nuances. Rien ne fut épargné. Madame Pixu, qui prétendait connaître sa maison et l'art de s'en servir, sentit la colère se lever en elle contre la blasphématrice, et commença de serrer ses mains l'une contre l'autre. Elle allait répondre, quand Anaïs remarqua du trouble sur les traits de sa cousine et crut bon d'ajouter
Je ne dis pas cela pour te peiner. Ce n'est pas ta faute. Ce sont des choses qu'on n'apprend pas si on ne les a dans le sang mais peut-être quand tu auras mon âge et que ton mari aura disparu, feras-tu mieux.
Madame Pixu bondit enfin
Tu n'as pourtant pas l'air de te trouver mal ici 1 Bien sûr dit Anaïs, pincée, je serais mal venue à te faire des reproches. Je ne suis pas si mal, chez vous simplement je faisais de petites constatations. Mon expérience me le permet, je pense ? P
Si,tu veux prendre ma place, dit Madame Pixu, libre à toi. Je me donne assez de peine pour avoir au moins le droit d'être traitée poliment.
Quel mauvais caractère tu as gémit Anaïs. Je parlais sans mauvaise intention. Si les œufs ne sont pas frais je n'y peux rien, et si ma chambre est mal balayée, je ne peux pas dire qu'elle soit propre.
Elle s'agenouilla sur le tapis et, glissant le bras sous le lit, elle ramena un petit morceau de papier.
Qu'est-ce que cela ? demanda-t-elle. Ce papier, était ici le premier jour. Chaque soir, j'ai regardé sous mon lit dans l'espoir qu'on l'aurait balayé. Et tu t'étonnes si je me fâche 1 Je trouve au contraire que j'ai montré beaucoup de patience. Madame Pixu, et malgré l'affection qu'elle portait à Anaïs, sentit dans ses bras des mouvements ébauchés, comme conseilleurs de gifles. Elle se leva droite et sortit de la chambre, laissant Anaïs stupide, son petit papier entre les doigts. Quand la porte fut refermée, la vieille resta un moment incertaine, puis se baissa, et, sous le lit, remit à sa place le petit morceau de papier blanc.