Fin très naturelle

Passereau l’écolier. Chapitre VIII : Fin très naturelle

Frontispice représentant Pétrus Borel

Là-dessus, se dirigèrent vers la rue de Rivoli, notre écolier et notre soldat, ou notre soldat et notre écolier, je laisse à chacun la faculté de donner la préséance à qui bon lui semblera suivant son goût et sa prédilection. Vit-on jamais couple d'hyménée mieux assorti entrer chez un traiteur, faisant noces et festins ? Un gros ossu, d'une stature hyperbolique, qui aurait pu servir d'observatoire, Dieu en soit loué, à feu Mathieu Lemsberg, – un tueur par l'épée ; c'est l’époux d'une part. – Un petit minois, enfantin et joliet, qui aurait pu faire un charmant docteur à l'usage des dames, un tueur par Broussais ; c'est l'époux d'autre part.  – Comme pour une partie fine ils s'enfermèrent dans un cabinet très particulier, je suis sûr qu'il en vint de mauvaises pensées dans l'esprit du garçon. Ceci nous montre qu'il ne faut point s'arrêter aux apparences. Gardons-nous de jugements téméraires, il est si facile de prendre, ainsi que dans cette occurrence, des gens qui vont se couper la gorge, pour des gens qui vont se l'embrasser.

 

Petrus Borel, Champavert : contes immoraux, 1833.
> Texte intégral dans Gallica : Renduel, Paris, 1833