Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1879-11-18
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 18 novembre 1879 18 novembre 1879
Description : 1879/11/18 (Numéro 4408). 1879/11/18 (Numéro 4408).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Mardi 1S Novembre 1879
mrywuMBW» ■wmnw—MMIIUMIIII iinmnaw»
PARIS
Dn an. . . . . , . . . ....... . . 55 fr. #
Six mois 28 50
Trois mois . . 15 »
Un Numéro, à Paris 15 cent.
— Départements. 20 —
BUREAUX
Paris, 10, line des Sainls-Pères ,«?:.■
On s'abonne, & Bcnie, place da (ïesù. >S
N 4 4-108 — Édition quotidienne';
Mardi 18 Novembre 1879
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DÉPARTEMENTS
■" On cui « . • • « « • v • t t ■ '. « à i " 55 fr. &
Six mois 23 ' 50
Trois mois 15 »
Édition semi-quotidienne
Un an, 30 fr. — Six mois, 16 fr. — Trois mois, 8 fr. 50
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés
ANNONCES
Mil. Ci. LÀGRAiîQB, OERF'et (/*, 6, place de la Bourse
FRANGE
PARIS, 17 NOVEMBRE 1879
Le Sirr/c, qui paraît être le confident
du ministre de l'intérieur, nous donne
aujourd'hui le texte d'une circulaire
qu'avait signalée l'Agence Bavas et
dont le Siècle, qui la qualifie d'impor
tante, déclare qu'il ne saurait « trop
approuver l'esprit. »
Voici la circulaire qui faitla joie du
Siècle :
Monsieur le préfet,
J'ai l'honneur d'appeler votre vigilance
sur deux infractions graves aux prescrip
tions de la loi de germinal an X, qui m'ont
été signalées à plusieurs reprises comme se
produisant dans un certain nombre de dio
cèses.
La première consiste dans l'omission vo
lontaire,par les curés et desservants de la
prière : Domine salvam fac Jtempublicam,
qu'ils sont astreints à réciter en vertu du
concordat et de l'article 51 de la loi orga
nique. Il importerait de rechercher si ces
ecclésiastiques obéissent, en agissant ainsi,
à des instructions parties de l'évêché ou
s'ils ne suivent que leurs inspirations per
sonnelles. Vous voudrez bien me trans
mettre les renseignements que vous aurez
recueillis sur ce point et y joindre voire
avis motivé.
Il est un second abus sur lequel je vous
invite à porter votre -swTfttfamM; . certains
évoques quittent leur diocèse pour un temps
plus ou moins long, sans demander l'auto
risation du gouvernement, violant _ ainsi
l'article 20 de la loi de germinal et laissant
en souffrance les intérêts qui leur sont con
fiés pour aller au loin prendre part à des
manifestations collectives et concertées;
plusieurs se rendont-à Rome pour y entre
tenir directement avec le Samt-Siège des
rapports dont le gouvernemeni devrait au
moins être avisé. > -
Je vous serai obligé, si vous venez il ap
prendre le départ du prélat placé à la tête
«le votre département pour une destination
quelconque, et en particulier pour Rome,
rte m'en référer sans relaril.
Recevez, etc.
Le ministre de l'intérieur et des cuites.
C h. L epkre.
En ce qui concerne la première
partie de cette circulaire,.il y a lieu de
s'étonner du doute émis par l 'auteur
de la circulaire. En dehors de lui, per
sonne, en effet, parmi les catholiques,
n'ignore que partout les évêques ont
prescrit la récitation da la prière qui
l'ait l'objet de la sollicitude ministé
rielle. 11 est donc superflu de deman
der aux préfets si « les infractions gra
ves » signalées par - M. Lepère sont
dues « à des instructions parties de
3'évêclié » ou aux « inspirations per
sonnelles » des curés que le minisfre
dénonce à la vigilance de ses préfets.
Ajoutons qu'en admettant l'existence
de ces « infractions graves », il y a lieu
de trouver au moins étrange la sollici
tude du ministre pour obtenir des
prières de l'Eglise lorsque, d'autre
ûart, le gouvernement s'applique si
bien'à combattre l'Eglise et lorsque
ses membres font si peu de cas de la
religion qu'on ne les voit jamais as
sister aux messes où se chante le Do-
. mine salvam.
JMous devons dire, d'ailleurs, que le
ministre pourraitbien être trompé par
de faux rapports lorsqu'il impute au
seul mauvais vouloir des çurés cette
pas réciter la seule prière à laquelle pa
raît tenir le goUvernementrépublicain.
Ainsi, nous connaissons personnelle-
ilement une paroisse où, depuis quel'é-
vêque a prescrit le chant du Domine
.salvam fac rempublicam , le curé fait vai
nement appel au bon vouloirde ses pa
roissiens pour chanter le Domine sal
vam, avant que lui-même récite l'orai
son qui doit suivre. Dans une paroisse
qui compte plus de trois cents âmes,
■il ne s'est pas encore trouvé un répu
blicain de bonne volonté pour prêter
ie secours de sa voix à la république
<;n détresse. Nous n'apprécions pas le
fait, nous le constatons, afin de mon
trer que le zèle du ministre risque par
fois de s'exercer h tort et peut se trom
per d'objet.
Voilà pour la première partie de la
circulaire. Quant, à la seconde, nous
demanderons à qui elle peut bien s'a-
îs ne sachions pas qi
un seul évêque « pli
département ». Jusqu
ïîous avions cru que l'évêque était
vAac.é à la tête d'un diocèse. Il paraît
que M. Lepère a changé tout cela.
Quoi qu'il en soit, M. Lepères'abuse
siï*/?spère amener les évêques à recon
naître la légitimité de son ingérence,
«n une question qui ne le regarde pas.
On sait ce qu'il faut pen^r des articles
■organiques, fct quel crédit l'on doit à
e.eux de ces articles qui, bien loin
«d'être comme le développement ^ du
■concordat, en sont la négation. L'ar
ticle 20 est de ce- nombre. Inspiré par
les idées joséphistes. il n'aspire en ef
fet à rien moins qu'à enchaîner la li
berté des évêques pour des démarches
.dont la plupart leur sont recomman
dées le jour mêffl.o-de leur sacre et font
na rtin de leurs obligations épiscopa-
j es , >4insi en est-il par exemple du
vovatT e ad limina, qui semble particu
lière me i n t suspect à M. le ministre
dè l'intérieur, «puisque l'espionnage
qu'il ^einande'à .*es préfefj» doit, selon
lui, viser tout particulièrement les
voyages des ôw7 ues ^Ronto.
Ici encore nous J^nstatons d ;Ui*
leurs que ie'sTministres républicains
vont plus loin que ne le fit le gou
vernement de Napoléon III en ses
plus mauvais jours. Ils y perdront
également leurs peines. Sous l'empire
les évêques n'ont pas consenti à recon
naître des prétentions qui visaient à
contrôler leurs rapports nécessaires,
soit avec Rome, soit avec leurs ouail
les; ils n'y consentiront pas davan
tage sous la république. L'erreur de
M. Lepère tient sans doute à ce qu'il
prend les évêques pour des fonctionnai
res soumis à sajuridiction civile pourles
choses mêmes qui sont de leur minis
tère pastoral. Or, les évêques ne sont
point des fonctionnaires ; le ministre
ne devrait pas l'ignorer.
A uguste R oussel.
Le conseil municipal de Paris, qui
se recrute maintenant parmi les an
ciens membres de la Commune, de
vance à grands pas le gouvernement
dans les voies de la persécution.
Après avoir donné le signal de l'ex
pulsion des frères et des sœurs des
ecoles communales, il annonce l'in
tention de chasser les catholiques des
églises. C'est à quoi tend le rapport
présenté par un sieur Jules Roche, au
nom de la commission du budget, sur
le chapitre des dépenses du culte. Le
procédé est sommaire; il consiste à
attribuer purement et simplement la
propriété des églises à la ville de Pa
ris et à faire du clergé et des fidèles
de simples bénéficiaires à titre gratuit.
M. Roche conclut de cette situation
que la ville immobilise, au profit du
culte catholique, un capital de 200
millions dont elle pourrait faire un
meilleur usage.
Le rapporteur ne demande pas en
core, contre toute loi, que les églises
soient retirées aux catholiques ou mi
ses en location comme des immeubles
ordinaires, mais son rapport impli
que pour l'avenir cette conclusion.
En attendant, M. Roche pose un pré
cédent à l'égard des maisons-mères des
frères de la Doctrine chrétienne et des
sœurs de Saint-Vincent de Paul, dont
la ville se prétend également pleine et
entière propriétaire. Appliquant ses
théories aux deux maisons, il invite,
au nom de la commission du budget,
le préfet de la Seine à congédier dans
le plus bref délai les frères et les sœurs
des immeubles anciennement affectés
à leur usage.
