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Titre : Revue interalliée pour l'étude des questions intéressant les mutilés de la guerre : physiothérapie, prothèse, rééducation fonctionnelle, rééducation professionnelle, intérêts économiques et moraux / directeur Dr Jean Camus,...

Éditeur : Comité permanent interallié pour l'étude des questions concernant les invalides de guerre et du travail (Paris)

Date d'édition : 1919-05-01

Contributeur : Comité permanent interallié pour l'étude des questions intéressant les invalides de la guerre (Paris). Éditeur scientifique

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb43649608b

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb43649608b/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 2926

Description : 01 mai 1919

Description : 1919/05/01 (A2,N3)-1919/05/31.

Description : Collection numérique : Documents consacrés à la Première Guerre mondiale

Description : Appartient à l’ensemble documentaire : BvdPrs001

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k6556768n

Source : Ville de Paris / Bibliothèque historique, BHVP, 2013-304681

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 14/10/2013

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pour l'étude des questions intéressant

Les Mutilés de la Gueirrë

Physiothérapie « Prothèse Rééducation Fonctionnelle « Rééducation Professionnelle Intérêts Économiques et Moraux

DIRECTEUR: Dr JEAN CAMUS Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris, Médecin des Hôpitaux.

COMlTt; DE RÉDACTION : MM. le Or BOURRILLON, Président du Comité Permanent Interallié.

CH. KRUG, Secrétaire général du Comité Permanent Interallié.

MM. le Professeur R. AGATHONOVITCH (Député de Serbie). — J. GALSWORTHY (Grande- Bretagne). — Le Colonel FINLEY (Canada). — Le Professeur R. GALEAZZI (Italie). —

GOLOUBEFF (Russie). — Miss GRACE HARPER (États-Unis). — Le Dr STASSEN (Belgique).— Le Professeur MARINESCO (Roumanie). — Le Dr MAROULIS (Monténégro).

— Le Dr J. PONTÈS (Portugal).

La Revue Interalliée est l'organe du Comité Permanent Interallié, composé de : PRÉSIDENT: M. le Dr BOURRlLLON (France). - "H::E-PRt:SIDE:-'TS: MM. le Lt Général Dr lELlS (Belgique); N. (Grande-Bretagne) ; le Colonel W. D. McCAW, (Etats-Unix) ; L. MARCH (France) ; le Professeur Commandeur H. BURCI (Italie) ; le D" DACOSTA FERREIRA (Portugal) ; AGATHO- NOVITCH (Serbie).

SECRÉTAIRE GÉNÉRAL: M. CH. KRUG (France). — SECRÉTAIRE : Miss GRACE S. HARPER.

(États-Unis). — TRÉSORIER :M. E. BRUNET (Belgique). - DmE(;n;UR DE LA REVUE: Dr JEAN CAMUS (France).

MCMRRI.S : BELGIQUE : MM. ALLEMAN, le Général-Major DERUETTE, le Major HAINAUT, le Médecin Principal LE BRUN, LE CLERCQ, le Dr STASSEN, le Sénateur THIEBAUT, le D" WAFFELAERT.

GRANDE-BRETAGNE: le Colonel J. G. ADAMI, Sir ARTHUR G. BOSCAVEN, M. le Dr P. H.

BOYDEN, le Major F. S. BRERETON, R. A. M. C., Lord CHARNWOOD, Sir LAMING WOR- THINGTON EVANS, Bart, M. P., le Lieutenant Général T. H. J. C. GOODWIN, C. B., C. M. G., D. S. O., le Colonel Sir R. JONES, C. B., F. R. C. S., le Major ROBERT MITCHELL, le Colonel A. L. WEUB, G. M. G. Right Honourable.

DOMINIONS : le Colonel FINLEY, le Colonel MAC'LAREN (Canada), Sir THOMAS MACKEXZIE, K. C.M. G., le Général RICHARDSON (Nouvelle-Zélande), le Lt Colonel TIIORNTON (Sud-Afrique).

ÉTATS-UNIS: MM. J. CAFFERY, E. C. CARTER, H. FOLKS, le Colonel JOEL E. GOLDTHWAIT, EDWIN L. HOLTON, le Dr A. LAMBERT, le Capitaine H. W. MILLER, le Colonel GRAYSON M. P.

MURPHY, le Lt Colonel W. SALMON, A. F. SANBORN, le D' VEDITZ.

FRANCE: MM. le Sénateur H. BÉRENGER, DHlErX, de l'Académie Française, le Dr BROUARDEL, HONNORAT, député, le Dr JEANBRAU, le Général MALLETERRE, E. VALLON, le Lieutenant DE VILLE-CHABROLLE.

GRÈCE: le Dr G. CARAMANOS, le Dr HIRSCHFELD.

ITALIE : MM. le Chevalier F. BARGONI, le Due de CAMASTRA, le Professeur G. CHEVALLEY, le Profes- seur Sénateur PIO FOA, le Professeur R.GALEAZZI, le Lt-Colonel Prof. G. LAGHEZZA, le Chevalier Professeur E. LEVI, M"1* le Professeur MONDOLFO, le Docteur GUIDO PARDO, le Professeur PUTTI, le Dr JEAN SALVI.

JAPON : MM. le Médecin-Principal KABASHIMA, le Médecin-Major KATESUMI NAWA, le Commandant AKI SEMBA.

MONTÉNÉGRO : MM. le D' MAROULIS, le Dr MILIANITCH.

PORTUGAL : MM. le Dr F. F0RMIGAL-LUZES, le Dr A. T. DELEMOS JUNIOR le Dr JOSÉ PONTÈS.

ROUMANIE : M. le Professeur MARINESCO.

RUSSIE : MM. le Professeur BAGENOFF, GOLOUBEFF.

SERBIE : MM. le Professeur OUROCHEVITCH, le Colonel Dr V. SOLBBOTITCH, Y. S. YANKOVITCH.

Adresser tout ce qui concerne la Rédaction à M. le Dr JEAN CAMUS, et les abonnements à M. LEMAIRE, Secretaire-Comptable, Hôtel du Comité et de l'Institut Interalliés, 102, rue du Bac, PARIS, VIIe Abonnement par an : 6 numéros, 18 fr. ; le numéro, 3 fr. 50


SOMMAIRE DU N° 3

l'ages

Nouveaux membres du Comité Permanent Interallié 201

PREMIÈRE PARTIE. - Articles originaux.

Village centres, par M. R. FORTKSCUE Fox. 201 Quelques considérations sur l'appareillage des mutilés de la main, par MM. J.

LAVMNE et M. PARAMEhLE 210 L'adaptation des machines agricoles aux impotences des mutilés, par M. R. DE SAIT-M.H'HICE. 219 La réforme de la mutilation et de la prothèse, par M. J. VANUHETTI 22'T Les grands principes de la loi Lugol sur les pensions militaires, par M. Cn.

VALEXTINO 238 DEUXIEME PARTIE. - Documentation.

Procès-verbaux des séances du Comité Permanent Interallié. 262 III Congrès national des Mutilés, Veuves et Anciens Combattants (France). 271 Les Mutilés à la Foire de Paris. 286 Société de Chirurgie de Paris (Séance annuelle du 22 janvier HH9). 289 Lois et projets de lois : Loi du 23 février 1919 relevant l'indemnité temporaire accordée aux petits retraités de l'Etat (France) 292 Décret du 18 mars 1919 modifiant la composition de l'Office National des Mutilés et Réformés de la Guerre (France). 293 Loi du 22 mars 1919 portant création d'une indemnité de démobilisation (France) 296 Loi du 5 avril 1919 sur les Sociétés coopératives ouvrières de production (France) 296 Loi du 23 avril 1919 sur les droits à pension des fonctionnaires victimes de faits de guerre (France) 297 Décret-loi du 5 octobre 1918 relatif à l'attribution de pensions complémentaires aux mutilés de guerre (Portugal). 297 Décret-loi du 7 octobre 1918 relatif au port d'un insigne spécial par les mutilés de guerre (Portugal). 299 Livres et publications : Report on médical and surgical developments of the war, par William SEAM.W BAIIHHIIGE 299 La prothèse fonctionnelle des blessés de guerre, par le Docteur DUCROUUKT 300 Les accidentés de la guerre : leur esprit, leurs réactions, leur traitement, par MM. LAIGEL-LAVASTl:"iE et COURBO:" 302 Les greffes d'organes morts 302 Amputazioni cineplastiche per la vitalizzazione delle membra artiticiali, par le Professeur A. PELLEGRJI. 303 Bulletin de la Société d'Encouragement pour l'Industrie nationale 304 Le retour à la terre du soldat aveugle. 304 Nouvelles diverses : Voyage de M. le D' Bourrillon aux Etats-Unis 304


REVUE INTERALLIÉE ( pour l'étude des questions intéressant

Les Mutilés de la Guerre

Nouvelle Adhésion au Comité Permanent Interallié

Le Gouvernement hellénique vient de faire connaitre au Comité Permanent Interallié qu'il avait désigné, pour le représenter dans son sein, MM. le Dr CARAMANOS et GUSTAVE HmscHFELD.

En se félicitant d'une adhésion qui lui est précieuse le Comité souhaite la plus cordiale bienvenue aux Délégués du Gouvernement hellénique.

t

PREMIÈRE PARTIE ARTICLES ORIGINAUX

Village Centres By R. FORTESCUE FOX, M. D.

The appeal to principles in the inception of a work is not less vital than faithfulness to principles in carrying it out. Those that underlie the village centre are very simple, and may be briefly stated as follows : First, it is essential for large numbers of war-disabled men that they should have combined treatment and training at the same place and both under medical supervision. Secondly, that this place should be in the country, not an institution, but a busy, happy community, with the right atmo-


sphere and social life. It will be convenient to discuss the practical application of these two principles a little more fully.

THE COMBINATION OF TREATMENT AND TRAINING.

The experience gained in other countries, especially during the last two years, has abundantly proved the value of the association of treatment with training in the restoration of wounded men. We in England have suffered too long from a verbal fallacy. Treatment and training are not two separate things; they are different - parts of the same thing. The fine work done for disabled men has therefore been marred by a fallacious and unnatural separation. Treatment and training are like the two wings of a bird. What Nature has joined, why have we cut asunder?

In the process of restoring disabled limbs or minds, recovery in truth begins when limb or mind begins to work. A return of function and activity is what we are always leading up to. For this reason the medical man uses at the proper time exercises for the re-training and co-ordination of the muscles. Every muscular movement makes an impression in its appropriate nerve centre, re-awakening a forgotten habit : and thus the restoration of function is gradually helped, from without and from within, simply by the power of work. It is impossible to draw a line of demarcation between treatment and training, and to say here treatment ends and there training or work begins. It is not even possible to draw a hard and fast line between "curative" and "vocational" training.

In the same way, what is true of the limb is also true of the mind.

Most mental affections in the early stages are happily curable, in the right atmosphere and under the right impressions, but not by idleness. Recovery can only come by way of mental movement and co-ordination, that is, by retraining the will and directing it towards occupation.

In the former days, not long past, the hospital was a place for treatment in the narrow sense. Let the limb be splinted until the bone is united, or dressed until the wound is closed. During many weary weeks or months, mind and body were allowed to be inactive. What wonder that young soldiers became listless, apathetic and unfit for active life?

Then in a happy day I - cui-alive workshops" were added to the hospital, but the word went forth that the training given to the battered limbs must be functional and not occupational, as who should say : By all means exercise your hand, but do nothing useful". The logic of facts has now carried us much further than that, although we have been slow to act upon it. We are beginning to realize that, for a seriously disabled man,


treatment and training ought not to be separated. Both are processes that must be carried on for many months, with constant watchfulness and patient care, and in the same place : and to obtain satisfactory results both should be under medical supervision. The tendency now is to bring the beginnings of vocational training into the hospital, but there is still too little of the medical element in the training school.

What has come of our artificial separation of these two great means of restoration? After a measure of "functional" recovery the discharged disabled man goes forth to the training school. The nature and amount of the work are left to his own choice or that of the trade instructor.

In the absence of expert guidance, the effect of this work upon limb and mind is neither watched nor recorded, and these subnormal men lack the continuous medical care which is perhaps most needed during the early and experimental stages of their return to active life. Many of them from this cause attempt too much or do the wrong work, give up their ill-directed efforts, or break down. They have missed the full measure of physical restoration that might have been theirs, and are consequently exposed to insecurity of position, anxiety, and discouragement.

THE SURROUNDINGS.

The best place for the physical and mental restoration of a large proportion of war-disabled men is the country. This is true of almost every kind of disability. Many of the seriously wounded, many convalescents, and all who are tuberculous, need open air life and pursuits. For the tuberculous the country offers the only promising hope of recovery.

Lastly, there are those who suffer from nervous and mental shock and exhaustion. These above all need the restful and healing influence of quiet places and occupations in the open air and mental treatment of the right kind.

There is strong evidence that men suflering from these more serious forms of disablement require a residential centre. Effectual medical care and guidance are impossible if a man spends his time in three places — partly at home, partly in the technical school, partly in the out-patient department of a hospital, not to mention the necessary daily journeyings.

Furthermore, to give the best results, the country centres should be not only residential but large. A variety ot equipment and a highly expert medical and technical stafl are needed, and only a large centre can form an economical medical and training unit.


The curative side provides all methods of treatment which are found to be beneficial in convalescence, especially that of "orthopædic" and nervous patients. The medical building will be equipped for physical treatment, by means of light and heat and cold, in the form of remedial baths, by manipulation, exercises and electrical currents. Accurate measurements and records for all kinds of disability will be kept, in order to check and guide not only the curative treatment but the work in which the men are engaged.

It has-been shown that in the country centres for agricultural re-education of disabled soldiers in France and Italy regular work in the open air has had great curative value. Recent results fully justify the wisdom of those who have long advocated it on medical grounds. Within the centres and on the neighbouring farms large numbers of men have been set to work in open-air occupations, under medical supervision, and have recovered both general fitness and the use of their limbs in a much shorter period than is the case under ordinary treatment. Even men with unhealed and suppurating wounds are now sent into the fields, and the daily measured appropriate work is found to expedite the process of healing. Physical treatment and technical training are carried on at the same time, with the result that a very large majority of the men so treated are fitted and re-educated in the shortest possible period to take up permanent work on the land or in some allied rural occupation. The agricultural cure is of course peculiarly appropriate to countries where the greater number of the population are agriculturists. But information goes to show that non-agricultural workers derive as much benefit as country- men. The Village Centre will offer the same facilities for this method of cure and training in England.

The aim of the Village Centre is to send out men not only fit and cured, so far as possible, but fully trained in self-supporting occupations.

The training and occupational side will therefore be highly organized, especially the agricultural and outdoor pursuits, which will be under the direction of an expert. A certain number of workshops will be fitted up for teaching village industries and handicrafts and necessary trades. This side will be under an Industries Director. The health and speedy recovery of the men will always be the paramount consideration, and work will be carried on and supervised on the principle that occupationis itself a cure.

The watchwords of the Village Centre are restoration and preparation for a self-supporting life, by all the means best adapted to the varied


forms of disability. An essential feature of the Centre is home life, and cottages will be available for a certain number of families. All harassing and unnecessary regulations will be avoided, and the men will have a share in the management of the place.

FIG 1.

OBJECTS OF THE VILLAGE CENTRES COUNCIL.

When in the autumn of 1917 the Village Centres Council, in laying.

their scheme before the Government, accepted responsibility for the large capital outlay necessary to provide and equip their first Centre, they relied upon the public to support them in initiating their work, and on the Ministry of Pensions for such fees and allowances as, once established, would make it self-supporting. The objects of the Council have been definitely stated as follows :— To assist the State in accelerating the restoration to health and fitness for work of ex-Service men who are injured in the Great War by disablement which has caused their discharge from Navy or Army but can remedied by new methods of medical treatment and physical re-education.

To associate with the medical treatment such vocational training in both indoor and outdoor occupations as can be practised in workshops and in land cultivation on a large country estate.

To offer attractive and co-operative conditions of social life which will appeal to the men.

To enable men and their families to occupy cottages and homes and


"a bit of land" on fair terms during the curative period, which may in many cases be prolonged.

To speed the men's recovery, so that with the help of their State Pensions and their own resources, or that of agencies like the King's Fund, they may be able to return to their former homes and previous occupations, or earn a new livelihood in agriculture, horticulture, or other healthy rural trades or callings.

To utilize the Village Centres permanently in the interests of disabled ex-Service men, and as national establishments for the restoration to health and for the physical re-education of other persons injured in the service of the State.

FIG. 2.

THE FIRST VILLAGE CENTER.

A large number of estates were investigated, in the hope of settiug up a Centre within a short distance of London. The Council's first choice was rejected by the authorities in December, 1917, because of the proximity of anti-aircraft guns. Finally, in May, 1918, |the Enham estate


of 1,027 acres, two-and-a-half miles from Andover', in Hampshire, was selected and subsequently acquired. It is peculiarly well adapted for a Village Centre, possessing a post office, smithy, and village hall, and a large number of thatched cottages, besides four outlying farms with homesteads, and last, but not least, three large residences.

In these three houses 150 men and the necessary staff can be at once accommodated, and the Council propose to take this number of suitable cases at once, and larger numbers as soon as accommodation can be provided.

There are several large walled gardens for the school of horticulture, and woods for forestry. An expert from the Board of Agriculture reports that the soil is remarkably well adapted for profitable cultivation, not only for the larger agriculture, but for market gardening and fruit.

It is a matter for the keenest regret that is has been impossible from various causes to open this Centre before. The lapse of time has, at all events, proved the soundness of the principles which underlie these proposals, the admirable results obtained wherever they have been put into pratice, and the urgent need for applying them to the problem of war disablement in England.

For years to come hundreds of thousands of disabled men will need restorative treatment and preparation for civil life. But the end of the war has made it reasonable to look beyond this great emergency, and to ask what permanent purpose, if any, the Village Centre is likely to serve.

It is of course very difficult to forecast future circumstances, and especially in rural areas. All who are qualified to express an opinion agree that there is much room for the revival and transformation of English village and rural life. On all accounts it would seem advisable that the Village Centre should offer some permanent contribution towards this great end. We know that the war has turned men's minds towards a country life. But many must first be restored to health, and many more be trained for agriculture and its accessory pursuits. The Village Centre is in full harmony with these movements. It should offer the best means of fitting these men for the occupations of their choice.

Two definite permanent objects of the Village Centre may be stated, which in the belief of the Council amply justify the opening of such centres, even after the war :— (1) The medical building will be completely equipped for the curative treatment not only of injured but of convalescent men. After the present emergency, the Council intend to make it available for all suitable cases needing such treatment —railway men, miners and others. They think


that such a place in the South of England will be a valuable permanent asset in caring for temporarily disabled persons.

(2) As a link in the national policy of rural development, by training ex-Service men and others for taking up work on the land. Many men who have been treated and trained may wish to remain on the estate.

If this proves to be the case, cottages and small holdings will doubtless be made available tor them at the Enham Village Centre.

RÉSUMÉ

Centres ruraux pour réformés de guerre par R. FORTESCUE FOX, M. D.

L'idée d'établir des centres ruraux pour les réformés de guerre se base sur les deux principes suivants : 1° pour un très grand nombre de mutilés il est essentiel qu'ils soient soumis au traitement et à la rééducation en même temps et dans le même endroit, et ce sous la surveillance du médecin ; 2° le siège de l'installation de traitement et de rééducation devrait être à la campagne, et ne devrait pas avoir la forme d'un établissement hospitalier, mais celle d'une communauté active et heureuse, avec son atmosphère propre et son existence sociale particulière.

En ce qui regarde le premier point, l'expérience des pays alliés en a prouvé la nécessité et l'efficacité; il a fallu du temps pour se rendre compte de l'erreur que l'on commettait en voulant guérir d'abord, rééduquer ensuite, et des conséquences fâcheuses qui en résultaient pour les sujets en traitement. L'erreur est maintenant reconnue en Angleterre, mais on ne s'attache pas encore assez à donner la haute main à l'élément médical dans les écoles de rééducation.

Que l'installation de traitement et de rééducation doive être de préférence située à la campagne est un fait qui va pour ainsi dire de soi, et à l'appui duquel on peut encore citer les excellents résultats obtenus en France et en Italie pour la rééducation agricole. Il n'est pour ainsi dire pas une seule forme d'invalidité qui ne doive bénéficier largement du traitement dans des établissements situés hors des villes — et il faut


mettre en première ligne les tuberculeux et les sujets atteints d'épuisement ou de maladies nerveuses. Dans bien des cas il faudra évidemment le séjour dans un établissement pourvu des moyens de traitement les plus perfectionnés et auquel sera attaché un personnel de valeur : cela n'est pas incompatible avec l'installation dans la campagne. Mais le facteur le plus intéressant du centre rural c'est de permettre aux sujets en traitement d'y mener la vie de famille, par l'appropriation d'habitations particulières où ils pourront loger leurs familles.

Pour la réalisation de ce projet, il s'est fondé, à la fin de 1917, un Comité des Centres ruraux (Village Centres Council), qui s'est proposé de recueillir les fonds destinés à l'installation du premier centre, en attendant que le succès espéré amène la création d'autres centres analogues qui pourraient, par la suite, recevoir non seulement les réformés rie guerre, mais encore toutes les personnes blessées ou devenues invalides au service de l'État.

Après d'assez longues recherches, le premier centre rural va être ouvert au mois de mai dans le domaine de Enham, dans le Hampshire.

Ce domaine, d'une surface de 1.027 acres (430 hectares environ), comprend trois grands bâtiments pouvant recevoir 150 hommes, ainsi que le personnel adéquat, et une certaine quantité de maisonnettes pouvant abriter des familles. Le village contigu comporte en outre quatre fermes, un bureau de poste, une forge, une salle de réunion, bref tous les éléments qui permettent de constituer une cellule sociale pouvant se suffire à elle-même.

Il semble que la guerre ait ramené dans beaucoup d'esprits le goÙI de l'existence à la campagne. L'organisation des centres ruraux pour réformés peut avoir une heureuse influence sur ce mouvement, en décidant à se consacrer définitivement aux travaux des champs nombre des hommes qui auront été traités et rééduqués dans ces centres.


Quelques considérations sur l'appareillage des mutilés de la main par M. Jean LAVIGNE, Médecin Aide-Major de 1re classe du Centre d'appareillage de Rennes, et M. Marcel PARAMELLE, Médecin Aide-Major de 21) classe du Centre d'appareillage de Rennes.

Si l'appareillage des amputés du membre supérieur peut être envisagé, à la rigueur, suivant un type invariable ; si de toute façon un même appareil peut être établi d'une manière fixe pour tous ceux qui se livrent à des travaux de force, pourvu que des outils convenablement choisis suivant le métier exercé s'adaplent à la partie terminale de l'appareil (1) ; si un même appareil peut être choisi indifféremment pour tous les amputés du membre supérieur à profession libérale, il ne peut pas être question de donner un modèle-type d'appareil pour les mutilations de la main. Autant de mutilations, autant d'appareils — et même, autant de métiers ou professions par espèce de mutilation et autaut de variétés dans l'appareillage. Il y aurait donc des volumes à écrire sur cette question. Nous nous sommes bornés, dans cet article, à indiquer très sommairement quelques cas spéciaux que nous avons eu à appareiller au Centre de Rennes.

Au début, l'appareillage des mutilés de la main était fort simple: s'il s'agissait de la perte totale des doigts, on donnait une manchette porteoutils ; s'il s'agissait de la perte d'un ou plusieurs doigts, on donnait un porte-outil de travail et des doigts en bois, de parade —, qui sous un gant redonnaient une physionomie normale à la main mutilée.

Dans le cas d'amputation totale des doigts, nous en sommes restés au même point ; nous donnons toujours la manchette porte-outils — le perfectionnement dans ce cas se trouve exclusivement dans le plus grand choix des outils professionnels.

Ce qui frappe immédiatement, c'est l'inutilisation des doigts subsis-

(1) Nous publierons prochainement un article sur cette question.


tants. Nous avons précisément essayé de nous servir du fonctionnement des doigts intacts, toutes les fois que nous avons eu un mutilé de la main à appareiller. Dans certains cas, ce fut impossible.

Pour utiliser les doigts, encore faut-il que ceux-ci soient mobiles; la figure 1 réprsente un cas de ce genre. Le blessé avait une résection totale des métacarpiens, sa main était absolument impotente ; et bien que plus infirme ainsi que s'il avait été amputé, il avait refusé toute inter-

FIG. 1.

vention. On lui avait fait fabriquer une manchette porte-outils à laquelle il pouvait fixer les outils de travail du modèle-type.

La figure 2 représente un mutilé qui avait subi une amputation atypique de la main. Il ne restait que le premier et le cinquième métacarpien bien étoffés, simulant deux doigts grossiers, mais doués de mouvements d'adduction et d'abduction. Le mutilé pouvait saisir un objet entre ses deux moignons. Il reçut un appareil à pince pour les travaux n'exigeant pas une grande force et dans lequel les mouvements d'adduction et d'abduction furent précieusement conservés ; pour les travaux pénibles, il reçut une manchette porte-outils spéciale articulée au poignet.

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Un mutilé amputé des deux derniers doigts avec leurs métacarpiens avait en outre une perte de substance du cubitus ; les mouvements de flexion du poignet étaient pratiquement nuls. La manchette en cuir moulé que nous lui fîmes construire eut pour but de maintenir la main en bonne position, sans porter entrave au libre jeu des doigts. Une bride de cuir souple, passant entre le pouce et l'index, permettait une fixité absolue de cette manchette lacée.

FIG. 2.

La figure 3 représente un outil que nous avons imaginé pour un menuisier présentant une désarticulation métacarpo-phalangienne des quatre derniers doigts de la main gauche et dont les mouvements du pouce étaient normaux. L'appareil dont il a été muni se composait d'une pièce de bois sculptée, s'adaptant exactement sur le moignon d'amputation, tout en débordant légèrement ce dernier sur les faces palmaire et dorsale de la main. L'extrémité libre de cette pièce de bois avait une forme ovoïde et présentait au niveau du pouce une partie légèrement excavée et dont les dimensions avaient été calculées de telle sorte qu'elles pussent permettre la préhension soit d'un outil de certaine dimension, soit d'un objet plus réduit, un clou par exemple. Un système de courroies mainte»


FiG. 3. — Outil spécial du docteur Lavigne.

FIG. 4. — Outil spécial du docteur Lavigne.


nait l'appareil en place, le fixant au poignet tout en permettant le libre jeu de ce dernier. Le mutilé s'est déclaré entièrement satisfait de cet appareil et a pu reprendre immédiatement son travail avec un rendement à peu près normal.

La figure 4 représente un mutilé amputé du pouce et de son métacarpien, désarticulé de l'index et du médius de la main gauche, les deux derniers doigts étant normaux.

Cultivateur de profession, nous avons imaginé, pour lui, une manchette articulée au poignet portant à la place du pouce un anneau métallique.

FIG. 5. — Pouce rigide de M. Paramelle.

Cet anneau avait été établi de telle manière que, d'après son orientation et ses dimensions, il figurât la boucle que forme le pouce en opposition avec l'index et le médius dans les actes de préhension. Une vis à ailette permettait le rétrécissement du calibre de l'anneau et par suite assurait le serrage des outils. Après essai, le mutilé se déclara satisfait de cet appareil et en demanda un deuxième semblable. Peu de temps après avoir appareillé le mutilé de la figure 4, nous avons eu un cas analogue : il s'agissait d'appareiller un amputé des trois derniers doigts de la main droite chez lequel le pouce et l'index de la même main étaient normaux.

Nous avons imaginé (appareil du docteur Lavigne) un appareil en quelque sorte symétrique de celui que représente la figure 4. L'anneau fut


construit plus long, formant une sorte de manchon de 0m, 03 de long et d'un diamètre suffisant pour le libre passage d'un manche d'outil aratoire. Une vis à ailette permettait le serrage comme dans le cas précédent. Les essais montrèrent que cet appareil rendait de très utiles services au mutilé et que le rendement obtenu était meilleur que dans le cas précédent. Le pouce et l'index subsistant, l'anneau imaginé devenait un adjuvant au lieu d'être, comme dans le cas de la figure 4, l'agent utile principal.

FIG. 6. — Pouce articulé du docteur Lavigne.

La figure 5 représente un appareil destiné aux travaux de force pour les mutilés amputés du pouce. La courbure de ce pouce est calculée de telle sorte qu'elle permette de saisir un outil quelconque avec les doigts qui restent ; les branches de métal nickelé sont bordées de cuir à semelle pour assurer un serrage parfait. Construit pour toute une série de mutilés, cet appareil a donné d'excellents résultats ; il n'est pas de cultivateurs, amputés du pouce et appareillés par nous, qui ne l'aient demandé.

La figure 6 représente un pouce articulé en cuivre nickelé que nous avons imaginé pnur les mutilés qui ne font pas de travaux de force. Il permet de saisir la plupart des objets, de prendre une chaise et de la déplacer. il permet d'écrire. La force des ressorts maintenant les phalanges en flexion est calculée de telle sorte que, lors de la préhension d'un objet, la deuxième phalange cède la première, puis, lorsque l'extension de cette dernière est à peu près complète, la première phalange cède à son tour. L'ensemble de l'appareil est rivé sur une gaine de cuir à


laçage postérieur. Un cordonnet passant entre l'index et le médius et cousu par ses deux extrémités à la gaine de cuir, empêche l'appareil de remonter.

Enfin, l'extrémité de la deuxième phalange est coupée longitudinalement et transversalement d'avant en arrière pour recevoir une pièce de liège, légèrement concave et qui rend la préhension plus efficace. Le premier appareil de ce genre fut établi pour un officier (dessinateur dans une industrie textile) qui a repris sa vie normale d'avant-guerre dans son usine, bien qu'amputé du pouce droit et de son métacarpien

FIG. 7. — Doigts articulés du docteur Lavigne.

Nous eûmes à appareiller un mutilé désarticulé de l'index et amputé du pouce, le premier métacarpien subsistant. L'appareillage fut beaucoup plus simple : nous coiffâmes directement le moignon avec le pouce articulé.

Ce moignon, muni de l'appareil, joua dès lors le rôle de la première phalange ; une articulation entre la première et la deuxième phalange suffit pour rendre possible au mutilé la reprise de ses travaux : un bracelet auquel se fixaient deux petites courroies de cuir rivées d'autre part au pouce articulé, maintenait en place l'ensemble de cet appareil.

Sur le même principe, nous avons fait établir des doigts articulés pour un mutilé porteur d'une désarticulation interphalangienne des trois


premiers doigts de la main gauche. Ouvrier électricien, il était surtout soucieux de savoir s'il pourrait ou non poser des fils électriques dont le cloutage est assez délicat ; il a pu reprendre intégralement son métier (fig. 7).

Il est enfin une mutilation très fréquente, la paralysie radiale, pour laquelle nous avons imaginé un gant représenté sur la figure 8. L'appareil se compose d'un gant de peau tannée et d'une manchette de cuir (fig. 8).

FIG. 8. — Gant radial du docteur Lavigne.

Intérieurement, le long des doigts, de l'articulation métacarpo-phalangienne à la dernière phalange, sur la partie médiane, sont cousues des gaines de toile. Ces gaines sont conductrices de cordonnets plats qui d'une part, au niveau des dernières phalanges, se bifurquent sous forme de boucles — lesquelles se fixent à la partie terminale et palmaire de chaque doigt (extenseurs artificiels) ; d'autre part, ces cordonnets sont cousus au niveau de la partie moyenne du métacarpe à des élastiques (une à deux épaisseurs suivant besoin) de course assez vaste. Ces élastiques passant sous une glissière cousue à la manchette de cuir sont rattachés : celui du pouce à une patte de cuir indépendante ; ceux des doigts à une patte de cuir unique. Ces deux pattes de cuir se bouclent sur la manchette avec la tension appropriée.

La manchette de cuir soutient le carpe en l'embrassant ; elle est fixée par un laçage antérieur.


Par ce système, nous avons obtenu l'extension des doigts sur la main et l'extension de la main sur l'avant-bras. La mobilité du poignet, bien que relative, est cependant suffisante. Il n'est pas un mutilé de condition sociale un peu élevée qui, lors de son passage au Centre de Rennes, ne nous ait demandé l'attribution de cet appareil, qui jusqu'ici a donné eqtière satisfaction au point de vue de l'esthétique comme au point de vue de son utilité.

Il est aisé de se rendre compte, par ces quelques descriptions d'appareils, choisis parmi les plus typiques que nous ayons eu à observer, de la diversité et quelquefois de la difficulté des problèmes à résoudre lorsqu'on se trouve en présence d'une mutilation ou d'une amputation atypique de la main. Il ne saurait être évidemment question, dans ces cas, de définir et d'établir un modèle-type d'appareil qui serait appliqué indistinctement à tous les blessés, car il y aurait alors toutes les chances pour que l'appareil choisi, aussi ingénieux qu'il puisse être, ne serve de rien au mutilé et soit destiné à moisir au fond d'une armoire. Il faut au contraire que chaque cas soit étudié en détail et que l'appareil attribué au mutilé soit celui qui tire le meilleur parti possible de sa lésion, pour le genre de travail auquel se livre le blessé. Ce sont surtout ces cas particuliers qui montrent toute l'importance du rôle du médecin appareilleur ; si l'application d'un appareil classique pour amputation de bras ou de jambe ne présente à la rigueur aucune difficulté, le choix d'un de ces appareils spéciaux est chose beaucoup plus complexe, car chaque mutilation est un cas nouveau à traiter — il faudra tenir compte, pour la construction de l'appareil, de la mobilité et du degré de force des doigts restants, de la sensibilité plus ou moins grande de telle partie du moignon, de la profession exercée par le blessé, et seul le médecin spécialiste a qualité pour donner au constructeur toutes les indications utiles. Il va de soi (et les photographies précédentes le montrent nettement) qu'aucune considération esthétique ne doit entrer en ligne de compte pour la construction d'un appareil de travail.

