Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1876-11-11
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Description : 11 novembre 1876 11 novembre 1876
Description : 1876/11/11 (A6,N1796). 1876/11/11 (A6,N1796).
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/04/2013
Sixième Année — No 1796
Prix du Numéro à Paria : 15 Centimes — Départements : 20 Centimes
Samedi 11 Novembre 1876
T r TTV cTffï r
LE E SIÈCLE
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
RÉDACTION
S'adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
B3, rue de Xjaffiiyette
Les Lettres non affranchies seront refusées.
ABONNEMENTS
PARIS
Trois mois tSfr.
Six mois 35 »
Un an. 50 »
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Trois mois 16 fr.
Six mois 32 »/
Un an., 62 p,.,
---.N'--'J. f
ÀIWONCES : Chez MM. LAGRANGE, CERF etjCf*
0f place Se la Bounet 6
ADMINISTRATION
Adresser les Lettres et Mandats à l'Administrateur
rue Ole Lafayette, 03
Les Manuscrits non insères ne seront pas rendus.
e ABONNEMENTS
PARIS
Trois mois 13 fr.
Six mois. 25 »
Un an. 50 »
DEPARTEMENTS
Trois mois. tofr.
SIX mOÍs. 32 p
Un an. 62 *
ANNONCES : Chez MM. LAGRANGE, CERF etC
0f place de ta BOtll", a
BULLETIN
- ■ Paris, 10 novembre 1876.
Le Sénat, dans la séance d'hier, a adopté
lè projet de loi relatif à l'administration de
l'armée. Il a ensuite voté sans discussion
un grand nombre de projets de lois.
La Chambre des députés a terminé la
discussion du budget de la marine. Elle a
ensuite rejeté la convention nouvelle passée
entre l'Etat et la Compagnie des allumettes.
La Gazetie de Cologne résume comme
suit les bases de négociations que nous avons
indiquées hier : Respect de l'indépendance
et de l'intégrité territoriale de la Turquie;
déclaration par chacune des puissances
qu'elle ne cherchera aucun agrandissement
territorial, aucun avantage spécial en ma-
tière cfo commerce; pacification des pro-
vinces insurgées par les moyens qu'a pro-
posés l'ambassadeur d'Anglètêrre dans la
note remise à la Porte le 21 septembre der-
nier.
Une dépêche de Vienne adressée au Daily
Telegraph nous apprend que la Russie a
soulevé quelques objections contre ce pro-
gramme, désireuse qu'elle est d'assurer
aux provinces insurgées une autonomie
politique complète. D'après la même dé-
pèche, le cabinet de Saint-James aurait per-
sisté dans l'attitude qu'il a prise et la Rus-
sie aurait cédé.Toutefois, le Nord, qui d'or-
dinaire exprime fidèlement les vues dé la
chancellerie russe, renchérit quelque peu
sur les conditions que propose l'Angleterre.
Il lions nonce que le général Ignatieff a
déjà reçu ses instructions et il les résume
en ces termes : « L'ambassadeur de l'em-
pereur Alexandre aura pour mission de
soutenir ériêrgîquemeat la création d'une
large autonomie administrative dans la Bos-
nie, l'Herzégovine et la Bulgarie, et de de-
mander que cette transformation soit ac-
compagnée de garanties efficaces assurant
son accomplissemént sincère, garanties
parmi lesquelles le contrôle à exercer par
les puissances tiendra nécessairement une
des premières places. »
La note anglaise ne comporte aucune de-
mande de garanties, et il faut s'attendre à
dé vivès discussions sur ce point. D'autre
part, l'Autriche né veut même pas du mot
autonomie administrative ; elle s'en tient à
l'introduction des réformes indiquées jpar
la note du comte Andrassy et par le mémo-
randum de Berlin.
Le cabinet de Saint-James semble dési-
reux de ne pas perdre un instant. Il a déjà
désigné son envoyé spécial et les secrétai-
res qui doivent l'accompagner. D'après une
dépèche adressée au Timës, là Russie et la
France ont accepté la proposition de confé-
rence faite par l'Augleterre. Mais il semble-
rait, s'il faut en croire le correspondant de
Bêrlin du mèiôé joumsi, que la conférence
chargée de rédiger les traités de paix sera
précédée par la réunion des ambassadeurs
à Constantinople, réunion dans laquelle ces
derniers élaboreraient un programme des
questions à discuter.
L'agence Havas se dit autorisée à démen-
tir la nouvelle d'après laquelle Sadik-Pacha
aurait informé le duc Decazes qu'une As-
semblée parlementaire turque commence-
rait à tenir ses séances vers le milieu de dé-
cembre et discuterait d'abord un projet de
loi tendant à établir les droits égaux de tou-
tes les croyances religieuses dans l'empire
ottoman.
Nous n'avons pas encore reçu la confir-
mation de l'élection 4e M. Tilden à la prési-
dence des Etats-Unis, mais les chances sem-
blent toujours en sa faveur.
----:-:: —- --:-----:-:-:.
Bourse do Paris
Ciétnre le 8 nov. le9nov. Han»ae Bal-ile
30/8
Comptant.. 72 71 90 10
Fin cour.. 72 07 1/2 71 95 12 1/2
* 1/8 O/O
Comptant.. 10050 101 20 70
SOlO
Comptant.. 10540 105 30 10
FinW 105 32 1/2 105 25 W ,/. 07 1/2
PETITE BOURSE DU gOïR :
Emprunt' 5 0/0. 105 fr. 22 1/2, 30.
5 0/0 turc. 11 fr. 65.
Banque Ottomane.. 381 fr. 87 1/2.
Egyptien. 281 fr. 25,231 87.
—
Il y avait longtemps qu'on n'avait parlé
du fameux article 8 de la constitution !
Une note, de régence Havas, commu-
niquée aux Journaux, donne un regain
d'actualité aux polémiques soulevées à
ce propos pendant les vacances. L'a-
gence Havas annonce qu'une lettre du
ministre des finances au président de
la commission financière « confirme
l'opinion du gouvernement que le Sé-
nat a le droit de reprendre les crédits
supprimés par la Ghambre. » Et les or-
ganes de l'opposition d'insinuer que la
lettre en question aurait été écrite après
une délibération du conseil des mi-
nistres.
Que le ministre des finances ait ou
non écrit ladite lettre, et que le con-
seil en ait ou non délibéré, peu im-
porte. Le gouvernement est libre de son
avis sur cette question comme sur
toute autre, mais son avis n'engage en
aucune façon celui du parlement. On
a trop discuté sur ce point pour que
nous reprenions ab ovo la théorie émi-
nemment constitutionnelle de l'inéga-
lité des deux Chambres en matière bud-
gétaire. Nous nous contenterons d'en
appeler au bon sens de quiconque n'o-
béit pas exclusivement à l'esprit de
parti.
Remettons une fois encore sous les
yeux du public cet article 8 :
« Le Sénat a, concurremment avec
la Chambre des députés, l'initiative et
la confection des lois.
TOUTEFOIS, les lois de finances doi-
vent être, en premier Heu. présentées à
la Chambre des députés, et votées par
elle. »
Qu'est-ce que cela veut dire ?
Rien, absolument rien, s'il s'agitd'une
simple question de priorité,
Beaucoup s'il s'agit d'une question de
prépondérance.
Quelques-uns de nos confrères se
donnent beaucoup de peine pour dé-
montrer que si le législateur n'avait eu en
vue que d'accorder un droit de priorité
à la Chambre en matière de budget, il
n'eût pas eu besoin d'employer ces deux
mots : présentées et votées; il se fût
contenté de dire que ces lois de finan-
ces seraient présentées d'abord à la
Chambre.
Rien n'est plus juste, en effet.
Mais ce qui semble encore plus vrai-
semblable , c'est que le législateur
n'a point voulu mystifier les Cham-
bres de l'avenir. Or, nousldemandons
à tous les esprits sensés, si l'article 8
ne constituait, en réalité, au profit des
représentants directs de la nation qu'un
droit de priorité, serait-il autre chose
qu'une mystification ?
Si le Sénat a le droit de défaire, en
matière de finances comme en toute au-
tre matière, ce qu'a fait la Chambre
des députés, veut-on nous dire à quoi
rime le droit de priorité inscrit à l'arti-
cle 8? Votez les premiers, messieurs
les députés ; ensuite messieurs les sé-
nateurs verront s'ils peuvent accepter
vos décisions. A cela se résume la théo-
rie des partisans de l'égalité des deux
Chambres dans les questions des fi-
nances.
On dit : Est-il vrai, oui ou non, que le
Sénat, dans l'intention du législateur,
a été créé pour s'opposer, s'il en était
besoin, aux coups de tète de la Cham-
bre ? Oui, assurément. Donc, le droit du
Sénat en matière de finances doit être
égal au droit de la Chambre, car sans
cela, il suffirait à la Chambre de bou-
leverser le budget pour, du même coup,
bouleverser la société.La Chambre sup-
primera le budget des cultes, le budget
de la magistrature,le budget de l'armée,
et paralysera ainsi l'action du Sénat,
qui n'eut jamais adhéré à la séparation
de l'Eglise et de l'Etat, à la suppression
des armées permanentes, etc.,. Tout
cela est parfaitement vrai et supérieu-
rement raisonné. Il n'y a qu'un petit
malheur, c'est que le Sénat n'a aucun
besoin de partager les prérogatives de
la Chambre en matière de finances
pour s'opposer à des mesures qui lui
paraîtraient dangereuses et subversives.
