studien zur Geschichte Font g AdU'ljs, 154.

*Hanotaux (Gabriel). Hommage, 224.

Hanote (Germaine), élève de 2e année, 191.

Hardel (Émilie), admise à subir l'épreuve de la thèse, 192.

Harsin (Paul), Crédit public et banque d'État en France, 371. Haucourt (Geneviève d'), élève de 2e année, 191.

*Henry (Patrice). Compterendu Étude sur la langue des serments de Strasbourg, 155.

Hildesheimer (Ernest), élève de 2e année, 191.

Hornung (Jacques), élève de 2e année, 191.

*Hosotte (Marie-Antoinette), admise à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archiviste-paléographe, 407. Houin (Anne-Marie), élève de lre année, 193.

*Huisman (Georges), directeur général des beaux-arts, 407. Jarry (Bernard), élève de ire année, 193.

*Jassemin (Henri), docteur ès lettres, 194. Premier prix Gobert à l'Académie des inscriptions, 408. La Chambre des comptes de Paris au xvO siècle, 366 Le mémorial de Robert II, duc de Bourgogne, 366.

Jean d'Arras, Mémoires, éd. par L. Stouff, 378.

*Jusselin (Maurice), chevalier de la Légion d'honneur, 195.

Ketner (F.), De oudste Oorkonden van het Klooster Bethlehem, 386.


Kienast (W.), Die deutschen Fürsten im Dienste der Westmàchte, 117.

*Labande (René), archiviste d'Alger, 194.

Labbé (Yvonne), élève de 3e année, 191.

La Bruyère (René), L'empoisonnement du prince de Condé (1588), 368.

La Force (Jacques de), élève de 3e année, 191.

La Jonquière (Jeanine), élève de 1re année, 193.

Langlais (Suzanne), élève de 3e année, 191.

La Porte du Theil (Marie-Pia de), élève de lre année, 192.

*Latouche (Robert), professeur d'histoire du moyen âge à l'Université de Grenoble, 407. Histoire du comté de Nice, 148.

*Lauer (Philippe), Fragments de comptes royaux des années 1289 et 1290, 318. Corpus codicum islandicorum medii aevi, 423.

*Laurain (Ernest), archiviste départemental honoraire, 194. *Laurent (H.), La loi de Gresham au moyen âge, 384.

Le Camus (cardinal). Lettres inédites, 369.

Lécureux (Bernadette), élève de 2e année, 191.

*Ledos (E.-G.), Nicolas Clément est-il l'auteur de la « Défense de l'antiquité de la ville de Toul »?, 310. Comptes-rendus Saint Albert le Grand, 171 Crédit public et banque d'État du xvie au xvme siècle, 371.

Le Foyer (Jean), Le droit pénal normand au xme siècle, 134. *Le Gentilhomme (Pierre). Titulaire d'une bourse Pierron, 407.

*Le Grand (Léon). Nécrologie, 409.

*Le Grand (Michel). Prix Berger à l'Académie des beaux-arts, 195.

Le Guay (Marie-Suzanne), élève de 2e année, 191.

*Lehoux (Françoise), admise à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archivistepaléographe, 407.

*Lelièvre (Pierre), conservateur de la bibliothèque de Nantes, 193.

*Lemaître (H.). Comptes-rendus Niort et sa banlieue, 144 Vie de saint François d'Assise, 168 Études inédites sur saint François d'Assise, 168 Archivum fratrum praedicatorum, 172 Les imprimés lillois, 174 The chained library, 175.

*Lemoine (H.), L'incendie du Palais de Justice et la disparition des archives de la Cour des aides, 89.

*Lemoisne (Paul-André). Prix Houllevigue à l'Académie des beaux-arts, 195.

*Lenoir (Madeleine). Sa thèse, 406. Archiviste-paléographe, 407.

*Léonard (Émile-G.), Le Trésor de Henri de Navarre, 74. Grand prix Gobert à l'Académie des inscriptions, 194.

Le Pesant (Michel), élève de 2e année, 191.

*Lesort (André). Nécrologie Auguste Le Sourd, 415.

*Le Sourd (Auguste), nécrologie, 415.

Level (Lise), élève de 3e année, 191.