Quant à la question plus générale
des églises, il émet le vœu que « la lé
gislation soit modifiée au plus tôt, de
manière à ce que les communes re
couvrent la libre disposition des im
meubles qui leur appartiennent et qui
sont actuellement consacrés aux cul
tes, et à ce qu'elles ne soient plus sou
mises à aucune charge relative aux
diverses religions. »
M. Roche a mis dans les considé
rants de son rapportée qu'il ne pou
vait mettre encore dans ses conclu
sions. Toute la haine antireligieuse des
radicaux, tout le fanatisme brutal et
stupide des lilïre-penseurs matérialis
tes est, là. En même temps, nous y
avons un avant-goût de la législation
de l'avenir.
Il serait superflu en ce moment de
traiter de la propriété des églises que
nous revendiquons, au moins dans
une certaine mesure, en vertu des lois
existantes et de nos titres plus anciens
et plus certains encore que les lois.
Nous donnerons le rapport du citoyen
Roche, comme expression des ten
dances du parti radical. Nous aurons
à y discuter ce qui concerne particu
lièrement les deux maisons-meres des
frères de la Doctrine chrétienne et des
sœurs de Saint-Vincentxle Paul, puis
que le rapport conclut à l'expulsion
immédiate de ces deux congrégations.
Le préfet de la Seine, invité à exé
cuter les résolutions de la commission,
voudra sans doute y mettre toute la
diligence possible pour être agréable
au conseil municipal. Les deux véné
rables instituts rétablis, au sortir de
la Révolution, par décret du gouver
nement et plus encore par la voix pu
blique, sont menacés d être jetés à la
rue par la brutalité des tyranneaux
municipaux. C'est trop braver la pa
tience des catholiques et de tous les
honnêtes gens avec eux.
Le Journal des Débats compte parmi
les feuilles les plus obstinément opti
mistes à l'endroit de la prospérité ré
publicaine. Il n'en est pas qui inter
prète plus systématiquement eu l'hon
neur de la politique économique du
pouvoir les chiffres d'augmentation de
receltes provenant presque exclusive
ment d'un accroissement considéra
ble de nos importations, Ces appa
rences décèlent pourtant une situation
très mauvaise, et nous avons vu que
le Soir, tout républicain qu'il est et
dévoué au libre-échange, a dû an foire
l'aveu. Aujourd'hui c'est dans le Jour
nal des Délais lui-même que nous li
sons ce qui suit :
. Si l'on consultait l'état général de l'in
dustrie et de l'agriculture de France, on
verrait que l'ensemble des circonstances
économiques justifie peu un accroisse
ment des salaires. Dans beaucoup d'indus
tries fin §'est vu contraint do réduire soit
le prix de la nîaln-d'fBuvre, soit le nombre
des jours do travail dans la semaine, çoit
le nombre d'heures dans la journée. Dans
certaines campagnes, celies du Midi par
j £;j itj salaires agricoles sont depuis
deux ou trois ans tombés de moitié, parfois
de plus encore.
Voilà des faits qui concordent bien
mal avec les assertions ordinaires du
Journal des Débats , concernant l'état
prospère de l'industrie sous le régi
me du libre-échange. Nous en prenons
acte/
La République française trouve très
bon que les journaux cléricaux, réac
tionnaires, etc., soient poursuivis et
condamnés, mais elle trouve très mau
vais que les journaux ainsi traités
osent prétendre que, si les républicains
ont promis la liberté de la presse, ils
ne songent guère à la donner.
Il lui est surtout désagréable d'en
tendre dire qu'en matière de presse la
République rappelle l'Empire. Aujour
d'hui encore, elle reproche à la Gazette
de France et au Gaulois de prendre texte
de la condamnation de l'Univers pour
affirmer que les journaux ne sont pas
libres et que les lois du régime impé
rial sont appliquées avec zèle par le
gouvernement républicain.
"Cependant, c'est en vertu du décret
vient d'être condamné
Si ce n'est pas là une application de
la législation impériale, qu'est-ce
donc?
Il faut ajouter que pour le délit de
reproduction de fausses nouvelles,
j gée sous l'empire. Jamais, non plus,
pour "le même cas, jugement aussi ir
rité ne fut rendu.
Nous croyons, enfin, que jamais
sous l'empire on ne vit président
de tribunal siéger dans un procès de
presse après que le Journal officiel eût
publié un décret l'appelant à d'autres
fonctions.
M. Delesvaux, ce magistrat si atta
qué, si insulté, même après sa mort,
n'eût pas voulu faire cette preuve de
zèle. Cela était réservé à M. Manau,
républicain de la veille et partisan
de la liberté absolue de la pressentant
que le parti radical fut un parti d'op
position.
Voici le joli article que publie la
Patrie au sujet du jugement rendu
contre nous sous là présidence de
M. Manau:
. " . FANTAISIE JUDICIAIRE
Nous avons annoncé hier que la 10° cham
bre correctionnelle, à Paris, a rendu un ju
gement longuement motivé, qui condamne
par défaut le gérant de Y Univers à mille
francs d'amende, aux dépens et à l'inser
tion du jugement dans le délai de trois jours
en tête du journal.
Mille francs pour une nouvelle emprun
tée à la Gazette du Midi, nouvelle qu'on
croyait évidemment exacte, sans quoi on
se fût bien gardé de la donner! la somme
est grosse et la peine est sévère.
On se demandait pourquoi la justice
frappe avec cette rigueur un journal qui
défend chaque jour la magistrature et la
justice contre les projets ou les attaques
du radicalisme. Une feuille radicale a pris
soin, hier matin, de nous expliquer cette
faveur particulière. Nous y lisons :
« Il (le tribunal) a rendu un jugement
« dans lequel il déclare assez malignement
« que Y Univers, en raison des principes d'or-
« dre et de conservation, dont il se prétend le
« défenseur, doit se montrer plus scrupuleux
« que tout autre, et le condamne à 1,000
« francs d'amende et à l'insertion du juge-
«ment.»
Il y-a tout un monde nouveau dans cette
théorie et dans ce considérant — s'il est
authentique.
En procédant selon cette logique, peut-
être républicaine, les tribunaux et les cours
arriveraient à créer une justice toute nou
velle qui rappellerait un peu les caricatures
de Daumier.
— Accusé, dirait le président, vous avez
été cinq fois déjà condamné pour fausses
nouvelles, calomnies, diffamations, offen
ses à la magistrature. Vous êtes un incor
rigible. Vous êtes inculpé cette fois encore
de fausses nouvelles : c'est un péché d'ha
bitude; considérant qu'on ne peut espérer
de vous rien de bon, le tribunal use d'in
dulgence et vous condamue à 55 francs d'a
mende.
Le lendemain, autre, procès, autre in
culpé. On entendrait dos considérants
comme ceux-ci :
— Considérant que X... est un homme
honorable, que le journal dont il est le gé
rant se fait remarquer, en toute circon
stance, par son respect pour la vérité, par
l'exactitude de ses nouvelles et la modéra
tion de son langage ;
Que, d'ailleurs, le journal incriminé se
distingue par l'énergie avec laquelle il dé
fend la magistrature contre les calomnies
de la presse radicale; qu'il proteste sans
cesse avec autorité et avec talent contre
tous les projets élaborés en vue de dimi
nuer l'indépendance des magistrats et le
prestige de la justice;
Que, par ces motifs, lo gérant X... mé
rite d'être traité avec une rigueur parti
culière ;
Le condamne en Ir.ois mille francs d'a
mende, aux dépens et à l'insertion.
Dans cet ordre d'idées, si Giile et Abadie
paraissaient devant un tribunal correction
nel pour avoir vol? deux cents francs — do
la braise, comme dit Gille—les juges, con
sidérant que c'est bien modeste pour d'aus
si grands coquins d'être descendus ït une si
petite opération, les condamneraient avec
une douceur toute maternelle à: quelques
jours de « turne » — encore le style de ces
aipiables personnages.
' En revanche, si.' après toutp upe vie de
probité et de travail, un malheureux avait
détourné cette même somme, il se verrait
foudroyé par le plus sévère châtiment que
ië qoda pénal puisse édictée. :
On irait si loin dans cette voie, qn selan-
cerait dons des déductions si extraordinai
res que nqus préférons nous arrêter.
Tout nous porte à croire que la feuille ra
dicale, en publiant ce pré tendu considérant,,
a voulu faire un acte rempli de malice etin-
sinuer que les journaux conservateurs doi
vent s'attendre à cire particulièrement mal
traités..
