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Titre : Historique du 1er régiment de cuirassiers

Éditeur : Chapelot (Paris)

Date d'édition : 19..

Sujet : Guerre mondiale (1914-1918) -- Histoire des unités

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb42716866r

Type : monographie imprimée

Langue : français

Langue : Français

Format : 33 p. ; in-8

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Description : Avec mode texte

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k63314933

Source : Service historique de la Défense, 2012-180175

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 12/10/2012

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HISTORIQUE 4e,

DU

1er RÉGIMENT DE

CUIRASSIERS

LIBRAIRIE CHAPELOT PARIS



HISTORIQUE

DU

1" RÉGIMENT DE CUIRASSIERS



HISTORIQUE

DU

1er RÉGIMENT DE

CUIRASSIERS

LIBRAIRIE CHAPELOT PARIS



HISTORIQUE DU 1

1" RÉGIMENT DE CUIRASSIERS'

1914

En 1914, le ier régiment de cuirassiers, commandé par le colonel Lasson, tenait garnison à Paris au quartier f Dupleix et faisait partie de la 20 brigade de cuirassiers (1er et 26 cuirassiers), général Louvat, et -de la Ire division de cavalerie, commandée par le général Buisson.

Le plan de mobilisation donnait à la Ire division de cavalerie le rôle de troupe de couverture.

Le 2 août, le Ier cuirassiers quittait le quartier Dupleix pour aller s'embarquer à la gare du Bourget. Il fut acclamé sur tout le parcours et il est difficile, pour ceux qui comptaient alors au régiment, d'oublier les ovations dont il fut l'objet. Combien de braves gens comblèrent les officiers et les cavaliers de tous les vivres dont ils disposaient.

Débarqué le 3 dans la région de Rouvroy-l'Echelle, il y stationne jusqu'au 5 août, date à laquelle il se met en marche pour aller cantonner à Sedan. Le 6 août, les Allemands ayant violé la neutralité de la Belgique qui leur avait fièrement refusé le passage, le ier cuirassiers, avec toute la ire division de cavalerie, pénétrait en Belgique par Bouillon et l'accueil qu'il y trouva fut des plus chaleureux.


Campagne de Belgique dp

Le régiment prit part en Belgique à toutes les opérations du ier corps de cavalerie, auquel appartenait la Ire division de cavalerie.

Le 8 août, après une marche forcée, il est en vue de Liège; le 15, le Ier cuirassiers repasse la Meuse à Dinant et, le 18 août, à Grande-Rosière, pris sous le tir d'une batterie allemande, il recevait le baptême du feu.

Au cours des vingt premiers jours de guerre, un bon nombre d'officiers, de gradés, de cavaliers ont été détachés, soit dans des reconnaissances à courte portée, soit en patrouille, et tous ont accompli leur mission avec beaucoup d'audace, rapportant toujours des renseignements précieux.

Le 22 août, le régiment repassait la frontière à Erquelines et rentrait en France par Jeumont.

Pendant cette première période, la cavalerie a bien rempli sa mission, car elle a couvert le rassemblement des forces françaises et s'est opposée à toutes les incursions de la cavalerie allemande; de plus, elle a fourni au haut commandement des renseignements de la plus haute importance sur la force des colonnes allemandes qui avaient pénétré en Belgique et sur leur marche. Pendant la retraite, l'épuisement des chevaux ne permit pas d'entreprendre des actions de cavalerie ; toutefois, il ne se passa pas pour ainsi dire de jour où l'artillerie de la division n'eût à intervenir. Elle prêta son appui aux Anglais, et le général Smith Dorrien, commandant le 26 corps d'armée britannique, écrivait : « Si nos pertes ne furent pas plus grandes au cours de la retraite des positions d'Haucourt, Coudry, Beaumont, Le Cateau, cela est dû en grande partie à l'appui qui nous fut donné par les troupes françaises et, en particulier, par le i" corps de cavalerie du général Sordet, opérant sur le flanc ouest des troupes britann;ques, et nous devons être reconnaissants à nos braves frères d'armes ».


La Division provisoire <:fo

L'épuisement des chevaux étant très grand, il fut décidé de former, avec les éléments les moins fatigués du corps de cavalerie, une division provisoire, chaque régiment fournissant un escadron. Le régiment forma un escadron à quatre pelotons, sous les ordres du capitaine Jacquemin.

Le Ier septembre, à 7 heures du matin, par un brouillard intense, le lieutenant Bouet est envoyé en découverte avec 21 cavaliers sur la ligne Compiègne - Marquéglise. Il recueille de nombreux renseignements, mais le brouillard se dissipe et son peloton est immédiatement aperçu par les Allemands. Un escadron ennemi se dirige sur lui et il est entouré de toutes parts. Le lieutenant Bouet fonce alors sur l'adversaire. L'élan du peloton fut admirable. Une mêlée s'en suivit au cours de laquelle plusieurs cavaliers allemands furent désarçonnés. Le lieutenant Bouet eut son cheval tué sous lui. Un deuxième escadron ennemi vint à la rescousse, mais les cuirassiers continuent leur combat dans les rues du village de Remy, s'embusquent derrière les maisons et ouvrent le feu sur les Allemands. Le cavalier Jarry, blessé à la main d'un coup de sabre et démonté sur la grande place de Remy, tirait à bout portant sur les cavaliers allemands qui débouchaient. Vingt et un cuirassiers, par leur audace, avaient tenu en échec deux escadrons ennemis.

Le ier septembre, dans la soirée, le lieutenant Clouët des Pesruches, ayant sous ses ordres un peloton du Ier cuirassiers et un peloton du 2e cuirassiers commandé par le lieutenant de Charpin-Feugerolles, part à son tour en découverte avec mission de reconnaître les forces ennemies qui débouchaient de Crépy-en-Valois. Cette reconnaissance, qui avait pénétré à l'intérieur des lignes allemandes, eut sa ligne de retraite coupée dans la forêt d'Ormois et ne put s'échapper qu'au prix de mille difficultés et après avoir traversé de nombreux bivouacs ennemis. Les Allemands,


exténués de fatigue, dormaient sous les javelles. Grâce au clair de lune, le lieutenant Clouët des Pesruches put s'orienter, échapper à la cavalerie allemande qui lui donnait la chasse et se rabattre sur Lizy-sur-Ourcq et Meaux, où il rejoignait le 3 septembre au matin les lignes anglaises.

C'est là qu'il remit au général Chestwood les renseignements qu'il avait recueillis.

