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ANNALES
FORESTIERES
s
TOME QUINZIÈME.
TYPOGRAPHIE HENNUYER, RUE DU BOULEVARD, 7, BATIGNOLLES.
Boulevard extérieur de Paris.
ANNALES
FORESTIÈRES
ET
MÉTALLURGIQUES
TOME QUINZIÈME
QUINZIÈME ANNÉE.
1856
PARIS AU BUREAU DES ANNALES FORESTIÈRES RUE DE LA CHAUSSÉE-D'ANTIN, 21.
M DCCC LVI
ANNALES
FORESTIERES
ET
MÉTALLURGIQUES.
A NOS ABONNÉS.
NoW^us'^|itfe^4oujours fait un devoir de ne pas commenter les rircul airfrwlp\*a4frfimst.ration. mais en voici une à laquelle nous avons
donné lieu. Nous ne pouvons nous dispenser d'en dire un mot.
Monsieur le Conservateur, Vous avez dû recevoir du directeur du recueil intitulé : Annales forestières et métallurgiques, la demande du tableau du personnel forestier employé dans votre conservation.
J'ai l'honneur de vous prévenir qu'une telle communication serait entièrement contraire aux intentions de S. E. le Ministre des finances, et vous devez vous abstenir de la faire.
Je saisis cette occasion de vous rappeler qu'aux termes des instructions, aucun agent ou préposé forestier ne doit avoir, relativement au service, des relations avec les recueils, revues, journaux, ou autres organes de publicité, sans l'autorisation expresse et préalable du Ministre. Veuillez renouveler sans retard aux agents et préposés sous vos ordres les avertissements qu'ils ont déjà reçus à cet égard, et les prévenir que toute infraction à cette disposition sera considérée comme un manquement grave à la discipline, et comme un fait de désobéissance qui entraînerait une répression rigoureuse.
Je vous invite à m'accuser immédiatement réception de la présente lettre, et à me certitier de l'accomplissement de la mesure qu'elle prescrit.
Recevez, etc.
Nous croyons que cette circulaire n'a pas été bien comprise ; elle a produit, dans tous les cas, une impression qui pourrait être fâcheuse pour notre publication, et qui nous autorise à en rechercher le sens et la portée. Plusieurs agents l'ont interprétée comme une défense d'entretenir des relations avec les organes de la presse en général et avec les Annales
forestières en particulier. Nous devons avant tout combattre cette interprétation. L'administration interdit seulement les communications relatives à des objets de service. C'est son droit rigoureux ; elle en use, mais elle ne va pas au delà. Jamais, nous en avons l'intime conviction, jamais elle n'a eu la pensée de priver ses agents de la faculté de faire imprimer et de soumettre à l'épreuve de la discussion des travaux scientifiques.
Les fonctionnaires ont, en effet, un important tribut à fournir à ce prodigieux courant d'idées dont la presse est le véhicule, à cette masse de matériaux qu'elle élabore et qu'elle répand dans le monde, au grand profit des intérêts privés et de l'intérêt en général. Défendre toute publicité aux fonctionnaires, serait vouloir priver l'administration elle-même d'un précieux concours. Il est incontestable que les d'Audiffred, les Bineau, les Troplong, les Michel Chevalier, etc., et dans notre spécialité les Duhamel, les Varenne de Feuille, les de Perthuis, les Baudrillart, les Lorentz, les Buffévent, etc., etc., ont grandement contribué par leurs écrits à accroître la force et l'influence des services publics en France.
L'administration forestière n'est pas une simple régie où tout le progrès consiste à modifier des états, des livres-journaux, des règles de comptabilité. C'est une administration qui s'appuie avant tout sur les sciences naturelles et économiques, et qui est tenue dès lors d'encourager et de suivre toutes les études scientifiques qui se rapportent à sa spécialité; mais ces études ne rentrent pas dans les attributions du fonctionnaire, une administration n'est pas une académie, et voilà pourquoi un recueil forestier est devenu aujourd'hui un moyen d'action dont on ne saurait longtemps se passer. Il est évident, d'ailleurs, que dès qu'on a reconnu la nécessité d'une école pour former des agents forestiers, on a proclamé en même temps celle d'un journal spécial. Il y a solidarité entre ces deux institutions : l'une aide l'autre ; le journal fait passer les découvertes, les théories au creuset de la critique. L'école s'empare des données, des résultats corroborés par la discussion.
Un de nos forestiers les plus éminents a bien compris ce mutuel appui que sont appelés à se prêter l'école et le journal, et qu'il nous soit permis de reproduire, à l'appui de notre opinion, le passage suivant de la remarquable préface qui accompagne la dernière édition du cours de culture : « Nous le disons en toute sincérité : cette troisième édition de notre « livre serait et plus complète et meilleure, si, pendant la longue période « qui s'est écoulée depuis la publication des deux premières, les fores« tiers (et par là nous entendons tous les hommes qui s'occupent de syl« viculture), qu'ils appartiennent ou non à l'administration publique, « avaient eu, autant qu'il l'eût fallu, la volonté ou la faculté de rendre « compte de leurs travaux. »
Oui, s'il y a un reproche à faire aux agents, c'est de n'avoir pas usé de la publicité autant qu'il l'eût fallu pour le progrès de la science et le bien de l'administration. Toutefois, les Annales forestières ont rendu, sous ce rapport, d'incontestables services, et les auteurs de la culture des bois l'ont reconnu en les citant à plusieurs reprises dans leur dernière édition.
D'autres auteurs ont également puisé dans les Annales. Les jurisconsultes surtout leur accordent une grande autorité (1). Enfin, l'administration elle-même a souvent profité et profite journellement de le :rs travaux.
Nous recevons, par exemple, tous les jours, des demandes de renseignements sur le prix des bois, sur l'état du commerce des fers et des autres métaux. On nous consulte sur des points de doctrine judiciaire, sur l'efficacité de telle ou telle méthode culturale. Nous répondons à ces questions. L'administration ne saurait le faire : elle n'est pas un bureau de consultations.
Nous le répétons donc : la circulaire de M. le directeur général des forêts n'a pas eu pour but d'anhihiler tout esprit d'investigation et d'initiative chez les agents, et de supprimer les relations scientifiques qui existent entre eux et notre publication.
Cela posé, réduisons à sa juste valeur, car on s'est encore trompé à cet égard, le fait qui a provoqué la mesure dont nous nous occupons.
Nous avons publié, dans le courant de l'année dernière, un état du personnel. Cet état renfermait des erreurs et des lacunes. Nous avons voulu les faire disparaître, et à cet effet, nous nous sommes adressés, non pas à toute une catégorie de fonctionnaires, comme la circulaire l'indique par erreur, mais à ceux de nos abonnés qui étaient à même de nous fournir les éclaircissements désirables.
Tel est, dans toute sa simplicité, le fait dans lequel l'administration a vu un acte contraire à ses prérogatives, un danger pour la discipline.
Ce résultat est regrettable; mais on nous pardonnera sans doute de ne pas l'avoir prévu. Maintenant que nous sommes prévenus, nous puiserons nos renseignements dans les journaux des localités, dans les annuaires, dans l'Almanach impérial. Nous nous arrangerons de manière à ne compromettre personne, et à satisfaire nos abonnés sans mécontenter l'administration.
Les Annales forestières ont été fondées par des hommes qui sont presque tous parvenus aux plus hauts échelons de la hiérarchie administrative.
Elles s'honorent de compter parmi eux un ancien directeur général des
(1) Voir, notamment, le Traité de législation de la chasse et de la louveterie, de M. Berriat-des-Prix ; le Journal du Palais, le recueil de M. Sirey, le Répertoire de législation et de jurisprudence de M. Dalloz, qui, dans le dernier volume qu'on vient de publier, sur le mot PÊCHE, renvoie constamment aux Annales pour le développement des questions.
forêts de l'Etat, l'administrateur général actuel des domaines de la couronne, le directeur de l'École forestière, plusieurs conservateurs, des membres de l'Institut, etc. Désigner de tels hommes, et pouvoir ajouter que le journal a conservé leur sympathie et leur appui, c'est prouver qu'il a été créé pour soutenir et, non pour entraver la marche de l'administration.
Nous resterons fidèles à cette mission. Les restrictions imposées par les règlements à nos relations avec nos abonnés ne nous feront pas oublier que les Annales ont à poursuivre un but plus élevé que la satisfaction d'une vaine curiosité. Ces restrictions n'affaibliront pas le dévouement des hommes qui se sont consacrés à l'existence de notre recueil, et nous sommes convaincus que, de leur côté, les agents forestiers ne voudront pas retirer leur appui au seul organe qui défende dans la presse les grands intérêts matériels et scientifiques qui leur sont confiés.
LTe T.
DE LA FORMATION DU PLAN D'EXPLOITATION DANS LES AMÉNAGEMENTS DE FORÊTS (J).
(Suite.)
FORMATION DES AFFECTATIONS.
Nous avons affaire à une forêt de 200 hectares, exploitable dans une révolution de cent ans. Cette révolution a été divisée en cinq périodes égales. Il s'agit de partager la forêt en un même nombre d'affectations correspondantes. Nous dresserons le tableau suivant :
TABLEAU DES AFFECTATIONS.
DÉSIGNATION CONTENANCE NATURE ÉTAT AGE DU PEUPLEMENT 1 des du ESSENCES. du à l'époque fixée DES CANTONS. DBS PARCELLES. PARCELLES. SOL. PEUPLEMENT. ACTUEL. pour son 1 EXPLOITATION ï 2 3 1 5 6 7 1 8
(t) Voir les numéros de novembre, décembre 1853, novembre 1855.
CLASSEMENT DES PARCELLES DANS L'AFFECTATION DE LA 1" PÉRIODE. DE LA 2* PÉRIODE. DE LA 3* PÉRIODE, DE LA 4* PÉRIODB. DE LA 5* PÉRIODE. 1 9 10 lï 12 13 1
On voit que nous avons maintenu toute la première partie du plan d'exploitation des taillis, partie destinée à recevoir le résumé de la description spéciale. On en comprend l'utilité. Il est important que le tableau des affectations présente les indications qui sont de nature à justifier l'ordre adopté pour la succession des coupes; car ce tableau est, comme nous l'avons déjà dit, le document essentiel et fondamental de l'aménagement, et il doit être établi de telle sorte qu'on puisse à la rigueur juger de son mérite, sans recourir à d'autres éléments d'appréciation que ceux qui y sont contenus.
Nous avons substitué à la seconde partie du plan, destinée à présenter l'ordre des exploitations annuelles, cinq colonnes dont l'objet est clairement indiqué par leur en-tête. On peut regarder chacune d'elles comme un compte ouvert à l'affectation dont elle porte le numéro. Toutes les parcelles qui devront être régénérées dans la première période seront donc inscrites dans la première colonne, et composeront la première affectation. Toutes celles qui devront être régénérées dans la deuxième période seront inscrites dans la deuxième colonne, et composeront la deuxième affectation, etc., etc.
Mais sur quelles considérations se fondera-t-on pour décider que telle parcelle doit être régénérée dans telle ou telle période? »
On se fondera sur les considérations que nous avons fait intervenir, dans la discussion à laquelle a donné lieu la formation du plan d'exploi- ; tation des taillis.
Il faut donc faire le classement des parcelles dans les affectations périodiques, de manière à rendre possibles des exploitations qui satisfassent tout à la fois, dans la mesure que comporte la nature des choses, aux exigences de l'exploitabilité, aux règles sur l'assiette des coupes, et au rapport annuel soutenu.
Appliquons rapidement à chacun de ces côtés de la question, les préceptes que nous avons donnés, en traitant de l'aménagement des taillis.
Formation des affectations suivant Vâge d'exploitabilité.
Si toutes les parcelles renfermaient des peuplements susceptibles deres-
ter sur pied jusqu'à l'âge d'exploitabilité, leur classement dans les affectations périodiques ne rencontrerait aucune difficulté.
La parcelle A renferme un peuplement âgé moyennement de trente-cinq ans ; elle ne sera exploitable que dans soixante-cinq ans; on la classera dans l'affectation de la quatrième période.
La parcelle B renferme un massif de vieux arbres clair-plantés, surmontant un jeune repeuplement. L'exploitation de ces vieux arbres sous forme de coupe secondaire ou définitive est urgente. On les classera dans l'affectation de la première période.
Rien de plus simple.
Mais il y a souvent des parcelles dont le peuplement n'est pas susceptible de végéter jusqu'au terme de la révolution, et qu'il faut, en conséquence, exploiter avant ce terme.
Cette nécessité peut tenir à une circonstance accidentelle : il s'agit d'un peuplement qui, quoique jeune encore, ne jouit déjà plus d'une vigoureuse végétation, soit qu'il ait été abrouti dans sa jeunesse, soit qu'il provienne de vieilles souches, soit que des éclaircies maladroites aient ébranlé sa constitution.
Dans ces cas-là, l'affectation à laquelle une parcelle appartient n'est pas indiquée par la différence existant entre l'âge normal d'exploitabilité et l'âge de cette parcelle, mais par le temps, difficile à apprécier d'ailleurs, pendant lequel le peuplement de la parcelle en question pourra rester sur pied sans dépérir.
La nécessité d'exploiter une parcelle avant le terme de la révolution peut dépendre d'une circonstance permanente : Cette parcelle se compose d'une essence dont la longévité est moins grande que celle d'après laquelle a été fixée la durée de la révolution. Ici, • de deux choses l'une : ou l'âge d'exploitabilité de cette essence est une partie aliquote de la révolution, ou il ne l'est pas. Dans le premier cas, on fait figurer la parcelle dans autant d'affectations différentes que son âge est renfermé de fois dans la révolution ; dans le second cas, on la laisse en dehors de l'aménagement, à moins qu'on ne juge convenable d'y pratiquer une substitution d'essences, qui permette de concilier son exploitation avec celle de la masse, et alors, son classement rentre dans les conditions prévues au paragraphe précédent.
Nous avons à nous occuper d'une parcelle de pins ou de bouleaux exploitables à cinquante ans et âgés aujourd'hui de vingt-cinq ans; nous la classerons dans l'affectation de la deuxième période et dans celle de la cinquième.
On pourrait prévoir des circonstances où une parcelle devrait figurer dans toutes les affectations. C'est ce qui aurait lieu s'il s'agissait de comprendre
dans l'aménagement de notre forêt, exploitable à cent ans, une parcelle exploitable en taillis à l'âge de vingt ans.
Mais ce sont là des hypothèses qui n'ont aucune utilité pratique, et que nous faisons seulement pour ne pas laisser notre démonstration incomplète.
En effet, dans la pratique, on évite généralement de comprendre dans le même aménagement des peuplements exploitables à des âges différents, parce qu'en compliquant le plan d'exploitation, ils deviennent par cela même une cause de confusion et de difficultés, et qu'aucun intérêt sérieux ne commande de se résigner à de tels inconvénients.
Ils deviennent une cause de confusion et de difficultés, parce qu'ils s'opposent à l'application des règles d'assiette, parce qu'ils contrarient la réalisation du rapport soutenu, parce qu'ils obligent de ramener les exploitations sur un point donné, plus souvent que sur les points environnants.
Aucun intérêt sérieux ne commande de se résigner à de tels inconvénients; car le plus important de tous les intérêts, celui de la consommation, ne saurait en retirer aucun avantage. En effet, lorsque le consommateur sollicite un produit d'une nature particulière, ce n'est pas d'une manière intermittente, c'est d'une manière permanente; ce n'est pas tous les cin quante ans, tous les vingt ans, c'est chaque année. Si donc les parcelles de pins, de bouleaux ou de taillis, dont nous parlions tout à l'heure, étaient assez grandes pour fournir chaque année une coupe, il faudrait en former une série particulière; dans le cas contraire, il conviendrait de les régénérer en essences susceptibles de parcourir la révolution applicable à la masse, et, si cette régénération était impossible, nous conseillerions de les laisser en dehors de l'aménagement.
Formation des affectations conformément aux règles d'assiette.
Cette formation doit être examinée à deux points de vue : 1° Au point de vue de la marche des exploitations dans chaque affectation; 2° Au point de vue de la position respective que les affectations doivent occuper sur le terrain.
Pour que la marche des coupes, dans chaque affectation, puisse se conformer aux règles d'assiette que nous avons indiquées dans notre travail sur le taillis, il est nécessaire que les affectations aient une forme aussi régulière que possible; qu'elles présentent leur moindre largeur aux vents les plus violents; qu'elles soient traversées et limitées par des chemins; mais, par-dessus tout, qu'elles constituent des masses distinctes et séparées.
Telles sont les dispositions que l'on doit chercher à réaliser pour assurer la marche des coupes dans chaque affectation. Nous recommandons
surtout de ne jamais scinder une affectation, quand on n'a pas pour le faire des motifs tout à fait majeurs.
La contiguïté des parcelles qui forment une affectation n'est pas utile seulement pour l'application des règles d'assiette ; elle l'est aussi pour l'économie des exploitations, lesquelles entraînent nécessairement à leur suite des intérêts nombreux, et un matériel considérable. Il est trèsdésirable que l'on n'occasionne pas à ces intérêts et à ce matériel des déplacements fréquents et coûteux. Or, ces déplacements seraient inévitables, si l'on formait, par exemple, une affectation avec des parcelles éloignées les unes des autres, et séparées par des massifs appartenant à d'autres affectations : après avoir fait des coupes d'ensemencement dans une partie de l'affectation, on pourrait être obligé de les entreprendre dans une autre, puis de revenir dans la première pour les coupes secondaires, sauf à retourner l'année suivante dans la seconde.
Ce seraient là des inconvénients très-fâcheux, et la subdivision d'une affectation en deux ou plusieurs parties non contiguës n'en présenterait pas d'autres, qu'ils suffiraient pour que l'on dût s'efforcer de l'éviter; ainsi, il est clair qu'il n'importerait nullement, au point de vue de la régularité désirable dans la gradation des âges, que l'affectation de la première période ou celle de la dernière fût partagée en deux parties, situées l'une au commencement et l'autre à la fin de la série : une pareille disposition ne serait défectueuse que parce qu'elle contrarierait le principe d'économie ci-dessus énoncé ; ce serait une raison suffisante pour ne pas l'admettre.
Les affectations sont enfin d'autant plus propres à faciliter, à assurer l'exécution de l'aménagement, qu'elles sont plus ramassées; car la tendance naturelle des agents est, dans l'assiette des coupes, de procéder de proche en proche, et il y aurait à craindre qu'ils ne négligeassent souvent des opérations urgentes, s'ils étaient forcés pour cela de se transporter sur des points trop éloignés de ceux où auraient eu lieu leurs opérations précédentes.
L'application des règles d'assiette, au point de vue de la position respective que les affectations doivent occuper, trouvera presque toujours assez de garanties dans les dispositions arrêtées pour assurer la marche et l'assiette des coupes annuelles. Il suffira, en général, que les règles soient observées dans l'assiette des coupes de chaque affectation, pour qu'il n'y ait rien à redouter des dangers que pourrait présenter la nonobservation de ces règles, dans l'assiette des affectations, vues dans leur ensemble; toutefois, n'oublions pas que nos futaies sont en grande partie situées dans les montagnes, où les accidents météoriques sont plus fréquents et beaucoup plus redoutables que dans les plaines; qu'elles
offrent, par la hauteur des arbres qu'on y rencontre, beaucoup plus de prise que les taillis aux vents, à la neige, au givre; que la nécessité d'éclaircir les massifs que l'on veut régénérer rend plus périlleuse encore leur situation, et que, dans de semblables conditions, la prudence exige quelquefois que les règles suivies pour l'assiette des coupes dans chaque affectation le soient également pour le rang, l'ordre dans lequel ces affectations arriveront en tour de régénération. Il pourrait être dangereux, par exemple, de placer l'affectation de la première période au sommet d'une montagne, ou dans toute autre partie qu'on saurait plus exposée que les autres aux vents dangereux : l'expérience prouve, en effet, que l'on ne saurait prendre trop de précautions pour mettre à l'abri d'un coup de vent les massifs à l'état de coupes secondaires ou de coupes d'ensemencement, et que la protection qu'offrent pour cela les bois de l'affectation dont elles font partie n'est pas toujours suffisante.
Cette considération des obstacles à opposer aux vents est celle dont on doit le plus se préoccuper dans l'exploitation des futaies.
Nous avons exposé et discuté les raisons qui pouvaient contrarier l'application des règles d'assiette dans l'aménagement des taillis, et nous avons essayé de démontrer qu'elles n'étaient pas de nature à justifier la non-observation de ces règles.
Quoique les pertes d'accroissement auxquelles on se condamne, quand on modifie le classement établi d'après l'âge d'exploitabilité, soient beaucoup plus considérables dans les futaies que dans les taillis, elles ne sauraient cependant prévaloir sur les inconvénients permanents qu'entraînerait une assiette vicieuse des coupes, car ces inconvénients sont de leur côté beaucoup plus graves dans les forêts de la première catégorie que dans les autres.
En fait, l'application des règles d'assiette, dans la formation du plan d'exploitation des futaies, n'est pas aussi embarrassante qu'on serait tenté de le croire : Nos forêts ont été traitées, soit par la méthode à tire et aire, soit par la méthode jardinatoire : dans le premier cas, elles ont été exploitées de proche en proche, la gradation des âges y est donc assez régulière; dans le second cas, elles présentent sur tous les points des arbres de tous les âges, formant des peuplements uniformes dans leur irrégularité; d'où il suit qu'il est indifférent, au point de vue des convenances de l'exploitabilité, de commencer les exploitations par un bout ou par un autre; enfin, en montagne, les coupes ont presque toujours été faites comme le veut la quatrième règle, c'est-à-dire en commençant par les parties inférieures, et la raison en est que cette manière de procéder était la plus commode.
Quoi qu'il en soit, toutes les fois qu'on se posera la question de savoir
si une parcelle doit être rattachée à une affectation autre que celle dans laquelle son âge l'avait fait classer, il faudra pour la résoudre examiner si cette parcelle est assez étendue pour qu'il ne soit pas nécessaire de combiner l'assiette des coupes à y faire, avec celle des parcelles contiguës.
Dans l'affirmative, on devra la maintenir dans la colonne où on l'avait d'abord placée ; dans la négative, on n'hésitera pas à la colloquer dans la colonne qui comprend les massifs qui l'avoisinent.
On conçoit donc que les exigences des règles d'assiette peuvent faire colloquer dans une affectation des bois plus jeunes ou plus âgés qu'ils ne faudrait, si la formation de cette affectation devait être exclusivement subordonnée à l'âge d'exploitabilité; la régularisation de la forêt et les grands avantages qu'on a le droit d'en attendre pour l'avenir le veulent ainsi.
Il semble que ce sont là des principes auxquels il n'y arien à objecter, et pourtant que d'étonnement ne provoquent-ils pas tous les jours ! Il n'est pas rare de voir des forestiers, très-estimables d'ailleurs, se récrier très-sincèrement lorsqu'on les invite à pratiquer une coupe d'ensemencement dans une futaie qui est plus ou moins éloignée d'avoir atteint son plus grand accroissement moyen. C'est qu'ils ne comprennent pas qu'audessus des besoins du peuplement dans lequel la coupe a été assise, il y a ceux de la forêt envisagée dans son ensemble, et ils voudraient exploiter, ils exploitent trop souvent ce peuplement de la manière qu'ils jugent la plus convenable, eu égard aux circonstances locales, sans examiner s'ils obéissent ainsi aux prescriptions de l'aménagement.
Ces erreurs sont fréquentes ; elles proviennent soit d'un défaut de portée dans les vues, soit d'une étude incomplète de l'aménagement que l'on est chargé d'exécuter ; il y a, dans tous les cas, d'autant plus à les redouter qu'elles ont souvent leur point de départ dans un fait sainement apprécié. Les praticiens principalement sont enclins à les commettre, parce qu'ils ont l'habitude de considérer les faits en eux-mêmes ou dans leurs conséquences immédiates et locales : ils n'apprécient que ce qui est sous leurs yeux; les circonstances extérieures et médiates leur échappent.
Mais il est évident que si l'on ne consultait, pour se diriger dans le martelage d'une coupe, que l'état actuel du peuplement, on ne pourrait que perpétuer le désordre dans une forêt, ou l'y mettre s'il n'y était déjà. Aussi ne connaissons-nous pas, dans le contrôle que l'administration supérieure est appelée à exercer sur la gestion de ses agents, d'objet plus important que celui qui concerne l'application des plans d'exploitation adoptés par elle.
Les agents ont fort peu, en général, le sentiment ou l'intelligence des sacrifices qu'il convient de faire à la régularisation de la marche des exploitations. Quand ils ont une coupe à effectuer, ils ne songent guère,
nous le répétons, à porter leurs regards au delà de l'enceinte de cette coupe. Ils ne sont pas, d'ailleurs, plus que les autres hommes, inaccessibles aux tentations de la critique, et ils ont bientôt dit : On veut que nous fassions une coupe d'ensemencement ici; mais c'est absurde : les bois sont encore trop éloignés d'avoir atteint l'âge d'exploitabilité ; ou bien : On nous condamne à sacrifier ce beau repeuplement, en nous empêchant de le dégager du massif qui le domine; mais cela n'a pas le sens commun, ce massif est exploitable, il faut se dépêcher de l'abattre. Et c'est par des considérations de ce genre qu'on bouleverse les aménagements, qu'on compromet l'avenir, et qu'en croyant bien faire, on ne fait pourtant que de la mauvaise besogne.
Revenons à notre classement.
Lorsqu'on a arrêté son opinion sur les règles d'assiette dont l'application à la forêt que l'on aménage est nécessaire, lorsqu'on s'est fixé sur les dispositions qu'elles réclament, on s'y conforme rigoureusement dans la formation des affectations, ce qui veut dire que l'on ne s'arrête ni à l'écart qui existe entre l'âge d'une parcelle et le rang de la période à laquelle il y a lieu de l'affecter, ni aux sacrifices d'accroissement qui pourraient en être la conséquence.
Mais ce n'est pas nécessairement une raison pour que l'on soit ensuite forcé de régénérer tous les bois, dans la période correspondante à l'affectation dont ils feront partie. Nous montrerons comment, dans la première révolution, on est amené exceptionnellement à la règle générale, à régénérer, en même temps que l'affectation de la période dans laquelle on se trouve, des parcelles qui appartiennent à d'autres affectations.
Nous admettrons pour le moment que cette obligation ne doive pas résulter des modifications apportées au tableau des affectations, pour le rendre conforme aux règles d'assiette, et nous allons voir quelles sont celles que le rapport soutenu pourrait encore motiver.
(La suite au prochain numéro. )
PISCICULTURE PRATIQUE APPLIQUÉE A L'EMPOISSONNEMENT DES COURS D'EAU, D'APRÈS LES MÉTHODES DE M. C. MILLET, INSPECTEUR DES FORÊTS.
RAPPORT SUR LES MOYENS DE REMPOISSONNER LA SEINE A L'AIDE DES GARES QUI COMMUNIQUENT AVEC CE FLEUVE.
(Lu à la Société zoologique d'acclimatation dans la séance du 1er février 1856, et présenté à l'Académie des sciences le 4 du même mois. )
La gare Boivin, située sur le territoire de la commune de Choisy-leRoi (Seine), est creusée parallèlement au cours de la Seine, sur la rive
droite de ce fleuve, où elle forme uu grand rectangle de 400 mètres de long sur 60 mètres de large; elle communique avec la Seine par un petit canal de 7 mètres de large, de sorte que ses eaux subissent toutes les variations de niveau que celles de la Seine peuvent subir, et que les poissons peuvent alterner avec la gare et le fleuve.
Les variations de niveau sont très-fréquentes, surtout à l'époque de la ponte de la plupart des espèces de poissons qui peuplent la Seine; outre les variations naturelles qui proviennent des pluies ou de la fonte des neiges, la Seine est encore soumise à des crues subites deux fois la semaine, par le flot provenant des parties supérieures, et destiné à faciliter le tlottage.
Il en résulte que, sur un parcours considérable, les œufs de poisson, notamment des espèces qui déposent leur frai sur les herbes, sont exposés à des causes nombreuses de destruction ; car on sait que les crues d'eau détériorent ou détruisent les frayères naturelles et que l'abaissement du niveau de l'eau a pour effet immédiat la destruction des œufs mis à sec et exposés aux influences de l'air et du soleil et à la voracité des animaux nuisibles.
Par conséquent, pour assurer la reproduction des espèces qui vivent dans la Seine, de manière à en obtenir un peuplement capable de subvenir aux besoins des populations riveraines, il devenait nécessaire de rechercher les moyens de remédier à ces causes de destruction, sans entraver toutefois l'exercice du flottage ou le service de la navigation.
La pisciculture a fourni ces moyens. Dans ses nombreuses explorations sur la Seine, M. Millet, inspecteur des forêts, qui s'occupe , depuis longtemps déjà, du repeuplement des cours d'eau, a eu l'heureuse idée de venir organiser, dans la gare de Choisy, une application pratique de pisciculture destinée au rempoissonnement de tout cours d'eau placé dans les conditions où se trouve la Seine.
Ses premiers travaux dans notre localité remontent au mois d'avril 1852; ils ont été continués sans aucune interruption depuis cette époque jusqu'à ce jour, pendant tout le temps favorable à la ponte et à l'élevage des poissons.
Le succès est complet, et les résultats obtenus ont une importance bien significative; car, pendant les années 1853 et 1854, la reproduction naturelle du poisson a été nulle ou presque nulle dans nos contrées, en raison des influences atmosphériques qui ont été tout à fait contraires à la ponte etàl'éclosion des œufs. Néanmoins, grâce aux travaux de M. Millet, les jeunes poissons et l'alevin qui proviennent des années 1853 et 1854 se présentent aujourd'hui en très-grande quantité; et jamais la gare et même les portions de la Seine limitrophes n'ont offert un peuplement aussi complet et aussi satisfaisant.
Ce peuplement se compose non-seulement des bonnes espèces qui vivent habituellement dans la Seine, mais aussi d'espèces inconnuesjusqu'à ce jour dans la région de Choisy et dans tous les cantons circonvoisins.
Du mois d'avril au mois de juillet 1852, M. Millet a opéré sur la perche ordinaire, la brème , la carpe, la tanche et autres poissons existant dans la localité. De plus, il a commencé à introduire : 1° une très-belle espèce d'écrevisse à pattes rouges; 2° la perche goujonnièrs; 3° l'alose, à l'aide de cent mille œufs au moins; et 4° le poisson rouge ou cyprin doré, à l'aide de trente mille œufs environ fécondés à Versailles et à Saint-Cloud, etc. > Dans les années 1855, 1854 et 1855, à partir du mois de février, il a opéré de nouveau sur les espèces précédentes, et, de plus, sur le saumon, la lote et le brochet..c, -.' On voit et on peut pêcher, dans la gare et dans quelques portions delà Seine, les jeunes poissons et l'alevin de toutes ces espèces, à l'exception du saumon et de l'alose, qui sont des poissons migrateurs ou voyageurs.
On sait, en effet, qu'à certaines époques de l'année, les jeunes saumons et les jeunes aloses quittent les localités où ils sont nés et où ils ont pu prospérer, pour gagner la mer, et qu'ils reviennent quand ils sont adultes ou plus âgés dans ces mêmes localités, pourvu qu'elles soient encore accessibles, et qu'elles ne soient pas dans des conditions incompatibles avec la nature de ces poissons.
Par ces intéressants essais d'introduction ou d'acclimatation, M. Millet a voulu doter notre contrée d'espèces qui n'y sont pas connues, et qui pourraient offrir de grandes ressources pour l'industrie de la pêche et pour l'alimentation publique. On a aujourd'hui l'espoir de voir le saumon venir fréquenter nos rapides et nos graviers ; car M. Missa, l'un de nous, a vu cette année quelques aloses dans la gare et à proximité de la gare ; or, d'après les souvenirs de M. Missa, qui habite le pays depuis trente ans, et qui s'est toujours occupé de la pèche et de la conservation du poisson, l'alose n'avait jamais paru ni dans la gare, ni dans la Seine; il en est de même pour le poisson rouge.
L'acclimatation de ce cyprin doré est résolue. Cette espèce, ayant dans le premier âge les caractères de la carpe, n'avait pas fixé d'abord l'attention des promeneurs ou des pêcheurs; mais, cette année, le poisson rouge s'est montré avec toute la richesse et l'élégance de sa robe et de ses formes.
On remarque même sur les sujets qui ont aujourd'hui de 15 à 20 centimètres de longueur, une vivacité de coloris que ne présentent jamais les poissons de cette espèce livrés au commerce. Après s'être tenue sous les grands bateaux et dans les herbes de la gare, cette belle espèce a commencé à se répandre dans la Seine, à une distance de plusieurs kilomètres.
Ces importants résultats ont été obtenus à l'aide de moyens qui sont d'une grande simplicité et d'une pratique à la portée de tout le monde.
Pour favoriser et assurer la reproduction des espèces existantes dans la localité, M. Millet procède soit par fécondation artificielle, soit par frayère artificielle; il donne la préférence à ce dernier mode. Pour le barbeau et le goujon, il suffit d'approprier des tas ou monticules de graviers lavés par une eau vive; pour le brochet, la perche, la brème, la carpe, la tanche et autres, il suffit de disposer en plan incliné, dans l'eau dormante, des cages à claire-voie ou des claies garnies de brindilles, par exemple, de balais de bouleau. Nous avons vu ces frayères artificielles couvertes de plusieurs millions d'oettfs en voie d'éclosion, et, depuis leur installation dans la gare, au mois d'avril 1852, elles ont produit en trois années des quantités innombrables de jeunes poissons, qui apparaissent par les beaux jours, soit entre deux eaux, soit à la surface de l'eau.
Pour introduire des espèces nouvelles ou étrangères à la localité, M. Millet a recours à la fécondation artificielle; c'est ce qu'il a fait pour le saumon, l'alose, le cyprin doré, etc., espèces pour lesquelles il n'avait pas pu organiser, sur les lieux mêmes, des frayères artificielles. Les œufs de saumon et d'alose ont été transportés dans des boîtes de bois ou dans les tamis de fécondation entre des linges humides, et ceux du cyprin doré sur des brindilles enveloppées d'un linge humide, dans un panier d'osier ou dans un tamis double.
Quand les œufs sont déposés sur les frayères, on peut, si cette précaution est nécessaire, les mettre à l'abri de leurs ennemis en enveloppant la frayère soit par un clayonnage, soit par un grillage ou un filet. On peut aussi enlever les objets qui supportent les œufs et les déposer dans des tamis flottants ou des caisses flottantes. Les œufs de saumon sont déposés sur le fond de l'appareil avec ou sans cailloux.
Les tamis flottants en canevas préparé ou en toile ntétallique galvanisée nous ont paru réunir d'excellentes conditions ; ils sont, en effet, peu coûteux, très-solides et d'un usage facile et commode; des tamis de 30 à55 centimètres de diamètre, et dont le prix est de 2 fr. 25 c. à 2 fr. 50 c., ont fonctionné, pendant trois ans, à partir du mois d'avril 1852, une - grande partie de l'année, sans avoir subi aucune altération notable : leur forme et leur légèreté permettent de les transporter facilement, de les manier et de les disposer sans aucun embarras, aune station convenable dans l'eau, et la forme arrondie des bords ne permet pas le séjour de matières étrangères ou des ordures charriées par les eaux; ils réunissent enfin de grands avantages, en servant à la fois pour la récolte, la fécondation, le transport et l'éclosion des œufs, et pour le transport et la conservation des jeunes poissons, jusqu'au moment dela dissémination.
Ces moyens de repeuplement, nous le répétons, sont très-simples et très-peu coûteux ; M. Millet les a mis en pratique sur une très-grande échelle dans la gare deChoisy, avec un entier désintéressement, sans aucune subvention de l'Etat. Son but était de prouver que la pisciculture pratique fournissait dès à présent les moyens d'empoissonner convenablement les eaux de la France, et de livrer à la consommation une masse considérable de poissons comestibles. Ce but a été complètement atteint.
Nous dirons, en terminant, que M. Millet a été dignement secondé dans cette grande œuvre par MM. Boivin, propriétaires de la gare, qui ont mis tous leurs poissons à sa disposition, et par le service de la navigation et celui de la surveillance de la gare, dont les employés ont fait preuve d'un zèle très-louable.
Choisy-le-Roi, 45 juillet 1855.
Ont signé : MISSA père, inspecteur de la navigation et des ports de l'arrondissement de Choisy-le-Roi. LEMIRE, directeur de la fabrique de produits chimiques. CARRÈRE, docteur médecin. L'ÉPINE, chef d'institution.
JAMIN, graveur sur cristaux. CAILLAUD, ad joint au maire. NORMAND aîné, maire de la commune de Choisy-le-Roi, rapporteur.
A l'appui de ce rapport, la Société zoologique d'acclimatation reçoit une série d'échantillons des espèces indiquées ci-dessus, dans des bocaux et des boîtes étiquetés, cachetés et scellés par les autorités locales. L'ouverture des boîtes contenant des poissons vivants est faite publiquement, sur l'invitation du président, par le secrétaire général des séances.
REVUE COMMERCIALE.
L'année commence sous d'assez bons auspices, la consommation est active, les affaires marchent, malgré la saison, les prix se maintiennent, et la conviction générale est que les cours, déjà bons, s'amélioreront encore au printemps.
Les marchands de bois à brûler seuls éprouvent quelque inquiétude, en voyant la température se maintenir au mois de janvier comme elle devrait être au mois de mars. seulement. Ceci pourra faire tout au plus que le commerce en chantier maintiendra la marchandise disponible à un prix convenable pour tout le monde.
Il ne peut y avoir baisse en forêt; car, au lieu de bois à brûler on ferait immédiatement du bois à charbon, qui se vend bien, ou des perches, ou des bois d'industrie quelconque, dont le placement serait assuré.
Il ne peut y avoir baisse sur les ports, car les ports sont à peu près vides ou garnis de bois appartenant au commerce de Paris, qui maintient les cours à la vente en harmonie avec les prix des achats faits avant l'hiver.
La houille est d'ailleurs si chère que le bois ne peut baisser, et même en maintenant les prix, même en supposant un hiver exceptionnellement doux, la consommation du bois doit s'étendre, et cela seul doit maintenir les cours à ce taux normal qui, sans devenir une charge lourde pour le consommateur , laisse bénéfice au commerce et revenu suffisant au producteur.
Les bois de service sont toujours très-recherchés; on en vend au mois de janvier comme on en vendait au mois de novembre, comme aux meilleurs mois de l'année. Pour mieux dire, il n'y a pas eu d'interruption dans les travaux, la consommation ne s'est pas ralentie.
Les cours se maintiennent en conséquence, et malgré la quantité plus qu'ordinaire de bois exploités et livrés au commerce, il y a placement assuré pour tout.
Aussi ne craint-on pas d'exploiter encore pour profiter des avantages offerts par la demande incessante de marchandises.
Tout vient à point, il faut bien le reconnaître : n'est-cepas un bonheur providentiel que ce surcroît de travail donné par une consommation extraordinaire, ces salaires élevés rendus possibles par les prix élevés de toute matière, cette saison si exceptionnellement belle, quipermetun travail non interrompu, et cette augmentation des ressources des grands propriétaires, qui leur permet de consacrer d'autant plus en travaux, en améliorations, en dons, en aumônes?
On peut exploiter beaucoup et avec d'autant plus de sécurité que tous les produits ligneux sont recherchés; il n'en est pas un qui soit en mauvaise condition, même relative.
Les charbons se placent toujours avec même avantage, soit pour les usines, soit pour la consommation particulière. Un certain ralentissement dans la demande s'était fait sentir après les adjudications; on craignait un moment de réaction : c'était simplement le temps d'arrêt nécessaire pour donner a chacun le temps de compter, de se reconnaître, d'établir le bilan des besoins et des ressources; et, compte fait, quelque abondantes qu'eussent été les provisions, il s'est trouvé qu'elles ne répondaient pas encore à la consommation probable.
Alors le marché s'est ranimé; les demandes sont venues nombreuses, pour s'assurer ce qui restait disponible, et tout se place, tout est placé.
Il y a bien eu quelques déceptions : les détenteurs qui avaient refusé si mal à propos les offres vraiment magnifiques des premiers jours ont dû baisser même au-dessous de ces offres. Il fallait s'y attendre, c'est la
marche ordinaire en pareil cas; mais enfin il y a eu placement à conditions sortables, pas grande différence.
Nous donnerons dans le premier numéro l'état de la consommation annuelle à Paris, et le tableau du mouvement des ports. On y reconnaîtra que la consommation a été considérable, et que, malgré la quantité de matière jetée dans la circulation, il reste exceptionnellement peu de bois disponibles sous toutes les formes. Nous donnerons également dans ce premier numéro les prix courants de chaque article; nous ne pouvons aujourd'hui que répéter que ces prix se maintiennent tels que nous les avons indiqués dans le dernier numéro. Ce n'est que dans un mois à peu près que les cours nouveaux se dessineront pour s'établir sérieusement au mois de mars. DELBET.
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FERS ET DES FONTES.
DÉCEMBRE 1855.
DÉSIGNATION DROIT QUANTITÉS ENTRÉES DIFFÉRENCE des NATURE D'OCTROI EN DÉCtllIBRE. sur le IT.ois correspond.
des hiwuhv, D OCTROI EiW DECEMBRE. J„ D'UNITÉS. décime * Augmentation Diminution XITIÈRES. compris. en en MATIÈRES. compris. 1855. 1854. lii55. 1855.
Bois à brûler, dur. stère. 3 00,0 il) 39,280 33,446 5,834 » — blanc. — 2 22,0 (2) 19,653 17,935 1,718 » Cotrets de bois dur. - 1 80,0 9,330 8,116 1,214 » Menuise et fagots. - 1 08,0 6,469 5,445 1,024 » Charbon de bois. hectolitre. 0 60,0 290,924 300,227 » 9,303 Poussierde ch. debois — 0 30,0 16,455 17,090 » 635 Charbon de terre. îoo kilogr. 072,0 55,072,012 55,357,054 Il 285,042 Charpente et sciage bois dur. stère. 11 28,0 10,891 10,991 » 100 Charpente, bois blanc. — 9 00,0 12,827 16,621 » 3,794 Lattes et treillages. les 100 bottes, 11 28,0 16,736 15.017 1,719 Il liois de déch. en chêne mètre carré. 021,6 1,648 i,963 « 315 — ensapin. — 0 12,0 5,984 4,019 1,965 » Fers, employés dans les constructions. 100 kilog. 3 60,0 764,564 1,439,204 » 674,640 Foute, employée dans les constructions.. — 2 40,0 650,000 471,103 173,897 »
(1) Ces 39,280 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 15,712,000 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 7,856,000 kil. de houille.
(2) Ces 19,653 stères de bois, multipliés par 300 kil., poids du stère de bois blanc, représentent 5,895,900 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 2,947,950 kil. de houille.
DES FORÊTS DE L'ALGÉRIE AU POINT DE VUE DES BESOINS MARITIMES.
(Suite.)
Tout porte donc à croire que le moment est venu de faire pénétrer directement notre influence industrielle et commerciale dans ces contrées.
L'exploitation des forêts est un des moyens les plus puissants d'arriver à ce résultat. Notre marine y trouverait d'abord un bien grand avantage, car on sait, par le travail consciencieux de M. de Maisonseul, commandant du port d'Alger, que le mètre cube de bois d'oeuvre de toute essence, rendu de Bone ici, revient à 40 fr., tandis qu'il en coûte 87 en moyenne, lorsqu'il nous arrive par Toulon.
Nous venons de donner l'esquisse d'une intéressante excursion forestière faite dans la grande Kabilie par M. Schmit, garde général des forêts à Aumale. Nous compléterons cette notice par un exposé des notions que cet observateur judicieux a recueillies sur les frontières d'Alger et de Tunis.
Avant d'aborder la partie principale de son exploration, M. Schmit s'est occupé de la forêt des Beni-Salah (au sud de Bone), qui contient des cantons de chênes-zènes que M. Croix, maître charpentier au port de Toulon, comparait, en 1846, à ce qu'il avait vu de plus beau en Italie et en Russie.
Or, cette forêt, d'une contenance de 15,000 hectares en chênes-zènes et en chênes-liéges ; celles de La Calle, qui présentent 9,000 hectares de chênes-liéges; celles deSkira, située à 40 kilomètres au sud-est de cette ville et qui possède un peuplement de chênes-zènes de dimensions colossales, ne sont que la continuation des vastes massifs que l'on rencontre dans la Tunisie, lorsque l'on franchit la frontière algérienne du côté de Tabarka, village en ruines sur le bord de la mer. Les Anglais tiraient jadis des bois de construction de ces contrées : en 1817, à l'époque où ils reprirent leurs communications régulières avec lesBarbaresques, ils proposèrent au dey d'Alger une somme annuelle de 200,000 fr. pour avoir le droit de couper du bois de construction dans les forêts de La Calle et des Beni-Salah, jusqu'à la Seybouse. Ils firent des propositions analogues au bey de Tunis, pour jouir de la même faculté dans les bois de Tabarka, et des endroits voisins. Il ne paraît pas que ces ouvertures aient eu des résultats.
L'Angleterre dut le regretter, surtout pour les forêts de Tabarka qui s'étendent sur presque tout le bassin de cette rivière et dont l'essence principale, le chêne-zène, jugée supérieure au plus beau chêne anglais, eût offert de précieuses ressources en bois de construction à ses chantiers de Gibraltar, de Malte et des îles Ioniennes.
Muni d'un ordre du bey de Tunis, M. Schmit put visiter les bois du Mekena, des Ouled-ben-Saïd, du Baïada, du Bou-Houina, et des OuledSedra, situés sur les territoires de Tabarque et des Khoumir. Le chênezène et le chêne-liége y dominent et se présentent dans la proportion de deux à un, tandis qu'un rapport inverse se remarque dans les forêts de Bou-Klellout et de l'Oued-el-Khal, où le chêne-liége occupe une plus no-
table étendue. Cette dernière essence règne presque exclusivement dans le Souk el Trouk ; mais cette forêt, véritable oasis au milieu de montagnes de sable, est sans issue et, par suite, inexploitable.
Le chêne-zène, qui occupe les versants nord de la montagne des Ouledben-Saïd, forme un peuplement presque homogène jusqu'au Kef-Settara.
Dans les autres parties, on trouve les deux essences mêlées ou par bouquets distincts.
La forêt des Ouled-ben-Saïd mérite de fixer l'attention; quoiqu'à moitié ruinée par de trop nombreuses coupes mal dirigées, elle vaut la peine qu'on la soumette à un traitement qui lui permette de produire des bois de marine de grosse et de moyenne charpente, car les chênes-zènes y atteignent des proportions remarquables, leur diamètre moyen pouvant être évalué à 1 mèt. 20 cent. Elle a d'ailleurs, — sous le rapport de la vidange, — des avantages marqués sur les forêts qui l'avoisinent. Ses produits, amenés jusqu'au pied de la montagne par le Sahel-el-Trek, chemin muletier construit par Ben-Ayet, qui tira de cette forêt une quantité con sidérable de pièces de charpente, seraient aisément charriés de ca point jusqu'à Tabarque, en jetant simplement un pont de bois sur l'Ouedel-Kébir. Le gouvernement tunisien a tout intérêt à réaliser ces indispensables améliorations.
Des centaines de pièces de bois pourrissent aujourd'hui sur le bord de la mer, triste témoignage d'exploitations faites dans l'ignorance des principes qui doivent guider le bûcheron, et avec une indifférence profonde pour les besoins des générations futures. Ainsi, les arbres ont tous été coupés à 60 cent. du sol, ce qui a le double inconvénient d'empêcher leur régénération naturelle et de priver les pièces de charpente d'une partie de leur longueur, celle où le bois est le plus compacte et le plus parfait.
Quoique des exigences de position aient empêché M. Schmit de faire un examen approfondi de ces intéressantes forêts, il en a assez vu pour pouvoir affirmer que le bey de Tunis s'assurerait un revenu de plusieurs millions s'il les faisait exploiter intelligemment, et qu'il y trouverait des ressources suffisantes pour relever sa marine déchue, et lui faire reprendre le rang qu'elle occupait au commencement de ce siècle, lorsque Hamouda-Bey se rendait si redoutable au commerce européen.
On a vu que des forêts couvrent tout le bassin de la rivière de Tabarque (Oued el Kebir). En effet, d'autres peuplements importants de chêneszènes existent à une grande distance de la mer sur le cours d'eau qui en prend le nom de Oued Zène, nom que lui donne El Bekri. Le géographe arabe ajoute que le pays s'appelait Blad Zana, et qu'il était couvert d'une vaste forêt de zènes dont le fruit se transportait en Afrikïa (Tunisie sep-
tentrionale), et dont le bois était si renommé pour la confection des arcs, que le calife de Bagdad avait frappé ce canton d'un tribut annuel de douze mille de ces armes de guerre.
Le pays des Beni-Mazen, des Ouled-Ali, des Merasna et des OucheLata présente aussi de l'intérêt au point de vue forestier; il offre de grands bois qui peuvent être comparés aux plus belles forêts de l'Europe et où les essences dominantes sont le chêne-zène et le chêne blanc.
M. Schmit pense que la Tunisie est aussi intéressée que nous-mêmes à faire exploiter ses riches forêts par l'industrie française. Cet avantage a été compris et recherché par une autre puissance ; c'est une raison de plus pour que nous nous en occupions sérieusement, et de manière à ne pas nous laisser prévenir. Tous les bois de construction employés aujourd'hui à Tunis viennent de la Suède et de Trieste. Des agents français détachés auprès du bey lui enseigneraient la manière d'exploiter ses propres forêts, non-seulement pour les besoins de sa marine, mais pour tous les autres. Il en pourrait résulter un accroissement de revenu d'environ 3 millions, résultat très-appréciable dans un pays où les ressources budgétaires diminuent de jour en jour et n'atteignent pas en ce moment 15 millions de francs par année.
Cette invasion pacifique de l'industrie française en Tunisie serait toute au profit de la contrée, car elle amènerait infailliblement une connaissance plus exacte et plus complète des nombreuses ressources qu'elle présente, gisements métallifères, essences résineuses, etc.
M. Schmit, qui ne s'est pas renfermé strictement dans sa spécialité, a compris tous ces résultats indirects et d'autres non moins importants qui découleraient nécessairement de l'exploitation des forêts tunisiennes par des mains françaises. Mais le sujet est trop intéressant pour être traité d'une manière en quelque sorte incidente. Nous nous contenterons donc de l'avoir indiqué ici, sauf à y revenir plus tard et avec toute l'étendue qu'il comporte.
Nous ferons remarquer en terminant que les pérégrinations forestières de M. Schmit n'étaient pas plus exemptes de danger sur la frontière de Tunis qu'en Kabilie. Pour ceux qui connaissent cette région, le nom des Khoumir, dont notre voyageur a visité le territoire, a une signification des plus sinistres, car il appartient à une tribu de brigands déterminés qui se tiennent à cheval sur deux territoires pour pouvoir plus facilement échapper à toute autorité. Les études faites dans de pareilles circonstances ont, en outre de leur mérite intrinsèque, celui de constituer un véritable acte de courage et de dévouement dont on doit tenir compte à celui qui l'accomplit.
; LES INONDATIONS.
Les désastres causés par les dernières inondations ont ému douloureusement tous les cœurs compatissants. Les organes de la presse périodique n'ont pas manqué cette occasion de se livrer à des dissertations plus ou moins éloquentes sur les moyens de conjurer le fléau et à des complaintes plus ou moins touchantes sur les malheureux qui en ont été victimes; mais, aujourd'hui, les eaux sont rentrées dans leur lit : il n'en est plus question, et il n'en sera probablement plus question, jusqu'à ce qu'elles en sortent de nouveau, et que de grands sinistres viennent encore épouvanter les populations.
C'est ainsi que cela se passe dans notre bon pays de France : on y est d'une sensibilité très-vive, mais peu durable; on y est propre aux grandes choses, à condition qu'elles puissent se faire vite. Si elles demandent du temps, de la persévérance, de la suite dans les idées, n'y comptez plus. Voyez plutôt où en est le reboisement des montagnes! Le reboisement! est-ce que c'est faisable? Une œuvre qui exigerait des siècles d'efforts soutenus! Il est bon, sans doute, d'en causer quelquefois, car c'est un texte qui donne carrière a l'imagination; mais la prendre au sérieux, en commencer l'exécution avec la certitude de ne pouvoir la terminer soimême ; allons donc ! qui voudrait s'en mêler?
Aussi, y a-t-il quelque ^chose de risible et de triste à la fois dans ces vœux sur le reboisement, qui se reproduisent à chaque inondation nouvelle, dans cette répétition stérile des mêmes idées et des mêmes projets.
Nous devons faire, toutefois, une exception en faveur de deux articles publiés récemment dans le Constitutionnel par M. Jacques Valserres. Il nous a paru qu'il y avait, surtout dans le dernier, des vues nouvelles. Nous le reproduisons donc, et, si l'espace nous le permet, nous le ferons suivre de quelques réflexions.
« Quel est aujourd'hui le moyen en usage pour se préserver des inondations ? c'est l'endiguement des fleuves et des rivières. Or, l'expérience nous prouve combien peu est efficace un moyen aussi coûteux. Si l'on additionnait toutes les sommes dépensées à faire des digues seulement depuis un demi-siècle, on arriverait à des milliards. Cependant, comme on n'attaque pas le mal dans sa racine, loin de décroître, les inondations deviennent chaque année plus menaçantes. Eh bien! si, au lieu de s'attacher aux plaines, on avait consacré quelques centaines de millions au reboise-
ment des pentes dénudées et au regazonnement des montagnes pastorales , si, comme conséquence, on avait soumis tous les terrains inclinés au régime forestier, les bassins de nos fleuves et de nos rivières n'auraient plus à craindre les débordements. Ce n'est pas tout. Les milliards consacrés à faire des digues, au lieu d'offrir de la sécurité, sont un véritable danger pour l'avenir.
« On sait en Italie les résultats funestes de l'endiguement du Pô et de l'Adige, qui déjà remonte à plus d'un siècle. Privées des limons réparateurs dont chaque crue nouvelle les enrichissait, les terres riveraines n'ont fait que s'appauvrir. Placées au-dessous du niveau du fleuve par suite de l'exhaussement successif du lit, elles se sont trouvées à la fois sujettes aux infiltrations du courant, et n'ont pu se débarrasser des eaux qu'elles avaient reçues. C'est ainsi qu'elles ont vu leur fertilité décroître, et l'état salubre dont elles jouissaient se pervertir. Mais, au prix de tant de sacrifices, ont-elles au moins conquis la sécurité? Non, car à mesure que le lit du fleuve s'exhausse, il faut élever les digues, aujourd'hui placées bien audessus des terres cultivables, et la plus légère rupture porterait au loin la ruine et la désolation. Ainsi, après avoir coûté des sommes incalculables, l'endiguement du Pô et de l'Adige n'a fait qu'accroître le danger des inondations et les charges qui grèvent les riverains.
« Supposons, au contraire, qu'au lieu de consacrer tous leurs soins à préserver la plaine, nos voisins d'Italie eussent dirigé leurs efforts vers les montagnes d'où s'échappent les rivières; si, considérant ces montagnes comme la véritable zone de défense, ils eussent conservé les bois et empêché les gazons de se détériorer; s'ils avaient replanté les pentes chauves, fait des barrages en travers pour éteindre les torrents, édicté un mode de culture pour les terrains abruptes, ils auraient ainsi, avec une dépense bien inférieure à celle de l'endiguement, rendu le régime de leurs rivières plus régulier, et, tout en conservant aux campagnes le bénéfice du limon, ils auraient réduit les débordements à desimpies crues inoffensives. C'est ainsi qu'en diminuant les charges des riverains, ce système n'aurait fait qu'augmenter encore leur sécurité.
« Les dangers suscités par l'encaissement du Pô et de l'Adige n'ont point encore frappé l'esprit de nos hommes d'Etat et de nos ingénieurs. A leurs yeux, le meilleur moyen de se mettre à l'abri des inondations consiste toujours dans l'endigage, témoin les nombreux projets de lois proposés sur la matière depuis quelques années. Un des plus célèbres est celui soumis à la Chambre des pairs le 17 janvier 1842, par M. Teste, ministre des travaux publics. lls'agissait alors de ceindre nos fleuves et nos rivières d'une ligne de chaussées insubmersibles. Mais on ne réfléchissait point que, le travail une fois terminé, l'exhaussement successif du lit des
artères principales eût entraîné la même opération sur chacun de leurs affluents, et que, toutes les digues terminées, il aurait fallu les élever sans cesse pour les garantir contre les plus hautes crues. Dès lors, à quoi bon adopter un système qui avait le double inconvénient de créer aux riverains les charges permanentes les plus lourdes, et d'épuiser le sol en le privant des limons réparateurs ?
« A nos yeux, c'est donc un véritablebonheur pour l'agriculture que tous les projets de lois sur l'endiguement de nos cours d'eau aient échoué. Le seul moyen de mettre les plaines à l'abri des inondations, c'est de constituer les pays de montagne en zone de défense, c'est-à-dire de reboiser les pentes ardues déchirées par les ravins, de couvrir de gazons les pelouses détruites par l'abus du parcours, de régler les modes de culture sur les sols inclinés ; en un mot, de soumettre au régime forestier toutes les parties du territoire que le dégel et les pluies torrentielles exposent à une dégradation incessante.
« Mais citons un exemple qui fera mieux ressortir l'efficacité de ce système. L'ancienne métropole des Cathuriges, Chorges, aujourd'hui petit bourg des Hautes-Alpes, est assis au pied d'une montagne composée d'argile et de schiste. Tant que les habitants- se bornèrent à user du pâturage avec modération, leur sécurité fut entière ; mais du jour où ils le surchargèrent de troupeaux, il se forma dans la montagne un torrent furieux qui vint déboucher en tête du bourg ; on fit une digue de 2 mètres d'élévation que les détritus entraînés par les pluies comblèrent aussitôt. Successivement la digue fut portée à 4, à 8, et jusqu'à 15 mètres. Parvenue à cette hauteur, lors des inondations de 1840, elle fut recouverte d'une masse énorme de gravier, et le bourg complètement submergé. On trouva sur la place du lieu des blocs de pierre de plus de 1,000 kilogrammes.
Au désespoir, les habitants se ravisèrent: ils interdirent le parcours de la montagne et y firent quelques semis. Avec ces mesures bien simples, la fnreur du torrent, qu'une digue de 15 mètres d'élévation n'avait pu contenir, se calma comme à vue d'œil, et depuis lors Chorges n'a pas éprouvé la plus légère crainte.
« Des mesures semblables, appliquées à tous les terrains où se forment les inondations, auraient sans doute le même résultat. Elles seraient beaucoup moins coûteuses et autrement efficaces que les digues dont l'impuissance est reconnue par les ingénieurs eux-mêmes et par les agronomes.
« Une fois la zone de défense mise à l'abri des pluies torrentielles et des influences atmosphériques, les travaux pour protéger les riverains dans la zone de plaine ne seraient plus que secondaires. Avec un régime plus régulier, les fleuves et leurs affluents deviendraient faciles à maîtriser. Sur les grandes artères paisibles comme la Seine, de simples plantations suf-
firaient pour protéger les rives. En cas d'érosions des berges, de faibles perrés ou de minces clayonnages fixeraient le courant dans le lit et n'empêcheraient point les crues de porter au loin dans les plaines leurs limons bienfaisants.
« Sur les fleuves rapides comme le Rhône, il s'agirait de conserver un chenal assez large pour le volume des eaux, mais de permettre aux crues de s'étendre sur les rives pour en accroître la fécondité. Dans ce but, on réserverait, de chaque côté du lit, une zone plus ou moins profonde qui serait plantée d'arbustes touffus et d'essences à longues racines. Les arbustes amortiraient la rapidité du courant, et les essences à longues racines protégeraient le sol contre l'action des eaux. S'il était nécessaire de recourir à des digues, elles devraient être submersibles.
« Sur les rivières torrentielles, comme la Durance, le salut des berges exigerait peut-être des travaux d'une plus grande résistance. Toutefois, la restauration des pentes, en rendant le régime de ces rivières plus régulier, diminuerait leur force d'impulsion, et réduirait beaucoup les frais de défense. Si, dans les parties hautes de leur cours, il devenait indispensable de les encaisser, ou pourrait y établir des digues insubmersibles; mais alors, pour empêcher le lit de s'élever au-dessus du sol arable, il faudrait assujettir ce dernier à un colmatage rationnel. C'est ainsi qu'on garderait un niveau constant, et qu'on empêcherait les terres de s'appauvrir.
« A l'égard des torrents, si nombreux dans les Alpes, les Cévennes et les Pyrénées, le danger qu'ils offrent aujourd'hui provient de la quantité d'humus et de graviers qu'ils entraînent au moment des pluies. Or, ce danger disparaîtrait par le reboisement des pentes, le regazonnement des montagnes pastorales et la soumission de tous les terrains inclinés au régime forestier. Les débordements auxquels ils sont sujets perdraient donc leur caractère dangereux, et leur lit, au lieu de se tarir après l'orage, conserverait un cours régulier que l'agriculture pourrait facilement utiliser.
« Tel est l'ensemble des mesures propres à éloigner le terrible fléau des inondations. Le système financier et administratif que nous avons esquissé nous paraît parfaitement répondre à la grandeur du problème qu'il s'agit de résoudre. D'un autre côté, l'expérience nous démontre combien les digues sont impuissantes à réprimer les débordements; elle nous enseigne, au contraire, combien il est facile d'éloigner tous les désastres par la conservation des bois et des gazons qui tapissent nos montagnes.
Il n'y a donc pas à hésiter. Il faut renoncer aux endigages, système doublement ruineux pour les riverains, et décréter d'utilité publique le reboisement et le regazonnement, les seuls moyens logiques, efficaces, de prévenir à tout jamais le terrible fléau des inondations.
« L'adoption de ce système aurait sur la société tout entière, les conséquences les plus heureuses. Au point de vue météorologique, le reboisement des montagnes et les plantations exécutées le long des fleuves et des rivières, en adoucissant le climat, modéreraient l'impétuosité des vents et empêcheraient le retour périodique des grêles et des gelées, si fatales à la richesse publique. Au point de vue agricole, en devenant plus bénignes, les inondations ne causeraient que de faibles dommages aux récoltes, et, loin d'entraîner les terres, elles les recouvriraient d'un limon fertilisant.
Les frais d'endigage, aujourd'hui très-onéreux, se trouveraient beaucoup réduits, et le cours des rivières devenant plus régulier, on pourrait le détourner au profit des irrigations ; on doublerait ainsi l'importance du bétail et la masse des engrais, chose fort importante pour la production des céréales et de la viande, dont nous éprouvons quelque disette.
« Au point de vue de l'industrie et du commerce, si nos rivières et nos fleuves étaient moins sujets à s'abaisser au-dessous de l'étiage, les usines mues par l'eau ne seraient point exposées à de nombreux chômages, qui obèrent nos fabricants, et la navigation, moins souvent interrompue, offrirait au commerce des moyens de transport plus réguliers, moins dispendieux.
« Enfin, l'application de ce système procurerait à l'Etat des économies considérables, sur la reconstruction et l'entretien des routes, ponts et chaussées, que les débordements dégradent chaque jour. En 1846, les dépenses se sont élevées à 14,400,000 fr., rien que pour le bassin de la Loire. Dans les Hautes-Alpes, la conservation des routes impériales coûte plus de 400,000 fr. chaque année. Le quart de cette somme suffirait après la restauration des pentes et des montagnes. Le Trésor a donc un intérêt immense à la réalisation immédiate des idées que nous préconisons.
« Mais, puisque le Trésor, l'industrie, le commerce et l'agriculture retireraient les plus grands avantages de cet ensemble de mesures, il appartient à un gouvernement ami du progrès matériel et du bien - être des peuples de les mettre à exécution , et c'est avec confiance que nous nous reposons sur lui du soin de les appliquer. » JACQUES VALSERRES.
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
Promotions et nominations de plusieurs agents forestiers dans l'ordre impérial de la Légion d'honneur. — Pisciculture pratique. — Produits des forêts résineuses de la Caroline du Nord.
Promotions et nominations dans l'ordre impérial de la Légion d'honneur, décrets des 27 et 29 décembre. — Au grade d'officier : M. URGUET de Saint-Ouen, administrateur des forêts, trente-quatre ans de services.
Au grade de chevalier : M. TALLOTTE, conservateur des forêts à Carcassonne (Aude), vingt-cinq ans de services.
M. FOUQUlER, inspecteur des forêts et domaines de la Couronne à SaintGermain-en-Laye (Seine-et-Oise), vingt-six ans de services.
=Pisciculture.-Nous publions aujourd'hui (p. 11-15), un rapport trèsintéressant sur les magnifiques résultats obtenus par M. Millet dans ses essais d'empoissonnement des cours d'eau. Nos lecteurs ne liront pas avec moins d'intérêt la lettre suivante, adressée à l'Académie par ce savant pisciculteur : « J'ai l'honneur d'adresser à l'Académie un rapport qui résume les principaux résultats que j'ai obtenus dans la gare de Choisy-le-Roi, par l'emploi de moyens réellement pratiques destinés à assurer l'empoissonnement des cours d'eau. Ce rapport est signé par l'inspecteur de la navigation et des ports de l'arrondissement de Choisy-le-Roi, les autorités locales et les personnes notables du pays, très-compétentes en pareille matière.
« Dans mes explorations sur les rives de la Seine, j'avais reconnu que la gare de Choisy pouvait être utilisée pour des travaux de pisciculture pratique.
« Cette gare, qui est creusée parallèlement au cours de la Seine, forme, sur la rive droite de ce fleuve, un grand rectangle de 400 mètres de longueur sur 60 mètres de largeur; elle communique directement avec la Seine par un petit canal complétement libre, sans écluse et sans barrage.
« Pendant ces trois dernières années, à partir du mois d'avril 1852, j'ai installé mes appareils dans la gare, et j'y ai organisé des frayères artificielles sous la surveillance des employés de la gare.
« Mes frayères artificielles couvertes, chaque année, de plusieurs millions d'œufs, et mes appareils flottants chargés, chaque année, de plusieurs milliers d'œufs des meilleures espèces, ont produit des quantités considérables de jeunes poissons qui peuplent aujourd'hui la gare, et qui, au fur et à mesure de leur développement, se répandent dans les cantons limitrophes, sur tout le cours de la Seine.
« Ces résultats, surtout ceux qui se rapportent aux années 1855 et 1854, pendant lesquelles la reproduction du poisson a été nulle ou presque nulle dans la contrée, en raison des influences atmosphériques et du régime des eaux, ont produit une heureuse impression sur les riverains pour la propagation et la conservation du poisson, et sur les nombreux visiteurs qui ont suivi mes expériences, et qui n'ont pas tardé à en appliquer les principes sur divers points de la France et de l'étranger.
« Pour ne laisser subsister aucun doute, aucune incertitude dans l'esprit des riverains, même les plus incrédules, j'ai eu l'idée de faire éclore dans la gare des œufs de poissons rouges ou cyprins dorés de la Chine. Dès le printemps de 1855, cette jolie espèce était abondamment répandue dans la gare et dans le cours de la Seine à plusieurs kilomètres de distance. Antérieurement à cette importation, l'inspecteur de la navigation et les riverains qui habitent le pays depuis plus de trente ans n'avaient pas vu ou péché un seul poisson rouge.
« L'importance des résultats obtenus fixera, j'ose l'espérer, la bienveillante attention de l'Académie, et pourra peut-être donner une nouvelle preuve à l'appui de l'opinion que j'ai émise, à savoir : que la pisciculture pratique était facile et peu coûteuse sur les cours d'eau, et que leur empoissonnement pouvait être opéré sans avoir recours à des établissements spéciaux, qui créent souvent des positions exceptionnelles et qui nécessitent toujours un personnel dispendieux, mais qui, en réalité, ne donnent que des résultats insignifiants et incapables de produire des matières alimentaires.
« Paris, 4 février 1856.
« C. MILLET, »
= Produits des forêts résineuses de la Caroline du Nord. — L'État de la Caroline du Nord contient, dit-on, plus de 2 millions d'acres de terres marécageuses couvertes de vastes forêts d'arbres résineux d'une magnifique espèce, d'une dimension énorme. Ces forêts sont plus précieuses pour l'État que toutes ses mines d'or, car elles produisent d'immenses quantités de goudron, de poix, de térébenthine et de résine.
Le suc de ces arbres s'extrait de la manière suivante : on creuse dans le tronc, tout près du sol, un trou pouvant contenir trois pintes de liquide ; au-dessus, et à différentes places, on pratique dans l'arbre des incisions qu'on relie par de petits canaux taillés dans l'écorce au trou en question, de façon que toute la séve qui s'échappe des blessures faites à l'arbre coule dans le réservoir commun préparé pour la recevoir. Les incisions sont répétées tous les huit ou quinze jours, de manière à donner une nouvelle surface à l'exsudation de la séve, jusqu'à ce que l'arbre finisse par être complètement à vif de tous les côtés de la base, à une dizaine de pieds de hauteur, ce qui arrive au bout d'un petit nombre d'années. C'est là ce qui explique ces forêts d'arbres morts qu'on rencontre constamment debout, sans branches ni écorce, semblables à des chantiers de construction de navires encombrés de grands mâts hors de service. La séve (térébenthine à l'état brut) commence à descendre dans les réservoirs vers le milieu de mars, lentement d'abord, mais de plus en plus rapidement à mesure que la saison s'avance ; puis elle se ralentit de nouveau en automne pour cesser complétement de couler en hiver. Ce liquide, qui, lorsqu'il descend dans les réservoirs, possède à peu près la consistance du miel, est enlevé à mesure que ceux-ci deviennent pleins, puis transvasé dans des barils où il se solidifie à peu près. Le rendement moyen de chaque arbre est d'environ 3 gallons par an. Chaque baril contient ordinairement 70 pour 100 d'huile ou d'esprit de térébenthine, qu'on extrait au moyen d'un appareil grossier, qui n'est autre qu'une grande cornue de fer d'une capacité de deux ou trois barils. On place la térébenthine dans la cornue; l'huile en est séparée par la distillation, et la résine reste au fond. Mais il ne faut pas croire qu'une fois mort le pin ne sert plus à rien. Dans les arbres abandonnés depuis longtemps, la matière résineuse s'est concentrée dans les couches intérieures du bois au moment où la végétation a cessé; ce bois mort est alors employé a faire du goudron.
Dans ce but, on coupe l'arbre en billots de dimensions convenables, puis on empile ces billots et on les recouvre de terre à peu près comme le bois dont on veut faire du charbon. Toutefois, la pile de bois est élevée sur un monticule préparé à cet effet, et dont le sommet affaissé présente la forme d'un entonnoir. Au centre de la cavité est un petit canal qui communique à un fossé creusé tout autour du monticule. On allume la
pile par le centre, et l'on modère la combustion jusqu a ce que toute la matière résineuse entre en fusion et coule dans la cavité centrale, et de là dans le fossé extérieur, où on la recueille pour la mettre en baril pour l'exportation. C'est le goudron du commerce.
(Courrier des États-Unis.)
ÉTAT GÉNÉRAL DU PERSONNEL DU SERVICE FORESTIER DE L'ALGÉRIE.
PROVINCE D'ALGER.
SERVICE ADMINISTRATIF.
MM.
MONNIER, insp. de 2e cl., chef du service de la province, à Aiger.
ROGER, Louis, s.-insp. de 3e el., à Alger.
MALTE, g. g. sédentaire de 3e cl., à Alger.
N., g. g. des travaux d'art, à Alger.
SERVICE ORDINAIRE.
JAUFFRET, s.-insp. de 3e cl., à Blidah.
lIECKENBINDER, chevalier de la Légion d'honneur, g. g. de lre cl., à Medeah.
BAUDOUIN DE MAISONBLANCHE, g. g. de 2e cl., à Cherchell.
CORNATON, g. g. de 2e cl., à Dellys.
SCIIMIT, g. g. de 2e el., à Aumale.
N., s.-insp., à Milianali.
ARNOULD, g. g. de 3e cl., à Milianah.
DEMONTZEY, g. g. de 3e cl., à Orléansville.
LAPOINTE, g. g. de 3e cl., à Tenez.
FERRY- FoNTNoUVELLE, brigadier forestier faisant fonction de g. g. adjoint, à Coleah.
PROVINCE DE CONSTANTINE.
LICHTLIN, insp. de 4e cl., chef du service de la province, à Constantine.
NIEPCE, s.-insp. sédentaire de 38 el., à Constantine.
DUFEU, s.-insp. de 2e el., chef de la section des travaux d'art, à Constantine.
SUBDIVISION DE CONSTANTINE.
PERGABT, s.-insp. de 2E cl., chef de la subdivision, à Constantine.
N., g. g., à Constantine.
MANGENOT, g. g. de 3e cl., à Batna.
MM.
ROCHET, brigadier faisant fonction de g.
g. adjoint, à Lambèze
DEMOYEN, g. g. de 3e cl., à Sétif.
N., g. g., à Rordj-bou-Aréridj.
SUBDIVISION DE PHILIPPEVILLE.
BEAUIlEGARD, s.-insp. de 1re el., chef de la subdivision, à Philippeville.
D'HARANGBIER DE QUINCEROT, g. g. de lre cl., à Philippeville.
ROCHOUX, g. g. de 2e ci., à J emmapes.
N., g. g., à Collo.
CHITTlER, g. g., à Djedjeli.
GAUCHER, g. g. de 3e cl., à Bougie.
SUBDIVISION DE BONE.
LAMBERT, s.-insp. de 1re cl., chef de la subdivision, à Bone.
DELAVAIVRE, g. g. de 2e cl., à l'Edough.
DE GAYFFIER, g. g. de 3e cl., à Barrai.
CALINET, g. g. de 2e cl., à Guelma.
SUBDIVISlON DE LA CALLE.
DÉZÉ, s.-insp. de 2° cl., chef de la subdivision, à La Calle.
STOCK, g. g. de 2e el., à La Calle.
PROVINCE D'ORAN.
DE CHERRIER, insp., chef du service de la province, à Oran.
HENRI, s.-insp. sédentaire, à Oran.
ROUSSET, g, g. des travaux d'art, à Oran.
WIUIART, brigadier forestier faisant fonction de g. g. adjoint, à Oran.
PASTOUREAU, g. g., à Mostaganem.
N., g. g., à Sidi-bel-Abbès.
MICHON, g g., à Tlemcen.
FIÉVET, g. g., à Mascara.
CORDAGE DU BOIS ROND (1).
le mot cordage, bien qu'il soit un dérivé de l'anciqrme i ^^| urer le bois de chauffage, remplacée présentement pa m §36r<îx^sî es mesures métriques, et nous définirons le cordage • en e ra lS éra n consistant à déterminer la quantité de stères ou de m ue peut fournir un certain nombre d'arbres ou de tiges
d'une grosseur et d'une hauteur connues.
Une observation préalable à placer ici, c'est qu'il importe essentiellement de bien distinguer l'une de l'autre deux expressions que l'on confond souvent, quoiqu'elles aient des valeurs très-différentes ; c'est le stère et le mètre cube : dans le but de prévenir toute équivoque, nous appellerons stère, la mesure métrique comprenant des vides avec le plein, comme une mesure de bois rond, et mètre cube, la même mesure en bois plein, ,comme une pièce de charpente : le stère énoncera donc un volume, et le mètre cube une solidité.
Le cordage des bois a fixé l'attention d'un assez grand nombre des autorités que compte la science forestière. En France, Duhumel et Tellèsd'Acosta (2); en Allemagne, Burgsdorf, Hartig et Werneck se sont livrés sur ce sujet à des expériences multipliées et minutieuses ; mais leurs procédés, dénués de méthode, n'ont abouti qu'à des résultats trop peu précis pour offrir toute l'utilité qu'on aurait le droit d'attendre d'expériences exécutées sur une large échelle et sous la direction de tels maîtres ; la faute des expérimentateurs nous semble être d'avoir négligé la considération de la forme, c'est-à-dire de n'avoir pas rattaché la configuration variée des bûches à quelque type géométrique, comme le cylindre ou le demi-cylindre, ou autre segment de ce solide. Nous ferons néanmoins bientôt notre profit des matériaux que nous ont légués ces auteurs, relativement au cordage du bois de quartier. Quant au bois rond ou rondin proprement dit, qu'ils n'ont pas ou presque pas distingué du quartier, nous allons essayer d'en asseoir le cordage sur une base à la fois théorique et pratique (3).
Ce problème a pour objet de chercher quel nombre de billots d'un dia-
(1) Note extraite de la nouvelle édition du Manuel théorique et pratique de l'Estimateur des forêts, devant paraître prochainement.
(2) Et les Cpmmissions d'aménagement. (Note de la rédaction.)
(3) Les Commissions d'aménagement ont tenu compte de toutes les circonstances dont parle M. Noirot.
mètre ou d'un pourtour donné peut être renfermé dans le cadre d'un stère ou d'une membrure rectangulaire d'un mètre de côté. Nous supposerons, dans un premier calcul, que le diamètre de chaque billot est uniformément de 20 centimètres, et que le billot est un cylindre parfait. La base du stère contiendra une couche de 5 billots, et la tranche verticale 5 couches pareilles ; ce qui fera 25 billots renfermés dans la membrure.
Nous évaluerons la solidité réelle des 25 billots pour la soustraire ensuite du mètre cube, afin de connaître à la fois le plein et le vide du stère.
PREMIER CALCUL.
La solidité de chacun de ces cylindres est égale au produit de leur hauteur commune (1 mètre) par leur base, ou par la surface du cercle dont nous connaissons le diamètre.
On sait que la surface d'un cercle est égale au carré du diamètre multiplié par le chiffre 0,7854, exprimant le quart du rapport de la circonférence au diamètre.
Nous avons ici le carré du diamètre = 0m-car-,04, dont le produit par 0,7854 est 0ra-car-,031416 ; puis devient Omo cub. ,031416 pour la solidité du billot de 1 mètre de longueur.
Multipliant ce dernier chiffre par 25 billots, on a une solidité totale de 0m CUb., 7854, et par conséquent une somme de vides représentée par 0m. cub.?2146.
DEUXIÈME CALCUL.
On veut savoir combien de billots de 5 centimètres de diamètre et de forme parfaitement cylindrique peuvent être renfermés dans un stère?
Il est clair que la base du stère contiendra 20 de ces billots, et que la tranche verticale contiendra 20 couches semblables ; ce qui fera un total de 400 billots.
Le carré du diamètre est. omo car. ,0025 A multiplier par le rapport. 0 ,7854 Surface du cercle. Omo car. ,0019635
La solidité de chaque cylindrede 1 mètre de hauteur seraOm-cob- ,0019635, chiffre dont la multiplication par 400 billots donne une solidité de omo CUb., 7854, résultat identique avec la solidité trouvée pour les 25 billots du stère précédent.
TROISIÈME CALCUL.
Nous supposons maintenant que le stère est rempli par un seul billot ou tronçon de 1 mètre de diamètre. Nous avons donc à chercher quelle est la solidité de ce corps, toujours regardé comme cylindre parfait.
Le carré du diamètre est ^m-car.
A multiplier par le rapport. 0 ,7854 Surface du cercle. 0 ,7854
La longueur étant l'unité, la cubature pleine du stère sera omo eUb., 7854 Et par conséquent le vide sera. 0 ,2146 On voit, par ces trois calculs, que, quel que soit le nombre des billots, ou 25, ou 400, ou un seul, on retrouve toujours la même proportion entre le plein et le vide du stère ; la solidité pleine (en se bornant aux deux premiers chiffres des fractions) ne dépasse jamais les 78/100, ou à peu près les 415 du stère, et le vide forme toujours les 22/100, ou à peu près 115 du même stère.
Pour résoudre ce problème d'une manière générale, appelons d le diamètre des rondins que l'on veut renfermer dans la coupe verticale d'un stère, ou dans le mètre carré dont nous désignons le côté par le chiffre 1.
Le nombre des rondins contenus dans l'un des côtés du stère sera et le nombre total sera d X =. D'une autre part, la surface d'un cercle étant égale au carré du diamètre multiplié par le rapport fixe 0,7854, on a cercle=s=:d2X0,7854, et le nombre des cercles étant p, la somme des surfaces des cercles est di X 0,7854 X 35; expression qui se réduit à Omo car., 7854; d'où ressort la valeur omo CUb., 7854 pour la solidité totale des billots de 1 mètre de longueur empilés dans la membrure d'un stère.
Ainsi, il est bien démontré que, quel que soit le nombre des rondins renfermés dans un stère, pourvu qu'ils aient même diamètre entre eux et qu'ils soient parfaitement cylindriques, le plein du stère sera toujours exprimé par la fraction 0m cub-,7854 Et le vide du même stère par la fraction. 0 ,2146 Il résulte de cette solution générale que, pour trouver le nombre de billots contenus dans un stère, il suffit de diviser l'unité par le carré du diamètre du billot.
Et, si nous voulons remplacer le diamètre par la circonférence, nous établirons cette proportion d : circ. : : 1 : 5.1416; d'où nous tirons d=circ.. cP=circ.2 3TÎ416"' e 9.8696 Substituant ce dernier terme dans l'équation N nous aurons N, ou le nombre de rondins =1 Xtctirct.® = cire." De ce qui précède découle cette double règle générale, que pour trouver le nombre de rondins pouvant entrer dans un stère, il faut : Si le diamètre est donné, diviser l'unité par le carré du diamètre, on a alors N=.
Si c'est la circonférence qui est connue, on divise le chiffre 9.8696 par le carré de la circonférence : on a N =-
Circ.2 *
Nous avons donc deux formules de l'usage le plus corïnnode pour déterminer combien de billots d'un diamètre, ou d'un pourtour donné, peuvent être contenus dans le cadre d'un stère ; mais nous ne devons pas oublier que nos combinaisons reposent jusqu'alors sur la supposition de la rondeur parfaite des billots. Or, on sait que cette régularité de forme n'existe pas dans la nature, de sorte que nos formules, n'étant encore que spéculatives, ne paraîtraient susceptibles d'aucune application pratique.
Il est vrai que ces formules sont purement abstraites; mais il est vrai aussi qu'elles peuvent acquérir une utilité tout à fait usuelle, par le concours d'expériences à l'aide desquelles on rectifie les résultats du calcul théorique, ainsi que nous le ferons comprendre par les deux exemples suivants.
PREMIER EXEMPLE.
On a un certain nombre de rondins à empiler : soit leur pourtour 30 centimètres. On trouvera le nombre de billots parfaits de cette grosseur pouvant entrer dans le stère, en divisant le chiffre constant 9,8696 par 900, carré de 30; ce qui donne le quotient 109,66, ou en nombre entier 110 billots pour le nombre cherché; mais un empilage réel n'a donné qu'un nombre de 99 billots de forme ordinaire ; d'où résultent les éléments de cette proportion.
110 : 99 : : 1 : x.
Le terme x est 0,90 : tel est le facteur par lequel il faut multiplier le chiffre théorique 110, pour trouver le nombre effectif 99. *
- DEUXIÈME EXEMPLE.
On a des billots de 50 centimètres de pourtour à empiler : on saura combien de ces rondins supposés parfaits peuvent être contenus dans le stère, si l'on divise le chiffre constant 9,8696 par 2,500, carré de 50.
Le quotient sera 39,5. Or, l'empilement effectif de rondins de cette grosseur et d'une forme ordinaire n'a pu faire entrer dans le stère que 37 billots et demi, de là cette proportion : 39.5 : 375 : : 1 : x.
Le terme x est 0.95; tel est le facteur, par lequel il faut multiplier le chiffre théorique 39.5 pour trouver le nombre effectif 37.5 ou 38 en nombre entier.
Des empilements opérés avec des rondins de grosseurs diverses ont fourni les facteurs de réduction consignés dans la troisième colonne du double tableau ci-après; lequel commence par les rondins de 15 centimètres, grosseur au-dessous de laquelle le brin ligneux n'appartient encore qu'au fagotage, et se termine aux rondins de 60 centimètres, grosseur passé laquelle une tige appartient à la classe des bois de quartier.
Tableau relatif au cordage des bois ronds.
NOMBRE FACTEURS NOMBRE FACTEURS GROSSEuR DE BILLOTS DE RÉDUCTION GROSSEUR DE BILLOTS DE RÉDUCTION t théoriques du nombre théoriques du nombre du ou parfaits des du 0u parfaits des pouvant être billots théoriques, pouvant être billots theoriques, BILLOT. contenus au nombre BILLOT. contenus au nombre dans un stère, des billots réels. dans un stère, des billots réels.
centimètres. centimètres.
15 439,0 0,77 38 68,3 0,93 16 386,0 0,78 39 65,0 0,93 17 341,0 0,79 40 61,7 0,93 18 305,0 0,80 4-1 58,7 0,93 19 273,0 0,81 42 56,0 0,94 20 246,0 0,82 43 53,4 0,94 21 224,0 0,83 44 51,0 0,94 22 204,0 0,84 45 48,7 0,94 23 187,0 0,85 46 46,6 0,94 24 171,0 0,86 47 44,7 0,95 25 158,0 0,87 48 42,8 0,95 26 146,0 0,88 49 41,0 0,95 27 135,0 0,89 50 39,5 0,95 28 126,0 0,89 51 37,0 0,95 29 117,0 0,90 52 36,0 0,96 30 110,0 0,90 53 35,0 0,96 31 103,0 0,91 54 34,0 0,96 32 96,4 0,91 55 32,6 0,96 33 90,6 0,91 56 32,0 0,96 34 85,4 0,92 57 30,4 0,97 35 80,6 0,92 58 39,3 0,97 36 76,2 0,92 59 28,4 0,97 31 72,0 0,93 60 27,4 0,97
USAGE DE LA TABLE PRÉCÉDENTE.
On veut savoir combien un stère peut contenir de billots de la grosseur de 30 centimètres et d'une configuration ordinaire.
On prend dans la deuxième colonne du tableau, vis-à-vis la grosseur 30 centimètres, le nombre théorique 110, que l'on multiplie par le facteur 0,90; ce qui donne 99 billots pour le nombre cherché.
Si les rondins sont plus droits que d'ordinaire, comme il en entrera un plus grand nombre dans le stère, ou prend le nombre théorique 117 correspondant à la grosseur 29 centimètres, et, en multipliant par le facteur 0,90, on obtient le nombre 105 billots.
Dans le cas où, au contraire, les billots sont moins réguliers que d'ordinaire, on prend le nombre théorique 103, correspondant à la grosseur 31 centimètres; la multiplication par le facteur 0,91 donne 93,7 ou 94 billots.
Dans les applications qui vont suivre, nous supposerons des billots de configuration ordinaire, c'est-à-dire ni tous réguliers, ni tous irréguliers, tels, en un mot, que les donne l'exploitation habituelle des taillis.
PREMIÈRE APPLICATION.
On veut savoir quel nombre de stères peuvent fournir 1240 baliveaux
ou brins de taillis de 6 mètres de hauteur moyenne et de 25 centimètres de grosseur au milieu de la tige.
Ces 1240 brins donneront 7440 billots, dont la grosseur 23 centimètres correspond au nombre théorique 187; la multiplication de ce dernier chiffre par le facteur 0,85 donne 159 billots par stère.
Divisant le total 7440 billots par le nombre 159, on trouve 46 stères 8110 pour le résultat cherché.
Si l'on veut connaître la solidité réelle d'un stère composé de brins de 25 centimètres de grosseur, on multiplie la solidité théorique Omo CUb., 7854 par le même facteur 0,85, et l'on a Om- cub,,667, ou simplementOm. eub.,66, pour la solidité pleine des 159 billots.
DEUXIÈME APPLICATION.
On veut savoir quel nombre de stères pourront fournir 650 tiges de 12 mètres de hauteur moyenne et de 57 centimètres de grosseur au milieu.
Ces 650 tiges produiront 7800 billots, dont la grosseur 57 centimètres correspond au nombre théorique 50 billots 4110; la multiplication de ce dernier chiffre par le facteur 0,97 donne 29 billots 5/10.
Divisant le total 7800 billots par le nombre 29,5, on trouve 264 stères 4110 pour le résultat cherché.
On trouvera la solidité réelle du stère de cette espèce, en multipliant la solidité théorique 0,7854 par le facteur 0,97, ce qui donnera une solidité pleine de om, cub-, 76, quantité maximum, ou la plus grande qu'il soit possible d'obtenir avec des billots d'une forme même très-régulière, bien qu'imparfaite encore.
Par ces deux applications comme par toutes celles qui peuvent dériver de notre dernier tableau, on voit : 1° Que dans le stère de bois rondin, le rapport du plein au vide tend d'autant plus à se rapprocher du maximum théorique omo cUb.,7854 que le nombre des billots-se trouve plus réduit; ce qui suppose des billots plus gros; 2° Qu'entre deux stères formés de rondins d'égale grosseur de part et d'autre, la plus grande solidité pleine est celle du stère qui se trouve composé des billots les plus rapprochés de la régularité du type cylindrique ; 3° Qu'entre deux stères composés, l'un de gros rondin, et l'autre de bois de moindre grosseur, si les billots sont tous également réguliers, la solidité pleine sera la même des deux côtés; d'où il suit que la première qualité à considérer dans la valeur comparative des stères de bois rond est le plus ou le moins de rectitude du billot.
MODE ABRÉGÉ DE CORDAGE DES BALIVEAUX OU BRINS SUR PIED.
Dans une estimation forestière, on peut avoir besoin de déterminer
par un calcul rapide la quantité de stères que donnera un certain nombre de baliveaux ou brins sur pied.
Cette appréciation est nécessairement fondée sur la grosseur et la hauteur des baliveaux : deux dimensions dépendantes de la double circonstance de l'âge des arbres et de la qualité du sol où ils végètent. Nous avons dressé en vue de ce mode d'évaluation le petit tableau ci-après, dont la cinquième colonne est déduite du tableau qui précède.
Tableau pour évaluer par approximation le cordage des bois rondins sur pied.
PÉRIODE GROSSEUR NOMBRE NOMBBE NOMBRE D, QUALITÉ moyenne DE BILLOTS de AMENAGE- DE BILLOTS BAUVEAUX MENT des DES TIGES DE BILLOTS de ou MENT des dans fourni chaque grosseur de tiges ou SOL S. chaque classe (pouvant entrer nécessaires dans pour former d'explollablllié. de sol. par une tige. un stère. un stère.
--. centimètres. 1 billots.
qualité inférieure. 19 221 37 20 ans. — moyenne.. 20 J 6 S 202 34 — bonne. 21 j 186 31 qualité inférieure. 22 j ■ 171 26 25 ans. S - moyenne.. 23 I 6 1/2 S 159 24 ( — bonne. 24 j ( 147 23 qualité intérieure. 26 1 ■ 128 17 30 ans. S — moyenne.. 21 ( 7 1/2 J 120 16 ! — bonne. 28 ) 112 15 qualité inférieure. 30 99 12 35 ans. moyenne.. 31 ( 8 112 5 94 11 ( — bonne. 32 ) ( 88 10 qualité inférieure. 34 1 79 8 40 ans. - moyenne.. 35 l 10 I 74 7 ( - bonne. 36 ) 70 7 I 1 1
L'emploi de ce tableau n'offrant aucune difficulté, nous nous bornerons au seul exemple qui suit : On a besoin de savoir combien 1280 baliveaux peuvent former de stères dans une forêt aménagée à 30 ans, et dont le fonds présente généralement une qualité moyenne.
Dans de pareilles conditions, le tableau indique pour le baliveau moyen une grosseur de 27 centimètres et une hauteur de 7 mètres 112; puis annonce, dans la dernière colonne, qu'il faut 16 de ces baliveaux pour remplir un stère : 1280 baliveaux produiront donc 80 stères.
NOIROT-BONNET, Ancien géomètre forestier.
Langres, le 17 novembre 1855.
DU RAPPORT
ENTRE
LA PRODUCTION DE LA HAUTE FUTAIE ET CELLE DU TAILLIS (1).
On a souvent essayé de réduire en formules chiffrées le rapport qui existe entre le produit de la haute futaie et celui des taillis. Mais les auteurs de ces essais ont oublié, qu'à part les circonstances locales, ce rapport est affecté par les divers modes d'accroissement des différentes essences susceptibles d'être aménagées en taillis, et qu'en conséquence il doit beaucoup varier.
Il est dans la nature de plusieurs de nos essences de croître très-lentement dans les premières années, et de mettre beaucoup plus de temps que les autres pour arriver à une certaine hauteur; mais aussi, dès qu'elles sont parvenues à ce degré, leur croissance s'accélère et se prolonge davantage. D'autres essences, au contraire, poussent rapidement dans les premières années, mais n'en sont que plus promptes ensuite à s'arrêter dans leur croissance. L'épicéa et le sapin, entre autres arbres conifères, appartiennent à la première de ces catégories; dans la seconde sont compris le pin et le mélèze. Or, il est dans la nature des choses que les essences qui poussent lentement dans les premières années, mais dont la croissance se prolonge, ne donnent le produit moyen le plus considérable qu'à un âge plus avancé que celles dont la croissance suit la marche inverse.
Parmi les arbres feuillus, le hêtre, le charme et l'orme, bien qu'à un moindre degré, tiennent sous ce rapport de l'épicéa et du sapin ; au contraire, l'érable, le frêne, le peuplier, l'aune, le bouleau, le tilleul, le saule, le noisetier, ainsi que le chêne, bien qu'à un moindre degré, se rapprochent du pin et du mélèze. En général, le mode de croissance qui est propre aux brins provenant de semences se présente pareillement dans les rejetons de souches. Ainsi ceux du hêtre, du charme et de l'orme se développent peu pendant longtemps et ne croissent rapidement qu'en avançant en âge, tandis que le recru des érables, des frênes, des aunes, les rejetons des racines du tremble, etc., poussent avec rapidité. Aussi préfère-t-on les révolutions plus longues pour les taillis de hêtres et de charmes, attendu qu'ils se prêtent le moins à des coupes très-rapprochées, et l'on exploite plus tôt les taillis d'essences tendres, parce qu'ils cessent de croître de très-bonne heure. Quant aux chênes, la marche de l'accroissement est
(1) Extrait des FeuiUes critiques de M. Pfeil.
différente selon qu'il s'agit de rejetons de souches ou de brins provenant de semences, les premiers se développant beaucoup plus rapidement que les seconds, mais s'arrêtant aussi beaucoup plus tôt dans leur croissance.
Il est donc évident que l'on ne saurait formuler aucun rapport déterminé entre le produit des futaies et celui des taillis, puisque les diverses essences dont ils se composent de part et d'autre peuvent suivre dans leur accroissement une marche toute différente. Les taillis de hêtres et de charmes, étant longs à se développer, doivent être d'un très-mince rapport, tandis que les taillis d'érables, de frênes, d'aunes, et particulièrement ceux de tilleuls et de peupliers, doivent être beaucoup plus productifs, puisque leur croissance est dans les premiers temps beaucoup plus rapide.
Mais il est encore une autre particularité dont on doit tenir compte, c'est la tendance qu'ont les différentes essences à s'éclaircir après un laps de temps plus ou moins long. Plus cette tendance est prompte à se manifester, comme, par exemple, dans les sapins, les mélèzes, les bouleaux, les aunes, et plus les révolutions à déterminer doivent être courtes ; car l'accroissement des peuplements entiers décline toujours aussitôt qu'ils commencent à s'éclaircir. Au contraire, plus un peuplement se maintient en' massif serré, plus son accroissement se prolonge, et plus la révolution peut être longue, comme pour le hêtre, l'épicéa et le sapin. Ces éclaircies proviennent du besoin de lumière qu'éprouvent les brins qui survivent, et dont les couronnes, souffrant sous l'ombre latérale des arbres voisins, dépérissent faute d'être suffisamment éclairées. On peut donc poser en principe que les arbres qui prospèrent à l'ombre peuvent être aménagés en révolutions plus longues que les arbres qui préfèrent la lumière, sans qu'on ait à craindre aucune perte dans la production ; qu'en second lieu, un taillis composé exclusivement d'arbres qui aiment la lumière doit être, en comparaison de la haute futaie, plus avantageux qu'un taillis dans lequel dominent les arbres qui prospèrent à l'ombre. Car la futaie composée d'arbres de la première espèce s'éclaircit dans un âge plus avancé, et par cette raison la croissance du peuplement s'interrompt ; ce qui n'arrive pas dans les taillis à cause des révolutions plus courtes qui leur sont appliquées. Au reste, ce fait ne se présente pas non plus dans les futaies composées d'arbres qui prospèrent à l'ombre, puisqu'elles restent en massif serré comme les taillis.
Les tilleuls, les peupliers et les saules fournissent la preuve la plus évidente de ce qui précède : en effet, les taillis restent communément en massif serré jusqu'à quinze et vingt ans; mais, dès que les brins sont parvenus à une certaine grosseur, on les voit s'éclaircir avec une vigueur et une rapidité extrêmes. Parmi les essences dures, c'est dans les taillis de chênes que ce phénomène se produit le plus tôt ; les pousses recouvertes
d'ombre dépérissent promptement, et il en résulte que le produit annuel ainsi que le produit moyen décroissent de très-bonne heure.
Une autre particularité, qui ne permet de formuler aucun rapport déterminé entre le produit de la futaie et celui du taillis, c'est que ce dernier est fort sujet à varier sur des sols semblables et même dans des essences identiques. La marche de l'accroissement dans les taillis ne fournit qu'une base fort incertaine, même pour déterminer la durée de la révolution.
Un taillis composé d'essences qui se renouvellent exclusivement par des rejetons de souches, et qui forment par conséquent des souches distinctes, comme l'aune, le bouleau, le chêne, le noisetier et l'érable, peut difficilement se maintenir en massif aussi serré que tel autre taillis dont le peuplement se renouvelle par des pousses de racines, comme, par exemple, dans les trembles, les saules, les ormes et souvent même dans les charmes. Il arrive fréquemment que les souches ne permettent point de repeupler, au moyen de marcottes ou de brins provenant de semences, les vides qui existent entre elles, ces marcottes et ces brins étant aisément étouffés par les pousses de souche qui ont une plus forte croissance. Or, du moment que le massif est plus ou moins interrompu, le taillis doit être naturellement d'un moindre rapport.
La croissance des rejetons de souches est aussi beaucoup plus inégale que celle des brins provenant de semences. Si ces rejetons sont venus trèsprès de terre et se sont formé des racines indépendantes, ou s'ils ont poussé à la partie supérieure d'une vieille souche en décomposition, ces circonstances exercent une influence considérable sur la croissance de ces rejetons et sur le produit qu'on peut en attendre.
Il faut encore, en ce qui concerne les futaies, tenir compte de la difficulté plus ou moins grande qui existe pour maintenir le peuplement en massif jusqu'à l'époque de la coupe, si l'on veut comparer ensemble les produits réels des divers modes d'exploitation, et non pas seulement les produits imaginaires indiqués sur les prétendues tables expérimentales dont on se sert communément. On pourrait bien arriver à reconnaître qu'en définitive, il est plus aisé de maintenir en massif serré un taillis qu'une futaie aménagée en plus longues révolutions.
Partout où le sol est tel que les essences dont le taillis se compose peuvent, non-seulement atteindre une certaine grosseur, mais encore continuer à croître en massif serré jusqu'à un âge très-avancé, le gros bois doit être incontestablement d'un plus grand rapport que le menu bois des taillis. Quand on coupe, dans la vingtième année, un peuplement provenant de semences et maintenu jusqu'alors en massif serré, les pousses donnent, les années suivantes, moins de bois que le peuplement, s'il fût resté debout, en aurait donné les années suivantes, jusqu'à l'âge où le
taux d'accroissement des futaies commence à décroître. En effet, suivant la théorie, ainsi que d'après le mode d'accroissement des essences, deux révolutions de vingt ans chacune ne sauraient donner une aussi grande quantité de bois qu'une révolution de quarante ans, parce que la croissance est plus forte dans la seconde période de vingt ans que dans la première, et à chaque coupe cette croissance doit toujours se développer encore. Quant au point de savoir combien la différence est grande ou si réellement il en existe une en définitive, c'est là une question dont la solution dépend d'une foule de choses, de sorte qu'il est absolument impossible d'évaluer cette différence en formules chiffrées. Les circonstances qui influent sur le taux de l'accroissement sont : 1° La nature du sol, qui peut être tel que le taillis puisse y prospérer, parce que ses racines ne pénètrent pas profondément dans le sol, tandis qu'un peuplement composé d'arbres plus forts s'éclaircirait ou du moins se trouverait arrêté dans sa croissance; 2° L'essence et le mode d'accroissement qui lui est propre ; 3° La possibilité ou la probabilité qu'il y a d'élever le peuplement en massif, et de le maintenir en cet état jusque dans un âge avancé.
C'est donc soutenir un principe complétement faux que de vouloir contraindre les particuliers à aménager leurs forêts en haute futaie exclusivement, et à n'admettre le taillis que lorsqu'il fournit du bois d'œuvre ou des matières dont on a besoin, comme l'osier ou l'écorce de chêne. Si l'on considère, en outre, que souvent le taillis retient mieux la terre sur les pentes escarpées que la futaie, et fournit un meilleur abri contre les dégâts qu'occasionnent les hivers, on ne peut que répondre à ceux qui demanderaient Jequel vaut le mieux du taillis ou de la futaie, qu'il est impossible de se prononcer d'une manière aussi absolue; mais que, dans tous les cas où il y a doute, on doit prendre les circonstances locales pour base de sa décision. M. B.
Si nous avons reproduit cet article, ce n'est certes pas parce que nous en adoptons tout le contenu, c'est pour remplir les conditions de notre programme, qui veulent que nous tenions nos lecteurs au courant de l'état de la science foréstière en Allemagne.
Le docteur Pfeil est un écrivain d'assez grand renom, qui exerce, par sa fécondité et sa tendance au paradoxe, une certaine influence dans son pays. Nous avons trouvé dans ses Feuilles critiques un article qui traite d'un sujet fort important, et qui fut longtemps controversé. Nous l'avons imprimé, mais nous devons faire nos réserves ; et si M. Pfeil ne conclut pas, s'il tombe dans des contradictions étonnantes, nous prions qu'on ne nous rende pas solidaires de ses erreurs.
Lorsqu'on veut comparer entre eux deux modes d'exploitation, on ne les envisage pas dans leur application à des bois composés d'essences différentes, et quand on dit que la futaie donne plus de produits que le taillis, on entend parler d'une futaie
et d'un taillis qui seraient composés des mêmes essences et placés dans les mêmes conditions de végétation. Poser la question comme le fait le docteur Pfeil, c'est se mettre évidemment dans l'impossibilité de la résoudre.
On remarquera, en outre, qu'après avoir montré que la prolongation des révolutions est favorable à la production, le docteur se hâte de se donner, quelques lignes plus bas, un démenti bien formel. On sait enfin, en France, que partout où vient le taillis, quelle que soit la qualité du sol, la futaie peut croître aussi, et même mieux, et de tout cela il résulte que si l'Allemagne est encore destinée à nous apprendre quelque chose, ce n'est pas au docteur Pfeil que nous en serons redevables.
(Note de la rédaction.)
REVUE COMMERCIALE.
Nous publions ici deux tableaux dont la comparaison peut donner d'utiles renseignements et motiver quelques prévisions sur l'état des affaires en 1856.
D'un côté, le disponible restant sur les ports pour faire face aux premiers besoins de l'année qui commence.
D'autre part, le chiffre de la consommation générale en bois de toute nature, pendant l'année qui vient de finir.
Voyons si le disponible dépasse les besoins probables, ou s'il est à craindre qu'il soit au-dessous de ces besoins; et si de l'un ou l'autre résultat nous ne pouvons pas assez raisonnablement préjuger les cours des différentes espèces de bois ou tout au moins indiquer le rapport probable entre l'offre et la demande.
Un premier fait considérable ressort du tableau des entrées dans Paris, c'est que la consommation a été sur tous points beaucoup plus importante en 1855 qu'en 1854. Reconnaissons tout d'abord que l'affluence des étrangers amenés par l'Exposition a dû faire consommer plus de combustibles ; mais là s'arrête l'influence de ce grand mouvement.
Les bois à ouvrer, les charpentes, le sciages, les fers ont une autre cause d'emploi plus actif. C'est, d'une part, l'augmentation progressive de la fortune publique, qui ne paraît devoir s'arrêter de longtemps. C'est un besoin plus grand de bien-être dans toutes les classes de la société; c'est un courant général d'affaires activé par la sécurité que donne aux transactions l'espoir d'une longue tranquillité intérieure.
Jusqu'ici la consommation plus grande a trouvé des ressources ménagées par les années antérieures. Des marchandises attendaient sur les ports, des exploitations avaient été retardées dans un temps où le placement
était incertain et mauvais. Ces réserves s'épuisent. Nous voyons les ports dégarnis au-dessous de leur état normal et nécessaire ; pas une coupe n'est restée invendue, et les produits d'une exploitation rapide autant que favorisée par un hiver exceptionnel se classent avant même d'être rendus à destination.
Puis la consommation générale n'est pas restée au-dessous du mouvement, plus facilement constatable à Paris, mais non moins prononcé sur tous les points du territoire. Les campagnes sont riches du prix élevé des denrées autant que du prix élevé des salaires ; et si quelques souffrances sont malheureusement trop vraies dans les grands centres industriels, il faut reconnaître que tout ce qui s'occupe de culture, propriétaires, fermiers, charrons, maréchaux, manouvriers, gagnent et consomment plus que jamais ils n'ont pu faire.
De là des constructions, des embellissements, de la consommation enfin sous toutes formes et de toutes matières, qui prend d'abord tout ce qu'il lui faut sur place et ne laisse venir à Paris que l'excédant de ses besoins satisfaits.
Et ces immenses travaux élevés partout si grandioses pour étendre nos voies ferrées. Combien n'absorbent-ils pas de matériaux, qui seraient venus s'offrir à leurs débouchés ordinaires et augmenter la masse du disponible !
Tout cela va sinon faire défaut absolu, au moins laisser un vide dans les approvisionnements de Paris, et la conclusion naturelle en découle que la demande dépassera les offres. Or, le vendeur, toujours obligé de subir les conditions quand il offre, impose, au contraire, ses conditions à qui demande et a besoin. La marchandise sera donc recherchée à de bons prix.
Peut-être même aurions-nous à craindre de l'exagération dans ce sens, si le commerce n'avait pris la précaution de se munir de bonne heure et par avance des bois à exploiter.
Tout le monde se présentant à la fois pour acheter au moment du besoin, les exploitants auraient élevé des prétentions croissantes en proportion du nombre de demandes; et, bon gré mal gré, il eut fallu prendre à tout prix ou renoncer aux affaires à défaut de marchandises.
Heureusement des marchés passés en grand nombre, même avant les exploitations, assurent à chacune des maisons de Paris la possibilité de suffire aux premières demandes des consommateurs. Les cours s'établiront ainsi sans grande secousse et se continueront pendant l'année, profitables à tous, en raison des prix d'achat, mais sans exagération.
Le commerce de Paris, habile en ses allures, sait fort bien que tout excès amène la réaction, et, dans ce cas, la perte résultant de la différence des
prix, incombe toujours à des approvisionnements faits qu'on ne peut écouler aux prix élevés d'achat consommés sous l'influence d'autres idées.
Un autre écueil est à craindre, d'ailleurs, plus dangereux encore; c'est la chute presque certaine de quelques spéculateurs trop ardents au moment de la fièvre de hausse, qui ne peuvent se soutenir au moment de crise, et font ainsi subir au commerce sérieux des pertes d'autant plus sensibles qu'on a spéculé sur une matière d'un prix plus élevé.
Aussi les commerçants, posés pour résister quand même, mettent-ils tous leurs soins à empêcher cette exagération des cours si dangereuse.
Cette sage prévoyance est poussée par eux au point de renoncer à des bénéfices acquis, de s'imposer même des sacrifices momentanés, pour arrêter un élan irréfléchi, qui se traduirait infailliblement en pertes pour eux, en désastres pour d'autres, et pour tous en temps d'arrêt préjudiciable à tout le monde.
Il reste sur les ports et dans les chantiers tout ce qu'il faut pour suffire à tous les besoins jusqu'aux premiers arrivages des bois nouveaux. Le temps favorise ces arrivages, qui déjà sont en bonne voie. Le commerce est pourvu par avance de bois nouveaux pour suffire à toute consommation prévue jusqu'au mois de juin ; et, avant cette époque, le besoin de vendre se sera fait sentir chez les exploitants en province, de manière à leur faire accepter les cours établis.
Donc certitude de bon placement pour le commerce de province, mais aussi garantie contre l'entraînement irréfléchi, et certitude pour le consommateur de trouver à prix raisonnable tout ce dont il aura besoin.
La différence en plus dans la consommation de Paris, en 1855, a porté dans des proportions diverses. Pour les bois durs à brûler, cette différence est à peu près d'un quart, d'un sixième seulement pour les bois blancs ; et de presque moitié pour les cotrets; par contre, il y a eu un dixième de diminution dans les menuises et fagots.
Le charbon de bois a augmenté d'un seizième seulement, quand la houille, suivant toujours la progression ascendante que nous avions depuis longtemps signalée, et pour cause, voit son chiffre porté à un quart de plus qu'en 1854.
Les charpentes et sciages de bois dur résument leur progression régulièrement maintenue toute l'année, par une différence en plus d'un huitième, et les charpentes et sciages de bois blanc, malgré quelques différences en moins dans certains mois, présentent encore une amélioration totale d'un douzième.
Les fers, qui avaient baissé pendant quelque temps, restent en fin de compte en bénéfice d'un vingtième, et les fontes toujours mieux soutenues donnent un dixième en plus que dans l'année précédente.
Nous ne parlons que des fers entrés dans les constructions, ceux-là seuls, payant à l'entrée, figurent à notre tableau, et ils nous intéressent spécialement comme remplaçant une quantité de bois que nous chercherons à évaluer.
