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Titre : Bulletin colonial : supplément à la Revue du XIXe siècle

Éditeur : [s.n.] (Paris)

Date d'édition : 1838-11-05

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327173415

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb327173415/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

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Description : 05 novembre 1838

Description : 1838/11/05 (N100).

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k63628518

Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-3013

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 17/12/2012

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Paris, 6 novembre.

La tendance un peu trop prononcée vers l'urèle de la politique et des discussions purement métropolitaines, qu'on avait laissé prendre au Bulletin colonial sous le titre nouveau de France et Colonies, avait fait naître quelques difficultés de la part du parquet, qui réclamait pour cette feuille jju cautionnement spécial. Au retour de M. de Saint-Priest, des dispositions ont été prises pour donner à sa publication, interrompue durant tluinze jours, une nouvelle activité et une direction plus conforme aux besoins ainsi qu'aux vœux qui lui ont été exprimés durant son exploration des Antilles.

L'expérience qui a été faite avec le changement de titre momentané du Bulletin colonial a donné la confirmation de cette opinion déjà exprimée dans un numéro d'avril dernier, à savoir : qu'il est absolument impossible de réunir en l'rance une douzaine d'abonnés à toute feuille portant un titre de spécialité coloniale. Outre-Mer et la lievue coloniale en sont la preuve bien évidente. Le premier devrait trouver au moins des lecteurs par 1 habileté de sa direction; mais il est beaucoup plus difficile qu'on ne le pense aux colonies, d'attirer l'attention des personnes étrangères à une spécialité sur le journal qui paraît consacré exclusivement à cette spécialité. La lievue du xne siècle, par la généralité de son titre, a seule l'avantage de pouvoir propager avec auocès la discussion des questions coloniales, d'abord parmi ses abon-

nés et son public, ensuite parmi les membres des deux Chambres, les publicistes et les électeurs notables du pays, lorsqu'il y a utilité pour la cause à faire gratis une distribution de quelques milliers de numéros. Mais, pour que l'influence de la Revue aille toujours s'accroissant dans la métropole, il est indispensable que les questions purement coloniales y soient traitées à de certains intervalles, sans quoi on finirait par la confondre avec les publications que nous venons de citer; et du moment où elle pourrait être considérée comme spécialement vouée aux intérêts coloniaux, elle perdrait une très-grande partie de son crédit et de son importance, qu'il devient chaque jour plus facile et plus nécessaire d'étendre au profit de ces mêmes intérêts.

C'est pour les mois de décembre et de janvier que doivent se ménager les principales ressources de la discussion.

COLONIES.

Nous devons à nos colonies aide et protection comme si elles étaient en proie à un vaste incendie. C'est «ne dette de commanaltlé. Ces expressions, employées par M. Blanqui, dans son remarquable rapport sur lu Corse, ont produit un grand effet; que ne devrait-on pas en attendre, quand on les applique, à plus forte raison, à nos colonies!

Personne ne met plus en doute leur détresse; il a fallu en apporter des preuves de toutes sortes : elles ont été d'une effrayante véiité. Tout le monde est convaincu. C'est au point que l'on ne peut plus achever une phrase sur ce sujet ; on ne vous en laisse pas le temps. Eh! oui, vous dit-on, nous le savons bien, nos colonies ne peuvent être sauvées que par le remède le plus prompt, par un dégrèvement immédiat. Vous le savez! et pourquoi donc écouler les sophismes, les jalousies et les faiblesses qui conseillent un ajournement, un ajournement mortel peut-être !

Les sophismes, nous les avons signalés : le ministère,[a-t-ou dit, peut bien dégréver par ordonnance royale dans l'intervalle des sessions des Chambres; mais non lorsque ce dégrèvement peut avoir pour effet de grever une autre matière. Or, c'est ce qui arriverait relativement au sucre indigène,si l'on diminuait le droit sur le sucre colonial; donc, etc., etc. Est-ce donc avec des syllogismes d'école que l'on fait les affaires ? .- On a dit encore que la session étant prochaine, la Chambre des députés serait mécontente qu'on ne l'eût pas attendue; qu'il y avait, d'ailleurs, un grand nombre de députés mal disposés pour nos colonies, ù raison do leur prédilection pour la culture de la betterave, et qu'il serait beaucoup plus dltlicne d'obtenir leur consentement au dégrèvement si le ministère en avait déjà pris l'initiative.

