HÉLÈNE VACARESCO 43
DETACHEE
Mes yeux, ne suivez plus la lune langoureuse! Mes mains, n'égarez point vos caressants loisirs Dans l'herbe souple et drue ou dans la source heureuse ! Je veux vous détacher, mes yeux, de vos désirs.
De tout ce qui vous plaît^ mes mains, je vous détache : Que tiédeur et fraîcheur vous manquent tour à tour! Et vous qui poursuivez tout ce que l'ombre cache, Mes jreux, reposez-vous d'avoir vu tout l'amour !
Ne touchez plus la flamme, ô mes mains dévorantes, Frêles de contenir votre propre chaleur, Et vous, mes doigts glacés aux frissons des attentes, Ne plongez plus dans l'air votre geste enjôleur!
Ne cherchez plus une eau pour vous revoir vous-mêmes,
Mes yeux, pleins de vertige et de fatalité,
Car vous portez en vous les horizons extrêmes,
O mes yeux voyageurs, où vous avez été!
Mes bras, ne bercez point les voluptés éteintes Dont Arous ne pouvez plus ni blêmir ni brûler ! Fermez-vous, mes regards, fermez-vous, mes étreintes, Car l'espace et l'ardeur n'ont rien à vous donner.
(La Dormeuse éveillée.)
PRÉSENCE
Mets la clef dans la serrure, La lampe près du miroir, Pour que mon coeur se figure Qu'il est moins seul et moins noir.