Mais voyons d'abord ce que nos forêts ont fait entrer en 1855, dans la caisse municipale, par l'impôt dont leurs produits sont chargés ; et voyons si les produits minéraux qui viennent les suppléer sont atteints dans la même proportion par cet impôt nécessaire, sans doute, mais équitable seulement, à la condition d'être le même eu égard au service rendu.
Bois à brûler.
546,807 stères de bois dur à 3 fr. l'un, ont donné. 1,640,421 fr. 00 c.
187,502 stères de bois blanc à 2 fr. 22 c.. 415,184 04 52,275 stères de cotrets à 1 fr. 80 c. 93,995 52,295 stères menuise à 1 fr. 08 c. 56,468 60 3,346,014 hectolitres charbon à 60 c. 2,007,608 40 207,462 poussier de charbon à 30 c. 62,238 60 Total pour les bois à brûler.. 4,275,915 fr. 64 c.
Bois à ouvrer.
103,409 stères charpentes et sciages, à 11 fr. 28 c. 1,168,669 52 162,495 stères bois blanc à 9 fr. 1,466,455 189,033 bottes lattes et treillage à 11 fr. 28 c !.. 21,322 92 2,656,447 44 Bois de déchirage , 8,713 56 Combustible minéral.
452,900,981 kilogrammes de houille à 72 c.. 3,260,887 06 Fers et fontes de construction.
8,353,106 kilog. deferà3fr. 60 c. 300,711 81 4,197,114 fonte à 2 fr. 40 c. 85,622 12 386,331 93 Récapitulation générale.
Bois à brûler. 4,275,915 fr. 64 c.
Bois à ouvrer 5,656,447 44 j 6,941,076 64 Bois de déchirage 8,713 56 ) Houille. 3,260,887 06 c. 99 Fers et fontes. 086,332 9o ) ü" Total général 10,588,296 fr. 63 c.
payés par les bois ou par la matière minérale qui remplace les bois, soit dans les foyers, soit dans les constructions, si la chaleur donnée par les 452,900,981 kilogrammes de houille brûlée avait dû être fournie par le bois, il aurait fallu entrer à Paris 2,264,504 stères de bois qui, payant 3 fr. l'un, auraient produit un chiffre total de 6,793,512 fr., soit un peu plus du double de l'impôt payé par la houille.
Nous pouvons donc répéter pour la millième fois : il y a inégalité de charges et par suite condition de perte pour la propriété et perte absolue pour la caisse municipale, et vraiment, quand cette perte se traduit dans une seule année par un déficit de 3,532,625 francs, déficit qui menace d'augmenter chaque année, on a peine à comprendre qu'il soit sursis aux mesures toutes d'équité qui rendraient les charges égales.
Voyons maintenant dans quelles proportions se trouvent les approvisionnements déposés sur les ports, comparés aux besoins d'une année entière et basés sur la consommation officiellement déclarée de l'année 1855.
Nous devons ici rappeler que, indépendamment et en plus de ce qui entre à Paris, il faut pour la banlieue, qui s'approvisionne aux mêmes sources, à peu près moitié des quantités constatées à l'octroi. C'est donc sur ces données que nous établirons nos calculs par chiffres ronds.
Sur ces bases, la consommation prendrait dans l'année, en bois dur à brûler, 820,000 stères.
Il en reste sur les ports 180,000 stères, soit un approvisionnement de quatre-vingts jours.
Il faudrait 271,000 stères de bois blanc. Les ports en conservent 44,000 stères, soit un approvisionnement de soixante jours.
Les chantiers intérieurs sont garnis de bois durs à brûler, pour à peu près une année entière ; la réserve serait donc à la rigueur d'autant plus suffisante que dans les mois d'été on consomme peu, mais il est d'usage de ne livrer à Paris au consommateur que des bois bien secs, c'est-à-dire de deux ans de coupe, et, à ce point de vue, les ports n'auraient pas provision nécessaire. Les bois restants ont donc une valeur de circonstance, sans qu'il y ait à craindre une hausse semblable sur les bois nouveaux.
Pour les bois blancs, la condition n'est pas la même. On en brûle autant à peu près en été qu'en hiver, puisque leur destination est d'alimenter les usines, et principalement les boulangeries, qui fonctionnent toujours.
La réserve de soixante jours est donc insuffisante; les 44,000 stères qui forment cette réserve ont une valeur relativement considérable, et les bois nouveaux qu'il faudra attaquer de bonne heure doivent se placer avec avantage aussitôt qu'ils seront disponibles.
La condition quelque peu précaire où nous nous trouvons, en ce qui con-
cerne les bois à brûler, se continue jusqu'à certain point pour les cotrets.
On brûle à peu près 7,000,000 de ces petits fagots chaque année (sept millions). Les ports en gardent un peu plus d'un million disponibles des exploitations de 1855 (1,234,000); c'est encore à peu près pour deux mois, toujours indépendamment de ce qui se trouve en chantiers.
Quant aux charbons de bois, nous ne pouvons tirer aucune conclusion de ce qui reste sur les ports. Cet article arrive a Paris tous les jours, soit directement des forêts, soit par les chemins de fer. Chaque exploitant en conserve un peu dans les coupes pour les besoins du printemps, les bateaux en rivière en gardent pour plusieurs mois; les chemins de fer peuvent en amener en une semaine, et de fort loin, plus qu'il n'en faudrait pour remplir les nombreux dépôts chargés de fournir à la consommation journalière :,il n'y a donc pas à craindre de voir la matière faire défaut à cette consommation; mais les usines métallurgiques ayant aussi des besoins considérables et pouvant payer leurs charbons à des prix fort élevés, les cours à Paris devront se maintenir à ce niveau.
Les bois à ouvrer se retrouvent à fin d'année à peu près dans la position qu'ils ont eue pendant toute la campagne, arrivant sur les ports et s'en allant à mesure, de manière à suffire aux besoins de la consommation sans former en aucun temps ces réserves qu'on voyait autrefois, capables de fournir à moment donné une matière à des spéculations toujours profitables à ceux qui pouvaient les faire.
Il était d'usage alors d'amener les bois sur les ports pendant l'été, quand les chemins étaient praticables et quand les lots étaient bien complets ; à la fin de la saison, on vendait, quelquefois avant l'hiver, mais le plus souvent c'était au mois de mars, quand chaque entrepreneur connaissait le nombre de décistères dont il aurait besoin dans l'année, et que l'état des rivières permettait de flotter de suite ce qu'on venait d'acheter.
Il restait ainsi toujours une année d'avance à l'exploitation sur la consommation. Mais il fallait charger la marchandise de pertes d'intérêts qui en augmentaient le prix de revient, sans profit pour personne.
On emploie aujourd'hui plus de charpentes, et, grâce à l'amélioration des routes et des voies flottables, on peut amener sur les ports en tout temps et employer à Paris, au mois de mars, un arbre qui était debout encore en forêt deux mois avant. Le séjour dans l'eau dessèche assez le bois pour qu'il puisse servir ainsi sans inconvénient.
Le premier avantage de ce mode expéditif est de réduire à presque rien les pertes d'intérêts, mais nous vivons ainsi au jour le jour, sans approvisionnement qui puisse s'offrir en cas de besoins imprévus. Cette situation ressort des tableaux comparés du stoc et de la consommation annuelle.
Il faut 1,200,000 décistères de charpentes à Paris ou dans la banlieue, il en reste 229,281 décistères sur les ports, soit pour deux mois au plus, et il ne s'en trouve pas dans les chantiers pour plus d'un mois de travail un peu actif du printemps.
On ne manquera pas de bois, car déjà les exploitations nouvelles en ont amené beaucoup sur les ports, et les nouveaux seront flottés en même temps que les anciens ; mais nous répéterons que c'est là vivre bien au jour le jour, et si on parvient, comme nous l'espérons, à empêcher une surélévation des cours qui serait fâcheuse, au moins faut-il s'attendre à voir maintenir fermes les prix que chaque détenteur espère obtenir.
Il serait assez singulier de voir les sciages rester au-dessous du cours relatif des charpentes, si les conditions d'approvisionnement de Paris étaient, comme autrefois, restées les mêmes pour les deux espèces. On consomme certainement plus de sciages que de charpentes, eu égard aux constructions élevées, car le fer n'a pas encore pu remplacer le bois dans les parquets, dans les lambris, dans les meubles, comme il l'a fait pour les solives du plus grand nombre de maisons construites dans les dernières années, et cependant les sciages qu'il faut vendre secs, et, par conséquent, chargés d'intérêts autant que de main-d'œuvre, sont positivement moins chers que la charpente, qui échappe à tous ces frais.
Les chemins de fer ont modifié les conditions relatives de toute l'influence qu'ils exercent sur les matières soumises à leur action. Les sciages, par leur forme, leur volume, et surtout leur poids réduit par la dessiccation, peuvent être transportés en wagons et profiter des tarifs réduits accordés aux chargements nombreux parcourant de grandes distances.
Les sciages peuvent donc venir à Paris de certains points trop éloignés pour que les charpentes supportent ou le trop long séjour dans l'eau, ou les frais trop élevés de flottage sur les canaux et de longs transports par terre.
Les futaies, moins chères à ces grandes distances, permettent d'obtenir en fin de compte un prix de revient inférieur aux prix des bois exploités sur les bords de la Marne, et Paris en profite pour les sciages, tandis que les charpentes, en raison de leur origine, ne peuvent offrir les mêmes conditions avantageuses.
L'ouverture du canal de la Marne au Rhin et l'établissement du chemin de fer de l'Est ont déplacé le commerce et l'exploitation des sciages. Le centre en était autrefois à Saint-Dizier, premier port flottable de la Marne, et les belles forêts de la Haute-Marne, de la Meuse et des Vosges amenaient à ce port toutes leurs futaies converties en planches ou membrures de toutes dimensions. Aujourd'hui ces futaies viennent à l'aide du canal, à Paris, où, comme charpentes de premier choix, elles obtiennent des prix
exceptionnels; et les sciages se font plus spécialement dans la Meurthe, la Moselle et le Bas-Rhin, où les bois sont moins chers.
Cette différence de condition explique, ce qui sans cela serait un contresens, qu'avec une consommation mieux assurée et des avances beaucoup plus considérables, un décistère de bois débité soit moins cher qu'un même décistère de bois brut.
Voici les cours résultant de quelques marchés passés depuis peu.
Bois à brûler, vendus à Clamecy 80 fr. le décastère, qualité médiocre.
Bois pelard, vendu à Joigny 90 fr., bonne qualité.
Bois blancs, vendus à Joigny 85 fr., belle qualité, partie en bouleau.
Charpentes ordinaires, offertes à 50 fr. sur les ports de l'Yonne et de la Marne.
Grosses charpentes, vendues en grume 65 à 70 fr., rendues à port après équarrissage par l'acheteur.
Brandilles ou petites charpentes, vendues sur la Marne et sur l'Yonne 47 fr. 50 c.
Un peu de faiblesse sur les prix des charbons à Paris a fait momentanément baisser les offres-précédemment faites sur les bois en forêt. Il ne paraît guère probable que ce mouvement rétrograde se maintienne. Le charbon vaut toujours à Paris 7 à 9 fr. les deux hectolitres, suivant la qualité ; la vente en est toujours aussi active.
Quelques lots de sciage se sont vendus sur les ports 110 à 120 fr., l'entrevous, suivant qualité, 150 à 165 fr. l'échantillon.
A Paris, il n'y a rien en rivière. Les ventes en chantier sont assez actives.
Nous avons indiqué dans la revue commerciale les motifs qui, selon nous, tenaient les sciages dans une condition relativement moins bonne que celle des charpentes.
Cependant les derniers numéros de l'Ancre de Saint-Dizier signalent une grande amélioration obtenue déjà dans les cours des sciages, et une tendance non moins grande vers des prix plus élevés encore.
Nous admettons sans conteste les prévisions de lAncre, toujours bien informé sur ce point, et placé d'ailleurs par ses relations de manière à savoir mieux que tout autre organe de la presse tout ce qui a rapport aux sciages.
Mais, pour élucider la question, nous voudrions la poser ainsi : L'amélioration obtenue dans le cours des sciages changera-t-elle la condition relative ?
La charpente suivra-t-elle une même progression ascendante dans ses cours?
Ou bien l'équilibre se rétablira-t-il entre le bois en pièces et le bois débité?
Nous verrions avec plaisir, dans l'intérêt général du commerce, l'Ancre donner son avis sur ce point.
Quant à nous, notre opinion n'a pas changé, parce que les faits sur lesquels elle s'appuie n'ont pas été modifiés, que nous sachions au moins.
Depuis Strasbourg jusqu'à Vitry, tous les ports du canal sont plus ou moins garnis, sans doute; mais tous (et ils sont nombreux) peuvent offrir à la consommation plus qu'elle ne saurait prendre de sciages, même en admettant des travaux aussi importants que nous avons lieu d'en espérer.
Mais si on emploie plus de planches, c'est qu'au préalable on aura employé plus de charpentes ; l'un ne va guère sans l'autre.
Or, la consommation augmentant pour les deux articles, l'écart restera le même, car nous savons les ressources disponibles en charpentes, et si nous n'osons pas dire que ces ressources pourraient se trouver au-dessous des besoins, au moins est-il constant qu'il faudra au commerce grande activité d'exploitation et d'expédition pour suffire à des demandes aussi actives que nous pouvons les espérer, eu égard à l'état général des affaires.
Saint-Dizier se trouve dans ce cas exceptionnel que les bois ordinairement destinés au débit sont, cette année, convertis en charpentes; il y aura donc sur ce port et dans son rayon beaucoup moins de planches et d'entrevous qu'il ne s'en fait année moyenne. C'est là une situation qui aurait une influence décisive sur les cours, si la fabrication plus étendue sur d'autres points ne venait compenser le déficit local. Cette situation doit, en tout cas, inspirer aux détenteurs des prétentions élevées ; et, dans l'état où sont les esprits, il nous paraît tout simple que, jusqu'à certain point, on subisse ces prétentions. Les prix obtenus pourront donc se maintenir, nous reconnaîtrons même que les prévisions de l'Ancre sont fondées, et qu'il peut y avoir augmentation nouvelle sur les lots qui resteront à vendre jusqu'au mois de juin.
Mais il y a aussi certitude acquise que le cours des sciages ne dépassera pas certaine mesure, parce que le rayon d'approvisionnement s'est de beaucoup étendu et que, sur tout le cours du canal, depuis Bar-le-Duc jusqu'à Strasbourg, on peut trouver dès à présent en marchandise fabriquée ce qui manque à Saint-Dizier, et parce que sur tout ce long parcours la matière abonde, la fabrication marche de façon à remplacer sur les ports tous les vides que la vente pourrait faire.
Nous n'avons donc pas à craindre sur les sciages la hausse exagérée possible sur les charpentes, si, comme nous l'avons dit, le commerce de Paris n'avait pris des mesures pour assurer au moins les premiers mois de 1856 dans des conditions de prix très-supportables. DELBET.
Annrovlslonnemcut de M'm^.-Mouvement des ports pendant le quatrième trimestre 1 Sb-% 1. ———————— 1
BOIS A BRULEIL I OIS A OUVRER. BUIS UIVCNJ.
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lecast. Unités. Uüités. Décist- Declst. UûUé8* l¡¡¡¡¡¡;;: Botles- 1JoUes' Bolles' ARRIVAGES TENDANT I.B 4e TRIMESTRE.
C.m~.n. 't .:)..M=."<"",~ "-S; '~S 4,832 8,293 » 2,000 » "'WN >» » CSompiôEne 480 210 120,71270,160 1,046 4S 5,327 1,337 10,162 14,867 2,000 2,782 423 » Cbâleu-ThlCrry. Il io3 1,447 20,706 Il 54,648 1 2392 71,548 17,528 31,42233,672 475 » Fontainebleau 1,865 251 356,57f; 148,889 1,270 1,142 17,986 2,671 1,742 1,524 » » 2,227 402 » Tryes. » £ 475 47,058 44,671 18,110 » 50,346 1,477 » 60,149 » 15,000 » » Joigny 1,583 277 114,811 706 89,874 » 21,542 200 38 52,347 » » GG 26,349 : c,lamt-cy 782,557 213 » » 33,80t 1,54819,4442,357 » » ), » » 2,72316,822 » É^EEE:: ÏÏÏ M. »».«>' »«.•«» |J<; I; 715 » 2,763 61 » ,1 2,628 2,379 » Cosne 715 1311 » 98,25349,247 » 4,889 500 JI 1,000 » 5,000 » 2,33927,503 JI — ~«5=;=5= -S5S 15,032 172,583 35,257 22,000 --;;- 43,3Õ4 73,878 1 » ENLEVEMENTS PENDANT LE 4e TRIMESTRE.
Compiègne. » 854 48 1,831,500 75,200 32,100 8,602 l 38,988 14,426 î 2,727 8,309 20,722 123 » pot-aux-prches. 257 153, , » hâteu-ThlCrry. » 1,068 1,174 0,755 » i1o099,22118 8 1100,88116 6 9^ 3,779 30,010 635,85629,762 » » 475 » J, Château-Thierry » >,068 145,937 1,270 1,251 10,936 4,089 40 1,799 919 » » 2,227 402 » Troyes » » 90 281 35,950 59,341 19,985 » 42,767 4,111 JI 45,250 JI » » » » Compiègne » 63 1,049 1,S174 î "i!!; Y&îï i.:™ •» 200 » 52,940 » » » 9,002 18,087 » K0N}ÏRBLEAU : iflZ » «.;» 89 »»•»» 2,034 48,456 1,476 17,943 >.|S » •„ <>R : ,S;S ":'»I : ; 2,133 »« 224,299210,150 1'25,170 1,145 6'0351 783 » 2,634 61 » » 16,433 3,574 » Cosne 657 175 48,280 58,475 » 5,927 1 790 » 1,000 » 17,700 » 4,44o 41,141 » - - - - ~,100 » 0 3 5 627 8,837 HflÙ 2,847,752 616,464 503,594 25,100 236,651: 1 5r 9n ,6,.-74 f 1t2« ,1|8o3 «> 164,164 30,74l | o«^,7nUn Uj» 58,083 75,o5i MARCHANDISES RESTANT SUR LES PORTS AU 31 DÉCEMBRE 1855.
9 277 985 Château-Thierry 21 849 188 48,678 17,418 934 6 881 4,224 48,878 10,61'2 6,000 ), 3,672 1,864 » COMPIÈGOC > 2,728 5,932 54,191 10,642 20 7,049 9,152 ; : ;„ )1 » Port-aux-Perches » 2,375 184 9,951 19,132 , 644 54 19, 10,642 20 7,049 9,152 » : )1 325 tii 3i991 „ » anu Fontainebleau ;; 1,571 »{ 19,051 19,300 418 31,600 1, 38 31618 » Il 4,613 23,208 » ),. » 46,M7 3,429 » 20,6 3 1,668 4j^ m S3-.::::::::::::::::::: R « T".S SJ 218 155,356 99,509 247 397 27,838 12 » 1,043 : : Il 361 :: 2I8155,S6OS » 3,757 521 )1 » 13,500 1 2,955 49,475
4 1 090 17^076 4,408 1,234,900 291,620 10,325 1 12,224 229,281 24,791 559 9,77884 4 45,680 13,143 41,168 w 22,189 - 87,241 -—- 10 no/
1 1 1 1 V. au numéro de novembre .,. mouvement des ports pendant de 1855, Indiquant les quantités restées au •« »»«'«««•
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FlîliS ET DES FORTES, RÉCAPITULATION DES ANNÉES 1855-54.
DÉSIGNATION NATURE DROIT QUANTITÉS ENTRÉES DIFFÉRENCE DÉSIGNÀTION NATURE D'OCTROI ",---..
des h'itoitr" declme pendant pendant Augmentation Diminution MATIÈRES. N compris. l'année 1855. l'année 1854. en 1835. en 1835.
f. c. m.
Dois à brûler, dur stère. 3 oo,o (0 54'6,807 480,813 65,994 » — blanc.. — 2 22,0 (2) 187,502 173,412 14,090 » Colrets de bois dur. — 1 80,0 52,275 25,151 27,124 » Menuise et faots. — 1 08,0 52,285 57,808 » 5,523 Charbon de bois hectolitre. 060,0 3,346,014 3,106,126 239,888 » Poussierde ch. de bois — 0 30,0 207,462 173,689 33,773 » Charbon de terre lOOkilogr. 0 72,0 452,900,981 400,205,243 52,695,738 » Charpente et sciage, bois dur. stère. Il 28,0 103,609,000 91,762,000 11,847 Il Charpente et sciage, bois blanc. - 9 00,0 162,495,000 150,288,000 12,207 » Laites et treillages. les 100 boltes. 1128,0 189,033,000 189,377,000 » 344 Bois de déch. en chflne mètre carré. 021,6 8,725,000 9,355,000 » 630 — en sapin. — 0 12,0 56,908,000 56,089,000 819 » Fers employés dans les constructions. lOOkilogr. 3 60,0 8,353,106 8,065,008 288,098 » Fonte employée dans les constructions. — 2 40,0 4,197,114 3,706,357 490,757 »
(1) Ces 546,807 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 218,722,800 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 109,361,400 kil. de houille.
(2) Ces 187,502 stères de bois, multipliés par 300 kil. poids du stère de bois blanc, représentent 56,250,600 kil., dont la puisianee calorifique égale celle de 28,125,300 kil. de houille.
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FERS ET DES FONTES.
JANVIER 1856.
DÉSIGNATION DROIT QUATlTÉS ENTRÉES DIFFÉRENCE Jpg NATURE, EN JANVIER. sur le mois correspond.
,)„. D OCTROI R~JANYIEt!. „, - D'UNITÉS. décime -- - Augmentation Diminution MATIERES. compris. 1856. 1855. 1en 1856.
Bois à brûler, dur stère. 3 00,0 i»; 17,079 16,532 547 » - blanc. - 2 22,0 (2) 10,547 8,497 2,050 » Cotrets de bois dur. - 1 80,0 2,646 5,630 » 2,984 Alenuise et fagots. - 1 08,0 2,867 2,883 Il 16 Charbon de bois hectolitre. 0 60,0 195,755 209,073 » 13,318 Poussierde ch. debois — 0 30,0 13,194 17,043 » 3,849 Charbon de terre lOOkilogr. o 72,0 31,333,360 23,189,399 8,143,961 » Charpente et sciage bois dur. stère. 11 28,0 5,155 4,172 983 » Charpente, bois blanc. — 9 00,0 9,579 8,783 796 » Lattes et treillages. les 100 bottes, il 28,0 9,776 10,353 » 577 Bois de déch. en chêne mètre carré. 0 21,6 412 302 no « — ensapin. — 012,0 2,780 2,129 651 » Fers, employés dans lesconstructions. 100 kilog. 3 60,0 533,700 605,187 » 71,487 Fonte, employée dans les constructions.. — 2 40,0 464,756 267,115 197,641 »
(1) Ces 17,079 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 6,831,600 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 3,415,800 kil. de houille.
(2) Ces 10,547 stères de bois, multipliés par 300 kil., poids du stère de bois blanc, représentent 3,164,100 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 1,582,050 kil. de houille.
ACCROISSEMENT EN DIAMÈTRE DES VÉGETAUX.
(Extrait d'un mémoire présenté à l'Académie des sciences par M. A. Trécul.)
« Certains observateurs croient que les décortications annulaires dont la réparation n'a pas lieu tuent les arbres en quelques années, tandis que d'autres ont prétendu qu'elles n'ont aucune ou presque aucune influence sur la végétation de ces arbres. A l'appui de cette dernière opinion, on a cité plusieurs fois un tilleul fort intéressant qui existait dans le jardin du château de Fontainebleau, et l'on s'en est servi comme d'un argument favorable aux théories qui veulent que des fibres radiculaires envoyées par les feuilles ou les bourgeons servent à l'accroissement en diamètre des végétaux.
« J'ai fait le voyage de Fontainebleau pour étudier ce tilleul et pour en exécuter le dessin, que j'ai l'honneur de mettre sous les yeux de l'Académie. Cet arbre était digne, en effet, de toute l'attention des physiologistes.
La description que je vais en donner sera d'autant moins superflue que je fournirai sur son état, à l'intérieur, des renseignements très-importants, et que quelques-unes des mesures publiées par M. Jacquin et rappelées dans les Comptes rendus du 7 mars 1853 ont été considérablement exagérées, n'ayant été indiquées, sans doute, que de souvenir. C'est ainsi que la circonférence au-dessus de la décortication a été presque doublée : M. Jacquin la porte à lra,10, tandis que je ne l'ai trouvée que de 6U centimètres. Suivant le même observateur, la circonférence au-dessous de la partie malade serait de 59 centimètres; c'est à peu près le chiffre exact : je l'ai trouvée de 54 centimètres.
« C'est le 29 mars 1853 que je fis mes observations. Cet arbre, qui avait été écorcé irrégulièrement, avait son bois altéré et détruit tout autour si profondément, qu'il ne restait plus qu'une portion minime du corps ligneux central, à l'endroit de la décortication, pour soutenir la partie supérieure de l'arbre et servir de véhicule aux sucs qui montaient des racines. Il était soutenu par des perches fixées à ses branches et à celles des tilleuls voisins.
« Cet arbre, planté vers 1780, fut écorcé en 1810 par des tombereaux employés à des terrassements. Il avait donc trente ans et était par conséquent fort et vigoureux quand l'accident lui est arrivé. En 1855, quarantetrois ans après cet accident, la portion en voie de destruction était de 32 centimètres de longueur du côté du nord, et elle commençait de ce côté à 57 centimètres au-dessus du sol. Vers le sud, l'altération était
beaucoup plus étendue, elle commençait au niveau de la terre et montait jusqu'à lm,05. La corps ligneux, sur cette partie dépourvue d'écorce, était si vermoulu et si desséché, si réduit dans la région moyenne de la nécrose, qu'on l'eût dit entièrement mort. Son plus grand diamètre en cet endroit était de 10 centimètres, et le plus petit de 5 1/2 centimètres.
« Autorisé par le directeur des cultures, M. Souchet, je détachai un peu du bois mort, et je reconnus que la partie centrale vivait encore, mais qu'elle n'avait plus que 2 1/2 centimètres d'épaisseur. Elle avait tout l'aspect d'un bois jeune et vigoureux, et elle était pleine de sucs. Ainsi, c'était par un axe ligneux de 2 1/2 centimètres d'épaisseur que passaient tous les liquides puisés dans le sol par les racines, dans leur trajet de ces organes vers les parties supérieures de l'arbre.
« Bien que cet axe ligneux vivant fût aussi limité, la végétation de ce tilleul n'en paraissait pas ralentie ; ses bourgeons étaient tout aussi nombreux et aussi avancés que ceux des autres tilleuls; il s'est couvert comme eux de feuilles et de fleurs. Sur ma recommandation, M. Souchet eut l'obligeance d'observer la chute des feuilles cette année-là, ce qu'il n'avait pas fait antérieurement, et il remarqua que ces organes étaient morts dès le mois d'août. Cette observation concorde avec plusieurs autres que je décrirai plus tard.
« Il est une circonstance importante à noter dans l'histoire de cet arbre singulier : c'est qu'il existait à la base de la partie vivante inférieure des broussins d'où naissaient de nombreuses petites branches qui pouvaient exercer, par l'action de leurs feuilles, une très-grande influence sur l'entretien de la vie dans cette partie du troue.
« Je ferai observer à l'Académie que les exemples d'arbres qui ont vécu longtemps après l'opération, et qui ont été cités, soit par Du PetitThouars, soit par Gaudichaud, etc., se trouvaient dans des conditions analogues : ils avaient produit par leur partie inférieure des scions dont les feuilles satisfaisaient au besoin de la respiration, qui est si nécessaire aux arbres que ceux-ci périssent quand cette fonction est trop longtemps suspendue. Il paraît donc probable que ces brindilles, en préservant de la mort la partie inférieure de l'arbre, ont contribué à la conservation de la vie dans la partie supérieure. C'est là que réside, il me semble, la solution du problème posé à la science par le tilleul de Fontainebleau ; mais les botanistes n'ont pas envisagé la question de cette manière : ils ont raisonné comme si la partie inférieure de cet arbre continuait à vivre sans le secours des feuilles. C'est là ce qu'ont voulu expliquer les défenseurs de la théorie des fibres radiculaires descendantes, et ce qui causait l'étonnement d'hommes mieux instruits des phénomènes physiologiques.
« Ainsi, la question est bien simplifiée, car : 10 le tilleul de Fontaine-
bleau était muni, à sa base, de rameaux foliacés; 2° ce tilleul n'avait point 1. m, 1 0 de circonférence au-dessus de la décortication, et seulement 59 centimètres au-dessous, de sorte que, si cela eût existé, le tronc se serait considérablement accru en diamètre du côté des feuilles, tandis qu'il serait resté stationnaire à l'extrémité opposée, comme on le supposait.
En réalité, le tronc avait 60 centimètres de circonférence au-dessus delà partie écorcée et 54 au-dessous, de manière que, pendant les quarante et quelques années qu'a duré cet état de choses, l'accroissement n'a varié que de 2 centimètres en diamètre dans les deux parties. Cette différence n'a plus lieu de nous étonner, puisque les fonctions des feuilles ne s'exerçaient pas en haut et en bas dans la même proportion.
« Il est vrai que certains botanistes n'accordent pas aux feuilles toute l'importance que je leur attribue ici : ils croient qu'elles ne sont pas nécessaires à l'accroissement des végétaux ; ils se fondent sur deux ordres de phénomènes qu'ils n'ont pas bien interprétés, et dont je ne citerai qu'un seul exemple dans cet extrait. Ayant vu que la souche d'un orme dont le tronc avait été coupé à quelques pieds au-dessus du sol a produit quelques couches ligneuses sans le secours des feuilles, ils en ont conclu que celles-ci ne sont pas utiles à cet accroissement (1). Il me semble que c'est là ne pas apprécier les faits à leur juste valeur. En effet, les feuilles ne concourent pas directement à la formation des couches ligneuses et corticales : c'est là un point que j'ai démontré antérieurement ; mais elles prennent part, d'une manière indirecte, à la production des éléments fibro-vasculaires et corticaux, par la fonction respiratoire dont elles sont le siège principal, et qui est nécessaire pour l'élaboration des matières nutritives qui servent ensuite à la multiplication utriculaire, ou qui, s'accumulant dans les diverses parties du végétal, sont plus tard employées à son accroissement. C'est cet approvisionnement qui fait qu'une souche ne périt pas nécessairement quand l'arbre a été abattu. Les matières alimentaires réunies dans cette souche et dans les racines servent à la nutrition des tissus de la couche génératrice. Ceux-ci, ne recevant plus la séve descendante qui les féconde à l'état normal, empruntent aux tissus anciens les substances nutritives qui y sont emmagasinées et dont ils ont besoin pour se multiplier, pour donner de nouvelles couches ligneuses et corticales et des bourgeons adventifs; mais si l'on enlève les bourgeons qui se développent, la provision des substances alimentaires s'épuise et la souche meurt.
« Pour que la souche continue à vivre, la provision doit être renouvelée, et la nature pourvoit de deux manières à ce renouvellement : 1° par le développement des bourgeons adventifs; 2° par l'influence des feuilles
(1) Gardener's Chronicie; octobre 1852, p. 143.
des arbres voisins de même espèce, lorsque les racines de la souche sont soudées avec celles de ces arbres. Ce phénomène, reconnu par Dutrochet, n'est pas encore admis par tous les botanistes, et pourtant rien n'est plus exact que cette observation. Je l'ai constaté sur le Taxodium distichum des forêts marécageuses de la Louisiane. Les souches de quelques arbres, dont le tronc avait été coupé à 50 centimètres au-dessus du sol, continuant à végéter, je m'assurai, sur plusieurs d'entre elles, que leurs racines étaient greffées avec celles des arbres voisins. Quelques-unes de ces souches, ayant 60 centimètres de diamètre, étaient creuses au centre ; leurs productions ligneuses et corticales, débordant de tout le pourtour de la troncature, s'étendaient en lames de 1 à 2 centimètres d'épaisseur sur la surface de celle-ci et la recouvraient entièrement; il arrivait même, dans plusieurs cas, que ces productions, ayant gagné les bords de la cavité centrale, y descendaient en suivant le corps ligneux altéré. »
ÉTAT DU PERSONNEL DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DES DOMAINES ET FORÊTS DE LA COURONNE.
Administration centrale.
ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL: M. Henri VICAIRE (OÎ&) BUREAU CENTRAL ET DU PERSONNEL :
MM.
CANOBY, * chef.
MATHIEU, sous-chef.
MOYRET, commis.
MARCOTTE, commis.
LEPRINCE, commis d'ordre.
Foy, commis.
MAIRET, commis.
NOEL, commis.
LACHER, commis.
FILLON, commis.
PREAUÈRE DIVISION.
VINEY, * chef de division, inspecteur général.
MM.
Thomas DESCIIESNES, sous-chef de 2 cl.
faisant fonctions de chef de bureau.
DE BOISSIEU, commis principal.
FnÉzARD, commis-rédacteur de 1re cl.
ANTHOINE, commis.
DEUXIÈME DIVISION.
Chef de division : N.
Bureau du contentieux: M. FLORIMONT, sous-chef de lre cl., faisant fonctions de chef.
BERLINER, commis.
PETIT, commis.
Bureau des domaines : M. BLAIS, souschef de ire cl., faisant fonctions de chef.
VINEY jeune, commis.
Service extérieur.
INSPECTION DE PARIS.
MM.
MUSTEL-DUQUESNOY, * insp. de tre cl.
DELAVIGNE, g. g. de 1" el., au parc de Vincennes.
LALOUETTE, g. g. de lre el., à Monlgeron.
INSPECTION DE VERSAILLES.
HUARD-DELAMARRE, insp. de 2E el.
BROSSARD DE CORBIGNY, s. - inspecteur de lre cl.
MAUSAUX, g. g. de 1re cl., à Versailles.
D'ESTOURNELLES DE CONSTANT, g. g. de lre cl., à Meudon.
RICHARD DE VILLERS-VAUDEY, g. g. des domaines, à Versailles.
INSPECTION DE SAINT-GERMAIN.
FOUQUIER, * insp. de 1RC cl.
RÉCOPÉ, s.-insp. de 2e cl., à Marly.
RocHl, g. g. de l10 el., à Saint-Germain.
INSPECTION DE RAMBOUILLET.
DE VIOLAINE, insp. de LRE cl.
PALENGAT, s.-insp. de 2e cl.
g. g., à Rambouillet.
DE BOURGE, g. g. de 2E cl., à Saint-Léger.
SAUGER, g. g. de pc cl., à Dourdan.
INSPECTION DE FONTAINEBLEAU.
MM.
LECLERC, * insp. de LRE cl.
DU POINCTES DE GEVIGNEY, s.-insp. de 2e Cl.
CANU, g. g. de 1re cl.
HUTIN, g. g. de 1re cl.
INSPECTION DE COMPIÈGNE.
DE WIMPFFEN, insp. de 2E cl.
EDELINE, s.-insp. de 2e cl.
VALLERANT, g. g. de 1re ci., à Ste-Périne.
DELARUE, g. g. de 2e cl., à Coinpiègne.
INSPECTION DE LAIGUE.
DE LAPANOUSE, insp. de 3e cl., à Compiègne.
BEKTHAULT DE SAINT-PAUL, s.-insp. de lre cl., à Compiègne.
SEllVICE DES EAUX.
SÉGtJY. arch.-direct., à Versailles.
BAJAT, insp., à Versailles.
TUOCHU, insp., à Versailles.
DUFRAYEIIJ * insp. de la macli. de Marly.
BERGERIE IMPÉRIALE DE RAMBOUILLET.
DAUJUER, directeur.
DOMAINES IMPÉtUAUX DE LA SOLOGNE.
VUILLET, régisseur, à la Molle-Beuvron.
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
= Par arrêté de M. le directeur général des forêts, en date du 28 décembre 1855, M. DELAPERcHE (Henri-Marie-Augustin), garde général à Villers-Cotterets (Aisne), a été nommé en la même qualité à la résidence d'Oloron (Basses-Pyrénées), en remplacement de M. Castel.
M. CASTEL (Louis-Marie-Jllles), garde général à Oloron (Basses-Pyrénées), a été nommé garde général à Habsheim (Haut-Rhin), en remplacement de M. Ruillé.
= Par arrêté du 31 janvier 1856, M. DEFRANCE (Marie-Étienne), garde général à Benfeld (Bas-Rhin), a été nommé en la même qualité à Sarthène (Corse), en remplacement de M. Schilling, nommé à la résidence de Benfeld (Bas-Rhin).
= Par arrêté du 18 février 1856, M. DUFAY, garde général à Montfort-sur-Rille (Eure), a été nommé à la résidence de Vernon (Eure), en remplacement de M. de Senevas, démissionnaire.
= STATISTIQUE. — On lit dans l'Institut le résumé suivant d'une note lue à l'Académie des sciences, dans la séance du 4 février 1856, par M. Becquerel, l'un de ses membres : « En 1824, la consommation individuelle de la houille n'était encore que de oqal,75 de carbone provenant de ce combustible; cette quantité était employée en grande partie dans le petit nombre d'usines qui existaient alors à Paris. Aujourd'hui, la quantité répartie par individu s'élève à 2q%90, c'est-à-dire est devenue quatre fois plus considérable.
« Le tracé graphique de la consommation de la houille de 1816 à 1852, en prenant pour abscisses les années et pour ordonnées les quantités consommées, et faisant passer une ligne par les points correspondants à la consommation moyenne, donne une courbe qui tourne sa convexité vers l'axe des abscisses. Cette courbe a pour équation : y=716,116 -h- 600 o;2,5a.
« La consommation individuelle du charbon de bois n'ayant pas changé depuis cinquante ans, la quantité qui entre dans Paris croît donc proportionnellement à la population et continuera à croître tant que la houille
ne sera pas substituée au charbon de bois dans les usages domestiques.
Le tracé graphique met bien en évidence cette proportionnalité.
« Telles étaient les choses en 1852. M. Becquerel a cherché depuis, à l'aide de documents qui lui ont été fournis récemment par l'administration, si les premières conclusions devaient être modifiées ou non.
« En reportant sur les tracés graphiques les nombres relatifs aux années 1853, 1854 et 1855, on constate, à la seule inspection des courbes, les faits suivants : « 1° C'est sous l'ère consulaire, de 1801 à 1804, que la consommation du bois a été la plus considérable a Paris; sous l'ère impériale elle a été fortement en baisse, avec des alternatives de hausse et de baisse; elle s'est relevée sous la Restauration avec de semblables alternatives pour redescendre de 1826 à 1834; de 1854 a 1837 il y a eu hausse, et la baisse est devenue de plus en plus considérable jusqu'en 1848; le mouvement de hausse est devenu de plus en plus sensible, à tel point que la consommation est revenue ce qu'elle était sous l'ère consulaire, bien que la population soit aujourd'hui double de ce qu'elle était alors.
« Le bois blanc et les menus bois participent à ce mouvement de hausse ; le bois surtout atteint le chiffre des années les plus favorisées depuis 1815 ; tandis que la consommation des menus bois, quoiqu'en hausse, n'a pas encore atteint le chiffre qu'elle présentait avant 1852. Cette hausse moins considérable ne peut être attribuée qu'à l'emploi de la houille dans le chauffage des classes peu aisées.
« 2° La consommation du charbon de bois continue à croître proportionnellement à la population, conséquence inévitable de ce que ce combustible n'a pas encore été substitué sensiblement à la houille dans les usages domestiques; « 3° La consommation de la houille, surtout depuis 1851, tant dans l'industrie que dans le chauffage des particuliers, cesse d'être représentée parla formule donnée plus haut et qui s'appliquait à la consommation de 1816 à 1851 ; la courbe, de convexe qu'elle était, est devenue concave; ce qui montre que la consommation suit maintenant une loi beaucoup plus rapide qu'avant, preuve du très-grand développement de l'industrie depuis quarante ans, car la consommation du bois allant en augmentant, quoiqu'on ait brûlé beaucoup de vieux bois provenant des démolitions, on ne saurait admettre que l'emploi de la houille dans les foyers domestiques ait augmenté sensiblement.
« La consommation toujours croissante du charbon de bois et des menus bois, et les prix élevés de ces deux combustibles, portent naturellement les propriétaires forestiers à couper leurs bois à douze ou quinze ans, au lieu de dix-huit à vingt. M. Becquerel craint que cet état de choses n'amène le dépérissement des forêts en France. En effet, les coupes multipliées altèrent de plus en plus les souches, font disparaître les brindilles qui, en se décomposant, fournissent avec les feuilles l'humus indispensable à la végétation; les réserves étant plus jeunes croissent moins en hauteur que dans les taillis plus âgés, et deviennent trapus : il en résulte que si ces coupes anticipées continuent à prendre de l'extension, elles feront disparaître ces chênes séculaires si recherchés pour les besoins de la marine et de l'industrie. »
QUELQUES OBSERVATIONS GÉNÉRALES SUR LA SYLVICULTURE EN FRANCE.
I ^U«^de-#s;^b@gnés, dont nous regrettons de ne pas connaître le nom, us observations suivantes. Nous nous empressons de les piftjjfery c*Y ejlt^ous paraissent de nature à intéresser nos lecteurs.
Il existe entre la sylviculture et l'agriculture un antagonisme fâcheux, qui est nuisible à l'une et à l'autre de ces deux branches de la culture générale. Or, d'après la manière d'être de ces deux natures de propriétés, la forêt représentant, outre la valeur du fonds, une richesse immobilière par son mode d'emploi actuel qui peut toujours être plus ou moins facilement réalisée et mobilisée, il est constant que c'est elle qui en souffre le plus, et qu'elle tend forcément à être remplacée par la culture des plantes annuelles.
Je sais que souvent un sol par sa déclivité, sa nature aride ou par tout autre motif, est impropre à une culture autre que celle du bois, et qu'il est probable que l'intérêt bien entendu du propriétaire le portera à sa conservation. Mais je parle d'un fait général, et je crois que la tendance au défrichement est certaine. Il est en effet évident pour tout le monde qu'il est de l'intérêt public de tirer de la terre le plus grand produit possible, et que la maintenir en bois quand elle peut produire mieux, c'est consentir à une perte qui peut être souvent considérable, Je crois donc que l'on peut regarder comme évident que tant que le bois n'atteindra pas un prix rémunérateur, tel que le revenu du sol boisé soit au moins égal à celui qu'il serait possible d'en retirer par toute autre culture, la forêt disparaîtra pour faire place à la culture arable (1).
On pourra sans doute, par des lois prohibitives, créer des obstacles, des entraves qui retarderont plus ou moins ce résultat final, mais il arrivera tôt ou tard et par la force des choses. Il arrivera, parce que ces lois faites, dit-on, dans l'intérêt général, bien que nuisant à l'intérêt particulier, disparaîtront nécessairement de notre législation ; car on comprend mieux chaque jour, la lumière se faisant dans les questions économiques, que l'intérêt public ne peut être autre chose que la somme des intérêts
(1) Il convient d'ajouter, comme cause devant arrêter les progrès du défrichement, la diminution dans le taux ordinaire des placements.
particuliers (1). J'en parle ici en général et je laisse de côté les cas exceptionnels qui n'empêchent pas le principe.
Quand arrivera ce prix rémunérateur du bois? C'est ce qu'il est difficile de prévoir aujourd'hui, et je ne veux pas aborder ce sujet; seulement je me contenterai de faire les observations suivantes : Le combustible minéral est presque partout à meilleur marché que le bois, et les voies de communication augmentant, ce fait tend à se généraliser de plus en plus.
Le bois de charpente cède partout la place au fer dans les constructions; et, dans celles en grand nombre qui s'élèvent en ce moment à Paris, on ne voit pas une seule pièce de bois.
Le prix du blé, au contraire, a une tendance à la hausse.
Enfin, les divers procédés de culture se perfectionnent chaque jour et permettent d'obtenir les plus beaux produits dans des sols réputés jusqu'alors tout à fait ingrats.
Et remarquez que le fait général que j'indique ici est tout à fait indépendant de la nature du propriétaire, que ce soit le particulier, la commune ou l'État, la loi de tendance est la même, et la généralité des forêts marche vers le défrichement, la limite étant ce prix rémunérateur du bois dont il est parlé plus haut.
Pour le particulier, l'avantage qu'il peut trouver dans le défrichement est évident, et personne ne le conteste.
Pour la commune l'intérêt est le même, et les besoins sont aussi pressants. Si le défrichement doit augmenter ses revenus, elle doit défricher: elle pourrait alors placer en rentes sur l'État la valeur de la superficie, et louer le sol à des fermiers offrant toutes les garanties désirables ; par ce moyen, la tutelle de la commune resterait toujours entre les mains de l'État.
Quant à l'État lui-même, pourquoi son intérêt serait-il différent de celui d'un particulier (2)? Sa fortune est la fortune de tous; si elle est mal administrée, c'est-à-dire si on en tire un revenu inférieur à celui qu'on pourrait en tirer, tous en souffrent; et, comme l'État a besoin de revenus, il est obligé de demander aux impôts, soit à la bourse de chacun, ce qu'il perd d'un autre côté.
(1) Cette opinion ne nous paraît nullement fondée: il y a très-souvent antagonisme entre l'intérêt privé et l'intérêt public. Celui-ci résulte non pas de la somme mais de la combinaison des intérêts particuliers. (Note de la réd.)
(2) L'intérêt de l'Etat diffère de celui d'un particulier parce que, tandis que le particulier recherche la rente la plus élevée, dût le rendement de sa forêt diminuer, l'Etat, au contraire, ne se préoccupe pas de la rente et tend à augmenter le rendement absolu.
C'est cette augmentation du rendement qui constitue celle de la fortune publique. L'élévation de la rente, quand les produits matériels diminuent, peut enrichir un individu.
mais elle appauvrit tous les autres. (Note de la réd.)
Sans doute la question des approvisionnements de la marine est fort importante et mérite, à tous égards, d'être prise en sérieuse considération. Mais si les bois qui viennent de l'étranger sont à meilleur marché, pourquoi continuera en produire? La division du travail, même de peuple à peuple, augmente la richesse générale, et on peut dire, malgré la situation présente, que la marche des sociétés les éloigne de plus en plus de l'état de guerre. Du reste, l'exemple de l'Angleterre est à lui seul un argument ; il n'y existe que très-peu de forêts, et cependant c'est la puissance maritime la plus considérable du monde.
'Dira-t-on que les propriétés forestières sont une garantie et une des causes du crédit de l'État? qu'elles peuvent servir de gage et inspirer confiance à ses créanciers ? Je crois qu'on a donné trop d'importance à cette objection. A la fin du siècle dernier, alors que l'État s'était emparé de tous les biens ecclésiastiques et de ceux des émigrés, certes il était grand propriétaire, et en aucun moment il n'eut entre les mains autant de domaines. Son crédit en était-il augmenté, et les effets publics avaient-ils une plus grande valeur? On plaçait à 50 pour 100 en achetant des rentes, et jamais la fortune de l'État ne fut autant ébranlée. Je crois qu'il ne faut pas chercher là les causes du crédit public : elles sont dans les événements politiques et dans la confiance qu'inspire la machine gouvernementale.
Le créancier ne s'occupe nullement de savoir à quel chiffre s'élève la valeur de la propriété de l'État, comparé à celui de la dette, il ne demande pas à être remboursé, les intérêts lui suffisent, car il sait qu'en allant à la Bourse il pourra rentrer quand il voudra dans ses capitaux.
Du reste, il n'est nullement question ici de l'aliénation des propriétés de l'État, mais seulement d'un changement possible dans leur mode de culture.
Mais je m'aperçois que je me laisse entraîner beaucoup trop loin et un peu au delà de mon sujet.
Dans tout ce qui précède, j'ai voulu dire que partout où il était possible d'obtenir du sol, par une culture arable, une rente supérieure à celle que donne un bois, il y avait tendance au défrichement; que cette tendance était la loi du progrès ; et, comme je crois qu'en général la culture en bois ne donne qu'une rente très-inférieure, j'ai dit que le défrichement, non pas de tous, mais de la majeure partie des bois, était le but vers lequel marchait la société moderne.
Ainsi il y a lutte entre l'agriculture et les forêts, lutte qui ne peut se terminer, comme il en a toujours été, que par la destruction de ces dernières, au moins jusqu'à la limite fixée par le prix rémunérateur dont j'ai déjà parlé.
Dans cette lutte chacun cherche à faire triompher son parti : les fo-
restiers voudraient toujours planter (1), et, par suite de notre organisation administrative, on met en bois des sols qui donneraient par toute autre culture des produits incomparablement supérieurs.
L'agriculture, de son côté, voudrait tout défricher, faire passer partout la charrue ; et elle sacrifierait souvent à quelques années d'abondantes récoltes toutes les richesses accumulées dans un sol par la forêt, évidemment au plus grand détriment des générations futures.
Cette lutte, qui est dans la nature même des choses, se trouve compliquée d'un côté par la législation forestière et de l'autre par notre organisation administrative. Il résulte de ces deux faits généraux un tiraillement fâcheux qui apporte une entrave réelle au progrès, et qui est aussi un grand obstacle à une convenable distribution dans le pays des différentes espèces de culture. Tel sol, en effet, ne donne cultivé en céréales qu'un produit net à peu près nul qui, s'il était mis en bois, pourrait donner une rente considérable ; tel autre produit des bois dont on trouve à peine le débouché dans une contrée où la terre arable a une valeur incomparablement supérieure.
Je vais essayer de faire comprendre en quelques mots ma pensée, et je demande humblement aux plus habiles le concours de leurs lumières, car il me semble qu'il y a là des vérités utiles.
La France périra faute de bois, avait dit Colbert, et depuis lors, sous l'impression de cette menaçante parole, les gouvernements ont tous, suivant d'anciennes coutumes et par des restrictions plus ou moins absolues, mis des obstacles au libre exercice de la propriété forestière. Les anciens gouvernements étaient, en général, pénétrés de cette idée que leur devoir était de tout réglementer dans leurs États, de fixer les moyens que chacun devait prendre pour arriver à la richesse, et de rendre leurs sujets heureux, même malgré eux. Je crois que les idées d'à présent sont beaucoup plus dans le sens du laisser-faire et de la liberté, pourvu qu'elle soit pour tous, pourvu aussi qu'elle n'offense en rien la morale publique. On rend davantage justice à l'intérêt individuel; on comprend mieux qu'il n'est pas de plus puissant mobile pour pousser l'homme sur le chemin de la fortune et du bonheur ; je dirai même qu'il n'en est pas de plus légitime, la question étant toujours dominée par les principes de la morale et de la religion.
Aussi, rien ne me paraît préférable à la liberté accordée au défrichement; l'intérêt particulier est le meilleur guide que l'on puisse choisir dans l'administration de la fortune des citoyens, et si la richesse des individus augmente, la richesse publique augmentera d'autant. Il y aura
(1) Nous n'admettons pas cela. Les forestiers ne veulent pas planter à tort et à travers, ils sont plus intelligents que ne le pense notre correspondant. (Note de la réd.)
certainement de fausses spéculations, peut-être bien des déceptions, mais ce ne seront que des cas particuliers, dans lesquels l'État n'a rien à voir, qui serviront d'exemple aux autres, et qui n'empêcheront pas que l'ensemble des opérations ne soient évidemment faites dans le sens le plus favorable à l'augmentation de la fortune publique, parce qu'elles seront faites, je le répète, pour le plus grand intérêt des individus.
Je ne demande pas cependant la liberté du défrichement d'une manière absolue et sans restriction. Sans doute l'intérêt public exige la conservation de certaines portions de forêts qui peuvent avoir une influence favorable sur l'état climatérique du pays ; mais ce ne sont là que quelques exceptions qui ne sont nullement incompatibles avec le principe de la liberté.
La reconnaissance et le classement de cette partie du sol forestier pourraient être faits à l'avance, comme le propose le savant auteur d'une Note sur le défrichement des bois, publiée en 1854 par les Annales forestières. J'ajouterais à cette mesure de larges encouragements accordés aux reboisements, ceux donnés par la loi actuelle étant tout à fait insuffisants. Par ce moyen le gouvernement faciliterait, autant qu'il est en son pouvoir, une convenable distribution des cultures ; les sols propres à la culture arable seraient mis en céréales, et on reboiserait les terrains aujourd'hui tout à fait incultes.
En second lieu, l'organisation de l'administration forestière me semble aussi créer des obstacles à l'augmentation de la fortune territoriale de notre pays.
Par suite de sa dépendance du ministère des finances, elle reçoit les inspirations de fiscalité qui en émanent; on ne voit en elle que deux chapitres, l'un aux recettes, l'autre aux dépenses, et tous les efforts tendent à diminuer l'un et à augmenter l'autre. Souvent une dépense bien entendue prodHirait 'tune augmentation considérable dans le revenu; mais, comme les deux chapitres sont entièrement séparés et qu'il ne peut y avoir compeusation, comme enfin, et la raison est péremptoire aux yeux des financiers, il y aurait augmentation dans les dépenses, on passe outre, et l'amélioration n'est pas faite.
C'est à peu près la position de ce propriétaire qui manque des capitaux nécessaires pour faire valoir sa terre, qui cultive presque sans fumure, et qui ne peut faire aucun de ces grands travaux d'amélioration dont l'action est si puissante sur la production.
La sylviculture est une des branches de la culture générale, et la place naturelle de l'administration forestière est au ministère de l'agriculture.
Si ce changement était accompli, on ne jugerait plus de l'importance des forêts de l'État d'après le chiffre seul vis-à-vis duquel elles figurent au
budget des recettes; des dépenses utiles et fécondes seraient exécutées, et l'administration devrait cesser d'être purement sylvicole. C'est à elle que serait confiée la gestion de la fortune territoriale des communes et de l'État; elle aurait entre les mains tous les intérêts généraux de la culture du pays, et elle deviendrait la protectrice naturelle des intérêts particuliers, en ce qui touche l'agriculture et la sylviculture.
Loin de moi la pensée de proposer le défrichement des propriétés forestières de l'État; je regarde au contraire leur conservation comme éminemment utile, au moins quant à présent ; et, quand la liberté de défrichement aura été rendue aux particuliers, quand par une culture plus rationnelle et l'élévation des prix le revenu du sol boisé aura considérablement augmenté, les conditions de la propriété forestière seront changées de telle façon que l'avantage se trouvera peut-être dans la conservation des forêts.
L'augmentation des capitaux suit, dans sa marche ascensionnelle, l'augmentation de la population, si elle ne lui est supérieure ; par suite, les procédés de culture s'améliorent, le taux de l'intérêt diminue, la valeur de la terre s'élève et son rendement à l'hectare doit nécessairement augmenter. La seule manière d'atteindre ce but pour la propriété boisée c'est la conversion des forêts en futaies pleines, et chacun sait que ce mode de traitement peut porter au double, et même au triple, le revenu de la propriété forestière. On obtiendrait ainsi une production aussi considérable sur une étendue moindre, et on pourrait, sans danger pour la consommation, rendre à l'agriculture des étendues considérables de terrains.
Si ces deux grandes mesures étaient prises, c'est-à-dire si la liberté, sauf les exceptions voulues par les nécessités climatériques, était rendue au défrichement, et si l'administration forestière dépendait du ministère de l'agriculture, tout esprit de lutte cesserait et on cultiverait la terre dans le plus grand intérêt de tous.
L'administration forestière deviendrait l'administration à laquelle seraient confiées toutes les propriétés rurales des communes et de l'État ; elle serait chargée d'y exécuter tous les grands et si utiles travaux d'amélioration pour lesquels l'État est loin d'avoir l'initiative aujourd'hui, et elle cesserait enfin d'être exclusive et peut-être trop absolue en matière de bois. UN ABONNÉ.
DU REBOISEMENT DES LANDES DE BRETAGNE.
TRAVAUX DE L'ASSOCIATION BRETONNE,
SESSION DE 1855.
L'ancienne province de Bretagne, qui comprend les cinq départements du Finistère, des Côtes-du-Nord, du Morbihan, de la Loire-Inférieure et de l'Ille-et-Vilaine, forme, on le sait, un triangle dont le sommet est le département du Finistère et la base ceux de l'Ille-et-Vilaine et de la LoireInférieure. Il est traversé, dans la direction de l'est à l'ouest, par une chaîne de montagnes peu élevées, qui est connue dans le pays sous le nom d'Echine de la Bretagne : elle divise cette province en deux parties, appelées haute et basse Bretagne.
La constitution de cette chaîne est granitique. Cette roche, en se soulevant, a entraîné avec elle les schistes qui la recouvraient et qui constituent aujourd'hui la plus grande partie des terrains de la contrée.
Les terres à schistes valent en général mieux, au point de vue agricole, que celles de granit : ainsi, tandis que les premières permettent, dans les parties élevées, la culture du chêne, dans les pentes, celle du blé, et dans les fonds, celle des prairies ; les secondes, sur les crêtes, se refusent à toute autre culture que celle du pin, et partout ailleurs se prêtent à peine à celle du seigle.
L'absence presque absolue de terrains calcaires rend impossible, en Bretagne, l'établissement de prairies artificielles ; il en résulte qu'elle est pauvre en bétail, et que par suite l'agriculture y est en retard. On sait, en effet, que la quantité de bétail peut, en général, servir de critérium pour faire juger de jl'état agricole d'une contrée. Plus elle a de bétail, plus elle possède d'engrais, plus l'agriculture peut devenir intensive et se perfectionner : avec peu de bestiaux, au contraire, l'engrais est rare, les différentes cultures, forcées de se contenter des éléments nutritifs que fournit la terre à l'état naturel, sont moins productives : il faut plus de terres pour le même résultat : l'agriculture est dite extensive.
C'est là, ou à peu près, l'état de la Bretagne : peu de bestiaux, peu d'engrais, pas de méthodes perfectionnées, une grande étendue de terres cultivées pour peu de produits. Il serait de toute nécessité, pour changer cet état de choses, d'effectuer des marnages sur une très-grande échelle; mais jusqu'aujourd'hui, malgré l'impulsion de l'autorité, malgré les primes votées
par les Conseils généraux pour l'introduction et l'emploi d'engrais calcaires, cette opération est restée en quelque sorte à l'état d'essai, et est loin d'être entrée dans les habitudes des cultivateurs.
Qu'il faille attribuer cette indifférence pour le progrès à l'ignorance et à la routine ou au manque de capitaux, ou enfin, ce qui est plus probable, à la faible densité de la population, dont les besoins, pouvant être satisfaits par les produits d'une culture élémentaire, ne nécessitent pas l'emploi des procédés perfectionnés qu'on remarque dans les pays plus peuplés, il n'est pas moins vrai qu'une grande partie delà Bretagne est aujourd'hui tout à fait inculte, et présente, sous le nom de landes, de vastes étendues couvertes de bruyères et de genêts. Ces landes, qui ne sont pas seulement reléguées sur les points isolés ou difficiles, mais qui arrivent souvent jusqu'à la porte des villes, sont, d'après la statistique de la France, distribuées ainsi qu'il suit :
Finistère. 259,000 h.
Côtes-du-Nord. 122,000 Morbihan. 299,000 Ille-et-Vilaine. 122,000 Loire-Inférieure. 174,000
-
Total. 976,000
C'est donc une étendue de près de 1 million d'hectares, dont la majeure partie appartient aux communes, qui, indépendamment des jachères, lesquelles s'élèvent à 418,500 hectares, est tout à fait inculte.
Les habitants, il est vrai, s'en servent pour en retirer un peu d'engrais : au moyen d'une espèce de houe, appelée étrèpp., ils enlèvent dans la lande une motte de gazon et de bruyère qu'ils mélangent par couches alternatives avec l'engrais animal; ils forment ainsi ce qu'ils appellent des tourbes d'engrais. qu'ils répandent ensuite sur le sol. Cette grossière opération, qui aboutit à la ruine de la moitié du pays pour la fertilisation de l'autre, est repoussée par tous les agriculteurs sérieux et tous les hommes éminents de la contrée, qui pensent que le reboisement des landes serait à tous égards infiniment préférable.
Le reboisement est, en effet, pour le moment, le seul moyen de tirer parti de ces vastes terrains, car l'agriculture est trop arriérée encore pour les utiliser : ce qu'il lui faut à elle, ce n'est pas de l'espace, ce sont des capitaux, c'est de l'instruction, qui permettent, au lieu de défricher de nouvelles terres, d'améliorer la culture des anciennes.
Vivement préoccupés de cette grave question, les Conseils généraux l'ont, à plusieurs reprises, mise à l'étude ; et, dans sa dernière session, celui du Morbihan a même proposé un prix pour le meilleur mémoire relatif au reboisement des landes.
Les comices agricoles ne sont pas restés en arrière : l'un d'eux, connu sous le nom d'Association bretonne, et composé des propriétaires les plus considérables et des hommes les plus éclairés et les plus compétents des cinq départements, a prouvé, dans la session de 1855, par l'importance qu'il a attachée à cette question, combien l'esprit public s'en préoccupe.
L'utilisation des landes y a été l'objet, de la part d'une Commission spéciale, d'une étude très-approfondie, et nos lecteurs nous saurons gré certainement de leur faire connaître quelques passages du rapport remarquable dans lequel M. le comte de Saisy a rendu compte des travanx de celte Commission : « La majorité de la Commission, a-t-il dit, s'est rangée de l'avis que, sans rien établir de décisif, il fallait procéder par la classification des landes, couvrir les hauteurs de semis résineux, afin d'abriter les coteaux et les plaines; convertir peu à peu les coteaux en terres labourables, et faire des prairies et des pâturages dans les parties humides.
« L'ensemencement d'un hectare de landes en pins maritimes, le plus rustique des résineux, et qui réussit si bien dans les sols granitiques, peut se faire au prix de 10 fr.
« On se contente d'enlever une motte, de mètre en mètre, à peu près, d'ameublir un peu la terre, et d'y déposer quelques graines de pins.
Quatre hommes peuvent ainsi ensemencer en avril et mai un hectare en
deux jours ; soit, la journée étant de 75 centimes o fr.
Graine. 4 Total. 10
Lorsqu'il y a des clôtures à faire, la dépense est un peu augmentée.
« Vous voyez donc, messieurs, que le moyen de mettre les landes en valeur par des semis de pins est peu dispendieux, et à la portée de bien des propriétaires. »
Le Congrès a adopté les conclusions de ce rapport dont l'article 1er est ainsi formulé : « Que les arêtes des montagnes et parties de landes non susceptibles d'être converties en terres labourables devaient être ensemencées en résineux ou en feuillus, appropriés au sol. »
Nous doutons fort que le chiffre de 10 fr., présenté par M. de Saisy, puisse servir de base à l'évaluation des frais de repeuplement d'un hectare de lande; nous doutons également que la méthode expéditive qu'il indique soit en général suivie de succès, mais là n'est pas la question ; si le reboisement des landes est une opération utile, il faut l'effectuer lors même qu'elle nécessiterait des sacrifices plus considérables. Du reste, ceux-ci ne sauraient être exorbitants, comme on le verra par les extraits suivants d'un compte rendu de M. Augustin, inspecteur de l'Association, sur des
semis de pins maritimes effectués sur 131 hectares de la vaste bruyère dite Guiscriff, dans le lieu dit Léon Burel, par M. Peyron, propriétaire.—Bien que les procédés employés n'offrent en somme rien de bien nouveau pour ceux qui sont familiarisés avec ce genre d'opération, il n'est néanmoins pas inutile d'entrer dans quelques détails pour donner une idée de la nature des difficultés à vaincre et des dépenses qu'elles nécessitent.
« Cette propriété, dit M. Augustin, est située commune de Guiscriff, canton de Faouët, arrondissement de Napoléonville. La route départementale de Scaër à Gourin la sépare en deux parties.
« La nature du terrain est de quatre espèces et se divise comme suit : 1/10 environ d'argile blanche compacte, mêlée de quartz, humide et marécageuse; 1/10 de tourbes composées de détritus et de végétaux, sur une profondeur de 40 centimères à 1 mètre; 4/10 de terre grise végétale, de 15 à 20 centimètres d'épaisseur, avec un sous-sol d'argile jaune perméable ; enfin, 3/10 de terre légère de qualité propre à toute espèce de culture.
« Voici comment M. Peyron a divisé son terrain : une grande ligne droite de 6 mètres de large coupe cette lande du nord au sud en deux parties égales : cette même ligne est coupée perpendiculairement et traversée par quinze lignes un peu moins larges, partant de la route départementale et aboutissant à la limite est. Chacune de ces lignes transversales a 5 mètres de large sur 4 à 500 mètres de long. Au moyen de ces lignes, le terrain est divisé en trente-deux parcelles de 3 à 4 hectares : des fossés ont été établis de chaque côté de ces différentes lignes, afin d'assainir le terrain.
« Les premiers travaux d'ensemencement ont été commencés dans les derniers mois de 1848, et continués sans interruption jusqu'en 1851.
« La plus grande partie du terrain a été ensemencée en bandes ou lignes, commençant dans chaque parcelle de l'est à l'ouest. Chaque bande a été tirée au cordeau et faite par le moyen de trois coups d'étrèpe, donnés latéralement, représentant une largeur d'environ 60 centimètres, la distance entre chaque bande est de 1 m,30.
« Le terrain mis à nu, par ce moyen, a été tantôt biné sur une profondeur de 3 à 4 centimètres, puis ensemencé, ensuite ratissé pour recouvrir la semence; tantôt ensemencé sans binage préalable, mais biné après l'ensemencement, ce qui a suffi pour recouvrir convenablement la graine et épargner les frais du coup de râteau. Mais l'expérience a prouvé à M. Peyron que le premier mode était préférable, bien qu'il coûte 8 à 10 pour 100 de plus que le second.
« Les dépenses par hectare, pour la première méthode, sont évaluées ainsi qu'il suit :
Etrépage, 40 lignes de 100 mètres à 5 cent. le décam. 20 fr.
Ensemencement (un quart de journée). 0,25 Binage (vingt journées à 75 centimes). 15 Hatissage. 4,50 50 kilogr. de graine à 40 fr. les 100 kilogr. , ., 20 Total 59,75
« Par le second moyen, les frais de ratissage étant économisés, la dépense se trouve réduite à 55 fr. 25 c. C'est, on le voit, une dépense bien minime pour un résultat important.
« M. Peyron, ajoute le rapporteur, ayant opéré dans diverses localités du département qu'il habite, m'a fait connaître son opinion sur l'époque la plus favorable pour l'ensemencement. Veuillez donc, messieurs, me permettre de vous en donner connaissance : aussi bien est-il, à mon avis, tout à fait opportun de nous occuper spécialement d'une culture qui peut seule amener, sans grands frais, la conversion en terrains productifs de ces immenses bruyères du Morbihan, où le peu d'épaisseur de la couche végétale ne permet que l'introduction de bois de pins, mélangés des diverses essences d'arbres forestiers appropriés à la nature du sol.
« M. Peyron dit que quand on sème une grande étendue de terrain et qu'on veut aller vite, cette opération peut se faire sans inconvénient en toute saison ; et quoique, sur son terrain, des graines semées en hiver aient parfaitement réussi, cependant la saison la plus opportune est dans les mois de mars, avril, mai et même juin : lorsqu'on sème plus tard, les plants n'ont pas acquis assez de force pour résister pendant l'hiver aux soulèvements des terres ameublies par la gelée. Le grand froid est moins nuisible que ces soulèvements qui déracinent les plants.
« Les terrains exposés au nord conviennent mieux aux semis de pins, parce qu'ils sont à l'abri des vents d'ouest et du sud-ouest qui sont trèsnuisibles. Le sol sec, léger et mêlé de sable, de granit ou de quartz, est celui qui leur convient le mieux : le sol humide et marécageux, reposant sur un fond d'argile imperméable, convient le moins. Dans ce cas, le pin vient bien pendant quelques années; mais, vers l'âge de quinze ans, quand les racines ont atteint la couche d'argile qu'elles ne peuvent pénétrer, il s'étiole et est déraciné par les vents; il vaut mieux alors exploiter ces parties et se contenter d'obtenir du chauffage, et renouveler cette opération tous les quinze ans.
« C'est là, messieurs, le seul moyen de préparer vos terrains actuellement improductifs à recevoir une culture avantageuse, et de ménager vos engrais d'étable et les amendements calcaires que vous avez tant de peine à vous procurer pour l'immense quantité d'excellent terrain qui ne demande que fort peu de soins. Bien loin de convertir vos grandes landes
éloignées de vos exploitations en terres labourables, semez-les en bois, imitez M. Peyron et les autres personnes de la Bretagne dont il y a beaucoup, dans le Morbihan, qui ont suivi cet excellent système. »
Les conclusions des deux rapports dont nous venons de donner des extraits sont donc les mêmes : il importe, pour utiliser les landes, de les reboiser ; c'est le seul moyen d'en tirer parti, et la culture forestière est la transition nécessaire par laquelle doivent passer ces terrains avant d'être utilement livrés à l'agriculture. La plus grande partie de ces landes appartient aux communes, l'Etat en possède également des étendues considérables. C'est à eux de donner l'exemple, en commençant sur une grande échelle une opération dont les frais sont si peu considérables et les résultats si sérieux à tous les points de vue; car les pins maritimes, jusqu'à présent à peu près uniquement employés, ne devront servir que d'essence transitoire, et pourront ultérieurement être remplacés par toute autre essence, et particulièrement par le chêne, auquel la proximité des ports de Brest et de Lorientdonnerait une valeur considérable. C'est ce qu'a bien compris l'Association bretonne, qui n'a pas clos ses séances sans formuler le vœu suivant : « La conservation des bois et des terrains forestiers du domaine de l'Etat en Bretagne devant être considérée comme étant d'une impérieuse nécessité, en vue des deux ports de Brest et Lorient, et de l'accroissement de leurs ressources au moyen de l'achat par le gouvernement de plusieurs milliers d'hectares de lande à affecter à de nouvelles plantations, en présence de la vente en fonds et superficie de 555 hectares de bois taillis dans les forêts de Lauvaux et Florange (Morbihan) et de Lavennec (Finistère) contenant 470 hectares ; le Congrès émet le vœu que la direction générale des forêts soit détachée du ministère des finances pour être rangée dans les attributions du ministère de l'agriculture. »
L'Association bretonne aura-t-elle plus de succès que les nombreux Conseils généraux et les différents Congrès agricoles qui, depuis tant d'années, renouvellent périodiquement le même vœu? X.
ACCROISSEMENT DES VÉGÉTAUX.
(Extrait d'un mémoire présenté à l'Académie des sciences par M. Trécul.)
« Dans la précédente séance, j'ai eu l'honneur d'entretenir l'Académie d'un arbre écorcé circulairement, qui a survécu quarante-quatre ans à cette opération. Aujourd'hui, je décrirai des arbres qui, se trouvant dans
des conditions différentes, n'ont prolongé leur existence que pendant peu de temps, ou seulement pendant un petit nombre d'années.
« J'avais cru jusqu'en 1853 qu'un arbre dont la partie inférieure du tronc, à la hauteur de 2 mètres, était morte l'année précédente, ne continuerait pas à s'accroître en diamètre dans sa partie supérieure. C'est pourtant ce que j'ai observé pendant les expériences que je fis au Muséum d'histoire naturelle pour étudier l'accroissement en diamètre des végétaux. Deux paulownias m'ont donné lieu de faire ces singulières observations. Ils avaient subi chacun deux décortications simultanées au printemps de 1852. Ces décortications furent enveloppées de toile enduite de caoutchouc, en prenant quelques précautions que les limites imposées à cet extrait ne me permettent pas d'indiquer ici. Les parties dénudées ont donné des productions cellulaires dans lesquelles des fibres et des vaisseaux se sont développés. Ces productions étaient semblables à celles dont j'ai mis plusieurs fois des exemples sous les yeux de l'Académie; mais elles étaient insuffisantes pour satisfaire à une réparation complète des plaies. Elles moururent pendant l'hiver avec toute la partie inférieure de ces arbres. La partie située au-dessus des décortications, au contraire, survécut. Le bois extérieur de la base de mes deux paulownias ne vivant plus, il m'importait de vérifier si le bois central végétait encore.
Pour atteindre ce but, je fis à la décortication inférieure une ouverture de 6 centimètres de longueur et de 45 millimètres de largeur par laquelle j'enlevai tout le bois du milieu, de manière qu'il y avait une cavité interne de 85 millimètres de diamètre. Je constatai ainsi au printemps de 1853 que le corps ligneux était entièrement privé de vie dans la partie placée au-dessous des décortications, tandis que la partie supérieure du tronc, les grosses branches et les principaux rameaux étaient restés vivants. J'avais surveillé pendant tout l'hiver l'action alternative de la pluie et du froid sur la partie inférieure de ces paulownias et sur mes productions cellulo-vasculaires nouvelles qui n'étaient plus garanties contre les intempéries de la saison. Je vis périr successivement ces productions ainsi que l'écorce et le bois de la base de ces arbres. La mort s'étendit même aux racines. Ce qui était au-dessus des décortications me paraissant plein de vie, j'attendais avec impatience le retour de la végétation pour voir ce qui en résulterait. Au mois d'avril, je fus tout surpris de voir les cellules les plus internes de l'écorce opérer la multiplication utriculaire, comme si l'arbre eût été en bonne santé, et l'écorce se détacher avec facilité comme celle des paulownias qui n'avaient pas été opérés.
« Le développement des éléments corticaux et fibro-vasculaires reprenait donc sa marche habituelle (je m'en assurai par l'examen microscopique), et cependant il n'existait sur l'arbre aucun bourgeon; car ceux
des jeunes rameaux ne se développèrent pas, les rameaux de l'année étant morts aussi pendant l'hiver. La production fibro-vasculaire qui se manifesta ne peut donc être attribuée à l'influence des bourgeons, puisqu'il n'y en avait pas. Il n'en parut que deux mois plus tard. Au mois de juin seulement, quelques bourgeons adventifs commencèrent à se montrer. Les premiers naquirent sur le tronc, près de l'insertion des branches. Quelque temps après, j'en observai d'autres sur les branches elles-mêmes, puis sur les rameaux. Ils reparurent donc de bas en haut en suivant l'ordre de la ramification. Ces bourgeons n'étaient pas vigoureux; les plus forts ne s'allongèrent pas au delà de 20 centimètres.
« La vie se maintint dans ces arbres pendant une grande partie du second hiver; mais la végétation ne se réveilla pas au printemps de 1854.
« Ces curieux phénomènes sont autant de preuves qui viennent s'ajouter à toutes celles que j'ai données contre la théorie des fibres radiculaires descendant des feuilles, puisque l'accroissement en diamètre a commencé lorsqu'il n'existait pas de bourgeons sur ces arbres, et deux mois avant la naissance des bourgeons adventifs.
« Quelques autres arbres écorcés circulairement m'ont aussi présenté des faits remarquables que je ne puis que signaler dans ce résumé; ils rentrent d'ailleurs dans un ordre de faits en partie connus. Parmi ces arbres, il y avait des ormes, un marronnier d'Inde, un tilleul, un noyer, des robiniers, un érable et un gleditschia. Tous périrent au bout d'un petit nombre d'années, ou dans l'année même, suivant que la décortication avait été pratiquée au commencement du printemps, aussitôt que l'écorce se détachait avec facilité, ou seulement à la mi-juin.
« Quand l'opération a été faite dès le début de la végétation, les arbres n'en parurent pas souffrir pendant la première année; ils donnèrent des feuilles et des fleurs comme à l'ordinaire. Il en fut de même au second printemps ; mais cette fois les feuilles se desséchèrent de très-bonne heure, en juillet et en août. La troisième année, il ne se développa que peu ou point de feuilles ; les plus jeunes pousses périrent : il ne naquit plus tard que des bourgeons adventifs; enfin la mort s'étendit graduellement de haut en bas sur les rameaux, sur les branches et sur le tronc. Ces arbres succombèrent donc lentement. Ils avaient été opérés de très-bonne heure, avant l'élongation de leurs bourgeons, excepté le marronnier d'Inde, dont les bourgeons s'allongent avant que l'écorce puisse se détacher. Dans ce cas, c'est-à-dire quand l'opération a été faite dès le début de la végétation, les accidents ne paraissent pas d'abord avoir de gravité; mais peu à peu la santé de l'arbre s'altère, et la mort est toujours la conséquence de la décortication, lorsque les deux bords de la plaie n'ont pu être réunis.
« Quand, au lieu d'avoir été effectuée dans la première quinzaine d'avril, la circoncision a été opérée à la mi-juin, c'est-à-dire lorsque la végétation est dans toute sa vigueur, les conséquences en sont immédiatement de la plus grande gravité. C'est pour cela qu'une décortication en hélice ayant été pratiquée le 12 juin sur un robinia de 6 à 7 centimètres de diamètre, et abandonnée au contact de l'air, bien qu'elle n'empêchât pas toute communication par l'écorce entre les deux extrémités de l'arbre, les rameaux de l'année, très-vigoureux, longs de 75 centimètres à 1 mètre, se flétrirent promptement, se courbèrent au bout de quelques jours et furent bientôt desséchés. La partie supérieure du tronc, que l'on avat étêtée avant la plantation de l'arbre, donna au mois d'août de nouveaux scions qui périrent en septembre. La partie inférieure développa des bourgeons adventifs dont la végétation fut très-active, mais le sommet de l'arbre languit et finit par succomber.
« Trois paulownias, opérés le même jour, furent plus intéressants encore. Chacun avait subi deux décortications annulaires; un anneau de bois de 4 à 5 millimètres de profondeur avait même été enlevé à la base de la décortication inférieure. Celle-ci avait été protégée contre les agents atmosphériques, au lieu que la supérieure avait été abandonnée au contact de l'air. Une demi-heure après l'opération, les feuilles des rameaux inférieurs se flétrissaient, s'affaissaient; les parties herbacées de ces mêmes rameaux s'infléchirent comme les feuilles. Ce phénomène se reproduisit des rameaux inférieurs aux supérieurs, de sorte que, dans l'espace de deux heures, toutes les feuilles des trois arbres étaient flétries, et onze jours après toutes étaient tombées; il ne restait plus une seule feuille sur ces trois paulownias. Les jeunes rameaux périrent de même promptement, et les branches et le tronc de deux d'entre eux moururent dans l'année sans même donner naissance à des bourgeons adventifs. Le troisième, chez lequel les circonstances de l'expérience étaient un peu différentes de celles des deux autres, continua à végéter au-dessous de la plaie inférieure, et me donna les résultats que j'avais attendus de ces études, c'est-à-dire que des lambeaux d'écorce, qui avaient été soulevés de haut en bas, et qui étaient restés attachés au tronc par leur base, produisirent dans leur intérieur des lames de bois, sans le secours des feuilles évidemment, puisqu'il n'y en avait plus sur l'arbre et que toute communication avec les rameaux était empêchée par deux décortications.
« Ainsi la mort, au moins de la partie supérieure de l'arbre, est la conséquence nécessaire de toute décortication annulaire dans un temps plus ou moins rapproché, toutes les fois que les deux bords de la plaie ne sont pas réunis en totalité ou en partie. Si l'arbre écorcé continue à vivre pendant un certain nombre d'années, comme le tilleul de Fontainebleau
cité dans la précédente séance, il périra comme ce tilleul par la destruction graduelle du corps ligneux sous l'influence des agents atmosphériques. »
REVUE COMMERCIALE.
Le bon état des affaires se maintient, la consommation est plus active que jamais, et néanmoins nous voyons se réaliser l'espoir exprimé dans notre dernière revue, que les cours de certains articles n'atteindraient pas les prix élevés qu'on avait pu craindre un instant.
Les bois de service approvisionnés avant l'hiver pour les premiers mois du printemps sont tous employés ou tout au moins vendus aux entrepreneurs de constructions ; les chantiers de la Râpée, de la Gare se sont littéralement vidés, quelques arrivages de bois nouvellement flottés n'entrent pas aux chantiers de dépôt et sont directement conduits après tirage dans les chantiers de débit ; les placements se font au fur et à mesure des arrivages, les transactions sont actives ; mais tout cela se fait sagement, froidement, sans idée de spéculation qui élève les prix au delà du niveau marqué par les achats aux lieux de production.
L'augmentation sur les derniers prix de 1855 est de 8 à 10 pour 100.
On devait s'y attendre et il y a toute raison de croire qu'elle se maintiendra ; mais aussi il y a probabilité que ce taux ne sera pas dépassé de quelque temps à moins d'insuffisance dans les arrivages.
Le cours sur les ports paraît être fixé à 55 fr. le mètre cube de bois ordinaire ; les dernières affaires ont été traitées à ce prix sur la Marne, l'Aube et l'Yonne.
A Paris, hors barrière, ces mêmes bois se vendent 65 fr. environ.
Les gros bois manquent sur les ports et sont plus recherchés. A défaut d'affaires conclues, le cours nominal serait de 65 à 70 fr. sur les ports et 80 fr. à Paris, hors barrière.
Les sapins suivent une progression ascendante soutenue et inquiétante à certains égards pour les engagements pris pour quelques constructions.
Les prix atteignent à peu de chose près ceux du chêne ; ceci surprend d'autant plus qu'on croyait à une diminution causée par la mise en disponibilité des bois qui avaient servi à élever les immenses bâtiments des an.
nexes du palais de l'Industrie et du palais des Beaux-Arts; mais tout cela s'est placé et les bois neufs n'en sont pas moins rares, recherchés et chers.
La première raison de ces prix élevés se trouve dans une consommation soutenue : nous en chercherons une seconde cause dans les envois con-
sidérables faits dans le Midi pour un marché de près de dix mille stères; mais le principal motif nous paraît être le résultat de deux associations qui ont réuni tous les sapins du Jura dans une même main et placé les sapins des Vosges dans une condition presque identique.
En somme, le commerce de Paris est obligé de payer maintenant 55 fr.
dans l'eau les sapins qu'il achetait 42 à 45 fr. en 1855.
Cependant l'augmentation n'a pas porté également sur tout ce qui est sapin. Les bois débités, les planches, les madriers sont restés à peu près aux cours de l'année dernière. On vend encore ces madriers ou plateaux aux prix de 1 fr. à 1 fr. 10 c. le mètre courant. Il résulte de cette différence de condition une espèce de contre-sens, puisque le mètre cube de madrier débité, avive arête, choisi, qui n'exige plus aucun frais de maind'œuvre pour être employé, se vend littéralement moins cher que le mètre cube de bois brut avec ses inconvénients, ses défectuosités et la dépense forcée d'appropriation.
La demande est égale sur les deux articles, mais l'un abonde, l'autre est rare ; de là toute la différence de valeur relative.
Les sciages de chêne, très-recherchés pendant quelque temps en province et vendus avec grande faveur pendant le mois de février, sont plus calmes et soutiennent à peine leurs derniers cours.
On en vend cependant à Paris ; mais il y avait provision qu'il faut écouler avant de penser à grossir les prix des nouveaux venus.
On parlait à Saint-Dizier de 140 fr. pour l'entrevous et 190 fr. pour l'échantillon, tandis que les premiers arrivages ne peuvent obtenir ces prix à Paris; aussi faudra-t-il forcément en rabattre un peu. L'écart doit être de 15 à 20 fr. sur l'un et l'autre article et il y a peu de chance que ces cours soient dépassés, puisqu'il y a dans tous les chantiers provision suffisante pour attendre quelques mois encore.
Quelques achats des rares bois blancs disponibles sur les ports ont justifié les prévisions énoncées dans notre numéro de février. La hausse est nettement déclarée et franchement acceptée. Le prix de 90 fr. le décastère a été dépassé sur les ports pour les lots dans lesquels le bouleau domine.
Ou ne trouverait rien au-dessous de 80 fr., et à ce taux on achète partout où il se trouve le peuplier dont on ne voulait pas offrir 50 fr. l'année dernière à pareille époque.
Encore est-on fort heureux de trouver aujourd'hui ce peuplier si dédaigné naguère. Les boulangers surtout recherchent ce bois à cause de la grande quantité de braise qu'il donne et dont la vente est si avantageuse qu'elle paye souvent la totalité du prix du bois employé à chauffer les fours.
Les cotrets ont suivi la même augmentation : tel boulanger qui avait un
marché à livrer pour 1855 au prix de22fr. le cent n'a pu renouveler ce marché pour 1856 qu'en payant 27 fr.; ce qui constitue une augmentation de 25 pour 100.
Le tableau desboisentrés à Paris pendant le mois de février confirme tout ce que nous venons de dire sur l'activité delà consommation. Tous les articles indiquent une augmentation soutenue, à l'exception cependant des bois durs à brûler qui restent un peu au-dessous des quantités entrées en 1855.
Les bois blancs se présentent avec 15 pour 100 de plus, les cotrets sont presque doublés. Les charbons de bois donnent 46,000 hectolitres de plus sur 179.000, soit près d'un quart en augmentation ; la houille varie de 51 à 35 millions de kilogrammes. Les charpentes et sciages de bois durs se font remarquer par un avantage de 55 pour 100 en plus, et sur les charpentes et sciages de bois blanc la différence est encore de plus d'un dixième, malgré les prix si élevés du sapin. DELBET.
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FERS ET DES FONTES.
FÉVRIER 185FI.
DÉSIGNATION DROIT QUANTITÉS ENTRÉES DIFFÉRENCE des NATURE D'OCTROI F.:V FEVRIER. sur le mois correspond.
D'UNITÉS. décime *' Augmentation Diminution MATIÈRES. compris. 1856. 1855. 1856.
Bois à brûler, dur stère. 3 00,0 il) 21,001 22,453 » 1,452 — blanc. - 2 22,0 (2) 13,451 11,598 1,853 » Cotrets de bois dur. - i 80,0 4,749 2,7?8 2,021 M Menuise et fagots. - 1 08,0 3.178 3,428 » 250 Charbon de bois hectolitre. 0 60,0 225.933 179,360 46,573 » Poussierde ch. debois — 0 3oro 13,027 11,656 1,371 » Charbon de terre 100 kilogr. 0 72,0 35,587,782 31,321,468 4,266,314 >.
Charpente et sciage bois dur. stère. 11 28,0 6,604 4,013 2.591 » Charpente, bois blanc. — 9 00,0 10,759 9,312 1,447 » Lattes et treillages. les 100 bottes. 1128,0 12,443 7,009 5,434 lIois dedéch. en chêne mètre carré. 021,6 1, 8 3,2 451 1.3SI » — en sapin. - 0 12,0 3,374 1,392 1,982 « Fers, employés dans les coitslructions. 100 kilog. 3 60,0 1,655,992 502,378 1,153,614 « fOllte, employée dans les constructions.. — 2 40,0 591,391 180,242 411,149
(1) Ces 21,001 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 8,400,400 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 4,200,200 kil. de houille.
(2) Ces 13,451 stères de bois, multipliés par 300 kil., poids du stère de bois blanc, représentent 4,035,300 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 2,017,650 kil. de houille.
ÉTAT GÉNÉRAL des Bois domaniaux dont l'aliénation doit avoir lieu en 4856, conformément aux dispositions de l'article 20 de la loi (1) de finances du 5 mai 1855.
NUMÉRO COMMUNES de la BOIS. PARCELLES ET CONTENANCES.
conservat. ET DÉPARTEMENTS.
t. Libermont (Oise), L'Hôpital 258 hectares il ares.
Pont-Saint-Pierre, la Longboël 609 h.
i Neuville, Komilly J (Eure et Seine-Infé2 rieure), /Maulevrier, Caudebec, Maulevrier La Sironnerie, il h.
(Seine-Inférieure), Idem Këlival, 20 h.
Epernay, Villy-le-Mou- Foichétif Folcliéiif, 24 h. 78 a.
lier, Leuglay, Saint- Horne. Coupes 1 et 2 (Il- série), 20 h.
I Broing-les-Moines, Lugny Lavigne et t'ombe-Bugnot, 21 h. 44 a.
J Verdonnet, Oret, Sarey Vau-Monnoyer, Vau-Baroonne, 40 h. 88 a.
3.( NoironetPothières, L'Essari Le Débat, 13 h. 72a.
J t Marmagne, Détain Duesmes Côle-au-Singey, 2 h. 14 a.
(Côte-d'Or), Charme-Boullerain.. Coupes de 25 a 30 (2e série), 52,h. 1 a.
t Fontenay Petiie-Forêt, 59 h. 90 a.
Détain. Chaum.-du-Buls et Pré.de-Nesles, 21 h. 30 a.
1 Choloy , Chavigny Lavaux 87 h. 25 a.
I Frebnes;Chambrey, I¡:iye. Graude-Fraise, 161 h. 97 a.
Besanxe-ta-Griinde, Grémecey Bois-de-Villers, 40 h.
1 norbach et ZOIll- Idem Haut-de Pourouse, 1 h.
J mange, Rhodes, Ho- Saint-Jean-Fontaine. Bois-du-Collége, i h.
4. mellin, Fribourg, Colnriery 168 h. 31 a.
Mittersheim,St-Jean- Adelhouse Adelhouse, 70 li.
1 de-Bassel(Meurthe), Brackenkoff. Pointe-de-Brakenkoff, 62 h.
I Goutte-Bainsing. Goutte-Bainsing, 169 h.
Sch vanhals. Devants-de-Teulong, 50 h.
Bambach. Gabelvald, 62 h.
Saverne, Mon Lvi ller et Creutzwald. 458 li.
- J Stimbourg, Samt- lIoncourt. 170 h.
i Mariin.Langensoult- Konnenhardt 335 h.
, zbach (Bas-Rhin), tFetdbaeh, Niederlarg, Fp,ldbaeh. 89 h.
6. Kiflls, Kuestenharih Niederlarg 98 h.
(Haut-Rhin), Kifîis 30 h.
Ruestenharth 120 h. 88 a.
( Rouville, le Vignen, Friches-de-Rouville, t Boissy-Fresnoy le Vignen, Boissy(oi,e), Fresnov 108 h. 53 a.
® COllcy (Aisne), Bosquet-ïle-Coucy.. 2 h. 36 a.
f Baives et hloustiers Neumont. 257 h. 3o a.
(Nord), 1 IEssoyes, Idem, Cun- Val-Louage 42 h. 97 a.
fin, Essoyes (Aube), La Fortelle 50 h. 47 a.
Vézelay, Saint-Martin- La Courroie 86 h. 25 a. 1 sur-Creuse, Préhv", ceulx. 139 h. 25 a.
Arthonnay (Yonne), Grand.Marat. 50 h. 14 a.
Launay, Garenne et Grapin 159 h. 43 a. I Préhy 2i4 h. 40 a. I Panfol 219 h. 18 a. |
(i) Loi du 5 mai 1855, article 20. — Le Ministre des finances est autorisé à aliéner des bois de l'État jusqu'à concurrence de 15,000,000 de francs. Ces bois ne pourront être pris que parmi ceux portés au tableau 1 annexé à la présente loi, et seulement jusqu'à concurrence de ladite somme de 15,000,000 de francs.
111 KUMÉRO COMMUNES de la [BOIS. PARCELLES ET CONTENANCES.
cOllscrvat. ET DÉPARTEMENTS.
¡ Sainte-Hélène, Idem, Sainte-Hélène Blanc-Cailloux, 20 h. 82 a. Moriville, Dames, Idem.v., Preslchamp, 27 b, i9 ».
Chaumouzey, Uxe- Fraize. Voie-Mauljean, 133 h. 35 a.
gney, Oncourt, Gol-Thernes.' Sur-la-Verrerie, 50 h. 93 a.
D. bey, Frémi - Fon- Trusey 186 h. 70 a.
"••••S laine, Saulxures Fincieux 62 h. 65 a.
I 1 (Vosges), Rappes-d'Aucourt. 100 h. 15 a.
f Ilaies-de-Golbey. 134 h. 9 a.
ï Bois-Cheviots. 82 h. 48 a.
* Herbegoulte 24 h. 62 a.
Trois-Fontaines , Id., Trois-Fontaines Bois-Girardin, 124 h.
Les. Essarls-les-Se- Idem Bois-IIautebert, 97 h. 50 a.
I zanne, Morsains, le Le Gault. Etang-dë-Jouy, 5 h. 5 a.
1 Gault,IdemiMarne), Idem La Haute-Tour, 4o h. 51 a.
*j.m 0 Braux, Idem, Signy- Château-Regnault. Le Grand-Terne, 122 b. 44 à.
l'Abbaye,Exermoet, Idem. , La Robillarde, 13 h. 34 a.
i Fumay, Vireux- ErigeniviHe*. 220 h. 58 a.
I Wald, Idem (Ar- Baulny Baulny, 27 h. 44 a.
f dennes), Francbois .*. Lisière en dehors de la roule de Rocroi,74 a.
La Houssière. Idem, 185 b. 83 a.
1 Le Laurier Idem, 166 h. 38 a.
Creutzwald, Norroy- Rondbeilgen. 287 h. 71 a.
le-See, La Chambre, Saint-Acnoufd Bais de Forêt, 49 h. 6 a.
■ Idem,Luppy,Gorze, Haneizel.. Houxguerelie, 10 h. po a.
Idem (M-oselle), - Idem Bananetzel, i4 h. 16 a.
( Sain Canton Nord, lu h. s5 a.
f Le Prince. 85 h. 22 a.
V Chevaux. Cant. loue. auravindeParfondval,87h.33a.
L'Hôpital du - Gros- L'Hôpital du Gros-
j Bois, Idem, Idem Bois.. La Buchotle, 145 h.
) (Doubs), Idem. Le Nazou (partie Ouest), 122 h.
'- Idem. u. Le Nazou (partie Est), 164 h.
18. I Bezain et Molain(Jura) Moidons..Malrocbet, 581 h. 91 a.
r Chapelle-du-Bard Saint-Hugon (partie) Vides extérieurs (pâturages), no h.
1 (Isère), Vercors (pariiej Idem, 1,000 h.
■B ■&. Saint-Agnans, Idem Idem (partie). Vides et clairières adjacents (pâtur.), 535 h.
V (Drôme), 1 /LaFerté-Macé,Magny- La Ferlé 1,376 h. 33 a.
< 1 le-Désert (Orne), /L'lle-en-Régault, Beu-Jean-d'Heurs. VaUée d'Hôrma, 239 h. 71 a. *
1 rey et Robert-Es- Beurey Beurey, 245 b. 50 a.
t pagne, Saudrupt et ParSOll. Vaux-Gobert, 137 h. 60 a. I l'Ile-en-Régaulf.,l\1e- JovilHers. Sincheron, 56 h. 76 a.
1 nil-sur-Saulx, Vaux, Vaux (chapitre). Vaux (chapitre), 119 h. 76 a.
J Montblainville, Han- La Chalade .» Bouzon, 79 b. 53 a.
40. nonville, Ramblu-Longeau Longeau, 236 h. 37 a.
t zin, idem, Loizon, Les Landes Graud-Bouchal, 10 h. 44 â.
à Pillon, Idem, Saint- Idem. Petit-Bouchat, 3 h. 12 a.
I Joire (Meuse), Hingry. llingry-Sorel, 108 h. 74 a.
f Idem Hingry-Brunchaut, 67 h. 43 a.
1 Idem. Hingry derrière Haudeville, 19 h. 33 a.
Evaux Côles-d'Hôtel-Sablajamont, 169 h, 5 a.
< (Saône-et-Loire), Chaume-Perrecy. 262 h.- 9 ) Chaplasse Du Paquier, 37 b, 44 a.
Colombrets. 471 h.
1 Grande-Vendue. 189 h. 44 a.
Niaux. Sue, Banat, Niaux 279h.
Gesties, Camarade, Suc 2,i63 h.
Montjoie, TourLou- Banat. 72 h.
ze, Sainte-Croix (A- Gesties. 128 h.
riége), Camarade. 69 h. 56 a. -
t a Eup, Cler-de-Rivière Vignavoize J76 h. 63 a.
(Haute-Garonne), Lasserre 271 h. 52 a.
Sainte-Croix. 176 h. 32 a.
Bçzan. 113 h. 28 a.
Cier-Pointis-Huos. 296 h. 78 a.
NUMÉRO COMMUNES de la BOIS. PARCELLES ET CONTENANCES.
conservai, ET DÉPARTEJtIENTS.
Combreux et Sury- Orléans Vieux-Fours et Boquessons, 333 h. 53 a.
aux-Bois, Fily-aux- Idem La Courie, 266 h. 77 a.
[ Loges, Chevilly, Id., Idem. Mézières, 199 h. 85 a.
1 D Vennecy, Id., Trai- Idem Les Diableaux, 226 h. 97 a.
DOU, Idem, Idem, idem. Truie-Pendue, 54 h. 5 a.
1 Chemault (Loiret), Idem. Les Barres, 391 h. 71 a.
Idem , Puits-Branger, 400 h. 80 a.
Idem. Plaine-Poteau, 363 h. 36 a.
Idem. Ecu de Bretagne, 314 h. 25 a.
Idem • Chambon, 182 h. 61 a.
! Rémery, Château- Prémery Vallée aux Moines, 19 h. il at i neur, Guérigny, Sar- Billary Maubrifonds, 41 h. 64 a.
•a l dolles (Nièvre), Riez. 241 h. 67 a.
I Sardolles 214 h. 9 a.
I Bénévent, Budelières Chabaud. 55 h. 98 a.
(Creuse), MOlltbardoux. 102 h. 99 a.
Teilhet, Royat (Puy- Chaulmc-du-Puy. 36 b. 79 a.
1 de-Dôme), Royat. 42 h. 20 a.
21 Buxièrc-Ia-Grue, Id., Gros-Bois (parcelles) A. B. C, 68 h. 89 a.
saint - ililaire, Ver- Idem L'Espinasse, A, B, 77 h. 37 a.
i 1 nusse, La Vilhain, Idem Parcelle A (partie), 2 h.
Louroux, Bourbon- Château-Charles Les Brosses, 55 h. 21 a.
nais, Saint-Caprais Soulongis 4io h.
V (Allier), Pouliaouen, Loc-Ma- La Mézec LaMézec, 105 h. 91 a.
=:1 -. < ria-uerien (Finis- Bodvarec. Bodvarec, 143 h. 75 a.
( 1ère), t Villiers-en-Bois, La Etampes. 406 h. 74 a.
84. < Moltç- Saint - Héray. Bois-de-la-Motte. Le Fouilloux, 90 h. 41 a.
S 4 ? (Deux-Sèvres), Carniol( Iiasses-Alpes), Peymian. 59 h.
8 1' Puget, Le Bar (Yar), Terres Gastes du Puget 540 h. 48 a.
La Combe-du-Bar. 38 h. 45.
! LeBéage, Idem, Idem, Bonnefoi. Grézier, 16 h. 35 a.
9m Sagne etGoudoutet /d'6m. Chaumette, 38 h. 43 a.
.) (Ardèeht;), Idem Piquet, 20 h.
1 (Ardèche), Champ-Montmezy. 81 h.
28 ) Lalcam,AurilIac(A vey- Guirande. 26 h. 5 a.
..,. I ron), Langast (Bas et Haut) 83 h. 34 a.
Í Ferrières, «' Villiers- L'Eparmont. 175 h. 42 a.
38. < aux-Bois, Halligni- Héronnière. 208 h. 99 a.
1 court (Hte-Marne), Garenne-de-Perihe.. 452 h. 54 a.
3. } Haut-du-Them (Ilte- Fahy-d en-Bas. 11 h. 97 a.
» *•••• Saône), /Première conservation 258 11 Report.11,680 23 Deuxième. 640 » Seizième 1,49-3 34 Troisième. 266 17 Dix-septième 659 88 fc Qatri.è,rne.,.. 878 53 Dix-huitième 3,746 09 = ICinquième 963 » Dix-neuvième 2,733 90 = Sixième. 337 88 Vingtième 516 51 1 «Septième 368 19 Vingt-unième 861 43 g HUitleme. 9ti2 9 Vingt-troisième. 249 66 : ( Neuvième 822 98 Vingt-quatrième -, 497 15 wXDixième 1,003 81 Vingt-sixième 637 93 fc [Onzième 545 23 Vingt-septième 155 78 IDouzième 431 a Vingt-huitième. 109 39 jvjj I Treizième 581 91 1rente-Ulllcmc. 83695 1 = ( Quatorzième. 2,255 » Trente-deuxième. U 97 I I Quinzième ; 1,376 33 — ————— TOTAL 24,180 21 A reporter 11,680 23
PRODUCTION DES TRUFFES A CARPENTRAS.
A l'Exposition de 1855, nous avons remarqué une vitrine de M. Rousseau , de Carpentras, renfermant de très-beaux échantillons de truffes conservées. Ces truffes étaient accompagnées d'un procès-verbal signé du maire et de plusieurs notables du pays, certifiant qu'elles avaient été obtenues dans un jeune bois provenant d'un semis de chênes, dits chênes truffiers, fait expressément pour en obtenir des truffes.
Mes collègues du jury s'adressèrent naturellement à moi, compatriote de l'exposant, pour savoir ce qu'ils devaient penser des faits cités à l'appui de cette exposition. J'avais entendu parler de pareilles plantations faites, je crois, dans l'arrondissement d'Apt ou dans le département des BassesAlpes, mais je n'y avais pas porté une grande attention. Il parut grave au jury de donner une récompense au fait de la production, sur lequel on n'avait pas de détails plus circonstanciés, et il se borna à accorder à M. Rousseau une médaille pour la bonne conservation des truffes exposées.
Je me proposai alors de visiter cette culture à mon retour dans mon pays ; et étant entré en communication avec leur auteur par l'intermédiaire de M. Fabre, directeur de la ferme-école de Vaucluse, je me rendis sur les lieux le 3 février 1856, accompagné de M. Fabre, de M. Aug. de Gasparin, mon frère, et de plusieurs amateurs d'agriculture qui désiraient asssister à l'examen que nous allions faire.
M. Rousseau est un négociant en truffes. Carpentras est un des centres où cette production afflue de tous côtés. Dans la saison, il n'est pas rare d'y voir acheter dans un marché i,500 kilogr. de truffes. M. Rousseau les prépare d'après la méthode d'Appert perfectionnée, et les expédie à Paris.
M. Rousseau possédait dans les environs de Carpentras un terrain peu fertile (1). La hausse continuelle du prix des truffes lui fit concevoir l'idée
(1) Son analyse m'a donne :
Elément pierreux (calcaire siliceux). 56.3 Elément terreux. 43.7
L'élément terreux donne :
Calcaire. 4.0 Silice. 57.1 Argile. 38.9 100.0
de l'utiliser en le transformant en une truffière, et pour cela il le sema en chênes verts et blancs, dont les glands avaient été choisis sur des chênes autour desquels la récolte des truffes paraissait la meilleure. Sur un trait de charrue, il sema les glands dans des sillons séparés de 4 mètres, les glands se touchant presque dans les sillons. Dans ses nouvelles plantations, il a donné 6 mètres d'écartement à ses lignes de chênes et les a semés moins drus.
A la quatrième année de la plantation, on trouva trois truffes dans le terrain; mais ce n'est qu'à six ans que commencèrent les récoltes; aujourd'hui les chênes ont neuf ans et 1 mètre de hauteur. Dans l'année 1854, dont l'été fut pluvieux, on récolta 15 kilogrammes de truffes; cette année, l'été ayant été sec, la récolte a été un peu moindre.
C'est une truie qui est chargée de la recherche des truffes. À la distance de vingt pas elle sentait la truffe et se portait rapidement au pied du chêne où elle se trouvait, creusait la terre avec son groin et aurait bientôt déterré et mangé sa trouvaille, si on ne l'avait détournée par un léger coup de bâton sur le nez, et en lui donnant un gland ou une châtaigne sèche qui était sa récompense. Dans une heure de temps, on a recueilli devant nous environ un kilogramme de truffes dans une faible partie de champ semé en chênes.
M. Rousseau marque au blanc de céruse les chênes au pied desquels on trouve des truffes, dans le but d'y choisir des glands pour de nouveaux semis, et aussi pour ne pas les sacrifier quand il éclaircira ses bois. J'ai bien remarqué que c'est aux chênes précédemment marqués que s'adressait toujours la truie. Il ne semble donc pas douteux qu'il y ait des individus plus propres à produire ce tubercule, et ce n'est pas sans raison qu'on leur a donné le nom de chênes truffiers. Mais comme tous les chênes de ce semis ont été obtenus par des glands de chênes truffiers, et qu'il n'y en a qu'un certain nombre d'entre eux qui le soient, on ne peut pas regarder cette propriété comme héréditaire et tenaut à une variété; elle est purement individuelle.
La plantation de M. Rousseau contient des chênes verts et des chênes blancs. On n'a pas ramassé de truffes au pied de la seconde espèce, soit qu'elle parvienne plus tard que l'autre à l'état de production, soit qu'elle soit moins favorablement située. En effet, elle reçoit en partie l'ombre d'une maison voisine. M. Fabre m'a dit qu'à Rordeaux, M. de Rouvrade, ayant une plantation de chênes qui couvrent une colline au sud et au nord, n'avait jamais trouvé des truffes dans la partie nord. Mais le chêne blanc produit des truffes comme le chêne vert; un grand nombre de truffières naturelles de Vaucluse sont plantées de chênes blancs. On a remarqué que les truffes que ceux-ci produisent sont plus grosses, mais moins
régulières que celles du chêne vert ; celles-ci sont plus petites, mais presque toujours sphériques.
On recueille les truffes à deux époques de l'année. En mai on ne trouve que des truffes blanches, qui ne noircissent jamais et manquent de parfum. On les sèche, et on les vend pour assaisonnements. La truffe noire commence à se former en juin, grossit jusqu'aux gelées; alors elle se marbre et prend tout son parfum. On les cherche un mois avant et un mois après Noël.
Il n'est pas douteux que l'on ne puisse faire des truffières à volonté dans le midi de la France, par des semis de chênes. Dans les mauvais terrains qu'on leur destine, les chênes viennent lentement, et les pleines récoltes des truffes n'arrivant que tard, à mesure du développement des racines, on augmentera probablement la production en éliminant successivement les chênes non truffiers, et en donnant ainsi plus d'espace pour le développement de ceux qui le sont. On prétend que la vigne produit aussi des truffes, mais les vignes que l'on m'avait indiquées comme ayant cette propriété étaient entourées d'une ceinture de chênes verts. Il paraîtrait cependant que l'association de la vigne est favorable à cette production, car les truffières près des vignes sont très-abondantes. Cet arbuste agirait-il de quelque manière sur les racines des chênes, pour les rendre plus propres à recevoir leur parasite? Cette observation a sans doute contribué à décider M. Rousseau à faire une plantation d'une ligne de vigne entre les allées des chênes. L'expérience décidera de la convenance de cette opération, qui, d'ailleurs, aura l'avantage d'utiliser son terrain par la récolte des raisins.
On voit cependant à quoi se borne cette spéculation agricole. Au bout de huit ans, on a obtenu 15 kilogr. de truffes sur deux hectares de terrain.
C'est 7k50 par hectare, qui, au prix moyen de 6 fr. le kilogr., donnent un produit de 45 fr. Il faut en déduire un labour de 10 fr., les journées de récolte des truffes et la rente du terrain qui pouvait s'élever à 25 fr.
par hectare (2h5 de seigle pour la part du maître), et enfin l'intérêt des frais de plantation et de l'entretien avant la production. Si l'avenir ne lui donne pas de plus larges bénéfices, si la quantité de truffes n'augmente pas considérablement, M. Rousseau aura fait une expérience curieuse, mais non une opération avantageuse, car on doit compter pour peu de chose la perspective éloignée des coupes de bois. On n'en doit pas moins des remercîments à l'auteur de cette entreprise ; on doit l'engager à y persévérer et à tenir une note exacte des produits futurs. Il serait à désirer que ceux qui ont fait de semblables plantations dans d'autres contrées, et l'on dit qu'ils sont nombreux en Périgord, voulussent aussi nous rendre compte des résultats qu'il ont obtenus. Je dois dire, en finissant, que
M. Rousseau nous a montré une prairie fumée avec des pelures de truffes, et qui donne des résultats prodigieux.
Comte DE GASPARIN , Membre de l'Académie des sciences et de la Société d'agriculture, Président du jury d'agriculture de l'Exposition universelle.
(Extrait du Journal d'agriculture pratique. )
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
Mutations datis le personnel forestier. — Nomination de M. Vicaire à la Société impériale d'agriculture. — Tanneries.
= Mutations dans le personnel forestier. — M. VALORY, sous-inspecteur à Bourges (Cher), a été nommé inspecteur à Baume-les-Dames (Doubs) en remplacement de M. Amanton, décédé.
M. DE PONS, garde général au Pavillon-de-Troncais (Allier), a été nommé sous-inspecteur à Bourges (Cher) en remplacement de M. Yalory.
M. DE BRINON, garde général en disponibilité, a été nommé garde général au Pavillon-de-Troncais (Allier) en remplacement de M. de Pons.
M. CLÉMENCEY, garde général à Saint-Affrique (Aveyron), a été nommé garde général au Pavillon-de-Troncais (Allier) en remplacement de M. de Brinon, démissionnaire, M. MARTIN, sous-inspecteur à Nevers (Nièvre), a été nommé sous-inspecteur à Rodez (Aveyron) en remplacement de M. Lamotte.
M. FORTIN, garde général à Saint-Dizier (Haute-Marne), a été nommé sous-inspecteur à Nevers (Nièvre) en remplacement de M. Martin.
M. LAROCHE-RIANDIÈRE, garde général à Château-Chinon (Nièvre), a été nommé garde général à Saint-Affrique (Aveyron) en remplacement de M. Clémencey.
M. AUVP.AY, garde général à Orgelet (Jura), a été nommé garde général à Chàteau-Chinon (Nièvre) en remplacement de M. Laroche-Riandière.
M. D'HARANGUIER DE QUINCEROT, garde général à Lormes (Nièvre), a été nommé aux travaux d'art à Bourges (Cher) en remplacement de M. Buffault.