Que si l'on peut concilier l'esthétique et l'utile, tant mieux ; mais il s'agit avant tout de remédier dans la mesure du possible à l'inégalité produite par une lésion qui, dans certains cas, équivaut comme gravité à une amputation.


L'adaptation des machines agricoles aux impotences des mutilés par M. Roger de SAINT-MAURICE, Ingénieur agronome.

Les paysans de France ont payé un lourd tribut pendant les quatre années et demie de guerre. Sur 5.760.000 hommes qui concouraient d'une façon active à la production agricole, 2.750.000 environ ont été appelés sous les drapeaux, soit près de la moitié. L'on peut évaluer à un million le nombre des agriculteurs portés morts ou disparus et à cinq cent mille celui des cultivateurs qui ne reviendront au village que physiquement diminués.

Ces cinq cent mille mutilés, nous voulons les ramener à la terre, non seulement parce qu'ils peuvent lui donner de nombreux enfants qui seront les producteurs de demain, mais aussi parce qu'ils sont encore susceptibles de mettre en valeur le sol qu'ils ont si vaillamment défendu.

En effet, contrairement à ce que beaucoup pensent, la plupart des mutilés peuvent exécuter les travaux agricoles s'ils sont munis d'appareils de prothèse convenables et de machines agricoles appropriées aux impotences dont ils sont atteints.

Nous devons faire en sorte de réduire au minimum l'incapacité de travail agricole des mutilés, et pour atteindre ce but deux moyens sont mis à notre disposition : 1° L'utilisation d'appareils de prothèse qui rendent au blessé une partie de la fonction du membre amputé ou impotent ; 2° L'emploi de machines agricoles disposées de telle manière que leur conduite n'exige pas l'intervention du membre amputé ou impotent.

Ces deux moyens peuvent être employés simultanément pour l'exécution d'un travail donné.

Le problème des appareils de prothèse de travail a été fort bien étudié par les médecins, par les mécaniciens orthopédistes et aussi, disons même surtout, par les agriculteurs.

Des dispositifs ingénieux ont été inventés et mis au point; le film « Les mutilés aux champs » montre quels éminents services ils rendent aux mutilés. Il serait désirable qu'ils soient plus connus et plus fréquemment employés. La propagande que le Service de la main-d'œuvre agricole


a entreprise a précisément pour objet de les porter à la connaissance de tous les intéressés.

La question de l'adaptation des machines agricoles aux impotences des mutilés est beaucoup moins avancée. A notre connaissance, elle n'a guère été étudiée que par l'Institut agricole de Sandar Limonest, près de Lyon, et par le Centre d'appareillage de l'hôpital 40 à Lyon. Nous allons indiquer brièvement les données de ce problème.

Nous prendrons les travaux agricoles dans l'ordre où ils se présentent normalement, et examinerons les machines qui permettent aux impotents des membres supérieurs, puis à ceux des membres inférieurs de les éxécuter sans difficultés.

LES LABOURS.

1° Impotence grave du membre supérieur. — L'expérience a montré que les amputés de bras, même désarticulés de l'épaule, peuvent faire des labours à plat avec des charrues Brabant doubles ; la manœuvre de retournement de la charrue au bout du champ se fait facilement avec un seul bras, à condition que la machine ne soit pas trop lourde. Il conviendrait donc de mettre à la disposition des mutilés d'un des membres supérieurs des charrues Brabant doubles aussi légères que possible et dont le retournement puisse se faire avec un seul bras.

Pour les labours profonds, les brabants sont d'un retournement difficile; il serait désirable de pouvoir procurer aux impotents du membre supérieur des charrues-bascules dont la conduite peut se faire avec un seul bras.

Dans beaucoup de régions on a coutume d'exécuter des labours en planches. La catégorie de blessés dont nous nous occupons actuellement aurait de grands avantages à employer des charrues à support à essieu coudé et à levier de relevage. Nous ne faisons guère en France que des déchaumeuses de ce modèle, il serait bon que les constructeurs des pays alliés sortent de leurs ateliers des charrues dans le genre de celles dont Eckert, Rudsack, Ventzki, etc, nous inondaient avant la guerre. Ces machines très stables sont d'une conduite facile et peuvent se manœuvrer d'une seule main.

2° Impotence grave du membre inférieur. — Le labour est un des travaux agricoles les plus difficiles à exécuter pour les blessés auxquels la marche est rendue pénible. Il s'agit de munir d'un siège les différents modèles de charrues.


En ce qui concerne l'exécution des labours à plat, le docteur Martin a solutionné le problème en accrochant à une charrue Brabant double ordinaire une remorque à bascule et à siège sur laquelle le mutilé prend place.

La maison Bajac avait sorti avant la guerre une charrue à retournement automatique et à siège permettant de faire les labours à plat. Au bout du champ les animaux, en tournant, faisaient subir une rotation de 180° au corps de la charrue sans que le conducteur ait besoin de descendre de son siège. Il y a là une idée particulièrement intéressante; ne serait-il pas possible de la rendre pratique, même pour de petits modèles de charrues?

Il faudrait enfin reprendre la construction de petites charrues-bascules à siège destinées à être tirées par des attelages animés et permettant d'exécuter des labours à plat. Plusieurs ateliers français avaient sorti de semblables machines il y a déjà une vingtaine d'années ; le besoin de charrues à siège ne se faisait pas sentir alors, l'heure de les employer a sonné, il faut en construire car elles auront preneurs.

Nous trouvons en Angleterre et en Amérique des charrues « tilbury doubles » à siège, permettant de faire des labours à plat. Il semble facile de construire des modèles analogues, moins lourds, moins coûteux, et mieux adaptés aux besoins de l'agriculture française.

C'est aussi aux États-Unis et en Angleterre qu'il nous faut aller chercher des charrues à siège pour l'exécution des labours en planches.

Elles sont lourdes et encombrantes ; nous souhaitons vivement que des , modèles répondant mieux aux exigences de notre culture sortent des usines.

Dans tous ces modèles de charrues à siège, il serait préférable d'avoir tous les leviers de manœuvre à droite pour les blessés de la jambe gauche et de les avoir à gauche pour ceux de la jambe droite.

Faisons enfin remarquer que l'emploi de charrues versant à gauche rend le travail moins pénible aux hommes ayant un raccourcissement de la jambe droite ainsi qu'à ceux ayant le genou gauche ankylosé ou atteints d'une paralysie du sciatique poplité externe gauche. Il faudrait donc pouvoir mettre des charrues versant à gauche à la disposition des blessés de cette catégorie.

LES FAÇONS AU SCARIFICATEUR ET AU CULTIVATEUR.

Les mutilés d'un bras peuvent conduire sans difficulté la plupart des modèles de scarificateurs et de cultivateurs.

Les blessés d'un des membres inférieurs trouvent des cultivateurs à siège, tels que ceux de Jean, Massey-Harris, etc., qui leur donnent toute


satisfaction. Signalons cependant qu'il serait désirable que tous les leviers puissent être placés, soit à droite, soit à gauche, suivant que le mutilé est impotent d'un membre gauche ou d'un membre droit.

Le siège doit être aussi accessible que possible et placé de telle manière, que les amputés de cuisse puissent facilement placer leur pilon rigide entre le bâti du cultivateur et le coffre du semoir à la volée.

LE HERSAGE.

Le hersage est compatible même avec une amputation totale du bras.

Ce travail est, avec le labour, le plus difficile à exécuter pour les hommes atteints d'une impotence grave du membre inférieur. Il faudra munir la herse d'un siège sur lequel le blessé pourra prendre place.

Il existe en Amérique des remorques à deux roues à siège s'attelant à la volée de la herse. Assis sur le siège, l'homme a toutes facilités pour conduire l'attelage et pour relever les segments en cas de bourrage. Ce dispositif simple, peu coûteux, pourrait être établi facilement et rendrait de grands services aux agriculteurs amputés de jambe.

Quelques maisons françaises construisent des herses à dents flexibles, munies d'un siège. Il serait opportun de généraliser cette heureuse initiative et de placer les leviers de commande à bonne portée du siège.

ÉPANDAGE DES ENGRAIS.

Les amputés ou impotents d'un bras peuvent sans difficulté conduire les différents modèles de distributeurs d'engrais. Le point le plus délicat est le remplissage du coffre qui devra être placé aussi bas que possible et être bien accessible.

Parmi les distributeurs d'engrais français, nous ne voyons guère que le semoir « Express », de M. Séverin, qui puisse être employé par les blessés auxquels la marche est rendue difficile.

Il serait très facile de munir les distributeurs d'engrais du modèle le plus courant d'un siège placé à proximité des commandes d'embrayage, et de réglage du débit.

LES SEMAILLES.

Les impotents d'un des membres supérieurs peuvent semer à la volée à l'aide du semoir à turbine « Cahoon ».

Ils peuvent également employer le semoir à archet qui permet aux désarticulés d'un bras de semer régulièrement.

Cette catégorie de blessés n'éprouve aucune difficulté pour conduire - les différents modèles de semoirs à la volée ou en lignes. Le remplissage du


coffre leur demandera par exemple plus de temps qu'à un homme valide, mais cela n'aura pas pour effet de diminuer sensiblement le rendement en travail, surtout si l'on prend soin de donner aux coffres de nos semoirs de grandes dimensions et de les rendre facilement accessibles.

Les travaux de semailles sont plus difficiles à exécuter pour les impotents graves du membre inférieur.

Pour les semailles-à la volée, ils pourront recourir aux cultivateurs Jean, Massey-Harris, etc., sur lesquels peut s'adapter un coffre de semoir.

Seulement nous demanderons aux constructeurs de placer le levier de relevage du cultivateur et le levier d'embrayage du semoir à droite pour les blessés de jambe ou bras gauche et de mettre ces deux leviers à gauche pour les impotents de jambe ou bras droit. Cette modification est facile à apporter et rend la conduite de ces instruments plus commode même pour les personnes valides.

Afin de permettre aux blessés des jambes d'employer les semoirs à la volée et les semoirs en lignes, il y aura lieu de les munir de sièges. Nous avons eu l'occasion de voir au concours agricole de 1913, au stand de la Franco-Hongroise, un semoir en lignes muni d'un siège à portée duquel se trouvaient toutes les commandes. Nous espérons que bientôt nos agriculteurs blessés pourront trouver chez les constructeurs des pays alliés des dispositifs analogues. Il y aurait peut-être lieu de remplacer le levier de relevage des socs par une manivelle plus facile à manœuvrer du siège.

Le problème qui se pose n'est pas bien difficile à résoudre.

FAUCHAISON ET MOISSON.

Les amputés et impotents de bras gauche peuvent sans difficulté faucher avec une faux ordinaire, les amputés du bras droit auront avantage à employer des faux gauchées; il serait désirable que les blessés puissent facilement se procurer ces faux dans le commerce.

En ce qui concerne les faucheuses, moissonneuses-javeleuses, moissonneuses-lieuses, il faudrait avoir des machines dont les commandes soient à droite pour les blessés de bras ou de jambe gauche, et d'autres machines dont toutes les commandes soient à gauche pour les blessés de bras ou de jambe droite.

HARNAIS ET MATÉRIEL DE TRANSPORT.

Il y aurait enfin bien des simplifications à apporter aux harnais des chevaux et des bœufs pour faciliter aux blessés le harnachement et le jougage. A notre connaissance, il n'a pas été fait de recherches dans ce sens non plus que pour rendre d'un emploi plus commode le matériel


de transport. Nous appelons d'une façon toute spéciale l'attention des constructeurs sur cette importante question.

* *

Telles sont brièvement esquissées les grandes lignes du problème de l'adaptation des machines agricoles aux diverses impotences des mutilés de guerre. Les modifications que nous demandons d'apporter au matériel agricole n'auront pas simplement pour objet de permettre l'usage des divers instruments aux blessés, elles en rendront l'emploi plus commode à tous les ouvriers agricoles, car elles réaliseront la taylorisation de notre attirail de culture.

La guerre a creusé des vides cruels dans les rangs de nos travailleurs ruraux ; il faut reculer la limite d'âge d'accession à la retraite et faire que les jeunes entrent dans la carrière quand les anciens y sont encore. Les modifications que nous demandons d'apporter à nos machines permettront d'atteindre ce but.

La Réforme de la mutilation et de la prothèse par M. le Dr Julien VANGHETTI.

I. — QUOAD VITAM; QUOAD FUNCTIONEM; QUOAD PROTHESIN.

Telle est la forme dans laquelle a été posé par nous, voici plus de vingt ans, le problème de la mutilation : il s'agit, non seulement de sauver la vie, mais encore de conserver la plus grande autarchie possible au mutilé, militaire ou civil, ouvrier ou non, atteint d'une diminution d'organe ou de fonction.

Le moyen proposé est la cinémalisation ou vitalisation du moignon et de l'appareil prothétique, vitalisation obtenue à l'aide des mouvements actifs et utiles dépendant directement de la volonté et qui sont, soit le fait d'une récupération in loco, soit un reliquat naturel, soit encore le résultat d'un emprunt au segment adjacent ou au tronc, réalisé par intervention chirurgicale ou par des moyens mécaniques.

La théorie de la cinématisation est si peu connue que l'on peut en lire encore des critiques d'une exagération excessive ou absolument sans


fondement, qui font sourire quiconque a la pleine connaissance du sujet.

En général, on trouve à l'origine de ces critiques quelque procédé spécial remontant à la phase primitive de cette technique particulière, procédé que l'on feint de considérer comme étant le seul et le dernier, alors que le nombre des procédés est infini et que la technique a, de longue date, dépassé sa période initiale.

Il n'est pas rare non plus de rencontrer des critiques ou des éloges de procédés qui nous sont attribués, tandis que nous n'avons jamais effectué de cinématisation en dehors de nos expériences sur les animaux, expériences vieilles déjà de plus de quatre lustres et qui avaient pour but de servir de base à des essais sur l'homme.

C'est nous qui avons, le premier, imaginé la théorie; ce sont les chirurgiens qui ont eu l'honneur de la faire passer dans la pratique.

Pour montrer le peu de fondement de certaines critiques et les conséquences fâcheuses qui en découlent, nous dirons qu'un seul chirurgien, appartenant à une nationalité ennemie, a pu, au cours d'un congrès tenu en fevrier 1916, présenter environ 50 cas de cinématisation, environ 150 en février 1917, et enfin, en février 1918, environ 500.

Ceux qui, en nous critiquant par misonéisme, paresse, ignorance ou légèreté, ont contribué à priver tant de nos mutilés des avantages de ce progrès chirurgical, et à accroître le renom des savants ennemis, peuvent être bien satisfaits du résultat obtenu.

Il. — CHIRURGIE CINÉMATIQUE OU CINÉPLASTIQUE.

D'après la définition que nous en avons donnée, la chirurgie orthopédique serait celle qui s'occupe de la statique, de la dynamique et de la cinématique du système de station, de locomotion et de préhension.

On donne depuis une vingtaine d'années le nom de plastique cinématique ou cinéplastique, à la chirurgie qui s'occupe de former de nouvelles entités motrices en utilisant les éléments anatomiques mutilés ou intègres, dans le but de vitaliser la prothèse, sans se demander si cette expression ne devrait pas avoir une signification plus étendue.

Ceci nous offre l'occasion de faireremarquer que la nouvelle terminologie que nous avons dû introduire porte de nombreuses traces du développement historique de la théorie et de la pratique de la cinéplastique.

Elle peut donc parfois paraître superflue et obscure à ceux qui n'ont pas suivi pas à pas notre longue série de recherches, et qui ignorent quels efforts d'euristique nous avons dû nous imposer durant les vingt dernières années pour convaincre les chirurgiens.


Mais les termes fondamentaux strictement nécessaires sont peu nombreux, très clairs, universellement acceptés tels quels, ou traduits dans toutes les langues.

Le principe de la plastique cinématique, dite aussi cinématisation chirurgicale, peut se résumer ainsi : « Dans une amputation ou désarticulation ou régularisation actuelle ou ancienne, le tendon ou le muscle pourvu de la protection physiologique nécessaire (peau, vaisseaux, nerfs, etc.), pourra en général servir à la prothèse cinématique toutes les fois qu'on pourra en faire un point d'attache artificiel soumis aux mêmes conditions de protection (1899). »

III. — PROTHÈSE CINÉMATIQUE OU CINÉPROTHÈSE.

Nous désignons du nom de prothèses les dispositifs mécaniques de toute nature qui remplacent les parties ou fonctions absentes ou imparfaites, et nous acceptons la division qui est le plus communément employée, tout en déclarant que nos études nous portent à distinguer de la prothèse dite prothèse de travail en général une prothèse d'atelier en particulier.

Nous avons appelé prothèse cinématique ou cinéprothèse celle qui, placée en n'importe quel point du corps, et quels que soient son point d'attache et son éloignement de la mutilation, utilise les mouvements résiduels ou récupérés pour en produire d'autres qui remplacent les mouvements absents ou offrent plus d'utilité que ceux qui restent.

Nous devons, par conséquent, distinguer trois sortes de cinéprothèses : a) La cinéprothèse mécanique ou physio-mécanique, actionnée seulement par des mouvements résiduels naturels ou transformés au moyen de mécanismes. Elle est très utile dans les cas où le chirurgien n'a aucune possibilité d'agir, mais présente divers inconvénients (usurpation de mouvements, possibilité de collisions entre eux, mécanismes trop compliqués, trop coûteux ou trop fragiles).

b) La cinéprothèse chirurgicale, ou mécano-chirurgicale, actionnée seulement par des mouvements récupérés par l'intervention de la chirurgie plastico-cinématique ou cinéplastique. Elle offre l'avantage de permettre la récupération des masses musculaires mutilées, qui, autrement, seraient restées inemployées ou perdues, ou bien la meilleure utilisation chirurgicale des mouvements naturels restants.

c) La cinéprothèse mixte, ou physio-mécano-chirurgicale. Elle peut réunir tous les avantages des deux premières sans leurs inconvénients


possibles ; c'est celle à laquelle il faut toujours songer en l'état actuel du développement de la cinéplastique.

Quelques-uns appellent cinématisation l'application simple de la prothèse cinématique (cinématisation mécanique).

IV. MOTEURS PL.\STtQ));S.

Un appelle ainsi toutes les entités motrices façonnées avec ou sans intervention chirurgicale sanglante.

Le moteur plastique représente une insertion artificielle d'une masse musculaire plus ou moins intacte sur un squelette externe et artificiel

FIG. 1. — Cinématisation tertiaire ; unimoteur latéral en anse; attache prothétique déjà introduite dans l'attache somatique (Pellegrini).

qui est l'appareil de prothèse. Cette opération consiste en l'union du point d'attache du moteur (attache organique ou somatique) au point d'attache de la prothèse (attache inorganique ou prothétique). (Fig. 1.) De même que, pour plus de clarté et de commodité d'étude, il à fallu établir deux ou trois types fondamentaux des moteurs auxquels peuvent se rattacher, avec plus ou moins d'exactitude, les nombreux moteurs que l'on peut imaginer, de même les distinctions entre ces types ont été déduites de la constitution formelle et générique de l'attache somatique.

Dans l'usage courant, les termes « attaches somatiques » et « moteur » sont souvent employés l'un pour l'autre, et nous avons ainsi :


a) Une attache somatique ou moteur à massue, dont le col est emboîté par l'attache de la prothèse : c'est le type le plus commode, même parce qu'il peut s'obtenir sans intervention sanglante ; b) Une attache somatique ou moteur à anse, dans laquelle s'accroche l'attache prothétique, moyen plus difficile, mais plus riche en possibilités, que l'on n'a jamais essayé d'obtenir jusqu'à présent sans intervention sanglante ; c) Un type mixte d'attache somatique ou moteur à anse-massue, quelquefois inévitable et qui est une combinaison des deux types précédents.

FIG. 2. — Cinématisation tertiaire; unimoteur extra-segmentaire en anse; attache prothétique en place et étirée avec force (Pellegrini).

V. — UNI MOTEURS ET PLURIMOTEURS.

Le moteur simple ou unimoteur est celui qui, par lui-même, c'est-àdire sans l'aide d'aucun dispositif artificiel, a le pouvoir d'exécuter un seul mouvement, par exemple : la flexion ou l'extension simplement.

Au contraire, le plurimoteur peut, par lui-même, exécuter plus d'un mouvement et être ainsi bimoteur, trimoteur, etc. Le bimoteur, quel qu'en soit le type, pourvu de deux mouvements exécutés alternativement, s'appelle aussi alternateur. Il a la propriété de pouvoir fonctionner dans les deux sens avec une seule attache somatique; et ainsi, par l'économie


de peau qui en résulte, on peut en constituer plusieurs sur le même moignon avec autant de paires de doubles mouvements alternatifs sur l'appareil de prothèse.

Il ne faut pas confondre « moteur double » et « bimoteur » : le premier signifie que deux moteurs se trouvent sur un même moignon et le second indique deux mouvements sur le même moteur.

Les moteurs, suivant leur position, peuvent être terminaux, latéraux, extra-segmentaires, brachiaux, thoraciques, pelviques, etc. (fig. 2). Mais leur importance est, en général, d'autant plus grande qu'ils sont situés plus hant, bien que l'effet total prothétique soit diminué par l'absence de pl usieurs segments, et c'est en particulier le cas pour le membre supé- rieur, s'il s'agit de la main, et pour le membre inférieur s'il s'agit du genou.

VI. — AMPUTATION ET CINÉMATISATION.

La différence essentielle entre elles est que la première est une destruction et la deuxième une reconstruction partielle à exécuter ensemble, ou séparément, sur un terrain déjà préparé ou non.

En ce qui regarde la théorie des moteurs plastiques, les amputations, désarticulations et régularisations peuvent se diviser ainsi : a) Amputation cinématique, équivalant à la cinématisation primaire. Théoriq uement parlant, il serait désirable que toutes les cinéplastiques fussent primaires; mais trop souvent des raisons de pathologie, de technique et de milieu l'empêchent.

b) Amputation hypocinêmatique, préparatoire à la cinématisation secondaire. Pratiquement, c'est un moyen terme pour éviter les difficultés du moment sans perdre la possibilité de cinématiser en terrain préparé et aseptique, dans un temps plus ou moins éloigné, pour obtenir un point d'attache somatique, ou sa mobilisation.

c) Amputation acinématique, ou ordinaire, susceptible seulement de cinématisation tertiaire. En théorie, les mutilations d'après l'ancienne technique devraient être abolies; en pratique, elles continueront à exister et à présenter un terrain aseptique, mais non préparé à la cinématisation et, par conséquent, de ressources souvent plus restreintes.

L'emploi de la troisième immunité (stomosines) peut être d'un grand secours pour la bonne réussite de la cinématisation.

VII. — RÉAMPUTATIONS.

Quand une amputation rapide quoad vitam est nécessaire, nous conseillons, surtout sur le front, les amputations linéaires suivant la méthode


de Celse et autres analogues, sans suture d'aucune sorte. Elles offrent l'avantage de pouvoir se prêter souvent à une cinématisation non sanglante ou se transformer en amputation hypocinématique.

Nous sommes tout à fait opposé à la réamputation dans le cas de moignons coniques ouverts et de saillies osseuses de plusieurs centimètres, si les masses musculaires mutilées n'ont pas été précédemment soumises sans résultat à des tractions élastiques continues ou discontinues, à une application de poids ou à une tension simple.

Car, conformément, à nos observations faites il y a une vingtaine d'années sur les animaux, la clinique a démontré amplement que les moignons, même non aseptiques, ou munis de leurs moteurs plastiques, peuvent se guérir bien sous le traitement par tractions, et que la section la plus considérable avec os sain en saillie peut être amenée à guérison sans aucun point de suture, en préparant ainsi le terrain à une cinématisation facile.

Nous avons d'ailleurs de bonnes raisons d'espérer que peu à peu s'établira une technique qui permettra d'utiliser aussi par la cinéplastique, et sans réamputations, les moignons coniques déjà cicatrisés, - tout au moins en ce qui concerne le membre supérieur.

VIII. — INSUFFISANCES ANATOMIQUES.

L'anatomie et la physiologie n'étaient pas bien préparées au dévelop- pement de la cinéplastique Dans les derniers temps, on a pu constater divers progrès tels que : la détermination des meilleurs lambeaux cutanés dans tout le corps, celle de la valence des zones ostéo-musculaires pour le membre supérieur, et celle des innervations.

Le chirurgien spécialiste ne s'effraie plus autant du manque de peau; suivant notre conseil, il l'accumule au point voulu au moyen de tractions, ou il emploie tout autre moyen tendant à obtenir la plus grande économie dans le revêtement des attaches somatiques.

La nécessité de raccourcir les os pour faire place à la course du moteur simple (unimoteur) ou n'existe pas, ou est extrêmement réduite, ou encore est atténuée par la détermination des zones de valence exclusivement osseuses par rapport à la prothèse ; ce qui fait disparaître un des arguments si commodes où se retranchaient le misonéisme et la paresse.

On a heureusement remédié à l'absence de tendons en faisant usage des aponévroses et, dans les cas d'absence complète de matière, on a cons-


truit enfin le moteur purement musculaire avec attache somatique obtenu à l'aide d'une perforation bien exécutée (tunnellisation).

Les recherches de laboratoire portent actuellement sur les arthroplastiques, les neurotisations des muscles paralysés et les productions osseuses sans emploi d'os ni de périoste, toutes choses qui concourront au perfectionnement de la technique cinéplastique et de ses résultats.

IX. — CONTINGENCES POST-OPÉRATOIRES.

Il semblait au début que seuls les établissements orthopédiques pourvus d'un appareillage complet et d'instruments de tous genres pouvaient s'occuper utilement de cinématisation.

Pendant la guérison le chirurgien général et le spécialiste se trouvent devant les mêmes difficultés, mais la pratique de la guerre a démontré qu'un chirurgien d'initiative peut obtenir les meilleurs résultats avec les moyens les plus simples à la portée de tous.

La supériorité des établissements orthopédiques se manifeste surtout dans la possibilité de fournir en temps voulu un bon appareil de prothèse fait suivant le cas, et avec précision, sans préoccupation d'économie de temps et d'argent, et dans celle d'être mieux au courant de ce qui se fait dans les autres pays et cliniques.

La pratique a malheureusement trop démontré qu'un chirurgien sans laboratoire orthopédique, même doté de la meilleure volonté, réussit difficilement à avoir une cinéprothèse suivant ses désirs et parfois même à en avoir une, quelle qu'elle soit.

D'autre part le caractère, très individuel, de la cinéprothèse chirur- gicale et mixte s'oppose à la fabrication en séries et empêche ainsi de lancer sur le marché une quantité d'appareils qui puissent s'adapter avec j facilité à n'importe quel cas.

X. — DIFFICULTÉS PSYCHOLOGIQUES.

Toute idée nouvelle en rencontre beaucoup et dans notre cas les plus à craindre sont-celles qui proviennent du misonéisme, de la paresse et de l'incompétence théorique et pratique, défauts personnels qui cherchent leur défense dans des défauts matériels inexistants ou exagérés.

Une grosse difficulté psychologique initiale se rencontre aussi chez les patients qui ne donnent pas trop de valeur à l'intégrité anatomique ou fonctionnelle.

Nous ne pouvons non plus passer sous silence qu'un grand chirurgien pourvu de tous les moyens nécessaires peut créer autour de lui ineon-


sciemment une atmosphère de froideur et de méfiance envers les cinéplastiques, tandis qu'un chirurgien moins renommé, mais plein de confiance, peut avoir des demandes absolument volontaires de blessés ou de mutilés déjà réformés.

Mettons que l'on ait à portée de la main un patient objectivement apte à la cinématisation, l'élément le plus nécessaire à la décision est la confiance du chirurgien et dans le chirurgien, et l'exemple d'un cas bien réussi est suffisant à faire naître cette confiance.

FIG. 3. - Cinématisation tertiaire; unimoteur brachial en anse élevant 10 kgs. à 5-6 cm., c'est-àdire capable d'un effort de 50-60 kgs. cm.

Or, quand on sait que dans le membre supérieur on a obtenu des énergies cinétiques de plusieurs dizaines de kilogrammes-centimètres par simple récupération (fig. 3) et dans le membre inférieur de plusieurs centaines, et que l'on peut déjà compter dans l'ensemble quelque millier de cas dans notre pays et dans plusieurs pays étrangers, la confiance devient obligatoire.


XI. — MOIGNONS ANCIENS.

Bien que depuis longtemps, et à plusieurs reprises, nous ayons forte- ment insisté en faveur des amputations hypocinématiques, il n'en a été pratique que fort peu, et pour celles qui l'ont été d'autres considérations sont la plupart du temps entrées en jeu.

Nous pouvons donc retenir que les cinématisalions aujourd'hui possibles seront presque toutes tertiaires et que, par conséquent, elles ne seront pas entièrement, susceptibles de donner tous les fruits désirables quant au nombre et à la force des moteurs; mais nous devons aussi retenir que l'utilité des opérations longuement préparées et exécutées à loisir en terrain aseptique ne saurait être minime.

FIG 4. — Cinématisation tertaire.

A. Délimitation de lambeau ou pont cutané. — B. Enroulement et suture du pont cutané : sépa- ration de la branche antérieure du moteur. — C. Chevauchement de la même branche sur le tunnel (formation de l'anse). — D. Bordage cutané des orifices du tunnel, et plastique cutanée pour couvrir le moteur. — E. — s. t. suture du tunnel. — s. c. suture cutanée externe. — s. m.

suture des deux branches (Pellegrini).

Les chirurgiens ont déjà construit beaucoup des moteurs prévus par la théorie, et d'autres encore, avec des résultats dynamiques qui, dans les meilleurs cas, peuvent être considérés comme parfaits; mais il est impossible de prévoir les progrès futurs, puisque nous sommes au commencement de la culture de ce champ.

Malheureusement, la question des moignons coniques est restée à peu près inabordée et le moyen qui nous paraît le meilleur pour l'attaquer à fond est d'éviter toute réampulation même cinéplastique et quelquefois toute opération sanglante. Mais entendons-nous bien !

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Nous ne pratiquons pas la chirurgie, et c'est pourquoi dès le début nous avons institué des expériences sur les animaux, et aujourd'hui encore nous les recommandons comme une source très riche d'enseigne- ments utiles et répudions l'expérience primaire sur l'homme.

Les nécessités impérieuses de la guerre n'existant plus, et alors qu'il s'agit de cinémalisation tertiaire, nous insistons sur la nécessité de l'expérience primaire sur les animaux, tout au moins pour tous les cas d'opérations sur les moignons coniques et non çoniques qui s'écarlent trop de la technique déjà en usage.

C'est, selon nous, le meilleur moyen d'avoir de nouveaux opérateurs bien pénétrés de la théorie et plus experts dans la pratique.

XII. — ClNÉPROTHKSE ET HYGIÈNE.

Il est inutile de démontrer que la bonne prothèse en général et la prothèse de travail en particulier contribuent puissamment à l'euphorie du corps et de l'esprit. Spécialement la cinéprothèse de travail, apportant plus de revenus, apporte aussi plus de bien-être matériel et moral.

Nous avons déjà combattu l'anthropomorphisme de la prothèse de travail ordinaire comme source de perte dans le rendement du travail, et en même temps nous avons combattu l'emprisonnement des membres et du tronc, arrivant ainsi à proposer la suppression des courroies d'attache dans beaucoup de cas de cinéprothèse d'atelier.

Ceci aurait pour avantages : un sentiment plus prononcé d'autarchie chez le mutilé, un plus grand respect des exigences de la propreté, une meilleure circulation du sang, une plus grande expansion du thorax dont les organes internes peuvent être déjà affaiblis par les causes habituelles (gaz asphyxiants, blessures), ou bien se trouver disposés à l'affaiblissement.

Les grands mutilés qui doivent être alimentés par des mains étrangères sont indubitablement dans les plus mauvaises conditions d'hygiène, surtout par l'impossibilité dans laquelle ils se trouvent de préparer euxmêmes leurs bouchées et de les mastiquer à leur aise, ce qui peut entraîner des troubles digestifs qui, d'autres causes aidant, peuvent favoriser pour le moins le développement d'un état neurasthénique avec quelles conséquences pour l'individu et pour ceux qui l'entourent, on peut se l'imaginer.

Nous exprimons aussi notre conviction qu'il est possible de donner


aux mutilés des deux bras une cinéprothèse spéciale purement mécanique et capable d'éviter les susdits inconvénients, pourvu que l'on renonce à toute prétention d'anthropomorphisme dans la façon de préparer les bouchées et de les porter à la bouche. Pourtant, il faut se rappeler que les moteurs thoraciques encore faibles peuvent avoir une importance insoupçonnée dans la solution du cas.

Toujours au point de vue hygiénique et plus spécialement pour le membre inférieur, qu'il nous soit permis de faire remarquer que, depuis le commencement de notre propagande, nous avons insisté sur l'utilité des points d'attache somatique, même entièrement pass i fs, pour la simpli- fication du soutien de la prothèse.

Aujourd'hui encore nous croyons à leur utilité. Ils devraient être l'objet d'une étude spéciale, car ils présentent des avantages sûrs dans la plupart des cas, même avec le concours des divers moteurs plastiques appropriés, présents en même temps sur le même moignon à n'importe quelle hauteur.

