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Titre : L'Afrique : journal de la colonisation française, politique, économique, agricole, commercial, littéraire et scientifique / fondé à Paris par les colons de l'Algérie ; [directeur-gérant responsable : Hte Peut]

Éditeur : au bureaux du journal (Paris)

Date d'édition : 1845-03-22

Contributeur : Peut, Hippolyte (1809-1889). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb326834694

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb326834694/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 316

Description : 22 mars 1845

Description : 1845/03/22 (A2,N42)-1845/03/26.

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k6366452j

Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-3025

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 12/11/2012

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Paris. 21 Mars. 1 PéllIIOR de raigérie..

La lettre suivante, que nous venons de recevoir de l'un de nos abonnés, nous prouve que notre pensée a été comprise, et que la pétition pour la réunion de l'Algérieà la France trouvera de chauds partisans parmi tous

les hommes qui veulent sincerement le ueveloppement rapide et la prospérité de notre nouvelle FRANGE AFRICAINE.

Monsieur le directeur, Permettez-moi d'emprunter les colonnes de votre consciencieux journal pour répondre quelques mots à un article inséré dans Y Algérie du 6 mars.

Cet article s'élève contre le projet de pétition ayant

Irait à la réunion de notre colonie a la France. On y oppose, comme principal obstacle à l'annexion désirce, l'état actuel des indigènes,qui ne sont pas encore assez mûrs, assez civilisés ni assez instruits (si ce n'est en fait de ruse) pour exercer les droits électoraux!.

A ce compte, les Français établis en Algérie ne pourront jouir des institutions de la mère-patrie que lorsqu'il aura plu à MM. les Bédouins et Kabyles d'atteindre le degré de perfectionnement voulu pour devenir électeurs, éligibles, voire même députés. Autant vaudrait

déclarer tout de suite que ce pays est à jamais voue au régime de l'arbitraire et du bon plaisir ; mais c'est ce qu'on n'ose pas dire ouvertement, bien qu'on le laissé sous-entendre par des réticences assez transparentes.

Après avoir établi, à sa manière, que l'assimilation demandée aurait pour effet inévitable de conférer aux indigènes tous les droits publiques et politiques définis par la Charte et les lois, la feuille à laquelle je fais allusion édifie tout un système de manœuvres électorales à l'usage des partisans d'Abd-el-Kader. Tout cela est bien puéril! Raisonnons cependant comme si nous avions à répondre à des argumens sérieux.

La réunion de l'Algérie a la France est une mesure nationale avant tout.; elle doit avoir pour objet d'établir l'égalité des droits entre les nationaux des deux rives de la Méditerranée. Il n'est pas nécessaire d'expliquer que, par ce mot de nationaux, nous n'entendons parler que des hommes ayant légalement la qualité de citoyen français. Or, que faut-il pour posséder cette qualité? être né de père français, ou s'être fait naturaliser, si l'on était étranger. La loi est formelle, et il ne

peut y avoir d'équivoque à cet égard. Ainsi, en Identi- liant l'Algérieàla France, on ne sauraitinvestiriesindigènes d'un titre qui ne peut leur appartenir ni en fait ni en droit. Ils resteraient toutnaturellementsous l'empire des dispositions qui régissent l'état des étrangers résidant sur notre territoire; ils seraient placés sur la même ligne que les Allemands, les Espagnols et les Maltais établis en Algérie, c'est-à-dire que les uns et les autres ne pourraient acquérir la qualité de citoyen français qu'en obtenant des lettres de naturalisation.

Vous voulez donc, s'écrjera la feuille opposee, que les indigènes, nos assujettis, nos adhérens naturels, soient mis en dehors du droit commun. Qu'est-ce à dire, que parle-t-on de droit commun,quand nos propres nationaux en sont exclus? Faut-il donc que, par le fait d'une philanthropie de commande, d'un libéralisme hyprocrite en faveur de hordes barbares, qu'on ne disciplinera jamais complétcment, nos frères légitimes ne soient plus Francais que de nom, dès qu'ils ont touché le sol alaérien? Depuis Quand. d'ailleurs.

l'intérêt des étrangers (et quels étrangers !) doit-il l'emporter sur celui de nos compatriotes? Soyons Français d'abord, et que les Arabes soient ce que nous voudrons les faire ou ce qu'ils pourront être.