M. POCHET, garde général à Beaumont-la-Ferrière (Nièvre), a été nommé garde général à Lormes (Nièvre) en remplacement de M. d'Haranguier de Quincerot.
M. BUFFAULT, garde général des travaux d'art à Bourges (Cher), a été
nommé garde général à Beaumont-la-Ferrière (Nièvre) en remplacement de M. Pochet.
M. SCHINER, garde général à Châteauneuf-sur-Loire (Loiret), a été nommé garde général à Montfort (Eure) en remplacement de M. Dufay.
= Nomination de M. Vicaire à la Société impériale d'agriculture. —
La mort de M. Michaud, honorablement connu par ses travaux sur les chênes d'Amérique, comme botaniste et comme agriculteur, avait laissé une place vacante dans la section de sylviculture à la Société impériale et centrale d'agriculture. Selon les usages de la Société, la section avait été chargée d'arrêter la liste des candidats qui se présentaient et d'en désigner spécialement trois à ses suffrages. Seulement, comme la section de sylviculture se trouvait trop peu nombreuse par suite de l'absence ou de la maladie de ses membres, il lui avait été adjoint pour cette présentation trois membres appartenant à d'autres sections, MM. Dupin aîné, Chevreuel et Pépin.
Les noms des candidats sur lesquels la section a porté son choix étaient tous connus des lecteurs des Annales ; mais l'un des trois ayant retiré sa candidature, la liste s'est trouvée réduite à deux candidats dont la présentation a eu lieu dans l'ordre suivant : M. Vicaire, M. le marquis de Vibraye.
M. de Vibraye n'est pas seulement l'un des plus grands, sinon le plus grand propriétaire de bois de la France, il est aussi un de ses sylviculteurs les plus instruits et les plus zélés. Les travaux de repeuplements et les plantations opérés sous ses ordres dans ses terres et ses forêts intéressent à la fois la science et les besoins généraux du pays.
Il serait superflu d'énumérer dans les Annales les titres de M. Vicaire.
Parmi ces titres, nous avons vu avec satisfaction M. l'administrateur général des forêts et des domaines de l'empire faire figurer avec honneur celui d'avoir concouru à la fondation et à la rédaction des Annales forestières.
Sur trente-huit votants, M. Vicaire a obtenu vingt-sept voix.
Nous nous félicitons de ce succès, auquel se rattachaient nos sympathies.
Il sera agréable au corps forestier tout entier, et il donne à la section de sylviculture le concours précieux d'un homme qui, sorti de l'école de Nancy, le premier de sa promotion, a parcouru avec distinction tous les degrés de la carrière forestière, et qui apporte à la Société le tribut d'une longue expérience, uni à celui du zèle et de l'activité.
Nous voyons avec plaisir les agents forestiers du pays briguer et obtenir l'honneur de faire partie de la Société d'agriculture. Nous y trouvons un heureux symptôme de rapprochement entre la science et l'administration, entre la théorie et la pratique ; on a trop longtemps cru au divorce de l'une et de l'autre. L. C. M.
== Tanneries. - Les Annales forestières se sont occupées souvent de
la question des écorces, déplorant les lois prohibitives qui, mettant obstacle à l'exportation de produits si vivement enviés par nos voisins, privent la propriété forestière et les consommateurs de bois de chauffage des avantages qu'une loi mieux appropriée aux besoins pourrait leur procurer. Nous croyons être agréable à nos lecteurs en leur faisant connaître, d'après la Revue franco-italienne, le développement considérable que prennent les tanneries dans les pays voisins de la France.
On compte trois cent vingt-sept tanneries sur la partie continentale des États sardes, non compris la Savoie. La quantité totale des cuirs de bœuf, de vache et de veau produite annuellement dans les tanneries piémontaises s'élève à 23,998 q. m., dont 14,000 pour semelles et 9,600 pour chaussures, auxquels il faut ajouter 200,000 peaux de moutons et de chèvres travaillées pour maroquins, et quelques centaines de peaux de cheval. L'ensemble de ces marchandises représente une valeur de 7,400,000 fr., dont la moitié, sauf un sixième à prélever pour l'achat de l'écorce de chêne, de pin, d'aune, de la noix de galle, de la mortelle et du sumac, est répartie entre le salaire des ouvriers, le prix de la chaux, des graisses, des huiles, l'intérêt des capitaux, la valeur des bâtiments, le bénéfice de la fabrication. L'île de Sardaigne n'a pas de tanneries, mais elle fait avec la terre ferme un grand commerce de peaux vertes.
Bastia (Corse) possède huit tanneries, qui donnent toutes des résultats satisfaisants. Il existe en Lombardie quatre-vingt-trois établissements de ce genre; la Vénétie n'en a que soixante-dix-huit. On tire de l'étranger un quart des peaux qui s'y travaillent, et le reste du pays même. Les peaux de diverses natures qu'elle livre préparées au commerce sont évaluées à la somme de 7 millions de francs. Il y a onze tanneries dans le duché de Modène; nous n'en connaissons qu'une dans le duché de Parme. On en a établi deux cents dans les États romains, qui fabriquent par an un demimillion de kilogrammes de peaux de toutes espèces, ayant une valeur de 5 millions de francs. En Toscane, où cette industrie est fort ancienne, quarante-un établissements sont consacrés à cette opération. Les peaux les plus employées sont celles de vache et de veau. L'on suit, pour leur préparation, les procédés français et anglais, en outre de ceux propres à l'Italie, et les peaux vernies et colorées ne le cèdent que de peu aux meilleurs cuirs d'Angleterre, Le tannage tient dans le royaume de Na ples une place assez importante. Les tanneries de Terra de Lavoro, de Terra d'Otrante, de Bénévent et de Calabre ont été de tout temps célèbres pour leurs peaux dorées et leurs cuirs. Aujourd'hui encore, les semelles fortes, les basanes et les peaux teintes et chagrinées de 1 à 30, assez bien confectionnées par les fabriques de Castellamare, font de ce pays le centre privilégié des tanneries napolitaines. Quant aux prix, les
cuirs pour semelles valent 300 fr., préparés par la méthode anglaise; 295 fr. 62 c. par la méthode française, et les buffles 260 fr. 86 c.
Les Messinois se sont depuis longtemps appliqués à la fabrication des cuirs, et leurs tanneries sont assez estimées. Messine en compte huit, où il se fabrique de gros cuirs, de grandes et de petites peaux de veau. Mais ces renseignements seraient incomplets si nous n'ajoutions quelques mots sur le commerce de cet article. En Piémont, l'importation des cuirs et des peaux dépasse de quatre cinquièmes l'exportation ; les statistiques lombardo-vénitiennes nous parlent d'un produit excédant les besoins du pays ; mais nous devons reconnaître que les chiffres de l'importation égalent au moins ceux de l'exportation. La Toscane importe en peaux et en cuirs 12,000 kil., d'une valeur de 1,210,000 fr. ; l'importation des États romains s'élève aussi à plus de 1 million de francs, tandis que son exportation n'arrive pas à 350,000 fr. ; la Sicile importe en tannerie pour 2,050,000 fr. Il n'y a que la partie continentale du royaume de Naples dont l'exportation excède l'importation, et encore la différence n'est-elle que de 300,000 fr. Ceci établit surabondamment la supériorité qu'a en Italie, dans ce commerce, l'importation sur l'exportation. Un calcul approximatif fixe à 42 millions de francs le produit des tanneries italiennes.
Un chiffre à peu près égal représente les produits des industries qui en dépendent, de manière que la valeur totale des peaux tannées et de leurs manipulations successives doit être évaluée à 84 millions de francs pour l'Italie.
= ESPAGNE. — Ouverture du port de Benicarlo à l'importation des douves et cercles de futailles. — La Gazette de Madrid du mois dernier publie, en matière de douane, Yordre royal dont nous donnons ci-après la traduction : « Madrid, le 5 mars 1856.
« Vu les conclusions d'un rapport fait sur une demande de quelques négociants de Benicarlo, province de Castellon, à l'effet d'obtenir que la douane secondaire de ce port soit ouverte à l'importation directe des douves et des cercles nécessaires à la confection des futailles servant à l'exportation des vins ; « La reine, toujours empressée d'accorder à l'agriculture et à l'industrie tous les avantages conciliables avec les intérêts de l'État, a bien voulu faire droit à la pétition dont il s'agit en ordonnant l'ouverture de la
douane de Benicarlo à l'expédition des douves et crovenant de l'étranger et destinés à la confection des futailles. r" 1 ;
(Annales du commerce extérieur^ 1
^DILLIBRE DÉFRICHEMENT DES BOIS.
dCxàfricher les bois a pris naissance dans un ordre de ch a n rapport, n'est plus le nôtre.
Li^n £ t^tWj/^es lois, les mœurs, les habitudes, tout a changé, radicaleme IIgé. Elle a survécu à tout ce qui avait protégé son ori-
gine, mais sans cesser d'être ce qu'elle a toujours été. une grave atteinte au droit de propriété.
Aussi, de nos jours, en 1827, le législateur n'a-t-il consenti à l'introduire dans le Code forestier qu'à titre de disposition transitoire et pour un temps limité.
De 1827 à 1853, période d'un quart de siècle traversée par tant d'orages, les choses sont restées ce que le Code les avait faites.
En 1853, alors que depuis plusieurs années l'interdiction qu'il avait maintenue manquait de sanction légale, il fallut y pourvoir; le calme, au moins apparent, d'une trêve forcée de plus vingt ans, fit bientôt place à la controverse la plus animée - l'ardente polémique de la presse, les discussions approfondies de la tribune, abordèrent de front et mirent à nu toutes les difficultés de la question. Tous les systèmes purent se produire ; toutes les opinions se faire jour. De part et d'autre tout fut dit, souvent avec éloquence, toujours avec conviction. Le sujet semblait épuisé, et l'on pouvait croire que cette fois l'épreuve serait décisive. A quoi a-t-elle abouti?
à faire proroger pour trois ans la disposition transitoire du Code.
A mon avis, rien ne prouve mieux combien ce qui paraît d'une si lumineuse évidence à quelques-uns laisse encore de prise au doute, et jusqu'à quel point les hommes les plus rompus au maniement des affaires ont toujours répugné à admettre que la liberté de défricher puisse avoir pour l'intérêt général les dangereuses conséquences qu'on en fait sortir.
Le terme de cette prorogation approche et le débat ne tardera pas à se rouvrir.
La question qui le domine est essentiellement celle-ci : La liberté de défricher est-elle ou peut-elle devenir menaçante pour l'intérêt général? Y a-t-il pour l'intérêt général de sérieux et légitimes motifs d'exiger qu'elle demeure suspendue?
Les chiffres peuvent sans doute éclairer quelques points de cette question; mais si grande que soit l'autorité qu'on leur accorde, ils ne peuvent pas la résoudre.
La position nouvelle que la loi en vigueur a faite à la propriété forestière, le nouveau droit qu'elle a introduit, les faits qui se sont accomplis ou qui peuvent s'accomplir comme conséquence de ce droit, c'est là qu'il faut en chercher la solution ; et si vous la voulez équitable, tout à la fois logique et en harmonie avec le principe de nos institutions, c'est uniquement là que vous la trouverez.
Sous ce point de vue, je n'ai pas à discuter l'interdiction de défricher considérée en elle-même ; en d'autres termes, la question de savoir si c'est là une mesure bonne en soi, une de ces mesures qui se recommandent par leur mérite propre, et qu'en tout état de cause il puisse être opportun ou utile d'appliquer; je ne l'envisagerai que relativement aux circonstances qui ont originairement conduit à y recourir, et à ces tout autres circonstances dans lesquelles, à près de deux siècles d'intervalle, on demande qu'elle soit définitivement prononcée ; laissant à de plus compétents que moi de discuter ces autres questions de consommation décroissante, de dégrèvement, fort importantes sans doute, mais tout à fait distinctes de la question principale dont elles compliqueraient la solution.
Où que nous portions nos regards, nous voyons partout les propriétés de toute nature soumises à des restrictions de jouissance ou à des servitudes, dont toutes ne souffrent pas au même degré, mais dont elles ont toutes à souffrir.
Dans les villes : je bâtis une maison, il est d'un grand intérêt pour moi de lui donner toute l'élévation que comporte l'étendue du terrain sur lequel je construis; la salubrité publique s'y oppose, et, selon la largeur de la rue où s'élèvent mes constructions, les règlements de la voirie à la main, on me dit : Jusque-là soit, mais pas un décimètre plus haut.
Un peu plus tard, et mon œuvre à peine mise à fin, une cause d'utilité publique survient. on m'exproprie, et je me vois contraint de déguerpir.
Hors des villes : j'ai acquis des terres dont le sol est profond et fertile ; y cultiver le tabac m'assurerait d'importants bénéfices, mais elles sont situées en dehors d'une zone que la loi a tracée, mon droit vient se heurter contre les intérêts du fisc; la culture du tabac m'est interdite, et même dans la zone où elle me serait permise, là où je trouverais avantage à enraciner mille pieds de tabac sur un hectare, il faut que je me résigne à n'en planter que quatre cents.
Ailleurs, je viens de convertir en manoir d'habitation une des dépendances de ma ferme ; le besoin s'est fait sentir de mettre à l'abri d'un coup de main un point du territoire reconnu d'un trop facile accès; des fortifications s'élèvent, qui enveloppent ma propriété dans le rayon des servitudes militaires, et, à la première alerte, clôtures, constructions an-
ciennes, constructions nouvelles, tout devra tomber sous l'impitoyable marteau de la démolition.
Si, du moins, il me restait l'espoir que les progrès de la civilisation nous conduisissent bientôt à un état de sécurité universelle, qui permît de renoncer à ces dispendieux appareils de défense; mais, autant que je puis en juger, les fruits de cet arbre de la paix perpétuelle, autrefois si complaisamment planté par le bon abbé de Saint-Pierre, sont encore loin d'arriver à maturité; et, sans être pessimiste ou frondeur, on peut raisonnablement craindre que les efforts réunis de M. Cobden et de son comité ne parviennent pas de longtemps à affranchir la propriété de cette lourde servitude.
Des restrictions de jouissance, des servitudes, tout cela a sans contredit un côté fâcheux; et cependant tout cela s'explique et se justifie, par cette raison souveraine que la vie en société n'est possible qu'à la condition du sacrifice continu de l'intérêt privé à l'intérêt général, et le jour où l'intérêt général cesserait de le réclamer, rien de tout cela ne pourrait plus ni s'expliquer ni se justifier.
N'est-ce pas assez dire que pour discuter utilement la question posée, nous avons, surtout et avant tout, à rechercher si, dans l'état actuel des choses, l'intérêt général exige réellement que la sylviculture soit indéfiniment tenue sous le coup de cette sorte d'interdit dont on demande qu'elle demeure frappée.
Si en cela la propriété forestière n'avait à subir que le sort commun, elle serait sans motif de se plaindre, et ses plaintes ne trouveraient point d'échos ; mais pour peu qu'on s'arrête à considérer la condition qui lui est faite comme propriété, on s'explique aisément pourquoi plus qu'aucune autre, et aujourd'hui plus qu'en aucun temps, elle souffre d'avoir à subir une condition si dure ; et l'on comprend de même qu'elle puisse se montrer impatiente d'échapper à la rude étreinte sous laquelle on s'efforce de la tenir.
Ouverte de toutes parts à tous les genres d'entreprises, et, de toutes, la plus exposée, de toutes aussi, la propriété forestière est le moins efficacement protégée; et, en dehors des lois, de la jurisprudence et des règlements, il y a de cela une cause morale, à trùs-peu près inaperçue, encore qu'elle ne cesse pas d'agir.
Dans l'opinion commune, aucune flétrissure, je dirais presque aucun blâme, ne s'attache aux délits forestiers. Pour un grand nombre, ce n'est, ou peu s'en faut, qu'une innocente industrie, que le besoin et la nature de la propriété légitiment; ils iraient volontiers jusqu'à prétendre qu'il en doit être du vol de bois comme de ce pain dérobé à l'étalage du boulan-
ger par un homme affamé ; et, malheureusement pour les forêts, les affamés y pullulent.
Que si parfois la conscience publique repousse et isole le dangereux maraudeur qui, la hache à la main, se livre effrontément au pillage de vos bois, elle épargne le plus souvent celui dont les bestiaux ou la faucille y portent tous les jours un ravage bien plus destructeur. Viennent-ils l'un et l'autre à être poursuivis; quand la justice les a condamnés, leur insolvabilité les absout, et le propriétaire voit ainsi le dommage souffert s'accroître pour lui des frais de la poursuite.
Ce qu'il est vrai de dire encore, c'est qu'ayant à lutter depuis plusieurs années et dans les conjonctures les plus difficiles contre deux concurrences également redoutables, et tout à la fois à faire la part des charges excessives qui grèvent tous ses produits, de proche en proche, la propriété forestière est tombée dans un état de malaise qui lui fait supporter plus impatiemment que dans ses bons jours tout ce qui la contraint ou la gêne.
Et pour elle l'interdiction de défricher a évidemment ce double caractère.
Toute mesure restrictive du légitime exercice d'un droit quelconque a pour premier effet de soulever des mécontentements; quelque vifs qu'ils puissent être, néanmoins, lorsque des mesures de ce genre s'appuient sur des motifs pris de l'intérêt général, le bon sens public se montre assez prompt à les accepter, par cette raison fort simple que, dans tout ce qui est réellement d'intérêt général, chacun a plus ou moins sa part. Il en a été ainsi de l'interdiction de défricher les bois, qui n'a dû de résister à tant de catastrophes, de rester debout au milieu de tant de ruines, qu'aux conditions de force et de durée qu'elle tenait de son origine.
A ne voir, dans la mesure telle qu'on l'applique aujourd'hui, que ce qui lui a donné un caractère exceptionnel plus prononcé, cette origine ne remonte qu'à la fin du dix-septième siècle, époque à laquelle les désordres dans l'administration des bois, poussés jusqu'à l'excès et ne connaissant plus de bornes, le mal qu'ils avaient produit était déjà si profond que, dans l'opinion des meilleurs esprits du temps, le remède en paraissait impossible. Ce qui faisait dire à Colbert que la France périrait faute de bois.
A cette époque où la complication des affaires de l'Europe mettait la France dans la nécessité d'entretenir des forces de terre et de mer capables de faire face à tous les événements, au besoin de les dominer, l'incertitude et les difficultés des approvisionnements au dehors aggravaient encore toutes les conséquences de ce gaspillage si alarmant de nos richesses forestières ; et l'on voit tout de suite qu'ici l'intérêt général était sérieusement engagé, qu'il parlait assez haut.
Le moment d'aviser était arrivé ; l'ordonnance de 1669 fut rendue pour
mettre un terme à des désordres si graves, pour opposer à leur retour une forte barrière, et tout à la fois pour assurer par nos propres ressources, et d'une manière permanente, l'approvisionnement de nos arsenaux.
Dans ce double but, l'ordonnance astreignit, sans exception, tous les propriétaires de bois à mettre et tenir en réserve sur leurs coupes, et par chaque arpent, un nombre déterminé de sujets des trois âges.
Quant à la défense de défricher, elle devenait la conséquence logique, nécessaire de l'obligation de réserver et de tenir en réserve. Hors de là, on eût ruiné d'une main ce que de l'autre on venait d'édifier. Colbert n'était pas homme à commettre une telle faute. La défense fut donc prononcée, à peine de 3,000 livres d'amende.
Sommes-nous aujourd'hui dans des conditions, je ne dis pas identiques, mais seulement analogues? Loin de là.
La loi qui a remplacé l'ordonnance est entrée dans une tout autre voie; elle a fait à la propriété forestière une tout autre position.
L'ordonnance ne disposait qu'à l'égard d'une portion de la superficie, laquelle toutefois, abattue ou sur pied, ne cessait pas de profiter au propriétaire, en même temps qu'elle profitait à l'État.
La loi actuelle s'attaque au sol, qu'elle permet de réduire à une condition de nudité telle que, pour un long temps du moins, il ne profite plus à personne.
Prenant pour point de départ ce principe que le droit d'user emporte le droit d'abuser, elle a relevé le propriétaire de toute obligation de mettre et tenir en réserve; elle l'autorise à couper ses bois à blanc étoc ; il peut les livrer au pâturage de ses bestiaux, y mettre le feu si bon lui semble, sauf à répondre de tout dommage envers les tiers.
Là néanmoins expire son droit de propriété ; il a pu librement disposer des produits ; disposer du sol producteur ne lui appartient plus, n'est plus en son pouvoir.
On inclinerait d'abord à penser qu'à cet égard, on a mal saisi le sens de la loi, qu'on l'interprète mal. Non, la loi, qui permet au propriétaire de détruire ses bois, lui interdit de cultiver sur le sol qui les avait nourris autre chose que du bois.
Dans quel but a-t-elle statué ainsi? On éprouve plus que de l'embarras à se l'expliquer. C'est là véritablement, pour moi du moins, l'inconnue du problème que la loi a voulu résoudre ; je n'essayerai pas de la dégager.
J'ai énoncé le fait, venons à ses conséquences.
Que, déterminé par d'impérieux besoins ou par une vive impatience de jouir, un propriétaire, après avoir fait table rase dans ses bois, les ait livrés au pâturage ; la hache et le brout n'ont rien épargné ; dépourvu d'arbri, desséché par le soleil et les vents, le sol, que le piétinement
journalier des animaux a tassé, durci jusqu'à la compacité la plus résistante, le sol s'est fermé à toute germination; la vie s'en est comme retirée.
Sa fécondité naturelle fût-elle assez puissante pour surmonter des causes si actives d'appauvrissement et de ruine, deux siècles peut-être suffiront à peine à y reproduire l'un de ces vigoureux et riches peuplements, seuls capables d'approvisionner nos grandes industries, nos arts; et même pour nos industries secondaires, pour nos besoins domestiques, une génération entière aura passé avant qu'ils puissent utilement trouver à s'y pourvoir.
Ne perdons pas de vue d'ailleurs qu'en ceci le propriétaire sera strictement resté dans les limites de son droit, qu'il n'aura rien fait que de l'exprès et formel consentement delà loi. delà loi, qui est la plus haute manifestation de l'intérêt général.
Les choses amenées à ce point de complète détérioration, à moins que nous ne devions à ce lointain et peut-être trompeur avenir, le sacrifice du présent déjà si prompt à nous échapper, et dont toutes les charges pèsent sur nous ; d'où pourraient donc naître pour l'intérêt général de sérieux et légitimes motifs d'interdire à ce propriétaire, et à quelles fins lui interdirait-il, de remettre en valeur, par une culture immédiatement productive, le sol de ses bois, réduit dans son état de presque stérilité à rester, un si long temps, vide de productions?
Et si de tels motifs n'existent pas, si encore ceux dont on s'autorise ne trouvent aucun appui dans les faits, si en un mot, à côté de l'intérêt privé en souffrance, l'intérêt général reste muet, ne faut-il pas en conclure que l'interdiction de défricher n'a plus de raison d'être, qu'elle ne peut plus ni s'expliquer ni se justifier.
Il y a plus : par les mille canaux de la consommation, tout produit de la terre aboutit nécessairement à créer un nouveau produit pour le trésor de l'État et à accroître ses ressources. Si, durant trente ou quarante ans, vous condamnez le sol déboisé à ne rien produire dont la consommation puisse s'emparer; ou, ce qui en diffère peu, à ne lui livrer que des produits viciés par une croissance languissante et tourmentée, dès lors d'une moindre valeur, et dont par cela seul elle répugnera à faire emploi, n'estil pas évident que ce n'est plus au seul détriment du propriétaire, mais aussi au détriment du trésor de l'État, que, trente ou quarante ans durant, l'interdiction aura fait de ce sol, appauvri par sa nudité prolongée, un sol beaucoup moins productif, ou, à très-peu près, un sol improductif.
On dira peut-être, c'est là un mal que le propriétaire se sera fait à luimême, et s'il en souffre, il ne peut s'en prendre qu'à lui.
A certains égards cela est vrai; mais, ce qui ne l'est pas moins, c'est que pour être juste il y a ici à tenir compte du tort de la loi ; de la loi qui,
rigoureusement parlant, n'a pas sans doute poussé le propriétaire à se faire le mal dont elle le condamne à souffrir, mais qui lui en a ouvert et aplani la voie.
Mais, dira-t-on encore, de si radicales destructions ne sont point à craindre; l'intérêt privé sera toujours assez puissant pour y mettre obstacle. Le dirai-je, dans l'intérêt forestier, et c'est de lui que nous nous occupons, la garantie me paraît peu rassurante.
Outre que l'impatience de jouir est une incitation très-vive et de tous les jours à prendre dans les bois beaucoup au delà de ce qui, tout en conservant, pourrait suffire à des besoins réels, l'intérêt privé, si clairvoyant en une foule de choses, est parfois bien aveugle dans ses déterminations.
Les preuves en abondent : pour quelques habiles qu'il a merveilleusement inspirés, combien en voyons-nous se débattre avec le dénûment ou la gêne, après avoir usé leur vie à détruire pièce à pièce une solide fortune, gage de leur bien-être et de celui de leur famille. De notre temps, l'intérêt privé a ruiné, ou radicalement détruit, plus de forêts qu'il n'en créera jamais, si tant est qu'il lui soit donné d'en créer.
En moins d'un demi-siècle, il a fait disparaître des bois toutes les vieilles futaies, que l'aliénation lui avait livrées. précieux débris de ces riches peuplements, dont la sollicitude éclairée de Colbert voulait prévenir la ruine.
Plusieurs adversaires du libre défrichement, hommes éclairés et consciencieux, mais qui n'envisagent qu'une des faces de la question, se sont préoccupés surtout de cette considération, que, soit comme matière première d'un grand nombre d'industries, soit comme combustible, le bois étant objet de première nécessité pour tous, il est d'intérêt général que le prix en reste accessible à tous, et ils ont dit : Par l'élévation progressive de ce prix, conséquence forcée de la rareté toujours croissante de la marchandise, les défrichements aboutiront à transformer une consommation usuelle et commune en consommation de luxe ; ce qui la mettra hors de la portée du plus grand nombre. Il y a là un danger réel que la prudence commande de prévenir.
Dans la première chaleur du débat, des hommes dont les lumières et le grand sens faisaient autorité ont cru trancher la question en leur répondant : «Entre la production et la consommation, toutes choses tendent sans « cesse à se mettre en équilibre.
« Si la valeur des bois vient à s'avilir jusque-là de ne plus donner au « propriétaire un raisonnable intérêt du capital représenté par le sol « producteur, on défrichera beaucoup, sans aucun doute; mais bientôt, « par l'effet d'une réaction que les défrichements effectués rendront
« inévitable, et d'autant plus vive qu'ils se seront plus multipliés ou plus « étendus ; le prix des bois, devenus plus rares, venant à se relever et à « atteindre un niveau favorable à la production, on ne défrichera plus, « on plantera ; l'émulation de planter succédera à l'émulation de défri« cher; le défricheur fera place au planteur. »
En théorie, cela peut paraître concluant; dans la pratique, ce n'est que spécieux, et ce qui serait vrai pour certaines cultures cesse de l'être quand il s'agit des bois.
Comme l'a dit le poëte : Tout établissement vient tard et dure peu. Ce n'est guère que de trente à quarante ans qu'on s'avise sérieusement de planter; en tenant compte, comme on le doit, des vicissitudes si fréquentes de la végétation, ce n'est guère non plus qu'à trente ou quarante ans de là qu'on peut obtenir des produits qui trouvent faveur dans la consommation.
A vrai dire, il est peu de planteurs qui puissent se promettre de mener l'expérience à fin ; bien moins encore de la recommencer, et entre tous en trouverait-on qui fussent tentés de livrer leur avenir à ce flux et reflux de hausse et de baisse dans lequel ils seraient incessamment aux prises avec la crainte d'avoir à exploiter trop tôt pour profiter de l'amélioration du prix des bois, ou trop tard pour n'avoir pas à souffrir de son avilissement? Il est permis d'en douter; la culture des bois ne se prête pas aussi docilement que les effets publics à ces périlleuses alternatives.
Mais sans rien emprunter à des théories qui ne sont pas toujours d'accord avec la pratique, il était facile d'opposer à ces partisans de l'interdiction des arguments plus sérieux, et l'on pouvait alors, comme on le peut aujourd'hui, répondre assez péremptoirement, ce me semble.
Le blé est aussi, et en première ligne, un objet de première, disons même, d'absolue nécessité ; personne n'ignore quel trouble a souvent jeté dans les esprits la question des grains ; de quelles émotions violentes elle a été, à diverses reprises, le prétexte ou la cause ; les exemples en sont, pour ainsi dire, sous nos yeux.
Dans l'intérêt général, tout ce qui peut fournir un nouveau texte à cette question brûlante, tout ce qui tend à la faire revivre, aurait des conséquences tout autrement graves que celles de la rareté ou du haut prix des bois ; et pourtant on a vu, sans en prendre ombrage, des cultures spéciales envahir successivement, et sur une grande échelle, des terres qui jusque-là n'avaient nourri que du blé. Nous voyons tous les jours des propriétaires, des fermiers, abandonner la culture du blé pour lui substituer d'autres produits, dont ils se promettent une meilleure rémunération de leurs travaux, et il n'est venu à la pensée de personne de les contraindre à ne cultiver que du blé.
Par quel fatal privilége le sylviculteur doit-il seul rester impitoyablement cloué à cette autre glèbe, la culture du bois ! U Pour l'expliquer, vainement se prévaudrait-on de cette circonstance qu'il suffit de quelques mois pour mûrir le blé, tandis que trente ou quarante ans peuvent à peine suffire à la maturité des bois.
Fondée en thèse générale, l'objection n'aurait ici de valeur et ne pèserait dans la balance qu'autant que, pour ce genre de ressources, nous en serions déjà réduits aux seuls bois dont le défrichement pourrait s'emparer, et nous n'en sommes pas encore là.. ,< Voyons d'ailleurs si d'autres rapprochements ne jetteraient pas une plus vive lumière sur ce point du débat.
Les farines, les fers, sont encore de ces objets de première nécessité dont l'intérêt général a aussi à se préoccuper.
Si, déçus dans leurs espérances par la langueur soutenue des affaires, et rebutés par les mauvais résultats de leur industrie, des maîtres de forge, des meuniers, après avoir mis leurs usines en chômage, se déterminaient à leur donner une autre destination; pour combler les vides que l'absence de ces produits laisserait tout à coup sur les marchés, oseriezvous proposer de contraindre le meunier à lever ses vannes, le maître de forge à mettre ses fourneaux en feu? Iriez-vous jusqu'à vouloir interdire à celui-ci de remplacer sa forge par une filature ou une papeterie, à celui-là de convertir son moulin en scierie ou en bocard? Je me hâte de dire non ; le doute pourrait vous blesser. Comment se fait-il donc que ce qui, à vos yeux comme aux miens, serait une énormité envers l'un et l'autre de ces industriels, vous paraisse si naturel et si simple à l'égard du propriétaire forestier; que vous vous étonniez de rencontrer en cela des contradictions? La prévoyance excluerait-elle l'équité? •
Objecterez-vous que ce sont là de vaines suppositions, qu'elles manquent de portée, qu'elles se réfutent d'elles-mêmes par leur invraisemblance, et qu'eussent-elles acquis sur quelques points l'autorité des faits, il restera toujours assez de terres cultivées en blé, assez de moulins faisant mouture et de forges en plein roulement, pour satisfaire à tous les besoins; ce qui exclut toute nécessité de pourvoir par mesures spéciales à des faits isolés et purement accidentels ?
Je vous l'accorde. Eh bien! ce qui vous rassure sur les conséquences peu vraisemblables de ces invraisemblables chômages est de point en point ce qu'on peut opposer de plus concluant aux craintes encore plus chimériques que vous cause la liberté, même limitée, de défricher.
- Faites à votre gré de la tendance au défrichement une véritable monomanie, et une monomanie contagieuse; ingéniez-vous à lui communiquer une énergie de volonté et d'action quiparticipe du phénomène ; qu'arrivera-t-il?
Et d'abord les besoins de l'industrie agricole et ses moyens de culture ont partout et nécessairement des bornes; par la force des choses, c'est des défrichements mêmes que surgira bientôt le plus puissant obstacle
à d'autres défrichements, si ce n'est leur impossibilité. Apporter au marché n'est pas tout, il y faut trouver acheteur.
En second lieu, que défrichera-t-on ?
Plus les premiers progrès du défrichement seront étendus, rapides, et plus ceux qui possèdent encore des futaies se trouveront intéressés, incités à les conserver; partout ailleurs, réserver sur ses bois n'étant plus depuis longtemps d'obligation pour personne, les réserves auront disparu bien avant qu'on en vienne à défricher.
Que défrichera-t-on? des taillis, de simples taillis; des bois dont vous n'avez à attendre que les moindres et les moins utiles des produits de la culture forestière ; qui, dès à présent, n'offrent de ressources d'aucune espèce aux plus importants, aux plus compromis de vos besoins, à vos arsenaux, à vos grandes industries, et qui peuvent d'autant moins leur en promettre pour l'avenir qu'il y a, chez un grand nombre de propriétaires, une tendance prononcée à n'exploiter qu'à courte révolution ; ce qui, partout et toujours, aboutit à l'appauvrissement progressif du sol, et par cela même à celui de la production ; des bois enfui qui, dussent-ils rester sur pied, ne seraient jamais traités qu'en taillis ; car vous admettez bien qu'on peut légitimement condamner le propriétaire forestier à ne cultiver que du bois, mais non pas qu'on puisse le contraindre à n'élever que des futaies ; vous vous montrez même convaincu qu'il aurait trop à perdre à en élever; à quoi j'ajoute que pour les particuliers, le morcellement de la propriété, dont l'égalité des partages recule de jour en jour les limites, est à lui seul un obstacle à peu près insurmontable à l'éducation des futaies.
Et cependant, on ne peut pas se le dissimuler, les bois de feu n'ont qu'une faible part à vos inquiètes prévisions; ce qui fait la plus grave difficulté de la situation, ce qui préoccupait Colbert, alors qu'il voyait la France menacée de périr faute de bois ; ce qui vous préoccupe aujourd'hui, et avec bien plus de raison, c'est la pénurie toujours croissante des bois de construction, dont nos arsenaux manquent et ne s'approvisionnent qu'à des prix ruineux ; des bois de construction que vous demanderiez vainement aux meilleurs taillis et que vous n'obtiendrez jamais en quantité et en qualité que des futaies pleines.
Je crois avec vous que pour remplacer celles que nous avons épuisées ou si imprudemment détruites, nous avons peu à espérer des travaux de nos planteurs; mais ce que je crois aussi, et plus fermement peut-être, c'est que pour celles qui nous restent nous avons encore bien moins à
craindre des entreprises du défrichement ; ce ne sont pas des futaies qu'on défrichera, on ne défrichera que des taillis.
Admettons maintenant que, dans cette ardeur de première impulsion, chez nous aussi vive à s'allumer qu'elle est prompte à s'éteindre, tout ce que le défrichement pouvait envahir il l'ait déjà envahi; pour fournira vos grandes consommations ce que les bois défrichés ne pouvaient ni leur donner ni leur promettre, pour approvisionner vos marchés, pour alimenter vos industries diverses, vos besoins domestiques, n'aurez-vous pas toujours les forêts qui restent entre les mains de l'État?
Les forêts de la couronne ?
Les forêts de montagnes, celles des communes et des établissements publics?
N'aurez-vous pas encore les forêts et bois des particuliers qui auront échappé à la contagion ; et ces autres bois qui, par leur situation et par la nature de leur sol, résisteront toujours aux convoitises des défricheurs?
Pour vous venir en aide au besoin comme bois d'œuvre, comme combustible, n'aurez-vous pas enfin : Les plantations de vos routes et carrefours, celles de vos haies (1) 1 Les houilles, déjà en possession de remplacer le bois, ou d'y suppléer, dans une foule d'usages?
Les tourbes, qu'une transformation récente appelle à prendre place à côté des houilles pour plusieurs de ces usages ; transformation que l'industrie vient d'opérer avec succès, après avoirlaissé quatre-vingts ans dans l'oubli la découverte faite vers 1770, et jusque-là demeurée stérile (2)?
Ce ne sont plus là des suppositions gratuites, de vaines hypothèses ; ce sont des faits, d'incontestables faits, et ils prouvent, ce qui est ici d'un grand poids : 1° Que les constructions militaires et civiles, ne trouvant de ressources d'aucune espèce dans les bois qui seraient défrichés, et ne pouvant en espérer aucune pour l'avenir, nos arsenaux, nos grandes industries, nos arts, sont de prime abord tout à fait désintéressés et hors de cause dans cette question du libre défrichement ; 2° Qu'en poussant tout à l'extrême dans l'exercice du droit de défricher, les forêts et bois que le défrichement ne peut jamais atteindre, ceux qu'il sera contraint de respecter, et les ressources auxiliaires que la con-
(1) Dans son chapitre sur la plantation des routes et flégards, Varennes Fénille évalue à douze millions le nombre des arbres qui peuvent être plantés, en les espaçant A vingt-quatre pieds.
(2) Parmi les projets soumis aux lumières de Beaumarchais se trouve un mémoire intitulé : Conversion de la tourbe en charbon; avantages de cette découverte. •— Beaumarchais et son Siècle, par L. de Loménie. t
sommation trouvera dans des produits qui ne tentent pas le défricheur, pourront toujours suffire à nos autres besoins.
En quoi l'intérêt général aurait-il donc à souffrir de la concession faite à la propriété forestière ? Où se rencontreraient, pour l'intérêt général, de sérieux et légitimes motifs de priver celui qui cultive les bois de la liberté de faire ce que font ou feraient librement ceux qui cultivent les céréales, le meunier, le maître de forges, et avec eux tous les autres industriels ou cultivateurs?
Dans l'intérêt de la consommation, arguerez-vous d'une inquiétante disproportion entre ses besoins et les seules ressources que lui laisseraient des défrichements aussi multipliés qu'étendus, ou, en d'autres termes, de l'insuffisance de ces ressources ?
Arguerez-vous, dans l'intérêt du consommateur, du sensible préjudice que lui ferait éprouver le plus haut prix des bois, inévitable conséquence de la même cause?
L'insuffisance ! La preuve vous en est-elle acquise, ou la présumez-vous seulement? Peu importe; sans hésiter je l'admets. Ce que je n'admets pas, toutefois, ce que je ne puis pas admettre, c'est que de rigoureux calculs l'eussent-ils démontrée, ce pût être là un légitime obstacle à l'émancipation du sylviculteur; et de cela seul que l'État peut légalement y pourvoir, sans recourir à l'interdiction de défricher, moyen d'un autre temps, que dans le nôtre l'équité désavoue et répudie, je conclus, et je crois assez logiquement, que ce motif d'interdire n'est que spécieux, qu'il manque à tous égards de solidité. Je m'explique.
Encore que depuis la fin du siècle dernier les destructions violentes, la guerre, les tourmentes politiques et les aliénations aient singulièrement réduit l'étendue et la possibilité de nos forêts, sur presque tous les points du territoire, des bois d'une vigoureuse croissance, de riches peuplements restent debout, qui, par leur destination ou leur assiette, échappent à toute tentative de défrichement.
Les mines de lignite, les mines de houille, les tourbières versent dans la consommation d'abondants et utiles produits que le défricheur ne peut pas attaquer.
Attirés par de si puissants moyens de travail, là sont venus se grouper de vastes ateliers, des usines, des manufactures, et toutes les sortes de fabrications qui consomment beaucoup et ne prospèrent qu'en raison de ce qu'elles consomment. Le baron DE SAHUNE.
(La suite au prochain numéro. )
REVUE COMMERCIALE.
Les exploitations sont terminées, ou tout au moins les bois sont abattus, mais non sans peine.
Les ouvriers ont été rares pendant tout l'hiver. Les coupes étaient nombreuses : ordinaires, arriérées, extraordinaires, coupes d'aliénations; tout avait été vendu, et on ne serait pas loin de la vérité en disant que nous avons coupé cette année 50 pour 100 en plus d'une année normale.
Aussi tous les prix de main-d'œuvre ont-ils été augmentés partout dans la même proportion.
Le prix moyen d'abatage et façonnage d'un stère de bois est ordinairement de 50 c. ; on n'en a guère fait couper à moins de 75 c., et souvent il a fallu donner plus.
Ainsi de même pour abattre un chêne ou lier un cent de bourrées.
L'équarrissage des charpentes est monté de 2 à 5 fr. par stère, et le cent de sciages, qui se fabriquait, depuis vingt ans, au prix de 12 fr., s'est payé partout 15 à 16 fr. pendant tout l'hiver.
On parle de donner 30 fr. pour faire cent bottes d'écorce ; on payait cela 25 fr. en 1855, et 20 fr. les années précédentes.
Les transports sont augmentés dans la même proportion.
Un des motifs de cette différence si considérable est qu'il s'est présenté plus de travail quand les ouvriers étaient plus rares ; mais la cause principale se trouve dans le prix plus élevé des denrées alimentaires et dans la nécessité bien comprise de payer à l'ouvrier une somme relativement suffisante pour sa dépense et l'entretien de sa famille. Constatons, à la louange du commerce de bois, que tout le monde s'est exécuté de bonne grâce, qu'il n'y a eu aucun tiraillement, aucune discussion sérieuse entre maîtres et ouvriers ; constatons surtout avec bonheur que, grâce à cette entente cordiale, ces dernières années si difficiles se sont passées parfaitement pour les populations travaillant aux bois, en général, et que, dans tous les villages avoisinant les forêts, on voit plus que jamais de la satisfaction et de l'aisance.
Et qu'on ne croie pas qu'il s'agisse de petites sommes dépensées pour l'exploitation des bois, le chiffre en est considérable ; il est peu de produits, peu d'industries qui dépensent autant en salaires. Nous pouvons en donner une idée dans quelques lignes.
La France possède environ 8 millions d'hectares en bois. L'aménage-
ment en rnoxe à vingt ans donne 400,000 hectares de coupe annuelle.
En m^enroé, hïçrfoctare peut produire ; 100 stères de bois à brûler ou
T. 11.— O
AyÍ\'- Õ':t-'' , 4'cYIE.-T. n. (.::2 f. ( , -e.
à carboniser, 1,000 bourrées, 5 stères de futaie ou bois de service, et 20 bottes d'écorce.
Tout cela coûte, cette année, en main-d'œuvre ou travail d'exploitation, à bien peu près, par hectare :
Pour 100 stères de bois, façon ou carbonisation, à 1 fr. l'un. 100 fr.
Pour 1,000 bourrées, façon et Iiage. - 20 Pour 5 stères de futaie, débités sous toutes formes 30 Pour 20 bottes d'écorces, façon et liage. 30 Ensemble, par heetare. 180
Soit pour 400,000 hectares. 72 millions.
Tous ces bois sont, en outre, chargés en voitures, transportés à domicile ou sur les ports, façonnés en trains pour le flottage, ou chargés en bateaux, tirés ou déchargés sur les berges, rangés, emmagasinés dans les chantiers. Nous resterons certainement au-dessous de la vérité en disant que ces diverses manutentions coûtent le double du travail en forêt, soit 144 millions à ajouter aux 72 millions d'exploitation proprement dite.
Voici donc 216 millions de salaires répandus par les coupes annuelles de nos forêts, avant que les produits de ces coupes ne soient arrivés chez le consommateur ou chez l'ouvrier qui les transforme encore de mille façons différentes, moyennant de nouveaux salaires que nous ne comptons pas ici.
Ces chiffres parlent plus haut que beaucoup de dissertations. Nous pouvons répéter qu'il est peu de produits du sol, peu d'industries qui donnent un tel contingent de travail; nous pouvons dire surtout, avec quelque orgueil, qu'il n'est pas de population ouvrière plus aisée, plus satisfaite, et pour cela plus morale, que les populations qui travaillent dans les forêts. Nous demanderons enfin si ces forêts dont on s'occupe à peine, dont les produits taillés à merci par l'impôt, l'octroi, les tarifs des chemins de fer et des canaux, ne mériteraient pas quelques-unes de ces faveurs qu'on prodigue aux fers, aux houilles, avec lesquels nous réclamons l'égalité sans pouvoir l'obtenir.
Les exploitations sont terminées, disions-nous en commençant, malgré le surcroît de travail donné par les coupes extraordinaires ; et grâce au temps favorable de l'hiver écoulé, grâce surtout aux sacrifices consentis par le commerce, on jouit déjà des produits des coupes.
Il en était temps pour les charpentes; les réserves s'épuisaient. Il ne reste plus rien sur les ports des bois de 1855; les chantiers sont vides à Paris depuis longtemps, et peu s'en est fallu qu'il n' y eût un moment des besoins non satisfaits.
Les charpentes nouvelles, flottées au fur et à mesure des arrivages sur les ports, sont déjà entrées dans la consommation qui les a accueillies avec faveur sur les prix des* anciennes.
Les ordinaires se placent de 60 à 65 fr. en rivière, les gros bois obtiennent couramment 80 fr., les lots de choix sont tenus à 110 fr. ; la vente est active, on tire de l'eau et on livre le plus souvent sur berges, sans avoir besoin d'entrer dans les chantiers.
Nous ne connaissons guère de ventes faites sur les ports, la matière manque ; les acheteurs vont chercher les bois en forêt et les font eux-mêmes travaillera leur guise. Les achats se font en grume sur la Marne, au quart de la circonférence, sans déduction, au prix le plus ordinaire de 50 à 55 fr.
dans les coupes, bois mêlés. Dans ce cas, le prix de revient, à Paris, dépend de la quantité relative de gros et petit bois. On estime que la moyenne en rivière doit être de 65 à 70 fr. pour les bois équarris.
Les gros bois seuls sont achetés en grume, au décistère, 7 fr. au quart.
La marine a payé 8 fr. des lots d'un classement médiocre. Plus haut, sur le canal, on vend an cinquième déduit 10 à 12 fr. les gros bois pour charpentes, et 15 fr. les marines.
Les bois à brûler se maintiennent en faveur. Les dernières ventes se sont faites à Clamecy à 110 fr. On a obtenu 90 fr. sur les ruisseaux.
Le prix toujours croissant des bois blancs a fait abattre d'immenses quantités de peupliers, achetés le plus souvent avant l'exploitation. Les premiers cours étaient de 60 fr. ; la concurrence a bientôt fait payer 70 fr., et maintenant on arrive à 80 fr. sur les ports. DELBET.
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FERS ET DES FONTES.
- MARS 1856.
DÉSIGNATION DROIT QUANTITÉS ENTRÉES DIFFÉRENCE des NATURE, EN )IARS. sur le mois correspond.
JGG NATURE D OCTROI EN MARS. »
D'UNITÉS. décime Augmentation Diminution - HA TIF. RES. compris. 1856. 1855. 1*56. 1856.
Bois à brûler, dur. stère. 3 00,0 û) 16,794 20,016 » - 3,2'22 C blanc. - 2 22,0 (2) 13,945 14,309 304 otre!s de bois dur. - 1 80,0 2,574 3,551 » 977 ^flnuise et fagots. - i 08,0 3.602 3,514 88 » Charbon de bois.. - hectolitre. 0 60,0 248,963 281,0i3 » 32,050 oUSslerde ch. de bois — 030,0 13,58 16,953 » 3,365 Charbon de terre. 100 kilogr. 0 72,0 33,659,875 35,789,516" 2,129,641 arpente et sciage bois dur stère. 11 28,0 8,568 7,580 988 » arpenle, bois blanc. — 9 00,0 10,547 14,137 » 3,590 et treillages. les 100 bottes. 11 28,0 n,566 12,697 » 1,131 OIS de déch. en chêne mètre carré. 0 21,6 59 1,550 » 1,491 ¡,' — en sapin. - 0 12,0 2,149 4,987 » 2,838 pe rs, employés dans les constructions. 100 kilog. 3 60,0 775,799 979,980 n 204,181 onte, employée dans les constructions.. — 2 40,0 590,407 222,549 367,858 1 »
6 (1) Ces 16,794 stères de bois, multipliés par 400 kil,, poids du stère de bois dur, représentent <^7,600 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 3,358,800 kil. de houille.
4 (2) Ces 13,945 stères de bois, multipliés par 300 kil., poids du stère de bois blanc, représentent ',83,5oo kil., dont la puissance calorifique égale celle de 2,091,750 kil. de houille.
LES BOIS DES COLONIES FRANÇAISES A L'EXPOSITION UNIVERSELLE.
(Rapport d'une Commission chargée d'examiner les bois envoyés par les colonies françaises à l'Exposition universelle de 1855. )
Conformément aux instructions de M. le ministre de la marine et des colonies, une Commission composée de MM. Bayle, ingénieur des constructions navales; Merruau, sous-chef à la direction des colonies, et Millet, inspecteur des forêts, rapporteur, s'est livrée à l'examen des divers échantillons de bois envoyés par les colonies françaises, pour désigner spécialement ceux qui pourraient servir à des expériences destinées à en constater les propriétés respectives, ou qui pourraient trouver place, comme spécimens, dans une Exposition permanente des principaux produits de nos possessions d'outre-mer.
Cette Commission a rendu compte de ses observations dans le rapport suivant, qu'on veut bien nous communiquer et que nous nous empressons de publier.
« En raison de l'état actuel des bois, la Commission a divisé son travail en deux catégories de produits : « La première comprend les échantillons façonnés et exposés ; « La deuxième comprend les bois en grume et ceux débités en plateaux, madriers ou solives, conservés en magasin.
PREMIÈRE CATÉGORIE.
« L'Exposition offre une série nombreuse d'échantillons de diverses essences, débités en parallélipipèdes rectangulaires, en planchettes et en feuilles de placage polies et vernies.
« On y distingue particulièrement : « 1° Parmi les bois de construction, « 1. Le balata des Antilles et de la Guyane, qui réunit à un haut degré les qualités de force et de durée; mais son poids en restreindra toujours l'emploi, dans les constructions navales, aux pièces principales des fonds de navires et à certaines pièces de liaison ; « 2. Le bois de vène du Sénégal qui, en raison de ses propriétés apparentes, doit être l'objet de sérieuses expériences; « 3. Le bois de teck (Teclona grandis) de la Guadeloupe, où il est malheureusement trop rare; cette essence, réunissant d'excellentes qua-
lités pour les constructions navales, devrait être propagée par tous les moyens possibles, soit à la Guadeloupe, soit dans les colonies d'un climat analogue ; « 4. L'ébène verte de la Guadeloupe, bois dur très-fort et donnant grande probabilité d'une longue durée ; mais son poids, sa faible élasticité en bornent l'emploi, dans les constructions navales, aux membrures des petits fonds ; du reste, ce bois est avant tout un bois d'ébénisterie ; « 5. Le bois de Jack (Artocarpus ïntegrifoUus) de la Réunion, qui affecte une couleur jaune citron pâle ; en raison de ses propriétés apparentes, cette essence doit être l'objet de sérieuses expériences; « 6. Le bois de chandelle de la Guadeloupe. Eu égard à sa pesanteur spécifique et à la texture de son grain, ce bois doit être l'objet d'expériences qui détermineront son classement, soit comme bois de construction, soit comme bois d'ébénisterie; « 7. Le bois de Marbouilla de la Guadeloupe; mêmes observations; « 8. Le petit natte (Imbruaria petiolaris) delà Réunion. Ce bois est d'une belle couleur rouge; mêmes observations.
« 2° Parmi les bois d'ébénisterie, « 1. L'ébène verte de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Guyane.
Ce bois a des qualités spéciales qui le feront rechercher par l'industrie; il n'est pas susceptible de se gercer quand il est travaillé ; il a un grain très-fin, parfaitement approprié au poli et au vernis avec des tons et des veines agréables à la vue. Il y aurait avantage incontestable à le répandre, dès à présent, dans l'industrie. Le beau piano Montai a été fabriqué avec ce bois ; « 2. Le grand natte, de Sainte-Rose, de la Réunion. Ce bois, qui a de l'analogie avec l'acajou, ne paraît pas être de nature à le remplacer et même à entrer en concurrence avec lui ; « 3. Le galba, delà Guadeloupe et de la Martinique, qui pourrait soutenir la concurrence avec l'acajou; « 4. Le galba, autre espèce delà Guadeloupe. Ce bois est plus tendre que le précédent; mais il est remarquable par son flambé et offre une propriété précieuse pour l'intérieur des meubles, par son odeur spéciale qui chasse les insectes destructeurs ; « 5. L'amarante de la Guyane. Ce bois est remarquable par sa couleur; on l'utilise avantageusement en moulures et en bois de marqueterie; « 6. L'ébène noire de Karikal (Inde). Ce bois offre d'assez bonnes qualités.
« 3° Parmi les bois de teinture, « 1. Le bois vert ou ébène verte de la Guadeloupe, qui produit une belle couleur jaune estimée en teinture;
« 2. Le bois de santal provenant du Gabon ; cette espèce donne une belle teinture rouge.
« Ces diverses espèces de bois, et, en général, toutes celles qui appartiennent à la première catégorie, quel que soit d'ailleurs leur degré réel d'utilité industrielle ou commerciale, devraient figurer dans une exposition permanente, ne serait-ce que comme renseignements statistiques ou documents scientifiques. Mais, pour éviter toute confusion ou méprise, et pour faciliter les transactions commerciales, il est indispensable que chaque échantillon porte la dénomination locale et la dénomination scientifique.
DEUXIÈME CATÉGORIE.
« Les bois de la deuxième catégorie ne pourront être convenablement appréciés que quand ils auront été débités. A cet effet, la Commission est d'avis de prendre des échantillons de toutes les espèces qui ne figurent pas dans la première catégorie.
« Pour une collection de bois, il convient d'adopter une certaine uniformité de formes et de dimensions, afin d'utiliser tout l'emplacement disponible et de faciliter les comparaisons; il est, en même temps, trèsimportant de donner aux échantillons une forme et des dimensions qui permettent d'apprécier en partie et à première vue les qualités des bois.
« Dans ce but l'on prendrait les dispositions suivantes : « Chaque échantillon aurait la forme d'un parallélipipède rectangulaire, dont la hauteur serait de 0m,25, et dont le côté de la base serait Om,10 ; il serait découpé dans le sens des fibres longitudinales, c'est-à-dire dans la longueur de la tige ou du tronc, en choisissant la région moyenne des couches concentriques qui présente un bois fait ou un bois parvenu à un état convenable de maturité. L'une des faces serait rabotée, polie et vernie; une autre serait simplement rabotée, et une troisième présenterait le trait de scie brut. L'un des deux bouts serait coupé en biseau sous un angle de 45°, pour faire même apprécier les couches superposées et les pores du bois.
« Sur les bois en grume, on pourrait découper une rondelle entière de 10 centimètres d'épaisseur pour les billons ayant moins de lm,50 de tour, et seulement une portion de rondelle de om, -1 0 d'épaisseur et de 0m,25 de hauteur pour les billons ayant, plus de lm,50 de tour. Les échantillons de cette nature auraient l'avantage de présenter l'écorce et toute la série des couches ou de l'intérieur du bois depuis l'écorce jusqu'au centre.
OBSERVATION GÉNÉRALE.
« Pour rendre la collection réellement utile et intéressante, chaque
échantillon serait accompagné de la feuille, et, autant qu'il sera possible, de la fleur et du fruit; il porterait les indications suivantes : « 1° Dénomination locale de l'arbre ; « 2° Dénomination botanique ; « 3° Dimensions en circonférence et hauteur qu'acquièrent les arbres de cette essence ; « 4° Époque de l'abatage; « 5° Usages ou emplois dans la localité ; « 6° L'espèce en est-elle rare ou abondante?
« 7° L'exploitation en est-elle facile ou difficile?
« 8° Les arbres de même espèce sont-ils en massifs, ou bien sont-ils isolés et disséminés?
« 9° Situation en montagnes, coteaux, plaines; « 40° Nature et état du terrain.
« Tout en appréciant les louables efforts qui ont été faits dans les colonies pour réunir les échantillons de la première et de la deuxième catégorie, la Commission ne peut que regretter que les produits les plus importants en diverses espèces de bois n'aient pas figuré à l'Exposition universelle. La Guyane, qui n'a rien envoyé, offre cependant des ressources très-considérables qui pourraient être avantageusement exploitées.
CONCLUSION.
« Dans l'état actuel des choses, la Commission a l'honneur de proposer à M. le ministre de la marine et des colonies : « 1° De faire placer à l'Exposition permanente les divers échantillons de la première catégorie et ceux que l'on obtiendra des bois actuellement en magasin à Paris; pour ces derniers, il serait urgent de les débiter parce qu'ils commencent à s'altérer et parce que la location du magasin actuel expire sous peu de jours; « 2° De faire compléter la collection des bois des colonies, notamment en ce qui concerne la Guyane et les îles françaises limitrophes de Madagascar ; « 5° De faire prendre les dispositions nécessaires pour qu'à l'avenir les échantillons soient fournis conformément aux indications suivantes : « Dans les localités où le bois pourrait être convenablement travaillé, on débiterait les échantillons dans la forme et les dimensions indiquées pour l'Exposition permanente; ces échantillons seraient fournis en double, l'un pour l'Exposition permanente, l'autre pour les expériences destinées à constater quelques-unes des propriétés ou des qualités des bois. On se dispenserait toutefois de tailler en biseau l'un des bouts du parallélipipède.
« Dans les autres localités on suivrait la marche indiquée ci-après : « Pour les espèces de bois ayant moins de 1 mètre de tour ou de circonférence, on enverrait un billon en grume, autant que possible revêtu de son écorce, ayant de 0111,55 à 0111,60 de longueur; « Pour les espèces ayant de 1 mètre à 1111,30 de tour, on enverrait: 1° une rondelle entière, autant que possible revêtue de son écorce, ayant à peu près 0111,23 àOm,25 d'épaisseur; 20 un plateau ou madrier, ayant en épaisseur 12 à 13 centimètres, et en longueur 55 à 60 centimètres; « Pour les espèces ayant plus de lm,30 de tour, on enverrait : 1° une portion de rondelle autant que possible revêtue de son écorce, ayant à peu près 23 à 25 centimètres d'épaisseur; cette portion serait, suivant le pourtour de l'arbre, soit le quart, soit le huitième, etc., d'une rondelle entière; dans tous les cas, cette portion serait découpée de manière à ce que le dos (côté de l'écorce) présentât toujours un développement d'au moins 25 centimètres ; 20 un plateau ou madrier ayant en épaisseur 12 à 13 centimètres, et en longueur 55 à 60 centimètres.
« Quant aux expériences destinées à constater les propriétés respectives des bois, la Commission croit devoir faire observer que ces expériences ont été faites, sur un très-grand nombre d'espèces de bois de la Guyane, par M. l'ingénieur Dumonteil, et répétées par une Commission spéciale dont le travail est inséré dans les Annales maritimes; que les billons existants pourraient être utilisés pour compléter en partie ces expériences, ou pour en rendre les résultats comparables avec ceux des expériences faites sur les mêmes espèces dans les autres colonies, et sur les essences les plus importantes delà France et de l'Europe. Le surplus serait livré au commerce, ou bien serait distribué aux administrations publiques et aux personnes qui voudraient compléter des collections.
Paris, le 20 décembre 1855.
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
Conditions à remplir pour être promu au grade d'agent forestier.-Le Hancornia specioa, le Gutta-Percha et le Caoutchouc artificiels. — Origine des Cerisiers — Hêtre phénoménal. — Reboisement des montagnes. — Taille des arbres. — Arbres à cire.
= Conditions à remplir pour être promu au grade d'agent forest'Íer.M. le directeur général des forêts a adressé aux agents, le 29 du mois dernier, la circulaire suivante : Monsieur le Conservateur, L'arlicle 13 de l'ordonnance réglementaire porte que nul ne peut être promu au grade de garde général s'il n'a pas fait partie de l'École forestière, ou s'il n'a exercé, pendant deux ans au moins, les fonctions de garde à cheval.
Cette prescription formelle a eu pour but d'obliger tous les candidats à la position d'agent forestier à recevoir l'instruction de l'École impériale forestière de Nancy, ou à se former par la pratique du service actif.
C'est dans la même vue qu'aux termes de l'art. 5 de l'arrêté ministériel du 14 août 1840, les gardes et brigadiers sédentaires ne peuvent entrer dans le service actif qu'avec leur grade, à moins que déjà ils n'aient appartenu à ce service.
M. le ministre des finances m'a prescrit d'assurer à l'avenir la stricte observation des règles que je viens de rappeler.
Son Excellence a décidé en conséquence, le 25 février courant, que les brigadiers sédentaires ne pourront pas parvenir au grade de garde général adjoint, à moins qu'ils n'aient antérieurement passé deux années dans le service actif.
Toutefois, une telle disposition ne devant pas avoir un effet rétroactif, les employés actuellement pourvus du titre de brigadier sédentaire pourront se présenter au concours d'usage pour l'admission au grade de garde général adjoint.
Je vous prie, M. le Conservateur, de porter immédiatement la décision qui précède à la connaissance des employés sédentaires de votre conservation et des inspections qui en dépendent.
Vous inviterez les brigadiers à vous faire connaître s'ils désirent concourir pour le grade de garde général adjoint, et à quelle époque ils comptent subir les examens.
Vous me ferez connaître la réponse de chacun.
Vous pourrez d'ailleurs me présenter, pour être employés dans des triages, les gardes et brigadiers sédentaires qui désireraient entrer dans le service actif, lorsqu'ils rempliront la condition d'âge fixée par l'art. 3 du Code forestier.
Je vous prie de m'accuser immédiatement réception de la présente circulaire.
Recevez, etc.
Le directeur général : GRAVE.
Cette décision est un acte de haute intelligence. Par l'influence qu'elle est appelée à exercer sur les destinées de l'administration forestière, elle mérite d'être rangée au nombre des mesures les plus importantes qui aient été prises depuis la fondation de l'École de Nancy. Ajoutons qu'elle est aussi un acte de fermeté. S'ilest facile de s'écarter de la règle, rien n'est difficile comme d'y revenir. Le maintien d'un abus se lie à des intérêts personnels d'autant plus tenaces qu'ils se sentent moins respectables, et d'autant plus puissants qu'ils s'appuient sur l'actualité, tandis que le bien public auquel on voudrait les sacrifier est surtout dans l'avenir.
Il y a huit ans, par une circulaire inexplicable, car elle émanait d'un homme qui avait rendu d'éminents services à l'administration, il fut décidé qu'entre les deux modes, l'Ecole et le service actif, institués par le Code forestier et l'ordonnance réglementaire pour le recrutement des agents forestiers, il en était créé un autre, exempt des difficiles épreuves afférentes aux deux premiers. Des jeunes gens de vingt-trois ans furent admis, après Un surnumérariat de une ou deux années, dans les bureaux des conservateurs, à concourir pour le grade de garde général adjoint, grade équivalent et même supérieur, si on en juge par les appointements, à celui de garde général stagiaire.
Les conséquences fâcheuses de cette circulaire étaient faciles à prévoir et ne tardèrent pas à se réaliser.
Les employés du service actif, se voyant enlever par des fils de famille les positions auxquelles ils pouvaient prétendre, tombèrent dans le découragement. L'École de Nancy, perdant de son côté les avantages que légitimaient les pénibles épreuves qu'elle impose, et les dépenses considérables qu'elle occasionne, fut bientôt menacée dans son avenir par le manque de candidats.
Une pareille situation n'était pas durable. La coexistence de l'École et du surnumérariat était aussi impossible que pourrait l'être l'équilibre entre deux forces inégales. Les esprits les moins clairvoyants reconnaissaient donc qu'il fallait nécessairement, pour rentrer dans les conditions d'une organisation normale, supprimer l'une ou l'autre de ces deux institutions, et, il faut le rappeler pour l'honneur de la logique, cette alternative était si nettement indiquée, que, mise en demeure, en 1849, par la Commission du budget, de s'expliquer sur l'utilité de l'École de Nancy, l'administration fut amenée à déclarer, pour ne pas compromettre sans doute le maintien du surnumérariat, que l'École n'avait pas rendu les services qu'on en attendait.
Mais il faudrait désespérer de tout bien dans ce monde, s'il pouvait appartenir à qui que ce soit d'y troubler longtemps les notions du juste et de l'injuste, d'y faire prévaloir l'erreur sur la vérité, la faveur sur le mérite. L'École de Nancy, attaquée dans le compte rendu des délibérations de la Commission que nous venons de désigner, fut réhabilitée à la tribune de l'Assemblée législative par le rapporteur même de cette Commission, l'illustre M. Berryer.
Cette réhabilitation solennelle, dont aucun de nos abonnés n'a sans doute perdu le souvenir, était implicitement la condamnation du surnumérariat. On s'obstina cependant à se soustraire à cette conséquence inéluctable, et ce journal devint la victime expiatoire des protestations que souleva une persistance désormais sans avenir. Eh bien ! nous le demandons : étions-nous de si grands révolutionnaires, pour avoir défendu l'administration contre ses propres erreurs, et n'aurions-nous pas le droit de prétendre aujourd'hui à quelque part dans la victoire? Nos lecteurs en jugeront. Quant à nous, nous ne faisons jamais intervenir notre intérêt personnel dans les questions que nous avons à discuter ; et si nous nous réjouissons de la mesure que vient de prendre le ministre, c'est par des motifs d'un ordre plus élevé.
L'administration forestière n'avait guère à s'occuper autrefois que de la police des forêts, de la conservation des chasses, de la surveillance de la pêche. Il n'en est plus ainsi actuellement : le progrès des lumières, le
développement de l'industrie et du commerce, les intérêts mieux compris de l'agriculture, ont révélé toute l'influence que les forêts exercent sur la civilisation, et l'immense importance qui s'attache à ce qu'on les cultive avec intelligence. C'est dès lors un des premiers besoins de notre pays, qu'un domaine aussi précieux ne soit confié qu'à des mains très-habiles, à des hommes d'une aptitude reconnue. Or, pour former ces hommes, il n'y a, il ne peut y avoir que deux moyens : l'enseignement théorique. élevé, d'une part, tel qu'on peut le donner dans une école spéciale, et de l'autre la pratique, c'est-à-dire la coopération, sous la direction de chefs expérimentés, à tous les travaux que comportent les fonctions forestières.
Mais s'il est vrai que l'enseignement de l'École de Nancy réponde aux besoins qui l'ont fait instituer, et que le service actif seul rende possible cette coopération, indispensable pour racheter par la pratique du métier les inconvénients du défaut d'instruction théorique, il faut bien reconnaître qu'en établissant un surnumérariat qui devait être nécessairement insuffisant au point de vue théorique, et nul au point de vue pratique, on créait une cause d'affaiblissement pour la composition du corps des agents forestiers. En supprimant cette cause, en réintégrant dans les conditions de recrutement de l'administration des forêts les garanties que réclament les grands intérêts qui lui sont confiés, le ministre des finances a raffermi cette administration sur ses bases, et l'a ramenée dans la voie de progrès d'où elle avait été détournée par la fatale institution qu'une main courageuse a enfin renversée.
Bien des gens vont sans doute conclure de ce qui précède que nous tenons pour des ignorants les agents qui sont entrés dans le corps par la porte du surnumérariat. Il n'en est pourtant rien. Nous n'entendons attaquer personne, et il ne nous en coûte même nullement de reconnaître que le surnumérariat a donné à l'administration des agents très-estimables.
Qu'est-ce que cela prouve? Au temps où il suffisait d'être fils de duc, de comte ou de baron pour obtenir le commandement d'un régiment ou celui d'un vaisseau, il y avait aussi de bons officiers, et néanmoins nul n'oserait prétendre assurément qu'on a eu tort de substituer dans l'armée, au privilège de la naissance, celui de l'instruction et des services rendus.
Qu'on veuille donc bien être persuadé qu'aucune intention blessante pour qui que ce soit ne dirige en ce moment notre plume. Nous ne nous occupons pas des individus. Nous ne voulons pas plus dénigrer les uns que flatter les autres. Le bien public est notre seul mobile, et c'est en son nom seulement que nous félicitons l'administration supérieure de la grande réforme qu'elle vient d'opérer.
= Le Hancornia speciosa, le gutta-percha et le caoutchouc artificiels.Pendant le cours de ses voyages dans l'Amérique méridionale, M. de
Claussen a eu l'occasion d'examiner divers arbres qui produisent du caoutchouc, et entre autres le Hancofnza s]Jeciosa, qui croît sur les plateaux élevés de l'Amérique du Sud, entre le 10° et 20° de latitude méridionale, à une hauteur de 3,000 à 5,000 pieds au-dessus du niveau de la mer. Cet arbre appartient à la famille des Sapotées, de laquelle fait également partie l'arbre qui fournit le gutta-percha. Son fruit ressemble à une poire de bergamote, et est rempli d'un suc laiteux qui est le caoutchouc liquide. Pour être mangeable, ce fruit a besoin d'être conservé quinze à vingt jours après avoir été cueilli ; pendant ce temps le caoutchouc disparaît ou se convertit en sucre; c'est alors un des fruits les plus délicieux que l'on connaisse, et que les Brésiliens, qui l'appellent Mangava, considèrent comme le meilleur de leur pays. L'auteur parle ensuite d'un mélange d'amidon, de substances oléagineuses ou résineuses, et de tannin ou de gluten qu'il a combiné au caoutchouc ou au gutta-percha pour durcir ces substances et les rendre propres à plusieurs usages industriels.
= Origine des cerisiers. — La Société impériale et centrale d'horticulture vient de faire connaître, sur l'origine des cerisiers, les curieux renseignements que voici : « Dans son ouvrage sur l'introduction des végétaux cultivés en Italie, M. Targioni exprime l'opinion que le merisier sauvage, commun dans les bois de l'Italie et de plusieurs autres parties de l'Europe et de l'Asie, est la souche première et unique de tous les cerisiers que l'on cultive maintenant pour leur fruit. L'auteur de la communication à laquelle sont empruntés les détails qui vont suivre pense comme le savant professeur de Florence.
« Cette manière de voir est cependant en opposition avec celle de la majorité des botanistes, qui, à l'exemple de Candolle, admettent quatre espèces de cerisiers, savoir: le cerasusavium ou merisier, le cerasus duracina ou bigarreautier, le cerasus juliana ou guignier ; enfin le cerasus caproniana ou griottier.
« Les cerisiers sont donc indigènes en Europe, fait qui contredit l'assertion de Pline. En effet, le grand naturaliste romain prétend qu'il n'existait pas de cerisiers en Italie avantla victoire de Lucullus sur Mithridate, et il assure que ce fut le célèbre vainqueur du roi du Pont qui en apporta à Rome les premiers pieds, l'an 680 de la république : il ajoute que cent vingt ans plus tard cet arbre fruitier s'était propagé dans tout l'empire romain, jusque dans la Grande-Bretagne.
« De là est née l'idée généralement répandue, quoique sans fondement, que le cerisier était venu primitivement de Cerasonte, aujourd'hui Zefano, et qu'il avait reçu de là, chez les Latins, le nom de cerasus.
« Il est toutefois possible que Lucullus ait importé en Italie les premières
variétés cultivées de cet arbre, et que les Romains n'aient pas su reconnaître leur identité avec le cerisier sauvage de leurs bois. Il est certain cependant que les cerises étaient connues en Grèce longtemps avant l'époque à laquelle vivait Lucullus ; car, selon Athénée, Diphilus-Siphonius en a parlé du temps de Lysimaque, l'un des généraux d'Alexandre.
« Parmi les nombreuses variétés de cerisiers qui sont cultivées aujourd'hui, Pline n'en mentionne que huit. Dans le nombre de celles-ci, celle qu'il nomme juliana serait, d'après Matthiole et Micheli, l'acquaiola des Italiens modernes, et celle à laquelle il donne le nom de ceciliana serait la visciolona, qu'on croit avoir été transportée de l'Arabie en Espagne, et de ce dernier pays à Rome.
« Les variétés qu'on possède maintenant en Toscane sont dues principalement aux soins des grands-ducs de la famille Médicis. Micheli, dans son catalogue, en signale quarante-sept, et Castello en a figuré quatrevingt-treize. La variété à fleurs doubles fut répandue dans les jardins de Florence, sous François Ier de Médicis, par Giuseppe Benincasa Fiammingo, curateur, qui [la prit dans le jardin botanique appelé alors Delle Stalle, et plus tard Dei Semplici.
« Les cerisiers, particulièrement parmi eux les bigarreautiers, sont susceptibles d'acquérir de très-fortes proportions. On en cite un, des côtes du golfe de Nicomédie, dont le tronc a une circonférence de quatre brasses et demie, ou de près de 3 mètres, et M. Targioni en a fait abattre un sur son propre domaine, qui commençait à pourrir, et qui n'avait pas moins de 2 mètres 52 centimètres de circonférence. »
= Hêtre phénoménal. - Il existe dans la forêt de Verzy, près de Reims (Marne), une sorte de hêtre qui présente de singulières anomalies de végétation. Ce hêtre croît, sur une étendue de plusieurs hectares, dans un sol calcaire un peu argileux et très-ferrugineux, au milieu d'autres hêtres d'une structure entièrement différente; il affecte les formes les plus bizarres.
Le tronc, au lieu de s'élever verticalement, est replié en tous sens; puis, à une hauteur de 2 ou 3 mètres, poussent de nombreuses branches qui se dirigent de tous côtés, se contournent tantôt à droite, tantôt à gauche, forment des exubérances, se replient plusieurs fois sur elles-mêmes, se greffant par approche entre elles, de manière à former l'agglomération de branches la plus singulière.
On dirait que, lorsque l'arbre a été assez élevé, un poids énorme s'est abattu sur sa tête, et l'a littéralement aplati.
Ces hêtres sont en assez grande quantité; presque toujours leurs branches couvrent une surface dont le diamètre est égal à leur hauteur. Ils se greffent par approche très-facilement. C'est ainsi que le tronc de quelquesuns est formé par la réunion de deux et même de trois brins différents. Les
extrémités des rameaux sont pendantes, et, lorsqu'elles touchent la terre, elles s'enracinent facilement.
La croissance de ces monstres est des plus lentes; aussi vivent-ils trèslongtemps, car l'un d'eux est désigné comme arbre de ligne de coupe dans un titre du quatorzième siècle, et il n'a pas plus de2"'50 de circonférence.
Parmi ces arbres, on en trouve vingt-deux qui ont de 8 à 10 mètres de hauteur; les autres, de tout âge et de toutes dimensions, ou se sont élevés seulement à 2 ou 5 mètres, ou se sont étalés de manière à couvrir des surfaces de 6 à 8 mètres de diamètre.
Ces curieux détails ont été communiqués à la Société centrale d'horticulture par M. Pissot, qui n'hésite pas à faire de ces hêtres une variété distincte du (agns sylvalica. Leurs racines paraissent avoir une disposition analogue à celle des branches. (Science pour tous.) On nous assure que le hêtre n'est pas le seul arbre qui présente dans la forêt de Verzy les singularités qu'on vient de décrire, et qu'il y a dans la même forêt un chêne, désigné par les gardes sous le nom de chêne fau, qui n'est'pas moins curieux.
= Reboisement des montagnes. — M. Jacques Valserre a émis dans le Constitutionnel du 8 courant un vœu auquel nous nous associons de grand cœur. Ce publiciste distingué voudrait que le gouvernement français prît l'initiative d'un Congrès agricole international, qui serait chargé de régler les grandes questions qui intéressent tous les peuples, et parmi ces questions il place le reboisement des montagnes.
Cette grande opération, dont tout le monde aujourd'hui reconnaît l'urgente nécessité, serait d'utilité européenne, et ne saurait être menée à bonne fin sans le concours de tous les peuples.
= Taille des arbres. — Une notice manuscrite sur les plantations et sur la taille la plus favorable à la reprise des arbres ayant été adressée à la Société impériale et centrale d'agriculture par M. le baron E. Roguet, M. Pépin, au nom de la section de sylviculture, vient d'en présenter à ses collègues un compte rendu dont voici la substance : Le travail de l'auteur est divisé en deux parties : 1° Systèmes divers et expériences ; 2° Théorie proposée.
« Lorsqu'il s'agit de plantations, dit M. Roguet, le premier point est de choisir des arbres d'une belle venue, dont la déplantation soit faite avec soin, afin que les racines de tout ordre soient bien ménagées et dans le meilleur état possible ; et l'une des choses les plus importantes est de savoir s'il convient de tailler seulement les arbres en les plantant, ou d'en supprimer entièrement la tête, et, dans ce cas, de quelle manière on doit procéder. Les avis, d'après lui, sont très-partagés : ainsi, quelques arboriculteurs croient qu'on ne doit retrancher aucune branche, non plus que
les racines, à moins toutefois qu'elles n'aient été cassées ou meurtries ; d'autres, au contraire, pensent que, lors de la plantation, il convient de couper toute la sommité des arbres.
« L'auteur trouve que pour et contre cette opinion de très-bonnes raisons sont produites. Le professeur Thouin, qui faisait autorité dans cette matière, conseillait de ne jamais retrancher toutes les branches en aucun cas, comme cela se pratique aujourd'hui sur les boulevards et sur les promenades publiques, où on les coupe par la moitié delà tige, sans leur laisser une seule brindille.
« L'expérience, du reste, a constaté qu'un assez grand nombre d'arbres ne devaient pas être taillés au moment de leur plantation. M. Pepin donne pour exemple l'allée des Marronniers, plantée il y a plus de quarante ans au jardin du Luxembourg, depuis l'entrée des pépinières jusqu'à l'Observatoire, ainsi que celle qui est contiguë à la rue Soufflot, plantée il y a trois ans par son confrère M. Hardy. Aucun de ces arbres, dit-il, ne fut rabattu, et ces plantations forment aujourd'hui les lignes d'arbres les plus complètes de nos promenades.
« Il existe plusieurs essences d'arbres propres à border les routes, et qui n'aiment pas à être soumises à la taille au moment de leur plantation: ce sont les aylcinles, ou faux vernis du Japon, les érables planes, les sycomores, et généralement toutes les espèces du genre, les frênes, les hêtres, les noyers, le sophora, les peupliers, les tilleuls, les chênes, les platanes, les ormes même, et les robinias.
« Mais lorsqu'on plante des arbres d'une certaine force, et qu'il se trouve plusieurs tiges à leur extrémité, on doit choisir celle qui est la mieux disposée à s'élancer verticalement, diriger les brindilles et supprimer les grosses branches, mais ne pas les laisser entières, ou les rabattre toutes sur le tronc de l'arbre.
« Les deux opinions font valoir de sérieux arguments, dit M. Roguet.
Ainsi, ceux qui prescrivent de ne point tailler disent qu'il faut produire chez le sujet déplanté le moins de perturbation possible, attendu que l'arbre en éprouve une considérable, par suite de l'arrachage, et il faut craindre d'en ajouter une autre en le tronquant; car, en lui enlevant ses branches, dont on n'apprécie peut-être pas tout le rôle dans la reprise, on retarde non-seulement la végétation, mais on la rend même plus douteuse, et l'on défigure pour longtemps, sinon pour toujours, l'arbre pour lequel toute section est, d'ailleurs, une blessure que l'on retrouve au bout de cinquante ans dans l'intérieur du tronc.
« La Commission de la Société impériale et centrale d'agriculture est de l'avis de l'auteur : elle pense qu'il ne faut tailler qu'avec modération au
moment de la plantation, et ne point couper la tête de l'arbre sur le tronc, comme on le pratique encore sur plusieurs points.
« La théorie proposée par M. Roguet est disposée par chapitres, traitant de l'organographie et de la taille qui convient le mieux pour assurer la reprise des arbres.
« Dans cette formation d'organes d'aspiration et d'expiration, les extrémités ténues des jeunes branches jouent le rôle et ont le pouvoir, si connu et si fécond en application, de stimuler l'action vitale. On devra donc, ainsi que le fait remarquer l'auteur, avoir un développement suffisant de jeunes rameaux minces et ténus, sans laisser à l'arbre un branchage qu'il ne pourrait nourrir sans des efforts trop grands ; et pour ne pas le surcharger d'un bois inutile, ce que la taille a pour but d'éviter, les yeux et les petites branches destinés à servir d'échappatoires doivent être assez rapprochés du tronc; de cette façon, la sève s'en écartera peu.
« En résumé, la Commission ayant apprécié le mérite du document qui lui a été soumis, a proposé de l'insérer en entier dans les Mémoires de la société, afin que les arboriculteurs y puisent des renseignements utiles à la préparation des arbres pour opérer les grandes plantations. »
= Arbres à cire. — M. Kellermann a récemment appelé l'attention sur les arbres à cire, dont il demande l'introduction en France.
En outre de la faculté qu'ils ont de produire de la cire, ces arbres absorbent l'air impur, assainissent les contrées marécageuses au sein desquelles ils sont plantés, et répandent au temps des chaleurs une odeur aromatique fort agréable ; leurs racines ont des propriétés médicinales et leurs feuilles préservent les étoffes des ravages des mites.
Deux espèces, le myrica cerifera, delà Caroline, et le myrica pensylvanica, de la Pensylvanie, devraient surtout être cultivées; elles fournissent une cire que l'on a réussi à blanchir sans altération et à transformer en bougies comparables aux bougies de cire ordinaire. Introduit sans peine en Algérie, le myrica cerifera tend à y devenir l'objet d'une grande culture; il se multiplie avec une facilité extrême par graines ou par boutures prises soit sur les branches, soit par les racines. En Amérique, les ciriers sont très-abondants et couvrent la majeure partie des marais.
M. Kellermann considère comme très-urgente et très-avantageuse la substitution, en France, des haies de myrica pensylvanica aux haies d'épines dans les endroits humides et marécageux ; le myrica cerifera remplacerait avec bénéfice les saules dans les prairies, aux bords des ruisseaux et rivières ; on obtiendrait de cette manière, dit-il, une amélioration réelle dans la salubrité de l'air, l'extinction de foyers pestilentiels, et en même temps une récolte abondante de cire végétale sans presque aucun frais de culture. (Cosmos.)
DU LIBRE DÉFRICHEMENT DES BOIS.
(Suite et fin.)
ïjatts si fréquentes des établissements industriels, au ilit-ee ses erises de subite réaction succédant tout à coup à de langueur, au plus fort enfin de cette fièvre de Consom souvent. à force de besoins, devient dévorante. une
disproportion quelconque entre les ressources et ces besoins s'est-elle Inaitifestée 7 A-t-on eu à se préoccuper de quelques symptômes qui fussent de nature à la faire pressentir? Non : les manufactures, les usines, les ateliers se sont multipliés et accrus. Ces énergiques instruments de l'industrie n'ont pas cessé de fonctionner; leur action ne s'est pas ralentie.
Si maintenant on ne perd pas de vue que dans le système de la liberté, comme dans celui de l'interdiction, les défricheurs ne peuvent rien entreprendre sur les forêts et bois de cette catégorie qui alimentent la consommation , il n'y a pas d'outrecuidance à dire et à maintenir que la liberté la plus entière de défricher, laissant à cet égard les choses en même état, aucun des besoins essentiels de la consommation ne serait plus menacé ou plus compromis par le libre défrichement qu'il ne peut l'être aujourd'hui.
Si cependant l'insuffisance de ressources qui vous préoccupe et vous alarme doit en effet résulter du retrait de l'interdiction, où donc serait-il possible qu'elle se fît sentir? Dans quelques localités moins bien partagées ou déjà pauvres en cultures forestières ; localités isolées ou trop distantes des grands centres de production pour s'y approvisionner avec avantage.
Ll, il est vrai, si la liberté de défricher pouvait avoir pour résultat un amoindrissement excessif des ressources encore existantes, ou peut-être Une pénurie absolue, les populations auraient d'autant plus à en souffrir que le bois, matière fort encombrante, ne supportant les frais du transport que dans des proportions très-restreintes, et par conséquent à de faibles distances, les contrées qui en manquent n'ont que peu ou point de secours à attendre des contrées trop éloignées où il abonde.
Là, sans aucun doute, il y aurait tout ensemble devoir et nécessité d'aviser, par un moyen efficace et prompt, à défendre les populations d'une si fâcheuse extrémité.
Ce moyen, aussi sûr que facile, est à la disposition de l'État.
Que partout où il aura été reconnu nécessaire d'y recourir, et avant de donner libre carrière aux défricheurs, l'État, procédant par voie d'expropriation, aux conditions et dans les formes que la loi détermine, réunisse à son domaine des bois, ou parties de bois, d'une possibilité telle qu'en mettant la production toujours disponible au niveau de la consommation, l'équilibre demeure aussi invariablement rétabli qu'il puisse l'être entre les ressources et les besoins.
Par là toute inquiétude sur les conséquences des défrichements possibles venant à cesser, il y aura tout à la fois justice pour le sylviculteur, prévoyante protection et sécurité pour tous; toutes choses qui méritent à un haut degré d'obtenir faveur par cela seul qu'elles donnent satisfaction à tous les besoins, sans nuire à personne : ce qui est le cachet des bonnes mesures. L'État lui-même en recueillerait cet avantage de pouvoir donner plus de développement à l'éducation des futaies pleines, devenues aussi une nécessité d'intérêt général, et qui ne peut prospérer sur une grande échelle qu'entre les mains de l'État.
Dans nos campagnes, dans nos villes, pour ouvrir une voie ferrée ou creuser un canal, pour dégager les abords d'un monument, donner plus d'étendue à une place ou la régulariser, pour élargir ou prolonger une rue, tous les jours on exproprie; serait-il donc plus difficile ou moins opportun d'exproprier, alors qu'il s'agit de garantir à un grand nombre le libre exercice de leurs droits de propriété, et à un plus grand nombre les moyens de satisfaire à un besoin de première nécessité?
Quant au plus haut prix des bois, ne fùt-il qu'accidentel et momentané, pour beaucoup de consommateurs il y aurait sans contredit à le regretter ; mais, outre qu'au delà de certaines limites l'emploi toujours en progrès des fers, des houilles et de la tourbe dans les constructions et le chauffage lui ferait un sérieux obstacle ; dans l'intérêt le plus général, le renchérissement lui-même serait-il sans compensation?
Ne profiterait-il pas d'abord à ceux-là qui auraient certes le plus de droits à en profiter? Aux propriétaires qui, après avoir subi un si long temps la lourde servitude de l'interdiction, n'auraient pas défriché?
Aux propriétaires peut-être plus nombreux de ces bois rebelles au défrichement, qui, comme ceux des meilleurs bois, ont porté et portent encore, mais avec tant de désavantage, le poids des mauvais jours de la propriété forestière?
Ne profiterait-il pas encore aux établissements publics, aux communes et à l'État, possesseurs, dans toutes les parties de la France, des masses boisées les plus importantes et les plus productives?
Aux communes, déjà menacées, dans les plus pressants de leurs besoins,
par une dépréciation progressive des produits de leur principale propriété?
A l'État, en qui se résument et se confondent tous les intérêts, et qui verrait par là se grossir, dans l'intérêt de tous, le chiffre de 25 à 30 millions pour lequel cette nature de produits a figuré durant plusieurs années dans son budget?
Enfin, comme raison sinon déterminante, du moins assez plausible de Maintenir l'interdiction, on a fait valoir cette circonstance que les propriétaires actuels n'étant entrés en possession, ou n'ayant acquis que sous l'empire de la loi prohibitive du défrichement, leur permettre aujourd'hui de défricher, ce serait leur attribuer une plus-value sur laquelle ils n'ont jamais pu compter et à laquelle ils sont sans droit. Je m'y arrêterai peu.
Qu'importe vraiment à l'intérêt général que la réparation d'une injustice profite plus ou moins à ces propriétaires? En quoi le bénéfice qu'ils y trouveront peut-il lui préjudicier? Je me le demande en vain.
Ce qui lui préjudicie toujours, c'est l'injustice même. Vient-elle à être reconnue, ce qui importe par-dessus tout à l'intérêt général c'est qu'elle soit promptement réparée, et à l'égard des propriétaires forestiers l'injustice est patente, elle crie. Z) Ici se rencontre un fait assez significatif pour qu'il mérite d'être signalé ; c'est le désaccord prononcé de nos adversaires sur ce point capital du débat.
Partisans déclarés de l'interdiction, si unis, si fermes dans leur résistance à toute tentative qui pourrait lui devenir menaçante, si unanimes Pour en faire prévaloir le principe, ils se divisent sur les moyens d'en justifier la nécessité.
Pour le grand nombre, ce qu'il y a d'essentiel dans cette question se réduit à quelques mesures à prendre pour que le prix des bois n'atteigne jamais un niveau trop élevé.
Entre ceux à qui la question paraît un peu plus compliquée, et qui portent leur vue plus loin, quelques-uns, je ne le dis que pour l'avoir entendu, quelques-uns affirment nettement que les propriétaires n'ont aucun intérêt à défricher, et qu'ils n'en revendiquent pas le droit; signalant ainsi, et mettant tout d'abord en relief ce qu'aurait à leur avis d'inopportun et de peu motivé le retrait de la disposition transitoire du Code.
D'autres, pour donner l'éveil sur la portée de la concession réclamée et pour en faire ressortir le danger, s'attachent à prouver que les propriétaires ont le plus grand intérêt à défricher leurs bois, et ils prennent le soin de déduire les motifs qui doivent les y déterminer.
Où que soit ici la vérité, loin que ces assertions qui se contredisent Puissent prêter appui au système de l'interdiction, elles aident bien plutôt à révéler le peu de consistance des données sur lesquelles il repose.
De ces deux choses l'une : ou les propriétaires n'ont réellement aucun intérêt à défricher leurs bois, et ce qui est d'étroite obligation mis à part, nul ne faisant que ce qu'il a ou croit avoir intérêt à faire, le droit de défricher leur fût-il acquis, il devient évident qu'ils s'abstiendraient d'en user; les choses resteraient donc en l'état où l'interdiction les a mises: on aurait, il est vrai, le droit de défricher; mais, faute d'intérêt à exercer ce droit, on ne défricherait pas. A quoi se réduiraient alors les dangereuses conséquences du libre défrichement? A reconnaître, avec la sanction de la loi, ce que le bon sens et l'équité crient pour ainsi dire sur les toits, que le droit de propriété du sylviculteur n'est pas d'une autre nature que celui de tous les autres propriétaires, et qu'il doit être respecté à l'égal de tous. Je ne vois rien là de bien alarmant pour l'intérêt général.
Ou, au contraire, les possesseurs de bois ont le plus grand intérêt à les défricher, et dès lors si, comme tous les faits le démontrent jusqu'à l'évidence, il n'y a pour l'intérêt général aucun motif sérieux de le leur interdire, à quel titre et dans quel but persisteriez-vous à déshériter le sol forestier de ce droit de libre culture acquis à tous les autres sols?
Y a-t-il là une énigme dont le mot m'échappe? Je confesse ingénument mon impuissance à le deviner.
On insiste; et, comme argument suprême, ultima ratio, on nous dit : Le bois ne peut être assimilé à aucun autre fruit de la terre ; les forêts qui le produisent exercent une puissante action sur le milieu qu'elles occupent, sur tout ce qui avoisine ce milieu : les sources, les cours d'eau, la végétation, la température, la santé des hommes, tout se ressent de leur influence.
Tant qu'elles sont debout, soit! n'incidentons pas sur le plus ou le moins ; mais quand il n'en subsiste que les ruines, et n'oublions pas que c'est la loi qui veut, non pas sans doute qu'il en soit ainsi, mais bien qu'il puisse en être ainsi ; quand de ces peuplements protecteurs il ne reste plus que des souches abrouties et un sol nu, leur influence survit-elle miraculeusement à leur destruction ?
Certes, lorsque pour me mettre en demeure de n'user qu'en conservant, vous imposez à l'exercice de mon droit certaines limites au delà desquelles cette salutaire influence serait affaiblie ou paralysée, il peut en résulter pour moi contrariété, gêne, dommage momentané peut-être. Je vous comprends toutefois; l'intérêt général est là et je me résigne. Mais si, après m'avoir reconnu le droit et donné pleine liberté de franchir ces limites que vous avez abattues, vous me punissez de les avoir franchies, je ne vous comprends plus, je ne puis plus vous comprendre, et la résignation me devient plus que difficile.
A moins donc qu'on ne prétende juger la question par la question, le formidable argument ne conclut rien.
Eh ! oui vraiment, il est des lois qui ont exilé les forêts du droit commun ; mais c'est précisément contre ces lois que, forte de son droit de propriété privée, la propriété forestière s'élève et qu'elle réclame ; c'est à ces lois qu'elle reproche de la réduire à un état permauent d'ilotisme, en violant à son égard le principe aujourd'hui le moins contesté, le principe le plus vivace de notre organisation sociale : Égalité dans les charges, égalité dans les droits.
Qui ne serait frappé, en effet, de ce qu'il y a d'étrange, mais surtout de contraire à l'esprit de nos institutions, non moins qu'aux lois de l'équité, dans cet ordre de choses faisant les parts si inégales entre deux classes de propriétaires ayant un droit égal à la protection de la loi, sous laquelle, par leur industrie ou par leurs travaux, ils aident également à la prospérité de l'État?
Toutes les faveurs pour les uns!. Pour les autres toutes les sévérités.
L'agriculteur, libre de disposer, selon son plus grand intérêt, de la terre qu'il exploite, toujours libre d'y pratiquer tous les genres de culture, de les alterner, de les restreindre ou de les étendre à son gré, et toujours protégé dans ses labeurs par l'action publique ; qui, sans surcroît de charges, veille pour lui à la conservation des fruits et des moindres instruments de ses cultures ; Le sylviculteur tenu, sans allégement d'aucune charge, de pourvoir par lui-même à la garde de son domaine et de ses produits, tenu de supporter tous les frais d'une surveillance trop souvent impuissante et que les poursuites qu'elle entraîne rendent encore plus onéreuse ; Le sylviculteur libre aussi, à la vérité, de ruiner, de détruire ce que jusque-là il avait cultivé, mais non plus de remplacer par une autre culture, Par une culture de son choix, ce qu'il aura détruit.
A celui-ci toutes les cultures demeurent interdites, fors celle-là que, pour son plus grand avantage, il voudrait abandonner.
Le bois a pris racine sur sa propriété, c'est du bois qu'il y a cultivé, il est condamné sans retour à n'y cultiver que du bois.
L'inégalité dans les droits pourrait-elle aller plus loin ?
Et s'il est vrai, comme on s'accorde à le dire et à s'en plaindre, s'il est vrai qu'à l'égard des bois le principe de l'égalité dans les charges ne reçoive que rarement une scrupuleuse application, peut-on se refuser à reconnaître que les griefs de la propriété forestière ne sont que trop fondés, et que dans l'intérêt le plus général l'équité en exige le redressement.
Un coup d'œil jeté sur les actes réglementaires ou législatifs qui, de-
puis tantôt deux siècles, ont décidé du sort des forêts, nous fera pénétrer plus avant dans le fond même de la question.
L'ordonnance de 1669 et la loi qui en a pris la place ont-elles fait, chacune pour son époque, ce qu'il y avait de mieux à faire? Il serait ici sans utilité de le rechercher.
Qu'ont elles voulu faire, et qu'ont-elles fait? Voilà surtout ce dont il importe que nous puissions nous rendre compte.
Je ne suis pas de ceux qui avaient voué une sorte de culte à l'ordonnance de 1669, dont ils prétendaient faire le palladium des forêts, s'obstinant à y voir ce qui ne s'y trouve pas, ce qui ne pouvait pas s'y trouver.
Je n'ai jamais vu dans cette ordonnance qu'un règlement de police forestière, qui témoigne à un haut degré de la sollicitude éclairée du grand ministre, mais aussi de la profonde ignorance où l'on était alors des premiers éléments de la sylviculture, et où ne se rencontre pas une donnée, une seule donnée applicable à un traitement raisonné des bois. Il est incontestable néanmoins qu'à son apparition elle a sauvé les forêts d'une imminente ruine.
L'avenir, que Colbert mettait tant de prudence et de soins à sauvegarder, a, il est vrai, trompé ses espérances; ces grandes et imposantes masses de futaies pleines, qu'il regardait comme le vaste magasin d'approvisionnement de nos arsenaux, ont en partie disparu, se sont appauvries ou dépeuplées ; la pratique désastreusement routinière du balivage n'y avait que trop aidé, nos tourmentes politiques et les aliénations ont fait le reste.
Mais, loin de reprocher au règlement de Colbert de n'avoir pas prévu ce qui, à son époque, était hors de toute prévoyance, n'y a-t-il pas justice à reconnaître que le bien qu'il avait en vue il l'a, en partie du moins, opportunément réalisé.
De quoi s'agissait-il en 1669? De faire cesser des désordres inouïs, d'intolérables abus ; les sages dispositions de l'ordonnance y ont mis fin.
De créer sur notre propre sol des ressources toujours disponibles pour nos arsenaux, dont les difficultés alors extrêmes des achats au dehors pouvaient, à un moment donné, compromettre les approvisionnements?
L'ordonnance y a pourvu par l'obligation de mettre et tenir en réserve; obligation qui d'abord a pu paraître excessive, mais qui, en réalité, protégeait l'avenir du domaine et qui l'enrichissait.
Interdire les défrichements était enfin l'unique moyen de garantir la conservation des réserves, et défense absolue de défricher a été faite, à peine de 3,000 livres d'amende ; en quoi cette législation ( car c'en était une alors) s'est montrée conséquente à son principe, conséquente à ellemême.
A son tour qu'a voulu faire et qu'a fait la loi qui nous régit?
Pour donner vie et force au principe qu'elle avait pris pour point de départ, elle a voulu affranchir la propriété d'une servitude réputée onéreuse, et elle l'en a affranchie, mais de telle sorte que la condition de l'affranchissement est devenue plus dommageable au propriétaire que ne l'était celle de la servitude.
Elle a concédé au propriétaire un droit que l'ordonnance lui avait refusé ; mais sitôt qu'il en use, elle le punit d'avoir cédé à une tentation qu'elle seule lui a suscitée ; elle l'en punit en lui interdisant de faire de sa propriété le seul usage qui puisse immédiatement profiter à tous aussi bien qu'à lui.
Elle lui dit : On t'avait dénié la faculté d'user librement de ta chose ; cette faculté, je te l'accorde. Tu peux abandonner tes bois à la hache du bûcheron ;"les livrer au pâturage de tes bestiaux, les faire brouter jusqu'aux racines; je t'en reconnais le droit, tu le peux. Mais l'œuvre de la hache et du broutement une fois consommée, mais le sol une fois démeublé de tout ce qui le fertilisait en l'abritant, tu n'iras pas plus loin.
Je t'interdis à toujours de lui demander par une autre culture d'autres produits que ceux dont je t'ai donné le droit de le dépouiller : ce sont des bois que le sol avait nourris; je t'ai, il est vrai, autorisé à les détruire ; mais tu les as détruits, désormais tu n'y cultiveras que du bois.
Eh ! ne valait-il pas mieux cent fois tenir le propriétaire en tutelle que l'émanciper ainsi? Il y eût gagné à coup sûr, et l'intérêt général avec lui.
Ce que sans témérité on peut donc se permettre de reprocher à cette loi, c'est de mentir ouvertement à son principe, qui était un principe d'affranchissement ; ce que je ne lui reproche pas moins, c'est surtout d'avoir, par ralléchement d'une jouissance sans frein, tendu au propriétaire un piège dans lequel devait l'entraîner cette surexcitation de l'impatience de jouir dont bien plutôt il eût fallu le défendre, et en cela on peut dire que la loi s'est montrée immorale et injuste.
Injuste, car il y a une injustice manifeste à faire tourner au détriment ou à la ruine du propriétaire les conséquences d'un fait avoué, autorisé par la loi, d'un fait qu'il n'y a pas même un prétexte de qualifier d'abusif, puisque c'est la loi qui le répute licite et qui l'a effectivement rendu tel.
Injuste, car il y a une autre et bien plus criante injustice, quand vous avez le nécessaire, à inféoder en quelque sorte toute une classe de propriétés à votre superflu.
Immorale enfin, car l'injustice et le mensonge sont essentiellement des immoralités, et de toutes les plus dangereuses, alors surtout qu'elles obtiennent droit d'asile dans la loi.
Eh quoi ! c'est à titre d'affranchissement que vous me reconnaissez le droit de démolir ma maison 1. Vous n'avez mis aucun obstacle à ce que
j'en arrachasse jusqu'à la dernière pierre; et, ma maison démolie, rasée, vous me condamnez à n'avoir plus d'autre abri, d'autre gîte, que ses ruines éparses et inhospitalières !
Il y a là, je le dis sans détour, je ne sais quoi de sauvage et de brutalement dur, qu'il m'est impossible de concilier avec cet esprit de bienveillante protection qui doit être celui de la loi, et dont la loi tire sa principale force.
Je crois avoir franchement abordé, sans en omettre aucun, tous les faits qui, dans le débat engagé, peuvent être considérés comme éléments essentiels de sa solution !
Entre ces faits, il en est un qui m'a toujours frappé, qui m'a toujours paru décisif : c'est le droit acquis à tout propriétaire d'user de ses bois jusqu'à complète destruction.
En présence de ce fait, l'interdiction de défricher ne peut plus être pour moi qu'une espèce de non-sens, ou plutôt qu'une tracasserie sans but, et l'on avouera, sans doute , qu'il est aussi d'intérêt général qu'en rien et pour rien la loi ne soit jamais tracassière.
En présence de ce fait, et plus on y réfléchit, moins on s'explique qu'à une époque qui diffère si essentiellement, et sous tant de rapports, de l'époque de 1669, et dans notre France de 1856, où tout pousse si résolument au mieux-être, au mieux-faire, au progrès en toutes choses, toute une classe de propriétaires se trouve frustrée de cette liberté d'action, garantie par nos institutions à toutes les autres classes de cultivateurs ou d'industriels ; plus on y réfléchit et moins on s'explique surtout cette obstination à creuser encore plus profondément, pour le sylviculteur et pour lui seul, la vieille ornière de l'interdiction où les législateurs de 1827 et de 1853 ne s'étaient résignés qu'avec répugnance à le retenir. ce que démontrent assez nettement le titre même de la disposition prohibitive du Code et la brièveté de la dernière prorogation.
Sous quelque point de vue que j'envisage la question et que je l'étudié, l'autorité des faits me ramène à ce corollaire : En 1669, la nécessité, l'urgence même de l'interdiction n'était pas contestable, les désordres les plus graves l'avaient mise au grand jour.
Etroitement liée par son origine à l'obligation absolue de mettre et tenir en réserve, et par là faisant obstacle à toute destruction, elle arrachait tout à coup les forêts à une ruine déjà menaçante; elle sauvait le présent et protégeait l'avenir; en un mot, elle pouvait paraître gênante, mais elle conservait.
De nos jours, en 1853 comme en 1856, alors que, depuis plus d'un demi-siècle, d'autres tendances, je dirais presque d'autres mœurs, une législation nouvelle, les découvertes de la science, celles de l'industrie et tant d'événements si divers, en transformant ce qu'ils n'ont pas détruit,
ont si profondément modifié nos habitudes, nos intérêts et jusqu'à nos besoins, l'interdiction, isolée de toute mesure conservatrice, impuissante par elle-même à empêcher qu'on détruise, puisque la loi a voulu qu'il fût libre au propriétaire de détruire, l'interdiction ne répond plus à rien de ce qui a fondé l'ordre de choses actuel, à rien de ce qui y domine, elle ne peut ni défendre, ni conserver, si ce n'est des ruines dont, au détriment de tous, elle protège et prolonge la stérilité.
Tout en témoigne donc, à une époque où l'on s'efforce de tout ramener à l'autorité de l'expérience et des faits, maintenir la défense de défricher les bois, telle que l'a prononcée la disposition transitoire du Code, et même dans de plus étroites limites de durée, ce serait méconnaître ce qui est au plus haut degré d'un intérêt général. le respect du droit; ce serait, si je puis ainsi dire, rompre en visière à la lettre autant qu'à l'esprit des institutions qui nous régissent.
Le principe le plus enraciné de ces institutions, l'équité, la logique.
tout concourt et s'accorde à demander que la loi qui interviendra mette fin à des discussions qui demeureront interminables aussi longtemps qu'on ne se placeca pas sur le terrain des faits accomplis et des nécessités de l'époque, qui ne sont plus, à beaucoup près, celles du dix-septième siècle ; tout concourt à demander que cette question du libre défrichement soit enfin résolue en sens inverse de ce que dispose le Code ; en d'autres termes, que la loi à intervenir fasse de la liberté de défricher, la règle, et de la défense de défricher, l'exception.
Dans ce système, l'exception s'appliquerait de plein droit, et d'une manière absolue, aux forêts de montagne proprement dite, aux forêts et bois assis sur des pentes d'une déclivité et d'une exposition déterminées.
Partout ailleurs, elle porterait sur les forêts et bois formant des abris naturels contre certaines influences, certains courants atmosphériques reconnus nuisibles aux progrès de la végétation, à la salubrité publique, abris qui ne pourraient pas disparaître sans exposer à d'incalculables dommages de nombreuses et importantes cultures.
On l'étendrait encore, dans de raisonnables limites, aux portions de forêts ou de bois dont le couvert protecteur peut aider à faire sourdre plus abondamment ou à entretenir les sources qui alimentent un cours d'eau.
Pour que l'arbitraire ne pût jamais vicier l'application d'une mesure aussi importante, l'opportunité de ces exceptions serait étudiée et constatée, dans chaque département, par une Commission spéciale d'enquête, composée d'hommes compétents sur toutes les questions qui se rattachent à la question principale ou qui en dérivent. Le Conseil général ou, au besoin, le Conseil d'arrondissement, serait appelé à fournir ses observations et son avis sur le travail des commissaires enquêteurs, dans lequel le gou-
vernement trouverait ainsi tous les moyens de statuer en pleine connaissance de cause.
Dans ces divers cas, enfin, les circonstances physiques qui auraient motivé l'exception venant à cesser, l'exception cesserait avec elles , et, comme tous les autres, le propriétaire recouvrerait l'entière liberté de disposer de sa chose.
En statuant ainsi, tout en faisant la part de la nécessité de combattre, d'atténuer, autant qu'ils peuvent être atténués ou combattus, les désastreux effets des déboisements inconsidérés, la loi, sans déserter son principe, sans imposer aucun sacrifice à l'intérêt général, donnera satisfaction à la propriété forestière, qui ne demande ni faveur, ni privilège, mais qui réclame ce qu'il nous appartient à tous de réclamer, protection et justice.
Le baron DE SAHUNE.
OBSERVATIONS SUR L'ARTICLE PRÉCÉDENT.
Il est peu de sujets qui aient donné lieu à autant d'écrits que le défrichement des bois. C'était donc une tâche fort difficile que s'imposait M. de Sahune, en entreprenant un nouveau travail sur la même question. Cette tâche, il l'a remplie, personne assurément ne le méconnaîtra, avec un grand talent, et, pour notre compte, nous approuvons complètement les considérations qu'il a développées en faveur de la propriété forestière, dans un style ferme et coloré qui en rehausse singulièrement la valeur.
Oui, il est vrai, nous l'avons dit depuis longtemps, mais M. de Sahune l'a répété en bien meilleurs termes, que la loi actuelle sur le défrichement fait peser sur les propriétaires une restriction qui n'est pas justifiée par les avantages qui en résultent pour l'intérêt public; et cela tient : 1° à ce que, dans cet intérêt même, il serait utile qu'une notable partie des terrains boisés appartenant aux particuliers fussent convertis en terres arables; 2° à ce que, pour ceux de ces terrains qu'il est réellement utile de conserver en nature de bois, la prohibition de défricher est inefficace, en ce sens qu'elle ne met pas obstacle à la dégradation de la superficie.
Oui, il est vrai que ladite prohibition, dans l'état actuel des choses, peut être considérée comme exorbitante du droit commun, non pas parce qu'elle porte atteinte à la liberté individuelle, car cette atteinte est autorisée paroles exigences de tout état social, mais bien parce qu'au lieu d'être accompagnée des immunités qui devraient être la condition de toute dépréciation occasionnée à la chose privée, dans l'intérêt de la chose publique,
elle s'ajoute, au contraire, à des charges extraordinaires que ne supportent pas les autres natures de biens-fonds.
Ces faits sont incontestables. M. de Sahuneles amis complètement en évidence. Son travail n'a qu'un défaut à nos yeux; mais un défaut grave.
Nous espérions qu'après avoir signalé avec tant de force et de logique les graves inconvénients du régime forestier actuel, il indiquerait les moyens d'y remédier; notre attente a été trompée, sa conclusion aboutit en définitive, à fort peu près, au maintien du statu quo.
M. de Sahune, d'accord en cela avec tous les écrivains qui ont traité le même sujet, reconnaît qu'il est des bois qui doivent être conservés, et que pour assurer cette conservation il est nécessaire que la puissance publique intervienne. Seulement, il veut qu'au lieu de poser la liberté de défricher comme exception et la défense comme principe, la loi fasse de la liberté la règle, et de la défense l'exception; mais le Code forestier ne veut pas, ne dit pas autre chose, et, d'ailleurs, qu'on proclame la liberté de défricher comme un droit, ou qu'on lui conteste ce caractère, dès qu'on permet à l'administration de s'opposer au défrichement dans certains cas non prévus à l'avance, dans certaines circonstances qu'on abandonne à son appréciation, on admet par cela même la nécessité pour tous les propriétaires d'une déclaration préalable de leur volonté de défricher, et la concession que l'on fait à la liberté n'est plus qu'une fiction. Pour qu'il en fût autrement, il faudrait ne pas laisser dans les futurs contingents, dans l'aléatoire, l'exercice du droit de défrichement.
M. de Sahune nous dit : « Je demande que l'on puisse défricher librement les bois et forêts, à l'exception de ceux qui sont situés en pente ou qui forment des abris naturels contre certaines influences, certains courants atmosphériques, reconnus nuisibles aux progrès de la végétation, à la salubrité publique, abris qui ne pourraient pas disparaître sans exposer à d'incalculables dommages de nombreuses et importantes cultures. »
Tout cela est fort bien ; mais comment s'y prend-on pour juger de l'opportunité des exceptions à la règle générale? Fera-t-on, à cet effet, comme nous l'avons proposé, un travail d'ensemble? Opérera-t-on en détail, morceau par morceau, au fur et à mesure des déclarations des propriétaires? Là est la question, la seule question, à vrai dire, qui réclame aujourd'hui une solution.
