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Titre : Commentaire de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et de 1793 : à l'usage de l'enseignement primaire, des cours d'adultes et d'adolescents / par Armand Depper ; lettre préf. de M. Ferdinand Buisson,...

Auteur : Depper, Armand. Auteur du texte

Éditeur : Gedalge (Paris)

Date d'édition : 1902

Contributeur : Buisson, Ferdinand (1841-1932). Préfacier

Sujet : Déclaration des droits de l'homme en société (1793)

Sujet : Déclaration des droits de l'homme et du citoyen

Sujet : Éducation à la citoyenneté

Sujet : France (1870-1940, 3e République)

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb340401915

Type : monographie imprimée

Langue : français

Format : 168 p. : portr. ; in-8

Format : Nombre total de vues : 168

Description : Collection : Éducation civique

Description : Manuels d'enseignement

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k1089654

Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8 Lb57 13368

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 15/10/2007

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ÉDUCATION CIVIQUE

COMMENTAIRE

MCUMUM DES DROITS DE L'MMiME

-E 1'7S3 ET DE 1793

rEnse~nement primaire, des Cours d'Adultes et d'Adolescents

LETTRE-PRÉFACE de M. Ferdinand BUISSON

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GED.ALnH, LIBH.UHE-ËDITEUR 7j, MUE ) BS SAfXTS-t'HnES, 7~

DELA

ET DU CITOYEN

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ARMAND DEPPER

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PARIS



LETTRE-PREFACE

MoM cher Inspecteur,

Vous me faites /H!t'C de M!<? CO;H~MM!'<~r CM ~OMMM /CK/M votre Commentaire sur la Déclaration des droits de l'Homme, et vous me ~cw~ de vous CM ~'rc woM ~c;weM~.

J'ai parcouru ces pages, vous le croï're~ sans peine, avec MH vif intérêt. D'abord, OM ne relit jamais sans e~:o~!OM ce grand texte de ~o~rc ~aM~c r~oM~cat'M..E~ puis l'entreprise que fOM~ ~H~e~ a quelque chose qui HcjpOM~t7 ~~M~?<er de we toucher jMr~'CM/cre:MeH~. Au ~o~CM~ où des A~Or/CM~ despublicistes, ~M Ao~MWM d'État, des savants, rccoMHat~~eM~ qu'il y a dans cette page immortelle de la Déclaration matière à bien <~M ~K~M, vous ~ye~ songé à la lire et à /a faire lire à MM tout autre point de vue.


C'est par l'école que yoMS c/tcrc/!e~ à /a /re JPCHC/7'Cr ~M~ /7MC de la H~OM ~'0!< elle est ~0?*tie 7/M /<3/n' toute r~'o~Ma~~e de lumière. TYc~reM~c idée ~<reM<CH~ et inspirée de la 77!cwc foi rcpM~M/HC ~Mï ecrï'rc par les Ao~M de ces Tables de la loi dit 7H07!~ ;HO~Cr;!C/ Vous ~c~ r~~OH de croire que le peuple ~'<ïM/o!<r~n<t peut co??:jL?re~6fre et ~M/?' ce ~«? le ~C:(' d'il CC7~ r/M~ ans ~Z~ ~COM~r/r et ~rwe7' ;c~or/<?M~c/77pM/.

Vous /?'~M~cr~ jpo/<r le peuple, <MMc ~/Mwc alerte et rapide, tout l'essentiel de l'histoy't'~K~ et tout l'essentiel du droit coM.y/M//OHM<?/ ~OM~MM qu'il /o?'/e de /K/<r<? coHM~~rc. ~b~~ Me ;jpcr~e~~y ~M la ~~c~~ï'oM des parties /('c~n'<~<M et des po/M~ ~ccoM~/rM. ~OM~ semblé, à ~OM droit ce me semble, ~M'<7 /!ï//a</ /o~~ coMCp7~7*er /<'OM ~Hr les ~r~M~ ~r!'HC!~e~, sur les ~ow~e~ /MW!'?!e~A', provoquer l'adhésion r<?/7cc/t! de vos lecteurs, des /'c?~MM ~y<r/OK~, aux !M /OM~w~M sur lesquelles rC~O~CMf MO~ !'?M~K~<OM~ démocratiques. E?< ce temps 0!'< la ~C~M~/t'~MC ?!'t! plus, ~n'a!OK, d'ennemis déclarés, puisque tous les /!0;M77!M des aMCt'eM~ partis s'appellent <~MorMa!~ républiC~!M~, à /<CMre oit tant de ces nouveaux adeptes de la ~cpM~Me, t'/MjtM~'eH~ de la servir ou de ~'CM servir, <ïM7!OMccM/ si haut /~jprc~CM/OM de la rc/brwcr ~OMr~cjp~rc de /a~c/br7~cr, il était bon que ~Hef~tt'MM s'appliquât, CO~!MC vous le ~e;


~e~ re;HC/~rc sous les ;~KA* de tous la pure, la simple, la vieille doctrine de nos pères dans sa ~CrC et incorruptible limpidité. Vous le faites CM y e/7~/o;H~ l'esprit et les méthodes de MO/re e'~ë!eu!CH/ ~r!a:'re qui a pOKr devise pédago~Kc, et qui pourrait avoir aussi ~07<r devise ~MM/OHjPO/t'~KC « ~CM, mais /?t'~M. » Vous :'oM~ ~~rc~c~ aux élèves des CoMr~ d'adultes, aux ~KJO! des P~/rOM~M, ~MA' mem~7'M des Associations ~W!'M/M des anciens élèves, c'est-à-dii-e à toute cette jeunesse ~o~M/~trc qui est la réserve inépuisable de la démocratie y?'~Mcaise.

.P/<M<? votre c~b7'/ e/rc accueilli cowwc il ;7~?'/<c de /'c/rc Ce sera votre récompense d'avoir co~/?'c à faire coMM~~rc, <n';Hcrc/ défendre la Patrie repK~/t'cat'Me.

~/e~ cor~'a/c/Mc~ vous.

F. BUISSON.

P~rt'ej"'<!f)'!7TOO-



AVANT-PROPOS

Aux MAÎTRES ET AUX MAITRESSES,

Le 28 mars 190!, la Chambre des Députés a décidé que la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen serait afnchée dans toutes les écoles publiques.

Les instituteurs et institutrices ne manqueront pas de « l'encadrer dignement », et de lui donner dans leur classe « la place d'honneur », ainsi que le recommande particulièrement l'inspecteur d'Académie de la Marne, M. Payot.

Tous voudront « faire pénétrer dans la mémoire et dans le cœur des enfants cette charte de nos libertés )). Tous s'efforceront, pour la


faire parfaitement comprendre, d'en éclaircir le texte, en donnant à leurs élèves tous les aperçus, toutes les explications qui sont nécessaires.

C'est pour les aider dans leur tache que nous avons écrit ce Commentaire. Les élèves, ne connaissant encore rien de cette Déclaration, ont besoin qu'on leur en fasse comprendre d'abord la lettre et l'esprit. La première partie de ce livre est donc le commentaire littéral et historique de la Déclaration il est destiné, soit à projeter quelque lumière sur tout ce qui pourrait paraître obscur, soit à préciser tout ce qui pourrait prêter à diverses interprétations.

Le texte, une fois lu en entier, -mais alors seulement, croyons-nous l'élève sera en état de bien suivre les considérations générales auxquelles se prête la Déclaration. Chaque chapitre pourra faire l'objet d'une leçon ou d'une lecture hebdomadaire. A la fin de l'année, les enfants sauront tout ce qu'il est bon de savoir. Et ainsi se trouvera instituée la fête de la Déclaration, dont Mirabeau avait conçu l'idée. Un jour spécial ne lui sera pas annuellement consacré, comme le sou-


haitait le grand orateur. Elle aura lieu chaque semaine, elle revêtira un caractère très simple et très religieux, puisqu'elle se fera à l'école, et consistera en un entretien familier au cours duquel naîtra, dans l'esprit et le cœur des enfants, un. sentiment, chaque fois plus vif, d'amour pour les principes de 1789 et de reconnaissance pour ceux qui les ont proclamés.

Les écoles américaines nous ont donné l'exemple. Dans chacune d'elles, la Déclaration de l'Indépendance, rédigée par le Congrès de Philadelphie en 1776, est affichée, commentée, apprise par cœur.

Le retard que nous avons mis à imiter sur ce point les États-Unis ne s'explique depuis la troisième République surtout que par une coupable indifférence.

Désormais, nous allons, comme eux, faire apprendre à nos enfants la proclamation qui ouvrit l'ère de la Liberté et de l'Egalité. La méditation à laquelle ils seront conviés fera entrer en eux, acceptés par le co;ur et la raison, les principes modernes dont l'ensemble constitue, comme on l'a dit, notre Évangile politique.


Et ces principes, admis et aimés de tous, contribueront puissamment à fortifier, sinon à créer, dans un avenir prochain, l'Unité morale et politique de notre pays.


A MES J.EUXES LECTEURS,

Ce livre a été fait pour vous expliquer les droits dont personne ne peut injustement priver une créature humaine et un citoyen français. Ces droits ont été proclamés solennellement par la Révolution française.

Chacun de vous les possède en naissant. Soit qu'ils dénnissent les conditions de l'homme vivant en société sous l'autorité d'un gouvernement, soit qu'ils énumèrent les garanties qui doivent en assurer légalement la jouissance, ils ne font qu'exprimer des vérités éternelles.

Vous allez les étudier, en examiner l'étendue et l'importance. Vous verrez que, du commencement à la fin, ils affirment votre dignité personnelle.

Vous les aimerez, vous les appliquerez dans tous les actes de votre vie. Devenus grands, vous ne permettrez pas qu'on les viole. Vous


saurez au besoin les défendre contre un usurpateur qui tenterait d'établir son pouvoir sur leurs ruines.

La connaissance de vos droits vous donnera une haute et juste opinion de vous-mêmes. Vous saurez ce qui vous est du. Maison même temps, et par contre-coup, vous saurez ce que vous devez aux autres, vos égaux. En apprenant que les droits de chacun sont semblables, vous apprendrez que vos devoirs vis-a-vis les uns des autres sont les mêmes.

Sans vous enseigner la morale, ce petit livre vous amènera à en mieux comprendre, à en appliquer les préceptes.

AnM~D DEPPER*.

(*) C'est, sous le pseudonyme d'AxMAXD DEpt'Ett que l'auteur s'est fait connaitre dans la presse. Chaque lundi, il donne dans le 7{<ïppf/ et le J~ S~c/c une CaM~erf'e pcd~oyt~xc.


TEXTE DE LA DËCLmTM~

DES DROITS DE L'HOMMK !T DU CITOYEN D)-: 1789

PRËA.MBULE

Les représentants du Peuple français,

constitués en ASSEMBLÉE NATIONALE, considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une Déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l'homme, afin que cette Déclaration, constamment présente à tous les membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs; afin que les actes du Pouvoir législatii et ceux du Pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés afin que les réclamations des citoyens, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous.

En conséquence, l'ASSEMBLÉE NATIONALE reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l'Être suprême, les droits suivants de l'homme et du citoyen


ARTICLE PREMIER. Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits i les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune. ARTICLE 2. Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression. ARTICLE 3. Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation nul corps, nul individu ne peut exercer dautorité qui n'en émane expressément.

ARTICLE 4. La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ainsi l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits; ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi. ARTICLE 5. La loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société. Tout ce qui n'est pas détendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas. ARTICLE 6. La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir, personnellement ou par leurs représentants, à sa formation; elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens étant égaux à ses yeux, sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois


publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.

ARTICLE 7. Nul homme ne peut être accusé, arrêté, ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis mais tout citoyen, appelé ou saisi en vertu de la loi, doit obéir à l'instant; il se rend coupable par la résistance.

ARTICLE 8. La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit et légalement appliquée. ARTICLE 9. Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi. ARTICLE 10. Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi.

ARTICLE 11. La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.

ARTICLE 12. La garantie des droits de


l'homme et du citoyen nécessite une force publique cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée.

ARTICLE 13.-Pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses de l'administration, une contribution commune est indispensable elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.

ARTICLE 14. Tous les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leurs représentants la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée.

ARTICLE 15. La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration.

ARTICLE 16. Toute société, dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de constitution.

ARTICLE 17. La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évi. demment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.


CHAPITRE PREMIER

LE TtTRE

Déclaration des Droits de l'Homme

et du Citoyen.

Nous venons de lire la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen adoptée par l'Assemblée Constituante. N'est-ce pas que sa lecture impressionne, comme tout ce qui est éternellement vrai, noble et beau?

Uetisons-ta maintenant pour en bien saisir toute la signification. Allons lentement et arrêtons-nous devant chaque mot.

J appelle votre attention sur le litre; il vous dit tout de suite ce qui se trouve dans les dix-sept articles de la Déclaration ce sont les Droits de l'Homme et du Citoyen.

Deux sortes de Droits par conséquent ceux qui concernent l'Homme et ceux qui appartiennent spécialement au Citoyen. Les premiers sont les Droits civils les seconds, les Droits C!<M, ou encore les Droits politiques. Vous verrez aisément la dinurence qui existe entre les uns et les autres. Les droits civils sont ceux que possède tout être humain, sans distinction de race ou de sexe. Les femmes peuvent les revendiquer aussi bien que NOTA. –Voir à la fin du volume, page <59, un Lexique expliquant tes mots suivis d'un astérisque.


les hommes c'est, par exemple, la liberté individuelle dans ses diverses manifestations, l'égalité devant la loi. Aussi bien que les hommes, les femmes peuvent pratiquer un culte, parler dans une réunion publique, écrire dans un journal, etc. Cependant certains droits leur échappent encore les Droits Politiques, apanage du citoyen, sont réservés aux hommes. Eux seuls prennent part aux votes pour élire les conseillers municipaux, généraux, les députés, les sénateurs; eux seuls peuvent être élus. Un certain nombre de penseurs estiment justement que peu à peu ces droits seront légalement reconnus aux femmes.

On remarquera que les droits énumérés dans la Déclaration ne sont pas réservés aux hommes à l'exclusion des femmes, ni aux seuls hommes de notre pays. Ils sont donnés comme étant ceux de toute personne vivant à n'importe quelle époque de l'histoire, dans n'importe quel pays.

Assurément, les Français qui les ont proclamés ont surtout pensé à eux-mêmes mais en parlant pour eux, ils ont aussi voulu parler au nom de tous. Ils se sont faits les interprètes~ du genre humain.

En rédigeant la Déclaration, ils n'ont pas prétendu établir, décréter les Droits de l'Homme et du Citoyen; ils ont hautement aftirmé que ces droits appartenant à tous, en tous temps et en tous lieux, étaient aussi vieux que l'Humanité.

Ils n'ont donc fait que les déclarer, c'est-à-dire les énoncer, les faire connaître.

Leur Déclaration n'est ni une ordonnance ni une loi, c'est un manifeste ou, si l'on veut, un


acte par lequel ils ont enlevé le voile derrière lequel étaient cachés depuis très longtemps les droits dont les rois avaient dépouillé les peuples.

Cela est si vrai qu'ils ont même avoué ne pas les avoir tous aperçus. Le 27 août 1789, l'Assemblée Constituante reconnut que la liste des Droits contenus dans la Déclaration était incomplète. Ils n'ont pas davantage donné le texte de leur Déclaration comme le seul admissible entre plusieurs, ils en ont choisi un, celui qui leur a paru le meilleur. Leur choix n'est pas une condamnation pour les formules qui pouvaient être trouvées après eux. Mais s'ils n'ont pas eu l'intention de présenter leur Déclaration comme parfaite et de source divine; s'ils en ont avoué eux-mêmes l'imperfection résultant de son origine humaine, leur œuvre telle qu'elle est n'en est pas moins admirable aucune de celles qui ont été faites depuis ne la surpasse en précision, en beauté, en grandeur!

QUESTIONNAIRE

i" Qu'appelle-t-on « droits civils ? 2" Qu'appelle-t-on droits civiques Il 3" Les femmes ont-elles tous les « droits civiques )' ? Qu'a dit, le 27 août ~89, l'Assemblée constituante au sujet de la Déclaration des Droits ?

REDACTION

1. La Déclaration des Droits de l'Homme est-elle une loi ou un manifeste ?

2. Quels droits énumère la Déclaration des Droits de l'Homme? La liste en est-elle complète ? '?


CHAPITRE II

LA DATE

La D~'c/</?'a~oH(/~ D?'o~/M/~6~o/)/cc~ /s.s<'M~/CC Co/M~/M~C </M 20 ~!< <M~ /7~ et acceptée /~r le r&ï le oe/o~e. Les auteurs de la Déclaration sont les Constituants, c'est-à-dire les Députés des Etats Généraux convoqués par Louis XVI en 1788, réunis à Versailles en 1789, qui jurèrent, le 20 juin 1789, de ne pas se séparer avant d'avoir donné une Constitution à la France (Serment du Jeu de Paume).

Les Députés avaient la ferme volonté de faire les réformes répondant aux besoins et aux demandes du Tiers Ktat Le peuple, dans les cahiers où étaient formulés ses désirs, avait demandé pour le royaume une Constitution fondée sur les Droits de l'Homme. Toute la Révolution était dans cette demande. Le 1 juillet, le marquis de La Fayette, qui avait combattu en Amérique pour l'indépendance des colonies anglaises, déposa un projet de Déclaration des Droits.

L'Assemblée nomma une commission pour en faire l'étude et se trouva bientôt en présence de nombreuses propositions, du même genre. Elle en arrêta le texte par ses votes du 20 au 26 août; mais on s'en entretenait depuis le premier du mois, tan-


tôt avec beaucoup de calme, tantôt au milieu des (liscussions les plus tumultueuses.

Cette Déclaration posait les principes d'une société nouvelle. Elle était d'accord avec les événements pour bouleverser l'état de choses existant. Le roi et la cour assistaient à l'écroulement du régime qui leur était cher, de ce régime qui donnait au monarque la toute-puissance, et aux grands les privilèges de toutes sortes. Parfois, les représentants de la noblesse et du clergé, dans un accès d'enthousiasme qu'ils regrettaient le lendemain, votaient des réformes radicales. (Telle la nuit du 4 août).

La Bastille avait été prise (14 juillet) et démolie par le peuple victorieux. Louis XYI, toujours irrésolu, avait voulu, pour arrêter la Révolution, recourir à la violence le moyen ne lui avait pas réussi.

Il avait essayé ensuite d'une conciliation hypocrite qui avait aussi piteusement échoué. Il était revenu au projet de se servir de l'armée pour expulser les députés et écraser les Parisiens. Mais il ne savait point prendre une décision il temporisait mal à propos. Depuis un mois, il examinait ce qu'il devait faire au sujet de la Déclaration des droits que l'Assemblée avait soumise à son approbation il la gardait par devers lui sans la renvoyer.

Cependant le peuple de Paris souffrait de la faim et l'accusait de ses maux. Le 5 octobre, la nouvelle se répandit que la cocarde tricolore avait été foulée aux pieds dans une fête offerte par la cour aux régiments concentrés autour de Paris. Une insur-


rection éclata à Paris hommes, femmes, enfants se rendirent en armes à Versailles. Ce jour même, le roi avait annoncé à l'Assemblée qu'il ne pouvait approuver la Déclaration. Il choisissait bien le moment L'Assemblée, irritée, dépêcha près de lui une députation pour lui demander une acceptation immédiate et catégorique

L'heure était grave Le château envahi, la reine l'Autrichienne, comme on l'appelait personnellement menacée, la famille royale courait un réel danger un nouveau refus du roi pouvait tout perdre Louis XVI signa une acceptation pure et simple.

H nous reste maintenant à dire pourquoi cette Déclaration, conçue, discutée, votée en 1789, est quelquefois appelée Déclaration de 1791 c'est qu'elle sert de base a la Constitution élaborée par l'Assemblée Nationale Constituante, conformément au serment du Jeu de Paume, pendant les années 1789-90-91.

On donne donc improprement à la Déclaration la date de la Constitution La Dcc/o'a~'o/K?~ </c /7< la Co?M<M~<W de 1791.

QUESTIONNAIRE

i" Que demandait le peuple en t789 ? 2" Que fit le marquis de la Fayette le il juittet 1789 ? 3" Que fit alors t'Assemblée ? 't 4" Que faisait Louis XVI pour arrêter la Révolution ? 5~ Que se passa-t-il à Paris te 5 octobre? 6° Que se passa-t-il à Versailles? `.'

REDACTION

Quand et comment fut votée par t'Assemblée constituante et adoptée par le roi la Déclaration des Droits de l'Homme de i7S9? 1!


CHAPITRE III

LE PRÉAMBULE

Les Représentants ~M Peuple Français,

COM~MM en .e/M~/CC ~V~OM~~ COM~dérant que /~Mr~Mce, l'oubli ou le mépris des Droits de /'J?ow~e sont les seules causes des malheurs publics et de la co''r!OM des ~OM~cr~cw~ ont résolu d'exposer, dans une Déclaration solennelle, les Droits naturels, inaliénables et sacrés de /'jEfo/M~ afin que cette Déclaration, co~M~c~~r~cM/c à tous les ~M;M du CO?~ social, leur rappelle sans cesse leurs Droits et leurs Devoirs; afin que les actes, du Pouvoir législatif et ceux du Pouvoir cjcccM/~ pouvant être à chaque ~Mtant comparés avec le but de toute institution ~0/ en soient plus respectés; afin que les rcc/o~M des C/M~ fondées ~~or~<ïM sur principes simples et incontestables, tournent toujours au ~M/M~'CM la Constitu~'0~ et au bonheur de /OZM.

En conséquence, l'Assemblée ~V~OM~/C reconnaît et déclare, CM présence et sous les auspices de /re Suprême, les Droits suivants de /To/Mwc du Citoyen.


Les dix-sept articles de la Déclaration des Droits sont précèdes du Préambule c'est-à-dire de l'introduction que nous venons de lire. On y trouve les motifs qui ont fait prendre aux Constituants la résolution d'exposer, dans une Déclaration solennelle, les Droits naturels, inaliénables et sacrés de l'homme ou, pour employer des termes plus simples, les Droits que nous apportons en naissant, les droits que nous ne sommes même pas libres d'engager, de vendre, d'abandonner pour quelque raison que ce soit, les droits que personne ne saurait sans crime nous enlever, car ils sont inviolables et vraiment saints.

La Constituante les a caractérisés avant de les dénnir. Le but qu'elle a poursuivi est double. Tout d'abord elle rappelle, pour les condamner, les causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements.

« Les malheurs publics », ce sont les tristes événements qui ont accablé la nation < la corruption des gouvernements », c'est l'altération, la décomposition du royaume régi par une administration vicieuse. La mauvaise gestion des finances, par exemple, et les dépenses inutiles, sans cesse croissantes, de la cour, avaient rendu le peuple extrêmement malheureux. La mauvaise perception* et la mauvaise répartition des impôts aggravaient le mal. Les privilèges de la noblesse et du clergé étaient choquants, la sujétion du peuple humiliante, irritante et périlleuse pour chacun. La France, mal gouvernée, courait à la ruine elle avait subi les plus sérieux revers à l'extérieur; à l'Intérieur, l'Etat tombait en dissolution.


En t789, une Assemblée Nationale ne pouvait l'oublier. La Constituante pensa avec raison que les causes de cette triste situation étaient « l'ignorance, l'oubli ou le mépris des Droits de l'Homme )) ignorance du peuple, oubli volontaire, mépris de la part des classes privifégiécs et du roi. I) est certain que la violation volontaire ou involontaire de ces droits avait provoqué, en grande partie, le dépérissement de la France, tant au point de vue matériel que moral. C'est la conclusion qui découle à chaque page d'une étude attentive de l'Ancien régime. La réorganisation de l'Etat s'imposait et devait raisonnabtement reposer sur le respect des droits individuels.

La Nation l'avait réclamée, comme nous venons de le voir. D'ailleurs, l'Assemblée Constituante (et c'est là le second but qu eHe poursuivait) voulait assurer la durée de ses réformes et le bon fonctionnement du régime nouveau. Elle pensa qu'il était bon que la Déclaration, constamment présente à tous les membres du corps social, leur rappelât sans cesse leurs droits et leurs devoirs.

C'était dire qu'elle désirait que cette Déclaration fût mise, non seulement sous les yeux, mais dans la mémoire, dans l'esprit et le cœur de tous, afin que personne ne perdit de vue ce qu'il faut et ce qu'il ne faut pas faire.

Elle précise au surplus ce qu'elle entend par là, en signalant deux avantages essentiel. C'est aun, dit-elle, que « les actes du pouvoir législatif et ceux du pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution pofitique, en soient plus respectés ».


Le « &~ <~ toute a~oc!'a/<oM politique », nous dira l'article 2, est la « Conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. »

La Constituante formulait donc le vœu de voir les citoyens s'intéresser vivement aux an'aires publiques, apprécier les actes des fonctionnaires et des législateurs, pour rechercher si ces actes sont conformes à leur qualité, à leurs droits d'hommes libres et égaux. Elle invitait le peuple à faire usage de ses droits pour les sauvegarder et tirer de ses réflexions un respect raisonné, et d'autant plus sincère, des lois et des règlements.

