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Titre : Historique d'un régiment à fourragère rouge, le 4e régiment de zouaves-tirailleurs pendant la grande guerre

Éditeur : Impr. française (Bizerte)

Date d'édition : 19..

Sujet : Guerre mondiale (1914-1918) -- Histoire des unités

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb425682815

Type : monographie imprimée

Langue : français

Langue : Français

Format : 1 vol. (113 p.) ; 22 cm

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Description : Appartient à l’ensemble documentaire : GG14182

Description : Avec mode texte

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k6260573z

Source : Service historique de la Défense, 2011-321868

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 13/08/2012

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Histoire d'un rtégiment A

Le 4 me Régiment mixte

de ZOUAVESTIRAILLEURS" pendant la

Grande Guerre



HISTOIRE d'un RÉGIMENT

à

FOURRAGÈRE ROUGE



HISTORIQUE

d'un

RE3G-IME3NT à Fourragère Rouge Le 4mt Régiment de Zouaves-Tirailleurs pendant

La Grande Guerre

Les voilà, ceux dont il est dit : « N'a pas cessé, malgré le nombre.

N'a pas cessé d'être hardi.

D'avoir du calme. du courage.

N'a pas cessé, malgré son âge..

N'a pas cessé, quoique blessé.

N'a pas cessé, malgré la neige. »

Ah 1 les voilà donc, me dilais-je.

Voilà ceux qui * n'ont pas cessé 1 Qu'ittttontbeauxta E. ROSTAND.



FRONTISPICE

s

Le livre que tu vas lire, Tirailleur du 40 Régiment Mixte, a été écrit par toi. Tout ce que tu vas y trouver, tu le connais déjà : tu le connais pour l'avoir accompli toimême, ou pour l'avoir entendu raconter cent fois par ceux de tes aînés — ceux à qui ta as voulu ressembler — qui en ont été les héros.

Parcours-le souvent, parce qu'il est un trésor inépuisable d'émotions profondes, une source intarissable de fier- té, la résurrection de ce passé immortel qui est le tien et qui a fait de toi cet homme étonnant — sur lequel se penche le Présent et devant qui s'inclinera F Avenir — un homme qui a fait la Grande Guerre Victorieuse. Tu te regarderas dans ce livre comme dans un miroir, et tu diras, en touchant ta poitrine qui a survécu par miracle : « Heureux ceux à qui leur destin — leur donnant une telle tâche — a permis d'y survivre pour y penser toujours !. »

Et puis, montre-le, prête-le, conte-le, commente-le. Car il n'y a pas de culte qui n'qit besoin de prêtres. Et parce que, si quelque modestie inexplicable te retenait d'entretenir autour de toi l'admiration que tu as conquise, tu dois à tes frères morts de cultiver les lauriers de leurs tombeaux. Ne considèrerais-tu pas comme un pieux devoir de veiller sur la gloire dont ton père, ton frère et toi-même aluiez paré votre nom ? Or, ton nom illustre est : « Tirailleur du 4° Mixte », et ton titre de noblesse : « Soldat de l'Armée Française ».



AVANT-PROPOS 9 Septembre 1914.-- 21 Juin 1915

Le 4° Régiment Mixte de Zouaves et de Tirailleurs a été constitué le 22 juin 1915 à Rexpoed, sous le commandement du Lieutenant-Colonel Levêque, par la réunion de deux bataillons du 8° Tirailleurs (le 1° et et le 6°) et d'un bataillon du 4° Zouaves (le 6°). Il est donc de ceux qui ont été créés sur le champ de bataille, en face de la mission à remplir.

Cette mission, le Président de la République la lui précisait lorsqu'à Hondschoote, le 25 juin 1915, il lui remettait son drapeau. L'Histoire prouve qu'il l'a généreusement remplie : né le dernier de tous les régiments de Tirailleurs, ne sera-t-il pas le premier à obtenir la fourragère à la couleur du ruban de la Légion d'honneur ?

*** Mais avant de commencer le récit des hauts-faits accomplis par le 40 Régiment Mixte, il est juste d'indiquer quelle part de gloire lui apportaient, dès sa naissance, les bataillons qui le composaient, de dire sous quels présages s'ouvrait la carrière de ce Régiment.

Le 1" et le 6° Bataillons du 8° Régiment de Tirailleurs se trouvaient au Maroc lorsque, le 4 août 1914, la guerre éclata. Embarqués dès les premiers jours de septembre à destination de la France, ils arrivaient à Cette, puis à Bordeaux où, avec le 20 Bataillon du 4° Régiment de Tirailleurs, venu lui aussi du Maroc, ils formaient le 8° Régiment de Marche de Tirailleurs, sous le commandement du Lieutenant-Colonel Delaveau.

La bataille de la Marne avait été gagnée; le flux boche brisé avait été repoussé jusqu'à l'Aisne; la bataille de l'Aisne commençait; le Général de Castelnau, sur le front qui, de l'Ouest de Soissons remontait vers le Nord, proje-


tait de refouler l'aile droite ennemie.

C'est alors que le 8° Régiment de Marche de Tirailleurs (1° Bataillon du 8° Tirailleurs sous les ordres du Commandant Masson, 2° Bataillon du 40 sous les ordres du Commandant Blondiau, 6° Bataillon du 80 sous les ordres du Commandant Millet), formant avec le 1° Régiment Mixte d'Infanterie Coloniale du Maroc (R. I. C. M.) la 4° Brigade du Maroc, est dirigé sur Compiègne où il débarque le 19 septembre. Le Commandement rattachait la 4° Brigade Marocaine au 13° Corps d'Armée (Général Alix), élément de la 11° Armée, celle du Général de Castelnau, dont l'action était déjà en cours sur la rive droite de l'Oise vers Noyon.

Tout aussitôt, le Régiment va donner ses preuves. Dès le 20, il prend contact avec l'ennemi; et le 21, il reçoit son véritable baptême du feu boche.

De très bonne heure, le 21 septembre, la présence des Allemands est signalée vers la Ferme de La Taulette-Lassigny. Le 8° Régiment de Marche de Tirailleurs reçoit l'ordre de se porter à l'attaque. Il prend le dispositif suivant : 6° Bataillon (Commandant Millet) à gauche; 1° Bataillon (Commandant Masson) à droite; 2° Bataillon (Commandant Blondiau) en réserve. La direction générale est Ouest-Est; l'objectif éloigné : Candor. En avant !

C'est le premier jour de l'autome, le soleil est resplendissant. Dans ce décor, les Tirailleurs avec leurs uniformes aux couleurs vives, offrent un spectacle qu'ils n'auront pas de nombreuses fois l'occasion de faire admirer : chéchias crânement campées, ceintures rouges sous les petites vestes bleu-clair, vastes pantalons blancs.

Cependant, à 800 mètres de Canny, près du petit bois qui est devenu le fameux Bois Triangulaire, des coups de feu éclatent. Des patrouilles ennemies rôdent; l'on est près des avant-postes. Mais les Tirailleurs en ont senti passer bien d'autres en Afrique I Les Bataillons Masson et Millet poursuivent résolument leur route. Le premier prend ses dispositions pour attaquer Lassigny; le 6° se porte vers la Ferme La Taulette que les Allemands occupent Le bourg de Lassigny est adossé au massif du Piémont qui domine toute la campagne environnante et qui, comme point d'appui, jouera à plusieurs reprises pendant la du-


rée de la guerre, un rôle très important. Les lisières du village, bordées de clôtures et de vergers, abritent des mitrailleuses et de l'infanterie ennemies; un vaste glacis,complètement découvert, s'avance au loin dans la plaine.

Et les Tirailleurs du 1° Bataillon, cibles méprisantes, marchent sur Lassigny. Les feux nourris de mousqueterie les accueillent. Les 77 éclatent dans leurs rangs : ils avancent. Le village est proche; le feu augmente. Plusieurs fois les Tiraillers viennent briser leurs rangs sur cet écueil où l'on meurt; la rage les prend. Le caporal Mohamed ben Abdallah apporté au poste de secours avec un bras déchiqueté répond aux paroles de reconfort du médecin : « Je m'en fous de mourir !. Vive la France !. »

Le Tirailleur de 1° classe Sadock ben Othman el Kalaï, qui recevra la Médaille militaire, entraîne fougeusement ses camarades, les électrise, et cependant domine si bien son enthousiasme qu'on le voit ramasser sur son chemin les cartouches des blessés, repérer froidement sa cible et tirer chaque fois à coup sûr.

L'Adjudant Laheurte, qui conduit sa section avec une énergie et un entrain remarquables — dit sa citation à l'Ordre de l'Armée — ayant été grièvement blessé, poursuit sa course jusqu'au moment où, épuisé, il tombe. Et lorsque le Chef de Bataillon lui adresse des félicitations et des encouragements, il répond : « Je suis peut-être mortellement touché, et cependant je désirerais vivre pour me venger !. »

Le Capitaine Mascart, profondément blessé, continue à conduire sa Compagnie jusqu'au moment où une deuxième balle le tue. Le Capitaine Roy tombe mortellement frappé; le caporal Mohamed ben Aouli est tué en se portant à son secours sous le feu des mitrailleuses.

La Compagnie Menétrier, en soutien, étaie jusqu'au oout les autres compagnies dans le mouvement qu'elles effectuent. Son Capitaine reste le dernier avec une seule section dans les tranchées, d'où il ne se retire que la nuit venue après avoir brisé une contre-attaque ennemie forte d'un bataillon.

Les Tirailleurs subissent des pertes trop lourdes. Force leur est, ce soir, après tant de tentatives infructueuses, d'établir leurs premières lignes à quelques centaines de mè-


très des lisières de Lassigny : on recommencera demain !

De son côté, le 6° Bataillon se porte à l'assaut de la Ferme La Taulette que la 23° Compagnie enlève d'un seul élan.

Le Commandant Millet, blessé l'un des premiers, passe le commandement au Capitaine Rothenflue.

Mais l'ennemi ne s'avoue pas vaincu. Il multiplie ses contre-attaques : il faut tenir !. Les ravitaillements sont à peu près inexistants, l'artillerie adverse redouble d'action : le 60 Bataillon, galvanisé par l'ardeur et la ténacité du Capitaine Rothenflue tient quand-même ! La nuit passe; on tient héroïquement le 22, le 23 et jusqu'au 2 octobre.

Et là aussi les actions d'éclat se multiplient. Le Tirailleur de 1° classe Amouar — dit la citation qui lui vaut la Médaille militaire — grièvement blessé à la cheville en allant chercher sous le feu des tranchées ennemies un Lieutenant dij R. I. C. M. blessé, poursuit cependant la mission qu'il s'est donnée et ramène son blessé.

Le 22 septembre, le 1° Bataillon reprend ses assauts sur Lassigny. Le boche s'est puissamment retranché; les Tirailleurs chargent à la baïonnette avec un entrain admirable, gagnant du terrain, sans parvenir toutefois à atteindre le village.

Le 23, une forte colonne d'attaque est constituée; le 1° Bataillon du 8° Régiment de Marche de Tirailleurs se joint à plusieurs autres bataillons d'Infanterie. Un vigoureux assaut est lancé par le Ravin de la Divette. Une fois de plus, les premières vagues, abordant les lisières du village, ne peuvent y pénétrer et s'y maintenir. D'autre part, l'artillerie ennemie devient de plus en plus active; les obus de 150 ont fait leur apparition; ils viennent s'écraser avec un fracas qui ne s'était pas encore entendu sur ce champ de bataille. i Le matin du 24, plusieurs centaines des nôtres fauchés par les mitrailleuses boches ou brisés par les gros obus, émaillent comme des gerbes tricolores ces lambeaux du terrain si chèrement disputé à l'ennemi. Aux pentes de la Divette, aux abords de la route de Fresnères, le soleil, comme pour honorer la mort de ces braves, vient caresser de ses premiers rayons les chatoyantes couleurs des uniformes d'Afrique. Etendus, le visage au sol, les mains cris-


pées sur leur arme, la mort les a figés dans le geste ultime de la charge à la baïonnette.

Les Tirailleurs du 80 sont bien les dignes descendants des Turcos de Wissembourg !

Au cours de la bataille, les seuls 1° et 6° Bataillons ont subi de lourdes pertes : 4 officiers et 53 hommes de troupe ont été tués; 16 officiers et 504 hommes de troupe ont été blessés. 107 hommes manquent.

*** Du 24 septembre au 1° octobre, le 1° Bataillon, aux avant-postes vers le Bois de Canny, reste en position d'attaque; le 6° Bataillon, dans la Ferme La Taulette, tient toujours. Mais le 2 octobre, une forte attaque allemande sur tout le front du Secteur provoque un repli : le 1 ° Bataillon s'installe vers la côte 83 (Ouest de Roye-sur-Matz), le 6° vers Canny.

C'est alors que, gagnant progressivement presque tout le front, commence cette guerre de positions dont le tempérament français devra bien s'accomoder — où chacun ayant muselé l'impatience de se battre, se révélera terrassier, mineur, bûcheron, et. troglodyte puisqu'il le faut!

Le Régiment aménage son Secteur : des tranchées et des boyaux sont creusés, des défenses accessoires et des réseaux de fil de fer barbelés — très rudimentaires encore — sont établis en avant des nouvelles lignes. On confectionne des chevaux de frise; des corvées tressent des claies, des gabions; les trous de renards s'agrandissent, des sapes précaires se crefisent qui semblent encore n'être que provisoires, cependant que les premières gelées se font sentir, que le mauvais temps rend la tâche ardue et que les beaux rêves de guerre en terrain découvert s'embrunissent. Et l'on mange une nourriture mal préparée dans des cuisines improvisées, qui arrive froide et figée, souvent réduite de moitié par les incidents de la route.

C'est d'abord un séjour pénible de trois semaines dans ce Secteur que l'on crée (Canny-sur-Matz); puis une relève dans celui du Plessier-de-Roye (Lassigny, Cury,Mareuil-LaMotée) où le Régiment reste onze jours. L'ennemi amène tout un matériel nouveau : pour la première fois, les TiFailleurs subissent le bombardement par grosses torpilles,


dont les détonations formidables et les immenses entonnoirs qu'elles creusent ne sont pas sans répandre une forte impression.

Puis, alternent les périodes de repos et les périodes de tranchées. Le système de relèves s'organise. Six jours de repos d'abord, 35 jours de tranchées (Plessier-de-Roye); 27 jours de repos et de réorganisation (région de Cuvilly et de Villers-sous-Coudun) et deux mois du Secteur de l'Ecouvillon à l'Oise (Le Carmoy, ferme Attiche, Le Hamel).

Entre temps, la première Compagnie est citée à l'Ordre du Corps d'Armée : « Occupant des tranchées de premiè« re ligne a supporté pendant deux heures, le 23 décem« bre, avec une ténacité inébranlable, un bombardement « intense de l'artillerie lourde ennemie sans qu'un seul « homme ait quitté son poste de combat. » Le Capitaine Porte a été tué en ligne.

Le Régiment a affirmé ses brillantes qualités militaires, harcelant sans cesse l'ennemi de ses nombreuses patrouilles et de ses coups de main audacieux, partout hardi et crâne et manifestant le plus magnifique esprit de sacrifice.

Les pertes du 24 septembre au 10 avril ont été : Officier tué 1; hommes de troupe tués 24; officier blessé 1; hommes de troupe blessés 175; disparus 14.

Le 10 avril, le Colonel Mordacq, commandant le groupement, adressait au Colonel Delaveau la lettre suivante (66/P du 10-4-15) : « Au moment de quitter le groupement Sud du 13° C. A.

« où il laisse le souvenir de ses belles qualités d'entrain et « d'offensive, le 8° Régiment de Marche de Tirailleurs a « fait spontanément pour ses adieux au Secteur, un auda, « cieux coup de main sur un poste ennemi.

« Il s'est emparé de ce poste que ses défenseurs avaient « abandonné.

« Cette action hardie, bien menée par la Compagnie Ro« thenflue lui a malheureusement coûté la perte de l'Adju« dant-Chef Nauzières, disparu au cours de l'opération.

« Le Colonel commandant le groupement adresse au 8° « Tirailleurs ses remerciements pour son active et dévouée « collaboration et lui souhaite bonne chance pour le reste « de la campagne.


« Il ne doute pas du succès partout Où le Régiment sera « engagé. »

*** On se bat avec acharnement en Belgique; c'est la deuxième bataille d'Ypres qui commence. 1 Les Allemands viennent, pour la première fois sur notre front, de faire usage de leur flétrissante invention : les gaz asphyxiants. Les armées alliées, pour n'avoir pu prévoir l'ignoble procédé de combat, subissent des pertes très graves et cèdent sous l'effet des nappes meurtrières.

Nos lignes ont reculé au Nord d'Ypres; l'ennemi vers Steenstraetes a franchi le Canal d'Ypres à Furnes.

Après un court séjour dans la région de Saint-Pol, le 24 avril 1915, le .8° Régiment de Marche de Tirailleurs est enlevé en camions-autos et transporté en Belgique, à Poperinghe. où il débarque le 25 à midi.

Aussitôt il est poussé en avant et va bivouaquer vers Brielen, à proximité du canal qu'il franchit dans la matinée du 26 sur des passerelles établies par le Génie.

Mais le terrain des Flandres est plat et découvert à perte de vue; l'ennemi observe tous nos mouvements.

Les passerelles sont soumises à un bombardement intense; le passage s'effectue avec beaucoup de difficultés.

Il s'effectue quand-même.

En liaison avec le R. I. C. M. le Régiment progresse rapidement. L'objectif est le village belge de Pilken. A 500 mètres des lignes boches, en dépit du tir serré des mitrailleuses, les Tirailleurs, dans un magnifique élan, se jettent à l'assaut du mouvement de terrain sur lequel sont installés les retranchements ennemis. L'artillerie fait rage. Un instant, ne serait-ce le paysage indéfiniment gris, le combat paraîtrait reprendre sa physionomie de Lassigny et de, La Taulette. Le lieutenant Hopnicker, blessé en avant de sa section de mitrailleuses, refuse de se laisser porter en arrière, garde son commandement jusqu'à ce que sa section puisse tirer, le passe enfin à son sergent en criant : « Vengez-moi !. »

L'Adjudant Bleing Félix, blessé sous les rafales d'obus, clame à son tour : « Marchez en avant, ne vous occupez pas de moi. »


Le Sous-Lieutenant Ali ben Hassen, blessé une première fois, reste à son poste jusqu'à ce qu'une seconde balle vienne le mettre hors de combat.

Le Capitaine Andrieu, cruellement touché, prononce em mourant ces paroles : « Je suis content de mourir à la tête de ma Compagnie !. »

Et les Tirailleurs progressent toujours.-Déjà les Compagnies de tête sont à 50 mètres des premières lignes ennemies, lorsque soudain les vagues chlorées envahissent le champ de bataille, empoisonnant l'air que réclament les poitrines haletantes et brisant le magnifique élan de nos troupes dépourvues de tout moyen de protection.

L'Adjudant Zuber ne s'arrête qu'asphyxié; il refuse de se laisser évacuer; le lendemain, souffrant encore, il repartira à l'assaut ave un autre régiment, parce que son bataillon ne prend pas part à ce nouveau combat.

Le Tirailleur Messaoud ben Mohamed, blessé, opprend sur le chemin de l'ambulance que son capitaine est tué : il fait volte-face, retourne sur la ligne de feu, et maîtrisant sa souffrance,aide à ramener le corps de son glorieux chef.

Le petit Danioux, 18 ans, engagé volontaire pour la durée de la guerre, agent de liaison, porte sans trêve, sous le feu incessant, les ordres de son capitaine. Enlln,très gravement blessé, il a le grand courage de rire encore, de railler devant ses camarades sa propre deuleur, redoutant pour leur ardeur combative, la pitié et l'attendrissement qui amollissent les cœurs.

Mais toute avance est devenue impossible. Le 27, on recommence : les mêmes émissions asphyxiantes rendent tous les efforts impuissants. Au cours des. tentatives du 28, le vieux sergent Youssef ben Hassine, vieux serviteur et vieux brave, enlève comme un chef véritable sa Section dont l'officier vient d'être tué. Les traits de bravoure et d'héroïsme sont innombrables !

L'Adjudant Jacquemot se lance à l'assaut et communique par son enthousiasme un tel élan à sa troupe, qu'il lui fait traverser d'un seul bond le barrage de mitrailleuses et le nùage de gaz. N Le Lieutenant Frizon, qui, déjà blessé le 21 septembre, est revenu sur le front à peine jjuéri, a entrainé sa Com-


pagnie dans les mêmes conditions. Avec quelques hommes, il arrive à 50 mètres d'une tranchée allemande et s'établit dans un poste d'écoute.

Le 30, une dernière attaque se brise, vaine. Alors le Secteur se stabilise.

1 Le régiment ne sera pas relevé avant le 26 mai. Tout un mois, il reste dans ce - coin misérable de Flandre que sa configuration rend si meurtrier. On ne peut creuser aucune tranchée sérieuse, aucun boyau véritable, aucun abri : dès les premiers coups de pioche la nappe d'eau se révèle.

Par malheur l'on est vu, repéré, observé de partout; pour chaque coup de pelle un coup de feu. Comme l'inaction est une épreuve trop rude pour ces merveilleux combattants, des attaques à fond sont fréquemment exécutées; elles ne rapportent qu'un peu plus de gloire et de nouvelles pertes.

Au 26 mai, lorsqu'il est enfin relevé pour aller à Rexpoède se reposer et se reformer, le 8° Tirailleurs de Marche (1° et 6° Bataillons seulement) compte pour ce dernier mois les pertes suivantes : tués : officiers 2, troupe 88 ; blessés : officiers 12, troupe 610; disparus : troupe 102; soit 904 hommes hors de combat.

* *$

Le 8° Régiment de Marche de Tirailleurs est encore à Rexpoède lorsque, ayant renvoyé au Maroc son 2° Bataillon (du 4° Tirailleurs), il reçoit en échange, le 22 juin 1915, le 6° Bataillon du 4° Zouaves et prend le nom de 4° Régiment Mixte de Zouaves-Tirailleurs.

Le 6° Bataillon du 4° Zouaves est digne de venir prendre place à côté des deux beaux bataillons de Tirailleurs, Animé de cette bravoure et de cet esprit de sacrifice qui sont la tradition de cette troupe d'élite, il vient de faire neuf mois d'une rude et brillante campagne.

Appelé de Ferryville sous les ordres du Commandant de Valon, il a été formé, dès fin août, avec deux bataillons du 1° Zouaves, le 1° Régiment de Marche de Zouaves. De suite, l'heure pressant, il est accouru devant Paris pour


faire, avec l'armée Maunoury, une barrière infranchissable à l'avance foudroyante ennemie.

L'ordre du jour du Général Joffre venait de paraître ; « Au moment où va se livrer une bataille dont dépend le « sort de la France, l'heure n'est plus de regarder en ar« rière. Toute troupe qui ne pourra plus avancer devra se « faire tuer sur place plutôt que de céder un pouce de « terrain. »

Le 7 septembre, pour leur baptême du feu, les batailIons du 1° Régiment de Marche de Zouaves, frémissants d'enthousiasme guerrier, répondaient à ces mâles paroles en enlevant Chambry à la baïonnette. Le 10, le 11, le 12, ils se lançaient à la poursuite d'un adversaire en déroute et, la rage au cœur, exaltés par le spectacle des dévastations, des rapines, des sacrilèges d'une horde de Vandales lâchée sur la France, arrivaient dans Soissons sur les talons des fuyards.

Ils ont pris part en septembre 1914 à cette meurtrière bataille de l'Aisne, laissant des morts.sur les pentes de la côte 132 dont l'ennemi tenait opiniâtrement le plateau, et dans le village de Crouy où des reconnaissances d'avions avaient signalé leurs cantonnements — sans jamais pourtant se départir de leur belle humeur et de leur mépris du danger.

En octobre, transporté dans le Pas-de-Calais, le 1° Régiment de Marche de Zouaves a livré l'assaut au Mont-SaintEloi. Son 6° Bataillon (provoquant l'admiration du commandant de l'artillerie qui, juché sur un caisson, suivait le combat à la jumelle) s'illustrait en enlevant de haute lutte le bois de Berthonval, en dépit de la fusillade et des tirs désespérés des mitrailleuses.

Ce même Bataillon a conquis de nouveaux lauriers dans le Secteur de Roclincourt, sur la route de Lille au Nord d'Arras. Il a subi l'affreuse guerre de mines, et soutenu la guerre de coups de mains, recevant des assauts incessants auxquels il répondait par des assauts, faisant merveille dans la nuit du 4 au 5 décmbre, où ses Zouaves bondissaient sur le terrain pour affronter les attaques ennemies sans cesse renouvelées, faisant merveille encore les 7 et 8 décembre où, dans une affaire brillante, savamment con-

M


duite et généreusement exécutée, il capturait plus de 100 Bavarois.

C'est dans le tumulte de l'un de ces combats que le Commandant de Robien s'élance le premier en brandissant sa canne et tombe héroïquement en criant : « En avant, mes enfants !. »

C'est là encore que le Zouave Coco, figure de légende, cuisinier et ordonnance à la fois, dont les camarades survivants ne connaîtront jamais le nom véritable, abandonne un instant ses fonctions pacifiques et, aidé de son âne fidèle avec lequel il ravitaillait ses officiers, relève les camarades blessés, puis ne pouvant résister à son instinct de bravoure, saisit brusquement un fusil, vole au combat, prend une mitrailleuse et tombe mortellement frappé en la rapportant dans nos lignes.

En avril 1915, en Belgique, à Boesinghe, ce 6° Bataillon prenant à l'improviste la succession d'unités que la première émission de gaz asphyxiants boches venait de surprendre et de décimer, a arrêté l'avance boche sur le Canal de l'Yperlée. De la rive Sud où il était établi, en face de positions dominantes puissamment organisées, il enrayait toutes les tentatives d'un ennemi agressif, entêté à courir à la mer. Bien mieux, il lançait des éléments sur la rive Nord, y prenait pied, grignotait le front adverse et, le 29 mai, enlevait ce fortin 17, position redoutable, dont il capturait en plus la garnison et tout le matériel.

Tel est ce Bataillon de Zouaves qui vient poursuivre sa tâche auprès de deux bataillons du 8° Tirailleurs, ajoutant ses vertus éprouvées au génie de sa nouvelle famille, le 4* Régiment Mixte de Zouaves et de Tirailleurs.


L'ADOLESCENCE 22. Juin 1915 -- 16 Avril 1916

Donc, un Corps superbe vient de naître de la - communion de deux familles de braves. On l'a baptisé ; il s'appellera devant l'Histoire : « Le 4° Régiment Mixte de Zouaves et de Tirailleurs ».

Maintenant on va l'exercer, lui donner une âme unique, une seule fierté : on va lui insuffler son esprit de Corps.

Tout d'abord, à Rexpoede qui est l'arrière du front, ses chefs vont le prendre en mains. C'est le Lieutenant-Colonel Levêque, placé le 14 mai 1915 à la tête du &0 Régiment de Marche de Tirailleurs — le Lieutenant-Colonel Delavau ayant été appelé, avec le grade de Colonel, au commandement de la 1° Brigade du Maroc qui préside à ses destinées. Les compagnies vont tirer à la cible sur le champ de tir de Bergues, non loin de Dunkerque; le régiment en entier va manœuvrer dans les dunes de Zuydcoote où il s'entraîne, avec le R. I. C. M., à des exercices de combat.

Et c'est alors, tandis que le troupier prenait conscience de la durée imprévue de cette guerre, que surgit cette chose inespérée : le Général en Chef accorde des permissions 1 Bien mieux, tous les soldats, officiers et hommes de troupe, à tour de rôle, auront leur permission. Le Grand Chef fait confiance à tous ! On déposera, qui son épée, qui son fusil, ses cartouches, son havresac; on ira serrer sur sa poitrine ces êtres chers que l'on a quelquefois désespéré de jamais revoir. Et puis l'on viendra reprendre sa place au feu. Le 4 septembre 1914, le Général Joffre écrivait : « L'heure n'est plus de regarder en arrière !. » Il dit, maintenant : « Allez donner de la fierté à celles qui ont souffert autant que vous !. Allez porter à la France l'exemple et le réconfort de votte beau moral. »

Le 10 août, le 4° Régiment Mixte monte en ligne. Il ne restera que huit jours dans ce sous-secteur de SteenstraeteHctsas (Bœsinghe); mais en huit jours, il aura 9 tués, dont


1 capitaine et 1 lieutenant, et 58 blessés, dont 3 officiers.

Les tranchées bordent le canal d'Ypres à Furnes; celles de l'ennemi qui s'alignent sur la rive opposée, sont richement pourvues de minenwerfer; chaque jour nos premières lignes sont bouleversées; le Capitaine Reboussin et le Lieutenant Toussart sont écrasés dans leur abri par une torpille.

Cependant, le Général en Chef préparait sa grande offensive d'automne qui devait simultanément être déclenchée en Champagne et autour d'Arras. Il disposait, disaiton, de nombreux canons de campagne, d'une puissante artillerie lourde; on parlait de millions d'obus et d'une quantité impressionnante d'obus spéciaux.

Ayant été relevé de Bœsinghe dans la nuit du 18 au 19 août, puis débarqué de chemin de fer le 29 à Freveet, le 4° Régiment Mixte, le 30, se met en route pour Basseux-Rivière (Sud d'Arras) où, le lendemain, il relève en secteur un régiment territorial.

Les travaux d'aménagement du terrain en vue de la grande offensive prochaine sont poussés activement. Chaque nuit, les bataillons ainsi que les régiments en réserve fournissent d'importantes équipes de travailleurs. Mais l'ennemi se tient sur ses gardes. Dès qu'il a saisi notre activité,il entreprend de paralyser nos travailleurs,la nuit,et de démanteler le jour une œuvre réalisée à force de ténacité et de bravoure. Ainsi se lève l'aube grise du jour « J ».

C'est au 25 septembre que le commandement a fixé le déclenchement de l'offensive. Le 4° Régiment Mixte de Zouaves et de Tirailleurs sera du premier jour. Il est prêt.

Les deux bataillons de Tirailleurs partiront en tête. Le 60 Bataillon (Commandant Lefèvre) à gauche. Le 1° Bataillon (Commandant Caillet) à droite; le bataillon de Zouaves (Commandant Degeorge) sera en soutien.

Le matin, l'artillerie intensifie son tir de préparation.

Devant lé front de chaque bataillon, elle doit pratiquer de larges brèches dans le puissant réseau de fil de fer qui protège les positions ennemies. A l'heure « H », elle allongera son tir qui viendra museler les mitrailleuses et les fusils allemands et protéger jusqu'au dernier moment la marche de nos vagues d'assaut.

A midi, les Tirailleurs sortent d'un bond des parallèles de départ, et sans hésitation, animés d'un souffle de victoire, se portent en avant pour franchir les brèches. Mais


en même temps les mitrailleuses de l'ennemi èntrcnt en action; elles semblent innombrables; son artillerie ouvre un feu de barrage nourri. Le Commandant Lefèvre est tué à la tête de ses troupes au moment où il clamait : « En avant ! pour la France !. »

Malheureusement, devant le 6° Bataillon de Tirailleurs, les réseaux de fil de fer sont restés à peu près intacts, la défense est infranchissable; et les assaillants sont là, immobilisés sous un feu infernal, ne pouvant avancer, ne sachant reculer. Certains se glissent parmi cet enchevêtrement de fer et d'abatis; et bientôt les réseaux sont jonchés de cadavres.

Devant le 1° Bataillon, les défenses ennemies ont été plus sérieusement entamées; les Tirailleurs les franchissent magnifiquement, et d'un seul élan bondissent dans les tranchées conquises. Les nettoyeurs font leur œuvre; les autres poursuivant irrésistiblement leur incursion dans les lignes allemandes, atteignent déjà le Moulin de Ficheux qui est leur premier objectif. Ils en chassent les occupants, s'y établissent en dépit d'un bombardement qui se concentre sur leur position, s'y organisent, repoussent une première contre-attaque immédiate, puis une seconde, puis d'autres encore, acharnées, désespérées.

L'ennemi qui s'épuise à aborder de front ces héros inébranlables, décide alors, avec des renforts appelés en hâte, de les encercler. Ce n'est que complètement débordés, leurs communications avec l'arrière à peu près supprimées, qu'après neuf heures de lutte ardente, les débris du 1° Bataillon se résolvent à rejoindre nos lignes. Ils ne les atteignent qu'après s'être ouvert un passage à la baïonnette à travers l'ennemi.

La conduite du 1° Bataillon, au cours de cette journée, est de celles que l'Histoire devra retenir. Il fut cité tout entier à l'Ordre de la X° Armée avec le motif suivant : « Le 25 septembre 1915 a brillamment enle-vé et traversé une ligne de tranchées allemandes protégée par un épais réseau de fil de fer, malgré un feu très violent de mitrailleuses, et s'est maintenu toute la journée sur la position en résistant aux contre-attaques ennemies. »

Sur ce terrain bouleversé, chèrement disputé, arrosé de leur sang et du sang boche aussi, les Tirailleurs du 4* Régiment Mixte laissaient les cadavres de bien des braves entre les plus braves. Qui citer? Le Capitaine Cornet, sans


doute, qui, après avoir brillamment entraîné sa Compagnie à l'attaque, l'avoir maintenue sur la position malgré un feu des plus violents, est tué en allant panser un sous-officier blessé en avant de la tranchée.

Le Tirailleur de 1° classe El Abidi ben Mohamed qui, arrivé l'un des premiers sur les tranchéées allemandes, s'y maintient pendant plusieurs heures, et, quoique blessé,

continue à soutenir un violent combat corps-à-corps.

Et surtout ces deux héros, l'Adjudant Tabutiau et le Tirailleur Fertin, dont les gestes superbes suffiraient seuls à illustrer un combat.

A midi, l'Adjudant Tabutiau enlève brillamment sa section, escalade et franchit les lignes ennemies, une balle de mitrailleuse lui fracasse le coup de pied, il tombe. Le sergent Blain se précipite pour lui porter secours. D'un geste net il l'arrête, son revolver au poing il montre l'ennemi.

Puis se tenant à genou, malgré la souffrance, il crie à perdre haleine : « En avant !. toujours la 3° section. Je ne compte plus, en avant quand-même !. » jusqu'à ce qu'il tombe criblé de blessures.

Fertin, lui, une heure avant l'attaque, a pansé son chef de section, le Sous-Lieutenant Bonifaci, très grièvement blessé, le portant lui-même et tout seul, il l'a ensuite conduit au poste de secours; puis, revenu .en courant, il a repris sa place, « heureux, disait-il, d'être de retour assez tôt pour prendre part à l'attaque ». Dès le signal de l'assaut, il se fait remarquer par sa grande bravoure, son allant si communicatif, mais ayant franchi les premières

lignes allemandes, soudain il chancelle; il crie à ses camarades qui progressent : « Bravo !. Vive la France !. » et s'abat sur le sol, le corps percé de balles.