Levi (G. E.), Il duello giudiziario, 174.

Levi (Maxime), élève de lre année, 193.

*Levillain (Léon), L'avènement de la dynastie carolingienne et les origines de l'État pontifical (749-757), (225. Compterendu Poème sur Louis le Pieux et Épîtres au roi Pépin, 156.

Levison (W.), Das Testament des Diakons Adalgisel- Grimo (634), 152.

Lièvre (L.), La monnaie et le


change en Bourgogne sous les ducs de Valois, 143.

*Longnon (Jean), bibliothécaire à l'Institut, 193.

Lorenzo (X.), Notas de diplomatica galega, 388.

*Lot (Ferdinand), Le premier budget de la monarchie française (1202-1203), 122.

Lot (Marianne), élève de 3e année, 191.

Luc (Pierre), élève de 1 re année, 192.

Mahn (Berthold), élève de 3e année, 191.

Mangin (Joseph), élève de 3e année, 191.

*Marichal (Paul), trésorier puis vice-président de la Société de l'École des chartes, 195.

*Marot (Pierre). 2e médaille au concours des Antiquités, 194, 209.

Marquant (Robert), élève de 3e année, 191.

*Martin (Germain), ministre des Finances et du Budget, 407. *Martin (Olivier). Second prix Gobert à l'Académie des inscriptions, 194 et 408.

*Marx (Jean), directeur au ministère des Affaires étrangères, 194.

*Mazerolle (Fernand), président de la Société de l'École des chartes, 195.

Meijers (E. M.), Le droit coutumier de Cambrai, 379.

Meinert (H.), Papsturkunden in Frankreich, 126.

Meusy (Lucienne), admise à subir l'épreuve de la thèse, 192. *Mirot (Albert), secrétaire adjoint [puis secrétaire] de la Société de l'École des chartes, 195. Compte-rendu La monnaie et le change en Bourgogne sous les ducs de Valois, 143.

*Mondain-Monval (Jean), chevalier de la Légion d'honneur, 408.

*Moranvillé (Henri), membre de la Commission de comptabilité, 195. Croisade d'Eble de

Roucy en Espagne, 212. Nécrologie Camille Couderc, 412.

*Morel (Octave), Les États-Généraux de Savoie sous les régences de Yolande de France et de Blanche de Montferrat, 58. *Morel (Pierre), archiviste de la Haute-Vienne, 194.

Neyrand (Pierre), admis à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archivistepaléographe, 407.

*Omont (Henri), membre de la Commission de publication, 195.

Ourliac (Paul), élève de 2e année, 191.

Oursel (Madeleine), élève de 1 re année, 192.

*Patry (Henry), chevalier de la Légion d'honneur, 408.

Pellegrin (Élisabeth), admise à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archiviste-paléographe, 407.

*Peretti de la Rocca (Emmanuel de), grand officier de la Légion d'honneur, 195.

*Petit-Dutaillis (Ch.), membre du Comité des travaux historiques, 408. Comptes-rendus L'essor de l'Europe, 116 Die deutschen Fûrsten im Dienste der Westmàchte, 117 Das deutsch-franzôsisch" Bùndnis von 1187, 117 Le premier budget de la monarchie française, 122.

Pline le jeune, Un manuscrit en onciale des Lettres, 420.

*Poëte (Marcel). Prix Jean-Jacques Bernier à l'Académie des inscriptions, 194.

*Pognon (Edmond), admis à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archivistepaléographe, 407.

Poindron (Paul), élève de 3e année, 191.

*Pradel (Pierre), conservateur adjoint au Musée de Versailles, 193. Secrétaire de la Société de l'École des chartes, 195.


Le mariage palatin de Marguerite de Savoie, 370 De oorkonden van het Klooster Bethlehem, 386 Die Namen der gotischen Buchschriften, 387 Champ Fleury, 387.

*Sauvage (R.-N.). Compterendu Exposé du droit pénal normand au xine siècle, 134. Shirtliffe (Yolande), élève de 1 re année, 193.

Sibertin-Blanc (Claude), élève de 3e année, 191.

Siemenski (Joseph), Guide des archives de Pologne, 391.

Société d'histoire du droit des pays flamands. Comptesrendus des journées. tenues à Liège (1932-1933), 382.