Aujourd'hui encore, la Déclaration, bien connue, bien comprise, bien appliquée, permettra aux citoyens de faire s'il y a lieu- « des réclamations fondées sur des principes simples et incontestables, tournant toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous ».

La Constituante admet que les citoyens puissent demander une chose qui leur est due, protester contre ce qu'ils croient injuste. Mais ces réclamations, pour être justifiées, doivent découler de droits incontestables, imprimés dans le cœur de tous en formules claires et simples.

Si elles sont réellement bien fondées, elles obligent ceux qui les ont fait naitre à éviter l'occasion d'en provoquer d'autres; elles ont pour effet de faire appliquer la loi selon la lettre et l'esprit*. Tout le monde y gagne. Comme dit le Préambule, « elles tourneront toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous ».

Les Constituants espéraient visiblement que la Déclaration des Droits rendrait impossible le retour


du despotisme* et ferait vivre heureux à jamais, sous le nouveau régime, les hommes désormais conscients et jaloux de leurs droits.

QUESTIONNAIRE

I" Quels sont les termes qui caractérisent les droits Je j'homme?– 2" A quelles causes )'Assemb)ée constituante attribuait-elle les maux dont sounrait la France? 3" La Déctaration'des Droits autorise-t-eHc les réclamations publiques ? Les auteurs de la Déclaration n'espéraient-ils pas éviter tout retour du despotisme ? 9

RÉDACTION

Que nous apprend le Préambule de la Déclaration des Droits de l'Homme? i'


CHAPITRE IV

L'ÉTAT D'ESPRIT DES CONSTITUANTS

Le Préambutc nous renseigne très exactement sur l'état d'esprit, les sentiments, les pensées des Constituants. Il n'est pas nécessaire de s'attacher à montrer que c'étaient des hommes épris, jusqu'à l'enthousiasme, des idées de liberté et d'égatité.

C'est par trop visible.

Leur o/7~M7M~ apparaît presque aussi clairement. (Sous le nom d'optimistes on désigne, dans le langage courant, les hommes qui ont une tendance à voir tout en beau, surtout en politique.) Les Constituants ont une confiance illimitée dans leur doctrine politique, qui consiste avant tout à respecter les droits de !'homme. Pourquoi, à leur avis. les malheurs publics ont-Hsaccab!é leur pays? Pourquoi la monarchie absolue est-elle devenue un gouvernement corrompu? C'est parce que les Droits de l'Homme ont été méconnus.

Et, sans doute, ils n'ont pas tort. C'est surtout, en effet, parce que l'Ancien Régime reposait sur le principe des privilèges qu'il est devenu si faible et si funeste à notre pays. Mais ils croyaient que c'étaient là les seules causes de notre décadence. Leur


HEUXtONDKS ÉTATS GKX);n.\UX(:i)))nin8'J).)



foi les induisait en erreur. Il y ~'a~ d'autres ca«ses. Par exemple, au xvm" siècle, l'entrée en scène de peuples nouveaux, une supériorité momentanée, à certains égards, des nations voisines sur nous, un concours de circonstances hostiles et imprévues, etc.

En outre, les Constituants avaient une foi auc?/y/c 6~?M /'<?~MC/<m. L'instruction ne pouvait produire, suivant eux, que des bienfaits. L'ignorance avait causé tout le mal, le savoir réparerait tout et serait a l'avenir la garantie de la stabilité politiquc et du bonheur de tous.

La connaissance des Droits de l'Homme suffirait. Tous pensaient, comme La Fayette, que la liberté était aimée dès qu'elle était connue.

Hctas notre nation devait prouver plus d'une fois en un siëcte(sousNapotéonr''ctNapotéonI!I), qu'un peuple déjà libre et se disant amoureux de la Liberté se laisse asservir facilement.

Les membres de l'Assemblée Constituante pensaient avec certains philosophes notamment avec !e grec Platon~, disciple de Socrate~, qu'il suffit de voir le bien et la vérité pour fuir le mal et l'erreur. C'est une noble mais dangereuse illusion il faut s'en défendre. Elle peut nous faire ravir nos libertés publiques, nous laisser surprendre endormis dans la garde que nous ne montons jamais avec assez de vigilance autour d'elles, ainsi que le prouvent les leçons de l'histoire.

Le second paragraphe du Préambule nous renseigne sur les c~'oy~MCM )'c/<<?«~ des députés de la Constituante. Ils croyaient en Dieu. Ils l'appelaient (-. /'7~re.y~'<~c )). Vottaire~, Jean-Jacques


Rousseau d'Alembcrt~ et le? autres philosophes du xvnt~ siècle le nommaient souvent ainsi; les Constituants, formes à leur école, s'exprimaient comme eux.

Ils étaient donc déistes; il n'est pas inutile de le rappeler plus d'une fois en effet la Révolution a pris un caractère rcHgicux.

Les Constituants n'ont pas touché aux dogmes établis; mais leurs successeurs, les Conventionnets par exemple, en 1794, ont crée des cultes nouveaux. Hébert"' a fait décréter !c cu!te de la déesse Raison~, Robespierre* a créé le culte de t'Etre Suprême, c'est-à-dire le culte d'un Dieu ne relevant d'aucune religion. D'autres hommes, vers le même temps, fondaient la Théophilanthropie qui réunissait dans un même culte Dieu et l'Humanité. Les Constituants, eux, ne pensaient pas a réagir contre le Christianisme et a répudier le Dieu des catholiques ou des protestants au contraire, c'est ce Dieu qu'ils appellent a leur aide avant de passer a la discussion des articles.

Ils veulent délibérer « sous les auspices de l'Etre suprême ». Cette partie finale du préambule contribue assurément à rendre la Déclaration plus solennelle aux yeux de tous elle la présente comme une œuvre humaine, c'est vrai, mais conçue, élaborée sous l'inspiration et avec le secours de la Divinité.

L'état d'esprit des Constituants se dégage donc nettement c'<PM< des optimistes et des déistes, disciples des philosophes /?'a7~a/ </M f/C-A«~CH!C siècle.


QUESTIONNAIRE

1° A qui donne-t-on le nom d'optimistes? 3" Aux yeux des Constituants, comme aux nôtres, que faut-il respecter avant tout ? 3" Les Constituants étaient-ils déistes ? Qu'est-ce qui permet de le dire ?

RÉDACTION

Pourquoi est-il permis de dire que les auteurs de la Déclaration des Droits de l'Homme étaient des optimistes ? 't


OfAPITRE V

ARTICLE PREMIER. Les Ao~WM M~CM/ et demeurent libres et égaux c~ droits. Les distillctions sociales ne ~eM~C/Z~ C/r~07~C~ que sur /<~7~c coy;~7!

L'article I' proclame deux principes la liberté et l'cgafite de tous les hommes.

C'est la condamnation de ce qui avait existé jusque-ia et existait encore.

La liberté n'était pas en France un droit reconnu pour tous personne même ne pouvait se natter de t'avoir. Le roi était un souverain absolu il exilait ou enfermait qui bon lui semblait. Sous le nom de /<?/<~ de cac/<p< il décernait des mandats d'arrestation contre des personnes qui n'avaient commis ni crime, ni délit, ni la plus légère contravention.

Personne n'était assuré, même en restant honnête, en obéissant aux lois, de ne pas aller en prison. L'Ancien Régime était le régime de /'a/a~'e~. C'était aussi !e régime des inégalités.

Les Français étaient divisés en trois classes, trois sociétés de conditions différentes, et traités dineremment par le pouvoir. Ils ne payaient point les mêmes impôts, ne servaient point l'Etat de la même manière; pour le même délit, la peine était plus ou


moins longue ou rigoureuse, suivant la condition du coupable.

< Pour un délit commis ensemble dit M. Duruy dans son Histoire f/e France (2" vol., p. 409), la marquise de Courcelles est condamnée à deux ans de clôture dans une abbaye Hostaing, qui n'est qu'un roturier, sera pendu et étranglé (arrêt de 1669). »

Les distinctions sociales n'étaient pas seulement de simples prérogatives, c'est-à-dire de simples avantages honorifiques, c'étaient souvent de bons privilèges qui favorisaient les Intérêts des uns au détriment de ceux des autres. A la haute noblesse étaient réservées les fonctions publiques les plus importantes et les mieux rétribuées, soit dans l'armée (il fallait faire preuve d'au moins trois quartiers de noblesse pour arriver au grade de capitaine), soit dans le clergé.

Les privilégiés étaient dispensés de payer les plus lourds impôts. Le peuple, qui travaillait et gagnait péniblement de quoi ne pas mourir de faim, était chargé de subvenir aux frais de l'État.

Les distinctions sociales, par trop grandes, étaient injustement fondées sur la noblesse, c'est-à-dire sur la naissance et la richesse.

Conformément à la Déclaration des Droits de l'Homme, et grâce à la Révolution, les Français sont devenus tous égaux devant la loi.

Les privilèges, les inégalités choquantes ont disparu. Il y a encore des grands et des petits, des forts et des faibles, des riches et des pauvres, c'est inévitable, mais tous ont les M~e~c-y droits et les


7MC~!M devoirs, tous sont soumis aux Me/?tCS lois et protégés par elles.

Nous ne sommes plus sous le régime de l'arbitraire et des privilèges, nous vivons sous un régime de liberté et d'égalité.

Sans doute, il y a encore des distinctions sociales. L'organisation d'un gouvernement l'exige mais elles ne sont fondées, comme dit l'article I" que sur/<eco)M?HWïC/ elles sont justinées par les services que rendent ceux qui en jouissent, elles ne sont accordées qu'aux fonctionnaires qui remplissent un emploi institué dans l'intérêt de la société et aux élus du peuple chargés de veiller aux intérêts de la nation, c'est-à-dire de tout le peuple. QUESTIONNAIRE

i" Quels principes proclame l'article de la Déclaration ? '2" La !ibert.é individuelle existait-elle sous l'Ancien Régime ?–3" Et t'ega!it6? Qui payait les impôts avant 1789 ? RÉDACTION

Avant n89 les hommes étaient-ils égaux ? Et aujourd'hui ? D'où proviennent les distinctions sociales?


CHAPITRE VI

ARTICLE II. Le but de /0:</C ~~OC/O~ ~o/MC est la conservation des Droits naturels et imprescriptibles de /'7:fo~n7~. Ces Droits ~oy// la liberté, la propriété, la ~~re/c et la résistance à l'oppression.

Qu'est-ce qu'une association /)o/?'~MC? C'est un gouvernement. Quel est le but du gouvernement? Pourquoi existe-t-il? Pour conserver, pour garder de toute atteinte « les droits naturels et imprescriptibles de l'homme ». On les appelle ~<~<c/s parce que c'est notre nature d'homme, de créature humaine, qui nous les donne; nous les avons en naissant. On les appelle :?:)7'c~C7'?'e.~ parce qu'ils sont éternels, impérissables, et qu'ils subsistent toujours, même s'ils sont violés. Un tyran peut les nier, les fouler aux pieds, ils ne sont point pour cela supprimés, ils conservent toute leur valeur ils ne périment~ point comme les actes notariés. On peut en priver une longue suite de générations, comme l'a fait l'ancienne monarchie; on ne peut les faire disparaître.

« Ces droits sont JaJibcrté (1), la propriété (1), < la sûreté (1) et la résistance a l'oppression. » (<) Nous aurons occasion de parler de chacun de ces droits séparément.


II n'est pas malaisé de comprendre en quoi consiste le droit de la résistance à l'oppression. C'est le droit qui sauvegarde~ tous les autres droits; c'est celui qui permet de les faire respecter quand ils sont violés et de s'insurger~ contre un acte illégal; c'est le droit de légitime défense du citoyen qui se voit attaqué, menacé, et en danger d'être dépouillé de tous ses droits d'homme et de citoyen; c'est en un mot le droit de résister à la tyrannie.

L'Assemblée nationale éprouvait d'autant plus vivement le besoin de le proclamer, de le faire connaître au peuple, qu'elle voyait les préparatifs militaires de Louis XVI pour détruire l'œuvre d'affranchissement qu'elle accomplissait sans peur. L'imminence du danger lui suggéra naturellement l'idée de proclamer solennellement le droit pour chacun d'opposer la force à la force, afin de défendre la légalité.

L'Ancien Régime n'avait jamais reconnu ce droit au peuple, il ne lui accordait même point celui de réclamer la liberté individuelle et la sécurité pour ses biens. Pendant longtemps les rois ont justifié leurs ordonnances et leurs actes, non pas en les montrant fondés sur la raison et l'intérêt général, mais simplement par cette formule « car tel est notre bon plaisir. »

Quand le peuple se voyait spolié~, maltraité, il était attristé, mais il se résignait; il n'avait pas conscience de ses droits et croyait qu'il n'était qu'un troupeau fait pour le roi, son berger.

Aujourd'hui, nous savons que nous sommes des êtres libres, nous savons que le gouvernement n'est


pas institué pour le bonheur du chef, mais pour le bonheur de tous, que tous par conséquent nous devons avoir la jouissance de nos droits naturels et imprescriptibles.

Si jamais des malfaiteurs au pouvoir voulaient, par un coup de force, nous en ravir l'usage, nous nous révolterions. Ce serait un devoir sacré. Mais rassurons-nous, les malfaiteurs sont rares qui arrivent à la direction des affaires publiques; cependant il y en a eu deux les deux Napoléon, qui ont implanté leur puissance en trompant le peuple, en violant ses droits. Nous devons toujours nous en souvenir afin d'être sur nos gardes et de ne pas accorder notre confiance à ceux qui chercheraient à les imiter.

QUESTIONNAIRE

1° Récitez l'article II. 2" Que faut-il entendre par cette expression « association politique P Que doit garantir l'association potitique ? t" Quel est le droit qui sauvegarde tous les autres ? Y a-t-il des souverains qui ont trompé le peuple et violé ses droits ? C" Citez leurs noms. RÉDACTION

Que faut-it entendre par droits naturels et imprescriptibles g Prenez des exemples.


CHAPITRE VII

ARTICLE III. Z.<?~ de toute souveraineté réside essentiellement dans la A~c' ~VM/ corps, H!</ n~ï'M ?!e ~et~ exercer ~ï<~or~c qui /~c;z e/c ejc~rc.Mc?He~.

L'article III répudie complètement la doctrine sur laquelle était fondée la monarchie absolue. L'ancienne monarchie avait la prétention d'être une institution divine. Un grand écrivain du xv)i" siecte, Bossuet~, avait voulu le prouver au moyen de l' « Ecriture Sainte~ ».

Voici à que! raisonnement se ramenait cette théorie

Dieu est le maître suprême des hommes. Mais il ne saurait exercer lui-même directement sa puissance sur chaque pays. Il la délègue donc il une famille. C'est la famille royale. Les aines de cette famille héritent du titre et des fonctions de roi. Ils sont les représentants de Dieu; on doit leur obéir et les respecter comme Dieu lui-même. La royauté était pour ce motif appelée /a?'oyaM~e de droit ~!<M. Et les natteurs allaient jusqu'à dire comme le même Bossuet « 0 rois, vous êtes des dieux. » Il y a eu en France le culte de la royauté. A la chapeHe de Versailles, une partie des courtisans tournaient le dos à faute!, au prêtre, à l'hos-


tie consacrée, et avaient le regard tourné vers le roi, leur vrai Dieu, celui qu'ils voyaient. « Tout ce qui touchait au roi était sacré, dit M. Rambaud (/~o!'re Civilisation française, 2° vol., p. 9). Quand on devait traverser son appartement, et, même en son absence, passer devant son lit, les femmes du plus haut rang, mais surtout les princesses du sang, étaient tenues de faire une révérence comme en passant devant un autel. Ces chrétiens étaient de véritables athées qui adoraient une idole.

Nous sommes loin de penser comme eux. Pour nous, comme pour les auteurs de la Déclaration, le principe (c'est-a-dirc l'origine) toute .o~;c?'<7/w/c ;'CA<f/e~7M la Nation. Le peuple est libre, et seul il a le droit d'instituer une autorité. Le gouvernement est institué par lui et pour lui. C'est luimême qui se gouverne. Ceux qui dirigent les affaires publiques le représentent aux yeux de l'étranger ou lui donnent des lois; ils tiennent leur pouvoir de lui. Aussi bien, la nation n'est-elle plus composée de sujets soumis a un roi, mais de C!'<oy<'7M /~rp.y et cy<zM;y <?~ <0! (art. t"). Les chefs de l'Etat ne tiennent plus leur puissance de Dieu, mais de la nation.

A~/ CO?'/M, ~M/ individu ne ~C!~ C.'C~'CC/' <<0rité qui ~'c~cTïc (c'est-à-dire qui ne vient) c~re~~e/Mpx~ dit peuple, Et c'est bien ce qui existe actuellement. Sans doute, les fonctionnaires qui possèdent une parcelle d'autorité ne sont pas directement nommés par le peuple. Ils ne sont plus élus ainsi que l'avait décrété t'Assemblée


Constituante. Mais nous voyons cependant que leur autorité émane bien du peuple. Considérons l'un d'entre eux l'inspecteur qui vient de temps à autre visiter l'école. Qui lui a conné son emploi ? Le ministre de l'instruction publique. Mais le ministre, de qui tient-il son titre? Du Président de la RépubHque. Et le Président de la République ? Du Parlement (Chambre des Députés et Sénat réunis en Congrès à Versailles). Et le Parlement? Des électeurs.

Or les électeurs, c'est le peuple Donc en définitive, l'inspecteur comme tous les fonctionnaires constituant un corps par leur réunion tire bien réetlemcnt, quoique indirectement, son autorité du peuple.

QUESTIONNAIRE

i" Récitez l'arlicle III. 2<~ Au dire de Bossuet, de qui les rois tenaient-ils leur pouvoir absolu? 3" Pensons-nous comme lui ? De qui l'inspecteur primaire tient-il ses fonctions ? RÉDACTION

Expliquez cette expression « Le peuple est souverain. « La souveraineté nationale. x


CHApmΠV!H

ARTICLE IV. La liberté consiste a ~70~voir faire /o~/ ce qui ~e ;n~7 jM~ ~z~/rt~ Ainsi l'exercice des droits /c/~ de chaque homme H'~ de ~or//cy que celles qui ~~M;'c~/ aux autres y~e/H~rM de la Société la yoK~.y~cc ces ;M droits. Ces bornes /;<?jpc~fc;y/ être ~e/'w~!ce.y que par la loi.

Le motdeHberté peut ch'c entendu dansplosieurs sens. La Déclaration précise celui qu'eHe a voulu lui dooner c'est de « ~o~<;<w faire tout ce qui ne MM~tM <Z~M/ ».

Prenons on exemple: Nous avons le droit d'entrer, de sortir de notre demeure à n'importe queHe heure du .jour ou de la nuit; il nous est seulement défendu de troubler !a tranquiltitc à laquelle les autres ont droit. Nous pouvons, si bon nous semble, garder toute la nuit une lumière dans nos appartements il nous est seulement interdit de troubler le repos de nos voisins. Il n'en était pas ainsi autrefois. Nos ancêtres étaient tenus de rentrer et de rester citez eux dès que le couvre-feu avait sonné. Et a partir de ce moment, leurs appartements devaient rester plongés dans t'obscunté.

H leur était encore interdit de vendre les produits de leurs champs dans les provinces voisines. La


liberté du commerce n'existait, pas. Ils ne pouvaient pas non plus ouvrir une boutique pour exercer leur métier où et quand il leur plaisait. La liberté du travail, la liberté de l'industrie étaient entravées parie régime des corporations~, des jurandes~ et des maitrises~. Avant du devenir patron, il fallait avoir été apprenti, puis compagnon et subir un examen avec succès. Une fois reçu patron, on ne pouvait pas exercer un autre métier que celui pour lequel on avait l'autorisation. Un cordonnier ne pouvait même pas de lui-mème se mettre au rang des savetiers en réparant les vieilles chaussures; il était condamné a faire du neuf ou a ne rien faire. Donc ni liberté personnelle, ni liberté du commerce, du travail, de l'industrie.

La liberté de conscience ou de religion, ta liberté de la presse (c'est-à-dire celle qui consiste a exprimer, à répandre sa pensée et ses opinions par le livre ou le journal) n'existaient pas davantage; nous aurons l'occasion de revenir longuement sur ces deux libertés avec les articles X et XI. La Déclaration dit encore < //c;xc)'c!cc des e~'Ot~ ):H/M?'e~ de c/<o~!<c /t<W!N!e ?t'c de ~o?'~M que celles ~Mt <ïM!<?'e~ a?<a' a'!</?'<'s MM/M~'es de la Société la jouissance </C ces mêmes droits. »

Le bon sens suffit, assez souvent, pour comprendre a quel moment on commence à empiéter sur les droits d'autrui.

Il est évident que j'ai le droit d'aller, de venir sur les routes publiques, à pied, à bicyclette, à cheval, en voiture, en automobile; mais je n'ai pas le droit d'empêcher les autres de se servir aussi bien que moi du chemin; je ne dois pas barrer


la route, t'obstruer' avec mon véhicule, ta. rendre dangereuse ;'ar une marche trop rapide. De même, tes autres n'ont te droit ni d'embarrasser ta voie pubtiquc de marct'andises, par exempte, ni de rendre la circutation difficite, impossi))te, par un rassemblement ou tout autre moyen.

Cependant tes bornes qui déterminent les droits de chacun ne sont pas toujours faciles a apercevoir, tant il va, de notre temps, des droits acquis et superposés, tant notre civilisation a. muttiptié tes usages, les coutumes, !cs manières de vivre, de travaiHcr et d'agir. Notre existence se complique tous tes jours par la création de quelque nouvctte invention. L'exercice de chacun de nos droits peut être revendiqué et interprété d'une manière variable dans une multitude de cas. Alors se pose une question malaisée a résoudre, carotte change d'aspect suivant le point de vue d'où on t'envisage. Le bon sens ne suffit plus pour trouver la solution et distinguer les limites 'm droit réclamé par l'un et contesté par l'autre. Les procès le démontrent constamment. C'est pourquoi, dit sagement !a. Déclaration, < &0?'~M C~C la /~C~C ~C ~e«~ <?/C ~C<C/'M!~C<M ~MC ~ar la loi x.

it ne faut donc faire dans la vie que ce que nous savons d'une façon certaine être permis et conforme a notre droit. En d'autres termes, il ne faut point dans notre honnêteté nous conduire en étourdis, mais en personnes raisonnables et réuéchics.

QUESTIONNAIRE

Hccitcz l'article !V. Que devaient faire nos ancêtre-. quand on sonnait le couvre-feu ? 3° La jibcrté du travail


existait-elle de leur temps ? 4* Est-il toujours facile de connattre exactement ses droits ? 5° Faut-il alors engager des procès à la légère ? g

RÉDACTION

i. Expliquez comment était entravée, avant 1789, la liberté individuelle.

2. Les bornes actuelles de notre iibert.é d'action.


CHAPITRE IX

ARTICLE V. -La loi K~ le droit de ~e/e~~re que les actions 7ZM~M la Société. Tout ce qui n'est pas défendu ~r loi ne peut être c~pecA~ et nul ne peut être co~r~~ il faire ce qu'elle M'or~OM~c pas.

L'article V est la suite naturelle de l'article IV. L'article IV déclare que la loi est seule capable de mettre des bornes à notre liberté. L'articleV ajoute que la loi n'a pas une puissance sans limites. Elle « n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. v

Ai-je le droit de faire l'ascension d'une montagne? de traverser une rivière à la nage? de me soigner ou non si je suis malade? de m'imposer des privations ?

Oui, car aucune de ces actions ne nuit à la Société. La loi est fondée sur l'intérêt général. Telle est la pensée qui se dégage de l'article V. C'est sur l'intérêt générât qu'elle veille, c'est lui qu'elle protège quand elle ordonne, et c'est encore lui qu'elle défend quand elle prohibe et punit.

Elle a prévu les précautions à prendre pour le sauvegarder en toutes circonstances. Les formalités dont les actes publics ou judiciaires sont entourés n'ont pas d'autre but. Si elle veut par exemple


qu'une vente, un échange de biens soient enregistrés, c'est pour que tout le monde puisse le savoir au bureau de l'enregistrement* et au bureau des hypothèques~; c'est pour que le même bien ne puisse pas être vendu deux fois, pour que son ancien propriétaire ne puisse pas emprunter sur sa valeur, pour que la possession ne puisse pas en être contestée à l'acheteur, etc.

Elle punit tout préjudice causé aux biens comme aux personnes. Elle garde le silence sur les actions qui sont regardées comme indifférentes à l'intérêt généra). Mais e!)c s'en occupe dès que l'opinion change à ce sujet.