Si l'on adopte le second parti, on ne ferme pas la porte à l'arbitraire; tout au plus la rend-on un peu moins large. On laisse suspendue sur toute la propriété forestière la menace de l'interdiction; car il n'est pas un bois qui ne puisse être considéré comme étant situé en pente, ou comme formant un abri salutaire contre des influences pernicieuses. On maintient finalement les choses dans une voie qui conduit fatalement, dans un délai
plus ou moins long, à la ruine complète des bois de particuliers. En effet, de quelques soins, de quelques précautions que l'on entoure l'examen des demandes de défrichement, on ne saurait le soustraire, dans le système que nous combattons, à des difficultés insurmontables, et entre autres à celle qui consiste à faire, dans l'influence d'un massif d'une certaine étendue, la part qui appartient à la fraction plus ou moins grande qu'il s'agira d'en détacher. Envisagée dans chacun des arbres dont se compose le massif, cette influence est inappréciable ; elle ne se manifeste clairement que lorsqu'on embrasse le massif dans toute son étendue.
Si l'on se décidait, au contraire, à procéder à la reconnaissance générale des bois à maintenir sous l'empire de la prohibition, on ne réglerait peutêtre pas les choses d'une manière qui serait à l'abri de toute critique. Bien des bois qui, à la rigueur, pourraient être défrichés sans inconvénients seraient exposés à être compris dans la zone défensive; d'autres, qui devraient être conservés, échapperaient à l'interdiction : rien n'est parfait dans ce monde. Mais on prendrait, dans tous les cas, le meilleur moyen d'arriver au but désirable : on affranchirait immédiatement et à jamais une grande partie de la propriété boisée de la menace d'interdiction qui la déprécie aujourd'hui presque autant que le ferait une interdiction formelle et définitive; on assurerait la conservation de la partie de cette propriété dont le maintien est véritablement utile ; on mettrait l'administration à l'abri des soupçons de partialité que fait peser sur elle le mode de procéder qu'on lui impose actuellement. On épargnerait aux agents forestiers, au grand profit du service, les déplacements, les fatigues et les dépenses considérables que leur occasionnent la multitude de demandes dont ils sont assiégés.
Nous savons que le travail à faire pour déterminer une fois pour toutes la portion du domaine forestier dont l'intérêt publie exige la conservation effraye beaucoup de personnes. Elles pensent que ce travail serait énorme d'abord; qu'il serait en outre fort incertain, par suite des appréciations très-délicates qu'il comporterait.
Pour ce qui est de cette dernière considération, nous nous bornerons à rappeler que l'incertitude d'une reconnaissance générale ne serait certainement pas plus grande que celle que présentent les reconnaissances partielles et successives auxquelles on se livre aujourd'hui.
Quant à l'énormité du travail, on n'a pas le droit de l'opposer comme une fin de non-recevoir, dans un pays où le cadastre exact de toutes les propriétés existe.
Non, là n'est pas l'obstacle. Il est dans l'empire des traditions. Il est surtout dans cette déplorable tendance à vivre au jour le jour, qui est le caractère dominant de notre époque ; mais c'est là un vice contre lequel onpeut réagir.
Nous regrettons que M. de Sahune n'ait pas partagé cette opinion; mais où nous sommes sans réserve de son avis, c'est lorsqu'il insiste sur la nécessité d'accorder à la propriété forestière une protection efficace, par la suppression des charges exceptionnelles qui la grèvent. Cette réforme, à laquelle l'administration paraît n'attacher qu'une médiocre importance, est pourtant une des choses qui intéressent au premier chef les propriétaires de bois, et qui les intéressent même beaucoup plus que la question de savoir si on leur permettra ou non de défricher. Qu'importe, en effet, par exemple.
aux habitants du Morvan, qu'on leur accorde cette permission? ils savent bien qu'elle serait illusoire ; que leurs terres ne peuvent produire que du bois, et que, bon gré mal gré, il faut qu'ils les maintiennent dans l'état où elles sont. Mais accordez-leur une diminution d'impôt foncier; abaissez les droits d'octroi, les droits de navigation que supportent les bois, etc., et ils applaudiront tous au maintien d'une interdiction qui sert leurs intérêts en même temps que l'intérêt public.
Voilà ce qu'il faut faire, et avant tout, parce que l'équité le demande.
Voilà ce qu'il faut faire aussi pour que, dans un grand nombre de circonstances, la prohibition du défrichement ne soit pas complètement inefficace; car, ainsi que le fait remarquer M. de Sahune, il n'y a pas de loi qui puisse conjurer la destruction d'un terrain boisé, lorsque son revenu net est inférieur à celui qu'il rapporterait s'il était converti en pâturage.
RAPPORT A LA SOCIÉTÉ FORESTIÈRE PAR LA COMMISSION DES ENCOURAGEMENTS POUR LES MEILLEURS APPAREILS DE CHAUFFAGE AU BOIS (1).
Messieurs, Ce serait méconnaître les vues et les services de la Société forestière que de penser qu'elle a borné ses efforts à chercher des remèdes ou des Palliatifs aux maux trop évidents qui découlent, pour la propriété boisée, rles vices de la constitution et du régime auxquels cette nature de propriété est soumise. Si la Société forestière s'est adressée tour à tour, et parfois non sans succès, aux autorités administratives, aux pouvoirs législatifs et judiciaires, aux ministres et jusqu'au chef de l'Etat, pour obtenir la réforme
(1) Cette Commission se composait de MM. le vicomte d'Aboville, le marquis delà Baume, Bertrand (de l'Yonne), le comte de Bridieu, le comte de Brosse, Colon, Delbet, je marquis d'Havrincourt, Michel, Rohin, le marquis de Saint-Seine, le comte de Sainteger, Tréfouël, Tripier.
des abus, des inégalités, des injustices de différente sorte auxquels la propriété forestière doit sa situation critique, elle ne s'est pas dissimulé que cette situation était surtout et avant tout produite par un fait matériel, indépendant des lois et de l'administration : ce fait, c'est la concurrence de la houille contre le bois et l'extension toujours croissante de cette concurrence.
Or, tant que la houille fournira un combustible meilleur marché que le bois, tant que, par le perfectionnement progressif des appareils destinés à la combustion de la houille, elle sera d'un usage plus commode ou plus avantageux que le combustible végétal, il ne faut pas se faire illusion ; il y aura là une situation qu'il ne dépend ni des administrations, ni des législateurs, ni des ministres de faire cesser. Le remède réel, radical, ne peut venir que de la propriété forestière elle-même.
Si, au lieu de chercher énergiquement les moyens de ramener vers le bois la préférence des consommateurs, soit par un abaissement du prix trop élevé auquel ils sont forcés de le payer aux marchands, soit par des améliorations et des perfectionnements dans les appareils usités pour la combustion; si, en un mot, la propriété forestière s'abandonne elle-même et se contente de suivre d'un regard impuissant et découragé les efforts intelligents et persévérants de la houille pour conquérir les marchés, le résultat ne peut être douteux : la houille achèvera de déposséder le bois.
C'est pour donner un premier exemple de ce qu'il y avait à faire à cet égard que vous avez, il y a deux ans, proposé des prix aux auteurs des appareils de chauffage présentant une amélioration réelle sur ceux usités jusqu'à ce jour, ou qui favoriseraient la substitution du bois à la houille pour les besoins industriels et domestiques. Une Commission a été nommée par vous avec la mission de rechercher les améliorations et les perfectionnements dont nous venons de parler, et d'en favoriser l'application pratique par tous les moyens en votre pouvoir.
Elle vient aujourd'hui vous rendre compte de cette mission, et elle est heureuse de vous annoncer tout d'abord que non-seulement le résultat dont elle a à vous entretenir a dépassé toutes les espérances que l'exiguïté de vos ressources et la grandeur du mal vous permettraient de concevoir, mais que les faits qu'elle va vous signaler seraient de nature à ouvrir à la production et à la consommation du combustible ligneux une nouvelle phase de prospérité.
Le premier soin de votre Commission devait être de donner la plus grande publicité possible au programme des prix à distribuer. Gênée sous ce rapport par le défaut de moyens mis à sa disposition, et paralysée par l'absence de la plupart de ses membres, elle n'obtenait que des résultats insuffisants, lorsque l'un de vos collègues du Loiret, dont la
zèle infatigable a puissamment contribué à propager la Société et à soutenir ses intérêts, l'honorable M. de Grandry, d'Orléans, nous informa qu'on fabricant d'épingles de cette ville s'occupait des moyens de substituer le bois à la houille pour le chauffage de la machine à vapeur de son usine, d'une force de dix à douze chevaux. Il ajoutait que des essais déjà faits il résultait que, grâce au nouvel appareil de foyer de MM. Ratisseau et Sion, la machine fonctionnait au bois à bien meilleur marché qu'à la houille. Ce fait, quelque invraisemblable qu'il parût, appela l'attention de la Commission, qui crut de son devoir de l'étudier sérieusement.
Elle se mit en rapport avec les inventeurs du nouvel appareil, les encouragea à continuer leurs essais, et prit avec eux l'engagement de suivre ces essais avec un persévérant intérêt, et d'aller en constater officiellement les résultats aussitôt que les renseignements qu'elle aurait réunis l'assureraient que l'expérience pourrait aboutir à des conclusions sérieuses.
MM. Ratisseau et Sion s'appliquèrent donc à introduire dans l'établissement de leur nouvel appareil les améliorations dont l'expérience journalière leur faisait sentir l'avantage, et préparèrent leur approvisionnement en bois pour substituer d'une manière permanente le combustible végétal au combustible minéral. Ils tenaient compte rigoureusement de la quantité et du prix du bois consommé, afin de faciliter sur leurs livres la comparaison avec la dépense occasionnée par l'emploi de la houille.
Quelques-uns des membres de la Commission, et entre autres MM. le marquis delà Baume, le vicomte d'Aboville, le comte de Brosses, avaient visité isolément et successivement l'usine, et tous s'accordaient â confirmer par leurs témoignages l'exactitude des renseignements communiqués par MM. Ratisseau et Sion, et l'importance que semblait avoir ce fait pour les intérêts forestiers.
A la prière d'un des membres de la Commission, M. le comte de Brosses, M. Delaitre, ingénieur ordinaire du département, consentit à procéder à un examen sérieux et approfondi des nouveaux procédés et de leur application pratique.
Il résultait du rapport qu'il voulut bien nous adresser à ce sujet que l'appareil fonctionnait d'une manière satisfaisante, que la dépense en bois était inférieure à celle de la houille, et que, de plus, la quantité de braise conservée après que la combustion du bois avait donné son effet utile pouvait être vendue à un prix qui, ajouté à la première économie, réduirait en dernière analyse la dépense de chauffage de plus de 40 pour 100.
Tout d'abord se présentait une question que la Commission dut chercher préalablement à résoudre : c'était de savoir si dans les autres localités, et notamment à Paris, la braise serait assurée de trouver un débouché, et si la consommation suivrait la progression de la production.
Une enquête fut entreprise et poursuivie par un de vos membres les plus actifs et les plus zélés, M. Delbet. Elle établit, sur des renseignements nombreux, que la production de la braise à Paris était très-loin de suffire aux besoins de la consommation, et qu'on pourrait en mettre sur le marché une quantité beaucoup plus considérable sans crainte de n'en pas trouver le placement. Comme nous«joignons le travail de M. Delbet à ce rapport, nous nous dispensons d'entrer dans les détails et les chiffres sur lesquels cette assertion est basée.
Après ces informations préalables, la Commission se crut en mesure de procéder aux expériences officielles sur lesquelles elle avait à baser son jugement.
Rendez-vous fut pris avec MM. Sion et Ratisseau, pour faire les expériences qui ont eu lieu le 5 mai, sous la présidence de M. le comte de Saint-Léger, assisté de quatre membres de la Commission, MM. d'Aboville, Delbet, Tripier et Tréfouël, et en présence de quatorze membres de la Société, appartenant au Loiret, que l'on avait prévenus du jour de ces expériences en les engageant à y assister : c'étaient MM. G. Baguenault, Bobée, membre du Conseil général, le marquis de Courcy, Dupré de Saint-Maur, membre du Conseil général, Ed. de Grandry, Jarry, maire d'Orléans, Ed. de Laage de Meux, du Houlley, Louët de Terrouenne, de Mainville, le baron Ach. de Morogues, membre du Conseil général, de Rancourt de Mimeraud, de Tracy, de Tristan. MM. de Bagneau et de la Touanne, propriétaires, avaient désiré assister à ces expériences, ainsi que M. de Wawrechin, inspecteur des forêts à la résidence d'Orléans.
En outre, M. Machart, ingénieur en chef des ponts et chaussées, et M. de Bussy, ingénieur des constructions navales, avaient bien voulu prêter leur concours à la Commission, se charger de suivre de point en point ces opérations et d'en constater les résultats dans un rapport.
Ce rapport, auquel la réputation de ses auteurs et leur autorité spéciale en pareille matière donne un poids si considérable, est trop important pour-n'être pas mis en entier sous vos yeux, ainsi que les différentes pièces qui lui servent d'annexes. Il vous en sera donc donné lecture, et vous en déciderez sans doute l'impression.
Il nous suffira ici de vous en tracer un rapide résumé, en vous exposant comment la Commission a procédé à ses expériences et en a établi les résultats. Mais avant tout, il convient de vous donner une idée sommaire de l'appareil et de la manière dont il fonctionne.
Obtenir de la combustion du bois sa plus grande somme d'effet utile, et, quand cet effet est obtenu, quand le bois cesse de donner de la flamme et commence à se réduire en braise, au lieu de laisser cette braise se consommer presque inutilement dans le foyer, l'étouffer immédiatement,
la recueillir et en tirer parti, soit en l'employant à divers usages, soit en la portant sur les marchés où elle est très-recherchée et se vend toujours bien, par conséquent, diminuer la dépense occasionnée par la combustion du bois au moyen du produit de la vente et de l'emploi de la braise, telle est en somme la pensée réalisée par l'appareil de MM. Ratisseau et Sion; et le but a été atteint, grâce à la manière dont cet appareil fonctionne.
Le foyer de la machine ne diffère des foyers ordinaires que par quelques légères modifications motivées par la nature du combustible. L'appareil proprement dit se compose uniquement de deux grilles mobiles et de deux étouffoirs à deux portes; chaque porte étant placée sous chaque grille et lui appartenant.
L'appareil se manœuvre ainsi : Le chauffeur charge la grille n° 1 de la quantité de bois nécessaire, suivant la force de la machine, et attend, pour charger de la même quantité de bois la grille n° 2, que le bois de la grille n° 1 soit brûlé à moitié, de manière que la flamme qui diminue d'un côté soit remplacée par une autre, afin d'entretenir toujours le même degré de chaleur sous la chaudière. Aussitôt que le bois de la grille n° 1 est arrivé à l'état de braise, le chauffeur bascule sa grille à l'aide d'une manivelle placée sur le devant du fourneau, et, par ce même mouvement, la porte de l'étouffoir s'ouvre pour recevoir la braise. Puis, lorsque le chauffeur remet la grille dans son état normal, la porte de l'étouffoir se ferme et éteint la braise. C'est alors que le chauffeur recharge de nouveau sa grille et continue alternativement la même manœuvre sur l'une et l'autre grille.
Le travail de votre Commission et les expériences dirigées sous ses yeux par les deux habiles ingénieurs qui lui prêtaient leur concours ont eu pour objet : 1° De constater, par l'examen des livres de MM. Sion et Ratisseau, la quantité de houille consommée dans leur appareil lorsqu'il marchait à la houille, ainsi que la quantité de bois consommée aujourd'hui, et par les prix comparés des deux combustibles de faire ressortir les conséquences économiques de l'emploi de chacun d'eux ; 2° D'étudier la marche de l'appareil en notant avec soin le volume d'eau évaporée et la quantité de braise fournie par une quantité déterminée de bois ; 5° De faire ces expériences sur les essences de bois les plus généralement en usage, afin de déterminer celles dont l'emploi pouvait être le plus avantageux, soit par un plus grand volume d'eau évaporée, soit par Une plus grande quantité de braise produite.
La Commission a expérimenté successivement cinq essences, savoir : le pin de Sologne (ou pin maritime), le chêne, le charme, le bouleau et le
tremble. Toutefois, comme les résultats présentés par ce dernier bois semblaient trop favorables et donnaient lieu à quelque doute, on a jugé à propos de le soumettre à de nouvelles vérifications avant de lui assigner son rang dans l'échelle ; c'est pour cette raison qu'il ne figure pas dans le rapport de M. Machart. Il en est de même du hêtre, qui n'a été expérimenté que postérieurement, la Commission n'ayant pas trouvé à Orléans, au moment où elle était réunie, une quantité suffisante de ce bois pour procéder à un essai de quelque valeur.
Mais cette lacune a été remplie depuis, grâce au zèle et au concours de M. le vicomte d'Aboville, et de MM. Machart et de Bussy; qui ont bien voulu faire venir le bois nécessaire et entourer cette dernière expérience de toutes les garanties qui peuvent lui concilier la confiance.
En résumé, les travaux divers de l'enquête poursuivie par la Commission et par les collaborateurs qui ont bien voulu lui prêter leur concours se formulent dans les conclusions suivantes : 1° Quand la machine à vapeur de MM. Ratisseau et Sion, marchant à la force de dix à douze chevaux, était chauffée avec la houille, il fallait, pour une journée de travail de douze heures, six hectolitres de houille de Blanzy, valant, à Orléans, 2 fr. 50 c. l'hectolitre, et la dépense s'élevait ainsi à 15 francs par jour.
Avec l'appareil actuel, qui a pour objet de substituer le bois à la houille, il faut pour le même intervalle de temps et pour obtenir la même force cinquante à cinquante-cinq cotrets, valant, à Orléans, de 26 à 28 francs le cent équivalant à trois stères, et occasionnant ainsi une dépense de 14 fr.
30 c., inférieure à celle de la houille.
Mais les cotrets produisant au minimum quatre à cinq hectolitres de braise se vendant, à Orléans, 1 fr. 50 c. l'hectolitre, soitpar jour environ 7 fr., la dépense de chauffage se trouve ainsi réduite à 7 fr. et 7 fr. 50 c., et présente ainsi une économie de près de 50 pour 100 sur le chauffage à la houille.
Il faut ajouter à cette première économie déjà si considérable.
1° La valeur de la cendre, qui produit à MM. Ratisseau et Sion environ 8 à 9 francs par mois ; 2° La valeur du frasis ou poussier de braise, dont il n'a pas été tenu compte et dont on trouve facilement le débit; 3° L'économie résultant de la diminution des frais d'entretien et de réparation des foyers, grilles et chaudières, beaucoup moins éprouvés par le feu de bois que par celui de la houille ; 40 L'économie très-importante, bien que difficilement appréciable, qui résulte de ce fait, savoir : 1° Que quand il faut près d'une heure pour mettre l'eau en vapeur avec l'emploi de la houille, il ne faut qu'un peu plus de dix minutes avec le
chauffage au bois, et, de plus, qu'avec le bois ou peut éteindre instantanément le feu et ne perdre aucun combustible, aussitôt qu'on n'a plus besoin de chaleur ; 2° Que le feu au bois est beaucoup plus facile à conduire que le feu à la houille, et qu'on n'a plus à craindre avec ce système les coups de feu pour les chaudières, si dommageables par la dépense qu'ils occasionnent et la perturbation qu'ils causent dans le travail.
A tous ces avantages, il faut enfin ajouter celui de débarrasser les localités où les usines sont établies de l'épaisse et noire fumée produite par la combustion de la houille, et dont les inconvénients se font tellement sentir dans les grandes cités que la police a dû rechercher les moyens de les en préserver.
Quant à la valeur relative des diverses essences expérimentées avec l'appareil de M. Ratisseau, le tableau suivant, extrait du rapport de M. Machart et des annexes de ce rapport, fournit tous les éléments pour l'établir.
RÉSULTATS POUR 10 KILOG. NOMBRE D'UNITÉS DE BOIS. de chaleur DÉSIGNATION DE B°IS' représentées POUVOIR Quantité de braise dans un kilog. lie bols cades Quantité Qv uantité de braise OBSERVATIONS.
des d'eau obtenue par par lorifique OBSERVATIONS.
ESSENCES. évapo- e n rèvilra- la braise total.
en qn 'io,l recueillie.
ree. volume, poids. de 1 eau. recueillie. kil. hect. kil.
I'in de Sologne 2,77 1,67 16,70 1759 1000 2759 Chêne en COlrets. 2,i3 0,73 14,60 153 876 2229 Charme. 2,62 0,69 10,30 1664 618 2282 Bouleau sec et sain. 2,41 0,82 12,30 1530 733 2268 Tremble. 3,39 0.78 7,80 2153 468 2621 Hêtre. 2,90 0,79 12,00 1842 720 2562
D'après les résultats consignés ci-dessus, les six essences expérimentées peuvent donc être classées dans l'ordre suivant, quant aux avantages de leur consommation avec l'appareil de MM. Ratisseau et Sion : Pin, tremble, hêtre, bouleau, chêne, charme.
On voit du reste que l'écart entre ces diverses essences ne descend jamais à un cinquième, et au moyen des chiffres de ce tableau, il sera toujours facile, quand on connaît le prix du bois et de la houille, d'établir le rapport de la dépense entre ces deux combustibles pour le chauffage d'une machine à vapeur.
Votre Commission a pensé qu'il y aurait intérêt à faire cette application aux conditions de chauffage à Paris, et elle a cherché à les déterminer dans les calculs suivants :
La houille coûte à Paris 55 francs les 1,000 kilos; six hectolitres
pèsent 480 kilos, et valent 26 fr. 40 c.
Le bois de tremble et la traverse du Morvan coûtent au plus à Paris 15 francs le stère.
Trois stères représentant six hectolitres de houille auront coûté. , - 59 fr.
Mais ils auront produit six cents litres de braise ou trois sacs de voie estimés au prix actuel 5fr. le sac en gros, soit 15 Reste en dépense pour le bois. 24 fr. ci. 24 fr.
Avantage du bois sur la houille. 2 fr. 40 c.
Maintenant, pour se faire une idée des conséquences que pourrait avoir relativement à la consommation du bois à Paris l'adoption du système de MM. Sion et Ratisseau, nous avons recherché dans la statistique des mines de 1852 quel était le chiffre de la consommation de la houille dans les usines et manufactures du département de la Seine, et nous avons trouvé qu'il était de 5,569,500 hect., dont le remplacement par le bois exigerait 2,784,750 stères. En supposant que l'adoption du bois n'eût lieu que pour un dixième de ces usines, il en résulterait encore un accroissement de consommation de près de 300,000 stères.
Nous terminerons ces recherches par une considération que nous trouvons dans une des dernières communications de M. Machart, et qui nous semble résumer les conséquences à tirer des expériences faites.
L'emploi du bois au chauffage des machines peut avoir lieu dans trois circonstances différentes : 1° Dans une localité où l'on trouvera facilement à vendre la braise, qui, à poids égal, vaut six à sept fois le prix du bois. Dans ce cas, l'on , doit viser à faire le plus de braise possible. Le pin donnera la force pour rien, et les bois les plus durs (qui sont les moins avantageux) seront encore plus économiques que la houille ; 20 Dans une localité où l'on ne pourrait pas vendre la braise, mais avec des conditions telles que l'on pût la recueillir pour la brûler à part dans un appareil propre à utiliser le mieux possible son pouvoir calorifique. Dans ce cas, le pin et le tremble vaporiseraient presque quatre fois leur poids d'eau : le hêtre 3 5/4, le chêne, le bouleau et le charme, environ 3 1/3. Pour faire la comparaison avec la houille, on peut considérer celle-ci comme évaporant au plus sept fois et demie son poids, dans de très-bons appareils ; 3° Enfin, si l'on ne pouvait ni vendre la braise, ni la recueillir à part, mais qu'on fût obligé de la brûler avec le bois lui-même dans un appareil
qui, comme celui de MM. Sion et Ratisseau, utiliserait à peine moitié de ce qu'on pourrait obtenir dans de bonnes conditions. Dans ce cas (le plus défavorable possible) 100 kilogrammes de pin vaporiseraient 540 d'eau ; les bois durs, environ les 516. Il faudrait donc que leur prix fût un peu inférieur à moitié du prix de la houille, pour qu'ils pussent soutenir la concurrence. Mais il est évident que cette hypothèse, qui suppose la braise sans valeur, suppose aussi un très-bas prix du bois.
A la suite de l'enquête dont il vient de vous être rendu compte, et par les considérations qui précédent, la Commission a été unanimement d'avis : Que l'appareil dont MM. Ratisseau et Sion sont les inventeurs et qui fonctionne dans leur usine tend à favoriser la substitution du bois à la houille pour le chauffage des machines à vapeur; Que les avantages déjà très-considérables résultant de l'emploi du bois dans les conditions actuelles, pouvant le devenir bien plus encore par suite des améliorations qu'une plus longue expérience apportera aux premiers débuts de cette invention, étaient de nature à modifier la tendance actuelle à employer exclusivement la houille, et à servir les intérêts de la propriété forestière en ouvrant aux bois des marchés qui lui restent fermés jusqu'à présent.
En conséquence, elle vous propose d'accorder à MM. Sion et Ratisseau le prix de 500 fr., que vous avez fondé pour encourager les appareils de combustion tendant à favoriser l'emploi du bois.
Elle vous propose encore de voter des remerciements à MM. les ingénieurs Machart, de Bussy et Delaitre, pour le concours si empressé et si utile qu'ils ont bien voulu prêter à la Commission, et de charger cette Commission, ou toute autre que la Société nommera, des démarches et des travaux nécessaires pour favoriser le développement de cette invention, et chercher par tous les moyens possibles à en étendre l'application.
Le rapporteur : L.-C. MICHEL.
Ces conclusions ont été adoptées.
ENQUÊTE SUR LA BRAISE DES BOULANGERS A PARIS.
La braise de boulanger se vend à Paris en détail 10 cent. la mesure de trois litres, soit l'hectolitre 3 fr. 30 cent.
Les boulangers des quartiers riches n'ont jamais assez de braise, et, pour satisfaire aux demandes pressantes de leurs pratiques, ils achètent aux boulangers des quartiers moins aisés.
Dans ce cas la braise est payée 4 à 5 fr. le sac de deux hectolitres.
Au prix de 10 cent. la mesure de trois litres, la braise est le plus cher de tous les combustibles, car elle dure fort peu; et on comprend que les quartiers pauvres s'en abstiennent.
Mais, par compensation à son peu de durée et à la dépense qu'elle occasionne, la braise a l'avantage de s'allumer rapidement, de ne pas dégager d'acide carbonique, et à ces deux titres elle est recherchée dans les quartiers riches par les cuisinières ou femmes de chambre, qui, n'ayant pas à s'inquiéter du prix de revient, trouvent commode d'avoir le matin un fourneau immédiatement prêt dont la durée suffit à faire chauffer la tasse de lait demandée de bonne heure, ou l'eau nécessaire à la toilette; fourneau qu'on peut conserver sans danger dans sa chambre, qu'une allumette suffit à préparer et qu'on n'a pas même le souci d'éteindre, puisqu'il ne dure que les quelques instants pendant lesquels on en a besoin.
Aussi, dans certains quartiers, la demande dépasse-t-elle la production à ce point que les boulangers ne veulent donner de la braise qu'une certaine quantité à chaque acheteur, et qu'ils en refusent positivement à tous autres consommateurs que ceux qu'ils fournissent de pain.
La braise est aussi très-recherchée par tous les marchands de charbon en détail, qui la mêlent, dans une certaine proportion, avec le charbon de choix vendu 9 fr. le sac de deux cents litres en gros et 12 fr. en détail.
Les boulangers des quartiers populeux, qui ne trouvent pas dans leur clientèle l'écoulement de toute leur braise, la vendent aux charbonniers 4 à 5 fr. le sac, suivant l'encombrement ou la demande.
L'opération est bonne, comme on le voit, pour les charbonniers, puisqu'ils y gagnent 100 pour 100.
Des spéculateurs proposent en ce moment à la boulangerie de prendre tous les jours toute la braise fabriquée, au prix de 5 fr. le sac de deux cents litres.
La spéculation consisterait à établir des dépôts de braise qui, réunis dans la même main et n'ayant pas de concurrence à craindre, doubleraient leurs prix. La matière étant devenue d'une absolue nécessité pour certains usages se vendrait encore dans ces conditions ; cependant, on ne peut se dissimuler qu'une spéculation de cette nature aurait pour résultat déplorable de diminuer la consommation par l'élévation des prix.
L'intérêt de la propriété forestière exigerait au contraire une consommation plus grande, même à prix réduits. L'application du procédé Sion et Ratisseau aux petites usines de Paris conduirait à ce double résultat, et cela seul suffirait à motiver les encouragements à donner pour la propagation des grilles mobiles.
Les bois qui conviennent le mieux pour le chauffage des machines à vapeur, comme pour les fours des boulangers, sont les bois les plus tendres et les moins chers, le sapin, le tremble, le peuplier. Ces essences donnent aussi un plus grand volume de braise.
.11 résulte de ces deux conditions que les boulangers qui savent bien choisir leur bois chauffent dans certains quartiers leur four pour rien, et font cuire pour rien le pain dont la taxe comprend un prix assez élevé pour la dépense de combustible.
Si au lieu de vendre la braise en détail 6 fr. 60 cent. le sac de deux hectolitres, on la vendait seulement 3 fr., elle serait, comparativement à la chaleur donnée, d'un prix abordable pour tous les usages domestiques, et on en pourrait vendre dix fois plus.
Or, à ce prix, la braise produirait encore une indemnité suffisante pour les boulangers, et les machines à vapeur en obtiendraient sur le prix du bois une réduction qui permettrait de soutenir la concurrence avec le chauffage à la houille.
Pour donner une idée de la quantité de braise qu'on pourrait vendre à Paris, si le prix en était réduit de moitié, il suffira de dire qu'en prenant comme base les quantités de charbon déclarées à l'octroi en 1855 , la consommation annuelle de Paris et de la banlieue serait de cinq millions d'hectolitres.
Pour produire cette quantité de charbons, on brûle tous les ans en forêt environ dix-sept cent mille stères de bois.
La boulangerie consomme à Paris environ deux cent mille stères de bois blancs.
Il suffirait donc de doubler la consommation de la braise pour utiliser deux cent mille stères de traverses du Morvan au chauffage des machines à vapeur dans Paris.
Ce résultat a son importance si l'on considère que la consommation de bois dur ne s'élève guère au delà de quatre cent mille stères, et qu'on l'augmenterait ainsi de 50 pour 100.
Un roulement de plusieurs mois dans l'usine de MM. Sion et Ratisseau a établi d'une manière incontestable que cinquante-deux fagots remplaçaient avantageusement six hectolitres de houille pour produire la vapeur nécessaire au mouvement des machines.
Dix-sept fagots réunis ont donné en volume un stère mal empilé, c'està-dire présentant plus de vides que n'en présente d'ordinaire une pile de bois mise en état, sur les ports d'approvisionnement de Paris.
Le poids constaté de ces dix-sept fagots a été de 262 kilos, tandis que le poids ordinaire d'un stère de bois blanc est de 300 kilos au moins.
De ces deux conditions réunies, poids et volume, il résulte qu'il faudrait
un peu moins de trois stères pour remplacer six hectolitres de houille dans le chauffage d'une machine à vapeur.
Il a été constaté, en outre, qu'un stère de bois produisait une moyenne de deux cent quatre litres de braise.
En négligeant toutes les fractions au détriment du bois sur la houille, nous admettrons en chiffres ronds trois stères de bois remplaçant six hectolitres de houille et produisant également en chiffres ronds six cents litres de braise.
REVUE COMMERCIALE.
Après l'activité fébrile apportée par chacun à s'approvisionner, après l'ascension soutenue des cours sur tous les bois, depuis la fin de 1855, nous avons remarqué pendant quelques jours une espèce de temps d'arrêt.
Il y a eu hésitation chez les acheteurs.
Ce mouvement non prévu était-il sérieux et durable ? était-il causé par les besoins satisfaits, par des offres dépassant la demande ? La réaction allait-elle se faire sentir?
On s'adressait ces questions le mois dernier, et en attendant réponse, on s'abstenait d'acheter et de vendre. L'incertitude n'a pas été longue; la consommation marchant toujours, le bilan des ressources étant connu, les vendeurs étant peu nombreux et la marchandise plutôt rare qu'abondante, les affaires ont repris leur cours et les choses marchent régulièrement, sans secousse.
Le disponible suffit aux besoins : il y a peu, mais on a la certitude de ne pas manquer. La baisse est impossible. Un retard dans les arrivages peut déterminer un instant de hausse qui se maintiendra si elle est modérée, mais il n'y a pas à craindre un soubresaut qui compromettrait beaucoup de positions, sans avoir compensation obligée d'autre part.
Les bois blancs sont toujours l'article rare et recherché parmi tous les autres. Les usines de province, habituées depuis quelques années à trouver toujours sous la main plus que leur consommation, à des prix excessivement bas, ont refusé de prendre pendant l'hiver les bois tenus un peu plus haut que de coutume. Le commerce de Paris, qui sait prévoir, s'est emparé de la matière; et maintenant ces usines glanent à tout prix, si elles veulent s'assurer la possibilité de marcher pendant l'hiver prochain.
Là est la cause principale du cours élevé des bois blancs. Le prix de 90 fr. est dépassé, sinon sur les ports, qui n'ont guère à vendre, au moins
en forêt, où le stère se paye 7 à 8 fr., même lorsqu'il coûterait 2 à 3 fr.
pour être rendu sur la rivière.
Une circonstance qu'on était loin de prévoir donnera certainement bientôt une nouvelle impulsion aux prix des bois à brûler. On vient de reconnaître et de constater officiellement que le bois peut coûter moins que la houille dans le chauffage des machines à vapeur; il y a dans ce fait une révolution en faveur de la propriété forestière.
Les charbons suivent les bois blancs dans l'ordre des prix avantageux.
Ici la cause est connue, elle se reproduit chaque année à la même époque, par l'interruption momentanée de la carbonisation en forêt.
Les bois restés de l'exercice 1855 sont épuisés, les derniers se brûlaient dans la première quinzaine d'avril; et les bois nouveaux, trop verts encore pour être carbonisés avantageusement, vont attendre les premiers jours de juin pour venir sur le marché. Les magasins se vident et tiennent leurs prix élevés en conséquence du peu de marchandise qui leur reste.
Puis on s'aperçoit de ce fait que nous avons signalé depuis deux ans déjà, que la concurrence des usines métallurgiques empiète sur l'approvisionnement ordinaire de Paris. Les bateaux de charbon sont arrivés plus rares que par le passé ; il s'en trouve à Paris moitié moins que d'ordinaire à cette époque.
Le résultat est une augmentation de 50 cent. à 1 fr. sur la voie de 200 litres à Paris, soit 2 fr. 50 cent. à 5 fr. par mètre cube en forêt, ou en moyenne 1 fr. 50 cent. par stère de bois. Disons bien vite que cette augmentation sérieuse au profit du disponible n'a pas chance de se maintenir, au moins à ce taux, sur les nouveaux bois, et qu'elle ne peut servir à fixer les cours des ventes prochaines.
Pour les charpentes, pour les sciages, il y a eu le temps d'arrêt, le moment d'hésitation dont nous avons parlé en commençant cet article, mais sans pouvoir déterminer la moindre flexion dans les cours, qui se maintiennent et qu'on parle d'élever en province.
Quelques lots arrivant sur les ports sont tenus à 60 fr. Les acheteurs résistent, ils ne voudraient pas dépasser le cours de 55 fr., accepté depuis le commencement de la saison. Mais on ne trouve plus guère de vendeurs à ce prix; en désespoir de cause, des offres de 57 fr. 50 cent. ont été faites et refusées pour quelques beaux lots dont on demande 60 fr. sur les ports de l'Aube, et il est probable que ce dernier prix sera accepté.
Les bois de 1855 sont depuis longtemps épuisés. On travaille sur les bois nouveaux. Depuis un mois déjà, les arrivages ne vont pas assez vite au gré des consommateurs, el l'empressement justifié d'ailleurs qu'on met à s'assurer les bois au fur et à mesure des arrivages ne peut que faire élever les prétentions des vendeurs.
Des offres ont été faites de 74 fr. le stère de gros bois sur le port. Le prix de 85 fr. est accepté pour ces mêmes bois rendus aux lieux et pris dans l'eau.
Les sapins maintiennent leur cours élevé. Les sciages sous toutes formes et de toute essence continuent d'être recherchés.
DELBET.
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FERS ET DES FONTES.
AVRIL 1856.
DÉSIGNATION DROIT QUANTITÉS ENTRÉES DIFFÉRENCE des NATURE D'OCTROI RN AVRlr sur le mois correspond.
D'UNITÙS. décime Dimin-ation MATIÈRES. compris. en et MATIÈRES. compris. 1856. 1855. Ilt5. 18.6 Bois à brûler, dur slère. 3 00,0 vi) 17,059 24,161 » 7,102 — blanc. - 2 22,0 (2) 13,344 14,187 » 843 Cotrets de bois dur. - 1 80,0 2.117 2,864 » 747 Alenuise et fagots. - 1 08,0 2.756 3,198 » 442 Charbon de bois hectolitre. 0 60,0 288.972 311,298 » 22,326 Poussierde ch. debois - 0 30,0 21,107 17,366 3,741 » Charbon de terre 100 kilogr. 0 72,0 25,0ii,i49 34,714,420 » 9,703,271 Charpente et sciage bois dur. stère. 11 28,0 10,593 7,152 3,411 » Charpente, bois blanc. — 9 00,0 14,382 14,937 » 555 Lattes et treillages. les 100 bottes. 1128,0 19,018 17,959 1,059 » Bois de déch. en chêne mèlre carré. 0 21,6 8»9 541 348 » - en sapin. — 0 12,0 4,950 6,251 » 1,301 Fers, employés dans lesconstructions 100 kilog. 3 60,0 737,306 758,727 » 21,421 Fonte, employée dans les constructions.. — 2 40,0 629,813 204,570 425,243 »
(1) Ces 17,059 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 6,823,600 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 3,411,800 kil. de houille.
(2) Ces 13,344 stères de bois, multipliés par 300 kil., poids du stère de bois blanc, représentent 4,903,200 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 2,001,600 kil. de houille.
SOCIÉTÉ FORESTIÈRE.
Le 25 mai dernier, la Commission permanente de la Société forestière s'est réuuie sous la présidence de M. le comte de Lariboisière, l'un de ses vice-présidents.
Au nombre des travaux mis à l'ordre du jour de la Commission se trouvait l'examen de l'influence que pourrait avoir sur la propriété boisée et sur les intérêts forestiers la loi récemment présentée au Corps législatif sur le défrichement des bois des particuliers.
Dans l'opinion de la Société forestière, l'adoption des mesures légishtives et administratives qui doivent faire jouir la propriété forestière de la protection qui lui manque, et qui est accordée par la législation actuelle aux autres propriétés, ne doit pas être séparée de la loi sur le défrichement ; car si la liberté de défricher, dit la Société, offre des dangers que l'on ne saurait nier, c'est que les charges qni pèsent sur le sol boisé et le défaut de protection dont il souffre déterminent souvent les propriétaires de bois à chercher dans le défrichement et dans la culture arable une jouissance plus complète et un produit plus avantageux de la terre.
On peut donc être certain qu'en donnant satisfaction aux intérêts forestiers par l'adoption des mesures de protection que ces intérêts réclament, on aurait plus fait pour la conservation des bois que par l'interdiction de défricher.
La Commission a émis les vœux ci-après : Il 1° Que le principe admis en matière de défrichement soit la liberté, restreinte par l'intérêt public; « Que l'intérêt public soit assuré par la délimitation préalable des zones dans lesquelles le défrichement sera interdit; « Que dans ces zones l'interdiction soit générale, et que l'État ne puisse aliéner aucune partie de ses bois avec faculté de défricher ; Il 2" Que la loi à intervenir ne soit que temporaire, et pour un laps de temps qui permettrait d'en étudier les effets et d'en modifier plus tard les dispositions, si ces modifications étaient jugées nécessaires ; Il 3° Que l'adoption des mesures législatives qui doivent faire jouir la propriété forestière de la même protection et des mêmes avantages que ceux assurés aux forêts de l'État et aux propriétés de toute autre nature, devance ou accompagne les modifications que doit introduire la loi projetée dans tes dispositions actuelles du Code forestier. »
A cette même réunion, un membre a signalé une nouvelle anomalie dans la législation forestière à l'égard des particuliers. Le Code pénal qui, par son article 140, punit des travaux forcés à temps ceux qui ont contrefait ou falsifié les marteaux de l'Etat servant aux marques forestières, ne prononce aucune peine pour le même fait quand il a lieu à l'égard des marteaux des particuliers servant à leurs marques forestières. Le parquet du chef-lieu d'arrondissement a refusé de poursuivre d'office ce fait constaté par le procès-verbal du garde particulier de ce membre de la Société.
Un certain nombre d'arbres ont été abattus à la suite de ce faux martelage par le coupable; la peine que le plaignant a fait prononcer en poursuivant à sa requête comme partie civile a été celle de 2 fr. d'amende, par application des art. 192 et 193 du Code forestier.
(Communiqué. )
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
= itlutations dans le personnel forestier. — M. DUMONT, inspecteur des forêts à Autun (Saône-et-Loire), a été admis à faire valoir ses droits à la retraite.
'• M. CURTON, inspecteur des forêts à Nantua (Ain), a été nommé inspecteur à Autun (Saône-et-Loire), en remplacement de M. Dumont.
M. LYON, sous-inspecteur des forêts à Belfort (Haut-Rhin), a été nommé inspecteur à Nantua (Ain), en remplacement de M. Curton.
M. FROIDEVAUX, sous-inspecteur des forêts à Vesoul (Haute-Saône), a été nommé sous-inspecteur à Belfort (Haut-Rhin), en remplacement de M. Lyon.
M. FRAISSIGNES, garde général des forêts à Wasselonne (Bas-Rhin), a été nommé sous-inspecteur à Vesoul (Haute-Saône), en remplacement de M. Froidevaux.
M. BARTHE-SAINT-FARRE, garde général stagiaire, a été nommé garde général à Wasselonne (Bas-Rhin), en remplacement de M. Fraissignes.
M. ALIBERT, inspecteur des forêts à Vesoul (Haute-Saône, a été nommé inspecteur à Briey (Moselle), en remplacement de M. Durand de Villers.
M. DURAND DE VILLERS, inspecteur des forêts à Briey (Moselle), a été nommé inspecteur à Vesoul (Haute-Saône), en remplacement de M. Alibert.
= Adjudications. — Voici l'époque de l'adjudication des fournitures de bois à faire dans les grandes administrations qui approche. Déjà les ministères , l'assistance publique et les grands établissements préparent leurs cahiers des charges. Le directeur de l'hospice impérial des QuinzeVingts a pris l'avance. C'est le jeudi 26 juin 1856, à 2 heures de relevée, qu'il sera procédé par lui-même, assisté d'un membre de la Commission consultative, à l'adjudication d'une fourniture de 100 stères environ de bois neuf, destinée aux besoins de cet hospice.
Le cahier des charges, déposé au secrétariat de l'administration, rue de Charenton, 28, pour être communiqué, contient une innovation que nous ne pouvons laisser passer sous silence, tant elle intéresse la propriété forestière, à laquelle elle ouvre une source de prospérité nouvelle.
Les propriétaires de bois sont admis à se présenter à cette adjudication, et leur soumission sera acceptée. — Nous voudrions voir cette clause introduite dans tous les cahiers des charges; nous voudrions surtout voir les propriétaires de bois se présenter et soumissionner eux-mêmes les fournitures. C'est pourquoi nous nous empressons de porter ce fait à leur connaissance.
LES BOIS DE PINS DU DÉPARTEMENT DE LA LOZÈRE.
État'à'ctueÍ' de ois de pins du département de la Lozère.- Mode d'exploitation à leur : applJq\OOr: vantages qu'il présente sous le rapport de l'augmentation des produits ..mritære:,. de l'exercice du pâturage et de la satisfaction plus grande donnée aux intérêts prtvéf dans la question du défrichement.
-- t').{.i5 ".I on parcourt les bois de pins sylvestres qui occupent diverses mo agnes du département de la Lozère, on est frappé de l'état incomplet
de leurs peuplements et du peu de ressources qu'ils offrent à la consommation. Ces bois, traités depuis un temps immémorial par la méthode du jardinage et livrés au pâturage, présentent en général les conditions suivantes : Entièrement composés de pins sylvestres, les peuplements sont loin d'être réguliers. On rencontre des arbres vieux et dépérissants à côté de jeunes recrus bien vivants, d'arbres d'âge moyen (quarante-cinq ou soixante ans), le tout formant un mélange confus dans lequel dominent toutefois ces derniers. Çà et là se présentent des parties peuplées d'arbres de même âge ou à peu près, en massif serré, à côté de vides où ne poussent que des genévriers et autres morts-bois. Des parties claires où de distance en distance un vieil arbre rabougri ombrage quelques jeunes plants, qu'il force bientôt à périr, se rencontrent souvent aussi dans ces peuplements qui passent sans cesse et sans transition d'un état à l'autre.
La faible production de pareils bois est facile à comprendre. Aussi ne sera-t-on pas surpris quand nous dirons que, d'après les états d'assiette de l'administration forestière, on n'exploite annuellement dans des forêts communales de 100 et 150 hectares que de 60 à 80 ou 90 stères de chauffage.
Il nous a semblé qu'il y avait quelque intérêt à rechercher si, au moyen d'un mode d'exploitation différent de celui qui a été suivi, et qui a amené les bois de la Lozère à l'état de dépérissement dans lequel ils se trouvent actuellement, on ne pourrait pas arrêter les progrès du mal et augmenter dans l'avenir, d'une manière notable, la production en matière.
Mais s'il est utile de préparer des ressources plus grandes aux générations futures, il ne faut pas sacrifier à ce résultat les intérêts du présent.
Par conséquent, les produits des exploitations annuelles devront ne pas être diminués; le pâturage, indispensable pour les nombreux troupeaux qui font la seule richesse du pays, devra ne pas être restreint pendant
tout le temps que dureront les coupes destinées à amener l'augmentation des produits en matière.
Le mode d'exploitation que nous proposons, qui est la coupe à blanc estoc, suivie de culture pendant deux ou trois ans avant d'arriver au réensemencement naturel, repose sur un fait bien certain, bien reconnu dans le pays. Les bois de pins sylvestres que l'on défriche, que l'on met en culture pendant deux ou trois ans seulement, se repeuplent toujours d'une manière suffisamment complète, lors même que le sol défriché se trouve dépourvu de toutes réserves : le repeuplement est toujours très-complet, si le terraiu défriché est entouré de bois de pins, ou si l'on y a conservé quelques porte-graines. Nous avons vu grand nombre de massifs de différents âges, formés de cette manière et en parfait état de peuplement et de végétation.
Pour plus de simplicité dans l'exposition du mode d'exploitation à suivre, raisonnons sur une forêt déterminée, la forêt communale du MalzienForain, par exemple, qui présente les conditions ordinaires de végétation et de peuplement des bois de la Lozère.
Sa contenance est de 110 hectares 58 ares. On y exploite annuellement 70 stères de bois de chauffage. Pour pouvoir le plus tôt possible, dans l'avenir, exploiter les bois à l'âge qui offre le plus d'avantages, et qui est quatre-vingts ou quatre-vingt-dix ans, lorsqu'on veut retirer principalement du bois de chauffage, fixons de suite la révolution des coupes de transformation à quatre-vingt-dix ans. Sur la quatre-vingt-dixième partie de la contenance totale, ou 1 hectare 23 ares, nous ferons une coupe à blanc estoc; réservant seulement quelques arbres, les plus propres à donner de la semence. Nous compléterons la quantité de 70 stères à laquelle nous devons arriver pour satisfaire comme actuellement aux besoins des populations, au moyen d'arbres vieux et dépérissants pris sur le reste de la forêt, et nous mettrons en culture cette étendue de 1 hectare 23 ares.
La culture durera trois ans. La seconde, la troisième année, nous exploiterons et nous cultiverons de même à la suite une contenance de 1 hectare 23 ares. En continuant ainsi les coupes à blanc estoc sur la même contenance, et les exploitations jardinatoires sur le reste de la forêt, prenant en première ligne dans ces exploitations les réserves laissées sur les coupes déjà faites, dès qu'elles seront ensemencées, on aura, au bout de la révolution, une forêt dont les peuplements seront complets et d'âge gradué ou à peu près, depuis un an jusqu'à quatre-vingt-dix ans.
On pourra dès lors exploiter cette forêt devenue normale par la méthode des coupes d'ensemencement, claires et définitives, ou continuer ce système de coupes à blanc estoc suivies de culture de céréales.
Or, la quantité de bois que, à cette époque, l'on retirera annuellement
de cette forêt, sera bien supérieure à 70 stères, production qui est loin d'atteindre celle que donne l'exploitation de 1 hectare 25 ares de bois de pins, âgé de quatre-vingt-dix ans, dans une futaie normale et régulière.
Voyons si les conditions que nous avions reconnu devoir être remplies le sont en effet, c'est-à-dire si l'on pourra, dans tout le cours de la transformation, exploiter annuellement, comme nous l'avons dit, 70 stères de chauffage, et si le pâturage ne sera pas restreint.
Nous disons : 1° que non-seulement la production en matière ne sera pas diminuée, mais que, au contraire, elle sera augmentée d'une manière sensible pendant la période de transformation ; 20 que le nombre de bêtes à laine et de bêtes à cornes que l'on pourra sans danger laisser introduire dans la forêt sera plus considérable qu'il ne l'est maintenant.
En effet, relativement à la première affirmation , il est clair qu'en supposant, comme il y a lieu de le faire, la possibilité de 70 stères convenablement déterminée, elle représente l'accroissement du matériel existant, pendant une année. Mais, d'après le système que nous proposons, on aura à exploiter, pendant une période de quatre-vingt-dix ans, tout ce matériel dont l'accroissement annuel seul est de 70 stères, plus tout l'accroissement qu'il prendra pendant quatre-vingt-dix ans, accroissement qui diminuera, il est vrai, chaque année, à mesure que le nombre des coupes exploitées à blanc estoc augmentera, mais qui n'en a pas moins une grande importance.
On aura de plus, pendant cette même période, les produits des éclaircies faites de vingt-cinq en vingt-cinq ans; éclaircies qui porteront sur une surface d'environ 80 hectares, et qui, dans la seconde moitié surtout de la révolution, fourniront une quantité de bois assez forte. Il est évident d'après cela que l'on pourra sans crainte, dès les premières années, augmenter d'une manière sensible le chiffre des délivrances actuelles.
En second lieu, l'avantage relativement au pâturage n'est pas moins certain. Dans l'état de confusion que présentent les bois de la Lozère, où les peuplements qu'il faudrait mettre en défens, c'est-à-dire les parties claires et les jeunes recrus, sont disséminés dans l'intérieur de massifs défensables, il est impossible de préserver les parcelles qui devraient l'être, qui n'ont souvent que quelques ares, sans interdire le pâturage d'une manière absolue. Cette interdiction serait la ruine des populations voisines des forêts qui n'ont guère d'autres ressources que leurs troupeaux, qu'il leur serait dès lors impossible de nourrir. Aussi, pour concilier l'intérêt du pâturage avec la conservation des bois, autant que cela est possible, on autorise le pâturage dans toute la forêt; seulement on restreint le nombre de têtes de bétail à y introduire. Ordinairement ce nombre est fixé à sept bêtes à laine et trois bêtes à cornes par hectare. Les coupes à blanc estoc suivies de culture retrancheraient forcément de l'exercice du pâ-
turage, pendant un certain temps, les massifs créés par le réensemencement naturel. En admettant qu'on ne laisse aller les troupeaux dans les coupes que lorsque les peuplements auraient de vingt à vingt-cinq ans, ce serait une surface de 30 hectares environ qui serait constamment mise en défens; mais il faut observer que l'on n'a plus besoin des jeunes recrus pour amener la régénération de la forêt, qu'il n'y a plus rien à ménager sur les 80 hectares qui seraient abandonnés au pâturage. Par conséquent, l'on pourra admettre par hectare dans cette partie du bois un nombre de bêtes à laine et de bêtes à cornes bien plus considérable que celui qui est actuellement fixé. Les troupeaux qu'on laissera introduire dans cette étendue restreinte pourront donc être plus nombreux qu'ils ne le sont aujourd'hui dans la contenance totale : seulement la forêt sera divisée, au bout de vingt-cinq ans, en deux cantons défensables séparés l'un de l'autre par vingt-cinq coupes.
Un autre avantage doit, suivant nous, résulter de cette méthode d'exploitation. C'est la satisfaction plus grande qu'elle permettra de donner aux intérêts privés dans la question des défrichements.
Le peu de ressources qu'offrent à la consommation locale des bois aussi incomplets et aussi irréguliers que ceux qui nous occupent peut faire craindre que, dans un avenir plus ou moins rapproché, la production en matière ne soit insuffisante. Dès lors, dans le but de conserver aux générations futures les bois qni leur seront nécessaires, l'administration peut s'engager dans une voie de prohibition complète en matière de défrichements. Cette mesure, conseillée par l'intérêt général, offre de graves inconvénients pour les particuliers auxquels elle impose des sacrifices, en les obligeant à conserver en nature de bois des terrains en plaine ou en pente douce et dans des conditions telles que, mis en culture, ils rapporteraient beaucoup plus. Mais dès qu'au moyen d'un autre mode d'exploitation on obtiendrait d'un terrain boisé, non-seulement dans l'avenir, mais encore dans le présent, des produits en matière beaucoup plus considérables que ceux qu'il fournit actuellement, on pourrait, sans crainte et sans compromettre en aucune façon les intérêts généraux, laisser opérer des défrichements sur une plus large échelle, toutes les fois que les circonstances particulières de sol et d'inclinaison n'en feraient pas un danger. Plus la transformation des massifs incomplets en futaies régulières s'étendra, plus la satisfaction donnée aux intérêts privés pourra être grande.
Nous devons examiner maintenant la possibilité de l'application de la méthode que nous avons exposée, au point de vue de la culture qu'elle nécessite; c'est-à-dire voir si les communes dont les bois sont l'objet principal de cette étude pourront faire chaque année cultiver les coupes exploitées à blanc estoc.
Il sera facile d'arriver à ce résultat. On sait, en effet, que les produits donnés par la culture d'une forêt nouvellement défrichée sont toujours très-beaux les premières années, à cause de l'humus qui s'est accumulé pendant que le terrain était en nature de bois; d'ailleurs, dans la localité, la main-d'œuvre est h bon marché. Dans ces circonstances, le rendement du sol, cultivé en céréales pendant trois ans, couvrira nécessairement et au delà les frais de défrichement. Notre opinion à cet égard est corroborée par ce fait, que beaucoup de propriétaires adressent à l'administration des demandes en défrichement, en s'obligeant à ne cultiver le sol que pendant trois ans, et que souvent ces demandes concernent un terrain considéré comme bois, mais qui en réalité ne présente que quelques mauvais pins et des genévriers, dont le produit ne peut figurer que pour une fraction excessivement minime dans la compensation des frais du défrichement. Il faut bien que le bénéfice résulte des produits obtenus par la culture pendant trois ans. Les communes trouveraient donc des concessionnaires qui entreprendraient ce défrichement et cette culture, moyennant une faible redevance, et cela d'autant plus facilement que ces travaux étant pour elles un bénéfice net et obtenu sans aucun déboursé, elles pourraient se montrer peu exigeantes dans la fixation de la redevance.
Il nous reste, pour terminer ces considérations sur les bois de pins de la Lozère, à faire observer que si, en théorie, ce qui a été dit pour la
forêt communale du Malzien peut s'étendre aux autres forêts, tant communales que particulières, qui sont toutes à peu de chose près dans les mêmes conditions, la faible étendue de quelques-uns des massifs s'oppose, dans la pratique, à l'application de ce système. C'est aux forestiers, aux propriétaires de bois, à voir la limite à laquelle il conviendrait de s'arrêter. C'est à eux aussi qu'il appartiendrait de modifier quelquefois l'étendue de la coupe à blanc estoc, fixée d'après le nombre d'années de la révolution adoptée; de la réduire lorsqu'on arriverait à des massifs parfaitement peuplés, dont les produits seraient assez abondants pour diminuer par trop ou même arrêter complètement l'extraction des arbres de réserve et des arbres vieux et dépérissants; de l'étendre, au contraire, quand elle porterait sur un vide ou une partie mal peuplée, pour ne pas exagérer les coupes jardinatoires. Pour la clarté de l'exposition, nous avons parlé d'une contenance invariable à donner aux coupes à blanc estoc, mais ce qu'il s'agit seulement d'obtenir, c'est, au bout de la révolution fixée, la régénération complète de tout le massif, en conciliant autant que possible l'égalité des contenances des coupes avec l'égalité des produits en matière et les nécessités des exploitations jardinatoires. Il pourra arriver, mais très-rarement, d'après les conditions générales des bois de la Lozère, que l'on soit obligé de mélanger aux céréales semées la troisième
année une petite quantité de graines de pins dans les vides assez grands pour que le manque d'arbres de réserve et l'éloignement du massif encore existant fassent craindre que le réensemencement ne soit pas assez complet : mais, nous le répétons, ce ne sera qu'une rare exception.
Nous sommes loin de croire que tout autre mode d'exploitation que celui que nous ont suggéré les observations faites par nous dans le pays ne puisse produire des résultats meilleurs et achetés peut-être par un sacrifice de matériel moins grand que celui qu'entraînerait nécessairement l'assiette de proche en proche de coupes à blanc estoc dans des futaies où la série des âges est irrégulière. Toutefois, le but principal de cette étude très-incomplète serait rempli, si nous avions pu appeler l'attention sur les bois de ce département, si négligés jusqu'à ce jour et qui méritent pourtant quelque intérêt. A. BUJON, Garde général des forêts.
DU CADASTRE ET DE L'IMPOT FONCIER DES BOIS ALIÉNÉS PAR L'ÉTAT EN FONDS ET SUPERFICIE.
Les bois et forêts de l'Etat, d'abord assujettis à l'impôt foncier, comme ceux des particuliers, ont été affranchis de cet impôt par la loi du 19 ventôse an IX. Cette exemption cesse de droit lorsque la propriété passe dans les mains des particuliers; mais par cela même qu'il s'agit d'établir une imposition nouvelle, il y a lieu de recourir aux formalités qui précèdent la formation générale des cotes.
D'un autre côté, l'imposition une fois établie devenant définitive et devant rester telle quelle jusqu'au renouvellement du cadastre général delà commune, on comprend quelle importance le propriétaire doit attacher à ce que cette opération soit juste et régulière.
Nous avons donc pensé qu'il serait utile et opportun, au moment où les masses de bois aliénées en 1855 viennent d'être cotisées et où les acquéreurs sont encore dans les délais de réclamation, de rappeler succinctement les règles spéciales de la matière.
I. Aux termes de l'art. 18 de la loi du 25 septembre 1814, reproduit par l'art. 51 de la loi du 15 mai 1818 et par les lois postérieures, lorsqu'un bois cesse de faire partie du domaine de l'Etat, il est alors cotisé d'après une matrice particulière et « comme les autres bois de la commune « ou, s'il n'en existe pas dans cette commune, comme ceux qui se trouvent
« dans les communes les plus voisines. » A cet égard, l'art. 67 de la loi du 3 frimaire an VII se trouve abrogé (Ord. du Cons. d'Et., 24déc. 1818, aff. Montmort). Ainsi, soit qu'il s'agisse de prendre pour termes de comparaison les bois d'une commune voisine, soit que la comparaison s'établisse avec les bois de la commune où est situé celui qui devient imposable, on ne doit pas prendre en considération les évaluations données aux autres propriétés foncières de cette dernière commune pour surélever le revenu imposable du bois sorti des mains de l'Etat, sous prétexte que les autres bois seraient évalués au-dessous de leur valeur (Ord. Cons. d'Et., 17 nov.
5 déc. 1854). A plus forte raison ne pourrait-on les classer comme terre labourable, sous prétexte que l'acquéreur qui a l'autorisation de défricher aurait pris des arrangements pour exécuter ce défrichement, ou même aurait affermé le sol du bois pour être cultivé. — Enfin , lorsqu'il existe des bois dans la commune où est situé celui qu'il s'agit d'imposer, on ne doit pas, sous le même prétexte, aller chercher des termes de comparaison dans les communes voisines (Ord. Cons. d'Et., 6 juin 1854). En un mot, l'administration et le propriétaire du bois imposable doivent s'accorder sur la désignation d'un autre bois déjà cotisé qui sert de terme de comparaison pour fixer la cote du bois à imposer; à défaut d'entente, chacun présente son type, et c'est sur ces bases de comparaison que s'établit l'impôt.
II. La cotisation des bois qui sortent des mains de l'Etat pour passer dans celles des particuliers est portée au rôle de la contribution foncière de la commune où ils sont situés, à partir de l'année qui suit leur distraction des propriétés de l'Etat (L. préc., 19 vent. an IX, art. 5). La même loi dispose, en outre, que les nouveaux possesseurs doivent d'ailleurs payer à la régie des domaines la contribution foncière pour l'année de leur entrée en jouissance, dans la proportion du temps qui reste à courir depuis cette entrée en jouissance jusqu'à la fin de l'année (L. 19 vent. an IX, art. 4). On s'était demandé si la contribution était due pour le mois qu'accorde l'administration à l'acquéreur pour remplir les formalités de prise de possession; l'art. 21 du cahier des charges arrêté le 50 sept. 1855 a fait cesser le doute à ce sujet, en disposant formellement que la contribution sera due à partir du jour de l'adjudication.
III. Si l'administration avait omis de faire dresser ce rôle et qu'il arrivât que, par suite, le nouveau possesseur fût resté un certain délai, plusieurs années par exemple, sans être soumis à l'impôt, pourrait-on exiger de lui qu'il l'acquittât pour les années antérieures à celles où il aurait été régulièrement porté sur les rôles? La question n'est pas sans difficulté; aucune loi n'a prévu ce cas, et la loi du 2 messidor an VII accordant trois mois seulement aux contribuables pour former leurs réclamations, on peut en
induire, en premier lieu, que l'Etat ne doit pas avoir une plus grande latitude pour faire rectifier les erreurs susceptibles de léser ses intérêts; d'un autre côté, d'après nos lois constitutionnelles, aucune contribution ne peut être levée si elle n'a été arrêtée par les pouvoirs politiques, et il faut même observer qu'une perception ainsi faite en dehors du vote de la législature pourrait échapper complètement à tout contrôle de sa part si les exercices auxquels on voudrait la rattacher se trouvaient définitivement réglés. Enfin on peut dire qu'en réalité l'omission ne lèse pas les intérêts de l'Etat, puisqu'elle n'affecte en rien le recouvrement de sommes votées proportionnellement aux besoins publics. Néanmoins, le Conseil d'Etat, s'arrêtant à ce motif que la loi du 1er mai 1822, relative à l'imposition des bois qui sortent des mains du domaine, ne. limite pas le nombre des années pour lesquelles les rôles peuvent être dressés, a jugé qu'en pareil cas l'administration du Trésor est en droit de réclamer le payement de l'impôt pour les trois dernières années antérieures à rétablissement des rôles, période de temps au delà de laquelle les contribuables, comme on le sait, ne peuvent plus être poursuivis pour les cotisations mises à leur charge. «Con« sidérant, porte l'ordonnance, que la loi du 1er mai 1822, ordonne que « les bois et autres propriétés devenues imposables seront cotisées, à « quelque titre que ce soit, d'après les rôles particuliers, et que ladite loi « ne limite pas le nombre des années pour lesquelles lesdits rôles pourront « être dressés; considérant que notre ministre des finances ne réclame « que le payement de trois années de contributions dues par les sieur et « dame Desmoutier de Mérinville, etc. » (Ord. Cons. d'Et., 12 mai 1850, M. Hutteau d'Origny, rapporteur).
IV. Ainsi que nous venons de le dire, la cotisation annuelle des bois qui sortent du domaine de l'Etat rend nécessaire toute la série d'opérations du cadastrement : levée de plans, travaux d'art, expertise, application du tarif d'évaluation, répartition.
Nous ne dirons rien des opérations préliminaires de délimitation, de division et d'arpentage, lesquelles sont purement administratives et dans lesquelles le propriétaire lui-même n'a pas à intervenir, si ce n'est pour exiger que les formes protectrices de son droit soient régulièrement observées.
V. La jurisprudence n'admet pas non plus, en général, qu'un contribuable puisse réclamer contre le tarif commun des évaluations. Cependant une exception a été admise en faveur des propriétaires possédant la totalité ou la presque totalité d'une nature de culture (Hèglemellt du 15 mars 1827, art. 81). — Il a été jugé par application de cet article qu'il suffit qu'un propriétaire possède à lui seul la presque totalité d'une nature de culture sur le territoire d'une commune pour qu'il ait le droit de se pourvoir à la
fois contre le tarif des évaluations et le classement de sa propriété (Ord.
Cons. d'Et., 27 février 1835, aff. Hotterman; 4 juillet 1838, aff. d'Escars).
Mais que faut-il entendre par propriétaire de la presque totalité d'une culture? D'après la jurisprudence du Conseil d'Etat, ces expressions sont limitatives, c'est-à-dire qu'il ne suffit pas, pour jouir de la faculté accordée par le règlement, de posséder une portion de culture, comparativement plus considérable qu'aucune de celles qui sont disséminées entre divers autres propriétaires ; mais qu'il faut, en réalité, posséder à soi seul la presque totalité des biens de même nature existants dans la commune ; c'est ainsi qu'il a été jugé : 1° que la faculté dont il s'agit ne peut être réclamée par le propriétaire qui, sur 227 hectares de bois existants dans une commune n'en possède que 50; « Considérant qu'il résulte de l'instruction « que sur 227 hectares de bois que présente la commune de Berelles, le « sieur Guillain n'en possède que 50; qu'ainsi il ne peut se prévaloir de la « faculté exceptionnelle établie par l'art. 81 du règlement précité, etc. »
(Ord. Cons. d'Et., 30 nov. 1856) ; 2° ni par celui qui, sur 445 hectares de bois que renferme la localité n'en a que 215, bien que le surplus se trouvât divisé par portions très-minimes entre un grand nombre de propriétaires : « Considérant, dit une autre ordonnance du 23 avril 1836, « que le sieur Marbeau ne possédant que 215 hectares sur 445 hectares '« de bois que renferme la commune, ne peut être regardé comme se trou« vant dans les termes de l'art. 81 dudit règlement, etc. » f i Du reste, il a été décidé que lorsqu'un propriétaire réclame contre le tarif des évaluations et le classement des biens qu'il possède dans une commune, il doit être sursis au jugement jusqu'à la production d'un extrait de la matrice cadastrale, s'il ne justifie suffisamment qu'il soit propriétaire de la'totalité ou de la presque totalité des biens de même nature de la commune ; qu'il faut également la production préalable d'un extrait de la matrice cadastrale, relative aux diverses propriétés de même sorte situées dans l'étendue delà commune; qu'enfin le préfet doit accompagner ces divers documents de son avis (Ord. Cons. d'Et., 4 juillet 1837).
Il y a lieu d'observer, au sujet des réclamations formées par les propriétaires de la totalité ou de la presque totalité d'une culture, les formes tracées par l'arrêté du 24 floréal an VIII et de procéder par voie d'expertise et de contre-expertise. Il a été décidé ainsi qu'en pareil cas, lorsque l'expertise administrative a été effectuée , le Conseil de préfecture ne peut rejeter la réclamation dont il est saisi, avant d'avoir préalablement ordonné une contre-expertise : « Considérant, porte l'ordonnance, que « les bois qui appartiennent au duc d'Escars, dans la commune de Nain« tré, forment la presque totalité d'une nature de culture, et qu'ainsi il est « admissible à réclamer à la fois contre le tarif d'évaluation et contre le
« classement de ladite forêt; Considérant que si le réclamant a compris « dans sa demande la révision de toutes les opérations cadastrales de la « commune de Naintré, demande que le Conseil de préfecture a dû reje« ter, il avait aussi expressément demandé la rectification du classement « et du tarif d'évaluation de la forêt qui lui appartient, et que le Conseil de « préfecture eût dû faire droit sur le second chef de réclamation en ordon« nant la contre-expertise, etc. » (Ord. Cons. d'Et., 4 juillet 1858, aff.
d'Escars). Dans ces divers cas, l'opération étant purement administrative, il semblerait que le Conseil de préfecture dût rester incompétent pour prononcer sur la validité, et que la réclamation qu'elle peut soulever dût être portée devant le ministre des finances, sauf recours au Conseil d'Etat.
Mais la doctrine contraire se trouve implicitement consacrée par les diverses ordonnances qui précèdent, et le Conseil d'Etat s'est, au surplus, formellement prononcé pour la compétence du Conseil de préfecture en pareil cas, en décidant que ce Conseil est compétent pour connaître du tarif des évaluations, alors que cette opération est inséparable du classement. (Ord. Cons. d'Etat, 27 fév. 1835, aff. Hotterman.) VI. « Tout propriétaire, porte l'ordonnance du 3 octobre 1821 (art. 9) « est admis à réclamer contre le classement de ses fonds pendant les six « mois qui suivront la mise en recouvrement du rôle cadastral. Passé ce « délai, aucune réclamation ne pourra être admise qu'autant qu'elle por« tera sur des causes postérieures et étrangères au classement. » Telle est la règle générale qu'une nombreuse jurisprudence a rigoureusement maintenue en repoussant constamment, comme frappées de déchéance, toutes les réclamations relatives au classement formées après l'expiration du délai fatal de six mois. « Considérant, porte une ordonnance, qu'aux « termes de l'art. 9 du règlement général ci-dessus visé, nul propriétaire « ne peut réclamer contre le classement de ses fonds que dans les six mois « qui suivent la mise en recouvrement du rôle cadastral, à moins que sa « réclamation ne porte sur des causes postérieures et étrangères au clas« sement; que, dans l'espèce, le rôle cadastral a été mis en recouvrement « en 1830, et que le sieur Calvet n'a réclamé que le 20 février 1833 ; « Considérant, en outre, que la réclamation ne porte ni sur une cause pos« térieure ni sur une cause étrangère au classement, d'où il suit qu'elle n'é« tait pas admissible. » (Ord. Cons. d'Et., 23 mai 1834, aff. Calvet).
— Il résulte de cette jurisprudence que les acquéreurs des bois de l'Etat nouvellement cadastrés ont le droit incontestable de réclamer contre la cotisation qui leur est imposée pendant les six mois qui suivent la mise en recouvrement, c'est-à-dire la réception delà copie du rôle ; mais, ce délai passé, les réclamations ne seraient plus recevables jusqu'au renouvellement général du cadastre de la commune.
VII. A l'effet de faciliter les réclamations et d'accélérer leur instruction et leur jugement, les états de sections et matrices arrêtés par le préfet sont adressés aux communes en même temps que le rôle cadastral. Chaque propriétaire doit être prévenu de leur envoi par un avertissement particulier et a le droit d'en prendre communication à la mairie, à l'effet de réclamer contre les erreurs qui auraient pu avoir été commises dans le classement de ses propriétés, comparé à celui-des propriétés de même nature dans la commune (Ord. 3 oct. 1821, art. 8 ; règl. 10 oct. 1821, art. 29 et 50).
D'après l'art. 30 du règlement du 10 octobre 1821, les réclamations sont présentées sous forme.de pétitions et sur papier libre, et remises au maire. Elles sont adressées au sous-préfet qui les transmet au contrôleur de l'arrondissement pour être instruites et jugées dans les formes prescrites en général par l'arrêté du 24 floréal an VIII, relatif à l'instruction et au jugement de toutes les réclamations en matière de contributions directes (Ord. 5 oct. 1821, art. 10). L'instruction doit être contradictoire et les pétitionnaires sont avertis des jour et heure où les agents procèdent à la vérification, afin qu'ils y assistent ou s'y fassent représenter par leurs fondés de pouvoirs. Au jour indiqué, l'inspecteur ou le vérificateur, de concert avec les classificateurs, et, par comparaison, avec les types ou étalons des classes où les parcelles sont rangées, procède à la vérification des classements contestés, en ayant soin d'inscrire dans une des colonnes d'un tableau préparé à cet effet l'avis des classificateurs sur le classement de chaque parcelle (Règl. 15 mars 1827, art. 82 à 85). Il a été jugé avec raison que si les vérificateurs n'ont fait aucune vérification personnelle de la surcharge annoncée par le plaignant, s'ils n'avaient sous les yeux ni les matrices des rôles ni les états de sections, lorsqu'ils ont comparé les taxes et qu'ils aient procédé sur de simples extraits, l'instruction est irrégulière, et l'arrêté du Conseil de préfecture qui l'a suivie doit être annulé. « Con« sidérant, dit l'ordonnance du 26 février 1823, qu'il résulte des pièces « du procès, et notamment de la lettre du préfet de la Drôme, du 12 no« vembre 1822, ci-dessus visée, que les formalités exigées par la loi du « 3 frimaire an VII, dans l'instruction des demandes en rappel à l'égalité « proportionnelle n'ont point été remplies dans l'espèce et qu'ainsi il y a « lieu d'annuler l'arrêté attaqué et de procéder à une nouvelle instruction « de l'affaire. » (Cons. d'Etat, 26 février 1823, 8 août 1855). Cette dernière décision porte que le classement n'est régulier qu'autant que la classification et le tarif des évaluations ont été préalablement portés à la connaissance des propriétaires pour qu'ils puissent soumettre leurs réclamations à ce sujet au préfet.
Lorsque la vérification est terminée sur le terrain, l'inspecteur rédige pour chaque réclamant un état présentant le classement primitif de chaque
parcelle objet de la réclamation, et l'avis des classificateurs sur chacune de ces parcelles ; il donne connaissance aux propriétaires des demandes que les classificateurs ne sont pas d'avis d'admettre, ou qu'ils n'admettent qu'en partie (Même règl., art. 85). Si les propriétaires adhèrent à l'avis des classificateurs, cette adhésion est signée d'eux ou de leurs fondés de pouvoirs sur l'état spécial rédigé par l'inspecteur (Ibid., art. 86). Dans le cas d'absence des réclamants ou de refus d'adhérer à l'avis des classificateurs, l'inspecteur doit prévenir les propriétaires que, suivant les dispostitions des art. 17 et 18 de l'arrêté du 24 floréal an VIII, ils peuvent requérir la contre-expertise, dans le délai de vingt jours. Il leur fait connaître que cette opération s'exécute aux frais de la commune lorsque la réclamation est reconnue fondée, tandis qu'elle est à la charge des réclamants quand les demandes sont rejetées (Ibid., art. 87). Et cette mise en demeure est de rigueur à ce point que son défaut d'exécution entraînerait la nullité de toute décision qui interviendrait. Il a été jugé que si, sur la demande en réduction, il y a dissentiment entre le réclamant et les répartiteurs, la contre-expertise est indispensable et que l'arrêté du Conseil de préfecture qui a statué sans cette formalité doit être annulé : « Consi- « dérant que, dans l'espèce, les répartiteurs et le réclamant n'étant pas « d'accord sur la réduction de cote demandée par le sieur., il y avait « lieu à ordonner la nomination d'experts, conformément à l'arrêté du « gouvernement du 25 floréal an VIII » (Ord. Cons. d'Et., 4 nov. 1856, aff. Carrère).
Si, dans les vingt jours, le réclamant n'a point fait connaître ses intentions, son silence est considéré comme une adhésion à l'avis des classificateurs. Le classement devient dès lors définitif et sans recours (Règl., 15 mars 1827, art. 90). Et il a été jugé : 1° que le propriétaire qui, mis ainsi en demeure de contredire, au moyen de la contre-expertise, l'évaluation donnée à sa propriété, ne l'a pas fait, devient non recevable à se plaindre plus tard de surélévation : « Considérant que le sieur ayant prétendu « que cette révision lui causait une surtaxe a été mis en demeure de récla« mer une contre-expertise; qu'il ne l'a point demandée dans les délais « fixés par la loi ; qu'ainsi c'est avec raison que le Conseil de préfecture « de. a maintenu les évaluations fixées par les répartiteurs » (Cons.
d'Et., 28 déc. 1838, aff. Morin; 11 avril 1837, aff. Caunet). 20 Qu'un contribuable ne peut se plaindre de ce que le classement de ses propriétés a été exagéré, s'il a négligé de formuler ou de soutenir ses réclamations, conformément aux règles ci-dessus (Cons. d'Et., 5 mai 1831).
On suit pour les expertises les formes tracées pour les autres réclamations, en matière de contributions, par la loi du 21 avril 1832 (art. 20).
L'un des experts est nommé par le réclamant, l'autre par le sous-préfet.
Ils peuvent être récusés s'ils ont un intérêt dans la contestation (Cons.
d'Et., 50mai 1841). Ils sont assujettis au serment; toutefois il a étéjugéà tort, selon nous, que cette formalité n'était pas substantielle (Cons. d'Et., 25 nov. 1851).
Les experts doivent se rendre sur les lieux et vérifier la propriété du ré.
clamant et toutes les autres propriétés prises pour terme de comparaison (L. 2 mess. an VII ; 24 flor. an VIII, art. 5et 10; Cons. d'Et., 1erjuin 1828, 18 oct. 1855, 28 août 1844).
Le réclamant a seul le droit, à l'exclusion du maire ou des agents, de désigner les propriétés qui doivent servir de termes de comparaison. Il a été jugé qu'un propriétaire de bois vendus par l'Etat n'est pas fondé à prendre pour termes de comparaison d'autres bois classés par erreur au-dessous de leur valeur réelle (Cons. d'Et., 10 juin 1855).
Le procès-verbal des experts n'est d'ailleurs qu'un élément d'instruction ; c'est au Conseil de préfecture qu'appartient, sauf recours au Conseil d'Etat, le jugement de toutes les réclamations tendant à un dégrèvement de l'impôt foncier. MAULDE, Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, membre de la Société forestière.
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REVUE COMMERCIALE.
SUR LA SITUATION DES PORTS D'APPROVISIONNEMENT DE PARIS AU COMMENCEMENT DU DEUXIÈME TRIMESTRE DE 1856.
Les bois de flot sont arrivés abondants au port de Clamecy, du mois de janvier au mois d'avril. Les enlèvements ont été nuls pendant la même période. D'où il résulte que l'approvisionnement qui manquait au 1er janvier se trouve au 1er avril porté à 11,809 décastères.
Les bois neufs n'ont presque pas varié. La quantité restant en bois dur est la même, 17,000 décastères; mais les bois blancs présentent un déficit de 7,000 stères sur les quantités constatées à la fin de 1855. Cette différence a pour cause le ralentissement ordinaire des arrivages pendant les premiers mois de l'année. L'équilibre sera probablement rétabli pendant le trimestre courant.
Nous remarquons sur les cotrets la même tendance à se présenter en moins grand nombre ; la consommation se maintient cependant à Paris au ttême niveau, les ports se dégarnissent aussi régulièrement que par le
passé; mais les arrivages font défaut. En somme, il ne restait au mois d'avril que 706,000 cotrets en approvisionnement, et ce chiffre est de beaucoup au-dessous des quantités ordinaires de la seule inspection de Compiègne.
Nous comprendrions sur d'autres points que la fabrication des cotrets ait été réduite par le prix élevé des charbons, qui ont absorbé toute la matière disponible; mais à Compiègne ou dans les environs il n'y a pas d'usines métallurgiques faisant concurrence à l'approvisionnement de Paris, et nous cherchons en vain le motif d'une réduction aussi considérable sur cet article.
Quoi qu'il en soit, les cours devront, s'en ressentir, et peut-être devonsnous attribuer à cette rareté relative le prix encore ascendant des bois à brûler sous toutes formes.
Nous constations dernièrement ce fait, que les charbons avaient pris d'autres moyens de venir à la vente à Paris, et que le nombre de bateaux attendant leur tour de déchargement était de moitié moindre que pendant les dernières années. Ce nombre diminuera encore, si nous en jugeons par ce qui vient sur les ports.
Les arrivages pendant le premier semestre de 4855 étaient de 77,000 hectolitres, il en est venu cette année 60,000 seulement.
Les bateaux emmenaient 96,000 hectolitres dans les trois premiers mois de 1855, tandis qu'ils n'ont pu en charger que 59,000 hectolitres cette année.
Enfin, il restait à la fin du trimestre de 1855, 27,000 hectolitres, au lieu de 9,000 indiqués en 1856 par l'état de situation au 1er avril.
Mais la différence la plus grande entre les deux années se trouve sur les charpentes. Les ressources au 1er janvier étaient de 229,000 décistères; elles restent auj ourd'hui a 200,000 seulement, et par l'état comparé des deux époques nous allons voir combien cette ressource est précaire.
Arrivages. Enlèvements. Restant à porl.
Decislèrps.
Au 1er avril 1855. 99,924 110,875 536,184 Au 1er avril 1856. 99,548 118,094 200,286
Ainsi les arrivages se font en proportion égale pendant les deux années; mais le commerce enlève un treizième en plus en 1856 pendant le trimestre, et le restant à port présente l'énorme différence de 80 pour 100 de moins au 1er avril 1855.
Cependant, malgré la consommation plus grande, malgré les ressources amoindries, malgré la certitude que ces ressources ne peuvent pas aug menter, nous sommes en présence de ce fait bizarre, que les cours sont à la baisse, et que la charpente est positivement moins chère aujourd'hui qu'elle ne l'était à pareille époque en 1855.
Les chantiers sont vides à Paris, les ports sont dégarnis au moins relativement, il y a beaucoup de travaux commencés, qui s'achèveront certainement, et avec tout cela les prix ont peine à se maintenir.
On se rend si peu compte de cet état singulier, que la province veut élever ses prix de vente, ou tout au moins les maintient très-haut; aussi les transactions sont-elles rares. Le commerce de Paris s'abstient, on ne prend que le strict nécessaire, et ce nécessaire est fourni par les quelques détenteurs qui, pressés par le terme de juin, se décident à accepter les prix refusés depuis quelques mois.
Un autre fait non moins singulier est que les gros bois, dont on craignait disette, sont les plus abondants sur le marché. On en a cherché partout, tout le monde en a trouvé un peu, les hautes prétentions des détenteurs ont empêché, sinon de consommer, au moins de s'approvisionner à l'avance dans les usines, dans les ateliers de construction ; si bien que le commerce, qui n'aime pas à garder la marchandise en magasin, est allé offrir cette marchandise au consommateur, lequel est d'autant moins disposé à la prendre qu'il voit plus de facilité à vivre au jour le jour.
Les cours ont donc grand'peine à se maintenir, et, malgré la rareté relative, on ne peut prévoir ce qui se passera pendant le trimestre. Le dernier mot restera probablement aux moins pressés soit d'acheter, soit de vendre.
Les sciages ont meilleure chance, ils se placent à des cours franchement établis. La fabrication, aussi régulière que la consommation, maintient l'approvisionnement des ports à peu près au même état; et de plus, l'article ne pouvant être employé qu'après un assez long séjour soit en chantiers, soit dans les magasins, les délais nécessaires à la dessiccation forment une réserve toujours suffisante pour empêcher les variations brusques auxquelles les autres bois sont soumis.
Sous la dénomination générale de sciages se trouvent comprises les diverses essences, chêne, hêtre, peupliers, sapins, dont les prix de vente diffèrent entre eux autant que les conditions d'approvisionnement.
On fait relativement peu de sciages de chêne sur les ports désignés en l'état de situation de l'approvisionnement de Paris. C'est sur le canal de la Marne au Rhin qu'il faut aller consulter les ressources disponibles,et la matière paraît devoir s'y montrer plus rare en fin d'année, par suite de la conversion en charpentes et en marines d'une grande partie des bois ordinairement débités en planches.
Les hêtres se présentent plus nombreux que d'ordinaire sur les ports, et, malgré les enlèvements considérables du dernier trimestre, il en restait encore au 1er avril près de 50,000 décistèresen sciages de toutes formes.
C'est presque le double de ce que nous voyons eu chêne, et cette proportion est anormale.
Pourquoi le hêtre, aussi dur que le chêne, et pouvant le remplacer avantageusement dans beaucoup d'emplois à cause de la grande différence de prix, est-il toujours dédaigné dans la construction ? Soti iimpressiotillab ilité trop grande ne permettra jamais d'en faire des ouvrages extérieurs : des portes, des croisées, des persiennes; il ne résiste pas aux alternatives de sécheresse et d'humidité; mais pour des lambris, pour des parquets, surtout dans les étages supérieurs, il durerait autant que le chêne et coûterait un tiers moins. Nos forêts en sont abondamment garnies ; on le trouve partout, c'est l'essence la plus nombreuse des futaies pleines; ses formes sont irréprochables, et cependant son prix ne dépasse guère celui du bois à brûler, qui devient forcément sa destination la plus commune.
On devrait donner au hêtre un plus noble et surtout plus utile emploi.
Ceci nous paraît être une question d'économie forestière sur laquelle il pourrait être important de revenir.
Les sciages de bois blanc nous ont depuis longtemps habitués à leurs brusques et considérables variations de prix et de quantités disponibles.
Il en restait au 1er avril 72,000 décistères sur les ports, au lieu de 45,000 constatés au 1er janvier, et 60,000 environ à l'époque correspondante de 1855.
Cependant le prix élevé du bois de boulange et la rareté relative de ces bois ont fait convertir en bûches bon nombre de peupliers propres au sciage, et qu'on n'eût pas manqué de débiter ainsi dans ces dernières années.
Ce n'est pas non plus à un ralentissement d'affaires qu'il faut attribuer ce stoc plus considérable. Les enlèvements ont atteint dans le dernier trimestre des proportions peu communes ; le commerce a disposé de 181,000 décistères de ces sciages, au lieu de 164,000 constatés pendantle précédent trimestre, et cette différence est de beaucoup plus sensible si nous comparons au premier trimestre de 1855, qui n'a pris sur les ports que 97,000 décistères.
Nous remarquons d'ailleurs des rapports à peu près semblables dans la fabrication. Les arrivages, qui n'étaient que de 84,000 décistères au 1er avril 1855, sont portés à 172,000 pendant le dernier trimestre de cette année, et nous inaugurons 1856 avec le chiffre de 207,000 décistères, que nous ne croyons pas avoir été atteint depuis longtemps.
Ainsi, d'un côté, le peuplier se voit appelé à remplacer en grande partie le tremble et le bouleau, brûlés dans les fours de la boulangerie et des usines; d'un autre côté, le sciage en prend sous toutes formes une quantité double des quantités annuelles. N'avons-nous pas, en présence de ces faits, à nous demander si ces exploitations ne dépassent pas la possi-
bilité des plantations, et si, dans un temps assez rapproché, une marchandise devenue nécessaire ne fera pas défaut.
Les peupliers, soumis à d'autres lois de production que les essences vivant en famille dans nos forêts, n'ont aucun aménagement régulier; ils vivent soit aux dépens des céréales sur les bords des champs cultivés, soit aux dépens des fourrages sur les ruisseaux ou les fossés des prairies; dans l'un ou l'autre cas, ils font le désespoir des fermiers, et chaque nouveau bail a pour condition expresse ou l'abatage des plantations existantes, ou l'interdiction de plantations nouvelles.
Le prix élevé des céréales motive et justifie ces mesures. Nous ne les combattons pas ; mais il importe de constater les résultats faciles à prévoir, et peut-être est-il temps de penser aux moyens de remplacer par des reboisements, par des semis, les plantations qui tendent à disparaître et qui laisseront un vide considérable.
Les sapins, dont la consommation va toujours croissant, ont atteint, ou peu s'en faut, le prix du chêne. Le peuplier remplaçait avantageusement ces deux essences pour les constructions rurales, autant par ses qualités que par son prix; mais si l'exploitation en est conduite comme nous le voyons depuis une ou deux années, il paraît clair qu'elle dépassera la possibilité , et nous ne voyons pas à quelle ressource il faudra recourir.
Deux inondations successives ont momentanément arrêté le flottage des bois, et les transactions s'en sont ressenties. On est peu disposé à acheter une marchandise dont on ne pourrait jouir. Aussi n'avons-nous que peu de chose à dire des prix restés a peu près comme le mois dernier, Paris attend impatiemment les arrivages pour regarnir les chantiers; quelques dégâts ont été signalés sur les ports et pour les trains en route. Les renseignements nous manquent encore pour en établir l'importance.
Le retour du beau temps va permettre enfin de lier et de rentrer les écorces. Cet article est en baisse depuis la conclusion de la paix. L'exportation, si elle était permise, maintiendrait les cours et réserverait pour les exploitations prochaines un travail lucratif aux populations qui vivent du salaire que les forêts répandent, Le prix moyen de 110 fr. les cent bottes en forêt est descendu à 90 fr.; encore ne trouverait-on pas à placer les qualités inférieures même avec grande réduction.
On parle de bois à brûler vendus à Clamecy 110 fr., sur le canal, 95, et 70 fr. sur les ruisseaux. Les bois blancs, toujours rares et recherchés, sont à 80, 90 et 95, selon les qualités, sur la Marne et sur la Seine.
La charpente ordinaire, payée 72 à 75 fr. dans Paris, se soutient à 58 et 60 dans l'eau.
Nous ferons une seule remarque à propos du tableau comparé de l'oc-
troi pendant les mois d'avril et de mai, c'est que, à côté d'une baisse générale, deux articlefsenls se trouvent en augmentation de quelque importance relative : les charpentes et sciages de bois durs et les lattes. Cela indique nécessairement un travail actif, et confirme ce que nous disions dans nos derniers numéros. DELDET.
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PALUS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FEItS ET DES FONTES.
MAI 1856.
DÉSIGNATION DUOIT QUANTITES EKTUÉE& DIFFËIlKSlCK des NATURE. R~ ,,~, sur le mois correspond.
NATURE D OCTKOI RN MAI. M| d'ukitÉs. décime ~- Augmentation Diminution - en en MATIÈRES. compris. 1856. 18a5. 1456. 1856.
Bois à brûler, dur stère. 3 oo,o 0\36 5i,oto » 20,144 — blanc. — 21.1,0 (2) 17,387 17,444 » 057 Cotrets de bois dur. - 1 80,0 1,7bO 3,112 Il 1,332 Menuise et fagots. - 1 08,0 2.247 2,717 » 470 Charbon de bois heclolilre. o 60,0 272.290 315,188 JI 42,898 Poussierde ch. de bois — 030,0 15,8U8 !9,s:o » 4,ot>'2 Charbon de terre. 100 kilogh 0 7-1,0 31,843,767 37,595,'^61 » 5;Ï5lj49l Charpente et sciage bois dur. stère. H 28,0 11,907 i0,205 1,702 » Bois b).t))C. - 9 00,0 16.267 lo,949 » 682 Lattes et treillages. les 100 bottes. 11 28,0 23,922 1 ,681 » Bois de déch. en chêne mètre carré. 021,6 46J 192 271 » — en sapin. — 0 12,0 4,948 3,973 975 » Fers, employés dans les constructions 100 kilog. 3 60,0 77t>,3:2 752,638 23,13i » Fonte, employée dans les constructions.. — 2 40,0 692,099 237,123 454,976 »
INONDATIONS. —Les dernières inondations ont donné lieu dans tous les journaux, petits ou grands, à une avalanche d'articles sur les moyens d'empêcher le retour des désastres qui ont épouvanté la France entière.
Plusieurs de nos abonnés nous demandent si nous ne dirons pas aussi notre mot dans cette circonstance. Pour ne rien dissimuler, nous avouerons que nous ne nous en soucions guère ; car il nous répugne de paraphraser ce qui a été déjà dit et redit tant de fois. Cependant, puisqu'on paraît le désirer, nous résumerons dans une de nos prochaines livraisons les diverses opinions qui ont été émises, et nous tâcherons d'en tirer une conclusion pratique.
(1) Ces 31,536 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 12,614,400 kil.. dont la puissance calorifique égale celle de 6,307,200 kil. de houille.
(2) Ces 17,387 stères de bois, multipliés par 300 kil., poids du stère de bois blanc, représentent 5,216,100 kil., dunt la puissance calorifique égale celle de 2,608,050 kil. (le houille.
A" ,"oF,sIOllull.e..t de P,u.'s.-.O'U'CD.Cllt dC",,, Parls prirmeijidit le ,.cJlllc.. ",lIclitl.C ****'• 7
h ?" SCIAGKS it /'«b I Ecorccs bois ni ufs. 5 Char sctAGES âler-Cer- Lattes. lEchalas. Ecorces ISPECTIOXS. liois ,.----- - Colrets 5 zR ç» » de de de de à lan.
de flot. dur. !t.end. re. »■ s S pente- chêne. de hois bl. de. Lattes. Echalas..
de not. dur. tendre. S hêtre.! bols bl. sapin. r¡¡,ns. ceaux. a tan.
— U ",,,. Il'¡ ¡;¡;;;;¡: 1 D.ci.. 151 Dècist. Décist. Décisl. ¡¡;;¡;;;;:, Milliers. | Boites. | boues, bo. •
D^TT DèSSi'. Décast. UuUw. Unîtes. Hect, ol. | Dpec.*.
ARRIVAGES rEM)ANT I.E 1" TRIMESTRE.
! i 9 295 14,216 173 7,030 » » » 11,717 » » 3 66.488 31,452 1,190 4,ôO:\ 3,0H 6W 13,066 27,958 3 Il Il » Compiègne. g )8l 20 088 600 Porl-tf iX-P<*rches' » 267 1f /7 6M88 31,^ 452 1,190 4>3 3,094 640 13,066 27,9.-»8 » 3 » » 76 , 4g, 5^4 „ 375 35o n 12 40. t 450 » i.hâleau-Thierry » 2™ 10^^ > Joigny. h 6>g.28 „ J2>7y9 1,790 Il 67,3 jO 2,3 -2314. 10*2 Jm® «y8: : ; :: : : : : : : : : v. : : * : «5 âî £ | «mu »..<3 3^ 20.33, US! '* » « • » 3r 8i,r :; n 2 3.,3 l4 102 CUÏ»«'Cy 33! 78^700 205 699 4!y67 868 3.341 » » "n 2 068 l8,520 10»«9 2 Il 2068 18,&20 Il R°n"y 88! „ 49.061 5,178 ~» 9^515 1 £ 2 - 1 207..205 21,» 537 14 >' T3T4,T05^ b 1 71^-2 2,00773 ENLÈVEMENTS PENDIT LE l" TRIMESTRE.
7" 8 C«Î*6, 7?! 823,400 58,700 » 17,715' 15,255 fi 105 1> Port-aux-Perches.. 'O. 21 4571 223 4 32 um 4,9.0 2,583 3,^8 ^18',6^.I0 O 2266^,9660 0 » 41 4!880 I'5b3 1,393 18, <2 4 9 2,8. 0 619,7 31,088, 7,074 155 2 769 19 119 66 62() „ ChJ.e»-TI.™-J «;• ", ,g S Sl8 'i2l4l 9 » 2,-8m ;o 6,9o7 31,088 7,074 îoo «, 4 : Port-aux-Perches 2» 65'21 78 95,ô69 56,438 891 900 7 9971 117 497 523 Il "J 2,405 1 ,950 Il Troyes. 72 467 3'2.308 1> 6,628 ») 18,156 29 Il * Fontainebleau 57 3-2 308 » 6,628 » 1,8-'56 ^9 „î5i i» W 9S0 » b i in n 5g7 » K°.~-":'::::;::::~ 57 577 38,027 3^0 3, t;o «,5.0 12 722 144 J : > : E":::'.:::::::: Il 677 112 85,2691IH,692 3,482 463 5,300 12 ). 722 144 » Il ,. Il Costie 432 OH 51,965 3,150 Il 2!!65 236 Il Il 1 Il 4,12031.353 Jf7 7^665 354^267 WÏi Hfi** l,8'°94 30,142 181,535 21,"6 » 4M°0 l4''6b3 ----;;- MARCHANDISES RESTANT SUR LES PORTS AU 31 MARS 1856.
Compiégnc ) 81 815 6] 422,70oj 3,300 » 6,828 14.163 3,073 5,814 1,590 » » S 880 )) Port-aiix-Perches 659 14'2 24.423! 8,140 627 7,3U 1,58643,33411,610 5 » 1,5uo. 1,436 Chà eau-Tliierry ».«2 ? 2' ?86 6,024 2.000 » ■i9'191 ao7 n 74S » » » y> Fontainebleau » 2'"8^ 68 185 asiôW » 156 !4'024 '127 a 713 » » 82 4 l88 « » 41.090 i'?SÎ o.,5 |' 5,190 » » s 34,'/333 3 » » 5.5 »>„ - ° 3. 768 4,803 1,532 - Il 38 8,063 1,161 19,111 C'amec>' n'!80 6902 499 » 3,105 74 24,268 237 Il 1, 19 » bb 15,669 Il •3S'.249 139 148,807 93,814 1,731 801 25 bbO » » „ » » 364 Il H0(W ,l8 51 50 90,495 2,690 » 9.^ ™ Il - 23 » 903 28.642 TTiÛ» "Tvâ2 3,769 "Wli ,21^0 200,286 29,340 49,9.8 72,435 ,6,45, 47 » -7"7^^ 6~
i~, trlmest,e de l838'ludiquanl 189 quanmesrcslèes au 31 décembre 1855" V au numéro de février 1856, p. 49, la tableau du mouvement des pottg pendant le 4 trimestre de 1855, Indiquant les quantités restées au 31 décembre 1855.
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
Nominations dans l'ordre de la Légion d'honneur. — Mutations dans le personnel forestier. — Influence des forêts sur la nature du sol. — Algérie. — Manière de récolter la gomme. — Organogénie végétale; ciiiieule, - Eniploi du collodion pour la multiplication des plantes par boutures.
= Nominations dans l'ordre de la Légion d'honneur. — Par décret impérial en date du 16 juin 1856, rendu sur la proposition du ministre secrétaire d'État au département des finances, ont été nommés dans l'ordre impérial de la Légion d'honneur : M. BARTE DE SAINT-FARE (Alexandre-Napoléon), conservateur des forêts à Lons-le-Saulnier (Jura); trente ans de service.
M. VOUZEAU (Marie-Michel-Eugène), conservateur des forêts à Besançon (Doubs): vingt-six ans de service.
= Mutations dans le personnel forestier. — M. JAHOT, sous-inspecteur à Verdun (Meuse), a été admis à faire valoir ses droits à la retraite.
M. AL. DE MAILLER, sous-inspecteur à Bitche (Moselle), a été nommé sous-inspecteur à Verdun (Meuse), en remplacement de M. Japiot.
M. BAGNERIS, garde-général à Haguenau (Bas-Rhin), a été nommé sous-inspecteur à Bitche (Moselle), en remplacement de M. Al. de Mailler.
= Influence des forêts sur la nature du sol. — Voici quelques détails empruntés au Chamber s- Journal, sur une question à l'ordre du jour: l'influence des forêts sur la nature du sol. Beaucoup de personnes parlent du reboisement comme pouvant neutraliser les effets désastreux des eaux; mais les exemples fournis par le recueil anglais, qui analyse le rapport d'une Commission forestière, prouvent que les forêts entretiennent l'humidité et fournissent aux sources et aux fontaines une eau abondante.
En effet, grâce à l'évaporation des feuilles des arbres, il se répand dans l'atmosphère une humidité qui, poussée par le vent, arrose de vastes territoires. Les forêts ont encore la propriété de retarder l'évaporation de l'eau de pluie, en sorte que les sources sont toujours dans un état d'écoulement salutaire, et les fleuves ne tarissent pas. Le savant M. de Humboldt a très-bien démontré cette loi, dont la vallée d'Aragua, dans l'Amé rique du sud, est une preuve frappante. De 1555 à 1800 c'est-à-dire
depuis le voyage d'Oviédo jusqu'à celui de M. de Humboldt, il s'est produit, dans les eaux du lac que renferme cette vallée, une baisse de deux mètres. Le célèbre voyageur attribue ce fait au déboisement. Mais, lors de la guerre de l'Indépendance, l'agriculture ayant été négligée, les arbres recommencèrent à pousser sur le sommet et les pentes des montagnes; alors l'eau, non-seulement reprit son niveau primitif, mais encore s'éleva tellement que l'on craignit pour le pays une inondation générale.
Des phénomènes analogues se sont produits à Marmato, dans la province de Popayam, où se trouvent de nombreux moulins à piler. Malgré la fréquence des pluies, l'eau baissait toujours et les moulins s'en ressensentaient pour leur industrie. On mit alors des entraves au déboisement, et les eaux coulèrent en abondance. Les affreuses sécheresses qui désolent les îles du cap Vert doivent être attribuées aux mêmes causes ; à Madère même, on a observé une altération dans le climat depuis la découverte de l'île par les Européens. La rivière de Soccoridos, qui pouvait autrefois porter des trains de flottaison, est aujourd'hui presque à sec. Le sol de Madère étant poreux, le manque d'eau s'y fait sentir d'une façon beaucoup plus considérable. Mais on remarqua de bonne heure cet inconvénient, et l'on défendit, sous les peines les plus sévères, d'abattre les arbres dans le voisinage des sources et des fontaines ; malheureusement, ces défenses ne furent pas observées. Les feuilles des arbres jouissent de la propriété de favoriser le dépôt de la rosée, qui entretient le sol dans une constante humidité. De cette façon, les arbres deviennent des condensateurs entre l'air et la terre.
L'île de Fer, une des Canaries, en fournit une preuve évidente. Certains arbres de cette île sont toujours enveloppés d'un nuage dont les feuilles pompent l'humidité, en sorte qu'il s'établit un courant d'eau continuel que les indigènes recueillent dans des vases placés auprès du tronc. Ce sont, pour les naturels, des sources intarissables fort estimées.
Enfin, nous citerons un dernier exemple. A Sainte-Hélène, la quantité de bois a considérablement augmenté, grâce à des plantations faites dans les dernières années ; et on a remarqué que depuis ce moment la quantité de pliie a augmenté dans la même proportion ; ellé est le double de ce qu'elle était pendant le séjour de l'empereur Napoléon Ier.
= Algérie.- Tout ce qui concerne l'Algérie est toujours pour nous d'un laut intérêt, et nous avons souvent eu occasion de parler des ressources qu'elle offre, et de la variété aussi bien que de l'abondance de ses productions. Nous trouvons aujourd'hui dans le voyage botanique entreptis par M. Cosson, de Philippeville à Biskra et dans les monts Aurès, de nouveaux renseignements sur la richesse forestière de notre belle colonie.
« La richesse forestière des environs de Batna est considérable. Les forêts reconnues par l'administration et soumises à sa surveillance, et celles où il a été fait quelques explorations, ne comprennent pas moins de 13,500 hectares. Les forêts du Djebel-Tougour, l'une des montagnes les plus élevées de l'Algérie, sont évaluées approximativement à 1,200 hectares de cèdres et 1,500 hectares de chênes verts et essences diverses.
Le Djebel-Bordjem contient plus de 1,800 hectares, dont le chêne vert forme l'essence principale. Les vastes forêts qui couvrent les nombreuses montagnes du Bellesma, composées de chênes verts et surtout de cèdres, se prolongent à une distance d'environ six lieues. On a abattu, dans l'une de ces forêts, un cèdre de près de 45 mètres de hauteur, et dont le tronc, mesuré à 1 mètre au-dessus du sol, présentait Gm,25 de circonférence.
Des cèdres de cette grosseur sont assez communs dans la forêt de Tenietei-llaad, située dans la province d'Alger, où l'on en trouve même qui offrent des proportions encore plus remarquables. Plus à l'ouest, on traverse une gorge de près de six lieues, dont les pentes sont couvertes de chênes verts et de pistacia atlantica ; l'écorce de ce dernier arbre contient beaucoup de tanin et pourra devenir l'objet d'une exploitation importante. Dans un autre ravin, également rapproché du territoire des BouAoun, on rencontre un bois de houx de 3 à 4 hectares. Les forêts des environs immédiats de Lambèse, composées surtout de chênes verts, de genévriers, et où le pin d'Alep se rencontre sur quelques points, présentent plus de 2,000 hectares. Il existe à Nya-Sdire, près de Lambèse, sur un versant occidental, une forêt où se confondent les chênes verts, les ormes, les érables, et où les frênes atteignent souvent de grandes dimensions ; on y voit aussi les pruniers sauvages et le lierre ; le chêne vert y acquiert fréquemment un magnifique développement, et son tronc ne se ramifie souvent qu'à 10 mètres du sol. A cinq lieues environ de Lambèse, à Squaq.
une forêt de cèdres couvre plus de 3,000 hectares. La pente des derniers contre-forts de l'Aurès (Djebel-Itche-Ali) qui, vers le point de jonction des vallées de Lambèse et de Batna, s'élèvent de plusieurs centaines de mètres au-dessus du niveau de ces vallées, est également couverte de bois. Mais il ne s'en trouve pas seulement dans les environs de Batna : on en rencontre aussi sur le territoire de Philippeville, parmi lesquels mi cite les bois du Sassaf et de Saint-Antoine; les forêts qui couvrent les montagnes limitant la vallée de Zéramna, et comprenant un espace de frès de 5,000 hectares presque exclusivement composés de chênes-liéges ; le bois de Stora, qui se continue avec les immenses forêts de la Kabylie et compte plus de 500 hectares de chênes-liéges et d'oliviers; la forêt d'Eghmen, qui occupe une étendue de 200 hectares, et des bois d'oliviers sauvages dans le voisinage de Gastonville et d'El-Arouch. Le sol de ces régions est,
du reste, d'une grande fertilité, et la plupart des arbres d'Europe s'y acclimatent sans peine ; les pépinières qui y ont été créées en divers endroits ont généralement donné de beaux résultats, et ont déjà puissamment contribué au reboisement partiel de terrains déboisés, tout en ne négligeant rien pour étendre en même temps la culture des arbres fruitiers, qui semble parfaitement réussir. »
= Manière d'obtenir et de récolter la gomme au Sénégal. — Nous empruntons à un rapport récemment publié quelques renseignements curieux sur la manière dont s'obtient et se récolte la gomme au Sénégal.
La gomme est fournie par l'acacia verek, arbre de moyenne grandeur atteignant 15 à 20 pieds au plus, très-rameux, à branches tortueuses, à bois très-dur, à écorce grise suant un liquide gommeux qui se solidifie plus tard en substance vitreuse et transparente. Les nombreux rameaux de cet arbre sont largement munis de piquants, qui les rendent on ne peut plus difficiles à exploiter. L'acacia verek se trouve partout dans le Sénégal; la gomme qu'il produit est blanche, ridée et terne à l'extérieur; intérieurement vitreuse, elle a presque toujours la forme de boule : les Maures la récoltent dans des forêts plus ou moins étendues, situées assez avant dans les terres ou plutôt dans les sables, et dont les principales sont les forêts d'Alfatak et celles d'El-Ebiar. La récolte commence après la saison des pluies, avec les premiers vents d'est, vers le mois de novembre: c'est la première traite, appelée par les acheteurs petite traite à cause de son insuffisance. Une autre, plus abondante que la première, se fait vers le mois de mars ; elle se prolonge souvent jusqu'au mois de juin ou de juillet; on la désigne sous le nom de grande traite. Elle est d'ailleurs subordonnée à l'arrivée plus ou moins tardive des pluies et des vents d'est et à l'intensité de ces deux phénomènes météorologiques. Les écorces des gommiers sont imbibées, distendues et gonflées sous l'influence de l'eau ; les vents d'est arrivent ensuite, les sèchent rapidement par leur action brûlante; elles se fendillent alors, et par ces incisions naturelles s'échappe, sous forme de larmes plus ou moins grosses, dont l'agglomération forme boule, le produit dont nous esquissons l'intéressant historique. Lorsque arrivent les premières eaux, les Maures vont camper près des forêts de gommiers ; ils envoient leurs captifs ramasser et détacher, dès qu'ils y apparaissent.
les morceaux de gomme qui pendent aux branches, et c'est, sans nul doute, a cette manière de faire qu'est due, surtout dans les forêts du bas du fleuve, la petitesse des boules. A mesure que chacun des captifs a rempli le sac outouloude cuir dont on l'a muni, il vient apporter le fruit de ses recherches à son maître, qui enfouit dans le sable cette gomme nouvellement recueillie. Pendant son séjour dans ces magasins improvisés, soit que la pluie y ait pénétré, soit que la gomme ait été récoltée trop fraîche, soit
enfin qu'elle ait été laissée trop longtemps sous terre, le sable s'attache à la surface des boules en plus ou moins grande quantité : c'est la gomme enterrée ou non marchande du commerce. Quand l'approvisionnement de ces silos économiques est jugé suffisant, la gomme est chargée sur des chameaux, des ânes, des bœufs, et apportée par cette caravane sur des marchés désignés d'avance et s'ouvrant à différentes époques; c'est là qu'elle est vendue, ou plutôt traitée en échange de marchandises venues d'Europe. Les marchés se nomment escales, l'ensemble des opérations traite, et les acheteurs traitants.
