Détail d'une page d'un manuscrit de Champollion Archéologie

Avant 1914, le champ de l'archéologie africaine se limite essentiellement à l'étude des grandes civilisations nord-africaines (Egypte, Nubie, Ethiopie, Carthage) tandis que les vastes contrées s'étendant au sud du tropique du Cancer demeurent inexplorées, faute d'outils de reconnaissance avancés mais aussi par conviction que ne peut s'y trouver aucun vestige digne d'intérêt. La découverte des splendeurs de l'Egypte pharaonique constitue un terrain d'enquête privilégié pendant toute cette période, ce qui relègue au second plan la singularité du pays le plus vaste du continent africain, le Soudan, de même que l'étude de la préhistoire africaine, qui demeure embryonnaire. Mais l'exploration progressive des sites du Soudan ouvrira la voie à des découvertes ultérieures considérables. On assiste donc à la constitution d'une archéologie axée surtout sur l'épigraphie à laquelle succède l'égyptologie globale de Mariette ou de Maspéro, puis une spécialisation des archéologues par discipline ou par aire géographique. La guerre de 1914 donne un coup d'arrêt aux fouilles ; elles seront relancées avec éclat par la découverte du tombeau de Toutankhamon en 1922.

Egypte
Dès la fin de l'Ancien Régime est débattue la nécessité d'une intervention française en Egypte, qui puise son argumentation dans une double justification, commerciale et idéologique. Dans cette veine, le Voyage en Syrie et en Egypte de C.-F. Volney influence largement le petit noyau de la communauté scientifique entraînée avec Bonaparte dans l'expédition d'Egypte entre 1798 et 1801, à l'origine de la fondation de l'Institut du Caire. Parmi eux, Vivant Denon est le premier à pénétrer en Haute-Egypte et à mettre ses talents de dessinateur et de graveur au service de la description des merveilles rencontrées. V. Denon, P.-X. Coste ou encore E.-F. Jomard, qui contribue à la description des antiquités égyptiennes, appartiennent encore à la catégorie du voyageur érudit des lumières. A leurs côtés se pressent une foule d'aventuriers, à la solde de consuls hardis, qui écument les trésors jonchant le sol africain, tels Belzoni ou Henry Salt et qui contribuent à la constitution des collections des principaux musées nationaux européens.
Véritable fondateur de l'égyptologie, Champollion bouleverse la conception occidentale de l'écriture par le déchiffrement des hiéroglyphes. Il remonte le Nil entre 1828 et 1829, amassant une somme considérable de notes, documents et de récits. Le prussien Lepsius visite de nombreux sites de 1842 à 1845, s'avançant loin dans l'actuel Soudan, tandis qu'Auguste Mariette et son disciple Gaston Maspéro illustrent la figure de l'égyptologue complet et militant par leur recherche systématique sur le terrain des matériaux nécessaires à la reconstitution de l'histoire et leur souci de voir demeurer sur place les vestiges retrouvés. Pour abriter les trésors recueillis, Mariette crée le futur Musée du Caire et Maspéro installe au Caire une école française, à l'origine de l'Institut français d'archéologie orientale.

Le Soudan
A la charnière de l'Egypte et de l'Afrique, l'histoire du Soudan se confond avec celle de la Nubie. Bien que parfaitement connue du monde grec et romain, l'antique civilisation de la haute vallée du Nil, dans sa partie soudano-nubienne, est restée longtemps ignorée des explorateurs, son étude ne constituant qu'une branche de l'égyptologie. Le plus important des pionniers de l'archéologie nubienne fut Frédéric Cailliaud. En 1822, lors de son expédition en Nubie et au Soudan, accompagné de Jomard, il fut en effet parmi les premiers à pénétrer l'actuelle province soudanaise du Butana. Ils y découvrirent les pyramides de Méroé, témoins des grandes nécropoles royales. A la fin du XIXe siècle, les recherches de Jacques de Morgan, archéologue et directeur du service des antiquités de l'Egypte marquent une nouvelle étape, suivie avant la guerre des prospections conduites en Nubie par Cecil M. Firth et George A. Reisner qui mettent à jour des cultures nouvelles.