7 et 8 mai 1945, deux dates pour une même Victoire !

Les 7 et 8 mai 1945 marquent la capitulation sans condition de l’Allemagne nazie et, avec elle, la fin des hostilités de la Seconde Guerre mondiale en Europe. Cette reddition, officialisée en deux actes signés à Reims puis à Berlin, sonne à travers tout le continent la Victoire des Alliés sur l’oppression et l’obscurantisme imposés par le Troisième Reich durant cinq longues années. Jours de triomphe et de libération, ces dates sont célébrées en Une par tous les journaux de la Libération.

Entre reddition et capitulation : les 7 et 8 mai 1945, de Reims à Berlin, une double signature pour une même victoire

Le 7 mai 1945, à 2h41 du matin, dans le Collègue moderne et technique de Reims (Marne) où est installé le quartier général (Q.G.) des forces alliées du général Eisenhower, est signé l’acte de reddition de l’Armée Allemande. Ce document militaire officialise la capitulation sans condition de l’Allemagne nazie et ordonne l’arrêt immédiat de toutes les opérations militaires terrestres, navales et aériennes. Toutefois, à la demande de l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) et de son dirigeant, Joseph Staline, une nouvelle signature aura lieu le lendemain à Berlin, afin de satisfaire l’exigence soviétique d’une reddition sur le front de l’Est. Ce jour « V », jour de la Victoire des Alliés, célébré en Une de la presse française, le 8 mai 1945 marque la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe. Les soviétiques retiendront la date du 9 mai. 

Salle où fut signée la capitulation allemande le 7 mai 1945 / ville de Reims, Collège moderne et technique.

Le 8 mai 1945, à 22h43, un second acte de reddition est signé à Berlin, capitale du Troisième Reich, marquant officiellement la fin des hostilités en Europe. Cette reddition sera relayée dans la presse française de la Libération dès le jeudi 10 mai pour les mieux informés et plus largement le vendredi 11 mai 1945, jour de la libération du territoire de la « Poche de Saint-Nazaire ».

Regards, La Reddition définitive est signée à Berlin, 15 mai 1945.

  

Quels médias français ont rapporté la victoire des Alliés et l’élan de joie qu’elle a suscité en France et en Europe ?

Juin 1940 : du refus de la défaite naît une presse de combat, clandestine et résistante. Paraissant au mieux et le plus souvent possible, dans une France occupée par les belligérants du Troisième Reich, la presse clandestine de la Résistance paraît dans l’ombre. À la Libération, elle sort de la clandestinité et devient, grâce aux ordonnances de 1944, l’expression de la France Libre et de l’esprit français retrouvé. Les organes de presse de la Libération deviennent les porte-voix d’une nouvelle presse, née de la volonté du jeune gouvernement provisoire présidé par le général de Gaulle et du soulèvement d’un peuple meurtri après cinq années d’occupation allemande.  

Aux côtés des titres issus de la Résistance, reparaissent en 1944 des journaux nationaux et régionaux qui, par lucidité et par courage, avaient choisi de se saborder, plutôt que de se compromettre. Contrairement à la presse dite « autorisée », inféodée au régime de Vichy et relayant la propagande de la Wehrmacht, ces journaux ont refusé toute compromissions avec l’occupant.

L’année 1944 marque aussi la naissance de deux grands quotidiens : Le Monde, paru à Paris le lundi 18 décembre 1944, quatre mois après la libération de capitale, et Ouest-France, dont le premier numéro est publié à Brest le lundi 7 Août 1944.

Qu’ils soient nés à la Libération ou relancés après des années de silence, ces nouveaux titres de presse couvrent les événements décisifs des 7 mai 1945 à Reims et du 8 mai 1945 à Berlin, marquant la capitulation de l’Allemagne nazie. Cette presse émergente incarne à la fois le retour à la démocratie et le renouveau du pluralisme politique en France.

 

Les 7 et 8 mai 1945 dans la presse française : récit de deux jours de Victoire !

Qu’elle soit ancrée à gauche ou à la droite chrétienne, toute la presse de la Libération consacre plusieurs jours à la couverture de cet événement historique. Du 8 mai au 11 mai 1945, les journaux célèbrent la fin d’un cauchemar, relayant avec force et émotion la reddition sans condition de l’Allemagne nazie.  

Pourtant, l’annonce ne parvient pas immédiatement aux Françaises et aux Français. En raison du décalage horaire avec les agences de presse américaines (Associated Press et United Press), les rédactions françaises diffusent la nouvelle de la capitulation des forces armées allemandes avec un jour de retard. L’information, recueillie directement auprès des forces Alliées, bouleverse une nation toute entière. 

Le 8 mai 1945, les Unes des journaux claquent comme un coup de tonnerre : « L’Allemagne a capitulé sans condition ! » L’acte de reddition, signé à 2h41 à Reims le 7 mai 1945, est enfin officialisé. La revue de presse de ce jour historique est saisissante, vibrante d’émotion et empreinte d’un profond soulagement.  