Dans les tranchées de départ qu'il a réintégrées, le régiment — combien amoindri ! — prend ses dispositions pour parer aux contre-attaques éventuelles. La nuit est tombée.Les brancardiers et des sauveteurs volontaires parcourent le terrain, ramassant les blessés et les morts. On ramène les cadavres du Capitaine Maffre-Bauge et du Lieutenant Dol. Depuis qu'il est arrivé au secteur, le 4° Régiment Mixte de Zouayes et de Tirailleurs — c'est sa première épreuve — a perdu 886 de ses braves : 4 officiers tués, 14 blessés et 7 disparus; 115 hommes de troupe tués, 506 blessés, 240 disparus. -


Le 27, on le relever puis on l'embarque en automobiles; le 30, il arrive à Hersin-Coupigny, cantonnement des unités de réserve du secteur du Double-Cressier de Lens, devant Bully-Grenay. La Brigade relève des éléments anglais. Déjà le R. I. C. M. monte en ligne.La première quinzaine d'octobre voit changer la physionomie de la grande offensive; ce n'est plus l'attaque sur un grand front, ce sont des actions locales; on réduit des positions qui donnent à l'ennemi un trop grand avantage; l'ennemi riposte, on attaque à nouveau, il contre-attaque, ce ne sont que combats incessamment renouvelés. Dans ce secteur où la Brigade arrive, il s'agit notamment de reprendre aux Allemands une tranchée dont ils viennent de s'empa-

rer. Le R. I. C. M. est en secteur : c'est le 4° Mixte qui exé- cutera l'opération. Elle est fixée pour le 10 octobre. Dans le 4° Mixte les deux bataillons de Tirailleurs ont seuls attaqué le 25 septembre : à son tour le Bataillon de Zouaves marchera.

Ce jour-là on vit le Bataillon de Zouaves à l'œuvre; lancé contre des défenses infranchissables il montrait du moins que lui aussi savait mourir.

A 16 heures, le 10 octobre, le signal de l'attaque est donné. Les Zouaves se précipitent hors de leurs tranchées; ils s'élancent au pas gymnastique, en chantant. Tel ce sergent Petit, cet entraîneur d'hommes, qui exalte ses zouaves, en leur criant pendant la charge : « Hardi ! les gars. En avant ! les Zouaves. On les tient !. » ; chante entre deux encouragements, et finalement, frappé au côté par une balle de mitrailleuse, meurt en clamant : « J'ai fait mon devoir, adieu ! vengez-moi !. » Que dire aussi de ce Zouave Mollet qui, atrocement blessé, incapable de se soutenir, tombant au fond d'un boyau, hurle à ses camarades ces paroles dont frémissent les âmes que tant d'horreurs sublimes n'ont pas trempées : « Passez sur moi 1. Passez sur moi, mais n'arrêtez pas le mouvement 1. »

Le journal de marche du 4° Régiment Mixte dit ceci � « Les Zouaves firent magnifiquement leur devoir, leurs .vagues d'assaut, malgré un tir meurtrier de mitrailleuses, vinrent s'abîmer dans le réseau de fil de fer qui protégeait la tranchée occupée. » ,

Le Capitaine Montet, le Sous-Lieutenant Villeneuve et 35 Zouaves furent tués; 150 furent blessés,


Le 13 octobre, le Régiment en entier montait en secteur et relevait le Régiment d'Infanterie Coloniale. Dans la nuit du 13 au 19, le Régiment d'Infanterie Coloniale remontait à son tour. Ainsi jusqn au 19 décembre, les deux Corps de la Brigade alternèrent dans les tranchées du Double-Crassier. Ces brefs séjours étaient extrêmement pénibles. Le Double-Crassier s'avançait profondément dans les lignes, dominant toutes les tranchées et tous les ouvrages français; l'une de ses branches appartenait en grande partie à l'ennemi; elle était émaillée de postes qui harcelaient nos tranchées et nos boyaux. Le 19 décembre, le 4° Régiment Mixte en quittant le secteur compte 2 officiers tués et 52 blessés; 78 hommes de troupe tués, 315 blessés, 39 disparus.

*** On l'embarque en autos, on lui donne quelques jours de répit, on le dirige sur la Belgique; et le 28 décembre, le bataillon de Zouaves entre en secteur devant Nieuport.

Trois mois et demi, alternant toujours en ligne avec le Régiment Colonial du Maroc, le Régiment restera dans cette région de Nieuport. Son secteur, en avant et à proximité de la petite ville, est celui de Lombaertzyde-Passchendaele.

A nouveau, c'est le terrain marécageux, inhospitalier des Flandres. Comme tout déblai est à peu près impossible, on a surélevé les travaux; les tranchées et les boyaux — en quelque sorte en relief — sont construits en gabionnade et en sacs à terre. Abris précaires, aisément repérés. L'ennemi manifeste là une activité à peu près incessante. Les communiqués annoncent presque chaque jour : «Action de l'artillerie ennemie dans le secteur de Lombaertzyde - Passchendae'e. » Coups-de mains, bombardements (particulièrement intenses h. 24 janvier 1916 et le 22 février), spécialement de minen concentrés sur nos points les plus sensibles.

Ainsi, le Régiment, sans prononcer d'attaque, en manifestant seulement sa ténacité, son énergie, sa crânerie, perd 160 hommes, dont 31 sont tués, et parmi lesquels on compte 3 officiers tués et 3 blessés.

Ces citations superbes valent d'être reproduites : Caporal Trebulle Sylva, Ferdinand, Médaille militaire : « Excellent caporal qui s'est toujours fait remarquer par « son sang-froid, son allant et sa crânerie. Le 24 janvier « 1916, au cours d'un violent bombardement, a fait l'ad-


« miration de tous par son calme et son énergie et son « mépris du danger. Blessé très grièvement, a quitté- ses « hommes en leur donnant des paroles d'encouragement « et en leur disant : Ça ne fait rien du tout; c'est pour la « France !. »

Caporal Ammar ben Mohamed Seghir, Médaille militaire : « Excellent Tirailleur, d'un courage à toute épreuve.

- « Déjà blessé deux fois au cours de la campagne, le 10 jan-

« vier et le 25 avril 1915. Le 22 février 1916, pendant un « violent bombardement de nos. tranchées, au cours du« quel il fut de nouveau grièvement blessé, a fait preuve « d'une superbe énergie en domptant sa douleur et en « encourageant ses hommes à résister vigoureusement. »

.Sous-Lieutenant Hugonnet Jean-Louis. Citation à POrdrè de l'Armée : « Jeune officier plein d'allant et de bravoure.

« Le 22 février, au cours d'un violent bombardement de « nos tranchées de première ligne a fait preuve du plus « grand mépris du danger en se jetant dans un poste « avancé particulièrement bombardé, où, par son sang« froid, son attitude calme et énergique, il a exalté le moi.

« ral de sa troupe. A été tué d'une balle au front au mo« ment où, d'un coup de fusili il venait d'abattre un Alle« maand dont il avait aperçu la tête au-dessus du para- « pet. »

.** Le 28 janvier 1916, le Commandant Vernois, du 40 Zouaves, nommé Lieutenant-Colonel, avait pris le commandement du 40 Régiment Mixte, le Lieutenant-Colonel Levêque ayant été appelé à la tête du 1420 Régiment d'Infanterie. Exercé, superbe à l'assaut, rivé au sol lorsqu'il s'agit de tenir, prêt partout aux ultimes sacrifices, et, toujours aux lèvres le mot héroïque, le 4° Régiment Mixte de ZouavesTirailleurs est jugé digne des plus grandes épreuves: Pourvu de son chef définitif, il va subir l'épreuve définitive.

Telle l'arme conçue lentement, minutieusement achevée, est soumise, entre les mains de l'artisan à qui on la destine, à la trempe qui va la rendre impérissable.


L'EPREUVE

VERDUN - Juin, Juillet, Août 1916

Le kronprinz d'Allemagne avait formé le gigantesque projet de prendre Verdun. �

On savait que les Alliés, faisant converger tous leurs efforts, préparaient une offensive qui devait simultanément se déchaîner sur tous les fronts. L'Etat-Major ennemi décida de dérober à notre Commandement l'initiative du combat, sans lui laisser le choix de la date ni du lieu.

Verdun fut choisi.

Verdun pris, c'était l'armée française enfoncée, tout le front de l'Est bouleversé, la route de Paris ouverte; c'était un coup de fouet au moral anémié de l'Allemagne, et surtout le coup fatal au moral de toute la France, l'affolement dans la capitale; c'était la possibilité d'une paix séparée à brève échéance, et la certitude de la victoire; c'étaient alors. les conditions écrasantes !

A la vérité, ce furent les pages sublimes de l'histoire de cette armée française qui, seule parmi les alliées, supporta cette épreuve de dix mois. Et ce furent la faillite du militarisme prussien et le tombeau de l'armée allemande.

L'entreprise ne paraissait pas être une folie présomptueuse. Certes, la forteresse pouvait être redoutable;- mais bien des secteurs y étaient tenus par des régiments territoriaux; les meilleures Divisions françaises étaient retenues en Champagne, en Artois, en Belgique où des incendies locaux s'allumaient sans cesse; on pourrait, en allant vite, tirer tout le profit de la surprise; on arriverait rapidement à commander la Meuse, toutes les sorties de Verdun vers le Nord et vers l'Est, la voie ferrée, la route de Bar-leDuc.

Fin février — tandis que l'on s'imaginait qu'aucune affaire d'envergure ne put être entamée avant le printemps


— l'attaque se déclencha comme une tempête et dès les premiers jours, la défense de Verdun chancela.

Les Allemands, en une semaine, réalisèrent des progrès inquiétants; puis, ainsi qu'il arriva au cours de cette guerre à chaque, heure solennelle, l'esprit de sacrifice cristallisa les rangs des Divisions françaises appelées au secours;on mourut, mais on tint bon.

Le 27 mai, alors que la bataille faisait rage depuis trois mois, sonna l'heure du 4° Régiment Mixte de Zouaves-Tirailleurs.

Il avait été, le 17 avril, enlevé en autos de la région de Nieuport; puis" après une période d'instruction de trois semaines dans la région de Dunkerque, il avait, deux semaines durant, au camp de Crèvecœur, dans l'Oise, fourni un entraînement intensif, étudiant dans des manœuvres de régiment et de Division, les leçons des premiers mois de Verdun.

Le 27 mai, le régiment débarque de chemin de fer *à Mussey, dans la Meuse; par petites étapes, il gagne Dombasle; le 5 juin, il bivouaque au bois Saint-Pierre; il est là, au seuil de la fournaise.

L'heure est très grave. La France a réussi à fixer l'ennemi et l'ennemi redouble de rage. On combat pied à pied.

On livre un assaut pour gagner un pouce de terrain. Jour et nuit, c'est le grondement ininterrompu du canon; dès que le jour baisse, l'immense, embrasement de la bataille rougeoie à l'horizon du Nord et de l'Est, -que sillonnent les vastes lueurs des artilleries lourdes; les longues fusées paresseuses montent dans le ciel. On imagine tout le caractère tragique de ce champ de bataille où, sur une scène exigiie et ravagée, se joue le sort de la Patrie.

Tout à l'entour, les routes sont parcourues d'automobiles qui filent à toute allure; munitions, matériel, vivres, trains de troupes, montent vers la ville. Sur les routes adjacentes avancent les T. C. et les T. R. Les bois sont peuplés de renforts ou d'unités au repos; la voie ferrée est jalonnée de stations de ravitaillement où règne une agitation continue, et d'H. 0. E. où pénètrent en théories incessantes les petites autos sanitaires.

Successivement, du 7 au 25, les bataillons du 4° Mixte monteront en ligne. Entre la célèbre côte 304 et le Bois, d'Avocourt, ils prennent le secteur d'Esne,


Là, c'est le spectacle de la désolation et de la dévasta tion. Des boyaux à peu près inexistants, impraticables, conduisent péniblement à des emplacements sans tranchées, sans abris, sur un terrain si bouleversé que même les trous d'obus ne se distinguent pas. Au sein du bombardement qui ne prend jamais fin, on se bat presque corps- à-corps, à portée de grenades. Il pleut; la pluie persistante fait de ce séjour argileux une bourbe épaisse et profonde où il s'agit de vivre et de combattre, entourés de cadavres en putréfaction, parmi des détritus, et des ordures de toutes sortes. La soupe arrive rarement; lorsqu'elle arrive jusqu'aux premières lignes, elle est froide, souillée, immangeable. La maladie s'insinue dans les rangs de ces braves dont les corps sont déprimés par un tel régime.

Les évacuations deviennent nombreuses : l'embarras gastrique, la diarrhée, la gelure des pieds font de véritables ravages. Sous le manteau de plomb que déploie le ciel gris et humide de cette fin de juin, dans cette atmosphère déprimante, au long de cette vallée tragique du Ravin de la Mort, des fantômes casqués, masque en sautoir, ployés sur le bâton qui tâte les trous d'obus où on s'enlise, vont et viennent en hâte. C'est le poseur de lignes téléphoniques qui cherche la rupture d'un fil; c'est un agent de liaison qui porte un ordre urgenl, c'est une équipe de brancardiers qui ploie sous son glorieux fardeau, c'est un ravitailleur encore que les autres là-haut attendent avec tant d'impatience.

Qui dira, comme il convient, la grande pitié de ces isolés qui vont ainsi, sous la menace imminente de la camarde !

Le cycliste Boulant vient de porter un pli à la Brigade; au carrefour de l'Eglise, il tombe frappé par un obus. Il trouve la force de se relever; il se traîne jusqu'au poste de secours voisin; de sa main valide il soutient son bras déchiqueté. et le papier qui atteste sa mission accomplie.

Fi de la douleur ! il n'a qu'une pensée. Et, tandis que le médecin panse l'horrible plaie : « Rendez l'enveloppe au Colonel, dit-il, le pli a bien été remis. » Quelques jours plus tard, Bouland succombait aux suites de sa mutilation.

Le ruban jaune et vert était venu, à son lit de mort, consacrer la grandeur d'âme de ce brave.

Et ainsi de bien d'autres dont nous échappent les noms héroïques.


Enfin, le 25, le dernier bataillon est relevé. Le régiment va se reposer quinze jours, et le 11 juillet il vient reprendre dans son ancien secteur son rôle de sacrifice.

Le temps n'a pus changé, l'épreuve est restée la même.

Voire, elle s'aggrave de plusieurs attaques importantes de l'ennemi qui charge derrière les liquides enflammés, après des préparations infernales d'artillerie. Le 4° Mixte, dont la seule vaillance résiste à toutes les infortunes, fait de toutes ces tentatives autant d'échecs.

Le 22 juillet, le Régiment compte : tués : 5 officiers, 99 hommes de troupe; blessés : 9 officiers, 584 hommes de troupe; soit 667 hommes hors de combat pour une période de secteur d'un mois.

A On le relève pour seize jours.

Le 7 août, de Sermaize où il se ressaisissait, le régiment est embarqué pour Verdun; le 8 il entre dans le secteur de

combat de Fleury où la bataille bat son plein.

L'ennemi occupe le village de Fleury et toutes les crêtes environnantes. Il a pris pied dans le Ravin des Vignes et s'avance sur la côte de Froideterre. Ses premières lignes sont déjà au-delà de l'ouvrage de Thiaumont.

Mais nos troupes parviennent à le fixer. Une réaction, à laquelle seront employées une Division et une Brigade, va se prononcer sur la ligne Thiaumont-Fleury .avec, pour objectifs, l'ouvrage de Thiaumont. le village de Fleury et le plateau qui l'environne. Elle agira lentement, grignotera les gains allemands, jusqu'à l'instant décisif où, plus près de ses buts, elle livrera aux deux ailes des assauts opiniâtres. -

Le temps presse; dès le 8, le régiment entre en secteur.

Il vient prendre sa place entre la 31° Division, qui, à l'aile gauche, a pour objectif Thiaumont, et le R. 1. C. M. qui.

à l'aile droite, fait face à Fleury. Le Bataillon de Zouaves, qui est en tête, a sa gauche vers le Ravin des Vignes et sa droite à 200 mètres du village. Les bataillons de Tirailleurs sont en réserve.

Le 9, les trois bataillons sont alertés. Le mouvement s'entame. Le Bataillon de Zouaves, en liaison avec la 31° Divisios progresse avec elle, avance d'une centaine de mètres et vient occuper les abords du Ravin des Vignes. D'autre part, vers Fleury, le Régiment Colonial du Maroc au prijç


de vigoureux combats à la grenade, se rapproche du village. Chaque jour il menacera de plus près ses lisières. La Compagnie de droite du Bataillon de Zouaves, de son côté, renforcée par la 210 Compagnie de Tiraillleurs, a pris contact avec les éléments ennemis sur les pentes du pla- teau.

La soif ardente est une souffrance véritable, et il n'y a pas la moindre source à proximité; les ravitaillements arrivent péniblement sous les bombardements par 105, 150 et 210 qui ne laissent aucune trêve. Aucune épreuve ne manquera sur ce terrain dont le seul spectacle amollirait les courages les mieux trempés.

Malgré tout, une activité fiévreuse règne parmi toutes ces unités. On avance insensiblement, pied à pied, ainsi qu'il est prévu; on s'agrippe au terrain; au fur et à mesure qu'on l'occupe, on s'efforce de l'organiser pour y reprendre haleine, posément, derrière un semblant d'abri, et pour le défendre s'il le faut. En effet, l'ennemi réagit par des bombardements avec des pièces de tous calibres, à coup aussi de contre-attaques renouvelées et infructueuses sur le Ravin des Vignes.

Cependant, le Bataillon Rothenflue (le 1° de Tirailleurs) vient relever les Zouaves. Sa mission reste la même, nettement offensive; il s'agit de prendre pied sur le plateau même, et d'atteindre, là-haut, la route qui relie Fleury et Thiaumont.

Enfin, le 18 août, l'attaque générale se déclenche sur tout le front de la Division. Ces troupes soumises depuis neuf jours à des combats quotidiens, s'enlèvent avec l'entrain et la légèreté de troupes fraîches. L'affaire est superbement menée. Le R. I. C. M. s'empare du village de Fleury; le 4° Régiment Mixte qui a suivi avec le même élan, prend pied sur le plateau.

Au cours du séjour en secteur, les pertes ont été élevées : 5 officiers, 97 hommes de troupe ont été tués; 8 officiers, 373 hommes de troupe ont été blessés.

A Mais le régiment, depuis son entrée dans la fournaise de Verdun, a donné toute la mesure de sa valeur guerrière.

Trempé à l'épreuve multiple de la fatigue, des privations, de la soif, de la maladie, des intempéries, des bombarde-


ments écrasants, et de l'assaut qu'on exige en fin de tout et malgré tout, il a prouvé qu'il savait tenir et conquérir.

Deux jours après le succès de Fleury, on l'emmène vers l'arrière; pendant deux mois, il va s'entraîner comme un athlète. Dès qu'il sera en forme, il trouvera l'occasien de manifester dans toute son ampleur son ardeur au combat; on le lancera sur Douaumont qui consacre les réputations glorieuses !


LA CONSECRATION IE VERDUN (suite) - 21 au 3o Octobre 1916j

L'armée allemande s'est acharnée sur Verdun au prix d'hécatombes légendaires : on ne représentera plus la forteresse fatidique que comme le charnier des troupes du kronprinz. En sept mois, elle a réalisé une avance de neuf kilomètres autour de ce qu'elle convoite; elle a pris des ouvrages fortifiés, dont certains forts importants; mais elle n'a pas pris Verdun 1 D'autre part, lés armées franco-anglaises, lancées sur le front de l'Artois et de la Picardie, se battent victorieusement, faisant chaque jour de nouveaux progrès, reprenant des vlUages, écrasant l'adversaire et capturant un matériel nombreux. - j Autour de Verdun, par suite des prélèvements qui ont été effectués pour le front harcelé de la Somme, l'ennemi semble avoir perdu sa vigueur offensive. C'est alors que le commandement français confie au Général Mangin la mission de donner le coup de massue qui le ramènera à son point de départ.

Dès le début, la grosse entreprise sera la reprise du fort de Douaumont. La 38° Division d'Infanterie s'y immortalisera toute entière. Le 4° Régiment Mixte devra s'emparer du village célèbre.

Longtemps à l'avance, l'opération sera préparée, étudiée, réglée jusque dans les derniers détails qui se puissent prévoir. Le 4° Mixte est au repos près de Stainville. A proximité des campements de chaque bataillon on a fait le choix de terrains qui se rapprochent le"*plus -possible du futur terrain d'attaque. Un décor représentant le futur champ d'action du régiment a été aménagé dans un vaste champ de manœuvre. Tous les obstacles y sont figurés. On répète chaque jour, méthodiquement, soucieux de ne rien laisser au hasard, envisageant toutes les hypothèses. Tous


les spécialistes, chacun dans leur sphère particulière, se rompent à l'exercice de leurs fonctions. Chacun s'applique, sur ce théàtre de préparation, à posséder à fond son rôle et à s'y mouvoir aisément.

Dans la première quinzaine d'octobre, tous les officiers et tous les chefs de sections sont transportés en autos à Verdun, où se fait alors une reconnaissance minutieuse du terrain d'attaque authentique. Non seulement chacun répète exactement et fixe dans sa mémoire l'objectif qu'il devra atteindre, mais encore visite l'emplacement qu'il occupera avant le départ, les cheminements et les boyaux qui y conduisent.

Tout est prévu. Des plans d'engagement détaillés fixant jusqu'à l'horaire, établis à tous les échelons du Commandement, déterminant la mission stricte de chacun, sont distribués.

Le grand jour approche enfin. Le 21 octobre, le régiment est transporté en autobus à Verdun. Il passe la nuit dans la citadelle, où l'on touche le complément de munitions, de matériel et de vivres; puis, dans l'après-midi du 22, pénétrant dans la zone vive, il gagne ses abris vers Froideterre.

L'action se dérdule comme le Lieutenant-Colonel Vernois qui dirige les opérations l'avait imaginée, et le rapport qui suit, sobre bulletin de victoire, mieux que le récit le plus éloquent montre la mission assignée au régiment, les dispositions pratiques choisies par les chefs à tous les échelons, les obstacles divers que la troupe vaillante eut à surmonter et mettra en relief ces efforts obscurs du corps et de l'esprit dont la coordination aboutit à une magnifiquepage d'histoire.

RAPPORT du Lieutenant-Colonel Vernois, commandant le 40 Régiment Mixte de Zouaves-Tirailleurs : 1° Mission. — Dans l'attaque exécutée le 24 octobre, la mission du 4° Régiment Mixte de Zouaves-Tirailleurs (Régiment de gauche de la Brigade Marocaine) était de s'emparer de toutes les organisations défensives de la crête Thiaumont - village de Douaumont, en deux bonds.

Le premier bond devait conduire le régiment sur une première position définie par la Batterie F., le retranchement S, et le sommet de la crête entre les ravins de la Dame et de la Couleuvre, dans le voisinage de la tranchée


Grenaux. Le deuxième bond devait amener le régiment à son objectif, lisière Nord du village de Douaumont.

Le 4° Régiment Mixte était encadré à droite par le Régiment Colonial (objectif Fort de Douaumont), à gauche par le 4° Zouaves de Marche (objectif : Tranchée de Prusse sur la pente Nord du Ravin de la Couleuvre). Le. front donné au régiment atteignait environ 500 mètres.

II0 Conception de la manœuvre. — Le Lieutenant-Colonel commandant le 4° Régiment Mixte disposait pour l'exécution de sa mission :1°) de deux bataillons de son régiment (6° Bataillon de Tirailleurs - .6° Bataillon de Zouaves) — le 3° Bataillon (1° Bataillon de Tirailleurs) étant en réserve à la disposition du Général commandant la 38° D. I.; 2°) d'un peloton de canons de 37; 3°) d'une Compagnie Sénégalaise; 4°) d'une demi-section d'appareils Schilt.

Ayant à enlever deux objectifs successifs qui paraissaient présenter les mêmes difficultés, il prit la décision de confier chaque mission à un bataillon, réservant à un bataillon indigène, dont l'élan au cours d'un assaut est remarquable, l'enlèvement du premier objectif, et confiant au Bataillon de Zouaves la conquète du 2° objectjf qui semblait! devoir exiger remploi d'une troupe plus manœuvrière.

111° Dispositif adopté. — Le dispositif adopté fut le suivant : Bataillons disposés en profondeur, le 6° Bataillon de Tirailleurs en tête, chaque bataillon en colonne double, les compagnies de mitrailleuses échelonnant leurs sections sur les flancs, avec d'autres sections de mitrailleuses en réservé. Les sections du canon de 37 ayant pour mission de prendre, au cours de la marche, des positions successives destinées à appuyer la progression de l'infanterie, en prenant sous leur feu les mitrailleuses ennemies qui pourraient se dévoiler dans les divers ouvrages de la crête de Thiaumont-Douaumont.

La Compagnie Sénégalaise fut utilisée : 1°) à renforcer dans les deux bataillons les groupes de nettoyeurs;2°) à assurer la garde des tranchées de départ au moyen de deux sections et demie renforcées de trois mitrailleuses de position.

(4* Mixte), feuille 3


Les appareils Schilt furent employés pour le nettoyage des principales organisations défensives de la crête Thiaumont-Douaumont (ouvrage de Thiaumont, abri de Wagner, village de Douaumont). Les équipes marchaient avec les fractions constituées, chargées du nettoyage de ces ouvrages, et devaient ensuite en former la garnison. (Une section de Tirailleurs tunisiens pour l'ouvrage de Thiaujmont. Après la conquête du premier objectif, le 6° Bataillon de Tirailleurs devait être renforcé plus tard par le gros de la Compagnie Sénégalaise, avec ses trois équipes de mitrailleuses de position.

De cette idée découleront les ordres qui furent donnés aux troupes du 4° Régiment Mixte en vue de l'attaque.

Mise en place des éléments pour l'attaque. — Le 22 octobre au soir, le 6° Bataillon de Tirailleurs venait prendre place en vue de l'attaque dans la parallèle P. 1 et ses abords immédiats.

Le 23 octobre, le 6° Btaillon de Zouaves, à son tour, prenait place dans la parallèle P. 2, ainsi que les autres troupes chargées d'accompagner et d'aider les deux bataillons dans leur progression. Suivant les ordres donnés, le Lieutenant-Colonel installait son poste de commandement à P.

C. 119.

Dans les nuits qui précédèrent l'attaque, les bataillons occupant les parallèles de départ eurent à exécuter de pénibles travaux de terrassement pour remettre en état les tranchées et boyaux que la pluie faisait ébouler et que le bombardement ennemi, de plus en plus intense, bouleversait chaque jour. Ils éprouvèrent ainsi des pertes sensibles du fait de la violence du tir de contre-préparation de l'artillerie ennemie (une centaine d'hommes hors de combat par bataillon).

Ces fatigues et ces pertes n'enlevèrent rien de la belle humeur et de l'allant des troupes.

Attaque. — Le 24 octobre, à 11 h. 39', le 6° Bataillon de Tirailleurs, entraîné par son chef, le Commandant Meffrey, dont l'ardeur, l'énergie et l'esprit de décision se déployèrent en cette circonstance d'une façon si remarquable que c'est grâce à elles et à la vaillance des troupes que le succès fut assuré, s'élança d'un seul bond hors des tranchées dans le dispositif suivant : Les deux vagues d'assaut de chaque Compagnie de tête, suivies des nettoyeurs de tranchées en formation déployée


à larges intervalles, les vagues de renfort des Compagnies de tête et les sections des Compagnies de deuxième ligne en colonne d'escouade par un

Le 6° Bataillon de Tirailleurs était suivi à 150 mètres environ du 6° Bataillon de Zouaves, disposé également en colonne double, et dans chaque Compagnie les sections en colonne d'escouade par un.

Malgré les difficultés de parcours d'un terrain argileux et détrempé et bouleversé de fond en comble par les bombardements des jours précédents, ces troupes se portèrent à l'attaque d'un élan magnifique, franchissant sans arrêt le tir de barrage adverse et atteignant en quelques minutes les premières tranchées ennemies qu'elles dépassèrent, marchant sans arrêt vers l'objectif indiqué dont elles se - rendaient maîtresses à 12 h. 25'. Le Commandant Meffrey en commença aussitôt l'organisation défensive.

A 13 h. 40' le Bataillon de Zouaves franchissait à son tour la crête occupée par le 6° Bataillon de Tirailleurs, se portant d'un seul bond sur le village de Douaumont dont il s'emparait à 14 h. 45' et en assurait aussitôt l'occupation au moyen de deux Compagnies et deux sections et demie de mitrailleuses placées en avant et à une soixantaine de mètres de la lisière Nord et en liaison étroite avec le Régiment Colonial à droite et avec le 4° Régiment de Zouaves à gauche, et une Compagnie plus une section et demie de mitrailleuses en réserve à 150 mètres en arrière du village, les sections disposées de façon à flanquer les éléments de la première ligne.

Au cours de la progression, les liaisons téléphoniques et par coureurs des deux bataillons n'ont pas cessé de fonctionner avec le poste de relai du P. C. 118. En raison du brouillard la signalisation par l'optique ne put être utilisée et on n'eut pas l'occasion de se servir de la signalisation acoustique.

L'intensité du brouillard n'avait pas été une gêne très considérable dans le maintien des directions d'attaque chez les différents éléments, par suite de l'emploi, généralisé jusqu'à la section, qui avait été fait de la boussole.

Les liaisons à la vue avec les régiments voisins ont été parfaitement assurées pendant tout le cours de l'opération au moyen d'unités (sections et demi-sections) qui en avaient été spécialement chargées.

Dans cette circonstance mémorable, le 4° Régiment Mix-


te de Zouaves-Tirailleurs a déployé les superbes qualités d'attaque qui l'avaient déjà fait distinguer au cours de la campagne et a montré qu'il était resté égal en valeur aux brillants combattants qui enlevèrent La Taulette le 22 septembre 1914, qui menèrent les assauts héroïques d'avril et de mai 1915 autour d'Ypres et du Moulin de Ficheux, le 25 septembre 1915.

Il convient en effet d'insister, comme le Lieutenant-Colonel Vernois vient de l'écrire, sur ces qualités d'attaque déployées par le régiment dans des circonstances particulièrement ardues, avec un entrain que n'avait pas compromis un bombardement préalable causant par avance 200 victimes, et que n'a affaibli à aucun moment la difficulté du terrain détrempé, glissant, collant aux brodequins, grêlé d'énormes trous inondés où des malheureux s'enlisaient.

La fatigue semblait ne pas atteindre ces hommes ardents au combat. Leur désir passionné de vaincre leur donnait un tel élan qu'ils rivalisaient entre eux dans l'accomplissement de hauts faits plus brillants toujours!

Quel admirable guerrier que cet Adjudant Baylot qui, à la tête de sa section, se lance à l'assaut, et, le premier at-.

teint les positions de l'ennemi! Il se heurte à la résistance d'un certain nombre d'Allemands, terrés dans des abris à moitié éboulés. Les uns font mine de se rendre; mais der- rière eux, Baylot, dans un éclair, a perçu qu'on le. met en joue. Il se jette sur le sol, et là, avec une agilité prestigieuse, jouant de la grenade et du révolver, il sème la mort et la panique parmi ces traîtres, tue les premiers, en capture sept, puis poursuivant sa marche, atteint bientôt l'objectif qu'il organise avec un sang-froid superbe.

Et ce sergent Lucas qui est blessé au début de l'attaque, mais qui, défaillant, ne cède le commandement de sa demi-section que deux heures plus tard, sur l'ordre formel du Commandant de Compagnie et qui, arrivé au « 36 » poste de secours, repart aussitôt vers les premières lignes pour diriger une corvée de matériel qui ne trouvait pas d'autre guide.

Et ce Sous-Lieutenant Granthomme qui, apercevant sur les parapets du fort de Douaumont des mitrailleuses ennemies -en action, électrise sa poignée d'hommes, saute le premier dans le fossé de l'ouvrage, s'élance sur les pièces.

les musèle, les capture et fait 22 prisonniers. Et encore cet


Adjudant Lecorche qui, le corps troué de balles, tombe en clamant : « En avant, mes enfants!. c'est pour la France!

» Et enfin ce clairon anonyme qui, pour signaler l'avance à l'avion de la D. I. qui errait dans le brouillard, jette vers le ciel le refrain du 4° Mixte et sonne « Au Drapeau 1. »

Rendons hommage aussi à la liaison et aux téléphonistes, dont les rangs s'éclaircirent, au Zouave Gervais qui quitte Douaumont un soir pour aller en mission vers l'arrière et qui, son officier lui recommandant de se reposer et de ne rentrer que le lendemain, fait cette réponse : « Si vous devez être tué ici, je ne veux pas vous plaquer », et se retrouve à son poste au lever du jour.

Rendons hommage à ceux qui ont rempli les missions les plus humbles, à ces corvées qui mettaient une nuit entière pour un seul voyage entre le bataillon de première ligne et le bataillon de soutien; à ces Robert, ces Leroux, ces brancardiers héroïques qui relevaient inlassablement les blessés sur les pistes défoncées, à travers les barrages d'obus de gros calibres, « leur apportant avec les soins matériels, le réconfort de leur parole et de leur exemple » « tombant souvent dans l'accomplissement de leur tâche » qu'ils remplissaient avec la ferveur d'un véritable sacerdoce!

Ainsi s'accomplit cette prise définitive de Douaumont par l'armée française. Le 4° Régiment Mixte de ZouavesTirailleurs s'y révéla l'un des premiers régiments d'assaut de France.

L'événement eut dans tout le pays un immense retentissement. La journée du 24 octobre nous donnait une victoire éclatantâ; le lendemain, tous les journaux annonçaient, avec les lettres qu'ils réservaient aux triomphes : «Douaumont est repris!

Le Journal Officiel publiait bientôt après ces lignes : « Le Général commandant la Ire Armée cite à l'Ordre de l'Armée : le 4° Régiment Mixte de Zouaves-Tirailleurs. —

Le 24 octobre 1916, sous l'énergique commandement du Lieutenant-Colonel Vernois, a enlevé, d'un élan admirable, les premières tranchées allemandes, puis successivement l'ouvrage et la ferme de Thiaumont; a inscrit une page glorieuse à son histoire en s'emparant dans un irrésistible assaut du village de Douaumont. »

La destinée victorieuse du 4° Régiment Mixte ne faisait encore que s'annoncer.


Z9 VERDUN (fin) - Décembre 1916Les forts, tout autour de Verdun, sont délivrés. Il s'agit, maintenant, pour assurer leur sécurité, de forcer l'ennemi à prendre du champ. Il faut rendre à Verdun (première forteresse française, dit le Kaiser, cœur de la France, dit le Kronprinz) son imposante tranquillité.

