42 TRAITE DES DISPENSES. LIV. I.
nement connu par un nombre de personnes, a été par elles répandu dans le public. Une chose , pour être manifeste, n'a pas besoin d'avoir été vue par la plus grande partie de la communauté , parce qu'alors elle seroit notoire ; mais il ne suffit pas non plus qu'elle soit connue et divulguée par deux témoins, quoique dignes de foi : au moins de célèbres Jurisconsultes prétendent-ils que pour rendre un fait manifeste, il faut la moitié des témoins qui seroient nécessaires pour le rendre notoire (1). Sur ce fondement on peut dire qu'un fait, pour être manifeste, doit être connu d'autant de monde qu'il en faut pour le rendre notoire , avec cette différence que pour le notoire, il faut que tout le monde ait vu ; et que, pour le manifeste , il suffit qu'une moitié ait appris de l'autre qui avoit vu.
XLIV. Enfin on appelle fameux, ce qui est connu par le bruit public : Famosum id quod famâ notum. Mais tout bruit ne produit pas ce genre de publicité : il n'y a que celui qui est fondé sur des conjectures très-fortes, ou qui ayant été répandu par une personne digne de foi , passe pour constant parmi ce qu'il y a de gens sages dans un canton. On voit, par exemple , un homme pâle et troublé sortir à grands pas d'une maison : son épée est teinte de sang, ou il en est lui-même tout couvert : on trouve dans cette même maison un de ses ennemis assassiné ; on dit publiquement que ce mauvais coup part de la main de celui à qui on a vu prendre la fuite : voilà ce que le droit appelle actio famosa. Il est vrai qu'il n'y a là qu'une sorte de présomption ; mais des présomptions de cette nature forment un scandale public.
XLV. Cela posé, je dis que la Pénitencerie ne dispense jamais de ce qui est public dans un des trois
(I) Manifestum regnlatur à notorio : si enim notorium requirit scientiam v. g. decem hominum, manifestum expetet quinque ; si notorium quindecim exigil, manifestum admillet scptem. Marc.-Paul. Leo, ibid. n. 49.