Pour tous ces motifs, tandis que nous jugeons comme nécessaire l'étude scientifique et systématique de la prothèse, nous nous permettons d exprimer encore une fois cette opinion que le moment est venu d'élever la classe des bandagistes, comme on l'a fait pour celle des dentistes.

XIII. — CONCLUSIONS.

La réforme de* la mutilation et de la prothèse s'esl déjà montrée capable de procurer la plus grande aularchie possible du mutilé, et les efforts de tous doivent se porter vers son perfectionnement et sa diffusion parmi les chirurgiens.

Les chirurgiens devront se rappeler qu'un Français d'esprit a dit des amputations ordinaires qu'elles n'étaient qu'une production de moignons en séries, et qu'un chirurgien de valeur a songé à en faire autant en ce qui regarde les amputations cinéplastiques, alors que les cinématisations doivent être individuelles au dernier point.

Parmi les mutilés fonctionnels qui peuvent bénéficier de la cinépro- thèse, nous avons déjà compris aussi les blessés en cours qui ont des segments de membres immobilisés par le chirurgien et ont le désir ou le besoin de travailler; c'est pourquoi il est permis d'affirmer qu'en général, pour ce qui concerne le travail, on peut avoir un homme diminué mais non annulé, et maintenant apparaît de plus en plus utile l'étude du problème que nous avons déjà proposé sous le nom du taylorisation du mutilé.


Figures schématiques des types fondamentaux de moteur plastique.

N. B. — Le signe algébrique positif indique l'action agoniste, le négatif l'action antagoniste; quand il s'agit de la main, le positif est fléchisseur, le négatif extenseur. Les noms entre parenthèses sont ceux des chirurgiens qui ont exécuté en premier lieu le moteur dont on parle. Les lettres signifient toujours la même chose.

FIGURE 1. — Moteur à massue simple (De Francesco) ; m) masse musculaire; n) noyau osseux, fibreux, etc., réuni à la masse, naturellement ou artificiellement et, ainsi, formant massue; c) col de la massue; t) téguments. L'attache du tirant de la prothèse se fait sur

'Fu;, 5. — Figures schématiques des types, etc. etc.

le col, et l'antagonisme reste subordonné à l'action automatique ou volontairement exercée - au moyen de l'élasticité, de la pesanteur, etc. La masse musculaire peut se composer d'individus à action antagoniste entre eux, pourvu qu'ils agissent synergiquement.

FIGURE 2. — Moteur à anse simple (Ceci) ; a) arc de l'anse; f) trou où pénètre le tirant pour la prothèse. Ici encore l'antagonisme reste lié à une force extérieure. Les masses sont désignées comme positives toutes deux, mais elles peuvent être aussi de fonctions opposées entre elles, pourvu qu'elles opèrent synergiquement.

FIGURE 3. — Moteur à anse entre tendons d'un même muscle ou dé plusieurs muscles de fonction naturellement semblable (Ceci).

FIGURE 4. — Double massue, l'une de flexion, l'autre d'extension (Putti). Dissociable en deux mouvements agonistes, employant l'un et l'autre l'antagonisme artificiel. Il vaut pourtant mieux éviter la dissociation, même quand elle est facile.

FIGURE 5. — Double anse, l'une de flexion, l'autre d'extension. Même remarque que plus haut.


FIGURE 6. — Anse entre des ventres musculaires d'action opposée (Sauerbruch). Prévue déjà par nous il y a onze ans et explicitement indiquée comme celle qui donne la guérison la plus rapide et comme existant déjà dans les anciens moignons obtenus par les anciennes méthodes. Ce n'est que récemment qu'elle a été mise en valeur par Sauerbruch, moyennant une nouvelle tunnellisation faite à la manière de l'uréthroplastie (Nové-Josserand-Rochet).

i) Cloison entre les masses musculaires dans laquelle ce chirurgien pratique le tunnel sagittalement par rapport au plan de la figure, obtenant ainsi un seul mouvement fléchisseur et agoniste. v) Petite verge indiquant une direction ayant un angle de 90° avec la précédente et dans laquelle direction, selon la théorie, devrait être pratiqué le tunnel pour obtenir deux mouvements alternatifs, outre le synergique, avec une seule anse et une seule tunnellisation.

FIGURE 7. — Anse musculaire double (Sauerbruch). Les deux flèches indiquent la direction de deux tunnels construits séparément, comme les deux anses, pour obtenir l'alternance de celles-ci.

FIGURE 8. — Anse alternante (Putti). f) Trou du point d'attache par anse, praticable sur les tendons ou les muscles de la masse motrice pourvue d'aponévroses, etc. Le même tire en flexion et pousse en extension. S'il était sur la masse négative il aurait un effet inverse, redressable ainsi mécaniquement. Cette espèce d'anse fut exécutée pour la première fois sans point d'attache (amputation transitoire ou hypocinématique), et en utilisant les muscles de la cuisse sur la rigole intercondylienne (ansa magna). Elle fut ensuite répétée en conservant la rotule de façon à servir d'appui axial sur la prothèse (Della Vedova).

FIGURE 9. — Anse alternante avec point d'attache à utricule. De Francesco a décrit la technique de l'infundibulum. Il consiste en une boutonnière tendineuse ou aponévrotique dans laquelle on fait s'enfoncer la peau pour faire pénétrer ensuite le bouton du tirant de la prothèse. Si cette attache agit dans une double direction comme l'ansicule, elle s'appelle utricule.

FIGURE 10. — Main cinématique idéale. Elle est formée de trois groupes de doigts ; chacun d'eux, désigné par un nombre ordinal romain, est mû en sens fléchisseur et extenseur par son anse alternante respective. Les trois anses alternantes ont un point d'attache à utricule désigné par un chiffre arabe précédé du signe de la fonction. Le 3 est négatif, c'est-à-dire extenseur; mais, par l'effet d'une inversion opérée par le levier qui meut le groupe 3, il acquiert la même fonction que les deux anses, c'est-à-dire la flexion, comme l'indiquent les petits signes faits à côté des articulations, entre les tirants et les leviers des groupes. Naturellement, si les anses n'étaient qu'au nombre de deux, les 2e et 3e groupes devraient être fusionnés. Le moteur du 3e groupe peut être aussi utilisé pour le perfectionnement du pouce ou du poignet (1).

I

(1) Nous renverrons les chirurgiens qui désirent se faire une idée précise et pratique de la question à l'excellent livre que vient de publier M. le Professeur A. Pellegrini sous le titre Amputazioni cineplastiche per la vitaliszazione delle membra artificiali, 1 vol. in-4°, aceompagné de 249 figures, Unione Tipografico-Editrice Torinese, Turin, 1919.


Les grands principes de la loi Lugol sur les pensions militaires par Ch. VALENTINO, Docteur en Médecine, Docteur en Droit.

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La nouvelle loi ?nr les pensions militaires, datée du 31 mars HII9 et promulguée au Journal Officiel du 2 avril, sans rom pre complètement avec la législation antérieure qui s'est trouvée lier le législateur par certains côtés, apporte cependant dans l'indemnisation des soldats infirmes un esprit neuf.

Avant d'entrer dans le détail de cette loi, il est essentiel, pour la bien comprendre, d'en dégager cet esprit neuf et, notamment, de déterminer le principe de la loi et sa zone d'application.

Le principe de la loi, c'est-à-dire son fondement juridique qui est le droit à réparation ; sa zone d'application, c'est-à-dire les conditions d'origine que les infirmités doivent remplir pour que le droit à réparation puisse s'exercer.

Ce seront les deux chapitres de cette étude qui se réfère aux articles1, 3, 5 et 6 de la loi Lugol, articles ainsi conçus :

ARTICLE PREMIER. — La République, reconnaissante envers ceux qui ont assuré le salut de la Patrie, proclame et détermine, conformément aux dispositions de la présente loi, le droit à la réparation due : 1° aux militaires des armées de terre et de mer affectés d'infirmités résultant de la guerre ; 2° aux veuves, aux orphelins et aux ascendants de ceux qui sont morts pour la France.

ART. 3. — Ouvrent droit à pension : 1° Les blessures constatées avant le renvoi du militaire dans ses foyers, à moins qu'il ne soit établi qu'elles ne proviennent pas d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités causées ou aggravées par les fatigues, dangers ou accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service. 4 ART. 5. — Toutes les maladies constatées chez un militaire ou marin pendant la période où il a été incorporé ou pendant les six mois qui ont suivi son renvoi dans ses foyers sont présumées, sauf preuve contraire, avoir été contractées ou s'être aggravées par suite des fatigues, dangers ou accidents du service.

Le délai de six mois prévu au précédent paragraphe ne courra,


pour les militaires actuellement renvoyés dans leurs foyers, qu'à partir de la promulgation de la présente loi.

Ils profiteront de la présomption établie par le présent article dès lors qu'avant l'expiration du délai de six mois prévu au paragraphe premier ils auront adressé au directeur du service de santé de leur , région, par lettre recommandée, une demande invitant ce service à constater leur maladie ou leur infirmité.

ART. 6. — Toute décision comportant rejet de pension définitive ou temporaire devra, à peine de nullité, être motivée et préciser les faits et documents dont résulte la preuve contraire détruisant la présomption établie aux articles 3 et 5 de la présente loi.

I. — LE DROIT A RÉPARATION La caractéristique de la loi du 11 avril 1831, qui réglait l'attribution des pensions militaires, est d'avoir été faite pour une armée de métier : les services de soldats de carrière devant aboutir à la concession de pensions d'ancienneté, il était juste, lorsque, par suite d'infirmités imputables au service, ces soldats étaient prématurément licenciés, que la retraite d'ancienneté fût, par anticipation, payée au titre des infirmités.

Aux officiers, cette pension d'infirmités était concédée dès que le maintien et le retour au service étaient impossibles ; aux hommes de troupe, à la condition que les infirmités fussent assez graves pour entrainer l'impossibilité de pourvoir à la subsistance (1).

Mais cette conception d'une retraite par anticipation, équitable au regard de soldats de métier, n'avait pas de sens au regard des soldats de notre armée nationale (2) et, avant de discuter sur les dispositions de la loi nouvelle, il était essentiel d'en établir le fondement juridique, c'est-àdire de déterminer en vertu de quel principe l'État donne les pensions et en vertu de quel droit l'invalide les réclame.

Cette nécessité d'un point de départ juridique a été fort bien [comprise par M. Fuster, professeur au Collège de France, qui fut chargé de joindre un rapport technique au projet de loi déposé en novembre 1915 par le Gouvernement. M. Fuster explique (3) que, si la pension est une récompense, un témoignage de reconnaissance, « il faut et il suffit qu'il y ait un acte héroïque, danger, accident, maladie ou tout au moins service rendu pour qu'on ait droit à une donation »; que si, au contraire, la

(1) Voir Ch. Valentino. Les pensions militaires en France (Revue interalliée mars 1919 p. 136.)

(2) M. Pierre Masse, dans son rapport 2383 du 21 juillet 1916, écrit p. 20 : « La transformation profonde subie par notre armée ne permet plus de conserver ces principes, base de notre législation des pensions: »

(3) Projet de loi n° 1410 déposé à la Chambre le 4 novembre 1915; p. 69.


pension est la réparation d'un dommage, « il faut, mais il suffit qu'il y ait à la fois accident ou maladie et dommage en résultant, quelle qu'en soit la réalité et quelle que soit la situation personnelle des ayants droit » ; que si, enfin, la pension est une assistance « il faut qu'il y ait à la fois accident, dommage éventuel et souffrance ou dangers réels, besoin, indigence même. » Et M. Fuster conclut (1) : « Un droit qui se réalisera en faveur de qui? Et des allocations de quel genre? Et de quelle importance? C'est ici qu'apparaissent, dans toute leur force, les divergences de vues sur les motifs de l'intervention nationale. La réponse à cette triple question diffère gravement, en effet, selon que prévaut l'une ou l'autre des conceptions générales que nous avons rappelées. »

Malheureusement, ni le Gouvernement ni le Parlement n'apprécièrent à son exacte valeur la portée des principes : constamment, en cours de discussion, on dut rappeler la nécessité d'un point de départ juridique (2) et, ce point de départ n'ayant pas été fixé, les votes turent inspirés de conceptions personnelles très différentes (3) ; les débats s'en trouvèrent allongés et confus (4).

(1) Loc. cit. p. 67.

(2) M. Pierre Hameil (Ch, 23 nov. 17 J. Off. p. 3028) dit : Que doit être cette loi ? Elle doit être le reflet de la pensée de notre époque, c'est-à-dire une réparation. » M. Goude (Ch. 27 nov. 17 J. Ol/', p. 3042) « On a imposé aux militaires non professionnels un devoir social; en face de ce devoir social s'inscrit le droit à réparation du dommage causé. »

M. Bonnevay (Ch. 4 déc. 17 J. 0/ p. 3121) : (f Je crois qu'à la base de la loi des pensions la notion de la réparation des dommages n'a jamais existé et ne peut pas exister. «

M. Aristide Jobert (Ch. 5 déc. 17 J. Off. p. 3151) : « Il s'agit de savoir si on réparera les dommages causés aux personnes et de quelle façon. «

M. Jean Bon (Ch. 26 déc. 17 J. Olf'. p. 3581) : « Il s'agit de savoir ici si vous entendez faire une loi de reconnaissance ou une loi de dédommagement. »

M. Léon Bérard (Ch. 12 déc. 18 J. Off. p. 3346) : « Je disais en substance il y a un an : Le premier point à régler quand on veut légiférer sur les pensions c'est de savoir quel caractère dominant on entend donner à la loi et si l'on fera une loi d'assistance, une loi de récompense nationale ou une loi de réparation. »

(3) M. Ferdinand Morin (Ch. 18 déc. 17 J. Off. p. 3322) dit : « Ayant l'intention de faire non une loi d'assistance, mais une loi de réparation. »

M. Pierre Masse (Ch. 26 déc. 17 J. Off. p. 3582) « Faisant une loi d'assistance et, comme l'a très bien dit M. Bon, une loi de reconnaissance. »

M. Lugol, rapporteur (Ch. 27 déc. 17 J. Off. p. 3606 : « Nous faisons en ce moment une loi d'indemnisation. »

M. Fernand Merlin (Ch. 26 déc. 17 J. Olr. p. 3581) : « C'est une dette de reconnaissance élémentaire envers ceux qui luttent et sauvent leur pays. »

M. Aristide Jobert (Ch. 29 janvier 18 J. Off. p. 237) : « Nous faisons une loi non de réparation.

mais une loi de reconnaissance nationale envers les victimes de cette terrible guerre. a

M. Abrami, Sous-Secrétaire d'État de l'Administration de la Guerre (Ch. 26 déc. 18 J. Off. p. 3592 : « Loi de solidarité, loi d'assistance aux mutilés, ce n'est pas une loi de réparation. »

(4) Témoin cet échange d'observations à la séance de la Chambre du 11 décembre 1917 (J. Off. *

p, 3219) : LE PRÉSIDENT DE LA COMMISSION DES PENSIONS : Nous allons discuter sur la création du droit qui est peut-être plus importante que le taux car le taux pourra être modifié ultérieurement.

M ERNEST LAFONT : Je croyais que cette question du droit était au moins implicitement réglée par les premiers articles.

M. LE SOUS-SECRÉTAIRE D'ÉTAT DE L'ADMINISTRATION DE LA GUERRE. — Nous l'espérions; mais vous voyez que chaque ligne, chaque mot donne lieu à discussion.


Ou du moins, l'effort du Gouvernement et des Commissions a été d'éluder une controverse juridique qui eût pu amener la détermination d'un droit en faveur des infirmes de guerre et de proclamer le droit sans le définir. M. Lugol, rapporteur à la Chambre, déclare (1) : « Il y a un droit absolu reconnu au profit des mutilés. Je suis heureux de proclamer du haut de la tribune ce droit reconnu par le Gouvernement et par la Commission au profit des invalides de toute catégorie. a M. Abrami, parlant au nom du Gouvernement (2) : « Mutilés et victimes de la grande guerre, ils sont les créanciers privilégiés de la nation. Nous avons à organiser en leur faveur la reconnaissance nationale. » Entin M. Chéron, rapporteur au Sénat (3) : « Le législateur reconnaît formellement envers les réformés et les mutilés de la guerre la dette de la nation. »

Il est évident que personne n'eût ose froisser l'opinion publique jusqu'à dire que les mutilés étaient sans droit, sans créance et que leurs pensions relevaient exclusivement de la bienfaisance. Cependant quelle est la nature de ce droit, d'où provient-il ? Suivant la thèse officielle ce droit tiendrait tout entier dans la loi et serait créé par cette loi même : le mutilé a droit à pension parce que la loi donne des pensions d'infirmités et ce droit est sanctionné par la possibilité de recours contentieux (4).

Mais alors si le législateur n'avait pas voté la loi, le mutilé n'aurait pas de droit et cela nous permet de dire qu'une telle théorie reconnaît bien, en faveur du mutilé, un droit à des pensions, mais non un droit à pension antérieur à la loi et supérieur à la volonté du législateur.

Là est la confusion (5)..

(1) Ch. 23 nov. 17 J. Off. p. 3015.

(2) Ch. 18 déc. 17 J. Off. p. 3320.

(3) Sénat 17 déc. 18 J. Off. p. 608.

(4) M. Masse écrit dans son rapport p. 42 cr Il existe un véritable droit à pension, réglé par la loi et sanctionné par un recours judiciaire. »

(5) Il faut bien comprendre la différence qui est fondamentale entre le droit à des pensions et le droit à pension; il n'y a dans cette distinction aucune argutie, mais seulement une difficulté provenant de ce que la langue française désigne du même mot « droit » l'avantage plus ou moins gracieux concédé par la loi et le droit proprement dit qui préexiste à la loi et dont celle-ci n'est jamais qu'une consécration. La liberté, par exemple, est un droit préexistant à la loi ; il est possible même que les lois d'un pays organisent l'esclavage; il n'en demeure pas moins que l'individu a droit à la liberté.

Par contre (CH. VALENTINO, L'indemnisation des infirmités de guerre, Giard et Brière p. 27) : « Le législateur peut décider que les cultivateurs toucheront une prime par hectare cultivé; il en résulte pour le cultivateur un droit de fait à toucher une prime; mais il ne s'ensuit pas que le cultivateur avait un droit juridique à une telle allocation; en effet, si la loi n'avait pas été votée il n'aurait pu prétendre que son droit était méconnu; et la loi qui lui donne l'allocation apparaît comme une loi purement gracieuse. L'allocation n'a pas le caractère d'une dette, mais d'une libéralité. a Vis-à-vis des infirmes de guerre la question est donc de savoir si ces infirmes, du fait de leurs infirmités, détiennent un droit à pension ou s'ils ne peuvent prétendre à pension que par la bienveillance ou la reconnaissance du législateur.


Ce souci de ne pas déterminer le droit tenait à la préoccupation d'abriter l'État de toute responsabilité qui eût entraîné, pensait-on, de formidables répercussions financières (1) et le Ministre des Finances exposa (2) que « la loi, ayant fixé les modalités de l'indemnisation, il convient que le droit du mutilé soit limité aux dispositions de cette loi. »

>.: :i:

Entrons maintenant dans l'étude du droit de l'infirme.

Suivant la thèse officielle, le militaire blessé ou tué a payé l'impôt du sang; M. Masse déclare (3) : « L'impôt du sang est dû sans réserve.

Dans la rigueur du droit national, il peut être exigé sans contre-partie directe au profit de l'individu. » L'État ne devrait donc rien et le mili-

taire infirme n'aurait aucun droit; il se serait, au contraire, libéré d'une dette. Tel est l'avis de M. Chéron (4) : « Dans le régime démocratique, les obligations militaires sont, à juste titre, considérées comme un devoir et un honneur essentiel pour le citoyen; elles sont la contre-partie des avantages de droit et de souveraineté qui lui sont attribués. »

Comment alors expliquer que l'État, s'il ne doit rien, intervienne et concède des pensions ?

L'explication donnée n'est pas très claire; mais, enfin, la voici : « L'impôt du sang payé, écrit M. Masse (5), ils ont le droit absolu d'attendre de la reconnaissance et de la solidarité nationales le soutien de leur détresse et la récompense de l'incomparable service rendu, » Et M. Masse ajoute (6) que le fondement du droit à pension, à son avis, est triple : « D'une part, la guerre, pour les personnes et pour les biens,

(1) M. Chéron, dans son rapport n° 234 du 31 mai 1918 p. 22, s'exprime ainsi : « Fallait-il admettre le principe de la responsabilité de droit commun et admettre que l'État devait réparer, soit envers l'ayant droit, soit envers sa famille, les conséquences de la guerre de telle sorte que la pension eût été égale aux salaires ou aux bénéfices que réalisait dans la vie civile le pensionné?

Outre les conséquences financières formidables auxquelles eût abouti un pareil système, il ne se défend pas du point de vue des principes eux-mêmes. Qui dit responsabilité dit faute. La guerre, surtout la guerre actuelle, qui nous a été imposée ne saurait être imputée à faute à l'État français. »

D'une part, M. Chéron a tort de croire que la responsabilité entraine forcément la réparation intégrale; d'autre part, il a tort de croire que la responsabilité implique forcément une faute; il a tort également de ne voir d'autre fondement au droit de l'individu qu'une responsabilité de l'État; enfin il a tort de combattre un principe de droit avec des arguments financiers. La dette de l'État c'est une chose; sa capacité de paiement c'est une autre chose.

(2) Ch. 27 déc. 18 J. Off. p. 3620.

(3) Loc. cit. p. 42. »

(4) Sénat 17 sept. 18 J. Off. p. 608.

(5) Loc. cit. p. 2. M. Masse à la Chambre (séance du 4 déc. 17 J. Off. p. 3122) déclare en outre : « Celui qui a payé l'impôt du sang devient le créancier de la nation, il est son créancier privilégié.

Il peut exiger que, lorsqu'il revient de la bataille sanglant et mutilé, la nation lui fasse droit. »

On ne saisit pas comment l'infirme, s'il n'a fait que payer un impôt et s'il est sans droit, devient créancier de la nation et peut exiger qu'on lui fasse droit.

(6) Loc. cit. p. 42.


constitue un véritable risque social (1). Elle entraîne pour les provinces frontières la dévastation, pour un grand nombre de soldats la mort ou les blessures. Il serait contraire à la justice et à l'égalité entre citoyens que les conséquences de ce risque ne fussent pas réparties, autant qu'il est possible, sur l'ensemble de la nation. D'autre part, il est naturel, il est conforme aux idées d'équité les plus élémentaires que l'État vienne en aide de façon réglée à ceux qui ont souffert et se sont sacrifiés pour la collectivité. La pension est alors une manifestation de solidarité nationale.

Enfin, la pension, comme la solde, est pour partie la marque et la récompense du service rendu. »

Au total, M. Masse (2) pense que la nouvelle loi des pensions constitue « une assistance militaire qui se développe sous nos yeux ».

M. Chéron, de son côté, estime (3) qu'il y a risque national dont les conséquences peuvent se traduire « par l'aide nationale, par une récompense, par un acte de solidarité.» Si donc il n'y a pas obligation formelle de l'État ni créance précise du mutilé, sur quelles bases établir les pensions?

M. Masse déclare « qu'il faut voir large » (4); à quoi M. Léon Bérard observe qu'on va être réduit à « faire de la générosité dans l'arbitraire », et M. Duclaux-Monteil, « de l'arbitraire dans la générosité » (5).

A cette conception d'impôt du sang dû sans contre-partie et de reconnaissance et d'assistance nationales, nous avons opposé dès 1917 (6) une conception toute différente. Il s'agit de savoir dans quel rapport juridique se trouvent le mobilisé et l'État et de déterminer ensuite la nature et la consistance des obligations qui doivent en découler; et c'est pour défendre ce point de vue juridique que nous fîmes déposer à la Chambre par nos amis MM. Lémery et Léon Bérard une contre-proposition de loi dont l'influence fut déterminante quant à la reconnaissance du droit de l'infirme.

Voici dans quels termes l'exposé des motifs de cette contre-proposition résume nos travaux et pose la question (7) :

(1) M. Fuster, dans le rapport cité, avait déjà écrit (p. 70) que les diverses conceptions de récompense, de responsabilité et d'assistance pouvaient sevconcilier dans la conceptipn d'un risque de guerre constituant un « risque social. »

(2) Loc. cit. p. 3.

(3) Loc. cit. p. zz.

(4) Loc. cit. p. 34.

(5) Ch. 30 nov. 17 J. Olf'. p. 3106.

(6) Ch. Valentino, Accidents du travail et blessures de guerre, Cadoret, Bordeaux, 1917; et Ch. Valentino, L'indemnisation des infirmités de guerre, le droit de l'infirme, Giard et Brière, 1917.

(1) Proposition de loi n° 3826 du 4 octobre 1917 p. 3.


1 Sans doute, à la rigueur, on peut dire que le militaire de carrière présent sous les drapeaux en dehors de toute obligation et de toute contrainte, de son propre et entier consentement, est tenu, vis-à-vis de l'État, par des liens contractuels et on pourrait être tenté d'en conclure que, pour ce qui le concerne, la réparation des infirmités contractées au service doit s'opérer suivant les conditions offertes par l'Etat et auxquelles le militaire de carrière a donné son adhésion, du fait même qu'il est entré volontairement dans l'armée.

Mais le militaire incorporé en vertu d'obligations découlant soit des lois de recrutement, soit des lois de mobilisation et qui, actuellement, constitue la presque totalité de l'armée se trouve, vis-à-vis de l'État, dans une toute autre situation. Cette situation a été récemment très justement précisée par M. le Médecin-major Valentino, docteur en droit, qui, dans un ouvrage sur les Accidents du travail et les blessures de guerre, assimile l'appel sous les drapeaux à une réquisition de services. Réquisition de services militaires dont les conséquences dommageables doivent être indemnisées suivant les principes posés par la loi du 3 juillet 1877 et par le très récent arrêt de la Cour de cassation du 6 mai 1917, c'est-à-dire par compensation des pertes effectivement subies. L'auteur ajoute même que l'indemnisation est due aux infirmes de guerre avec une force particulière et même privilégiée, suivant l'idée contenue dans l'article 2092 du Code civil, puisque les militaires sont des citoyens requis en vue de la conservation de la chose nationale.

Cette base juridique de la réquisition est parfaitement exacte en droit. Les mots « impôt du sang » ne correspondent en effet à aucune réalité. Il n'y a pas d'impôt do sang; il y a un impôt de service, ce qui n'est pas la même chose; tous doivent le service, sans plus; ceux qui, de ce fait, subissent en outre un préjudice spécial et supplémentaire en contractant dans le service une infirmité ne peuvent, sans injustice, être sacrifiés à ceux, plus heureux, qui terminent leur service sans en souffrir de la même façon. C'est là, dans notre droit moderne tout entier basé sur l'idée de la réparation par la collectivité des préjudices particuliers causés à certains dans l'intérêt de tous, que se trouve incontestablement le fondement juridique du droit des infirmes de guerre. Quant à « l'impôt du sang » ce n'est là qu'un mot vide de signification; ce qui est dû à la collectivité c'est le service; ce n'est pas le sang, ni la vie, ni même la santé ; ceux qui ont perdu l'un de ces biens ont subi, du fait du service, un préjudice exceptionnel et supplémentaire dont les autres, qui ne l'ont pas subi, leur doivent purement et simplement réparation.

Là est l'idée essentielle et d'où tout le reste découle; d'une part, elle autorise à présen- ter le citoyen mobilisé et détérioré au service comme un véritable créancier de la nation ; d'autre part, elle oblige à poser le droit de l'infirme à réparation intégrale. «

Cette proposition de loi de MM. Lémery et Léon Bérard venait d'être déposée et la discussion à la Chambre n'avait pas encore commencé qu'eut lieu à Paris, en novembre 1917, le premier Congrès national des Mutilés et des Réformés et, aussitôt, le Congrès prit catégoriquement position pour le droit à réparation qui devint ainsi la revendication fondamentale (1).

(1) Voici le texte de la motion adoptée par le Congrès de Paris : « Considérant que les flottements continuels de la législation et des mesures gouvernementales en matière de pensions militaires proviennent de ce que le droit des blessés de guerre à réparation n'a jamais été posé; » Considérant que la collectivité n'a pas, vis-à-vis des blessés, un simple devoir moral d'assistance et que ceux-ci peuvent prétendre à antre chose qu'à une libéralité dont ils dev raient, en tout état de cause, se contenter.

Déclare :


La reconnaissance du droit ainsi ievendiqué fut repoussée par la Chambre d'abord et par le Sénat ensuite; mais, sous l'action de la campagne que nous ne cessions de mener (1), l'idée faisait peu à peu son chemin et finissait par pénétrer les esprits; les objections de fond tombaient l'une après l'autreet seules subsistaient des objections de forme. Ainsi, au Sénat (2), M. Chéron déclare: « Si vous demandez qu'un droit véritable soit reconnu aux mutilés et réformés de la guerre vous avez ample satisfaction. Ce droit, nous l'avons reconnu dans la lettre même de la loi. Je répète encore que notoS reconnaissons la dette de la nation envers les mutilés et réformés de la guerre ».

A quoi M. Louis Martin rétorque (3) : « Alors, puisque vous déclarez que, dans le détail, à chaque ligne du texte, vous leur donnez cette satisfaction partielle, pourquoi hésitez-vous à inscrire au frontispice de la loi la formule qui leur donnerait un satisfaction totale? »

Et le Sous-Secrétaire d'État de l'Administration de la Guerre répond simplement que l'inscription du droit en tète de la loi n'ajoutera rien (4) : « Où se trouve l'intérêt? Ne nous battons pas pour des mots. La chose seule importe, et la chose la loi la définit et la détermine, c'est le droit à pension. »

Mais la loi étant revenue du Sénat à la Chambre, M. Lugol, dans un

« Que les blessés de guerre ont un véritable droit à la réparation du dommage résultant pour eux de leur infirmité, » Émet le vœu : » Que ce droit, nettement reconnu par M. le Médecin-major Valentino et la proposition Lémer\Bérard, constitue le fondement de la nouvelle législation des pensions. »

Cette déclaration fut renouvelée dans les termes suivants par le deuxième Congrès national qui se tint à Lyon en février 1918 : « Le Congrès national renouvelle formellement la déclaration faite par le premier Congrès national de Paris : que les blessés ou malades de guerre ont un droit à la réparation du dommage résultant pour eux de leur infirmité.

» Il demande que ce droit, qui doit être inscrit dans l'article premier de la loi, constitue le fon- dement de la nouvelle législation.

» Il proteste énergiquement contre toutes considérations budgétaires qui n'ont d'ailleurs pas arrêté le législateur pour d'autres lois et notamment pour la réparation des dommages matériels de la guerre et qui sont dépourvues de toute valeur lorsqu'il s'agit de la reconnaissance d'un droit supérieur répondant à l'appel de toutes les consciences. »

(1) Voir nos articles des 20 octobre, 3 et 10 novembre 1917 dans le Journal des Mutilés; du 2 mars 1918 dans le Pays; du 3 juillet 1918 dans La Vérité; du 7 juillet 1918 dans le Pays; des 19 et 22 septembre, des 9 et 23 octobre dans La Vérité; des 27 octobre, 10 et 17 novembre dans Après la Bataille; du 29 novembre dans La Vérité ; du 1er décembre 1918 dans Après la Bataille.

Tous ces arti(les consacrés au droit à. réparation ont donné le ton à l'innombrable petite presse que les associations de mutilés répandent dans toute la France et ont servi de thème à des cen- taines de conférences.

(% Sénat 19 sept. J. Off. p. G32.

liJ, Sénat 19 sept. 18 J. Off. p. 6'25.

(4) Sénat 19 sept. 18 J. Ulf". p. 025.


nouveau rapport (1), propose d'ajouter en tête de la loi un article ainsi conçu : « La République, reconnaissante envers ceux qui ont assuré le salut de la Patrie, proclame et détermine, dans les conditions fixées par la présente loi, le droit à la réparation due : 1° Aux militaires des armées de terre et de mer affectés d'infirmités résultant de la guerre; 2° Aux veuves, aux orphelins et aux ascendants de ceux qui sont morts pour la France. »

Le rapport de M. Lugol s'exprime de la façon suivante (2) : Mais le rapporteur ajoute : « Si on se bornait à proclamer dans notre loi le droit des mutilés à réclamer la répa- ration des dommages qu'ils ont subis sans définir les conditions dans lesquelles s'effectuera cette réparation, on laisserait croire à ces intéressés qu'ils 'peuvent prétendre et que la nation s'oblige à leur fournir, sous toutes les formes et sous tous les aspects, la réparation du mal et du préjudice qu'ils ont souffert. Or cela est impossible. a Voilà pourquoi le texte proposé, tout en reconnaissant le droit à réparation, tient à le limiter aux dispositions fixées par la loi. Mais, de deux choses l'une : ou bien le droit du mutilé est exclusivement conditionné par les dispositions de la loi et, outre que l'article nouveau est superfétatoire, nous retombons dans la conception d'un droit né de la loi ; ou bien le droit des mutilés est supérieur à la loi, laquelle n'a d'autre valeur qu'une valeur forfaitaire d'application, et le texte proposé est mal rédigé.

