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Mexico avec un bataillon de zouaves et assurait le commandant du corps expéditionnaire qu'il entrerait à Puebla sous une pluie de fleurs. Hélas ! ce fut sous une grêle de balles et cle boulets.
Du reste, bien d'autres voix disaient à ce général qu'il lui faudrait compter avec la résistance des adversaires qu'il allait rencontrer et qu'il devrait repousser loin de son esprit les folles illusions que le ministre de France s'efforçait d'y entretenir. Mais il n'eut pas le temps d'entendre ces voix qui, de toutes parts, amies ou ennemies, lui criaient : « Cave », autrement dit Casse-cou en langage ordinaire français.
La plupart des écrivains qui ont essayé de faire de l'histoire ont blâmé le général de Loreneez de n'avoir pas tenu compte de ces avertissements. Ils ont eu raison dans une certaine mesure; mais ils ont forcé la note. Les uns poussés par la partialité sans scrupules que leur inspirait pour la cause de Juarez leur implacable hostilité contre le Gouvernement de l'Empereur ; les autres, parce qu'ils se sont laissé prendre aux rodomontades des généraux et des partisans de Juarez et tromper par les intrigues ourdies par des agents du Gouvernement de Mexico et même, ce qui est plus douloureux à dire, par des Français. M. Dubois de Saligny a été surtout l'objet des critiques les plus violentes et en partie fondées, car, lui aussi, clans un sens opposé, a forcé la note d'une façon blâmable.
Dans ces conditions, il importe pour le jugement que, quarante ans après cet événement, doivent prononcer les esprits impartiaux, de remettre les choses au point.
D'une part, les Mexicains, ceux de Juarez, avec une jactance emphatique un peu aventurée, déclaraient que les petitsfils de Fernand Cortez sauraient défendre avec héroïsme la terre du grand conquérant; d'autre part, M. Dubois de Saligny et les réfugiés mexicains qui s'étaient jetés dans nos bras, assuraient que la population tout entière nous appelait de ses voeux et nous recevrait sous des arcs de triomphe.