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Titre : Bulletin colonial : supplément à la Revue du XIXe siècle

Éditeur : [s.n.] (Paris)

Date d'édition : 1839-12-04

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327173415

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb327173415/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 495

Description : 04 décembre 1839

Description : 1839/12/04 (A4,N43).

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k6366533j

Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-3013

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 12/11/2012

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Paris, 3 Décembre.

PROCÈS DU SIEUR AIIÉ NOEL.

L'affaire do sieur Amé Noël acquiert chaque jour plus de gravité. Une question toute judiciaire a dégénéré en question politique. Les passions hostiles aux colonies se sont exaltées; un organe de h prease a pris avec trop peu de prudence la, défense des colonies. L'orgueil des aholitionDistes s'en est irrité, et maintenant les provocations, les injures et les menaces les plus véhémentes sont adressées à tous les propriétaires de nos colonies, ear rien n'est moins doux qu'un humanitaire. - -- -

Dans un de ses derniers numéros le Courrier Françauù publié nu article ayant pour titre : Insolence du régime colonial. Ce journal prétend que les souffrances des esclaves augmentent à mesure que des voix généreuses s'élèvent pour eux en France ; il tonne contre le jury qui a acquitté, contre l'avocat qui a défendu le sieur Amé Noël. Il ne veut pas qu'on dise que l'esclave est la chose du maître. Enfin il invoque un châtiment contre ce qu'il appelle les abominations des Antilles, et cette école de violence et d'immoralité qu'on appelle le régime de l'esclavage. Il invoque l'intervention des Chambres et prétend qu'il suffirait de retirer aux colonies la main qui les protège, pour voir revenir le dernier colon avec le dernier soldat.

- - - -

On croit reconnaître à la violence et à l'âpreté de ces expressions un écrivain à qui ses hautes fonctions dans la magistrature devraient imposer plus de calme et de modération. C'est assez mal s'y prendre que d'accuser les colons-de violence, d'insolence et d'outre-cuidance que employer à leur égard des formes pareilles. L'exemple siérait très-bien à côté de la leçon. Nous le donnerons, nous, à l'auteur de cet article en ne nous emportant ins contre lui.

- De que! ,'agit-il? La France a quatre colonies à esclaves, et * c'est dans une seule que l'on entend parler des abominations que signale le Courrier. Voih donc trois colonies hors de catfse.

C'est un grand point ; mais poursuivons.

Dans cette colonie il y a deux mille propriétaires. Sur ce nombre un seul est accusé d'avoir cruellement maltraité un esclave. Encore ces mauvais traitemens, s'ils ont eu réellement lieu, auraient leur source dans des passions entièrement étrangères aux rapports ordinaires de maître à esclave, c'est-à-dire au travail. Voilà donc tous les colons de cette ile moins un, entièrement étrangers à cette affaire et ne pouvant pas même en être rendus solidaires, à moins qu'on ne les juge capables de croire à la sorcellerie, aux pactes avec le diable et au sabbat.

Voilà de la raison opposée à des exagérations injustes. Nous accorderons même que le sieur Amé Noël soif en définitive aussi coupable qu'on veut le faire, qu'il ait outrepassé les droits du maître et violé ceux de l'humanité ; eh bien ! nous disons que cette accusation regarde le sieur Amé Noël tout seul.

Il n'est pas de trimestre que la, police française ne découvre dans des caves 01.1. dans des bouges quelques malheureuses victimes de l'abus de l'autorité paternelle, quelques pauvres jeunes ouvriers accablés de travaux, de mauvais traitemens, de privations et de misère. Dernièrement encore les feuilles judiciaires ont signalé un fait semblable dans un des faubourgs de Paris, à l'égard de jeunes apprentis. On regarderait comme un insensé l'écrivain qui, s'appuyant sur un incident pareil, accuserait tous les parens, tous les chefs d'atelier d'être des barbares et demanderait des châtiment contre eux. L'auteur de l'article du Courrier n'est pas plus raisonnable.