- ~3î& Bataille de la Marne Pendant ce temps, le gros du régiment s'était replié jusque dans la région de Versailles, en passant au nord de Paris. Mais le 6 septembre, il se reportait en avant avec toute l'armée et, le 7, prenait part à la bataille de l'Ourcq et à l'attaque de deux divisions d'infanterie sur Betz. Le 8, il est devant Levignen. Une reconnaissance, commandée par le lieutenant de la Batut, du 28 escadron, est chargée de reconnaître Gondreville; le brigadier Capoulade, sachant le village occupé, n'hésita pas à y pénétrer, mais il est accueilli par un feu violent. Son cheval, qui avait reçu trois balles dans l'encolure, ramène le brigadier. Celui-ci était grièvement blessé au poignet et à la main, mais sa mission était remplie puisqu'il rapportait les renseignements demandés.

A Montepilois, le 8 septembre, le capitaine Dadvisard, envoyé le matin en soutien du train de combat, engage une action très vive contre de l'infanterie ennemie qui attaque nos convois.

La division, qui s'était engagée un peu trop audacieusement, se dérobe à l'action convergente des masses alle- mandes, par une marche de nuit, à travers la forêt d' Armenonville.

Mais les armées allemandes étaient battues et contraintes à la retraite; le 10 septembre, le régiment se reportait en avant.


Tentative de poursuite et Course à la mer <^>

La forêt de Compiègne avait permis aux forces allemandes de se dérober, et la fatigue de nos chevaux était si grande qu'il ne fut pas possible d'engager une poursuite bien vigoureuse. Le 10 septembre, le régiment passe l'Oise à Verberie et c'est alors que commence pour lui la course à la mer. Dans cette course, la cavalerie, jetée en avant, occupe le terrain, s'y cramponne et le garde jusqu'à l'arrivée de l'infanterie, traçant ainsi la ligne de tranchée jusqu'en Belgique Le 14 septembre, le capitaine Papin, avec deux pelotons du ier escadron, s'engage à pied aux lisières du village de Harbonnières. Il appuie l'action des cyclistes et de l'artillerie de la division, et force l'ennemi à se retirer.

Le 15 septembre, Péronne est repris, mais le 17, le général Bridoux, qui commandait la Ire C. C., était tué dans une embuscade au nord de Vermand. Grièvement blessé, il put être transporté dans le village voisin où il expira.

Sa mort, qui fut celle d'un soldat, édifia tous ceux qui l'entouraient.

Le 23 septembre, le premier demi-régiment (capitaines Papin et Delage sous les ordres du commandant Gatelet) tient les avant-postes à Marqua, surveillant les débouchés de Roiselles. Attaqué à 5 heures 30 par une grosse colonne allemande de toutes armes, le premier demi-régiment soutint pendant toute la journée un combat en retraite par Hamel, Bruicourt et Tincourt, tandis que les escadrons débordés par le nord de Tincourt se replient sous une vive fusillade ; l'adjudant Foucher n'hésite pas à retourner en arrière avec le cavalier Choubillon au secours d'un sergent mitrailleur qui n'a pu remonter à temps sur sa voiture. Il le prend en croupe sur son cheval et le ramène ainsi sous le feu.

Le 25 septembre, le régiment se porte sur Albert et Montauban où la ire division se rassemble pour appuyer


l'action de la 2e armée (général de Castelnau) qui progresse vers l'est, à cheval sur les deux rives de la Somme.

Le 30 septembre, au cours d'un combat à Virty-enArtois, le cavalier Plinchon était en patrouille et se repliait devant l'attaque d'un peloton ennemi, lorsqu'il aperçut le cheval de son brigadier qui galopait sans son cavalier dans la campagne; n'écoutant que son courage, il fit demi-tour et retourna du côté des Allemands. Il retrouva son brigadier blessé et le ramena dans nos lignes en tenant l'ennemi en respect à coups de carabine.

Le 4 octobre, le régiment prend part au combat de Souchez et, le 5, aux opérations autour de Mont-Saint-Eloi.

Le 6, il est à l'attaque de Bouvignies.

Le 20 octobre, le régiment est décuirassé afin de pouvoir s'engager plus facilement à pied et, le 26, il recevait l'ordre de prendre ses cantonnements de rafraîchissement à Bourbers-sur-Canche. Parti de Paris le 2 août avec son effectif de 36 officiers, 686 hommes, 722 chevaux, le régiment ne comptait plus que 28 officiers, 425 hommes et 430 chevaux.

La différence représente les pertes subies soit par le feu, soit par suite des fatigues supportées ou des détachemëhts fournis.

Depuis le 23 septembre, les prises de contact avaient été presque journalières et la ire division de cavalerie avait eu chaque jour l'illusion d'être sur le point de se mesurer avec quelques éléments de la fameuse cavalerie von Marwitz; mais la cavalerie allemande glissa toujours au dernier moment entre nos doigts et nous ne la vîmes jamais que sous forme de cavaliers pied à terre, faisant le coup de feu derrière une haie ou enterrés dans une tranchée.


1915

Le régiment passe la fin de 1914 et le début de 1915 au repos dans la région de Boubers ; il en profite pour se reformer complètement. Un changement total s'imposait dans l'emploi de la cavalerie pendant cette guerre où les Allemands refusaient toute rencontre à l'arme blanche; il fallut apprendre tous les nouveaux procédés de combat de l'infanterie, connaitre les armes nouvelles, principalement les armes automatiques, initier enfin la cavalerie à la guerre de tranchées.

Le 20 janvier 1915, le régiment prend pour la première fois les tranchées à la Fosse-Calonne, laissant ses chevaux au cantonnement. Le détachement est sous les ordres du commandant Hermelin.

Le 7 février, le colonel Lasson, nommé au commandement de la 11e brigade de dragons, est remplacé par le colonel Gillois.

Le 13 février, le régiment embarque à Amiens pour la Champagne. Le 23 février, le capitaine Dadvisard est désigné sur sa demande pour servir, avec son grade, dans l'infanterie et, le 24 avril, il est tué glorieusement devant Messine, à la tête de sa compagnie, avec laquelle il avait sollicité l'honneur d'attaquer le premier. L'un de ses hommes écrivait : « Notre capitaine trouva là une mort glorieuse et nous le pleurons, car il est mort en héros et les mots ne sont pas assez forts pour chanter ses louanges et exalter ses mérites ».


