Rappel de votre demande:


Format de téléchargement: : Texte

Vues 1 à 72 sur 72

Nombre de pages: 72

Notice complète:

Titre : Bulletin des arrêts de la Cour de cassation rendus en matière criminelle

Auteur : France. Cour de cassation. Auteur du texte

Éditeur : Imprimerie impériale (Paris)

Éditeur : Imprimerie royaleImprimerie royale (Paris)

Éditeur : Imprimerie nationaleImprimerie nationale (Paris)

Date d'édition : 1838

Contributeur : Duchesne, Émile (1820-1887). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34508686x

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34508686x/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 72432

Description : 1838

Description : 1838 (T43,N8).

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k58603790

Source : Bibliothèque Interuniversitaire Cujas, 2010-70564

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 01/12/2010

Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 96%.


BULLETIN DES ARRÊTS

DE LA COUR DE CASSATION.

MATIÈRE CRIMINELLE, 8.

( 251. ) La question relative au fait principal, objet de l'accusation, et celles qui se rattachent aux circonstances aggravantes de ce fait, doivent être posées séparément et recevoir du jury des réponses distinctes et séparées (l).

ANNULATION, sur le pourvoi de Jean-Charles Bruminer, d'un Arrêt rendu par la Cour d'assises du département du Bas-Rhin, le 21 juin 1838.

Du 2 Août 1838.

Ouï M. le baron Fre'teau dePe'ny, conseiller, en son rapport: et M. Pascalis, avocat ge'ne'ral, en ses conclusions;

Vu l'article 3 45 du Code d'ins'truction criminelle, rectifie' par la loi du 9 septembre 1835, et l'article 3 de la loi du 13 mai 1836, lesquels sont ainsi conçus :

Article 345. «Le chef du jury lira successivement chacune des «questions pose'es comme H est dit en l'article 336, et le vote aura «lieu ensuite au scrutin secret, tant sur le fait principal et les cir«constances aggravantes, que sur les circonstances atte'nuantes.»

Article 3. (Loi du 13 mai 1836.) «Le chef du jury de'pouillera «chaque scrutin en pre'sence des jures, qui pourront ve'rifier les «bulletins;

«II en consignera le re'suîtat sur-le-champ en marge ou à la sui(e «de la question re'solue, sans ne'anmoins exprimer le nombre des «suffrages, si ce n'est lorsque, sur le fait principal, la de'cision af«firmative aura e'te' prise à la simple majorité', etc., etc.«

Attendu que, de la combinaison des deux articles pre'cite's, il re'- sulte que les re'ponses du jury sur chacune des questions qui lui sont soumises doivent être distinctes et se'pare'es, et qu'il n'est pas

(i) Voyez un arrêt du 5 juillet 1838 ( Bull. n° 187 )> et les arrêts indiques en note. * .

Criminel. 183$. N° 8- 30


{ 364 ) conforme à la loi d'exprimer simultanément ces réponses, tant sur, le fait principal que sur les -circonstances aggravantes;

Attendu que les formalités prescrites par les deux articles dont il s'agit, tant en raison <le leur objet que par suite de la disposition ■spéciale du législateur, doivent être conside're'es comme substantielles ;

Attendu que, dans l'espèce de l'arrêt attaque', les re'ponses du jury, sur chacun des faits soumis à sa de'cision , expriment cette décision par une formule unique qui embrasse tout à la fois le fait principal et les circonstances aggravantes; attendu que ces re'¬ ponses constituent une violation expresse des articles pre'cite's,

LA COOR casse et annule l'arrêt attaque' de la cour d'assises du Bas-Rhin;

Et, pour être proce'de' à de nouveaux de'bats, et statue' conforme'ment à la loi, renvoie la cause à la cour d'assises du département du Haut-Rhin;

Ordonne, etc.

Fait, juge' et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

(N° 252.) La durée de la contrainte par carpS pour le recouvrement des frais nepeut être fixée conditionnellement, suivant le taux auquel ces frais pourront s'élever : cette fixation ne peut avoir lieu qu'après leur liquidation définitive (l).

ANNULATION, sur le pourvoi de Jeanne Doulanjoux, veuve Fa.ugeroitj d'un Arrêt rendu par la Cour d'assises du département delà Corrèze, le 19 juin 1838.

Du 2 Août 1838.

Ouï, en son rapport, M. Gilbert de Voisins, conseiller; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions;

Attendu que la cour d'assises a fixé la durée de la contrainte par corps, quoique les frais ne fussent pas liquidés définitivement lors de la prononciation de l'arrêt, puisque la cour d'assises se crut obligée de prolnonoer conditionnellement pour la durée de cette contrainte, suivant que ces frais s'élèveraient à trois cents francs et au-dessus, ou seraient inférieurs à cette somme;

Que cette disposition constitue une double violation de la loi sur la contrainte.par corps, puisque, d'une part, il faut que les frais soient définitivement liquidés lors de la prononciation de l'arrêt, pour que, dans le cas où ils s'élèveht à trois cents francs ou au(1)

au(1) arrêt du t~2 juillet 1838 (Bull. n° S02) et ceux indiqués en noie. *


( 365 ) dessus, la fixation de la durée de la contrainte par eorps ait une base légale, et que, de l'autre, les cours d'assises ne Sont point appelées à fixer cette durée, lorsque les frais ne s'élèvent pas à trois cents francs:

Par ces motifs, LA COUR casse et annule, par voie de retranchement, cette disposition de l'arrêt de la cour d'assises ;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

( N° 253. ) L'auteur d'un billet déclaré faux ne peut encourir la peine du faux en écritures de commerce, lorsque ce billet ne porte pas la signature d'un commerçant, par cela seul qu'il a été négocié à un banquier, qu'il porte l'énonciation valeur en marchandises, et qu'il a été endossé par un .commerçant (l). , " ,

ANNULATION , sur le pourvoi de Pierre-Honoré Sudric, d'un Arrêt rendu contre lui, le 25 juin 1838» par la Cour d'assises du département d'Indre-et-Loire.

Du 2 Août 1838.

Ouï M. Rocher, conseiller, en son rapport;.

Ouï Me Verdière, dans ses observations à l'appui du pourvoi;

Ouï M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions;

Vu les articles 147 et 148 du Code pénal;

Attendu que l'arrêt attaqué s'est fondé, pour appliquer aux faits reconnus constants la peine du faux en écriture de commerce, sur ces trois circonstances : .

1° Que les billets déclarés faux auraient été négocie's à un banquier;

2° Qu'ils renfermeraient renonciation valeur en marchandises;

3° Que Sudric, à l'ordre duquel ils ont été passés, et qui les a endossés, serait négociant;

Attendu, en premier lieu, que la qualité de celui auquel un billet est négocié n'implique en aucune sorte le caractère commercial de cet effet; qu'un billet à ordre privé peut être entre le porteur et le banquier avec qui il contracte l'objet d'une négociation civile; qu'au surplus, le fait même d'une négociation commerciale ne change point le caractère primitif de l'engagement;

Attendu, en second lieu, que l'énonciation valeur en marchandises ne constate légalement la commercialité d'un billet à ordre qu'autant qu'il est déclaré, en fait, que les marchandises ont été livrées pour être revendues, ou pour en louer l'usage, ou pour toute autre opération de commerce;

(l) Voyez, arrêt du s juillet 1838 {Bull. n° 189).

26.


( 366 ")'■..

Attendu, en troisième lieu, qu'alors même que la qualité de marchand attribuée à Sudric, simple endosseur des billets reconnus faux, aurait les mêmes effets que s'il les eut souscrits, cette qualité n'a él^ni énoncée dans les questions posées aux jurés, ni déclarée par leurs réponses, et que dès lors elle n'a pu servir de base à la qualification légale du fait de faux, et par suite à là peine qui lui a été appliquée; qu'ainsi en condamnant le demandeur comme coupable du crime de faux en écriture de commerce, l'arrêt attaqué a faussement appliqué l'article 147 du Code pénal et violé l'article 150 du même Code:

Par ces motifs, LA COUR casse et annule l'arrêt de la cour d'assises d'Indre-et-Loire, du 25 juin dernier, la déclaration du jury tenant;

Et, pour être fait à ladite déclaration application de la peine déterminée par la loi, renvoie le demandeur et les pièces du procès devant la cour d'assises de Loir-et-Cher ;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

( N° 254. ) Le vol commis par un militaire, au moment où il est en route pour rejoindre son corps, est de la compétence des tribunaux ordinaires (l).

ARRÊT , sur le réquisitoire de M. le Procureur général à la Cour de cassation, faisant cesser le conflit négatif élevé entre le Tribunal de première instance d'Argentan et le 2e Conseil de guerre de la 14e division militaire, dans l'affaire du nommé Gilles-Mathurin Morice, prévenu de vol'dans une voiture publique.

Du 2 août 1838.

Suit la teneur du réquisitoire et de l'arrêt :

A LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE.

Le procureur général à la Cour de cassation expose qu'il s'est élevé un conflit négatif entre le tribunal de première instance d'Argentan (Orne) et le 2e conseil de guerre de la 14edivision militaire.

Gilles-Mathurin Morice, remplaçant d'un jeune soldat de la classe de 1836, porteur d'une feuille de route délivrée à Bourbon-Vendée, et voyageant pour aller rejoindre le 4e régiment d'artillerie, a été arrêté le 15 mars dernier, à Gacé (Orne), sous la prévention de vol commis dans une voiture publique, au préjudice d'un habitant de Rouen.

(l) Voyez arrêts des 22 fe'vrier 1828 et 29 juin 1837 {Bull, n 09 /i9 et 192 ).


( 367 )

Le tribunal de première instance d'Argentan , saisi de cette affaire, et réuni en la chambre du conseil, s'est déclaré incompétent,. le 3 avril 1838, par ce motif que l'inculpé est au service militaire; qu'au moment où le délit qui lui est reproché a été commis, il se . rendait à Douai pour y rejoindre son corps, ainsi qu'if est attesté par la feuille de route qui lui a été délivrée à Bourbon-Vendée le 6 mai dernier, et que dès lors les tribunaux militaires sont seuls compétents pour juger le délit dont il est soupçonné de s'être rendu coupable.

Le 2" conseil de guerre permanent de la 14e division militaire, devant lequel Morice a été traduit, s'est également déclaré incompétent, le 15 juin 1 838 j par le motif que les délits commis par dès militaires présents à leur corps diffèrent essentiellement de ceux qu'ils commettent hors du corps , lorsqu'ils ne sont pas astreints aux diverses obligations de la discipline militaire, et que, dans, l'espèce, ledit Morice voyageait isolément pour rejoindre le 4° régiment d'artillerie, dans lequel il n'avait pas même été incorporé, et qu'il n'était par conséquent point sous les drapeaux, ni justiciable de la juridiction militaire.

Le conseil de guerre, par cette déclaration d'incompétence, a fait une juste application de la loi. Sa décision est conforme à l'avis du conseil d'état du 30 tliermidor-7 fructidor an xn, qui porte dans son dispositif: « La connaisance des délits communs commis pardesrai*litaires en congé on hors de leurs corps est de la compétence des tw«bunaux ordinaires. •> '

Elle est conforme aussi à la jurisprudence delà Cour de cassation, consacrée par deux arrêts en date du 22 février 182.8 et 29 juin 1837..

Dans ces circonstances, vu la lettre de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, en date du 11 juillet 1.838;

Vu l'avis du conseil d'état du 30 thermidor-7 fructidor an.xn, ensemble les pièces du procès,

Nous requérons pour le Roi qu'il plaise à la Cour, sans s'arrêter ù l'ordonnance de la chambre du conseil, laquelle sera considérée comme non avenue, renvoyer le-prévenu et les pièces du procès devant telle juridiction compétente qu'il plaira à la Cour d'indiquer.

Fait au parquet, le 18 juillet 1838.

Pour le procureur général absent :

Le premier avocat-général, Signé : F.-L. LAPLAGNE-BARRIS.

Ouï M. Voysin de Gartempe fils, conseiller, en son rapport; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions ;

Vu le réquisitoire du procureur général près l'a Cour;


.( 368 )

Vu là lettre de M.Te garde des sceaux, ministre delà justice, adressée au procureur général, le 11 juillet dernier, formelle aux fins dudit réquisitoire ;

Vu l'ordonnance de la chambre du conseil du tribunal de première instance d'Argentan, du 3 avril 1838, par laquelle ce tribunal se déclare incompétent et renvoie devant l'autorité militaire le nommé Gilles-Mathurin Morice, remplaçant un jeune soldat de la classe de 1836, porteur d'une feuille de route délivrée à Bourbon-Vendée, et voyageant pour rejoindre le 4° régiment d'artillerie auquel il devait être incorporé, inculpé d'avoir volé, dans la voiture publique d'Alençon à Gacé, au préjudice d'Auguste Paupard, une bourse contenant de l'argent; décision fondée sur ce que l'in' culpé était militaire au moment où le délit qui lui est reproché a été commis; ■ ' ' ' .

Vu le jugement rendu le, 15 juin 1838 par le 2° conseil de guerre de la 14e division,militaire, par lequel ce conseil de guerre s'est aussi déclaré incompétent, par le motif que les délits commis par des militaires, hors de leur corps et de leur garnison ou can tonnement, sont de la compétence des tribunaux ordinaires, et que, dans l'espèce, l'inculpé voyageant isolément pour rejoindre le 4e régiment d'artillerie, dans lequel il n'avait pas même été incorporé, n'était par conséquent point sous les drapeaux, ni justiciable de la juridiction militaire;

Attendu qu'il résulte de l'ordonnance de la chambre du conseil du tribunal de première instance d'Argentan, et du jugement rendu par le 2e conseil de guerre de la 14e division militaire, l'un et Fautre passés en force de chose jugée, un conflit négatif ; que le cours de la justice est interrompu, et que c'est à la Cour de cassation qu'il appartient de le rétablir, d'après les dispositions de l'article 527 du Code d'instruction criminelle;

Vu l'avis du conseil d'état du 30 thermidor-7 fructidor an xn, portant dans son dispositif :

«La connaissance des délits communs commis par des militaires «en congé ou hors de leurs corps est de la compétence des tribu« naux ordinaires ; >>

Attendu qu'il est constant qu'au mois de mars Î838 , date du vol imputé à Morice, cet individu était hors du corps dont il devait faire partie, et qu'il n'avait pas encore rejoint; que par conséquent c'est aux tribunaux ordinaires qu'il appartient de connaître du vol qui lui est reproché,

LA COUR, statuant par voie de règlement déjuges, et faisant droit sur le réquisitoire du procureur général du Roi, sans s'arrêter à l'ordonnance de la chambre du conseil du tribunal de première instance d'Argentan, du 3 avril 1838, laquelle sera considérée comme non avenue, renvoie ledit Morice, en l'état où il se trouve, et les pièces du procès, devant le juge d'instruction du tribunal de première instance de Mortagne, pour être procédé et, après Tins-


( 369 ) truction terminée, statué par ledit tribunal sur la prévention conformément à la loi ;

Ordonne, etc.

Fait et jugé, etc. — Chambre criminelle.

( N° 255. ) L'intervention de la partie civile ne peut être reçue aprir la déclaration du jury (l).

La durée de la contrainte par eorps ne peut être fixée qu'autant que les condamnations pécuniaires s'élèvent à âOOfrancs (a).

ANNULATION, sur le pourvoi de Sébastien Haas, JcanWerlings,. et de Georges Werlings, et pour violation des articles 67 , 335 du Code d'instruction crimincHe, 1 et 40 delà loi du 17 avril 1832,. d'un Arrêt rendu par la Cour d'assises du. département du. Haut-Rhin, le 22 juin 1838.

Bu 2 août 1838.

Ouï M. Isambert, conseiller, en son rapport; et M. Pascalis,,avocat général, en ses conclusions;

Sur le chef qui prononce des dommages-intérêts, et qui fixe la durée de la contrainte par corps :

Vu les articles 67 et 335 du Code d'instruction criminelle-, 7 et 40 de la loi du 17 avril 1832 sur la contrainte par corps;

Attendu que la cour d'assises a reçu l'intervention, comme parties civiles, de Sébastien Balthazard et de la veuve de Nicolas Remy, après la déclaration du jury, et par conséquent après la clôture des de'bats, et leur a.adjugé des.dommages-intérêts;

Attendu, de plus, que l'arrêt attaqué a fixé la durée de la contrainte par corps à uue année, bien qu'il n'existe pas , au profit de l'Etat, de condamnation à l'amende, ni de liquidation de frais audessus de 300 francs; qu'ainsi ledit arrêt a violé les dispositions précitées du Code d'instruction criminelle et deTa loi sur la contrainte par corps,

LA COUR casse et annule l'arrêt rendu par la cour d'assises du département du Haut-Rhin, le .22 juin dernier, au chef des dommages-intérêts, et delà fixation de la durée de la contrainte par corps,

Et, attendu qu'il n'existait pas de partie civile régulièrement constituée, la Cour déclare qu/jl n'y a lieu de prononcer aucun renvoi;

Ordonne, etc. , Fait, jugé etpronp^céf etc.-—Chambre criminelle.

(1) Voyezarrêts du 16 octobre 1813 {Bull. n°222);du 21 octobre 1836 {Bull, n° 402); du 22 avril 1836 {Bull, n» 12«)Î du 25 mai ,1887 {BulL n° 160).

(2) Voyez arrêt du 2 août 1838 et ceux en noie {Bull. n° 2S2).


(3™ )

(N°256. ) La Cour d'assises ne peut fixer la durée de la contrainte par corps qu'autant que les condamnations pécuniaires au profit de l'Etat s'élèvent à 300 francs au moins (l).

ANNULATION, par voie de retranchement, pour violation de la loi du 17 avril 1832, sur la contrainte par corps, d'un Arrêt rendu par ,1a Cour d'assises du département de.la Corrèze, le. 5 juin 1838 , contre Pierre Bellonie.

Du 2 août 1838.

Ouï, en son rapport, M. Gilbert de Voysins, conseiller; et M* Pascalis, avocat-général, en ses conclusions;

Attendu-que les frais liquidés par l'arrêt ne s'élèvent qu'à la somme de 257 francs 75 cent.; que néanmoins la cour d'assises a cru devoir fixer la durée de la contrainte par corps pour le payement desdits frais ; que la loi de la matière n'autorise les cours d'assises à fixer cette durée que lorsque les frais s'élèvent à la somme de 300 francs et au-dessus ; qu'ainsi cette disposition constitue une violation formelle de la loi sur la contrainte par corps(17 avril 1832,) :

Par ces motifs, LA COUR casse et annule, par voie de retranchement, cette disposition de l'arrêt de la cour d'assises;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. •— Chambre criminelle.

( 257.) La question relative au fait principal, objet de l'accusation, et celles qui se rattachent aux circonstances aggravantes de ce fait, doivent être posées séparément et recevoir du jury des réponses distinctes et séparées (2).

ANNULATION, sur le pourvoi du nommé Henri Acker, et pour violation formelle du nouvel article 341 du Code d'instruction criminelle et de l'article 3 de la loi du 13 mai 1836 , d'un Arrêt rendu parla Cour d'assises du département duBas-Rhin, le 25 juin 1838.

Du 2 août 1838.

Ouï, en son rapport, M. Gilbert de Voysins, conseiller; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions;

Attendu qu'il résulte de la combinaison du nouvel article 341 du Code d'instruction criminelle et de l'article 3 de la loi du 13 mai 1836, que les présidents des cours d'assises doivent re(1)

re(1) arrêt du 2 août 1838 {Bull. n° 255) et ceux indique's en note.

(2) jVoyez arrêt du 2 août 1838 {Bull. n°25l) et les arrêta indiqués en note.


mettre aux jurés des questions séparées, tarit sur le fait principal de l'accusation que sur chacune des circonstances aggravantes qui peuvent s'y rattacher, et que les jurés doivent donner des réponses spéciales et distinctes à chacune de.ces questions;

Attendu que, dans l'espèce, il s'agissait d'une soustraction frauduleuse commise par un domestique au préjudice de son inaitre;

Attendu que la question aggravante de la domesticité devait, conformément aux dispositions du Code d'instruction criminelle, être séparée de la question sur le fait principal, et recevoir des jurés une réponse distincte et spéciale;

Attendu que, contrairement aux dispositions du Code précité, les deux questions ont été posées cumulativement, et que les jurés n'y ontfait qu'une seule et même réponse, ce qui constitue une violation formelle de la loi :

Par ces motifs, la Cour casse et annule les débats, la déclaration du jury et l'arrêt qui s'en est suivi ;

Et, pour être statué conformément à la loi, renvoie l'affaire devant la cour d'assises du département du Haut-Rhin:

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

(N° 258. ) Le prévenu d'avoir commis une contravention aux règlements sur la petite voirie, en réparant sur l'ancien alignement la façade d'unemaison sujette à reculemcnt, doit être condamné, non-seulement à l'amende, mais à la démolition des travaux indûment effectués.

Le tribunal de police ne peut, en ordonnant la démolition des travaux élevés en contravention à l'alignement, ajouter qu'il sera sursis à cette démolition jusqu'à l'approbation du plan do l'autorité municipale par l'autorité supérieure ( t ).

ANNULATION, sur le pourvoi du Commissaire dé police remplissant les fonctions du Ministère public près le Tribunal de simple police de la ville d'Aurillac, d'un Jugement rendu par ce tribunal, le 7 juillet 1838, contre le sietar Saint-Paul.

Du 3 Août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives,,et les conclusions de M. l'avocat général Pascalis;

Vu les articles 4 et 5 de l'édit du mois de décembre 1607; 3, n° 1er, titre XI, de la loi des 10-24 août 1790; 29 et 46, titrel", de celle des 19-22 juillet 1791 ; 10 de l'arrêté du maire d'Aurillac, en date du troisième jour complémentaire de l'an xi; 471, n° 5, du Code pénal, et 161 du Code d'instruction criminelle;

(l) Voyez arrêt du 21 juillet «838 et fes arrêts en note [Bull. n° 242 ).


