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Titre : L'Afrique : journal de la colonisation française, politique, économique, agricole, commercial, littéraire et scientifique / fondé à Paris par les colons de l'Algérie ; [directeur-gérant responsable : Hte Peut]

Éditeur : au bureaux du journal (Paris)

Date d'édition : 1845-07-06

Contributeur : Peut, Hippolyte (1809-1889). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb326834694

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb326834694/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 316

Description : 06 juillet 1845

Description : 1845/07/06 (A2,N63)-1845/07/12.

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k6366469t

Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-3025

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 12/11/2012

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tes lettres non affranchies seront rigoureusement refusées.

Nous prévenons les personnes qui désirent établir des relations avec le journal Y Afrique que son correspondant officiel à Alger est M. Alexis Belly, rue Scipion, 11 et 13. A ce titre, M. Belly se chargera de nous faire parvenir toutes les communications qu'on voudra bien nous faire dans l'intérêt du pays.

M. Belly est également chargé des abonnemens, des annonces, en un mot, de tout ce qui concerne les intérêts matériels du journal.

Avlaau commerce et A l'Industrie.

L'industrie et le commerce ne peuvent manquer d'apprécier les avantages que leur ollrent les annonces faites en Algérie, où un débouché illimité leur est ouvert ! 1

L'Algérie en effet est un pays qui se peuple, et qui consomme, ainsi que tous les pays naissans, des produits de toute espece et en quantités considérables : Meubles, fers ouvrés, tissus, quincaillerie, articles de papeterie, librairie, ustensiles de ménage, modes, vètemens.. armes, passementeries, objets de fantaisie., etc., etc., s'y placent en abondance et avec une extrême facilité. Les producteurs ont donc tout intérêt à se faire connaître, afin que l'on puisse s'adiesser à eux.

Sous ce rapport, nul journal ne leur offre un moyen de publicité plus ellicace que le journal Y Afrique.

Le journal VAfrique, en effet, à cause du caractère spécial de sa rédaction, pénètre dans les localités les plus reculées de l'Algérie, et, ce qui n'a lieu pour aucun autre organe de publicité, il est lu ou reçu par toutes les personnes qui habitent le pays.

Comme les communications avec la France ont lieu tous les cinq jours seulement, et que chaque courrier apporte forcément cinq numéros des autres journaux à la fois; il en résulte qu'une seule annonce dans le journal l'Afrique est plus avantageuse que cinq annonces successives dans les journaux quotidiens; ceci doit nécessairement faire donner au journal Y Afrique la préférence par toutes les personnes qui ont ou qui désirent avoir des relations d'affaires avec l'Algérie.

On s'adresse pour les annonces, à Paris, au bureau du journal, aS, rue Ste-Anne; à Alger, au bureau de

correspondance, 11, rue Scipion ; dans les autres villes de l'Algérie, chez les correspondans.

Paris, 6 Juillet.

Deiv grandes ConcesaloiiM en Atgerte M. le maréchal Bugeaud, ne pouvant faire triompher la colonisation militaire, dont personne ne veut, s'efforce de faire à la colonisation civile des conditions telles qu'elle ne puisse produire que des résultats incomplets et excessivement lents.

C'est ainsi qu'il lutte, avec une persévérance qui ne se dément pas, contre l'admission des colons aisés, comme si, pour une oeuvre aussi diflicile que la fertilisation de l'Algérie, il n'était pas indispensable d'avoir des capitaux aussi bien que des bras. Il faut à M. Bugeaud des colons pauvres, des villages misérables, une agriculture languissante, beaucoup d'argent dépensé sans profits évidens; il lui faut tout cela afin que la colonisation civile soit compromise, et que la colonisation militaire soit proclamée la seule efficace.

M. le gouverneur général veut inaugurer dans ses étais un gouvernement purement arbitraire, un règne de despotisme et d'arbitraire, le tout au profit de nous ne savons trop quelles folles ambitions. Mais la colonisation civile, si elle n'était pas gênée dans ses développemens, aurait pour effet inévitable, en couvrant l'Algérie d'un vaste réseau de villes et de village peuplés de citoyens, de rendre radicalement impossible, tant sur le littoral que dans l'intérieur de cette annexe de la France, l'application des procédés du bon sens naturel.

Aussi M. le maréchal Bugeaud, aidé en cela par l'administration sans dignité dont il dispose, fait-il tout ce qu'il peut pour faire avorter la colonisation civile et lui ravir l'assistance, qui serait décisive, des capitaux et de l'intelligenèe indépendante.

