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Titre : L'Afrique : journal de la colonisation française, politique, économique, agricole, commercial, littéraire et scientifique / fondé à Paris par les colons de l'Algérie ; [directeur-gérant responsable : Hte Peut]

Éditeur : au bureaux du journal (Paris)

Date d'édition : 1845-08-16

Contributeur : Peut, Hippolyte (1809-1889). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb326834694

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb326834694/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 316

Description : 16 août 1845

Description : 1845/08/16 (A2,N71)-1845/08/22.

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k6366475j

Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-3025

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 12/11/2012

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Paris, 15 Août.

Lorsque, le 16 août 1844, il y a un an, jour pour jour, -nous faisions paraître le premier numéro du journal Y Afrique* nous n'osions espérer les résultais auxquehi nous sommes parvenus. Sans doute ces résultats •swr#- encore lents, au gré de nos désirs; sans doute sieus voudrions pouvoir franchir d'un élan plus rapide espace qui nous sépare de notre bul; sans doute nous voudrions que l'Algérie fût déjà peuplée, riche, puissante, heureuse ; sans doute nous sommes loin du terme de notre carrière; mais qui pourrait nier les immenses progrès accomplis en si peu de temps? Qui pourrait méconnaître les pas de géant qu'a faits la ques-

tion d'Afrique? -- Il y a un an, cette question était mal connue, mal jugée ou mal comprise. Etrangère au plus grand nombre, peu d'hommes se trouvaient en état de l'apprécier exactement. L'Algérie était populaire, il est vrai, comme tout ce qui est glorieux, parce que la gloire sera toujours populaire en France; mais cette popularité était une popularité d'instinct, une popularité de sentiment. On aimait l'Algérie en raison des sacrifices qu'elle avait coûtés, en raison des obstacles qu'on avait à vaincre; mais quelle incertitude sur ses ressources, sur sa fécondité, sur ses développemens !

quels préjugés sur l'état réel du pays, sur les périls que

liml peut y courir, sur les forces de la population indigène qui l'habite! Quelle ignorance sur le gouvernement local, sur son organisation intérieure, sur ses formes administratives, sur les abus de toute nature que se permettait une administration à peu près livrée à elle-même! Quelle divergence dans les esprits sur le parti que la France pouvait tirer de sa conquête, et sur la direclÏon qu'elle devait lui imprimer! De temps à autre seulement la presse enregistrait quelques faits de guerre, quelques actes glorieux, quelques traits de courage, quelques nouvelles toujours accueillies avec faveur, parce qu'elles nous rappelaient les efforts de nos concitoyens occupés à fonder un nouvel empire français sur les rivages de l'Afrique; mais tout cela avait lieu sans suite, sans liaison, sans idée d'ensemble, sans but précis, et il ne pouvait guère en être autrement, pareeque la presse, emportée parle torrent de l'attualité et des affaires de l'intérieur, n'avait ni le temps ni la possibilité d'étudier à fond les besoins d'un pavs à l'égard duquel d'ailleurs elle manquait de tout

moyen de contrùlt. - Aujourd'hui, les choses sont bien changées; les idées saines et justes ont fait invasion de toutes parts. Le gouvernement de l'Algérie est percé à jour, l'impuissance du régime militaire est constatée et ce régime unanimement condamné; les abus sont signalés et poursuivis avec soin; la France, en un mot, a repris son rôle, elle entend que la conquête qu'elle a payée de son or et de son sang soit gouvernée avec sagesse, et quelle soit mise en communauté intime, sur un pied d'égalité parfaite avec elle; elle veut y assurer le règne des lois, et y transporter ces garanties essentielles qui doivent accompagner un citoyen français sur toute terre appartenant au domaine de la France. C'est la civilisation, eu un mot, qu'elle veut y implanter avec toutes ses conséquences, tous ses attributs, avec toutes les formes nécessaires à l'existence et au dévelopment d'une société régulièrement constituée.

