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Titre : L'Afrique : journal de la colonisation française, politique, économique, agricole, commercial, littéraire et scientifique / fondé à Paris par les colons de l'Algérie ; [directeur-gérant responsable : Hte Peut]

Éditeur : au bureaux du journal (Paris)

Date d'édition : 1845-03-16

Contributeur : Peut, Hippolyte (1809-1889). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb326834694

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb326834694/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 316

Description : 16 mars 1845

Description : 1845/03/16 (A2,N41)-1845/03/22.

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k63664514

Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-3025

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 12/11/2012

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A partir du 2 avril prochain, le journal 1 !• AffttQVË caractères Paris, i5 Mars.

Les ronCes «tolm-cnt être faites « n Algérie par le servlee ttes ponlci et ettatMwecM Nous apprenons que la direction des affaires de l'Algérie, cette fois bien inspirée, a fait décider par le ministère, il y a quelque temps, que, dans te but d'acliver les travaux de routes, des travailleurs militaires seraient mis désormais, selon lès besoins, à la disposition de l'autorité civile et du service spécial des ponts et chaussées.

Jusqu'à présent on n'a pas fait à ce dernier service, qui cependant devrait, surtout quand tout est à la

paix, avoir la haute main dans tout ce qui regarde la viabilité algérienne, la part d'influence et d'action qui lui revient incontestablement. Les ponts et chaussées n'ont que quelques lambeaux de route autour des villes du littoral, tout le reste est dévolu au génie militaire et à l'artillerie, qui, certes, n'ont pas été créés pour des travaux de cette nature; c'est une anomalie et ùn iotervertissement de rôle qui ne peuvent durer.

La direction de l'Algérie, ou plutôt le bureau des travaux, l'a parfaitement compris. La décision dont nous venons de parler (Dieu veuille qu'on sache la maintenir /), a pour but et aura pour conséquence de mettre enfin les travaux des routes, qui ont une si grande importance en Algérie, entre les mains du seul service qui ait la spécialité voulue pour leur imprimer une direction sensée et profitable.

On parle beaucoup et à tout propos des routes ouvertes par le génie militaire. M. le maréchal Bugeaud disait l'autre jour à la tribune qu'il en avait fait au moins ttOO lieues; un journal dont le ministérialisme algérien est des plus singuliers, lui en attribuait officiellement 2,199 kilomètres. u -

Personne plus que nous n'est dispose à rendre hommage à L'habileté, à l'activité et aux éclatans services du corps royal du génie, bien qu'en Algérie il ait fait bon nombre d'écoles, et qu'on ait eu à signaler de son fait des constructions malheureuses, autant sous le rapport du goût que sous celui de solidité; par exemple, la façade du palais du gouverneur, les voûtes à l'épreuve de la bombe de l'hôpital de la Casbah, qui se sont écroulées après une grosse pluie, la caserne de cavalerie de B:)ne, qui vient d'avoir le même sort, et bien d'autres encore-, c'est, du reste, un sujet sur lequel nous reviendrons.

Mais nous ne pouvons accepter comme réels les grands succès qu'on lui prête en fait de voies de communication. Les roules que le génie à ouvertes et qu'il ouvre, ne sont, en général,que des sentiers et des chemins de campagne, ne présentant rien qui ressemble à des routes, dans la véritable acception du mot. Vienne une pluie un peu forte, et ces prétendues voies disparaissent et s'écoulent avec les eaux, laissanlles passages plus difficiles, plus impraticables qu'auparavant. Il en résulte que ces routes dont on parle tant n'existent point peudanl la mauvaise saison, c'est-à-dire lorsqu'elles seraient surtout indispensables.

Le tracé, en outre, est essentiellement provisoire et défectueux. On cite telle section de route, celle de Philippeville à Constantine, qui a subi trois ou quatre rectifications on ne peut plus coûteuses avant de prendre sa direction définitive.

Cet état de choses ne saurait se perpétuer, car ce serait faire d'énormes dépenses pour de petits et incomplets résultats ce serait, en outre, faire croire aux chambres et au pays que l'Algérie est dotée de routes, tandi > qu'on ne lui fait que de mauvais chemins.