Il y a à peine quelques années, elle ne s'occupait point d'établir la responsabilité des patrons dans les accidents dont leurs ouvriers étaient victimes. Aujourd'hui, elle a détermine les cas, les degrés et l~s conséquences de cette responsabilité (loi de '1898).

Elle ne se laisse jamais inspirer que par l'intérêt générât, ou, ce qui revient au même, part'intérct de chacun. Elle ne prescrit que ce qui est utile, ne punit que ce qui est nuisible à la conservation de nos droits.

Aussi le législateur qui a rédigé la Déclaration des Droits dit-il à l'article V « 7o~ ce qui ?t'e~ pas </<°/M~< la loi ?!~ peut C~'e <?M!C/<C et ?!!</ MC peut ~e C0~r<i! faire CC ~M'<?/ ~'0;0;MC ~<7A'. ? »

Cependant il y a, n'est-ce pas, des actions à l'accomplissement desquelles la toi ne s'oppose pas, et qui sont réprouvées des honnêtes gens? Un créancier impitoyable fait saisir un débiteur qui se


trouve, par suite de circonstances malheureuses (maladie, chômage, crise économique etc.), dans l'impossibilité de payer sa dette à la date fixée ce créancier use simplement de son droit.

N'a-t-il point commis cependant aux yeux de tous une action blâmable? ~'est-il pas immoral de faire confiner l'extrême justice à l'injustice? De mème, il est bon parfois de faire ce que fe cœur commande, bien que la loi ne l'ordonne pas. Les lois humaines ne sauraient sans absurdité exiger de la Société l'abdication de ses droits. Elles ne sauraient donc nous imposer un acte de désintéressemcnl. Mais la loi morale éternelle et immuable* que nous avons tous au fond du cœur nous dicte notre devoir à ce sujet, t"uten n"us laissant libres de l'accomplir. Ceux qui lui obéissent n'en ont que plus de mérite, puisqu'ils font le bien volontairement. Quand il s'agit de notre conduite privée, il faut donc oublier que '( ~OM~ ce '< ?:7 <cn(/« ~a/' /</ loi ~e /)p/</ ~'c <'M~cc/~ y~c ~c ~CM~ ~'c co~/y'H<M< à faire ce y~W/c ~9;'</o/<p pas ».

Mais, des que nous sentons notre liberté menacée par un acte d'intimidation, il faut nous rappeler ce texte et mettre nos actes d'accord avec lui et notre conscience faire au besoin ce qui n'est pas défendu et ne pas nous laisser contraindre par ce que la loi n'ordonne pas.

QUESTIONNAIRE

1° Récitez l'article V. 2" Sur quel principe est fondée la loi? 3° A quoi servent le bureau de l'enregistrement et le bureau des hypothèques ? Citez le cas d'un créancier qui


use impitoyablement de tous ses droits. S" Feriez-vous comme lui

RÉDACTION

i. Par un ou deux exemples, montrez que notre conscience nous défend parfois de faire ce que la loi permet.

2. Montrez que notre conscience est plus exigeante que la loi.


CHAPITRE X

AuïtCLE VI. La loi est l'expression de la volonté générale Tous les Cï'/o~M ont droit de concourir, ~cr~o~~c//e;c;~ ou par leurs représentants, à sa formation elle doit être la wc~ïc pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse.

Tous les citoyens étant égaux à ~MJ~Ct~ sont également admissibles à toutes ~~H~~ places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre ~M/c//oy! que celle de leurs vertus et de leurs talents.

Cet. article proclame t'origme de la loi et son impartialité à l'égard de tous.

Souveraine Impérieuse eue ne peut émaner que de la Nation (art. III). Mais la Nation est souvent divisée quand il s'agit de prendre des décisions

en vue de sauvegarder t'intérêt général. Par exemple, le Nord et le Midi, les villes et les campagnes, n'ont pas les mêmes intérêts agricoles, industriels et commerciaux à défendre, partant les mêmes idées économiques. Là, on veut frapper de droits certains produits, ici on ne veut pas. On est libreëchangiste ou protectionniste ou prohibitionniste A tous les autres points de vue, il est extrêment rare de voir tout le monde penser de même.


Les discussions qui s'engagent dans une réunion de quelques personnes aussitôt qu'une idée est émise le démontrent suffisamment.

Les lois ne sont presque jamais votées il l'unanimité des suffrages. Elles émanent simplement de la majorité. Elles .yoM< /'c~/)rc<0?< de la volonté géMe~'a/e. La minorité qui ne les approuve pas doit s'incliner devant elles dès qu'elles sont promulguées~, sinon, ce serait l'anarchie~. I! n'est pas défendu de faire une propagande active afin de provoquer la modification des lois qu'on juge mauvaises, mais en attendant on est tenu de se conformer à leurs prescriptions.

D'ailleurs, ce sont nos représentants au Parlement qui les ont votées en notre nom. Elles sont donc indirectement notre œuvre leur obéir, c'est obéir à nous-mêmes. H serait déraisonnable de ne pas vouloir le faire.

Dans l'Antiquité a Athènes et à Rome les citoyens libres pouvaient co?:coM?' personnellement à l'élaboration des lois. Les hommes libres, les citoyens, peu nombreux, pouvaient se réunir sur la place publique où était dressée une tribune pour quiconque voulait prendre la parole. En outre, ils avaient des loisirs qui nous manquent tous avaient des esclaves qui travaillaient pour eux.

De notre temps, aucune place ne serait assez vaste pour contenir les citoyens de n'importe quelle nation; il n'y a plus d'esclaves pour leur permettre de ne pas travailler et de passer leur temps à la discussion des anaircs publiques.

Z.erey!'M:e/?a?'/cM!eM/CM'e rep?'cMM<a~/est le seul moyen dont disposent les citoyens pour concourir


à la formation des lois. Ils élisent des délègues auxquels ils donnen mandat d'agir à leur lieu et place. Ces délégués sont, de nos jours, en France, les <~M/M élus par le suffrage universel et les séna/eM~ élus par le suffrage restreint Ils légifèrent~ au nom du peuple français dont ils senties représentants.

Quelle que soit la loi qu'ils votent, elle la MteH!e poM?' <o:<s~ soit y:<'f//e /)~/e</c, soit ~M'c//c ~!<7MSSC.

Sous l'Ancien Régime, il n'en était pas ainsi. Nous avons déjà vu que pour un même délit les nobles et les roturiers n'étaient, pas punis de la même peine. La loi protégeait l'existence des privilèges. De nos jours, elle ne saurait favoriser personne sans violer les droits de l'homme (art. I"). Tous les citoyens sont égaux à ses yeux.

Et tous, ajoute l'article VI de la Déclaration, « ~0?~ C~/C~~ C~MM.S~/M toutes les f//y7ï< places et emplois ~M~/<6~, selon leurs capacités et sans a?</?'C </M/C/!0~ que celle de leurs vertus et de leurs talents ».

Il est clair que les Constituants, cette fois, n'ont voulu parler que des hommes seuls. Ils n'ont pas eu l'intention de proclamer le droit pour les femmes d'être admises aux fonctions administratives. L'État leur en a, depuis, ouvert l'accès, en les employant dans l'Enseignement et dans les Postes et Télégraphes.

La tendance de les assimiler aux hommes, toutes les fois que l'intérêt général le permet, est manifeste.

Néanmoins, l'égalité des sexes, même sous cette


condition, est loin d'être un fait accompli; nous n'insistons pas.

La fin de l'article VI nous invite plutôt à retenir que les fonctions publiques ne sont plus ni vénales* ni héréditaires, ni réservées à une classe de privilégiés comme avant 1789.

On ne les acquiert ni à prix d'argent, ni par droit de naissance. On s'en rend digne par ses capacités, ses vertus et ses talents. Aussi voit-on s'élever aux plus hautes charges de l'Etat des hommes sortant des plus modestes familles. C'est le régime de l'égalité et du mérite.

QUESTIONNAIRE

i" Récitez l'article VI. 2" Les lois sont-eUe faites à l'unanimité des suffrages ? 3o Citez des administrations puNicmes où les femmes sont employées. 40 Comment peut-on s'élever aux fonctions publiques °

RÉDACTION

i. Que faut-il entendre par a La volonté générale ? g Montrez que la loi, faite par la majorité, doit être respectée par runanimité des citoyens.

3. Les hommes et les femmes sont-ils également admissibles aux emplois pub)ics ? -?


ARTICLE VII. Nul ~0;M~!CMC~<?!~<<? accusé, d'rrc~ ni ~c~M que dans les cas déterminés par la loi, c/jc/OM les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres ~r~traires, doivent c/re~M;!M; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi, doit obéir à l'instant: il se rend coupable par la résistance. Cet article signale les droits de toute personne qui tombe sous le coup de la loi. Elle ne peut être accusée, arrêtée, ni détenue que si la loi le permet. Encore faut-il observer les formes prescrites. Par exemple, si un homme n'est point pris en flagrant dé!it~, il ne peut être arrêté que par un agent porteur d'un mandat d'arrêt délivré par le juge d'instruction. Comme détenu, ou prévenu, il n'est point soumis au régime des prisonniers et, depuis quelques années, il est assisté d'un avocat pendant ses interrogatoires. On ne doit point le traiter en coupable tant que sa faute n'a pas été prouvée. Les Constituants, par l'article VII, protestent contre les arrestations opérées à leur époque arbitrairement au moyen des /<?'<M de cac/tc~ Ces lettres, dont il était fait un abominable usage au xvui° siècle, portaient l'ordre signé du roi d'emprisonner une personne désignée sans autre forme de

CHAPITRE XI


jugement. On l'oubliait parfois en prison jusqu'à sa mort elle n'avait souvent commis auéun méfait, mais elle déplaisait ou portait ombrage à quelque courtisan, grand seigneur ou grande dame. Les lettres de cachet ont servi toutes sortes de vengeances et de caprices; elles ont donné lieu a un trafic odieux.

Certains parents s'en servaient pour faire enfermer leurs fils ou leurs Mlles coupables de désobéissance des époux, pour se débarrasser l'un de l'autre; on cite un mari et une femme qui, ayant eu, à ce sujet, la même pensée en même temps, furent arrêtes le même jour. Les débiteurs cherchaient a en faire délivrer contre leurs créanciers pour ne pa:-avoir a payerlcurs dettes. Sous LouisXV, il était facile de s'en procurer à prix d'argent. « Le ministre La Vrillière en faisait faire commerce par la comtesse de Langcac; il en vint a les laisser vendre par ses laquais; il n'en coûtait plus que 25 louis pour faire arrêter quelqu'un. » (Rambaud, //M/o!?'p de la Civilisation /<co'Mc, 2*' vol., p. 98.) Sous Louis XV, plus de 150,000 lettres de cachet furent distribuées. Voltaire demandait un jour au lieutenant de police Hérault « Monsieur, que faiton de ceux qui fabriquent de fausses lettres de cachet? Monsieur, on les pend. C'est toujours bien fait, en attendant qu'on. traite de même ceux qui en signent de vraies. »

C'est ce que pensaient également les Constituants, puisqu'ils déclarent que « ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires doivent être punis ».

C'est très bien, mais il faut reconnaitre que la


AhttAMAU.



responsabiHté des agents subalternes appelés à les exécuter peut être des plus atténuées. Il serait, par exemple, difficile au gendarme soumis à la discipline militaire, à l'obéissance passive, d'apercevoir l'arbitraire dans l'acte qu'on lui ordonnerait de commettre.

Ce qui vaut mieux que l'assurance de savoir que les auteurs de tout acte arbitraire seront punis, c'est l'assurance de savoir qu'on est à l'abri. Et cette assurance, jointe au souci d'assurer les recherches de la justice, doit conduire le citoyen <c/e o« saisi eit UC/M <MC loi « 0~'C! fi /'<a/ il se ~'C/t~ coupable par la résistance.

Mais, de son coté, le magistrat investi du pouvoir de mettre ses concitoyens en état d'arrestation doit être très prudent et très scrupu)cux; Une doitdécerner un mandat d'arrêt que quand il le juge indispensable. Une erreur est si vite commise et une erreur de ce genre entache, hé!as à tout jamais, l'honneur de celui qui en a été la victime. Le magistrat doit avoir à la fois le soin de la réputation d'autrui et le sentiment de sa responsabilité personnelle.

QUESTIONNAIRE

Récitez l'article VII. 2" Un prévenu doit-il être traité en coupab)e ? 3" Etait-il difficile aux grands de se procurer des lettres de cachet sous l'Ancien Régime ? 4" Le magistrat doit-il faire opérer le plus ou le moins d'arrestations possible ? 9 RÉDACTION

1. Que savez-vous des lettres de cachet? g

2. Un crime a été commis. Les soupçons s'égarent sur plusieurs personnes. Le magistrat hésite à lancer un mandat d'arrêt. Pourquoi p


CHAPITRE XH

ARTICLE VIII. La loi ne doit établir que des peines ~~r/c/e~!c/~ et e~?'7z~cy/~ Mcc<?~saires, et M~/ lie peut être p!<M!' ~M'c~ vertu ~M loi établie et ~ro~n<cc ~rï'c~rcw< au délit et /e~/c~!C;~ <~7//<~cc. L'ancienne !cgistat.urc prévoyait des raffinements de cruauté dans l'application de certaines peines. On les a supprimées et on a bien fait ce n'étaient ni des peines réparatrices, ni des peines nécessaires.

Notre Code pénal a été adouci et amélioré, pas encore assez cependant pour répondre parfaitement au principe posé par l'article VIII de la Déclaration des droits.

Sans doute, les emprisonnements, les dommagesIntérêts prononcés par nos tribunaux sont des peines nécessaires; ceux-ci réparent la perte causée, ceuxlà mettent dans l'impossibilité de nuire l'individu dangereux pour la société.

Mais ces peines sont-elles toujours « strictement et évidemment nécessaires ? ? » Sont-elles toujours exactement proportionnées et appropriées au délit? Non, de l'avis des magistrats eux-mêmes. EUessont tantôt trop dures et tantôt trop légères. Ainsi s'expliquent les verdicts* déconcertants de certaines


cours d'assises et même de tribunaux correctionnels. Parfois, elles n'atteignent, pas le vrai coupage. Le Code implacable exige leur application. Et comme, en France, le juge n'a pas le droit de prendre certaines libertés avec lui, il frappe souvent quand il y aurait lieu de pardonner. Le malheureux qui, poussé par la faim, dérobe un morceau de pain, est passible d'une peine. La pitié proteste. Il s'est trouve dernièrement un tribunal pour acquitter un prévenu accusé d'un tel délit (1) l'opinion publique a vivementapprouvé. Ce mème tribunatarcndu plusieurs fois depuis des jugements conformes à t'equite et contraires aux lois ce qui prouve que le Code pénal a besoin d'être amendé. Parviendra-i-on jamais a n'établir ~«p (/c.') ~c/~c~ .c/c//<e/ et cM~eM~e~ ~cc~s<ï!'rc~

Si désirable que cela soit, il est permis d'en douter.Il faudrait prévoir autant de pénalités que de délinquants. Car chaque délit est commis dans des circonstances spéciales et sous l'influence de passions différentes. Mais il faut tendre vers cet idea! et s'efforcer d'en approcher le p)us possible. Il faudrait, par exemple, que la peine moralise, améliore. Or, de nos jours, elle déprave trop souvent. Le coupable dans la prison est en contact avec des malfaiteurs dont beaucoup sont incorrigibles. Au lieu de s'amender, il se corrompt. La prison est l'école du vice. Malheur à celui qui y entre! En nous plaçant à un point de vue tout particulier, ajoutons qu'on discute depuis très longtemps (1) Tribunal de Château-Thierry, dont le président est M. Magnaud.


si la peine (le mort est véritablement ?!ece.M<H'e. Les uns disent oui, à cause de l'effroi qu'elle donne à ceux qui méditent un crime. Les autres disent non, en affirmant que la société abuse de sa force quand elle s'arroge le droit de tuer un assassin. Suivant eux, elle n'a que le droit de le mettre désormais hors d'état de nuire en l'enfermant.

Dans un certain nombre de pays en Suisse par exemple on pense ainsi, et la peine capitale a été supprimée.

II apparaît ainsi clairement que l'homme le plus coupable ne perd jamais tous ses droits naturels. La société conserve à son égard des devoirs à remplir. L'indignité d'un individu n'anéantit pas en lui la dignité de la nature humaine.

L'article VIII de la Déclaration des Droits nous fait comprendre en outre que cette déclaration n'a pas édicté des lois, mais simplement proclamé les principes qui doivent lui servir de fondement. Nos lois actuelles ne sont pas en parfaite conformité avec la première partie de l'article VIII elles doivent être amendées. Elles sont, par contre, d'accord avec la seconde partie de cet article Nul n'est puni ~M'c~ ue~:< ~'?~e loi établie et jorowM~M~e a)t<c/eMreM?e~ au délit et /cya/cwe?!~ ap~Mce. L'auteur d'un délit non prévu parle Code ne saurait être condamné.

L'oubli est réparé aussitôt par une loi, mais cette loi ne peut s'appliquer au cas qui l'a fait naitre. Elle n'a pas d'enet ?'c/roac~ elle ne peut réprimer un acte qui s'est passé avant sa promulgation. Quant aux formes de procédure prévues et qui sont la garantie des accusés, elles doivent être res-


pectées, dans quelque procès que ce soit. Ne pas les suivre est un crime.

QUESTIONNAIRE

10 Récitez l'article VIII. 3° Les délits et les crimes doiventils dre réprimes avec des rat'nnements de cruauté ? 3" Lu juge en France n'est-il pas tenu d'appliquer la loi, même quand elle lui parait trop dure La prison corrige-t-elle toujours Pourquoi déprayo-t-eUc souvent Go La loi peut-elle avoir un effet rétroactif ? '?

RÉDACTION

Montrez que nos lois MlueUes ne sont pas toujours d'accord avec les prinopes contenus dans la Déclaration des Droits de l'Ilomme. Prenez un exempte.


CHAPITRE XIII

ARTICLE IX. Tout Ao~Me étant pr~M~ze ~MOCCy~ jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coup~/f, s'il ~c indispensable de /rrc/er, -toute r~MCMr qui ne serait pas nécessaire pour ~rcr de sa ~cr~o~~c doit être sévèrement rcprf/M~? par la loi.

Voici le troisième article de la Déclaration des Droits de l'Homme qui s'occupe de l'application des lois et de la situation faite à un accusé. N'en soyons pas étonnes. La justice, qui n'est autre que le pouvoir de faire respecter les droits de tous, est une chose trop essentielle pour qu'on ne prenne pas le soin minutieux d'en bien définir les principes. Il importe d'insister sur la façon dont elle doit fonctionner sans porter atteinte à nos droits naturels.

L'article 9 pose à ce sujet un principe qui rompait complètement avec le passe « Tout Ao?MM<? c~~r&MMC !oce?ï~!M<y«'a ce qu'il ait été </ec/a?'e coupable. C'est exactement le contraire de ce qui se passait sous l'Ancien Régime. Un prévenu était alors considéré comme coupable partant c'était à lui à prouver son innocence. Songez combien cela est difficile.

Comment établiriez-vous, par exemple, que vous


n'avez point volé une somme qui a disparu la semaine dernière de chez votre voisin ? Si quelque présomption pèse sur vous, il vous sera à peu près impossible de démontrer que vous n'y êtes pour rien. Sous l'Ancien Régime, on vous aurait arrêté et mis à la torture pour vous faire avouer. Pendant que le magistrat vous aurait interrogé, on vous aurait broyé les membres afin de vous amener à l'aveu toutefois un médecin qui assistait les tortionnaires les aurait arrêtés au moment où il aurait pu craindre votre mort. Auriex-vons avoué pour cesser de souffrir? vous étiez condamné comme coupable. Seriez-vous revenu sur cet aveu en expli(luant qu'il vous avait été arraché par la torture? on vous aurait de nouveau soumis à la question. Un être débile avouait un homme fort résistait. Comme l'a dit Montesquieu, la torture était le plus sur moyen de perdre un innocent de faible complexion~ et de sauver un coupable robuste. De nos jours, c'est aux magistrats à établir la culpabilité du prévenu et non à celui-ci à prouver son innocence. Tous les moyens de défense lui sont donnés. II n'y a plus d'informations secrètes tout accusé est assisté d'un avocat pour l'aider à détruire l'accusation. Grâce à ce système, de malhonnêtes gens peuvent quelquefois échapper à fa justice, mais les innocents ne restent pas entre ses mains, et, durant la prévention, ils ne sont pas traités comme des coquins. Ceci console de cela. Il vaut mieux laisser un crime impuni que de le faire expier à un honnête homme.

Tout prévenu est laissé en liberté, M!0?7M ~«c le magistrat ne ~'Myc indispensable de /'a~'C~


Si le prévenu est récalcitrant (cela arrive), « ~o~/e ?'~M<?W ~M~ MP serait /XM nécessaire pour ~'aMM?'C?' de sa /j<M/</<e est ~<~<M~c ».

Les agents devront le maîtriser au lieu de répondre à ses coups par des coups. Les agents qui useraient de vioicnccs inutiles seraient sévèrement punis.

On le voit,.au lieu d'appliquer, comme jadis, la question au prévenu, on le traite avec ménagement, lors même que les présomptions les plus graves pèseraient sur lui.

La justice s'est humanisée. Elle respecte, dans la mesure du possible, les droits de l'homme chez tout prévenu jusqu'au moment où elle doit les lui enlever, en partie, pour le punir d'un délit dont il a été reconnu coupable.

QUESTIONNAIRE

1" Récitez l'article !X. '2° Est-il facile de prouver son innocence quand on est accusé ? 3° Est-ce au prévenu à prouver son innocence ? Est-ce à la Justice à prouver sa culpabilité ? Le prévenu est-il toujours arrête ? Les lois sont-elles plus douces qu'autrefois t

RÉDACTION

Comment était traité un prévenu sous l'Ancien Régime? Comment est-il traité de notre temps ?


CHAPITRE XIV

ARTICLE X. Nï~ ne doit C/rc inquiété pour ses opinions, ~cy?!~ re/cz~<?~ pourvu que /~r manifestation ne /o!c pas /'or~re public c~z'~r la loi.

La discussion de cet article fut extrêmement vive à la Constituante. Les membres du clergé voulaient faire proclamer que la religion était indispensable « pour le bon ordre de la société », qu'elle devait, par conséquent, être « maintenue, conservée et respectée ». Si cette proposition de l'abbe d'Eymar avait été votée, elle aurait permis plus tard de réclamer le rétablissement du Tribunal de la « Sainte Inquisition ». Il aurait été logique de poursuivre quiconque n'aurait point pratiqué la religion. Les consciences auraient été de nouveau tyrannisées au lieu d'être affranchies. Mais la Constituante ne pouvait pas refuser de reconnaître a chacun le droit de penser selon ses sentiments en matière de religion. C'aurait été renier une des formes de la liberté que l'article I! range au nombre de nos droits naturels et imprescriptibles.

Elle ne voulait pas nous ramener dans le passé, à l'époque despersécutions. Elle émancipa* donc la conscience en déclarant que « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses ». Ces derniers mots « même religieuses » font bien sen-


tir malgré tout la timidité avec laquelle agit la Constituante en cette occasion.

Les Constituants discutaient ce jour-la le 23 août la question de la liberté de conscience. Pas autre chose. On ne s'en douterait pas d'après le texte de. l'article X. Les premiers mots feraient plutôt supposer qu'il s'agissait d'une motion sur la liberté de penser en généra!. Relisez le texte. <( Nu! ne doit être inquiété pour ses opinions. x Ce n'est que par surcroît, semb!e-t-i!, qu'on s'occupe des opinions religieuses. La liberté pour elles est aussi reconnue. Mais la phrase a l'air d'une concession. Elle est accordée plutôt qu'admise comme un droit naturel.

L'article X prodame non pas franchement la liberté de conscience, mais la tolérance religieuse. Ce mot de tolérance, synonyme de condescendance, d'indulgence, de permission bénévole a quelque chose de choquant. Il entre de la pitié dans la tolérance. C'est une autorisation qui semble avoir pour seule origine la générosité. Or la liberté d'embrasser et de pratiquer un culte est un droit respectable et sacré.

Vous le voyez, la rédaction de l'article X se ressent quelque peu des préjugés de l'Ancien Régime. La religion catholique était en ce temps seule admise par le roi « très chrétien, Htsaîné de l'Eglise x. Les non-catholiques étaient persécutés. Toute irrévérence ou sacrilège à l'égard du catholicisme étaient très sévèrement punis, même au xvm' siècle où les idées de tolérance commençaient à être reçues. En 1765, un jeune homme de dix-neuf ans, le chevalier de la Barre, accusé de ne pas avoir salué


une procession et d'avoir chanté une chanson sur Marie-Madeleine, fut torturé. On .lui coupa la langue et la main droite. Puis on le décapita, et son corps fut brûlé.

Au xvn" siècle, Louis XIV avait persécuté les Jansénistes~, dont les vertus et les talents étaient admirables.