Société des Amis de la cathédrale de Strasbourg. Bulletin, 149. *Solente (Suzanne), Deux chapitres de l'influence littéraire de Christine de Pisan, 27. Une charte-partie de 1107, 213. Dates de deux ouvrages de Christine de Pisan, 422. Deux nouveaux mss. des abbayes de Foucarmont et de Mortemer, 422.

*Stein (H.), professeur honoraire à l'École des chartes, 193. Membre de la Commission de publication, 195. Un sénéchal du xme siècle Guillaume de Combreux, 329. ̃ Nécrologie Léon Le Grand, 409. Comptes-rendus Jean Petit, 131 Jean de Gerson et l'éducation des dauphins, 133.

Streeter (B. H.), The chained library, 175.

Studien zur lateinischen Dichtung des Mittelalters, 163.

Tabachovitz (A.), Étude sur la langue des serments de Strasbourg, 155.

Taillefer (C.), L'abrégé du calendrier, 173.

Tattegrain (Anne-Marie), élève de lre année, 193.

*Tessier (Georges), Un répertoire des communautés soumises à la règle bénédictine, 424.

*Prat (René), admis à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archivistepaléographe, 407.

*Prinet (Max), chargé d'un cours à l'École des chartes, 194. Compte-rendu Pals ou lys des plus anciens emblèmes du comté de Provence, 149.

*Rastoul (Amand), chevalier de la Légion d'honneur, 408.

Rebillon (A.), Les États de Bretagne de 1661 à 1789, 135. Les sources des États de Bretagne (1492-1791), 135.

*Regnard (Gabrielle), admise à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archiviste-paléographe, 407.

Répertoire bibliographique de l'histoire de France, IV, 176. *Rey (Léon), chevalier de la Légion d'honneur, 408.

Ricozzi (Rocco), élève de 2e année, 191.

*Robin (Pierre), La compagnie des secrétaires d'État, 368.

Rousseau (Louis), élève de lre année, 193.

Ruinart (Thierry), Mabillon, 388. Sabatier (Paul), Vie de s. François d'Assise, 168. Études inédites sur s. François d'Assise, 168.

*Saint-Exupéry (Simone de), conservateur adjoint des archives de l'Indo-Chine, 408.

Saint-Rémy (Henry de), élève de lre année, 192.

Samanek (V.), Studien zur Geschichte Kônig Adolfs, 154.

*Samaran (Charles), professeur à l'École des chartes, 193. Membre de la Commission de publication, 195. Un prétendu autographe de François 1er, 217. Leçon d'ouverture du cours de bibliographie et d'archives à l'École des chartes, 95. Documents inédits sur la jeunesse de Thomas Basin, 46. Comptes-rendus Studien zur lateinischen Dichtung des Mittelalters, 163


Comptes-rendus Papsturkunden in Frankreich, 126 Das Testament des Diakons Adalgisel Grimo, 152; Die Bonner Urkunden des frùhen Mittelalters, 152; Diplomatik der màhrischen Immunitàtsurkunden, 152 L'abrégé du calendrier, 173 Il duello giudiziario, 174 Notas de diplomatica galega, 388 Mabillon, 388. *Thibout (Gabrielle), admise à subir l'épreuve de la thèse, 192. Sa thèse, 406. Archivistepaléographe, 407.

Thibout (Marc), élève de 3e année, 191.

*Thomas (Antoine), Jean de Gerson et l'éducation des dauphins, 133.

Tory (Geofroy), Champ Fleury, 387.

Treharne, The baronial plan of reform, 361.

Vaillant (Pierre), élève de 3e année, 191.

Vasseur (Marguerite), admise à subir l'épreuve de la thèse, 192.

Vernet (André), élève de lre année, 192.

*Viard (Jules). Prix du budget à l'Académie des inscriptions, 408. Comptes-rendus Études (et Nouvelles études) sur les institutions financières de la France à la fin du moyen âge, 364 La Chambre des comptes de Paris au xve siècle, 366 Le mémorial de RobertII, duc de Bourgogne, 366 Actes et documents anciens intéressant le Belgique, 383.