Ce qui nous autorise, du reste, & cette
supposition, c'est que la feuille radicale
donYnous parlons appelle la magistrature :
« toute de robe et de toque qui grouille
dans les antres deThémis. »
La même feuille dit encore : « On votera
« peut-être le divorce, puis un remaniement
« de l'ex-magistrature, ce corps depuis long-
« temps défunt et si peu embaumé. »
Assurément, niYUnivers, ni aucun jour
nal conservateur n'imprimerait dans ses
colonnes un langage aussi impertinent, et,
s'il s'en avisait, sa légèreté ne resterait pas
impunie.
La îeuille radicale qui traite de la sorte
la magistrature et la justice qu'elle rend
était bien capable d'inventer le « considé
rant » dont nous venons de parler, et nous
persistons à penser qu'il n'est éclos que de
son imagination.
La Patrie a tort de prêter au journal
qu'elle cite le « considérant » qui l'é-
tonne. Il se trouve, sauf quelques va
riantes de formes, dans le jugement
par lequel M. le magistrat Manau a
couronné sa carrière de président de
la 10 e chambre du tribunal correc
tionnel.
Un nouveau conseiller
^us ce titre; uniit dans \VL~~G~atette
de France :
On s'est étonné dans divers journaux de
la nomination do M. Manau au poste de
conseiller à la cour do Paris. On a fait à
ce propos maintes observations, présenté
maintes critiques, et cependant si l'on
avait voulu se rappeler l'origine de la for
tune de M. Manau comme magistrat, on
aurait été moins surpris. M. Manau, avant
d'appartenir au tribunal de la Seine, avait
été procureur général à Toulouse après le
4 septembre; à cette époque, simple avo
cat îi Toulouse et conseiller municipal, il
s'était, de sa propre autorité, et sous la
protection de M. Armand Duportal, préfet
de Toulouse, emparé révolutionnairement
du pouvoir et présidait une commission
chargée de tous les pouvoirs administratifs,
'politiques et judiciaires. Il procéda à la ré
vocation des magistrats du département.
La lecture des dépêches du gouvernement
du 4 septembre au sujet du rôle joué par
M. Manau est fort intéressante. En voici
quelques-unes :
Toulouse, o sèptembre 1870, 3 h. 50.
N° 839. — Commission départementale au citoyen
ministre de la justice, Paris
La république a été acclamée à Toulouse avec
le plus grand enthousiasme Mer soir.
L'ordre ie plus parfait règne dans le départe
ment.
Le conseil municipal élu au mois d'août der
nier, confirmédans ses pouvoirs par l'acclamation
populaire et investi par elle du pouvoir révolu
tionnaire, vient de nommer deux commissions
prises dans son sein, l'une dite commission muni
cipale, chargée de tous les pouvoirs communaux,
et l'autre dite commission départe mentale, chargée
de tous les pouvoirs administratifs, politiques et
judiciaires intéressant le département.
La première est composée des citoyens Gatien-
Arnoult, président ; Mounié, Bibent, Castelbou,
Tourné, Esquié.
La deuxième, des citoyens Manau, avocat, pré
sident, Cousin, Mulé Antonio, Pastre, Bégué,
Esparbês.
La commission municipale est en permanence
pour s'oceuper de la distribution des armes aux
patriotes. La commission départementale, qui a
l'honneur de se mettre en rapport avec vous,
vient, par son premier acte, de charger plusieurs
patriotes des trois arrondissements de la Haute-
Garonne de former les commissions d'arrondisse
ment qui devront remplacer les sous-préfets.
Elle a cru devoir ordonner la continuation des
opérations de recrutement et de révision par les^
fonctionnaires qui en étaient déjà chargés.
Le président de la commission départe
mentale de la Haute-Garonne,
J. M an au , avocat.
Toulouse, S septembre 4170,7 h. soir.
V 8i2. — Commission départementale au citoyen
ministre de la justice, Paris.
Lé conseil municipal de la ville de Toulouse
vient do nous nommer membres d'une commis
sion départementale chargée de tous les pouvoirs
administratifs, politiques et judiciaires du dépar
tement. Cette commission est ainsi composée :
J.-P. Manau, avocat, président ; Gustave Cousin,
avocat; Léon Pastre, propriétaire; Joseph Begué,
docteur-médeci d ; Antonin Mulé, homme de lettres;
Esparbôs, comptable, tous membres du conseil
municipal. Nous nous empressons de vous faire
prrt de la création- de cette commission, et nous
signalons à votre attention la délégation des pou
voirs judiciaires qui lui a été faite. Ce n'est pas
sans intention que celte délégation a eu lieu.
A Toulouse, les magistrats du parquet ont été
les persécuteurs de la démocratie et de la presse
républicaine. La population émue et irritée dé
sire ardemment leur révocation immédiate. Il
importe, dans l'intérêt de l'ordre, que satisfac
tion soit donnée sans retard à l'opinion publique.
Nous allions nous-mème procéder provisoirement
à cette révocation et au remplacement de ces
fonctionnaires; mais nous avons jugé convenable
auparavant de vota demander un télégramme
autorisant les mesures que nous croyons urgent
de prendre. Nous l'attendons. Nous vop,s deman
dons même autorisation pour les parquets de no3
trois arrondissements.
Vive là République!
Salut et fraternité.
Pour la commission départementale,
Le président : J.-P. M anau , avocat,
docteur en droit.
. P. S. — Nous sommes en permanence, atten
dant votre réponse, pour agir ce soir mf me.
Toulouse, 0 septembre 1870, i h. soir.
N" 857. — Procureur général et procureur Répu-
llique, à justice, Paris.
Une commission départem,estais ge disant in
yestie 4e pleins pouyoirs administratifs, politiques
et judiciaires nous fait signifier à l'instant un ar
rêté de révocation.
Quel compte devons Y nous tenir de celte noti
fication ? i|evonp-nqos remetire le service?
Le procureur général, Léon Dypftfc..
Le procureur sjè la tyépuljliquè B ïiî.çt,
Toulouse, 6 septembre 1870, H h. 48, soir.
N° 863. — Président commission départementale
au citoyen ministre de l'intérieur, Pam
Des manifestations fâcheuses ont lieu de la
part de la mobile. Il est nécessaire, pour les faiié
cesser, de donner de suite aux soldats le droit
réclamé d'élire leurs officiers.
Il y a urgence extrême à donner cette autori
sation. Attendons la réponse télégraphique. Les
conseils de révision fonctionnent sans relâche.
Population ardente pour la résistance à l'en
nemi.
Ordre règne, J. M axau.
Toulouse, 7 septembre 1870, 1 h. matin.
N° 8G6. — Président commission départementale
au citoyen ministre justice, Paris.
Nous avons dû considérer votre silence après
notre dépêche comme une' approbation de la me
sure de révocation dçnt nous vous démontrions
la nécessité, daus l'intérêt de l'ordre. Aussi nous
avons révoqué les citoyens Léo Dupré, procureur
général, et Bellet, procureur de'la République.
Notification de notre arrêté parlant à leur 'per
sonne. — Le service est assuré aux deux par
quets par les substituts. '
La population est enchantée de cet acte éner
gique accompli envers deux persécuteurs de la
démocratie, J. M anau.
Toulouse, 8 septembre 1870, 6 h., soir.
N° 879. — Préfet à justice, Paris.
Le procureur impérial Bellet, révoqué par com-
mision départementale/résiste et continue à exer
cer ses fonctions. Veuillez ratifier d'urgence cette
révocation en la confirmant dans votre arrêté;
l'opinion publique et la nécessité de maintenir
l'ordre l'avaient rendue nécessaire.La commission,
avant d'agir, vous avait avisé par dépêche et avait
au besoin demandé votre autorisation. Votre si
lence après cette dépêche avait été interprété
comme une autorisation. Le procureur se rit de
' la mesuré prise. Des mesures coercitives sont né
cessaires pour faire respecter l'acte patriotique et
légitime de la commission et son autorité. Donnez-
moi autorisation de les prendre, réponse télégra
phique indispensable pour- faire cesser cette si
tuation. Armand DuronTAL.
Toulouse, 3 février 1871, 3h. lo, soir.
M 0 7,190. — Procureur général à Justice,
Bordeaux.
Président Degrand refuse de demander sa re
traite. Il veut remonter sur son siège ou être
frappé. Statuer d'urgence. M anau.
Toulouse, 9 février 1871, 6 h. 30, soir.
: N° 7,132. — Procureur général à Justice,
Bordeaux.
Degrand, président déchu, se propose de remon
ter sur son siège lundi. Suis prêt àfaire exécuter
le décret qui le révoque, même par arrestation.
Donnez-moi vos instructions tant pourlui que ses
assesseurs au besoin ou pleins pouvoirs. M anau.