Le Sénat n'a point le droit de rétablir
des crédits supprimés par la Chambre,
mais il a le droit de supprimer la Cham-
bre, d'accord avec le président de la
République ; et c'est ce qu'il ne manque-
rait pas de faire, le cas échéant.
En d'autres termes, les prérogatives
de la Chambre en matière de budget ont
pour corollaire le droit régalien attribué
au Sénat et au président de dissoudre
la Chambre.
On voit donc que les craintes témoi-
gnées par les défenseurs trop ardents
des droits du Sénat sont purement ima-
ginaires.
Nous n'ajouterons qu'un mot.
A défaut de la lettre, l'esprit de la
constitution interdit ébsofuntiènt d'in-
terpréter l'article 8 dans 1e sens in-
diqué par l'agence Havas et les jour-
naux de l'opposition. On peut équivo-
quer tant qu'on voudra ; mais on aura
beau dire et beau faire, la constitution
du 25 février a établi un régime qui, de
nom et de fait, est une République.
Nous avons un président de la Répu-
blique, un Sénat, une Chambre des dé-
putés; tous trois électifs. Quel autre
nom donner à une pareille organisation
politique que celui de République? Et
quel est le caractère distinctif du gou-
vernement républicain, sinon de don-
ner partout et toujours la prépondé-
rance au pouvoir qui représente le plus
sûrement la nation, c'est-à-dire au pou-
voir issu directement du suffrage uni-
versel?
- E. ScïiNÉftB.
, —.— -
Le Journal des Débats donne les rensei-
gnements suivants sur la mesure prise par
le ministre des finances pour la transmis-
sion au Sénat des budgets votés par la
Chambre des députés :
Le ministre des finances a adressé au prési-
dent de la commission sénatoriale des finan-
ces une lettre sur les procédés matériels de la
transmission au Sénat du budget voté par la
Chambre des députés, afin d'abréger autant que
possible les délais de cette transmission.
Le ministre fait remarquer qu'après que
toutes les parties du budget (textes de lois et
tableaux législatifs) auront été votées par la
Chambre des députés, il faudra un certain
temps au ministre .des finances pour préparer
un nouvel exposé des motifs èt pour faire im-
primer et distribuer la loi votée aux membres
au Sénat pour examiner le budget, àlacommis-
sion pour nommer ses rapporteurs, aux rap-
pour rédiger, déposer et faire imprimer leurs
rapports, au Sénat enfin pour la discussion, ce
qui pourrait, si on ne prenait pas de précau-
tions, conduire jusqu'à la fin de l'année et em-
pêcher la promulgation avant le Ie' janvier,
car la promulgation après le 1er janvier entra-
verait la perception des impôts et le payement
des dépenses publiques.
Le ministre a donc pris des mesures pour
préparer, aussitôt le vote du budget de chaque
ministère, un état présentant en regard de
chaque chapitre :
1° Les propositions primitives du gouverne-
ment et les crédits votés par la Chambre des
députés ;
2° Les augmentations ou diminutions de
crédits opérées par la Chambre des députés :
3° L'indication des crédits non alloués dont
le gouvernement demande le maintien.
Le ministre a joint à sa lettre, comme exem-
ple, le tableau du bhdget de l'instruction pu-
blique, lequel a été transmis au Sénat sans au-
cune demande de rétablissements de crédits.
Cet état est disposé sur quatre colonnes :
Première colonne, propositions primitives
du gouvernement ;
Deuxième colonne, crédits votés par la
Chambre des députés;
Troisième colonne ; différences (a); augmen-
tation de crédits rb): diminution de crédits :
Quatrième colonne, indication des crédits
non alloués par la Chambre des députés et
dant le gouvernement demande le maintien (a);
sommes (b) ; motifs.
Le Journal des Débats ajoute :
On peut voir, par le résumé que nous don-
nons de la lettre écrite par le ministre des fi-
nances à la commission des finances du Sénat,
que la question de droit constitutionnel traitée
par un grand nombre de journaux n'a été ni
soulevée ni, à plus forte raison, résolue par le
ministre des finances. Ce qui résulte de cette
lettre, c'est que le gouvernement croit avoir le
droit de défendre devant les deux Chambres
les demandes de crédits qu'il a d'abord présen-
tées à la Chambre des députés. Il est bien clair
que si un crédit refusé par la Chambre des dé-
putés est accordé par le Sénat, le crédit en
question ne deviendra définitif qu'après un re-
tour à la Chambre des députés et un vote fa-
vorable de cette Chambre ; car aucun crédit ne
peut avoir d'effet que s'il est accepté par l'une
comme par l'autre Chambre. Il ne peut donc pas
être question d'un rétablissement de crédit
par le Sénat, mais d'un appel du Sénat, sur l'ini-
tiative du gouvernement, à une nouvelle déli-
bération de la Chambre des députés.
:—
LA
QUESTION DES SOUS. OFFltlERS
Le ministère et le Parlement sont
convaincus qu'il y a quelque chose à
faire pour maintenir et fortifier les ca
dres de l'armée. Il est malheureuse-
ment trop certain que le recrutement des
sous-officiers devient de jour en jour plus
difficile. On en fait beaucoup, et d'excel-
lents, meilleurs peut-être que la France
n'en a jamais eu ; mais la plupart s'é-
chappent vers les carrières civiles au
moment même où leurs services seraient
surtout appréciés, dans la force de l'âge
et dans la plénitude de leur capacité mi-
litaire. Comment les retenir? Que faut-il
faire pour attacher au régiment ces ser-
viteurs utiles et modestes qui sont le
nerf de toute armée?
L'institution du volontariat, qui écré-
me les classes, et la réduction du ser-
vice militaire à cinq ans, sont les causes
les plus apparentes du mal. Il y en a
d'autres, moins visibles et plus pro-
fondes. Pourquoi ne dirions-nous pas
franchement que le progrés de l'ipnass-
truction publique et le développement
de la civilisation moderne font du
sous-officier un être à part et un privi-
légié au rebours dans la société fran-
çaise ?
Laissons- la guerre de côté, puisqu'il
est établi que tous les citoyens en état
de porter les armes seront soldats de-
vant l'ennemi, soit qu'ils appartiennent
à l'armée permanente, à la réserve ou
à l'armée territoriale. Il s'agit seulé-
ment ici d'apprécier les raisons qui
peuvent retenir un homme sous les dra-
peaux en en temps de paix. -
Qu on y voie un bien ou un mal, que
l'on s'en plaigne ou qu'on s'en félicite,
letégiment n'est plus, comme aux siè-
cles derniers, un monde à part, une
femille tendrement aimée par 1,500 ou
2,000 braves gens qui n'en avaient,
pour ainsi dire, pas d'autre, et à qui
e drapeau tenait lieu de clocher. Pour
neuf hommes et demi sur dix, c'est une
éccfle obligatoire à laquelle rien ne les
attache lorsqu'ils ont terminé .leur ap-
prentissage, ou, comme ils disent, fait
leur temps.
Dans une société laborieuse et rela-
tivement confortable comme la nôtre,
tout jeune homme bien bâti et muni
d'une instruction quelconque est libre
de choisir entre vingt-cinq ,, ou trente
professions qui toutes sont moins dures
et plus lucratives que le métier de sol-
dat.
Nous sommes loin du temps où le
campagnard , opprimépar son seigneur,
exténué par la corvée, dévoré par des
impôts abominables, s'engageait pour
manger tous les jours un morceau de
pain noir. Aux champs comme à la
ville, le travailleur honnête a sous la
main, non seulement les moyens de
gagner sa vie, mais d'élever une famille
et d'épargner un peu.
L'armée, envisagée comme carrière,
est plus ingrate que l'industrie, que l'a-
griculture, que tous les autres états
sans exception. Les prolétaires du dra-
peau sont les plus pauvres et les moins
indépendants des prolétaires. Les né-
cessités du budget réduisent les offi-
ciers au nécessaire le plus strict : il est
avéré notamment que les sous-lieute-
nants et lieutenants ne gagnent pas
même de quoi vivre : la loi les force à
contracter des dettes qu'ils acquittent
loyalement plus tard.
Etant donnés deux frères dont l'un
entre à Saint-Cyr et l'autre au magasin
du Louvre ou du Bon-Marché, on sait
d'avance que c'est le premier qui aura
besoin du second au sein des honneurs
et de la gloire. Un médecin militaire,
quel que soit son talent, sera toujours
plus pauvre qu'un médecin civil ; un
pharmacien doré sur tranche n'égalera
jamais la fortune du pharmacien bour-
geois de la rue. Les maréchaux de
France eux-mêmes sont des nécessi-
teux, si vous les comparez aux maré-
chaux du commerce et de l'industrie.