La gomme achetée sur les marchés intérieurs, ainsi que nous l'avons précédemment indiqué, est descendue à Saint-Louis, où elle est emmagasinée, et de là dirigée sur la France. Mais avant d'être expédiée, elle est tirée et classée en gomme friable, dite sadra-beida, et en gomme dure de Galam, ou le bas du fleuve. Les gommes dures sont à peu près les seules employées par le commerce métropolitain, lorsque leur prix se maintient dans des limites raisonnables. La gomme friable n'acquiert d'importance que dans les conditions contraires, c'est-à-dire que lorsque le prix de la gomme dure ne permet pas d'en faire usage dans certaines industries à bon marché. La gomme de l'acacia verek est chimiquement identique avec la gomme arabique des officines, qu'elle est appelée à seconder et à remplacer, tandis que la gomme friable est menue et brisée comme du gros sel, amère toujours, blanche, verte, rouge ou jaune, suivant que l'arbuste est jeune ou vieux, vigoureux ou chétif, et aussi en raison du terrain plus ou moins sablonneux sur lequel il a pris racine. La gomme friable se trouve sur la rive droite du fleuve, dans le désert, à partir de Galam ; elle est produite par un acacia épineux, qui ne dépasse jamais 20 pieds, et qu'on appelle sadra-beida ou arbre blanc, à cause de son écorce blanche. Elle se récolte en janvier, février et mars dans des forêts peu éloignées de Bakel, où les Maures viennent la vendre au fur et à mesure qu'ils la recueillent, la nature de cette gomme ne leur permettant pas de l'enterrer, ainsi qu'ils le font habituellement pour la gomme dure. Cette dernière se divise en deux classes bien distinctes : celle de Galam et du bas du fleuve et celle de Ghioloff; celle-ci, aussi belle et même souvent plus estimée que la gomme des forêts des Maures, est généralement beaucoup plus grosse et recouverte à la surface d'une sorte de cristallisation. Le gonakié fournit une gomme rouge et âpre, que les Maures mêlent fréquemment aux autres qualités de gomme; elle se dessèche très-facilement et devient vitreuse.
Malheureusement, ce produit, ainsi qu'on peut s'en convaincre par des relevés authentiques, est à peu près stationnaire; il n'est pas susceptible d'amélioration, et, partant, d'augmentation progressive par les soins des hommes; il reste et demeure ce qu'il est, ce que le font les influences
climatériques sous l'empire desquelles il se forme et s'engendre ; ainsi, l'abondance des pluies, la force, l'intensité et la persistance des vents d'est sont des causes qui agissent très-puissamment sur la quantité, la bonté et la beauté de la récolte, tandis que l'absence de ces circonstances heureuses, jointe à des accidents particuliers ou locaux (la disparition partielle d'une forêt, les incendies), agit dans le sens contraire, et diminue grandement l'importance et la qualité de la production.
= Organogénie végétale. — Cuticule. — M. Trécul a fait des observations qui l'ont conduit à admettre une manière de voir particulière sur l'origine et le développement de la membrane mince dont sont revêtues extérieurement les parties encore jeunes des végétaux ligneux et les plantes herbacées, membrane à laquelle a été donné le nom de cuticule. Après avoir exposé les opinions diverses qui ont été émises à cet égard, il fait connaître et motive la sienne dans une première note dont voici un extrait : « La cuticule fut découverte en 1757 par Ludwig; elle fut entrevue par Duhamel en 1758, et observée de nouveau en 1762 par Ben, de Saussure.
Hedwig, en 1795, la crut composée de deux membranes entre lesquelles il s'imaginait voir un système de vaisseaux lymphatiques. Sprengel, puis de Mirbel, Rudolphi, montrèrent que ces prétendus vaisseaux ne sont que des lignes correspondant aux parois latérales des cellules de l'épiderme, et ils ont dit que la cuticule, qu'ils appelèrent aussi épiderme, n'était que la paroi extérieure des cellules superficielles. Jusqu'en 1834, on discuta sur l'existence de la cuticule; mais, depuis le mémoire de M. Ad. Brongniart, qui fit voir la généralité de son existence, la discussion n'eut plus pour objet que l'origine et la constitution de cette membrane. Depuis cette époque, plusieurs opinions ont été émises pour expliquer sa nature. La première consiste à regarder la cuticule comme une membrane essentiellement indépendante des cellules sous-jacentes. Déjà, en 1829, Turpin l'avait considérée comme une immense cellule dans laquelle se développeraient toutes les autres par une multitude de générations successives. Cette idée fut reproduite par MM. Hartig, Karsten et Garreau. 2° M. H. Molli, après avoir dit que la cuticule était formée par la matière intercellulaire, qu'il considérait alors comme préexistant aux cellules, annonça, en 1842, que la cuticule était formée par la réunion de la membrane primaire ou externe des cellules superficielles, doublée à l'intérieur par des couches secondaires ou d'épaississement. Il est important de noter qu'alors M. Mohl n'avait pas encore eu l'idée de son utricule primordiale. M. Wigand a sur la cuticule un avis analogue à cette opinion de M. MohI.
3° Treviranus prétendit, en 1855, que la cuticule devait être attribuée à "ne matière coagulable versée à l'extérieur par les cellules de l'épiderme
et concrétée. A cette manière de voir se sont ralliés MM. Valentin, Payen, Schleiden et enfin M. Mohl lui-même. Cette opinion a pour elle les apparences, ainsi que nous le verrons. 4° Une autre théorie est soutenue par M. Schacht. Cet anatomiste admet avec M. Mohl, pour chaque cellule, une utricule primordiale azotée, non composée de cellulose, qui sécrète à l'extérieur des couches d'épaississement formées de cellulose. Ce serait la première de ces couches, la plus externe, qui constituerait la cuticule proprement dite; les autres, plus internes, qui brunissent par l'iode et l'acide sulfurique, sont nommées par lui , avec M. Mohl, couches cuticulaires ; celles qui ne bleuissent pas et qui sont plus rapprochées de l'utricule primordiale sont appelées couches d'épaississement. Cette théorie de l'utricule primordiale (sans cellulose) génératrice pourrait être soutenue avec succès, si je n'avais pas prouvé, dans la séance du 6 novembre 1854, qu'il peut se former des couches secondaires à l'extérieur de la première membrane de cellulose aussi bien qu'à son intérieur. Je ferai voir d'ailleurs, dans la deuxième partie de ce travail, qu'il peut y avoir épaississement considérable loin de cette prétendue utricule primordiale, et dans des circonstances dans lesquelles il est impossible d'invoquer son action. Dans le même mémoire, j'ai établi un autre principe, que je n'ai pas donné comme général, parce qu'il ne l'est pas : c'est celui du dédoublement des membranes cellulaires. Depuis ma publication, ce principe a été admis par M. Ilartig, qui, abandonnant son ancienne théorie, l'a généralisé bien à tort. Eh bien, c'est un tel dédoublement de la paroi extérieure des cellules de l'épiderme qui donne naissance à la cuticule. Je dis qu'il y a un dédoublement de la membrane cellulaire, et non une excrétion proprement dite, parce que les deux membranes, au moment de leur séparation, ont la même épaisseur et le même aspect, tandis que les parties excrétées ont une apparence différente de la partie sécrétante. C'est ainsi que la matière intercellulaire se distingue de la paroi de l'utricule qui lui a donné naissance ; c'est ainsi également que les couches qui s'interposent souvent entre la cuticule et la paroi cellulaire se différencient de l'une et de l'autre, à l'origine du moins; et c'est précisément l'excrétion de ces couches qui a fait croire à celle de la cuticule. Au reste, je me suis expliqué plus longuement dans mon mémoire cité précédemment sur le sens que j'attache aux mots excrétion et dédoublement.
« On a beaucoup parlé jusqu 'ici de l'origine de la cuticule; cependant peu d'anatomistes, en réalité, l'ont décrite, et aucun ne l'a figurée à sa naissance dans les végétaux élevés en organisation. Voici comment elle apparaît.
« Les cellules superficielles ne sont, dans l'origine, munies que d'une paroi parfaitement homogène et qui paraît simple; mais d'ordinaire, quel-
que jeunes que soient ces cellules, la paroi externe se dédouble quand elle est mise en contact avec l'iode et l'acide sulfurique ; la pellicule externe jaunit ou brunit, c'est la cuticule; tandis que l'interne devient bleue et se gonfle plus ou moins. C'est cette membrane bleuissante qui sécrète ou excrète, si on l'aime mieux, les couches que l'on voit s'interposer plus tard entre elle et la cuticule. Si je n'avais que de tels faits, la vérité de mon assertion ne serait pas démontrée, et il serait difficile de prouver que la cuticule n'est pas une membrane indépendante des cellules qu'elle revêt, ou une cellule enveloppante, mère de toutes les autres; mais j'ai trouvé des plantes qui ne laissent rien à désirer à cet égard, car elles présentent à la fois des parties pourvues d'une cuticule et des parties qui n'en ont pas.
Dans celles qui n'ont pas de cuticule, la paroi cellulaire reste simple et bleuit tout entière sous l'influence de l'iode et de l'acide sulfurique. Un bel exemple de ce phénomène est offert par les feuilles du tillandsia zonata; leur épiderme est environné d'une cuticule qui se colore en jaune ou en brun par l'action des réactifs cités, tandis que les innombrables écailles peltées qui ornent ces feuilles n'en sont pas munies ; la paroi extérieure de chaque cellule de ces écailles reste simple et devient du plus beau bleu.
La cuticule n'est donc pas une cellule enveloppant toute la plante, puisque ces écailles n'en sont pas revêtues. Je citerai bientôt des preuves d'une autre nature. ",.
« Le pistia, qui vit à la surface de l'aquarium du Muséum d'histoire naturelle, est non moins intéressant, car l'épiderme du limbe de ses feuilles, ainsi que les poils qu'il supporte, ne paraissent pas avoir de cuticule quand on les examine sans le secours de l'iode et de l'acide sulfurique; quand on se sert de ces réactifs, on rencontre quelquefois des cellules dont la paroi externe bleuit sans se dédoubler ; le plus souvent cependant la paroi externe se divise en deux membranes : l'une interne se gonfle et bleuit; l'autre externe (la cuticule) paraît bleue, jaune ou brune, suivant son âge et suivant le degré de concentration de l'acide qui l'altère facilement, ainsi que le tissu cellulaire qu'elle enveloppe. En agissant avec précaution, on obtient fréquemment une cuticule très-bleue. Cela prouve que, dans le principe, cette membrane est formée de cellulose, ce qui n'avait pas été démontré directement. Pour obtenir ce résultat, il faut opérer de la manière suivante. On place les coupes transversales dans la teinture aqueuse d'iode, on ajoute ensuite de l' acide sulfurique dilué au contact de l'air, puis un peu d'acide plus fort, mais pas trop concentré. Bientôt on peut distinguer la membrane cellulaire de la cuticule ; la première se goutte et bleuit; la seconde reste mince, mais bleuit aussi, si elle est assez jeune.
Si l'on se servait tout de suite d'acide assez concentré, la cuticule deviendrait jaune brun, le tissu cellulaire bleuirait, puis brunirait à son tour,
quelquefois même deviendrait brun sans avoir bleui, et finirait par se dissoudre (1).
« Ainsi, la membrane qui doit produire la cuticule est d'abord simple, homogène, puis elle se partage en deux membranes parallèles, d'égale épaisseur, et présentant le même aspect. L'extérieure est la cuticule de la cellule correspondante. La cuticule générale est donc composée d'autant de parties qu'il y a de cellules superfIcielles, au moins à l'époque de sa formation; car dans le viscam album, par exemple, la pellicule externe d'un rameau déjà âgé a certainement moins de parties qu'il y n'a de cellules dans l'épiderme de ce rameau au moment de l'observation; mais la cuticule végète, s'étend, à mesure que les cellules se multiplient.
a Je terminerai cette première note en indiquant comment on doit concevoir l'union intime, la continuité de ces parties. A l'époque à laquelle s'effectue le dédoublement de la membrane cellulaire primitive, les cloisons qui séparent les cavités utriculaires de l'épiderme sont aussi formées d'une membrane simple, qui ne se divise pas par l'action de l'acide sulfurique ; ce n'est que postérieurement qu'elles se partagent en deux pellicules appartenant à chacune des cellules collatérales, et que de la matière dite intercellulaire est sécrétée par elles. Ces cloisons ou parois latérales des cellules étant simples ou très-intimement unies dans l'origine, il est évident que la cuticule qui se sépare de chaque cellule doit être parfaitement continue avec les cuticules partielles qui naissent des cellules adjacentes. » (Extrait de l'Institut, journal des sciences.) = Emploi du collodion pour la muitiplication des plantes par boutures. — Le procédé de M. Low, pour l'emploi du collodion dans la multiplication des plantes par boutures, prend un rapide accroissement dans les jardins d'Angleterre, parce que l'on y reconnaît de très-grands avantages. Aussi trouve-t-on maintenant du collodion dans toutes les pharmacies. Pour s'en servir, on trempe dans le liquide l'extrémité inférieure de la bouture, et on l'y enfonce de 0m,003 environ. La blessure faite par la serpette se couvre ainsi d'une couche très-mince d'un enduit qui la préserve de l'humidité surabondante, ainsi que de l'action nuisible de l'air, et assure la reprise en la rendant incomparablement plus prompte et plus facile. Le collodion est également très-utile pour la greffe des arbres fruitiers, des camellias, des rhododendrons et de plusieurs autres plantes ; il remplace alors avec avantage et avec économie les compositions résineuses dont on enveloppe les entes. (Dingler's polytechniches Journal, tome CXXXV, et Fortschritt, 11° 40.)
(1) Pour faciliter l'observatioih on peut chauffer un peu dans l'eau les coupes, afin d'en dégager l'air retenu entre les poils.
OBSERVATIONS SUR LA RÉVOLUTION APPLICABLE A UNE FOHÊT DE CHÊNES DE 0 A 80 ANS.
ei e t peuplée de chênes âgés de 0 à 80 ans et qui doit êtrfec^uip^é§fi»e de la futaie, on admet qu'à cet âge (les bois étant r ut autre motif) elle peut se reproduire naturellement par la^yitij^^
Et on demande lequel des deux systèmes suivants il est préférable d'adopter : 1° Commencer immédiatement les coupes d'ensemencement ; 2° Laisser écouler une certaine période pendant laquelle aucune coupe principale ne sera faite, afin que les bois puissent atteindre le terme de leur exploitabilité, ou au moins s'en rapprocher davantage.
A 80 ans, le chêne est loin d'avoir atteint l'époque à laquelle il peut fournir la matière à la fois la plus considérable et la plus utile, et son exploitation à cet âge entraîne une perte qui, au premier abord, peut paraître considérable.
D'un autre côté, une interruption de 20 années, par exemple (car il semble que, dans ce cas, la période blanche adoptée ne pourrait être moindre), dans les revenus de la forêt, est chose grave et certainement aussi une perte importante pour le propriétaire.
Recherchons quelles peuvent être les conséquences de ces deux systèmes, et nous verrons que, si l'on considère une période de temps assez longue pour que les deux modes de traitement dont il s'agit conduisent deux forêts aujourd'hui semblables, après leur avoir fait traverser des phases différentes, à présenter de nouveau la même succession d'âge et le même peuplement, nous verrons, dis-je, que la perte supportée par le propriétaire, dans le cas du traitement n° 1, se réduit à une différence de production en matière à peu près insignifiante.
Supposons donc deux forêts entièrement identiques de contenance, de sol et de peuplement, et renfermant des bois de 0 à 80 ans, comme il a été dit plus haut; supposons, pour fixer les idées, que 140 ans soient l'âge adopté pourl'exploitabilité du chêne, et que la révolution, fixée à ce chiffre, ait été partagée en 7 périodes de 20 ans chacune.
Dans la première forêt, que nous nommerons A, on commence immédiatement les coupes de régénération ; la première coupe porte sur des bois âgés de 80 ans, mais chaque année les exploitations prennent des
bois de plus en plus âgés, et les derniers arbres qui tombent ont 140 ans.
Dans la deuxième forêt, que nous désignerons par la lettre B, il n'est fait aucune coupe pendant la première période de 20 ans, mais seulement à partir de la deuxième ; les premiers bois exploités auront 100 ans, les derniers 140 ans, et il tombera des arbres de tous les âges intermédiaires, dans le cours de la révolution.
Au moment où commencent les coupes dans la forêt A, les âges successifs peuvent être représentés par la progression arithmétique suivante : 0, 1,2, 3. 77, 78, 79, 80.
Lorsque les premières coupes seront assises dans la forêt B, les âges successifs des parcelles qui la composent seront ainsi qu'il suit : 20,21, 22. 97, 98, 99, 100.
Si maintenant on remarque que la forêt A est exploitée en 140 ans et la forêt B en 120 ans, il est facile d'établir le tableau suivant, donnant l'âge des bois au moment de leur exploitation, pendant chaque période, dans le cours de la révolution de 140 ans, qui, nous l'avons dit, a été adoptée pour l'une et l'autre forêt.
AGE MINIMUM AGE MOYEN NUMÉROS DES BOIS, DES BOIS, au moment de leur flu r.en~ de leur eX)Jloilalion, au moment. e eur des pendant chaque période. exploitation.
PÉRIODES. 'T i—1 fORfir A. FORÊT B. FORÊT A. FOUET B.
t" période. 80 Néant. 8ï Néant.
2e — 89 100 93 10i 3e - 98 107 102 110 4* - 106 114 110 117 58 — 115 120 118 123 60 — 123 127 127 130 78 — 132 134 136 137 Tolaux. 770 720 Moyenne. 110 120 (1) 4
(1) On peut considérer la forêt A comme théoriquement formée de 80 parcelles, dont les âges sont de 0 à 80 ans; or, la révolution adoptée étant 140 ans, on exploite 80me 4me chaque année un 140 ou un 7 de parcelle ; donc, dans n années on exploitera la 4 f^nie parcelle 4 , en supposant que le n° 1 soit donné à la parcelle la plus âgée. Dans n années, la nme parcelle est âgée de 80 ans, et la y1 est plus âgée que la nme d'une quantité égale à n- — ; donc l'âge de la coupe exploitée dans la nme année peut être représenté, dans la forêt A, par la formule 80+ —-^-j:=80-h 7
Ainsi, pendant la première révolution, l'âge moyen des bois exploités est de 110 ans dans la forêt A, et de 120 ans dans la forêt B.
Si maintenant nous consultons la table VI de Cotta, article CHtNE (tome XI du Traité cl aménagement de M. de Salomon), nous voyons que la différence entre le volume à 110 ans et celui à 120 est égale à 11 pour 100 du volume à 110 ans, quelle que soit d'ailleurs la classe adoptée dans la table VI.
Donc la perte consentie par le propriétaire, dans le cas de la forêt A, est égale à 11 pour 100 du produit de la forêt. (Comme la valeur du mètre cube de bois de 110 ans est sensiblement la même que celle du mètre cube de bois de 120, nous croyons ne devoir tenir compte que du produit en matière.) Cette perte est certainement considérable, et si l'examen de la question s'arrêtait à ce moment de la vie des deux forêts, on devrait donner la préférence au traitement adopté pour la forêt B.
Mais il faut remarquer qu'à la fin de cette première révolution, les forêts ne présentent plus le même peuplement. La forêt A, en effet, est peuplée de bois de 0 à 140 ans, et la forêt B renferme des arbres de 0 à 120 ans seulement.
Cette différence dans l'âge des bois en amène une importante dans le volume actuellement sur pied, et il est nécessaire , pour nous rendre un compte exact de la question, que nous poussions notre étude pendant une seconde révolution. Je sais combien ces considérations sont théoriques, et tout ce que cette compensation à la perte supportée pendant la première révolution a de tardif et de lointain ; mais il est indispensable, cependant, de continuer notre examen au delà de la première révolution, et la méthode que nous suivons, toute théorique qu'elle est, nous a paru la plus simple et la plus facile à saisir.
Concevons donc une seconde révolution pour les forêts A et B, et, pour
Pour la forêt B, la formule serait : 100 + n- i - n) = 100 + g.
On pourrait obtenir directement l'âge moyen, en remarquant que les différents âges des bois, au moment de leur exploitation, peuvent s'écrire de la manière suivante (forêt A) :
la somme de ces différents chiffres sera :
Comme 140 exprime le nombre des coupes, la moyenne sera
plus de simplicité, supposons qu'elle ait été fixée, comme la première, à 140 ans.
Tous les bois de la forêt A seront exploités à l'âge de la révolution, c'est-à-dire, à 140 ans.
L'âge des bois exploités dans la forêt B peut être établi comme dans le tableau ci-après :
AGE MINIMUM AGE MOYEN NUMÉROS DES PÉRIODES. DES BOIS, DES BOIS, NUMÉROS DES PERIODES. au moment de leur au moment de leur exploitation, exploitation, pendant chaque période, pendant chaque période.
ire période 120 121 2e - 123 121 30 - 126 127 4e - 129 131 5" - 132 133 6- - 134 135 7e - 137 138
Tota!. 909 Age moyen des bois, au moment de leur exploitation, pendant la deuxième révolution. 130 ans.
Comparant maintenant, au moyen delà table VI de Cotta, les volumes à 140 et à 130 ans , nous voyons que leur différence est égale à 8 pour 100 du volume à 130 ans.
Cette différence est en faveur de la forêt A.
Or, si nous remarquons que 8 pour 100 du volume à 130 ans représentent environ 9,75 pour 100 du volume à 110 ans (première révolution) nous arrivons à ce résultat que la différence de production a été pendant la première révolution de 11 pour 100 de V (Y étant le volume exploité sur A pendant la première révolution) en faveur de B ; et que cette différence a été de 9,75 pour 100 de V, pendant la deuxième révolution, en faveur de A.
Si donc nous considérons l'ensemble des deux révolutions, nous voyons que, pendant ce long espace de temps, la différence de production entre les deux forêts a été de 1,25 pour 100, de V en faveur de B.
Cette différence, répartie moyennement sur chaque année, est extrêmement minime, et elle constitue un très-faible avantage en faveur du traitement adopté pour la forêt B.
Si, d'un autre côté, on remarque que dans le système adopté pour la forêt A, on ne retarde pas les exploitations, et qu'on peut satisfaire aux
besoins, toujours si pressants, du moment présent, on n'hésitera pas à donner la préférence au mode de traitement qui consiste à commencer, dès la première année, les coupes de régénération.
UN ABONNÉ.
LETTRE DE L'EMPEREUR.
L'Empereur a adressé la lettre suivante à M. le ministre des travaux publics : Monsieur le ministre, Après avoir examiné avec vous les ravages causés par les inondations, ma première préoccupation a été de rechercher les moyens de prévenir de semblables désastres. D'après ce que j'ai vu, il y a dans la plupart des localités des travaux secondaires indiqués par la nature des lieux, et que les ingénieurs habiles mis à la tête de ces travaux exécuteront facilement. Ainsi, rien de plus aisé que d'élever des ouvrages d'art qui préservent momentanément d'inondations pareilles les villes telles que Lyon, Valence, Avignon, Tarascon, Orléans, Blois et Tours. Mais quant au système général à adopter pour mettre, dans l'avenir, à l'abri de si terribles fléaux nos riches vallées traversées par de grands fleuves, voilà ce qui manque encore et ce qu'il faut absolument et immédiatement trouver.
Aujourd'hui chacun demande une digue, quitte à rejeter l'eau sur son voisin. Or, le système des digues n'est qu'un palliatif ruineux pour l'État, imparfait pour les intérêts à protéger, car, en général, les sables charriés exhaussant sans cesse le lit des fleuves, et les digues tendant sans cesse à le resserrer, il faudrait toujours élever le niveau de ces digues, les prolonger sans interruption sur les deux rives, et les Soumettre à une surveillance de tous les moments. Ce système, qui coûterait seulement pour le Rhône plus de 100 millions, serait insuffisant, car il serait impossible d'obtenir de tous les riverains cette surveillance de tous les moments, qui seule pourrait empêcher une rupture, et, une seule digue se rompant, la catastrophe serait d'autant plus terrible que les digues auraient été élevées plus haut. Au milieu de tous les systèmes proposés, un seul m'a paru raisonnable, pratique, d'une exécution facile, et qui a déjà pour lui l'expérience.
Avant de chercher le remède à un mal, il faut en bien étudier la cause. Or, d'où viennent les crues subites de nos grands fleuves? Elles viennent de l'eau tombée dans les montagnes, et très-peu de l'eau tombée dans les plaines. Cela est si vrai que, pour la Loire, la crue se fait sentir à Roanne et à Nevers vingt ou trente heures avant d'arriver à Orléans ou à Blois. Il en est de même pour la Saône, le Rhône et la Gironde, et dans les dernières inondations, le télégraphe électrique a servi à annoncer aux populations, plusieurs heures ou plusieurs jours d'avance, le moment assez précis de l'accroissement des eaux.
Ce phénomène est facile à comprendre : quand la pluie tombe dans une plaine, la terre sert pour ainsi d'éponge; l'eau, avant d'arriver au fleuve, doit traverser une vaste étendue de terrains perméables, et leur faible pente retarde son écoulement.
Mais lorsque, indépendamment de la fonte des neiges, le même fait se représente dans les montagnes, où le terrain, la plupart du temps composé de rochers nus ou de
graviers, ne retient pas l'eau, alors la rapidilé des pentes porte toutes les eaux tombées aux rivières, dont le niveau s'élère subitement. C'est ce qui arrive tous les jours sous nos yeux quant il pleut : les eaux qui tombent dans nos champs ne forment que peu de ruisseaux, mais celles qui tombent sur les toits des maisons et qui sont recueillies dans les gouttières forment à l'instant de petits cours d'eau. Eh bien ! les toits sont les montagnes et les gouttières les vallées.-Or, si nous supposons une vallée de deux lieues de brgeur sur quatre lieues de longueur, et qu'il soit tombé dans les vingt-quatre heures 0m,10 cent. d'eau sur cette surface, nous aurons, dans ce même espace de temps, 12,800,000 mètres cubes d'eau qui se seront écoulés dans la rivière, et ce phénomène se renouvellera pour chaque affluent du fleuve.
Ainsi, supposons que le Rhône ou la Loire ait dix grands affliients, nous aurons le volume immense de 128 millions de mètres cubes d'eau qui se seront écoulés dans le fleuve en vingt-quatre heures; mais si ce volume d'eau peut être retenu de manière à ce que l'écoulement. ne se fasse qu'en deux ou trois fois plus de temps, alors, on le conçoit, l'inondation sera rendue deux ou trois fois moins dangereuse.
Tout consiste donc à retarder l'écoulement des eaux. Le moyen d'y parvenir est d'élever dans tous les affluents des rivières ou des fleuves, au débouché des vallées, et partout où les cours d'eau sont encaissés, des barrages qui laissent dans leur milieu un étroit passage pour les eaux, les retiennent lorsque leur volume augmente, et forment ainsi en amont des réservoirs qui ne se vident que lentement. Il faut faire en petit ce que la nature a fait en grand. Si le lac de Constance et le lac de Genève n'existaient pas, la vallée du Rhin et la vallée du Rhône ne formeraient que deux vastes étendues d'eau ; car tous les ans, les lacs ci-dessus, sans pluie extraordinaire, et seulement par la fonte des neiges, augmentent leur niveau de deux ou trois mètres; ce qui fait pour le lac de Constance une augmentation d'environ 2 milliards et demi de mètres cubes d'eau, et pour le lac de Genève de 1,770 millions. On conçoit que cet immense volume d'eau, s'il n'était pas retenu par les montagnes qui, au débouché de ces deux lacs, l'arrêtent et n'en permettent l'écoulement que suivant la largeur et la profondeur du fleuve, une effroyable inondation aurait lieu tous les ans. Eh bien ! on a suivi cette indication naturelle il y a plus de cent cinquante ans, en élevant dans la Loire un barrage d'eau dont l'utilité est démontrée par le rapport fait à la Chambre, en 1847, par M. Collignon, alors député de la Meurthe.
Voici comment il en rend compte : a La digue de Pinay, construite en 1711, est à 12 kilomètres environ en amont de Roanne. Cet ouvrage, s'appuyant sur les rochers qui resserrent la vallée et enveloppant les restes d'un ancien pont que la tradition fait remonter aux Romains, réduit en cet endroit le débouché du fleuve à une largeur de 20 mètres; sa hauteur au-dessus de l'étiage est également de 20 mètres, et c'est par cette espèce de pertuis que la Loire entière est forcée de passer dans les plus grands débordements.
« L'influence de la digue de Pinay est d'autant plus digne d'attention qu'elle a été créée, comme le montre l'arrêt du Conseil du 23 juin 1711, dans le but spécial de modérer les crues et d'opposer à leur brusque irruption un obstacle artificiel tenant lieu des obstacles naturels, qui avaient été imprudemment détruits dans la partie supérieure du fleuve. Eh bien! la digue de Pinay a heureusement rempli son office au mois d'octobre dernier : elle a soutenu les eaux jusqu'à une hauteur de 21m,47 cent.
au-dessus de l'éliage; elle a ainsi arrêté et refoulé dans la plaine du Forez une masse d'eau qui est évaluée à plus de 100 millions de mètres cubes, et la crue avait atteint son maximum de hauteur à Roanne quatre ou cinq heures avant que cet immense réservoir fût complètement rempli.
« Si la digue de Pinay n'avait pas existé, non-seulement la crue serait arrivée beaucoup plus vite à Roanne, mais encore le volume d'eau roulé par l'inondation aurait augmenté d'environ 2,Î)0Û mètres cul les par seconde; la durée de l'inondation aurait été plus courte, mais l'imagination s'effraye de tout ce que cette circonstance aurait pu ajouter au désastre déjà si grand dont la vallée de la Loire a été le théâtre.
« D'ailleurs, l'élévalion des eaux en amont de la digue de Pinay n'a produit aucun désordre; bien loin de là : la plaine du Forez ressentira pendant plusieurs années l'action fécondante des limons que l'eau, graduellement amoncelée par la résistance de la digue, y a déposés.
« Tel a été le rôle de cet ouvrage, qu'une sage prévoyance a élevé pour notre sécurité et nous servir d'exemple. Or, il existe dans les gorges d'où sortent les affluents de nos fleuves un grand nombre de points où l'expérience de Pinay peut être renouvelée économiquement si les points sont bien choisis, utilement pour modérer l'écoulement des eaux, et sans inconvénient, et, le plus souvent, avec un grand profit pour l'agriculture.
« Au lieu de ces digues ouvertes dans toute leur hauteur, on a proposé de construire aussi des barrages pleins, munis d'une vanne de fond et d'un déversoir superficiel. Les réservoirs ainsi formés, pouvant retenir à volonté les eaux d'inondation, permettraient de les affecter, dans les temps de sécheresse, aux besoins de l'agriculture et au maintien d'une utile portée d'étiage pour les rivières. Il L'édit de 1711, dont parle M. Collignon, indique parfaitement bien le rôle que les digues sont appelées à jouer. On y lit le passage suivant : « Il est indispensablement nécessaire de faire trois digues dans l'intervalle du lit de la rivière où les bateaux ne passent point : la première aux piles de Pinay, la seconde à l'endroit du château de la Roche, et la troisième aux piles et culées d'un ancien pont qui était construit sur la Loire, au bout du village de Saint-Maurice; et, avec le secours de ces digues, les passages étant resserrés, lorsqu'il y arrive de grandes crues, les eaux qui s'écoulaient en deux jours auraient peine à passer en quatre ou cinq. Le volume des eaux, étant diminué de plus de la moitié, ne causera plus de ravages pareils à ceux qui sont survenus depuis trois ans. »
En effet, en 1856 comme en 1846, les digues de Pinay et de la Roche ont sauvé Roanne d'un désastre complet.
Remarquons, en outre, que, suivant M. Boulangé, ancien ingénieur en chef du département de la Loire, la digue de Pinay n'a coûté que 170,000 fr., et celle de la Roche 40,000, et il ne compte qu'une dépense de 5,400,000 fr. pour la création de cinq nouvelles grandes digues et de vingt-quatre barrages dont il propose la construction sur les affluents de la Loire. D'ailleurs, M. Polonceau, ancien inspecteur divisionnaire des ponts et chaussées, qui admet en partie le même système, pense qu'on pourrait faire ces mêmes digues en gazon, en planches et en madriers, ce qui serait encore plus économique.
Maintenant, comme il est très-important que les crues de chaque petit affluent n'arrivent pas en même temps dans la rivière principale, on pourrait peut-être, en multipliant dans les uns ou en restreignant dans les autres le nombre des barrages, retarder le cours de certains affluents, de telle sorte que les crues des uns arrivent toujours après les autres.
D'après ce qui précède et d'après l'exemple de Pinay, ces barrages, loin de nuire à l'agriculture lui seront favorable par le dépôt de limon qui se formera dans les lacs artificiels et servira à fertiliser les terres. ,, Là où les rivières charrient des sables, ces barrages auraient l'avantage de retenir
une grande partie de ces sables, et, en augmentant le courant au milieu des rivières, d'en rendre le thalweg plus profond. Mais quand même ces barrages feraient quelque tort aux cultures des vallées, il faudrait bien en prendre son parti, quitte à indemniser les propriétaires, car il faut se résoudre à faire la part de l'eau comme on fait la part du feu dans un incendie, c'est-à-dire sacrifier des vallées étroites peu fertiles au salut des riches terrains des plaines.
Ce système ne peut être efficace que s'il est généralisé, c'est-à-dire appliqué aux plus petits affluents des rivières. Il sera peu coûteux si l'on multiplie les petits barrages au lieu d'en élever quelques-uns d'un grand relief. Mais il est clair que cela n'empêchera pas les travaux secondaires qui doivent protéger les villes et certaines plaines plus exposées.
Je voudrais donc que vous fissiez étudier ce système le plus tôt possible sur les lieux mêmes par les hommes compétents de votre ministère.
Je voudrais qu'indépendamment des digues qui doivent être élevéessurles points les plus menacés, on fit à Lyon un déversoir semblable à celui qui existe à Blois; il aurait l'avantage de préserver la ville et d'augmenter beaucoup la défense de cette place forte.
Je voudrais que, dans le lit de la Loire, on élevât pendant les basses eaux, et parallèlement au cours du fleuve, des digues faites en branchages, ouvertes en amont, formant des bassins de limonage, ainsi que le propose M. Fortin, ingénieur des ponts et chaussées. Ces digues auraient l'avantage d'arrêter les sables sans arrêter les eaux, et de creuser le lit de la rivière.
Je voudrais que le système proposé pour le Rhône par M. Vallée, inspecteur général des ponts et chaussées, fût sérieusement étudié avec le concours du gouvernement suisse. Il consiste à abaisser les eaux du Rhône à l'endroit où il débouche du lac de Genève, et à y construire un barrage. Par ce moyen on obtiendrait, selon lui, un abaissement des hautes eaux du Léman utile au Valais, au pays de Vaud et à la Savoie; une navigation meilleure du lac, des embellissements pour Genève, des inondations moins désastreuses dans la vallée du Rhône, une navigation meilleure de ce fleuve.
Enfin, je voudrais que, comme cela existe déjà pour quelques-uns, le régime des grands fleuves fût confié à une seule personne, afin que la direction fût unique et prompte dans le moment du danger. Je voudrais que les ingénieurs qui ont acquis une longue expérience dans le régime des cours d'eau pussent avancer sur place et ne pas être distraits tout à coup de leurs travaux particuliers ; car il arrive souvent qu'un ingénieur qui a consacré une partie de sa vie à étudier soit des travaux maritimes au bord de la mer, soit des travaux hydrauliques à l'intérieur, est tout à coup, par avancement, employé à un autre service, où l'État perd le fruit de ses connaissances spéciales, résultat d'une longue pratique.
Ce qui est arrivé après la grande inondation de 1846 doit nous servir de leçon : on a beaucoup parlé aux Chambres, on a fait des rapports très lumineux, mais aucun système n'a été adopté, aucune impulsion nettement définie n'a été donnée, et l'on s'est borné à faire des travaux partiels qui, au dire de tous les hommes de science, n'ont servi, à cause de leur défaut d'ensemble, qu'à rendre les effets du dernier fléau plus désastreux.
Sur ce, je prie Dieu, monsieur le ministre, qu'il vous ait en sa sainte garde.
NAPOLÉON.
Plombières, 19 juillet 1856.
NOTICE.
MODE D'ACTION DES VÉGÉTAUX SUR LES MASSES D'EAU ET SUR LES TERRAINS EN PENTE; DE LEUR INFLUENCE COMME FORCE MODÉRATRICE DES COURS D'EAU.
Je crois d'abord que nous n'avons aucun moyen radical et exclusif de lutter contre une aussi grande puissance que celle qui se fait. sentir dans une inondation ; mais il est bien certain que si on emploie judicieusement, avec esprit d'ordre et de subordination, tous les vrais moyens qui se présentent, on aura trouvé un frein pour la gouverner; et c'est beaucoup, car alors tout pourra être prévu, calculé, et par suite tous les effets seront atténués.
CAUSES DES INONDATIONS.
Elles sont indiquées comme il suit dans la lettre adressée à M. le ministre des travaux publics : « Avant de chercher un remède à un mal, il faut en bien étudier la « cause. Or, d'où viennent les crues subites de nos grands fleuves? Elles « viennent de l'eau qui tombe dans les montagnes et très-peu de l'eau « tombée dans les plaines.
« Ce phénomène est facile à comprendre : quand la pluie tombe dans « une plaine, la terre sert pour ainsi dire d'éponge; l'eau, avant d'arriver « au fleuve, doit traverser une vaste étendue de terrains perméables, et « leur faible pente retarde son écoulement. Mais lorsque, indépendamment « de la fonte des neiges, le même fait se représente dans les montagnes, « où le terrain, la plupart du temps composé de rochers nus ou de gra« viers, ne retient pas l'eau, alors la rapidité des pentes porte toutes les « eaux tombées aux rivières, dont les eaux s'élèvent subitement. C'est ce « qui arrive tous les jours sous nos yeux quand il pleut : les eaux qui « tombent dans nos champs ne forment que peu de ruisseaux, mais celles « qui tombent sur les toits des maisons et qui sont recueillies dans les « gouttières forment à l'instant de petits cours d'eau. Eh bien! les « toits sont les montagnes et les gouttières les vallées. »
Le toit de cette maison, pris pour exemple, n'est autre dans la nature que la montagne déboisée, le rocher mis à nu.
Mais, nous le demandons, le même effet se produirait-il si le toit de la maison était en chaume au lieu d'être en tuile?
Assurément non !
Mais reprenons notre toit en tuile ; et supposons qu'au bout de quelques années, par suite de l'incurie du propriétaire, ce toit se soit couvert de lichens, de mousses, etc., de ces plantes à organisation très-simple qui viennent sur les pierres, sur les troncs d'arbre, dans les lieux les plus arides, sur les sables même des landes et du désert.
Supposons que le temps ait encore marché et que ces premiers végétaux, se succédant les uns aux autres, aient déjà pu former de leur détritus, mêlé aux éléments terreux de la tuile désagrégée, un sol primitif d'une certaine épaisseur.
Sur ce sol, ainsi préparé pour les recevoir, on verra bientôt apparaître, çà et là d'abord, puis partout ensuite, des plantes d'une organisation plus parfaite : des sedums, des crucifères, des graminées viendront y implanter leurs racines fibreuses et traçantes, et le sol ne suffisant plus à leur besoin d'extension, elles pénétreront avec une force végétative inconcevable entre les interstices des tuiles, dans leurs fissures, et constitueront Iii, pour le sol meuble qui doit les nourrir, une force de résistance sur la tuile capable d'arrêter de fortes impulsions.
Si l'on a la patience d'attendre, si, pour nous servir toujours du même exemple, le propriétaire abandonne complètement sa maison, indubitablement l'on verra au bout d'un certain temps sur ce toit une surface verdoyante, et, au milieu des plantes herbacées, l'on verra déjà apparaître quelques arbustes.
Eh bien! arrêtons-nous là, et demandons-nous si y effet désastreux signalé sur le toit en tuile, bien conservé, se produira sur ce même toit abandonné à lui-même depuis quinze ans et recouvert de cette croûte spongieuse verdoyante?
Évidemment, non !
Et la même observation .constaterajt au moment d'une averse, l'effet suivant, qui ne serait autre que l'effet de l'éponge.
L'observateur verrait que l'eau, au lieu de tomber en masse et immédiatement dans la gouttière pour y former un courant d'eau rapide et quelquefois débordant, comme il l'avait remarqué il y a quinze ans, n'y tombe plus que peu à peu et par petits filets et bien longtemps encore après la pluie ; et dans la gouttière, il reconnaîtrait un cours d'eau lent et normal (1).
Voici l'effet ; voici le principe :
(t) Les montagnes, effets du soulèvement de l'écorce terrestre, étaient originairement dénudées ; leur boisement a été l'effet du temps et de la nature. Qu'on préserve les pentes déboisées de toute atteinte dévastatrice, et les mêmes causes amèneront les mêmes effets.
Si on le peut, qu'on aide avec discernement la nature, et l'on hâtera l'état de choses qu'on veut obtenir.
Étendons-le: doublons, multiplions les forces, et nous aurons son application sur un coteau, sur une montagne, sur une chaîne de montagnes, sur toute une contrée montagneuse.
Cet effet peut ainsi se traduire : L'ensemble du sol et des végétaux qu'il nourrit, ou la croûte végétative qui, par suite du temps, se forme et s'attache aux pentes dénudées, est une véritable éponge qui, en retenant l'eau et en modérant son écoulement, fait l'office d'un réservoir, Et par ce fait, les pentes se trouvent un peu transformées en plaines.
Mais, remarquons-le, l'effet que nous venons de constater est purement mécanique, et il est dû au sol et à la plante considérée comme corps inerte.
Les plantes exercent encore deux autres effets : elles agissent physiquement et physiologiquement.
Les plantes agissent physiquement sur la masse d'eau versée, en favorisant son évaporation. On comprend que 1 mètre cube d'eau compacte, c'est-à-dire qui ne présente au milieu évaporant que 6 mètres carrés de surface, s'évaporera moins vite que 1 mètre cube d'eau divisé en deux demi-mètres cubes, présentant ensemble 12 mètres carrés de surface.
C'est ici la goutte d'eau qui, au lieu de tomber directement sur le sol, vient se diviser et s'étendre sur les feuilles et les branches des arbres.
Les plantes agissent physiologiquement sur l'eau en en absorbant une partie.
Ou sait que par leurs feuilles les végétaux décomposent l'eau et s'assimilent l'hydrogène pour rejeter l'oxygène ; Et que par les racines ils pompent l'eau, véhicule naturel des principes nutritifs qu'ils trouvent dans le sol.
Par conséquent si M est la masse d'eau suspendue au-dessus d'un massif de bois ou tout simplement et plus généralement au-dessus d'une surface verdoyante, e la quantité d'eau évaporée, a celle absorbée, Ce sera le reste M - (e + a) qui arrivera au sol et servira à alimenter nos cours d'eau.
Nous résumerons comme il suit l'action des plantes sur la masse d'eau et les terrains en pente : Les plantes contribuent (1) par leurs détritus à former un sol sur les pentes dénudées ;
(1) Nous disons contribuent, parce que le sol qui se forme sur la roche se compose de deux éléments distincts : un élément minéral produit de la décomposition de la roche, et un élément végétal produit de la décomposition des plantes.
Par leurs racines, elles fixent ce sol sur la roche, en empêchent l'éboulement et solidifient même sur sa base la roche fracturée.
Les plantes et leur sol forment sur la roche une croûte spongieuse qui, à l'exemple d'un réservoir, retient la masse d'eau versée et ne la laisse plus s'échapper que goutte à goutte et par petits filets.
Sur la masse d'eau condensée et destinée à tomber, les plantes en retranchent deux parts : une part qu'elles vaporisent et une autre part qu'elles absorbent. Leur influence sur les cours d'eau est donc un fait incontestable.
Et maintenir l'état boisé des terrains en pente est une conséquence de cette utile influence.
On trouvera en ce moment des terrains en pente à trois états différents : 1° Des pentes boisées; 2° Des pentes en voie de se déboiser et en voie de se reboiser; 3° Des pentes dénudées.
Le tout appartenant à l'Etat, aux communes, aux établissements publies et aux particuliers.
L'Etat a tout pouvoir sur les forêts qui lui appartiennent, mais il a un pouvoir fort restreint sur les bois des communes et aucun sur ceux des particuliers.
D'un autre côté, l'administration des eaux et forêts, telle qu'elle est organisée, c'est-à-dire l'administration des eaux et forêts, ADMINISTRATION FINANCIÈRE, est-elle bien apte aux grandes missions?.
Mais, pour en revenir à la question qui nous occupe et par application de cet aphorisme donné dans la lettre déjà citée, Tout consiste donc à retarder Vécoulement des eaux.
Je me suis encore demandé si l'on ne pourrait pas tirer un parti avantageux des grands végétaux en plaine, pour diminuer la vitesse des courants sur nos petits affluents et y former instantanément et dans les cas urgents une série de barrages temporaires. Il s'agirait, pour arriver à ce but, de placer stratégiquement sur le bord des cours d'eau, soit par bandes continues, soit par groupes isolés, des massifs de bois.
Cette idée m'est venue en observant : 1° Que dans les hautes crues les berges des cours d'eau complètement dénudés sont toujours plus ou moins dégradées et souvent emportées; que celles des cours d'eau boisés, au contraire, sont presque toujours conservées et rarement endommagées; 2° Que lorsque la cuvette est à plein bord et à fortiori lorsqu'elle est dépassée par l'eau, la vitesse du courant est moindre dans l'affluent boisé que dans celui qui est dénudé.
Si l'on trouve cette force de résistance des massifs de bois sur le bord
des eaux suffisamment intense pour atténuer d'une manière appréciable la puissance des courants, ne pourrait-on pas dès lors maintenir boisés, sur une surface déterminée et proportionnelle à la largeur de l'affluent, les deux bords de cet affluent.
Déplus, ces deux bandes de vieilles futaies situées le long des affluents, dans les vallées exposées aux inondations, ne pourraient-elles pas être considérées comme des matériaux tout portés et tout préparés pour y établir immédiatement, lorsque besoin serait, des barrages temporaires; d'habiles ouvriers auraient en bien peu de temps abattu et jeté au travers du courant ces masses de grands arbres.
Ce serait une futaie jardinée qu'il conviendrait de maintenir là.
Lorsque ces arbres seraient arrivés à maturité, le propriétaire riverain pourrait en profiter, à la condition de les remplacer.
Ces vieux arbres abattus et sacrifiés par place seraient bientôt remplacés. On sait avec quelle vigueur croissent certaines essences sur le bord des eaux ; dix ou quinze années suffisent pour former un tronc résistant et utile. CHEVAL-HUBERT, Propriétaire de bois.
REVUE COMMERCIALE.
MOUVEMENT DES PORTS PENDANT LE DEUXIÈME TRIMESTRE 1856.
Les arrivages sur les ports ont été considérables pendant le trimestre, Malgré le mauvais temps presque continu. Les enlèvements d'ailleurs, non moins actifs, ont fait presser à tous prix les transports par terre des coupes aux ports flottables.
Il a fallu de la part des exploitants des sacrifices dont on ne tient pas assez compte, pour maintenir l'équilibre entre la production et la consommation par les temps si peu convenables aux transports. Les attelages doublés, les équipages détériorés, les prix doubles parfois des prix ordinaires et toujours de beaucoup au-dessus des cours normaux sur lesquels on avait compté en achetant les coupes. C'étaient là des mesures héroïques, capables de compromettre des opérations jugées bonnes à l'état normal, et devenues souvent mauvaises, toujours médiocres, par l'addition de ces charges inattendues.
Il faudra tenir grand compte de cette situation pour estimer la valeur des coupes nouvelles bientôt à vendre ; les prix de main-d'œuvre ou transport établis une fois en hausse sont toujours difficiles à changer en teInps ordinaire. Toute proposition de baisse est impossible à mettre
en avant soit pour façons, soit pour transports, tant que le prix des objets de première nécessité restera ce qu'il est pour les hommes et pour les chevaux.
Or, le prix de revient des bois étant augmenté dans une proportion notable par les deux éléments façons et transports, il faudra ou que le consommateur paye le bois plus cher, ou que le producteur le vende un peu moins, l'intermédiaire exploitant ne peut prendre que sur l'un ou sur l'autre les frais plus élevés d'exploitation dont il a subi cette année toutes les charges.
A qui donc faudra-t-il demander le sacrifice à faire? Nous croyons que personne ne s'y soumettrait volontiers, voyons donc sur qui forcément retombera la charge. La situation de l'approvisionnement nous donnera sur ce point quelques indications utiles.
Les bois à brûler se montrent sur les ports, bu nombre de 28,500 décastères ; il n'y en avait que 23,200 décastères à pareille époque en 1855.
Cette quantité disponible refroidit un peu le commerce, qui s'empresse peu de faire venir à Paris. Les prix sont élevés ; il y a peu ou point de risques d'augmentation nouvelle, quelques chances, au contraire, et plus d'espoir encore de baisse, et on s'abstient, momentanément au moins.
Aussi, dans le mois de juin, correspondant à la fin du trimestre, on n'a fait entrer dans Paris que 50,479 stères de bois au lieu de 92,516 qu'on entrait l'année dernière.
Il y a donc au moins incertitude au sujet des bois à brûler, et on ne peut guère se dissimuler que c'est une condition peu favorable pour les adjudications.
Les bois blancs eux-mêmes sont entrés en moins grande quantité dans le mois de juin ; la consommation de cet article n'éprouve cependant guère de ralentissement, et on ne peut espérer de baisse sur une matière à peine suffisante ; aussi, sommes-nous porté à croire que c'est par ricochet seulement ou par imitation qu'il y a moins d'arrivages à Paris en bois blanc.
Le mouvement des ports, loin de constater le même symptôme, accuse 41,930 stères à l'enlèvement. Le dernier trimestre n'en présentait que 19,470. Les forêts ont remplacé le vide, le stoc resté suffisant pour faire face aux besoins.
De cela, nous pouvons conclure que les coupes en bois blanc trouveront acquéreurs aux conditions de 1855.
Les coterets marquent des différences assez sensibles et sur le dernier trimestre et sur le trimestre correspondant.
Les ports en ont reçu plus du double. Le commerce a disposé de près de 1,400,000, chiffre égal à peu de chose près aux arrivages ; il en reste
cependant sur les ports 120,000 de moins qu'en 1855. L'entrée dans Paris a un peu baissé.
Cet article trouve une rude concurrence dans le prix élevé des charbons.
Les achats devront en être difficiles et les prix soutenus.
Le disponible en charbon va toujours baissant. Il n'en reste que 31,000 hectolitres sur les ports au 1er juillet, quoique la saison soit bonne pour la fabrication en forêt.
Pendant tout le trimestre, on n'a pu recevoir pour envoyer à Paris que 235,000 hectolitres, c'est-à-dire moins de la consommation d'un mois, puisqu'en juin dernier, il en entrait à Paris 260,000 hectolitres, et 276,000 en juin de l'année précédente.
Les chemins de fer ont cependant apporté des quantités dont nous ne savons pas le chiffre, mais qui doivent être assez fortes pour suffire à la consommation.
Ce qu'on sait, c'est qu'il n'y a pas d'avance, c'est que les dépôts vendent au fur et à mesure des arrivages, qu'on ne met rien en halle, et que l'hiver viendra sans qu'on ait en avance ces larges provisions qui attendaient leur tour de vente autrefois plus que de raison peut-être.
Aussi les cours sont-ils au plus haut point qu'on les ait vus depuis bien longtemps, et on ne peut pas espérer de réduction qui ramène aux prix ordinaires.
Les bois à charbon sont donc certains de trouver acheteurs lorsqu'ils seront dans les limites et dans les conditions de qualité nécessaires pour venir sur le marché de Paris.
Mais il n'en faut pas conclure que cet état défavorable soit commun à toutes les forêts du territoire. Les conditions ne sont pas les mêmes là où les charbons servent à la fabrication de la fonte.
Le fer a quelque peu baissé depuis le commencement de l'année, et tout porte à croire que cette baisse fera de nouveaux progrès. Il est donc peu probable que les bois à charbon se maintiennent aux prix de 1855, lorsqu'ils seront destinés exclusivement aux forges.
La situation est moins tranchée pour les charpentes ; nous voyons pour cet article ce fait singulier, que la marchandise est presque rare et que néanmoins elle est en baisse prononcée.
La consommation est positivement moins grande à Paris; il n'est entré en juin que 9,348 stères, au lieu de 10,736 entrés en juin de l'année dernière. Le mouvement des ports a été aussi moins important, surtout pour les arrivages, qui restentdel7,000 décastères au-dessous des enlèvements.
Si on vend moins, si on vend moins cher, la conclusion toute simple est qu'on devra vouloir acheter moins cher les coupes qui fourniront la matière
aux spéculations de l'année prochaine. Remarquons à l'appui de cette opinion, qu'il y a moins de consommation probable en 1857.
Les lignes de chemins de fer en construction n'auront plus de besoins à satisfaire. Le matériel des chemins de fer qui a tant usé de gros bois paraît être complet, on ne fabrique plus ou on fabrique peu relativement.
Si le fer baisse, on en emploiera d'autant plus dans les constructions, et ce sera une redoutable concurrence pour le bois.
Tout enfin bien pesé, nous craignons que les futaies ne trouvent pas aux adjudications prochaines cet écoulement facile et surtout avantageux qu'elles avaient aux adjudications dernières. Nous craignons la baisse en forêt, parce que la baisse à Paris menace de se maintenir.
Et pourtant, il ne reste au 1er juillet que 193,438 décastères de charpente sur les ports, et nous ne croyons pas en avoir jamais vu si peu. Le restant était de 201,000 l'année dernière à pareille époque.
Les sciages sont à l'état normal comme approvisionnement. L'arrivage dépasse l'enlèvement pour le chêne. C'est le contraire pour le hêtre qui cependant présente encore un restant à part de 41,475 décastères, quand il ne reste que 38,445 décastères de chêne.
Notre dernière revue trimestrielle signalait des arrivages plus importants que de coutume en sciages de bois blanc. Le chiffre de 207,000 décastères nous paraissait fort élevé déjà, et voici que le second trimestre en envoie à peu près 304,000 décastères, qui d'ailleurs ne font que poser, puisque le commerce en prend immédiatement 271,000. C'est une immense consommation toute spéciale, qui atteste le commerce d'exportation qui se fait à Paris.
Les sciages de bois blanc sont exclusivement en peupliers dont la presque totalité se débite en voliges ou planches fort minces destinées à faire les caisses d'emballage de ces mille objets précieux confectionnés par l'industrie parisienne, et répandus soit dans les provinces, soit à l'étranger.
Un million de décastères de peupliers se trouvent annuellement employés à ces emballages quand la vente est active, et chaque décastère donne à peu près 50 mètres courants de petites planches à emballage.
Quel peut être le nombre, quelle peut être la valeur de ces objets dont l'emballage emploie 50 millions de mètres de planches ?
Quelle solidarité, quels rapports nombreux existent forcément entre toutes les branches de production nationale?
La pensée d'un artiste prend corps sous les mains habiles d'un ouvrier parisien artiste lui-même, dans une œuvre créée pour l'ornement de quelque somptueuse demeure, sur un point quelconque du monde.
Des rubans sont noués de certaine façon par les jolis do/gts de nos
Parisiennes, et mêlés à des fleurs, des dentelles. L'ensemble constitue un objet de mode qui doit orner un gracieux visage à Saint-Pétersbourg.
Mais pour que ces objets si précieux arrivent à destination avec la fraîcheur nécessaire, il a fallu que la main d'un terrassier plantât, il y a vingt ans, une branche de peuplier sur les bords de la Seine ou de l'Aube.
Cette branche, grossie au profit du propriétaire du sol, est devenue un arbre. Des Auvergnats sont descendus de leurs montagnes pour scier cet arbre en planches, et des bateliers ont amené ces planches aux layetiers de Paris, qui en ont fait des enveloppes protectrices.
Ces sciages en bois blanc répandent par rapport au prix de la matière plus de salaires que tout autre essence de bois. Un décastère de peuplier, qui ne vaut souvent sur place qui 1 fr. 25 c., coûte quelquefois 1 fr. 50 c.
de débit en voliges, sans compter les transports par terre et par eau et les manutentions diverses à subir avant d'arriver chez l'ouvrier qui l'emploie.
Le tableau de situation des ports nous présente toujours sans mouvement un autre article dont l'appropriation à sa destination définitive est une source de travail bien rétribué quand ce travail est nécessaire ; nous voulons parler des merrains, qu'on a cessé de fabriquer depuis plusieurs années que la vigne ne donne que peu ou point de récoltes.
La matière, d'autant plus recherchée au moment du besoin qu'il la faut de qualité spéciale et peu commune, n'a pas aujourd'hui plus de valeur que le bois ordinaire, et ceci ne contribue pas peu à la prévision d'une diminution du prix des futaies de chêne. On ne fait pas de merrains, ou le peu qui s'en fait reste sur les ports, où nous en voyons une certaine quantité amoncelée depuis quatre ans, et attendant une année d'abondance de raisin.
Les lattes ont eu plus de succès; on en a beaucoup fabriqué sans doute pendant le printemps, car nous en voyons arriver 103,403 bottes au lieu de 34,000 au premier trimestre. La vente est de 85,000 contre 48,000, et néanmoins, il en reste sur les ports près de 23,000 bottes au lieu de 10,000 restant au 1er avril.
Les échalas comme le merrain souffrent par la même cause, on en fait peu, on en vend peu, et il en reste peu sur les ports, parce que les vignerons ne récoltant pas ne peuvent pas faire de dépenses dans leurs vignes.
Enfin les écorces, achetées cher dans un moment où l'on croyait avoir besoin extraordinaire de cuirs, arrivent en grandes quantités dans les magasins et sur les ports.
Mais sur ce produit si important des coupes en exploitation, il y a certitude trop acquise de baisse, avec laquelle il faudra compter en vendant les coupes nouvelles. Cette baisse n'est pas de moins de 20 à 25 pour 100,
et elle frappera tout entière sur le produit du sol, puisque la main-d'œuvre restera dans les mêmes conditions de prix.
Nous ne terminerons pas cet article sans faire remarquer l'augmentation énorme constatée en juin dans l'entrée des fers et des fontes à Paris, augmentation d'autant plus extraordinaire, que tous les bois sont dans la condition opposée et se présentent en baisse.
Remarquons, en outre, que l'impôt ne frappant que les fers et fontes employés dans les constructions, cette affluence si grande à l'entrée indiquerait une recrudescence dans le choix donné au fer sur le bois. Ceci pourrait n'être pas étranger au mouvement en arrière qu'il nous faut bien constater dans la vente des bois d'œuvre à Paris.
Il est entré dans le mois de juin 1856, 952,500 kilos de fer, au ieu de 600,000 kilos, chiffres ronds entrés en 1855.
La proportion, moins grande sur les fontes, présente encore un avantage de 25 pour 100 en faveur de cette année.
En présence de ces faits, le vendeur devra-t-il élever ou maintenir ses prétentions? L'acheteur peut-il s'engager sans crainte et suivre les cours des dernières ventes? Les chiffres peuvent servir à former les opinions, ils sont officiels. Quant aux réflexions dont nous les faisons suivre, elles sont le résultat de nos propres observations, nous les livrons au jugement des parties intéressées. DELBET.
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FERS ET DES FONTES.
JUIN 1856.
DÉSIGNATION DROIT QUATlTÉS ENTIUES DIFFÉRENCE des NATURE, EIV JUm- SUr-le ibois correspond.
des D OCTROI EN JUIN.. ,-.
D'UNITÉS. décime I '"- Augmentation Diminution HATIERES. compris. 1856. 1855. 11156. 1856.
Bois à brûler, dur. stère. 3 00,0 il) 30,479 92,316 « 6 1,837 — blanc. - 2 22,0 (2) 15,723 19,464 » 3,741 Cotrets de bois dur. - l 80,0 2,099 2,838 » 739 Slenuise et fagots. - 108,0 2,102 5,151 » 3,049 Charbon de bois hectolitre. 0 60,0 260,429 276,710 » 16,281 Poussierde ch. debois — 030,0 13,100 22,871 » 9,771 Charbon de terre. 100 kilogr. 0 72,0 31,066,267 31,831,602 » 775,335 Charpente et sciage bois dur. stère. 11 28,0 D,348 10,736 » 1,388 Bois blanc — 9 00,0 13,023 15,516 » 2,493 Lattes et treillages. les ioo bottes. 1128,0 10,787 19,036 » 2,249 Bois dedéch. en chêne mètre carré. 021,6 621 466 155 » — en sapin. — 0 12,0 4,644 5,864 » «220 Fers, employés dans les constructions. 100 kilog. 3 60,0 952,507 599,958 352,549 » Fonte, employée dans 167,177 les constructions.. — 2 40,0 599,390 1 432,113 »
(1) Ces 30,479 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 12,191,600 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 6,095,800 kil. de houille.
(2) ces 15,723 stères de bois, multipliés par 300 kil., poids du stère de bois blanc, représentent 4,716,900 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 2,358,450 kil. de houille.
Approvislouiioiitcitt de Paris.—Hoiiicinciif des ports pondant le deuxième trtmcmtve M8&0.
I BUIs A liRULEIt. n| BOIS A OUVRER. BOIS DIVERS.
liOIS NfcUFS. er "3 W g. SCIAGES ,. „
INSPECTIONS. Bois £ 2 g- sa SCIAGES 1 Cer- Ecorces Cotrets. - S g S» g de de de de l\lcr- Cer- Ecorces de flot. dur. tendre. pi S. g gruau. pente, chêne, hêtre, bois bl. Ide. Lattes. Echalas. a Mn.
Décast. Décast. Décast Unités. Unités. Hectol. Décist. Décist. chêne. hêtre. Décist. Dècist. Milliers. Milliers. Bottes. Bottes. Boues.
Decast. 'Decast. Décast. Unités. Unités. Hcctul. Il II Boues.
ARRIVAGES PENDANT LE 2e TRIMESTRE.
Compiègne. 22 1,039 88 882,500 1) » 30,071 36,720 10,146 1,141 25,618 » » » 36,507 50 1) Port-aax-Perches. 155 788 231 136,288 100,345 414 7,339 5,781 1,734 7,823 47,000 » H 1) 3,992 1.671 1) Château-Thierry » 646 2,026 33,720 28,000 12,479 14,109 100,37 i 40,331 136 58,503 64,706 » » 786 1,076 » Fontamebleau. » 826 249 146,129 89,071 372 520 15,756 3,048 » 2,470 1,111 » » 30,605 » » Troyes. » 121 458 64,595 » 18,256 » 44,497 857 1) 87,863 » 400 » » » » Joigny.,. 244 501 925 112,696 33,039 75,250 923 32.395 687 » 80,477 » » 1) 19,513 3,611 10,892 Clamecy. 7,108 2,901 562 1) » 54,301 889 22,217 2,204 » « » 10 » 3,287 4,550 » Rogny » 1,029 330 164,066 61,596 66,175 636 4,239 236 » 1,908 226 » 1) 1,767 325 165,163 Cosne. « 268 76 2,54S 72,315 29,945 » 9,681 603 1) » » 4 » 6,946 24.062 15,215 7,529 8,119 4,945 1,542,539 390,966 257,192 54,487 271,640 59,846 9,100 303,839 66,043 4l4 » 103,403 35,345 191,270 ENLÈVEMENTS PENDANT LE 2e TRIMESTRE.
Compiègne. 80 843 86 783,000 1,000 » 31,509 ] 31,009 9,853 1,323 20,132 » 1) 1) 36,003 880 » Porl-aux-Prches. 12 429 153 55,72 164,668 414 6,917 5,583 1,153 15,815 20,765 » » 1) 4,329 975 » Chàteu-Thlerry. 667 2,044 24,337 14,600 7,001 8,586 89,319 31,558 387 49,014 60,494 » » 786 1,076 » fontamebleau. » 1,107 164 143,518 89,691 372 528 20,153 2,262 » 1.403 262 Il » 24,307 » 1) Troyes. » 151 357 65,933 Il 17,657 » 55,198 2,664 » 99,753 1) Il 1) 421 Il Il JOI{.\ny. 367 1,116 744 121,292 105,418 73,106 800 32,408 302 38 79,604 » » » 12,549 9,869 4,987 Clamecy. 5,071 3.279 340 » » 53,404 665 30,270 1,725 Il Il » 8 Il 2,273 13,145 Il Rogny. » 2,473 223 198,278 280,004 51,593 453 10,883 » » 865 176 Il » Il Il 105,682 Cosne. » 535 82 1,903 102,730 31,567 » 13,715 1.324 » Il » 8 » 3,607 15,088 » 5.530 10,600 4,193 1,393,982 658,111 235,114 49,458 288,538 50,841 17,563 271,536 60,932 16 » 84,275 41,033 110,669 MARCHANDISES RESTANT SUR LES PORTS AU 1" JUILLET 1856.
Compiègne. 23 1,011 8 522,200 2,300 » 5,390 19,874 3,566 5,632 7,076 » » » » 6,250 50 Port-aux-Pcrches. 143 1,018 220 104,990 43,904 Il 1,049 7,540 2,167 35,342 37,835 » 5 Il 1,163 2,132 « Châleu-Thierry » 995 2,268 15,407 2,900 5,478 9,669 60,246 25,422 176 24,675 17,958 » » Il » » Fontainebteau. Il 1,804 270 70,826 28,628 Il 148 9,627 2,670 325 2,194 3,562 » » 6,298 82 « Troyes. » 296 363 2,808 Il 599 » 30,389 3,383 M 22,343 Il 400 » 94 Il » Joiny. 236 867 369 23,172 11,630 3,676 123 24,409 385 » 8,936 » » » 8,127 13,455 5,905 Clamecy. 13,4l7 6,605 721 » Il 4,002 298 16,215 716 Il Il Il 21 » 1,099 7,074 Il Rogny. Il 1,795 246 114,595 149,938 16,313 985 19,286 236 » 1,669 50 » » 1,767 689 64.776 Cosnc. Il 251 45 1,192 58,216 1,068 » 5,852 » » « Il 19 » 4,240 37,616 15,215 - --- 13,819 14,642 - 4,510 - 855,190 297,516 31,136 17,662 193,438 38,545 41,475 104,728 21,570 445 » 22,788 67,298 j 85,946 IL RESTAIT SUR LES PORTS D'APPROVISIONNEMENT DE PARIS AU 2* TRIMESTRE 1855 (le. JUILLET).
1 9,8871 13,312] 3,0991 971,3261264,1681 48,6371 11,421|201,015| 31,3181 42,205152,2501 6,4261 751 » | 18,0351 58,9181 66,718
BOIS. - ADJUDICATIONS DES COUPES DE BOIS.
Voici le moment des adjudications des coupes de bois domaniaux et communaux qui approche ; on annonce des ventes : A Dijon (Côte-d'Or), pour le 50 août.
A Beaune, pour le 1er septembre.
A Toul, pour le 4 septembre. :
A Semur, pour le 4 septembre.
A Chàtillon, pour le 6 septembre.
A Bar-sur-Aube (Aube), pour le 20 septembre.
A Wassy, pour le 22 septembre.
A Chaumont, pour le 25 septembre.
A Troyes (Aube), pour le 25 septembre.
A Langres (IL-Marne), pour le 29 septembre, A Avallon (Yonne), pour le 30 septembre.
A Tonnerre (Yonne), pour le 2 octobre.
A Auxerre (Yonne), pour le 4 octobre.
A Joigny (Yonne), pour le 6 octobre.
A Sens (Yonne), pour le 8 octobre.
La commune de Moutier-en-Der a vendu les solives environ 4 fr. 75 c.
- Les charbons reviennent à 18 fr. le mètre cube.
ALIÉNATIONS.
Les Annales forestières ont publié, dans leur numéro du mois de mars 1856, p. 75, l'état général des bois domaniaux dont l'aliénation devait avoir lieu en 1856, conformément aux dispositions de l'art. 20 de la loi des finances du 5 mai 1855.
Voici les dates auxquelles doivent avoir lieu quelques-unes de ces aliénations : 2e CONSERVATION. — Evreux, le 28 août 1856. — Bois domanial de Longboel, aménagé en futaie. — Contenance : 610 hectares 44 ares, divisé en six lots.
Itonen, le 30 août 1856. — Bois domanial de Maulevrier. —Contenance : 31 hectares 43 ares, divisé en quatre lots.
3e CONSERVATION. — Dijon, le 29 août 1856. — Forêt de Folchetif, arrondissement de Dijon, commune d'Epcrnay. — Lot unique : canton des Accrues-de-FoIchétif. —
Contenance : 28 hectares 95 ares de taillis sous futaie.
Forêt de Borne, arrondissement de Beaune, commune de Villy-le-Moulier. —
Lot unique : canton de Bois-au-Chat. — Contenance : 19 hectares 6 ares de taillis sous futaie.
Forêt de Charme-Boullerain, arrondissement de Chàtillon-sur-Seine, commune
de Pothières. — Lot unique : canton du Petit-Charme-Boullerain. — Contenance : 52 hectares 1 are de taillis sous futaie.
Forêt de Lugny, arrondissement de Châtillon, commune de Leuglay. _18r Lot: canton de la Vigne. — Contenance : 85 ares 50 centiares de taillis sous futaie.
2e Lot : cantons de Combe-Bugnon, le Charmois, Bouchot-Saint-Denis, Champdu-Bois, Roche-d'Argilière, la Laume et Bouchot-de-la-Carrière. — Contenance : 13 hectares 53 ares de taillis sous futaie.
3e Lot : cantons de Don-Roulot, le Parquet, Bouchot-de-la-Maison-Neuve, Bouchotdu-Four-à.Chaux, les Quatre-Bouchots-de-Don-Roulot. — Contenance : 7 hectares 4 ares de taillis sous futaie. Forêt du Sarcy, arrondissement de Châtillon, commune de Saint-Broing-IesMoines. -1er Lot : canton Vau-Monnoyer. — Contenance : 3 hectares 68 ares de taillis sous futaie.
28 Lot : canton Vau-Barbenne. — Contenance : 3 hectares 60 ares de taillis sous futaie.
3e Lot : canton de Montoilles. — Contenance : 33 hectares 60 ares de taillis sous futaie.
Forêt de l'Essart, arrondissement de Châtillon, commune de Verdonnet. — Lot unique : canton du Débat. — Contenance : 15 hectares 72 ares de taillis sous futaie.
Forêt de Duesmes, arrondissement de Châtillon-sur-Seine, commune d'Orret. —
Lot unique : canton de la Côte-au-Singey. - Contenance : 2 hectares 2 ares de taillis sous futaie.
Forêt de Détain, arrondissement de Dijon, commune de Détain. — fer Lot : canton du Grand-Chaumeau-des-Buis. — Contenance : 12 hectares 62 ares de taillis sous futaie.
2e Lot : canton du Petit-Chaumeau-des-Buis. — Contenance : 1 hectare 21 ares da taillis sous futaie.
Forêt de Fontenay, arrondissement de Semur, commune de Marmagne. — Lot unique : canton de la Petite-Forêt. — Contenance : 59 hectares 90 ares de taillis sous futaie.
68 CONSERVATION. — Colmar, 9 septembre 1856. — Forêt de Ruestenhart, aménagée en taillis sous futaie, située dans la commune de Ruestenhart, arrondissement de Colmar. — Contenance : 109 hectares 91 ares formant un seul lot.
Forêt de Kiffis, peuplée d'une jeune futaie de hêtres, sapins, pins et charmes, âgée de quarante à quarante-cinq ans, située dans la commune de Kiffis, arrondissement de Colmat'. — Contenance : 30 hectares formant un seul lot.
Forêt de Feldbach, située dans la commune de Feldbach, arrondissement d'Altkirch. — Contenance : 89 hectares formant un seul lot.
Forêt de Niederlarg, située commune de ce nom, arrondissement d'Altkirch. Contenance : 98 hectares formant un seul lot.
12e CONSERVATION. — Besançon, 12 août 1856. — Forêt de l'hôpital du Gros-Bois, située sur la commune de ce nom, arrondissement de Besançon, peuplée de taillis sous futaie. —Contenance : 426 hectares 47 ares divisés en trois lots.
15e CONSERVATION. — Alençon, 29 août 1856. — Forêt domaniale de La FertéMacé, située dans l'arrondissement de Domfront. — Contenance : 1358 hectares b6 ares divisés en sept lots, y compris la maison forestière de Bagnoles.
21e CONSERVATION. — Guéret, 30 août 1856. — Bois domanial de Montbardoux, situé dans la commune de Budelières, arrondissement de Boussac. —Contenance: 103 hectares formant un seul lot. ,
REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.
I.
Des droits d'usage dans les forêts, de l'administration des bois communaux et de Vaffouage, par M. MEAUME, avocat, professeur à l'École impériale forestière, chevalier delà Légion d'honneur (1).
L'une des parties les plus importantes du Code forestier est, sans contredit, celle qui traite des droits d'usage, de l'administration des bois communaux et de l'afflouage.
Une publication comprenant l'explication de cette section de la loi de 1827 était vivement désirée. Plusieurs personnes ont fait observer que si le commentaire complet du Code forestier est indispensable aux agents de l'administration, il convenait de détacher de ce commentaire, pour les réunir dans un ouvrage spécial, les matières qui intéressent plus particulièrement les jurisconsultes, les maires des communes situées dans les pays boisés et les propriétaires de forêts grevées des dévorantes servitudes d'usage.
C'est pour répondre à ce désir que M. Meaume s'est déterminé à publier les deux volumes sur lesquels nous appelons aujourd'hui l'attention de nos lecteurs.
Le grand ouvrage dont ces volumes sont extraits est trop connu des abonnés des Annales, la réputation de leur savant auteur est trop bien établie, pour qu'il soit nécessaire d'entrer dans un examen détaillé de cette nouvelle publication.
Qu'il nous suffise de dire que tout ce qui a été écrit et jugé sur cette partie de notre législation s'y trouve résumé, mis en œuvre et discuté avec une indépendance remarquable et une grande sûreté de vues, et qu'en résumé cet ouvrage est le meilleur guide théorique et pratique que l'on puisse recommander aux personnes qui ont à s'occuper des questions relatives aux droits d'usage et à la jouissance des bois communaux.
M. Meaume a utilisé avec habileté les travaux les plus récents des historiens modernes. Les dissertations sur l'origine des droits d'usage, sur le cantonnement et l'affouage, renferment les renseignements les plus intéressants et les moins connus. L'intérêt de ces renseignements n'est
(1) Paris, Ang. Durand, libraire-éditeur, 5, rue des Grés; 2 vol. in-8°, prix : 10 fr.
(Envoi franco dans toute la France.)
point d'ailleurs purement théorique. Il n'est presque pas un procès en ces matières où il ne faille remonter à plusieurs siècles en arrière, déchiffrer de vieux titres, interpréter des règlements ou des coutumes dont le souvenir est déjà bien loin de nous. Il suffirait, pour s'en convaincre, de parcourir les nombreuses décisions judiciaires rapportées par M. Meaume, et dont une grande partie, empruntées aux Cours de Nancy, de Colmar, de Metz et de Besançon, étaient jusqu'à présent inédites.
L'ouvrage que nous annonçons forme deux volumes de près de 500 pages chacun. La matière des droits d'usage seule occupe tout le premier volume et un tiers du deuxième. C'est assez dire avec quels développements cette importante matière se trouve traitée..
II.
Répertoire méthodique et alphabétique de législation, de doctrine [et dejurisprudence, par MM. DALLOZ, tome XXXV (renfermant les traités du droit de Pêche, des Pensions, des Peines, de la Péremption, etc. (1).
MM. Dalloz ont publié récemment le XXXVe volume de leur grand ouvrage. Ce volume est consacré à l'exposition de plusieurs matières importantes. Il en est une notamment qui intéresse d'une manière particulière les agents de l'administration des forêts ; nous voulons parler du droit de pêche dans les cours d'eau, droit dont l'exercice est actuellement régi par la loi du 15 avril 1829.
Un certain nombre de commentaires, dont plusieurs n'étaient pas sans mérite, ont été publiés sur cette loi dans l'année qui a suivi sa promulgation. Mais ces ouvrages ont vieilli; on n'y trouve guère que les discussions dont la loi a été l'objet devant les Chambres, et l'exposé de l'ancienne jurisprudence. Les auteurs ne pouvaient prévoir alors toutes les difficultés auxquelles cette loi donnerait lieu dans son application. Aussi les personnes qui ont à s'occuper de questions relatives au droit de pêche se trouvent-elles souvent fort embarrassées, faute d'un livre qui soit à la hauteur de la science et au niveau de la jurisprudence. Il existe, à la vérité, plusieurs ouvrages généraux sur les cours d'eau ou sur le droit administratif, dans lesquels la loi de 1829 se trouve commentée; mais ces ouvrages, qui se bornent à l'exposé des principes généraux, ne peuvent être que d'un faible secours pour les praticiens.
La législation sur la pêche attendait un commentateur. Elle l'a trouvé dans M. Meaume, aux lumières duquel MM. Dalloz ont cru devoir recourir pour cette matière toute spéciale.
(1) Paris, au bureau de la Jurisprudence Générale, rue de Lille, 31; 1 vol. in-40.
Prix : u fr.
Le nom du savant professeur de Nancy est, à lui seul, la meilleure des garanties du mérite de son travail. Nous avons lu et examiné le traité du droit de pêche avec la plus scrupuleuse attention et le plus vif intérêt. Pour résumer en quelques mots notre appréciation sur cet important travail, nous dirons qu'on y trouve la même science et le même talent que dans les autres ouvrages de M. Meaume, et qu'il répond entièrement au programme de MM. Dalloz, c'est-à-dire qu'il renferme l'exposé le plus complet possible de la législation, de la jurisprudence et de la doctrine, sous le triple rapport du droitcivil, du droit criminel et du droit administratif (1).
Outre le travail dont nous venons de parler, le XXXVe volume du Répertoire de MM. Dalloz contient plusieurs autres traités, tous exécutés sur le même plan, et spécialement les traités de la pêche maritime, des pensions civiles, des peines et de la péremption.
Le premier de ces traités, qui est également dû à la collaboration de M. Meaume, renferme l'explication des règlements sur la pêche côtière ou petite pêche, et sur les grandes pêches hors du territoire continental de l'Europe.
Dans le traité des pensions civiles, les agents forestiers trouveront le commentaire de la loi du 9 juin 1835 et du décret d'exécution du 9 novembre suivant, et dans le traité des peines, l'exposé des principes généraux de notre droit criminel, dont la connaissance est si indispensable aux chefs de service.
Là se trouvent élucidées toutes les questions relatives au cumul des peines, à la récidive, aux excuses, à la force majeure, au discernement, au caractère des amendes, à la confiscation, aux réparations civiles, et enfin à la prescription.
Ajoutons qu'au commencement de chacun de ces traités se trouve le texte complet des lois, décrets et règlements sur la matière, et que les arrêts et jugements qui se trouvent cités sont reproduits in extenso dans des notes placées au bas de chaque page.
Comme on le voit, MM. Dalloz ne négligent rien pour donner à leur Répertoire le plus haut degré de perfection et d'utilité possible.
III.
Traité historique, théorique et pratique de la législation des portions communales ou ménagères, comprenant: l'édit de 1769 pour les TroisÉvêchés; l'édit de 1774 pour la Bourgogne; les lettres patentes de
(1) M. Meaume a le projet de publier prochainement un traité-commentaire de la législation sur la pêche fluviale. Nous sommes heureux d'être les premiers à l'annoncer aux abonnés des Annales.
1777 pour la Flandre; l'arrêt du Conseil de 1779 pour l'Artois ; mis en harmonie avec les règles du droit commun et les principes du Code Napoléon ; précédé d'un essai sur le système féodal, les droits de fief, les droits de justice, sur l'origine, la nature, le caractère des municipalités , communes et biens communaux, sous l'empire des lois romaines et gallo-romaines, barbares, féodales, révolutionnaires, actuelles, et d'un aperçu sur quelques droits seigneuriaux antérieurs à 1789, notamment le droit de triage, par M. C. LE GENTIL, avocat et juge suppléant près le tribunal civil d'Arras (l).
Plusieurs des parties les plus importantes du droit moderne sont encore régies aujourd'hui par des règlements ou des usages qui ont pris naissance à l'époque de la féodalité, et qui ne peuvent être ni bien comprises ni appliquées dans leur véritable esprit sans une connaissance approfondie des principes du régime féodal. De ce nombre est la matière du partage et de la jouissance des biens communaux, sur laquelle M. Le Gentil vient de publier un traité historique, théorique et pratique. La tâche était ardue, mais M. Le Gentil a su triompher des difficultés de plus d'un genre qu'elle présentait.
L'auteur a divisé son livre en trois parties : Dans la première, après avoir esquissé à grands traits l'histoire des institutions féodales, et rappelé l'origine et la formation des communes et des municipalités, en présence et sous la dépendance plus ou moins directe de la puissance féodale, M. Le Gentil établit la filiation des lois et règlements concernant l'administration, la jouissance, l'aliénabilité et la prescriptibilité des biens communaux, en faisant ressortir l'influence que le régime féodal a exercée sur ces règlements.
Dans la deuxième partie de son ouvrage, l'auteur traite de quelques droits seigneuriaux, tels que le droit de cantonnement, le droit de triage et le droit de plantis sur les marais, soit à un point de vue général, soit en ce qui touche spécialement les provinces de Flandre et d'Artois.
Enfin, dans la troisième partie, M. Le Gentil, arrivant à l'objet principal de son livre, expose de la manière la plus complète les principes de la législation sur le partage et la jouissance des biens communaux, et notamment de l'affouage. On remarquera particulièrement les chapitres où l'auteur traite des conditions d'aptitude personnelle, telles que le domicile Ou la résidence, le feu ou ménage, l'inscription et l'aspirance, la naturalisation, le droit héréditaire, la représentation, les droits des aînés et Puînés, des enfants naturels reconnus, des enfants adoptifs, des veuves, etc.
(1) Paris, Auguste Durand, libraire-éditeur, rue des Grès, 5; 1 gros volume in-8°.
elri x - 7 fr.
Tous ces points soulèvent journellement dans la pratique les questions les plus délicates et les plus difficiles ; on les trouvera résolues de la manière la plus lucide dans l'ouvrage de M. Le Gentil, tant à l'aide de la jurisprudence que d'après la législation et les usages applicables à chaque localité.
A un point de vue plus spécial, nous signalerons particulièrement à l'attention des lecteurs des Annales, dans la première partie, la discussion très-remarquable à laquelle s'est livré M. Le Gentil sur la question si controversée de savoir si les propriétés communales sont toutes d'inféodation, ou si, au contraire, elles n'ont pas conservé pour la plupart le caractère d'allodialité ; dans la deuxième partie, des dissertations pleines d'intérêt et des notions historiques et théoriques d'une grande utilité sur le triage, sur l'aménagement-règlement d'usages, et sur le cantonnement dans l'ancien et le nouveau droit.
En résumé, le Traité des portions communales et ménagères est à la fois un ouvrage d'érudition et de pratique qui assure à M. Le Gentil un rang distingué parmi les jurisconsultes de notre époque.
CH. D.
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
= Remarques sur un tronc d'arbre découvert dans une situation verticale et tel qu'il a végété dans les régions arctiques par 750 32' N. et92°0., ou immédiatement au nord du détroit de Nàrrow, qui s'ouvre dans le Wellington-Sound, par sir E. BELCHER. —L'auteur avait envoyé quelques bandes de chasseurs à la recherche de lièvres et de perdrix; l'une de ces bandes, commandée par le bosseman, revint vers minuit, le 12 septembre 1853, en annonçant qu'elle avait découvert le bout d'un mât de perroquet d'un vaisseau, dans une position droite, à un mille et demi environ dans les terres ; le contre-maître charpentier affirmait de son côté que c'était certainement une vergue travaillée d'environ huit pouces de diamètre. Une semblable communication, faite par des personnes suffisamment compétentes, le frappa singulièrement. Un point seulement ne paraissait pas trèsclair à son esprit, c'est que la pièce était bien loin dans les terres et de plus dans une cavité. Néanmoins, le lendemain, accompagné du bosseman et de matelots armés de pics et d'outils, il se dirigea sur le point indiqué pour procéder à la recherche de ce débris, mais ce ne fut qu'avec de très-
grandes difficultés qu'on parvint à le retrouver, la neige ayant recouvert toutes les empreintes des pas de la veille. L'auteur, à sa vue, put aisément se convaincre que ce n'était ni un mât ni une vergue, et que cette pièce n'avait pas été placée là par la main de l'homme. C'était le tronc d'un arbre qui, très-probablement, avait végété dans ce lieu; mais à quelle époque? c'est ce qu'on ne saurait déterminer avec certitude; il est probable cependant que ce doit être à la même époque où furent échouées et déposées dans les mêmes lieux les baleines qu'on y a trouvées aussi à des élévations de 500 à 800 pieds au-dessus du niveau actuel de la mer, quand dans ces régions régnait une température beaucoup plus élevée que celle qu'on y observe aujourd'hui. Quoi qu'il en soit, l'auteur a fait déblayer le terrain, qui était une vase gelée et qui éclatait à chaque coup comme de la glace. La souche a enfin été extraite après qu'on en eut coupé les racines.
On a recueilli les portions du sol qui étaient immédiatement en contact avec l'arbre, ou qui l'entouraient, dans l'espoir de rencontrer des impressions de feuilles ou de cônes, et le tout a été emballé et transporté en Angleterre.
Près du point en question, on a découvert quelques monticules qui auraient pu faire supposer l'existence d'autres troncs d'arbre, mais on a reconnu que ce n'étaient que des amas de mousse de neuf pouces d'épaisseur, contenant des os de lemming en quantité si extraordinaire qu'on pouvait les considérer comme une masse d'engrais animal.
M. Hooker, deKew, à qui on a transmis tous ces matériaux, a adressé à ce sujet la note suivante à l'auteur : « La pièce de bois rapportée par sir Ed. Beleher des rivages du détroit de Wellington appartient à une espèce du genre pin, probablement du pimis (abies) alba, conifère qui s'avance le plus vers le nord. On sait qu'on le rencontre jusqu'au 68e parallèle et qu'on le trouve flottant sur les plus grands fleuves de l'Amérique du Nord qui se jettent dans l'Océan polaire.
La structure du bois de l'arbre rapporté diffère d'une manière remarquable par ses caractères anatomiques de celle de tous les autres conifères qui me sont connus. Chaque anneau concentrique ou couche annuelle consiste en deux zones de tissus. L'une, celle extérieure, plus large vers sa circonférence, est de couleur pâle, et consiste en tubes ordinaires de fibres ligneuses marquées des disques communs à tous les conifères. Ces disques sont communément opposés les uns aux autres lorsqu'il y a plus d'une série dans la direction de la longueur de la fibre, et, ce qui est tout à fait insolite, ils présentent des lignes rayonnantes à partir de la dépression centrale à la circonférence. L'autre zone, ou celle intérieure de chaque anneau annuel de bois, est plus étroite, de couleur foncée et formée de fibres plus allongées, à parois plus épaisses, proportionnellement à leur diamètre. Ces tubes ne portent pas de disques, ou du moins ceux-ci sont en petit nombre,
et ils sont recouverts de stries en spirales qui donnent à chacun de ces ibes l'aspect d'un ruban qu'on aurait enroulé. Les caractères qu'on vient d'indiquer dominent dans toutes les parties du bois, mais ils se modifient légèrement dans les différents anneaux. Ainsi, la zone extérieure est plus chargée dans quelques-uns d'entre eux que dans d'autres, et les fibres qui portent des disques dans la zone extérieure sont parfois chargées de marques fugitives de stries en spirale; et enfin les fibres marquées en spirale de la zone interne portent quelquefois des disques. Ces apparences suggèrent l'idée du retour annuel de quelque cause spéciale qui modifiait les premières et les dernières fibres formées dans chaque couche annuelle, de façon que les premières diffèrent en nombre aussi bien qu'en qualité de celles formées les dernières. Les conditions que présente un climat arctique paraissent très-propres à expliquer ces changements. La zone interne, ou celle qui s'est formée la première, doit être considérée comme étant imparfaitement développée et s'étant déposée dans une saison où les fonctions de la plante se sont exercées d'une manière intermittente et lorsque, à quelques heures d'un soleil chaud, succèdent plusieurs jours d'un froid extrême. A mesure que la saison avance, la chaleur et la lumière du soleil persistent pendant la plus grande partie des vingt-quatre heures, et les fibres ligneuses récemment formées sont alors beaucoup plus développées; elles sont aussi bien plus grosses, ne présentent aucun indice de stries, mais se parsèment de disques d'une structure plus éminemment organisée qu'on n'en rencontre communément dans l'ordre naturel auquel cet arbre appartient. » (Extrait de VInstitut, journal des sciences.) = Production du bois dans l'Amérique du Nord. — On peut juger à quel point est considérable la production du bois de construction dans l'Amérique du Nord, par ce fait, qu'à Peterborough, dans le Canada, une scierie a chaque jour en mouvement 136 scies, qui sont elles-mêmes aiguisées et tenues en état par des machines. Cette scierie débite tous les neuf mois 70,000 arbres. Une seule maison de commerce, la maison Egan et Ce, occupait, l'hiver dernier, 3,800 hommes à abattre le bois.
1,700 chevaux et 200 bœufs à la charrier, et 400 attelages à transporter les vivres et le fourrage nécessaires. Le commerce des bois a pris un tel développement au Canada que, dans l'année dernière seule, 18 millions de pieds cubes de bois de sapin ont été exportés de Québec, tandis qu'en 1847 l'exportation n'avait été que de 9,626,000 pieds cubes. Les forêts du Canada sont encore, pour bien des années, pourvues de bois en abondance.
DE LA CULTURE DES FORÊTS, DES PLANTATIONS ET DES DÉFRICHEMENTS.
.: 7;:. (1' ;'A,' Si/ftm |^|^|îàË?Wine des cultures qui s'élèvent sur le sol de la Fran ,o,tju grande partie des plaines couvertes aujourd'hui de cé r ent dans les siècles reculés que des landes, des bruyères, j ) an oes ; les marais sont convertis en prairies, la vigne
couvre des coteaux qui étaient arides daus le moyen âge et même à des époques plus récentes. Toutes ces transformations sont l'effet des travaux successifs qui ont créé la richesse dont jouit la génération actuelle.
Les forêts qui subsistent sont demeurées incultes ; pourquoi le travail de l'homme ne pourrait-il pas les améliorer? S'il était possible d'obtenir un produit d'un quart ou d'un tiers plus considérable que le produit actuel, ce travail recevrait un salaire qui n'a pas existé jusqu'à présent. La sylviculture ne peut demeurer stationnaire à une époque où l'agriculture prend de l'extension, où la population augmente, où l'industrie multiplie les capitaux, où se développent le besoin et les moyens d'étendre l'exploitation du sol aux dépens des forêts.
Le renchérissement des bois sera limité par le produit des plantations et par l'introduction d'une nouvelle méthode de cultiver les forêts : augmentation du volume des taillis et des futaies; création de salaires; tels seront les résultats, les avantages que procurera cette salutaire innovation.
Une moindre étendue de terrain suffira à une consommation plus considérable.
Les plantations s'exécuteront de préférence sur les terrains infertiles, sur les coteaux, sur les montagnes. Les terrains arides plantés en bois donneront un produit net bien plus élevé que s'ils étaient livrés à l'agriculture. On peut démontrer par l'évidence des faits et par les calculs les plus simples que tous les sols dont la composition et la situation ne sont pas favorables à la culture agraire peuvent être plantés avec avantage en essences forestières.
En effet, supposons deux terrains qui, livrés à l'agriculture, rendront annuellement le premier 40 francs par hectare et le second 8 seulement.
Supposons, en même temps, que le propriétaire les plante'tous les deux en bois, en choisissant les essences forestières qui conviennent le mieux à des sols de nature différente; le premier pourra toujours rendre 40 francs
par an, mais le second rendra 16 francs. Le rapport des produits respectifs sera donc changé en faveur de la culture forestière.
On objectera peut-être que les forêts qui seront plantées sur des sols peu féconds ne donneront pas de beaux arbres ; mais le doute à cet égard sera bientôt dissipé si l'on jette un coup d'œil sur les forêts des Pyrénées, du Jura, des Vosges. Uu sol pierreux, montueux, est peu favorable aux productions agricoles, à moins que la végétation ne soit stimulée par des amendements plus ou moins coûteux, tandis que les arbres y atteignent des dimensions colossales, s'ils ne sont pas abattus prématurément. Une fois le sol abrité, couvert par les plants forestiers, l'humidité qui les nourrit ne s'évapore plus; tandis que si ce terrain était cultivé en céréales, l'eau des pluies, des rosées, réduite en vapeur, ne laisserait presque rien pour la nourriture des plantes.
Si l'on était maître de fixer la répartition du sol entre les différentes cultures, on chercherait d'abord à reconnaître tous les espaces où les forêts sont utiles sous le rapport de leur influence, relativement à la température, aux pluies, aux sécheresses, aux gelées. Il serait facile de déterminer les emplacements qu'elles pourraient sans inconvénient céder à l'agriculture, et, d'un autre côté, toute l'étendue qui pourrait être abandonnée par l'agriculture pour être plantée en espèces forestières.
On aurait donc soin de conserver toutes les forêts pour lesquelles il ne serait pas évident que le défrichement serait avantageux à perpétuité, sans qu'il puisse, sous aucun rapport, devenir nuisible.
Cette distribution des différentes cultures doit d'autant moins être considérée comme idéale que tous les intérêts s'accordent pour en réclamer l'exécution.
Dans l'ordre économique, l(but que l'on doit se proposer est d'obtenir pour toutes les classes de la population, et surtout pour la classe la plus nombreuse, le chauffage et les bois de construction au plus bas prix possible. Mais, à mesure que l'agriculture et les autres branches de l'industrie se développent, l'étendue du sol boisé décroît. Les mesures conservatrices fléchissent devant les besoins. La loi plus puissante de la libre culture du sol et de l'accroissement de la population étend son action, et l'empiétement sur les forêts devient une nécessité.
Mais l'excès a un terme. Il arrive une époque où il est aussi avantageux de créer un bois que de cultiver des plantes alimentaires. La culture des forêts, en augmentant la production, prévient l'excès de la cherté.
Nous allons présenter successivement des observations sur les différents modes de culture et d'aménagement des forêts.
DES HAUTES FUTAIES.
Le mode d'exploitation des forêts en hautes futaies est le plus ancien, et celui qui maintient sur le sol le volume le plusconsidérable de produits en matière; mais le produit net est bien moins élevé que si l'on abattait les arbres avant qu'ils eussent atteint toute leur croissance.
En effet, supposons une étendue d'un hectare couverte d'un taillis de trente ans, le propriétaire veut reconnaître s'il lui est plus avantageux d'exploiter ce taillis que de le laisser croître en futaie, jusqu'à ce que les arbres aient atteint l'âge de cent vingt ans.
Il vendrait son taillis à raison de 600 fr. l'hectare, tandis que sa futaie vaudrait, quatre-vingt-dix ans plus tard, 10,000 fr.
Cette somme de 600 fr. par hectare, avec intérêts composés au taux de
4 pour 100 pendant quatre-vingt-dix ans, s'élèverait à. 19,680 fr.
Une seconde coupe de taillis de trente ans vaudrait 600 fr., somme qui, avec les intérêts au même taux pendant soixante ans, s'élèverait à 4,046 » Une troisième coupe de taillis de trente ans se vendrait 600fr., somme qui, avec les intérêts composés au même taux de 4 pour 100 pendant trente ans, s'élèverait à. 1,871 » Enfin la qnatrième coupe de taillis vaudrait. 600 » Total. 26,197 fr.
Cette étendue d'un hectare, exploitée en taillis, donne, à l'expiration de la période de cent vingt ans, un produit net de 26,197 fr., au lieu d'une somme de 10.000 fr. que l'on aurait obtenue en laissant élever les arbres en haute futaie.
D'habiles forestiers ont cherché les moyens de porter à un taux plus élevé le produit net des massifs de futaie, en y opérant des nettoiements périodiques, par exemple, tous les vingt ans; ils espéraient que le produit de ces nettoiements , ajouté à la valeur que le massif d'arbres aurait acquise à l'époque de son exploitation définitive, équivaudrait à la somme des produits rendus par les coupes de taillis; mais le succès n'a pas répondu à leur attente : le premier nettoiement seul a donné un produit de quelque importance, le sol couvert de grands arbres n'a pu nourrir et développer de nouveaux brins ; tout était étouffé sous l'ombrage, et en définitive le produit net des bois exploités en taillis est toujours demeuré le plus élevé.
La conséquence de ces observations est que les propriétaires ne trouveraient point de profit à élever des futaies pleines. Cependant l'intérêt public exige la conservation des futaies, soit en massifs, soit en taillis. Il est donc nécessaire que l'Etat et les établissements publics, qui doivent
envisager un avenir indéfini, possèdent la plus grande étendue possible de forêts.
La science pratique a pour but, en Allemagne, de maintenir sur le sol le volume d'arbres le plus considérable possible, sans égard au produit net ; c'est un trésor que l'on veut conserver intact, que l'on veut transmettre à la postérité, dût-il en résulter une grande perte pécuniaire.
En Angleterre, c'est le produit net que l'on cherche ; mais, d'un autre côté, et par opposition, on conserve des massifs de futaie dans les parcs, on respecte les grands arbres placés dans les haies, comme objets précieux, comme ornements, sans esprit de calcul.
En France, les particuliers administrent leurs propriétés d'après leurs besoins présents, d'après leur manière d'envisager l'avenir : les uns, dirigés par l'esprit de conservation, laissent vieillir les arbres; d'autres, qui ont le souci d'accroître leurs richesses, comparent la valeur des arbres avec le produit des capitaux avantageusement placés; ils se rencontrent dans leur manière d'exploiter leurs forêts avec les dissipateurs, les arbres tombent également sous leurs coups, mais ils en emploient le prix utilement. On peut ralentir mais non arrêter les effets de cette destruction. Le système d'aménagement, qui consiste à obtenir le plus haut produit pécuniaire possible, prévaut en France, en Angleterre ; il prévaudra en Allemagne comme ailleurs, dans les forêts qui appartiennent aux particuliers.
Les hautes futaies étaient autrefois soumises au mode de jardinage qui consiste à abattre çà et là dans le massif les arbres dépérissants et ceux dont on avait besoin; mais les semis naturels qui les remplaçaient ne croissaient qu'avec une extrême lenteur, sous l'ombrage des arbres voisins.
La science devait chercherun remède aux effets de cette routine désastreuse.
Il est peu de personnes qui n'aient ouï parler des coupes sombres, des coupes claires, des coupes définitives, admirable système d'aménagement qui a pour obj et de maintenir sur le sol, par l'effet d'une exploitation régulière, le maximum du volume ligneux; mais, à une époque où chacun s'occupe du soin d'accroître ses revenus, il est devenu impossible de repousser d'une manière absolue l'esprit de calcul qui est contraire à l'adoption générale de ce mode d'aménagement.
La première modification scientifique est celle qui a été proposée par M. Pfeil.
Au lieu de laisser aux semis naturels le soin du repeuplement, il emploie le travail. Si une forêt de 100 hectares doit s'exploiter à l'âge de cent ans, on exploitera en entier un hectare par an ; il suffira donc de repeupler un hectare, soit par des semis, soit par des plantations ; une pépinière d'un hectare annexée à cette forêt fournit tous les sujets nécessaires pour garnir le sol de la coupe.
L'un des avantages que présente cette méthode est d'une grande importance ; le jeune plant, n'étant pas ombragé comme il l'est dans l'autre système, croît bien plus rapidement.
Mais l'innovation aura bien d'autres conséquences qui n'étaient pas dans les premières prévisions. Nous allons les exposer.
En exploitant une grande partie des arbres qui existent sur le sol, on pourra réaliser dans une courte période une partie du capital.
Supposons un massif de 100 hectares, uniformément peuplé d'arbres à feuilles caduques, chênes, hêtres, etc., âgés de cent ans, et de sous-bois exploités à différentes époques. Si l'on divise ce massif en cent parties égales, l'exploitation annuelle devra être circonscrite sur l'étendue d'un hectare dans laquelle on abattra tous les arbres.
La coupe de la deuxième année sera âgée de cent et un ans ; celle qui s'exécutera dans le cours de la troisième année aura cent deux ans ; la dernière serait âgée de deux cents ans, si le propriétaire suivait cette série sans innovation ; il pratiquerait des éclaircies en même temps qu'il ferait chaque année une coupe pleine de la contenance d'un hectare. Mais il ne tardera pas à reconnaître qu'il serait désavantageux de conserver des massifs pendant un siècle et demi ou même deux siècles; il se décidera à faire des coupes extraordinaires à mesure que de nouveaux débouchés s'ouvriront : le plus simple calcul démontrera qu'un aménagement réglé sur la période de vingt-cinq à trente ans lui rendra un revenu plus élevé, mais on cesse d'obtenir le maximum des produits en nature.
Cependant des bois de charpente, de charronnage, de menuiserie sont de nécessité absolue ; ne peut-on en élever sans perte ? En France, on a depuis plusieurs siècles résolu cette question, en réservant les plus beaux arbres des massifs, en abattant les autres et en laissant croître des taillis dans les intervalles des arbres réservés. On est arrivé ainsi au système des futaies sur taillis, qui finira par être adopté pour la majeure a rtie des forêts.
Ce système, ou pour mieux dire cet usage, n'est pas l'effet d'un progrès ni d'un déclin de la science forestière. Il est la conséquence d'un état antérieur qu'il devenait nécessaire de changer, lorsque des taillis qui étaient sans débouchés pouvaient commencer à être employés dans des forges, des verreries et autres usines ; lorsque de nouveaux débouchés étaient ouverts par les routes, les cours d'eau, qui charriaient le bois de chauffage dans les villes.
Un même mode d'aménagement ne sera pas applicable à une forêt éloignée de tous les lieux de consommation et à cette même forêt si un chemin de fer est construit dans son voisinage immédiat.
DES FORÊTS AMÉNAGÉES EN TAILLIS SOUS FUTAIE.
Les usages locaux, fondés sur des intérêts puissants qui diffèrent d'une contrée à l'autre, expliquent bien mieux les divers systèmes d'aménagement que ne peuvent le faire les calculs scientifiques. ,
Dans la partie du Nivernais où les taillis sont destinés à l'approvisionnement de Paris en bois de chauffage, on les exploite à l'âge de vingtcinq à trente ans, après les avoir soumis à des nettoiements qui ont pour effet de faire grossir les brins, en détruisant les plants traînants ou surabondants.
Dans les contrées méridionales, où le sol boisé rapporte autant en pâturage qu'en bois, on ne donne aucun soin aux taillis.
Dans les pays des hautes montagnes, où les bestiaux mis au pâturage n'ont pas été assez nombreux pour détruire les forêts, où de larges débouchés n'ont pas été ouverts pour absorber toute la production forestière, les hautes futaies subsistent encore.
Les moines avaient défriché des espaces immenses, mais ils étaient devenus d'autant plus soigneux de la conservation et de l'amélioration des bois qui leur restaient.
La passion de la chasse a contribué à la conservation des forêts dans le domaine des rois et des grands seigneurs.
On défrichait une grande partie du sol forestier pour fonder des fermes, des métairies, on en conservait une autre partie pour les réparations des bâtiments et pour les besoins des métayers ; le système des futaies en massifs et des taillis purs se formait ainsi sans que les enseignements de la science intervinssent.
Nous ferons à ce sujet une distinction entre les forêts du midi de la France et les forêts du nord. Dans cette dernière contrée, les populations ne s'étaient pas disséminées dans des métairies, elles formaient de grands villages dont les maisons étaient coritiguës ; les terres d'une paroisse, d'une seigneurie étaient divisées entre le seigneur et les habitants; les forêts formaient de grands massifs soumis à des droits d'usage et de pâturage.
Le système du métayage, qui n'avait subi que peu de modifications depuis la conquête des nations du nord, domina dans nos régions méridionales. Il s'est moins opéré de perfectionnements agricoles, sylvicoles et industriels dans ces contrées:que dans celles du nord.
L'expérience et le calcul ont fait reconnaître que la période la plus avantageuse pour l'exploitation des taillis est celle de vingt-cinq à trente ans (1); elle concilie les résultats opposés du calcul des produits en matière et du produit net, elle est la plus favorable à l'accroissement des
(1) Voir Maison rustique du dix-neuvième siècle, t. IV, p. 85 et suiv.
baliveaux qui doivent devenir des futaies. Mais les besoins toujours croissants tendent à faire devancer les coupes; il en résulte, à la fin, une grande diminution dans la masse de la production, mais on ne s'en aperçoit pas pendant toute la durée de la période de destruction.
La détermination de l'âge d'exploitation des taillis subit les vicissitudes des besoins ou de la position de fortune des propriétaires ; les événements imprévus entraînent fréquemment la nécessité d'un changement dans l'ordre que l'on croyait avoir établi d'une manière durable.
Les bois situés loin des lieux de consommation ne peuvent être coupés avantageusement que lorsqu'ils sont parvenus à un âge avancé; les frais de transport seraient trop élevés si le produit des coupes ne consistait, par exemple, qu'en brins de fagots.
Mais si les lieux de consommation sont très-rapprochés de la forêt, si les besoins locaux n'exigent que du menu bois, on exploite les taillis lorsqu'ils sont encore très-jeunes. Nous citerons pour exemple les forêts situées dans les environs de Falaise (Calvados). L'aménagement des taillis y est ordinairement réglé à l'âge de sept à neuf ans ; on les emploie à la cuisson de la chaux qui sert à l'amendement des terres.;Le produit net de ces bois est très-élevé.
La quantité des futaies sur taillis et des massifs de vieux arbres a subi depuis l'époque de 1789 une diminution de plus de moitié ; on ne veut plus conserver d'arbres qui ne croissent pas au moins de 3 pour 100 par an. Tout ce que les enseignements de la science peuvent faire actuellement, c'est d'indiquer un système d'aménagement fondé sur cette supposition que le propriétaire se dirigera d'après les notions de son intérêt bien compris et d'une sage prévoyance, en écartant toutes les causes d'une destruction prématurée des produits.
Un élément de calcul que l'on néglige souvent est le renchérissement très-probable, et à une époque peu éloignée, du prix des futaies de chêne ; elles deviendront nécessairement plus rares, à mesure que les besoins de revenus plus considérables augmenteront. Le moyen de prévenir la destruction de cette essence si précieuse est enseigné par les forestiers allemands qui ont recommandé de semer du gland en assez grande quantité dans les coupes qui viennent d'être exploitées ; mais l'expectative d'une jouissance éloignée n'engage guère à s'occuper d'améliorations; on répugne aux innovations même les plus faciles, quelque assuré, quelque avantageux que puisse être le résultat, s'il ne doit se manifester qu'à une époque éloignée.
Nous placerons ici une remarque essentielle qui a pour objet de faire sentir combien il est important de ménager les souches dans l'exploitation des coupes. Un taillis qui croît sur souches atteindra à égalité d'âge un
volume bien supérieur à celui d'un taillis formé de semis. La différence à l'âge de vingt-cinq ans serait dans le rapport de trois à deux.
Tout ce qu'on doit attendre à l'avenir, de l'art du forestier, c'est de faire croître les taillis et les futaies le plus rapidement possible. Il faut, pour atteindre ce but, que le travail intervienne dans la culture des forêts comme dans la culture des champs. C'est, à notre époque, une nécessité qui résulte de la lutte des besoins pécuniaires contre l'esprit de conservation. C'est le moyen de concilier deux influences opposées, l'intérêt du présent et celui de l'avenir.
Autrefois les forêts subsistaient en grandes masses pendant une longue suite de générations ; de nos jours le sol forestier tend à se diviser moins rapidement sans doute que le sol agricole, mais cette tendance n'est pas moins réelle ; la conséquence sera l'introduction d'une nouvelle culture dans les forêts qui ne seront pas défrichées et la création des forêts artificielles dans les terrains où l'agriculture ne sera pas profitable. Le travail sera soldé par l'excédant de produit qui résultera de cette innovation.
DU TRAVAIL DANS LES FORÊTS
La moyenne de la période d'exploitation des forêts est de vingt ans ; ainsi aucun travail humain ne s'opère sur les dix-neuf vingtièmes de leur étendue.
Un hectare de terrain cultivé en vigne exige vingt fois plus de travail et procure par conséquent vingt fois plus de salaires que le travail qui s'exécute dans un hectare de forêts. La culture des jardins potagers qui s'opère sur de si petits espaces emploie encore un plus grand nombre d'ouvriers en proportion.
Ne pourrait-on pas, par l'application d'une culture bien entendue, faire croître pendant un temps et dans un espace donnés, beaucoup plus de bois que l'on n'en recueille dans nos forêts incultes (1)?
Il suffit de voir ce qui se passe dans les pépinières pour juger de l'influence de la culture sur la croissance des plantes ligneuses ; on sait d'ailleurs que la destruction des plantes parasites et l'extirpation des rejets inutiles font croître le volume des brins restants dans une forte proportion.
Après l'exploitation d'une coupe on doit donc faire arracher les épines et les essences peu productives.
On sème du gland et des graines d'essences résineuses dans les inter-
(1) M. Cordier, auteur de l'ouvrage intitulé Agriculture de la Flandre française, a vu dans le département du Nord des terrains de même nature, dont les uns encore en forôls ne rendaient annuellement que 10 fr. par hectare, tandis que les autres, livrés à une culture lrès-perfeclionnée, produisaient par an jusqu'à 3,200 fr. (De la liberté du travail, par M. Ch. Dunoyer, t. II, p. 213.)
valles des souches après l'exploitation. On recouvre d'une couche de terre les souches, pour empêcher autant que possible la déperdition des sucs nourriciers.
Lorsque le recru a atteint l'âge de huit à dix ans, on exécute un nettoiement ; on extirpe les épines et tous les arbrisseaux qui auraient pu surgir ; on se garde bien de receper le jeune plant de semis.
On assainit les sols trop humides. Les forestiers anglais pratiquent avec un soin admirable l'opération du drainage dans les plantations où l'eau demeurerait trop longtemps stagnante à la surface du sol; ils lui ouvrent un cours régulier en creusant des fossés et des rigoles dans toutes les directions convenables. Mais, s'il faut se débarrasser des eaux superflues, on doit utiliser celles qui peuvent concourir au développement de la végétation ; il est toujours utile de les conserver sur le sol tant qu'elles ne sont pas évidemment nuisibles ; on les distribuera avec art et on n'expulsera que le superflu, au lieu de faire, sans discernement, écouler dans des fossés celles qui féconderaient le sol.