Il faut donc que le service des routes, et sur le littoral, et dans l'intérieur, à l'exception de certains points

extrêmes, soit dévolu tout entier au service des ponts ..h8.ÍIII.I O.A .i' av Y8M"L"'1 ce but, et qui devrait avoir à sa disposition autant de travailleurs militaires qu'en exigeraient les circonstances. C'est aux chambres, et surtout à la commission du budget de 1846, qu'il appartient de pousser le ministère dans cette voie, et de faire taire l'opposition intéressée du régime militaire qui exploite l'Algérie.

Du port cl'Alaer, L'opinion en France est unanime sur la nécessité de terminer promptement le port d'Alger, et de mettre les crédits alloués pour son exécution en harmonie avec l'importance de cet ouvrage.

L'administration supérieure seule semble étrangère au vœu général ; seule elle persiste dans une voie que

l'on pourrait justement taxer de mauvais vouloir calculé. Comment, en effet, expliquer la lésinerie parcimonieuse avec laquelle elle agit à l'égard d'un travail qui constitue l'un des plus grands intérêts de la France et de l'Algérie, puisque de la rapidité de son achèvement dépend peut-être l'avenir entier de notre conquête ? Il y a la quelque chose que nous n'osons appeler par son nom, et que. dans tous les cas, nous ne saurions assez sévèrement signaler.

La presse, quelle que soit l'opinion qu'elle représente, et nous voyons avec plaisir cet accord, manifeste la même pensée à l'égard du port d'Alger.

Voici ce que nous lisons dans plusieurs journaux de nuances très-diuerentes au sujet d'une discussion qui a eu lieu hier, jeudi, à la chambre des pairs.

Réforme. i La chambre des pairs a adopte aujourd'hui la loi porlnnl règlement définitif du budget de 1842. M. Charles Dupin a fait remarquer que la surnme de 1 ,300,000 fr. pour le port d'Alger était insuflbaule. Avec de si faibles ressources, les travaux dureraient douze à quinze ans. Il a demandé en outre que l'on s'occupât de créer un port à Oran. M. le maréchal Soult a répondu qu'on en avait dit autant à la chambre des députés, et qu'il refusait au Luxembourg ce qu'il avait refusé au PalaisBourbon. A la bonne heure! voilà qui est net et péremptoire.

M. le maréchal Soult trouve que l'Algérie coûte déjà assez cher,

et qu Alger est en état de défense suffisant. La mauvaise humeur de M. le maréchal Soult quand on lui parle de l'Algérie est as- sez singulière : la bataille de Toulouse scrail-clle jalouse du combat (j'Isly.

Ce qu'il faudrait examiner d'abord, c'est laqueslion de savoir si les dépenses qu'occasionne l'Ai gélie, ont toujours été faites dans l'intérêt du pays : si l'on avait appliqué ait port d'Alger les millions que nous ont coûtés les expéditions princières, il y a longtemps que les travaux seraient terminés, mais on diraft que notre occupation d'Afrique a pour premier but de fournir aux lilsdu roi une lice où ils puissent gagner leurs ép4'rons.

M. le duc d'Orléans a fait l'expédition des Portes-de-Fer : M. le ducdcNetnours a eu celle de Constantine : M. le duo d'Aumale esi allé à Biskara; on piégare pour M. de Montpensier l'expédition du Juijura et de Deliys : l'expérience a démontré que la présence du ces jeunes gens coiVe beaucoup, sert peu, et gêne souvent. Mais M le maréchal Soult n'a garde de parler alors de sou économie ; il la réserve pour les travaux utiles, qui se poursuivent lenlement, sans bruit, sans éclat, et qui n'auraient d'autre mérite que de consolider entièrement notre conquête.

Patrie. -

La chambre des pairs a discuté aujourd'hui la loi des comptes de 1842, nui a été adoptée par U2 voix contre 2.

