ET LE THÉÂTRE DE 18J0 A 1870. 111
mède à cette faiblesse de la loi. Le théâtre de la PorteSaint-.Martin jouait un drame de Léon Gozlan, Pied-deFer. De nombreuses suppressions avaient été faites dans un tableau de bagne, et notamment dans les rôles de deux galériens plaisants. Non-seulement on ne tenait, aucun compte des suppressions convenues, mais, de plus, chaque soir, les comiques chargés de ces deux rôles principaux aggravaient le cynisme de la situation par des plaisanteries nouvelles. L'inspecteur des théâtres reçut l'ordre d'agir. Le difficile était de surprendre les acteurs en flagrant délit : dès que l'inspecteur arrivait, un signal, parti du contrôle, les prévenait en scène, et le texte était immédiatement respecté. Cependant, un soir, la mystification prit fin. La surveillance du théâtre se trouva en défaut, l'inspecteur passa inaperçu, cl le procès-verbal fut dressé. On cita l'artiste et le directeur devant le tribunal ; pour quel résultat? Une condamnation légère, qui ne fut jamais exécutée, si nous nous souvenons bien. Quant à l'inspecteur, qui avait fait son devoir, mal soutenu par le ministère public, il fut bafoué pendant une heure par un avocat ; il sortit de là, se promettant de ne plus recommencer une campagne pareille. Il n'était point dans le faux; ses successeurs l'imitèrent. En effet, une pénalité bien précise faisant défaut, il n'y avait qu'une mesure administrative, le retrait définitif ou temporaire de l'autorisation de la pièce, qui pût s'appliquer utilement. Cette mesure aurait entraîné la plupart du temps la fermeture momentanée du théâtre; parfois peut-être elle aurait servi de prétexte à un disastre imminent. Aussi recula-t-on toujours devant une extrémité sévère, mais qui seule, toutefois.