Au xv!" siècle, on brûlait encore les hérétiques On les massacrait en croyant faire œuvre pie L'histoire raconte et flétrit les atrocités des guerres religieuses. L'Ëdit de Nantes (1598), ea y mettant fin, assimila les protestants aux catholiques pour remplir les fonctions publiques et exercer les professions libérales. Louis XIV nt cesser cette égalité. Les protestants furent donc contraints de se livrer exclusivement à l'agriculture, au commerce et à l'industrie. Ce fut bien pis quand l'Édit de Nantes fut révoqué (1685). Les protestants cessèrent d'avoir un état civil légal car ils cessaient d'avoir leur propre organisation sociale, elles registres de l'état civil, tenus aujourd'hui par les maires, étaient confiés aux curés.

Les femmes, les enfants des protestants étaient aux yeux mêmes de la loi réputés illégitimes. On poursuivait de temps a autre leurs familles comme coupables.d'immoralité « notoire et scandaleuse ?. On annulait leurs unions, on confisquait les dots des femmes. Cette situation dura jusqu'en i789!

Ce temps odieux n'est plus. Son retour semble impossible il n'existe plus de différence pour cause de religion, entre les hommes; tous sont libres et égaux devant la loi. Il est permis a tous (le croire


ou de ne pas croire, d'être ou non pratiquants, d'appartenir a n'importe quelle religion.

Tous les cultes sont autorisés à organiser des manifestations <( /e«?' e.s'< .s'cM/p/Mc?!/ ~e?'<~ de <?'OMbler /'o?Y/e public élabli ~<z?' la loi. »

Ainsi les processions sont interdites dans certaines communes, non seulement parce qu'elles peuvent interrompre la libre circulation, mais encore et surtout parce qu'ctfes peuvent occasionner des désordres, faire naître, par exemple, des rixes entre personnes de cultes d)uc!'ents.

A l'intérieur du temple aucune cérémonie n'est défendue.

QUESTIONNAIRE

t" Récitez l'article X. '2" Que savez-vous de la discussion de cet article a l'Assemble constituante 3" Quel est le sens du mot tolérance Ug quelle époque date la pratique de la totcrnnce Pourquoi les processions sont-elles interdites dans certaines viHes 1

RÉDACTION

Comment étaient traités les protestants avant la Hevo!ution française ?

Faites un rapide historique de la manière dont ils ont été traités. en France, depuis la Reforma jusqu'en 17S9 et jusqu'à nos jours.


CHAPITRE XV

ARTICLE XI. La libre CO~~M/H'M/ZO~ des pensées et des q~/MM~-y est !<~ des droits les plus précieux de ~OWW<? tout citoyen peut donc parler, écrire, u~~r~Mer /z'~rc~!c; M!</ à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.

Cet article ne proclame pas seulement la liberté de penser, mais encore, et cxpresi-emcnt, le droit pour chacun de communiquer, de répandre, de propager ses idées. Ce droit. dit la Déclaration, est M~ des plus jO?'C'C!'eU.K de /OW/~<

La monarchie absolue ne t'aYait jamais admis. Quelquefois seulement, par caprice, sous Louis XV et Louis XVI, elle l'avait toléré.

La liberté d'écrire était illusoire. Les correspondances des familles mêmes étaient violées. Les lettres conuëes à la poste étaient ouvertes dans le « Cabinet noir* » pour s'assurer qu'aucun complot n'était tramé, pour découvrir les auteurs des crimes, ou simplement pour s'amuser des secrets de famille qu'on y pouvait trouver. Louis XV éprouvait personnellement un plaisir très grand a les surprendre. Les livres publics étaient soumis à une surveillance étroite. Pour un rien, ils étaient interdits, mis au pilori* et brûlés. La liste des chefs-d'œuvre


proscrits par le pouvoir serait longue. Et quelquesuns étaient vraiment inoffensifs. Ils ne pouvaient que circuler en contrebande, après avoir été imprimés en Hollande ou en Angleterre, pays de liberté. Les imprimeurs étalent jetés en prison les auteurs aussi. La plupart des écrivains du xvtu* siècle ont été bannis ou emprisonnés. Voltaire, après avoir été deux fois à la Bastille, eut soin de vivre hors de France ou tout près de la frontière. D'autres firent comme lui. Quand on pense que Buffon, qui s'absorbait dans l'Histoire naturelle, était lui-même inquiété, on comprend que les autres écrivains pouvaient être menacés à chaque instant. L'abbé Galiani, avait quelque raison de définir l'éloquence* « L'art de tout dire sans aller à la Bastille. »

Cette persécution des écrivains explique pourquoi il y avait si peu de journaux en 1789 (une dizaine) et pourquoi, surtout, ils étaient insignifiants. La presse ne pouvait prendre son essor que le jour où la liberté serait conquise. Mais à partir de ce moment, elle a pris un développement considérable, on peut dire inattendu aujourd'hui, c'est par milliers que se comptent les journaux. La Presse nous tient au courant de tout ce qui se passe dans l'univers. Elle critique tout. L'opinion publique, c'est elle quand elle ne la crée pas, elle en est l'écho. Elle exerce une action profonde et étendue sur tous. C'est le quatrième pouvoir de l'Etat 1

Elle fait et défait les réputations. Elle enregistre les mensonges, les erreurs, les crimes, les bienfaits, tout ce qui se fait, se dit, se colporte. Elle a les cent voix et plus de la Renommée. Elle médit, ca-


lomnie, complimente, glorifie. On peut dire d'elle ce qu'Ésope disait de la langue « Il n'y a rien de meilleur, ni de pire. »

De notre temps, les écrivains et les imprimeurs ne sont plus traqués, poursuivis. Les livres circulent aussi facilement que les journaux. Les orateurs, les conférenciers peuvent parler aussi librement que les autres écrivent. Il suffit, pour organiser une réunion publique, de faire connaître son intention à ce sujet au maire ou au commissaire de police.

Assurément, tout citoyen est responsable de ses actes, et par conséquent, de ses paroles comme de ses écrits. S'il abuse de la liberté pour causer du tort à ses semblables, il en supporte les conséquences. Il faut qu'il se conforme aux lois, sinon if est frappé par elles. C'est tout à fait juste. Quant aux correspondances confiées aujourd'hui à la poste, elles sont respectées. II n'y a plus de Cabinet noir. Une lettre est une chose sacrée.

Ne croyez-vous pas que « le Bon /<?H~ », c'est le nôtre et non celui qui remonte au delà de 1789 ? 2 QUESTIONNAIRE

i" Récitez l'article XI. 20 Quelle a été l'attitude de l'Ancienne Monarchie à l'égard de la liberté de pensée ? 3" Connaissez-vous un plaisir de Louis XV ? 4° Comment l'abbé Galiani déSnissait il l'éloquence? 5" La Presse est-elle inIluente aujourd'hui 6" Le secret des correspondances estil respecté aujotird'hui ?

REDACTION

1. La surveillance de la pensée sous l'Ancien Régime. 2. La liberté d'écrire avant 1780 et de nos jours.


CHAPITRE XVI

ARTICLE XII. La garantie des Droits de /'jH~o~<? et du C~~e~ nécessite ï/~e force ~M~Mc/ cc~c ~b;'cc est donc z'ee pour /c de tous et non pour /z7z'/e partiCM/zerc de ceux auxquels elle est confiée. Les droits des citoyens peuvent être menacés par une guerre ou par la violation des lois. Le danger à parer est double il peut venir de l'extérieur ou naître à l'intérieur. La force publique a donc pour but, d'une part, de prévenir toute invasion, tout désastre national, d'imposer le respect de nos droits aux voisins et de nous mettre en sécurité. C'est l'armée qui est chargée d'y veiller.

D'autre part, la force publique a pour but de maintenir l'ordre dans le pays, d'assurer l'exécution des lois, par la contrainte si c'est nécessaire. La police est chargée de ce soin. II arrive dans des cas exceptionnels qu'elle est impuissante. L'armée alors vient à son aide. Mais en temps ordinaire, elle suffit à sa tâche.

La force publique « est MM<<<Mee pow l'avantage de tous et non ~o!<r /<<e ~c?'~CM/!c?'e de ceux au~MC~ elle est confiée ».

C'est un principe qui n'est plus contesté. Autrefois il en était autrement. Sous l'Ancien Régime,


l'armée était la propriété de ses chefs. Le colonel achetait son régiment; le capitaine, sa compagnie. Aucune condition d'àge et de capacité n'était exigée. H suffisait d'avoir de la naissance et de l'argent. On voyait des colonels de dix ans Les chefs enrôlaient les soldats et les considéraient vraiment comme « leurs hommes ». Ils en faisaient les instruments de leurs pensées. Que de fois ils se sont tigués contre le roi Ils revendiquaient le droit de révolte des qu'ils étaient mécontents. II a fallu plusieurs siècles pour leur faire entendre que la soumission a l'égard du pouvoir établi était un devoir pour eux comme pour tous. Leur dernière insurrection a troublé la France sous la minorité de Louis XIV. Mais dès qu'elle a été vaincue, la Royauté a été toute-puissante. La force publique, dès lors, a eu pour objet de maintenir les prétentions royales et, par conséquent, de léser les droits de l'homme et du citoyen au lieu de les garantir.

Aujourd'hui, la force publique remplit véritablement sa fonction. Elle veille sur l'intégrité de notre sol, le respect de nos biens et de nos personnes. L'armée n'est plus une force qui vit à côté ou au-dessus de la nation. C'est la nation elle-même. Elle ne se compose plus de mercenaires, d'enrôlés tous les citoyens valides sont soldats, tous les soldats sont des citoyens. C'est l'armée nationale. Elle a toute la discipline qu'il faut pour être forte. Mais elle a aussi le sentiment des droits de l'homme et du citoyen. Elle ne voudrait point prendre part a une action dont le but serait de les opprimer. Elle ne se prêterait plus à un coup d'État. Elle sait


n y:<'e//e est !?M<~Mee/?UM7' /'at;aM~c de ~o«y ~HOH po!(/' ~'«~7~e /)~tcu/!cre de ce~.x CM.ry!«/s elle est con fiée ».

Ses chefs (1'aiHeurs ne veulent pas, comme ceux d'Espagne, se servit' d'elle pour réaliser leurs desseins ambitieux. La France ne connaît pas les pronunciamientos

Chefs et soldats sont soumis aux lois. Ils sont ce qu'ils doivent être les respectueux et dévoués serviteurs du gouvernement établi.

QUESTIONNAIRE

1" Q~e dit. I'ar)ic)e XH ? 2* De quoi est constituée la force pubtiquc ? 3" Qucl et le rôle de i'armee t" Quel est le r~)e de la police ? o° L'armée doit-elle se prêter aux coups d'État ? C" Quel est son devoir a l'égard du Gouvernement ? RÉDACTION

1. Le rô!e et les devoirs de l'armée.

2. Quf faut-il entendre par cette expression a La force publique ?


CHAPITRE XVH

ARTICLE XIII. .Potn' /'e/~rc~'e~ de la yorcc publique C/~70~r/M~~7C/M~~C/7!M~r~'o~ M/ze contribution con~t~e est !'M~M/?~z~c. elle doit être c~/c/~c/~ répartie e/r~ tous les c/~q~c~~ raison de leurs /~c~

Chaque mot de cet article mérite de retenu' notre attention. « POJ7/?/'<?/p~'c~f/e/b?'e<<e et POUR les ~e~AC.< ~'<z~7;o/<, une co~~«~0~ COM<?7!M?<C est !'?«/S/~M< »

A la tournure de la phrase, vous sentez que les Constituants éprouvent le besoin (le justifier la nécessité de l'impôt. Ils savaient combien l'impôt était alors odieux. Les rois ne s'étaient pas préoccupes d'en expliquer l'utilité. Toute explication n'eût pas été comprise, du reste, tant l'ignorance du peuple était grande. Le paiement des impôts paraissait un simple assujettissement qu'il fallait subir. Et ces impôts augmentaient tous les ans, devenaient de plus en plus écrasants. La misère était affreuse. Dans certains endroits, le fisc prenait aux paysans jusqu'à 80 0/0 de leurs revenus.

Les campagnes se dépcup!aient. Les habitants semblaient à La Bruyère « des animaux farouches », « livides », vivant dans des « tanières » « de pain noir, d'eau et de racines ».


On comprend que la Constituante ait tenu à dire pourquoi il fallait maintenir les impôts. L'état des esprits de cette époque le demandait. De nos jours, on jugerait la précaution inutile, car tout le monde comprend que pour permettre au gouvernement de vivre il faut faire face à ses dépenses, solder les travaux qu'il fait effectuer, payer le traitement de ses fonctionnaires.

C'est encore sous l'influence de l'opinion régnante que les Constituants ont parlé de « contributions » au lieu de parler d'impôts.

Le mot impôt répugnait. Il sentait l'ancien régime qui !M/)OM</ d'autorité à chacun sa part a payer. Le mot contribution désigne au contraire ce que chacun consent à donner dans une charge commune. Un citoyen libre co/~?'<e aux dépenses pu-.bliques un sujet est z'~os~.

La force de l'habitude nous fait conserver l'usage de dire indifféremment impôt ou contribution. Nous ne remarquons plus la différence de sens qui les distingue mais nos pères, dans leur joie d'être affranchis, y étaient très sensibles.

La deuxième phrase de l'article XIII indique LE CAKACTÈRE DE LA COXTIUBUTIOX. « Elle doit ~'C e~a/Cment ?'epo'<?'c c~e <o!M les citoyens, e/: rc~oM de leurs facultés. »

C'était une nouvelle condamnation du passé. Car les impôts sous l'ancien régime étaient non seulement inégalement répartis entre les trois classes de la société, mais encore entre le peuple des din'érentes provinces. Les provinces étaient plus ou moins privilégiées, suivant la date et les circonstances de leur réunion à la couronne. Par exemple,


l'impôt de la gabelle, ou impôt sur le sel, était très variable. L'Ile de France, la Champagne, la Bourgogne, la Normandie, la Picardie, le Maine, ta Touraine, payaient le sel de 55 a GO livres" le (luintal ailleurs il était vendu 28 livres; certains pays ne le payaient même que 9 livres.

Quant aux trois ordres de t'Ktat, te peuple subvenait presque seul aux dépenses considérables du gouvernement; la noblesse et te clergé, tous deux immensément riches, ne payaient presque rien. Les impôts étaient inversement progressifs a l'avoir de chacun. Très justement, les Constituants réclamaient l'égalité de tous devant )cs charges communes. Il est naturel que l'impôt soit en raison des facultés, c'est-à-dire des biens de chacun. Personne ne le conteste plus aujourd'hui.

QUESTIONNAIRE

t° Que dit l'article XIII 2° Pourquoi les auteurs de la Déclaration ont-ils tenu à justifier la. nécessite de l'impôt 30 Comment La Bruyère dëcrivait-H les habitants des campagnes? 4" Quel est le sens du mot contribution ? ~° Les impôts étaient-ils également répartis sous l'Ancien Régime? –C° Comment doit être réparti l'impôt ?

REDACTION

Pojrquot t'imp<)t était-il odieux sous FAacicn Régime ?


CHAPITRE XVIII

ARTICLE XIV. Tous les C//q~C7M 0~/ le droit de constater, par eux-mêmes o~~r leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la co~MCM~'r /cw<?7z/, ~M suivre /'e~o/ et ~H ~cr~er la quotité, l'assiette, le recouvrement et la ~~rcc.

Les Constituants n'adnieHaicnt plus la théorie de la monarchie absolue et le droit qui en résultait, pour la royauté, de lever capricieusement les impôts.

Dans ses Mémoires Louis XIV dit textuellement que les rois ont « la disposition pleine et libre des biens de leurs sujets )). Et, ajoute-t-il, « tout ce qui se trouve dans l'étendue de leurs Etats, de quelque nature que ce soit, leur appartient au même titre, et les deniers qui sont dans leur cassette, et ceux qui demeurent entre les mains de leurs trésoriers, et ceux qu'ils laissent dans le commerce de leurs peuples ».

En conséquence, lui et ses successeurs établissaient les impôts qui leur étaient nécessaires pour couvrir leurs dépenses personnelles, celles de la cour, celles des seigneurs pensionnes, enfin celles de l'État, sans même se soucier de ce que pouvait en penser le peuple. L'impôt était trop lourd et la manière de le faire payer vexatoire. L'armée, mise à la


disposition des trésoriers généraux ou des receveurs chargés de la perception, en assurât), le recouvrement.

C'était une monstruosité a faire disparaître. Ce fut l'œuvrc de l'Assemblée Constituante. La nouvf;![c doctrine des contributions qu'elle proclame est conforme à la théorie de la souveraineté populaire. (Art. HI.).

« 7"o~ les c!'<o?/eHs <m< le ~?'o:'< de co~e/' par c~.r-M?~M.s', OM/)~' /<?!<~ ?'~rc&e~/o' la ?!ces~c de la COM<7'M~'0;! /)M&<C, de la CO~tS~ /CM?C~ oT<'?ï ~M<!)?'<? /'em~/oï et f/'e« <~c~c?' ~xo/t~e, l'assiette, le rCCOMU?'<'?MC/)7 et la ~?('T6. ? o

Ce texte fait éclatcr tout (le suite a nos yeux une contradiction. La Constituante établissait la nécessité du suffrage universel en déclarant que tous les citoyens ont le droit de voter et (le répartir les impôts par l'intermédiaire de leurs représentants, et la Constitution de 179!, fondée sur la Déclaration des Droits de l'Homme, établit seulement le régime censitaire. Le suffrage universel ne devait être proclamé que parfa Révolution de 1818.

L'article XIV suggère encore une rcucxion digne d'être retenue. En déclarant que tous les citoyens ont le droit de s'occuper des finances publiques, il sous-entend que c'est f/'?!;o!)OM?' tous de .s'c?'<?.MP/' < <?'y ~MM.

L'égoïste seul peut se montrer indiffèrent, encore fait-il preuve de maladresse.

I! y va en effet de son intérêt comme du nôtre. Si quelque chose nous Jcse, nous pouvons le signaler, créer un courant d'opinion favorabte a nos idées, obtenir une réforme.


La liberté (le la presse et de réunion (art. XI) nous en fournit )c moyen.

Ces remarques fait))! nous pouvons constater que de nos jours les contributions sont votées, réparties et perçues comme le veut la Déclaration des Droits. Elles sont votées par le Parlement, qui. en fixe le chiffre et la base. Leur empioi est soigneusement justifie a un centime près. Quant au recouvrement, il est opère par les percepteurs qui n'usent des rigueurs prévues par la loi qu'après avoir adresse plusieurs avertissements au contribuable en retard. Le peuple de notre temps paie moins d'Impôts qu'avant 1789 il ne paie que ceux dont il a luimême reconnu l'utilité, et il n'a plus à subir les vexations d'autrefois.

L'impôt a cessé d'être odieux.

QUESTIONNAIRE

t" Que dit l'article XIV f 2" Que dit Louis XIV dans ses Mémoires au sujet des biens de ses sujets ? La Constituante a-t-eUe établi le suffrage universel? t" A qui est confié le recouvrement de Hmpùt ? ~° L'impôt est-il aujourd'hui odieux

RÉDACTION

En vertu de quel principe Louis XIV 6tab)i~ait-i[ le3 impôts? Eu vertu de quel autre le Parlement vote-i), de nos jours, les contributions?


!-m~r~uJt.C)'Kt'A)~K.(:'t)jui!))':S'.)



CHAPITRE XIX

ARTICLE XV. La société a le droit de ~c~tï~~r compte à tout agent public de son ~7H'H!r~OM.

Ainsi se trouve posé le principe du contrôle que le peuple souvrain exerce sur tous ceux qui détiennent une fonction d'État.

Les rois du xix" siècle s'y sont eux-mêmes soumis, renonçant à leur prétention de ne relever que de Dieu et de n'avoir à justifier leur conduite que devant lui seul.

Puisque tout pouvoir émane de la nation, & la Société a e!e?MM: le droit de demande1' compte à /0:~ agent public de son C</7M:7!S~'C~'0?: ». Elle en use quelquefois d'une façon tapageuse. Un orateur ou un journaliste lance par exemple une accusation contre un fonctionnaire. Un procès s'engage et l'accusateur est sommé de faire la preuve de ce qu'il a avancé. Ce moyen est extrême; il excite les passions, favorise la calomnie qui, si fausse qu'elle soit, laisse toujours planer un soupçon sur l'accusé.

Il y a encore les enquêtes confiées soit à une commission parlementaire pour faire la lumière sur une question grave et d'intérêt général,. soit aux chefs hiérarchiques~ d'un ou plusieurs fonctionnaires dénoncés pour incapacité, abus de pouvoir


ou malversation. C'est souvent encore beaucoup de bruit pour rien. Il est rare que les réclamations formulées soient fondées. Et cela se comprend, car toute administration est l'objet d'une surveillance perpétuelle de la part des inspecteurs. Chaque administration a les siens, l'armée, les finances, l'enseignement, les postes, etc.

Les inspecteurs des finances ont le droit de vérifier les caisses de toutes les administrations. Les autres inspecleurs n'ont d'autorité que dans leur propre administration.

Les inspecteurs des finances vont vérifier les caisses (les postes, les inspecteurs des postes n'ont rien a voir chez les percepteurs. Les inspecteurs sont eux-mêmes soumis au contrôle de certains chefs, et ces chefs n'échappent pas à l'œil du public, de la presse et du Parlement.

Les administrations au surplus ne cachent rien de leur gestion*. Ce sont comme de vastes maisons de verre où l'on peut voir tout ce qui se passe. Elles publient toutes des statistiques~, des rapports qui reproduisent avec fidélité ce qu'elles font. Vous comprenez alors pourquoi les procès et les enquêtes découvrent rarement les fautes signalées bruyamment.

Les fautes réelles échappent difficilement aux yeux de ceux qui ont pour rôle de les relever discrètement et de les prévenir.

Voyez tous les yeux braqués sur votre école et votre maître les plus modestes autorités scolaires sont les délégués cantonaux au-dessus d'eux est l'inspecteur primaire qui veille aux intérêts scolaires d'un arrondissement, puis l'inspecteur d'Aca-


démie qui s'occupe des écoles de tout le département, enfin les inspecteurs généraux qui vont dans toute la France. Eux-mêmes sont placés sous les ordres du Directeur de l'Enseignement primaire qui relève du Ministre de l'Instruction publique, et le Ministre doit compte de son administration aux Chambres, c'cst-a-dire aux représentants du pays. Toutes les administrations sont organisées de même. De nombreux contrôles y sont établis à tous les degrés, dans l'intérêt général.

QUESTIONNAIRE

Que dit l'article XV? 3° Comment sont con'rôles les actes des fonctionnaires? 3" Les administrations cherchentelles à cacher ce qu'elles font. ? Citez les chefs dont reléve l'école publique.

RÉDACTION

1. Comment la société fait-elle rendre compte à tout agent publie de son administration ?


CHAPITRE XX

ARTICLE XVI.- Toute société, dans laquelle la ~r~y!c des droits n'est pas assurée, ni la séparation des ~OM~ozr~~er~z~, M'0!M/ de constitution.

L'article XVI n'affirme point un droit, il exprime une simple ycrite politique. Une Société où la séparation des pouvoirs n'existe pas n'a point de constitution, c'est-à-dire point de loi fondamentale fixant et limitant les attributions de ceux qui détiennent l'autorité.

Nous savons qu'il y a trois sortes de pouvoirs le po?<uo!?' ~a~</ qui fait les lois, le ~OM~o~' exéCM~qui les fait appliquer, et !e jOOMUo~' judiciaire qui en réprime la violation.

Il est certain que si ces trois pouvoirs étaient réunis dans la main du même homme, cet homme aurait une puissance absolue. Il ferait les lois qu'il voudrait, les ferait exécuter comme il l'entendrait, et punirait selon son caprice ceux qui ne les respecteraient pas. Aucune loi antérieure ne saurait le lier, puisqu'il aurait la faculté de la détruire surle-champ pour faire appliquer celle qu'il ferait sur l'heure. Ce serait le despotisme! Montesquieu* a mis cette idée en relief dans « l'Esprit des lois*)). Les Constituants, ses disciples, ont' pour ainsi dire extrait l'article XVI de cette œuvre maîtresse.


La Constitution doit, aux termes de cet article, assurer la garantie de nos droits naturels c'est même la première condition qu'elle doit remplir. I! est incontestable que si cette condition est nécessaire, elle est aussi suffisante. En effet, un gouvernement qui reconnaît. les droits des citoyens, et s'incline devant eux, ne saurait être oppresseur. La séparation des pouvoirs rassure sur la bonne application des lois. Mais les lois peuvent être arbitraires la garantie des droits rassure sur la justice des lois elles-mêmes.

La haute conception que les Constituants se faisaient d'une Constitution apparaît donc clairement.