Le 30 octobre, le 4° Régiment Mixte avait été relevé des positions qu'il venait de conquérir — relève mouvementée, telles qu'elles furent toujours autour de Verdun, errement pénible à travers un chaos bourbeux, retour tragique sous l'arrosage des canons boches vers un arrière éloigné de 20 kilomètres — et s'en était retourné dans sa zone de repos de Stainville.

Il faudra dans un avenir prochain chasser l'ennemi des observatoires de la côte du Poivre, enlever Louvemont, les Chambrettes. Les terrains de manœuvres, autour des cantonnements, sont à nouveau et différemment aménagés, figurant tout ce que les photographies d'avions ont pu donner de renseignements sur les ouvrages du terrain véritable. Tout le programme qui a présidé à la préparation de l'attaque de Douaumont est remis en œuvre pour Louvemont : plan, horaire, répétition, étude minutieuse. Et cela pendant cinq semaines.

C'est le 11 décembre que le régiment est enlevé et monte vers le secteur d'attaque. Dans la nuit du 13 au 14, le Bataillon de Zouaves y pénètre et prend position en avant des carrières d'Haudromont. La nuit suivante, le 6° Bataillon de Tirailleurs vient se placer à sa gauche. L'attaque est pour le lendemain matin.

La mission, à la suite d'une préparation confiée à un matériel puissant, est d'enfoncer les premières lignes ennemies; puis, en liaison avec le R. I. C. M. d'une part et le 8° Tirailleurs d'autre part, de pousser jusqu'à la crête Louvemont - Les Chambrettes et de s'y établir au-delà de la route qui relie ces deux points. Les deux bataillons de première ligne exécuteront l'attaque. Le 1° Bataillon de Tirailleurs (Capitaine Massé) marchera en soutien.

Le terrain à parcourir revêt une configuration très accidentée. Il est aussi très étendu (1600 mètres). Les premières lignes ennemies sont accrochées à mi-pente d'un ravin escarpé et nous dominent. La gauche du Bataillon Meffrey se trouve appuyée au ravin profond qui s'allonge jusque vers Louvemont, sensiblement dans l'axe de la direction


générale et sur lequel, tailladant le terrain, viennent s'amorcer plusieurs autres ravins presque perpendiculaires.

Le plus important est celui du Prêtre, que les bataillons auront l'un après l'autre à franchir.

Le 15 décembre, à 10 heures, l'attaque est prononcée au milieu d'un entrain unanime, en dépit du crépitement des mitrailleuses ennemies qui brusquement se révèlent au moment du départ. A nouveau se reproduit ce tableau plusieurs fois décrit. Glissant dans la boue épaisse, Zouaves et Tirailleurs, électrisés par leurs chefs ou s'électrisant les uns les autres, franchissent la zone de mort que marque, en avant de nos positions, le barrage ennemi. Mais, cette fois encore, surpris par la fougue et la maestria de l'attaque, l'adversaire ne déclenche son tir qu'après l'écoulement total des Compagnies d'assaut. Déjà elles pénètrent dans les premières tranchées allemandes que l'on nettoie prestement. Des incidents brillants se déroulent. Commz l'avance se poursuit, le Tirailleur Aïssa ben Merzouck, bondissant de la tranchée conquise, aperçoit une mitrailleuse en action qui tient en haleine un groupe de camarades. Il s'élance, à courte distance, il braque sur les servants son fusil-mitrailleur : le personnel de la pièce, suffoqué par une telle audace, commet l'imprudence d'hésiter. alors les Tirailleurs se jettent sur l'équipe et la capturent.

De tous les points de ces tranchées, des prisonniers, tantôt en file indienne, tantôt dans le plus grand désordre, et toujours dans la plus grande hâte, filent vers l'arrière où le Bataillon Massé les reçoit.Mais en tête, la crête du premier ravin perpendiculaire à l'axe de la marche est atteinte. Suivant au plus près le barrage roulant de notre artillerie, les assaillants poussent l'attaque avec une vigueur et une assurance imperturbables sur la deuxième position.

Les lignes allemandes, maintenant, sont solidement organisées, De tous côtés, les mitrailleuses qui les défendent entrent en action, semant la mort. L'instant devient critique. Une seconde d'hésitation sous cette grêle de balles, donnant à l'ennemi quelque assurance, compromettrait le succès de la journée. Mais les vétérans de Douaumont en décident autrement. Les premières vagues des Compagnies de tête, composées de grenadiers et de fusiliers-mitrailleurs d'élite, redoublent d'intrépidité. Une à une des mitrailleuses prennent la fuite; d'autres sont assaillies furieu-


sement. Un indigène de la 22° Compagnie de Tirailleurs, tombant lui seul sur un nid, massacre les servants et ramène, l'une après l'autre, deux pièces à son Commandant de Compagnie. Déjà les Tirailleurs descendent l'autre versant, lorsque le Bataillon de Zouaves se heurte sur tout son front à une vaste organisation ennemie que sa position à contre-pente a préservée de notre bombardement et que défend un personnel entêté et un matériel nombreux. Ces occupants résolus opposent une reristance opiniâtre. Le Bataillon Dhomme est retenu sur place, subit des pertes.

C'est alors, dans un bel esprit de solidarité et de camaraderie de combat, que le'Commandant Meffrey lance sur le flanc droit de l'obstacle, à l'aile gauche des Zouaves, sous les ordres du Lieutenant Jourdan quf lui a signalé le danger, deux sections de Tirailleurs. D'autre part,- les Zouaves' s'acharnent : leur Compagnie de soutien manœuvre rapidement sur la droite de l'obstacle. Une section de mitrailleuses parvient à se placer de manière à prendre d'enfilade la tranchée ennemie surttoute sa longueur. Bientôt la garnison assiégée capitule : les Zouaves font prisonniers 5 officiers, 111 hommes et s'emparent d'une dizaine de mitrailleuses.

Cet obstacle imprévu a retardé, d'une demi-heure le Bataillon de Zouaves." Il peut enfin reprendre sa marche.Pressant l'allure, il arrive bientôt sur la route Louvemont - Les Chambrettes que nos batteries ont pilonnée. Dans les abris creusés sous la voie même se trouve un important détachement ennemi. Sans même tenter de résister, domptés à l'avance, ces hommes — un chef de bataillon et 200 soldats — se rendent. Et, sans autre incident, le Bataillon Dhomme atteint son objectif, à droite du Bataillon de Tirailleurs qui a rallié le sien sans coup férir.

Aussitôt, on s'organise sur les pentes du nouveau ravin d'où se découvre vers l'avant un vaste panorama. Des-reconnaissances offensives sont envoyées vers des emplacements de batteries ennemies connus et repérés.

Vers midi, sous la protection d'un engagement puissant d'artillerie, une reconnaissance de la 23° Compagnie de Tirailleurs, commandée par le Lieutenant Jourdan, reçoit la mission d'aller détruire une batterie allemande à 600 mètres environ en avant de la position conquise. Quatre canons de 77 sont mis hors de service par les pionniers du bataillon. Les grenadiers, appuyés de deux sections, exécutent le nettoyage des abris où tout le personnel ennemi'


s'est réfugié. Sous les ordres du Sous-Lieutenant Lanterne, qui a remplacé le Lieutenant Jourdan blessé, la vaiillante petite troupe rentre sans hâte dans nos lignes, ramenant 23 prisonniers.

L'ennemi désemparé n'envoie que le lendemain des petites patrouilles peu audacieuses dont la seule mission est de reconnaître l'emplacement de nos nouvelles lignes. Son artillerie réagit à peine; nous dominons un adversaire intimidé qui se rend à l'évidence de notre supériorité.

Il gèle les jours suivants : il tombe même une neige très dense. On reste quatre jours encore sur ce morceau de France arraché à l'envahisseur, à besogner, à établir les communications avec l'arrière, à subir le froid et les intempéries. Nombreux sont les cas de gelure des pieds. Enfin, le 20 décembre, le Régiment est relevé. Il a perdu 1285 hommes, dont 2 officiers tués et 12 blessés; 69 hommes de troupe tués, 1129 blessés et 73 hommes de troupe disparus.

Ainsi, définitivement, la mission du Général Mangin est accomplie; l'ennemi est à 15 kilomètres de Verdun. En 10 mois, il a accumulé ses morts sur ce terrain dont il est chassé, il a usé le moral de ses troupes. « Grâce à tous, chefs et soldats, dit le Général Pétain, un coup formidable a été porté à la puissance militaire allemande. » La France, devant Verdun, a fait la plus belle conquête : celle de l'admiration, du resp.ect et de la reconnaissance éternelle du monde civilisé qu'elle vient de sauver.

Le 4° Régiment Mixte de Zouaves-Tirailleurs a pris une large part à cette œuvre magnifique. Reconnaissant l'importance de son dernier succès, le Général commandant la II0 Armée, le cite à l'Ordre avec le motif suivant : « Le 15 « décembre 1916, sous l'habile et énergique commande« ment du Lieutenant-Colonel Vernois, a, dans un magnifi- « que élan, enfoncé les lignes allemandes sur une profon« deur de 2 kilomètres, s'emparant malgré une vive résis« tance de l'ennemi, de trois organisations successives for« tement retranchées, capturant 1038 prisonniers dont 27 « officiers, et prenant ou détruisant 5 canons de 77, 10 ca« nons de tranchées et un nombreux matériel de guerre. »

Et le 2 janvier 1917, le Général commandant en chef décide que le « 4° Régiment Mixte de Zouaves-Tirailleurs ayant été cité deux fois à l'Ordre de l'Armée pour sa brillante éonduite devant l'ennemi, aura droit au port de la fourragère aux couleurs du ruban de la Croix de guerre. »


LA MATURITÉ 1917 L'Offensive de l'Aisne

L'hiver de 1916-1917 eut des rigueurs exceptionnelles : aucune affaire capitale ne salua la naissance de la 40 année de guerre. Dans l'Est, le front a été rétabli par la belle victoire de Mangin. Vers l'Ouest et le Nord, la Somme a été complètement libérée par l'offensive franco-anglaise de 1916; les Anglais sont devant Saint-Quentin et Lens, et non loin de Cambrai. 1917 va-t-il être l'année de la victoire?

Le 4° Régiment Mixte a été relevé du secteur de Louvemont le 20 décembre et a passé les fêtes de Noël et du Jour de l'An dans des cantonnements de repos du Barrois. Mais la 38° Division n'est pas de celles qui restent longtemps inactives. Dès le 5 janvier, le régiment part pour le camp de Gondrecourt où, malgré les intempéries d'un hiver excessif, malgré la neige qui monte quelquefois jusqu'aux genoux, et la bise qui glace les visages et les doigts, il recommence à s'entraîner. C'est là qu'il reçoit l'ordre qui prescrit à toute la Division de se porter par voie de terre vers un nouvau théâtre d'opénations, celui de l'Aisne. Alors commence, à travers une contrée pittoresque, la longue série de ces marches qui découvriront quelques semaines durant, pour la 38° Division, une face encore inconnue de la guerre. Le froid s'aggravait de jour en jour, la neige tombait en tourmente; de lourds glaçons s'attachaient aux moustaches et aux sourcils; les chevaux étaient blancs de givre. Bientôt, le verglas revêtit les routes; les hommes devaient marcher avec une attention de tous les instants, les conducteurs gelés, conduire leurs chevaux par la bride. On. arrivait parfois la nuit dans des cantonnements avec lesquels on ne faisait connaissance que le lendemain matin au moment de se remettre en route. Et pendant ces dix-neuf jours, jamais la gaieté ne se


démentit. On eût dit au contraire que cette bise glacée, soufflant sur la bonne humeur, l'attisait. Les chansons de route des Français alternaient avec ces mélopées cadencées que les indigènes entamaient souvent au départ d'une pause, pour les poursuivre jusqu'à la pause suivante, en les rythmant de leurs mains lourdes. La discipline de route était strictement observée, l'habillement impeccable; les convois s'alignaient sur la droite de la route, propres et ordonnés, sans bagages inutiles; en près de trois semaines, on n'enregistra qu'un seul accident aux voitures. De sorte que le Général, chaque fois qu'il doublait la colonne, s'arrêtait pour voir passer son 4° Mixte, et témoignait sa satisfaction.

C'est ainsi què le régiment parcourt dans leur plus grande largeur ces deux départements de la Haute-Marne et de la Marne, illustrés par tant d'anciens combats. Un des beaux régiments de France foulait les champs de bataille les grognards de Napoléon, en 1814 et, un siècle plus tard, les poilus du'Général Foch s'étaient couverts d'une gloire immortelle. C'est d'abord Vassy, où Napoléon, le 26 mars, arrivait au point du jour pour décider ce combat de Saint-Dizier qui fut sa dernière victoire; c'est Montierender, à la remarquable abbaye du XIIIe siècle, où les Cosaques, les Kalmouks et les Baskirs étaient venus répandre la terreur; c'est Brienne, témoin de l'aurore d'une éblouissante fortune militaire et témoin de son crépuscule; c'est Arcis-sur-Aube, où le 20 mars, huit heures durant, les Français avaient combattu : d'abord 7.500 contre 14.000, ensuite 13.000 contre 20.000, enfin 16.000 contre 25.000, sans céder un pouce de terrain. Ce sont encore les marais de Saint-Gond où, le 24 mars, sur 4.300 qu'ils étaient le matin, les 500 derniers soldats de Pacthod, ayant subi tout le jour les assauts de 20.000 cavaliers, avaient réussi à s'échapper; les marais de Saint-Gond dont la route, depuis 1914 est jalonnée de tombes aux cocardes tricolores; où le Général Foch, à la bataille de la Marne, culbuta cette Garde Prussienne dont l'Allemagne s'énorgueillissait.C'est Montmirail, célèbre pour l'une des plus belles victoires du plus puissant génie militaire que le monde ait connu; et c'est le monument qui commande le recueillement et le respect.

Le 4 février, dispos, entraîné par- des marches qui l'avaient mené du Barrois jusqu'en Brie, le 4° Régiment Mix-


t te arrivait sur la Marne, à Pavant, terme d'un voyage de trois semaines.

Il se remet au travail. L'instruction est reprise et les bataillons s'entraînent à nouveau à des exercices de combat.

Puis les Zouaves, à la disposition du service routier de l'avant, vont dans la zone de Barbonval se livrer à la réfection dés routes, tandis que les Tirailleurs restent pour en-

treprendre dans les bois des travaux de fascinage. Les présomptions se précisent : tout ceci marque bien l'approche d'un nouveau grand jour.

Le 27, le 4° Mixte — au complet — monte par nouvelles étapes vers le front, en arrière du II0 Corps d'Armée Colonial. C'est maintenant la vallée de l'Aisne, accidentée, animée de collines boisées et de plateaux, coupée de cours d'eau nombreux. C'est la région des Creutes, vastes grottes, anciennes champignonnières qui, suivant les besoins, sont des emplacements de combat redoutables ou dos cantonnements de repos peu séduisants.

Le régiment passe quelques jours dans le secteur d'Ailles et se regroupe ensuite à Saint-Thibaut. n L'offensive est imminente. Chaque nuit, des troupes disputent les routes aux convois automobiles et aux échelons d'artillerie; le jour elles se dérobent dans les bois. Tous les mouvements se font en grand mystère. Les emplacements de batteries sont établis depuis longtemps; les munitions, sont à pied d'œuvre, cachées à la vue des avions; aucun soupçon ne doit être donné à l'ennemi. On dut, hélas, bientôt se rendre à l'évidence : l'ennemi avait tout su.

Le 16 est le jour fixé pour l'attaque. Les armées françaises, de Coucy-le-Château à l'ouest jusqu'à l'est de Reims, doivent livrer l'assaut décisif. Elles doivent rompre le

front, déloger l'ennemi de toutes ses organisations fortifiées; exploitant le succès, transporter le combat au grand jour, et nous rendre enfin la guerre de mouvement qui décidera de notre victoire.

La 38° D. I. est rattachée au II0 Corps d'Armée Colonial qui forme la droite de la VI° Armée; la mission de ce Corps est de percer le front, d'atteindre la crête du bois d'Elva — Moulin de la Tour (ferme) au-delà de Martigny. Chavailles. Celle de la 38° Division est d'expoiter immédiatement ce succès vers Laon, sans l'aiser aux Allemands le temps de se ressaisir.


L'attaque a été déclenchée dans la pluie du petit jour. Le 4° Régiment Mixte qui ne joue pas ce premier acte, se trouve dans la coulisse immédiate, au sein de notre artillerie. Une violente canonnade a été déchaînée pendant les dernières heures de la nuit, les Corps de première ligne ont dû s'élancer à l'assaut. Le temps est détestable, mais l'enthousiasme est indescriptible. La confiance a été chauffée à blanc. Au reste c'est merveille de voir toutes prêtes tant de troupes de toutes armes. Les cavaliers sont massés prêts à sauter en selle; les avant-trains des batteries, attelés, sont prêts à être accrochés. Les canons attendent le moment d'avancer.

A 7 h. 35, le 40 Régiment Mixte reçoit l'ordre de éommencer son mouvement. Par des cheminements appropriés, il vient prendre les emplacements de première ligne d'où la 15° Division d'Infanterie Coloniale s'est élancée tout-àl'heure. Mais cette chose surprenante s'est produite : les Corps de la 15° D. I. C. n'ont pu progresserl Ils sont en arrêt devant la troisième ligne de tranchées allemandes.Alors, • brusquement, tombe parmi nos tii ailleurs et nos zouaves l'ordre d'arrêter le mouvement.

Or, comme s'ils n'avaient pas compris cette nouvelle incroyable, certains des nôtres, emportés par leur ardeur, ne peuvent être retenus. Deux Compagnies du Bataillon Meffrey, non seulement ont dépassé les anciennes lignes françaises, mais encore ont pénétré dans les lignes allemandes et sont mêlées aux troupes coloniales en plein combat. La 22° Compagnie a même accentué son avance et se trouve dans la seconde tranchée allemande, lorsque le Capitaine Ricard qui la commande est tué. Les 21° et 23° Compagnies, elles, occupent les premières lignes françaises.

Tandis que les Bataillons Jauffret et Dhomme vont occuper des abris dans le ravin de Moulins, le Bataillon Meffrey reste en ligne où il bouche le trou qui s'est formé entre des unités du Corps Colonial.

Mais la triste réalité se fait jour. Etonnés le matin de voir passer l'heure où ils devaient, franchissant le front des troupes coloniales, passer à leur tour en première ligne et progresser en talonnant l'ennemi, les Tirailleurs et les Zouaves du 4° Mixte ont bien compris que les Allemands opposaient une résistance imprévue. Cependant la


journée a passé, et aucun changement heureux n'est survenu. On pense au 25 septembre 1915.

Vers 21 heures, le Bataillon Dhomme est alerté et envoyé en première ligne relever les débris d'un bataillon sénégalais. Il tombe de la neige fondue; il fait très froid; les boyaux, éboulés, sont presque impraticables.; dans la nuit très obscure, les zouaves avancent péniblement, puis s'installent sur un terrain que nos tirs de préparation ont bouleversé. Ils restent là trois jours. Le 19 ils sont relevés, ainsi que les tirailleurs du 50 Bataillon; le 4° Régiment Mixte va stationner aux creutes de Verdun et de l'Yser.

Au cours de ces journées décevantes d'impatience et d'épreuve, le 6° Bataillon de Tirailleurs a eu une trentaine de tués — parmi lesquels le Capitaine Ricard et le SousLieutenant Crimonet — et une centaine de blessés; le 1° Bataillon de Tirailleurs quelques tués, une quarantaine de blessés.

A -

Mais à l'aile droite, l'ennemi qui occupait le petit plateau de Craonne et l'isthme d'Hurtebise a été rejeté de cette magnifique position défensive. Là, nos troupes ont effectué une avance sensible. La bataille s'y poursuit âprement : les Allemands contre-attaquent avec une extrême violence pour reprendre le terrain qui leur a été arraché.

Le régiment est alerté et se porte dans la région Poteau d'Aillies - Ferme Hurtebise.

Or, le 24 avril, un bombardement ennemi d'une intensité peu commune se déverse sur tout le secteur; de nombreux avions nous survolent; tout fait présager que la bataille va entrer dans une nouvelle passe.

Le 25, en effet, à 5 h. 15, après une préparation d'artillerie brève, mais massive, sur nos lignes, précédées de stosstruppen, sept Compagnies de troupes d'élite appartenant à la Garde prussienne s'élancent à l'assaut de nos positions autour de la Ferme d'Hurtebise et du monument commémoratif de la victoire de Craonne de 1814.

Le 6° Bataillon de Tirailleurs est déployé sur un front de 900 mètres, du boyau Salatz au monument, en liaison à sa gauche avec le Bataillon Rafignac du 4° Régiment de Marche de Zouaves.

Le choc, extrêmement rude, des premiers bataillons assaillants, est reçu par la 21° Compagnie. Ebranlée par la


préparation, puis virtuellement submergée par les vagues d'assaut qui suivent au plus près un barrage roulant, cette Compagnie héroïque tient pourtant. Le mot d'ordre est : « tenir coûte que coûte ». Rapidement, par sections, des îlots de résistance sont formés, contraignant l'ennemi à marquer un temps d'arrêt et lui font payer cher son avance. C'est le combat corps-à-corps, à coups de grenades et de révolver, une lutte furieuse où chacun a fait le sacrifice de sa vie. Puis, l'attaque gagne les positions de la 23° Compagnie, qui se sectionne en d'autres centres de résistance.

Pied à pied, fiévreusement, on dispute le terrain. On sait que le bataillon de réserve du Régiment de Zouaves prépare en hâte une rude contre-attaque; jusqu'à ce qu'il vienne se jeter dans la mêlée, il faut tenir, lutter, mourir, gagner du temps, faire payer sa vie. Déjà plusieurs heures ont passé et l'ennemi furieux s'essouffle, mais s'entête.

Parmi les nôtres, les traits d'héroïsme sont sans nombre.

Il faudrait pouvoir citer tous les superbes combattants de ce bataillon enthousiaste. Vers la gauche, le Sous-Lieutenant Vadon et les sergents Bonrepaux et Marcault forment un îlot de résistance, une section en tout, qui brise les efforts de l'ennemi déjà depuis plus d'une heure. Le caporal Izard dirige l'équipe de grenadiers; debout sur le parapet de la tranchée, secondé par le brave tirailleur Saad, il fait lui-même un barrage infranchissable. Cependant les grenades s'épuisent; comme elles sont près de manquer, on en demande deux caisses à la section du 4° Zouaves la plus voisine. La lutte continue et s'acharne. Furieux de ne pouvoir réduire un poste que défend une poignée d'hommes, l'ennemi l'accable d'un bombardement de torpilles.

Le sergent Bonrepaux est blessé, le caporal Izard est blessé, 3 tirailleurs sont tués. Enfin à 7 h. 30, ayant été contenu plus de deux heures, l'ennemi progressant au prix de nouvelles pertes, de trou d'obus en trou d'obus, oblige les débris de la section Vadon — 8 hommes! — à abandonner le poste retourné de fond en comble. Protégé par l'intrépide tirailleur Guidot, qui fait merveille à la grenade et au fusil, le repli s'effectue vers le monument; là ces braves, inlassables, vont continuer à se battre dans les rangs des Zouaves. Le sergent Marcault est blessé..

L'assaut gagne la tranchée de soutien de la 23° Compagnie. C'est la dernière étape que l'on puisse permettre avant l'arrivée de la contre-attaque, à tout endroit l'on se


dévoue : officiers et tirailleurs sont héroïques dans ces tragiques circonstances. Là, le Sous-Lieutenant Bonnemaison se défend pied à pied, à coups de grenades, de fusil et de F. M. Un noyau de résistance se forme. Armé d'un F. M. le tirailleur Tarbouch interdit toute avance à l'ennemi, tandis que le sergent Allirol fait un barrage serré de grenades. Des tirailleurs tombent l'un après l'autre. A son tour le sergent est frappé d'une balle en plein front et tombe. Mais déjà les Zouaves accourent, ils bondissent, - foncent sur l'assaillant épuisé, le rejettent de la ferme Hurtebise, des abords du monument, du boyau Prûm où déjà il s'infiltrait, reprennent tout le terrain perdu. En fin de journée, lorsque le 116° Régiment d'Infanterie vient relever Zouaves et Tirailleurs, la continuité du front est partout rétablie.

Ainsi, grâce au dévouement, digne de l'antique, de. ce beau 6° Bataillon du 4° Régiment Mixte, la journée du 24 avril fut, pour les Allemands, un échec coûteux et une dure leçon. Le terrain qu'ils ont prétendu reprendre est jonché des cadavres de leurs soldats d'élite. Mais ce com» bat d'Hurtebise a coûté au 6° Bataillon qui s'y est sacrifié : 18 tués, 106 blessés dont 3 officiers; 186 disparus dont 4 officiers.

Le Commandant Meffrey qui fut l'âme de la résistance y conquit son grade d'Officier de la Légion d'honneur.

Depuis le 16 avril, premier jour de l'offensive, les pertes du régiment se chiffrent ainsi : 2 officiers et 53 hommes de troupe tués; 8 officiers et 428 hommes de troupe blessés; 4 officiers et 261 hommes de troupe disparus.

A Le Bataillon Meffrey, décimé, est relevé le 28 avril et va se reconstituer à Cramaille, dans la région de Fère-en-Tardenois, pendant que les Bataillons Jauffret et Dhomme continuent de tenir sur la crête du Chemin des Dames. Le 23 mai, le régiment est regroupé au Sud de l'Aisne dans les petits villages de Serre, Barbonval, Revillon. Le jour, les tirailleurs et les zouaves se réentraînent. La nuit, sous d'incessants bombardements par avions, ce ne sont q l'alertes, éparpillements dans les boyaux-abris, réveils et attentes sinistres.

Enfin, le 14 Juin, le régiment remonte en secteur dans cette zône du Chemin-des-Dames — Ailles, Paisy, Hurtebise — où il a été si éprouvé 2 mois auparavant. L'enne-


mi, au reste, prépare une vigoureuse attaque sur tout ce front. Il sonde le terrain. Il multiplie ses coups de main, en particulier devant le secteur du 6ème Bataillon de Zouaves. Déjà le 16, un détachement de stosstruppen, réussit à pénétrer dans nos postes avancés. Mais on faisait bonne garde. Le caporal Fontaine, s'est élancé à la tête d'un groupe de Zouaves, et, quoique blessé, a réussi, après un combat corps-à-corps à l'en chasser.

Tous ces jours, d'ailleurs, les Zouaves font merveille.

L'ennemi se heurte, à chaque tentative, à des combattants résolus tels que le sergent Bouchain, le caporal Boulenc, le zouave Forges. Dans la nuit du 22 au 23, une vingtaine d'hommes appartenant à une stosstruppe, menés par un officier et un sous-officier, à la suite d'une préparation rapide, mais violente, de grenades à ailettes, tous en bras de chemise, sans coiffures, armés de révolvers et leurs ceintures garnies de grenades à manches, s'élancent sur nos lignes. Cette fois encore, la garde est bien faite. L'expédition est reçue par une grêle de balles. La lutte s'engage .entre le détachement de stosstruppe et les deux guetteurs de la tranchée : les zouaves Duviau et Viron. Viron saisi à la gorge est terrassé par l'officier et le sous-officier boches.

Duviau déployant une intrépédité remarquable, se bat avec acharnement; de sbn F. M. il étend à ses pieds l'officier, puis le sous-officier, et dégage son camarade. Ce corps-àcorps furieux a permis à nos grenadiers d'accourir; les zouaves Gauthier, Beau, Tresarieu, Theil, Bernet, en particuliers luttent comme des démons. Enfin l'assaillant est rejeté hors de la tranchée. Le F. M. Duviau recevra la Médaille militaire et son pourvoyeur sera cité à l'Ordre.

A plusieurs reprises, l'ennemi, préparant de nouvelles reconnaissances, déverse sur nos tranchées une pluie de grenades et de bombes à ailettes; nos énergiques ripostes par de violents tirs de barrages de V. B. sur ses lignes le musèlent et arrêtent toutes ses tentatives. C'est au cours de l'un de ces petits bombardements indéfiniment répétés que le Capitaine Chabodie, cruellement blessé, mourut, montrant une dernière fois le plus bel héroïsme.

« Brillant officier, dit sa dernière citation, superbe d'en« train et de bravoure, adoré de ses tirailleurs Au cours « d'un combat de nuit, pendant qu'il dirigeait la lutte dans « une tranchée de première ligne, est tombé mortellement « blessé, a fait preuve, avant de mourir, d'une fermeté (4e Mixte), feuille 4


« d'âme magnifique, réconfortant par ses paroles ses ti« railleurs accourus pour le soutenir. »

Le régiment est relevé dans la nuit du 28 au 29 juin, puis se porte dans les cantonnements de Launoy, Droisy, Courdoux, d'où, en autos-camions, il gagne Montreuil-aux-Lions près Château-Thierry.

Là, du 7 au 27 juillet, à la disposition du Groupe des Armées du Nord, il se réorgnise et reprend l'instruction.

C'est au cours de ce séjour et à l'occasion de la Fête Nationale, qu'une délégation est formée pour représenter le régiment à Paris, à la revue du 14 Juillet. Le Drapeau et sa garde, et une section composée de soldats d'élite vont donc participer à cette fête où la population parisienne fait un triomphe aux étendards des plus valeureux régiments de l'armée française.

Le 27 juillet, le régiment est dirigé vers Crépy-en-ValOis; le 30, il s'embarque en autos pour Beaulieu-les-Fontaines (Camp de Lassigny) et là, jusqu'au 19 août, il se livre à des exercices de combat, manœuvres de Régiment et de Division. Le 21, il remonte vers l'Aisne, dans le secteur au Nord de Vailly, il relève la 43° D. I.

Donc, le 25 août, le Batailon J auffret prend les lignes aux « Grands Riez », et le 26, le Bataillon Dhomme s'installe au lieu dit « Le Projecteur ». Le secteur est tranquille, zouaves et tirailleurs y exécutent paisiblement des travaux, lorsqu'un incident très dramatique vient l'animer deux jours.

Les faits valent d'être consignés; certains de ceux qui les ont vécus volontairement ont, ce jour ou depuis, ici ou ailleurs, trouvé la mort qu'ils n'ont jamais fuie. Honneur à ces braves!

Le 6 septembre, à 6 h. 15 du matin, comme il survolait nos lignes, un avion français est assailli par deux avions boches qui appartiennent à l'escadrille de chasse d'un as allemand. Il accepte le combat. Der. mitrailleuses crépitent dans l'air; de part et d'autre, on suit le duel avec passion.

Et puis soudain, le Français pique de l'aile : en un instant il vient s'écraser sur le plateau des Roche entre les tranchées du 4° Mixte et les tranchées allemandes, à 300 mètres des premières, à 100 mètres à peine de l'ennemi.

Aussitôt, d'un même élan, le caporal Chritofari, le caporal Bachelier, les zouaves Mainière et Dubourg, de la 21° Compagnie du Bataillon Dhomme, bondissent de la sape


qu'ils occupent, et s'élancent sur le terrain. Mais comme bien l'on pense, froidement, les fusils et les mitrailleuses d'en face ouvrent sur eux un feu nourri; Dubourg reçoit une balle en pleine tête; les autres, rampent sur le sol. Par surcroît de malheur l'avion détruit est tombé avec ses victimes de l'autre côté d'un ancien réseau boche large de 4 mètres. Dès que nos zouaves, qui ne craignent pas de s'infiltrer parmi les broussailles de fil barbelé, font un mouvement, ils essuient une salve. Ils insistent : des balles sifflent à leurs oreilles. Ils aperçoivent alors, près de l'appareil, étendu sur le sol, inerte, l'un des deux aviateurs, l'of-

ficier. Ils l'appellent, l'invitant à se traîner jusqu'à eux.

Mais d'une voix très faible, mourante, le malheureux leur fait comprendre que le pilote a été tué là-haut en plein ciel, que sa mort fut la cause de la chute, et que lui-même, brisé, mutilé est dans l'incapacité de se mouvoir. Pourtant, il vit — c'est là ce qui importe. Les sauveteurs l'exhortent à patienter, à se traîner s'il le peut jusqu'au prochain trou d'obus, et là à attendre que la nuit tombante leur permette de venir le chercher.

Ils rentrent, et tout le jour les Allemands arrosent l'appareil de leurs perfides bombes à ailettes, cherchent à atteindre les corps des victimes, visent avec persévérance le xeservoir dont l'incendie, carbonisant le tout, comblerait leurs vœux.

C'est alors que, sur l'ordre du Lieutenant-Colonel Vernois, commandant le sous-secteur, la 21° Compagnie de Zouaves (Compagnie Schaeffer) prépare la petite opération qui doit aboutir au sauvetage de l'équipage du malheureux avion.

L'expédition doit avoir lieu sans l'aide de l'artillerie; mais il est entendu qu'à partir de 19 h. 30 nos batteries se tiendront prêtes, à la première demande, à l'encager de leur tir sur des points très précisément fixés.

Dans l'après-midi, disent les survivants de cette 21° ,tous les zouaves de la Compagnie vinrent l'un après l'autre demander à faire partie de la reconnaissance. A 20 h. 15 enfin, la patrouille sort; elle est composée du sergent Poulet, des caporaux Drapeau et Fournel, des zouaves Mainières, Ramseyer, Pivert, Banchero, Pellon, Schwander et Gallemard. Mais l'ennemi n'a pas cessé son tir de grenades à ailettes; au sortir même de la tranchée, le caporal Drapeau, Fellon et Schwander sont grièvement blessés. Les autres


progressent : les 300 mètres vont être franchis, lorsque Si près du but — nos sauveteurs se heurtent à une forte ligne de patrouilleurs boches. Des grenades, des coups de révolvers sont échangés; notre petit groupe, trop faible pour avoir le dessus, est contraint de se replier. Le sergent Pouiet est blessé au visage.

Que va-t-il advenir du malheureux aviateur resté sur le terrain à la merci de ces Allemands, qui, tout le jour, ont cherché sa mort ? Bientôt, tout rentre dans le calme.

Alors le Sergent Michoud, qui commande le petit poste de tête de la sape, sort à son tour, rampe; et revient enfin avec la certitude que le blessé a été laissé vivant, mais sans secours. Plus tard on apprendra par le héros de cette aventure, le Lieutenant aviateur Arnoux~ miraculeusement sauvé, que les boches, sans égard pour ses blessures, l'avaient abandonné en lui refusant un quart d'eau.

Mais la nuit a passé, le petit jour se lève. Le Sergent Michoud, le Sergent Poulet, les» Zouaves Mainière, Langlois, Sanchero et Sontempe reprennent l'expédition qu'ils ont juré de réussir. Or, un brouillard providentiel couvre le plateau. Il est 5 heures; ils partent dans le grand silence. Ils franchissent hâtivement le terrain; puis à travers le réseau barbelé, se glissent vers l'appareil. Les boches tirent, mais ces braves sont tenaces. Ils arrivent au but.