C'est ce que M. Léon Bérard soutint d'une manière saisissante (3) : (C Une déclaration des droits, voyez-vous, comporte nécessairement, par définition, une grande force d'affirmation et un certain air tranchant. Les hommes les moins enclins à l'affirmation doivent en convenir. Imaginez une Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui serait libellée à la manière de votre texte : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux dans les conditions fixées par la présente déclaration. » Les mutilés, si je puis ainsi dire, ont leurs droits de l'homme et ils ont leurs « droits du mutilé ». Les uns et les autres sont également sacrés ; il faut proclamer et définir les uns et les autres avec la même netteté, avec la même énergie d'affirmation. »

L'Union fédérale des Associations françaises de Mutilés fit donc opposer au texte de la commission le texte suivant qui fut présenté par M. Pierre Rameil (4) : « La République, reconnaissante envers ceux qui

(1) Rapport n° 5141 du 31 octobre 1918.

(2) Rapport n° 5141 p. 8.

« Les mutilés et les associations qu'ils ont formées ont exprimé le désir devoir la loi qui les concerne contenir l'affirmation d'un principe dont tout le monde, dans notre pays, reconnaît la justesse. »

(3) Ch. 12 décembre 18 J. Olf'. p: 3347.

(4) Amendement Pierre Hameil, Queuille, Verlot, Léon Bérard, Abel Lefèvre et Paul Laffont, Ch.

27 déc. 18 J. Off. p. 3620.


ont assuré le salut de la Patrie, proclame le droit à la réparation due. »

Le Gouvernement s'opposa à cette formule : « Voilà une proclamation liminaire, dit M. le Sous-Secrétaire d'État à l'administration de la guerre (1), conçue dans les termes absolus où serait rédigée une déclaration des droits du réformé; la loi lui reconnait et lui assure un droit intégral à réparation. Et si notre loi se proposait vraiment de leur donner cette réparation intégrale, si elle parvenait à la leur donner je m'inclinerais. Puisque nous avons fait un forfait, nous ne saurions donc parler honnêtement de réparation. Nous avons le droit, dans ces conditions, je dirai plus, nous avons le devoir de dire, pour ne pas laisser naître dans les associations de mutilés et dans l'esprit des bénéficiaires de la loi des espérances trompeuses, que, si nous réparons, ce n'est que partiellement, ce n'est que dans une certaine mesure, ce n'est que dans les limites fixées par les articles de la loi. »

Le ministre des Finances vint soutenir la même thèse (2); mais M. Pierre Rameil répondit avec beaucoup d'à-propos (3) : «M. le Ministre des Finances confond le droit et l'application. Je le répète, nous voulons qu'on proclame le droit à réparation. Le droit à réparation du mutilé est intégral; mais : 1° par l'impossibilité d'évaluer en chiffres le dommage intégral, 2° par considérations financières, une base transactionnelle sera acceptée à l'article 9. Cet article touche à l'application, mais pas au droit qui doit être affirmé à l'article 1er. »

Finalement, un texte modifié fut voté, qui constitue l'article 1er de la loi : - « La République, reconnaissante envers ceux qui ont assuré le salut de la Patrie, proclame et détermine, conformément aux dispositions de la présente loi, le droit à réparation due : 1° Aux militaires des armées de terre et de mer affectés d'infirmités résultant de la guerre ; 2° Aux veuves, aux orphelins et aux ascendants de ceux qui sont morts pour la France. »

« Proclame et détermine conformément aux dispositions de la présente loi »; il n'y a pas grande différence avec le libellé primitif de la Commission « proclame et détermine dans les conditions fixées par la présente loi »; mais, pour donner à la nouvelle formule son exacte valeur il convient de se référer aux déclarations du ministre des Finances sur lesquelles se fit l'accord : « Si nous nous contentions, dit le ministre (4), de mettre ces mots de simple logique et de bon sens « conformément aux dispositions de la présente loi », le droit à réparation serait ainsi proclamé,

(1) Ch. 26 déc. 18 J. off. p. 3592.

(2) Ch. 26 déc. 1918 J. 0ff. p. 3594.

(3) Ch. 26 déc. 1918 J/O/J'. p. 3594.

(4) Ch. 27 dec. 1918 J. °lr p. 3620.


affirmé solennellement et il serait entendu que ce sont les dispositions de cette loi qui en déterminent les modalités. » Dans la formule « proclame et détermine conformément aux dispositions de la présente loi », il faut donc comprendre que « conformément aux dispositions de la présente loi » se rapporte à détermine et non à pro- clame, si bien que l'interprétation juste de l'article 1 el' est la suivante : « La République proclame le droit à réparation et le détermine conformément aux dispositions de la présente loi. »

Ainsi a fini par être établi le fondement juridique de la nouvelle loi des pensions selon notre doctrine et les vœux des mutilés : les citoyens ont été requis par la mobilisation : « Tous les bénéficiaires de cette loi, dit le sous-secrétaire d'f:tal. de l'administration de la Guerre (1), portent cette marque spéciale d'être requis par la mobilisation. » Ils ont un droit à réparation pour le dommage que leur causent leurs infirmités; la loi nouvelle est donc une loi de réparation, non d'assistance; les mutilés ont vis-à-vis de la nation une situation non de secourus, mais de créanciers et, comme le disait M. Léon Bérard (2), la loi, en reconnaissant le droit à réparation, leur donne le moyen « d'en discuter d'égal à égal avec l'État à titre de créanciers. »

II. — LA QUESTION D'ORIGINE

La législation ancienne attribuait des pensions pour infirmités résul- tant de blessures reçues au cours d'événements de guerre ou en service commandé ou encore résultant de maladies contractées ou aggravées par suite de fatigues ou dangers du service. L'imputabilité au service devant être péremptoirement prouvée par la production de pièces authentiques émanant, soit du commandement, soit du corps médical (3).

La loi nouvelle apporte deux innovations capitales : 1° L'origine n'a plus à être prouvée; elle est présumée, à charge de preuve contraire par l'État; 2° L'imputabilité au service est reconnue, non plus seulement aux infirmités provenant de l'exécution directe du service, mais à toutes celles résultant d'accidents, dangers ou fatigues survenus « par le fait ou à l'occasion du service. »

Nous allons examiner ces deux innovations.

(1) Ch. 31 janvier 18 J. 0ff. p. 254.

(2) Ch. 12 déc. 18 J. Off. p. 3346.

(3) Voir Ch. Valentino, les pensions militaires en France (Revue interalliée, mars 1919 p. 136


i — Présomption d'origine.

La présomption d'origine a fait sa première apparition à propos de la loi du recrutement du 21 mars 1905. Cette loi prévoit deux sortes de réformes temporaires : celle de l'article 19 qui est prononcée avant ou après incorporation pour maladie ou infirmité contractée avant l'entrée en service; c'est la réforme temporaire première catégorie, devenue réforme temporaire n° 2 ; et celle de l'article 38 qui est prononcée après un certain temps passé au corps et par suite de maladie contractée au service; c'est la réforme temporaire deuxième catégorie, devenue réforme temporaire n° 1 (1).

Or, l'instruction du ministre de la Guerre en date du 21 janvier 1910, article 43 (2), indique que « lorsque la maladie ayant provoqué la réforme temporaire a été contractée au cours du service, il y a présomption qu'elle est imputable, soit aux obligations du service en général, soit à un fait du service. Si les médecins experts ne peuvent émettre un avis ferme à ce sujet, l'intéressé doit bénéficier du doute et être classé par conséquent dans la deuxième catégorie (3) » Deuxième apparition de la présomption d'origine à propos de la ici du 9 décembre 1916, qui accorde aux réformés n° 2 définitifs ou temporaires des allocations mensuelles, à la condition d'une incorporation de soixante jours pendant les hostilités et pourvu que l'infirmité ait été aggravée par les fatigues, dangers ou accidents du service militaire; l'aggravation, sur amendement de M. Moutet, devant être présumée imputable aux fatigues du service, sauf preuve contraire par l'autorité compétente (4).

(1) C'est la circulaire ministérielle 576 ci/7 CCM du 25 août 1917 (B. O. 15 oct. 17) qui a changé la dénomination des réformes temporaires pour la mettre en harmonie avec la dénomination des réformes définitives qui sont dites n° 1 lorsqu'il y a imputabilité au service et n° 2 lorsqu'il n'y a pas imputabilité.

(2, Bulletin Officiel du Ministère de la Guerre, édition méthodique vol. 684, Lavauzelle, Paris.

(3) Cette présomption d'origine en faveur des réformés temporaires est très curieuse : d'une part, elle ne s'applique qu'aux maladies et non aux blessures ; d'autre part, elle crée cette situation que si un militaire est assez malade pour être mis en réforme définitive, il faut que l'origine soit prouvée et, si la preuve n'est pas faite, c'est la réforme n° 2 qui s'applique ; tandis que [s'il est assez peu malade pour n'être mis qu'en réforme temporaire, l'origine n'a pas à être prouvée, la présomption peut s'appliquer et c'est la réforme temporaire n° 1 qui est prononcée. Mais si la maladie s'aggrave et que la réforme temporaire ait à être transformée en réforme définitive, l'origine ne pouvant être prouvée, la réforme temporaire n° 1 est changée en réforme définitive n° 2. Tout cela manquait de cohérence.

(4) A première vue cette loi paraît singulière ; puisque la législation des pensions admettait l'aggravation au même titre que l'origine directe, il semble, l'aggravation étant nécessaire pour que le réformé n° 2 ait droit à allocation mensuelle, que si lllocation est accordée c'est la réforme n° 1 avec gratification ou la pension qui devrait être appliquée.

Mais précisément, pour qu'il y ait réforme n° 1 ou pension, l'aggravation doit être prouvée ; c'est parce qu'elle n'a pu être prouvée que la réforme n° 2 a été prononcée ; et la loi du 9 décembre 1916 peut jouer, parce qu'elle admet l'aggravation sans preuve, par simple présomption.


Cependant, cette présomption ne fut pas prévue par le projet de loi du Gouvernement, mais fut introduite par M. Masse, dans son rapport, sous la forme suivante (1) : « Ouvrent droit à pension ou à gratification : » 1° Les blessures constatées avant le renvoi du militaire dans ses foyers, à moins qu'il ne soit établi qu'elles ne proviennent pas d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés en service commandé; » 2° Les maladies et infirmités causées ou aggravées par les fatigues, dangers ou accidents du service.

» Quand le militaire ou marin a été incorporé pendant soixantejours au moins, toutes les maladies contractées ou aggravées pendant la période où il a été mobilisé sont réputées, sauf preuve contraire, provenir des fatigues, dangers ou accidents du service, à la condition que le militaire ou marin ait fait constater l'infirmité dont il est atteint par le service de santé dans le délai maximum de six mois à partir de son renvoi dans ses foyers. »

Il y a donc lieu de distinguer les infirmités résultant de blessures et celles résultant de maladies.

Pour les infirmités résultant de blessures, le rapport Masse propose que la présomption joue pour celles « constatées avant le renvoi du militaire dans ses foyers. a Il n'y eut rien de changé sur ce point et l'article 3 de la loi sanctionne cette disposition.

Pour les infirmités résultant de maladies, le rapport Masse propose de faire jouer la présomption moyennant : 1° La constatation dans les six mois du renvoi dans les foyers; 2° Que cette constatation soit faite par le service de santé; 30 Une incorporation de soixante jours.

Il convient d'examiner ces trois points et d'examiner ensuite dans quelles conditions l'État peut détruire la présomption par preuve contraire.

1° CONSTATATION DANS LES SIX MOIS DU RENVOI DANS LES FOYERS.

Le texte de M. Masse disait simplement : « A la condition que le militaire ou marin ait fait constater l'infirmité dont il est atteint. dans le délai maximum de six mois à partir de. son renvoi dans ses foyers. »

Cette loi de 1916 a donc corrigé, avant le vote de la nouvelle loi des pensions, ce que l'ancienne avait de trop rigoureux et a fait aux réformés n° 2 une situation d'attente. La loi nouvelle admettant la présomption d'origine, les réformés n° 2 bénéficiaires de la loi de 1916 sont sûrs de devenir des pensionnés.

(1) Masse, loc. cit. p. 189.


Mais l'article ayant été renvoyé à la Commission en revient le 11 décembre 1917, modifié : « Toutes les maladies constatées chez un militaire ou marin pendant la période où il a été incorporé ou pendant les six mois qui ont suivi son renvoi dans ses foyers sont présumées.

« Le délai de six mois indiqué ci-dessus ne courra, pour les militaires actuellement renvoyés dans leurs foyers, qu'à partir de la promulgation de la présente loi. »

Le texte ainsi modifié n'a plus varié et est devenu partie de l'article 5.

20 CONSTATATION PAR LE SERVICE DE SANTÉ.

Le texte de M. Masse disait : « A la condition que le militaire ou marin ait fait constater l'infirmité dont il est atteint par le service de santé. »

A la séance de la Chambre du 11 décembre 1917, M. Mauger propose d'ajouter la disposition suivante : « Ils profiteront de la présomption admise par le présent article s'ils justifient qu'ils ont, dans le délai cidessus, adressé au Directeur du Service de Santé de leur région une lettre recommandée invitant ce service à constater leur maladie. »

Ce texte est voté après adjonction de « invitant ce service à constater leur maladie ou infirmité. » Avec une légère modification de forme apportée par un nouvel amendement Mauger déposé le 20 décembre 1918 et voté le 27 décembre, il est devenu le dernier paragraphe de l'article 5: « Ils profiteront de la présomption établie par le présent article dès lors qu'avant l'expiration du délai de six mois prévu au paragraphe premier, ils auront adressé au Directeur du Service de Santé de leur région, par lettre recommandée, une demande invitant ce service à constater leur maladie ou leur infirmité ».

3° INCORPORATION DE SOIXANTE JOURS.

A la séance de la Chambre du 6 décembre 1917, ce temps d'incorporation paraissant arbitraire, M. Bonnevay propose de dire: « Quand le militaire ou marin a été incorporé pendant soixante jours ou aura fait campagne. » les fatigues de la campagne, si courte qu'elle soit, pouvant faire jouer la présomption.

Mais M. Jean Bon, d'une part, et M. Puech, d'autre part, demandent la suppression pure et simple de la condition des soixante jours, l'homme incorporé devant être présumé sain et le temps d'incorporation étant sans intérêt. 1


Le Président de la Commission, tout en reconnaissant l'arbitraire du délai de soixante jours et en acceptant l'amendement de M. Bonnevay, se refuse cependant à étendre la présomption d'une façon qu'il juge excessive (1) : « Véritablement, dit-il, nous estimons que ces hommes qui ont séjourné quelques jours à la caserne, n'ayant même pas été examinés auparavant par le Conseil de révision et qui sont partis parce qu'ils l'ont demandé, doivent faire la preuve que ce séjour si bref a causé quelque aggravation à leur santé. a Mais, devant l'insistance de la Chambre, le Président de la Commission propose le texte : « Quand le militaire ou marin a été incorporé après un conseil de révision ou s'il a fait campagne. ». Mais alors celui qui n'aurait pas subi la visite d'un conseil de révision et qui n'aurait pas fait campagne aurait été exclu de la présomption; le texte était mauvais et fut renvoyé à la Commission.

A la séance du 11 décembre 1917, la Commission rapporte un nou- veau texte ainsi conçu : « La présomption n'est pas acquise au militaire ou marin qui depuis moins d'un an avant son arrivée au corps n'a pas subi l'examen d'un conseil de révision ou d'une commission de réforme ou la visite médicale d'incorporation et qui a été réformé dans les soixante jours de cette incorporation, à moins, dans ce dernier cas, qu'il n'ait fait partie de troupes d'opérations. »

M. Betoulle propose d'ajouter « qu'il n'ait fait partie de troupes d'opérations ou qu'il n'ait été victime d'une maladie contagieuse ou endémique ».

Le texte de la Commission et l'amendement Betoulle sont alors adoptés.

Le Sénat ne pensa faire subir à ce texte que des modifications de présentation ; mais, dans sa séance du 17 décembre 1918, la Chambre ayant jugé la nouvelle présentation défectueuse quant au fond, tout fut remis en discussion et l'article renvoyé à la Commission sur intervention de M. Peyroux et de M. Puech (2).

(1) Ch. 6 déc. 1917 J. Off. p. 3179.

(2) Voici le texte du Sénat : « La présomption n'est acquise au militaire qu'aux deux conditions suivantes : 1° Si moins d'un an avant son arrivée au corps il a subi l'examen d'un conseil de révision ou d'une commission spéciale de réforme qui l'ont reconnu apte au service ou s'il a été admis au corps à la suite de la visite médicale d'incorporation ; 2° S'il n'a pas été réformé dans les soixante jours de ladite incorporation.

Nonobstant cette dernière disposition, le militaire ou marin gardera le bénéfice de la présomption établie par le présent article si, même dans le délai de soixante jours ci-dessus visé, il a fait partie de troupes d'opérations ou s'il a été atteint d'une maladie contagieuse ou endémique. »

A ce texte, M. Puech (Ch. 17 déc. J. Off. p. 3406) reproche de ne faire jouer la présomption que sous deux conditions : « Qu'avions-nous dit? Que toutes les maladies, soit la maladie elle-même, soit l'aggravation, bénéficiaient de la présomption; qu'elles étaient toutes présumées ou contractées


Le 20 décembre 1918 la Commission rapporte le texte suivant.: « La présomption n'est acquise au militaire ou marin qui a été réformé dans les soixante jours de son incorporation que si, moins d'un an avant son arrivée an corps, il a subi l'examen d'un conseil de révision ou d'une commission spéciale de réforme ou s'il a été admis au corps à la suite de la visite médicale d'incorporation.

Nonobstant cette dernière disposition, le militaire ou marin gardera le bénéfice de la présomption établie par le présent article si, dans le délai de soixante jours ci-dessus visé, il a fait partie de troupes d'opérations ou s'il a été atteint d'une maladie contagieuse ou endémique ».

Mais MM. Mauger et Émile Faure proposent de substituer au texte précédent le texte suivant : « Toutes les maladies constatées chez un militaire ou marin pendant la période où il a été incorporé ou pendant les six mois qui ont suivi son renvoi dans ses foyers sont présumées, sauf preuve contraire, avoir été contractées ou s'être aggravées par suite des fatigues, dangers ou accidents du service. » 1 Voici comment M. Manger défendit son amendement (1) : « Vous avez déterminé d'une façon très nette que la visite sanitaire devrait être faite le premier jour de la mobilisation et que l'incorporation ne pouvait avoir lieu qu'après cette visite. Vous ne l'avez pas fait ou, j'irai plus loin, n'avez pu le faire. Est-ce que c'est l'homme ou les siens qui doivent en subir les conséquences? Est-ce que c'est à lui ou aux siens qu'on doit imposer l'obligation d'avoir à faire la preuve de l'état de santé où il se trouvait au moment de la mobilisation ? C'est à vous de faire cette preuve et de démontrer que cet homme que vous avez incorporé et qui, pour moi, du moment que vous l'avez incorporé, devait être indemne de tout germe maladif ne se trouvait pas dans les conditions voulues. Et même, n'eùt-il pas été dans les conditions voulues, ce serait encore à vous de prouver que sa situation n'a pas été aggravée par les fatigues que vous avez pu lui imposer.

« Si vous l'avez accepté, si vous l'avez fait entrer dans la caserne, là où il ne devait pas entrer sans avoir passé la visite, et si sa situation s'est aggravée, vous n'avez pas le droit de le renvoyer en disant : « Vous n'êtes pas resté soixante jours militaire, je ne puis pas vous donner le bénéfice de la présomption. » Je vous demande de donner à celui-là comme à tous les autres ce bénéfice. Vous avez le droit de faire la preuve contraire. Vous chercherez, pour le faire, à vous entourer de tous les renseignements qu'il vous sera facile de de vous procurer s'il y a doute dans votre esprit. Pourquoi voulez-vous que ce soit lui ou les siens qui fassent cette preuve? Pourquoi la ferait-il et comment? Comment la feraient la veuve ou l'enfant qui resteront? N'avez-vous pas plus de facilité qu'eux pour la faire? »

ou aggravées au service. Et nous n'avions admis qu'une seule exception : au cas où le soldat n'aurait pas été visité avant son incorporation et aurait été réformé dans les soixante jours de ladite incorporation. Le Sénat, lui, subordonne le bénéfice de la présomption à deux conditions. C'est tout différent. Pas de présomption pour ceux qui ne réunissent pas les deux conditions : » Io Visite avant son arrivée au corps; » 2° S'il a été réformé dans les soixante jours de son incorporation.

» L'erreur est évidente. »

(1) Ch. 20 déc. 18 J. D/ p. 3480 et suiv.


Cet amendement de MM. Mauger et Émile Faure, pris en considération après scrutin, fut renvoyé en commission, rapporté favorablement le 27 décembre 1918 et est devenu le premier paragraphe de l'article 5 de la loi.

La présomption joue donc dans tous les cas, sauf preuve contraire, et la condition des soixante jours d'incorporation a disparu.

4° LA PREUVE CONTRAIRE.

Dès l'instant qu'une présomption d'origine était proposée en faveur de certaines infirmités, il devenait nécessaire d'envisager la possibilité d'une preuve contraire. On voit donc cette possibilité figurer à l'article 2 du projet Masse ; mais elle y figure sous deux formes, suivant qu'il s'agit de blessures ou de maladies. 11 Concernant les blessures, il est dit : « les blessures constatées.

à moins qu'il ne soit établi qu'elles ne proviennent pas d'événements de guerre. »; Concernant les maladies, il est dit : « toutes les maladies. sont réputées, sauf preuve contraire, provenir. » # Cette dualité d'expressions faillit disparaître incidemment par un amendement de MM. Goude et Valière (1) ainsi conçu : « Ouvrent droit à pension les blessures reçues, les infirmités ou maladies contractées ou aggravées sous réserve de la preuve contraire à la charge de l'autorité compétente. »

Mais ce texte n'ayant pas été voté, la dualité a persisté dans tous les autres amendements, dans l'amendement Puech du 5 décembre 1917 (2), dans le texte rapporté par la Commission le 6 décembre 1917 (3), dans l'amendement Betoulle proposé à la même date (4), et a fini par s'implanter dans la loi.

C'est ainsi que l'article 3, parlant des blessures, dit : « Les blessures constatées avant le renvoi du militaire dans ses foyers, à moins qu'il ne soit établi qu'elles ne proviennent pas d'événements de guerre » et que l'article 5, parlant des maladies déclare : « Toutes les maladies constatées sont présumées, sauf preuoe contraire. »

(1) Ch. 5 décembre 1917.

(2) L'amendement Puech propose : « les blessures constatées avant le renvoi du militaire dans ses foyers, à moins qu'il ne soit établi qu'elles ne proviennent pas d'événements de guerre ou d'ac cidents éprouvés par le fait 'ou a l'occasion du service. »

(3) Le texte de la commission propose : « Ouvrent droit à pension. les blessures constatées avant le renvoi du militaire dans ses foyers, à moins qu'il ne soit établi qu'elles ne proviennent pas. »

(4) L'amendement Betoulle propose : « les blessures constatées avant le renvoi du militaire dans ses foyers, à moins qu'il ne soit établi qu'elles ne proviennent pas. »


Il n'y a d'ailleurs là qu'une différence de forme dont il importe de noter qu'elle ne touche pas au fond; nous allons en avoir la certitude dans un instant.

A la séance de la Chambre du 11 décembre 1917, M. Marius Moutet fit adopter l'amendement suivant : « Toute décision de rejet sera motivée et indiquera les faits et documents, les présomptions graves, précises et concordantes d'où résulterait la preuve contraire à la charge de l'État. »

Mais ce texte était fâcheux: ce qu'on demande à l'État c'est une preuve ; or des présomptions, si précises et si concordantes qu'elles soient, ne constituent pas une preuve. Le Sénat, dans sa séance du 19 septembre 1918, a donc modifié le texte; en outre il lui a donné la sanction de la nullité des décisions de rejet qui seraient prises en violation des dispositions prescrites (1) et en a fait uu article spécial ainsi conçu : « Toute décision comportant rejet de pension définitive ou temporaire devra, à peine de nullité, être motivée et préciser les faits et documents sur lesquels s'appuiera l'État pour établir qu'il a détruit par la preuve contraire la présomption établie aux articles 2 et 4 de la présente loi. »

L'article n'a plus subi, ensuite, lors du retour à la Chambre, qu'une insignifiante modification de rédaction et est devenu l'article 6 de la loi : « Toute décision comportant rejet de pension définitive ou temporaire devra, à peine de nullité, être motivée et préciser les faits et documents dont résulte la preuve contraire détruisant la présomption établie aux articles 3 et 5 de la présente loi. »

Ici, nous revenons à ce que nous disions précédemment : le fait que l'article 6 impose à l'État, pour détruire la présomption de l'article 3, c'està-dire relative aux blessures, et pour détruire celle de l'article 5, c'est-àdire relative aux maladies, de motiver et de préciser à peine de nullité dans un cas comme dans l'autre, montre qu'il n'y a pas deux genres de preuves contraires et que l'expression à moins qu'il ne soit établi de l'article 3 a exactement la même valeur que le sauf preuve contraire de l'article 5. L'article 6 dit même explicitement, in fine, que la présomption des articles 3 et 5 doit être détruite par une preuve contraire.

IL - Par le fait ou à l'occasion du service.

L'ancienne législation ne consentait à prendre en charge que les infirmités imputables à un fait de service : accident, danger ou fatigue, le service étant interprété dans un sens strict de service commandé.

(1) Voir le rapport n° 234 de M. Chéron, p. 41.


Cette interprétation beaucoup trop étroite avait suggéré à M. Mirman, dans sa proposition de loi de 1905 (1), d'adapter à la législation militaire la formule par le fait ou à l'occasion du service accréditée par la loi du 9 avril 1898 sur les accidents du travail (2).

Également, dans notre proposition déposée par MM. Lémery et Léon Bérard, la formule par le fait ou à l'occasion du service est reprise (3).

Cependant, ni le projet du Gouvernement ni le rapport de M. Masse n'apportent, sur ce point, de modification à la législation ancienne. L'un et l'autre, dans leur article 2, s'en tiennent aux blessures reçues au cours d'événements de guerre ou en service commandé et aux maladies contractées ou aggravées par suite des fatigues ou dangers du service (4).

La discussion s'est engagée à la Chambre le ) décembre 1917; MM. Goude et Valière proposent la rédaction suivante : « Ouvrent droit à pension. les blessures reçues, les infirmités ou maladies contractées ou aggravées par le fait ou à l'occasion du service. », Voici comment M. Goude defendit son amendement. (5) : « Je crois qu'il est de beaucoup préférable de remplacer les formules de la commission qui sont, en grande partie, des vieilles formules de la loi de 1831 par l'expression plus moderne sur laquelle une jurisprudence constante est établie, je veux parler de la loi des accidents du travail qui contient les mots par le fait ou à l'occasion du travail. Reprenons donc la forme même de la loi sur les accidents du travail et reprenons avec elle toute la jurisprudence établie. Nous y verrons clair, nous saurons où nous allons. »

Le Sous-Secrétaire d'État de l'Administration de la Guerre intervint alors (6) pour « supplier la Chambre de ne pas se laisser hypnotiser tout au long des débats par les principes d'une loi (la loi des accidents du travail) dont le fondement juridique est complètement différent de celui du projet en discussion (7) ».

(1) Voir Ch. Valentino les pensions militaires en France (Revue interalliée, mars 1919, p. 148).

(2) L'article 1er de la loi du 9 avril 1898 déclare : « Les accidents survenus par le fait du travail ou à l'occasion du travail aux ouvriers et employés dans l'industrie du bâtiment, les usines.

donnent droit, au profit de la victime où de ses représentants, à une indemnité à la charge du chef d'entreprise. »

(3) L'article premier de la proposition Lémery-Léon Bérard s'exprime ainsi : «Les infirmités survenues en temps de paix ou en temps de guerre, durant les périodes obligatoires de service ou d'instruction, par le fait ou à l'occasion du service, donnent droit, au profit de la victime ou de ses représentants, à une indemnité a la charge de l'État. »

(4) Le projet du Gouvernement, article 2, dit : « Blessures reçues au cours d'événements de guerre ou en service commandé « et « maladies contractées ou aggravées par suite des fatigues ou dangers de service. »

Le rapport Masse, article 2, dit : « Blessures provenant d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés en service commandé » et « maladies et infirmités causées ou aggravées par les fatigues, dangers ou accidents du service. »

(5) Ch. 5 déc. 17 J. Off. p. 3151.

(6) Ch. 5 déc. 17 J. Off. p. 3152.

(7) Contrairement, et avec raison, M. Masse a écrit dans son rapport (p. 43) : « la loi du 9 avril 1898 traite les mêmes sujets qu'une loi des pensions de la guerre : risques d'infirmités et risque de mort par suite de traumatismes. »


Mais M. Marius Moutet ne s'arrête pas à cette objection et déclare (1). :

<> La langue juridique la plus précise c'est celle qui a été déterminée par les nombreux exemples d'une jurisprudence établie. Dans la mesure où cette jurisprudence pourra nous être utile, il faudra l'employer lorsque les termes en auront été définis par des années d'expérience et par d'innombrables décisions.

Et M. Marius Moutet ajoute : « Toute diminution dans la capacité .physique du soldat, dans la mesure où elle est acceptée par la loi, toute diminution qui ne serait pas survenue si l'invalide n'avait pas.

été lié au service doit donner lieu à réparation. Voilà une notion qui est claire et c'est cette notion que nous voulons voir entrer dans la loi. Vous dites service commandé, nous disons, nous :par le fait ou à l'occasion du service. »

La question était nettement posée.

M. Puech, dans un but transactionnel sans doute, fait alors observer que la loi du 0 avril 1898 vise les accidents et non les maladies, et propose (2) de n'appliquer la formule : par le fait ou à l'occasion du service qu'aux accidents militaires. M. Millevoye se rallie à cette proposition, et finalement l'article est renvoyé à la Commission.

A la séance du 6 décembre 1917, la Commission rapporte un texte où la formule « par le fait ou à l'occasion du service » n'est pas insérée, mais d'où a disparu le service « commandé »; il n'est plus question que de « service » et le texte est ainsi rédigé : « Ouvrent droit à pension. les blessures constatées., à moins qu'il ne soit établi qu'elles ne proviennent pas d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés en service et les infirmités causées ou aggravées par les fatigues, dangers ou accidents du service. »

« Je ne comprends pas, dit M. Marius Moutet (3), la résistance de la Commission à adopter les expressions nettes et précises que nous lui avons soumises ».

M. Lugol, rapporteur, explique alors (4) que, de l'avis de la Commission et de J'avis du Gouvernement, l'expression en service proposée par le nouveau texte est « plus extensible, bien plus favorable » que l'expression « par le fait ou à l'occasion du service. » Le Sous-Secrétaire d'État de l'Administration de la Guerre (5) estime l'expression par le fait ou à l'occasion du service « trop restrictive » ; M. Pierre Masse (6) craint que l'ex-

(1) Ch. 5 déc. 17 J. Off. pp. 3152 et 3153.

(2) Ch. 5 déc. 17 J. Off. p. 3154; voici le texte de l'amendement de M. Puech : « Les blessures constatées., à moins qu'il ne soit établi qu'elles ne proviennent pas d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait et à l'occasion du service. » On remarquera que M. Puech dit « par le fait et à l'occasion » et non « ou à l'occasion », ce qui, en réalité, retire tout intérêt à la formule.

(3) Ch. 6 déc. 17 J. Off. p. 3163.

(4) Ch. 6 déc. 17 J. Off. p. 3265.

(5) Ch. 6 dec. 17 J. Off. p. 3167.

(6) Ch. 6 déc. 17 J. Off. p. 3166.


pression par le fait ou à l'occasion du service ne fasse naitre des difficultés : « On raisonnera à perte de vue pour savoir si tel acte qui a été accompli par un soldat l'a été par le fait ou à l'occasion du service. »

Cette attitude de la Commission et du Gouvernement qui, la veille, réclamaient la formule restrictive du service commandé et repoussaient un élargissement qu'ils estiment maintenant trop étroit, jette la confusion, et les amendements les plus divers s'entrecroisent : M. Betoulle propose (1) ( accidents éprouvés par le fait de la mobilisation » ; M. André Paisant (2) « pendant la durée de la mobilisation J); M. Pressemane (3) cc par le fait et pendant la durée de la mobilisation »; M. Ernest Lafont (4) « pendant le service ou à l'occasion du service »; M. Jean Bon (5) propose même la suppression de toute formule, les blessures et les infirmités constatées dans les délais prescrits devant, sans exception, être présumées imputables au service. C'est à qui trouvera la solution la plus large.

Mais M. Bouffandeau (6), au nom de la Commission du Budget, demande que compte soit tenu des possibilités financières et que le « nombre des parties prenantes » ne soit pas augmenté à l'excès; et le Sous-Secrétaire d'État de l'Administration de la Guerre (7) prie la Chambre de s'en tenir à l'expression par le fait ou à l'occasion dit service. 'La Commission (8) se rallie alors à cette formule qui est votée. Le texte devient donc : « Ouvrent droit à pension.

» 1° Les blessures constatées., à moins qu'il ne soit établi qu'elles ne proviennent pas d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service; « 2° Les infirmités causées ou aggravées par les fatigues, dangers ou accidents du service. »

On remarquera que ce deuxième paragraphe n'emploie pas la formule du premier paragraphe; M. Marius Moutet demanda (9) : <( Il est bien entendu que l'expression « ou accidents du service » a le même sens que nous avons indiqué il y a un instant? — Parfaitement; c'est entendu », répondit le Président de la Commission. «

(1) Ch. 6 déc. 17 J. Off. p. 3165 et 3168.