La d.scùssion n'a porté que sur t'attocittion iifT-ctée aux travaux du port d'Alger, que beaucoup de membres ont trouvée insuffisante. Des explications ont été données à ce sujet par MM. les ministres de la guerre et de la marine. Il est hon de constater qu'à la chambre des pairs, comme à la chambre des députés , tout le monde est disposé à allouer au gouvernement les fonds qu'il jugera nécessaires pour mener promptement à fin ces travaux et pour mettre nos possessions africaines à l'abri des chances d'une guerre. Le ministère est bien averti, et celle manifestation du vœu des chambres le décidera sans doute à accroître les allocutions financières destinées au port d'Alger.

Qpnd une dépense est utile, quand elle doit nécessairement êle, c'esf toujonrST-même atrVoînt-de vue du trésor, un excellegt calcul que de demander sur-le-champ aux contribua» bles les saerijjces qu'elle exige. On recueille bientôt ce qu'on a semé, et la sécurite dont nous jouirions sur l'avenir de notre colonie compenserait largement ce que le port d'Alger nous aurait coûté.

Débats..

Une courte mais intéressante discussion a eu lieu aujourd'hui à la chambre des pairs , à l'oeension de la loi des comptes de 1842. L'état de ces côtes africaines, et particulièrement du port d'Alger, a donné lieu à quelques vives paroles M. le baron Dupin. On consacre à ce grand et important travail une somme annuelle de 1 million 500,000 fr. : c'est le chiffre normal depuis un assez grand nombre d'années; c'est celui des budgets de ! 844 et 1IHa; c'est encore celui du projet de budget de 1846. Un pareil crédit est-il suffisant, est-il tel que le prescrit une politique prévoyante et une économie bien entendue? Telle n'ett pas, à ce qu'il nous a paru, l'opinion de la majorité de la noble chambre ; telle n'est pas non plus l'opinion d'une decommissions financières de la chambre des députés, qui a adressé sur-ce sujet des observations à M. le maréchal ministre de la guerre; le ministre à fait aujourd'hui cette déclaration à la chambre des pairs. Enfin M. le maréchal parait être entièrement du même nvis; et, en se résignant à un crédit qu'il trouve insuflisunt, il aurait cédé aux scrupules du ministre des finances et à la crainte de voir une demande plus considérable froidement accueillie par les chambres. Tout ceci semble présager une demande de crédits supplémentaires pour les travaux du port d'Alger.

- Cette éventualité effraie M. Pelet (de la Lozère). L'honorable pair acru devoir, à cette occasion, recommander la circonspeclion au gouvernement et lui prêcher l'économie. Equilibrons nos budgets, mettons nos dépenses d'accord avec nos recettes, comblons nos déficits : tel est, aux yeux de M. Pelet (de la Lozère), notre premier .devoir et notre plus pressant besoin. Il ne manquait à ce discours que de sortir d'une autre bouche; mais on conviendra que c'était chose singulière et piquante dans celle du ministre qui a ordonnancé les ruineuses dépenses du cabinet du 1er mnrs, de l'ancien collègue de l'homme dÉfat qui s'est si énergiquement prononcé, quand il s'est agi d'arrêter un plan pour le port d'Alger, en faveur du plan le plus vaste et le plus coûteux.

On a dit plusieurs fois, et cette opinion a été portée aujour- d'hui à la tribunede la chambre des pairs,que, la guerre échéant, la ville d'Alger serait à la merci de la première flotte qui voudrait l'attaquer. et que la rade n'offrirait pas à une escadre française un abri où elle pût soutenir une agression avec avantage.

Celle double assertion a été combattue par M. le ministre de la marine, dont les paroles ont produit l'impression la plus favorable sur l'esprit de la noble chambre. Le port d'Alger est dès à présent en assez bon élai pour résister à une attaque; depuis la tentative infructueuse de lord EXmOtllh, il a bien changé de face, et nos soldats le sauraient défendre encore plus vaillamment et plus habilement que les troupes du dey.

Si les questions qui intéressent l'Afrique étaient abordées de la même manière par la presse, on verrait bientôt s'effacer les abus et disparaître la plupart des obstacles qui se sont opposés depuis bientôt quinze ans.

et qui s'opposent encore au développement de l'Algérie.