La presse de Paris se prononce avec un remarquable accord et une netteté de vues plus précise de jour en jour. Le National, le Siècle, la Réforme, Yà Démocratie Pacifique, la Presse, la France, le Courrier Françai", la Patrie, le Commerce s'expriment tous dans le sens d'une réforme radicale. La Réforme, la Dérnocra1 lie Pacifique, la Presse ont déclaré résolument l'urgence de réunir l'Algérie à la France, et de placer les deux ays sous l'empire de la même loi. Le Siècle n'est plus

séparé de nous que par une nuance, et si le National n'a pas encore émis son opinion sur cette importante question, c'est que, sans doute, l'occasion lui a manqué; il nous semble, en effet, impossible que tous les organes sérieux de l'opinion publique, que tous les journaux qui ont le sentiment sincère de la grandeur et de la dignité nationale, ne se rangent pas à l'idée que nous avons émise et que nous défendons.

La chambre a suivi le mouvement de la presse, et, dans la dernière discussion du budget de l'Algérie, nos lecteurs n'ont sans doute pas oublié que la commission chargée de l'examen de ce budget a déclaré par l'organe de son rapporteur, M. Bignon, que ce n'est pas de la loi du 24 avril 1833 que résulte le droit de régler par ordonnance l'administration civile de l'Algérie, et que CETTE CONQUÊTE DOIT ÊTRE UNE ANNEXE DE LA FRANCE. Avons-nous dit autre chose depuis que nous

existons ? et quelles heureuses et profondes modificacations dans les esprits indique ce langage!

Nous n'avons certes pas la folle vanité de soutenir que seul nous avons tout fait, que les principes auxquels nous nous sommes attaché émanent exclusivement de nous, que sans nous rien n'aurait eu lieu; de pareilles prétentions seraient ridicules. Mais on pourra bien nous accorder que si la presse, en si peu de temps, a fait de si grands progrès dans l'examen d'une question qui, l'année dernière, lui était encore si étrangère, et que si les esprits sont aussi vivement préoccupés aujourd'hui de ce qui se passe en Algérie, préoccupation qui se traduit par une tendance prononcée aux grandes entreprises et aux puissantes associations, on voudra bien nous accorder, ùisuoi-DOUSt que les discussions soutenues auxquelles nous nous sommes livré n'ont pas été sans influence sur ces résultats.

Parlerons-nous maintenant des bénéfices positifs acquis au pays? nous ne serons pas embarassé pour en citer quelques exemples; il nous est en effet impossible de ne pas faire ressortir la coïncidence qui existe entre les vœux que nous avons été si souvent dans l'obligation de manifester, et la satisfaction qui a été accordée aux légitimes désirs de l'Algérie; cefait prouve mieux que tous les raisonnemens auxquels nous pourrions nous livrer l'intluence de la publicité,quand cette publicité est honnête, consciencieuse, persévérante et qu'elle ne poursuit pas d'autre but que la satisfaction des intérêts généraux du pays; et sous ce rapport, nous sommes heureux de remercier l'autorité supérieure d'avoir bien voulu prendre de temps à autre en considération les observations que notre devoir

nous commandait de lui soumettre. -

Ainsi nous avons demandé, dès les premiers jours, des améliorations dans l'hôpital civil, et l'organisation du service médical à Alger; on s'occupe de ces améliorations, et l'organisation du service médical vient d'avoir lieu. Cette organisation laisse encore beaucoup i. désirer; maisentin, ce qui a été fait est un acheminement vers le mieux.

Nous nous sommes élevé , dans le temps, contre la fiscalité d'un édit inséré dans le 1Moniteur algérien, qui soumettait à l'impôt du timbre toutes les demandes, toutes les lettres adressées aux agens de l'administration en Algérie. Cet avis a été immédiatement rapporté.

La liquidation des indemnités trainait tellement en longueur, que cette liquidation paraissait devoir durer éternellement, nous nous en sommes plaint à diverses reprises ; aujourd'hui, on s'occupe activement de cette liquidation.