Le régiment quitte la Champagne le 26 avril, après un séjour dans la région de Verdun, et débarque près de Breteuil, où commencent les détachements presque continuels aux tranchées de Warvilliers, Groville, Rivière. Les cuirassiers se font remarquer par leur mépris du danger et se montrent aussi bons fantassins qu'ils étaient hardis cavaliers.

Le 20 septembre, le ier corps de cavalerie est rattaché à la 106 armée qui se prépare à attaquer, et c'est à cette époque que le maréchal Foch, alors général, réunit les officiers et leur dit, en termes vibrants, combien il compte sur la cavalerie dans la bataille qui commence. Le régiment bivouaque à Savy-Berlette, mais l'attente se prolonge et cette fois la cavalerie n'interviendra pas encore.

Le 20 octobre, le régiment est envoyé en mission sur les côtes de la Manche, afin de garder la voie ferrée entre Etaples et Abbeville. Il y reste jusqu'au 2 novembre, époque à laquelle il se rend dans la région d'Hesdin.

En décembre, le régiment a un détachement aux tranchées. Le secteur affecté au régiment (Beaumetz, Bailleulval) est dans un état épouvantable, les tranchées n'existant pour ainsi dire pas. La pluie tombe sans arrêt, les boyaux sont pleins d'eau; pas d'abris, pas de fils de fer, le terrain détrempé rend les ravitaillements très difficiles, mais le moral de tous reste excellent.


1916

Le début de cette année n'apporte pas de changement dans l'emploi du régiment, qui a une compagnie aux tranchées du sous-secteur de Beaumetz. La section de mitrailleuses du lieutenant Hersant subit un tir de destruction par obus de gros calibre. Sa belle tenue pendant le bombardement valut à cette section une citation à l'Ordre du Corps de Cavalerie.

Le 31 mai, à Marquivilliers, le sous-lieutenant Trémeau exécute un coup de main heureux avec les grenadiers du régiment. Après une courte préparation d'artillerie, le détachement d'attaque sort de la tranchée bien que le tir de barrage ennemi continue, se place en colonne avec calme et se porte rapidement dans la direction du petit poste qu'il doit enlever.

Le terrain est tellement bouleversé par le bombardement qu'il est méconnaissable. Le sous-lieutenant Trémeau, aidé du brigadier Rouyer, se porte en avant et découvre un grand abri non détruit dont l'entrée débouche dans un boyau rempli d'Allemands. Le sous-lieutenant Trémeau décharge sur eux son revolver ; le brigadier Rouyer les attaque à la grenade, tandis que l'escouade Saur les tient sous son tir en progressant. Le feu devient de part et d'autre très violent; les cris de l'ennemi redoublent l'ardeur de nos grenadiers qui lancent dans le boyau deux mines explosives. Toutefois, la nuit approche, le temps consacré à l'opération est écoulé. Il faut songer à emporter les


blessés; l'ordre de repli est donné. Au cours de cette opération, les cavaliers Zalesky et Laulan, du 1er escadron, furent tués et les cavaliers Leprince, Vicard, Lashermes, Chanez blessés. Tous avaient rivalisé de courage et de décision.

Dans le courant des mois de juillet et août, le régiment est envoyé à l'instruction dans la région de Monsures, Croissy-sur-Celle. La fin de cette année se passe dans les tranchées, où le régiment envoie de nombreux détachements (sous-secteur de Francport).


1917

Le service aux tranchées, commencé en 1916, continue jusqu'au 15 mars 1917. Les cavaliers du régiment ne se souviendront pas sans émotion des tranchées du bois SaintMard, où ils laissèrent plusieurs de leurs camarades de la tranchée du Fer-à-Cheval, que l'ennemi détruisit si souvent à coups de minen et qu'il fallait rétablir hativement pendant la nuit.

A l'entrée de cette tranchée, un petit poste faillit être enlevé par une attaque allemande et ne dut son salut qu'à la présence d'esprit et au sang-froid du maréchal des logis Vieljeux qui, saisissant le fusil-mitrailleur, arrêta net par son feu l'attaque allemande qui se replia en désordre. Seul, le feldwebel qui commandait l'attaque atteignit la tranchée.

Le 10 mars, le colonel Gillois quitte le ier cuirassiers.

Sous son commandement, le régiment s'était fait remarquer partout et tout spécialement dans la division par sa bravoure, sa discipline et sa belle tenue. Le colonel de Viry le remplace à la tête du régiment.

Le 19 mars, le Ier cuirassiers se rendait au camp de Crévecœur, lorsqu'il apprit brusquement le repli général des Allemands. Le 3" escadron, commandé par le capitaine Gallon, part de suite en découverte dans la direction Ham et Saint-Quentin. Cet escadron, après avoir traversé à la nage le canal du Nord, tombe, au delà de Ham, sur une arrière-garde ennemie forte de deux compagnies cyclistes


et de deux escadrons de uhlans qu'il met en désordre en la prenant sous son feu. Continuant à se porter en avant, il réussit à s'approcher de Saint-Quentin.

L'escadron Gallon fit preuve, dans la poursuite, du plus bel esprit offensif, et sa découverte a d'ailleurs mérité les félicitations particulières du général Humbert, commandant la 36 armée, dans une lettre écrite le 25 mars 1917 au général commandant le Ier corps de cavalerie, lettre dans laquelle il félicitait le général Robillot et la Ire division de.

cavalerie pour leur coopération aux actions de la 3" armée, du 19 au 23 mars 1917 : « Mon attention, écrivait le général Humbert, a été particulièrement attirée sur le détachement de découverte (ier cuirassiers), qui a donné le plus bel exemple de courage, de ténacité et de dévouement. » A la suite de ces opérations, le capitaine Gallon reçut la Croix de la Légion d'honneur.

Quant au régiment, il franchit la ligne de tranchées près de Roye, dans la nuit du 19 au 20 mars. Le pays est partout dévasté, les villages sont détruits, les arbres fruitiers sont coupés. Un tel spectacle ne fait qu'accroître la haine de tous contre les Allemands.

Dans la journée du 20 mars, le Ier escadron est à l'avantgarde et bouscule, vers 16 heures 30, une arrière-garde ennemie à Cuny, sa pointe d'avant-garde pousse jusqu'au canal aux abords de Jussy, les avions allemands survolent très bas les éléments de cavalerie qu'ils aperçoivent et les mitraillent à courte portée.

Mais le front s'étant de nouveau cristallisé et la cavalerie n'étant plus utile, le régiment est renvoyé à l'arrière.