Et cependant la somme de talent, de
dévouement qui se dépense dans l'ar-
mée excède infiniment, à grade égal,
celle qui réalise les fortunes bour-
geoises
Il est un âge où tous, civils et mili-
taires, nous pensons nécessairement au
repos. La retraite n'a rien qui déplaise
au manufacturier ou au négociant arri-
vé. Il court au-devant d'elle, souvent
à la fleur de son âge. L'officier la re-
doute et la subit, car elle le réduit à la
portion congrue ; elle limite ses res-
sources à l'heure où ses besoins de-
viennent plus pressants ; elle en fait un
rentier viager, c'est-à-dire un égoïste
malgré lui, le jour où l'infortuné se sai-
gnerait aux quatre membres pour éta-
blir ses fils ou doter ses filles !
Mais enfin l'officier, dans sa médio-
£ iât& volontaire, a de nobles consola-
tions. Il souffre, mais il brille, je ne dis
pas par l'or de ses épaulettes, mais par
l'éclat d'un rôle héroïque. Hommes et
femmes lui savent gré de cette vie sa-
crifiée au pays. Personne, dans le monde
le plus superficiel et le plus sot, ne lui
reproche d'être pauvre. Quelquefois
(pas assez souvent), une riche héritière
s'honore de lui donner sa main. Son
grade, acquis par de loyaux services et
solidement garanti par les lois, est une
véritable propriété. Il a des droits, des
privilèges ; il jouit d'une liberté raison-
nable, on ne lui marchande pas les loi-
sirs.
La condition du sous-officier, telle
que la routine l'a faite, comporte une
pauvreté moins sensible peut-être, mais
sans aucune compensation. Nous ad-
mettons fort bien que l'on passe par là
pour arriver plus haut; nous compren-
drons difficilement qu'on y reste de
propos délibéré. La possession d'état
n'existe pas pour le sous-officier : son
grade est toujours révocable. Condam-
né au célibat perpétuel, comme un
moine, il est cloîtré dans la caserne, où
toutes les responsabilités, toutes les pu-
nitions sont constamment supendues
sur sa tète.
L'usage antique et tort logique qui
donne un jour de liberté par semaine
aux moindres mercenaires de la ville
et de la campagne, n'existe pas pour
le sous-officier. Et quant à l'avenir, s'il
n'a pas le bonheur d'être enrôlé dans
ces armes spéciales où l'on devient
garde de quelque chose après vingt ans
de service, il sait ce qui l'attend! Les
invalides, ou une pension de retraite à
peine suffisante pour végéter dans un
mauvais trou !
C'est un chien de métier, comme je
l'ai souvent entendu dire à de braves
garçons qui comparaient leur sort à
celui de leurs frères,de leurs camarades
plus heureux et moins méritants. Il
faut que cette opinion soit bien répan-
due dans le monde pour que tous les par-
tis politiques et même toutes les clas-
ses de la société proclament qu'il y a
quelque chose à faire. Jamais,.je crois,
question militaire ne s'est plus fortement
imposée à l'attention du pays. Telle est
l'urgence et la gravité du problème que
certains législateurs, dans leur empres-
sement à trouver une solution, propo-
sent, comme M. Keller, de traiter les
sergents mieux que les capitaines, ce
qui me paraît excessif.
ABOUT.
(A suivre.)
LE PARLEMENT
COURRIER DE LA CHAMBRE
Versailles, 9 novembre 1876.
Ce doux budget de la marine n'a pas
voulu prendre fin sans faire parler de lui.
Pour le dernier jour, il a offert au public
français une représentation extraordinaire :
UN HOMME A LA MER
Brame maritime, historique et parlementaire
en plusieurs tableaux.
Mayotte. Connaissez-vous Mayotte? Il ne
faut par rougir pour cela; on peut être très-
honnête homme et ne pas connaître Mayotte.
Mayotteestunepetiteîlede50 kilom. sur 32,
une des îles Comores, au S.-E., par 42° 59'
longitude E. et 12° 50' latitude S., riche en
takamaka blanc, bois d'ébène et bois de
natte, selon Bouillet, et principalement en su-
creries, ajoute la chronique parlementaire.
Mayotte relève de la direction des colo-
nies. Et le directeur du service colonial au
ministère de la marine est M. Benoistd'Azy,
fils de l'ancien député. Il est là assis, au
banc ministériel. Or, il se trouve que la
manne budgétaire pleut sur Mayotte à ce
point que la commission a jugé convenable
de réduire les libéralités ministérielles et
de signaler à la Chambre, dans le rapport
de M. Raoul Duval, des traités postaux lé-
gèrement extravagants que la direction des
colonies a cru devoir conclure directement,
sans tenir compte de la règle qui lui ordon-
nait de passer parle ministère des finances.
M. Germain Casse, s'emparant des cri-
tiques un peu obscures contenues dans le
rapport, opère une charge à fond contre le
directeur des colonies et termine en disant:
Je voudrais bien savoir la vérité, car il en
est qui prétendent que tous ces avantages
octroyés à Mayotte, au détriment du Trésor,
profitent à une certaine sucrerie, et ceux-là
disent encoreque M. Benoist d'Azy, père du
directeur du service colonial, est principal
actionnaire et directeur de cette sucrerie.
D'un coup d'épaule violent, M. Germain
Casse vient de lancer par-dessus bord M.
Benoist d'Azy fils.
Un homme à la mer !
L'amiral Fourichon ne t'ait ni une ni deux:
d'un mouvement irréfléchi, il pique une
tète et voilà M. le ministre de la marine qui
nage au secours de son directeur des co-
lonies : G'est moi. le ministre, qui suis res-
ponsable; ce ne sont pas « des accusations
mal fondées ou des insinuations haineuses
qui me feront abandonner mon collabora-
teur. »
La pleine eau est commencée.
La galerie prend intérêt à ce tournoi aqua-
tique. La droite, qui ne serait pas fâchée de
voir un ministre se noyer, excite de ses
hurrahs l'amiral.
Poum ! C'est M. Raoul Duval qui plonge
correctement du banc de la commission.
Bien que l'acte de M. Germain Casse lui pa-
raisse un peu brutal, il ne lui semble pas
immérité au fond, et, « puisqu'on le force à
s'expliquer sur le fond, il va le faire. » Et
il le fait.
On a exécuté dernièrement dans l'ile
des travaux d'assainissement, de dessèche-
ment de marais. A ce sujet, il a été proposé
aux propriétaires de l'ile une coopération
de travail qui leur allouait le tiers ou la moitié
du sol conquis; mais, en même temps, il
leur était déclaré que leur décision devait
être prise dans les six semaines. Or, les
propriétaires habitent la France, sont re-
présentés là-bas par des gérants, et il faut
trois mois pour avoir une réponse! Cepen-
dant un gérant, un seul, a trouvé moyen
de recevoir la réponse en temps utile ; c'est
le gérant de la sucrerie Benoist d'Azy !
Il est clair que M. Raoul Duval, vigou-
reux nageur, vient de rattraper le directeur
du service colonial, et de le saisir par une
jambe de façon à lui faire boire un coup.
M. Benoist d'Azy tente de remonter à fleur
d'eau. Le voilà à la tribune, tirant sa coupe
tant bien que mal, battant l'eau à droite, à
gauche, et prenant le chemin le plus long
pour aller à Mayotte. Il s'essouffle et n'a-
vance guère. Du reste, quand il peut se
croire sauvé, M. Raoul Duval revient sur
lui, d'une brasse vigoureuse, et, vlan! une
nouvelle passade.
— Chose curieuse à constater : le paque-
bot qui apportait à Mayotte le délai de six
semaines fixé par la direction des colonies
portait en même temps au gérant de la su-
crerie privilégiée l'autorisation nécessaire
pour profiterdes avantages offerts par l'Etat.
C'est ce qu'on peut appeler la passade
avec coup de pied sur les épaules.
Chaque fois que M. Benoist d'Azy tente de
revenir à la surface, une nouvelle poussée
l'envoie à vingt, à trente brasses au-des-
sous du niveau de la mer. M. Raoul Duval
se pique au jeu et redouble de vigueur à
mesure que l'autre redouble d'opiniâtreté.
- L'Etat dépense une somme relative-
ment forte pour la création de routes à
Mayotte. Je me suis fait communiquer un
plan de l'île. Il se trouve que toutes ces
routes convergent à la même sucrerie.
La scène n'est pas émouvante toutefois ;
cethommequiboitcoupsur coup,bienque sa
situation soit certainement pénible, n'excite
pas la compassions il n'a pas de ces mouve-
ments de désespoir qu'on comprendrait en
pareille circonstance. La réaction, qui a
commencé à prendre le parti de M. Benoist
d'Azy, se tait maintenant en présence
des faits apportés à la tribune par M. le rap-
porteur, et l'on n'entend plus que les « Oh ! »
de stupéfaction qui échappent aux républi-
cains.