Mulheureusement il n'en est pas ainsi, et cette espèce d'oubli dans lequel la presse parisienne laisse trop souvent désintérêts de la plus haute gravité, a fréquemment servi d'encouragement à un pouvoir qui ne demande que le bénéfice du silence pour ne rien faire, quand ce n'est pas pour tout oser.

Nous venons de faire allusion à l'oubli dans lequel la presse parisienne laisse trop souvent, pour ce qui a rapport à l'Afrique, des questions du plus haut intérêt.

Cet oubli nous a été déjà plusieurs fois signalé d'Alger avec un pénible étonnement. La lettre suivante, que nous recevons de l'un de nos abonnés, nous a paru trop sagement conçue et trop bien exprimer ce sentiment pour que nous ne croyions pas de notre devoir de la rendre publique. Nuus la publions néanmoins sous toute réserve de notre opinion personnelle, mais avec la douloureuse conviction que les aperçus

qu'elle contient ne manquent pas d'un certain degré de vérité. -.

Alger, 3 mars.

Monsieur, Depuis 1830, l'esprit public, en France, s'est constamment et énergiquement prononcé pour la conservation et la colonisation de l'Algérie. Dans le parlement comme dans la presse, tous les partis se sont ralliés sur ce terrain. C'est peut-être la seule question qui les ait trouvés unanimes.

D'où vient cependant que, jusqu'à présent, la presse parisienne n'a porté que l'attention la plus indifférente sur les affaires du gouvernement civil de cette colonie? d'oll vient qu'clle ne s'en occupe pas plus que s'il s'agissait des afftires du gouvernement cochincbinois? Comment expliquer que les accidens de guerre aient seuls le privilège de l'émouvoir, et que, pour tout le reste, elle soit atteinte d'une sorte de myopie, comme en faisait récemment l'aveu un journal d'opposition, le Courrier Français? comment se peut-il, enfin, qu'elle ne s'euquière pas le moins du monde des faits et gestes d". cette espèce de pachalick qui préside aux destinées de notre conquête, qu'elle laisse passer, sans en dire mot, les questions les plus graves et les plus vitales pour l'Afrique française, et que vous, Monsieur, qui avez pris à làrhe de porter la lumière dans les ténébreux arcanes de notre administration, qui, maintes fois déjà, avez signalé, en parfaite connaissance de cause, les incroyables énormités de notre régime législatif et gouvernemental, vous en soyez encore à prêcher dans le désert ?

Il y a là, vous le reconnaîtrez avec moi, matière à beaucoup de réflexions.

Jusqu'à ces derniers temps, nous avions supposé bonnement, nous autres colons, que, si la presse de Paris gardait le silence sur les choses et les hommes de notre gouvernement algérien, c'était parce qu'elle ne savait pas ou ne pouvait savoir que très-imparfaitement ce qui se passait dans nos contrées transmarines; mais à présent que vous êtes là pour lui ouvrir les yeux, pour l'éclairer et l'édifier, aujourd'hui qu'elle ne peut plus prétexter cause d'ignorance, nous ne comprenons plus rien à l'impassibilité de son attitude, et nous en sommes venus à penser qu'elle ne voit pas, parce qu'elle ne veut pas voir ; qu'elle n'entend pas, parce qu'elle ne veut pas entendre ; qu'elle se tait, parce qu'elle a un intérêt quelconque à se taire.

Que les journaux ministériels ne trouvent rien à redire à ce qui se fait en Afrique, qu'ils n'engagent aucune sorte de polémique sur les actes du gouvernement de ce pays, qu'ils s'abstiennent de les apprécier, cela se conçoit à merveille; en évitant soigneusement de provoquer tout examen critique à cet endroit, ils se tiennent parfaitement dans leur rôle; car ils n'ignorent pas, sans doute, combien cet examen pourrait être compromettant pour leurs patrons.

