À propos de l’auteurPascale Hellégouarc’h

Manuscrit autographe

S’il demeure avant tout l’auteur du roman épistolaire Les Liaisons dangereuses, Choderlos de Laclos amorce en premier lieu une carrière militaire dans l’artillerie, et ses moments de répit le conduisent à l’écriture. Ses premières pièces sont en vers, puis il s’essaie à l’opéra comique : Ernestine sera représenté en 1777 devant la reine Marie-Antoinette pour une unique représentation. Parallèlement à ses affectations militaires qui le font voyager à travers la France – Strasbourg, Grenoble, Besançon, Paris –, il commence en 1778 la rédaction des Liaisons dangereuses, qui restera son œuvre majeure.
 
Choderlos de Laclos naît à Amiens le 18 octobre 1741 dans une famille nouvellement anoblie en 1701 par l’achat d’une charge de secrétaire des Finances de Monsieur, frère de Louis XIV. Ces quartiers de noblesse ne suffisent pas pour devenir officier sauf dans l’artillerie : Laclos intègre donc l’école d’artillerie de La Fère (future école Polytechnique) et devient sous-officier en 1761, c’est le début de sa carrière militaire. Il est d’abord affecté à la Brigade des colonies en garnison à La Rochelle, puis il part à Toul en 1763 où il devient franc-maçon dans la loge L’Union, c’est ensuite Strasbourg (1763-1769), Grenoble (1769-1775), Besançon (1775-1776).  
Sa vie de garnison le fait beaucoup voyager et lui permet de trouver çà et là l’inspiration de ses créations futures. Cette vie est cependant bien loin de ses rêves de conquête et de gloire, Laclos commence à écrire pour tromper l’ennui. Ses premières pièces, en vers, sont publiées dans l’Almanach des Muses, il écrit ensuite un opéra-comique, Ernestine, qui ne rencontrera pas un grand succès : il sera représenté une seule fois, le 19 juillet 1777, devant la reine Marie-Antoinette. Il continue à écrire, très influencé par les idées de Jean-Jacques Rousseau dont il admire par dessus tout La Nouvelle Héloïse – « le plus beaux des ouvrages produits sous le titre de roman ».
En 1779, il est sous les ordres du marquis de Montalembert et il participe à l’édification des fortifications de l’île d’Aix. C’est là qu’il commence la rédaction des Liaisons dangereuses, roman épistolaire qui propose une critique fine de la société du siècle des Lumières sous un raffinement formel très abouti. En 1782, Laclos signe un contrat de publication pour 2000 exemplaires, sous ses seules initiales « Ch. De L. », une nouvelle édition suivra très vite. Le succès est immédiat, le scandale aussi : le roman fascine et dérange par la parfaite maîtrise de l’art épistolaire, la polyphonie machiavélique qui s’y déploie et le piège magistralement orchestré mis en scène sans l’aide du moindre narrateur. Il y est question de naïveté, de trahison, de jeux de séduction qui tournent mal, de manipulation. Au-delà, et plus largement, c’est le pouvoir, la relation entre la raison et les sentiments qui, inscrits dans le contexte intellectuel et social des Lumières, provoquent des réactions contrastées chez les lecteurs, entre effroi et fascination. La conquête du savoir est au cœur des interrogations des Liaisons dangereuses, comme la question de la morale, la place des femmes et le rôle de leur éducation – Cécile Volanges est une proie facile car le couvent ne lui a pas donné les armes pour se défendre, la Marquise de Merteuil à l’inverse s’est forgée par ses lectures et son envie d’apprendre. Cette réflexion sur la place des femmes apparaît comme un écho à l’admiration de Laclos pour Rousseau, ces questions sont essentielles à la fin d’un XVIIIe siècle où la société va connaître des changements majeurs.
Laclos, lors de la Révolution, est favorable à une monarchie éclairée qui reconnaît la nécessité des réformes et il se range du côté du Duc d’Orléans. En 1790, il adhère au Club des Jacobins, écrit dans le Journal des amis de la Constitution et prône une monarchie constitutionnelle. Pendant la Terreur, il est arrêté en 1793 puis relâché en 1794 alors que le Duc d’Orléans sera exécuté. Il soutiendra ensuite Napoléon Bonaparte avant de mourir à Tarente en Italie en  1803. En 1784, un fils est né de son union avec Marie-Soulange Duperré, qu’il épousera en 1786.