Vie (la) de saint Alexis, publiée par le chanoine Meunier, 376. Villard (André), élève de 3e année, 191.

*Waquet (H.). Part du prix Bernier à l'Académie des beauxarts, 409. Compte-rendu Les États de Bretagne de 1661 à 1789, 135; Les sources des États de Bretagne (1492-1791), loO,

Wehmer (C.), Die Namen dergotischen Buchstaben, 387.

Zatschek (H.), Diplomatik der màhrischen Immunitàtsurkunden, 152.

*Ziegler (Aloisius). Sa thèse, 406. Archiviste paléographe, 407.


Le prix de l'abonnement à la Bibliothèque de l'École des chartes est de 50 fr. par an pour la France et la Belgique, et de 70 fr. (sauf variation des changes) pour l'étranger. Les ouvrages destinés à la Bibliothèque de l'Ecole des chartes, en vue de compte-rendu, doivent être adressés, francs de port, à la Société de l'École des chartes, librairie Auguste Picard, rue Bonaparte, 82.

Livret de l'École des chartes. 1891, in-12: 5 fr. Supplément, 1902, in-12 4 fr. 2e Supplément, 1913, in-12 3 fr. Nouvelle édition, refondue et augmentée d'un historique de l'École et de la bibliographie des thèses, 1921, 2 vol. in-12 30 fr. Table de la,Bibliothèque de l'École des chartes. lre et 2e séries, 1839-1849 Épuisé. 3e et 4e séries, 1850-1859 Épuisé. 5e et 6e séries, 1860-1869. 3 vol. in-8° Épuisé. 1870-1879. 1 vol. in-8°: Épuisé.

Table des tomes XLI à LX (1880-1899), suivie des tables générales sommaires des tomes 1 à LX. 1 vol. in-8° 25 fr. Table des tomes LXI à LXX (1900-1909). 1 vol. in-8° Épuisé. Table des tomes LXXI à LXXXV (1910-1924). 1 vol. in-8° 25 fr.

Mémoires et documents

Publiés par la Société de l'École des chartes.

1. Extraits des comptes et mémoriaux du roi René, pour servir à (histoire des arts au XVe siècle, par A. Lecoy de LA MARCHE. 1873. In-8°, de xvi et 368 p. Épuisé.

2. Cartulaire de l'abbaye de Conques en Rouergue, par G. Desjardins. 1879. In-8°, de cxx et 518 p. Epuisé.

3 (I). Le Procès de Guichard, évêque de Troyes (1308-1313), par Abel Rigault. 1896. In-80, de xii-315 p. Épuisé.

4 (II). Le Soulèvement des travailleurs en Angleterre en 1381, par André Réville, 1 898. In-8°, de cxxxvi et 346 p., carte Epuisé. 5 (III). La grande Chancellerie royale et, V expédition des lettres royaux, de l'avènement de Philippe de Valois à la fin du XIVe siècle (1328-1400), par 0. Morel. 1900. In-8°, de xm-592 p. 80 fr. 6 (IV). Essai sur le règne d'Alexis Ier Comnène (1081-1118), par F. Chalandon. 1900. In-8°, de lii-346 p. Épuisé.

7 (V). Examen critique des chartes mérovingiennes et carolingiennes de l'abbaye de Corbie, par L. LEVILLAIN. 1902. In-8", de xiii- 382 p. 25 fr.

8 (VI). Essai sur les sources de l'histoire des Antilles françaises (1492-1664), par J. DE Dampierre. 1904. In-8°, de XL-239 p. 20 fr. 9 (VII). La Maison d'Armagnac au XVe siècle et les dernières luttes de la Féodalité dans le midi de la France, par Ch. SAMARAN. 1908. In-8°, de xxi-524 p., carte. Épuisé.

10 (VIII). La Provence du Ier au XIIe siècle, études d'histoire et de géographie politiques, par G. DE Manteyer. 1909. In-8°, de 532 p. Épuisé.

11 (IX). L'Administration royale dans la sénéchaussée de Beaucaire au temps de saint Louis, par Robert Michel. 1910. In-8°, de 567 p. 50 fr.

12 (X). Charles de France, frère de Louis Xl, par Henri STEIN. 1921. In-8°, de ix-871 p. 75 fr.