Quant à M. le ministre de la marine, le
voilà à l'eau, quelque peu refroidi, ce nous
semble, et fort empêtré pour repêcher cette
vieille épave que lui a léguée l'ordre moral.
Il fait la planche, n'osant pas se retirer tout
à fait hors de la portée de ce collaborateur
en perdition, n'osant pas non plus poursuivre
ce sauvetage qu'il a entrepris inconsidéré-
ment.
M. Germain Casse risque une nouvelle
démarche, qui n'est certes pas un coup de
maître : « M. le ministre de la marine, dit-
il, doit regrettera présent les paroles un peu
vives qu'il m'a adressées au début de cette
discussion. Du reste, il est en dehors de
l'incident ; le vote que je vais émettre est
un vote de blâme contre le directeur du
service colonial. »
L'amiral Fourichon est l'homme de la
minute. Parmi de nombreuses qualités, il
a un grand défaut, c'est de sentir beaucoup
trop vivement pour un parlementaire et
d'exprimer ses sentiments avec beaucoup
de vivacité pour un ministre. Les quelques
mots de M. Germain Casse remuent en lui
la fibre chevaleresque et font vibrer un
donquichottismefort peu ministériel. Le voi-
là derechef à la tribune :
— Non ! non ! Pas vous il ne s'agit pas
de vous ! crie le parti républicain tout en-
tier.
Il hésite, descend aux applaudissements
des gauches, et immédiatement la droite de
crier : « Le ministre ! le ministre ! »
La scène se prolonge. La droite a intérêt
à envenimer les choses.
— Mais il devait couvrir son directeur!
hurle M. Haentjens.
L'amiral Fourichon tombe dans le pan-
neau et remonte pour s'écrier : « S'il y a un
vote de blâme, il s'ad resse à moi ! »
La droite applaudit avec frénésie. Par-
bleu ! Qu'est-ce qu'elle demande ? La dislo-
cation du Cabinet.
Par suite de l'impétuosité inconsidérée
du ministre, la situation devient critique.
Au lieu d'un homme à la mer, en voilà deux,
barbotant côte à côte, à bout de souffle. Cha-
cun regretterait de voir noyer l'amiral Fou-
richon, il faut le repêcher.
C'est M. Gambetta qui se charge de cette
tâche. M. le président du budget se jette à
l'eau en guise de bouée.
M. Gambetta nous a montré aujourd'hui,
sous un de ses plus brillants aspects, son
talent multiple. Malgré une droite terrible-
ment houleuse, il manœuvre avec une ha-
bileté remarquable, une présente d'esprit
peu commune et ramène en lieu sur l'ami-
ral Fourichon hors d'haleine.
« Le budget! le budget! Ne nous laissons
pas dévoyer par les questions politiques.
Nous vous avons apporté des chiffres et
nous croyons en avoir établi l'exactitude^
si oui, votez-les. » Par sa sagesse, par son
grand sens pratique, M. Gambetta étonne
ses adversaires et enthousiasme ses amis.
Le ministre de la marine, qui peut eftfift
respirer largement au bout d'une longue
heure, dit de son banc: « Je prie la Cham-
bre de remarquer que les réductions propor
sées par la commission du budget ont été
acceptées par nous. »
C'est le mot de la fin, couvert des applau-
dissements unanimes du parti républicain,
La réaction fait mine piteuse; elle espérait,
un conflit et elle s'aperçoit un peu tard
qu'elle seule est en désaccord avec le mi-
nistre.
Quant à M. Benoist d' Azy, il a dispa-
ru. Que les ondes lui soient légères ! M.
le ministre de la marine tenait absolument,
par bonté d'âme, à le couvrir, et e'ast lui
qui, sans le vouloir, a fait passer la der-
nière vague sur la tète du directeur du ser-
vice colonial. Il l'a noyé tout habillé, voilà
tout.
M. Benoist d'Azy n'est plus. Il reste en-
core M. Benoist de Mayotte; maisJelui-la
comprendra certainement que sâ plâce n'est
pas à la tète du service colonial.
PAUL LAFARGUE.
COURRIER DU SÉNAT
A trois heures, M. Martel montait au fau-
teuil ;
A trois heures un quart la séance était
ouverte:
A quatre heures un quart elle était levéfe
et le Sénat s'ajournait au mercredi 15 no-
vembre.
Nous devions aujourd'hui terminer la loi
sur l'administration de l'armée; le Sénat
avait ajourné les articles 16, 17, 18 et 19,
relatifs au service de santé; la -commission
avait besoin de se concerter avec M. le mi-
nistre de la guerre. Cet ajournement n'a été
d'aucune utilité. M. de Freycinet vient ex-
poser à la tribune que l'on n'a pas pu se
mettre d'accord, mais qu'il est possible
qu'on s'entende entre la première et la se"
conde lecture.
Le Sénat est donc appelé a voter provi-
soirement la rédaction qui lui est soumise.
M. de Fleycinettient. à bien préciser les
termes de la question et montre le incon-
vénienls résultant de l'état de choses actuel.
Le médecin soigne les malades : mais les
attributions de l'intendant sont telles qu'il
peut à chaque instant corriger ou biffer les
ordonnances du médecin. Le rapporteur
a encore montré aujourd'hui sa connais-
sance parfaite des choses de l'armée -«t
augmenté sa réputation d'orateur d'afiiaires.
Son discours n'a pas été long; il ne contient
rien d'inutile< Personne n'a répondu et la
Sénat a voté qteil passerait à une secon*
de lecture. -,
Puis on a adopté ou pris en considération
cinq propositions de loi en moins de dix
minutes. M. Martel est un président - pré-
cieux ! Il mène les séances tambour bat-
tant.
La Chambre haute s'est ajournée au mei^
credi 15 novembre. Cette fois on ne peut
lui adresser aucun reproche. Elle n'a réel-
lement rien à faire. La Chambre des dépu*
tés n'a pas terminé l'examen du budget ét
l'on ne peut procéder à la seconde lecture
de la loi sur l'administration de l'armü clu4
cinq jours après la première délibération.
A mercredi ! Ce jour-là sans douté on ttt-
posera le rapport sur la proposition Gati-
neau, et l'on demandera la mise à l'ordre
du jour des élections sénaioriales.
P. DE SIENNE.
LA PROPOSITION (JATINEAU
AU SÉltfAT
A la date du six novembre, M. le président
de la CUambv6 des députés.a tvau^œi^au pré-
sident du Sénat la proposition de loi ayant pour
objet de mettre fin-aux poursuites pour faits
relatifs à l'insurrection de la Commune.
Nos lecteurs n'ont pas oublié la discussion
qui.eut.ljeu à la Chambre et F attitude prise en
cette circonstance par le gouvernement. Des
négociations avaient été entamées et l'on avait
pu croire que le cabinet était daccord avec la
commission pour admettre la cessation des.
poursuites. On n'allait pas plus loin, e, mais 6â
point paraissait acquis. Le projet or con-
tenait d lenffiRJL ,. el' au
jury les crimes de droit commun exceptés de
la prescription. On savait que le gouvernement
voulait maintenir la juridiction des conseils
de guerre. M. Dufaure combattit le projet en
entier et le lendemain la Chambre votait le
texte de la commission.
Nos adversaires-étaient radieux en voyant le
cabinet ou tout au moins M. Dufau re endèsac-
cord avec la Chambre, et ils comptaient sur la
Sénat pour accentuer encore le dissentiment.
Hier, en effet, les bureaux avaient à nommer
la commission chargée d'examiner la proposi-
tion. Grâce à l'inexactitude de nos amis, nous
n'avons que quatre commissaires sur neuf. Ce
sont: MM. Jules Simon, Bertaud, Pelletan et
Cazot : les commissaires de droite sont : MM.
Paris, de Gavùrdie, Porriquet, de Peyramoat
et de Meaux.
Malgré leur succès, les adversaires du projet
de loi paraissaient très-émus. C'est que cette
fois le cabinet a pris une attitude qui décon-
certe tous leurs projets.
Hier matin, en effet, le conseil des ministres
s'est occupé de cette question. La discussion
a, dit-on, été très-vive. M. de Marcère, qur a
voté à la Chambre la première partie de la loi,
a insisté pour que le cabinet prit une attitude
très-nette et se déclarât partisan de la cessa-
tion des poursuites. M. le ministre de J'iirte-
ri eur obtint gain de cause et. afin qu'aucun
doute ne put s'élever dans les esprits, il fut
convenu que les ministres faisant partie du
Sénat se rendraient dans leurs bureaux et ex-
primeraient J'opinion du gouvernement.
