LA PEINTURE RUSSE DU XIVe SIECLE
(THÉOPHANE LE GREC)
LE style national russe, en ce qui concerne la peinture, se cristallise définitivement au xv° siècle. En effet, la « période prémongole » et le xive siècle ne sont que des époques de préparation et de tâtonnement, et d'autre part les siècles qui suivent le xvc offrent déjà l'image d'une évolution lente vers des formes différentes et même vers une négation absolue des formes antérieures.
Or, ce style national russe est le résultat d'un double processus : les « formes » byzantines subissent une transformation progressive et radicale ; les nouvelles formes correspondent à un contenu idéologique tout différent qui naît sous l'influence de la conscience religieuse purement nationale.
Néanmoins, l'ancienne peinture russe pendant toute la durée de son existence n'a jamais abandonné les traits caractéristiques essentiels qu'elle a empruntés au style byzantin et qui en font un phénomène unique et inimitable : elle est restée pour toujours un art à deux dimensions fondé sur la ligne et la couleur pure, un art monumental dans son essence, en d'autres termes, un •art qui tend vers la généralisation, qui pose avant tout le problème rigoureux de la composition et de la répartition équilibrée de ses éléments constructifs : qu'il s'agisse de peinture monumentale dans le sens strict du mot (mosaïques ou fresques) ou de peinture de tableaux (icônes), le caractère de cet art reste toujours le même. Il n'est pas sans intérêt de noter qu'il y a toujours eu une liaison étroite entre les peintures murales — dans les églises russes en pierre, jusqu'au XVIII 0 siècle inclusivement — et les icônes. Seulement, plus tard, le caractère de cette liaison a évolué. C'est que jusqu'à la fin du xve siècle la peinture des icônes a été entièrement sous l'influence de la peinture murale ; par contre, au xvf et au XVII 0 siècle leurs rôles se sont trouvés intervertis. L'art des icônes exerce son influence sur la peinture murale qui ainsi