"Un fragment détaché tout à coup
de la voûte de la Bibliothèque a roulé à mes pieds,
comme je passais : un peu de poussière s'est élevée, quelques
plantes ont été déchirées et entraînées
dans sa chute. Les plantes renaîtront demain ; le bruit et la poussière
se sont dissipées à l'instant : voilà ce nouveau débris
couché pour des siècles auprès de ceux qui paraissaient
l'attendre. Les empires se plongent de la sorte dans l'éternité
où ils gisent silencieux."
Chateaubriand
Voyage en Italie
Longtemps objet de méditations
sur les empires défunts, la déchéance des empires, la grandeur
disparue, comme l'a décrit Du Bellay dans ses Antiquitéz de
Rome, et parallèlement fascination érudite avec des
accumulations de descriptions de colonnes, bas-reliefs, inscriptions comme l'ont
fait Mabillon ou Spon, les ruines deviennent poétiques et pittoresques au XVIIIe siècle,
romantiques au XIXe siècle.
La découverte, la mise à jour vers 1750 des vestiges de Pompei
et Herculanum ne fait qu'accentuer l'ampleur du phénomène.
De nombreux archéologues, architectes, artistes ou amateurs se précipitent
vers la Campanie
ou la Sicile faire des relevés de monuments, de fouilles où l'exactitude
se mêle à l'anecdotique.
La ruine devient un élément fondamental de décor et confère une dimension pittoresque aux différentes vedute de Piranese, de Barbault, aux tableaux de Poussin, Le Lorrain, Panini ou Hubert Robert.
Les villes mortes de Pompei et Herculanum revivent dans des romans ou nouvelles ainsi Arria Marcella deThéophile Gautier ou Les filles de feu de Gérard de Nerval sous une forme romanesque et fantastique.
Affichant une sensibilité pré-romantique, Dupaty est un grand amateur de ruines. Il célèbre la grandeur de Rome, et le charme du paysage romain et campanien qu'il auréole de mystère. Il restitue les sensations qu'il éprouve, les émotions qu'il ressent en visitant les monuments antiques romains du Colisée au Mausolée d'Auguste en passant par Pompei.
Mme de Stael dans son roman Corinne ou l'Italie accorde une grande importance aux ruines omniprésentes dans sa vision de l'Italie comme un présage de mort inéluctable.
Stendhal apprécie
les ruines antiques mais déplore qu'elles aient perdu leur physionomie
originale parce que réutilisées en églises pour la plupart.
A l'inverse, Chateaubriand est sensible à la correspondance entre
l'Eglise et les ruines, la vision de dômes sur les vestiges antiques,
lui apparaissant comme un lien tissé entre passé et présent.
Il célèbre les ruines de Rome et de Naples perdues dans une nature
calme et mystérieuse, cette campagne romaine qu'il est un des premiers
à célébrer.