La Gazette de France, qui reproduit
les dépêches ci-dessus, est loin cepen
dant de publier le dossier complet de
M. Manau. Sans prétendre le complé
ter, nous y ajouterons quelques dépê-
ches se rapportant à l'entrée de M. Ma
nau dans la magistrture. Voici en
quels termes M. Duportal présentait
M. Manau au ministre de la justice,
qui était alors M. Crémieux.
Toulouse, 9 septembre 1870.
Préfet de la Hautè-Gamnne à ministre
de la justice, Paris.
J'attends, suivant votre dépêche, remplacement
du procureur de la République Bellet. D'accord
avec Saint-Gresse, procureur général, je vous de
mande, dans l'intérêt d'une action commune,
comme acte de justice envers un proscrit de dé
cembre, arrêté par M. Piou, et envers l'homme
qui vient de remplir avec bonheur et dévouement
les fonctions de président de la commission dé
partementale, à Toulouse, et de maintenir le
plus grand ordre, la nomination de M. Jean-Pierre
Manau, avocat, docteur endroit, ancien secré
taire de Ledru-Rollin en 18, exilé pendant quatre
ans, poursuivi en 81 et 58, aux fonctions de pre
mier président près la cour d'appel de Toulouse.
Jules Favre et Picard vous diront ce que vaut ce
choix, excellent sous tous les rapports. Ils l'esti
ment et l'aiment beaucoup.,..
D upoutal.
1 En même temps que M. Duportal,
d'accord avec Saint-Gresse, recomman
dait M. Manau pour le poste de pre
mier président, M. Saint-Gresse se re
commandait lui-même pour ce poste,
et appuyait la nomination du trop'
confiant M. Manau à la plaee de...
procureur de la république :
Toulouse, 10 septembre.
Le procureur général à M. Hérold, secrétaire gé
néral du ministre de la justice à P mis.
Réponse à votre lettre de ce jour. Le chois de
Manau, comme procureur de la République, se
rait excellent. Ecrirai demain.
S aint-(ïhessk,
procureur fénéral.
H fut ainsi fait. M. Saint-Gresse fut
nommé premier président, et M. Ma
nau procureur de la république ; mais
bientôt après il fut promu au poste de
procureur général.
M. Duportal, dans son livre ;
Commune à Toulouse, s'exprime ainsi
à ce sujet ;
J'avais poussé la condescendance pour cet
ami des mauvais jours, pour cet avocat de mes
petites causes extra muros, jusqu'à demander
pour lui la première présidence de notre cour
4'appel, Il avait lui-même libellé la dépêche. Je
n'avais fait que signer. Voyez-vous M c Manau,
ce procureur général d'un jour et pour cause de
réparation encore ! premier président ds la cour
d'appel de Toulouse? (1 faut réellement avoir
brûlé ges vaiseaux devant le décorum adminis
tratif pour oser faire de pareilles propositions au
garde des sceaux.
Et je i'avais fait sans sourciller, pour oh-
tenir au proscrit Manau la réparation qu il ambi
tionnai!; étaient médiocres mon souci de la fonc
tion et mon désir d'en relever l'éclat par le fonc
tionnaire.
J'avais plus fait eneore pour cet ex-ami. Après
avoir contribué à l'habiller de la robe plus mo
deste et plus en rapport avec sçs «îérites de pre
mier avocat générai, j-; consentis, sur sa dç.
inar. !i, à ie recommander à Gambetta pc;ur lui
obtenir l'hermine de procureur gtewai/Kt nous
réussîmes cette fois,
Nous n'ajouterons aucun tvail à ce
portrait de .\J. le conseiller Manau,
point par hû-mOme et par amis
politiques.
L'éducation nationale
ET M. JULES FERRY
Invité par le congrès dit « libre et
laïque de l'éducation », qui siégeait
récemment à Paris, M. le ministre de.
llnstruction publiq»ôs«a«»piâûa^ae.& ,
regrets de ne pouvoir pas assister à la
séance à laquelle il était convié. Le mi
nistre termine en ces termes son épî-
tre au secrétaire de la réunion pédago
gique : « Je crois inutile d'ajouter que
je suis avec le plus vif intérêt les tra
vaux d'une société dont le rôle est si
considérable dans le développement de
Y éducation nationale. »
Depuis que M. Jules Ferry, membre
du cabinet Waddington, occupe le mi
nistère de l'Instruction publique, dans
ses discours, dans ses épîtres que l'Of
ficiel publie avec un zèle digne d'une
meilleure cause, sans cesse il est ques
tion de l'éducation nationale* On serait
néanmoins tenté de croire qu'il en a
une fausse idée, et que ses connais
sances à cet égard égalent sa pré
voyance pendant le siège de Paris,
comme pourvoyeur officiel de la gran
de cité.
La nation. est une société réelle.
Quel en est le fondement ? Evidemment
ou une famille, ou bien une réunion
de familles fondues par le travail des
siècles dans un tout distinct qui tran-»
che avec les autres nationalités.
_ Puisque la famille est ainsi la source
de la société nationale, la famille doit
surveiller sa race, la conserver et l'é
lever pour s'y reproduire. Elle doit lui
transmettre avec la vie matérielle ses
goûts, ses affections, sa profession, ses
croyances. Elle ne pourrait autrement
survivre dans son enfant. Enlevez à la
famille cette liberté d'éducation, vous
altérez profondément l'élément qui est
la source même de l'unité nationale,
vous pourrez même l'anéantir. Il faut
donc que l'Etat laisse aux citoyens la
liberté d'élever leurs enfants, afin de
ne pas altérer la race nationale.
L'éducation doit préparer l'homme à
jouir de sa fortune patrimoniale, à l'au
gmenter selon son aptitude. La famille
doit donc placer son enfant auprès de
qui bon lui semblera et lui donner 1e
degré d'instruction selon la nuance de
son avenir. Si vous enlevez aux familles
cette faculté, vous entravez leur déve
loppement, vous altérez le type pri
mitif.
_ Un des éléments de la prospérité na
tionale, c'est la puissance militaire.
Quelle en est la source et la condition
indispensable? L'énergie morale que
la famille peut seule inspirer. C'est
elle qui transforme en héros, à l'heure
du péril social, ces générations ado
lescentes. C'est elle qui a formé dans
l'âme ces habitudes de dévouement, de
discipline qui exaltent le courage. Le
foyer domestique a fait germer dans
les cœurs ces sentiments de virilité
qui les animent au jour du combat, '
Si vous arrachez l'enfant, au nom
de prétendus droits de l'Etat, pour lui
donner une éducation légale, officiel
le, contrainte, vous affaiblissez en lui
l'esprit de famille; les nobles qualités
de l'âme dont la faïqille est la source
féconde ne pouvant plus se dévelop
per, le nom de patrie sera sans pres
tige au jour du péril,
L'histoire nous apprend que les ra
ces héroïques ont toujours été celles
qui ont fait prédominer chez elles l'é
ducation domestique.
S'il est dans la société nationale un
élément qui s'offre à l'esprit comme
l'ennemi de la liberté dans l'œuvre de
Véducation, c'est le gouvernement ou
l'Etat. Et cependant, si la liberté d'è-
dûcation est la loi suprême de la vie
nationale et de son expansion, cette
loi s'impose impérieusement au gou
vernement.
Si ^ la nation avait le bonheur de
posséder un gouvernement parfaite
ment en harmonie avec ses opérations,
exprimant fidèlement toutes ses for
ces natives, la nation pourrait, dans
cette hypothèse, lui déléguer une lar
ge part dans l'éduralion, quoique cette
action dut toujours s'exercer avec une
grande réserve, .
Mais, si la nation n'est plus désor
mais dans ces conditions favorables à
l'expansion, de la vie sociale; s'il n'y
a plus unité ni dans les croyances, ni
dans les doctrines scientifiques et les
mœurs publiques, si l'anarchie s'est
intronisée dans la vie publique, si
l'Etat n'est plus l'écho fidèle des aspi
rations de la vie nationale, les droits
du gouvernement sur l'éducation mo
rale de la jeunesse sont alors presque
anéantis j l'Etat ne professant plus au
cune religion, aucune doctrine, ne
représente plus que la force publique
pour le règlement des intérêts maté
riels et civils du peuple ; son action, po
sitive, universelle sur l'éducation se
rait tyrannique. "*
Comment d ailleurs cô gouverne—
ment sans , doctrine-® positives ferait-
il 1 éducation £ u peuple? S'il ensei
gne une doctrine, il sort de sa con-
dlt'xon négative en fait de croyan
ces ; il exagère son pouvoir ; s'il n'en
enseigne aucune, il doit laisser à ceux
qui peuvent encore croire à quelque
chose le droit de parler.
