"Ramenez-moi, disais-je, au fortuné rivage
Où Naples réfléchit dans une mer d'azur
Ses palais, ses coteaux, ses astres sans nuage,
Où l'oranger fleurit sous un ciel toujours pur.
Que tardez-vous? Partons ! Je veux revoir encore
Le Vésuve enflammé sortant du sein des eaux;"
Lamartine
Nouvelles méditations poètiques
VII. Tristesse
Si, de tous temps, de grands écrivains se sont rendus en Italie à
l'instar de Montaigne, de Rabelais ou de Montesquieu, ce n'est véritablement
qu'à partir du XIXe siècle que le voyage d'écrivain
trouve sa véritable expression littéraire et personnelle.
La plupart des écrivains du XIXe siècle se sont rendus
en Italie, pour un bref voyage ou un séjour prolongé. La relation
de voyage devient alors une manière de parler de soi, la description
des sites donnant lieu à l'expression de souvenirs personnels, de rêveries,
voire de méditations sous l'influence du romantisme. Ainsi Chateaubriand
voit dans la cascade de Tivoli sa Bretagne natale et réfléchit
sur le chaos des civilisations devant les sépultures de la Via Appia.
A travers ses Méditations,
Lamartine nous livre des "sensations". Dans Rome,
Naples et Florence, Stendhal exprime une ivresse apparentée à
une sorte de "folie", à tel point qu'on parlera plus tard d'un
syndrome de Stendhal.
Les frères Goncourt cherchent à faire une oeuvre d'imagination
plus qu‘une transcription du réel.
Sous l'influence du réalisme et du naturalisme, d'autres auteurs se
sont intéressés à l'Italie sociale et politique, rompant
avec les clichés véhiculés dans les guides touristiques
et contribuant parfois à forger l'opinion publique sur la question du
patriotisme italien et la popularité de Garibaldi. Les souvenirs de voyage
de Dumas père dans Le Corricolo,
Le Speronare ou dans
Une année à Florence en font le premier grand reporter français.
Dans Les Italiens d'aujourd'hui, René Bazin décrit les quartiers
miséreux de Naples.
Dans Rome, Zola fournit un témoignage
documenté sur la chute de la papauté et sa tentative pour reprendre
le pouvoir à la fin du XIXe siècle.
En marge des courants romantiques et réalistes, le Voyage
en Italie de Taine occupe une place particulière.
Professeur d'esthétique, il aborde l'Italie en philosophe et historien
d'art et applique la méthode scientifique à son étude.
Les oeuvres de fiction reflètent cet engouement pour l'Italie : romans d'aventures, romans d'inspiration autobiographique, romans historiques, nouvelles fantastiques mêlent parfois données historiques ou sociologiques et éléments d'imagination ou de vécu personnel.
Cet intérêt des écrivains français pour l'Italie se prolonge au XXe siècle. Venise est au coeur de La recherche du temps perdu de Marcel Proust, elle est un motif d'inspiration essentiel pour Henri de Régnier, Maurice Barrès, André Suarès, Paul Morand...