QUESTIONS
DIPLOMATIQUES ET COLONIALES
BULGARIE
HISTOIRE INTERIEURE ET PARTIS
Ainsi que je l'ai fait pour les partis serbes, j'étudierai les partis bulgares en fonction de l'histoire intérieure de leur pays : ils sont la résultante d'un long passé qui explique, en même temps que leur formation, leur orientation et leurs tendances actuelles.
A la fin du XVIIIe siècle, la situation des Bulgares ressemble par bien des côtés à celle des Serbes. Ils sont des raias soumis à des maîtres multiples : pachas, kaïmakams et cadis; spahis; janissaires; évêques grecs. Ils n'ont point oublié leur grandeur passée : les souvenirs radieux de leurs tsars du moyen âge — Siméon, Samuel, Johannitsa — éclairent la nuit dans laquelle ils sont plongés.
Mais les Bulgares, bien que d'une race tourano-slave vigoureuse et énergique, ne s'éveillent pas aussi vite que les Serbes. Les causes de leur torpeur prolongée sont multiples.
La masse paysanne a dû livrer ses fusils. Les quelques Bulgares riches — tchorbadji — sont les familiers des Turcs. L'église grecque de Constantinople, plus proche, a poursuivi avec moins d'insuccès qu'en Serbie son oeuvre hellénique de déslavisation. Du côté de Rhodope, des Bulgares ont, surtout au XVIIe siècle, passé en masse à l'Islam (Pomaks actuels).
Enfin et surtout, la situation géographique des régions bulgares est désavantageuse. La plaine du Nord ne prête point à une résistance comme les régions montagneuses serbes. Les régions montagneuses bulgares, situées au Sud, sont trop voisines de Constantinople — centre de la puissance turque, — pour qu'il soit possible à l'insurrection d'y naître. Toute la Bulgarie est, à la différence de la Serbie dès la fin du XVIIe siècle, englobée à l'intérieur de l'Empire ottoman. L'Autriche est, à l'origine, sans action sur elle : la Serbie les
QUEST. DIPL. ET COL. — T. XVIII. — N° 183. — 1er OCTOBRE 1904. 26