Dans ces derniers temps, des membres de la chambre des députés, jouissant de l'estime publique et honorables à tous égards, comme MM. Ferdinand Barrot.

de Belleyme, Iotlet, Dezeimeris, ont pensé que ce serait servir puissamment la cause de l'Algérie que de participer, de leur personne et de leur argent, à l'am-

vre de la colonisation. Ils ont donc demandé des concessions assez importantes, et M. le maréchal Soult, comprenant le bien que produirait l'intervention d'hommes aussi considérables dans les affaires algériennes, n'a pas balancé, ce dont, pour notre part, nous le louons bien sincèrement; à leur promettre des terres en proportion des moyens d'exploitation qu'ils voudraient y consacrer.

L'exemple donné par ces députés a été fécond. Plusieurs de leurs collègues, de toutes les nuances d'opinions, sont disposés à solliciter aussi des concessions.

On dit que des pairs de France, de grands propriétaires, des capitalistes, des conseillers d'état, etc., tournent aussi leurs vues vers l'Algérie.

M. le maréchal ne pouvaits'accommoder, lui gouverneur militaire, lui homme d'arbitraire, lui contempteur des institutions civiles , lui autocrate au petit pied, de cette invasion de colons constitutionnels, attendu qu'il n'est pas douteux que, dès qu'ils auront des intérêts personnels en Algérie, il ne se fassent un devoir de réclamer pour ce pays des garanties civiles et un gouvernement qui soit naturellement porté à ne tendre qu'à une seule chose, à la création sur le sol conquis d'une vaste société-civile.

Il n'est pas d'expédiens auxquels M. le due d'Isly n'ait eu recours pour détourner ces députés de leurs projets. Il leur a dit, il leur a écrit, il leur a fait dire et écrire qu'ils se ruineraient, qu'il n'y avait rien à attendre de l'agriculture européenne en présence de la concurrence des indigènes, qu'ils ne retireraient pas l'intérêt de leurs capitaux, que les grandes exploitations étaient impossibles, qu'il leur faudrait

vingt ans, trente ans de sacrifices pour obtenir des résultats appréciables, qu'enfin, puisqu'ils voulaient perdre de l'argent, ils feraient mieux de le jeter tout de suite dans la Méditerranée que de se donner la peiné de le transporter en Algérie.

Voyant que ces conseils n'aboutissaient à rien, M. le maréchal Bugeaud, qui a su se créer auprès de lui, à sa portée, un journalisme dévoué, et organisé de telle sorte qu'il ne peut être qu'un instrument complaisant et dépendant, a fait injurier par la presse d'Alger, de la manière la plus inconvenante, non-seulement les députés assez osés pour vouloir des concessions en Algérie, mais encore, M. le ministre de la guerre luimême.

Voici, pour preuve de ce que nous avançons, l'extrait d'un article publié récemment dans lê Courrier d'Afrique sur les concessions. Le style en dénote suffisamment l'origine, et si M. le maréchal Soult l'a lu, nous ne doutons pas qu'il n'en ait été vivement ému.

En effet, si d'après l'article du journal censuré, les députés qui demandent des concessions font preuve d'audace, ceux qui les accordent n'en montrent pas moins.

Or, qui les accorde, si ce n'est le ministre? C'est donc M. le maréchal Soult qui est insulté par la presse de son subordonné M. le gouverneur général de l'Algérie. Estce clair i)

« Dans notre feuille du 17 mai, nous avons fait pressen» tir les aveui-s seaitdalerises q ici étaient sur le tapis : au» jourd'hui, nous pouvons annoncer comme à peu près » certain que l'un de ces postulans, que nous avons quali» fiés de riches mendians, obtiendra ce qu'il demande : » 1,200 hectares (5,500 arpens, rien de moins) lui seront »: accordés; la fortune de 100 familles à un homme puis» sant par sa position et sa fortune ! Ceux qui ont travaillé » pour cet acte inqualifiable ont cru mettre à couvert leur » responsabilité en consultant, pour la forme, les adminis-