L'organisation du corps des défenseurs, à Alger, était dans les vœux de tout le monde ; depuis plus d'un an, M. le procureur-général d'Alger la sollicitait inutilement; nous avons donné de la publicité à ces

justes exigences, et l'organisation a paru. Cette organisation n'est pas ce qu'elle devrait être ; mais, ainsi que nous le disions tout à l'heure pour le service médical. c'est un pas de fait.

De criantes injustices lésaient des intérêts particuliers ; ces intérêts ont élevé la voix dans le journal, on a fait droit à leurs plaintes.

Nous n'avons cessé de réclamer en faveur du port d'Alger; la Chambre a élevé de 500,000 fr. l'allocation destinée à l'achèvement des travaux de ce boulevard de nos établissemens, et tout le monde a reconnu avec nous la nécessité de leur communiquer une impulsion plus rapide et plus soutenue.

De nombreuses plaintes nous étaient parvenues sur la négligence qui présidait à la manière dont les cadres de la milice étaient entretenus ; l'article dans lequel nous signalions cet abus avait à peine paru à Alger, qu'un recensement général était ordonné.

- Un projet ridicule, relativement à la création de la rue du Rempart, allait voir le jour; ce projet, qui au- rait coûté à l'Etat plusieurs millions, causait à la ville d'Alger un dommage irréparable. L'Afrique s'empara de cette question, en fit ressortir les désavantages sous le rapport financier, les fautes monstrueuses sous le rapport artistique. Le projet fut abandonné; l'Etat y gagne des millions qui auraient été follement dépensés, et la ville une rue qui, si l'on se conforme aux plans indiqués par nous, n'aura pas sa pareille dans le monde.

Depuis longtemps on sollicitait inutilement le déplacement du magasin des fourrages, dont la présence au centre du faubourg Bab-Azoun était une menace perpétuelle mm gommes fait tes échos de ces réclamations si fondées en raison ; le déplacement du parc aux fourrages est aujourd'hui un fait accompli.

Le génie et l'artillerie, par des motifs qu'il nous est impossible de comprendre, s'opiniàtraient à vouloir

établir le parc d artillerie dans ce même faubourg BabAzoun, qui sera bientôt le véritable centre d'Alger.

Nous nous sommes élevé contre ce projet avec toute l'énergie que nous devions mettre à repousser une aussi funeste conception ; l'autorité supérieure a décidé en faveur des motifs que nous faisions valoir. Il en a été de même dans la question relative à la démolition des remparts de l'ancienne ville, et bientôt des terrains importans seront rendus à l'industrie et au commerce, qui ne peuvent actuellement en tirer aucun parti.

Un arrêté avait paru qui portait des peines contre les commerçans assez osés pour trafiquer des marchandises pendant leur séjour sur le quai d'Alger; cet arrêté est tombé devant les critiques qu'il nous suggéra à l'époque de son apparition.

Que n'a-t-on pas dit sur les concessions? Néanmoins, sauf quelques esprits systématiquement faux, tout le

monde est d accord sur la necessite d'appeler en Afrique les grands capitalistes, qui seuls peuvent vivifier le pays par l'apport des ressources dont ils disposent ; nous nous sommes fait les représentans de cette opinion, qui veut que les capitaux sont indispensables à la colonisation de l'Algérie , et que le meilleur moyen de sauver les petits colons de la ruine certaine à laquelle ils courraient s'ils étaient abandonnés à euxmêmes, est d'encourager l'émigration des hommes riches dispDsés à consacrer tout ou partie de leur fortune aux défrichemens du sol et à la culture des terres en Algérie. L'ordonnance toute récente que nous avons publiée dans notre dernier numéro répond suffisamment à cette pensée, en même temps qu'elle adoucit la rigueur de l'ordonnance du 1er octobre, dont nous avons si justement combattu quelques parties.