(2) Ch. 6 déc, 17 J. Off. p. 3165.

(3) Ch. 6. déc. 17 J. Off. p. 3165.

(4) Ch. 6 déc. 17 J. Off. p. 3167.

(5) Ch. 6 déc. 17 J. Off. p. 3169.

(6) Ch. 6 déc. 17 J. Off. p. 3169.

(7) Ch. 6 déc. 17 J. Off. p. 3167 et 3168.

(8) Ch. 6 déc. 17 J. Off. p. 3168.

(9) Ch. 6 déc. 17 J. Off. p. 3169.


Mais, pour éviter une interprétation fâcheuse, lorsque la loi revint du Sénat, la Commission unifia les textes et rédigea le second paragraphe da la façon suivante : « 2° Les infirmités causées ou aggravées par les fatigues, dangers ou accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service » (1).

A la séance de la Chambre du 17 décembre 1918, quoique l'accord parût définitif, nouvelle discussion : M. Nouhaud et M. Jean Bon (2) proposent de remplacer l'expression par le fait ou à l'occasion du service par « accidents survenus pendant la mobilisation ». Devant les explica- tions très larges de M. Lugol, rapporteur, la Chambre s'en tint au texte déjà voté qui est devenu partie de l'article 3 de la loi nouvelle.

* * *

Il reste à examiner l'exacte portée de l'expression autour de laquelle on a tant combattu « par le fait ou à Poccasion du service). Nous le ferons à l'aide des déclarations de M. Lugol, rapporteur, et à l'aide de la jurisprudence relative à la loi sur les accidents du travail, ces diverses données étant d'ailleurs concordantes. »

A la séance de la Chambre du 6 décembre 1917, M. Lugol (3) a déclaré : Dans tous les cas, quelle que soit la manière dont l'accident s'est produit, que ce soit par la faute du soldat lui-même, par celle de ses chefs ou par celle de l'État, la responsabilité est la même, l'indemnité est la même, le droit est égal. Nous voulons que tous les soldats blessés soient traités et indemnisés de la même façon.

A la séance de la Chambre du 17 décembre 1918, parlant à propos du militaire qui a imprudemment dévissé une fusée d'obus, M. Lugol a déclaré (4) : Pour qu'il n'y ait pas ouverture'du droit à la pension, il faudrait qu'il y eût, à la charge du militaire, une faute tellement lourde qu'on pût dire qu'elle est équivalente au dol. En dehors de cette hypothèse et chaque fois, par exemple, qu'il s'agira du maniement même imprudent, même contraire aux ordres, d'un explosif, le militaire sera cou-

(1) Voici les explications données par M. Lugol dans son rapport n° 5141 p. 13 : « Cette différence dans les termes employés pourra faire croire, nous a-t-on dit, que le Parlement a voulu dire des choses différentes. On soutiendra que les « accidents du service » c'est autre chose que les « acci dents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ». C'est ainsi la porte ouverte à tous les procès.

Devant cette crainte et dans le désir de réduire au minimum les difficultés d'application de la loi, la commission a cru devoir reproduire exactement dans le second paragraphe les termes qui figurent dans le premier. »

(2) Ch. 17 déc. 18 J. Off. p. 3400 et suiv.

(3) Ch. 6 déc. 17 J. Off. p. 3163.

(4) Ch. 17 déc. 18 J. Off. p. 3404; dans cette déclaration à la Chambre M. Lugol ne fait que reprendre les termes de son rapport n° 5141 p. 14. Comparez ce que dit M. Lugol : cc si la guerre n'avait pas eu lieu. » avec ce que disait M. Marius Moutet : « toute diminution qui ne serait pas survenue si l'invalide n'avait pas été lié au service doit donner lieu à réparation ».


vert. Ce n'est pas à lui à expliquer pourquoi la fusée a éclaté, ni à dire si elle était armée par suite d'un choc en cours de route ou encore si elle a été atteinte par un shrapnell au moment où l'artilleur la tenait dans sa main. Si la guerre n'avait pas eu lieu, ce soldat n'aurait .pas été exposé au danger qui l'a atteint ; voilà ce qui est certain ; il est donc bien liste qu'il soit garanti. C'est le vœu du Parlement, c'est le sens du texte que nous proposons et, après le vote de cette loi. ce sera la base et le fondement de toutes les décisions (1) qui auront à intervenir en matière de blessures accidentelles. »

.- En s'en référant à la jurisprudence relative aux accidents du travail, il faut comprendre : Est survenu par le fait du service tout accident causé par le service et arrivé sur les lieux et pendant le temps où le soldat est soumis à l'autorité militaire; Est survenu à l'occasion du service tout accident arrivé sur les lieux et pendant le temps où le soldat est soumis à l'autorité militaire, mais dont la cause n'est pas l'exécution du service.

Mais la notion de « service») doit être interprétée d'une façon très large.

A la séance de la Chambre du 6 décembre 1917 (2), le Sous-Secrétaire d'Etat, de l'Administration de la Guerre, répondant à une question de M. Pressemane, a déclaré, en effet (3) : Il est incontestable que, d'une manière générale, aussi longtemps que l'homme est mobilisé et retenu à la caserne, au cantonnement, dans son unité, il peut être considéré comme « en service » ; mais les difficultés commencent lorsqu'il s'agit d'apprécier les circonstances spéciales dans lesquelles tel ou tel accident peut survenir, telleou telle maladie peut éclater.

«Monsieur Pressemane, aux questions d'espèce que vous m'avez posées, voici ma réponse : « Un homme est permissionnaire. Quelle est la responsabilité de l'État à son égard Elle demeure, aux termes de la loi, ce qu'elle est aux termes de la législation actuellement en vigueur. L'État est, au point de vue de sa responsabilité, comptable de la santé ou de l'intégrité physique d'un soldat aussi longtemps qu'il l'a sous sa dépendance, c'est-àdire aussi longtemps que cet homme n'est pas rendu dans ses foyers.

Lorsque l'homme est rendu chez lui, en permission, il échappe à la surveillance, au contrôle et, si l'on peut dire, au service même de l'Etat.

1

(1) Voir Ch. Valentino, Accidents du travail et blessures de guerre, Cadoret, Bordeaux, p. 37 et suiv.

(2) J. Off. 7 décembre 1917, p. 31(33.

(3) A la séance de la Chambre du 17 décembre 1918 (J. Olf', du 18, p. 3402), la confirmation suivante a été donnée : M. ARISTIDE JOBERT. Cette question a déjà été traitée lors des premiers débats, mais il n'est point mauvais de faire préciser afin d'éviter des injustices. Il s'agit de la situation des soldats permissionnaires. Il est entendu, n'est-ce-pas, que ceux-ci ont droit au bénéfice de la loi jusqu'au jour.

M. LE SOUS-SECRÉTAIRE D'ÉTAT DE L'ADMINISTRATION DE LA GUERRE. jusqu'au jour où ils sont arrivés dans leurs foyers.

M. ARISTIDE JOBERT. Bien. Voici donc un permissionnaire qui, en cours de route, croyant être arrivé à sa station, ouvre la portière et, comme le train est encore en marche, tombe, se blesse, et doit subir l'amputation de la jambe.

M. LE SOUS-SECRÉTAIRE D'ÉTAT DE L'ADMINISTRATION DE LA GUERRE. Il a, sans aucun doute, droit à pension.


« Je suppose que cet homme se rende, pour son plaisir personnel, ou pour subvenir aux besoins de sa famille, à la pêche et qu'il tombe à la rivière. Ne serait-ce pas vraiment anormal et abusif que d'étendre à un accident de ce genre la responsabilité de l'État?

« Si, au contraire, l'accident survient en cours de route, pendant que l'homme se rend en permission régulière ou en revient, aux frais et par les transports de l'État, l'accident survenu durant ce voyage, aussi bien à l'aller qu'au retour, incombe à l'État et engage sa responsabilité. »

Il faut donc que l'accident : Soit survenu au cours du service; 2° Que l'exécution du service en ait été la cause ou l'occasion.

D'où il suit que sont imputables au service tous les accidents : Qu'ils proviennent de l'exécution normale du service; Ou d'une faute du militaire; Ou d'une faute d'un tiers; Ou d'un cas fortuit Ou d'un cas de force majeure, s'il est prouvé que c'est bien le service qui a exposé le militaire à l'action de cette force.

En tous cas, n'est pas imputable au service l'accident résultant de la faute intentionnelle de la victime (1). Encore est-ce à l'État qu'il appartient de faire la preuve de cette faute intentionnelle.

(1) Par faute intentionnelle, il faut entendre la faute qui a été volontairement commise pour produire un accident et se créer ainsi des droits à une indemnité, ou encore celle qui, commise dans un but criminel, a déterminé un accident dont l'auteur s'est trouvé victime par suite de circonstances imprévues.

Comparez ce que dit M. Lugol à la Chambre (séance du 17 déc. 18 J. Off. p. 3404) : «'S'il y a eu mutilation volontaire, s'il y a eu condamnation, vous ne pouvez vraiment pas donner une pension. «


, DEUXIÈME PARTIE DOCUMENTATION

Procès-verbaux

DES

Séances du Comité Permanent Interallié

SÉANCES DU 29 AVRIL 1919

Première Séance , Le Comité Permanent Interallié pour l'Étude des Questions intéressant les Invalides de la Guerre s'est réuni à Paris, en son hôtel, rue du Bac, 102, le 29 avril 1919, À 10 heures du matin, sous la présidence de M. le Dr BOURRILLON. président.

Étaient présents : Belgique. — MM. ALLEMAN, le Général-Major DERUETTE, le Major HAINAUT, LE CLERCQ, le. Lieutenant-Général MELIS, le Dr STASSEN.

Grande-Bretagne et Dominions. — MM. le Colonel J. G. ADAMI et le Colonel MURRAY MACLAREN (Canada).

États-Unis. — MM. Jefferson CAFFERY, le Capitaine H. W. MILLER et Miss H. M.

KING, représentant M. E. C. CARTER.

France. — MM. le Dr BOURRILLON, le or BROUARDEL, Charles KRUG et E. VALLON.

Italie. — M. le Colonel LAGHEZZA.

Monténégro. — MM. les Drs MAROULIS et MILIANITCH.

Portugal. — MM. les Drs da COSTA FERREIRA et José PONTÈS.

Absents excusés : Belgique. — MM. le Ministre BRUNET et le Sénateur THIÉRAUT.

Grande-Bretagne. — MM. le Dr BOYDEN, le Lieutenant-Général GOODWIN, le Colonel R. JONES, le Colonel WEBB.

Dominions. — Sir Thomas MACKENZIE (Nouvelle-Zélande).

France. — M. le Député HONNORAT.

Italie. — MM. le Professeur BURCI et le Professeur GALEAZZI.

Serbie. — M. le Député AGATHONOVITCH. ,


Procès-verbal. — Le procès-verbal des séances des 4 et 5 novembre 1918 est adopté.

A propos de ce procès-verbal, M. le Dr da COSTA FERREIRA déclare que le Gouvernement portugais l'a envoyé expressément, avec M. le Dr José PONTÈS, à la présente réunion, pour l'excuser et justifier l'ajournement que les événements graves qui, pendant quelque temps, ont troublé le Portugal, l'ont contraint à demander.

« Aujourd'hui, heureusement, tout cela est passé, et nous pouvons enfin, ajoute M. le Dr da COSTA FERREIRA, en toute sûreté et avec l'espoir d'une pleine réussite, nous occuper des travaux nécessaires pour préparer la réunion du Comité à Lisbonne. » M. le Dr da COSTA FERREIRA demande donc au Comité de fixer la date de son voyage au Portugal.

Le Comité décide que cette question sera examinée au cours de la deuxième séance qui aura lieu dans le courant de l'après-midi.

Modifications à la composition du Comité Permanent Interallié. — M. LE PRÉSIDENT signale les modifications apportées à la composition du Comité Permanent Interallié depuis la dernière séance.

Il exprime les unanimes regrets causés par la mort de Sir Charles NICHOLSON, président de la Délégation anglaise, et salue l'entrée dans le Comité de S. E. Sir WORTHINGTON EVANS, Ministre des Pensions du Royaume-Uni, et du Colonel WERB, Directeur général des Services médicaux du Ministère des Pensions.

En ce qui concerne les États-Unis, il signale le départ du Général BRADLEY et la nomination comme délégués de M. E. C. CARTER, Secrétaire de l'Y. M. C. A., du Colonel W. D. MACCAW, Chirurgien en chef du Corps de Santé, et de M. Edwin L. HOLTON, Agent spécial du « Fédéral Board for Vocational Education #; Pour l'Italie, l'entrée au Comité de M. BARGONI, Directeur de la Caisse nationale pour les accidents du travail, du duc de CAMASTRA, du Colonel Gennaro LAGHEZZA, et du Professeur Ettore LEVI.

Enfin, il fait part au Comité de la démission de M. le Commandant TOMANOVITCH, remplacé par M. le DR MILIANITCH, comme délégué du Monténégro.

M. le Lieutenant-Général MELIS, président de la Délégation belge, fait connaître que son Gouvernement lui a annoncé qu'il était dans l'intention de nommer comme délégués au Comité Permanent Interallié MM. PASTUR, Député permanent de Charleroi, et le Dr DOURLET, Directeur de l'École des Mutilés de Charleroi.

Élection d'un vice-président. — Sur la proposition de la Délégation américaine, le Comité nomme vice-président du Comité Permanent Interallié M. le Colonel Walter C. MACCAW, en remplacement de M. le Général BRADLEY, qui est rentré aux États-Unis.

La Délégation anglaise n'ayant pas fait connaître le candidat choisi par elle, le Comité décide de remettre à la prochaine réunion la nomination d'un second vice-président, en remplacement de Sir Charles Nicholson, décédé.


Conférence de Rome. — M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL communique au Comité une lettre de M. le Professeur BURCI, en date du 12 mars 1919, par laquelle il l'avisait que le Comité d'organisation de la troisième Conférence Interalliée, qui devait avoir lieu à Rome au mois de mai 1919, n'avait pu obtenir en temps utile, malgré ses instances réitérées, les locaux nécessaires pour la Conférence et l'Exposition.

« Si la remise des locaux avait lieu même dans le courant du mois de mars, ajoutait M. le Professeur BURCI, il serait désormais impossible de préparer la Conférence pour la date fixée. II faut donc la renvoyer à un autre moment et se mettre d'accord pour le choix de la nouvelle date avec le Comité Permanent Interallié. Mais, en attendant, je vous annonce (avec le plus profond regret pour mon Pays, pour la Délégation italienne et pour moi-même) que j'ai envoyé depuis quelques jours au Président du Conseil ma démission et celle du Comité d'orga..

nisation. »

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL fait part au Comité des diverses démarches qu'il fut amené à faire à la réception de cette lettre tant auprès de Son Excellence M. le Président du Conseil des Ministres d'Italie, actuellement à Paris, qu'auprès de l'Ambassadeur d'Italie, et il donne lecture aux membres présents de la lettre suivante de M. le comte Honin-Longare, ambassadeur d'Italie, en date du 18 avril 1919.

qui indique la solution donnée à l'incident : « Sur les instructions de mon Gouvernement, j'ai l'honneur de vous informer que la troisième Conférence Interalliée pour l'assistance aux Invalides de la guerre.

ainsi que l'Exposition y relative, qui devaient avoir lieu au mois de mars prochain, ont été renvoyées au mois d'octobre prochain, par suite de difficultés rencontrées dans le choix de locaux adoptés.

« La Présidence du Conseil italien a été obligée d'accepter la démission présentée par le Président du Comité organisateur de la Conférence, M. Burci ayant notifié sa démission aussi au Comité Permanent de Paris. A sa place, M. le Professeur Commandeur Richard Galeazzi, de l'Institut clinique de Perfectionnement de Milan.

Membre de la Délégation italienne auprès du Comité de Paris, a été nommé Président du Comité organisateur. »

Après avoir pris connaissance de cette lettre, le Comité décide, à l'unanimité, d'accepter la nouvelle date proposée par le Gouvernement italien pour la Conférence de Home. Il manifeste le désir que le choix définitif du Comité d'organisation se porte de préférence sur la première quinzaine d'octobre. M. le Colonel G. LAGHEZZA veut bien se charger de transmettre ce vœu à son Gouvernement.

Il fera également connaître au Comité d'organisation le désir exprimé par divers Membres du Comité Permanent Interallié de visiter au cours de leur voyage les écoles de rééducation les plus intéressantes de l'Italie.

M. le Lieutenant-Général MELIS demande qu'en vue d'éviter le renouvellement d'errements regrettables, le Secrétariat du Comité Permanent signalé au Comité d'organisation les points défectueux des précédentes Conférences.


M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL rappelle à ce sujet le « Règlement pour les Conférences Interalliées » arrêté par le Comité Permanent Interallié au cours de la séance du 5 novembre 1918 et auquel les divers Comités d'organisation devront se conformer à l'avenir.

Voyage du Président aux Élals-lJim. - M. le Dr BOURRILLON rend compte des conditions dans lesquelles il a été amené à accepter l'invitation que lui avait adressée la Croix-Bouge américaine d'aller faire, dans diverses villes des Etats-Unis, deux conférences, l'une sur ce que la France avait fait pour ses invalides, l'autre sur l'action et le programme du Comité Permanent Interallié.

A son arrivée à i\¡'w-York seulement, il a appris que ce projet était modifié et que l'on allait improviser un Congrès auquel prendraient part tes personnes appar- tenant à divers pays alliés qui, ainsi que lui-même, avaient été invitées par la Croix- Rouge américaine : trois Anglais, deux Belges, un Italien, cinq Canadiens, deux Français et un grand nombre d'Américains, qui exposeraient la doctrine des Etats- Unis en matière de blessés de guerre. Un programme fut immédiatement dressé et réparti entre une vingtaine de sections. En moins de huit jours, les rapports furent établis et le Congrès eut lieu du 18 au 21 mars.

M. LE PRÉSIDENT déclare que s'il avait connu, avant de quitter Paris, qu'une sorte de Conférence Interalliée se tiendrait à New-York, il n.dll pas manqué de consulter à son sujet le Comité.

Après ces explications, M. le 1)" BOURRILLON ajoute que, sur sa demande, ij a été décidé qu'un Comité d'action national serait créé aux États-Unis pour faciliter la tâche du Comité Interallié. Ce Comité sera choisi parmi les notabilités américaines auxquelles fera appel un Comité d'organisation composé de M. Coolidge, du Colonel Goldthwait et de Miss Grâce Harper, avec le concours dévoué de M. MacMurtrie, Directeur de l'Institut des Mutilés et Estropiés de la Croix-Bouge américaine à New-York.

Le Comité approuve cette initiative et décide qu'il y aura lieu de créer dans les divers Pays alliés de semblables Comités qui collaboreront avec les Délégués natio-' naux au Comité Permanent Interallié Pl, par eux, avec le Comité.

Sur la demande de M. le Président, M. ALLEMAN, qui a pris part au même voyage, fournit au Comité des détails sur la rééducation fonctionnelle et professionnelle aux États-Unis, sur le rôle du « Federal Board for Vocational Education», sur les conseillers moraux attachés aux mutilés, etc.,.

Après une discussion à laquelle prennent part MM. le Lieutenant-Général MELIS, da COSTA FERREIRA et VALLON, M. KRUG propose que, pour éviter toute fausse interprétation, le Comité Permanent Interallié demande aux organisateurs des réunions de New-York de ne pas leur donner le titre de « Conférence » qui prêterait à confusion avec la Conférence officielle qui doit se tenir à Rome en 1919.

M. ALLEMAN répond qu'en ouvrant la première séance de, New-York, M. Mac Murtrie, qui présidait, a tenu à signaler lui-même qu'il ne s'agissait pas là d'une.

Conférence interalliée; il ne fera donc aucune difficulté, semble-t-il. pour accepter la proposition de M. Krug.


Action de la Croix-Rouge internationale. — M. le Lieutenant-Général MELIS signale au Comité que par une circulaire signée de M. Naville, Président par intérim de la Croix-Rouge internationale, les diverses Croix-Rouges nationales ont été invitées à se réunir à Genève, un mois après la signature de la paix, en vue d'étudier l'élargissement de l'action des Croix-Rouges, conformément aux propositions de M. Davison, Président du Comité d'Angleterre, des États-Unis, de France, d'Italie et du Japon.Or, dans l'appel adressé par M. Naville, figure la question des mutilés et invalides de la guerre.

M. le Lieutenant-Général MELIS pense qu'il serait nécessaire que le Comité Permanent Interallié, constitué par des Délégations nationales, spécialement chargées par leurs Gouvernements respectifs de l'étude des questions intéressant les invalides de la guerre, fît connaître, son existence aux Comités des Croix-Rouges, en manifestant son intention de conserver, dans leur intégralité, les fonctions qui lui ont été confiées par ces Gouvernements.

M. VALLON appuie la proposition de M. le Lieutenant-Général Melis. Il signale que, dans presque tous les pays alliés, les questions relatives aux mutilés ont été confiées à un organisme spécial (Ministère des Pensions, Office National, etc.) dont les délégués font partie du Comité Permanent Interallié. On ne saurait donc admettre que les Croix-Rouges se substituent, soit au point de vue national, soit au point de vue international, aux organes actuels qui n'ont pas démérité.

Sur une question de M. LE CLERCQ, M. VALLON déclare qu'il ne saurait s'agir d'empêcher les Croix-Rouges de s'occuper des invalides de la guerre : leurs concours moral et pécuniaire a été et sera toujours très précieux et il ne pourrait être question de limiter leur action dans ce domaine. Mais il ne faudrait pas que les Croix-Rouges se substituent au Comité pour conseiller et diriger l'action des divers Gouvernements en faveur des victimes de la guerre.

M. le IV STASSEN approuve les déclarations de M. Vallon. Il pense que les Croix-Rouges ne sauraient faire abstraction des organismes déjà existants et qui ont fait leurs preuves.

La discussion est renvoyée à la réunion de l'après-midi et la séance est levée à midi et quart.

+

,. Deuxième Séance

La séance est ouverte à 14 h. 30, sous la présidence de M. le D' BOURRILLON.

Sont présents les membres qui assistaient à la première séance et M. le Profes- seur Jean CAMUS (France).

Adion de la Croix-Rouge internationale (suite). - MM. les DRS MAROULIS et MiLïAMTCtt déposent sur le bureau un exemplaire de la circulaire de la Croix-Rouge


signalée au Comité Permanent Interallié par M. le Lieutenant-Général MELIS. Lecture en est donnée.

Après une discussion à laquelle prennent part les divers membres présents, le Comité charge, à l'unanimité, son Bureau d'adresser à M. Naville une lettre lui faisant connaître l'existence du Comité Permanent Interallié et lui indiquant la mission qui lui a été confiée par les divers Gouvernements alliés ou associés représentés dans son sein. Copie de cette lettre devra être également adressée à M. Davison, Président des Croix-Rouges alliées. Enfin les délégués sont priés de faire connaître à leurs Gouvernements respectifs les décisions prises par le C. P. 1. en vue de maintenir les prérogatives des divers organes nationaux chargés de la protection des invalides de la guerre et les siennes propres.

Collaboration à la Société des Nations. — M. LE PRÉSIDENT appelle l'attention du Comité Permanent Interallié sur l'article 24 du Pacte qui institue la Société des Nations, lequel est ainsi conçu : « ART. 24. — Tous les Bureaux internationaux antérieurement établis par traités collectifs seront, sous réserve de l'assentiment des parties, placés sous l'autorité de la Société. Il en sera de même de tous les autres Bureaux et de toutes les Commissions pour le règlement des affaires d'intérêt international qui seront créées ultérieurement.

» Pour toutes questions d'intérêt international régies par des conventions générales, mais non soumises au contrôle de commissions ou de bureaux internationaux, le Secrétariat de la Société, si les parties le demandent et si le Conseil y consent, fera réunir et distribuer toutes informations utiles et prêter toute l'assistance nécessaire ou désirable.

» Le Conseil peut décider de faire rentrer dans les dépenses du Secrétariat celles de tout Bureau ou Commission placé sous l'autorité de la Société. »

M. le DR BOUHRILLON estime que le Comité Permanent Interallié pour l'Etude des questions intéressant leq Invalides de la guerre devrait, en s'appuyant sur cet article, se placer sous l'autorité de la Société des Nations.

M. KRUG fait observer que cette démarche entraînerait à brève échéance l'internationalisation du Comité Permanent Interallié.

M. le DI' CAMUS déclare que la collaboration des représentants d'œuvres inter- alliées pour mutilés avec les œuvres similaires des pays ennemis aurait actuellement quelque chose de choquant.

M. VALLON fait observer que, délégués officiels et par conséquent mandataires de leurs pays respectifs, les membres du C. P. I. ne doivent pas avoir sur les questions internationales d'autre opinion que celle de leurs mandants : il estime donc que, lorsqueula Société des Nations sera ouverte à d'autres pays que ceux qui la composent actuellement, Jil appartiendra au C. P. L de s"incliner sans protestation

M. le Dr STASSEN signale que la question des invalides de la guerre peut évoluer rapidement, du fait de l'échange de main-d'œuvre entre les diverses nations du globe ; il appuie donc la manière de voir de M. VALLON.

Après une intervention de M. le Lieutenant-Général MELIS et de M. le Major


HAINAUT, le Comité décide d'accepter la proposition de son Président et d'adresser au Secrétariat de la Société des Nations la demande prévue par l'article 24 précité.

Institut Interallié. — M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL rend compte du fonctionnement du Service de documentation. Il insiste auprès des Correspondants nationaux pour qu'ils veuillent bien signaler et éventuellement faire envoyer au C. P. I. tous les documents imprimés susceptibles d'intéresser ceux qui s'occupént des invalides de la guerre. Il indique les difficultés rencontrées par ce service pour se procurer notamment les publications qui ne sont pas vendues en librairie.

Le Musée est presque complètement installé ; y figurent déjà les envois de la Belgique,, de la Grande-Bretagne, de la France et de l'Italie ; l'inauguration en pourra avoir lieu incessamment.

Enfin, les démarches en vue de la reconnaissance d'utilité publique de l'Institut ont été faites et sont actuellement en cours.

M. le Dr LONTÈS signale que, malgré l'effort considérable fait au Portugal par la Délégation portugaise en faveur des mutilés portugais, elle n'a pas perdu de vue ses devoirs envers l'Institut, et il remet au Secrétaire Général, qui le remercie chaleureusement, un premier don de 1.000 francs pour cet organisme.

Revue Interalliée. — M. le Professeur Jean CAMUS, directeur de la lie vue Interalliée, fait appel au concours le plus large des membres du Comité, ef spécialement à ceux de langue anglaise, pour assurer à la Revue une plus grande diversité.

Il insiste avec M. KRUt. pour que les correspondants nationaux collaborent effectivement à l'action commune par l'envoi de documents au fur et à mesure de leur publication dans leurs Pays respectifs.

Il appelle enfin l'attention du Comité sur les enquêtes de la Revue auxquelles il importe que le plus grand nombre de personnes compétentes puissent prendre part.

M. VALLON demande que la partie « Documentation » soit plus largement développée dans la Revue. Les articles originaux, bien que très intéressants, ne traduisent que l'opinion d'une personnalité unique sur une question spéciale. Au contraire, la documentation fournit des matériaux d'étude, des points de comparaison précieux pour tous ceux qui s'occupent de la question des invalides de la guerre. A son avis, la Revue devrait comprendre, pour les trois quarts au moins, des articles documentaires, projets de lois, comptes rendus, etc.

M. le Professeur CAMUS répond que les derniers numéros de la Revue comportaient une partie « Documentation » beaucoup plus importante que les premiers et qu'il entend encore développer la Revue dans le sens indiqué par M. VALLON.

Situation financière. Subventions. — M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL, en l'absence de M. E. BRUNET, trésorier, et en son non, fait connaître l'état satisfaisant des finances du Comité.


Au 15 avril il existait, en effet, en caisse, à la Banque de France, une somme de 77.480 francs. Les formalités prévues ont été remplies pour qu'aucune somme ne puisse être touchée sans la double signature du Président ou du Secrétaire Général et du Trésorier.

Les Pays ci-après ont, à la date de ce jour, versé leur subvention pour l'exerIl cice courant ou annoncé son versement incessant : Belgique, Canada, États-Unis, France et Portugal. Il est rappelé aux autres Nations représentées au Comité que la subvention afférente à l'exercice 1918-1919 doit être versée avant le 30 juin 1919.

Échange de mutilés et relations interalliées. — M. VALLON signale que l'Office national des Mutilés et Réformés de la Guerre a reçu une demande d'un mutilé, élève d'une école française de rééducation professionnelle, qui désirerait être admis dans un établissement similaire en Angleterre pour perfectionner ses connaissances en anglais.

Cette demande soulève l'intéressante question de l'échange des mutilés entre les écoles de rééducation des Pays alliés. La Commission de rééducation de l'Office National, qui en a été saisie, a émis un avis favorable; mais elle a pensé que la question dépendait du Comité Permanent Interallié.

M. ALLEMAN déclare qu'au cours des réunions tenues récemment à New-York, cette question avait été étudiée par le « Federal Board for Vocational Education » avec un soin tout particulier et d'une façon très large.

L'action des Pays alliés et associés à l'égard des mutilés avait été, en effet, envisagée sous trois aspects différents : En ce qui concerne le paiement des pensions, le Federal Board était d'avis d'étudier les moyens les meilleurs pour permettre aux mutilés pensionnés de toucher dans le pays de leur résidence, et avec le minimum de formalités, le montant de la pension servie par leur pays d'origine.

En ce qui concerne les appareils de prothèse, il estimait que chaque pays devrait, à titre de réciprocité, entretenir et renouveler les appareils de prothèse fournis aux mutilés par l'un quelconque des pays alliés ou associés.

Enfin, pour la rééducation professionnelle, deux procédés semblaient possibles: ou bien le Pays de résidence prendrait purement et simplement à sa charge la rééducation des mutilés alliés ; ou bien, cette charge serait finalement supportée par le Pays d'origine qui devrait rembourser au Pays de résidence les frais faits en vue de cette rééducation.

Toutes ces questions avaient été réservées pour être discutées à la Conférenee Interalliée de Rome.

M. VALLON déclare se rallier à cette manière de voir, mais il demande que tous les Pays représentés au Comité Permanent soient officiellement saisis de ces diverses questions par les soins du Secrétaire Général, de façon à ce que leurs Délégués à Rome aient qualité pour engager leurs Pays respectifs sur ces questions.

Il en est ainsi décidé.


Mutilés de la guerre victimes d'accidents du travail. — M. le Dr STASSEN signale l'intérêt qu'il y aurait pour tous les mutilés à ce que leur Pays d'origine, en vue de faciliter le retour à l'activité sociale, prenne toutes les dispositions nécessaires pour que leurs mutilations ou leurs infirmités résultant de la guerre n'aggravent pas la situation de leurs employeurs s'ils devenaient victimes d'accidents du travail.

Il cite l'exemple d'un borgne autrefois bouilleur et qui ne peut reprendre en Belgique son ancien métier, aucune mine ne consentant à l'employer à cause des dangers que court cet homme de devenir aveugle en cas d'accident du travail.

M. STASSEN indique que la France, par une loi du 25 novembre 1916, et dans le but de faciliter le retour des mutilés au travail, a constitué un fonds spécial de prévoyance dit « des blessés de la guerre », destiné à exonérer les chefs d'entreprise de la totalité ou d'une quotité des rentes allouées à un invalide de la guerre victime d'un accident du travail. M. le Dr TASSEN demande que l'attention de la Société des Nations soit attirée sur cette question qui présente un intérêt général évident.

M. ALLEMAN appuie la proposition de M. le Dr STASSEN. Il rappelle que cette question a déjà fait l'objet d'études suivies à la Conférence de Londres ; il propose en conséquence que le Comité Permanent Interallié, par voie de suggestion, signale aux différents Pays alliés et associés l'utilité de mesures législatives destinées à pallier le danger signalé par M. le Dr STASSEN.

Après une courte discussion, la proposition de MM. le D' STASSEN et ALLEMAN est adoptée et le SECRÉTAIRE GÉNÉRAL chargé d'en assurer l'exécution.

Réunion du Comité à Lisbonne. — Le Comité examine la suite qu'il convient de donner à la nouvelle invitation que le Gouvernement portugais a bien voulu lui adresser par l'intermédiaire de MM. les DIS A. da COSTA FERREIRA. et José PONTÈS.

Sur la proposition de ce dernier, il décide que la prochaine réunion du Comité Permanent Interallié aura lieu à Lisbonne à la fin du mois de juin ou au début du mois de juillet.

La Délégation portugaise est priée de s'entendre, pour la fixation définitive de la date et pour le programme, avec le Secrétariat Général.

Rien ne se trouvant plus à l'ordre du jour, la séance est levée à 17 heures.


IIIe Congrès national des Mutilés, Veuves et anciens Combattants (France) 1 La Revue Interalliée n'a pu donner le compte rendu des deux premiers Congrès des Associations de Mutilés qui ont eu lieu au début des années 1917 et 1918, avant l'apparition de son premier numéro.

Par contre, elle est heureuse de publier aujourd'hui les vœux émis au troisième Congrès des Associations de Mutilés et Réformés, auquel assistait un délégué du Comité.

Le Congrès s'est ouvert le 20 avril dernier à Orléans ; plus de 250 délégués, représentant environ 200.000 mutilés, y apportèrent leur volonté de travailler sérieusement, fermement, à l'élaboration d'un plan général des solutions à donner aux nombreux problèmes que fait naitre la présence en France d'environ 1.900.000 invalides (1).