Au surplus, que nos adversaires se rassurent ; nous voulons que tout le monde participe au droit commun, non point tel qu'un régime bâtard ou arbitraire peut l'entendre, mais tel qu'il est défini par la loi; car ce

que nous désirons, c'est le règne de la loi partout où elle peut avoir accès. Or, la loi francaise protège les étrangers à l'égal des régnicolôs; mais elle ne leur accorde pas les droits politiques dont ceux-ci jouissent.

Eh bien ! nous ne demandons rien de plus que ce que dit la loi; mais aussi rien de moins. Que parlezvous donc de désordre, de bouleversement, à propos d'un acte aussi éminemment régularisateur que celui

que nous réclamons? Quelle perturbation peut-on appréhQnder, quand la réunion a pour objet de satisfaire le plus pur des sentimens, l'amour de la nationalité?

Tranquillisez-vous donc, et cessez d'emboucher la trompette d'alarme ; l'ordre ne sera pas troublé, bien au contraire; car c'est du jour où l'Algérie sera assimilée à la France que datera véritablement le règne de l'ordre. Les arabomanes, les courtisans du sabre,

les pêcheurs en eau trouble pourront y perdre, nous n'en disconvenons pas; mais le bien public y gagnera, et la compensation est fort de notre goût. Continuez, si le jeu vous plait, à demander l'organisation des travaux publics coloniaux; donnez de bonnes raisons, si vous le pouvez, à l'appui de votre idée, et l'on verra si elle offre ou non quelque mérite; mais, fût-elle cent

fois parfaite, il n'en pourrait découler aucun argument contraire à l'annexion désirée. Que la colonie algérienne soit ou non régie par les lois et les institutions de la métropole, votre projet n'a ni plus ni moins de chances d'être adopté ou repoussé. Vous voulez qu'on organise la direction du travail agricole, rien de mieux; c'est là une question de détail, une affaire administra-

tive, une matière a règlement. Mais, avant tout, et, comme base fondamentale, nous voulons la constitution sociale et politique de l'Algérie; nous voulons qu'un grand acte proclame solennellement à la face du monde que la frontière méridionale * ta Frknce èït au dMcrf, nous voulons enfin que, pour tout Français, la patrie soit aussi bien en Algérie que dans le territoire compris entre Toulon et Dunkerque, entre l'Océan et les Alpes. Volii ce que nous voulons et ce que

nous espérons obtenir, avec l aide de l'opinion publique, avec le concours de tous les hommes qui savent placer au-dessus de l'intérêt individuel le aentiment de l'honneur national, l'amour de l'ordre, le respect de la légalité.

Agréez, monsieur le Directeur, l'expression de mes sympathies, Un de vos abonnée, propriétaire à Alger.

Incapacité eolonlMlr|M ûm «iBWèra de la guerre el de l'aiRlaltrrallSR «a AIgérie. II est impossible de rencontrer plus d'hérésies en matière de science sociale et administrative que dans le préambule de l'Instruction sur l'exécution des dis-, positions de Vordonnance royale du Ier octobre 1844, titre V, à l'effet de faire cesser l'inculture des terres, adressée le 2 février dernier au général gouverneur

par intérim de l'Algérie. - - Pour mieux faire ressortir toute l'ignorance de la direction des affaires de l'Algérie où se sont formulés et ce préambule et les instructions qui le suivent, on agrandsoin de déclarer que : u L'Algérie n'existera réellement que lorsqu'elle » pourra se suffire à elle-même. De là l'urgente né» cessité de la peupler, de la fertiliser sans retard, les » capitaux et les bras se présentant en foule. »

On sait que l'ordonnance du 1er octobre dernier prescrit la délimitation, par le ministre de la guerre, des territoires où, dans chaque province, se concentreront plus particulièrement les efforts colonisateurs de l'administration. Elle rend également la culture obligatoire dans ces territoires, et déclare que les propriétaires qui ne cultiveront pas seront expropriés de leurs terrains, sauf à accepter forcément, en échange, d'autres ter-

rainseo dehors du territoire délimité, ou à payer 5 francs d'impôt par hectare détenu inculte.