( 372 )

Et attendu, en fait, que le jugement de'noncé a condamné SaintPaul à l'amende prononcée par la loi, pour avoir, sans l'autorisation préalable qu'exige l'arrêté précité, et,malgré la défense expresse qui lui en avait" été faite, élevé des trumeaux en pierre de taille sur l'ancien aliguement de la façade de sa maison, laquelle est sujette à reculement, suivant Je plan proposé par la commission municipale;

Que ledit Saint-Paul devait donc être condamné aussi en même temps, selon les principes généraux de la matière, à faire démolir immédiatement les travaux qu'il a indûment effectués;

D'où il suit qu'en déclarant qu'il sera sursis à la démolition par lui ordonnée jusqu'au moment où l'alignement proposé par ladite commission aura été définitivement arrêté et approuvé par l'autorité supérieure, ce jugement a commis une violation expresse"des dispositions ci-dessus visées :

En conséquence, LA COUR, faisant droit au pourvoi, casse et .annule, mais uniquement au chef qui accorde un sursis pour effectuer la démolition dont il s'agit, le jugement que le tribunal de simple police a prononcé, le 7 juillet dernier, contre Saint-Paul, propriétaire;

Et, pour être de nouveau procédé sur ce chef des réquisitions du ministère public conformément à la loi, renvoie ledit SaintPaul, avec les pièces de la procédure, devant le tribunal de simple police du canton de Saint-Mamet;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

( N° 259r)% La Cour de cassation ne peut ordonner l'extraction des prévenus où condamnés des maisons où ils sont détenus, pour être transférés dans la maison de justice du lieu où elle siège, afin qu'ils puissent être entendus en personne sur leurs moyens de cassation.

! Le demandeur en inscription de faux doit, à peine d'être déclaré non recevable, consigner l'amende prescrite par le règlement du 28 juin ■1738.

L'arrêt qui déclare un prévenu non recevable dans, une récusation par lui proposée contre l'un des juges, est un arrêt préparatoire contre lequel il ne peut être formé de pourvoi distinct.

La récusation d'un magistrat doit être déposée au greffe et non artiticùlée à l'audience en présence du magistrat récusé.

En matière correctionnelle, celui qui, sans motifs suffisants, forme une récusation contré un magistrat, est passible de l'amende prescrite par le- Code de procédure civile (l).

Une demande de mise en liberté sous caution est une demande principale : indépendante du jugement de la prévention elle-même ) les jugements qui statuent à cet égard ont donc un effet définitif ', et le vecaurs en cassation doit être formé, à peine de nullité, ..dans les trois jours.

(l) Voyez arrêt du 3 octobre 1835 {Bull. n°382).


( 373 ) L'arrêt de condamnation qui, en ne prononçant qu'une amende de 400 francs, sans ajouter aucune liquidation des dépens, fixe à six mois la durée de le contrainte: par corps, commet un excès de pouvoir^).

ANNULATION, sur le pourvoi de Napoléon Lemeneur, ex-avocat à Falaise, du chef d'un arrêt de la Cour royale de Caen du 26 avril 1838, et Rejet des pourvois par lui formés contre divers autres arrêts et jugements.

Du 3 Août 1838.

Napoléon Lemeneur, ancien juge auditeur au tribunal de la Basse-Terre, île Guadeloupe, et ancien avocat à Falaise, révoqué des fonctions de magistrat colonial, et définitivement rayé du barreau de Falaise, par une décision du conseil de discipline confirmée par les chambres réunies de la cour dé Caen, a été poursuivi pour avoir outragé, par paroles, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, les magistrats de la cour royale de Caen, le procureur général et le président du tribunal de Falaise : un mandat de dépôt a été décerné contre lui sur cette poursuite, le 22 février 1838.

Le 3 mars, jugement par défaut du tribunal correctionnel de Caen, qui le déclare convaincu du délit à lui imputé, et le condamne à six mois de prison, et, en outre, à faire réparation aux magistrats outragés.

Sur son opposition, jugement du 17 mars, qui lui accorde sa mise en liberté sur le cautionnement de 500 francs, et qui, d'ailleurs, confirme la condamnation.

Appel à minimâ du procureur du Roi et du procureur général; appel de Lemeneur lui-même, sauf en ce qui concerne sa mise en liberté sous caution.

Sur cet appel, il récuse à l'audience le conseiller B.runet, fils du président de Falaise. Un arrêt du 27 mars le déclare non recevable en cette récusation.

Le28 mars, la cour, statuant sur l'appel du ministère public, annule le jugement du 17 mars au chef qui accordait à Lemeneur sa liberté sous caution.

Le 29 au matin, il déclare au greffe se pourvoir en cassation contre les arrêts du 27 mars. A l'audience, il conclut au sursis par divers motifs; le conseilIerBrunet s'abstient; la cour de Caen passe outre; Lemeneur fait défaut sur le fond ; la* our le condamne à dix mois d'emprisonnement, en retranchant la disposition relative à la réparation à faire aux magistrats. ^^

Le6 avril, Lemeneur se désiste au greffe deaBi pourvoi contre

(l) Voyez arrêts du 8 juillet 1836 {Bull. n° 221 1 du 29 juin 1837 [Bull. n° 227).


(374) les, arrêts des 27 et 28 marsj il forme opposition à l'arrêt du 29 mars le 14 avril; puis il refuse de paraître à l'audience sur son opposition. Le président lui fait faire deux sommations; et, par une troisième ordonnance, prescrit de passer outre.

26 avril 1838, arrêt définitif qui confirme l'arrêt par défaut du 29 mars, et fixe à six mois la durée de la contrainte par corps sans liquidation des dépens;

Le 28 avril, Lemeneur se pourvoit en cassation : les pièces sont enregistrées au greffe; le 23 mai, il conclut devant ta Cour au sursis jusqu'à ce qu'il soit mis à même de se défendre, et jusqu'à ce que les ministres de l'intérieur et de la justice et la Cour aient ordonné sa translation dans la maison de justice de Paris.

, Sur les incidents par lui présentés, et sur ses pourvois, il a été rendu successivement trois arrêts par la Cour, sous les dates des 28 juin, 13 juillet et 3 août 1838.

Voici ces arrêts :

ARRETDU 28 JUIN 1838.

Ouï M. Isambert, conseiller, en son rapport; Mc Lanvin , avocat ' de Lemeneur, en ses observations; et M. Helk>$ avocat général, en ses conclusions ; ' #

Vu la requête en date du 26 juin, déposée le 27 au greffe de la Cour, tendante à ce qu'il soit sursis provisoirement,à statuer sur la demandé en translation antérieurement présentée à la Cour jusqu'à ce qu'il ait été statué par les ministres de l'intérieur et de la justice, auxquels ledit Lemeneur aurait adressé semblable demande à fin de translation; .

Attendu que ces démandes sont étrangères à la compétence de la Cour, et qu'aux termes de l'article 425 du Codé d'instruction criminelle la Cour doit statuer sur les recours en cassation dans le mois, à compter du jour où les délais sont expirés;

Attendu, en fait, que le recours en cassation du demandeur est enregistré au greffe de la Cour à la date du 23 mai dernier;

Sur la demande afin de translation du prévenu de la maison d'arrêt de Caén, où il est détenu, dans la maison de justice du lieu où siège la Cour, à fin qu'il puisse lui présenter sa défense en personne;

Attendu qu'il s'agh^'un prévenu condamné, et non d'un recours fondé sur la compétence; que, dès lors, la demande ne rentre pas dans le cas prévu par le deuxième aliéna de l'article 421 du Code d'instruction c^ainelle; que, d'ailleurs, il est détenu et non en liberté; . -^P

Attendu que, si aux termes de l'article 613 du même Code, le juge d'instruction et le président'des assises, ont droit de rendre les ordonnances qu'ils croient nécessaires à l'instruction et au juge-


( 375 ) ment, et qui sont exécutoires dans les maisons d'arrêt et de justice, et si cette disposition est commune aux magistrats ayant juridiction , l'exercice de ce pouvoir est facultatif pour ceux qui sont chargés de l'instruction et qui ont la police des audiences, et corrélatif à la nature de la juridiction et à l'état des prévenus ;

Attendu qu'aucune disposition de la loi n'autorise la Cour de cassation à ordonner l'extraction des prévenus ou condamnés des maisons où ils sont détenus, pour être transférés dans la maison de justice du lieu où elle siège, afin qu'ils puissent être entendus en personne sur les moyens de cassation qu'ils peuvent présenter contre les jugements ou arrêts définitifs, objet de leurs recours :

Par ces motifs, LA COUR rejette la demande en sursis et la demande en translation formée par Napoléon-César-Auguste Lemeneur; et, pour être statué sur son pourvoi, continue la cause à quinzaine pour tout délai.

Ainsi jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

ARRÊT DU 13 JUILLET 1838.

Ouï de nouveau M. Isambert, conseiller, en son rapport; Me Lanvin, avocat, qui a déclaré ne pouvoir conclure ; et M. Hello, avocat général, en ses conclusions;

Vu ia nouvelle requête enregistrée au greffe de la Cour le 12 juillet, et après en avoir délibéré à l'audience d'hier et cejourd'hui;

Attendu qu'au nombre des pièces jointes au dossier il existe , à la date du 29 mars 1838, une copie, signifiée à la requête de Lemeneur, d'une déclaration faite au greffe de la cour royale de Caen, ledit jour 29 mars, d'un pourvoi en cassation par lui formé envers deux arrêts rendus par ladite cour les 27 et 28 du même mois;

Que dans un autre acte du 9 avril 1838, notifié à la requête dudit Lemeneur, il est énoncé que, par déclaration ;passée le' 6 du même mois au grefle de ladite cour, Lemeneur s'est désisté de son pourvoi du 22 mars, sous la réserve de se pourvoir ultérieurement;

Que les arrêts des 27 et 28 mars sont de nouveau frappés de recours par la déclaration de Lemeneur; mais qu'il n'appartient qu'à la Cour de statuer sur la validité et les effets, soit du pourvoi du 29 mars, soit du désistement du 6 avril; et qu'il convient de statuer par un seul et même arrêt sur les deux pourvois et sur la légalité des arrêts des 27, 28 et 29 mars et du 26 avril 1838,

LA COUR, avant de faire droit, ordonne qu'à la diligence du procureur général en la Cour, il sera fait apport à son greffe de la déclaration du pourvoi du 29 mars, du désistement du 6 avril, et de l'expédition des deux arrêts des 27 et 28 mars, pour être ensuite statué par la Cour ce qu'il appartiendra.

Ainsi jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.


( 376 )

ARRET DU 3 AODT 1838.

Ouï de nouveau M. Isambert, conseiller, en son rapport; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions ;

Vu les nouvelles requêtes déposées au greffe de la Cour le 25 juillet dernier et le jour d'hier, signées Lemeneur;

Vu également les pièces rapportées au greffe en exécution de son arrêt du 13 juillet dernier;

Après en avoir délibéré en la chambre du conseil ;

Sur la demande en inscription de faux contre l'acte de l'huissier Philippe, du 14 avril 1838 :

Attendu que le demandeur n'a pas consigné Pamende prescrite par le règlement du 28 juin-1738, 2e partie, titre X, article 6, et que cette consignation est exigée, même en matière de grand criminel, de la part des condamnés qui ne sont pas astreints à !a consignation d'une amende pour leur pourvoi; qu'ainsi cette amende doit être consignée, à plus forte raison, en matière correctionnelle;

Attendu, d'ailleurs, que cette demande n'est accompagnée d'aucuns motifs qui la rendent pertinente et admissible,

LA COUR déclare Lemeneur non recevable dans sa demande à fin d'inscription de faux.

Sur la demande à fin d'apport au greffe des conclusions que le demandeur a prises les 24 janvier et 21- février 1838:

Attendu qu'elles sont jointes au dossier; que d'ailleurs la Cour ne pourrait se livrer à leur examen sous le rapport de la prévention d'outrage imputée au prévenu;

Sur la demande à fin d'apport d'autres pièces, et de sursis au jugement de la cause jusqu'à cet apport :

Attendu que Lemeneur ne désigne pas les pièces qui manqueraient au dossier et pourraient éclairer la religion de la Cour; que rien n'établit que le dossier de l'affaire soit incomplet, et qu'ainsi il n'y a lieu d'ordonner aucun nouvel apport de pièces, et, par suite , de surseoir au jugement du pourvoi;

Sur les conclusions à fin de sursis jusqu'à ce que le ministre de la justice ait autorisé ou prescrit la translation du demandeur dans la maison de justice de Paris, et, dans tous les cas, afin que la Cour ordonne cette translation :

Attendu que des conclusions tendantes aux mêmes fins ont été rejetées par l'arrêt du 28 juin dernier, et que le demandeur n'a pas produit de motifs nouveaux à l'appui de sa nouvelle demande;

Sur les griefs pris de l'atteinte portée à sa défense et sur la prolongation de sa détention préventive :

Attendu, d'une part, que deux avocats lui ont été désignés d'office; que l'un d'eux a cru devoir se désister de cette défense; que


( 377 ) Lemeneur«'est opposé à ce que l'autre le défendît; et, d'outre part, que tous les retards dont il se plaint ne proviennent que de son fait : que la justice a rempli à son égard tous ses devoirs, pour hâter la décision de la cause, en laissant toute latitude à sa défense :

Par ces motifs, LA COUR rejette les moyens préjudiciels proposés ou renouvelés par le demandeur.

Sur le pourvoi par lui formalisé au greffe de la cour royale de Caen* le 29 mars dernier :

Attendu que Lemeneur s'en est désisté par un acte régulier reçu au même greffe le 6 avril suivant,

LA COUR donne acte à Lemeneur de ce désistement et déclare en conséquence n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi du 29 mars, qui demeure comme non avenu.

Statuant sur le pourvoi déclaré au greffe de la cour de Caen, lé 28 avril, contre divers jugements et arrêts énoncés audit acte :

Attendu, quant au pourvoi dirigé contre les jugements du tribunal correctionnel de Caen des 3 et 17 mars 1838, que ces jugements sont en premier ressort, et qu'ils ont été frappés d'appel, tant de la part du ministère public que de Lemeneur lui-même, ' sauf à l'égard de ce dernier la disposition qui l'admettait à la liberté sous caution; attendu que le recours en cassation n'est ouvert que contre. les jugements en dernier ressort (article 413 du Code d'ins-. truction criminelle),

LA COUR déclare Lemeneur non recevable dans son pourvoi contre Iesdits jugements. .

En ce qui touche le pourvoi formé contre l'arrêt du 27 mars 1838, par lequel la cour de Caen a déclaré le demandeur non recevable en la récusation par lui proposée contre le conseiller Brunet, membre de jadite cour :

Attendu que cet arrêt n'était que préparatoire, qu'ainsi, aux termes de l'article 416 du Code d'instruction criminelle, le pourvoi formé après l'arrêt définitif, le 28 avril, a valablement saisi la Cour : que les réserves faites par Lemeneur dans son désistement s'appliquent à cet arrêt ;

Mais attendu que, dans le silence du Code d'instruction criminelle sur la matière des récusations, il faut recourir au Code de procédure civile, comme droit commun en cette partie, pour les cas de récusation, et suivre les formes tracées par ce Code, pour le jugement de ces récusations, en tout ce qui est compatible avec la célérité qu'exige le jugement des affaires correctionnelles ; attendu que la formalité prescrite par l'article 384 de ce Code, qui veut que la récusation soit déposée au greffe, et non articulée en présence du magistrat récusé à l'audience, n'est point inconciliable avec la procédure correctionnelle; qu'elle a pour but de ménager la dignité de la justice, sans nuire au droit de la partie; qu'il en est de même de la disposition qui punit d'une amende celui qui, sans motifs suffisants, s'est ainsi attaqué à la personne du magistrat;


( 378 )

Que c'est donc à bon droit que, dans l'espèce, l'arrêt attaqué a déclaré Lemeneur non recevable dans sa récusation contre le conseiller Brunet, laquelle .n'a pas été déposée au greffe, et condamne le récusant à 100 francs d'amende :

Par ces motifs, LA COUR rejette le pourvoi de Lemeneur envers l'arrêt du 27 mars.

En ce qui touche le pourvoi dirigé contre l'arrêt du 28 mars, qui a réformé sur appel le jugement par lequel le prévenu avait été admis à la liberté sous le cautionnement de 500 francs;

Attendu qu'une demande de mise en liberté sous caution est une demande principale, indépendante du jugement de la prévention; qu'elle peut être formée en tout état de cause ; que les jugements qui statuent, à cet égard ont un effet définitif; qu'il est impossible de les assimiler aux jugements préparatoires dont il est parlé en l'article 416 du Code criminel, puisque, si le recours n'était ouvert qu'après l'arrêt définitif, ce recours serait presque toujours sans objet: le jugement définitif ayant pour résultat d'amener de plein droit la mise en liberté définitive du prévenu sous les liens d'un mandat, ou de prononcer une condamnation susceptible d'exécution sur sa personne;

D'où il suit que, dans l'espèce, le pourvoi du 28 avril a été tardivement renouvelé, et que d'après l'article 373 du Code d'instruction criminelle ce pourvoi ne peut être accueilli; qu'ainsi la Cour n'a point à examiner si l'appel du jugement de première instance était recevable, ni si la cour dejCaen a pu refuser audit Lemeneur la liberté sous caution que les premiers juges lui avaient accordée ,

LA COUR déclare le pourvoi du demandeur contre l'arrêt du 28 mars non recevable.

Sur le pourvoi dirigé contre le troisième arrêt du 29 mars, qui qui a statué sur divers moyens préjudiciels proposés par Lemeneur :

A l'égard du sursis motivé sur le pourvoi formé contre l'arrêf du 27 mars qui a rejeté la récusation du conseiller Brunet fils, pourvoi alors subsistant ;

Attendu que ce magistrat s'est abstenu de connaître ultérieurement de la cause ; qu'ainsi le motif du sursis n'existait plus;

A l'égard du sursis demandé à raison du pourvoi formé contre l'arrêt qui a rétracté la mise en liberté sous caution :

Attendu que cette demande était séparée du foud de la prévention, et que cette prévention pouvait être jugée, sans égard à cette instance particulière, qui devait demeurer sans influence sur la culpabilité ou la non-culpabilité du prévenu;

Sur le sursis demandé à raison d'un recours en renvoi pour cause de suspicion légitime devant la Cour de cassation :

Attendu que ce recours n'existait pas en fait, et qu'eut-il existé, la cour de Caen n'était pas dessaisie de la cause, tant que le demandeur n'aurait pas justifié d'un arrêt de la Cour de cassation qui


( 379 ) eut ordonné ce sursis (art. 545 et suivants du Code (l'instruction criminelle);

Sur les autres moyens de sursis, attendu qu'ils ne reposaient que sur des faits ou des considérations que la cour de Çaen était appelée à apprécier souverainement, et qu'il ne peut de cette appréciation résulter d'ouverture à cassation :

Par ces motifs, LA COUR rejette le pourvoi de Lemeneur contre l'arrêt du 29 mars.

Sur le pourvoi dirigé contre l'arrêt définitif du 20 avril 1838 :

Attendu que cet arrêt a été rendu après l'accomplissement des formalités prescrites par la loi pour la régularité des débats; qu'en, s'appropriant les motifs de l'arrêt par défaut du 29 mars, cet arrêt a reconnu et déclaré Napoléon Lemeneur convaincu d'outrages, par paroles, envers les magistrats composant la cour royale de Caen, son procureur général et le président du tribunal de Falaise, tendant à inculper leur honneur et leur délicatesse, soit dans l'exercice, soit à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, en écartant la circonstance que ces outrages auraient été commis à l'audience ;

Et qu'en le condamnant, en réparation de ce délit, à la peine de dix mois d'emprisonnement, la cour royale de Caen a fait une légale application de l'alinéa premier de l'article 222 du Code pénal :

Par ces motifs, LA COUR rejette le pourvoi de Lemeneur en ce chef;

Mais, sur le chef de l'arrêt attaqué qui a fixé à six mois la durée de la contrainte par corps;

Vu les articles 7, 34, 35, 39 et 40 de la loi du 17 avril 1832;

Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces articles que, dans le cas où la condamnation, dans ses dispositions pécuniaires, ne s'élève pas à trois cents francs, il y a lieu de distinguer entre le cas où des condamnations sont prononcées dans l'intérêt des particu- . liers et celui où elles n'ont lieu que dans l'intérêt de l'État ou de la vindicte publique: au premier cas, il y a lieu de fixer'la durée de la contrainte par corps dans la limite de six mois à cinq ans, pour le cas où le condamné justifierait de son insolvabilité (article 39) ; dans le second cas, la durée de la contrainte est fixée par la loi elU-même, savoir, à quatre mois si, quand elles excèdent cent francs, le condamné justifie de son insolvabilité (article 35) ;

Et attendu que dans l'espèce il n'existe contre Lemeneur aucune liquidation de dépens dans. l'arrêt attaqué, et qu'il n'a: été prononcé contre lui qu'une amende de cent francs, par suite du rejet de sa demande eu récusation; d'où il suit que l'arrêt attaqué a commis un excès de pouvoir en fixant à six mois la durée de la contrainte par corps, et violé les articles 7 et 40 de Li los-précitée:

Par ces motifs , LA CCUR casse et annule l'arrêt IVIHÏ!" ic 2""avril' dernier par la cour royale de Caen, au-chef seulement quî'.à fixé la durée de la contrainte par corpiÇ : ''■'■■ :''.:..- ':

Criminel. fSXS. N" 8. 27


( 380 ) Et attendu,qu'il n'y ia pas de partie civile, dit qu'il n'y a lieu de prononcer aucun renvoi sur ce point; Ordonne, etc. ■ , . Ainsi jugé et prononcé, etc. -—Chambre criminelle.