Le 16 avril, il est au nord de Fismes, mais l'attaque ne répond pas aux espérances que sa préparation avait pu faire concevoir et la cavalerie ne peut jouer son rôle de poursuite. Le régiment, revenu dans la région de Vaumoise, envoie une compagnie et une section de mitrailleuses aux tranchées d'Amigny-Rouy. Le cavalier Ducoudray y fut tué. Le médecin-major Perrin, gravement blessé, ainsi que les cavaliers Leseur, Pouillon et Challier.


A partir du mois de juin et jusqu'en décembre, le régiment prend les tranchées dans le secteur de Coucy-le-Château. Pendant le mois de novembre, les lieutenants de Montbrison et Trémeau y furent blessés.

Au cours de cette période, tous firent preuve de beaucoup d'endurance et de courage. Le secteur, surtout vers la fin de l'année, fut l'objet de violents bombardements par obus de gros calibres et par obus toxiques. De plus, les cantonnements de l'arrière, dans les villages détruits comme Vezaponin, ne permettaient pas de prendre tout le repos nécessaire, et nos pauvres chevaux qui étaient dans la boue, manquant de soins, faisaient peine à voir.

Mais on faisait contre mauvaise fortune bon cœur, et la bonne humeur ne cessa jamais de régner.


1918

Le 10 janvier, le général Lasson, commandant la 2e B.C., est nommé au commandement de l'I. D. du 2e corps de cavalerie, et il est remplacé dans son commandement par le colonel de Brantes. 1 Le Ier cuirassiers, ramené à l'arrière, passa le mois de février dans la région de Presles. L'instruction du régiment, formé en compagnies et en bataillon, y fut poussée activement. L'année 1918 allait lui fournir de nombreuses occacions d'en faire l'application.

=<¥>==- Combats du 23 au 30 Mars 1918 dp

Le 13 mars, le régiment avait quitté la région de Presles pour venir cantonner à la Pommeraye (région de Blérancourt) ; les officiers du régiment avaient même pris part, à Caumont, à un concours hippique organisé par les Anglais, lorsque, le 21 mars, les Allemands déclenchaient leur offensive sur un front de 80 kilomètres. Le 23 mars, nous apprenons que l'ennemi a percé le front à la soudure des armées françaises et anglaises.

Le commandement étant dans l'ignorance des emplacements occupés par la gauche française et la droite anglaisé,


le premier demi-régiment, sous les ordres du commandant de Vaulchier, reçoit la mission de déterminer la gauche française et la droite anglaise, ainsi que le contour du front de l'ennemi qui se serait infiltré dans la brèche.

L'opération fut habilement et rapidement menée. Parti de la Pommeraye le 23 mars à 13 heures, le commandant de Vaulchier obtint, dans la nuit du 23 au 24 mars, les renseignements demandés grâce à de nombreuses reconnaissances faites par des officiers et des sous-officiers.

De tous ces renseignements, il ressortait que le front n'était pas complètement coupé, mais comme il s'était beaucoup étiré, il n'avait plus qu'une force combattive très faible A la suite de ces opérations, le commandant de Vaulchier recevait du général Robillot, commandant le 2e C. C., la note suivante : « Le commandant de Vaulchier a su obtenir les meilleurs résultats des escadrons qu'il commandait, dans des conditions très délicates. Il a montré une fois de plus qu'il avait les qualités d'un chef de cavalerie ».

Le premier demi-régiment rejoint le régiment le 24 mars à Candor.

Le 25 mars, une compagnie formée par le Ier et le 2e escadrons, sous le commandement du capitaine Clouet des Pesruches, est mise avec une S. M. (lieutenant Fargue) à la disposition du groupe cycliste qui était engagé à hauteur de la ferme de l'Abbaye-aux-Bois. La compagnie arrive en ligne à 18 heures et prolonge à gauche la ligne des cyclistes. Elle subit aussitôt un violent feu d'infanterie qui lui cause des pertes. A 21 heures, la compagnie reçoit l'ordre de se porter à la droite des cyclistes (mission de contre-attaque), d'occuper les lisières nord du village de Beaulieu-les-Fontaines et d'arrêter, coûte que coûte, la progression de l'ennemi. Le mouvement sous le feu fut des plus pénibles, mais il réussit.

Malgré quatre attaques successives très violentes, l'infanterie allemande ne peut déboucher, elle est décimée par le feu de la compagnie, appuyée elle-même par un violent tir


de barrage. Nos F. M. furent particulièrement meurtriers dans cet engagement. Le lieutenant Fargue, couvrant l'aile gauche du groupe cycliste, cause de grands vides dans les rangs ennemis, puis protège par son feu la retraite des cyclistes. Le 26, à 3 heures du matin, la compagnie avait perdu tout contact avec les éléments des 307e et 338e R. I.

qui s'étaient repliés et elle était complètement débordée sur sa gauche. A 4 heures, elle reçut l'ordre de battre en retraite et elle retrouvait ses chevaux à Avricourt dans la matinée du 26.

Les jours suivants, le Ier escadron reçoit différentes missions. Le 27 mars, il envoie un peloton en reconnaissance (peloton de Coux) sur Erches-Saulchoix (le Bois le Comte).

Au cours de cette reconnaissance, le maréchal des logis de la Tour du Pin, grièvement blessé, échappa aux mains des Allemands grâce à son énergie. Puis l'escadron rétablit, avec trois pelotons, la résistance au nord' de Onvilliers en faisant remonter en ligne les éléments d'infanterie qui retraitaient par Remeaugis. Il les ravitaille en munitions.

Du 27 au 28, il envoie des patrouilles sur Vaux, Assainvillers, Boulogne-la-Grasse. Du 28 au 29, il est mis par moitié à la disposition des groupes d'A. M. A. C. qui réclamaient de la cavalerie pour les éclairer et les protéger.

Le 30, il joua le rôle d'escadron divisionnaire après avoir subi, dans Rollot, un bombardement des plus violents; mais ce village étant débordé par l'ennemi, il dut se replier.

A la suite de ces opérations, le capitaine Clouët des Pesruches reçut la Croix de la Légion d'honneur et le lieutenant Fargue fut cité à l'Ordre de l'Armée. J Quant au 2e escadron, sous les ordres du capitaine de la Monnerai de Lassigny, il s'était porté le 26 sur Lignières.

Le 27, il est engagé en combat d'arrière-garde à Regibaye.