13 (XI). Louis XI et l'Angleterre ({4GI-Î483), par J. Calmette et G. Périnelle. 1930. In-8°; de xxiv-424.p,– 80 fr. Adresser tout ce qui concerne les abonnements à la librairie Auguste Picard, 82, rue BONAPARTE, Paris, VIe. N'ngent-le-Rotiou, imprimerie Daupeley-Gouvekneijr. 1934.



ou l'Art et science de la proportion des lettres (Id.), 387. Xurxo Lobenzo. Notas de diplomatica galega. 0 protcolo nos documentos do outo meio-evo (Georges Tessier), 388. Dom Thierry Ruinart, Mabillon (Id.), 388. [François Buttin], Catalogue de la collection d'armes anciennes européennes et orientales de Charles Buttin (Jean Cordey), 389. Joseph CUVELIER, Travaux du cours pratique d'archivéconomie donné pendant l'année 1927 (Georges Bourgin), 390. – Joseph Siemienski, Guide des archives de Pologne. 1 Archives de la Pologne ancienne (Id.), 391. Léo CROZET, Manuel pratique du bibliothécaire (E. C.), 392.

Livres nouveaux, 393.

VIII. Chronique ET Mélanges, 406.

École des chartes et Société de l'École des chartes, 406. – Nécrologie Léon Le Grand (Henri Stein), 409. Camille Couderc (Moranvillé), 412. Charles Grandjean (J. C.), 414. –Auguste Le Sourd (André Lesort), 415. Madeleine d'Autume (C. B.), 418. Diplôme technique de bibliothécaire, 418. A propos d'un essai de plume du manuscrit en onciale des Lettres de Pline le Jeune (L.-Carolus Barré), 420. Dates de deux ouvrages de Christine de Pisan (S. Solente), 422. Deux nouveaux manuscrits provenant des abbayes de Foucarmont et de Mortemer (Id.), 422. Corpus Codicum 1 slandicorum Medii aevi (Pli. Louer), 423. Un répertoire des communautés soumises à la règle bénédictine (G. Tessier), 424. Correspondance de J.I. Rousseau (L. A.), 425. Dépôts d'archives notariales de la Seine effectués aux Archives nationales au 31 décembre 1933 (E. C.), 42"). Les archives notariales de Florence (Georges Bourgin), 427.

IX. TABLE DES matières, 429.

X. TABLE ALPHABÉTIQUE, 431.

La Bibliothèque de l'École des chartes forme, chaque année, un volume grand in-8° d'environ trente feuilles.

Le prix de l'abonnement, à partir de 1930, est de 50 fr. par an pour la France et la Belgique, et de 70 fr. (sauf variation des changes) pour l'étranger.

Les réclamations relatives à la distribution de la revue doivent être adressées, pour ce qui concerne les sociétaires, à M. Albert MIROT, secrétaire de la Société, aux Archives nationales, 60, rue des Francs-Bourgeois, et, pour ce qui concerne les abonnés non sociétaires, à la librairie AUGUSTE PICARD, 82, rue Bonaparte, Paris, VIe.

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Tous les ouvrages envoyés en vue de la publication d'un compterendu doivent être adressés à la LIBRAIRIE AUGUSTE PICARD, 82, rue Bonaparte, Paris, VIe.

Les périodiques échangés avec la Bibliothèque de l'École-des chartes et tous ouvrages destinés à l'École nationale des chartes doivent seuls ^treadressés i9, rue de la Sorbonne, Paris, Ve.


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Pour mener à bien cette enquête et pour donner cette vue d'ensemble, il fal- lait à l'auteur une information très étendue et une culture cosmopolite. Par suite d'heureuses circonstances, M. Stephen d'Irsay était préparé à cette tâche. Il a poursuivi ses études, tant scientifiques que littéraires, en Allemagne, en Angleterre et en Italie et a enseigné en Amérique. Les principales langues de l'Europe lui sont familières et ses séjours variés lui ont permis d'explorer les bibliothèques les plus variées. C'est en France, où ses conférences sur le sujet de son livre ont attiré l'attention, qu'il a voulu l'écrire et dans la langue même qui permet à la pensée le plus de précision et de clarté.

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