Voici l'avion mort, voici l'aviateur qui lève vers eux son regard enfiévré, suppliant. C'est alors que Manière, tendant son mouchoir; lui souffle au visage : « Mon lieutenant, laissez-vous faire, gardez ce mouchoir dans la bouche. Si vous criez nous sommes perdus ! » On le charge dans une toile de tente; on charge dans une autre le corps en lambeaux de l'infortuné pilote Le cortège revient, étouffant ses pas Et c'est ainsi, après 24 heures d'essais opiniâtres que, faisant bon marché de leur vie, six volontaires de la 21° Compagnie de Zouaves sauvèrent le Lieutenant-Aviateur Paul Arnoux, autre brave, donnant l'exemple d'une magnifique camaraderie.

Â

Le 8 Septembre, le 4ème Régiment Mixte est relevé par le 8ème Tirailleurs. Les bataillons occupent d'abord Chassemy, Serhoise, le camp Girodon, la Champignonnière. Ils travaillent pour le Génie; puis de là, s'éloignant de la zô-


ne de feu, descendant à Murret et Croûtes, les Croûtes, Matz et Viollaine.

La 38° D. I. doit participer dans un avenir prochain à une grande offensive sur le front de la VI ° Armée, dans l'Aisne toujours. Alors ainsi qu'il a été fait pour Douaumont, pour Louvemont, le régiment préparé jusque dans ses plus petits détails l'accomplissement de sa mission. Recheiche et aménagement de terrains de manœuvres, figuration des obstacles, exercices des spécia-

lités, étude de la progression, répétitions Après un mois de travaux assidus, le 17 Octobre, bien préparé et confiant en lui-même, le régiment remonte vers Chasseny, Ciry-Salsogne.

Il s'agit, pour le 4° Régiment Mixte, au sein d'une opération d'ensemble — il aura à sa droite le R. I. C. M., et à sa gauche les 1° et 31° B. C. P. — d'enlever : — 1°) les organisations défensives du plateau des Marraines jusqu'à la tranchée de la Danse incluse (premier objectif); — 2°) la tranchée de la Lusace, le bois de la Garenne, le ravin de Chavignon, la partie Est de Chavignon, le Voyeu, (deuxième objectif); — tout cela puissamment organisé, occupé et défendu par les plus valeureux corps de l'armée allemande : les Régiments de la Garde.

Dans la nuit du 22 au 23 Octobre, le Bataillon Meffrey, chargé d'enlever le premier objectif, et le Bataillon Dhomme le second, prennent leur dispositif de départ dans les tranchées et les parallèles du plateau des Marraines. Déjà ils subissent quelques pertes. Mais cette épreuve, loin d'éteindre leur ardeur combative, ne fait que les rendre plus impatients de foncer sur l'adversaire.

De sorte que c'est avec joie qu'à 5 h. 15, au milieu de notre tir d'artillerie formidable et réconfortant qui dure depuis plusieurs jours, ils-accueillent le signal du départ.

L'attaque se déclanche au jour naissant. Au loin, la silhouette de la Malmaison se détache confusément; elle va servir de point de repère.

Le Bataillon Meffrey, en tête, sort d'un bond des paralleles de départ, et s'échelonne, en progressant dans l'ombre, derrière le barrage roulant d'obus qui succède au tir de préparation. Dans les compagnies de tête, les sections d'assaut s'avancent, progressant littéralement dans nos vagues de fer et de feu. Si bien que l'ennemi, ayant


subi la rafale d'obus, n'a pas le temps de se ressaisir et de mettre en action ses mitrailleuses. Les boches, encore tapis dans leurs tranchées, sont tués sur place par nos premières vagues; les autres, blottis dans leurs sapes, sont capturés par nos nettoyeurs.

C'est ainsi qu'est conquise la première tranchée, celle de la Fourragère Jaune. Mais le flot ne s'arrête pas; ses premières vagues, roulent sur le terrain, derrière ce rideau de feu ef si près de lui qu'elles semblent vouloir le pousser. Et c&st ainsi encore que sont enlevées successivement les tranchées du Grison, du Brandon, de la Carabi-.

ne, et par endroits la tranchée de la Danse — qui est l'objectif — en partie bouleversée est submergée. Pourtant, quelques tronçons de cette dernière ligne n'ont pas été éprouvés; des îlots de résistance ont pu s'y établir; l'action combinée des F. M., des V. B., des grenades à main, en vient rapidement à bout Il est 5 h 45, et le premier objectif est atteint. Il l'a été en 30 minutes.

Les tirailleurs, sans perdre un instant, en étroite liaison avec les Coloniaux à droite et les Chasseurs à gau-

che, s'organisent sur l'a position conquise. -A 9 h. 15 seulement? le Bataillon de Zouaves doit les dépasser pour marcher sur le deuxième objectif. Il est là, tout près, rassemblant ses forces; en bon ordre, les Zouaves ont progressé dans les traces des tirailleurs, ils sont prêts à bondir.

Mais, emportés par leur élan, beaucoup de tirailleurs du 6° Bataillon ont dépassé la tranchée de la Danse.

Des mitrailleuses ennemies ont surgi des trous d'obus qui parsèment le terrain devant la première position que les zouaves, tout-à-l'heure, doivent enlever.. Alors, une lutte héroïque s'entame. Les balles sifflent de tous côtés; il s'agit d'éteindre le feu de ces Maxims, de briser ces centres de résistance pour ouvrir la voie au Bataillon Dhomme. Des combats locaux s'engagent. Des zouaves de ce bataillon qui, tout-à-l'heure talonnait le Bataillon Meffrey en action, ardents à la lutte, sont venus délibérément s'en mêler. De part et d'autre, c'est un bel acharnement des troupes passionnées, enivrées par la bataille. Peu à peu, la résistance faiblit; des centres se taisent, d'autres usent leurs forces; enfin l'ennemi semble à peu près dompté.

Un seul de ces ilôts échappe encore à nos coups; supé-


rieurement organisé, hors de portée de nos V. B. il tient toujours. Il tiendra trois heures; jusqu'à ce que submergé par l'attaque du Bataillon de Zouaves, il soit réduit au silence et capitule avec 10 grenadiers de la Garde et ses deux mitrailleurs.

Les tirailleurs ont rempli superbement leur mission.

Tel le Lieutenant Hemmerlé qui, dépassant son objectif, a réduit un centre de résistance qui gênait la progression des unités voisines. Tels encore le Sergent Lorin qui, s'acharnant après un autre, capture une mitrailleuse et 32 soldats allemands; le tirailleur Ali Ben Sadock Ben Abdallah qui, modèle de bravoure et d'énergie, ayant enlevé une demi-section, prend courageusement la tête de sa section dont le chef vient de tomber, et l'entraîne jusqu'à l'objectif assigné; tels enfin, parmi les zouaves qui sont venus avant leur heure se piêler au combat, le Capitaine Scheeffer de la 21° Compagnie qui est tué, le SousLieutenant Pauchon de la 22° qui est grièvement blessé.

Cependant, il est 9 h 15, heure à laquelle le Bataillon Dhomme, dépassant le Bataillon Meffrey, doit reprendre la marche en avant. La Compagnie Jourdan du 1er Bataillon de Tirailleurs qui avait renforcé le Bataillon de Zouaves, les Compagnies Pauchon, 22° de Zouaves et Humbert — 23° de Zouaves — partent de front, et en dépit du tir impressionnant et meurtrier des mitrailleuses de la tranchée de la Lusace, en lisière du bois de la Garenne, foncent sur leur objectif. C'est une véritable ruée à l'assaut. Les Zouaves, les Tirailleurs balaient tout sur leur passage, portant une telle épouvante dans les rangs ennemis qu'aussitôt les mitrailleuses se taisent.

Le flot des assaillants approche. Ils sautent dans la tranchée, tuent les uns, capturent ceux qui se rendent; certains boches affolés tentent de s'enfuir par le ravin de la Garenne; mais là précisément débouche la Compagnie Schœffer dont le Lieutenant Romain a pris le commandement.

Ainsi est prise la tranchée de la Lusace. A l'aile droite, la Compagnie Humbert, crânement entraînée par son chef, se porte résolument en avant, en liaison avec les Coloniaux. Et le Bataillon Dhomme dans la formation d'assaut prévue, longeant le bois de la Garenne, marche sur Chavignon.


La progression, ardente toujours, se fait plus lente. Des mitrailleuses ennemies se révèlent à chaque instant au cours de la marche. De trous d'obus en trous d'obus, grenadiers et voltigeurs entourent chaque fois le centre de résistance qui se démasque : ils le débordent; à portée de grenade ils bondissent; deux ou trois hommes tombent.

mais les survivants faisant place nette, vengent la mort de ces infortunés camarades.

Vers le chemin creux, fortement défendu, l'un de ces centres est singulièrement tenace. Le sergent Brysselbout de la 22° de Zouaves, enlevant sa demi-section, s'élance sur la position. Il est blessé; mais sa crânerie a eu raison de la résistance. Le sergent Brysselbout a reçu la Médaille militaire avec la citation suivante : « Enlevant sa demi« section à l'assaut d'un centre de résistance fortement « défendu par des mitrailleuses, a été blessé au cours de « l'action. Transporté à l'ambulance, y est resté deux jours « à peine; incomplètement guéri, et sur sa demande ex« presse, a rejoint sa Compagnie qui était en première li« gne et repris sa place au combat. »

Dans les abris qui bordent ce chemin, de nombreux prisonniers sont faits. Ils appartiennent au 20 Régiment des Grenadiers de la Garde. Ces troupes sont réputées invincibles; pourtant elles ploient devant la « furia » des nôtres.

Un de leurs officiers, saisi d'admiration pour l'élan avec lequel ces zouaves vont à l'assaut, s'écrie d'enthousiasme : « Vous, les Zouaves!. Nous, la Garde!.» reconnaissant ainsi que ce qu'il y a de plus réputé en Allemagne vient d'être vaincu par ce qu'il y a de plus beau en France.

Cependant, à la hauteur de la carrière du Préfet, le bataillon, ainsi qu'il est prévu, s'arrête et se reforme, assure ses liaisons, en particulier avec la Compagnie qui a continué à avancer par le ravin de la Garenne. Pendant cette pause, le barrage de nos canons s'est stabilisé. Mais à 10 heures 10 (H' + 55), le barrage roulant progresse à nouveau et le bataillon, s'y collant au plus près, poursuit sa marche.

Elle se fait de plus en plus difficile. Le bataillon n'est plus soumis au tir des seules mitrailleuses qui relèvent de sa zone d'action, ou des pièces qui, perchées dans les arbres du bois de la Garenne, sont abattues au passage à coups de fusil; mais encore de celles à l'ouest du ravin,


qui sont installées sur le plateau que le lOB. C. F. n'a pas encore atteint.

On progresse donc par bonds de trous d'obus en trous d'obus. Deux mitrailleuses ennemies terrées elles-mêmes dans des entonnoirs devant le boyau de la Garenne, sont encerclées, puis réduites par le groupe de tête de la 23° Compagnie. Puis c'est à une batterie de minenwerfer, en bordure du bois, que l'on livre assaut. Elle est prise et ses servants faits prisonniers. Enfin, comme l'on allait dépasser la dernière lisière du bois et atteindre le mont des Tombes, on se heurte à une batterie de 4 pièces de 105; on la capture avec tout son personnel, parmi lequel 4 officiers.

Au pied du mont des Tombes, se découvre maintenant le village de Chavignon. Il est 11 heures. Le 4° Régiment Mixte a couvert la presque totalité de ses étapes, sans qu'aucun des obstacles incessants, qu'il a découverts sur sa route et annihilés, ait retardé sa marche; il se trouve à l'heure prévue devant son plus fameux objectif. Comme le Bataillon Dhomme s'engage sur les pentes Nord-Ouent du mont, qui descendent vers les lisières Sud et Sud-Est de Chavignon, l'artillerie ennemie réagit fortement à coups de 150, tout particulièrement dans le chemin creux. Alors les zouaves s'élancent au pas de course et dévalent vers le village.

Les éléments de la 23° Compagnie qui marchent en tête, atteignent le village au moment où y débouche la section du Sous-Lieutenant Hue, avant-garde de la Compagnie Romain qui suivait le fond du ravin. Il est 11 h. 10; les lisières tout aussitôt sont assaillies. Il s'agit d'enlever de haute lutte la partie désignée. Le combat s'engage une fois de plus. Dès l'entrée, dès la première maison, les servants d'une mitrailleuse installée dans un grenier sont descendus à coups de fusil tirés à travers le parquet du premier étage. Les zouaves pénètrent à l'intérieur du village, réduisent à l'impuissance les défenseurs qui tirent par les soupiraux des caves ou dissimulés dans les ruines, sèment la panique dans les rangs d'une Compagnie ennemie de 200 hommes qui s'avance groupée dans la rue principale, son Commandant à cheval en tête ., mettent ces Allemands en fuite, et, ayant tué son cheval obligent l'officier à rejoindre au pas de course sa Compagnie en déroute.


Il est 11 h. 45 lorsqu'enfin le Bataillon Dhomme ayant dépassé Chavignon, la 210 Compagnie atteint Le Voyeu, objectif le plus avancé du régiment. A midi le front Le Voyeu - Briqueterie est complètement jalonné par les pelotons de tête des 21° et 23° Compagnies. La mission est remplie! C'est là que rejoint le Sous-Lieutenant Martin de la 6° C. M. de Zouaves. Chargé de progresser avec les Chasseurs pour flanquer au besoin la marche du bataillon, il a contre-battu des mitrailleuses ennemies, muselant leur tir à courte distance; il a rempli sa mission avec tant d'initiative et d'audace, qu'il a soulevé les applaudissements de ces autres valeureux combattants dont l'un des Capitaines, en pleine action, est venu lui donner l'accolade.

Comment, d'autre part, vanter la conduite des SousLieutenants Camand, Cresson, Guillotin? Ils seront, sur le champ de bataille, décorés de la Légion d'honneur. Que dire de plus éloquent aussi que cette citation du Lieutenant Delacour : « Officier d'une remarquable énergie et de beaucoup « d'allant. Blessé le 21 octobre, a refusé de se laisser éva« cuer afin de prendre part à l'attaque du lendemain. Le « 23 octobre 1917, a enlevé brillamment sa section à l'as« saut des tranchées ennemies, et blessé une seconde fois, « dut abandonner son commandement disant : « Je regrette surtout de ne pouvoir suivre mon bataillon jus« qu'au bout!. » et que cette autre du caporal Pichon : « Blessé cinq fois au cours de la campagne, est revenu « chaque fois reprendre sa place à peine guéri. S'est en« core distingué lors'de l'attaque du 23 octobre 1917 par « son sang-froid, son mépris complet du danger. Brûlé « par les gaz vésicants, n'a consenti à se faire soigner « qu'après la relève. »

Enfin, que citer de plus beau et de plus simple à la fois que ce trait de dévouement du tirailleur Dellong?

Sous son commandement, quatre brancardiers portent un blessé. Un obus éclate à quelques mètres du groupe, jetant à bas blessé et porteurs; deux de ces derniers sont grièvement atteints par des éclats. Un instant étourdi, Dellong se redresse; il panse rapidement ses camarades, remet son blessé sur le brancard et appelant à l'aide un camarade qui passe, il reprend avec son fardeau le chemin du poste de secours.


Ayant enfoncé le front, le régiment est là à moins de. 10 kilomètres de Laon que l'on aperçoit nettement, dressée sur son pain de sucre, ainsi qu'une immense redoute à 100 mètres au-dessus de la grande plaine.

La réaction de l'ennemi est, pour ainsi dire, inexistante.

Des reconnais'sances françaises sont poussées en avant : les précisions qu'elles rapportent permettent le 26 de gagner encore 500 mètres. Le Bataillon Dhomme porte ses lignes en bordure du canal.

En dix jours, le 4° Mixte laisse là : 118 tués dont 4 officiers; 680 blessés dont 13 officiers; 45 disparus, soit 837 hommes hors de combat.

Tant d'abnégation, une besogne si brillamment accomplie font que le Général Maistre, commandant la VI ° Armée, lui décerne une troisième citation à l'Ordre : « Sous l'énergique commandement du Lieutenant-Colo« nel Vernois, a attaqué, le 23 octobre 1917, des positions « ennemies puissamment organisées et. sur lesquelles la « Garde Prussienne avait l'ordre de tenir à tout prix. A « enlevé d'un superbe élan plusieurs lignes de tranchées « solidement défendues; puis, manœuvrant avec vigueur « vers un deuxième objectif et brisant la résistance opi« niâtre de l'adversaire, s'est emparé, après plusieurs com« bats corps-à-corps de la moitié Est du village de Cha« vignon, réalisant ainsi une avance de plus de 3 kilomè« très. A fait au cours de sa progression 900 prisonniers « dont 18 officiers des régiments de la Garde Prussienne, « a capturé 10 canons, 12 minenwerfer, 25 mitrailleuses « et une grande quantité de munitions et de matériel. »


LA MAITRISE 1918 h L'Année de la Victoire

Relevé sur le champ de bataille de la Malmaison dans la nuit du 29 au 30 octobre, et enlevé aussitôt en camionsautos, le 4° Régiment Mixte est débarqué dans les environs de Château-Thierry où il passe quelques jours à se reconstituer, puis il gagne par voie de terre la Champagne (cantonnements de Champigneulles et de Poccancy) où il consacre quatre semaines à parfaire l'instruction de ses renforts. 1 Le 14 décembre, un ordre l'appelle dans la Champagne pouilleuse où, durant tout l'hiver, il s'emploiera activement à l'organisation de puissantes lignes de défenses — celles précisément sur lesquelles se brisera en juillet 1918 la dernière des offensives allemandes — au Nord de Mourmelon et de Somme-Suippe et sur les pentes Nord de la montagne de Reims, dans le riche vignoble de Vierey, Verzenay, Ludes, Villers-Allerand.

C'est là que l'ordre d'alerte déterminé par le déclenchement de l'offensive allemande de mars vient trouver le 4° Mixte, et c'est de là qu'il est transporté en camions dans l'Oise, dans cette même région de Lassigny qui a vu ses débuts en 1914. Le 27 mars 1918, après avoir traversé Compiègne, à peu près vide de ses habitants, et pris au passage la vision rapide et navrante des malheureuses populations fuyant leurs foyers sous la menace de l'ennemi, le 40 Mixte commence son débarquement près de Ressons-sur-Matz à 15 heures.

A ce moment paraissait l'ordre fameux du Général Pétain : « L'ennemi s'est rué sur nous dans un suprême effort. Il « veut nous séparer des Anglais pour s'ouvrir la route de « Paris. Coûte que coûte il faut l'arrêter. Cramponnez-vous « au terrain, tenez ferme, les camarades arrivent. Tous


« réunis, vous vous précipiterez sur l'envahisseur; c'est la « Bataille! Soldats de la Marne, de l'Yser et de Verdun, je « fais appel à vousl Il s'agit de la France! »

Oui, c'était la Bataille! et c'était l'ultime effort. En quatre jours, l'ennemi qui avait attaqué les armées françaises et anglaises à l'endroit de leur jonction, généralisant l'emploi des gaz et des lance-flammes, avait atteint sur les Britanniques une avance parfois de 60 kilomèsres, et récupéré la presqu.3 totalité de ses pertes de 1916.

C'était une inondation d'infanterie. En files innombrables, hérissées de mitraillettes, les Boches progressaient dans la campagne, détruisant une seconde fois les villages ressuscités des ruines, littéralement poussés par les réserves qui s'avançaient sur les routes en théories interminables.

C'était le « Drang nach Westen », la ruée vers l'Ouest.

Après quatre jours d'une progression enivrante — que l'artillerie au reste ne parvenait même pas à suivre — le flot boche va se briser sans remède sur la falaise que l'esprit de sacrifice français a dressée promptement. Quatre jours il a monté comme une inondation, croyant sa marche inéluctable : quatre jours vont suffire à briser ce rêve orgueilleux.

Quelle fut la part du 4° Régiment Mixte dans cette nouvelle bataille? Le rapport du Colonel Vernois va nous l'apprendre : « RAPPORT sur les opérations exécutées par le 4° Mixte dans les journées du 28 mars au 2 avril 1918.

« Débarqué dans la journée du 27 mars à Riquebourg, des camions automobiles qui le transportaient, le 4° Mixte était appelé dès le soir même à s'engager dans la bataille qui se livrait sur le front : Canny-sur-Matz - Counhy. Le régiment apprenait en effet qu'il était mis, par le Général commandant le 2° C. C. à la disposition du commandant de la 62° D. I. et recevait l'ordre à 23 heures de se porter sur les hauteurs entre Roye-sur-Matz et Conchy, et de participer à la reprise du village de Roye que l'on supposait tombé aux mains de l'ennemi.

« Le 28, à 3 heures, il était en position. Sa droite (Bataillon de Zouaves) appuyée à la station et au village de Roye, en liaison avec les troupes du 279° R. I. qui tenaient toujours le village; sa gauche (Bataillon de Tirailleurs Meffrey), à la lisière Sud-Est de Conchy, dont l'ennemi s'était


emparé la veille, et en liaison avec le Bataillon Helbert du 4° Zouaves de Marche. Le 30 Bataillon du régiment (Bataillon de Tirailleurs Jauffret) était en réserve de régiment aux abords de Biermont.

« Le 28 mars vers 16 heures, après de nombreuses escarmouches qui s'étaient produites au cours de la journée et avant qu'il ne se soit complètement asssis sur sa position, le Bataillon de Zouaves était violemment attaqué aux abords de la station de Roye par de forts détachements d'assaut ennemis, précédés de flammen-werfer. Une lutte très vive s'ensuivait jusque vers 22 heures. Les fractions de ce bataillon furent presque complètement entourées (Section du Sous-Lieutenant Hue, entre autres). Les contreattaques vigoureuses des Zouaves (Compagnie Le Drenou), appuyées des tirs ajustés des mitrailleuses, eurent raison de ces adversaires ardents, qui durent se replier en désordre vers la côte 97, laissant sur le terrain à moins de 10 mètres de nos troupes les cadavres de leurs flammen-wer-

fer. Le Bataillon de Zouaves avait eu, au cours de cette lutte, son Chef de Bataillon (Commandant Dhomme) blessé, 2 zouaves tués, 15 blessés et 5 disparus.

« Le 29 mars au matin, sur l'ordre qui lui en parvenait du commandant de 11. D. 62, le 4° Mixte passait à son tour' à l'attaque sur tout son front, en liaison avec les troupes de la 38ème D. I. Dans cette manœuvre les bataillons avaient à exécuter un mouvement de conversion à droite, le village de Roye servant dé pivot, et qui devait leur permettre de s'emparer des hauteurs au N. de Roye, Conchy, Boulogne-la-Grasse. Le 4ème Mixte attaquait avec deux bataillons en première ligne, un bataillon en soutien.

« Du premier élan, la Compagnie Courvennec (Compagnie de droite du Bataillon de Zouaves) atteignait son objectif : la côte 83 au N. du village de Roye.

« A sa gauche, les autres Compagnies du Bataillon de Zouaves et du Bataillon de Tirailleurs Meffrey progressaient malgré les tirs d'enfilade des mitrailleuses enne mies installées sur les hauteurs de la Marliere et à Conchy. A l'extrême gauche de la ligne, la Compagnie Jourdan, du Bataillon de Tirailleurs Meffrey, entamait avec les défenseurs du village de Conchy, dont la lisière F.

était bordée de mitrailleuses, une lutte des plus rudes, qui durait toute la journée, cherchant à déborder Conchy


à l'E. afin de faciliter la progression des Zouaves du 4ème de Marche dans cette localité.

« Quand l'ordre vint de s'arrêter sur le terrain conquis et de se préparer à recevoir une contre-attaque ennemie, le 4ème Mixte avait gagné une bande de terrain profonde d'un kilomètre environ. Il tenait à mi-hauteur les pentes S. du mamelon 97, et le chemin creux au N. de la route Conchy-Roye. C'est sur cette position qu'il brisa les contre-attaques répétées des Allemands descendant des hauteurs de la Marlière et débouchant de la lisière S. E.

de Conchy. Sous les rafales de nos mitrailleuses et F. M., ils furent refoulés en désordre vers leurs points de départ. Dans cette journée, les pertes du régiment avaient été de 20 tués et de 105 blessés, en grande partie supportées par le Bataillon Meffrey (95).

« Le 30 Mars, dès 6 heures du matin, l'ennemi attaque violemment sur le front : Roye, Boulogne-la-Grasse. Débordées par un adversaire très supérieur en nombre, les troupes de la 76 ème D. I. sont forcées de se replier en combattant sur Orlivers. Le 4ème Mixte maintient ses positions, infléchissant seulement sa ligne à l'Ouest pour ne point laisser se créer une trouée entre lui et le 4ème Zouaves de Marche. Durant toute la journée, la lutte se déroule aussi ardente et opiniâtre que la veille, lutte à laquelle prennent part toutes les unités du régiment. Dans la soirée le flot ennemi est contenu, mais la journée a été chaude. Le Commandant Jauffret tué, le Lieutenant-Colonel Renn et le Capitaine Achte, tous deux adjoints au Chef de Corps, grièvement blessés; le Lieutenant-Colonel Vernois blessé légèrement n'a pas voulu quitter le commandement de son régiment.

« Dans les journées des 31 mars et 1er avril, la lutte se poursuit avec moins d'âpreté pour le 4ème Mixte, mais non sans pertes. Un brillant retour offensif du 4ème Zouaves de Marche au N. d'Orvillers avait permis le 31 Mars de réduire un peu la poche créée sur l'ensemble de notre front par l'attaque allemande de la veille. Mais l'on peut affirmer, je crois, que si l'attaque allemande du 30 sur Orviliers n'a pas eu toutes les conséquences que l'ennemi en attendait, que si le retour offensif du 4 ème Zouaves de Marche fut le lendemain un heureux succès pour nos armes, cela fut dû en grande partie à ce que le 4ème Mixte tint comme un roc sur ses positions, interdi-


sant à l'ennemi tout débouché de Conchy vers le S. E.

comme celui-ci avait tenté de le faire, l'empêchant d'étendre à l'E. le gain qu'il avait réalisé vers le S, dans la direction d'Orviliers.

« Jeté, dès son arrivée, dans la mêlée, presque sans vivres, ne disposant que d'une infime partie de son matériel, le 4ème Mixte déploya à un haut degré dans les dures journées des 28 Mars au 1er Avril les belles qualités d'énergie, de ténacité et de vaillance qui sont le fondement de sa gloire -et qui lui ont valu déjà 3 citations à l'ordre de l'armee. »

Le 2, le régiment était relevé. Ses pertes depuis le 20 Mars étaient assez lourdes : Tués : 2 officiers, 52 hommes de troupe; blessés : 5 officiers, 297 hommes de troupe; Disparus : 6 hommes de troupe; soit 363 hommes hors de combat.

Mais sa gloire se rehausse encore. De nouveaux héros ce sont révélés dans ses rangs, aussi beaux que ceux de Douaumont, de Louvemont, de la Malmaison, et capables des mêmes dévouements, des mêmes sacrifices.

Tel ce sergent Canton de la 6ème C. M. qui, menacé d'être encerclé et manquant de munitions, se cramponne au terrain et ne veut pas en céder un pouce; tel ce SousLieutenant Larassiette qui, après avoir brillament entraîné sa Section à l'attaque des postions adverses, violemment contre-attaqué par un ennemi supérieur en nombre, lui inflige des pertes sévères et qui, sous la menace d'un mouvement tournant ne veut pas abandonner sa conquête, exhorte ses tirailleurs à la résistance, et, le fusil à la main, se fait tuer glorieusement d'une balle en plein front; tel aussi le Capitaine Le Dresou qui résiste victorieusement à un violent assaut mené avec le concours de lanceflammes : puis, contre-attaquant à son tour, rejette l'ennemi en désordre; tels encore les Sergents Chamey et Hauck qui, cernés, luttent jusqu'au bout contre les flammenwerfer qui les enveloppent èt, profitant de la nuit pour forcer l'investissement, regagnent nos lignes en ramenant tous leurs camarades blessés et leur matériel; tel toujours ce fusilier-mitrailleur Mohamed Ben M'hamed Lanti qui, après avoir fait merveille dans l'attaque d'un centre de résistance, se distingue dans la défense par le tir précis de son arme et fait échouer toutes les tentatives de l'adversaire; tel enfin l'Adjudant Van de Ven, le Caporal Pois-


son qui, assaillis et tournés par des forces supérieures, résistent avec la plus grande énergie et forcent, en fin de compte, l'ennemi à se replier.

Jugeant que, dans les circonstances, le 4 ème Mixte a bien mérité de la Patrie, le Général Commandant la Illème Armée cite le Régiment à l'ordre de l'Armée : « Les 28 et 29 Mars 1918, sous le commandement du Lieutenant-Colonel Vernois, a défendu avec la plus grande énergie les positions confiées à sa garde, repoussant victorieusement et après de 'violents corps-à-corps, toutes les tentatives faites par un ennemi agressif pour déboucher de ses positions et s'emparer de la Station de Roye-sur-Matz, gagnant même du terrain au Nord de ce village, interdisant à ce même ennemi les 30 et 31 Mars d'étendre son attaque vers l'Est, lui infligeant des pertes sanglantes et facilitant, par l'énergie de sa défense et la vigueur de ses contre-attaques locales, le retour offensif d'un Corps voisin ».

C'est la quatrième citation. du régiment à l'Ordre de l'Armée, elle entraînera l'octroi de la fourragère aux couleurs du ruban de la Médaille Militaire.

Quelques jours se sont passés dans les cantonnements proches de la région de Ressons-sur-Matz, et le 12 Avril, le régiment, transporté en camions-autos, s'installe à AyChampagne près d'Epernay.

Séjour mémorable, parmi l'accueil sympathique de cette riche population viticole. Ay est le pays du premier crû de Champagne; ses maisons qui sont presqu'autant de vil-

las, sont accueillantes; c'est un cantonnement privilégié, d'ailleurs bien mérité.

C'est à ce moment que se produit dans le régiment une modification profonde. Par ordre supérieur, le 6° Bataillon de Zouaves, bataillon superbe, au passé glorieux entre tous, un des vainqueurs de Douaumont et de Chavignon, est dissous à la date du 18 avril. On se souvient des adieux émouvants que lui adressa le Lieutenant-Colonel Vernois. Une partie de ses cadres et le plus grand nombre de ses zouaves sont envoyés en renfort au 4° Régiment de Marche de Zouaves et au 8° Régiment de Marche de Tirailleurs.

En remplacement, un 7° bataillon de Tirailleurs est formé au moyen des cadres et des spécialistes zouaves restant, puis de contingents indigènes provenant des 129 et 130 Bataillons d'instruction du 4° Régiment de Tirailleurs

(4 e Mixte), feuille 5


de Sousse, enfin d'éléments des 1° et 60 Bataillons de Tirailleurs.

Les Compagnies prennent les noms de 25°, 26°, 270 Compagnies et 7° C. M.

Le régiment ne comprend donc désormais que des éléments du 8° Tirailleurs. Mais le Lieutenant-Colonel Vernois obtient que soit maintenu ce nom de 4° Régiment Mixte de Zouaves Tirailleurs illustré sur tant de champs de batailles.

Le 2 mai, le régiment quitte Ay. En quatre étapes il atteint le Nord de la forêt de Laigue. Dans la nuit du 8 au 9, le 6° Bataillon, dans la zone de Pontoise, prend les lignes en bordure de la rive gauche de l'Oise; la plus grande partie du secteur se trouve dans la forêt de Carlepont.

Entre temps, l'ennemi avait tenté une nouvelle offensive, prononcée cette fois dans la région entre Oise et Aisne.

Arrêté presque aussitôt, il a formé une poche au Sud-Est de Noyon.

Dans la nuit du 16 au 17 mai, le 7° Bataillon se porte en ligne à gauche du 6°, dans la zone de Sempigny, sur l'Oise, à un kilomètre de Noyon. La région est vallonnée et boisée. Très proche se dresse le mont Renaud qui appartient moitié aux Français, moitié à l'ennemi, et commande Sempigny ainsi que toute la campagne.

Le 1° Bataillon, lui, est en réserve à Huleu.

Les deux bataillons de première ligne organisent leur secteur, posent des réseaux de fil de fer, aménagent des tranchées et des abris. Le 6° Bataillon se trouve sur un -terrain, où le moindre coup de pelle découvre une nappe d'eau; force lui est de recourir aux gabionnades et d'élever ses abris en superstructure. Le 7°, lui, établit des petits postes sur le bord du fleuve. Fréquemment, des patrouilles de nuit sont envoyées en barques pour tâter l'ennemi; des coups de feu sont parfois échangés; mais le secteur se maintient dans un calme d'assez mauvais aloi.

Cependant, la relève est projetée. Dans la nuit du 23 au 24, déjà le 6° Bataillon a cédé la place à un bataillon du 8° Tirailleurs; et le 70 doit à son tour partir la nuit suivante, lorsque le 24, à 3 h. 50 du matin, un bombardement d'une extrême violence se déclenche sur la région du mont Renaud, gagnant presque aussitôt Sempigny. Les minenwerfer qui ne s'étaient pas encore révélés exécutent sur le village un tir écrasant. La zone battue s'étend au-delà et


atteint en arrière jusqu'au P. C. du Chef de Bataillon. Le village est mis en pièces; la plupart des caves utilisées comme abris sont enfoncées, les tranchées et les boyaux promptement nivelés, les communications coupées. A la faveur de cette canonnade, qui comprend des projectiles de tous calibres et une forte proportion d'obus toxiques, l'ennemi, à l'Est de Sempigny, tente de franchir l'Oise au moyen de radeaux légers et d'une passerelle que quelques groupes de combat de la 26° Compagnie lui interdisent de lancer.

Mais plus loin, de son déluge de torpilles, il a paralysé le petit poste du pont de Sempigny dont les hommes pour la plupart ont été ensevelis. S'appuyant aux piles du pont, Il parvient à lancer une seconde passerelle. Notre réaction lui interdit d'en déboucher. Trois avions sur le village, viennent mitrailler les défenseurs. Mais bientôt, à 4 h. 50, le feu faiblit, à 5 h. 15 il s'arrête. L'ennemi se replie sans même prendre le temps de supprimer sa passerelle; du mont Renaud, on le voit se hâter vers Pont-Levêque emportant des morts et des blessés.

Le 70 Bataillon a perdu 41 combattants : 1 officier blessé, 8 hommes de troupe tués et 24 blessés; en outre 8 hommes manquent à l'appel qui vraisemblablement ont été ensevelis sous les obus.