Le rôle du gouvernement doit sô
borner, dans cette hypothèse, à éta
blir des concours scientifiques pour
ceux qui veulent embrasser certaines
carrières dans l'Etat, et à exercer sur
les écolça une haute police semhlablp
mrywuMBW» ■wmnw—MMIIUMIIII iinmnaw»
PARIS
Dn an. . . . . , . . . ....... . . 55 fr. #
Six mois 28 50
Trois mois . . 15 »
Un Numéro, à Paris 15 cent.
— Départements. 20 —
BUREAUX
Paris, 10, line des Sainls-Pères ,«?:.■
On s'abonne, & Bcnie, place da (ïesù. >S
N 4 4-108 — Édition quotidienne';
Mardi 18 Novembre 1879
noa
DÉPARTEMENTS
■" On cui « . • • « « • v • t t ■ '. « à i " 55 fr. &
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Trois mois 15 »
Édition semi-quotidienne
Un an, 30 fr. — Six mois, 16 fr. — Trois mois, 8 fr. 50
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés
ANNONCES
Mil. Ci. LÀGRAiîQB, OERF'et (/*, 6, place de la Bourse
FRANGE
PARIS, 17 NOVEMBRE 1879
Le Sirr/c, qui paraît être le confident
du ministre de l'intérieur, nous donne
aujourd'hui le texte d'une circulaire
qu'avait signalée l'Agence Bavas et
dont le Siècle, qui la qualifie d'impor
tante, déclare qu'il ne saurait « trop
approuver l'esprit. »
Voici la circulaire qui faitla joie du
Siècle :
Monsieur le préfet,
J'ai l'honneur d'appeler votre vigilance
sur deux infractions graves aux prescrip
tions de la loi de germinal an X, qui m'ont
été signalées à plusieurs reprises comme se
produisant dans un certain nombre de dio
cèses.
La première consiste dans l'omission vo
lontaire,par les curés et desservants de la
prière : Domine salvam fac Jtempublicam,
qu'ils sont astreints à réciter en vertu du
concordat et de l'article 51 de la loi orga
nique. Il importerait de rechercher si ces
ecclésiastiques obéissent, en agissant ainsi,
à des instructions parties de l'évêché ou
s'ils ne suivent que leurs inspirations per
sonnelles. Vous voudrez bien me trans
mettre les renseignements que vous aurez
recueillis sur ce point et y joindre voire
avis motivé.
Il est un second abus sur lequel je vous
invite à porter votre -swTfttfamM; . certains
évoques quittent leur diocèse pour un temps
plus ou moins long, sans demander l'auto
risation du gouvernement, violant _ ainsi
l'article 20 de la loi de germinal et laissant
en souffrance les intérêts qui leur sont con
fiés pour aller au loin prendre part à des
manifestations collectives et concertées;
plusieurs se rendont-à Rome pour y entre
tenir directement avec le Samt-Siège des
rapports dont le gouvernemeni devrait au
moins être avisé. > -
Je vous serai obligé, si vous venez il ap
prendre le départ du prélat placé à la tête
«le votre département pour une destination
quelconque, et en particulier pour Rome,
rte m'en référer sans relaril.
Recevez, etc.
Le ministre de l'intérieur et des cuites.
C h. L epkre.
En ce qui concerne la première
partie de cette circulaire,.il y a lieu de
s'étonner du doute émis par l 'auteur
de la circulaire. En dehors de lui, per
sonne, en effet, parmi les catholiques,
n'ignore que partout les évêques ont
prescrit la récitation da la prière qui
l'ait l'objet de la sollicitude ministé
rielle. 11 est donc superflu de deman
der aux préfets si « les infractions gra
ves » signalées par - M. Lepère sont
dues « à des instructions parties de
3'évêclié » ou aux « inspirations per
sonnelles » des curés que le minisfre
dénonce à la vigilance de ses préfets.
Ajoutons qu'en admettant l'existence
de ces « infractions graves », il y a lieu
de trouver au moins étrange la sollici
tude du ministre pour obtenir des
prières de l'Eglise lorsque, d'autre
ûart, le gouvernement s'applique si
bien'à combattre l'Eglise et lorsque
ses membres font si peu de cas de la
religion qu'on ne les voit jamais as
sister aux messes où se chante le Do-
. mine salvam.
JMous devons dire, d'ailleurs, que le
ministre pourraitbien être trompé par
de faux rapports lorsqu'il impute au
seul mauvais vouloir des çurés cette
pas réciter la seule prière à laquelle pa
raît tenir le goUvernementrépublicain.
Ainsi, nous connaissons personnelle-
ilement une paroisse où, depuis quel'é-
vêque a prescrit le chant du Domine
.salvam fac rempublicam , le curé fait vai
nement appel au bon vouloirde ses pa
roissiens pour chanter le Domine sal
vam, avant que lui-même récite l'orai
son qui doit suivre. Dans une paroisse
qui compte plus de trois cents âmes,
■il ne s'est pas encore trouvé un répu
blicain de bonne volonté pour prêter
ie secours de sa voix à la république
<;n détresse. Nous n'apprécions pas le
fait, nous le constatons, afin de mon
trer que le zèle du ministre risque par
fois de s'exercer h tort et peut se trom
per d'objet.
Voilà pour la première partie de la
circulaire. Quant, à la seconde, nous
demanderons à qui elle peut bien s'a-
îs ne sachions pas qi
un seul évêque « pli
département ». Jusqu
ïîous avions cru que l'évêque était
vAac.é à la tête d'un diocèse. Il paraît
que M. Lepère a changé tout cela.
Quoi qu'il en soit, M. Lepères'abuse
siï*/?spère amener les évêques à recon
naître la légitimité de son ingérence,
«n une question qui ne le regarde pas.
On sait ce qu'il faut pen^r des articles
■organiques, fct quel crédit l'on doit à
e.eux de ces articles qui, bien loin
«d'être comme le développement ^ du
■concordat, en sont la négation. L'ar
ticle 20 est de ce- nombre. Inspiré par
les idées joséphistes. il n'aspire en ef
fet à rien moins qu'à enchaîner la li
berté des évêques pour des démarches
.dont la plupart leur sont recomman
dées le jour mêffl.o-de leur sacre et font
na rtin de leurs obligations épiscopa-
j es , >4insi en est-il par exemple du
vovatT e ad limina, qui semble particu
lière me i n t suspect à M. le ministre
dè l'intérieur, «puisque l'espionnage
qu'il ^einande'à .*es préfefj» doit, selon
lui, viser tout particulièrement les
voyages des ôw7 ues ^Ronto.
Ici encore nous J^nstatons d ;Ui*
leurs que ie'sTministres républicains
vont plus loin que ne le fit le gou
vernement de Napoléon III en ses
plus mauvais jours. Ils y perdront
également leurs peines. Sous l'empire
les évêques n'ont pas consenti à recon
naître des prétentions qui visaient à
contrôler leurs rapports nécessaires,
soit avec Rome, soit avec leurs ouail
les; ils n'y consentiront pas davan
tage sous la république. L'erreur de
M. Lepère tient sans doute à ce qu'il
prend les évêques pour des fonctionnai
res soumis à sajuridiction civile pourles
choses mêmes qui sont de leur minis
tère pastoral. Or, les évêques ne sont
point des fonctionnaires ; le ministre
ne devrait pas l'ignorer.
A uguste R oussel.
Le conseil municipal de Paris, qui
se recrute maintenant parmi les an
ciens membres de la Commune, de
vance à grands pas le gouvernement
dans les voies de la persécution.
Après avoir donné le signal de l'ex
pulsion des frères et des sœurs des
ecoles communales, il annonce l'in
tention de chasser les catholiques des
églises. C'est à quoi tend le rapport
présenté par un sieur Jules Roche, au
nom de la commission du budget, sur
le chapitre des dépenses du culte. Le
procédé est sommaire; il consiste à
attribuer purement et simplement la
propriété des églises à la ville de Pa
ris et à faire du clergé et des fidèles
de simples bénéficiaires à titre gratuit.
M. Roche conclut de cette situation
que la ville immobilise, au profit du
culte catholique, un capital de 200
millions dont elle pourrait faire un
meilleur usage.
Le rapporteur ne demande pas en
core, contre toute loi, que les églises
soient retirées aux catholiques ou mi
ses en location comme des immeubles
ordinaires, mais son rapport impli
que pour l'avenir cette conclusion.
En attendant, M. Roche pose un pré
cédent à l'égard des maisons-mères des
frères de la Doctrine chrétienne et des
sœurs de Saint-Vincent de Paul, dont
la ville se prétend également pleine et
entière propriétaire. Appliquant ses
théories aux deux maisons, il invite,
au nom de la commission du budget,
le préfet de la Seine à congédier dans
le plus bref délai les frères et les sœurs
des immeubles anciennement affectés
à leur usage.