Par Constitution, ils n'entendaient point toute loi réglant l'organisation et le fonctionnement d'un gouvernement. Selon eux, ce nom doit être réserve à une loi de ce genre, mais absolument respectueuse des droits de l'homme et du citoyen. Elle ne peut instituer qu'un régime de Liberté et d'Egalité. Les Constitutions imparfaites ou trompeuses ne sont point dignes de s'appeler ainsi. Notre ancienne Monarchie absolue n'avait pas de Constitution elle ne garantissait pas les droits de l'homme et n'admettait pas nettement la séparation des pouvoirs. Les rois avant 1789 rendaient les ordonnances et les faisaient exécuter. Lorsque les tribunaux ne les appliquaient pas suivant leur désir, ils suspendaient l'action de la justice ou annulaient les arrêts rendus. En 1770, les juges de Paris, indignés, déclarèrent « qu'ils n'avaient point l'esprit assez libre pour décider des biens, de la vie et de l'honneur des sujets du roi. »


Nous savons en outre, par tout. ce qui précède, que lcs droits naturels de l'homme n'étalent pas reconnu:! ators.

Depuis 1789, nous avons eu beaucoup de Constitutions. Elles se rapprochent ou s'écartent plus ou moins de l'idéal conçu par les Constituants. En examinant la nôtre, ccHede 187~, nous verrons que la y~<' </< <o~ y est <ï~cp c/ ~e /M sc/)~a~o?< </< ~o~o~~ y est ~'7<??'7~</<

QUESTIONNAIRE

t'* Que dit l'article XVI ? -2° Combien y a-t-il de sortes de pouvoirs H" Quel est le philosophe qui a établi la nécessité de leur séparation t" Que doit garantir une Constitution digne de ce nom ?

RÉDACTION

1. Quels avantages résuttent de la séparation des Pouvoirs? `t 3. L'ancienne monarchie française avait-elle une Constitution ?

3. Notre Constitution est-elle conforme it l'article XVI de la Déclaration des Droits de L'Homme ?


CHAPITRE XXI

ARTICLE XVII. La propriété étant M~ droit n~o/ et sacré, Mz</ Me peut <?/~ être privé, si ce ;z'c~ /o;7<e la Mccc~z'z~<e_, légalement constatée, /'<?..v/~c c~7!y~c?!~ et sous la coy~c'M ~c juste .et ~r~c /?!~c~c.

Ce principe n'était point celui de la monarchie absolue. Louis XIV, nous l'avons vu, se considérait comme le propriétaire de tout ce qui existait dans son royaume. Il ne doutait pas que ce qu'il laissait a ses sujets ne fût de pure grâce. Bossuet et les docteurs de la Sorbonne t'entretenaient dans cette croyance monstrueuse. C'est en s'appuyant sur elle comme sur un axiome que fut rendue t'ordonnance de 1692, qui proclame la propriété .s?<~c~e!<! et M~ue;sc//e <~M roi ~r toutes les terres.

D'autres ordonnances déclarèrent encore les ecclésiastiques et certaines autres personnes incapables de propriété. (Rambaud, Ilistoire de la C~/M~'o~ française, 2° vol., p. 4.)

Les ~/cM!o~'e~ de Louis ~7~ disent d'ailleurs, en propres termes, que « les rois sont seigneurs absolus et ont naturellement la disposition pleine et entière de tous les biens possédés, aussi bien par


les gens d'église que par les séculiers. » Louis XV, Louis XVI pensaient de même. C'est donc la Co?:.s7?'/M~!<<' y~! a posé le ~rï~C~e de la /~?'0/)?'!6~C M~u/c//cc~ l'a ?'a~6~e au MOM~?'c de nos droits !<o/C&/P.S' c/ .~ac?'e~.

L'article XVH énonce en même temps une exception au droit de propriété, qui est devenue un principe de loi « A':</ ~c ~CM< c/?'c ~?' de sa /)?'0/C/C, ce ?t'6'A'< /0?'.S~:<e la ?:CCC~/<C ~«~/<C, /~yc/CM:~ï~ co/M~/ee, /'<r/ye eu!W<'7M?MC~ )< Du nos jours, quand des travaux d'intérêt généra! sont entrepris et exigent une modincation dans l'état des propriétés, cette modification a lieu, quelles que soient les protestations des propriétaires, âpres certaines formautés légales. C'est /'<?~o~r~/M?! /~M?' cause J'?/e //?/<?<C.

S'agit-i!, par exempte, de construire une route, un ciu'min de fer? les terrains nécessaires sont enleyés a ceux qui les possèdent après le versement ~'?</M~<)/e <c<i!/a~/e :~f/cM!?!~e, uxéc de gré il gré ou par un jury nommé a cet effet.

Vous entendrez peut-être protester contre le droit de propriété individuelte. Il n'est donc pas inutile de le justifier à vos yeux, comme il le fut n ceux des Constituants par le célèbre abbé Siéyès Ce droit découle de la liberté humaine et du travail. La liberté qui veut se déployer exige que nous agissions. Elle ne peut se déployer que par le moyen de notre corps, de nos actions et de notre travail.

En renonçant a notre activité, nous renoncerions en même temps à notre Liberté. Nos organes nous


forcent à prendre l'air que nous respirons, l'eau que nous buvons et qui deviennent nôtres au point de faire partie de notre personne aussitôt après leur absorption notre travail les a transformes en sang et en chair.

De même, la liberté et notre trayait établissent notre droit de propriété sur les objets que nous faisons, sur ce que l'on appâte « le fruit de notre trayait ». Prenons un exempte Le statuaire qui d'un bloc de marbre fait une statue est en droit de dire que son œuvre est à lui; c'est la réatisation de son rêve par le moyen de ses fjcuttés son travail a crée son droit de propriété. De quel droit un Louis XIV vicndrait-it !ui dire « Ceci est a moi, non à toi? » Du droit du plus fort. Mais la force ne saurait primer~ ic droit. L'artiste, au contraire, peut lui dire « C~ttc statue est à moi, cette œuvre est la micnue; j'ai mis en elle quelque chose de moi. »

Le laboureur qui a améliore sa terre, qui la ensemencée, travaillée, qui a moissonne, est bien eu droit de dire que le blé qu'il récolte est a lui, que c'est sa propriété.

L'artisan qui transforme la matière a également tedroitdo dire que l'objet fabrique lui appartient, il échange le fruit de son travail contre un sa)aire qui est sa propriété.

Si, en mourant, il laisse ce qu'il possède à .ses enfants, ceux-ci sont bien en droit dédire que cette propriété est à eux, qu'elle leur appartient légitimement.

Le droit de propriété est donc bien un droit inviolable et sacré, comme la liberté et Ja personne humaine etie-meme.


QUESTIONNAIRE

l* Que dit l'article XVII ? 2" Que proclame l'ordonnanco de 1692 ? 3° Qui a fondé le droit de propriété individuelle en France ? Citez un exemple d'expropriation pour cause d'utilité publique. Que reçoit le propriétaire exproprié ? 9 RÉDACTION

i. Que pensait Louis XIV des biens de ses sujets?

2. En certains cas, ne se voit-on pas privé de son droit de propriété ?

3. Sur quels principes repose le drjit de propriété ? '?


7

CONSIDÉRATIONS GENERALES

CHAPITRE XXII

LES CAUSES OUt ONT PROVOQUÉ LA DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME

1

Comment ces Droits, longtemps ignorés, ont été formulés.

On se demande pourquoi les Français ont attendu l'année 1789 pourproclamer leurs droits. r Deux choses les ont empêchés de le faire auparavant.

Il leur -manquait d'abord la claire notion de ces droits et, quand ils l'ont eue, ils ont dû attendre focca~MM de les /b7'~M/er.

Ne croyez pas, en effet, que depuis que l'Humanité existe, les hommes ont eu le sentiment très vif et très net de leurs droits. Songez combien sont encore nombreux ceux qui ne les soupçonnent pas, en Asie, en Af~ac~pt~même ailleurs 1


Pendant 'tes siècles, les hommes ont vécu sans se douter de l'existence de ces droits. Ils ont subi les régimes les plus tyranniques sans protester ils ont connu, au temps de la Grèce et de Rome, des régimes démocratiques, des régimes de liberté, sans être parvenus a découvrir ces droits, sans les réclamer par conséquent.

Les plus grands esprits de la civilisation antique, comme Aristote~, affirmaient la nécessité de l'esclavage. La légitimité (les « Droits de l'homme » ne leur i- apparaissait pas. On peut dire que, malgré )eur supériorité intellectuelle, ils n'étaient pas dignes de les voir.

Qu'est-ce a dire alors des hommes ignorants du Moyen Age? II semble que l'Humanité ait été contrainte par les lois secrètes de son évolution à attendre un long temps avant de prendre pleinement conscience de sa dignité, de sa valeur morale et de ses droits.

Sans la misère y serait-elle même parvenue? Mais les hommes, assujettis dès l'origine de toutes les sociétés, ont fini par éprouver de telles soun'ranccs, qu'ils ont pressenti et vaguement entrevu que c'était a tort qu'ils les enduraient. Ils ont compris que la recherche du bonheur était une loi pour tous. Et cle déduction~ en déduction, ils sont arrivés à concevoir de moins en moins confusément leurs droits naturels, imprescriptibles, inviolables, quoique méconnus ou méprisés.

Dans leur besoin de justiner leurs révoltes, ils devaient en: chercher et en trouver les formules. Le .Christ em~vait.fourni quelques-unes en proclamant l'égalité de tous dèyant: Dieu. La philosophie, à la


même époque, tenait à peu près le même langage que lui. Les bouleversements causés par les invasions, la constitution de la société féodale survinrent. Les hommes retombèrent dans l'ignorance. Ils cessèrent de penser. Ils ne se reprirent à faire usage de leur raison qu'au xvt~ siècle, grâce au double mouvement de la Réforme religieuse et de la Renaissance littéraire.

Les philosophes émancipèrent les esprits. Les écrivains du xv)n" siècle critiquèrent tout et vulgarisèrent tes formutes d'affranchissement etles droits naturels de l'homme. Si l'Humanité semblait avoir perdu ses titres, Montesquieu~, Voltaire' Rousseau* et les Encyclopédistes~ les avaient retrouvés. Les hommes de la Révolution étaient en état de proclamer lcs Droits de l'Homme et du Citoyen. Mais ce qui était possible au xvm" siècle en France, ne l'était point au xvn~. Les Etats Généraux de 1614 étaient dans l'impossibilité d'accomplir t'œuvrc des États Généraux de 1789. Ils ne pouvaient point faire une révolution que personne ne demandait. Z,'occ<M!'<w de rédiger la Déclaration des Droits cle l'Homme ne pouvait naître que lorsque t'ëtat d'esprit du peuple, résultant des idées nouvelles et de la misère générale, permettrait d'opposer triomphalement aux principes de la vieille société monarchique ceux de la société actuelle.

La co?!uoca<!o~ des États Gc~e~M;~a~' Zo~ XY/ C~ /7<~ ?M!/r6 L'OCCAStOK INDISPENSABLE. QUESTIONNAIRE

t" Tous les hommes ont-ils conscience de leurs droits ? ~o La misère n'a-t-elle pas contribué à les faire entrevoir ?


3° Que proclama le Christ ? Que firent les philosophes au xvm° siècle ? 50 Quand la France eut-elle l'occasion de rédiger la Déclaration des Droits

RÉDACTION

1. Pourquoi la France n'a-t-elle pas proclamé les Droits de l'Homme et du Citoyen avant 1789 ?

3. Les droits naturels de l'homme ont-ils toujours été connus et admis ? `~


CHAPITRE XXIII

LES CAUSES QUI ONT PROVOQUÉ LA DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME

II

Le vœu de la France et les besoins de notre nature.

Pourquoi l'Assemblée Constituante, au lieu de se contenter d'invoquer verbalement les Droits de l'Homme, pour justifier la Révolution qu'elle accomplissait, a-t-elle voulu au contraire les rédiger et les proclamer solennellement ?

Elle n'a fait qu'obéir en cela « MM <œ« du peuple et à KM !'Mï~e~'e!<.E ~cso:~ de ?to~'c M<ï<c. Le peuple français avait lui-même exprimé, dans les cahiers de 1789, le désir de voir formuler les Droits de l'Homme (tans une Déclaration qui servirait de base aune nouvelle constitution politique». C'est ce que dit en propres termes le comte Stanislas de Ctcrmont-Tonnerre dans son rapport résumant les demandes des cahiers, rapport lu à l'Assemblée le 27 juIUeH189.

C'est ce vœu qui nous a valu la Déclaration des Droits. Mais si ce vœu a été conçu et réalisé, c'est

parce qu'il répondait à un besoin impérieux de notre nature.

Nous savons combien les Français aiment a se


rendre compte de tout ce qu'ils font ou voient faire. Ils cherclient les causes, les motifs de tout, cle leurs actions comme de celles des autres. A défaut de les trouver, ils les imaginent, Ils vcuient a tout prix sinon tout justifier, du moins tout expfiqucr. C'est leur raison qui l'exige, et leur raison est peutêtre plus exigeante à cet égard que celle des autres peuples.

Voyez ce qui se passe en justice un procès est engage, plaidé, juge nous voulons savoir pourquoi t'arrêt a été rendu de cette manière et non d'une-autrc. Le juge est tenu aujourd'hui:') le faire conna!trc en disant quels sont les motifs, les considérations, les articles de loi qui lui ont fait prendre sa décision. L'expose qu'il en fait avant de donner le texte du jugement s'appelle les Co~!</e7'<]!7!< Sous l'Ancien Régime, les juges avaient pris d'eux-mêmes la louable habitude de le faire. Ils montraient beaucoup de scrupules à prouver qu'ils faisaient droit a chacun, selon les usages et les coutumes, le bon sens et l'équité. On aurait dit qu'ils tenaient à éclairer les plaideurs et le public, et a éviter toutes les récriminations.

Ils faisaient savoir les raisons qui les avaient déterminés en leur àme et conscience.

Cela répondait d'ailleurs si bien à un besoin de notre nature, que le roi lui-même en arriva à motiver ses ordonnances Motiver une ordonnance, c'est en faire comprendre le sens et l'utilité, c'est inviter le peuple à la respecter, non parce qu'elle est un ordre catégorique, mais parce qu'elle est nécessaire.

François I" n'expliquait l'intérêt des siennes


qu'en tes terminant par ces mots <( Car tel e't notre bonptaisir. »

C'était une insolence et une atteinte à la 'lignite tiumaine. Ses successeurs, sans le vouloir peutêtre, en atténuèrent t'cnet en faisant précéder tours édits 'te considct'ant~s. Leur raison tcur imposa celle itabitudc.

Au xv)n" siècle, Jcs ordonnances royales étaient donc motivées comme les arrêts judiciaires. Cette coutume sembtait si indispensable que, lorsque le peuple réclama une constitution nouvelle, il demanda qu'auparavant on rédigeât sous le nom de Déclaration des Droits de t'JIomme les Considérants qui devaient la justifier. On peut donc dire que Dec/m'o~ des Droits f/<? /o~?/~e le Co?!.S<(/MH< cle la 7}cUO/«/fO~ /?'H?!~<tMC.

Les Constituants eureuttc souci de tout motiver, ils ne voulurent pas présenter la Déclaration ellemême sans en justifier la nécessité par un considérant, et ils la tirent précéder d'un Préambule. QUESTIONNAIRE

f Le peuple français avait-il demandé une rédaction des Droits de l'Homme y 2° Pourquoi ? Qu'appe))c-t-o)i considérants, en style judiciaire ? !<' Les ordonnances royales ontelles toujours été motivées –~° L'etaient-cttes au xvme siècle ? 6° A quoi sert le préambule de la Dectaration

RÉDACTION

I. A qui faut-il attribuer l'idée de la Déclaration des Droits? 2. Sous quelles influences a été rédigée la Déclaration des Droits ?

3. A quelles préoccupations ont obéi les Constituants en rédigeant la Déclaration des Droits de l'Homme ? l'


CHAPITRE XXIV

LES CAUSES QUI ONT PROVOQUÉ LA DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME

III

Les Déclarations américaines.

De /'cupM des Co?~<M~ M!~?Me~, l'idée de rédiyerM?!e Déclaration des Droits de /OMM~ a été e~?'<<ce aux ~n!c?'c<s.

Le rapporteur du Comité choisi par l'Assemblée nationale pour étudier le projet de constitution s'exprimait ainsi, à ce sujet, dans la séance du 27 juillet 1789:

« Cette noble idée, conçue dans !<M a!c Ae~ï!~re, devait de préférence se transplanter d'abord parmi nous. Nous avons concouru aux événements qui ont rendu à l'Amérique septentrionale sa liberté elle nous montre sur quels principes nous devons appuyer la conservation de la nôtre; et c'est le Nouveau Monde, où nous n'avions autrefois apporté que des fers, qui nous apprend aujourd'hui à nous garantir du malheur d'en porter nous-mêmes. ))

Les Etats-Unis venaient de s'émanciper, grâce à notre alliance avec eux. Les colons anglais de l'Amérique du Nord avaient conservé les traditions de la mère patrie. Lorsque l'Angleterre, endettée


par les frais de la guerre de sept ans (175G-17G3), voulut leur faire payer certains impôts, ils demandèrent que le droit de les voter leur fùt reconnu, comme il l'était aux habitants de la Métropole L'Angleterre refusa. Ils se révoltèrent et s'affranchirent. Mais auparavant, ils prirent le monde à témoin de la légitimité de leurs revendications. Chacune des treize colonies rédigea une Déclaration des Droits, et, le 4 juillet i776, tous leurs représentants, réunis à Philadelphie, votèrent la Déclaration de l'Indépendance.

Ces déclarations méritent de retenir notre attention la nôtre en est visi))!cn)ent inspirée. La Déclaration des Droits de la Virginie est, comme la nôtre, précédée d'un exposé de motifs. Les « attendus » dénoncent l'oppression, les rapines les vexations, bref, la perfidie anglaise qui va jusqu'à « user de tous artifices possibles pour engager les esclaves des colons à se soulever, les excitant et les armant contre )<*urs maîtres. » La Déclaration comprend dix-huit articles qui proclament la liberté de tous les hommes, la liberté de conscience, la liberté de la presse, le droit de propriété, la souveraineté nationale, la séparation des pouvoirs.

La Déclaration des autres Etats est a peu près semblable. Quant à la Déclaration de l'Indépendance, elle contient ce passage essentiel « Nous regardons comme incontestables et évidentes par elles-mêmes les vérités suivantes que tous les /<o~M:es o~~<fcrce.ycy<!M;r; qu'H ont été doués par le Créateur de certains droits inaliénables; que parmi ces droits on doit placer au premier rang la vie, la


~p~cctla)'cc/«~'c/<c~M~)!c~ que, pour s'assurer la jouissance de ces droits, les hommes ont établi parmi eux des gouvernements ~o/~ la y'?M/c <<<or!'ù~ émanc << co~so~cM!c~< des yoMucr~e's; que toutes les fois qu'une forme de gouvernement quelconque devient destructive de ces Hns pour les'jucUcs elle a été établie, /f/)e!~)/e<! le ~'0!'< de la C/t~O~ ~/6' l'abolir, <'< f/'<7M~7<M/' !<?!/MM!«~OMu~c?~p?! en établissant ses fondements sur les principes et en organisant ses pouvoirs dans la forme qui lui paraitront h; plus propres à lui procurer /<! S~C/C et /e~O~~CM~ »

Puis viennent l'énonce des griefs des colonies contre la Métropole et enfin la Déclaration d'Indépendance. Il est incontestable, quoi qu'on en ait dit, que les Américains ont exposé les droits « nature)s ? et '( inalienabtes » de l'homme en gênera!. Aussi bien que les Constituants, ils ont dit que les hommes, quelle que soit leur patrie, ont été crées libres et égaux; aussi bien qu'eux, ils ont proclamé le principe de la souveraineté popu!aire: plus hardis que nos pères de 1789, ils ont affirmé que l'homme avait droit a !a. recherche du bonheur. On ne peut donc pas nier que leurs Déclarations ont, comme la nôtre, un caractère philosophique d'universalité. La nôtre leur reste tout de même supérieure par sa sérénité et l'absence de toute contradiction violente entre elle et l'état social dont elle était désormais le fondement.

On éprouve, en enet, un douloureux étonnement quand on entend les Américains proclamer que /OM les /tOHtWPô $o~ e~a/e~e~ libres et Me~oc~6~~ (art. I" de la Déclaration de la Virginie) en


même temps qu'its s'indignent de voir csc/<c. se soulever contre eux, à t'instigation des Ang!ais.

En outre, leurs Déclarations n'ont pas conservé dans leurs formes le caractère de désintéressement (lue possède la notre elles sont faites /?oM/' établir /c/!M//ce</c/ewM~c; elles n'ont pas d'autre but. La nôtre visait les abus de la monarchie française, c'est certain mais elle ne le laisse pas voir. Cette absence d'allusions.fait justement qu'eHe est ptusgeneratc et plus généreuse. Le temps ne saurait la faire vieillir. Elle peut être Invo'niée en tout temps, en tout lieu. La France, en la faisant, s'est identifiée avec l'Humanité.

QUESTIONNAIRE

A qui a été empruntée l'idée de rédiger la f)éc)ar:)ti~n des Droits A quelle époque les Etats-Unis se sont-ils émancipes ? 3" Avant de s'émanciper, n'ont-ils pas proclamé leurs Droits ? ~0 Mais ont-ils reconnu la liberté de tous les hommes 5" Leurs déclarations sont-c~es aussi désintéressées que la nôtre 9

RÉDACTION

Montrez la supériorité de la Déclaration des Droits de l'Ilomme de I'789 sur les Déclarations américaines.


CHAPITRE XXV

CARACTÈRES DE NOTRE DÉCLARATION DES DROITS

On ne saurait trop insister sur ce point xo<rc Dcc/ara<!OM des Droits a wtc~c~'ey/tïVoso/~ï~fe /<~ ~~re?!

En se plaçant au-dessus des événements au milieu desquels elle est née, elle a pris une <7eua<U7t qui manque aux Déclarations américaines. En parlant de l'homme en géncrni, elle a pris un caractère !<pyM'/ a~'o/ L'Assemblée Nationale française a parle au nom du Monde, au lieu de se contenter de parler au nom de la France. Ainsi le voulaient nos traditions

Les Français sont le peuple lc moins égoïste de la terre. L'Histoire établit que dans la plupart des faits auxquels ils ont été mêlés, ils ont montré beaucoup de générosité, parfois un désintéressement complet. Ils ont toujours été les défenseurs des nobles causes. Au Moyen Age, '!s ont été les soldats de Dieu. A l'époque de la Révolution, les soldats du droit. La France a une àme d'apôtre. En devenant libres, nous avons voulu affranchir les autres hommes, <( nos frères )), comme disaient les orateurs de nos Assemblées révolutionnaires. A partir de 1189, nous sommes devenus les ~'o~y/es* <~e la Liberté en Europe, Et c'est bien grâce à nous que


peu à peu les gouvernements ont cesse d'être despotiques, pour devenir constitutionnels. Cependant on ne saurait oublier que notre Déclaration est M/!<? œc Kc<:o~/e ayant pour but de poser les principes sur lesquels devait être etaborée une société nouvelle. Chacun de ses mots condamne une injustice du passé. Il y a en elle des lacunes (voir chap. XXVII) qui ne s'expliquent que par la crainte de voir ce passé ressusciter sous une autre forme.

Enfin, cette Déclaration n'est-elle pas pour nous aussi une Déclaration d'Indépendance ?

M. Aulard, dans son Histoire de la Révolution, dit très justement « On peut considérer la Déclara« tion à un double point de vue, négatif ou positif; « comme détruisant le passé ou comme édifiant* « l'avenir. Aujourd'hui, rétrospectivement, nous la « considérons surtout au second point de vue, « c'est-à-dire comme le programme politique et « social de la France à partir de 1789. Les hommes « de la Révolution la considérèrent surtout au ~'e« M:!cr~O!'M~ de vue, comme la notification c~M décès « de l'Ancien Régime et, ainsi que le veut le « Préambule, comme une barrière contre une « résurrection possible de cet ancien régime, tout « de même que les Américains avaient édifié « leur Déclaration des droits en machine de « guerre contre le roi d'Angleterre et le système <( despotique H.

Il est Indéniable que notre Déclaration et les Déclarations américaines qui l'ont inspirée se ressemblent à beaucoup de points de vue. Elles sont ~œt<r~. Leurs principes ont été J9MM&S aux mêmes sources. Si la


nôtre est plus parfaite que les autres, le mérite en revient uniquement à nos qualités natives, servies par une haute culture morale et intellectuelle. QUESTIONNAIRE

D'où vient le caractère élevé de notre Déclaration ? 2" Notre Déclaration n'est-elle pas cependant une œuvre nationale ? 3° Que dit M. Aulard à ce sujet Les Déclarations française et américaines ne se ressemblent-elles pourtant point ? ?-

REDACTION

t. Pourquoi notre Déclaration des Droits a-t-elle plus que les Déctarations américaines un caractère élevé et universel? 2. Notre Déclaration des Droits a-t-elle, malgré son caractère universel, un caractère national? 9


CHAPITRE XXVI

LES SOURCES DE LA DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME

Les Déclarations française et américaines des Droits de l'homme sont soeurs. Leurs principes, avons-nous dit, ont été puisés aux mêmes sources. Les uns et les autres ont été empruntés aux écrivains français du xvin° siècle. Cette communauté d'origines est connue de tous ceux qui ont étudié notre littérature du xvui° siècle.

