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Lorsque le général en chef fut parti, le général Bazaine demanda au général Douay ce qu'il comptait faire. La réponse fut catégorique : « Ma foi, je vous avoue que j'ai tout fait; j'ai usé tout ce que j'avais d'expérience, de savoir, d'énergie; j'ai employé tous les moyens de force, de vigueur, tout enfin ! Je suis à bout de ressources et je déclare qu'on ne peut plus rien tirer de moi pour ce genre de guerre. »
Cette profession de foi si nette, si franche, si sincère, ne supporte aucun commentaire; c'était une retraite honorable, elle ne peut inspirer qu'un respect sympathique.
Les deux généraux se serrèrent la main et nous quittâmes le Pénitencier, de sinistre mémoire. En suivant les tranchées, nous y trouvons les débris du bataillon de zouaves qui retour nent à leur camp. Ces malheureux sont absolument démoralisés et se suivent deux par deux, la tête basse, mornes et silencieux. Il ne reste dans ce bataillon qu'un seul officier valide. Les tranchées étant pleines d'eau, nous marchons à travers champs, malgré les boulets de la place. Nous traversons le village presque ruiné de San-Mathias et nous arrivons au dépôt de tranchée, puis à la Noria, clans nos lignes, où nous nous arrêtons pour attendre nos chevaux que nous avons envoyé chercher, car nous sommes éreintés. Nous trouvons là nos zouaves du 3° qui reviennent de Cholula y installer une garnison. Leur colonel, Mangin, raconte que partout on se plaint avec amertume de la mauvaise direction des opérations. On a partout raison; mais comment changer ?
Enfin, nous rentrons à Amatlan où la consternation est générale, aussi bien dans nos troupes que dans la population mexicaine qui nous entoure.