Dans le cinquième bureau, en effet, St. Léon
SajO prit ln parole..Il déclara que l'article lr
était en parfaite concordance avec la lettre
par laquelle le maréchal de Mac-Mahon expri-
mait le désir qu'on nefit pas de nouvelles poth"
suites ; cet article, loin d être considéré ptft;e
gouvernement comme une réponse httsiae àia
lettre du président, lui paraît en être le corol-
laire tout naturel. Le cabinet ne peut pas ad-
mettre ,une loi qui de prés ou. de loin l'esse;
bîerâlt àf«àrâstie, mais en revanche H é. tm
grand désir d'apaisement, et c'est pour cela
qu'il adopte l'article 1er et qu'il demandera au
Prix du Numéro à Paria : 15 Centimes — Départements : 20 Centimes
Samedi 11 Novembre 1876
T r TTV cTffï r
LE E SIÈCLE
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
RÉDACTION
S'adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
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Les Lettres non affranchies seront refusées.
ABONNEMENTS
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Un an., 62 p,.,
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ÀIWONCES : Chez MM. LAGRANGE, CERF etjCf*
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Adresser les Lettres et Mandats à l'Administrateur
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Les Manuscrits non insères ne seront pas rendus.
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Un an. 50 »
DEPARTEMENTS
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SIX mOÍs. 32 p
Un an. 62 *
ANNONCES : Chez MM. LAGRANGE, CERF etC
0f place de ta BOtll", a
BULLETIN
- ■ Paris, 10 novembre 1876.
Le Sénat, dans la séance d'hier, a adopté
lè projet de loi relatif à l'administration de
l'armée. Il a ensuite voté sans discussion
un grand nombre de projets de lois.
La Chambre des députés a terminé la
discussion du budget de la marine. Elle a
ensuite rejeté la convention nouvelle passée
entre l'Etat et la Compagnie des allumettes.
La Gazetie de Cologne résume comme
suit les bases de négociations que nous avons
indiquées hier : Respect de l'indépendance
et de l'intégrité territoriale de la Turquie;
déclaration par chacune des puissances
qu'elle ne cherchera aucun agrandissement
territorial, aucun avantage spécial en ma-
tière cfo commerce; pacification des pro-
vinces insurgées par les moyens qu'a pro-
posés l'ambassadeur d'Anglètêrre dans la
note remise à la Porte le 21 septembre der-
nier.
Une dépêche de Vienne adressée au Daily
Telegraph nous apprend que la Russie a
soulevé quelques objections contre ce pro-
gramme, désireuse qu'elle est d'assurer
aux provinces insurgées une autonomie
politique complète. D'après la même dé-
pèche, le cabinet de Saint-James aurait per-
sisté dans l'attitude qu'il a prise et la Rus-
sie aurait cédé.Toutefois, le Nord, qui d'or-
dinaire exprime fidèlement les vues dé la
chancellerie russe, renchérit quelque peu
sur les conditions que propose l'Angleterre.
Il lions nonce que le général Ignatieff a
déjà reçu ses instructions et il les résume
en ces termes : « L'ambassadeur de l'em-
pereur Alexandre aura pour mission de
soutenir ériêrgîquemeat la création d'une
large autonomie administrative dans la Bos-
nie, l'Herzégovine et la Bulgarie, et de de-
mander que cette transformation soit ac-
compagnée de garanties efficaces assurant
son accomplissemént sincère, garanties
parmi lesquelles le contrôle à exercer par
les puissances tiendra nécessairement une
des premières places. »
La note anglaise ne comporte aucune de-
mande de garanties, et il faut s'attendre à
dé vivès discussions sur ce point. D'autre
part, l'Autriche né veut même pas du mot
autonomie administrative ; elle s'en tient à
l'introduction des réformes indiquées jpar
la note du comte Andrassy et par le mémo-
randum de Berlin.
Le cabinet de Saint-James semble dési-
reux de ne pas perdre un instant. Il a déjà
désigné son envoyé spécial et les secrétai-
res qui doivent l'accompagner. D'après une
dépèche adressée au Timës, là Russie et la
France ont accepté la proposition de confé-
rence faite par l'Augleterre. Mais il semble-
rait, s'il faut en croire le correspondant de
Bêrlin du mèiôé joumsi, que la conférence
chargée de rédiger les traités de paix sera
précédée par la réunion des ambassadeurs
à Constantinople, réunion dans laquelle ces
derniers élaboreraient un programme des
questions à discuter.
L'agence Havas se dit autorisée à démen-
tir la nouvelle d'après laquelle Sadik-Pacha
aurait informé le duc Decazes qu'une As-
semblée parlementaire turque commence-
rait à tenir ses séances vers le milieu de dé-
cembre et discuterait d'abord un projet de
loi tendant à établir les droits égaux de tou-
tes les croyances religieuses dans l'empire
ottoman.
Nous n'avons pas encore reçu la confir-
mation de l'élection 4e M. Tilden à la prési-
dence des Etats-Unis, mais les chances sem-
blent toujours en sa faveur.
----:-:: —- --:-----:-:-:.
Bourse do Paris
Ciétnre le 8 nov. le9nov. Han»ae Bal-ile
30/8
Comptant.. 72 71 90 10
Fin cour.. 72 07 1/2 71 95 12 1/2
* 1/8 O/O
Comptant.. 10050 101 20 70
SOlO
Comptant.. 10540 105 30 10
FinW 105 32 1/2 105 25 W ,/. 07 1/2
PETITE BOURSE DU gOïR :
Emprunt' 5 0/0. 105 fr. 22 1/2, 30.
5 0/0 turc. 11 fr. 65.
Banque Ottomane.. 381 fr. 87 1/2.
Egyptien. 281 fr. 25,231 87.
—
Il y avait longtemps qu'on n'avait parlé
du fameux article 8 de la constitution !
Une note, de régence Havas, commu-
niquée aux Journaux, donne un regain
d'actualité aux polémiques soulevées à
ce propos pendant les vacances. L'a-
gence Havas annonce qu'une lettre du
ministre des finances au président de
la commission financière « confirme
l'opinion du gouvernement que le Sé-
nat a le droit de reprendre les crédits
supprimés par la Ghambre. » Et les or-
ganes de l'opposition d'insinuer que la
lettre en question aurait été écrite après
une délibération du conseil des mi-
nistres.
Que le ministre des finances ait ou
non écrit ladite lettre, et que le con-
seil en ait ou non délibéré, peu im-
porte. Le gouvernement est libre de son
avis sur cette question comme sur
toute autre, mais son avis n'engage en
aucune façon celui du parlement. On
a trop discuté sur ce point pour que
nous reprenions ab ovo la théorie émi-
nemment constitutionnelle de l'inéga-
lité des deux Chambres en matière bud-
gétaire. Nous nous contenterons d'en
appeler au bon sens de quiconque n'o-
béit pas exclusivement à l'esprit de
parti.
Remettons une fois encore sous les
yeux du public cet article 8 :
« Le Sénat a, concurremment avec
la Chambre des députés, l'initiative et
la confection des lois.
TOUTEFOIS, les lois de finances doi-
vent être, en premier Heu. présentées à
la Chambre des députés, et votées par
elle. »
Qu'est-ce que cela veut dire ?
Rien, absolument rien, s'il s'agitd'une
simple question de priorité,
Beaucoup s'il s'agit d'une question de
prépondérance.
Quelques-uns de nos confrères se
donnent beaucoup de peine pour dé-
montrer que si le législateur n'avait eu en
vue que d'accorder un droit de priorité
à la Chambre en matière de budget, il
n'eût pas eu besoin d'employer ces deux
mots : présentées et votées; il se fût
contenté de dire que ces lois de finan-
ces seraient présentées d'abord à la
Chambre.
Rien n'est plus juste, en effet.
Mais ce qui semble encore plus vrai-
semblable , c'est que le législateur
n'a point voulu mystifier les Cham-
bres de l'avenir. Or, nousldemandons
à tous les esprits sensés, si l'article 8
ne constituait, en réalité, au profit des
représentants directs de la nation qu'un
droit de priorité, serait-il autre chose
qu'une mystification ?
Si le Sénat a le droit de défaire, en
matière de finances comme en toute au-
tre matière, ce qu'a fait la Chambre
des députés, veut-on nous dire à quoi
rime le droit de priorité inscrit à l'arti-
cle 8? Votez les premiers, messieurs
les députés ; ensuite messieurs les sé-
nateurs verront s'ils peuvent accepter
vos décisions. A cela se résume la théo-
rie des partisans de l'égalité des deux
Chambres dans les questions des fi-
nances.
On dit : Est-il vrai, oui ou non, que le
Sénat, dans l'intention du législateur,
a été créé pour s'opposer, s'il en était
besoin, aux coups de tète de la Cham-
bre ? Oui, assurément. Donc, le droit du
Sénat en matière de finances doit être
égal au droit de la Chambre, car sans
cela, il suffirait à la Chambre de bou-
leverser le budget pour, du même coup,
bouleverser la société.La Chambre sup-
primera le budget des cultes, le budget
de la magistrature,le budget de l'armée,
et paralysera ainsi l'action du Sénat,
qui n'eut jamais adhéré à la séparation
de l'Eglise et de l'Etat, à la suppression
des armées permanentes, etc.,. Tout
cela est parfaitement vrai et supérieu-
rement raisonné. Il n'y a qu'un petit
malheur, c'est que le Sénat n'a aucun
besoin de partager les prérogatives de
la Chambre en matière de finances
pour s'opposer à des mesures qui lui
paraîtraient dangereuses et subversives.