Dans l'instruction en question, le ministre de la guerre se félicite de la découverte de cet ingénieux moyen consistant à donner aux colons dépossédés des terres lointaines en échange de celles qu on leur arrache dans le voisinage des villes; il ajoute gravement qu'ainsi l'Etat se trouvera dispensé de payer des indemnités pécuniaires, et il déclare que les avantages économiques de ce système d'échange sont évident* -

U est clair pour nous que ce moyen de favoriser la culture est tout simplement un moyen d'exproprier sans avoir aucune indemnité à payer, car on donne au colon en échange d'un terrain que l'on déclare avoir une valeur productive, un terrain qui ne coûte rien et qui n'aura de valeur réelle que lorsque la culture sera possible hors des limites fixees. De plus, par ce moyen d'échange forcé, on élude la partie de l'ordonnance du 1er octobre 1844 qui fixe le mode d'expropriation

et attribue la fixation de l'indemnité préalable aux tribunaux à défaut de jurés. A quoi sert de réglementer la propriété si on viole aussi ouvertement l'ordonnance qui la régit et qui avait la prétention de la constituer? Mais là ne gît pas encore la preuve incontestable de l'ignorance du ministère de la guerre en ce qui concerne la prospérité publique et la création d'intérêts - agricoles et commerciaux. - - - --

Le fait de l'incullure des terres qui environnent Alger et d'autres villes est causé, dit le ministre, par des agioteurs qui, après avoir acheté des terres pour rien, les détiennent incultes pour les revendre trèscher, et s'opposent ainsi à tout progrès agricole. Nous pouvons aflirmer que ces prétendus agioteurs sont en très-petit nombre, et que s'il y en a, ils entendraient bien mal leurs intérêts. En effet, quél ë&l M HWf de toute espèce d'entreprise agricole, commerciale ou in-

dustrielle ? c est évidemment le désir et l'espoir de réaliser des bénéfices. Or, pense-t-on que des hommes mus par ce désir, qui est le levier du monde actuel, soient assez simples pour laisser des terres improductives, si leur exploitation, d'une façon quelconque, pouvait donner des produits ?

Le rôle d'un gouvernement intelligent n'était donc pas de dire aux colons : Vous cultiverez ou vous serez

expropriés; mais de rechercher si réellement on pouvait cultiver avec l'espoir de rentrer, non-seulement dans sep déboursés, mais encore de faire un léger bénéfice; car enfin, quelque léger qu'eût été le benéfice, cela valait encore mieux que de payer, sans en rien retirer, la rente annuelle constituant le prix d'achat de ces terrains détenus en friche ; sans compter la plusvalue qu'eussent acquis ces terrains par la mise en culture.

Conçoit-on ces mesures codroitives de mise en culture, et présence d'un arrêté du conseil d'administion ture, d jktger, qui ordonne de jeter les fumiers à la mer pour sn débarratter?

Ce ne sont donc point ces prétendus agioteurs qui sont la cause de l'inculture des terrains en Algérie, et M était parfaitement superflu de faire des lois pour les teindre.

,Si on ne cultive pas en Algérie, c'est apparemment qu'on ne peut faire utilement concurrence, soit aux

produits des Arabes, soit aux provenances de l'Espagne, de l'Italie ou de la Crimée. Faudrait-il, pour exciter à la culture, frapper de droits très-forts ces provenances à leur entrée en Algérie? Alors les denrées y deviendraient d'un prix si exorbitant que la maiq-d'oeuvre y serait plus rare encore , ce qui renrendrait par conséquent toute culture impossible.

Pô< ,e cultive donc pas en Algérie, non point parce qu'on ne veut pas cultiver, mais parce que les produits seraient obtenus à un prix qui en rendrait le débit impossible, parce que les capitaux manquent, et que les capitaux ne viendront jamais féconder un pays où

l'avenir est aussi incertain, ou l'on est sans droits politiques et presque sans droits civils, où les intérêts communaux ne sont pas représentés; où il n'y a pas de loi qui garantisse les droits de chacun ; où l'on est à la merci de tous les tàtonnemens administratifs; où l'on recommence la civilisation, comme si nous ne l'avions pas en France à peu près aussi parfaite que possible dans les conditions actuelles; où enfin un consul anglais proteste contre les droits de la France sur l'Algérie.

