Le salon des globes

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Chargé d’une ambassade extraordinaire à la cour de Rome en 1679, le cardinal d’Estrées (1628-1714), neveu de la "belle Gabrielle", la maîtresse d’Henri IV, fut séduit par des globes de 1,75 m de diamètre que le duc de Parme, Ranuccio Farnèse, montrait à ses visiteurs. Il décida d’en offrir de beaucoup plus grands au roi Louis XIV, alors au sommet de sa gloire ; il espérait, disait-on, devenir chef du Conseil de conscience.
César d’Estrées commanda le travail à l’artisan des globes de Ranuccio, un franciscain né à Venise en 1650 qui avait appris et pratiquait la gravure et l’astronomie en même temps que la théologie. Vincenzo Coronelli avait déjà publié plusieurs petits almanachs gravés, mais c’est à cette commande extraordinaire qu’il dut la poursuite de sa brillante carrière de géographe et de fabricant de globes, et une rapide ascension dans la hiérarchie des frères mendiants.

Conservés dans leurs caisses à l’hôtel de Lionne à Paris jusqu’en 1703, les Globes sont ensuite transférés à Marly. Ils seront exposés dans deux pavillons du château jusqu’en 1715, puis seront entreposés au Louvre jusqu’en 1722, date à laquelle ils arrivent à la Bibliothèque royale – actuel site Richelieu de la BnF.
Débute alors la construction d’un Salon des Globes, conçu comme un lieu d’exposition permanent, par l’architecte Robert de Cotte.

Achevé en 1731, le Salon des Globes n’est rendu accessible au public qu'en 1782. On a même envisagé, pendant cette période, de mécaniser les sphères pour les faire tourner. Une fois installés dans leur salon, les Globes resteront visibles pendant plus d’un siècle. Le succès est immense au départ : un témoignage spectaculaire de la grandeur du règne de Louis XIV surgissait en effet au grand jour. Les Globes connaissent quelques décennies de tranquillité, mais le 11 mars 1850, Le Moniteur annonce qu'ils seraient coupés en deux moitiés à l'équateur et transférés à Versailles « pour laisser plus de place aux employés du bureau du Catalogue ».
Le Magasin pittoresque publie une contre-attaque pour alerter l'opinion. En 1875, le projet réapparaît et il est cette fois combattu par la revue La Nature.
Comme dans toutes les bibliothèques, les besoins d’espace pour accueillir les lecteurs, mais aussi pour abriter des collections en expansion permanente deviennent prégnants : ils finissent par avoir raison des Globes.
En 1900, la décision est prise de détruire le Salon des Globes pour réaliser la grande salle des périodiques, dite Salle Ovale. Les Globes sont relégués, en 1915, à l’Orangerie de Versailles.