Mais que les journaux de l'opposition en agissent de mcme, qu'ils demeurent silencieux en présence de ces mesures insensées, de ces illégalités flagrantes, de ces abus de pouvoir et de toutes ces folles dépenses qui se renouvellent sans cesse sous leurs yeux; qu'ils enregistrent de pareils laits, purement et simplement, il titre de nouvelles, sans trouver un mot de IJlàme et sans paraître y attacher la moindre imporlance ; qu'ils aillent même, parfois, jusqu'à leur donner une explication plus ou moins explicite; qu'ils laissent tomber du haut de la tribune parlementaire, sans les relever et les stigmatiser, des paroles telles qu'en faisait entendre récemment M. le maréchal CugeauII; qu'en toutes choses,enifn, concernant l'administration civile de l'Algérie, ils s'associent, par une sorte de complicité tacite, à la tolérance des chambres, qui semblent avoir adopté pour règle de fermer les yeux et de laisser faire; c'est ce qui nous parait surprenant et quelque peu suspect.

Devons-nous croire, Monsieur, que cette presse, qui se dit indépendante et ferme dans ses principes, n'est, en réalité, rien moins que pourvue des qualités qu'elle s'attribue?

On raconte ici d'étranges choses sur son compte. D'aucuns disent que les intérêts sérieux du pays ne la touchent que Irèsmédiocrement, qu'elle en fait bon marché et ne prend nul souci de les étudier, de les bien comprendre, pour les défendre ensuite avec autorité; qu'elle ne se préoccupe que de misérables intrigues, que de questions de personnes et des moyens de pousser au pouvoir les candidats ministériels sous le patronage desquels elle est placée; qu'il en est ainsi, notamment, de tous les journaux appartenant à l'opposition dite consti'ution:ielle et dynastique; que, de ceux-là surtout, il n'y a rien à attendre pour le soutien de la cause de notre colonie algérienne et pour l'intelligente discussion de ses besoins.

D'autres prétendent qu'il n'y a pas meilleur espoir à fonder sur la presse radicale elle-même, qui ne demande pas mieux, dit-on, que l'Algérie soit gouvernée en dépit du bon sens, parce

Chronique de Paris. Un proverbe italien dit qu'une des trois choses qui foni mourir, Ire cose da morire, c'est d'attendre et de ne pas voir venir, aspettar e nonvenire. Depuis un mois, les deux millions d'habitàns de la grantl'ville devraient être morts et enterrés ; depuis un mois ils attendent l'heureux iclour du printemps et du zépbyrc, grala vice veris et favoni, et depuis un mois, comme hier, comme la veile, comme aujourd'hui, l'eau n'existe plus, on n'a que de la glace, et la neige argenle nos toits et nos campagnes. Une entorse a été donnée au globe, et Paris se trouve à la latitude de Moscou.

Les promeneurs des Tuileries frémissent de peur autant que de froid. Chaque pays, on le ait, a sa destinée attachée à la conservation d'une tour ou d'un arbre ; (nous ne sommes pas encore délivrés tout à l'ait des augures et des a rus pi ces). Paris voit son bonheur, sa prospérité, son accroissement attaché au marronnier qui étale pompeusement ses immenses rameaux tout près de ce coin du jardin de Lenotre, appelé la petite Provence, par allusion à la douce température de ses abris. Les rentiers qui s'y réunissent affirment que l'année où, contre tout usage établi depuis un temps immémorial, cet arbre privilégié n'aura pas montré le vert jaunissant de ses feuilles naissautes le 20 mars à midi précis, les plus grandes calamités désoleront la ville qu'il aura oublié d'ombrager ce jour-là à heure fixe. Ilélas!

c'est aujourd'hui le 16, et le marronnier du 20 mars, car c'est ainsi qu'on l'appelle, ne montre que ses bras noirs et décharnés couverts d'un givre éclatant, ce qui, pour confit mer encore la prédiction, ne le fait pas mal ressembler à un fantôme évoqué des sombres rivages.