A Bône, l'autorité sommeillait; nous l'avons rappelée à ses devoirs, un peu durement peut-être, parce

qu'elle le méritait, mais avec toute raison, quelques jours après, la Seybouse nous apprenait que le premier fonctionnaire civil de la localité s'était mis en mouvement pour visiter une province qu'il n'avait jamais parcourue. Nous aurons soin de veiller à ce qu'il ne retombe pas dans sa léthargie accoutumée; en Algérie, tout le monde doit agir, et les fonctionnaires publics doivent être les premiers adonner j'exemple.

Il a été plusieurs fois sérieusement et très-sérieusement question de replacer Constantine sous le régime militaire; nous avons chaque fois fait sentir combien la réalisation d'un pareil projet serait insensée, et nous avons la satisfaction de penser que nos observation à cet égard n'ont pas été sans quelque influence sur le discrédit dans lequel l'idée de militariser Constantine semble être tombée pour le moment.

Depuis longtemps Philippeville demandait un han-

gar pour abriter les marchandises qui jusqu'alors étaient restés exposées, sur le rivage, aux intempéries de l'atmosphère et aux ravages de la mer; chaque année le commerce faisait des pertes considérables : le journal VAfrique s'est fait l'interprète énergique de ces vœux, et Philippeville aura son hangar.

Beaucoup d'autres faits d'une nature semblable se pressent sous notre plume; mais il serait su péril u de les énumérer tous, ils ne serviraient qu'à allonger cet article, déjà beaucoup trop longpuisqu'il parle de nous.

Nous avons cru néanmoins ne pas devoir passer sous silence les services que peut rendre une bonne publicité, afin de faire taire toutes ces voix jalouses et méchantes qui s'acharnent à nous harceler. Quel que soit le mépris que nous inspire la calomnie, nous l'avouons, il nous est pénible de voir surgir contre nout» des accusations du sein même de ceux auxquels nous avons voué nos études et que nous nous ellbrçons de de servir. Notre crime peut-être est de remplir trop consciencieusement notre devoir, mais cette nécessité est une de celles devant lesquelles nous ne fléchirons jamais. Nous l'avons déjà dit, et nous le répétons : fais ce que dois, advienne que pourra.

Nous venons de mettre en saillie quelques-uns des principaux résultats que nous croyons pouvoir trèslégitimement attribuer à nos constans efforts pour hâter le développement de la colonisation ; et ces résultats, tout le monde peut les voir, tout le monde peut facilement les apprécier; mais il en est d'autres qui ne peuvent être ni vus, ni facilement appréciés, et cependant ceux-là sont, sans contredit, de tous les plus importans ; nous voulons parler des craintes salutaires que la publicité inspire à tous les agens du pouvoir, grands et petits, de la retenue dans laquelle elle les maintient, du frein qu'elle impose à leurs passions personnelles, car les agens du pouvoir sont passionnés comme les autres hommes, des injustices qu'elle empêche, des mauvaises mesures qu'elle retient, de cette influence occulte et permanente qui s'exerce sur tous, partout, à chaque inslant etqui devrait être bénie pour tout le mal qu'elle empèche.

alors même qu'elfe ne produirait aucun bien.

Ajouterons-nous encore les résultats immenses obtenus sur l'opinion en Algérie, cette communauté d'idées à laquelle participent aujourd'hui tous les points du territoire, de telle façon que depuis Djemmaa-Cazaouat jusqu'à La Calle, et depuis Alger jusqu'à Biskara, il y a mêmes pensées et mêmes voeux ; avantage incalculable, et qui doit donner une irrésistible impulsion à toutes les réclamations qui seraient formulées à l'avenir dans l'intérêt du pays.

Nous pouvons le dire sans être taxé de mensonge, avant la publication de l'Afrique , il n'y avait pas d'opinion publique en Algérie; les esprits étaient irrésolus, divisés, sans cohésion, sans unité, et par conséquent sans force. Les intérêts étaient isolés et les individus plutôt juxtaposés qu'unis entre eux par des -- liens - sé-

FEMLETON DU JOURNAL L'IFRIQUE. - 16 AOUT.

Chronique de Paris.