A 18 heures, il est mis à la disposition du général commandant la 228 D. I. pour la défense de Rollot. A la tombée de la nuit et sur la demande pressante du commandant d'artillerie divisionnaire, il occupe la voie ferrée à l'est de la station pour permettre le décrochage de l'artillerie à trac-


teurs qui parvient à sauver son matériel. Le commandant Citreux, qui commandait ce groupe, fit remercier le lendemain le colonel de Viry de l'aide apporté à ses artilleurs.

Le 28, le 2e escadron met le village de Rollot en état de défense et, à 14 heures, il reçoit l'ordre de prendre part à une contre-attaque sur Onvillers en soutien du 46 bataillon du 8e tirailleurs. Formant une compagnie avec des éléments du 23e dragons, l'escadron participe d'une façon brillante à cette action qui fut très chaude et il y subit de nombreuses pertes.

Le 29, il forme une compagnie avec des fractions des 32e et 23e dragons en vue de participer à la défense de Rollot et, dans ce but, la compagnie organise défensivement les lisières des bois au nord-ouest de Rollot.

Malgré l'extrême fatigue de la troupe, les travaux furent rapidement exécutés et, le 30, lorsqu'elle fut relevée, le secteur se trouvait en bonne voie d'organisation.

Pendant ce temps, les 3e et 4e escadrons furent dirigés, par Laucourt, sur Guerbigny où, sous les ordres du capitaine Gallon, ils formèrent, le 26, une compagnie mise, avec la 2e C. M., à la disposition de la 56e D. I.

La compagnie prend les avant-postes entre Guerbigny et l'Echelle-Saint-Aurin et se porte à l'attaque de nos lignes.

Pendant ce temps, les Anglais sont également attaqués et leur droite cède à une forte colonne allemande qui débouche d'Andechy. Nous apercevons les Allemands qui descendent les pentes au pas de course pour aller s'entasser dans le fond de la vallée ; par trois fois, un officier mitrailleur anglais vient prévenir le capitaine Gallon que les éléments anglais ont reçu l'ordre de battre en retraite et qu'ils sont débordés par l'ennemi, mais le capitaine Gallon s'y refuse et répond que l'ordre est de se maintenir sur les positions. Mais les Anglais, complètement débordés, précipitent leur retraite et passent sur la rive gauche de l'Avre en découvrant la gauche de la compagnie. Pendant ce temps, les F. M. des sections de gauche s'efforcent d'empêcher les masses allemandes de déboucher au sud de l'A vre. L'ennemi, sentant


de la résistance, met en batterie de nombreuses mitrailleuses. A la droite de la compagnie, les sections Rouyer et Guerry résistent à la pression de l'ennemi et le contiennent jusqu'à midi 30.

Le maréchal des logis Courtois se distingue particulièrement en interdisant le carrefour qu'il a mission de défendre avec sa demi-section; mais vers 13 heures, la compagnie Gallon se trouve dans une situation très difficile.

A gauche, les Anglais se sont repliés jusque dans le village de Guerbigny, à environ 1.500 mètres en arrière; à droite les chasseurs ont été submergés. Plusieurs ont été faits prisonniers et des groupes sont aperçus exécutant un mouvement de repli. Profitant de ce recul, les Allemands se sont infiltrés par la vallée et les boyaux et progressent pendant que leurs mitrailleuses prennent d'enfilade la section Rouyer placée vers le centre de notre ligne face à l'EchelleSaint-Aurin. De plus, les fantassins ennemis attaquent à la grenade et à la mitrailleuse et progressent en force sur le côté droit de la section Guerry. Le sous-lieutenant Guerry est entouré, tiré et manqué à bout portant, il se laisse tomber pour ne pas être fait prisonnier.

La pression devient alors très forte sur la section Rouyer qui est, en outre, prise d'enfilade par les mitrailleuses ennemies aussi bien à droite qu'à gauche. Plusieurs gradés et cavaliers sont entourés et, après une lutte corps à corps, parviennent à se dégager ainsi que le sous-lieutenant' Rouyer. Celui-ci tue à bout portant un Allemand qui tentait de le faire prisonnier et réussit à se frayer un passage à coups de revolver. La compagnie est sur le point d'être encerclée, un repli devient nécessaire pour reprendre les liaisons avec les unités voisines. Ce repli se fait par échelon, l'ennemi étant ralenti de front pir les F. M. Cependant, les Allemands progressent à droite et à gauche et nous précèdent au ravin de Guerbigny qu'ils battent avec leurs mitrailleuses ainsi que les pentes sur lesquelles débouche la compagnie. Ordre est donné de traverser le ravin en lignes d'escouade, sans arrêt, jusqu'à la lisière des bois


que l'on apercevait entre Lignières et Guerbigny. La traversée du ravin se fit sous le tir des mitrailleuses et de l'artillerie ennemie. Les escouades se tapent à la lisière est des bois de Guerbigny, précédées par le tir de l'artillerie ennemie, dont les mitraillettes continuent à progresser à droite et à gauche 14 Puis le mouvement est repris, à travers bois, dans la direction du village de Lignières. Au débouché de la lisière ouest des bois, la liaison se rétablit enfin avec des éléments du 106e R. I. La ligne se forme rapidement et se reporte dans la direction des bois de Guerbigny d'où les Allemands ont débouché immédiatement derrière nous ; tandis que l'artillerie française arrose les lisières, l'ordre est donné de se replier en échelon dans la direction de Gratibus où de nouvelles troupes de réserve renforcent la ligne. C'est là que le 27, au soir, grâce aux liaisons constamment maintenues, les deux escadrons purent retrouver leurs chevaux pour aller cantonner à Grivesnes.

Le 28, le demi-régiment se rend à Caply.

Le 29, il met pied à terre à La Morlière, pour former une compagnie mise à la disposition du bataillon Hermann.

Dans la soirée, cette compagnie est placée en réserve à Royaucourt.

Le 30 mars, dès le lever du jour, les Allemands bombardent le village de Royaucourt et attaquent Le Montchel. Ils avancent en grand nombre sur la croupe au sud-ouest du Montchel et dans le ravin à l'ouest.