Dans la nuit, la relève s'effectua. Le régiment est regroupé au Nord de la forêt de Laigue. Il laisse dans ce secteur, après - un séjour de deux semaines et demi : 13 tués dont 1 officier (Lieutenant Ferrière); 61 blessés dont 1 officier; 8 disparus présumés tués.

A C'est à cette époque que se produit un petit incident de guerre qui, par son originalité et les qualités de sang-froid et de rapide décision qu'il a exigés de son auteur, mérite d'être signalé : Le 1° juin, vers 9 h. 30, le zouaave Dauxerre, agent de liaison du Commandant, aperçoit un biplan ennemi qui, à la suite d'un combat soutenu contre un aéroplane à cocarde tricolore, manœuvre pour atterrir. Saisissant un mousqueton, il s'élance dans la direction du point où il présume que l'avion va se poser; et précisément, il l'atteint au mo-

ment où les deux aviateurs, indemnes, s'apprêtent à mettre pied à terre. Aussitôt, il les couche en joue, tire, met hors


de combat le feldwebel — pilote, qui se précipitait sur sa mitrailleuse; et, tenant en respect l'officier observateur, lui interdit, tant de se servir de ses armes que de détruire son appareil et les documents qu'il contient.

Puis, appelant à l'aide un sapeur du Génie qui accourt, Dauxerre ligotte ses deux prisonniers, recueille tous les documents dont abondent leurs poches et le fuselage de leur aéroplane; enfin très fier, vient remettre le tout — gens et papiers — aux mains du Commandant de Corps d'Armée dont le P. C. est dans le voisinage.

A Mais déjà les combats ont repris, par suite d'une avance de l'ennemi sur le flanc droit de la Division. La 40 Brigade du Maroc a reçu l'ordre de tenir la région du mont de Choisy, le 6° Bataillon du 4° Mixte est mis à la disposition du Colonel commandant le R. I. C. M. en première ligne.

Engagé avec le Régiment Colonial, ce bataillon, dans la nuit même, perd 3^ tués, 33 blessés, 5 disparus.

La 1° Compagnie (Compagnie Piedanna), également à la disposition du R. I. C. M., a reçu l'ordre de prononcer à 21 heures une action dans le bois de Nampcel. Personne ne connaît le terrain; il fait nuit. Pourtant la première Compagnie se lance courageusement à l'assaut. Dès le début, d'ailleurs, les sections du Lieutenant Sauveton et de l'Adjudant-Chef Salvat progressent de 150 mètres et font des prisonniers. Mais celle du Sous-Lieutenant Cazassus est arrêtée par des feux de mitrailleuses. Entraînés par leur belle ardeur, le Sous-Lieutenant Cazassus et le Tirailleur français Boutouiller qui l'accompagne disparaissent dans la nuit sans que, depuis, leur trace ait jamais pu être retrouvée. Au petit jour, les Sections Sauveton et Savat, isolées par.leur avance, sans liaisons, se voient contraintes de se replier en combattant contre un ennemi qui leur barre la route, Elles rejoignent leur base, non sans capturer quelques nouveaux prisonniers.

Pendant toute la journée du 1er juin, l'ennemi accentue sa pression contre le Mont de Choisy, tenu par le Bataillon Somali du Commandant Bouet, et contre les lisières des bois de Caisnes et de la Montagne et de Nampcel.

Le 2 Juin, il écrase ce malheureux bataillon sous un bombardement furieux. Notre deuxième Compagnie (Compagnie Nadin) est mise à la disposition du Commandant


Bouet ainsi que la première Compagnie de Mitrailleuses.

Et c'est ici que se place l'un des plus valeureux faits d'armes de toute l'histoire des tirailleurs de notre régiment.

Nous ne saurions mieux faire que reproduire le récit exact qu'en font les annales de route du 4° Mixte : « Le 2 juin, à 21 heures, le 2° peloton de la 1° C. M.

était désigné pour renforcer la ligne tenue par le Bataillon Somali à l'Ouest du Mont de Choisy, à la lisière Nord-Est des villages de Caisnes et Hedin.

« Sous les ordres du Lieutenant Perruche, il se porte immédiatement en ligne, parcourant 3 kilomètres sous un tir de barrage très nourri, et traversant plusieurs nappes de gaz.

« Le Bataillon Somali résiste courageusement. Mais ayant subi de fortes pertes, tenant un front très étendu, sans organisations défensives, les unités de première ligne sont dans une situation précaire. La plupart des mitrailleuses qui le soutiennent ont été éteintes par le bombardement.

C'est dans ces conditions que le peloton de Mitrailleuses de la 1° C. M., arrive vers 23 heures, se met en batterie. Les pièces sont portées résolûment en avant de la ligne d'infanterie, les épaulements immédiatement établis et un feu violent est dirigé sur les lisières du bois qui couvre le Mont de Choisy, et d'où l'ennemi cherche toujours à déboucher, acompagnant ses tentatives d'un bombardement soutenu d'obus toxiques.

« La progression de l'ennemi est momentanément arrêtée.

« Les journées du 3 et du 4 sont plus calmes, le bombardement moins serré. Des patrouilles boches tentent toujours de déboucher du bois. Toutes sont mises en fuite, la plupart laissant des morts sur le terrain où elles se sont aventurées.

« Le 4, à 20 heures, un bombardement extrêmement violent se déclenche soudain. Mines et obus de tous calibres pleuvent sur Caisnes, Hesdin. Nos premières lignes sont inondées de gaz. Après 20 minutes de canonnade, des colonnes ennemies sortent du bois et se portent à l'assaut de nos positions, à moitié dissimulées par les nappes de gaz et de fumée qui couvrent la ligne. Les mitrailleuses ouvrent le feu avec précision et fauchent les assaillants, L'ennemi recule, puis s'enfuit devant les deux pièces de


droite. Mais la 8° pièce installée à la lisière d'un verger, dispose d'un champ de tir de 50 mètres à peine; elle est dépassée par une colonne ennemie qui s'est glissée à travers les maisons de Hesdin, à l'abri des feux et des vues de l'autre pièce.

« Dans le même moment, une troisième colonne arrive par le chemin creux bordé d'une haie où se trouve en batterie cette 8° pièce. Cette colonne est fauchée, ses débris se disloquent en laissant une trentaine de cadavres.

« Mais nos mitrailleurs sont assaillis par derrière; les ennemis venus à travers les ruines de Hesdin les entourent. Alors, un corps-à-corps désespéré s'engage. Les servants se défendent à coups de mousquetons et se replient vers la première ligne d'infanterie située sur le talus de la route à une quarantaine de mètres en arrière. Puis, sans perdre une seconde, au commandement du Sergent Coume et du caporal Mahé, cette poignée de braves rallie quelques tirailleurs somalis dont les chefs sont tombés et foncent à la baïonnette, avec une fureur et une audace irrésistibles. Le Sergent Coume électrise ses hommes par son exemple. Il tombe frappé d'une balle et d'éclats de grenade.

Déjà ébranlé par les lourdes pertes qu'il a subies, attaqué à la baïonnette, l'ennemi lâche pied. Il s'enfuit vers la lisière du bois, tandis que les mitrailleurs, réprenant leur pièce, ouvrent le feu sur les fuyards.

« L'affaire a duré un quart d'heure environ. L'adversaire, qui avait pour objectif le ruisseau de Caisnes a subi un sanglant échec. La 8° pièce est entourée de morts ennemis; on en compte une trentaine dans le chemin creux; une demi-douzaine passés à la baïonnette gisent en arrière des servants. Pour venir complimenter ses hommes, le Capitaine enjambe les cadavres allemands.

« Les mitrailleurs sont radieux malgré leur fatigue. Leur moral est admirable, leur tenue est superbe, et leur bravoure au cours de cette affaire a fait l'admiration des Officiers d'Infanterie Coloniale qui en ont fourni le témoignage enthousiaste ».

Un tel acharnement dans la défense ne dompte pourtant pas l'ennemi, qui tente à la vérité d'entamer une affaire d'envergure. Le 5, son bombardement reprend de plus belle, 54 des nôtres sont blessés; nous comptons 11 tués, parmi lesquels le Sous-Lieutenant Boulenger.


Et les jours se succèdent parmi les mêmes périls. Le 9, à 23 heures 50, le bombardement gagne les arrières de tout le secteur et se prolonge sans accalmie jusqu'au 10, 10 h. 30. Des patrouilles, en même temps, tentent d'aborder nos lignes; elles laissent des morts et des prisonniers.

C'est en réalité une offensive qui se déchaîne. L'attaque ennemie s'effectue sur la rive droite de l'Oise et réalise une avance jusqu'à Ribecourt. Ainsi se trouve découvert tout le flanc gauche de la Division. D'autre part, la perte du' Mont de Choisy découvre son flanc droit. La 38° D. I., dans une situation assez périlleuse, s'avance donc en flèche par rapport aux Divisions voisines. Ordre lui est donné le 10 Juin à 20 heures de se replier sur Bailly, Tracy-le-Val, Bois Sf-Mard, nos anciennes lignes de 1914. Le mouvement commence à 21 h. 30; chaque bataillon de 1° ligne se couvre par une arrière-garde forte d'une section d'infanterie et d'une section de mitrailleuses; il se fait dans un ordre parfait, sans le moindre incident, à l'insu de l'ennemi.

l'uis, le 11, le régiment est regroupé dans la forêt de Laiguë. La période qu'il vient de vivre a été particulièrement pénible pour certaines de nos unités, mises à l'improviste à la disposition d'autres Corps pour rétablir une situation difficile et participer à des opérations délicates.

Les unités ont fait preuve d'une abnégation au-dessus de tout éloge. Pour le salut d'autres régiments, elles ont sacrifié 373 hommes : 43 tués dont 1 officier; 322 blessés dont 1 officier; 8 disparus dont 1 officier.

Le 15 juin, le Général Guyot de Salins, commandant la 38° D. I. remet la Médaille militaire au caporal Mahé et aux tirailleurs Richard et Kerurien, de la 8° pièce de la 1° C. M. La pièce elle-même est citée à l'Ordre de l'Armée avec ce motif : « Le 4 juin 1918, placée en extrême pointe avant de la ligne d'infanterie, a fait subir des pertes sanglantes aux colonnes ennemies se portant à l'attaque. Submergée et tournée, a continué à lutter au mousqueton; puis, ralliant quelques hommes de l'unité voisine, a immédiatement contre-attaqué et s'est dégagée à la baïonnette. »

Le régiment, après le dur séjour dans la région de l'Oise, jouit donc d'une détente bien méritée, détente d'ailleurs assez précaire, puisque nos bataillons sont encore en réserve de secteur, et que même les 7° et 1° Bataillons font


un court séjour en ligne, à la droite de Bailly. Le 9 juillet, il croit pouvoir, au bivouac dans la forêt de Compiègne, goûtér un repos plus réel; lorsque, le 12; il s'embarque en camions pour cantonner à Vauciennes, à 6 kilomètres Ouest de Villers-Cotterets.

A ce moment, sur l'Allemagne près de lancer une nouvelle offensive, passe une folle espérance, tandis que le cœur de la France meurtrie est étreint d'angoisse. L'Histoire dira quelle sérénité grave le tienéral Foch, devenu Généralissime des armées alliées, sut montrer dans ces heures dramatiques.

Dans la nuit du 14 au 15, le régiment apprend que la formidable machine allemande s'est à nouveau ébranlée.

L'attaque ennemie s'engage cette fois sur tout le front de la IVo Armée. Or, dans le plus grand secret, le Général Mangin qui commande la X 0 Armée a préparé une puissante attaque de flanc qui, si elle réusssit, doit changer la face de la guerre. L'aube qui se lève est celle de la seconde bataille de la Marne. Le 40 Régiment Mixte va y participer.

Le 15 juillet 1918 — Vauciennes (Aisne) — l'arme au pied, le 4° Régiment Mixte stationne aux lisières de la forêt de Retz.

Le 16 au matin, le régiment est à pied d'œuvre, rassemblé dans la forêt de Villers-Cotterets; le Colonel Vernois, évacué, en a passé le commandement au Chef de Bataillon Dhomme. Dans la nuit du 17 au 18, sous un ciel d'orage, il a pris sa formation de combat, à l'est des creutés de Chavigny. Encadré par une Division américaine à gauche, par le R. I. C. M. à droite, il est disposé en profondeur, 1° Bataillon en tête, 6° Bataillon en soutien, immédiatement derrière le premier; le 7° plus en arrière en réserve de Brigade. Le Chef d'Escadrons Sutterlin, commandant le 32° IL A. C. marche avec le Commandant du Régiment et est chargé, avec ses trois groupes, d'assurer le barrage roulant devant le front du 4° Mixte et de briser si possible tous les obstacles qu'il pourrait rencontrer dans sa zone de marche. Le 4° Mixte attaquera et progressera dans l'axe de direction générale Fère-en-Tardenois.

Quelle impressionnante veillée des armes! Une nuit d'encre. Du côté boche, quelques rafales d'artillerie; se doutent-ils de nos projets? -.Chez nous, un silence qu'interrompent seuls le ronronnement des moteurs et le roulement des voitures; ce sont nos tanks qui, en nombre, sil-


lonnent les routes de la forêt et notre artillerie qui, au dernier moment, vient occuper ses emplacements de combat. Le jour durant, troupes et engins ont été soigneusement masqués sous les couverts; leurs mouvements n'ont commencé qu'à la nuit tombante. A l'aube, tout sera en place; et l'assaut partira en même temps que notre premier coup de canon.

4 h. 30. Un silence d'angoisse. Une blême lueur pointe à l'Orient. C'est l'heure prévue.

4 h. 35. Notre artillerie se déclenche, brusque, formidable, illuminant comme d'un gigantesque feu d'artifice les lisières des bois où nos canons de tous calibres ont été soigneusement dissimulés. Frémissants, les tirailleurs ont bondi, 1° Bataillon en tête. Dès lors c'est la ruée irrésistible. Nos obus sèment parmi les rangs ennemis, la surprise, la panique et la mort.

Suivant au plus près le barrage roulant serré et précis, le 1° Bataillon tombe sur les tranchées ennemies en même temps que nos derniers obus. De tous côtés les Boches, les yeux hagards, l'air hébété, jettent leurs armes et lèvent les bras en se précipitant au devant des tirailleurs et en criant : « Kamarad ».

D'un geste dédaigneux, les tirailleurs leur indiquent la direction de notre base de départ et sans arrêt, uniquement soucieux de coller au barrage roulant, continuent la progression.

Chaque centre de résistance dépassé est l'occasion d'une nouvelle moisson de prisonniers.

Stimulés par la pleine réussite du démarrage, les bataillons de tête et de soutien rivalisent d'ardeur. Le bois du Mausolée est rapidement traversé; passant au Sud de Vauxcastille, le bataillon de gauche, ainsi que le prévoyait le plan d'engagement, se rabat sur la Savières à hauteur de l'extrémité Sud du parc de Vierey. De nombreuses mitrailleuses ennemies, en position dans le parc de Vauxcastille, tirent sans relâche sur nos troupes.

La liaison avec les Américains a été mal établie; partis en retard, ils ne marchent pas exactement sur leur point de direction; des unités du bataillon de soutien sont dans l'obligation d'intervenir pour réduire ces mitrailleuses.

Une section commandée par le Sous-Lieutenant Pervalet, du 6° Bataillon, appuyée par une section de mitrailleuses.

réussit, par une manœuvre audacieuse et habile, à encer-


cler un de ces centres de résistance, capturant deux mitrailleuses lourdes, une dizaine de servants et 2 officiers. Avant de franchir le ruisseau de la Savières, les tirailleurs ont l'indicible joie de traverser à 3 k. 500 environ de la base de départ, la ligne d'artillerie extrêmement dense, composée de 77, de 105 et de 150. Les servants ennemis n'ont ni eu le temps, ni la possibilité de se porter à leurs pièces, tant a été nourri, dense et précis le tir de nos contre-batteries. Affolés, ils sont cueillis mi-vêtus, courant autour de leurs pièces qui portent encore les couvre-bou-

ches et les couvre-culasses.

Ce dépassement de la ligne d'artillerie de l'ennemi, ossature de la résistance, galvanise nos tirailleurs qu'une marche pénible, à bonne allure, sur un terrain raviné et accidenté, sous une atmosphère lourde, a déjà éprouvés.

Une nouvelle ardeur anime leur courage; entraînés par leurs chefs, ils dévalent d'un élan irrésistible vers le bois du Mausolée et les pentes qui mènent au ravin de la Savières : ils s'enfoncent dans ces terrains marécageux qui bordent la rivière, avec de l'eau et de la boue jusqu'aux genoux. D'un trait, ils escaladent le talus de la voie ferrée.

Pour permettre aux unités de se reformer et de souffler, un arrêt a été prévu dans la progression des vagues d'as-' saut au-delà de la voie ferrée longeant le ruisseau de la Savières. C'est là que se reforment les 1° et 6° Bataillons et qu'ils se tiennent prêts à bondir vers leur deuxième objectif en se collant de nouveau contre le barrage roulant qui doit se stabiliser jusqu'à 6 h. 40.

A 6 h. 40, les tirailleurs escaladent allègrement le talus abrupt qui, de la voie ferrée donne accès au plateau de la côte 143, véritable glacis, commandé par le parc de Vierzy d'un côté, par la ferme de Montrembœuf de l'autre.

L'ennemi cantonné à Vierzy, Montr^ubœuf et environs, promptement alerté, a eu le temps de se ressaisir et de s'organiser. Sur des positions reconnues et préparées, dans le parc de Vierzy et vers Montrembœuf, se constituent des centres de résistance abondamment et exclusivement pourvus de mitrailleuses. Elles vont nous causer un mal énorme et nous faire payer cher toutes les tentatives faites au cours de la journée pour rompre ce solide barrage d'armes automatiques.

La progression continue lentement en liaison avec le R.

I. C. M., mais nous n'avons toujours aucune liaison vers la


gauche avec les Américains qui sont arrêtés par des mitrailleuses ennemies installées aux environs de Vauxcastillç. Vers le parc de Vierey et dans les champs de blé qui l'entourent, la fusillade ennemie fait rage. C'est en conduisant leurs tirailleurs à l'assaut de ces positions que tombèrent le Capitaine-Adjudant-Major Achte, les Sous-Lieutenants Connesson, Guillotin, Vuillemot et Autret; les rangs s'éclaircissent, un flottemént se produit, un vide se fait entre la gauche du 1° Bataillon et le mur du parc; -déjà les Allemands cherchent à s'y infiltrer et à nous tourner. D'un coup d'oeil, le Commandant Meffrey a vu le danger : avec son coutumier esprit de décision, il y pousse une de ses Compagnies. Le trou est bouché, la progression reprend lentement et péniblement jusqu'au bois allongé où une nouvelle batterie de 77 tombe entre nos mains.

Du parc de Vierey, les mitrailleuses ennemies redoublent de violence et prennent d'enfilade toute notre première ligne, la progression est momentanément arrêtée. Le Commandement décide alors que la reprise du mouvement en avant, avec l'appui de l'artillerie, s'effectuera dans la soi- rée.

En vue de ces nouvelles attaques, afin d'étayer les Bataillons Meffrey et Pineau" déjà très éprouvés, le Colonel commandant la Brigade met à la disposition du commandant du.régiment le 7° Bataillon, qui était jusqu'alors en réserve de Brigade, ainsi qu'un Bataillon du 8° Tirailleurs (4° Bataillon, Commandant Deranque).

La 27° Compagnie du 7° Bataillon va renforcer immédiatement le 1° Bataillon, et la 26° le 6° Bataillon.

A 16 h. 15, l'offensive est reprise; malgré un violent tir de notre artillerie sur le parc de Vierey, les mitrailleuses installées en bordure du parc et dans les champs de blé voisins rendent toute progression impossible.

Les' Américains à notre gauche n'avaient pas encore dépassé Vauxcastille à 11 h.; aussi lorsque le 7° Bataillon progressant pour rejoindre le régiment arrive à hauteur de ce hameau, sa Compagnie de gauche, la 26°, est accueillie par un feu nourri de mitrailleuses. Les Américains essayent en vain de les contournér par le Nord. Le SousLeutenant Aguilon pousse vivement sa section vers un deces centres de résistance, parvient à l'encercler en partie et prend d'enfilade la tranchée ennemie d'où partent ces tirs de mitrailleuses et de nombreux coups de fusil. Les


Américains, d'autre part, redoublent d'ardeur; aussi les occupants de cette tranchée et des abris voisins, se rendant compte que toute résistance devient inutile, capitulent, et se rendent au Sous-Lieutenant Aguilon qui, avec une poignée d'hommes fait ainsi prisonniers 200 Allemands dont 6 officiers et un Chef de Bataillon.

Cet exploit permet aux Américains de poursuivre leur progression veps Vierzy, dont ils ne peuvent atteindre, les lisières qu'à la tombée de la nuit.

C'est alors que le Bataillon Pineau, renforcé par la 27* Compagnie, reprend résolument et crânement la marche en avant. La Compagnie de gauche longeant les bords du plateau se rabat sur le parc et prend de flanc les défenses qui, jusqu'ici, contenaient par leurs feux les Compagnies du 1° Bataillon. Le parc est vivement encerclé, les Allemands s'enfuient vers le village et de nombreux prisonniers sont faits par les Américains.

Aussitôt, le 60 Bataillon, qui a soutenu le mouvement en avant du 1° Bataillon, reprend sa marche et, malgré les rafales, combinées de mitrailleuses et d'artillerie lourde, il parvient à gaguer les Baraques des 5 chemins, réalisant ainsi une nouvelle avance d'un kilomètre.

C'est au cours de cette progression que le Capitaine Jacquemot, Commandant la 210 Compagnie, est blessé, pendant le combat que livre sa Compagnie pour aider le R. I.

C. M. à s'emparer de la ferme de Montrembœuf. Le Capitaine Dorey, Commandant le Bataillon R. I. C. M., dans une lettre adressée au Commandant du 60 Bataillon de Tirailleurs, s'est fait un devoir de signaler la belle con- duite du Capitaine Jacquemot de la 21° Compagnie. Ce té-

moignage consncre officiellement la belle camaraderie.

d'armes qui, nu combat, a toujours régné entre le R. I. C. M.

et le 4° Mixte de la même Brigade, la 40 Brigade dù Maroc.

La nuit est venue, le Bataillon Meffrey est en liaison à droite avec le R. I. C. M. vers la ferme de Montrembœuf. A gauche, un trou existe, car les Américains n'ont pu encore débouther de Vierzy. Qu'importe 1 se flanquant par des petits-postes poussés sur la gauche, le 6° Bataillon profite de la nuit pour prendre position en avant des 5 chemins en vue de l'attaque du lendemain.

L'attaque recommence le 19. A 6 h. 15, nouveau bond de 500 mètres sous un feu meurtrier de mitrailleuses : impos-


sible de pousser au-delà, il faut se terrer dans les champs de blé.

Arrivent les chars d'assaut; et, renforcé d'autre part par une compagnie du 3° Bataillon Deranque un dernier effort amène ce qui reste du 6° Bataillon et de la Compagnie Le Drenou sur la route Tigny, Parcy-Tigny qui est dépassée de 100 mètres.

L'avance n'a pu être poussée au-delà : car si, à droite; nous maintenons le contact avec le R. I. C. M., à gauche, Tigny demeure toujours aux mains de l'ennemi. Les mitrailleuses nous prennent de flanc et nous infligent des pertes sévères.

Le 7° Bataillon, commandé par le Capitaine Mougin relève le 6° Bataillon à bout de force; d'autre part, la 55° D. I. a relevé la Division Américaine.

Dans la journée du 20, le 11° Tirailleurs, qui est à la gauche du Régiment, attaque vigoureusement Tigny, mais ne peut se maintenir dans le village; le 21 avec l'aide de chars d'assaut et d'une puissante préparation d'artillerie lourde, ce régiment renouvelle en vain ses assauts sur Tigny.

Le même jour, à 15 heures, la 38° D. I. reprend l'offensive; mais, de Tigny, les mitrailleuses ennemies nous prennent de flanc et arrêtent intantanément toute progression de notre part. Le Capitaine Mougin, Commandant le 7° Bataillon de Tirailleurs, est tué bravement en s'élançant à l'assaut des positions ennemies, entraînant par son exemple ses 2 Compagnies de première ligne qui doivent se terrer presque immédiatement. La réaction de l'artillerie ennemie s'accentue de plus en plus et nos premières lignes sont soumises à de violents bombardements.

L'effort fourni par le régiment, son état de fatigue, les pertes subies, nécessitent une relève. Elle a lieu dans la nuit du 22 au 23.

Au cours de ces quatre journées, le régiment avait capturé 950 prisonniers, 6 batteries dont 2 lourdes, plus de 150 mitrailleuses et il avait effectué une avance de 7 kilomètres. Mais il avait perdu plus de 700 des siens, dont 7 Officiers et 75 Hommes tués.

Une fois encore il venait de se montrer digne de ses morts, digne de ses anciens et de son passé, digne de ses glorieux émules de la 38° D. I. Tous Officiers, Sous-Officiers et Tirailleurs renouvelèrent les traditions de bra-


voure et d'héroïsme, d'enthousiasme, qui sont le patrimoine du 4° Mixte. La place manquerait pour rapporter tous les faits d'armes.

Le Lieutenant Aguilon et le Lieutenant Courvoisier furent faits Chevaliers de la Légion d'Honneur. Nous avons assisté à l'exploit du premier; le second, Officier de la 1° C. M. combattant de tous les instants, flanquait les vagues d'assaut dans le même temps qu'il réduisait les centres de résistance, facilitant ainsi la progression de tout un Bataillon.

Le Sergent Pipier, de la 22° Compagnie, reçut la Médaille Militaire. En face d'un feu crépitant de mitrailleuses, sa section d'autre part est prise d'enfilade; son chef tombe; lui n'hésite pas à prendre le commandement : il parcourt la ligne, encourage les uns et les autres, puis il décide de courir sus, à l'adversaire; il enlève ses camarades; et grâce à un mouvement habilement conçu, sème la panique parmi l'ennemi.

Il faut citer en exemple un combattant modeste, l'agent de liaison Travers qui, intrépide, parcourt le champ de bataille, apparaissant aux moments les plus critiques, venant de très loin sous les balles et les obus toujours avec cette démarche tranquille et. assurée qui lui permèttra de tenir jusqu'au bout. Cette fois, une des sections de sa Compagnie s'est trouvée dans une situation très périlleuse; rien ne l'a arrêté; et à aucun moment, son commandant de Compagnie — qu'il vint d'ailleurs à plusieurs reprises renseigner bénévolement — n'est resté dans l'ignorance de ce qui se passait.

L'ordre général de la X° Armée, consacre une cinquième fois, en ces termes, la valeur du 4° Mixte : « Régiment d'élite, qui a montré une fois de plus qu'on pouvait entièrement compter sur lui. Le 18 Juillet, énergiquement commandé par le Chef dé Bataillon Dhomme, renforcé par le Bataillon Deranque du 8° Tirailleurs, est parti à l'assaut avec un entrain merveilleux, brisant toutes les résistances, refoulant l'ensemble sur une profondeur de 7 kilomètres, lui faisant subir des pertes cruelles et capturant 950 prisonniers, 26 canons, 150 mitrail leuses et un nombreux matériel. »

,.. Sans répit, le 4° Régiment Mixte va poursuivre sa ta-


che. Relevé le 22 juillet par un Corps anglais, il est dirigé sur la région de Perrefonds, Trosly-Breuil, où il incorpore d'importants renforts de jeunes classes. Puis, sans avoir eu le temps d'amalgamer ces nouvelles recrues, il remonte en ligne au Nord de la forêt de Laigue, dans le secteur de Saint-Léger-aux-Bois, en bordure de l'Oise, de Montmacq jusqu'à l'Ouest de Bailly. La rivière forme là une vaste boucle que l'ennemi occupe et que nous entourons.

Dans ce nouveau secteur, le régiment est soumis nuit et jour à de violents bombardements par obus à ypérite dont les effets sont accrus par la présence des bois qui retiennent près du sol les vapeurs délétères. Aussi le nombre des évacuations est-il considérable — près de 20 par jour. Le moral du 4° Mixte n'en est point atteint cependant, et pour tromper son attente le régiment entreprend dans la boucle de l'Oise une série de reconnaissances offensives dont l'exécution — dans des conditions topographiques déplorables, avec une rivière à dos — développera dans la troupe les qualités d'audace et de décision qu'elle possède déjà à un haut degré.

Ces petites opérations débutent le 11 Août par une reconnaissance du Lieutenant Salvat qui, avec 2 barques et 30 Tirailleurs de la 2° Compagnie, pousse une pointe sur les fermes de la Vçrrue et de Fernière, et enlève un poste allemand de 4 hommes et une mitraillette. Elles se déve roppent les 12 et 13 Août par l'entrée en action sur la rive droite de l'Oise de la Compagnie Jacquier, renforcée d'une section de mitrailleuses, chargée de nettoyer la boucle et de couvrir, le cas échéant, le passage de la rivière.

C'est dans ces circonstances que le 4° Mixte est appelé à prendre part à des opérations de plus grande envergure qui se préparent dans le voisinage et au cours desquelles il fera une ample moisson de lauriers. Ces opérations qui se déroulent du 13 au 29 Août, sont résumées dans le rapport ci-après du Colonel Vernois commandant le ré giment.

« Le 4° Mixte était en secteur dans la région de SaintLéger-aux-Bois, quand, le 13 août, il reçut l'ordre de venir prendre position à la gauche de la 15° D. I. à la lisière Nord du bois Saint-Mard : un bataillon en première ligne, un bataillon en soutien (éperon Ouest de Cosne), un bataillon au repos (Forêt de Laigue).


« Le 4° Mixte formait le régiment de droite de la 38®.

D. I., dont les trois régiments accolés tenaient le front depuis la creute Saint-Mard, à l'Est, jusqu'à Bailly et l'Oise, à l'Ouest. Cette division était destinée à participer à une offensive générale dans le but de rejeter l'ennemi au Nord de l'Oise et de le poursuivre.

« Dans le plan d'engagement de la 38° D. I., le 4° Mixte devait, avec deux bataillons en première ligne et un bataillon en soutien, enlever la première ligne boche (tranchée de Westphalie et de la Joute), puis successivement : la montagne des Rosettes, l'éperon du Four à Verre et le bois de Carlepont (partie Ouest du bois de la Montagne), les deux Maupas, Laigle, la partie Est de la forêt de Carlepont et atteindre l'Oise entre Pontoise (inclus) et le hameau de Mont-à-Lagache (inclus). « La Division — disait la phrase du plan d'engagement résumant la manœuvre à exécuter doit faire effort par' sa droite (8° Tirailleurs et 4° Mixte), en se liant à la 15° D. I. et enlever Carlepont et Laigue, pour couper à l'ennemi ses routes vers l'Est.

« L'opération se présentait pour le 4° Mixte sous un aspect particulièrement difficile : tant en raison de la nature tourmentée du terrain, coupé de ravins, couvert de

bois et parsemé de villages, que par l'accumulation des défenses créées au cours de quatre années de guerre sur un champ de bataille passif ; réseaux de fil de fer étendus dans les bois, organisations préparées de longue main par les Boches en utilisant les lignes et les obstacles du terrain; en particulier la montagne des Rosettes et surtout l'eperon du bois de Carlepont, au Nord du Four à Verre, auquel deux lignes de tranchées superposées, des batteries de M. W., installées sous bois sur le plateau, et les - solides et vastes creutes Monseigneur et de la Montagne donnaient le caractère d'une citadelle.

« Le 4° Mixte, à qui allait incomber la lourde, mais glorieuse tâche d'enlever ces défenses et d'ouvrir aux autres troupes de la Division l'accès de la plaine de Carlepont et des Maupas, se trouvait beaucoup moins en forme qu'il ne l'avait été à la veille de toutes les précédentes actions offensives auxquelles il avait pris part. L'offensive du 18 au 22 juillet vers Longpont, lui avait coûté les meilleurs de ses officiers et de ses cadres. En outre, pour remplacer les 825 hommes mis hors de combat dans ces journées de lutte


sanglante, le régiment n'avait reçu qu'un renfort de 775 jeunes tirailleurs, insuffisamment instruits et dont la plupart n'étaient arrivés que quelques jours avant la montée du régiment en secteur (un renfort de 500 hommes, le jour même).

« L'amalgame indispensable, quand il s'agit des troupes indigènes, entre anciens et jeunes, n'existait donc pas. Et, pour les deux causes indiquées ci-dessus, la valeur combative du régiment était fort amoindrie. Cependant, les événements vont montrer quel prodigieux ressort possédait cette troupe, et de quel effort elle était encore capable grâce à l'énergie et à l'esprit de sacrifice de ses cadres et de ses anciens tirailleurs français et indigènes.

« Le 17 août, le Colonel commandant le 4° Mixte était avisé que son régiment aurait à exécuter le lendemain, en liaison avec la 15° D. I., une opération offensive à objectif limité ayant pour but de s'emparer de la montagne des Rosettes et de prendre pied sur l'éperon au Nord du Four à Verre. Cette opération devait être appuyée à gauche par un bataillon du 8° Tirailleurs qui, une fois l'objectif atteint, servirait de liaison entre le nouveau front du 4° Mixte et l'ancien front de la D. I. à l'Ouest.

« Le 17, dans la nuit, les trois bataillons du 4" Mixte prenaient leurs emplacements de combat : deux bataillons accolés en première ligne (Bataillon Meffrey à droite, Bataillon Bisserier à gauche); le Bataillon Pineau, en réserve, dans les creutes de Viezignieux.

« Le 18 août, à 18 heures, en exécution des ordres donnés par le Colonel commandant le 4° Mixte : le Bataillon Meffrey, en liaison avec la 15° D. I., attaquait la droite, en avant, pour prendre pied sur l'éperon au Nord du Four à Verre et déborder par le flanc Est la montagne des Rosettes, sur laquelle marchait le Bataillon Bisserier en la débordant par le flanc Ouest.

« La Compagnie de mitrailleuses Jourdan (du Bataillon Pineau), installée sur l'éperon à l'Ouest de Cosne, faisait du tir indirect, pendant la préparation de l'artillerie et durant une partie de la progression de l'infanterie, balayant de ses balles le sommet de la montagne des Rosettes.

« Le Commandant Pineau poussait une de ses Compagnies d'infanterie de la creute de Viezignieux dans les tranchées de départ, en soutien éventuel des deux bataillons d'attaque.

(4. Mixte), feuille 6


« Apxès de vifs engagements au fusil F. M., voire à la grenade, la montagne des Rosettes était enlevée à 20 heuies environ, le Bataillon Bisserier en occupait les pentes Nord et Ouest en liaison avec le 8° Tirailleurs à gauche, et à droite avec la Compagnie Pasquier (du Bataillon Meffrey), qui tenait les pentes Est.