On fera élaguer les baliveaux, opération qui procurera le double avantage d'en accélérer la croissance et de dégager les taillis de l'ombrage nuisible des branches qui croissent dans la partie inférieure des tiges; mais cette opération, au lieu d'être éminemment utile, serait nuisible, si elle n'était exécutée avec adresse et discernement : on n'élaguera pas les branches des gros arbres, si l'élagage n'a pas été déjà pratiqué lorsqu'ils n'étaient encore qu'à l'état de baliveaux de l'âge du taillis.
Nous avons dit que le système des futaies sur taillis tendait à envahir toutes les forêts ; cependant on doit, autant que possible, conserver les massifs existants en y pratiquant des nettoiements successifs. L'avenir profitera des privations de jouissance que l'on s'imposera. Il sera toujours temps d'opérer la conversion.
Au nombre des innovations utiles introduites dans la sylviculture, l'une des plus importantes est celle que M. le comte Bakowsky a fait pratiquer dans ses forêts de Bohême. Elle consiste à garnir de plants résineux toutes les places vides, même les plus petites, toutes celles qui sont inutilement occupées par des épines ou par des espèces nuisibles. Une augmentation considérable de produits est le résultat de cette opération qui est fondée sur la propriété que possèdent les arbres résineux de croître très-serrés et par conséquent d'occuper un très-petit espace, relativement à leur volume, sans nuire à la végétation des arbres voisins.
Une pépinière devient l'accessoire nécessaire d'une forêt cultivée.
Des propriétaires soigneux ont reconnu que les routes, les chemins qui traversent les forêts et qui rendent la traite des bois commode et peu dispendieuse procurent encore un avantage important ; ils favorisent l'ac-
croissement des taillis et des arbres situés dans leur voisinage : la diminution de l'étendue du sol boisé produit un excédant de valeur deux fois plus considérable que la perte qui, en apparence, résulterait de cette diminution. D'ailleurs, une bonne division du sol, des limites bien établies, sont une sorte de garantie contre la tentation d'anticiper sur les coupes.
NOIROT, Membre de l'Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon.
(La suite au prochain numéro. )
PISCICULTURE PRATIQUE.
RAPPORT SUR LES MESURES A PRENDRE POUR ASSURER LE REPEUPLEMENT DES COURS D'EAU DE LA FRANCE, par M. C. MILLET, inspecteur des forêts, membre de la Société impériale d'acclimatation (1).
Plusieurs de nos confrères, et particulièrement M. Monier de la Sizeranne, en rappelant à l'attention de la Société d'acclimatation l'importance de la pisciculture pour le repeuplement des cours d'eau de la France, ont exprimé le vœu que des études fussent faites et que des instructions spéciales fussent préparées par la Société, dans le but de propager les bonnes pratiques de pisciculture et d'apporter un remède aux diverses causes qui concourent au dépeuplement des eaux.
Ces importantes questions ont déjà fixé l'attention de la Société ; son Bulletin présente un grand nombre de notices ou mémoires relatifs à la pisciculture : le n° 4 du tome II (avril 1855) renferme des instructions détaillées et pratiques sur la récolte, la fécondation et le transport des œufs de poissons; et le numéro de février 1855 contient un mémoire sur l'hygiène et l'alimentation des jeunes poissons, etc., etc.
Toutefois, dans ces divers mémoires et instructions, on ne s'est occupé jusqu'à ce jour que des moyens de féconder des œufs et de créer de jeunes poissons ; on n'a ainsi envisagé la question qu'à un point de vue très—restreint, car, en pisciculture notamment, il ne suffit pas de créer, il faut surtout savoir conserver.
En effet, les sacrifices de temps et d'argent que l'on pourrait faire pour
(t) Ce rapport a été fait au nom d'une Commission spéciale instituée par la Société impériale d'acclimatation, et composée de MM. de Montgaudry, A. Perier, C. Wallut et C. Millet, rapporteur.
avoir des poissons à l'état d'alevin ou de fretin, et les meilleurs résultats que l'on pourrait obtenir dans cette voie deviendraient en général inutiles ou tomberaient en pure perte, si le repeuplement naturel ou artificiel des eaux et si la conservation du poisson n'étaient pas protégés d'une manière très-efficace. Il y a donc lieu de rechercher les meilleurs moyens de protection et de conservation, et de les étudier dans leur application réellement pratique.
De longues et nombreuses observations faites sur les cours d'eau et sur les poissons nous ont amené à reconnaître que les causes principales du dépeuplement que l'on déplore aujourd'hui, et qui prive le trésor public d'un revenu important et la consommation générale de bons aliments, • devaient être attribuées, d'une part, au régime des cours d'eau, et, d'autre part, à l'insuffisance des mesures de répression.
C'est donc spécialement à ces deux points de vue que nous étudierons ici la question du repeuplement et de l'empoissonnement des eaux.
I. — USINES ET ÉTABLISSEMENTS EMPÊCHANT LE PASSAGE DU POISSON.
Sur un grand nombre de cours d'eau, on construit soit des usines, soit des barrages, écluses, etc., qui ne permettent pas au poisson de circuler librement et surtout d'aller frayer dans des endroits convenables. Il en résulte nécessairement que la reproduction de plusieurs espèces devient impossible, ou du moins insignifiante, et que, par suite, le dépeuplement des eaux s'opère très-rapidement.
Sans porter aucune entrave au service régulier des usines, de la navigation et du flottage, on peut facilement concilier les exigences de ce service avec celles de la reproduction naturelle du poisson.
Il suffirait, en effet, d'établir sur les points où la libre circulation et surtout la remonte du poisson sont devenues impossibles, soit des passages libres toujours faciles à franchir par la truite et par les migrateurs, tels que saumon, alose, lamproie, etc., soit des plans inclinés avec barrages discontinus qui feraient l'office de déversoirs, ou qui serviraient à l'écoulement des eaux surabondantes, soit enfin des écluses que l'on tiendrait ouvertes à l'époque de la remonte ou de la descente.
L'organisation de ces passages naturels ou artificiels devrait être rendue obligatoire : 1° pour l'avenir, à l'égard des constructions, barrages, écluses, etc., qui seraient établis sur les cours d'eau, et qui, par leur situation, pourraient empêcher ou entraver la libre circulation, et notamment la remonte et la descente du poisson; 20 dès à présent, à l'égard des établissements de cette nature qui existent sur les cours d'eau dont l'entretien est à la charge de l'État, Enfin, dans un grand nombre de localités, les usiniers, et notamment
les meuniers, ont établi et entretiennent soigneusement des appareils de pêche ( les anguillières, par exemple ), qui sont très-destructeurs. Nous avons vu, en différentes occasions, des appareils dans lesquels on péchait, en une seule nuit, plus de cent kilogrammes de poisson.
On devrait prendre, dans le plus court délai possible, les mesures les plus énergiques pour faire disparaître ces appareils et en empêcher le rétablissement.
II.—CURAGE ET DRAGUAGE.
Curage. — Dans le curage des cours d'eau, on perd presque toujours une grande quantité de poissons, surtout en fretin et alevin, parce qu'on laisse le lit à sec ou parce qu'on abandonne le poisson dans des eaux vaseuses ou bourbeuses, qui le font périr promptement.
On doit recommander et même prescrire, dans toutes les opérations de curage, de laisser écouler le jeune poisson avec les eaux, ou bien de le retenir et de le placer dans des réserves convenablement organisées, ainsi que cela se pratique pour la pêche de la plupart des étangs.
Draguage. — Le draguage bouleverse souvent et détruit les lits ou amas de graviers et de cailloux qui forment d'excellentes frayères naturelles pour un grand nombre de bonnes espèces de poissons, telles que saumon, truite, ombre, barbeau, etc.
Il conviendrait, pour concilier les exigences du service des eaux et des usines avec celles de la reproduction des poissons, de faire, dans les opérations de draguage, quelques réserves sur les points essentiellement favorables à la ponte des meilleures espèces.
III. - PLANTATIONS.
Les plantations de bois, à hautes ou basses tiges, sur les bords des eaux présentent des avantages et des inconvénients qui sont essentiellement subordonnés à l'état et à la nature des eaux et des plantations.
Voici les avantages : 1° En s'enfonçant et en se ramifiant dans le sol, les racines retiennent les terres et consolident les rives, surtout dans les versants à pentes rapides ; 2° Les racines dans l'eau offrent de bons abris au poisson, et leur chevelu est souvent favorable à la ponte de plusieurs espèces dont les œufs vont se coller aux objets environnants ; 3° Les arbres offrent, dans certaines positions, un abri contre les mauvais vents, si funestes au poisson, et donnent un ombrage que plusieurs espèces recherchent pour s'abriter et se reposer ; 4° Ils servent généralement à la production ou à la réunion de myriades
d'insectes qui périssent ou tombent dans l'eau, où ils deviennent presque toujours la proie de plusieurs espèces de poissons, qui en sont très-friands et qui en font leur nourriture presque exclusive, à certaines époques de l'année.
Voici maintenant les inconvénients : Les plantations , surtout celles qui sont à basses tiges ou à rameaux étendus, et qui couvrent souvent une grande partie de la surface de l'eau, ont toujours des effets nuisibles, en interceptant l'air et la lumière.
Les arbres sont d'ailleurs quelquefois nuisibles au libre cours des eaux par le développement de leurs racines, et peuvent, dans certains cas, provoquer des débordements.
En conséquence, pour les plantations existantes et pour celles à créer, on doit, en tenant compte des observations qui précèdent, les disposer de manière à ne jamais les rendre nuisibles ou dommageables.
IV. - LOIS ET RÈGLEMENTS SUR LA PÊCHE.
< 1° D'après les dispositions de l'art. 26 du 'Code de la pêche fluviale (15 avril 1829), des règlements spéciaux déterminent les filets, engins et instruments de pêche qui, étant de nature à nuire au repeuplement des rivières, devront être prohibés; il en résulte que tout ce qui n'est pas défendu par les règlements locaux est permis. Cette disposition a des conséquences très-fâcheuses ; car les pêcheurs, par un simple changement de nom et par une légère modification de forme, peuvent continuer à se servir d'engins destructeurs, sous la protection même de la loi : le règlement devient ainsi complètement impuissant devant les tribunaux. Il y a donc une modification importante à introduire : la loi devrait porter que tout ce qui n'est pas nominativement permis est défendu.
2° La pêche, en temps de fraie, est prohibée par les règlements. Il conviendrait, pour un grand nombre de localités, de faire étudier et de déterminer aussi exactement que possible les époques ordinaires de la fraie, eu égard aux divers cours d'eau et aux diverses espèces de poissons, pour être en mesure de reviser convenablement les règlements là où les prohibitions et les interdictions ne concordent pas avec les époques de la fraie, et où les règlements ne favorisent pas toujours la propagation des bonnes espèces au détriment des espèces inférieures (1).
Les fécondations artificielles ne sont praticables qu'en temps de fraie.
Il y aurait donc lieu de faire une exception à cette prohibition générale, à l'égard des personnes qui seraient autorisées à faire des fécondations arti-
(1) Déjà, dans un grand nombre de localités, l'intervention éclairée des agents de l'administration des forêts a amené, dans cette partie du service, de salutaires et imporlantes améliorations.
ticielles, et qui seraient, à cet effet, munies d'un arrêté spécial du préfet du département (1).
3° L'art. 30 du Code de la pêche fluviale punit la pêche, le colportage ou le débit des poissons, dans certaines conditions prévues par les règlements; mais on a excepté de cette disposition la vente du poisson provenant des étangs ou réservoirs. Il faudrait supprimer cette exception ; car, autrement, la liberté de colporter et de vendre les poissons d'étangs ou de réservoirs rend toute prohibition illusoire.
Toutefois l'exception serait maintenue à l'égard du fretin ou de l'alevin destiné à l'empoissonnement ou au repeuplement des eaux.
En supprimant l'exception en faveur des étangs ou réservoirs, on appliquerait au poisson les mesures de police que l'on applique au gibier (art. 4 du Code de la chasse). On ne voit pas, en effet, les motifs pour lesquels on favoriserait la reproduction ou la conservation du gibier plus que celles du poisson ; car le poisson entre dans l'alimentation générale en proportion plus forte que le gibier ; il ne cause aucun dégât, le gibier en cause souvent de très-considérables à l'agriculture.
4° D'après l'art. 72 du Code de la pêche fluviale, l'amende peut être réduite au-dessous de 16 francs, et l'emprisonnement au-dessous de six jours. Les tribunaux, en appliquant trop souvent dans certaines localités les dispositions de cet article, rendent à peu près nul l'effet des poursuites dirigées contre les délinquants ou les contrevenants. Il y aurait lieu de supprimer cet article, ou du moins de ne jamais l'appliquer en cas de récidive.
5° L'art. 25 du même Code punit d'une amende et d'un emprisonnement quiconque aura jeté dans les eaux des drogues ou appâts de nature à enivrer ou détruire le poisson. Les dispositions de cet article devraient être étendues à quiconque aurait pêché du poisson enivré ou empoisonné.
La coque du Levant est l'une des substances les plus énergiques pour l'enivrement et la destruction du poisson ; ses effets sont d'autant plus désastreux que les braconniers peuvent souvent se la procurer dans les campagnes à très-bas prix, chez les droguistes, les herboristes, et même
(1) Ces autorisations ne seraient données qu'avec beaucoup de prudence et de réserve. On prendrait, par exemple, les mesures nécessaires : 1° pour ne jamais créer dans une région un monopole toujours très-prolilable à certaines individualités, mais trèspréjudiciable au développement de la pisciculture; et 2° pour ne délivrer d'autorisations spéciales qu'aux personnes offrant de bonnes garanties d'exécution. Car, si l'on persévérait pendant quelques années encore dans la voie suivie par quelques pisciculteurs, on arriverait infailliblement à la destruction des meilleures espèces, notamment dans le Rhin et les lacs des contrées voisines, ainsi que dans plusieurs cours d'eau du département de l'Oise, sans aucun avantage pour la pisciculture et sans aucune amélioration pour les autres cours d'eau.
les épiciers. Il y aurait, par conséquent, un intérêt réel à faire appliquer, d'une manière plus rigoureuse qu'on ne l'a fait jusqu'à ce jour, les dispositions des règlements sur la vente des substances vénéneuses ; on éviterait d'ailleurs, par l'application de ces mesures, les accidents qui résultent quelquefois de la présence de la coque du Levant, soit dans les eaux où elle a été introduite, soit dans les poissons livrés à la consommation (1).
G0 L'art. 11 du Code de la chasse punit d'une amende ceux qui auront pris ou détruit des œufs ou des couvées de cailles, perdrix, etc. Une amende devrait être infligée à ceux qui auraient pris des œufs de poissons ou qui auraient détruit des frayères.
Une exception serait faite à l'égard des personnes qui seraient autorisées à recueillir des œufs fécondés pour l'empoissonnement ou le repeuplement des eaux.
7° Dans un même but de conservation, on interdirait formellement, dans les cours d'eau, la coupe des herbes en temps de fraie ; car les œufs de plusieurs espèces de poissons s'attachent aux herbes ; d'ailleurs, le fretin et l'alevin y trouvent un refuge et un abri dans le premier âge.
Il n'y aurait d'exception à cette interdiction que dans le cas où la coupe des herbes serait prescrite par l'autorité compétente pour ne point entraver le service de la navigation ou celui de certaines usines, et pour assurer le libre cours des eaux : on pourrait toutefois, dans un grand nombre de localités, maintenir dans l'interdiction, sur chaque rive, un sixième ou un septième de la surface totale ; cette réserve serait suffisante pour la ponte de plusieurs espèces de poissons qui frayent sur les herbes à proximité des rives, et pour la conservation de l'alevin. Elle aurait aussi un résultat utile pour la conservation et la propagation des larves, des coquillages et d'une multitude d'animaux qui contribuent dans une forte proportion à l'alimentation des poissons.
8° D'après les dispositions des règlements sur la chasse, des primes sont accordées à ceux qui détruisent des animaux nuisibles. Il y aurait lieu d'appliquer cette mesure aux cours d'eau, et d'encourager la destruc-
(t) La coque du Levant est le fruit de l'Anamirta cûcculus ou Menispermum coccuhis, Lin.
Aux termes de la loi du 21 germinal an XI, qui régit la vente des médicaments, les droguistes ne peuvent vendre que des drogues simples, eu gros ; il leur est interdit d'en débiter aucune au poids médicinal (art. 23). Dès qu'une drogue est sortie de chez eux dans les conditions tixées par l'ordonnance du 29 octobre 18i6 sur les substances vénéneuses, ils ne sont plus responsables.
Quant aux herboristes, la vente des substances vénéneuses pour l'usage médical leur est implicitement interdile par l'ordonnance du 29 octobre 1846 (tit. II, art. 5) : Ils ne peuvent vendre que des plantes vertes ou sèches.
tion des loutres; la loutre est, en effet, un animal qui détruit une grande quantité de poissons, surtout à l'époque de la fraie.
9° Au sujet des animaux nuisibles, il ne faut pas perdre de vue que les oies et les canards, abandonnés en tout temps sur les cours d'eau, y détruisent beaucoup de frai dans les herbes, ou bien le dévorent ainsi que le fretin. Il y aurait lieu d'interdire l'entrée de certains cantons de rivières pour les canards et les oies, pendant le temps de la fraie et du développement du jeune fretin.
10° Dans les principaux cours d'eau dont la pêche est affermée, il conviendrait en général de prolonger la durée des baux, afin que les fermiers aient intérêt à activer et à favoriser la reproduction ; il y aurait lieu, dans le même but, de donner plus d'étendue aux cantonnements de pêche. Dans l'état actuel des choses, les fermiers se bornent presque généralement à profiter des ressources du présent, sans se préoccuper aucunement de celles de l'avenir, parce qu'ils n'ont pas la certitude, avec un bail de courte durée, de pouvoir utiliser leurs réserves ou leurs travaux de repeuplement, et parce qu'ils ont la crainte, avec un cantonnement peu étendu, de voir plusieurs espèces de poissons passer dans les cantonnements limitrophes. Ils trouveraient, d'ailleurs, sur un plus grand développement, un meilleur choix de frayères naturelles ou artificielles.
11° Pour assurer le repeuplement et la conservation, on désignerait, dans chaque cantonnement ou portion de rivière, une certaine étendue de bras, fossés, ruisseaux, noues, gares, etc., en communication avec ces rivières, dans lesquels on favoriserait la fraie naturelle, soit par une active et incessante surveillance, soit par des frayères artificielles; la pêche y serait interdite pendant toute la durée de la fraie des diverses espèces et même pendant toute l'année, afin de ne pas endommager les frayères et de ne pas troubler les jeunes poissons dans les retraites où ils trouvent à se reposer et à s'abriter.
En cas d'insuffisance de ruisseaux, bras, noues ou gares, on établirait de petits viviers ou réservoirs à proximité des cours d'eau, sous la surveillance immédiate de gardes-pêche ou gardes-rivière qui seraient chargés de la production de l'alevin, soit par la conservation des frayères naturelles et l'établissement de frayères artificielles, soit par l'emploi d'œufs préalablement fécondés.
Ces travaux de rempoissonnement seraient encouragés par des primes.
Dans les eaux qui dépendent du domaine public (cours d'eau navigables ou flottables), et dans les canaux de toutes catégories, ce service pourrait être organisé, dès à présent, à l'aide des gardes-pêche et des éclusiers.
Dans les autres cours d'eau, il y aurait opportunité de créer des gardes-
rivière qui auraient des attributions semblables ou analogues à celles des gardes-pêche.
En ce qui concerne spécialement les cours d'eau principaux, c'est-à-dire les fleuves et les rivières, dans lesquels la conservation et la police de la pêehe sont confiées à l'administration des forêts, l'organisation d'un bon service de pisciculture n'éprouverait aucune difficulté. Cette administration dispose, en effet, d'un personnel actif, intelligent et dévoué qui présente environ quatre cent trente brigadiers et gardes-pêche, affectés à la surveillance de 8,000 kilomètres de rivières. Ces employés connaissent parfaitement les mœurs et les habitudes des poissons, les conditions les plus favorables à leur reproduction et à leur développement ; ils sont d'ailleurs rompus aux fatigues du service des rivières, et possèdent toutes les connaissances nécessaires pour lutter contre les efforts de la dévastation.
De plus, ils sont placés, dans chaque région, sous les ordres de conservateurs, d'inspecteurs, de sous-inspecteurs et de gardes généraux, qui savent imprimer à leur service une direction intelligente et éclairée. L'administration des forêts se trouve donc, dès à présent, dans les conditions les plus favorables pour opérer, à peu de frais et avec certitude de succès, le repeuplement des plus beaux cours d'eau de la France.
On arriverait aux mêmes résultats dans les cours d'eau secondaires, soit par la création de gardes-rivière, soit par l'embrigadement des gardes champêtres.
Enfin, pour assurer encore d'une manière plus énergique et plus efficace l'application des règlements, et par une nouvelle assimilation des bonnes dispositions du Code de la chasse (art. 26), tous les délits en matière de pêche devraient être poursuivis d'office par le ministère public.
OBSERVATIONS GÉNÉRALES ET CONCLUSIONS.
Dans l'état actuel des cours d'eau de la France, ce qu'il y aurait de mieux à faire, ce serait : 1° De supprimer les barrages partout où leur établissement n'est pas indispensable pour le service des usines ou pour celui de la navigation et du flottage ; 2° Dans tous les cas, de modifier l'organisation de ces barrages de manière à permettre la remonte des poissons migrateurs et la libre circulation des poissons de toutes catégories ; 3° D'encourager et de favoriser l'exploitation et le développement des réservoirs ou viviers à poissons marins, et la culture des huîtres et des moules ; 4° De compléter l'organisation d'un bon service de surveillance, de manière à protéger efficacement la reproduction naturelle et la conserva-
tion du poisson, et de faire poursuivre d'office, par le ministère publie, les délits de pêche.
Ces mesures seraient suffisantes pour faire rendre aux cours d'eau, d'ici à peu d'années, une grande partie de ce qu'ils produisaient autrefois et de ce qu'ils pourraient encore produire en bons poissons comestibles, et pour développer sur une très-grande échelle la production du saumon.
Elles sont, d'ailleurs, les plus simples, les plus économiques et les plus pratiques.
Accessoirement ou simultanément : On organiserait, dans les affluents et les ruisseaux, des frayères artificielles.
On procéderait, dans des cours d'eau secondaires et dans quelques sources convenablement disposées, à la production de l'alevin des meilleures espèces de poissons par la méthode des fécondations artificielles.
Telles sont, messieurs, les considérations générales que votre Commission m'a chargé de vous soumettre pour la solution pratique d'une question qui présente un très-haut intérêt; car le rempoissonnement des cours d'eau de la France produirait en abondance des aliments sains, substantiels et peu coûteux, et pourrait donner, dans un avenir peu éloigné, une première solution du beau et grand problème de la vie à bon marché.
Ce rempoissonnement viendrait d'ailleurs largement compenser le déficit de produits provenant du dessèchement d'étangs ou de lagunes insalubres que l'industrie agricole, entrant dans une voie de progrès que l'on ne saurait trop favoriser, tend chaque jour à convertir en prairies ou en terres arables.
Dans le but de donner à l'examen de cette importante question toute la publicité qu'elle comporte, votre Commission a l'honneur de vous proposer : 10 De faire insérer in extenso le présent rapport dans le Bulletin de la Société ; et 2° d'en faire un tirage à part pour en envoyer des exemplaires au ministre des finances, au ministre de la marine, au ministre de l'agriculture, du commerce et des travaux publics, aux préfets des départements, aux conservateurs et inspecteurs des forêts, et aux ingénieurs chargés du service, des canaux et des cours d'eau navigables et flottables.
Il ne suffit pas, en effet, messieurs, d'élaborer dans le silence du cabinet et de venir ensuite produire en assemblée générale les mesures les plus propres à améliorer l'état bien déplorable de la plupart de nos cours d'eau au point de vue de la production du poisson.
Il faut, par tous les moyens qui sont en notre pouvoir, appeler la sollicitude du gouvernement et l'attention des propriétaires et des consommateurs sur l'opportunité et même l'urgence de l'application de ces mesures.
Il faut enfin prouver de plus en plus, par notre active et infatigable intervention dans toutes les questions d'intérêt public'qui se rattachent à nos travaux, que la Société d'acclimatation est de fait, et pas seulement de nom,, un établissement d'utilité publique.
Les conclusions de ce rapport ont été adoptées en séance générale.
Des exemplaires seront adressés, par les soins du Conseil, à MM. les ministres des finances, de la marine et de l'agriculture, à MM. les préfets des départements, et aux autres fonctionnaires dans les attributions desquels sont placés les cours d'eau et canaux.
ERREUR QUE L'ON PEUT COMMETTRE EN ARPENTANT AVEC UNE BOUSSOLE NON HORIZONTALE.
Les Annales ont publié, dans le courant de l'année 1855 (page 89 du volume), sur l'erreur que l'on peut commettre en arpentant avec une boussole non horizontale, un article dont les conclusions nous paraissent laisser quelque chose à désirer. L'auteur, en calculant cette erreur, arrive à un nombre insignifiant, et il en conclut avec logique qu'il n'y a pas lieu de se préoccuper de l'horizontalité de l'instrument.
Mais il est aisé de voir qu'il suppose que la lunette reste parallèle au limbe de la boussole, et que, par suite, l'erreur qu'il calcule n'est autre chose qu'une erreur de lecture causée par le non-parallélisme du cercle gradué et de l'aiguille aimantée. Or, lorsqu'il s'agit d'un arpentage en montagne, hypothèse dans laquelle on s'est placé, la lunette, dirigée suivant la pente du terrain, cesse d'être parallèle au limbe. Elle se meut dans un plan qui doit être perpendiculaire au plan du cercle gradué, et qui n'est pas vertical si l'instrument n'est pas placé horizontalement. Dès lors, on comprend facilement, et à priori, que, pour un même nombre de degrés marqués par la pointe de l'aiguille, le limbe de la boussole étant supposé non horizontal, la lunette sera dirigée dans des directions faisant avec la méridienne des angles différents, si l'on fait varier celui qu'elle fait avec l'horizon, puisqu'elle se meut dans un plan qui n'est pas vertical.
On voit donc que l'erreur commise en opérant avec une boussole inclinée sur l'horizon varie avec le degré de cette inclinaison et avec la pente du terrain.
Nous allons essayer de calculer quel peut être son maximum.
Nous admettrons, avec M. Cornebois, que l'erreur pouvant résulter de la lecture de l'angle doit être négligée, et nous rechercherons seulement celle qui peut résulter de ce fait que le plan dans lequel se meut la lunette n'est pas vertical.
Supposons, pour plus de simplicité, que la ligne AB, qui représente l'axe de la lunette, soit horizontale, la boussole étant inclinée sur l'horizon; déterminons le plan vertical passant par AB au moyen des lignes verticales AC et BD; ■ Supposons que le plan de mouvement de la lunette soit représenté par le plan ABF, limité par les lignes AE et BF perpendiculaires à AB ; Supposons enfin que la lunette soit dirigée, dans son plan, sui-
vant la ligne BE.
On lira sur la boussole un certain angle qui sera celui que la direction magnétique fait avec AB ou avec tout autre ligne située dans le plan vertical ABC. L'erreur commise sera donc égale à la projection horizontale de l'angle ABE.
Par le point E, faisons passer un plan horizontal, et soit GH la ligne d'intersection de ce plan avec le plan vertical AD; l'angle HGE est l'angle cherché qu'il s'agit de calculer.
Appelons x, l'angle HGE; a, l'angle HAE, qui mesure celui que le plan du limbe fait avec l'horizon ; h, l'angle que le rayon visuel, passant par la lunette, fait avec l'horizontale.
D'après nos hypothèses, le plan CAE est vertical, la ligne HG est horizontale, et le triangle GHE est rectangle en H ; le triangle AHE est rectangle en H; le triangle BGE est également rectangle en G; enfin BG est égal à AH.
Nous pouvons donc écrire les relations suivantes : (Triangle HGE) HE = EG sin x.
(Triangle HEA) HE = HA tg a.
(Triangle BEG) EG = BG tg GBE.
Remarquant que l'angle GBE est complémentaire de l'angle h, on en tire:
Si maintenant nous nous plaçons dans l'hypothèse admise par M. Cornebois, c'est-à-dire si nous supposons qu'entre l'aiguille et le verre de la boussole, il y ait un intervalle de 0m,01, et que la longueur de l'aiguille
soit de om, 1 0, la valeur maximum de tg a, ou plutôt de son logarithme, sera 9,0000000 (correspondant à environ 5° 42' 40"); d'un autre côté, si l'opération a lieu sur un terrain présentant une pente de 30°, On a x = 5° 18' 35".
On voit que ce résultat est bien différent de celui auquel était arrivé l'auteur de l'article dont il est ici question.
Si nous donnons à a une valeur moitié moindre, c'est-à-dire si nous supposons que la boussole soit inclinée de 20 36' sur l'horizon, et si nous faisons h = 20°, On a x =0° 56' 45", Valeur qui est loin d'être négligeable.
Enfin, si, avec la même inclinaison de l'instrument, nous supposons h = 10° (pente très-faible dans un pays de montagnes, On a # = 0° 27'30", Erreur très-appréciable, même avec un rapporteur.
On peut conclure de ces calculs qu'il est très-nécessaire, surtout en montagne, de placer le limbe de la boussole aussi horizontalement que possible, et qu'une négligence dans cette partie de l'opération entraînerait à des erreurs qui pourraient être considérables.
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FERS ET DES FONTES.
JUILLET 1856.
DÉSIGNATION DROIT QUANTITÉS ENTRÉES DIFFÉRENCE des NATURE D'OCTROI EN JUILLET. sur le mois correspond.
des EN JUILLET. /'D'UNITÉS. décime * - Augmentation Diminution MÀTIÈRES. compris. ell au MATIÈRES. compris. 1856. 1855. 1856. 1856.
Bois à brûler, dur. stère. 3 00,0 (1) 60,835 82,874 » 22,039 — blanc. - -2 22,0 (2) 22,083 17,310 4,773 » Cotrets de bois dur. - l 80,0 1,988 2,047 » 59 Menuise et fagots. - 1 08,0 3.643 4,562 » 919 Charbon de bois. hectolitre. 060,0 310,834 265,554 45,280 » Poussierde ch. debois — 0 30,0 15,110 19,938 » 4,828 Charbon de terre 100 kilogr. 0 72,0 34,902,299 36,668,473» 1,766,174 Charpente et sciage de bois dur. stère. 11 28,0 t2,337 10,629 1,708 » Id., de bois blanc — 9 00,0 15,625 14,229 1,396 » Lattes et treillages. les 100 bottes. 11 28,0 23,822 15,854 7,968 » Bois de déch. en chêne mètre carré. 021,6 783 319 464 » - en sapin. - 0 12,0 5,739 5,939 » 200 Fers, employés dans les constructions. ioo kilog. 3 60,0 866,958 614,994 251,964 m Fonte, employée dans 132,393 les constructions.. — 2 40,0 716,559 584,166 »
(t) Ces 60,835 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 24,334,000 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 12,167,000 kil. de houille.
(2) Ces 22,083 stères de bois, multipliés par 300 kil., poids du stère de bois blanc, représentent 6,624,900 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 3,312,450 kil. de houille.
BOIS. — ADJUDICATIONS DES COUPES DE BOIS.
On annonce des ventes de coupes de bois : A Remiremont (Vosges), pour le 8 septembre.
A Senones (Vosges), pour le 11 septembre.
A Saint-Dié (Vosges), pour le 12 septembre.
A Lure (Haute-Saône), pour le 15 septembre.
A Altkirch (Haut-Rhin), pour le 16 septembre.
A Mirecourt (Vosges), pour le 17 septembre.
A Neufchâteau (Vosges), pour le 18 septembre.
A Vesoul (Haute-Saône), pour le 18 septembre.
A Epinal (Vosges), pour le 20 septembre.
A Strasbourg (Bas-Rhin), pour le 22 septembre.
A Gray (Haute-Saône), pour le 23 septembre.
A Schlestadt (Bas-Rhin), pour le 24 septembre.
A Colmar (Haut-llhin), pour le 25 septembre.
A Saverne (Bas-Rhin), pour le 27 septembre.
A Wissembourg (Bas-Rhin), pour le 50 septembre.
ALIÉNATIONS.
Dans notre numéro du mois de juillet dernier (p. 188), nous avons fait connaître la date des ventes de quelques-unes des forêts domaniales dont l'aliénation devait avoir lieu en exécution de la loi du 5 mai 1855. —
Nous nous empressons de joindre aux renseignements fournis par notre dernier numéro ces indications nouvelles : 11e CONSERVATION. — Metz, le 9 septembre 1856. — Bois de Saint-Arnould, situé dans la commune de Norroy-le-Sec, inspection de Briey. — Contenance : 49 hectares 6 ares, formant un seul lot.
Bois des Chevaux, situé dans la commune de Gorze, inspection de Metz. — Contenance : 87 hectares 55 ares, formant un seul lot.
Bois-le-Prince, situé dans la commune de Gorze. - Contenance : 85 hectares 22 ares, lot unique.
Bois Saint-Paul, situé dans la commune de Luppy. - Contenance : 10 hectares 85 ares, formant un lot.
Bois de Rondheilgen, situé dans la commune de Porcelette, inspection de Thionville. — Contenance : 287 hectares 71 ares, divisés en quatre lots.
Bois de Hanetzel, situé dans la commune de Lachambre, section d'Holbach, inspection de Sarreguemines. — Contenance : 25 hectares 6 ares, divisés en deux lots.
Le bois des Chevaux et le bois de Rondheilgen seront vendus sans faculté de dél'ichement.
20e CONSERVATION. — On annonce pour la fin de septembre ou le commencement d'octobre la vente de la forêt de Sardolle, située dans la commune de ce nom, arrondissement de Nevers. — Contenance : environ 214 hectares, en deux lots.
Ainsi que la vente de la forêt de Bellary, située dans la commune de Châteauneuf, arrondissement de Cosne. —Contenance : environ 60 hectares, en deux lois.
24e CONSERVATION. — Le Fouilloux, situé dans la commune de Lamothe-SaintHeray. — Contenance : environ 90 hectares 40 ares, divisés en quatre lots; sera vendu vers la fin de septembre ou la première quinzaine d'octobre.
Ainsi que Etampes, situé dans les communes de Marigny, les Fosses, et Villiers.
en-Bois. — Contenance : 427 hectares 87 ares, divisés en quatorze lots.
Le bois domanial de Longboël, situé sur le territoire des communes de Romilly, Pont-Saint-Pierre et la Neuville (2e conservation), contenant 610 hectares 44 ares, aliéné avec facilité de défrichement, a été vendu à Evreux, le 28 août dernier, au prix de 1,444,000 fr.
CUBAGE ET ESTIMATION.
MESURAGE DE LA GROSSEUR DES ARBRES.
Les calculs de cubage qui ont pour base le diamètre sont plus expéditifs et plus intelligibles que ceux qui ont pour base la circonférence.
La nature, la dimension et le nombre des pièces d'équarrissage, de fente ou de sciage qu'on peut retirer des arbres se déduisent du diamètre.
L'œil se forme plus vite à l'évaluation exacte du diamètre qu'à l'évaluation de la circonférence.
Par tous ces motifs, le mesurage de la grosseur des arbres par le diamètre doit être préféré au mesurage par la circonférence.
Préférable, il doit être constamment employé ; car la comparaison et la généralisation des résultats, opérations essentielles en pareille matière, exigent l'adoption d'un système uniforme.
Connaissant les inconvénients attribués au compas de cordonnier, dont on se sert habituellement pour obtenir le diamètre, nous avons imaginé une règle et un ruban (1) qui peuvent le remplacer, et qui n'ont pas ses inconvénients.
Ces deux appareils donnent, sans calculs, le diamètre des arbres, en mesurant le contour.
(1) Cette règle et ce ruban se trouvent au Bazar forestier, 46, rue de l'Arbre-Sec, Paris.
La règle a om ,314 de longueur. Elle est garnie d'une bande molletée de cuivre ou de fer, pour écorcher l'arbre au point de départ et éviter le glissement sur l'écorce.
Le ruban a de 5 à 10 mètres de longueur, et il est armé d'une lamelle aiguë en cuivre qui permet de le fixer sur les arbres.
La règle et le ruban sont gradués, et les graduations espacées de 0m,0314.
Oro ,0314 représentant la circonférence d'un cercle de 0m ,01 de diamètre, les deux instruments donnent, approximation bien suffisante, le diamètre de centimètre en centimètre.
Nous n'entendons point les substituer au compas de cordonnier, qu'on emploiera toujours malgré ses inconvénients, parce qu'il est très-commode et très-expéditif. Nous songeons seulement à les lui donner pour auxiliaires, quand les arbres à mesurer sont placés dans des conditions qui rendent son emploi trop difficile. JULES D'AUVERGNE.
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
Mutations. -Correspondance. — Société forestière. — Société d'agricultnre.- Pêche.
= Mutations dans le personnel forestier. — M. LEVAVASSEUR, sousinspecteur à Balleroy (Calvados), a été nommé sous-inspecteur à Réalcamp (Seine-Inférieure), en remplacement de M. Vassout.
M. VASSOUT, sous-inspecteur à Réalcamp (Seine-Inférieure), a été nommé sous-inspecteur à Balleroy (Calvados), en remplacement de M. Levavasseur.
M. GURNAUD, garde général de 2mc classe à Lévier (Doubs), a été nommé garde général de lre classe à Blois (Loir-et-Cher), en remplacement de M. Guiot, Léonide, mis en disponibilité sur sa demande.
M. COUSIN, garde général stagiaire à Besançon (Doubs), a été nommé garde général de 5me classe à Lévier (Doubs), en remplacement de M. Gurnaud.
M. DE COURTIVRON, garde général stagiaire à Beaune (Côte-d'Or), a été nommé garde général de 3me classe à Haguenau (Bas-Rhin), en remplacement de M.Bagneris, nommé sous-inspecteur à Bitche (Moselle).
M. GROSJEAN, garde général stagiaire à Vesoul (Haute-Saône), a été
nommé garde général de 3me classe au Russey (Doubs), en remplacement de M. Laporte, démissionnaire.
M. CADET DE VAUX, garde général à Uzès (Gard), a été nommé garde général à Spincourt (Meuse), en remplacement de M. Gillet.
M. AUBERT DE TREGONAIN, garde général stagiaire au Mans (Sarthe), a été nommé garde général de 3me classe à Uzès (Gard), en remplacement de M. Cadet de Vaux.
M. ABORD, garde général stagiaire à Commercy (Meuse', a été nommé garde général de 3me classe à Gex (Ain), en remplacement de M. Petit, admis à faire valoir ses droits à la retraite.
M. BUCHARD, garde général de 2me classe à Châtillon-sur-Seine (Côted'Or), a été élevé à la lrc classe de son grade.
M. RENAUX, garde général de 2me classe à Triaucourt (Meuse), a été élevé à la 1 re classe de son grade.
M. CLERC, garde général de 3me classe à Nuits (Côte-d'Or), a été élevé à la 2me classe de son grade.
= On nous adresse la lettre suivante : MONSIEUR LE RÉDACTEUR, Dans le numéro des Annales forestières du mois de mars dernier, vous avez bien voulu publier quelques observations sur la sylviculture en France, que j'avais eu l'honneur de vous adresser. Permettez-moi tout d'abord de vous remercier du bienveillant accueil que vous avez bien voulu faire à ce modeste essai, en lui ouvrant les colonnes de votre si utile journal. Mais une note dont vous l'avez fait suivre me donne lieu de craindre qu'il n'ait pas été parfaitement compris , et je viens vous adresser quelques explications auxquelles, je l'espère, vous serez assez bon pour faire le même accueil qu'à l'article qui les a précédées.
La note n° 2, mise au bas de la page 58, donne au mot rente une signification différente de celle avec laquelle je l'ai employée, et on pourrait en induire, pour l'article entier, un sens tout autre que celui qu'il a réellement. Ce mot a en effet plusieurs acceptions, et il peut être employé, sans aucun doute, comme dans la note précitée, pour signifier le rapport existant entre le capital et le revenu. Mais je parlais de production agricole, et j'ai voulu désigner par ce mot ce qu'on entend ordinairement par rente du sol, c'est-à-dire cette différence entre le prix du marché et les frais de production, entre le prix courant et le prix naturel des produits de la terre (d), ou, en d'autres termes, le produit de la terre, net de tous frais.
Avec cette explication, la note n° 2 vient à l'appui de ce que j'ai dit. L'Etat, en effet, doit tendre à augmenter le rendement absolu, la production du sol, dont il est propriétaire. Sa fortune, ainsi que je l'écrivais, est la fortune de tous ; si elle est mal administrée, c'est-à-dire si Ton en tire un revenu inférieur à celui qu'on pourrait.
eu tirer, tous en souffrent, et comme il a besoin de revenus, il est obligé de demander aux impôts, soit à la bourse de chacun, ce qu'il perd d'un autre côté.
Il le doit aussi, parce que c'est à lui qu'il appartient de donner l'exemple, et qu'il
(t) Rossi, Cours d'économie politique.
est très-fàcheux de voir entre les mains de l'Etat, qui devrait montrer à tous le chemin des progrès utiles, des propriétés improductives ou ne donnant qu'un faible revenu. ,t Si donc un sol peut donner, par la culture arable, une rente supérieure à celle que l'on peut en tirer par la culture forestière, il est de l'intérêt général qu'il soit défriché, quel qu'en soit d'ailleurs le propriétaire.
Une seule considération peut être invoquée contre la liberté du défrichement, c'est celle qui pourrait résulter des conditions climatériques de certaines contrées, mais je crois que ce ne peut être que l'exception, et je parle en général. j Les lois dont le but est d'obliger une nature de propriétaires à la production de certaines denrées sont d'un autre temps. Dans un pays comme la France, avec tous les moyens de transport qui sillonnent aujourd'hui le monde entier, il ne peut y avoir qu'un moyen d'appeler la production, c'est d'offrir au producteur un profit suffisant.
Tout autre procédé est artificiel, et il entraine avec lui une perte certaine de partie des forces vives du pays.
J'ai l'honneur d'être, etc., UN ABONNÉ.
Notre honorable correspondant donne au mot renie une autre signifIcation que nous. Il en a parfaitement le droit. Quand une définition n'est pas définitivement fixée, chacun peut adopter celle qui lui convient. Nous ferons seulement observer à notre collaborateur que ses explications n'infirment pas l'objection que nous avons adressée au passage de son article, dans lequel il veut démontrer qu'en économie forestière l'intérêt de l'Etat ne diffère pas de celui d'un particulier.
Cette objection était ainsi formulée : « L'intérêt de l'Etat diffère de celui d'un particulier, parce que, tandis « que le particulier recherche la rente la plus élevée, dût le rendement de « sa forêt diminuer, l'Etat, au contraire, ne se préoccupe pas de la rente « et tend à augmenter le rendement absolu. C'est cette augmentation du « rendement qui constitue celle de la fortune publique. L'élévation de la « rente, quand les produits matériels diminuent, peut enrichir un individu, « mais elle appauvrit tous les autres. »
Eh bien! qu'on remplace si l'on veut le mot rente par ceux-ci : rapport entre le capital et le revenu, il n'en restera pas moins vrai qu'il y a dans la fonction du fonds forestier une circonstance essentielle que l'Etat ne doit pas envisager au même point de vue que les particuliers ; et c'est pour cela, du reste, qu'il traite ses forêts en futaie, tandis que les particuliers traitent les leurs en taillis simple.
= Société forestière. — La Société forestière, gardienne vigilante des intérêts qu'elle représente, a profité de la réunion des Conseils généraux pour leur adresser la lettre suivante, qui accompagnait les Bulletins et Mémoires publiés par elle.
La Commission permanente de la Société forestière à MM. les membres des Conseils généraux.
Paris, le 18 août 1856.
MESSIEURS, Au moment où les Conseils généraux vont se réunir, nous avons cru utile d'appeler leur attention sur les souffrances de la propriété boisée et les moyens de les alléger.
A cet effet, nous vous adressons les derniers comptes rendus de la Société forestière, ainsi que les mémoires qu'elle a publiés.
Au nombre des questions qui intéressent vivement la propriété forestière est la loi sur les défrichements des bois des particuliers, portée devant le Corps législatif et ajournée à la prochaine session.
La Société forestière, dans sa dernière assemblée générale, a émis, à l'occasion de cette loi, des vœux que vous trouverez reproduits dans le procès-verbal de cette séance (3e Bulletin trimestriel de la Société, p. 49) (1).
La Société serait heureuse de voir le Conseil général de votre département formuler des vœux analogues à ceux qu'elle a émis.
La question de l'exportation des écorces, qui fait aujourd'hui l'objet d'une enquête administrative dans certains départements, est aussi d'une grande importance pour les propriétaires de bois.
Cette question, d'ailleurs, ne touche pas seulement les propriétaires de bois, elle est liée aux intérêts respectables de cette classe nombreuse d'ouvriers que l'exploitation de ce produit, perdu aujourd'hui à cause de sa surabondance, pourrait faire vivre si l'exportation en était permise.
La production des écorces dépasse les besoins de la consommation en France; le développement des procédés chimiques appliqués au tannage tend encore à amoindrir ces besoins. Les dispositions du Code, en ce qui concerne la répression des délits forestiers commis dans les bois des particuliers, sont notoirement insuffisantes pour faire cesser le maraudage, cette cause incessante de ruine de nos forêts.
Des modifications sont nécessaires pour conférer à la propriété boisée une protection efficace, analogue à celle accordée à tous les autres genres de propriétés par la loi commune.
Les voies et moyens de transport des produits forestiers auraient besoin d'être améliorés.
Des tarifs exceptionnels permettent de faire circuler à bas prix le fer et la houille, par la voie des canaux et des chemins de fer, tandis que des tarifs trop élevés frappent le transport des bois, produit du sol national.
L'impôt foncier, réparti dans des proportions inégales sur le sol boisé et sur le sol arable, accable de charges exorbitantes le sol forestier, qui réclame une répartition plus équitable.
Telles sont, Messieurs, les principales questions étudiées par la Société forestière, et sur lesquelles elle fixe votre attention, vous priant d'appeler l'examen sérieux du gouvernement sur ces différents points, qui se rattachent si étroitement à l'intérêt général.
(t) Ces vœux sont conformes à l'opinion émise sur cette question par la Société impériale d'agriculture.
Des vœux émis par vous sur toutes ces questions permettraient à la Société de poursuivre avec bien plus d'autorité ses démarches.
Recevez, Messieurs, l'expression des sentiments de considération avec lesquels nous avons l'honneur d'être, Les Membres du bureau de la Société :
MM. le duc DE RAUZAN, Président.
Le comte DE LARIBOISIERE, } BENOIT D'AZY, Vice-Présidents.
zee- res¡ en s.
EUG. CIIEVANDIER, Le comte DE SAINT-LÉGER, Le marquis DE LA BAUME, FERDINAND DE LESSEPS, 1 L.-C. MICHEL, Secrétaires.
SÉGURET,
TREFOUEL,.
La Société aurait pu appeler aussi l'attention des Conseils généraux sur une question dont le Conseil général du département du Bas-Rhin a pris l'initiative l'an dernier, celle de savoir s'il ne serait pas avantageux que la direction générale des forêts fût confiée au ministère de Vagriculture et du commerce. On nous assure que le Conseil général du Bas-Rhin, qui déjà l'an dernier a émis un vœu pour que ce changement soit opéré, sera encore appelé cette année à se prononcer sur cette question, qu'on se propose de lui soumettre de nouveau. (Communiqué.) = La Société d'agriculture et les inondations. — La Société impériale et centrale d'agriculture n'est pas restée indifférente devant les désastres qui ont récemment désolé une partie de la France : une Commission composée de MM. d'Harblay, président, Dupin aîné, Ant. Passy, Mony de Mornay, Léonce de Lavergne, Pommier, Moll, Becquerel, Boussingault, Seguier, Nadault de Buffon et Vicaire, est chargée de rechercher les causes des inondations et les moyens d'en prévenir le retour.
M. Vicaire, rapporteur de la Commission, a fait un travail qui sera soumis à la Société, aussitôt que la saison aura ramené à Paris les membres de cette Commission, absents pour la plupart afin de profiter des vacances.
= Pêche merveilleuse. — Il y a quelques jours, des pêcheurs ayant tendu leurs grands filets dans laDordogne, ont ramené à bord cinquantecinq saumons. Ces poissons voyageurs, assez rares pour le moment dans nos parages, ont été pris dans les environs de Beaulieu, et pesaient tous ensemble près de 400 kilogrammes. (Echo de Vésone. )
a DE LA CULTURE DES FORÊTS, DES PLANTATIONS ET DES DÉFRICHEMENTS (4).
(Suite.)
DU DÉFRICHEMENT DES FORÊTS.
L':to)*.,pVPrÍ être divisées en trois classes : le Il , ., 10 1 0 ce-Ha conservation est d'utilité publique ;
2° Celles qui peuvent être défrichées avec profit et sans inconvénient ; 3° Les forêts ou portions de forêts réduites à l'état de broussailles et qu'il serait utile de restaurer, de réédifier.
La répartition des diverses cultures ne s'est pas toujours opérée dans l'intérêt du pays, ni même dans l'intérêt des propriétaires. Tel espace qui formerait d'excellentes terres arables est encore couvert, de forêts; tel autre a été défriché uniquement parce qu'il se trouvait à portée des habitations. Une nouvelle distribution du sol dans l'intérêt de la production et sous le point de vue météorologique est devenue l'une des nécessités actuelles.
Nous remarquerons d'abord que l'on a attribué aux défrichements des forêts exécutés depuis un demi-siècle les grandes inondations qui ont eu lieu, ily a une quinzaine d'années, dans les vallées de la Loire et du Rhône ; mais la destruction des forêts situées sur les versants de ces fleuves n'a pu fournir un excédant de plus d'un centimètre d'épaisseur dans la grande masse d'eau qui a envahi ces vallées. Une des causes qui ont augmenté d'une manière sensible le volume des eaux sorties de leur lit est le dessèchement du sol cultivé, dessèchement opéré par une multitude de fossés qui précipitent le cours des eaux vers les affluents des fleuves.
Lorsque des hommes compétents auraient déterminé le choix des forêts qu'il est utile de conserver, il faudrait jeter un coup d'œil sur les coteaux dénudés depuis des siècles; les propriétaires de ces terrains y replanterontils les essences détruites? Il est permis de l'espérer, car on voit de nombreux exemples du succès d'importantes plantations exécutées dans ces derniers temps.
Les défrichements cesseront aussitôt que l'on arrivera à un état de (1) Voir le numéro des Annales forestières du mois d'août 1856.
choses tel, que tout sol boisé rapportera autant que s'il était cultivé en céréales. Si les défrichements s'opéraient dans une juste proportion, les plantations se multiplieraient dans les terrains montueux, peu fertiles; l'état atmosphérique, au lieu de se détériorer, s'améliorerait.
La découverte et l'exploitation de nouvelles houillères, l'introduction des bois étrangers, l'emploi du fer dans la charpente et en général tout ce qui a pour résultat de diminuer le prix des bois amène la destruction d'une partie des forêts, si la consommation des bois de toute espèce demeure la même. L'industrie houillère n'a pris encore en France que peu de développement, malgré l'abondance de cette richesse, mais elle prendra nécessairement une grande extension.
Dans nos contrées méridionales, de vastes forêts sont réduites à l'état de broussailles improductives; une partie de l'espace qu'elles occupent pourrait être défrichée avantageusement.
Supposons cent hectares couverts de broussailles; il est certain que trente hectares bien plantés et bien aménagés suffiraient pour produire une quantité de bois égale à celle que rend l'exploitation irrégulière de ces broussailles; il resterait donc soixante-dix hectares qui pourraient être cultivés en céréales, en vignes, en prairies artificielles ou réduits en pâturages dont une partie serait irriguée par des sources.
Ce serait en vain que l'on replanterait les coteaux, les montagnes, si l'on n'ouvre des débouchés aux produits forestiers nouvellement créés, si le revenu du sol planté ne s'élève pas au-dessus du revenu que procure le pâturage. Les habitants des localités ne verraient pas sans regret reboiser toute l'étendue du sol où cette condition ne serait pas remplie.
Tellès d'Acosta, auteur d'une Instruction sur les bois de marine, conseille d'adopter et d'étendre autant que possible l'usage de la houille pour le chauffage, comme un moyen de ménager les forêts; mais l'extension de cet usage produirait un effet opposé, car les forêts, rapportant un moindre revenu, seraient ou défrichées ou réduites en broussailles et en pâturages.
Nous voyons depuis trente ans s'opérer en même temps le défrichement d'une partie des forêts, et les plantations qui s'exécutent dans les terrains infertiles de la Champagne, de la Sologne, du Maine, dans les landes de nos départements de l'ouest; l'art s'est perfectionné, les débouchés se sont étendus; on plante mieux et à meilleur marché qu'autrefois. On doit attendre d'une génération qui calcule sur les frais et les produits de toutes les entreprises qu'elle fera des progrès dans la création des forêts nouvelles, comme elle en a fait dans la création et la culture des prairies artificielles.
Le défrichement des forêts s'arrêterait si l'avantage qui en résulterait
ne paraissait pas devoir dépasser les limites ordinaires du profit des capitaux. Le défrichement du sol, sa mise en culture exigent des travaux dispendieux, tandis que les forêts produisent un revenu sans nouvelle mise de fonds, et que, si l'on n'exploite pas une coupe à l'époque fixée par l'aménagement, la croissance continue en attendant une chance favorable à la vente.
Les forêts situées sur les plateaux, sur les coteaux qui dominent les sources, doivent être comprises, sans exception, dans la classe de celles qu'il ne serait pas permis de défricher; mais par compensation on pourrait, en établissant de nouvelles voies de communication, procurer des débouchés à leurs produits. Ce serait la plus efficace sauvegarde contre la destruction.
Dans les contrées où la population est en progression croissante, où la culture s'étend sur les sols de médiocre qualité, les défrichements s'opéreront dans des forêts qui auraient été transformées en terres arables depuis plusieurs siècles, si le sol, à raison de trop d'humidité, n'avait pas été rebelle à la culture; mais les propriétaires, assurés aujourd'hui de vaincre cet obstacle par l'opération du drainage, n'hésiteront plus à défricher un terrain qui augmentera de valeur dans une forte proportion.
Si les forêts ne suffisent plus aux besoins locaux, les plantations marcheront de front avec les défrichements; elles couvriront les pentes, les coteaux que l'agriculture ne peut exploiter sans perte.
L'un des arguments contre la liberté du défrichement des forêts est fondé sur le besoin des bois propres aux constructions maritimes. Les partisans du libre exercice des droits de propriété répondent que la Hollande et l'Angleterre qui achètent de l'étranger leurs bois de construction possèdent une marine assez imposante ; mais on peut leur répondre que par l'effet d'une bonne culture forestière, il sera moins dispendieux de trouver dans son territoire un approvisionnement suffisant que de le faire venir des contrées éloignées.
Les forêts d'Angleterre ne pourraient fournir des bois de construction navale que pour deux ou trois ans ; la marine anglaise importe, par an, douze millions de pieds cubes de bois provenant principalement du nord de l'Europe. Il ne reste, en Ecosse, de gros chênes que pour construire à peine deux vaisseaux ; mais de grandes plantations s'exécutent dans cette parti du Royaume-Uni.
En France, les forêts peuvent produire autant d'arbres que les constructions de tout genre peuvent en absorber, à l'exception des bois propres à la mâture et à quelques autres usages. On avait proposé d'affecter au service de la marine une étendue de quatre-vingt mille hectares de forêts, qui seraient aménagés en haute futaie, et qui devraient suffire à toutes les
constructions maritimes. Cette superficie, couverte de chênes et d'essences résineuses, si elle était bien cultivée par les soins de l'administration forestière, pourrait fournir les 40,000 stères dont la marine de l'Etat a besoin tous les ans. Cette proposition a été écartée, mais on peut la reproduire un jour.
On avait présenté comme une ressource inépuisable les importations des bois que l'on pouvait exploiter, moyennant un faible tribut, dans les montagnes de la Turquie d'Asie et dans d'autres contrées de l'Orient oit il existe encore d'immenses espaces couverts d'arbres magnifiques, mais cette exploitation s'épuisera, ces forêts ne se repeupleront pas; d'ailleurs les frais d'extraction et de transport absorberaient souvent la valeur des bois importés.
La France achète de l'étranger des bois propres à divers usages, pour 50 à 40 millions par an; l'agriculture a donc pu s'emparer de l'étendue du sol forestier qui aurait produit une égale quantité de matière ligneuse; il en résulterait un avantage important pour notre pays si les forêts que l'on a défrichées n'étaient pas placées dans des conditions qui en rendaient la conservation utile.
Nous ajouterons quelques observations relatives aux effets que le pâturage a exercés pendant une longue suite de siècles, et exerce encore sur les forêts. Il a occasionné la destruction d'une étendue dix fois plus grande que celle qui a été défrichée pour être livrée à l'agriculture.
Il sera toujours avantageux pour la propriété forestière de la dégager des entraves des droits d'usage et de pâturage, surtout si le rachat ou le cantonnement peuvent s'opérer à des conditions qui ne soient pas onéreuses.
Mais lorsque la propriété est affranchie de toute servitude, le propriétaire peut trouver du profit à permettre le pâturage dans ses bois, si l'exercice en est sévèrement limité. Il n'en résultera aucun dommage dans une haute futaie, car les grains produisent cent fois plus de plants qu'il n'en faut pour remplacer les arbres que l'ou enlève ; U se trouve quelques rejets qui, en surmontant les plus faibles, sont bientôt placés hors des atteintes de la dent du bétail.
Dans les taillis sous futaie, le pâturage bien réglé, exactement surveillé, produit ordinairement plus de bien que de mal. En effet, ces taillis sont ordinairement si épais, que les plants de bonne essence assez vigoureux pour percer l'obscurité qui les enveloppe seraient bientôt étouffés si les bestiaux, en retranchant les branches du sous-bois, ne rendaient le fourré moins épais, moins impénétrable.
Nous ajouterons une remarque très-importante : les futaies sur taillis trop branchues et les taillis trop épais étouffent les plants des meilleures
espèces d'arbres ; les espèces inférieures, comme le charme, les bois blancs et les arbrisseaux résistant mieux à cette cause de destruction.
Les permissions de pâturage que peut accorder un propriétaire ne rendent pas moins utile le rachat du droit, car, le sol une fois affranchi de toute exigence, le propriétaire peut à son gré ou permettre le parcours ou le défendre, en suspendre ou en reprendre l'exercice et le modifier comme il le juge opportun.
DE LA PLANTATION DES FORÊTS.
Sous la dénomination de forêts plantées, nous comprendrons seulement les massifs peuplés d'essences forestières, et non les plantations d'arbres épars qui forment la clôture ou la bordure des héritages.
Les règles à suivre dans la création et dans l'aménagement des forêts plantées sont fondées sur des calculs économiques bien compris. — Faire le choix d'un sol qui puisse nourrir des arbres avec profit, et qui ne soit susceptible que d'un médiocre produit comme terre arable. — Planter les landes, les friches. — Ouvrir de nouvelles voies de communication pour se procurer des débouchés. — Employer les procédés de plantation, d'entretien, d'exploitation les moins dispendieux et ceux dont le succès est à la fois le plus rapide et le plus assuré.
La culture forestière, devenue l'une des nécessités de notre époque s'étendra à mesure que les anciennes forêts diminueront, soit dans leurs produits, soit dans l'étendue de l'espace qu'elles occupent. Si un hectare couvert d'arbres exige autant de travail qu'un hectare semé en prairie artificielle, ce sera un progrès égal à celui qui a transformé le sol inculte en sol cultivé. Il est peu de territoires qui ne présentent quelques parties qui seraient avantageusement plantées en essences forestières, ici pour procurer un abri contre des vents impétueux, là pour garnir des coteaux arides.
Le premier soin à prendre sera le choix de l'emplacement de la nouvelle forêt; ensuite il s'agira du choix des plants. Nous entrerons à ce sujet dans quelques détails.
Un habile forestier, M. Kasthofer, n'hésite pas à conseiller de remplacer dans les forêts les espèces d'arbres les moins productives, par de meilleures espèces que devra multiplier l'industrie forestière. Nul doute que le tilleul, que le charme qui ont envahi une si grande place dans nos forêts, devraient être détruits à mesure de l'exploitation des coupes, et remplacés par le chêne, le frêne, le mélèze, le pin laricio, le pin sylvestre, en adaptant le choix de ces différentes espèces aux qualités du sol, aux besoins locaux et au calcul des dépenses actuelles et des recettes de l'avenir.
Pour juger de la préférence que l'on donnera à certaines espèces d'ar-
bres sur d'autres, dans le choix que l'on en fera, il faut comparer leurs qualités respectives et leur valeur.
On a depuis longtemps préféré pour les plantations les espèces qui croissent rapidement, parce que l'on cherche une prompte jouissance.
Mais, pour juger du mérite de ce choix, il faut faire entrer dans le calcul les prix respectifs des différents arbres dans une période et dans un espace donnés. On connaîtra, à l'aide d'expériences faites par des forestiers renommés, les espèces qu'il sera profitable de choisir.
Le tableau suivant peut servir de renseignement pour ces différentes appréciations. Nous n'y ferons figurer que les espèces principales.
ACCROISSEMENT COMPARÉ DE DIFFÉRENTES ESPÈCES DE BOIS DANS DES SOLS DE MOYENNE QUALITÉ.
o o o •= O W) tC U S £ 0 DÉSIGNATION <0 «50 nj „ M o e s — ta a g e- r- 2 S « « Su5 §2™ S i sT-2 « des 35 g 2» 2 g ;: ce = g -:' g o o Pu g Ou50 ESPÈCES. u - § ESPÈCES. - 73 Z * "SLiS à s. s. E mètres cubes, mètres cubes. mètres cubes. kilogrammes.
- - - Chêne. 88 118 150 732 Hêlre. 84 116 150 703 Pins. 177 23 4 290 574 Mélèze. 197 254 309 557 Epicéa 137 190 248 498 Bouleau. 112 H7 178 644 Frêne 131 176 221 703 Aulne el tremble. 139 188 239 435
La qualité et la valeur vénale des bois ne se mesurent pas seulement par leur volume, il faut faire entrer dans les calculs l'élément de la pesanteur spécifique. Elle est indiquée approximativement dans le tableau suivant :
PESANTEUR r des ESPECE DES BOIS. bois agés de 50 ans, f crus dans un massif d'un hectare. kilogrammes. r.uêne. 86,376 1 H êl re. 81,548 Piiis 134,316 Méli'zc. 141,478 Epicéa. 5)4,620 Bouleau. 94,668 Frêne. 123,728 Aulne, tremble 81,780
On voit par ce tableau que, dans un temps donné, un hectare couvert
de chênes et de hêtres rend un poids bien moindre que les pins, le mélèze et le frêne; mais d'autres éléments entrent dans la valeur vénale de chaque espèce de bois, c'est d'abord l'usage habituel que l'on en fait, c'est son abondance ou sa rareté relativement à son emploi dans les diverses localités. Le chêne est propre à une infinité d'usages auxquels le hêtre et les bois blancs ne peuvent servir, mais le pin et surtout le mélèze peuvent entrer en concurrence avec le chêne pour les emplois les plus fréquents et les plus utiles.
En Allemagne, dit M. de Chambray dans son Traité de la culture des arbres résineux, on emploie indifféremment le chêne et le pin sylvestre pour le chauffage ; en Ecosse, le pin est le bois le plus employé pour la charpente, la menuiserie (1). Le mélèze, presque incombustible, résiste à l'humidité ; il est préférable au chêne pour la construction des vaisseaux et des bateaux.
Les essences résineuses présentent encore un motif de préférence pour la formation ou le repeuplement des forêts; elles résistent mieux aux causes destructives que les arbres feuillus. Elles améliorent le sol par le dépôt de leurs aiguilles, au point de lui donner, à la fin de la période d'exploitation, un haut degré de fécondité.
Dans le choix des espèces qui formeront les massifs, on devra donc préférer les pins et le mélèze, puisque leur volume et leur poids dans un temps et sur un espace donnés sont supérieurs à ceux des autres espèces, et que ces arbres sontpropres aux usages les plus communs; on plantera du frêne, du bouleau, de l'orme pour les besoins locaux, pour certains usages qui n'emploient qu'une quantité de bois peu considérable; on conservera, on multipliera le chêne. On placera chaque espèce dans le sol qui lui conviendra le mieux.
On évitera autant que possible de planter des arbres forestiers en ligne sur le bord des chemins environnés de chaque côté d'espaces découverts, car ces arbres, exposés à tous les vents, ne croîtraient pas d'une manière régulière ; ils ne donneraient qu'un produit bien plus faible que s'ils formaient des massifs; ils nuiraient dans une forte proportion au bon entretien des voies publiques.
Nous allons indiquer les principaux soins que réclament les forêts artificielles.
Pépinières. - Dans les sols siliceux, on mélange un peu de chaux avec la terre où doivent être déposées les semences. On a soin d'assainir le terrain si le sous-sol retient l'eau.
On peut choisir un sol fécond pour semer les graines d'arbres, mais il
(1) The practical Planter, by Thomas Cruickshank.
est essentiel que les plants soient repiqués dans un sol de médiocre qualité ; ce sera une transition nécessaire pour les préparer à végéter plus tard dans des terres de dernière qualité.
Semis. — Le chêne ne doit pas être semé en pépinière pour être replanté; il doit être semé à demeure, car les plants ne réussissent pas aussi bien que ceux de frêne, de hêtre et d'orme. On sèmera le gland dans des massifs de pins ou de mélèze, lorsque les plants de ces dernières espèces auront atteint une hauteur d'un mètre à un mètre et demi. Le semis se fait ordinairement dans le cours du mois de mars, un peu avant l'époque où les glands commencent à germer; on les couvre de deux ou trois centimètres de terre.
Lorsque les branches des essences résineuses couvriront les jeunes brins de chêne, on devra élaguer ces branches; le chêne a besoin d'ombrage pour germer, pour croître pendant ses premières années, mais plus tard le plant serait étouffé, au lieu d'être seulement abrité. Les semences de pin ne doivent être recouvertes que d'un demi-centimètre de terre.
On entremêlera les espèces à racines pivotantes avec les espèces à racines traçantes.
Plantation. — Les racines devront être étendues de manière qu'elles puissent prendre leur plein développement. Elles seront disposées comme elles l'étaient dans la pépinière. Une condition essentielle est de les laisser entières.
On doit éviter de couper le sommet des plants.
Les labours assez fréquents font plus que doubler la rapidité de la croissance.
On a le soin d'éclaircir les plantations aussitôt que les branches des sujets se touchent.
Elagage. — L'élagage des jeunes arbres à feuilles caduques doit être pratiqué le plus fréquemment possible, en observant de ne point laisser de chicot et de ne pas enlever trop de branches.
Les forestiers écossais, qui entendent si bien la culture des arbres, recommandent de ne pas élaguer les branches des pins et des mélèzes, à moins qu'elles ne présentent des marques de décadence. Cependant l'élagage des pins est pratiqué dans les plantations du Maine et de la Sologne, et il ne paraît pas qu'il en résulte plus d'inconvénients que d'avantages.
Dans quelques contrées, après l'abatage des arbres résineux, on livre le sol à la culture des céréales ou des plantes oléagineuses pendant quelques années avant de le replanter. On profite ainsi de la fertilité que les dépôts d'aiguilles ont donnée au sol.
La succession alterne des essences forestières dans les vieilles forêts ne
s'opère pas d'une manière absolue. Les forêts de sapins se perpétuent pendant une suite de siècles; on croirait que leur permanence est continue et indéfinie, mais il y a des intervalles pendant lesquels les bois blancs, le tremble, le marceaux, remplacent les arbres morts ; ensuite les semences résineuses reviennent, s'introduisent sous ces plants de bois tendres, et les plants qu'elles produisent finissent par reprendre possession de l'espace que les grands arbres de leur espèce avaient occupé.
Les futaies de chêne se reproduisent plus difficilement.
Dans la succesion des cultures, on aura soin d'observer cette grande loi de la rotation des espèces végatales.
RÉSUMÉ.
On peut définir ainsi l'avenir des forêts : Introduction du travail durant toute la période des aménagements; transformation successive des forêts existantes en forêts cultivées.
Extirpation des arbustes et autres plantes nuisibles ou sans valeur.
Nettoiement des taillis.
Elagage des baliveaux et des arbres.
Défrichement d'une partie des forêts de la plaine, surtout dans les localités où elles forment de grands massifs qui pourraient être divisés, séparés par des cultures agraires.
Culture des massifs de haute futaie destinés à fournir des bois propres aux constructions maritimes.
Plantation de massifs dans les plaines dénudées, pour rompre le cours des vents, pour conserver de l'humidité sur le sol.
Création de forêts artificielles dans les plaines peu fertiles, sur les coteaux, sur les plateaux qui dominent les sources.
Le résultat de cette distribution du sol forestier sera une plus grande production dans une moindre étendue de terrain ; le travail sylvicole aura assez d'efficacité pour répondre à tous les besoins de bois de chauffage, de bois propres aux usines et aux constructions.
L'administration et les particuliers appliqueront les connaissances théoriques et pratiques à une culture qui procurera le maximum des produits.
Telle est la tendance actuelle; il ne s'agit que de la bien diriger.
NOIROT, Membre de l'Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon.
CULTURE DU FRÊNE.
Le bois du frêne, comme bois d'œuvre, se prête à une foule d'usages ; cet arbre peut croître et prospérer dans des terrains où il serait difficile de produire avec avantage toute autre essence forestière. Ces considérations nous engagent à donner aux lecteurs des Annales forestières la traduction d'un mémoire publié récemment à ce sujet par l'un des forestiers les plus distingués de l'Allemagne méridionale.
EXPÉRIENCES SUR LA CULTURE DU FRÊNE, par G. MEYER, inspecteur des forêts du prince de Vottingen-Vallenstein, à Mauren.
La culture du frêne a déjà été l'objet d'un grand nombre d'écrits ; néanmoins, les notions que je me propose de publier ne paraîtront peut-être pas dépourvues d'intérêt. D'après mes propres observations, les hommes pratiques eux-mêmes ont sur ce genre de culture des idées complétement erronées ; les ouvrages théoriques ne donnent sur le même sujet que des indications également défectueuses.
Le frêne peut, à très-peu de frais, donner d'excellents produits, s'il est cultivé dans le sol qui lui convient ; peut-être l'exposé de mes expériences à cet égard est-il appelé à engager mes collègues à en étendre la culture. Depuis longues années, j'ai planté le frêne sur de grands espaces ; mes expériences réalisées sur une très-grande échelle ont pour elles la sanction du temps; elles permettent de juger les diverses méthodes en pleine connaissance de cause ; les observations dont j'ai à rendre compte sont le résultat de l'expérience, rien que de l'expérience. Les erreurs dans lesquelles j'ai pu tomber préserveront d'erreurs semblables ceux qui voudront en faire leur profit.
Durant ma longue pratique forestière, j'ai acquis la conviction de la possibilité de cultiver en très-grand le frêne sans donner au sol plus de préparation qu'il n'en reçoit pour le boisement en érable blanc ou en arbres conifères.
I. Emplacement et conditions locales convenables au frêtie. - Dans l'Allemagne méridionale, le frêne croît naturellement dans les bas-fonds, les vallées traversées par un cours d'eau et les terrains marécageux; c'est là qu'il se développe avec le plus de vigueur. On le rencontre encore dans les vallées boisées, dans les ravins, près des sources, sur les rivages que
les eaux ont fait ébouler, parce que le sol en est meuble et spongieux, dans les terres basses où l'aulne domine, dans les bois plus ou moins humides, au sol tourbeux dépourvu de pente. Le frêne se trouve aussi dans les montagnes de moyenne hauteur ; il y couvre les pentes inférieures et les ravins exposés au nord, là où le sol, tout en conservant une certaine vigueur, est pierreux, et plus ou moins compacte. Le frêne se trouve isolément ou par petits bosquets, parmi les bois à feuilles larges situés sur des terrains dépourvus de pente, à une élévation médiocre. Lorsque dans les bois de cette nature on a repeuplé par plantation d'anciennes clairières gazonnées, le frêne les envahit plus ou moins, par semis naturel ; toutefois, il n'y peut prospérer que quand la couche superficielle est suffisamment profonde et qu'elle repose sur un sous-sol qui n'est pas d'une nature trop stérile.
La qualité du bois de frêne est en rapport avec la nature du sol dans lequel l'arbre a végété. Il peut croître dans le sol le plus gras et le plus substantiel ; seulement le bois de l'arbre abattu trop jeune, alors qu'il est encore à l'état de perche, est un peu mou et poreux ; mais il acquiert en vieillissant les qualités qui le rendent propre à diverses usages. Bechstein avait déjà consigné cette remarque, dans sa Botanique forestière (t. I, p. 419). « Il est remarquable, dit-il, que le frêne, lorsqu'il avance en âge, donne dans un sol gras et fertile un bois meilleur, plus dur et plus solide que dans un terrain maigre. Dans ces conditions, le charron le préfère au bois du frêne abattu jeune, venu dans un sol sec et peu fertile ; ce dernier bois est sensiblement plus cassant. » Des observations récentes prouvent qu'il en est de même de plusieurs autres espèces de bois d'œuvre.
Le frêne, dans son jeune âge, supporte bien un ombrage assez épais, spécialement celui que donnent les arbres à bois tendre, tels que l'aulne, le tremble, le tilleul, le saule et les conifères. Dans un sol frais, d'après mes observations personnelles, le frêne ne dépérit pas sensiblement jusqu'à l'âge de quinze à vingt ans, sous l'ombre du hêtre et du charme. Si les pousses de frêne à demi étiolées par un tel ombrage sont dégagées et assujetties à un bon tuteur, elles croissent aussi vigoureusement que si elles avaient commencé leur vie:végétale dans une situation découverte. Néanmoins, lorsqu'on veut activer la croissance des jeunes frênes, il faut commencer à les dégager dès qu'ils ont atteint la hauteur de 60 centimètres à 1 mètre. Le frêne réussit mieux entouré d'autres arbres, que quand les plantations sont uniquement formées de frênes; il ne doit occuper exclusivement le sol que là où celui-ci est très-substantiel; on sait en effet que le feuillage du frêne est trop clair pour donner à la terre un engrais suffisant. Pour les terres humides, le meilleur mélange d'arbres à associeç au frêne se compose d'aulnes, de peupliers, de cerisiers à grappes, de tilleuls
d'hiver et de saules. Si le sol est plus sec, le frêne végète mieux parmi les charmes, les hêtres, les érables et les tilleuls d'été. Le frêne, soit qu'il se reproduise par semis naturels, soit qu'on l'ait planté artificiellement, porte déjà des grains fertiles lorsqu'il est encore à l'état de simple perche ; c'est ce que j'ai observé sur des frênes que j'ai fait planter il y a vingt-cinq à trente ans ; cette précocité de reproduction par ses semences est très-favorable à la propagation naturelle du frêne.
II. Propagation naturelle et culture du frêne. — Lorsqu'il se trouve dans les bois prêts à être exploités ou qui doivent l'être prochainement des frênes à l'état de perches on à celui d'arbres déjà formés, le sol étant suffisamment couvert, on voit au bout de quelques années, si les soins nécessaires n'ont pas été négligés, s'élever une multitude de jeunes frênes qu'il est facile de conserver quand la coupe du bois ne se fait ni trop tôt ni trop tard. On ne peut pas, bien que ce soit l'opinion assez généralement admise, reproduire le frêne au moyen d'arbres porte-grains plantés de place en place dans des coupes par éclaircies, ou dans des taillis à la moitié de leur croissance, également éclaircis ; de longues années d'expérience ne me laissent aucun doute sur ce point. Les jeunes sujets ne grandissent pas sur un sol gazonné; le frêne veut être cultivé sous un taillis de six à douze ans, toujours dans des places modérément ombragées ; il faut qu'à l'époque de la coupe des taillis, les jeunes frênes aient déjà de 1 à 2 mètres de hauteur; ce sont là des conditions indispensables au succès de cette culture. La graine du frêne ne réclame aucune préparation du sol ; elle tombe des arbres soit en hiver, soit au printemps ; les agents atmosphériques les mettent pendant l'été en contact avec le sol ; en automne, la chute des feuilles la recouvre ; elle lève au printemps de la seconde année.
C'est une grave erreur de croire qu'il faut donner au jeune plant de frêne dès sa deuxième ou sa troisième année une situation découverte; il lui faut au contraire un ombrage assez épais, ainsi que je l'ai déjà fait observer.
C'est lorsqu'il croît ainsi à l'ombre que le frêne pousse de profondes racines, surtout quand le sol est humide et marécageux; plus tard, lorsqu'il vient à se trouver dégagé, sa tige s'élance rapidement. Si les jeunes frênes croissent entourés d'aulnes, de trembles, de tilleuls, de bouleaux, de saules marceaux ou de pins, ils ne réclament un premier éclaircissement que quand ils ont atteint la hauteur de 30 à 60 centimètres ; mais s'ils croissent sous des charmes ou des hêtres, on peut déjà commencer à les dégager modérément, quand ils n'ont pas plus de 12 à 15 centimètres. Partout où le sol convient au frêne, en suivant ces indications, on assurera sa propagation naturelle ou sa substitution à d'autres essences par repeuplement. Les principes généraux de la sylviculture trouvent d'ailleurs leur application quant aux soins à lui donner ultérieurement.
III. Culture du frêne par semis et par plantation.
A. — Semis. On sait que la graine du frêne vient à bien assez fréquemment; il n'est pas rare d'en voir les arbres chargés en abondance; la récolte en est facile. La conservation de cette graine n'offre pas de difficultés; elle possède les propriétés germinatives dans la proportion des neuf dixièmes, pourvu qu'après la récolte elle ait reçu les soins convenables. Il ne faut pas la récolter avant le 20 octobre. Serrée dans un grenier bien aéré, elle doit être séchée avec soin et fréquemment remuée, il ne faut la mettre en tas que lorsqu'elle est parfaitement sèche. Le dessèchement ne peut lui nuire pendant l'hiver. Parvenue à la dessiccation désirée, on la détache du pédoncule commun, de façon à isoler chaque semence ailée ; en cet état, elle peut être livrée au commerce. J'ai toujours acheté au prix de 20 24 kreutzers le minot de Bavière de graine de frêne (0,674 du boisseau de Prusse). Ce minot bien rempli pèse en moyenne 15 livres bavaroises (15 livres 1/2 de Prusse, 6 kilogrammes 800 grammes environ), ce qui met la livre de graine de frêne à un peu moins de 2 kreutzers, prix très-peu élevé.
Les semis de cette graine faits au printemps, du 15 avril au 15 mai, m'ont constamment réussi. Dans les terrains qui remplissent les conditions décrites ci-dessus, on peut semer sur les pentes, parmi les taillis à moitié de leur croissance, mais qui ne doivent être abattus que dans un intervalle de six à douze ans. Les semis peuvent se faire sur une très-grande échelle, sans autres frais que ceux de l'achat de la graine ; la proportion est d'environ une à trois graines par pied carré de surface, ce qui donne 20 livres de graine pour un journal bavarois, et 17 livres 9/10 pour un morgen de Prusse. Selon que la graine est plus ou moins sèche, la livre de Bavière en contient de 4,000 à 6,000, et la livre de Prusse, de 3,300 à 5,000. Les semis terminés, il n'y a plus à s'occuper des soins de culture; mais il faut interdire d'une manière absolue soit le pâturage, soit l'enlèvement pour litière de l'herbe croissant dans les bois ; on doit aussi s'opposer à la trop grande multiplication du gibier dans les taillis ensemencés en frênes. La graine du frêne veut donc être, non pas enterrée, mais simplement déposée sur le sol. Je crois devoir le répéter: toute espèce de préparation donnée au sol dans ce cas, pourvu que par sa nature il convienne au frêne, c'est du temps et de l'argent perdus. Ce point veut être soigneusement éclairci. Si l'emplacement à ensemencer est mouillé, humide, ou simplement frais, s'il n'est pas recouvert d'herbe et qu'en automne il reçoive une couche même peu épaisse de feuilles, la graine lèvera, sans qu'il soit nécessaire de la couvrir artificiellement. Mais si le sol est plutôt sec qu'humide, s'il est gazonné et trop faiblement ombragé par les arbres, les semis de frêne ne réussiront pas ; leur culture dans ces condi-
tions doit échouer. Une seule circonstance exige une mesure préparatoire; c'est quand le sol, de nature suffisamment humide, planté de hêtres, est couvert d'une couche de feuilles par trop épaisse. Il y a lieu, dans ce cas, d'enlever au râteau la partie supérieure de la couche de feuilles ; mais ce n'est pas là une dépense, c'est un produit.
Cette méthode, aussi sûre que peu coûteuse, m'a été suggérée, il y a vingt-cinq ans, par l'observation de quelques crues naturelles sur les bords du Danube et dans quelques parcs domaniaux, Depuis ce temps, j'ai multiplié le frêne dans une foule de localités diverses, et toujours avec le succès le plus complet; j'ai à montrer comme preuve de ce que j'avance, sur des terrains réunissant, les conditions ci-dessus décrites, des frênes en massifs serrés, de la plus belle venue. Les forestiers, qui n'avaient rien vu de semblable, ont trouvé ces jeunes arbres, je puis le dire, d'une beauté étonnante; à la place qu'ils occupent en ce moment, il n'y avait jamais eu précédemment que des marécages, ou de pauvres prairies parsemées d'aulnes et de bouleaux, Durant les dix ou les vingt premières années de ce siècle, il y eut en Souabe et en Bavière une reprijdescence de zèle pour arrondir, repeupler et améliorer les forêts. Les prairies boisées, précédemment exploitées comme pâturages, furent acquises et converties en forêts, quelquefois même avec trop d'empressement. De 1815 à 1820, j'ai entrepris des repeuplements par plantation d'aulnes, de bouleaux et de peupliers, dans ces sortes de prairies et dans des terrains marécageux découverts. Ces arbres ayant atteint l'âge de quinze à vingt ans, ces bois ont été améliorés par des semis de frênes. Plus tard, les aulnes furent abattus et la méthode ci-dessus décrite fut appliquée de point en point. En général, de six à dix ans après le semis de graine de frêne, un premier éclairci faisait disparaître les gaulis les plus forts. Deux ans après, nouvel éclairci, pour supprimer les sujets devenus les plus forts à leur tour. A la coupe définitive tombaient les pousses primitivement les plus faibles, devenues exploitables, par la suppression successive des autres. Ces derniers sujets sont ceux dont le voisinage convient le mieux aux jeunes frênes. A l'époque de la coupe définitive de leurs voisins, les frênes avaient généralement une hauteur de 1 mètre 30 centimètres à 2 mètres. Le reste de leur culture rentre dans les données générales de la sylviculture.
Ne tenant pas suffisamment compte de la nature du sol nécessaire à la végétation du frêne, j'avais cru d'abord pouvoir convertir en bois de frênes des bois de trembles et d'autres essences à bois tendre. Partout où le sol n'était pas à un degré suffisant meuble, humide et substantiel, partout où le sous-sol était de terre glaise ou d'argile compacte, ces tentatives ont échoué. Dans les endroits où les trembles émettaient de leurs
racines des pousses vigoureuses et regarnissaient promptement le terrain, les frênes se sont inaititellue d'lis de bonnes conditions; mais là où les recrues des trembles se faisaient mal, les jeunes frênes parvenus à la hauteur de 2 mètres à 2 mètres 60 centimètres commençaient à dépérir ; ils se desséchaient par le sommet, ainsi que cela arrive souvent à l'érable blanc ; leur croissance, en un mot, restait faible et languissante.
B. — Plantations. N'ayant à rapporter ici que des faits généralement connus, je serai bref. Le frêne supporte bien la transplantation ; la structure de ses racines s'y prête parfaitement; moyennant les soins convenables on peut transplanter avec succès des frênes déjà forts et même parvenus à l'état d'arbres tout formés. Les sujets pour les plantations peuvent être élevés dans les terrains décrits plus haut, ou bien en pépinière, d'après les procédés connus. Personne n'est supposé ignorer que dans la pépinière, la graine de frêne est connée d'abord à la terre dans une situation ombragée, et qu'on la repique en planches, en lignes, au printemps de la seconde année. Il faut enfin que le sol de la pépinière conviennjtï au frêne' pour que cet arbre y puisse fournir des sujets d'une bonne venue; ainsi le sol d'une pépinière, s'il est argilo-sableux, peut être parfait pour l'élevagé du chêne, du hêtre et des arbres conifères, et ne rien valoir du tout pour le frêne; ce dernier veut en pépinière un sol meuble, frais et substantiel.
Selon la nature plus on moins favorable du sol, et les soins dont les jeunes frênes sont l'objet, ils atteignent en trois ou quatre ans la hauteur de 130 centimètres à 1 mètre 50. Ils peuvent alors être transplantés, soit dans la pépinière même; soit au dehors, dans des terrains humides, suffisamment ombragés. Jamais je n'ai vu les plantations de frêne réussir sur des clairières ou des parties de bois gazonnées; mais le frêne prospère admirablement dans les champs cultivés enclavés au milieu des forêts, et en général sur tout terrain ayant été en culture, surtout s'il s'y trouve associé à des arbres d'autres essences, et aussi sur les levées qui bordent les fosses d'écoulement. Le frêne devrait être planté de préférence au milieu d'arbres destinés à être abattus au bout de quelques années ; dans tous les terrains où j'ai conseillé les semis de frêne, les plantations peuvent également réussir.
La manière dont se comporte le frêne prouve un fois de plus à quel point on peut être induit en erreur par des inductions fondées sur l'analogie, que n'a pas confirmées l'expérience. Ainsi, puisque les semis de frênes réussissent dans les prairies boisées, on pourrait croire que dans ces mêmes prairies, les plantations obtiendraient le même succès ; c'est ce qui n'a pas lieu. Que les prairies boisées soient plus ou moins garnies d'arbres, les frênes plantés y languissent souvent pendant plus de dix ans, et
ne se mettent à bien végéter que lorsqu'ils sont entourés d'arbres d'autres essences, qui ont poussé dans leur voisinage.
En résumé, dans les conditions ci-dessus indiquées, je puis conseiller les semis de frêne en grand comme en petit, sans aucune réserve ; la plantation ne peut être conseillée qu'en petit etconditionnellement, le succès n'en est jamais aussi certain.
REVUE COMMERCIALE.
Toute l'attention du commerce de bois se porte en ce moment sur les adjudications de coupes qui se font presque partout depuis le commencement du mois.
Les conditions de vente et d'achat ne se ressemblent pas partout, même relativement. Mais partout nous avons à enregistrer le même résultat général : succès complet. L'administration, les propriétaires et le commerce s'entendent au mieux pour cela ; il ne reste pas de coupes invendues, et tout le monde a lieu d'être satisfait.
La Côte-d'Or a commencé vers la fin d'août; à Dijon et Beaune tout s'est placé. Les taillis un peu moins chers que l'an passé, environ 15 pour 100 ; mais, par compensation, les futaies ont été vendues plus cher de 20 pour 100 environ. De nouveaux acheteurs se sont présentés à ces marchés, qui ont fait une rude concurrence aux anciens preneurs.
La Société des Alpes, qui jusqu'alors s'était exclusivement occupée des sapins, a pris sur la Saône tout ce qu'elle a pu réunir de chênes aux prix de 75 à 85 fr. le stère, au cinquième déduit, sous feuille. On suppose à cette Société des engagements pris de livrer dans le Midi. Quoi qu'il en soit ces prix élevés, sur lesquels on ne comptait pas, ont dérouté toutes les combinaisons du commerce local, qui se trouve au dépourvu. La marine elle-même n'a pas pu réunir son approvisionnement ordinaire.
La Saône est chargée d'approvisionner le Midi en bois de chêne de service; c'est le débouché ordinaire des belles forêts de la Côte-d'Or et de la Haute-Saône. On pourrait espérer que les futaies prenant toujours le même chemin, quoiqu'en passant par des mains différentes, le cours ne serait pas sensiblement affecté par les achats considérables de la Société des Alpes ; mais il est peu probable qu'avec ses gros capitaux et sa puissante organisation, cette Société veuille faire le détail auquel se livre le
commerce ordinaire. On suppose donc avec quelque raison des besoins nouveaux à satisfaire en même temps que les besoins de chaque année.
Aussi le commerce cherche-t-il à s'approvisionner comme de coutume en prenant plus haut et plus loin, et déjà les prix s'élèvent dans la HauteSaône, dans le Doubs, jusqu'à se mettre à peu près au niveau des cours établis par ces premières adjudications.
Semur et Châtillon-sur-Seine vendaient quelques jours après Dijon et Beaune. Les futaies ont trouvé preneurs surles deux points à 10 pour 100 environ de plus qu'en 1855. Mais, au lieu de diminuer, les taillis ont augmenté de prix sur ceux de l'année dernière, de 10 à 15 pour 100.
C'est là un fait anormal, puisque les fontes, les fers étant en baisse sans espoir de se relever, on ne comprend guère que les charbons se payent en hausse : nous n'y voyons pour nous d'autre cause que la quantité moins grande de bois à vendre.
Il restait en 1855 un très-grand nombre de lots invendus des années précédentes. L'affiche était chargée à ce point qu'on pouvait craindre de ne trouver ni assez de preneurs à l'adjudication, ni assez d'ouvriers pour exploiter; ces deux considérations suftisaient pour amener la baisse malgré le prix élevé des fers, tandis que cette année les choses étant revenues à l'état ordinaire, chacun a voulu s'assurer sa part indispensable, et les prix du bois ont augmenté malgré la baisse des métaux. Le prix des bois en forêt s'est ainsi fixé à peu près à 7 fr. le double stère de charbonnette, et 35 fr. le stère de bois de service, au sixième déduit.
A la fin d'août, MM. de Rostchild et Werlé mettaient en vente les belles coupes de la forêt du Dert, dont les futaies magnifiques avaient attiré de nombreux amateurs. Les taillis, offerts séparément aux maîtres de forges, n'ayant pas trouvé de preneurs à l'adjudication, la séance avait 1 été sans résultats; mais dans la journée, une grande maison de Paris ( MM. Moreau père et fils, qui tiennent à s'assurer toujours les plus belles charpentes) a traité pour la totalité des coupes et cédé les charbonnettes aux maîtres de forges. Le tout était à peu près au même prix de 12 fr. le double stère et 12 fr. la solive, cinquième déduit.
Quelques jours après il y avait grande animation aux ventes de Toul (Meurthe). Là aussi se trouvaient de très-beaux arbres, et MM. Moreau avaient par avance offert aux marchands du pays des prix qui leur ont fait acheter les coupes bien au-dessus des cours sur lesquels on comptait. En moins de deux heures l'affiche était épuisée, et le même soir toutes les futaies grosses et petites se trouvaient dans la même main à 25 pour 100 de plus qu'on n'avait pu les vendre en 1855. Le prix moyen est évalué sur pied en forêt 70 fr. le stère, cinquième déduit.
Une grande partie des taillis, autrefois exclusivement réservés aux
forges, se trouvent maintenant achetés pour le chauffage des grandes villes de l'Alsace et de la Champagne. Le canal a opéré cette révolution au profit des forêts de la Meurthe, qui vendent maintenant leurs produits aussi cher et quelquefois plus cher que ne peuvent obtenir les forêts des environs de Paris.
Le stère de bois à brûler trouve preneurs sur les ports du canal à 7, 8 et 9 fr. suivant qualités.
A Nancy, Sarrebourg èt Château-Salins, même résultat, vente complète et par correspondants, eu égard à la qualité des produits et à la distance que ces produits ont à parcourir pour trouver le consommateur. Les grosses futaies de chêne reviendront à 70 fr. le stère équarti et rendu sur le canal.
La conservation de la Meuse commençait ses ventes le 16 à Bar-leDuc. L'affiche, grossie d'un nombre assez élevé de lots invendus de 1855, laissait quelques craintes au sujet du placement total. On remarquait quelque hésitation parmi le commerce, mais dans ce pays une administration conciliante encourage si bien les acheteurs que, par déférence, on s'est décidé à prendre tout, et tout s'est vendu tnieux qu'on ttfe l'espérait.
Le double stère de taillis s'est placé aux prix de 9 à 11 fr., suivant qualité. Les futaies de choix ont atteint les prix élevés des adjudications précédentes, 8 à 9 fr. la solive cinquième déduit; et les futaies ordinaires 6 et 7 fr.
L'administration de monsieur le comte de Chambord offrait de belles coupes à Vassy et à Sainte-Menehould. Les 17 et 20 septembre, les estimations de Vassy, basées un peu trop peut-être sur les prix ridiculement exagérés de 1855, avaient eu pour résultat de faire manquer la vente. Trois lots seulement avaient été pris en séance publique, mais quelques concessions de part et d'autre permirent de traiter dans la soirée aux prix de 7 à 9 fr. pour les solives, et 12 à 15 fr. pour le double stère de charbonnette.
A Sainte-Menehduld, c'était tout le contraire : le commerce, excité par des offres séduisantés pour les produits fabriqués, a poussé les enchères jusqu'à l'excès. Là aussi toutes les futaies étaient assurées d'avance à MM. Moreau de Paris, qui les ont payées en moyenne 20 pour 100 de plus qu'en 1855. Les taillis, tenus au delà des prix offerts par les maîtres de forges, sont restés aux mains des adjudicataires aU prix moyen de 5 fr. le stère façonné.
Les fournisseurs de la marine se sont complètement effacés; ils n'ont pas paru à la plupart des adjudications, et n'ont pas acheté un seul arbre.
Le commerce de sciage s'est pourvu des bois ordinaires à des prix qui laissent un bénéfice assuré, si les cours se maintiennent. Quant aux charpentes de choix, elles sont réunies dans une même main, qui paraît
disposée à continuer de prendre à toutes les adjudications. Il y a donc lieu de croire que les cours seront élevés en 1857 plus qu'on ne le pensait, en voyant la faiblesse des cours de 1856, malgré des demandes continues et en présence d'un approvisionnement restreint.
DELBET;
TABLEAU COMPAÍfÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FERS ET DES FONTES.
AOUT 1856.
DÉSIGNATION DROlf QUANTITÉS ENTRÉES biFFËHKNCE NATURE, FN AOUT sur le mois correspond.
des D OCTROI EN AOUT , -"'- • des D'UNITÉS. décime - Augmentation Diminution en en MATIÈRES. compris. 1856. 1855. H56. 1856.
liois à brûler, dur sière. 300,0(1) 80,240 76,418 3,822 » — blanc. — 2 22,0 (2) 19,108 21,210 » 2,102 Colrels de bois dur. — 1 80,0 1,656 2,947 H i,29i lieiiuise et fagots. — 1 08,0 6,430 5,130 1,300' » Ch.irhondebois. hectolitre. 0 60,0 272,952 323,093 » 50,141 llotisgier (le eh. de bbis — ô 30,0 10,533 21,179 h l(/,646 Charbon de terre 100 kilogr. 0 72,0 31,748,743 42,227,309 » 10,478,566 Charpente et sciage de bois dur. stère. 11 28,0 11,869 10,480 1,389 » Id. de bois blanc.-, — 9 00,0 13,384 14,089 k 705 Lattes et treillages. les 100 bottes. 11 28,0 24,666 21,135 3,531 » Bois de déch. en chêne mètre carré. 0 21,6 585 1,206 » 621 Fe — ensapin. — 0 12,0 4,789 4,476 313 » Fers employés dans
les constructions. 100 kilog. 3 60,0 900,393 678,561 221,832 » Fonte employée dans
les constructions.. — 2 40,0 744,286 4ol,i64 340,122 »
(î) Ces 80,240 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 32,096,000 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 16,048,000 kil. de houille.
(2) Ces 19,108 stères de bois, multipliés par 300 kil., poids du stère de bois blanc, représentent 5,732,400 kil.. dont la puissance calorifique égale celle de 2,866,200 kil. de houille.
ALIÉNATIONS.
Nous avons publié dans les Annales forestières (1) l'indication des bois à vendre en fonds et superficie, en exécution de la loi du 5 mai 1855.
Voici les différentes dates auxquelles auront lieu quelques-unes de ces adjudications : 4e Conservation. A Château-Salins (Meurthe), le 4 octobre.
5'6e — A Draguignan (Var), le 4 octobre.
98 — A Saverne (Vosges), le G octobre.
248 — A Niort (Deux-Sèvres), le 6 octobre.
(1) Voir le numéro de mars 1856, p. 75 et suiv.
5e Conservation. A Schelestadt (Bas-Rhin), le 6 octobre.
7e — A Rocroi (Ardennes), le 10 octobre.
4e — A Sarrebourg (Meurthe), le 14 octobre.
21e — A Clermont (Puy-de-Dôme), le 14 octobre.
2" — A Rouen (Seine-Inférieure), le 18 octobre.
218 — A Montluçon (Allier), le 20 octobre.
10e — A Chàlons (Marne), le 20 octobre.
20e — A Nevers (Nièvre), le 20 octobre.
7e — A Avesne (Nord), le 2i octobre.
8e — A Auxerre (Yonne), le 27 octobre.
8e — A Troyes (Aube), le 29 octobre.
31e — A Chaumont (Haute-Marne), le 4 novembre.
Dans la Côte-d'Or, 238 hectares de parcelles détachées ont été vendues 200,000 fr.
La forêt de Ruestenhardt, située dans le département du Bas-Rhin et contenant 110 hectares, a été vendue 104,000 fr.
La Houssière (Ardennes), contenant 185 hectares, a été vendue 360,000 fr.
Le bois de l'Hôpital du Gros-Bois (Doubs), contenant 427 hectares, a été vendu 420,000 fr.
Chaume-Perrecy (Saône-et-Loire), contenant 265 hectares, a été vendu 310,000 fr.
Cier-Pointes-Huos (Haute-Garonne), contenant 510 hectares, a été vendu 137,000 fr.
Mont-Bardoux (Creuse), contenant 105 hectares, a été vendu 140,000 fr.
EXPÉRIENCES SUR DIVERSES ESSENCES DE BOIS PROPRES AUX ÉCHALAS.
M. Hartig, à Berlin, a fait un certain nombre d'expériences importantes sous le point de vue de la durée des échalas. C'est le résultat d'un essai fait pendant sept ans que nous présentons. Le bois qu'il a expérimenté a été coupé au milieu de l'hiver et autant qu'il a été possible sur un terrain de même nature. Les échalas furent écorcés aussitôt après avoir été abattus et séchés, chacun avait 1 mètre 63 centimètres de longueur et 6 à 7 centimètres de diamètre. Le sol dans lequel ils furent enfoncés, le printemps suivant, était composé d'une argile sablonneuse, et était plutôt frais que sec. Cependant cet administrateur en chef des forêts en fit enfoncer auss
dans une argile sèche, dans du sable humide et dans du sable sec, afin de connaître l'effet de la diversité du sol sur la durée du bois.
Il a divisé en sept classes : Jre Classe. — Mélèzes, genévrier, genévrier de Virginie, thuya, se sont trouvés non altérés après sept ans.
2e Classe. — Robinier commun ou acacia, chêne pédonculé, chêne seuil, pin sylvestre, sapin élevé, épicéa, pin piquant, pin de Weymouth, pin cembre ; après sept ans un sixième était altéré jusqu'à un demi-pouce au-dessus du sol.
3e Classe. — Orme commun, frêne commun, hêtre commun, sorbier des oiseaux, peuplier pyramidal ; la partie enfoncée en terre s'est trouvée totalement pourrie.
4e Classe. — Erable plane, bouleau blanc étaient pourris après cinq ans.
5e Classe. - Saule blanc, marronnier d'Inde, platane d'occident, étaient détruits après quatre ans.
6e Classe. — Charme commun, tilleul à grandes feuilles, banbar noir, aulne glutineux, aulne grisâtre, peuplier tremble, érable argenté, n'ont résisté que trois ans à l'altération.
Quoique les bois de la troisième, quatrième, cinquième et sixième classe aient résisté à l'altération complète le temps indiqué ci-dessus, ils n'auraient pas pu servir comme soutiens sans avoir été coupés à leur base.
Ce raccourcissement serait déjà devenu nécessaire à l'égard des tuteurs de la troisième classe après cinq ans, à l'égard de la quatrième après trois ans, de la cinquième après deux ans, de la sixième après un an ; car,ien que ces échalas ne fussent pas encore totalement pourris à ces époques, ils se trouvaient néanmoins dans un état où ils ne pouvaient rendre aucun service. Il est d'ailleurs à observer que pendant que l'extrémité inférieure se trouvait entièrement décomposée, la partie au-dessus du sol était encore parfaitement saine. Le bouleau blanc seul fait exception, car toute la masse était friable. Quant aux autres espèces de bois, la partie qui était en terre s'était pourrie plus ou moins lentement. A l'égard des espèces de la première et de la deuxième classe, la partie enfoncée en terre se trouve aujourd'hui, après sept ans, encore en bon état.
En outre, M. Hertig a fait les remarques suivantes : 1° Que les échalas fendus de vieux troncs d'arbre durent plus longtemps, toutes circonstances égales, que ceux qu'on obtient de jeunes arbres de seize à vingt ans.
2° Des échalas desséchés et non écorcés durent un peu plus longtemps que ceux qui sont écorcés.
5° Les échalas préalablement desséchés durent plus longtemps que ceux qu'on emploie étant encore tout verts.
DOCUMENTS OFFICIELS.
Le ministre de l'agriculture et du commerce a adressé la circulaire suivante aux préfets : « Monsieur le préfet, « Des procédés récemment découverts paraissent donner les moyens de tirer parti des marrons d'Inde dans l'industrie et particulièrement dans la fabrication de l'amidon, ce qui permettrait de faire rentrer dans la consommation alimentaire une partie des substances farineuses aujourd'hui employées dans cette fabrication.
« A ce point de vue, il serait intéressant pour mon département ministériel de savoir quelles seraient à peu près les quantités de marrons d'Inde qu'il serait possible de recueillir pour les livrer à l'industrie. Je désirerais donc que vous me fissiez parvenir des renseignements qui me permettraient d'apprécier d'une manière approximative l'importance des plantations de marronniers d'Inde qui peuvent exister sur le territoire de votre département, soit dans les forêts et dans les bois, soit dans les promenades ou jardins publics, soit sur les routes ou voies publiques, soit même dans les propriétés particulières.
« Je vous prierais de vouloir bien joindre à ces informations quelques aperçus sur la production des marronniers d'Inde et sur l'importance habituelle de leurs récoltes annuelles. Dans le cas d'ailleurs où l'on tirerait déjà quelque parti des marrons d'Inde dans votre département, je vous serai obligé de me le faire connaître.
« Recevez, etc.
« Le ministre de l'agriculture, du commerce el des travaux publics, « ROUHER. »
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
Mutations dans le personnel forestier. — Plantation de pins sylvestres en Champagne. —
Noix d'Amérique. — Transport dit poisson vivant. — Substitution du bois au chitFon dans la fabrication du papier, par MM. Charles Watt et Hugo Burgess. —Conservation do bois ; nouveau moyen. — L'arbre à cire. — Inondations; Société universelle de Londres. — Emploi comme fourrage des feuilles d'orme et de peuplier.
= Mutations dans le personnel forestier. — M. LAURENT (André-Laurent-Clément), sous-inspecteur de lre classe à Ajaccio (Corse), a été
nommé sous-inspecteur à Luxeuil (Haute-Saône), en remplacement de M. Demaugeon, admis à faire valoir ses droits à)a retraite.
M. PEBREL, garde général de LRE classe à Castillon (Ariége), a été nommé sous-inspecteur à Ajaccio (Corse), en remplacement de M. Laurent.
M. GILLET, garde général de 5è classe en disponibilité, à été nommé garde général à Castillon (Ariége), en remplacement de M. Pebrel.
M. POIRSON, sous-inspecteur à Mirecourt (Vosges), a été nommé sousinspecteur à Montmédy (Meuse); en remplacement de M. Jouaux.
M. JOUAUX, sous-inspecteur à Montmédy (Meuse), a été nommé sousinspecteur à Alençon (Orne), en remplacement de M. Quinchez.
M. QUlNCDEZ, sous-inspecteur à Alençoii (Orne), a été nommé sousinspecteur à Lorient (Finistère), en remplacement de M. Pin, admis à faire valoir ses droits à la retraite.
M. ROMAN, garde général à Bourg-Saint-Andéol (Ardèche), a été nommé sous-inspecteur à Carpentras (Vaucluse), en remplacement de M. Mazières, remis en disponibilité.
M. VÈNE, sous-inspecteur de 2e classe à Foix (Ariége), a été promu à la lre classe de son grade.
On annonce qu'il va être formé dans l'administration des forêts douze * commissions chargées de régler le cantonnement des usagers. Les membres de ces commissions ne sont point encore nommés.
= Plantation de pins sylvestres eU Champagne. -':- Une communication intéressante vient d'être faite à la Société impériale et centrale d'horticulture par M. Aridry, secrétaire général, relativement aux plantations de pins sylvestres qui couvrent aujourd'hui des centaines d'hectares dans les plaines crayeuses de la Champagne, dont la stérilité était autrefois proverbiale.
Ces plantations, faites depuis vingt-cinq ans environ, s'accroissent chaque année par l'ensemencement naturel. Par rébranchement des pousses inférieures, elles fournissent aux habitants du pays du combustible pour se chauffer, en place du saule marceau ou vorde, seul bois qu'ils eussent auparavant; le revenu annuel qu'elles donnent aux propriétaires est supérieur même à la valeur primitive du sol. Dans le domaine de Loisy-surMarne, situé aux environs de Vitry-le-Français, et appartenant à M. Haudos, on peut voir plusieurs hectares de jeunes sapins de la plus belle végétation, et de sept ans de plantation seulement, mais placés à un mètre de distance les uns des autres. M. Andry insiste particulièrement sur l'importance de ce mode de plantation. Il pense que, serrés les uns contre les autres, les jeunes arbustes se prêtent un mutuel appui, se soutiennent mieux, se fournissent réciproquement plus d'ombre, et, par conséquent, plus d'humidité; et rendent à la terre, par la chute de leurs feuilles, une partie des
éléments dont ils ont besoin pour végéter, et qu'ils y retrouvent abondamment. Les mousses, les lichens et autres parasites se développent également avec plus de facilité dans ces plantations ; une végétation nouvelle s'y forme, et là où, il y a à peine quelques années, on ne trouvait que de la craie, vivent déjà quelques plantes , telles que le petit genêt, des plantains, des rosiers sauvages, l'anémone pulsatile, etc.
Le mode de plantation que nous venons d'indiquer n'entraîne pas, du reste, de grands frais ; car un hectare de terrain inculte, qui coûte en moyenne dans le pays de 15 à 20 fr., peut être planté de cette manière moyennant une dépense de 105 à 110 fr., comprenant 20 fr. de maind'œuvre environ, et 85 à 90 fr. pour un mille de jeunes pins de la taille de un mètre, prix auxquels ils sont vendus, à lever au choix dans les plantations anciennes, Au résumé, là où existaient encore, il y a vingt-cinq ans, des plaines arides sans aucune valeur, on pourra admirer, dans un avenir peu éloigné, de belles et vastes forêts d'arbres résineux qui, en procurant le bien-être et l'assainissement du pays, l'affranchiront du tribut qu'il paye à l'étranger pour se procurer des bois indispensables à ses besoins.
= Noix d'Amérique. — Depuis plusieurs années, on vend dans les
rues de Paris, pendant les mois de février, mars et avril, des graines comestibles que les marchands nomment noix d'Amérique; ces graines ont une forme comprimée, triangulaire, offrant un côté intérieur tranchant et un côté extérieur convexe, marqué de deux ou accidentellement de trois arêtes saillantes ; elles sont ligneuses, dures, à surface rugueuse, et renferment chacune une grosse amande blanchâtre, constituant une masse homogène, charnue, qui représente les deux cotylédons unis, confondus, comme nous en avons un exemple dans les graines du marronnier d'Inde.
Ces amandes contiennent, dans leur tissu, une certaine quantité d'huile, très-propre à brûler, qu'on peut en retirer avec avantage ; c'est par suite de la présence de cette matière huileuse qu'elles rancissent promptement, ce qui fait qu'elles doivent avoir perdu de leur saveur quand elles arrivent en Europe. Cependant elles sont encore assez agréables à manger : on leur trouve un peu le goût de la chair du coco.
Ces graines, qui ont été désignées aussi sous les noms d'amandes et de châtaignes du Brésil, sont réunies, au nombre de seize à vingt, dans un fruit plus ou moins globuleux de 8 à 14 centimètres de diamètre ; il est traversé à l'intérieur par une sorte de colonne verticale autour de laquelle, vers sa partie inférieure, les graines sont disposées en cercle et attachées sur deux rangs. Les parois du fruit sont ligneuses, et il est recouvert par un brou épais et charnu : son sommet offre une sorte de petit cou-
vercle qui se détache circulairement à la maturité, et met à découvert les graines contenues dans son intérieur.
Ce fruit volumineux est produit par un arbre très-élevé, qui peut, diton, acquérir jusqu'à 30 mètres-de hauteur dans son pays natal, c'est-à-dire sur les bords de l'Orénoque, dans l'Amérique méridionale, où M. deHumboldt l'a observé. Cet arbre, qui porte les noms vulgaires de châtaignier du Brésil ou juvia, est cultivé depuis longtemps à Cayenne sous le nom de touka.