Une contre-attaque est préparée en vue de reprendre le terain perdu. La compagnie qui avait d'abord eu la mission de préparer un repli vers les lisières ouest de Royaucourt, reçoit, vers 9 heures, l'ordre de se porter à la sortie nordouest de cette localité en vue de participer à la contre-attaque; il s'agit d'appuyer, par le ravin situé à l'ouest du Montchel, l'attaque d'une compagnie du 49° R. I., dont l'objectif est la cote 98. La compagnie, réduite à trois sections, gagne, par les lisières ouest de Royaucourt, l'intersection des routes de Royaucourt à Abremont et à Mesnil-


Saint-Georges. Les unités de contre-attaque sont terrées dans le voisinage nord de Royaucourt, vers la cote 90, prêtes à se porter en avant. Sur la gauche, on n'aperçoit aucun élément ami. Les sections Brégeault et Marchand sont déployées en tirailleurs et la section Rouyer en échelons à gauche. La S. M. est à sa hauteur, vers le centre de la ligne. La liaison entre l'officier commandant la compagnie du 496 R. I., élément de base du mouvement en avant, s'effectue vers la cote 90. Après une préparation faite par les A. M. et les A. C. de la 5e D. C., les éléments de contreattaque reçoivent l'ordre de se porter en avant.

Après avoir parcouru une centaine de mètres, l'attaque est arrêtée par une brusque réaction de l'ennemi et par le feu de ses mitrailleuses et de ses mitraillettes installées dans le petit bois et dans les haies en bordure du ravin du Montchel. Ces mitrailleuses croisent leurs feux et battent tout le terrain compris entre les pentes ouest de la croupe 98 au nord et les pentes nord-ouest de la cote 90 au sud. Un nouveau bond est cependant exécuté malgré le feu de l'ennemi qui redouble d'intensité. La compagnie, étant dans l'axe du ravin, se trouve sous le feu direct d'une mitrailleuse qui nous coûte des pertes sensibles.

Une nouvelle progression nous rapproche des pentes sudouest de la croupe 98. Au fond du ravin, entre le petit bois et le village du Montchel, des groupes ennemis s'avancent.

Sans hésiter et mettant rapidement ses mitrailleuses en batterie, l'adjudant Besnard les surprend par son feu et les disperse.

Peu après, une section de mitrailleuses du 350e R. I. se met en position dans la partie ouest du plateau 98 et des hommes du 350e reviennent l'encadrer. La section Rouyer se relie à eux et la progression s'accélère. Nous approchons de la crête un peu avant la tombée de la nuit. Baïonnette rau canon, les deux compagnies escaladent les pentes du plateau 98 et enlèvent de vives forces l'objectif qui leur avait été assigné.

Des mitrailleurs allemands fuient, abandonnant leur


matériel. Les travaux d'organisation défensive sont immédiatement entrepris, malgré une réaction très violente de l'artillerie ennemie. La section de mitrailleuses Besnard s'organise dans une haie, à mi-côte, flanque les pentes sudest de la cote 98 et prend d'enfilade le ravin du Montchel.

La nuit fut employée à approfondir les éléments de tranchées, non seulement pour parer à un retour offensif allemand, mais aussi en prévision des tirs d'enfilade que l'artillerie ennemie ne manquera pas d'exécuter dans la journée du lendemain. Au petit jour, ce but était atteint.

Une fois de plus, l'ennemi était contenu sur notre front.

Le 31 mars, la journée fut relativement calme. L'artillerie ne tira que par intermittence des salves peu,prolongées.

Dans la nuit du 31 mars au Ier avril, la compagnie et la

section de mitrailleuses furent relevées vers 2 heures par une compagnie du 327e R. I. et placées en réserve dans les bois de la Morlière.

Le Ier avril, la compagnie reçoit l'ordre de reprendre ses chevaux à Gannes, d'où le premier demi-régiment rejoignit le gros du régiment à Meignelay dans l'après-midi.

A la suite de ces opérations, au cours desquelles les différentes unités du Ier cuirassiers n'avaient cessé de donner d'éclatants témoignages de bravoure, de généreuse initiative, de sang-froid et de ténacité, l'étendard fut décoré de la Croix de guerre et le régiment cité à l'ordre du 2e corps de cavalerie en ces termes :

« ier régiment de cuirassiers : Amené au combat par le « colonel de Viry dans les meilleures conditions d'entraî« nement physique et moral, a fourni pendant les combats cc récents un détachement de découverte au contact de « l'ennemi, un escadron et deux compagnies à pied. Deux « sections de mitrailleuses en liaison avec l'infanterie don« nant partout les résultats les plus utiles et le plus magni« fique exemple de l'emploi d'une cavalerie bien commandée , « dans l'action. »


Le 6 avril, le régiment quitte Maignelay et se rend par étapes dans la région sud-ouest de Château-Thierry et, de là, en Champagne.

Le 19 avril, le colonel de Brantes est nommé général de brigade.

Le 16 mai, le régiment cantonne à Coulvagny, mais le 29 mai il est alerté. Sa mission est de s'opposer à l'avance des Allemands qui, de l'Aisne, dévalent sur la Marne.

Le régiment passe au nord de la Marne et s'arrête en formation articulée dans la forêt de Ris. Le capitaine de la Monneraye prend alors le commandement d'une compagnie formée par les ier et 2e escadrons et renforce le bataillon du commandant Domenech, du 28 cuirassiers.

Dans la journée du 30, la compagnie de la Monneraye forme l'arrière-garde du bataillon Domenech qui, tout en maintenant l'ennemi, est obligé de se replier de Vincelles sur Chassins. C'est à hauteur de ce village que la section du sous-lieutenant Robert arrête la progression de l'ennemi en ouvrant le feu à courte portée sur les têtes des colonnes allemandes. Devant cette résistance, l'ennemi suspend sa marche sur Chassins et glisse vers Tréloup. La compagnie reçoit l'ordre, à la tombée de la nuit, de se replier sur le pont de Dormans pour aller prendre position sur' la rive gauche de la Marne, le long de la voie ferrée afin de défendre le passage de la rivière. La compagnie de la Monneraye occupe cette position jusqu'au 6 mai, elle rejoint alors le régiment au hameau de Piérarderie.

Dans cette même journée du 30 mai, le capitaine Bouet reçoit l'ordre de se porter sur Chassins. Les deux sections fournies par le, 46 escadron tiennent les avant-postes au nord-est du village, mais elles ne parviennent pas à se relier ,à droite avec le groupement du colonel Joannard.

D'autre part, le bataillon Domenech, ayant été obligé de se replier, les deux sections du capitaine Bouet faillirent être entourées par les Allemands ; elles réussirent pourtant à se dégager et à gagner Chassins grâce à l'appui d'une automitrailleuse qui vint prendre position sur la route de Vin-


celles-Verneuil et balaya de ses feux les lisières des bois d'où les Allemands interdisaient tout mouvement pour gagner les ponts.