Quant à la question plus générale
des églises, il émet le vœu que « la lé
gislation soit modifiée au plus tôt, de
manière à ce que les communes re
couvrent la libre disposition des im
meubles qui leur appartiennent et qui
sont actuellement consacrés aux cul
tes, et à ce qu'elles ne soient plus sou
mises à aucune charge relative aux
diverses religions. »
M. Roche a mis dans les considé
rants de son rapportée qu'il ne pou
vait mettre encore dans ses conclu
sions. Toute la haine antireligieuse des
radicaux, tout le fanatisme brutal et
stupide des lilïre-penseurs matérialis
tes est, là. En même temps, nous y
avons un avant-goût de la législation
de l'avenir.
Il serait superflu en ce moment de
traiter de la propriété des églises que
nous revendiquons, au moins dans
une certaine mesure, en vertu des lois
existantes et de nos titres plus anciens
et plus certains encore que les lois.
Nous donnerons le rapport du citoyen
Roche, comme expression des ten
dances du parti radical. Nous aurons
à y discuter ce qui concerne particu
lièrement les deux maisons-meres des
frères de la Doctrine chrétienne et des
sœurs de Saint-Vincentxle Paul, puis
que le rapport conclut à l'expulsion
immédiate de ces deux congrégations.
Le préfet de la Seine, invité à exé
cuter les résolutions de la commission,
voudra sans doute y mettre toute la
diligence possible pour être agréable
au conseil municipal. Les deux véné
rables instituts rétablis, au sortir de
la Révolution, par décret du gouver
nement et plus encore par la voix pu
blique, sont menacés d être jetés à la
rue par la brutalité des tyranneaux
municipaux. C'est trop braver la pa
tience des catholiques et de tous les
honnêtes gens avec eux.
Le Journal des Débats compte parmi
les feuilles les plus obstinément opti
mistes à l'endroit de la prospérité ré
publicaine. Il n'en est pas qui inter
prète plus systématiquement eu l'hon
neur de la politique économique du
pouvoir les chiffres d'augmentation de
receltes provenant presque exclusive
ment d'un accroissement considéra
ble de nos importations, Ces appa
rences décèlent pourtant une situation
très mauvaise, et nous avons vu que
le Soir, tout républicain qu'il est et
dévoué au libre-échange, a dû an foire
l'aveu. Aujourd'hui c'est dans le Jour
nal des Délais lui-même que nous li
sons ce qui suit :
. Si l'on consultait l'état général de l'in
dustrie et de l'agriculture de France, on
verrait que l'ensemble des circonstances
économiques justifie peu un accroisse
ment des salaires. Dans beaucoup d'indus
tries fin §'est vu contraint do réduire soit
le prix de la nîaln-d'fBuvre, soit le nombre
des jours do travail dans la semaine, çoit
le nombre d'heures dans la journée. Dans
certaines campagnes, celies du Midi par
j £;
deux ou trois ans tombés de moitié, parfois
de plus encore.
Voilà des faits qui concordent bien
mal avec les assertions ordinaires du
Journal des Débats , concernant l'état
prospère de l'industrie sous le régi
me du libre-échange. Nous en prenons
acte/
La République française trouve très
bon que les journaux cléricaux, réac
tionnaires, etc., soient poursuivis et
condamnés, mais elle trouve très mau
vais que les journaux ainsi traités
osent prétendre que, si les républicains
ont promis la liberté de la presse, ils
ne songent guère à la donner.
Il lui est surtout désagréable d'en
tendre dire qu'en matière de presse la
République rappelle l'Empire. Aujour
d'hui encore, elle reproche à la Gazette
de France et au Gaulois de prendre texte
de la condamnation de l'Univers pour
affirmer que les journaux ne sont pas
libres et que les lois du régime impé
rial sont appliquées avec zèle par le
gouvernement républicain.
"Cependant, c'est en vertu du décret
vient d'être condamné
Si ce n'est pas là une application de
la législation impériale, qu'est-ce
donc?
Il faut ajouter que pour le délit de
reproduction de fausses nouvelles,
j gée sous l'empire. Jamais, non plus,
pour "le même cas, jugement aussi ir
rité ne fut rendu.
Nous croyons, enfin, que jamais
sous l'empire on ne vit président
de tribunal siéger dans un procès de
presse après que le Journal officiel eût
publié un décret l'appelant à d'autres
fonctions.
M. Delesvaux, ce magistrat si atta
qué, si insulté, même après sa mort,
n'eût pas voulu faire cette preuve de
zèle. Cela était réservé à M. Manau,
républicain de la veille et partisan
de la liberté absolue de la pressentant
que le parti radical fut un parti d'op
position.
Voici le joli article que publie la
Patrie au sujet du jugement rendu
contre nous sous là présidence de
M. Manau:
. " . FANTAISIE JUDICIAIRE
Nous avons annoncé hier que la 10° cham
bre correctionnelle, à Paris, a rendu un ju
gement longuement motivé, qui condamne
par défaut le gérant de Y Univers à mille
francs d'amende, aux dépens et à l'inser
tion du jugement dans le délai de trois jours
en tête du journal.
Mille francs pour une nouvelle emprun
tée à la Gazette du Midi, nouvelle qu'on
croyait évidemment exacte, sans quoi on
se fût bien gardé de la donner! la somme
est grosse et la peine est sévère.
On se demandait pourquoi la justice
frappe avec cette rigueur un journal qui
défend chaque jour la magistrature et la
justice contre les projets ou les attaques
du radicalisme. Une feuille radicale a pris
soin, hier matin, de nous expliquer cette
faveur particulière. Nous y lisons :
« Il (le tribunal) a rendu un jugement
« dans lequel il déclare assez malignement
« que Y Univers, en raison des principes d'or-
« dre et de conservation, dont il se prétend le
« défenseur, doit se montrer plus scrupuleux
« que tout autre, et le condamne à 1,000
« francs d'amende et à l'insertion du juge-
«ment.»
Il y-a tout un monde nouveau dans cette
théorie et dans ce considérant — s'il est
authentique.
En procédant selon cette logique, peut-
être républicaine, les tribunaux et les cours
arriveraient à créer une justice toute nou
velle qui rappellerait un peu les caricatures
de Daumier.
— Accusé, dirait le président, vous avez
été cinq fois déjà condamné pour fausses
nouvelles, calomnies, diffamations, offen
ses à la magistrature. Vous êtes un incor
rigible. Vous êtes inculpé cette fois encore
de fausses nouvelles : c'est un péché d'ha
bitude; considérant qu'on ne peut espérer
de vous rien de bon, le tribunal use d'in
dulgence et vous condamue à 55 francs d'a
mende.
Le lendemain, autre, procès, autre in
culpé. On entendrait dos considérants
comme ceux-ci :
— Considérant que X... est un homme
honorable, que le journal dont il est le gé
rant se fait remarquer, en toute circon
stance, par son respect pour la vérité, par
l'exactitude de ses nouvelles et la modéra
tion de son langage ;
Que, d'ailleurs, le journal incriminé se
distingue par l'énergie avec laquelle il dé
fend la magistrature contre les calomnies
de la presse radicale; qu'il proteste sans
cesse avec autorité et avec talent contre
tous les projets élaborés en vue de dimi
nuer l'indépendance des magistrats et le
prestige de la justice;
Que, par ces motifs, lo gérant X... mé
rite d'être traité avec une rigueur parti
culière ;
Le condamne en Ir.ois mille francs d'a
mende, aux dépens et à l'insertion.
Dans cet ordre d'idées, si Giile et Abadie
paraissaient devant un tribunal correction
nel pour avoir vol? deux cents francs — do
la braise, comme dit Gille—les juges, con
sidérant que c'est bien modeste pour d'aus
si grands coquins d'être descendus ït une si
petite opération, les condamneraient avec
une douceur toute maternelle à: quelques
jours de « turne » — encore le style de ces
aipiables personnages.
' En revanche, si.' après toutp upe vie de
probité et de travail, un malheureux avait
détourné cette même somme, il se verrait
foudroyé par le plus sévère châtiment que
ië qoda pénal puisse édictée. :
On irait si loin dans cette voie, qn selan-
cerait dons des déductions si extraordinai
res que nqus préférons nous arrêter.
Tout nous porte à croire que la feuille ra
dicale, en publiant ce pré tendu considérant,,
a voulu faire un acte rempli de malice etin-
sinuer que les journaux conservateurs doi
vent s'attendre à cire particulièrement mal
traités..