Paris est désert.-ot..e spirituel confrère du Siècle, inventeur Ju genre, ne date plus ses revues que des contrées les plus éloignées de la capitale. Baden, Spa, Aix sont le rendez-vous des spnrtsmen, des dandys et des lionnes de la grande ville. Il ne reste plus ici que les agioteurs de la Chaussée-d'Antin, les intendansdu faubourg Saint-Germain, les condamnes aux travaux forcés de la presse, et les joueurs de domino, ou ceux dont nous vous parlions dans dernière Chronique, ces joueurs qui battraient les cartes sur un volcan. De ceux-ci nous vous avions promis une longue et lamentable histoire; mais le temps, qui efface tout, a déjà fait perdre le souvenir de leur malheur, et nous devons jeter un voile sur leurs fautes, qui ont été pardonnees. Puissent-elles leur servir de leçon! A la place du drame que nous aurions eu à vous raconter, nous aimons mieux vous parler de ceux qui se jouent sur les planches.

L'Ambigu nous en a servi un dont la trame est aussi embrouillée que possible. C'est le sublime du genre; mais les auteurs ont eu une excuse ils travaillaient moins pour leur réputation que pour cette des décorateurs, et sous ce rapport, MM. Dennery et Clairville ont parfaitement réussi,

car Il est ImpOSSlOle de rien voir déplus trais etde plus réel que les différentes vues de Paris et de la banlieue. Essayons toutefois de donner une idée du fond de la pièce.

Un jeune homme, nommé Frédéric, tout frais débarqué de Toulouse, vient à Paris pour y chercher les plaisirs qu'il a rêvés au fond de sa province, et une famille dont aucun souvenir ne se présente à son esprit. Dés son arrivée, à la barrière de Fontainebleau, il trouve un portefeuille contenant des valeurs considérables. et, premier coup du sort, admirable effet de la providence des mélodrames, ce portefeuille, nous pouvons bien vous le dire en confidence, doit un jour lui appartenir. Mais comme Frédéric n'est ni

somnambule ni écossais, qu'il ne possède ni la transposition des sens et du temps ni la seconde vue, comme Frédéric est honnête homme, il rend le portefeuille à son propriétaire provisoire, qui lui paie la récompense honnête, toujours promise en pareil cas, par une lettre de reeom mandation pour un millionnaire, rien que ça, qui s'appelle 11. de Clamarens.

Maintenant voici l'histoire de ce M. de Clamarens : en sa qualité de nabab, il a pu commettre énormément de fautes pendant sa vie la liste en est interminable mais le forfait qui lui pèse le plus sur la cODscience, est l'abandon

d'une jeune fille, nommée Marie Raymond. La punition la plus dure infligée à cet oubli est la perte d'un cnfant, fruit de ces amours. Aussi met-il tout en œuvre pour réparer ta perte et retrouver son trésor. Dans la prévision d'un aussi heurcux événement, il a confié a son vieux intendant une somme importante dont les titres étaient dans le fameux portefeuille si heureusement trouvé et rendu au signataire de la fameuse lettre de recommandation.

Toutefois, la perte de son fils n'est pas le seul châtiment infligé au coupable. A côlé de lui vit une Mil" Henaud, gouvernante tyrannique qui l'a subjugé et qui le domine. Cette femme, d'un grand caractère et d'une cruauté inexplicabiL, a eu aussi un fils; elle aussi a perdu ce fils, et s'efforce de le retrouver : dans cette pièce , tout le monde cherche un parent. Néanmoins, par manière d'acquit, M""Reuaud passe son temps à tourmenter le maître, ctpow;- sa famille, comme disait Robert Maeaire, elle accapare l'héritage du millionnaire au profit de trois mauvais garnemens, ses neveux, qu elle a installés dans l'hôtel Clamarens. et qui sont les instrumens passifs de ses projets. Cette trilogie vivante, ce cabinet d'un pouvoir exécutif sous la présidence de Min" Renaud,se présentant toujours en ligne de bataille, fait le plus singulier effet. Jusqu'à présent, le drame le plus frénétique n'avait qu'un traitre; ici nous en avons quatre, marchant, il est vrai, comme un seul homme.