( K" 260. ) Lorsqu'il résulte d'un procès-verbal que des arbres réservés ont été enlevés par un adjudicataire dans l'étendue de sa coupe et qu'il y a impossibilité de constater la grosseur des arbres, en raison de ce qu'ils ont été coupés au-dessous du marteau royal, il y a lieu d'appliquer les dispositions du deuxième paragraphe de l'article 34 du C.for. (t).

ANNULATION, sur le pourvoi de l'Administration des forêts, d'un Jugement rendu, sur appel de police correctionnelle, par le Tribunal de première instance d'Albi, le 2 mars 1838, entre ladite administration et le sieur Alexis Cabrai.

Du 3 Août 1838.

Ouï M. le baron Fréteau de Périy, conseiller, en son rapport; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions;

Attendu qu'il est établi, dans l'espèce, par un procès-verbal non attaqué, que la constatation des baliveaux manquants a été impossible à faire par lès agents forestiers, en raison de ce que ces baliveaux ont été coupés au-dessous de l'empreinte du marteau royal ;

Que de cette circonstance il résulte, en effet, que les souches de ces baliveaux, bien que demeurées dans le sol forestier, ne pouvaient être distinguées de celles des arbres abandonnés à l'adjudicataire, et dès lors ne pouvaient plus servir à la constatation dont il s'agit ;

Attendu que cette même circonstance établissait précisément le cas prévu par le paragraphe second de l'article 34 du Code forestier:

Que cependant le jugement attaqué, tout en reconnaissant l'existence du délit à la charge de l'adjudicataire, a écarté l'application de l'article 34, pour appliquer au délit l'article 193 , lequel n'est point applicable aux cas où le délit est à la charge de l'adjudicataire', et où la" grosseur des arbres manquants n'a pu, d'après une circonstance quelconque , être déterminée; •

Attendu qu'en statuant ainsi le jugement attaqué a fait une fausse application de l'article 193, et violé, en ne l'appliquant pas , l'article 34 du Code forestier,

LA COUR casse et annule le jugement attaqué;

Et, pour être statué conformément à la loi sur l'appel interjeté par l'administration forestière, du jugement du tribunal de Cas(l)

Cas(l) arrêts du 23 mars 1837 {Bull. n° 89) et du 1G juin 1837 {Bull. n° 183). #


(381.) très, en date 28 octobre 1837, renvoie la cause et les parties devant la cour royale de Toulouse, chambre des appels de police correctionnelle ;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé , etc. — Chambre criminelle.

Nota. La Cour a rendu à fa même audience, et au rapport du même magistrat, un arrêt semblable qui casse, sur fe pourvoi de fa même administration , un autre jugement rendu par le même tribunal, à I'e'gard du sieur Alexis Cabrol.

(N°261.) Le règlement de police par lequel un maire enjoint à tous'les marchands de comestibles ou autres de cesser la revente du pain, est pris dans les limites des attributions municipales. En conséquence, le tribunal de police ne peut se dispenser d'appliquer les peines de police à ceux dont ■ta contraventtonest constatée.

ANNULATION, sur le pourvoi du Commissaire remplissant les fonctions du Ministère: public près le Tribunal de simple police de la ville de Marseille, d'un Jugement rendu par ce tribunal, le 14 juin 1838, en faveur des époux Vialeton.

Du 4 Août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives,-et les conclusions de M. l'avocat général Pascalis ;

Vu les articles 12 du décret du 22 décembre 1813,1 et 3 de l'arrêté du maire de Marseille, en datedu 17 novembre 1837, qui enjoint à tous les marchands de comestibles ou autres, dans cette ville, dé cesser immédiatement la revente du pain; 471,n° 15, du Code pénal, et 161 du Codé d'instruction criminelle ;

Et attendu, en fait, qu'il est constaté par un procès-verbal dressé à leur charge, que les époUx Vialeton sont marchands de comestibles, et exercent cumulativement avec cette profession celle de regrattiers ou revendeurs de pain ;

Qu'ils ont,donc contrevenu à l'article 3 de l'arrêté précité;

D'ôù;'il^,sult;(qÙ'en les renvoyant de l'action dirigée contré eux à ce sujét'v.aai^réa de leur appîrqùef;la peine attachée par la loi à cette contràyén.li.1an*,,'par le motifcqtj'eJedit article permet, même aux marchands;dé comestibles quifspnt aussi regrattiers ; de continuer l'exercicède'cette dernière^indtîstvie jusqu'au 30 septembre prochain, le jugement dénoncé a manifestement violé cette disposition:,,'et par suite l'article 471, n° 15, du Code pénal, ainsi que l'aftjjçle 161 du Code d'instruction criminelle;

■* 27.


( 382 ) En conséquence, LA COUR , faisant droit au pourvoi, casse et annule le jugement que le tribunal de simple police de la ville de Marseille a prononcé en faveur des époux Vialeton , le 14 juin dernier;

dernier; -,

Et, pour être de nouveau statué sur la prévention, conformément à la loi , renvoie les parties, avec les pièces de la procédure , devant le tribunal de simple police du canton de Roquevaire ;

Ordonne, etc.

.Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

^ N° 262.) Le prévenu de contravention aux règlements de petite voirie, à raison des réparations faites à la façade d'une maison sujette à reculement, doit être condamné , non-seulement aux peines de police, mais

: à la démolition des travaux effectués ; le tribunal de police ne peut refuser deprononcer celle condamnation, sous prétexte que ces travaux n'ont rien ajouté à la consolidation du mur (l).

ANNULATION , sur le pourvoi du Commissaire de police remplissant les fonctions de Ministère public près le Tribunal de simple po.

po. du canton de Lcsparre, d'un Jugement rendu par ce tribunal, le 22 juin 1838, contre Jean Bidau père.

Du 4 Août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives, et les conclusions de M. l'avocat général Pascalis;

Vu les articles 3, n° 1er, titre XI, de la loi des 16-24 août 1790; 46 , titre Ier, de celle des 19-22 juillet 1791 ; 1er et 2 de l'arrêté du maire de Lesparre, en date du 19 août 1825; 5 de Pédit du mois de décembre 1607, maintenu par l'article 29 de ladite loi de 1791, et *161 du Code d'instruction criminelle;:

Attendu, en fait, qu'il résulte du procès-verbal régulièrement dressé dans l'espèce, à la charge de Jean Bidau-père, que ce propriétaire a fait recrépir., sans autorisation , la façade de sa maison sujette à reculement, et remplir une lézarde d'environ deux mètres de longueur;

Qu'en punition de cette contravention, le jugement dénoncé l'a condamné à l'amende portée par l'article 471, n° 15, du Code pénal; ,

Qu'il devait donc, en même temps, pour la faire disparaître, • ordonner la démolition des réparations qui la constituent ;

Qu'il s'ensuit de là qu'en refusant de prononcer cette réparation civile du préjudice qu'elle cause à l'intérêt public, par le motif que le recrépissage dont il s'agit est d'une très-mince importance,

(l) Voyez î'arrêt du 3 août 1838 et les arrêts en note {Bull. n° 258 ).


. ( 363 ) puisque, par le peu de mortier qu'on y à etâployé, il ne saurait ajouter à la consolidation du mur, ce jugement a formellement violé le principe consacré tant par l'article 5 de l'édit précité que par l'article 161 du Code d'instruction criminelle, ci-dessus visés :

En conséquence, LA COUR , faisant droit au pourvoi, casse et %. annule, mais uniquement eu ce qu'il a refusé d'ordonner la démo- : - lition des travaux iudûment faits, le jugement que le tribunal de simple police du canton de Lesparre a rendu, le 22 juin dernier^ contre Bidau père ;

Et, pour être de nouveau statué conformément à la loi, sur ce chef des réquisitions du ministère public, renvoie ledit Bidau, avec les pièces de la procédure, devant le tribunal de simple police du canton de Pauillac;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. —Chambre criminelle. fev

( N° 263. ■) Le recours en cassation, est le seul moyen d'obtenir la réformation des jugements rendus en matière de simple police, lorsque les amendes, restitutions ou autres réparations civiles n'excèdent pas la somme de 5 francs outre lès dépens.

En conséquence, est nul le jugement qui aurait accueilli l'appel d'un jugement semblable, par le motif que la condamnation, bien qu'elle ne fut que d'un-franc d'amende,- entraîne par une conséquence nécessaire la suppression de plantations, et que cette suppression est d'une valeur indéterminée (l).

ANNULATION, SUÉ le pourvoi du Procureur du Roi près le Tribunal de première instance de Lille, d'un Jugement rendu sur appel de police correctionnelle parce tribunal, le 9 juillet dernier, en faveur du sieur Dutoit.

Du 4 Août 1838. ■ -. ■

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives, et les conclusions de M. l'avocat général Pascalis ;

Vu les articles 408, 413 et 172 du Code d'instruction criminelle;

Attendu qu'aux termes de la dernière dé ces dispositions les. prévenus ne peuvent'attaquer, par la voie de-l'appel, les jugements rendus en matière de simple police, que lorsqu'ils prononcent contre eux un emprisonnement, ou lorsque les. amendes, restitutions et autres réparations civiles auxquelles ils les ont con^ damnés excèdent la somme de 5 francs, outre les dépens;

(i) Voyez arrêts du 5 septembre 1811 {Bull. n° 126); du 30 juil 1825 (Bull.W ili/l). ' '


( 384 )

D'où ,il résulte que le recours en cassation est le seul moyen d'en, obtenir la réformation, s'il y a lieu, quand ils n'infligent qu'une amende inférieure à cette somme;

Et-attendu, en fait, que Charles-François Dutoit nra été condamne'par le jugement que le tribunal de simple police a rendu contre, lui, dans l'espèce, qu'à 1 franc d'amende ;

Que l'appel par lui relevé de cette sentence n'était donc point recevable; '

Qu'il s'ensuit de là qu'en l'accueillant, par le motif que la condamnation précitée entraînerait la conséquence de la suppression des plantations indûment effectuées, et que cette suppression est d'une valeur indéterminée, le jugement dénoncé a manifestement violé tout ensemble l'article 172 ci-dessus visé, ainsi que les règles de la compétence :

En conséquence, LA COUR, faisant droit au pourvoi, casse et annule le jugement prononcé par le tribunal correctionnel de Lille, le 9 juillet dernier, en faveur dudit Dutoit;

Et, pour être de nouveau statué conformément à la loi sur

. l'appel du jugement que le tribunal de simple police du canton

. d'Arnientières a rendu dans la cause le 11 mai dernier, renvoie

Tes parties, avec les pièces de la procédure, devant le tribunal de

,,• police correctionnelle séant à Douai;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. —Chambre criminelle.

( N° 264. ) Le tribunal de simple police qui déclare que le fait de la poursuite ne présente ni délit, ni contravention', doit annuler la citation; H ne peut/ sans excès de pouvoir, prononcer son incompétence pour en connaître, et renvoyer les parties à se pourvoir devant qui de droit.

ANNULATION, sur le pourvoi du Commissaire de police remplissant les fonctions du Ministère public près le Tribunal de simple police de la vilje de Versailles, d'un Jugement rendu par ce tribunal, lé lcT juin !8'38, en faveur du sieur Rageot.

-,-,' Du 4 Août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives, et les conclusions de M. l'avocat général Pascalis ;

Vu l'article 159 du Code d'instruction criminelle,

Attendu qu'aux termes de cet article, le tribunal de simple police qui a déclaré que le fait de la poursuite ne présentait ni délit ni contravention, devait annuler la citation qui l'en avait saisi ;

D'où il suit, qu'en prononçant son incompétence pour en connaître, et en renvoyant les parties pour se pourvoir devant qui de droit, ce tribunal a commis nnc violation expresse dudit article : .


( 385 )

En conséquence, LA COUR, statuant sur le pourvoi, casse et annule, mais en ce chef seulement, le jugement rendu par le tribunal de simple police de la ville de Versailles, le 1er juin dernier, en faveur de Pierre-Michel Rageot, boulanger;

Déclare qu'il n'y a lieu de renvoyer l'affaire sur ce point devant un autre tribunal;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

(N° 265. ) Pour appliquer le paragraphe 2 de l'article 54 du Code forestier, il faut qu'il y ait eu impossibilité de constater l'essence et la dimension des arbres abattus en délit par les adjudicataires ; dans toits les autres cas, il faut appliquer le paragraphe 4er du même article, à peine de nullité.

L'amende prononcée par le second paragraphe est applicable en raison de chacun des arbres enlevés (l).

ANNULATION, sur le pourvoi de l'Administration des forêtsi d'un Arrêt rendu par la Cour royale de Nîmes, Chambre des appels de police correctionnelle, le 17 août 1837, dans la cause d'entre ladite administration , et les sieurs Bernard, Raymond et Bousquet.

Du 4 Août 1838.

Ouï M. le baron Fréteau de Pény, conseiller, en son rapport; Me Chevalier, avocat en la cour et de l'administration forestière, en ses observations; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions ;

Attendu que le principe général, d'après lequel le législateur a fixé les amendes encourues par suite des délits forestiers, a été de proportionner le montant de ces amendes à la gravité des délits et à l'importance du préjudice qui en résultait;

Que ce principe ressort particulièrement des,dispositions de l'article 192 du Code forestier;

Que l'article 34, qui n'est que l'application plus rigoureuse de ces dispositions de l'article 192, faite à une classe particulière de coupables, doit donc être entendu dans le même esprit'que l'article 192 lui-même;

Attendu que la rédaction du paragraphe premier de l'article 34 ne laisse aucun doute sur l'intention du législateur à cet égard ;

Qu'il est impossible d'admettre, par voie de supposition, que le législateur ait voulu faire dans le paragraphe second une exception formelle, soit au principe général de la loi, soit au principe d«

( l ) Voyez arrêt du 3 août 1838 et les arrêts cités en note {Bull. n° 2 6 C


( 386 ) paragraphe premier, dont le second n'est que la suite et le corollaire ;

Attendu que, si le paragraphe second devait être entendu dans le sens adopté par l'arrêt attaqué, le paragraphe troisième du même :article34 rendrai' impossible, dans un grand nombre de cas, l'application, même simple, des dispositions de l'article 192, dispositions que le législateur a cependant voulurendre plus rigoureuses, quand les coupables ont la qualité d'adjudicataires;

Qu'en effet ce paragraphe troisième exige qu'il y ait restitution des arbres enlevés, ou du moins de leur valeur, laquelle, dit l'article, sera estimée à une somme égale à l'amende encourue; et que cette restitution deviendrait illusoire quand les arbres enlevés seraient d'une certaine grosseur, puisque le maximum de l'amende se trouvant, d'après l'esprit de l'arrêt, borné à 200 francs, quel que fût le nombre des arbres enlevés, ce maximum pouvait ne pas atteindre la valeur de deux arbres, seulement, telle qu'elle est fixée par lé tarif annexé à l'article 192 ;

Qu'il suit de là qUe le paragraphe dont il s'agit dans l'espèce doit être entendu en Ce sens que l'amende qu'il prononce est applicable en raison dé chacun des arbres enlevés ;

Attendu qu'en prononçant dans un sens contraire, l'arrêt attaqué a faussement interprété et par suite violé le paragraphe second de l'article 34 du Code forestier,

LA COUR casse et annule l'arrêt, dont il s'agit, de la cour royale de Nîmes ; » '

Et, pour être statué conformément à la loi sur l'appel interjeté par l'administration forestière du jugement rendu, le 28 avril 1837, par le tribunal d'Uzès, jugeant correctionnellement, renvoie la cause et lès parties devant la cour royale de Montpellier, chambre des appels de police correctionnelle;

Ordonne, etc. ;

Fait, jugé et prononcé, etc. :—Chambre criminelle.

(N°268.) L'exposition en vente de pains n'ayant pas le poids fixé par un règlement depoiice, rentre dans les termes de l'article 414, n° -15., du Code pénal, et ne peut être confondu avec la contravention prévue par l'article 479, n" 6, du même Code.

REJET du: pourvoi du Commissaire de police remplissant les fonctions du Ministère public près le Tribunal de simple police de l'arrondissement de Carcassonne, en cassation du Jugement rendu par ce tribunal, le 6 juillet 1838, contre les sieurs Magron, Maijmpu et Bessac.

Du 4 Août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives; les observations de Me Aronssohn , avocat des défendeurs, parties intervenantes ; et les conclusions de M. l'avocat général Pascalis.


( 387 )

Attendu que la contravention dont les défendeurs ont été reconnus coupables résulte seulement de ce qu'ils ont exposé en vente des pains n'ayant pas le poids fixé par le règlement local de police ; que la sanction pénale de ce règlement se trouve dans l'article 471, n° 15, du Code pénal; qu'en infligeant donc aux contrevenants la peine que cet article prononce, le jugement dénoncé en a fait une juste application, et n'a point violé l'article 479, n° 6, du même Code qui ne concerne que les boulangers et bouchers ayant vendu le pain ou la viande au delà du prix fixé par la taxe légalement faite et publiée , fait tout différent de celui dont il s'agit dans l'espèce ;

Attendu d'ailleurs que ce jugement est régulier en la forme,

LA COUR rejette le pourvoi ;

Ordonne, etc.

Fait et jugé, etc. — Chambre criminelle.

(N° 267.) En matière de contributions indirectes, et à l'égard des marchands pour le compte de qui se font les transports, la saisie des chargements et des voitures ou instruments de transports est facultative, et le défaut de saisie pendant le transport n'éteint pas l'action de la régie.

L'exception portée par l'article 47 de loi du 28 avril 48/6 n'est applicable qu'à l'égard des voiluriers qui peuvent faire la fraude pour leur propre compte, si d'ailleurs les employés ont cessé de suivre la marchandise (l).

REJET d'un pourvoi formé par Letellier, marchand de vin en gros àLisieux, contre un Arrêt rendu le 4 août 1836, par la Cour royale de Càen, au profit de l'Administration des contributions indirectes.

Du 4 Août 1838.

Ouï M. Isambert, conseiller, en son rapport; M8 Marinier, avocat du sieur Letellier, et Me Latrufte Montmeyiian, avocat de l'administration des contributions indirectes, en leurs observations respectives; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions;

Vu la requête d'intervention de l'administration des contributions indirectes; — LA COUR reçoit ladite administration intervenante sur le pourvoi de Letellier, et statuant tant sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour, le 4 mai dernier seulement, que sur l'intervention déposée le 26 juin;

Attendu que, d'après l'article 100 de la loi du 28 avril 1816, les marchands en gros sont tenus, sous peine de saisie, de représenter

(l) Voyez arrêts des 4 cf 5 janvier 1810 [Bull. nos 3 et s); du 4 de'cenibre 1818 {Bull.no 145); du 13'février 1810 ( Bull. n° 2 ( ) ; du 2 7 septembre 1822 {Bull. n<> 135); du 10 juin 1826 [Bul/.n 0 323).


( 388 ) les congés, acquits à caution ou passavants, et les décharges d'après les quittances du droit de circulation ;

Que l'article 6 de la même loi défend, sous Iapeine portée en l'article 19, de faire aucun enlèvement ni transport de boissons sans déclaration préalable de l'expéditeur ou de l'acheteur, et sans que le conducteur soit muni d'un congé, d'un acquit à caution ou d'un passavant pris au bureau de la régie ;

Attendu qu'aucune disposition de la loi ne soustrait les marchands en gros à représenter ces expéditions, soit pendant le transport des liquides , soit à domicile, à l'égard des liquides en magasin;

Que ces dispositions sont indépendantes et distinctes de celles de l'article 17 de la même loi, qui enjoint aux voituriers, bateliers et tous autres agents du transport des boissons, d'exhiber à toute réquisition des employés des contributions indirectes les expéditions dont ils doivent être porteurs, et qui autorise, sur leur refus, ou en cas de fraude ou de contravention, la saisie du chargement et des instruments de transport, puisque la contravention prévue par cet article est encourue quand bien même il serait ultérieurement justifié de l'acquit des droits;

Qu'ainsi le moyen de cassation pris, dans l'espèce, de ce que la saisie des boissons transportées nuitamment dans les magasins de Letellier n'a pas été effectuée pendant le transport, n'a aucune application à la cause; qu'il n'est pas exact de prétendre, comme le soutient le demandeur, que l'obligation pour les marchands en gros de justifier de l'acquit des droits , ce qui ne peut avoir lieu que par les quittances rapprochées des expéditions, cesse de droit lorsque le transport est consommé; que cette exception n'est applicable qu'au cas de l'article 17, et à l'égard des voituriers qui peuvent faire la fraude pour leur propre compte, si d'ailleurs les employés ont cessé de suivre la marchandise ;

Attendu qu'à l'égard des marchands eux-mêmes pour le compte de qui se font les transports, la saisie du chargement et des voitures ou instruments de transport est facultative, et que le défaut de saisie pendant le transport n'éteint pas l'action de la régie ;

Attendu d'ailleurs que, dans l'espèce, il a existé un obstacle légal à la saisie instantanée des liquides transportés en fraude ; qu'en effet, au moment où cette fraude a été consommée, la marchandise a été entreposée dans un domicile qui n'était ouvert à l'action des employés qu'en temps de jour; que le deuxième alinéa de l'article 237 de la loi du 28 avril 1816 ne contient pas d'exception à l'article 76 de l'acte du 22 frimaire an vin (13 décembre 1799), portant que la maison de toute personne habitant le territoire français est inviolable ; que, pendant la nuit, nul n'a le droit d'y entrer que dans le cas d'incendie, d'inondation ou de réclamation faite de l'intérieur; que la loi de 1816 sur les contributions indirectes ne fait à cette règle constitutionnelle, par son article 235, que deux exceptions , lesquelles ne se rencontrent pas dans l'espèce ;


(' 389 )

Attendu enfin que, par leur procès-verbal, les employés ontconstaté le.transport frauduleux de dix-neuf barils dans la maison de gros de Letellier; que ne pouvant s'y introduire, attendu l'heure de nuit, ils ont veillé jusqu'au jour à ce qu'aucun enlèvement ne fût effectué ; qu'alors ils ont vérifié dans la maison même de ce marchand l'identité des barils et l'absence d'expéditions régulières; que l'inscription de faux contre les énonciations de ce procès-verbal a été jugée non pertinente et inadmissible; que l'arrêt attaqué, en prononçant contre Letellier, pour sa contravention à l'article 6 delà loi, les peines de l'article 19, a fait une saine application de ces articles, et n'a point violé les dispositions de l'article 17 ni de l'article 237 de laloi du 28 avril:

Par ces motifs, LA COUR rejette, etc. ;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

( N° 268. ) Il n'y a pas lieu de déterminer la durée de la contrainte par corps à l'égard des individus condamnés à une peine perpétuelle (l).