Nous nous bornerons à répondre qu'il serait bien plus raisonnable de craindre que le dégrèvement ne fût de nouveau remis en question à la Chambre, et que beaucoup de dépulérqui n'auraient pas voulu retirer un secours accordé à nos colonies, ne se fissent moins de scrupule de le refuser ou de le réduire, cle le marchander, s'il faut dire le mot, que dans le cas où il aurait été déterminé par une ordonnance royale, par mesure d'urgence.

Les jalousies déchaînées contre nos malheureuses colonies sont déplorables; la générosité du caractère français, toujours prête à s'émouvoir pour des infortunes étrangères, semble se glacer lorsqu'il s'agit des colonies et des colons. Voyez ce qui se passe, depuis i83o, à l'égard de ceux de Saint-Domingue! Non-seulement on ne leur a payé aucun à-compte sur leur indemnité foncière pendant ces huit années, malgré l'évidence de leurs droits et de leur

misère, mais on leur a pris plus de deux millions sur dcp intérêts acquis, dus par la caisse des consignations à 3 p. o b sur des fonds qu'elle avait fait valoir à 4 p. o/o et au-dessus. Le million de fonds de secours, dont on parle tant, a été réduit de plus de 200,000 fr.; ce qui reste se partage entre d'anciennes familles de Canadiens et autres étrangers de Saint-Domingue, puis d'anciens habitants de cette colonie qui, la plupart, ont eu peu ou point d'indemnité.

D'ailleurs, ce fonds de secours se réduit par des extinctions successives. On voit donc que, depuis huit ans, on a retiré aux anciens propriétaires de Saint-Domingue une partie de ce qui leur était acquis auparavant, et qu'ils attendent encore le paiement de l'inscription foncière qui leur a été délivrée en vertu de la loi du 5o avril 18%6.

Saint-Domingue a été - un trésor pour la France. - 011 - ne s'en --

souvient plus ! -

Voilà bientôt deux ans que l'on fait des enquêtes. Jamais question n'a été autant débattue que celle des sucres. Enfin, une réduction de droits de 15 fr. par 100 kilog. a été consentie par le gouvernement, après de longues diseussions au conseil supérieur de commerce, tous les ministres et tous les intérêts présents. Et, ce qui a le plus influé sur cette détermination, c'est le péril imminent de nos colonies, c'est le désespoir des planteurs sans ressources et sans crédit au milieu de leurs produits privés d'acheteurs; c'est aussi la détressse de leurs créanciers dans nos ports, qui se voient menacés d'être entraînes dans la ruiuc de leurs débiteurs. Il n'y a pas un mot de plus que la vérité dans ce que nous venons de dire.

Quand le bruit s'est répandu, il y a quelques jours, que le dégrèvement serait ajourné à la session prochaine, nous avons refusé de le croire comme on refuse de croire à lu démence ou à la lâcheté avant d'en avoir la preuve. Maintenant s'envelopper dans son mimipsu, gémir et se taire, voila à quoi nous sommes icautis. Tris le sort pour les amis au bivu !

Après un tel abandon, que l'on vienne nous parler de colonies nouvelles ! que l'on nous invite à appeler les capitaux pour former un fonds de colonisation de 5o millions dans l'Algérie ! Ne devons-nous pas répondre en conscience que la première condition est une protection assurée et constante de la métropole? Or, voyez comment nos colonies sont protégées!.,.

QUESTION DES SUCRES.

Délibération du Conseil supérieur du commerce.

On connaît aujourd'hui les résultats des cinq séances consacrées par le conseil supérieur de commerce à la grave question de la taxation des sucres. Les huit ministres ont assisté à toutes les séances ; c'est M. le comte Alolé qui s'était chargé de présider.

ixuiUcton.

UNE FEMME DU MONDE.

I.