Chaque société a des hommes excentriques, des avares, des colériques, des hommes de violence, de haine et d'emporte- ment, qui se laissent aller à des mouvemens d'irascibilité et de vengeance. Les colonies en ont moins que d'autres pays, mais enfin elles n'en sont pas exemptes. Croit-on que les Antilles soient le séjour des anges, des saints et des élus ? Eh ! mon Dieu ! les hommes qui voudraient tant de perfections dans les colons devraient bien regarder un peu autour d'eux.

Encore une fois, l'affaire du sieur Amé Noël, homme de couleur libre, est une affaire isolée, isolée par sa nature, isolée par sa personniifcation. Les colons n'en prennent ni la solidarité ni la responsabilité. Comme leur manière de traiter les es-

claves est entièrement l'opposé de ce qu'on veut faire croire par un seul fait, il se font forts de prouver que cette accusation ne peut les atteindre, ni de loin, ni de près.

Quant à l'expression qui a si fort scandalisé l'écrivain du Courrier, que 1 esclave est la chose du maître, il est à regretter • qu'un grave jurisconsule n'ait pas daigné ouvrir nn de ses livres de droit pour s'assurer si cette manière de parler n'était pas légale. Un esclave est un homme sans doute, aux yeux de Dieu, comme à ceux de tout chrétien, mais il est une chose par la valeur qu'il représente et par sa possession. La jurisprudence tant ancienne que nouvelle a consacré cette locution ponr tout ce qui est un objet d'achat, de vente ou de louage, animée on inanimée. Nous n'entendons pas par là que le noir esclave soit une bête de somme, ou une charrette, mais nous disons qu'il est une propriété , d'une nature particulière si l'on veut, et que touht propriété est une chose.

Quant à la menace de retirer aux colons la main qui la pro-

tége, nous attendrons que la proposition en soit faiie sérieusement aux Chambres. Les colons ne sont pas des enfans dénaturés; ils ne se regardent pas comme dispensés de reconnaissance et de déférence envers la mère-patrie ; mais ils croient lui rendre services pour services et que leurs travaux sont aussi utiles à la métropole que la protection de celle-ci leur est prolkable.

C'est dans des termes de sagesse, de logique et de raison que nous voudrions renfermer cette discussion. Nous sommes persuadés que tous les intérêts y trouveraient leur compte.

Affaire Amé Noël. M. H. Ruyneau de Saint-George, délégué de l'île Bourbon, a adressé la lettre suivante au Journal des Débat» : j AU ntDAcTEUR.

« Les journaux continuent à s'occuper de l'arrêt de la cour d'à*" sises de la Basse-Terre ( Guadeloupe), qui a aquitte Amé Ntël de l'accusation dirigée contre lui.

» Les élétnens nous manquent pour une appréciation exacte dd

sifitiuuMta*.

SOUVENlRSitNTlltES DU TEMPS DE L'EMPIRE.

Rnttlj.

IV.

1 Huit jours après son entrevue avec l'empereur, Kretlly recevait nomination de garde-général des eaux et forêts à Montélimart.

Cette nouvelle existence lui parut monotone, mais elle chungea vers les premiers mois de 1814. Lorsque les alliés eurent inondé la France, il conçut ridée de - lever un corps de partisans, mais il était trop tard.

Déjà les touverains alliés étaient maîtres de la capitale ; Napoléon ̃avait abdiqué et se dirigeait, par le midi de la France, vers le lieu de son embarquement pour l'île d Elbe. Krettly, ayant su que Napoléon devait passer par Montélimart, voulut voir son empereur une dernière fois. En allant au-devant de lui, il rencontra un vieil officier de l'armée d'Egypte. Krettly hâte le pas , rejoint cet officier, le ttconna!t et l'aborde. Tous deux se serrèrent la main sans prononcer une parole et continuèrent tristement leur marche. Arrivés ensemble à l'entrée de l'hôtel de poste , devant lequel la voiture de Napoléon et arrêtée, il furent aperçus par le général Bertrand, qui vint audevant d'eux et les introduisit auprès de Napoléon. Ils le trouvèrent .is devant le feu , les coudes posés sur une petite table et la tête appuyée dans ses deux mains. En voyant Krettly, l'empereur se leva, ifit quelques pas vers lui, et ne l'appelant pas comme autrefois Bamboche ! il lui tendit la main en prononçant ce seul mot : « Viens! Il