ANNULATION, pour fausse application des articles 7 et 4') de la loi sur la contrainte par corps, d'un Arrêt rendu par la Cour d'assises du département de la Seine, le 15 juin 1838, contre le nommé Guerin.

Du 9 Août 1838.

Ouï M. Rocher, conseiller, en son rapport;

Ouï Me Rigaùd, dans ses observations à l'appui du pourvoi;

Ouï M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions ;

Vu les articles 7 et 40 de la loi sur la contrainte par corps;

Attendu que la disposition de l'arrêt attaqué, qui détermine la durée de la contrainte par corps pour le recouvrement des frais, est inconciliable avec une peine perpétuelle ; qu'ainsi cette disposition constitue une fausse application des articles précités,

LA COUR casse et annule, par voie de retranchement, ladite disposition;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. —Chambre criminelle.

( N° 269. ) Est nul l'arrêt d'une cour d'assises qui rejette la demande d'un accusé ayant pour objet la position d'une question subsidiaire, sans que le ministère public ait été entendu sur cet incident.

(l) Voyez arrêt du 12 juillet 1838 et les arrêts en note {Bull. n° 200 ).


( 390 )

ANNULATION., sur le pourvoi de Pierre Abent, d'un Arrêt rendu contre lui, le 23 juin 1838, par la Cour d'assises du département de la Gironde.

Du 9 août 1838.

Ouï M. Rocher, conseiller, en son rapport;

Ouï M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions;

Vu les articles 1er, 273, 276, 277, 335 et 408 du Code d'instruction criminelle ;

Attendu, en droit, qu'il résulte de la combinaison de ces articles qu'en matière criminelle le ministère public intervient aux débats comme partie principale; que, dès lors, il doit être entendu sur tout incident auquel donnent lieu des conclusions tendantes à une décision motivée de la cour d'assises ;

Que la demande d'un accusé ayant pour objet la position d'une question subsidiaire constitue un contentieux qui ne peut être terminé que par un arrêt; qu'il importe à l'intérêt de la défense, et qu'il est d'ailleurs d'ordre public qu'une telle demande, qui, si elle est fondée, peut trouver un appui dans l'impartialité éclairée du ministère public, soit contradictoirement débattue;

Et attendu, en fait, qu'il résulte du procès-verbal d'audience que le défenseur de l'accusé, dans l'espèce, ayant demandé que la question subsidiaire d'homicide par imprudence fut posée au jury, la cour d'assises a immédiatement délibéré et statué par voie de rejet, sans que le ministère public ait été entendu; en quoi ont été violés les articles précités du Code d'instruction criminelle et les principes de la matière :

Par ces motifs, LA COUR, après délibéré dans la chambre du conseil, casse et annule l'arrêt de la courjd'assises de la Gironde du 23 juin dernier, ensemble la déclaration du jury et les débats j

Et, pour être procédé à des débats nouveaux, à une nouvelle déclaration du jury, en vertu de l'arrêt de renvoi et de l'acte d'accusation, et s'il y a lieu à un nouvel arrêt, renvoie le demandeur et les pièces du procès devant la cour d'assises de la Dordogne;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.-

( 270. ) Le tribunal de simple police ne peut, sans excès de pouvoir, renvoyer de la plainte le prévenu d'une contravention constatée par un procès-verbal régulier, lorsque la preuve contraire n'a été ni offerte, »" produite aux débats.

La connaissance même personnelle que h juge pourrait avoir des faits ne saurait remplacer la preuve légale et détruire la foi duc aux procèsverbaux. .


( 391 )

ANNULATION, sur le pourvoi du Commissaire de police remplissant les fonctions du Ministère public près le Tribunal de simple police du canton de Rocroi, d'un Jugement rendu par ce tribunal , le 3 juillet 1838, en faveur de Nicolas Beurel.

Du 9 Août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives, et les conclusions de M. l'avocat général Pascalis;

Vu les articles 154 et 161 du Code d'instruction criminelle;

Attendu, en droit, qu'il résulte de la combinaison de ces deux articles que les tribunaux de simple police ne peuvent statuer sur la prévention dont ils sont saisis que d'après les procès-verbaux qui sont produits devant eux, ou les preuves contraires par lesquelles les inculpés les auraient débattus; d'où il suit que la connaissance personnelle que le juge pourrait avoir des faits rie saurait remplacer une preuve légale, et détruire la foi due au procès-verbal produit devant lui ;

Et attendu, dans l'espèce, qu'un procès-verbal régulièrement dressé constate que cinq chevaux de Nicolas Beuret ont été trouvés, le 16 juin dernier, pâturant dans des terres artificielles appartenant à Rémale Petitfrère et à Piller;

Que la preuve contraire du fait énoncé dans ce procès-verbal n'ayant été ni offerte, ni produite, celui-ci en est resté la constatation légale, et devait par lui-même entraîner la condamnatio^Iu prévenu à la peine que la loi prononce ;

D'où il suit qu'en le relaxant de la plainte, par le motif qu'il est constant et à la connaissance personnelle du tribunal que ces chevaux pâturaient sur des terres incultes appartenant auxdits Petitfrère et Piller, et avec la permission de ceux-ci, L^iugement dénoncé a méconnu la foi due au procès-verbal pré^^Bet, par suite, expressément violé les articles ci-dessus visés : ^^r .

En conséquence, LA COUR, faisant droit au pourvoi, casse et annule le jugement que le tribunal de simple police du canton de Rocroi a rendu, le 3 juillet dernier, en faveur de Nicolas Beuret;

Et, pour être de nouveau statué sur la prévention, conformément à la loi, renvoie les parties avec les pièces de la procédure, devant le tribunal de simple police du canton de Signy-le-Petit;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

( N° 271. ) Le boulanger prévenu d'avoir vendu un pain n'ayant pas le poids fixé par les règlements de police ne peut être excusé par le motif que ce pain, destiné à sa consommation particulière, ne devait pas être vendu, et que l'acheteur l'avait choisi de préférence.


( 392 )

ANNULATION, sur le pourvoi du Commissaire de police remplissant les fonctions du Ministère public près le Tribunal de simple police du canton de Brou, d'un Jugement rendu par ce tribunal, le 13 juin dernier, en faveur du sieur Caumont.

Du 9 Août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives, et les conclusions de M. l'avocat général Pascalis;

Vu les articles 3, n° 4, titre XI, de la loi des 10-24 août 1790 ; — 46 , titre Ier, de celle des 19-22 juillet 1791 ; — 4 de l'arrêté du maire de Brou en date du 14 février 1831 , qui défend aux boulangers de cette commune d'y vendre du pain d'un poids inférieur à quatre ou-deux kilogrammes ; — 471, n° 15 du Code pénal; ainsi que les articles 65 du même Gode, et 161 du Code.d'instruction criminelle; , . > '

Et attendu, en fait, qu'il, est reconnupar le jugement dénoncé que Louis-Auguste Caumont, boulanger, a vendu à la veuve Cauéhard un pain qui, aux termes de l'article 4 de l'arrêté précité, aurait dû peser deux kilogrammes, et présentait néanmoins un déficit, sur ce, poids, de 122 grammes ( quatre onces);

Qu'il avait donc, par cela seul, encouru la peiné de cette contravention ;

£'où il suit qu'en le relaxant de la poursuite, par le motif que ladite veuve Cauchard aurait elle-même choisi de préférence ce pain, parce qu'il était plus cuit, même un peu brûlé, selon son goût, et nonobstant que Caumont lui fit observer qu'il n'était pas destiné à être vendu, et qu'il Pavait mis de côté pour servir à la consommation de son ménage, ce jugement a admis, à la prescription de l'arr|ÉÉ|pnt il s'agit, une exception qu'il n'est point susceptible de recède dans son application , et, par suite, commis une violation expresse des dispositions ci-dessus visées :

En conséquence ,-LA COUR, faisant droit au pourvoi, casse et annule le jugement que le tribunal de simple police du canton de Bro.u a prononcé, le 13 juillet dernier, en faveur de Louis-Auguste Caumont, boulanger;

Et, pour être de nouveau statué sur la prévention conformément à la loi, renvoie les parties avec les pièces de la procédure , devant le tribunal desimpie police du canton de Bonneval;

Ordonne, etc. ,

Fait et jugé, etc. — Chambre criminelle.


( 393 )

( N° 272. ) Est nul le jugement du tribunal de police qui, contrairement à un arrêté du maire qui fixe la place que doit occuper l'étalage en avant des boutiques et magasins, a relaxé le contrevenant delà plainte,par le motif que lepassage était suffisamment libre.

ANNULATION, sur le pourvoi du Commissaire de police remplissant les fonctions du Ministère public près le Tribunal de simple police de la ville d'Agen, d'un Jugement rendu par ce tribunal, le 27 juin 1838, en faveur de Joseph Boivin.

Du 9 Août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives, et les conclusions de M. l'avocat général Pascalis ;

Vu les articles 3, n° 1er, titre XI, de la loi des 16 et24 août 1790; 40, titre Ier, de celle des 19, 22 juillet 1791; 1 et 3 de cet arrêté, qui veulent, l'un, que les montres, tréteaux et autres objets servant à étaler des marchandises, ne puissent être portés, sous les cornières, à plus de cinquante centimètres en avant de l'entrée des boutiques ou magasins; l'autre, que les étalages qui s'y fout sur des bancs ou tréteaux, pour toutes marchandises de quelqu'espèce que ce soit, vis-à-vis les boutiques et magasins, ne dépassent pas les piliers intérieurs desdites cornières; 471, n° 15, du Code pénal, 65 du même Code, et 161 du Code d'instruction criminelle;

Et attendu que Je procèsTverbaI rapporté dans l'espèce constate que Joseph Boivin, cordonnier et marchand, est contrevenu auxdits articles 1 et 3, en embarrassant la voie publique par les étalages d'oignons qui s'y trouvent spécifies, tant au dehors qu'au-dessous des cornières;

Que le fait de ces étalages est resté constant dans l'instruction qui a eu lieu sur la prévention devant le tribunal de simple police;.

Qu'il devait donc être réprimé conformément à la loi;

D'où il suit qu'en relaxant ledit Boivin de la plainte, notamment par le motif que le passage a été suffisamment libre, le jugement dénoncé a admis, dans l'application de l'arrêté précité, une distinction dont il n'est point susceptible, créé une excuse qu'il n'a pas établie, et commis une violation expresse des disposition ci-dessus visées :

En conséquence, LA COUR, faisant droit au pourvoi, passe et annule, mais uniquement sur ce chef, le jugement que le tribunal de simple police de la ville d'Agen a prononcé, le 27 juin dernier, en faveur de Joseph Boivin ;

Et, pour être de nouveau statué sur ce chef seulement conformément à la loi, renvoie les parties, avec les pièces de la procédure,


(394 ) devant le tribunal de simple police du canton du 'Pont-SainleMaric; < .. ' ' \

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

( 273.) Lorsqu'un règlement de police défend^ de maintenir dans les maisons particulières un dépôt quelconque de nature à incommoder les voisins, le tribunal de police nepeut s'abstenir d'appliquer les peines de police au propriétaire.prévcnu, par un procès-verbal régulier, de conserver une fosse d'aisances dont les matières répandent des exhalaisons fétides dans le voisinage (1).

ANNULATION ,,sur le pourvoi du Commissaire de police remplissant lesfonctrons du.Ministère public près le Tribunal de simple police du canton d'Issoire, d'un Jugement rendu par ce tribunal, le 20 juillet 183.8, en faveur de Joseph Nicolas.

Du 9 août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives, et les conclusions de M. l'avocat général Pascalis ;

Vu les articles 50 dé la loi du 14 décembre 1789; 3, n° 5, titre XI. de celle des 16-24 août 1790; 46, titre Ier, de la loi des 19,-22 juillet 1791; 6 et 12 de l'arrêté du maire d'Issoire, en date du 11 juin 1832, qui défendent de maintenir dans les maisons, écuries, granges,, cours, jardins, aucun fumier, glaces, neiges ou dépôt quelconque qui puisse vicier l'air; compromettre la santé publique, ni incommoder les voisins, et ordonnent de vidanger les fosses d'aisances aussi souvent que cela sera nécessaire ; 471, n° 15, du Code pénal ; 154 et 161 du Codé d'instruction criminelle;

Et attendu qu'un procès verbal régulier constate, à la charge de Joseph Nicolas, queles exhalaisons fétides qui s'échappent de la fosse d'aisances de cet individu excitent des plaintes de la part des voisins de son habitation, et que les matières contenues dans cette fosse s'échappent à travers-le mur qui la sépare de la maison voisine; ;

Que ce fait constitue une contravention à la disposition combinée des articles 6 et 12 de l'arrêté susdaté; ,

Que ledit Nicolas devait donc être condamne' àla peine dont elle ' le rend passible; - ,.

D'où il suit qu'en le renvoyant de la poursuite, 1 par le motif ;que cette contravention ne résulterait pas dudit proçès-verbalj Je, jugement dénoncé a commis une violation expresse^des articles ci-dessus visés: , .'.:, I;-;," :' ..

(l) Voyez arrêt du 9 août 1838 {Biilî.n" 272 ).


( 395 )

En conséquence, LA COUR , faisant droit au pourvoi, casse et annule le jugement que le tribunal de simple police du canton d'Issoire a prononcé, le 20 juillet dernier, en faveur de Joseph Nicolas;

Et, pour être de nouveau statué sur la prévention conformément à la loi, renvoie les parties, avec les pièces de la procédure, devant le tribunal de simple police du canton de Sauxillanges;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

( 274.) Les affiches apposées en vertu d'un jugement, pour annoncer une vente forcée, sont affranchies des dispositions des règlements de police relatifs aux affiches.

ANNULATION , sur le pourvoi du Commmissaire de police de la ville de Lyon, remplissant les fonctions du Ministère public près le Tribunal de simple police de ladite ville, d'un Jugement rendu par ledit tribunal de police, le 28 juin 1838, en faveur du sieur Darmes.

Du 9 août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives; les observations de Mc Verdière, avocat de Darmès , partie intervenante ; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions ;

Attendu que l'affiche dont il s'agit dans l'espèce a seulement pour objet d'annoncer au public, conformément aux dispositions impératives du Code de procédure civile, une vente forcée qui devait avoir lieu en vertu d'un jugement du tribunal de première instance de Lyon , confirmé par la cour roj'ale de la même ville;

Attendu qu'elle ne peut rentrer sous l'application de l'ordonnance municipale de police, puisque la loi du 10 décembre 1830 excepte de ses dispositions les actes de l'autorité publique, et que ceux qui doivent nécessairement être faits en exécution des décisions ' de l'autorité judiciaire ne sauraient dépendre de l'observation d'un règlement local dont ils sont légalement affranchis;

Attendu, au surplus, que le jugement est régulier en la forme,

LA COUR rejette le pourvoi, etc.;

Ordonne, etc.

Ainsi jugé, etc. — Chambre criminelle.

( N° 275.) Le président des assises a le droit de faire entendre, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, cl sans prestation de serment, un témoin citépar le ministère public , et à l'audition duquel ce magistrat a renoncé, lorsque l'accusé a acquiescé à cette renonciation par son silence.

La cour d'assises peut, sans excès de pouvoir, refuser de poser subsidiairement au jury une circonstance non admise comme excuse par la loi.

Criminel. 1838- N° 8. 28


( 396 )

Le président n'est pas tenu déposer d'office aux jurés les circonstances qui ne résultent pas du résumé de l'acte d'accusation ou du dispositif de l'arrêt de renvoi.

L'association de malfaiteurs formée en France contre les personnes et les propriétés espagnoles constitue le crime d'avoir, par des actes non approuvés par le Gouvernement, exposé les Français à des représailles, et dès lors est justiciable des tribunaux français. '

ANNULATION, sur le pourvoi des nommés Thomas Cabane, Dominique Clausi, Bernard Dagues et Bonaventure Prats, d'un Arrêt contre eux rendu par la Cour d'assises du département des Pyrénées-Orientales le 18 juin dernier.

Du 10 Août 1838.

Ouï M. Isambert, conseiller, en son rapport; Me Rigaud, avocat, en ses observations; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions;

Après en avoir délibéré en la chambre du conseil,

La Cour, vuîaconnexité, joint les pourvois de Cabanes, Clausi, Dagues et Prats, et, statuant sur ces pourvois :

Sur le premier moyen , tiré de la violation de l'article 317 et de la fausse application de l'article 269 du Code d'instruction criminelle, en ce que le président n'a entendu qu'en vertu de son pouvoir discrétionnaire, et sans prestation de serment, un témoin cité comme tel par le ministère public, sans que les accusés aient expressément consenti à la renonciation que le ministère public a faite à son audition:

Attendu que le procès-verbal des débats constate que le ministère public a fondé sa renonciation sur un défaut d'identité entre le témoin qui a comparu et celui qui était désigné par la citation, ce qui rentrait dans le cas prévu par l'avant-dernier alinéa de l'article 315 du même Code; que les accusés, par leur silence, ont acquiescé à cette renonciation, ce qui a dispensé la cour d'assises d'en délibérer; que, dans cet état des faits , le témoin dont il s'agit avait cessé de faire partie des débats, et qu'ainsi, en le faisant entendre en vertu de son pouvoir discrétionnaire , et sans prestation de serment, le président de la cour d'assises n'a fait qu'user du pouvoir qui lui est conféré par la loi;

Surle deuxième moyen, tire'de la violation de l'article 339 du Code d'instruction criminelle, en ce que la cour d'assises a refusé de poser au jury, par addition aux questions posées, la circonstance que les crimes de vol et de séquestration avaient été commis en Espagne, et que l'association de malfaiteurs formée en France n'avait été dirigée que contre les personnes ou propriétés espagnoles;

Attendu que la question qui se rattachait à cette circonstance ne constituait pas une excuse légale, mais un moyen d'incompétence,


( 397 ) ou d'application de la peine, et qu'ainsi l'article 339 précité, n'étant pas applicable, n'a pu être violé;

Sur le troisième moyen, verbalement exposé à l'audience, et tiré de la violation de l'article 337 du même Code, en ce que les questions résultant de l'acte d'accusation n'ont pas été posées au jury avec toutes les circonstances comprises dans le résumé de cet acte, c'està-dire que la séquestration de personne avait eu lieu tant en France qu'en Espagne, et que le vol n'avait été que la suite de cette séquestration, quoique consommé en Espagne :

Attendu que ces circonstances ne résultaient point du résumé de l'acte d'accusation ni du dispositif de l'arrêt de renvoi , et qu'ainsi le président n'était pas tenu de la poser d'office aux jurés;

Sur le quatrième moyen , tiré delà violation des règles de compétence établies par les articles 5, C et 7 du Code d'instruction criminelle, et du refus de poser au jury les circonstances de fait qui servaient de base à ce moyen;

Attendu qu'il a été jugé par l'arrêt de renvoi, que les faits complexes sur lesquels portait l'accusation s'étaient passés partie en Espagne, partie en France, ce qui suffisait pour établir la compétence de la cour d'assises des Pyrénées-Orientales; que, sur la demande du. défenseur des accusés, cette cour d'assises a décidé qu'il n'était rien résulté des débats qui modifiât, à-cet égard, les énonciations jcpnfénues dans les motifs dudit arrêt de renvoi ; qu'elfe était compétente,; .pour décider ce point de fait, qui ne se référait pointa la question, de culpabilité des accusés, mais à sa pronre juridiction;

Attendu d'ailleurs, en ce qui concerne l'association de malfaiteurs formée en France contre les personnes et les propriétés espagnoles, que cette association rentrait dans l'accusation d'avoir «par des «actesnon approuvés parle Gouvernement, exposé des Français «a éprouver des représailles », et que la compétence des tribunaux français pour connaître de ces deux chefs rentre évidemment dans les exceptions prévues par les articles 5 et 7 du Code d'instruction eriminelle ; qu'ainsi, sur ces deux chefs, la cour n'assises n'avait à poser aux jurés aucune question autres que celles résultant du dispositif de l'arrêt de renvoi et du résumé de l'accusation ;

Sur le cinquième et dernier moyen, tiré d'une prétendue contradiction entre la réponse négative du jury sur la circonstance de tortures corporelles qui auraient accompagné le vol, et la réponse affirmative sur la même circonstance de tortures en ce qui concerne la séquestration qui a précédé le vol ; JM|

Attendu que les réponses du jury se rapportaient à CPÎ époques différentes, et qu'ainsi elles ne constituent point de contradiction;

Attendu, d'ailleurs, la régularité de la procédure, et Papplicalion légale de la peine au fait le plus grave déclaré par le jurv,

28.


( -398 ) -celui de séquestration avec menace de mort et tortures corporelles,

LA COUR rejette le pourvoi des demandeurs;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

(N° 276.) Est nul le jugement qui ne renferme ni expressément, ni implicitement , la preuve de l'assistance du greffier ou de son commis assermenté (i).

ANNULATION, sur le pourvoi des sieurs Aigoin, père et fils, d'un Jugement rendu sur appel de police correctionnelle, le 23 mai 1838, parle Tribunal de première instance de l'arrondissement de -Saint-Omer.

Du 11 Août 1838.