Mises à la disposition du capitaine Clouet des Pesruches, du 6e dragons, les deux sections du capitaine Bouet prirent position à l'ouest de Verneuil. C'est là que, le 31 mai, vers 10 heures, lorsque l'ennemi se fut emparé de la Malmaison, ces deux sections protégèrent de leurs feux la retraite de deux bataillons d'infanterie et de deux compagnies du génie. Les deux sections ne passèrent elles-mêmes sur la rive gauche de la Marne qu'après l'écoulement de la colonne entière.

Le reste du régiment, bivouaqué à la Piérarderie, subit, le 8 juin, un bombardement qui tua et blessa plusieurs cavaliers. Mais l'attaque allemande était de nouveau enrayée et le régiment fut renvoyé à l'arrière. Il cantonne, le 10 juin, à Thibie et, le 28, il est passé en revue par le général Gouraud, commandant la 4e armée.

Le 15 juillet, le régiment réduit à trois escadrons, le 4e escadron étant maintenu à Juvigny à la suite d'une très forte épidémie de grippe, se reporte en avant. Le Ier cuirassiers a pour mission d'occuper les troisièmes positions de la 48 armée à Saint-Hilaire-au-Temple. La matinée fut consacrée à la reconnaissance et à l'occupation de secteur sous un bombardement d'obus de gros calibres. Mais l'attaque allemande étant venue s'effondrer sur les positions de la 4e armée, la brigade de cuirassiers était rassemblée à nouveau. Après une longue étape, elle arrive au bivouac à Oiry, à l'est d'Epernay, à 11 heures du soir, dans la nuit du 15 au 16.

Vers minuit, le Ier et le 2e escadrons du 1er cuirassiers forment une compagnie sous le commandement du capitaine Clouet des Pesruches, mise à la disposition du commandant Domenech, du 2e cuirassiers. Après une marche pénible, la compagnie arrive de grand matin à hauteur du château de Boursault. Le commandant Domenech y prend les ordres et le bataillon se met en marche, la compagnie du ier cuiras-


siers en tête. En cours de route, le capitaine Clouet des Pesruches reçut l'ordre de se porter dans la direction d'Œuilly et de prolonger la droite du 53e régiment d'infanterie coloniale jusqu'à la Marne. La compagnie, avec la section de Rohan-Chabot en avant-garde, se porta de suite sur Montvoisin que l'on croit occupé par les troupes françaises. La marche se fait à la faveur des bois. Parvenu à 600 mètres environ au sud-ouest de Montvoisin, le capitaine aperçut des fantassins allemands qui progressaient au nord du village.

Craignant que ce point d'appui ne fût déjà aux mains de l'ennemi et ne voyant aucun élément ami, il prit le parti de l'aborder en formation de combat. Le capitaine donne ses ordres. La section Rohan-Chabot progressera le long des pentes boisées, gagnera les lisières sud du village de Montvoisin qu'il fera reconnaître. La section Vieljeux se portera sur Montvoisin parallèlement à la route de Villesaint-Montvoisin et reconnaîtera le village dans sa partie est. La section Montbrison se portera aux lisières nord de Montvoisin, les reconnaîtra et tiendra sous son feu la grande route nationale n° 3. La section de Gournay est en réserve. Le capitaine se trouve, de 'sa personne, en lisière du bois et à 300 mètres des premières maisons de Montvoisin d'où il a d'excellentes vues sur le village.

Se conformant exactement aux ordres reçus, les trois sections atteignent leurs objectifs.

La 'section Montbrison se heurte à hauteur du chemin de terre Montvoisin-la-Cave à une ligne de fantassins allemands qui avançaient en tirailleurs appuyés par une mitrailleuse. Les fusiliers-mitrailleurs de la section entrèrent immédiatement en action, lui permettant d'atteindre son objectif et de s'organiser sur place en tenant sous son feu tous les points occupés par l'ennemi. Le maréchal des logis de Toledo, qui trouve la mort au début de cet engagement, fit preuve d'une grande bravoure en entraînant ses hommes sous le feu.

La section Vieljeux s'efforça de gagner les premières


maisons du village, mais, accueillie par un feu violent, elle dut stopper à 80 mètres des lisières, prenant sous le feu de ses fusils-mitrailleurs des groupes ennemis qui se dispersent. Les liaisons entre ces deux sections avaient été rapidement établies.

Entre temps, les deux sections de mitrailleuses du régiment mises à la disposition du capitaine reçurent l'ordre : Fune de battre la grande route qui longe la Marne, l'autre de prendre position 'sous bois de façon à protéger les éléments en ligne et à les soutenir éventuellement en cas de repli.

C'est alors que parvinrent les premiers renseignements sur la section Rohan-Chabot.

Conformément aux ordres qu'elle avait reçus, cette section avait abordé le village par le sud. Mais en atteignant son objectif, elle fut prise 'sous un très violent bombardement d'obus de gros calibres; son chef, le sous-lieutenant de Rohan-Chabot, avait été tué à sa tête. Le sous-offic:er de peloton, le maréchal des logis Ozouf, ainsi que plusieurs cavaliers avaient été blessés. Malgré le trouble causé par ces pertes et la douleur de savoir leur officier tué, les deux maréchaux des logis Vermeulen et Philippet décidèrent de continuer la mission et de reconnaître le village. Mais ceux qui y pénétrèrent furent tués ou faits prisonniers.

Cependant, grâce aux dispositions prises, sur un terrain difficile, la compagnie arrêta non seulement la progression des Allemands, mais les fit replier en désordre dans le village d'où ils ne tentèrent plus de déboucher.

Vers 10 heures du matin, la liaison avec le 53e R. I. C.

avait fait connaître que les lignes du 53e R. I. C. ne passaient plus à la cote 175, mais à la cote 253 et, vers midi, le bataillon qui était à la gauche de la compagnie s'était replié sur la Cense-Carrée. Dans ces conditions, il fallut reporter la ligne légèrement en arrière. Les sections de mitrailleuses ouvrirent un feu nourri sur Montvoisin (lisière est et sud-est) pour couvrir ce mouvement qui s'exécuta normalement malgré un violent bombardement. Les Alle-


mands ne-tentèrent plus aucune autre contre-attaque. Rien à signaler sur les nouvelles positions où les hommes montrèrent beaucoup de calme et de sang-froid, malgré l'éclatement des obus toxiques. *

Vers 16 heures, ordre est donné à la compagnie de s'appuyer, la droite au 5e dragons, la gauche à la ferme de l'Epine. De fait, la droite trouva, à 500 mètres au sudouest de Villesaint, une compagnie du 5e dragons qui occupait les avancées de Villesaint jusqu'à la Marne.

