QUESTIONS DIPLOMATIQUES ET COLONIALES
LA QUESTION DES NOUVELLES-HÉBRIDES
La France et l'Angleterre viennent de conclure un accord touchant les Nouvelles-Hébrides. C'est la suite d'une histoire déjà longue et une nouvelle phase d'un procès qui n'est point fini. Aussi ne peut-on comprendre l'intérêt, la portée et la valeur du traité récent qu'en rappelant brièvement les moments principaux d'une rivalité ancienne 1.
De tout temps, les Nouvelles-Hébrides n'ont pas été seulement convoitées par la France et l'Angleterre ; elles ont fait l'objet des visées de l'Australie, et c'est ce qui toujours a compliqué le débat. Vers 1870-1880, c'est une question sociale qui a entraîné les Australiens vers les Nouvelles-Hébrides : les villes d'Australie, peuplées d'immigrants qu'attiraient les mines d'or, devaient rejeter l'excès d'une population trop vite croissante ; l'intérieur du continent présentait les plus grandes difficultés de pénétration et de séjour ; les hommes et le commerce regardèrent vers le dehors ; les Nouvelles-Hébrides les attirèrent. Les missionnaires wesleyens, autant commerçants que missionnaires, furent leurs guides et leurs pionniers.
Bientôt, la colonie grandit : les ambitions croissent avec la force. L'Australie pensa devenir la reine de l'Océanie et se créa une doctrine de Monroe à sa taille : elle s'efforça d'obtenir de la métropole que nul territoire vacant en Australasie n'échût à
1 Pour étudier la question des Nouvelles-Hébrides dans son développement actuel jusqu'en 1903, il suffit de consulter les quatre ouvrages suivants, prenant chacun la question à son point de vue et tous très recommandables : Dans l'Amérique, l''Australasie au début du XXe siècle (par FALLEX et MAIREY. Delagrave, 1905), on trouvera un résumé substantiel des conditions géographiques et politiques de l'Océanie ; le livre si précieux de M. FRANTZ DESPAGNET (La diplomatie de la troisième République. Larose, 1904) condense en quelques pages (p. 422) l'histoire diplomatique jusqu'en 1900 ; dans le livre sur Les accords franco-anglais du 8 avril 1904 (Pedone, 1905), M. POLITIS, auteur d'un livre et d'un long article sur la question, apprécie fort diligemment la situation nouvelle créée aux Hébrides par le traité franco-anglais (p. 139 et suiv.) ; enfin le livre excellent de M. RUSSIER sur Le partage de l'Océanie (Vuibert et Nony, 1903) est ce qui a été écrit de plus complet sur la question, au point de vue géographique (p. 188 et 249).
QUEST. DIPL. ET COL. - T XXI - N° 219 — 1er AVRIL 1906. 30