Par une de ces soirées pluvieuses dont le ciel parisien se mon li e si prodigue, et par trois pouces de boue, un jeune homme d'une tournure distinguée et d'une mise élégante fit avancer un des cabriolets de remise qui d'habitude stationnent sous une porte cochère de la ruede Seine.

a Cocher, dit-il après avoir franchi le marchepied, et en s'asseyant au fond du cabriolet, allons bon train.

- Oit allons-nous ï demanda le cocher, le bras levé et prêt à fouetter.

- Où nous allons, répondit celui-ci que cette question toute simple n'eût point dn surprendre. Ma foi, je n'en sais rien : allez loujours. D Mais comme le cocher, qui se flattait de posséder parfaitement son Paris, cherchait vainement le position topographique de ce lieu-là, et hésitait tout en répétant sa première question : a Eh bien ! allez au diable 1 lui dit le jeune homme.

Suffit, not'maUre, vous me direz le numéro en roule. Hue! gare 1 ! »

Et le cheval, stimulé par deux vigoureux coups de fouet, partit comme un trait.

a Où sommes-nous r demanda après dix minutes de trajet le jeune homme, qu^parut enfin se recueillir pour prendre une résolution.

Presdesboutevards, répondit son compagnon.

C'est bien ! Maintenant, rue de Verncuil, 4'5» » Dix minutes encore de course ventre à terre, et le cocher avait gagné son heure, le jeune homme sa destination.

« Madame de Flavel r Il dit-il et, passant rapidement devant la Iohis du con.

cierge ; et une minute après il entrait lestement dans l'antichambre et se faisait annoncer.

• J'avais dit que je n'y serais pour personne, D fit avec une moue contrariée madame de Flavel au domestique qui précédait de quelques pas le videur.

Puis se tournant vers celui-ci : a Ah l c'est vous, monsieur Ludovic.

Et aussitôt laissant une place vide sur le divan qu'elle occupait, elle la désigna par un geste charmant à Ludovic, qui vint s'asseoir près d'elle.

a Je me croyais, dit-elle, condamnée pour toute la soirée; car il fait un temps affreux l e Et, frissonnant à la seule idée de la pluie qui venait battre les persiennes, madame de Flavol semblait vouloir se rcployer sous elle-même conimo une

jolie couleuvre privée du soleil, et elle cachait ses petits pieds sous une tête de tigre dont la peau servait de descente au divan.

« Mais, savez vous, continua lajjeune femme, que c'est fort bien à vous d'être venu faire mentir mes tristes prévisions et me sauver de moi-même; car, ce soir, je ne sais pourquoi je me sentais l'àme en deuil..

Ludovic, après avoir parcouru d'un regard madame de Flavel, dont la tête appuyée sur les coussins qu'elle froissait à peine, semblait, sous ses cheveux ccnùrés, une rose mousseuse dans ses enveloppes, ne put s'empêcher d'ébaucher un sourire incrédule, au mot deuil prononcé par des lèvres qui ne savaient que sourire.

« Pourquoi donc ne pas me croire r dit-elle alors en plissant son front, pour tâcher de simuler une ride. Pourquoi vouloir toujours que ma tête seule n'ait point porté sa couronne d'épines?

Une couronne de Heurs lui va si bien.

- Oh! cependant, continua-t-elle sans prendre garde à cette réponse, moi aussi j'ai acquis et n'ai point usurpe le droit de dire mes jours tristes! et dans ce livre qu'on appelle la vie, que de pages remplies, mais non point oubliées, pourraient, si je voulais y faire lire, légitimer le droit que vous voulez absoluulcut me contester !. »

Semblable à un refiel, une légère animation était venue éclairer la physionomie de madame de Flavel. Sa main, dont on voyait fuir les veines bleues, roulait le manche en nacre d'un écran, tandis que, sous la robe qui l'empri-

sonnait, se gonllail légèrement son sein.

Tout cela était vrai, naturel, bien senti; il n'y avait pas moyen de s'y tromper, madame de Flavcl comprit qu'elle s'était trop laissée alter, et elle se mordit les lèvres en regardant Ludovic, dont la physionomie semblait attendre la suite d'une confidence à peine ébauchée encore et annoncée à peine par quelques mots solennels.