On dit que les capitaux se portent en foule en Algérie. Jusqu ici, aucune somme réellement appréciable ne s'est portée vers l'Algérie pour l'agriculture. Une caisse hypothécaire, au capital de 3 millions , se propose bien de se fonder dans le pays; mais pour faire valoir son argent au taux du commerce. Or, que veuton que devienne l'agriculture avec des prêts à 10 p. 0/0, et encore ce taux n'existe-t-il que pour Alger; il est bien plus élevé ailleurs. On parle encore d'un chemin de fer d'Alger à Blidah, au capital de 10 millions; sans

doute ce sera un progrès, niais non dans le sens agricole.

L'agriculture, qui n'est pas une spéculation à courlti échéance, demande en Afrique d'autres garanties que n'en exigent les opérations industrielles; il lui faut un long avenir. Or, on ne lui assurera ces garanties et cet avenir que par la réunion de l'Algérie à la France, qui fera des colons algériens des citoyens français admi-

nistrés comme on l'est en France. Tant que cela ne sera pas fait, il n'y aura pas de capitaux pour féconder l'agriculture, partant pas de main-d'œuvre, et conséquemment pas d'agriculture.

Le ministere de la guerre veutmettre des colons sur les terrains expropriés; mais Ipur donnât-il terrain, maison, instrumens aratoires, semences et bestiaux , ces colons retomberont avant peu dans la condition de ceux qu'on exproprie pour cause d'incullure, c'est-àdire qu'ils ne pourront produire des denrées à un prix

marchand ; puis, après du temps perdu et de l'argent gaspillé, on sera plus arriéré qu'on ne l'est actuellement, car on aura détruit la foi de la France en l'Algérie. Peut-être est-ce le but qu'on se propose. On ne conçoit pas, en effet, la persistance que met le gouvernement à refuser à l'Algérie le bienfait de nos institutions.

Colonisation mUltalre, Fouka, Uered et Matlma.

Les essais de colonisation militaire que M. le maréchal Bugeaud a tentés jusqu'à présent ont occasionné des dépenses hors de proportion avec l'insignifiance des résultats obtenus. C'est ce que nous allons démontrer par des faits qui sont connus de tout le monde en.

Algérie. "II 'bl' d" 1 Le premier village établi d'après ce système, le fut avec des militaires libérés; c'est celui de Fouka, sur le

territoire de Coléah; il a - coûté, en constructions de toute nature, près de 300,000 fr., et ces dépenses ont abouti à l'établissement d'une quarantaine d'hommes sans sou ni maille, qu'il a fallu marier, pourvoir d'un ménage, d'une maison, d'instrumens aratoires, de secours de toute espèce, et enfin, auxquels on a accordé des rations jusque dans ces derniers temps. On peut,

sans exagération, evaluer a 15,000 fr. le coût de chacun de ces ménages, y compris la valeur de la maison.

Ce village se trouvant, malgré ses groses dépenses, incomplet, inachevé, il a fallu y introduire une trentaine de familles civiles.

Après Fouka est ven *ueered, sur la route de Bouffarick à Blidah. Comme lie premier, il a une enceinte en pierres qui le fait ressembler à un couvent, et de gran1. des maisons pour deux familles : le tout construit par lo génie militaire. Pour le peupler, on a eu recours à des soldats encore attachés au drapeau, organisés en com-

FEULLETON DU JOCllHL L'AIME. 1 Chronique Algérienne.

Alger, le 10 mars 1845.

C'est une chose merveilleuse vraiment que la transition rapide qui nous a fait passer en une nuit de la zène glaciale à la zone torride. Ii y a dix jours à peine, nous étions bloqués de partout par des pluies torrentielles; aujourd'hui, la poussière

couvre les routes, ni plus ni moins qu'aux jours de sirocco. Les rivières, débordées, sont rentrées dans leur lit, les communications interrompues ont renoué leurs fils, les craintes qu'on avait conçues pour quelques camps éloignés se sont évanouies, l'activité commerciale reprend de plus belle, cl nous commençons à recoonaUre, à une chaleur de 22 degrés, que l'Afrique n'est pas si loin qu'on se permettait de le dire il y a trois semaines.