Les personnages une fois posés ainsi dans leurs rôles, Frédéric se présente rue de Varennes avec sa lettre

de recommandation. A sa vue, M. de Clamarens se trouble; une force qu'il ne peut définir ni maîtriser l'appelle; il sanglotte; des voix inconnues murmurent à son oreille des paroles mystérieuses; et sans autre preuve que certains détails qui rappellent le fameux gigot d'Hyacinthe dans les Saltimbanques, il reconnaît son fils, tombe en syncope, et l'on peut croire qu'il ne jouira pas longtemps d'un bonheur imprévu. Mu" Renaud ordonne à ses neveux d'éloigner de lïtùtel, pendant vingt-quatre heures, le nouveau venu, redoutable obstacle à ses projets ambitieux, et, en exécution de ses ordres, la trilogie promène Frédéric de barrière en barrière, intrà et extra mur os, à Saint-Cloud,

a Grenelle, a Charentun; que sais-je?–Ici,–tableaux.

A Saint-Cloud, les spectatrices ramènent leurs chiiles sur lellrs épaules. - Un air frais et humide pénétre tout à coup dans la sallc. Les grandes eaux jouent sur la scène comme dans le parc, et n'allez pas croire que ce soit en carton ou en bois peint; non, certes, elles sont bien là en chair et en eatix, comme disait Odry dans une stalle voisine de la nôtre. La grande cascade envoie jusqu'à l'orchestre ses flocons écumeux. Le jet d'eau py ramidal du romi.point lance ses filets argentés jusque dans les frises.–Première décoration dont la vue vaut a elle seule le prix d'une loge entière. (Style de réclame.) A Grenelle, une autre partie de l'acte se passe au théâtre

dccccharmant vulage,ct nous y voyons les merveilles chorégraphiquesqui, l'hiver dernier, ont valu tanttle bravos aux petites danseuses que nous avions enlevées à Vicnnc,-Ull rideau de fond, miroir improvisé, sépare le théâtre en deux parties.– Tandis que les premiers sujets de l'Ambigu exécutent les poses les plus variées sur le premier plan, de l'autre côté durideau, leurs pointes, leurs ballons, leurs assemblés et leurs écots sont reproduits avec une fidélité admirable par d'autres personnages. L'illusion cstcomplètc, et cette scène seule vaut encore le prix d'une loge entière.

Nos lecteurs nous dispenseront de suivre Frédéric et la trilogie dans leurs interminables pérégrinations; qu'il nous suffise de dire de ces décorations ce que nous en avons déjà dit; elles sont magnifique*, et. chacune d'elles vaut toujours le prix d'une loge entière.

Mais au milieu de toutes les pompes de cette nature d'outre-rampe, il est assez difficile de retrouver le nœud de l'intrigue; l'imbroglio va toujours en s'auginentant; toujours on est au moment de tuer le nouveau Muise, et toujours une - fille de Pharaon, sous les traits du vieux intcndant ou de

Mm. Renaud, le retire sain et sauf des dangers auquels il était exposé. Tout à coup, ce qui n'était pas trèsifficilc à prévoir, la vieille gouvernante découvre aussi que Frédéric est son fils. M. de Clamarens découvre que son tyran n'est autre que Marie Raymond; tout le monde se découvre, se reconnaît et s'embrasse: Frédéric est proclamé le fils et l'héritier de son père ; de plus, il épouse sa cousine, dont l'amour était venu se glisser au milieu des inextricables difficultés de sa position, et. le rideau tombe, allez-vous dire. –Pas du tout, le rideau se Il'vc,.L-Au milieu de la scène de famille la plus larmoyante, Pascal, le vieux serviteur, a longuement réfléchi pour trouver une situation dramatique, un mot final, il se réveille enfin, il s'eeric: Allons-nous promener aux ClunnpsElysées, c'est le 20 juillet (historique); et à cette révélation profonde, inespérée, le père oulteux iette sabénuillc. les

amoureux se prennent par le bras, le parterre impatient hurle la Marseillaise, et les spectateurs ébahis clignent des yeux devant les torrcns de lumière qui devraient jaillir de quinze mille becs de gaz dont laplupart étaient veufs de tout éclat. Mais, en conscience, il y avait bien assez de feux comme ça.