« La Compagnie de droite du Bataillon Meffrey (Compagnie Fouquet), n'avait pu enlever l'éperon du Four à Verre, formidablement organisé et défendu; elle s'était accrochée aux premières pentes de cet éperon et cherchait à travers bois la liaison avec le 10° R. I. (15° D. I.).

« Le chiffre des prisonniers faits au cours de cet engagement s'élevait a 62, appartenant au 8° Rés., 120 Rés., 58° Btn d'Artillerie.

« Nos pertes s'élevaient à 138 (tués, blessés, intoxiqués.

disparus).

« Le 19 août, ordre parvenait au Colonel commandant le 4° Mixte que le mouvement en avant était momentanément suspendu. Les deux bataillons (Meffrey et Bisserier) se retranchaient sur place et se mettaient en mesure de repousser toute contre-attaque ennemie. Un peloton de la Compagnie Sauveton (du Bataillon Pineau), était porté dans les parallèles de départ en soutien du Bataillon Bisserier, l'emploi de la Compagnie Jacquier .(du même Bataillon), en place dans les tranchées de départ depuis la veille, étant plus spécialement prévu comme soutien éventuel du Bataillon Meffrey.

« Le 20 août, l'attaque générale était reprise à 7 h. 10; la manœuvre restant, dans son ensemble, ce qui avait été prévu dans le premier ordre définissant la mission de la 38° D. 1.

« Au 4° Mixte, le Bataillon Meffrey avait pour mission d'enlever l'éperon du Four à Verre et le système de tranchées (Zaïre et des Vandales), qui prolongeaient vers le Nord l'organisation défensive de l'éperon; pendant que le Bataillon Bisserier débouchant du bois des Rosettes marcherait sur la Motte-Ferme, et le Grand-Maupas; et que le Bataillon Pineau, contournant par l'Ouest la montagne des Rosettes viendrait par un mouvement de glissement vers la droite s'intercaler entre le Bataillon Bisserier et le Bataillon Meffrey pour déborder ensuite par l'Est Grand-Maupas et Petit-Maupas.


« Partant du ravin au Sud du Four à Verre (Compagnie Fouquet), et du flanc Est de la montagne des Rosettes (Compagnie Pasquier), le Bataillon Meffrey attaquait avec acharnement l'éperon du Four à Verre. La lutte était des plus rudes. Des deux tranchées superposées de l'éperon, les Boches faisaient pleuvoir sur les tirailleurs de la Compagnie Fouquet une grêle de balles de mitrailleuses et des grenades, qu'appuyaient de leur tir des M. W. placés sur le plateau dans le voisinage de la creute Monseigneur.

Ayant perdu plus de la moitié de son effectif, la Compagnie Fouquet ne pouvait progresser; elle luttnit désespérément en s'accrochant au terrain.

« La Compagnie Pasquier, après des efforts opiniâtres, avait pu prendre pied vers 10 heures, dans la tranchée des Vandales (à 300 mètres environ au .Nord du Four à Verre), mais les assaillants pris d'enfilade par le tir de nombreuses mitrailleuses boches étaient contraints d'évacuer la tranchée.

« Le Colonel Vernois demandait alors au Colonel Regnier le renfort d'une Compagnie tirée de la réserve de l'I. D. qu'il placerait en réserve dans le voisinage de la creute Saint-Mard et ordonnait au Commandant Meffrey de reprendre, avec l'aide de sa Compagnie de soutien (une section en renfort à la Compagnie Fouquet, trois sections en renfort à la Compagnie Pasquier), l'attaque de l'éperon.

« Pendant que le Bataillon Meffrey soutenait contre les défenseurs de l'éperon du Four à Verre cette lutte disproportionnée, le Bataillon Bisserier débouchant du bois des Rosettes progressait, malgré les tirs des mitrailleuses ennemies qui garnissaient les lisières Sud de Carlepont et de Grand-Maupas, dans la direction de la Motte-Ferme qu'il atteignait vers 10 h. 50.

« Au sortir du bois des Rosettes, le Bataillon Pineau s'était déployé face au Nord-Est, à droite du Bataillon Bisserier et, sous les rafales des mitrailleuses boches placées dans la tranchée des Vandales, marchait dans la direction de l'extrémité Est de Grand-Maupas, mais il ne pouvait dépasser le ru du Moulin et la route de Carlepont - Four à Verre. Il était environ midi, le bataillon ne comptait guère plus de 120 hommes en ligne et sa Compagnie de mitrailleuses ne pouvait plus servir que 3 pièces.

« Soutenue, comme il a été dit plus haut, par les trois sections de la Compagnie Bouchez, la Compagnie Pasquier


reprenait dans l'après-midi avec une opiniâtreté invincible la série de ses attaques sur la tranchée des Vandales. A 16 heures, enfin, elle parvenait à s'en rendre maîtresse et progressait vers le Nord pendant qu'une fraction de la Compagnie Bouchez se rabattant à droite par la tranchée de Zaïre sur l'éperon du Four à Verre, ouvrait à la Compagnie Fouquet l'accès du plateau.

« Le Bataillon Pineau, profitant du succès de la Compagnie Pasquier, poussait immédiatement ses éléments de tête au-delà de la route de Carlepont - Four à Verre et occupait dans cette partie ta ligne de résistance ennemie.

« A 19 heures, la résistance de l'ennemi était définitivement rompue et la situation du 4° Mixte était la suivante : Le Bataillon Meffrey, rassemblé en position d'attente à la lisière du bois de Carlepont, 600 mètres au Sud de PetitMaupas; — le Bataillon Pineau, à l'Ouest du Bataillon Meffrey, entre le chemin du Four à Verre à Petit-Maupas et la corne Nord-Ouest du bois de Carlepont; — lé Bataillon Bisserier, à la Motte-Ferme, avec des éléments à l'Est dans la tranchée des Vandales.

« Nos patrouilles refoulaient les arrière-gardes boches sur Petit-Maupas où se dévoilaient des mitrailleuses ennemies.

« Après une journ j de très durs combats, la position ennemie, solidement établie sur les hauteurs du Four à Verre, la crête Ouest du bois de Carlepont, les lisières Sud du Grand-Maupas et de Carlepont, était enfin forcée grâce à l'ardeur, à la ténacité et surtout à l'opiniâtreté des Bataillons Meffrey, Pineau et Bisserier, qui, dix fois dans la journée, étaient revenus à l'assaut de positions formidablement organisées et défendues avec acharnement.

« Dans la nuit du 20 au 21 août, le Colonel commandant le 4° Mixte envoyait l'ordre : au Bataillon Pineau de se porter immédiatement à Petit-Maupas et de pousser de ce point des patrouilles vers Laigle et le bois au Sud pour chercher la liaison avec le 10° R. I.; — au Bataillon Bisserier de se porter à la lisière Sud-Est de Grand-Maupas. Le Colonel mettait à la disposition du Commandant Meffrey la Compagnie de Zouaves venue de la réserve de l'I. D.; cette compagnie rejoignait immédiatement le Bataillon Meffrey sur son emplacement.

, « Le 21 août, à 6 h. 15', sur l'ordre qui en était venu de la 38° D. I., le 4° Mixte reprenait sa marche droit au Nord


en liant son mouvement à droite avec le 10° R. I. pour venir border l'Oise, de Mont-à-Lagache (inclus) à Pontoise (inclus)

« Le dispositif adopté comportait : deux bataillons en première ligne (Bataillon Pineau à droite), (Bataillon Bisserier à gauche) ; un bataillon en deuxième ligne (Bataillon Meffrcy).

« La progression s'exécutait en deux bonds : Premier bond, de la région des Maupas au carrefour de l'Etoile de Laigle, où l'artillerie devait appuyer le forcement de la ligne d'arrêt ennemie; Laigle, boucle en M sur l'Oise; — Deuxième bond : du carrefour de l'Etoile de Laigle à l'objectif final qui fut atteint vers 8 h. 30'.

« Au cours de cette marche, des indices nombreux (matériel de toute nature abandonné sur le bord des chemins) d'une retraite précipitée de l'ennemi étaient relevés.

« L'occupation de la position sur l'Oise était assurée : 1° par les deux bataillons de première ligne échelonnés en profondeur, tenant, celui de droite Pontoise et ses abords, celui de gauche Couarcy et le hameau de Mont-à-Lagache; — 20 le Bataillon Meffrey, réserve de sous-secteur, était en formation de rassemblement dans le voisinage de la ferme de Courcelles.

« Aussitôt arrivés sur l'Oise, les bataillons de première ligne s'occupaient activement de rassembler des moyens de passage pour jeter sans tarder des reconnaissances sur la rive droite de la rivière.

« Une de celles-ci (du Bataillon Pineau) enlevait le 21 août à 16 heures, sur la rive droite de l'Oise, un petit poste de 7 hommes.

« Nos patrouilles et reconnaissances conservaient partout le contact de l'ennemi qui se repliait sur les boquetaux situés dans la boucle de l'Oise et sur le canal. ».

Le 22 août, le 4° Mixte renforce les détachements qu'il avait jetés de l'autre côté de l'Oise; il se constitue, sur la rive droite de la rivière, dans la boucle qu'elle forme au Sud de Morlincourt, de fortes avant-gardes destinées le cas échéant à couvrir le franchissement de la rivière par tout le régiment.Du 22 au 27 août, combats d'avant-postes sur la rive droite de l'Oise pour assurer le nettoyage de la boucle.

Le 28 août, la 37° D. I., placée à la gauche de la 380, se porte à l'attaque du mont Renaud et de Royon, son mouve-


ment est appuyé par la 38° D. I.; le 4° Mixte, renforcé par des éléments du 10° R. I., commence une série d'opérations qui, après une lutte pied à pied tenace et violente, le rend maître de la lisière Est de Morlincourt et de tout le terrain compris entre le canal et l'Oise jusqu'à 1 kilomètre 500 à l'Est de Varesnes.

C'est dans cette situation que le trouve le 31 août l'ordre de relève qui le ramène en arrière dans le bois de Cariepont pour souffler un peu après ces rudes journées de combat et se reconstituer.

Les pertes totales du régiment, au cours de ces journées, s'élevaient à : officiers : 1 tué, 11 blessés ou intoxiqués, 3 disparus; troupe : 47 tués, 852 blessés ou intoxiqués, 3 disparus.

Les effectifs de certaines compagnies étaient à ce point appauvris qu'il avait fallu procéder au fusionnement de deux bataillons en un seul.

Parmi les nombreux actes de bravoure, d'héroïsme même, accomplis au cours de ces opérations, il faut citer ceux-ci : Le 18 Août, le Sergent Briansoulet, marchant en tête d'une reconnaissance qui a pénétré dans les lignes boches, tombe sur un groupe que commande un officier; il abat l'officier d'un coup de pistolet, met en fuite les soldats et rentre dans nos tranchées en rapportant d'importants renseignements.

Le même jour, le Tirailleur Mosbah Ben Mohamed Ben Amar, détaché comme patrouilleur en avant de la section arrêtée dans sa marche par le tir d'une mitrailleuse, s'élance sur l'ennemi, tue ou blesse à coups de grenades les servants et s'empare de 3 Allemands et de la mitrailleuse.

Le 21 Août, le Tirailleur Lerognon, en patrouille sur les bords de l'Oise, aperçoit sur la rive opposée un petit poste allemand de 7 hommes; il dispose des patrouilleurs, leur enjoint de ne tirer qu'à son signal, et lui-même traversant l'Oise à la nage surprend le petit-poste. le "ait prisonnier en entier et s'empare d'une mitrailleuse.

De même le Sergent Trinquier, commandant une section de mitrailleuses, fait subir à l'ennemi des pertes importantes, et aidé de quelques tirailleurs, capture 50 soldats boches, s


Une citation à l'Ordre de la X" Armée, la 60 depuis le mois d'octobre 1916, vient affirmer à nouveau les mérites du 4" Mixte: « Régiment d'élite. Sous le commandement du Colonel « Vernois est parti à l'attaque les 19 et 20 août 1918 avec « un entrain merveilleux. Arrêté un moment par l'ennemi.

« qui occupait une position formidablement défendue par « des mitrailleuses en nombre considérable et qui lui eau« saient'tles pertes sévères, l'a manœuvré et obligé à une « retraite précipitée. Continuant la poursuite, est arrivé ail « bord de la rivière sur les talons de l'ennemi, l'empê« chant de détruire les passerelles qu'il y avait installées, « réalisant ainsi une avance de près de 10 kilomètres, fai- « sant plus de 100 prisonniers, s'emparant de deux canons « et d'un matériel considérable. »

Cette citation entraîne l'attribution de la fourragère rouge, apanage de quelques régiments illustres, et que, de tous les régiments de tirailleurs — ses aînés — le 4° Mixte est le premier à obtenir.

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2? Du 16 Septembre au 11 Novembre 1918 Alors commence une longue période reposante, féconde en impressions nouvelles.

Tout d'abord, embarqué en camions-autos, le 6 septembre à Tracy-le-Val, le régiment va cantonner près d'Estrées-Saint-Denis, dans les villages de Moyvillers et Arcy.

Pendant dix jours il se réorganise et goûte en paix un repos bien gagné.

Le 16 il s'embarque en chemin de fer, et le 17 il débarque dans la région de Montbéliard.

C'est de 1 £ que, par étapes, il gagne la Haute-Alsace dont pour la première fois, il foule le sol sacré. La Division entre en secteur dans la région dé Dannemarie. Le régiment, lui, est tout d'abord en réserve à Chavannes-sur-L'Etang, près de Montreux-Vieux, à quelques pas de l'ancienne frontière. La troupe est employée à des travaux d'organisation d'une position de résistance. De plus, Je régiment est chargé de l'information d'une Brigade américaine de la 88° D. I. U. S. Nos instructeurs, 7 officiers et 18 sous-officiers, sont envoyés dans les Corps Américains où, enseignant nos procédés d'instruction et nos méthodes de com-


bat, ils portent à nos alliés le fruit d'une expérience acquise au cours de quatre années de guerre.

C'est à ce moment que le chancelier allemand, Max de Bade, lance à travers le monde le message par lequel il demande au Président Wilson d'intervenir pour que la paix soit conclue. Mais eh France, on est incrédule. L'heure ne semble pas être venue; nous sommes sur le chemin de la victoire, nous avons, dans l'adversité, juré d'aller jusqu'au bout; il faut aller jusqu'au bout du triomphe.

Et le 11 octobre, le 4° Mixte monte en ligne à l'aile droite de la Division — sous-secteur de Rechesy en bordure de la frontière suisse. Le pays est très séduisant; les vallons s'enchevêtrent, tantôt couverts de riches cultures, tantôt chevelus de bois épais. Les tranchées commencent à proximité des villages alsaciens que la guerre semble avoir respectés, tant la France a apporté de soins et d'ingéniosité à les soustraire aux bombardements. Entre les lignes, vers la droite extrême du secteur, des sentinelles suisses veillent. Un calme serein règne sur toute la contrée. Les tirailleurs ont vécu quatre ans sans soupçonner que, quelque part, le front pût revêtir un tel aspect.

Le i" novembre, le régiment est relevé par le 2° Régiment de Tirailleurs Marocains. Le 5 il se met en route pour une série d'étapes qui, par Méricourt, Fretey-les-Lure, Citers, Remircmont, le conduisent dans la région où la .Division se concentre.

Et c'est le 9 novembre, an camp d'Arches, au cours d'une revue que le Général de Castelnau, commandant le G. A.

E. accroche au glorieux Drapeau du 4° Mixte, en présence de son Colonel et d'une délégation, la fourragère à la couleur de la Légion d'honneur. Cette fourragère, il l'a conquise à Douaumont, à Louvemont; il l'a anoblie à Bier- mont, à Chavignon, et rougic de son sang à Longpont et Carlepont, dépensant sa jeunesse, sa bravoure, son inépuisable esprit de saerifice. Des milliers de ses tirailleurs l'ont payée de leur vie. Salut, ô morts du 4° Mixte!

Cependant, arrivé le 10 à Saint-Nabord, le régiment, la nuit même, à minuit, se remet en marche. Le 10 déjà l'éta.

pe a été rude. Mais le bruit s'est répandu que le Maréchal Foch a choisi ce secteur de Lorraine pour y frapper le coup de grâce. Depuis le mois d'août, l'ennemi est en retraite; son repli peu à peu s'est précipité; aujourd'hui il est désordonné.De la frontière hollandaise au pivot de Lor-


raine, à travers la Belgique qui renaît et les Ardennes dont on libère un lambeau à chaque heure, les Allemands en déroute reçoivent chaque jour un coup plus cruel d'un adversaire implacable. Chaque matin, depuis trois mois, nos journaux publient un nouveau bulletin de victoire. Le Kaiser s'est enfui, entraînant son fils dans la chute; la révolution a éclaté à Hambourg, en Bavière, sur la Ruhr, à Berlin. Des plénipotentiaires sont venus apporter au Maréchal Foch la supplication de l'Allemagne assassine; ils sont repartis chargés de ses exigences formelles. Et la France, attendant leur réponse, lève un poing crispé pour-un dernier coup.

C'est pourquoi, dans les rangs du 40 Mixte qui, par marches forcées gagne le front où se prépare l'ultime offensive, il n'y a pas un seul traînard malgré le manque de sommeil et la fatigue.

Le 11 on fait halte à Deyvillers. Et c'est là que soudain retentit comme un coup de tonnerre l'étonnante nouvelle : « L'armistice a été signé ce matin à 5 heures. Les hostilités ont été suspendues à 11 heures. »

La France est victorieuse !

Entendez, vétérans, jeunes soldats, et vous enfants de la France d'Afrique ! Entendez, mutilés et vous, cadavres de Lassigny, de l'Artois, de Verdun, du Chemin des Dames, de l'Oise, sous la terre trempée de sang où vous a couchés la mitraille ! Entendez, veuves, orphelins, mères vêtues de deuil : « La France est Victorieuse ! Vive la France ! .» Et puis, un calme grandiose s'épand sur les cantonnements. Fatigue excessive ? Immense recueillement ? Ou bien n'est-ce pas peut-être que monte au cœur des braves entre les plus braves, enfants chéris de la Victoire, la réminiscence du chant de toutes les enfances : « les lauriers sont coupés ! »


L'APOTHÉOSE � L'Alsace Retrouvée

Il y a des émotions devant lesquelles les mois sont lettres closes: et des soirs où l'on voudrait pouvoir écrire avec ses larmes.

Alsace, le 17 Itorembre 4918.

Alors s'avancent les heures inoubliables d'Alsace. �

L'une des conséquences immédiates de l'armistice du Maréchal Foch est que, le 17 novembre, à 5 heures, par tous les cols de l'ancienne frontière des Vosges, les armées françaises entreront en" Alsace. La 38° Division, que le Général Pétain a baptisée l'une des premières Divisions de France, appelée huit jours plus tôt à faire partie de l'armée qui devait frapper le coup de grâce, sera de celles qui accompliront cette mission historique.

Donc, dans la nuit du 16 au 17, le 4° Mixte, par Docelle, Corcieux, Fraize, Plainfing, s'avance vers l'Alsace. Une joie intense fait battre les coeurs, c'est une journée mémo-

rable qui se lève. Par la route tortueuse qui grimpe au flanc de la montagne, au début du jour, le régiment arrive au col du Bonhomme. Il le franchit à 8 heures; il franchit l'ancienne frontière, celle que la botte prussienne a jalonnée il y a quarante-huit ans.

L'émotion est indicible. Mais déjà, en chantant, les bataillons dévalent la pente Est, celle que les Allemands ont crue la leur. Il n'y- a plus de Vogesen ! Il n'y a plus que des Vosges françaises! Les chansons de route se répercutent dans la forêt, l'allure est rapide, on a hâte de les voir, ces Alsaciens retrouvés, et d'éprouver leur accueil.

Dans la vallée profonde, on atteint les anciennes lignes, on les escalade joyeusement. Mais soudain, la fanfare des clairons éclate : les lignes allemandes s'appuyaient au village en ruines du Bonhomme; et le régiment traverse le Bonhomme, le premier vililage d'Alsace. Quelques habi-


tants ont voulu être là, parmi les décombres de leur hameau évacué, pour y recevoir les Français. Lequel d'entre nous ne garde leur image? Ils étaient dix peut-être, parmi lesquels cette enfant de 15 ans, vêtue de blanc et ceinte de l'écharpe tricolore, dix en tout, hommes et femmes, qui criaient : « Vive la France!. », les bras chargés de fleurs et qui pleuraient. Plus loin, au premier étage d'une maison qui tient encore,un petit vieillard a jeté sa casquette; il tend ses bras, et impuissant à rien dire, montrant de temps en temps sa gorge que la-joie étrangle, il balance son corps avec le rythme" d'une bénédiction.

Sur la route, des enfants passent et crient : « Vive la France!. » en soulevant leurs chapeaux. L'un dit : « Ils vous attendent à la Poutroye!. »- Du plus loin qu'on l'aperçoive, le village apparaît pavoisé de drapeaux sans nombre. Le régiment approche. Oui, on l'attend à la Poutroye!

Car bientôt, avant même qu'il n'atteigne les premières maisons, une acclamation lointaine, 'immense, retentit qui ne s'arrêtera plus : « Vive la France! Vive la France!. » Làbas, sur la grand' Place, la foule est massée. Mais dès les premiers seuils, des chapeaux, des mouchoirs, des drapeaux s'agitent : « Vivent les Libérateurs!. » Les enfants, sur le pas des portes sonnent les clochettes de l'allégresse; les femmes jettent des fleurs; les mères élèvent au-dessus de leurs têtes leurs nourrissons êffarés. L'une d'elles brandit le sien, et le poussaant jusque dans les bras d'un sousofficier supplie : « Embrassez-le!. Embrassez-le!. » Les filles envoient des baisers; et les vieux, qui ont souffert l'amertume de l'exil, tendent au b.out de leurs bras tremblants leur médaille de 70.

Magnifiquement, les Tirailleurs défilent. Ils atteignent la place de la Mairie, où, entourés d'Alsaciennes en costume traditionnel et des notables en redingotes et chapeaux hauts-de-forme, le Général Dufieux, commandant la Division, et son Etat-Major, les attendent. Et c'est le même cri, - toujours, qui jaillit de ces poitrines où battent des cœurs qui n'ont jamais désespéré. Un vieillard s'avance, les mains tendues, et dit : « Comme nous vous avons attendus!. »

Et l'on pense qu'au matin, tandis qu'ils endossaient leurs habits de fête, ils se sont dit, la gorge serrée et les yeux humides : « Voici le dernier matin que nous les attendons !. » � •


Il y a des drapeaux partout. Pourtant les Allemands ne sont pas loin : ils sont partis hier soir. De ces drapeaux, il y en a — on nous les a montrés et nous les avons bien reconnus — que l'on a sortis avec émotion du coin secret de grenier où ils ont dormi 48 ans. Les autres, on a passé dans chaque maison toute la nuit à les faire avec des linges de fortune : des serviettes ont été teintes en bleu; des édredons rouges ont été éventrés; les femmes ont cousu, les hommes ont assisté, plein de respect. Ah! la belle nuit blanche, la veillée des drapeaux!

Et le 4° Mixte poursuit sa marche triomphale. Mais les incidents abondent; il faut en passer. Déroutés par ces uniformes kakis que les lithographies anciennes, gardées pieusement dans le mystère des tiroirs, n'ont jamais reproduits, certains demandent : « Qu'est-ce qu'ils sont? »

Quelqu'un a dit : « Des Turcos » Alors le mot fait fortune, il traverse la foule, vole de bouche en bouche : « Les Turcos ! les Turcos ! » On crie : « Vivent les Turcos ! » On crie n'importe quoi, d'ailleurs, car la joie est en délire; un vieillard à bout d'enthousiasme clame : « Vive Napoléon » Le 6° Bataillon cantonne cé soir-là dans la vieille bourgade pittoresque de Kaysersberg où tout le reste du jour serrant des mains et criant : Vive ma France ! Vive ma France!. a se promène ce vieux lignard à moustache blanche, cet ancien combattant de 70 qui a exhibé de sa cachette son vieil uniforme, pantalon rouge, tunique croisée, képi pompon; l'Etat-Major et les autres bataillons cantonnent à Hachinete, Frelong, Orbey. Partout ce ne sont que bals, chansons, libations. Partout c'est le même accueil généreux. Ils ont ouvert les paysans d'Alsace, leurs celliers, leurs caves, leurs maisons. Et ils disent : « Venez chez nous; tout ce qui est chez nous vous appartient !.

Nous voudrions vous donner à manger, mais vous avez bien plus que nous, qui depuis 4 ans ne mangeons plus à notre faim Seulement nous avons de bons lits profonds pour le repos de vos corps, et nous avons le vin d'Alsace ! Buvez, Buvez 1 Nous ne vous donnerons jamais assez : tout ce qui est à nous vous appartient ! »

Ils regardent avec une admiration voisine de l'ahurissement tout ce qui sort de nos roulantes : ils disent : « Quel beau pain ! » ; lorsque passent des cyclistes, ils se


crient les uns aux autres : « Ils ont encore du caoutchouc eux ! » et ils s'esclaffent. L'Alsace n'est plus qu'amour et foi : on pense aux quelques âmes moroses qui ont douté de sa fidélité

Le 18, par Kaysersberg, Kiestehein, Sicolsheim, Bettwilir, Mittelwihr, Belblenheim, Ostheim, Gemard, le régiment va cantonner à Illhausern, Elsenhein, Ohnehnehim.

C'est partout le même enthousiasme. Les routes regorgent des populations qui se rendent à Colmar; car les Français entrent aujourd'hui dans le Chef-lieu du Haut-Rhin. De toutes les voitures, où se pressent des gens en habits de fête des chapeaux et des mouchoirs s'agitent. Et c'est toujours le même vivat. Personne ne passe sans crier : « Vive la France ! » .Une femme prend tout le monde à témoin : « C'est une autre vie qui commence 1 n'est-cepas ? C'est une autre vie ! ». Pas un village qui ne soit richement pavoisé. Aux fenêtres, parmi les oriflammes et les fleurs s'exposent d'anciens chromos patriotiques qui reproduisent le plus souvent des épisodes de 70. Ici dans un buisson de feuillage, trône Jeanne d'Arc. A Sigolsheim un ancien maître d'armes, coiffé d'un vieux képi de fantassin, se promène affichant son brevet sur sa poitrine.

Le régiment, sur les traces des troupes allemandes qui se retirent, a deux fois l'occasion de les dominer. Elles vont, mal vêtues, minables, en désordre, sous les sarcasmes des Alsaciens qui se hâtent de hisser leurs drapeaux avant que l'oppresseur n'ait diparu. Ainsi à Markolsheim, une compagnie du 4° Mixte prend pssession du pont de bateaux. Après de brèves formalités, le détachement boche, sous la conduite de deux officiers, s'éloigne, pesant, sans discipline, sans tenue et, derrière lui, superbes, alertes, faisant sonner les talons, les tirailleurs s'avancent sous les vivats.

Ainsi se succèdent les journées de Markolsheim, Makenneim, Ohnenheim, Heidolsheim, et l'arrivée au bord du Rhin légendaire. Et puis vient la suite des nombreuses solennités. Tout d'abord, c'est le 25 Novembre, l'entrée du Maréchal Pétain à Strasbourg. Une importante délégation de chaque régiment de la 38° Division qui, pour avoir eu si souvent sa place à la peine, sera désormais fréquemment à l'honneur, doit l'y représenter.


Donc, le 25 Novembre, le maréchal Pétain entre à Strasbourg, et les détachements de la IVo Armée vont défiler. A 13 h. 30, en tête de tout le cortège, la délégation de la 38" D. I., sous le commandement du Général Dufieux, franchit la porte de Schirmeck et entre dans la ville en liesse.

Ces héros, ces vainqueurs îe rencontrent aujourd'hui solennellement avec ce qui, 48 ans, fut un idéal pour la France : entre les rangs pressés de ceux qu'ils ont sauvés de l'oppression, entre les maisons de Strasbourg couvertes des couleurs chéries, ils vont en colonne par huit, roides, aveuglés par toutes ces mains et tous ces trophées qui les saluent, étourdis par les cris d'amour de tant de poitrines, ivres de gloire ! « Vive la France ! Vive la France!. » La clameur ne s'apaisera plus!. Devant Kléber ils présentent les armes. Devant le Maréchal ils se redressent encore. Le grand chef, entouré d'un brillant Etat-Major et de tous les Généraux Commandant les Groupes d'Armées — Général de Castelneau, Général Fayolle, Général Maistre — se tient sur la place de la République, hier encore place Impériale. Mais voici, précédé par le Colonel Vernois, le 4° Régiment Mixte de Zouaves-Tirailleurs. Sa nouba déboite et fait défiler le régiment et son drapeau. Le Maréchal salue. Alors des applaudissements crépitent. De telles émotions sont inoubliables.

Une semaine plus tard, le reste du régiment qui a rallié Strasbourg vient s'associer à tant de joies. Déjà les fêtes succèdent aux fêtes, les cérémonies aux cérémonies.

Le 9 décembre, c'est devant le Président de la République, le Président Clemenceau, les 3 Maréchaux de France, les délégations du Sénat et de la Chambre des Députés, que le 4° Mixte défile. Les présidents, comme jadis le Général Joffre à Dannemarie, sont venus apporter à Strasbourg le baiser de la France.

Puis les fêtes de Noël et du Premier de l'An français viennent resserrer ces nouvelles amitiés. On danse partout tous les soirs, Strasbourg a retrouvé sa gaieté de vivre; sa joie est débordante.

C'est alors que commence au 4° Mixte la démobilisation des plus anciens échelons. Les premiers s'en vont, d'autres suivent On s'étonne de n'assister à aucune joie bruyante. Pattir, même vivant, c'est mourir un peu !

C'est mourir à ce régiment que l'en aime, et qui lui-même meurt un peu chaque jour! Lequel de nous osera pré-


tsndre qu'il partira le cœur léger, sans retourner la tête, sans laisser un peu de lui-même au sein de cette famil- le qui vit naître sa gloire, où il a subi les pires souffrances en accomplissant ses plus beaux gestes?

Mais fin janvier 1919, après un séjour de deux mois splendides,un changement survient. En exécution des clauses d'une nouvelle prolongation d'armistice, la 38° D. I.

passe sur la rive droite du Rhin et vient occuper dans l'ancien duché de Bade, la tête de pont de Kehl.

Le 30 janvier, à 8 h. 30 précédé par la nouba; un premier détachement, le Bataillon Bisserier — le Général Hirschauer, Gouverneur militaire de Strasbourg en tête — franchit le Rhin au Pont de Kehl. Enfin, dernière consécration de son éclatante victoire, le 4° Régiment Mixte foule le sol allemand et le foule en vainqueur, tandis que la population honteuse, dérobée dans ses maisons, risque à travers ses rideaux des regards curieux et apeurés. Sur la place de l'Eglise, le Bataillon défile devant le Général Gouverneur. Puis, il va s'installer dans le sous-secteur Sud (Goldscheuer, Marlen, Altenheim, Mullen, Hosselhurst, Eckartoweier) où le reste du régiment vient le rejoindre le 4 Février.

Le 4 avril, le 40 Mixte passe aux cantonnements de Kehl et de Strasbourg. Les 7 et 8 mai, il relève le 5° Tirailleurs dans le sous-secteur Nord (Bodersweier, Link, Zierodshofen, Holzhausen, Rhenbischosheim, Diersheim, Deutesheim) où il se trouve lorsque, le 29 juin, la paix est signée.

La population badoise apprit avec .effroi que les Français venaient s'installer chez elle, et même cet effroi devint de la terreur lorsqu'elle connut que les régiments — impitoyables aux anciens combats — avaient été choisis.

Il n'est pas de criminel qui ne redoute un châtiment au moins égal au mal qu'il a commis. Les Boches se souviennent de ce qu'ils ont fait chez nous : ils ont eu peur des représailles.

Mais les Français sont d'une autre race.

Ils en ont imposé par leur belle tenue. Ils sont fidèles à la forte parole que le Général Hirschauer a fait afficher sur les murs : « Ils ont été disciplinés dans la bataille; ils le sont dans la Victoire. »

L'Histoire, qui enregistrera les ravages que la France a subis, notera également la grandeur d'âme des vainqueurs!


EPILOGUE

C'est ainsi, à l'aurore de la paix, que s'achève l'histoire glorieuse d'un des premiers régiments d'assaut de France.

Il s'est battu souvent sans penser à manger, et quelquefois ayant épuisé ses dernières cartouches; il est resté des jours et des nuits sur la brèche, et lorsqu'il descendait enfin dans un cantonnement de repos qu'il avait bien gagné, il y restait quelques jours pour remonter aussitôt dans la fournaise; il a subi cinq fois l'épreuve de Verdun, dans la boue, la pluie, parmi la faim, la soif, la maladie, et cinq fois celle de l'Aisne dans la neige et parfois par 10° de froid; lorsque, alerté, on le transportait quelque part, c'était parce que l'heure était grave, et qu'il fallait savoir mourir!. Et pendant quatre années et demie de la plus ardue des campagnes, pas un mot ne sortit de ses rangs qui n'exprimât ces grands sentiments d'abnégation ou ces heureux sentiments d'insouciance dont est fait le plus bel esprit militaire!.

Il a traversé toute la guerre en se jouant de l'adversité, en méprisant la mort qui fut sa constante compagne, en inscrivant avec son sang son nom sur la plus grande page de l'Histoire. Nul régiment ne fut plus beau : aucun ne compta dans ses rangs plus de ces héros dont les gestes plongeront dans la reconnaissance les générations futures. Gloire à toi, ô 4° Mixte!.

Il était du 49 Mixte, ce Tabutiau qui, étendu par une douloureuse blessure sur le champ de bataille où pleuvaient les balles, se dressait à genoux et criait : « En avant!. Je ne compte plus,mais en avant quand-même!. En avant!.» Il était du 4° Mixte, ce caporal indigène qui, le bras déchiqueté, répondait aux exhortations du médecin : « Je m'en


fous de mourir. Vive la France!. » Il était du 4° Mixte, ce Capitaine Cornet, qui se faisait tuer en pansant ses tirailleurs sous le feu des mitrailleuses. Du 4° Mixte encore, ces Andries « contents de mourir ainsi », tous ces Lefebvre, ces Legorche qui exhalaient dans leur dernier souffle : « C'est pour la France!. Vive la France!. », et ce Salem ben Saïd Djemi, beau soldat, serviteur superbe, qui, couché par un éclat de gros obus, rouvrait ses yeux pour dire en souriant : « C'est le service!. », puis rendait sa belle âme à son Dieu. Du 40 Mixte toujours, ces Christofari, ces Michoud, ces Mainière qui couraient dix fois à la mort pour sauver un camarade inconnu et mourant. Du 4° Mixte enfin, ces Coume, ces Mahé et tant d'autres, qui ne se rendaient pas, luttaient comme des démons, tuaient, amoncelaient à leurs pieds des cadavres, et sortaient de l'enfer en riant!.

