SAUVETEUR
L
Le patron du canot de la Société centrale de sauvetage des naufragés dû port d'Etel, Esprit Le Meur, achevait sa toilette des grandes occasions.
Etel est un village, — on n'ose dire une petite ville, — situé sur le cours d'eau qui porte son nom et qui se jette dans l'Atlantique, sur la côte du Morbihan, au nord de Quiberon, au sud de Lorient.
Esprit Le Meur était un homme de quarante-huit à cinquante ans, de taille moyenne, d'une carrure décelant une prodigieuse Arigueur. Son visage aux lignes régulières, bien que très accentuées, encadré d'un collier de barbe noire, où pas un fil blanc n'avait fait encore son apparition, révélait la vraie physionomie du matelot breton dans son honnêteté et son courage traditionnels.
Il était tout de noir vêtu en la circonstance, ou plutôt d'une étoffe d'un bleu si foncé qu'il donnait la sensation de noir. Ce bleulà est même caractéristique du vêtement des hommes de mer sur toute la côte qui va de Saint-Nazaire à Roscoff. On le trouve, en effet, sur le gros drap des vareuses, la flanelle des cottes et le croisé des bourgerons, sur le pantalon aussi bien que sur le gilet.
Esprit Le Meur, en dépit de ce costume, presque neuf, de céré-