En somme, Paris et la Banlieue n'est pas une pièce, c'est un prétexte. On n'attend pas le nœud de l'intrigue, mais la succession des différentes vues dont elle est l'occasion.

Qu'importe; tout le monde voudra aller voir ce nouvel enfantement de l'Ambigu, qui, tout compte fait, n'est pas dans la rue Hichcheu, et n'est point dans l'obligation de soutenir une réputation purement littéraire.

Les Variétés ne nous ont pas fait assister à des scènes dont le théâtre fût aussi voisin de la capitale. Cependant la

pièce d'Emile n'est qu'un prétexte, absolument comme à l'Ambigu. - Ici nous sommes en Espagne, ou peu s'en faut; lescontrabandistas font le désespoir des douaniers; en général, ceux-ci se prêtent volontiers à tous les mauvais tours qui leur sont joués, et en particnlier, ils subissent avec le plus grand calme les avanies les plus humiliantes du chien de l'un de ces contrebandiers. Emile, c'est le nom de cet intéressant animal, vole les pâtés de foie gras, débouche le Champagne, sonne la cloche, dénonce les voleurs, s'attache lui-même à la chaîne pour faire croire à son innocence, reprend de la dentelle qui avait été surprise dans les. mollets de son maître, -- écrit

le nom ue 1 empereur Napuléon, corrige des lautes d ortographc, salue la société, lit une heure quelconque sur un cadran de bois dont l'aiguille est clouée, et reçoit les applaudissemeus de la foule avec cette attitude calme des grands talens qui ont la conscience de leur valeur. A ces eloges, nous pourrions bien mêler la critique pour une distraction qu'Emile s'est permise beaucoup trop près du souffleur. Mais dans la coulisse, on assurait que c'était la première fois qu, 'il se rendait coupable d'un pareil oubli, que, d'ailleurs il était parfaitement convaincu de t'milite

des principes contenus dans la civilité puérile et honnête.

A tout péché miséricorde.–L'auteur du librelto ne s'est pas taitconnattre. Mais nous savons que le pseudonyme de Terre-Neuve, qu'il a spirituellement choisi, cache un nom souvent applaudi aux théâtres de boulevard, en compagnie de M. Paul Fouché. M. Roqueplan doit remercier M. de Terre-Neuve, ou, pour mieux dire, M. A e d'avoir trouvé un cadre aux curieux exercices d'Emile. C'est un lour de force et un acte de complaisance dont public et directeur pourront lui savoir gré.

On a joué au même théâtre Mme Panache, pièce do fourire dans laquelle Mllu Flore est applaudie tous les soirs, pour le comique de son physique et la bêtise de ses reparties. Cette pièce, la reprise du Chevreuil pour la rentrée d'Odry, et Emile, constituent un répertoire fort drolatique au dire de certaines gens. Quelques esprits s'indignent au contraire de voir la «ailé française s'émousscr et le sel attique se changer en gros sel ; mais ce sont, sans aucun doute, des esprits chagrins ou envieux , et l'on ne doit tenir aucun compte de leurs observations.–Qu'en pensezvous?

L'Académie royale de musique et l'Opéra Comique ont donné deux représentations d<* pièces nouvelles. D'autres vous en parleraient sans les avoir vues, ou, pour mieux din' eUlt'lldut's; nous serons plus consciencieux. La seule chose que nous puissions vousfdire par avance, c'est que le niable à Quatre a réussi à l'Opéra, ainsi que le Ménvtrier au théâtre Favart. A la prochaine fois notre compte-rendu.

JULES DE FLVEAU.