Cette littérature n'est pas restée enfermée dans le domaine de l'art pur Elle a moins eu le culte de la phrase, de la forme et de la composition, que le culte de la pensée. Les écrivains en général ont plutôt été des penseurs que des artistes. Ils ont critiqué tout ce qui les choquait. Ce sont les révolutionnaires, les vrais précurseurs~ de la Révolution. Leurs noms sont bien connus; trois d'entre eux dominent tous les autres par leur grandeur, ce sont Montesquieu~, Voltaire~ et Rousseau~. Autour d'eux se groupent les auteurs secondaires. Mais il faut mentionner spécialement d'AIembert et Diderot qui ont entrepris et mené à bonne fin l'œuvre puissante de l'Encyclopédie immense recueil de 37 volumes où étaient résumées toutes les connaissances humaines. Leurs idées se retrouvent naturellement dans l'esprit de leurs lecteurs, les


hommes de ht Révolution. Ce sont elles qui, condensées en formules abstraites, constituent les Déclarations des Droits de l'homme des treize colonies américaines, la Déclaration cle l'Indépendance et la Déclaration des Droits de l'homme de 1789. LY/~e/'c/ ~e/:e~, le ~c~«~/<c que l'article Vde la Déclaration française montre comme étant l'objet de toutes nos lois, c'est ce que tous les écrivains français du xvn~ siècle ont toujours opposé à la multitude des abus de toute nature qu'ils combattaient.

La Liberté, l'~a/~e étaient les deux mots de leur devise politique et sociale. C'étaient les deux principes aux noms desquels ils s'attaquaient a l'arbitraire et aux privilèges.

La SouueraMp~e joo/):<c est nettement posée comme un droit, par Jean-Jacques Rousseau, dans son livre le Co~ social. Le droit divin des rois ne trouve plus devant eux des défenseurs habiles et célèbres.

La 7'o/e?'a?!ce est prcchée avec passion par Voltaire, non seulement dans son poème de la ~fe/t?'M</e*, mais encore et surtout dans ses plaidoyers en faveur de Calas et de Sirven

L'Amour de la ~'M~ïce inspire toutes les œuvres du siècle.

Et il est inutile, n'est-ce pas? de rappeler que ces écrivains persécutés sont partisans de la liberté de penser et d'écrire.

Les genres littéraires les plus variés lettres, romans, contes, poésies légères~, poèmes épiques*, comédies, tragédies, servaient à propager ces idées nouvelles.


LB MARQUIS bE LA FAYETTE.



Cette ~/c/'a~'c</<' co/ était inspirée par la /?<M'so~ qui analysait, critiquait tout. L'Ancien Régime qui reposait sur des traditions'" ne résistait. pas a l'examen auquet il était, soumis. La :Y~/w'? était considérée par beaucoup, et surtout par. Housscau, comme sente digne d'être écoutée. La Société artificieUe du xvut. siecfe était condamnée. Les Droits de t'homme rec)ames par fa Dectaration sont les <( /h' y<6[/W6' )).

Le ~<e"' n'était point sérieusement. battu en brèche par ie J/~<<M Les Constituants et les Américains donneraient x sous les auspices de t'Etre suprême )).

Le xvtu~ siecte ayait de plus une toi entière dans t''?/YM'<~ e~ /'a< </e lu ~'c/c~cc <p)I commençait a briHer d'un vifeciat. Beaucoup d'esprits n étaient pas etoignes de croire que « quiconque sait tire est un homme sauver, que ta~c/c~cc et le ~<<p~ sont en retations étroites, qu'it sufnt de connaitre son devoir pour !'accomp!ir.

Or, c~~c /~<<e~«)'e <ye~'cM// ~~c !?/<;c ~û/b~/c ~M les f/e<~ Mo/< Au xvm° sièctc, « pour

« tout homme cuttivc, qu'it habite {'Europe ou <( l'Amérique, la seconde patrie, quelquefois la pre« miërc, c'est la France. Pan:- est ht capit-ute de <( rhitcHigcnce. Notre pays marche a ta tctc dct. « nations te j~enie i'rançais se rej~and sm' t'Europe. « L'Italie, l'Espagne, qui autrefois avaient cte no~ <( Institutnces, se mettent maintenant a noire eco)e. (( tj'Angtetcn'e, d'où noxs étaient venue:- tant d'idec-K depuis cent ans, nous te.~ emprunte de nouveau « sous la forme plus exquise et plus claire que nous tcur avons donnée, ~on seu!emcnt i'AHemagn'


« mais même la Suède, le Danemark, la Russie, les « colons anglais, espagnols, portugais de l'Amé« rique regardent du côté de la France.

« Cette civilisation universelle et ~KHMwe qui a « eu ses principaux foyers dans l'antiquité, à « Athènes et à Rome pendant la Renaissance « en Italie, en Allemagne, aux Pays-Bas, rayonne « maintenant de tout son éclat, dans la France de « Louis XIV et de Louis XV. Ao/?'c ~ty«c a « l'universalité ~M'aM~ <)!:< Moyen j4ye le latin; « elle l'a remplacé comme langue de la diplo'( matie, des cours, de la philosophie, des sciences, « de la société, au point que les aristocraties curo« peennc-~ en oublient leur langue nationale. On « peut qualifier d'un mot la civilisation française « du xvm* siècle, cilc est la Civilisation. Ce qui « aide à ce rayonnement de la France sur le monde, « c'est qu'à cette époque, presque nulle part il n'y « a, comme .aujourd'hui, un sentiment jaloux et exclusif de la nationalité. La Civilisation était « alors cosmopolite )). (Rambaud, ~~<we </c la C~U<7Ma~C7~ /raHf<ÏMC.)

Il n'est donc pas étrange de voir l'Amérique du Nord emprunter à notre littérature les principes qu'elle invoque pour se rendre indépendante. Et il n'est pas plus étrange de constater que ?:o/re première Déclaration des Droits est, co~MC notre littéra~K~'c, universelle et co~/M6'~o/<c

QUESTIONNAIRE

t" QucHes sont les sources des Déclarations française et américaines ? 2" Quels ont Été les précurseurs de la Révolution 3° Citez les noms des principaux écrivains français du


XYm'' siècle. 4° Citez les principales idées qui leur étaient chères. 50 Leurs écrits etaicnt-iis lus partout ? 9 REDACTION

Expliquer que les principes de la Déclaration de l'Indépendance américaine ont été tirés des mêmes sources que ceux de la Déclaration des Droits de ~89.


CHAPITRE XXVII

LES IMPERFECTIONS DE LA DÉCLARATION DE 1789

Les critiques n'ont pas été épargnées à la Déclaration des Droits de t'Homme cle )789. EHes sont venues notubrcuscs de cotes très ditrërents. Ceux qui les ont formulées se divisent en c~?~/).s' /a~c//c.<f.

Les ~.s ~<C//C~< le /?!C7/~C ~?!C DeC/<~Y<0~ des Droits, Les <7/C.S ?«' /?~<< pas. Ces derniers forment à leur tour plusieurs groupes. Bien que menant le même combat, ils n'ont ni les mêmes idées, ni les mêmes sentiments. Ils ne partent pas du même point, s'ils arrivent au même but. Il y a d'abord ceux qui sont d'accord pour reconnaître les vérités contenues dans la Déclaration des Droits. Parce que nos droits naturels et imprescriptibles leur paraissent trop évidents, ils ~</y~ la Dcc/a</o~ ?.?7c. Devant ses axiomes~, ils s'écrient sincèrement ou non, car il faut le dire, parmi eux se trouvent des ennemis de la Déclaration « Cela va sans dire! » Il faut se contenter de répondre « Si cela va sans dire, cela n'en va que mieux quand on le dit. »

Mais il y a ceux qui, très franchement, afnrment que la Z)~c~'a//o~ des Droits est un abus de /4~M/M~/ce ?~<<o?!a/c co/M~Ma~c, car cette Assem-


b!éc n'était pas fondée à proclamer les Droits de l'homme nos droits dérivent toujours de concessions du pouvoir. Les partisans de cette opinion ont à peu près disparu aujourd'hui. H est visible que Joseph de Maistre qui l'a soutenue était imbu de la doctrine du droit divin des rois.

Ce n'était pas le cas d'Auguste Comte Ce grand philosophe français a protesté aussi contre la Déclaration des Droits, non pour la dénigrer, c'était un admirateur fervent de la Révolution, mais pour dénoncer l'erreur commise, à son avis, en érigeant « .9y~pw<z/«~~wc7< p/t p7~ ?<<a/ ~<??w~<'?~,

/'<Wp'«/< A'~c/e )).

Sa critique mériterait d'être retenue si les Constituants eux-mêmes n'avaient pris pour ainsi dire le soin de la prévenir en reconnaissant que leur Déctaratit'n des Droits n'était ni complète, ni définitive. Ils ne se sont point dissimulé ses imperfections. Ils étaient natureHement conduits à penser, étant donnée leur foi dans le progrès, que l'avenir saurait l'améliorer. C'est <'c qui ressort nettement des débats que la Déclaration a fait naître. Le 20 août i78~, Dcsmeunier*!e disait « Jamais notre Déclaration n'aura qu'une perfection relative. » Cet aveu met mal à l'aise pour poursuivre l'exposé des critiques adressées a la Déclaration. Mais il faut les examiner afin de les apprécier et ne pas se laisser émouvoir par ceux qui les répètent. Quant aux observations de ceux qui admettent le principe de la Déclaration des Droits, clles portent sur les /acM?!<M qu'on peut relever dans l'œuvre des Constituants elles signalent l'oubli de certains droits évidents.


Pourquoi, disent-elles, la ~c~e~'c/~c ~< ~o/eM/' n'est-elle pas reconnue comme un droit? L'homme a le droit d'aspirer sinon au bien-être, du moins au

M:CMX-e~'<

Il faut reconnaître que sur ce point les Américains furent plus hardis que nous. Ce droit fut proclamé par eux. Les Constituants, qui le savaient, l'ont omis volontairement. Ils n'ont point osé le proclamer dans la crainte de l'entendre invoquer pour de trop nombreuses et trop importantes revendications sociales.

La Convention en 1793 n'aura pas cette timidité. (Voir chap. XXXI.)

Un autre oubli relevé souvent dans la Déclaration de 1789 est relatif au <o!7(/'<MM'c~o?!. Notre législation contemporaine a été hostile à ce droit pendant longtemps. C'est depuis peu seulement qu'elle le permet en le réglementant.

La Révolution, brisant les vieux cadres étroits de la Société industrielle, supprima les corporations*, les jurandes* et les maîtrises* devenues tyranniques.

Ce fut le triomphe de la liberté individuelle et la proscription de toutes les collectivités Ouvriers et patrons furent condamnés à l'isolement. Les Constituants avaient peur de faire revivre les institutions du passé en proclamant le droit d'association. Cependant le système individualiste avait de graves inconvénients. Il affaiblissait notre agriculture, notre industrie, notre commerce. On l'a compris. En 1884, la loi sur les Syndicats* mit fin à l'isolement obligatoire pour chacun. Patrons et ouvriers ont depuis formé des unions, des associations qui,


en groupant leurs efforts, les rendent plus puissants et favorisent leurs entreprises.

La Constituante aurait pu aussi proclamer le droit </e tous à /My/r!<c//oM. Elle ne le fit pas. La Convention, en 1793, devait encore rectifier sur ce point la Déclaration de 1789 (voir chap. XXXI). Mais le reproche le plus fréquent qu'on lui adresse est de ne pas avoir exposé les Devoirs de /<owM:e en établissant ses droits. Ce n'est point là une omission. Ce fut une décision prise après une séance orageuse, à la majorité de S70 voix contre 433. La Cons~M~e ?!e t'o~<~<M /~?'c une Dée/o~ des Devoirs, Estima-t-elle que les devoirs découlaient des droits, que « la Déclaration des Droits contient implicitement" une Déclaration de Devoirs (!) ?? Repoussa-t-elle la proposition parce qu'elle était inutile ou parce qu'elle était soutenue par le clergé? Toujours est-il qu'elle manifesta, après une longue discussion, la volonté de s'en tenir à une simple déclaration des droits. En 1793, la Convention vit la une lacune et la combla (voir chap. XXXI).

Toutes ces critiques établissent ou veulent établir que la Déclaration des Droits de l'Homme de i78!) n'est pas parfaite.

Les Constituants ont été les premiers à le dire. Leur œuvre n'en est pas moins imposante par les grandes vérités qu'elle énonce. Nous ne saurions aujourd'hui encore l'enrichir que de deux ou trois (1) Pour les maîtres voir la démonstration que M. Alexis Bertrand fait de cette proposition dans son exceltent ouvrage La Déclaration des Droits de rj7omMe et du Citoyen. Delagrave, éditeur. Un vol. in-8".


autres pour la compléter et en faire notre Évangile politique,

QUESTIONNAIRE

1° La Déclaration de 1789 est-elle parfaite ? Ne l'a-t-on pas jugée inutile Que fnut-i! penser de cette critique Y a-t-il des lacunes dans cette Déclaration S" Citcx-en. RÉDACTION

Quelles sont les principa)es lacunes signalées dans la Déclaration des Droits

Tout le monde s'accorde-t-il à reconnaitre que la Constituante a bien fait de rédiger la Déclaration des Droits de l'Homme ?


CHAPITRE XXV! H

LES BEAUTÉS L)TTÉRA)RES DE LA OÉCLARATtON

Considérée air point, de vue HUerairc, [aDcctaration des Droits de l'Homme, rédigée par la Constituante, ofFre d'admirables beautés.

On ne s'en étonne pas quand on se rappelle que les membres de cette Assemblée avaient reçu une haute culture classique". Les Collèges du xv)n° siècle les avaient habitues a priser le style d'une manière toute spéciale. Leurs professeurs, en commentanUcs auteurs, insistaient particulièrement sur l'art de la composition, le mouvement de la pensée et le tour heureux des phrases. Leur attention avait surtout, été appelée sur la beauté de la forme. Leurs lectures en avaient entretenu le culte en eux, car les philosophes du xvm" siècle étaient des maîtres écrivains. Les Constituants les imitèrent; la Déclaration qu'ils ont rédigée en est une preuve. On'n'en. remarque pas assez d'ordinaire les qualités littéraires. C'est un tort.

On n'y trouve pas, comme en beaucoup de lois, ces impropriétés~, ces constructions vicieuses~ qui obscurcissent le sens d'une phrase et font engager des procès aussi faciles à plaider que difficUcs à juger.

L'oeuvre est belle, non seulement par les vérités qu'elle exprime, mais encore par la manière dont


ces vérités ont été exprimées. C'est une œuvre d'art.

.L'o'c~'e des idées, sans être d'une extrême rigueur, n'est pas le fait du hasard. Il résulte d'un travail spécial encctué après le vote des dix-sept articles. Ce sont des principes numérotés qui, tout en se suivant, ont à l'égard les uns des autres une certaine indépendance. Sans vouloir a tout prix montrer leur liaison, l'Assemblée les a disposés de telle sorte qu'ils semblent pourtant s'engendrer dans une certaine mesure.

Voici leur disposition dans toute sa simplicité « 6~M ~'ea?M~M/<° contenant les raisons et démontrant la nécessité de la déclaration; /c~'<w!!e~' <M'cles destinés à définir d'abord le citoyen par ses droits essentiels de liberté et d'égalité; p?~ c<w~c co7'o//<H'?'e~, la souveraineté également définie par son caractère essentiel qui est d'être populaire et nationale; /'<MM:e~'a/ïo~ des droits naturels qui dérivent et de l'idée de citoyen et de l'idée de souveraineté enfin la ya~<? yoKïWTtCMe~a/e et en quelque sorte l'incarnation politique de tous ces droits le gouvernement représentatif qui implique~ la division des pouvoirs et la responsabilité des agents )) (t).

La langue est abstraite comme l'est toujours la langue judiciaire ou philosophique qui n'exprime que des idées pures. Mais si on n'y trouve pas de couleur, on y trouve des phrases au tour net et incisif, tantôt impérieusement brèves, tantôt explicatives, toujours limpides.

(1) Bertrand. –La D~ara~oH des 7))'o!'<s de ~o/nme, p. 78.


D'abord c'est la ~c~'<o<~e qui se développe avec ampleur dans le préambule. Puis le défilé des /b?'MM/p.~ coM~M avec les dix-sept articles qui suivent. En quelques mots, les Constituants ont su donner des f/M~o;~ excellentes de la liberté (art. IV), de la loi (art. VI). On y rencontre aussi des a/wa~'o/~ simples et sereines comme dans l'article premier « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits )) (1). Souvent l'affirmation est renforcée en prenantunsenslimitatifpar une énergique tournure (2).< La loi M'a le droit de défendre ~~cles actions nuisibles à la Société (art. V). D'autres fois ce sont de ~o~e.y énumérations dans lesquelles chaque mot représente un principe. Par exemple à l'article II « ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression )) (3). De temps a autre la phrase s'allonge, devient explicative (4). Mais presque constamment elle reste concise sans cesser d'être claire, simple sans perdre de son autorité. Elle a toute la gravité judiciaire qui lui convient. Elle rend la pensée avec force. Dans sa précision et son /aco~M/?:e, elle est vraiment lapidaire.

Aussi bien est-il vrai qu'elle imprime dans la mémoire la vérité qu'elle traduit.

Le style fait vivre les écrits. Celui de la Déclaration a contribué certainement par ses mérites à populariser la Déclaration elle-même. Si elle est un superbe manifeste de vérités politiques et sociales, (1) Voir aussi les articles II, III, XI, XII, XV, XVI. (2) Articles t, III. IV, V, VII, VIII.

(3) Articles II et XI.

(4) Articles IV, VI, XI, XIII, XIV, XVII.


elle est en même temps une belle pagedelincrature.

QUESTIONNAIRE

La Decfaration de )78!) ~fÏrc-t-c))c()':s beautés )iH6raircs.' 2" A-t-e)jc été rédigée d'après un p)a)) Le stylu a-t-il été soigne Consthue-t-dtc une he))c page )it.tcrairc REDACTION

1 En quoi consistent, les beautus littéraires de la Déctat'ation ?

3. A quoi faut-i) tes attribuer? '1


CHAPITRE XX!X

LES PRtNCtPAUX AUTEURS DE LA DÉCLARATtON DES DROITS DE L'HOMME DE t783

Les principaux auteurs ')c la Déclaration des Droits de l'homme méritent d'être connus. Nous entendons désigner sous ce nom ceux qui ont travaitte d'une façon très personneUe à son élaboration",a sa rédaction. Si nous voulions désigner tous Ics membres de l'Assemblée constituante qui en ont discuté et voté les principes, il faudrait les nommer tous.

La /)/<x~ (les articles, c/t e~c<, /<o'c/~ f((/o/)/~ /'w:<7/</w~e, et la majorité des députes prit une part active aux débats. Ce n'est pas au milieu de t'indifference que la Déclaration fut émise. Le premier jour de ta discussion, il y avait cinquante-six orateurs inscrits pour prendre la parole. Les jours suivants, los séances furent parfois tumultueuses. En lête, il faut tout d'abord signaler le /~w//<w. C'est le marquis de La Fayette, député de la noblesse d'Auvergne. It était désigne mieux que personne pour proposer de rédiger une Déclaration des Droits de l'homme à l'imitation de t'Ameriquc. Il avait été un des premiers volontaires français accourus au secours des Américains luttant pour leur indépendance. Il avait alors vingt ans et venait


de se marier. H n'hésita point cependant à partir, laissant sa jeune femme et frétant un navire a ses frais. Les Américains lui confièrent un commandement. Il se lia d'amitié avec Washington~ et, de retour en France, il combattit pour les idées de liberté et d'égalité qui lui étaient chères. Le journal ~e P<w~ f/« J~Mr rendait compte en ces termes de sa motion* a l'Assemblée constituante

« M. le marquis de La Fayette a proposé le projet d'une dcctaraUon dcsdroits naturels de l'homme, et de l'homme vivant en société, pour en former le premier chapitre de la Constitution.

« Après l'avoir présentée avec la noble simplicité d'un héros philosophe, il l'a soumise avec cette modestie qui lui est naturelle au jugement de l'Assemblée.dans l'espérance, a-t-il dit, que ce premier essai engagerait d'autres membres a en présenter de meilleures qu'il s'empresserait de lui préférer, x

Aussitôt, en effet, les projets abondèrent. Des commissions furent nommées. Le travail d'élaboration commença. L'Assemblée fit son profit de toutes les rédactions proposées, toutefois a~CMH projet /)C~OMHc/ fut adopté, Le texte accepté fut celui que le sixième bureau de l'Assemblée avait préparé. Mais il fut, en cours de discussion, profondément remanié. Les cr/!M/M de /'a?Mu/'c furent donc nombreux. Nous nous bornerons à signaler ceux qui furent assez heureux pour faire accepter, dans l'examen d'un article, leur rédaction. Leur nom mérite d'être connu. II y a quelque chose de leur personnalité dans la Déclaration, puisqu'elle se compose de for-


mules émanant d'eux. L'histoire n'a pas conservé fidèlement le souvenir de tous. Certains sont oublies: tels Redon, Desmeunier, Périsse du Luc, le comte de Castellane, le marquis de Bonnay. D'autres ont garde une certaine réputation, comme Targct, Lameth et Duport. Enfui il en est qui sont cétèbres à d'autres titres, comme Tronchet, Mounicr et Taticyrand. C'étaient des membres du ctergé, comme ce dernier, des magistrats, comme Duport, des avocats, comme Tronchet, Mounicr et Target (membre de l'Académie française).

Mais au-dessus d'eux tous était celui qui les dominait non seulement de sa grande taille et de son regard hautain, mais encore de son génie oratoire, de sa vaste intelligence et de l'ascendant qu'il avait pris dès la réunion dès États Généraux. ~<~c<ïM intervenait dans presque toutes les discussions. U ramenait à la question les débats qui s'égaraient, il les élargissait le plus souvent. Il apportait des idées justes, précises, et il les soutenait avec toute la force d'une argumentation solide et d'une persuasion naturelle. Sa conduite, a un moment de la discussion, n'est pas sans reproche (i); mais pour une défaillance il ne faut ni passer sous silence le grand rôle qu'en somme il joua, ni en amoindrir l'importance et le mérite.

Le Préambule a été rédigé par un Comité de cinq membres dont il était. Les quatre autres membres sont

7VoMC/ célèbre pour avoir défendu Louis XVI (i) Voir Bertrand, La D~c~ratton des Droits derHomm~. p. 68.


devant. la Convention. Ancien avocat consultant, jouissant d'une très grande réputation, il devint, après la Révolution, président de la Cour de Cassation et prit une part considérable a la rédaction de notre Code civil;

De la Z.M:WKC, évoque et député de Langres; /~</o; députe de Hiom;

D<cw~'e~ députe de Paris. C'est ce dernier qui a fixé ta rédaction de la Déclaration selon le désir de t'AssCmbtcc.

Les trois premiers articles sont de ~OM~tc/ députe du Dauphine. Meunier tint a t'Assemblée Constituante une place importante. It en était le président lors des journées des 5 et G octobre 1789. Il s'éloigna de France en t7{)0 et ne rentra qu'après le coup d'État du t8 Brumaire. Napoléon fit de lui un de ses préfets. Les articles IV et Vsontd'.4/M:<7/M~'c </c Lametlt, député de Péronne, un ancien combattant d'Amérique comme La Fayette.

L'article VI est du fameux 7'a//cy7'aK<f, évêque d'Autun, qui devait devenir ministre des Affaires étrangères sous le Directoire et sous Napoléon, p:)is ambassadeur de France à Londres sous LouisPhilippe. Après avoir parlé en maître aux souverains d'Europe pendant l'époque impériale, il s'efforça, après Waterloo, de représenter, dignement et habilement, la France vaincue au Congrès de Vienne (t8i5), d'où sortirent les traités qui fixèrent les limites de l'Europe pendant un demi-siècle. C'était le premier diplomate de son temps.

Les articles VII, VIII et IX ont été proposés, mais modifiés au moyen d'amendements et de sousamendements, par 7'a~e~, célèbre avocat de


Paris et académicien, le MH~MM f/c ~MMay, députe de la Nièvre, Duport, ancien conseiller du Parlement, un ami de Lameth.

L'article X fut proposé par le comte de Castel/a~c, mais profondément modifié par plusieurs amendements et sous-amendements.

L'article XI est du <~<c de La /~oe~e/OMcaM/< député de Paris, renomme par sa philanthropie. Les articles XU, XIII, XV et XVI ontctë formulés par le bureau de t'Assemblée.

