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très bien l'espagnol, la conversation fut prompte et facile à entamer et on ne perdit rien des longues formules de politesse que la mode mexicaine oblige à échanger entre personnages. Lorsque les généraux et principaux officiers de Marquez eurent été présentés au grand chef français, on se remit en route pour Jalapa. Nous nous étions mêlés aux Mexicains et l'accueil le plus empressé fut échangé entre nous tous. Du reste partout, rien ne peut égaler la rivalité de courtoisie qui anime, entre eux, les officiers d'armées alliées. »
Vers 9 heures nous arrivons en vue de Jalapa et nous restons saisis d'admiration à son aspect. Nonchalamment étendue sur l'un des contreforts de la Cordillère, cette riante cité, blottie dans un nid de verdure, élève dans une atmosphère inondée de lumière ses dômes, ses coupoles de toutes couleurs qui dessinent leurs silhouettes miroitantes sur les pentes bleues des montagnes. De tous côtés cle fraîches vallées se faufilent au travers de mamelons boisés et çà et là quelques hacyendas aux blanches murailles animent ces solitudes; en arrière, le regard s'élève lentement sur les pentes majestueuses de la Sierra pour s'arrêter un instant sur les contours bizarres du coffre de Pérote et se perdre enfin clans l'infini céleste.
Le chemin qui se déroule en avant de nous paraît être l'allée d'un parc; il se glisse avec lenteur au milieu de haies de rosiers et de jasmins, de dahlias arborescents aux fleurs bleu pâle; et, du milieu des buissons, des massifs, s'élèvent les poivriers au léger feuillage, ou bien de gigantesques daturas suspendant leurs grandes fleurs blanches qui, balancées par la brise, répandent sur le voyageur leur parfum pénétrant. Et la chevauchée brillante des gens de guerre passe grave et sévère au travers de ces sourires de la nature et arrive aux portes de Jalapa. Là, les troupes sont rangées en haie, le canon retentit, les cloches sonnent leurs plus solennels carillons, saluant l'entrée du général Bazaine. Les troupes mexicaines sont à gauche, les nôtres en face;