C'est à ce moment que le lieutenant Montbrison fut blessé.

La compagnie Clouet des Pesruches resta en ligne sur ces positions les 17, 18 et 19 juillet, subissant, avec la plus vaillante ténacité, des bombardements d'une grande intensité.

Le combat, auquel avait pris part la compagnie, avait été particulièrement dur : « Le courage des hommes, dit le capitaine dans un rapport particulier, a été au-dessus de tout éloge, ainsi que la calme simplicité avec laquelle ils accomplirent leur devoir ».

Le 17 juillet,, le régiment cantonne à Monthelon, en liaison étroite avec le bataillon Domenech dont le poste de commandement fut successivement établi à la ferme de l'Epine, puis au Pâtis.

Le 20 juillet, il quitte cette localité pour aller bivouaquer en forêt de Reims et, le 25, dans les bois de Verdilly.

Le 30 juillet, il regagnait le cantonnement de l'Epineaux-Bois.

Les combats de juillet 1918, dans la région de la Marne, furent les derniers auxquels prit part le Ier régiment de cuirassiers pendant la campagne. Après quelques étapes et de nombreux changements de cantonnements, le régiment cantonne à Saint-Germain-en-Laye, à partir du 23 août (état-major et 2e escadron), un escadron est à Paris, quartier Dupleix (le 3e),, un escadron est à Melun (le Ier).

Le 25 octobre, le régiment quitte Saint-Germain-en-Laye pour se porter dans la région de Nancy. Il se dirige, par


étapes successives, sur Revigny où il cantonne le 9 novembre.

C'est à Silmon - Culey - Guierpent et Loisey, en plein secteur américain, que le Ier cuirassiers apprend la signature de l'armistice.

Le ig, il entrait en Lorraine.

En même temps qu'un pieux et reconnaissant souvenir pour ceux qui sont tombés pour la cause la plus sacrée, il vient au cœur de tous une grande joie à la vue du territoire reconquis, à la pensée de la fin des souffrances endurées depuis quarante-huit ans par une population restée française malgré la rudesse allemande.

Les premiers villages traversés sont d'ailleurs inhabités, les Allemands, dès le 15 septembre, ayant ordonné l'évacuation de la population. Mais les habitants reviennent chez eux peu à peu et manifestent leur joie d'être redevenus français.

Le 21 novembre, la brigade fait son entrée solennelle à Boulay ; le régiment cantonne à Roupeldange-Eblange et Boulay.

Le 26 novembre, le régiment était à Sivry - Serrière Morey - Belleau, puis gagna par étapes la région d'Héricourt. Le régiment embarque le 8 décembre pour débarquer le 9 à Lyon-Guillotière. De là, le régiment gagna ses cantonnements de Saint-Bonnet-de-Mure (état-major et 4e escadron), Manicieu (2e escadron), Saint-Priest (1er escadron), Saint-Pierre-de-Chandieu (3e escadron), où il prit ses quartiers d'hiver en attendant la signature du traité de paix.


CONCLUSION

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La notice historique qui précède permettra à tous ceux qui ont fait la campagne avec le Ier cuirassiers de revivre, par la pensée, certaines journées glorieuses et aussi des jours pénibles.

Son cadre restreint n'a pas permis de relater en détail tous les faits individuels qui mériteraient une mention particulière s'ils étaient mieux connus.

Il n'a pas été possible non plus d'y insérer toutes les citations obtenues. Beaucoup d'entre elles n'ayant récompensé d'ailleurs que longtemps après des actes individuels de courage et de bravoure.

Quoiqu'il en soit, il ressort, de ce résumé rapide des opérations, que le 1er cuirassiers a su, sous l'habile impulsion de ses chefs, s'adapter aux exigences nouvelles de la guerre moderne, faire table rase des préjugés du passé, étudier à fond et connaître les méthodes imposées par l'affreuse guerre de tranchées, utiliser en plein rendement les armes auto natiques d'un modèle nouveau; conservant au surplus son esprit cavalier, il a donné des preuves, dans les rencontres avec des patrouilles de cavalerie ennemies, dans l'exploration ou dans des esquisses de poursuite, de ses qualités bien connues de courage, de généreuse initiative et de complet dévouement à la cause sacrée qu'il défendait.

Dans un ordre du jour adressé au ier corps de cavalerie, le général Féraud s'exprimait ainsi le 27 septembre 1919 : « La guerre ne vous a sans doute pas permis de vivre les « chevauchées audacieuses que nous avions rêvées, mais sur « l'Yser, dans les tranchées qui ont jalonné notre front de


« Nieuport à la Suisse, sur les hauteurs de Laffaux, à tra« vers les plaines de Noyon et de Montdidier, dans la « Somme, à Fismes, dans l'Oise, sur la Marne, partout où « l'heure fut la plus critique, vous avez opposé à l'ennemi « l'obstacle d'une résistance que rien n'a pu briser. »

Le Ier cuirassiers obtenait d'ailleurs, par ordre n° 17.174 D du G. Q. G., en date du 7 mai 1919, une citation à l'ordre de l'armée ainsi conçue : « Les unités du ier régiment de cuirassiers combattant « à pied et les sections de mitrailleuses ont fait preuve d'une « héroïque ténacité en résistant à l'infiltration allemande « au nord et au sud de la Marne, du 29 mai au 5 juin 1918, « luttant pied à pied, sans regarder au sacrifice, pour con« tenir un ennemi mordant, supérieur en nombre et décidé « à percer coûte que coûte.

« Réengagées du 15 au 29 juillet 1918, se sont à nouveau « signalées par leur entrain et leur abnégation, en parti« culier devant Montvoisin où la progression ennemie fut « définitivement enrayée grâce à la puissance et la précision « de leur feu, à l'intelligente initiative des cadres et à la « bravoure de tous les cavaliers. »

Et si le ier cuirassiers disparaît, du fait de la nouvelle organisation de la cavalerie, son étendard décoré de la Croix de Guerre restera le témoin de ses hauts faits d'armes et de son glorieux passé..




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