J) traitons d'Alger; la direction de l'intérieur, la direction » des domaines se sont laissé émouvoir, et ont dit qu'il » était convenable de taxer la concession à 6 francs par » hectare; c'était déjà beaucoup d'indulgence lorsqu'il » s'agissait d'une faveur à accorder ; mais cela ne faisait » pas le compte de ceux qui demandaient un avis ; la hante Il administration,.à Paris, réduira la somme à 3 fr. ( un peu moins de 1 fr. par arpent ). Ce n'est pas tout : la » jouissance de plusieurs des premières années sera gra» tuite ; ainsi nous ne tarderons pas à voir arriver l'audaIl cieux solliciteur, qui viendra visiter son nouveau fief et » repartira après avoir installé ses vassaux, ou peut-être après avoir brocanté. Pendant ce temps, les petits colons, » véritables travailleurs, ceux qui remuent la terre et la » mettent en bon produit ; ceux qui ont une famille à nourIl rir, pour qui le gouvernement paié des frais de voyage, J) qui ont vendu en France leur petit patrimoine pour ve» nir coloniser, ceux, là mourront de faim à Alger, et l'adIl ministration localc éprouvera les plus grands embarras Il pour leur donner ce qu'on leur a promis, ce qui leur » est dû.

» On ne sait pas, en vérité, de quel côté il faut voir le » plus d'audace, de la part de ceux qui demandent de telles » faveurs, ou de la part de ceux qui les accordent. Le bu» rcau de la colonisation, à Paris, pourrait seul nous ex» pliquer ce mystère ; mais ce qui est bien certain, c'est » ce que disait, il y a peu de jours, un homme de cœur et » de probité : « Si j'étais chef de ce bureau, j'empêcherais » absolument de pareils seandales, et si une puissance » supérieure pouvaiL me forcer la main, je donnerais ma » démission ; car, dans le cas contraire, on m'accuserait » à tort ou à raison de m'associer à d'indignes tripotages." » Après avoir accordé de telles faveurs à un individu, » comment pourra-t-on les refuser à d'autres, et alors ciue

tJ deviendra l'Algérie, que deviendra la fortune publique? » Une autre concession de 1,000 hect. sur le territoire de » Philippeville et sur la rive droite du Saf-Saf, est arrêtée • aussi. A l'égard de cette dernière, l'administration mili» taire, toutefois, a été assez influente pour faire réserver Il dans la vallée du Saf-Saf 112 hectares destinés au pacage Il des troupeaux. Cependant, cette étendue est insuffisan te » pour ce service. On demandaitdavantage3 mais la faveur » a prévalu. On s'engage dans une voie ruineuse. »

Toutes ces récriminations portent à faux, et en pre-

nant en ceci la défense du ministre, on ne nous accusera pas, nous l'espérons, de courtisanerie, car on sait, et de reste, que si nous attaquons vertement, c'est-à-dire comme elle le mérite, l'administration des affaires africaines à Alger, nous ne craignons pas de dire son fait à l'administration des affaires africaines à Paris. - ,

Les grandes concessions sont nécessaires pour attirer les capitaux, pour faire de la grande et fructueuse agriculture, pour fournir par le fermage et l'exploitation partiaire, de l'emploi et un emplacement facile aux familles pauvres qui, sans l'assistance des propriétaires aisés, ne pourraient pas se fixer en Algcrie.

En effet pour obtenir une concession, quelque restreinte qu'elle soit, il faut disposer de ressources torles que la plupart des émigranfJ ne les possèdent pas.

Si avec deux mille francs et le secours de l'administration, un colon peut à peine bâtir sa maison, défri* cher une dizaine d'hectares, que voulez-vous que fasse, livré à ses propres forces, Un émigrant qui n'aura que cinq cent, mille, quinze cents francs mèinep Qu'un

grand concessionnaire puisse le recevoir, 1 installer, et le petit colon est sauvé, il est acquis à rAtgcrie.

On dit, de la part de M. le gouverneur général, que ces grandes concessions sont ruineuses pour J'état.

Nous disons, nous, qu'elles sont tout à son avantage.

L'Algérie sera une charge très-lourde pour la France tant qu'elle sera livrée à la guerre, à l'inculture, à la solitude. Tout ce qui peut tendre à y amener de la population, à y faire naître des intérêts, à y établir des exploitations agricoles, est à l'avantage immé-

diat de l'état. Les grandes concessions contribueront nécessairement à ce résultat; elles sont donc un bien, en même temps qu'elles sont une nécessité.

Mais pour qu'elles produisent de bons résultats, il est essentiel, et c'est ce qui ne nous parait pas avoir été fait pour la Rassauta, qu'elles soient accordées à des personnes en position d'en tirer un prompt et convenable parti, et qu'en tontes circonstances elles soient, par leur étendue, proportionnées aux ressources réelles des parties prenantes.