Merci à vous tous, Géants de l'Ere Nouvelle — qui est celle de la Justice et du Droit!. Merci aux Blessés, aux Mutilés, aux Morts!. Merci même aux plus humbles, à ceux qui, vous ayant aidés à porter le Flambeau, passent dans votre ombre le seuil de l'Histoire; merci au Lieutenant Gueirard, figure vivante du dévouement, courbée sur une besogne ingrate et inépuisable — qui vous ont assuré les armes dont vous avez vaincu l'ennemi, et les vêtements qui vous ont protégé contre le froid!. Merci au MédecinMajor Salzes — qui, au sein même de la mêlée, parcourant les champs de batailles, a, pendant quatre ans et demi, étanché le sang des blessures, et consacré sa compétence et son esprit de sacrifice à disputer à la mort, pour les rendre à leur Mère, les plus beaux enfants de la France!.

A

Et maintenant, Poilu du 4° Mixte, qui que tu sois : officier, troupier de Paris, paysan de Bretagne, cadet de Gascogne, tirailleur beylical. — quoique tu deviennes — laboureur, artisan, marchand, disciple ou maître — garde précieusement le souvenir de tant de beautés.

Sois fier, aime ton beau régiment : tu ne revivras jamais plus les émotions profondes que tu as connues sous les plis de son Drapeau.

D'autres besognes t'attendent; car la vie n'est qu'un seul labeur. Puisses-tu, au sein du vallon verdoyant où

(4e Mixte), feuille 1


fume ta modeste chaumière, ou dans ta ville puissante qu'agite une activité pacifique bienfaisante, auprès de ta mère, de ta compagne, de ta fiancée, et de tes enfants, — tes beaux enfants de vainqueur qui tendent pour ton cou le collier de leurs bras — puisses-tu trouver l'apaisement et toutes les joies que tu as bien conquis.

Mais déjà, qui que tu sois, et quel que soit ton âge, conçois que ton passé récent est riche du plus beau bonheur.

Heureux celui, qui au soleil de l'âge mûr, a sacrifié cinq années de sa vie au salut de l'Humanité I Heureux celui, - plus jeune, pour qui quelque vierge fidèle a gardé sa beauté, et chante en l'attendant sur le chemin, les paroles du poëte : « Il n'est pas un amant vulgaire, « Et sa grandeur est ma fierté!. »

Bodersweier (Bade) - 19 juin 1919.


AUX MORTS 1

- Que devons-nous aux morts — Rendre leur mort féconde, Et, pour qu'il n'en soit pas d'oubliés en ce monde, Grouper, chacun, les noms dont nous nous souvenons, Et ne pas vivre un jour sans réciter ces noms.

». ï^O^TAND.

LISTE DES MORTS POUR LA FRANCE (Période 1914-1919)

ASTOR Gaston-Augustin, lieutenant (15-12-16); ACHTE Abel-Chrysostôme,capitaine (18-7-18); BOULANGER LouisEmile-René, sous-lieutenant (6-6-18); BROUILLARD Nestor, sous-lieutenant (20-12-16); BROUSSIER Auguste-LucienPierre, sous-lieutenant (14-8-16); CHABODEE Jean, lieutenant (23-6-17); CHEVAUX André-Joseph-Antoine, souslieutenant (27-11-17); DELMAS Louis-Pierre-Bernard, souslieutenant (18-3-18); DE MONTERA Louis, sous-lieutenant (12-9-16); DUPONT Lucien, sous-lieutenant (19-8-18); FERRIERE Georges-Louis, lieutenant (16-5-18); GRIMONEST Maxime-Joseph-Auguste, sous-lieutenant (16-4-17); GUILLOTIN Marie-Georges, sous-lieutenant (18-9-18); JAUFFRET Paul-Léon-Joseph, chef de bataillon (30-3-18); LA-

CROIX Paul-Marie-Ambroise, médecin auxiliaire (19-7-18); • LEPAPE Georges-Edmond, capitaine (3-11-17); MADIN Paul, capitaine (21-7-18); MAFFRE-BAUGE Jean-Marie-Emmanuel-Louis, capitaine (25-9-15); MARCY Lucien-Joseph, sous-lieutenant (16-10-18); MEFTAH ben Mohamed ben Meftah, sous-lieutenant (3-7-18); MICAELLI Jean-Baptiste, sous-lieutenant (20-5-17); MOUGIN Paul-Henri, capitaine (21-7-18); PELLIER Panl-Jules-Victor-Marie, capitaine (238-16); POMPEI Joseph-Jean-Albert, sous-lieutenant (20-517); RICARD Adrien-Pierre, capitaine (16-4-17); VADON Stéphane-Marius,sous-lieutenant (23-10-17); VAUTIER Henri-Auguste, lieutenant (20-8-18); VUILLEMOT Clovis, souslieutenant (18-7-18); SALAH ben Abich (19-8-18); EL HADI TOUHAMI ben Hadj Khelil (29-6-16); HELLAL Mohamed el Aouiti el Hamraoui (25-4-16); LAHEURTE Paul-Henri, adjudant-chef (18-7-18); FRIMIGACCI Joseph,adjudant (178-16); AMMAR ben Mabrouk ben M'Barek ben Sebhan (118-16); AHMED ben Ahmed ben M'hamed ben Taleb (16-417); MOHAMED ben Hassin Abid, sergent (5-12-16); HASSEN ben M'Ahmed el Iman, caporal (25-9-15); ABDALLAH ben Ahmed (18-7-18); KHALIFA ben Mohamed Jouad (1-1215); SADOK ben Mohamed ben Hassin Belghits (12-6-16); YOUNES ben Mohamed el Hadad Tazarki (26-10-18); FRFDJ h en Mohamed Sonissi. sergent (23-10-17); SALAH


ben Mohamed ben Ali ben Brahim (16-6-16); AFFRE EmileFirmin-Joseph, adjudant (17-8-16); PUISEUX Laurent-Emmanuel Emile, adjudant-chef (18-7-18); ABDALLAH ben Mekki el Mahali (28-10-16); YOUNES ben Brahim ben Abdallah, sergent (19-12-16); AMMAR ben Ali Laabidi el Hachemi (5-9-18); BRAHIM ben Amor (10-6-18); ABDESSELEM ben Hadj el Hadi ben Mohamed (20-8-19); MESSAOUD ben El Arbi ben El Hadi Chaïeb (24-1-17); DAUDON Jacques (24-6-16); M'HAMED ben Ahmed Salah ben Taleb (11-4-17); TESSIER Jean-André, sergent (5-8-16); REBOULLET Jean-Victor, sergent (24-10-16); HASSIN ben Sliman el Djenzeri (16-4-17); BELGACEM ben Hadi Hamouda ben Chaâbane (23-10-17); VIGNEAU Jean-Roger, sergent (19-616); ALLIROL Jean-Antoine, sergent (25-4-17); MABROUK AMARA ben Zerbi (1-9-16); MARQUIS Auguste-Pierre, sergent (8-7-16); BRIC Paul, sergent (22-10-16); CHADLI ABDALLAH el, Fezani (16-8-16); MOHAMED ben Belgacem ben Amara, caporal (8-11-15); BERARDET Camille-Philibert, caporal (16-6-16); LECLERC Auguste-Pierre-Jacques, caporal (31-12-16); AMOR ben Ahmed Khamoussi (25-417); PITOU René-Auguste, sergent-major (27-3-16); BOUTEFA FREDJ CHATILI (25-9-15); ERBS Auguste, adjudant (16-4-17); NOVEL Léon-Petrus, sergent (19-6-16); NAGOUCH ABOUD ben Ahmed, caporal (25-9-15); MOHAMED MAHDI BOUCHI el Andoulsi (8-7-16); MARCELLESI JeanBaptiste, sergent (25-9-15); MOHAMED ABID ben Rahal el Gharbi (17-6-16); SALAH ben Maâtoug ben Moussa el Mehni (17-8-16); LAMASOU Pierre (21-6-17); BELKIR ben Amor el Herzi, caporal (30-4-15); EL HACHEMI ben Otsmane Lemeouchi (14-8-16); GELAI ben Abdallah ben Moussa el Khamoun (22-9-15); AMMAR ben Salah el Hannachi (118-16); PELLEGRIN Pierre-Emilien (6-1-19); MOHAMED ben Smaïl ben Ahmed Redjeb (23-10-17); ATHMAN ben Lakdar ben Atliman (19-8-16); GORSE Joseph, sergent (259-15); ASTRUC François-Julien, sergent (23 10-17); POLLET Emile-Maurice-Eugène, caporal (15-10-18); ALLARD Marius-Félicien, caporal (25-9-15); FREDJ ben Hassen el Kherbouche (18-5 15); CHIBA ben Mohamed el Benouri (30-4-15); DESCAZEAUX Emile-Edmond (1-6-18); OTMAN ben Abid ben Otman, sergent (25-9-15); AUMAGE PhilippeDenis, sergent (25-9 15); MONNIER Paul, sergent-fourrier (23-10-17); NIAUDOT Anselme, sergent (15-12-16); MARCHAL Ephrens-Joseph, sergent (9-6-16); LIOTARD Jules (12-8 15); MAILLARD Marcel-Ernest, caporal (16-6-16); RACHDI RABAH ben Ali, caporal (3-11-16); OROSCO VincentLéopold, caporal (20-4-17); GALLEA Philippe-Antoine, caporal (14-5 15); TISSOPIN Roger-Marius, caporal (5-9-15); CHASSAIGNE Sylvestre, caporal (20-5-16); TAHAR ben Ali ■ ben El Hadj M'Ahmed Bakar (26-4-16); MOSBAH ben M' Barek ben Abid, sergent (25-9-15); MOHAMED ben Hassen Abdel Hamid, sergent (19-7-18); RYKEBUSCH Elie-Joseph (12-7-15); BAGUE Gabriel, caporal (19-8-16); MONTI Francois-Michel (3-11-17); ROCHE Abel-Lucien (25-5-15); COLLIOT Georges-Louis, sergent (23-10-17); LABORDERIE Paul (18-8-16); RIBOT Albin-Emile-Jules, caporal (16-6-16); DUC André-Charlemagne-Gustave-Edmond, caporal (25-915); SLIMANE MANSOUR AHMED (31-5-18); BUQUET Henri-Edouard-Jean, caporal (25-9-15); LAURENT LéonFrançois, adjudant (1-5-15); CHANOIS François-Henri-Ed-


mond, sergent (25-9-15); MATTEI Antoine-Martin (25-9-15); ROUGIER Charles-André, caporal (18-8-16); TISSIER PaulNoël, caporal (23-12-16); BOYER Adrien-Fernand, sergent (31-5-18); HASSEN ben Ameur ben Rhelel, caporal (27-417); LAPEYRE Marie-Joseph-Henri, caporal-fourrier (14-716); ALI ben Zerroug ben Abdennebi (17-8-16); JONQUET Augustin-Albert-Charles-Laurent, caporal (18-12-16); LAURO Jules-Léon, caporal (29-10-17); LACAILLE Félix-Pierre (16-1-16); VIDUS Basile-Albert-Victor, caporal (20-9-18); GENTY Louis-Ferdinand (8-10-18); MAGNAN Paul-Auguste, caporal (24-10-15); OUANES BELAID ben Amara, caporal (24-10-16); BLAIN Jean, sergent (24-5-18); BEAUGIER Louis-Joseph, caporal (25-9-15); LAFOSSE Louis-Bernard (25-4-17); HURET Léon (18-12-16); LAURY Albert-JulesLéon (15-12-16); CARBONNET André-Auguste-Louis (25-417); PIRODEAU Jules-Auguste (27-10-16); PHILIPPON Joseph-Louis, caporal «25-9-15); PIERRE Joseph, caporal (28-10-16); LANGOUET Philippe-Louis, caporal (23-10-17); DAUTECOURT Louis-Gustave, sergent (18-12-16); NOUIOUA ben Amara ben Naouar, caporal (18-6-16); POMMIER Victor (23-10-17); LACROIX Louis-Jean-Marie, caporal (1512-16); GASPARINI Adrien (21-10-17); GUARINIETTO, caporal (23-10-17); ESTANG Henri-Emile, caporal (15-12-16); PUGET Alexandre-Louis (15-12-16); GAILLARD Léon-Gustave (25-10-16); LAJUGIE Emile-René (9-9-16); MOHAMED ben Mabrouk el Gharad (13-10-15); MOHAMED ben Mohamed ben Ali, sergent (20-5-17); EL KHEDIRI ben Salem ben ben Ali, M'Ahmed, sergent (5-2-16); ALI ben Lakhdar ben Ali ben ben Mostfa (15-6-16); Boukhechem Mohamed Saïd ben Mohamed (25-9-15); SALAH ben Mabrouk ben Mansour, caporal (18-6-16); MOHAMED ben Messaoud ben Ammar (6-1018); GINER Jean-Baptiste (23-10-17); CHERIF ben Messaoud ben Amara (11-8-16); PALLUSSIERE Louis-JulienErnest-Joseph, sergent (16-6-16); BELGACEM ben Ahmed el Menari el Haskini el Allouchi (24-7-18); FREMAUX Maurice-Paul-Joseph (24-10-16); MESSAOUD ben Khelifa ben Ayadi (18-7-16); HAMDANE ben Salem ben M'Barek (21-515); TAHAR ben Ali Griba (15-7-16); FREDJ ben Mohamed el Brini (2-10-14); MOHAMED ben Amara ben Belgacem ben Abdallah (3-8-16); ALI ben Hassin ben Ali el Djouini (19-8-16) ; CHIAPPINI Ange-Jean, caporal-fourrier (23-1017); FRAQUET François, caporal (8-7-16); BORDET PaulEtienne, sergent (26-1--17); REHOUMA ben Meftah Ramdame (26-4-15); FRIANCHE Alexandre, caporal (17-8-16); MARTINI François-Louis (22-7-18); AHMED ben Mahmoud ben Hassen (27-9-15); AHMED ben El Hadj el Arbi (13-1015); BRAHIM ben Bachir ben Hadj Ali (27-10-17); MENESCLOU Léon-Antoine (25-10-16); EMATABAL Albert (6-616); DRAI Aaron (24-10-16); M'HAMMED ben Maâmmar Toumi (17-7-16); BESOGNE Antoine (21-9-15); BENEDETTI Augustin, caporal (21-7-18); AMOR ben Ali ben Fredj Zouari (20-11-18); BLANCHARD Jules-Albert (20-7-18); LAFORGUE Justin-François-Paul, sergent-fourrier (15-12-16); ABDALLAH ben Saci ben Belgacem (23-10-17); MURY Joseph-Eugène-Paul, caporal (23-10-17); GELLY Joseph-Henri-Eugène (14-7-16); CHERIT Charles (18-8-16); SAID el Maki el Arfaoui, sergent (19-6-16); PORTHAULT MauriceThéodore, sergent (18-10-15); MOHAMED ben Salah el Hammami, caporal (17-11-15); SALAH ben Ammar ben Sa-


lah ben Rehouma (26 ou 2-84-15); AFFRE Clément (18-5-

16); CARRE Louis-Eugène (15-12-16); MAHMOUD ben Hadj Fredj Sklima, caporal (18-6-16); SALAH ben Ahmed ben Djaballah (24-10-17); HATTAB ben Ali Seghir (29-4-15); ALI ben Khelifa ben M'Barek (14-7-16J; ABDELOUAHAB ben Chaouch Tayeb (18-6-16); M'BAREK ben Ali b. Medakhel (15-6-16); MOHAMED ben Seghir ben Ali ben Lakdhar (23-10-17); ABDALLAH ben Amara ben Hadj Salah (23-9-16); ABDELHAK AHMED ben Hocine (23-10-17); BELGACEM ben Larbi ben El Hamel (17-8-16); BARON Alexandre-Jean (25-10-16); RABAH ben Sliman ben Issaâd.

(19-1-17); MOHAMED ben Ahmed ed Deghis Chaouch (1010-16); SANNEJOUAN Georges-Marcel, sergent (16-4-17);

AHMED bel Hadj Hassin ben Charadi (2075 17); MOHAMED ben Mabrouk ben Ahmed (13-7-16); TOUMI ben El Mabrouk el Arbi (20-5-17); BRICE Joseph-Henri, caporal (24-10-16); ABDENNEBI ben Belgacem Rezdni (11-8-16); VIALLET Louis Félix, sergent (17-7-16); PROFFIT GastonClément (13-7-16); HAMEAUX Henri (23-10-17); - DIROT Ernest (5-6-18); RIES Louis (24-10-17); DEBIZE Jean-Antoine Benjamin-Louis, sergent (18-12-16); MOHAMED ben Abdel Hafid ben Mohamed (24-11-16); SOULIER RaymondLouis-Robert (3-4-17); DUVAL Alfred-Eugène, caporal (168-18); LESAGE René (12-8 16); MASSET Pierre-Dominique-Clément (16-6-16); ELIE Fernand, caporal (28-10-16); KHEMIS ben Smida ben Brinis (24-12-17); BRAHIM ben Saâd, caporal (15-12 16); MOUGINOT Charles-Louis-Georges (19-8-16); COULANGE Pierre-Georges, caporal (15-616); FLEURY Edouard-Joseph (19-8-16); LARBI ben Animar ben El Fazaâd Charni (16-1-15); ET TOUMI ben Belgacem ben Khader ech Charni (24-7-16); SALAH ben Mohamed ben Hoiiche (187-18); BARBE Emile-Marius (18-616); LARBI ben Mohamed ben Amara (25-9-15); SEGRETAIN Auguste-Joseph (14-7-16); CABANEL François-Georges-André (31 7-18); ELAL ben Bou Maiza ben Eligen (199-17); BELGACEM ben Touhami ben Senoussi (22-5-17); KHELIFA ben Ahmed el Djemaï (19-6-16); MOHAMED ben Laroussi ben Abid (5-12-15); ALI ben Hassen ben Mohamed Riahi (186-18); ALI ben Belgacem ben Ferhat (10-?17); TAILLEFERT Frédéric-Félix (octobre 17); MOHAMED ben Ali ben Ouemssaah (31-7-15); CASAMATTA JeanCharles-Félix, adjudant (15-12-16); ALBERTINI jean-Baptiste, sergent (25-4-17); LACOMBE Guillaume (23-12-16); HASSEN ben Taïeb ben Mohamed ben Larbi (20-7-16); MOHAMED ben Abd el Kader ben Hafsa (27-4-15); AMOR ben Mohamed ben Ahmed (17-5-15); BECHIR ben Seghir ben Hassin (2-1-16); AHMED ben Belgacem ben Bou Khatem (25-9-15); CARTERON Charles (1812-16); YOUCEF ben Hadj el Djemmi ben Ali (17-8-16); HASSEN ben Brahim Essemeri Saci (21-9-16); BOUVIER Joseph-Eugène (4-5 18); AUBŒUF Elie (14-6-16); BOULIDARD Auguste (18-8-16); FERRAND Jean-Paul (16-6-16); HERAUT Claire-Marie (2610-17); FOUANON Victor-Maxime, caporal (20-7-18); BAGLIN Armand-Louis-Albert (23-10 17); AMOR ben Eredj Ahacha (28-12-16); SALAH ben Hassen el Khaladi, caporal (3-9-16); BERDOU Aristide-Joseph (26-1016); BAUER Lucien-Georges-Michel (26-10-16); AHMED ben Menai el Hasni (30 3-18); TROSSET Jean-Marie-Marc-Joseph (19-12-16); DJILANI ben Abdallah, caporal (23-10-17); VALO Cons-


tant-Joseph-Marie (26-1-17); DEVAUCHELLE Eugène-Amédée Casimir (23-10-17); REVEYRON Paul-Adrien-Josepht sergent (28^10-16); CAITUCOLI Joseph-Antoine, sergent (5-6-18); LIORET Jean-Gabriel-Eugène, sergent. (197-t8); BLIVET Pierre François (24-10-16); CHARRIER Raoul-Gustave (28-8-17); DEZALLE Joseph-Pierre, sergent (20-8-18); TAHAR ben Amor ben Azab el Hadj (25-9-15); THIBOUT Contant-Alcide Raoul (23-10-17) j LORIN AlbertRené-Gaston, sergent (19-7-18); CONSTANT Firmin-RaoulFernand (11-6-17); VIDAL Julien-Henri, caporal (16-6 18); ACHARD Fernand-Marcel, sergent (30-7-18); AHMED ben - Ali el Allouche Bradei (26-10-16),; SADOUX Fernand-Ambroise (23-10-17); Ali bel Hadj Abdelkader (2-12-15); BOURNY Louis-Emile (28-3 18); MOHAMED ben Ali ben Salah (114-15); BASTIEN Henri-Jean-Baptiste, sergent (28-10-16); MOUIE François-Jean, sergent (31-5-18); LEVAVASSEUR Léon Auguste-Clément (10-4-16); ABBAS ben Ahmed ben Brahim (16-12-16); COURANT Franc-Gabriel, sergent-fourrier (18-7-18); WOHNER Alfred, caporal (30-3-18); BARGAS Louis Antonio (25-4-17); TEDDE Marcel-Eugène (6-717); AHMED ben El Azzabi, caporal (14-6-16); AHMED ben Ali el Fouar, caporal (1-1-16); MOHAMED ben Habid bel Madine (26-10-17); AUBERT Adolphe-Auguste-Léon (7-616); ANTONINI Ange François (30-3-18); BONNET Eugène-Antoine (23-10-17); AUDRAND Maxime-Antoine-Robert (20-5-17); LAZARI Antoine (19-7-18); JOURGET Pierre-Michel, sergent (30-3-18); BRAHIM ben Mohamed ben Dif el Arbi el Adouani (25-10-16); QUET Germain-Valère-Félix (26-10-17) BACHAUD René-Marcel (27-4-17); HARDUIN Théophile (25-4-17); MANCHET Albert (10-6-18); AMARA ben Belaïd er Riahi, caporal (21-5-17); ABDA ben Zeramal el Amdouni (31-3-18); ZAMMIT Joseph-Augustin (26-4-1)7; GARDA Marcel-Henri (23-10-17); KUHN Louis-Ferdinand (10-8-18); SALAH ben Ahmed ben Ali (31-7-15); AMMAR ben Mohamed ben Naceur el Majeri (16-6-16); SALAH ben Necib Ahmed (18-7-18); AMAT Vincent-Georges-Joseph (108-18); AHMED ben Saâd ben Salah el Khmiri, caporal (205-17) ; QUENZA Roch-Ernest-Edouard, sergent-fourrier (28• 8-17); BONHEUR François-Alexis (28-10-17); HAMMA ben Brik el Mazeni (26-10-16); BILLY Pierre, caporal (29-8-18); LAKDAR ben Amara el Aouadi (25-9-15); SALAH ben Mohamed ben Taïeb el Ayadi (28-8-16); FAZAA ben Boukhatem el Mazeni (16-4-16); SIMON Maurice-Jean-Etienne (2312-16); ABDALLAH ben Fredj (27-10-16); Ali ben Rehaïem ben Youssef (5-16-18); EL HAMROUNI ben Mohamed el M'Barek el Ouadi (16-12-15); AMOR ben Otsmane ben Ali Charni (30-5-16); MOHAMED ben Saïd Nasseur (20-9-15); AHMED ben El Hadj Abderrahmane Zagraoui (23-2-16); HASSIN ben Mohamed ben Bou Drira (19-12-16); HERNIO Joseph-René-Ange, caporal (1-7-18); LAMINE ben Mohamed Salah ben Messaoud (16-8-16); MOHAMED ben Ameur ben Belgacem (17-6-16); PAULET Victor-Henri (29-3-18); - REHAIEM ben Amara ben Bellil (25-10-16); LAURENT Paul (2-11-17); BRAHIM ben Hellal el Achi el Bou Zidi, caporal (19-8-16); GALES François-Marie (24-10-16); LABIDI ben Belgacem ben Louaze (25-9-15); YOUNES ben Ahmed ben Salah (25-9-15); BELAID ben Brahim ben Ammar (11-.

- 2-16); SALA Sébastien-Jean-Joseph (1-4-18,); GHIDAOUI ben Salah ben Amara (29-10-16); YOUNES ben Ali ben


Brahim (25-10-16); MOHAMED ben Salah ben Naceur, sergent (16-4-17); GERIOLA Gaston-Baptiste, caporal (30-318); TRICHET Marius-Henri (21-8-18); VIGNAL AugusteRodolphe (23-10-17); MOHAMED ben Ali bou Guedouka (18-6-17); LAURO Gaëtan (25-10-17); MOHAMED bpn Bediaf el Djellali (10-5-15); SAILLANT André-Roger (24-218); ALI ben Khader ben El Arbi, caporal (16-6-16); LOISELEUR Camille-Antoine, caporal (23-10-16); DESRUELLE Albert-Fernand, caporal (28-7-18); SADOK ben Mohamed el Bedoui (28-10-16); MOHAMED ben Ahmed ben Salah ben Khedidja (6-12-15); CHAMBERT Léon-Désiré, sergent (29-3-18); AMOR ben Mohamed ben Ramdan (5-12-15);.

PAYEN Paul, caporal (25 au 29-9-18); MOHAMED ben El Akremi bou Sourba (12-8-15); BURGAT Ernest-Dominique, sergent-fourrier (17-8-16); MOHAMED ben Messaoud ben Amara el Madjeri (9-12-16); MOHAMED ben Amor ben Nouir (13-10-15); MOHAMED ben Salem ben Assibi (16-417); BELGACEM ben Nouioua ben Ahmed (26-4-15); RAM- H DAN ben Ali Harrath (14-6-17); THOMINET Louis-Edmond (5-6-18); BRILLET Camille-Arthur, caporal (26-10-16); SALAH ben Hassen el Gouiden cl Bejaoui (8-12-16); AMOROS Jcan-Michel (18-7-18); AHMED ben Salah ben Ali ben Amara ed Dridi (11-11-15); EL ARBI ben Ali bou Terra el. Guizani (5-12-15); RABAH ben Hassen ben Saïd el Béjaoui (25- .)-15); MOULIN Albert-Vincent (26-10-16); MORISSON Al- fred-Eugène-Clément, caporal (30-9-18); LAFON Jean-Isnel (23-10-17); HAMOUDA ben Mahmoud el Hadj Hassin (20-818); SABER ben Tellili Aouadi (18-10-15); TESTUD PierreLouis (22-8-18); MERCIER Louis-Eugène (18-8-16); BRAHIM ben Ramdan ben Frich (16-8-18); BERTHOUX Charles (25 au 29-9-18); ABID ben Mohamed ben Mabrouk (19-816); SALAH ben Bou Beker ben Alaïa el Ouadj (19-10-15); PLUQUELLEC François-Marie (14-8-16) ; COQUIN Théophile-Marie (28-10-16); RIHANI ben Bou Guerra ben Khelifa (19-6-16); MOHAMED ben Mohamed ben Soussi el Hichcri (5-7-16); SALAH ben Hamadi ben Salah (25-10-16); SALEM ben Khelifa ben Ali Laouedj (14-10-15); LOYER Hcnri-Jules-Marie (5-9-17); MESSAOUD ben Ali el Itim (192-17); GRIMAUD François-Joseph-Marie (19-8-16); MOHAMED ben Ali ben Ahmed Sahli (15-12-16); BARBEDETTE François (15-6-17); PAPE Emile-Jean-Pierre (4-4-17); MOHAMED ben Amor ben Riche*(18-7-16) ; MOHAMED ben Ali ben Ammar (3-9-15); MAHMOUD ben Taher el Masrouki (11-8-16); MOHAMED HAIHAR nen Ayad ben Ahmed (259-15); MOHAMED ben Salem el Aouedj, sergent (28-10^16); ALESSANDRI Ange-Joseph (11-8-18); EL ABED ben Salah ben Gacem (26-10-17); BAHAR ben Mohamed (25-6-17); CRUCHET René-Albert (25-10-17); SALAH FERHAT ben Tria (4-5-15); SADOK ben Ahmed Bechir (16-18) ;MAHMED AHMED ben Bou Laarès (25-9-15); CHERIFI CHERIF ben Mohamed, sergent (6-12-16); MANOC Vincent, sergent (211-17); ARCHIMBAUD Etienne (2-5-17); MOHAMED ben Hamouda el Khiari (4-12-15); SALAH ben El Hadj Salem, sergent (10-8-19); FONDE Fernand-Marius (42-7-7); DIGNON Edouard (14-1-17); MEIGNEN Emile (10-4-17); TARTS Pierre-Georges (17 au 27-10); MEROUR Pierre-Marie (6-11-16); MOHAMED ben Belgacem Laroumi (9-11-16); BOQUET Léon-Désiré (28-8-17); TOMASSINA Frédéric-Ange, caporal (22-2-19); BOUCHEKROUK ABDELKADER ben


Aïssa (26-10-16) ; MARCHAND René-Jules (8-6-18); ALEMAN Henri-Charles-René (15-12-16); MONJAL Pierre, caporal (14-8-18); SACI ben Ahmed ben Mazouh, caporal (188-16); EL HACHEMI ben Mahmoud ben Attia, caporal (106-16); DERIGNY Edouard (26-5-19); SALEM ben Saïd Djenni, caporal (3-12-15); SALAH ben Fredj bou Saada (711-16); SAID ben Brahim ben Alouani, caporal (8-7-18); ABBAS ben Ali ben Salah (15-12-16); AMOR bou Chaâla ben Ahmed (13-4-16); BELGACEM SALEM ben Mohamed ben Chaïeb (29-6-16); MOHAMED ben MOHAMED ben Hassin (25-9-15); DUVERT Marius, caporal (5-6-18); PATUREAU Jules-Désiré (30-10-17) ; ABDELKADER ben El Mabrouk el Oughemmi, caporal (25-9-15); AHMED ben Amor Salah el Mogoli (18-8-16); ENGELVIN Baptiste-Prosper (303-18); FOUQUET Marcel, caporal (18-8-16); MOHAMED ben Belgacem ben Naceur (9-4-17); GRAND VILLAIN Eugène-Paul-Isidore (20-5-17); COLLIN Albert-Julien-Octave (19-7-18); TOUCHEFEU Louis-Pierre-Marie-Constant (2310-17); EL HASSIN ben Rabah ben Brahim, caporal (2-1215); DEGARDIN Alexandre-Florentin, caporal (23-10-17); LIAIS Jacques-Emile-Marie (23-10-17); MOHAMED ben Mohamed ben Saâd (23-10-17); MOHAMED ben Ali ben Faïl (19-8-16); TROUCHE Pierre (20-8-18); POTEAU IldefonteJoseph, caporal (27-10-16); SALAH ben Amor Ali el Kordi (5-2-16); Ali ben El Hadi Mohamed bel Guith (29-3-18); MARTAL ben Djebil (1-11-15); HASSOUNA ben Salah ben Ezzeni, caporal (24-3-17); MOULDI ben Djedidi ben Ali Sliman (23-10-17); AISSA ben Youcef M'Salem (22-7-16); CHERIF ben Abdallah ben Mohamed el Kalaï, caporal (1512-16); SINTES Antoine (20-5-17); Khemis ben Hassen Metali (25-9-15); LATRE Georges-Léon (7-5-16); DESJEUNE '- Marcel, caporal-fourrier (18-8-16); AMMAR ben El Hadj Salah, caporal (18-7-18); M'AHMED ben Ammar el Mastouri (6-2-17); CHIRON Joseph-Henri-François (15-6-16); MAUSIER Romain-Raymond-Paul (22-11-18); GAUDIN Jean-Claude-Marie (19-7-18); LABBRE Joannès (23-10-16); HASSEN ben Saâd ben Salah el Andoumi el Malhi (30-116); GROBOIS René-Louis (4-5-18); AMOR ben Essaheli ben El Abidi (14-6-16); VRILLAUD André-Edouard-Pol, sergent (12-10-18); CHAMOIS Fernand-Eugène, caporal (187-18); DELGOT Abel-Camille-François (19-7-18); MORIER François-Françis (4-18); SALAH ben Ali Dechraoui, sergent (4-5-17); DIEULEFET Marius-Clément (25-10-16); SALAH ben Amara ben Ali, caporal (18-12-16); CHATUT Francisque (26-9-18); MAHMOUD ben Boubeker ben Ali ben Salah el Hadjeri (3-6-16); CHAPUZET Henri-Jean (144-17); IALI ben Mohamed ben Salem, caporal (23-10-17); DALBOS Gabriel (23-10-17); SAID ben Ali ben Mohamed - ben Soltane (18-8-16); EL BORNI es Segheïr ed Debghi (23-10-17); ASLINE Aimé-Joseph-Pierre (7-11-18); HIPEAU Charles-Elie (20-8-18); MOHAMED ben Ali ben Ismaïl, caporal (25-4-17); BELGACEM ben Mohamed ben Salah ben Riahi (27-10-16); DESMEUZES Lucien-René, sergent (1512-16); FOURNEAUD François, sergent (7-10-18); OTHMAN ben Ali el Herchaïn (4-4-17); MARTINET Albert-Henri, caporal-fourrier (14-3-16); LOUPIAC Pierre-Marcellin, caporal (20-8-16); AHMED LAKDAR ben Larbi ben Ahmed (30-8-17); MOHAMED AMMAR MANSOUR (18-7-18); SLAMA ben Salah ben Bou Khatem (24-6-17); AMEUR ben


Tcbiga ben Briniz (15-11-18); CABRESPINES AntoineHenri (24-10-16); PARET Eugène (23-7-18); BLEVÏN Joseph-François-Jean-Louis (24-10-18); CHIKHAOUI Si Belkacem bon Si Saïd (25-9-15); MOHAMED ben El Amri èl Habchi (26-9-17); MESSAOUD ben Hassen Djendoubi (1512-16); PIPIER Jean, sergent (18-8-18); M'AHMED ben Mo-

hamed es Samah (19-8-16) ; COQUINOT Maurice-Jean, sergent (18-7-18); SADOK ben Ahmed ben Ali (18-8-16); ALI ben Hamoudaben Mohamed (18-8-16); MOHAMED ben Ferhat el Messaï, caporal (8-7-16); HENICHE ben Mohamed ben Saâd (24-9-51); AMMAR ben Salem ben Zaghouani (27-3-18); ABDALLAH ben Mohamed ben Ouhem el Mazini (17-8-16); DONCHERY Albert-Ernest, .adjudant (23-1017); MICHOUD Claude, adjudant (20-8-18); AMARA ben Brik el Kaâbi (15-12-16); LEGER Henri (13-6-18); LARBI ben Mohamed ben Amor (18-9-18); MOHAMED ben Rabah ben Hellal Ourhani (15-3-18); TIXIER Jean-Alexandre, sergent (8-5-17); MABROUK ben Brahim ben El Kamel (21-617); GERARD Gabriel-Jules (29-4-17); GORLtER Jean-Jaeques-Xavier, sergent (23-10-17); SALAH ben Ahmed el Madieri (22-8-16); BASTIDE Joseph-Claude (17-8-16); THEROUDE René, caporal (21-10-17); MASSE Alfred (25-1016); BECHIR ben. Mohamed ben Hemimed (4-11-16); PIERRON Félix (25-4-17); AHMED ben Mohamed Maadali el Gharbi (30-9-18); LESEUL Lucicn-.Louis,caporal (23-10-17); MOHAMED ben Bou Teraâ ben Hadef (25-4-17); MOHAMED SALAH ben Ahmed ben Naceur (25-4-17); SIDI ben Ahmed ben Mcbarek �25-9-15); DOIL Jacques (20-10-18); LARBI ben Mohamed cd Dib (1-12-15); ARGANS Jean-Marie, caporal (18-7-18); SALAH ben Mohamed ben Delalaj caporal (13-6-16); TREVY Maurice-Auguste-Adrien (15-1216); ABDEL AZIZ ben Ahmed ben Abdallah (25-9-15); SOMBRUN Pierre-Albert, caporal (20-5-17); ALI ben Mohamed ben Salem er Riahi, sergent ('14-8-16); BEAUGER Ernest-Henri (27-10-16); MAHMOUD ben Tahar ben Boubeker (7-5-17); LARBI ben Ahmed ben Mohamed Chebeheb (6-5-17); BRAHIM ben Zemmal ben Amor (25-4-17); LECOMTE Camille-Paul, caporal (18-7-18); MOHAMED ben Larbi ben El Amari (1-12-16); MARIN Joseph (27-10-18); MOHAMED ben Hamouda el Metlouti (16-9-18); MOHA-

MED ben Smaïl ben Mahmoud (29-3-18); DJABEUR ben Ahmed ben Daou (20-5-17); LAKDAR ben Essaïb ben Mohamed (24-10-16); ALI ben Mohamed Soussi (23-11-15); EL KAMEL ben Amara ben El Hadj (26-11-16); KEMIS ben Hamda ben Hadj Saïd (12-6-16); MOHAMED ben Mansour ben Ahmed ben Mansour (15-6-16); BRAHIM ben Ali ben Ferhat Sassi (3-11-15); SALAH ben Othman ben Salem Trablesi, caporal (30-10-18); HAMOUDA bel Kilani el Louati (29-12-16); MOHAMED ben Mahmoud Turqui, sergent (5-917); DUPUY Jean, sergent (20-8-18); EL GUALOUL ben Sadok ben Lakdali (17-7-16); MOHAMED ben Gacem Ghemari, caporal (20-8-18); AMOR ben Hassen ben Mezad (15-8-

17); DJILANI ben Sadok ben Ali ben Sadok (24-10-17); ALI ben Ahmed ben Hamed (3-12-15); AHMED ben Ali ben El Djebali (19-8-16); AUFORT Adrien, sergent (18-7-18); AMOR ben Ali ben Amor Zine (15-7-16); MOHAMED ben Hadj Mohamed ben Salem (13-3-16); MOHAMED ben Mohamed ben Ali ben Khelifa (15-7-16); ABDELKRIM ben.