Il est remarquable de constater combien le désir de trouver un terrain d'entente et de maintenir la concorde entre les associations aida à éviter les froissements qui naissent trop souvent du choc des idées. Les débats, tant dans les commissions qu'en séance plénière, furent quelquefois confus; ils ne devinrent jamais tumultueux.

Dès le début de la séance inaugurale, la décision fut prise que la discussion d'un programme politique minimum ne pourrait avoir lieu qu'en dehors du Congrès et n'engagerait nullement la Fédération des Associations françaises.

Aussitôt cette décision prise et les comptes de la Fédération approuvés, les congressistes se partagèrent en quatre commissions, qui se mirent immédiatement au travail : La première commission eut à examiner les questions d'ordre intérieur concernant l'organisation de l'U. F. et du Congrès; la deuxième s'occupa des lois sociales; la troisième, de la rééducation professionnelle; la quatrième, de la prothèse.

Les rapports généraux clairs et remarquablement documentés furent discutés point par point au cours de trois séances. Les conclusions de ces rapports furent généralement admises, mais non sans avoir été examinées et critiquées par des esprits qu'éclairait constamment la dure expérience de plus de quatre ans de guerre.

Quoiqu'ayant jugé à propos de bannir des débats et de ne prendre aucune décision impliquant l'adhésion à un parti politique, les mutilés montrèrent qu'ils entendent non seulement gérer eux-mêmes leurs intérêts, mais aussi faire entendre efficacement leur voix et donner leur avis au sujet de l'application des grands principes pour lesquels ils ont combattu.

(1) Rapport sur le fonctionnement du Service général des Pensions, J. Off. de février 1919.


Dans ce sens, nous citerons les vœux ayant trait : 1° A l'admission à la Conférence de la Paix de délégués des anciens combattants de toutes les nations alliées ; 2° A la constitution d'une Société des Nations et, en attendant le fonctionnement efficace de celle-ci, au rapprochement des groupements de mutilés et anciens combattants de tous les pays alliés, joignant leurs efforts pour l'obtention et le maintien d'une paix juste et durable ; 3° A l'amnistie des condamnés militaires subissant une peine autre que celles prononcées pour trahison ou délit de droit commun.

Voici, du reste, l'ensemble des vœux d'intérêt général votés par le Congrès d'Orléans.

Vœux votés par le Congrès sur les Rapports des Commissions.

DEUXIÈME COMMISSION

Lois sociales.

Rapporteurs : MM. M. LEHMANN, CASSIN, BELLlER.

Le Congrès aifirme sa solidarité absolue avec les populations malheureuses des régions sinistrées et émet le vœu que les mesures de réparation qui leur sont légitimement dues soient mises à exécution dans le plus bref délai et dans leur intégralité.

Le Congrès affirme à nouveau que la réparation des dommages causés par la guerre aux personnes doit être effectuée par l'État, par préférence à tous autres paiements. Il compte sur la vigilance des pouvoirs publics pour exiger des empires centraux, conformément à la proposition NADI, le remboursement des sommes affectées à cette réparation et subsidiairement obtenir la solidarité financière des Alliés.

Comme corollaire au droit à réparation, le Congrès revendique pour les intéressés le droit de discuter les modalités du paiement, de contrôler la liquidation de leurs créances et d'une façon générale de gérer eux-mêmes leurs intérêts.

Le Congrès, considérant que, de tous les Alliés, les sacrifices consentis par la France ont été les plus lourds, émet le Nmu : « Que la Conférence de la Paix lui fasse la plus large application des principes de Droit contenus dans la triple formule : Réparations, restitutions, garanties ».

COMMISSIONS DE RÉFORME Le Congrès demande : 1° La suppression des enquêtes de gendarmerie ; 20 Des sanctions sévères contre les médecins-majors qui systématiquement sousestiment les infirmités ; Il réclame des sanctions judiciaires contre les médecins-majors, dont les rapports établis avec légèreté ou malveillance, ont entraîné des condamnations de la part des conseils de guerre, — condamnations qui, dans de nombreux cas, ont été suivies d'exécutions capitales, ainsi qu'en font foi des arrêts de réhabilitation de la Cour de Cassation. x


Le Congrès estime que, dans ces hypothèses, la responsabilité personnelle des médecinsmajors est engagée puisqu'il y a eu faute lourde.

Les noms des médecins, frappés de peines disciplinaires pour sous-estimations systématiques ou condamnés, devront être affichés dans les salles des commissions de réforme; .1° Que la Commission consultative médicale ne puisse réduire une indemnité sans avoir procédé à l'examen des intéressés ; 4° Qu'un tableau faisant ressortir le pourcentage d'invalidité le plus favorable, par comparaison des trois barèmes existants, soit affiché dans les salles des Commissions et dans les corridors y conduisant.

Composition des Commissions. — Que dans la composition des Commissions figurent, outre les deux officiers combattants dont l'adjonction est prévue par le projet pendant devant le Parlement, un soldat et un sous-officier.

En ce qui concerne la loi des pensions : Point de départ de la pension. — Que la Commission visée à l'article 3, al. 6, soit celle qui, pour la première fois, aura constaté l'invalidité des ayants droit (qu'ils soient réformés nos 1, 2 ou auxiliaires).

Mise en observation. — Que les dispositions de l'article 40, en ce qui concerne l'hospi- talisation, en cas de mise en observation, s'appliquent également aux hospitalisations pres- crites par les Commissions de Réforme à des démobilisés ou des pensionnés temporaires; que ces dispositions soient par suite insérées à l'article 9, y compris l'alinéa concernant la rupture du contrat de travail. (A ce sujet, le Congrès proteste contre la restriction apportée à cette prescription, qui la rend illusoire dans les cas sérieux et demande, par suite, la suppression de la limitation à un mois de l'hospitalisation); que l'indemnité journalière soit attribuée aux intéressés pour la ou les journées qu'ils ont perdues à passer devant une Commission de Réforme. Le Congrès proteste contre les hospitalisations abusives prescrites par les Commissions de Réforme dans le seul but d'intimider les intéressés et de les amener à renoncer à faire valoir leurs légitimes prétentions, de telles pressions constituant de véritables chantages.

Il proteste également contre la prétention de certains médecins et chirurgiens, qui se sont, à cet égard, acquis une triste renommée, d'obliger des blessés et malades à subir des traitements et des opérations dont l'inefficacité a été démontrée, et de réduire leurs indemnités en cas de refus des intéressés. Il demande l'application stricte à cet égard de la jurisprudence des accidents du travail.

Régime des hôpitaux. — Le Congrès, saisi de la récente circulaire de M. Mourier, soussecrétaire d'État du Service de Santé, concernant les promenades des blessés et malades des hôpitaux militaires, en demande l'abrogation immédiate.

Invalides affectés de lésions multiples. — Le Congrès demande la modification de l'alinéa 3, de l'article 4 de la loi, en ce sens que, si une ou plusieurs lésions sont incurables, les intéressés jouissent, quant à ces lésions, de tous les avantages conférés aux pensionnés définitifs.

Allocation journalière en attendant la liquidation de la pension. — Le Congrès réclame que cette allocation qui est toujours de 1 fr. 70, chiffre de 1914, soit en rapport avec la hausse des prix actuels et portée à 5 francs.

Femmes des grands blessés. — Le Congrès demande que les femmes des grands blessés et malades hospitalisés bénéficient de la pension des veuves, par analogie avec la disposition de l'article 55 relative aux femmes d'aliénés. Pour les unes et pour les autres, il réclame l'application du taux exceptionnel et non du taux de réversion, qui ne peut se justifier en pareille matière.


Augmentation du nombre des sanatorias et hôpitaux. — Le Congrès demande l'ouverture d'un grand nombre de sanatoria et hôpitaux pour les invalides militaires et le vote par le Parlement de la proposition Merlin-Honnorat.

RÉFORMÉS N°2 ET RÉFORMÉS TEMPORAIRES Le Congrès demande que les réformés temporaires ne puissent être astreints à passer des visites jusqu'à la fin de leur vie et qu'ils deviennent réformés définitifs après trois visites annuelles.

En ce qui concerne les allocations temporaires attribuées aux réformés n° 2 par la loi du 9 décembre 1916, il proteste contre la suppression aux intéressés de ces allocations sous prétexte que la loi des pensions est promulguée.

Il réclame le vote par le Parlement dans le plus bref délai de la proposition Lugol et, en attendant le vote de cette proposition, que la loi du 9 décembre 1916 continue à être appliquée, étant donnée la lenteur probable de la mise en application de la loi des pensions.

TRIBUNAL DES PENSIONS Juge pensionné. — Le Congrès émet le vœu que le pensionné ne puisse figurer dans le tribunal que pendant une session, qu'il soit inéligible pendant les six mois qui suivront et ne puisse, pendant cette période, être désigné comme juge.

Il appartiendra à l'Union Fédérale d'adresser à toutes les associations des instructions détaillées pour être remises aux juges pensionnés. Ceux-ci, dont le choix par les associations devra être particulièrement méticuleux, en raison du rôle considérable qu'ils auront à jouer, devront prendre l'engagement d'honneur de se conformer à la ligne de conduite qui leur sera tracée; en particulier, ils devront refuser de remplacer le juge mutilé qui aurait dù démissionner à la suite d'irrégularités graves constatées par lui dans le fonctionnement du tribunal.

Juge médecin. — Le Congrès, rappelant toutes les déclarations faites à cet égard au Parlement, invite les associations à récuser les médecins qui auraient siégé dans les Commissions de Réforme : Constatant une lacune de l'article 36, alinéa 5, il demande aux syndicats et associations de médecins de s'entendre avec nos associations pour l'établissement de la liste des médecins, se réservant, au cas où un accord amiable ne serait pas possible, de réclamer une addition à la loi sur ce point et en ce sens.

Organisation de la défense. — Indépendamment des instructions précitées à remettre aux juges pensionnés, l'U. F. et les Associations auront le devoir de constituer, le plus près possible des intéressés, des Comités de Défense médico-juridiques, composés de médecins, d'avocats et d'officiers ministériels.

Des cliniques pour l'examen de nos camarades devront-être créées.

Enfin, le Congrès émet le vœu que la défense des intéressés, en l'absence d'avocat, puisse être assumée par un délégué d'association, dûment mandaté, ou en tout cas, que, les intéressés puissent toujours se faire assister d'un camarade.

VEUVES 1° Droit de vote. — Le Congrès émet le vœu que, conformément à ce que vient de décider la Chambre belge, le droit de vote soit accordé aux veuves et mères des soldats morts au champ d'honneur; 2° Compagnes. — Il renouvelle formellement le vœu du Congrès de Lyon, tendant à l'assimilation des compagnes aux femmes légitimes dans le cas de vie maritale notoire ;


3° Il demande que les ayants cause des militaires décédés puissent revendiquer le bénéfice de la loi, quand bien même la mort serait survenue à la suite d'une condamnation pour infraction militaire; 4° Il demande que les femmes d'origine française mariées à des soldats alliés, devenues veuves à la suite d'événements de guerre et ayant obtenu leur réintégration dans la nationalité française, puissent revendiquer le bénéfice de la loi des pensions; 5° Considérant qu'il ne suffit pas aux législateurs de préconiser la repopulation par des discours, que la restriction apportée par l'article 14, à la date du mariage qui « doit être antérieur à la blessure, etc. », \a à l'encontre du but que se proposent ceux qui veulent encourager la natalité, il demande la suppression pure et simple de cette restriction.

Taux de la pension. — Le Congrès demande l'élévation de 1.200 francs du taux de la pension de la veuve du simple soldat, celui de 800 francs n'étant nullement en harmonie avec le coût actuel de la vie.

Pension de reversion. — Le Congrès demande: 1° Que le taux de cette pension soit, pour la veuve du simple soldat, des deux tiers du taux de la pension normale.

2° Qu'elle soit accordée aux veuves des réformés temporaires.

3° Que la limite du taux d'invalidité y donnant droit, soit abaissée à 40 0/0 pour les blessés, taux figurant dans la loi sur l'emploi obligatoire des mutilés et à 10 0/0 pour les malades, les médecins indépendants, étant, pour ces derniers, unanimes à reconnaître qu'une maladie, fût-elle de 10 0/0, est toujours susceptible, en s'ajoutant à une autre, nouvellement contractée (ce qui est l'hypothèse de la réversion) d'entraîner la mort.

ORPHELINS ET ENFANTS D'INVALIDES Eu égard au coût actuel de la vie, le Congrès demande le relèvement à 750 francs des majorations pour enfants de veuves et d'invalides de 100 0/0 ; et le relèvement proportionnel des majorations prévues à l'article 13 pour les enfants d'invalides de moins de 100 0/0.

ASCENDANTS Le Congrès demande : 1° Le droit de vote pour les mères.

2° L abaissement à 55 ans de la limite d'âge pour les ascendants du sexe masculin.

3° L assimilation absolue des mères-veuves, aux veuves.

jo L'assimilation des grands-parents aux parents.

5° L'assimilation des ascendants des infirmes de plus de 60 0/0 aux ascendants des morts.

PAYEMENT DES PENSIONS Le Congrès émet le vœu que le projet de loi de la Commision des Pensions modifiant le paiement des arrérages et instituant le carnet d'identité soit voté dans le plus bref délai.

PETITS RETRAITÉS DE L'ÉTAT Considérant que la loi sur les pensions, en ce qui concerne le taux, a satisfait aux revendications de nos associations, que ces taux sont calculés d'après le coût moyen de la vie, le Congrès se refuse à émettre au sujet de la loi sur les petits retraités de l'État des revendications qui, en réalité, constitueraient des exigences nouvelles contrairement aux vœux du Congrès de Lyon.

En conséquence: Passe à l'ordre du jour :


MÉDAILLE MILITAIRE Considérant: Qu'en vertu du décret de 1852, les blessés et malades de la guerre peuvent légitimement prétendre à la médaille militaire ; Que c'est uniquement par la généralisation de son attribution que l'on pourra remédier aux injustifiables inégalités résultant de l'incohérence et de la diversité des pratiques actuelles : Que la médaille militaire n'est pas et n'a jamais été l'exclusive récompense des actes d'héroïsme ; qu'elle ne l'a au contraire été qu'exceptionnellement au cours des guerres, alors que, normalement, elle était, pendant le temps de paix, distribuée avec régularité et sans parcimonie, en quelque sorte automatiquement, à tous les militaires ayant accompli un certain nombre d'années de service, Le Congrès émet le vœu, conformément aux mandats donnés par l'unanimité des associations : Que la médaille militaire soit attribuée en principe à tous les « combattants », à moins que l'autorité militaire ne fasse la preuve qu'ils ont démérité, et étant entendu que devront être considérés comme combattants tous ceux qui ont ou auraient eu droit au pécule à raison de la haute paye de combat : Renouvelle la protestation unanime formulée par les associations contre les paroles prononcées par le sous-secrétaire d'État de l'Administration de la guerre, lors de la discussion de la proposition Georges Bureau-Patureau-Baronnet.

DISPARUS Le Congrès demande instamment que le Sénat vote dans le plus bref délai le projet qui lui est soumis et mette fin à des situations particulièrement dignes de la sollicitude des pouvoirs publics.

PRISONNIERS Considérant que le régime imposé à nos prisonniers en Allemagne a été plus cruel que celui des bagnes ; Que l'histoire de leur captivité est un martyrologe ; Que, parqués comme du bétail, couchés sur des paillasses où la vermine grouillait, nos prisonniers ont manqué de tout dans les camps allemands ; Que sans les envois de France, qui d'ailleurs ne leur parvenaient pas toujours, ils seraient morts de froid et de faim ; Que toutes les brutalités, toutes les vexations, ils les ont subies : l'injure, la bastonnade, la poursuite des chiens policiers, les coups de crosse, de baïonnette ; qu'on les a tenus attachés au poteau, face au soleil ; qu'on les a enfermés dans des cages en fer comme des bêtes féroces ; qu'on les a jetés dans des cachots glacés, dans des chambres de chauffe des usines ;

Qu'on a fait pis encore: qu'on les a obligés à creuser des tranchées contre leurs frères „ d'armes, à approvisionner les batteries allemandes sous le feu français; , Que l'Allemagne s'est servie de nos prisonniers comme d'un instrument dé pression sur l'opinion française et leur a infligé toutes ces tortures dans l'espoir abominable d'affoler les familles françaises; Que les réparations et les sanctions s'imposent ; Le Congrès réclame : DANS L'ORDRE MATÉRIEL.

1° Indemnité alimentaire et vestimentaire, calculée selon la durée de la captivité, suffisante tout au moins pour couvrir les frais supportés par les familles ;


20 Remboursement des mandats envoyés par sa famille au prisonnier ou inversement, qui, par la faute de l'office postal allemand ou par l'infidélité des intermédiaires du camp, ne sont pas parvenus à destination ; 3° Remboursement, au taux de 1 fr. 25 le mark, de toutes sommes déposées en Allemagne au cours de la captivité et qui y sont restées ; Restitution de tous objets laissés dans les camps; 5° Remise immédiate des certificats d'origine de blessures, demeurés aux mains des autorités allemandes.

DANS L'ORDRE MORAL.

1° Recherche et punition de tous agents de l'autorité allemande, si haut placés qu'ils soient, qui, de leur fait, soit en n'observant pas les conventions internationales, soit en édictant des règlements inhumains, soit en interprétant ces textes d'une façon abusive.

soitencore en retenant par devers eux, en totalité ou en partie, les sommes, aliments ou vêtements destinés aux prisonniers de guerre, ont aggravé la condition de ces prisonniers; 2° Faculté pour les plaignants de les poursuivreen justice et de se porter partie civile.

Le Congrès prie le Ministre de la Guerre de présenter sa requête devant la Conférence de la Paix.

S'il n'existe pas de Tribunal devant lequel des faits de cet ordre puissent être portés, il appartient à la Conférence d'en créer un, car l'opinion publique n'admettrait pas qu'un empêchement de procédure fit obstacle aux sanctions légitimes.

PUPILLES DE LA NATION Le Congrès émet le vœu : 1° Que le service des pupilles de la nation soit considéré comme un service national ; 2° Que les délégués des associations, veuves et infirmes de guerre, figurent en majorité au sein de l'Office national, des offices départementaux et des sections cantonales et que tous les fonctionnaires de ces offices soient recrutés parmi les veuves, réformés de guerre, et à leur défaut, orphelins de guerre.

Le Congrès donne mission à l'Union Fédérale d'inviter le Gouvernement à mettre un terme à l'exploitation matérielle et aux agissements dont sont l'objet, dans beaucoup d'établissements privés, les orphelins de la guerre, et à multiplier la création d'établissements publics.

Le Congrès émet un vœu en faveur de l'extension de la gratuité scolaire à tous les degrés de l'enseignement pour les enfants et orphelins des victimes de la guerre. Il demande que les enfants des pensionnés de guerre conçus après la fin des hostilités puissent être admis au nombre des pupilles de la nation.

PÉCULE Le Congrès demande: 1° Que le pécule soit attribué à toutes les veuves ; 2° Qu'en cas de perte de carnet après démobilisation ou décès du titulaire, la faculté, déjà reconnue aux militaires avant leur démobilisation, soit étendue aux veuves ; 5° Que la limite d'âge des enfants des ayants droit soit élevée à 18 ans, conformément à l'article la de la loi des pensions.

LE STATUT DU DÉMOBILISÉ Le Congrès, faisant siennes les critiques adressées par les combattants à l'institution de l'indemnité de démobilisation, dénommée par eux un « pourboire » et qui est mani-


festement insuffisante à répondre aux besoins nés pour les mobilisés de leur long séjour aux armées, Émet le vœu: Qu'un ensemble de mesures législatives soient prises en vue de l'établissement d'un statut complet du combattant comportant notamment; a) L'organisation du crédit: b) La suppression des intérêts moratoires, sauf le cas où il serait prouvé que les mobilisés n'ont pas souffert de la guerre ; c) Délais de paiement pour les dettes antérieures au 2 août 1914; d) Droits de priorité pour achats de matériels, licences, transports, etc.

Le Congrès appuie la proposition Laval-Pierre Rameil, tendant à l'institution d'une pension du combattant.

1° Dans la mesure où cette pension serait internationalisée et 2° à la condition que cette pension ne soit pas considérée comme suffisante à constituer le statut du combattant, mais qu'elle n'en soit qu'une des modalités.

Bien qu'estimant l'indemnité de démobilisation comme tout à fait insuffisante, le Congrès proteste contre la mesure d'exception qui exclut les jeunes classes du bénéfice de la loi.

IMPOTS.

Le Congrès adopte les conclusions suivantes : « Les tempéraments sur les impôts d'argent sont un droit pour ceux qui ont déjà payé l'impôt du sang. Leur réglementation est réservée jusqu'à étude complète de la question. » Il demande en outre que : « 1° Les pensions servies par l'État aux victimes de la guerre soient exemptes de l'impôt cédulaire sur les pensions viagères, institué par la loi du 31 juillet 1917, et leur paiement exempt du droit du timbre de quittance. Les revenus qui en seront tirés ainsi que ceux provenant des traitements afférents à la médaille militaire et à la Légion d'honneur ne devront pas entrer en ligne de compte pour l'établissement de l'impôt général sur le revenu.

« Les dégrèvements de cotes personnelles-mobilières soient faits proportion- nellement aux réductions de loyers. »

MOYENS DE TRANSPORT Toute une série de vœux fut adoptée, réclamant : 1° Le quart de place pour les mutilés et ceux qui accompagnent les grands invalides et aveugles ; 20 La gratuité des abonnements de travail ; 3° La carte de priorité ; 4° La généralisation des places assises réservées.


TROISIÈME COMMISSION Office national et Comités départementaux — Réadaptation — Travail Emplois réservés — Crédit aux mutilés — Placement.

Rapporteur : Ch. VALENTINO.

J. - OFFICE NATIONAL ET COMITÉS DÉPARTEMENTAUX 1° REPRÉSENTATION DES MUTIÜs.

Le Congrès émet le vœu que l'Ouiee national soit en majorité composé de mutilés, réformés et veuves de guerre, désignés par les associations, la désignation des délégués à l'Office national ayant lieu suivant un mode de vote analogue à celui employé pour l'élection au Conseil Supérieur de la Mutualité.

CADRES DU PERSONNEL DE L'OFFICE.

Le Congrès demande : Que les emplois de l'Office national et des offices départementaux soient exclusivement réservés aux mutilés et aux veuves de guerre et que l'Etat fixe un minimum d'appointements, les Conseils généraux restant libres de parfaire le minimum par des allocations supplémentaires.

3° GESTION DIRECTE.

Le Congrès demande : La remise aux mutilés, aux réformés et aux veuves, de la gestion entière et directe de leurs intérêts.

II. - RÉADAPTATION La réforme devant être prononcée dès la consolidation des blessures et la pension liquidée avant toute rééducation, le Congrès demande que le délai maximum d'apprentissage imposé aux invalides par l'État dans ses usines et ateliers soit supprimé et que l'apprentissage puisse se poursuivre pendant tout le temps nécessaire à la remise de l'infirme en position d'exercer convenablement la nouvelle profession.

Le Congrès adopte en outre les conclusions suivantes : 1° La rééducation en écoles doit être condamnée et faire place à la rééducation à l'usine ou à la ferme.

2° La rééducation en usine, outre qu'elle présente l'avantage de mettre le mutilé dans les conditions réelles de la profession à laquelle il prétend s'exercer, se trouve assurer son placement par anticipation.

30 En dehors de l'apprentissage en usine, il y a lieu d'assurer la rééducation par l'apprentissage auprès des petits fabricants et, à ces petits fabricants, pour les dédommager de leur peine, doivent aller les subventions inutilement distribuées jusqu'à ce jour aux écoles de rééducation. Ainsi, par la même occasion, nombre de petites industries locales qui ont besoin d'encouragement se trouveront indirectement aidées.

4° La rééducation doit prendre, autant que possible, une forme mutuelle ; c'est-àdire que, dans les usines, la conduite et l'instruction des mutilés en apprentissage doit être confiée à des mutilés et que les petits fabricants auxquels il convient de faire appel doivent être, autant que possible, des mutilés eux-mêmes.

Que l'indemnité de rééducation soit calculée de façon que l'invalide ne touche jamais une somme inférieure à'celle correspondant au taux de pension pour invalidité absolue : et, si l'invalide est soutien de famille et qu'il doive quitter son foyer pour subir la rééducation, que la famille continue de toucher pendant toute la rééducation les allocations qui étaient servies pendant la mobilisation.


III. — TRAVAIL

1° CHÔMAGE DES MUTILÉS.

Le Congrès adopte un vœu spécifiant que : L'État doit être tenu pour responsable du placement de tout réforme de guerre el que le mutilé qui fait la preuve qu'il a demandé du travail à un office et n'en a pas obtenu doit recevoir de l'État les subsides nécessaires à l'entretien de sa famille et à son propre entretien.

A propos des.soldats du service auxiliaire, blessés de guerre, le Congrès demande : Que si les nécessités du licenciement ne permettaient pas d'étendre jusqu'à eux, d'une façon ferme, la protection demandée, il serait, au moins, entendu que les auxiliaires blessés de guerre ne seraient remerciés qu'en dernier lieu et au cas où leur maintien serait absolument impossible.

Le Congrès adopte aussi les vœux suivants : 1° Que les hommes valides qui ont abandonné leur profession pour s'employer dans les usines de l'Itat soient renvoyés à leur profession première.

20 Que les retraités des diverses administrations, repris pendant les hostilités, soient rendus à leur retraite.

3° Que les fonctionnaires des administrations publiques, ayant atteint la limite d'âge, soient mis à la retraite d'office.

2° ACCIDENTS DU TRAVAIL.

Deux vœux relatifs à l'application de l'article 69 de la loi des pensions ont été émis : 1° Que la perte du second œil ou d'un second membre soit prise en considération, que l'accident soit survenu avant ou après la liquidation.

20 Que l'article 69 de la loi des pensions soit étendu à toutes les infirmités survenues par accident chez tous les infirmes de guerre, sauf recours, bien entendu, contre les tiers.

3° REPRISE ou TRAVAIL.

Le Congrès s'associe à une protestation contre la mauvaise volonté de certaines administrations de l'État à employer des mutilés et adopte des vœux demandant : Que toutes les administrations publiques et privées appliquent rigoureusement la loi du 22 novembre 1918 qui assure aux démobilisés la reprise de leur emploi d'avantguerre, et que cette loi, mal connue et mal appliquée par les tribunaux, fasse l'objet d'une circulaire interprétative du Ministre de la Justice aux procureurs généraux ; Que la loi du 22 novembre 1918 soit modifiée de façon que l'employeur soit tenu de remettre l'employé démobilisé non pas au salaire d'avant-guerre, mais au salaire normal du moment de la démobilisation ; Que le démobilisé soit, non pas remis dans sa situation d'avant-guerre, mais placé dans la situation qu'il aurait eue s'il n'avait pas été mobilisé ; Que les fonctionnaires, devenus au service définitivement inaptes à remplir leurs fonctions actuelles ou une fonction équivalente, reçoivent la pension civile à laquelle ils auraient droit à vingt-cinq ans de service si cette pension est supérieure à la pension militaire ; Qu'à égalité de titres, de services et d'ancienneté, le fonctionnaire mutilé ou ancien combattant ait sur ses collègues un droit de préférence ; étant entendu que les services


militaires pendant la mobilisation doivent compter pour l'avancement au même titre que les services civils; Qu'une enquête soit faite dans toutes les administrations et service publics à l'effet de rechercher les titres à l'avancement des fonctionnaires promus, les conditions dans lesquelles s'est opéré l'avancement pendant la guerre et d'examiner si les droits des mobilisés ont été effectivement sauvegardés.

4° CONGÉS DES FONCTIONNAIRES.

Deux vœux ont été émis à propos du fonctionnement du décret du 24 juillet 1917 qui autorise le Ministre à accorder des congés spéciaux aux fonctionnaires devenus invalides du fait de la guerre.

Le premier vœu demande à ce que, sur les instances du fonctionnaire, la commission chargée de statuer sur l'opportunité du congé réclame à l'autorité militaire, et avant de statuer, le dossier médical de l'intéressé ou, si l'autorité militaire n'a pas le dossier, que ces commissions en constituent un comportant toutes les pièces, documents, examens et analyses désirables.

Le deuxième demande que l'expression restrictive « devant l'ennemi » disparaisse du décret de 1917 et soit remplacée par l'expression « du fait ou à l'occasion du service » ; et que les congés soient attribués non pas seulement pendant deux ans, mais jusqu'à complet rétablissement, suivant la législation de 1852.

5° OBLIGATION D'EMPLOI.

Les vœux émis réclament le vote de la loi sur l'obligation d'emploi et protestent contre le retard apporté à celui-ci tout en faisant des réserves sur le texte voté par la Chambre des Députés.

Le Congrès demande : Que la liste des établissements assujettis soit dressée une fois pour toutes par un règlement d'administration publique, les modifications annuelles ne pouvant consister qu'à ajouter à la liste primitive de nouveaux établissements.

De plus, l'employeur devra être tenu d'employer des mutilés suivant deux pourcentages, la loi imposant : 1° L'obligation de réserver aux mutilés un chiffre total d'emplois correspondant à un certain pourcentage de son personnel global ; 2° L'obligation de répartir ces mutilés dans toute hiérarchie des emplois, suivant certains pourcentages fixés pour chaque emploi.

Les vœux suivants relatifs à l'application de la loi sont adoptés : Que l'application de la loi soit contrôlée, non pas en fin d'année, mais en cours d'année et à tout instant; que le patron défaillant sois soumis immédiatement à l'amende et qu'au cas où il persisterait à se dérober à la loi, interviennent des peines correctionnelles ; Que l'État exige des communes, ou départements, que les mutilés employés soient payés au taux habituel sans faire entrer en ligne de compte le taux de leur pension.

Que des sanctions pénales interviennent contre les employeurs qui tiendraient compte de la pension d'invalidité pour réduire le salaire ; Que la réduction de salaire soit appréciée par une commission mixte patronale et ouvrière suivant la proposition Durafour, avec cette différence que les ouvriers appelés à siéger dans cette commission devraient être des ouvriers mutilés; que ces ouvriers devraient être désignés par les Associations et non par les Comités départementaux ou locaux ; et que l'intéressé, s'il le jugeait opportun, pourrait se faire assister d'un médecin de son choix.

Que, par analogie avec la loi du 8 juillet 1890 sur les délégués à la sécurité des ouvriers mineurs, des mutilés représentant les Associations reçoivent, dans la loi sur l'obligation d'emploi, les fonctions que cette loi prétendait confier aux inspecteurs du travail.


IV. — EMPLOIS RÉSERVÉS ET PRIORITÉ D'EMPLOI 1° EMPLOIS RÉSERVÉS.

Les vœux adoptés demandent : Que les réformés temporaires n° 1 soient admis au bénéfice des emplois réservés ; Que la liste des emplois réservés soit exactement dressée par le Ministre du Travail avec toutes indications concernant les conditions d'emploi et que cette liste soit adressée à toutes les Associations de mutilés ; Qu'aux retraités et réformés prêtres des diverses religions soient réservés des emplois - en rapport avec leur caractère confessionnel ; Que l'on réserve de préférence aux Alsaciens-Lorrains ayant combattu pour la France les différentes places d'administration dans la nouvelle organisation de l'Alsace-Lorraine.

Qu'une loi intervienne réservant des emplois aux veuves de guerre et qu'aucune titularisation du personnel féminin ne puisse être prononcée avant qu'il ait été statué sur l'application aux veuves des emplois réservés ; Que les mutilés ayant les aptitudes nécessaires puissent se voir réserver des fonctions élevées ou tout au moins des fonctions d'avenir ; Que le droit de préférence pour tous les emplois réservés joue d'abord en faveur des militaires devenus infirmes devant l'ennemi et, en second lieu, pour les militaires devenus infirmes du fait, ou à l'occasion du service, les engagés et rengagés venant ensuite ; Qu'afin de tenir compte de l'interruption des études, le délai de postulation et de préférence pour tous les emplois nécessitant un examen d'aptitude technique soit prolongé d'un temps égal à la durée de la guerre ; Que la production de diplômes universitaires ne soit pas nécessaire, lorsque le candidat satisfait à l'examen d'aptitude ; Que les commissions spéciales, actuellement constituées au moins en majorité par les militaires, comprennent des représentants des administrations intéressées et, parmi ces représentants, un mutilé.

Que les conditions d'aptitude physique soient rendues concordantes d'un ministère à l'autre pour les emplois de même nature ; Que les examens d'aptitude soient pratiqués par des médecins civils et non militaires ; Que ces médecins n'aient pas à s'en tenir à l'application automatique d'un catalogue impératif, mais qu'ils aient la liberté de conclure suivant leur conscience et leur bon sens.

