I EXPOSITION UNIVERSELLE
DE 1878
«r^ \ '■''. s:j ORGANE DES INTERETS DES EXPOSANTS ^BSB
SUITE ^^AtP^BLICATION AUTORISÉE PAR LA COMMISSION DE 1867
Rédacteur en Chef : M. JULES BIVLJ:N:F\AXJT, Ingénieur.
N« 135
ADMINISTRATION, REDACTION, ABONNEMENTS
3S, RUE! SAINT-LAZABB, 35
"PARIS
JUIN 1878
ANNONCES
EJ. RBNIHR, AX>—> XVAJFB'IOECA.GHJ
PLAGE DES VICTOIRES
N«135
SOMMAIRE :
JEXTB
1° M. L'ABUÉ ROUSSEL, par Maillard des Broys.
2o PARTIE OFFICIELLE.
3* CHRONIQUE, par Adelin.
*o LES PETITS IMPRIMEURS D'AUTEUIL A L'EXPOSITION, par Ch. de Lêry.
5° UNE VISITE A L'EXPOSITION, par Adelin.
fi* LES COLONIES NÉERLANDAISES D'ORIENT, par II. de La Blauchère.
pRAYURES
1» L'AUBE ROUSSEL.
S» CHAMP DE MARS. — Fabrication des fleurs artificielles.
3° — — — Fabrication de la dentelle.
4» — — — Fabrication des perles artificielles.
5° HUTTE AUSTRALIENNE.
6° LES PETITS IMPRIMEURS D'AUTEUIL.
7° CHAMP DE MARS. — Façade du côté de l'École militaire.
M. L'ABBE ROUSSEL
Un humble prêtre qui déjà s'était dépensé dans les bonnes oeuvres, soit comme directeur de patronages ouvriers, soit comme aumônier militaire, éprouvait une profonde douleur en voyant le nombre considérable d'enfants orphelins ou abandonnés qui errent jour et nuit dans les rues de la capitale et des faubourgs. Dépourvus de tout soutien, ces infortunés en viennent forcément, logiquement, à grossir le nombre des chevaliers d'industrie, parfois même des criminels et toujours des fauteurs de désordre.
S ans ressources personnelles, cet homme de bien quo les malheureux nomment aujourd'hui a le bon abbé Roussel » inspiré par la foi, résolut d'apporter remède à ce déplorable état de choses. De l'or il n'en avait pas, mais il avait la vertu qui a fait les Vincent de Paul et tous les bienfaiteui's de l'humanité.
Un soir, vers la fin de l'hiver 1865-66, pendant qu'il se demandait peut-être s'il serait bientôt en mesure de commencer sa mission charitable, il aperçut, malgré l'obscurité, une forme humaine penchée sur un ruisseau. L'abbé Roussel s'approcha et vit un adulte d'une quinzaine d'années occupé à fouiller consciencieusement les ordures. — Que fais-tu là ? lui dit le prêtre.— Je cherche à manger, répondit l'enfant.
L'abbé Roussel comprit que son heure était arrivée et emmena le
M. L'ABBE ROUSSEL
jeune homme. Le lendemain un
secoud vagabond avait rejoint le
premier. Bientôt ils furent six. Et six qui
avaient l'appétit de leur âge...
aiguisé encore par les privations. Mais les ressources du digne prêtre s'épuisaient sensiblement et un moment arriva où bienfaiteur et protégés se virent réduits à la portion congrue... puis au pain sec... puis... « au coucher sans souper ». La situation devenait inquiétante et pourtant l'abbé Roussel ne désespérait pas.
Quelques amis charitables lui vinrent en aide. Et ce peu était d'un prix inestimable pour le père adoptif comme pour les enfants.
L'oeuvre était fondée. La misère lui ayant donné sa consécration, elle avait désormais droit de vie. Toutefois, une autre pensée préoccupait le vertueux fondateur : le local était trop exigu et sept personnes s'y trouvaient mal à l'aise. D'ailleurs il fallait prévoir que le nombre des enfants augmenterait. Car beaucoup d'autres mouraient de faim dans ce Paris, ou s'y livraient à toutes les licences du vagabondage. Ayant appris qu'il existait à Auteuil une villa abandonnée , l'abbé Roussel la visita. Cette maison située au fond d'une avenue perdue au milieu des broussailles n'était plus qu'une masure. Néanmoins elle plut au serviteur de Dieu. Or, pour l'acheter, l'abbé Roussel était plus riche de bon coeur que d'argent. Emprunter n'était point chose facile. Enfin il lui