Malgré le froid qui sévissait ce jour-là plus encore que de coutume, le jeudi de la Mi-Carême a été très-bruyant et trèsjoyeux. Pour prendre leur revanche du Mardi-Gras, les masques parcouraient nos rues et nos boulevards en troupes nombreuses. Pendant la nuit, la salle de l'Opéra a regorgé de danseurs ou de curieux, et les bals du noble faubourg el. de la Chaussée-d'Antin ne se ressentuient. point de l'artluerice considéraille des halsit billets imprimés. Tout le monde s'est amusé: le public payant et le public invité.

Il n'y a pas jusqu'au monde littéraire qui n'ait eu sa fête ce bienhvuiviix jour, jour de repus tlonnc aux Iristes el graves heures du carême. Car ce rnèine jour il y avait fête à l'Acadcmie; M. Victor lltigo recevait M. Sainte-Beuve, et les deux élus, l'ancien et le nouveau, le récipiendaire et l'introducteur, avaient à prononcer l'éloge de M. Casimir Delavigne. Bien a^ant l'heure indiquée, une longue file de voilures et de piétons assiégeaient les abord du palais de t'institut; la garde municipale faisait briller de toutes paris et son zèle et son uniforme ; on se heurtait, on se foulait, mais en règle et dans l'ordre prescrit par les règlemens. A l'intérieur c'était bien pis, ma foi ! on se heurtait, on se foulait aussi, comme au dehors, mais cette fois dans le plus grand désordre. Les bons fusiliers de la ligne qui, l'arme au pied, formaient la taie jusqu'à l'entrée du cénacle, protégeaient

le désordre, mais ne le réprimaient pas; ils auraient eu trop à perdre. Nous avons vu les plus jo!is doigts de rose presser les buffle tries sans tache d'un voltigeur, et de frais visages effleurer de vieilles moustaches. Ce tohu-bohu, surexcité encore par les rebuffades fort peu académique de l'hllissier en chef de l'Institut, a été porté à tel point qu'à l'arrivée du duc d'Aumale, c'est à grand peine si les honneurs princiers ont pu être rendus au nouvel arrivant; mais, comme à quelque chose malheur est bon, cette confusion a permis aux dames nombreuses que l'on repoussait par cette fin de non-recevoir : Il n'y a plus de places, de pénétrer en tapinois dans l'enceinte. L'académicien est trop galant de sa nature pour renvoyer pareil auditoire, et tout rè glement se lait à la vue de jolis yeux qui demandent grâce.

Tant bien que mal, et comme des oiseaux ou des génies familiers, la plus belle moitié du genre humain (style locali s'est assise pêle-mêle avec les immortels, et la séance a été ouverte.

Le discours de M. de Sainte Beuve et la réponse de M. Victor Hugo étaient attendus avec impatience. Qu'on nous pardonne les anachronismes en faveur de la comparaison; c'étaient Calvin et Luther discutant sur le pape. Le chefd'une école discourant avec un de ses anciens disci¡-.Ies,qui depuis avait, lui aussi, voulu faire secte, à propos de la vie et des œuvres du dernier représentant de la foi antique. M. deSainle-Beuve a gagné ses éperons au service des romantiques, et M. Victor Hugo avait peut-être le droit de le traiter un peu en transfuge. Mais M. Hugo n'a pas seulement du génie, il a cet esprit et ce tact dont il avait déjà fait preuve à la réception de M. Saint-Marc Girardin; il a vu qu'il se trouvait en présence d'une tombe, et il n'a pe ssé qu'à la

glorifier. Ce noble tribut payé à la némoire d'un homme qu'on lui avait souvent opposé comme valeur, a produit un effet puissant, grâce à la mâle éloqueuceet au luxuriant style de l'orateur.