Le châtaignier du Brésil a une forme pyramidale ; il est garni depuis sa base de branches qui s'étalent horizontalement, et dont les extrémités sont flexibles et pendantes ; les plus basses touchent la terre ; ses feuilles sont seule à seule des deux côtés opposés du rameau sans se correspondre; elles sont de forme oblongue, un peu épaisses, coriaces, ondulées sur les bords; elles atteignent jusqu'à 60 centimètres de long; leur queue est très-courte comparativement, puisqu'elle n'a que 3 à 4 centimètres ; elles sont d'un vert jaunâtre, vernissées en dessus, mates en dessous, et marquées de nombreuses nervures latérales presque perpendiculaires sur la côte du milieu. (Sciencepour tous.) = Transport du poisson vivant. — Un modeste pêcheur de Bussang, dans l'arrondissement de Remiremont (Vosges), un nommé Jean-Cyrille Noël, vient de donner l'idée de l'invention d'un petit appareil destiné au transport du poisson sans que celui-ci ait le moins du monde à souffrir durant le trajet.
Le sieur Noël, doué de la même nature d'observation que ses confrères qui ont créé la pisciculture, remarqua que la truite vit ordinairement dans les eaux agitées et fouettées par les accidents, tandis qu'elle fuit au contraire les eaux calmes, ce qui fait que lorsque l'on veut transporter ce poisson, il ne tarde pas à périr. M. Boullanger, juge de paix du même pays, imagina, d'après les instructions du sieur Noël, un petit appareil, une petite caisse partagée par un compartiment à claire-voie; au moyen d'un mécanisme que l'on monte comme une pendule, et qui consiste dans la rotation de palettes, l'eau qu'on a mise dans la caisse se trouve agitée et permet au poisson qui se trouve dans l'autre compartiment de vivre pendant le transport. Des expériences, qui ont été faites de différentes manières, ont pleinement réussi. L'inventeur a fait déposer au ministère de l'agriculture et du commerce, et remettre à M. Coste, au Collége de France, un échantillon de cet ingénieux appareil. [Science pour tous.) = Substitution du bois au chiffon dans la fabrication du papier, par MM. Charles Watt et Hugo Burgess. — Des expériences, dit le Mecanic's Magazine, ont été faites, sur une très-grande échelle, aux Etats-Unis et en Angleterre, et les résultats ont démontré que l'on pouvait, avec le bois,
obtenir de la pâte à papier de très-belle qualité, et à un prix qui permet de le substituer économiquement au chiffon.
Le procédé consiste à faire bouillir le bois dans une solution de soude caustique, pour enlever l'alcali ; le bois est alors traité par un courant de gaz chlore, ou par un composé oxygéné de chlore, dans un appareil convenable, puis lavé, pour le débarrasser de l'acide chlorhydrique ; on traite de nouveau avec une petite quantité de soude caustique, qui convertit instantanément la masse en une pâte que l'on n'a plus qu'à laver et à bJall" chir, qu'on bat ensuite , pendant une heure et demie, dans les machines ordinaires, et qu'on transforme en papier.
Le procédé n'exige que quelques heures ; en fait, une pièce de bois peut être convertie en papier et imprimée en vingt-quatre heures. (Science pour tous. )
= Conservation du bois; nouveau moyen. — Voici, pour la conservation du bois, une invention curieuse que nous trouvons dans le London lilterary Journal: « Les procédés employés jusqu'à présent consistent en général à imprégner le bois de sels métalliques, avec cette différence que les uns plongent le bois dans une solution de sels métalliques pendant un court espace de temps, mais à une température élevée, les autres le plongent dans ladite dissolution pendant un temps assez long, mais à la température ordinaire. M. Apelt, professeur saxon, emploie une tout autre méthode; il opère simplement sur le bois comme la nature elle-même. Le charbon sulfuré, ayant été changé en charbon vitriolique, est mis en contact immédiat avec le bois et attire l'humidité atmosphérique ; étant également exposé à l'influence de la pluie, le sulfate de fer contenu dans le charbon est dissous, et pénètre lentement et graduellement dans le bois, qui s'en imprègne. Par ce procédé, à la fois peu coûteux et effectif, le bois, si on peut s'exprimer ainsi, se minéralisé. »
= L'arbre à cire. — M. Verlot, membre de la Société d'agriculture et jardinier en chef du Jardin des Plantes à Grenoble, confirme en ces termes les faits énoncés par M. Kellermann au sujet de l'arbre à cire (myrica cerifera). (V. les Annales forestières du mois d'avril 1856.) Le jardin de Grenoble possède, en parfait état de santé, un arbre à cire qui a été planté en 1847, dans un terrain naturellement humide.
Le climat de l'Isère lui est tout à fait favorable, la gelée ne l'ayant pas atteint, bien qu'il n'ait jamais été garanti, même pendant les plus grands froids.
La hauteur de ce sujet est de 2m50; les graines qu'il produit sont généralement très-abondantes; mais il y a des années où, selon les conditions atmosphériques, cette abondance est moins grande.
Il se multiplie facilement et d'une manière extraordinaire ; ses racines donnent elles-mêmes naissance, sans aucun travail d'homme, à une foule de drageons, dont beaucoup s'éloignent de 1 à 2 mètres du tronc-mère.
Les fruits naissent sur le vieux bois. Ce fruit est de la grosseur d'un petit pois ou d'un grain de poivre ; il est globuleux, entièrement entouré d'une matière blanchâtre, granuleuse, qui fournit la cire, Les feuilles exhalent une forte odeur aromatique qui se rapproche beaucoup du parfum de certaines verveines.
L'arbre avait encore des fruits et des feuilles le 6 février dernier, ce qui vient à l'appui des dires de M, Kellermanij, et prouye qu'il résiste complètement à l'hiver.
D'après M. Verlot, si le myrica ceriferq jouit réellement, ainsi qu'on l'affirme, de la propriété d'assainir les lieux marécageux par son odeur aromatique, et cela indépendamment de la cire qu'on en pourrait tirer, il rendrait de grands services à la contrée de l'Isère, où les marais sont nombreux et les eaux abondantes.
= Inondations. - Société universelle de Londres. — La Société uni.
verselle pour l'encouragement des arts et de l'industrie, à Londres, vient de fonder un prix consistant en une médaille d'or d'une valeur de 50 livres sterling (1,250 francs) à distribuer, dans sa séance du 31 janvier prochain, à l'auteur du meilleur mémoire sur les moyens de prévenir et de combattre les inondations.
Les mémoires, plans et devis, devront être adressés, franco, avant le 15 novembre prochain, au secrétariat général de la Société, n. 58, Torrington-Square, à Londres.
= Emploi comme fourrage des feuilles d'orme et de peuplier. —
M. J.-Isidore Pierre nous apprend, dans un mémoire très-intéressant qu'il a présenté à l'Académie des sciences, que les feuilles vertes et fraîches de l'orme peuvent, lorsqu'elles sont très-tendres, contenir presque autant de matière azotée que le foin normal, mais que cette proportion d'azote diminue, comme on devait s'y attendre, avec l'âge des feuilles et avec la saison : cependant, peu de jours avant leur chute, les feuilles fraîches d'orme renferment encore les trois quarts de l'azote que l'on trouve dans les jeunes feuilles tendres; mais comme les feuilles mûres sont moins aqueuses que les feuilles nouvelles et tendres, la richesse de la matière sèche des premières en matière azotée se trouve réduite à environ moitié de celle des dernières. Si l'on compare les feuilles d'orme, même lorsqu'elles sont arrivées à leur complète maturité, au foin des prairies artificielles, elles contiennent, au même état de dessiccation, à peu près la même proportion de matière azotée, et sont encore plus riches d'environ 50 pour 100 que le foin normal.
Les feuilles de peuplier du Canada, plus estimées comme fourrage que celles du peuplier d'Italie, contiennent a peu près autant d'azote que les feuilles d'orme.
= On écrit de Charleville (Ardennes) au Journal des Chasseurs : « Je ne sais si cette lettre aura le mérite de prendre place dans vos annales cynégétiques; c'est une superbe battue, non aux loups ni aux renards, encore moins aux sangliers, mais une battue aux braconniers.
« Depuis longtemps nos bois, nos plaines, sont infestés de cette maudite race. M. Clicot, capitaine de gendarmerie de l'arrondissement de Mézières, étant bien déterminé à purger son arrondissement de cette mauvaise engeance, a fait pratiquer des visites domiciliaires chez les braconniers les plus connus. Il y a pris, savoir : « 397 collets à lièvres, en fil de laiton ; 19 collets à chevreuils, en fil de laiton ; 5,693 collets à perdrix et gelinottes ; 13 piéges à lièvres, nouveau modèle, fabriqués comme les piéges à fouinej ayant une planchette ; 15 filets à perdrix; 17 filets à cailles; 3 filets ou panneaux; 13 filets à grives; 14 œufs de perdrix, 35 œufs de cailles, deux armes de guerre; en fait de pièces de gibier : 1 chevrette pleine, 3 lièvres, 5 perdrix, 7 bécasses et 19 grives.
« Ces prises ont été faites sur cinquante-neuf braconniers, y compris trois gardes. »
= On nous écrit de Médéah (Algérie) : Un incendie qui eût pu avoir des conséquences très-graves a éclaté dans le courant du mois d'août dernier dans une des forêts qui avoisinent la plaine de la Métiùja.
Cet incendie est attribué à l'exercice d'un ancien mais dangereux usage arabe, qui consiste à mettre le feu dans les pal lies boisées de certaines contrées, afin que les troupeaux trouvent dans les nouvelles pousses une nourriture plus abondante.
Des indigènes des monts Mouzaïas se seraient, dit-on, livrés à cette pratique, et le feu allumé par eux s'est propagé avec une rapidité immense sur une surface de 1,600 hectares de bois de peu de valeur, il est vrai, mais dans lesquels néanmoins se trouvaient des bouquets de pins d'Alep, d'oliviers et de caroubiers en quantité assez considérable.
Toute la forêt des Mouzaïas et la plaine de la Métidja eussent été infailliblement la proie des flammes sans l'arrivée de la garnison de Médéah, accourue à marche forcée sur les lieux du sinistre.
Les Arabes des Soumattas et des Mouzaïas, au nombre de quatre cents environ, ont lutté d'ardeur avec nos braves soldats; et, après vingt-quatre heures de travaux exécutés avec entraînement sous l'habile direction de M. Heckinbinder, garde général des forêts, chargé du cantonnement dans lequel avait éclaté l'incendie, on est parvenu à se rendre maître du feu et à sauver les richesses incalculables qu'il eût en un instant dévorées. On nous assure que grâce à l'activité déployée pour arrêter les progrès du feu, les désastres qu'il a occasionnés sont sans grande importance.
DES COMMISSIONS D'AMÉNAGEMENT
ET DE CANTONNEMENT.
te tfW¡1t¡ b¡¡ ¡f N ouJ10{mli'ans notre dernière livraison qu'il allait être créé douze coi¡lb cantonnement. Le fait est vrai, seulement il paraît qu'indépendamment de ces douze commissions, il en sera établi un
nombre égal pour l'aménagement proprement dit.
Vingt-quatre commissions ! c'est beaucoup ; c'est trop peut-être ; et si nous ne savions pas que M. le directeur général des forêts est homme à mener à bonne fin les entreprises les plus difficiles, nous ne serions pas sans inquiétude sur le résultat de celle-ci; mais il est probable qu'avant de provoquer la création de vingt-quatre commissions, l'administration, bien convaincue de la gravité d'une semblable mesure, a préparé tous les moyens d'en assurer le succès.
Néanmoins, nous ne saurions garder le silence dans cette circonstance, et nous allons exposer rapidement nos idées sur les dispositions que nous paraît comporter la réalisation du projet dont il s'agit.
Lorsqu'il y a quelques années, l'administration manifesta l'intention de créer de nouvelles commissions pour l'aménagement des forêts de la liste civile, nous accueillîmes cette nouvelle par un article qui eut quelque retentissement, et dans lequel nous nous efforçâmes de démontrer qu'il était indispensable, si l'on voulait retirer de ces commissions tous les avantages désirables, de les placer dans d'autres conditions que leurs devancières.
Nos conseils ne furent suivis qu'en partie, et, du reste, par des circonstances indépendantes de leur volonté, les commissions de la liste civile, entravées dans leurs travaux, ont dû cesser de fonctionner avant d'avoir accompli leur tâche, et ne nous ont par conséquent fourni aucun enseignement nouveau sur la matière dont elles avaient à s'occuper. Leur passage peut être considéré comme non avenu, et nous nous trouvons encore, comme il y a trois ans, en présence d'une grande opération dont le succès serait fort incertain, si l'on n'appelait à son aide pour la bien conduire que les données de la tradition.
L'aménagement, dans son acception générale, comprend tous les travaux nécessaires pour porter à son maximum le rendement d'une forêt. Il
ne consiste pas seulement à régulariser le peuplement, il a également pour objet les améliorations de tout genre, y compris le cantonnement des droits d'usage, qui doivent avoir pour résultat l'augmentation du revenu.
Nous avouons donc tout d'abord que la séparation qu'on semble vouloir établir entre les commissions de cantonnement et les commissions d'aménagement ne nous paraît pas fondée. — Acceptons-la toutefois pour bonne et examinons ce qu'il y aurait à faire pour faciliter à ces diverses commissions l'accomplissement de leur tâche.
Commissions d'aménagement. — Avant d'entreprendre un travail quelconque, la première chose à faire est de se bien pénétrer du but que l'on veut atteindre et des moyens les plus efficaces pour y réussir.
Aménager une forêt, c'est en régler l'exploitation de la manière la plus avantageuse, dans l'intérêt du propriétaire.
Quand ce propriétaire est l'Etat, comme son intérêt se confond avec celui de la société, la production des forêts qui lui appartiennent doit être telle qu'elle satisfasse autant que possible aux divers besoins de l'industrie, du commerce, de l'agriculture et des services publics.
On voit par cette seule définition que l'aménagement est l'opération fondamentale de la gestion forestière, et qu'il est même indispensable pour que cette gestion puisse répondre à ce qu'on attend d'elle.
Sur les douze cent mille hectares qui forment le domaine de l'Etat, il y en a cent mille au plus qui ont été aménagés régulièrement; l'exploitation du surplus n'est soumise à aucun principe rationnel : sur certains points elle n'obéit à aucune règle ; sur d'autres elle se conforme à des habitudes traditionnelles dont on ne connaît ni l'origine ni la raison d'être, au lieu de se conformer à la nature et à l'étendue bien constatée des besoins du pays. L'administration marche presque en aveugle dans l'exercice de la plus importante de toutes ses attributions.
Elle sait bien ce que les forêts rapportent au Trésor bon an mal an, en espèces sonnantes ; elle ne sait ce qu'elles fournissent en produits matériels ; à quels usages servent ses produits ; s'ils répondent aux besoins de la société, à la possibilité des massifs d'où ils proviennent ; elle ignore même si le mode de traitement que l'on applique à ses forêts est justifié par la nature du sol et du climat, et s'il est propre à assurer la conservation de ces éléments essentiels de la production.
Cet état de choses nuit à une foule d'intérêts respectables, et, pour y remédier, il n'y a qu'un moyen, c'est l'aménagement.
Mais l'aménagement implique une série d'opérations difficiles, longues et coûteuses. Nous insistons sur ces qualificatifs : si l'on veut réellement aménager les forêts, il faut d'abord choisir des agents d'une capacité
éprouvée et ne leur marchander ensuite ni le temps ni l'argent. Pour certaines personnes, l'aménagement d'une forêt consiste à fixer arbitrairement la révolution à laquelle elle devra être assujettie, à diviser cette révolution en un nombre quelconque de périodes et à partager la forêt en un même nombre de parties approximativement égales, pour être exploitées l'une en coupe de régénération, les autres en coupes d'amélioration.
Mais, en vérité, ce n'est pas là un travail sérieux. Qu'on s'en contente faute de mieux, lorsqu'on ne dispose d'aucune ressource pour en faire de plus complet, soit. Toujours est-il que cela ne mérite pas le nom d'aménagement.
Nous rejetons donc bien loin de nous la pensée qu'on veuille employer à des à peu près de ce genre les futures commissions ; nous supposons qu'on en attend des projets complets, bien étudiés, des projets qui satisfassent au but que nous avons défini.
Or, pour ces projets complets, bien étudiés, il faut, nous le répétons, non-seulement des hommes instruits, intelligents et actifs, il faut encore leur fournir les moyens d'action nécessaires.
En quoi consistent-ils?
Le premier de ces moyens d'action, celui dont l'absence a été la p rncipale cause du peu de fruit qu'on a retiré des anciennes commissions, c'est une instruction sur les aménagements, une instruction simple, précise. Sans cette instruction, nous affirmons que les commissions, fussentelles composées des agents les plus éclairés de l'administration, ne donneront que de médiocres résultats.
Une fois l'instruction faite, il s'agira d'aviser à son exécution, et à cet effet plusieurs choses seront à considérer : 1° La composition des commissions; 2° Les ressources pécuniaires à mettre à leur disposition ; 3° Le contrôle à exercer sur leur manière d'opérer.
Reprenons chacune de ces propositions et essayons de les justifier.
Instrtictioii sur les aménagements. - Est-il possible, est-il utile de publier une instruction sur les aménagements?
C'est une opinion répandue, même parmi les forestiers, qu'il n'y a pas de principe absolu en matière d'aménagement ; qu'il n'y a que des pratiques empiriques variables suivant les localités ; qu'il n'y a pas de règles d'une application générale, et qu'en conséquence, essayer d'imposer aux agents un programme quelconque serait une tentative presque impossible, vu la multitude de cas particuliers, d'exceptions qu'il y aurait à prévoir, et dangereuse en raison même des omissions qu'on serait exposé à commettre.
Voilà l'opinion que bien souvent, trop souvent, nous avons entendu
formuler. Si elle était fondée, elle enlèverait, ne le dissimulons pas, au métier de forestier un de ses titres les plus recommandables à la considération dont il est entouré. S'il était vrai que la science de l'aménagement fût une chimère, un jeu de l'esprit, une conception purement idéale qui ne pouvait éclore que dans les cerveaux nébuleux de nos voisins d'outreRhin, la sylviculture deviendrait la dernière de toutes les branches de l'agriculture.
Mais à qui fera-t-on croire qu'il n'y ait rien au fond de sérieux et d'utile dans une matière qui a préoccupé tant d'intelligences lumineuses : les Hartig, les Cotta, en Allemagne; et en France les Varennes de Fenille, les de Pertuis, les Lorentz, les de Buffévent, les Salomon, etc.
Eh quoi ! ces hommes auxquels personne assurément ne refuse une certaine dose d'intelligence auraient passé une partie de leur vie à enseigner par leur parole ou par leurs écrits une science qui serait dépourvue de tout fondement? Cela n'est pas admissible; et, sans entrer ci dans des développements qui nous conduiraient beaucoup trop loin, nous nous bornerons à rappeler ce que nous écrivions, il y a cinq ans, dans notre article d'introduction à la deuxième série des Annales foestières.
« La production forestière, et les avantages qui s'y rattachent, sont subordonnés à des circonstances nombreuses et diverses qui dérivent toutes, soit des lois naturelles et immuables de la végétation, soit des conventions humaines, des convenances de la société ou de l'individu ; en d'autres termes, de l'économie politique.
« On peut considérer les lois de la végétation, abstraction faite des autres connaissances qui sont comprises dans l'économie forestière, et dans ce cas, on étudie la culture proprement dite. Cette partie de la scie nce enseigne les moyens de faciliter la croissance des bois, de les améliorer, de les régénérer.
« Si de l'étude des lois de la végétation on passe à celle de l'économie politique dans ses rapports avec la sylviculture, on rencontre tout d'abord armi les plus intéressantes des notions qu'elle comprend, celles de la égi slation. Leur importance n'a pas besoin d'être démontrée.
« Après la législation, il convient de connaître l'influence que les bois sont appelés à exercer soit par leur existence même, soit par leur produit ur la prospérité publique et privée.
« Les rapports des forêts avec le climat, le sol, l'hygiène, la défense u territoire, l'utilisation de leurs produits au point de vue agricole, commercial, industriel, rentrent dans cette partie de la science forestière.
« Puis, quand on possède les connaissances diverses qui viennent d'être indiquées sommairement, il reste à en faire l'application combinée
de manière à en retirer les avantages les plus considérables. Cette application peut être considérée comme le couronnement de l'économie forestière, et constitue la science de l'aménagement. »
Qui dit science dit en même temps une collection de principes s'appliquant à un objet déterminé, et s'engendrant les uns les autres pour aboutir à un résultat utile. Ces principes peuvent être contestés; ils n'en existent pas moins, et ce n'est certainement pas sans raison que le gouvernement entretient pour les enseigner à l'Ecole de Nancy, depuis qu'elle est fondée, un professeur spécial.
Mais s'il y a des principes d'aménagement, il faut ne rien négliger pour en assurer l'application ; et cela est d'autant plus nécessaire que c'est précisément à cause des difficultés que rencontre cette application, que beaucoup de gens se sont avisés de les contredire. Or, pour en assurer l'application, il faut une instruction ; instruction large tant qu'on le voudra, dans laquelle on se bornera à poser les règles générales, mais qui indiquera avec netteté les points sur lesquels devront porter les investigations des agents, la marche qu'ils auront à suivre dans leurs opérations et la forme sous laquelle ils devront présenter le résultat de leurs travaux. C'est là une mesure préalable, évidemment indispensable, si l'on veut que les commissions ne retombent pas dans les tâtonnements et les erreurs qui ont été reprochés à leurs devancières. Citte instruction est sans doute difficile ; nous n'avons pas à nous occuper de ce côté de la question ; nous ferons seulement observer que s'il n'y avaitpas parmi les agents forestiers des hommes capables de la rédiger, ce serait une preuve que la grande œuvre que l'on se propose d'entreprendre est prématurée, et doit être renvoyée à une époque où le niveau de l'instruction sera plus élevé.
Composition des commissions. — Les anciennes commissions se composaient de trois agents ; un arpenteur était en outre attaché à chacune d'elles pour tous les travaux géodésiques. Nous laisserons de côté dans ce moment l'arpenteur ; il rentre dans la catégorie des auxiliaires que le budget de chaque commission devra lui permettre de se procurer, et nous admettrons que les agents, menbres d'une commission, n'auront à s'occuper que des travaux purem nt forestiers, qui demandent le secours de la science, de l'esprit d'observation et du tact. L'administration tirera, sans contredit, d'un aient quelconque, beaucoup plus de profit en l'employant, par exemple, haire la description d'une forêt qu'en le chargeant de lever des parcelles. laire la description est une opération délicate ; lever les parcelles est un tavail mécanique indépendant de toute instruction forestière, et qui sera bien mieux et bien plus promptement exécuté par un géomètre de professon qu'il ne pourra l'être par un agent.
Cela posé, on peut se demander s'il est bon que les commissions
soient composées de plus ou moins de trois agents : c'est une question trèsimportante à étudier; pour notre compte, nous sommes disposés à croire que l'on trouverait une garantie plus grande d'unité et d'ensemble dans le travail, si le nombre des membres de chaque commission était augmenté.
Il nous semble, en effet, qu'il y aurait plus d'avantages sous ce rapport à n'avoir, dans un bassin de consommation, qu'une seule commission composée d'un chef habile et de cinq subordonnés, que d'en avoir deux dirigées par deux chefs qui pourraient ne pas marcher d'accord.
Ceux qui possèdent la pratique des travaux d'aménagement seront sans doute de notre avis, car ils savent bien que tous ces travaux, lorsque les bases en ont été établies, cOiltradictoirement, par tous les membres d'une commission, ne doivent pas nécessairement être faits en commun ; qu'il est beaucoup d'opérations que l'on peut et que l'on doit se distribuer, et que l'important est que le chef exerce une surveillance active sur la manière dont chacun de ses subordonnés s'acquitte de la tâche qui lui a été dévolue.
Ressources pécuniaires à mettre à la disposition des commissions. Pour construire une route, un pont, un édifice quelconque, il ne suffit pas de se procurer un ingénieur capable, il faut encore pouvoir mettre à sa disposition le crédit nécessaire pour les nivellements, la confection des plans et devis, l'achat, la taille, la pose des matériaux.
Les aménagements sont des travaux d'utilité publique de l'ordre le plus élevé. Ils nécessitent des levés géodésiques, sans lesquels ils manqueraient de base certaine, des comptages, des abatages et des façonnages de bois, des études de routes, de scieries, etc. Or, pour cela, il faut des géomètres, des bûchetons, des ateliers de compteurs, des commis de toute sorte. D'un autre côté il y a lieu de se préoccuper de la dépense qu'occasionnera l'exécution des aménagements, et, par conséquent, des repeuplements, des assainissenents, des routes, des constructions diverses qui auront été reconnues utiles. Nous estimons que le chiffre de la dépense immédiate, non compris le traitement des agents, pourra s'élever pour chaque commission à huit or dix mille francs par an ; mais si l'on ne s'occupait de pourvoir qu'à cette dépense, sans songer à celle d'exécution, on imiterait, qu'on nous passe la conparaison, l'imprévoyance d'un homme qui, après avoir consacré beaucour d'argent à faire fabriquer un bel équipage, ne pourrait pas s'en servir nate des moyens d'acheter un cheval.
Contrôle. — Une des conditionsles plus essentielles d'un bon service est l'unité, c'est-à-dire la concordant de toutes les règles qui président aux travaux des divers fonctionnairesqui sont attachés à ce service. Or, cette unité, c'est l'administration centale qui en représente l'esprit et qui est appelée à la réaliser par le contrôl qu'elle exerce sur les agents des
départements. Il suffit que ce contrôle soit purement bureaucratique, lorsqu'il s'agit d'un service qui n'est pas susceptible d'être influencé par des considérations locales, ou dont l'action se manifeste clairement et complètement par les écritures qui sont soumises à l'approbation de l'autorité supérieure ; mais quand il en est autrement, quand les exigences des localités peuvent influencer la conduite et les actes des agents ; quand ces actes, d'autre part, ont une signification et une portée qui ne sont pas susceptibles d'une définition exacte, et qui ne sauraient dès lors être appréciées en parfaite connaissance de cause par l'administration centrale, il est nécessaire que celle-ci s'adjoigne des inspecteurs ambulants qui se transportent sur les lieux, y portent son esprit et ses intentions, et s'assurent qu'on ne s'en écarte pas.
L'administration forestière manque de ces auxiliaires utiles. Les agents du service actif ne sont vérifiés, contrôlés que par les inspecteurs généraux des finances, qui sont étrangers à la sylviculture, et qui ne sauraient dès lors remplir complètement, en ce qui concerne la gestion forestière, la mission régulatrice qu'on leur a confiée.
Cet état de choses est essentiellement fâcheux pour le service forestier, envisagé dans son ensemble. Au cas particulier qui nous occupe, pour les aménagements qu'on se propose d'entreprendre, l'absence d'un contrôle actif serait de nature à compromettre le succès de l'opération. En effet, si des travaux demandent à être conduits avec ensemble, avec unité, ce sont sans contredit les travaux d'aménagement ; et on doit le comprendre, puisque indépendamment des circonstances locales auxquelles ils doivent se conformer, ils sont soumis à des exigences générales de consommation que l'administration centrale seule, qui domine tout le service, peut apprécier.
En résumé, il y a dans l'organisation qui se prépare quatre points essentiels que nous nous permettrons de recommander à toute la sollicitude de l'administration : C'est d'abord une instruction, C'est ensuite la composition des commissions, C'est en troisième lieu le crédit nécessaire pour qu'elles soient pourvues de tous les moyens d'action désirables, C'est, enfin, l'institution d'inspecteurs-contrôleurs.
Toutes choses qui demandent à être profondément méditées, solidement constituées, si l'on veut que l'entreprise tourne à l'honneur de l'administration.
Dans notre prochaine livraison, nous nous occuperons des commissions de cantonnement.
REVUE COMMERCIALE.
Le froid commence à se faire sentir. L'hiver vient, et déjà chacun pense à s'approvisionner du combustible nécessaire. Mais les prix sont élevés, on s'en plaint ; on se demande s'il y a chance de diminution ou risque d'augmentation nouvelle. Voyons ce que nous pouvons espérer ou craindre à ce sujet.
Et d'abord, quel est l'état des approvisionnements du commerce?
Quelles sont les ressources pour la saison qui commence?
Si nous consultons les tableaux mensuels de l'entrée dans Paris, nous voyons que depuis le mois d'avril, époque des premiers arrivages, jusqu'au mois de septembre il y a diminution continue dans les quantités entrées.
Or, les bois arrivant au mois d'avril sont exclusivement destinés à la consommation de l'hiver suivant et mis en chantier pour cela.
Cette diminution n'a d'ailleurs rien d'inquiétant : il sera facile de combler la différence, et déjà le commerce s'en est sérieusement occupé, car il y a augmentation depuis deux mois sur les bois durs seulement. Les bois blancs, les cotrets, le charbon, la houille restent pour chaque mois avec une différence en moins sur tous les mois correspondants de 1855.
Le tableau suivant indiquera sur chaque article la différence mensuelle et la différence totale à l'époque où nous sommes arrivés.
TABLEAU DES QUANTITÉS ENTRÉES EN MOINS A PARIS, PENDANT LES SIX DERNIERS MOIS, EN COMBUSTIBLES DIVERS.
Bois dur. Bois blanc. Cotrets. Charbon Houille.
de bois.
Avril. 7,1025t. 848 747 22,326hecf. 9,703,271 kilos Mai. 20,144 57 1,332 42,898 5,751,494 Juin. 61,837 3,741 739 16,281 775,355 Juillet. 22,039 » 59 » 1,766,174 Août. » 2,102 1,291 50,141 10,478,566 Septembre.. » 970 1,338 7,469 8,487,785 111,122 7,718 5,506 159,115 36,962,645
Les six derniers mois donnent en moins à l'entrée dans Paris : 111,122 stères bois dur.
7,718 stères bois blanc.
5,506 stères de cotrets.
139,115 hectolitres de charbon de bois.
36,962,645 kilos de houille.
Par compensation, les mois d'août et septembre ont donné en plus 25,000 stères de bois dur.
Les bois à ouvrer ont donné en plus :
Avril 3,441 Mai 1,702 Juin. »
Juillet 1,708 Août 1,389 Septembre. 1,176 Ensemble. 9,416 stères, ou 94,160 décistères.
Les différences constatées au tableau ci-dessus ne peuvent pas avoir les mêmes conséquences sur tous les articles. Les chiffres n'ont donc qu'une signification relative.
Les bois durs ne se consomment qu'en hiver ; tout ce qui est entré forme les ressources de la saison ; et un approvisionnement moindre doit amener une augmentation de prix si la consommation n'est pas restreinte.
Les bois blancs se brûlent en été comme en hiver. La consommation ayant toujours marché malgré la réduction dans les arrivages, le déficit se fera sentir d'autant plus vivement. L'augmentation de prix est donc imminente.
Les cotrets, tenant un peu de l'une et de l'autre espèce, doivent suivre à peu près les mêmes variations de cours. Cependant leur clientèle est différente ; leur fabrication peut être influencée par un autre combustible, le charbon , auquel ils empruntent plus ou moins de matière, suivant la relation existant dans les prix, il est donc plus difficile de prévoir quels seront les cours.
La diminution considérable que nous voyons à l'entrée des charbons peut être un motif de baisse sur les prix de cette marchandise. Les magasins étant presque tous hors barrière, on n'entre guère dans Paris que la consommation de chaque jour, et, sans crainte de beaucoup se tromper, on peut considérer comme ayant été consommée en moins toute la différence entre les six mois correspondants de 1855 et 185G. Or, les prix élevés obtenus depuis près d'une année ont dû exciter le commerce à produire plus. Les approvisionnements ont été faits sur le même pied
qu'en 1855. On prépare plus encore pour 1857. Les forges, les hautsfourneaux, moins ardents, laissent plus de latitude au commerce de Paris.
On produit plus, on consomme moins : donc probabilité de baisse, qui devient presque une certitude.
Nous croyons qu'il en est de la houille comme des charbons de bois : les dépôts, les magasins sont aussi à l'extérieur, et la différence en moins constatée au tableau indique une consommation moindre. Ceci s'explique d'ailleurs par l'affluence des étrangers amenés à Paris penflant l'Exposition. Rien de semblable n'a pu cette année maintenir la consommation au niveau qu'elle avait atteint. La diminution, quelque grande qu'elle soit, est assez motivée.
Mais la production de la houille étant à peu près la même et la consommation générale ayant plus de motifs d'être augmentée que d'être restreinte, on ne peut conclure de la baisse à Paris, à moins que des approvisionnements trop considérables ne créent une concurrence au profit du consommateur parisien.
Somme toute, il y a lieu de croire que les combustibles se maintiendront chers pendant tout l'hiver, à l'exception du charbon de bois qui doit baisser un peu de prix par les motifs détaillés plus haut.
Sur les bois à ouvrer l'incertitude n'est pas permise, si l'on considère l'augmentation soutenue des entrées et l'état de la place.
Les constructions ont été des plus actives pendant toute l'année et le bois a repris quelques-uns des avantages que le fer lui avait enlevés depuis longtemps. Bon nombre de maisons, et des plus importantes, ont fait leurs solives en bois. On paraît d'ailleurs disposé à construire beaucoup en 1857, et, pour peu qu'on suive les mêmes errements, les charpentes seront chères, à moins cependant que les chemins de fer cessent de prendre et qu'il arrive à Paris une quantité de bois qui dépasse les besoins.
Quant à présent les prix en général sont élevés.
Les charpentes valent, dans l'eau, hors barrière, 60 à 75 fr., suivant qualités.
Les charbons se tiennent de 8 à 9 fr. la voie chez le consommateur.
Les bois à brûler se placent de 30 à 40 fr. la voie de deux stères.
Les sapins continuent de baisser.
DELBET.
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FERS ET DES FONTES.
SEPTEMBRE 1856.
DÉSIGNATION DROIT QUANTITÉS ENTRÉES DIFFÉRENCE des NATURE n'OCTI\Ol EN SEPTEMBRE sur le mois correspond.
D'UNITÉS. décime '"* Augmentation Diminution MATIÈRES. compris. <856. 1855. 11J. en 1856. 1855. 1856. 1856.
bois à brûler, dur stère. 3 00,0 (1) 64,443 43,333 21,UO » — blanc. — 2 22,0 (2) 16,214 17,184 » 970 Cotrets de bois dur. — t 80,0 2,003 3,341 » 1,338 Menuise et fagots. — 1 08,0 5,331 4,613 718 » Charbon de bois hectolitre. 0 60,0 258.147 265,616 « 7,469 Poussierde ch. debois — 0 30,0 13,000 11,800 1,200 » Charbon de terre 100 kilogr. 0 72,0 28,601,593 37 089,378 » 8,487,785 Charpente et sciage de bois dur. stère. 11 28,0 11,2°8 10,122 1,176 « Id. de bois blanc - 900,0 15,017 13 886 1,131 » Lattes et treillages. les too bottes. 1128,0 21,033 15,243 5,790 » Bois de déch. en chêne mètre carré. 021,6 170 578 » 408 — ensapin. — 0 12,0 5,755 5,585 170 » Fers employés dans les constructions. 100 kilog. 3 60,0 1,009,172 647,297 361,875 » Fonte employée dans les constructions.. — 2 40,0 788,390 285,505 502,885 »
(1) Ces 64,443 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 25,777,200 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 12,888,600 kil. de houille.
(2) Ces 16,214 stères de bois, multipliés par 300 kil., poids du stère de bois blanc, représentent 4,864,200 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 2,432,100 kil. de houille.
CUBAGE ET ESTIMATION.
TABLETTES-TARIFS (1).
Deux planchettes en bois de 0m,010 d'épaisseur, 0m,130 de largeur, 0m,314 de longueur, se déployant et se fermant à l'aide de charnières, forment la carcasse de cet appareil.
La planchette supérieure est revêtue, à l'intérieur, d'un tableau imprimé sur papier-parchemin. — L'autre d'une feuille de verre dépoli, sur laquelle on peut écrire avec un crayon ordinaire.
Le bord de la planchette supérieure est divisé en cent parties égales ; le bord de la planchette inférieure est garni d'une bande de cuivre dentée.
Fermé, l'instrument sert à mesurer la grosseur des arbres. — La
(1) Les tablettes-tarifs se trouvent au bazar forestier, 46, rue de l'Arbre-Sec, à Paris.
bande de cuivre et la graduation sont destinées à cet usage. — II donna le diamètre en mesurant le contour.
Ouvert, il sert à déterminer le volume et la valeur vénale.
On peut le manœuvrer par tous les temps. — Le papier-parchemin et le verre dépoli triomphent des pluies les plus longues.
Le tableau imprimé indique, pour chaque diamètre, depuis 1 centimètre jusqu'à 1 mètre, le volume en grume, pour 1 mètre de longueur.
( On obtient celui des arbres d'un diamètre double ou triple en multipliant les chiffres primitifs par 4 ou par 9. ) Une simple multiplication, très-facile à l'aide du verre dépoli, fait connaître le volume total, et par suite la valeur vénale en grume.
Le volume est donné, par fractions espacées de 5/100, depuis 50/100 jusqu'à 100/100, en fonction du volume du cylindre.
Le cube des arbres qui n'atteignent pas au moins 50 pour 100 du volume du cylindre n'est pas mentionné ; mais s'il se présente des arbres de cette catégorie on a leur cube, sans calcul, en prenant la moitié des nombres correspondant à des chiffres doubles.
Le tableau fait aussi connaître le volume des pièces équarries qui représentent habituellement, on le sait, de 50 à 80 pour 100 du volume des arbres en grume.
Dans tout ce travail c'est le cylindre que nous prenons pour terme de comparaison.
Nous le préférons au cône : parce que la forme cylindrique est plus simple et mieux saisie par tout le monde que la forme conique; - parce que le cylindre est plus habituellement employé que le cône pour le cubage des bois abattus, et qu'il importe de ne pas multiplier inutilement les unités.
Les tablettes-tarifs facilitent les estimations et forment rapidement des estimateurs. JULES D'AUVERGNE.
NOTE SUR L'ORIGINE DES SOURCES.
On sait que des travaux importants ont été exécutés en Perse de toute ancienneté pour rechercher les eaux souterraines, les amener à la surface des terrains et les employer à leur irrigation. Ces travaux consistent dans le creusement de puits plus ou moins espacés, qu'on réunit à
leur partie inférieure par une galerie destinée à recueillir les eaux. Des conduites de dégagement s'embranchent sur la galerie et conduisent le liquide à la surface du sol, quand on ne peut pas employer à cet usage des machines élévatoires.
Ces galeries, désignées sous le nom de câris, ont quelquefois, au dire d Elphinstone, jusqu'à 50 kilomètres de longueur. On comprend que des travaux de cette importance ne peuvent être entrepris que par l'Etat, par de très-riches particuliers, ou enfin par l'association des propriétaires intéressés.
Me trouvant en tournée dans le département de Vaucluse, j'ai eu occasion de voir un petit travail de même nature exécuté sur la partie inférieure du mont Ventoux par un simple agriculteur, qui ignorait à coup sûr l'existence des câris et pouvait, ajuste titre, se regarder comme l'inventeur du système qu'il employait. Le travail a été couronné de succès, et il m'a paru utile de le faire connaître. Mais, avant de décrire les détails de son exécution, j'entrerai dans quelques développements sur les particularités: que présente le mont Ventoux et sur la constitution géologique du sol qui le compose.
Sources du mont Ventoux. - Cette montagne, comprise tout entière dans le département de Vaucluse, l'une des plus élevées qui soit à l'intérieur de la France ; l'altitude de son sommet est de 1,960 mètres ; sa base affecte approximativement la forme d'une ellipse allongée dont le grand axe, situé de l'est à l'ouest, aurait 25,000 mètres de longueur et dont le petit axe, situé du nord au sud, aurait 7,500 mètres; la surface correspondante est d'environ 15,000 hectares. Elle est entièrement formée d'un calcaire néocomien, présentant de nombreuses fissures, et tellement perméable que toutes les eaux de pluie s'infiltrent dans l'intérieur, et que les ravins qui existent à sa surface sont constamment à sec, si ce n'est dans les cas très-rares de la chute de pluies torrentielles.
Dans la partie élevée, on ne voit surgir aucune source; mais, en approchant de la base, on rencontre, à 385 mètres au-dessus du niveau de la mer, vers l'extrémité ouest du grand axe de l'ellipse dont j'ai parlé et tout près de Malaucène, une source abondante dont le débit est assez considérable pour mettre en jeu, immédiatement à sa sortie et successivement des moulins, des papeteries et autres usines importantes. L'absence de sources supérieures indique que la couche imperméable qui arrête les infiltrations a une inclinaison de l'est à l'ouest, et qu'elle vient affleurer le sol au point où surgit la source de Malaucène, qu'on a désignée sous le nom de Groseau.
En examinant à l'est et au nord la base du mont Ventoux, on ne découvre aucune source de quelque importance ; il n'en est pas de même
vers le sud, oit, tout à faifc au pied de la montagne, et beaucoup plus bas que le niveau du Groseau, on trouve des sources qui, quoique moins abondantes, suffisent cependant à faire mouvoir, en éclusant, les moulins de Bedoin et de Mourmoiron, mais dont le débit total est de beaucoup inférieur à celui du Groseau.
Il résulte de ces faits que la couche imperméable qui reçoit les infiltrations du mont Ventouxforme, sur la plus grande partie de sa surface, une espèce de vallon incliné de l'est à l'ouest, qui dirige la plus grande partie de ces eaux vers Malaucène, et qu'il y a une ligne de faîte, à partir de laquelle cette couche, s'inclinant vers le sud, vient ensuite affleurer la plaine dans les points où surgissent les sources que nous venons de citer. D'après cette description, il est évident que non-seulement on ne doit pas rencontrer de sources dans la partie supérieure du mont Ventoux, mais qu'on n'y a pas même creusé de puits, à cause de l'excessive profondeur qu'il aurait fallu leur donner; en se dirigeant, au contraire, vers le midi et en se rapprochant de la plaine, l'épaisseur de la couche perméable devient assez faible pour qu'il soit possible de la perforer par des puits, qui atteignent jusqu'à la surface imperméable sur laquelle coulent, par suintements ou par filets, les eaux d'infiltration.
C'est dans cette partie que l'agriculteur intelligent dont j'ai parlé a établi une suite de puits qu'il a reliés par une galerie souterraine, contenue à l'amont par un mur en pierres sèches, et à l'aval par un mur bétonné.
Quoique les suintements partiels fussent assez faibles, il a ainsi recueilli et conduit à jour une belle source, insuffisante, il est vrai, pour faire mouvoir une usine, à cause de la faible longueur donnée à la galerie, mais bien propre cependant à arroser une prairie ou un jardin ; il est inutile de dire que les sources qui surgissaient plus bas, dans la partie correspondante, ont été interceptées et annulées.
On doit donc considérer lacalotte perméable du mont Ventoux comme un immense filtre, à travers lequel suintent les eaux de pluie qui tombent sursasurface, etquiviennentalimenter les quelques sources que nous avons signalées. Ces sources sont séparées des montagnes voisines par des vallées tellement profondes qu'il n'est pas possible de leur attribuer d'autre origine. Au reste, pour corroborer cette assertion, on peut assez facilement reconnaître qne la quantité d'eau qui tombe chaque année sur le mont Ventoux, calculée à raison de la surface que nous avons assignée à sa base, est suffisante pour les alimenter, et même qu'elle est en rapport avec leur débit.
En effet, bien que je ne les aie pas jaugées, je pense, d'après les indications citées plus haut, et d'après les renseignements qui m'ont été fournis, que leur débit total doit varier à l'étiage entre 1 et 2 mètres cubes;
or, en examinant la quantité de pluie qui tombe dans la contrée, on voit, d'après les relevés consignés dans le cours d'agriculture si remarquable de M. deGasparin, qu'il tombe annuellement à Manosque, placé à l'est du mont Velltoux, une hauteur d'eau de 0m774, et à Orange, situé à l'ouest, de Om 758 ; la moyenne de ces deux nombres est 0m 756. Si l'on considère, en outre, que les pluies les plus abondantes dans ce pays sont produites par les vents du sud-est et que les nuages poussés dans cette direction, venant se heurter contre le mont Ventoux, doivent s'y décharger plus facilement que dans la plaine, on sera conduit à admettre, sans crainte d'exagération, que la hauteur de l'eau tombée sur cette montagne doit être annuellement d'environ 0m85, c'est-à-dire supérieure de Om 10 à la moyenne que nous venons d'énoncer pour ces deux villes. La base ayant 15,000 hectares ou 150 millions de mètres carrés, la quantité totale d'eau tombée dans une année sera de 150,000,000 + 0,85 ou 127,500,000 mètres cubes qui, divisés par 51,556,000, nombre de secoudes dans l'année, donnent 4 mètres cubes. Ce volume doit comprendre le débit moyen des sources, la perte résultant de l'évaporation à la surface et les écoulements invisibles dont il est impossible de se rendre compte.
Ainsi que je l'expliquerai tout à l'heure, le débit moyen diffère beaucoup moins du débit à l'étiage dans les sources que dans les cours d'eau ordinaires, et il me paraît naturel d'admettre que, pour celles dont je m'occupe, il doit varier entre 2 et 5 mètres cubes.
L'évaporation à la surface doit être nécessairement très-réduite dans un terrain aussi perméable où l'eau est absorbée presque instantanément.
Enfin, le mont Ventoux est circonscrit par des vallées tellement profondes et sa forme est si nettement dessinée qu'il ne peut s'échapper qu'un très-petit volume d'eau inaperçu.
Le chiffre auquel je suis arrivé me paraît donc représenter, d'une manière très-satisfaisante, toutes les circonstances de l'écoulement des pluies tombées sur la surface de cette montagne.
Je vais maintenant essayer de rendre compte, par quelques observations, des phénomènes qui se produisent dans ces immenses filtres naturels.
On sait que l'eau placée dans un filtre en papier, semblable à ceux qu'on emploie dans les laboratoires de chimie, met assez longtemps pour s'écouler, bien qu'elle n'ait qu'un faible obstacle à vaincre et qu'elle soit soumise à l'action d'une assez forte pression ; on ne doit donc pas s'étonner de voir l'écoulement devenir plus lent à mesure que la puissance du filtre augmente, et, pour donner une idée du temps que l'assèchement met à se reproduire, je dirai que j'ai vu des tunnels creusés dans un terrain cal-
caire d'une composition géologique semblable à celle du mont Ventoux, où les suintements continuaientà se produire après une sécheresse extraordinaire, qui avait duré trois ou quatre mois, et avait réduit les cours d'eau voisins à leur plus simple expression, et cela bien que la hauteur du terrain au-dessus de la voûte, c'est-à-dire l'épaisseur du filtre, ne fût que d'environ 10 mètres. On conçoit, d'après cela, que des sources semblables à celles du Groseau, alimentées par un filtre d'une hauteur aussi prodigieuse, ne doivent jamais tarir et que, bien qu'elles soient sujettes à un accroissement de débit à la suite de grandes pluies, la différence entre l'étiage et les hautes eaux doit y être beaucoup moins sensible que dans les cours d'eau ordinaires.
J'ai été naturellement conduit, pour expliquer le succès obtenu par le petit câris établi sur la partie méridionale du mont Ventoux, à étudier l'origine des sources qui surgissent au pied de cette montagne, et à rendre compte des phénomènes géologiques qui président à leur production.
Avant de généraliser les idées que j'ai émises à ce sujet, il paraîtra curieux, sans doute, d'en faire l'application à la fontaine de Vaucluse, qui est située non loin de là, et dont le débit est si remarquable.
BOUVIER, Ingénieur en chef, directeur des ponts el chaussées.
(La suite au prochain numéro. )
(Extrait des Annales des ponts et chaussées.)
DOCUMENT OFFICIEL.
MINISTÈRE DES FINANCES.
Liste par ordre de mérite des candidats qui ont été admis, par arrêté du ministre des finances, en date du 18 octobre 1856, à l'École forestière de Nancy.
MM.
De la Berge (Camille).
De la Morinière (Armand-Arthur).
Ernst (Charles-Joseph-Matlhieu).
Crousse (Edouard-Louis).
Lartigue (Louis-Jules).
Gomien (Alphonse-Emile).
Combrau (Gustave-Leon).
Châtelain ( Henri-Marie-Viclor-Christophe).
Chapelain (Paul-Emile).
Yanhoucke (Léon-Augustin).
Sédillol (GarniIle-Joseph).
Veruiu (Pierre-Joseph).
Morel (Abel-Maurice-Gaspard-Emile).
Champenois (Amédée).
Giraud (Henri-Léopold).
Delpéré de Cardaillac deSaint-Paul (Guil-
MM.
taume-Aibfrt-Marie-Saint-Livrande).
Vasseiot de Régné (Mldérie).
Delà porte (Louis-Charles-Joseph).
De Villeneuve (Gaspard-Gabriel-Héliou).
Caslel (Georges-Abilon).
Duchatais (Théodore Louis- Jules-Ursin).
De Douliet d'Auzers (Joseph).
Prudot ( Emilien - François - Louis - Victoire).
Bal lin (Louis-Frédéric-Alexandre).
Deplais (Marie-Jules).
Mathieu Saint-Laurent ( Marie-Paul-Camille).
Reeu lié (Pierre- Victor- Virgile).
Beaumont (Auguste-Jean-Briptiste).
Dincher (Paul-Emile).
De Gibon (Léonce-Marie).
ADMINISTRATION DES FORÊTS,
| ÉTAT DU PERSONNEL PAR ARRONDISSEMENT.
M. Graves (0 *), directeur général, président du Conseil d'administration.
MEMBRES DU CONSEIL D'ADMINISTRATION.
M. Perrier (0 &).
M. Urguet de Saint-Ouen (0 * ).
M. Certes *.
BUREAU CENTRAL ET DU PERSONNEL (1).
M. Tellier, chef.
Première division.
M. Urguet de Saint-Ouen ( 0 *), administrateur.
PREMIER BUREAU.
M. Guy *, chef.
DEUXIÈME BUREAU.
M. Maison, chef.
Deuxième division.
M. Perrier (0 <&), administrateur.
PREMIER BUREAU.
M. Meynier, chef.
DEUXIÈME BUREAU.
M. Sonolet *, chef.
Troisième division.
M. Certes *, administrateur.
PREMIER BUREAU.
M. Beaussire, chef.
DEUXIÈME BUREAU.
M. de Fos, chef.
BUREAU TEMPORAIRE DES ALIÉNATIONS.
M. Meynier, chef du premier bureau de la deuxième division.
(1) Les Annales forestières ont publié; dans le numéro de janvier 1855, p. 21 et âuiv., la répartition du travail entre leâ différents bureaux de l'administration centrale des forêts.
ÉCOLE IMPÉRIALE FORESTIÈRE, ÉTABLIE A NANCY.
M. Parade A. directeur.
f M. Mathieu, - Histoire naturelle.
p M. Regnault, — Mathématiques.
j M. Meaume, — Législation et jurisprudence.
M. Barré, chef du cours. - Dessin et constructions forestières.
inspecteurs t M. Lanier.
des études. t M. Nanquette.
Le cours de sylviculture est professé parle directeur de l'École.
CONDITIONS D'ADMISSION.
Le nombre des élèves à admettre à l'École est fixé chaque année par le ministre des finances, en raison des besoins de l'administration des forêts, et d'après un concours public.
Les examens de l'École forestière ont lieu à Paris et dans les départements, à la même époque, aux mêmes lieux que ceux de l'École Polytechnique, et sont faits par les examinateurs nommés par le ministre des finances. Les aspirants sont tenus d'adresser au directeur général de l'administration des forêts, avant le 31 mai au plus tard, leur demande d'admission au concours, acéoifipagnée des pièces suivantes : 1° L'acte de naissance, revêtu des formalités prescrites par les lois, et constatant que l'aspirant aura au 1er novembre dix-neuf ans accomplis et n'aura pas plus de vingt-deux ans ; 2° Un certificat signé d'un docteur en médecine et dûment légalisé, attestant que l'aspirant est d'une bonne constitution, qu'il a été vacciné ou qu'il a eu la petite vérole, et qu'il n'a aucun vice de conformation ou infirmité qui puisse le rendre impropre au service forestier; 3° Le diplôme de bachelier ès sciences. Néanmoins, le candidat qui ne serait pas encore pourvu de cette pièce peut y suppléer par un certificat constatant qu'il a fait des études classiques, jusqu'à la rhétorique inclusivement;, à charge par lui de produire le diplôme à l'administration des forêts, le 15 octobre au plus tard; 4° La preuve qu'il possède un revenu annuel de 4,500 fr. au moins, ou à défaut, une obligation par laquelle ses parents s'engagent à lui fournir une pension de pareille somme pendant son séjour à l'École forestière, et une pension de 600 fr. depuis sa sortie de l'École jusqu'à ce qu'il soit employé comme garde général en activité.
L'examen porte sur les objets ci-après, savoir : 1° l'arithmétique complète ; 2° l'algèbre ; 3° la géométrie ; 4° l'application de la géométrie ;
50 la trigonométrie ; 6° la physique ; 7° la chimie ; 8° la cosmographie ; 9° la mécanique; 10° l'histoire naturelle ; 11° la langue allemande; 12° la langue latine; 13° la langue française ; 14° l'histoire et la géographie ; 15° le dessin d'imitation ; 16° le dessin linéaire, le lavis.
INSTRUCTION DES ÉLÈVES ET LEUR DESTINATION.
La durée des cours établis à l'École forestière est de deux ans ; à la fin de chaque année les élèves sont soumis à des examens, d'après lesquels ils sont de nouveau classés.
Si leur examen est satisfaisant, les élèves de la seconde divisjon passent dans la première, et ceux de la première sont envoyés dans les inspections forestières les plus importantes, en qualité de gardes généraux stagiaires, pour y acquérir, sous la direction des inspecteurs, les connaissances pratiques ; et dès qu'ils ont fait preuve de l'instruction nécessaire pour exercer un emploi, ils sont nommés, au fur et à mesure des vacances, à des cantonnements de gardes généraux. Ils jouissent, pendant leur temps de stage, d'un traitement de 1,000 fr.
ARRONDISSEMENTS FORESTIERS (au nombre de 32).
PREMIER ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Oise, Seine, seine-et-Marne, Sèine-èt-Oi.) M. Becquet *, conservateur, à Paris.
M. Ritt, garde général sédentaire, à Paris.
Résidences. Inspecteurs. Résidences. S. -inspect.
Oise Beauvais - Génin. Beauvais Jousselin.
Seine Paris De Piiiteville. Paris Burger.
Seine-el-Oise .,. - .,., .,.
Seine-et-Marne tleaux Feisthamel.
DEUXIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Eure, Seine-Inférieure.) M. de Suzanne, conservateur, à Rouen.
M. Lefebvre, sous-inspecteur sédentaire, à Rouen.
Eure < Louviers Lemaire. Loutriers Rigeon de Coursy.
( Lyon v Bichon. Lyons-la-Forét. Leprévost.
Rouen. De Kermel. Rouen Richomme.
! Sl-Saem. Delivet de Barville. St-Saens. Ouvrier.
Caudebec Charlier. Guerbaville Legriel.
Blallgy Gussot. H éalcamp Levavasseur.
TROISIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Côte-d'Or.) M. Lerouyer-Lafosse conservateur, à Dijon.
M. Bédel, sous-inspecteur sédentaire, à Dijon.
t, Strnur Grépy. Montbard Reyhard.
[Dijon (Nord) Champaux. Saint-Seine vallagnosc, PAtP H'Hr ) Di30n Bry d'Arcy. DIjon. Trichon.
î Châtillon- ( Nord..Laurenceâu. 1 RChecâetyil-lso. n-s.-Seine.. Galiî)t.
f s.-Seine. Sud.Rey. Recey-s. -Ource. Ti-On.
Beaune. Virot. Beaune Liégard
QUATRIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Meurthe.) M. Fliche *, conservateur, à Nancy.
M. Défaut, sous-inspecteur sédentaire, à Nancy.
Résidences. Inspecteurs. Résidences. S.-inspect.
f Nancy De Frawemberg. Nancy Bresson.
i Vie. Vaulier. Château-Salins. Boiselle.
Meurthe.;. Sarrebourg Rolland. Sarrebourg Marin.
Mpurihp i. Abreschwiller Caille. Abreschwiller Vulpillat.
f Lunéville Meslier de Rocan. Lunéville. Daubrive.
Toul. ',. Micard. Toul. Mangin.
CINQUIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ.. Bas-Rhin.) M. Hun *, conservateur, à Strasbourg.
M. Grimm, sous-inspecteur sédentaire, a Strasbourg.
Strasbourg .Georges. Strasbourg De Feucault.
Haguenau Clém. de Granprey. lIa.fJuellau Bonjour Duvivier.
S Sclilestadt Maraude. Sctilesladt De Serres.
al. Wissembourg Furst. Wissembourg Dupuy de Clinchamps.
Saverne Sa voye. Saverne Ornatio.
La Petite Pierre.Mareschàl. La Petite Pierre.Grandjean.
SIXIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Haut-Rhin.) M. Zaepffel, conservateur, à Colmar.
M. Charles, sous-inspecteur sédentaire, à Colmar.
Colmar Canferra. Colmar Fririon.
Colmar Lorentz. Roitffach Lasale.
! Alikirch Tamisier. Altkirch. Vetter.
Mulhouse Brunck. Mulhouse Mangin.
Belfort Elminger. Belfort. Froidevaux.
SEPTIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Aisne, Nord, Pas-de-Calais, Somme.) M. Thiéry *, conservateur, à Douai.
M. Millet, sous-inspecteur sédentaire, à Douai.
A' f Villers-Cotterets ..Fliche. iVillers-Cotterets.. ■ Etchégoyen.
A'sne. Laon., Perrier. LaoM. Demory de NeuOieux.
nora , f Lille D'Hastrel. Valenciennes Camus.
Nord.. Le Quesnoy Deraismes. Le Quesnoy.N..
Pas-de-Calais. 1 Boulogne Hennequin. Boulogne Frézon.
Somme 1 Abbevïlle Cornuau. Abbeville Ade.
HUITIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Aube, Yonne.) M. Suremain-Missery, conservateur, à Troyes.
M. Monin, sous-inspecteur sédentaire, à Troyes.
Troyes Delachapelle-Croizel. Troyes De Waru.
Aube. Bar-sur.seine. Collas. Bar-sur-Seine Vinchon.
( Bar-sur-Aube Guérin. Bar-sur-Aube Wignier.
( Sens Marcotte. Sens. Moreau.
Sens*, * *. .*:::::: ..Dubon. Auxci're llan)bourgt.
Yonne. < Auxerre Dubon. \Auxerre Uambourgt.
( Avallon Guérard. Avallon Parison.
NEUVIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Vosges.) M. Dubouays de la Bégassière *, conservateur, à Epinal.
M. Cornu, sous-inspecteur sédentaire, à EpinaI.
Epinal Baudrillart. Epinal Daniel.
iRumbervillers Girol. Rumbervillers Gand.
Neufchûteau nenrys. Neufchûteau .Grandjean.
Mirecourt Chevalier. Mirucourt iUasson.
Vosges. Remireinont Galmiche. Hemiremont Vincent.
Saint-Dié D'Aranco de Navarro. Saint-Dié Enist.
Senones brussaux. Senones.. Picot.
Fraixe..Bouvenot. Fraixe..Delafoise.
DIXIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Ardennes, Marne.) M. Martin (Pierre) *, conservateur) à Châlons. M. Deleuze, sous-inspecteur sédentaire, à Châlolls.
Résidences. inspecteurs. Résidences. s.-inspect.
ÇMcziêres De Rey. Mêzières Bertrand.
Ardennes Sédan Dubois du Tallard. Vouziers De Faillonnet.
Rocroy Garot. Furnay Morel.
( Epernny Decaisne. Epernay Lefol.
Marne. Vitry-ie-Français.. Perrier. Sle-Menehould. Marly.
ONZIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Moselle.) M. de Mecquellem *, conservateur, à Metz.
M. Dazier, sous-inspecteur sédentaire, à Metz.
I Sarreguemines. Magnien dit Magnienville 1 Sarreguemines De Schwartz.
t nitche Durand de Prémorel. Bilche uagnéris.
Moselle Briey. Alibert. fifte!/ Huart.
1 Thionville Gand. Thionville Guérillot.
Metz. Belfoy. Metz Desgodins.
DOUZIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Doubs.) M. Vouzeau *, conservateur, à Besançon. ': M. Larousse-Lavillette, garde général sédentaire, à Besançon.
Besançon Schuier. Besançon.Goret.
D b Baume-Les-Dames. Valory. Baurne-les Dames..Lestre.
Doubs H e n r i o t
ou s. l'olltarlier. Henriot. Pontarlier Cardot.
\Monlbéliard Bigault d'Avocourt. Monibéliard Fallot.
TREIZIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Jura.) M. Barte de Sainte-Fare *, conservateur, à Lons-le-Saulnier.
M. Dapremont, sous-inspecteur sédentaire, à Lons-le-Saulnier.
Lons-le-Saulnier.. Picard. Loizs-le-Saulnier.. Cotheret.
I oôle Dubois-Lapatelière. nàle Rance de Guiseuil.
Jura. DoL. Girard de St-Géraod. IIlolsey. Drot.
j. ura \poligny Grené. Poligny Grognot.
Arbois Choderloz de Lacloz. Arbois. Bavilley.
I St-Claude Rousselot. Si-Claude Huard.
QUATORZIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Hautes-Alpes, Drôme, Isère.) M. Thévenin, conservateur, à Grenoble. «
M. Duguiny, garde général sédentaire, à Grenoble.
Il t Alpes Embrun Puret. Embrun Nouguier.
iHiadmuitoes» -Aiilpnepss j Gap Delafont. Gap. Richaud.
l Valence Deval. Valence. Bozonnier de Lespinasse nrAmo ( Die., Chavanne. ChûliUon Charpentier.
( Grenoble Jacquot. Grenoble Beurnier.
Isère iVizille Giloire de l'Epinais. Vizille Chiboys.
( Sl-Marcellin Clavez. St-lllarcellin. Couzier.
QUINZIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Calvados, Eure-et-Loir, Manche, Mayenne, Orne, Sarthe.) M. Barbereux, conservateur, à Alençon.
M. Morel, sous-inspecteur sédentaire, à Alençon.
Calvados Caen De Vigan. Balleroy. Vassout.
Eure-et-Loir. Dreux Séguinard. /Jreux. Savart de Maupas.
Mayenne Manche , Orne Alençon Barbier. Alençon Jouaux.
., l âlortaytie Deosarsins. Tourouvre. Liesta.
Sarthe Il.f Alan,.,.. Béraud. Neufch(uel. Quéfemme.
SEIZIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Meuse.) M. Baudelot *, conservateur, à Bar-le-Duc.
M. Vivier, sous-inspecteur sédentaire, à Bar-le-Duc.
Résidences. lnspeclew's. Résidences. S.-inspect.
Bar-le-Duc Marulaz. Rar-le-Duc Teîssier.
iMontmédy Gellé. Mon/médy , Poirson.
Ieuse. Commercy Reiiauld. Commercy Koyer.
t Saini-Mihiel Mangin. Saini-Mihiel Henry.
V Verdun De Maillier. Verdun De Rlaillier.
DIX-SEPTIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Ain, Rhône, Saône-et-Loire.) M. Lucotte *, conservateur, à Maçon.
M. Goin, sous-inspecteur sédentaire, à Mâcon.
I Bourg Pascalis. Bourg Leduc.
Ain. j 1\' a rll Il Il. Lyon. Naniua Narquois.
Ain ( Belletj Barillot. Belley De Chabannes.
Rhône.
f Châton-sur-Saône. Bp-snard Duval. Châton Viénot.
Saône-et-Loire.. Curton. Alltttn Kabre.
(Mâcon Cardot. Màcon Fradin.
DIX-HUITIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Ariége, Haute-Garonne, Lot, Tarn-et-Garonne.) M. Soubirané *, conservateur, à Toulouse.
M. Pagès, sous-inspecteur sédentaire, à Toulouse.
Ariège f Foix Thiriat. Foix., Vène.
1 St-Girons. De Boixo. Sainl.Girons. Ouchaufour.
J Toulouse L&lanne. Lè§uevin Eichépérestou.
Haute-Garonne t Saini-GauàenAlarLinet. Saint-Gaudens Burdin de St-Martio.
Lot. 1.
Tarn-et-Garonne
DIX-NEUVIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Loiret.) M. Trumeau *, conservateur, à Tours.
M. Quinton, sous-inspecteur sédentaire, à Tours.
Indre-et-Loire.. 1 Tours. Barrande. Loches Duval.
Loir-et-Cher. B/oX. Dubois. Blois D'Auvergne.
Loiret (Orléans De Wavrechin. Of/t a;~ Despreauxde S-Sauveu t ~,..p' t Lorris. Lambert. LorrIs. Lefebvre.
VINGTIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Cher, Nièvre, Indre.) M. des Meloizes *, conservateur, à Bourges.
M. Carraud, garde général sédentaire, à Bourges.
Cher. , 1 BQ urges. Gilliot. Bow'qes. De Pons.
t Cosne Veyrier-Muraud., chûièauneuf ., Theurier.
Nièvre -J Clamecy Leddet. Varzy,. Lebrun.
( Nevers.,. Bruny. Nevers Fortin.
Indre | châleauroux Bramaud Boucheron. Laurent.
Indre. 1 c/MteaKfOMjc. Bramaud Boucheron. Issoudun. Laurent.
VINGT-UNIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ.' : Allier, Creuse, Loire, Puy-de-Dôme.) M. d'Entraignes *, conservateur, à Moulins.
M. de Roquefeuil, sous-inspecteur sédentaire, à Moulins.
Aii- (Sloulins Joly. Moulins Soumain.
Allier Moniluçon Blotin. Cerilly Sausse Mignot.
Creuse.,
Loire Si-Elienne Delart-Bordeneuve.
Puy-de-Dôme. | Clermont-Ferraucl. Labussière. Clermont-Ferrand. Colomez.
VlttGT-DEtîXIÈME ARRONDISSEUENT (Départ. : Gers, Basses-Pyrénées, Hautes-Pyrénées.) M. Houdouart conservateur, à Pau.
M. Viard, sous-inspecteur sédentaire, à Pau.
Résidences. Inspecteurs. Résidences. S.-illspect.
Gers. 1 Auch Masson de la Sauzaie Gers Pau Allain.
j Pau Dutemps. PaM. Allain.
Basses-pyre, ne, es. j saint-Palais Fourtet. Saillt-palais. Brcscon.
Tarbes Delatour. Tarbes Boulet d'Olive.
Hautes-Pyrénées Bagnères de Bigor-Vigries. ibagnères Thomas.
VINGT-TROISIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Côtes-du-Nord, Finistère, Ille-et-Vilaine, Loire-Inférieure, Morbihan, Maine-et-Loire. )
M. Bruchard, conservateur, à Rennes.
M. Huron, sous-inspecteur sédentaire, à Hennes.
Côtes-du-Nord * Finistère. Lorient. Gouthières. Quimperlé Quinchez.
Morbihan.
Hie-et-Vitaine. Rennes. Boutarel. Rennes Peuncher.
Loire-Inférieure Nantes. Lebescont de Coatpont. Blain. Rolland.
Maine-et-Loire.
VINGT-QUATRIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Charente, Charente-Inférieure, Deux-Sèvres, Vendée, Vienne.) M. Demercière, conservateur, à Niort.
M. Lacroix d'Hanonstadt, sous-inspecteur sédentaire, à Niort.
Charente. 1 Angouleme Lafériêre. Angouléme De Vernejoul.
Chart'nte-!nfér.
Deux-Sèvres. Niort Legris-Kergavarec.. Beauvoir Chauveau.
Vendée.
Vienne Poitiers Chameron.
VINGT-CINQUIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Aude, Tarn, Pyrénées-Orientahs.) M. Tallotte *, conservateur, à Carcassonne.
M. Bouquillon, sous-inspecteur sédentaire, à Carcassonne.
Aude Limoux Cantegril. Carcassonne Pellegrini.
Tarn. Casu'es. Gorsse. Laso'es. Pelouze.
Tai@,.i 1 Prades De Frégevilila. lrille fraîiche Mathieu.
Pyrénées-Orient. Prades De Frégeville. Villefranche Mathieu.
VINGT-SIXIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Basses-Alpes, Bouches-du-Rhône, Var, Vaucluse.) M. Anlheaulme, conservateur, à Aix.
M. Rouden, garde général sédentaire, à Aix.
Basses-Alpes. Digne. De Béer. Digne. Sambuc.
Bouches-du-Rh. Aix. Solier. Aix. Regimbeau.
Var. 1 Draguignan Jucault. Draguignan Billoux.; Vaucluse. Avignon. Ticliadou. Cui-pentras Roman.
VINGT-SEPTIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Ardèche, Gard, Hérault, Lozère.) M. Cler *, conservateur, à Nîmes.
M. Pessard, garde général sédentaire, à Nîmes.
Ardèche Prias. Lamolte. Montpezat Coll iet.
Gard. Uzes. Auger. J)imes. Valette.
Héraull. Montpellier. Granier. Montpellier. Rambaud.
Lozère. Mende Madin.
VINGT-HUITIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Cantal, Corrèze, Haute-Loire, Haute-Vienne, Aveyron.) M. Fourmont Tournay, conservateur, à Aurillac.
AI. Bouquet de la Grye, garde général sédentaire, à Aurillac.
Résidences. Inspecteurs. Résidences. S.-inspect.
Cantal Aurillac Prévost. Murât Reynard.
Corrèze. TM~e. Jurron.
Corrèze Tulle Jurron.
Haute-Loire Le Puy. Froger de l'Eguille.
Haute-Vienne.
Aveyron Rodez Lariviére. Rodez Martin.
VINGT-NEUVIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Dordogne, Gironde, Landes, Lot-et-Garonne.) M. Poirson, conservateur, à Bordeaux.
M. Duffau, sous-inspecteur sédentaire, à Bordeaux.
Dordogne t.
B,,rdeaux. Larrieu. La Teste Dumugron.
Bordeaux Duluc, Landes. Dax. De Mondétour. 1 Dax. Leblanc.
Lot-et-Garonnc.,. 11Ilarmande. Ibert.
TRE NTIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Corse.) M. Cetto *, conservateur, à Ajaccio.
M. Bonifacio, garde général sédentaire, à Ajaccio.
Corse ( Ajaccio Loyauté. I Ajaccio Pebrel.
t Cor le Davout. | corie Fouque.
TRENTE-UNIÈME' ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Haute-Marne.) M. Bigeon de Coursy, conservateur, à Chaumont.
M. Turot, sous-inspecteur sédentaire, à Chaumont.
f Chaumont Guyot de Lorrey. \Ckaumont Dieudonné.
Chaiimoni **"«*" Guyot de Lorrey. 1 Langres De Baudel.
Haute-Marne. 2 Langres. Pambet. Langr~ De Baudel.
! Wassy. De Cournon. Wassy Bonaventure.
TRENTE-DEUXIÈME ARRONDISSEMENT.
(Départ. : Haute-Saône.) M. de Coucy, conservateur, à Vesoul.
M. Ja yet, garde général sédentaire, à Vesoul.
Gray. Mantels. Gray Docteur.
) Lure Hutin. Lure Rigoigne.
Haute-Saône. ¡,uxeuil. Riboulet. Luxeuil Laurent.
Vesoul. Durand de Villers. Vesoul Fraissignes.
Vesoul Durand de villers. Luxe.u.i.l Rigoigne.
SERVICE DES TRAVAUX D'ART.
M. Viaud, inspecteur, à Grenoble.
M. Drovon, sous-inspecteur, à Paris.
M. Sommer-Fogel, idem. à Strasbourg.
M. Lalouette, idem, à Rouen.
M. Maiogon, idem, à l'1f'lz.
M. Delor, idem, à Toulouse.
M. Lebrun. sous-inspecteur, à Rennes.
M. Durcy. idem, à Troyes.
M. Grandjean, idem, à Mâcon.
M. Mangin, idem, à Epinal.
M. Lacordaire, idem, à Besançon.
COMMISSIONS D AMÉNAGEMENT.
M. Guillaume Dufay, inspecteur, à Villers-Cotterets.
M. Bouvart, sous-inspecteur, à Yillers-Cotterets.
M. Poivre. idem, à Villers-Cotlerfis.
M. Sthéme, inspecteur, à Fontainebleau.
M. Bosquillon de Frescheville, inspecteur, à Compiègne.
M. Perrard, sous-inspecteur, à Compiègne.
M. de Blair, inspecteur, à Versailles.
M. Barbier, sous-inspecteur, à Versailles.
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
Mutations dans le personnel forestier. — Ecole impériale forestière de ;Nancy. —
Conservation et germination des graines. — L'Iris juncea. — Nouveau médicament fourni par un arbre de la Chine.
= Mutations dans le personnel forestier. — M. BIGAULT D'AVOCOURT, inspecteur des forêts à Mirecourt (Vosges), a été nommé inspecteur à Montbéliard(Doubs), en remplacement de M. Chevalier.
M. CHEVALIER, inspecteur des forêts à Montbéliard (Doubs), a été nommé inspecteur à Mirecourt (Vosges), en remplacement de M. Bigault d'Avocourt.
M. MASSON, garde général des forêts à Brouvelieures (Vosges), a été nommé sous-inspecteur de troisième classe à Mirecourt (Vosges), en remplacement de M. Poirson, nommé sous-inspecteur à Montmédy (Meuse).
M. PuroN, garde général des forêts aux Grandes-Ventes (Seine-Inférieure), a été nommé garde général à Dompaire (Vosges), en remplacement de M. Ksesser, admis à faire valoir ses droits à la retraite.
M. FORSTALL, garde général stagiaire à Blois (Loir-et-Cher), a été nommé garde général à Chateauvillan (Haute-Marne), en remplacement de M. Gaulot.
M. HERBELOT, garde général adjoint des forêts, attaché à la neuvième conservation, a été nommé garde général de troisième classe à BourgSaint-Andéol ( Ardèche), en remplacement de M. Roman, nommé sousinspecteur à Carpentras (Vaucluse).
= Ecole impériale forestière de Nancy. — Les examens de fin d'an- née et de sortie de l'Ecole impériale forestière se sont terminés le 5 du mois de septembre. C'est l'honorable M. Certes, administrateur des forêts, qui a été délégué, cette année, par M. le directeur général pour présider les opérations du jury. Les résultats ont été très-satisfaisants.
Vingt-huit élèves de la promotion sortante ont été jugés aptes à prendre rang dans le corps des agents forestiers ; deux ont été remis, pour cause de maladie, à achever leurs épreuves à la prochaine rentrée des études, et il y a tout lieu d'espérer que ces épreuves aussi seront heureuses. C'est donc un recrutement de trente agents, instruits et capables, que l'Ecole fournit cette année à l'administration.
Les examens des élèves de première année ont également donné des résultats dont il y a lieu de s'applaudir. Sur vingt-sept élèves qui compo-
saient cette division, y compris deux appartenant au service forestier de la couronne, vingt-six ont été reconnus capables de passer au cours de deuxième année; un seul a dû être rayé des cadres comme n'ayant point atteint la cote réglementaire.
Dans l'audience de congé qui a suivi la clôture des opérations du jury, M. le président, entouré de tous les fonctionnaires de l'Ecole, a adressé aux élèves qui venaient de terminer leur cours une courte allocution dans laquelle il a exprimé, en termes aussi dignes que bienveillants, la haute sollicitude de l'administration supérieure pour l'établissement, sollicitude dont elle vient de donner une nouvelle preuve en provoquant la création de quatre bourses exclusivement réservées aux fils d'agents forestiers.
« Instituée par décret du 31 juillet dernier, cette mesure de haute bienveillance deviendra pour le corps entier un motif puissant d'encouragement dans une carrière toute d'abnégation et de dévouement qui, à ce titre, est justement entourée de considération, mais qui ne conduit pas à la fortune. L'agent forestier, père de famille, bénira un jour la mémoire du chef actuel de l'administration qui, en facilitant à ses enfants l'accès de cette école, aura ménagé un tel couronnement à une longue série de services désintéressés. »
Après les avoir félicités des succès qu'ils venaient d'obtenir, l'honorable président du jury a donné aux jeunes agents qu'il venait de proclamer quelques conseils empreints à la fois d'une haute sagesse et des sentiments les plus paternels, en leur montrant tour à tour les écueils à éviter, les voies à préférer, les qualités à acquérir pour remplir la mission qui les attend comme subordonnés, comme chefs et comme fonctionnaires publics.
Quelques paroles touchantes, rappelant aux élèves les soins affectueux qu'ils ont reçus des maîtres qu'ils allaient quitter, ont terminé ce discours, dont toutes les parties, aussi bien dites que bien pensées, ont produit une profonde impression sur ceux qui l'ont entendu.
= Conservation et germination des graines.— M. Morel a fait la communication suivante à la Société impériale et centrale d'agriculture, sur le moyen de conserver les graines et de hâter leur germination : « Les graines s'altèrent et périssent lorsque l'humidité s'en empare ; il est souvent fort difficile de s'en garantir, surtout lorsqu'elles ont à faire de longs trajets par mer.
« Les physiologistes connaissent la longévité d'un grand nombre de graines à la durée desquelles il serait difficile, peut-être impossible, d'assigner des bornes.
« Les forêts de deuxième création en sont un exemple. Les phénomènes de leur reproduction en végétaux autres que ceux qui ont été détruits n'ont probablement pas été assez étudiés par les botanistes Capucras,
Restingues, Hemathes; un examen sérieux donnerait sans doute naissance à des découvertes physiologiques du plus haut intérêt.
« Il est donc évident que la plupart des graines conserveront leur vertu végétative en prenant certaines précautions dont l'expérience seule peut démontrer l'efficacité.
« Or, je vois dans le Gardners Chronicle, du 29 mars, que M. G.-Z. Wilson communique à la Société des arts, qu'un de ses amis qui, avec autant de zèle que de succès, cultive des plantes tropicales, a reçu plusieurs graines qui, ayant été trempées dans la glycérine pendant dix et vingt jours, ont germé promptement et vigoureusement. « La glycérine, dit-il, « doit avoir la faculté de rétablir la vitalité, car j'en ai fait avantageuse« ment l'essai sur une ou deux graines desséchées de l'Inde. » Il pense qu'il serait utile de pousser plus loin les expériences, en faisant des envois de graine dans de la glycérine.
« Il serait assez curieux qu'une substance dont l'existence est à peine connue eût le pouvoir de préserver les graines pendant de longs voyages.
« La glycérine est un sirop doux et incolore produit par l'acide stéarique dans les fabriques de bougies de stéarine. »
= L'Iris juncea. — M. A. de Cès-Caupenne, résidant à la Safia (Algérie), a adressé à M. le président de la Société impériale zoologique d'acclimatation la lettre suivante sur le zetoutt d'Algérie : « Fixé en Algérie, où je dirige une importante exploitation forestière située dans la province de Constantine, vivant en contact incessant avec les Arabes, j'ai remarqué qu'au nombre des mets qui composent leur frugale alimentation il en est un fort recherché dans tous les douars que j'ai visités et que leur fournit une plante qui croît à l'état sauvage dans les forêts et les terrains humides : zetoutt, c'est le nom que les Arabes donnent à cette plante (1).
« Sa tige ressemble assez à celle du narcisse sauvage. La partie alimentaire de la plante se compose d'un oignon qui ne dépasse guère la dimension d'une noisette.
« Le zetoutt fleurit au printemps, en même temps que les iris et les jonquilles.
« Dès qu'il est en fleur, les femmes arabes s'empressent de le récolter.
Pour le manger, elles dépouillent l'oignon de la pellicule qui le recouvre et le font cuire dans le beurre ou bien dans l'eau et le convertissent en pâte, comme la pomme de terre, pour en faire des gâteaux.
« Cette plante est farineuse, et la fécule a un goût très-fin.
« Pendant l'hiver, les sangliers en sont très-friands, et, de même que
(1) Cette plante est V iris juncea.
(Note de M. A. Passy.)
les fouilles des porcs servent à la découverte des truffes, les fouilles des sangliers guident les Arabes dans la recherche du zetoutt.
« Tout porte à croire qu'au moyen d'une culture sarclée on pourra accroître le volume de l'oignon du zetoutt, et arriver ainsi à introduire dans l'industrie agricole ou maraîchère de la France un produit nouveau qui, en se vulgarisant, peut devenir une ressource précieuse. C'est là une question qui mérite peut-être de fixer l'attention de la Société impériale zoologique d'acclimatation.
« L'un de ses membres, l'honorable M. Tastet, à qui j'en parlais naguère, l'a envisagée ainsi, et c'est d'après ses encouragements que je me permets, monsieur le président, de vous adresser quelques échantillons de zetoutt que j'ai recueillis moi-même, il y a quelques jours, dans la forêt de chênes-liéges de la Safia.
« Je serais heureux d'apprendre que cettef communication a été accueillie avec intérêt par la savante société que vous présidez.» (Bulletin de de la Société impériale zoologique d'acclimatation.) = Nouveau médicament fourni par un arbre de la Chine. —M. J. Cloquet présente un nouveau médicament qui lui a été adressé par M. le capitaine de vaisseau Simonnet de Maisonneuve, commandant la frégate la Sibylle, dans les mers de la Chine et du Japon.
Ce médicament est un extrait alcoolique retiré par M. le docteur Barthe, chirurgien de la frégate, du bois d'un arbre de la Chine nommé tagale, et que, pour cette raison, il propose de nommer extrait de tagale.
Cette substance se présente sous la forme de poudre grossière, d'un brun foncé, formée de petits grumeaux d'aspect résineux, se collant entre eux par la pression, et prenant facilement la forme pilulaire sous laquelle elle a été employée.
La saveur de cet extrait est d'une amertume tenace et d'une âcreté remarquable; son odeur est légèrement empyreumatique.
Le bois qui fournit ce médicament est jaune et léger, semblable à celui que fournit la racine de réglisse ; il se pulvérise facilement, et dégage ainsi pendant plusieurs jours une forte odeur de chlore.
Faute de moyens convenables qu'on ne saurait trouver à Hong-Kong ni même à Canton, M. le docteur Barthe n'a pu faire une analyse rigoureuse de ce médicament, qu'il a employé avec avantage sur plusieurs marins de l'équipage de la frégate atteints de diarrhées et de dyssenteries graves.
J. RAMBOSSON.
DSSIONS DE CANTONNEMENT.
~f~~ -.
Il y a enFrânçèpllis dÇ300,000 hectares de forêts domaniales qui sont grevées dbydVôi^d^a^e/u bois, au profit d'environ 1,100 communes.
Ces droits, .JlJU à¡i:' eux croissants, tendent à absorber tous les pro,. , , .1 "II"
duits des torets qui les supportent ; ils entravent en outre 1 application des modes d'exploitation et des méthodes d'aménagement, qui seraient le plus propres à augmenter le revenu de cette partie importante des domaines de l'Etat. Ce sont là des considérations trop puissantes, trop décisives, pour qu'il soit permis de mettre en doute l'utilité du projet qu'a le gouvernement d'éteindre les droits d'usage, et nous applaudissons très-sincèrement à ce projet; mais on peut concevoir, pour arriver à le réaliser, un autre moyen que le cantonnement, et nous allons sur ce point entrer dans quelques développements que nos lecteurs, nous l'espérons, ne trouveront pas tout à fait dépourvus d'intérêt.
Le Code forestier prévoit que l'extinction des droits d'usage au bois aura lieu par la voie du cantonnement. Il ne fait point d'ailleurs de ce mode d'affranchissement une obligation à laquelle il ne soit pas possible de se soustraire; or, le cantonnement présente plusieurs inconvénients.
L'extinction d'un droit d'usage par la voie du cantonnement a pour résultat, nos lecteurs ne l'ignorent pas, d'attribuer en toute propriété à l'usager une portion de la forêt grevée, qui soit susceptible de lui tenir lieu de son droit, et dont la valeur soit par conséquent équivalente à celle de ce dernier.
C'est toujours une chose très-délicate que de déterminer un capital qui soit le juste équivalent d'un revenu annuel, attendu que le rapport entre ces deux espèces de valeurs est très-variable, et, par cette raison déjà, le choix du cantonnement, pour l'extinction des droits d'usage, peut être critiqué puisqu'il expose à des difficultés d'appréciation et par suite à des contestations.
Un autre reproche à faire à ce mode d'extinction, c'est qu'il est de nature à compromettre la bonne gestion et quelquefois même la conservation du sol forestier. Il est de nature à en compromettre la bonne gestion, parce qu'il a pour effet d'augmenter la portion de ce sol, qui se trouve entre les mains des communes. Quel que soit le bon vouloir des communes , quel que soit l'esprit de prévoyance dont on les suppose
douées, elles sont soumises à trop d'exigences pressantes, elles ont des besoins trop impérieux pour que l'on puisse espérer qu'elles consacreront jamais à l'exploitation de leurs forêts les soins, les capitaux, le temps nécessaires pour la rendre aussi fructueuse que possible. Les faits existent, d'ailleurs, très-nombreux et très-significatifs, qui démontrent qu'on ne saurait attendre des communes, pour l'administration, la conservation et l'amélioration de leurs forêts, la sollicitude éclairée et efficace qui préside à la gestion des forêts domaniales. La grande différence qui existe entre l'état des forêts domaniales et l'état des forêts communales, au préjudice de ces dernières, la peine qu'ont les agents forestiers à obtenir des Conseils municipaux l'argent indispensable pour les améliorations les plus urgentes, l'impopularité qu'ils se sont créée en essayant de s'opposer aux jouissances abusives, sont là pour attester combien il serait fâcheux, au point de vue de l'intérêt du sol forestier d'augmenter l'étendue des forêts que les communes possèdent déjà.
Nous avons dit que la conservation des forêts abandonnées aux communes usagères, pour leur tenir lieu de leurs droits, pourra elle-même être menacée, et c'est ce qui arrivera infailliblement, lorsqu'un cantonnement se composera d'une portion de bois trop petite pour être susceptible d'un revenu annuel qui soit en rapport avec les frais d'exploitation, de garde et d'impôt qu'elle aura à supporter. Dans ce cas, qui se reproduira très-souvent, il est évident qu'ayant à choisir entre le capital que lui procurerait la vente de son cantonnement et le faible produit net qu'elle pourrait en retirer de temps à autre, la commune préférera le capital, et s'efforcera d'obtenir l'autorisation de vendre, autorisation qu'on ne saurait, en vérité, lui refuser.
Tous ces inconvénients ont frappé beaucoup d'esprits éclairés, et on s'est demandé s'il ne conviendrait pas, dans l'intérêt de l'État comme dans celui des communes usagères, et surtout dans l'intérêt du sol forestier, de remplacer le cantonnement par un rachat en rentes. On pourrait, par exemple, effectuer l'extinction d'un droit d'usage en constituant à l'usager, sur l'État, une rente perpétuelle égale à la valeur pécuniaire de l'émolument annuel dudit droit.
Dans ce système, point de difficultés sérieuses, peu de contestations à craindre. Il s'agit simplement d'apprécier la valeur vénale d'un objet tangible, certain, la valeur nette du bois délivré chaque année à l'usager.
Cette valeur connue, l'inscription d'une rente égale sur le grand livre offre à l'usager l'équivalent qui lui est dû, et la dette publique n'est grossie qu'en apparence; car les bois qu'on délivrait aux usagers devant être vendus désormais au profit de l'État, celui-ci trouve dans le produit de cette vente l'argent nécessaire pour satisfaire ses nouveaux rentiers.
Ainsi, le cantonnement est un mode d'extinction qui est susceptible de rencontrer de grandes difficultés dans l'application, et de compromettre la gestion et même la conservation du sol forestier. Le rachat en rentes est, au contraire, un mode d'une exécution simple, prompte et sûre, et il est favorable à la conservation du sol forestier.
Il y a cependant de graves motifs pour que ce dernier mode ne soit pas toujours préféré au premier, et ces motifs, les voici : Ce n'est point seulement pour faciliter à l'État l'extinction des servitudes qui grèvent ses forêts qu'on a imaginé le cantonnement ; ce mode d'affranchissement a été suggéré par des considérations d'un ordre plus élevé. On a voulu, tout en dégrevant le sol forestier, ne porter aucune atteinte à la solidité du patrimoine des communes ; on a voulu, en outre, intervertir leurs titres, sans rien changer à la nature de leurs revenus, et en cela on a poursuivi un but louable. Il est certain que si l'extinction de tous les droits d'usage avait lieu au moyen d'une constitution de rentes, ces rentes ne seraient pas employées à l'acquisition du bois nécessaire aux habitants, et que ce changement apporté à leur jouissance aurait, dans beaucoup de circonstances, de très-fâcheux effets. Ce n'est pas tout, les communes ont des besoins incessants qui dépassent en général le niveau de leurs ressources, qui les sollicitent à dissiper les capitaux dont elles disposent, et l'on a pensé, avec beaucoup de raison, que l'équivalent de leurs droits d'usage serait moins facile à dépenser, s'il était représenté par un immeuble que s'il l'était par des rentes. La propriété immobilière, la propriété forestière surtout, puise dans son essence même, dans les entraves qui gênent les transactions dont elle est l'objet, dans le respect qu'elle inspire, des garanties de conservation que n'offrent pas l'argent ou les rentes. On voit bien dés fils de famille risquer au jeu, sans vergogne, les billets de banque que leur ont laissés leurs pères, On en voit moins qui se décident à mettre aux enchères le château de leurs ancêtres, le sol qui les a nourris. Une commune obtient assez aisément l'autorisation de contracter un emprunt, sauf à l'amortir au moyen d'une imposition extraordinaire; elle n'osera pas demander à aliéner une forêt importante, ou, si elle l'ose, il est probable que sa demande ne sera pas accueillie favorablement.
On voit donc que des motifs très-respectables peuvent être invoqués en faveur du cantonnement, et, pour conclure, nous dirons qu'à nos yeux le rachat en rentes devrait être adopté, toutes les fois que le cantonnement à offrir aux usagers serait trop peu étendu pour être susceptible d'un revenu annuel qui ne fût pas hors de toute proportion avec les frais généraux et irréductibles de garde et d'exploitation.
Si cette conclusin était admise le travail des commissions de can-
tonnement serait singulièrement amoindri ; néanmoins, il leur resterait encore assez à faire pour qu'on ne dût pas négliger de les munir de tous les moyens d'action désirables. Nous nous proposons de les indiquer; mais avant, nous ne résistons pas au désir de soumettre à nos lecteurs quelques nouvelles idées sur l'opportunité qu'il y aurait, selon nous, à confier aux mêmes commissions l'aménagement et le cantonnement. Après y avoir mûrement réfléchi, cette opportunité nous est apparue avec un caractère d'évidence qui ne nous paraît pas laisser place au doute.
L'extinction des droits d'usage qui grèvent une forêt est une opération qui, comme la délimitation et beaucoup d'autres qu'il est inutile d'énumérer, rentre dans la catégorie des travaux que l'aménagement comporte plus ou moins impérieusement. Nous disons plus ou moins impérieusement, parce qu'il y a des situations où le maintien d'un droit d'usage serait parfaitement conciliable avec la réalisation des avantages que l'on a en vue lorsqu'on aménage une forêt. C'est précisément aux agents chargés de l'a.
ménagement qu'il appartiendrait, ce nous semble, d'apprécier ces situations, d'examiner si l'extinction d'un droit d'usage est indispensable ou utile, de la proposer dans l'affirmative, et d'en préparer les bases, le cas échéant.
La rapidité et la sûreté des travaux, tant du cantonnement que de l'aménagement proprement dit, gagneraient beaucoup à la réunion des deux services que l'on veut séparer. En effet, pour cantonner des usagers, il sera nécessaire de procéder souvent à l'étude complète de la forêt grevée, et toujours à la détermination de la possibilité de la portion de bois qu'il serait juste d'abandonner en toute propriété aux usagers pour leur tenir lieu de leurs droits. Le cantonnement exigera donc des recherches et fournira des données qui, pour l'aménagement proprement dit, constitueront des renseignements précieux, et qui, dans tous les cas, impliqueront chez les agents qui les auront recueillis une connaissance approfondie de la forêt.
Eh bien, il ne saurait être douteux que ces recherches, ces données, cette expérience acquise, devraient être utilisées pour l'aménagement, et qu'elles ne le seront pas, si l'on sépare les commissions de cantonnement des commissions d'aménagement, si, lorsque des agents auront effectué le cantonnement, on en appelle d'autres pour faire l'aménagement. Ceux-ci auront à recommencer, en grande partie, les travaux de ceux-là, et ils y consacreront beaucoup de temps qui aurait pu être épargné.
Nous croyons fermement que ces réflexions mériteraient d'être prises en considération. Nos lecteurs en jugeront.
Parlons maintenant des moyens d'action dont il conviendrait que les commissions de cantonnement fussent pourvues.
Comme les commissions d'aménagement, elles auront besoin, avant tout, d'une instruction. Essayons d'en démontrer la nécessité : Instruction sur les cantonnements. — Un travail de cantonnement consiste essentiellement : 1° A déterminer la valeur nette de l'émolument annuel usager. Par valeur nette, on entend la somme que l'on obtient lorsque du prix du bois à délivrer on retranche les frais d'exploitation, de façonnage, et tous autres incombant à l'usager ; 2° A fixer le capital monétaire représentatif de cette valeur : 3° A chercher une portion de forêt dont la valeur vénale, fonds et superficie, soit équivalente à ce capital.
Ces trois opérations reposent sur des principes spéciaux plus ou moins contestés et plus ou moins contestables.
Ces principes, c'est pour l'administration un devoir de les fixer, et nous sommes persuadé qu'elle y songe. Elle ne saurait abandonner aux caprices de ses agents le soin de régler une matière aussi délicate.
Comment déterminera-t-on l'émolument annuel usager lorsqu'il s'agira, par exemple, d'un droit aux bois de construction, donnant lieu à des délivrances irrégulières, imprévues? Quelles déductions devra-t-on faire subira la valeur brute de cet émolument, ou, en d'autres termes, quels sont les frais qu'on devra porter au compte des usagers? La solution à donner à ces questions est trop incertaine dans l'esprit des agents forestiers, pour que l'administration ne la fasse pas connaître d'une manière précise. "Une rente foncière se rachète au moyen de la somme qu'on obtient en la capitalisant au denier vingt. De là, on a conclu, et la Cour de Nancy a adopté ce principe, que, pour trouver le capital représentatif d'un droit d'usage, il fallait en multiplier la valeur nette annuelle par 20. Les communes usagères combattent ce principe, et elles se fondent sur des raisons qui sont au moins spécieuses ; elles disent : le capital représentatif d'un revenu annuel est d'autant plus élevé relativement à ce revenu, que celui-ci est plus assuré. Une rente perpétuelle de 5 fr., provenant d'un placement chez un banquier ou d'un prêt, ne vaut que 100 fr., tandis qu'elle en vaut 150, si elle provient d'un champ, d'une maison, d'un immeuble quelconque, parce que, dans le premier cas, elle est exposée à plus de risques que dans le second. Nos droits d'usage présentent toutes les garanties désirables de solidité, puisqu'ils sont hypothéqués sur des immeubles appartenant à l'État. Si vous voulez les échanger contre des capitaux, offrez-nous des capitaux assez élevés pour qu'il nous soit possible de nous procurer, dans d'aussi bonnes conditions de solidité, les revenus
dont nous jouissons en qualité d'usagers. Il est incontestable que cet argument n'est pas dépourvu de fondement.
Enfin, la valeur vénale d'un immeuble est subordonnée exclusivement au revenu qu'on en peut retirer ; mais pour les bois, ce revenu varie suivant le mode d'exploitation et la durée de la révolution, et, par suite de la tutelle que l'État exerce sur les communes, celles-ci ne sont pas libres d'adopter, pour l'exploitation de leurs bois, le mode et la révolution qu'elles préféreraient. Devra-t-on se préoccuper des règlements qui leur sont imposés sous ce rapport, et s'y conformer dans l'estimation des portions de bois qui leur seront attribuées à titre de cantonnement ? L'équité le voudrait peut-être; mais ce n'est pas l'avis des jurisconsultes. La question mérite, dans tous les cas, d'être étudiée et résolue.
Il résulte, ce nous semble, de ce qui précède, qu'une instruction spéciale n'est pas moins nécessaire pour les commissions de cantonnement que pour celles d'aménagement. Nous allons voir que la composition des premières de ces commissions réclame autant de sollicitude que celle des secondes.
Composition des Commissions. — Un décret en date du 12 avril 1854 a décidé qu'en matière de cantonnement, il sera procédé par deux agents forestiers aux études nécessaires pour déterminer l'offre à faire aux usagers.
D'après les dispositions de l'ordonnance réglementaire du 1er août 1827, le projet de cantonnement était préparé par trois experts, dont un désigné par le conservateur, un autre choisi par le directeur des domaines et le troisième par le préfet.
Ces dernières dispositions étaient défectueuses et donnaient lieu, comme nous l'avons démontré dans la chronique du numéro du 25 août 1855, à de graves inconvénients. La loi ayant réservé à l'État la faculté de racheter les droits d'usage au moyen du cantonnement, c'est à lui que revient naturellement le soin de préparer l'offre à faire aux usagers; c'est lui qui doit supporter les frais de l'opération, et il n'était pas rationnel de lui imposer pour cela une expertise coûteuse et qui avait surtout le défaut d'être indépendante de son action. On a donc fort bien fait de supprimer cette expertise; mais ce que nous ne nous expliquons pas, c'est qu'on ait cru devoir fixer le nombre des agents qui auraient à préparer le cantonnement. Pourquoi deux plutôt que trois, plutôt qu'un ? L'essentiel n'est-il pas que le cantonnement préparatoire se fasse sous la surveillance del'administration par des fonctionnaires qu'elle a le droit de désigner, de diriger et de contrôler? Il y a des cantonnements peu importants qui pourraient être préparés par un seul agent. Il en est d'autres qui exigeraient le concours de plusieurs agents. Si l'on croyait devoir appliquer à la lettre le décret du 12 avril 1854 et si, comme on le présume, les commissions d'amé-
nagement étaient composées de trois agents, on verrait cela d'étrange, que les opérations souvent les plus difficiles, les plus délicates, les plus compliquées, seraient précisément celles que l'on aurait confiées aux commissions le moins fortement constituées. Ce serait une anomalie, et nous espérons qu'on trouvera le moyen de l'éviter. Ce que nous avons dit, d'ailleurs, dans notre premier article, sur la composition des commissions d'aménagement, s'applique également aux commissions de cantonnement, et nous n'insisterons pas davantage sur ce sujet.
Nous pouvons également nous dispenser de toute nouvelle considération, pour faire comprendre la nécessité des ressources à mettre à la disposition des commissions de cantonnement, et l'utilité d'un contrôle effectif; les exigences du cantonnement ne diffèrent pas sur ces divers points de celles de l'aménagement.
Mais pour assurer le succès des travaux de cantonnement, les moyens que nous avons indiqués ne sauraient suffire. Et nous croyons qu'il ne faudrait rien moins que toute l'influence dont le gouvernement dispose par ses diverses administrations. Expliquons-nous : Ce qui a contrarié, jusqu'à présent, les tentatives faites à différentes époques pour affranchir les forêts domaniales des servitudes qui les grèvent, ce n'est pas seulement l'imperfection des règlements sur la matière, c'est la répugnance naturelle des communes usagères pour le cantonnement. En admettant, ce quin'étaitpas, qu'on leur offrît, en échange de leurs droits, une portion de forêt susceptible d'un revenu net égal à l'émolument usager, le cantonnement n'en avait pas moins pour effet de mettre un terme à l'augmentation du nombre des feux. Cette répugnance pourra, devra même s'affaiblir, par suite de la générosité avec laquelle on réglera les bases des cantonnements projetés. Nous n'en doutons nullement; mais elle ne disparaîtra pas entièrement, et l'on peuts'attendre à ce qu'elle sera exploitée par les esprits chagrins, par cette nombreuse classe de gens qui ne sont jamais contents de rien, qui éprouvent le besoin de faire de l'opposition en tout et pour tout ; qu'elle sera exploitée, disons-nous, et qu'elle suscitera bien des embarras à l'administration. Eh bien ! il faut prévoir cette opposition et se mettre à même de la combattre avec succès. Le gouvernement le peut facilement : par ses préfets, il exerce une influence considérable sur les conseils municipaux ; par ses procureurs généraux, il exerce une influence égale sur la jurisprudence des tribunaux et des Cours. Nous pensons donc qu'il conviendrait, qu'il serait même indispensable, pour mener à bonne fin l'entreprise dont il s'agit, que le ministre de l'intérieur et le ministre de la justice fussent invités à transmettre l'instruction sur les cantonnements, l'un à tous les préfets, l'autre à tous les procureurs généraux, en leur prescrivant d'user de toute leur action pour qu'elle atteigne son but.
Que l'instruction soit aussi libérale que possible, qu'elle fasse une large part aux usagers ; Qu'on en confie l'exécution à des agents éclairés et conciliants; Que les préfets et les procureurs généraux y donnent énergiquement leur appui, Et tout ira bien ; Et nous aurons vu, grâce à une administration intelligente, s'effectuer dans l'espace de quelques années de grandes choses : Le recrutement du corps forestier replacé sur les bases du mérite et de la justice, favorisé, en outre, par des bourses accordées aux fils d'agents; Le crédit destiné aux repeuplements, plus que quintuplé ; L'exploitation des forêts, ramenée aux principes recommandés par la science et le sentiment des intérêts généraux du pays.
Voilà des faits acquis déjà, que l'on doit à l'initiative de M. le directeur général actuel. Ils sont d'un bon augure pour le résultat des mesures qui se préparent.
REVUE COMMERCIALE.
La campagne se termine ; il y a eu grande activité, transactions importantes sur les bois de toute espèce. Nous pouvons en établir le bilan par la récapitulation du mouvement de chaque trimestre; nous pouvons constater les ressources disponibles pour le commencement de la campagne prochaine.
Les cours sont restés élevés pour la presque totalité des articles. Quelques-uns, chers déjà, ont encore subi une augmentation considérable. Les bois à brûler sont dans ce dernier cas, sous quelque forme qu'ils se présentent à la consommation.
Les bois de flot, cotés à Clamecy 90 fr., à pareille époque de 1855, se vendraient aujourd'hui 110 à 120 fr., s'il y en avait à vendre, mais il n'en reste pas sur les ports ; il n'en est pas arrivé pendant le dernier trimestre, et le commerce en a enlevé près de 14,000 décastères ; aussi le restant figure-t-il pour le chiffre insignifiant de 887 décastères, répartis sur l'Yonne et le canal de Lourcq.
Les bois neufs se présentent plus nombreux ; il en est arrivé près de 22,000 décastères dans les trois mois. Les enlèvements n'en ont pris que 17,000, et les ports restent encore garnis de 19,000 décastères.
Cet état ne motive pas les prix si élevés qu'on demande au commerce et aux consommateurs, prix oubliés depuis plus de dix ans, et qu'on désespérait de voir revenir. On assure que des offres de 140 fr. ont été dédaignées sur le port de Clamecy, et que la demande a été maintenue à 150 fr. le décastère. L'augmentation, à Paris, est de 6 francs environ, la voie de deux stères, tenue à 44 fr. pour les belles qualités qu'on livrait à 38 fr., à pareille époque de 1855.
Les flottages ont été empêchés dans le cours de l'année, tantôt par les débordements, tantôt par les eaux basses. L'approvisionnement de Paris n'est pas en ce moment aussi complet que d'ordinaire à pareille époque ; mais il reste sur les ports un assez beau contingent disponible pour ne pas laisser d'inquiétude.
Même situation, mêmes prix élevés pour les bois blancs ; retard dans les flottages, mais arrivages bien soutenus sur les ports, et en fin de compte restant disponible plus important qu'à aucune autre époque des années 1855 et 1856.
Le cours entre les prix des bois blancs comparés aux prix des bois durs indique un grand changement dans la situation respective des deux essences; on les vendait presque aux mêmes conditions, il y a trois ans, 80 fr.
à peu près. Il y a eu augmentation sur les deux, mais non pas augmentation égale ou même proportionnelle. Personne ne penserait à demander plus de 100 fr. d'un décastère de bois blanc, taudis qu'on ne craint pas de porter à 150 fr. le prix du bois dur.
Le cours élevé de la houille, 56 à 60 fr. les mille kilos, ne contribue pas peu à maintenir les cours des bois à Paris, et à faire élever ces cours sur les ports. La consommation se partage toujours entre ces deux combustibles. L'élévation de prix se fait sentir sur l'un comme sur l'autre.
Nous n'avions pas vu depuis longtemps les cotrets figurer pour des chiffres aussi importants dans le mouvement trimestriel des ports. La rivière d'Oise seule en a reçu près d'un million et demi pendant les trois derniers mois, et, au 1er octobre, il en restait encore 1,790,000 sur tous les ports, quoique dans le trimestre ces ports en eussent expédié 1,323,000. En somme, il est arrivé sur les ports d'approvisionnement de Paris, pendant les trois premiers trimestres :
18,804 décastères de bois de flot ; 34,361 décastères de bois neuf dur ; 13,717 décastères de bois blanc.
Ensemble.. 66,882 décastères; Plus 4,453,943 cotrets.
Pendant ces trois trimestres ces mêmes ports ont envoyé à la consommation :
19,626 décastères de bois de flot; 32,114 décastères de bois neuf dur ; 10,614 décastères de bois blanc.
Ensemble.. 62,354 décastères; Plus. 3,900,536 cotrets.
Il est donc venu plus de matière qu'il n'en fallait au commerce, puisque les enlèvements restent au-dessous des arrivages. Ce n'est donc pas l'insuffisance de la marchandise qui en a fait élever le prix.
Les charbons de bois ont été fort chers aussi pendant toute l'année, nous en avons dit les motifs. La consommation des usines avait empiété sur le terrain d'approvisionnement de Paris, et fait augmenter le prix de cet article en le rendant plus rare. La réaction se fait déjà sentir, il y a moins de demandes, moins de vides à combler; les usines payent moins cher, on peut prévoir le moment où il y aura sur les charbons certaine réduction de prix à la vente en détail. Cette réduction est déjà demandée par le commerce d'achat en gros, sur le pied de 50 centimes environ par voie de deux hectolitres.
Nous trouvons les bois à ouvrer toujours se maintenant à de bons prix, toujours demandés, quoique se présentant en quantités suffisantes.
Toutes les charpentes restant sur les ports ont été achetées par le commerce de Paris dans le courant d'octobre, le flottage en a été commencé immédiatement. Les arrivages sont nombreux à Paris. Chaque maison veut emmagasiner une certaine provision pour les besoins éventuels de l'hiver, et pour les besoins toujours assurés du printemps; et, malgré ce désir de mettre en réserve, les travaux en cours d'exécution, continués grâce au temps favorable encore, enlèvent une grande partie de ces bois avant même qu'ils ne soient entrés sur les chantiers.
Aussi les cours restent-ils élevés, au moins relativement. Les différences sont grandes d'ailleurs suivant la forme, les dimensions et la qualité des charpentes. Ainsi, les mêmes acheteurs payent 40 à 42 fr. 50 c. sur l'Yonne, 50 à 55 fr. en basse Seine, 60 fr. au port de Brienne, 55 à 60 fr.
à Troyes, 60 à 65 fr. sur la Marne, et enfin, les gros bois de la HauteMarne obtiennent jusqu'à 70 fr. sur les ports quoique coûtant 10 à 14 fr.
de flottage.
Malgré ces différences si grandes dans les prix d'achat, les charpentes les plus avantageuses pour le consommateur sont celles qui se payent le plus cher, à cause de leur forme et du mérite de la fabrication, aussi ces dernières sont-elles recherchées en forêt. Elles ont d'ailleurs un avantage
immense, c'est que les frais généraux de main-d'œuvre, transport, flottage, tirage et octroi ne sont pas plus élevés pour un stère de bois vendu à Paris 90 fr., que pour le stère dont on n'obtient que 60 fr. La différence tout entière porte donc sur le prix du bois en forêt, et si l'on considère que les frais généraux coûtent en moyenne 40 fr. pour un stère de bois employé dans Paris, il en résulte que le bois de qualité inférieure ne rapporte que 20 fr. au sol qui l'a nourri, tandis que la première qualité rapporte 50 fr.
Etant donnés deux arbres bien venants et bien conformés : l'un, abattu à l'âge de cinquante ans, sera de la dernière catégorie, et ne rapportera que 20 fr. ; tandis que l'autre, abattu à l'âge de cent cinquante ou deux cents ans, sera de la première catégorie, et rapportera 50 fr. Cette différence doit être prise en grande considération quand on veut aménager une forêt.
Les charpentes amenées sur les ports pendant les trois premiers trimestres de 1856 sont au nombre de 732,477 décistères.
Les enlèvements pendant la même période sont seulement de 710,697 décistères; aussi le disponible se trouvait-il, au 1er octobre, plus important qu'on ne l'avait vu à aucune époque de l'année. Ce disponible est, nous le répétons, tout entier dans les mains du commerce de Paris, à destination des premiers travaux du printemps. Les charpentes de sapin ne figurent pas au tableau de situation des ports.
L'institution des ports organisés ne s'étend pas jusqu'aux points éloignés où croissent les sapins. Nous ne savons donc pas aussi régulièrement quelles sont les ressources en ce genre, mais nous pouvons dire que les exploitations ont été vigoureuses pendant la campagne, que les canaux ont été parfois couverts des trains qui amenaient les sapins à la vente, et qu'enfin, sur toutes les voies flottables, il y a des dépôts considérables qui attendent des acheteurs ou une expédition retardée par manque de bras ou d'eau.