Le Sénat n'a point le droit de rétablir
des crédits supprimés par la Chambre,
mais il a le droit de supprimer la Cham-
bre, d'accord avec le président de la
République ; et c'est ce qu'il ne manque-
rait pas de faire, le cas échéant.
En d'autres termes, les prérogatives
de la Chambre en matière de budget ont
pour corollaire le droit régalien attribué
au Sénat et au président de dissoudre
la Chambre.
On voit donc que les craintes témoi-
gnées par les défenseurs trop ardents
des droits du Sénat sont purement ima-
ginaires.
Nous n'ajouterons qu'un mot.
A défaut de la lettre, l'esprit de la
constitution interdit ébsofuntiènt d'in-
terpréter l'article 8 dans 1e sens in-
diqué par l'agence Havas et les jour-
naux de l'opposition. On peut équivo-
quer tant qu'on voudra ; mais on aura
beau dire et beau faire, la constitution
du 25 février a établi un régime qui, de
nom et de fait, est une République.
Nous avons un président de la Répu-
blique, un Sénat, une Chambre des dé-
putés; tous trois électifs. Quel autre
nom donner à une pareille organisation
politique que celui de République? Et
quel est le caractère distinctif du gou-
vernement républicain, sinon de don-
ner partout et toujours la prépondé-
rance au pouvoir qui représente le plus
sûrement la nation, c'est-à-dire au pou-
voir issu directement du suffrage uni-
versel?
- E. ScïiNÉftB.
, —.— -
Le Journal des Débats donne les rensei-
gnements suivants sur la mesure prise par
le ministre des finances pour la transmis-
sion au Sénat des budgets votés par la
Chambre des députés :
Le ministre des finances a adressé au prési-
dent de la commission sénatoriale des finan-
ces une lettre sur les procédés matériels de la
transmission au Sénat du budget voté par la
Chambre des députés, afin d'abréger autant que
possible les délais de cette transmission.
Le ministre fait remarquer qu'après que
toutes les parties du budget (textes de lois et
tableaux législatifs) auront été votées par la
Chambre des députés, il faudra un certain
temps au ministre .des finances pour préparer
un nouvel exposé des motifs èt pour faire im-
primer et distribuer la loi votée aux membres
au Sénat pour examiner le budget, àlacommis-
sion pour nommer ses rapporteurs, aux rap-
pour rédiger, déposer et faire imprimer leurs
rapports, au Sénat enfin pour la discussion, ce
qui pourrait, si on ne prenait pas de précau-
tions, conduire jusqu'à la fin de l'année et em-
pêcher la promulgation avant le Ie' janvier,
car la promulgation après le 1er janvier entra-
verait la perception des impôts et le payement
des dépenses publiques.
Le ministre a donc pris des mesures pour
préparer, aussitôt le vote du budget de chaque
ministère, un état présentant en regard de
chaque chapitre :
1° Les propositions primitives du gouverne-
ment et les crédits votés par la Chambre des
députés ;
2° Les augmentations ou diminutions de
crédits opérées par la Chambre des députés :
3° L'indication des crédits non alloués dont
le gouvernement demande le maintien.
Le ministre a joint à sa lettre, comme exem-
ple, le tableau du bhdget de l'instruction pu-
blique, lequel a été transmis au Sénat sans au-
cune demande de rétablissements de crédits.
Cet état est disposé sur quatre colonnes :
Première colonne, propositions primitives
du gouvernement ;
Deuxième colonne, crédits votés par la
Chambre des députés;
Troisième colonne ; différences (a); augmen-
tation de crédits rb): diminution de crédits :
Quatrième colonne, indication des crédits
non alloués par la Chambre des députés et
dant le gouvernement demande le maintien (a);
sommes (b) ; motifs.
Le Journal des Débats ajoute :
On peut voir, par le résumé que nous don-
nons de la lettre écrite par le ministre des fi-
nances à la commission des finances du Sénat,
que la question de droit constitutionnel traitée
par un grand nombre de journaux n'a été ni
soulevée ni, à plus forte raison, résolue par le
ministre des finances. Ce qui résulte de cette
lettre, c'est que le gouvernement croit avoir le
droit de défendre devant les deux Chambres
les demandes de crédits qu'il a d'abord présen-
tées à la Chambre des députés. Il est bien clair
que si un crédit refusé par la Chambre des dé-
putés est accordé par le Sénat, le crédit en
question ne deviendra définitif qu'après un re-
tour à la Chambre des députés et un vote fa-
vorable de cette Chambre ; car aucun crédit ne
peut avoir d'effet que s'il est accepté par l'une
comme par l'autre Chambre. Il ne peut donc pas
être question d'un rétablissement de crédit
par le Sénat, mais d'un appel du Sénat, sur l'ini-
tiative du gouvernement, à une nouvelle déli-
bération de la Chambre des députés.
:—
LA
QUESTION DES SOUS. OFFltlERS
Le ministère et le Parlement sont
convaincus qu'il y a quelque chose à
faire pour maintenir et fortifier les ca
dres de l'armée. Il est malheureuse-
ment trop certain que le recrutement des
sous-officiers devient de jour en jour plus
difficile. On en fait beaucoup, et d'excel-
lents, meilleurs peut-être que la France
n'en a jamais eu ; mais la plupart s'é-
chappent vers les carrières civiles au
moment même où leurs services seraient
surtout appréciés, dans la force de l'âge
et dans la plénitude de leur capacité mi-
litaire. Comment les retenir? Que faut-il
faire pour attacher au régiment ces ser-
viteurs utiles et modestes qui sont le
nerf de toute armée?
L'institution du volontariat, qui écré-
me les classes, et la réduction du ser-
vice militaire à cinq ans, sont les causes
les plus apparentes du mal. Il y en a
d'autres, moins visibles et plus pro-
fondes. Pourquoi ne dirions-nous pas
franchement que le progrés de l'ipnass-
truction publique et le développement
de la civilisation moderne font du
sous-officier un être à part et un privi-
légié au rebours dans la société fran-
çaise ?
Laissons- la guerre de côté, puisqu'il
est établi que tous les citoyens en état
de porter les armes seront soldats de-
vant l'ennemi, soit qu'ils appartiennent
à l'armée permanente, à la réserve ou
à l'armée territoriale. Il s'agit seulé-
ment ici d'apprécier les raisons qui
peuvent retenir un homme sous les dra-
peaux en en temps de paix. -
Qu on y voie un bien ou un mal, que
l'on s'en plaigne ou qu'on s'en félicite,
letégiment n'est plus, comme aux siè-
cles derniers, un monde à part, une
femille tendrement aimée par 1,500 ou
2,000 braves gens qui n'en avaient,
pour ainsi dire, pas d'autre, et à qui
e drapeau tenait lieu de clocher. Pour
neuf hommes et demi sur dix, c'est une
éccfle obligatoire à laquelle rien ne les
attache lorsqu'ils ont terminé .leur ap-
prentissage, ou, comme ils disent, fait
leur temps.
Dans une société laborieuse et rela-
tivement confortable comme la nôtre,
tout jeune homme bien bâti et muni
d'une instruction quelconque est libre
de choisir entre vingt-cinq ,, ou trente
professions qui toutes sont moins dures
et plus lucratives que le métier de sol-
dat.
Nous sommes loin du temps où le
campagnard , opprimépar son seigneur,
exténué par la corvée, dévoré par des
impôts abominables, s'engageait pour
manger tous les jours un morceau de
pain noir. Aux champs comme à la
ville, le travailleur honnête a sous la
main, non seulement les moyens de
gagner sa vie, mais d'élever une famille
et d'épargner un peu.
L'armée, envisagée comme carrière,
est plus ingrate que l'industrie, que l'a-
griculture, que tous les autres états
sans exception. Les prolétaires du dra-
peau sont les plus pauvres et les moins
indépendants des prolétaires. Les né-
cessités du budget réduisent les offi-
ciers au nécessaire le plus strict : il est
avéré notamment que les sous-lieute-
nants et lieutenants ne gagnent pas
même de quoi vivre : la loi les force à
contracter des dettes qu'ils acquittent
loyalement plus tard.
Etant donnés deux frères dont l'un
entre à Saint-Cyr et l'autre au magasin
du Louvre ou du Bon-Marché, on sait
d'avance que c'est le premier qui aura
besoin du second au sein des honneurs
et de la gloire. Un médecin militaire,
quel que soit son talent, sera toujours
plus pauvre qu'un médecin civil ; un
pharmacien doré sur tranche n'égalera
jamais la fortune du pharmacien bour-
geois de la rue. Les maréchaux de
France eux-mêmes sont des nécessi-
teux, si vous les comparez aux maré-
chaux du commerce et de l'industrie.