En deux mois, voilà trois réceptions nouvelles faites à l'Aca.démie ; mais, depuis quelque temps, il en est de nos corps savans comme de nos vieilles bandes de l'empire. La mort y éclaircit des rangs à peine reformés. Depuis quelques jours, deux nouveaux fauteuils sont encore vacans, et M. Alfred de Vigny n'a pas longtemps à attendre pour se décorer de palmes vertes, suivant son ardent désir. Les nouvelles perles qu'ont à déplorer les quarante sont MM. l'abbé de Feletz et Elienne, deux antipodes en politique, deux Siamois par l'esprit et Il's bonnes, manières. M. Feletz a été, sous la restauration, un des collaborateurs les plus assidus du Journal tics Debats, qui défendait alors le Irône et Tau tel. Il nous resiede lui plusieurs volumes - d'une critique rine,qitoi(lite profonde, et mordante, sans oublier

le Ion exquis du monde auquel il appartenait. A la même épo que ou à peu près, M. Etienne fondait le Constitutionnel et publiait ses Lettres sur Paris, après avoir acquis sous l'empire' la réputation d'un des plus spirituels auteurs dramatiques. M. Etieune joignait aux qualités de l'esprit les dons heureux d'un caractère doux, conciliant et honnête. Suivant les justes et véridiques paroles d'un de nos confrères, on nimail ion caractère, on goûtait son talent, on estimera Srt mémoire.

A la mort de ces deux illustrations, consacrées par le lemps et l'élection de leurs contemporains, il faut joindre le trépas dou-

loureux et regrettable d'un de nos médecins les plus renommés, J M. Olivier (d'Angers), et la mort vio'ente de M. Dujarrier, gé- 1 rant de la IJresse. Il serait inconvenant, et dangereux peut-être pour ceux qui restent, de publier el d'apprécier les motifs du une! qui a amené si fatalement mort d'homme. Mais, en se rappelant les paroles qu'écrivait la victime au moment de son départ : a Je vais me battre pour un motif aussi absurde que futile, » ne doit-on pas regretter que parmi les témoins, au milieu de ces jeunes hommes, remplis de courage et d'intelligence, il ne s'en soit pas trouvé un seul qui ait osé apposer à un combat que n'exigeaient pas les circonstances.

Ce n'est pas seulement en matière de religion que le respect humain fait commettre des fautes. M. Dujarrier était l'un de ces hommes habiles dont la fortune rapide rst due aux spéculations de la presse; il avait sû s'enrichir là où tant d'autres se ruinent. C'était un heureux et hardi spéculateur. Et c'est au moment eu il jouissait largement de la vie, qu'une rencontre, qui pouvait n'avoir aucune suite, une inimitié due à des cou,is d'épingles, vient lui ravir l'existence. Quel que soit le jugement sur l'homme, une pareille fia est toujours déplorable.

Ce n'est pas seulement des rigueurs tie la saison et des vides faits autour de nous et parmi nous que nous avons à nous

plaindre par le temps qui court, les procès de toute nature assaillent la'presse. El parmi toutes les réclamations, la plus singulière, à notre avis, est celle de cet auteur trainant son critique au piéloire, pour le forcer à insérer sa réponse à l'appréciation littéraire d'une de ses pièces. Ou veut-on en veniravec cette jurisprudence? à contraindre un journal au rôle d'une affiche destinée à publier un comple-rendu sans couleur, sans portée, sans études; cela est impossible, Mieux vaut tuer que déshonorer. Nous espérons bien que le Constitutionnel défendra sa cause jusqu'au bout, et qu'il ne s'arrêtera pas devant la décision erronée d'un tribunal qui, sans doute, aura trop voulu s'attacher à la lettre de la loi, et n'en aura pas vu les conséquences.

La pièce qui a fourni matière à discussion était le Lys d'Evretix, joué à l'Odéon, et dont l'auteur est un ancien mailrc de pension nommé M. A. Loyau de Lacy.

Au reste, les theaires continuent à chômer de piecesa grands 1 succès. L'on attend toujours au Français la première représentation de Virginia*. Mlle cachet y a, dit-on, un rôle fort imporiant, et son indisposition est la seule cause du retard. L'Opéra vil sur l'exploitation des jeunes viennoises. On va cependaut reprendre Marie Stuart, suspendue par l'absence (le Sioliz et plus tard par I indisposition de Gardoni. L'Odéon a fait représenter, avant-hier, IValstein, tragédie en cinq actes imitée de Sehillcr, par M. de Villenave fils, avec un prologue représentant le camp du fameux Walstein. Dans ce pro!ogue, on joue des airs de Musard, pour faire danser de vieux retires qui débitent des calembours, comme les loustics de nos chambrées, et dans la pièce on y admire l'absence de hardiesse et de mouvement qui ditioguent. Schiller. Il est vrai qu'à la place nous avons des unités de temps et de lieu. Ces défauts sont regrettables, car, pour être juste, nous devons dire qu'il y a d'assez beaux vers dans cette pièce, qui mérite au moins l'épi"-