Ce qui nous autorise, du reste, & cette
supposition, c'est que la feuille radicale
donYnous parlons appelle la magistrature :
« toute de robe et de toque qui grouille
dans les antres deThémis. »
La même feuille dit encore : « On votera
« peut-être le divorce, puis un remaniement
« de l'ex-magistrature, ce corps depuis long-
« temps défunt et si peu embaumé. »
Assurément, niYUnivers, ni aucun jour
nal conservateur n'imprimerait dans ses
colonnes un langage aussi impertinent, et,
s'il s'en avisait, sa légèreté ne resterait pas
impunie.
La îeuille radicale qui traite de la sorte
la magistrature et la justice qu'elle rend
était bien capable d'inventer le « considé
rant » dont nous venons de parler, et nous
persistons à penser qu'il n'est éclos que de
son imagination.
La Patrie a tort de prêter au journal
qu'elle cite le « considérant » qui l'é-
tonne. Il se trouve, sauf quelques va
riantes de formes, dans le jugement
par lequel M. le magistrat Manau a
couronné sa carrière de président de
la 10 e chambre du tribunal correc
tionnel.
Un nouveau conseiller
^us ce titre; uniit dans \VL~~G~atette
de France :
On s'est étonné dans divers journaux de
la nomination do M. Manau au poste de
conseiller à la cour do Paris. On a fait à
ce propos maintes observations, présenté
maintes critiques, et cependant si l'on
avait voulu se rappeler l'origine de la for
tune de M. Manau comme magistrat, on
aurait été moins surpris. M. Manau, avant
d'appartenir au tribunal de la Seine, avait
été procureur général à Toulouse après le
4 septembre; à cette époque, simple avo
cat îi Toulouse et conseiller municipal, il
s'était, de sa propre autorité, et sous la
protection de M. Armand Duportal, préfet
de Toulouse, emparé révolutionnairement
du pouvoir et présidait une commission
chargée de tous les pouvoirs administratifs,
'politiques et judiciaires. Il procéda à la ré
vocation des magistrats du département.
La lecture des dépêches du gouvernement
du 4 septembre au sujet du rôle joué par
M. Manau est fort intéressante. En voici
quelques-unes :
Toulouse, o sèptembre 1870, 3 h. 50.
N° 839. — Commission départementale au citoyen
ministre de la justice, Paris
La république a été acclamée à Toulouse avec
le plus grand enthousiasme Mer soir.
L'ordre ie plus parfait règne dans le départe
ment.
Le conseil municipal élu au mois d'août der
nier, confirmédans ses pouvoirs par l'acclamation
populaire et investi par elle du pouvoir révolu
tionnaire, vient de nommer deux commissions
prises dans son sein, l'une dite commission muni
cipale, chargée de tous les pouvoirs communaux,
et l'autre dite commission départe mentale, chargée
de tous les pouvoirs administratifs, politiques et
judiciaires intéressant le département.
La première est composée des citoyens Gatien-
Arnoult, président ; Mounié, Bibent, Castelbou,
Tourné, Esquié.
La deuxième, des citoyens Manau, avocat, pré
sident, Cousin, Mulé Antonio, Pastre, Bégué,
Esparbês.
La commission municipale est en permanence
pour s'oceuper de la distribution des armes aux
patriotes. La commission départementale, qui a
l'honneur de se mettre en rapport avec vous,
vient, par son premier acte, de charger plusieurs
patriotes des trois arrondissements de la Haute-
Garonne de former les commissions d'arrondisse
ment qui devront remplacer les sous-préfets.
Elle a cru devoir ordonner la continuation des
opérations de recrutement et de révision par les^
fonctionnaires qui en étaient déjà chargés.
Le président de la commission départe
mentale de la Haute-Garonne,
J. M an au , avocat.
Toulouse, S septembre 4170,7 h. soir.
V 8i2. — Commission départementale au citoyen
ministre de la justice, Paris.
Lé conseil municipal de la ville de Toulouse
vient do nous nommer membres d'une commis
sion départementale chargée de tous les pouvoirs
administratifs, politiques et judiciaires du dépar
tement. Cette commission est ainsi composée :
J.-P. Manau, avocat, président ; Gustave Cousin,
avocat; Léon Pastre, propriétaire; Joseph Begué,
docteur-médeci d ; Antonin Mulé, homme de lettres;
Esparbôs, comptable, tous membres du conseil
municipal. Nous nous empressons de vous faire
prrt de la création- de cette commission, et nous
signalons à votre attention la délégation des pou
voirs judiciaires qui lui a été faite. Ce n'est pas
sans intention que celte délégation a eu lieu.
A Toulouse, les magistrats du parquet ont été
les persécuteurs de la démocratie et de la presse
républicaine. La population émue et irritée dé
sire ardemment leur révocation immédiate. Il
importe, dans l'intérêt de l'ordre, que satisfac
tion soit donnée sans retard à l'opinion publique.
Nous allions nous-mème procéder provisoirement
à cette révocation et au remplacement de ces
fonctionnaires; mais nous avons jugé convenable
auparavant de vota demander un télégramme
autorisant les mesures que nous croyons urgent
de prendre. Nous l'attendons. Nous vop,s deman
dons même autorisation pour les parquets de no3
trois arrondissements.
Vive là République!
Salut et fraternité.
Pour la commission départementale,
Le président : J.-P. M anau , avocat,
docteur en droit.
. P. S. — Nous sommes en permanence, atten
dant votre réponse, pour agir ce soir mf me.
Toulouse, 0 septembre 1870, i h. soir.
N" 857. — Procureur général et procureur Répu-
llique, à justice, Paris.
Une commission départem,estais ge disant in
yestie 4e pleins pouyoirs administratifs, politiques
et judiciaires nous fait signifier à l'instant un ar
rêté de révocation.
Quel compte devons Y nous tenir de celte noti
fication ? i|evonp-nqos remetire le service?
Le procureur général, Léon Dypftfc..
Le procureur sjè la tyépuljliquè B ïiî.çt,
Toulouse, 6 septembre 1870, H h. 48, soir.
N° 863. — Président commission départementale
au citoyen ministre de l'intérieur, Pam
Des manifestations fâcheuses ont lieu de la
part de la mobile. Il est nécessaire, pour les faiié
cesser, de donner de suite aux soldats le droit
réclamé d'élire leurs officiers.
Il y a urgence extrême à donner cette autori
sation. Attendons la réponse télégraphique. Les
conseils de révision fonctionnent sans relâche.
Population ardente pour la résistance à l'en
nemi.
Ordre règne, J. M axau.
Toulouse, 7 septembre 1870, 1 h. matin.
N° 8G6. — Président commission départementale
au citoyen ministre justice, Paris.
Nous avons dû considérer votre silence après
notre dépêche comme une' approbation de la me
sure de révocation dçnt nous vous démontrions
la nécessité, daus l'intérêt de l'ordre. Aussi nous
avons révoqué les citoyens Léo Dupré, procureur
général, et Bellet, procureur de'la République.
Notification de notre arrêté parlant à leur 'per
sonne. — Le service est assuré aux deux par
quets par les substituts. '
La population est enchantée de cet acte éner
gique accompli envers deux persécuteurs de la
démocratie, J. M anau.
Toulouse, 8 septembre 1870, 6 h., soir.
N° 879. — Préfet à justice, Paris.
Le procureur impérial Bellet, révoqué par com-
mision départementale/résiste et continue à exer
cer ses fonctions. Veuillez ratifier d'urgence cette
révocation en la confirmant dans votre arrêté;
l'opinion publique et la nécessité de maintenir
l'ordre l'avaient rendue nécessaire.La commission,
avant d'agir, vous avait avisé par dépêche et avait
au besoin demandé votre autorisation. Votre si
lence après cette dépêche avait été interprété
comme une autorisation. Le procureur se rit de
' la mesuré prise. Des mesures coercitives sont né
cessaires pour faire respecter l'acte patriotique et
légitime de la commission et son autorité. Donnez-
moi autorisation de les prendre, réponse télégra
phique indispensable pour- faire cesser cette si
tuation. Armand DuronTAL.
Toulouse, 3 février 1871, 3h. lo, soir.
M 0 7,190. — Procureur général à Justice,
Bordeaux.
Président Degrand refuse de demander sa re
traite. Il veut remonter sur son siège ou être
frappé. Statuer d'urgence. M anau.
Toulouse, 9 février 1871, 6 h. 30, soir.
: N° 7,132. — Procureur général à Justice,
Bordeaux.
Degrand, président déchu, se propose de remon
ter sur son siège lundi. Suis prêt àfaire exécuter
le décret qui le révoque, même par arrestation.
Donnez-moi vos instructions tant pourlui que ses
assesseurs au besoin ou pleins pouvoirs. M anau.
La Gazette de France, qui reproduit
les dépêches ci-dessus, est loin cepen
dant de publier le dossier complet de
M. Manau. Sans prétendre le complé
ter, nous y ajouterons quelques dépê-
ches se rapportant à l'entrée de M. Ma
nau dans la magistrture. Voici en
quels termes M. Duportal présentait
M. Manau au ministre de la justice,
qui était alors M. Crémieux.