Ce n'est pas qu'il n'y eût alors quelques raisons de croire à une perturbation générale dans les sphères célestes. Les auciens de la colonie disaient que depuis 14 années (leurs souvenirs ne remontaient pas plus haut), ils n'avaient jamais rien vu de pareil. La foule qui sortait du bal toute joyeuse avait trouvé un malin de la neige sous ses pas. Collines et plaines s'étaient montrées pendant huit jours couvertes d'un immense linceuil ; de nouvelles Alpes avaient surgi à t'horizon, avec leur manteau de frimas; et un thaleb, versé dans la science de l'histoire, rucontait naïvement parmi les siens qu'un semblable bouleversement de la nature avait présagé autrefois, je ne sais quelle année de l'Hégire, l'épouvantable désastre du sultan Calassi.

Tout cela, comme vous le voyez, n'était pas très-rassurant pour des chrétiens; mais ce qui l'était bien moins encore pour des Français, c'est l'espèce de stupeur qui s'était emparée de vous, mesdames, en plein carnaval, et qui rendait vostronts soucieux et vos lèvres inquiètes, même au milieu des emportemens de la danse. On tût dil, à vous voir ainsi toutes trembloltantes, encapuchonnées dans votre double burnous, les veux fixés sur ces sommets blanchis qui bornaient la Milidj3, que toutes les gluces de la llussie avaient fait irruption parmi nous.

On eut dit que le froid d'un ciel de plomb vous avait pénétré jusqu'au cœur, que voire sein n'avait plus de ballemens, totre bouclic p us de IJurnles, votre esprit même plus de jeunesse, el

qu'une ère fatale d atonie et d'immobilité allait succéder à l'activité chaleureuse qui vous rendait si belles. Comme nous mau- disions alors ces nuages venus du |>ôle qui ternissaient notre beau soleil'Comme nous protections de toutes nos forces contre ces neiges envahissantes, dont la présence outrageait nos cainp >gnes !.. car, en prenant en main la cause de la nature, c'était la tôlre que nous défendions en secret. Si la vie de l'Afrique est dans sou soleil, votre beauté est dans ne rayons ; et

du jour où les tiges parfumées de l'aloës ne s'élanceraient plus sur la marge des chelOini, où les buissons protecteurs du cactus ne ceindraient plus nos oasis d'orangers, où les larges feuilles du bananier el du figuier n'ombrageraient plus les sources de nos fontaines; de ce jour, notre règne finissait, el vous ne seriez plus que de pâles étrangères errantes sur un sol étranger.

Mais tranquillisez-vous!. gràce à Dieu et au désert, ce jour n'arrivera jamais. Voyez plutôt : notre ciel a repris toute ha pu- reté, les traces de l'orage n'existent plus, de vives splendeurs inondent l'atmosphère, tout semble vous inviter à quitter les di-

vaus moelleux, où vous êtes accroupies, el à venir , respirer, fenêtres ouvertes, l'air si pur et si frais de la mer, et les parfums rajeunissans du Sahel.

La vie intérieure est propre aux longues causeries, aux récits colorés, aux luttes de l'imagin3tion et des souvenirs. Ce qu'on a d'ailleurs de mieux à faire en carême, surtout quand il pleut, c'est de parler du caruaval, et, lorsqu'on a épuisé la série des plaisirs, de risquer résolument celle des aventures.

Aussi, que n'a-t-on pas dit à l'ombre de la cheminée, pendant ces iristes heures de pluie où nous suivions avec intérêt les jeux de la flamme du foyer. En fait de piquantes indiscrétions

et de charitables médisances, l'Orient n a rien a envier à l Oceidenl. Il est, du reste, permis de tout dire là où l'on peut tout inventer; el l'imagination des antiques Mille et une Nuits ne s'est pas tellement perdue à travers les siècles qu'il n'en soit resté quelque chose pour les nuits modernes.