Ouï M. Rocher, conseiller, en son rapport;

Ouï Metxalisset, dans ses observations à l'appui du pourvoi;

Ouï M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions;

Vu les articles 1040 du Code de procédure civile; 153, 155, 190, 211 du Code d'instruction criminelle, et 91 du décret du 30 mars 1808;

Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces articles, et que c'est d'ailleurs un principe de.droit public, qu'il n'y a de tribunal légalement composé qu'autant que le greffier en fait partie; que, dès lors, tout jugement doit, à peine de nullité, renfermer, soit expressément, soit implicitement, la preuve de l'assistance de ce fonctionnaire ou de celle du commis-greffier assermenté qui le représente;

Attendu que, dans l'espèce, cette preuve ne ressort ni du mode ordinaire de constatation résultant de la signature, ni d'aucune énonciatiori d'où on puisse l'induire; qu'ainsi le jugement attaqué ne fait foi en aucune sorfe de cet élément nécessaire de sa légalité;

En quoi ont été violés les articles précités et les principes sur la matière:

Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin de s'occuper des autres moyens, LA COUR casse et annule le jugement sur appel du tribunal correctionnel de Saint-Omer du 23 mai dernier;

Et, pour être procédé et statué conformément à la loi sur les appels respectivement interjetés, par ie ministère publient par les demandeurs, du jugement du tribunal correctionnel de Montreuil du 8 mars précédent, renvoie les sieurs Aigoin père et fils, et les

(l) Voyez arrêts du 27 prairial an ix {Bull. 220) ; du 29 messidor n ix ( Bull, n" 272 ); du 13 avril 1837 {Bull. n° 1 lu).


( 399 ) pièces du procès, devant la cour royale d'Amiens, chambre desappels de police correctionnelle.

Ordonne, etc.

Fait et jugé, etc. — Chambre criminelle.

#

(N° 277.) Les droguistes, soit qu'ils débitent des préparations médicinales qu'ils ont eux-mêmes composées, soit qu'ils ne fassent que débiter lesdrogues composées par des pharmaciens , sont, dans l'un et l'autre cas, passibles des peines portées par l'article 33 de la loi du 21 germinal an xi (i).

ANNULATION, sur le pourvoi du Procureur général près la Cour royale de Coîmar, d'un Arrêt rendu par la chambre des appels de police correctionnelle de cette cour, le 7 mars 1838, en faveur du sieur Besson.

Du 11 Août 1838. -

Ouï M. Isambert, conseiller, en son rapport; Mc Aronsohn, avocat, en ses observations pour l'intervenant; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions;

Vu les articles 24, 25 et 28 de la loi du 21 germinal an xi (il avril 1803), relatifs aux attributions et au placement des pharmaciens, à la publication de leurs noms et lieux de résidence; spécialement la disposition de l'article 25, qui interdit d'une manière générale et absolue la préparation, la vente et le débit des médicaments, de la part de ceux qui ne sont pas reçus dans les formes légales;.

Vu les articles 29 et 30 de la même loi, relatifs aux visites à faire dans les officines, dans les boutiques des épiciers droguistes, et dans les magasins où l'on fabriquera et débitera j sans autorisation légale, des préparations ou compositions médicinales;

Vu l'article 32, qui défend aux pharmaciens de faire, dans les lieux de leurs résidences, aucun débit ou commerce autre que celui des drogues et préparations médicamenteuses;

Vu l'article 33 de la même loi, qui défend, sous peine de 500 fr. d'amende, aux épiciers droguistes, la vente d'aucune composition ou préparation pharmaceutique, et qui ne leur permet que le commerce en gros des drogues simples;

Vu enfin l'article 36, qui défend, sous des peines ultérieurement fixées par la loi du 29 pluviôse an xm ( 18 février 1805 ), la distribution de drogues et préparations médicamenteuses, dans les lieux y désignés, toute annonce et affiche de remèdes secrets, ainsi que tout débit au poids médicinal;

(i) Voyez arrêts du 9 septembre 1813 {Bull: n" 200 ); 13'février 1824 {Ihdl. n°29); 9 octobre 1824 {Bull. n"s 134 et 13û); 2G juin 1335 ( flull. n" 2 53 ) et l'arrêt suivant.


( 400 )

Attendu que la loi du 29 pluviôse contient la sanction pénale des prohibitions générales contenues dans la loi du 21 germinal, et que l'article 33 de cette loi contient une peine spéciale contre les épiciers droguistes qui ont contrevenu à sa disposition ;

Attendu que la distinction établie par l'arrêt attaqué entre les droguistes qui composent indûment des drogues et préparations médicinales, et ceux qui ne font que débiter celles composées par les pharmaciens , conformément aux formules décrites dans le Codex, n'est point autorisée par l'article 33, puisque cet article en prohibe la vente d'une manière absolue de la part des épiciers droguistes;

Que l'argument pris de l'arrêté du Gouvernement du 25 prairial an vin ( 14 juin 1805), relatif à la vente des remèdes secrets, par l'entremise de préposés, n'est point applicable à l'espèce, puisque l'exception admise par ce décret est subordonnée à l'agrément des autorités locales, qui ont droit, en cas d'abus, de retirer aux préposés leur autorisation (article 3) ;

Attendu qu'ainsi oe décret n'a pas lui-même dérogé au principe général qui met hors du commerce la vente et la distribution des préparations ayant le caractère de remède médicinal, et qui, dans l'intérêt de la santé des citoyens, ne confie ce commerce qu'aux hommes de l'art ;

Que les pharmaciens n'ont eux-mêmes reçu cette faculté de débit que dans le lieu de leur résidence, afin d'assurer leur responsabilité personnelle; que l'innocuité de la distribution de ces préparations ne peut être garantie que par leur surveillance actuelle et permanente; que la surveillance imposée aux jurys médicaux et aux autorités locales pourrait être facilement éludée si les pharmaciens pouvaient faire des dépôts en des lieux et en des mains qui ne seraient pas connus à l'avance de l'autorité, et que la précaution établie par l'article 28 de la loi de germinal an xi deviendrait sans objet;

Et, attendu que, dans l'espèce, Besson, droguiste, a été trouvé débitant des sirops de salsepareille et du sirop pectoral dit de Velan, en bouteille, de la composition du sieur Courtois, pharmacien à Lyon ; que le jugement du tribunal de Strasbourg et l'arrêt attaqué ont tous deux déclaré que ces remèdes étaient des compositions pharmaceutiques ; que Besson n'a point demandé à prouver que ces sirops fussent des drogues simples, étrangers à l'art de guérir, et appartenant à la liberté du commerce ; qu'au contraire, il a soutenu que le débit en était licite dans ses mains, comme exerçant les droits du pharmacien Courtois; que l'arrêt attaqué l'a renvoyé de poursuite, par ce motif que le privilège du pharmacien couvrait le débitant; d'où il suit que ledit arrêt a formellement viole l'article 33 de la loi précité:

Par ces motifs, LA COUR casse et annule l'arrêt rendu, le 7 mars 1838, par la cour royale de Colmar, chambre criminelle ;


(401 )

Et, pour être de nouveau statué sur l'appel du ministère public, renvoie la cause et les pièces de la procédure devant la cour royale de Nancy, chambre des appels de police correctionnelle ;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

( N° 278 ). La disposition qui défend aux droguistes de débiter des préparations pharmaceutiques est absolue, et ne peut recevoir d'exception pour le cas où les préparations auraient été composées par un pharmacien (l).

ANNULATION , sur le pourvoi du Procureur général près la Cour royale de Colmar, d'un Arrêt rendu par la chambre des appels de police correctionnelle de cette cour, le 7 mars 1838, en faveur du sieur Charles Kob.

Du 11 Août 1838.

Ouï M. Isambert, conseiller, en son rapport; Me Rigaud, avocat, en ses observations pour Kob, intervenant; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions;

Vu la requête déposée au greffe delà Cour, au nom du sieur Kob , tendant à être reçu intervenant:

LA COUR reçoit Kob intervenant sur le pourvoi du procureur général de Colmar; et, statuant tant sur le pourvoi que sur l'intervention :

Vu l'article 33 de la loi du 21 germinal an xi (.11 avril 1803), sur la police de la pharmacie, qui défend aux épiciers droguistes, sous peine de 500 francs d'amende, de y en dm aucune composition ou préparation pharmaceutique, et qui ne leur permet que le commerce, en gros, des drogues simples;

Vu, d'ailleurs, l'article 25 de la même loi, qui défend d'une manière générale et absolue, à toute personne qui n'a pas été reçue pharmacien, de préparer, vendre ou débiter des médicaments;

Vu enfin l'article unique de la loi du 294 pluviôse an xm (18 février 1805), qui contient une sanction pénale de l'article 36 delà loi du 21 germinal, et, par suite, de l'article 35 précité';

Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la préparation et la vente des drogues ayant le caractère de médicaments sont hors du commerce ordinaire; qu'elles ont été confiées par la loi aux pharmaciens; que ceux-ci sont tenus de surveiller par eux-mêmes Iesdites préparation et vente; que la loi ne leur permet pas d'établir hors de leurs officines des dépôts de médicaments, et d'en confier la vente à d'autres qu'aux hommes

(l) Arrêt du il août 1S38 {Bull. n° 277 ) et les arrêts en note.


( 402 )

de l'art; que la disposition de l'article 25 et de l'article 33 est absolue, et s'oppose à la distinction d'après laquelle, soit les particuliers, soit les épiciers ou droguistes eux-mêmes, seraient autorisés à vendre des préparations pharmaceutiques;

Et attendu que, dans l'espèce, Kob, droguiste à Strasbourg, a été déclaré convaincu d'avoir tenu dans sa boutique, pour être vendues au public, des pastilles d'ipécacuanha et du sirop de Briand; qu'il a été reconnu, par l'arrêt attaqué, que ces pastilles et ce sirop étaient des préparations pharmaceutiques; que Kob n'a pas demandé à établir qu'ils étaient des drogues simples, et qu'au contraire il a fondé sa défense sur ce que les pharmaciens desquels il les recevait, et qui les avaient composées, avaient droit de les vendre par son entremise ; que l'arrêt attaqué a accueilli cette défense et renvoyé Kob de l'action du ministère public ;

D'où il suit que l'arrêt attaqué a formellement violé la disposition de l'article 33 de la loi du 21 germinal:

Par ces motifs, LA CouR casse et annule l'arrêt rendu, le 7 mars 1838, par la cour royale de Colmar, chambre correctionnelle, au chef qui a refusé d'appliquer les peines de l'article 33 à la vente des préparations pharmaceutiques dont il s'agit;

Et, pour être de nouveau statué sur l'appel du ministère public, renvoie la cause et les parties devant la cour royale de Nancy, chambre des appels de police correctionnelle ;

Ordonne, etc.

Fait et jugé, etc. — Chambre criminelle.

(N° 279.) L'article 446 du Code d'instruction criminelle, qui p-ohibe le pourvoi contre les jugements en dernier ressort préparatoires et d'ins■ traction , ne s'applique pas aux jugements interlocutoires qui autorisent des preuves d'où peut résulter un préjugé sur le fond.

En conséquence, le jugement qui ordonne, avant faire droit, la visite des lieux et la vérification de certains faits, est un jugement interlocutoire contre lequel un pourvoi a pu être régulièrement formé.

REJET du pourvoi des sieurs, 1° François-Antoine Franc, 2° François Moulin, 3° Clau\de-Rènè Duhamel, 4° Louis-Constant Lemonnier, 5° Marc - Philippe Guincestre, 6° Pierre - Christophe Mauny, 7° René Méhudin, 8° Sébastien Godard, 9° Jean-Pierre Méhudin, 10° Toussaint Hatoy, 11° et le sieur Pierre-Adrien Dubreuil, du Jugement rendu sur appel par le Tribunal correctionnel de Louviers (Eure), le 5 avril 1838; entre les susnommés et les sieurs Modeste- Adrien Roque et compagnie.

Du 16 Août 1838. OuïM. Isambert, conseiller, en son rapport ;M°Goudard, avocat de Franc et consorts ; Mc Rigaud, avocat de Roque et compagnie, en leurs observations; et M. Pascalis, avocat général, en ses conclusions;


( 403 )

En ce qui concerne lé pourvoi émis au nom de Pierre-Adrien Dubreuil; — Attendu que ledit Dubreuil n'a pas figuré dans la procuration donnée au sieur Franc, et que le pourvoi n'a pas été formé au nom de Dubreuil par un avoué, conformément à l'article 417; que la déclaration du pourvoi faite par Franc est donc étrangère à Dubreuil, qui n'a point formalisé de pourvoi au greffe,

LA COUR déclare le pourvoi déclaré au nom de Dubreuil par Franc, nul et non avenu, et dit qu'il n'y a lieu à statuer à cet égard ;

Déclare le pourvoi régulier en ce qui concerne François-Antoine Franc, et les sieurs François Moulin , Claude-Réné Duhamel, LouisConstant Lemonnier, Marc-Philippe Guincestre, Pierre-Christophe Mauny, Sébastien Godard, René Méhudin, Jeàn-Pierre Méhudin^et Toussaint Hatoy. "

Vu aussi la requête d'intervention déposée au greffe de la Cour au nom des sieurs Roque et compagnie,

La Cour reçoit l'intervention ; et, statuant sur les pourvois de Franc et consorts et sur l'intervention de Roque et compagnie,

Sur la fin de non-recevoir contre le pourvoi, tirée, de ce que le jugement attaqué s'est borné à ordonner une expertise pour vérifier les faits respectivement allégués ; qu'il n'est ainsi qu'un jugement d'instruction, et qu'à ce titre, d'après l'article 41G du.Code d'instruction criminelle, le pourvoi est non recevable:

Attendu, en droit, que l'article 416, qui prohibe lepourvoi contre les jugements en dernier ressort préparatoires et d'instruction, ne s'applique pas aux jugements interlocutoires qui autorisent des preuves d'où peut résulter un préjugé sur le fond; que cette interprétation résulte de la combinaison de l'article 410 avec l'article.452 du Code de procédure civile; jttà

Attendu, en fait, qu'il s'agissait jcttfflfs l'espèce de l'interprétation d'un règlement du préfet de l'Eure sur la rivière de i'Av.re; que l'on imputait à Roque et compagnie une contravention fondée sur ce qu'ils avaient tenu ouverte.la vanne lançoire de leur usine, pendant le temps consacré à l'irrigation ;

Attendu qu'en statuant sur cette poursuite le tribunal de Louviers a ordonné, avant faire droit, que, par l'ingénieur qu'il a désigné, les lieux seraient visités, et que certains faits allégués par les prévenus contre l'application du règlement à leur usine seraient vérifiés;

Que de cette vérification il pouvait résulter des éléments d'interprétation sur les points contestés du règlement; que, dès lors, la mesure ordonnée par le tribunal constituait un interlocutoire , et non un simple préparatoire :

Par ces motifs, LA COUR rejette la fin de non-recevoir.

Sur le moyen de cassation tiré tic la fausse interprétation dos


( 404 ) articles 1er, 4 et 6 du règlement du 8 ventôse an xn, et de l'usurpation commise par le jugement attaqué sur les attributions conférées à l'autorité administrative;

ilttendu que le jugement attaqué, en ordonnant l'enquête, a expressément, réservé l'interprétation du règlement dont il s'agit et son application au fait à lui dénoncé; qu'il n'a donc violé ni pu violer ledit règlement ; qu'en admettant la preuve des faits allégués par Roque et compagnie, il n'a point subordonné sa décision à cette preuve, et n'a point entrepris sur les attributions de l'autorité, qui seule a eu le droit de faire et seule aurait celui de modifier ledit règlement; qu'ainsi il n'y a pas eu violation des dispositions de la loi en forme d'instruction du 20 août 1790:

Par ces motifs, LA COUR rejette le pourvoi, etc.; * Ordonné, etc.

Fait et jugé, etc. •— Chambre criminelle.

,( N°280.) L'administration des forêts n'est pas compétente pour poursuivre le fait d'un établissement de verrerie. C'est au ministère public seul qu'appartient ce droit, conformément aux articles 77 et 95 de la loi du 21 avril 4810, qui a remplacé à cet égard l'arrêt du conseil du 9 août 4723. ,

REJET du pourvoi de l'Administration des forêts contre un Arrêt rendu par la Cour royale de Nancy, chambre des appels de police correctionnelle', ie 6 janvier 1838, dans la cause entre ladite administration et le sieur Adolphe Muel.

Du 16 Août 1838.

Ouï M. Isambert, conseifjp en son rapport; Me Théodore Chevalier, avocat del'administration des forêts, Me Piet, avocat du sieur Muel, en leurs observations; et M.Pascalis, avocat général, en ses conclusions;

Vu le mémoire en intervention déposé au greffe au nom du sieur

Muel, .

LA COUR reçoit Muel partie intervenante; et statuant tant sur le pourvoi que sur l'intervention :

Attendu que l'arrêt du conseil du 9 août 1723, revêtu du mandement d'exécution pour les grands maîtres des eaux et forêts, signé du roi Louis XV à Meudon, et contre-signe du ministre, qui régit les établissements de verreries, a été remplacé par l'article 73 de la loi du 21 avril 1810, à l'égard des établissements servant à l'exploitation des mines, minières et carrières ;

Attendu qu'on ne peut chercher de sanction aux prohibitions contenues dans l'article 73 précité q;ie celle du titre X de la même


( 40* ) loi ; que ce titre X, aussi bien que le titre IX, renferme des dispositions générales qui s'appliquent aux titres antérieurs delà même loi, soit quanta la pénalité, soit quant à la compétence; qu'en particulier l'article 77 et l'article 95 de la loi ne confèrent de compétence pour la poursuite qu'aux magistrats du ministère public; que notamment l'article 77, quant au renvoi qu'il prononce relativement aux peines applicables aux divers cas de contravention, ne se réfère pas nécessairement audit arrêt du conseil de 1723;

Attendu, d'ailleurs, que le fait poursuivi ne rentre pas dans les cas spécifiés en l'article 159 du Code forestier, et qu'il est reconnu par l'administration que la matière n'est pas forestière; d'où il suit que, dans l'espèce, l'arrêt attaqué a dû, comme il l'a fait, déclarer l'administration forestière sans qualité et non recevable dans son action contre le sieur Muel, et par suite dans son appel:

Par ces motifs, LA COUR rejette le pourvoi, etc. ;

Ordonne, etc.

Fait et prononcé, etc. — Chambre criminelle^

( N° 281.) Un individu qualifié noir réfugié de Sainte-Lucie doit être considéré comme personne de condition libre, et dès lors son pourvoi doit être admis et doit profiter à ses coauteurs ou complices esclaves.

La peine du fouet est au nombre des peines affliclives en vigueur sous l'ancienne législation , et conservée à l'égard des esclaves par le Code pénal de 1828, amendé en 4835, et doit être appliquée à ceux qui sont convainciis d'avoir participé à là soustraction frauduleuse d'un canot appartenant à autrui pour s'évader de la colonie, ou de s'être rendus complices de cette soustraction frauduleuse.

Le noir libre, coauteur du même crime, est passible des peines portées par les articles 384 et 384, n° 4, du Code pénal.

Lorsqu'une personne libre est condamnée pour crimes commis de complicité avec des esclaves, les frais doivent être prononcés solidairement contre tous.

ANNULATION, sur le pourvoi d'Antoine, noir réfugié, d'un Arrêt de la Cour d'assises de l'arrondissement du Fort-Royal Martinique, en date du 23 mai 1838.

Du 17 Août 1838.

Ouï M. Isambert, conseiller, en son rapport; et M. Heilo, avocat général, en ses conclusions;

En ce qui touche la régularité et les effets du pourvoi du sieur Antoine :

Attendu que ledit Antoine, étant qualifié noivi-éfugié de SainteLucie , a été considéré à bon droit comme personne de condition libre, par l'arrêt rendu par les trois magistrats de la cour d'assises sur l'incident élevé relativement à la position des questions, et par


( 4*06 ) les questions posées et résolues en cour d'assises, ainsi que par la peine à lui appliquée, puisqu'il n'avait pas de maître à IaMartinique, et que l'introduction des noirs, à titre d'esclaves, est interdite par les lois abolitives de la traite,

LA COUR déclare Antoine recevable en son pourvoi ;

En ce qui concerne les individus non libres qui ont été compris dans l'arrêt de condamnation.

Vu l'article 9 de l'ordonnance royale du 4 juillet 1 837, portant:

«Il n'y a lieu, pour les esclaves, qu'au recours à la clémence du «Roi : à moins qu'ayant été condamnés, pour complicité avec des «individus de condition libre, le pourvoi n'ait été formé par ces «derniers;»

Attendu que ces esclaves étaient les coauteurs ou les complices du crime imputé au sieur Antoine;

LA COUR déclaré que le pourvoi profite aux nommés Paul, Joseph, Martial, Elre, Ernest, Jean, esclaves du sieur Léchelle; Alfred, Cyrile, Jean, esclav^ de la demoiselle Félicité; Placide, Cezaire et Jean, esclaves du sieur Roty, lesquels n'ont pas formellement renoncé au bénéfice du pourvoi.