C'est un sujet sur lequel nous reviendrons,attenfhl qu'il intéresse profondément l'avenir de la colonisation qui, au lieu de se faire uniquement par l'état et par des hommes sans ressources personnelles suffisiiites, comme le voudrait M. le maréchal Bugeaud., doit se faire tout à la fois par l'état et par les particuliers, par des colons pauvres et par des colons riches, comme le veulent avec nous M. le ministre de la guerre, M. le général de Lamoricière, MM. les pairs, MM. les députés, en un mot tout les hommes qui ont réfléchi sur les élémens essentiels à la constitution des sociétés bien organisées.

A propoMde l'ordonnance du 15 avril.

Il est dit dans l'art. 51 de l'ordonnnance du 15 avril que les directeurs, chefs des services administratifs, correspondent avec le gouverneur général sur toutes autres matières que celles de comptabilité, et qu'ils lui adressent, pour être soumis au conseil supérieur d'administration, les projets d'ordonnances, arrêtés et règlemens généraux concernant les objets qui sont dans leurs attributions.

Cette disposition, de même que la plupart de celles

dont se compose l'ordonnance, n'est, que la consécration législative de règles précédemment établies par des décisions ministérielles.

Obtiendra-t-elle plus d'obéissance que ces décisions ?

Les chefs des services civils se soumcLtront-ils, plus docilement que par le passé à ne correspondre qu'avec le gouverneur général, et à faire passer, par l'intermédiaire du conseil d'administration, tous leurs projets d'ordonnances, d'arrêtés et règlemens généraux?

Nous en doutons fort, et nous avons môme toute rai-

FEUILLETON DU JOBBML L'AFRIQUE. - 6 JUILLET.

:..

.,,' - I Chronique d..aris.

Décidément notre climat s'est fait romantique ; il pro- cède, lui aussi, par opposition, se plaît dans les contrastes, et nous offre successivement, dans la même journée, sans transition aucune, la température de toutes les saisons et de tous les pays. Le printemps est jeune,–pardonnons-lui ses écarts, son abandon, ses caprices et sa folie ; aussi bien, malgré toutes les émeutes atmosphériques qu'il nous a suscitées, la nature séparé de ses atours, les bois se parfument de senteurs enivrantes, la feuillée frémit sous l'haleine des brises, les rayons de soleiu s'étalent sur de Vertes campagnes ou glissent furtivement dans les mystérieux ombrages, les hirondelles sont revenues, messagères fidèles, retrouver leur nid - appendu au faite de nos palais,

et les provinciaux à émigration périodique ou fortuite usent le bitume de nos boulevards, applaudissent les doublures de nos grands artistes, et font reluire au grand jour les toilfettes les plus excentriques de Brivcs-la-Gaillarde, de Pézenas ou de Romoranlin. Tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. De quoi nous plaindrions-nous ? 1

De toutes les illustrations qui, d'ordinaire, surgissent au milieu de nous, à cette époque de l'année, les plus remarquables, sans contredit, sont quelques I-o-ways; venus des bords du Missouri sur ceux de la Seine. Un trèsgrand intérêt devait naturellement s'attacher à ces audacieux émigrans partis du pied des montagnes Rocheuses pour venir contempler face à face notre civilisation qu'ils n'avaient qu'entrevue ou seulement pressentie. Malheureusement comme les Harpies, la spéculation, peut-être aussi la dure nécessite, ont tout gâté.– Au lieu de maintenir la Pluie qui marche et ses compagnons à la hauteur où les

avait places notre imagination, au lieu de ne les laisser visiter que par des hommes d'élite, on a été entraîné à escompter la curiosité publique, et dès-lors ces types vivans des héros de Côoper sont tombés au rang de Tom Pouce; ils ont été jugés, applaudis et siffles par ceux qui avaient acheté à la porte le droit de critique. Toutefois, pour les esprits observateurs, la présence à Paris des Américo-Indiens est un fait digne, a juste titre, de la plus sérieuse attention, et la vue de cette race primitive de la grande famille humaine une bonne fortune.

L'aspect général des sauvages en impose à la première

vue. Leur stature est élevée, leur corpulence assez forte, leurs membres très-développés, leurs muscles très-énergiques. Leurs bras, plus long qu'ils ne le sont d'ordinaire chez les peuples civilisés, dénotent les habitans d'un pays inculte, habitués à se servir avec une égale facilité de leurs quatre membres ; leur peau est bistre plutôt que rouge, et marbrée de blanc; les pommettes de leurs joues sont saillantes, leurs yeux petits, leur nez d'une forme assez pure vu de profil, mais épaté et disgracieux vu de face, leur bouche grande, bordée de lèvres épanouies comme chez les nègres, leur menton carré, leur front moyen, un peu déprimé à son sommet.