J'ai déjà esquissé à grands traits la physionomie du carnaval algérien. Il a beaucoup dégénéré, disent quelques -uns.-Il est encore dans l'enfunce, disent quelques autres.–Je ne sais pas précisément à qui donner raison, mais je crois que persoune n'a tort, dans le sens absolu du mot. La différence des points de vue fait seule la différence des conclusions. Il est certain, par exemple, qu'en 1835, il y ajuste dix ans, dans cette même salle

de spectacle où nous avons dansé cette année, et où nous danserons encore, s'il plait à Dieu et à M. Curet, il se donnait des bals remarquables par le choix de la société, l'éclat des toilettes, le confortable de l'ambigu, l'entrain sans réserve que chacun y apportait , et l'espèce d'ivresse tourbillonnante qui dévorait toute la salle jusqu'au matin. Aujourd'hui que la population est multipliée dans une immense proportion, que l'élément pu.

blic a pris sa place, et la place d'honneur encore, à côté de l'élément mililaire, il n'en est plus ainsi. Pourquoi? parce que la société nouvelle a autre chose à faire que de penser exclusivement à ses plaisirs, même pendant vingt quatre heures, parce

que la fièvre d argent a remplacé la lièvre de gloire, et que cellt-ciest antipathique à toute espèce d'élan; parce qu'une baisse notable s'est fait sentir dans l'enlbousiasme qu'inspire un bal masqué, depuis qu'on s'est aperçu qu'il s'y glissait, à l'ombre d'un costume plus ou moins travesti, des caravanes de houris mauresques descendues de la Casbah; parce qu'enfin, là où les intérêts se créent, la vanité se glisse; là où l'ct belle sociale se développe, les points extrêmes se distanoeut, cl qu il

n'est plus possible alors, avec la méme^do&e de bonne volonté individuellevde rencontrer la même spontanéité, la même entente des passions, et par conséquent la même puissance de résultat.

Il y il à Alger une réunion presque aristocratique, désignée sous le nom modeste de cercle, et composée d'une centaine d'hommes honorables par leur position ou indépendans par leur fortune. Il sembla, de prime abord, qu'il serait très-facile à ce petit nombre de membres de se concerter pour donner un bal dans leurs salons, soit à l'élite de la population civile, soit aux familles mêmes et aux connaissances intimes du cercle. Eh bieu!

il exUte déjà entre ces familles des nuances si tranchees, des distinctions si inconciliables, qu'il n'a pas encore été possible de s'entendre pour les réunir. Aujourd'hui, le bal projeté ne se donnera pas, quoiqu'il soit vivement désiré. Il y a dix ans, il eût élé voté par acclamation, et décrété d'urgence comme une victoire.

le ne voudrais pas cependant redorer le passé au préjudice du présent. Le présenta du bon. quoi qu'on dise, ne filt-ce que ce qu'il promet. Nous sommes loin encore, sans nul doute, des éblouissantes fêtes de la rue Lepelletier, loin même des sarabandes fantastiques du caveau Vivienne; le parquet de la Régence

ne glisse pas, celui de la saite tÁurel glisse trop (car u nous a manqué sous les pieds) ; l'orchestre, surtout s'en va mourant, décomposé, distrait, d'une pâleur désespérante, ni plus ni moins que s'il uailtait i un mariage de raison ou à un convoi ministériel. Mais vienne un jour la baguette enchantée de Musard, viennent les magiciens de l'harmonie visiter la ville du soleil, vienne surtout une salle digne de ce nom et un parquet convenablement raboté,et au tam-tam provocateur de nos spleudides fantaisies, les collines même de Sahel s'ébranleronl.