Statuant sur le pourvoi du sieur Antoine, et des non-libres susnommés :

Attendu la régularité de la procédure et des débats ;

Attendu, quant à l'application de la peine, que les non-fibres ont été déclarés convaincus d'avoir participé, comme coauteurs, à la soustraction frauduleuse d'un canot appartenant à autrui pour s'évader de la colonie, ou de s'être rendu complices de cette soustraction frauduleuse, en ayant, avec connaissance, aidé ou assisté les auteurs de cette soustraction dans les faits qui l'ont préparée ou facilitée, ou dans ceux qui l'ont consommée ,

Que ces faits sont prévus par les articles 3 et 4 de l'édit du 1er février 1743, maintenu en vigueur par l'article 5 du Code pénal colonial; mais que la peine de ce crime ne peut être celle du jarret coupé, établie par l'article 4 de l'édit précité, attendu l'abrogation des peines de mutilation prononcée par l'ordonnance royale du 30 avril 1833; que cette peine ne peut être non plus celle de mort, prononcée par l'article 35 de l'édit de 1085, auquel se réfère l'article 3 de l'édit de 1743, concurremment avec les peines afllictives au cas de vol qualifié; attendu, en ce qui concerne la peine de mort, qu'elle n'est prononcée par l'avticle 35 qu'avec la formule s'il y a liau, et que les peines arbitraires sont abolies par l'effet de la promulgation dans les colonies de l'article 4 du Code pénal de la métropole;

Attendu, quant aux peines afllictives pronolfcées par ledit article 35,

Que la peine du fouet, appliquée par l'arrêt attaqué, est au nombre des peines afllictives en vigueur sous l'ancienne législation criminelle, et conservées, à l'égard des esclaves, par le Code pénal de 1828, amendé en 1835; qu'ainsi, dans l'espèce, l'arrêt attaqué, en


( 407 ) prononçant cette peine contre les non-libres, et en #es remettant ensuite à la disposition de leurs maîtres, a fait une légale application des lois pénales précitées ;

Attendu, quant au sieur Antoine , déclaré convaincu d'être coupable , comme coauteur de la soustraction frauduleuse du canot, avec escalade et effraction intérieure, pendant la nuit, au préjudice du sieur de Valmeniez, que la cour d'assises a fait une application légale des peines des articles 384 et 381, n° 4, du Code pénal colonial, et de l'article 15 du même Code :

Par ces motifs, LA COUR rejette le pourvoi d'Antoine, aux chefs ci-dessus, et celui des non libres, Paul, Joseph, Marcel, Elie, esclaves du sieur de Valmeniez; Jean, esclave du sieur Léchelle; Alfred, esclave du sieur de Kirwan ; Cyrile, esclave du sieur Gustave Birot ; Jean, esclave de la demoiselle Félicité; Placide, Cézaire, esclaves du sieur Guignot; Jean, esclave du sieur Roty; et Ernest, esclave de la demoiselle Destourelle ;

Mais, en ce qui concerne le chef de l'arrêt de condamnation qui condamne Antoine aux dépens du procès ,

Vu l'article 55 du Code pénal colonial, ainsi conçu: «Tous les individus condamnés pour un même crime, ou pour «un délit, sont tenus solidairement des amendes, restitutions des «dommages-intérêts et des frais.

«Néanmoins, en cas de recelé par des personnes de condition «libre, en toutou partie, de choses volées par des esclaves,les rè«celeurs seront seuls tenus dupayementdes amendes et des frais; ils « seront en outre passibles des restitutions et des dommages-intérêts , «qui ne pourront être répétés contre le maître de l'esclave condamné «qu'après la discussion de leurs biens. »

Vu également l'article 11 de l'ordonnance royale précitée du 4 juillet 1827, qui, à l'égard des colonies des Antilles, a réformé les abus de l'ancienne jurisprudence criminelle, et fixé les principes principaux du droit public en cette matière, en attendant l'application du Code d'instruction criminelle; ledit article 11 ainsi conçu: «En matière de grand ou de petit criminel, l'accusé ou la par«tie civile qui succombera sera condamné aux frais envers l'Etat et «envers l'autre partie.

«Les frais faits contre les esclaves seront à la charge de la caisse «coloniale.»

Vu aussi l'article 368 'du Code d'instruction coloniale, tel qu'il a été amendé par l'article 8 de la loi du 22 juin 1835, ainsi conçu , pour toutes les colonies où ce Code est en vigueur:

«L'accusé, ou la partie civile, qui succombera sera condamné «aux frais envers l'Etat et envers l'autre partie.

«Dans les affaires soumises aux cours d'assises, la partie civile «qui n'aura pas succombé ne sera jamais tenue des frais.

« Dans le cas où elle en aura consigné, en exécution du décret «du 18 janvier 1811, ils lui seront restitues.»


# ( 408 )

Attendu que ledit article 368 se combine avec l'article 55 du Code pénal, et que la solidarité établie par cet article 55 est un principe qui, dans la législation coloniale, ne reçoit d'exception qu'au cas de recelé commis par un homme libre, prévu par le 2e alinéa du même article ;

Attendu que cette exception ne peut être étendue à d'autres cas, notamment au fait de soustraction frauduleuse commise concurremment par Antoine et les non-libres; et que le cas de recelé n'a été posé ni résolu par la cour d'assises ;

Qu'ainsi c'est en violation des dispositions précitées que l'arrêt attaqué a condamné Antoine seul aux frais du procès, et lui aurait ainsi refusé le recours qu'il aurait droit d'esercer, en cas d'acquittement de ces frais, envers la caisse coloniale,s'il y a lieu, à raison de la participation des non-libres au crime dont il est déclaré convaincu ; que ledit 'arrêt, pour se conformer à l'article 55 du Code précité, devait prononcer la solidarité:

Par ces motifs, LA COUR casse et annule l'arrêt rendu le 23 mai 1838 par la cour d'assises de l'arrondissement du Fort-Royal Martinique, au chef seulement relatif à la condamnation aux frais; sauf au sieur Antoine à se pourvoir ultérieurement de ce chef ainsi que de droit ;

Ordonne, etc. " . _ .

Fait, jugé et prononcé,- etc. — Chambre criminelle.

( N° 282. ) Est nul le jugement du conseil de discipline de la garde nationale qui a rejeté, sans motifs énoncés, les conclusions formelles par lesquelles un individu demandait une remise pour faire entendre un témoin.

ANNULATION, sur le pourvoi du sieur Lemansois-Dupré, d'un Jugement contre lui rendu, le 4 mai 1838, par le Conseil de discipline du 2e bataillon de la 6e légion de la garde nationale de Paris.

Du 17 Août 1838.

Ouï M. Rocher, conseiller, en son rapport;

Ouï Mc Lemarquière, dans ses observations à l'appui du pourvoi; .

Ouï M. Hello, avocat général, en ses conclusions ;

Attendu que le sieur Lemansois-Dupré avait, par des conclusions formelles, demandé une remise pour faire entendre des témoins, et que le conseil de discipline a passé outre au jugement de l'affaire, sans motiver le rejet de ses conclusions;

En quoi ont été violés l'article 7 de la loi du 20 avril 1810, et le droit de défense,

LA COUR casse et annule le jugement du conseil de discipline du 2e bataillon de la 6elégion de la garde nationale de Paris;


( 409 ) .

Et, pour être procédé et statué, s'il y a lieu, conformément à la loi, sur le fait dont le sieur Lemansois-Dupré était prévenu, renvoie icelui et les pièces du procès devant le conseil de discipline du 1er bataillon de la 5e légion de la garde nationale de Paris;

Ordonne, etc.

Fait et jugé, etc.— Chambre criminelle.

(N° 283.) Les règles relatives à la promulgation.ne sont pas applicables aux ordonnances d'amnistie ; elles ne s'appliquent qu'aux faits accomplis au moment où elles sont rendues, et on ne peut les étendre à des actes postérieurs à leur date (i).

ANNULATION, sur le pourvoi de l'Administration des forêts, d'un Arrëtrendu par la Cour royale de Besançon, chambre des appels de police correctionnelle, le 11 décembre ï837, dans la cause entre ladite administration et la îemmè Demandre.

Du 17 Août 1838.

Ouï le rapport de M. Voysin de Gartempè-fifs'J conseiller ; et les conclusions de M. Hello, avocat.général;

Vu les articles 1er et 2 de l'ordonnance d'amnistie pour les délits forestiers, en date du 30 mai 1837; ensemble les articles 194 et 198 du Code forestier;

Attendu que les ordonnances d'amnistie ne peuvent concerner que les faits accomplis au moment où elles sont rendues, et qu'on ne saurait les étendre à des actes postérieurs à leur date, en vertu des règles sur la promulgation des lois et des ordonnances , règles qui n'ont été établies que pour fixer d'une manière certaine l'époque à laquelle ces lois et ordonnances deviennent obligatoires pour les citoyens ;

Attendu que le délit, constaté par procès-verbal du 1er juin 1837, était postérieur à l'amnistie :

Par ces motifs, LA COUR casse et annule l'arrêt de la cour royale de Besançon du 11 décembre dernier;

Et, pour être statué sur l'appel émis par l'administration forestière du jugement du tribunal de police correctionnelle de Vesoul du 3 août précédent, rendu entre cette administration et la nommée Marie Demandre, renvoie la cause et la prévenue devant la cour royale de Dijon ;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

(l) Voyez arrêts du 7 frimaire an vu ( Bull. n° 129); du 2 décembre 1837 {Bull. n° 418 bis.)


( 410 )

( N* 284.) Les ordres des chefs de la garde nationale ne sont obligatoires et n'emportent de sanction pénale pour les citoyens, dans le service de celte garde, que quand les ordres ont été donnés conformément aux règlements légalement faits, ou lorsqu'ils sont relatifs au service.

En conséquence, la formation des tableaux relatifs a la composition du conseil de discipline qui est imposée au maire, président du conseil de recensement,ne peut êtreimposèc par celui-ci auxcliejsde corps, elle refus d'un capitaine de déférer à une partie, des exigences d'un ordre du jouifait dans ce but ne constitue pas une désobéissance punissable.

ANNULATION, sur le pourvoi du capitaine Petit-Hardel, d'un Jugement Tendu, le 10 février 1838, parle Conseil de discipline du bataillon de la garde nationale de Saint-Germain.

Du 18 Août 1838. -

Ouï M. Isambert, conseiller, en son rapport; Me Latruffe-Montmeylian, avocat, en ses observations; et M. Hello, avocat général en ses conclusions ; ,

Vu les articles 73, 78 et 85 de fa loi du 22 mars 1831, sur le service de la garde nationale;

Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces articles que les ordres des chefs de la garde nationale ne sont obligatoires et n'emportent de sanction pénale pour les citoyens, leurs subordonnés dans le service de cette garde, que quand ces ordres ont été donnés conformément aux règlements légalement faits, ou lorsqu'ils sont relatifs au service;

Attendu que, d'après l'article 105 de la même loi, la formation ., des tableaux relatifs à la composition du conseil de discipline est imposée au maire, président du conseil de recensement et au chef du corps; que cette opération, purement administrative, ne peut être portée sur les chefs des compagnies, dont les obligations sont limitées par la loi; que d'ailleurs le capitaine Petit-Hardel a fourni, avant la poursuite, les renseignements qui étaient en son pouvoir, relativement à l'état des gardes nationaux habillés et non habillés;

Attendu, en second lieu, quant aux renseignements nécessaires à l'élimination des contrôles dé la garde nationale des individus qui ne doivent pas y figurer, d'après l'article 13 de la même loi, et à l'inscription ou radiation des autres citoyens, que, d'après les articles 14 et suivants de la même loi, c'est au maire qu'il appartient de recueillir ces renseignements, et au conseil de recensement de les apprécier; que le concours des habitants de la commune à ces opérations, d'après l'article 18 et l'article 25 de la même loi est volontaire ;

Attendu dès lors que l'ordre du jour du chef du corps, sous la date du 9 décembre 1837, dépassait, quant à la sanction pénale, les limites des pouvoirs conférés par la loi à cet officier, que le refus, par le capitaine Petit-Hardel, de déférer à une partie des


;( «i )

exigences de cet ordre du jour ne constituait pas une désobéissance qui se rattachât au service;

D'où il suit, dans l'espèce, que le jugement attaqué, en pro-> nonçant contre le capitaine Petit-Hardel la peine de la réprimande, a fait une fausse application de l'article 35 de la loi précitée, ainsi que de l'article 78 sur l'obéissance provisoire , et commis uu excès de pouvoir :

Par ces motifs, LA COUR casse et annule le jugement rendu, le 10 février 1838, parle conseil de discipline du bataillon de la garde nationale de Saint-Germain;

Ordonne la restitution de l'amende consignée;

Et attendu que le fait poursuivi ne présente aucune infraction aux règles du service, ni délit, ni contravention (

LA COUR, VU l'article 429 du Code d'instruction criminelle, déclare n'y avoir lieu de prononcer aucun renvoi ;

Ordonne, etc.

Fait et prononcé, etc. —- Chambre criminelle,

(N° 285.) Lorsqu'il résulte d'un procès-verbal régulier que les employée de la régie ont reconnu dans une brasserie des marcs de houblon, frais et tièdes, dans une chaudière, et qui avaient servi à un brassin nouvellement confectionné, le tribunal correctionnel -ne peut refuser de Jaire ait prévenu l'application de la peine portée par l'article 429 de la loi du 28 avril 4816, pour fabrication d'un braSsin sans déclaration préalable, soui prétexte que le procès-Verbal n'établit pas suffisamment que les marcs ne proviennent pas d'un brassin précédent (l).

ANNULATION, sur le pourvoi de l'Administration des contributions indirectes, d'un Jugement rendu sur appel par le Tribunal correctionnel de Saînt-Mihiel, le 30 novembre 1837, entre ladite administration et le sieur Mainbourneaux.

Du 18 Août 1838,

Ouï le rapport fait par M. Vincens Saint-Laurent, conseiller; les observations de M" Latruffe-Montmeyiian , avocat de l'administration des contributions indirectes, demanderesse; celles deM°LedruRollin, avocat du sieur Mainbourneaux, intervenant; et les conclusions de M. Hello, avocat général;

Vu les articles 26 du décret du 1"' germinal an xin, 120 et 129 de la loi du 28 avril 1816;

Attendu qu'il résulte d'un procès-verbal régulier que les employés de la régie, s'étant rendus, le S9 juin 4837, dans la brasserie du. sieur Mainbourneaux, y ont reconnu frais et tièdes, dans la chaw dière n" 4, les marcs du houblon qui avait été employé à un brassirt nouvellement confectionné ; que le siéur Mainbourneaux, interpellé par eux de représenter la dernière déclaration, a répondu n'avoir

(l) Voyez arrêt du lrr mars 1808 {Bull, n" 50 ) et les arrêts en note. Criminel. .183S. N" 8. à 9


( 412 > brassé depuis le 20 du courant; que s'ètanl introduits dans l'entonnerie, malgré la résistance de Mainbourneaux, qui a fermé les portes, et en les faisant enfoncer en présence et de l'autorité du maire, ils y ont reconnu 50 hectolitres de bière forte, guillantc, encore chaude, et entonnée depuis peu de temps, laquelle ils ont saisie, pour contravention à l'article 120 de la loi du 28 avril 1816 ;

Attendu que ces faits constituaient à la charge du sieur Mainbourneaux, indépendamment de la contravention de refus d'exercice, celle de fabrication d'un brassin sans déclaration préalable prévue par ledit article 120, et emportant, aux termes de l'article 129, l'amende et la confiscation de la bière saisie;

Quef, cependant, le tribunal d'appel de Saint-Mihiel a refusé de faire application au prévenu desdits articles 120 et 129, par le motif que le procès-verbal ne prouvait pas suffisamment que les marcs et la bière trouvés dans son établissement ne provinssent pas du brassin déclaré le 20.juin ;

Que ce tribunal n'a pu juger ainsi sans méconnaître la foi due au procès-verbal, et sans violer d'abord l'article 26 du décret du 1er germinal an xm, et par voie de conséquence les articles 120 et 129 de la loi du 28 avril 1816,

LA COUR casse et annule le jugement rendu le 30 novembre dernier par le tribunal correctionnel supérieur de Saint-Mihiel, entre l'administration des contributions indirectes et le sieur Mainbourneaux, dans la disposition seulement qui a refusé d'appliquer l'article 120 de la loi dû 28 avril 184,6, et annulé la saisie;

Et, pour être statué, quant'à ce, sur les appels respectivement interjetés du jugement du tribunal correctionnel de Montmédy, du 25 juillet précédent, renvoie la cause et les parties devant le cour royale de Nancy, chambre correctionnelle;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc.— Chambre criminelle.

(N° 286.) Les dispositions du Code d'instruction criminelle relatives à la prescription sont seules applicables aux faits d'injures prévus et réprimés par les dispositions du Code pénal (1).

REJET du pourvoi formé par Percheron, avoué, contre un Jugement rendu sur appel, le 26 mars 1838, par le Tribunal correctionnel de Charle ville, au profit de Percebois y notaire.

Du 18' Août 1838. Ouï M. Isambert, conseiller, en son rapport; Me Ledru-RoIIin,

avocat du sieur Percheron, et Mc Legé, avocat du sieur Percebois ,

en leurs observations; ainsi que M. Hello,' avoca général, en ses

conclusions;

(l) Voyez arrêts du 11 juin 1829 {Bull, n" 118); du 26 juillet 1831 ( Bull, 2/17 ).


{ 413

Vu la requête d'intervention déposée au greffe de Cour àà nom du sieur Percebois,

LA COUR reçoit ledit Percebois partie intervenante; et, statuant tant sur le pourvoi que sur l'intervention,

Sur le premier moyen tiré de la violation de l'article 29 de la loi du 26 mai 1819, et de la fausse application de l'article 640 du Code d'instruction criminelle :

Attendu qu'il s'agit dans l'espèce, non d'un délit de diffamation ou d'injure publique, mais d'un fait d'injure verbale et non publique, qui, d'après l'article 20 de la loi du 17 mai 1819, continue d'être puni des peines de simple police, et n'est nullement qualifié par l'article premier de la même loi ; qu'ainsi il n'a pas été dérogé au droit antérieur par cette loi;

Attendu, quant à la prescription, que l'article 29 de la loi dd 26 mai 1819 n'a innové que relativement aux crimes et délits commis par la voie de la presse ou tout autre moyen de publication ;

Que la prescription de six mois introduite par cet article 26 est même inconciliable avec le fait d'injure non publique, puisque cette loi ne fait courir la prescription que du fait de publication ; » Attendu dès lors que l'article 640 du Code d'instruction criminelle, qui a fixéà une année la prescription descontraventions, reste applicable aux faits d'injure prévus et réprimés par le Codé pénal, en vertu de la réserve insérée en l'article 20 de la loi du 17 mai 1819;

D'où il suit que le jugement attaqué n'a point violé ledit article 29, et justement appliqué l'article 640 du Code d'instruction criminelle;

Sur le second moyen tire de la violation des règles de la compétence et de la fausse application des articles 192 et 213 du Code d'instruction criminelle:

Attendu que le renvoi de la cause n'a été demandé, sur l'appel, ni par la partie civile ni par le ministère public, quoiqu'appelant de son chef; qu'ainsi le tribunal était compétent pour statuer pur l'action de Percebois, partie civile, et sur l'action publique;

Sur le troisième moyen résultant dé la requête additionnelle, et tiré de la violation de l'article 7 delà loi du 20 avril 1810, et de la violation de l'article 408 du Code d'instruction criminelle,'en ce que le jugement attaqué ne contient aucun motif propre à justifier le rejet de la demande en renvoi formée par Percheron :

Attendu que ce moyen manque en fait, et que le jugement attaqué répond par un motif exprès au moyen d'incompétence et de renvoi ci-dessus allégué :

Par ces motifs, LA COUR rejette, etc.; — Ordonne, etc.

Ainsi fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

29.


( 414 )

(N° 287.) L'action en diffamation ne peut être exercée à raison des parole!» prononcées devant une cour d'assises contre un témoin par un individu quiy comparaissait comme accusé, qu'autant que cette action a été formellement réservée par la cour d'assises, sur la demande du plaignant.

ANNULATION d'un Jugement rendu sur appel par le Tribunal correctionnel de Beauvais, le 31 mai 1837, entre Jean-Marie Delormel et Christophe Martin.

Du 23 Août 1838.

Ouï le rapport fait par M. Vincens Saint-Laurent, conseiller; les observations de Mc Piet, avocat de Jean-Marie Delormel, demandeur; celles de Me Béguin-Billecocq , avocat de Christophe Martin, intervenant; et les conclusions de M. Hello, avocat générai; :

Vu les articles 23 de la loi du 17 mai 1819, et 319 du Code d'instruction criminelle ;

Attendu que l'article 23 de la loi du 17 mai 1819 doit être combiné avec l'article 319 du Code d'instruction criminelle ;

Que , d'après ce dernier article, l'accusé a le droit de dire , tant contre la personne du témoin que contre sa déposition, tout ce qui peut être utile à sa défense ; ,

Que s'il sort, en usant de ce droit, des bornes d'une défense légitime , il appartient au président de l'y faire rentrer ;

Que si ses paroles prennent le caractère d'un délit, la cour d'assises a le droit, en vertu de l'article 181 du Code d'instruction criminelle , de prononcer, soit sur la réquisition du ministère public , soit sur celle du témoin outragé, les peines et les dommages-intérêts qui peuvent être encourus;

Qu'à défaut de répression immédiate par la cour d'assises, le tribunal correctionnel ne pourrait en connaître plus tard qu'autant que cette cour, juge naturel de la question de savoir si les discours tenus par l'accusé portaient sur des faits étrangers à la cause, et s'ils n'étaient pas nécessaires dans l'intérêt de la défense, aurait réservé l'action;

, Que, lorsque la cour d'assises n'a ni réprimé ces discours, ni réservé l'action, il y a présomption que l'accusé n'est pas sorti des bornes de la défense légitime.

Attendu, en fait, que l'action en diffamation dirigée contre le demandeur portaitsur des discours qu'il aurait tenus à l'audience de la cour d'assises de l'Oise, devant laquelle il comparaissait comme accusé du crime d'incendie, et à l'occasion de la déposition clel'intervenant appelé comme témoin; que cette cour n'avait donné acte d'aucunes réserves ; que cependant le tribunal correctionnel de Beauvais a reçu l'action de l'intervenant, sous le prétexte qu'il devait être assimilé aux tiers qui, aux termes de l'article 2 3 dé la loi dii 17 mai 1819, peuvent agir sans avoir besoin que leur action leur ait été réservée ;


( 415 )

Qu'en jugeant ainsi ce tribunal a faussement appliqué ledit article 23, et eu même temps violé l'article 319 du Code d'instruction criminelle et les règles de la compétence:

Par ces motifs, LA COUR casse et annule le jugement rendu par le tribunal correctionnel supérieur de Beauvais, le 31 mai 1837, entre Jean-Marie Delormel et Christophe Martin ;

Et, pour être statué sur l'appel interjeté par ledit Delormel du jugement du tribunal correctionnel de Ciermont, renvoie la cause et les parties devant la Cour royale d'Amiens, chambre correctionnelle ;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. —r Chambre criminelle.