Et cependant la somme de talent, de
dévouement qui se dépense dans l'ar-
mée excède infiniment, à grade égal,
celle qui réalise les fortunes bour-
geoises
Il est un âge où tous, civils et mili-
taires, nous pensons nécessairement au
repos. La retraite n'a rien qui déplaise
au manufacturier ou au négociant arri-
vé. Il court au-devant d'elle, souvent
à la fleur de son âge. L'officier la re-
doute et la subit, car elle le réduit à la
portion congrue ; elle limite ses res-
sources à l'heure où ses besoins de-
viennent plus pressants ; elle en fait un
rentier viager, c'est-à-dire un égoïste
malgré lui, le jour où l'infortuné se sai-
gnerait aux quatre membres pour éta-
blir ses fils ou doter ses filles !
Mais enfin l'officier, dans sa médio-
£ iât& volontaire, a de nobles consola-
tions. Il souffre, mais il brille, je ne dis
pas par l'or de ses épaulettes, mais par
l'éclat d'un rôle héroïque. Hommes et
femmes lui savent gré de cette vie sa-
crifiée au pays. Personne, dans le monde
le plus superficiel et le plus sot, ne lui
reproche d'être pauvre. Quelquefois
(pas assez souvent), une riche héritière
s'honore de lui donner sa main. Son
grade, acquis par de loyaux services et
solidement garanti par les lois, est une
véritable propriété. Il a des droits, des
privilèges ; il jouit d'une liberté raison-
nable, on ne lui marchande pas les loi-
sirs.
La condition du sous-officier, telle
que la routine l'a faite, comporte une
pauvreté moins sensible peut-être, mais
sans aucune compensation. Nous ad-
mettons fort bien que l'on passe par là
pour arriver plus haut; nous compren-
drons difficilement qu'on y reste de
propos délibéré. La possession d'état
n'existe pas pour le sous-officier : son
grade est toujours révocable. Condam-
né au célibat perpétuel, comme un
moine, il est cloîtré dans la caserne, où
toutes les responsabilités, toutes les pu-
nitions sont constamment supendues
sur sa tète.
L'usage antique et tort logique qui
donne un jour de liberté par semaine
aux moindres mercenaires de la ville
et de la campagne, n'existe pas pour
le sous-officier. Et quant à l'avenir, s'il
n'a pas le bonheur d'être enrôlé dans
ces armes spéciales où l'on devient
garde de quelque chose après vingt ans
de service, il sait ce qui l'attend! Les
invalides, ou une pension de retraite à
peine suffisante pour végéter dans un
mauvais trou !
C'est un chien de métier, comme je
l'ai souvent entendu dire à de braves
garçons qui comparaient leur sort à
celui de leurs frères,de leurs camarades
plus heureux et moins méritants. Il
faut que cette opinion soit bien répan-
due dans le monde pour que tous les par-
tis politiques et même toutes les clas-
ses de la société proclament qu'il y a
quelque chose à faire. Jamais,.je crois,
question militaire ne s'est plus fortement
imposée à l'attention du pays. Telle est
l'urgence et la gravité du problème que
certains législateurs, dans leur empres-
sement à trouver une solution, propo-
sent, comme M. Keller, de traiter les
sergents mieux que les capitaines, ce
qui me paraît excessif.
ABOUT.
(A suivre.)
LE PARLEMENT
COURRIER DE LA CHAMBRE
Versailles, 9 novembre 1876.
Ce doux budget de la marine n'a pas
voulu prendre fin sans faire parler de lui.
Pour le dernier jour, il a offert au public
français une représentation extraordinaire :
UN HOMME A LA MER
Brame maritime, historique et parlementaire
en plusieurs tableaux.
Mayotte. Connaissez-vous Mayotte? Il ne
faut par rougir pour cela; on peut être très-
honnête homme et ne pas connaître Mayotte.
Mayotteestunepetiteîlede50 kilom. sur 32,
une des îles Comores, au S.-E., par 42° 59'
longitude E. et 12° 50' latitude S., riche en
takamaka blanc, bois d'ébène et bois de
natte, selon Bouillet, et principalement en su-
creries, ajoute la chronique parlementaire.
Mayotte relève de la direction des colo-
nies. Et le directeur du service colonial au
ministère de la marine est M. Benoistd'Azy,
fils de l'ancien député. Il est là assis, au
banc ministériel. Or, il se trouve que la
manne budgétaire pleut sur Mayotte à ce
point que la commission a jugé convenable
de réduire les libéralités ministérielles et
de signaler à la Chambre, dans le rapport
de M. Raoul Duval, des traités postaux lé-
gèrement extravagants que la direction des
colonies a cru devoir conclure directement,
sans tenir compte de la règle qui lui ordon-
nait de passer parle ministère des finances.
M. Germain Casse, s'emparant des cri-
tiques un peu obscures contenues dans le
rapport, opère une charge à fond contre le
directeur des colonies et termine en disant:
Je voudrais bien savoir la vérité, car il en
est qui prétendent que tous ces avantages
octroyés à Mayotte, au détriment du Trésor,
profitent à une certaine sucrerie, et ceux-là
disent encoreque M. Benoist d'Azy, père du
directeur du service colonial, est principal
actionnaire et directeur de cette sucrerie.
D'un coup d'épaule violent, M. Germain
Casse vient de lancer par-dessus bord M.
Benoist d'Azy fils.
Un homme à la mer !
L'amiral Fourichon ne t'ait ni une ni deux:
d'un mouvement irréfléchi, il pique une
tète et voilà M. le ministre de la marine qui
nage au secours de son directeur des co-
lonies : G'est moi. le ministre, qui suis res-
ponsable; ce ne sont pas « des accusations
mal fondées ou des insinuations haineuses
qui me feront abandonner mon collabora-
teur. »
La pleine eau est commencée.
La galerie prend intérêt à ce tournoi aqua-
tique. La droite, qui ne serait pas fâchée de
voir un ministre se noyer, excite de ses
hurrahs l'amiral.
Poum ! C'est M. Raoul Duval qui plonge
correctement du banc de la commission.
Bien que l'acte de M. Germain Casse lui pa-
raisse un peu brutal, il ne lui semble pas
immérité au fond, et, « puisqu'on le force à
s'expliquer sur le fond, il va le faire. » Et
il le fait.
On a exécuté dernièrement dans l'ile
des travaux d'assainissement, de dessèche-
ment de marais. A ce sujet, il a été proposé
aux propriétaires de l'ile une coopération
de travail qui leur allouait le tiers ou la moitié
du sol conquis; mais, en même temps, il
leur était déclaré que leur décision devait
être prise dans les six semaines. Or, les
propriétaires habitent la France, sont re-
présentés là-bas par des gérants, et il faut
trois mois pour avoir une réponse! Cepen-
dant un gérant, un seul, a trouvé moyen
de recevoir la réponse en temps utile ; c'est
le gérant de la sucrerie Benoist d'Azy !
Il est clair que M. Raoul Duval, vigou-
reux nageur, vient de rattraper le directeur
du service colonial, et de le saisir par une
jambe de façon à lui faire boire un coup.
M. Benoist d'Azy tente de remonter à fleur
d'eau. Le voilà à la tribune, tirant sa coupe
tant bien que mal, battant l'eau à droite, à
gauche, et prenant le chemin le plus long
pour aller à Mayotte. Il s'essouffle et n'a-
vance guère. Du reste, quand il peut se
croire sauvé, M. Raoul Duval revient sur
lui, d'une brasse vigoureuse, et, vlan! une
nouvelle passade.
— Chose curieuse à constater : le paque-
bot qui apportait à Mayotte le délai de six
semaines fixé par la direction des colonies
portait en même temps au gérant de la su-
crerie privilégiée l'autorisation nécessaire
pour profiterdes avantages offerts par l'Etat.
C'est ce qu'on peut appeler la passade
avec coup de pied sur les épaules.
Chaque fois que M. Benoist d'Azy tente de
revenir à la surface, une nouvelle poussée
l'envoie à vingt, à trente brasses au-des-
sous du niveau de la mer. M. Raoul Duval
se pique au jeu et redouble de vigueur à
mesure que l'autre redouble d'opiniâtreté.
- L'Etat dépense une somme relative-
ment forte pour la création de routes à
Mayotte. Je me suis fait communiquer un
plan de l'île. Il se trouve que toutes ces
routes convergent à la même sucrerie.
La scène n'est pas émouvante toutefois ;
cethommequiboitcoupsur coup,bienque sa
situation soit certainement pénible, n'excite
pas la compassions il n'a pas de ces mouve-
ments de désespoir qu'on comprendrait en
pareille circonstance. La réaction, qui a
commencé à prendre le parti de M. Benoist
d'Azy, se tait maintenant en présence
des faits apportés à la tribune par M. le rap-
porteur, et l'on n'entend plus que les « Oh ! »
de stupéfaction qui échappent aux républi-
cains.
Quant à M. le ministre de la marine, le
voilà à l'eau, quelque peu refroidi, ce nous
semble, et fort empêtré pour repêcher cette
vieille épave que lui a léguée l'ordre moral.