Mohamed ben Kelifa, caporal (27-4-17); REHOUMA ben Sa-


lah ben Bou Zid (16-4-17); ALI ben Ahmed ben Mohamed Sebouhi (10-1-16); MOHAMED ben Mohamed ech Chouk (15-1-16); MOHAMED ben Salah ben Ali ben Khelifa (25-915); AHMED ben Mohamed ben Ali ben Dahar (25-9-15); ALEYA ben Ali Medda el Messaleni (9-7-16); M'AHMED ben Mohamed ben El Telmoudi (18-8-16); HASSINE ben Ali ben Belgacem (4-4-17); AHMED LACHEHEB el Ouchaichi (17-8-16); ALI ben Mohamed ben Deboub (25-9-15); BERTHIER Marcellin-Joseph, caporal (30-10-18); MOHAMED ben Hamouda Serdeg (2-7-15); MOHAMED ben Mohamed (30-3-17); FERDJANI ben Salah ben Ferdjani (25-915); DAVID Charles-Alphonse-Armand (29-3-18); MANTOL ,. René-Henri (23-10-17); AHMED ben Ali ben Othmane (27-717); EL BOUHALI ben Ahmed ben Chehibi el Azouizi (219-15); SALAH ben Mohamed ben Amor ben Slimane (18-1216); SALEM ben Ahmed ben Khelifa (17-8-16); MOHAMED ben Salah ben Saket el Fâïh (?); MOHAMED ben Ali ben Seghir el Djemaraï (22-9-15); AMMAR ben Ahmed ben Larbi Djebali (18-6-16); BRAHIM ben Mohamed ben Ali ben Salah ech Chabi (19-6:16); ABID ben Ali ben Abid el Boughanemi (25-9-15); AMMAR ben Chabane ben El Hadj Ali Aloui (4-9-15); RABŒUF Jean-Charles (20-8-18); SALAH ben Brik en Nefati (25-10-17); BRAHIM ben Belgacem ben Saâd (18-6-16); HAMED ben Messaoud (4-12-15); BRAHIM ben Salah ben Mansour (11-2-16); AMMAR ben Ali ben Maamar (17-6-16); AHMED SOUFFI ben Mohamed (25-10-16); ABDA ben Slimane ben Salah (25-9-15); SALAH ben Mohamed ben Ali ben Salem (25-9-15); MAHMOUD ben Ahjned ben El Hadi (7-10-16); MOHAMED ben Saad ben Abdallah Chouchane (7-7-16); ABDESSELEM ben Naceur ben Belgacem Lidi (29-10-15); MOHAMED ben Ahmed ben Fredj Zouidi (1-12-15); BELKHIR ben Salah ben Belkhir (14-6-16); BRAHIM ben Ammara ben Mohamed es Salah (23-10-17); EMBAREK ben Mohamed Meruan (7-12-15); YOUCEF ben Mohamed ben Ammar Riahi (17-6-16); TABET ben Ahmed ben Khalifa (23-8-16); LUCAS OlivierFrançois-Piérre-Marie, sergent (23-10-17); MOHAMED ben Mohamed ben Saïd ben Soltane (31-1-18); SALEM ben Mohamed el Oucham (13-6-16); EL HAFNAOUI ben Beloum ben Messaoud (16-6-16); ABDALLAH ben Mohamed ben Naceur (16-6-16); NACEUR ben Mohamed ben Brahim (12-1015); EL BECHIR ben Belgacem ben Ahmed ben Ammar (1110-15); MOHAMED ben Salah ben Ali (28-10-16); MOHAMED ben. Amor Herrarer (21-6-16); SALAH ben Bachir ben Merzoug (23-10-17); HAOUZ ben Amor ben Brahim (25-1016); MOHAMED ben Gharla ben Nouara (28-9-15); ALI ben Chaouch Amara (2-11-15'); EL HAMADI ben Hassine ben Kèhouma (30-3-18); TAIEB ben Tounsi (24-1-16); EL HADJ Raoui-ben El Hadj Ali ben Mohamed (29-3-18); BECHIR ben El Hamadi el Ouslati (3-12-15) ; MOHAMED ben Ahmed ben Belgacem (8-7-16); EL ABASSI ben Mohamed ben Ali (14-8-16); ABDALLAH ben Lakdar ben Hemissi (15-3-16).; SALAH ben Ahmed ben El Arbi (16-6-16); MOHAMED ben Ferhat ben Saad (17-8-16); HANNACHI ben Mohamed ben Saâd Louati (8-7-16); BOUZID ben Mohamed Salah ben Abdallah (14-6-16); SALAH ben Belgacem ben Amor ben Boubakeur (24-10-16); SALAH ben Mabrouk ben Amor (3-1215); EL MIZOUNI ben Amara ben Salah ben Ahmed (7-618); HAMOUDA ben Mohamed ben Guedidi (27-4-17); CHA-


HALED MILOUD ben Saïd (5-12-16); MOHAMED ben Salem Khida (17-8-16); RABAH ben Ali ben Hassine (30-1016); MOHAMED ben Amor el Menaï (5-12-16); MOHAMED bou M'Barek Djouba (27-10-16); SALAH ben Salem ben Salah ben Belgacem (16-4-17); ALI ben Abdallah ben Mahmoud (19-8-16); MOHAMED ben El Adjroudi ben Belgacem (18-6-16); TAHAR ben Milad ben Saïda (25-8-16); EL KILANI ben El Hadj Belgacem el Anami (1-12-15); AHMED ben Amor el Mahjoub (22-9-15); SALEM ben Mohamed Maïouk (30-1-17); EL MESILINI ben El Aïadi (27-9-15); AMOR ben Belgacem ben Amor el Ferdjani (19-8-16); MOHAMED ben Mabrouk ben Kriem (27-6-19); MONDON Pierre-Marius (9- 11-18); BELGACEM ben Ech Chetioui ben Mabrouk ben Abdallah (?); MOHAMED ben Ali Djaballah (20-8-16); MOHAMED ben Ahmed ben Mohamed El Hettaï (12-7-16); FRANK Emile (18-8-18); ALI ben Salah ben Abdelhafid (2310-16); BANSART Louis-Raymond (18-7-18); AILLOT Louis (25-10-16); YAHIA ben Younès ben Mansour (13-1-16); HASSEN ben Bou Bekeur ben Abdel DjoÜad (25-9-15); ALLALA ben Brahim ben Mansour (18-12-16); AMOR ben Guedara Lahirech (12-5-17); HAFIANE ben Solami el Hadjili (26-6-17); DJEMAA ben Mabrouk el Hammami (3-9-15); SAID ben Belgacem bel Bey (19-6-16); MOHAMED ben Ali ben Hadj Ali (10-8-16); MAAMAR ben Bou Cheniba (26-915); HASSEN ben Boukhris Toumi (15-12-15); MOHAMED ben Saad (19-6-16); YOUSSEF ben Bougatf (24-4-17); KHE-

LIFA ben Ali Chouanine (28-10-16); ALI ben Belkhir (23-718); MOHAMED ben Ghouiha ben Mostepha (3-9-15); BRAHIM ben Laïfa Kellaï (3-9-15); SALAH ben Brahim el Ayachi (17-G-16); MOHAMED fren Bachir ben Jouadi (8-7-16); HASSEN ben Sliman Mohamed ech Cheikh (16-4-17); ESSEGHIR ben Seghir ben Ali ben Saïd (6-12-15); NAOUI ben ALI ben Abdallah (18-7-18); SALAH ben Ali Trabelsi (28-

10-16); TIDJANI ben Atteya ben Mohamed (18-4-17); DJEBEUR ben Mohamed Ladjnef el Hichri (16-8-19); EN NAFAA ben Mohamed ben Ahmed ed Dib Mazini (6-2-16); MOHAMED el Moundji ben El Hadj Lamine (22-9-15); AHMED ben Neffati ben Amor el Faidi (5-12-15); BACHIR ben Ahmed ben Merah el Aïri (25-9-15); M'BAREK ben Mabrouk Banccha (18-10-15); BOU DJEMAA ben Mabrouk el Kouache (25-10-16); BERTRAND Léon-Louis-Gabriel-Célestin, caporal (?); VUILLERMET Françis-Marius (11-6-18); DALLIA AMMAR ben Mohamed ben Achour (9-6-16); AMAR ben Ahmed ben Mabrouk, caporal (19-6-17); ABDEL AZIZ ben Larbi ben Slimane (25-10-16); SAAD .ben Ahmed ben Abbas el Hakimi (27-10-17); SALEM ben Mohamed Doghman (3-11-16); MOSTEFA ben Mohamed ben Aleya el Fezaa (5-12-15); AHMED ben Taïeb ben Smida (18-8-16)-, MOHAMED ben Chihi ben Mohamed (18-7-18); RESGUI ben Ahmed ben Salah (31-1-16); SALAH ben Amara Belgacem el Ghezouani (18-7-16); ALI ben Mohamed ben Tounsi (18-6-16); YOUNES ben Mohamed ben Hassine (20-5-17); SAAD ben Salah bou Rial (7-4-17); MOHAMED LASSOUED el Hadj Mohamed Lamina (12-11-16); ABID ben Salah Hassine Djendoubi (13-1-17); ESSEBTI ben Mohamed ben Ahmed Chageni (6-9-18); EL AIECH ben Ali Ahmed Chimi (15-12-16); BRAHIM HAMADI ben Saïd (19-7-16); SADOK ben Abda ben Khemis Aouaadhi (15-12-16); CHEDLI ben Ali Klassi, cappral (23-10-16); BOU NOUARA ben Ahmed


ben Abdallah Rekhimi (17-8-16); BELGACEM ben Abdallah ben Mohamed (14-11-15); MOHAMED ben M'Ahmed Naouache (16-6-16); MAAMAR ben Brahim ben Khelifa (1-6-18); AMOR ben Salah El Tayeb, sergent (17-8-16); SADOK ben Hadj Lakhdar el Gharbi, caporal (3-12-17); DENNELIOU Guillaume-Marie (18-8-18); HASNAOUI ben Khemiri ben Henza (18-3-19); TAYEB ben Belgacem ben Smida (18-718); KHELIFA ben Mabrouk Saoud (3-9-15); GRAR KOUIDER (12-11-15); RABAH ben Boudjemaâ Daouadi (19-6-16); ALI ben Amor ed Dridi (18-12-16); BRAHIM ben Salah ben Daoud, sergent (18-10-15); MOHAMED ben Mohamed Chebil Maklouf (19-6-16); GOURON René-Léon (25-7-18); SAAD ben Ali ben Mohamed (21-2-16); ALI ben Hamda ben Nacer (18-10-15); SADOK ben Brahim ben Mohamed Chichi (259-15); FREDJ ben Ayache Toumi Teboubli (27-9-15); MAAMAR ben Abidi ben Ali (25-10-16); LARBI ben Mazouri ben Ali En Nefzi (18-7-18); MOHAMED ben Ali ben Touii (2510-16); MOHAMED ben Ahmed Essid ben Louar (16-4-17); MOHAMED MAAMAR ben Abd Esselagi el Abidi (26-3-16); SALAH ben Ahmed Khentouche (26-7-17); BRAHIM MOHAMED ben Ahmed (23-7-16); DJILANI ben Abdallah ben Salem ben Dahdah (28-3-18); MOHAMED ben Aoun ben Naceur (2-610-17); AHMED ben Embarek ben Ouhida (27-1016); MOHAMED ben Saïd Kordane (26-7-17); YOUCEF ben Mohamed ben Ali ben Youcef (5-6-18); BELOUM ben Ali ben Hadj Belloum (18-7-18); ALI ben Khelifa ben Ahmed (26-5-17); SALAH ben Mohamed ben Saïd Taïachi (23-1017); SADEK ben Mohamed Abdeltif (18-21-16); NAVELLO Jean-Baptiste-Ernest-Louis, caporal (29-3-18); EMBAREK ben Seghir Djelassi (2-9-15); DROUET Armand (6-8-18); MAILLARD Louis (19-7-18); HAMIDA ben Mahfoud ben Hamida (2-4-18); TAHAR ben Ammar er Reguiaï (4-4-18); KHEMIS ben Mohamed Trabelsi, sergent (17-6-16); HENION Pierre-Auguste (18-8-18); KHOUDIRI ben Mohamed ben Khemis (25-10-16); MOHAMED ben Seghir el Mouldi En Nouali (19-12-16); BONNOT Robert (11-7-16); AHMED ben Salah (8-6-17); AHMED ben Ali Tounsi (14-3-18); BELGACEM ben Hadaj Abdennour el Bennouri, sergent (19-718); SALEM ben Meftah el Gabsi (?); MOHAMED ben Ali es Seghair el Aouni (25-10-16); HADI ben Mustapha ben Ali Belhouan (27-10-16); MOHAMED ben Hadj Salah ben Hadj Ammar (10-1-17); BRAHIM ben Amor ben Aissa el Moghrani (10-6-18); BRAHIM ben El Hadj Belkacem el Abbassi (5-6-18); MOHAMED ben Ammar Chagaah el Arrouchi (4-4-17); ALI ben Mansour ben M'Hammed ben Ramdam (8-11-18); FICHET Michel (5-6-17); HASSEN ben Ahmed ben Zouita el Tadjini (4-4-17); AMOR ben Rabah (104-17); AHMED ben Salah el Yacoubi (15-12-16); MOHAMED ben Tabet ben Ali ben El Hafsi (2-54-17); ALI ben Mohamed ben Khelifa (15-12-16); AMOR ben Brahim Essaïs Banaï (25-6-17); ABDEL JEBBAR ben Salah ben Mahfoud (23-4-17); HASSINE ben Ahmed ben El Hadj M'Barek (2--8-17); ABDESSELEM ben M'Hamed ben Salem Kaabar (13-1-17); MOHAMED ben Tahar ben Ghezabi (29-3-18); TAHAR ben Mohamed ed Deihaïd (29-5-17); ALEYA ben Ahmed el Mraïadh (5-6-18); ABBES ben Hassine ben Maâman, sergent (20-7-18); ALI ben Tahar ben El Hadj Mohamed Djemal es Selimi (16-12-16); KHEMIS ben Ahmed ben Aouini (13-7-17); MOHAMED ben Tahar ben El Hammami


ben Slama (10-1-19); ABDALLAH ben Mohamed ben Salah ben Hassine el Hasni (1-4-18); MOHAMED ben Belgacem ben El Aîch el Amdouni (23-12-16); MOHAMED ben Amor ben Mecheri (25-10-16); ALI ben Mohamed Laoum ben Amor (27-12-16); AHMED ben Salah ben Messaoud er Rouhi el Bechoumi (11-4-17); TAHAR ben Ammar ben Ahmed el Amri (11-4-17); AHMED ben Mohamed ben Ammar ben Othman (7-2-17); BOULANOUAR ben Mohamed ben Zayane (18-12-16); ALI ben Salah ben Brahim (9-1--18); MOHAMED SALAH ben Abdallah ben Messaoud el Houachi (20-6-18); YOUCEF ben Ahmed Eddib el Djendoubi (19-7-18); BOUKHRIS ben HélaI ben Abdallah (3-1-17); MOHAMED ben Naceur ben Ferhat (22-16); SAAD ben Mohamed ben Ali (23-12-16); RAMDANE ben Saïd ben Ali (18-7-18); AMOR ben Smaïl Hanachi (171-17); ABID ben Ali ben Abid (16-4-17); SALAH ben Mohamed el Ouslati (28-12-16); BRAHIM ben El Abidi ben Namouchi (26-4-17); HAMMADI ben Naceur ben Ahmed ben Khalfallah (25-12 16); AHMED ben Ali ben Ahmed el Ouahni (25-9-15); AZZOUZ ben Ahmed ben Hassen ben Younès (10-6-16); AMOR ben M'Hammed ben Ahmed ben Abed (191-16); FETTAH ben Ali ben Fettah Semrani (24-10-16); MOHAMED ben Houimel el Gharbi (17-8-16); EL HOUICHI ben El Hamzy Larbi el Dridi (27-9-19); MABROUK ben Ali ben Mansour (25-4-17); AHMED ben El Hadj Belgacem ben Ahmed (22-4-17); ABES AMER ben Ahmed ben Abés (23-417); MOHAMED ben Ahmed ben Ali ben Djeridi (23-1216); MOHAMED ben M'Hammed ben Ali ben Ammar (17-616); LARBI ben Necii ben Mohamed (19-8-16); FELIS ben Ali ben Smaïl (25-10-16); MOHAMED ben Brahim ben Amar (25-4-17); ABDEL AHMED ben Ali Hamouda (27-1016); AHMED ben Seghir ben Hassen; sergent (18-10-18); MOHAMED ben Ahmed ben Salah el Amdouni (19-6-17); LARBI ben Abdallah ben Sifi (6-11-15); REDJEH ben Ahmed Baba (18-6-16); SALAH ben Hamda ben Abdallah (113-16); MABROUK ben Ahmed Lassoued (28-10-16); EL HADI ben Ahmed ben Othman (18-6-16^ ; AHMED ben Ali ben Mohamed Turki (18-12-16); AHMED ben Achour ben El Drairi (24-2-16); ALI ben Amor ben Cheik Salem (20-4-16); AMAR ben Hadj Abid (19-8-16); YOUCEF ben Ayed Yahyeterre (12-6-16); MOHAMED ben Hamouda ben Khader (198-16); M'AHMED ben Ahmed Fellah (26-10-16); BELGACEM ben Taïeb ben Ali (26-10-16); KHEMIS ben Mohamed Testouri, caporal (14-6-18); EL BOURNI ben Hassine Samoud (8-7-16); MOHAMED ben Mohamed Aïouaz (16-6-16); ABDELKADER bel Hadj Mohamed ben Ohman el Kabtemi (25-4-17); ABDELKADER (25-4-17); SALAH ben Ali.el Raab (26-10-17); MOHAMED MAHMOUD FRICHA (5-6-18); MEBROUK ben M'Ahmoud Bou Khris (17-8-16); SMILI IAYA (18-7-18); AHMED ben Fradj Chouine (10-8-16); EL AICH ben Mohamed ben Djaffar (22-7-18); ALI ben Ahmed Guerata (14-6-18); EL BECHIR ALI TARCHOUME (22-1116); AMMAR ben Ali el Hattab (23-10-16); BECHIR ben Salem ben Ali ben Salah (17-7-16); MOHAMED AMMAR ben Hadj Hamed (26-10-15); ALI ben Mohamed Hammamoun (26-10-16); SALAH ben Ahmed ben Ali ben Salem (5-6-18); AHMED BOU GHETEF ben M'Barek (23-10-17); MOHAMED ben Ali ben Salah ech Chaïeb (22-2-17); AMOR ben Belgacem Amor (28-10-16); BELGACEM ben Amor ben


Amara (28-10-16); HASSEN ben Salah el Aouadi, caporal (5-12-18); AHMED ben Mohamed el Gavani (9-11-18); AHMED ben Mohamed ben Tahar Labassi (24-10-17); AHMED ben Amor ben Hadj Ahmed el Abbassi (7-7-17); ALI ben Amar Charni (26-6-17); BOUBAKER ben Othman el Houili (29-3-18); BELGACEM BOU SAHA ER RADJHI (29-3-18); ALLALA ben Boudjemaâ ben Hamouda (29-3-18); MOHAMED ben Othman Ahmed ben Amar (23-10-17); AMAR ben Ahmed ben Bey Neffri (30-3-18); AMOR ben Mohamed Sa-

lah Zaafran (1-4-18); ALI ben Amor el Khediri Es Silih (14-8-18); AHMED - ben Amar ben Hadj Smaïl el Matouni (24-10-17); SALAH ben Boukraa ben Belaïd (9-10-18); SALAH ben Mohamed ben Abdallah (24-6-17); HASSEN ben Khalfa ben Amor ben Naour (1-6-18); ABDA ben Khemis ben Amar el Khemiri (1-12-18); MOHAMED ben Hassin Belker- Chichi Guenouni (5-6-18); AMMAR ben Salah ben - El Ghesid (21-7-18); MOHAMED SEBTI SALAH EL KEMIRI (22-10-17); BRAHIM ben Abid ben Djeld (23-10-17); MOHAMED el Amri ben Achour (29-3-18); MOHAMED SEGHAIER ben Asteri (28-7-17); AMMAR ben Tidjani ben Ali (23-10-17); ALI ben Khelifa ben Ayad (18-10-18); MOHAMED ben Salah ben Bouzid (?); ABDALLAH MOHAMED SAAD KLEBAOUI (30-3-18); AHMED MOHAMED SALAH ZELFANI (27-10-17); MOHAMED ben Amniar Milad el Ferdjani (23-10-17); AMOR ben Ahmed Tahrouni (23-10-17); MAHMOUD BECHIR ben Attia (29-3-18); ALI ben Sassy 1 Abden Nebi Trabelsi (23-10-17); KHEMIS ben Mohamed ben Gacem ben Taïeb Khiari (23-6-18) ; ALI ben Mohamed ben Salah el Brhati (23-10-17); ALI ben Mohamed ben Amor Chadli el Hammami (28-7-18); MOHAMED SALAH BRAHIM CHETALI (6-12-18); M'HAMED ben Amor Larbi es Sayari (23-10-17); SALEM ben Mohamed Hadj Ahmed (15-6-17); HASSEN ben Mansour Djendourbi (16-7-18); MIZOUNI MAHMOUD CHAIBI (23-10-17); ABU) EL FETNI ben Ali (30-3-18); SALAH BECHIR el Djami (18-7-18); SAAD ben Ammar ben Saâd el Hablani (25-6-17); AHMED ben Ammar ben El Rebeï (29-3-18); MOHAMED ben Mehrez Ahmed Mehrez (25-10-17); HAMED ben Mohamed Salah ben Messaoud (22-1-19); AHMED ben Hadjal ben Salah bou Saad (13-5'17); NASR ben Mohamed Chennouf (8-117); SADOK MOHAMED ben Messika (28-4-17); MAHMOUD SALAH AMOR OUSLATI (24-4-17); HASSEN ben Belgacem Mabrouk Zlassi (14-10-17); MOHAMED ben Fredj ben Chiba (21-10-17); FARA ben Ahmed (20-5-17); ALI ben Mohamed ben Salah ben Fezlini (19-8-18) ; EL ABIDI ben Mohamed ben Yrida (22-1-19); ALI ben Ech Cheikh Khelifa (164-17); ALI ben Jdidi (22-7-18); BRAHIM ben Hadj Salah el Ouerghi (17-8-16); ALI ben Mohamed el Taiari (25-9-15); BEN AISSA ben Hamouda, caporal (4-4-17); KRIM ben Letaylef ben Dellaa (14-8-18); HAMIDA ben Ali Badeur (20-517); EL MOULDI TAIEB ben Hadj (23-10-17); BECHIR ben Salem Ghenai (24-10-17); SALAH ben Hassen ben Ali ben Mohamed (28-4-17); EL HAMADI ben Breaik el Ksarsi (174-17); ALI ben Khdifa (27-8-18); ALI ben Mohamed el Khe- diri el Kebir (30-9-18) ; BELGACEM Mohamed ben Belgacem (17-4-17); TAHAR ben Salem el Oussif (25-4 171: ABDALLAH ben Salah ben Othmane el Aouadi (29-3-18); AHIBI ben Fredj ben Khelifa (20-5-17); MOHAMED MOHAMED BOU MAIZA (25-4-17); ALI ben Khediri bea Cheikh


El Arbi (30-3-18); ALI ben Brahim ben Er Raïs el Yaccubi (18-6-16); ALI ben Amor ben Naceur (19-6-16); MOHAMED ben Dhô el Guemir, caporal (27-4-17); SALAH HADJ ALI FALFOUL (23-1-17); TAYEB ben Mohamed ben Brahim (1-5-15); OTHMAN ben Ali Femina (20-10-18); MOHAMED ben Mohamed ben Salem Dogaz ben Hafsia (26-7J.8); AHMED ben Brahim ben Salem el Khemiri (20-8-! 8); HAMOUDA ben Hassen Amara Riahi (11-7-19); MOHAMED ben Smida El Arfaoui (18-7-715); AHMED ben Hassen ben Bou Rial (16-8-18); SALAH ben Taïeb el Hemissi (27-9-18); MOHAMED ben Amor ben Alaouï (29-3-18); ALi ben Ah-

- med ben Zahra (20-7-18); ALI ben Rahaïm el Banuouri (2410-18); AHMED ben Seghaïr ben Hadj Hamouda (20 10-18); EL HEDI ben Abid ben Mbrouk (14-6-18); SASSI ben Mohamed ben Abdallah (18-6-18); FARHAT ben Aii ben Salem (3-11-16); AHMED ben Hassen ben Bou Rial (18-6-1 S): TAHAR ben Dehbi ben Seghir (19-8-18); GHOUÇHANE BELGACEM ben Ammar ben Belkheir (20-5-17); AHMED ben Hassin ben El Hadj (25-9-15); *CHABANE ben Ahmed Gourta':s (24-10-17); EL HADI ben Othman el Bejaoui (23-

1-19); FREDJ ben Hassine ben Ahmed Bhar (11-12-18); ESSAYAD ben Mabrouk ben Othman Et Thabali, caporal (303-18); AMEUR ben Djilani ben Amor Chaïb (2-4-18); ESBOUJE ben Amara ben Ahmed (21-8-18); TOUHAMI ben Abid ben Ali (8-12-16); EL BAHARI ben Mohamed ben Salah ben Hassen (28-8-18); GAST Constant (18-7 18); AMROUN AMEUR ben Saïd (13-10-18); SALAH ben Mohamed ben Ammar ben Azzouz (19-1-18); BELGACEM ben Ahmed ben Abdelkader (6-12-18); FREDJ ben Ahmed ben Khalifa (28-4-17); MOHAMED ben Larbi ben Ali ben Farch (2-418-; AHMED ETTOUMI ben Saïd el Houïni (11-4-18); HAMDA ben Mohamed ben Minallah (30-3-18); MOHAMED ben Hocin Hocin ben Salah (31-5-18); ALI ben Hassen bou Kadi (23-10-18); SALAH ben Ali ben Belgacem (29-ÎM8); MOHAMED ben Hassin Ez Zeddajte (29-12-18); SALAH ben Ali bou Laaresse (19-7-18); AHMBe ben Salah ben Hassine (56-18); MOHAMED ben Mahmoud Abdel Hadi (30-3-18); AU ben Tlili ben Youssef ben Ali (18-7-18); MOHAMED ben Aleya bou Azza, sergent (15-4-18); SAID el Fenani (29-318); BRAHIM ben Hassen Khalfallah (29-3-18); M A AT ALLAH ben Ali ben Maatallah (29-3-18); TOUHAMi ben Belgacem ben Athman (2-4-18); SEGHIR ben Mohamed ben Youssef el Kouki (17-10-18); AMEUR ben Mohamed ben Ahmed Demak Khefdour (31-5-18); ABD EL KAf'EP ben Youssef (8-8-18); CHADLI ben El Adjimi el Alouani (20-1- 19); SAID ben Mohamed ben Ali Ezouari (10-8-18' : FRADJ ben Farhat ben Hadj Ahmed ben Amar (12-8-18); MABROUK ben Ali ben Salah (30-8-18); MOHAMED ben M'Barek ben Amor ben Naaceur (20-8-18); ALI ben Abdallah ben Amor el Harzeli (31-3-18); MOHAMED ben Hassen ben Hadj Mohamed Hjaioume (12-8-18); MOHAMED ben Saad ben Hocine (14-8-18); AMMAR ben Belgacem beu Flmia (18-8-18); ES SOUIAI ben Mohamed ben Hadjali (10-8-18J; SADOK ben Ahmed ben Khantouche (14-8-18), HASSEN ben -Amar ben Brahim (29-8-18); KHALIFA ben Abdallah ben Naceur el Ferchichi (26-3-18); ALI ben Amor el Habiri (24-5-18); MOHAMED ben Ali Djabber (29-8-18); TAHAR ben Ammar bou Ragaa (24-5-18); MOHAMED ben Amor ben Ahmed Abiche dit BENCHIRO (19-7-1 S); KHEMAIS

*


ben Mohamed Decdouk (3-6-18); MOHAMED ben Sadok ben Mohamed ben Hadj Meftah (24-5-18); EL ARBI ben Slimane ben Ammar (2-6-18); MOHAMED ben Salah ben Arfa el Ouslati (5-6-18); BELGACEM ben Ali el Kboussi Kelas (5-618); AHMED ben Ali ben Ahmed ben Ameur (2-8-18); HAMOUDA ben Mohamed ben Hamouda (24-5-18); MOHAMED ben Ali ben Mohamed ben Mabrouk (18-8-18); ALI ben Brik Ben Gouider (3-12-18) ; KELIFA ben Hessine ben Abdallah (5-6-18); MOHAMED ben Ahmed ben Ammar (19-8-18); GOUIDER ben Sassi ben Amor .(20-8-18); MOHAMED ben Mabrouk ben Brahim (13-8-18); MESSAOUD ben El Sebti ben Ahmed (12-8-18); MOHAMED ben Abdallah ben Hadj el Mbrouk (28-8-18); TAHAR ben Ali Kabouïa (16-8-18); ALI ben Mohamed Ahmed Remani (15-1-58); MOHAMED ben Mohamed el Hamrouni (28-8-18) ;SALEM ben Hadj Ali bou Dernàf (13-8^18); SALEM ben Fradj Nasr (19-7-18); ES SACI ben Mahmoud Guerouz (17-10-18); AMOR ben Belgacem el Harzi (19-7-18); ALI ben Belgacem ben Larbi (20-8-18); BELGACEM ben Mousbah ben El Bedoui (18-718); BRAHIM ben Ali ben Hassine (20-8-18); SADOK ben Khelifa el Hami, adjudant (28-8-18); TAHAR ben El Maoui ben El Ferdjrii (16-9-18); SALEM ben Ali ben Salah (31-818); YOUCEF ben El Khazem ben Es Soussi (6-9-18); SALAH ben Ali ben Hamida (5-6-18); AIT KHELIFA HADI ben Lounès (27-8-18); ALI ben Khelifa ben El Mabrouk (188-18); ABDALLAH ben Daou ben Ardaoui (26-8-18); SALAH ben Mohamed ben Belgacem ben Youssef (19-8-18); SALAH ben Hassen ben Mohamed Guezguez (15-8-18); ALI ben Ayad ben Ayar (19-7-18); ALI ben Mansour ben Ali ben Bennour el Achi (7-10-18); SALAH ben Mabrouk ben Salah (20-8-18); MOHAMED ben Smaïl (24-8-18); ALI ben Salah ben Ali Sassi (1-6-19); SALEM ben Mohamed Chaouikha (20-12-18); AYAD ben Mohamed Djebali (82-11-18); BELGACEM ben Mohamed (5-6-18); MOHAMED SMAIL MOHAMED AHMED (24-8-18); KHELIFA bei-i Salem Farès (3-6-18); ALI ben Mohamed el Ahmar (18-8-18); MOHAMED ben Ali El Naouari (21-7-18); AMOR BECHIR MOHAMED EL FALAH (20-8-18); THOUDRANE ben Aïssa ben Mes- saoud es Sassi (20-8-18); FREDJ ben Mohamed Ferhat (245-19) ; SALAH ben Ali Es Salah ben Ali (18-8-18); MOHAMED ben Youcef ben Hadaïett, caporal (5-6-18); JARDE André-Eugène (30-12-18-; MAURETTE Jean, sous-lieutenant (6-12-18); ALI ben Madi ben Bacha (25-7-18); MURACCIOLE Eugène, sergent (31-5-18); HASSIN ben Mohamed ben Amor ben Zid (17-12-16); M'AHMED ben Mansour ben Hamouda «10-8-17); LALANDE Armand (21-7-18); MOHAMED ben ^Belgacem ben Ahmed (5-1-19).




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