Toulouse, 9 septembre 1870.
Préfet de la Hautè-Gamnne à ministre
de la justice, Paris.
J'attends, suivant votre dépêche, remplacement
du procureur de la République Bellet. D'accord
avec Saint-Gresse, procureur général, je vous de
mande, dans l'intérêt d'une action commune,
comme acte de justice envers un proscrit de dé
cembre, arrêté par M. Piou, et envers l'homme
qui vient de remplir avec bonheur et dévouement
les fonctions de président de la commission dé
partementale, à Toulouse, et de maintenir le
plus grand ordre, la nomination de M. Jean-Pierre
Manau, avocat, docteur endroit, ancien secré
taire de Ledru-Rollin en 18, exilé pendant quatre
ans, poursuivi en 81 et 58, aux fonctions de pre
mier président près la cour d'appel de Toulouse.
Jules Favre et Picard vous diront ce que vaut ce
choix, excellent sous tous les rapports. Ils l'esti
ment et l'aiment beaucoup.,..
D upoutal.
1 En même temps que M. Duportal,
d'accord avec Saint-Gresse, recomman
dait M. Manau pour le poste de pre
mier président, M. Saint-Gresse se re
commandait lui-même pour ce poste,
et appuyait la nomination du trop'
confiant M. Manau à la plaee de...
procureur de la république :
Toulouse, 10 septembre.
Le procureur général à M. Hérold, secrétaire gé
néral du ministre de la justice à P mis.
Réponse à votre lettre de ce jour. Le chois de
Manau, comme procureur de la République, se
rait excellent. Ecrirai demain.
S aint-(ïhessk,
procureur fénéral.
H fut ainsi fait. M. Saint-Gresse fut
nommé premier président, et M. Ma
nau procureur de la république ; mais
bientôt après il fut promu au poste de
procureur général.
M. Duportal, dans son livre ;
Commune à Toulouse, s'exprime ainsi
à ce sujet ;
J'avais poussé la condescendance pour cet
ami des mauvais jours, pour cet avocat de mes
petites causes extra muros, jusqu'à demander
pour lui la première présidence de notre cour
4'appel, Il avait lui-même libellé la dépêche. Je
n'avais fait que signer. Voyez-vous M c Manau,
ce procureur général d'un jour et pour cause de
réparation encore ! premier président ds la cour
d'appel de Toulouse? (1 faut réellement avoir
brûlé ges vaiseaux devant le décorum adminis
tratif pour oser faire de pareilles propositions au
garde des sceaux.
Et je i'avais fait sans sourciller, pour oh-
tenir au proscrit Manau la réparation qu il ambi
tionnai!; étaient médiocres mon souci de la fonc
tion et mon désir d'en relever l'éclat par le fonc
tionnaire.
J'avais plus fait eneore pour cet ex-ami. Après
avoir contribué à l'habiller de la robe plus mo
deste et plus en rapport avec sçs «îérites de pre
mier avocat générai, j-; consentis, sur sa dç.
inar. !i, à ie recommander à Gambetta pc;ur lui
obtenir l'hermine de procureur gtewai/Kt nous
réussîmes cette fois,
Nous n'ajouterons aucun tvail à ce
portrait de .\J. le conseiller Manau,
point par hû-mOme et par amis
politiques.
L'éducation nationale
ET M. JULES FERRY
Invité par le congrès dit « libre et
laïque de l'éducation », qui siégeait
récemment à Paris, M. le ministre de.
llnstruction publiq»ôs«a«»piâûa^ae.& ,
regrets de ne pouvoir pas assister à la
séance à laquelle il était convié. Le mi
nistre termine en ces termes son épî-
tre au secrétaire de la réunion pédago
gique : « Je crois inutile d'ajouter que
je suis avec le plus vif intérêt les tra
vaux d'une société dont le rôle est si
considérable dans le développement de
Y éducation nationale. »
Depuis que M. Jules Ferry, membre
du cabinet Waddington, occupe le mi
nistère de l'Instruction publique, dans
ses discours, dans ses épîtres que l'Of
ficiel publie avec un zèle digne d'une
meilleure cause, sans cesse il est ques
tion de l'éducation nationale* On serait
néanmoins tenté de croire qu'il en a
une fausse idée, et que ses connais
sances à cet égard égalent sa pré
voyance pendant le siège de Paris,
comme pourvoyeur officiel de la gran
de cité.
La nation. est une société réelle.
Quel en est le fondement ? Evidemment
ou une famille, ou bien une réunion
de familles fondues par le travail des
siècles dans un tout distinct qui tran-»
che avec les autres nationalités.
_ Puisque la famille est ainsi la source
de la société nationale, la famille doit
surveiller sa race, la conserver et l'é
lever pour s'y reproduire. Elle doit lui
transmettre avec la vie matérielle ses
goûts, ses affections, sa profession, ses
croyances. Elle ne pourrait autrement
survivre dans son enfant. Enlevez à la
famille cette liberté d'éducation, vous
altérez profondément l'élément qui est
la source même de l'unité nationale,
vous pourrez même l'anéantir. Il faut
donc que l'Etat laisse aux citoyens la
liberté d'élever leurs enfants, afin de
ne pas altérer la race nationale.
L'éducation doit préparer l'homme à
jouir de sa fortune patrimoniale, à l'au
gmenter selon son aptitude. La famille
doit donc placer son enfant auprès de
qui bon lui semblera et lui donner 1e
degré d'instruction selon la nuance de
son avenir. Si vous enlevez aux familles
cette faculté, vous entravez leur déve
loppement, vous altérez le type pri
mitif.
_ Un des éléments de la prospérité na
tionale, c'est la puissance militaire.
Quelle en est la source et la condition
indispensable? L'énergie morale que
la famille peut seule inspirer. C'est
elle qui transforme en héros, à l'heure
du péril social, ces générations ado
lescentes. C'est elle qui a formé dans
l'âme ces habitudes de dévouement, de
discipline qui exaltent le courage. Le
foyer domestique a fait germer dans
les cœurs ces sentiments de virilité
qui les animent au jour du combat, '
Si vous arrachez l'enfant, au nom
de prétendus droits de l'Etat, pour lui
donner une éducation légale, officiel
le, contrainte, vous affaiblissez en lui
l'esprit de famille; les nobles qualités
de l'âme dont la faïqille est la source
féconde ne pouvant plus se dévelop
per, le nom de patrie sera sans pres
tige au jour du péril,
L'histoire nous apprend que les ra
ces héroïques ont toujours été celles
qui ont fait prédominer chez elles l'é
ducation domestique.
S'il est dans la société nationale un
élément qui s'offre à l'esprit comme
l'ennemi de la liberté dans l'œuvre de
Véducation, c'est le gouvernement ou
l'Etat. Et cependant, si la liberté d'è-
dûcation est la loi suprême de la vie
nationale et de son expansion, cette
loi s'impose impérieusement au gou
vernement.
Si ^ la nation avait le bonheur de
posséder un gouvernement parfaite
ment en harmonie avec ses opérations,
exprimant fidèlement toutes ses for
ces natives, la nation pourrait, dans
cette hypothèse, lui déléguer une lar
ge part dans l'éduralion, quoique cette
action dut toujours s'exercer avec une
grande réserve, .
Mais, si la nation n'est plus désor
mais dans ces conditions favorables à
l'expansion, de la vie sociale; s'il n'y
a plus unité ni dans les croyances, ni
dans les doctrines scientifiques et les
mœurs publiques, si l'anarchie s'est
intronisée dans la vie publique, si
l'Etat n'est plus l'écho fidèle des aspi
rations de la vie nationale, les droits
du gouvernement sur l'éducation mo
rale de la jeunesse sont alors presque
anéantis j l'Etat ne professant plus au
cune religion, aucune doctrine, ne
représente plus que la force publique
pour le règlement des intérêts maté
riels et civils du peuple ; son action, po
sitive, universelle sur l'éducation se
rait tyrannique. "*
Comment d ailleurs cô gouverne—
ment sans , doctrine-® positives ferait-
il 1 éducation £ u peuple? S'il ensei
gne une doctrine, il sort de sa con-
dlt'xon négative en fait de croyan
ces ; il exagère son pouvoir ; s'il n'en
enseigne aucune, il doit laisser à ceux
qui peuvent encore croire à quelque
chose le droit de parler.
Le rôle du gouvernement doit sô
borner, dans cette hypothèse, à éta
blir des concours scientifiques pour
ceux qui veulent embrasser certaines
carrières dans l'Etat, et à exercer sur
les écolça une haute police semhlablp
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