Il fait la planche, n'osant pas se retirer tout
à fait hors de la portée de ce collaborateur
en perdition, n'osant pas non plus poursuivre
ce sauvetage qu'il a entrepris inconsidéré-
ment.
M. Germain Casse risque une nouvelle
démarche, qui n'est certes pas un coup de
maître : « M. le ministre de la marine, dit-
il, doit regrettera présent les paroles un peu
vives qu'il m'a adressées au début de cette
discussion. Du reste, il est en dehors de
l'incident ; le vote que je vais émettre est
un vote de blâme contre le directeur du
service colonial. »
L'amiral Fourichon est l'homme de la
minute. Parmi de nombreuses qualités, il
a un grand défaut, c'est de sentir beaucoup
trop vivement pour un parlementaire et
d'exprimer ses sentiments avec beaucoup
de vivacité pour un ministre. Les quelques
mots de M. Germain Casse remuent en lui
la fibre chevaleresque et font vibrer un
donquichottismefort peu ministériel. Le voi-
là derechef à la tribune :
— Non ! non ! Pas vous il ne s'agit pas
de vous ! crie le parti républicain tout en-
tier.
Il hésite, descend aux applaudissements
des gauches, et immédiatement la droite de
crier : « Le ministre ! le ministre ! »
La scène se prolonge. La droite a intérêt
à envenimer les choses.
— Mais il devait couvrir son directeur!
hurle M. Haentjens.
L'amiral Fourichon tombe dans le pan-
neau et remonte pour s'écrier : « S'il y a un
vote de blâme, il s'ad resse à moi ! »
La droite applaudit avec frénésie. Par-
bleu ! Qu'est-ce qu'elle demande ? La dislo-
cation du Cabinet.
Par suite de l'impétuosité inconsidérée
du ministre, la situation devient critique.
Au lieu d'un homme à la mer, en voilà deux,
barbotant côte à côte, à bout de souffle. Cha-
cun regretterait de voir noyer l'amiral Fou-
richon, il faut le repêcher.
C'est M. Gambetta qui se charge de cette
tâche. M. le président du budget se jette à
l'eau en guise de bouée.
M. Gambetta nous a montré aujourd'hui,
sous un de ses plus brillants aspects, son
talent multiple. Malgré une droite terrible-
ment houleuse, il manœuvre avec une ha-
bileté remarquable, une présente d'esprit
peu commune et ramène en lieu sur l'ami-
ral Fourichon hors d'haleine.
« Le budget! le budget! Ne nous laissons
pas dévoyer par les questions politiques.
Nous vous avons apporté des chiffres et
nous croyons en avoir établi l'exactitude^
si oui, votez-les. » Par sa sagesse, par son
grand sens pratique, M. Gambetta étonne
ses adversaires et enthousiasme ses amis.
Le ministre de la marine, qui peut eftfift
respirer largement au bout d'une longue
heure, dit de son banc: « Je prie la Cham-
bre de remarquer que les réductions propor
sées par la commission du budget ont été
acceptées par nous. »
C'est le mot de la fin, couvert des applau-
dissements unanimes du parti républicain,
La réaction fait mine piteuse; elle espérait,
un conflit et elle s'aperçoit un peu tard
qu'elle seule est en désaccord avec le mi-
nistre.
Quant à M. Benoist d' Azy, il a dispa-
ru. Que les ondes lui soient légères ! M.
le ministre de la marine tenait absolument,
par bonté d'âme, à le couvrir, et e'ast lui
qui, sans le vouloir, a fait passer la der-
nière vague sur la tète du directeur du ser-
vice colonial. Il l'a noyé tout habillé, voilà
tout.
M. Benoist d'Azy n'est plus. Il reste en-
core M. Benoist de Mayotte; maisJelui-la
comprendra certainement que sâ plâce n'est
pas à la tète du service colonial.
PAUL LAFARGUE.
COURRIER DU SÉNAT
A trois heures, M. Martel montait au fau-
teuil ;
A trois heures un quart la séance était
ouverte:
A quatre heures un quart elle était levéfe
et le Sénat s'ajournait au mercredi 15 no-
vembre.
Nous devions aujourd'hui terminer la loi
sur l'administration de l'armée; le Sénat
avait ajourné les articles 16, 17, 18 et 19,
relatifs au service de santé; la -commission
avait besoin de se concerter avec M. le mi-
nistre de la guerre. Cet ajournement n'a été
d'aucune utilité. M. de Freycinet vient ex-
poser à la tribune que l'on n'a pas pu se
mettre d'accord, mais qu'il est possible
qu'on s'entende entre la première et la se"
conde lecture.
Le Sénat est donc appelé a voter provi-
soirement la rédaction qui lui est soumise.
M. de Fleycinettient. à bien préciser les
termes de la question et montre le incon-
vénienls résultant de l'état de choses actuel.
Le médecin soigne les malades : mais les
attributions de l'intendant sont telles qu'il
peut à chaque instant corriger ou biffer les
ordonnances du médecin. Le rapporteur
a encore montré aujourd'hui sa connais-
sance parfaite des choses de l'armée -«t
augmenté sa réputation d'orateur d'afiiaires.
Son discours n'a pas été long; il ne contient
rien d'inutile< Personne n'a répondu et la
Sénat a voté qteil passerait à une secon*
de lecture. -,
Puis on a adopté ou pris en considération
cinq propositions de loi en moins de dix
minutes. M. Martel est un président - pré-
cieux ! Il mène les séances tambour bat-
tant.
La Chambre haute s'est ajournée au mei^
credi 15 novembre. Cette fois on ne peut
lui adresser aucun reproche. Elle n'a réel-
lement rien à faire. La Chambre des dépu*
tés n'a pas terminé l'examen du budget ét
l'on ne peut procéder à la seconde lecture
de la loi sur l'administration de l'armü clu4
cinq jours après la première délibération.
A mercredi ! Ce jour-là sans douté on ttt-
posera le rapport sur la proposition Gati-
neau, et l'on demandera la mise à l'ordre
du jour des élections sénaioriales.
P. DE SIENNE.
LA PROPOSITION (JATINEAU
AU SÉltfAT
A la date du six novembre, M. le président
de la CUambv6 des députés.a tvau^œi^au pré-
sident du Sénat la proposition de loi ayant pour
objet de mettre fin-aux poursuites pour faits
relatifs à l'insurrection de la Commune.
Nos lecteurs n'ont pas oublié la discussion
qui.eut.ljeu à la Chambre et F attitude prise en
cette circonstance par le gouvernement. Des
négociations avaient été entamées et l'on avait
pu croire que le cabinet était daccord avec la
commission pour admettre la cessation des.
poursuites. On n'allait pas plus loin, e, mais 6â
point paraissait acquis. Le projet or con-
tenait d lenffiRJL ,. el' au
jury les crimes de droit commun exceptés de
la prescription. On savait que le gouvernement
voulait maintenir la juridiction des conseils
de guerre. M. Dufaure combattit le projet en
entier et le lendemain la Chambre votait le
texte de la commission.
Nos adversaires-étaient radieux en voyant le
cabinet ou tout au moins M. Dufau re endèsac-
cord avec la Chambre, et ils comptaient sur la
Sénat pour accentuer encore le dissentiment.
Hier, en effet, les bureaux avaient à nommer
la commission chargée d'examiner la proposi-
tion. Grâce à l'inexactitude de nos amis, nous
n'avons que quatre commissaires sur neuf. Ce
sont: MM. Jules Simon, Bertaud, Pelletan et
Cazot : les commissaires de droite sont : MM.
Paris, de Gavùrdie, Porriquet, de Peyramoat
et de Meaux.
Malgré leur succès, les adversaires du projet
de loi paraissaient très-émus. C'est que cette
fois le cabinet a pris une attitude qui décon-
certe tous leurs projets.
Hier matin, en effet, le conseil des ministres
s'est occupé de cette question. La discussion
a, dit-on, été très-vive. M. de Marcère, qur a
voté à la Chambre la première partie de la loi,
a insisté pour que le cabinet prit une attitude
très-nette et se déclarât partisan de la cessa-
tion des poursuites. M. le ministre de J'iirte-
ri eur obtint gain de cause et. afin qu'aucun
doute ne put s'élever dans les esprits, il fut
convenu que les ministres faisant partie du
Sénat se rendraient dans leurs bureaux et ex-
primeraient J'opinion du gouvernement.
Dans le cinquième bureau, en effet, St. Léon
SajO prit ln parole..Il déclara que l'article lr
était en parfaite concordance avec la lettre
par laquelle le maréchal de Mac-Mahon expri-
mait le désir qu'on nefit pas de nouvelles poth"
suites ; cet article, loin d être considéré ptft;e
gouvernement comme une réponse httsiae àia
lettre du président, lui paraît en être le corol-
laire tout naturel. Le cabinet ne peut pas ad-
mettre ,une loi qui de prés ou. de loin l'esse;
bîerâlt àf«àrâstie, mais en revanche H é. tm
grand désir d'apaisement, et c'est pour cela
qu'il adopte l'article 1er et qu'il demandera au
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