L'arlicle XIV, par /'<'r!'MC f/M ~Mc, député de Lyon.

Et l'article XVI! par D«/?o~.

QUESTÏONNAJRE

1° Les articles de !.i Déclaration ont-ils été votés en générât avec une grosse majorité 2° Quel a été le promoteur de la Déclaration? 3* Quels en ont été les principaux rédacteurs? 4" Quel a été le rôle de Mirabeau? Y

RÉDACTION

1. Quels sont les auteurs de la Déclaration que vous connaissez ? `?

2. Comment a été proposée et élaborée la Déclaration des Droits de l'Homme F


CHAPITRE XXX

LIMPORTANCE DE LA DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME DE 1789

L'importance de la Déclaration des Droits de l'Homme n'a pas échappé aux yeux de ceux mêmes qui l'ont dénigrée.

L'historien allemand, H. de Sybel*, âpres avoir dit que les discussions dont elle était sortie lui paraissaient « pénibles et « humiliantes », ne peut s'empêcher de reconnaître qu'elle ouvre une ère nouvelle. <( La Déclaration des Droits, finit-il par dire, en dépit de ses graves imperfections, restera comme un grand monument placé à la limite de deux époques bien différentes pour la France; elle marquera a jamais la source et le cours de ce torrent dont les flots ne tariront plus dans la vie politique des États européens (i). n

Ce que dit Gœthe, le soir de la bataille de Valmy,.aurait pu être dit à la Constituante quand la Déclaration fut faite < En ce lieu, et dans ce jour, commence une nouvelle époque pour l'histoire du monde. »

Les principes établis n'ont pu être détruits. Par la force de leur vérité, ils se sont peu à peu imposés partout. La vieille Europe despotique est devenue libre en les appliquant.

(t) H. de Sybel. Histoire de l'Europe pendant la Reoo<M<t~ /anfa<se. (Traduction de M"' Dosquet, p. 81.)


En France, les hommes au pouvoir qui leur étaient le plus hostiles n'ont pas osé les contester, même aux époques de vive réaction.

Les divers gouvernements qui se sont succédé de 179i à nos jours ont été bien différents les uns des autres par leurs origines, leurs tendances et tours actes. Mais à l'égard de la Déclaration des Droits de 1789 leurs diverses attitudes ont servi bien plus :') reconnaitre son importance qu'a l'amoindrir. Les uns ont la co~yc~' ~o~?' c~ /<r/?'c<v/ra~rc les un/x.'r/ec/to~s.

La Convention a vote, a trois reprises, trois Déclarations. Elles ont trois caractères très din'erents. Les deux premières, datées de )7U3, avaient pour but de l'amender celle de t7'~ de combiner celles de i78*) et de 1793 pour en faire une parfaite et y ajouter une Dectaration des Devoirs. La République de 1848 a fait également une Déclaration des Droits. Mais ni les unes, ni les autres ne sont parvenues a faire oublier celle de 1780.

Seule celle du23juini7')3 peut lui être comparée utilement. Elle l'a complétée très heureusement sur certains points.

Nous la trouverons plus loin.

D'</«~es );e'M!M ~c sont ~c/a~M </< la D~c~/!0~ de /7~, alors <<& C.ZM~C~~ C?! verlu <P co?M~/M~'o7< y!« <?/! était la x~af/'o~. Tel le Consulat. Bonaparte disait alors « Citoyens, la Dévolution est fixée aux principes qui t'ont commencée. Elle est finie. »

Telle encore la Constitution du H janvier 18~2, qui instituait le gouvernement pct'sonnct de LouisNapoléon Bonaparte (Napoléon HI). L'article 1'" était


ainsi conçu < La Constitution reconnaît, confirme et garantit les grands principes proclamés en 1789 et qui sont la base du droit public des Français. ? x Les MOMarc/t! du dix-neuvième siècle o?:< eM/?/s ~<?/r<7MC/!MC. Si leur attitude était contraire aux principes de 1789, du moins elle était nette. Les Chartes de 1814 et de 1830 étaient des restrictionsapportées aux principes de la Déclaration des Droits de 1789. Mais elles en admettaient quelques-uns. Elles en étaient comme un écho affaibii.

Enfin, le gouvernement actuel de la République ayant existé en fait avant d'avoir reçu sa Constitution, n'a pas eu la pensée de rédiger une Déctaration des Droits de l'Homme. Mais, en réalité, il repose sur les principes que renferment celle de 1189 et celle de 1793. Par son vote du 14 mai 1901, la Chambre des députés a décidé que toutes deux méritaient d'être affichées dans les édifices publics et commentées dans les écoles. Elle les a donc adoptées. A~OMS AOM!WM refc~M~, de propos t/c/v, aux vrais ~?:c/ de la .Oe'woc?'c ?'<wMca/KC. QUESTIONNAIRE

Qu'a dit l'historien allemand M. de Sybel à propos de la Déclaration ? 2° Les principes qu'elle a proclamés ont-ils été respectés ? 3" N'a-t-on pas voulu les compléter ? 4" Quand ? i a" Les avons-nous adoptés

RÉDACTION

1. La Déctaration des Droits de l'Homme de 1789 a-t-elle été respectée en France ? Quelle a été son influence ? 2. Quelle a été, de 1789 à nos jours, l'altitude des gouverne. ments français à l'égard de la Déctaration de Droits de l'Homme de ~89 ? e


TEXTE DE LA DËCL~AT!~

))ES DROITS DE L'HOMME ET DU CITOYEN AnOf'TEt: P.Ut LA COXVEXTtOX XATfOXALE

LE~3jL-)si7M

Le Peuple français, convaincu que l'oubli et le inépris des droits naturels de l'homme sont les seules causes des malheurs du monde, a résolu d'exposer, dans une déclaration solennelle, ces droits sacrés et inaliénables, afin que tous les citoyens, pouvant comparer sans cesse les actes du gouvernement avec le but de toute institution sociale, ne se laissent jamais opprimer et avilir par la tyrannie; afin que le peuple ait toujours devant les yeux les bases de sa liberté et de son bonheur, le magistrat, la règle de ses devoirs, le législateur, l'objet de sa mission.

En conséquence, il proclame, en présence de l'Être suprême, la Déclaration suivante des droits de l'homme et du citoyen

ARTICLE PREMIER. Le but de la société est le bonheur commun.

Le gouvernement est institué pour garantir


à l'homme la jouissance de ses droits naturels et imprescriptibles.

ARTICLE 2. Ces droits sont l'égalité, la liberté, la sûreté, la propriété.

ARTICLE 3. Tous les hommes sont égaux par la nature et la loi.

ARTICLE 4. La loi est l'expression libre et solennelle de la volonté générale; elle est la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse; elle ne peut ordonner que ce qui est juste et utile à la société; elle ne peut défendre que ce qui est nuisible.

ARTICLE 5. Tous les citoyens sont également admissibles aux emplois publics. Les peuples libres ne connaissent d'autres motifs de préférence, dans leurs élections, que les vertus et les talents.

ARTICLE 6. La liberté est le pouvoir qui appartient à l'homme de faire tout ce qui ne nuit pas aux droits d'autrui; elle a pour principe la nature, pour règle la justice, pour sauvegarde la loi; sa limite morale est dans cette maxime « Ne /<fts pas à un autre ce f~e tu ne veux pas qu'il te soit fait. »

ARTICLE 7. Le droit de manifester sa pensée et ses opinions, soit par la voie de la presse, soit de toute autre manière, le droit de s'assembler paisiblement, le libre exercice des cultes, ne peuvent être interdits.

La nécessité d'énoncer ces droits suppose ou la présence ou le souvenir récent du despotisme.

ARTICLE 8. La sûreté consiste dans la protection accordée par la société à chacun de ses


membres pour la conservation de sa personne, de ses droits et de ses propriétés.

ARTICLE 9. La loi doit protéger la liberté publique et individuelle contre l'oppression de ceux qui gouvernent.

ARTICLE 10. Nul ne doit être accusé, arrêté ni détenu, que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle a prescrites. Tout citoyen, appelé ou saisi par l'autorité de la loi, doit obéir à l'instant; il se rend coupable par la résistance.

ARTICLE 11. Tout acte exercé contre un homme hors des cas et sans les formes que la loi détermine, est arbitraire et tyrannique; celui contre lequel on voudrait l'exécuter par la violence a le droit de le repousser par la force. ARTICLE 12.– Ceux qui solliciteraient, expédieraient, signeraient, exécuteraient ou feraient exécuter des actes arbitraires, sont coupables et doivent être punis.

ARTICLE 13. Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi.

ARTICLE 14. Nul ne doit être jugé et puni qu'après avoir été entendu ou légalement appelé, et qu'en vertu d'une loi promulguée antérieurement au délit. La loi qui punirait des délits commis avant qu'elle existât, serait une tyrannie; l'effet rétroactif donné à la loi serait un crime. ARTICLE 15. La loi ne doit décerner que des peines strictement et évidemment nécessaires;


les peines doivent être proportionnées au délit et utiles à la société.

ARTICLE 16. Le droit de propriété est celui qui appartient à tout citoyen de jouir et de disposer à son gré de ses biens, de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie. ARTICLE 17. Nul genre de travail, de culture, de commerce ne peut être interdit à l'industrie des citoyens.

ARTICLE 18. Tout homme peut engager ses services, son temps; mais il ne peut se vendre, ni être vendu; sa personne n'est pas une propriété aliénable. La loi ne reconnaît point de domesticité; il ne peut exister qu'un engagement de soins et de reconnaissance entre l'homme qui travaille et celui qui l'emploie. ARTICLE 19. Nul ne peut être privé de la moindre portion de sa propriété, sans son consentement, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité. ARTICLE 20. Nulle contribution ne peut être établie que pour l'utilité générale. Tous les citoyens ont le droit de concourir à létablissement des contributions, d'en surveiller lemploi et de s'en faire rendre compte. ARTICLE 21. Les secours publics sont une dette sacrée. La société doit la subsistance aux citoyens malheureux, soit en leur procurant du travail, soit en assurant les moyens d'exister à ceux qui sont hors détat de travailler. ARTICLE 22. L'instruction est le besoin de tous. La société doit favoriser de tout son pouvoir les progrès de la raison publique, et


mettre l'instruction à la portée de tous les citoyens.

ARTICLE 23. La garantie sociale consiste dans l'action de tous pour assurer à chacun la jouissance et la conservation de ses droits; cette garantie repose sur la souveraineté nationale.

ARTICLE 24. Elle ne peut exister, si les limites des fonctions publiques ne sont pas clairement déterminées par la loi, et si la responsabilité de tous les fonctionnaires n'est pas assurée.

ARTICLE 25. La souveraineté réside dans le peuple elle est une et indivisible, imprescriptible et inaliénable.

ARTICLE 26. Aucune portion du peuple ne peut exercer la puissance du peuple entier; mais chaque section du souverain assemblée doit jouir du droit d'exprimer sa volonté avec une entière liberté.

ARTICLE 27. Que tout individu qui usurperait la souveraineté soit à l'instant mis à mort par les hommes libres.

ARTICLE 28. Un peuple a toujours le droit de revoir, de réiormer et de changer sa constitution. Une génération ne peut assujettir à ses lois les générations futures.

ARTICLE 29. Chaque citoyen a un droit égal de concourir à la formation de la loi et à la nomination de ses mandataires ou de ses agents.

ARTICLE 30. Les fonctions publiques sont essentiellement temporaires elles ne peuvent


être considérées comme des distinctions, ni comme des récompenses, mais comme des devoirs.

ARTICLE 31. Les délits des mandataires du peuple et de ses agents ne doivent jamais être impunis. Nul n'a le droit de se prétendre plus inviolable que les autres citoyens.

ARTICLE 32. Le droit de présenter des pétitions aux dépositaires de l'autorité publique ne peut, en aucun cas, être interdit, suspendu ni limité.

ARTICLE 33. La résistance à l'oppression est la conséquence des autres droits de l'homme.

ARTICLE 34.-Il y a oppression contre le corps social lorsqu un seul de ses membres est opprimé. Il y a oppression contre chaque membre lorsque le corps social est opprimé.

ARTICLE 35. Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.


CHAPITRE XXXI

LA DÉCLARATtON DE 1793

A peine s'était-il écoulé trots ans depuis le jour où la Constituante avait voté la Déclaration des Droits de l'Homme, que la Convention éprouvait le besoin de formuler à son tour une déclaration semblable. En 1792, des idées nouvelles s'étaient fait jour. La Monarchie était détruite, la République proclamée. Il y avait plus de hardiesse dans les esprits. Certains droits que les Constituants avaient omis, ou craint de proclamer, paraissaient évidents. La Convention se mit à l'oeuvre pour refaire l'oeuvre de la Constituante. Plusieurs projets furent élaborés (1) et examinés. L'un d'eux réunit enfin l'unanimité des voix et fut adopté le 29 mai 1793. Mais il y avait division dans la Convention entre les deux partis qui se disputaient le pouvoir le parti girondin et le parti montagnard. L'un devait proscrire l'autre. Le 2 juin 1793, 29 députés girondins furent arrêtés, les autres se dispersèrent. Les montagnards eurent dès lors la toute-puissance ils voulurent appliquer leurs idées propres.

La Déclaration du 29 mai les exprimait mal. Ils (i) Par Gensonne.Romme, Robespierre et le Comité de Constitution.


en rédigèrent une autre. Elle fut votée te 23 juin 1 793. Cette année-là vit donc proclamer deux déclarations. Mais c'est la deuxième qu'on veut désigner d'ordinaire quand on parie de la Dec~c?'a~o?< de /7~. Elle diffère de celle de i789 sur plusieurs points, ~t l'article elle ~'oc/o~c que le « but de la société est le ~o?:AeM?' commun. »

Au chapitre XXVII, il a été dit que c'était là une lacune volontaire des Constituants. Ce n'est pas la seule qui ait été comblée par les Conventionnels. En 1793, l'Assemblée nationale voyait mieux la vérité des principes de solidarité

La Déclaration de 1789 était muette sur /a/a<ernité. On est heureux de lire à l'article XXI de celle de i7!)3 « Les secours publics sont une </e~cMcrée. » C'est le droit pour chacun de réclamer contre la misère extrême qui tue, quand elle est supportée par un homme dans l'impuissance de la combattre tout seul.

Comme le dit le même article « La société doit la subsistance aux citoyens malheureux, soit en leur procurant du travail, soit en assurant les moyens d'exister à ceux qui sont hors d'état de travailler. »

Et ce n'est pas seulement le pain du corps que la société doit à chacun de ses membres, c'est aussi le pain de l'esprit l'instruction élémentaire doit <c ~o/tM&e à tous, car tous en ont besoin.

C'est ce que proclame l'article XXII

< L'instruction est le besoin de tous. La société doit favoriser de tout son pouvoir les progrès de la raison publique et mettre l'instruction à la portée de tous les citoyens. »


PtttSEMLAttASTH.t.K~tjuittctnS')



La Convention, qui n'a pu réaliser toutes ses idées, a légué à l'avenir le soin de le faire a sa place. La République actuelle, en décrétant /M/?'«c~'oM o~a/OM'e pour tous par la loi du 28 mars 1882, s'est faite son exécutrice testamentaire Un gouvernement de liberté ne pouvait agir autrement.

La liberté ne peut exister que dans une société d'hommes éclairés. L'ignorance favorise le despotisme. La démocratie ne peut être l'état politique que des nations où tous les enfants vont a i'écote. La Convention a Insisté avec force sur les principes de liberté et de souveraineté populaire. Elle s'est montrée jalouse de la liberté individueiïe au point de défendre au besoin la liberté d'un citoyen contre ce citoyen lui-même. RcMsez t'articteXVHI « Tout homme peut engager ses services, son temps; mais il ne peut se vendre, ni être vendu; sa personne n'est pas une propriété aiiénabte*. Z~ loi ne ~co/UM~ point de <~oH:c~!c~e; il ne peut exister qu'un engagement de soins et de reconnaissance entre l'homme qui travaille et celui qui l'emploie. »

Le mot domesticité est pris évidemment dans son sens primitif. II désigne l'état de dépendance, de servitude dans lequel vivent, par exemple, relativement à nous, les animaux que nous entretenons et dont nous disposons selon nos désirs. Domesticité est alors synonyme d'esclavage. Le mot de domestique était odieux aux Français de 1793. Ils l'avaient supprimé de leur vocabulaire. Pour dire un domestique, ils disaient un < officieux )'. Ce mot a reparu depuis avec le sens que nous lui donnons


couramment il sert à nommer une personne payée pour services rendus à la maison.

En ce qui concerne la .S'o~wa~e/p nationale, les Conventionnels l'ont déclarée une, indivisible, imprescriptible et inaliénable (art. XXV). Leur amour pour elle est entier et farouche. A l'article XXVII, ils s'écrient <t ~<c /OM/ individu qui usurperait la ~0?<UCra!C/e SOtT, A L'tKSTAXT, M!S A MORT PAR LES HOMMES LIBRES. »

Il est plus sage, dirons-nous, de se rendre maître de lui pour le déférer à la justice et le juger selon les formes de la loi. La colère même d'un peuple prenant un homme en flagrant délit de tyrannie est mauvaise conseillère. Elle peut conduire a. de regrettables excès et même à des erreurs grossières et Irréparables.

Un acte de légitime et suprême autorité, ou de grande prudence, peut ressembler parfois à une usurpation de pouvoir. Il serait malheureux de faire la confusion.

L'article XXXV ne mérite pas cette observation. 11 est fondé sur un droit la résistance à l'oppression. Il proclame le droit à l'insurrection comme étant un droit sacré et «/t devoir M6~s/)CHsa&/e.

« Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. »

La grande difficulté pratique est seulement de pouvoir être sûr à l'occasion que le gouvernement viole les droits du peuple. Si on se trompe, en effet, on se met en état de rébellion on tombe sous le coup de la loi. Si on n'agit pas, on est dépouillé,


opprimé. Mais quand le doute n'est pas permis (et il ne l'était pas aux coups d'Etats du 18 brumaire et du 2 décembre 185i), l'insurrection est bien, comme le dit l'article XXXV, ~e plus .sncrcf/f.s ~'o~' et le /<y !'?!y)e/!sa~/e </c.s' devoirs.

En dehors des articles et des principes qui viennent d'être cités, Ii Déclaration de 1793 reproduit celle de 1789. C'est un hommage qu'elle lui rend. La reproduction est assez souvent textueDe. On s'en convaincra en relisant les articles IV, V, VI, XII, XV, XtX, et surtout les articles X et XX. L'article XIII delà Déclaration des Conventionnels est la copicdet'artic)e!Xdc!a Déclaration des Constituants. Il semble en en'et que la Dectaration de 1789 ait donné la formule dënnitive de p)usieurs vérités et qu'on ne puisse mieux faire en voûtant t dire ce que les Constituants ont dit que répéter les mots et les tournures dont ils se sont servis. Les Conventionnels ont encore subi le charme dn plusieurs expressions très heureuses de Robespierre qui, le 24 avril 1793, avait présenté et fait applaudir un projet personnel de Déclaration. Mais il ne l'avait pas fait adopter.

Sauf quelques mots, le Préambule est de lui. Six articles, les articles IV, VI, VII, XXI, XXX et XXXI lui ont été en partie empruntés. Les articles XXXIII et XXXIV sont exactement les articles XXV et XXVI de son projet.

On sait quelle action profonde il exerçait sur ses collègues. Le nom de tyran qui lui a été donné n'est pas une calomnie. Mais on sait aussi que, disciple enthousiaste de Rousseau, il ne manquait pas de talent littéraire. Les formules de son projet ont L


été certainement étudiées par lui avec soin. Elles ont été polies et repolies. Elles ont du brillant et de la fermeté.

Inspirée à la fois par la Constituante et par Robespierre, la Convention en 1793 a élaboré une Déclaration qui complète celle de 1789 et soutient pour la forme la comparaison avec elle.

Toutes deux traduisent les croyances politiques et sociales de la France aux deux moments de crise qui ont enfanté notre civilisation actuelle. Toutes deux méritent d'être gravées dans nos cœurs. Les principes qu'elles énoncent sont restés les nôtres. Notre attachement à eux est le palladium~ de nos libertés.

QUESTIONNAIRE

t" Combien la Convention a-t-elle voté de Déclarations des Droits en 1793 Que dit la seconde pour compléter celle de 1789 ? 3" N'y a-t-il pas des réserves à faire au sujet de l'art. 27? Pourquoi 8° Quelle double influence littéraire a subie la Convention dans la rédaction de la Déclaration de 1793 ?

RÉDACTION

1. Comparer les Déclarations de 1789 et de 1793 (ressemblances et différences).


CONCLUSION

LES DÉCLARATtONS DE 1789 ET DE )795. NOS CODES ET NOS MŒURS (')

Les Déctarations de 1789 et de 17!)~ traduisent en formules claires et précises les idées et les sentiments de la France contemporaine. H n'est donc pas étonnant qu'elles aient exercé une action décisive, aussi étendue que profonde, sur nos mœurs et nos lois.

Depuis d789, les Français, appetés à la vie politique, ont mené une existence nouvelle qui contraste absolument, sur bien des points, avec celle que l'Ancien Régime leur imposait. Leurs mceurs se sont modifiées, en générai, avec d'autant plus de facilité qu'elles ont pu se conformer des lois après lesqueUcs tout le monde soupirait.

Notre législation actuelle, en cn'ct, repose sur les principes mêmes de la Déclaration. M. Compayré l'a dit très justement « Toutes les lois justes, équi(1) !~ous tenons à dire que ce chapitre nous a été inspiré par l'exceUent Commentaire de M. Eugène Blum, dont M. Gabrid Compayré a écrit la préface. Cet ouvrage, très sérieusement documente, nous a fourni la plupart des renseignements qui étayent nos considérations, Il est édite chez Atcnn. Prix H fr.75.


tables et utiles qui gouvernent notre pays n'en ont éts que t'appHcitIon successive. Loin d'être des formules vaincs, creuses, autant que solennelles, les affirmations de la Déctaration sont grosses de conséquences, pleines de portée pratique. »

It est facile de l'établir. A chacun des articles des deux Déctarations se rattache un système de lois conçues en vue d'assurer « le bonheur commun » qui est « le but de la société ? » (art. I"de ta Déclaration de !79~), on « la conservation des droits naturels et Imprescriptibles de l'homme ? qui est « le but de toute association politique ? (art. II de la Déclaration de î7St)).

La rédaction et la mise en vigueur d'un code de lois communes a tous les Français constitue )a première et ta plus éclatante consécration des principes proclamant /<];e~cct /'e'ya/c des citoyens (art. t'~ de la Déclaration de 1789; art. III de ta Déclaration de 1793).

L'article H de la première, les articles IX, XXXIII, XXXtV et XXXV de la seconde, ont fait prendre une foule de mesures en vue d'organiser la rcsM~:cc /cy~p « /'o/~r<M;<M.

Contre l'oppression politique, le droit de pétition, ta liberté de réunion, la liberté de la presse on'rent de sérieuses garanties. L'opprimé peut crier l'injustice dont it souffre. Si sa réclamation est justifiée, on unit par y faire droit.

Contre l'oppression sociale qui peut accabter un être humain, citons la loi du 24 juillet i889 qui protège les plus faibles, les enfants maltraités ou moralement abandonnés. L'État se substitue aux parents indignes, leur enlève leurs enfants pour


les faire élever lui-même. « L'enfant, qui était jadis ta chose <!u père, est devenu le pupille de la nation » (M. Blum). Le docteur Roussel, sénateur de la Lozère, qui a fait voter cette loi, avait déjà attacllé son nom a celle qui a pour but de veiller sur la vie et la santé (les enfants mis en nourrice (loi du 23 décembre 1874). Ce législateur mérite d'être béni des enfants.

L'adolescent est protégé comme l'enfant, Il ne peut être employé dans l'industrie avant l'âge de douze ans (loi (lu 2 novembre 1892). II ne peut ni être forcé par '-on père un métier dangereux ou vil, ni être persécuté et exploité par son patron (loi du 7 décembre 187~).

Les ouvriers, depuis la loi du 21 mars 1884, peuvent se syndiquer et opposer la force de leur union a la puissance financière des patrons. Si patrons et ouvriers en arrivent à une rupture, si une grève éclate, la loi conciliatrice du 27 décembre 1892 intervient pour régler pacifiquement le dinerend par un arbitrage facultatif.

Les victimes d'accident < par le fait du travail y sont indemnisées (lois du !) avril 1898 et du 30 juin 1899).

Les pauvres reçoivent, en cas de maladie, l'assistance médicale gratuite (loi du 1S juillet 1893). Les sociétés de secours mutuels scolaires et autres qui concourent indirectement aux mêmes résultats sont subventionnées par l'Etat (loi du i~avrit 1898).