Krettly se précipite sur cette main qu'il couvre de pleurs; mais Napoléon l'attire à lui, et, avec une émotion qu'il ne cherche pas à déguiser : « Que fais-tu? C'est sur mon cœur que doivent venir se reposer tous les braves de ma vieille garde. Viens donc, te dis-je! a Le vieil officier d'Egypte, présent à cette scène, pleurait à chaudes larmes, et, après être tombé à deux genoux, avait saisi les basques -de la redingotte de l'empereur, et les portait avidement à ses lèvres.

Vapoléon le relève et l'embrasse à son tour.

« Mes enfans, leur dit-il après un moment de silence, votre dénouement à la patrie, votre amour pour ma personne feront un jour notre gloire et la mienne. Les revers s'effacent avec le temps , les passions s'affaiblissent et disparaissent; mais l'histoire reste. Vous aérez grands comme moi dans la postérité. »

Cette noble pensée parut consoler Napoléon; son regard avait quelque chose d inspiré, et sa belle physionomie reprit en cet instant œ calme et cette sérénité qui lui étaient ordinaires. Puis il y eut encore quelques minutes de silence. Enfin, de ce ton familier dont il usait volontiers avec ses vieux soldats, il donna sur la joue de Krettly quelques petits coups du revers de sa main en lui disant avec .- un aourire indéfinissable s

tt Est-ce que par hasard, vous ne croiriez plus à ce que dit votre empereur, monsieur? »

Celui-ci, le voyant en si bonne disposition, lui demanda la faveur de l'accompagner à l'île d'Elbe.

« Jmpossible, dit Napoléon un peu sèchement; je l'ai refusé à des gens qui m'aimaient autant que toi. Tu n'es pas raisonnable, mon ami, reprit-il ensuite avec abandon; tu as une femme et des enfans: tu te dois à ta Camille. Une seule chose m'afflige : c'est la crainte qu'on ne rende malheureux ceux que j'ai rendus heureux pour les récompenser de ce qu'ils ont fait pour la France et pour moi. Ce sera pourtant le triste système de ceux qui vont me succéder. Pour eux, régner sera tout; la patrie ne sera rien. »

Napoléon se tul et redevint pensif.

Krettly et son compagnon auraient voulu rester avec l'empereur encore bien long-temps ; mais craignant que leur visite ne devînt indiscrète , Krettly se bâta de prendre la parole : « Sire, encore un mot essentiel à vous dire.

Parle.

DéScz'vous du passage de Donzerre et surtout de celui d'Avignon. M L'empereur regarda Krettly avec étonnement.

« Oui, sire, tout le monde est instruit de la route que votre majesté doit suivre; je l'ai explorée moi-même, mais comme sur un terrain ennemi.

C'est bien, c'est bien, je te remercie. Adieu messieurs. »

A ces mots Krettly et le vieil officier prirent congé de l'empereur, qui leur dit encore en les voyant s'éloigner : « Mes bons amis , faisons des vœux pour un meilleur avenir. n

Après le départ de Napoléon, Krettly reprit ses fonctions à Montélimart et continua de les remplir avec le même zèle qu'auparavant; mais le garde-général des eaux et forêts eut à subir , eu sa qualité d'ancien soldat de l'usurpateur, des tracasseries, des dénonciations, des menaces anonymes, des injustices sans nombre. La nouvelle du retour d, l'île d'Elbe lui fit oublier tous ses chagrins.