(N° 288.) Le sort du prévenu ne peut être aggravé sur son appel lorsque le ministère public n'apoint appelé lui-même.

Lorsque les tribunaux correctionnels prononcent comme juges d'appel des tribunaux de police, ils n'ont de pouvoir que pour réprimer les contraventions de police; si les débats établissent un fait correctionnel, et que ces tribunaux soient en même temps saisis par l'appel du ministère public, ils doivent seulement se déclarer incompétents (i).

ANNULATION , sur le pourvoi du Procureur du Roi près le Tribunal de première instance d'Avesne, d'un Jugement rendu sur appel par ce tribunal, le 22 mars dernier^ dans la disposition relative à Jean-Joseph Dineux.

Du 24 Août 1838.

Ouï le rapport de M. Vincens Saint-Laurent, conseiller; et les conclusions de M. Heilo , avocat général ;

Attendu que, conformément aux principes développés dans l'avis du conseil d'étal du 12 novembre 1806, le sort du prévenu ne peut être aggravé sur son appel; que le ministère public n'ayant pas appelé du jugement du tribunal de simple police qui a«flHkfadamné Paul et Dineux à des peines de simple police, en ^H^HPe l'article 479, n° 8 , du Code pénal, les faits de la prévenraflPRe pouvaient plus recevoir du tribunal d'appel une qualification plus grave ; que , s'il y avait erreur de la part du premier juge, le bénéfice de cette erreur était définitivement acquis aux prévenus;

(l) Voyez arrêts du 18 janvier 1822 {Bull. n° il); du 27 mars 1812 {Bull. n° 74); du 1" mai 1812 {Bull. n° 115); du 19 janvier 1816 ( Bull. n° 3 ) ; du 21 décembre 1816 ( Bull. n° 87 ) ; du 17 novembre 1814 {Bull. n° 40); du 26 février 1825 {Bull. n°35); du 7 janvier 1826 {Bull. n° i ) ; du 10 mars 182G {Bull. nP 48); du 4 août 1826 {Bull. n° 151 ); du 30 juin 1827 {Bull. n° 169); du 22 juillet 1830 {Bull.w 0 189); du 17 janvier 1829 ( Bull. n° il); du 2 7 février 1835 {Bull, n" 6 7); du

7 octobre 1836 ( Bull. n° 333); du3ô mars 1837 {Bull. n° 93) ; du 30 mar*

1837 ( Bull. n° 95).


( 416 )

Que cependant le tribunal correctionnel d'Avêsnes a décidé que }cs faits constituaient ie délit prévu par les articles 1, 13 et 19 de i* -loi du 17 mai 1819, et a prononcé contre:Dineux, l'un des appelants» la peine correctionnelle de 16 francs d'amende ; en quoi il a violé l'autorité de la chose jugée ;

Attendu, d'un autre côté, que les tribunaux correctionnels, Iors^ qu'ils prononcent comme juges d'appel des tribunaux de simple police, n'ont depouvpir que pour réprimer les contraventions de police ; que si„par les débats), les faits leur paraissent être de la compétence de la juridiction correctionnelle, ils ne peuvent, si d'ailleurs ils y sont autorisés par un appel du ministère public, que se déclarer incompétents, ainsi que le disent les articles 160 et 176 du Gode d'instruction criminelle, et non prononcer des peines correctionnelles;

Que le tribunal correctionnel d'Avêsnes, en prononçant, comme juge d'appel de simple police, une amende de 16 francs, peine correctionnelle, aux termes de l'article 179 du Code d'instruction criminelle, a confondu les divers ordres de juridiction et violé les règles de la compétence ot les articles 160 et 176 du même Code:

Parces motifs, LA COUR casse et annule le jugement rendu par le tribunal correctionnel d'Avêsnes le 22 mars dernier, dans les dispositions relatives à Jean-Joseph Dineux, ledit jugement sortissant effet pour le surplus ;

Et, pour être statué sur l'appel interjeté par ledit Dineux du jugement du tribunal de simple police d'Avêsnes, du 17 février précédent, renvoie Je procès devant le tribunal correctionnel de Va-* îenciennes; ,

Ordonne, etc. • '

Fajt, jugé et prononcé, etc. —Chambre criminelle.

(N° 289J L'article 29, titre Ie", de la loi des 49-22 juillet 4791, a main-, ~ é&ÈSm règlements alors existants, qui établissaient des dispositions de 'S^K notamment pour l'achat des matières d'or et d'argent, et cette Tg!|!Pç ;>u perdre sa force par la promulgation de celle du 19 bi-umaire an ri. En conséquence est nul le jugement d'un tribunal de simple police oui s'est déclaré incompétent, parle motif que le fait d'un bijoutier, de n'avoir pas soumis son registre au visa'du commissaire de police, 'ne serait punissable que des peines portées en ladite loi dit 49 brumaire.

ANNULATION, sur le pourvoi du Commissaire de police remplissant les fonctions du Ministère public près le Tribunal de simple police de la ville de Rouen, d'un Jugement rendu par ce tribunal le 5 juillet 1838, entre le ministère public et le sieur Poupardin,

Du 24 août 1838.

Ouï le rapport de M, le conseiller Rives, et le3 conclusions de M. l'avocat générai Helïo;


(417)

Vu les observations adressées au greffe de la Cour par le défendeur au pourvoi;

Vu les articles 408 et 413 du Code d'instruction criminelle, en exécution desquels doivent être annulés tous arrêts et jugements en dernier ressort qui présentent la violation des règles de la compétence;

Vu pareillementla sentence réglementaire du bailliage de Rouen, en date du 27 janvier 1779, qui enjoint à tous brocanteurs de faire viser leurs registres tous les mois par le commissaire?de police de leur quartier, sous peine de dix livres d'amende contre les refusants ou déloyaux;

Ensemble les articles 137 et 139 du Code précité;

Attendu, en droit, que l'article 29, titre Ier, de la loi des 19-22 juillet 1791, a maintenu les règlements alors existants qui établissaient des dispositions de sûreté, notamment pour l'achat des matières d'or et d'argent;

Que la sentence précitée n'a donc pas cessé de conserver son autorité;

Qu'elfe n'a pu, en effet, perdre sa force par la promulgation de la loi du 19 brumaire an VI, qui n'est spécialement relative qu'à la surveillance du titre et à la perception des droits de garantie des matières et ouvrages d'or et d'argent;

Que l'article 76 de cette loi, qui oblige lesfabricantset marchands des mêmes matières à présenter leurs registres à l'autorité publique, toutes les fois qu'ils en seront requis, n'est ni expressément dérogatoire à la disposition différente de la susdite sentence, ni inconciliable avec celle-ci ;

Que, dès lors, le tribunal de simple police était compétent, dans l'espèce, pour prononcer sur la prévention résultant de ce que le bijoutier Poupardin n'a pas soumis son registre au visa du commissaire de police de son quartier;

D'où il suit qu'en déclarant qu'il ne pouvait en connaître, par le motif que ce fait ne serait punissable que des peines portées en la loi susdatée du 19 brumaire an VI, le jugement dénoncé a commis une violation expresse des règles de la compétence, ainsi que des dispositions ci-dessus visées :

En conséquence, LA COUR, faisant droit au pourvoi, casse et annule le jugement que le tribunal de simple police de la ville de Rouen a prononcé, le 5 juillet dernier, entre le ministère public et Poupardin, bijoutier;

Et, pour être de nouveau statué sur la poursuite conformément à la loi, renvoie les parties, avec les pièces de la procédure, devant le tribunal de simple police du canton deDarnetal;

Ordonne, etc. ,

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.


( 418)

(N° 2,90.) L'article 50 de la loi du 28 avril 4846 embrasse dans ses dispositions toutes- les personnes qui donnent à manger pour de l'argent et par spéculation, quand bien même elles ne tiendraient pas une maison ouverte au public, où le premier venu fût reçu à se faire servir (i).

ANNULATION, sur le pourvoi de l'Administration des contributions indirectes ; d'un Arrêt rendu par la Cour royale d'Agen, chambre desjfcppels de police correctionnelle, le 10 janvier 1838, entre, ladite administration et la veuve Jauzenque,

Du 24 août 1838,

Ouï le rapport fait par M. Vincens Saint-Laurent, conseiller; les observations de Me Latruffe-Montmeylian , avocat du denian-deur; et les conclusions de M. Hello, avocat général ;

Vu l'article 50 de {a loi du 28 avril 1816 ;

Attendu, en fait, que d'un procès-verbal régulier il résulte que les employés des contributions indirectes ont trouvé, chez la veuve Jauzenque, marchande e'picière, deux particuliers prêts à se mettre à teble, qui ont déclaré être ses pensionnaires;

Que la veUve Jauzenque, poursuivie à raison de ce fait, comme ayant contrevenu à l'article 50 ciidessus visé, n'a point méconnu la vérité de cette déclaration ; qu'elle s'est bornée à dire pour sa défense qu'elle n'avait fait aucun prix avec ces individus, et qu'elle ne devait être remboursée de ses dépenses qu'à l'époque oùf après l'établissement prochain de leur famille dans la ville de Casseneuil, il cesseraient de prendre leur repas chez elle;

Que c'est sur ces explications de la veuve Jauzenque, et aussi sur ce qu'il n'était pas allégué qu'elle eut, dans aucune autre circonstance, reçu des pensionnaires ni fourni des consommations alimentaires à qui que ce soit, au jour, au mois ou à l'année, que la cour d'Agen s'est fondée pour la relaxer des poursuites ;

Mais attendu que ledit article 50 embrasse dans ses dispositions toutes les personnes qui donnent à manger, pour de l'argent et par spéculation, quand bien même elles ne tiendraient pas une maison ouverte au public, où le premier venu fût reçu à se faire servir;

Que le défaut d'une convention préalable sur la quotité du prix et les délais accordés pour le payement ne peuvent faire disparaître la contravention, lorsqu'il est d'ailleurs reconnu, que la nourriture fournie devait être payée ;

D'où il suit qçe l'arrêt attaqué, en jugeant que l'article 50 de la loi du 28 avril 1816 n'était pas applicable à la veuve Jauzenque, a formellement violé ledit article,

(l) Voyez arrêts du 1er octobre 1824 {Bull. n° i29);du 4 juin 1829 ( Bull n" 114); du 14 août 1834 {Bull. n° 272); du 24 août 1838 ( Bull.. n° 291 ),


( 419 )

LA COUR casse et annule l'arrêt rendu, le 10 janvier 1838, par la chambre correctionnelle de la cour royale d'Agen, en faveur de la veuve Jauzenque;

Et, pour être statué sur l'appel interjeté par l'administration des contributions indirectes, du jugement du tribunal correctionnel de Villeneuve, du 2 septembre 1837, renvoie la cause et les parties devant la cour royale de Toulouse, chambre correctionnelle;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

( N° 291.) L'article 50 delà loi du 28 avril 4846 embrasse dans ses dispositions toutes les personnes qui donnent à manger pour de l'argent et par spéculation, quand bien même elles ne tiendraient pas une maison ouverte au public, où le premier venu fût reçu à se faire servir {i).

ANNULATION, sur le pourvoi de l'Administration des contributions indirectes, d'un Arrêt rendu par la Cour royale d'Aix, chambre des appels de police correctionnelle, le 29 mars 1838, entre ladite administration et le sieur David Danne.

Du 24 Août 1838.

Ouï le rapport fait par M. Vincens Saint-Laurent, conseiller; les observations de M° Latruffe-Montmeylian, avocat delà demanderesse; et les conclusions de M. Hello, avocat général;

Vu l'article 50 de la loi du 28 avril 1816;

Attendu que d'un procès-verbal régulier il résulte que les employés des contributions indirectes, s'étant transportés au domicile de Danne, y ont trouvé trois individus assis aune table, deux de ces individus servis, l'un d'une soupe, l'autre d'un plat de dessert avec une demi-bouteille de vin, et chacun d'un verre; que les employés leur ayant demandé, s'ils étaient en pension chez Danne, l'un d'eux a répondu que c'était à la portion seulement qu'il y mangeait; que Danne, étant alors survenu, a répondu aux employés qu'il ne servait ces individus, qui étaient ses amis, que de soupe, et qu'ils se procuraient eux-mêmes le reste ; que, quant au peu de vin qu'ils buvaient, ils sç le procuraient, une bouteille après l'autre, au cabaret voisin;

Que , dans le même procès-verbal, Danne a reconnu qu'il donnait à logera quelques personnes par hasard, et qu'il leur procurait ce qui leur était nécessaire ;

Attendu que ces faits plaçaient Danne dans la classe de ceux qui doivent faire la déclaration prescrite par l'article 50 ci-dessus visé; '

(i) Voyez arrêt du 24 août 1838 {Bull, 290), et les arrêts en note.


( 420 )

Qu'en effetles dispositions de cet article sont générales et embrassent tous ceux qui donnent à boire et à manger pour de l'argent; que cet article n'exige pas qu'on tienne table ouverte et qu'on reçoive tous ceux qui se présentent; qu'il s'applique à toutes les spéculations de ce genre, quelque restreintes qu'elles soient;

Que la cour royale d'Aix tenant pour constant, sur la simple allégation de Danne, qu'il ne logeait que par hasard; que ceux qui ont été trouvés chez lui étaient ses amis, et qu'il ne les servait que de soupe, et laissant de côté le fait avoué par lui qu'il leur fournissait du vin q(i'il se procurait au cabaret voisin, a jugé que les prescriptions de l'article 50 de la loi du 28 avril 1816 lui étaient étrangères; mais qu'aucune de ces circonstances ,xd'après les principes qui viennent d'être posés, n'était de nature à faire disparaître la contravention: d'où il suit que l'arrêt attaqué a formellement violé ledit article,

LA COUR casse et annulé l'arrêt rendu par la cour royale d'Aix, le 29 mars dernier, en-faveur de David Danne; . Et, pour être statué sur l'appel interjeté par l'administration des contributions indirectes du jugement du tribunal correctionnel de Marseille du 21 novembre précédent, renvoie la cause et les parties devant la cour royale de Nîmes, chambre correctionnelle;

Ordonne, etc.

Fait et jugé, etc. — Chambre criminelle.

(N° 292.) Laprésomption derecel établie par l'article 64 de la loi du 28 avril 4816 existe contre le débitant qui, lors du procès-verbal ou des poursuites dirigées contre lui, n'a pas établi par une preuve légale et authentique que la jouissance d'une cave contiguë à la sienne et le vin saisi dans cette cave appartenaient à un autre {i).

ANNULATION, sur le pourvoi de l'Administration des contributions indirectes, d'un Arrêt rendu parla chambre des appels de police correctionnelle de la Cour royale de Grenoble, le 27 avril 1838, £ntre ladite administration et le sieur Jacques-Pierre Roux.

Du 24 Août 1838.

Oui' le rapport fait par M. Vincens Saint-Laurent, conseiller; les observations^de Mc Latruffe-Montmeylian, avocat de l'admînis" tration des contributions indirectes; et les conclusions de M. Hello, avocat général ;

Vu l'article 61 de la loi du 28 avril 1816, portant : «II est fait défense aux vendants en détail de receler des boissons «dans leurs maisons ou ailleurs, et à tous propriétaires ou principaux «locataires de laisser entrer chez eux des boissons appartenant

(l) Voyez arrêt du 24 mars 1838 {Bull, n 83) et les arrêts en note.


( 421 ) «aux débitants, sans qu'il y ait bail par acte authentique pour les, «caves, celliers, magasins et autres lieux où seront placées lesdites «boissons: toute communication intérieure: entre les maisons des «débitants et les maisons voisines est interdite, et les commis sont «autorisés à exiger qu'elles soient scellées;» 4

Vu aussi les articles 50, 53, 56, 62 et 63 de ladite loi;

Attendu que, d'après les articles 50 et 53 de la loi du 28 avril 1816, les débitants doivent déclarer aux employés toutes les boissons qu'ils ont en leur possession, dans leur demeure ou ailleurs;

Que, d'après l'article 56, ils sont tenus d'ouvrir leurs caves, celliers et autres parties de leur maison aux employés, pour y faire leurs visites;

Qu'en rapprochant de ces deux articles l'article 61 ci-dessus transcrit, qui a été fait pour en assurer l'exécution, on reconnaît clairement qu'il a pour effet d'établir la présomption que tout local auquel le débitant peut librement avoir accès sans sortir de sa maison fait partie des lieux par lui occupés, et que toutes les boissons qui y sont placées, et qui se trouvent ainsi à sa disposition pour alimenter son débit, sont sa propriété ; qu'il est par suite dans l'obligation légale de représenter aux employés les expéditions y relatives, et que, faute de le faire, lesdites boissons sont censées recelées;

Que cette présomption ne cesse, d'après l'article 61, que par la représentation d'un bail authentique attribuant à un autre qu'au débitant la jouissance du local où les boissons sont trouvées;

Qu'elle doit également cesser, sans doute, lorsque ce local est possédé par un voisin du débitant à titre de propriété , sauf, dans ce cas, le droit de la régie d'exiger, en vertu de la disposition finale de l'article 61, que la communication intérieure soit scellée, ou, si cela est impossible, de faire autoriser, conformément aux articles 63 et 63, l'exercice chez ce voisin ; mais qu'une simple allégation du débitant ne peut suffire pour établir que le voisin est propriétaire, pas plus qu'elle ne suffirait pour établir qu'il est locataire; qu'elle doit être ajjpuyée de preuves légales et certaines; faute de quoi, la présomption qui résulte de l'article 61 doit conserver toute sa force , et il ne peut y avoir lieu pour la régie de recourir aux mesures de précaution indiquées par les articles ci-dessus;

Attendu, en fait, qu'il est établi par un procès-verbal régulier, 1° que la cave du sieur Roux, débitant à Auberive, communique avec une autre cave par une porte fermée seulement de son côté à l'aide d'une cheville de bois, qui s'ôte et se met à volonté; 2° que, dans cette autre cave, les employés ont trouvé une certaine quantité de vin, pour lequel le sieur Roux n'a pu représenter d'expéditions;

Que le sieur Roux, pour sa défense, a soutenu, soit lors du pro^ cès-verbal, soit sur les poursuites dirigées contre lui, que ce vin ne lui appartenait pas, et qu'il n'avait sur cette cave qu'un droit de


( 422 ) passage qui lui était absolument nécessaire pour garnir et dégarnir sa cave, et qu'on ne jpouvait dès lors lui interdire ;

Mais qu'on ne trouve ni dans le jugement du tribunal de Vienne, ni dans l'arrêt confirmatif de la cour royale de Grenoble, la mention d'aucune preuve légale par laquelle il aurait établi que la jouissance de la cave et la propriété du vin saisi appartenaient à un autre que lui; que même le prétendu propriétaire de ce vin n'a fart aucune réclamation ni lors de la saisie ni en justice ;

Que cependant l'arrêt attaqué a tenu pour constants les faits allégués par le sieur Roux, et a décidé, en conséquence, que la présomption de recel établie par l'article 61 de la loi du 28 avril 1816, n'existait pas contre lui, mais que c'était seulement le cas de recourir aux mesures prescrites par les articles 62 et 63 de la même loi;

En quoi il a formellement violé le susdit article :

Par ces motifs, LA COUR casse et annule l'arrêt rendu par la chambre correctionnelle de la cour royale de Grenoble, le 27 avril dernier, en faveur de Jacques-Pierre Roux;

Et, pour être statué sur l'appel interjeté par l'administration des contributions indirectes du jugement rendu au tribunal correctionnel de Vienne, le 13 février précédent, renvoie la cause et les parties devant la cour royale de Lyon, chambre correctionnelle ;

Ordonne, etc.

Fait et jugé, etc.—Chambre criminelle.

(N° 293.) L'instituteur qui est muni du brevet de capacité et du certificat de moralité, et qui est présenté par le conseil municipal, n'est passible d'aucune peine lorsqu'il a rempli provisoirement ses fonctions avec l'agrément du maire, sans attendre sa nomination, qui, en définitive, a été refusée.

REJET du pourvoi du Procureur du Roi près le Tribunal correctionnel de Chaumont (Haute-Marne), d'un Jugement rendu sur appel par ledit tribunal, le 16 juin dernier, en faveur du sieur François Galland.

Du 24 Août 1838.

Ouï le rapport fait par M. Vincens Saint-Laurent, conseiller; et M. Hello, avocat général, en ses conclusions.

Attendu qu'il résulte, en fait, du jugement attaqué que Galland, muni du brevet de capacité et du certificat de moralité exigés par l'article 4 de la loi du 28 juin 1833, et présenté par le conseil municipal de Meuse, pour la place d'instituteur primaire de cette commune, en a rempli provisoirement les fonctions avec l'agrément du maire, sans attendre sa nomination qui, en définitive, a été refusée ;

Que le jugement attaqué, sans examiner si ce fait était pu-


( 423 ) nissable, s'est fondé sur la bonne foi de Galland pourle renvoyé* de l'action du ministère public; #

Attendu que ce fait peut être considéré sous un double point de vue, ou par rapport aux lois spéciales sur l'instruction publique, ou par rapport au Code pénal;

Que , sous le premier point de vue, et s'il rentrait dans les termes des dispositions pénales que contiennent ces lois, il formerait une contravention qui ne pourrait être excusée à raison de la bonne foi;

Mais que l'article 6 de la loi du 28 juin 1833, qui pUnit ceux qui tiennent école, sans avoir satisfait aux conditions de l'article 4 de la même loi, ne peut être appliqué au fait essentiellement différent pour lequel Galland est poursuivi ;

Que l'article 22, de la même loi, qui règle les formes dans* lesquelles sont nommés, institués et installés les instituteurs communaux, n'est sanctionné par aucune disposition pénale;

Qu'on ne peut chercher cette sanction dans l'article 56 du décret du 15 novembre 1811, dont la disposition, en ce qui concerne l'instruction primaire, a été remplacée et abrogée parles articles 4 et 6 de la loi du 28 juin 1833;

Que, par rapport au Code pénal, et en supposant que le fait dont il s'agit put, suivant les circonstances, constituer l'usurpation de fonctions publiques prévue par l'article 258 de ce Code, il n'y aurait cependant pas lieu, dans l'espèce, à l'application des peines portées par cet article; qu'en effet, un délit de cette nature comporte l'examen des questions d'intention et de moralité, et que le jugement attaqué reconnaît, en termes exprès, la bonne foi de Galland ;

Attendu, en conséquence, qu'en l'état des faits qu'il a reconnus, le tribunal de Chaumont n'a, sous aucun rapport, violé la loi, en renvoyant Galland des poursuites du ministère public,

LA COUR rejette le pourvoi, etc. ;

Ordonne, etc.