Si de cet aspect général on passe à l'appréciation phré nologique du .crâne, on le trouve plus riche qu'on ne serait porté à le croire dès l'abord. Son ensemble, présentant la forme d'un sphéroïde allongé ovale plutôt que rond, rappelle, comme forme, le crâne de la race noire, et, comme observation, le type arabe. Sans doute les instincts l'emportent de beaucoup sur les sentimens et sur les facultés; l'affectivité, l'amour des enfans, de son intérieur, de son prochain, le désir de louer, sont presque nuls chez ces peuples. Mais on y retrouve à un étatde développement très-considérable la fermeté, la combativité, la destructivité, la circonspection, la ruse, la constructivité. La vénération et l'amour du merveilleux, l'imitation et l'aequisivité sont moyennes. On sent que l'on palpe dans ses doigts l'enveloppe osseuse d'un de ces cerveaux de peuple no-

made, industrieux, vindicatif, superstitieux et rêveur ; on Ut sur ces saillies qu'il y a là de nobles instincts mal dirigés par des facultés que l'éducation pourrait réformer; et l'on se prend à regretter que la conquête européenne, au lieu d'acculer ces tribus dans des roches inaccessibles, n'ait pas cherché à les initier aux bienfaits intellectuels d'une civilisation qui lesavait dépouillés de tous leurs biens matériels.

Les l-o-wayssont au nombre de douze, commandés par un roi de leur tribu nommé le Nuage-lîtanc, et par un géant nommé la Pluie qui marche, lequel a beaucoup plus de six pieds. Ce dernier a pour fils le Général Commandant, enfant très-gracieux et qui rappelle les magnifiques types de beauté égyptienne. Mais leur véritable chef, depuisleur départ d'Amérique, est M. Catlin. Ce voyageur intrépide mérite bien un pareil honneur ; car il a consacré sept années de sa vie à visiter les qnarante-huit tribus où l'on retrouve encore dans toute leur pureté les races aborigènes de l'Amérique septentrionale. Un délégué du gouvernement des Etats-Unis, M. Melody, veille aussi sur la sûreté de ces bizarres citoyens de la république du nouveau-monde. Enfin ils sont protégés, croient-ils, par un sorcier médecin et factotum de la troupe, qui se t'ait appeler Pieds ampoulés, et sans le secours duquel les navires qui portaient la Pluie qui marche se seraient ar-

rêtés, la chose est certaine; ce qui aurait donné lieu, disonsle en passant, à un singulier contre-sens. Voici le fait: on était encore dans le grand océan, il ventait frais et le navire filait à l'heure une quantité de nœuds fort honnête, lorsqu'un des passagers indisposa sérieusement contre lui l'un des génies familiers du Grand Esprit qui préside aux voyages heureuxio tout à coup, les voiles s'affaissèrent le long des mats, la mer se polit comme la surface d'un miroir, il y eut calme plat, à l'endroit même où se trouvait le vaisseau, tandis qu'à quelques pas de là une brise ronde faisait clapoter les flots précisément dans la direction demandée,–l'ofilcier commandant eut beau mettre les chaloupes à la mer, pour se haler dans le vent- impossible, le navire était environné d'un cercle fatal de paix à tout prix dont il ne put sortir qu'à l'aide des Pieds ampoulés qui le lancèrent sans secousse, là où toute puissance humaine n'aurait pu le transporter –quelques paroles mystérieuses et quelques grains de tabac avaient suffi au grand Albert de ces parages pour accomplir le prodige.

Quoi qu'il en soit de ces sortileges, dont nous voyons la portée, parce que nous n'avons pas la myopia intellec- tuelle des I-o-ways, avouons que si la confiance que ces peuples ont dans leur médecin est aveugle, elle est bien- gagnée, sinon justifiée, par les épreuves auxquelles sont soumis les candidats au titre de docteur. Avoir quatre crochets de fer dans la poitrine, être attaché à un pieu sans toucher terre et regarder fixement le soleil sans baisser les yeux, depuis l'aurore jusqu'au crépuscule, tel est, tout simplement, le programme du concours. Croyez-vous qu'à ces conditions-là il y eùt beaucoup de médecins en France?

