Eugène Sue a vécu une existence paradoxale. Ce fut un grand bourgeois qui découvrit la misère et s’engagea contre elle, après avoir été la coqueluche des milieux conservateurs grâce à ses romans d’aventures et mondains. Ce fut un écrivain qui créa (avec d’autres) un nouveau style, le roman feuilleton, faisant de lui un paria méprisé par beaucoup d’autres écrivains. Ce fut un dandy coureur et sceptique qui devint concerné et socialiste. Ce fut un auteur qui connut un succès incommensurable, porté aux nues par tout un peuple, tant en France qu’à l’étranger, mais qui après sa mort fut totalement ignoré par l’université et l’histoire littéraire. Il mourut pauvre, en exil, ayant sacrifié à ses convictions sa tranquillité et sa fortune. Mais il reste un raconteur d’histoires hors pair. Le Juif errant et Les Mystères de Paris demeurent des monuments de la littérature populaire, ayant influencé des générations d’écrivains et de lecteurs.