Fait et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

(N° 294.) L'article 23 de la loi dû 48 vendémiaire an VI, qui, après l'annulation d'un second jugement, prescrit un référé au coi-ps législatif, a été implicitement abrogé par la loi du 29 prairial au VI, qui ordonne qu'en cas de seconde annulation d'un jugement rendu par un conseil de guerre, le prévenu serarenvoyè, avec les pièces du procès et la décision du conseil de révision, devant le Ier conseil de guerre d'une des division.-: militaires voisines (l). ,^

// en est de même de la note annexée à l'article 58 au décret du 42 novembre 4806, qui se réjèrc au susdit article 23.

(l) Voyez arrêt du 18 août 1831 {Bull. 183) et autre arrêt du 8 décembre 18 30 {Bull. n° 382).


( 424 )

ANNULATION, sur le réquisitoire de M. le Procureur général à la Cour, d'une Décision prise par le Conseil permanent de révision

• du 3e arrondissement, séant à Lorient, le 12 mai 1838, à l'égard du nommé Renault.

Du 30 Août 1838.

Suit la teneur du réquisitoire et de l'arrêt :

A LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE.

Le procureur général à la Cour de cassation expose qu'il est chargé par M. le garde des sceaux, ministre de la justice, conformément à l'article 441 du Code d'instruction criminelle, de requérir l'annulation d'une décision du 12 mai 1838, du conseil de révision du 3e arrondissement, séant à Lorient, rendue dans les circonstances suivantes :

Le 2e conseil de guerre maritime, séant à Lorient, condamna, le 27 avril 1838, le nommé Renault, à cinq ans de travaux publics, pour désertion à l'intérieur. Le jugement fut annulé, le 3 mai suivant, par le conseil permanent de révision au port de Lorient, par ce motif, que les questions avaient été posé;s à huis clos, et que l'article 8 de l'ordonnance du 22 mai 1816, prescrit de se conformer aux dispositions de l'arrêté du 19 vendémiaire an xn, qui, dans son article 37, exige que les questions soient posées en public et en présence de l'accusé. La procédure fut renvoyée devant le 1er conseil de guerre permanent, séant au même port; mais ce conseil, ayant également posé les questions à huis clos, le conseil permanent de révision statua, le 12 mai 1838, dans les termes suivants :

«Vu l'article 23 de la loi du 18 vendémiaire an vi; vu le second «paragraphe de la note annexée à l'article 58 du décret du 12 no«vembre 1806, ainsi conçu :

«Néanmoins si le nouveau pourvoi en révision est fondé sur les «mêmes moyens qui ont déjà déterminé l'annulation du 'premier «jugement, la question ne peut plus être agitée devant les officiers «et magistrats délégués par l'article 54, sans nous avoir été préa«lablement soumise au conseil d'état, et lesdits officiers et magistrats sont tenus de se conformer à la décision que nous aurons «donnée. Ordonne, conformément à l'article 23 ci-dessus cité, qu'il a en sera référé au conseil d'état.»

Le conseil de révision a évidemment méconnu, par cette décision, les règles de sa compétence.

L'article 23 de la loi du 18 vendémiaire an VI, qui, après l'annulation d'un second jugement, prescrit un référé au corps législatif, a été implicitement abrogé par la loi du 29 prairial an vi, qui ordonne qu'en cas de seconde annulation d'un jugement rendu par


( 425.) Un conseil de guerre, le prévenu sera renvoyé, avec les pièces du procès et la décision du conseil de révision, devant le 1er conseil de guerre d'une des divisions militaires voisines.

Pour lever tous les doutes sur cette abrogation, un avis du conseil d'état, du 5 germinal an xi, approuvé le 5 du même mois par le premier consul (inséré au bulletin n° 2,658, 9e série, 2e partie, 2e semestre 1831 ) intervint qui décida que l'organisation du corps législatif et le nouveau mode de formation de la loi ne permettant plus les référés au corps législatif, l'article 23 de la loi du 18 vendémiaire an vi est implicitement abrogé, et qu'en cas de second recours contre un jugement de conseil de guerre par les mêmes moyens de nullité, on doit suivre la marche tracée par l'article 1er de la loi du 29 prairial an vi.

Cette interprétation a été sanctionnée par deux arrêts de la cour de cassation, du 18 août 1831 [Bull, criminel, n" 183) et par uiï autre du 8 décembre 1836 [Bull, criminel, 382).

Quant à la note annexée à l'article 58 du décret du 12 novembre 1806, qui organise les tribunaux maritimes, et sur laquelle le conseil de révision s'est, en outre, fondé, pour en référer au conseil d'état, il nous semble évident que cette note rédigée dans les mêmes termes à peu près que l'article 23 du décret du 18 vendémiaire an vi, ne peut pas conserver quelqu'effet, lorsque cet article 23 n'en a aucun, et que les raisons qui ont fait déclarer cet article abrogé s'étendent à la note dont il s'agit. D'ailieurs, cette note, annexée à une disposition du décret qui organise les tribunaux maritimes, ne pouvait être invoquée par le conseil de révision, qu'aurait uniquement régi l'article 23 de la loi du 23 vendémiaire an vi, si cet article n'avait pas été abrogé, comme nous l'avons établi plus haut et comme l'a jugé la Cour.

Dans ces circonstances, vu la lettre de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, du 7 août 1838, vu l'article 441 du Code d'instruction criminelle, vu la loi du 29 prairial an vi, vu l'avis du conseil d'état du 5 germinal an xi,

Nous requérons, pour le Roi, qu'il plaise à la Cour, casser et annuler la décision du 12 mai 1838, du conseil de révision au port de Lorient;

Et, attendu que le cours de la justice se trouve suspendu, renvoyer le prévenu, et les pièces de la procédure, devant le conseil de révision qu'il plaira à la Gourde désigner; ordonner qu'à la diligence du procureur général du Roi, la décision à intervenir sera imprimée et transcrite sur les registres du conseil de révision du 3e arrondissement, siégeant à Lorient.

Fait au parquet, le 17 août 1838.

Pour le procureur général :

Le premier avocat général, F. L. LAPLAGNE-BARRIS.


( 426 )

Ouï lé rapport de M. le conseiller Rives, et les conclusions de M. l'avocat général Hébert ;

Vu l'article 441 du Code d'instruction criminelle;

Le présent réquisitoire et les décisions qui s'y trouvent énoncées;

La lettre de M. le garde des sceaux, en date du 7 du courant;

Ensemble l'article 1er de la loi des 17 juin 1798, 29 prairial an vi, et l'avis du conseil d'état, du 5 germinal an XI, approuvé le même jour;

Attendu que l'article 1er de cette loi a virtuellement abrogé, ainsi que l'a décidé l'avis précité du conseil d'état, l'article 23 de celle des 9 octobre 1797-18 vendémiaire delà même année;

D'où il suit, dans l'espèce, que le conseil maritime permanent de révision au port de Lorient a faussement applique cette dernière disposition, et la note annexée à l'article 58 du décret du 12 novembre 1806, qui ne peut avoir aucune autorité aujourd'hui, puisqu'elle se référait évidemment au susdit article 23: - En conséquence, LA COUR, faisant droit au présent réquisitoire, casse et annule la décision prononcée par le conseil permanent de révision séant au port de Lorient, le 12 mai dernier, à-l'égard du nommé Renault;

Et, attendu que cette décision a suspendu le cours de la justice, et qu'il est nécessaire de le rétablir,

Renvoie ledit Renault et les pièces de la procédure devant le 1er conseil de guerre maritime du port de Brest;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

(N° 295.) Un garde national poursuivi pour avoir manqué une revue et deux gardes hors de tour, et qui invoque pour sa défense une absence momentanée qu'il demande à prouver par témoins, est fondé à demander la nullité du jugement qui, l'ayant condamné, ne contient de motifs qu'à

J l'égard du manquement à la revue, et qui en est entièrement dénué sur le rejet de l'exception prise de son absence.

ANNULATION, sur le pourvoi du sieur Drudes de Campagnoll.es, d'un Jugement rendu contre lui le 7 juin 1838, par le Conseil de discipline du bataillon de la gardé nationale de Vire.

Du 30 Août 1838.

Ouï le rapport de M. Vincens Saint-Laurent, conseiller; les observations de MeMandaroux-Vertamy, avocat du demandeur, et les conclusions de M. Hébert, avocat général;

Vu l'article 7 de la loi du 20 avril 1810;

Attendu que les prescriptions de cet article sont d'ordre public et sont communes à toutes les juridictions;

Que le demandeur, poursuivi pour avoir manqué à une revue et à deux gardes hors de tour, a soutenu pour sa défense qu'il était


( 427 ) .

absent de la ville de Vire, lorsqu'il a été commande', tant pour la revue que pour les gardes hors de tour;

Que des témoins ont été produits par lui pour établir ce fait, qui, s'il eût été prouvé, aurait été pleinement justificatif ;

Que le conseil de discipline, sans s'arrêter à cette défense, l'a condamné à la peine de l'emprisonnement;

Mais que son jugement ne contient de motifs qu'à l'égard du manquement à la revue; qu'il en est entièrement dénué sur le rejet de 1 exception prise de l'absence du demandeur aux jours où il a été commandé pour les gardes hors de tour, quoique ce soit cependant le refus de ces deux services d'ordre et de sûreté qui serve de base à la condamnation;

Qu'ainsi il y a eu violation dudit article 7,

LA COUR casse et annule le jugement rendu par le conseil de discipline de la garde nationale de Vire, le 7 juin dernier, contre lesieurDrudesdeCampagnolIes;

Et, pour être statué sur l'opposition dudit Drudes de Campagnolles au jugement rendu contre lui par défaut par ledit conseil de discipline, le 31 mai .précédent, le renvoie, avec les pièces du procès, devant le conseil de discipline de la garde nationale de Tallevande-Legrand ; .

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononce', etc.— Chambre criminelle.

(N° 296.) Lorsqu'un arrêté dû préfet n'admet une tolérance dans le poids du pain que dans le cas d'une extrême cuisson, ou d'un accident qui aurait influé sur le résultat de la fournée, le tribunal qui renvoie les prévenus de la poursuite doit, à peine de nullité, juger en termes explicites au'ils se trouvent excusables à cause de l'extrême cuisson ou d'un accident qui avait influé sur le résultat de la fournée. Il ne peut se borner simplement à déclarer que le déficit rentre dans les dispositions de cet article.

ANNULATION , sur le pourvoi du Commissaire de police remplissant les fonctions du Ministère public près le Tribunal de simple police de la vifie de Nantes, d'un Jugement rendu par ce tribunal, le 5 juillet 1838, en faveur des sieurs Guyot etLefèvre.

Du 30 Août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives, et les conclusions de M. l'avocat général Hébert;

: Vu l'article 44 de l'arrêté réglementaire du préfet de la Loire-Inférieure, en date du 2 février 1814, concernant l'exercice de la boulangerie de Nantes, lequel n'admet une tolérance dans le poids du pain, que cet arrêté détermine, que dans le cas d'une extrême cuisson, ou d'un accident qui aurait influé sur le résultat de la fournée ;

Criminel. 1838. N" 8. 30


(428 )

Vu Tes articles 161 du Code d'instruction criminelle, 65 et 471, »° 15, du Code-pénal;

Et attendu qu'il est reconnu et constaté, dans l'espèce, que les prévenus ont exposé en vente plusieurs pains qui n'avaient pas le poids exigé par-l'arrêté précité;

Qu'ils ne pouvaient donc échapperjù l'application de la peine attachée à la contravention résultant de ce fait que, dans le cas où le tribunal saisi de la prévention aurait vérifié et formellement jugé, en termes explicites, qu'ils se trouvaient excusables par la tolérante qu'accorde ledit article 44,à cause dep'extrénie cuisson de ces pains ou d'un accident qui uvaitinflué sur le résultat de la fournée;

D'où il suit qu'en se bornant simplement à déclarer que le déficit à eux reproché rentre dans la disposition de cet article, le jugement dénoncé a expressément violé les articles ci-dessus visés:

En conséquence, LA COUR, faisant droit au pourvoi, casse et annule le jugement que le tribunal de simple police de la ville de Nantes a prononcé, le 5 juillet dernier, en faveur de Guyotet Lefèyre, boulangers ;

Et, pour être de nouveau statué sur la prévention conformément à la loi, renvoie les parties, avec lés pièces de la procédure, devant le tribunal de simple police du canton de Carquefou;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chanibrecriminfille.

(Nu 297.) Si un délit est imputable plusieurs personnes, soit comme auteurs, soit comme complices,. il doit être prononcé une peine distincte Contre chacune d'elles.

Il ne peut y avoir d'exception à cette règle générale du droit criminel que dans les cas où des lois spéciales font porter la peine sur le délit plutôt que sur son auteur.

Ainsi le mari et ta femme qui se rendent'conjointement coupables du délit d'usure doivent être punis séparément et chacun d'eux de la peine de l'amende (l).

ANNULATION, sur le pourvoi du Procureur général près la Cour > royale de Ptennes, d'un Arrêt rendu par cette Cour, chambre des

appels de police correctionnelle, le 11 juillet 1838, centre les

e'poux Drouard.

Du 30 août 1838.

Ouï le rapport fait par M. Vincens Saint-Laurent, conseiller; et les conclusions de M. Hébert, avocat général;

(l) Voyez ai-rêlsdu 2 5 OGCobre 1811 ( Bull. n° 141 ); du l 7 juillet 1812 {Bull. n° 1GG); du 3 juillet i&06{Bull. n" 107'); Ju 4 ilore'dl au X {Bull. n" 165); du 14 octobre 1636( Bull. n° 207 ).


( 429 ) Vit l'article 4 de la loi du 3 septembre 1807; Attendit que, d'après les principes généraux du droit criminel, toute personne qui se rend coupable d'un délit doit être punie d'une» peine; qu'il suit delà que, si un délit est imputable à plusieurs personnes, soit comme auteurs, soit comme Complices", il doit être prononcé une peine distincte contre chacune d'elles;

Qu'il ne peut y avoir d'exception à cette règle que dans les'cas où des lois spéciales font porter la peine sur le délit plutôt que sur son auteur; ,

Que la loi particulière sur l'usure, loin de déroger au droit commun, le confirme expressément, puisqu'elle ordonne que tout indi. vidu convaincu de se livrer habituellement à l'usure soit condamne' à l'amende ;

Que les règles du droit civil relatives à Fautorité maritale et à l'ad'iMnistra'tidn de la communauté ne sont point applicables aux matières criminelles; qu'on ne peut dès lors s'en autoriser, ni en général, pour affranchir la femme mariée qui commet un délit de la peine qu'elle a encourue; ni en particulier, pour ne punir que : d'une seule amende solidaire contre le mari et la femme communs en biens qui se rendeut conjointement coupables d'un délit d'usure;

Attendu, en fait, que la cour royale de Rennes a déclaré Drouard et sa femme coupables de s'être livrés habituellement à l'usure; qu'elle a fondé cette déclaration, d'une part, sur ce que la femme Drouard, administrant la communauté en l'absence de son mari, avait fuit,la plupart des prêts, d'autre partj sur ce que Drouard en avait lui même quelques-uns, et devait être considéré, d'après les ciiconstances relevées dans l'arrêt, comme ayant coopéré à tous;

Qu'il y avait doticculpabilitépersonnellede chacun des prévenus; d'où la conséquence qu'une peine devait être infligée à chacun d'eux;

Que cependant la cour royale, par le motif que, dans tous lés prêts, lesdeux époux s'identifiaient, et qu'on ne devait les condamner que comme s'il n'y avait qu'un délinquant, n'a prononcé contre eux qu'une seule amende solidaire :

Par ces, motifs, LA COUR casse et annule l'arrêt rendu par la cour royale de Rendes, chambre correctionnelle, le 11 juillet dernier, contre Pierre-Joseph Drouard et Julie Cordier, sa femme;

Et, pour être statue sur les appels interjetés, tant par eux que par le ministère public, du jugement rendu au tribunal correctionnel de Rennes, le 9 juin précédent, renvoie Icsdils époux Drouaïi! devant la cour royale d'A:)gers, chambre correctionnelle;

Ordonne, etc.

Fait, jugé et prononcé, etc. — Chambre criminelle.


( 430 )

(N° 298.). II. n'y.a pas lieu h prononcer la contrainte par corps, ni à en fixer la durée, quand il s'agit d'une condamnation, sait à la peine de mort, soit à une peine perpétuelle (l).

ANNULATION, dans l'intérêt de la loi et par voie de retranchement, d'une disposition de l'Arrêt rendu par la Cour d'assises du département de la Seine-Inférieure, le 17 juillet 1838, contre JeanBaptiste Auber.

. Du 30 Août 183,8.

Ouï M. le conseiller Meyronnet de Saint-Marc, en son rapport; Me Béguin, avocat en la Cour, en ses observations verbales à l'appui du pourvoi; et M. l'avocat général Hébert, en ses conclusions;

Statuant sur le réquisitoire d'office du ministère public;

Attendu qu'il n'y a pas lieu à prononcer la contrainte par corps ni à en fixer la durée, aux termes des articles 7 et 40 de la loi du 17 avril 1832, quand il s'agit d'une condamnation, soit à la peine ds mort, soit à une peine perpétuelle ; attendu cependant, qu'en condamnant en outre ces deux individus solidairement aux frais du procès, liquidés à la somme de 428 francs 80 centimes, la cour d'assises de la Dordogne a fixé à un an la durée delà contrainte par corps, en quoi cette cour a fait une fausse application desdits articles 7 et 40 de ladite loi du 17 avril 1832 :

Par ces motifs, LA COUR casse et annule, mais dans l'intérêt de la loi seulement, et par voie de retranchement, cette partie de l'arrêt du 16 juillet dernier;

Ordonne, etc. Fait et jugé, etc. — Chambre criminelle.

(N°299. ), Le caj/aretier qui se borne simplement et exclusivement à don^ ner à boire et à manger n'est pas astreint aux obligations imposées aux aubergistes, hôteliers et loueurs de maisons garnies; il n'est donc pas tenu d'avoir le registreprescritpar l'article 475, n" 2, du Codepénal (2).

REJET du pourvoi du Commissaire de police de la ville de Briançon

(Hautes-Alpes), remplissant les fonctions du Ministère public

près le Tribunal de simple police du canton de Briançon, d'un

Jugement rendu par ledit tribunal de police, le 2 août 1838, en

veur de la dame veuve Albert, aubergiste.

Du 30 Août 1838.

Ouï le rapport de M. le conseiller Rives, et M. Hébert, avo-.

cat général, en ses conclusions ;

(1) Voyez arrêt du 9 août 1838 {Bull. n° 268) et les arrêts en note. (2J Voyez arrêt du âl janvier 1837 (0t^.n°27).


f«» ) .

Attendu que le mot logeur comprend, dans lu généralité de son acception, toutes les personnes qui font état de recevoir habituellement ceux qui se présentent dans. leurs maisons pour y demeurer pendant plus ou moins de temps; que les cabaretiers, lorsqu'ils ne se bornent pas simplement et exclusivement à donner à boire et à manger, contractent donc nécessairement les obligations qui sont imposées aux aubergistes, hôteliers et loueurs de maisons garnies; d'où il suit qu'ils ne sont tenus que dans ce cas d'avoir le registre prescrit par l'article 475, n° 2, du Code pénal, et d'y inscrire, conformément à cet article, non-seulement les voyageurs étrangers, mais encore les personnes même qui logent momentanément chez eux, encore bien qu'elles aient leur domicile habituel dans le même lieu ;

Et attendu, dans l'espèce, qu'il n'est point énoncé dans le procèsverbal rapporté à la charge de la veuve Albert qu'elle ait logé quelqu'un dansson cabaret, et que le jugement dénoncé déclare formellement qu'elle se borne à donner à boire et à manger ;

Qu'en la relaxant, dès lors, de l'action exercée contre elle pour ne s'être pas pourvue dudit registre, ce jugemen:, lequel est d'ailleurs régulier en la forme , n'a point expressément violé l'article précité,

LA COUR rejette le pourvoi ;

Ordonne, etc.

Fait et prononcé, etc. — Chambre criminelle.

Au bas de chaque expédition est écrit : Mandons et ordonnons à tous huissiers sur ce requis de mettre le présent arrêt * exécution ,


( 432 ) à" nos procureurs généraux et à nos procureurs près "es'tribunaux

•de première instance d'y tenir :1a main; à .tous commandants et officiers de la force publique d'y.prêter main-forte, lorsqu'ils en seront légalement requis. En foi de quoi.le présent arrêta été signé par le premier président-de. la Cour et par le greffier.

■Signé C'° PORTALIS, premier président; LÀPORTE, greffier.

■ ■ ■ CERTIFIA conforme par nous

-"-■•'- Garde des sceaux de France, Ministre secrétaire,

d'état au département de la justice et des cultes i

,..''' ■ Signé BARTHE.

A TA 1US, DE L'LMI'RI.MEIUE ROYALE. ~ iMiil'b 1839.