Je dirai plus. Avant dix ans le carnaval algérien sera le rendez-vous de tous les désœuvrés du siècle. Partout ailleurs, on court après les excentricités naturelles, les ressemblances bi-

zarres, les costumes caractéristiques, comme après des atômes in8aizJisables.-lci, par le fait seul de la diversité des races, les excentricités nous débordent. Le boléro, la cachucha, les menlilles andalouses, les bérets pyrénéens, les broches vénitiennes, les yeux noirs sous le voile, toutes les danses nationales, toutes les parures expressives, toutes les couleurs symboliques, tous les types de beauté et d'élégance se meuvent sur leur théâtre normal ; et il ne faut que donner à ce fait préexistant une certaine force de durée, un certain cachet de grandeur digne de la métropole africaine, pour faire d'un bal français ouvert sous les canons de la Casbah, à l'ombre des minarets sonores d'Alger la bien gardée, côte à côte avec les noires murailles du palais d'Omar, le plus magnifique panorama que l'imaginatioo bu-

I I mMj nrasser.

~M~u) a ce ncore ! L'Europe a l'intrigue, nous avons la ~t~ 41 n~ c~t à-otfe tout ce qui fait vivre, tout ce qui ébranle, in^M £ 4& tout ce qui crée, tout ce qui multiplie la vqlie aitrigue sous le masque est le dernier mol éfilq cite, et nous n'en sommes encore qu'aux

premiers élans de sève et de verdeur. Or, l'histoire intime d'Alger est toute dans cette différence. Ses romans, si jamais elle en a, mêleront la passion la plus féconde aux mille éventualités de la vie populaire, et ressusciteront l'amour dans son acception la plus complète. Ses annales de chaque jour ont déjà des formes romanesques qui déconcertent les esprits positifs, coulés au moule de la vieille civilisation. Ainsi, pour ne citer qu'un fait actuel, on annonce aujourd'hui la présentation dans le monde algérien d'une fort jolie juive indigène, appartenant à

une famille inconnue, douée d'une petite fille jolie comme elle, et qu'un haut personnage administratif se décide à épouser.

Partout ailleurs ce mariage projeté serait un scandale à tout rompre. La fiancée n'a aucune de ces séductions cODveotionuelles qui font accepter une femme libre en dépit de son passé.

Son éducation est oulle, son esprit ordinaire, et sa petite fille, toute adorable qu'elle soit, dit-on, n'en accuse pas moins une liaison antérieure à celle d'aujourd'hui. Toutes ces considérations ont bien fait blàmer un peu la démarche du haut personnage; mais comme, en définitive, la jeune indigène est belle à

rendre fou, comme elle a adopté, pour plaire à son amant toutes les convenances de toilettes et de manières qu'impose le despotisme parisien, comme, du reste, un attachement profond, violent, inépuisable, de part et d'autre, semble être le mobile puissant de cette détermination, les femmes, pour qui le cœur blloul quand il est quelque chose, ont commencé par la prendre sous leur patronage, et aujourd'hui tous les salons sont disposés à s'ouvrir devant la nouvelle Kebecca, par cela seul qu'il y a en elle ce qui fait tout pardonner dans le ciel el sur la terre, el surtout en Afrique, l'amour.

Je pourrais, sans épuiser le champ de l'actualité, ajouter à cette histoire venue en droire ligne de l'âge d'or, bieu des dénouemens du même genre. -Hais, comme je ne veux pas sortir du cercle exceptionel que je me suis tracé, pour empiéter sur les positions ordinaires de la vie, je me contenterai d'esquisser un dernier récit tout imprégné d'orientalisme, dont la dernière scène date de quinze jours, et qui m'a été confié avec toute la discrétion convenltble, au coin du feu, un soir de pluie diluvienne, dans un salon de la rue des ConlIls, par la plus aimante, la plus aimée, la plus gracieuse, la plus mignonne, la

plus délicale, la plus intéressante, la plus idéale, la plus vertueuse, la plus angélique femme d'Alger, Madame

Devinez.

M. Sicphen D. ,

Je suis obligé de commencer mon histoire comme un roman, pour lui enlever uu peu de sa dangereuse transparence.

M. Stéphen D., lieutenant au ter rfolment de chasseurs, était un de ces officiers, romme il y en a tant dans l'armée d'Afrique, qui ont quitté gaiement la vie de famille ou de garnison, pour embrasser celle des camps, et à qui les fat,gues de cette nouvelle existence n'ont rien fait perdre de leur distinction originelle. Venu en Afrique à un âge où les passions, sans être éteiate.) ont déjà subi l'importante modification de l'expérience,