Les cours, après avoir souvent varié, paraissent fixés au moins jusqu'au printemps. La grande Société des Alpes a baissé les prix des sapins de faibles dimensions, pour lesquels elle avait à craindre quelque concurrence. Les sapins sont descendus graduellement jusqu'à 40 fr. le stère. Mais seul détenteur sérieux des pièces de fortes dimensions, cette même Société en maintient les prix au taux élevé de 70 fr. dans l'eau. Il est vrai que pour valoir ce prix les sapins doivent avoir lm ,66 de circonférence au milieu.
Ces brusques mouvements en hausse ou en baisse, qui restent à la disposition d'une Compagnie puissante, ont eu des effets déplorables pour le commerce. Les cours élevés au moment des adjudications ont fait payer
les coupes à des prix plus élevés qu'on ne les avait vus depuis plusieurs années. La baisse faite immédiatement après, et maintenue, fait solder toutes les opérations en pertes considérables, jusqu'à ce qu'une réaction vienne dans un autre temps déjouer les prévisions qu'on croyait fondées.
Les sciages maintiennent leurs cours dans toutes les essences. Le marché, bien approvisionné, reste actif sans grandes variations. On vend à Paris l'entrevous 130 à 140 fr.; l'échantillon 170 à 180 fr. Le consommateur prend tout ce qu'on lui offre ; la fabrication suffit aux demandes. Les charpentes, relativement plus chères que les sciages, prennent les plus belles pièces. On débite des bois de dimensions ordinaires dont le prix est moins élevé. C'est principalement à cette condition que les sciages de chênes doivent de rester exempts des secousses auxquelles ils étaient sujets en d'autres temps.
L'approvisionnement reste un peu au-dessous de ce qu'il était soit l'année dernière à pareille époque, soit à la fin de chaque trimestre de cette année ; mais les exploitations partout en train peuvent combler le vide relatif. Si la situation se maintenait au printemps ce qu'elle est aujourd'hui, il y aurait probablement un peu de hausse bien motivée par un défaut d'équilibre qu'on peut prévoir.
Les sciages de hêtres se trouvent dans le même cas, et il est peu probable que de ce côté l'équilibre se rétablisse. Les forges, soit pour compléter leur approvisionnement, soit pour obtenir plus de qualité, ont fait casser en charbonnette une grande partie des hêtres qu'on débitait autrefois en sciages. De là rareté de ce dernier article et maintien probable des prix, si ce n'est élévation même sensible.
Nous remarquons un état tout contraire à propos des sciages de bois blanc. Le stoc en était de 37,000 décistères seulement au mois d'octobre 1855, et depuis il a successivement augmenté dans la proportion considérable de 72,000 décistères au mois de mars, 104,000 au mois de juin, et enfin, près de 119,000 décistères au mois d'octobre. On peut en conclure que nous approchons d'un moment de baisse sur cette matière.
Les merrains ont repris quelque faveur, malgré la récolte encore si précaire de l'année ; les tonneaux s'usent d'autant plus qu'on s'en sert moins. On néglige en effet de les entretenir quand on n'en a pas besoin.
Les cercles manquent, les douves se perdent, et il faut en venir aux cerceaux neufs pour loger même une récolte médiocre. C'est à cela sans doute qu'on a dû cette année de voir rechercher les merrains délaissés depuis longtemps.
Les lattes suivent la condition des charpentes et pour l'écoulement et pour les prix. On en a beaucoup fabriqué, et cependant tout s'écoule. La
vente se fait en forêt pour les besoins locaux, aux prix de 1 fr. 25 c. à
1 fr. 50 c. la botte, suivant qualité. A ce taux, le bois produit net 60 à 70 fr. le stère en forêt ; mais il faut pour cela du bois de choix sans nœuds. Une partie seulement de l'arbre peut être employée à ce service ; le reste en est un peu déprécié. Mais, somme toute, il y a avantage à cette fabrication, pourvu qu'elle emploie à peu près la moitié du cube de l'arbre débité. DELBET.
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES, DES FERS ET DES FONTES.
OCTOBRE 1856.
DÉSIGNATION DROIT QUANTITÉS ENTRÉES DIFFÉRENCE NATURE D'OCTROI EN OCTOBHE" sur le mois correspond.
des - /D'UNITÉS. décime ■' *~'* Augmentation Diminution JlATIÈRES. compris. 1856. 1855. 1S56. 1856.
Rois à brûler, dur. stère. 3 00,0 (1) 54,235 35.907 18,328 » — blanc. — 2 22,0 (2) 20,066 13,551 6,515 » Cotrets de bois dur. - 1 80,0 2,841 6,370 » 3,529 Menuise et fagots. - 1 08,0 6,542 4,292 2,250 » Charbon de bois. hectolitre. 0 60,0 343,030 316,844 26,186 » Poussierde ch. debois — 0 30,0 12,843 15,903 » 3,060 Charbon de terre. 100 kilogr. o 72,0 38,882,995 34,650,162 4,232,833 » Charpente et sciage de bois dur. stère. Il 28,0 11,285 8,239 3,046 » Id. de bois blanc. — 9 00,0 17,215 13,921 3,294 « Lattes et treillages. les 100 bottes, il 28,0 21,156 16,354 4,802 » Bois dedéch. en chêne mètre carré. 0 21,6 355 809 » 454 — en sapin. — 0 12,0 4,919 4,984 » 65 Fers employés dans les constructions. 100 kilog. 3 60,0 1,056,651 582,848 473,803 » Fonte employée dans les constructions.. — 2 40,0 751,179 303,135 448,044 »
(t) Ces 54,235 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 21,694,000 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 10,847,000 kil. de houille.
(2) Ces 20,066 stères de bois, multipliés par 300 kil., poids du stère de aois Dlanc, represenieni 6,019,800 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 3,009,900 kil. de houille.
Approvisionnement de PIll'is.-ltlouvemeut des ports pendant le troisième trimestre 1856.
BOIS A BRULER. 1 BOIS A OUVRER. COIS DIVERS. --------------- a, --- bois «tUFS. 2 en Char-hler Cer-Ecorce INSPECTIONS. Bois 2 t- S g- sa en Char- de de deLattu. Echalos. Ecorces Cotrets. q S. | S" g| de de do de Lattes. Echalas.
-- pente, chêne. hètre. bois bl. sapin. - - a tan.
Decasl. Décast. Décast. Unités. Unités. Hectoi. j Décist. Décist. Décist. Decist. Décist. Décist. Milliers. Miniers. Bottes. Botieg. Boues.
ARRIVAGES TENDANT LE 3e TRIMESTRE.
Compiègne. 6 1,854 210! 1,431.600 357,800 25,900 20,601 57,079 6;810 871 19,417 » « » 15,763 »' » Port-aux-Perches. 192 1,3;0 406 169,554 145,677 2,362 4,733 3,352 589 5,404 28 311 » 1 » 3,788 3.48 » Château-Thierry » 975 2,475 26,0t8 14,680 106,456 6247 125,674 17,614 9 27,658 47,563 » » 730 » » Fontainebleau. » 2,906 684 274,785 318,628 » 4,411 19,638 5,451 » 2,212 509 » » 11,509 » 20,472 Troyes. » 286 548 42,400 25,175 36,253 » 75,770 2,012 » 56,624 » » » 617 » 1, Joigny. » 1,195 986 60,457 37,766 130,938 412 17,142 83 » 61,682. 420 » » 21,855 2,933 16,272 Clamlcy. » 10,515 908' » 4,193 118,323 624 23,301 2,579 » « » 11 » 1.469 23,519 16,306 Rogny. » 2,874 408 255,939 457,674 207,662 244 9,333 1,141 » i ,346 500 » » 16,655 3,619 122,675 ,) » » » » » » » » » » » » » » ) » 198 21,925 6,625 J 2,260,833 93 627,894 1 37,272 361,289 36,288 5,284 197,250 48,992 12 - » 242,4ï6 59,995 175,725 ENLÈVEMENTS PENDANT LE 3e TRIMESTRE.
COmpiègne. » 1,135 61 800,900 156,300 26,900 24,004 69,972 7,201 474 15,030 » » » 17,756 » » Port-aux-perches. 67 571 189 76,759 160,254 2,362 3,358 4,659 1,374 38,656 28,87 1 » 1 » 2,718 48 » Château-Thx-rry. » 718 989 14,596 14,130 81,510 7,246 106,052; 36,755 )' 28,864 30,0 3 » » 730 » » Fontainebleau » 2,200 247 151,450 26a,491 » 2,772 23,172 3,469 » 3,409 515 » » 16,007 » 20,472 Troyes. » 127 216 38,600 14,887 36,350 » 45,044 2,0j6 » 44,266 a » » 617 » » Joigny. 236 926 751 54,541 35,800 121,988 369 27,120 327 » 52,690 » 17 » 24,023 8&3 22,177 Clamecy. 1218,26. 10,471 1,064 » 4,194 198,654 382 22,7U 2.912 » » » 19 » 1,983 23,917 16,306 Rogoy. « 1,145 232 186,043 401,228 200,461 219 5,335 1,253 » 1,070 550 » » 12,004 165 188,687 )> » » » » » » » » » » » » * » » 13,729 17,294 3,7 4 9 1,322,8 8 9 1,036,293 670 225 38,150 304,065 55,547 39,130 174,203 31,118 37 » 75,838 1 25,013 247,642 MARCHAINDISES RESTANT SUR LES PORTS AU le' OCTOBRE 1856.
Compiègne. 29 1,730 157 1,152,900'203,800 » 1.987 26,981 2,924 6,029 1 1,463 » » » 4,250 50 » Port-aux-Perches.,.. 268 1,766 437 197 785 29,512 » 2,424 6,233 1,374 32,090 37,272 » 5 » 22,233 2,432 » Château-Thierry » 1,252 3,754 26,909 3,450 27,424 8670 79,968 16,281 185 23,469 29.468 » » » » » Fontainebleau. » 2,510 707 194,161 72,465 » 1,787 6,092 4,652 325 997 3,556 » » 1,M3 82 » Troyes » 455 695 6,608j 10,288 502 » 61,1 15 3,339 » 34,701 » 4 » 94 » » JOIgny. » 1,141 605 29,088 13,596 12,626 16 44,430 141 » 8,992 420 y. » 5,959 15,510 » Clamecy. 590 6,649 564 » » 13,671 540 16,805 383 » » 11 » 585 6,736 » Rogny. » 3,524 421 1 83,991 3il, 80723,5131 1,010 23,284 123 » 1,944 » « » 6.418 4.143 581 « 11 » » » » » » » » » » » » » » » 88 7 19,017 7,340 1,790,4451674,918] 77,736 15,584 264,908 29,217 38,629 118,838 34,444 23 » 41,342 28,953 581 SITUATION DES MÊMES TORTS AU 1er OCTOBRE 1855.
1,6501 11,1041 4,010\1,619,8971280,655\439,61'2\ 12,665\219,361 [ 46,392[ 56,9351 37,2411 8,7281 46l * 1 36,9681 68,7141 » IL RESTAIT SUR LES TORTS d'aPPUOMSIONHEMEKT DE fAMS AU â* TRIMESTRE 1856 (IE* JUILLET).
va,%v9\ \1<,\>\'1\ 4,Õ,\\)\ \Io"Õ>,H}\)\'19',a\\>\ ?\,\?\>\ n,6~A\v9S,43&\ ?'\>',a-\a\ 4t,4i;,\\o4,T*ft\ '11,a" 44&\ « V '2'1,'>'\ 61,198' 85,946
NOTE SUR L'ORIGINE DES SOURCES.
Fontaine de Vaucluse. — Cette fontaine extraordinaire, dont le volume à l'étiage est évalué de 10 à 12 mètres cubes par seconde, doit correspondre nécessairement à un bassin d'une immense étendue; or, en consultant la carte géologique de MM. Dufrénoy et Elie de Beaumont, on voit que le même terrain néocomien qui circonscrit le mont Ventoux se continue au sud et à l'est de cette montagne et occupe un espace très-considérable, qui s'étend de la fontaine de Vaucluse à Sisteron, c'est-à-dire règne sur 70 kilomètres de longueur et dont la largeur varie entre 26 et 5 kilomètres. C'est là, à mon avis, le bassin de la fontaine de Vaucluse, et j'ai été conduit à l'admettre en reconnaissant qu'on ne trouve ni sources ni puits sur toute cette étendue; que, comme pour le mont Ventoux, les ravins sont constamment à sec, si ce n'est dans des cas tout à fait exceptionnels ; que les eaux de pluie, alors même qu'elles tombent sur des cônes renversés, sont immédiatement absorbées et que les quelques villages qui sont bâtis sur cette espèce de désert ne sont alimentés que par des eaux de citerne.
Ceci admis, le bassin de la fontaine se trouve naturellement circonscrit par les limites du terrain néocomien et par le ravin très-profond de laNesque, qui le sépare du mont Ventoux; j'ai mesuré très-exactement cette surface sur la carte géologique, en traçant des lignes parallèles très-rapprochées, et j'ai trouvé qu'elle est de 00,500 hectares. C'est un plateau élevé où les pluies doivent être plus abondantes que dans la plaine, et par les mêmes considérations que j'ai développées plus haut, je prendrai 0m 85 pour le chiffre de la hauteur d'eau qui y tombe annuellement. Le volume total est donc de 820,250,000 mètres cubes ; en divisant comme précédemment ce chiffre par 31,536,000, nombre de secondes dans l'année, je trouve, pour le débit moyen des souces alimentées par le bassin, 26 mètres cubes, volume qui satisfait évidemment de la manière @ la plus concluante, soit au débit de la fontaine de Vaucluse, soit aux pertes qui peuvent résulter de l'évaporation ou des écoulements dont il est impossible de tenir compte.
Cette explication, à la fois si simple et si naturelle, anéantit les hypothèses plus ou moins bizarres qu'on a faites jusqu'à ce jour sur l'origine de la fontaine de Vaucluse. Ainsi les uns, sans songer à l'immense éloi-
gnement qui les sépare, la font venir des glaciers des Alpes; les autres l'attribuent aux infiltrations de la Durance, sans remarquer qu'elle débouche à plus de 100 mètres au-dessus du niveau de la mer, que la Durance, dans le point le plus rapproché, tout en ayant sensiblement le même niveau, en est encore distante de 28 kilomètres, et que ces infiltrations devraient par suite se produire à une très-grande distance en amont, sans remarquer non plus que la déperdition d'un volume d'eau aussi important par une rivière qui n'apporte au Rhône, à l'extrême étiage, qu'environ 50 mètres cubes, serait assez sensible pour qu'on pût facilement désigner le point où elle se produit. Ces hypothèses n'expliquent pas d'ailleurs ce que deviennent les eaux pluviales qui tombent sur l'immense surface dont nous avons parlé, et qui alors ne manifesteraient nulle part leur existence.
Mais notre explication démontre en même temps que cette belle fontaine qu'on envie au département de Vaucluse, et qui, employée soit à faire mouvoir des usines, soit à des irrigations, enrichit une partie de son territoire, n'est pas un don gratuit de la nature, et qu'elle n'est obtenue qu'au détriment d'une surface d'environ 100,000 hectares, comprise soit dans ce département, soit dans celui des Basses-Alpes, qui sont condamnés à une stérilité presque complète.
En jetant les yeux sur la carte géologique de la France, on observe ce fait remarquable que la plupart des sources importantes de cette contrée sont placées au pied de montagnes calcaires de même nature.
Fontaines de Nîmes et du bourg Saint-Andéol. — Ainsi la fontaine de Nîmes est située au sud-est d'un assez vaste plateau appartenant au terrain néocomicn. Mais ici la hauteur du filtre est beaucoup moindre que dans les cas précédents, aussi remarque-t-on une différence bien plus sensible entre les hautes et les basses eaux.
La fontaine de Tourne, qui débouche au bourg Saint-Andéol et fait à sa sortie mouvoir des usines, est également dominée par une montagne aride, appartenant au même terrain ; mais la montagne est élevée et le débit de la source est beaucoup moins variable.
Observations générales et conclusions. — Ces phénomènes ne sont pas particuliers au terrain néocomien, et si l'on excepte quelques cas très-rares tels que ceux des puits artésiens, on peut dire, d'une manière générale, que toutes les sources sont dues aux infiltrations, à travers les terrains perméables, des eaux de pluie qui, se réunissant sur une couche imperméable, viennent ensuite affleurer le sol. Les couches imperméables présentent naturellement des inclinaisons et des ondulations diverses, et de là résulte la transformation des suintements en filets d'eau plus ou moins importants qui créent à leur tour des sources plus ou moins considérables, suivant l'étendue du bassin. Mais la puissance et la nature du filtre
jouent aussi un rôle très-important. Si la hauteur est faible, les sources tarissent vite ; si, au contraire, elle est très-grande, elles ne tarissent jamais et ne présentent que de faibles variations dans leur débit.
Ainsi, dans les terrains très-perméables où, par suite, le sol est extrêmement aride et où les bassins des couches imperméables sont très-étendus, ou rencontre des sources rares et abondantes telles que celles dont nous nous sommes occupés; mais elles varient assez dans leur débit, à cause de la facilité des filtrations, et elles ne deviennent à peu près constantes qu'autant que le filtre est très-épais. Dans les terrains granitiques, au contraire, où la couche supérieure est moins facilement perméable et où les bassins sont peu étendus, on rencontre une grande multitude de sources moins variables que dans le cas précédent, quoique à vrai dire leur constance soit toujours en raison de la puissance du filtre.
Dans les grands travaux de chemin de fer qu'on a entrepris depuis quelques années, il est arrivé souvent qu'en perçant des tunnels, ou en creusant des tranchées profondes, on a coupé la surface séparative des terrains perméables et imperméables. On a rencontré alors des eaux souvent trèsabondantes, très-gênantes pour les travaux et dont on ne s'est affranchi que difficilement. Dans les tunnels, on a construit après leur achèvement des aqueducs d'écoulement; et dans les tranchées, le meilleur système employé, pour empêcher la dégradation des talus, a consisté à construire immédiatement au-dessus de la couche imperméable de petits conduits maçonnés, qui ont recueilli les eaux et les ont amenées dans les talwegs que présente cette couche, où, au moyen de câris, on leur a donné une fuite vers les fossés de la tranchée. Ces faits sont, on le voit, en parfaite harmonie avec ceux que j'ai développés plus haut.
Depuis que je me suis formé cette théorie sur l'origine des sonrces, il m'a été souvent possible de déterminer approximativement la position et l'emplacement des bassins qui alimentaient les sources que j'examinais, et même de juger jusqu'à un certain point, d'après la constance des eaux, de l'épaisseur de la couche perméable. On concevra sans peine que par l'application de ces idées, un homme intelligent, possédant quelques connaissances de géologie et aussi de botanique (car les joncs et autres plantes aquatiques indiquent presque toujours la présence d'eaux souterraines), puisse, par une étude spéciale et une grande pratique, arriver, sans invoquer, ainsi que le font les hydroscopes, des sensations surnaturelles, à donner, après avoir reconnu l'existence d'une source et de son bassin, les moyens de la retrouver plus haut et, par suite, de l'utiliser d'une manière beaucoup plus avantageuse ; et dans ce cas le système des caris est sans nul doute celui qui doit donner les résultats les plus certains et les plus satisfaisants.
Telles sont les idées que j'ai acquises par une observation attentive et une longue expérience; j'en ai souvent fait part à des camarades qui ont trouvé qu'il serait bon de les faire connaître, et c'est ce qui me décide à les publier. Trop heureux si cette publication peut réaliser les espérances d'utilité que j'y entrevois.
BOUVIER, Ingénieur en chef, directeur des ponts et chaussées.
(Extrait des Annales des ponts et chaussées.)
SUR LA TRUFFE, LE CHÈNE TRUFFIER ET LA MOUCHE TRUFFIGÈNE, Par M. RAVEL, négociant en truffes noires, à Montagnac, près Rie? :
( Basses-Alpes ).
Dans une note présentée à l'Académie des sciences le 18 janvier 1847, M. B. Robert avait donné quelques détails intéressants sur le rapport intime qui existe entre certains arbres, certaines espèces de chênes surtout, et les truffes qu'on rencontre sous leur ombrage. Il avait très-nettement établi que les truffes naissent au contact des racines chevelues de ces arbres, aux extrémités des filaments capillaires imperceptibles de ces racines. Allant plus loin, M. Robert avait soulevé, sans la résoudre, cette question fondamentale : « Ne peut-on admettre que les truffes sont des sortes de noix de galle souterraines, qu'elles doivent leur origine à une circonstance analogue à celle qui fait naître les noix de galle sur les jeunes branches des chênes, a la piqûre d'un insecte? »
Dans une lettre écrite au commencement de cette année à M. Barrai, rédacteur en chef du Journal d'agriculture pratique, M. le comte de Gasparin affirme avoir vérifié l'exactitude d'une assertion émise par M. Rousseau, de Carpentras ; à savoir, que pour faire apparaître des truffes dans une localité où il n'en exista jamais, il suffit de faire des plantations de certaines espèces de chênes, appelées par lui chênes truffiers.
On sait enfin depuis longtemps qu'une espèce particulière de mouche ou tipule voltige sans cesse sur les truffières, pénètre pour y déposer ses œufs dans le sol où la truffe doit naître et se développer; que la truffe mûre, abandonnée à elle-même, se décompose, envahie qu'elle est par
les larves de la mouche, qu'elle est bientôt dévorée par les vers qui sortent des larves, que ces vers donnent plus tard naissance à une nouvelle génération de mouches, etc.
M. Ravel, de Montagnac (Basses-Alpes), commune oit la production de la truffe va prenant sans cesse des développements de plus en plus considérables, membre d'une famille qui fait depuis plus de cent ans le commerce des truffes, qui a puissamment contribué lui-même aux progrès de cette branche importante de notre industrie agricole, croit, après trente années d'observations incessantes, avoir résolu complètement le problème difficile de la génération des truffes, de leur véritable nature, de leur mode de propagation naturelle et industrielle. Il n'a eu connaissance de la note de M. Robert, de la lettre de M. de Gasparin, qu'à son arrivée à Paris, en juillet dernier; s'il se rencontre avec l'habile natura-
liste, avec le praticien exercé, avec le savant agronome, c'est donc tout à fait fortuitement et sans le savoir. Cette coïncidence, au reste, loin de le décourager, lui donne une confiance nouvelle dans le résultat de ses recherches, d'autant plus que ceux qui l'ont précédé n'ont fait qu'entrevoir chacun une portion de la vérité qu'il apporte, lui, tout entière, et qu'il appuiera de preuves aussi nombreuses qu'irrésistibles. Les conclusions auxquelles il est arrivé, et qui résultent du mémoire que nous allons analyser, peuvent être formulées comme il suit : 1° La truffe, alors même qu'on puisse ou qu'on doive la considérer comme un champignon, n'est pas un produit d'origine purement végétale ; elle naît de la piqûre faite par une mouche aux filaments très-déliés des racines chevelues de certaines espèces d'arbres, et en particulier du chêne blanc à glands sessiles ou sans pédoncules. Sous ce rapport, son origine est animale, et elle doit être assimilée aux noix de galle, dont elle serait comme une variété souterraine ; 2° Il existe des espèces de chênes qu'on peut et qu'on doit appeler à juste titre chênes truffiers ; 3° Il existe une sorte de mouche outipule qu'on doit appeler truffigène, comme il existe une sorte de mouche appelée galligène ou galle-insecte ; 4° Ce n'est pas dans la truffe déjà née, mais sur la racine d'où la truffe doit naître que la mouche truffigène dépose ses œufs, de telle sorte que les œufs préexistent dans la truffe, se transforment dans son sein en larves et en vers qui vivront plus tard de sa substance, si on l'abandonne à elle-même, et produiront une nouvelle génération de mouches; 5° Chaque espèce de truffe, la truffe noire d'hiver, la plus estimée de toutes; la truffe musquée, aussi d'hiver; enfin la truffe blanche, de printemps et d'été, a son chêne truffier ou sa mouche truffigène propres ; 6° On peut déterminer a volonté la production des truffes et de telle
espèce de truffe donnée dans des terrains appropriés, qui ont pour caractère essentiel d'être à la fois calcaires sous certaines conditions et meubles, par le semis ou plantation des chênes truffiers, et par l'importation de la mouche truffigène propres à l'espèce de truffes dont il s'agit.
DE LA TRUFFE, DE SON ORIGINE, DE SES VARIÉTÉS, DE SA VALEUR COMME ALIMENT.
M. Ravel n'a pas la prétention de nier que la truffe soit un végétal ou un véritable champignon hypogé, comme MM. Tuiasne l'ont démontré, ayant son organisation propre ; mais il affirme qu'elle ne s'engendre jamais par elle-même, par la simple diffusion de spores arrivés à l'état de maturité et féconds, qu'elle naît essentiellement, comme la noix de galle, d'un accident survenu à la végétation des racines de certains arbres, ou de la piqûre faite par une certaine mouche aux racines de ces arbres; de telle sorte que sans mouche et sans piqûre des racines l'existence de la truffe serait complètement impossible, aussi impossible que l'existence de la noix de galle. La truffe donc, comme la noix de galle, serait, si l'on peut s'exprimer ainsi, l'ouvrage d'un insecte auquel la nature a appris à préparer pour sa couvée, et l'abri qui doit la protéger, et l'aliment qui doit la nourrir. Voici, suivant M. Ravel, comment la truffe naît. Les mouches que l'on voit voltigeant sans cesse, même en hiver, sur les truffières, pénètrent dans le sol, atteignent les racines chevelues et les piquent à leurs extrémités pour y déposer leurs oeufs ; la piqûre détermine l'issue d'une goutte de liquide laiteux qui est le premier élément de la truffe, son embryon; le filament radiculaire périt presque aussitôt, et la goutte reste isolée; de blanche qu'elle était, elle devient bientôt grise, puis brune et enfin noire ; elle s'accroît en même temps aux dépens sans doute des sucs riches en azote et en carbone qu'elle rencontre dans la terre et qui sont plus abondants au voisinage des racines de l'arbre. Si au premier instant de la formation plusieurs gouttes laiteuses ou embryons de truffes se trouvent en contact, ils s'unissent et se soudent en quelque sorte pour donner naissance à une truffe composée, de forme mamelonnée et bizarre, comme on en rencontre si souvent. Nous laissons à M. Ravel la responsabilité de sa théorie, nous contentant de nous faire son écho.
Elle ne fait pas pour lui l'ombre d'un doute; il ajoute cependant : « Si les choses se passent autrement que je viens de le décrire, si au lieu de naître comme la galle, de la piqûre d'un insecte, la truffe naissait comme le champignon de spores ou sporules, le rôle de la mouche truffigène n'en serait pas moins nécessaire ; elle aurait pour mission soit d'amener les spores au contact des racines sur lesquelles ils puissent germer, semblable alors aux insectes qui transportent le pollen des fleurs sur leurs
pattes, leurs ailes ou leur abdomen, soit tout au moins d'ouvrir le sein de la terre pour que les spores puissent y pénétrer. » Dans tous les cas, M. Ravel admet comme un fait incontestable, arrivé pour lui presqu'à l'état de démonstration complète, que l'intervention de la mouche appelée par lui truffigène est un élément essentiel de la génération des truffes ; et il se fait fort de prouver, par des expériences positives, qu'un sol rendu inaccessible à la mouche truffigène ne fera jamais naître de truffes. C'est même pour cette raison que les truffes ne sont abondantes, comme nous le dirons tout à l'heure, que lorsque la terre a été rendue suffisamment meuble par des pluies tombées en temps utile, qu'elles sont excessivement rares dans les années sèches, où le sol devient en quelque sorte imperméable, qu'elles cessent d'apparaître ou de se former lorsqu'on répand à la surface de la terre ou qu'on enfouit dans son sein du fumier, qui a pour premier effet de chasser ou d'éloigner la mouche truffigène.
Il résulte de cette genèse, que nous ne prétendons pas juger, et qui est dans tous les cas très-ingénieuse, que, dès le premier instant de sa formation, la truffe contient les œufs d'une certaine espèce de mouche, que le développement de ces œufs marche parallèlement avec le développement de la truffe; que celle-ci, par conséquent, est en réalité une sorte de composé, végétal à la fois et animal, ce qui s'accorde au reste parfaitement avec son extrême richesse en azote. Les œufs éclosent lorsque la truffe, parvenue à l'état de maturité, peut servir de nourriture aux vers qui en naissent; ces vers plus tard se transforment en chrysalides qui deviendront mouches à leur tour.
Il existe un grand nombre d'espèces ou de variétés de truffes ; on les trouvera décrites soit dans le Dictionnaire des sciences naturelles de Levrault, soit dans les ouvrages spéciaux; nous nous contenterons de signaler les espèces principales, celles qu'on trouve plus communément dans le commerce.
Au premier rang se place la truffe comestible proprement dite, la truffe noire, hérissée de petites éminences arrondies, quelquefois pyramidales et à quatre faces, si recherchée par son odeur pénétrante et parfumée, par sa saveur agréable qui en fait les délices des gourmets. C'est le plus estimé des assaisonnements, et Brillat-Savarin l'appelait le diamant de la cuisine ; aussi a-t-elle été célébrée dans tous les temps et dans tous les lieux. Elle apparaît dans le sol au mois de juillet; elle est alors petite et blanche intérieurement; elle est grise en octobre, marbrée en novembre, et noire à la fin de décembre ; en janvier, février et mars, c'est le moment où elle a le plus de parfum.
La truffe dite de Bourgogne ressemble assez à la truffe comestible ; elle en diffère par une odeur d'ail assez prononcée, et les marbrures
blanches de sa chair, qui se dessinent très-nettement sur un fond noir; elle apparaît aux mêmes époques, mais le moindre froid la fait périr en la dépouillant de son enveloppe grenue. Il est enfin une troisième truffe noire et d'hiver, connue sous le nom de truffe musquée, qui, à l'intérieur et à l'extérieur, ressemble à la truffe de Bourgogne, et périt comme elle dénudée, dès que la température descend au-dessous de zéro.
Une autre espèce, très-distincte des premières, est la truffe blanche ou d'été; elle apparaît en automne, reste blanche tout l'hiver jusqu'en mai, et devient grise en juin et juillet, époque de sa maturité; on la vend coupée en tranches et séchée au soleil.
La truffe grise, dite de Piémont, a sa surface entièrement lisse ; elle est arrondie irrégulièrement, rousse ou jaunâtre à l'extérieur et à l'intérieur ; homogène, compacte, sans marbrures ; elle exhale une odeur d'ail assez pénétrante ; sa chair est fine, délicate et très-recherchée ; elle est.
en pleine maturité à la fin de l'automne ou au commencement de l'hiver; on la trouve assez souvent mêlée aux truffes noires des Basses-Alpes, de la haute Provence. Ces trois espèces de truffes naissent principalement sous les chênes ; on en trouve quelquefois sous d'autres arbres ou arbustes, le châtaignier, le charme, le cormier, le noisetier, le cade ou espèce de genévrier, etc., etc. ; mais c'est sous le chêne seulement qu'elles acquièrent tout leur parfum et toute leur saveur ; ailleurs elles sont comme abâtardies et dégénérées.
La truffe est un aliment très-riche en principes nutritifs, trop riche même peut-être, si on la mangeait seule et avec excès, ce qui la rendrait échauffante et d'une digestion difficile. Hachée et mêlée à des aliments de nature végétale ou de pouvoir nutritif faible, elle constitue une excellente nourriture. Un de nos amis, d'un âge assez avancé, dont l'estomac trèsfatigué digérait avec peine, s'est mis pendant six mois à ce régime, sans maner même une seule fois de la viande, et il s'en est parfaitement trouvé. Il est à désirer, par conséquent, que ce tubercule entre de plus en plus dans l'alimentation usuelle, ce qui ne pourra avoir lieu qu'autant qu'on sera parvenu à le faire naître partout et en abondance, par les moyens que nous indiquerons tout à l'heure.
La meilleure manière actuellement connue de conserver et d'expédier les truffes est de les préparer par la méthode d'Appert, dans des bouteilles à gros goulot, hermétiquement fermées, et de les faire entrer dans les conserves alimentaires préparées suivant la même méthode. Sous ces deux formes, elles sont devenues l'objet d'une industrie et d'un commerce considérables ; l'on n'a plus à craindre de les voir s'échauffer ou se décomposer en une espèce de gelée ou bouillie, qui n'est en réalité que la masse de vers déposés en germe par la mouche truffigène.
Nous dirons un mot seulement des procédés d'extraction des truffes.
Ils sont au nombre de trois : la pioche seule, la pioche guidée par l'instinct du chien dressé, le groin du cochon ou porc truffier. Dans le premier cas, l'ouvrier, qui, à l'aspect des lieux ou à la présence des mouches, a soupçonné ou reconnu l'existence des truffes dans le sol d'un chêne, l'attaque de tous les côtés avec la pioche jusqu'à une certaine profondeur; c'est évidemment un procédé barbare, car la pioche coupe en même temps les racines traçantes de l'arbre d'où doivent sortir et les racines chevelues et les truffes, dans la théorie de M. Ravel ; le sol ainsi labouré devient stérile, ou ne se repeuple de truffes qu'après trois ou quatre ans, tandis que, plus respecté, il en aurait donné tous les ans.
Dans le second cas, l'ouvrier se fait accompagner d'un chien dressé ; il reconnaît la présence du tubercule à la manière dont-le chien flaire la terre., et il l'enlève d'un coup de pioche habilement donné; c'est moins barbare, mais on coupe encore des racines et l'on nuit à la future récolte.
La troisième méthode est incomparablement la meilleure; on abandonne la recherche des truffes a l'instinct d'un cochon d'une espèce particulière, et susceptible d'une éducation spéciale ; on le conduit sur les terrains truffiers, il flaire, sent la truffe, creuse la terre avec son groin, la fait apparaître et l'amène à la surface ; il regarde alors son maître, quand il est parfaitement dressé; celui-ci prend la truffe et donne en échange un gland au cochon qui s'en contente et se remet à fouiller. Le groin du cochon attaque à peine les racines chevelues qui repousseront facilement, il laisse intactes les racines traçantes ; il donne en même temps à la terre une sorte de labour très-favorable au développement des truffes nouvelles. Par les temps secs et frais, par un vent favorable, le cochon sent la truffe à 40 ou 50 mètres de distance, et à 1 mètre de profondeur sous la terre même recouverte de neige. F. MOIGNO.
(La suite au prochain numéro.)
DOCUMENT OFFICIEL.
SUR LE DROIT DE PÊCHE DANS LE CANAL DE RÉVIGNY.
NAPOLÉON, Par la grâce de Dieu et la volonté nationale, Empereur des Français, A tous présents et à venir, salut : « Vu les articles 1, 2 et 3 de la loi du 15 avril 1829, sur la pêche fluviale ;
« L'ordonnance du 10 juillet 1835 et le tableau y annexé, contenant la désignation des parties de fleuves, rivières et canaux navigables ou flottables sur lesquels le droit de pêche doit être exercé au profit de l'État ; « Le procès-verbal en date du 8 octobre 1853, par lequel l'inspecteur des forêts à Bar-le-Duc propose que le droit de pêche sur le canal de Révigny soit abandonné aux riverains ; « Les pièces transmises par M. le préfet de la Meuse et constatant le résultat des enquêtes de commodo et incommodo auxquelles il a été procédé sur cet objet ; « Vu la proposition contenue dans la dépêche de notre ministre de l'agriculture, du commerce et des travaux publics, en date du 13 janvier 1855, et tendant au déclassement du canal de Révigny ; « Les délibérations du Conseil d'administration des forêts et des domaines, et les avis des directeurs généraux de ces administrations; « Considérant que le flottage n'étant plus pratiqué sur le canal de Révigny, l'Etat a intérêt à abandonner aux riverains le droit de pêche sur ce cours d'eau, en leur laissant supporter la charge effective d'entretien ; « Sur le rapport de notre ministre secrétaire d'État au département des finances ; « Avons décrété et décrétons ce qui suit : « Art. 1er. — Les dispositions de l'ordonnance du 10 juillet 1835 portant que la pêche sera exercée au profit de l'Etat sur le canal de Révigny, dans tout son cours, dans le département de la Meuse, ainsi que dans le département de la Marne, jusqu'à sa réunion avec la Chée, sont rapportées.
« Art. 2. — Notre ministre secrétaire d'Etat au département des finances est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera inséré au Bulletin des lois.
Fait à Biarritz, le 1er septembre 1856.
NAPOLÉON.
Par l'Empereur : Le ministre secrétaire d'Etat au département des finances, P. MAGNE.
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
Mutations dans le personnel forestier. — Encouragement donné à un brigadier forestier pour semis et plantations. — Sucre de bouleau. — Note sur le dragonnier. — Extraction et préparation du caoutchouc.
= Mutations dans le personnel forestier. — M. DE SAINT-GÉRAND , inspecteur des forêts à Dôle (Jura), a été nommé inspecteur à Autun (Saône-et-Loire), en remplacement de M. Curton, décédé.
M. DESGODlNS, sous-inspecteur des forêts à Metz (Moselle), a été nommé inspecteur à Dôle (Jura), en remplacement de M. de Saint-Gérand.
M. MARIN (Parfait), sous-inspecteur des forêts à Sarrebourg (Meurthe), a été nommé sous-inspecteur à Metz (Moselle), en remplacement de M. Desgodins.
M. MAUGIN (Ernest), sous-inspecteur des forêts à Mulhouse (HautRhin), a été nommé sous-inspecteur à Sarrebourg (Meurthe), en remplacement de M. Marin (Parfait).
M. CORNU, sous-inspecteur sédentaire des forêts à Epinal (Vosges), a été nommé sous-inspecteur à Mulhouse (Haut-Rhin), en remplacement de M. Mangin (Ernest).
M. CORNEBOIS, garde général des forêts à Munster (Haut-Rhin), a été nommé sous-inspecteur sédentaire à Epinal (Vosges), en remplacement de M. Cornu.
M. FARCY, garde général stagiaire des forêts à Dreux (Eure-et-Loire), a été nommé garde général à Munster (Haut-Rhin), en remplacement de M. Cornebois.
M. GAULOT, garde général des forêts à Châteauvillain (Haute-Marne), a été nommé sous-inspecteur à Moissey (Jura), en remplacement de M, Drot.
= Encouragement donné à un brigadier forestier pour semis et planlations. — Le comice agricole de Sarrebourg a, dans sa dernière réunion, donné une médaille d'argent au brigadier forestier Michaud (Georges), résidant à Saint-Jean-de-Bassol (Meurthe), pour ses semis et plantations.
Nous sommes heureux d'avoir à enregistrer la récompense et les faits qui l'ont si bien méritée.
Brigadier depuis dix-huit ans, M. Michaud s'est constamment préoc-
cupé du repeuplement des forêts soumises à sa surveillance. Chaque an née il fait des semis, des plantations, dont le succès est assuré par des soins continus.
Déjà, en 1853, la Société d'agriculture de Nancy avait donné à M. Michaud une médaille de bronze pour ses semis; en 1854, une mention honorable de la même Société venait récompenser une persévérance qu'on ne saurait trop louer; et, enfin, cette année une médaille d'argent est venue compléter ces distinctions honorifiques.
Cet exemple sera suivi, nous n'en doutons pas. Le brigadier, le garde peuvent faire beaucoup de bien en utilisant ainsi quelques loisirs, et, par le seul fait d'une attention soutenue à remplir les vides toujours si nombreux dans chaque triage, ils peuvent augmenter dans une forte proportion le produit du sol et prouver ainsi qu'ils sont de véritables forestiers.
= Sucre de bouleau. — Un chimiste allemand assure avoir trouvé le moyen de produire, à un prix modique, un sucre cristallisable qu'il tire du bouleau.
= Le dragonnier. — Dans le Journal de la Société botanique de Londres, M. Bunbury, qui a fait un voyage à Madère et au pic de Ténériffe, donne des détails sur le fameux arbre le dragonnier, auprès de la villa d'Orotova, que les naturalistes connaissent par la relation de M. Alexandre Humboldt et la gravure qu'il en a donnée dans ses Monuments des peuples. L'arbre est toujours debout, mais ce n'est plus qu'une ruine. Son feuillage est encore vert et vigoureux, mais depuis quelques années il a perdu beaucoup de ses branches, et M. Bunbury affirme que cet arbre si vieux ne vivra pas maintenant plus d'un siècle. A 2 mètres 80 centimètres de la racine il a 10 mètres de circonférence. Mais cet arbre, un des plus anciens du monde, n'est rien auprès de Xadansonia digitata , ou arbre à pin, dans le voisinage de Joal, entre le Cap-Vert et l'embouchure du fleuve de Gambie. Il a été visité dernièrement par le commandant de la station anglaise dans la Sénégambie, le lieutenant-colonel Luke Smith O'Connor. L'arbre s'élève au-dessus de tous les autres de la forêt et sert de point pour s'orienter, aux navigateurs, à plusieurs milles en mer. On attribue à cet arbre, d'après sa circonférence et ses anneaux, un âge de cinq mille, cinq mille cent cinquante ou même peut-être six mille ans.
Ainsi, ce vénérable patriarche des forêts de la Sénégambie serait contemporain des constructeurs des Pyramides, même de Menés, et il portait des fruits depuis longtemps à l'époque où la constellation de la Croix du Sud était encore visible pour les habitants des côtes de la Baltique.
Aussi cet arbre était-il tenu en grande vénération, et les indigènes croient que si l'un d'eux peut suspendre aux branches de Yadansonia quelque objet appartenant à son ennemi, en lançant en même temps une
malédiction, celui que cette malédiction frappe périra infailliblement dans l'année. v= Extraction et préparation du caoutchouc à Carthagène (État dé la Nouvelle-Grenade). — Nous extrayons d'un mémoire de M. André Anthoine, communiqué dernièrement à la Société impériale et centrale d'agriculture, et ayant trait à l'extraction et à la préparation du caoutchouc dans la province de Carthagène (État de la Nouvelle-Grenade), des éléments d'étude qu'il nous paraît utile de consulter pour celles de nos colonies où ce produit sa récolte : « Les Indiens, on le sait, obtiennent le suc laiteux qui contient le caoutchouc, par incision à l'écorce de l'arbre qui le produit ; ils le laissent couler dans un trou fait dans le sol au pied de l'arbre, et garni de feuilles de latanier. Un bon arbre donne facilement de quinze à dix-huit litres à une seule saignée, qui peut se renouveler plusieurs fois dans l'année. On a reconnu, après un examen attentif, que ce suc laiteux se compose de trois principes parfaitement distincts : le caoutchouc proprement dit, matière sans saveur ni couleur ; une eau de végétation abondante, et une gomme-résine, qui devient noire par l'effet de la lumière. Ces trois matières sont intimement liées ensemble, mais dans le phénomène de la formation de la gomme élastique leur séparation a lieu. Le caoutchouc, conservant une partie de la gomme-résine à laquelle il doit sa couleur brune, se coagule à la surface, et l'eau de végétation, noirâtre et chargée d'une plus grande proportion de gomme-résine, se réunit à la partie inférieure si l'opération se fait dans un vase, ou s'absorbe si on emploie les moyens convenables. On parvient à maintenir le suc laiteux liquide en l'agitant deux ou trois fois par jour avec un bâton ; cette découverte n'a pas d'utilité, car ce serait augmenter le prix de revient sans profit que de transporter une eau dont on n'a pas l'emploi. Le rhum est un moyen très-économique pour faire instantanément coaguler le caoutchouc. Environ un trentième de cette liqueur versée et agitée dans le suc laiteux produit un effet identique à celui de la présure dans le lait. Le rhum, à Carthagène, vaut 20 centimes le litre. Le jus de citron offre cette particularité : il enlève complètement les taches noires produites sur le linge et détache les parcelles de caoutchouc, qui, dans la manipulation du suc laiteux, sèchent aux poils des mains et des bras. Ce résultat ne s'obtient avec aucune espèce de savon.
« Ces observations, assez curieuses du reste, ne sont pas les plus importantes dont nous avons à faire mention; ainsi, en mélangeant le suc laiteux à dix fois son volume d'eau, le caoutchouc remonte à la surface parfaitement incolore, de telle façon qu'on peut l'appliquer entre deux étoffes légères de soie blanche et rose, sans marquer l'extérieur de la
moindre souillure. Le lavage doit se faire dans des vases à goulot allongé, afin d'obtenir une certaine couche de caoutchouc. On le conserve liquide de la même manière que le suc laiteux, mais pour fort peu de temps. C'est alors qu'on lui donne, par l'addition d'une petite quantité d'eau chargée de couleur, la teinte que l'on désire, teinte qu'il conserve indélébile dans la coagulation. Mais ce qui nous a paru le plus remarquable dans le mémoire de M. A. Anthoine, c'est le procédé dont il fait usage pour séparer le caoutchouc des corps qui lui sont étrangers. Il fixe sur trois traverses, espacées de 75 centimètres et entassées au niveau du sol, des cadres de 2 mètres 50 centimètres de longueur, 1 mètre de largeur et 5 centimètres de hauteur. Ces cadres étant remplis d'un sable fin, il pose sur le sable une toile de coton quelconque. Cette toile est tendue au moyen d'un autre cadre, de même dimension que le premier, mais dont les bords intérieurs sont légèrement évasés jusqu'au tiers de leur hauteur, de manière que, posé sur l'autre, ce cadre forme un rebord d'environ 5 centimètres. Il coule ensuite le suc laiteux (10 litres pour environ 2 millimètres d'épaisseur de caoutchouc) ; l'eau de végétation est absorbée par la toile et le sable : douze ou quatorze heures après, on lève le cadre supérieur, auquel la toile reste attachée par le caoutchouc collé sur ses bords ; on laisse deux heures à l'air libre pour faire sécher le caoutchouc que l'humidité du sable a pu faire conserver à l'état pâteux, et l'on détache la feuille de caoutchouc, qui est parfaitement homogène et prête pour l'exportation.
On obtient ainsi chaque jour autant de feuilles de caoutchouc de 3 kilogrammes, même plus pesantes et plus épaisses, que l'on a de moules ou de cadres. Cette fabrication en feuilles a donné l'idée, en les coupant en bandes de largeur convenable, d'appliquer le caoutchouc entre les bordages d'une embarcation ; puis, serrant au moyen d'écrous et clouant le bordage, de remplacer avec économie la longue et imparfaite opération du calfeutrage. Cet essai a réussi on ne peut mieux, et serait applicable à de grands navires. »
Le caoutchouquier atteint, dans les forêts qui bordent la rivière Sinée, une grosseur moyenne de 50 à 60 centimètres de diamètre sur une hauteur de fût de 16 à 20 mètres. C'est le ficus elaslica, vulgairement appelé cara sucia. Son port est celui d'un beau platane ; ses feuilles sont alternes, de la forme de celles du châtaignier, mais plus grandes et garnies en dessous d'un duvet fauve. Il les perd en décembre et en janvier, et produit une figue petite et nombreuse.
Le caoutchouc pur, liquide, quoique sans saveur, est un poison. Un singe, en ayant pris pour du lait, mourut dans les vingt-quatre heures.
A NOS ABONNÉS. >
rJij»{ de iers articles sur les commissions d'aménagement et de s ont attiré un grand nombre de lettres qui témoignent ^a%iSy*ei (Mfémotion bien naturelle qu'a causée dans le corps forestier s opérations projetées, et de l'importance qu'on attache
aux points sur lesquels nous avons cru devoir appeler l'attention. Nos correspondants, en général, reconnaissent que nos propositions sont admissibles pour le fond; mais ils ne sont pas tous du même avis quant à la forme, et plusieurs d'entre eux nous font à ce sujet de singuliers reproches que nous ne saurions passer sous silence.
« Vos idées sont très-judicieuses, très-logiques, nous dit-on ; mais vous avez eu tort d'abord de les publier et ensuite de les formuler d'une manière peu convenable. Votre ton est trop décisif, trop tranchant ; votre argumentation trop dogmatique. Vous vous posez en professeur. L'administration ne peut cependant pas marcher à la remorque d'un écrivain ; elle aurait certainement accueilli avec plaisir des vues développées dans un rapport confidentiel. Les mêmes vues, exposées dans un journal, ne sont plus une aide : c'est une leçon, c'est presque une critique. Il faudrait une grande force d'âme pour la recevoir sans sourciller. »
Tels sont, en substance, les reproches qui nous ont été adressés. Ils
nous paraissent si peu justifiés que nous n'avons pas hésité un seul instant à les reproduire, ne fût-ce que pour donner aux personnes dont on suppose que nous avons froissé la susceptibilité un témoignage de l'entière confiance que nous avons dans l'élévation de leur caractère et l'impartialité de leur jugement.
Nous sommes parfaitement convaincu que les auteurs de ces reproches ont une trop petite idée, d'une part, des sentiments qui animent l'administration supérieure, de l'autre, des privilèges d'un journal, et nous croyons que cette double erreur provient principalement de ce que l'on envisage les questions dans leurs rapports avec les individus, au lieu de les envisager dans leurs rapports avec l'intérêt général. Il est probable que si, lorsque nous avons parlé de l'administration, on n'avait pas songé à MM. tels ou tels, qui en occupent les hauts emplois; que si, en appréciant nos articles, on n'avait pas fait des suppositions, entièrement gratuites d'ailleurs, sur le nom du rédacteur, la pensée ne serait venue à
personne qu'ils fussent de nature à blesser l'amour-propre de qui que ce soit. Qu'on veuille bien se figurer, par exemple, que ces articles sont traduits de l'allemand, qu'ils s'adressent à toutes les administrations qui pourraient avoir à faire des aménagements et des cantonnements, et les intentions pédantes qu'on nous prête d'un côté, les susceptibilités puériles dont on gratifie, de l'autre, les hommes honorables qui dirigent l'administration des forêts de notre pays, tout cela s'évanouit, et il ne reste plus que la question de savoir si les considérations que nous avons publiées sont bonnes ou mauvaises.
L'administration est un corps moral qui est placé, par son impersonnalité, au-dessus des faiblesses de l'amour-propre individuel; elle ne saurait avoir la science infuse; elle n'est pas l'initiatrice nécessaire de toute amélioration, de tout progrès. Il y a mieux : ce n'est pas d'elle qu'il faut attendre la première idée de ce progrès, de cette amélioration. Sa fonction est essentiellement conservatrice et traditionnelle. Son devoir est de n'accueillir qu'avec beaucoup de prudence, après mûr examen, les innovations qui lui sont proposées, et nous comprenons qu'elle n'accepte que sous bénéfice d'inventaire celles qui émanent de nous.
Un journal est un être abstrait. Ce n'est pas M. tel ou tel occupant telle position sociale qui comporte de certaines convenances, de certaines obligations, c'est tout le monde. Il n'est ni au-dessus ni au-dessous de qui que ce soit ; il est en dehors de toute classification hiérarchique. Il ne relève que de la conscience, et il a le droit de tout dire sans réserve et même sans mesure, quand il ne s'adresse qu'aux idées, et qu'il croit être dans le vrai. Il formule l'opinion courante : celle de Paul, de Pierre, de Jacques, lorsqu'il la trouve bonne. Cette opinion fût-elle hasardée, il n'y a pas d'inconvénient à ce qu'il la livre à la publicité, puisque ses colonnes sont ouvertes à la contradiction.
Si nos lecteurs avaient fait ces réflexions, ils se seraient épargné des craintes indignes de l'administration, indignes de nous, indignes de tous ceux qui ne sont guidés dans leurs appréciations que par le sentiment du devoir. Le devoir, est-ce donc un vain mot? Ce mot qui est au fond de toutes les morales, de toutes les religions, de toutes les consciences; ce mot qui purifie toutes les joies, adoucit toutes les peines, justifie toutes les actions ; ce mot qui renferme enfin toute la destinée de l'homme icibas. Nous avons, nous, le sentiment du devoir, et nous supposons chez les autres ce que nous trouvons en nous-mêmes. Voilà pourquoi, sans trop nous préoccuper du qu'en dira-t-on, nous allons droit à un but, quand il nous paraît utile de l'atteindre.
LES PLANTATIONS DE PARIS.
Les Parisiens montrent un goût de plus en plus prononcé pour les jardins anglais, les squares, les pelouses, les avenues, en un mot pour tout ce qui peut leur rappeler la campagne et égayer leurs yeux attristés par l'aspect des rues étroites et sombres, ou aveuglés par la réverbération du soleil sur les blanches façades. En 1749, Voltaire réclamait, au nom des habitants de Paris « l'élargissement des nombreuses rues étroites et infectes qui déshonoraient cette capitale, et l'assainissement de ces quartiers obscurs, resserrés, hideux, représentant le temps de la plus honteuse barbarie. » Maintenant que cette besogne est faite, ou à peu près, on voudrait voir planter un arbre ou semer du gazon anglais partout où l'on peut disposer de quelques mètres carrés de terrain. Tout cela est dans l'ordre : après l'utile devait nécessairement venir l'agréable. Parmi les causes qui ont déterminé ce mouvement en faveur des embellissements végétaux, nous devons ranger en première ligne le besoin que l'on éprouve de remplacer les jardins particuliers, qui disparaissent avec une extrême rapidité devant la truelle du maçon; l'idée émise par M. Chevreul, et à laquelle on a selon nous accordé une importance exagérée, que les feuilles des arbres sont de véritables égouts aériens dans lesquels viennent se déverser les miasmes délétères qui infectent l'atmosphère de Paris ; enfin et surtout l'influence de plus en plus puissante de la littérature moderne sur nos goûts et nos habitudes. Un ingénieux critique a remarqué qu'il serait difficile de trouver à cueillir un brin d'herbe dans les ouvrages des auteurs du dix-septième siècle et il explique ainsi pourquoi il ne pousse guère, dans les jardins de Lenôtre, que des statues de marbre et de bronze ; aujourd'hui que l'herbe pousse, pour ainsi dire, entre chaque ligne chez nos écrivains modernes, ne sommes-nous pas en droit d'attribuer à cette nouvelle tendance littéraire l'engouement pour la verdure que nous venons de signaler?
L'administration de la ville de Paris, il faut lui rendre cette justice, s'efforce depuis quelque temps de contenter sur ce point le goût du public, et elle ne recule devant aucun sacrifice pour mettre les boulevards, les quais, les places et les promenades en harmonie avec les grands travaux architectoniques qui ont été effectués récemment sur divers points
de la capitale. Nous nous proposons d'examiner aussi succinctement que possible ce que l'autorité municipale a déjà fait pour assurer le service des plantations, et d'indiquer en outre les améliorations dont ce service nous paraît susceptible.
D'après un mémoire publié en 1855 par M. Jouanet, employé au service des plantations, le nombre total des arbres plantés sur les boulevards, les quais, les places, les cimetières, les écoles communales, etc., s'élève, non compris ceux qui sont situés au Jardin des Plantes, aux Tuileries et au Luxembourg, qui ne sont pas régis par la ville, et dont la contenance totale est de 83 hectares, à 57,154, dont 13,267 âgés de 1 à 10 ans, et 12,500 de 75 à 100 ans, et plus. La plus âgée de ces plantations est celle du Cours-la-Reine, elle date de 1616; celle des boulevards aura de la peine à parvenir à un âge aussi avancé. En supposant qu'il faille mille de ces arbres en moyenne pour peupler complètement un hectare de terrain, on trouve qu'avec le matériel des plantations municipales on pourrait former une petite forêt de 57 hectares. Les boulevards intérieurs figurent dans le tableau de M. Jouanet pour 9,137 arbres, et les cours des écoles communales pour 1,130. Il est regrettable que cet employé n'ait pas cru devoir classer le peuplement de ces plantations par catégories d'essences; ce classement aurait sans doute permis de déterminer s'il était ou non nécessaire d'opérer des substitutions d'essences. En revanche, il s'est amusé à calculer le volume de tous les arbres dont il s'agit, et il est arrivé au chiffre de 18,821 stères ou mètres cubes, lesquels, estimés l'un dans l'autre à 25 fr. le stère, portent la valeur totale à 470,540 fr. Ce chiffre nous paraît passablement exagéré, et si jamais la ville de Paris, à bout de ressources, venait à vendre sur pied ses plantations, nous ne conseillerions à aucun marchand de bois de s'en rapporter à l'estimation de M. Jouanet. Quoi qu'il en soit, les diverses plantations qui forment le peuplement forestier de la ville de Paris sont loin de présenter une brillante végétation; il suffit, pour s'en convaincre, de parcourir la ligne des boulevards ou de se promener aux ChampsÉlysées.
Jusqu'au commencement de l'année 1856, l'amélioration des plantations et promenades était placée dans les attributions de cinq ingénieurs des ponts et chaussées chargés du service de la voirie de la ville de Paris.
Chaque ingénieur devait veiller au remplacement ou à l'entretien des arbres placés dans sa circonscription. Les inconvénients d'une organisation aussi morcelée finirent par attirer l'attention de F administration municipale qui décida, il y a un an environ, que le service des plantations serait spécialisé et que la direction en serait exclusivement confiée à un ingénieur en chef des ponts et chaussées. L'espace com-
pris dans l'enceinte de Paris a été partagé en cinq divisions, surveillées chacune par un piqueur ; chaque division comprend cinq sections et l'on a affecté à chaque section un cantonnier. Ces employés sont chargés de la mise en terre des plants et des travaux d'entretien, notamment de l'arrosage et de l'élagage. Afin de donner à nos lecteurs une idée de l'étendue et de l'importance de ces divisions, nous prendrons pour exemple celle des Champs-Elysées, qui comprend les deux plateaux des Champs-Élysées, les quais de la Conférence et de Billy, tous les boulevards extérieurs depuis la barrière de Passy jusqu'à celle de Clichy avec les places avoisinantes, et enfin six écolescominunales.
Cette division est peuplée d'environ 10,000 arbres, dont 5,000 pour les Champs-Elysées. La fourniture des plants fait l'objet d'une entreprise par soumission directe ; les travaux de terrassement sont aussi confiés à un entrepreneur.
Cette organisation nous paraît de beaucoup supérieure à celle qui l'a précédée. Toutefois, nous nous permettrons de faire observer que l'administration municipale s'est méprise en persistant à confier au corps des ponts et chaussées un service aussi étranger aux études et aux occupations des hommes si distingués d'ailleurs qui font partie de ce corps ; si l'on voulait à toute force rattacher le service dont il s'agit à l'une des grandes administrations de l'État, mieux eùt valu donner la préférence à celle des forêts, plus compétente que toute autre, on en conviendra, pour tout ce qui tient à l'arboriculture. Logiquement, on aurait dû mettre à la tête d'un service aussi important un arboriculteur instruit, actif et intelligent, capable de former par lui-même d'habiles conducteurs et des cantonniers entendus, de leur inculquer de bonnes traditions et de les initier à ces mille petites pratiques de détail qu'un homme spécial seul peut connaître et par suite enseigner. Une pareille méprise remet involontairement en mémoire le mot si célèbre et toujours si vrai de Beaumarchais.
L'article 3 du cahier des charges relatif à la fourniture des arbres, arbustes et plantes, est conçu en ces termes : « Les arbres demandés pour les promenades et places publiques seront généralement des platanes, des érables, des ormes à larges et à petites feuilles, des marronniers à tleurs blanches et rouges, des merisiers et des peupliers blancs, suisses ou de Virginie. Les arbres et arbustes, et les plantes pour les jardins, comprendront toutes les variétés et espèces connues qui se trouvent dans les pépinières. »
L'acacia et le tilleul ne figurent pas dans cette liste. Selon nous, l'acacia est proscrit à juste titre. Quant au tilleul, on aurait dû distinguer. Il est vrai que le tilleul à larges feuilles ne fait pas brillante figure dans nos promenades, parce que ses feuilles jaunissent de très-bonne heure ; mais
il n'en est pas de même pour la variété à petites feuilles, que l'on aurait certainement pu employer sur divers points. Ou a fait au merisier un honneur qu'il est loin de mériter. Cette essence n'est pas digne de nos promenades, et il eût mieux valu mettre à sa place le sorbier des oiseleurs.
L'orme à larges feuilles nous paraît devoir être préféré, partout où cela sera possible, à l'orme à petites feuilles, dont le feuillage dur, sombre, offre un aspect désagréable. Nous regrettons de ne pas voir figurer sur la liste précitée le vernis du Japon (ailanlhus glandulosa), dont la croissance est si rapide, et qui, lorsqu'il est convenablement élagué, forme un élégant parasol; le mûrier à papier de Chine (broussomtia papyrifera), dont on peut voir un bel échantillon sur le boulevard Bourdon, et enfin l'orme de Sibérie (planera crenosa), dont le port et le feuillage sont beaucoup plus gracieux que ceux de l'orme ordinaire. Il existe plusieurs planera sur la place de la Salpêtrière ; celui qui se trouve au Jardin des Plantes, le long de la galerie de minéralogie, offre un type magnifique de cette essence. M. Dubreuil a proposé le noyer noir. Cet arbre de l'Amérique septentrionale pousse avec une grande rapidité et acquiert de belles proportions ; toutefois on ne pourrait le planter qne dans les lieux écartés, comme le marronnier, à cause des fruits qui pourraient faire tomber les passants ou servir de projectiles aux enfants.
Sur presque tous les points le sol de Paris est composé de remblais de diverses natures, mais principalement de gravats, qui sont comme le détritus des incessants travaux de démolition et de reconstruction effectués depuis des siècles dans cette immense capitale. C'est donc un sol d'alluvion d'une espèce toute particulière, mais qui malheureusement n'a pas la fertilité qui caractérise ordinairement ce genre de terrain. Le sol naturel des Champs-Élysées notamment s'est recouvert depuis 1770, époque du renouvellement de cette promenade par M. d'Angevilliers, d'une couche de graviers, de plâtras et de débris de toute espèce dont l'épaisseur s'élève, sur quelque points, jusqu'à lm,50. Aussi les arbres dont les racines ne peuvent recevoir que très-difficilement, par suite de l'existence de cette couche, l'eau et l'air qui leur sont nécessaires, sont-ils presque tous dans un état complet de dépérissement. On dit que l'administration municipale est sur le point de régénérer la promenade des ChampsÉlysées et de la rendre digne du nom qu'elle porte ; on fait même en ce moment abattre, probablement dans ce but, un nombre assez considérable
d'arbres morts ou viciés : eh bien ! nous sommes convaincu que la réussite des plantations projetées sera très-problématique, si l'on a pas la précaution de transformer complètement le sol, soit en y faisant transporter de la terre végétale, soit plutôt en ramenant à la surface le sol naturel, qui paraît du reste être de bonne qualité. Puisque nous sommes sur
le chapitre des Champs-Élysées, nous profiterons de l'occasion pour conseiller à l'administration de ne pas suivre, pour le renouvellement progressif de cette promenade, les errements en vigueur dans le jardin voisin, aux Tuileries. Là on s'est proposé de résoudre le problème de régénérer la plantation des marronniers sans faire çà et là quelques larges éclaircies où le soleil puisse pénétrer; en un mot, sans que le public puisse s'en apercevoir. A cet effet, tous les ans, à la même époque, on vient planter avec tout le soin possible un certain nombre de jeunes plants parfaitement bien conformés au pied des grands marronniers qui forment le peuplement des grands carrés. Cette plantation est effectuée dans l'espoir que les jeunes plants grandiront à l'ombre tutélaire de leurs aînés, et qu'ils finiront par les remplacer quand ceux-ci seront morts de vieillesse.
Ces jeunes plants ne recevant jamais un rayon de soleil, sous l'épais dôme de feuillage qui les couvre, meurent, qui au bout d'un an, qui au bout de deux ans. Ceux qui atteignent trois ans sont regardés comme ayant un tempérament très-robuste. L'année suivante, on revient avec la même 'ponctualité remplacer ceux qui manquent à l'appel et planter quelques nouveaux sujets, et tout est dit. Voilà nombre d'années que l'administration des bâtiments de la couronne exécute ce travail de Pénélope, et cependant nous serions fort étonné si on nous disait qu'elle est parvenue par ce moyen à enrichir les Tuileries d'un arbre de plus.
Le sol actuel de Paris, nous l'avons dit, est presque partout infertile.
Pour remédier à ce grave inconvénient, l'administration est obligée, toutes les fois qu'elle veut planter un arbre, de faire creuser un grand trou ayan neuf mètres cubes de capacité et de le faire remplir de bonne terre végétale.
Les détails de cette opération sont indiqués dans le tableau suivant :
Fouille. 2">,50 X 2",50 X t-,85 - 9m- «■ 375 X 0 fr. 77 c. - 7 f. 22 c.
Terre végétale, 2m,50 x 2m,50 x lm,25 =» 9 375 x 2 86 - 26 81 Terre enlevée, même cube, 9 375 X 2 31 = 21 66 Arbre fourni, compris épine et tuteur = 3 40 Total. 59 09
Ce chiffre est exorbitant, cela est certain, et nous connaissons beaucoup de forêts en France où, pour une égale somme, on ferait planter cinq mille plants. Il est malheureusement impossible de planter dans Paris à meilleur marché. C'est une raison de plus pour que l'administration municipale veille avec un soin extrême à la conservation de plantations aussi coûteuses. Elle n'ignore pas, par exemple, que le gaz, et surtout que le goudron de gaz qui suinte à travers les conduits, infecte la terre végétale en la transformant en un véritable magmat, et exerce par suite une pernicieuse influence sur la végétation des arbres; et cependant on nous af-
firme qu'elle n'a pas encore mis la compagnie d'éclairage en demeure de faire les travaux nécessaires pour prévenir désormais les fuites de gaz et les écoulements de goudron. Les prescriptions de l'arrêté préfectoral qui a été rendu par suite du traité passé entre la ville et MM. Péreire sont cependant bien précises. L'article 1er de cet arrêté dispose « qu'à l'avenir les conduites de distribution du gaz d'éclairage et de chauffage placées sous le sol des promenades et de toutes les voies publiques plantées de Paris, et les branchements transversaux du service public et privé, seront renfermés dans des drains ou des pierrées ayant une inclinaison ascendante de cinq millimètres au moins par mètre, et mis en communication avec l'atmosphère au moyen d'ouvertures ménagées dans le socle des candélabres ou dans les soubassements des édifices desservis, à une hauteur suffisante pour éviter toute inondation et tout ensablement des drains et pierrées. » Nous ne comprenons pas pourquoi l'on hésite à appliquer dans toute leur rigueur les prescriptions de cet arrêté à une compagnie qui jouit d'un si fructueux monopole.
Les racines d'un arbre s'étendant en général horizontalement et assez loin, il est certain que le cercle étroit laissé au pied des arbres sur les trottoirs bitumés est insuffisant ; l'eau et l'air ne peuvent pas pénétrer dans la terre en quantité suffisante ; aussi serait-il à désirer qu'on laissât partout, comme sur les quais, une bande de terre nue suivant l'alignement de la plantation. Le bitume est nuisible, non-seulement parce qu'il s'oppose au passage de l'eau et de l'air, mais encore parce que, absorbant pendant l'été une grande quantité de chaleur, il échauffe trop le terrain.
Le pavage, sous ce rapport, nous paraît bien préférable. La disposition la plus propre à concilier les exigences de la végétation et la commodité des passants nous paraît être celle qui a été adoptée pour la plantation du quai de Billy : au milieu de la bande de terre qui sépare deux arbres, on a placé, pour le passage des piétons, une petite bande transversale de bitume large de 60 centimètres. Ces dispositions seraient sans doute d'une application difficile sinon impossible sur les boulevards du centre, par exemple, où la circulation a pris, depuis quelques années, des proportions démesurées ; mais existe-t-il réellement un moyen de faire végéter des arbres sur les boulevards dont il s'agit, et si ce moyen n'existe pas, ne vaudrait-il pas mieux supprimer radicalement ces plantations qui sont l'objet de tant de plaisanteries, et consacrer l'argent qu'elles coûtent à la création de nouvelles promenades dans les quartiers de la capitale qui en sont privés?
En résumé, et quelles que soient d'ailleurs les imperfections de détail qui peuvent être signalées dans le service des plantations, nous pensons que l'administration municipale est entrée dans une bonne voie, et que dans
quelques années les Parisiens n'auront plus le droit de se moquer des arbres rachitiques ou des manches à balai qui, jusqu'à ces derniers temps, ont été censés faire l'ornement de leur ville. A. F.
REVUE COMMERCIALE.
Nous n'avons guère de transactions à enregistrer. La saison ne permet plus d'achats au dehors. On s'occupe des exploitations et des inventaires plus que de ventes et d'expéditions de bois.
La foire du 6 décembre à Sézanne a, comme d'ordinaire, fixé le prix des écorces de Champagne ; il y avait peu d'empressement de la part des acheteurs. Les grosses écorces, c'est-à-dire les écorces des gros chênes, étaient complètement dédaignées ; on n'en voulait pour aucun prix. Les écorces fines ou de taillis, demandées au-dessous des cours de 1855, étaient tenues par les marchands de bois à peu près aux prix obtenus l'année dernière : 100 à 115 fr. les cent quatre bottes du poids de 15 à 18 kilos prises en forêt. Quelques marchés ont été conclus de 105 à 110 fr.; les lots ordinaires restent à vendre; on croit que les tanneurs finiront par les prendre aux prix indiqués plus haut, 105 à 110 fr.
A la même foire quelques marchés ont été faits pour des bois à charbon avec quelque faveur sur les prix de 1855 : des lots vendus l'année dernière 8 fr. 50 c. la corde de 3 stères ont obtenu 10 fr. cette année.
C'est le contraire de ce qui se passe partout ailleurs et surtout dans les centres métallurgiques, où les charbons sont généralement en baisse. La seule explication raisonnable que nous puissions donner de cette marche extraordinaire, c'est qu'en 1855 les 3 stères pour 8 fr. 50 c. étaient de beaucoup au-dessous de leur valeur.
Malgré l'active consommation de la campagne qui vient de finir, il reste encore beaucoup de charpentes sur les ports, et pas un acheteur ne se présente. Le commerce de Paris a double raison de s'abstenir : le flottage serait impossible jusqu'au mois de mars et les chantiers regorgent en ce moment. De longtemps on ne les avait vus aussi bien fournis, et s'il y avait pendant l'hiver le temps d'arrêt d'autrefois, la vente serait difficile au printemps, et les prix baisseraient. Heureusement on travaille encore presque comme en été; il y a vente de chaque jour pour continuer ou achever des travaux. Ces livraisons assez nombreuses entretiennent les
cours jusqu'alors. La baisse serait à craindre si le froid apportait interruption des travaux pendant deux mois.
Les derniers marchés connus avaient pour motif des charpentes amenées au port des Lions; ces bois, de dimension moyenne, ont obtenu 65 fr. dans l'eau.
Le merrain est recherché en Champagne, en Bourgogne. Cet article maintient le cours général; cependant, une adjudication de cent mille gournables en bois de chêne s'est faite tout dernièrement à Cherbourg à 10 pour 100 de moins que la précédente adjudication faite il y a deux ans.
Toujours même calme sur les sapins ordinaires; on en vend beaucoup, mais la matière abonde et les prix se basent sur un trop-plein qui menace de durer. Les gros sapins, toujours aussi rares, maintiennent leurs prix élevés, 70 fr. dans l'eau.
Les bois à brûler se soutiennent; la consommation est active malgré la douceur de la température. Les expéditions ont cessé et ne pourront reprendre qu'au printemps. C'est sur l'approvisionnement en chantier qu'il faut passer l'hiver, quoi qu'il arrive. Cet approvisionnement ne laisse rien à désirer. D'ailleurs il paraît peu probable que les prix s'élèvent, même en cas de grands froids. Mais aussi on ne peut compter sur une réduction des prix ; il a fallu payer trop cher pour penser à vendre bon marché.
Les entrées en chantier ou dans la consommation résultant de l'état dressé dans le mois de novembre sont, à très-peu de chose près, les mêmes que dans le mois correspondant de 185G.
Les bois durs sont exactement au même chiffre, 41,000 stères.
Les bois blancs sont en augmentation sensible, 19,000 stères au lieu de 13,000.
Même chiffre pour les cotrets et menuises.
Réduction de quelque importance sur les charbons de bois : 31,000 hectolitres sur 311,000, c'est-à-dire un dixième.
Mais surtout réduction bien plus grande sur la houille : 44 millions de kilogrammes au lieu de 52 millions, presque;un sixième. C'est énorme, et d'autant plus à remarquer que depuis bien longtemps c'est une augmentation constante que nous voyons sur cet article.
Les charpentes, les sciages en bois durs et bois blancs se présentent dans des conditions d'égalité presque absolue.
Les fers ont cessé leur mouvement ascensionnel. Nous sommes arrivés sans doute au point culminant pour cet article comme pour les fontes, et nous serions d'autant moins étonné de voir retourner l'échelle que le bois semble avoir reconquis une partie de la clientèle qui lui appartenait autrefois exclusivement. DELBET.
TABLEAU COMPARÉ DE L'ENTRÉE A PARIS DES BOIS, DES COMBUSTIBLES , DES FERS ET DES FONTES,
NOVEMBRE 1856.
DÉSIGNATION DROIT QUANTITÉS ENTRÉES DIFFÉRENCE des NATURE D'OCTROI EN NOVEMBRE sur le mois correspond.
des - /- ..;.
D'UNITÉS. décime * Augmentation Diminution MATIÈRES. compris. >856. 1855. en en 1856. 1855. 1856. 1856.
Bois à brûler, dur. stère. 3 00,0 (1) 41,359 41,836 » 477 — blanc. - 2 22,0 (2) 18,945 13,095 5,850 » Cotrets de bois dur. - l 80,0 7,481 7,519 » 38 Menuise et fagots. - 108,0 6,295 6,327 » 32 Charbon de bois. hectolitre. 0 60,0 279,357 311.339 » 31,882 Poussier de ch. de bois — 0 30,0 14,449 16.430 « 1,981 Charbon de terre 100 kilogr. 0 72,0 44,566,131 52,750.977 » 8,184,846 Charpente et sciage de bois dur. stère. 11 28,0 9,909 9,389 520 » Id. de bois blanc. — 9 00,0 13,681 i3,9io » 229 Lattes et treillages. les 100 bottes, il 28,0 20,170 16,416 3,754 » Bois de déch. en chêne mètre carré. 021,6 1,007 663 344 » — en sapin. — 0 12,0 4,277 5,334 » 1,067 Fers employés dans lesconstructions. 100 kilog. 3 60,0 884,221 866,074 18,147 » Fonte employée dans les constructions.. — 2 40,0 607,679 572,499 35,180 »
(t) Ces 41,359 stères de bois, multipliés par 400 kil., poids du stère de bois dur, représentent 16,543,600 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 8,271,800 kil. de houille.
(2j Ces 18,945 stères de bois, multipliés par - 300 kil., poids du stère delbois blanc, représenlent 5,683,500 kil., dont la puissance calorifique égale celle de 2,841,750 kil. de houille.
SUR LA TRUFFE, LE CHÊNE TRUFFIER ET LA MOUCHE TRUFFIGÈNE, Par M. RAVEL, négociant en truffes noires, à Montagnac, près Riez (Basses-Alpes).
DE LA MOUCHE TRUFFIGÈNE.
Nous ne ferons qu'esquisser aujourd'hui cette partie de notre sujet, parce que nous manquons des renseignements nécessaires, et que ce n'est que par une étude spéciale, par des expériences directes et plusieurs éducations, que l'on pourra arriver à déterminer complètement le genre et l'espèce de ces mouches, leurs mœurs, les moyens de les élever et de les propager. C'est à peine si les auteurs qui ont traité de la truffe en ont dit quelques mots ; ils la désignent sous le nom trop vague de tipule ; elle ne
devait exciter d'ailleurs que fort peu d'intérêt tant qu'on n'avait pas soupçonné le rôle important qu'elle joue dans la production du précieux tubercule, tant qu'on ne la considérait que comme une sorte de mouche à viande, qui n'apparaissait sur les truffières que pour déposer ses œufs sur les tubercules déjà formés.
Nous nous contenterons donc de dire qu'il y a autant de variétés de mouches truffigènes qu'il y a de variétés de truffes, que la mouche de la truffe noire diffère réellement de la mouche de la truffe blanche ; la différence est assez sensible pour être appréciée même par un œil assez peu exercé, surtout si on compare les larves ou les chrysalides, qui diffèrent les unes des autres, par leur forme plus ou moins allongée, leur volume, leur couleur, beaucoup plus que ne le font les insectes ailés ou parfaits.
C'est à l'état de chrysalides que l'on pourra expédier les mouches truffigènes pour les propager et les faire servir à la production des truffes - les chrysalides se conservent parfaitement et très-longtemps dans du sable très-sec. On les déposera sur les racines chevelues des chênes, avec certaines précautions et en quantité suffisante pour assurer le développement de quelques-unes au moins.
Les mouches truffigènes voltigent sans cesse sur les truffières à la hauteur de 30 ou 40 centimètres ; bien différentes des mouches ordinaires, elles ne craignent pas le froid, et résistent à des températures même trèsbasses, en se cachant à la surface du sol ou en s'y enfonçant à une certaine profondeur ; quand le soleil luit ou que la température est plus douce, elles sortent pour s'accoupler, et rentrent en terre pour déposer leurs œufs, non sur la truffe déjà formée, comme on l'a cru jusqu'ici, mais, comme le veut M. Ravel, sur les petits filaments des racines, en faisant naître la truffe.
Quand l'hiver est assez rigoureux pour congeler le sol et faire périr les truffes moins profondes, les mouches périssent aussi; mais il s'en engendrera de nouvelles dans les tubercules profondément enfouis ; celles-ci continueront la race et la production des truffes. Ce n'est au reste que par un temps très-sec, et lorsque le sol n'est pas couvert de neige, que le froid peut faire périr les truffes et les mouches ; les unes et les autres vivent très-bien sous un manteau de neige, et c'est même dans ces circonstances que l'on peut compter sur une abondante récolte.
DU CHÊNE TRUFFIER, DES TERRAINS PROPRES A SA VÉGÉTATION, DE SA PROPAGATION PAR SEMIS DE GLANDS, DE SA CULTURE.
Tous les chênes ne sont pas producteurs de truffes ou truffiers, c'est un fait incontestable : le chêne truffier se distingue des autres par ses glands sessiles ou sans pédoncules, c'est-à-dire que jamais on ne rencontrera de truffes sous un chêne à glands pédonculés. Les meilleurs chênes truffiers
appartiennent en général à la classe des chênes blancs, et chaque variété produit une espèce particulière de truffes. Ainsi à Montagnac, et en général dans les Basses-Alpes, l'on trouve quatre variétés de chênes blancs, dont une seule, le chêne pubescent (quercus pubescens), produit la truffe noire ou parfumée; la seconde donne la truffe musquée ou de Bourgogne; la troisième, la truffe d'été ou blanche ; la quatrième ne donne pas de truffes.
Toutes quatre cependant vivent sur le même sol; toutes quatre donnent des glands et des noix de galle.
Il est assez difficile de les reconnaître à première vue tant elles se ressemblent par la disposition générale et le feuillage; rien n'est plus facile au contraire que de distinguer un chêne truffier d'un chêne non truffier par l'aspect du sol que couvre son ombrage. Le sol du chêne truffier est entièrement stérile et dénudé, rien n'y croît, on ne peut même rien y faire croître à l'aide de la culture. On a beau semer du blé, du seigle, de l'avoine, sur un terrain couvert de chênes truffiers, alors même qu'ils seraient espacés de 30 à 50 mètres les uns des autres ; ces plantes n'arriveront jamais à maturité sur l'emplacement des truffières.
M. Ravel croit avoir remarqué que la truffe noire du chêne vert, aussi parfumée que celle du chêne blanc, est plus ronde, se conserve moins, et ne supporte pas aussi bien le transport. Le chêne vert d'ailleurs demande un climat plus doux, ne végète parfaitement que dans une zone limitée, en deçà de certaines latitudes, et croît beaucoup plus lentement, ce ne sera donc pas lui qu'il faudra cultiver et propager, en vue de la production et de la multiplication des truffes, mais bien le chêne truffier blanc, à glands sessiles. L'âge et la grandeur du chêne n'influent pas d'une manière directe sur la production des truffes; un jeune chêne de cinq ou six ans peut donner d'aussi belles truffes qu'un chêne adulte de trente à quarante ans, mais il en donnera moins parce qu'il a moins de racines. Si on coupe une grosse branche du chêne, on diminue la production de truffes, sans doute parce que la racine correspondante à cette branche cesse de végéter ou végète moins activement. La production des glands et des truffes marche en général simultanément; c'est-à-dire que s'il y a beaucoup de glands, il y aura beaucoup de truffes ; toutes deux supposent une végétation active des branches et des racines. C'est tout le contraire pour les noix de galle, dont la présence en grand nombre est un signe de malaise de l'arbre, et coïncide presque toujours avec l'absence plus ou moins complète de truffes ; de sorte que ces années-la les ouvriers truffiers sont réduits à faire le commerce beaucoup moins lucratif des noix de galle.
Les truffes sont rangées dans la terre par étage comme les racines qui leur donnent naissance, les plus superficielles sont les plus grosses et les plus belles. D'ailleurs, le sol du chêne truffier ne s'épuise jamais à produire
des truffes, il en donne indéfiniment et sans qu'il ait besoin d'être fumé ; le fumier, au contraire, comme nous l'avons déjà dit, arrête complétement et pour plusieurs années la production des truffes en faisant fuir la mouche truffigène. Il faut se contenter de diviser le sol à la surface, de le rendre meuble par un simple hersage fait avec une herse à dents arrondies, de l'amener en un mot à l'état où le met le groin du cochon, état dans lequel les racines sont plus facilement accessibles aux mouches qui doivent les piquer, ce qui est une condition essentielle à la production des truffes.
Aussi l'observation prouve-t-elle que la récolte sera plus abondante, si les mois de juillet, d'août et de septembre sont signalés par des pluies copieuses qui empêchent le sol de durcir. Les cultivateurs habiles dont les plantations sont voisines d'un cours d'eau feront bien de suppléer par un arrosage régulier à l'absence des pluies ; mais cet arrosage devra être léger, assez peu abondant, de manière à rendre le sol meuble seulement et non pas compacte.
Le chêne truffier vient sous tous les climats où végète le chêne blanc, c'est-à-dire dans toute la France et dans l'Europe entière. La Provence, le Languedoc, la Bourgogne, le Morvan, le Dauphiné, sont déjà de fait en possession d'un chêne truffier auquel on pourrait substituer, sans aucune difficulté, le chêne producteur de la truffe par excellence, de la truffe noire ; et, dans ces diverses provinces, on trouve le chêne, non-seulement sur les plaines, mais sur les collines les plus élevées. Rien ne serait plus facile que de l'importer et de l'acclimater en Angleterre, où la truffe est si estimée et achetée si cher; la rigueur du froid pourrait, il est vrai, faire périr de temps en temps les tubercules, mais ce seront toujours des accidents rares, d'autant plus qu'une couche de neige de quelques centimètres d'épaisseur est un abri très-suffisant. Il sera toujours vrai, néanmoins, que le climat le plus favorable au développement du tubercule sera celui où les pluies seront abondantes au printemps et dans les mois de juillet, d'août et de septembre, et qu'on ne trouvera des truffes en abondance au pied des chênes que dans les terrains tertiaires ou de transport, à base de chaux ou d'argile, peu profonds, mélangés de rognons de silice ou de sable siliceux.
Le chêne truffier peut être obtenu ou à l'aide de semis de glands, ou par le repiquage des jeunes plants. La première méthode est incomparablement plus avantageuse et plus économique, parce que les glands sont d'un transport facile. On a coutume de stratifier les glands avant de les ensemencer, pour déterminer dans la masse une sorte de fermentation ou un commencement de germination, que l'on obtient de même artificiellement par d'autres moyens. C'est un mauvais procédé, car, dans le transport, au lieu de l'ensemencement, les germes se brisent et le gland
reste stérile, ou ne donne naissance qu'à un chêne chétif ou malade. Il vaut infiniment mieux enterrer le gland sur place par le procédé suivant.
La main armée d'un marteau à pointe longue et conique, l'ouvrier planteur perce d'abord dans la terre un trou de quatre à cinq centimètres de profondeur, et pousse le gland jusqu'au fond; il ramène la terre, et frappç un grand coup avec la tête du marteau pour la tasser, et défendre ainsi le gland de la dent des rats ou des mulots.
Si les chênes nés des glands doivent rester sur place, on sèmera les glands en ligne droite, en laissant entre eux un intervalle d'environ quinze centimètres, et entre les lignes un intervalle de trois mètres. Rien n'empêchera de cultiver pendant les premières années l'espace vide entre ces lignes, à la seule condition de conserver à droite et à gauche de chaque ligne une largeur de vingt centimètres qui ne sera pas ensemencée. A la troisième ou quatrième année, lorsque les jeunes plants de chênes seront en état d'être transplantés, on fera les éclaircies nécessaires, en laissant entre les arbres l'intervalle qu'exige un accroissement régulier et parfait. Dès la quatrième année, on pourra récolter quelques truffes, et on reconnaîtra leur présence à l'absence complète de toute végétation. Il importe de bien remarquer, dans tous les cas, que la mouche truffigène ne se fixera et ne deviendra féconde, que la truffe ne se développera par conséquent, que sous les ombrages que le soleil peut atteindre. Il faut donc éclaircir la plantation à mesure qu'elle grandit, de manière à la maintenir accessible au soleil ; on diminue, sans aucun doute, de cette manière, le nombre des chênes truffiers, mais ceux qui restent donnent un plus grand produit, en même temps que leur bois prend une plus grande valeur : dans tous les cas, c'est une condition essentielle au développement des tubercules ; et rien n'empêche de replanter ailleurs les pieds extirpés, ainsi que nous allons le dire.
S'il ne s'agit que de constituer une pépinière de chênes qu'on replantera plus tard sur d'autres points, l'espace entre les glands pourra être réduit à 6, et celui entre les lignes à 80 centimètres. Le semis des glands, nous l'avons dit, est préférable au repiquage des jeunes plants; et si l'on adopte cette seconde méthode, il faut avoir grand soin, avant de replanter, de supprimer les racines pivotantes pour ne laisser que les racines chevelues.
Les semis ou plantations de chênes truffiers ne demandent d'ailleurs aucun autre soin que celui du hersage ou labour superficiel dont il a été question, d'un arrosage en temps opportun et par les temps de sécheresse trop grande, en août, juillet et septembre.
En résumé : 1° M. Ravel, fort de sa longue expérience et d'une observation de plus de trente années, est intimement convaincu que l'on peut acclimater presque sur tous les points de la France et de l'Europe le
chêne truffier ; et il s'est mis en mesure de fournir à tous ceux qui lui en feront la commande des glands choisis, du chêne sous lequel naît la truffe noire ou truffe comestible par excellence. Comme le gland est mûr vers le 15 octobre, il sera bon que les demandes parviennent dans le commencement de ce mois. M. Ravel expédiera les glands demandés dans des paniers ,H jour, où l'air puisse circuler sans peine, et conserver à la semence toute sa fraîcheur. A la rigueur, il expédierait aussi de jeunes plants de chênes truffiers. mais sans garantir le succès du repiquage.
2° Si on se procurait le gland du chêne truffier sans importer en même temps la mouche truffigène, on s'exposerait à attendre très-longtemps ou à n'obtenir peut-être jamais une récolte qui compense les déboursés de la plantation. M. Ravel tiendra donc aussi à la disposition des amateurs des larves de mouche, avec une instruction sur la manière de les faire naître et de les multiplier. Ce sera lorsque les semis de chêne auront atteint l'âge de quatre ou cinq ans qu'il faudra importer les mouches truffigènes.
M. Ravel les expédiera à l'état de larves ou de chrysalides, dans des boîtes à jour, que l'on déposera sous l'ombre des chênes nés des glands primitivement formés par lui.
3° Enfin, M. Ravel pourra plus tard céder ou procurer, à des prix raisonnables, de jeunes truies truffières, dressées pour la cueillette des truffes.
L'idée de propager artificiellement ou de multiplier indéfiniment la truffe'par l'importation simultanée des chênes truffiers et de la mouche truffigène est certainement une idée neuve, que personne n'avait encore émise, et dont par conséquent M. Ravel a pu s'assurer la priorité par la demande d'un brevet d'invention. Il a vu avec raison, dans cette idée, le point de départ d'une grande industrie qu'il pourra seul exploiter, en raison de son droit exclusif à la vente du gland ou plant de chêne truffier et de la mouche truffigène.
Tout le monde est d'accord aujourd'hui sur la nécessité de reboiser le sol ; mais le plus grand nombre recule devant les dépenses que le reboisement entraîne. On ne se résigne qu'à grand'peine à faire le sacrifice du revenu annuel de la terre, et à laisser ses héritiers recueillir les bénéfices d'un bois en plein développement. L'industrie truffière permet de résoudre cette difficulté capitale. En semant ou plantant des chênes truffiers, suivant la méthode que nous avons indiquée, on s'assurera, dès la quatrième ou la cinquième année, un revenu égal ou du moins comparable à la valeur du sol, dont on pourra jouir, par conséquent, en même temps qu'on laisse à ses enfants ou petits-enfants la perspective d'une exploitation forestière lucrative. F. MOIGo.
(Extrait du Cosmos.)
DOCUMENT OFFICIEL.
COPIE D'UNE CIRCULAIRE ADRESSÉE PAR M. LE MINISTRE D'ÉTAT ET DE LA MAISON DE L'EMPEREUR A MM. LES INSPECTEURS DES DOMAINES ET FORÊTS DE LA COURONNE , RELATIVE A LA DESTRUCTION GÉNÉRALE DES LAPINS.
Paris, 29 novembre 1856.
« Monsieur l'inspecteur, « L'Empereur vient de m'ordonner de faire procéder immédiatement à la destruction des lapins dans toutes les forêts de la dotation de la couronne.
« S. M. a voulu, en prescrivant cette mesure, mettre un terme aux graves dommages que les lapins causent aux forêts et aux propriétés riveraines.
« Il n'a point échappé à l'Empereur que la destruction des lapins nuira aux chasses, et qu'elle aura, en outre, pour effet de priver la plupart des préposés forestiers d'une ressource précieuse pour leur famille; mais S. M. a pensé que ces inconvénients ne sauraient être mis en parallèle avec les avantages qui résulteront de la destruction.
« On pourra d'ailleurs, pour les chasses, suppléer en grande partie aux lapins par les lièvres, et des dispositions devront être prises à cet effet, partout où les circonstances le permettront.
« D'un autre côté, l'Empereur trouvera certainement dans ses généreuses inspirations les moyens de compenser par d'autres avantages la perte que les préposés forestiers de la couronne éprouveront.
« Convaincue du bon esprit qui anime tous les employés de la liste civile, S. M. ne doute pas de l'empressement qu'ils mettront à exécuter ses ordres, et elle n'a pas voulu, par ce motif, que des chasseurs étrangers à l'administration leur fussent adjoints. Elle se repose, du reste, entièrement sur vous, Monsieur l'inspecteur, du soin de diriger leur action et de stimuler leur zèle si, contre son attente, il en était besoin.
« C'est pendant l'hiver, et surtout au moment des neiges, que les lapins commettent le plus de dommages dans les bois ; il importe donc d'en hâter autant que possible la destruction.
« Je vous invite en conséquence, Monsieur l'inspecteur, à prendre dans ce but toutes les dispositions qui vous paraîtront compatibles avec un bon service.
« Si des difficultés survenaient, vous en référeriez à M. l'administrateur général des domaines et forêts de la couronne, que je charge spécialement de suivre l'exécution de la mesure et de m'en rendre compte.
« J'ai donné à S. M. l'assurance, Monsieur l'inspecteur, que vous feriez personnellement tous vos efforts pour remplir ses intentions, et j'apprendrai avec plaisir que je n'ai pas trop présumé dans cette circonstance de votre zèle.
« Recevez, etc.
« Le ministre d'État et de la maison de l'Empereur, « Signé : ACHILLE FOULD. »
Quelques réflexions ne seront peut-être pas inutiles pour faire comprendre l'importance de cette mesure.
Le savant Duhamel disait aux seigneurs de son temps qu'il fallait renoncer à élever des bois ou se priver de gibier, et les seigneurs ne l'écoutaient guère ; aussi leurs forêts se trouvaient-elles dans un état pitoyable, et non-seulement leurs forêts mais les campagnes environnantes, car le gibier n'est pas moins friand des produits de l'agriculture que des jeunes pousses des arbres. On cite des contrées entières dont les habitants ont dû émigrer, et qui ont été transformées en désert par suite de la multiplication du gibier qui y avait rendu toute culture impossible. Moins un pays contient de gibier et plus il peut nourrir de créatures humaines. Les philanthropes chasseurs ne savent donc ce qu'ils disent quand ils se plaignent de la diminution du gibier en France, comme d'un grand malheur au point de vue de l'alimentation publique.
Les ptus grandes causes ne sont pas toujours celles qui produisent les plus grands effets. Parmi les animaux sauvages, les plus gros sont loin d'être les plus redoutables pour les bois et pour les champs. Ainsi les lapins, qui sont presque les plus petits des hôtes de nos forêts, méritent d'en être considérés comme les bêtes les plus malfaisantes, et cela par deux raisons : d'abord parce que leur voracité ne respecte rien et s'attaque même a l'aubier des arbres après avoir rongé l'écorce ; ensuite parce qu'ils se multiplient avec une incroyable rapidité. Mettez deux lapins dans un champ, au bout de deux ans vous en trouverez quatre mille. Strabon raconte que deux lapins apportés du continent dans les îles Baléares, s'y multiplièrent au point de contraindre les habitants à réclamer une autre patrie : Terram sibi habitandam quod suâ se ab animalibus pelli, usque eorum multitudini resistere posse, dicerent.
Pour donner une idée du mal que peuvent faire les lapins, nous dirons qu'on ne porte pas à moins de 100,000 fr. les dommages qu'ils eau-
saient chaque année, soit à la forêt de Compiègne soit aux campagnes environnantes. J Mais si les lapins sont considérés comme un fléau pour les bois et les champs, ils font au contraire la joie du chasseur, auquel ils offrent les moyens faciles et sûrs de remplir sa carnassière ; et, dans les forêts de la liste civile, cette considération avait jusqu'alors été opposée victorieusement aux doléances des forestiers et des cultivateurs.
L'Empereur n'a plus voulu qu'il en fût ainsi ; il a voulu qu'on préférât l'utile à l'agréable ; il a voulu que dans l'administration de ses domaines comme dans celle de l'État, le bien public fût toujours placé au-dessus de l'intérêt individuel. ,.,ft'
CHRONIQUE FORESTIÈRE.
Mutations dans le personnel forestier. — Moyen de distinguer le chêne du châtaignier dans les vieilles charpentes.- Moyen de fendre les arbres.- Conservation des bois.
•I .rf.
= Mutations dans le personnel forestier. - M. DE FRANCE (MarieÉtienne), garde général des forêts de troisième classe, en résidence à Sartène (Corse), a été élevé à la deuxième classe de son grade au même poste.
M. DE KmwAN, garde général de troisième classe à Tarascon (Ariége), a été nommé en la même qualité à Pierre-Fontaine (Doubs).
= Moyens de distinguer le chêne du châtaignier dans les vieilles charpentes. — Les Sociétés impériales et centrales d'agriculture et d'horticulture se sont occupées à différentes reprises des moyens de distinguer parmi les charpentes de construction ancienne celles qui appartiennent au chêne de celles qui sont en bois de châtaignier. Un double intérêt s'attache, en effet, à cette constatation, car, seule, elle doit permettre de vérifier ce que la tradition rapporte de la conservation remarquable et très-longue du bois de châtaignier, et de décider si la culture de cet arbre serait préférable à celle du chêne 'pour diverses applications, ou s'il n'y aurait pas eu confusion entre les propriétés attribuées aux deux essences.
Dans la dernière séance de la Société impériale et centrale d'horticulture, M. Payen, qui avait été chargé d'étudier expérimentalement cet intéressant problème, a fait connaître le résultat de ses recherches. Par l'emploi des réactifs chimiques sur chacun des deux bois, M. Payen a constaté que l'ammoniaque produit une coloration rouge, éphémère, plus distincte sur le châtaignier que sur le chêne. De plus, si l'on trace des lettres sur chacun des bois avec un liquide limpide, incolore, du sulfate de
fer dissous dans l'eau, par exemple, les caractères apparaissent presque aussitôt : en noir sur le chêne, en violet intense sur le châtaignier.
Des caractères distinctifs bien tranchés, outre ceux constatés à l'aide des réactifs chimiques, ont été observés sur les bois en question par M. Payen, à l'application duquel des échantillons du quercus pedunculata de l'ancien continent, du quercus rubra des Etats du nord de l'Amérique et du Canada, provenant du bois de Boulogne, avaient été soumis. Ces deux espèces ont offert des caractères identiques à ceux du quercus sessiliflora, ou chêne commun à glands sessiles de notre continent.
Sur les coupes perpendiculaires aux fibres du bois ou un peu obliques, le chêne laisse voir distinctement à l'œil nu un grand nombre de rayons médullaires, portant, tout autour du centre du canal médullaire ou de la moelle, traversant le cœur et l'aubier pour aboutir aux couches corticales. Ces rayons, qui contiennent un tissu cellulaire, se montrent de couleur plus pâle et plus luisants que les tissus ligneux et fibreux des couches concentriques d'accroissement qu'ils traversent. On n'aperçoit rien de semblable sur la coupe également perpendiculaire aux fibres du bois ou un peu oblique du châtaignier ; celui-ci ne laisse voir à l'œil nu que ses couches concentriques d'accroissement, en général plus ternes et plus épaisses, mais toujours exemptes de rayons médullaires directement appréciables. Ces caractères se retrouvent sans peine dans les charpentes anciennes ou nouvelles, même jusque dans leurs menus morceaux, pourvu que l'on puisse y pratiquer une coupe perpendiculaire aux fibres de 1 centimètre ou 2 d'épaisseur. De ces observations, M. Payen a conclu qu'aucun des échantillons d'anciennes charpentes provenant des démolitions de Paris qui lui avaient été remis, et sur lesquels il a expérimenté, n'était en bois de châtaignier.
Mais on ne saurait trop encourager la culture de cet arbre, qui est à la fois arbre fruitier et forestier, et dont la croissance est rapide, comparativement à celle du chêne.
=.Uoyen de fendre les arbres.. - Le Morning Chronicle raconte que des expériences ont été faites pour essayer un moyen proposé par M. M.
White, marchand de bois de construction, pour fendre les troncs d'arbre.
Le procédé est très-simple. On perce un trou qui pénètre jusqu'au milieu du tronc d'arbre, et on place une cartouche à son orifice. On y introduit ensuite, par-dessus la cartouche, un morceau de fer destiné à opérer la percussion, et on l'y retient fixé. En frappant sur le morceau de fer, on détermine l'explosion de la cartouche, et par suite le tronc d'arbre se trouve divisé. Cette innovation est due au capitaine Norton, qui assistait la semaine dernière aux expériences.
::= Conservation des bois. — Le problème de la conservation des bois.
dont la consommation va toujours en augmentant, par suite des développements de l'industrie et de l'établissement des chemins de fer, est un des plus importants que puisse avoir à résoudre la chimie industrielle.
La Société impériale et centrale d'horticulture, par l'organe de son secrétaire général, M. Andry, a appelé dernièrement l'attention de ses membres sur les bons résultats que l'on obtient de l'emploi, comme tuteurs, échalas de vigne, etc., de bois traités par le sulfate de cuivre en dissolution dans la proportion de 2 kilogr. pour 100 litres de liquide. Au Jardin des Plantes de Paris, on applique avec un plein succès ce procédé de conservation aux paillassons et aux toiles destinés à couvrir les serres, et qui, auparavant, ne duraient guère plus d'une année.
A ce sujet, M. Payen est entré dans quelques explications sur les différents agents en usage aujourd'hui pour la conservation du bois, tels que goudron de gaz distillé, acétate de plomb, chlorure de zinc, sulfate de fer, sulfate de cuivre, etc. On a essayé, en Angleterre, l'acide arsénieux ; mais on a reconnu qu'il devient dangereux pour les ouvriers chargés de mettre en œuvre les bois qui en sont imprégnés. Le chlorure de calcium agit comme le sel marin; il offre quelques avantages dans certaines applications, par exemple pour les cercles en bois employés dans des lieux secs ; car ses propriétés hygroscopiques, en préservant le bois d'altération, lui conservent, en outre, toute sa souplesse. M. Payen est d'avis que le sulfate de fer doit être rejeté comme détruisant la force de cohésion des tissus végétaux. Il recommande surtout, lorsqu'on a recours au sulfate de cuivre, de le choisir aussi pur que possible, ce qui se reconnaît facilement à la belle couleur bleu foncé que présentent les cristaux de ce sel. L'ami-
rauté anglaise donne la préférence aJJ.--Ghe de zinc neutre, dont l'efficacité a été reconnue, notainmenrcontKé l'à6tton destructive des tarets 1 )
de la mer Noire.
FIN DU TOME QUINZIÈME.
TABLE DU TOME QUtNZIÈME.
JANVIER.
Aux abonnés des Annales forestières, à l'orcasioll d'une circulaire de M. le directeur général des forêts. 1 De la formation du plan d'exploitation dans les amenagemeuts des forêts (suite). 4 Fiscicullure pratique, appliquée à l'empoissonnement des cours d'eau, d'après les méthodes de M. C. Millet, inspecteur des forêts. Il Revue commerciale. 15 Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris, décembre 1855. 17 Des forêts de l'Algérie au point de vue des besoins maritimes (suite). ibid.
Les inondations, par M. Jacques Valserres. 21 Chronique forestière. — Promotions et nominations de plusieurs agents forestiers dans l'ordre impérial de la Légion d'honncllr.-Pisciculture pratiqlfe. - Produits des forêts résineuses de la Caroline du Nord. —
Etat général du personnel du service forestier de l'Algérie. 25
FÉVRIER.
Cordage du bois rond, par M. NoirotBonnet. 29 Du rapport, entre la production de la haute futaie et celle du taillis (extrait des Feuilles critiques de M.
Pfeil). 36 Revue commerciale. 40 Tableau du mouvement des ports d'approvisionnement de Paris pendant le quatrième trimestre de 1855. 49 Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris. — Récapitulation des années 185-55. 50 Même tableau, janvier 1856. ibid.
Accroissement en diamètre des végétaux, par M. A. Trécul. 51 Etat du personnel de l'administration générale des domaines et forêts de la couronne. 54 Chronique forestière. — Mutations dans le personnel forestier. — Statistique. 55
MARS.
Quelques observations générales sur la sylviculture en France. 57 Du reboisement des landes, travaux de l'Association bretonne, session de 1855. 63 Accroissement des végétaux, extrait d'un mémoire présenté à l'Académie des sciences, par M. Trécul. 68 Revue commerciale. 72
Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris, février 1856. 74 Etat général des bois domaniaux dont l'aliénation doit avoir lieu en 1856, conformément aux dispositions de l'art. 20 de la loi des finances du 5 mai 1855. 75 Production des truffes à Carpentras, par M. le comte de Gasparin. 78 Chronique forestière. — Mutations dans le personnel forestier. — Nomination de M. Vicaire à la Société impériale d'agriculture. — Tanneries. - Ouverture du port de Benicarlo (Espagne) à l'importation des douves et cercles de futailles. 81
AVRIL.
Du libre défrichement des bois, par M. le baron de Sahune. 85 Revue commerciale. 97 Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris, mars 1856. 99 Les bois des colonies françaises à l'Exposition universelle de Paris. 100 Chronique forestière. —Conditions à remplir pour être promu au grade d'agent forestier. — Le hancornia speciosa, le gutta-percha et le caoutchouc artiticiels. — Origine des cerisiers. — Hetru phénoménal.
, Reboisement des montagnes. —
Taille des arbres. — Arbres à cire. 104
MAI.
Du libre défrichement des bois, par M. le baron de Sahune (suite). 113 Observations sur l'article précédent. 122 Rapport à la Société forestière par la Commission des encouragements pour les meilleurs appareils de chauffage au bois. 125 Enquête sur la braise des boulangers de Paris. 133 Revue commerciale. 136 Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris, avril 1856. 138 Société forestière. Vœux relatifs au défrichement des bois des particuliers. ibid.
Chronique forestière. — Mutations dans le personnel forestier. — Adjudication de la fourniture de bois de l'hospice impérial des QuinzeVingts. 140
JUIN.
Les bois de pin du département de la Lozère, par M. A. Bujon, garde général des forêts. 4 141
Du cadastre et de l'impôt foncier des bois aliénés par l'Etat en fonds et superficie, par M. Maulde, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation. 146 Revue commerciale. 153 Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris, mai 1856. 158 Inondations. ibid.
Tableau du mouvement des ports d'approvisionnement de Paris pendant le premier trimestre de 1856. 159 Chronique forestière. — Mutations dans le personnel forestier. — Nominations dans l'ordre de la Légion d'honneur. — Intluence des forêts sur la nature du sol. — Algérie. —
Manière d'obtenir et récolter la gomme au Sénégal. — Organogénie végétale; cuticule. — Emploi du collodion pour la multiplication des plantes par boutures. 160
JUILLET.
Observations sur la révolution applicable à une forêt de chênes de 0 à 80 ans. 169 Lettre de l'Empereur à l'occasion des inondations, et des travaux à faire pour les éviter à l'avenir. 173 Notice : Mode d'action des végétaux sur les masses d'eau et sur les terrains en pente; de leur influence comme force modératrice des cours d'eau, par Cheval Hubert, propriétaire de bois. 177 Revue commerciale : mouvement des ports pendant le deuxième trimestre de 1856. 181 Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris, juin 1856. 186 Tableau du mouvement des ports d'approvisionnement de Paris pendant le deuxième trimestre de 1856. 187 Adjudications de coupes de bois. 188 Aliénations de forêts domaniales. ibid.
Revue bibliographique : 1° Des droits d'usage dans les forêts, de l'administration des bois communaux et de l'affouage, par M. Meaume, avocat, professeur à l'Ecole impériale forestière de Nancy et chevalier de la Légion d'honneur. 190 20 Répertoire méthodique et alphabétique de législation, de doctrine et de jurisprudence, par MM. Dalloz, t. XXXV, renfermant les Traités du droit de pêche, des pensions, des peines de la péremption, etc. 191 30 Traité historique, théorique et pratique de la législation des portions communales ou ménagères, comprenant l'édit de 1769 pour les Trois-Évêchés; l'édit de 1774 pour la Bourgogne ; les lettres patentes de 1777 pour la Flandre ; l'arrêt du Conseil de 1779 pour l'Artois; mis en harmonie avec les règles du
droit commun et les principes du Code Napoléon, par M. G. Legentil, avocat et juge suppléant près le tribunal civil d'Arras. 192 Chronique forestière. — Remarques sur un tronc d'arbre découvert dans une situation verticale. — Production du bois dans l'Amérique du Nord. 194
AOUT.
De la culture des forêts, des plantations, par M. Noirot. 197 Pisciculture pratique, rapport sur les mesures à prendre pour assurer le repeuplement des cours d'eau de la France, par M. C. Millet, inspecteur des forêts. 206 Erreur que l'on peut commettre en arpentant avec une boussole non horizontale. 215 Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris, juillet 1856. 217 Adjudications de coupes de bois. 218 Aliénations de bois domaniaux. ibid.
Mesurage de la grosseur des arbres. 219 Chronique forestière. — Mutations dans le personnel forestier. — Correspondance. — Société forestière.
-Lettre aux membres des Conseils généraux, réunis en session ordinaire. - La Société d'agriculture et les inondations. — Pêche merveilleuse. 220
SEPTEMBRE.
De la culture des forêts (suite et fin), des défrichements, par M. Noirot. 225 De la-culture du frêne. 234 Revue commerciale. 240 Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris, août 1856. 243 Aliénations. ibid.
Expériences sur diverses essences de bois propres aux échalas. 244 Document officiel relatif à la production exacte des marronniers d'Inde. 246 Chronique forestière. — Mutations dans le personnel forcstier.-Plantations de pins sylvestres en Champagne. — Noix d'Amérique. —
Transport du poisson vivant. —
Substitution du bois au chiffon dans la fabrication du papier. — Conservation du bois, nouveau moyen.
— L'arbre à cire. — Inondations, Société universelle de Londres. —
Emploi comme fourrage des feuilles d'orme et de peuplier. — Commencement d'incendie à Médéah ( Algérie). ibid.
OCTOBRE.
Des Commissions d'aménagement et de cantonnement. 253 Revue commerciale. 260 Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris , septembre 1856. 263
Tablettes-tarifs. 263 Note hur l'origine des sources. 26 i Liste des candidats admis le 18 octobre 1856 à l'Ecole forestière de Nancy. 268 Administration des forêts, état du personnel par arrondissement. 269 Chronique forestière. — Mutations dans le personnel forestier. -Ecole impériale forestière à Nancy. Conservation et germination des graines. — L'iris jllncea.-Nouveau : médicament fourni par un arbre de la Chine. 277
NOVEMBRE.
Des Commissions de cantonnement. 281 Revue commerciale. 288 Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris, octobre 1856. 293 Tableau du mouvement des ports d'approvisionnement de Paris pendant le troisième trimestre de 1856. 294 Note sur l'origine des sources (suite et fin). 295 Sur la truffe, le chêne iniffier et la mouche truffigène. 298
Pêche. Décret sur le droit de pêche dans le canal de Revigny. 303 Chronique forestière. - Mutations dans le personnel forestier. — Encouragement donné à un brigadier forestier pour semis et plantations.
— Sucre de bouleau. — Note sur le dragon nier. — Extraction et préparation du caoutchouc. 305
DÉCEMBRE.
A nos abonnés. 309 Les plantations de Paris. 311 Revue commerciale. 317 Tableau comparé de l'entrée des bois et des combustibles à Paris, novembre 1856. 319 Sur la truffe, le chêne truffier et la mouche trufligène (suite et fin). lbid.
Circulaire relative à la destruction des lapins. 325 Chronique forestière. — Mutations dans le personnel forestier.—Moyen de distinguer le chêne du châtaignier dans les vieilles charpentes. v — Moyen de fendrtes arbres. —.
Conservation déchois. ■•»*'Î827 - - iv .f ; - r\-'
FIN DE LA TABLE.