Mais la femme du monde reprit le dessus en un clin d'œil; madame de Flavel recomposa sa figure habituelle en se grondant intérieurement d'avoir failli se laisser aller à faire des confidences comme une pensionnaire, et elle revint ce qu'elle était pour tous et même pour Ludovic , c'est-à-dire femme du monde, avant d'avoir laissé découvrir au jeune homme deux femmes en une seule, espèce de dualilé où la première, pour renier son passé et défendre même contre ses souvenirs ces rejetons vivaces d'un tronc coupé, était

venue s associer ou plulùt s unir à la femme du monde, qui maintenant seule existait.

Dans la vie, à chaque pas se rcncontrentdc ces natures entées qui, semblables aux arbres sur lesquels on a grell'c des rameaux étrangers, dépensent leur sève à porter des fruits étrangers, et cachent ainsi sous l'artifice leur espèce première.

< Oh:! mais j'y songe, dit madame de Flavcl pour tourner la causerie confidentielle en caquetage évente, Duprez joue ce soir dans Guillaume Tell. « Et tirant aussitôt le cordon de sa soniieUe :

a Pierre, dit-elle au domestique accouru à cet appel, dites à Fanina de venir m'habiller, et faites atteler..

Ludovic s'était levé, et, les yeux sur la pendule comme feignant de trouver dans l'heure qu'elle marquait un prétexte plausible, il allait sortir.

« Me quitter! y songez-vous? »

Et comme le jeune homme, pour justifier ses mouvements, balbutiait un de ces lieux communs polis, si nombreux dans le code de la civilité.

a Je n'admets point d'excuse, car j'ai besoin d'un cavalier; à moins que, par un refus, vous ne vouliez vous rendre coupable du crime de lèse-galanterie.

.Je ne serai pas longue, continua madame de Flavcl en faisant quelques pas pour aller dans son cabinet de toilette ; mais au surplus, ajouta-t-elle en approchant un guéridoa sur lequel figuraient deux ou trois album au milieu de charmantes babioles élégantes qu'on passe sa journée à glaner chez Chau- liu, au Petit Dunkerque ou à la Porte-Chinoise.

o Choisissez! voici des croquis de nos meilleurs faiseurs, un fragment manuscrit d'un nouveau poeme de M. de Lamartine, deux autographes de M. de Châteaubriand, le dernier roman de Georges Sanel,..,,, Peu d'instants après, l'équipage, dont les chevaux piaffaient d'impatiencè dans la cour de l'hôtcl, emportait madame de Flavel et son cavalier à l'Opéra.

11.

Ça et là, comme des épis oubliés dans un champ moissonné, se trouvent encore de nos jours de ces organisations au fond desquelles la poésie du cœlU', bannie de toutes parts, est venue chercher un refuge contre le positivisme du jour.

Ludovic était un de ces êtres privilégiés qui, fort rares maintenant, ressemblent à ces (leurs dont ils subissent le sort, cl ij,1i, s'épanonissant au déclin de leur saison, se flétrissent aux premières gelées de la nuit.

L'âme jeune et vierge, il se plaisait à s'égarer au milieu des chimères qu'il prenait pour un monde, comme l'enfant, dans sa naïve ignorance) prend les nuages pour le ciel. Sur sa l'uute, rêvée à travers le prisme de JillexPérience, les ronces et les cailloux, c'esl-à-tlire les déceptions, puis la réalité, l'inévitable réalité ! ne s'étaient pas encore montrés à lui, car il aimait madame de Flavel, et le bandeau d'un premier amour est bien ,

Il était huit heures du malin : au mois de janvier c est une ncure qui, d'habitude bien apprise, évite dans sa course vagabonde les volets bien clos, pour aller, comme une hirondelle matinale, battre les vitres des mansardes et y chanter à plein gosier le réveil. Ludovic, quoique rentré fort tard de l'Opéra, où il avait accompagné Mme. de Flavel, et fatigué de la course qu u lui avait fallu l'aire pour regagner à pied sa modeste demeure de la rue Saint-Jacques, était déjà debout, car il est de ces nuits dont la Imfevcté même est une longue insomnie, lorsqu'on vint happer chez lui.