Que le mutilé puisse se faire assister d'un médecin de son choix ; Que le résultat de l'examen d'aptitude physique soit notifié au postulant avant toute transmission au ministre et que le mutilé ait le droit d'exiger une contre-expertise à trois experts désignés, l'un par le mutilé ; le deuxième, par l'administration intéressée ; le troisième, par les deux premiers ; Que le mutilé occupant effectivement, à titre temporaire ou auxiliaire, l'emploi qu'il sollicite soit, par ce fait même, réputé apte à cet emploi et dispensé d'examen médical ; Que l'instruction et le classement des demandes d'emploi soient accélérés, notamment lorsqu'il n'y a pas lieu à examen technique minutieux ; Qu'en cas de titularisation d'un auxiliaire, la titularisation porte effet pour l'avancement et la retraite à dater de l'entrée effective en service et non à dater du décret de titularisation ; Que les mutilés nommés à des emplois réservés soient affectés à des postes aussi proches que possible de leur domicile ; Qu'il soit institué des commissions, comprenant notamment des fonctionnaires mutilés afin de veiller à ce que la répartition des mutilés, dans les divers services soit judicieusement effectuée ; Que le gouvernement prenne toutes mesures utiles pour augmenter en Algérie le nombre des emplois réservés en vertu de la loi du 17 avril 1916.


2° PRIORITÉ D'EMPLOI.

Le Congrès proteste contre la mauvaise volonté de certaines administrations de l'État à employer des mutilés et adopte le vœu suivant : Que pour tous les emplois non réservés des administrations publiques ou des entreprises concessionnaires ou subventionnées, les retraités ou réformés définitifs ou temporaires de la guerre actuelle soient, à égalité de capacité, nommés par priorité ; et en cas de concurrence entre retraités et réformés, à égalité de compétence, que la priorité joue au bénéfice de ceux dont les infirmités ont été contractées devant l'ennemi.

V. — CRÉDIT AUX MUTILÉS 10 CRÉDIT AGRICOLE.

Le Congrès considère la loi du 19 mars 1918 comme une loi défectueuse qui crée pour les mutilés une situation inférieure à la situation de droit commun qu'avait instituée la loi de 1910. Les mutilés seront donc bien inspirés en utilisant la loi de 1910 plutôt que celle de 1918: ils ne pourront emprunter que pour quinze ans, c'est entendu; ils ne pourront acquérir qu'une propriété de 8.000 francs, d'accord ; ils paieront un intérêt de 2 0/0, c'est vrai. Mais ils assureront, du moins, leur avenir en conservant l'insaisissabilité de leur pension, d'une part, et de leur bien de famille d'autre part.

Le Congrès émet en outre le vœu : Qu'en raison de la diffitulté que les mutilés éprouvent à se procurer le matériel qui leur est nécessaire, les prêts agricoles puissent être consentis en partie en machines, outils de travail, etc., à la demande des intéressés.

2° CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL.

Le Congrès demande : 1° Que des prêts industriels et commerciaux soient consentis aux infirmes de guerre aussi bien que des prêts agricoles.

2° Que pour l'approvisionnement des coopératives de production satisfaisant à la loi du 5 avril 1919 des bons de priorité soient accordés.

3° CAPITALISATION DE LA PENSION.

Le Congrès demande ; 1° La suppressiou de la saisissabilité instituée par la loi du 9 avril 1918.

20 Qu'il ne soit pas tenu compte du projet de saisissabilité inclus dans la proposition Queuille et Eynac déposée à la Chambre en vue d'un crédit industriel et commercial aux mutilés.

3° Que les acquisitions faites par capitalisation de pension soient déclarées insaisissables, comme s'il s'agissait de la pension elle-même.

4° CAISSES DE CRÉDIT COOPÉRATIF.

Le Congrès demande : Que les Comités départementaux entrent en pourparlers immédiats avec les associations de mutilés pour la réalisation des caisses de crédit coopératif.

5° CONCESSIONS COLONIALES.

Le Congrès émet le vœu : Que le Parlement mette à l'étude l'attribution de concessions coloniales et l'organisation d'un crédit d'exploitation en faveur des infirmes de la guerre et des anciens combattants et qu'un droit de priorité soit accordé à ceux qui habitent déjà les colonies.

VI. - PLACEMENT Le Congrès adopte des conclusions : 1° Demandant que les mutilés aient au conseil d'administration de l'Office de placement un certain nombre de sièges obligatoires réservés.


20 Tendant à la constitution, au sein des otlices de placement, d'une section spécialement chargée de la main-d'œuvre mutilée.

3° Demandant que le secrétaire, non pas de l'office de placement, mais de la section des mutilés de cet office, soit un mutilé.

QUATRIÈME COMMISSION Appareillage et Prothèse Rapporteurs : MM. LÉGER et MERCIER.

- 1ER VOEU Emet les vœux suivants, qui devront être présentés dans un délai minimum d'un mois, au service de santé, par le ou les rapporteurs, et dans les conditions fixées par les statuts de l'union fédérale.

2" VOEU L'article 64 de la loi des pensions devra être étendu aux questions d'appareillage et d'orthopédie, en ce qui concerne le choix de l'orthopédie et de l'appareil.

3e VœuRemise en vigueur de la circulaire du service de santé, en date du 6 juin 1916, qui autorisait le mutilé, qui a dû pourvoir lui-même aux frais de son appareillage, à se faire rembourser son appareil par l'État, et au nouveau tarif du cahier des charges (décision comportant un effet rétroactif).

4e. VOEU Que les mutilés et professionnels soient admis à la commission d'études des appareils de prothèse et d'orthopédie, en nombre égal et au même titre que les médecins, et que cette commission soit appelée à statuer dans le plus bref délai.

5e Vœu Qu'un concours primé soit institué et ouvert à tout fabricant d'appareils ou inventeur pour la recherche des appareils les plus perfectionnés.

6e Vœu Que l'appareil dit provisoire soit remplacé par un deuxième appareil définitif.

7e VOEU Que les mutilés atteints de paralysie radiale, ou de toute autre infirmité nécessitant le port de gants, reçoivent ces gants gratuitement de l'État et que cette mesure soit étendue à tous les accessoires nécessités par dés infirmités spéciales ou par des appareils orthopédiques ou prothétiques.

8e Vœu Qu'il soit donné aux porteurs de souliers orthopédiques la paire de souliers, et non la seule chaussure orthopédique et que les formes deviennent la propriété du mutilé, et lui soient remises.

9e Vœu Qu'il ne soit fixé aucune limite et en aucun cas, pour la durée des appareils orthopédiques et prothétiques, mais qu'il soit exigé, par contre, une garantie de durée du fabricant.

10e VOEU Que tous les amputés doubles de cuisses, tous les impotents de membres inférieurs, et dans certains cas d'espèces jugés par les commissions d'appareillage (double amputation des jambes, désarticulation de la hanche) soient munis d'une voiturette du modèle le plus pratique.

11e VOEU Le libre choix de l'orthopédiste étant acquis, demande que l'appareil soit payé par le mutilé, au moyen d'un bon spécial, remis à l'intéressé par le centre ou le sous-centre d'appareillage et équivalent à la valeur de l'appareil.


12e VOEU Que les appareils de prothèse de la bouche soient donnés en double.

13", VoEu Qu'aucune circulaire ministérielle, aucune décision quelconque intéressant l'appareillage des mutilés ne puisse être prise qu'après consultation et entente avec les fédérations des mutilés.

Que les associations des mutilés reçoivent, au même titre que les centres d'appareillage, les circulaires et instructions relatives à la prothèse et à l'orthopédie.

He VOEU Que tout mutilé atteint d'une infirmité quelconque et nécessitant le port d'un appareil, puisse, à l'aide du certificat d'un docteur spécialiste de son choix, avoir le droit de choisir l'appareil spécial qui lui conviendra ; le refus du chef de centre devra être motivé sur le carnet d'appareillage du mutilé.

15e VOEU Que l'indemnité forfaitaire de déplacement soit relevée de façon telle que le mutilé n'éprouve aucune perte du fait de son déplacement.

16e VOEU Que les appareils choisis par les mutilés soient réceptionnés par une commission comprenant des mutilés non fabricants d'appareils, et que l'intéressé ait un délai d'un mois, pour acceptation définitive de son appareil.

17° VOEU Qu'il n entre pas dans la fabrication des yeux artificiels de matières susceptibles d'irriter la muqueuse. ,

18e VOEU Que le mutilé choisisse librement le centre ou le sous-centre d'appareillage de sa région.

19e VOEU Qu'en plus des centres et sous-centres existants ou en voie de formation, il soit créé, dans le plus bref délai, des sous-centres £ Brest, Rouen, Montluçon, Gap, Pau, Ajaccio et dans toute autre ville, et chaque fois que des nécessités l'exigeront.

20e Vœu Que le service de santé fasse appel aux associations pour la désignation des mutilés compétents qui pourront être chargés de la direction et de l'administration des souscentres d'appareillage, qui doivent avoir le même rôle et les mêmes attributions que le centre même.

21e VOEU Que les centres et sous-centres soient installés de préférence, et chaque fois que cela sera possible, dans le centre de la ville, ou à proximité de la gare.

22° Vœu Que le centre de Saint-Maurice soit transféré à Paris dans le plus bref délai.

23e Vœu Considérant que les mutilés ont le plus grand intérêt à échanger des idées, au point de vue de l'appareillage : demande la création d'un comité d'études international des fédérations de mutilés.

24e VOEU Qu'un comité d'études fonctionne effectivement au sein de la fédération et qu'il ne cesse jamais d'exercer son action. Ce comité d'études sera composé uniquement de compétences choisies même en dehors de l'union fédérale.

25e VOEU

Ce comité technique pourra recevoir des directives de l'union fédérale mais ses


membres, au point de vue technique, auront toujours voix prépondérante aux délibérations. Il conserve toujours son autonomie.

26e VOEU Émet le vœu formel que le comité technique s'occupe très activement de l'organisation civile des centres d'appareillage.

Les mutilés à la Foire de Paris (5 mai 1919)

Office national. — L'Office national des Mutilés et Réformés de la Guerre (Ministère du Travail et de la Prévoyance sociale en France) avait invité toutes les écoles de rééducation professionnelle pour mutilés à exposer dans son Stand.

Très aimablement, l'Office national avait offert une place d'honneur au Comité Permanent Interallié, lui demandant de bien vouloir se faire connaître au public.

Un tableau énonçant sa constitution, ses buts et son rôle interalliés, un choix de pièces de prothèse prises parmi les plus intéressantes de son Musée, des photographies, ont été placés dans la salle d'honneur de la baraque Adrian, où l'Office national avait installé son exposition.

Celle-ci comprenait les envois de nombreuses écoles de rééducation professionnelle, programmes, graphiques relatifs à leur fonctionnement, échantillons des travaux de leurs élèves. Cette exposition permet de voir quel a été l'effort fourni par les provinces et par Paris pour la rééducation des mutilés dans tous les corps de métiers, depuis l'habillement jusqu'aux travaux d'art, en passant par la menuiserie, la chaudronnerie, la mécanique, le dessin industriel, la cordonnerie, la bourrellerie, etc., etc.

La prothèse à la Foire de Paris. — Quant à la prothèse elle-même, il semble bien qu'elle ait été négligée à la Foire de Paris, nous n'y avons vu que peu de chose, et surtout peu de nouveautés. La Société anonyme française des membres artificiels expose sa jambe « Frees Clarke » ; cette firme se met à munir actuellement ses jambes d'un verrou facultatif. Deuxième nouveauté : elle fabrique pour le Service de Santé français des jambes artificielles du type Hanger.

La maison Ferrandoux de Tours présente des séries bien connues de mains de Boureau, un bras de travail du docteur Cousin, sa pince universelle et un poignet à ressort. Pour les amputés de jambes, elle fabrique des jambes du type dit américain avec un verrou automatique d'une grande solidité et vraisemblablement efficace ; on peut y voir également la main Maublanc, main articulée, en aluminium, rattachée à un gilet moteur qui supprime toutes courroies, épaulières ou bretelles.

La maison Meyrignac présente une nouvelle pince légère à serrage automatique, articulée sur l'avant-bras, un porte-outil agricole à double chappe, un bracelet porte-outil que l'on fixe sur le manche, un sabot d'agriculteur adaptable instantanément à tous les pilons. Elle expose également toute une série d'appareils provi-


soires pour amputés du membre inférieur, adoptés par le Centre d'appareillage du Gouvernement militaire de Paris, et une jambe du type américain dont le cuissard peut facilement suivre les modifications du moignon.

Nous avons remarqué dans le stand de la maison Mayer-Guillot un pilon-fourche très léger et résistant pour travaux de force; une jambe à quillon se transformant aisément en jambe de parade, en bois évidé; un bras de parade en bois évidé avec main en feutre donnant au toucher l'impression de la main humaine.

Nous avons retrouvé dans plusieurs stands la main Vallée dont nous avons déjà entretenu nos lecteurs.

Les mutilés aux champs. — Le Ministère de l'Agriculture et le Sous-Secrétariat d'État du Service de Santé, dont l'étroite collaboration a depuis longtemps dirigé ses efforts vers le retour à la terre des agriculteurs mutilés, ont tenté de faire connaître, tant aux mutilés qu'au public les outils de travail et machines agricoles qui peuvent être mis aujourd'hui à la disposition des cultivateurs impotents.

Sous la direction éclairée de M. de Saint-Maurice, dont on connaît le dévouement constant à nos mutilés agricoles, il a été réuni toute une série d'outils et de machines. Pour mettre cette exposition à la portée du grand public, un caractère original lui a été donné: grâce à l'emploi de mannequins ingénieusement équipés, ce n'est pas une exposition froide et morte; il semble voir les mutilés effectivement travailler, et chacun peut se rendre compte qu'il peut reprendre sa place d'avantguerre.

L'amputé du bras droit (1) conduit sa petite charrue grâce au bras provisoire Deleury, muni du laboureur Jullien; les semailles sont faites par deux mutilés, l'un de l'avant-bras (2), l'autre désarticulé de l'épaule gauche (3), grâce au semoir à archet pour l'un, au semoir à turbine pour l'autre. Le faucheur (4), amputé de l'avant-bras droit, rebat sa faux aussi bien qu'un homme valide à l'aide du marteau à ressort amortisseur Jullien. Un autre faucheur (5), avec une faux droite ou gauche selon sa lésion, peut travailler grâce au porte-outil de Devanne. Un peu plus loin, nous voyons un faneur (6) retournant ses foins et les mettant en meule grâce au crochet Deleury. Les durs travaux de bêchage ou de terrassement sont rendus possibles par l'emploi de la main de terrassier de Boureau (7), du cultivateur Jullien (9) et du porte-outil de Devanne (10), et la terre, aussi bien que le fumier ou toute autre chose, peut être emportée dans la brouette, par l'amputé de bras, dont le membre artificiel est muni d'un crochet Deleury (8).

Le métier de jardinier est rendu facile par l'emploi de certains outils: ici nous voyons un désarticulé de l'épaule qui, grâce à la ceinture de travail du docteur Cousin (11), manie le râteau tout en regardant son camarade amputé du bras droit repiquer des salades avec le plantoir de Devanne (12). Un amputé de l'avant-bras droit le regarde et en oublie de tailler ses arbres, bien qu'il le puisse faire facilement avec la pince d'arboriculteur de Devanne, commandée par l'extension de son moignon (13).

S'il est certain que les amputés des membres supérieurs sont très gênés dans l'exécution des travaux, parfois minutieux, de la terre, il n'en est pas moins vrai


que l'amputé du membre inférieur éprouvera certaines difficultés à se déplacer dans les terres meubles ; ces difficultés disparaissent par l'adaptation de certains dispositifs: un amputé de cuisse appareillé avec le pilon Ripert à verrou facultatif (14) peut bêcher son jardin grâce au sabot de Gouget (15), comme il peut râtisser grâce au quillon à base large de Mayet-Guillot (16). La maison Vermorel met à la disposition des amputés du membre supérieur une souffreuse à pression entretenue (17), un pulvérisateur à pression entretenue (18 et 19), dont la pompe est actionnée par le membre artificiel au moyen du cultivateur Jullien. Un pulvérisateur à pression préalable (20) est destiné aux amputés de bras.

Le métier si minutieux d'apiculteur s'accommode fort bien d'une amputation de bras, et c'est ainsi que nous voyons un amputé du bras droit soigner sa ruche grâce à la pince Lumière (21).

Mais ces mannequins étaient en nombre insuffisant pour permettre de présenter au public même les principaux outils de travail destinés aux mutilés agricoles, et un grand nombre étaient exposés sur les tables : citons les cultivateur, laboureur, agriculteur, pince à repiquer, de Jullien ; la pinœ d'arboriculteur, le sabot-porteoutils, de Devanne; les crochets, de Deleury, de Mayet-Guillot, d'Aubert ; les porte-outils agricoles, de Compain, de Gourdon et Gendron ; un pilon extensible pour le travail en plan incliné; le sabot de Gouget, la pince Lumière, la main de vigneron de Boureau, le bras de travail de Gourdon, le bras de travail de Trèves pour désarticulé de l'épaule.

De l'autre côté de la baraque étaient rangées les machines agricoles proprement dites qui s'adressaient, elles, surtout aux mutilés du membre inférieur.La remorque du docteur Martin s'attelle à toutes les charrues, et permet à l'amputé du membre inférieur de labourer sans avoir à marcher ; d'une construction simple, elle est facilement réalisable et semble devoir rendre de sérieux services à nos mutilés.

Certains constructeurs de machines agricoles, s'inspirant des desiderata que leur ont exprimés à différentes reprises les services du Ministère de l'Agriculture, ont commencé à créer des types nouveaux à l'usage plus particulier des amputés. La maison Butterosi expose trois charrues-tilbury, une à deux socs pour labourer à plat, deux à un et deux socs pour les labours en planche; un pulvérisateurtilbury à disques et une herse à siège.

La maison Vallut a envoyé un cultivateur à semoir, à siège, également. La maison Vermorel, un pulvérisateur à pression entretenue, à siège.

Le semoir « Express » Sesverin est un semoir à disques, muni d'un siège disposé de telle façon qu'en déplaçant trois boulons on puisse mettre le levier de commande soit à la droite, soit à la gauche du conducteur; il est muni d'un marche-pied spécial concave, pour empêcher le pilon de glisser quand l'amputé monte sur l'ap- pareil ; les brancards sont munis de cale-pilons. C'est une machine bien étudiée et réellement adaptée aux besoins des mutilés de bras ou de jambe.

Le semoir de Billy à siège est également issu d'une bonne conception des besoins des mutilés ; quelque petites améliorations de détail, en particulier les repose-pilons,


le rendraient parfait. La maison Gougis a envoyé un distributeur d'engrais à siège ainsi que deux semoirs en lignes. Le premier semoir ordinaire comporte à l'arrière un siège à proximité des leviers; le second est un semoir de grande largeur qui comporte à l'arrière une passerelle qui permet au conducteur de se déplacer facilement et sans danger, pour aller manœuvrer son levier de réglage.

Enfin, nous voyons une faucheuse de la maison McCormick, où tous les leviers sont placés à la droite du conducteur; ils peuvent être également placés tous à la gauche, ce qui facilite considérablement le travail pour un amputé de bras.

Notons encore la machine à rebattre les faux de Sandar Limonest, le métier à vannerie pour amputé du membre supérieur et commandé par le pied, également de Sandar Limonest ; un peloir à osier envoyé par la Chambre syndicale des osiéristes.

Cette exposition se complète très heureusement par l'exhibition des très beaux films « Les Mutilés aux Champs », pris par le Service de la Main-d'OEuvre agricole, dans les divers centres de rééducation agricole.

A voir cette très intéressante et très utile exposition on est amené à regretter qu'elle n'ait qu'une si courte durée; et, volontiers, on souhaiterait la voir devenir permanente. Serait-il donc impossible de la transférer dans quelque local ouvert au public, où elle continuerait son œuvre de propagande, pour le plus grand bien des mutilés français, et de la France ?

C. L.

Société de Chirurgie de Paris

Séance annuelle du 22 janvier 1919 Compte rendu des travaux présentés par le docteur MORESTIN, Secrétaire annuel.

Pendant toute cette année, la Société de Chirurgie n'a eu de pensée que pour la guerre et les blessés de la guerre. Quelques questions semblent avoir plus spécialement retenu l'attention de ses membres et avoir subi une sensible évolution sous l'influence de leurs travaux.

Sous l'impulsion des professeurs Quénu et Delbet, la conception du shock a évolué, entraînant une orientation nouvelle de la thérapeutique dont les blessés ont sûrement bénéficié. Aux shoqués par grosse hémorragie, par collapsus nerveux, traitement médical avant l'intervention (réchauffement, sérum, huile camphrée, etc.).

Mais aux shoqués par une intoxication partie de la plaie, et due à la résorption des produits mis en liberté par la dilacération des muscles et leur autolyse, intervention immédiate supprimant la cause réelle du shock.

Il était désolant de voir succomber des blessés à la grangrène gazeuse, alors que la lésion initiale était en elle-même curable et parfois peu grave. Le sérum antigangréneux, mono ou polyvalent, dû aux recherches de Leclainche et Vallée, de Weinberg et Seguin, de Sacquépée, neutralise les toxines engendrées par les


anaérobies pathogènes, perfringens, œdématiens, vibrion septique, bellonensis. Il peut être préventif, injecté avant l'infection déclarée ; il est un adjuvant précieux dans la gangrène déclarée ; et la sérothérapie antigangréneuse a permis d'améliorer considérablement le pronostic des blessures souillées, exposées de ce fait à la gangrène gazeuse, et de la gangrène gazeuse elle-même.

Sur le sujet tant débattu déjà de l'anesthésie une nouvelle discussion s'est élevée. M. Coryllos, en Roumanie, s'est consacré à la rachinococaïnisation, même haute (4e cervicale) et en est enchanté.

J.-L. Faure, lui, préfère l'anesthésie générale par le mélange de Schleich.

Beaucoup de chirurgiens ont adopté la rachi-anesthésie basse pour la chirurgie du bassin et des membres inférieurs. D'autres donnent leur préférence au chloroforme en mélange titré.

Quant à l'anesthésie locale, sous toutes ses formes, elle a de nombreux défenseurs, en la personne notamment de MM. Pauchet, de Martel et Lapeyre.

La conclusion de cette discussion semble être qu'actuellement le chirurgien dispose d'une dizaine de modes pratiques d'anesthésie ; tous sont bons, s'ils sont employés selon l'indication.

La suture primitive après exérèse des parties contuses et contaminées a cause gagnée; son domaine s'est même étendu, et nous voyons pratiquer, après l'épluchage de la. plaie, des sutures tardives (Sencert et Cholers), des sutures secondaires précoces (Barthélémy, Morlot et Jean veau) , des sutures retardées (Alglave).

Les plaies du crâne ont été l'objet de travaux intéressants. Willems et Albert défendent avec insistance la stérilisation immédiate, à la curette, de la plaie cérébrale, et la fermeture hermétique de la dure-mère, autant que son état le permet, afin de replacer le cerveau dans ses conditions physiologiques normales.

L'extraction des projectiles intra-cérébraux peut seule permettre la stérilisation absolue de la plaie ; elle doit être faite sous le contrôle de la radioscopie (Rouvillois, Mauclaire), parfois avec le concours de l'électro-aimant.

Un auto-vaccin dans le traitement des plaies cérébrales a fait l'objet d'une communication intéressante de MM. Mocquot et Moulinguet.

Le rapporteur est plus sobre en ce qui concerne les mutilations de la face. Il signale une communication importante d'Ombredanne sur les autoplasties. [Nous devons, à la mémoire du docteur Morestin, rappeler ici tout ce qu'il a fait, et avec quelle maîtrise, pour améliorer les conditions de ces malheureux mutilés de la face. (N. d. I. R.) ].

Il semble, à lire les communications de Pierre Duval, de Lapointe, de Marion, de J.-L. Faure, de Le Fort, que l'extraction des projectiles intra-thoraciques, quel qu'en soit le siège, soit entrée dans le domaine courant de la chirurgie. Petit de la Villéon a adopté un curieux et très simple procédé d'extraction des projectiles, même hilaires, par une simple boutonnière cutanée.

L'emphysème médiastinal aigu est une complication, heureusement rare, des plaies de poitrine, mais d'une soudaine et terrible gravité. M. Gatellier fournit les


éléments d'un diagnostic précoce de cet accident et en indique la thérapeutique chirurgicale, d'une rare hardiesse : ouverture des loges périviscérales par une ouverture susternale ; ne s'arrêter qu'au péricarde et à la colonne vertébrale.

La chirurgie du cœur a bénéficié de nombreuses observations. Le rapporteur rappelle en particulier celle de Pierre Duval relative à l'extraction au niveau de la terminaison de la veine cave inférieure d'une balle qui avait pénétré dans le ventricule droit.

La chirurgie de l'abdomen est devenue de plus en plus interventionniste, une laparatomie primitive semblant préférable à l'expectative.

La chirurgie des artères semble avoir mis en valeur le procédé d'intubation artérielle au moyen d'un tube d'argent paraffiné pour le rétablissement de la circulation des gros vaisseaux. A signaler les travaux intéressants de Le Senne, Marquis, Lefebvre, Clermont, Chutro, sur les ligatures des vaisseaux carotidiens.

La chirurgie des traumatisme articulaires a réalisé d'immenses progrès au cours de cette guerre. Aujourd'hui, le traitement conservateur opératoire immédiat est la règle, surtout pour le genou. La Société de Chirurgie s'est même prononcée catégoriquement, en affirmant que l'articulation, en dehors des cas de nécessité absolue, ne pouvait être laissée ouverte et que le genou devait être refermé hermé- tiquement après le nettoyage.

M. Willems a exposé une méthode pleine de promesses pour le traitement des arthrites suppurées ; la mobilisation extrêmement précoce de l'article immédiatement, même après l'intervention. Les chirurgiens qui ont essayé cette méthode (Dehaye, Debrez, Guibé, Breton) en sont complètement partisans.

Les travaux de Leriche sur les résections, d'Heitz Boyer sur les greffes osseuses ont permis d'étudier de près les processus ostéogéniques. Il semble que le périoste soit déchu de ses propriétés ostéogéniques au bénéfice de l'os lui-même : l'os fait l'os.

La chirurgie des nerfs a fait l'objet de travaux importants. Au début, le chirurgien recherchait par l'affrontement des deux segments du nerf sectionné une réunion immédiate. Voici que les expériences de MM. Nageotte et Sencert semblent montrer qu'il faille laisser entre les tranches de section du nerf la place nécessaire pour le développement du névrome du bout supérieur, du gliome de l'inférieur ; maintenir cette place disponible à la disposition des éléments nerveux qui croissent lentement, et assurer l'orientation correcte des produits de régénération du nerf.

De là, la conclusion de MM. Nageotte et Sencert, qui préconisent la suture indirecte, avec interposition d'un greffon mort. Leurs expériences sont peut-être trop récentes, mais elles semblent ouvrir un champ nouveau à la chirurgie nerveuse.

Ce rapport ne donne qu'une idée imparfaite de l'œuvre que la Société de Chirurgie de Paris a accomplie pendant l'année 1918. Combien de communications intéressantes, de rapports soigneusement documentés, de présentations de malades ou d'appareils utiles et ingénieux qui occupent les 2.000 pages de son bulletin, ne peuvent trouver place, même pour mémoire, dans ce résumé des principaux travaux de la docte Société.

C. L.

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Lois et Projets de Lois

Loi du 23 février 1919 relevant l'indemnité temporaire accordée aux petits retraités

de l'État (France).

Nous avons donné dans le n° 6 de la Revue (p. 622) le texte de la loi du 30 avril 1918 rele- vant le taux des allocations temporaires accordées aux petits retraités de l'État. Une nouvelle loi, promulguée le 23 février 1919, en a modifié

les dispositions. Elle est ainsi conçue : ARTICLE PREMIER. — L'allocation temporaire instituée en faveur des petits pensionnés de l'État et assimilés par la loi du 18 octobre 1917, modifiée par celle du 30 avril 1918, est portée rétroactivement à trente francs (30 fr.) depuis le 1er juillet 1918 jusqu'au 1er janvier 1919. A partir de cette dernière date, cette allocation est portée à soixante francs (60 fr.) par mois.

Les conditions d'âge fixées pour l'obtention de cette allocation par le paragraphe 2 de ladite loi sont abaissées pour les femmes à cinquante-cinq ans.

Pourront prétendre à cette allocation, dans les conditions visées par ladite loi, mais sans inter- diction de cumul avec les allocations militaires, les intéressés dont la pension n'excède pas quatre mille francs (4.000 fr.).

Les pensionnés dont la retraite est comprise entre 4.000 et 4.720 francs recevront une allocation réduite calculée de manière à porter leur pension globale à quatre mille sept cent vingt francs (4.720 fr.).

ART. 2. — A partir du 1er janvier 1919, tous les militaires et marins, sous-officiers et soldats, pensionnés ou gratifiés pour infirmités attribuables à la guerre actuelle toucheront, sans distinction d'âge ni de charges de famille, les allocations ci-dessous fixées jusqu'au jour où seront mis en application les tarifs édictés par la prochaine loi des pensions : Pension ou gratification de 40 0/0, 20 francs par mois.

Pension ou gratification de 50 0/0, 30 francs par mois.

Pension ou gratification de 60 0/0, 40 francs par mois.

Pension ou gratification de 70 0/0, 50 francs par mois.

Pension ou gratification de 80 0/0, 60 francs par mois.

Les sommes que ces militaires et marins recevront en vertu de la présente loi s'imputeront jusqu'à due concurrence sur le rappel des arrérages auxquels ils pourront prétendre par suite de l'augmentation de pension qui leur sera attribuée.

Le relèvement de l'allocation temporaire, auquel pourront prétendre, en conformité de l'article premier, les femmes pensionnées de la guerre actuelle sera imputé à due concurrence sur l'augmentation de pension pouvant résulter de la loi à intervenir.

Le Journal Officiel du 25 février 1919 contient sur l'application de cette loi une instruction interministérielle très détaillée dont nous ne publions que le sommaire : OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES. — Modifications apportées au régime des allocations par la loi du 23 février 1919. — Objet de l'instruction.

ARTICLE PREMIER. — Différentes catégories de bénéficiaires de l'allocation temporaire.

ART. 2. — Catégorie I. — Régime normal de la loi.

ART. 3. — Catégorie II. — Régime spécial des sous-officiers et soldats réformés de la guerre actuelle.

ART. 4. — Catégorie III. — Régime spécial des femmes pensionnées de la guerre actuelle.

ART. 5. — Intéressés ne rentrant pas dans le cadre d'application de la loi.

ART. 6. — Cumuls.

ART. 7. — Pensions militaires proportionnelles.

ART. 8. — Pensions de réversion.

ART. 9. — Gratifications de réforme.

ART. 10. — Pensions de la caisse des invalides de la marine et de la caisse nationale de prévoyance au profit des marins français.

ART. 11. — Introduction des demandes.

ART. 12. — Transmission, instruction et jugement des demandes.

ART. 13. — Recours contre les décisions des commissions.

ART. 14. — Fixation du montant de l'allocation temporaire.


ART. 15. — Point de départ de l'allocation temporaire.

ART. 16. — Cas particulier des pensionnés qui ne sont pas en possession de leur titre.

ART. 17. — Payement des allocations temporaires. — Mesures à prendre pour le payement des rappels.

ART. 18. — Restes à payer. — Payements après décès.

ART. 19. — Imputation de la dépense. — Mandats de régularisation délivrés par le préfet. —

Délégation de crédits.

ART. 20. — Changement de résidence.

ART. 21. — Radiation ou réduction de l'allocation. — Suspension de payement.

ART. 22. — Reversement des allocations indûment payées.

ART. 23. — Application de la loi du 23 février 1919 dans les colonies, les pays de protectorat et

à l'étranger.

Décret du 18 mars 1919 modifiant la composition de l'Office national des Mutilés et des Réformés de la guerre

(France).

Le numéro 5 de la présente Revue contient (p. 534 et suiv.) le texte refondu des décrets des 26 février 1918 et 24 septembre de la même année, réglant l'organisation et le fonctionne, ment de l'Office national des Réformés et Mutilés.

La composition de ce dernier vient d'être modi-

liée par un décret en date du 18 mars dernier (Journal Officiel du 5 avril 1919), que nous reproduisons ci-dessous.

LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE, Sur les rapports des Ministres du Travail et de la Prévoyance sociale, de la Guerre, de la Marine, de l'Intérieur, du Commerce et de l'Industrie, de l'Agriculture et du Ravitaillement, des Finances; Vu la loi du 2 janvier 1918 concernant la rééducation professionnelle et l'Office national des Mutilés et Réformés de la Guerre ; Vu le décret du 26 février 1918, modifié par le décret du 24 septembre 1918, déterminant les mesures d'exécution de la loi du 2 janvier 1918, DÉCRÈTE : ARTICLE PREMIER. — Les articles lor, 2, 5, 7, 8, 38 et 39 desdits décrets sont modifiés ainsi qu'il suit : Article premier. — L'Office national des Mutilés et Réformés de la Guerre, présidé par le Ministre du Travail et de la Prévoyance sociale, est composé de soixante-dix membres de nationalité française, nommés pour trois ans, par décret rendu sur la proposition du Ministre du Travail, savoir : Cinq sénateurs; Dix députés ; Trois représentants du Ministre du Travail ; Trois représentants du Ministre de la Guerre, dont un représentant du Service |de Santé militaire ; Deux représentants du Ministre de l'Intérieur ; Deux représentants du Ministre du Commerce ; Deux représentants du Ministre de l'Agriculture ; Deux représentants du Ministre de la Marine, dont un représentant du Service de Santé; Un représentant du Ministre des Finances ; Un représentant du Ministre de l'Instruction publique ; Un représentant du Ministre des Colonies; Deux membres, l'un patron, l'autre ouvrier, du Conseil supérieur du Travail ; Un membre du Conseil supérieur des Sociétés de Secours mutuels; Un membre du Conseil supérieur de l'Enseignement technique; Un membre du Conseil supérieur de l'Agriculture ; Un membre de la Chambre de Commerce de Paris; Un membre du Conseil supérieur de l'Assistance publique ; Un chirurgien et un médecin des hôpitaux; Trois directeurs d'école de rééducation professionnelle ; Seize mutilés ou réformés de la guerre, choisis de préférence dans les associations de mutilés ; Six personnes choisies dans les associations, institutions ou œuvres privées qui s'occupent des mutilés ou réformés de la guerre. Quatre personnes connues par leur compétence spéciale, leurs travaux ou leurs services.