Le vieux porte-étendard des guides accourut aussitôt à Paris. Mais à ce moment il était difficile d'approcher de Napoléon. En vain pendant dix jours essaya-l-il de pénétrer dans le palais des Tuileries, pendant dix jours l'inexorable consigne le repoussa de toutes les grilles. Enfin le onzième, il épia l'instant où l'empereur, qui revenait à cheval après avoir visité le faubourg Saint-Antoine, arrivait au palais par le guichet du Pont-Royal. A peine Krettly l'a-t-il aperçu que rien ne l'arrête : il court comme un insensé au devant de

son ancien général, les factionnaires veulent le retenir, il force la consigne, n'écoute rien, en maltraite même quelques uns , et hors d'haleioc arrive sous le grand vestibule du pavillon de Flore, en même temps que Napoléon mettait pied II terre.

« Sire ! sire ! s'écrie-t-il, un de vos anciens braves ! »

En entendant cette voix l'empereur se retourne avec vivacité ; le vieil f uniforme des chasseurs à cheval de sa garde frappe ses regards : il reconnaît Krettly : « Toi ? mon vieil ami ; » lui dit-il.

Malgré ces mots de mon vieil ami, et l'accent de bienveillance avec lequel ils ont été prononcés, le vieux soldat d'Egypte , fasciné par le drestige que Napoléon exerçait toujours sur ses soldats,) reste muet et comme en admiration devant lui.

a Je pensais à toi il y a quelques jours, reprend Napoléon, et j'étais étonné de n'avoir pas encore eu ta visite.

Sire, répond enfin Krettly, je me battais dans le Midi pour Votre Majesté.

Tu te battras donc toujours? répliqua l'empereur avec un sourire.

Il faut bien faire quelque chose, sire ; j'apporte à Votre M ajesté un rapport fidèle de tout ce qui s'est passé depuis son départ dans mon département ; j'ai tout vu , j'étais partout.

Comme jadis, dit Napoléon en prenant le rapport. Viens de* main trouver Bertrand, ton rapport sera lu, et si j'ai quelques commissions à te donner, nous verrons. » A ces mots Napoléon lui ayant tendu la main , Kretlly la pressa respectueusement dans les siennes et se retira transporté de joie et d'orgueil à la pensée que son empereur lui avait conservé une petite place dans son souvenir.

Le lendcmain, Krettly accourut aux Tuileries, mais ce fut le colonel Bussy, aide-de-camp de l'empereur, qui le reçut au lieu du grand maréchal : « Sa majesté à lu votre rapport, lui dit-il, et voici sa réponse qu'elle m'a chargé de vous transmettre : « Dites au capitaine Krettly qu'il vienne au palais quand il voudra ; les portes lui seront toujours ouvertes : il y sera bien reçu. *

Des députatiohs de tous les départemens de la France arrivèrent bientôt en foule auprès de l'empereur, pour lui adresser les félieilations d'usage ; celles de l'Isère et de la Drôme se présentèrent à leur tour. Krettly s'était mis à la tète de ces derniers : « Eh bien! messieurs, dit Napoléon en frappant familièrement sur

t'épaule de son protégé, êtes-vous content de la résolution de eet homme-là ?

Oui, sire, répondit le chef de cette députation , il a rendu d'immenses services au pays et à votre majesté. Malheureusement des gens plus haut placés que lui n'ont pas fait de même.

Messieurs, c'est que les conséquences n'effraient que les lâches ou les timides : je n'ai besoin ni des uns ni des autres ; je ne me repose que sur le dévouement et Je courage de ceux qui me comprennent. N'est-ce pas, mon vieux camarade? ajouta-t-il d'une voix élevée, en saisissant un des favoris de Krettly. Va, mon brave! j'eapère avant - peu te faire - monter quelques échelons de plus. »

L'empereur continua de s'entretenir successivement avec chacun des membres de la députation, et lorsqu'elle fut sur le point deae retirer, il revint à Kretlly : « Tu iras trouver, de ma part, le ministre de la guerre, le prince d'Eckmulh. Tu le connais bien. Il te donnera une commission pour prendre le commandement d'un corps franc dans ton département. C'est convenu. »