L'épisode burlesque que nous venons d'emprunter

aux pérégrinations de nos aventureux voyageurs est la petite pièce du grand spectacle qu'ils nous ont offert; mais après le gai vaudeville, le drame larmoyant, c'est dans l'ordre, - n'est-cc pas?–dans l'ordre habituel do la scène qui se joue sur les planrhes, et de cette scène bien autrement incidcntée qu'on appelle la vie. - Nous vous avons dit Itintérèt qui s'était attaché à l'arrivée des sauvages, intérêt de curiosité, amour du nouveau. L'intérêt qui suivra leur départ est de toute autre nature, c'est un intérêt affectueux, de commisération. Ces hommes, pour se montrer à nous et nous voir, avaient quitté leurs montagnes abruptes, leurs fleuves écumeux, leurs hautes prairies peuplés d'hôtes dangereux, avaient groupé autour d'eux tout ce qui pouvait leur rappeler la pairie,

qui n'est pas tin croyez-le bien. Ils avaient arraché les piquc.t(. u.. a, ient. leurs tentes, en avaient roulé les pe- après avoir soigneusement empaqiieléyl^r ..,.8 el, leurs colliers de dents et les coiihHi^vtf^^>wUl&/f$CMeignent,ils s'étaient confiés aux périls tâtiïfll aux courroux de l'Océan, avec leurs rejeton de tout arbre qui se cou-

ronne, et leurs femmes, ces compagnes de toutes les misères et de tous les hasards; mais qu'il adore le Christ ou invoque le Grand Esprit, qu'il soit sauvage ou civilisé, peau rouge ou visage pille, qu'il s'appelle I-o-way ou Français, l'homme laisse toujours ses jorcs aux ronces du chemin.-Parmi nos étranges visiteuggj on remarquait surtout.

Petit-Loup et sa femme; leur union.àvait été accompagnéu d'événemens romanesques. De beaux et de nombreux enfans faisaient l'orgueil du père et la consolation de la mère. Hélas! ces enfans sont morts les uns après les autres; leurs tombes sont semées en Europe comme des jalons de ce pèlerinage social accompli par la lribu; et voilà que la mère, dont le cœur s'était brisé à chacune de ces douloureuses stations, vient de succomber elle-même.

Paris, cette reine de la civilisation européenne, a vu défiler le long de ses interminables carrefours le cortège funèbre d'uïie Iroquoise!. N'est-ce pas qu'il y a là un événement triste et profondément dramatique dans cette

femme que l'amour attache fatalement a un homme, qui sacrifie, pour le suivre, tout ce que devait aimer celle àme passionnée, le wigwam paternel, les longues causeries de ses sœurs, les enants du soir sous les arbres de la savane, pour venir prosaïquement expirer entre quatre murs, après avoir pleuré sur les restes de tous ceux qu'elle avait aimés. Pauvre humanité, qui naît faible et débile, grandit' tourmentée et souffreteuse, et s'éteint sans avoir goûté pure et entière cette félicité qu'elle ambitionne sans cesse.

Mais voilà que nous aussi nous tournons au drame larmoyant, et faisons d'une chronique une ennuyeuse homélie. Du monde et de sa réalité, passons au théâtre et à la fiction; la fiction seule est joyeuse ici-bas.

Nous n'avons pas la prétention de mettre nos lecteurs an courantde tout ce qui a été produit sur la scène depuis notre dernier feuilleton, qui date déjà de plus d'un loiig mois.- Un mois, à Paris, au théâtre, mais c'est un grand siècle, - grand par la durée, bien entendu; pour en liuir

avec toute nécrologie, parlons d abord de l'Odéon. L'Odéon est mort, mort à la peine. Après avoir lutté avec courage, avec persévérance, avec fruit au point de vue littéraire et dramatique, les artistes de ce théâtre ont vu s'écrouler cet échafaudage de leur avenir; les uns se sont réfugiés, disons mieux, - exilés en province; d autres attendent, aspettar e non l'enire; d'autres sont engagés à l'Ambigu et à la Porte-St-Martin ; ceux-ci ont changé de carrière, car l'art ne peut pas se pratiquer aux boulevards comme sur les planches d'un Théâtre-Français. - D'autres enfin, nous nous trompons, un autre, s'est couché dans la tombe, ce dernier refuge de toute ambition déçue. Mlle Laurence, qu'une vocation réelle, irrésistible, avait appelée au théâtre, dont la nature, éminemment artistique, avait été puissamment secondée par des éludes opiniâtres, trop