Cessent de plein droit de faire partie de l'Office les membres qui n'exercent plus les fonctions qui les avaient fait désigner.

Peuvent être remplacés par le Ministre du Travail, les membres qui ont manqué à deux sessions consécutives de l'Assemblée plénière ou à trois réunions consécutives de la section dont ils font partie, à moins que leur excuse n'ait été admise comme valable par ladite Assemblée plénière ou section.

Par mesure transitoire, les membres actuels de l'Offiee pourront être maintenus en fonctions, en excédent, s'il y a lieu, des membres spécifiés ci-dessus, jusqu'à ce que cessent les fonctions qui les avaient fait désigner.

Les frais de déplacement des membres de l'Oflice national qui habitent en dehors de la région parisienne seront fixés par arrêté du Ministre du Travail, après avis dn Ministre des Finances.

Le Président de l'Office national est assisté de trois Vice-Présidents désignés par le Ministre du Travail, parmi les membres de l'Office national.

Art. 2. — L'Office national comprend trois organes dont la composition est fixée par un arrêté du Ministre du Travail ; un Comité d'Administration, une Commission de Rééducation et un Conseil de Perfectionnement, un même membre pouvant faire partie de plusieurs organes. Chacun de ces trois organes comprend au moins douze membres.

Le Comité d'Administration : Examine le projet de budget de l'Office et les comptes financiers; Donne son avis sur les projets de budget et les comptes financiers des Comités départementaux et des Comités locaux; Prépare les avis de l'Assemblée plénière sur l'acceptation ou le refus des dons et legs dans les cas prévus à l'article 3 du présent décret ; Est chargé des rapports avec les Comités départementaux et locaux pour ce qui concerne soit la constitution et l'administration de ces Comités, soit le placement ; Prend les délibérations nécessaires, soit pour autoriser l'encaissement, en cours d'exercice, des recettes imprévues et en affecter le montant aux divers articles du budget, d'accord avec la Commission de Rééducation et le Conseil de Perfectionnement, soit pour statuer sur les questions administratives et financières qui lui sont soumises par son Président; Tient un registre des invalides donnant sur chacun d'eux les renseignements utiles pour faciliter la rééducation, le placement ou l'aide générale dont ils peuvent avoir besoin ; Recueille les renseignements précis sur les emplois accessibles aux mutilés, suivant la nature de la mutilation, les besoins de chaque industrie et de chaque région, les placements effectués, les offres et les demandes d'emploi qui n'ont pu être satisfaites par les organismes locaux; Donne son avis sur l'attribution des emplois réservés aux mutilés et réformés de la guerre, par application de la loi du 17 avril 1916; D'une façon générale, a dans ses attributions tout ce qui concerne le fonctionnement administratif et financier de l'Office national, tout ce qui concerne le fonctionnement des Comités départementaux ou locaux et toutes les questions ressortissant du Ministère du Travail notamment celle du placement.

Les délibérations du Comité d'Administration doivent êtres prises par sept membres au moins.

Elles sont immédiatement exécutoires.

La Commission de Rééducation : Donne son avis sur les demandes de subventions de l'État formées par les institutions ou groupements qui s'occupent de la Rééducation professionnelle ; Rassemble les documents relatifs à l'outillage, aux méthodes, à l'organisation générale de la rééducation ; Est saisie des rapports d'inspection ou de mission relatifs à la fréquentation des écoles et aux résultats obtenus; Examine les recours formés contre les décisions des Comités départementaux relatives à la rééducation et, d'une manière générale, a, dans ses attributions, toutes les questions touchant à la rééducation professionnelle et au fonctionnemeut administratif, financier ou technique des centres et écoles de rééducation professionnelle.

Le Conseil de Perfectionnement : A dans ses attributions toutes les questions qui se rapportent aux intérêts généraux, matériels et moraux des invalides de la guerre ainsi que les rapports avec les institutions de toute sorte (autres que celles qui s'occupent de la rééducation professionnelle) qui ont pour but de prêter un concours quelconque aux militaires ou anciens militaires visés à l'article premier de la loi.

Il est saisi de tous les documents relatifs aux institutions qui aident les invalides, les renseignent ou les défendent, ainsi que des informations sur les secours accordés.

Art. 5. — L'Assemblée plénière de l'Office national se réunit au moins une fois par semestre et toutes les fois que les besoins du service l'exigent, ou sur la demande du Comité d'Administration.

L'Assemblée ne peut valablement délibérer que si vingt-cinq au moins des membres en exercice assistent à la séance.


Lorsque le nombre des membres présents est inférieur à vinq-cinq, les délibérations sont renvoyées à la séance suivante; elles sont alors valables quel que soit le nombre des votants.

Toutefois, toute réclamation contre l'inobservation des dispositions du paragraphe précédent n'est valable que si elle a été adressée au Ministre du Travail dans les cinq jours de ladite délibération, faute de quoi celle-ci est exécutoire sauf ce qui est dit à l'article 3.

En cas de partage des voix, la voix du Président est prépondérante.

Les procès-verbaux sont signés du Président et du Secrétaire général. Ils font mention des membres présents.

Dans les huit jours qui suivent la séance, une copie des délibérations est envoyée au Ministre du Travail.

Art. 7. — Les services administratifs de l'Office national sont répartis en trois sections correspondant aux trois organes spécifiés à l'article 2 et ayant chacune à leur tête un chef de Section.

Le chef de la 1er Section (Comité d'Administration) tient les registres de l'ordonnateur.

Un Secrétaire général, sous l'autorité du Président du Comité d'Administration, assure le fonctionnement des services et pourvoit à l'exécution des décisions et des délibérations de l'Assemblée plénière et des trois Sections de l'Office.

Le personnel de l'Office est placé sous l'autorité du Président du Comité d'Administration et du Secrétaire général.

Le Président du Comité d'Administration peut déléguer ses pouvoirs soit à un autre membre du Comité, soit au Secrétaire général.

Le Secrétaire général et les Chefs de Section ont entrée avec voix consultative dans les séances de l'Assemblée plénière.

Le Secrétaire général remplit les fonctions de Secrétaire et les Chefs de Section, les fonctions de Secrétaires adjoints.

Un Inspecteur technique, nommé par le Ministre du Travail, est attaché à la Commission de Rééducation. Il est chargé du contrôle des Écoles de Rééducation subventionnées par l'Office.

Toutefois, les écoles dépendant des Ministères de l'Agriculture, du Commerce, de l'Industrie et de l'Instruction publique, demeurent placées sous le contrôle de l'Inspection technique de ces Administrations.

Ses rapports techniques sont soumis à la Commission de Rééducation. S'ils contiennent des questions d'ordre administratif et financier, ils sont communiqués également au Comité d'Administration.

Les conditions de recrutement et d'avancement, l'effectif, les traitements et les règles de discipline, dans les services administratifs de l'Office, sont fixés par un décret rendu sur la proposition des Ministres du Travail et des Finances.

Art. 8. — Le projet de budget de l'Office est préparé par le Président du Comité d'Administration qui, après l'avoir soumis à l'examen de ce Comité, le présente à l'Assemblée plénière dans la première quinzaine de novembre.

Le budget, délibéré par l'Assemblée, est approuvé par décret; il est, à cet effet, remis avant la fin du mois de novembre, au Ministre du Travail.

La période complémentaire de l'exercice est la même que pour les opérations des buqgets communaux.

Chaque année, au mois de mai, l'excédent de recettes, les restes à recouvrer et à payer, sont repris dans un budget additionnel, préparé, délibéré et approuvé dans les mêmes formes que le budget primitif.

Sont également compris dans le budget additionnel les crédits destinés à faire face aux dépenses supplémentaires reconnues nécessaires et les ressources affectées au payement des dépenses.

Art. 38. — Les budgets des écoles de rééducation professionnelle, transmis à la Commission de Rééducation et arrêtés par elle, sont soumis à l'avis du Comité d'Administration, puis approuvés par le Ministre du Travail.

Les subventions de toute nature, accordées dans les limites des crédits inscrits au budget de l'Office seront, sur l'initiative et après examen soit de la Commission de Rééducation, soit du Conseil de Perfectionnement, soit du Comité d'Administration, selon la nature du crédit, allouées sur simple délibération du Comité d'Administration.

Art. 39. — Les Comités départementaux, les établissements de rééducation et les diverses œuvres subventionnées, produiront, à l'appni de leurs demandes de subventions, les justifications spécifiées par les arrêtés interministériels sur le régime financier desdits établissements et celles qui leur seront demandées soit par le Comité d'Administration, soit par la Commission de Rééducation ou par le Conseil de Perfectionnement.


Loi portant création d'une indemnité de démobilisation

(France).

Le Journal Officiel du 29 mars 1919 publie la loi du 22 mars 1919, instituant une prime de démobilisation au bénéfice de tous les militaires des armées de terre ou de mer servant,

ou ayant servi effectivement, pendant trois mois au moins, entre Je 2 août 1914 et la date de la signature de la paix. Cette loi s'applique évidemment aux mutilés et réformés de la guerre, et c'est à ce titre que nous croyons devoir en donner un résumé.

La prime acquise, jusqu'au grade de capitaine inclus, et indépendamment du grade, se compose d'une indemnité fixe de 250 francs, augmentée de 20 francs par mois de service effectif aux armées et de 15 francs par mois de service effectif à l'intérieur, en plus du temps dû par la classe de l'intéressé.

Seront comptés comme service effectif les séjours dans les hôpitaux et congés de convalescence pour blessures ou maladies, la durée des instances de réforme, le temps passé en captivité et, d'une façon générale, tous les mois pendant lesquels le mobilisé touchait ou aurait dû toucher une solde d'après les règlements en vigueur à l'heure actuelle.

Toutefois, en ce qui concerne les hommes engagés ou mobilisés avant la date de l'appel de leur classe, la prime mensuelle pour le temps de service qu'ils auront accompli avant cette date sera de 20 francs par mois.

N'auront pas droit à la prime mensuelle les mobilisés ayant cumulé leur solde militaire avec un traitement civil, toutes les fois que ce cumul aura produit une somme supérieure à 5.000 francs par an, sous bénéfice d'une majoration de 1.000 francs par enfant âgé de moins de 16 ans.

Ladite prime sera payée par fractions mensuelles de 100 francs, la première fraction étant versée au bénéficiaire un mois après la perception de son indemnité de 250 francs. Toutefois, si l'intéressé accepte le paiement en bons de la Défense nationale à un an, la totalité de sa prime lui sera versée de suite.

Le Journal Officiel de la même date publie les décrets et instructions ministérielles devant servir à l'application de cette loi.

Loi du 5 avril 1919 sur les sociétés coopératives ouvrières de production (France).

Le Sénat et la Chambre des Députés ont adopté, Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

ARTICLE UNIQUE. — L'article 14 de la loi du 18 décembre 1915 est complété par la disposition suivante : J « Les avances prévues au paragraphe précédent en faveur des sociétés ouvrières de production pourront être portées au double de l'actif net dont justifiera la société emprunteuse, si ces sociétés sont composées, pour les trois quarts au moins, de mutilés, de réformés et de veuves pensionnées de la guerre. »


Loi du 25 avril 1919 sur les droits à pension des fonctionnaires oictimes de faits de

guerre (France).

LE SÉNAT ET LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS ont adopté, LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE promulgue la loi dont la teneur suit :

ARTICLE PREMIER. — Les fonctionnaires, employés, ou agents civils de l'État régis pour la retraite par les lois des 22 août 1790, 18 avril 1831 et 9 juin 1853 qui, victimes d'événements de guerre auxquels ils auraient été exposés par les obligations de leur service, se trouveraient hors d'état de continuer l'exercice de leurs fonctions, pourront prétendre à une pension exceptionnelle par application des lois précitées, s'ils renoncent à se prévaloir des dispositions générales applicables aux victimes civiles de la guerre. Dans ce cas, les blessures ou infirmités seront considérées comme reçues ou contractées dans l'exercice des fonctions civiles.

Pour le calcul des pensions du régime de la loi du 9 juin 1853, les événements de guerre seront assimilés aux circonstances définies à l'article 11-1° de cette loi.

ART. 2. — Les fonctionnaires, employés ou agents civils de l'État placés pour la retraite sous des régimes spéciaux ne comportant pas affiliation à la Caisse nationale des Retraites pour la vieillesse qui, soit dans l'accomplissement du service militaire, soit par suite des obligations de leurs fonctions civiles, sont atteints, en temps de guerre, de blessures ou infirmités ouvrant droit à une pension militaire ou à une pension de victime civile peuvent, en renonçant à demander cette pension, réclamer le bénéfice de leur régime normal de retraites s'ils sont reconnus hors d'état de continuer ou de reprendre l'exercice de leur emploi. Des règlements d'administration publique détermineront les conditions d'application du présent article.

ART. 3. — Les fonctionnaires, employés ou agents de l'État, tributaires, en cette qualité, de la Caisse nationale des Retraites pour la vieillesse qui, soit dans l'accomplissement du service militaire, soit par suite des obligations de leurs fonctions civiles, sont atteints en temps de guerre de blessures ou infirmités ouvrant droit à une pension militaire ou à une pension de victime civile, ne peuvent obtenir cette pension, s'ils réclament la liquidation anticipée de la rente viagère constituée à leur profit sur la Caisse nationale des Retraites, qu'en renonçant à la rente complémentaire à la charge de l'Etat, prévue par le règlement spécial sous lequel ils sont placés.

ART. 4. — L'option faite par le fonctionnaire lui-même dans les conditions indiquées aux trois articles précédents emportera détermination du régime éventuellement applicable à la veuve ou aux orphelins.

Peuvent opter directement pour le régime de pensions afférent à l'emploi civil, les veuves ou orphelins des fonctionnaires qui seraient morts avant d'avoir usé de la faculté d'option ouverte par lesdits articles.

Dans le cas où la veuve serait en concours avec des enfants d'un autre lit, il sera statué relativement à l'option à exercer, et sur citation délivrée à la requête de la partie la plus diligente, par le Tribunal Civil du lieu de la succession siégeant en Chambre du Conseil. Les actes de procédure seront exempts des droits de timbre et d'enregistrement.

ART. 5. — Dans tous les cas, la cause du décès, l'origine et la gravité des blessures ou infirmités seront, même en cas d'option pour le régime normal de retraites, constatées dans les formes prescrites pour la liquidation des pensions militaires ou des pensions de victimes civiles de la guerre.

ART. 6. — L'option autorisée par les articles 1er, 2, 3 et 4 devra être exercée, ou la citation prévue à l'article 4 délivrée, dans les délais impartis aux intéressés pour faire valoir leurs droits à la pension militaire ou à la pension de victime civile.

ART. 7. — Seront reçues à exercer rétro-activement le droit d'option prévu par les articles 1er, 2, 3 et 4 les personnes visées par ces articles qui auraient formé une demande de pension militaire ou de pension de victime civile entre le 2 août 1914 et la promulgation de la présente loi. Il en sera ainsi même si leur demande avait été suivie d'une concession de pension.

Les délais prévus à l'article 6 auront dans ce cas pour point de départ la promulgation de la présente loi.

La présente loi, délibérée et adoptée par le Sénat et par la Chambre des Députés, sera exécutée comme loi de l'État.

—————————— • 1

Décret-loi du 5 octobre 1918 relatif à l'attribution de pensions complémentaires aux mutilés de guerre (Portugal).

LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE PORTUGAISE, Considérant qu'il est de toute justice de créer une disposition légale qui assure les intérêts des militaires mutilés et estropiés de la guerre, et qui soit en même temps l'expres-


sion de la reconnaissance de la Nation envers ses glorieux serviteurs, qui se sont héroïquement sacrifiés pour elle ; Vu les lois nos 373 et 491 des 2 septembre 1915 et 12 mars 1916; Le Conseil d'État entendu, DÉCRÈTE : ARTICLE PREMIER. — A tout militaire mutilé ou estropié en service, chez qui le traumatisme aura produit, d'une forme permanente et définitive, une perte de capacité fonctionnelle égale ou supérieure à 30 p. 100, il sera accordé une pension complémentaire en rapport avec le pourcentage de la dépréciation existante.

§ 1. — Est considérée comme perte de 20 ou 30 p. 100 de la validité la réduction de cette valeur dans la capacité pour le travail en général, et non pour un métier ou une profession en particulier.

§ 2. — La pension complémentaire est indépendante de la pension de réforme à laquelle le mutilé aurait droit conformément à la législation en vigueur.

ART. 2. - Le refus, ou la mauvaise volonté du mutilé, de se soumettre à la rééducation professionnelle, ou encore la non-utilisation des appareils de prothèse indispensables, peut faire descendre le pourcentage d'invalidité de 20 à 30 p. 100.

ART. 3. — Les pensions complémentaires, quelle que soit la nature de l'incapacité à laquelle elles se rapportent, sont fixées pour une période de cinq ans; cette période écoulée, les mutilés à qui la pension complémentaire aura été accordée seront soumis à un nouvel examen qui pourra déterminer la diminution, la suppression ou l'augmentation de cette pension, selon le degré d'adaptation de l'individu ou l'évolution des lésions.

Paragraphe unique. — Les militaires appelés à la révision auront droit au transport gratuit, au logement et à la nourriture pendant toute la période d'observation.

ART. 4. — Les militaires à qui la pension complémentaire aura été refusée parce que leurs infirmités ou leurs mutilations n'ont pas été considérées comme se trouvant dans les conditions légales, pourront, un an après la décision dont ils auront été l'objet, requérir un nouvel examen après lequel la pension complémentaire leur sera accordée, si les lésions, par suite d'évolution naturelle et non par négligence, mauvaise volonté ou aggravation volontaire, ont porté l'incapacité à un degré égal ou supérieur à 30 p. 100.

ART. 5. — L'examen de l'incapacité, sa révision et l'appréciation de toutes les questions y ayant trait, rentrent dans les attributions du Conseil créé par le décret n° 3151, 1re série.

ART. 6. — La pension complémentaire sera un pourcentage de la pension de réforme, égal au pourcentage de l'incapacité.

ART. 7. — Les pensions complémentaires seront payées en même temps et dans les mêmes conditions que les pensions ordinaires de réforme.

ART. 8. — L'évaluation du pourcentage du degré d'incapacité sera faite par tous les procédés nécessaires de clinique et de laboratoire; elle devra être établie


et définie individuellement pour chaque mutilé et estropié, et faire l'objet d'un bulletin spécial.

ART. 9. — Toute législation contraire est révoquée.

Les Secrétaires d'Etat de tous les départements sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution de ce décret qui sera publié au Journal Officiel.

Décret-loi du 7 octobre 1918 relatif au port d'un insigne spécial par les mutilés de

guerre (Portugal).

LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE PORTUGAISE, Considérant qu'il convient que les militaires mutilés et estropiés de la guerre puissent porter un insigne qui indique que leurs blessures ont été reçues en campagne, et qui soit

en même temps une marque de la reconnaissance et de la protection auxquels ont droit ceux qui le porteront ; Sur la proposition du Secrétaire d'État de la Guerre, DÉCRÈTE : ARTICLE PREMIER. — Les mutilés et les blessés de la guerre ont le droit de porter un insigne qui consistera, pour l'uniforme, en un ruban rouge avec deux lisérés verts et une agrafe argentée, suivant les dimensions du modèle annexé, et pour le costume civil, en un petit nœud aux couleurs nationales, portant au centre une étoile d'émail blanc, également selon les dimensions indiquées dans le modèle respectif.

ART. 22. — Le présent décret entre immédiatement en vigueur.

Les Secrétaires d'État de la Marine et des Colonies, et de la Guerre sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal Officiel.

(Nous donnerons dans notre prochain numéro les textes de lois importantes, allemandes, canadiennes, italiennes, etc, que le manque de place ne nous a pas permis de faire figurer dans celui-ci.)

Livres et Publications

Report on médical and surgical deoelopments of the

war.

By William SEAMAN BAINBRIDGE. (Government Printing Office, Washington, January 1919.) Ce rapport a trait aux faits observés tant

sur le front occidental et en Angleterre, du mois de décembre 1917 au mois de juillet 1918, qu'en Allemagne pendant l'automne 1915.

L'auteur passe en revue toutes les principales questions que la guerre a


soulevées dans le domaine de la chirurgie. Citons parmi les principaux chapitres : Traitement des blessures de guerre chez les Alliés, les sutures primitives, retardées ou secondaires — nouvelles méthodes antiseptiques de Carrel, Mencière, et autres.

Traitement des blessures en Allemagne. Progrès de la chirurgie de guerre, notamment en ce qui concerne l'anesthésie — le traitement des blessures articulaires par la méthode de mobilisation précoce de Willems — extension continue dans le traitement des fractures — trépanation — chirurgie orthopédique et plastique.

Soins donnés aux blessés depuis leur relevage sur la ligne de feu jusqu'au moment de leur passage dans un centre de convalescence, chapitre dans lequel l'auteur fournit d'amples renseignements sur les hôpitaux qu'il a visités. Rééducation des mutilés, tant fonctionnelle que professionnelle. Les Congrès de chirurgie mettant au point les principes généraux qui régissent les soins à donner aux blessés : utilité des laboratoires de bactériologie associés aux services de chirurgie — localisation des projectiles — traitement du shock traumatique — amputations — traitement des fractures, des plaies des vaisseaux, des nerfs de la moelle, du cerveau, de l'abdomen — transfusion du sang — traitement des pseudarthroses, etc., etc.

Services auxiliaires, en particulier ceux de l'American Red Cross, de l'Young Men Christian Association, de l'Young Women Christian Association, des Knights of Columbus, etc., etc.

Ce livre est un compendium fort complet de ce qui a été fait jusqu'en 1918 pour les blessés militaires; écrit par un Américain, il permet de comparer les points de vue et les méthodes transatlantiques avec les continentaux.

L'abondance des gravures ajoute encore à la clarté du texte, toutes raisons qui en rendent la lecture non seulement intéressante, mais encore attrayante.

C. L.

La prothèsè fonctionnelle des

blessés de guerre

Par le docteur DUCROQUET (Masson, éditeur 120, boulevard Saint-Germain, Paris, 1919.)Dans une première partie de son ouvrage,

l'auteur expose les principes généraux qui doivent régir la construction d'un bon appareil prothétique pour impotence fonctionnelle; en particulier, solidarisation de l'appareil au membre ou au segment de membre par le choix judicieux des points de fixation, ceux-ci étant de trois ordres : Point de support, point de contre-ascension, point de contre-rotation et situation des axes mécaniques, de telle façon que le rôle fonctionnel se rapproche le plus possible des axes humains.

C'est par une étude minutieuse de chaque articulation et de son fonctionnement que l'auteur arrive à déterminer la situation et l'orientation de l'axe idéal, de celui qui permettra des mouvements fonctionnellement identiques à ceux du membre sain.

Après cette discussion, l'auteur présente les diverses catégories d'appareils utilisables : appareils d'immobilisation, dont les points d'appui, point de pression.


et points de contre-pression, varient selon l'articulation à immobiliser, ou le mouvement pathologique à entraver. Appareils à mouvements limités soit par butée, soit par secteur, les premiers utilisés dans le cas de diminution ou d'exagération des mouvements articulaires, les seconds pour permettre la mobilisation progressive des articulations enraidies.

Appareils pour paralysie à verrou ou à tenseur, les uns étant fréquemment utilisés pour les impotences du coude ou du genou, les autres dans certaines paralysies, telles que celles du sciatique externe ou du radial.

Appareils de décharge, destinés à soustraire, pendant la marche, le membre malade à la pression du poids du corps, employés seuls ou conjointement avec un appareil d'immobilisation.

Cette étude des appareils orthopédiques serait incomplète sans l'étude de la chaussure orthopédique. Après avoir rappelé le mode de confection d'une chaussure normale, l'auteur passe en revue les diverses lésions du pied, ainsi que les appareillages qu'elles nécessitent.

Aux pieds bots correction, dans les cas légers, par épaississement d'un des bords de la chaussure, et, dans les cas plus graves, par désaxage du talon avec ou sans adjonction d'une attelle latérale.

Aux raccourcissements, correction par pied à plat et liège horizontal ou par equinisme et liège oblique. (Au delà de six centimètres, il faut compléter l'exhaussement par liège oblique au moyen d'une correction horizontale.) Au delà de douze centimètres, on peut encore corriger le raccourcissement par pied sÙnulé, c'est-àdire au moyen d'un socle ayant la forme d'un pied, et sur lequel repose, généralement en équinisme, le pied réel.

Après un chapitre consacré à l'étude cinématique de la marche hormale, l'auteur étudie la marche pathologique due à une lésion du membre inférieur, raccourcissement ou ankylose, ainsi que les moyens orthopédiques à mettre en jeu pour remédier aux inconvénients d'une telle marche.

De ces indications mécaniques et fonctionnelles l'auteur conclut aux applications pratiques ; c'est là l'objet de la deuxième partie de son ouvrage.

Fractures de jambe consolidées plus ou moins vicieusement, pseudarthroses du membre inférieur et du membre supérieur, paralysies du sciatique poplité externe, paralysies radiales, contractures et lésions musculaires, pieds bots, y sont, tour à tour, passés en revue. Pour chaque cas, l'auteur expose quelles sont les qualités nécessaires de l'appareil à employer, et quels sont les défauts à éviter dans sa construction.

Alimentée par les enseignements recueillis au cours de sa longue pratique, et en particulier pendant ces cinq années de guerre, cette étude, illustrée de deux cent vingt dessins, tous originaux et exécutés sous la direction effective du docteur Ducroquet, est une suite des plus heureuses et des plus utiles à « la prothèse des amputés » écrite par l'auteur en collaboration avec le professeur A. Broca.

C. L.


Les accidentés de la guerre : leur esprit, leurs réactions,

leur traitement.

Par MM. LAIGNEL-LAVASTINE, professeur agrégé à la Faculté de Médecine, et P. COURBON, médecin des asiles publics d'aliénés. (Baillière, éditeur, Paris, 1919.)

La durée et l'intensité des troubles dans l'accidenté de guerre s'expliquent par une inertie réactionnelle, inertie dans la genèse de laquelle la part de conscience de l'accidenté peut aller de la simple patience envers la gêne réellement causée par la blessure ou la maladie jusqu'à la création de troubles sans cause légitime.

Cette sinistrose de guerre tient à plusieurs facteurs, biologiques, sociaux, psychologiques, intrinsèques à l'accidenté, facteurs multiples dont les auteurs précisent le rôle.

La thérapeutique de l'accidenté de guerre, qu'elle soit préventive ou curative, doit avoir pour but le triple rétablissement de l'accidenté dans son corps, dans son esprit et dans sa position.

Elle a à sa disposition les ressources de la biologie, de la psychologie et de la sociologie.

Les auteurs signalent en particulier la grande importance du rôle que peut jouer la rééducation professionnelle.

Les auteurs terminent leur ouvrage par une étude très intéressante et très minutieuse de la simulation et de ses différentes formes, ainsi que des moyens curatifs à employer.

C. L.

Les greffes d'organes morts.

Les communications successives que viennent de faire à l'Académie de Médecine et à la

Société de Chirurgie les docteurs NAGEOTTE et SENCERT, sont de nature à bouleverser toutes les idées que nous nous faisions des greffes.

Jusqu'à présent il était à peu près universellement admis que seules des greffes vivantes pouvaient être utilisées; et encore, les chances de réussite étaient-elles très limitées quand il s'agissait de greffons empruntés à un autre individu que le greffé.

Nous voyons aujourd'hui les docteurs Nageotte et Sencert utiliser des greffons pris sur un individu d'une autre race zoologique, et morts depuis un mois, et cela avec une réussite parfaite, telle que l'examen histologique n'a pu révéler une discontinuité de structure entre les tissus vivants et les greffons morts.

Chez le blessé qui fait l'objet de leur communication, ils ont pratiqué huit greffes tendineuses de 4 centimètres environ chacune, au niveau des fléchisseurs des doigts, avec des fragments de tendons de chien, greffons morts et conservés dans l'alcool depuis un mois ; les résultats qu'ils ont obtenus ont dépassé toutes les espérances puisque le blessé a recouvré l'usage complet de sa main.


Encouragés par ce succès, les docteurs Nageotte et Sencert continuent actuellement leurs recherches expérimentales, notamment au sujet de la greffe des tissus vasculaire et osseux ; en particulier, ils ont déjà pu remplacer un fragment de plusieurs centimètres de la carotide d'un chien par un greffon carotidien mort depuis longtemps.

Ces faits, que plusieurs pourraient considérer comme fantastiques, offrent un champ nouveau et illimité à la chirurgie réparatrice.

C. L.

Amputazioni cineplastiche per la vitalizzazione delle

membra artiflciall.

Par le Professeur A. PELLEGRlNI, 1 vol. in-4, Unione Tipografîco-Editrice Torinese, Turin, 1919. — Prix, 9 lire.

Donner la vie aux membres artificiels,

c'est-à-dire faire produire à ces membres, inertes par nature, certains mouvements réglés par la volonté de l'individu, c'est là un problème audacieux dont la solution, poursuivie depuis de longues années par des chercheurs patients, est enfin réalisée dans des limites, saus doute encore restreintes, mais qui ne cesseront de s'étendre au fur et à mesure que les praticiens des divers pays se seront convaincus qu'il ne s'agit pas là d'une théorie aventurée, mais d'opérations effectives déjà pratiquées avec succès dans des cas mulliplps. Nous donnons dans ce même numéro un article original du Professeur Vanghetti - celui-là ême qui revendique légitimement la priorité de cette conception révolutionnaire en matière chirurgicale — article dans lequel le savant professeur a fait un exposé lucide de la théorie de la cinéplastique et des divers procédés d'application qui ont été imaginés jusqu'à présent. Les spécialistes trouveront, dans l'ouvrage que vient de publier le professeur Pellegrini, la confirmation pratique de la thèse à laquelle avaient abouti les expériences de laboratoire de son confrère. Chirurgien réputé, le docteur Pellegrini a exécuté un certain nombre de cinéniafisations et c'est la relation des résultats obtenus qui nous est donnée dans le présent ouvrage qu'illustrent un très grand nombre de dessins schématiques et de photographies. Il y a là de quoi convaincre les incrédules de la portée considérable de ce perfectionnement apporté à l'art chirurgical et des services qu'il est appelé à rendre aux mutilés de l'avenir et même peut-être à une partie encore de ceux que nous a rendus la présente guerre — et nous ne pouvons que souhaiter de voir les chirurgiens français entrer largement dans la voie où leur confrère italien a déjà réalisé de si beaux succès.

Des considérations générales et une bibliographie très étendue complètent ce très utile ouvrage dont il serait désirable qu'une traduction française étendît le champ d'action chez nous.

A. R.


Bulletin de la Société d'En-

couragement pour l'Industrie nationale (Novembre - Décembre

1918, Paris).

Nous y relevons un rapport fort intéressant de M. Henri-René D'ALLEMAGNE sur l'utilisation de la main-d'œuvre des mutilés de la guerre dans l'industrie du jouet, à l'usine de Puteaux « Le Jouet de France ».

Grâce au dévouement et à la générosité de M. François Carnot et de ses collaborateurs, une usine modèle de découpage et de tournage du bois a pu être installée, où les mutilés de la guerre peuvent faire l'apprentissage d'un métier lucratif.

Bien mieux encore, la fabrication des jouets y est assurée par les rééduqués devenus ouvriers ; actuellement quatre-vingts mutilés (et il y a de la place pour deux cents) y sont occupés pour un salaire variant de 8 à 15 francs par jour à fabriquer des jouets et du mobilier d'enfants et, bientôt, du mobilier pour les régions dévastées.

La Société d'Encouragement a donc pu, à juste titre, adresser ses félicitations au promoteur de cette œuvre, qui répond au triple but de rééduquer les mutilés, de les placer, et de ramener en France une industrie qui avait été accaparée par l'Allemagne.

C. L.

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Le retour à la terre du soldat

aveugle.

Edité par l'Association Valêntin Haüy, Paris, 1919.

Dans ces quelques pages d'une lecture

passionnante on reconnaît la marque du caractère français.

Les cultivateurs devenus aveugles devaient, semblait-il, ne plus pouvoir reprendre leur métier; ils donnent dans leurs lettres un démenti formel à cette hypothèse. L'aveugle de guerre, s'il veut, peut se livrer à des occupations rurales multiples qui lui permettent de sortir de son isolement, et de reprendre contactintime avec le Monde, avec la Vie.

C. L.

Nouvelles diverses

Voyage de M. le Or Bourrillon

aux États-Unis.

Sur l'invitation qui lui avait été adressée par la Croix-Rouge américaine le Président du Comité s'est rendu, au mois de mars dernier,

aux Etats-Unis pour y exposer le rôle et l'action du Comité Permanent. Le manque de place nous oblige à reporter au prochain numéro de la Revue le compte rendu de ce voyage qui a été fertile en résultats.



ÏAKIS.1MFRIMERIK CHAIX (SUCCURSALE 1), 11, BOULEVARD SAINT-MICHEL. — 1512-19.