thèté de consciencieuse, si comme on l'allirme, l'auteur a mis 20 ans à la polir. Malheureusement ce peut être un demi succès littéraire, mais ce n'est certes pas un succès pour le théâtre. Espérons que le Diogène de M. Félix Pyat saura ramener la foule au-delà des ponts; Nous le désirons en vue de l'institution elle-même et de sa durée, et pour qu'il y ait une avanue, une rampe qui facilite aux jeunes talens l'accès de la première scène française.

Si les théâtres chôment, en revanche les salles de concert sont incessamment assiégées. La consommation de billets qui sa fait à Paris, dans cette seconde période du carême, est effrayante. Si nous avions le talent du statisticien qui a coulé le budget en colonne de la place Vendôme, nous trouverions que l'argent, employé à défrayer ainsi les artistes pourrait servir à construire un railway capable de traverser l'Europe. Parmi cette pluie de billets, qu'on est bien obligé de subir des maîtresses de maison chez lesquelles chantent ou jouent pendant l'hiver les artistes bénéficiaires, on a quelquefois la main heureuse, et cela nous est arrivé cette année, pour le concert de M. Henri Cohen, maestro plein de mérite et d'avenir, autant que de modestie. Parmi tous les morceaux de sa composition qui ont été exécutés, nous avons surtout applaudi une scène de Faust, savamment modulée par

l'auteur, et brillamment exécutée par l'orchestre qui 1 interprétait. Ceux qui auront assisté à la soirée de Mm0 Sahatier et de Mlle Loveday, auront pu, comme nous,ne pas trop maugréer contre l'impôt musical prélevé à cette époque de l'année. Mais, sérieusement, on devrait mettre un terme à la fureur du flot d'artistes plus ou moins Allemands, Italiens, Russes ou Auvergnats dont la marée grossit toujours avant Pâques fleurie ; juli nom, qui devient pour oette année un mensonge.

Hier, le salon s'est ouvert.au milieu des curieux qui encombraient la salle, impossible de rien apprécier dignement. Nous avons seulement. remarqué, et tout en courant, la gigantesque bataille de la Smala, parllorace Vernet ; t'empereur de Maroc au milieu de ses officiers, par Delacroix; un Christ magnifique, d'Eusène Goyct ; un tableau de genre très-spiritmllemcnt conçu el finement exécuté, par M. J.-B, Goyet, son père; des animaux, par Brascassat; un Alchimiste, par lsabey. Dans la salle de sculpture, un buste, de M. lIonlissieux; un groupe, de M. Etex; un Jean-liart, de David; le buste de M. Ledru-Hol- - - -. - - .I_! Il - - .1 - ,,- -- -- - --

lin et du capitaine Lclièvrc,et un meuamon uc Imme, p.trm.

Mathieu Ptlemmier, ce jeune homme qui, l'année dernière, s'est posé, des l'ahord, au rang de nos premiers artistes.

Puisque nous en sommes à vous parler de sculpture, nous avons bien envie de vous indiquer de charmantes miniatures en bois dont nous avons découvert le reduil rue Blanche, 19. C'est la Suisse aperçue du gros bout d'une lorgnette;".chiiiels, montagues, sapins, laitières et chevriers, rien n'y manque. On dirait de ces tableaux chinois dont nous entretiennent les correspondances diplomatiques de M. Lagrenée, et qui ne sont autre chose que la nature en raccourci. Ce fini est obtenu par île simples paysans qui n'ont eu pour modèle et pour maîtres que la nature. Mais aussi quel modèle et quel maître que la nature * Jules DE Fuveau.