Ces lois, touten réagissanteontre les irrégularités du sort ou l'oppression sociale, dénotent chez nous une sympathie récite pour les malheureux ou une


louable prévoyance contre la misère. Elles sont une application directe des principes de solidaoité énoncés à l'article XXI de la Déclaration de 1793. L'article III de la Déclaration de ~89 et l'article IV de la Déclaration de i793 proclamant la ~oM!;<°~!?!c<e nationale, ont reçu leur application intégrate quand la République de 1848 a proclamé le suffrage universel.

Le suffrage universel entrainait avec lui la liberté de réunion, le droit d'affichage. Le législateur y a pourvu. Le Code pénal assure la liberté de l'électeur en sévissant contre tout acte de pression et de corruption (art. 109, HO).

Le suffrage universel ne peut subsister que dans un pays où l'instruction est répandue (voir le chapitre XXI). L'instruction obligatoire a donc été décrétée avec beaucoup de logique le 28 mars 1882. L'article XXII de la Déclaration de 1793 s'est du même coup trouvé réalisé.

La liberté de la jo'esse est encore un postulat pratique du suffrage universel. Elle a été établie tardivement, puisqu'elle ne date vraiment que de la loi du 29 juillet 1881. Jusque-ià, les articles XI de la Déclaration de 1789 et VII de la Déclaration de 1793 avaient toujours été violés, plus ou moins.

La //6e)'~ de /)e?<see dans le domaine religieux existe depuis plus longtemps. Ce principe, bien que timidement énoncé en 1789, a reçu sa pleine application dans le Code civil l'état civil a été laïcisé (loi du 20 septembre 1792). La laïcisation des cimetières a été plus longue à obtenir. C'est seulement depuis le 14 novembre 1881 qu'il n'y a plus, pour


chaque culte, dans le même cimetière, des parties réservées. En conséquence, la loi du o avril 188~ a enlevé la police des cimetières aux fabriques et l'a confiée aux maires. La loi du i5 novembre 1887 sur la liberté des funérailles a complété cet ensemble de lois sur le respect des croyances, en permettant à chacun de se faire enterrer ou incinérer, avec ou sans le concours de la religion.

La liberté du <?/, nettement posée par l'article XVII de la Déclaration de 17')~, est garantie par la loi depuis la Révolution. Chacun a désormais le droit de choisir sa profession et, de l'exercer comme il l'entend.

Les coalitions d ouvriers et les grèves, longtemps interdites, sont autorisées depuis t8(!4.

L'article VI de la Déclaration de 1789 et l'article V de la Déclaration de 1793 énoncent que les emplois publics doivent être réservés à ceux qui les méritent par leurs capacités et leurs vertus. Voilà pourquoi un grand nombre de fonctions ne sont accordées qu'après avoir été conquises dans un examen ou un concours.

Le service- militaire est devenu o~o~'<? pour tous. Institué pour l'avantage de tous, comme dit l'article XII de la Déclaration de i789, il était logique d'en assurer la permanence en faisant appel à tous. Aussi notre armée ne compte-l-elle plus de mercenaires~, ni de « remplaçants )) Depuis 1889, tous les citoyens sont soldats. lare ce n'est plus un métier, c'est contribuer a ta défense du pays. C'est accomplir un devoir civique qui honore, puisqu'il est une preuve de validité physique. L'armée n'est plus un ensemble de troupes recrutées, entretenues


par l'État, vivant d'une vie particulière. C'est la nation-armée elle-même.

Les articles XIII et XIV de la Déclaration de 1789 et l'article XX de la Déctaration de 1793 ont été respectés a la lettre et dans leur esprit depuis qu'ils ont été formulés. L'Administration financière de la France est une des premières du monde, grâce à sa clarté, a son honnêteté, et à la facilité qu'elle offre pour son contrôle.

11 suffit de relire l'article XVI de la Déclaration de 1789 et l'article XXVIII de la Déclaration de 1793 (.~e/~ar~~o~ des ~OM~o:'rs) pour se convaincre que tour application suppose la rédaction des Constitutions.

Tous les États européens et américains qui se sont émancipés a notre exemple ont des constitutions écrites. L'influence de nos idées a été universelle. Mieux encore que notre drapeau, elles ontfait le tour du monde. Elles en ont fait la conquête morale.

Nous avons vu que l'article XXVII de la Déclaration de 1793 invitaitle peuple à lyncher* les tyrans. Il a toujours inspiré une mesure plus sage. Par exemple, notre Constitution de 1875 a prévu l'établissement d'une Haute-Cour de Justice pour juger les crimes commis contre la sûreté de t't~tat. La République de 1848 a aboli la peine de mort en matière politique.

Le droit f/e/)7'o/~e/e !M<<c//<?, posé par l'article XVII de la Déclaration de 1789 et par l'article XVI de la Déclaration de i793, a été respecté étroitement par le législateur. Il a été soigneusement défini par le Code. Toute espèce d'usurpation ou de violation


a été prévue et rendue impossible. Des chapitres entiers du Code sont exclusivement consacrés à sa défense.

Les principes de S!) et de !)3 ont encore été sanctionnés par les adoucissements qui ont été apportés aux pénalités. Signalons les principaux. La loi du 28 avri! 1832 a supprimé plusieurs peines afftictivcs comme la marque, le carcan, la mutilation du poing des parricides. Depuis 1848, il n'y a plus d'exposition publique. En 18S4, les bagnes furent remplacés par la transportation des condamnés aux colonies. Dans la répression des délits et des crimes on admet les circonstances atténuantes, ce qui permet d'abaisser la condamnation. La loi récente du sursis (loi Béranger) permet aux juges de suspendre l'effet d'une peine si le coupable parait digne de cette clémence.

Ces réformes, dont l'intention a été de supprimer les peines qui n'étaient ni « strictement », ni « évidemment nécessaires )~, ni « utiles à la société », ni i « proportionnées aux délits », ont été, entre mille autres, une application directe des deux Déclarations (art. VIII de la Déclaration de 1789, art. XV de celle de 1793).

Est-ce à dire cependant que notre !égis!ationest à l'heure présente en parfaite harmonie avec les Déclarations des Droits de l'homme? Hétas non Quelques exemples le prouveront.

La ~y'c~e, la liberté !<e/~<' n'est pas, en théorie, suffisamment défendue contre le pouvoir exorbitant du juge d'instruction qui peut faire arrêter les gens sur de simples présomptions. « En 1893, sur 13,006 personnes ayant bénéficié


de non-lieu, 3,896 avaient été arrêtées (I) autant dire déshonorées aux yeux de leurs voisins. On relàche sans doute le prévenu aussitôt que son innocence est reconnue, mais il n'a droit à aucune réparation publique, à aucun dédommagement, a aucune excuse. Il faut qu'il s'estime heureux de s'en tirer à si bon compte

part, l'agent public, dans l'exercice de ses fonctions, peut, tout en respectant les formes légales, commettre impunément les plus graves préjudices à la réputation et aux biens de ses concitoyens. Il n'a à redouter que les peines disciplinaires dont la révocation est la plus dure. La responsabilité des fonctionnaires n'est pas aussi nettement établie que le souhaite l'article XXIV de la Déclaration de 1793.

Enfin beaucoup d'emplois publics, loin d'être accordés au mérite, après un examen, le sont à la faveur.

Il y aurait bien des choses à dire sur la violation des principes. Mais le grand point est de se rappeler que notre législation n'est pas toujours d'accord avec eux.

Pourquoi? Parce que les mœurs font les lois. Or M(M M!Û?M~ ~O/Y/C?~ .yW ~0~ idées el nos S<~t~M:P~. Les préjugés ont une telle force, qu'ils nous contraignent souvent de faire ou de dire ce que nous trouvons inutile, ridicule, voire odieux. Nous n'avons pas le courage de nos états d'esprit. Nous manquons de sincérité, et l'hypocrisie mondaine subsiste. Ou bien encore, nous nous laissons vivre (1) Circutaire du Garde.des Sceaux, 1901.


en évitant de raisonner nos actes et en nous conformant à de mauvaises traditions. L'habitude a pris sur nous un empire absolu et nous fait chérir des coutumes qui choquent la justice.

On voit des parents qui s'obstinent encore à « avantager l'aine de leurs enfants autant que la loi le permet. On voit des gens qui ont sans cesse à la bouche les mots d'égalité et qui ne veulent frayer qu'avec les personnes de leur condition, qui se croient souillés par le contact des humbles. H y en a même qui traitent leurs domestiques comme autrefois étaient traites les vilains et les serfs. On voit des ouvriers car le mal sévit dans tous les rangs de la société se griser aux mots de liberté et de fraternité, et frapper leurs camarades qui ne pensent pas comme eux sur les moyens a employer pour la revendication de leurs droits. On voit des citoyens, justement jaloux de tour titre d'électeurs, s'abstenir aux élections ou se laisser acheter leurs votes.

On voit des partisans de la liberté absolue de penser qui ne peuvent endurer la controverse. On rencontre des gens qui prêchent la tolérance et qui voudraient supprimer tous les temples ou interdire tous les cultes.

Quelles contradictions ne voit-on pas entre les idées et les actions des hommes

Nous en trouverions tous en nous-mêmes si nous faisions sincèrement notre examen de conscience. Notre devoir est de les rechercher. Descendons en nous-mêmes. Dès que nous les aurons aperçues, chassons-les par un effort persévérant de notre volonté soutenue par la raison.


Nous deviendrons meilleurs parce que nous deviendrons plus logiques. Nos mœurs seront conformes à nos principes. Le législateur sera obligé de remanier les codes parce que les lois ont besoin de répondre aux moeurs.

Alors nous aurons atteint le bel idéal entrevu par nos pères. Ce sera, autant qu'il est permis de l'espérer ici-bas, le règne de la Justice, le régime vrai de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. Ce sera l'âge d'or qui est bien, suivant la remarque d'un philosophe, non derrière nous, mais devant nous. QUESTIONNAIRE

<" Les principes des Déclarations des Droits ont-ils exerce une profonde influence sur les moeurs et les loi-* 2" Citez des lois inspirées par ces principes. 3° Citez des adoucissements apportés dans l'application des peines innigées aux criminels. t* Nos mœurs sont-elles en parfait accord avec les principes de t789 et de 1793 ? 5" Prouvez que non par des exemples. G° Que faut-il faire pour mettre en harmonie notre conduite et nos principes r'aut-it avoir confiance en l'avenir t


LEXIQUE

A

Alembert (d') (tTÏ7-t78~). Savant et Httérateur français, né à Paris.

aliénable, adj. Qui peut être vendu ce dont on peut se séparer.

amender, va. Rendre meilleur.

Anarchie, s/Absence de gouvernement par suite, désordre et confusion.

Antiquité, < Époque historique qui a précédé le Moyen Age, c'est-à-dire les Invasions et le triomphe du Christianisme. C'est t'époque où ont britté les civilisations égyptienne, grecque et romaine.

Arbitraire, adj. et M). Qui est le produit de la seule volonté du souverain. Despotique.

Aristote. Philosophe grec, né à Stagyre, en Maccdoine (38{-3M av. J.-C.). Discipte, puis contradicteur de Plalon. Art pur. La théorie de l'art pur consiste à negHger le fond pour ne se préoccuper que de la forme.

Athènes.–YiHe illustre de l'ancienne Grèce. Elle constituait alors une puissante république. L'éloquence et tous les beauxarts y Horissaient. Aujourd'hui capitale du royaume de Grèce. 45.000 habitants.

Auspice, sm. Divination de l'avenir, surtout d'après le vol des oiseaux. Sous les auspices de quelqu'un, sous l'influence de quelqu'un.

Axiome, sm. Vérité évidente, qui n'a pas besoin d'être démontrée.

B

bénévole, adj. Animé de dispositions favorables. Bossuet. Né en IG27 a Dijon, mort en 170t, évoque de Condom, puis de Meaux. Prédicateur, historien, theofogien, <; le dernier père de l'Église Un des plus grands écrivains français.


c

Cabinet noir. Exprcs-ion par laquelle on désigne le lieu où l'on ouvre les correspondances, pour en surprendre iessecrets.

Calas. Négociant de Toulouse, faussement accusé d'avoir étrangle son fils (lui voulait abjurer le protestantisme, fut condamné au suppHce (le la roue en t7C2. Vottaire poursuivit et obtint la réhabilitation de sa mémoire.

caractérisé, y~p. État de ce qui a )c caractère, la quatité propf'f.

catégorique, adj. Clair et précis.

classique, «<7/. Qui est a L'usage des classes. Tout auteur, tout ouvrage (lui fait autorité.

Collectivité, sf. Un ensembie de personnes ou de choses.

Complexion, sf. En médecine, ensemble des caractères physiques que présente une personne considérée au point de vue de la santé.

Comte (Auguste). Célèbre pbitospphe fraucau (1798<857). Fondateur de la doctrine positiviste.

Conciliation, sf. Rapprocttement, entente dans laquelle on fait disparaitre les causes des différends.

Constitution, État générât de l'organisition physique chez un homme. Loi fondamentale d'un État.

Construction vicieuse. Mauvais arrangement des mots dans une phrase.

Corollaire, sm. En mathématiques, conséquence découlant d'un théorème.

Corporation, sf. Association dont les membres sont unis et liés par des règlements.

cosmopolite, adj. Universel par~opposition à national. Couvre-feu, sm. Autrefois coup de cloche qui marquait l'heure de se retirer chez soi et d'éteindre feu et lumière. Crise économique. Période pendant laquelle les affaires vont mal.

D

Déduction, s/\ Conséquence tirée d'un raisonnement. Déesse Raison. –.Divinité du euhe imaginé par Hébert et quelques autres Conventionnels.

déférer, va. Traduire devant un tribunal.


Délit (flagrant). Délit aperçu au moment où il se commet.

Desmeunier. Membre de l'Assemblée nationale constituante.

Despotisme, sm. Pouvoir absolu, arbitraire, oppressif. Diderot. Littérateur, philosophe français (1733-84), fondateur de l'jEnc</c!opc<<t?.

Dogme, sm. Point de doctrine établi comme fondamental et incontcs'.abie dans une religion.

E

Écriture Sainte. L'Ancien et le Nouveau Testament. Edifiant, ppr. Du verbe édiCer, construire.

Élaboration, s/ Travail qui aboutit à une création ou à un arrangement.

Eloquence, sf. L'art de bien dire, de convaincre et de persuader.

Émanciper, va. Affranchir.

Encyclopédie. Vaste dictionnaire détaillé de toutes les connaissances, conçu par Diderot, et exécute grâce lui. Encyclopédistes. Les auteurs de l'Encyclopédie. Enregistrement (Bureau de 1'). Bureau on l'on enregistre moyennant un droit tous les actes qui ont besoin d'authenticité.

Épique (poésie). Poésie où le poète conte des faits extraordinaires et merveilleux.

Ésope. Fabuliste grec mort vers l'an 700 avant J.-C. Esprit (de la loi). L'intention d'une loi.

Esprit des Lois (L'). Titre du grand ouvrage de Montesquieu.

Exécutrice testamentaire. Personne chargée d'assurer l'exécution d'un testament.

G

Gestion, Action, manière d'administrer; résultat d'unc administration.

H

Hébert (1755-94). Conventionnel, auteur du journal Le Père DMcA~e.


Henriade. Poème épique de Voltaire, dont le héros est Henri IV.

Hérétique, sm. Nom donné aux chrétiens qui ne sont pas catholiques.

hiérarchique, a~. Qui appartient aux ordres et subordinations de la hiérarchie.

Hypothèque, s f. Dette qui grève un immeuble et le suit en quelque main qu'il passe.

1

Idéal, sm. Rêve de l'esprit; conception d'un état parfait. immuable, a< Qui ne peut être changé.

impérieuse, a<fj. Qui commande sans réplique. implicitement, adu. D'une manière qui résulte naturellement d'un sous-entendu.

impliquer, va. Envelopper, engager. Il se dit de choses qui en font supposer d'autres.

Impropriété, sf. En grammaire, mot employé mal à propos.

Instigation, s~. Excitation provoquée par quelqu'un. insurgé, pp. Qui se soulève contre le gouvernement. Insurrection, $/ Soulèvement armé contre l'Etat. Interprète, sm. Celui qui éclaircit, explique le sens d'un livre, d'une chose; qui parle au nom d'un autre.

J

Janséniste, ~m. Partisan de la doctrine de l'évoque Jansénius. Doctrine austère, voisine du protestantisme- Jurandes, sf. –Le corps des jurés dans les corporatMns ouvrières d'autrefois.

L

La Bruyère (1645-1696). Célèbre moraliste français, auteur des C<'rac<érM.

Légère (poésie). Qui a le caractère de facilité et d'agrément.

légiférer, vn. Faire des lois.

lésé, pp. de léser. Faire tort, infliger un dommage. Lettre (de cachet). Sous l'Ancien Régime, lettre scellée renfermant un ordre d'arrestation.. Libre-échangiste, sm. Partisan de la théorie qui sou-


tient que les communications commerciales entre les peuples doivent être affranchies des prohibitions et des impôts. Livre, sf. -Ancienne monnaie; se dit aujourd'hui pour franc qui en représente à peu près la valeur.

lyncher, va. Néologisme qui désigne l'exécution sommaire des criminels par le peuple avant tout jugement.

M

Maistre (Joseph de) (i75{-i82i). Publiciste, né a Chambéry, auteur du Pape et des Sotr~M de Sa:)!t-P~eM&our~. Maîtrise, sf. Qualité de mailre dans les anciennes corporations de métiers.

Manifeste, sm. Ecrit, publication qu'un homme ou un parti adresse au pubtic pour t'informer de sa manière de voir.. Matérialisme, xm. Système de philosophie d'après lequel tout est matière et vient de la matifrc.

Mémoires été Louis XIV. Recueil des pensées de Louis X!Y.

Mercenaire, sm. Tout homme qui travaille pour de l'argent. Etranger qui sert dans t'armée pour de l'argent. Métropole, sf. Etat considéré par rapport aux colonies qu'il a fondées et qu'il possède.

Montesquieu (1689-175!)). Célèbre publiciste français, auteur de l'Esprit des Lois.

Motion, sf. Proposition faite dans une assemblée délibérante par un de ses membres.

0

obstruer, M. Boucher par quelque obstacle interposé. Ordonnance, sf. Sous l'Ancien Régime, ce mot désignait les ordres, lès lois du roi.

P

Palladium, ~m. Garantie, sauvegarde. Do Pallas, statue de la déesse qui passait pour le gage de la conservation de Troie.

Perception, sf. Action dé recueillir les impôts. périmé, pp. de périmer. Qui a perdu sa valeur légale.


Philosophe, sm. Penseur, écrivain qui s'applique à rechercher les causes et les principes.

pie, <!t< Pieux. OEuvre pie, œuvre pieuse.

Pilori, sm. Poteau où l'on exposait autrefois certains condamnés.

Platon (-~39-347 av. J.-C.). Célèbre philosophe grec, né à Athènes. Disciple de Socrate.

Postulat, sm. Ce ~ue l'on admet comme vrai sans le démontrer.

Précurseur, sm. Celui qui annonce quelqu'un ou quelque chose.

Presse, sf. -L'imprimerie en général. Le journalisme en particulier.

primer, fn. Avoir le premier rang. Avoir l'avantage sur les autres.

prohiber, va. Défendre, interdire.

Prohibitionniste, <m. Partisan de la prohibition des produits étrangers.

promulguer, va. Publier une loi suivant les formes voulues.

Pronunciamiento, néologisme. Coup d'état militaire. Propagande, ~y. Action de répandre une doctrine, des idées.

Proscription, s~. Condamnation à l'exil. Abolition, destruction.

Prosélyte, sm. Nouveau converti ardent à prêcher ses nouvelles croyances.

Protectionniste, sm. Partisan de la protection des produits nationaux par des tarifs douaniers.

R

Rapine, s/. Ce qui est ravi par violence. Volerie, concussion.

Rébellion, s/ Action coupable de se révolter contre une autorité légitime.

Remplaçant, sm. Qui remplace quelqu'un. Celui qui autrefois remplaçait un jeune homme dans )e service militaire. Restreint. (V. Suffrage.)

rétroactif, adj. Qui agit sur le passé.

revendiquer, va. Réclamer une chose qui nous appartient.

Robespierre (1789-9~). Célèbre par le rote qu'il joua à la Convention.


Rome. Capitale de l'Empire romain dans l'antiquité. Aujourd'hui capitale de l'Italie (2M.OOO h.).

Rousseau (J.-J.). –Né à Genève (1712-1778). Célèbre philosophe, auteur du Contrat social.

S

sauvegarder, va. Défendre, protéger.

Siéyèa (L'abbé). Célèbre homme politique (1748-1836), joua un grand rote sous la Révolution.

Sirven. Victime de la persécution religieuse, défendu par Voltaire.

Socrate (469-400 av. J.-C.). Le plus fameux philosophe de l'antiquité. Né à Athènes.

Solidarité, Lien d'union morale ou matérielle, volontaire ou non, qui existe ou devrait exister entre tes hommes. souveraine, adj. Toute-puissante.

Spiritualisme, sm. Doctrine qui reconnait l'existence de Dieu et de l'Ame.

spolier, va. Dépouiller par fraude ou par violence. Stabilité politique. Caractère d'un État qui dure. Statistique, sf. Science des dénombrements précis. Sujétion, sr. Domination, servitude.

Suffrage, sm. Suffrage restreint, celui auquel tous les citoyens ne sont pas appelés.

Sybel (de). Historien allemand contemporain. Syndicat, sm. Réunion de personnes associées en vue de soutenir leurs intérêts.

T

temporiser, vn. Différer, attendre un temps plus favorable.

Théophilanthropie, sf. Doctrine philosophique associant dans un même culte Dieu et ['Humanité.

Tiers État. Le troisième état de la nation avant 1789. H comprenait le peuple et la bourgeoisie.

Tradition, s~. Chose, habitude transmise de génération en génération.

Trésoriers généraux. Personnages chargés de la perception des impots sous l'Ancien Régime.

tricolore, adj. Qui a trois couleurs.


v

vénal, ad/Qui se vend.

Verdict, sm. Résultat de la délibération du jury. Le jugement lui-même qui en est la conséquence.

Virginie. Un des treize États américains qui s'affranchirent de la domination anglaise au xvmc siècle. Cnp. Richmond.

Voltaire (1694-1778). Chef du parti des philosophes au xyur* siècle. I[ exerça sur les esprits une inHuence profonde. Ce fut « le roi Voltaire ».

W

'Washington,(1732-1799).–Homme. d'Ëtat.et gênera! américain. Ce fut le héros de la guerre de. l'Indépendance américaine. Après l'émancipation des.Ëtats-Unis, il fut élu successivement deux fois président dé la RpptM~[Qe><.


TABLE DES MATIERES

Pages.

LETTM-PttÉFACE (le M. BuiSSOn 5 AVAXT-PROPOS. 9 Te.E<ede~aDec~)-<M?:~i7S9. 15 CftAp. L–&~hDcdM~~n. 19 II.–DatedeIaDMcIaration. 22 Ifl.–PruambuIe do la Déclaration. 25 IV. L'état d'esprit des Constituants. 30 V.–Commentaire do rartictci' :<6 Vf.–Commentairedei'artic)ë 2. 39 VII. Commentaire de l'article 3. 42 VIII. Commentaire de l'article 4. 45 IX. Commentaire do l'article S. 49 X. Commentaire de l'article G. 53 XI. Commentaire de l'article 1. XII. Commentaire de l'article 8. 62 XIII. Commentaire de l'article 9. 66 XIV. Commentaire de l'article 10. 69 XV. Commentaire de l'article M. 73 XVI. Commentaire de l'article 12. 7G XVII. Commentaire de l'article 13. 79 XVIII. Commentaire de l'article 14. 82 XIX. Commentaire de )'artic!elS. 87 XX. Commentaire de l'article 16. 90 XXI. Commentaire de l'article 17. 93 XXII. Causes qui ont provoqué la Déclaration des droits de l'homme. I. Comment

ces droits, longtemps ignorés, ont été

formulés. 97


Pages.

CHAp. XXIII. Causes qui ont provoqué la Déclaration des droits de l'homme. Il. Le voeu

de la France et les besoins de notre

nature. Ml

XXIV. Causes qui ont provoqué la Déclaration des droits de l'homme. III. Les Décla-

rations américaines. 104

XXV. Caractères de notre Déclaration des droits de l'homme. 108

XXVI. Les sources de la Déclaration des droits de l'homme. 111 1

XXVII. Les imperfections de la Déclaration de 1789. il8

XXVHI. Les beautés littéraires delà Déclaration.. )23 XXIX. Les principaux auteurs de la Déclaration des droits de l'homme de 1789. 127

XXX. L'importance de la Déclaration des droits de l'homme de 1789. 132

Texte de la Déclaration des droits de ~'AoniMe et du citoyen, adoptée par la Convention nationale, le 23 juin H93. 135 CttAr. XXXI. La Déclaration de n93. 14i CoxcLusiox. Les Déclarations de 1789 et de 1793. Kos codes et nos mœurs. 149 LEXtQUE ~7?~ 159

PAXtt. tMP. P. MOCU.I.OT, ]3, QUAI VOLTAIRE.