Unes du 8 mai 1945, presse quotidienne parisienne, politique et d'information générale, née de la Résistance : Combat, France-Soir, Franc-Tireur, Libération, L'Humanité
Unes du 8 mai 1945, presse quotidienne parisienne, politique et d'information générale, renaissante à la Libération : Le Populaire, La Croix, Le Figaro, Ce soir 8 mai 1945, Ce soir 9 mai 1945
Unes du 8 mai 1945, presse quotidienne à Alger, siège du gouvernement provisoire : L'Echo d'Alger, La Dépêche Algérienne, Dépêche de Constantine
Unes du 8 mai 1945, presse quotidienne régionale, politique et d'information générale, née ou renaissante à la Libération : Le Berry républicain, Le Provençal, Le Bien Public, La République du Sud-Ouest, Les Dernières Nouvelles d'Alsaces

Quand sonna l’heure de la Victoire !

Le Mardi 8 mai 1945, à 15h, heure française, l’annonce de la capitulation allemande signée à Reims résonne sur les ondes. Le Général de Gaulle en fait la proclamation solennelle à la radio, tandis que la nouvelle s’affiche à la une de tous les journaux. Les plus talentueux éditorialistes de l’époque célèbrent, sous leur plume ce « jour V » – jour de la Victoire des Alliés– et, avec lui, la clameur des peuples européens libérés, hurlant la même joie dans toutes les capitales d’Europe et du monde. « Cette immense joie pleine de larmes, ce délire qui emplissait Paris ». 

« Mais ce qu’ensemble ils célébraient, c’est la force que donnent aux hommes libres la conscience de leurs droits et leur amour forcené de l’indépendance. […] Si hier était le jour de tous, c’est qu’il était justement le jour de la liberté et que la liberté est à tous les hommes ou à personne. »

Extrait de l’éditorial publié dans Combat du 9 mai 1945. Texte reprenant le ton des éditoriaux de la Libération, rédigés dans Combat par Albert Camus.

« […] Trésaillez de joie parce que l’Europe avait été mise en esclavage par des tortionnaires et par des assassins et qu’elle est redevenue la patrie des hommes libres, et qu’elle n’a pas abandonnée, et que nos yeux ont vu la manifestation de la justice. » 

Extrait de l’éditorial « 8 mai 1945 » de François Mauriac publié dans Le Figaro, 8 mai 1945.  

Robert Capa, Place de l'Opéra. Capitulation de l’Allemagne et fin du conflit en Europe, Paris, 8 mai 1945

« Peut-être, dans le recul du souvenir, sera-t-il possible de choisir, plus tard, au milieu des canons, des sirènes et des cloches, parmi les chants, les drapeaux, les appels et les rires, l’image privilégiée qui ne trahira rien de cet instant »

Extrait de l’éditorial publié dans Combat du 9 mai 1945. Texte reprenant le ton des éditoriaux de la Libération, rédigés dans Combat par Albert Camus 

 

Le Jour « V » et les hebdomadaires : maîtres du photoreportage

À l’heure de la Victoire, les hebdomadaires d’actualité spécialisés dans le photoreportage prennent toute la mesure de l’Histoire en marche. Regards, Point de Vue, Images du Monde ou encore Le Globe consacrent chacun un numéro spécial aux journées marquant la capitulation de l’Allemagne nazie et la fin du Troisième Reich.  

Leurs pages, abondamment illustrées, restituent avec force les scènes de liesse populaire qui embrasent les rues, du cœur de Paris aux places de province. Grâce à l’objectif de leurs photojournalistes — parmi lesquels le légendaire Robert Capa — les lecteurs sont projetés au plus près des événements, comme s’ils y étaient. Chaque cliché devient une empreinte de mémoire, saisissant l’émotion brute de l’instant.

Les rédactions, elles aussi, se mettent au diapason de l’Histoire. Dans Point de Vue, Raymond Aron signe un éditorial, sobrement intitulé « En quête d’espérance ». Entre lucidité et foi en l’avenir, il dessine les contours d’un monde à reconstruire, et d’un espoir à réinventer.  

« La victoire est donc, en un sens, totale. Non seulement la menace hideuse de l’asservissement du monde par la bande hitlérienne a été écartée mais l’Allemagne, couverte de ruines, s’effondre dans une catastrophe apocalyptique. »

Unes de la presse hebdomadaire illustrée en Mai 1945 : Regards, Point de Vue, Images du Monde, Globe

Les 7 et 8 mai 1945, immortalisés par la presse de l’époque, demeurent dans notre mémoire collective comme le symbole de la victoire de la dignité humaine et de la justice sur la barbarie et l’obscurantisme. Ces journées historiques ont marqué un tournant décisif, posant les fondements d’une paix solide et durable en Europe, portées par l’espoir de préserver les générations futures du retour des heures sombres du passé et de l’insidieuse banalisation du mal.

Pour aller plus loin :

• KASPI André, La libération de la France : juin 1944 - janvier 1946, édition Perrin, coll. « Tempus », 2004, 563 p.
• VAÏSSE Maurice, (Directeur de publication). 8 mai 1945. La victoire en Europe, éditions Complexe, 2005, 228 p.
• CAMUS Albert, À Combat. Editoriaux et articles 1944-1947, édition Jacqueline Lévi-Valensi, Gallimard, coll. « Folio », 2013, 144 p.
• Service de l’Information après la Libération, dossiers des autorisations de paraître (1940 -1962), cotes F/41/1706 à F/41/1762 aux Archives nationales (Pierrefitte)
• La renaissance de la presse à la Libération. Dossier. Crise et renouveau de la presse depuis 1945 ; BnF/ Les Essentiels.